FOUDA OWOUNDI Surliquidité Bancaire en CEMAC

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africaine de l’Intégration                                                                           Vol. 3. No. 2, Octobre 2009 

La surliquidité des banques en zone franc :


Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?

FOUDA OWOUNDI Jean Pierre1

Résumé : La détention par les banques d’un volume de


liquidités est justifiée théoriquement par leur mission
d’assurance de liquidité. Mais depuis une quinzaine
d’années, les banques de la zone Franc détiennent des
liquidités en abondance largement supérieures à ce qui est
nécessaire à cette mission et paradoxalement les crédits
octroyés à l’économie sont en baisse. Dans cet article, nous
proposons une analyse des déterminants de cette surliquidité
à partir du cas des six pays membres de la CEMAC. Cette
analyse est étayée par des vérifications empiriques,
effectuées avec les données de panel des bilans et des
comptes de résultat bancaires agrégés, portant sur la période
de 1993 à 2006. Nos tests confirment globalement nos
hypothèses sur le rôle de l’interaction entre plusieurs
facteurs : l’incertitude liée à la forte dégradation du climat
des affaires, l’effet de mémoire des crises bancaires
antérieures et le renforcement de la frilosité des banques,
ainsi que les innovations financières engendrées par la
libéralisation financière.

The excess liquidity of banks in Franc Zone: How to


explain the paradox of the CEMAC?

Abstract: The holding by Banks of a certain volume of


liquidity can theoretically be explained by the need to ensure
the liquidity of the economy. Surprisingly, banks from the
1
Faculté des Sciences Economiques et de Gestion Université de Yaoundé II, Cameroun

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CEMAC zone have been carying excess liquidity for the last
fifteen years while funds available to finance growth are on
the decrease. This paper analyzes the factors that influence
excess liquidity using panel data, namely consolidated
balance sheets and income statements for the period 1993
thru 2006. The empirical results confirm that there is an
interaction between uncertainly due to bad economic
environment, the recollection of past banking crises, as well
as financial reforms generated by economic liberalization.

INTRODUCTION

La notion de liquidité recouvre la monnaie banque centrale


et les actifs susceptibles d’être convertis à bref délai en
espèces sans risque de perte en capital. Elle renvoie aussi à
la capacité d’une banque à liquider ou à transformer en
cette monnaie un actif non monétaire, acquis pour être
détenu jusqu’à une échéance lointaine. En raison des
graves conséquences de la crise financière internationale, la
liquidité des banques et des marchés est aujourd’hui au
cœur des préoccupations des Banques centrales et des
gouvernements.

L’importance de ce sujet est principalement liée à l’activité


de transformation pratiquée par les banques. Selon Lelande
et Pyle (1977), celles-ci ont une capacité à faire l’économie
des coûts d’information2, ou à faire celle des coûts de
2
En raison notamment de l’existence des asymétries d’information sur le marché, liée au
fait que certains opérateurs détiennent une information particulière mais qui n’est pas
totalement transmise aux prix des actifs. De ce fait, il y a une incertitude qui pèse sur le
prêteur, augmente le risque de défaut auquel il doit faire face. Cette incertitude peut se
situer avant le contrat (l’emprunteur dispose d’une information privée avant le contrat de

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transaction, si l’on se réfère à l’analyse de Williamson


(1985). Mais il reste que leur spécificité réside, selon le
modèle de Diamond et Dybvig (1983), dans l’assurance de
liquidité offerte aux clients. Contrairement aux
intermédiaires non monétaires – qui prêtent ce qu’ils ont
préalablement emprunté – leur financement résulte d’un
endettement à l’égard du bénéficiaire.

Leur dette à vue circule comme monnaie et est acceptée par


les agents économiques comme moyen de paiement.
Seulement, elle est exigible et doit être couverte à tout
moment. A cet effet, les banques offrent aux déposants une
certitude de liquidité meilleure que celle que les marchés
pourraient leur fournir3. Au travers de la transformation
des actifs, elles leur proposent des instruments de
placement dont les caractéristiques sont différentes de
celles des actifs de financement, et leur offrent ainsi la
possibilité de pouvoir retirer leurs fonds à tout instant avant
la maturation des crédits. Cette garantie de liquidité
s’exerce également par rapport à leur risque d’insolvabilité,
parce qu’elles peuvent intervenir en leur fournissant des
liquidités sans lesquelles ils feraient défaut. La nécessité
d’éviter le risque d’illiquidité et son corollaire – la panique –
permettent donc de comprendre pourquoi une banque doit
détenir un stock de liquidités.

Cet argument devient cependant caduc dès lors que la


banque détient des liquidités au-delà de ce qui est
convenable pour faire face à ce risque. C’est le cas lorsque
les banques détiennent des liquidités oisives en abondance,

dette) et conduit d’après Stiglizt et Weiss (1981) à la sélection adverse ; tout comme elle
peut se situer après le contrat (le prêteur court le risque d’une exécution partielle du
contrat ou de sa non-exécution du fait de l’emprunteur), auquel cas elle peut conduire à
l’aléa moral (Gale et Hellwig, 1985).
3
En effet, par défaut d’information observable, aucun contrat d’assurance de liquidité ne
peut être écrit par le marché.

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largement supérieures à ce qui peut être considéré comme


optimal – surliquidité bancaire – au regard des ratios
prudentiels qui leur sont imposés. Ces ratios sont en effet
définis en référence au degré de transformation de la
liquidité compatible avec la stabilité financière et la
structure financière optimale.

De nombreuses études ont noté ce phénomène non


seulement en Afrique subsaharienne – 40 pays sur 44 –
mais aussi au Maroc, en Egypte et en Algérie, ou encore en
Thaïlande et dans la région des Caraïbes. La zone Franc est
particulièrement touchée depuis le début des années 1990.
Dans l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine –
UEMOA, cette surliquidité se traduit par des dépôts auprès
de la Banque centrale excédant largement les montants
requis par la réglementation relative aux réserves
obligatoires, ainsi que le souligne une étude de la Banque
de France (2006). Mesurée en pourcentage de la masse
monétaire, elle a représenté en moyenne plus de 6 % entre
2000 et 2006. De même, dans la Communauté Economique
et Monétaire de l’Afrique Centrale – CEMAC, la trésorerie
des banques est en permanence excédentaire, ce qui se
traduit par des coefficients de liquidité largement
supérieurs à la norme de 100 % fixée par la Commission
Bancaire de l’Afrique Centrale – COBAC.

La Banque des Etats de l’Afrique Centrale – BEAC – s’est


montrée très préoccupée par cette situation et les a
soumises au principe de la constitution de réserves
obligatoires, prévues de longue date par ses statuts. Elle a
même décidé d’instaurer à partir du 1er juillet 2002 des
coefficients de réserves obligatoires différenciés, définis en
fonction de la situation de liquidité dans chaque pays
membre (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée Equatoriale,

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Centrafrique et Tchad). Mais la surliquidité des banques


persiste. Si la BEAC s’en est tant préoccupée, il faut dire
que cela est dû au fait que le crédit bancaire constitue la
principale source de financement des économies de la zone,
et que par conséquent la détention de liquidités oisives est
non sans ce qu’il est convenu d’appeler ici coût
d’opportunité. En effet, le taux d’investissement privé dans
la sous-région demeure faible (de l’ordre de 23 % du PIB) et
est loin du seuil susceptible de favoriser l’atteinte des
Objectifs du Millénaire pour le Développement – OMD – en
général et la réduction de la pauvreté en particulier.

Plus généralement, la liquidité des banques est aujourd’hui


plus qu’avant une préoccupation majeure tant pour les
gouvernements que pour les organisations financières
internationales. On l’a vu avec les crises financières des
années 90 et la standardisation au niveau international des
politiques de contrôle du système bancaire4. On le voit
également aujourd’hui avec la crise des subprime apparue
aux Etats-Unis à l’automne 2007, et dont l’histoire montre
qu’une croissance plus importante de la liquidité comparée
à celle de l’économie réelle peut conduire à de graves
problèmes économiques. Plus précisément, cette crise
interpelle les régulateurs et les superviseurs sur la nécessité
de mieux connaître le déplacement des liquidités comme le
souligne Ricol (2008), notamment les lieux où celles-ci
s’investissent et l’identification, dès que possible, des risques
susceptibles d’entraîner des bulles spéculatives. Par ailleurs,
son paradoxe n’est pas très différent de celui de la
surliquidité en zone Franc, à savoir que les liquidités sont
globalement toujours abondantes, mais ne sont plus là où

4
notamment avec l’adoption par le Comité de Bâle d’une approche prudentielle fondée
sur les ratios de fonds propres et de liquidité, ou avec la réforme du ratio Cooke, qui visait
une plus grande maîtrise des risques, et plus récemment avec le ratio McDonough visant
un renforcement du contrôle quantitatif.

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elles sont le plus nécessaires. Cette préoccupation est


d’autant plus justifiée que l’on s’est rendu compte que
l’abondance de liquidités qui caractérise l’économie
mondiale (CFPB, 2008) a rendu les banques peu vigilantes
en matière de risques et a provoqué finalement une crise
sur les marchés, avec des effets récessifs sur l’économie
réelle5 comme on le sait (cas récent des Etats-Unis et de
l’Europe ou encore du Japon).

L’objet de cet article n’est ni de chercher à déterminer ce


qu’il convient d’appeler seuil de liquidité, ni de traiter du
problème de la gestion du risque d’illiquidité, lequel
s’apparente au problème de la détermination du stock
optimal de liquidités que doit détenir une firme bancaire.
Plusieurs travaux ont tenté de longue date d’y apporter un
éclairage, on peut citer pour mémoire Poole (1968),
Baltensperger (1972), Hart et Jaffee (1974). En revanche,
notre ambition est de proposer des éléments de réponse à la
question de savoir quels sont les déterminants de la
surliquidité actuelle des banques dans la zone Franc. Car,
ce paradoxe n’a pas encore fait l’objet d’analyses
significatives. Wanda (2006) par exemple s’est intéressé à
l’analyse de ce phénomène uniquement dans le cas du
Cameroun, et a montré que ses déterminants sont
nombreux. Mais son étude ne prend pas en compte les
aspects macroéconomiques et institutionnels.

En outre, la taille de l’échantillon (10 banques) et la période


retenue (2002 à 2005) ne sont guère suffisantes pour

5
En d’autres termes, si les banques ne prêtent pas, elles ne jouent pas leur rôle macro-
économique fondamental dans la croissance, souligné il y a longtemps par Schumpeter
(1912). Mais inversement, si elles sont confrontées à un choc de liquidité il peut y avoir
un effondrement brutal du système de crédit en l’absence d’une intervention du prêteur en
dernier ressort, pareillement elles peuvent ne pas être à mesure de jouer ce rôle (Figuet,
2000).

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valider ses conclusions. De même, l’étude de Saxegard


(2006) s’est limitée à ses conséquences sans s’appesantir
sur ses causes, en montrant notamment que la surliquidité
affaiblit les canaux de transmission de la politique
monétaire dans la CEMAC. En outre, l’abondance de
liquidités n’est pas sans inconvénient, au regard de ce que
l’on observe actuellement au niveau mondial6, à savoir la
mauvaise appréciation des risques, les faillites bancaires et
la récession économique. Dans la première partie, nous
proposerons une analyse des fondements théoriques et
empiriques du paradoxe de la surliquidité bancaire en zone
Franc, et dans la deuxième, une analyse des déterminants
et les vérifications empiriques.

I. Les fondements théoriques et empiriques du paradoxe


de la surliquidité des banques en zone Franc

Les systèmes bancaires de la zone Franc ont connu à partir


du milieu des années 80 deux principales réformes : l’une
liée à la restructuration des établissements bancaires, et
l’autre au changement de politique monétaire. S’inscrivant
dans un contexte de libéralisation financière, ces réformes
avaient pour objectif de restaurer la liquidité des banques
sinistrées par la crise bancaire et de permettre un meilleur
financement de l’économie. Si le premier objectif a été
atteint, le deuxième à l’évidence reste loin des ambitions des
réformateurs. Les banques sont surliquides mais les crédits
à l’économie baissent en tendance. Afin de bien comprendre
les faits empiriques de ce paradoxe, il convient de revenir

6
Notons que plusieurs facteurs expliquent l’abondance de liquidités au niveau mondial, à
savoir : la plus grande mobilité de l’épargne liée à la globalisation financière, les
excédents de ressources des pays asiatiques et surtout du Japon, la politique monétaire
américaine, etc.

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sur la situation économique de la zone et ses implications


en matière de politiques macroéconomiques.

1.1 La situation économique de la zone et les défis


du développement

La zone Franc est constituée par deux grandes Banques


centrales : la Banque des Etats de l’Afrique de l’Ouest –
BCEAO – et la BEAC. Elle se caractérise non seulement par
la parité fixe du Franc CFA avec l’Euro, mais aussi la
convertibilité illimitée de celui-ci et surtout l’obligation faite
à chacune de ces Banques centrales de verser au moins 50
% de leurs réserves de change dans le compte dit
d’opérations, ouvert à la Banque de France, en contrepartie
de la garantie donnée par le Trésor français7. En tant que
mécanisme clé de la zone, ce compte détermine la politique
monétaire à travers le niveau de réserves et de ce fait
encadre la création monétaire. Les statuts des Banques
centrales prévoient, en outre, une limitation des avances
qu’elles peuvent consentir aux Trésors publics nationaux en
fonction de la situation des finances publiques. La situation
économique actuelle de la zone n’est guère reluisante.
Malgré la stabilité du cadre macroéconomique, les réformes
entreprises après la crise n’ont pas produit des résultats
satisfaisants, spécialement en matière de croissance et de
réduction de la pauvreté.

Les réformes et les faibles performances


économiques

L’histoire récente de la zone est marquée par de graves


problèmes économiques et financiers, auxquels elle a été
7
Initialement de 65 %, cette fraction a été ramenée en 2007 à 50%.

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confrontée à partir du début des années 80, et qui se sont


traduits par d’importants déficits budgétaires et des
comptes d’opérations. Si le pacte européen de stabilité des
prix appelait à de nouveaux mécanismes de coopération
entre les pays africains membres et la France, cela a semblé
d’autant plus nécessaire qu’elle était en proie à ces
problèmes, caractérisés par une grave illiquidité des
banques, une inflation rapide, des taux de change
surévalués8 et un lourd endettement extérieur et intérieur
des Etats. Largement débattue9, cette crise a milité en
faveur de réformes institutionnelles. C’est ainsi que la
question de l’intégration10, déjà d’actualité au lendemain
des indépendances, a été remise au goût du jour.
L’intégration a été considérée comme une étape utile à
l’ouverture ultérieure de la zone sur le marché mondial et à
la libéralisation des échanges. L’idée motrice était qu’elle
permettrait d’intensifier les échanges et de donner aux
petites économies ouvertes de la zone une dimension
économique critique leur permettant de faire face aux blocs
commerciaux d’Amérique, d’Europe et d’Asie. Comme l’a
rappelé Berg (1993), l’objectif des nouvelles stratégies dites
institutionnelles était de construire cette intégration sur la
base de la coopération monétaire existante. Ce type
d’intégration – qualifiée de verticale – voulait surtout tirer

8
La surévaluation du franc CFA a été très débattue, notamment en ce qui concerne le
niveau des taux de mésalignement par rapport au taux de change d’équilibre [Collange et
Plane (1994), Devarajan (1996), Fouda Owoundi (2001) etc.]. Les résultats disponibles
sont très contrastés. Des raisons d’ordre méthodologiques ont souvent été avancées
(Hugon [1999]).
9
Pour Guillaumont et Guillaumont-Jeanneney (1993), elle est née d’une croissance
excessive de la masse monétaire, mais aussi des chocs exogènes (prix des matières
premières) ; alors que pour Stasavage (1996), c’est le manque d’efficacité des
mécanismes de la zone dans le renforcement de l’équilibre budgétaire qui est en cause.
10
En raison de la balkanisation de l’Afrique (Cheik Anta Diop, 1960) et de ce que
Bekolo-Ebe et Ngango (1989) appellent : la désintégration économique du continent, les
différentes tentatives d’intégration en Afrique (CEAO, CEDEAO, MRU, UDEAC,
CEEAC, CEPLGL, ZEP, etc.) se sont soldées par un échec.

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avantage des effets bénéfiques sur le commerce intra-zone


engendrés par plus d’autonomie dans l’action publique11. Il
se fondait implicitement sur le rôle déterminant des
institutions dans la croissance (North, 1990) et visait le
desserrement des contraintes administratives et la
réduction de l’incertitude sur l’application des règles
juridiques, facteurs qui ont souvent limité la productivité de
ces économies. A cet égard, deux grandes unions
économiques ont été créées en 1994 : l’UEMOA et la
CEMAC ; celles-ci avaient pour objectif d’apporter des
réponses appropriées aux problèmes économiques et de
développement. Dans le cadre de ces unions, les Etats ont
mis en place des dispositifs de surveillance multilatérale de
leurs politiques économiques, avec des critères de
convergence rappelant l’expérience européenne liée à la
mise en place de l’Euro.

Malheureusement, les résultats de la convergence nominale


des économies sont à ce jour décevants, ainsi que le
montrent certaines études (Fouda Owoundi, 2008), encore
moins ceux de la convergence réelle, qui de l’avis de certains
observateurs devait permettre d’apprécier son efficacité par
rapport aux critères de zone monétaire optimale (Bougthon,
1992). L’exemple de la CEMAC reste de ce point de vue
assez illustratif. L’état d’avancement des grands chantiers
communautaires, comme l’édification du marché commun,
le développement des infrastructures, etc., est le moins que
l’on puisse dire décevant. En effet, s’il est vrai que le Tarif
Préférentiel Généralisé (TPG) mis en place en 1994 a atteint
le taux 0 en 1998 entre les six Etats membres, il reste que
les échanges intra-communautaires n’ont pas enregistré de

11
Cette analyse des fondements de l’intégration a été développée lors de la conférence
organisée en avril 1992 par la Banque mondiale sur Les nouvelles dimensions de
l’intégration régionale, à travers l’étude de Jaime de Melo, Panagariya et Rodrik, (citée
par Guillaumont et Guillaumont-Jeanneney, 1993).

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progrès significatifs. Les échanges effectués avec les autres


pays de l’Afrique ont représenté environ 6 % seulement du
total des flux commerciaux avec l’extérieur entre 1995 et
2005; alors que les échanges commerciaux intracom-
munautaires atteignaient à peine 3 % de la valeur totale des
échanges, soit 119 milliards de FCFA (voir tableau 1). Si les
échanges intra-communautaires sont de si faible ampleur12,
comment ne pas partager l’idée selon laquelle la zone Franc
n’est pas une zone monétaire optimale13.

12
Des études montrent que dans le cas de l’ UEMOA, les pays échangent également peu
entre eux.
13
Si la zone monétaire optimale peut se définir à partir de la manifestation de chocs
symétriques aux pays, ou par des similitudes de comportement dans la flexibilité des prix
et des coûts (Kenen, 1969), ainsi que par la mobilité des facteurs de Mundell (1961) ou
encore par le degré d’ouverture de McKinnon (1963), alors la zone franc ne l’est pas
effectivement. En effet, certaines études montrent que les chocs macroéconomiques qui
touchent les pays membres ne sont guère uniformes. Dans le cas par exemple de la
CEMAC, le Cameroun, le Congo et le Gabon reçoivent des chocs plus ou moins
symétriques, contrairement au Tchad, à la RCA et à la Guinée Equatoriale dont les chocs
sont très spécifiques ou asymétriques (Ekomié (1999), N’goma (2000, Ondo Ossa (2004).

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Tableau 1 : Structure géographique des échanges


commerciaux (en % de la valeur des échanges)

1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005

Total
Afrique 8,7 7,3 6,7 8,9 7,9 7,7 7,4 8,2 8,6 7,4 8,0

dont :- 3,2 3,1 3,2 4,2 3,5 3,0 2,4 3,0 3,5 2,3 2,3
CEMAC

- UEMOA 2,8 0,7 0,9 1,2 0,8 0,6 1,0 1,0 0,7 0,8 0,9

- autres 2,8 3,5 2,6 3,5 3,6 4,1 4,1 4,2 4,4 4,3 4,7
pays
d’A-
frique

Union 69,2 61,5 64,0 60,0 53,0 43,7 44,6 36,8 39,2 35,6 31,8
europée
nne

Améri- 3,9 9,1 11,2 15,9 14,1 24,0 30,5 35,8 31,7 34,5 42,2
que du
Nord

Amé- 0,3 0,6 0,4 0,4 0,4 0,5 0,5 0,4 0,7 0,5 0,7
rique du
Sud

Asie 6,7 8,9 7,1 6,6 10,2 14,2 11,8 14,0 13,6 16,8 12,3

Moyen 0,3 0,4 0,1 0,6 0,6 0,2 0,3 0,3 0,2 0,2 0,2

et
Proche
Orient

Source : BEAC, in : Comité monétaire la Zone franc, Rapport


annuel 2006

Ces performances, loin d’être le fait d’un hasard, tiennent à


plusieurs facteurs, dont les plus importants sont liés
certainement aux politiques fondées sur les préférences
nationales et au problème des infrastructures, ainsi que l’a

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noté la Commission Economique des Nations Unies pour


l’Afrique (2007) à propos de l’enclavement de certains Etats
(Tchad, Centrafrique) et la très faible connexion des réseaux
nationaux de toute sorte.

En outre, si les pays ont enregistré ces dernières années des


taux de croissance réels globalement positifs (5,5 % en 2005
contre 3,3 % en 2006 pour l’ensemble de la CEMAC), ainsi
qu’une sensible amélioration du cadre macroéconomique,
les études les plus récentes s’accordent à dire que cela est
allé de pair avec un faible niveau de développement humain,
se traduisant, selon Avom et Carmignagni (2008) par un
niveau anormalement élevé de la pauvreté et un
approfondissement des inégalités. Selon les mêmes auteurs,
la distance moyenne entre revenus pauvres et seuil de
pauvreté est en augmentation constante. Même au
Cameroun14, qui est le seul pays de la sous-région à avoir
stabilisé le taux de pauvreté autour de 40 % entre 2001 et
2007, l’indice de développement humain n’a pas enregistré
de progrès significatif : 0,514 en 1990 et 0,506 en 2004,
contre 0,628 et 0,722 pour le Cap Vert, 0,657 et 0,76 pour
la Tunisie. Cette évolution se comprend, puisque la zone est
aujourd’hui marquée par le chômage, dont le taux demeure
très élevé, d’environ 20 % au Congo et 25 % au Gabon.

La promotion d’une croissance pro-pauvres

Suivant les analyses de la variation de l’incidence de la


pauvreté proposées par des auteurs comme Lopez (2004),

14
L’Institut National de la Statistique du Cameroun vient de rendre publics les résultats de
la troisième enquête camerounaise auprès des ménages (ECAM III). D’après cette
enquête, le taux de pauvreté est resté stable autour de 40 % entre 2001 et 2007, après
avoir reculé de 13 points entre 1996 et 2001, en raison des faibles performances
économiques, le taux de croissance du PIB en termes réels s’étant stabilisé autour de 3 %
contre un objectif de 7 %.

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Avom et Carmignagni (2008) montrent que du point de vue


de la politique macroéconomique seule la promotion d’une
forme de croissance pro-pauvres situerait les pays de
l’Afrique centrale dans un scénario favorable à la réduction
de la pauvreté. En conséquence, il serait nécessaire selon
eux, que les Etats investissent dans les infrastructures de
base, l’éducation, la santé et autres biens publics, qui sont
les mécanismes permettant au surplus de richesse lié à la
croissance d’aller à toutes les populations et aux pauvres en
particulier. Si l’on suit ces auteurs, la politique budgétaire
de l’Etat, principal levier de lutte contre la pauvreté dans ces
pays comme l’affirme si bien l’OCDE (2007), doit jouer un
rôle essentiel dans ce sens. Malheureusement celle-ci
souffre de deux principaux handicaps. Le premier est lié à
la nature des mécanismes de surveillance multilatérale mis
en place, qui ne sont pas, selon Ary Tanimoune et Plane
(2005), en cohérence avec les problèmes économiques de la
zone et les engagements des gouvernements envers la
communauté internationale. Le deuxième par contre tient à
la nature même des économies. Contrairement à l'économie
de la zone UEMOA qui apparaît relativement plus diversifiée
avec un ensemble de productions agricoles d'exportation
(coton, cacao, café essentiellement), de cultures vivrières
(riz, mil, manioc, igname) et un secteur secondaire
comparativement développé (industries agro-alimentaires,
industrie textile, BTP), l'économie de la zone CEMAC dans
son ensemble est fortement dépendante du pétrole. Comme
le montre le tableau 2, les recettes d’exportation de ce
produit alimentent de plus en plus les ressources des Etats
(49,13 % en 2002 et 70 % en 2006).

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Tableau 2 : Tableau des opérations financières des


Etats de la CEMAC (extrait)

Intitulés 2002 2003 2004 2005 2006


Recettes totales 3536 3688,7 4246,4 6069 7933,6
(en milliards
FCFA)
Recettes 49,13 47,46 53,58 63,58 70,04
pétrolières (en %)
Source : Administrations nationales, FMI et BEAC

A cet égard, la balance commerciale est structurellement


excédentaire selon la conjoncture sur ses prix, elle présente
une très grande volatilité, avec une forte sensibilité des
soldes budgétaires publics aux fluctuations des cours,
d’autant plus grande que le cours du dollar par rapport à
l’Euro fluctue. A cela s’ajoute le poids du secteur informel
dans les économies, qui a comme inconvénient la réduction
de l’assiette fiscale et donc des recettes fiscales susceptibles
d’assurer le financement de la production des biens publics
nécessaires à cette forme de croissance. Il convient aussi de
noter que ce secteur souffre lui-même de l’exclusion de
l’accès au crédit.

Comme on peut le comprendre, les défis actuels pour la


zone en général et la CEMAC en particulier résident, d’une
part dans l’identification des politiques publiques
appropriées, et d’autre part dans la résolution du problème
plus large de financement du développement. Or,
contrairement à l’UEMOA où l’on observe des efforts
significatifs en vue de mener une politique budgétaire active
et respectant la contrainte d’endettement15, la CEMAC n’est
15
compte tenu des effets de crédibilité par rapport aux bailleurs de fonds et d’autres
partenaires au développement.

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pas encore parvenue à réaliser une modification structurelle


du mode de financement des économies. Le financement
monétaire des gouvernements par la BEAC reste en vigueur.
Pourtant cette modalité de financement rame à contre
courant des débats économiques récents sur l’indépendance
de la Banque centrale, et demeure en tout état de cause très
limitée comme source de financement pour soutenir une
politique active de lutte contre la pauvreté.

Les Etats de l’UEMOA eux font de plus en plus recours aux


financements intérieurs, par émission de titres publics sur
le marché financier sous-régional, ouvert en 1998. Ces
financements représentent d’après la Banque de France
(2006) près du triple des ressources extérieures, obtenues
traditionnellement auprès des créanciers bilatéraux et des
institutions financières internationales. Bien que la taille de
ce marché reste encore étroite – avec 1,5 % du PIB de
l’UEMOA en 2006 – sa progression est néanmoins
remarquable – 0,1 % du PIB en 2000 – et s’accompagne
d’un recul tendanciel du financement monétaire. On note
également que la surliquidité des banques en est un facteur
de développement, dans la mesure où, non seulement
celles-ci y utilisent leurs excédents de liquidité en achat de
titres publics et privés, mais surtout contribuent à travers
ces opérations à faire baisser les conditions financières des
fonds levés par les Etats et le secteur privé. Dans la zone
CEMAC en revanche, le problème de la surliquidité des
banques reste entier, malgré la situation économique
présentée précédemment à grands traits et le fait que les
pays en développement sont actuellement victimes d’un
effet d’éviction sur les marchés de capitaux internat-
ionaux16. Si l’existence d’importants besoins financiers tant
16
La dégradation des finances publiques dans la plupart des pays de l’OCDE suggère
que le problème d’éviction au niveau interne fait actuellement place à un vrai problème
d’éviction au niveau international. Si autrefois le recyclage des excédents d’épargne au
niveau international se faisait du Nord vers le Sud, des pays de l’OPEP vers les pays en

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du côté des Etats que du secteur privé rend paradoxale


cette surliquidité, celle-ci l’est davantage par le fait que la
pratique est loin d’être conforme aux enseignements de la
théorie économique.

1.2 La surliquidité bancaire et le déclin des crédits


à l’économie

Selon la distinction introduite par Hicks (1974), les


systèmes financiers de la zone Franc sont de type économie
d’endettement, parce que dans cette union monétaire les
entreprises satisfont leurs besoins de ressources
essentiellement par recours au crédit, et du fait de la
prépondérance de la finance indirecte, les banques
commerciales doivent avoir un besoin structurel de
refinancement auprès de la Banque centrale. Leur
surliquidité et le déclin des crédits à l’économie constituent
donc un véritable paradoxe, car pour le grand public, si ces
dernières collectent des fonds c’est pour les utiliser pour
leur propre compte en opérations de crédit. Un tel
phénomène paraîtrait moins curieux dans le cadre d’une
économie de marchés de capitaux, où les entreprises
peuvent diminuer leur demande de crédit en émettant des
titres sur ces marchés. Après avoir rappelé les fondements
théoriques de ce paradoxe, nous l’étayerons par des faits
empiriques.

développement via le système bancaire international, actuellement on assiste à un


recyclage Nord-Nord, comme le témoigne l’attrait des marchés de capitaux des Etats-Unis
pour le Japon.

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Bref retour sur les enseignements de la théorie


économique

Le mécanisme du multiplicateur de crédit, bien que


théoriquement inadaptée à l’économie d’endettement17, se
trouve à la base de la conception selon laquelle les dépôts
font les crédits. Son point de départ est la controverse sur
l’offre de monnaie. Déjà posée au XIXe siècle, à l’occasion
du débat entre l’école de la banque – Banking School – et
l’école de la circulation – Currency School –, cette
controverse s’est poursuivie et a donné lieu à l’opposition
entre multiplicateur et diviseur de crédit. Selon ce
mécanisme, lorsque la Banque centrale augmente la
monnaie banque centrale (base monétaire), les banques
commerciales en récupèrent une fraction sous forme de
dépôts et se livrent à des opérations de prêts de l’excès de
liquidité qui ne leur rapporte rien. Les crédits octroyés
donnent naissance à leur tour à de nouveaux dépôts, qui
seront à nouveau prêtés, et ainsi de suite. Les monétaristes
établissent un lien mathématique entre la base monétaire
émise par la Banque centrale et la monnaie en circulation
dans l’économie. Si l’on considère les enchaînements
dynamiques de dépôts et de crédits, ce mécanisme montre
que les banques commerciales ont la capacité de créer de la
monnaie au multiple de la base monétaire, à partir d’une
augmentation exogène de celle-ci. D’après ce mécanisme,
les banques commerciales ne peuvent donc consentir un
crédit que si elles disposent d’une liquidité excédentaire,
mais dont le montant est parfaitement déterminé par la
Banque centrale. Elles ont de ce fait une contrainte de

17
Celle-ci nous renvoie à une analyse en termes de diviseur de crédit, en raison de
l’endettement important des entreprises à l’égard des banques commerciales et du fait que
cela engendre un besoin structurel de refinancement auprès de la banque centrale. Mais,
c’est toujours le mécanisme du multiplicateur qui joue. Il y a simplement inversion dans
le sens de la causalité entre la masse monétaire et la base monétaire.

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ressources préalables, elles ne peuvent faire des crédits que


si elles disposent au départ de ressources. Autrement dit,
un excès de liquidités à leur bilan suffit logiquement pour
qu’elles accordent des crédits. Vue d’une banque, c’est l’idée
très ancrée dans les esprits selon laquelle ce sont les dépôts
des clients qui rendent possibles les opérations de crédit, et
qui fait dire à Levy-Garboua (1992) que l’enseignement de la
macroéconomie selon lequel les crédits fonts les dépôts a
perdu de sa force.

La vérité des faits empiriques

Le paradoxe de la surliquidité bancaire tient non seulement


à son caractère atypique par rapport au type de système
financier en vigueur, mais surtout aux faits empiriques. Il
est bien connu que la notion de liquidité est souvent utilisée
lorsque l’on parle de la liquidité d’un actif (Chevallier-Farat,
1992) ou de la monnaie. On sait également que l’on
considère habituellement la liquidité comme une qualité
non absolue et attribuée à l’ensemble des actifs (Diatkine,
1996). En effet, ces derniers sont plus ou moins liquides, et
ceux qui sont parfaitement liquides correspondent aux
placements qui peuvent être transformés rapidement en
monnaie. Il importe de rappeler que les banques disposent à
cet effet des liquidités, constituées des espèces, des avoirs
en comptes courants à la Banque centrale et d’autres actifs
financiers et qu’elles peuvent liquider à brève échéance afin
d’obtenir de la monnaie centrale. On admet que le stock de
ces liquidités varie non seulement sous l’influence de
facteurs autonomes et institutionnels (mouvements de
billets, solde des opérations avec l’extérieur, solde des
opérations du Trésor public), mais aussi de l’obligation qui
leur est faite de constituer des réserves obligatoires non
rémunérées à la Banque centrale. Lorsqu’une banque
recourt au marché interbancaire ou encore à cette dernière
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– agissant comme prêteur en dernier ressort –, cela est


généralement un signal qu’elle est confrontée au problème
de liquidités. Dans le cas contraire, on admet qu’elle dispose
de liquidités suffisantes et se trouve à l’abri du besoin, ce
qui se traduit alors par une trésorerie positive. Mais,
lorsque celle-ci reste excédentaire18 de façon permanente et
au-dessus d’un certain niveau, on peut parler de surliquidité
bancaire.
Le problème de savoir comment déterminer le niveau seuil
peut être résolu en considérant comme référence les normes
prudentielles fixées par les autorités chargées du contrôle
des banques. Dans le cadre de la CEMAC, le règlement de la
COBAC R-93/06 relatif à la liquidité des établissements a
instauré plusieurs ratios de liquidité, notamment le rapport
de liquidité et le coefficient de transformation à long terme.
Ce dernier est une norme qui vise à obliger les banques à
respecter un rapport minimum entre leurs emplois et
engagements à plus de cinq ans d’échéance et leurs
ressources de même nature.
Le minimum fixé est de 50 %. Mais celui-ci ne permet ni de
saisir la liquidité bancaire immédiate, ni celle bancaire
potentielle. C’est la raison pour laquelle il convient de se
référer au rapport de liquidité, qui impose aux banques de
respecter un rapport minimum entre leurs disponibilités et
exigibilités à moins d’un mois. A tout moment, celles-ci
doivent présenter un rapport de liquidité au moins égal à
100 %. Ainsi, toute banque dont le rapport de liquidité se
situe en-dessus de ce seuil, peut être considérée comme
étant en situation de surliquidité. Comme le montre le
tableau 3, il apparaît que toutes les banques de la CEMAC
sont dans cette situation depuis 1995.

18
Les banques peuvent conserver des réserves libres, c’est-à-dire au-delà des réserves
obligatoires qui leur sont imposées. Cela arrive dans les pays où toutes les banques n’ont
pas un accès direct au marché monétaire, comme par exemple aux Etats-Unis.

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Tableau 3 : Ratio de liquidité des banques de la CEMAC (en moyenne par pays en %)

Pays 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007

Tchad 221,12 239,87 242,47 303,43 250,47 112,4 180,5 174,9 211,8 204,8 178,8 281,3 230,5

Guinée

Equat. 265,69 283,42 229,92 186,19 212,84 217,8 244,2 253,3 333,3 275,8 322,7 310,5 303,8

Gabon 154,78 200,57 135,95 134,34 135,63 144,1 128 139,6 185,3 219,5 232,1 210,4 198,8

Centrafrique 204,06 207,36 211,08 195,63 175,69 127 72 73,7 86,2 119,9 165,1 149,7 182,8

Cameroun 110,98 107,7 141,56 122,03 136,71 169,4 156,4 206,4 185,9 197,6 203,5 231,8 242,8

Congo 336,7 181,6 156,1 126,8 175,2 287,6 293,5 337,8

CEMAC 174,5 151,1 182,4 191,2 206,8 233,2 244,5 239

Source : Commission Bancaire de l’Afrique Centrale (calculs en moyenne par pays faits à titre exceptionnel et
ayant l’avantage de préserver la confidentialité des informations individuelles)

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Cette surliquidité peut être appréhendée également à partir


d’autres indicateurs, comme le solde de trésorerie des
banques (st), le rapport de liquidité (rl), le niveau de
refinancement auprès de la BEAC (ref), ou encore le solde
des opérations avec la clientèle (soc). Le paradoxe de la
surliquidité est illustrée par le graphique – surliquidité
bancaire et crédits à l’économie dans la CEMAC 1993-2006,
ce qui retrace l’évolution de ces différents indicateurs (avec :
ST = st/b mesurant la surliquidité; REF = ref/b, le
refinancement ; CRED = cred/b, les crédits à l’économie ; et
ET = et/b, les emplois de trésorerie). Ces indicateurs sont
considérés en pourcentage du total du bilan19 (b).

Graphique - Surliquidité bancaire et crédits à l'économie dans la


CEMAC 1993-2006
en % du bilan cumulé

90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Années
1993

1995

1997

1999

2001

2003

2005

-10%
-20%
ET REF ST CRED SOC

19
La variable rl n’est pas rapportée au total du bilan

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Construit à partir des données agrégées des bilans et des


comptes de résultats des banques de la CEMAC, le
graphique retrace de façon particulière l’évolution du
montant des crédits octroyés par les banques – à partir des
encours figurant dans leurs bilans (cred), comparativement
à celle de leurs emplois de trésorerie (et). Il montre que les
crédits consentis par les banques connaissent en tendance
une baisse importante. Ils représentaient 78 % du total du
bilan de l’ensemble des banques de la Communauté en
1993, mais en 2006 leur part ne vaut plus que 42,67 %.
Dans le même temps, leur solde de trésorerie a connu une
forte augmentation, il est passé de - 6,18 % du total du
bilan en 1993 à 39,43 % en 2006. L’abondance des
liquidités qu’elles détiennent se traduit par ailleurs par une
forte diminution des ressources de refinancement,
lesquelles ne représentent plus que 0,19 % de leur bilan
cumulé en 2006, alors qu’elles représentaient 60,55 % en
1993. Il importe cependant de noter que ces évolutions
globales cachent des disparités importantes – qu’une
analyse plus fine par pays permet de voir –, car on constate
qu’elles sont dans l’ensemble dépendantes de la situation
des banques du Cameroun, pays dont la part de marché
s’élève à plus de 50 % du marché bancaire de la CEMAC20.
Cela étant, on constate qu’il existe une corrélation négative
entre l’évolution de la liquidité des banques et leurs
opérations de crédit. Lorsque ces dernières diminuent, celle-
ci a tendance à augmenter, et de ce fait, elles ont moins
recours au refinancement de la banque centrale.

20
De 1993 à 2003, le Cameroun fait 49,76 % en moyenne du total des bilans des banques
de la CEMAC ; en 2006, les banques du Cameroun représentent 44,8 % du bilan cumulé
de l’ensemble des banques de la zone. On remarque néanmoins que la part de marché de
ces banques est en diminution depuis quelques années.

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Mais en vérité, la spécificité de la zone Franc nous place en


présence d’une double surliquidité. Le cas que nous venons
de voir est en effet celui de la surliquidité des banques
commerciales vis-à-vis de la BEAC et renvoie à un système
bancaire qui a une forte préférence pour la liquidité et qui
refuse de prêter aux agents économiques. Le second cas,
qui est moins visible, est celui de l’abondance des réserves
détenues par les Banques centrales vis-à-vis de l’extérieur
et qui se traduit au niveau de la zone par des excédents de
réserves de loin supérieurs à ce qui est requis pour la
garantie donnée au Franc CFA par le Trésor français. Il
convient de rappeler que l’émission de la monnaie dans la
zone est régie par le taux de couverture de la monnaie.
Celui-ci est en clair un objectif intermédiaire de la politique
monétaire, qui intervient, comme dans la règle monétariste,
à travers la relation de stricte proportionnalité qui lie la base
monétaire, la masse monétaire et le taux d’inflation21. Selon
le FMI – Statistiques Financières Internationales22, ce taux
était de 94, 65 % en 2006. Il dépassait donc de loin le seuil
minimum de 20 %, ceci en raison de l’augmentation des
avoirs extérieurs nets de la CEMAC qui sont passés de 95,6
en 1995 à 4382,2 milliards de francs CFA en 2006, dont un

21
Selon la Convention de coopération monétaire du 23 novembre 1972 signé entre les
États de la zone d'émission de la BEAC et la France, l'État français garantit la
convertibilité de la monnaie émise par la BEAC en lui consentant un droit de tirage
illimité sur un compte d'opérations ouvert auprès du Trésor français. En contrepartie, la
BEAC doit y déposer une fraction de ses réserves de change. Dans ses statuts en vigueur
jusqu’en 1999 et amendés en juillet 2003 (voir Rapport Zone franc 2003), il est précisé un
objectif intermédiaire de la politique monétaire. L'article 11 indique que le taux de
couverture extérieure de la monnaie, défini par le rapport entre l’encours moyen des
avoirs extérieurs de la BEAC et l’encours moyen de ses engagements à vue, ne peut être
inférieur ou égal à 20 % au cours de trois mois consécutifs. Dans le cas contraire, ou si le
compte d’opérations est débiteur pendant plus de trois mois consécutifs, les plafonds de
refinancement des banques sont réduits : de 20 % dans les pays dont la situation fait
apparaître une position débitrice en compte d’opérations; de 10 % dans les pays dont la
situation fait apparaître une position créditrice mais d’un montant inférieur à 15 % de la
circulation fiduciaire rapportée à cette même situation.
22
Cité par Arouna Mopa (2008).

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montant de 4165,9 milliards déposé dans le compte d’opé-


rations.

En définitive, la baisse des crédits à l’économie dans un


contexte d’abondance de liquidités bancaires constitue
indiscutablement un paradoxe, ce d’autant que l’énorme
potentiel économique de la CEMAC contraste fortement avec
le niveau actuel de développement économique et social des
Etats. Sur le plan théorique, ce paradoxe découle des
enseignements du mécanisme du multiplicateur de crédit.
Or la détention de ressources préalables ne suffit pas pour
que les banques se livrent à des opérations de crédit.
Comme l’a si bien souligné Lebourva (1962), elles
distribuent d’abord des crédits et se préoccupent ensuite de
trouver les réserves correspondantes nécessaires23. Comme
nous allons le voir, leur comportement en tant que firmes
joue un rôle clé dans l’offre de crédit et détermine
grandement leur situation en matière de liquidité.

II. Les déterminants de la surliquidité et les


vérifications empiriques

Le multiplicateur de crédit renvoie à la situation où la


banque considère comme donnés ses dépôts et ajuste ses
actifs de façon à maximiser ses objectifs. Ainsi, elle adapte
ses actifs, crédits et réserves, à la variation exogène de ses
dépôts. Or elle observe habituellement une gestion du
passif, qui consiste à déterminer ses actifs et à chercher les
dépôts nécessaires. De ce fait, elle a un comportement qui
s’inspire des principes de l’analyse micro-économique de la
firme. Elle doit déterminer le montant des crédits en tenant
compte de la demande de dépôts, de façon à respecter
l’équilibre de son bilan entre crédits (actif) et dépôts (passif)

23
C’est l’optique du diviseur du crédit.

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et à maximiser son profit. Elle maximise donc une fonction


d’utilité, qui dépend non seulement du profit et de son
aversion pour le risque, mais aussi de la recherche de
liquidité. Ce schéma suggère que la surliquidité observée
relèverait d’une multitude de facteurs. Après avoir examiné
ceux-ci, nous présenterons les vérifications empiriques.

2.1 Les déterminants de la surliquidité bancaire

Deux principaux facteurs expliquent cette surliquidité :


l’incertitude croissante dans la sous-région et la libéra-
lisation financière.

L’incertitude croissante dans la sous-région

En effet, les facteurs du premier groupe ont accru la


sensibilité des banques au risque de défaut de la clientèle et
engendré de leur part une forte préférence pour la liquidité.
On se souvient que le problème de la surliquidité des
banques dans la CEMAC est apparu juste au lendemain de
la dévaluation du franc CFA de janvier 1994, notamment
avec la forte hausse du solde des opérations avec la clientèle
de l’ensemble des banques commerciales. Celui-ci a
augmenté de plus de 40 % entre décembre 1993 et fin mars
1996. Face à cela, deux principales explications avaient été
avancées.

La première était liée à la dévaluation : celle-ci aurait


permis de mettre fin à la spéculation et aurait favorisé le
rapatriement massif des capitaux spéculatifs placés hors de
la zone d’émission de la BEAC. Puisque, quelque temps
auparavant, la fuite de capitaux s’était accélérée dans la
zone Franc, si bien qu’en 1991 par exemple, 30 % et 50 %
de billets émis respectivement par la BCEAO et la BEAC
étaient sortis de leurs zones d’émission respectives. En
1992, ces proportions s’étaient élevées à 40 % et 60 %, de
La surliquidité des banques en zone franc : Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?            68
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sorte qu’au premier semestre de l’année 1993, la fuite des


capitaux a atteint 270 milliards de francs CFA, soit près de
15 % de la masse monétaire.

C’est ainsi que la Banque de France a été amenée à décider


en août 1993 de ne plus racheter les billets en francs CFA,
et que la BEAC et la BCEAO à leur tour ont décidé chacune
de ne plus racheter les billets émis par l’autre. Ces
décisions auraient eu, selon cette explication, un impact
positif sur les ressources des banques, car de nombreux
clients auraient ouvert à partir de ce moment des comptes
bancaires, de manière à pouvoir réaliser leurs transferts par
voie réglementaire. La deuxième était quant à elle liée à la
dégradation de la situation économique et à l’absence de
projets éligibles au financement bancaire – projets dits
bancables. En effet, les économies de la CEMAC, comme
celles du reste de l'Afrique subsaharienne, avaient bénéficié
entre 1973 et 1979 d'une amélioration notable des termes
de l'échange. Mais avec le deuxième choc pétrolier de 1979-
1980 et la récession intervenue dans les pays industriels,
elles ont enregistré une forte dégradation des termes de
l'échange (près de 12 %), qui a atteint un niveau sans
précédent à partir de 1985, avec un recul de près de 50 %.
Ainsi, à la fin de l'année 1992, les baisses cumulées
s’élevaient à 61 % pour le pétrole, 73 % pour le cacao, 78 %
pour le café, 3 % pour le coton et 4 % pour le bois. En bref,
la chute et l'instabilité grandissante des cours mondiaux
des matières premières ont provoqué une profonde
dégradation de leur situation économique et financière.

Les pays de l’Afrique subsaharienne dans leur ensemble ont


en conséquence enregistré une évolution très négative de la
croissance du PIB réel et du solde budgétaire global. Ce
dernier est passé de - 4,45 % à 8,15 % du PIB en moyenne
entre 1986 et 1993. Sur la même période, leur dette

La surliquidité des banques en zone franc : Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?            69
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extérieure est passée de 54,85 % à 74,25 % du PIB. Tout


cela a eu comme conséquence un tarissement des flux de
capitaux entrants dans la CEMAC, lesquels sont passés de
637,5 à 353,9 milliards de francs CFA, entre 1985 et 1992.

Mais cette analyse pour intéressante qu’elle soit paraît


aujourd’hui peu crédible. Si la dévaluation a occasionné
une augmentation des liquidités des banques, et la
mauvaise situation économique un manque de projets
bancables, cela ne saurait plus être le cas aujourd’hui,
puisque le cadre macroéconomique dans la CEMAC s’est
relativement amélioré entretemps. En fait, on n’a pas
remarqué que les mauvaises performances économiques ont
eu pour effet de dégrader l’environnement des affaires, au
point où celui-ci est devenu un des plus mauvais du monde,
ce qui lui vaut d’être dénoncé par beaucoup de travaux,
comme les études de l’OCDE (2007) sur les perspectives
économiques en Afrique. Selon le Rapport 2007 de la
Banque mondiale sur l’environnement des affaires dans le
monde, les lois sur le nantissement et la faillite ne sont pas
favorables au développement du crédit en Afrique centrale.
De plus, les systèmes judiciaires se caractérisent par un
manque d’efficacité dans la résolution de litiges
commerciaux, avec notamment un nombre très élevé de
procédures et des délais de règlement très longs. Non
seulement les décisions de justice sont lentes à prendre et
difficiles à faire exécuter, mais aussi très souvent, sont
entachées d’irrégularités. Ces systèmes ne sont donc pas
suffisamment incitatifs pour encourager le développement
de contrats financiers de toute sorte. Le rapport
précédemment cité montre que l’indice de droit des
créanciers et emprunteurs est inférieur à la valeur moyenne
(5).

La surliquidité des banques en zone franc : Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?            70
Revue africaine de l’Intégration                                                                           Vol. 3. No. 2, Octobre 2009 

En outre, comme le soulignent beaucoup de travaux


[Wamba et Tchamambe-Djiné (2002), Reinhart et Tokatlidis
(2003), Chouchane-Verdier (2004), etc.], le système
d’information n’est pas de nature à faciliter les décisions
relatives au crédit. Il n’existe pas de bases de données
gérées par le secteur public qui soit à mesure de rassembler
des informations sur la solvabilité des emprunteurs, ce qui
fait que le nombre de personnes pour lesquels on dispose
d’une information à jour sur leur historique de
remboursement, sur leurs dettes impayées ou leurs crédits
en cours est faible. Il n’existe même pas de bureau de
crédit, d’entreprise privée ou une organisation à but non
lucratif qui gère une base de données sur la solvabilité des
emprunteurs et qui facilite les échanges d’informations en
matière de crédit.

En conséquence, cette incertitude radicale, en reprenant les


termes de Hugon (2007), rend le risque non probabilisable et
accroît la frilosité des banques en matière de crédit. Ceci se
traduit alors par des comportements court-termistes,
consistant non pas à faire des arbitrages entre risque et
rentabilité, mais à choisir le court terme et la liquidité, qui
garantissent le plus grand nombre d’options possibles par
rapport à l’irréversibilité des crédits à moyen ou à long
terme. C’est la raison pour laquelle on remarque que les
opérations de trésorerie augmentent, et représentent la
composante la plus importante de l’actif cumulé des
banques (45 % en 2006 par exemple). Il en est de même des
emplois interbancaires (40,45 % du bilan cumulé avec un
montant de 1744 milliards de francs CFA), constamment en
hausse (19,88 % en 2006) alors que les ressources
interbancaires ne cessent de diminuer et ne représentent
finalement qu’une faible proportion de leur bilan cumulé
(5,53 %, avec un montant de 238 milliards). Ainsi, pour
l’année 2006 par exemple, le solde interbancaire global est
prêteur de 1506 milliards, contre 1361 milliards en 2005.

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De plus, les opérations au jour le jour et à terme sont en


hausse et sont essentiellement constituées des placements
à la BEAC (soit 225 milliards sur un total de 605 milliards).
La répartition des crédits à l’économie en fonction de leur
durée (tableau 4) complète ces illustrations. Les crédits à
court terme représentent en moyenne 69,37 % du total des
crédits à l’économie entre 1997 et 2006, car ceux-ci sont
moins risqués que les autres formes de crédit – environ 30
% – caractérisées par des échéances plus longues.

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Tableau 4 : Répartition des crédits à l'économie dans la CEMAC (en millions de FCFA)

Part
Types de
crédit 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 moyenne

CT* 750893 841309 929666 1027031 1107865 1124112 1153781 1115358 1238984 1176091 69,37%

MT** 251945 309228 292243 321426 348506 425556 474131 491969 553561 681498 27,51%

LT*** 42976 41092 41242 46757 43838 43515 45980 42980 57155 64664 3,12%

Total 1045814 1191629 1263151 1395214 1500209 1593183 1673892 1650307 1849700 1922253 100,00%

*, **, *** : court, moyen et long terme.


Source : BEAC (2006), p. 64.

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La préférence pour le court terme et la liquidité se trouve


favorisée par un effet de mémoire, qui rappelle les faillites
bancaires de la fin des années 80. On se souvient qu’à
partir du milieu des années 80, les systèmes bancaires de la
zone Franc en général et ceux de la CEMAC en particulier
ont traversé une grave crise, marquée du côté des banques
par la détention d’un volume de créances irrécouvrables très
élevé et par une grave situation d’illiquidité24.

Par ailleurs, les difficultés financières rencontrées par les


Etats ont conduit à une baisse spectaculaire des deux
principales composantes de l’activité des banques, à savoir
les crédits et les dépôts. De plus, le fait que les pouvoirs
publics aient voulu faire de la monnaie un instrument de
développement, s’est traduit par une vaste étatisation des
systèmes bancaires, laquelle a eu pour effet une large
distribution des crédits à des entreprises publiques ou non,
avec une forte proportion de crédits de complaisance
généralement octroyés sous la pression politique
(Guillaumont et Guillaumont-Jeanneney, 1993). Elle a eu
également comme conséquence une tendance systématique
à la sous-estimation des probabilités de chocs de crédit,
résultant du défaut d’un ou de plusieurs emprunteurs
importants. De cette tendance, qu’on peut qualifier de
myopie au désastre, en empruntant le langage de Guttentag
et Herring (1986), est née cette grave crise.

Or selon la théorie de la myopie au désastre, la crise de


crédit qui résulte de l’aveuglement au désastre est
généralement brutale et engendre un renversement des
comportements des banques. Cela signifie qu’à l’aveu-
glement peut se succéder une défiance généralisée à l’égard
24
Selon la COBAC (1995), au 31 août 1989 par exemple, les engagements de la BEAC
sur les établissements de crédit s’élevaient à 800 milliards de francs CFA, dont 520
milliards (65 %) de créances sur les établissements en situation critique, et 240 milliards
(30 %) d’impayés.

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de la solvabilité des emprunteurs, de sorte que les banques


peuvent être conduites à procéder à un rationnement
drastique de la quantité de crédit octroyée, comportement
bien connu depuis les travaux de Hodgman (1960), Freimer
et Gordon (1969) ou Jaffee et Modigliani (1969), ou encore
ceux relativement plus récents de Stiglitz et Weiss (1981).

Plus concrètement, on a remarqué qu’après cette crise,


celles-ci ont adopté une attitude de prudence excessive à
l’égard de nouvelles opérations de crédit. C’est ainsi qu’elles
ont accumulé des excédents de trésorerie et accru leurs
placements à l’étranger. On remarque en outre qu’elles ont
une préférence accrue pour la clientèle des entreprises
étrangères et de firmes multinationales – pour qui le risque
est supposé être faible, voire nul – comparée aux PME
nationales qui présentent beaucoup de faiblesses –
structure familiale, absence de comptabilité, insuffisance de
fonds propres, asymétrie d’information, etc. Cette plus
grande sensibilité au risque a été bien illustrée au
Cameroun, où la Citibank a financé le projet d’extension et
de modernisation du réseau de la Société Mobile Téléphone
Network (MTN), pour un montant global de 23 milliards de
francs CFA, remboursable sur sept ans. Dans le même
ordre d’idées, la Société Générale des Banques au
Cameroun (SGBC) a consenti un prêt de 29 milliards de
francs CFA à la Société Orange, pour la même échéance.
Très récemment encore en juin 2007, un consortium de
banques camerounaises constitué de la SGBC, de la BICEC,
de la Standard Chartered Bank Cameroon et de la Citibank
Cameroun a accordé un prêt à la Société MTN pour un
montant de 44,5 milliards de francs CFA. On a remarqué
que ces opérations de crédit ont été favorisées par le fait
qu’elles présentaient un risque très faible voire nul, puisque
MTN par exemple est une société qui opère dans le domaine
de la téléphonie mobile et bénéficie de l’effet de mode, ce qui

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lui permet de réaliser des chiffres d’affaires très élevés.


Cette sensibilité accrue au risque de défaut de la clientèle a
engendré la réduction du volume de crédit et ce faisant
l’accroissement de leurs ressources liquides. Mais ce
comportement n’explique pas à lui seul leur surliquidité, il
agit en interaction avec d’autres facteurs, liés pour la
plupart aux changements induits par la libéralisation
financière.

La libéralisation financière

En effet, après la grave crise économique et financière des


années 80, la plupart des pays africains au sud du Sahara
ont été amenés à mettre en œuvre des politiques
d’inspiration néo-libérale, à travers les programmes
d’ajustement structurel et les politiques de libéralisation
financière. Largement défendues par McKinnon (1973) et
Shaw (1973), ces politiques condamnent les interventions
du gouvernement sur les marchés de capitaux et prônent
des réformes financières et bancaires. Dans la CEMAC, ces
dernières ont porté d’une part sur les instruments de la
politique monétaire et de l’épargne, et d’autre part sur le
cadre institutionnel et les institutions financières (Avom et
Eyeffa Ekomo, 2007). Leur mise en œuvre a engendré
d’importants changements au niveau du système
bancaire25, changements qui expliquent également la
surliquidité actuelle des banques. On peut citer à titre
purement indicatif deux changements.

Le premier est relatif à l’assainissement des banques. Sous


l’effet des réformes, la structure financière des banques
s’est considérablement améliorée. Pour l’année 2006, le
système de cotation développé par la COBAC (système
SYSCO), en vue d’apprécier la situation financière des

25
Celui-ci représente l’essentiel des actifs financiers dans la CEMAC (cf. FMI, 2007).

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établissements, montre que celles-ci sont dans l’ensemble


en bonne santé ; 4 banques ont été classées en cote 1
(situation financière solide), 22 en cote 2 (situation
financière bonne), 3 en cote 3 (situation financière fragile) et
3 autres en cote 4 (situation financière critique). Le
renforcement de leur structure financière a eu pour effet
d’accroître leur crédibilité, en particulier vis-à-vis de la
clientèle des déposants, par nature très sensible aux
problèmes d’illiquidité et d’insolvabilité. En effet, le ratio de
solvabilité de base des principaux réseaux bancaires
installés dans la CEMAC a atteint au cours de cette année
le niveau de 17,38 %, alors que la norme fixée par la
COBAC est de 8 %. En outre, les fonds propres nets corrigés
s’étaient élevés à 169 milliards contre 149 milliards en
2005, soit un ratio de solvabilité de 13,43 %. Les fonds
propres comptables quant à eux ont également enregistré
une progression, avec un montant de 338 milliards, contre
302 milliards en 2005, soit un taux de progression de
12,04 %. C’est ainsi que le coefficient de fonds propres et de
ressources permanentes a dépassé largement le niveau
minimal de 50 %, en atteignant un taux moyen de 99,59 %
au 31 décembre 2006. De plus, comme le montre le tableau
5, l’activité des banques enregistre une hausse chaque
année, mais avec des taux variables par pays.

La surliquidité des banques en zone franc : Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?            77
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Tableau 5 : Activité et performances microéconomiques des banques de la CEMAC

Années 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

Produit net bancaire (en millions


FCFA) 189216 208906 235687 244135 258030 284296 314414

Résultat net (en millions FCFA) 48291 41232 38480 36082 49897 61944 73306

Coefficient de rentabilité (en %) 20,05 14,13 12,36 10,60 13,01 14,93 16,20

Coefficient de rendement (en %) 1,88 1,75 1,37 1,29 1,61 1,64 1,70

Créances douteuses / bilan


cumulé 5,67 % 6,77 % 6,73 % 7,25 % 6,99 % 5,98 % 5,11 %

Crédits/bilan cumulé (en %) 48,81 61,02 57,70 59,88 55,31 49,47 47,53

Dépôts/bilan cumulé (en %) 63,75 72,18 74,22 74,87 76,11 77,37 78,87

Taux d’augmentation du bilan


cumulé (en %) -8,39 19,52 -0,32 10,82 21,53 14,17

Source : Construit à partir des données de la COBAC, Rapports annuels, 2004, 2005 et 2006

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Leur bilan cumulé a enregistré une hausse de 14,56 % et a


atteint un montant de 4311 milliards de francs CFA en
2006. Cette croissance s’est accompagnée d’une
restauration de la rentabilité, de sorte que leur bénéfice net
s’est chiffré à 73,8 milliards, soit une augmentation de 12,4
% par rapport à leur performance de 2005 (61,9 milliards).
Ce bénéfice, qui représentait plus de 45 % de leur
capitalisation, ne résulte pas de leur activité classique, car
grâce à la libéralisation financière, elles ont diversifié leur
offre de services et ont accru les activités génératrices de
commissions.

Le second changement porte sur les innovations financières,


aussi bien en termes de nouvelles technologies financières –
électronisation des flux monétaires, application de
l’informatique aux opérations de banque et aux transactions
sur les marchés financiers – qu’en termes de nouveaux
actifs financiers26. Les innovations de produits financiers
ont principalement porté sur la microfinance. Au cours des
dernières années, la sous-région de l’Afrique centrale a
enregistré une très forte expansion du microcrédit,
notamment dans les centres urbains (Malo et Koyadondri,
2006). Les sources officielles indiquent qu’au 31 décembre
2006, le nombre d’établissements de microfinance (EMF) en
activité s’élevait à 783, dont 679 avaient obtenu l’agrément
de la COBAC. Selon certains, cette expansion aurait
engendré une concurrence sur le marché bancaire et un
gonflement des liquidités oisives des banques du fait des
pertes de parts de marché. Mais en vérité elle n’a pas induit
une concurrence significative, car la part des dépôts et des
crédits de la microfinance est restée faible, comparée à celle
des banques classiques – environ 5 % des activités
bancaires. En revanche, ce sont les innovations de

26
Nous empruntons ici la définition que donne Guillaumont Jeanneney (1998).

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processus qui ont eu un impact remarquable sur la


situation financière des banques. Le développement de
nouvelles technologies financières leur a permis d’accroître
les services susceptibles de générer des commissions27. Il en
est par exemple ainsi des paiements électroniques.
Beaucoup d’entre elles proposent aujourd’hui à leurs clients
des cartes bancaires affiliées au réseau international Visa.
Celles-ci permettent à une bonne frange de ces clients de
faire des retraits d’espèces dans les distributeurs
automatiques, ainsi que des paiements auprès de certains
commerçants. Certaines proposent également des services
de E-banking ou de Internet banking, celles qui n’ont pas
encore introduit dans leur organisation ces technologies
s’attèlent à le faire. Ces nouveaux services ont suscité la
mise en place de la compensation électronique entre les
établissements de crédit et la possibilité de rendre les cartes
bancaires interchangeables aux niveaux national et
international, tellement l’enjeu financier est important.
Dans le même ordre d’idées, il a été mis en place en
septembre 2007 le système de gros montants automatisés
(SYGMA), qui doit assurer en temps réel le transfert des
montants importants de sommes d’argent entre les banques
de la CEMAC. Un système de télé-compensation en Afrique
centrale (SYSTAC) a également été rendu opérationnel, et il
est prévu avec l’Office monétique d’Afrique centrale l’entrée
en fonctionnement du système monétique interbancaire, qui
débouchera sur la mise en circulation d’une carte bancaire
unique commune à tous les établissements de crédit. Un
comité régional de normalisation de toutes ces innovations a
été mis en place – le CORENOFI, car elles apparaissent
nécessaires dans le contexte de mondialisation et
d’accélération des innovations technologiques, et surtout
déterminantes pour la rentabilité des banques. En effet,

27
Ce ne sont pas des services qui visent à résoudre l’épineux problème de l’accès au
crédit ou de financement du développement.

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elles permettent d’augmenter le produit net bancaire sans


forcément effectuer des opérations de crédit, dans un
environnement qui plus est caractérisé par une grande
incertitude, puisqu’en contrepartie de tous ces nouveaux
services, la clientèle doit servir aux banques plusieurs
commissions : à la souscription d’une carte, à chaque
opération de retrait de fonds, à chaque consultation de
compte, au titre de la cotisation liée à la détention de la
carte, etc.. Dans ces conditions, non seulement leurs
liquidités connaissent un gonflement du fait de ces
commissions diverses, mais aussi deviennent oisives. A cela
s’ajoute le fait que la libéralisation n’a pas engendré, comme
le souligne l’OCDE (2007), une véritable concurrence
permettant de baisser le coût des services financiers. Elle a
par contre exacerbé la liberté des établissements en matière
de tarification, puisque ceux-ci facturent actuellement tous
leurs services. C’est ainsi qu’ils effectuent différents
prélèvements sur les comptes de leurs clients, comme les
frais de courrier – environ 1580 FCFA – ou encore la
commission mensuelle de gestion – de l’ordre de 2500
FCFA, etc.

2.2 Les vérifications empiriques

Nous venons de voir que les facteurs susceptibles


d’expliquer la surliquidité des banques sont multiples. Nous
allons maintenant essayer de confirmer cette hypothèse par
des tests. Pour cela, nous procéderons d’abord à la
spécification du modèle, ensuite nous présenterons les
différents tests effectués et enfin nous examinerons les
résultats obtenus.

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La spécification du modèle

Selon la théorie de la myopie au désastre de Guttentag et


Herring, en l’absence de base rationnelle à leurs
évaluations, les décideurs des banques estiment la
probabilité d’occurrence de certains évènements, comme le
défaut de l’emprunteur, à partir de la mémorisation qu’ils
ont d’évènements similaires. Cela conduit à ce que la
probabilité subjective d’un choc devienne une fonction
décroissante de la période de temps écoulée depuis le
dernier événement. A cette règle de décision en
environnement incertain, se joint une discontinuité ou seuil
heuristique ; lorsque la probabilité atteint un niveau
critique suffisamment bas, celle-ci est traitée comme si elle
était nulle. Selon cette théorie, ce phénomène de myopie au
désastre n’est pas constant dans le temps. Il dépend du
temps écoulé depuis le dernier choc, du degré de
concurrence dans le secteur bancaire, du raccourcissement
de l’horizon temporel des décideurs liée à leur mobilité
professionnelle et à certaines modalités de rémunération,
ainsi que de l’anticipation que font les banques d’un soutien
implicite de la Banque centrale.

Inspiré de cette théorie, le modèle proposé suppose que


l’image de la grave crise bancaire des années 80 reste
encore assez vivante dans la mémoire collective des banques
et détermine leurs opérations de crédit à l’économie. Il
admet donc que le temps écoulé n’est pas suffisamment
important pour effacer de leur mémoire la probabilité
d’occurrence d’une insolvabilité de grande ampleur des
emprunteurs, susceptible d’engendrer comme par le passé
leur illiquidité. Ainsi, pour une année t donnée, elles
prennent en compte les évènements survenus en année t-1,
en particulier ceux qui sont de nature à provoquer leur
illiquidité. Si l’on considère, à la suite de Dermine (2005) ou

La surliquidité des banques en zone franc : Comment expliquer le paradoxe de la CEMAC ?            82
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de Boyd et Nicolo (2005), l’importance des créances


douteuses – mesurée par la fraction des provisions
constituées par rapport au total du bilan (CD = pcd/b) –
comme la variable signalant le risque de faillite d’une part,
et d’autre part qu’à la date t, la part du solde de trésorerie
dans le total du bilan de l’ensemble des banques d’un pays i
est STit, le modèle s’écrit en conséquence comme suit :

STit = αit + βitSOCit + γitCDit + λitMIFit-1 + μitFRit-1 +


εitSBit + θit

En effet, le solde de trésorerie des banques est une


résultante de leur fonds de roulement (FR) et du solde des
opérations effectuées avec la clientèle (SOC), qui lui-même
est la différence entre les dépôts et les crédits. De plus,
comme nous l’avons vu, il existe une corrélation négative
entre la proportion des crédits dans le total du bilan des
banques (CRED) et le solde de trésorerie, corrélation qui fait
que toute baisse des crédits à l’économie se traduit une
augmentation de ce dernier. Par ailleurs, le modèle suppose
que leurs comportements sont identiques et invariants dans
le temps, mais que ceux-ci sont susceptibles d’être
déterminés par les spécificités propres28 à chacune d’elles,
spécificités qui sont difficiles à capter parce que non
observables – effets fixes individuels –, et qui agissent sur
leur liquidité. Il suppose aussi que, pour un pays i donné, le
solde de trésorerie de l’ensemble des banques, à une année
t, est également déterminé par la marge d’intermédiation
financière29 anticipée à la date t à partir des résultats
réalisés en t-1 (MIF), ainsi que par le niveau du fonds de

28
F*, la statistique de test calculée, est égale à 12,1224 et F5 : 66 = 2,37 ; ce qui amène à
rejeter l’hypothèse HO d’absence de spécificités individuelles (cas où F* est inférieure à
F5 : 66 ).
29
Celle-ci est calculée ici par la différence entre le total des produits des opérations avec
la clientèle figurant au compte de résultats et le total des charges de même nature ; cette
différence est ensuite rapportée au total du bilan.

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roulement (FR), tout comme par l’environnement


économique et institutionnel d’ensemble, saisi ici par la
situation des finances publiques (SBit-1)30. Ces déterminants
se justifient par le fait qu’ils correspondent aux indicateurs
d’activité, de rentabilité et de risque qui sont au cœur des
stratégies des firmes bancaires. En outre, ils intègrent
d’autres contraintes, comme le coût du refinancement
déterminé par la politique monétaire. Dans le modèle ainsi
défini, α et θ sont les paramètres permettant de capter
globalement les effets fixes individuels, α, β, γ, λ, μ et ε les
autres coefficients à estimer.

Les tests et les résultats

En raison de la non-disponibilité de séries temporelles


individuelles, liée au caractère confidentiel des informations
bancaires, les vérifications empiriques ont été effectuées à
partir des données de la COBAC sur les bilans et les
comptes de résultat des banques, et présentées de manière
agrégée par pays (la répartition des banques par pays est
donnée en annexe), soit au total 65 observations pour les
six pays de la CEMAC. Ces vérifications ont été réalisées en
quatre étapes. La première a consisté à contrôler
l’exhaustivité des variables à l’aide du test des suites31. La
seconde, quant à elle, avait pour objectif de juger de
l’opportunité de faire un panel plutôt qu’un pool, ceci à
travers une variante du test de Chow, qui consiste à tester
l’hypothèse Ho que les coefficients (ai) représentant les
ordonnées à l’origine des droites des moindres carrés
ordinaires (MCO) de chaque série individuelle i sont égaux

30
Il s’agit plus précisément du solde budgétaire de base sur le PIB. Celui-ci est aussi une
bonne proxy pour évaluer l’incidence des réserves extérieures des Etats à travers
notamment les recettes budgétaires provenant des exportations de pétrole.
31
La région critique n’est pas de la forme (R-m)/s ≥ μα, puisque (R-m)/s = 0,10319 et
la valeur de μ0,05 lue sur la table de la loi normale centrée réduite est de l’ordre de
0,5199.

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(a1 = a2 ; a2 = a3 ; a3 = a4 ; a4 = a5 ; … ; an-1 = an). Si le test


permet de rejeter Ho, comme c’est le cas32, il convient de
mettre les données en panel, car la droite des MCO ne
saurait représenter chaque individu. La troisième étape
quant à elle a consisté à vérifier la pertinence du modèle à
effets fixes, comparé à celui à effets variables, qui fournit
pourtant un nombre de degrés de libertés réduit. Elle a
porté sur le test de Haussman basé sur l’égalité des
coefficients, complété33 par celui de Breush et Pagan. Ce
dernier permet de tester l’hypothèse Ho de nullité de la
variance de la partie fixe du terme d’erreur34, qui
correspond à l’absence de biais du modèle à effets
aléatoires. La quatrième enfin a consisté à effectuer des
régressions, intégrant ou non toutes les variables exogènes.
Les résultats de ces vérifications sont présentés au tableau
6. Les colonnes ST(1), ST(2), ST(3) et ST(4) correspondent
aux différentes équations testées.

32
Car F (5, 54) = 7,72 ; Prob > F = 0,000.
33
Le test de Haussman ne permet pas de conclure en faveur d’un modèle à effets fixes.
34
Cette hypothèse est rejetée : chi 2 = 8,01 ; prob > chi 2 = 0,0047.

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Tableau 6 : Résultats des vérifications empiriques

ST(1) ST(2) ST(3) ST(4)


SOC 0,854* 0,799* 0,809* 0,806*
(0,059) (0,055) (0,056) (0,055)
CD 0,487* 0,580* 0,611* 0,593*
(0,126) (0,118) (0,121) (0,118)
MIF -1,534* -1,205** -1,014**
(0,519) (0,468) (0,491)
FR 0,154 0,285+ 0,186
(0,168) (0,148) (0,152)
SB 0,005* 0,006* 0,005*
(0,001) (0,001) (0,001)
constante 0,036 0,028 -0,044 0,011
(0,037) (0,032) (0,022) (0,035)

R2 0,828 0,857 0,850 0,861


+ : significativité à 10%; ** : …à 5%; * : … à 1%. (….) :
écart- type

Ces résultats montrent que le modèle est globalement


satisfaisant, car pour toutes les équations, R2 est d’un
niveau élevé, avec une valeur comprise entre 0,828 et
0,861. Mais, lorsqu’on lui retire la variable permettant de
capter l’environnement et la stabilité du cadre macro-
économique (SB), R2 prend la plus petite valeur (0,828).
Alors qu’en y retirant les paramètres à caractère
microéconomique (FR ou MIF), la variabilité expliquée de la
surliquidité augmente, de façon différenciée selon qu’il s’agit
de la variable FR – R2 égal à 0,857 – ou de la variable MIF –
R2 égal à 0,850. En outre, si le modèle de base – équation
ST(4) – est meilleur, compte tenu du niveau élevé de R2

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(0,861), l’équation ST(2) permet d’obtenir également un R2


élevé (0,857), comparée à l’équation ST(3) dont le R2 est égal
à 0,850. En plus, toutes les variables exogènes de cette
équation sont significatives, avec un intervalle de confiance
d’au moins 95 %.

Si l’on retient en conséquence le résultat relatif à l’équation


ST(2), on voit que la surliquidité des banques est
principalement déterminée par les opérations avec la
clientèle, puisque le coefficient de la variable SOC (0,799)
est plus élevé que tous les autres coefficients et est positif.
Ce résultat n’est pas surprenant. D’une part, sur le plan
théorique, il est connu que les dépôts desserrent la
contrainte de liquidité engendrée par les fuites. D’autre part,
sur le plan pratique, les économies de la CEMAC sont
essentiellement pétrolières et ont bénéficié ces dernières
années d’un gonflement de leurs recettes d’exportation lié à
la flambée du prix du baril de pétrole. En revanche, le
deuxième facteur qui détermine la surliquidité est plus
intéressant, à savoir le risque de crédit. En effet, la variable
CD dont le coefficient s’élève à 0,580, a un signe positif, ce
qui signifie que plus le risque de crédit est élevé plus les
banques ont une forte préférence pour la liquidité et plus
elles sont surliquides. Son incidence apparaît davantage
lorsqu’on retire au modèle de base la variable d’envi-
ronnement et de stabilité macroéconomique (SB). Dans ce
cas, on constate que la variabilité totale expliquée de la
surliquidité devient plus faible (R2 = 0,828), comparée à celle
obtenue en retirant les variables microéconomiques (R2 =
0,857 et R2 = 0,850). Par ailleurs, le signe négatif du
coefficient de la variable MIF signifie que la surliquidité est
une fonction décroissante de la marge d’intermédiation
financière anticipée, c’est-à-dire plus la MIF anticipée est
faible plus grande est la préférence pour la liquidité, et
inversement.

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Alors que si l’on considère le résultat relatif à l’équation


ST(3), un autre facteur explicatif de la surliquidité
intervient, bien que de moindre significativité, à savoir le
niveau du fonds de roulement (FR). En effet, les banques
ont enregistré après les restructurations bancaires, la
libéralisation financière et l’application de nouvelles
mesures réglementaires édictées par la COBAC un
renforcement de leurs fonds propres, ainsi qu’une
augmentation des commissions perçues.

CONCLUSION
Au terme de cette analyse, il apparaît que la surliquidité des
banques en zone Franc s’explique par leur bonne santé
financière, qui émane de leur rentabilité accrue liée à la
libéralisation financière et aux innovations financières
qu’elles introduisent dans le système financier. A cela
s’ajoutent deux autres facteurs : l’incertitude grandissante –
qui caractérise les économies de la zone – et l’effet de
mémoire qui les rend très frileuses en rappelant les faillites
bancaires des années 80 à 90. Ces facteurs favorisent leur
préférence pour la liquidité et les opérations à très court
terme, ce qui se traduit par une diminution des crédits à
l’économie.
Ces résultats – qui mettent aussi en évidence les
implications néfastes des crises bancaires – suggèrent au
moins quatre axes de réflexion. Le premier est relatif à
l’amélioration du système d’information concernant le degré
de solvabilité des emprunteurs potentiels, ainsi que de
l’environnement judiciaire des affaires nécessaire à la
conclusion et l’exécution des contrats financiers et de
garantie. En fait, la surliquidité et l’effet de mémoire
traduisent un manque de confiance dans les institutions. On

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sait que les pays qui ont effectué des réformes de ce type
ont enregistré une croissance des crédits au secteur privé
(Banque mondiale, 2006). Le second est relatif au problème
de la mobilisation des ressources locales, car l’abondance
de liquidités montre que les pays de la zone ont davantage
besoin d’une mobilisation de ces ressources que de
transferts de fonds venant des pays du Nord, pour qu’ils
soient placés dans un scénario moins défavorable à la
réduction de la pauvreté. Le troisième par contre concerne
les moyens à mettre en œuvre à cet effet. De ce point de
vue, des contributions extérieures et locales peuvent être
utiles, à travers notamment des fonds de garantie qui
encourageraient les banques à octroyer des crédits. Le
quatrième quant à lui est une fois de plus, et la crise
financière internationale actuelle le montre, celui de la place
que les pouvoirs publics doivent donner à la prévention
dans la gestion des systèmes bancaires et financiers.

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Tableau 1 - Répartition des banques de l’échantillon

Nombre de banques par pays et par année


Pays 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006

Cameroun 10 9 9 8 8 9 10 8 10 10 10 10 10 11

Centrafrique 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3

Congo 5 5 5 5 4 4 5 4 4 4 4 4 4 4

Gabon 9 9 8 8 8 8 8 6 5 6 6 6 6 6

Guinée 1 1 2 2 2 2 2 2 3 3 3
Equa. 3 3 4

Tchad 4 5 5 5 5 5 6 6 6 6 6 7 7 7

Total 32 31 32 31 30 31 34 29 31 32 32 33 33 35
Source : construit à partir des données de la Commission Bancaire de l’Afrique centrale

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