4 119 Evaluation de Létat Nutritionnel
4 119 Evaluation de Létat Nutritionnel
4 119 Evaluation de Létat Nutritionnel
Tableau 119.1. Principales causes de dénutrition pure dans les pays industrialisés
Augmentation
Carences d’apport Pertes digestives accrues des besoins
Anorexie mentale Gastrectomies (totales) Maladies inflammatoires/infectieuses
Sujets âgés Pancréatites chroniques Cancers
Végétalisme Syndromes de malabsorption Traumatismes et brûlures
Croyances parareligieuses (ascétisme) Résections intestinales étendues Stress chirurgical
Régimes d’exclusion By-Pass intestinaux Endocrinopathies
BPCO Maladies métaboliques
Insuffisance cardiaque sévère
Alcoolisme
La fréquence de la malnutrition chez des patients hospitalisés a été Tableau 119.2. Situations cliniques nécessitant une évaluation de l’état nutritionnel
estimée entre 30 et 50 % des patients médicaux aussi bien que chirurgi- [32]
caux [2, 5]. Une relation directe entre l’état nutritionnel initial et la
morbidité et la mortalité hospitalière semble aujourd’hui établie avec Évidence clinique • Marasme
une incidence de complications graves postopératoires pouvant de MPE • Hypoalbuminémie
dépasser 30 % dans une population dénutrie, double de celle constatée • Forme mixte
chez les patients non dénutris [6]. La dénutrition liée à l’agression aiguë • Kwashiorkor
peut survenir soit sur un état nutritionnel sain, soit sur un état nutri- Maladies chroniques • Cancer
tionnel déjà défaillant et l’aggraver. Beaucoup de complications sont • VIH
imputables à une malnutrition protéique et énergétique (MPE) : • Alcoolisme
• l’augmentation des infections nosocomiales relative à une • Néphropathie
défaillance du système immunitaire; • Hépatopathie
• le retard ou l’incapacité de cicatrisation des tissus; • Chimiothérapies anticancéreuses retentissant
• la prolongation de la ventilation mécanique en cas d’altération des sur l’absorption et/ou l’utilisation des nutriments
fonctions vitales. Défaillances aiguës • Sepsis sévères
Les syndromes dépressifs et autres dérangements psychologi- avec hypercatabolisme • Traumatismes sévères
ques sont également fréquents. • Chirurgie d’urgence
Les taux de mortalité sont deux à quatre fois supérieurs chez les • Brûlés
patients avec MPE. De plus, une assistance nutritionnelle adéquate a
Patients âgés [33] • Anorexie physiologique
été reconnue comme facteur de réduction des complications posto-
• Pauvreté de la dentition
pératoires chez des patients sévèrement dénutris [7]. • Problèmes socio-économiques
L’évaluation de l’état nutritionnel a donc pour objectif de • Maladies chroniques
dépister les patients porteurs d’un état nutritionnel altéré et de les
traiter, dans un souci de diminuer l’incidence des complications
favorisées par la malnutrition. COMMENT ÉVALUER L’ÉTAT NUTRITIONNEL?
L’évaluation de l’état nutritionnel doit porter sur les différents
CHEZ QUELS PATIENTS ÉVALUER compartiments de l’organisme d’une part (fig. 119.1) et sur l’exis-
L’ÉTAT NUTRITIONNEL? tence et la durée d’une nutrition inadéquate d’autre part. Les
marqueurs principaux d’évaluation de l’état nutritionnel chez
Il est admis que les patients ayant une apparence et une activité l’adulte sain sont recensés dans le tableau 119.3. Tous ces marqueurs
physiques normales, une alimentation supposée normale et qui sont sont perturbés de façon non spécifique par de nombreuses situations
indemnes de toute cause préalable significative d’augmentation des pathologiques, ce qui rend complexe l’interprétation de leurs résul-
besoins nutritionnels ne requièrent aucune enquête particulière. tats. De plus une maladie organique et la simple inactivité peuvent
Cette catégorie de patients n’est pas considérée comme à risque de avoir le même retentissement sur ces marqueurs que la malnutrition
développer des complications liées à la malnutrition [6, 7]. Cepen- elle-même.
dant les catégories de patients répertoriées dans le tableau 119.2 Des méthodes sophistiquées de mesure de l’état nutritionnel
peuvent tirer bénéfice d’une telle évaluation, en conduisant à la mise ont été développées telles la dilution d’isotopes multiples, l’absorp-
en route d’une assistance nutritionnelle adéquate. tiométrie biphotonique ou l’activation neutronique [9, 10].
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Tableau 119.4. Principaux signes cliniques du marasme et du kwashiorkor • L’étude de la contraction du muscle adducteur du
pouce en réponse à un stimulus électrique du nerf médian au
Marasme MPE hypocalorique et Kwashiorkor MPE niveau du poignet est réalisable chez des patients inconscients. Elle
hypoprotidémique hypoprotidémique fait appel aux techniques d’enregistrement électromyographique
(EMG). La courbe force/fréquence d’un muscle exprime le rapport
• Fonte musculaire du tronc et des • Absence de fonte musculaire des amplitudes de contractions musculaires développées en réponse
extrémités • Absence de perte de tissu gras sous- à une stimulation nerveuse électrique de fréquence croissante (10 Hz
• Faiblesse musculaire cutané à 100 Hz). Normalement l’élévation de la fréquence de stimulation
• Perte de tissu gras sous-cutané • Masse grasse abaissée est suivie d’une augmentation de la force de contraction du muscle,
• Absence d’œdème • Œdèmes déclives ou généralisés créant un tétanos. En cas de dénutrition, le tétanos n’est pas observé.
• Foie augmenté de volume
Ce phénomène a été rattaché à une diminution de la production
énergétique par les muscles. Dans le même registre on peut évaluer
sur une période de six mois, ou de 5 % sur une période d’un mois est la relaxation musculaire après stimulation, dont l’altération
indicative d’un état nutritionnel altéré. Cependant la sensibilité et la témoigne d’une fatigue musculaire. Il s’agit d’un phénomène actif
valeur prédictive positive d’évaluer correctement une perte de poids (ATP-dépendant) basé sur un efflux de calcium du réticulum sarco-
sont inférieures à 75 % [12]. De plus en présence d’œdèmes ou de plasmique. Chez le patient dénutri, une lenteur à la décontraction
déshydratation, situations fréquentes chez les patients admis en traduit un dysfonctionnement des pompes calciques [3]. L’associa-
réanimation, manifestes ou présents dans l’histoire de la maladie, le tion d’une courbe force/fréquence anormale et d’une lenteur à la
poids ou les variations de poids ne peuvent servir à évaluer l’état décontraction est le facteur prédictif le plus spécifique et le plus
nutritionnel du patient. sensible, chez des patients en préopératoire, de complications asso-
ciées à un déséquilibre nutritionnel [16].
L’analyse électromyographique de la contraction-relaxation
MESURES ANTHROPOMÉTRIQUES musculaire est de réalisation plus lourde que l’étude dynamomé-
trique mais reste facilement utilisable en routine au lit du patient.
Les mesures anthropométriques, permettant de définir l’état
nutritionnel chez des individus sains, peuvent être affectées par des
facteurs non nutritionnels. Par exemple, on observe une perte de DOSAGES DES PROTÉINES PLASMATIQUES
masse musculaire chez les patients alités en dehors de toute malnu-
trition. L’interprétation de ces mesures doit donc rester prudente Les protéines plasmatiques reflètent la masse viscérale des
[13]. Toutefois il s’agit d’un outil non invasif et peu coûteux, d’utili- protéines. Elles comprennent l’albumine, la transferrine, la transthy-
sation très simple entre des mains expérimentées. rétine ou préalbumine (TBPA) et, chez les patients à fonction rénale
Ces mesures comprennent, outre le poids (P) et la taille (T) des normale, la protéine vectrice du rétinol (RBP). Le taux d’albumine
patients permettant de calculer l’index de masse corporelle (IMC = sérique est le marqueur plasmatique le plus utilisé, bien qu’une
2 diminution de l’albuminémie reflète généralement une augmenta-
P/T ), la mesure du diamètre bicipital et l’épaisseur du pli cutané
tricipital (PCT) à l’aide d’un compas spécifique dit de Harpenden tion de son catabolisme et traduit plus la sévérité et la durée de
(adipomètre). Ces mesures sont réalisées sur le bras non dominant et l’agression métabolique que le statut nutritionnel lui-même [17]. Si
permettent le calcul de la circonférence musculaire du bras (MAMC), plusieurs études ont montré qu’un taux d’albumine sérique inférieur
reflet de la masse maigre. Le PCT est corrélé à la masse grasse. Une à 30 g.l–1 était corrélé avec une augmentation nette du nombre de
malnutrition protéinoénergétique sévère est définie par une valeur complications postopératoires [18], d’autres travaux plus réservés
de la MAMC inférieure au 10e percentile. L’existence d’une grande considèrent ce marqueur comme moins prédictif que le seul examen
variabilité interindividuelle suggère que les mesures devraient clinique [19]. En termes de prédiction des complications, la sensibi-
toujours être enregistrées par le même observateur [12]. Les valeurs lité de l’albuminémie s’accroît si son dosage est combiné avec celui
obtenues sont moyennées et comparées à des tables issues de popu- de la transferrine. Bien que la transferrine soit couplée au métabo-
lations contrôles normales, appariées en fonction de l’âge, du sexe et lisme du fer, elle répond mieux que l’albumine à une renutrition. Les
marqueurs à demi-vie brève que sont la TBPA et le RBP sont surtout
de l’origine ethnique. La confrontation des valeurs mesurées chez un
utiles dans le suivi d’une assistance nutritionnelle. Il en est de même
individu à des valeurs normales permet d’identifier la personne
pour la somatomédine C (ou IGF-1, pour insulin like growth factor 1),
comme « malnutrie » ou « normale ». Il n’existe pas de tables pour
dont les taux peuvent se normaliser en huit jours. Les autres
toutes les catégories de populations, en particulier pour les sujets
marqueurs de la phase aiguë de l’inflammation renseignent sur la
âgés ni pour les patients ayant une musculature développée. Ces
réaction de l’organisme à l’agression plutôt que sur l’état nutri-
mesures n’ont aucune valeur en cas d’emphysème sous-cutané, de
tionnel et n’ont pas leur place dans son évaluation.
syndrome œdémateux généralisé, ou en cas d’anomalies de l’élasti-
cité cutanée. L’existence d’un risque élevé d’erreurs dans Les concentrations plasmatiques des protéines dites nutrition-
l’acquisition et l’interprétation des mesures anthropométriques doit nelles sont très influencées par le syndrome inflammatoire; cette
conduire à une grande prudence afin d’éviter de classer des patients notion a donné lieu à l’élaboration d’un index pronostique inflam-
normaux comme étant dénutris. Ce risque a été estimé à plus de matoire et nutritionnel (PINI). Le PINI a été proposé pour corriger les
20 % [1]. Enfin en raison de leur lenteur de variation, peu significa- fluctuations des principales protéines nutritionnelles (albumine et
tive en deçà de trente jours, les mesures anthropométriques ne transthyrétine) par rapport aux protéines plus spécifiques de
peuvent être utilisées pour surveiller l’efficacité d’une assistance l’inflammation que sont la protéine C réactive (CRP) et l’orosomu-
nutritionnelle à court terme [5]. coïde, selon la formule suivante [20] :
CRP ( mg.l –1 ) × orosomucoïde ( mg.l –1 )
PINI = -------------------------------------------------------------------------------------------------
-
albumine ( g.l –1 ) × transthyrétine ( mg.l –1 )
TESTS ÉVALUANT LA FONCTION MUSCULAIRE Normalement proche de l’unité, le PINI représente un indice
Des modifications fonctionnelles telles qu’une diminution de la pronostique permettant de différencier des groupes de patients
force musculaire secondaire à une nutrition insuffisante apparaissent dénutris en fonction du risque de complications encouru : de 1 à
bien avant les variations objectives des mesures anthropométriques 10 = faible; 11 à 20 = modéré; 21 à 30 = élevé, et au-delà de
[14]. Elles constituent souvent de meilleurs indices prédictifs de 30 = risque vital.
complications que les autres paramètres anthropométriques [15, 16].
Ainsi la fonction musculaire peut être considérée comme une
mesure spécifique des effets de la dénutrition et de l’efficacité d’une
INDEX CRÉATININE/TAILLE
assistance nutritionnelle. Deux méthodes peuvent être employées L’excrétion urinaire quotidienne de créatinine est étroitement
chez les patients de réanimation, selon leur état de conscience. liée à la masse maigre du corps, comme cela a été démontré par dilu-
• L’évaluation de la force développée au niveau de la tion de potassium marqué (40K). On estime que 1 g de créatinine est
main du côté non dominant à l’aide d’un dynamomètre manuel est synthétisé à partir d’une masse musculaire de 17 à 20 kg, pour être
surtout employée en période périopératoire. Ce test, de réalisation totalement excrété par le rein. Le dosage de la créatinine urinaire
simple chez le patient conscient, est reconnu comme équivalent à la répété trois jours consécutifs et comparé à des valeurs témoins appa-
mesure de la circonférence du bras en termes de prédiction des riées en fonction du sexe et de la taille permet de calculer un index
complications postopératoires [15]. créatininurie/taille. Celui-ci est un indice fiable de la masse muscu-
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laire mais il est soumis à de grandes variations tant en conditions • aptitude fonctionnelle (normale, activité subnormale, ambula-
physiologiques que pathologiques, ce qui le rend en pratique toire, ou alitement);
d’intérêt très limité. Il est inutilisable en cas d’insuffisance rénale ou • stress (zéro, minime, ou élevé);
de rhabdomyolyse [5]. • signes physiques :
La 3-méthyl-histidine (3-MH) est issue de la dégradation des – perte des réserves adipeuses sous-cutanées sur les triceps et/ou
protéines fibrillaires. Intégralement excrétée, son élimination la poitrine,
urinaire est un bon reflet théorique du catabolisme musculaire. Pour – atrophie des muscles deltoïdes, temporaux et/ou quadriceps,
être interprétable son dosage doit être précédé d’un régime non
– rétention hydrique : œdème et ascite,
carné de plusieurs jours et rapporté à la créatininurie des 24 h. Ce
– lésions muqueuses : glossite, mélanodermies,
dosage répété permet de suivre l’efficacité d’une assistance nutrition-
nelle qui en diminuant le catabolisme protéique musculaire conduit – autres signes suggestifs de déficience.
à une réduction de l’excrétion urinaire de 3-MH. La confrontation des différentes réponses permet de dépister les
discordances entre les données recueillies. Après compilation de
celles-ci, le patient est classé dans l’une de trois catégories suivantes :
ÉVALUATION DE LA FONCTION IMMUNITAIRE • état nutritionnel normal : restriction minime ou nulle de l’apport
nutritionnel et/ou de l’absorption des nutriments avec retentisse-
L’immunité à médiation cellulaire est un élément particulière-
ment fonctionnel minime et absence de modification du poids
ment sensible à la malnutrition et à la renutrition. Cependant
corporel;
l’altération de la compétence immunitaire n’étant pas spécifique de
la malnutrition, son analyse ne constitue qu’un outil médiocre dans • malnutrition modérée : évidence claire d’alimentation restreinte
l’évaluation de l’état nutritionnel. Deux types de tests interviennent avec modifications fonctionnelles mais faible retentissement sur le
dans l’évaluation de l’immunité : le comptage lymphocytaire et les poids du corps;
réactions cutanées d’hypersensibilité retardée. • malnutrition sévère : modification de l’alimentation et du poids du
L’infection constitue une des causes majeures d’élévation de la corps avec retentissement fonctionnel.
morbidité et de la mortalité en réanimation. La lymphopénie Plusieurs études contrôlées ont montré que l’EGS permet
s’associe à une sensibilité accrue aux infections en cas de MPE [21]. d’identifier, de façon reproductible, des patients présentant des
Le compte des lymphocytes totaux (CLT) est calculé par la relation risques de développer des complications secondaires à la dénutri-
suivante : tion. Dans une étude, un EGS coté à C était corrélé à un risque de
survenue de complications multiplié par 7 [8]. Mais la sensibilité de
CLT = (% lymphocytes × leucocytes totaux)/100 la méthode était variable en fonction de l’atteinte clinique et de la
population étudiée. Detsky et al. ont cependant souligné, outre la
Le CLT permet une approche satisfaisante du statut immuni- simplicité de la technique d’évaluation subjective, sa grande repro-
taire des patients. Un CLT compris entre 800 et 1 200 reflète un ductibilité avec des variations interexaminateur insignifiantes [23].
déficit immunitaire modéré, tandis qu’un CLT inférieur à 800 Cet outil de jugement clinique semble fournir une estimation fiable
témoigne d’un déficit sévère [22]. Toutefois le CLT a été abandonné de l’état nutritionnel des patients ainsi que des indications perti-
en évaluation nutritionnelle en raison d’une grande sensibilité à des nentes d’assistance nutritionnelle [11, 24].
facteurs non nutritionnels d’une part, et devant l’absence de corréla- De nouveaux outils ont été développés récemment, prenant en
tion démontrée avec le devenir des patients d’autre part. De même le compte des paramètres cliniques ainsi que l’existence et la sévérité
comptage des sous-populations lymphocytaires, parfaitement d’une maladie associée. Il s’agit du Malnutrition universal screening
corrélé avec la sous-nutrition dans le marasme où le stress métabo- tool (MUST) proposé par la British Association for Parental and
lique est absent, n’est pas utilisable chez les patients de réanimation. Enteral Nutrition [25] ou du Nutritional risk screening tool 2002 (NRS-
Les réactions cutanées d’hypersensibilité retardée (HCR) sont 2002) formulé par l’European Society for Clinical Nutrition [26]. Le
provoquées par injections intradermiques séparées de quatre à huit NRS-2002 a été évalué dans des populations médicale et
solutions antigéniques comprenant des substrats protéiques purifiés, chirurgicale; son calcul inclut un premier screening comportant la
des levures et des solutions de streptokinase-streptodornase. La taille recherche d’une perte poids récente, d’un IMC inférieur ou égal à
de la réaction inflammatoire est mesurée à 24 et 48 h. Une indura- 20,5, l’existence d’une maladie sous-jacente grave et l’évaluation des
tion supérieure à 5 mm témoigne d’une fonction immunitaire ingestas. La présence de l’un de ces paramètres conduit à calculer
préservée [5]. L’absence totale de réaction pour la totalité des anti- ensuite un score en fonction de l’importance de la perte de poids, de
gènes définit l’anergie. De nombreux facteurs altèrent de manière la valeur de l’IMC, de la gravité de la maladie en cours et de la réduc-
non spécifique l’HCR, et ce même en dehors de toute malnutrition : tion des ingestas. La valeur du score permet de classer les patients en
les infections virales, bactériennes, et autres granulomatoses; trois catégories respectivement à haut risque, à risque modéré et à
l’urémie, les cirrhoses et hépatopathies, les traumatismes, brûlures et absence de risque nutritionnel [26].
hémorragies; les médicaments tels les stéroïdes, les immunosuppres-
seurs et la cimétidine et enfin la chirurgie et l’anesthésie générale. Si
l’anergie cutanée résultant de malnutrition peut être inversée par CALCUL D’INDICES DITS NUTRITIONNELS
une assistance nutritionnelle, l’existence d’un ou plusieurs de ces Aucun des paramètres et mesures précédents pris isolément ne
facteurs chez le patient de réanimation rend équivoque l’interpréta- s’avère suffisamment performant pour apprécier la gravité d’une
tion des HCR dans ce contexte. À noter que le simple drainage d’un dénutrition. C’est pourquoi l’utilisation d’indices nutritionnels
abcès peut inverser une anergie cutanée [17]. De ce fait, l’étude des multivariés est actuellement préconisée. Plusieurs indices ont été
réactions cutanées d’hypersensibilité retardée ne peut être recom- développés, faisant appel à des méthodes statistiques et mathémati-
mandée dans l’évaluation de l’état nutritionnel des patients de ques pour identifier les patients à risque de complications liées à la
réanimation. malnutrition. Ces indices, utilisant des paramètres nutritionnels
significatifs, ont été conçus et validés généralement dans des groupes
ÉVALUATION GLOBALE SUBJECTIVE spécifiques de patients, habituellement de cancérologie ou de
chirurgie. Leur utilisation ne peut donc être généralisée sans
L’évaluation globale subjective (EGS) répertorie les six caracté- réserves.
ristiques suivantes basées uniquement sur l’histoire et l’examen Le plus largement étudié est le prognosis nutritional index (PNI)
physique du patient : [27] qui a été développé chez des patients subissant une chirurgie
• variations de poids : gastro-intestinale :
– poids perdu dans les six derniers mois (0 ou < 5 %; > 10 %), PNI (% risque) = 158 – 16,6 (albumine) – 0,78 (PCT)
– variations durant les deux dernières semaines : augmentation, – 0,2 (transferrine) – 5,8 (HCR)
stabilité, ou diminution (en cas de prise de poids récente, la
perte précédente n’est pas considérée); Cette équation prédit correctement le risque de complications
• alimentation : aucun changement ou nutrition surabondante, postopératoires surtout dans des populations ayant une forte inci-
régime amaigrissant, préparations hypocaloriques ou famine; dence de malnutrition. Une assistance nutritionnelle adéquate a été
• symptômes gastro-intestinaux depuis plus de deux semaines (rien, reconnue comme capable d’améliorer le devenir postopératoire de
anorexie et écœurement, vomissement, diarrhée); patients ayant un PNI élevé [5]. Cependant il ne permet pas de
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dépister les patients pouvant bénéficier d’une assistance nutrition- nutritionnel adéquat. Si un état limite de malnutrition est souvent
nelle périopératoire [17]. difficile à dépister, un haut niveau de suspicion demeure le meilleur
Buzby et al. ont proposé un autre indice très simple, le nutri- indice d’un déficit nutritionnel potentiellement néfaste et indique le
tional risk index (NRI) utilisant la concentration plasmatique recours à une assistance nutritionnelle.
d’albumine et les variations de poids des patients de chirurgie viscé-
rale et thoracique [28] :