CM Islam Cours 1

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CM MONDE ISLAMIQUE

Arts du livre et peinture dans le monde arabe médiéval

Dans le monde islamique, le manuscrit règne en majesté. Jusqu’au XVIIIe siècle, la quasi
totalité des livres sont des manuscrits, des livres produits entièrement par la main.

Le livre était présent au Proche-Orient sous la forme d’un codex, un livre manuscrit construit
à partir de l’assemblage de cahiers. La forme du codex était la forme dominante à l’apparition de
l’islam. C’est sous la forme d’un codex que le Coran est mis par écrit. La vénération portée au
Coran et à son manuscrit a donné une impulsion déterminante à l’objet et lui a conféré une
place privilégiée. Le désir de magni er le Coran a engendré l’apparition de la calligraphie et
de l’enluminure. Beaucoup de ces manuscrits sont parés de reliures. La calligraphie,
l’enluminure et la reliure sont indissociables des arts du livre.

Les arts du livre deviennent le support privilégié de l’établissement de la peinture. Dans


l’islam, il y a de la guration, et notamment dans le domaine des arts profanes. La peinture de
manuscrits constitue un versant incontournable des arts du livre. La première peinture de
manuscrits apparait au sein du territoire formé par l’Egypte, la Syrie et l’Irak. Les premiers
témoins de cette peinture remontent au Xe siècle. Ces manuscrits renferment de nombreuses
images guratives qui viennent illustrer des textes scienti ques et littéraires. Les chercheurs
nomment cela : « la peinture arabe ».

Qu’est ce que le monde arabe ?


Qu’est ce qui le monde arabe et quelle est son histoire ?

La notion de monde arabe est une notion complexe qui fait appel à di érentes réalités. C’est une
dé nition géographie, politique, linguistique et historique. Le monde arabe aujourd’hui est
composé de 22 pays. Au cours du temps, les frontières ont uctué. Le monde arabe se
caractérise par une grande diversité culturelle, communautaire et religieuse. La lange arabe
et la culture partagée constituent le fond commun.

Le patrimoine linguistique est la langue arabe est un instrument de communication entre les
individus. Le patrimoine culturel commun correspond à des référentiels historiques.

Au niveau communautaire, on trouve de nombreuses communautés di érentes : persanes,


indiennes, africaines et asiatiques.

Sur le plan religieux, le monde arabe est caractérisé par sa diversité. Il existait d’importantes
communautés chrétiennes au Liban, en Egypte, en Syrie, en Jordanie et en Irak. Ces populations
chrétiennes ne sont pas un ensemble homogène mais ce sont plusieurs églises di érentes.
Jusqu’à la première moitié du XXe siècle, des communautés juives étaient présentes dans
plusieurs pays arabes. De petites communautés substituent en Tunisie et au Maroc.

Il y a également une diversité au sein de la religion musulmane. Le sunnisme est le courant


majoritaire dans le monde arabe. Néanmoins, on note la présence de communautés chiites au
Yemen, au Liban, en Syrie. Il y a une diversité culturelle et religieuse.

Le terme «  médiéval  » est issu de l’histoire européenne. Ce usage est problématique. Son
application au champs de l’étude islamique est problématique. Le monde islamique s’étend sur
plus de XIVe siècle et couvre un large éventail de sociétés humaines de l’Espagne à la Chine. Sa
périodisation est très compliquée. En l’absence de terminologie, le terme « médiéval » est utilisé
et désigne la période chronologique qui s’étend du Xe siècle au XVIe siècle de notre ère.

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L’histoire du monde islamique commence autour de la gure de Mahomet. Il serait né vers
570 à La Mecque en Arabie. Il est issu d’une grande tribu qui contrôlait la ville de La Mecque. Il
devient caravanier et va en Mésopotamie où il entre en contact avec des tribus juives et
chrétiennes. À l’âge de 40 ans, marié à une riche veuve, il se retire pour méditer dans une grotte
proche de La Mecque. En 610, il aurait reçu les premières révélations faites par l’archange
Gabriel. Ces révélations durent jusqu’à sa mort en 632. La prédication coranique débute dans la
ville natale de La Mecque. Autour de lui, se regroupe une communauté de croyants. Les pouvoirs
locaux le critiquent. En 622, il s’exile au nord de la Mecque dans la ville de Yathrib (Médine). Cet
exil est l’Hégire et marque le début du calendrier islamique basé sur un rythme lunaire. Le
prophète est un chef religieux et militaire. En 630, il conquiert la Mecque et détruit les idoles
qui étaient alors vénérées. Mahomet meurt en juin 632 et laisse la jeune communauté musulmane
dans un certain désarroi car la question de sa succession n’avait pas été tranchée avant sa mort.
Il n’a pas de ls et n’a pas désigné un proche compagnon pour le succéder. C’est la première
scission politique entre la famille du prophète et d’autres personnes qui voulaient que la
succession repose sur le mérite.

Les premiers califes sont des compagnons très proches du prophète. Ali marque son désaccord
sur l’élection. Accusé d’avoir commandité le meurtre du troisième calife, Ali est fortement
contesté par ses partisans.

Mu’awiya était le gouverneur de la province nouvellement acquise de la Syrie. Il demande justice


et un arbitrage favorable lui est rendu. Il est nommé calife en 661 à Jérusalem. Le gendre du
prophète, Ali et son ls sont assassinés. À ce moment émerge le chiisme, un parti qui défend
les droits exclusifs de la descendance du prophète. C’est la première grande scission
religieuse. Mu’awiya donne naissance à la dynastie des umayyades. C’est une grande période de
conquêtes. C’est la première dynastie qui fait oeuvre de mécènes. C’est une phase de genèse
pour les arts du monde islamique.
En 750, il y a une nouvelle révolution menée par des descendants de l’oncle du prophète : c’est la
n du califat umayyade par le sang. Seul un membre échappe au massacre, il va en Espagne où il
forme le califat umayyade.

Le califat abbasside règne jusqu’au XIIIe siècle. La capitale est fondée en Irak, en 762, à
Bagdad. En plus de sa fonction de capitale politique, Bagdad devient le principal centre
intellectuel de la capitale abbasside. Il y a une activité intense dans tous les domaines de la
connaissance : formation du droit islamique, naissance de la grammaire arabe. Le calife al
Ma’mûn met en place une politique culturelle majeure en faisant traduire en arabe des textes
anciens grecs, en sanskrit et en moyen perse. C’est l’époque des grandes traductions de textes
philosophes et scienti ques. Les populations arabes chrétiennes et juives jouent une rôle majeure
dans l’approbation de cette héritage. On assiste à la création de grands courants de pensée à
Bagdad puis au Caire et à Cordoue.

Cette phase d’expansion intellectuelle, culturelle et artistique conduit à une période de


fragmentation politique.
À la n du IXe siècle, il y a l’émergence de deux nouveaux califats :

• Le califat des Fatimides (chiite). La califat apparait en 909. Ils conquiert l’Egypte et fonde la
capitale du Caire.

• Le califat umayyade de Cordoue. Il se proclame calife en 929 et règne sur le califat de Cordoue
jusqu’en 1031. Ces trois califats favorisent l’épanouissement de grandes capitales où se
développent les arts du livre, la peinture de manuscrits.

Au milieu du XIe siècle, on assiste à l’arrivée de généraux turcs originaire d’Asie centrale que l’on
nomme les Seldjoukides. Ils arrivent et libèrent le calife abbasside de la tutelle sous laquelle il
avait été placée en 945. Se met en place un modèle politique : le calife décide de donner aux
Seldjoukides le titre de sultan et leur délègue ses pouvoirs politiques et militaires. En
revanche, les califes gardent leur pouvoir religieux et leur identité culturelle. Sous les
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Seldjoukides, une nouveauté, la fondation d’institutions nouvelles, les madrasas en Irak. Ce
sont des lieux d’enseignement du droit islamique. De nombreuses madrasas voient le jour à
Bagdad peu après. L’empire se morcelle à cause de querelles de succession au sein de la famille
seldjoukide. On a l’apparition de pouvoirs régionaux autonomes comme la dynastie curde des
Ayyoubides. Saladin était un émir sous le pouvoir des Seldjoukides. On a une importante
production de manuscrits à peinture.

En 1250, des esclaves militaires turques renversent leur maître et s’emparent du pouvoir. Ils
étaient appelés Mamlouks, « possédés » en arabe. Les Mamlouks ont pu dominer pendant trois
siècles l’Egypte et la Syrie par leur formation militaire pointue. Ils ont réussi à maintenir leur
pouvoir. Ils ont repoussé l’invasion mongole. Ils ont gagné une forte de légitimité aux yeux des
populations locales.

Les mongoles mettent n au calife abbasside. La prise de Bagdad se fait en 1258 et marque la
n du califat. Il y a une production artistique exubérante, un patronage et une production d’objets
et de manuscrits luxueux. Damas, le Caire et Alep sont de grands centres de production.

La chute des Mamlouks a lieu en 1516.

En quelques mois, l’empire ottoman s’empare de la Syrie puis du Caire. Ces ottomans viennent
mettre un terme à la domination mamlouk. La Syrie et l’Egypte deviennent des provinces de
l’empire ottoman. Cet événement marque la n de la période médiévale dans le monde islamique.

Avènement de trois empires :

• Empire moghol en Inde ;

• Empire ottoman autour de la Méditerranée ;

• Empire perse en Iran.

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—> La peinture arabe
Dans une vision cyclique de l’histoire de l’art, de nombreux chercheurs ont jugé que la
peinture arabe était une proto peinture de la peinture persane. Lors de la prise de Bagdad, la
peinture arabe mourrait. De la peinture arabe émerge donc la peinture persane. C’est une idée
complètement dépassée.

En 1962, on assiste à la publication d’une monographie intitulée La peinture arabe par Richard
Ettinghausen. C’est un ouvrage « de son temps ». Il considère qu’après 1258, on entre dans une
période de déclin. À la suite de Ettinghausen, il y a la publication de deux ouvrages : Mamluk
Painting de Haldane en 1978. C’est la première monographie s’intéressant à la peinture mamlouk.
Arab Painting de James est un grand article sur la peinture des premiers fragments aux
manuscrits à peinture.

Ces dernières années, on a assisté à un renouvellement des approches autour de la peinture


arabe. Ces nouvelles approches sont focalisées sur la nécessité d’étudier les manuscrits à
peinture comme des objets matériels entiers, les étudier de manière globale. Pendant
longtemps, les manuscrits étaient étudiés de manière isolée par rapport au texte. Cette étude du
manuscrit en tant qu’objet matériel vient de la codicologie.

Cette discipline de la peinture arabe est neuve.

—> Les limites du concept de « peinture arabe »


C’est un concept complexe qui regroupe plusieurs réalités et plusieurs critères. Le premier critère
est le critère linguistique. La peinture arabe désigne les manuscrits écrits en langue arabe. Cette
dé nition linguistique trouve ses limites. Il n’y a pas que le critère linguistique.

Le second critère est le critère d’ordre culturel. La peinture arabe correspond aux manuscrits en
langue arabe contenant des peintures et produit dans le monde arabe. Ces questions de limite
sont importantes pour comprendre le concept de la peinture arabe. Dans des périodes
d’hybridation culturelle, ces critères sont rigides.

Le troisième critère est le critère stylistique. C’est le critère utilisé a n de déterminer si un


manuscrit appartient ou non à la peinture arabe. La peinture arabe regroupe des ensembles de
manuscrits extrêmement hétérogènes sur le plan stylistique. Le concept de peinture arabe
présente un certain nombre de limites.

La peinture arabe est dé nie comme la peinture du monde arabe.

—> La peinture arabe médiévale


On compte une petite centaine de manuscrits à peinture. Ces manuscrits vont constituer le coeur
de notre cours. Les premiers témoignages de la peinture arabe sont ces quelques feuillets
fragmentaires datant de la période fatimide. Ce sont des représentations assez sommaires.
Ces fragments sont controversés. Le premier manuscrit arabe à peinture est un manuscrit daté de
1009-10 de notre ère. Ce manuscrit est fameux et conservé. Il contient un texte scienti que
intitulé «  Le traité des étoiles xes  ». Le texte a été composé par Abd al Rahman al Su . De
nombreux dessins à l’encre ponctués de points rouges représentant les constellations sous forme
de gures animées. Ces représentations sont conformes à la tradition grecque. On y voit des
éléments iconographiques issus de la tradition perse sassanide comme l’habit de la femme. Ces
dernières années des doutes ont été éveillés à propos de sa datation, elle daterait de la n du XIIe
siècle.

C’est le premier témoin de l’émergence d’une production de manuscrits à peindre avec 2


catégories de sujets : des textes scienti ques et l’illustration de textes littéraires.

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Les ouvrages scienti ques vont être les premiers à être illustrés. Des textes extrêmement variés
vont être illustrés. Au sein des manuscrits scienti ques, les illustrations ont une valeur
didactique, elles aident à la compréhension du texte. Certains manuscrits scienti ques
peuvent être ornés d’images narratives. C’est le cas du manuscrit «  Livre de la thériaque  »,
1098-99. Le manuscrit contient un texte, un ouvrage de pharmacologie sur la préparation de la
thériaque, un antibiotique contre les morsures de serpent. Il y a des écritures cou ques
monumentaux. Le manuscrit est orné de peintures de plantes médicinales. Il est orné de six
peintures narratives qui vont venir o rir au lecteur des anecdotes que le texte ne présente pas.
Les images narratives vont s’émanciper progressivement du texte qu’elles accompagnent.

Un genre très particulier connait son apogée en Syrie et en Egypte à l’époque mamlouk
(1258-1516). On voit la naissance et le développement d’ouvrages « furusiyya » comportant des
illustrations représentant les pratiques décrites dans le texte.

Le deuxième grand type de textes illustrés vont être les ouvrages littéraires. On a deux grands
classiques de la littérature arabe qui vont être illustrés : les fables animalières de Kalila et Dimna et
Les Séances (Maqâmât). Ces classiques donnent lieu à de nombreux manuscrits.

Kalila et Dimna
C’est un recueil de fables qui tire son nom de deux chacals, les protagonistes de l’histoire et les
narrateurs. Ce livre de Kalila wa Dimna trouve son origine dans un recueil de fables sanskrit, le
Panchatantra qui a été composé en Inde, aux alentours du IVe siècle de notre ère. Ce texte
composé au IVe siècle a donné Kalila wa Dimna par le biais de diverses traductions (le moyen
perse (ou pehleir) vers 550 et en arabe vers 700 (milieu du VIIIe siècle). Lors de la traduction en
arabe, de nouvelles fables ont été ajoutées. Le traducteur est l’un des grands auteurs de la
littérature arabe classique, ‘Abd Allah Ibn al-Muqa a’. C’est à partir de cette version arabe
que les fables vont être di usées dans l’ensemble du monde. Le texte est traduit au l du
temps, en de très nombreuses langues orientales comme le perse, le turc-ottoman, le mongol. La
version arabe va être directement traduite vers le grec, le latin, l’espagnol, l’allemand ou encore le
français. À partir de ces traductions en langues occidentales, Jean de la Fontaine s’en inspire
pour écrire ses Fables. C’est le texte arabe qui connait le plus de manuscrits à peinture, on
compte 29 manuscrits à peinture dont les dates de production s’étendent du XIIIe siècle au XIXe
siècle.

Le premier manuscrit (Arabe 3465, f. 48) conservé est un manuscrit qui aurait été produit en Syrie,
aux alentours de 1200-1220. C’est un manuscrit précieux conservé à la BNF.

Le deuxième manuscrit (Arabe 3447) date de l’époque Mamlouk. Il aurait été produit en Egypte
vers 1310. Il est conservé à la BNF.

Les Séances
Les Séances (Maqâmât) sont un grand classique de la littérature arabe. Les Séances ont été
écrites par al-Hariri au début du XIIe siècle. Ce texte est écrit dans une langue extrêmement
complexe, extrêmement élaborée. L’auteur a fait preuve d’une grande virtuosité verbale,
extrêmement admirée par les lecteurs du monde arabe. Dans certains passages, on peut lire une
phrase de droite à gauche et de gauche à droite. On compte 13 manuscrits à peinture qui ont été
produits entre le XIIIe siècle et le XVIIIe siècle.

Le peintre du manuscrit (BNF, Arabe 5847, f.19) a signé, il s’appelle al-Wasiti. Le manuscrit a été
copié en 1237, à Bagdad.

Le deuxième manuscrit date de la période Mamlouk. Le style est totalement di érent. Le


manuscrit a été produit au Caire en 1334. Il est conservé à Vienne ( AF 9, f.87v).

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En Espagne et en Afrique du Nord, il y a peu de manuscrits à peinture qui ont été produits.
Extrêmement peu de recherches ont été menées sur le sujet. On connait que quelques
manuscrits scienti ques, principalement des ouvrages d’astronomie et un seul manuscrit littéraire
qui est un manuscrit de l’histoire de Bayâd wa Riyâd, un livre sur un amour platonique. Le
manuscrit en question aurait été produit en Espagne durant le XIIIe siècle.

—> La peinture de manuscrits arabes


Quelles sont les di érentes étapes de production d’un manuscrit à peinture ?
Comment est conçu un cycle iconographique ?
Quel est le lien entre le texte et l’image ?

Ce sont les manuscrits, eux-mêmes, qui peuvent nous renseigner sur le contexte de
production. Pour un manuscrit, il peut y avoir jusqu’à trois personnes : un copiste, un enlumineur
et un peintre.

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