Chapitre 1 Yaourt 2020

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UNIVERSITE NANGUI ABROGOUA

UE : EVALUATION DE LA QUALITE DES PRODUITS LAITIERS


NIVEAU : MASTER 2 PRODUCTION ANIMALE
ENSEIGNANT : PROF YUE BI YAO CLEMENT
ANNEE UNIVERSITAIRE : 2019-2020

CHAPITRE II: APTITUDES TECHNOLOGIQUES DES BACTERIES DU YAOURT

I- BACTÉRIES SPÉCIFIQUES DU YAOURT


Les deux bactéries associées dans la préparation du yaourt ont pour rôle principal d'abaisser
le pH du lait au point isoélectrique de la caséine (pH 4,6) de façon à former un gel (ou
coagulum). Outre le goût acidulé qu'elles donnent au gel, elles lui assurent une saveur
caractéristique due à la production de composés aromatiques (acétaldéhyde principalement,
cétone, acétoïne, diacétyle). Enfin, par la production de polysaccharides (glucanes), certaines
souches ont une action dans la consistance du gel.

I.1- ESPÈCE LACTOBACILLUS BULGARICUS


Lactobacillus delbrueckii ssp bulgaricus est un bacille gram positif, immobile,
asporulé, micro aérophile. Il est isolé sous forme de bâtonnets ou de chainettes, il possède un
métabolisme strictement homofermentaire ( ) et produit l'acide D-lactique à partir des
hexoses par l'intermédiaire de la voie d'Embden Meyerhoff Parnas (EMP) et il est incapable
de fermenter les pentoses. Il se développe bien à la température de 45 à 50°C en acidifiant
fortement le lait jusqu'à 1,8 % (pH voisin de 4,5), voir 2,7 % d'acide lactique (Ph 3,8 à 3,6). Lb.
bulgaricus est une bactérie thermophile, très exigeante en calcium et en magnésium et sa
température optimale de croissance est d’environ 42°C, elle est responsable de la production
d’acétaldéhyde. La Figure 1 illustre l’aspect microscopique des cellules de Lb. bulgaricus.

Figure 01: Aspect des cellules de Lb. bulgaricus sous le microscope électronique1.

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I.2- ESPÈCE STREPTOCOCCUS THERMOPHILUS
Streptococus salivarius, ssp. thermophilus est un cocci Gram positif, disposé en chaines en
langueurs variables ou par paires, anaérobie facultatif, immobile, on le trouve dans les laits
fermentés et les fromages. C’est une bactérie dépourvue de l’antigène D ( ), sensible au bleu de
méthylène (0,1%) et aux antibiotiques, elle est incapable de métaboliser le galactose et se
développe bien de 37 à 40 °C, mais croît encore à 50 °C. Thermorésistante, elle survit au
chauffage à 65 °C pendant 30 minutes ou à 74 °C pendant 15 secondes, son métabolisme est de
type homofermentaire ( ). St. thermophilus se différencie des autres espèces de même genre
par son habitat (lait et produits laitiers), par son caractère non pathogène et ses propriétés
probiotiques et technologiques.
En industrie agro-alimentaire, St. thermophilus est en deuxième position derrière
Lactococcus. lactis dans le classement des bactéries lactiques utilisées. Elle est la seule espèce du
genre streptocoque utilisée dans la fabrication des produits laitiers fermentés, elle est utilisée dans
la fabrication de nombreux fromages, à pâtes pressées cuites (Emmental, Gruyère, Parmesan et
Granatypes,...) mais aussi pour la Mozzarella, le Cheddar, et certains laits fermentés.
Le rôle principal de cette bactérie dans la fabrication du yaourt est la fermentation du
lactose du lait en acide lactique, mais elle est nettement moins acidifiant que le lactobacille, il
produit généralement de 0,5 à 0,6 % d'acide lactique (pH voisin de 5,2) uniquement de
configuration L qui est l’'isomère préféré dans les produits alimentaires, dû à la présence de L
lactate déshydrogénase chez l'être humain. Certaines souches sont capables de supporter un pH
de 4,3 à 3,8.
En plus de son pouvoir acidifiant, elle est responsable de la texture des les laits fermentés,
elle augmente la viscosité du lait par production de polysaccharides.
La figure 2 illustre l’aspect microscopique des cellules de St. thermophilus.

Figure 2: Aspect des cellules de St. thermophilus sous le microscope électronique2.

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I.3- LA PROTO-COOPÉRATION ENTRE ST. THERMOPHILUS ET LB. BULGARICUS
La fabrication du yaourt repose sur les interactions prenant place entre deux espèces de
bactéries lactiques, St. thermophilus et Lb. bulgaricus. Souvent l’association entre ces deux
espèces est appelée proto-coopération car elle est bénéfique mais pas indispensable à la
croissance de chaque espèce dans le lait. Cette proto-coopération recherchée, entraine une
stimulation mutuelle qui se traduit par:
-un accroissement de la vitesse d’acidification;
- un accroissement des niveaux de populations bactériennes finales;
- une diminution du pH final du produit ;
- une stimulation de la production de composés aromatiques notamment de l’acétaldéhyde
;
- une meilleure stabilité du produit fini ;
- une production plus importante de certains composés comme des polysaccharides
extracellulaires (EPS).
Pour se développer, les bactéries ont besoin d'acides aminés et de peptides directement
utilisables. Or, le lait n'en contient que de faibles quantités permettant seulement de démarrer leur
croissance. St. thermophilus se développe plus rapidement au pH (6,6- 6,8) du lait et rend le
lait anoxique et légèrement acide, Lb. bulgaricus acidifie alors le lait d’avantage jusqu'à un pH
d'environ 4,3 à 4,2 par l’attaque de la caséine qui libère les peptides permettant au streptocoque
de poursuivre sa croissance.
De son côté, le streptocoque stimule le lactobacille par production d'acide formique, le
dioxyde de carbone et l’acide pyruvique (figure 03) (Jeantet et al., 2008).
Le streptocoque produit de l'acide lactique principalement sous la forme L (+), alors que le
lactobacille donne surtout la forme D(-). A la fin de la fermentation, le tiers environ du lactose est
transformé en acide lactique. Dans la fabrication du yaourt, l'utilisation du lactose se fait selon la
voie suivante: une lactase hydrolyse le lactose en galactose et en glucose. Ce dernier est ensuite
transformé en acide pyruvique puis en acide lactique pendant que le galactose s'accumule
progressivement dans le lait sans être utilisé. Ainsi, dans un lait à 6,5 % (en poids) de lactose, 100
g du yaourt obtenu contiennent environ, après 2 jours de conservation, 4 g de lactose, 0,05 g de
glucose, 0,05 g d'oligosaccharide et 1,5 g de galactose.

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Figure 3: Proto-coopération entre St. thermophilus et Lb. bulgaricus.

II. APTITUDES TECHNOLOGIQUES DES BACTÉRIES LACTIQUES DU YAOURT


Les bactéries lactiques sont des micro-organismes de catégorie alimentaire qui jouent un
rôle essentiel dans la fermentation des matières premières animales et végétales. Leur capacité
à fermenter les hydrates de carbone et, à un moindre degré, de dégrader les protéines et
les lipides mène à la synthèse d'une large gamme de composés, tels que les acides organiques,
les peptides, les composés antimicrobiens et aromatiques et les exopolysaccharides. Ces
métabolites peuvent contribuer aux caractéristiques organoleptiques, technologiques et
nutritionnelles des aliments fermentés.

II.1- APTITUDE ACIDIFIANTE


La production d’acide lactique est l’une des principales fonctions des bactéries lactiques en
technologie laitière, car cet acide organique permet de concentrer et de conserver la matière
sèche du lait, en intervenant comme coagulant et antimicrobien. Le processus d’acidification du
yaourt dépend de l’activité symbiotique de St. thermophilus et Lb. delbrueckii ssp. bulgaricus.
L’importance de l’acide lactique durant la fabrication du yaourt peut se résumer comme suit:
- Il aide à déstabiliser les micelles de caséine, ce qui conduit à la formation du gel;

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- Il donne au yaourt son gout distinct, comme il contribue à la saveur et l’aromatisation du
yaourt ;
- Il intervient comme inhibiteur vis-à-vis des micro-organismes indésirable.
L’acidité du yaourt est communément exprimée en degré Dornic (1°D = 0,1g d’acide lactique/L
de lait). Elle se situe entre 100 et 130°D.
Le développement de l'acidité est important non seulement pour la fermentation du lait,
mais également nécessaire pour un arome, une texture et une saveur bien-équilibrés de
yaourt.

II.2- APTITUDE PROTÉOLYTIQUE


La croissance jusqu’à des densités cellulaires permettant aux bactéries lactiques d’assurer
les fonctions de fermentation repose sur un système protéolytique capable de satisfaire tous les
besoins en acides aminés en hydrolysant les protéines. Les bactéries lactiques démontrent des
potentialités différentes, liées à leur équipement enzymatique, pour l’utilisation de la fraction
azotée.
Quelques hydrolysats de protéine augmentent le taux d'acidification de yaourt, réduisent le
temps de fermentation et augmentent la viabilité des deux bactéries dans le lait.

II.3. APTITUDE TEXTURANTE


La texture et l'onctuosité constituent, pour le consommateur, des importants éléments
d'appréciation de la qualité du yaourt. Certaines souches bactériennes produisent, à partir du
glucose, des polysaccharides qui sont constitués de longues chaines d’unités répétitives de sucres
simples et /ou de dérivés de glucides plus ou moins ramifies.
Il est couramment admis que la production des exopolysaccharides ( ) est le résultat de
l’action exercé par St. thermophilus, mais, Lb. bulgaricus possède une aptitude à produire des EPS
composés de galactose, glucose, rhamnose, à des rapports 1/1/4.
L'utilisation de ces bactéries produisant les EPS augmente la résistance du coagulât de
yaourt aux chocs physiques et thermiques, et joue un rôle important en réalisant la fermeté
satisfaisante et la viscosité du yaourt.

II.4. APTITUDE AROMATISANTE


Divers composés volatiles et aromatiques interviennent dans la saveur et l'appétence ( )
du yaourt. C'est principalement le lactose qui joue un rôle dans la formation de ces composés.
Parmi ceux-ci, outre l'acide lactique qui confère au yaourt son goût acidulé, c'est l'acétaldéhyde
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qui a été identifié comme le plus important des composés carbonyliques qui contribuent à l'arôme
typique du yaourt. Il provient en grande partie de la transformation de la threonine (acide aminé,
l'un des principaux constituants des protéines). En outre, les deux bactéries du yaourt Lb.
bulgaricus et St. thermophilus sont capable de produire l’acétaldéhyde (composé chimique
CH3―CH≅O, dérivant de l'alcool éthylique) mais à des proportions différentes, sa concentration
optimale est estimée entre 17 et 41mg/L durant la fermentation du yaourt.
Le diacétyl (une cétone liquide, volatile, jaune, à odeur de fromage) contribue à donner un
goût délicat dû à la transformation de l'acide citrique et, secondairement, du lactose par certaines
souches de streptocoques. D'autres composés (acétone, acétoïne, butane-2-one, etc.) contribuent
à l'équilibre et à la finesse de la saveur. Celle-ci résulte d'un choix avisé des souches, de leur
capacité à produire dans un juste rapport les composés aromatiques et du maintien de ce rapport
au cours de la conservation des levains et de la fabrication.

II.5. APTITUDE ANTAGONISTIQUE


Les composés antimicrobiens produits par les bactéries lactiques peuvent empêcher la
croissance des bactéries pathogènes dans les produits fermentés. Ces composés inclues le
peroxyde d’hydrogène, CO2, le diacétyle, l’acétaldéhyde, les D-isomères des acides aminés
et les bactériocines.
La production d’acide lactique diminue le pH en créant un milieu défavorable au
développement des microorganismes pathogènes.

III- DÉFINITION ET DONNÉES SUR LE YAOURT


Le mot yaourt (yoghourt ou yogourt) vient de « yoghurmark », mot turc significant «
épaissir ». Selon la définition établie par la FAO (Food Agricultural Organisation) et l’OMS (
Organisation Mondiale de la Santé) en 1977, le yaourt est un lait coagulé obtenu par la
fermentation lactique due à deux ferments spécifiques ensemencés simultanément :
Streptococcus thermophilus et Lactobacillus bulgaricus qui sont contenus naturellement dans le
lait, à l’exclusion de toute autre bactéries . Ces bactéries doivent se retrouver vivantes à la

concentration de 107 /g de produit. Elles sont aussi thermophiles et dégradent le lactose en


acide lactique à partir de 45°C dont la teneur doit etre au moins 0,7% lors de sa vente.
Le Codex Alimentarius, norme n° A- 11 (a) (1975) définit ainsi le yaourt: «Le yaourt est
un produit laitier coagulé obtenu par fermentation lactique grâce à l'action de Lactobacillus
bulgaricus et de Streptococcus thermophilus à partir du lait frais ainsi que du lait pasteurisé (ou
concentré, partiellement écrémé, enrichi en extrait sec) avec ou sans addition (lait en poudre,
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poudre de lait écrémé, etc.). Les micro-organismes du produit final doivent être viables et
abondants».
La législation de nombreux pays exige que les bactéries du yaourt soient vivantes dans le
produit mis en vente. D'autres pays admettent qu'à la suite d'un traitement thermique destiné à
améliorer la durée de conservation, le produit ne contient plus de bactéries vivantes. Cette pratique
n'est pas recommandable, car elle modifie les propriétés du yaourt.

III.1- COMPOSANTS DU YAOURT


La principale matière première pour la fabrication des yaourts est le lait dont, pour
l'essentiel, le lait de vache. Il est constitué d’environ 88% d’eau et de 12% de matière sèche
totale contenant des glucides, des protéines, des lipides et des minéraux.
Cependant, la plupart des yaourts contiennent d’autres additifs tels que les matières sèches laitières
non- g r a s se s (MSNG), pour augmenter le taux de matière sèche non- gr a s du lait de 8.25%
à 16%.
Les constituants non laitiers se composent des édulcorants, des stabilisateurs, des fruits
et des colorants. Des édulcorants tels que le sirop de sucrose, de sucre inverti, de fructose,
de glucose ou de galactose sont ajoutés principalement pour des préférences du gout.
Des stabilisateurs tels que les gommes naturelles, les gommes naturelles modifiées ou les
gommes synthétiques sont ajoutés pour améliorer et maintenir la fermeté et l'uniformité de
gel, et améliorent également la perception dans la bouche.

III.2- TECHNOLOGIE DE FABRICATION DU YAOURT


Le schéma de la figure suivante résume les étapes de la fabrication du yaourt. Celle-
ci peut subir des variantes de sorte que les étapes indiquées peuvent faire l'objet de modifications
dans leur ordre comme dans leur nombre. Cette figure montre qu'il existe deux types de yaourts:
- Le yaourt ferme ou étuvé, dont la fermentation se fait après conditionnement en pots;
- Le yaourt brassé, dont la fermentation se fait en cuve; le coagulum obtenu est alors
dilacéré et brassé pour être rendu plus ou moins visqueux, puis conditionné en pots.
La technologie donnée ci-après concerne le yaourt au lait de vache; elle peut s'appliquer sans
difficultés aux yaourts aux laits d'autres espèces utilisés seul ou en mélanges.

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Figure 4: Schéma de la fabrication du yaourt

III.2.1- PRÉPARATION DU LAIT


La matière première peut être soit du lait frais, soit du lait recombiné (à partir de lait
en poudre maigre et de matière grasse laitière anhydre: qui ne contient pas d’eau), soit du lait
reconstitué (à partir de lait en poudre maigre), ou encore un mélange. Dans tous les cas, elle doit
être de bonne qualité microbiologique, exempte d'antibiotiques (substance capable de détruire
ou d'empêcher la croissance de certains micro-organismes) ou d'autres inhibiteurs et parfaitement
homogénéisée.

III.2.2- STANDARDISATION DU MÉLANGE


La consistance et la viscosité du yaourt sont pour une grande partie sous la dépendance de
la matière sèche du lait. En effet, tous les nutriments jouent un rôle sur la qualité finale du yaourt.
Les protéines, de par leur coagulation et leur capacité de liaison avec l’eau, agissent sur la
texture, particulièrement sur la viscosité, la consistance, l’élasticité et la fermeté. La graisse
confère de l'onctuosité et la sensation de douceur à la bouche, masque l'acidité et améliore la
saveur.
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Le lactose est le composé utilisé pour l’acidification et a un faible pouvoir sucrant, soit
quatre fois plus faible que celui du sucre de table.
La standardisation du mélange laitier permet non seulement de pallier aux variations de
composition du lait mais aussi, à obtenir la composition désirée. Cette standardisation peut
s’obtenir par l’ajout de concentrés et d’isolats de protéines sériques, de poudre de lait écrémé ou
entier, de lactose et de la crème en fonction de la teneur désirée en protéines, solides totaux et
matières grasses.
Selon le Code des principes FAO/ OMS, la teneur minimale en matière sèche laitière non
grasse est de 8,2 % (en poids) quelle que soit la teneur en matière grasse (norme n°A- 1 1 (a),
1975).

III.2.3- HOMOGÉNÉISATION

Ce traitement est pratiqué dans le cas des laits gras (10 à 25.106 Pa à 60- 90°C), soit en
phase montante de la pasteurisation, soit en phase descendante mais avec des risques de
recontamination dans ce cas.
L’homogénéisation du lait à plusieurs objectifs : elle améliore la fermeté des gels
obtenues après fermentation, augmente leur capacité de rétention d’eau et réduit la synérèse
(contraction du caillé qui peut se faire grâce aux liaisons) , par ailleurs elle prévient le crémage
( remontée spontanée de la crème à la surface du lait au repos) au cours des opérations « statiques
» de la fabrication du yaourt, en particulier lors de la période d’incubation en pots ou dans les
cuves de fermentation, cela est due au fractionnement de la taille des globules gras de 4-5 µm
à 1 µm par cisaillement (Schorsch, 2001 ; Amiot, 2002).
En plus de conférer une couleur plus blanchâtre au mélange laitier, cette diminution de
diamètre facilite l’insertion des globules gras dans les pores du réseau caséique du yaourt. Cette
étape permet également de mélanger de façon homogène les divers ingrédients laitiers ajoutés
lors de l’étape de la standardisation. Une autre des conséquences de l’homogénéisation est la
formation de nouvelles gouttelettes de globules de gras entourées par des caséines et des
protéines sériques. La résultante est une augmentation du caractère hydrophile des globules de
gras (Schorsch, 2001).

II.3.4. Traitement thermique


Le lait enrichi, éventuellement sucré, subi un traitement thermique. Le barème de traitement
thermique le plus couramment utilisé est de 90- 95°C pendant 3 à 5 minutes (Mahaut, 2000).
Cependant, une température élevée pendant un brève temps (100°C à 130°C pour 4 à 16 secondes)
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ou bien une ultra haute température (UHT) (140°C pour 4 à 16 s) sont parfois utilisés (Sodini et al.,
2004).
Ce traitement a de multiple effet sur la flore microbienne ainsi que sur les propriétés
physico-chimiques et fonctionnelles (qui ont une incidence sur le comportement sensoriel) du lait.
Tout d’abord, il assure l’innocuité du produit suite à la destruction des microorganismes pathogènes
et indésirables (Walstra, 2006). Il crée des conditions favorables au développement des bactéries
lactiques, et inactive des inhibiteurs de croissance telle que les lactopéroxidases et des enzymes
telles que la lipase responsable de l’oxydation des lipides (Walstra, 2006).
De même, il réduit les sulfures toxiques et entraîne la production d’acide formique qui
est un facteur de croissance pour Lb. bulgaricus (Loones, 1994). Le traitement thermique a
également un effet sur la conformation tridimensionnelle des protéines, induisant la modification
de leurs propriétés fonctionnelles. Il dénature la majorité des protéines du lactosérum (85%), la
résultante est l’association de la caséine κ et de la β- lactoglobuline via un pont disulfure. Des
liaisons entre les caséines et l’α- lactalbumine sont également engendrés (Mahaut, 2000; Sava et
al., 2005).
Au niveau rhéologique, ces modifications se traduisent par une amélioration après
fermentation de la fermeté des gels (Jeantet et al., 2007). De plus le traitement thermique entraine
une production plus importante de l’acétaldéhyde, le composé responsable de l’arôme « yaourt
» (Ozer et Atasoy, 2002).
Lorsque les laits ont été stockés au froid ou/et contiennent des substances à odeurs désagréables, il
est recommandé de compléter le traitement thermique par leur désaération (FAO, 1995).

II.3.5. Fermentation lactique


Le lait enrichi et traité thermiquement, est refroidi à la température de fermentation, 40 -45°C.
Cette température correspond à l’optimum de développement symbiotique des bactéries lactiques
(Lee et Lucey, 2010). L'incubation se fait à l'aide d'un levain comprenant exclusivement une ou
plusieurs souches de chacune des bactéries spécifiques du yaourt: St. salivarius ssp. thermophilus,
et Lb. delbrueckii ssp. bulgaricus qui sont inoculés entre 2 et 5% dans le mélange laitier afin

d’atteindre une population initiale de l’ordre de 107 UFC/ ml avec un ratio de 1:1 (Clark et
Plotka, 2004). Ces deux espèces bactériennes vivent en symbiose et en synergie, elles dégradent
le lactose en acide lactique, entrainant une baisse du pH et la gélification du milieu avec des
modifications structurelles irréversibles. En outre, ces bactéries produisent des composés
carbonylés volatiles (l’acétaldéhyde, le diacétyl, l’acétoïne, l’acétate d’éthyle) et des

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exopolysaccharides qui participent, respectivement, à l’élaboration de l’arôme et de la texture des
yaourts (Ott et al., 2000).
Une bonne agitation est nécessaire pour rendre parfaitement homogène le mélange lait - ferment
(FAO, 1995). La vitesse d’acidification et le pH final influencent la formation du gel acide. Une
vitesse d’acidification lente engendre la formation d’un gel lisse et homogène et donc plus faible
(Haque et al., 2001). Le respect du pH final est primordial puisque les propriétés sensorielles
(acidité, flaveur, texture) du produit fini en dépendent, c’est pourquoi, lorsque le pH atteint une
valeur comprise entre 4,7 et 4,3, un refroidissement en deux temps (rapide jusqu’à 25°C, puis plus
lent jusqu’ à 5°C) est appliqué afin de stopper la fermentation. En effet, l’activité des bactéries
lactiques est limitée pour des températures inferieure à 10°C (Sondi et al., 2004).
Le temps de fermentation se situe entre 3 et 7 h jusqu’à l’obtention d’une acidité finale de 0,9
à 1,2% en équivalent d’acide lactique (Clark et Plotka, 2004).

II.3.6. Conditionnement et stockage


II.3.6.1 Yaourt ferme (dit aussi en pot ou étuvé)
Le lait ensemencé est rapidement réparti en pots (en verre, en carton paraffiné, en matière
plastique) d'une contenance habituelle de 12,5 cl. Dans le cas des yaourts sucrés, aromatisés, aux
fruits, à la confiture, etc., 1 'apport des additifs se fait avant ou après le remplissage des pots (FAO,
1995). Après le capsulage (aluminium, carton paraffiné), les pots sont placés dans une étuve (à
air chaud) ou parfois au bain-marie pour permettre la fermentation. L'acidification dépend de la
température et de la durée d'incubation. L'incubation dure environ de 2 à 3 heures. Les pots sont
maintenus dans l'étuve jusqu'à l'obtention d'une acidité de 0,75 (au minimum) à 1% environ
d'acide lactique, soit 75 à 100° Dornic. A ce moment, le caillé doit être ferme, lisse et sans
exsudation de sérum (FAO, 1995).
Les pots sont alors immédiatement sortis de l'étuve, refroidis le plus rapidement possible à
la température de +4 à +5 °C. Ce refroidissement à pour but d'arrêter l'acidification par
inhibition des bactéries lactiques. Les pots sont ensuite stockés à +2/ +4 °C pendant 12 à 24 heures
de façon à augmenter la consistance sous l'action du froid et de l'hydratation des protéines (FAO,
1995).

II.3.6.2 Yaourt brassé


Le lait ensemencé est maintenu en cuve ou en tank à la même température que dans le cas
des pots (entre 42 et 46 °C) jusqu'à obtention de l'acidité voulue. Celle-ci est souvent un peu plus
élevée que pour le yaourt ferme: de 1 à 1,2 % d'acide lactique, soit 100 à 120 °Dornic.
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On procède alors au découpage et au brassage du caillé par l'un des procédés ci-après:
agitation mécanique à l'aide d'un brasseur à turbine ou à hélice; passage du gel à travers un tamis;
homogénéisation à basse pression (FAO, 1995).
Le brassage terminé, le caillé est immédiatement et rapidement refroidi à une température
inférieure à 10 °C. Le brassage du caillé au cours de la réfrigération améliore l'onctuosité du
produit. Le yaourt est ensuite conditionné en pots et conservé à +2 à +4 °C. L'addition
éventuelle d'arômes, de pulpes de fruits, etc., se fait au moment du remplissage des pots. L'addition
du sucre peut se faire avant incubation, à condition de ne pas dépasser 6 % afin de ne pas ralentir
la fermentation. Pour conserver au yaourt brassé sa consistance semi-liquide, le mélange
d'additifs (fruits + sucre) ne doit pas dépasser 15 %. (FAO, 1995).

II.4. Conservation des yaourts


II.4.1.Conditions et durée légale de conservation
Basé sur le niveau d'hygiène, la qualité microbienne des ingrédients et des matériaux
d'emballage, la durée de conservation du yaourt est autour de trois semaines aux conditions de
réfrigération. Le yaourt est toujours en danger de dégradation protéolytique par la protéolyse
(hydrolyse des protéines au cours des processus métaboliques sous l'effet d'enzymes) du lait qui
peut se produire pendant l'entreposage au froid due à la croissance des bactéries psychrotrophes
(capable de survivre à des basses températures, jusqu'à -5 °C et ayant une température optimale de
croissance à 25 °C) (FAO, 1995).
Plusieurs techniques sont utilisées pour garder et améliorer la qualité du yaourt à savoir la
congélation, l’utilisation du gaz, l’addition des préservateurs et la stérilisation par la chaleur mais
la réfrigération reste toujours la méthode la plus connue pour contrôler l’activité métabolique des
ferments et leurs enzymes dans le yaourt au cours du stockage (Adam et Mass, 1999).

II.4.2. Qualité du yaourt au cours de la conservation


Si le maintien de yaourt au froid empêche la multiplication bactérienne, il n'arrête pas
complètement son activité métabolique. Le yaourt montre des modifications durant toute la
durée de conservation, ce qui altère sa qualité (Dave et Shah, 1998).

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II.4.2.1.Qualité physico-chimique
a. Post-acidification
La post-acidification a un effet négatif sur la qualité du yaourt et diminue la durée de
conservation. Elle est étroitement associée à l’activité métabolique persistante des lactobacilles
pendant le stockage à 4° C (Béal et al., 1999).
Le pH influe la flaveur et la texture finale du produit et reflète donc la qualité du produit
final. Si la valeur de post-acidification est très basse, nous aurons un yaourt très acide avec des
problèmes de séparation d’eau (synérèse), et si elle est haute, la flaveur sera affectée en raison
d’un manque d’acidité (Tamime et Robinson, 1999). Lb. delbrueckii ssp. bulgaricus et St.
thermophilus sont responsable de la post-acidification du yaourt pendant le stockage au froid
(Donkor et al., 2006).

b. Synérèse
La synérèse ou la séparation spontanée du petit lait sur la surface du yaourt est considérée
comme un défaut. Ce problème peut être réduit ou éliminé par l'augmentation du niveau des
solides du lait à 15% (Shah, 2003).

c. Viscosité
La viscosité du yaourt diminue progressivement pendant le stockage. Cette diminution est
due à l’augmentation du temps de stockage (Shakeel Hanif et al., 2012). Elle se changent en
fonction de ferment utilisé grâce à leurs protéases ce qui implique le rôle des micro- organismes
en affectant la viscosité de yaourt (Olivera et al., 1996).

II.4.2.2.Qualité microbiologique
La qualité microbiologique du lait et les produits laitiers est influencée par la flore initiale
du lait cru, les conditions de la transformation, et la contamination après le traitement
thermique. Les microorganismes les plus souvent évoqués sont les psychrotrophes Gram
négatives, les coliformes, les levures et les moisissures. En outre, diverses bactéries telle que
Salmonella sp., Listeria monocytogenes, Campylobacter jejuni, Yersinia enterocolitica, les
souches pathogènes d’ E. coli et les souches entéro-toxinogènes de Staphylococcus aureus
peuvent également être trouvées en lait et produits laitiers.
Actuellement, la maîtrise de ces bactéries pathogènes nécessite la mise en place d’un
système de contrôle et de surveillance rigoureux (Roginski et al., 2003).

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La viabilité des bactéries lactiques constitue le plus important obstacle rencontré au cours
de la fabrication, et particulièrement pendant le stockage à cause de leur courte durée de vie
dans les produits laitiers fermentés (Analie et Viljoen, 2001). Les principaux facteurs
responsables de la perte de viabilité des bactéries lactiques ont été attribués à la diminution du
pH du milieu et de l'accumulation des acides organiques en raison de la croissance et de la
fermentation (Sun et Griffiths, 2000).

II.4.2.3. Qualités organoleptiques


a. Fermeté
Le maintien d'une texture et d'une dureté uniformes au cours de la fabrication et
pendant toute la période de conservation est le principal objectif dans la production du yaourt.
La fermeté du yaourt n’est probablement pas affectée au cours de la conservation (Shakeel
Hanif et al., 2012).

b. Arôme
Les composants aromatiques qui contribuent à l’arome finale du yaourt peuvent être
divisés en quatre catégories à savoir les acides non volatiles (lactique et pyruvique), les acides
volatiles (butyrique et acétique), les composés carbonyliques (l’acétaldéhyde et le diacétyle) et
divers autres composés (acides aminés et les produits formés par la dégradation thermique) (Serra
et al., 2009).
Le yaourt doit être consommé à environ 10°C, au dessous de cette température, le profil de la
flaveur n’est plus apprécié à cause du froid, il est rapporté que tous les composants volatils présent
dans le yaourt diminuent au cours du stockage à moins 8°C, au dessus de 10°C le produit perd sa
fraicheur (Gafaar, 1992).

c. Texture
Les différences de texture entre les yaourts sont attribuées au type du lait utilisé et leurs
différences compositionnelles (Shakeel Hanif et al., 2012). En effet, un taux élevé de matière
sèche totale augmente la fermeté de gel et réduit le degré de la synérèse (Mohammeed et al.,
2004).

d. Goût
La perte du goût du yaourt est le résultat du développement de l'acidité, l'oxydation de
graisse ou la protéolyse des protéines (Shakeel Hanif et al., 2012). Les activités protéolytiques
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des bactéries lactiques peuvent avoir quelques effets nuisibles sur le lait fermenté. La production
des peptides (protide formé par un nombre restreint d'acides aminés) amers est en grande partie
attribuée à la protéolyse par Lb. delbrueckii ssp bulgaricus pendant le stockage (Gürsoy et al.,
2010 ).

I.5. Le yaourt et ses biens faits


Lors de la transformation du lait en yaourt, certains avantages apparaissent (Bronner
et Pansu, 1999 ; Roudant et Lefrancq, 2005 ; Vierling, 2008):
- La caséine est partiellement hydrolysée, ce qui améliore la digestibilité ;
- La production de certaines vitamines du groupe B par les bactéries lactiques, l’apport
vitaminique complémentaire pouvant être de 1 à 20% ;
- L’acidité du yaourt favorise l’absorption intestinale du calcium et du fer;
- Par son pH, l’acide lactique inhibe le développement de germes pathogènes et constitue
une protection du yaourt lui-même mais aussi du tube digestif du consommateur ;
- Les bactéries du genre Lactobacillus sécrètent du peroxyde d’hydrogène antiseptique
pouvant être efficace in vivo ;
- La flore du yaourt exerce un effet bénéfique sur certains mécanismes immunitaires de tube
digestive ;
- Streptococcus thermophilus peut empêcher l’implantation de certaines bactéries
pathogènes dans l’intestin, telles que les salmonelles et les colibacilles.

…..FIN….

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