DR Germain Donfack, Les Chansons Langue Et Cultures Nationales
DR Germain Donfack, Les Chansons Langue Et Cultures Nationales
DR Germain Donfack, Les Chansons Langue Et Cultures Nationales
Dr Germain Donfack
Université de Yaoundé 1, Cameroun
[email protected]
22
2022
http://annales.univ-mosta.dz
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Les chansons
langue et cultures nationales
Dr Germain Donfack
Université de Yaoundé 1, Cameroun
Résumé :
Pendant la guerre de l’indépendance du Cameroun, les nationalistes
avaient produit des chansons pour mettre fin à la colonisation et pour obtenir
l’indépendance. Sur la base d’un corpus de douze chansons collectées, la
méthode ethnographique, donne l’opportunité de lire et de comprendre la
promotion de la langue et des cultures nationales du Cameroun dans le
contexte de décolonisation. Notre article reconstitue, sauvegarde le
patrimoine pour des générations futures et identifie la contribution desdites
chansons. Nous pouvons dire que cette littérature orale africaine chantée
résulte d’un traumatisme collectif. En définitive, elle contribue à promouvoir
les marques linguistiques et culturelles du Cameroun et même de l’Afrique à
partir du département de la Menoua.
Mots-clés :
cultures, langue, nationalistes, chansons, Cameroun.
o
The songs
Language and national cultures
Dr Germain Donfack
University of Yaounde 1, Cameroon
Abstract:
During the war of independence of Cameroon, the nationalists had
produced the songs in order to stop the colonization and toobtain the
independence. On the basis the twelve songs collected, the ethnographic
methodgives the opportunity to read and understand the promotion of the
language and the national cultures of Cameroon in the decolonization context.
Our article reconstitutes, saves the heritage for the futures generations
andidentifies the contribution of these songs about their cultural and linguistic
values. We can say that this African sung oral literature results from collective
trauma. In conclusion, it contributes to promote the Cameroonians linguistic
and cultural elements and same of the Africa from the Menoua Division.
Keywords:
cultures, languages, nationalists, songs, Cameroon.
o
Introduction :
La littérature orale est l’ensemble des œuvres produites
oralement par un peuple pour préserver et transmettre de
génération en génération son savoir, son histoire, ses règles et
ses modes de vie en langue locale. Dans cette considération, il
s’agit généralement des chansons, des discours et des récits
anonymes et variables dans leur forme, mais pas dans leur fond,
transmis de bouche à oreille. C’est la littérature orale qui
caractérise principalement le peuple africain. Il y a un
déploiement des langues purement africaines et des éléments
socioculturels qui permettent à l’Africain de s’enraciner dans sa
culture en restant ouvert au monde extérieur. Ce qui offre la
possibilité de découvrir les langues et les cultures nationales
propres à chaque pays. Tel est le cas du Cameroun avec ses
chansons nationalistes produites pour mettre fin au système
colonial français, mais curieusement, qui nous présentent une
abondance de marques linguistiques et culturelles. Il s’agit d’un
véritable problème qui donne lieu aux questions suivantes :
Quelle est la contribution des chansons nationalistes pour la
promotion de la langue et des cultures nationales du Cameroun ?
S’agit-il d’un patrimoine linguistique et culturel ? Grâce à la
méthode ethnographique, nous allons ressortir : la
reconnaissance identitaire de la langue camerounaise, la
promotion de la littérature orale du Cameroun, la peinture des
pratiques culturelles communautaire et la lecture de
l’organisation de la société traditionnelle et des évènements.
1 - La reconnaissance identitaire de la langue camerounaise :
1. Les circonstances de production des chansons :
La naissance des chansons nationalistes dans le département
de la Menoua est l’œuvre des populations qui, pendant la guerre
de l’indépendance, avaient produit cette littérature chantée à
connotation politique. Ces chansons mettaient en valeur
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Les chansons langue et cultures nationales
un premier succès.
Selon ces témoins, les nationalistes atterrissaient dans les
villages les grands jours de marché. Avant d’arriver, ils
creusaient des grands trous sur la route pour empêcher les
véhicules militaires de venir de la ville de Dschang pour les
traquer ou ils barraient ces routes avec des arbres abattus sur
place. Ainsi, ils commençaient à chanter aux marchés et
obligeaient toutes les personnes présentes de montrer et de
déchirer leurs pièces personnelles constituées de la carte
nationale d’identité, de l’acte de naissance, de la carte d’impôts
ou de taxes ou même le laissez-passer. En plus, ils proféraient
des menaces de mort et demandaient à ces mêmes populations
d’isoler les colons avec leurs produits vendus dans leurs magasins
à Dschang. Sans pièces officielles, les victimes étaient dans
l’obligation de fuir les colons pour ne pas être fusillées parce
qu’elles n’avaient plus de pièces. Elles devenaient ainsi et
obligatoirement nationalistes et commençaient aussi à chanter.
Selon ces informateurs, c’est cette technique de militantisme
forcé qui favorisait le nombre de chanteurs toujours croissant et
la diffusion de cette littérature orale chantée. Généralement,
une chanson entonnée dans un marché populaire était exécutée
par presque tous ceux qui se trouvaient au marché à l’instant.
Cependant, ces chansons qui n’étaient pas exécutées lors des
cérémonies officielles parce que leurs auteurs vivaient dans la
clandestinité, sonnaient très mal aux oreilles du gouvernement
colonial. "Les chansons nationalistes sont hors la loi, au même
titre que leurs auteurs. Elles sont chantées essentiellement, au
cours de leurs entraînements ou de leurs opérations, par ceux
que la terminologie gouvernementale appelle (maquisards)"(10).
"Le chant de résistance se présente comme un texte où le
langage poétique est doté d’une forte densité lexicale,
sémantique et symbolique. Il se caractérise par la variété des
stratégies discursives"(11).
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Notes :
1 - Clément Dili Palaï : Conte et parémie moundang : Production et figuration,
Thèse de Doctorat, Université de Ngaoundéré 2004, p. 47.
2 - Georges Lapassade : Méthodologie de l'approche biographique en
sociologie, rapport au Cordes, Centre d'étude des mouvements sociaux,
Bertaud, Paris 1977, p. 15.
3 - Maurice Tadadjeu et Etienne Sadembouo : Alphabet général des langues
camerounaises, Propelca, Yaoundé 1984.
4 - Michel Ballard : Les théories de traduction, Seuil, Paris 1992, p. 88.
5 - Maurice Tadadjeu et Steven Birds : Petit dictionnaire Yémba-Français, Sil,
Yaoundé 1997.
6 - Lilyan Kesteloot : La poésie traditionnelle, Fernand Nathan, Paris 1978,
p. 6.
7 - Louisette Fossi Makamthe : Les composantes discursives de la
communication oraturale ŋgêmbà : Une étude sémiostylistique, Thèse de
Doctorat Ph/D, Université de Dschang 2015, p. 43.
8 - Adeline Nguefack : "La chanson, un genre à part entière de la littérature
orale", Littérature orale africaine : Décryptage, reconstruction, canonisation,
L’Harmattan, Paris 2013, p. 101.
9 - Maurice Tsalefac et al.: Un chef moderne à la tête de Bafou, grande
chefferie de l’Ouest Cameroun, Crac, Yaoundé 1994, p. 20.
10 - Gabriel Kuitche Fonkou : "Les chansons nationalistes : histoire d’une
littérature et littérature d’une histoire", Figures de l’histoire et imaginaire au
Cameroun, L’Harmattan, Paris 2007, p. 19.
11 - Barbara Rahma : "Le chant de la résistance : au-delà de l’expression
poétique, le pouvoir de la parole", Littérature orale africaine : Décryptage,
reconstruction, canonisation, L’Harmattan, Paris 2013, p. 142.
12 - Henri Bandolo : La flamme et la fumée, Sopecam, Yaoundé 1985, p. 438.
13 - Stéphane Mosès : L’ange de l’histoire, Seuil, Paris 1992, p. 23.
14 - Françoise Grellet : Apprendre à traduire, Pun, Nancy 1991, p. 215.
15 - Ibid.
16 - Paulo Coelho : L’alchimiste, Editions Anne Carrière, Paris 1994, p. 166.
17 - Lucien Goldmann : Littérature et société, Gallimard, Paris 1967, p. 48.
18 - Sylvère Mbondobari : "Identité(s) et imaginaire dans le texte postcolonial
négro-africain", Palabres actuelles, Identité et identités, N° 1, Gabon 2007,
p. 73.
Références :
1 - Ballard, Michel : Les théories de traduction, Seuil, Paris 1992.
2 - Bandolo, Henri : La flamme et la fumée, Sopecam, Yaoundé 1985.
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N° 22, Septembre 2022
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