Droit Parlementaire

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UNIVERSITE DE YAOUNDE II-SOA

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

DEPARTEMENT DE DROIT PUBLIC

MASTER I DROIT PUBLIC

DROIT PARLEMENTAIRE

Par

Pr Cyrille MONEMBOU

Agrégé des Facultés de Droit

Année académique 2019-2020

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PLAN
Introduction : L’avènement de l’institution parlementaire

Ière partie : Les institutions parlementaires

Chapitre 1 : Les chambres parlementaires

Section 1 : L’Assemblée nationale

Para 1 : Le nombre de parlementaire

Para 2 : L’élection des députés

Section 2 : Le Senat

Para 1 : Le nombre de sénateurs

Para 2 : Le régime électoral des sénateurs.

A- La désignation par élection


B- La désignation par nomination
Chapitre 2 : Les organes parlementaires

Section : 1 Les organes directeurs

Para1 : Le bureau

Para 2 : La conférence des Présidents

Section 2 : Les formations internes

Para1 : Les groupes parlementaires

Para2 : Les commissions

II ère : partie : Le Mandat parlementaire

Chapitre : L’accession au mandat parlementaire

Section 1 : Les conditions d’éligibilité

Para 1 : Les inéligibilités au mandat

Para 2 : Les incompatibilités au mandat parlementaires

Section2 : Le temps du Mandat

Para 1 : la durée normale du mandat

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Para 2 : La durée anormale du mandat

Chapitre : La protection du Mandat parlementaire

Section : Une protection pénale : Les immunités

Para1 : L’irresponsabilité et l’inviolabilité

Para 2: Les limites aux immunités : la levée légale de l’immunité

Section2 : Une protection financière

Para1 : L’octroi d’une indemnité au parlementaire


Para 2 : L’octroi des micros crédits aux parlementaires

IIIème partie : Les fonctions parlementaires

Chapitre 1 : La fonction législative

Section1 : L’inventaire législatif

Para1 : Les lois ordinaires

Para 2 : Les lois particulières


Section 2 : La procédure législative

Para1 : La procédure d’adoption

Para 2 : Le droit d’amendement


-
Chapitre 2 : La fonction contrôle

Section 1 : Le contrôle information

Para1 : Les questions

Para 2 : Les commissions

Section 2 : Le contrôle sanction

Para 1: L’engagement de la responsabilité sur le vote de confiance

Para 2 : L’engagement de la responsabilité sur la motion de censure

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INTRODUCTION

L’institution parlementaire est considérée sans aucun doute comme le


vestige historique du régime parlementaire. En réalité, son évolution est liée à
l’histoire politique britannique avant sa diffusion dans toute l’Europe centrale et
sa transposition en dehors de l’Europe. Elle a connu une évolution ; puisque tout
commence en 1215 avec le Roi JEAN SANS TERRE qui rencontre une
opposition de ses sujets sur ses dépenses exorbitantes. Une solution négociée est
donc trouvée avec la création de la curia major, une sorte de grand conseil
chargé d’autoriser toute augmentation des impôts demandés par le Roi ; d’où la
naissance du principe du consentement du peuple à l’impôt. C’est donc cette
chambre, au gré des évolutions qui deviendront plus tard le parlement
britannique dans son aspect politique c'est-à-dire la chambre des communes.
L’institution parlementaire est ainsi au cœur du régime parlementaire.
D’ailleurs, son origine britannique référencier du régime parlementaire en dit
long sur son importance dans l’architecture institutionnelle d’un Etat. C’est dans
cette logique que René CAPITANT affirme que gouverner c’est légiférer.
Dans le cadre de cet enseignement relatif au droit parlementaire et
électoral camerounais, il s’agira tout d’abord de cerner les institutions
parlementaires (Première partie), ensuite analyser le mandat parlementaire
(Deuxième partie), et enfin de cerner les fonctions du parlement (Troisième
partie).

PREMIERE PARTIE: LES INSTITUTIONS


PARLEMENTAIRES

pour cerner les différentes institutions parlementaires, il faut analyser à la


fois la constitution et le règlement intérieur des assemblées. En combinant donc
les deux textes, il apparait clairement qu’il faut opposer les chambres
parlementaires (Chapitre 1) des organes parlementaires (Chapitre2).

CHAPITRE 1: LES CHAMBRES PARLEMENTAIRES

L’une des plus grandes innovations du constitutionnalisme camerounais


avec la réforme constitutionnelle du 18 janvier 1996 est sans aucun doute le
bicaméralisme. En effet, l’article 14 alinéa 1 de la constitution dispose « (1)
Le pouvoir législatif est exercé par le Parlement qui comprend deux (2)

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chambres : - l’Assemblée Nationale ; - le Sénat ». Il est donc évident que les
deux chambres parlementaires au Cameroun sont tour à tour l’AN (Section 1) et
le Sénat (Section 2).

Section 1 : L’ASSEMBLEE NATIONALE


L’AN encore appelée chambre basse est en réalité le siège véritable du
pouvoir législatif au regard de l’origine de ses membres jouissant d’une plus
grande légitimité. C’est donc à juste titre que l’AN investie d’une plus grande
légitimité reçoit le serment du PR. En analysant la constitution et le règlement
intérieur, on peut mieux saisir le nombre de parlementaires (Paragraphe 1) tout
comme leur source d’origine (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : LE NOMBRE DE DEPUTES

L’AN est composée de 180 députés répartis en fonction de la population


active en principe. Toutefois, l’attribution du nombre de députés par
circonscriptions électorale peut aussi tenir compte d’autres enjeux qui ne sont
pas toujours liés à la démographie. Mais ce découpage est une prérogative du PR
et constitue d’ailleurs un acte de gouvernement insusceptible de recours devant
le Juge administratif. Il y a donc lieu de dire qu’au-delà de la représentativité
démographique, la détermination du nombre de députés est aussi et avant tout
politique.

Paragraphe 2: LA QUESTION DE LA LEGITIMITE DES DEPUTES

En tant que chambre politique de l’institution parlementaire, l’AN, au


même titre que la chambre des communes en Grande Bretagne jouit d’une réelle
légitimité par rapport à la chambre haute qui est le Sénat. Bien qu’élu dans une
circonscription, le député est l’élu de la nation toute entière et c’est en cela qu’il
est appelé « député de la Nation ». Il tire donc directement son pouvoir du
peuple qui le mandate pour agir en ses lieux et place. C’est la matérialisation du
régime représentatif tel que pensé par SIEYES. Une fois élu, le député ne peut
plus être révoqué par ses électeurs et n’est d’ailleurs pas censé représenter les
intérêts de ses électeurs à l’AN.
Au regard de ce qui précède, il est clairement établi que sur le plan de la
légitimité le député apparait mieux loti que les membres du sénat.

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Section 2: LE SENAT
Le sénat est la seconde chambre parlementaire au Cameroun née sous
l’égide de la libéralisation de la vie politique au Cameroun. Pour justifier sa
création, plusieurs raisons ont été avancées ; d’où la nécessité d’étudier à la fois
le nombre et le mode de désignation des sénateurs (Paragraphe 1), et les
raisons ayant justifié la création du sénat (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: LE NOMBRE ET LE MODE DE DESIGNATION DES


SENATEURS
Conformément à la constitution, le sénat camerounais est composé de 100
sénateurs élus et désignés ; soit 70 élus et 30 désignés. Les 70 sénateurs sont
élus au suffrage universel indirect par un collège électoral constitué de
conseillés régionaux et de conseillés municipaux. Les 30 autres sont nommés
par le PR à raison de trois (03) par Région. Le mode de désignation est déjà e
lui-même suffisamment illustratif sur les raisons ayant justifié la création d’un
sénat au Cameroun.

Paragraphe 2: LES MOTIFS DE CREATION DU SENAT AU


CAMEROUN
Deux raisons sont souvent évoquées pour justifier la création du sénat par
le constituant du 18 janvier 1996. Il s’agit de la représentativité (A) et de la
modération du pouvoir accompagnée de l’idée d’amélioration du travail
législatif (B).

A- L’IDEE DE REPRESENTATIVITE DU SENAT


L’idée de représentativité est liée aux différentes classes dans l’histoire
politique britannique. En effet, la chambre haute (Chambre des Lords)
représentait les différentes classes de la société britannique (la bourgeoisie,
l’aristocratie, la noblesse). La chambre haute permettait ainsi aux britanniques
de se souvenir de leur évolution sociale. Tel n’est pas l’objectif assigné par le
constituant camerounais au Sénat. En réalité, au regard de son collège électoral,
il est établi que le sénat accorde une place importante au commandement
traditionnel. D’ailleurs, la forte présence des chefs traditionnels au sénat est
suffisamment illustrative de cette situation.

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Bien plus, le sénat apparait comme la chambre des CTD ; puisqu’il assure
également leur représentativité.

B- LA MODERATION DU POUVOIR ET L’AMELIORATION DU


TRAVAIL LEGISLATIF
Le constituant camerounais de 1996 motive la création du sénat par la
volonté d’améliorer la qualité de la loi adoptée et d’assurer la modération du
pouvoir.
S’agissant de la modération du pouvoir, il s’agit de mieux domestiquer les
velléités conflictuelles de l’AN pour in fine stabiliser les rapports entre
l’exécutif et le législatif. Il s’agit en fin, par un regard différent dans
l’élaboration des lois de mieux assurer sa qualité.
Il est donc évident que l’architecture de l’institution parlementaire au
Cameroun a été transformée avec la révision constitutionnelle du 18 janvier
1996. Mais au-delà des chambres parlementaires qui sont prévues par la
constitution coexistent des organes parlementaires nécessaires à son bon
fonctionnement.

CHAPITRE 2: LES ORGANES PARLEMENTAIRES

Pour mieux comprendre le fonctionnement de l’institution parlementaire, il


est important d’analyser, d’identifier et de décrypter les différents organes qui
accompagnent au quotidien l’accomplissement des missions qui sont accordées
à l’institution parlementaire par la constitution. Mais la précision, l’explicitation
de ces différentes misions au-delà de ce que prévoit le constituant relève
également des textes internes notamment le règlement intérieur.
A partir de ces deux textes, il faut préciser qu’il existe des organes de
direction et de travail parlementaire (section 1) ; toutes choses qui traduisent
l’autonomie de l’institution parlementaire (section 2).

Section 1: LES ORGANES DE DIRECTION ET DE TRAVAIL DES


PARLEMENTAIRES
L’activité parlementaire est centrée autour d’organes qui ont reçu mandat
du constituant d’assurer la direction de l’institution parlementaire (paragraphe

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1). Mais parce que tous les parlementaires ne peuvent pas siéger dans ces
organes de direction, il leur est trouvé des cadres d’action (paragraphe 2).

Paragraphe 1: LES ORGANES DIRECTEURS


Chaque chambre parlementaire dispose de deux types d’organes : le
bureau (A) et la conférence des présidents (B).

A- LE BUREAU
Chacune des chambres parlementaires dispose d’un bureau qui est une
instance collégiale présidée par un président mais organiquement distinct de
celui-ci. Suivant l’article 11 alinéa 1 modifié par la loi n°2014/016 du 09
septembre 2014 (article 11 de la loi n°2002/005 du 02 décembre 2002), le
bureau est clairement précisé. L’article 16 (nouveau) indique clairement que le
bureau définitif de l’AN comprend :
 01 président ;
 01 premier vice président ;
 05 vices présidents ;
 04 questeurs ;
 12 secrétaires.
Il convient de préciser que le secrétaire général de l’AN est membre ex-officio
du bureau définitif. La composition du bureau doit refléter la configuration de
l’AN. Dans la même optique, il faut préciser que le bureau dispose des pouvoirs
pour organiser les services et représenter l’AN. De manière formelle, il est
constitué pour un mandat d’un an et ses membres sont rééligibles. Le bureau de
l’AN est consulté par le président de la République pour la dissolution de
l’assemblée, la nomination des trois membres par le président de la république
du conseil constitutionnel.
S’agissant du sénat, il faut indiquer que l’article 8 de la loi n°2013/006
du 10 juin 2013 portant règlement intérieur du sénat précise les membres du
bureau. Il s’agit de :
 01 président ;
 01 premier vice Président ;
 04 vices présidents ;
 03 questeurs ;
 08 secrétaires.
Et comme avec l’AN, le secrétaire général siège ex-officio dans le bureau.

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Qu’il s’agisse du bureau du sénat ou de celui de l’AN, il faut préciser que
les membres ont pratiquement les mêmes missions. Alors que les secrétaires
veillent à la rédaction des procès verbaux, les questeurs sous la direction du
bureau sont chargés du contrôle des services administratifs et financiers.
De la même manière, les deux présidents de chambres exercent à
l’identique les mêmes prérogatives. Ils constituent des autorités politiques et
administratives des chambres parlementaires. Ils représentent les différentes
chambres dans tous les actes de la vie civile et ils sont des ordonnateurs du
budget de leurs institutions. Il est donc évident que tout en étant membre du
bureau, les présidents de chambres bénéficient d’une visibilité institutionnelle
bien plus forte que leurs bureaux respectifs.
Quid de la conférence des présidents ?

B- LA CONFERENCE DES PRESIDENTS


L’article 18 alinéa 2 de la constitution et l’article 23 alinéa 2 du même
texte constitutionnel prévoit cet organe de direction des chambres
parlementaires. Ils fixent par ailleurs à l’identique la composition de la
conférence des présidents. Elle est composé des présidents des groupes
parlementaires ; des présidents des commissions parlementaires et des membres
du bureau. Un membre du gouvernement participe aux travaux de la conférence
des présidents.
La conférence des présidents a pour rôle de statuer sur la recevabilité des
textes reçus, c'est-à-dire de vérifier si les projets et propositions de lois sont
effectivement du domaine de la loi. Il s’agit donc vraisemblablement d’un
contrôle préalable. La conférence des présidents a également pour rôle de fixer
l’ordre du jour de la chambre. Il convient néanmoins d’indiquer que cette
prérogative est fortement diluée du fait du contrôle de l’ordre du jour de chacune
des chambres par le gouvernement. L’alinéa 4 de l’article 18 de la constitution
s’agissant de l’AN indique que l’ordre du jour comporte en priorité et dans
l’ordre que le gouvernement a fixer la discussion des projets de loi ou des
propositions de loi qu’il a accepter.

Paragraphe 2: LES AUTRES CADRES D’EXERCICE DU TRAVAIL


PARLEMENTAIRE
Il s’agit des groupes parlementaires (A) et des commissions
parlementaires (B).

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A- LES GROUPES PARLEMENTAIRES
Les groupes parlementaires sont les organes politiques du parlement
regroupant les différentes députés ou sénateurs en fonction de leurs partis
politiques, ou des coalitions qui se constituent au sein de la chambre. Les
groupes parlementaires contribuent à la rationalisation du travail parlementaire.
Il s’agit de permettre aux parlementaires issus du même bord politique ou ayant
des idées proches de ce parti politique de manière indirecte, le groupe
parlementaire peut apparaitre comme un porte voie des parlementaires députés
ou sénateurs ; puisqu’il est membre de plein droit de la conférence des
présidents. L’adhésion à un groupe parlementaire n’implique pas
automatiquement l’adhésion à un parti politique que représente le groupe
parlementaire en question. L’article 20 du règlement intérieur de l’Assemblée
Nationale du 09 septembre 2014 indique que les députés peuvent s’organiser
en groupes parlementaires, mais aucun groupe parlementaire ne doit comprendre
moins de 15 députés.
Pour le cas du sénat, l’article 23 précise que le nombre de sénateurs nécessaires
pour constituer un groupe parlementaire est de 10. Le groupe parlementaire
permet par ailleurs au parti de discipliner ses membres puisqu’il est le canal
adapté pour le parti de donner des consignes de vote.
A côté des groupes parlementaires se trouvent également des commissions
parlementaires.

B- LES COMMISSIONS PARLEMENTAIRES


Les commissions parlementaires constituent le lieu par excellence de
déroulement du travail parlementaire. C’est dans le cadre de ces commissions
que les députés et les sénateurs procèdent à un examen minutieux des projets et
propositions de lois. Il est prévu dans le règlement intérieur de chaque chambre
la constitution chaque année de neuf (09) commissions générales composées en
nombre égal de députés. Ce nombre est repris à l’identique par le règlement
intérieur du sénat ainsi que le type de commissions. Il s’agit de :
 La commission des lois constitutionnelles ;
 La commission des finances et du budget ;
 La commission des affaires étrangères ;
 La commission de la défense nationale et de la sécurité ;
 La commission des affaires économiques ;
 La commission de l’éducation ;
 La commission des affaires culturelles, sociales et familiales ;

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 La commission de la production et des échanges ;
 La commission des résolutions et des pétitions.
Tout projet ou proposition de lois, après sa recevabilité par la conférence des
présidents est affecté à la commission qui traite des questions en lien avec ledit
projet.
Cette architecture organique est illustrative de l’autonomie accordée à
l’institution parlementaire.

Section 2: LA TRADUCTION DE L’AUTONOMIE DU PARLEMENT

Dans l’esprit de la séparation des pouvoirs tel que pensé par Montesquieu,
au-delà de la distinction des organes et de la spécialisation des fonctions, il est
important que tout pouvoir puisse jouir d’une indépendance dans ses rapports
avec les autres pouvoirs lui permettant de s’assumer. Telle est la finalité de
l’autonomie reconnue dans son organisation et son fonctionnement à chacune
des chambres du parlement. Il s’agit d’une part d’une autonomie juridique et
administrative (paragraphe 1) et d’autre part d’’une autonomie financière et en
ressources humaines (paragraphe 2).

Paragraphe 1: L’AUTONOMIE JURIDIQUE ET ADMINISTRATIVE


Il convient tour à tour d’analyser l’autonomie juridique (A) et l’autonomie
administrative (B).

A- L’AUTONOMIE JURIDIQUE
L’une des marques de l’autonomie d’une institution parlementaire est la
capacité qui lui est reconnue d’élaborer ses propres règles. Les chambres
parlementaires n’ont donc pas échappé à cette exigence d’un pouvoir
indépendant. En effet, elle dispose de la capacité d’élaborer et d’adopter leurs
propres règlements intérieurs. Les articles 17 alinéa 2 et 22 alinéa 1 disposent à
l’identique que chacune de ces chambres fixe elle-même ses règles
d’organisation et de fonctionnement sous forme de loi portant règlement
intérieur.
Toutefois, pour éviter que sous le prétexte de l’autonomie les chambres
s’octroient des pouvoirs exorbitants au-delà de ce qui est prévu par la
constitution, un contrôle de constitutionnalité obligatoire est opéré avant toute
promulgation par le Président de la République. La juridiction constitutionnelle

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vérifie ainsi le respect par la constitution du règlement intérieur de la chambre
parlementaire.
Après avoir adopté un nouveau règlement intérieur par une loi du 26
novembre 2002 finalement promulguée par le PR le 02 décembre 2002, le
président de l’AN a saisi le président de la Cour Suprême siégeant comme
conseil constitutionnel, comme l’y oblige la constitution pour un contrôle de
constitutionnalité préalable. Le juge constitutionnel transitoire a par une décision
rendue le 28 novembre 2002, une décision déclarant l’article 3 nouveau alinéas
2, 3, 4, 5, 6 et 7 et les articles 4, 5, 6, 7 et 10 contraires à la constitution. Ces
différents articles instituaient une procédure de validation de mandat par le
parlement lui-même après la proclamation des résultats par le conseil
constitutionnel. Nonobstant cette décision, le président de la république a qu’en
même promulgué ce règlement intérieur en l’Etat.
Au-delà de cette autonomie juridique existe une autonomie administrative.

B- L’AUTONOMIE ADMINISTRATIVE
L’autonomie administrative est illustrée par l’existence d’une administration
propre à chacune des chambres parlementaires. Il est clairement établi que
chaque chambre jouit d’une autonomie administrative (article 102 du
règlement intérieur de l’AN et 108 du règlement intérieur du sénat). Cette
autonomie administrative implique l’existence des services administratifs dont
l’organisation est arrêtée sur proposition du secrétaire général par le président de
la chambre après accord du bureau. En réalité, le secrétaire général de la
chambre coordonne l’administration et peut donc être assisté par des secrétaires
généraux adjoints. L’autonomie administrative est le préalable à une autonomie
financière et des ressources humaines.

Paragraphe 2: L’AUTONOMIE FINANCIERE ET DES RESSOURCES


HUMAINES
Chacune des chambres représente une administration propre
indépendante de l’administration, bras séculier de l’exécutif. A cet effet, elles
jouissent d’une autonomie financière (A) et en ressources humaines (B).

A- L’AUTONOMIE FINANCIERE DES CHAMBRES


PARLEMENTAIRES
Chacune des chambres parlementaires dispose d’un budget qui lui est
propre géré par des organes qui lui sont propres. Il est ainsi prévu que la

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gestion des finances aussi bien de l’AN que du sénat est assurée par le
président de l’AN et le président du sénat. Ils sont tous les deux ordonnateurs
des budgets de leurs chambres et peuvent néanmoins faire de leurs secrétaires
généraux des ordonnateurs délégués. Les questeurs, organes propres de la
chambre assurent le contrôle des finances de chacune des chambres. A cet
effet, ils émettent leurs avis sur les engagements des dépenses de l’institution
sous le contrôle du bureau. Ils préparent par ailleurs le projet de budget de la
chambre et le soumettent au bureau avant son examen et son vote par la
commission des finances et du budget fonctionnant comme commission de
comptabilité budgétaire. Après le vote par La commission des finances et du
budget, le budget de la chambre est inscrit par ordre dans le budget général
de l’Etat (voir les articles 104, 105 et 106 de la loi portant règlement intérieur
de l’AN. Pour néanmoins essayer de respecter le principe de la séparation
entre l’ordonnateur et le comptable, un agent comptable est placé auprès de
chacune des chambres.
Il convient néanmoins de préciser que les chambres parlementaires, du fait de
leur autonomie ne sont soumises à aucun contrôle financier de l’extérieur.
Pour couronner cette autonomie, il faut ajouter l’autonomie en ressources
humaines.

B- L’AUTONOMIE EN RESSOURCES HUMAINES DES


CHAMBRES PARLEMENTAIRES
Au-delà des parlementaires qui sont membres de droit des commissions
comme précédemment indiqué, il y a lieu de noter l’existence d’un personnel
administratif chargé d’assurer les missions administratives de la chambre.
Nonobstant l’existence des fonctionnaires issus de la fonction publique générale
mis à la disposition des différentes administrations parlementaires, il faut
préciser l’existence d’un personnel propre à chacune des chambres. Ce
personnel est recruté directement par la chambre et c’est elle qui détermine sont
statut. L’alinéa 2 de l’article 105 de la loi portant règlement intérieur de
l’An de 2014 par exemple dispose que sur proposition du secrétaire général, le
bureau détermine le statut des fonctionnaires de l’Assemblée Nationale. Ces
derniers ont qualité de fonctionnaire de l’Etat ; d’où l’existence d’une fonction
publique parlementaire.
S’il est déjà indiqué que les députés et les sénateurs constituent les deux
piliers du parlement camerounais, il reste à indiquer comment accède-t-on à ces
fonctions de parlementaire ; d’où la nécessité d’étudier le mandat parlementaire.

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DEUXIEME PARTIE: LE MANDAT
PARLEMENTAIRE

Parler du mandat parlementaire implique nécessairement l’analyse des modes


d’accès au mandat parlementaire d’une part (Chapitre 1) et d’autre part la
protection du titulaire du mandat parlementaire (Chapitre 2).

CHAPITRE 1: L’ACCESSION AU MANDAT


PARLEMENTAIRE

L’exercice d’un mandat parlementaire nécessite qu’on puisse


justifier de la qualité vous permettant d’exercer ledit mandat. Pour être
parlementaire, il faut remplir les conditions nécessaires en fonction des
exigences de chacune des chambres. Pour ce qui est de la chambre basse c'est-à-
dire l’AN, il faut être investi par un parti politique dès lors que les partis
politiques concourent à l’expression du suffrage universel. Toutefois, la
constitution prévoit l’hypothèse de candidature indépendante sous des
conditions rigoureuses comme c’est le cas avec l’élection du président de la
république.
Quant au sénat, il y a évidemment la condition de l’investiture par un parti
pour les 70 sénateurs élus ; mais également la possibilité d’appartenir à aucun
parti politique pour les sénateurs nommés compte tenu de la spécificité de cette
chambre.
Mais au-delà de cette qualité politique à avoir, il y a des conditions d’éligibilité
(Section 1) qui peuvent impacter d’une manière ou d’une autre le temps du
mandat (Section 2).

Section 1: LES CONDITIONS D’ELIGIBILITE


Pour être élu député ou sénateur, il faut remplir absolument les conditions
imposées par la loi électorale. Autrement dit, il faut éviter de tomber sous le
coup des inéligibilités (paragraphe 1) et des incompatibilités (paragraphe 2).

Paragraphe 1: LES INELIGIBILITES AU MANDAT


Il y a des inéligibilités liées à la jouissance des droits civiques et
politiques (A) et des inéligibilités liées aux condamnations pénales (B).
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A- LES INELIGIBLITES LIEES A LA NON JOUISSANCE DES
DROITS CIVIQUES ET POLITIQUES
Il faut d’entrée de jeu préciser que la fonction de représentant du peuple est
une fonction digne dès lors qu’on est amené à parler au nom du peuple. De
manière générale, on ne peut prétendre au mandat parlementaire si on ne dispose
pas de toutes ses facultés mentales. Autrement dit, il faut jouir de ses droits
civiques, c'est-à-dire disposé de toutes ses facultés mentales. Par ailleurs, il faut
être inscrit sur une liste électorale et remplir les conditions d’âge c'est-à-dire 23
ans pour la députation et 40 ans pour le sénat. Il faut justifier de la nationalité
camerounaise et savoir lire et écrire l’une des langues. Toutes ces conditions
sont essentielles pour prétendre à une élection ; mais elles ne sont pas
exclusives.

B- LES INELIGIBILITES DU FAIT DES CONDAMNATIONS


Pour accéder à la fonction parlementaire, il ne faut pas avoir fait l’objet d’une
condamnation pénale ayant porté préjudice à votre casier judiciaire. Autrement
dit, il ne faut pas avoir été condamné à plus de 06 mos d’emprisonnement ferme.
Cette exigence soulève néanmoins la problématique de la grâce qui pourrait être
accordée après une condamnation pénale. Il faut tout de suite préciser que si la
grâce, prérogative exclusive du PR empêche d’exécuter la condamnation, elle
n’efface pas pour autant la sanction.
Une fois qu’on a rempli les conditions d’éligibilité, et qu’on accède enfin
au mandat parlementaire, son exercice est encore conditionné par le respect des
règles d’incompatibilité.

Paragraphe 2: LES INCOMPATIBILITES AU MANDAT


PARLEMENTAIRE
Les incompatibilités posent un principe d’interdiction de tout cumul à la
fois avec les fonctions publiques (A) et les fonctions électives (B).

A- L’INTERDICTION DU CUMUL AVEC LES FONCTIONS


PUBLIQUES
L’exercice d’un mandat parlementaire exige que le titulaire du mandat
puisse être entièrement au service de l’institution parlementaire. Il est donc
interdit aux parlementaires d’exercer toute autre fonction publique de nature à
préjudicier l’efficacité de son action. L’article 22 de la loi du 10 juin 2013

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portant règlement intérieur du sénat précise les différentes fonctions
publiques ne pouvant pas être conciliées avec le mandat de sénateur. Ainsi
entendu, l’exercice du mandat de sénateur est incompatible avec les fonctions de
membre du gouvernement et assimilés, de membre du conseil constitutionnel, de
membre du conseil économique et social, de délégué du gouvernement auprès
d’une communauté urbaine ou de toute fonction publique non élective. Bien
plus, les fonctions de sénateur sont également incompatibles avec les fonctions
de président du conseil d’administration ou de salarié d’un établissement public
ou d’une entreprise du secteur public ou parapublic. C’est également dans cet
esprit que le mandat de député tel qu’indiqué par l’alinéa 2 de l’article 4 de la
loi de 2014 portant règlement intérieur de l’AN s’inscrit clairement. L’on ne
peut être député si on exerce des fonctions publiques rétribuées sur les fonds de
l’Etat. Ces incompatibilités touchent également les fonctions électives.

B- L’INTERDICTION DU CUMUL AVEC LES FONCTIONS


ELECTIVES
L’idée principale développée ici est relative à l’impossibilité d’exercer
plusieurs mandats de nature différente. Il s’agit de considérer le titulaire d’un
mandat comme un professionnel qui a été élu ou désigné pour assurer
efficacement une mission. Il y a quelques années au Cameroun il était permis la
conciliation du mandat parlementaire se situant au niveau national et le mandat
de Maire ou de conseillé municipal se situant au niveau local. Ce cumul s’est
avéré néfaste non seulement pour l’efficacité de l’action parlementaire, mais
également pour la mise en œuvre de la décentralisation. L’interdiction a donc été
posée de cumuler le mandat de député et celui de maire ou de toute autre
fonction élective. Cette interdiction a été reprise par le règlement intérieur du
sénat. Toutefois, il faut préciser que des missions temporaires ou extraordinaires
peuvent être confiées aux députés (article 4 alinéa 3 de la loi de 2014) et aux
sénateurs (article 22 alinéa 5 de la loi de 2013) par le gouvernement.
Néanmoins, le cumul du mandat législatif et de la mission ne peut excéder deux
ans (il faut relever qu’il est clairement mentionné dans les règlementa intérieurs
des deux chambres que malgré l’expiration de ce délai de deux ans, la mission
peut être renouvelée par décret pris après avis du bureau de la chambre).
S’il est avéré que toutes les incompatibilités sont levées, le député peut alors
exercer son mandat en fonction du temps indiqué.

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Section 2: LE TEMPS DU MANDAT
Au-delà du temps clairement indiqué considéré comme la durée normale
du mandat parlementaire (Paragraphe 1), il peut survenir plusieurs incidents
impactant sur la durée du mandat (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: LA DUREE NORMALE DU MANDAT


PARLEMENTAIRE
Elle est affirmée de manière claire par la constitution (A) pour atteindre
des objectifs précis (B).

A- L’AFFIRMATION CONSTITUTIONNELLE DE LA DUREE DU


MANDAT
Au terme de l’article 15 alinéa 1 de la constitution, l’AN est composée de
180 députés élus au suffrage universel direct et secret pour un mandat de 05 ans.
Tel est également la durée du mandat de sénateur qu’il soit élu ou nommé. Il y a
lieu de préciser que le constituant camerounais n’a pas jugé utile de préciser que
ce mandat est renouvelable. De manière claire, il n’a pas limité le nombre de
mandat des députés ou des sénateurs contrairement à ce que vient de faire le
constituant tchadien. En effet, la nouvelle constitution du Tchad a limité à la fois
le mandat présidentiel, le mandat des parlementaires et le mandat des conseillés
municipaux.

B- LES OBJECTIFS DU RENOUVELEMENT DU MANDAT DES


PARLEMENTAIRES
Le renouvèlement des mandats permet d’assurer la stabilité de l’institution.
Le constituant permet que les parlementaires puissent revenir à chaque fois
obtenir l’autorisation du détenteur réel du pouvoir. Dans une république, le
peuple est le détenteur unique du pouvoir politique qu’il délègue à des
représentants qui sont considérées comme des exerceurs du pouvoir. Du fait de
l’interdiction du mandat impératif pensé comme un moyen pour le peuple de
sanctionner à tout moment un parlementaire, le renouvèlement du mandat érige
le peuple en arbitre ultime. Mais la durée normale du mandat telle que fixée par
le constituant peut connaitre des incident ou accidents.

17
Paragraphe 2: LES INCIDENTS A LA DUREE DU MANDAT
La durée normale du mandat parlementaire peut connaitre des
perturbations puisqu’elle peut être modifiée. Il peut s’agir d’une modification
provoquée (A) ou d’une modification subie (B).

A- LA MODIFICATION PROVOQUEE
La modification provoquée est liée à l’action de l’homme qui peut décider
par une loi d’agir sur le mandat. L’article 15 alinéas 4 de la constitution
camerounaise autorise le président de la république à modifier par la
prorogation la durée du mandat des députés. Cette prorogation se fera par une loi
adoptée par l’AN elle-même à la demande du PR et après consultation du
président du conseil constitutionnel et des présidents des bureaux de l’AN et du
sénat.
La modification peut aussi raccourcir la durée du mandat. Il peut tout d’abord
s’agir d’une vacance créée à la suite d’une démission du fait des incompatibilités
constatées au moment de la vérification du mandat. La vacance peut également
survenir à la suite de la nomination à une fonction incompatible.
Dans les deux situations, le suppléant accède directement à la fonction.
De manière plus spécifique, il faut évoquer l’hypothèse de l’alinéa 4 de
l’article 15 de la constitution qui accorde au PR la prérogative de dissoudre
l’AN. Il s’agit d’une fin prématurée du mandat ; les députés étant renvoyés
devant les électeurs pour une nouvelle élection. La dissolution concerne donc en
tout état de cause le député titulaire et son suppléant. Tel n’est pas le cas dans
une modification subie.

B- LA MODIFICATION SUBIE DE LA DUREE DU MANDAT


Il y a lieu d’établir clairement une différence entre les parlementaires élus
(députés et sénateurs) et les parlementaires nommés (sénateurs). Pour ce qui
concerne les parlementaires élus, il faut indiquer que l’unique cause de
modification subie de la durée du mandat que constitue le décès du titulaire ne
peut donner lieu à son remplacement par le suppléant. Pour pallier à ce cas de
vacance, il faut organiser une élection partielle à laquelle prendront part tous les
partis politiques ayant compatit au moment de l’élection du titulaire.
S’agissant spécifiquement des sénateurs nommés, il y a lieu de préciser
que la situation est totalement différente. En effet, l’article 21 de la loi de 2013
portant règlement intérieur du sénat dispose clairement que pour le cas des
sénateurs nommés, le décès, la démission ou la nomination à une fonction

18
incompatible conduit au remplacement du sénateur concerné par un décret du
Président de la République. Autrement dit, la mort d’un sénateur nommé
entraine son remplacement par le PR qui peut décider d’accorder le mandat au
suppléant ou à toute autre personne. Il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire.
Au regard de ce qui précède, il est permis de constater l’encadrement
juridique rigoureux à la fois de l’accès au mandat et de son exercice. Cela
démontre l’importance de la fonction parlementaire ; d’où la nécessité d’assurer
la protection du titulaire du mandat.

CHAPITRE 2: LA PROTECTION DU TITULAIRE DU


MANDAT PARLEMENTAIRE

Pour exercer efficacement leur mandat, les parlementaires ont droit à une
protection. Il s’agit des immunités assurant la protection pénale (Section 1) et
des avantages assurant la protection financière (Section 2).

Section 1: UNE PROTECTION PENALE ASSUREE PAR LES


IMMUNITES
La protection pénale est posée comme principe (Paragraphe 1) même s’il
existe des situations de levée des immunités (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: LE CONTENU DE L’IMMUNITE PENALE


L’article 14 alinéa 6 de la constitution dispose clairement que « La loi
fixe le régime électoral de l’Assemblée Nationale et du Sénat ainsi que le régime
des immunités, des inéligibilités, des incompatibilités, des indemnités et des
privilèges des membres du Parlement ». Il s’agit donc d’une immunité pénale
qui vise à assurer la protection de la fonction parlementaire. Cette protection
pénale recouvre deux réalités : l’irresponsabilité pénale (A) et l’inviolabilité du
domicile (B).

A- L’IRRESPONSABILITE PENALE
Elle vise à assurer une protection aux parlementaires contre des pressions qui
pourraient être exercées par le juge instrumentalisé par l’exécutif. Dans
l’exercice de ces fonctions, le parlementaire ne peut être poursuivi, recherché,
arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans
l’exercice de ses fonctions. Il y a donc lieu de noter que cette protection pénale

19
ne concerne pas spécifiquement l’individu ; mais plutôt la fonction. D’ailleurs,
elle ne couvre que l’exercice de la fonction.
Il faut néanmoins relever la difficulté de séparer la vie professionnelle et la vie
personnelle du parlementaire et sa vie non parlementaire.

B- L’INVIOLABILITE DU DOMICILE
De manière indirecte, le parlementaire bénéficie également d’une protection
de son domicile ou de ses locaux de travail (cabinet parlementaire) dans le cadre
de l’exercice de ses fonctions. Ils ne peuvent pas dès lors faire l’objet de
perquisitions sans autorisation expresse. Au-delà de la protection de la fonction
parlementaire, il y a lieu d’indiquer que cette inviolabilité rentre également dans
la logique de la séparation des pouvoirs assurant une indépendance du pouvoir
législatif vis-à-vis des autres pouvoirs. Mais le principe de l’immunité n’a pas
valeur absolue puisqu’il connait des limites.

Paragraphe 2 : LES LIMITES AUX IMMUNITES PARLEMENTAIRES


Elles sont de deux ordres avec la même finalité, c'est-à-dire l’engagement
des poursuites judiciaires contre le parlementaire en cas de flagrant délit (A) ou
de demande de levée d’immunité adressée à la chambre (B).

A- LES CAS DE FLAGRANT DELIT COMME LIMITE AUX


IMMUNITES
Il faut d’entrée de jeu préciser que l’immunité n’a pas vocation à faire des
parlementaires des hommes au dessus de la loi. Il s’agit simplement des mesures
de protection. Ainsi donc, lorsque le parlementaire est pris en cas de flagrant
délit en matière pénale ou de crime commis contre la sûreté intérieure ou
extérieure de l’Etat, l’immunité cesse d’agir.

B- LA LEVEE DE L’IMMUNITE COMME LIMITE A L’IMMUNITE


ABSOLUE
Le député n’est pas pénalement intouchable puisqu’il peut être procédé à la
levée de son immunité lorsque des charges lourdes pèsent contre lui. La
demande de levée d’immunités est adressée à la chambre par les juridictions
compétentes, c'est-à-dire celles qui enquêtent sur les faits qui lui sont reprochés.
Le bureau de la chambre se réunit donc pour voter ou non la demande
d’immunité adressée.

20
Depuis l’indépendance, l’immunité parlementaire d’un député n’a été levée
qu’une seule fois le 14 février 2005. Le député en cause était DOH GAH
GWAYIN III député RDPC de la circonscription du Ngo-ketunjia dans la région
du nord-ouest au sujet d’une affaire de meurtre dans laquelle il aurait été
impliqué. Mais il faut indiquer que les procédures engagées même en cas de
flagrant délit peuvent toujours être interrompues par le Ministre de la Justice
pour les juridictions ordinaires, et le Ministre des Forces armées pour les
juridictions militaires.
La protection pénale est nécessairement complétée par la protection
financière.

Section 2: LA PROTECTION FINANCIERE


Pour permettre aux députés d’être à la hauteur des missions qui leur sont
confiées, il leur est accordé des indemnités (Paragraphe 1) et des crédits de
fonctionnement (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : LE PAIEMENT DES INDEMNITES AUX


PARLEMENTAIRES
Ces indemnités sont de deux ordres puisqu’elles varient en fonction du
statut du parlementaire. Il existe des indemnités communes à tous les
parlementaires (A) et des indemnités spécifiques aux membres du bureau (B).

A- LES INDEMNITES COMMUNES A TOUS LES


PARLEMENTAIRES
Ces indemnités concernent les parlementaires en activité et peuvent
également intéresser les parlementaires en cessation d’activité s’ils remplissent
certaines conditions.
En activité, les parlementaires ont droit à une indemnité législative de base
qui est calculée conformément aux textes spécifiques des chambres. A cette
indemnité il faudrait ajouter une indemnité pour frais de mandat, une
indemnité de session ainsi qu’une dotation mensuelle pour la rémunération
d’assistants parlementaires.
En cessation d’activités, les parlementaires remplissant les conditions
peuvent bénéficier d’une pension-retraite. En effet, l’article 118 de la loi de
2014 portant règlement intérieur de l’AN dispose expressément qu’un député

21
peut prétendre à la pension de retraite parlementaire à condition de cumuler
dix annuités de cotisation pour une pension proportionnelle ou 15 annuités pour
la pension d’ancienneté au cours d’un ou de deux mandats.
Mais les indemnités versées à tous les parlementaires sont largement en deçà
des avantages accordés aux membres du bureau.

B- LES INDEMNITES PARTICULIERES ACCORDEES AUX


MEMBRES DU BUREAU
Au regard des fonctions qu’ils occupent, les membres du bureau ont droit à
des avantages atypiques. Mais il y a lieu tout d’abord de donner un contenu au
concept de membres du bureau. Au-delà de ce qui a été indiqué précédemment à
savoir le président, le premier vice-président, les vice-présidents, les questeurs,
les secrétaires, il convient en rapport avec les avantages financiers spécifiques
d’ajouter les présidents et vice-présidents des groupes parlementaires, le doyen
d’âge, les deux plu jeunes députés ou sénateurs, les membres des bureaux des
commissions, et le rapporteur de la commission des finances et du budget.
Les membres des bureaux classiques et les présidents et vices présidents des
groupes parlementaires ont droit à un hôtel de fonctions, les moyens de transport
et un personnel domestique.
Par contre, les autres membres évoqués bénéficient simplement d’une
indemnité spéciale de session.
Au-delà de ces indemnités, il est accordé aux parlementaires d’autres
possibilités financières.

Paragraphe 2: L’OCTROI D’AUTRES AVANTAGES FINANCIERS


Il s’agit des microcrédits (A) et des crédits à taux d’intérêt faible (B).

A- L’OCTROI DES MICROCREDITS


Il s’agit d’une particularité camerounaise pouvant même être considérée
comme une curiosité. En effet, le budget des chambres parlementaires prévoit
des crédits d’investissement au profit des parlementaires. Ces fonds sont
destinés à la réalisation des petits projets en faveur des populations. Il peut s’agir
de la construction des salles de classe, la construction des addictions d’eau, de
l’entretien des marchés.etc. Il faut néanmoins relever que la réalisation de ces
investissements pose un problème en rapport avec la séparation des pouvoirs.
L’exécutif étant chargé d’exécuter, et le parlement de légiférer et contrôler
l’action de l’exécutif. On peut dès lors s’étonner que les membres du parlement

22
se substituent à l’exécutif. Mais dans le fond, il faut appréhender les micros
projets comme des techniques permettant d’améliorer la situation financière des
parlementaires.

B- L’OCTROI DES CREDITS A TAUX D’INTERET FAIBLE


Il convient d’entrée de jeu de préciser que le parlement n’est nullement une
banque chargée de réaliser des opérations financières. Mais parce que disposant
des budgets autonomes et dans l’optique d’améliorer les conditions de travail de
leurs membres, certaines facilités financières peuvent leur être octroyées. Il ‘agit
des crédits automobiles remboursables à des très faibles intérêts pour permettre
aux parlementaires qui n’en ont pas de pouvoir acquérir des moyens de
transports. Le remboursement se fait sur mode de prélèvement à la source ; c'est-
à-dire par des retenues sur salaire.
Toutes ces différentes indemnités ont pour objectif de permettre au parlement
d’exercer ses différentes fonctions.

TROISIEME PARTIE: LES FONCTIONS


PARLEMENTAIRES

Au-delà de la nécessité de clairement préciser les fonctions du parlement


au Cameroun (Chapitre 1), il s’agira in fine de faire l’autopsie de l’institution
parlementaire dans notre pays (Chapitre 2).

CHAPITRE 1: LA DUALITE DES FONCTIONS DU


PARLEMENT

A la lecture de la constitution, les fonctions assignées au parlement


camerounais ne sont pas originales. Il s’agit des fonctions classiques reconnues à
toute institution parlementaire notamment le vote de la loi (Section 1) et le
contrôle de l’action du gouvernement (Section 2).

Section 1: LA FONCTION LEGISLATIVE DU PARLEMENT


« Légiférer c’est gouverner ». Telle est la conception que René
CAPITANT a de la fonction législative. Par cette formule, il s’agit de démontrer
23
l’importance de la loi dans le fonctionnement de l’Etat ; la loi étant l’expression
de la volonté générale tel que pensé par Jean Jacques ROUSSEAU. Il est
important de faire préalablement un inventaire des différentes lois (Paragraphe
1) avant d’analyser la procédure législative (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: L’INVENTAIRE LEGISLATIF


Il faut d’ores et déjà rappeler que l’initiative des lois appartient
concurremment au président de la république et aux membres du parlement. On
distingue alors en droit camerounais les lois pouvant être considérées comme
ordinaires (A) par opposition à celles pouvant être considérées comme
particulières (B).

A- LES LOIS DITES ORDINAIRS


Il s’agit nécessairement des lois adoptées dans le cadre de l’article 26 de la
constitution. A cela il faut ajouter les lois de ratification des traités et accords
internationaux dans les domaines relevant de l’article 26. En effet, le président
de la république a le monopole, dans la négociation et la signature des traités et
accords internationaux. Mais pour qu’il puisse intégrer l’ordre juridique
camerounais, ils doivent être soumis à la ratification parlementaire. Par ailleurs,
il faut ajouter la loi d’habilitation par laquelle le parlement autorise le président
de la république à intervenir par ordonnance dans son champ de compétences.
Les règlements intérieurs des assemblées parlementaires constituent aussi des
catégories de lois.
Mais à côté de ces lois ordinaires coexistent des lois particulières.
B- LES LOIS DITES PARTICULIERES
Il s’agit de la loi constitutionnelle et de la loi référendaire. La loi
constitutionnelle est adoptée par le pouvoir constituant dérivé ; c'est-à-dire par
une assemblée représentant le peuple. Elle est particulière de part son origine et
de sa nature.
La loi constitutionnelle ne peut être adoptée en droit camerounais que par le
congrès, c'est-à-dire les deux chambres réunies. Sa nature est donc particulière
puisqu’elle ne peut pas faire l’objet d’un contrôle de constitutionalité par le
conseil constitutionnel. D’ailleurs son champ d’action est restrictif dès lors
qu’elle ne peut intervenir sur la forme républicaine, l’unité et à l’intégrité
territoriale de l’Etat et les principes démocratiques qui régissent la République.

24
Par contre, la loi référendaire est l’émanation directe du peuple puisqu’elle est
adoptée à la suite d’un référendum. Elle ne connait pas de limites à son champ
d’action et ne peut faire l’objet d’aucun contrôle par le conseil constitutionnel.
Une question demeure, celle de savoir comment sont adoptées les lois
dites ordinaires ?

Paragraphe 2: LA PROCEDURE LEGISLATIVE


L’adoption d’une loi passe nécessairement par deux étapes : l’examen en
commission (A) et l’examen en plénière (B).

A- L’EXAMEN DU PROJET OU DE LA PROPOSITION DE LOI EN


COMMISSION
Il faut d’entrée de jeu indiquer que les projets ou propositions de loi déposé à
l’AN ou au sénat sont transmis à la conférence des présidents qui juge de leur
recevabilité. En cas de doute ou de litige sur la recevabilité d’un texte, le
président de la république, le président du sénat ou le président de l’AN ou un
tiers des sénateurs ou des députés peuvent saisir le conseil constitutionnel pour
se prononcer.
Dès que le texte est jugé recevable par la conférence des présidents, il est
alors transmis à la commission de rattachement. Le texte est alors soumis à un
examen minutieux de la commission avec l’audition des membres du
gouvernement pour ce qui est des projets de loi. Une fois l’examen en
commission générale achevé, le texte est préparé pour être soumis en plénière.

B- L’EXAMEN DU TEXTE EN PLENIERE


En réalité, il revient à la chambre de fixer la date de discussion du texte. Mais
l’urgence peut être demandée par le gouvernement ou par un parlementaire. Il
faut indiquer que l’urgence est de droit si elle est demandée par le gouvernement
ou pour ce qui est de l’AN par la moitié des députés + 1. Dès lors qu’elle est
demandée, une date est immédiatement fixée pour débattre du texte en plénière.
La procédure d’adoption de la loi commence par l’AN avec la discussion
article après article. Les députés disposent ainsi du droit d’amendement sous
réserve des limitations posées par l’article 30. Le texte est alors soumis au vote
en plénière ; la loi étant adoptée par l’AN à la majorité simple des députés. Le
texte ainsi adopté est transmis au sénat par le mécanisme de la navette
parlementaire permettant ainsi au sénat de se livrer au même exercice. Le sénat
peut examiner et adopter immédiatement le texte à l’identique à la majorité

25
simple des voies. Le texte adopté par le sénat est retourné au président de l’AN
qui le transmet sous 48h au PR pour promulgation. Si le sénat décide d’amender
le texte à la majorité simple des sénateurs, le texte amendé est retourné à l’AN
par le président du sénat pour un nouvel examen. Les amendements proposés
par le sénat sont adoptés ou rejetés par l’AN à la majorité simple des députés. Le
texte définitivement adopté par l’AN après acceptation ou rejet des
amendements du sénat est transmis au PR par le président de l’AN pour
promulgation.
Il peut arriver que le sénat rejette tout ou partie du texte adopté par l’AN. Ce
rejet doit être approuvé par le sénat à la majorité absolue des sénateurs. Dans
ce cas, le texte en cause accompagné de l’exposé des motifs du rejet est retourné
par le président du sénat à l’AN pour un nouvel examen. Le texte retourné à
l’AN peut faire l’objet de plusieurs hypothèses d’action :
 L’AN adopte le texte après délibération à la majorité absolue des députés
et celui-ci est transmis au PR pour promulgation ;
 En cas d’absence de majorité absolue à l’AN, le PR peut provoquer la
réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte
commun sur les dispositions rejetées par le sénat.
La commission mixte paritaire comprend les représentants des deux chambres.
Le texte élaboré par la commission mixte paritaire est soumis par le président de
la république pour approbation aux deux chambres. Aucun amendement n’est
recevable ; sauf accord du PR ;
Si la commission mixte paritaire ne parvient pas à l’adoption par l’une et
l’autre chambre, le PR peut :
 Soit demander à l’AN de statuer définitivement ;
 Soit déclaré caduque le projet ou la proposition de loi.
Une fois le texte adopté, le PR doit le promulguer dans un délai de 15 jours à
compté de sa transmission, sauf s’il demande une seconde lecture ou s’il saisit le
conseil constitutionnel. En cas de non respect de ce délai le président de l’AN
ayant constaté la carence du PR peut se substituer à lui et promulguer la loi. Le
texte promulgué est alors publié au journal officiel de la république en français
et an anglais.
En dehors de sa fonction législative, le parlement exerce une fonction de
contrôle.

26
Section 2: LA FONCTION DE CONTROLE
Ce contrôle est de deux ordres : un contrôle sans sanction (Paragraphe 1)
et un contrôle sanction (Paragraphe 2).

Paragraphe 1: LE CONTROLE SANS SANCTION


C’est un contrôle qui peut impliquer l’objectif d’information du parlement
(A) tout comme il peut intervenir pour une investigation (B).

A- LE CONTROLE POUR INFORMATION


Il s’exerce par le biais des questions écrites et orales. Le régime des questions
est fixé par la constitution qui dispose en son article 35 alinéa 3 que « (3) Au
cours de chaque session ordinaire, une séance par semaine est réservée par
priorité aux questions des membres du Parlement, et aux réponses du
Gouvernement ». Il s’agit pour le gouvernement d’apporter des informations aux
représentants du peuple. Toutefois, les exigences de sécurité et de défense
nationale peuvent restreindre cette information du parlement.

B- LE CONTROLE PAR L’INVESTIGATION


Le contrôle par l’investigation se fait au moyen des commissions d’enquêtes
parlementaires. L’article 86 du règlement intérieur de l’AN prévoit qu’en
application de l’article 35 alinéa 1 de la constitution, l’AN peut par le vote d’une
proposition de résolution constituer une commission d’enquête parlementaire
chargée de recueillir des éléments d’information sur des faits déterminés,
d’examiner la gestion administrative, financière ou technique des services
publics en vue d’informer l’AN. Il y a lieu de relever leur rareté dans l’histoire
parlementaire du Cameroun. L’unique menace de constitution d’une
commission d’enquête parlementaire ayant été brandie dans l’affaire
MOUNCHIPOU SEIDOU. Mais le gouvernement a brandi l’argument des
poursuites judiciaires qui avaient été engagées contre lui.
A côté du contrôle sans sanction coexiste un contrôle sanction.

Paragraphe 2: LE CONTROLE SANCTION


Il ne peut être exercé que par l’AN par le biais d’une motion de censure. Il
s’agit donc d’examiner les conditions d’une motion de censure (A) et les effets
d’une motion de censure (B).

27
A- LES CONDITIONS DE VOTE D’UNE MOTION DE CENSURE
Conformément à l’alinéa 3 de l’article 34, « (3) L’Assemblée Nationale peut
mettre en cause la responsabilité du Gouvernement par le vote d’une motion de
censure. Pour être recevable, la motion de censure doit être signée par au
moins un tiers des membres de l’Assemblée Nationale. Le vote ne peut
intervenir moins de quarante-huit (48) heures après le dépôt de la motion de
censure. La motion de censure est adoptée à la majorité des deux tiers des
membres composant l’Assemblée Nationale ». Il s’agit donc clairement d’un
instrument visant à sanctionner l’exécutif ; d’où la nécessité de cerner ses effets.

B- LES EFFETS D’UNE MOTION DE CENSURE


Si la motion de censure est adoptée, le PM doit remettre au PR la démission
du gouvernement. Autrement dit, le vote d’une motion de censure entraine le
renversement du gouvernement.
Toutefois, nonobstant le vote de la motion, le PR peut décider de reconduire le
PM dans ses fonctions et lui demander de former un nouveau gouvernement.
Au regard de ce qui précède, il y a lieu de faire une autopsie de
l’institution parlementaire camerounaise pour mieux comprendre son passé,
analyser son présent et anticiper son avenir.

CHAPITRE 2: Le régime des actes parlementaires

Il est très clairement établi que l’institution parlementaire du fait de


l’institution parlementaire est dotée d’une autonomie normative lui permettant
d’édicter à la fois des actes législatifs et des actes non législatifs. Si l’analyse
des actes législatifs ne pose aucun problème juridique puisqu’il s’agit des lois et
des ordonnances régulièrement ratifiées, il y a lieu d’analyser de façon précise
les actes non législatifs non seulement en les identifiant (Section 1), mais
également en précisant leur modalité de contrôle (Section 2).

Section 1: L’identification des actes non législatifs


Les actes non législatifs ne font pas intervenir la procédure législative qui
débouche sur une promulgation présidentielle. Ils peuvent être pris par les
organes directeurs du parlement à titre individuel ou collectif c’est-à-dire le
Président de la Chambre, le Secrétaire général de l’Assemblée ou encore le
bureau de la Chambre. On peut ainsi retrouver dans cette catégorie les actes

28
réglementaires à caractère décisoire (Para 1) et les actes réglementaires non
décisoires (Para 2).
Para 1 : Les actes règlementaires à caractère décisoires
Les actes réglementaires décisoires en droit administratif émanent d’une
autorité administrative et modifient l’ordonnancement juridique en créant les
droits et les devoirs des administrés. Pour fonctionner normalement, les
Assemblées parlementaires édictent ainsi des arrêtés relativement à
l’organisation (A) ou au fonctionnement des chambres parlementaires (B).
A- Les arrêtés parlementaires d’organisation
Il convient d’indiquer d’entrée de jeu que les arrêtés parlementaires peuvent
êtres édictés aussi bien par le Président de la chambre ou encore le bureau. Ces
organes détiennent ainsi le pouvoir réglementaire dès lors qu’ils sont à la tête
d’une administration réelle au Parlement. Ces organes édictent ainsi les arrêtés
relatifs à l’organisation des services (1) et la réorganisation des services des
chambres parlementaires par arrêté (2).
1- L’organisation des services

Par arrêté N°2009/001/AB/AN du 8 jan 2009, le PAN organisait les


services du secrétariat général de l’AN. Dans la même logique, l’arrêté
N°2013/005/AH/SEN du 23 Août 2012 portant organisation administrative du
secrétariat général du Senat participe également de cette logique d’organisation
administrative. Il s’agit en fait de permettre à l’administration parlementaire de
disposer des services et des structures devant faciliter l’administration
parlementaire indispensable pour l ’exercice des fonctions attribuées au
Parlement par le constituant.
2- La réorganisation des services.
De manière permanente, les organes détenteurs du pouvoir réglementaires
ont la possibilité de modifier par arrêté l’organisation par arrêté l’organisation
interne su service pour l’adapter aux évolutions intervenues au sein de
l’institution parlementaire. Il est évident qu’après la loi n° 2016 :011 du 27
octobre 2016 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n°
2013 :006 du 10 juin 2013 que le PAN ainsi que le SG procéderont à une
réorganisation des services pour s’arrimer à ces nouvelles évolutions juridiques.
Ces actes par lesquels ces organes reprécise la configuration administrative au
sein des chambres parlementaires constituent inexorablement des actes
décisoires au même titre que les arrêtés parlementaires de fonctionnement.

29
B- Les arrêtés parlementaires de fonctionnement
Pour assurer le bon fonctionnement des chambres parlementaires, les
Présidents de l’AN et du Senat édictent des arrêtés relatifs à l’administration
parlementaire (1) et à la police au sein du Parlement (2).
1- Les arrêtés relatifs à l’administration parlementaire
Relativement à l’administration parlementaire, le pouvoir réglementaire
permettant d’édicter les actes décisoires liés à l’administration parlementaire
peut être mis en exergue dans une pluralité de domaine. Il peut tout d’abord
s’agir des délégations de compétence. Tel est par exemple le cas de l’arrêté du
PAN n°067/AP/AN/92 du 24 septembre 1992 accordant délégation de
compétence financière au SG de l’AN. Il peut également se mettre en œuvre
dans la gestion du personnel de l’institution parlementaire précisément la
nomination et les affectations. L’arrêté n°2006/021/AP/AN portant nomination
du conseiller spécial du PAN s’inscrit dans cette logique. Comment ne pas
évoquer l’arrêté du SG n°2009/001/AN/SG portant nomination des chefs de
services au Secrétariat général.
Ce pouvoir réglementaire se met également en œuvre en matière
disciplinaire. Ainsi le Président de l’institution parlementaire ainsi que le SG
peuvent infliger par arrêté des sanctions disciplinaires au personnel
parlementaire. Ces actes peuvent également intervenir pour assurer la police au
sein du parlement.
2- Les arrêtés relatifs à la police au sein du Parlement
Responsable administratif de l’institution parlementaire, le PAN ou le
Senat ont l’obligation d’assurer la sécurité à la fois des membres politiques
(sénateurs et députés) et des membres de l’administration (personnel
parlementaire au sein du Parlement). Cela impose l’adoption des mesures
administratives à caractère décisoire visant à assurer la police pendant les
sessions ou assurer la sécurité des personnes ou de leurs biens dans l’institution.
Ces actes peuvent restreindre les libertés des uns et des autres, restrictions
justifiées par les impératifs de sécurité.
A côté des actes réglementaires décisoires sont édictés par les instances
parlementaires des actes non décisoires.

Para 2 : Les actes réglementaires non décisoires


Les actes non décisoires sont ceux qui ne modifient pas l’ordonnancement
juridique et n’accorde ni des droits ni des obligations aux administrés. Au sein

30
des assemblées parlementaires, on peut identifier les avis (A) et les directives et
circulaires (B).
A- Les avis
Ils sont souvent émis dans le cadre de la consultation. Le parlement peut
ainsi être amené à formuler des avis. Il importe de déterminer le champ de ces
avis (1) avant d’indiquer qu’ils constituent de simples actes d’orientation (2).
1- La détermination des champs des avis
Les avis émis par les chambres parlementaires sont de divers ordres et
peuvent provenir de beaucoup de domaines. C’est ainsi que l’AN et le Senat
sont solliciter pour avis par le Président de la République avant de soumettre au
referendum tout projet de réforme. Le parlement émet également un avis avant
tout recours par le PR aux pouvoirs exceptionnel. Bien plus, le PR sollicite
également l’avis des présidents des chambres parlementaires avant toute
abrogation ou prorogation du mandat des parlementaires.
Les différents avis ne constituent nullement les actes contraignants mais
simplement des actes d’orientation.
2- Les actes d’orientation
En droit administratif, il existe trois catégories d’avis, l’avis facultatif,
l’avis obligatoire et l’avis conforme.
L’avis facultatif laisse la possibilité à celui qui doit le demander de le faire
ou pas. Il n’est soumis à aucune contrainte de l’obtenir. Par contre, l’avis
obligatoire doit être impérativement obtenu mais sans que le demandeur ne soit
tenu de le suivre. Mais l’avis conforme implique une double obligation. Non
seulement le demandeur est obligé de le solliciter lais en plus, il est tenu de le
suivre.
En droit parlementaire, les avis sollicités auprès du parlement sont
simplement des avis obligatoires qui ne lient pas le PR. Ils constituent des actes
d’orientation à charge pour lui de prendre la décision qui lui sied. A côté des
avis existent d’autres actes non décisoires.

B- Les autres actes non décisoires


Il s’agit des directives (1) et des circulaires (2).
1- Les directives interprétatives des assemblées parlementaires
Dans les Assemblées camerounaises, les directives sont prises par les
organes administratifs. Ce sont des actes d’incitation et d’orientation laissant en
principe une liberté de moyen. En clair, il s’agit des documents d’ordre intérieur
adresser par les responsables administratifs à leurs subordonnés pour leur

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indiquer comment exercer leur pouvoir de décision lorsque leur appréciation
n’est pas liée par les textes.
La directive parlementaire est un acte de rationalisation et de facilitation
de l’octroi de l’administration parlementaire. Elle tend à assurer la cohérence
des décisions à prendre dans une série d’affaire et à organiser la façon
d’apprécier ce que doit être le contenu des décisions.

2- Les circulaires interprétatives parlementaires


Les circulaires interprétatives se retrouvent aussi dans les assemblées
parlementaires car le parlement est une structure publique et dispose d’une
administration hiérarchisée. En tant que tel, il édicte des circulaires
interprétatives qui ne produisent pas d’effet juridique à l’égard des agents du
parlement. N’étant qu’un acte indicatif, elle ne fait pas grief. On peut ainsi
citer la circulaire N°2009/019/AN indiquant aux députés l’arrivée imminente
d’une mission de contrôle de réalisation des micro-projets.
S’il est établi que les assemblées parlementaires édictent une pluralité
d’actes, il convient de préciser que ces actes ne sont pas soumis à un
régime juridique.

Section 2 : Le contrôle des actes non législatifs


S’il est clairement admis que le principe est celui de l’absence de contrôle
des actes réglementaires par le juge administratif (Para 1), il convient de relever
qu’il existe quelques hypothèses de contrôle possible des actes décisoires par le
juge administratif (Para 2).
Para 1 : Le principe de l’absence de contrôle des actes réglementaires
du Parlement.
L’absence de contrôle des actes réglementaires du Parlement pour les
actes décisoires est justifiée par la séparation des pouvoirs (A) alors que
l’absence de contrôle des actes non décisoires est établie en droit administratif
(B).
A- La séparation des pouvoirs justifie l’incompétence du juge
administratif pour les actes décisoires.
Le Juge administratif est compétent pour connaitre la légalité des actes
réglementaires décisoires. La question qu’on est en droit de se poser est de
savoir si cette compétence peut être étendue aux actes règlementaires du
Parlement précisément les actes décisoires. Il convient d’entrée de jeu
d’affirmer que le juge administratif est incompétent pour contrôler les
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actes décisoires du Parlement. Cette incompétence est justifiée par la
séparation des pouvoirs interdisant ainsi à un pouvoir autonome et
indépendant d’intervenir dans le champ d’action d’un autre pouvoir
autonome et indépendant. L’incompétence du juge administratif est ainsi
consécutive à la difficile assimilation des autorités parlementaires aux
autorités administratives classique et à l’immunité des actes internes du
Parlement.
Bien que matériellement administratifs, les actes décisoires du
Parlement ne sont pas formellement administratif et échappent tout état de
cause au contrôle du juge administratif. Ce qui n’est pas le cas des actes
non décisoires qui de façon naturelle ne sont pas soumis à un contrôle
juridictionnel.
B- L’absence de contrôle de principe des actes non décisoires
Les actes non décisoires ne sont pas des actes administratifs mais
constituent les mesures d’ordre intérieur. Parce qu’ils ne font pas grief
c’est-à-dire ne modifient pas l’ordonnancement juridique et ne crée pas
des droits et d’obligations à l’endroit des administrés. Ils sont par essence
insusceptible de recours devant le juge administratif.
Les avis, les circulaires interprétatives, les directives interprétatives des
assemblées parlementaires ne sauraient ainsi être déférées devant le juge
administratif.
Si la séparation des pouvoirs a jadis justifié l’incompétence du juge
pour les actes décisoires, il convient de relever que la muraille
immunitaire est en train de se fissurer dès lors qu’un contrôle du juge
administratif est de plus en plus admis.
Para 2 : Le possible contrôle des actes décisoires par le juge
administratif
Si ce contrôle est déjà expressément reconnu en France (A), il faut
préciser qu’il est encore embryonnaire au Cameroun (B).
A- La reconnaissance de la pleine compétence du Juge
administratif
Dès lors qu’on s’inscrit dans la logique de l’Etat de droit, toute activité de
l’administration deviennent justiciables et sont susceptibles d’être contrôlé par le
juge. Ces actes règlementaires du Parlement étant des actes juridiques, leur
contrôle est de plus en plus envisagé. En France, l’ordonnance n°58-1100 du 17
novembre 1985 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires

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attribue expressément la compétence au JA pour connaître du contentieux des
actes parlementaires
B- L’affirmation embryonnaire de la compétence du juge
administratif au Cameroun
La compétence du juge administratif relativement aux actes décisoires du
parlement s’affirme progressivement en matière de gestion de carrière et de
sanction disciplinaire. L’article 151 (2) du statut général de la fonction publique
de l’Assemblée nationale de 1975 dispose expressément que « le recours
contentieux éventuellement intenté contre la décision infligeant une sanction
disciplinaire ne suspend pas son exécution ». De l’analyse de ce texte, on peut
considérer que les actes de révocation d’un personnel parlementaire peuvent
faire l’objet d’un recours devant le juge administratif. Bien plus en matière de
gestion de carrière, le juge administratif camerounais précisément la Chambre
administrative a eu à se prononcer favorablement contre un acte du PAN
refusant le reclassement d’une fonctionnaire parlementaire dans l’affaire
DIALLO en 2009. Le caractère atypique de ce jugement nécessite un bref rappel
des faits.
Monsieur DIALLO en service au Parlement a bénéficié d’un stage de
formation à l’étranger au terme duquel il devait logiquement changer de statut
ou plutôt de catégorie. De retour du stage, il introduit une requête après du PAN
pour son reclassement, requête qui est rejetée par acte du PAN. L’intéressé
engage alors une action en justice devant la chambre administrative en
considération qu’il s’agit bel et bien d’un acte administratif, la Chambre
administrative se déclarera compétente pour connaître d’un tel acte en se
reconnaissant d’ailleurs son caractère administratif et procédera à son annulation
pour illégalité.
Si cette espèce s’avère marginale démontrant d’ailleurs l’immunité
accordée aux actes administratifs du Parlement, force est de constater qu’à
l’absence d’un contrôle externe, il existe néanmoins un contrôle interne opéré
par les organes directeurs des chambres parlementaires.

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Conclusion

L’AUTOPSIE DE L’INSTITUTION PARLEMENTAIRE

L’institution parlementaire bien que dotée d’une autonomie administrative et


financière est confrontées à de sérieuses contraintes à la fois financière et
d’indépendance. S’agissant tout d’abord des aspects financiers, il faut noter Au-
delà des indemnités accordés aux parlementaires membres du bureau ou non, il
y a lieu de relever le caractère insuffisant voir insignifiant de ces moyens
financiers ; toute chose qui impacte négativement sur leur indépendance. Il est
donc impératif de reconsidérer cette situation pour dignifier la fonction
parlementaire.
Dès lors qu’ils sont affaiblis financièrement, les parlementaires sont
contraints de se tourner vers la réalisation des activités économiques. Et leur
choix est généralement porté sur les marchés publics créant ainsi une réelle
dépendance vis-à-vis de l’exécutif. La réalisation des marchés publics constitue
en tout état de cause une entorse grave à la séparation des pouvoirs ; le
contrôleur devenant lui-même l’exécutant.
Le diagnostique étant ainsi clairement posé, il reste à indiquer les pistes de
solution.
Sans être exhaustif, et sans aucune prétention à des solutions-miracles, il
est possible d’envisager des réformes visant à une plus grande autonomisation
de l’institution parlementaire, toute chose qui va impacter sur son
fonctionnement par une redynamisation de son activité.

Cette autonomisation concerne à la fois les chambres et les parlementaires


Pour rendre le parlement véritablement autonome, il y a lieu pour ses organes
directeurs de rompre avec la déférence absolue vis-à-vis du PR. L’idée de
déférence qui induit une certaine allégeance est logiquement nocive à une
meilleure autonomisation du parlement. Les deux chambres doivent prendre
conscience qu’elles constituent un pouvoir au même titre que les autres
pouvoirs. D’ailleurs René CAPITANT affirme clairement que « gouverner c’est
légiférer ».
L’autonomisation est donc d’abord psychologique avec la rupture des réflexes
de subordination.

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L’autonomisation des parlementaires est une condition sine qua none
d’indépendance de l’institution parlementaire vis-à-vis des autres pouvoirs.
Cette autonomisation est à la fois psychologique, politique et financière.
Sur le plan psychologique, le parlementaire doit rompre avec la culture de la
crainte révérencielle vis-à-vis des autorités gouvernementales.
Sur le plan politique, il s’agit d’éviter d’entrer dans une léthargie dans l’optique
d’assurer continuellement sa fidélité et sa loyauté au parti, condition de son
renouvèlement de mandat.
Sur le plan financier, les chambres parlementaires doivent substantiellement
améliorer les avantages accordés aux parlementaires. Cela passe nécessairement
par une meilleure gouvernance des ressources allouées aux deux chambres
parlementaires.
Cette redynamisation doit logiquement porter à la fois sur le pouvoir de
légiférer (A) que sur le pouvoir de contrôler (B).
Il s’agit tout d’abord aux parlementaires d’utiliser à bon escient et à juste titre
le pouvoir que la constitution leur donne. Il s’agit ici du pouvoir d’initier des
lois. Mais au-delà de ce pouvoir d’initiative des lois, les parlementaires doivent
mettre en exergue le droit d’amendement qui leur est reconnu sur les textes
d’origine gouvernementale ; toute chose qui nécessite de solides connaissances
dont la faiblesse peut être compensée par des cabinets parlementaires
suffisamment outillés en ressources humaines.
Les parlementaires doivent utiliser à bon escient toutes les possibilités qui
leur sont offertes par la constitution pour assurer un meilleur contrôle de
l’activité exécutive. Il s’agit par exemple de sortir de leur sommeil des
commissions d’enquête parlementaire. Il s’agit également d’utiliser le vote de la
loi de règlement comme une véritable occasion pour soumettre la gestion
financière de l’exécutif à un contrôle. Bien plus, les séances des questions
écrites et orales doivent cesser d’être de simples rituels pour devenir de vrais
instruments de contrôle parlementaire de l’activité de l’exécutif.

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

1) Droit parlementaire, Jean JICQUEL, Jean-Eric JICQUEL et Pierre


AVRIL
2) Pierre Flambeau NGAYAP, droit parlementaire camerounais ;
3) La constitution de la République du Cameroun, Alain Didier Olinga ;

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4) NJO MOUELLE (E), député de la Nation ;
5) Bernard MOMO, Le parlement camerounais, lexlata, fevrier-mars 1996 ;
6) MBANDAM joseph, Le mandat impératif et la déchéance en droit
parlementaire camerounais, juridis periodique.

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