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LA DÉPRESSION

D’où vient-elle?
Comment la traiter?
Quel rapport avec le stress?

Prof. Dr Dr Martin E. Keck


01/2017 © Lundbeck (Suisse) SA, 8152 Glattbrugg
4
Le masculin est utilisé pour alléger le texte, et ce, sans préjudice pour la forme féminine.
3
À propos de l’auteur:

Le Prof. Dr méd. Dr rer. nat. Martin E. Keck est neuroscientifique, spécia-


liste en psychiatrie, psychosomatique, psychothérapie, neuropsychiatrie
(FMH en neurologie) et médecine générale. Après une formation inter-
nationale à Munich, Bâle, Londres et Zurich, il a travaillé de 1996 à 2005
à l’Institut Max Planck de psychiatrie à Munich.

Parmi les reconnaissances reçues pour ses travaux scientifiques dans le


domaine des maladies dues au stress, comme la dépression et le burn-
out, figure entre autres le Prix bavarois d’encouragement au doctorat
remis par le ministère bavarois de la Science, de la Recherche et de l’Art.

Martin Keck est l’auteur de plus de 100 publications scientifiques dans


des revues spécialisées internationales. Il est membre de la faculté
de médecine de l’Université Ludwig Maximilian de Munich, co-fondateur
du programme de recherche « Kompetenznetz Depression » (réseau de
compétences dédiées à la dépression) et fait partie de nombreuses
­sociétés professionnelles. Martin Keck fait également partie du conseil
d’administration de la Société suisse pour l’anxiété et la dépression
(SSAD) et de l’Alliance munichoise contre la dépression, il siège au
conseil consultatif scientifique de la Société suisse de pharmacovigilance
en psychiatrie (SSPVP) et du réseau suisse d’experts sur le burnout (SEB).

Après avoir été Directeur médical dans une grande clinique suisse, il a
été nommé, en 2014, à la tête de la clinique de psychiatrie, de psycho­
somatique et de neurologie de l’Institut Max Planck de psychiatrie, à
Munich. De renommée internationale, la clinique se consacre essentiel-
lement au diagnostic et au traitement des maladies dues au stress ainsi
qu’à la recherche sur ces pathologies dont l’incidence est en augmenta-
tion dans le monde entier.

4
Une étroite collaboration entre des spécialistes en psychiatrie, en
psychosomatique, en psychothérapie, en neurologie, en radiologie et en
médecine interne permet un travail scientifique tout à fait unique sur la
neurologie d’un point de vue global.
Prof. Dr med. Dr rer. nat. Martin E. Keck, eMBA UZH
Directeur de clinique et médecin-chef

Spécialiste en psychiatrie et en psychothérapie


Spécialiste FMH en neurologie/Spécialiste en neuropsychiatrie
Spécialiste en psychosomatique et psychothérapie
Spécialiste en médecine générale

Clinique de psychiatrie,
de psychosomatique et de neurologie
de l’Institut Max Planck de psychiatrie
Kraepelinstrasse 2–10
D­- 80804 Munich
www.psych.mpg.de
Tél. +49 89 30622 1

5
TABLE DES MATIÈRES

Introduction  8

L’essentiel en bref pour le lecteur pressé 10

Qu’entendons-nous par dépression? 14


La dépression: une maladie fréquente, à prendre au sérieux 14
Les symptômes de la dépression 15
Les formes particulières de dépression 20
Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn-out 22
La dépression de la personne âgée 22
La dépression post-partum 23
La dépression saisonnière (dépression hivernale)  24
La dépression masculine («male depression») 24
La dépression: une maladie qui met la vie en danger 26

Comment une dépression survient-elle?  28


Une maladie potentiellement chronique et systémique 28
La dépression due au stress:  30
bouleversement de la régulation des hormones du stress
Comment naît la dépression liée au stress?  34
Comment fonctionne le métabolisme nerveux?  35
Stress, cerveau et psychisme – un exemple 38
La faute aux gènes? 39
Qu’est-ce que la médecine personnalisée? 41

6
Comment soigne-t-on la dépression?  44
Le point sur le traitement de la dépression due au stress: 44
pourquoi autant d’échecs?
Nouveaux concepts dans le traitement de la dépression due 45
au stress: traitement d’entretien et traitement au long cours
Concept thérapeutique 49
Psychothérapie50
Thérapie cognitivo-comportementale 52
Thérapie interpersonnelle (TIP) 53
Traitement médicamenteux 56
Les antidépresseurs pendant la grossesse 59
Techniques de relaxation 60
Traitements complémentaires non médicamenteux éprouvés 63
Douze règles de base pendant le traitement
d’une dépression 66

Aide complémentaire 69
Signes avant-coureurs éventuels 69
Plan de crise personnel 70
Suggestions pour les proches et amis 72

Lecture et adresses utiles 74


Lectures conseillées 74
Adresses utiles 74

7
INTRODUCTION

Les troubles dépressifs font partie des maladies les plus graves et les plus
significatives dans le monde. Ils touchent, sous leurs différentes formes,
jusqu’à 20% de la population et affectent la pensée, les émotions, le
corps et les relations sociales d’une personne, autrement dit tous les
aspects de sa vie. Malgré sa signification, la dépression n’est souvent ni
dépistée ni traitée de façon appropriée, entraînant ainsi une grande
souffrance et une baisse considérable de la qualité de vie des malades
et de leurs proches. Ces dernières années, il est apparu clairement que
la dépression est une maladie chronique due au stress, d’où l’expression
«dépression due au stress» ou «dépression anxieuse». La dépression est
aussi un facteur de risque pour d’autres maladies graves telles que la
crise cardiaque, l’accident vasculaire cérébral, l’ostéoporose, la démence
ou le diabète. Non traitée, elle peut raccourcir l’espérance de vie.

La dépression est une maladie grave mais curable. Il ne s’agit en aucun


cas d’une tristesse normale et ne traduit ni un échec moral ni un manque
de volonté! Les avancées de ces dernières années permettent un nouvel
aperçu, plus complet, des options de traitement. Et pourtant, seuls 10%
des malades reçoivent un traitement adapté et suffisant.

La psychothérapie spécialisée au long cours, qui repose sur des bases


scientifiques éprouvées, ainsi que le traitement médicamenteux sont
essentiels, car ils mènent à une guérison complète. Les patients insuffi-
samment soignés qui présentent des symptômes rémanents subissent
une rechute dans 80% des cas. Voilà pourquoi, lorsque les symptômes
ont régressé, les patients sont suivis pendant au moins six mois dans le
cadre d’un traitement d’entretien destiné à prévenir les rechutes.
Le nombre d’épisodes survenus dans le passé et leur intensité déter-

8
minent la nécessité d’un traitement au long cours, c.-à-d. un accompa-
gnement du patient au-delà du traitement d’entretien.

Ce guide repose sur les dernières avancées de la science et a pour


objectif une meilleure compréhension de la dépression. Il s’adresse aux
malades et à leur entourage, de même qu’à toute personne s’intéressant
au sujet. Ce guide ne remplace en aucun cas une visite médicale ou un
entretien thérapeutique; il se veut le prélude à une discussion plus
approfondie.

Bien cordialement.


Prof. Dr med. Dr rer. nat. Martin E. Keck

9
L’ESSENTIEL EN BREF
POUR LE LECTEUR PRESSÉ

1 La dépression est une maladie grave, parfois même fatale,


qui nécessite un traitement spécifique.

2 Les principaux symptômes de la dépression sont l’humeur


sombre ou la sensation de vide intérieur, l’épuisement
(burn-out), le surmenage, les angoisses, l’agitation intérieure,
les troubles de la pensée et du sommeil.

3 La personne dépressive ne ressent plus aucune joie et a


du mal à prendre des décisions, aussi banales soient-elles.

4 La dépression est souvent accompagnée de symptômes phy-


siques persistants, comme des troubles gastro-intestinaux,
des maux de tête ou de dos. Bon nombre de patients mettent
ces symptômes au tout premier plan.

5 Un sentiment de culpabilité infondé peut être l’indice d’une


dépression.

6 Comme tout individu gravement malade, la personne


dépressive a besoin du soutien et de la compréhension
de son entourage.

7 La dépression se caractérise par un trouble du métabolisme


nerveux au niveau du cerveau. La concentration en neuro­
transmetteurs (sérotonine, noradrénaline, dopamine) est en
rupture d’équilibre, et ce généralement en raison d’une
hyperactivité durable des hormones du stress. Non traitée,
cette hyperactivité augmente le risque d’hypertension,
de crise cardiaque, d’accident vasculaire cérébral, de diabète,
d’ostéoporose ou de démence. D’où l’importance d’instaurer
un traitement rigoureux et durable.

10
8 La dépression est la principale cause d’incapacité de travail
et de retraite anticipée/invalidité.

9 Dans la dépression, les zones cérébrales responsables des


sentiments et des émotions ne sont pas les seules touchées;
les aires pilotant l’attention et la concentration, la mémoire, le
rythme intellectuel et les fonctions dites exécutives sont égale-
ment lésées. Ces dernières englobent les capacités telles que
la planification et l’exécution, le multitâche ou le calcul mental.
Une dépression n’est considérée comme guérie que lorsque
ces symptômes ont également disparu ou se sont nettement
améliorés.

10 Les causes de la dépression sont variables et toutes les


dépressions ne se ressemblent pas. Au contraire, le diagnostic
peut cacher un large éventail de symptômes physiques et
psychiques, d’origines et d’évolutions de la maladie. Les
conclusions neurobiologiques peuvent contribuer à définir
différents groupes de patients et ouvrir la voie à une médecine
personnalisée. La médecine personnalisée signifie que la
personnalité et les caractéristiques physiques d’un individu
sont utilisées pour optimiser le traitement qui peut ainsi être
adapté au malade.

11 La dépression est une maladie curable. Le traitement repose


sur différentes formes éprouvées de psychothérapie, des
médicaments modernes qui améliorent l’humeur (antidépres-
seurs), des méthodes de gestion du stress, des techniques
de relaxation et des approches de médecine complémentaire
(par ex., la phytothérapie).

11
12 Les antidépresseurs modernes entraînent peu d’effets secon-
daires et leur dosage peut être adapté individuellement pour
une meilleure tolérance. Ils ne rendent pas dépendants et
n’altèrent pas la personnalité. Ce ne sont ni des stimulants ni
des calmants.

13 Les antidépresseurs n’agissent pas immédiatement. Leur


effet apparaît généralement après plusieurs jours ou semaines.

14 Lorsqu’un traitement médicamenteux est indiqué, les prescrip-


tions du médecin doivent être suivies à la lettre. Les effets
secondaires éventuels, malaises, craintes ou doutes doivent
être abordés ouvertement avec le médecin traitant.

15 Les dépressions récurrentes peuvent être traitées de façon


préventive. Ces mesures préventives sont très importantes,
dans la mesure où chaque nouvel épisode dépressif accroît
le risque de récidive.

16 Le suicide est un risque important de la dépression. Ce risque


peut être identifié à temps. Il s’agit d’une urgence absolue.
Les personnes suicidaires doivent être suivies le plus rapidement
possible par un médecin.

12
13
QU’ENTENDONS-NOUS PAR DÉPRESSION?
La dépression: une maladie fréquente, à prendre
au sérieux

Étant donné la prévalence des maladies dépressives, connaître les trai-


tements disponibles et les aides proposées revêt une grande impor-
tance non seulement pour les médecins, toutes spécialisations confon-
dues, mais aussi pour le grand public. La dépression concerne environ
15 à 20% de la population et touche deux fois plus de femmes (20%) que
d’hommes (10%). Cette différence entre hommes et femmes s’explique,
au moins en partie, par le fait que bien souvent, les symptômes de
la dépression chez les hommes ne sont pas reconnus comme tels (voir
page 24).

La prévalence de la dépression signifie aussi que chacun d’entre nous


connaît au moins une personne dépressive au sein de sa famille, de ses
proches ou de ses amis. Malheureusement, la maladie est encore trop
souvent passée sous silence ou non diagnostiquée. Cette sous-estima-
tion vient du fait que le terme de «dépression» est utilisé à tort dans
le langage courant, alors qu’il ne s’agit que d’un trouble passager de
l’humeur.

La dépression peut survenir à n’importe quel âge, de l’enfance à un âge


avancé. Dans près de 15 à 20% des cas, et tout particulièrement en
l’absence de traitement ou en cas de traitement insuffisant, la maladie
peut devenir chronique. Un deuxième épisode survient dans 50 à 75%
des cas. Chaque nouvel épisode accroît le risque de récidive. Le traite-
ment rigoureux de chaque épisode n’en est que plus important.

La dépression, qui compte parmi les cinq maladies les plus répandues
dans le monde, est associée à un fort taux de mortalité ainsi qu’à un
degré élevé de handicap et de problèmes psychosociaux chroniques.
L’importance de la dépression devrait continuer à augmenter jusqu’en
2030. Selon les estimations de l’OMS (Organisation mondiale de la
Santé), la dépression deviendra alors, dans les pays industrialisés,
la maladie qui nécessitera les plus gros moyens financiers, après les
maladies cardiaques.

14
En 2008, les coûts totaux liés à la dépression, c’est-à-dire aussi bien
les coûts directs (coûts de traitement) qu’indirects (par ex. les coûts
générés par l’incapacité de travail), ont représenté 22 milliards d’euros
en Allemagne (Source: Institut économique RWI). En Suisse, la dépres-
sion a coûté entre 8 et 10 milliards de francs à l’économie suisse en 2009
(Source: Institut de médecine sociale et préventive à l’Université de
Zurich).

Les symptômes de la dépression

Un épisode dépressif peut survenir dans le cadre de ce que l’on appelle


des troubles unipolaires ou bipolaires. On parle de dépression unipolaire
lorsque seuls des épisodes dépressifs surviennent. Toutefois, outre ces
symptômes dépressifs, certains patients souffrent également d’épisodes
maniaques. Les épisodes maniaques se caractérisent par une activité
débordante, une humeur euphorique, un moindre besoin de sommeil, un
flot débordant d’idées, souvent aussi par des achats compulsifs. On parle
alors de maladie affective bipolaire. La dépression unipolaire peut bas­
culer vers un trouble bipolaire avec des phases maniaques – la célèbre
étude de cohorte zurichoise montre que, en moyenne, 1% des dépres-
sions unipolaires bascule vers les troubles bipolaires chaque année.

La dépression se manifeste par des symptômes de nature et d’intensité


différentes. Les symptômes-types varient considérablement d’une per-
sonne à une autre. Selon les critères de l’Organisation mondiale de
la Santé (CIM-10, voir liste ci-après), un épisode dépressif est identifié
comme une tristesse persistante pendant au moins deux semaines. Elle
s’accompagne d’une perte de joie de vivre, de motivation et d’intérêt,
ainsi que d’une baisse des capacités de concentration et des perfor-
mances générales. À cela s’ajoutent des symptômes physico-végétatifs
(voir illustration 1, page 21) tels que des troubles du sommeil, une perte
d’appétit et de poids ainsi qu’un rétrécissement du champ de la
conscience face à la situation perçue comme sans issue. Cela peut aller
jusqu’à des pensées morbides et des envies de suicide. La pensée est
ralentie et tourne généralement autour d’un seul sujet, à savoir pourquoi
ça va mal, à quel point la situation actuelle est désespérée et l’avenir sans
espoir (voir illustration 2, page 29).

15
Critères de la dépression de l’Organisation mondiale de la Santé
(CIM-10)

• Humeur dépressive 

• Perte d’intérêt et/ou de plaisir, y compris pour les activités
considérées comme agréables 

• Perte de motivation, manque d’énergie, plus grande fatigabilité,
épuisement (burn-out) 

• Angoisse, agitation intérieure 

• Diminution de la concentration et de l’attention 

• Manque de confiance en soi et d’estime de soi, dévalorisation de soi

• Grande difficulté à prendre des décisions 

• Pensées obsessionnelles, propension à ruminer 

• Perspectives sombres, désespérance, pessimisme 

• Sentiments de culpabilité très forts, autocritique

• Troubles du sommeil persistants

• Perte d’appétit, perte de poids

• Perte de libido, c’est-à-dire intérêt moindre pour la sexualité

• Désarroi profond, pensées morbides, idées suicidaires, tentatives
de suicide

Pour caractériser un état dépressif, ces symptômes doivent être présents


pendant au moins deux semaines.

Traitement des différents symptômes

Les différents symptômes de la dépression ne s’éclipsent pas tous au


même rythme. Souvent, les troubles du sommeil disparaissent rapide-
ment à la suite d’un traitement médical, parfois au bout de quelques
jours, tandis que l’amélioration de l’humeur ou la disparition des symp-
tômes physiques demande bien plus de temps. La thérapie des troubles
cognitifs mentionnés ci-dessus exige beaucoup de patience. Dans cer-
tains cas, ils peuvent encore être présents, au moins en partie, des mois
voire des années après l’amélioration des autres symptômes et affecter
profondément les malades. On ne peut alors parler de guérison ou de
convalescence, et le traitement doit être poursuivi avec rigueur et confor-
mément aux symptômes exprimés.

16
Troubles du sommeil
Les troubles du sommeil peuvent provoquer des difficultés
à s’endormir, un sommeil agité ou un réveil trop matinal.
Le sommeil est perçu comme insuffisant, peu récupérateur
et très superficiel.

La structure même du sommeil est perturbée par la dé-


pression. Chez une personne en bonne santé, les divers
stades (endormissement, sommeil léger, sommeil moyen
et sommeil profond) sont différenciés. S’ajoute à cela
le stade que l’on appelle REM, ou phase durant laquelle
se produisent les rêves. Ces cinq stades se déroulent
dans le même ordre trois à quatre fois par nuit. La méde-
cine du sommeil sait aujourd’hui que la succession non
perturbée de ces différentes phases de sommeil est
nécessaire afin que la nuit soit reposante pour le corps
et l’esprit.

Si les phases de sommeil profond ou de rêve font défaut


ou si elles ne se suivent pas dans le bon ordre, même
un sommeil prolongé n’apportera aucune récupération
notable. C’est le cas chez une personne dépressive. Les
antidépresseurs permettent de retrouver une structure
saine et normale du sommeil.

17
18
Les troubles cognitifs: la mémoire, l’attention
et la concentration

Dans la dépression, les aires cérébrales responsables des sentiments


et des émotions ne sont pas les seules touchées; les zones pilotant
l’attention et la concentration, la mémoire, le rythme intellectuel et
les fonctions dites exécutives sont également lésées. Ces dernières
englobent les capacités telles que la planification et l’exécution,
le multitâche ou le calcul mental. Ainsi, la procrastination s’installe,
c’est-à-dire que les tâches à réaliser sont constamment reportées.
Souvent, des actes routiniers tels que lire ou écouter les informations
deviennent très difficiles, voire impossibles, à réaliser. Le mental se
fatigue plus vite aussi, de sorte que les activités intellectuelles sont
perçues comme extrêmement complexes.

Dans près de la moitié des cas, ces déficits parfois importants


perdurent au-delà de l’épisode dépressif aigu, après la régression
des symptômes-clés de la dépression (par ex., humeur dépressive,
absence de plaisir, troubles du sommeil). Cette situation affecte
le traitement psychothérapeutique et joue un rôle déterminant dans
l’altération durable du fonctionnement social et professionnel et de
la qualité de vie. Par conséquent, le diagnostic précis des déficits
en début et en cours de traitement revêt une importance capitale
pour la prise en charge neuropsychologique, comportementale et
ergothérapeutique personnalisée, dans le but d’améliorer les capa­
cités cognitives.

19
Les formes particulières de dépression

Certains symptômes très marqués permettent d’identifier des formes


particulières de dépression. La dépression larvée ou masquée est l’une
de ces principales formes. Elle se distingue surtout par des symptômes
physiques, des troubles végétatifs et des problèmes au niveau des
organes (voir illustration 1, page 21). Une autre forme particulière est la
dépression mélancolique, caractérisée par un état d’angoisse manifeste
le matin ainsi que par une perte de poids, de joie de vivre, de libido et
d’intérêt.

Certains termes utilisés autrefois, tels que «dépression endogène»,


«dépression névrotique» et «dépression réactionnelle» ne sont plus em-
ployés aujourd’hui, car les concepts qui les sous-tendent ont été réfutés
par la recherche actuelle.

La dépression peut s’exprimer tout à fait différemment chez certaines


personnes. Au lieu d’être tristes ou abattues, elles deviennent irritables,
agressives, colériques ou augmentent leur consommation d’alcool.
Selon les circonstances, elles peuvent aussi s’adonner au sport intensif.
Les malades se sentent stressés et épuisés. Ce genre de symptômes
touche plus fréquemment les hommes.

20
Maux de tête Douleurs dentaires
Vertiges dues au bruxisme nocturne (grincement
des dents), tensions dans les mâchoires
Somnolence
Altérations de la muqueuse buccale
douleurs en cas d’aliments acidifiants
Acouphènes

Douleurs dorsales et cervicales,


particulièrement chez la femme

Problèmes respiratoires
Douleurs musculaires par ex. sensation de pression
ou d’oppression

Transpiration
Problèmes cardiovasculaires
par ex. palpitations, arythmie,
troubles du rythme cardiaque

Troubles gastro-
intestinaux
par ex. nausées,
Problèmes de
sensation de réplétion,
bas-ventre
diarrhée, constipation,
par ex. douleurs
douleurs, dyspepsie
ou problèmes liés
(inconfort digestif
au cycle menstruel
apparaissant après
chez la femme
les repas), côlon irritable

Illustration 1:
Les symptômes physiques sont parfois tellement marqués que les problèmes psycho­
logiques sous-jacents sont difficilement décelables. On parle alors de dépression mas-
quée (= larvée).

21
Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn-out

Le syndrome d’épuisement professionnel ou burn-out décrit une dé-


pression due à l’épuisement, resp. son prélude qui apparaît en raison
d’un surmenage professionnel prolongé. Les femmes se voient souvent
confrontées à des contraintes supplémentaires telles que les tâches
ménagères et familiales. Ces tâches peuvent, à elles seules, représenter
l’équivalent d’une activité professionnelle. Le burn-out se caractérise par
un manque d’énergie, des performances réduites, de l’indifférence et du
cynisme ainsi que par un désinvestissement marqué consécutif à des
surperformances et un engagement très intensif, souvent pendant des
années. Un événement relativement mineur (changement de poste, par
exemple) suffit alors à déclencher la maladie.

Des symptômes physiques diffus tels qu’une forte transpiration, des


vertiges, des maux de tête, des problèmes gastro-intestinaux et des
douleurs musculaires sont souvent présents. Les troubles du sommeil
sont très fréquents. Le syndrome d’épuisement professionnel peut
évoluer jusqu’au stade de dépression grave. Des attentes plus élevées
vis-à-vis des collaborateurs, une pression sans cesse croissante au travail
et le manque chronique de reconnaissance ont conduit à une augmen-
tation du nombre de cas de burn-out. Les changements des conditions
de travail inhérents à la mondialisation, comme une disponibilité perma-
nente par e-mail, téléphone portable ou smartphone, posent de nou-
veaux défis pour la santé et la gestion du stress professionnel.

La dépression de la personne âgée

On parle de «dépression de la personne âgée» au-delà de 65 ans. D’une


manière générale, les maladies dépressives ne sont pas plus fréquentes
chez le sujet âgé. Il semblerait même qu’elles soient un peu plus rares
chez les «jeunes seniors» âgés de 65 à 75 ans. Chez les patients plus âgés,
il arrive souvent que la dépression ne soit pas dépistée et reste par
conséquent non traitée pendant des années. L’âge ne justifie en aucun
cas l’apparition d’une dépression. De plus, le risque que la maladie
devienne chronique et que la personne nécessite des soins est élevé.
Les patients âgés ont tendance à passer les symptômes dépressifs sous

22
silence et à se plaindre plutôt de problèmes physiques. Les différents
symptômes physiques sont donc plus présents chez les personnes âgées
que chez les patients jeunes (voir illustration 1, page 21). Des douleurs
diffuses chez les personnes âgées peuvent ainsi traduire une dépression.
La maladie peut également survenir ou s’aggraver dans le cadre d’une
alimentation insuffisante ou carencée, ou encore en raison d’une absorp-
tion insuffisante de liquides. Comme pour tout le monde, une vie active
avec une activité physique régulière constitue un facteur de protection
avéré pour les personnes âgées. Les déficiences cognitives insuffisam-
ment traitées et rémanentes (voir pages 19 et 46) représentent, précisé-
ment à un âge avancé, un facteur de risque de survenue ultérieure de
la démence. Leur traitement revêt donc une importance particulière.

D’une manière générale, la dépression double la probabilité d’être


atteint de maladie de Parkinson ou d’Alzheimer.

La dépression post-partum

Les semaines qui suivent l’accouchement (= période post-partum) consti-


tuent pour une femme la période la plus favorable au développement
d’une maladie psychique. Les épisodes dépressifs après l’accouchement
(= dépression post-partum) surviennent chez 10 à 15% des femmes. Ils
commencent généralement au cours de la première voire de la deuxième
semaine, puis évoluent insidieusement au fil des semaines et des mois.
Le tableau clinique est identique à celui d’un autre épisode dépressif
vécu à un autre moment de la vie. La phase post-natale est cependant
caractérisée par des modifications hormonales importantes et brutales:
les taux hormonaux de progestérone, d’œstrogène, de cortisol et de
thyroxine s’effondrent au cours des 48 premières heures suivant l’accou-
chement. Pour l’heure, les raisons pour lesquelles ces modifications
hormonales conduisent à la maladie chez certaines femmes n’ont pas été
clairement élucidées. Le baby blues, comme on l’appelle souvent, doit
être distingué de la dépression post-partum. Il apparaît au cours de la
première semaine, généralement pas avant le troisième jour, et ne dure
que quelques heures ou quelques jours. Il concerne environ 50% des
accouchées et n’est pas considéré comme une maladie.

23
La dépression saisonnière (dépression hivernale)

Les journées d’hiver sombres et brumeuses affectent l’humeur. Dans


certains cas, pour ceux qui souffrent d’une dépression dite saisonnière
ou hivernale, cette situation peut conduire à une maladie grave, parfois
même fatale. Cette forme de dépression est due à la baisse de lumière
qui accompagne la saison. En effet, l’œil perçoit moins de lumière et le
manque de stimulation électrique qui en résulte peut induire, chez les
personnes sensibles à ce phénomène, un trouble du métabolisme céré-
bral menant à l’apparition d’une dépression.

«Il suffit que je nomme une chose pour


qu’elle perde ses piquants.»
Marie von Ebner-Eschenbach, écrivaine, 1830–1916

La dépression masculine («male depression»)

La dépression avec ses différentes manifestations est plus facilement


négligée chez l’homme parce qu’elle se présente souvent autrement que
chez la femme. Les symptômes-types observés chez l’homme sont
l’irritabilité, l’agressivité, un comportement à risque ou addictif (aug­
mentation de la consommation d’alcool, pratique sportive excessive et
dangereuse ou conduite à risque sur la route). Le repli social et l’absence
de recours à une aide ou à un suivi médical sont plus fréquents chez les
hommes.

Parfois, le dépistage de la dépression fait suite à une longue période de


souffrance. Chacun réagit différemment, mais il est bon de reconnaître
la souffrance. C’est le seul moyen d’initier un traitement adéquat. La
pose d’un diagnostic adéquat est donc le premier pas vers un traitement
réussi.

24
25
La dépression: une maladie qui met la vie en danger

La dépression est une maladie grave qui, dans certains cas, peut mettre
la vie en danger. Non traitée, elle peut être fatale. Le suicide dû à une
dépression représente en effet la deuxième cause de mortalité chez les
personnes de moins de 40 ans, derrière les accidents. 15% des patients
souffrant de graves épisodes dépressifs mettent fin à leurs jours. Selon
les données de l’Office fédéral de la statistique, chaque année, en Suisse,
plus de 1’400 personnes mettent fin à leurs jours. Le chiffre réel des
suicides est certainement bien plus élevé. En Allemagne, pays nettement
plus peuplé, 10’000 à 15’000 personnes se suicident chaque année, soit
30 à 40 personnes par jour ou une personne par heure. Par conséquent,
le nombre de décès par suicide excède significativement celui des décès
dus aux accidents de la route. La quasi-totalité des patients atteints d’une
dépression sévère pensent au suicide. Près de la moitié des personnes
souffrant de troubles dépressifs font une tentative de suicide à un
moment donné de leur vie. Inversement, la majorité des personnes qui
se suicident souffrent de dépression. La «mort libre», c’est-à-dire la
décision de mettre fin à ses jours alors que l’on est en bonne santé, est
rarissime. En général, lorsque la dépression est dépistée et traitée,
l’envie pressante de mourir disparaît également.

«Tel homme qui, dans un excès de mélancolie,


se tue aujourd’hui, aimerait à vivre s’il attendait
huit jours.»
Voltaire, écrivain et philosophe, 1694–1778

Même en l’absence de toute tendance au suicide, non traitée, la dépres-


sion peut conduire très rapidement, chez les personnes âgées notam-
ment, à des états mettant leurs jours en danger parce qu’elles se replient
au lit, perdent l’appétit ou ne boivent pas suffisamment, par exemple. Il
est en outre très bien établi que l’évolution de nombreuses autres mala-
dies telles que le diabète ou l’état de santé post-infarctus est extrême-
ment altérée par la présence concomitante d’une dépression non traitée.

26
Risque de suicide

Il est important de connaître le risque de suicide


de chaque personne dépressive. Le mieux est
encore d’évoquer le sujet directement avec la
personne concernée en lui demandant d’évaluer
l’intensité et la fréquence à laquelle elle pense
au suicide. On a longtemps cru qu’il ne fallait en
aucun cas parler de suicide avec les personnes
dépressives pour éviter de leur en donner l’idée.
Cette idée est fausse. Chaque personne dépres-
sive, au plus profond de son désespoir, envisage
cette possibilité et se sent généralement sou­
lagée de pouvoir enfin en parler. Les idées suici-
daires constituent une urgence absolue! Les
candidats au suicide doivent être suivis par un
médecin le plus vite possible.

27
COMMENT UNE DÉPRESSION
SURVIENT-ELLE?

Une maladie potentiellement chronique et systémique

Depuis quelques années, les efforts intensifs de la recherche au niveau


international ont permis d’affirmer qu’une dépression constitue un risque
de survenue de maladies vasculaires comme les pathologies cardiaques
ou les accidents vasculaires cérébraux. Elle pourrait jouer un rôle aussi
important que les facteurs de risque classiques tels que le tabagisme, le
surpoids et la sédentarité. Pourtant, le grand public, aussi bien que les
programmes de prévention de santé publique leur accordent bien plus
d’attention à l’heure actuelle. La maladie dépressive favorise également
l’apparition d’ostéoporose et de diabète de la maturité (diabète de type
II). La dépression est aujourd’hui considérée comme une maladie «sys-
témique», car elle affecte le cerveau autant que de nombreux autres
organes (voir illustration 2, page 29).

D’où l’importance
d’une thérapie précoce,
rigoureuse et au long
cours.

28
RALENTISSEMENT
AGITATION

MAL DE VIVRE
TROUBLES IRRITABILITÉ
MOTEURS VIDE INTÉRIEUR
SENTIMENT DE CULPABILITÉ
DÉSESPOIR
ÉNERGIE • IDÉES SUICIDAIRES
MOTIVATION • MODIFICATIONS
APPÉTIT •• DE L’HUMEUR
SOMMEIL ••
LIBIDO •
POULS •
TRANSPIRATION •
TROUBLES
VÉGÉTATIFS ATTENTION •
CONCENTRATION •
MÉMOIRE À •
COURT TERME
INHIBITION DE
LA PENSÉE
TROUBLES
PLANIFICATION •
COGNITIFS ET EXÉCUTION
D’ACTIVITÉS
Troubles de la pensée et
du traitement des informations

ACCIDENT VASCULAIRE
CÉRÉBRAL
INFARCTUS
OBÉSITÉ ABDOMINALE
OSTÉOPOROSE
DIABÈTE
DÉMENCE

Illustration 2: Symptômes de la dépression.

29
La dépression due au stress:
bouleversement de la régulation des hormones du stress

Le stress est partout et fait partie intégrante de la vie: toute confrontation


avec des contraintes externes ou internes déclenche une réaction de
stress normale. Le cerveau et le corps réagissent à toute incitation au
changement par le stress. Au quotidien, le stress prend des formes très
variées et peut, par exemple, se manifester lorsque les contraintes de
performance augmentent dans la sphère professionnelle ou privée. En
outre, les conflits relationnels, le flux croissant d’informations et l’accélé-
ration de la vie quotidienne peuvent, eux aussi, engendrer du stress.

En réaction au stress, le corps mobilise de l’énergie. Il s’adapte ainsi à


son environnement dont les conditions et exigences sont en constante
évolution. Tant qu’un épisode de stress reste de courte durée, il peut être
considéré comme positif et stimulant. Normalement, la réaction au stress
prend fin rapidement.

En cas de stress chronique, en revanche, la réaction au stress ne se calme


pas. Elle provoque une concentration élevée d’hormones du stress au
niveau du cerveau, ce qui peut favoriser la dépression; d’où la notion
de dépression due au stress. Cette prédisposition peut être aussi bien
d’origine génétique que remonter à des expériences vécues au cours de
la petite enfance (abus sexuel ou négligence, par exemple).

À noter: en règle générale, ce n’est pas le stress qui est pathogène (voir
illustration 3, page 31), mais la manière négative dont ce stress est perçu
et géré par un individu.

La dépression est considérée aujourd’hui comme un état de stress chro-


nique qui provoque un épuisement et une sensation constante de sur-
menage. On essaie souvent de gérer le stress de la vie quotidienne soit
en le combattant, soit en se résignant, mais aucune de ces deux variantes
n’est une solution satisfaisante, car le stress reste présent et pèse sur
la santé à long terme.

30
Le stress survient lorsque des sollicitations internes
ou externes sont trop intenses et dépassent les possi-
bilités d’adaptation de la personne.

PERSISTANTS
INCONTRÔLABLES
INTENSES…
RÉACTION
INDIVIDUELLE
AU STRESS
STRESS PERCEPTION
ÉVÉNEMENTS INDIVIDUELLE
CONTRAIGNANTS NÉGATIVE

STRESS
PERMANENT ET
PATHOGÈNE

DÉPRESSION
DUE AU STRESS
BURN-OUT

Illustration 3: Le vécu et la réaction négatifs d’une personne à un ou plusieurs événe-


ment(s) générateur(s) de stress (par ex. décès, déménagement, conflits familiaux, pro-
blèmes professionnels, chômage, etc.) peuvent conduire à la maladie.

31
Le stress chronique s’accompagne assez souvent d’une impression de
perte de contrôle de la situation. Dans certaines zones cérébrales
(au niveau du système limbique qui sert à réguler nos sentiments), il se
produit également une hyperactivité des amygdales, qui jouent un rôle
important dans la régulation des émotions. Sur le plan hormonal, il en
résulte une activation pathologique et durable du système hormonal du
stress (axe HPA ou axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien). Le cerveau
perd le contrôle de ce système.

Parmi toutes les modifications hormonales possibles, ce décalage


de régulation du système hormonal est le plus documenté en cas de
dépression. La majorité des patients dépressifs montrent par exemple
une concentration élevée d’hormones du stress dans le sang. Les traite-
ments médicamenteux antidépressifs comme la pharmacothérapie avec
inhibition de la recapture de la sérotonine, mais aussi les thérapies
psychothérapeutiques contribuent à la normalisation de l’hyperactivité
pathologique du système hormonal du stress et ainsi des symptômes
cliniques.

Outre l’axe HPA, un autre système est concerné: les patients dépressifs
montrent une concentration extrêmement élevée de cortisol ainsi qu’un
dysfonctionnement dans la régulation du système nerveux végétatif (voir
illustration 4, page 33); ce dysfonctionnement est également associé à
une augmentation de l’activité sympathique qui, à son tour, conduit à une
hypersécrétion d’adrénaline. L’hyperactivité durable des systèmes hor-
monaux du stress peut finalement provoquer d’autres altérations méta-
boliques susceptibles d’entraîner les maladies mentionnées ci-dessus:
infarctus, accident vasculaire cérébral, ostéoporose, insulino-résistance
et diabète. Nous savons aujourd’hui que toutes les maladies psychiques
ont des effets sur le corps et, inversement, que les maladies physiques
influencent considérablement la psyché. Il est important de savoir que
les maladies psychiques reposent sur des processus neurobiologiques
qui se déroulent au niveau du cerveau. Dans le cas de la dépression, il
s’agit le plus souvent d’un dérèglement du système des hormones du
stress. Toute maladie psychique est par conséquent «psychosomatique»
(cela signifie qu’elle repose sur des aspects aussi bien physiques que
psychiques) et exige un traitement exhaustif et global. Cet élément est
essentiel dans le cas de la dépression.

32
SYSTÈME NERVEUX VÉGÉTATIF

Sympathique Parasympathique

dilate les voies aériennes resserre les voies aériennes

accélère la fréquence ralentit la fréquence


cardiaque cardiaque

augmente la sécrétion
d’hormones du stress
par les glandes surré-
nales

ralentit la fonction modifie la fonction


intestinale intestinale

Illustration 4: Ce diagramme est une présentation simplifiée du système nerveux auto-


nome (végétatif). Le système sympathique accélère la fréquence cardiaque et augmente
la sécrétion d’hormones par les glandes surrénales. Le système parasympathique
ralentit la fréquence cardiaque et possède une fonction calmante et protectrice. Le bon
fonctionnement et l’équilibre entre les deux systèmes sont importants pour rester en
bonne santé.

33
Comment naît la dépression liée au stress?

La dépression a rarement une seule origine. Elle est due la plupart du


temps à une combinaison de différents facteurs, associée à une prédis-
position génétique. Des contraintes psychosociales aiguës telles que la
perte ou le décès d’une personne très proche ou encore un surmenage
chronique peuvent déclencher une maladie dépressive. Les facteurs
sociaux qui exigent une adaptation à un nouvel environnement (par ex.
mariage, chômage, retraite) interviennent fréquemment avant le début
d’une dépression. Ces facteurs déclencheurs ne sont cependant pas
présents chez tous les patients. La dépression frappe aussi de manière
inattendue. Il faut donc faire preuve de prudence avant d’interpréter une
dépression comme une réaction compréhensible face à des circons-
tances difficiles. Les coups du sort peuvent en effet induire de la tristesse,
une humeur sombre ou des troubles de la personnalité, mais pas néces-
sairement une dépression. Par contre, si une maladie dépressive survient,
elle doit être traitée en conséquence. Le stress perdure souvent des
années durant, sans pour autant provoquer de maladies. Parfois, un évé-
nement en apparence bénin est alors la goutte d’eau qui fait déborder
le vase et déclenche la maladie.

De nombreux éléments restent encore inexpliqués, mais une chose est


sûre: en cas de dépression, la communication entre les cellules du cer-
veau est perturbée. Près de cent milliards de neurones collaborent au
sein de réseaux complexes situés dans la matière grise. Chacun de ces
neurones communique, par l’intermédiaire de ses points de contact, les
synapses, avec d’autres neurones dont le nombre peut atteindre 10’000.
Les détails de ce processus ne sont pas entièrement élucidés.

On sait cependant qu’au cours d’une dépression, le métabolisme céré-


bral est perturbé. Les neurotransmetteurs – sérotonine et/ou noradréna-
line et/ou dopamine – sont déséquilibrés. Le problème provient de
la perturbation du système de contrôle des hormones du stress: l’hyper­
activité durable de ce système perturbe le métabolisme des cellules
nerveuses au point que la production et l’évacuation des neurotransmet-
teurs sont déséquilibrées. Soit leur concentration est insuffisante, soit la
transmission ne fonctionne plus correctement. Mais cette perturbation
de la transmission entre les cellules nerveuses se répercute progressive-
ment dans les émotions et les pensées, et conduit à une perte de

34
motivation, d’appétit et de sommeil, à des difficultés de concentration
et aux autres symptômes de la dépression. Les antidépresseurs, tout
comme la psychothérapie d’ailleurs, interviennent à ce stade pour rééqui-
librer le métabolisme cérébral et normaliser la régulation des hormones
du stress. C’est pourquoi l’association psychothérapie – traitement
médicamenteux obtient d’excellents résultats en cas de dépression
modérée à sévère.

Comment fonctionne le métabolisme nerveux?

Toutes nos pensées et sensations reposent sur l’activité de nos cellules


nerveuses. Lorsqu’une cellule nerveuse est active, l’impulsion électrique
est dirigée le long des fibres nerveuses jusqu’à l’extrémité des dendrites
et aux zones de contact avec d’autres cellules nerveuses. Ces zones de
contact, sortes de fentes entre deux cellules nerveuses, sont nommées
des synapses. L’impulsion électrique ne peut pas passer par-dessus la
fente synaptique. Elle est donc relayée par des substances chimiques: les
neurotransmetteurs. Ces derniers sont produits par la première cellule
nerveuse et déversés dans la fente synaptique. Les neurotransmetteurs
se fixent alors aux points d’ancrage de la cellule nerveuse suivante, les
récepteurs, et déclenchent, par le biais de ces récepteurs, une nouvelle
impulsion électrique ou d’autres modifications à la prochaine cellule
nerveuse. C’est ainsi que la transmission se poursuit. Les substances-clés
dans l’apparition de la dépression sont, entre autres, la sérotonine, la
noradrénaline et la dopamine (voir illustration 5, page 36).

L’activité accrue du système hormonal du stress conduit à un déséqui-


libre au niveau du métabolisme nerveux. La quantité de neurotransmet-
teurs disponibles dans les fentes synaptiques est insuffisante, d’où une
perturbation dans la transmission de l’information entre les cellules
nerveuses.

35
ÉTAT NORMAL

Cellule nerveuse 1

Transporteurs
des neurotransmetteurs

Transporteurs
des neurotransmetteurs Sérotonine
Dopamine
Fente synaptique Noradrénaline
Sérotonine
Récepteurs des neurotransmetteurs
Dopamine
Noradrénaline
Cellule nerveuse 2 Récepteurs des neurotransmetteurs

DÉPRESSION

Cellule nerveuse 1 Hormones du stress

Hormones du stress

Transporteurs
des neurotransmetteurs

Fente synaptique Transporteurs


des neurotransmetteurs Sérotonine
Dopamine
Noradrénaline
Sérotonine
Cellule nerveuse 2 Récepteurs des neurotransmetteurs
Dopamine
Noradrénaline
Récepteurs des neurotransmetteurs

Illustration 5: La dépression peut avoir des causes aussi bien physiques et biologiques
que psychiques et psychosociales, et être traitée sur ces différents plans. Qu’elles
soient d’ordre génétique ou dues à des facteurs externes (par ex. contraintes profes-
sionnelles et familiales), ces causes peuvent conduire à un stress chronique et à une
hyperactivité pathologique du système hormonal du stress. Cette hyperactivité a pour
conséquence une perturbation du métabolisme des cellules nerveuses.

36
37
Stress, cerveau et psychisme – un exemple

Notre cerveau est capable de fabriquer de nouvelles cellules nerveuses,


parfaitement fonctionnelles, jusqu’à un âge avancé (voir illustration 6,
page 39). Ce processus de création de nouvelles cellules neuronales
(neurogenèse) joue probablement un rôle majeur dans l’apparition de
certaines maladies psychiques, surtout s’il est défaillant. Le stress chro-
nique contribue en grande partie à réduire, voire à stopper la production
de nouvelles cellules dans des zones cérébrales-clés. Or, curieusement,
il s’agit des zones responsables de la régulation de nos émotions, appe-
lées «système limbique». On peut dès lors aisément imaginer que la
dépression due au stress conduit, au moins partiellement, à une baisse
de la neurogenèse, ce qui nous ramène aux symptômes classiques tels
que troubles de la concentration et de la mémoire, sentiment de vide et
humeur sombre. L’hippocampe, une zone très importante du système
limbique, rétrécit en cas de dépression chronique. Son rôle étant déter-
minant dans les fonctions de mémorisation, cela explique pourquoi une
dépression chronique insuffisamment traitée augmente le risque de
survenue ultérieure de la maladie d’Alzheimer. En revanche, si la dépres-
sion est traitée, l’hippocampe reprend sa taille et sa fonction d’origine.

Heureusement, nous savons, grâce à la recherche, que la fabrication de


nouvelles cellules nerveuses peut être stimulée de différentes manières
par voie thérapeutique, et ce jusqu’à un âge avancé:


• Sport d’endurance modéré (par ex. jogging, natation, vélo,


marche nordique)
• Activité intellectuelle (par ex. psychothérapie, nouveaux
apprentissages) 

• Diminution du stress (par ex. techniques de gestion du stress,
biofeedback, voir page 61)

• Antidépresseurs: tous les antidépresseurs modernes stimulent
la neurogenèse de deux façons: d’une part, en normalisant
l’hyperactivité des hormones du stress et, d’autre part, en stimulant
directement les cellules nerveuses.

38
Illustration 6: Un microscope à fort grossissement permet de voir en rouge-orange
les nouvelles cellules nerveuses dans la région de l’hippocampe (système limbique).
Le trait jaune mesure 10 μm (1 μm = 1/1’000 mm).

La faute aux gènes?

On sait depuis longtemps que la dépression touche plus souvent les


personnes apparentées à des patients dépressifs. Il existe donc une
prédisposition génétique qui accroît le risque de maladie. Ce risque
augmente selon le degré de parenté: fratrie et enfants (du premier degré)
présentent 10 à 20% de risque d’être malades. Cela signifie aussi que
la probabilité de rester en bonne santé est très élevée (80 à 90%). Ce
n’est pas la maladie elle-même qui est transmise, mais le risque accru de
réagir au surmenage par une dépression. Cette augmentation du risque
est probablement due à une prédisposition à répondre à un stress
constant par un dysfonctionnement du système hormonal du stress et
du métabolisme nerveux.

Prendre conscience de ce terrain peut servir à activer des mesures pré-


ventives avant qu’il ne soit trop tard, comme mieux gérer son stress,
prévoir des temps de repos ou recourir à une aide thérapeutique dans
les situations difficiles.

39
Nous savons aujourd’hui que d’infimes modifications du patrimoine
génétique (ADN) sont responsables des différences de prédisposition
face à la dépression. À la différence des maladies génétiques classiques,
il ne s’agit pas là d’une défaillance grave. Le modèle génétique présente
uniquement de petites lacunes qui, dans un premier temps, ne conduisent
qu’à des limitations fonctionnelles et, peuvent, bien plus tard, mener à
la dépression. Les gènes se présentent sous différentes variantes d’une
personne à l’autre, variantes qui fonctionnent plus ou moins bien, mais
ne se distinguent du patrimoine génétique que par des différences
minimes. L’ensemble du patrimoine génétique (le «mode d’emploi» du
corps) se compose d’environ trois milliards d’éléments. Ce que les scien-
tifiques appellent le «polymorphisme d’un seul nucléotide» est la varia-
tion d’un seul élément dans un seul gène. Ces infimes variations géné-
tiques sont également responsables de différences visibles comme la
couleur des yeux, des cheveux ou la stature. Lorsqu’une certaine variante
est liée à un terrain pathologique favorable, on parle alors de gène de
susceptibilité. C’est ainsi que la prédisposition à la maladie d’Alzheimer
est également déterminée par une certaine variante génétique.

Dans le cas de la dépression, nous ne connaissons que quelques-unes


de ces modifications génétiques minimes qui augmentent la prédispo-
sition. Elles se trouvent notamment dans les gènes responsables de
l’activité des hormones du stress. Il faut savoir que les personnes vulné-
rables ne tombent malades que lorsque leur système est débordé, ce qui
est d’autant plus probable que les conditions extérieures sont défavo-
rables: enfance, structure familiale, éducation, situation professionnelle,
événements douloureux ou mode de vie malsain. De telles connais-
sances ouvrent donc de meilleures possibilités de prévention. On ne
peut cependant pas encore analyser et déterminer précisément le risque
génétique de chacun en raison de la multitude de gènes impliqués.

Le risque n’est toutefois pas nécessairement inscrit dans le patrimoine


génétique, l’ADN. L’épigénétique y joue aussi un rôle. Ce terme corres-
pond à un niveau de régulation supérieur aux gènes. C’est ainsi que des
changements dans l’ADN – tels que de petits appendices chimiques –
déterminent si un gène donné est actif, donc souvent exprimé, ou s’il est
«muet». Comme nous le savons désormais, les facteurs externes (comme
le stress durant la petite enfance) peuvent conduire à de telles modifica-
tions épigénétiques.

40
Qu’est-ce que la médecine personnalisée?

Les causes de la dépression sont diverses et toutes les dépressions ne


se ressemblent pas, ce qui n’est pas assez pris en compte à l’heure
actuelle. Au contraire, le diagnostic peut cacher un large éventail de
symptômes physiques et psychiques, ainsi qu’une multitude d’origines
et d’évolutions de la maladie.

Les conclusions neurobiologiques peuvent aider à définir différents


groupes de patients et ouvrir la voie à une médecine personnalisée. La
médecine personnalisée signifie que la personnalité et les caractéris-
tiques physiques d’un individu sont utilisées pour optimiser le traite-
ment qui peut ainsi être adapté au malade. La dépression peut avoir de
nombreuses causes sous-jacentes, ce qui rend d’autant plus complexes
les facteurs de succès d’un traitement antidépresseur. À la lumière des
connaissances actuelles, nous nous sommes rapprochés de notre but
qui consiste à adapter le traitement antidépresseur à chaque patient
dans le cadre de la médecine dite personnalisée. De nombreuses infor-
mations sont utiles pour définir le profil unique de nos patients et la
thérapie ciblée qui en découle. Les traitements superflus, parce qu’inef-
ficaces, peuvent être évités et les effets indésirables minimisés. Cela
signifie plus de sécurité pour les patients et un traitement plus efficace.

Un exemple: Un médicament est souvent prescrit pendant un laps de


temps prolongé avant même de savoir s’il bénéficie ou non au patient.
Tous les médicaments subissent plusieurs étapes de transformation dans
le corps avant d’atteindre le cerveau et d’y déployer leur effet thérapeu-
tique. La première étape de transformation se déroule au niveau du foie.
La fonction rénale joue un rôle-clé dans le drainage des médicaments
hors du corps. La vitesse et l’amplitude de ces processus d’élimination
varient d’un patient à l’autre; c’est pourquoi nous déterminons, grâce au
Suivi Thérapeutique Pharmacologique (STP), la concentration indivi-
duelle de chaque médicament dans le sang et sommes ainsi en mesure
d’ajuster la posologie à la vitesse de traitement et d’élimination de
chaque patient. Des déterminations génétiques plus approfondies de
différentes enzymes hépatiques (appelées protéines CYP) indiquent
la vitesse de dégradation de certains médicaments et les interactions
possibles entre différents médicaments propres à chaque patient; elles
peuvent donc aider à établir une posologie efficace.

41
Le gène ABCB1 affecte les propriétés d’une molécule «gardienne» de
la barrière hémato-encéphalique, laquelle empêche certains antidépres-
seurs d’atteindre leur cible thérapeutique: le cerveau. Cette barrière sert
essentiellement à protéger le cerveau des micro-organismes et des
toxines qui se trouvent dans le sang. Cependant, certaines variantes
ABCB1 remplissent mieux cette fonction de gardienne que d’autres.
C’est justement cette protection optimisée qui peut être préjudiciable.
Lorsque les antidépresseurs ne parviennent même pas à franchir la
barrière hémato-encéphalique, les médicaments avalés ou injectés n’ont
aucune chance d’arriver jusqu’à leur site d’action; ils sont donc totale-
ment inutiles pour le malade.

Grâce aux travaux sur le mode d’action du gène ABCB1, nous sommes
de plus en plus à même d’émettre des recommandations de traitement
personnalisé sur la base des variantes ABCB1 du patient, associées à
d’autres caractéristiques de la maladie. Ainsi, l’on est sûr que le médica-
ment prescrit est au moins en mesure d’agir.

Les informations données ici à titre d’exemple permettent aux établisse-


ments spécialisés d’optimiser leur stratégie thérapeutique médicamen-
teuse en offrant un maximum d’efficacité avec un minimum d’effets
secondaires.

42
43
COMMENT SOIGNE-T-ON LA DÉPRESSION?
Le point sur le traitement de la dépression due au stress:
pourquoi autant d’échecs?

De nos jours, la dépression peut être guérie, à condition d’être traitée


de manière appropriée. Bien souvent, un traitement efficace et bien
toléré n’est pas suivi, car la dépression n’a pas été dépistée ou sa sévérité
a été sous-estimée. Plusieurs raisons à cela:

• Les personnes souffrant de dépression jugent à tort leur maladie


comme un échec personnel et n’osent pas consulter leur médecin.
Bon nombre de malades sont aussi trop désespérés et trop affaiblis
pour pouvoir chercher de l’aide.
• La plupart des personnes dépressives sont suivies par leur médecin
de famille. Ce dernier a bien souvent du mal à diagnostiquer une
dépression, les patients plaçant leurs douleurs physiques au premier
plan. Ainsi, la dépression sous-jacente n’est pas dépistée chez plus
de la moitié des patients.
• Même lorsque le diagnostic est posé, moins de la moitié des patients
prend un traitement antidépressif systématique, soit parce que le
traitement prescrit n’est pas efficace, soit parce qu’il n’est pas suivi
(antidépresseurs, par ex.) ou qu’il est abandonné par peur ou manque
d’informations, ou encore parce que la psychothérapie proposée est
refusée.
• Un succès mitigé est parfois dû à un trop faible dosage d’antidé-
presseurs ou à l’absence d’une psychothérapie éprouvée conjointe-
ment au traitement médicamenteux. Il peut aussi s’expliquer en cas
de dépression particulière (par ex. atypique ou psychotique) exigeant
des connaissances médicales poussées. Enfin, il peut arriver que la
barrière hémato-encéphalique d’un patient soit très active et que
le médicament prescrit ne parvienne pas à la franchir pour atteindre
le site dans lequel il doit déployer ses effets: le cerveau.
• Dans la plupart des cas, le traitement n’est pas suivi assez longtemps.
La moyenne habituelle est de trois à quatre mois maximum, une
durée nettement inférieure à celle des six à neuf mois préconisée
par toutes les directives internationales. Un traitement antidépressif
doit être pris jusqu’à la disparition totale des symptômes. Ces symp-
tômes comprennent également les troubles cognitifs (troubles de

44
la pensée et de la gestion de l’information), fréquemment négligés,
en particulier l’attention, la concentration, la mémoire et les fonc-
tions exécutives, c.-à-d. la planification et l’exécution d’actions ou de
fonctions pouvant être affectées par une dépression, mais trop sou-
vent ignorées.

La dépression de la personne âgée, souvent non diagnostiquée ou


insuffisamment traitée, illustre bien l’importance d’un traitement au long
cours. En effet, avec l’âge, il n’est pas rare que la maladie dépressive
s’accompagne de troubles marqués de la pensée et du traitement de
l’information, ce qui augmente le risque d’évolution sévère. De nom-
breux travaux ont mis en évidence le fait que la présence continue de
symptômes cognitifs, tels que des oublis fréquents ou des difficultés de
concentration, s’accompagne, à long terme, d’une évolution négative.
Chez les patients âgés, il pourrait même s’agir d’un facteur de risque de
démence.

Nouveaux concepts dans le traitement de la dépression


due au stress: traitement d’entretien et traitement au
long cours

Les patients qui présentent des symptômes rémanents, tous âges


confondus, ont 80% de risque de faire une rechute. Les symptômes
rémanents ou la diminution des performances intellectuelles deviennent
eux-mêmes facteurs de stress et déclenchent de nouveaux épisodes
dépressifs.

L’objectif thérapeutique repose donc sur un traitement de la dépression


au long cours menant à une guérison complète, incluant le suivi du
patient pendant au moins six mois après la disparition des symptômes
dépressifs. Pendant cette phase importante où commence le traitement
d’entretien, les antidépresseurs ne doivent en aucun cas être arrêtés ou
diminués et il peut s’avérer judicieux de poursuivre la psychothérapie.
La guérison ne peut être établie qu’en l’absence de tout symptôme
au-delà de six mois (voir illustration 7, page 46).

45
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Santé

Symptômes
Syndrome

Rechute
Nouvel
épisode
Maladie
Phase aiguë Symptômes cognitifs

Psychothérapie
et traitement
médicamenteux

Traitement en Traitement Prévention


phase aiguë d’entretien des rechutes
Phases du traitement (6 à 12 (stabilisation) (traitement au
semaines) (4 à 9 mois) long cours)
(à partir de 1 an)

Illustration 7: Les différentes phases d’un traitement réussi, qui prévient les rechutes.

46
Les trois phases d’un traitement efficace de la dépression

Traitement en phase aiguë:


Améliore les symptômes et les fait disparaître.
Durée: plusieurs semaines.

Traitement d’entretien:
Prévient les rechutes grâce à une stabilisation des phases
asymptomatiques. La guérison complète ne peut être établie
qu’en l’absence de tout symptôme au-delà de six mois.
Durée: quatre à neuf mois.
A noter: certains symptômes, qui n’étaient pas prépon­
dérants au début, peuvent nécessiter la poursuite du
traitement. L’amélioration de certains troubles, tels que
le comportement suicidaire ou les problèmes de sommeil,
permet souvent de les révéler ou de les dépister. Il s’agit
généralement de l’altération des performances intellec­-
tuelles comme l’attention, la concentration et la mémoire.

Prévention des rechutes:


Prévient les récidives après la guérison complète ainsi que
l’apparition de nouveaux épisodes. Durée: une à plusieurs
années.

47
Plus les épisodes dépressifs étaient nombreux et sévères par le passé,
plus il convient de suivre le patient au-delà des six mois d’entretien. Le
traitement médicamenteux est à l’heure actuelle la thérapie la plus étu-
diée pour traiter la dépression récurrente au long cours. Le risque de
rechute peut être diminué de 50% grâce au traitement d’entretien et/ou
au traitement au long cours. Les antidépresseurs et le lithium sont les
thérapies les mieux documentées et présentent ainsi le plus haut niveau
de preuves scientifiques. Tout comme pendant le traitement d’entretien,
la médication qui a mené à la guérison est généralement poursuivie au
même dosage pour prévenir les rechutes.

L’instauration d’un traitement préventif de 2 à 3 ans est dans certains cas


judicieuse afin d’empêcher une récidive après la guérison. Ce traitement
antidépresseur au long cours est particulièrement indiqué en présence
d’au moins trois épisodes dépressifs ou de deux épisodes survenus au
cours des cinq dernières années ou encore de deux épisodes associés à
un facteur de risque. Parmi ces facteurs de risque, on distingue des cas
de maladie dans la famille, une apparition précoce (avant l’âge de 40 ans)
ou tardive (après l’âge de 60 ans) de la maladie, un bref intervalle entre
les épisodes, une aggravation rapide des premiers épisodes ou encore
la présence d’autres maladies.

C’est à chaque patient, en accord avec son spécialiste, qu’incombe la


décision de suivre un traitement basé sur des antidépresseurs modernes,
présentant peu d’effets secondaires. Ces médicaments ne créent pas de
dépendance et sont bien tolérés, ce qui permet de les prendre sans
problème pendant des mois voire des années.

À l’arrêt de l’antidépresseur, il convient de procéder lentement, pas à pas.


Le métabolisme nerveux doit d’abord se réhabituer à fonctionner sans le
soutien d’un médicament. Après une guérison complète, il en est tout à
fait capable, mais il a besoin de quelques semaines pour s’y habituer.

48
Concept thérapeutique

Pour les patients nécessitant une psychothérapie stationnaire intensive,


tout traitement scientifiquement fondé doit être global.

Différentes approches psychothérapeutiques telles que la psycho­


thérapie cognitivo-comportementale, la thérapie psychodynamique et
la thérapie verbale sont choisies ou combinées en fonction des besoins
personnels du patient.

«Ce sont les pensées d’un homme


qui déterminent sa vie.»
Marc Aurèle, empereur romain et philosophe, 121–180

Outre la médication, différentes thérapies individuelles ou de groupe


sont appliquées, de même que, suivant les symptômes, des thérapies
corporelles et/ou créatives, des techniques de relaxation et des exercices
de gestion du stress (biofeedback, relaxation progressive de Jacobson,
yoga, qi-gong, tai-chi – voir page 60) selon des schémas à géométrie
variable. Il va de soi qu’un problème personnel ne peut être résolu qu’en
concertation avec le patient et s’inscrit dans le cadre d’un plan global de
traitement.

49
Psychothérapie

Le traitement efficace de la dépression doit toujours comprendre une


psychothérapie. Il doit être adapté au profil émotionnel du patient, avec
pour objectif une gestion différente du stress, un autre regard sur
l’estime de soi et sur l’assimilation des événements stressants. La thérapie
cognitivo-comportementale (TCC) et la thérapie interpersonnelle (TIP)
sont les options psychothérapeutiques les mieux documentées à l’heure
actuelle et dont l’efficacité est la mieux établie. Elles réduisent en outre
le risque de rechute à long terme et sont utilisées avec succès tant dans
le domaine ambulatoire que dans les hôpitaux. Ces thérapies modernes
sont centrées sur la recherche de solutions et sur la mobilisation des
ressources; autrement dit, elles ne se contentent pas de rechercher les
conflits passés et leurs causes, et ne se concentrent pas uniquement sur
les lacunes.

Nos pensées, nos émotions et nos actions interagissent sans cesse et


se répercutent sur nos fonctions physiques. Une humeur sombre est
par exemple accentuée par des pensées négatives (voir illustration 8,
page 51). Le repli, qui est bien souvent la conséquence naturelle d’un
mal-être, renforce les pensées et les émotions désagréables. Tout cela
engendre un stress supplémentaire, renforçant le cercle vicieux dans
lequel les personnes dépressives s’enferment régulièrement. La psycho-
thérapie offre des approches visant à rompre ce cercle vicieux. Il est
important de pratiquer, avec l’aide d’un thérapeute, des activités qui font
du bien au moral, car une personne dépressive n’en est plus capable
toute seule. Il est tout aussi important de comprendre comment, dans
certaines situations, la dépression déclenche presque automatiquement
des sentiments et des pensées désagréables. La pensée dépressive est
typiquement unilatérale et négative, elle ne voit qu’à travers des lunettes
noires. La psychothérapie aide à enlever lentement ces lunettes.

50
PENSÉES

ACTIONS ÉMOTIONS

CORPS

Illustration 8: Nos pensées, nos émotions et nos actions interagissent sans cesse et se
répercutent sur nos fonctions physiques (par ex. rythme cardiaque/pouls).

51
Thérapie cognitivo-comportementale

La thérapie cognitivo-comportementale part du principe que notre


pensée détermine nos émotions et notre comportement. On entend par
«comportement» non seulement les activités visibles d’un individu, mais
aussi ses processus internes tels que ses émotions, ses pensées et ses
mécanismes physiques. Chaque individu a acquis, au cours de sa vie, par
son expérience personnelle et par mimétisme, des comportements,
attitudes et réactions émotionnelles. Cette série de schémas de compor-
tement et de pensée, associée à un surmenage et à un stress chronique,
mènent à la dépression.

Pendant la thérapie, les comportements, schémas de pensée et attitudes


problématiques sont abordés et analysés de manière concrète. Cette
thérapie doit aider la personne dépressive à changer les schémas de
comportement, généralement habituels et inconscients, qui entravent
son bien-être et permettent à la dépression de persévérer. Le patient
dépressif a une image de lui-même particulièrement négative: il se voit
plein de lacunes, médiocre, sans valeur et indésirable. Ces pensées
l’amènent même à croire qu’il ne possède pas les qualités requises pour
être heureux. Il a en outre tendance à se sous-estimer et à se critiquer.
Toute expérience est interprétée négativement, par principe. Le patient
ne voit que les déceptions et les échecs, et pense que l’avenir ne lui
apportera rien de bon. Un changement de la situation actuelle, jugée
comme très négative, semble exclu. La thérapie comportementale
s’attaque tant aux schémas de pensée négatifs qu’aux comportements.
Un changement de comportement, par exemple la reprise d’une activité
agréable et d’activités sociales, engendre lentement des émotions posi-
tives et de nouvelles expériences. Celles-ci apportent de nouvelles
pensées et inversement. L’un des objectifs de la thérapie comportemen-
tale repose sur l’acquisition de compétences destinées à nouer et à
entretenir des relations sociales ainsi qu’à mieux gérer ses émotions. Un
autre objectif consiste à encourager l’assimilation d’événements négatifs
du passé ainsi que la gestion actuelle des crises ou des situations diffi-
ciles. L’apprentissage de compétences permettant de construire sa vie
de façon plus positive et plus satisfaisante, par exemple à l’aide d’exer-
cices destinés à redécouvrir la notion de plaisir ou par la pleine conscience,
est également une pierre angulaire du traitement.

52
Thérapie interpersonnelle (TIP)

La thérapie interpersonnelle est spécialement conçue pour traiter la


dépression. Elle part du principe que les relations interpersonnelles
exercent une grande influence sur l’apparition d’une dépression et
concentre le travail thérapeutique sur les relations ici et maintenant.
Selon la TIP, les expériences interpersonnelles et psychiques antérieures
se reflètent dans le comportement actuel du patient. Ainsi, des événe-
ments pesants (tels que décès d’un proche ou rupture amoureuse), de
même que des situations difficiles (harcèlement au travail, chômage,
retraite ou disputes quotidiennes avec ses proches) peuvent déclencher
des symptômes dépressifs. Chez certains, il faut traiter les problèmes de
couple ou familiaux tandis que chez d’autres, il faut faire le travail de deuil
ou favoriser le passage à une nouvelle étape de la vie (par ex. lorsque les
enfants quittent la maison ou à la retraite).

À l’inverse, la dépression peut causer des problèmes interpersonnels.


L’objectif de la thérapie est de soulager les symptômes dépressifs et
d’améliorer les relations interpersonnelles dans la vie privée et/ou profes-
sionnelle. La thérapie aide à comprendre la maladie et à mettre en
évidence le lien, souvent occulté, entre les symptômes de la dépression et
les relations interpersonnelles. Le travail cible par exemple l’amélioration
de l’approche de communication, le développement de stratégies pour
résoudre de nouveaux problèmes ou la gestion de situations de stress
relationnel. La thérapie interpersonnelle aide en outre à prévenir les
rechutes.

Pleine conscience

La pleine conscience (en anglais, mindfulness) est à l’opposé du multi-


tâches pathogène, à savoir la perception claire et sans jugement de ce
qui se passe à un instant donné. Les sensations du corps, les pensées,
les sentiments, agréables, désagréables ou neutres, doivent simplement
être observés et acceptés tels qu’ils sont. Dans la vie trépidante de tous
les jours, cette faculté est souvent mise de côté – nous faisons une chose
en pensant à une autre.

53
Cette situation peut, à terme, conduire à un stress chronique. Le réap-
prentissage de la pleine conscience peut donc être salutaire. Dit simple-
ment, cette thérapie consiste à apprendre, entre autres, à ne faire qu’une
seule chose à la fois. De plus, de nombreuses personnes dépressives ont
perdu toute sensation physique et n’arrivent plus à savoir si elles sont
tendues ou détendues. Là aussi, il est possible d’y travailler et de réap-
prendre à se détendre rapidement.

Schémathérapie

La schémathérapie (ou thérapie des schémas) est actuellement l’une des


procédures thérapeutiques les plus pragmatiques et les plus efficaces
en matière de traits de caractère potentiellement pathogènes pouvant
contribuer au développement de la dépression. Elle ouvre les méthodes
de thérapie cognitivo-comportementale à des éléments de concepts
psychodynamiques et à d’autres thérapies éprouvées comme l’analyse
transactionnelle, l’hypnothérapie et la Gestalt-thérapie. Le bénéfice sur
les malades est considérable et rapide. La schémathérapie part du prin-
cipe que, dans l’enfance et tout au long de la vie, des schémas, c’est-à-
dire des modèles de comportement ont été acquis; ces schémas, qui
comprennent des souvenirs, des émotions, des cognitions et des sensa-
tions physiques, peuvent influencer un comportement pathogène. Un
schéma dit mésadapté fait donc souvent suite à des expériences toxiques
vécues pendant l’enfance et fondées sur la violation des besoins humains
fondamentaux. C’est le cas des expériences traumatiques ou de la
non-satisfaction des besoins essentiels (l’attention ou la protection, par
ex. par les proches). Dans certains cas, ce type de comportement peut,
en raison de l’importance excessive accordée à la performance, à la
précision et à la fiabilité, générer un tel stress qu’il conduit au burn-out.
L’identification de ce type de schémas peut exercer une influence favo-
rable sur le comportement pathogène.

54
Cognitive Behavioral Analysis System of Psychotherapy (CBASP)

Cette méthode psychothérapeutique a été développée spécifiquement


pour traiter la dépression chronique et son efficacité est bien établie. Son
processus structuré repose sur des réunions individuelles ou de groupes,
au cours desquelles les participants peuvent prendre conscience des
pensées et des postulats qui façonnent leur vie. Ces empreintes ont créé
des mécanismes de défense psychiques, généralement nécessaires, qui
peuvent mener, au fil des ans, à des schémas défavorables de compor-
tement et d’interaction interpersonnelle (la méfiance, par ex.). À l’aide
d’analyses de situations, la personne apprend à faire le lien entre, d’une
part, son comportement et ses mécanismes de pensée et, d’autre part,
les conséquences qui en découlent. Sur cette base, des solutions et des
opportunités de changements comportementaux sont recherchées et
mises en œuvre.

Autres éléments de psychothérapie

La gestion du stress est un autre pilier important de la psychothérapie.


Le stress personnel et les contraintes doivent être identifiés pour pouvoir
ensuite agir dessus. Leur extrême hétérogénéité d’une personne à l’autre
rend l’encadrement thérapeutique individuel indispensable. La maîtrise
du stress contient des éléments actifs et passifs. Le thérapeute aide
et conseille le patient dans l’élaboration de son programme personnel
(voir page 60).

Dans certains cas, le recours à la thérapie psychanalytique ou à la


psychologie des profondeurs peut s’avérer utile. Dans ce type de théra-
pie, on attache beaucoup d’importance au développement durant
l’enfance: la psychanalyse part du principe que les premières années de
la vie sont déterminantes, car elles laissent des traces dans le psychisme.
La thérapie cherche à dévoiler au patient les conflits cachés ou refoulés
et à les analyser.

La thérapie systémique (familiale) cible le groupe (= le système) dans


lequel le patient vit. Ce système peut être un couple, une famille, un
cercle d’amis ou des collègues. Cette forme de thérapie considère que

55
le patient n’est en réalité que le «porteur du symptôme» et que l’origine
du problème doit être cherchée puis résolue dans l’ensemble du sys-
tème. Comme pour la thérapie interpersonnelle, l’accent est mis sur le
relationnel et les aspects sociaux. Une thérapie systémique peut se faire
en groupe, par exemple avec toute la famille.

Traitement médicamenteux

Alors que les formes légères de dépression se soignent très bien à l’aide
d’une simple psychothérapie, celle-ci s’accompagne d’antidépresseurs
dans les dépressions modérées à sévères. L’importance accordée à la
médication avec les antidépresseurs modernes bien tolérés, surtout
dans le traitement stationnaire des dépressions sévères, ne signifie
aucunement que les autres piliers de la thérapie, comme la psychothé-
rapie et les approches psychosociales ne jouent pas, eux aussi, un rôle
important. Tous les médicaments reposent sur le principe découvert
par Roland Kuhn, en Suisse, il y a plus de 50 ans: le renforcement des
neurotransmetteurs (sérotonine, noradrénaline, dopamine). On a long-
temps pensé que les antidépresseurs augmentaient uniquement la
concentration de ces neurotransmetteurs (substances messagères). On
sait aujourd’hui qu’ils agissent également en normalisant l’activité des
hormones du stress.

Le millepertuis (Hypericum perforatum), un remède à base de plantes, a


prouvé son efficacité dans la dépression légère à modérée. Il agit lui
aussi sur les niveaux de sérotonine et de noradrénaline et donc en partie
en tant qu’inhibiteur de la recapture de la sérotonine-noradrénaline
(IRSNA). Pour éviter un échec thérapeutique, il faut soigneusement
choisir la préparation, car les remèdes de phytothérapie diffèrent consi-
dérablement en matière de formulation et d’ingrédients. Un traitement
phytothérapeutique doit également faire l’objet d’un suivi par un médecin
spécialisé en raison du risque potentiel d’interactions avec d’autres
médicaments et de l’importance du dosage individuel. Dans les cas de
dépression modérée à sévère, trois classes de médicaments sont princi-
palement utilisées: les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine,
les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine-noradrénaline et enfin
les nouvelles substances multimodales qui agissent de manière ciblée

56
à la fois sur l’inhibition sélective de la recapture et sur l’activité des
récepteurs.

Pour ne pas changer inutilement ou trop rapidement de médicament et


ainsi perdre un temps précieux, il convient de garder à l’esprit que l’effet
antidépresseur n’est généralement ressenti qu’au bout de deux à quatre
semaines. Un changement de médication ne doit donc être effectué
qu’une fois la dose suffisante administrée et après quatre semaines.
En cas d’échec, il faut d’abord envisager d’augmenter le dosage ou de
passer à un autre antidépresseur. Une autre possibilité consiste à suivre
une «stratégie d’augmentation», c.-à-d. l’ajout d’une substance n’ayant
pas de propriétés antidépressives pour renforcer l’effet de l’antidépres-
seur. À l’heure actuelle, les sels de lithium, un traitement thymorégulateur
(=régulateur de l’humeur), sont les plus efficaces. Ces sels présentent
également une action «anti-suicide» prouvée, c.-à-d. qu’ils diminuent
les idées suicidaires et l’intention de mettre fin à ses jours. Les antipsy-
chotiques modernes, bien tolérés, présentent une autre possibilité
d’augmentation. Ces traitements doivent être dans tous les cas prescrits
par un spécialiste expérimenté.

Malgré les efforts soutenus de la recherche, nous ne pouvons toujours


pas définir avec précision quel sera le meilleur antidépresseur pour un
patient donné. Le choix du médicament est déterminé par l’expérience
du patient et du médecin traitant ainsi que par ses éventuels effets
secondaires (rarement: prise de poids, troubles de la fonction sexuelle,
nervosité, etc.), les antécédents thérapeutiques et les troubles qui carac-
térisent l’épisode dépressif en cours. Lorsque des symptômes tels que
troubles du sommeil, agitation, nervosité, angoisse ou tendance suici-
daire sont mis au premier plan, le traitement de première intention
repose sur un antidépresseur à effet sédatif (calmant), éventuellement
associé à une benzodiazépine. En cas de troubles du sommeil, un anti-
dépresseur sera plus indiqué qu’un somnifère classique, car il aidera
à normaliser la structure du sommeil, perturbée par la dépression, (voir
page 17) et apportera ainsi un sommeil réparateur.

Les antidépresseurs n’augmentent pas le risque de suicide. Dans certains


cas, la pharmacothérapie peut toutefois aggraver les pensées et les actes
suicidaires en début de traitement, car le médicament n’a pas encore
déployé son effet antidépresseur et la stimulation du métabolisme ner-

57
Mythes autour des antidépresseurs

Les antidépresseurs utilisés de nos jours entraînent très


peu d’effets secondaires. La survenue d’effets secon-
daires en début de traitement n’est pas à exclure, mais
ces effets disparaissent ensuite.

Les antidépresseurs ne créent pas de dépendance et


n’altèrent pas la personnalité. Ce ne sont ni des stimulants
ni des calmants. L’objectif du traitement médicamenteux
n’est en aucun cas de dissimuler les problèmes, au
contraire. Les médicaments, grâce au soulagement qu’ils
procurent, servent bien souvent de base à une psycho­
thérapie. Utilisés convenablement, les antidépresseurs
constituent un soutien ou une béquille, qui aident à remo-
biliser les capacités d’autoguérison grâce à la normalisa-
tion du métabolisme nerveux. Ils aident les malades à
se prendre en charge.
58
veux peut engendrer une nervosité et une agitation. On comprend dès
lors l’importance de la rigueur dans le suivi du traitement médicamen-
teux et dans l’encadrement du patient, ainsi que la nécessité de prendre
en considération la prescription éventuelle d’une benzodiazépine à court
terme. De tels effets secondaires peuvent bien souvent être atténués ou
éliminés grâce à des remèdes phytothérapeutiques, tels que la passi-
flore, la valériane, la pétasite ou la mélisse.

La preuve irréfutable de l’efficacité des antidépresseurs, prescrits correc-


tement et au bon dosage, dans la dépression modérée à sévère, de
même que le fait que la plupart des tentatives de suicide et des suicides
sont à mettre sur le compte d’un traitement insuffisant soulignent la
nécessité d’un traitement rigoureux.

Les antidépresseurs pendant la grossesse

Tout comme les autres médicaments, la prise d’antidépresseurs pendant


la grossesse peut majorer, dans des cas isolés, le risque de malformation
pour l’enfant. C’est pourquoi la prise de médicaments doit être évitée
autant que possible pendant la grossesse. Il convient toutefois de bien
peser le pour et le contre entre un infime risque tératogène et celui d’un
épisode dépressif. L’épisode en soi peut présenter un grand risque pour
l’enfant à naître. On sait que le risque de rechute est trois fois plus élevé
lorsqu’un traitement antidépresseur est interrompu pendant la gros-
sesse.

Il est donc judicieux d’aborder en amont et avec confiance son désir


d’enfant avec le médecin traitant pour pouvoir planifier et suivre attenti-
vement la grossesse. Lors d’un entretien approfondi, la procédure est
discutée en détail. À l’heure actuelle, il existe des antidépresseurs pré-
sentant un risque infime si leur prise est maîtrisée.

59
Techniques de relaxation

Techniques thérapeutiques
de gestion du stress

(en complément d’une psychothérapie


et d’un traitement médicamenteux)

• exercices de gestion du stress/


management du stress
• training autogène

• relaxation musculaire progressive

• biofeedback
• tai-chi

• qi-gong

• thérapie craniosacrale

• massage

• réflexologie plantaire

• hydrothérapie (par ex. thérapie Kneipp)
• aromathérapie

• acupuncture

Illustration 9: Sélection de techniques établies de gestion active ou passive du stress.

60
Biofeedback

Les nombreuses interactions entre le psychisme et le corps sont


aujourd’hui de plus en plus étudiées. Le biofeedback montre parfaite-
ment la relation complexe entretenue par le corps et le psychisme:
chaque humeur, chaque pensée, chaque contact humain et chaque
activité engendre dans notre corps une réaction des cellules nerveuses
et ainsi une modification des énergies. Beaucoup de patients ressentent
très vivement ces réactions végétatives (par exemple les battements du
cœur/le pouls, la tension musculaire, la respiration, la résistance de la
peau), tandis que, pour d’autres, ces sensations ont disparu. Le biofeed-
back permet de mettre en évidence et de ressentir ces réactions. Une
aide thérapeutique aide à reconnaître ces réactions physiques, à les
comprendre, à les harmoniser et à les influencer favorablement. Le bio-
feedback apprend à minimiser les tensions aussi bien physiques que
psychiques (stress) et favorise un état plus calme et plus serein.

Relaxation musculaire progressive selon Jacobson

Les exercices de relaxation sont particulièrement appropriés pour


les personnes sous tension permanente. Le Docteur E. Jacobson avait
observé en 1928 que les tensions musculaires étaient très souvent liées
à des inquiétudes, à des angoisses et à une tension psychique. L’interac-
tion entre la sensibilité psychique et la tension, resp. la relaxation muscu-
laire, peut donc être utilisée à des fins thérapeutiques. La relaxation
musculaire progressive selon Jacobson est l’une des méthodes les plus
réputées en la matière. Elle est facile à apprendre et à pratiquer au quo-
tidien. Différents groupes musculaires sont tout d’abord volontairement
contractés (pendant 5 à 10 secondes) puis de nouveau relâchés (pendant
20 à 30 secondes). L’attention se porte alors sur la différence entre ten-
sion et relaxation. Un entraînement régulier permet d’atteindre de plus
en plus vite un état de détente agréable. La sensation de calme est alors
communiquée aux centres de régulation des hormones du stress et aide
à apaiser le système devenu hyperactif.

61
Le plan de traitement avec
les différents éléments qui
le composent est propre
à chacun. Il doit être élaboré
en concertation avec le patient
et sans cesse adapté à ses
besoins.

62
Traitements complémentaires non médicamenteux
éprouvés

La privation de sommeil et la luminothérapie sont des traitements qui ont


fait leurs preuves, que ce soit en complément d’une thérapie médica-
menteuse ou en alternative à cette dernière pour les formes de dépres-
sion plus légères.

Pour les formes plus sévères, certains experts ont utilisé avec succès
de nouvelles méthodes telles que la stimulation du nerf vague (SNV)
ou la stimulation magnétique transcrânienne (SMT) dans des centres
spécialisés.

Le traitement peut également s’accompagner de techniques utiles,


issues de la médecine complémentaire, resp. de la naturopathie, comme
la phytothérapie, l’hydrothérapie (utilisation de l’eau, thérapie de Kneipp),
la médecine chinoise traditionnelle (acupuncture, qi-gong), les massages
ou encore l’aromathérapie. Le traitement moderne de la dépression
incarne une psychiatrie innovante, holistique et basée sur des preuves,
c’est-à-dire fondée sur les résultats de la recherche. Il montre bien que
les maladies peuvent être guéries en misant sur une approche de santé
globale, qui privilégie les capacités d’autoguérison.

Privation de sommeil

La privation de sommeil est bonne pour le moral. À première vue, cela


surprend puisque beaucoup de patients dépressifs souffrent de troubles
du sommeil. Cependant, la privation de sommeil, en général partielle,
s’est avérée très efficace dans le traitement de la dépression. Le coucher
s’effectue à heure normale et le réveil a lieu vers une heure du matin.
Il est important de ne pas se rendormir, ne serait-ce que quelques ins-
tants, pendant toute la durée de la thérapie et le jour qui suit, au risque
d’ annuler tout l’effet bénéfique du traitement sur le moral. En général,
cette thérapie est pratiquée en groupe avec un encadrement médical,
car elle est difficile à suivre tout seul.

63
Luminothérapie

Cette thérapie pratiquement sans effets secondaires s’est révélée très


efficace, non seulement dans la dépression hivernale, mais aussi dans les
autres formes de dépression. Elle consiste à s’exposer à une source de
lumière (2’500 à 10’000 lux), tous les matins, durant 30 à 60 minutes. Il
est possible de lire pendant ce temps. En règle générale, plus la lumino-
thérapie est effectuée tôt le matin, meilleurs sont les résultats. En cas de
dépression récurrente en automne et en hiver, ce traitement peut être
appliqué en prévention.

Électroconvulsivothérapie (ECT)

L’ECT est indiquée dans le traitement des dépressions graves; c’est l’une
des méthodes antidépressives les plus efficaces. Le principe thérapeu-
tique repose sur une convulsion cérébrale déclenchée en douceur après
une brève narcose (sommeil provoqué artificiellement par des agents
médicamenteux) et une détente musculaire. Pendant l’intervention, qui
dure près d’une minute, le patient est mis sous surveillance anesthésio-
logique. Cette méthode s’avère particulièrement intéressante dans la
mesure où elle présente peu d’effets secondaires et peut être employée
avec succès là où d’autres traitements ont échoué, respectivement en cas
de dépression sévère ou chronique.

64
65
Douze règles de base pendant le traitement
d’une dépression

1 Faites preuve de patience. La dépression s’installe générale-


ment lentement et disparaît aussi progressivement, même
avec un traitement. La thérapie nécessite du temps, mais cela
en vaut la peine! 


2 Si vous avez besoin de médicaments, respectez scrupuleuse-


ment les prescriptions du médecin. Soyez patient, les effets
sont rarement immédiats.

3 Les antidépresseurs ne rendent pas dépendants et ne


modifient pas la personnalité.

4 Il est important de communiquer à votre médecin, ouverte-


ment et en toute confiance, tout changement de votre état,
ainsi que les soucis, les craintes et les doutes que vous pourriez
avoir dans le cadre du traitement.

5 Signalez immédiatement tout effet secondaire désagréable.


Les effets secondaires observés sont généralement bénins et
apparaissent surtout en début de traitement.

6 N’arrêtez pas les médicaments, même si vous vous sentez


mieux. L’arrêt du traitement doit être soigneusement préparé.

7 Planifiez avec précision chacune de vos journées la veille


au soir (avec un planning horaire, par ex.). Prévoyez aussi des
activités agréables.

8 Fixez-vous de petits objectifs réalisables. Votre médecin ou


votre thérapeute peut vous y aider.

9 Tenez tous les jours un journal de vos humeurs. Votre


médecin ou votre thérapeute peut vous montrer comment
faire et discuter régulièrement avec vous de son contenu.

66
10 Une fois réveillé, levez-vous rapidement, ne restez pas au lit.
Lorsqu’on est dépressif, rester allongé ouvre la porte aux
idées noires. Ce conseil n’est pas toujours facile à suivre.
Si vous êtes dans ce cas, élaborez avec votre thérapeute des
stratégies pour y arriver.

11 Bougez: L’activité physique est un précieux antidépresseur et


favorise la neurogenèse.

12 Une fois que vous allez mieux, voyez avec votre médecin ou
votre thérapeute comment diminuer les risques de rechute.
Distinguez les signes avant-coureurs et établissez un plan de
crise.

67
68
AIDE COMPLÉMENTAIRE
Signes avant-coureurs éventuels

• Tension
• Agitation
• Légère irritabilité
• Impatience
• Troubles du sommeil
• Difficultés à se lever le matin
• Grande fatigue, épuisement, sentiment de surmenage et de stress
• Perte d’appétit ou appétit anormal
• Sensibilité au bruit
• Pression au niveau de la poitrine, de la tête
• Mal-être physique général, maux de tête
• Pertes de mémoire
• Difficultés de concentration
• Apparence physique et soins corporels négligés
• Difficultés à prendre des décisions dans la vie quotidienne
• Baisse de performance au travail
• Repli sur soi
• Niveau d’activité en baisse
• Pas d’envies
• Moins de joie de vivre
• Angoisses
• Sentiment de vide intérieur, d’insensibilité
• Idées noires, obsessions
• Soucis quant à l’avenir
• Doutes et manque de confiance en soi
• Mal de vivre, pensées morbides

69
Plan de crise personnel

Que faire lorsque je remarque l’apparition de signes avant-coureurs


d’une rechute?

1. Prendre au sérieux les signes avant-coureurs.

Mes signes avant-coureurs personnels:

2. Signaler ces signes de dépression à une personne de confiance.

Nom de la personne de confiance:

3. Les surmonter, y faire face.

Ce qui peut m’aider dans cette situation:

70
4. Faire appel à un professionnel le plus tôt possible.

Mon médecin de famille (nom et numéro de téléphone):

Mon spécialiste (nom et numéro de téléphone):


Mon psychothérapeute (nom et numéro de téléphone):

71
Suggestions pour les proches et amis

• Informez-vous en détail sur la maladie. C’est généralement possible


dans le cadre d’un rendez-vous commun chez le médecin traitant
ou le psychothérapeute. Les enfants doivent également être impli-
qués, dans la mesure du possible. Même les enfants en bas âge
peuvent comprendre que le changement de comportement d’un
parent, source d’angoisse potentielle, est dû à une maladie qui doit
être traitée. 


• Les idées ou intentions suicidaires constituent une urgence absolue.


Faites immédiatement appel à un service d’urgence médicale.
Il est impératif de parler ouvertement des risques de suicide avec
une personne dépressive.

• Invitez la personne dépressive à faire preuve de patience. La dépres-


sion se traite et peut être guérie, mais il lui faut du temps pour
régresser. Encouragez-la à suivre son traitement et à prendre réguliè-
rement ses médicaments. Si nécessaire, prenez des initiatives et fixez
les rendez-vous chez le médecin à sa place. Incitez-la à entreprendre
de petites activités. En cas de doute, parlez-en avec le médecin trai-
tant ou avec le psychothérapeute.

• Une personne dépressive a souvent du mal à entamer ou à mener à


bien une activité. Le simple fait de se lever, de faire sa toilette et de
s’habiller ou encore d’effectuer de simples tâches ménagères peut
lui paraître insurmontable. Les proches et les amis peuvent l’aider en
l’encourageant en douceur à suivre un planning quotidien détaillé.

• Du fait de leur maladie, les patients dépressifs éprouvent de grandes


difficultés à prendre des décisions. Il ne faut donc pas les contraindre
à prendre des décisions importantes qu’ils regretteront une fois
guéris. N’oubliez pas que les personnes dépressives ont tendance
à tout voir en noir. La situation est bien souvent vue sous un jour
complètement différent au sortir de la dépression.

• Un grand voyage ou un week-end wellness est généralement perçu


comme un grand stress et peut même aggraver la maladie. Ce type
de projets peut être reconsidéré si l’état du malade s’améliore.

72
• Il est important d’accepter l’état de la personne malade tel qu’elle
le vit et le décrit. Essayez de lui rappeler sans relâche que la dépres-
sion est une maladie qui ne dure pas et se traite. Ne considérez pas
que les sensations physiques désagréables et l’hypocondrie dont
le malade fait preuve sont exagérées ou «imaginaires»: la dépression
rend insupportable toute douleur insignifiante ou sensation désa-
gréable.

• La maladie peut subitement faire apparaître chez votre conjoint ou


ami du désintérêt, de la distance et un manque d’entrain. Faites
preuve de patience pendant cette période éprouvante. Les choses
s’arrangeront dès lors que le traitement aura atténué la maladie.
Ne vous éloignez pas du proche touché par la maladie, aussi distant
qu’il vous paraisse.

• Les sentiments d’impuissance, de tristesse, mais aussi de colère et


de rage constituent des réactions normales et fréquentes lorsque
l’on partage la vie d’une personne malade. La personne qui porte
assistance au malade doit être autant ménagée que le malade
lui-même. Si vous êtes l’ami ou le proche d’une personne malade
psychiquement, renseignez-vous sur les difficultés éventuelles de
ce rôle. Parlez-en avec des amis ou des personnes vivant la même
situation, rejoignez éventuellement un groupe d’entraide. N’hésitez
surtout pas, dans ces moments difficiles, à solliciter vous-même de
l’aide!

• Lorsque la dépression se dissipe enfin, apportez votre aide pour pré-


venir la rechute. Incitez votre proche à se présenter aux rendez-vous
thérapeutiques ou de contrôle. Si nécessaire, motivez-le à prendre
régulièrement ses médicaments pour éviter la réapparition de la
maladie. Lorsque leur état s’améliore, les personnes dépressives ont
souvent du mal à continuer leur traitement. Vos encouragements
sont alors les bienvenus.

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LECTURE ET ADRESSES UTILES
Lectures conseillées

J’ai envie de comprendre la dépression. Auteur: S. Soumaille; Éditeur:


Médecine & Hygiène; ISBN: 2-880-49143-6

Des troubles anxieux à la dépression. Auteur: A. Pelissolo; Éditeur:


Phase 5; ISBN: 9-782-91543956-4

Le miroir de Janus – comprendre et soigner la dépression et la maniaco-


dépression.
Auteur: S.P. Tawil; Éditeur: Pocket; ISBN: 9-782-26613602-0

Adresses utiles

Groupes d’entraide

Dans un groupe d’entraide, les malades et leurs proches sentent


qu’ils ne sont pas seuls. Bon nombre de personnes arrivent plus facile-
ment à parler de la pathologie au sein d’un groupe de malades. Elles
y trouvent des informations complémentaires, de la compréhension et
un soutien réciproque dans les moments de crise.

Equilibrium (malades et leurs proches)


www.depressionen.ch, tél. 0848 143 144

Fondation suisse pour la cause des malades psychiques


www.promentesana.ch, tél. 0848 800 858

VASK – Association faîtière de familles de malades souffrant de


schizophrénie ou de troubles psychiques
www.vask.ch, tél. 061 271 16 40

74
www.depression.ch
> téléchargement d’un «Journal des humeurs» au format A4
> téléchargement du «Calendrier des épisodes dépressifs» au format A4

Si vous cherchez quelqu’un à qui parler anonymement


La Main Tendue
www.143.ch, tél. 143

Soutien médical

En cas d’urgence: services d’urgences régionaux

Société Suisse des troubles anxieux et dépressifs


www.sgad.ch

Institut Max Planck de psychiatrie: www.psych.mpg.de

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CH-BRIN-2016.09-00008493 / BRI024 sto.ch

Lundbeck (Suisse) SA, 8152 Glattbrugg, www.lundbeck.ch

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