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N° 24-25 | 29 

novembre 2022

Prévention et dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles


(Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
// HIV and sexually transmitted infections prevention and screening
(World AIDS Day, December 1)
Coordination scientifique // Scientific coordination
Florence Lot et Anna Mercier (Santé publique France, Saint-Maurice)
Et pour le Comité de rédaction du BEH : Isabelle Villena (CHU Reims), Isabelle Grémy (Institut Paris-Région, Paris), Bertrand Gagnière
(Santé publique France – Bretagne), Anne Guinard (Santé publique France – Occitanie), Hélène Therre (Santé publique France, Saint-Maurice)

> SOMMAIRE // Contents

ÉDITORIAL // Editorial ARTICLE // Article


Accélérons la réponse vis-à-vis du VIH Couverture vaccinale contre les infections
et des infections sexuellement à papillomavirus humain des filles
transmissibles pour tenir les objectifs âgées de 15 à 18 ans et déterminants
de 2030 de vaccination, France, 2021
// Accelerate the response to HIV and sexually // Human papillomavirus vaccination coverage
transmitted infections to meet the 2030 targets........p.  428 among girls in France aged 15-18 years
Dr Pascal Pugliese and determinants of vaccination, 2021......................p.  446
Praticien Hospitalier, CHU de Nice, Président du Corevih Rémi Hanguehard et coll.
Paca-Est, membre du Conseil national du sida et des hépatites Santé publique France, Saint-Maurice
virales
ARTICLE // Article
ARTICLE // Article
Dépistage du VIH et des infections
Évolution du niveau de protection sexuellement transmissibles bactériennes
contre le VIH parmi les hommes en France, 2014-2021
ayant des rapports sexuels // HIV and bacterial sexually transmitted
avec des hommes séronégatifs infections screening in France, 2014-2021................p.  456
pour le VIH – Résultats de l’enquête Cheick Haïballa Kounta et coll.
Rapport au sexe 2017-2019-2021 Santé publique France, Saint-Maurice
// Trends in HIV protection methods
among HIV-negative men who have sex (Suite page 428)
with men: Results from the Rapport au sexe
survey 2017-2019-2021, France..................................p.  430
Annie Velter et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice

ARTICLE // Article La reproduction (totale ou partielle) du BEH est soumise à l’accord préalable de Santé publique France.
Conformément à l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle, les courtes citations ne sont pas
soumises à autorisation préalable, sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la
La PrEP chez les migrants : source, et qu’elles ne portent pas atteinte à l’intégrité et à l’esprit de l’œuvre. Les atteintes au droit d’auteur
y sommes-nous vraiment ? attaché au BEH sont passibles d’un contentieux devant la juridiction compétente.

// PrEP among migrants in France: Retrouvez ce numéro ainsi que les archives du Bulletin épidémiologique hebdomadaire sur
https://www.santepubliquefrance.fr/revues/beh/bulletin-epidemiologique-hebdomadaire
What is the real picture?.............................................p.  438
Hugues Cordel et coll. Directeur de la publication : Laëtitia Huiart, directrice scientifique, adjointe à la directrice générale de
Santé publique France
Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpitaux Rédactrice en chef : Valérie Colombani-Cocuron, Santé publique France, [email protected]
Rédactrice en chef adjointe : Frédérique Biton-Debernardi
universitaires Paris Seine-Saint-Denis, Hôpital Avicenne AP-HP, Responsable du contenu en anglais : Chloë Chester
Bobigny Secrétariat de rédaction : Valérie Contactsis
Comité de rédaction : Raphaël Andler, Santé publique France ; Thierry Blanchon, Iplesp ; Florence Bodeau-
Livinec, EHESP ; Julie Boudet-Berquier, Santé publique France ; Kathleen Chami, Santé publique France ;
Bertrand Gagnière, Santé publique France - Bretagne ; Isabelle Grémy, ORS Île-de-France ; Anne Guinard /
Damien Mouly, Santé publique France - Occitanie ; Nathalie Jourdan‑Da Silva, Santé publique France  ;
Philippe Magne, Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de
la fonction publique hospitalière ; Valérie Olié, Santé publique France ; Alexia Peyronnet, Santé publique
France ; Hélène Therre, Santé publique France  ; Sophie  Vaux, Santé publique France ; Isabelle Villena,
CHU Reims.
Santé publique France - Site Internet : https://www.santepubliquefrance.fr
Prépresse : Luminess
ISSN : 1953-8030

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  427
Praticien Hospitalier CHU de Nice, Président du Corevih Paca-Est – Coordination de la lutte contre le VIH et les IST, Conseil national
du sida
Pascal Pugliese

ARTICLE // Article
Découvertes d’infection à VIH
chez les enfants en France, 2010-2021
// New cases of HIV among children diagnosed
in France, 2010-2021..................................................p.  463
Pierre Pichon et coll.
Santé publique France, Saint-Maurice

> ÉDITORIAL // Editorial

ACCÉLÉRONS LA RÉPONSE VIS-À-VIS DU VIH ET DES INFECTIONS SEXUELLEMENT


TRANSMISSIBLES POUR TENIR LES OBJECTIFS DE 2030
// ACCELERATE THE RESPONSE TO HIV AND SEXUALLY TRANSMITTED INFECTIONS TO MEET THE 2030 TARGETS
Dr Pascal Pugliese

Praticien Hospitalier, CHU de Nice, Président du Corevih Paca-Est, Membre du Conseil national du sida et des hépatites virales

Ce numéro thématique du Bulletin épidémiologique L’enquête Eras ne permet pas d’analyser aisément le
hebdomadaire (BEH), consacré au VIH et aux infections niveau de protection des personnes nées à l’étranger.
sexuellement transmissibles (IST), est riche d’ensei- Hugues Cordel et coll. 3, du service des maladies infec-
gnements sur l’état de la santé sexuelle en France, et tieuses de l’Hôpital Avicenne à Bobigny, décrivent les
sur le chemin qu’il reste à parcourir pour atteindre d’ici résultats d’une enquête transversale auprès des pres-
2030 les objectifs fixés vis-à-vis de la lutte contre le cripteurs sur la prise en charge en PrEP des personnes
VIH et, plus largement, sur ceux à mettre en œuvre migrantes. Les  prescriptions, principalement desti-
pour une stratégie de santé sexuelle efficiente. nées aux HSH, restent rares parmi ces populations.
Selon les prescripteurs interrogés, ce  constat est
La crise sanitaire de la Covid-19 a eu un impact impor-
principalement le fait d’une ­méconnaissance de la
tant sur le déploiement des stratégies de prévention
prévention biomédicale et des difficultés de suivi
combinée du VIH et des IST, sur l’offre de soins
de ces populations. L’élargissement des indica-
dédiée et sur le niveau de protection des personnes
tions 2 devrait être connue de tous les profession-
exposées au VIH.
nels de santé et s’accompagner de programmes de
Annie Velter et  coll. 1 de Santé publique France, recherche interventionnelle pour mieux caractériser
décrivent l’évolution de la protection contre le VIH les contextes de vie et d’expositions où la PrEP serait
parmi les hommes séronégatifs ayant des rapports la plus utile à ces populations. Les femmes migrantes,
sexuels avec d’autres hommes, à partir des données comme d’autres femmes, ont aussi besoin d’accéder
issues des trois éditions de l’enquête Rapport au à la PrEP pour disposer d’un autre outil de prévention
sexe (Eras) réalisée en 2017, 2019 et 2021. Le niveau adapté à leurs besoins ou à leurs contraintes.
global de protection est élevé, mais diminue entre
Les objectifs  2030  vis-à-vis du VIH ne pour-
2019 et 2021. Le préservatif reste l’outil de protection
ront donc être tenus sans une approche globale
le plus utilisé, cependant une baisse continue de son
de santé auprès des  personnes en vulnérabilité
usage est observée, tandis que la part des hommes
socio-­é conomique. Parmi celles-ci, les  personnes
ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes
migrantes doivent pouvoir bénéficier d’un bilan
(HSH), rapportant avoir été diagnostiqués pour une
de santé proposé dans leur parcours de vie et de
IST, augmente en  2021. Cette baisse est contreba-
soins : en soins primaires, en permanences d’accès
lancée par l’augmentation significative de l’usage de la
aux soins de santé (Pass), centres de lutte antituber-
prophylaxie pré-exposition (PrEP) (passant de 7% d’uti-
culeuse (Clat), services universitaires de médecine
lisation lors du dernier rapport anal avec un partenaire
préventive et de promotion de la santé (SUUMPS)…,
occasionnel en 2017, à 28 % en 2021). L’adoption de la
incluant la santé  sexuelle 4 et la connaissance de
PrEP reste néanmoins insuffisante puisque la majorité
l’offre de prévention et de soins dédiée.
des participants séronégatifs inclus dans cette étude
étaient éligibles à la PrEP selon les recommandations La nécessité d’une approche syndémique est
françaises 2. La crise sanitaire de la Covid-19 a freiné aussi ­soulignée par les résultats de l’étude de
l’accès à l’offre de soins dédiée et a accru les vulnéra- Rémi Hanguehard et coll. 5 de Santé publique France,
bilités mentales de nombreuses personnes exposées portant sur la couverture vaccinale contre les infec-
au VIH, rendant urgente la relance d’une prévention tions à papillomavirus humain (HPV) des filles âgées
du VIH dans une approche globale en santé sexuelle. de 15  à 18  ans en France, et sur les déterminants

428  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
de cette vaccination. S’appuyant sur les données de vis-à-vis du VIH et des IST, dans une approche
l’enquête Baromètre santé 2021, l’étude montre que la globale.  Les objectifs  2030  fixés par la stratégie
couverture vaccinale contre le HPV dans cette popu- nationale de santé sexuelle ne seront tenus qu’avec
lation n’était que de 43,6% (intervalle de confiance à une implication forte des pouvoirs publics et des
95% : [40,1-47,1]) en France métropolitaine en 2021, professionnels de santé, associant une communi-
et plus basse encore dans les DROM. Même si cette cation ciblée sur la prévention combinée du VIH et
couverture vaccinale s’est améliorée par rapport aux des IST, le déploiement large de la prescription et du
enquêtes précédentes, elle reste modérée et loin de suivi de la PrEP en soins primaires, un recueil épidé-
l’objectif de 60% posé par le Plan cancer 2014-2019 6. miologique efficient, le déploiement de la médiation
La France compte parmi les couvertures vaccinales en santé et la conduite d’actions territoriales visant à
les plus faibles d’Europe, notamment dans les popu- réduire les inégalités en santé. La relance de l’activité
lations les moins  favorisées économiquement. Ces de dépistage du VIH, par tous les moyens dont nous
résultats nous invitent à repenser la politique de disposons, reste une priorité pour atteindre le premier
vaccination contre le HPV, en proposant par exemple objectif de la cascade de prise en charge, à savoir que
d’organiser cette vaccination par la médecine 95% des personnes vivant avec le VIH connaissent
scolaire, en l’accompagnant d’actions d’éducation à leur séropositivité, pour bénéficier d’une prise en
la santé et à la sexualité, afin de limiter l’impact des charge adaptée et réduire ainsi la transmission. ■
inégalités sociales et territoriales en santé. Références
Cheick Kounta 7 et  coll. de Santé publique France, [1] Velter V, Ousseine Y, Dupire P, Roux P, Mercier A. Évolution
présentent les données du dépistage du VIH et du niveau de protection contre le VIH parmi les hommes ayant
des IST bactériennes en France entre 2014 et 2021. des rapports sexuels avec des hommes séronégatifs pour le
Elles indiquent une augmentation globale depuis VIH – Résultats de l’enquête Rapport au sexe 2017-2019-2021.
Bull Épidémiol Hebd. 2022;(24-25):430-8. http://beh.sante​
plusieurs années de l’activité de dépistage, associée à publi​quefrance.fr/beh/2022/24-25/2022_24-25_1.html
une baisse de l’activité en 2020 liée à la crise sanitaire
de la Covid-19. L'activité de dépistage r­é-augmente [2] Haute Autorité de santé. Réponses rapides dans le cadre
de la COVID-19 – Prophylaxie (PrEP) du VIH par ténofovir
en 2021 pour les IST bactériennes, mais reste infé- disoproxil / emtricitabine dans le cadre de l’urgence sanitaire.
rieure à celle de 2019 pour le dépistage du VIH. Saint-Denis La Plaine: HAS  ; 2021. https://www.has-sante.fr/
jcms/p_3262060/fr/reponses-rapides-dans-le-cadre-de-la-
Cette étude repose sur les données individuelles de
covid-19-prophylaxie-prep-du-vih-par-tenofovir-disoproxil-/-
remboursement du Système national des données de emtricitabine-dans-le-cadre-de-l-urgence-sanitaire
santé (SNDS). Ce système complète, sans les remplacer,
[3] Cordel  H, Penot  P, Lucarelli  A, Ahouanto  M, Michaud  C,
les données issues des laboratoires de biologie médi-
Diemer  M, et  al. La PrEP chez les migrants  : y sommes-nous
cale, des centres gratuits d’information, de dépistage et vraiment  ? Bull Épidémiol Hebd. 2022;(24-25):438-45. http://
de diagnostic du VIH, des hépatites et des IST (CeGIDD) beh.santepubliquefrance.fr/beh/2022/24-25/2022_24-25_2.html
et des déclarations obligatoires (DO), dont les modalités
[4] Santé publique France. Aborder la sexualité et la santé
de recueil sont à simplifier et à moderniser pour béné- sexuelle avec les  personnes migrantes. Repères pour votre
ficier d’une surveillance épidémiologique dynamique et pratique. Saint-Maurice: Santé publique France; 2021. 13  p.
exhaustive, indispensable au pilotage des actions de la https://www.santepubliquefrance.fr/determinants-de-sante/
stratégie nationale de santé sexuelle. sante-sexuelle/documents/depliant-flyer/aborder-la-sexua​
lite-et-la-sante-sexuelle-avec-les-personnes-migrantes
Le défaut d’exhaustivité de la DO du VIH représente
[5] Hanguehard  R, Gautier  A, Soullier  N, Barret  AS, Parent
ainsi une limite au travail présenté par Pierre Pichon et du Chatelet I, Vaux S. Couverture vaccinale contre les infec-
coll. 8 de Santé publique France, portant sur les décou- tions à papillomavirus humain des filles âgées de 15 à 18 ans
vertes d’infection à VIH chez les enfants entre 2010 et déterminants de vaccination, France, 2021. Bull Épidémiol
et 2021 en France. Les données recueillies permettent Hebd. 2022;(24-25):446-55. http://beh.santepubliquefrance.fr/
néanmoins de souligner la persistance de diagnostics beh/2022/24-25/2022_24-25_3.html
liés à une transmission du VIH de la mère à l’enfant [6] Ministère des affaires sociales et de la Santé. Plan Cancer
(TME), malgré l’efficacité de sa prévention : le nombre 2014-2019. Guérir et prévenir les cancers  : donnons les
d’enfants ayant découvert leur infection par le VIH mêmes chances à tous, partout en France. Paris: ministère
de la Santé; 2014. 152  p. https://solidarites-sante.gouv.fr/
est estimé à 581 [355‑808] en données corrigées sur soins-et-maladies/maladies/article/cancer
la période. Près d’un tiers des TME concernent des
enfants nés en France et sont liées à une découverte [7] Kounta CH, Drewniak N, Cazein F, Chazelle É, Lot F. Dépis-
tage du VIH et des infections sexuellement transmissibles
tardive de la séropositivité de la mère dans près de bactériennes en France, 2014-2021. Bull Épidémiol Hebd.
la moitié des cas. La couverture du dépistage des 2022;(24-25):456-62. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/
femmes enceintes et de leurs conjoints est à améliorer, 2022/24-25/2022_24-25_4.html
en proposant par exemple de re-tester systématique- [8] Pichon P, Cazein F, Dollfus C, Lot F. Découvertes d’infection
ment les mères pendant la grossesse, voire en propo- à VIH chez les enfants en France, 2010-2021. Bull Épidémiol
sant la PrEP dans un contexte de vulnérabilité. Pour Hebd. 2022;(24-25):463-8. http://beh.santepubliquefrance.fr/
les enfants nés dans une zone d’endémie, la priorité beh/2022/24-25/2022_24-25_5.html
reste celle d’un dépistage aussi précoce que possible
Citer cet article
après leur arrivée en France.
Pugliese P. Éditorial. Bull Epidémiol Hebd. 2022;(24-25):428-9.
Les études publiées dans ce numéro soulignent donc http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2022/24-25/2022_24-
de manière claire la nécessité d’accélérer la réponse 25_0.html

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  429
Santé publique France, Saint-Maurice

>
Annie Velter et coll.

ARTICLE // Article

ÉVOLUTION DU NIVEAU DE PROTECTION CONTRE LE VIH PARMI LES HOMMES


AYANT DES RAPPORTS SEXUELS AVEC DES HOMMES SÉRONÉGATIFS POUR LE VIH –
RÉSULTATS DE L’ENQUÊTE RAPPORT AU SEXE 2017-2019-2021
// TRENDS IN HIV PROTECTION METHODS AMONG HIV-NEGATIVE MEN WHO HAVE SEX WITH MEN:
RESULTS FROM THE RAPPORT AU SEXE SURVEY 2017-2019-2021, FRANCE

Annie Velter1,3 ([email protected]), Youssoufa Ousseine1, Paul Dupire2 , Perrine Roux3, Anna Mercier1

1
 Santé publique France, Saint-Maurice
2
 École nationale de la statistique et de l’administration économique (Ensae), Paris
3
 Aix-Marseille Univ, Inserm, Institut de recherche pour le développement (IRD), Sciences économiques et sociales de la santé
& traitement de l’information médicale (Sesstim), Institut des sciences de la santé publique (Isspam), Marseille

Soumis le 12.09.2022 // Date of submission: 09.12.2022

Résumé // Abstract
La fin des années 2000 a été marquée par l’arrivée d’une approche biomédicale de la prévention du VIH, et,
en 2016, les autorités françaises ont introduit la prophylaxie pré-exposition (PrEP). Dans ce contexte de chan-
gements notables, mesurer l’évolution du niveau global de protection contre le VIH des hommes ayant des
rapports sexuels avec des hommes (HSH) est primordial.
Les données mobilisées pour cette étude, sont issues des éditions 2017, 2019 et 2021 de l’enquête Rapport au
sexe (Eras), enquête en ligne transversale et anonyme, auto-administrée et basée sur le volontariat. L’utilisation
de différents outils de prévention (prévention biomédicale, préservatif) du VIH par les HSH séronégatifs lors
de leur dernier rapport anal (DRA) avec un partenaire masculin occasionnel, a été comparée au cours des
trois éditions.
Le niveau global de protection, intégrant le traitement comme prévention (en anglais, Treatment as Prevention
(TasP)), la PrEP, le traitement post-exposition (TPE) ou le préservatif, est élevé et stable entre  2017 et  2021,
sans différence significative. Même si le préservatif reste l’outil de protection le plus utilisé, une baisse continue
de son usage est observée passant de 67% en 2017 à 60% en 2019 et 45% en 2021 (odds ratio ajusté : 0,74 ;
intervalle de confiance à 95% : [0,72-0,77] ; p<0,001). Cette baisse est contrebalancée par l’augmentation signi-
ficative de l’usage de la PrEP. La proportion des HSH séronégatifs qui prenaient la PrEP lors de leur DRA avec
un partenaire occasionnel est passé de 7% en 2017 à 28% en 2021 (1,58 [1,52-1,65] ; p<0,001).
Malgré la mise à disposition de moyens de prévention biomédicaux efficaces, dont l’utilisation de la PrEP
qui va croissant, en plus de l’utilisation du préservatif, pour autant, le niveau global de prévention contre
le VIH n’augmente pas dans cette population d’HSH séronégatifs exposés au risque de contamination.
L’ouverture de la primo-prescription de la PrEP en médecine de ville et des actions associatives d’ « aller-
vers » pourraient permettre de poursuivre la tendance de manière plus soutenue, alors que l’utilisation du
préservatif ne cesse de s’éroder. Aussi, les programmes de prévention doivent être poursuivis en s’adap-
tant à l’ensemble de la population HSH dans toute sa diversité et en promouvant l’ensemble des outils de
prévention actuels.
The late 2000s saw the advent of a biomedical approach to HIV prevention, and in 2016 the French authorities
introduced pre-exposure prophylaxis (PrEP). In this context of significant change, measuring the overall level of
protection against HIV among men who have sex with men (MSM) is crucial.
Data for this study were obtained from the 2017, 2019 and 2021 editions of the survey Rapport au sexe (ERAS),
a cross-sectional, anonymous, self-administered and voluntary online survey. Use of different HIV prevention
methods (biomedical prevention, condoms) by HIV-negative MSM on the last occasion they had anal inter-
course with a casual male partner was compared over the three editions.
The overall level of protection, including treatment as prevention (TasP), PrEP, post-exposure prophylaxis
(PEP) or condoms, is high and stable between 2017 and 2021, with no substantial difference. Even if condoms
remain the most widely used method of protection, a continuous decline in their use is observed, from 67% in
2017 to 60% in 2019 and 45% in 2021 (adjusted odds ratio: 0.74; 95% confidence interval: [0.72-0.77]; p<0.001).
This decline is offset by a significant rise in PrEP use. The proportion of HIV-negative MSM who were taking
PrEP the last time they had anal intercourse with a casual partner increased from 7% in 2017 to 28% in 2021
(1.58 [1.52-1.65]; p<0.001).
Despite the availability of effective biomedical prevention methods, including PrEP, which is increasingly being
used in addition to condoms, the overall level of HIV prevention is not rising in this population of HIV-negative
MSM exposed to the risk of infection. Allowing general practitioners to deliver initial PrEP prescriptions, along

430  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
with outreach activities organised by associations, could help to continue the trend in a more sustained manner,
at a time when condom use is steadily diminishing. Prevention programmes must therefore continue by adapting
to the entire MSM population, in all its diversity, and by promoting all prevention methods currently available.

Mots-clés : Protection, VIH, Hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, Prévention combinée
// Keywords: Protection, HIV, Men who have sex with men, Combination prevention

Introduction rencontres gays, des applications de rencontres


géolocalisées gays et des sites d’information affi-
Les hommes ayant des relations sexuelles avec des nitaires gays. Par ailleurs, des bannières ont été
hommes (HSH) restent une population dispropor- diffusées via des plateformes programmatiques,
tionnellement touchée par l’épidémie à VIH/sida 1. c’est-à-dire par l’achat d’espace publicitaire auto-
En France, en 2019, 43% des nouveaux cas de VIH matisé basé sur des critères spécifiques. Les
diagnostiqués avaient été contaminés par rapports critères de diffusion étaient : le ciblage des hommes
sexuels avec un homme 2. de 18 ans et plus, naviguant sur des pages conte-
Ces dernières  années grâce à des progrès théra- nant des mots-clés en relation avec l’homosexua-
peutiques considérables, on assiste à un véritable lité et les rencontres entre hommes. De la même
changement de paradigme de la prévention vis-à-vis manière, sur les réseaux sociaux (Facebook),
du VIH sous le concept de prévention combinée. les hommes de plus de 18  ans ayant «  liké  » des
Cette prévention repose sur un socle d’outils, de stra- contenus ou des pages en lien avec l’homosexua-
tégies et de ressources diversifiées dont les piliers lité ont été exposés aux bannières de la campagne.
sont le dépistage, l’utilisation des préservatifs et la En cliquant sur ces dernières, les personnes étaient
prévention biomédicale : traitement post-­exposition dirigées vers le site de l’enquête où des informations
(TPE), prophylaxie pré-exposition (PrEP) et le traite- sur ses objectifs étaient présentées, ainsi que les
ment comme prévention (TasP). Au sein de la popu- conditions de participation et la confidentialité des
lation des HSH, l’efficacité de ces outils biomédicaux données. Les  ­participants étaient invités à valider
a été démontrée, que ce soit le TasP 3, ou la PrEP leur consentement pour accéder au questionnaire
dans des essais 4-6 ou dans la vie quotidienne 7-10. en ligne. Aucune adresse IP n’est collectée. Aucune
La combinaison de ces interventions, ainsi que l’aug- incitation financière n’est proposée. Les seuls
mentation de leur couverture au sein des populations critères d’inclusion pour participer étaient le fait
clés comme les HSH, sont essentielles pour infléchir d’être un homme et d’être âgé de 18  ans ou plus,
la dynamique des contaminations à VIH. sur la base de la déclaration.
Au cours de la dernière décennie, Santé publique Quatre grandes parties comparables entre les trois
France et les associations de lutte contre le VIH ont éditions composaient le questionnaire  : les carac-
promu les différents outils constitutifs de la préven- téristiques sociodémographiques, le mode de
tion combinée auprès des HSH. L’enquête Rapport vie et la socialisation, les données de santé et les
au sexe (Eras) sous la responsabilité scientifique de comportements sexuels et préventifs au cours des
Santé publique France, avec le soutien de l’Agence six derniers mois et au cours du dernier rapport selon
nationale de recherche sur le  sida et les hépatites le type de partenaire (stable ou occasionnel).
virales – Maladies infectieuses émergentes, a été Les questions concernant les  derniers  rapports
mise en œuvre afin d’évaluer l’appropriation de la sexuels ont permis de recueillir des détails sur le type
prévention combinée par les HSH en France. de partenaire (régulier ou occasionnel), les pratiques
L’objectif de cette étude est de décrire les profils des sexuelles dont la pénétration anale et les outils de
répondants se déclarant séronégatifs pour le VIH au prévention du VIH utilisés (préservatif, TasP, PrEP,
cours du dernier rapport anal (DRA) avec un parte- prophylaxie post-exposition (PEP)). Les répon-
naire occasionnel en 2017, 2019 et 2021, et l’évolution dants avaient la possibilité de rapporter l’utilisation
du niveau de protection global contre le VIH incluant les de plusieurs outils de prévention. L’indicateur de
différents outils de prévention du VIH que sont le TasP, protection développé dans notre étude comprend
la PrEP, le préservatif et le TPE utilisés par ces HSH. cinq  catégories (une catégorie pour chaque outil)
hiérarchisées selon le niveau d’efficacité de chaque
outil pour réduire le risque de contracter le VIH chez
Méthode les HSH 11 (tableau 1). Le niveau global de protection
Les données utilisées dans cette étude sont issues est la somme des quatre outils.
des trois éditions Eras réalisée en 2017, 2019 et 2021.
Il s’agit d’enquêtes transversales, en ligne, auto-­ Analyses statistiques
administrées et anonymes. Les périodes de recru-
Des analyses descriptives ont été réalisées pour
tement s’échelonnaient entre février et mars sur
décrire les caractéristiques des répondants et l’évo-
six semaines.
lution de l’usage des outils de prévention. Les carac-
Les participants sont recrutés par le biais de téristiques des participants des enquêtes 2017,
différents supports digitaux. Des bannières ont 2019 et 2021 ont été comparées à l’aide du test de
été postées directement sur des sites Internet de Kruskal-Wallis pour la médiane et de régressions

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  431
Tableau 1
Description des cinq catégories d’outils de prévention du VIH utilisés par les hommes séronégatifs au dernier rapport anal
avec un partenaire masculin occasionnel, enquête Rapport au sexe (Eras), France, 2017-2019-2021
Rang des outils de prévention
Description
selon l’efficacité
Répondants qui ont déclaré utiliser le TasP lors de leur DRA (le dernier partenaire occasionnel du répondant était
1. TasP
séropositif et avait une charge virale indétectable)
2. PrEP Répondants qui ont déclaré utiliser la PrEP lors de leur DRA (n’ont pas déclaré utiliser le TaSP)
3. Préservatif seul Usage exclusif du préservatif
4. TPE Usage exclusif du TPE
5. Aucun outil DRA sans aucune protection

TasP : traitement comme prévention ; PrEP : prophylaxie pré-exposition ; TPE : traitement post-exposition ; DRA : dernier rapport anal.

logistiques binaires univariées afin d’identifier les et  31  [24-44] en  2017 (p<0,001)). La part de répon-
tendances. Les odds ratio (rapports de chances) dants nés à l’étranger restait faible (7%), sans diffé-
produits dans ces analyses de tendance indiquent rence entre les trois enquêtes (p<0,494). Le niveau
les probabilités d’évolution des caractéristiques d’études était élevé, avec une nouvelle augmentation
dans le temps. entre 2017 et  2021 (69% en  2017 vs  72% en  2021,
p<0,001). De même, la part des répondants exer-
Nous avons évalué les tendances de l’usage des
çant une activité salariale, indépendante ou auto-­
outils de prévention entre 2017 et  2021 en utili-
sant une régression logistique binaire avec comme entrepreneuriale était en hausse passant de 64%
variable dépendante l’usage de l’outil de préven- en 2017 à 70% en 2021 (p<0,001). Une amélioration
tion et variable indépendante, l’année (exemple  : de la situation financière perçue des répondants était
PrEP vs non PrEP, aucun moyen de prévention vs au constatée  : en  2021, 58% rapportaient une situa-
moins une protection). Cette régression est ajustée tion confortable (ça va, à l’aise) contre 52% en 2017.
selon l’âge, le niveau d’études, la taille de la ville Les  répondants résidaient moins souvent en  2021
de résidence, la situation financière et la relation dans une agglomération de plus de 100  000  habi-
stable avec un homme. Les odds ratio ajustés (ORa) tants qu’en 2017 (43% vs 48%, p<0,001).
et les intervalles de confiance à 95% (IC95%) sont Si les répondants s’auto-définissaient majoritaire-
rapportés. Les analyses statistiques ont été réalisées ment homosexuels, on notait une augmentation de
avec le logiciel Stata 15®. la part des répondants s’auto-­définissant bisexuels :
12% en 2017 vs 17% en 2021, (p<0,001). Alors qu’une
large majorité des répondants fréquentaient les sites
Résultats ou applications de rencontre gays (95% en  2021),
Caractéristiques de la population une  baisse de  la fréquentation des lieux de convi-
vialité gays a été observée (75% en  2017 vs  70%
Au total, 60 855 questionnaires ont été complétés en  2021, p<0,001). En termes de nombre de  parte-
au cours des trois éditions d’Eras. De ces partici- naires sexuels masculins dans les 6  derniers  mois
pants, 48 581 rapportaient être des HSH sexuelle- avant l’enquête, la part des répondants rapportant
ment actifs dans les 6 mois précédant les enquêtes
entre  6 et 10  partenaires a augmenté entre 2017
et résider en France. Parmi eux, 37  541  rappor-
et  2021 (14%  vs  21%, p<0,001), au détriment de
taient être séronégatifs pour le VIH, 18 724 avaient
celle des répondants ayant entre 1 et 5 partenaires
eu leur dernier rapport sexuel avec un partenaire
(67% vs 58%, p<0,001). La proportion des répondants
occasionnel. Au final, 12 905 participants avaient
ayant plus de 10 partenaires est restée stable, sans
pratiqué la pénétration anale lors du de leur
différence significative à hauteur de 20% pour 2021.
dernier rapport sexuel avec un partenaire occa-
sionnel et ont été inclus dans cette étude, avec Concernant le recours au dépistage du VIH dans les
respectivement 4  078, 5  568 et 3  259  personnes 12 derniers mois, s’il était observé une augmentation
pour Eras 2017, Eras 2019 et Eras 2021 (figure 1). significative de la proportion de répondants ayant
réalisé 3  tests et plus dans l’année (27% en  2017
Caractéristiques des répondants à Eras 2017, vs 38% en 2021, p<0,001), la tendance était inverse
2019 et 2021 pour ceux ayant réalisé 1 ou 2 tests (respectivement :
Les caractéristiques sociodémographiques et 25% vs  17% (p<0,001) et  23% vs  17% (p<0,001)).
comportementales des HSH séronégatifs pour le Quant au dépistage d’au moins une IST dans les
VIH, dont le DRA était avec un partenaire masculin 12  derniers  mois, le taux s’élevait à 69% en  2021,
occasionnel, sont présentées dans le tableau 2 pour sans différence significative avec les deux éditions
chaque enquête. Les répondants de l’édition  2021 précédentes. La part de répondants diagnostiqués
étaient plus âgés que ceux des éditions antérieures, pour une IST dans les 12  derniers  mois n’était pas
avec un âge médian de 34 ans (intervalle interquar- différente sur la période, concernant 15% des répon-
tile, IQ  : [26-46] contre  33  (IQ  : [25-45]) en  2019 dants en 2021.

432  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Figure 1
Diagramme de flux des répondants sélectionnés pour l’étude des enquêtes Rapport au sexe (Eras),
France, 2017-2019-2021
ERAS 2017 ERAS 2019 ERAS 2021

18 069 hommes 24 308 hommes 18 478 hommes


ayant complété ayant complété ayant complété
le questionnaire le questionnaire le questionnaire

17 549 hommes 23 663 hommes 17 142 hommes


vivant en France vivant en France vivant en France

17 133 hommes 22 284 hommes 15 506 hommes


HSH HSH HSH

15 654 HSH actifs 19 668 HSH actifs 13 259 HSH actifs


sexuellement dans sexuellement dans sexuellement dans
les 6 derniers mois les 6 derniers mois les 6 derniers mois

11 910 HSH actifs 15 566 HSH actifs 10 065 HSH actifs


sexuellement sexuellement sexuellement
séronégatifs VIH séronégatifs VIH séronégatifs VIH

5 785 HSH actifs 7 638 HSH actifs 5 301 HSH actifs


sexuellement sexuellement sexuellement
séronégatifs dont séronégatifs dont séronégatifs dont
le dernier rapport le dernier rapport le dernier rapport
sexuel a eu lieu sexuel a eu lieu sexuel a eu lieu
avec un partenaire avec un partenaire avec un partenaire
occasionnel occasionnel occasionnel

4 078 HSH actifs 5 568 HSH actifs 3 259 HSH actifs


sexuellement sexuellement sexuellement
séronégatifs dont séronégatifs dont séronégatifs dont
le dernierrapport anal le dernier rapport anal le dernier rapport anal
a eu lieu avec a eu lieu avec a eu lieu avec
un partenaire un partenaire un partenaire
occasionnel occasionnel occasionnel

Un total de 12 905 hommes


inclus dans l'analyse

Le partenaire occasionnel avec qui le DRA avait différences significatives  : 75% en  2017 vs  74,5
eu lieu était en  2021 plus souvent un partenaire en  2021 (ORa=0,97  ; IC95%:  [0,74-1,17]  ; p<0,104).
occasionnel connu qu’en  2017 (54% en  2017 L’utilisation du préservatif par les HSH séronégatifs
vs  59% en  2021, p<0,001). Les répondants d’Eras était majoritaire lors de leur DRA avec un partenaire
2021  rapportaient plus souvent connaître le statut occasionnel, mais diminuait, passant de 67% en 2017
séronégatif pour le VIH de leur partenaire occa- à 60% en  2019 et 45% en  2021 (0,74  [0,72‑0,77]  ;
sionnel que ceux d’Eras 2017 (61% vs 53%, p<0,001). p<0,001). La  proportion des HSH séronégatifs qui
La part de répondants connaissant le statut séropo- prenait la PrEP a significativement augmenté passant
sitif au VIH de leur partenaire était faible (2%), sans de 7% en  2017 à  28% en  2021 (1,58  [1,52‑1,65]  ;
différence significative selon les éditions. p<0,001). Ces tendances recoupaient des niveaux
différents selon les classes d’âge des répondants
Évolution et tendance des comportements comme le décrivent les figures 2 et 3. Ainsi, des diffé-
préventifs rences significatives ont été constatées, à la fois entre
L’évolution et les tendances des comportements classes d’âge pour une édition donnée et entre les trois
préventifs sont présentés dans le tableau 3. Le taux éditions d’Eras pour chaque classe d’âge. L’usage du
global de protection (TasP, PrEP, TPE, préser- préservatif était plus important parmi les répondants
vatif,) au DRA avec un partenaire occasionnel âgés de moins de 25 ans que chez leurs aînés, quelle
est resté stable au cours des trois éditions sans que soit l’édition d’enquête. Cet usage a diminué dans

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  433
Tableau 2
Évolution des caractéristiques des répondants séronégatifs pour le VIH dont le dernier rapport anal a eu lieu
avec un partenaire occasionnel – Enquête Rapport au sexe (Eras), France, 2017-2019-2021
Total ERAS 2017 ERAS 2019 ERAS 2021
N % N % N % N % ORa  IC95%  p-valeur
12 905 4 078 5 568 3 259
Âge médian 33 [25-45] 31 [24-44] 33 [25-45] 34 [26-46]     <0,001
Classes d’âge
18-24 ans 3 094 24,0 1 122 27,5 1 354 24,3 618 19,0 0,85 0,82-0,88 <0,001
25-34 ans 3 847 29,8 1 209 29,6 1 612 29,0 1 026 31,5 1,03 0,99-1,06 0,050
35-44 ans 2 580 20,0 764 18,7 1 100 19,8 716 22,0 1,06 1,02-1,10 <0,001
45 ans et plus 3 384 26,2 983 24,1 1 502 27,0 899 27,6 1,05 1,01-1,09 0,002
Lieu de naissance
Pays étranger 847 6,6 276 6,8 342 6,1 229 7,0 1.02 0,96-1,08 0,494
France 12 058 93,4 3 802 93,2 5 226 93,9 3 030 93,0 0,97 0,92-1,04 0,494
Niveau d’études
Baccalauréat et moins 3 657 28,3 1 280 31,4 1 458 26,2 919 28,2 0,96 0,92-0,99 0,022
Supérieur au baccalauréat 9 248 71,7 2 798 68,6 4 110 73,8 2 340 71,8 1,04 1,00-1,07 0,022
Taille de la ville de résidence supérieure à 100 000 habitants
Oui 5 952 46,1 1 967 48,2 2 568 46,1 1 417 43,5 0,93 0,91-0,96 <0,001
Situation professionnelle
Salarié, indépendant, auto-entrepreneur 8 682 67,3 2 605 63,9 3 799 68,2 2 278 69,9 1,08 1,05-1,12 <0,001
Autres* 4 223 32,7 1 473 36,1 1 769 31,8 981 30,1 0,91 0,88-0,94 <0,001
Situation financière perçue
À l’aise, correcte 7 236 56,1 2 117 51,9 3 239 58,2 1 880 57,7 1,06 1,03-1,10 <0,001
Juste, difficile, endettée 5 669 43,9 1 961 48,1 2 329 41,8 1 379 42,3 0,93 0,90-0,96 <0001
Orientation sexuelle
Homosexuel 10 399 80,6 3 381 82,9 4 445 79,8 2 573 79,0 0,92 0,89-0,96 <0,001
Bisexuel 1 885 14,6 485 11,9 856 15,4 544 16,7 1,12 1,07-1,17 <0,001
Autres (hétérosexuel, refus de se définir) 621 4,8 212 5,2 267 4,8 142 4,4 0,94 0,87-1,01 0,100
Fréquentation des lieux de convivialités (bars, saunas, backrooms)
Oui 9 406 72,9 3 065 75,2 4 059 72,9 2 282 70,0 0,91 0,88-0,95 <0,001
Fréquentation de sites Internet et/ou applications de rencontres
Oui 12 264 95,0 3 841 94,2 5 298 95,2 3 125 95,9 1,12 1,04-1,21 <0,001
Relation stable avec un homme dans les 6 derniers mois
Oui 5 141 39,8 1 730 42,4 2 180 39,2 1 231 37,8 0,94 0,91-0,97 <0,001
Nombre de partenaires dans les 6 derniers mois
1à5 7 458 57,8 2 716 66,6 2 849 51,2 1 893 58,1 0,91 0,89-0,94 <0,001
6 à 10 2 547 19,7 576 14,1 1 287 23,1 684 21,0 1,12 1,08-1,16 <0,001
Plus de 10 2 900 22,5 786 19,3 1 432 25,7 682 20,9 1,01 0,97-1,04 0,550
Nombre de tests VIH dans les 12 derniers mois
Aucun 3 208 24,9 1 062 26,0 1 215 21,8 931 28,6 1,06 1,02-1,10 0,001
1 test 2 751 21,3 1 003 24,6 1 206 21,7 542 16,6 0,84 0,81-0,88 <0,001
2 tests 2 539 19,7 925 22,7 1 069 19,2 545 16,7 0,88 0,84-0,94 <0,001
3 tests et plus 4 407 34,1 1 088 26,7 2 078 37,3 1 241 38,1 1,15 1,12-1,19 <0,001
Dépistage d’au moins une IST (hors hépatite B et VIH) dans les 12 derniers mois
Oui 8 961 69,4 2 693 66,0 4 028 72,3 2 240 68,7 1,02 0,99-1,06 0,119
Diagnostic d’au moins une IST dans les 12 derniers mois (hors hépatite B et VIH)
Oui 2 198 17,0 590 14,5 1 115 20,0 493 15,1 0,99 0,95-1,03 0,400

434  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Tableau 2 (suite)
Total ERAS 2017 ERAS 2019 ERAS 2021
N % N % N % N % ORa  IC95%  p-valeur
12 905 4 078 5 568 3 259
Type de partenaire occasionnel avec qui a eu lieu le dernier rapport anal
Occasionnel connu 7 111 55,1 2 190 53,7 3 007 54,0 1 914 58,7 1,07 1,04-1,10 <0,001
Occasionnel inconnu 5 794 44,9 1 888 46,3 2 561 46,0 1 345 41,3 0,93 0,90-0,95 <0,001
Statut VIH du partenaire occasionnel avec qui a eu lieu le dernier rapport anal
Séronégatif 7 339 56,9 2 171 53,2 3 177 57,1 1 991 61,1 1,11 1,07-1,14 <0,001
Séropositif 265 2,1 87 2,1 115 2,1 63 1,9 0,96 0,86-1,07 0,544
Vous ne savez pas 5 301 41,1 1 820 44,6 2 276 40,9 1 205 37,0 0,90 0,87-0,93 <0,001
Chemsex au dernier rapport sexuel
Oui 934 7,2 262 6,4 381 6,8 291 8,9 1,13 1,06-1,19 <0,001

* Autres : Chômeurs, allocataires du Revenu de solidarité active, retraités, étudiants


N : effectif ; ORa : odds ratio ajusté ; IC95% : intervalle de confiance à 95% ; IST : infections sexuellement transmissibles.
Le chemsex ou sexe sous drogues (contraction des mots anglais chemical pour chimique et sex pour sexe), est l’utilisation de produits psychoactifs
(cocaïne, gamma-hydroxy-butyrate/gamma-butyro-lactone (GHB/GBL), amphétamines, méthylènedioxypyrovalérone (MDPV), 3-méthylméthcathinone
(3-MMC), méphédrone (4-MMC)...) pendant et pour les relations sexuelles.

Tableau 3
Évolution du niveau de prévention et des outils utilisés lors du dernier rapport anal avec un partenaire occasionnel
par les répondants séronégatifs pour le VIH – Enquête Rapport au sexe (Eras), France, 2017-2019-2021
  2017 2019 2021
ORa IC95% Tendance p-value
%
TasP 0,8 0,8 0,6 0,89 0,74-1,08 0,259
PrEP 7,0 17,7 28,2 1,58 1,52-1,65 <0,001
Préservatif seul 66,8 59,6 45,3 0,74 0,72-0,77 <0,001
TPE 0,5 0,5 0,5 0,98 0,78-1,21 0,858
Aucun moyen de prévention 24,9 21,3 25,4 1,03 0,99-1,06 0,104

ORa : odds ratio ajusté ; IC95% : intervalle de confiance à 95% ; TasP: Traitement comme prévention ; PrEP : Prophylaxie pré-exposition ; TPE : Traitement
post-exposition. En gras sont indiquées les évolutions significatives.

Figure 2 Figure 3
Évolution de l’usage exclusif du préservatif Évolution de l’usage de la PrEP
lors du dernier rapport anal avec un partenaire lors du dernier rapport anal
occasionnel par les répondants séronégatifs pour le VIH avec un partenaire occasionnel
selon les classes d’âge par édition d’enquête Rapport par les répondants séronégatifs pour le VIH
au sexe (Eras), France, 2017-2019-2021 selon les classes d’âge par édition d’enquête
% Rapport au sexe (Eras), France, 2017-2019-2021
80
70,9
67,4
%
70 66,4
63,6 64,9 60,1 56,7
40 34,4
60 53,5 56,2 32,4
46,8 28,4
50 30 25,6
42,0
38,8
40 20,8
18,1
30 20
14,1
11,7
20 8,0 7,5 7,5
10
10 2,3
0 0
Eras 2017 Eras 2019 Eras 2021 Eras 2017 Eras 2019 Eras 2021
18-24 ans 35-44 ans 18-24 ans 35-44 ans
25-34 ans 45 ans et plus 25-34 ans 45 ans et plus

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  435
toutes les classes d’âge de manière plus ou moins connaissance sur la PrEP important : 86% pour les
importante. En  2017, 71% des répondants avaient répondants séronégatifs d’Eras 2019 14. Pour autant,
utilisé le préservatif lors de leur DRA, contre 65% son adoption est encore insuffisante, d’autant que
pour ceux âgés de 45 ans et plus (p<0,001) ; en 2021 la majorité des participants séronégatifs inclus dans
ces proportions passaient respectivement de 56% à l’étude étaient éligibles à la PrEP selon les recomman-
39% (p<0,001). L’usage de la PrEP a augmenté dans dations françaises 15,16. Malgré sa disponibilité et son
toutes les classes d’âge. Elle est plus utilisée chez les remboursement, des obstacles à l’accès à la PrEP
répondants âgés. En 2017, 7% des répondants âgés ont ralenti le développement de son usage. En effet,
de 45 ans et plus utilisaient la PrEP, contre 2% pour initialement, seuls les médecins spécialistes exerçant
les moins de 25  ans (p<0,001)  ; en  2021 ils étaient à l’hôpital ou dans un centre gratuit d’information,
34% pour les plus âgés et 14% pour les plus jeunes de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) pouvaient
(p<0,001). la prescrire 16. Des disparités géographiques dans
l’accès à cet outil ont également été décrites 17. Aussi,
L’usage du TasP par les  partenaires occasionnels
depuis le 1er juin 2021, les autorités sanitaires fran-
séropositifs était minoritaire : 0,8% en 2017 vs 0,6%
çaises ont étendu sa prescription par les médecins
en  2021 (0,89  [0,74-1,08]  ; p<0,259). De la même
généralistes, afin d’accélérer son déploiement et
manière, le TPE était peu rapporté  : 0,5% en  2017
d’augmenter le nombre d’utilisateurs de la PrEP 16.
et 2021 (0,98 [0,78‑1,21] ; p<0,858).
Des outils et ressources ont été mis à leur disposi-
Enfin, la non protection du DRA avec un parte- tion, dont une plateforme de ­e-learning dédiée à la
naire occasionnel est restée stable au cours des PrEP (www.formaprep.org). Cette mesure n’étant
trois  éditions, à hauteur de 25%, sans différence probablement pas suffisante, du fait de la difficulté à
significative (1,03 [0,99-1,09] ; p<0,104). être suivi par un médecin généraliste, mais aussi de
parler d’orientation sexuelle et de santé sexuelle dans
Discussion ce cadre, des actions associatives d’  «  aller-vers  »
sont indispensables. Par ailleurs, il a été observé que
Cette étude est la première en France à évaluer l’évo- l’épidémie de Covid-19 a eu un impact négatif sur
lution du niveau de protection contre le VIH et l’appro- la dynamique de diffusion de la PrEP. Les données
priation des différents outils de prévention parmi les nationales françaises ont montré que les initiations à
HSH séronégatifs lors de leur DRA avec un parte- la PrEP avaient diminué en 2020 18. Dans une édition
naire occasionnel au cours des 5 dernières années. spéciale Covid-19 de l’enquête Eras, parmi les 11%
Le niveau de protection global n’a pas augmenté sur d’utilisateurs de PrEP avant le confinement, 59% ont
la période étudiée, en 2021 il s’élève à 75%. Même si déclaré avoir arrêté la PrEP pendant le confine-
le préservatif reste l’outil de protection le plus utilisé, ment et 15% n’utilisaient pas de PrEP au moment
une baisse continue de son usage est observée, de l’enquête 19. Diverses raisons peuvent expliquer
contrebalancée par l’augmentation significative de cet arrêt de la PrEP, comme les difficultés d’accès
l’usage de la PrEP. aux services infectieux hospitaliers ou aux CeGIDD
Depuis le milieu des  années 1990, l’usage du durant les c­ onfinements, la diminution des activités
préservatif parmi les HSH ne cesse de diminuer sexuelles et les vulnérabilités de santé mentale dues
en France 12, comme dans les autres pays à hauts à la crise de la Covid-19.
revenus 13, quel  que soit leur statut VIH.  Dans la Ainsi, la diminution de la fréquentation des lieux
population d’étude d’HSH séronégatifs fortement de convivialités gays, du nombre de  partenaires,
exposés au VIH du fait de leur activité sexuelle du recours récent au dépistage VIH met en lumière
importante, l’utilisation du préservatif a baissé de une rupture de tendances entre 2019 et  2021 par
22 points entre 2017 et 2021 : pour la première fois rapport à 2017 et 2019. L’évaluation par Holt et coll.
moins de la moitié des HSH séronégatifs avaient des conséquences de la crise de la Covid-19 et les
utilisé un préservatif lors de leur DRA avec un parte- mesures de freinage mises en œuvre en Australie sur
naire occasionnel. De même, quel que soit l’âge des les comportements sexuels et préventifs, dont l’uti-
répondants, l’usage du préservatif s’érode. Même lisation de la PrEP, sont concordants avec nos
si les jeunes répondants utilisent plus le préser- résultats 20.
vatif que leurs aînés, ceux âgés de moins de 25 ans
en 2021 ne sont plus que 56% contre 71% des moins Malgré l’ajout d’outils biomédicaux aux préserva-
de 25 ans en 2017. tifs, le niveau de protection et le recours au dépis-
tage du VIH insuffisant dans cette population active
En revanche, la PrEP est de plus en plus utilisée sexuellement, compromettent l’objectif de fin de la
depuis 2017 11, atteignant 28% en 2021, et ce particu- transmission du VIH dans les prochaines  années.
lièrement parmi les 35 ans et plus. La diffusion d’infor- En 2021, 25% des répondants séronégatifs n’avaient
mations sur la PrEP et ses bénéfices à l’ensemble aucune protection lors de leur DRA avec leur parte-
de la population HSH constitue la première étape naire occasionnel et 62% avaient réalisé moins de
pour augmenter son utilisation. Les premières initia- 3  tests de dépistage au cours de l’année. On peut
tives d’information sur la PrEP mises en œuvre par faire l’hypothèse qu’une partie de ces HSH se soit
les associations communautaires et les autorités engagée dans des stratégies de sérosorting. En effet,
sanitaires à travers des campagnes ciblant les HSH on constate une augmentation de la part des répon-
ont effectivement permis d’atteindre un niveau de dants rapportant que leur partenaire occasionnel

436  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
n’était pas un inconnu et qu’ils connaissaient leur [3] Rodger  AJ, Cambiano  V, Bruun  T, Vernazza  P, Collins  S,
statut sérologique négatif pour le VIH. Néanmoins, Degen O, et al. Risk of HIV transmission through condomless
sex in serodifferent gay couples with the HIV-positive partner
l’efficacité du sérosorting n’a pas été démontrée par
taking suppressive antiretroviral therapy (PARTNER): Final
des essais randomisés 21. results of a multicentre, prospective, observational study.
Pour autant, ces nouveaux résultats ne vont pas dans Lancet. 2019;393(10189):2428-38.
le sens d’une compensation des risques au niveau [4] Grant  RM, Lama  JR, Anderson  PL, McMahan  V, Liu  AY,
communautaire des HSH 22-24, qui du fait de la diffu- Vargas  L, et  al. Preexposure chemoprophylaxis for HIV
sion de la PrEP pourrait entrainer une augmentation prevention in men who have sex with men. N Engl J Med.
2010;363(27):2587-99.
des comportements à risque de contamination au
VIH. Aussi est-il crucial de poursuivre les programmes [5] McCormack  S, Dunn  DT, Desai  M, Dolling  DI, Gafos  M,
de prévention, conçus comme un ensemble d’outils Gilson R, et al. Pre-exposure prophylaxis to prevent the acqui-
sition of HIV-1 infection (PROUD): Effectiveness results from
de prévention adaptés à tous les HSH et à toutes
the pilot phase of a pragmatic open-label randomised trial.
les périodes de leur vie sexuelle, afin de maintenir Lancet. 2016;387(10013):53-60.
les normes préventives existantes, quelles que soient
les générations 12. [6] Molina JM, Charreau I, Spire B, Cotte L, Chas J, C
­ apitant C,
et  al. Efficacy, safety, and effect on sexual behaviour of
Cette étude comporte des limites d’ordre méthodolo- on-demand pre-exposure prophylaxis for HIV in men who
­
gique. Les enquêtes dites de convenance, basée sur have sex with men: An observational cohort study. Lancet HIV.
2017;4(9):e402-e10.
le volontariat, comme Eras, tendent à surreprésenter
les hommes les plus identitaires 25. Aussi, nos résul- [7] Jourdain  H, de Gage  SB, Desplas  D, Dray-Spira  R.  Real-
tats ne peuvent être généralisés. Toutefois, le recru- world effectiveness of pre-exposure prophylaxis in men at high
tement via les réseaux sociaux a permis de diversifier risk of HIV infection in France: A nested case-control study.
Lancet Public Health. 2022;7(6):e529-e36.
les profils sociodémographiques et affinitaires des
répondants d’Eras et d’inclure des hommes plus [8] Tassi  MF, Laurent  E, Gras  G, Lot  F, Barin  F, de Gage  SB,
distants de la scène gay. et al. PrEP monitoring and HIV incidence after PrEP initiation
in France: 2016–18 nationwide cohort study. J Antimicrob
Malgré la mise à disposition des outils biomédicaux Chemother. 2021;76(11):3002-8.
de prévention du VIH efficaces, en plus de l’utilisation
[9] Volk  JE, Marcus  JL, Phengrasamy  T, Blechinger  D,
du préservatif, l’augmentation de l’utilisation de la
Nguyen  DP, Follansbee  S, et  al. No new HIV infections with
PrEP ne permet pas cependant d’augmenter le niveau increasing use of HIV preexposure prophylaxis in a clinical
global de prévention contre le VIH. Les programmes practice setting. Clin Infect Dis. 2015;61(10):1601-3.
de prévention doivent se poursuivent en s’adaptant
[10] Molina  JM, Ghosn  J, Assoumou  L, Delaugerre  C,
à l’ensemble de la population HSH dans toute sa Algarte-Genin  M, Pialoux  G, et  al. Daily and on-demand HIV
diversité et en promouvant l’ensemble des outils de pre-­exposure prophylaxis with emtricitabine and tenofovir
prévention actuels. ■ disoproxil (ANRS PREVENIR): A prospective observational
cohort study. Lancet HIV. 2022;9(8):e554-e62.
Remerciements
[11] Duchesne  L, Lydie  N, Velter  A.  Increase in the overall
Nous remercions l’ANRS|MIE pour son soutien, via notam-
level of protected anal sex in men who have sex with men
ment la mise à disposition d’un poste de moniteur d’études
in France: Results from the repeated cross-sectional survey
en sciences sociales, Nathalie Lydié (Agence régionale
Rapport au Sexe, France, 2017-2019. AIDS Care. 2020;
de Santé Nouvelle-Aquitaine) pour son implication et son
32(sup2):162-9.
soutien dans la réalisation des enquêtes, Nicolas Etien (Santé
publique France), Bérangère Gall et Solange Brugnaux (BVA) [12] Methy N, Meyer L, Bajos N, Velter A. Generational analysis
pour la qualité de leur travail dans la mise en œuvre des of trends in unprotected sex in France among men who have
enquêtes, nos  partenaires associatifs pour leur soutien et sex with men: The major role of context-driven evolving
leur relai des  enquêtes dans leur réseau et l’ensemble des patterns. PLoS One. 2017;12(2):e0171493.
hommes gays et autres hommes qui ont des rapports sexuels
avec des hommes ayant pris le temps de répondre aux trois [13] Chapin-Bardales  J, Schmidt  AJ, Guy  RJ, Kaldor  JM,
éditions d’Eras. McGregor  S, Sasse  A, et  al. Trends in human immunodefi-
ciency virus diagnoses among men who have sex with men
Liens d’intérêt in North America, Western Europe, and Australia, 2000-2014.
Ann Epidemiol. 2018;28(12):874-80.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard
du contenu de l’article. [14] Velter A, Ousseine YM, Duchesne L, Lydie N. Non-use of
combination HIV prevention tools and its determinants among
Références men who have sex with men living in France. Infect Dis Now.
[1] Marty  L, Cazein  F, Panjo  H, Pillonel  J, Costagliola  D, 2022;52(6):341-8.
Supervie V. Revealing geographical and population heteroge-
[15] Haute Autorité de santé. Recommandation relative à
neity in HIV incidence, undiagnosed HIV prevalence and time
la prise en charge à titre dérogatoire de TRUVADA (Emtri-
to diagnosis to improve prevention and care: Estimates for
citabine/ Fumarate de Tenofovir Disoproxil) dans le cadre
France. J Int AIDS Soc. 2018;21(3):e25100.
d’une recommandation temporaire d’utilisation. Saint-Denis:
[2] France Recherche Nord & sud Sida-hiv Hépatites. Épidé- HAS; 2015. https://www.has-sante.fr/jcms/c_ 2582227/fr/
miologie de l’infection VIH en France 2013-2018. Tendances decision-n-2015-0279/dc/sem-du-9-decembre-2015-du-​
et contribution de la prévention combine (dépistage, trai- college-de-la-haute-autorite-de-sante-adoptant-la-recom​
tement antiretroviral des PVVIH, prévention par le préser- mandation-relative-a-la-prise-en-charge-a-titre-deroga​
vatif et la PrEP). Paris: ANRS; 2020. 42  p. https://www.anrs. toire-de-truvada-emcitrabine-/-fumarate-de-tenofovir-di​
fr/sites/default/files/2020-07/ANRS_Rappor tEpidemiolo​ soproxil-dans-le-cadre-d-une-recommandation-tempo​raire-
gieVIH2013_2018_EN.pdf d-utilisation-rtu-abrogee-28/02/2017

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  437
Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpitaux universitaires Paris Seine-Saint-Denis, Hôpital Avicenne AP-HP, Bobigny
Hugues Cordel et coll.
[16] Haute Autorité de santé. Réponses rapides dans le cadre [21] Heymer  KJ, Wilson  DP.  Available evidence does not
de la COVID-19 – Prophylaxie (PrEP) du VIH par ténofovir support serosorting as an HIV risk reduction strategy. AIDS.
disoproxil / emtricitabine dans le cadre de l’urgence sani- 2010;24(6):935-6.
taire. Saint-Denis: HAS  ; 2021. https://www.has-sante.fr/
jcms/p_3262060/fr/reponses-rapides-dans-le-cadre-de-la- [22] Gafos  M, Horne  R, Nutland  W, Bell  G, Rae  C, Wayal  S,
covid-19-prophylaxie-prep-du-vih-par-tenofovir-diso​proxil-/- et  al. The context of sexual risk behaviour among men who
emtricitabine-dans-le-cadre-de-l-urgence-sanitaire have sex with men seeking PrEP, and the impact of PrEP on
sexual behaviour. AIDS Behav. 2019;23(7):1708-20.
[17] Annequin  M, Villes  V, Delabre  RM, Alain  T, Morel  S,
Michels D, et al. Are PrEP services in France reaching all those [23] Holt M, Murphy DA. Individual versus community-level risk
exposed to HIV who want to take PrEP? MSM respondents compensation following preexposure prophylaxis of HIV. Am J
who are eligible but not using PrEP (EMIS 2017). AIDS Care. Public Health. 2017;107(10):1568-71.
2020;32(sup2):47-56. [24] Rojas Castro  D, Delabre  RM, Molina  JM.  Give PrEP a
[18] Billioti de Gage  S, Desplas  D, Dray-Spira  R.  Roll-out of chance: Moving on from the "risk compensation" concept. J
HIV pre-exposure prophylaxis use in France: A nationwide Int AIDS Soc. 2019;22(Suppl 6):e25351.
observational study from 2016 to 2021. Lancet Reg Health Eur. [25] Velter A, Saboni L, Bouyssou A, Bernillon P, Sommen C,
2022;22:100486. Semaille  C. Échantillons de convenance par Internet et par
[19] Di Ciaccio M, Villes V, Michels D, Morel S, Delabre RM, la presse. Enquête Presse Gays et Lesbiennes 2011. Bull
Rojas Castro  D, et  al. Impact of the early 2020 COVID-19 Methodol Sociol. 2015;126(1):46-66.
crisis and lockdown on PrEP use among men who have
sex with men (MSM) in France. Sex Transm Infect. 2022; Citer cet article
98(7):510-7.
Velter  V, Ousseine  Y, Dupire  P, Roux  P, Mercier  A. Évolution
[20] Holt  M, Chan  C, Broady  TR, Mao  L, MacGibbon  J, du niveau de protection contre le VIH parmi les hommes ayant
Rule J, et al. Adjusting behavioural surveillance and asses- des rapports sexuels avec des hommes séronégatifs pour le
sing disparities in the impact of COVID-19 on gay and VIH – Résultats de l’enquête Rapport au sexe 2017-2019-2021.
bisexual men’s HIV-related behaviour in Australia. AIDS Bull Épidémiol Hebd. 2022;(24-25):430-8. http://beh.sante​
Behav. 2022:1-17. publiquefrance.fr/beh/2022/24-25/2022_24-25_1.html

> ARTICLE // Article

LA PREP CHEZ LES MIGRANTS : Y SOMMES-NOUS VRAIMENT ?


// PREP AMONG MIGRANTS IN FRANCE: WHAT IS THE REAL PICTURE?

Hugues Cordel1,2 ([email protected]), Pauline Penot 2,3, Aude Lucarelli4, Marie Ahouanto5, Céline Michaud 6,


Myriam Diemer7, Pierre Leroy 2,7,8, Nicolas Vignier1,2,9

1
 Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpitaux universitaires Paris Seine-Saint-Denis, Hôpital Avicenne AP-HP, Bobigny
2
 Société française de lutte contre le sida, Nice
3
 CeGIDD du Centre hospitalier intercommunal André Grégoire, GHT Grand Paris Nord-Est, Montreuil
4
 Corevih, Centre hospitalier de Cayenne, Guyane
5
 Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpital Bichat AP-HP, Paris
6
 Coordination des centres délocalisés de prévention et de soins, Centre hospitalier de Cayenne, Guyane
7
 Service des maladies infectieuses et tropicales, Hôpital Lariboisière AP-HP, Paris
8
 Groupe hospitalier Sud Île-de-France, Melun
9
 Université Sorbonne Paris Nord, UFR SMBH, IAME, UMR 1137, Bobigny

Soumis le 16.09.2022 // Date of submission: 09.16.2022

Résumé // Abstract
Introduction  – Près de 40  000  personnes utilisent actuellement la prophylaxie pré-exposition (PrEP) en
France, majoritairement des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH). Les personnes
migrantes et en particulier les femmes et les hommes originaires d’Afrique et des Caraïbes en restent éloignées.
Méthode  – Trois enquêtes transversales auprès des prescripteurs ont évalué en  2018, 2019 et  2021 la
fréquence de prescription de la PrEP auprès des personnes migrantes (toutes orientations sexuelles), les obsta-
cles ­rencontrés et les perspectives d’amélioration. L’expérience de certains répondants ayant développé des
approches innovantes sont ensuite décrites.
Résultats – De 60 à 113 professionnels ont répondu aux enquêtes annuelles. La fréquence de prescription à au
moins une personne migrante a augmenté de 27% en 2018 à 70% en 2021. Une grande partie des prescripteurs
l’ont prescrite à moins de 5 personnes migrantes. Les HSH migrants représentent une part importante des files
actives. La proportion de femmes, d’hommes et de personnes trans migrants non HSH bénéficiaires de la PrEP
a progressivement augmenté en 4 ans.

438  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Les principaux obstacles rencontrés par les prescripteurs sont la difficulté à suivre les personnes migrantes
mises sous PrEP, la méconnaissance de la PrEP par ces dernières, les barrières à l’accès aux droits et leur
manque d’intérêt pour cet outil de prévention.
Conclusion – La prescription de la PrEP chez les personnes migrantes est une réalité en France, mais reste rare
et bénéficie surtout aux HSH nés à l’étranger. Elle doit être encouragée et facilitée par différentes approches
novatrices.
Introduction – Nearly 40,000 people in France are currently using pre-exposure prophylaxis (PrEP), the majority
of whom are men who have sex with men (MSM). Migrants, in particular women and men from Africa and the
Caribbean, remain under-represented.
Method – Three cross-sectional surveys of prescribers in 2018, 2019 and 2021 were used to assess the frequency
of PrEP prescriptions among migrants (of all sexual orientations), as well as obstacles to treatment and pros-
pects for improvement. Descriptions of innovative approaches used by certain prescribers were also recorded.
Results – Between 60 and 113 health professionals responded to each annual survey. Frequency of PrEP prescrip-
tion for at least one migrant patient increased from 27% in 2018 to 70% in 2021. A large proportion of prescribers
delivered prescriptions to less than five migrant patients. MSM represent a significant proportion of migrant PrEP
users, yet this proportion has gradually decreased from 65% in 2018 to 38% in 2021. There was a concomitant
increase in the proportion of other key migrant populations (non-MSM men, women, transsexuals) receiving PrEP.
The main obstacles to treatment encountered by prescribers included difficulties in establishing patient
follow-up, lack of knowledge about PrEP among migrants, barriers to accessing healthcare rights and lack of
interest in PrEP treatment.
Conclusion – PrEP prescriptions for migrants are being delivered but remain rare and concern mainly
MSM. Innovative approaches could help encourage and facilitate wider use among migrant populations.

Mots-clés : PrEP, Migrants, Prescripteurs, Expériences


// Keywords: PrEP, Migrants, Prescribers, Feedback

Introduction hexagonale ou dans les outre-mer, 4,8% en Europe,


3,2% en Asie, 5% en Amérique ou dans les Caraïbes,
La prophylaxie pré-exposition (PrEP) est un des moyens et seulement 2,4% en Afrique subsaharienne. La
de la prévention combinée du VIH. Elle repose sur la grande majorité d’entre eux étaient des HSH (98,7%).
prise d’un traitement antirétroviral de manière continue
ou discontinue chez les personnes séronégatives à haut Par ailleurs, à partir des données d’Epi-Phare, la part
des  personnes étrangères sans-papiers et/ou en
risque d’être exposées au VIH et a montré une bonne
situation de précarité financière peut être évaluée
efficacité. Elle a été autorisée en France en 2015, d’abord selon le nombre de personnes bénéficiaires de l’Aide
dans le cadre d’une autorisation temporaire d’utilisation, médicale d’État (AME) ou de la Complémentaire santé
puis d’une autorisation de mise sur le marché. Jusqu’à solidaire (CSS, ex-CMU-C). Seuls 0,3% des PrEPeurs
mi-2021, plus de 40 000 personnes avaient initié une étaient bénéficiaires de l’AME et 7% de la CSS/CMU-C
PrEP en France, en majorité des hommes (97,5%) 1. de 2016 à 2021. Ces données ne comptabilisent pas
Les études ayant montré l’efficacité de la PrEP ont été les personnes sans couverture maladie ayant béné-
menées auprès de personnes hétérosexuelles en Afrique ficié d’une délivrance de la PrEP gratuitement dans
subsaharienne et d’hommes ayant des rapports sexuels un centre gratuit d’information, de dépistage et de
diagnostic du VIH, des hépatites et des IST (CeGIDD)
avec d’autres hommes (HSH) en Europe et en Amérique
ou une permanence d’accès aux soins de santé
du Nord 2. Ce sont d’ailleurs les HSH qui représentent la
(PASS). Ainsi, peu de données sont disponibles sur la
majorité des utilisateurs de la PrEP en France. prescription de la PrEP chez les personnes migrantes.
Les  personnes migrantes, entendues comme Différentes barrières relatives au déploiement de la
les  personnes nées étrangères à l’étranger et rési- PrEP auprès des personnes migrantes ont été avan-
dant en France 3, et en particulier les femmes et les cées comme les facteurs socioéconomiques, cultu-
hommes originaires d’Afrique et des Caraïbes, repré- rels, liés au prescripteur, au défaut de perception
sentent pourtant une part importante des décou- du risque ou encore en lien avec une connaissance
vertes d’infection par le VIH 4. Ces infections étaient de l’outil 7. Des études françaises ont également
acquises dans 30 à 50% des cas sur le territoire confirmé cette ­ méconnaissance de la PrEP chez
français selon l’enquête ANRS-Parcours menée certaines populations clés comme les  personnes
originaires d’Afrique subsaharienne en Île-de-France
en 2012-2013 en Île-de-France auprès de personnes
ou les femmes migrantes en Guyane française 8,9.
originaires d’Afrique subsaharienne 5. Les données Cependant, une fois informées, les  personnes
nationales de prescription de la PrEP, selon le groupe- migrantes se disent fréquemment intéressées par ce
ment EPI-Phare 1, ne renseignent pas le pays de nais- nouvel outil de prévention, notamment les hommes
sance. Dans la cohorte francilienne Prévenir 6, 82,5% ayant des  partenaires multiples ou les femmes
des 3 056  utilisateurs inclus étaient nés en France suspectant leur partenaire d’infidélité 10-13.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  439
L’objectif de ce travail était ainsi de décrire les pres- Prescription de la PrEP aux personnes
criptions de PrEP chez les personnes migrantes en migrantes (tableau 1)
France et les freins rencontrés par les acteurs de la
Seuls 27% en  2018 et 32% en  2019 des répon-
santé sexuelle pour son déploiement.
dants déclaraient avoir déjà évalué des personnes
migrantes en vue d’une prescription de PrEP.
Méthodes La proportion de répondants ayant déjà prescrit au
Trois enquêtes transversales ont été menées en 2018, moins une fois une PrEP à une ou des  personnes
2019 et 2021 auprès de médecins prescripteurs de PrEP migrantes est passé de 24% en  2018, à 30%
de France par la « Commission migrants » de la Société en  2019 et à 70% en  2021. Les files actives de
française de lutte contre le sida (SFLS). Les question- PrEPeurs migrants étaient de petite taille  : moins
naires ont été transmis auprès des listes de diffusion de 5  personnes dans 67% des cas en  2018 à
de professionnels des commissions spécialisées 43% en  2021. À l’inverse les files actives de
(migrants, communications, médicaments) de la SFLS 21 à 50 PrEPeurs sont passées de 4% à 10% entre
et de la Société de pathologie infectieuse en langue 2018 et  2021. Il s’agissait d’une augmentation de
française (Spilf). Les questionnaires ne s’adressaient taille des files actives franciliennes et de Guyane et
qu’aux médecins spécialisés en santé sexuelle pres- la création de nouvelles files actives en région.
cripteurs de PrEP représentant près de 200 membres. Les HSH migrants représentent la majorité des
personnes migrantes mises sous PrEP mais cette
Les questionnaires évaluaient tout d’abord le nombre
proportion a progressivement diminué, passant
de prescriptions de PrEP à des personnes migrantes
de 65% des files actives en  2018 à 38% en  2021,
dans chaque centre prescripteur. Une définition
en lien avec l’apparition d’autres populations clés
précise des «  personnes migrantes  » n’était pas
dans les files actives de personnes migrantes sous
précisée et a été laissée à l’appréciation des répon-
PrEP. Les femmes migrantes travailleuses du sexe
dants. Les obstacles à la prescription étaient ensuite
représentaient 20% des files actives en 2018, contre
explorés par des questions fermées. Dans le ques-
30% en  2021. Les femmes migrantes en situation
tionnaire de 2021, le pays de naissance des PrEPeurs
de vulnérabilité, ainsi que les personnes migrantes
n’était pas recueilli et des propositions fermées d’obs-
hétérosexuelles multipartenaires et les  personnes
tacles à la prescription n’y figuraient pas. En 2021, une
migrantes effectuant un voyage à destination de leur
question a été ajoutée sur les mesures pouvant faci-
pays d’origine représentaient respectivement 8%,
liter l’utilisation de la PrEP chez les migrants. Enfin, la
22% et 13% des files actives en 2018, 2019 et 2021.
prescription chez les femmes migrantes a été égale-
Les  personnes migrantes étaient originaires de
ment évaluée. Les questionnaires ont été diffusés différents territoires  : par exemple, celles nées en
sur les plateformes GoogleForm® pour le baromètre Afrique subsaharienne représentaient 14% en 2018
de 2018 et 2019 et Framaform® pour le baromètre de
et 54% en 2019 des files actives et ceux nés dans
2021. Elles ont été ensuite analysées de façon descrip-
d’autres pays d’Europe 25% et 8% respectivement.
tive grâce au logiciel Stata 11® (StataCorpLLC, USA).
Dans un deuxième temps, un focus est réalisé sur Obstacles à la prescription (tableau 1)
quelques initiatives de promotion et de prescription Les principales barrières rapportées par les pres-
de la PrEP. Les centres présentés ont été sélec- cripteurs étaient, en  2018 et  2019, la difficulté à
tionnés  sur  le  caractère innovant de leur approche suivre les personnes ayant débuté une PrEP (30%
de sensibilisation et d’offre de PrEP aux personnes et 28% des répondants respectivement), ainsi que
migrantes et sur leur capacité à fournir des données la mé­c onnaissance de ce moyen de prévention par
détaillées sur la population d’intérêt de ce travail. Le les populations migrantes (40% et 19%). L’accès
caractère innovant était apprécié sur la mise en place aux droits (25%, 19% et 27% en 2018, 2019 et 2021)
de partenariat avec des structures communautaires ainsi que la barrière de la langue (18%, 13%, et 47%)
et médicosociales, l’ « aller-vers », la mise en place étaient aussi fréquemment rapportés. En  2021,
d’actions en dehors des murs de l’hôpital, un focus sur le fait que la prévention du VIH ne soit pas une
une population éloignée des structures de prévention, préoccupation pour les personnes migrantes était
etc. Les données proviennent des rapports d’acti- le principal obstacle rapporté (53%). Le manque
vités de chaque centre. Un recueil spécifique des de moyens (8%,  6% et 13%), et la longueur des
prescriptions de PrEP chez les migrants avait égale- consultations (2%, 3% et 15%) étaient également
ment été réalisé dans le cadre du rapport d’activité une préoccupation des prescripteurs.
2021 du Comité de coordination régional de la lutte
contre les infections sexuellement transmissibles et le Leviers à la prescription (tableau 2)
VIH (Corevih) d’Île-de-France (regroupant 57 centres), En 2021, les meilleurs moyens pouvant faciliter l’uti-
publié en mai 2022. Il est également présenté. lisation de la PrEP par les  personnes migrantes
éligibles, étaient un partenariat avec les associations
Résultats communautaires ou une maison de quartier, ainsi que
des actions de médiation en santé.
En  2018, 113  médecins ont répondu à l’enquête,
84 en 2019 et 60 en 2021 (tableau 1). Les répondants Près de la moitié (48%) des répondants ne trou-
exerçaient dans toutes les régions de France, l’Île-de- vait pas plus difficile de prescrire la PrEP chez une
France étant la région la plus représentée (tableau 1). femme migrante que chez un homme. Néanmoins,

440  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Tableau 1
Pratiques de prescription de la PrEP à des personnes migrantes en France en 2018, 2019 et 2021
2018 2019 2021
n % n % n %
Prescripteurs répondants (total) 113 100% 84 100% 60 100%
Prescripteurs répondants (total par région)
Auvergne-Rhône-Alpes 9 8% 4 5% 3 5%
Bourgogne-Franche-Comté 6 5% 2 2% 1 2%
Bretagne 5 4% 0 0% 4 7%
Centre-Val de Loire 2 2% 2 2% 1 2%
Corse 0 0% 0 0% 0 0%
Grand Est 0 0% 3 4% 3 5%
Hauts-de-France 4 4% 4 5% 6 10%
Île-de-France 24 21% 40 48% 23 38%
Normandie 3 3% 1 1% 0 0%
Nouvelle-Aquitaine 6 5% 3 4% 3 5%
Occitanie 1 1% 3 4% 3 5%
Pays de la Loire 2 2% 2 2% 5 8%
Provence-Alpes-Côte d’Azur 7 6% 6 7% 3 5%
Guyane 2 2% 1 1% 4 7%
La Réunion 0 0% 1 1% 1 2%
Guadeloupe et Saint-Martin 0 0% 2 2% 0 0%
Non Renseignée 42 37% 10 12% 0 0%
Répondants ayant déjà prescrit la PrEP en initiation ou renouvellement
27 24% 25 30% 42 70%
à une personne migrante
Prescripteurs répondants ayant déjà évalué des personnes migrantes
31 27% 27 32%
pour la PrEP
Distribution des populations clés dans les files actives de personnes migrantes sous PrEP
Total usagers 188 100% 64 100% 755 100%
HSH migrants 122 65% 20 31% 284 38%
HSH migrants TDS 5 3% 0 0% 33 4%
Femmes migrantes TDS 38 20% 18 28% 230 30%
Femmes trans migrantes TDS 8 4% 12 19% 105 14%
Femmes migrantes en situation de précarité et de vulnérabilité sexuelle 4 2% 6 9% 33 4%
Femmes ou hommes hétérosexuels multipartenaires 6 3% 8 13% 40 5%
Femmes ou hommes hétérosexuels à l’occasion d’un retour au pays 5 3% 0 0% 30 4%
Prescripteurs répondants 27 11 42
Région d’origine des personnes migrantes sous PrEP
Afrique Subsaharienne 16 14% 13 54%
Afrique du Nord 11 10% 3 13%
Europe 28 25% 2 8%
Moyen Orient et Turquie 5 5% 2 8%
Amérique du Nord 10 9% 0 0%
Amérique Centrale et du Sud 18 16% 1 4%
Caraïbe et République dominicaine 12 11% 1 4%
Asie 9 8% 2 8%
Océanie et Océan Indien 2 2% 0 0%
À combien de personnes migrantes estimez-vous avoir prescrit la PrEP sur les 3 dernières années ?
<5 18 67% 10 40% 18 43%
5-20 7 26% 3 12% 11 26%
21-50 1 4% 2 8% 8 19%

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  441
Tableau 1 (suite)
2018 2019 2021
n % n % n %
50-100 1 4% 3 12% 4 10%
>100 0 0% 0 0% 1 2%
Inconnu 0 0% 7 28% 0 0%
Difficultés à prescrire la PrEP chez les personnes migrantes
Prescripteurs répondants 40 100% 32 100% 60 100%
Difficultés de suivi 12 30% 9 28% 15 25%
Accès aux droits 10 25% 6 19% 16 27%
Barrière de la langue 7 18% 4 13% 28 47%
Manque de moyens 3 8% 2 6% 8 13%
Consultations longues 2 2% 1 3% 9 15%
Méconnaissance auprès des migrants 16 40% 6 19%
Les migrants ne se sentent pas concernés 11 28% 1 3%
Public difficile à toucher 9 23% 2 6%
Difficultés à investir l’outil 6 15% 1 3%
Parcours HSH inadapté aux migrants 4 10% 1 3%
Réticence des associations 2 5% 0 0%
Éthique 1 3% 1 3%
Pas une préoccupation pour la personne 32 53%
Difficile à expliquer à la personne 16 27%
Prise quotidienne 12 20%
Difficile à aborder 11 18%
Manque de formation du prescripteur 5 8%
Manque d’efficacité 1 2%

PrEP : prophylaxie pré-exposition au VIH ; HSH : hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ; TDS : travailleurs du sexe.

30%  d’entre eux ne se prononçaient pas. De plus, ces expériences concernaient dans 8% des cas
seuls 15% des répondants étaient tout à fait d’accord, des patients sans couverture maladie et ayant
ou d’accord, avec le fait que la PrEP chez les migrants bénéficié d’une délivrance gratuite via la PASS ou
est facile à mettre en œuvre. le CeGIDD.

Expériences À Melun, la mise en place d’une consultation de


prévention à orientation santé sexuelle dans une
La PrEP chez les  personnes migrantes s’est déve- PASS ambulatoire associative a permis d’évaluer
loppée sur tout le territoire, mais par leur localisation, et de confirmer la vulnérabilité sexuelle de femmes
certains centres ont des files actives plus importantes et d’hommes migrants primo-arrivants, le plus
de personnes migrantes et/ou ont mis en place des souvent demandeurs d’asile, de les informer sur
initiatives d’intérêt que nous décrivons ici et résu- l’existence de la PrEP, de la proposer à 50 d’entre
mons dans le tableau 3. deux, parmi lesquels 22 l’ont acceptée, 10 ont été
En Île-de-France, sur les 10  632  personnes sous reçu en consultation PrEP et une seule femme était
PrEP recensées par la commission Inter-Corevih toujours sous PrEP lors de l’évaluation (6 femmes
Île-de-France, 2 628 étaient des HSH nés à l’étranger perdues de vue, 2 femmes et 1 homme n’étant plus
(25%), 102 (1%) étaient des femmes hétérosexuelles en situation de vulnérabilité sexuelle) 14. À Avicenne,
malgré des campagnes de promotion avec les
nées à l’étranger, et 21 (0,2%) étaient des hommes
associations communautaires dès 2016, dans une
hétérosexuels nés à l’étranger.
approche de « ramener vers », très peu de femmes
Dans quatre des centres hospitaliers franciliens migrantes en situation de précarité et de vulnéra-
ayant prescrit la PrEP à des personnes migrantes bilité sexuelle (définies par l’absence de logement
(Melun, Lariboisière, Montreuil et Avicenne), les personnel, de titre de séjour depuis au moins un
bénéficiaires étaient principalement des HSH nés an, de couverture maladie ou d’isolement social
à l’étranger, mais aussi des femmes et hommes ou relationnel et la probabilité élevée de contracter
hétérosexuels issus de l’immigration. Ces usagers une ou des IST, d’avoir une grossesse imprévue ou
étaient le plus souvent originaires d’Afrique sub­ d’être victime de violences sexuelles) ont débuté un
saharienne. Lorsque l’information était disponible, suivi PrEP.

442  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Tableau 2
Faisabilité et leviers du déploiement de la PrEP auprès des personnes migrantes, enquête 2021 (N=60)
Question n %
Selon vous, quelles mesures faciliteraient l’initiation d’une PrEP chez une personne migrante ?
Partenariat avec les associations communautaires, les maisons de quartiers, les CCAS ou les missions locales 43 72%
Médiation 32 53%
Hors les murs 28 47%
Communication ciblée 27 45%
Gratuité 26 43%
PrEP injectable 23 38%
Formation large des médecins 23 38%
Suivi et prescription par des sages-femmes et infirmiers 19 32%
Délivrance en pharmacie sans ordonnance 2 3%
Selon-vous est-il plus difficile d’initier/suivre une PrEP chez une femme migrante par rapport à un homme migrant hétérosexuel ?
Non 29 48%
Oui 13 22%
Ne sait pas 18 30%
La PrEP chez les migrants est-elle facile à mettre en œuvre ?
Tout à fait d’accord 2 3%
D’accord 7 12%
Ni en désaccord, ni d’accord 18 30%
Pas d’accord 23 38%
Pas du tout d’accord 7 12%
Ne sait pas 3 5%

N : Effectif ; PrEP : prophylaxie pré-exposition au VIH ; CCAS : centres communaux d’action sociale.

Tableau 3
Présentation de quelques files actives choisies de PrEPeurs nés à l’étranger
Corevih Melun Lariboisière Montreuil Avicenne Goutte Guyane
 
Île-de-France1 (77) (75) (93) (93) d’Or (75) (973)
Année du recueil 2021 2021 2021 2021 2021 2020 2020
File active de PrEPeurs nés à l’étranger 2 751 22 73 99 24 21 186
Couverture maladie ND 20 (91%) 68 (93%) ND 22 (92%) ND 48 (26%)
Nombre d’Initiations de PrEP chez
1 191 (43%) 6 (27%) 21 (29%) ND 5 (21%) ND 70 (38%)
des personnes nées à l’étranger
Nombre de PrEPeurs nés à l’étranger
ND 10 25 ND 21 5 82
perdus de vus (cumulés depuis 2016)
Distribution des populations clés dans les files actives
HSH nés à l’étranger 2 628 (96%) 15 (68%) 63 (86%) 72 (73%) 22 (92%) ND 22 (12%)
Femmes hétérosexuelles nées à l’étranger 102 (4%) 4 (18%) 7 (10%) 23 (23%) 1 (4%) ND 146 (78%)
Hommes hétérosexuels
21 (1%) 3 (14%) 3 (4%) ND 1 (4%) ND 7 (4%)
nés en France ou à l’étranger
Continent de naissance
Afrique subsaharienne ND 11 (50%) 18 (25%) 39 (39%) 10 (42%) ND 0
Afrique du Nord ND 3 (14%) 13 (18%) 8 (8%) 8 (33%) ND 0
Amérique centrale et du Sud, Caraïbes ND 3 (14%) 13 (18%) 28 (28%) 3 (13%) ND 171 (92%)
Amérique du Nord ND 0 3 (4%) 1 (1%) 1 (4%) ND 0
Asie ND 1 (5%) 14 (19%) 10 (10%) 1 (4%) ND 0
Europe ND 4 (18%) 12 (16%) 13 (13%) 1 (4%) ND 15 (8%)

1
La file active du Corevih Île-de-France est une file active régionale exhaustive recensée en 2021 par la commission intercorevih PrEP et qui précisait si
les personnes suivies étaient nées en France ou à l’étranger. Corevih : comités de coordination régionaux de la lutte contre les infections sexuellement
transmissibles et le VIH.
ND : Non disponible ; PrEP : prophylaxie pré-exposition au VIH ; PrEPeurs : usagers de la PrEP ; HSH : hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  443
En Guyane française, à la consultation PrEP du Des travaux ont déjà montré que la difficulté d’accès
Centre hospitalier de Cayenne, récemment délo- et de délivrance du traitement, ainsi que des doutes
calisée en centre-ville, ce sont 77  usagers qui à propos de l’efficacité à prévenir le VIH étaient
bénéficiaient de la PrEP en 2020, majoritairement rapportés par certaines  personnes migrantes 10.
des femmes travailleuses du sexe (TDS) origi- On peut rajouter la méconnaissance chez les popu-
naires de République dominicaine (n=52) et des lations les plus précaires et isolées des messages
HSH, 45% étant arrivés en Guyane dans l’année de de santé publique. Enfin, les préoccupations quoti-
début de la PrEP et 59% n’avaient pas de couver- diennes des personnes migrantes primo-arrivantes
ture maladie 15. par d’autres problèmes sociaux dans un contexte de
survie les éloignent des démarches de prévention
Un accès à la PrEP a également été déployé dans les en général et de la PrEP plus particulièrement. Ces
communes isolées de Guyane au sein des centres obstacles sont comparables à ceux rapporté dans
délocalisés de prévention et de soins (CDPS) avec une étude réalisée dans 34  pays européens alors
l’aide de l’association Aides. En 2021, 29 personnes que les politiques d’accès et de remboursement de
s’étaient vu prescrire la PrEP, le plus souvent des la PrEP différaient selon le pays 19.
femmes TDS (n=23), mais aussi des consultants pour Les exemples d’initiatives innovantes de prescrip-
accident d’exposition sexuelle (n=4) ou des hété- tion de la PrEP par les acteurs de la santé sexuelle
rosexuels multipartenaires (n=4). Seules 11 étaient français permettent d’identifier des leviers mobili-
toujours sous PrEP à la fin de l’année, les motifs sables. Ces initiatives montrent que la PrEP peut
d’arrêt étant le plus souvent la tolérance, la difficulté être introduite chez des  personnes migrantes
de prendre un traitement au long cours ou la rupture non HSH, mais en utilisant des circuits différents
de couverture maladie. de ceux habituellement dédiés à ces  derniers. Ils
nécessitent un engagement fort des différents
Des expériences d’  «  aller-vers  » consistant à une acteurs. La coopération avec les acteurs du soin
prescription hors des murs de l’hôpital, avant la primaire et les associations communautaires, ainsi
généralisation de la prescription de la PrEP en ville que les opérations de médiation en santé soulignent
en  juin  2021, ont eu lieu 14,16,17 ou sont program- l’importance d’un travail pluridisciplinaire. Par
mées 12. Elles démontrent la faisabilité de la exemple, au Royaume-Uni, une opération de média-
démarche mais pointent les besoins nécessaires tion par les pairs auprès de femmes noires a permis
pour introduire la PrEP chez quelques  personnes de les informer sur la PrEP, mais pointe la néces-
migrantes. L’expérimentation, dans le quartier de sité d’un engagement important des promoteurs
la Goutte d’Or à Paris, d’une consultation PrEP du projet pour le rendre pérenne 20. La PrEP chez
les  personnes migrantes doit ainsi s’inscrire dans
délocalisée dans une maison de santé pluridiscipli-
une vision globale de la prévention et de la santé
naire, a montré que sur 180 personnes interrogées,
sexuelle des migrants.
43 étaient éligibles à la PrEP selon leur médecin
généraliste, 21 l’ont débuté, 16 l’ont pris au moins Des travaux complémentaires explorant de façon
pendant 3 mois et 5 étaient toujours sous PrEP à la qualitative les files actives avec de nombreuses
fin de l’expérimentation 16. femmes et hommes hétérosexuels migrants sous
PrEP en France pourraient donner des pistes afin
d’améliorer son déploiement chez les  personnes
Discussion migrantes à haut risque d’acquisition du VIH.
Après la baisse importante rapportée en  2020 Notre étude a exploré l’attitude des prescripteurs
de l’ensemble des prescriptions de PrEP, ces de PrEP chez les personnes migrantes. Elle a néan-
dernières sont revenues en 2021 à un niveau supé- moins plusieurs limites. La définition de migrant
rieur à celui de 2019 1. La prescription de PrEP
(personne née étrangère à l’étranger) n’a pas claire-
aux  personnes migrantes semble avoir augmenté
ment été définie et n’est probablement pas connue
ces dernières années mais reste encore marginale
de tous les répondants et a ainsi pu conduire à une
et se concentre sur les HSH dans l’hexagone. Si on
sous-­déclaration de la prescription de la PrEP chez
peut se féliciter de l’accès et de l’utilisation de la
les HSH nés à l’étranger, en particulier de ceux nés
PrEP par les HSH migrants, on le voit dans l’augmen-
dans les pays à haut niveau de revenu. Des HSH
tation des effectifs de PrEPeurs le long des années,
non français, mais européens ou même américains
l’utilisation de la PrEP chez les autres catégories
du Nord, n’ont peut-être pas été classés comme
de migrants exposées est insuffisante. En particu-
lier, la promotion de la PrEP chez les femmes en HSH migrants en raison de l’absence de vulné-
situation de vulnérabilité ou de travail du sexe est rabilité qui peut être sous-entendue par certains
une nécessité et est un objectif déjà évoqué depuis dans la notion de migrants. Par ailleurs, les ques-
plusieurs années 18. tionnaires différaient légèrement selon les années,
ainsi que le nombre de répondants, ce qui limite
Une meilleure compréhension des freins existants les comparaisons temporelles. Le taux de parti-
à l’utilisation et de l’état d’avancement de l’accès à cipation des prescripteurs est faible au regard du
la PrEP chez les  personnes migrantes en France, nombre de centres et de prescripteurs en France.
en particulier chez celles en situation de vulnérabilité Cependant les centres ayant les plus grosses files
sexuelle, est susceptible d’aider à son déploiement. actives semblent avoir répondu régulièrement.

444  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
La sur-­représentation des HSH chez les migrants Île-de-France. AFRAVIH 2022. 11e  conférence internationale
usagers de la PrEP et la difficulté de passage à francophone. Marseille, 6-9 avril 2022.
l’échelle de la PrEP chez les migrants reste néan- [9] Vignier  N, Michaud  C.  Connaissance et usage de la PrEP
moins visible à chaque enquête. par les femmes dominicaines exerçant le travail du sexe sur le
fleuve Maroni en Guyane française. Journées thématiques –
IST, PrEP, Santé sexuelle. Paris, 7-8 juin 2022.
Conclusion
[10] Hadj  L, Desgrées du Loû  A, Dupont  J, Nguyen  VK.
L’intérêt de la PrEP pour prévenir l’acquisition du Acceptabilité et freins chez les populations africaines et
VIH chez les  personnes migrantes exposées est caribéennes vivant en Île-de-France d’une nouvelle offre de
apparue rapidement après son déploiement. Plus de prévention du VIH : le Truvada® en prophylaxie pré-­exposition
(PrEP). Une  enquête exploratoire. Bull Epidémiol Hebd.
six  ans plus tard, peu de  personnes migrantes 2017(6):110-4. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2017/6/
bénéficient effectivement de la PrEP.  Le nombre 2017_6_2.html
de prescripteurs impliqués a pourtant augmenté
[11] Cordel  H.  Are migrant women from Sub-Saharan Africa
et les expériences innovantes se sont multipliées.
ready for HIV pre-exposure prophylaxis? 27th ECCMID. Vienna,
Ces initiatives doivent être soutenues et renforcées, 22-25 April 2017.
notamment en médiation en santé, tout en conti-
nuant à innover avec de nouveaux circuits de déli- [12] Regnault H, Mosnier E, Inegbeze G, Mosnier M, Michels D,
Girard  G, et  al. Une ignorance située : méconnaissance
vrance de la PrEP intégrés dans une prise en soins
de la PrEP chez les femmes TDS immigrées à Marseille.
globale des  personnes migrantes les plus vulné- Etude  FASSETS.  Journées thématiques – IST, PrEP, Santé
rables ou exposées. ■ sexuelle. Paris, 7-8 juin 2022.

Remerciements [13] Delabre RM, Bernier A, Sánchez F, Vilotitch A, Chanos S,


Cosmaro  ML, et  al. «  Yes, I’m interested in taking PrEP!  »:
Les auteurs remercient tous les répondants des différentes PrEP interest among women respondents to the European
enquêtes. community-based survey « Flash! PrEP in Europe ». PLoS One.
2021;16(2):e0246037.
Liens d’intérêt
[14] Cordier  H.  Parcours en santé sexuelle de  personnes
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard
migrantes primo-arrivantes aux antécédents de violences
du contenu de l’article.
subies, prises en soin dans une PASS ambulatoire.
Références AFRAVIH  2022. 11e  conférence internationale francophone.
Marseille, 6-9 avril 2022.
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[7] Okoro  ON, Whitson  SO.  Sexual health, HIV care and pre-­ Womens Health (Lond). 2022;18:17455057221091728.
exposure prophylaxis in the African immigrant population: A
needs assessment. J Immigr Minor Health. 2020;22(1):134-44. Citer cet article
[8] Coulibaly K, Gosselin A, Carillon S, Taéron C, Mbiribindi R, Cordel  H, Penot  P, Lucarelli  A, Ahouanto  M, Michaud  C,
Desgrées du Loû  A.  Les traitements antirétroviraux pour la Diemer  M, et  al. La PrEP chez les migrants  : y sommes-nous
prévention du VIH : des outils de prévention faiblement connus vraiment  ? Bull Épidémiol Hebd. 2022;(24-25):438-45. http://
par les immigrés africains en situation de précarité vivant en beh.santepubliquefrance.fr/beh/2022/24-25/2022_24-25_2.html

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  445
Santé publique France, Saint-Maurice

>
Rémi Hanguehard et coll.

ARTICLE // Article

COUVERTURE VACCINALE CONTRE LES INFECTIONS À PAPILLOMAVIRUS HUMAIN DES FILLES


ÂGÉES DE 15 À 18 ANS ET DÉTERMINANTS DE VACCINATION, FRANCE, 2021
// HUMAN PAPILLOMAVIRUS VACCINATION COVERAGE AMONG GIRLS IN FRANCE AGED 15-18 YEARS
AND DETERMINANTS OF VACCINATION, 2021

Rémi Hanguehard, Arnaud Gautier, Noémie Soullier, Anne-Sophie Barret, Isabelle Parent du Chatelet, Sophie Vaux


([email protected])

Santé publique France, Saint-Maurice

Soumis le 19.09.2022 // Date of submission: 09.19.2022

Résumé // Abstract
Introduction – Notre étude vise à estimer la couverture vaccinale contre les infections à papillomavirus (HPV)
chez les filles de 15 à 18 ans en France, à explorer les déterminants associés à cette vaccination et à décrire les
raisons de non-vaccination en France métropolitaine.
Méthode – L’étude s’appuie sur les données recueillies lors de l’enquête Baromètre santé 2021. Les parti-
cipants ont été sélectionnés par une génération aléatoire de numéros de téléphone fixe et mobile, et
interrogés entre février et  décembre  2021. Les parents de filles de 15 à 18  ans ont été interrogés sur la
vaccination HPV de leur(s) fille(s). Les déterminants de la vaccination HPV ont été étudiés par régression
univariée et multivariée de Poisson. Les analyses ont été réalisées sous Stata® SE.64 15.1 (StataCorp,
États-Unis).
Résultats – La couverture vaccinale contre les infections à HPV est estimée à 43,6%  [40,1-47,1] en France
métropolitaine, à 13,8%  [7,8-23,0] en Guadeloupe, à 17,2%  [9,5-29,2] en Martinique, à  22,6%  [14,4-
33,5] en Guyane, et  à  24,0%  [16,3-33,2] sur l’île de La Réunion. En France métropolitaine, les couver-
tures vaccinales sont plus élevées chez les filles âgées de 18  ans (48,7%  [40,6-56,9], ratio de prévalence
ajusté (RPa)=1,30  [1,04‑1,62], p=0,022) versus celles de 15  ans  (39,0%  [32,4-46,0]), chez les filles aînées
(46,8%  [42,9‑50,8], RPa=1,34  [1,08‑1,67], p=0,008) vs  celles ne l’étant pas  (31,8%  [25,2-39,2]), lorsque les
parents ont les plus hauts revenus (2e  et  3e  terciles de revenus par unité de consommation  : 53,8%  [47,2-
60,2] et 56,4% [50,1-62,6]) vs 1er tercile : 32,9% [28,0‑38,2], respectivement RPa=1,35 [1,10-1,66], p=0,004 et
RPa=1,24 [0,99-1,55], p=0,063), se considèrent à l’aise financièrement en comparaison avec ceux ayant une
situation financière plus défavorable : « à l’aise » : 58,8% [50,9‑66,2] vs « y arrive difficilement » : 25,6% [15,5-
39,3], RPa=0,56 [0,35-0,88], p=0,013 et « n’y arrive pas sans dettes » : 14,5% [5,7-32,2], RPa=0,35 [0,14-0,85],
p  = 0,02)  , ont au moins 5  années d’études après le bac  (59,2%  [52,1-66,1], RPa=1,32  [1,06-1,65], p=0,012)
vs  ceux sans diplôme ou avec un diplôme inférieur au bac  (36,7%  [30,5-43,4]), et ceux de nationalité fran-
çaise de naissance (46,3%  [42,5-50,0]) vs  ceux qui ont acquis la nationalité française (24,1%  [14,9-36,4],
RPa=0,59 [0,38-0,91], p=0,017).
Conclusion – Malgré une amélioration des couvertures vaccinales contre les infections à HPV chez les filles
en France, elles restent modérées notamment dans les populations les moins favorisées économiquement.
Ces résultats invitent à renforcer les actions de promotion de vaccination notamment auprès de ces populations
en vue de réduire les inégalités de santé.

Introduction – Our study aimed to estimate human papillomavirus (HPV) vaccination coverage among girls
aged 15-18 years in metropolitan France, to explore the determinants associated with this vaccination and to
describe the reasons for non-vaccination.
Method – This study used data collected during the 2021 Health Barometer survey. Participants were selected
through random digit dialling of landline and mobile phone numbers then interviewed between February and
December 2021. Parents of adolescent girls aged 15-18 years were asked about the HPV vaccination status of
their daughters. The determinants of HPV vaccination were studied using univariate and multivariate Poisson
regression. Analyses were carried out using Stata® SE.64 15.1 (StataCorp, USA).
Results – HPV vaccination coverage is estimated at 43.6% [40.1-47.1] in metropolitan France, 13.8% [7.8‑23.0]
in Guadeloupe, 17.2%  [9.5-29.2]  in Martinique, 22.6%  [14.4-33.5]  in French Guiana, and 24.0%  [16.3‑33.2]
in  Reunion Island. In metropolitan France, vaccination coverage is higher among 18  year-old girls
(48.7% [40.6‑56.9], PRa=1.30 [1.04-1.62], p=0.022) vs 15 year-old girls (39.0% [32.4-46.0], PRa=1.30 [1.04-1.62],

446  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
p=0.022); among eldest daughters (46.8%  [42.9‑50.8], PRa=1.34 [1.08-1.67], p=0.008) vs  younger daugh-
ters (31.8% [25.2-39.2], PRa=1.34 [1.08-1.67], p=0.008); among higher-earning families, i.e. those in the 2nd
and 3rd terciles of income per consumption unit (53.8% [47.2-60.2] and 56.4% [50.1-62.6]) vs the 1st tercile
(32.9% [28.0-38.2], PRa = 1.35 [1.10-1.66], p=0.004 and PRa=1.24 [0.99-1.55], p=0.063, respectively); among
those who consider themselves financially comfor­table (58.8%  [50.9-66.2]) vs  those experiencing finan-
cial difficulties (e.g. “just about get by”: 25.6% [15.5-39.3], RPa=0.56 [0.35-0.88], p=0.013 and “can’t get by
without going into debt”: 14.5% [5.7-32.2], PRa=0.35 [0.14-0.85], p=0.02); among those qualified to doctorate
level (59.2%  [52.1-66.1]) vs  those qualified to upper-­secondary/equivalent level or less (36.7%  [30.5-43.4],
PRa=1.32  [1.06-1.65], p<0.012); and among those born with French nationality (46.3%  [42.5-50.0]) vs  those
who acquired French nationality (24.1% [14.9-36.4], PRa=0.59 [0.38 –0.91], p=0.017).
Conclusion – Despite recent improvement, HPV vaccination coverage among adolescent girls in France remains
moderate, particularly in economically disadvantaged populations. These results call for increased efforts to
promote vaccination, particularly among the populations identified with low coverage, in order to reduce health
inequalities.

Mots-clés : Infections à papillomavirus humain, Vaccination, Couverture vaccinale, Adolescentes


// Keywords: Human papillomavirus infection, Vaccination, Vaccination coverage, Teenage girls

Introduction restent cependant modérées. L’étude des déter-


minants liés à la vaccination contre les infections à
L’infection à papillomavirus humain (HPV), sexuelle- HPV et des raisons de non-vaccination permettra de
ment transmissible, est le principal facteur de risque renforcer des actions de promotion adaptées aux
du cancer du col de l’utérus. La grande majorité populations devant être ciblées préférentiellement.
des  personnes sexuellement actives sont infectées
au cours de leur vie, mais l’élimination du virus est le Les objectifs de cette analyse sont d’estimer les
plus souvent spontanée. La persistance de l’infec- couvertures vaccinales contre les infections à papil-
tion liée à certains HPV à haut risque oncogène peut lomavirus chez les filles de 15 à 18 ans aux niveaux
aboutir à la survenue de lésions précancéreuses qui national (France métropolitaine) et régional (métro-
peuvent évoluer vers des cancers. Il est estimé que pole et DROM), d’explorer les déterminants asso-
6  400  cancers annuels en France sont attribuables ciés à cette vaccination et de décrire les raisons de
aux HPV, soit près de 2% des cancers incidents. non-vaccination en France métropolitaine.
Les cancers les plus fréquents sont le cancer du
col de l’utérus chez les femmes, ainsi que le cancer Méthode
de l’anus et les cancers de la sphère ORL pouvant
affecter les hommes et les femmes 1. La vaccination Organisation de l’enquête
contre les  infections à HPV est recommandée chez
Cette étude a été réalisée à partir des données
les filles depuis 2007. L’efficacité de la vaccination
des enquêtes Baromètres de Santé publique
pour empêcher l’infection par les HPV inclus dans le
France 2021 conduites en France métropolitaine
vaccin est très élevée 2-6. Depuis le 1er janvier 2021, les
et dans les départements et régions d’outre-mer
recomman­dations de vaccination ont également été
(DROM). Depuis 1992, plusieurs enquêtes du
étendues aux garçons. Les vaccins sont indiqués dans
Baromètre santé ont été mises en place par Santé
la prévention des lésions précancéreuses et cancers
publique France à des intervalles réguliers comme
du col de l’utérus, de la vulve, du vagin et de l’anus et
observatoires des comportements des Français pour
des verrues génitales (condylomes acuminés) dus aux
orienter les politiques de prévention et d’information
types d’HPV contre lesquels les vaccins sont formulés.
de la population. Il s’agit d’enquêtes permettant de
La vaccination est recommandée entre 11 et 14 ans
mieux connaître les connaissances, les attitudes, les
avec un schéma à  2  doses (6  mois entre les deux
croyances et les pratiques des Français en matière
doses), et entre 15 et 19 ans révolus selon un schéma
de santé. La méthode d’enquête a été précédem-
à 3 doses dans le cadre d’un rattrapage vaccinal 2.
ment décrite 7. Elle repose sur une génération aléa-
La vaccination contre les infections à HPV est toire de numéros de téléphone fixe et mobile. Le
également recommandée chez les hommes ayant champ de l’enquête inclut les personnes âgées de
des relations sexuelles avec d’autres hommes 18 à 85 ans résidant en France et parlant le français.
(jusqu’à 26 ans).
Les participants ont été sélectionnés selon un
Les couvertures vaccinales contre les infections sondage à deux degrés sur ligne fixe (sélection d’un
à HPV chez les filles de 15 et 16  ans sont suivies individu par ménage selon la méthode Kish 8) et à un
chaque année grâce aux données du Système degré sur ligne mobile (sélection de la personne qui
national des données de santé Datamart de consom- décroche). L’enquête a été menée par téléphone par
mation inter-régimes de l’Assurance maladie (DCIR- l’institut Ipsos, en France métropolitaine du 11 février
SNDS) et sont publiées par Santé publique France au 15  décembre  2021 (avec une trêve estivale du
lors de la semaine de la vaccination 3. Selon cette 19 juillet au 22 août) 9, du 7 avril au 12 octobre 2021
source de données, si les couvertures vaccinales pour les Antilles et la Guyane, puis du 20  avril au
ont progressé au cours des dernières années, elles 13 juillet 2021 pour La Réunion 10.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  447
Recueil des données nationalité française acquise, étranger), le fait
d’être un professionnel de santé ; pour le foyer : le
L’un des parents de fille(s) âgée(s) de 15 à 18  ans
est interrogé sur le fait d’ « avoir déjà entendu parler revenu moyen rapporté à l’unité de consommation
de la vaccination HPV contre les papillomavirus  » du foyer (revenu/UC), la taille d’unité urbaine (rural,
(réponse : oui, non, ne sait pas), et après une informa- <20 000 habitants, de 20 000 à 99 999 habitants, de
tion complémentaire « Il s’agit de la vaccination contre 100 000 à 199 999 habitants, ≥200 000 habitants et
les virus responsables du cancer du col de l’utérus, région parisienne), et la région de résidence.
en avez-vous déjà entendu parler ? » (réponse : oui,
Les analyses univariées et multivariées ont été réali-
non, ne sait pas), puis sur la vaccination de la ou des
sées par régressions de Poisson.
filles de 15 à 18 ans de la famille (réponse : oui, non,
ne sait pas) uniquement si une réponse positive a été Tous les déterminants avec une p-value inférieure
donnée à l’une des deux questions précédentes. à 0,2 dans les analyses univariées (au moins une
Si au moins une fille a été déclarée comme non modalité) ont été inclus dans les analyses multiva-
vaccinée contre le HPV par le parent, les raisons riées et présentés dans les tableaux de résultats.
de non-vaccination sont recueillies pour la fille non L’analyse multivariée finale a été construite par élimi-
vaccinée la plus âgée du foyer. nation descendante. Seules les variables avec une
p-value inférieure à 0,05 ont été conservées dans
Analyse des données l’analyse définitive (au moins une modalité). Les ratios
Les estimations ont été pondérées afin de tenir compte de prévalence (RP) et ratios de prévalence ajustés
de la probabilité d’inclusion de l’adulte interrogé (RPa) sont utilisés pour mesurer l’association. Afin
(au sein du ménage et en fonction de l’équipement de tester les possibles facteurs de confusion, les
téléphonique), et de la structure de la population via variables exclues du modèle définitif sont réintro-
un calage sur marges utilisant les variables suivantes : duites une à une. Les facteurs de confusion sont
le sexe croisé avec l’âge en tranches décennales et la définis par une modification de ≥30% des ratios de
région, la taille d’unité urbaine, la taille du foyer et le prévalence. Les colinéarités et interactions ont été
niveau de diplôme (population de référence : Institut testées lorsque pertinentes. Les comparaisons de
national de la statistique et des études économiques
pourcentages ont été réalisées avec un test de Chi2
(Insee), enquête emploi 2020).
(correction designed-based).
Les résultats sont présentés avec les pourcentages
Les analyses ont été réalisées avec l’utilisation de
et leurs intervalles de confiance (IC95%). On entend
comme  personnes vaccinées contre les infections Stata® SE.64 15.1 (StataCorp, États-Unis). Toutes
à HPV les personnes ayant reçu au moins une dose les analyses ont été réalisées avec la commande
de vaccin contre les infections à HPV, le nombre de «  svy  », prenant en compte le plan de sondage
doses n’ayant pas été recueillies dans le question- et poids dans toutes les estimations (analyses
naire et la complétude de la vaccination ne pouvant descriptives, intervalles de confiance, régression
ainsi pas être vérifiée. Les couvertures vaccinales de Poisson).
sont estimées pour toutes les filles de 15 à 18 ans
que le parent ait ou non entendu parler de la vaccina-
tion contre les infections à HPV ou contre le cancer
Résultats
de l’utérus. Une fille dont le parent ne sait pas si elle Participation
a été ou non vaccinée contre les infections à HPV
est considérée comme non vaccinée. Au total, en France métropolitaine, 24 514 personnes
ont été interrogées, 17  496 sur téléphone mobile
Pour les foyers composés de plusieurs filles âgées
(71%) et 7 018 sur téléphone fixe (29%). Le taux de
de 15 à 18 ans, les filles ont été considérées comme
indépendantes dans les analyses. Une analyse de participation révisé, c’est-à-dire tenant compte de la
sensibilité a été réalisée en sélectionnant aléatoire- part des éligibles parmi les ménages non joints, s’est
ment une seule fille par foyer et en procédant à de élevé à 44,3% (39,5% sur téléphones fixes et 46,5%
nouvelles analyses sur cet échantillon. sur les téléphones mobiles), pour un questionnaire
d’une durée moyenne de 36 minutes.
Pour la France métropolitaine, les déterminants
possibles investigués pour la couverture vaccinale Dans les DROM, plus de 6 000 personnes âgées de
contre les infections à HPV sont  : 1/ pour la jeune 18 à 85 ans et résidant dans ces territoires ont été
fille : l’âge, le fait que la jeune fille soit l’aînée de la interrogées par téléphones  : 1  511 en Guadeloupe,
fratrie ; 2/ pour le parent interrogé : le genre, l’âge, 1  526 à la Martinique, 1  478 en Guyane et  2  004
le niveau d’études (sans diplôme ou inférieur au à La  Réunion. Les taux de participation révisés
baccalauréat, bac ou équivalent, bac +2, bac +3 ou s’élèvent à 46% en Guadeloupe et Martinique, 51%
4, bac +5 ou  plus), la situation professionnelle (en à La Réunion et 54% en Guyane.
activité, étudiant, chômage, autre inactif), la situa-
tion financière perçue (à l’aise, ça va, juste, y arrive L’enquête porte sur 1 289 filles âgées de 15 à 18 ans en
difficilement, n’y arrive pas sans dettes, ne sait pas) France métropolitaine (tableau 1), 92 en Guadeloupe,
et la nationalité (nationalité française de naissance, 56 en Martinique, 104 en Guyane et 168 à La Réunion.

448  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Tableau 1
Couverture vaccinale contre les infections à papillomavirus humain (HPV) chez les filles âgées de 15 à 18 ans,
analyses univariées et multivariées par régression de Poisson, Baromètre santé 2021, France métropolitaine (n=1 289)
Couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus humain
n CV [IC95%] RP [IC95%] p RPa1 [IC95%] p
Total 1 289 43,6 [40,1-47,1]
Âge de l’adolescente
15 ans 309 39,0 [32,4-46,0] ref ref
16 ans 368 44,8 [38,6-51,1] 1,15 [0,92-1,44] 0,227 1,09 [0,88-1,34] 0,445
17 ans 347 41,7 [35,2-48,4] 1,07 [0,84-1,35] 0,583 1,03 [0,82-1,28] 0,814
18 ans 263 48,7 [40,6-56,9] 1,25 [0,98-1,59] 0,072 1,30 [1,04-1,62] 0,022
Sexe du parent interrogé
Homme 556 39,9 [35,0-45,0] ref ref
Femme 733 46,4 [41,7-51,3] 1,16 [0,99-1,37] 0,067 1,22 [1,05-1,42] 0,009
Classe d’âge du parent interrogé
<45 ans 331 44,2 [37,4-51,3] ref
45-54 ans 815 45,2 [40,9-49,6] 0,72 [0,53-0,97] 0,031
55 ans et plus 143 32,3 [23,8-42,3] 0,98 [0,81-1,18] 0,818
Fille aînée au sein de la fratrie
Non 259 31,8 [25,2-39,2] ref ref
Oui 1 030 46,8 [42,9-50,8] 1,47 [1,16-1,87] 0,001 1,34 [1,08-1,67] 0,008
Niveau d’études du parent interrogé
Sans diplôme ou inférieur au bac 303 36,7 [30,5-43,4] ref ref
Bac ou équivalent 227 36,4 [29,6-43,9] 0,99 [0,76-1,29] 0,961 0,93 [0,72-1,19] 0,564
Bac +2 232 52,1 [44,6-59,5] 1,42 [1,13-1,78] 0,003 1,16 [0,92-1,45] 0,195
Bac +3/+4 262 51,8 [44,8-58,7] 1,41 [1,13-1,76] 0,002 1,13 [0,90-1,43] 0,300
Bac +5 256 59,2 [52,1-66,1] 1,62 [1,31-2,00] <0,001 1,32 [1,06-1,65] 0,012
Situation professionnelle du parent interrogé
Travail 1 138 45,7 [42,1-49,4] ref
Études 6 –  –  – 
Chômage 67 27,8 [16,3-43,3] 0,61 [0,67-1,00] 0,051
Retraité 9 –  –  – 
Autres inactifs 69 40,9 [26,8-56,7] 0,89 [0,61-1,31] 0,568
Revenus en terciles du foyer
1er tercile (≤1 170 €) 492 32,9 [28,0-38,2] ref ref
2d tercile (1 170-1 800 €) 360 53,8 [47,2-60,2] 1,63 [1,34-1,99] <0,001 1,35 [1,10-1,66] 0,004
3  tercile (>1 800 €)
e
370 56,4 [50,1-62,6] 1,72 [1,42-2,08] <0,001 1,24 [0,99-1,55] 0,063
Ne sait pas/Refuse de répondre 67 40,7 [25,9-57,4] 1,23 [0,80-1,90] 0,332 1,08 [0,75-1,56] 0,679
Situation financière perçue du parent interrogé
À l’aise 273 58,8 [50,9-66,2] ref ref
Ça va 628 46,9 [42,1-51,9] 0,80 [0,68-0,94] 0,008 0,85 [0,72-1,01] 0,065
Juste 259 39,4 [32,2-47,2] 0,68 [0,53-0,85] 0,001 0,79 [0,62-1,01] 0,064
Y arrive difficilement 91 25,6 [15,5-39,3] 0,44 [0,27-0,71] 0,001 0,56 [0,35-0,88] 0,013
N’y arrive pas sans dettes 34 14,5 [5,7-32,2] 0,25 [0,10-0,60] 0,002 0,35 [0,14-0,85] 0,020
Ne sait pas 4 –  –  –  –  – 
Nationalité du parent interrogé
Française de naissance 1 145 46,3 [42,5-50,0] ref ref
Française acquis / réintégration 86 24,1 [14,9-36,4] 0,52 [0,33-0,82] 0,005 0,59 [0,38-0,91] 0,017
Étrangère 55 31,1 [19,1-46,3] 0,67 [0,43-1,06] 0,086 0,79 [0,53-1,19] 0,265
Refus 3 –  –  –  –  – 

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  449
Tableau 1 (suite)
Couvertures vaccinales contre les infections à papillomavirus humain
n CV [IC95%] RP [IC95%] p RPa1 [IC95%] p
Région de résidence
Nouvelle-Aquitaine 112 44,6 [33,6-56,2] ref
Île-de-France 225 35,2 [27,6-43,6] 0,79 [0,56-1,11] 0,175
Grand Est 110 45,9 [33,7-58,5] 1,03 [0,70-1,50] 0,885
Hauts-de-France 109 48,9 [36,8-61,1] 1,10 [0,76-1,57] 0,619
Normandie 55 53,5 [36,7-69,5] 1,20 [0,80-1,80] 0,385
Centre-Val de Loire 51 59,6 [43,3-74,1] 1,34 [0,92-1,94] 0,125
Bourgogne-Franche-Comté 58 51,9 [35,9-67,5] 1,16 [0,77-1,75] 0,469
Bretagne 74 50,5 [37,0-63,9] 1,13 [0,78-1,65] 0,518
Pays de la Loire 107 53,9 [41,6-65,8] 1,21 [0,86-1,70] 0,282
Auvergne-Rhône-Alpes 174 34,1 [26,2-43,0] 0,76 [0,53-1,09] 0,139
Occitanie 107 42,4 [30,6-55,1] 0,95 [0,64-1,40] 0,797
Provence-Alpes-Côte d’Azur/Corse 107 39,4 [28,8-51,1] 0,88 [0,60-1,30] 0,528

CV : couverture vaccinale ; IC95% : intervalle de confiance à 95% ; RP : ratio de prevalence ; RPa : ratio de prévalence ajusté.
1
ajusté sur l’âge de l’enfant, le sexe du parent interrogé, le fait d’être fille aînée, le revenu/UC, la situation financière perçue, le niveau de diplôme et la
nationalité du parent interrogé.
P : une valeur p, qui signifie valeur de probabilité, est une mesure statistique comprise entre 0 et 1.

Connaissance de la vaccination Couverture vaccinale contre les infections


contre les infections à HPV à HPV déclarées
En France métropolitaine, parmi les parents de filles En France métropolitaine, 50,2%  [46,4-53,9] des
âgées de 15 à 18 ans, 70,7% (intervalle de confiance parents de filles âgées de 15 à 18 ans ayant entendu
à 95% : IC95%: [68,6-72,9]) ont répondu avoir déjà parler de la vaccination contre les infections à HPV,
entendu parler de la vaccination contre les papil- ou de manière plus générale de la vaccination contre
lomavirus (947  parents), et 55,0%  [50,4-59,6] de les virus responsables du cancer du col de l’utérus,
ceux ne connaissant pas cette vaccination, ont ont déclaré que leur fille avait été vaccinée.
déclaré avoir en revanche déjà entendu parler de
la vaccination contre les cancers du col de l’utérus En prenant en compte l’ensemble des filles âgées de
(144 parents). 15 à 18 ans, que les parents aient ou non entendu
parler du vaccin, la couverture vaccinale contre
Au total, en France métropolitaine, 86,9% [83,8‑89,4]
les infections à HPV en France métropolitaine
des parents de filles âgées de 15 à 18  ans
était de 43,6%  [40,1-47,1]. Ceci revient à consi-
(1 091 parents) ont entendu parler de la vaccination
dérer que les filles dont le parent n’a pas entendu
contre les infections à papillomavirus ou, de manière
parler de la vaccination HPV ne sont pas vaccinées.
plus générale, contre les virus responsables du
Les données régionales sont présentées sur les
cancer du col de l’utérus.
tableau 1 et figure.
La connaissance de la vaccination contre les
En Guadeloupe, 20,8% [12,1-33,4] des parents de filles
­infections à HPV variait en fonction du sexe du
de 15 à 18 ans ayant entendu parler de la vaccination
parent interrogé : 23,3% [18,8-28,5] des pères de
contre les infections à HPV ou de manière plus géné-
filles âgées de 15 à 18 ans n’avaient jamais entendu
rale de la vaccination contre les virus responsables du
parler de la vaccination contre les infections à
cancer du col de l’utérus, ont déclaré que leur fille avait
papillomavirus ou contre les virus responsables
été vaccinée. Ce pourcentage était de 24,8%  [14,0-
du cancer du col de l’utérus, contre 5,4%  [3,3-
40,1] en Martinique  ; 42,3%  [28,2-57,8] en Guyane et
8,6] des mères de filles de 15 à 18 ans (p<0,001)
33,8% [24,1-45,1] à La Réunion. 
(tableau 2).
En prenant en considération l’ensemble des filles âgées
Dans les DROM, les proportions de parents des
de 15 à 18 ans, que les parents aient ou non entendu
filles âgées de 15 à 18  ans ayant déjà entendu
parler du vaccin, les estimations de couvertures vacci­
parler de la vaccination contre les infections à HPV
nales sont les suivantes : Guadeloupe : 13,8% [7,8‑23,0] ;
ou contre les virus responsables du cancer du
Martinique : 17,2% [9,5‑29,2] ; Guyane : 22,6% [14,4-
col de l’utérus sont les suivantes  : Guadeloupe  :
33,5] ; La Réunion : 24,0% [16,3-33,2].
66,4%  [51,8‑78,5], Martinique  : 69,4%  [52,3-
82,4], Guyane  : 53,3% [40,9-65,3], La Réunion  : Dans le cadre de l’étude de sensibilité, lorsqu’une
71,1% [62,1-78,7]. seule fille a été prise en compte de manière aléatoire

450  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Tableau 2
Vaccination contre les infections à papillomavirus humain (HPV) des filles âgées de 15 à 18 ans, selon le sexe du parent
interrogé, Baromètre santé 2021, France métropolitaine (n=1 289)
Mère interrogée Père interrogé
% IC95% % IC95%
Fille vaccinée contre HPV 46,4 [41,7-51,3] 39,9 [35,0-45,0]
Fille non vaccinée contre HPV 46,3 [41,5-51,2] 29,8 [25,4-34,7]
Ne sait pas si la fille est vaccinée contre HPV 1,9 [0,9-4,2] 7,0 [4,5-10,7]
N’a jamais entendu parler de la vaccination HPV (ou de la vaccination
5,4 [3,3-8,6] 23,3 [18,8-28,5]
contre le cancer du col de l’utérus)

IC95% : intervalle de confiance à 95%.

Figure de la fratrie (46,8%  [42,9‑50,8], RPa=1,34  [1,08-


Couvertures vaccinales régionales contre les infections 1,67]  p=0,008) en comparaison à celles ne l’étant
à papillomavirus humain (HPV) chez les filles âgées pas (31,8% [25,2‑39,2]) (tableau 1).
de 15 à 18 ans, Baromètre santé 2021, France
Des différences significatives ont également été
métropolitaine (n=1 289) et DROM (n=406)
observées en fonction de déterminants sociaux, avec
des couvertures vaccinales plus élevées pour les
filles dont les parents avaient les plus hauts revenus
(2e et 3e  terciles de revenus par unité de consom-
mation  : 53,8%  [47,2-60,2] et 56,4%  [50,1-62,6])
vs  1er  tercile  : 32,9%  [28,0-38,2], respectivement
RPa = 1,35 [1,10‑1,66], p=0,004 et RPa=1,24 [0,99‑1,55],
p=0,063), et plus faibles pour les filles dont les parents
Guadeloupe considéraient leur situation financière comme défavo-
Martinique
rable en comparaison à ceux qui se considéraient à
l’aise financièrement, et avec une évolution dégres-
Guyane sive en fonction de la situation financière perçue
(tableau 1).
La Réunion
La couverture vaccinale des filles augmentait avec
Mayotte
le niveau d’études du parent interrogé, avec une
différence significative de couverture vaccinale pour
les filles dont le parent était sans diplôme ou avec
un diplôme inférieur au bac (36,7%  [30,5-43,4]) en
Couvertures vaccinales HPV (%) comparaison avec les parents ayant suivi au moins
<30 30-40 40-50 >50 cinq années d’études après le bac (59,2% [52,1-66,1],
Source : Santé publique France. RPa=1,32 [1,06-1,65], p=0,012).
Date de création de la carte : septembre 2022.
La nationalité française acquise était également
un déterminant de plus faible couverture vacci-
dans les foyers composés de plusieurs filles, la couver- nale des filles (24,1% [14,9-36,4], RPa=0,59 [0,38-
ture vaccinale HPV en France métropolitaine a été 0,91], p=0,017) par rapport à celles dont les
estimée à 43,7% [40,1-47,3]. parents sont de nationalité française de naissance
(46,3%  [42,5‑50,0]). Les parents de nationalité
Dans les DROM, les couvertures vaccinales  selon étrangère déclaraient également une vaccination
la même méthodologie ont été estimées à 15,1% plus faible de leur fille mais de manière non-signi-
[8,6‑25,0] en Guadeloupe, 15,9%  [8,5‑27,8]  en ficative dans les analyses multivariées. Il n’était
Martinique, 22,3%  [14,0-33,6] en Guyane et  23,5% pas observé de différence significative entre les
[16,3-27,0] à La Réunion. couvertures vaccinales régionales en France
métropolitaine.
Déterminants de la couverture vaccinale
contre les infections à HPV des filles La couverture vaccinale des filles était différente
de 15 à 18 ans en fonction du sexe du parent interrogé. Elle était
en moyenne 1,22 fois plus élevée lorsque la mère était
En France métropolitaine, les analyses multi- interrogée que lorsque le père était interrogé (respec-
variées ont montré des couvertures vaccinales tivement 46,4%  [41,7-51,3]  vs  39,9%  [35,0‑45,0],
plus élevées chez les filles âgées de 18  ans RPa = 1,22 [1,05-1,42], p=0,009). De plus, 7,0% [4,5-
(48,7%  [40,6-56,9], RPa=1,30  [1,04-1,62], p=0,022) 10,7] des pères interrogés avaient répondu ne pas
en comparaison à celles des filles âgées de 15 ans savoir si leur fille avait reçu le vaccin, contre 1,9% [0,9-
(39,0% [32,4‑46,0]), ainsi que chez les filles aînées 4,2] des mères (tableau 2).

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  451
Raisons de non-vaccination entendu parler de cette vaccination ne sont
contre les infections à HPV pas  vaccinées, la couverture vaccinale des filles
âgées de 15 à 18 ans en France métropolitaine est
Les raisons principales de non-vaccination
estimée à 43,6%  [40,1-47,1]. La  couverture vacci-
rapportées par les parents déclarant que leur
nale contre les infections à HPV chez les filles est
fille n’était pas vaccinée étaient  : 1/ le vaccin est
en progression : elle était estimée chez les filles de
dangereux, et il y a une peur des effets secon-
15 ans à partir des données du DCIR-SNDS à 29,4%
daires (20,4%  [15,7‑26,0]), 2/  le  médecin n’a pas
en  2018, à  40,7% en  2020 et 45,8% en  2021 3,11.
proposé le vaccin (10,1% [7,1-14,1]), et 3/ le vaccin
La  couverture vaccinale contre l'infection à HPV
n’est pas utile/nécessaire, ne se sent pas à risque
chez la jeune fille reste cependant modérée en
(8,2% [5,7‑11,5]) (tableau 3). France et loin de l’objectif de 60% posé par le plan
cancer 2014-2019 12. Elle compte parmi les couver-
Tableau 3
tures vaccinales les plus faibles d’Europe alors que
Raisons de non-vaccination contre les infections ces couvertures sont supérieures à 70% notam-
à papillomavirus humain (HPV) déclarées spontanément ment en Finlande, en Hongrie, à Malte, en Norvège,
par les parents dont au moins une fille âgée de 15 à 18 ans en Espagne, au Royaume-Uni ou en Suède 13.
n’est pas vaccinée. Baromètre santé 2021, France
métropolitaine (n=490) La couverture vaccinale augmente significative-
ment avec l’âge de la jeune fille. Elle est plus élevée
Raisons de non-vaccination % IC95% pour les filles de 18 ans (48,7% [40,6-56,9]), ainsi que
Ce vaccin est dangereux – Peur d’effets pour les aînées de la fratrie.
20,4 [15,7-26,0]
secondaires
La couverture vaccinale varie en fonction de
Son médecin ne lui a pas proposé ce vaccin 10,1 [7,1-14,1]
critères sociodémographiques et notamment
Ce vaccin n’est pas utile/nécessaire – économiques. Elle augmente avec le niveau de
8,2 [5,7-11,5]
Ne se sent pas à risque
revenu atteignant 56,4%  [50,1-65,6] dans les
Ne sait pas 7,2 [4,6-10,9] foyers les plus aisés et 58,8%  [50,9-51,9] pour
En cours/Va le faire 6,7 [4,6-9,8] les  parents se déclarant à l’aise financièrement.
Oubli, ne prend pas le temps 6,7 [4,5-10,1] Les couvertures vaccinales sont également parti-
culièrement faibles pour les filles dont le parent
Opposé(e) à cette vaccination 6,2 [3,9-9,8]
est au chômage (27,8% [16,3‑43,3] vs 45,7% [42,1-
Son médecin lui a déconseillé/contre-indiqué 49,4] pour les filles dont le parent a une activité
6,1 [4,1-9,0]
ce vaccin
professionnelle) alors que l’absence de différence
Ne sait pas que sa fille devrait être vaccinée 5,9 [3,5-9,9] significative retrouvée dans les analyses multiva-
Choix parent(s)/de la famille/de la fille elle- riées est certainement liée à la taille réduite de
4,8 [3,1-7,4]
même l’échantillon (67  parents au chômage). En  2019,
Pas entendu parler/manque d’informations 3,6 [2,2-5,9] il avait été montré que les couvertures vacci-
Trop jeune/plus tard 3,6 [1,9-6,7] nales pour les filles contre les infections à HPV
N’est pas allé(e) voir son médecin pour cela 3,4 [1,9-6,0] étaient plus faibles pour celles résidant dans des
communes les moins favorisées (estimé sur l’indice
Autres raisons 3,0 [1,6-5,6]
de désavantage social, Fdep) ainsi que pour celles
Peur de la piqûre 2,9 [1,3-6,4] bénéficiant de la couverture maladie universelle
Ce vaccin n’est pas efficace 1,9 [0,9-3,7] complémentaire (CMU-C) 14.
En discussion/n’en a pas encore parlé à sa fille 1,9 [0,9-4,0] Le vaccin est remboursé à 65% par l’Assurance
Déjà sexuellement active/trop tard 1,9 [0,9-4,3] maladie et la part restante peut être prise en charge
Cela ne l’intéresse pas, ne la préoccupe pas 1,6 [0,8-3,0] par la mutuelle complémentaire. L’avance des frais et
l’absence de remboursement de la part complémen-
La fille n’a pas eu de rapport sexuel 1,0 [0,3-3,4]
taire en l’absence de mutuelle complémentaire ou
Manque de recul 1,0 [0,5-2,0] de la CMU-C peuvent constituer des freins à cause
Opposé(e) à toutes les vaccinations 0,9 [0,3-2,4] du coût des vaccins (Cervarix  : 95,05  euros/‌dose  ;
Le frottis/le dépistage suffit 0,8 [0,3-2,5] Gardasil  :  116,86  euros/dose, prix honoraires
compris) 2. La vaccination dans les centres de vacci-
Le vaccin n’est pas obligatoire 0,4 [0,1-1,2]
nation publics, les centres gratuits d’information, de
IC95% : intervalle de confiance à 95%. dépistage et de diagnostic (Cegidd), et les centres
de planification familiale permet d’éviter les avances
de frais, mais ces centres ne sont pas facilement
accessibles à toutes les filles géographiquement.
Discussion
Au-delà du frein financier, les plus faibles couver-
En 2021, en France métropolitaine, 50,2% [46,4‑53,9] tures vaccinales pourraient également être dues à
des parents de filles âgées de 15 à 18  ans ayant un moindre suivi médical, moins d’information ou
entendu parler de la vaccination contre les infec- une moindre perception de l’intérêt des mesures de
tions à HPV ou contre le cancer du col de l’utérus prévention ou à des barrières culturelles. Ces déter-
ont déclaré que leur fille était vaccinée. En faisant minants n’ont cependant pas été pris en compte dans
l’hypothèse que les filles dont les parents n’ont pas notre étude.

452  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Il est observé que la couverture vaccinale augmente contre les infections à HPV pour plus de 20% des
avec le niveau d’études du parent interrogé, et parents de filles non vaccinées. Dans le Baromètre
atteint presque 60% pour les filles dont le parent 2016, plus de la moitié des parents et de leurs filles
a suivi au moins 5  années d’études après le bac. déclaraient que le vaccin pouvait provoquer des
Ces résultats sont contraires à ceux observés en effets ­secondaires graves que la fille ait ou non été
France en  2016 ou aux États-Unis, Canada, et vaccinée 15. En  2019, de 37% à 53% des parents,
Norvège, où des couvertures vaccinales inférieures en fonction de l’âge de la fille, citaient la crainte des
ont été observées lorsque les parents étaient les effets ­secondaires pour expliquer le choix de ne pas
plus diplômés 1,15. Nos  résultats vont ainsi dans le faire vacciner leur fille 19. Si ces différences ne sont
sens d’une amélioration des couvertures vaccinales pas directement comparables car, en 2016 notam-
contre les infections à HPV ces dernières  années ment, la réponse était suggérée dans le cadre d’une
en France, notamment pour les filles dont les réponse fermée, ces résultats vont dans le sens
parents sont les plus diplômés et qui ont pu être d’une moindre crainte des effets secondaires graves
plus réceptifs aux messages de promotion de la en 2021.
vaccination HPV.
De plus, pour 10,1% des filles non vaccinées, il est
Les couvertures sont également plus faibles pour les rapporté l’absence de proposition du médecin, et
filles dont le parent d’origine étrangère a été natu- pour 6,1% d’entre elles le parent relate que le médecin
ralisé comparées aux filles de parents de nationalité a déconseillé la vaccination contre HPV à la jeune
française. fille. Ces résultats sont d’autant plus préjudiciables
Les couvertures vaccinales varient en fonction des que l’avis et le conseil du médecin sont détermi-
régions : elles sont particulièrement basses dans les nants pour la vaccination HPV des adolescentes 18,20.
DROM.  En France métropolitaine, il est globalement En 2016, près de la moitié des filles non vaccinées et
observé un gradient Nord-Sud, les couvertures les 63% des parents déclaraient que le médecin n’avait
plus élevées étant observées au nord de la Loire, pas proposé la vaccination 15. En 2019, ce pourcen-
Île-de-France exceptée, comme précédemment tage s’étendait de 27% à 39% en fonction de l’âge
observé en France 3,11, mais cependant sans qu’il soit de la fille 19. Si, comme pour le point précédent, ces
constaté de différences significatives à l’issue des différentes estimations ne sont pas directement
analyses multivariées. Les tailles d’échantillon étant comparables, car on a vu qu’en 2016 la réponse était
réduites dans certaines régions, certains intervalles suggérée dans le cadre d’une réponse fermée, ces
de confiance sont larges et ont pu masquer les diffé- résultats vont dans le sens d’une proposition plus
rences existantes. fréquente de la vaccination contre le HPV par les
médecins.
Contrairement à d’autres pays, la vaccination contre
les infections à HPV en France est dite «  oppor- Notre étude présente certaines limites. Les couver-
tuniste  » dans le sens où c’est la jeune fille ou ses tures vaccinales sont estimées à partir de données
parents qui prennent rendez-vous avec le médecin déclaratives de parents de filles adolescentes qui
pour la vaccination. L’organisation de la vaccination sont sujets à des biais de mémoire, de connais-
par la médecine scolaire pourrait permettre d’aug- sance de la vaccination réalisée. Elles peuvent
menter les couvertures vaccinales comme cela a également être sujets à des biais de désirabilité
été observé en Australie, au Canada, en Finlande, sociale pouvant conduire à des surestimations.
en Norvège ou en Écosse 13,16, et notamment si elle Notre étude montre l’importance du sexe du parent
est accompagnée d’actions d’éducation à la santé 17. interrogé sur les réponses données. Les pères sont
Cette organisation pourrait permettre de limiter les ainsi moins informés sur cette vaccination (23,3%
différences liées aux niveaux socio-économiques. des pères interrogés vs  5,4% des mères interro-
Il convient de noter que des relances pour la vaccina- gées), et plus fréquemment incapables de répondre
tion contre les infections à HPV sont également orga- sur la vaccination de leur fille (7,0% vs  1,9%). Au
nisées dans les pays où les couvertures vaccinales final, pour 30,3% des pères et 7,3% des mères,
sont les plus hautes 13. l’absence de réponse sur la vaccination contre le
En France métropolitaine, plus de 13% des parents HPV a conduit à considérer leur fille comme non
vaccinée et potentiellement à sous-­ e stimer la
de filles de 15 à 18 ans n’ont pas entendu parler de la
couverture vaccinale réelle. Ces différences pour-
vaccination contre les infections à HPV. Ce pourcen-
raient s’expliquer par une meilleure connaissance
tage est relativement stable en comparaison à 2016
du suivi médical des filles par les mères. En 2016,
(16% pour les parents de filles de 11 à 19  ans) 15.
des différences dans les estimations de couver-
Ce  pourcentage est également particulièrement
tures vaccinales avaient également été observées
élevé dans les DROM. La connaissance de la vacci-
entre les estimations produites à partir des décla-
nation a cependant été identifiée comme un détermi-
rations des parents ou celles des filles 15. Ces résul-
nant favorable à la vaccination 18, ce qui invite ainsi à
tats invitent ainsi à envisager d’interroger les filles
renforcer la communication autour de la vaccination
directement plutôt que leurs parents, et notamment
HPV, notamment dans les DROM.
leur père, pour estimer au plus près de la vérité
La crainte des effets secondaires, la peur du les couvertures vaccinales dans les études ainsi
vaccin est la raison principale de non-vaccination conduites.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  453
La question de la vaccination des filles a été très faibles variations, nous permettent de valider la
posée aux parents ayant déjà entendu parler de la méthode retenue tout en évitant de réduire l’échan-
vaccination contre les infections à HPV ou contre tillon d’analyse.
le cancer du col de l’utérus. Ceci revient à poser
L’enquête Baromètre, par sa méthodologie, exclut
l’hypothèse que les filles des parents n’ayant pas
les personnes ne disposant pas de téléphone ainsi
entendu parler de cette vaccination ne sont pas
que les  personnes non francophones qui ne sont
vaccinées contre le HPV.  Les couvertures vacci-
donc pas représentées dans l’étude. Les couvertures
nales ainsi calculées sont ainsi potentiellement
vaccinales peuvent ainsi être surestimées du fait d’un
sous-estimées. L’estimation des couvertures
défaut de prise en compte des personnes d’origine
vaccinales uniquement pour les filles dont les
étrangère, non francophones ou parlant mal le fran-
parents ont entendu parler de cette vaccination
çais. Les déterminants de la vaccination montrent
peut conduire à ne retenir que les filles dont les
que les couvertures vaccinales sont plus faibles dans
parents sont les mieux informés et les plus favo-
ces populations.
rables à la vaccination contre les infections à HPV,
et pose l’hypothèse que les couvertures vaccinales Les comparaisons entre estimations régionales
des filles sont identiques, que les parents aient doivent être regardées avec prudence en raison des
ou non entendus parler de la vaccination contre tailles des échantillons régionaux réduites. Les déter-
le HPV et donc conduit à ­s ur­e stimer les couver- minants de la vaccination et les raisons de non-
tures vaccinales. La comparaison des estimations vaccination dans les DROM ne sont pas étudiés dans
de couvertures vaccinales de notre étude et de cet article alors qu’il s’agit des régions où les couver-
celles issues du DCIR provenant du SNDS permet tures vaccinales contre HPV sont les plus faibles.
cependant de retrouver des résultats concordants. Des travaux spécifiques p ortant s ur l es d onnées
Dans notre étude, les couvertures vaccinales des de l’enquête Baromètre DROM 2021 seront réalisés
filles âgées de 15  ans sont estimées en France ultérieurement.
métropolitaine à 39,0% [32,4-46,0] en prenant en
compte l’ensemble des filles, et à 47,5% [40,1‑55,1] Cette étude n’examine pas la couverture vaccinale
en limitant l’analyse à celles dont le parent inter- contre le HPV chez le garçon et ses déterminants
rogé a entendu parler de cette vaccination. Selon alors que cette vaccination est recommandée
les données issues du DCIR-SNDS, en  2021, depuis le 1er  janvier  2021. Lors de la concep-
la couverture vaccinale de la première dose contre tion de l’enquête et la réalisation des question-
les infections à HPV des filles de 15  ans (nées naires, les recommandations n’étaient pas encore
en  2006) a été estimée à 45,8% en France 3, et  à publiées. Il a été estimé que 6% des garçons âgés
46,7% en France métropolitaine. Les données de 15  ans avaient reçu au moins une dose de
de couverture vaccinale issues du DCIR-SNDS, vaccin HPV au 31 décembre 2021 3. Cette couver-
peuvent cependant être sous-estimées car ne ture vaccinale très faible n’aurait certainement
tiennent pas compte des vaccinations qui n’ont pas permis d’étudier les déterminants de cette
pas fait l’objet d’un remboursement (campagnes vaccination étant donné un nombre trop limité de
de vaccination gratuites, personnes sans couver- garçons vaccinés lors de la réalisation de l’enquête
ture médicale), mais à l’inverse tiennent compte Baromètre.
de vaccins remboursés mais non administrés. Les
campagnes de vaccination gratuite contre le HPV Conclusion
seraient cependant peu fréquentes selon un état La vaccination contre les infections à HPV asso-
des lieux réalisé en 2018 21. ciée au dépistage est le moyen le plus efficace pour
Le fait d’avoir considéré les filles appartenant à un prévenir les cancers du col de l’utérus. Les couver-
même foyer comme indépendantes, a pu donner tures vaccinales contre les infections à HPV sont en
davantage de poids aux parents ayant plusieurs augmentation chez la jeune fille en France, mais elles
filles âgées de 15 à 18  ans, et ce d’autant plus si restent à des niveaux modérés, notamment dans
les couvertures vaccinales des filles dans ces les populations les moins favorisées économique-
foyers sont très différentes de celles de foyers avec ment. Ces résultats invitent à renforcer les efforts de
une seule fille. L’analyse de sensibilité avec sélec- communication et d’incitation à la vaccination globa-
tion aléatoire d’une fille au sein du foyer, ramenant lement, mais également plus spécifiquement auprès
les analyses sur un nombre de jeunes filles égal de ces populations en vue de réduire les inégalités
au nombre de parents (n=1  210), ne montre pas de santé. ■
de différence significative sur les estimations de
couverture vaccinale ainsi que dans l’étude des Remerciements
déterminants à la vaccination. L’estimation de la Les auteurs remercient l’ensemble des participants aux études
couverture vaccinale globale augmente de 0,1 point Baromètre santé 2021, France métropolitaine et DROM.
dans l’analyse de sensibilité par rapport à l’ana- Les auteurs remercient également Laura Zanetti de Santé
lyse principale en France métropolitaine. Dans les publique France pour sa relecture.
DROM, les couvertures vaccinales augmentent de
1,3 point en Guadeloupe et diminuent de 1,3 point Liens d’intérêt
en Martinique, 0,3 point en Guyane et 0,5 point à La Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard
Réunion, alors que les effectifs sont très faibles. Ces du contenu de l’article.

454  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
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barometres-de-sante-publique-france/barometre-sante- uploads/2019/02/RAPPORT_V7_final-erratum-version-compr​
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Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  455
Santé publique France, Saint-Maurice

>
Cheick Haïballa Kounta et coll.

ARTICLE // Article

DÉPISTAGE DU VIH ET DES INFECTIONS SEXUELLEMENT TRANSMISSIBLES BACTÉRIENNES


EN FRANCE, 2014-2021
// HIV AND BACTERIAL SEXUALLY TRANSMITTED INFECTIONS SCREENING IN FRANCE, 2014-2021

Cheick Haïballa Kounta ([email protected]), Nicolas Drewniak, Françoise Cazein, Émilie Chazelle,


Florence Lot

Santé publique France, Saint-Maurice

Soumis le 03.10.2022 // Date of submission: 10.03.2022

Résumé // Abstract

Introduction – Le dépistage des infections sexuellement transmissibles (IST) est un élément essentiel de la
prévention. Cet article décrit l’activité de dépistage du VIH et de trois IST bactériennes (syphilis, gonococcies
et infections à Chlamydia trachomatis (Ct)) en 2021 en France, et les tendances récentes, à partir des données
individuelles de remboursement du Système national des données de santé (SNDS).
Méthode – Les données du SNDS permettent de suivre le nombre de remboursements par l’Assurance maladie
des tests de dépistage du VIH, de la syphilis, des infections à gonocoque et à Ct, réalisés en secteurs privé
et public (hors hospitalisation), et de personnes bénéficiant de ces remboursements. L’analyse a porté sur les
bénéficiaires de 15  ans et plus. Les taux nationaux de dépistage ont été calculés pour 1  000  personnes de
15 ans et plus, selon l’âge et le sexe.
Résultats – En 2021, 4,59 millions de dépistages du VIH ont été réalisés chez 3,98 millions de bénéficiaires
(soit un taux de 70,7 pour 1 000 habitants). La même année, 2,97 millions de tests de dépistages de l’infection
à Ct ont été réalisés chez 2,32 millions de bénéficiaires (41,3/1 000). Toujours en 2021, 4,74 millions de tests
de dépistage de l’infection à gonocoque ont été effectués chez 2,69  millions de bénéficiaires (47,9/1  000).
Enfin, 3,39  millions de  tests de dépistage de la syphilis ont été réalisés chez 2,84  millions de bénéficiaires
(50,6/1  000). Les taux de dépistage étaient plus élevés chez les femmes que chez les hommes, et chez
les jeunes femmes et hommes de moins de 26  ans pour les IST bactériennes. Ces taux ont augmenté de
2014 à 2019 pour toutes les infections (VIH, gonocoque, Ct et la syphilis), ont ensuite diminué en 2020, puis
augmenté de nouveau en 2021.
Conclusion – Les données de remboursement, bien que ne représentant pas la totalité des dépistages réalisés,
permettent de mettre en évidence les variations des taux de dépistages selon l’âge et le sexe, au cours du
temps. Après une période d’augmentation des dépistages, la chute observée en 2020 au début de la pandémie
à Covid-19, a été rattrapée en 2021 pour les IST bactériennes, mais pas encore pour le VIH, d’où l’importance
de remobiliser sur le dépistage.

Introduction – Screening for sexually transmitted infections (STIs) is an essential part of prevention. This
article describes screening activity for HIV and three bacterial STIs (syphilis, gonorrhoea and Chlamydia
trachomatis [CT]) in 2021 in France, along with recent trends in screening rates, based on individual medical
reimbursement data from the National Health Data System (SNDS, for Système national des données
de santé).
Method – The SNDS data show the number of health insurance reimbursements to cover screening tests for
HIV, syphilis, CT or gonococcal infections carried out in both private and public clinics (excluding hospitals),
and the number of people who receive these reimbursements. The analysis focused on beneficiaries aged
15 years and over. National screening rates were calculated per 1,000 inhabitants aged 15 years and over, by
age and gender.
Results – In 2021, 4.59 million HIV  tests were carried out on 3.98 million beneficiaries (i.e. a screening
rate of 70.7 per 1,000 inhabitants). In the same year, 2.97 million  tests for CT infection were performed
on 2.32  million beneficiaries (41.3/1,000). Also in 2021, 4.74 million  tests for gonococcal infection were
carried out on 2.69  million beneficiaries (47.9/1,000). Finally, 3.39 million syphilis  tests were carried out
on 2.84  million beneficiaries (50.6/1,000). Screening rates were higher among women than men, and
higher among young people (under 26 years) for bacterial STIs. Screening rates increased between 2014
and  2019  for all infections (HIV, gonococcal, CT and syphilis), decreased in 2020, then increased
again in 2021.

456  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Conclusion – Reimbursement data, although not representative of total screening activity, make it possible to
highlight variations in screening rates according to age and gender, and over time. After a period of increased
screening, the drop observed in 2020 at the start of the COVID-19 pandemic was offset in 2021 for bacterial
STIs, but not for HIV. It is therefore important to reinforce screening efforts for HIV.

Mots clés : Dépistage, VIH, Infections sexuellement transmissibles, Syphilis, Gonococcie, Chlamydia trachomatis,
Système national des données de santé
// Keywords: Testing, HIV, Sexually transmitted infections, Syphilis, Gonorrhoea, Chlamydia trachomatis, National
Health Data System

Introduction est obligatoire chez les femmes enceintes au cours


du 1er trimestre de la grossesse en vue de réduire la
Le dépistage des infections sexuellement trans- transmission mère-enfant 6. Le dépistage des infec-
missibles (IST) est un élément clé de la démarche tions à Neisseria gonorrhoeae (NG) est ciblé pour les
préventive globale permettant de réduire le risque de HSH, les personnes vivant avec le VIH et/ou ayant
transmission par un diagnostic précoce et de limiter des antécédents d’IST, les populations ayant des
la survenue de complications par la mise en route rapports sexuels non protégés 7.
rapide d’un traitement 1.
L’objectif de cet article est de décrire l’activité
En France, la stratégie de dépistage du VIH préco- de dépistage du VIH et de trois IST bactériennes
nisait le dépistage ciblé et régulier des popula- (syphilis, infection à Chlamydia trachomatis et gono-
tions les plus exposées, soit les hommes ayant coccie) en France en  2021 à partir du Système
des rapports sexuels avec des hommes (HSH) national des données de santé (SNDS), en présen-
multipartenaires, les utilisateurs de drogues tant les tendances depuis 2014 avec un focus sur les
injectables  (UDI) et les  personnes multiparte- deux dernières années compte-tenu du contexte de
naires ­o riginaires d’Afrique subsaharienne et des la pandémie de Covid-19.
Caraïbes. Elle mettait aussi l’accent sur la propo-
sition d’un test de dépistage à l’ensemble de
la population générale âgée de 15 à 70  ans lors Méthode
d’un recours aux soins, en dehors de toute notion
d’exposition à un risque de contamination par le Source des données
VIH 2. En  2017, cette stratégie a fait l’objet d’une
Les données de remboursement du SNDS ont été
réévaluation qui a abouti à augmenter la fréquence
extraites en juillet  2022 chez les adultes (15  ans et
du dépistage du VIH au sein des populations clés.
plus) pour identifier les  tests de dépistage réalisés
Elle préconise : au minimum un dépistage par an
dans les laboratoires privés (laboratoires de ville
chez les HSH et tous les trois mois chez ceux à
et d’établissements de santé privés) et une partie
haut risque d’exposition et dans les régions les
de ceux réalisés dans les laboratoires d’établisse-
plus affectées ; un dépistage par an chez les UDI
ments de santé publics (tests réalisés en dehors
et chez les personnes originaires des pays de forte
d’une hospitalisation) 8. L’identification des  tests de
prévalence. En parallèle, elle maintient la propo-
dépistage s’est faite en sélectionnant les codes de la
sition d’un test de dépistage à l’ensemble de la
nomenclature des actes de biologie médicale (NABM)
population générale âgée de 15 à 70 ans 3.
correspondants. Le terme de dépistage correspond
Depuis 2003, le dépistage systématique des infec- à la recherche de pathogènes chez des patients
tions  uro-génitales basses à Chlamydia tracho- asymptomatiques ou symptomatiques, les données
matis  (Ct) était recommandé chez les femmes de SNDS ne permettant pas d’identifier la présence
de moins de 25  ans et les hommes de moins de ou non de symptômes.
30  ans fréquentant les Consultations de dépis-
L’analyse a porté sur la période de  janvier  2014
tage anonyme et gratuit du VIH (CDAG), les centres
à décembre 2021 et les données ont été stratifiées
d’information, de dépistage et de diagnostic des IST
par sexe et âge.
(CIDDIST), les centres de planification et d’éduca-
tion familiale (CPEF) et les centres d’orthogénie 4. En Infection par le VIH
septembre  2018, ce dépistage a été r­ecommandé
à toutes les femmes sexuellement actives de Pour l’infection à VIH, l’acte sélectionné est le séro-
15  à  25  ans, les femmes enceintes ainsi que les diagnostic de dépistage du VIH (code 388).
femmes et les hommes présentant des facteurs de
Infections à Chlamydia trachomatis
risque quel que soit leur âge, tout en étant étendu
aux cabinets de médecine générale, de gynécologie Pour les infections à Ct, les actes de dépistage
et de sage-femme 5. Le dépistage de la syphilis est sélectionnés correspondent à une recherche par
préconisé pour les populations exposées comme test d’amplification des acides nucléiques (TAAN)
les HSH, les travailleurs du sexe et leurs clients, (code  5257  jusqu’en  2018, 5204, 5301, 5302
les  personnes vivant avec le VIH, les migrants de et  5303  actuellement), à la sérologie (code  1307),
pays endémiques et les personnes ayant des parte- à une recherche par hybridation moléculaire sans
naires sexuels multiples. Le dépistage de la syphilis amplification génique, à une recherche par culture ou

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  457
à une recherche directe par méthode immunologique Analyses
(techniques utilisées jusqu’en 2018, codes 5256, 5255
Les nombres de dépistages décrits sont les nombres
et 5254 respectivement) 9.
d’actes remboursés, alors que les taux rapportés à
Infections à gonocoque la population sont calculés à partir du nombre de
bénéficiaires. Les taux de dépistage annuels corres-
Pour le dépistage des infections à gonocoque, pondent au nombre d’adultes ayant eu au  moins
seule la recherche de NG par culture (codes un  remboursement pour un dépistage d’IST dans
5202 et  5203) était remboursée jusqu’en  2017. l’année rapporté à la population française de 15 ans
Depuis  juin  2018, la réalisation d’une recherche et plus (données de l’Institut national de la statistique
par TAAN (recherche conjointe avec la recherche et des études économiques). Ils ont été calculés
de Ct) étant inscrite à la NABM, les codes corres- selon le sexe et l’âge.
pondants (code 5301, 5302 plus 5303 depuis 2019)
ont donc été sélectionnés. Les codes d’examen
microbiologique de produit d’origine pelvienne Résultats
obtenu par cœlioscopie (5204) et d’examen micro- Dépistage de l’infection à VIH
biologique du sperme (5205) ont été retenus
également 9. En  2021, les données du SNDS permettent de
dénombrer 4,59 millions de sérologies VIH réalisées
Syphilis et remboursées en France chez des  personnes de
15 ans et plus (tableau). Près des deux tiers (63%) de
Pour la syphilis, jusqu’en  2018, une combinaison
ces sérologies ont concerné les femmes (tableau). La
de tests était recommandée pour dépister l’infection :
majorité des dépistages concernait la classe d’âge
test tréponémique (TT) et test non tréponémique
des 26 à 49  ans (tableau). Néanmoins, près d’un
(TNT) 10. Les codes suivants ont ainsi été sélec-
quart des dépistages chez les femmes concernaient
tionnés : sérodiagnostic de dépistage (code 1326) et
les moins de 26 ans, et près d’un tiers les 50 ans et
sérodiagnostic de titrage (code 1327) 10. À la suite de
plus chez les hommes.
la modification de la NABM en  2018, l’association
systématique d’un TT et d’un TNT a été remplacée En  2021, 3,98  millions de  personnes de 15  ans
par un seul TT sur Immunoglobulines (Ig) totales, à et plus ont été testées au moins une fois dans
confirmer par un TNT quantitatif en cas de positi- l’année pour le VIH, soit un taux national de
vité 9,10. Les codes suivants ont donc été inclus  : dépistage de 70,7 pour 1 000 habitants de 15 ans
1256 (TT recherche d’Ig totales), 1257 (TNT avec et plus (figure  1). Après une tendance globale à
titrage), 1258 (nouveau TNT en cas de suspicion de l’augmentation jusqu’en  2019, le taux de dépis-
séroconversion avec un premier TNT avec titrage tage du VIH a diminué en 2020, puis a augmenté
négatif) et 1250 (confirmation par sérodiagnostic en 2021 sans atteindre le niveau observé en 2019.
avec recherche d’Ig G par Western blot ou Immuno Entre 2019 et 2021, le taux de dépistage du VIH a
blot chez la femme enceinte). Le code  correspon- diminué de -4%, de façon plus importante chez les
dant à la recherche de tréponèmes par examen hommes que chez les femmes (-6% vs -2%). Cette
direct par coloration ou immunofluorescence, diminution était plus marquée pour les moins de
remboursé jusque 2014 (code  0246), a été sélec- 26 ans, chez les hommes (-11%) comme chez les
tionné également. femmes (-4%).

Tableau
Nombre de tests de dépistage remboursés chez les personnes de 15 ans et plus, et répartition par sexe et groupe d’âge,
France, 2021
Chlamydia
VIH Gonocoque Syphilis
trachomatis
N= 4 586 528 N= 2 974 697 N= 4 737 723 N= 3 388 952
% % % %
Femmes 63 68 78 65
Dont : 15-25 ans 23 32 28 26
26-49 ans 61 60 63 67
≥50 ans 16 8 9 7
Hommes 37 32 22 35
Dont : 15-25 ans 17 20 17 18
26-49 ans 52 66 69 61
≥50 ans 31 14 14 21

Source : Système national des données de santé, tests remboursés en secteur privé et public (hors hospitalisation), actes réalisés en 2021, extraction
juillet 2022, Santé publique France.

458  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Figure 1
Taux de dépistage des infections à VIH (pour 1 000 personnes de 15 ans et plus), France, 2014-2021
160

140
Taux de personnes dépistées/1 000

120

100

80

60

40

20
2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
Femmes <26 ans Femmes 26-49 ans Femmes ≥50 ans
Femmes Total Hommes <26 ans
Hommes 26-49 ans Hommes ≥50 ans Hommes
Source : Système national des données de santé, tests remboursés en secteur privé et public (hors hospitalisation), par année de réalisation des actes,
extraction juillet 2022, Santé publique France.

Infections à Chlamydia trachomatis d’âge de 26 à 49 ans pour les deux sexes, mais chez
les femmes, plus d’un quart des tests de dépistages
En  2021, 2,97  millions de  tests de dépistage de
ont été réalisés également chez les 15-25 ans.
l’infection à Ct ont été réalisés en France dont plus
des deux tiers (68%) chez les femmes (tableau). La En 2021, 2,69 millions de personnes de 15 ans et plus
majorité des tests concernaient la classe d’âge de ont été testées au moins une fois pour une infection
26 à 49 ans, mais parmi les femmes testées, près à gonocoque, soit un taux national de dépistage de
d’un tiers d’entre elles avaient entre 15 et 26 ans. 47,9 pour 1 000 habitants de 15 ans et plus. Le taux de
dépistage était plus élevé chez les femmes de moins
En 2021, 2,32 millions de personnes de 15 ans et
de 26  ans (figure  3). Après une tendance globale à
plus ont été testées au moins une fois pour une
l’augmentation jusqu’en  2019, chez les femmes
infection à Ct, soit un taux national de dépistage
comme chez les hommes et dans les deux  classes
de 41,3 pour 1  000  habitants de 15  ans et plus
d’âge, le taux de dépistage de l’infection à gonocoque
(figure  2). Le taux de dépistage était plus élevé
a diminué en 2020 puis a ré-augmenté en 2021, abou-
chez les femmes de moins de 26  ans. Le taux a
tissant à une augmentation de +5% entre 2019 et 2021.
globalement augmenté entre 2014 et  2021 chez
Sur cette période, le taux de dépistage a augmenté de
les femmes comme chez les hommes, et chez les
façon plus importante chez les hommes que chez les
plus jeunes (15-25  ans) comme les plus âgés
femmes (+12% vs +3%). Cette augmentation était plus
(≥26  ans), malgré deux années de diminution
marquée pour les moins de 26 ans quel que soit le sexe
en  2018 et  2020. Entre 2019 et  2021, le  taux de
(+19% pour les hommes vs +7% pour les femmes).
dépistage de Ct a augmenté de +8%, de façon plus
importante chez les hommes que chez les femmes Syphilis
(+10% vs +7%), ainsi que chez les moins de 26 ans,
notamment chez les hommes (+13% vs +9% chez En  2021, 3,39  millions de  tests de dépistage
les 26 ans et plus). de la syphilis ont été réalisés en France dont
près des deux tiers (65%) chez les femmes (tableau).
Gonococcies Le  dépistage de la syphilis chez les hommes a
concerné les plus de 50 ans dans 1 cas sur 5.
En  2021, 4,74  millions de  tests de dépistage de
l’infection à gonocoque ont été réalisés en France En  2021, 2,84  millions de  personnes de 15  ans et
dont plus des trois quarts (78%) chez les femmes plus  ont été testées au moins une fois pour une
(tableau). La majorité des tests concernaient la classe syphilis, soit un taux national de dépistage de

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  459
Figure 2
Taux de dépistage des infections à Chlamydia Trachomatis (pour 1 000 personnes de 15 ans et plus), France, 2014-2021
120

100

Taux de personnes dépistées/1 000 80

60

40

20

0
2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
Femmes <26 ans Femmes Femmes ≥26 ans
Total Hommes <26 ans Hommes
Hommes ≥26 ans
Source : Système national des données de santé, tests remboursés en secteur privé et public (hors hospitalisation), par année de réalisation des actes,
extraction juillet 2022, Santé publique France.

Figure 3
Taux de dépistage des infections à gonocoque (pour 1 000 personnes de 15 ans et plus), France, 2014-2021
140

120
Taux de personnes dépistées/1 000

100

80

60

40

20

0
2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
Femmes <26 ans Femmes Femmes ≥26 ans
Total Hommes <26 ans Hommes
Hommes ≥26 ans
Source : Système national des données de santé, tests remboursés en secteur privé et public (hors hospitalisation), par année de réalisation des actes,
extraction juillet 2022, Santé publique France.

460  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
50,6 pour 1 000 habitants de 15 ans et plus. Le taux pas d’un remboursement individuel avec notamment
de dépistage était plus élevé chez les femmes de les tests réalisés dans un cadre gratuit (en CeGIDD,
moins de 26 ans (figure 4). Le taux national de dépis- par l’ Office français de l’immigration et de l’intégra-
tage a globalement augmenté entre 2014 et  2021, tion (OFFI), …). Ainsi, sur l’année 2019 qui a précédé
malgré une période de diminution en 2020 (la dimi- la pandémie, l’activité globale de dépistage du VIH
nution apparente en 2018 étant liée à un problème de était estimée à 6,10 (IC95%:  [6,02‑6,18])  millions
remontée de données). Entre 2019 et 2021, le taux a de tests 12 grâce à l’enquête LaboVIH, soit un nombre
augmenté de +2%. supérieur de 30% par rapport au nombre de dépis-
tages remboursés dans le SNDS (4,70 millions).
Discussion Les femmes sont proportionnellement plus dépistées
que les hommes, notamment chez celles en âge de
Les données d’activité de dépistage du VIH et des
procréer, en raison des dépistages prénataux qui
IST bactériennes reposent sur différents systèmes
reposent sur le dépistage du VIH systématiquement
de surveillance auxquels participent les laboratoires
proposé et le dépistage obligatoire de la syphilis
de biologie médicale et les centres gratuits d’infor-
au 1er trimestre de la grossesse, et des recomman-
mation, de dépistage et de diagnostic des infections
dations de dépistage des infections à Ct chez les
par les virus de l’immunodéficience humaine, des
femmes de 15 à  25  ans et les femmes enceintes 5.
hépatites virales et des infections sexuellement trans-
Le niveau de dépistage élevé des infections à gono-
missibles (CeGIDD), ou sont issues du SNDS.  Les
coque chez les femmes s’explique par l’utilisation
systèmes de surveillance basés sur la participation
d’une PCR multiplex permettant de dépister conjoin-
des biologistes sont impactés depuis 2020 par la
tement une infection à gonocoque dans le cadre
surcharge de travail liée à la crise sanitaire associée
d’un dépistage d’une infection à Ct. Les hommes
à la pandémie de Covid-19 11, ce qui peut en limiter
de 50 ans et plus sont plus particulièrement testés
la fiabilité. Les données présentées ici concernent
pour l’infection à VIH et la syphilis, sans doute en lien
les remboursements de près de 99% de la popula-
avec les r­ ecommandations de dépistage concernant
tion résidant en France et ne présentent pas cette
les HSH.
limite. Cependant, elles ne couvrent pas l’ensemble
des tests de dépistage effectués dans la mesure où Malgré l’augmentation du taux de dépistage du VIH
elles n’incluent ni les tests réalisés en secteur public en 2021 par rapport à 2020, il reste inférieur à celui
lors d’une hospitalisation, ni ceux qui ne bénéficient de 2019, marquant ainsi une rupture avec la tendance

Figure 4
Taux de dépistage de la syphilis (pour 1 000 personnes de 15 ans et plus), France, 2014-2021
140

120
Taux de personnes dépistées/1 000

100

80

60

40

20

0
2014 2015 2016 2017 2018* 2019 2020 2021
Femmes <26 ans Femmes Femmes ≥26 ans
Total Hommes <26 ans Hommes
Hommes ≥26 ans
* problème de remontée de données en 2018
Source : Système national des données de santé, tests remboursés en secteur privé + public (hors hospitalisation), par année de réalisation des actes,
extraction juillet 2022, Santé publique France.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  461
à l’augmentation observée les années précédentes. [3] Haute Autorité de santé. Réévaluation de la stratégie
Ce fléchissement pourrait avoir des conséquences de dépistage de l’infection à VIH en France. Saint-Denis La
Plaine: HAS; 2017. 3 p. https://www.has-sante.fr/upload/docs/
potentielles sur le délai au diagnostic des personnes
application/pdf/2017-03/dir2/reevaluation_de_la_strategie_
infectées, et donc sur la prise en charge individuelle depistage_vih_-_synthese_reco.pdf
et la prévention de la transmission du VIH. La diminu-
tion du taux de dépistage entre 2019 et 2021 était plus [4] Haute Autorité de santé. Évaluation du dépistage des
infections uro-génitales basses à Chlamydia trachomatis en
importante chez les hommes que chez les femmes,
France. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2003. 95 p. https://www.
probablement du fait des dépistages prénataux qui has-sante.fr/jcms/c_464119/fr/evaluation-du-depistage-des-
se sont maintenus. infections-uro-genitales-basses-a-chlamydia-trachomatis-
en-france-2003
Une tendance globale à l’augmentation du taux de
dépistage est également observée jusqu’en 2019 pour [5] Haute Autorité de santé. Réévaluation de la stratégie de
les trois IST bactériennes. La diffusion de la prophy- dépistage des infections à Chlamydia trachomatis. Saint-
laxie pré-exposition du VIH (PrEP) a pu participer à Denis La Plaine: HAS; 2018. https://www.has-sante.fr/
jcms/c_2879401/fr/reevaluation-de-la-strategie-de-depis​
cette augmentation depuis 2016, du fait du suivi des tage-des-infections-a-chlamydia-trachomatis
patients comprenant un dépistage tous les trois mois
du VIH et des autres IST. Cependant cela ne concerne [6] Haute Autorité de santé. Évaluation a priori du dépistage de
la syphilis en France. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2007. 284 p.
qu’un faible nombre de personnes en comparaison
https://www.has-sante.fr/jcms/c_548127/fr/evaluation-a-prio​
avec le nombre total de personnes dépistées chaque ri-du-depistage-de-la-syphilis-en-france
année 13. Les taux de dépistage de ces trois IST ont
diminué en 2020 puis augmenté de nouveau en 2021. [7] Haute Autorité de santé. Dépistage et prise en charge de
l’infection à Neisseria gonorrhoeae : état des lieux et propo-
Entre 2019 et 2021 l’augmentation du taux de dépis-
sitions. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2010. 144  p. https://
tage des IST bactériennes était plus marquée chez has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-03/argumen​
les moins de 26 ans, ce qui peut s’expliquer notam- taire_gonocoque_vf.pdf
ment par l’application des recomman­dations de 2018
[8] Tuppin P, Rudant J, Constantinou P, Gastaldi-Ménager C,
de la HAS 5.
Rachas A, de Roquefeuil L, et al. Value of a national adminis-
trative database to guide public decisions: From the système
national d’information interrégimes de l’Assurance Maladie
Conclusion (SNIIRAM) to the système national des données de santé
Ces données montrent une augmentation globale de (SNDS) in France. Rev Épidemiol Santé Publique. 2017;65
Suppl 4:S149-67.
l’activité de dépistage du VIH et des IST bactériennes,
observée depuis plusieurs années, malgré une chute [9] Caisse nationale de l’Assurance maladie des travailleurs
en  2020 liée à la crise sanitaire de la Covid‑19, salariés. Biologie médicale nomenclature des actes. Paris:
rattrapée en  2021 pour les IST bactériennes, mais Cnamts; 2019. 127  p. http://www.codage.ext.cnamts.fr/f_
mediam/fo/nabm/DOC.pdf
pas encore pour l’infection à VIH.
[10] Ndeikoundam Ngangro  N, Viriot  D, Lucas  E, Boussac,
Face à ces constats et dans un contexte de prévention Zarebska M, Lot F, et al. Relevance of health-care reimburse-
combinée vis-à-vis du VIH, il est important de remo- ment data to monitor syphilis epidemic in France, 2011-2013.
biliser les professionnels de santé et les populations BMJ Open 2018;8(7):e020336.
clés sur l’importance du dépistage combiné pour
[11] Simões D, Stengaard AR, Combs L, Raben D, The EuroTEST
toutes les IST (VIH, IST bactériennes, hépatites B et C) COVID-19 impact assessment consortium of partners. Impact of
pour un bénéfice individuel et collectif. Un dépistage the COVID-19 pandemic on testing services for HIV, viral hepa-
précoce des personnes et de leurs partenaires, suivi titis and sexually transmitted infections in the WHO European
rapidement d’une mise sous traitement est indispen- Region, March to August 2020. Euro Surveill. 2020;25(47):pii=20
sable pour interrompre les chaines de transmission 01943. https://www.eurosurveillance.org/content/10.2807/1560-
7917.ES.2020.25.47.2001943
de l’infection à VIH, comme des IST bactériennes et
des hépatites B et C. ■ [12] Santé publique France. Surveillance du VIH et des IST
­bactériennes. Bulletin de santé publique VIH-IST. décembre 2021.
Liens d’intérêt https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-trauma​
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard tismes/infections-sexuellement-transmis​sibles/vih-sida/docu​
du contenu de l’article. ments/bulletin-national/bulletin-de-sante-pu​blique-vih-ist.-de​
cembre-2021
Références
[13] Billioti de Gage  S, Desplas  D, Dray-Spira  R.  Roll-out of
[1] Ministère des affaires sociales et de la Santé. Stratégie HIV pre-exposure prophylaxis use in France: A nationwide
nationale de santé sexuelle, agenda 2017-2030. Paris: minis- observational study from 2016 to 2021. Lancet Reg Health Eur.
tère des affaires sociales et de la Santé; 2017. 75  p. https:// 2022;22:100486.
solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/strategie_nationale_sante_
sexuelle.pdf Citer cet article

[2] Haute Autorité de santé. Dépistage de l’infection par le Kounta  CH, Drewniak  N, Cazein  F, Chazelle  É, Lot  F.
VIH en France. Stratégies et dispositif de dépistage. Saint- Dépistage du VIH et des infections sexuellement transmis-
Denis La Plaine: HAS; 2009. https://www.has-sante.fr/ sibles bactériennes en France, 2014-2021. Bull Épidémiol
upload/docs/application/pdf/2009-10/synthese_depistage_ Hebd. 2022;(24-25):456-62. http://beh.santepubliquefrance.
vih_volet_2_vfv_2009-10-21_16-48-3_460.pdf fr/beh/2022/24-25/2022_24-25_4.html

462  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Santé publique France, Saint-Maurice

>
Pierre Pichon et coll.

ARTICLE // Article

DÉCOUVERTES D’INFECTION À VIH CHEZ LES ENFANTS EN FRANCE, 2010-2021


// NEW CASES OF HIV AMONG CHILDREN DIAGNOSED IN FRANCE, 2010-2021

Pierre Pichon1 ([email protected]), Françoise Cazein1, Catherine Dollfus2 , Florence Lot1

 Santé publique France, Saint-Maurice


1

 Service d’hématologie et d’oncologie pédiatrique, Hôpital Armand-Trousseau, AP-HP, Paris


2

Soumis le 13.09.2022 // Date of submission: 09.13.2022

Résumé // Abstract
Cet article présente les données de la déclaration obligatoire du VIH chez les enfants (moins de 15  ans) en
France.
Entre 2010 et 2021, le nombre d’enfants ayant découvert leur infection par le VIH est estimé à 581 (intervalle
de confiance à 95% (IC95%): [355‑808]), soit un peu moins de 1% de l’ensemble des découvertes sur la même
période. Chez les 54% d’enfants dont le lieu de naissance est connu, 51% sont nés en Afrique subsaharienne,
32% en France et 17% dans d’autres pays. Chez les 49% d’enfants dont le mode de contamination est connu,
90% ont été contaminés par transmission mère-enfant (TME), 5% par transfusion sanguine dans un pays autre
que la France et 4% lors de rapports hétérosexuels.
Chez les enfants contaminés par TME, près d’un tiers sont nés en France. Ces derniers n’ont bénéficié d’aucune
prophylaxie antirétrovirale dans 28% des cas et la séropositivité de leur mère a été découverte après l’accou-
chement dans 46% des cas.
Une amélioration du dépistage des femmes enceintes, si besoin répété en cours de grossesse ou d’allaitement,
et de leur conjoint, permettrait de réduire encore le nombre de contaminations par TME chez les enfants nés
en France.
This article presents data on the mandatory reporting of HIV infections in children (under 15  years old) in
France.
Between 2010 and 2021, the number of children diagnosed as HIV-positive is estimated at 581 (95% confidence
interval (95%CI): [355‑808]), i.e. slightly less than 1% of all new cases reported over this period. Among the 54%
of children whose place of birth is known, 51% were born in Sub-Saharan Africa, 32% in France and 17% in other
countries. Among the 49% of children whose mode of infection is known, 90% were infected by mother-to-
child transmission (MTCT), 5% by blood transfusion in a country other than France and 4% during heterosexual
intercourse.
Among children infected by MTCT, almost one-third were born in France. These children did not receive
antiretroviral prophylaxis in 28% of cases and the mother was diagnosed as HIV-positive after delivery in 46%
of cases.
Improved screening of pregnant women, repeated during pregnancy or breastfeeding if necessary, and
screening of spouses, would further reduce the number of infections by MTCT among children born in
France.

Mots-clés : VIH, Enfant, Prévention


// Keywords: HIV, Child, Prevention

Introduction fœtale (TME). Ce risque a été estimé à 0,2% sur la


période 2011-2017, chez les femmes incluses dans
Avec près de 5  000  découvertes d’infection par
l’enquête périnatale française (EPF, cohorte ANRS
le VIH en  2020 en France 1, l’épidémie de VIH
CO1/CO11) 2. Il paraît intéressant, dans ces condi-
demeure active et ce malgré les actions de préven-
tions, de décrire les caractéristiques de la population
tion mises en place. Concernant les enfants et en
spécifique que constituent les enfants nouvellement
particulier les nouveau-nés, la  proposition systé-
diagnostiqués aujourd’hui.
matique d’un test de dépistage de la mère pendant
la grossesse depuis 1985 et l’existence de trai- Cet article présente les données issues de la déclara-
tements prophylactiques de la mère et l’enfant tion obligatoire (DO) de l’infection par le VIH chez les
depuis 1994, ont considérablement réduit le enfants de moins de 15 ans, diagnostiqués en France
risque d’infection à VIH par transmission materno- entre 2010 et 2021, quel que soit leur pays d’origine.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  463
Matériel et méthode notable de cette proportion d’une année sur l’autre.
Le nombre corrigé de découvertes chez les enfants a
En France, l’infection par le VIH est soumise à la
diminué entre 2010 et 2021 (p=0,01), mais cette dimi-
déclaration obligatoire (DO) depuis 2003. La DO est
nution est principalement liée à une baisse en 2020 et
réalisée sur la base d’un code d’anonymat, en paral-
en 2021. Sur la période 2010-2019, aucune évolution
lèle par le biologiste ayant confirmé le diagnostic
significative n’est observée (p=0,19) (figure 1).
d’infection à VIH et par le pédiatre prescripteur du test
ou réalisant la prise en charge médicale de l’enfant. La quasi-totalité (99%) des infections à VIH chez ces
Depuis 2016, la DO du VIH se fait en ligne sur l’appli- enfants sont des infections par le VIH-1.
cation e-DO (www.e-do.fr). Parmi les enfants, 54% sont des filles ; 15% des
L’analyse porte sur les nouveaux diagnostics d’infec- enfants ont été diagnostiqués avant 1 an, 26% entre
tion à VIH chez les enfants de moins de 15  ans au 1 et 4 ans et 59% entre 5 et 14 ans.
moment du diagnostic, entre le 1er janvier 2010 et le La région de domicile au moment du diagnostic est
31 décembre 2021, et déclarés au 30 juin 2022. connue dans 85% des cas, ainsi, 30% d’entre eux
Le nombre de déclarations reçues (données brutes) étaient domiciliés en Île-de-France, 53% dans une
sous-estime le nombre exact de nouveaux diagnos- autre région métropolitaine, 11% dans les départe-
tics en raison d’un défaut d’exhaustivité. Le nombre ments d’outre-mer (DOM) et 6% à l’étranger.
réel de diagnostics d’infection à VIH peut être estimé Le lieu de naissance est connu pour 54% des
(données corrigées) en prenant en compte les délais enfants (figure 1). Parmi eux, 51% sont nés en Afrique
de déclaration, le défaut d’exhaustivité, ainsi que subsaharienne, 32% en France et 17% dans d’autres
les valeurs manquantes. La méthode de correction pays. La part des enfants nés en France a diminué
a été brièvement décrite précédemment 3. Dans le entre les périodes 2010-2015 et 2016-2021 (p=0,005).
présent article, le nombre global d’infections à VIH
diagnostiquées chez des enfants est ainsi basé sur La notion d’inclusion dans l’EPF est connue pour
des données corrigées. La tendance du nombre 39% des enfants. Parmi eux, seuls 8% étaient inclus
annuel de diagnostics chez les enfants sur la période dans cette cohorte. Cette proportion est plus élevée
d’étude a été testée par la méthode des moindres pour les enfants nés en France (20%) que pour ceux
carrés pondérée par la variance. nés à l’étranger (2%).

En revanche, les effectifs des cas pédiatriques sont Entre 2012 et  2021, la notion de co-infection VHB
trop faibles pour permettre la description de leurs est connue pour 36% des enfants, dont 4% de
caractéristiques à partir de données corrigées. Cette co-­
­ infections. La notion de co-infection VHC est
description est donc réalisée à partir des données connue pour 34% des enfants dont 4% étaient
brutes, non corrigées. Les proportions sont calculées ­co-infectés. Il n’y a pas de cas de double c
­ o-infection
après exclusion des cas pour lesquels les données par le VHB et le VHC déclaré chez ces enfants.
sont manquantes, mis à part le sexe et l’âge au Les modes de contamination sont connus pour
diagnostic qui sont systématiquement renseignés. 49% des enfants (figure 2) et varient selon leur âge.
Ont été étudiés dans cet article le sexe, l’âge au La plupart d’entre eux, 90%, ont été contaminés par
diagnostic, la région de domicile, le lieu de naissance, TME, 5% par transfusion sanguine dans un pays autre
l’inclusion dans l’enquête périnatale française (EPF, que la France et 4% lors de rapports hétérosexuels.
cohorte ANRS CO10 gérée par l’Inserm CESP U1018), Un cas concerne une contamination par allaitement
le mode de contamination probable, le motif de réali- par une personne autre que la mère.
sation du test ayant permis le diagnostic, le stade Concernant les huit déclarations d’enfants conta-
clinique au moment de la découverte de l’infection, minés par rapports hétérosexuels, six étaient des
les co-infections par le virus de l’hépatite B (VHB) et filles âgées de 9 à 14 ans au moment du diagnostic
C (VHC) (antigène  HBs, ARN VHC chez l’enfant de (figure 2).
moins de 18 mois ou anticorps anti-VHC à partir de
18 mois, informations disponibles seulement depuis Enfants contaminés par transmission
2012). En cas de TME, l’existence d’une prophylaxie, mère-enfant
le lieu de naissance de la mère et le moment de la
découverte de sa séropositivité par rapport à la gros- Sur 175 cas déclarés, un peu plus de la moitié (55%)
sesse sont aussi décrits. étaient des filles.
Le lieu de naissance est renseigné pour 90% des
enfants contaminés par TME  : 50% sont nés en
Résultats Afrique subsaharienne, 33% en France et 17% dans
Le nombre de découvertes d’infection à VIH chez les d’autres pays. L’année d’arrivée en France est connue
enfants de moins de 15 ans entre 2010 et 2021 est pour 87% des enfants contaminés par TME et nés
estimé à 581 (intervalle de confiance à 95% (IC95%): à l’étranger. Chez ces enfants, le délai moyen entre
[355-808]) (données corrigées) à partir des 396 cas année de naissance (proxy de la date de contami-
déclarés (données brutes). Cette population repré- nation) et arrivée en France est de 5,9 ans. Quant au
sente un peu moins de 1% des nouveaux diagnos- délai moyen entre l’arrivée en France et le diagnostic
tics déclarés sur la même période, sans variation d’infection à VIH, il est de 0,8 ans.

464  |  29 novembre 2022  |  BEH 24-25 Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre)
Figure 1
Nombre de découvertes d’infections à VIH chez des enfants de moins de 15 ans par année de diagnostic
(données corrigées) et répartition par lieu de naissance (données brutes). (DO du VIH, données au 30 juin 2022)
90

80

70

60
Nombre de découvertes

50

40

30

20

10
41% 40% 46% 53%
25% 25% 25% 26%
11% 0% 43% 14%
0
2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
Année de diagnostic <-Covid->

Nés en France* Nés à l'étranger* Inconnu* Nouveaux diagnostics**


* données brutes ** données corrigées
DO : déclaration obligatoire.

Figure 2
Nombre de découvertes d’infections à VIH chez des enfants de moins de 15 ans, par âge au diagnostic
et par mode de contamination. (DO du VIH, données brutes au 30 juin 2022)
60

50
Nombre de découvertes

40

30

20

10

0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14
Âge au moment du diagnostic
Mode de contamination :
Hétérosexuel TME Autres Inconnu
DO : déclaration obligatoire ; TME : transmission mère-enfant.

Le lieu de naissance de la mère est connu pour 92% 2%  étaient diagnostiqués au stade de primo-­
des enfants nés en France  ; 69% de leurs mères infection symptomatique, 59% au stade asymptoma-
sont nées à l’étranger, le plus souvent en Afrique tique, 22% étaient symptomatiques non-sida et 18%
subsaharienne. étaient au stade sida. Parmi ceux nés à l’étranger, la
Le stade clinique est connu pour 91% des enfants répartition est de 56% d’asymptomatiques, 31% de
contaminés par TME.  Parmi ceux nés en France, symptomatiques non-sida et 14% de sida.

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  465
Le motif de réalisation du test était connu dans 86% (45% chez ceux nés à l’étranger, mais aussi 40%
des cas : 67% des enfants avaient été testés du fait chez ceux nés en France). Chez les enfants nés à
de la séropositivité de leur mère, 24% en raison de l’étranger, cette fréquence élevée est à rapprocher
signes cliniques ou biologiques liés au VIH, 7% car du délai écoulé entre la contamination et l’arrivée
arrivant d’une zone d’endémie et 3% pour une cause en France (moyenne de près de six  ans), plus que
non liée au VIH. du délai entre l’arrivée en France et le diagnostic de
l’infection à VIH qui est nettement plus court (moins
Enfants nés en France contaminés d’une année en moyenne). Chez les enfants nés en
par transmission mère-enfant France, ces découvertes tardives sont principale-
Chez les enfants contaminés par TME et nés en ment liées au fait que l’infection de la mère n’était
France, 56% ont été diagnostiqués dans leur pas connue à la naissance.
première année et 44% entre 1 et 14 ans. Chez les Les deux tiers des enfants contaminés par TME sont
enfants qui n’avaient pas été diagnostiqués l’année nés à l’étranger, en particulier en Afrique subsaha-
de leur naissance, 68% ont été diagnostiqués à un rienne (50%). Cela peut s’expliquer à la fois par une
stade symptomatique (hors primo-infection) ou sida prévalence du VIH plus élevée qu’en France dans
et 32% à un stade asymptomatique. cette zone géographique et par un moindre accès
au dépistage et ou à la prophylaxie de la TME
La période de découverte de la séropositivité de la
dans certains de ces pays 4. Par ailleurs, un certain
mère était renseignée dans 92% des cas, dont 29%
nombre d’enfants déjà connus comme infectés par
avant la grossesse, 25% pendant la grossesse et
le VIH dans leur pays d’origine peuvent arriver en
46% après la grossesse.
France dans le cadre de regroupements familiaux.
L’existence d’une prophylaxie antirétrovirale (ARV) de Si leur diagnostic datait de plus d’un an, ils ne sont
la TME était connue dans 69% des cas. La moitié pas décrits dans le présent article, focalisé sur les
(50%) des femmes en ont bénéficié durant la gros- nouveaux diagnostics.
sesse et 47% durant l’accouchement, tandis que Un tiers des TME concernaient des enfants nés en
58% des enfants en ont bénéficié après la naissance. France. Les deux tiers de ces enfants avaient une
La part des enfants n’ayant été exposés à aucune mère née dans un pays étranger. Cette proportion
prophylaxie ARV était de 28%. peut être expliquée là encore par la prévalence plus
élevée du VIH dans le pays d’origine de ces femmes,
Discussion même si l’enquête Parcours a montré qu’au moins
Cet article décrit, à partir des données de la DO, 30% des femmes nées en Afrique subsaharienne
les enfants de moins de 15  ans infectés par le VIH suivies en Île-de-France en  2012-2013 pour leur
diagnostiqués en France entre 2010 et 2021, quel que infection à VIH avaient été contaminées en France 5.
soit leur lieu de naissance, leur mode de contamina- De plus, il ne peut être exclu une différence de
tion et les circonstances de leur diagnostic. recours au système de santé, et donc aux services
pouvant assurer une prise en charge adéquate des
Le nombre estimé (corrigé) de découvertes d’infec- femmes, entre mères nées en France et mères nées
tion à VIH chez des enfants, stable de 2010 à 2019, à l’étranger, quelle qu’en soit la raison (sociale,
a diminué ensuite, diminution également observée économique, administrative…) 6.
chez les adultes 1. Cette diminution chez les enfants
pourrait être liée au contexte de la pandémie de Chez ces enfants contaminés par TME nés en France,
SARS-CoV-2. Les restrictions de déplacement, la séropositivité de la mère était découverte après la
qui ont pu entraîner une diminution des arrivées sur grossesse dans 46% des cas, ce qui reflète le fait
le territoire de femmes enceintes et/ou d’enfants nés que, bien que le dépistage du VIH concerne la quasi-­
à l’étranger, une moindre activité de dépistage ou totalité des femmes enceintes en France 7, certaines
un retard de déclaration lié à une baisse des effec- d’entre elles échappent à ce dépistage. Par ailleurs,
tifs de personnels soignants peuvent en constituer une partie des TME résulte de séroconversions
les raisons. survenues en cours de grossesse (postérieurement
au dépistage proposé au cours du premier trimestre)
La quasi-totalité des enfants dont le mode de ou lors de l’allaitement, en l’absence de répétition
contamination est connu ont été contaminés par du dépistage de la mère en cours de grossesse, ou
TME. Toutefois, l’ensemble des contaminations en l’absence de dépistage du conjoint. Le dépis-
par TME ne sont pas décrites dans cet article, d’une tage du conjoint est pourtant recommandé par la
part en raison des modes de contamination non Haute Autorité de santé (HAS) depuis 2009 8 et ce
renseignés, mais aussi parce que certaines sont dépistage est pris en charge à 100% par la sécurité
découvertes après l’âge de 14 ans, comme cela a sociale. Mais cette proposition est rarement effec-
été le cas pour 48  jeunes déclarés sur la période tuée dans le suivi des femmes enceintes 9. La promo-
d’étude. Aucune transmission par usage de drogue
tion d’une consultation prénatale des pères, incluant
injectable (UDI) n’a été déclarée sur cette période
notamment un dépistage du VIH, a fait l’objet d’une
chez les moins de 15 ans.
recherche-action du Centre population et déve-
La fréquence des découvertes tardives (stade loppement (CEPED), soutenue par l’ANRS 10. Cette
clinique sida ou symptomatique sans sida) n’est pas intervention s’est déroulée entre 2021 et 2022 et ses
négligeable chez les enfants contaminés par TME résultats sont en cours d’analyse. Ces défauts de

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dépistage de la mère et du père de l’enfant à naître Conclusion
entraînent un retard de dépistage de l’enfant. Près
Malgré l’efficacité de la prévention de la TME du
de la moitié des enfants contaminés par TME et nés
VIH, des diagnostics liés à ce mode de contamina-
en France ont ainsi été diagnostiqués après leur
tion persistent, y compris chez des enfants nés en
première année de vie.
France. Il semble donc important d’améliorer encore
La comparaison avec les pays voisins 11 montre que la couverture du dépistage des femmes enceintes et
la proportion de découvertes liées à une TME par de leur conjoint, si besoin répété au cours de la gros-
rapport à l’ensemble des diagnostics (enfants et sesse ou de l’allaitement. Pour les enfants nés dans
adultes) en France en 2020 (0,6%) est voisine de celle une zone d’endémie, la priorité reste celle d’un dépis-
observée en Europe de l’Ouest (0,8%). tage aussi précoce que possible après leur arrivée
en France.
Le défaut d’exhaustivité de la DO du VIH repré-
sente une limite à ce travail. Cette exhaustivité a été Une remobilisation de l’ensemble des déclarants,
estimée globalement (enfants et adultes) à 69% en et notamment des pédiatres, permettrait de disposer
moyenne sur la période étudiée, mais elle pourrait de données de surveillance plus robustes pour mesurer
être différente chez les enfants, dans la mesure où les l’impact des mesures de prévention de la TME. ■
déclarants ne sont pas les mêmes. Le nombre total
Remerciements
d’enfants diagnostiqués, estimé (données corrigées)
sur la base de cette exhaustivité globale, est donc à Nous remercions les biologistes et les pédiatres ayant déclaré
considérer avec prudence. Les données brutes (non les diagnostics d’infection à VIH chez des enfants, ainsi
que Maria-Clara Da Costa, Lotfi Benyelles, Charly Ramus
corrigées), quant à elles, ne permettent pas d’inter-
(Santé publique France) pour la gestion des DO VIH.
préter les tendances, dans la mesure où la sous-­
déclaration des cas pédiatriques a pu varier d’une Liens d’intérêt
année à l’autre et s’est aggravée entre 2020 et 2021, Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt au regard
en lien avec la pandémie de Covid-19. Ainsi, la dimi- du contenu de l’article.
nution récente du nombre de cas déclarés (figure 1)
ne reflète sans doute pas l’évolution réelle du nombre Références
de diagnostics. [1] Santé publique France. Surveillance du VIH et des
IST b ­actériennes. Bulletin de santé publique VIH-IST.
La description des caractéristiques des enfants décembre  2021. https://www.santepubliquefrance.fr/mala​
diagnostiqués, en revanche, ne peut être réalisée dies-et-trauma ​ t ismes/infections-sexuellement-transmis​
qu’à partir des données brutes  : les effectifs des sibles/vih-sida/documents/bulletin-national/bulletin-de-
diagnostics d’infection à VIH chez les enfants sont sante-publique-vih-ist.-decembre-2021
trop faibles pour permettre de réaliser des calculs [2] Sibiude  J, Le Chenadec  J, Mandelbrot  L, Hoctin  A,
de  corrections par âge, mode de contamination, Dollfus C, Faye A, et al. Update of perinatal HIV-1 transmission
pays de naissance, etc. Cette description des carac- in France: Zero transmission for 5482 mothers on continuous
téristiques est présentée dans cet article en propor- ART from conception and with undetectable viral load at deli-
very. Clin Infect Dis. 2022:ciac703.
tions, et non en effectifs qui sous-estiment la réalité
en raison de la sous-déclaration. [3] Tran TC, Cazein F, Le Strat Y, Barin F, Pillonel J, Lot F. Décou-
vertes de séropositivité VIH chez les seniors en France, 2008-
Une autre limite des données brutes est le carac- 2016. Bull Epidémiol Hebd. 2018;(40-41):792-8. http://beh.
tère incomplet de la plupart des items, à l’exception santepubliquefrance.fr/beh/2018/40-41/2018_40-41_1.html
du sexe et de l’âge. Cela concerne tous les items [4] UNAIDS Global HIV & AIDS statistics – Factsheets 2022.
(pays de naissance, mode de contamination, stade https://www.unaids.org/en/resources/fact-sheet
clinique…) censés être renseignés par le pédiatre,
[5] Desgrées du Loû A, Pannetier J, Ravalihasy A, Gosselin A,
qui sont manquants quand celui-ci n’a pas réalisé Supervie V, Panjo H, et al; groupe ANRS-Parcours. Migrants
la déclaration et que seul le biologiste a déclaré le subsahariens suivis pour le VIH en France : combien ont été
cas. Ainsi, le mode probable de contamination est infectés après la migration ? Estimation dans l’Étude Parcours
inconnu dans 51% des cas, le plus souvent du fait (ANRS). Bull Epidémiol Hebd. 2015;(40-41):752-8. http://beh.
de l’absence de déclaration médicale. La charge de santepubliquefrance.fr/beh/2015/40-41/2015_40-41_2.html
travail des professionnels de santé leur laisse peu [6] Morlat P, Blanc A, Bonnet F, Brun-Vezinet F, Costagliola D,
de temps pour participer à la surveillance du VIH, Dabis  F, et  al. Prise en charge médicale des  personnes
qui peut être perçue comme éloignée de leur cœur vivant avec le VIH – Désir d’enfant et grossesse. Paris: CNS;
de métier. Cependant, la réalisation de ces décla- 2018. 52  p. https://cns.sante.fr/wp-content/uploads/2017/11/
experts-vih_grossesse.pdf
rations est indispensable pour suivre précisément
l’évolution des diagnostics, et l’analyse des données [7] Tran TC, Pillonel J, Cazein F, Sommen C, Bonnet C, Blondel B,
disponibles serait plus robuste si les données étaient et al. Antenatal HIV screening: Results from the National Peri-
natal Survey, France, 2016. Euro Surveill. 2019;24(40):1800573.
complètes. Les proportions indiquées, qui sont https://www.eurosurveillance.org/content/10.2807/1560-7917.
calculées après exclusion des valeurs ­inconnues, ES.2019.24.40.1800573
pourraient être surestimées ou sous-estimées,
[8] Haute Autorité de santé. Dépistage de l’infection par le
mais seulement si les caractéristiques des enfants
VIH en France  : stratégies et dispositif de dépistage. Saint-
déclarés uniquement par le biologiste étaient diffé- Denis La Plaine: HAS; 2009. 41  p. https://www.has-sante.fr/
rentes de celles des enfants déclarés également par upload/docs/application/pdf/2009-10/synthese_depistage_
le pédiatre. vih_volet_2_vfv_2009-10-21_16-48-3_460.pdf

Prévention et dépistage du VIH et des IST (Journée mondiale de lutte contre le sida, 1er décembre) BEH 24-25 |  29 novembre 2022  |  467
[9] Frange P, Chaix ML, Veber F, Blanche S. Missed opportu- 2021 (2020 data). Stockholm: ECDC; 2021. https://www.ecdc.
nities for HIV testing in pregnant women and children living in europa.eu/en/publications-data/hiv-aids-surveillance-eu​
France. Pediatr Infect Dis J. 2014;33(2):e60-2. rope-2021-2020-data
[10] Penot  P, Jacob  G, Guérizec  A, Letembet-Ippet  VA,
­Obergfell P, Harich R, et al. Dépistage prénatal des pères à la Citer cet article
maternité de Montreuil : l’autre moitié de l’équation. AFRAVIH Pichon P, Cazein F, Dollfus C, Lot F. Découvertes d’infection
2020. 8-11 novembre 2020. à VIH chez les enfants en France, 2010-2021. Bull Épidémiol
[11] European Centre for Disease Prevention and Control/WHO Hebd. 2022;(24-25):463-8. http://beh.santepubliquefrance.fr/
Regional Office for Europe. HIV/AIDS surveillance in Europe beh/2022/24-25/2022_24-25_5.html

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