Albert Camus
Albert Camus
Albert Camus
Albert Camus apprend très vite à accepter les multiples aspects de l'existence, la souffrance
comme la beauté, et s'engage dans ses récits et ses essais à faire triompher la révolte sur
l'indifférence.
Né en Algérie, il étudie grace à une bourse, mais il doit les interrompre à cause de la tuberculose.
Rejetant le régime hitlérien, il adhère dès 1934 au parti communiste dont il sera exclu au bout de
trois ans. Son diplôme d'études supérieures a pour sujet les « Rapports de l'hellénisme et du
christianisme à travers les œuvres de Plotin et de saint Augustin ».
Entre 1936 et 1938, il fonde une compagnie théâtrale, « L'Équipe », rédige un essai, L'Envers et
l'Endroit, et devient rédacteur au journal Alger républicain.
En 1937, il n'est pas admis pour des raisons de santé à l'agrégation et ni dans l'armée.
Il doit quitter l'Algérie à cause de ses opinions politiques : il soutient les nationalistes.
Il continue son activité de journaliste, entre dans la Résistance en 1943 et fonde Combat. Très
proche du groupe existentialiste, il fait paraître un récit, L'Étranger. Le succès viendra après la
guerre avec le roman La Peste.
La guerre d'Algérie représente un cas de conscience douloureux pour lui, qui étant de gauche
souhaitait la réconciliation et l'instauration d'un régime démocratique et qui, en 1954, lance un
appel à la trêve civile. Puis il décide de s'isoler parce qu'il était déçu des critiques de sa famille
politique d'origine, mais il rédige La Chute, son récit le plus secret. En 1957, à Stockholm il reçoit le
prix Nobel pour une œuvre «qui met en lumière les problèmes se posant de nos jours à la
conscience des hommes». Il meurt à quarante-sept ans dans un accident de voiture.
L'absurde et la révolte
La formation philosophique de l'écrivain et les temps troubles de la guerre lui rapproche des
existentialistes.
L'absurde et la révolte sont le fil conducteur d'une œuvre qui fuit la littérature et sa somptuosité.
On classe les ouvrages de Camus en deux cycles : celui de l'absurde et celui de la révolte.
L'absurdité tragique de l'existence détermine un pessimisme, capable de se transformer en
rébellion : l'homme réagit en opposant sa propre volonté et sa morale.
Dans Le Mythe de Sisyphe, il illustre la thèse de l'absurde de la condition humaine, de laquelle
l'homme peut échapper à travers l'action, la fraternité, la lutte collective. Sisyphe sait que ces
efforts sont vains et il est supérieur aux dieux qui l'ont condamné.
Dans La Peste il reflète la situation de la France coupée en deux : zone occupée et régime de Vichy,
comme un témoignage contre l'oppression nazie. La querelle de L'Homme révolté et la crise
algérienne feront évoluer sa pensée, dans le monologue de La Chute qui condamne l'action
politique des existentialistes et la solidarité des héros de La Peste.
L'harmonie et l'intensité
Malgré les déboires de L'Homme révolté, la pensée de Camus demeure convaincante et sa densité
continue à frapper les lecteurs. En homme de théâtre, Camus sait à la fois montrer la réalité et
imposer la fiction : La Peste est la chronique réelle d'une épidémie imaginaire. L'auteur renonce
aux longues descriptions réalistes pour se concentrer sur les détails essentiels, parce qu'il
recherchait un style harmonieux, capable d'exprimer avec netteté sa passion.
Il dénonce les défauts de la justice ou l'aveuglement de l'Église, déploie l'ironie, dans La Chute, à
l'égard de lui-même ; il sait retenir l'émotion et éviter le sentimentalisme. Il en résulte des pages
lyriques intense, où les éléments du paysage méditerranéen se coagulent en de personnages et ne
se bornent pas à un rôle décoratif.
L’Étranger
L'Étranger, récit ou roman, est l'évolution de cette Mort heureuse que Camus choisit de ne pas
faire paraître. Achevé en 1940 et publié deux ans plus tard, le livre passe pour un événement aux
yeux de la critique.
L'action
L'histoire se passe à Algerie et alentours, en été. L'employé français Meursault, se rend à
l'enterrement de sa mère et le lendemain il rencontre une collègue, Marie, qui devient sa
maîtresse. Le couple va pique-niquer sur une plage, avec l'ami Raymond Sintès. Une dispute éclate
avec des Arabes qui pourraient les avoir suivis et Raymond est blessé. Plus tard, le revolver de
Raymond en poche, Meursault retourne sur la plage et il tire sur l'Arabe qui est encore là.
Il est condamné à mort et la froideur qu'il manifeste à l'égard du monde est considérée comme
une circonstance aggravante. Ce n'est qu'à la fin du roman que Meursault découvre « la tendre
indifférence du monde ». Sur le point d'être guillotiné, il se sent partie intégrante d'un univers où il
a tout de même été heureux, aspire à sortir de l'isolement où il s'est retranché et souhaite « qu'il y
ait beaucoup de spectateurs le jour de son exécution et qu'ils l'accueillent avec des cris de haine ».
Behaviorisme narratif
Pour mieux rendre la torpeur, l'inertie de Meursault, Camus utilise une technique psychologique
très en vogue aux États-Unis, le behaviorisme narratif : le narrateur décrit à la première personne,
qui favorise traditionnellement les confidences, les comportements des personnages, sans avoir
recours à l'introspection ou aux explications physiologique en donnant espace à l'objectivité.
L'Étranger est dominé par un ton impersonnel, grâce au nouveau utilise en littérature du passé
composé ; il souligne le détachement, l'impassibilité d'un homme dont la phrase préférée semble
être « ça m'est égal ».
L'auteur entend décrire un homme dépourvu de conscience ; pendant le procès, lorsque
Meursault se rend compte de sa condition et de ses sentiments, Camus le laisse s'épancher,
abandonnant la sécheresse de la psychologie comportementale.