Économie Verte

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 73

i

L’économie verte nous conduira-t-elle au


développement durable?

Mémoire soumis à la
Faculté des études supérieures et postdoctorales
en vue de l’obtention du grade de maîtrise en
Mondialisation et développement international (M.A.)

École de développement international et mondialisation


Faculté des sciences sociales
Université d’Ottawa
Avril 2013

© Jules Aimable Muhizi, Ottawa, Canada, 2013


ii

Remerciements

Je tiens à remercier profondément mes parents pour leurs accomplissements de


responsabilités à mon éducation et à ma scolarisation qui ont constitué le
fondement de la présente étape franchie. Mes remerciements s’adressent aussi
spécialement à mon épouse et à mes enfants pour le sacrifice enduré le long de
mon parcours académique en supportant mes absences de la maison pour mes
études. Merci aussi à mes sœurs, mes frères, et mes cousin(e)s Eugénie et Eugène,
pour votre soutien divers.

Je dois également exprimer ma profonde gratitude à mon directeur et mon


évaluateur de mémoire, respectivement Professeur Canet Raphaël et Professeur
Beaudet Pierre, pour non seulement avoir accepté ces tâches, mais aussi et surtout
pour leurs sincères conseils, encadrements et encouragements offerts avec une
patente gentillesse et une simplicité exemplaire.

Je ne manquerais en aucun cas de faire preuve de reconnaissance du soutien


financier de la part des Gouvernements Rwandais et Canadien ainsi que de
l’Université d’Ottawa, sans lequel, je ne pourrais réaliser ce rêve.

Enfin, mes sincères remerciements s’adressent à ceux et celles, de proche ou de


loin, qui ont contribué à mon succès universitaire : Professeurs d’Université
d’Ottawa, l’EDIM, collègues de promotion, compagnons à la bibliothèque
Morisset, amis, etc.
iii

Dédicace

Aux victimes du génocide des Tutsis du Rwanda qui rêvaient


poursuivre leurs études jusqu’au niveau de la maîtrise,

À ceux qui ont combattu et arrêté ce génocide, en


particulier le Front Patriotique Rwandais Inkotanyi,

À mes enfants, à qui je souhaite


d’aller plus loin dans leurs études,

Je dédie le fruit de mon labeur.


iv

Table des matières


1. Introduction ....................................................................................................................... 1
1.1. Contexte problématique du développement durable......................................... 1
1.2. Question de recherche et hypothèse .................................................................... 6
1.3. Plan de travail ....................................................................................................... 7
2. Cadre conceptuel, théorique et méthodologique ............................................................ 9
2.1. Définitions des concepts ........................................................................................ 9
2.1.1. Le développement durable ...................................................................... 9
2.1.2. L’économie verte .................................................................................... 10
2.2. Approches théoriques d’analyse ........................................................................ 11
2.2.1. Durabilité faible ...................................................................................... 12
2.2.2. Durabilité forte ....................................................................................... 13
2.3. Cadre méthodologique........................................................................................ 15
2.3.1. Méthode d’analyse de contenu .............................................................. 15
2.3.2. Échantillonnage ...................................................................................... 15
3. Analyse empirique: Cinq étapes d’analyse de contenu et validation de l’hypothèse 19
3.1. Étape de lectures préliminaires et repérage « des énoncés » .......................... 19
3.2. Étape d’identification des catégories d’analyse ............................................... 20
3.3. Étape de choix et classification des unités de sens ........................................... 21
3.4. Étape de description scientifique ....................................................................... 22
3.4.1. Tableau récapitulatif des catégories et unités de sens ......................... 23
3.4.2. Contraintes de catégorisation................................................................ 31
3.5. Étape d’interprétation ........................................................................................ 32
3.5.1. Document du PNUE .................................................................................. 33
3.5.2. Document de l’OCDE ............................................................................... 40
3.5.3. Déclaration de Rio+20 ............................................................................. 48
3.6. Validation de l’hypothèse de recherche ............................................................ 53
4. Conclusion et recommandations .................................................................................... 56
Bibliographie ............................................................................................................................... 63
v

Liste des acronymes

APD Aide publique au développement

FMI Fonds monétaire international

GES Gaz à effet de serre

GIEC Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

IDE Investissements directs étrangers

OCDE Organisation pour la coopération et le développement économique

OIT Organisation internationale du Travail

OPEP Organisation des pays producteurs de pétrole

PAM Programme alimentaire mondial

PIB Produit intérieur brut

PNUE Programme des Nations Unies pour l’environnement

RNB Revenu national brut


1

1. Introduction

La partie introductive de ce mémoire offre une mise en contexte de la thématique du

développement durable en mettant en exergue la problématique de recherche, la question de

recherche et le plan du travail.

1.1. Contexte problématique du développement durable

Le présent travail de recherche repose sur le thème de développement durable qui, de

nos jours, représente une préoccupation majeure à l’échelle mondiale. À l’origine du concept

dans les années 1980, l’idée poursuivie était de trouver un modèle de développement équilibré

qui intègrerait trois dimensions : la dimension économique, la dimension environnementale et la

dimension sociale. Cela impliquait une modification de la perspective dominante du

développement prioritairement économique, négligeant ainsi les volets social et écologique.

Cependant, plus de deux décennies après l’émergence du concept de développement durable, le

monde est aujourd’hui confronté à une triple crise : économique, écologique et sociale. Ainsi, le

rêve du développement durable est encore loin de devenir une réalité puisque ses trois piliers

sont ébranlés.

Mise à part la récente crise économique déclenchée en 2008, les crises écologique et

sociale existaient bien avant l’invention du développement durable et ont même contribué à son

émergence. De ces deux crises persistantes, la crise écologique a attiré l’attention du monde

scientifique, mais aussi du monde politique à l’échelle de la planète. Elle est imputée aux

activités économiques anthropiques polluantes. Celles-ci sont responsables, non seulement d’une

production à grande échelle des gaz à effet de serre (GES) qui conduisent au phénomène du

réchauffement climatique, mais également à l’épuisement des ressources naturelles du fait de


2

leur surexploitation. Les résultats de recherche attribuent « le réchauffement récent avec une

probabilité supérieure à 90% à l’impact anthropique » (Mélières et al., 2010, p.269). Selon le

GIEC (2007, p.5), la contribution de l’activité humaine dans les émissions mondiales a connu

une hausse de 70% entre 1970 et 2004, mais, durant la même période, « [l]es rejets annuels de

dioxyde de carbone (CO2) – le plus important gaz à effet de serre anthropique – ont progressé de

80 % ».

Le déséquilibre environnemental qui en résulte questionne l’avenir de la planète de par

les menaces sérieuses qui mettent en péril des biens communs fondamentaux qui garantissent la

survie même de l’humanité : l’eau, l’air, les sols et les écosystèmes (Badie et al., 1999). Malgré

le débat controversé sur les enjeux climatiques durant les dernières années, aujourd’hui, « les

scientifiques sont quasi unanimes : les changements climatiques sont réels, et ils sont en cours »

(Sénat du Canada, 2010, p.19). Selon les climatologues, le danger du réchauffement planétaire

atteint le point critique : le « point de non-retour climatique » (Hari, 2011, p.191). En effet, le

réchauffement climatique global implique deux grandes conséquences qui menacent l’espèce

vivante, à savoir : l’augmentation de la température et du niveau de la mer. D’une part, comme

en témoigne le quatrième rapport du GIEC, la planète a connu une hausse linéaire de

réchauffement se situant entre 0,6 et 0,8 °C sur l’ensemble du 20e siècle (GIEC, 2007). Cette

tendance est inquiétante car, « un accroissement de température de 2°C de la planète, par rapport

au niveau préindustriel, constitue un seuil fatidique au-delà duquel la capacité des sociétés et des

écosystèmes à s’adapter est menacée » (Poulin, 2011, p.12-13). Outre cette augmentation

généralisée des températures dans le monde, le GIEC soulève la problématique de l’élévation du

niveau de la mer, en concordance avec le réchauffement planétaire, qui a atteint en moyenne 1,8

mm/an depuis 1961 et de 3,1 mm/an depuis 1993. Cela, « sous l’effet de la dilatation thermique
3

et de la fonte des glaciers, des calottes glaciaires et des nappes glaciaires polaires » (Ibid.). Au

vue de cette tendance, Giraud (2010, p.24) présume que l’« élévation du niveau des océans de 1

à 2 m d’ici la fin du siècle [occasionnerait] 250 millions de réfugiés climatiques avant 2050

». À la suite des effets irréversibles dus aux dégâts causés à l’environnement par l’activité

humaine, « la crise écologique met en danger la vie de millions de gens et peut-être même la vie

sur terre, du moins dans plusieurs régions » (Poulin, 2011, p.14). Par ailleurs, la modification

profonde des conditions d’existence sur la planète Terre due à la détérioration environnementale

affecte tous les êtres vivants, tant les espèces humaine, animale que végétale. Selon Jurgensen

(2009), le coût de la négligence et de la passivité dont le monde a fait preuve en matière

d’environnement ne cesse d’augmenter. « Le choc écologique serait […] comparable à celui de

la crise de 1929 ou d’une guerre mondiale » et le coût de la facture écologique atteindrait « une

somme colossale de 5 500 milliards ». Les estimations prétendent « les pertes moyennes de

l’ordre de 1,5 à 5 % du PIB mondial pour un réchauffement de 4 °C » (Ibid., p.103).

Cependant, les effets pervers du modèle actuel de développement ne se limitent pas à la

détérioration de l’environnement, l’équité sociale en est tout autant affectée. Selon l’OIT (2011),

l’ère de la mondialisation est dépourvue d’une dimension sociale et génère des rapports sociaux

asymétriques et des opportunités inégales, ainsi que des écarts de revenus au sein des pays et des

écarts de développement entre les pays. Les inégalités grandissantes qui en découlent engendrent

des conséquences perverses en matière de bien-être et de protection sociale auprès d’une

importante couche de la population. D’après l’inventaire de l’OIT (2011) des indicateurs de

disparités sociales, l’étendue du défi social mondial est importante : Environ 1,4 milliard de

personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour. Jusqu’à 2,6 milliards, soit 37% de la

population mondiale, sont dépourvus de système de latrine basique dont 1/3 sans accès à l’eau
4

potable. On compte 1,75 milliard de personnes qui vivent en situation de « pauvreté

multidimensionnelle » dont 925 millions souffrant de famine chronique. Sur ce, Ziegler (2011)

déplore qu’il y ait un mort de faim toutes les cinq secondes pendant que la production agricole

mondiale est capable de nourrir 12 milliards d’humains. Nous ne sommes pourtant que 7

milliards aujourd’hui sur terre. Parmi les facteurs causaux, l’on reproche au système dominant

libéral, l’absence d’une répartition équitable de la richesse. Pour Guay (2011, p.145), « [à]

l’échelle mondiale, une part croissante de la valeur ajoutée créée dans les entreprises a été

accaparée par les actionnaires [et les gestionnaires] au détriment des travailleuses et

travailleurs ». De là, les richesses mondiales se trouvent concentrées aux mains d’une poignée de

personnes : 2% de la population mondiale détient 50% du patrimoine mondial, au moment où

« 50% de l’humanité n’en détient que 1% ». La fortune des trois personnes les plus riches a une

valeur nette excédant le PIB des 50 pays les plus pauvres (Poulin, 2011).

Concernant la crise économique actuelle déclenchée en 2008, elle est considérée comme

la pire crise économique depuis la Deuxième Guerre mondiale (Keeley et Love, 2010). Comme

l’ont constaté ces auteurs, en 2009, elle a laissé derrière elle de multiples conséquences : la

contraction économique a atteint un sommet inégalé depuis 1945, avec récession de 2,1% dans la

zone de l’OCDE. À l’échelle mondiale, au cours de la même année, le volume des flux

commerciaux a connu une baisse remarquable de 12% (Ibid.). La crise économique a également

affecté le marché de l’emploi dont le taux de chômage est passé de 5.8%, avant la crise en 2007,

à 8.7% en 2011 (Nations Unies, 2012). Elle a été responsable d’une chute drastique des flux des

capitaux. Par exemple dans les pays de l’OCDE, le volume des IDE entrants a baissé de 35 % et

les flux sortants de 19 % entre 2007 et 2008 (OCDE, 2009). Dans le monde en développement,

en 2009, les IDE entrants ne représentaient que 30% de ce qu’ils étaient l’année précédente
5

(Keeley et Love, 2010). Aux effets de la récession, l’on ne peut oublier l’héritage d’un

endettement important grâce auquel les gouvernements ont mené le sauvetage des institutions

financières afin de relancer l’activité économique. Dans les pays de l’OCDE, en 2011, la dette

publique s’estimait aux environs de 100% du PIB (Ibid.). L’on ne peut s’empêcher de

mentionner l’impact de cette crise sur la flambée des prix des denrées alimentaires dans le

monde, associée à la hausse du prix du carburant (PAM, 2009). Selon le FMI (2011), avec la

persistance de la crise dans la zone euro, la sortie de la crise pourrait se prolonger au risque

d’une nouvelle dégradation économique. Bien que le déclenchement de la crise fût constaté aux

États-Unis, elle s’est rapidement transformée en une grande crise économique mondiale suite au

contexte actuel de la globalisation marquée par des interdépendances des marchés et des

économies nationales. Toutefois, la crise a révélé la défaillance du système de régulation

financière et monétaire internationale (Keeley et Love, 2010). Une déréglementation du secteur

financier donne lieu à la spéculation qui risque d’ignorer la prise en compte de l’économie réelle

et conduire à une crise (Ibid.). Cette crise a renforcé la remise en question du modèle

économique actuel hérité du Consensus de Washington (Hakim et al., 2010) qui en a défini les

principes directeurs ayant pour finalité la libéralisation économique.

Ainsi, face à ces enjeux sociaux, environnementaux et économiques, différents auteurs

convergent sur la nécessité d’un changement du modèle actuel de développement, bien qu’ils

divergent sur les voies et moyens à emprunter. De là, le compromis autour du développement

durable devient plus que jamais irrépressible. C’est un modèle de développement capable

d’assurer une économie prospère et respectueuse de l’impératif environnemental, tout en

garantissant l’équité sociale aussi bien dans le processus de production que dans le partage du

fruit de ce travail.
6

Mais dans cette recherche de modèles alternatifs de développement, une nouvelle

approche gagne du terrain, se voulant une meilleure stratégie pour atteindre le développement

durable. Il s’agit du concept d’« économie verte », lancée en 2008 par le PNUE, pour lequel une

large majorité d’acteurs internationaux manifestent un grand intérêt.

1.2. Question de recherche et hypothèse

Le contexte de triple crise rapidement décrit ci-dessus révèle la fragilité du modèle actuel

de développement et justifie l’idée de refonder le développement dans une perspective durable.

Bien que la perception de durabilité soit loin d’être unanime, la tendance émergente à l’échelle

globale privilégie la stratégie d’« économie verte » communément appelée « croissance verte »

pour atteindre le développement durable. Notons néanmoins que, en marge de cette stratégie

hégémonique, d’autres courants, notamment « la décroissance » et « l’écosocialisme », affichent

des positions diamétralement opposées sur la durabilité et ses stratégies de mise en œuvre.

Malgré tout, l’économie verte s’est récemment imposée à Rio lors de la conférence des Nations

Unies sur le développement durable (Rio+20) tenue en juin 2012 (Nations Unies, 2012). Ainsi, le

choix préférentiel de ce concept pour mettre en œuvre le développement durable suscite un

questionnement : l’économie verte permet-elle de cheminer vers un développement durable?

Notre travail de recherche aura donc pour but de répondre à cette question.

Considérant que l’hypothèse est « une prédiction concernant une relation entre deux ou

plusieurs variables » (Lefrançois, 1992, p.46) , et en nous référant à notre question de recherche

d’où se dégagent deux variables, économie verte en tant que « variable dépendante » et

« développement durable en tant que « variable indépendante » (Ibid., p.159), nous pensons, en

termes d’hypothèse de recherche, que l’économie verte nous permettrait de cheminer vers
7

la mise en œuvre du développement durable. Cela suppose que la stratégie d’économie verte

peut simultanément favoriser la reprise et la stimulation de la croissance économique, la

promotion du développement social et l’atténuation des défis environnementaux. Pour mesurer la

validité de cette hypothèse, le seul et unique indicateur effectif qui prouverait que l’économie

verte est susceptible de conduire à la mise en œuvre du développement durable est la présence

d’une approche englobant les trois dimensions du développement durable dans la stratégie de

mise en œuvre de l’économie verte. Dans l’espoir que l’économie verte puisse permettre la mise

en œuvre du développement durable, il faut qu’elle reflète impérativement une approche intégrée

caractérisée par une considération des trois dimensions du développement durable de façon

simultanée. Le manque d’équilibre dans les mesures visant chacune de ces dimensions

représenterait un modèle sectoriel ou étapiste sur lequel repose le statu quo où elles subissent un

traitement différencié en priorisant les unes aux autres, comme c’est le cas actuellement avec la

suprématie de la dimension économique. Bien entendu, la présence d’une approche intégrée

n’implique pas forcement l’atteinte du développement durable, du fait que l’existence formelle

théorique d’une approche est une chose, et sa concrétisation pratique en est une autre.

1.3. Plan de travail

Le présent travail de recherche est subdivisé en quatre parties. La première partie

introductive comporte, comme nous l’avons mentionné plus haut, l’analyse contextuelle du

développement durable à travers laquelle est présentée la problématique de recherche, la

formulation de la question et de l’hypothèse de recherche, et le plan de travail. La deuxième

partie présente le cadre conceptuel, théorique et méthodologique de la recherche. Dans cette

partie, nous allons dans un premier temps définir deux concepts clés pour notre étude, à savoir
8

les concepts de développement durable et d’économie verte. Dans un second temps, nous verrons

les approches théoriques interprétatives du développement durable qui serviront dans l’analyse

du concept d’économie verte en tant outil privilégié pour atteindre le développement durable. En

troisième lieu, nous décrirons la démarche méthodologique de l’analyse de contenu que nous

allons utiliser et la détermination de l’échantillon de recherche. La troisième partie sera

consacrée à l’analyse empirique où sera articulée la recherche proprement dite. L’analyse

s’effectuera à travers un processus de cinq étapes d’analyse de contenu et sera close par une

phase de validation de l’hypothèse. Enfin, la quatrième et dernière partie concluante fournira une

synthèse des principaux éléments issus de la recherche, les recommandations et une ouverture

vers des recherches ultérieures qui pourraient prolonger la présente analyse.


9

2. Cadre conceptuel, théorique et méthodologique

2.1. Définitions des concepts

De notre question de recherche se démarquent deux concepts fondamentaux, le

développement durable et l’économie verte, dont les définitions choisies et données ci-dessous

reflètent la perspective de notre recherche.

2.1.1. Le développement durable

Apparu en 1987, le développement durable est un concept qui a émergé d’un long

processus de réflexions et de débats autour d’un modèle de développement qui soit à la fois

quantitatif et qualitatif, et bâti sur trois piliers : écologique, économique et social (Lévêque et al.,

2008). Selon sa définition célèbre, telle que formulée dans le rapport dit Brundtland de la

Commission mondiale sur l’environnement et le développement de l’ONU, « le développement

durable, c’est s’efforcer de répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des

générations futures de satisfaire les leurs » (Smouts, 2005, p.1). Le concept de développement

durable est conçu pour corriger les insuffisances du paradigme dominant de développement

ayant pour seul critère principal la croissance économique. Sa préoccupation est d’intégrer les

dimensions environnementale et sociale dans le processus du développement afin d’atténuer les

déséquilibres écologique et social qu’engendre le modèle économique libéral voire même

socialiste. Ainsi, il s’est imposé en tant qu’un compromis devant établir un équilibre entre trois

priorités : le maintien de « l’intégrité de l’environnement », l’assurance de l’« équité sociale » et

la nécessité de « l’efficience économique » (Poisson de Haro, 2011, p.56).


10

Selon le concept, ces trois piliers sont accompagnés et complétés par trois principes :

soit la solidarité, la précaution et la participation. Le premier principe renvoie à la « solidarité

entre les peuples et les générations » avec laquelle le développement deviendrait profitable à

tous, aujourd’hui et dans l’avenir. Beaumais et al. (2001) rejoignent ce principe en notant que

parler d’équité intergénérationnelle suppose avant tout de réaliser l’équité intragénérationnelle

qui la conditionne. Le second principe est en rapport avec la prudence dont doivent faire preuve

les acteurs dans le domaine du développement pour limiter les conséquences sur

l’environnement. Le dernier principe de participation veut que la population soit associée aux

processus de prise de décision (Cohen-Bacrie, 2006).

Le concept de développement durable implique aussi deux concepts sous-jacents. D’abord, il y

a le « concept des besoins » qui met l’accent sur les besoins fondamentaux des plus démunis

auxquels la priorité doit être accordée pour leur assurer les besoins essentiels. Ensuite, il évoque

« l’idée des limitations que l’état de nos techniques et de notre organisation sociale imposent sur

la capacité de l’environnement à répondre aux besoins actuels et à venir » (Abdelmalki et al.,

1995, p.289).

2.1.2. L’économie verte

Pour le PNUE (2011, p.2), l’économie verte est « une économie qui entraîne une

amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale tout en réduisant de manière significative

les risques environnementaux et la pénurie de ressources. Sous sa forme la plus simple, elle se

caractérise par un faible taux d’émission de carbone, l’utilisation rationnelle des ressources et

l’inclusion sociale ». Lacarrière (2011, p.184) la définit comme « un modèle de développement

moins dépendant des énergies carbonées, mais sans pour autant renoncer aux modes de vie et
11

habitudes de consommation qui les caractérisent ». Ce type d’économie traduit une parfaite

conciliation de la durabilité environnementale et de la croissance économique pour former ce que

Jurgensen (2009, p.101) appelle « l’éconologie ». Selon Perret (2010), l’économie verte repose

sur six principaux principes: privilégier les ressources renouvelables; utiliser les ressources rares

de manière efficiente; réutiliser, réparer, recycler; utiliser en priorité les ressources locales pour

éviter les dépenses d’énergie associées au transport; maintenir la diversité en évitant « du one

best way, la spécialisation et la standardisation »; tenir compte des interdépendances et favoriser

la coopération. Ce concept, promu par le PNUE, est aujourd’hui présenté comme une stratégie de

mise en œuvre du développement durable, la plus adéquate pour répondre aux défis de nourrir 9

milliards de personnes à l’horizon 2050 et de stabiliser d’urgence le climat (PNUE, 2011).

2.2. Approches théoriques d’analyse

Ce premier travail de réflexion sur nos deux concepts clés, nous permet déjà de

remarquer que l’un, le développement durable, se présente comme une finalité alors que l’autre,

l’économie verte, comme un moyen de l’atteindre. Les deux sont si intimement liés que le cadre

théorique les englobant n’est pas distinct. Nous nous référerons principalement à deux approches

fondamentales en confrontation qui tentent, aujourd’hui, d’interpréter le développement durable,

à savoir l’approche de durabilité faible et de durabilité forte. Cependant, le développement

durable est un concept assez large et aux « contours flous ». Le manque de précision dans son

contenu normatif, tel qu’il est conçu dans le rapport Brundtland, fait qu’il est sujet à diverses

interprétations (Abdelmalki et al., 2010). Ainsi, le cadre conceptuel du développement durable

ne pouvant faire l’unanimité, l’analyse théorique peut différer selon l’angle priorisé :
12

économique, écologique ou éthique (Vallée, 2002). C’est dans cet esprit qu’ont émergé les deux

approches de durabilité, faible et forte, qui s’opposent diamétralement.

2.2.1. Durabilité faible

Selon Blaise (2011), l’approche dite de « durabilité faible » est axée sur la logique de

« l’économie de l’environnement » et porte son analyse sur l’angle exclusivement économique.

La dimension économique est donc prédominante et la dimension sociale est marginalement

considérée à travers l’équité intergénérationnelle que les tenants de cette approche conçoivent de

façon singulière. En effet, cette vision préconise que « les facteurs de production sont totalement

substituables » (Abdelmalki et al., 2010, p.76). Cela signifie que pour l’approche de la durabilité

faible, la règle veut que « la somme du capital naturel et du capital construit doit être maintenue

constante » afin de permettre le remplacement du capital naturel par le capital construit

(Mancebo, 2008, p.54). Ainsi, la génération actuelle doit faire preuve d’utilitarisme, de

rationalité et d’efficacité économiques pour valoriser les ressources disponibles et réinvestir la

rente réalisée dans un « capital reproductible » profitable pour les générations futures (Vallée,

2002). Donc, il n’est pas question d’épuisement des ressources naturelles et de dégradation de

l’environnement car les acquis du progrès technologique accompagnés par les investissements

sont susceptibles de produire des substituts. Sur ce, il importe de mettre l’accent sur la recherche

et développement ainsi que sur la croissance de l’efficacité (Ibid.). En matière de préoccupation

environnementale, les « écocentristes » partagent la perception de durabilité faible et nient

carrément l’existence des contraintes écologiques (Bontems et al., 2007). Leur foi dans les vertus

innovantes et salvatrices de la technologie fait que cette vision ne se soucie pas des limites de la

nature et considère que les ressources naturelles doivent être mises à la disposition de la
13

croissance économique. Cette approche de durabilité faible a été critiquée par Blaise (2011) qui

estime qu’avec des enjeux de changement climatique, l’on ne peut se fier sur le rapport coût-

bénéfice pour guider le comportement des agents économiques. Mancebo (2008) remarque

également que l’équité intergénérationnelle ne peut être assurée par le marché étant donné les

défaillances de celui-ci à assurer une allocation efficiente des ressources et son impuissance à

« juger la valeur future » de celles-ci.

2.2.2. Durabilité forte

Quant à l’approche de « durabilité forte », elle est prônée par les tenants de

« l’économie écologique » et repose sur l’inclusion de l’impératif environnemental dans

l’appareil productif. De ce point de vue, il ne s’agit pas d’une simple protection de

l’environnement, mais plutôt des réformes en profondeur de l’économie, en prenant en compte

non seulement des enjeux environnementaux, mais aussi sociaux (Bontems et al., 2007). Donc,

contrairement aux tenants de la durabilité faible, les défenseurs de la durabilité forte privilégient

« l’existence des contraintes écologiques absolues » (Vallée, 2002, p.45). L’idée de

substituabilité totale entre capital technique et capital naturel reconnue par la durabilité faible est

quasiment réfutée par la durabilité forte. « Alors que le capital technique reproductible peut

toujours être modifié en hausse ou en baisse, la diminution du capital naturel est, elle, souvent

irréversible » (Ibid.). Cette approche reconnait l’existence d’un seuil de préservation obligatoire

du capital naturel pour s’assurer de la fourniture des biens et services irremplaçables (Mancebo,

2008). En revanche, la durabilité forte croit à la complémentarité du capital naturel du capital

reproductible. Elle est également convaincue de la possibilité de réconciliation entre l’économie

et l’écologie (Vallée, 2002). Néanmoins, bien que l’approche de durabilité forte se montre
14

appropriée à la mise en œuvre du développement durable, force est de constater que la dimension

sociale requiert ou prend moins d’importance dans le débat par rapport aux deux autres

dimensions. On constate aussi une profonde contradiction lorsque le souci de préservation

environnementale ignore le dynamisme de l’environnement et l’inévitable niveau de

transformation due à la subsistance humaine (Mancebo, 2008).

Enfin, l’analyse comparative de Mancebo sur les deux formes de durabilité se résume de
la façon suivante :

Degré de Idée-clé Conséquence Terme-clé Enjeu du


durabilité développement
durable
capital naturel et certaines actions capital naturel Préserver les stocks
Durabilité capital construit humaines critique de capital naturel
forte ne peuvent être conduisent à des irremplaçable
substitués de manière irréversibilités
parfaite
capital naturel et la somme du Allocation Trouver des
capital construit capital optimale solutions
Durabilité sont parfaitement naturel et du des ressources techniques dites
faible substituables capital « propres » pour
construit doit être remplacer produits et
maintenue procédés, ou
constante restaurer
l’environnement

Source : Mancebo, 2008, p.53

En reliant le cadre conceptuel et théorique, nous sommes persuadés que la philosophie de

durabilité forte reflète mieux la perspective du développement durable du fait de la valorisation

du capital naturel, dont on reconnait les limites irréversibles, et la prise en compte des facteurs

sociaux. Bref, nous nous servirons de ces deux approches théoriques pour analyser et situer le

concept d’économie verte dans l’univers de la durabilité afin de pouvoir évaluer son impact dans

la mise en œuvre du développement durable.


15

2.3. Cadre méthodologique

Afin de procéder à la validation de notre hypothèse, il nous revient de déterminer une

démarche méthodologique à suivre. Celle-ci indique le cheminement qui permet de mener notre

recherche à terme, en confirmant ou infirmant l’hypothèse de recherche. Ainsi, notre démarche

déductive et qualitative va reposer sur la méthode de l’analyse de contenu avec laquelle nous

aurons à analyser en profondeur trois principaux documents qui relatent la mise en action de

l’économie verte à des fins de réalisation du développement durable.

2.3.1. Méthode d’analyse de contenu

Selon Campenhoudt et Quivy (2011, p.207), la méthode d’analyse de contenu satisfait

aux exigences « de la rigueur méthodologique et de la profondeur inventive ». Dans sa

dimension d’approche qualitative et intensive, l’analyse porte sur « un petit nombre

d’informations complexes et détaillées [ayant] comme information de base la présence ou

l’absence d’une caractéristique ou la manière dont les éléments du ‘‘discours’’ sont articulés les

uns aux autres » (Ibid.). Pendant que dans une recherche quantitative, l’analyse de contenu

s’intéresse à la fréquence, pour la recherche qualitative, « la notion d’importance implique […]

la valeur d’un thème […] » (Grawitz, 1993, p.536). Concernant notre recherche, nous allons

utiliser l’analyse de contenu pour examiner la présence ou non de l’approche intégrée du

développement durable dans les documents guides de l’économie verte choisis.

2.3.2. Échantillonnage

Ainsi, notre échantillon est constitué de trois documents de vulgarisation de l’économie

verte que nous avons jugés pertinents et objectivement acceptables compte tenu de leur légitimité
16

internationale liée à l’identité des organisations qui en sont les auteurs. Le choix de trois

documents plutôt qu’un seul s’inscrit, non seulement dans une logique d’échantillonnage

représentatif bien que la représentativité de l’échantillon ne soit pas un élément déterminant en

recherche qualitative, mais aussi dans une démarche de triangulation d’informations pour la

fiabilité des résultats de recherche (Rongère, 1975, p.60). Leur choix s’inspire de la méthode

non probabiliste des choix raisonnés du fait de la nature et de la spécificité de l’objet d’analyse

(Lefrançois, 1992, p.221). De là, nous avons retenu les trois documents suivants :

2.3.2.1. Document du PNUE


« Vers l’économie verte »

Le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) a publié, en 2011, un document

ayant pour titre : « Vers une économie verte : Pour un développement durable et une éradication

de la pauvreté ». Ce rapport est centré sur la promotion du concept d’économie verte pour relever

les défis auxquels est confronté le développement durable. Ce fut le premier document officiel de

vulgarisation du concept d’économie verte, d’où la considération du PNUE comme étant son

initiateur. Ce document de 44 pages nous est absolument indispensable pour notre recherche

puisqu’il porte sur les deux concepts dont nous voulons analyser le lien relationnel. Notons aussi

que la réalisation de ce document s’inscrit dans la contribution du PNUE au processus de Rio+20

au centre duquel étaient placés les concepts d’économie verte et de développement durable

comme nous allons le voir dans les pages qui suivent. Bref, ce document constitue une « feuille

de route » pour Rio+20 (PNUE, 2011, p. iv).


17

2.3.2.2. Document de l’OCDE


« Vers une croissance verte »

L’auteur de ce document, l’OCDE, est une grande organisation de coopération et de

développement économique dont la mission est de mener des études thématiques visant

l’amélioration du bien-être économique et social et de les mettre à la disposition des États pour

leur mise en application. Ses 34 pays membres comptent les plus grandes économies nationales

du monde et l’organisation entretient des relations de partenariat avec les économies émergentes

non membres, ce qui témoigne de l’ampleur de son influence sur les politiques gouvernementales

à travers le monde. Lors de son 50e anniversaire, en 2011, elle a publié le document « Vers une

croissance verte » qui donne un cadre stratégique d’action pour une nouvelle économie dite

verte. Elle le considère comme une contribution à la réalisation des objectifs de Rio+20 (OCDE,

2011). Ainsi, ce document de 160 pages est déterminant dans l’orientation du concept et mérite

de faire partie de notre corpus.

2.3.2.3. La déclaration finale de Rio+20

C’est un document de 60 pages ayant comme titre « L’avenir que nous voulons », qui constitue la

Déclaration finale de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20)

qui s’est tenue à Rio de Janeiro au Brésil du 20 au 22 juin 2012. Ce document constitue le plus

récent outil marquant l’actualisation de l’engagement politique international pour la réalisation

du développement durable à travers la nouvelle approche de l’économie verte. La pertinence de

cette déclaration s’explique non seulement par le fait qu’elle est d’actualité et qu’elle émane des

Nations Unies, la plus importante organisation internationale renfermant la quasi-totalité des

pays du globe, mais également par le fait que le thème de la conférence coïncide parfaitement

avec notre thème de recherche.


18

À travers l’analyse de contenu de ces trois documents qui forment notre corpus

d’enquête, le but de notre recherche est de retracer et d’évaluer si les tenants de l’économie verte

accordent la même importance aux trois piliers du développement durable, contrairement au

modèle traditionnel de développement. Donc, nous aurons, d’une part, à retracer la présence

(existence) du lien entre l’économie verte et chacune des trois dimensions du développement

durable, et d’autre part, à évaluer le contenu pour le qualifier soit d’approche intégrée, soit

d’approche sectorielle ou étapiste afin de valider notre hypothèse. Seule la perspective intégrée

pourra confirmer notre hypothèse. Pour faire preuve d’objectivité dans notre analyse, nous serons

tenus d’adopter un comportement d’« innocence de l’état d’esprit » qui exige au chercheur de se

placer au-delà de ses opinions personnelles afin d’observer la rupture épistémologique (Leray,

2008).
19

3. Analyse empirique: Cinq étapes d’analyse de contenu et validation de


l’hypothèse
La présente partie est fondamentale pour notre recherche qualitative d’analyse de

contenu. Cette technique « s’est construite contre les risques d’interprétation subjective des

textes, par les opérateurs » (Mucchielli, 2006, p.37), d’où sa capacité d’exploiter totalement et

objectivement « des données informationnelles » (Ibid., p.24). Comme le recommande Rongère

(1975, p.55), « analyser c’est décomposer le contenu d’un ensemble complexe en éléments plus

simples, pour classer ces éléments, puis éventuellement en mesurer », le sens et la valeur

relative, dans le cas d’une recherche qualitative. En s’inspirant du modèle général des étapes de

l’analyse de contenu proposé par L’Écuyer (1990), notre démarche méthodologique va reposer

sur cinq étapes, lesquelles traduisent la rigueur objective et méthodique requise pour toute

recherche scientifique. Par ordre successif, ces étapes sont : (1) lectures préliminaires et

repérage des énoncés ; (2) identification des catégories d’analyse ; (3) choix et classification des

unités de sens ; (4) description scientifique et (5) interprétation des résultats.

3.1. Étape de lectures préliminaires et repérage « des énoncés »

Cette première étape est essentielle pour plusieurs raisons. Elle permet l’acquisition du

« sens général » et la familiarisation avec les concepts clés du document à analyser. Elle vise

également le repérage des « principales particularités » sur lesquelles les analyses subséquentes

vont reposer. Il s’agit en quelques sortes d’identification des « idées forces » (L’Écuyer, 1990,

p.57-58). Ainsi, cette étape prépare particulièrement les suivantes, celles relatives à la

catégorisation et au choix des unités informationnelles. L’exercice demande de lire et de relire


20

les trois documents du corpus. Ainsi, le processus d’exploitation des documents suit une

approche itérative tant que l’analyse de contenu n’est pas encore arrivée à terme.

3.2. Étape d’identification des catégories d’analyse

La technique d’analyse de contenu demande, pour la deuxième étape, de déterminer les

catégories d’analyses qui « servent à ranger les éléments du contenu du texte à analyser »

(Rongère, 1975, p.55). Autrement dit, les catégories représentent « des rubriques significatives »

qui reflètent la classification du contenu en fonction de l’objectif de recherche (Grawitz, 1993,

p.543). L’identification des catégories d’analyses constitue une étape cruciale de la technique

d’analyse de contenu car, « dans l’analyse documentaire, c’est par le moyen des catégories, que

l’analyste va recueillir les données » (Ibid.). De ce fait, la détermination des catégories doit

répondre aux trois qualités essentielles : l’objectivité, l’exhaustivité et l’exclusivité (Rongère,

1975, p.56). L’objectivité renvoie à la clarté des caractéristiques des catégories dont chacune des

définitions doit être « univoque ». Pour l’exhaustivité, la démarche exige le traitement intégral

du contenu du document analysé afin de repérer tous les éléments significatifs à catégoriser.

Quant à l’exclusivité, aucun élément ne peut être classé dans plus d’une catégorie, ce qui

implique la distinction nette des catégories de manière à ce que les ambiguïtés et les

chevauchements ne puissent avoir lieu (Ibid.). À la lumière des conditions techniques de

catégorisation, et conformément à notre hypothèse de recherche, nous pouvons définir trois

catégories d’analyse axées sur les trois dimensions du développement durable dont nous

voulons évaluer l’existence dans la stratégie d’économie verte :

- Catégorie économique : Dans cette catégorie, seront classées toutes les stratégies

d’économies vertes reliées aux objectifs de croissance économique.


21

- Catégorie environnementale : Cette catégorie va renfermer ce que préconise l’économie

verte en termes de préoccupation écologique ou de protection environnementale.

- Catégorie sociale : Tous les éléments relatifs au développement social, au bien-être

social et à l’équité sociale, contenus dans l’économie verte seront classés dans cette

rubrique.

Ainsi, l’on peut se demander sur quelle base s’est faite la détermination de ces trois

catégories. Notre approche de catégorisation s’inscrit dans « le modèle B, ou modèle fermé »

proposé par L’Écuyer (1990, p.66). Selon cet auteur, il existe trois types de modèle de

catégorisation : le modèle A ou modèle ouvert, le modèle B ou modèle fermé et le modèle C ou

modèle mixte (Ibid., p.65-66). Le modèle B ou fermé dont nous nous sommes servi consiste « en

ce que les catégories sont prédéterminées, c’est-à-dire fixées par le chercheur dès le départ; il

s’agit alors pour ce dernier de vérifier le degré avec lequel ces catégories peuvent être retrouvées

ou non dans le matériel analysé; ces catégories sont habituellement immuables, c’est-à-dire

qu’elles ne peuvent être modifiées en cours de route » (Ibid., p.66). Étant donné qu’une catégorie

est assez large, pour faciliter la clarification et la compréhension des éléments d’analyse, la

technique d’analyse de contenu appelle au choix des unités qui doivent être classées au sein

d’une catégorie.

3.3. Étape de choix et classification des unités de sens

Dans chacune des catégories, sont classées « des unités de sens » communément appelées

des « des unités de contexte » (L’Écuyer, 1990, p.60). En recherche quantitative, elles prennent

le nom d’« unités de numération » ou « d’enregistrement ». Pour l’analyse de contenu en

recherche qualitative, « l’essentiel est le sens, non la forme » (Mucchielli, 2006, p.42). Il s’agit
22

« des thèmes, mots, … reconnus comme significatifs » dont l’analyse qualitative « se borne à

relever la présence ou l’absence » (Rongère, 1975, p.56). Ces unités de signification aussi

reconnues sous le nom d’« énoncés » ont « le grand mérite de demeurer constamment et

exclusivement liées à l’identification des éléments du texte possédant un sens complet en eux-

mêmes » (L’Écuyer, 1990, p.61). Et comme l’indique le même auteur « [l]es critères du choix

d’un type d’unité plutôt qu’un autre reposent sur des impératifs bien précis dictés par les

objectifs mêmes de la recherche » (Ibid., p.59). Ainsi donc, à travers les lectures des documents,

nous avons procédé à la classification des unités de sens rencontrées en fonction « du degré

d’apparentement » (Ibid., p.74) à l’une ou l’autre parmi les trois catégories.

3.4. Étape de description scientifique

Cette phase procède à une analyse descriptive qui a pour but de compiler les unités de

sens dans les catégories d’analyse correspondantes. En effet, « [l]’analyse qualitative consiste à

décrire les particularités spécifiques des différents éléments regroupés sous chacune des

catégories et qui se dégagent en sus des seules significations quantitatives » (L’Écuyer, 1990,

p.107). Ainsi, les unités de sens retracées marquent la preuve de présence de chacune des

dimensions du développement durable dans la stratégie d’économie verte, à travers chacun des

documents de l’échantillon. D’une part, les unités de sens témoignent de la reconnaissance de

l’importance de la dimension, et d’autre part, elles rendent compte si les mesures ou les

stratégies préconisées par le verdissement économique reflètent la prise en compte de chacune

des dimensions du développement durable.


23

3.4.1. Tableau récapitulatif des catégories et unités de sens

Catégories et leurs unités de sens (*)


Documents /
échantillon Catégorie Catégorie Catégorie
économique environnementale sociale
PNUE * « La réalisation du *Aux gouvernements de *Le « modèle de
développement « poser des règles du jeu l’« économie brune » n’a
durable dépend plus favorables aux pas vraiment réussi à
presque entièrement produits écologiques » mettre fin à la
d’une bonne approche (p.1). marginalisation sociale »
économique » (p.2). *Le « modèle de (p.2)
* « Le verdissement l’« économie brune » n’a *L’économie verte « se
des économies ne fait pas vraiment réussi à caractérise par
pas obstacle à la mettre fin à l’épuisement l’inclusion sociale »
création de richesses des ressources » (p.2). (p.2).
et d’emplois » (p.3) *L’économie verte « se * Économie verte comme
« verts » (p.5). caractérise par un faible « stratégie vitale
*Le verdissement taux d’émission de d’élimination de la
économique comme carbone » (p.2) pauvreté persistante »
un nouveau moteur de *La pénurie de ressources (p.3).
croissance (p.3). comme « marque de *L’inégalité sociale
*le verdissement fabrique d’une économie comme « marque de
« génère […] un taux qui est très loin d’être fabrique d’une économie
plus élevé de verte » (p.4). qui est très loin d’être
croissance du PIB, *Économie verte pour verte » (p.4).
mesure classique de la réduire l’empreinte *l’économie verte
performance écologique (p.4). reconnait l’insuffisance
économique » (p.6). * « l’exploitation des de l’agriculture verte à
*« Le ralentissement ressources naturelles sans « garantir un accès
de la déforestation et laisser aux stocks le temps équitable à la nourriture
l’augmentation du de se reconstituer, au prix aux populations
reboisement se de la dégradation de affamées » (p.8).
justifient du point de l’environnement et *Le verdissement de
vue économique » de la perte généralisée l’agriculture susceptible
(p.7). d’écosystèmes » (p.4). de réduire la pauvreté à
*l’agriculture verte *Nécessité d’adoption du travers la hausse de
peut permettre « Système de comptabilité rendement agricole de
d’augmenter les environnementale et 79% en moyenne et des
rendements agricoles économique (SCEE) de la produits écologiques
mondiaux des cultures division statistique des recherchés sur le marché
principales de 10% Nations Unies » pour international (p.10).
(p.8). corriger la mesure par le *«Des investissements
*« Le secteur de la PIB traditionnel ignorant verts représentant
pêche joue un rôle le capital naturel (p.5). environ 0,16 % du PIB
24

essentiel dans le *Poursuivre des « énergies mondial/an permettraient


développement renouvelables et de maintenir l’utilisation
économique », et « la l’utilisation rationnelle des de l’eau sur la planète
valeur des bénéfices ressources, l’efficacité dans des limites durables
du verdissement du énergétique […] et et d’atteindre
secteur de la pêche est l’utilisation rationnelle des les Objectifs du
estimée à environ trois matériaux de fabrication et Millénaire pour le
à cinq fois de l’amélioration de la développement relatifs
l’investissement gestion des déchets » (p.5). à l’eau d’ici 2015 »
nécessaire » (p.10). *le verdissement (p.11).
*Les énergies entraîne « un gain de biens * « Le passage à une
renouvelables environnementaux économie verte vise à
contribuent à « une communs ou de capital augmenter l’accès aux
croissance naturel » (p.6). services et aux
économique solide » * « L’économie verte infrastructures considéré
(P.14). reconnaît la valeur du comme un moyen de
*« Les énergies capital naturel » (p.6). lutte contre la pauvreté et
renouvelables ouvrent *Économie verte pour la d’amélioration de la
des opportunités préservation de la qualité de vie en
économiques biodiversité non seulement général » (p.11).
majeures» (p.15). pour ses services éco- *Les énergies
* « L’économie verte systémiques (p.6) renouvelables pour
favorise l’utilisation *Privilégier « le favoriser l’accès à
plus rationnelle des ralentissement de la l’électricité pour tous
ressources et déforestation et pour limiter les effets de
l’efficacité l’augmentation du la biomasse traditionnelle
énergétique » (p.15). reboisement » pour « les aux pauvres (p.12).
*Avec l’économie avantages en termes de *Promotion du tourisme
verte, [i]l est possible régulation du climat » d’où vert pour « soutenir
de transformer les la nécessité du mécanisme l’économie locale et
déchets en produits de « REDD » (p.7). réduire la pauvreté »
commercialisables » *« La modélisation (p.12).
(p.19). de l’économie verte *Le verdissement du
* « La construction de suggère qu’une affectation tourisme pour « renforcer
nouveaux bâtiments de 0,03 % du PIB entre le potentiel d’emploi
verts et la rénovation 2011 et 2050 » pour grâce à la hausse du
du stock existant de combattre la déforestation recrutement et de
bâtiments gros (P.7). l’approvisionnement
consommateurs * Adopter l’agriculture locaux » aux bénéfices
d’énergie et verte caractérisée par des des communautés
de ressources sont « pratiques écologiques pauvres impliquées
porteuses d’économies telles que l’usage rationnel (p.12).
importantes » (p.22). de l’eau, le recours massif *« L’économie verte crée
* « L’amélioration de aux éléments fertilisants des emplois et renforce
l’efficacité biologiques et naturels, des l’équité
énergétique du secteur pratiques de labour sociale » (p.13).
25

du transport grâce à optimales et la lutte *Création d’emplois par


l’adoption de intégrée contre les ennemis « la gestion des déchets
carburants propres et des cultures », d’où le et le recyclage » […]
au passage du besoin d’y investir 100 à « bien que l’emploi
transport 300 milliards de dollars décent pose des
privé à des transports par an entre 2010 et 2050 problèmes considérables
publics et non (P.8). dans ce secteur » (p.14).
motorisés peut *Nécessité du *Les emplois verts
présenter des « verdissement du secteur impliquent l’exigence du
bénéfices de l’eau » car « le maintien « travail décent : salaire
économiques » (p.23). du statu quo conduit à un suffisant pour vivre,
* « Sur la durée, écart important et non disparition du travail des
l’économie verte durable entre enfants, santé et sécurité
connaît une croissance l’approvisionnement et les professionnelles,
plus rapide que prélèvements d’eau protection sociale et
l’économie brune » à l’échelle mondiale » liberté d’association »
(p.23). (p.9). (p.14).
* Le verdissement du * « Diminuer le
secteur de la pêche pour gaspillage et augmenter
« le but de reconstituer les l’efficacité des systèmes
stocks halieutiques agricoles et alimentaires
surpéchés et en voie peut
d’épuisement » (p.10). contribuer à assurer la
* « L’économie verte sécurité alimentaire
substitue les énergies mondiale aujourd’hui et
renouvelables et les demain » (p.19).
technologies à faible taux *Objectif jugé réaliste de
d’émission de carbone aux « réduction de 50 % des
combustibles fossiles » pertes et du gaspillage
dont le système dans tous les maillons de
énergétique est la filière alimentaire »
responsable des deux tiers (p.20).
de gaz à effet de serre * « L’économie verte
(p.15). assure des conditions de
* L’usage des énergies vie urbaines plus
renouvelables « présente durables » à travers des
des avantages en termes « processus
d’atténuation du d’urbanisme » tenant en
changement compte « des questions
climatique » (p.15). de cohérence sociale et
* «[D]écoupler totalement de santé urbaine » (p.21).
la croissance de
l’utilisation intensive des
matières premières et de
l’énergie » comme réponse
« aux contraintes nées de
26

la pénurie de ressources et
de la nécessaire limitation
des émissions de carbone »
(p.16).
* « La lutte contre le
gaspillage alimentaire
constitue une stratégie
importante et négligée
pour atteindre l’objectif de
nourrir une population
mondiale à la démographie
galopante sans alourdir le
fardeau environnemental
de la production » (p.20).
* « L’économie verte
assure une mobilité à
faible taux d’émission de
carbone » (p.21).
*Construction des
bâtiments verts pour
« l’environnementalisation
des villes » étant donné
que « le secteur de la
construction est l’émetteur
de gaz à effet de serre
numéro un dans
le monde » (p.21).
*Mise en place des
« politiques
d’environnementalisation
du transport » pour
contribuer à la réduction
des émissions (p.23).
* « Le verdissement de la
plupart des secteurs
économiques permettrait
de réduire de façon
significative les émissions
de gaz à effet de
serre » (p.26).
* « Réduire les dépenses
publiques dans les
domaines qui épuisent le
capital naturel » (p.30) et
réorientations des
subventions dans le
27

verdissement des secteurs


polluants (p.30).
* « Recourir à la fiscalité
[environnementale] et aux
instruments économiques
pour promouvoir
l’innovation et les
investissements verts »
(p.31).
* « Les taxes sont
habituellement de bonnes
incitations à la
réduction des émissions de
CO2 et à une utilisation
plus efficace des
ressources naturelles ; de
plus, elles stimulent
l’innovation » (p.32)
*principe du « pollueur-
payeur » (p.32).
* « Les instruments
économiques tels que les
permis négociables sont de
puissants outils
de gestion de «
l’invisibilité économique
de la nature », de plus en
plus utilisés pour
traiter un large éventail de
questions
environnementales »
(p.32).

OCDE * « La croissance * « La croissance verte est * « Les stratégies de


verte est susceptible susceptible d’apporter des croissance verte doivent
d’apporter des réponses aux défis […] prêter une attention toute
réponses aux défis environnementaux » (p.9). particulière aux
économiques et […] *Miser sur l’innovation problèmes sociaux et aux
d’ouvrir de nouvelles pour « trouver de préoccupations relatives
sources de nouveaux moyens de à l’équité qui peuvent
croissance » (p.9). résoudre les problèmes résulter directement du
*la croissance verte d’environnement » (p.9). verdissement de
doit miser sur « la *Croissance verte pour l’économie – tant au
productivité » pour « enrayer le changement niveau national
répondre aux défis climatique » et « les qu’au plan international »
économiques (p.9). déséquilibres induits dans (p.12).
28

* « Création de les systèmes naturels [qui] * « Les stratégies doivent


nouveaux marchés par entraînent aussi un risque être appliquées
la stimulation de la d’effets plus profonds, parallèlement à des
demande de soudains, très néfastes et initiatives centrées sur le
technologies vertes et peut-être irréversibles, pilier social plus général
de biens et services comme ceux qu’ont subis du développement
verts » (p.9). certains stocks de poissons durable » (p.12).
* « une bonne et que pourrait subir la *Le verdissement de la
politique économique biodiversité » (p.10). croissance « peut […]
est au centre de toute * « Le verdissement de la apporter des avantages
stratégie de croissance croissance requerra une sur le plan social »
verte » (p.10). utilisation beaucoup (p.13).
*« La croissance verte plus efficiente des * « La prise en compte
mise sur l’innovation ressources afin de réduire des effets redistributifs
qui « est à même au minimum les pressions du verdissement de la
d’engendrer de sur l’environnement » croissance sera
nouvelles sources de (p.10). déterminante pour le
croissance » (p.12). * « Les stratégies de faire accepter par la
* « Au cœur de la croissance verte doivent population » (p.14).
croissance verte […], encourager un *Le processus
il y a la comportement plus d’élaboration des
reconnaissance du respectueux de politiques de croissance
capital naturel en tant l’environnement de la part verte doit favoriser la
que des entreprises et des participation « des
facteur de production» consommateurs » (p.11). catégories concernées de
(p.22). *« La croissance verte vise la population » en vue
* « Le PIB reste un à inciter à une utilisation d’assurer l’équité de la
indicateur efficiente des réforme (p.95).
primordial pour ressources naturelles et à *Pour assurer l’équité de
comprendre la rendre la pollution plus la réforme, « [i]l y a lieu
performance coûteuse » (p.12). de mettre en place des
économique » (p.22). * « La croissance verte programmes bien ciblés
*La croissance verte implique le remplacement pour compenser les effets
vise à « encourager « des activités polluantes préjudiciables subis par
une innovation par d’autres plus propres les ménages pauvres, en
capable de susciter ou qui assurent des tenant compte de la
une croissance forte et services configuration de
équilibrée » (p.26) environnementaux (p.13). l’ensemble du système de
*La croissance verte * « Nécessité de prélèvements et de
implique croissance verte car, « les prestations » (p.95).
l’accroissement du incidences des activités * « Veiller à ce que tous
« rendement de économiques sur les les pays puissent tirer
l’utilisation des systèmes profit de la croissance
ressources pour environnementaux verte » (p.95).
pérenniser la engendrent des *Suite à une taxe
croissance » (p.28) déséquilibres qui menacent environnementale,
29

* « Suite à la crise la croissance économique « modifier l’impôt sur le


économique, un et le développement » revenu ou les prestations
certain nombre de (p.19). sociales subordonnées au
pays ont renforcé leur *Au cœur de la croissance revenu est un bon
fiscalité verte, la prise en compte moyen de dédommager
environnementale du capital naturel pour les catégories pénalisées
dans le cadre de leur « l’atténuation des les plus pauvres »
stratégie incidences (p.112).
d’assainissement environnementales des *Assumer les coûts
budgétaire » (p.46). activités économiques » environnementaux en
* « L’innovation est (p.25). fonction de revenu serait
au cœur de la *Recours aux moyens de un dispositif plus
transformation d’une tarification de la pollution équitable et pour le bien-
économie. […] elle environnementale, comme être global (p.112).
donne naissance à de des instruments de taxes et * « les effets
nouvelles idées, à de de permis négociables redistributifs des
nouveaux (p.39). politiques
entrepreneurs et à de * « Élimination des existantes en matière de
nouveaux modèles subventions biodiversité sont peut-
d’entreprise. Elle dommageables qui être déjà défavorables
contribue à encouragent la pollution aux pauvres » car, la
l’établissement de ou la surexploitation responsabilité de gestion
nouveaux marchés » des ressources » (p.39). durable est assumée
(p.57). *La croissance verte localement par les
* « Pour que privilégie « les nouvelles pauvres alors que les
l'innovation verte technologies de transport bénéfices sont globaux
conduise à une susceptibles de réduire les (p.112).
accélération sensible émissions de carbone,
de la croissance notamment celle des
économique et à la véhicules électriques. »
création de (p.75).
nouvelles entreprises, * « La création d’une
d'emplois et architecture mondiale
d'activités, les propice à l’avènement
technologies et d’une croissance plus verte
l'innovation vertes nécessite
devront se généraliser de renforcer la coopération
dans la société » internationale face aux
(p.62). défis environnementaux »
*La croissance verte (p.95).
met l’accent sur les *Importance de l’APD
infrastructures de « au service de la
transport « pour durabilité
accompagner la environnementale »
croissance (p.117).
économique et le * « Les stratégies pour une
30

développement » croissance verte doivent


(p.74). fixer des priorités en
*Dans le cadre de la matière d’environnement »
croissance verte, « les (p.140).
autorités chargées des
finances, de
l'économie et de
l'environnement
jouent un rôle
moteur » (p.139).

Déclaration * « une économie * « une économie verte * « une économie verte


de Rio+20 verte devrait devrait contribuer […] en devrait contribuer à […]
contribuer à préservant le bon améliorer l’intégration
l’élimination de la fonctionnement des sociale et le bien-être de
pauvreté et à la écosystèmes de la l’humanité, et créer des
croissance planète » (p.11-12). possibilités d’emploi et
économique durable » *L’économie verte de travail décent pour
(p.11-12). « permettra de gérer plus tous » (p.11-12).
*l’économie verte est durablement les ressources *l’économie verte est
sensé « promouvoir naturelles et, l’impact appelé à promouvoir le
une croissance écologique étant moins partage de la croissance
économique nuisible, d’utiliser plus économique » (p.12).
soutenue » (p.12) rationnellement les * « Contribuer à combler
ressources et de réduire la le fossé technologique
production de déchets » entre pays développés et
(p.13). pays en développement
*l’économie verte devrait et réduire la dépendance
privilégier, autant que technologique des pays
possible, un « consensus en développement par
international » dans tous les moyens
l’adoption « des mesures possibles » (p.12).
de lutte contre les * « Améliorer le bien-être
problèmes des peuples et des
environnementaux communautés
transfrontaliers ou autochtones,
mondiaux » (p.12) d’autres populations
locales et traditionnelles
et des minorités
ethniques en
reconnaissant et en
appuyant leur identité,
leur culture et leurs
intérêts, et éviter de
mettre en danger leur
patrimoine culturel, leurs
31

pratiques et leurs savoirs


traditionnels, en
préservant et en honorant
les approches non
commerciales qui
contribuent à éliminer la
pauvreté » (p.12).
*Améliorer le bien-être
« des groupes indigents
et vulnérables » en leur
permettant l’acquisition
des moyens d’existence
et l’autonomisation p.13)
*Favoriser l’égalité entre
les hommes et les
femmes (p.13).
* « Répondre aux
préoccupations en
matière d’inégalités et
promouvoir
l’intégration sociale, et
notamment une
protection sociale
minimale » (p.13).
* « les politiques
sociales [à travers
l’économie verte] sont
indispensables à la
promotion du
développement durable »
(p.14).

3.4.2. Contraintes de catégorisation

En se référant au principe d’exclusivité dans la catégorisation des unités de sens tel que

nous l’avons évoqué à l’étape 2, notre exercice de classification s’est révélé assez exigeant

compte tenu de l’interrelation dont font preuve les trois piliers du développement durable sur

lesquels reposent nos catégories d’analyse. À plusieurs reprises, nous nous sommes retrouvés

dans une situation d’hésitation pour la classification des unités de sens lorsque celles-ci

marquaient une double connotation ou une signification transversale. À titre illustratif, l’objectif
32

d’élimination de la pauvreté poursuivi par l’économie verte était présenté à la fois au sens

économique dans le cadre d’accroissement de revenus et au sens social dans la logique d’assurer

l’équité sociale. De même pour le verdissement de l’agriculture, la tendance allait dans le sens

triple : économique en termes d’augmentation des rendements, environnemental pour ce qui est

des nouvelles pratiques écologiques utilisées et social en matière de valorisation des petits

exploitants agricoles. Ainsi, cela pouvait occasionner des chevauchements et les ambiguïtés que

la qualité du principe d’exclusivité cherche à éviter. Pour y faire face, à chaque fois qu’un tel cas

était rencontré, nous prenions le soin de décortiquer davantage la signification en fonction du

contexte auquel s’inscrit l’unité de sens.

3.5. Étape d’interprétation

Cette dernière étape met un terme au processus d’analyse de contenu. Toutefois,

L’Ecuyer (1990) fait remarquer que l’étape d’interprétation est sujette à débat. Certains trouvent

cette étape injustifiée en estimant qu’une fois la précédente étape d’analyse descriptive faite,

l’analyse de contenu est complète. Dans leur logique, « à trop vouloir interpréter on néglige

parfois de considérer vraiment l’objet même de l’analyse de contenu, c’est-à-dire les contenus

eux-mêmes » (Ibid., p.109). Par contre, d’autres soutiennent l’ajout de l’étape interprétative pour

compléter l’analyse descriptive en approfondissant « les relations entre les diverses composantes

du matériel obtenu pour en arriver à joindre finalement le sens le plus profond et caché du

phénomène analysé » (Ibid.). Selon la même conception, cette étape permet une recherche

compréhensive et explicative sur « les causes des résultats et leur signification », ce qui exige de

pousser au-delà d’une simple analyse descriptive (Ibid.). Mucchielli (2006, p.103) abonde dans

le même sens en expliquant que, lors de cette étape, l’analyse de contenu dans son approche
33

d’analyse sémantique et structurelle permet de « dépasser le contenu manifeste explicite et à

atteindre, par une analyse de second degré […], un sens implicite, non immédiatement donné à la

lecture ».

Au terme du processus de choix des unités de sens lors de l’étape précédente, nous

postulons que des unités de sens correspondantes à une catégorie d’analyse donnée représentent

en quelques sortes des indicateurs de la présence du lien relationnel entre l’économie verte et la

dimension du développement durable concernée. Rappelons aussi que ces unités de sens

constituent les données de recherche soumises à l’interprétation analytique ayant pour finalité la

validation de l’hypothèse de recherche. Ainsi, pour la suivante analyse interprétative, nous allons

procéder séparément à l’interprétation des trois documents de notre échantillon avant de

confronter les résultats à notre hypothèse de recherche.

3.5.1. Document du PNUE

À la lumière des unités de sens catégorisées en fonction des dimensions du

développement durable, nous pouvons croire, à première vue, que le document du PNUE

promouvant l’économie verte reflète l’approche intégrée recherchée. Sur ce, le PNUE note

explicitement que l’avenir durable « ne sera possible que si les piliers environnementaux et

sociaux du développement durable sont traités sur un pied d’égalité avec le pilier économique »

(PNUE, 2011, p.iv). Cependant, derrière cette image de perspective équilibrée au sein de

l’économie verte, force est de constater une suprématie flagrante des dimensions économique et

environnementale sur la dimension sociale telle que le prouve l’analyse des unités de sens

identifiées. En effet, la priorité accordée à la dimension économique se traduit en ces termes du

PNUE : « La réalisation du développement durable dépend presque entièrement d’une bonne


34

approche économique » (Ibid., p.2). Autrement dit, c’est principalement la perspective

économique qui détermine la durabilité du développement. Cela laisse entendre la subordination

des dimensions environnementale et sociale à la dimension économique. C’est pour cela que les

stratégies prioritaires de l’économie verte proposées par le PNUE s’assurent de démontrer au

premier plan les retombées économiques pour prouver de leur pertinence. Toute stratégie verte

doit donc garantir la croissance économique comme l’affirme, rassurant, le PNUE (Ibid., p.3) : «

Le verdissement des économies ne fait pas obstacle à la création de richesses et d’emplois » dits

« verts ». Ainsi, le verdissement des secteurs clés de l’économie doit, a priori, faire preuve

d’accroissement des gains économiques avant d’en évaluer les avantages écologiques et sociaux.

Dans cette optique, l’agriculture verte a le potentiel d’accroître la productivité jusqu’à des

hausses de rendements pouvant atteindre 79%, selon certaines études (Ibid., p.10). De même, le

verdissement des secteurs forestier, de la pêche, du transport, du bâtiment et des énergies

renouvelables est porteur d’économies importantes ou d’opportunités économiques majeures

(Ibid., p.10-23). De plus, l’économie verte, selon le PNUE, met un accent particulier sur les

principes économiques liés à l’efficacité et à la rationalité en matière de consommation

énergétique et d’utilisation des facteurs de production d’origine naturelle (PNUE, 2011, p.15 et

p.22).

Néanmoins, malgré la domination significative de la dimension économique, la

dimension environnementale n’est pas pour autant négligée. La connotation même du

qualificatif « vert » donné au nouveau modèle d’économie marque l’importance accordée au

capital naturel dans cette nouvelle forme d’économie. Pour le PNUE (2011, p.6), le verdissement

de l’économie entraîne « un gain de biens environnementaux communs ou de capital naturel ».

Pour valoriser le capital naturel, le PNUE recommande l’adoption du « Système de comptabilité


35

environnementale et économique (SCEE) de la division statistique des Nations Unies » qui

consiste à corriger la mesure du PIB traditionnel qui ignore le capital naturel (Ibid., p.5).

Plusieurs autres stratégies sont proposées par le PNUE dans le but de réduire l’empreinte

écologique et préserver l’environnement. Notamment le mécanisme « REDD » (Réduire les

Émissions liées à la Déforestation et à la Dégradation des forêts) pour sauvegarder le domaine

forestier pour ses effets environnementaux et combattre la déforestation en investissant « 0,03%

du PIB entre 2011 et 2050 ». Ensuite, nous avons le verdissement de l’agriculture par l’adoption

des pratiques écologiques et la réduction des émissions de gaz à effet de serre afin d’atténuer les

changements climatiques par la substitution des énergies renouvelables aux énergies fossiles

combustibles. Enfin, il est proposé l’écologisation des secteurs du bâtiment et du secteur de

transport (Ibid.), le recours aux instruments de marché en l’occurrence la taxation pour limiter la

pollution et la réorientation des subventions gouvernementales vers la protection de

l’environnement (Ibid.).

Cependant, la stratégie de taxation environnementale suscite de vifs débats. Pour les

partisans de cette approche, la taxe présente l’avantage d’influer directement sur les signaux

donnés par les prix. Son objectif est de modifier ces signaux en internalisant les externalités,

notamment l’externalité négative de la pollution, et de permettre une évaluation correcte des

facteurs de production, en particulier le capital naturel pour inciter des actions limitatives des

dommages environnementaux (de Perthuis, 2010). Ainsi, pour stimuler cette incitation, la taxe

permet de donner un prix aux émissions, ce qui encourage le pollueur à les limiter « jusqu’au

point où le coût marginal de la dépollution égalise le prix de la taxe » (Ibid., p.50). Pour assurer

l’efficacité de la taxe, elle doit s’appliquer directement sur les activités polluantes comme les

grandes installations industrielles ou les actions de grande consommation des ressources


36

naturelles. Cela est appuyé par l’OCDE (2011, p.43) qui note que « l’efficience économique

exige que la fiscalité cible l’externalité, ce qui implique que la priorité devrait être accordée à la

taxation directe des émissions polluantes ». C’est le principe du pollueur-payeur inspiré par

l’économiste britannique Arthur Pigou et des écotaxes qui ont d’ailleurs pris pour qualificatif son

nom, « les taxes pigouviennes » (Rebillard, 2008). Selon une étude de l’OCDE en 2010, une taxe

bien réfléchie est susceptible de produire de bons résultats, comme ce fut le cas avec la taxe

suédoise sur les émissions de NOx qui a incité les entreprises à adopter des stratégies

d’antipollution adéquates du point de vue environnemental et économique (OCDE, 2011). Le

succès de cette taxe est confirmé par Wendling (2008, p.150) qui réalise que la condition de

succès est la fixation d’une taxe environnementale égale « au coût marginal des dommages

provoqués par une unité supplémentaire de pollution ».

Néanmoins, d’autres arguments sont avancés pour nuancer les effets de la taxe

environnementale. L’efficacité recherchée pour limiter les dommages environnementaux ne peut

être atteinte qu’à la condition de l’harmonisation de la fiscalité environnementale à l’échelle

mondiale, ce qui n’est pas facile à réaliser (Blaise, 2011). En effet, la fixation de taxes

homogènes est susceptible d’apaiser les craintes de perte de compétitivité entre les pays et de

favoriser une convergence des efforts internationaux visant le contrôle des émissions polluantes.

Étant donné l’existence « des externalités environnementales globales comme le changement

climatique, une convergence vers un prix minimum des émissions de gaz à effet de serre dans

tous les pays du monde constituerait un résultat idéal qui permettrait de faire face aux

préoccupations concernant la compétitivité » (OCDE, 2010, p.46). Toutefois, la taxation sur la

pollution dans un monde économiquement libéralisé risque de connaitre les «fuites de carbone» à

la suite de la délocalisation (Aghion, 2009). L’efficacité exige aussi que tous les pays aient des
37

systèmes institutionnels de fiscalité efficients et cela n’est pas non plus le cas aujourd’hui. Il

s’avère aussi important de souligner que la taxe environnementale peut avoir un impact négatif

social dans la mesure où elle risque de provoquer la modification des prix à la hausse, affecter le

pouvoir d’achat des populations et par conséquent poser un problème social (Jurgensen, 2009).

De façon générale, les instruments de marché sont insuffisants comme stratégie d’incitation aux

comportements environnementaux et, de ce fait, doivent être associés aux instruments

règlementaires non-économiques (de Perthuis, 2010). Ainsi, la règlementation constitue le

principal outil des politiques environnementales nationales (Ibid.). Comme l’explique l’OCDE

(2011, p.50), « les initiatives réglementaires permettent à la fois d’encourager la croissance verte

et d’améliorer les dispositifs en place. Elles viennent aussi compléter et soutenir les instruments

de marché ». Elle peut contribuer à promouvoir une économie verte en fixant les normes de

référence pour exercer les activités économiques afin d’observer la dimension verte de la

croissance.

Cependant, il faut remarquer que le cadre réglementaire exerce une influence qui peut

être aussi positive que négative sur la croissance verte. Dans la logique du recours à la

réglementation, la norme est censée accroître la performance des entreprises en matière

d’efficience de l’utilisation des ressources naturelles et de réduction de la pollution. Toutefois,

lorsque la réglementation impose rigidement des pratiques aux agents économiques, cela risque

d’entraver les incitations à l’innovation. Ainsi, « le cadre réglementaire doit aussi favoriser les

initiatives spontanées du secteur privé » sans ignorer cependant que l’imposition de certaines

normes, notamment technologiques, peut se révéler pertinente dans certains cas pour encourager

le verdissement. Un bon dosage de la norme est indispensable car, l’absence du caractère incitatif

dans la norme n’amène les agents économiques qu’à se limiter aux prescriptions, sans efforts
38

supplémentaires (Ibid.). Par ailleurs, cette réglementation doit s’inscrire dans un cadre politique

qui assure l’amélioration directe de l’impact économique et environnemental des activités

économiques axées sur l’exploitation des ressources naturelles.

Quant à la dimension sociale à travers le document du PNUE, mise à part la

reconnaissance formelle des effets sociaux désastreux du modèle de l’« économie brune », il n’y

a pas de stratégies concrètes proposées pour réaliser l’inclusion sociale, bien que le PNUE

affirme que l’économie verte « se caractérise par l’inclusion sociale » (Ibid., p.2). En général, les

unités de sens reliées aux aspects sociaux montrent que la dimension sociale s’inscrit dans les

impacts indirects ou induits de l’économie verte. Pour preuve, les énergies renouvelables qui

constituent une composante importante de la stratégie verte sont prioritairement privilégiées pour

la cause environnementale et un nouveau marché économique avant les bénéfices sociaux qui

peuvent en découler. Dans le même ordre d’idées, les infrastructures vertes préconisées par

l’économie verte sont avant tout conçues dans une perspective économico-environnementale

pour laquelle on espère tirer les avantages sociaux en tant externalités positives (Ibid., p.11).

L’on peut aussi relever quelques incohérences ou contradictions dans les unités de sens qui

traduisent la considération sociale dans le document du PNUE. Premièrement, on constate une

contradiction au sujet de l’agriculture. D’un côté, le verdissement de l’agriculture est acclamé

pour ses gains de productivité (Ibid., p.10) pour lesquels le gaspillage peut-être aussi réduit de

50% en vue d’assurer la sécurité alimentaire (Ibid., p.20). De l’autre côté, le PNUE remarque que

l’économie verte reconnait l’insuffisance de l’agriculture verte à « garantir un accès équitable à

la nourriture aux populations affamées » (Ibid., p.8). De même avec la création des emplois

verts, ceux-ci sont listés dans les bénéfices sociaux sous prétexte des conditions décentes qu’ils

peuvent offrir. Or, aucun mécanisme pratique n’est suggéré en la matière. Qu’un emploi soit
39

qualifié de vert ne garantit en rien ni le salaire juste ni les conditions de travail favorables sans

mesures réglementaires contraignantes additionnelles. En effet, dans un système de marché

mondialisé caractérisé par une forte pression de compétitivité des entreprises, la logique de

rationalisation des coûts de production en tant qu’avantage concurrentiel amène les employeurs à

adopter des comportements qui vont à l’encontre des intérêts sociaux tant de leurs employés que

de la communauté. En général, on assiste à une « politique de modération salariale, de

diminution des conditions de travail et d’une plus grande précarisation du travail » (Guay, 2011,

p.145). Il faut rajouter à cela, la tendance généralisée des entreprises de vouloir « remplacer les

travailleurs par les machines plus productives, afin de gagner un avantage par rapport à ses

concurrents » (Tanuro, 2012, p.14). Dans la même perspective, le manque d’équité sociale

s’observe dans la répartition des gains de la chaîne des valeurs mondialisées, tel que le constate

le même auteur : « [à] l’échelle mondiale, une part croissante de la valeur ajoutée créée dans les

entreprises a été accaparée par les actionnaires [et les gestionnaires] au détriment des

travailleuses et travailleurs » (Ibid.). Pour Ziegler (2011, p.269), ces pratiques dont la

performance entrepreneuriale compétitive s’obtienne au prix d’un recul social conduisent au

« dumping social » caractérisé par un coût social et humain sévère.

Cette forme d’inégalité dans le partage de la richesse créée s’appliquerait aussi sur le

marché international des produits agricoles écologiques que l’économie verte promeut en faisant

miroiter des gains sociaux pour les petits producteurs (PNUE, 2011). En effet, rien n’est

envisagé pour corriger les rapports asymétriques qui caractérisent les échanges commerciaux

afin d’assurer un commerce équitable. L’asymétrie dans les échanges demeure car, « les prix

d’achat aux producteurs sont la plupart du temps très faibles, la plus-value de ces échanges étant

captée principalement par les intermédiaires et les distributeurs » (Rebillard, 2008, p.117). Plutôt
40

que d’insérer les marginalisés dans le processus de production de l’économie verte ou modifier

les rapports d’échanges asymétriques en vue d’une perspective d’autonomisation des perdants,

l’économie verte ne se contente que des propositions d’actions palliatives ou de soulagement des

victimes du modèle à travers l’aide pour la réalisation des Objectifs du millénaire pour le

développement (PNUE, 2011).

Il ressort de cette analyse interprétative du document du PNUE que malgré sa prise de

conscience de l’utilité d’une approche intégrée axée sur les trois piliers pour la mise en œuvre du

développement durable, la démarche proposée pour l’application de l’économie verte est loin de

refléter cette approche intégrée. En effet, la vision de l’économie verte à travers le document du

PNUE est d’intégrer la dimension environnementale dans le processus productif pour une

poursuite de la croissance économique pérenne. Même en supposant que ces deux dimensions

soient intégrées, cela représenterait une intégration en binôme alors que le développement

durable en exige un trinôme qui ne laisserait jamais la dimension sociale à la marge.

3.5.2. Document de l’OCDE

À travers le document de l’OCDE, les unités de sens retracées font preuve de la présence

des trois dimensions du développement durable, mais n’ayant pas la même importance en termes

de priorité dans leur mise en œuvre. La dimension économique prime largement sur les deux

autres avec la croissance comme priorité absolue. D’ailleurs, l’OCDE préfère employer le terme

« croissance verte » à la place de l’« économie verte ». Pour elle, la croissance verte est

primordiale parce qu’elle est « susceptible d’apporter des réponses aux défis économiques et

environnementaux et d’ouvrir de nouvelles sources de croissance », notamment par le biais des

canaux axés sur la productivité, l’innovation et les nouveaux marchés stimulés par les
41

technologies vertes (OCDE, 2011, p.9). Selon cette institution, il importe d’encourager

l’innovation de manière à pouvoir susciter « une croissance forte et équilibrée » (Ibid., p.22).

Dans un contexte de crise économique, l’OCDE exhorte les gouvernements à placer la croissance

verte « au cœur de leur stratégie économique » (Ibid., p.139). De cette perspective, la croissance

verte devient une réponse à la crise économique qui est alors de fait priorisée par rapport aux

crises environnementale et sociale. Elle suggère également l’instauration de la fiscalité

environnementale qui servirait à atténuer aux contraintes budgétaires exacerbées par la crise

économique actuelle (Ibid., p.46). De plus, avec la croissance verte, l’accent est mis sur la

performance économique avec l’indicateur de mesure traditionnel du PIB (Ibid., p.22).

Pour la dimension environnementale, les unités de sens afférentes illustrent bien que la

question écologique se trouve aussi à l’agenda de la croissance verte. Selon l’OCDE, celle-ci

représente une stratégie indispensable permettant de s’attaquer aux enjeux environnementaux tels

que le changement climatique et les déséquilibres éco-systémiques (Ibid., p.10). Grâce à

l’efficience prônée par le verdissement de la croissance dans l’utilisation des ressources, les

pressions exercées sur l’environnement peuvent être considérablement réduites (Ibid.). La

croissance verte, à travers ses stratégies, vise aussi à inciter les entreprises et les consommateurs

à adopter des comportements respectueux de l’environnement. Parmi ces stratégies, figure celle

du recours aux instruments de marché, en l’occurrence la taxation, pour « rendre la pollution plus

coûteuse » (Ibid., p.12). Dans la même optique, il est important de mentionner que la croissance

verte plaide pour l’environnement en misant sur l’innovation comme source de nouvelles

technologies vertes qui vont permettre de réduire les émissions de GES. Elle propose enfin la

réaffectation des subventions gouvernementales et l’aide publique au développement « au

service de la durabilité environnementale » (Ibid., p.117). En analysant les motivations de la


42

conscience environnementale de l’OCDE, force est de constater, comme chez le PNUE, que des

raisons économiques justifient particulièrement l’intérêt porté à la cause environnementale. En

effet, il devient nécessaire de verdir l’économie car, « les incidences des activités économiques

sur les systèmes environnementaux engendrent des déséquilibres qui menacent la croissance

économique et le développement » (Ibid., p.19). De plus, la croissance verte implique

l’accroissement du « rendement de l’utilisation des ressources pour pérenniser la croissance »

(Ibid., p.28). Dans ce cadre, la problématique d’épuisement des ressources est très préoccupante

non seulement en matière d’environnement, mais aussi en termes de défis économiques par

rapport à l’approvisionnement en matières premières. D’après Brabec (2010), le mode

d’exploitation des ressources par l’économie « brune » accélère l’épuisement des ressources,

d’où l’impérativité de la stratégie verte. Celle-ci implique un mode de gestion efficiente de la

rareté des ressources car, il ne resterait, au niveau mondial, que des réserves de cuivre pour 40

ans, 28 ans de plomb, 17 ans d’étain, 220 ans pour l’aluminium et 440 ans pour le fer. En termes

de besoins énergétiques, 45% à 70% de pétrole seraient déjà consommés et la quantité de gaz

restant serait seulement pour 60 ans (Ibid.).

Face à ces stratégies vertes relatives à la dimension environnementale, il s’avère

important d’y apporter un regard analytique et critique pour en souligner les paradoxes et les

limites.

Premièrement, l’approche de l’OCDE voulant responsabiliser les entreprises pour

réaliser une croissance verte, et par conséquent mettre en œuvre le développement durable, paraît

à la fois fondée et peu prometteuse. Le fondement de l’implication du secteur privé au

verdissement de l’économie s’explique par ses moyens non seulement financiers, mais aussi et

surtout technologiques. L’éco-innovation étant devenue un indicateur de positionnement


43

concurrentiel, toute entreprise est censée s’investir en recherche et développement pour acquérir

un « leadership technologique » lui permettant d’accroître sa compétitivité. Selon Ambec et

Lanoie (2009, p.73), « une amélioration de la performance environnementale de l’entreprise peut

s’accompagner d’une amélioration de sa performance économique », contrairement à la version

de l’incompatibilité entre l’objectif de maximisation de profits et les charges pour la performance

environnementale. Pour ce faire, Brabec (2010) recommande aux entreprises d’explorer la

stratégie de « 3R » : Recycler, Réutiliser et Réduire dans leur nouveau « business model » pour

une économie durable. Cette approche s’inscrit dans un modèle d’« économie circulaire » à

promouvoir pour ses performances environnementales (Jurgensen, 2009). Avec ce modèle, les

opérateurs privés doivent rompre avec le schéma classique du cycle de vie des biens industriels

afin de minimiser le gaspillage des ressources en remettant dans le circuit productif les biens

usagés (Rebillard, 2008). Ils peuvent aussi explorer l’idée de « matérialisation des biens et des

services », argumentée par Suren (2004), pour sa pertinence en termes des avantages non

seulement économiques, mais aussi écologiques. Ce concept veut que l’on obtienne « plus de

services et de biens à partir d’une quantité de matière identique, voire moindre » (Ibid., p.110). Il

en résulte ainsi l’accroissement de la productivité des ressources. Toutefois, Rebillard (2008,

p.15) rappelle que la croissance ne doit pas être confondue obligatoirement avec une quantité

plus grande de biens, mais peut signifier aussi « plus de valeur ajoutée pour chaque bien

produit ». C’est donc grâce à l’innovation que les privés peuvent contribuer à la protection de

l’environnement sans compromettre la productivité de leurs affaires.

Cependant, bien que le secteur privé soit un acteur important vue son pouvoir

économique et technologique ainsi que son rôle dans le système productif très déterminant dans

le cadre des émissions, il apparaît illusoire d’attendre un apport considérable de la part des
44

acteurs privés. Les raisons en sont multiples. D’abord, il y a le caractère hétérogène du milieu

des affaires qui ne peut leur permettre de développer une vision commune pro-environnementale.

Les acteurs économiques non seulement ne peuvent partager une même idéologie, mais

également leurs intérêts sont divergents, ce qui les amène à l’adoption de stratégies concurrentes

(Chartier et Foyer, 2012). Ces auteurs rendent compte que les différences idéologiques chez les

entreprises ont été observées même à Rio+20 où la Chambre internationale de commerce semble

camper sur « une ligne idéologique ultralibérale classique », pendant que « le WBCSD (World

Business Council for Sustainable Development) semble réclamer plus de réglementation et

d’investissements publics en faveur du développement durable » (Ibid.). Ensuite, même si

Ambec et Lanoie (2009) rassurent que l’économique et l’écologique peuvent converger pour la

durabilité, l’on ne peut nier que la recherche de profits économiques maximums chez les

entreprises peut constituer une entrave majeure aux efforts communs environnementaux.

Deuxièmement, les limites de la stratégie d’innovation se caractérisent par les enjeux du

transfert technologique. Étant donné que les acquis de l’innovation sont soumis aux règles

relatives aux principes de la propriété intellectuelle, le transfert des nouvelles technologies vertes

devient sujet de marchandisation puisque les entreprises innovantes cherchent à en accumuler les

profits, ce qui en entrave la diffusion. Pour les énergies vertes, Sterner (2011) signale le paradoxe

entre la croissance infinie poursuivie par l’économie verte et la substitution des énergies fossiles

en déplorant que la poursuite de la croissance sans fin implique des besoins énergétiques accrus

dont le charbon demeure la ressource bon marché. Concernant le recours aux biocarburants, il

apparaît aussi contradictoire de prétendre résoudre la crise environnementale par notamment les

agro-carburants avec le risque d’aggraver la crise alimentaire. Sur ce, l’industrie de l’éthanol est

mise en cause pour son potentiel dévastateur en matière de pauvreté et d’insécurité alimentaire
45

dans le monde. Selon Nora (2009, p.232) « Remplir le réservoir d’un SUV de 95 litres d’éthanol

pur requiert plus de 204 kilos de maïs – soit assez de calories pour nourrir une personne pendant

un an ». À cela, Gleizes (2012, p.104) rajoute « la malédiction de l’effet rebond, l’augmentation

du volume de consommation de matières premières malgré l’amélioration des techniques ».

Troisièmement, les sources de financement préconisées par l’OCDE pour le

verdissement de l’économie semblent assurer une garantie douteuse. À cet égard, les enjeux de

financement sont immenses. De prime abord, l’importance du volume d’investissements pour

l’économie verte fait douter de sa faisabilité. Les besoins de financement estimés par le PNUE

révèlent la nécessité d’investissement supplémentaire aux efforts actuels de 2 % du PIB mondial

par an sur la période allant de 2010 à 2050 (PNUE, 2011). Il est difficile d’espérer que les

gouvernements puissent accorder une priorité au verdissement économique jusqu’au point de

supporter ce coût, particulièrement dans le contexte actuel de crise économique marqué par une

crise de la dette publique qui menace de nombreux pays dits développés et qui sont aussi les

principaux bailleurs de fonds de ces mesures. Évidemment, cette menace se répercute sur les

pays pauvres du Sud qui ne peuvent que compter sur ces derniers pour financer le « fonds vert »

initié lors de la conférence de Cancún, au mois de décembre 2010, pour épauler les pays en voie

de développement dans la perspective verte. Ce fonds a pour objectif de mobiliser 100 milliards

de dollars chaque année jusqu’en 2020 (PNUE, 2011). Quant au détournement de l’APD pour

assurer la durabilité environnementale tel que suggéré par l’OCDE, il aurait pour sévère

conséquence de porter atteinte à la durabilité sociale de l’APD, et cela marque la négligence de

la dimension sociale du développement durable par l’OCDE. Il importe cependant de rajouter

que les engagements financier pris par les bailleurs de fonds sont rarement honorés, à l’instar de

l’objectif du 0,7% du RNB consacré à l’APD qui n’a jamais été atteint après avoir été adopté par
46

les Nations Unies il y a quatre décennies. Par ailleurs, à la proposition de l’OCDE de réorienter

les subventions publiques vers la durabilité environnementale, aussi suggérée par le PNUE, elles

sont d’une grande utilité comparativement aux « effets d’aubaine et l’aléa moral » qu’elles

peuvent engendrer (Blaise, 2011, p.107). Pour éviter tout inconvénient, les subventions étatiques

devraient être orientées vers la recherche et le développement en matière de technologies propres

et pour faciliter l’accès aux produits verts souvent chers à la consommation du grand public. À

défaut des investissements publics, le verdissement de l’économie aurait besoin de recourir aux «

fonds de capital-risque » appliquant le même taux de rentabilité financière que pour l’économie

classique, ce qui rendrait chers les emprunts de verdissement et par conséquent découragerait la

mise en œuvre des projets verts. De même, le financement des institutions financières suit la

même tendance lucrative (Ibid.).

Concernant la dimension sociale, bien que le degré d’importance accordé aux enjeux

sociaux soit d’ampleur moindre comparativement aux autres dimensions, le document de

l’OCDE se montre tout de même attentif à ce sujet. La dimension sociale est prise en compte

lorsque l’OCDE propose la participation des couches sociales défavorisées au processus

d’élaboration des politiques de la croissance verte. Cette implication des pauvres aurait pour but

d’atténuer les effets sociaux pervers de la croissance verte et de rendre celle-ci plus équitable

(Ibid., p.12). Dans cette perspective, « les stratégies doivent être appliquées parallèlement à des

initiatives centrées sur le pilier social plus général du développement durable » (Ibid.). Ainsi,

pour assurer l’équité sociale de la croissance verte, « [i]l y a lieu de mettre en place des

programmes bien ciblés pour compenser les effets préjudiciables subis par les ménages pauvres,

en tenant compte de la configuration de l’ensemble du système de prélèvements et de prestations

» (p.95). L’on peut aussi apprécier que la taxe environnementale proposée pour inciter à la bonne
47

gestion des ressources naturelles prenne en considération les répercussions sévères à l’égard des

pauvres et établisse un mécanisme compensatoire à travers, notamment, « [l’]allégement de

l’impôt sur le revenu, crédits d’impôt ou relèvement des prestations sociales » (Ibid., p.112).

Cependant, certaines suggestions de l’OCDE vis-à-vis de cette équité sociale semblent

être ambigües ou contradictoires. Par exemple, la suggestion de « [v]eiller à ce que tous les pays

puissent tirer profit de la croissance verte » (Ibid., p.95) paraît ambigüe en l’absence des

nouveaux systèmes internationaux qui peuvent permettre d’y parvenir. La contradiction

s’observe également lorsque l’OCDE note que « [l]a prise en compte des effets redistributifs du

verdissement de la croissance sera déterminante pour le faire accepter par la population » (Ibid.,

p.14). Cela donne lieu à une interprétation selon laquelle la considération de la dimension sociale

ne représente pas un objectif en tant que tel à atteindre, mais plutôt un moyen utilisé dans le but

d’assoir une dimension économique verdie dans un climat social paisible. Cette subordination de

la dimension sociale se confirme par l’abstraction des aspects sociaux parmi les quatre groupes

d’indicateurs interdépendants de la croissance verte établis par l’OCDE (2011, p.131), à savoir :

« des indicateurs qui rendent compte de l’éco-efficience de la production et de la consommation ;

des indicateurs du stock d’actifs naturels ; des indicateurs de suivi de la qualité environnementale

de la vie et des indicateurs décrivant les réponses apportées et les opportunités économiques ».

La négligence de la dimension sociale par l’OCDE se lit aussi de façon flagrante dans sa

position présentée à Rio+20 :

« Pour l’OCDE, la croissance verte repose sur une approche concrète et souple
permettant d’accélérer les progrès dans les dimensions économiques et
environnementales du développement durable tout en tenant pleinement compte
des conséquences sociales du verdissement de la dynamique de croissance des
économies. L’objet des stratégies de croissance verte est de veiller à ce que les
actifs naturels donnent leur plein potentiel économique sur une base durable »
(OCDE-Rio+20, 2012, p.1).
48

À l’issue de cette analyse, le document de l’OCDE est loin de refléter l’approche intégrée

recherchée pour réaliser le développement durable du fait de la suprématie évidente de la

dimension économique.

3.5.3. Déclaration de Rio+20

Les données recueillies dans la déclaration finale de Rio+20, « l’avenir que nous

voulons », illustrent bien que finalement celle-ci ne représente aucunement un plan de mise en

œuvre de l’économie verte pour atteindre le développement durable. Plutôt que de passer en

revue des actions concrètes devant être menées pour construire l’économie verte dans une

perspective du développement durable, la déclaration s’attarde sur les généralités : réaffirmation

des principes de Rio et les plans d’actions passés ; le processus évolutif du développement

durable ; les acteurs concernés et le cadre institutionnel du développement durable. Il est aussi à

déplorer que la déclaration ne réserve qu’une partie minimale au sujet de l’économie verte, alors

que celle-ci était l’un des thèmes clés de la conférence. En effet, sur 60 pages de la déclaration

finale, seulement quatre pages et demi, de la page 11 à la page 15, ont été consacrées à

l’économie verte dans le contexte du développement durable et de l’élimination de la pauvreté. À

travers cette partie, les unités de sens repérées montrent que les éléments reliés à la dimension

sociale prédominent. D’abord, on s’attend à ce que l’économie verte parvienne à « améliorer

l’intégration sociale et le bien-être de l’humanité » (Nations Unies, 2012, p.11). Ensuite,

l’économie verte est qualifiée de porteuse d’esprit de partage de la croissance économique et du

progrès technologique (Ibid., p.12). Enfin, l’économie verte se montre soucieuse de la précarité

des groupes vulnérables et de l’égalité des sexes pour lesquelles les politiques sociales ciblées

deviennent impératives « pour compenser les effets préjudiciables subis par les ménages
49

pauvres » en vue d’assurer l’équité de la reforme (Ibid., p.95). Néanmoins, au regard de ces

prétentions sociales, nous nous rendons compte qu’elles restent irréalisables tant que les voies et

moyens de les mettre en œuvre font défaut. Lorsque la déclaration exhorte le partage « d’une

croissance soutenue » ou le transfert technologique sans proposer des dispositifs pratiques

contraires au statu quo pour y arriver, on se demande quelle est la nouveauté en matière d’équité

de la part de l’économie verte. Donc, il n’est pas convainquant de suggérer l’équité sociale sans

évoquer de nouveaux mécanismes qui peuvent la concrétiser. Pour résumer le bilan de la grande

conférence, Chartier et Foyer (2012, p.118) notent que « rien de concret et d’ambitieux ne

semble avoir émergé de Rio+20 ».

Concernant les dimensions économique et environnementale, la déclaration de Rio+20

en parle très sommairement en affirmant, d’une part, le potentiel économique que représente

l’économie verte pour une croissance soutenue et une contribution à l’élimination de la pauvreté,

et, d’autre part, l’impact écologique de l’économie verte pour la gestion rationnelle des

ressources et « le bon fonctionnement des écosystèmes de la planète » (Ibid., p.12). Le fait de ne

pas avoir mis en exergue la dimension économique n’empêche pas de souligner son poids

prépondérant : « Nous savons que la croissance économique durable et équitable pour tous dans

les pays en développement est une condition primordiale de l’élimination de la pauvreté et de la

faim, et de la réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement » (Nations Unies,

2012, p.24). Une remarque similaire sur la prépondérance de la dimension économique est faite

par Chartier et Foyer (2012, p.118) qui voient en Rio+20, « un retour de la realpolitik,

d’un ‘‘réalisme’’ diplomatique et politique basé essentiellement sur les rapports de forces entre

nations, sur les intérêts à court terme et sur des considérations économiques bien plus que

morales ».
50

En matière écologique, la déclaration privilégie un « consensus international » pour

affronter les défis environnementaux (Ibid., p.12). Dans la logique, cela est pertinemment la

meilleure option car, pour une problématique d’une ampleur planétaire, il faut une réponse de

portée globale qui inclut tous les acteurs à tous les échelons. Or, il semble illusoire d’espérer que

cela ait un impact écologique à la hauteur des enjeux, étant donné la crise actuelle du

multilatéralisme résultant de la divergence des intérêts nationaux, essentiellement économiques,

et le respect du principe de souveraineté nationale. D’une part, l’impasse du « multilatéralisme

environnemental » dure depuis des décennies malgré de multiples « grandes messes » organisées

pour les négociations internationales, cela à cause principalement des « facteurs liés […] à une

situation géoéconomique plus générale » (Chartier et Foyer, 2012, p.119-120). Étant donné que

les conditions initiales des pays sur le plan économique diffèrent, alors que les négociations

internationales sur la stabilisation du climat impliquent les mesures de limitation des émissions

qui affecteraient différemment les économies nationales, il devient difficile d’arriver à un accord

consensuel qui soit à la hauteur des enjeux environnementaux. Comme le témoigne Le Cacheux

(2010, p.55), même les gouvernements de l’Union européenne soucieux de la question « ne

s’accordent ni sur les instruments de la politique climatique ni sur les stratégies de négociation ».

Les pays en développement voient dans les plafonds d’émissions de GES une entrave potentielle

à leur rattrapage économique (Sterner, 2011). Pour eux, les pays développés devraient

compenser pour « les préjudices qu’ils ont causés ces dernières décennies au climat mondial »

avec leurs anciennes émissions (Ibid., p.117). Cette responsabilité des pays industrialisés dans

l’impasse climatique actuelle fut amplifiée par le mouvement pour la justice climatique qui s’est

rassemblé à Cochabamba en Bolivie, dans le cadre de la Conférence mondiale des peuples contre

les changements climatiques organisée en avril 2010 suite à l’échec de la Conférence de


51

Copenhague, pour qui, « le Nord doit reconnaître sa dette climatique/écologique à l’égard des

pays du Sud et mettre en place un système de réparations pour la régler » (Müller, 2010, p.79).

Selon la même source, il faudrait que les gouvernements du Nord remboursent cette dette qui

équivaudrait à 6% de leur PIB annuel (Ibid.). « Par contre, les pays développés reprochent aux

pays émergents d’être actuellement grands pollueurs et en font un prétexte pour ne pas agir. Leur

réticence s’illustre par le fait que les États-Unis n’ont pas ratifié le protocole de Kyoto alors que

le Canada s’en est récemment retiré. Par ailleurs, il est clair que les pays de l’OPEP, dans une

perspective de rationalité nationale, soient réticents lors des négociations afin de maintenir leur

base économique axée sur l’exploitation des énergies fossiles malgré leurs grandes émissions des

gaz à effet de serre. Sur ce, Combes (2010) déplore que dans la recherche de substitution aux

combustibles fossiles, les considérations géopolitiques l’emportent sur la préoccupation

environnementale pour sortir de la dépendance énergétique au monde arabe. De plus, il importe

de prendre en compte l’influence décisive des acteurs privés qui profitent du statu quo,

notamment les firmes multinationales pétrolières et les entreprises spécialisées dans la

dépollution. D’autre part, la réponse environnementale globale espérée ne peut résulter de

l’adoption volontariste de l’économie verte où chaque pays a droit de jouir de sa souveraineté en

élaborant les politiques d’économie verte en fonction de « ses ressources naturelles […], de ses

circonstances, objectifs, responsabilités et priorités nationaux ainsi que de la marge de manœuvre

décisionnelle dont il dispose en ce qui concerne les trois dimensions du développement durable »

(Nations Unies, 2011, p.12).

En définitive, en analysant la raison qui a poussée Rio+20 à mettre en relief la cause

sociale dans la déclaration finale, nous pouvons de fait penser à une influence de la pression de

l’action mobilisatrice des mouvements sociaux qui avaient organisés une conférence parallèle, le
52

Sommet des Peuples pour la justice sociale et environnementale, contre la marchandisation de la

vie et pour la défense des biens communs, qui s’est déroulé à Rio du 15 au 23 juin 2012. Cela est

confirmé par Chartier et Foyer (2012, p.129) qui expliquent le rôle joué par « les syndicats,

notamment à travers la Confédération syndicale internationale (CSI), qui ont réussi à pousser

leurs principales revendications dans le texte ». Ce succès relatif s’explique par « un long travail

de suivi des négociations autour du texte et une culture politique du consensus largement

éprouvée » (Ibid.). Tout compte fait, cela n’a qu’un effet d’apaisement de la revendication

sociale de la société civile puisque aucun engagement palpable n’a été réellement pris. Bref,

Rio+20 n’a pas marqué une nouvelle ère du développement durable comme on s’y attendait et

Chartier et Foyer l’expriment ainsi : « Pas de transitions, pas de limites, pas de changements de

modes de vie, on l’aura compris, la conception de l’économie verte que porte le texte tend à un

retour d’une logique développementaliste marquée par la revendication du droit au

développement dans un marché mondial dérégulé » (Ibid., p124). Malgré tout, comme l’a

recommandé le sommet des peuples de Cochabamba sur le climat et les droits de la Terre-mère,

la mobilisation populaire est un outil indispensable pour pousser les acteurs politiques à prendre

les décisions qui s’imposent (Houtart, 2010). Toutefois, malgré toutes ces controverses qui

traversent la déclaration de Rio+20, elle réitère que la réalisation de l’économie verte est « un

des moyens précieux dont nous disposons pour parvenir au développement durable » (Nations

Unies, 2012, p.11). Et son approche marque la nécessité de l’intégration des trois dimensions du

développement durable :

« Pour réaliser le développement durable il faut : encourager une croissance


économique soutenue, partagée et équitable ; créer davantage de possibilités
pour tous ; réduire les inégalités ; améliorer les conditions de vie de base ;
encourager un développement social équitable pour tous ; promouvoir une
gestion intégrée et durable des ressources naturelles et des écosystèmes qui
contribue, entre autres, au développement économique, social et humain
53

sans méconnaître la protection, la régénération, la reconstitution et la


résistance des écosystèmes face aux défis existants et nouveaux » (ONU,
2012, p.2).

3.6. Validation de l’hypothèse de recherche

Comme la phase interprétative vise à confronter l’hypothèse aux faits de l’observation

documentaire, il est maintenant question de comparer les résultats issus de cette précédente

analyse interprétative à l’hypothèse de recherche afin de confirmer ou d’infirmer celle-ci. À titre

de rappel, notre hypothèse présume que l’économie verte nous permettrait de cheminer vers la

mise en œuvre du développement durable, et pour ce faire doit refléter une approche intégrée des

trois dimensions du développement durable. C’est cette intégration, traduite par la simultanéité

de mise en œuvre de ces dimensions, qui fait l’objet d’indicateur de mesure de l’hypothèse, à

travers chacun des trois documents de promotion de l’économie verte ciblés lors de la

constitution de notre corpus.

À cet effet, il ressort de notre analyse empirique qu’aucun document de notre échantillon

ne reflète une approche intégrée des trois dimensions du développement durable. Comme l’ont

démontré les unités de sens au premier degré lors de l’analyse descriptive et l’a aussi révélé, au

second degré, l’analyse interprétative, la supériorité de la dimension économique sur les deux

autres dimensions est remarquable. Toutefois, la conscience environnementale est présente

particulièrement dans les documents du PNUE et de l’OCDE, mais se justifie davantage par

l’importance incontournable du « capital naturel » pour la pérennité de l’activité économique.

Or, le maintien de l’intégrité écologique veut que la préservation de l’environnement ait la même

priorité que l’efficience économique pour ses avantages éco-systémiques et les limites même de

la capacité de la nature. De là, on se rend compte que le « principe de précaution » poursuivi par

le développement durable n’est pas respecté. Enfin, c’est particulièrement la dimension sociale
54

qui est le parent pauvre de l’intégration des trois piliers par l’économie verte dans sa tentative de

mise en œuvre du développement durable. Quand bien-même la déclaration de Rio+20 semble

afficher une considération significative pour l’équité sociale, l’analyse approfondie démontre

qu’il s’agit d’un discours « politiquement correct », vide de mesures concrètes, qui vise à plaire

aux pressions de la société civile. Cette marginalisation de la dimension sociale marque

l’absence du « principe de solidarité » promu par le développement durable afin que le

développement économique soit profitable à un double niveau, intra-générationnelle et inter-

générationnelle. Ainsi, le « concept des besoins », sous-jacent au concept de développement

durable, ne trouve pas sa place dans le modèle d’économie verte et la satisfaction des besoins

fondamentaux des plus démunis ne peut émaner du verdissement économique.

À l’image de cette inégalité des piliers du développement durable, nous considérons que

l’économie verte est dotée d’une approche sectorielle ou étapiste qui ne peut cheminer vers le

développement durable puisque celui-ci prône une approche intégrée permettant la réalisation

simultanée des dimensions économique, environnementale et sociale. De cette réalité empirique,

les résultats de la recherche permettent ainsi d’infirmer notre hypothèse de recherche.

Dans les faits, l’économie verte n’incarne pas la stratégie de mise en œuvre du développement

durable, mais plutôt, elle s’avère une stratégie de continuité et de renforcement du capitalisme en

particulier en cette période de crise économique (Tanuro, 2012). Cette analyse est partagée par

Chartier et Foyer (2012), qui, suite à la conférence de Rio+20, constatent un risque de recul de la

perspective du développement durable à cause de la crise économique actuelle :

« Ce retour au développementalisme dur et le plébiscite du libre-échangisme


illustrent très bien l’incapacité du système multilatéral à dépasser des paradigmes
qui ont montré leurs limites et marque presque une régression par rapport aux
années 1980, avant l’émergence de la notion de développement durable. En
période de crise pour les uns et de développement accéléré pour les autres, la
55

croissance économique reste l’horizon indépassable, pour les États comme pour
les entreprises » (Ibid., p.125.).

La suprématie économique est également confirmée par Gleizes (2012, p.104) qui

déplore que « l’économie verte se limite à concilier emploi et croissance », d’où le dépérissement

patent de ce concept, « [a]lors que celui de développement soutenable essayait de concilier

justice sociale, soutenabilité du mode de production, préservation de l’environnement et de

l’avenir des générations futures ». Telle qu’elle est analysée à travers cette étude, l’économie

verte se veut théoriquement conciliatrice de la croissance économique et de la préservation de

l’environnement pour le bien-être social de tous à l’image du développement durable, mais elle

demeure ancrée dans la logique du « productivisme inhérent au capitaliste » (Tanuro, 2012,

p.14). Elle tente l’intégration de l’impératif environnemental dans le modèle capitaliste sans

nuire à la croissance ni à remettre en question les principes marchands qui contribuent à la

surexploitation des ressources naturelles. Pourtant, ce n’est que leur remise en question qui peut

conduire à un réel dépassement de l’économie « brune » fondé sur une parfaite intégration des

trois dimensions du développement durable. Or, comme l’ont montré les résultats de recherche,

la dimension économique est privilégiée par l’économie verte, tandis que l’impératif

environnemental est avant tout pensé pour pérenniser l’économie, et que l’impératif social ne fait

que bonne figure malgré le risque d’« approfondissement des inégalités qui existent déjà dans les

échanges entre Nord et Sud » (Salleh, 2012, p.87). Dans cette perspective, l’économie verte

s’apparente à l’approche théorique de durabilité faible. Cela est d’autant plus vrai qu’elle

demeure guidée par la vision néolibérale dans sa logique marchande et de croissance sans fin, et

sous l’emprise de la régulation du marché, puisque l’approche de durabilité forte « privilégie les

contrôles directs qui sont le résultat d’une approche normative et juridique de la politique de

l’environnement et s’oppose à la régulation économique par le marché » (Blaise, 2011, p.109).


56

4. Conclusion et recommandations

L’avènement du concept de développement durable, en tant que compromis international

pour un développement équilibré permettant l’intégration des dimensions économique,

environnementale et sociale, fut porteur d’un optimisme immense pour les partisans du

changement. Il représentait une solution aux défis environnementaux et sociaux longtemps

négligés en faveur de la croissance économique considérée comme l’indicateur suprême du

développement. Toutefois, après plus de deux décennies, cette vision limitative et simpliste du

développement persiste. Malgré l’unanimité conceptuelle à l’échelle mondiale, nous sommes

toujours à la recherche d’une approche stratégique pouvant réellement permettre sa mise œuvre.

Récemment, un nouveau concept d’économie verte a émergé pour définir une stratégie

hégémonique dont la mission serait de concrétiser le développement durable. C’est cette

nouvelle stratégie d’économie verte qui a incité à la présente recherche dont l’objet est de

vérifier l’hypothèse selon laquelle l’économie verte peut nous faire cheminer vers le

développement durable. L’étude s’est basée sur un échantillon de trois principaux documents

officiels de vulgarisation du concept, examinés par la méthode de l’analyse de contenu.

Au terme de l’analyse, nous avons constaté l’incapacité de l’économie verte à apporter un

équilibrage des piliers du développement durable bien que les trois documents reconnaissent la

nécessité de leur parité. L’économie verte s’avère une nécessité et un pas positif pour relancer

l’économie en tenant en compte de l’environnement, néanmoins, elle est loin d’une solution

finale ni pour l’environnement ni pour assurer une économie socialement équitable comme le

veut le développement durable. Nous nous sommes rendus compte de la prédominance de la

dimension économique par rapport aux autres dimensions. Néanmoins, l’économie verte est

marquée par une conscience environnementale non négligeable, mais demeure motivée dans une
57

certaine mesure par le souci de la pérennité économique. Cette constatation est similaire à celle

de Perret (2010, p.52), selon laquelle « il n’existe pour l’instant aucun scénario crédible,

socialement juste et écologiquement soutenable […], les assertions simplistes selon lesquelles la

propension du capitalisme à l’efficacité peut permettre de stabiliser le climat et nous protéger des

pénuries sont lourdes de désillusions ». Ainsi, l’économie verte est loin de refléter un modèle à la

hauteur des enjeux sociaux et environnementaux pour lesquels une transformation profonde des

modes actuels de production, d’échange, de consommation, de transport et d’habitat s’impose.

Or, ce changement radical ne peut émaner de cette économie verte qui demeure ancrée dans la

doctrine néolibérale et ne peut permettre de « sortir de l’aliénation consumériste et marchande,

de la tyrannie de la performance et de la concurrence » (Marion, 2011, p.116). Ainsi, comme

l’ont démontré les résultats de recherche, l’économie verte privilégie une approche sectorielle

contraire à l’approche intégrée prônée par le développement durable, d’où l’infirmation de

l’hypothèse qui espérait que l’économie verte puisse cheminer vers le développement durable.

Dans la perspective de favoriser une approche intégrée du développement durable, les

dimensions environnementale et sociale méritent impérativement d’être renforcées. Pour que

l’économie verte génère un impact environnemental répondant à l’ampleur de la crise

écologique et à l’urgence d’action, Tanuro (2012) recommande d’envisager un plan stratégique

climatique plus ambitieux et de plus long terme que les scénarios actuels, dont le protocole de

Kyoto. À cet effet, la réduction des émissions de GES devrait atteindre un niveau se situant de

25% à 40% d’ici l’an 2020 afin de s’assurer de limiter la hausse de la température moyenne à

moins de 2°C supportable pour la vie sur terre. Les stratégies d’atténuation nécessaires font appel

à une panoplie de mesures combinant l’innovation technologique, les instruments économiques

de marché et les instruments réglementaires impliquant l’action régulatrice gouvernementale.


58

Dans ce cadre, les stratégies innovatrices doivent miser sur le secteur énergétique du fait que «

60 à 80 % du recul des émissions proviendrait de l’approvisionnement et de la consommation

énergétique ainsi que des procédés industriels » (GIEC, 2007, p.22). Peu importe le coût, la

substitution de l’énergie fossile par l’énergie renouvelable est impérative, cependant, en prenant

soin de limiter les contradictions sociales qui peuvent en résulter notamment les problèmes

alimentaires causées par la production d’agro-carburants. Concernant la nécessité d’une

planification climatique cohérente, une rigoureuse régulation publique s’impose, tant à l’échelle

nationale qu’internationale. À la suite des enjeux de la gouvernance mondiale, Casella et al.

(2010, p.20) suggèrent le « renforcement du système existant des Nations-Unies en matière de

mesures et vérifications, indispensable pour garantir la matérialité et la cohérence des

engagements pris par les différents pays ».

Quant à la dimension sociale devenue le parent pauvre de la triple finalité du

développement durable, pour la hisser à la parité, différents auteurs tracent certaines pistes à

suivre qui, généralement vont à l’encontre du modèle productiviste et du règne du marché.

Lacarrière soutient l’avis des tenants de l’anti-productivisme et des courants écologistes pour

lesquels la décroissance se présente comme l’unique réponse pour mettre en œuvre le

développement durable. « Les objecteurs de croissance soulignent en effet que la croissance

engendre par nature des inégalités et que les conditions d’un monde solidaire, où l’accès aux

ressources serait équitable, passe par une émancipation par rapport aux besoins marchands et aux

techniques industrielles pour en revenir aux fondamentaux des besoins de subsistance et à une

relocalisation des activités économiques » (Lacarrière, 2011, p.184). En effet, selon l’auteure, le

fondement productiviste de l’économie verte constitue une « dérive aliénante du capitalisme »

qui aveugle les gens avec des préoccupations matérielles et débouche sur une perception faussée
59

du bonheur. Dans cette perspective, la lutte pour le pouvoir d’achat représente une « dérive

consumériste ». Il est plutôt préférable de lutter pour « le pouvoir de vivre » qui implique le

changement radical des modes de vie et de pensée, ce dont l’économie verte n’est pas porteuse

(Ibid., p.185). Celle-ci ne remet donc pas en cause le dogme de la croissance et de la

consommation qui se traduit par une situation inégalitaire entre le Nord et le Sud, à l’intérieur

des nations et à l’égard des générations futures. Enfin, seule une transformation profonde peut

tendre vers une société plus égalitaire, et un changement qui serait aussi l’occasion de retisser le

lien social, de « resymboliser la société » (Ibid., p.186).

D’autres auteurs prônent un interventionnisme étatique de nature keynésienne. Comme le

précisent Mathieu et Sterdyniak (2008), les questions sociales restent, pour l’essentiel, du

domaine public national. L’omniprésence de la régulation étatique demeure ainsi un impératif

pour que l’économie puisse assurer l’inclusion sociale. L’analyse comparative de quatre modèles

sociaux à travers l’Europe (modèle scandinave, libéral, continental et méditerranéen) effectuée

par ces auteurs démontre l’efficacité du modèle scandinave en termes de préoccupations sociales

grâce à l’intervention de l’État. Inspiré par la social-démocratie, le modèle scandinave offre une

protection sociale uniforme et de niveau élevé à tous les citoyens. Dans ce modèle, l’inclusion

sociale est une norme accompagnée par une politique active de réinsertion par l’emploi. Le

niveau de fiscalité y est très élevé et l’État assure une redistribution par les prestations publiques

de protection sociale de bonne qualité dont la part des dépenses publiques s’élève à 33% dans les

pays comme la Suède, Danemark et la Finlande. Ce modèle réduit nettement les inégalités de

revenus, mais il peut être confronté à l’affaiblissement des incitations individuelles au travail

(Ibid.). L’importance de la régulation par l’État plutôt que par le marché est réitérée par Clerc

(2010, p.36) qui propose un modèle à capitalisme régulé « où les actionnaires et les détenteurs du
60

capital ne seront plus les acteurs principaux, ceux qui organisent le système en fonction de leurs

seuls intérêts ». Selon l’auteur, cette régulation permettrait d’atténuer les externalités négatives

du système actuel afin de construire le lien social et limiter la course à l’accumulation (Ibid.,

p.38). Pour Maréchal et Quenaut (2005), l’interventionnisme de type keynésien permet le « ré-

encastrement de l’économie » pour assurer la reproduction de la vie sociale. Celle-ci demande

des règles sociales et des cadres institutionnels contenant l’économie et déstructurant les

principes du consensus de Washington qui ont procédé au « dés-encastrement de l’économie ».

Cette régulation publique fut aussi appuyée par le sommet de Cochabamba de 2010 qui proposa

de l’élargir à l’échelle internationale en créant un tribunal international pour sanctionner les États

qui ne respecteraient pas les règles strictes qu’il faut fixer pour promouvoir les impératifs social

et environnemental (Houtart, 2010).

Il existe aussi la proposition d’un modèle de « développement par le bas » promouvant

une plus grande équité sociale (Crétiéneau, 2009). C’est une approche de développement au

service de l’Homme comme l’a noté Perroux, semblable au développement humain au sens de

Sen, par et pour la liberté des hommes, ou similaire du développement endogène prôné par les

dépendantistes (Ibid.). Le modèle prône l’organisation d’une économie décentralisée impliquant

suffisamment les citoyens à travers des activités de production, de consommation et d’échanges

(Ibid.). Il préconise une « économie enchâssée dans le social » et dans un espace de solidarité,

plutôt que d’échanges économiques au sens marchand (Ibid., p.172). Cette forme d’économie est

susceptible de promouvoir une « solidarité démocratique » de deux faces, « une face

réciprocitaire désignant le lien social volontaire entre citoyens libres et égaux, [et] une face

redistributive désignant les normes et les prestations établies par l’État pour renforcer la cohésion

sociale et corriger les inégalités » (Maréchal et Quenaut, 2005, p.324). Il en découle une grande
61

intensité du capital social au service d’un intérêt mutuel ou collectif à travers les organisations

sociales coopératives (Ibid., p.345). Cette forme d’organisation de la production localisée doit

être accompagnée par un système de commerce équitable dans les échanges régionaux et

internationaux. L’approche de commerce équitable réduit les inégalités dans les rapports

commerciaux puisque « [l]es prix ne sont plus fixés par un rapport de force, mais par un système

de partenariat ». Cette approche permet de « prendre en compte les droits économiques et

sociaux des producteurs » (Vanhoove, 2005, p.135).

Enfin, la dernière recommandation se réfère au nouveau concept d’économie sociale et

solidaire qui, en quelques sortes, renferme les mêmes normes sociales que ces derniers modèles.

Il a une ambition noble de créer une nouvelle forme d’économie fondée sur des manières

différentes de l’organisation du travail, de la production et de la distribution du surplus,

valorisant la « valeur ajoutée sociale » au même titre que la valeur ajoutée économique (Perrot,

2006). Contrairement à l’économie classique et à l’économie verte, l’accent particulier est mis

sur l’intégration des exclus au sein du marché de l’emploi et sur le comblement des lacunes

locales en termes de services sociaux aux individus. L’approche organisationnelle du travail, de

production et d’échange à travers les coopératives ou les associations favorise, outre les

interactions économiques, le tissage des liens sociaux axés sur la solidarité, la réciprocité,

l’équité et la cohésion sociales (Ibid.).

Somme-toute, face à l’impuissance du concept de l’économie verte à enrayer les lacunes

environnementales et sociales pour réaliser un développement durable, la grande question qui se

pose est l’avenir de celui-ci. Y aurait-il possibilité d’améliorer l’économie verte en lui

incorporant les normes environnementales et sociales recommandées ci-dessus afin qu’elle

reflète l’approche intégrée recherchée par le développement durable? Ou bien, faudrait-il tenter
62

la durabilité via l’approche de la décroissance? À défaut d’un modèle intégré à l’image du

développement durable, y aurait-il lieu d’explorer le modèle d’économie plurielle promu par

Arnsperger (2011)? Ce modèle renvoie à un système multi-modèle où différentes approches

économiques peuvent cohabiter. Selon l’auteur, compte tenu du risque de résistance au

changement de la part de l’économie classique, « [i]l serait urgent d’imaginer une pluri-

économie où diverses options de vie économique – capitalistes, marchandes non capitalistes et

non marchandes – puissent coexister de façon durable, chacune acceptant les limites

réglementaires rendant possible cette coexistence » (Ibid., p.74). Pour quiconque qui se trouve

interpelé par la question du développement durable, de tels scénarios méritent de faire l’objet

d’une analyse ultérieure à la recherche d’une stratégie plus adéquate reflétant une durabilité

forte.
63

Bibliographie

ABDELMALK, Lahsen et MUNDLER, Patrick (1995). Économie du développement, Les


théories, les expériences, les perspectives, Hachette Supérieur, Paris, 311p.

ABDELMALK, Lahsen et MUNDLER, Patrick (2010). Économie de l’environnement et du


développement durable, Éditions Fe Boeck Université, Bruxelles, 219p.

AGHION, Philippe et al. (2009), « Quelles politiques pour encourager l'innovation verte ? »,
Regards croisés sur l'économie, 2009/2 n° 6, p. 165-174.

AMBEC, Stefan et LANOIE, Paul (2009). « Performance environnementale et économique de


l'entreprise », Économie & prévision, 2009/4 n° 190-191, p. 71-94.

AMSPERGER, Christian (2011). « Dépasser le capitalisme, mais par étapes », Projet, 2011/5 n°
324 - 325, p. 73-81.

ARIÈS, Paul (2008). La décroissance : Un nouveau projet politique, Éditions Golias,


Villeurbanne, 362p.

BADIE, Bertrand et SMOUTS, Marie-Claude (1999). « L’émergence des biens communs », dans
Le retournement du monde. Sociologie de la scène internationale, Paris, Presses de la
FNSP, p.205-225.

BARBIER, Edward B. (2012). « Économie verte et développement durable : enjeux de politique


économique », Reflets et perspectives de la vie économique, 2012/4 Tome LI, p. 97-117.

BEAUMAIS, Olivier et CHIROLEU-ASSOULINE, Mireille (2001). Économie de


l’environnement, Bréal, Paris, 340p.

BELEM, Gisèle (2010). « Du développement au développement durable : cheminement, apports


théoriques et contribution des mouvements sociaux », Les cahiers de la CRSDD -
collection recherche, No 06-2010, 92p.

BLAISE, Séverine (2011). « L'après-Kyoto : quelle approche face au changement climatique? »,


Mondes en développement, 2011/2, n°154, p.103-120.

BOCQUET, Anne-Marie et al. (2010) « Économie sociale et solidaire et développement durable


: quelles spécificités pour les coopératives et les mutuelles ? », Géographie, économie,
société, 2010/3 Vol. 12, p. 329-352.

BONTEMS, Philippe et ROTILLON, Gilles (2007). L’économie de l’environnement, La


Découverte, Paris, 119p.

BRABEC, Maximilien (2010). Business Model Vert: L’économie durable comme stratégie
gagnante, Dunod, Paris, 243p.
64

CAMPENHOUDT, Luc Van et QUIVY Raymond (2011). Manuel de recherche en sciences


sociales, 4e édition, Édition Dunod, Paris, 262p.

CASELLA, Henri et al. (2010). Cancun : L’an un de l’après Copenhague, Les Cahiers de la
Chaire Économie du Climat, No8, 25p.

CHARTIER, Denis et FOYER, Jean (2012). « Rio+20 : la victoire du scénario de l'effondrement


? », Ecologie & politique, 2012/2 N° 45, p. 117-130.

COHEN-BACRIE, Bruno (2006). Communiquer efficacement sur le développement durable : De


l’entreprise citoyenne aux collectivités durables, les éditions demos, Paris, 133p.

COMBES, Maxime (2010). « Réflexions sur le « capitalisme vert » », Mouvements 3/2010 (n°
63), p. 99-110.

COULON, Patrick et MAYER, Sylvie (2005). Le Développement en débat : Croissance?


Décroissance? Durable? Solidaire? Éditions Syllepse, Paris, 225p.

CRÉTIÉNEAU, Anne-Marie (2009). « Participation et innovations sociales, Pour un


développement durable « par le bas », dans Développement durable : pour une nouvelle
économie, Éditions scientifiques internationales, Bruxelles, pp.169-186.

DE PERTHUIS, Christian (2010). Et pour quelques degrés de plus… Changement climatique :


incertitudes et choix économiques, Pearson, Paris, 290p.

DELACOUR, Marie-Odile (2006). Climat : la grande menace : tous les climatologues


constatent que la terre se réchauffe plus, Carnets de l'info, Paris, 84p.

DEMAZE, Tsayem Moïse (2009). Paradoxes conceptuels du développement durable et nouvelles


initiatives de coopération Nord-Sud : le Mécanisme pour un Développement Propre
(MDP). Cybergeo : European Journal of Geography, Environnement, Nature, Paysage,
27p.

Écosocialisme ou barbarie!, Nouveaux Cahiers du socialisme, Éditions Écosociété, No6, p.188-


200.

EJIGU, Mersie (2011). « Cadre des indicateurs du développement durable en Afrique et liste
d’indicateurs préliminaire », Rapport établi pour la Commission économique pour
l’Afrique (CEA), 78p.

FMI (2011). Etudes économiques et financières : Perspectives de l’économie mondiale,


Croissance au ralenti, risques en hausse, Édition française, Washington, 225p.

GADREY, Jean (2010). Adieu à la croissance : Bien vivre dans un monde solidaire, Les petits
matins / Alternatives Économiques, paris, 189p.
65

GALLEZ, Caroline et MORONCINI, Aurore (2003). Le manager et l’environnement : Outils


d’aide à la décision stratégique et opérationnelle, Presses polytechniques et
universitaires romandes, Lausanne, 248p.

GAUDILLIERE, Jean-Paul et Fabrice Flipo (2009). « Inégalités écologiques, croissance « verte


» et utopies technocratiques », Mouvements 4/2009 (n° 60), p. 77-91.

GAUTIER, Catherine et FELLOUS, Jean-Louis (2008). Eau, Pétrole, Climat : Un monde en


panne sèche, Odile Jacob, Paris, 320p.

GIEC (2007). Bilan 2007 des changements climatiques : Rapport de synthèse, Contribution des
Groupes de travail I, II et III au quatrième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts
intergouvernemental sur l’évolution du climat, Sous la direction de l’Équipe de rédaction
principale, Pachauri, R.K. et Reisinger, A., Genève, 103 p.

GIRAUD, Gaël et RENOUARD, Cécile (2010), « Peut-on réformer le capitalisme ? », Études,


2010/1 Tome 412, p. 19-30.

GLEIZES, Jérôme (2012). « De 1992 à 2012, les sommets de la Terre à Rio ou l'extension de la
marchandisation du monde », Mouvements, n° 70, p. 99-106.

HAERINGER, Nicolas (2010) « Changer le système, pas le climat » : la construction du


mouvement pour la justice climatique » Entretien avec Nicola Bullard, Mouvements,
2010/3 n° 63, p. 47-57.

HAKIM, Ben Hammouda et al., (2010). « De Washington à Pittsburgh : d'un consensus subi à un
consensus nouvellement établi ? », Mondes en développement, 2010/2 n° 150, p. 69-86.

HARI, Johann (2011). « Vert pâle. Ces groupes écologistes qui marchandent notre avenir », dans

HOUTART, François (2010), « La conférence mondiale des peuples sur le changement


climatiques et les droits de la Terre-Mère », Mouvements, 2010/3 n° 63, p. 82-87.

HUGON, Philippe (2010). « La crise va-t-elle conduire à un nouveau paradigme du


développement ? », Mondes en développement, 2010/2 n° 150, p. 53-67.

JURGENSEN, Philippe (2009). L’économie verte : Comment sauver notre planète, Odile Jacob,
Paris, 313p.

KEELEY, Brian et LOVE, Patrick (2010). De la crise à la reprise : Causes, déroulement et


conséquences de la Grande Récession, Les essentiels de l’OCDE, Les Editions OCDE,
Paris, 160p.

L’ÉCUYER, René (1990). Méthodologie de l’analyse développementale de contenu : Méthode


GPS et Concept de Soi, Presses de l’Université du Québec, Québec, 472p.

LACARRIÈRE, Sarah (2011), « La croissance verte : un mythe salutaire pour un monde


solidaire ? », Revue internationale et stratégique, 2011/1 n° 81, p. 183-188.
66

LAURENT, Éloi (2011). « Quelle crédibilité économique et écologique pour la gauche en 2012 ?
», Multitudes, 2011/3 n° 46, p. 110-121.

LAURENT, Éloi et LE CACHEUX, Jacques (2011). « Réforme de la fiscalité du carbone dans


l’Union européenne », Les options en présence, Revue de l'OFCE, 2011/1 n° 116, p. 393-
408.

LE CACHEUX, Jacques (2010) : « La nouvelle gouvernance de l’économie et de la finance


globalisées », Questions internationales, n°43, mai-juin 2010, pp.52-58.

LEFRANCOIS, Richard (1992). Stratégie de recherches en sciences sociales : Application à la


gérontologie, Les presses de l’Université de Montréal, Montréal, 358p.

LERAY, Christian (2008). L’analyse de contenu : de la théorie à la pratique : la Méthode


Morin-Chartier, livre électronique, Presses de l'Université du Québec, Québec, 180p.

LEVEQUE, Christian et SCIAMA, Yves (2008). Développement durable. Nouveau bilan,


Dunod, Paris, 259p.

LIPIETZ, Alain (2012). Green Deal. La crise du libéral-productivisme et la réponse écologiste,


La Découverte, Paris, 185 p.

LOWY, Michael (2011). « Écosocialisme et planification démocratique », dans Écosocialisme


ou barbarie!, Nouveaux Cahiers du socialisme, Éditions Écosociété, No6, P.124-139.

MANCEBO, François (2008). Développement durable, Armand Colin, Paris, 125p.

MARÉCHAL, Jean Paul et QUENAULT, Béatrice (2005). « Le développement durable : Une


perspective pour le XXI e siècle », Presses Universitaires de Rennes, Rennes 422p.

MARION, Louis (2011). « La décroissance : un mouvement social qui combat l’aliénation »,


dans Écosocialisme ou barbarie!, Nouveaux Cahiers du socialisme, No6, pp.111-122.

MASSIÉRA, Alain (2009). De la croissance économique au développement durable, Collection


L’esprit économique, L’Harmattan, Paris, 202p.

MATHIEU, Catherine et STERDYNIAK, Henri (2008) « Le modèle social européen et l'Europe


sociale », Revue de l'OFCE, 2008/1 n° 104, p. 43-103.

MÉLIÈRES, Marie-Antoinette et MARÉCHAL, Chloé (2010). Climat et Société. Climats


passés, passage de l’homme, climat futur : repères essentiels, CRDP de l’académie de
Grenoble, Grenoble, 366p.

MUCCHIELLI, Roger (2006). L’analyse de contenu, Des documents et des communications,


Collection formation permanente, Les Editions ESF, Issy-les-Moulineaux, France, 223p.

MÜLLER, Tadzio (2010). « De Copenhague à Cochabamba : nous cheminons en posant des


questions renouvelées? », Mouvements, 2010/3 n° 63, p.71-81.
67

NATIONS UNIES (2012). Situation et perspectives de l’économie mondiale pour 2012 et 2013,
16p.
http://www.un.org/en/development/desa/policy/wesp/wesp_current/2012wesp_es_fr.pdf,
consulté le 3 février 2013.

NATIONS UNIES, (2012). « L’avenir que nous voulons », Résolution adoptée par l’Assemblée
générale, Soixante-sixième session, Rio de Janeiro, 60p.

OCDE (2009). L’OCDE en chiffres, L’Observateur de l’OCDE, Les éditions de l'OCDE, Paris,
93p.

OCDE (2010). La fiscalité, l’innovation et l’environnement : Stratégie de l’OCDE pour une


croissance verte, Éditions OCDE, Paris, 271p.

OCDE (2011). Vers une croissance verte, Éditions OCDE, Paris, 160p,
http://dx.doi.org/10.1787/9789264111332-fr, consulté 08 février 2013.

OCDE (2012). OCDE et Rio+20, http://www.oecd.org/fr/croissanceverte/50450599.pdf, consulté


le 4 mars 2013, 12p.

OIT (2011). Le socle de protection sociale pour une mondialisation juste et inclusive, Rapport du
groupe consultatif présidé par Michelle Bachelet, mis en place par le BIT avec la
collaboration de l’OMS, Genève, 98p.

PAM (2009). Le rapport annuel du Programme alimentaire mondial 2009, Rome, 56p.

PAULET, Jean-Pierre (2005). Le développement durable, Transversale Débats, Ellipses Édition


Marketing, Paris, 188p.

PERRET, Bernard (2010). « Croissance verte ou développement humain ? », Projet, 4/2010 (n°
317), p. 49-55.

PERRET, Bernard (2011) « Y a-t-il une vie après la croissance ? », Projet, 2011/5 n° 324 - 325,
p. 118-123.
PERROT, Pascal 2006. Définition et mesure de la «valeur ajoutée sociale» dans les associations,
Revue internationale de l`économie sociale, no301, pp.42-60.

PNUE (2011), « Vers une économie verte : Pour un développement durable et une éradication
de la pauvreté – Synthèse à l’intention des décideurs », 44p,
www.unep.org/greeneconomy, consulté le 02 février 2013.

POISSON de Haro, Serge (2011). « Comment intégrer le développement durable à la stratégie?


», Gestion, Vol. 36, p. 56-65.

POULIN, Richard (2011). Crises écologiques, inégalités sociales et écosocialisme, dans


Écosocialisme ou barbarie!, Nouveaux Cahiers du socialisme, Éditions Écosociété, No6,
P.6-25.
68

REBILLARD, Julien (2008). La croissance verte : Comment le développement durable peut


générer du profit, Alban Éditions, Paris, 170p.

RONGERE Pierrette (1975). Méthodes des sciences sociales, deuxième édition, Édition Dalloz,
Paris, 118p.

SALLEH, Ariel (2012). « Rio +20 et l'économie verte : les technocrates, les méta-industriels, le
Forum social mondial et Occupy », Mouvements, 2012/2 n° 70, p. 83-98.

SCIAMA, Yves (2010). Le changement climatique : une nouvelle ère sur la Terre, Petite
encyclopédie Larousse, Paris, 128p.

SÉNAT DU CANADA (2010). « Attention Canada! En route vers notre avenir énergétique :
Vers une stratégie canadienne de l’énergie durable »,
http://celarc.ca/cppc/224/224237.pdf, consulté le 22/01/2013.

SMOUTS, Marie-Claude (2005). Le développement durable. Les termes du débat, Armand


Colin, Paris, 288p.

STERNER, Thomas (2011). « Engagements volontaires et croissance verte dans l'ère d'après
Copenhague » Voluntary Pledges and Green Growth in the Post-Copenhagen Climate,
Revue d'économie du développement, 2011/4 Vol. 25, p. 115-151.

SUREN, Erkman (2004). Vers une écologie industrielle : comment mettre en pratique le
développement durable dans une société hyper-industrialisée, Éditions Charles Léopold
Mayer, Paris, 252p.

SUREN, Erkman (2004). Vers une écologie industrielle : comment mettre en pratique le
développement durable dans une société hyperindustrialisée, Éditions Charles Léopold
Mayer, Paris, 252p.

TANURO, Daniel (2012). L’impossible capitalisme vert, La Découverte, Paris, 223p.

VALLÉE, Annie (2002). Économie de l’environnement, Éditions du Seuil, Paris, 344p.

VANHOOVE, Jean-Paul (2005). « Le commerce équitable, outil pour le développement


durable », dans Le développement en débat, Éditions Syllepse, Paris, pp.135-138.

WENDLING, Christophe (2008). « Les instruments économiques au service des politiques


environnementales », Économie & prévision, 2008/1 n° 182, p. 147-154.

ZACCAÏ, Edwin (2002). Le développement durable : Dynamique et constitution d’un projet,


EcoPolis no 1, P.I.E.-Peter Lang, Bruxelles, 358p.

ZIEGLER, Jean (2011). Destruction massive, Géopolitique de la faim, Éditions du Seuil, Paris,
344p.

Vous aimerez peut-être aussi