LescooprativesauMaroc Enjeuxetvolutions
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Said Ahrouch
University Ibn Zohr - Agadir
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A
* Université Ibn Zohr, Agadir. travers leurs valeurs de démocratie, de solidarité, de partage et
d’entraide, les coopératives jouent un rôle de plus en plus impor-
tant dans le développement économique et social du Maroc. Leur
attractivité croît surtout depuis 2005, année du lancement de l’Initiative
nationale du développement humain (INDH) encourageant la création
(1) Ce texte est issu d’une com- et la pérennisation des structures de l’économie sociale et solidaire. La
munication présentée au colloque
européen de l'ACI « Les contri-
présente contribution traite des enjeux de l’entrepreneuriat coopératif,
butions des coopératives à une examine les appuis institutionnel et fiscal offerts par l’Etat marocain aux
économie plurielle », organisé à
l’université Lumière-Lyon 2 les 2,
coopératives et présente enfin le poids économique et social des coopéra-
3 et 4 septembre 2010. tives dans l’économie marocaine (1).
●
L’appui institutionnel
Dès l’indépendance du Maroc, en 1956, le modèle économique coo-
pératif a constitué un choix stratégique pour ce pays, afin d’assurer
une mobilisation nationale pour la modernisation et le développe-
ment des secteurs traditionnels, notamment l’agriculture, qui béné-
ficie encore aujourd’hui d’une exonération fiscale. L’encouragement
à l’organisation de production sous forme coopérative traduisait à
l’époque le rôle que peuvent jouer les coopératives dans le progrès
national, l’amélioration de la situation économique et sociale et
l’épanouissement personnel des coopérateurs. Au niveau institution-
nel, a été créé en 1963 l’Office de développement de la coopération
(ODCO ; www.odco.gov.ma), comme structure administrative char-
gée de l’accompagnement des coopératives dans les domaines de la
formation et de l’information et comme appui juridique. Restructuré
en 1975, cet office est devenu une entreprise publique jouissant de
la personnalité morale et d’autonomie financière et administrative.
Actuellement, les missions de l’ODCO sont fixées par la loi 24-83
(art. 77). Il s’agit principalement, sauf en ce qui concerne les coopéra-
tives de la réforme agraire, de soutenir les coopératives et leurs unions
(2) Article 6 de la loi 24-83 fixant
aussi bien à la création (instruction et centralisation des demandes)
le statut général des coopéra- qu’en cours d’activité (formation, information, assistance juridique,
tives et les missions de l’Office
du développement de la coopé-
œuvres sociales, mise à niveau et restructuration…). Les coopératives
ration au Maroc. ne peuvent traiter qu’avec leurs membres. Ce principe d’exclusivisme (2)
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N° 322 RECMA – REVUE INTERNATIONALE DE L’ÉCONOMIE SOCIALE
Les coopératives au Maroc : enjeux et évolutions
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L’appui fiscal
En matière fiscale, les coopératives bénéficient, au Maroc, d’exonérations
importantes. Il s’agit principalement des exonérations de l’impôt des
patentes, de la taxe urbaine, de l’impôt sur les bénéfices professionnels
(article 87 de la loi 24-83) et de la taxe sur la vente de produits et sur les
opérations et services effectués pour le compte des adhérents (article 88 de
la loi 24-83). Toutefois, si les coopératives étaient historiquement exonérées
sans limitation en vertu de leurs statuts, ce n’est plus le cas actuellement.
Depuis 2005, en effet, les pouvoirs publics ont soumis à l’impôt sur
les sociétés (IS) et à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) les coopératives
réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1 million de dirhams (environ
90 000 euros, NDLR).
Selon le gouvernement marocain, cette imposition visait à rétablir la
concurrence loyale dans plusieurs branches d’activité. Certaines coopé-
ratives agricoles, et notamment laitières, ont pu en effet développer des
(3) Bensalem Fennassi, 2004, structures capitalistes un peu éloignées des petits éleveurs (3). De leur côté,
« Coopératives : la fin des privi-
lèges », Aujourd’hui le Maroc,
les représentants des coopératives accusent le gouvernement d’avoir cédé
n° 739, 29 avril. aux pressions exercées par des opérateurs privés organisés en sociétés
commerciales, qui n’ont cessé de critiquer les situations de concurrence
déloyale.
Depuis, pour défendre leurs intérêts, les coopératives ont décidé de réagir
en commun par la création de la Fédération nationale des coopératives.
L’objectif est de convaincre le gouvernement d’abroger les dispositions
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RECMA – REVUE INTERNATIONALE DE L’ÉCONOMIE SOCIALE N° 322
Varia
(4) Coopérative agricole créée en au terme desquelles elles sont imposées. Cette imposition, selon le pré-
1987 : 112 adhérents particuliers,
70 coopératives adhérentes (dont
sident de l’Union des coopératives agricoles marocaines (Uncam), allait
14 000 éleveurs) ; capital social, induire le licenciement d’au moins la moitié des effectifs employés par
140 millions de dirhams (12,5 mil-
lions d’euros) ; chiffre d’affaires,
les coopératives. Toutefois, ces licenciements n’ont jusqu’à présent pas
1,7 milliard de dirhams (152 mil- eu lieu, au moins à la Copag (4), la plus grande coopérative concernée par
lions d’euros) ; emplois directs,
3 300 personnes.
ces mesures.
●
L’évolution des coopératives au Maroc de 2005 à 2009
Il est difficile de trouver des statistiques fiables sur les coopératives pour
mener une analyse approfondie et tirer des conclusions significatives, car
ces données sont éparpillées, insuffisantes et parfois absentes pour cer-
taines périodes. Cela étant, le lancement de l’INDH en 2005 a donné un
coup de pouce à la création des coopératives, notamment dans le milieu
rural, qui souffrait de l’exclusion et de la pauvreté. Ainsi, de 2005-2009
le nombre de coopératives a crû de 38,3 % (tableau 1). Cette évolution
traduit le rôle déterminant du tissu coopératif dans le développement
économique et social au Maroc, grâce à une volonté politique réelle.
Quant à la répartition sectorielle (tableau 2), l’agriculture est le secteur le
plus important. Il occupe le premier rang (62 %) dans le tissu coopératif,
comme il l’occupe dans la participation au PIB. Il est suivi respectivement
par les secteurs de l’habitat et de l’artisanat. Notons aussi que la struc-
turation des activités liées à l’huile d’argan a donné naissance à plusieurs
coopératives dans ce domaine qui représente aujourd’hui 2,3 % du tissu
coopératif national. Une place d’autant plus notable que ces coopératives
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Tableau 1
L’évolution de l’effectif des coopératives au Maroc de 2005 à 2009
Année 2005* 2006* 2007* 2008* 2009*
Nombre de coopératives 4 985 5 276 5 749 6 286 6 895
Taux de croissance en % 3,3 5,9 9 9,35 9,7
* Attaaoun, n° 88, hiver 2009, p. 9
** www.odco.gov.ma (rubrique « Statistiques »).
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Tableau 2
La répartition sectorielle des coopératives (données de 2008)
Secteur Agriculture Habitat Artisanat Autres secteurs
Pourcentage 62,1 15,4 12,3 8,2
Sources : Attaaoun, n° 91, automne 2009, p. 25 (publication de l’ODCO).
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Les coopératives au Maroc : enjeux et évolutions
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