Nephrologie

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N éph ro log ie & Thérapeutiq ue 16 (2020) 7S10- 7S15

Néphrologie
Nephrology

Bertrand Gondouin
Association Dialyse Provence Corse, 11 rue Jules Isaac 13009 Marseille, France

1. Insuffisance rénale aiguë 2. Glomérulopathies

Les complications post-ponction biopsie rénale (post-PBR) Concernant la néphropathie à IgA, l’International IgA
sont un enjeu en néphrologie. Une étude du CHU de Béthune a Nephropathy Network a récemment développé un score clinico-­
tenté d’analyser les facteurs de risque de complications dans histo-pronostique de risque absolu d’évolution vers l’IRCT ou de
leur registre de 727 patients ayant bénéficié d’une biopsie déclin de DFG de 50 %. L’étude de Bon et al., du CHU de Saint-
rénale entre 2007 et 2020. Les auteurs confirment l’incidence Étienne, a analysé 468 patients de leur cohorte sur un suivi de
augmentée de complications post-PBR dans le contexte 12 années et permettant de valider ce score dans leur population
d’IRA. Les études émettent des mesures préventives en fonction avec même un suivi à plus long terme que les études originelles.
des facteurs de risque mis en évidence : TDM, amélioration du D’après l’Abstract PO N51
repérage, Minirin par voie transjugulaire pour les biopsies à Le risque d’insuffisance rénale terminale au cours des
risque hémorragique. vascularites à ANCA est évalué par le score de Brix, selon les
D’après l’Abstract CO N01 pourcentages de glomérules normaux, de fibrose interstitielle
Les patients admis en réanimation sont à risque de dévelop- et la fonction rénale au diagnostic. L’artérite des petites artères
per une IRA. La consultation néphrologique post-réanimation rénales, elle, n’est pas prise en compte. Une étude avait pour
entre 30 à 90 jours après la sortie se met en place petit à petit objectif de définir l’impact pronostique de l’artérite des petites
sur tout le territoire. Or, quels sont, en situation réelle, les artères rénales. Sur 251 patients inclus, 13,5 % avaient une
délais intéressants pour réaliser ce suivi ? Une étude du CHU atteinte vasculaire. La survie de ces patients était significative-
de Bordeaux s’est intéressée, sur leur cohorte de 232 patients ment diminuée. En analyse multivariée, l’atteinte vasculaire
en réanimation ayant présenté une IRA, à la progression entre augmentait significativement le risque de passage en IRCT.
IRA, maladie rénale aiguë (MRA : persistance d’une insuffisance L’ajout de ce paramètre au score de Brix permet d’affiner la
rénale entre 7‑90 jours) et IRC (après 90 jours). Parmi les discrimination pronostique des patients.
patients avec IRA, 61/232 (26,3 %) sont décédés à j7, 106/232 D’après l’Abstract CO N02
(46 %) ont progressé en MRA sans récupérer, 65/232 (28 %) L’incidence de la syphilis est en augmentation en France. Cette
ont récupéré dans les 7 jours, mais parmi eux, 3 (4,6 %) ont série de 11 patients rapportée par Goussard et al. montre que les
présenté une MRA secondairement (cf. Fig. 1). patients ont un âge médian de 46 ans, 10/11 étaient des hommes.
D’après l’Abstract CO N06 Sept patients avaient une insuffisance rénale aiguë (créatininémie
médiane 161 μmol/L). Deux ont nécessité une prise en charge
en HD. L’aspect en microscopie optique était une glomérulo-
néphrite extramembraneuse dans 10 cas avec une recherche

Correspondance.
Adresse e-mail : [email protected] (B. Gondouin).
© 2020 Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Récupération Récupération*
55/232 (23,7 %) 10/116 (8,6 %)

IRA 116/232 75/116


MRA = 116 patients IRC = 75 patients
= 232 patients (50 %) (64,6 %)

J0 J90 3 ans 5 ans

Décès Décès Décès Décès


61/232 (26,2 %) 8/116 (6,9 %) 30/75 (40 %) 11/75 (14,6 %)
Perdus de vue Perdus de vue
22/75 (29,3 %) 7/75 (9,3 %)

Fig. 1. Insuffisance rénale aiguë après un épisode d’insuffisance rénale aiguë en réanimation : Étude de cohorte prospective (d’après Orieux et al.).

d’antigène tréponémique négative. Quatre patients avaient des

1,00
lésions tubulo-interstitielles d’aspect granulomateux. Les dépôts
étaient IgG polytypiques dans 10 cas (IgG1 n = 4/4, IgG3 n = 3/4).
Tous les patients ont été traités par antibio­thérapie, associée à une

0,75
corticothérapie (n = 2) et/ou un traitement immuno­suppresseur
(n = 2). Tous les patients ont présenté une réponse rénale, com-
plète dans 9 cas. La néphropathie syphilitique doit être évoquée
0,50

devant un aspect de glomérulonéphrite extramembraneuse


atypique (prolifération associée ou granulomes).
D’après l’Abstract PO N38
0,25

Le rituximab est une alternative intéressante à la cortico­


thérapie du syndrome néphrotique idiopathique (SNI)
de l’adulte. Son administration sous-cutanée (SC) est en train
0,00

de se développer en hématologie. C’est pourquoi Atenza et 0 6 12 18 24 30 36


al. ont étudié l’efficacité du RTX par voie SC chez 15 de leurs Délai avant rechute (mois)
patients en comparant les données à celles de la littérature sur
prospectif rétrospectif sc
l’efficacité du RTX en IV dans le SNI. Les auteurs rapportent une
efficacité comparable lorsque la voie SC est comparée aux études Fig. 2. Utilisation du rituximab par voie sous cutanée
prospectives et rétrospectives (cf. délai avant rechute, Fig. 2). dans le traitement des SNILGM et HSF primitive chez l’adulte :
étude pilote (d’après Atenza et al.).
D’après l’Abstract PO N36
La glomérulopathie à C3 (GC3) et le syndrome hémo­
lytique et urémique atypique sont deux pathologies rénales néphropathie spécifique (néphropathie en rapport avec la GM :
différentes, résultant d’une dérégulation de la voie alterne (VA) NRGM). La biopsie rénale a révélé chez 91 (27,7 %) patients une
du ­complément. De rares observations de formes mixtes GC3/ NRGM, mais de plus, parmi les patients sans hémopathie maligne
micro­angiopathie thrombotique (MAT) ont été rapportées. avérée (n = 245), 16 % présentaient une monoclonal gammopathy of
L’objectif de cette étude de Chabannes et al. a été de mieux carac- renal significance (MGRS). Les auteurs concluent qu’une protéinurie
tériser ces atteintes. Dix-neuf patients ont été inclus. L’atteinte de Bence Jones (PBJ) négative et/ou un rapport kappa/lambda nor-
rénale est sévère : tous ont une insuffisance rénale et 4 (21 %) mal sont fréquemment associés à l’absence de MGRS, mais seule
requièrent la dialyse. Quatre-vingt-deux pour cent des patients la biopsie rénale permet d’écarter formellement ce diagnostic.
ont des stigmates de MAT biologiques, et 32 % des  critères D’après l’Abstract PO N34
d’HTA maligne. Sur le plan immunologique, 47 % des patients Le rituximab est efficace pour prévenir les rechutes dans le
ont un C3 bas. Aucun patient n’a de C3NeF, 21 % ont un anti-FH syndrome néphrotique corticodépendant (SNCD) de l’enfant, mais
de faible titre, et 63 % un variant rare/pathogène des protéines les risques liés à ce traitement sont peu décrits. L’étude de Laroche
de la VA. Six sur 19 (32 %) ont une gammapathie monoclonale et al. a analysé les données d’une cohorte de 38 patients traités par
(GM). Sur le plan thérapeutique, 66 % ont reçu de l’éculizumab, rituximab pour SNCD. Les auteurs trouvent que l’introduction de
63 % un traitement immunosuppresseur et 32 % un traitement rituximab avant l’âge de 10 ans était associée à un risque plus élevé
hématologique. Après un recul médian de 57,9 mois, 63 % des d’événement indésirable grave (Fig. 3). Sur les 38 enfants inclus
patients sont en IRCT. Cette étude rapporte la 1re cohorte de dans l’étude, quatorze EIG sont survenus chez 12 (32 %) patients,
patients à formes mixtes C3G/MAT au pronostic très sévère. dont six cas d’agranulocytose, deux cas de colite inflammatoire,
D’après l’Abstract PO N37 un cas pneumocystose et trois cas de réaction anaphylactique.
En présence d’une GM et d’une atteinte rénale, une biopsie D’après l’Abstract PO N29
rénale est souvent envisagée. Roux et al. ont repris leur cohorte Une étude de Bataille et al. s’est intéressée aux données
de patients biopsiés et y ont trouvé 328 patients présentant une épidémiologiques françaises concernant des patients atteints
GM. Parmi les patients biopsiés ayant une GM, 27,7 % ont une de vascularite à ANCA. Sur une étude de registre à partir des bases

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Âge à l’introduction par lumasiran est associé à une réduction significative d’oxalate
1,00 du rituximab urinaire sur 24 heures dans le groupe traité vs placebo : 65,4 % vs
P-value = 0,004 Âge < 10 ans 11,8 %, respectivement. Les auteurs en concluent que le traite-
Âge ≥ 10 ans ment par lumasiran est associé à une diminution significative,
Risque cumulé d’EIG

0,75 rapide et soutenue de l’oxalurie avec un profil de tolérance


favorable.
D’après l’Abstract MCO 01
0,50

4. Maladie rénale chronique


0,25

Concernant la population très âgée, peu de données sont


0,00 disponibles sur le rapport bénéfices/risques de la biopsie
0 1 2 3 4 rénale dans cette population. Fedi et al. ont réalisé une étude
Temps depuis la première administration de rituximab (années) rétrospective monocentrique sur les indications de biopsie,
le résultat et l’impact thérapeutique, et les complications de
Nombre à risque
la biopsie rénale chez les patients de plus de 85 ans. L’étude
Âge < 10 21 10 9 8 6
a porté sur 104 patients et 57 % des biopsies ont montré une
Âge ≥ 10 17 16 15 7 6
atteinte rénale accessible à un traitement, et 49,5 % des patients
0 1 2 3 4
Temps depuis la première administration de rituximab (années) ont effectivement reçu un traitement spécifique (corticoïdes
chez 42 %, cyclophosphamide chez 7 %, rituximab chez 7 %). La
Fig. 3. Les enfants de moins de 10 ans traités par RTX pour SNI
biopsie rénale peut révéler une néphropathie accessible à un
corticodépendant sont plus à risque d’effets indésirables graves
(d’après Laroche et al.). traitement spécifique chez les sujets très âgés.
D’après l’Abstract PO N54
Les anticoagulants directs n’ont pas à l’heure actuelle été
de données Système national d’information interrégime de l’Assu- évalués dans la prévention des complications trombo­emboliques
rance maladie (SNIIRAM), Données de consommation interrégimes du syndrome néphrotique. L’étude de Van Meerhaeghe et al. avait
(DCIR) et PMSI entre le 2010 au 2017, les auteurs ont inclus tous les pour but d’évaluer l’efficacité de l’apixaban dans cette indication.
patients ayant un diagnostic de granulomatose avec polyangéite Vingt-deux patients ont été inclus avec un taux d’albumine moyen
(GPA) et de polyangéite microscopique (PAM), soit 6 581 patients. de 15,7 g/L et une protéinurie moyenne de 7,3 g/L. Trois patients
L’étude montre que la GPA est 2 fois plus fréquente que la ont présenté un événement thromboembolique (ET) au moment
PAM en France. De plus, on observe une mortalité 2 fois supé- du diagnostic du syndrome néphrotique (SN), avant initiation de
rieure à celle de la population générale. l’apixaban. Un seul des 21 autres patients a développé un ET, 2 mois
D’après l’Abstract PO N28 après l’introduction de l’apixaban. Les taux sanguins d’apixaban
étaient similaires aux concentrations thérapeutiques atteintes lors
de l’étude AMPLIFY-EXT. Aucun saignement mineur ou majeur
3. Néphropathies héréditaires n’a été enregistré au cours de la période de suivi. Cette étude
montre que les patients néphrotiques mis sous traitement par
Récemment, le séquençage complet de l’exome (WES) a mon- apixaban développent des concentrations d’apixaban similaires
tré un bon rendement diagnostique dans les néphro­pathies indé- à la population générale malgré l’hypoalbuminémie sans risque
terminées. La Nouvelle-Calédonie est un territoire comprenant accru de saignement.
une incidence d’IRCT 2 fois supérieure à la France métropolitaine, D’après l’Abstract PO N68
avec une nette prédominance de néphro­pathies indéterminées. Les patients porteurs de MRC ont fréquemment des infections
Une étude calédonienne a réalisé le WES chez 58 patients avec dont certaines sont à prévention vaccinale. Malgré les recomman-
des confrontations clinico-­génétiques organisées mensuellement dations d’immunisation, les couvertures vaccinales semblent en
en téléconférence. Cette initiative a permis de démocratiser dessous des objectifs, mais aucune étude de grande ampleur ne
l’accès aux examens de génétique à une population à forte les a mesurées à ce jour. L’étude COVARISQ avait pour objectif
prévalence de néphropathies indéterminées de l’adulte jeune d’estimer rétrospectivement les couvertures vaccinales des adultes
avec un coût relativement modéré (1 200 € environ). L’analyse atteints de comorbidités à l’échelle nationale, à partir des bases
d’exome et la mise en place de confrontations génético-cliniques du Système national des données de santé. L’étude a porté sur les
sont une vraie avancée pour la prise en charge des jeunes patients couvertures vaccinales en 2017 contre les pneumo­coques, la grippe
en Nouvelle-Calédonie. et l’hépatite B chez les patients ayant une MRC. 56 138 patients
D’après l’Abstract CO N03 IRC stade terminale et 17 567 patients avec un SN ont été analysés.
L’hyperoxalurie primaire de type 1 est une affection rare mais Les proportions de malades ayant eu au moins un vaccin remboursé
malheureusement sans ressources thérapeutiques jusqu’alors. contre les pneumocoques sur la période de l’étude étaient de 42 % en
ILLUMINATE-A est une étude de phase 3 du lumasiran, un ARNi cas d’IRC stade terminale (3 % pour le VPC13 seul, 22 % pour le PPV23
thérapeutique expérimental, dont les résultats ont été exposés seul et 17 % pour les 2 vaccins) et de 27 % en cas de SN (3 % pour le
au congrès 2020 de la SFNDT. Ici les résultats présentés sont VPC13 seul, 13 % pour le PPV23 seul et 11 % pour les 2 vaccins). Pour
ceux relevés à 6 mois de l’étude contre placebo. Le traitement la vaccination antigrippale, les proportions étaient respectivement

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de 49 % et de 33 %. Seuls 35 % des patients IRC avaient eu au moins un comparaison, il faut traiter 20 patients par des statines pendant
vaccin remboursé contre l’hépatite B. Cette étude montre clairement 3 ans pour prévenir un infarctus du myocarde dans 1 patient…
que les couvertures vaccinales des patients avec une IRC stade (Garneata L, J Am Soc Nephrol 2016).
terminale ou un SN étaient très insuffisantes. Une étude follow-up en cours de publication sur cette cohorte
D’après l’Abstract PO N27 a analysé la survie à long terme, l’évolution de leur fonction rénale
et leur état nutritionnel. Deux cents patients ont été inclus.
Symposium de Dr. Schär et de Fresenius Kabi La survie des patients à 5 ans est plus importante dans le groupe
Approche nutritionnelle de la MRC : facteurs clés de sVLPD comparée à celle du groupe LPD (92 % vs 82 %). En analyse
succès dans les stades 3‑5 et chez les transplantés rénaux multivariée, incluant plusieurs facteurs (type de régime, âge, sexe,
modalité de dialyse, score Davies de comorbidités), seul le type
Régime hypoprotidique dans l’IRC sévère : à considérer aux de régime hypoprotidique est associé à une plus longue survie.
vues des données récentes Seulement 51 % des patients en sVLPD versus 93 % dans le groupe
LPD ont eu besoin de commencer la dialyse. La compliance était
D’après la communication orale du Pr Liliana Garneata bonne pendant la période d’étude pour les 2 régimes.
(Bucarest) Ces études n’ont toutefois pas inclus de patients diabétiques.
Une étude de Teplan et al. avait montré en 2003 que le régime
Le Pr Garneata a récapitulé les données actuelles sur le hypoprotidique LPD supplément avec des céto-analogues était
régime hypoprotidique dans l’IRC. associé avec une réduction significative de la protéinurie et du
Il est connu depuis longtemps que les régimes alimentaires taux de dégradation de la fonction rénale (Teplan V, Klin Biochem
pauvres en protéines permettent de retarder la mise en dialyse. Met 2003).
Ce régime hypoprotidique permet un meilleur contrôle des diffé- Dans une autre étude non publiée, unicentrique, non
rentes complications métaboliques de la MRC, comme l’acidose contrôlée, le Pr Garneata a analysé les effets d’un régime sLPD
métabolique et la maladie osseuse (Giovannetti S, Lancet 1964). chez des patients avec MRC diabétique. Ceux-ci ont retrouvé
Néanmoins, l’étude MDRD (Modification of Diet in Renal une réduction significative de la protéinurie sur une période de
Disease) a donné des résultats contra­dictoires (Levey AS, Am 1 an. La pente de décroissance du DFG a été de 1,5 mL/min/an
J Kidney Dis 1996, Klahr S, NEJM 1994). Actuellement des et la pression artérielle a été significativement abaissée lorsque
données plus récentes ont permis de montrer que les régimes les données à 1 an ont été comparées au début de l’étude. Cette
hypoprotidiques freinaient la dégradation de la fonction rénale étude présente des résultats préliminaires encourageants pour
chez l’IRC et notamment : la réalisation d’une étude contrôlée de plus grande ampleur.
– une amélioration du contrôle de la pression artérielle ; Le régime hypoprotidique très strict, végétarien, supplé-
– une réduction de la protéinurie ; menté avec des KA semble :
– une amélioration de la résistance à l’insuline (Aparicio M, –  efficace pour retarder le moment du démarrage de la
Am J Kidney Dis 2009). dialyse chez les non-diabétiques ;
Au-delà des effets métaboliques, un régime pauvre en – être faisable à long terme ;
protéine amène une vasoconstriction de l’artériole afférente du – être associé à une meilleure survie rénale.
glomérule et ainsi potentialise l’effet de la néphroprotection. Le régime hypoprotidique classique à 0,6‑0,8 g/kg/j supplémenté
Le régime hypoprotidique dans la MRC doit être un traite­ avec des KA semble être un régime efficace et sûr dans la MRC
ment individualisé. Il existe plusieurs protocoles possibles : diabétique et serait intéressant dans la réduction de la protéinurie,
– un régime hypoprotidique classique : 0,6 g de protéines/kg/j de la pression artérielle et dans la diminution du DFG. Les données
(Low Protein Diet [LPD]) ; actuelles ne nous permettent pas de prescrire de régime sVLPD aux
– un régime hypoprotidique supplément en céto-analogues patients diabétiques en accord avec les récents KDOQI 2020.
(KA) : 0,6 g de protéines/kg/j + KA : 1 cp/10 kg de poids idéal Ces derniers résultats nécessitent confirmation par publica-
(LPD supplémenté [sLPD]) ; tion et réalisation d’une étude contrôlée, randomisée avant de
– un régime hypoprotidique très strict, végétarien (0,3‑0,4 g pouvoir conclure définitivement.
de protéines/kg/j), supplément en céto-analogues des acides Les derniers guidelines KDOQI vont d’ailleurs dans ce sens.
aminés essentiels (KA) : 0,3‑0,4 g protéines/kg/j + KA : 1 cp/5 kg
poids idéal (appelé sVLPD – Very Low Protein Diet supplémenté Les mesures de néphroprotection chez les patients
ou appelé aussi Keto Diet [KD]). transplantés rénaux – L’approche nutritionnelle
Dans une étude randomisée sur plus de 200 patients, l’équipe KDOQI 2019
du Pr Garneata a comparé l’effet de sVLPD et de LPD sur la dégra-
dation de la fonction rénale chez des patients non diabétiques, D’après la communication orale du Pr Karine Moreau
MRC stade 4‑5. Sur un peu plus de 1 an de suivi, seulement (Bordeaux)
13 % des patients en sVLPD avaient atteint l’objectif primaire
(démarrage de dialyse ou réduction de 50 % du DFG), alors que La transplantation rénale est une situation de rein unique
42 % l’avaient atteint en LPD. Ces résultats étaient maintenus en particulière. Lorsque l’on compare les évolutions du DFG dans
analyse multivariée après ajustement des variables confondantes un couple receveur-donneur, la baisse du DFG par année est
habituelles (TA, poids, masse musculaire, etc.). en général plus importante chez le receveur. Les causes sont
Une donnée intéressante montre qu’il faut traiter 3 patients immunologiques (avec le risque de rejet par exemple) et non
en sVLPD pour éviter une mise en dialyse sur 1 an. À titre de immunologiques spécifiques ou non à la transplantation.

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La situation des patients MRC 5T évolue au cours du temps Une étude australienne a comparé une prise en charge
avec le but du néphrologue de ralentir la dégradation de sa standard (4 consultations nutritionnelles/an avec conseils) versus
fonction rénale. une prise en charge intensive (12 consultations dans l’année
Que nous disent les recommandations KDOQI 2019 ? et suivi de l’activité physique). La prise de poids est identique
– Les patients MRC 5T doivent bénéficier d’une évaluation entre les 2 groupes. La prise en charge nutritionnelle comme
nutritionnelle tous les 3 mois tout comme les patients stades 4‑5. recommandée dans les KDOQI, c’est-à-dire tous les 3  mois,
– Concernant les apports en protéines, pas de définition de semble être suffisante chez les transplantés également.
cible pour la population des transplantés rénaux spécifiquement La prise en charge nutritionnelle globale doit s’appuyer sur
explicitée mais a priori les mêmes recommandations que pour l’activité physique et doit la promouvoir.
les patients stades 4‑5 peuvent être appliqués. Le faible niveau d’activité physique chez le transplanté
– Il n’y a pas de recommandation pour la source animale ou s’accompagne de nombreux désordres cardiovasculaires ou
végétale des protéines. métaboliques.
– L’alimentation type méditerranéenne est recommandée. Enfin, un bon état nutritionnel avant la greffe améliore la
– Il faut augmenter les apports en fruits et légumes (ce qui survie du greffon. Les patients avec des taux d’albumine hauts
permet de lutter contre le surpoids, l’HTA et permet une faible ont une meilleure survie de greffon sur une étude observa-
charge acide). tionnelle. La prise en charge nutritionnelle adéquate est donc
– Des bicarbonates doivent être initiés pour une cible de extrêmement importante avant la transplantation (Molnar MZ,
HCO3– sanguins à 24‑26 mm. Am J Transplant 2011).
– Des apports de Na limités à 2/3 g/j, soit 5,7 g de NaCl/j.
– Des micronutriments à supplémenter si déficit. Importance de l’approche multidisciplinaire
Il est connu que le régime alimentaire occidental (riche en dans la prise en charge des patients stades 3‑5 :
lipides, protéines et sucres rapides) va induire une réponse Au-delà des freins, restez sereins
immunitaire pro-inflammatoire.
Une étude de cohorte néerlandaise (Gomes-Neto AW, Clin D’après la communication orale du Dr Isabelle Tostivint et
J Am Soc Nephrol 2020) montre que les patients qui adoptent Marie-Paule Dousseaux (Paris)
une alimentation type méditerranéenne ont un risque diminué
de perte de greffon et un déclin de fonction rénale. Ce d’autant La présentation démarre par un vœu formulé par les oratrices
plus si le patient est protéinurique ou est greffé récemment. pour proposer au maximum de patients MRC stades 3‑5 une prise
Au niveau de l’apport protéique recommandé chez le en charge « innovante » associant une diminution de l’apport
transplanté, une étude prospective a été réalisée sur 12 ans de protéines avec supplémentation par céto-analogues en plus
sur 48  patients. Les patients qui respectaient un régime des mesures de néphroprotection habituelles. Cette association
pauvre en protéines à environ 0,7 g/kg avaient une moindre bien menée améliore l’évolution clinico-biologique ainsi que la
dégradation de leur fonction rénale au cours du temps et une qualité de vie des patients.
moindre protéinurie comparés aux patients non compliants Pour être bien menée, cette prise en charge doit se faire sous
qui avaient un apport de 1,4 g/kg/j (Bernardi A, Am J Kidney l’impulsion du néphrologue bien sûr, mais aussi avec l’implica-
Dis 2003). tion forte de la diététicienne, du médecin généraliste, du patient
Malheureusement, aucune étude n’est disponible dans la et de son entourage.
littérature concernant l’utilisation de régime hypoprotidique Un autre cercle est insuffisamment pris en compte et peut
avec supplémentation en KA à ce jour. avoir une importance capitale dans la prise en charge : ce sont
Pour les autres éléments liés à l’alimentation chez les les secrétaires, les aides-soignantes, les IDE, les associations de
greffés : patients et les informations que le patient peut trouver sur le
–  l’acidose s’accompagne d’un risque accru de perte de Web ou les réseaux sociaux.
greffon (avec une étude en cours sur le sujet sur une cohorte Il faut donc baisser les freins à la prise en charge multi­
importante de patients) ; disciplinaire.
– les apports sodés excessifs s’accompagnent d’une HTA ; Les trois étapes importantes sont l’étape d’annonce, la
– l’hydratation très importante n’améliore pas la survie du mise en place et le long terme avec pour but d’accompagner le
greffon mais entraîne un risque important d’hyponatrémie. patient et son entourage. D’ailleurs nous voyons l’importance
Dans les premiers mois de post-transplantation, la prise de de l’entourage à toutes ces étapes.
poids est plus délétère et entraîne une augmentation de 18 % On commence la prise en charge par un état des lieux nutri-
du risque de perdre le greffon et de 23 % le risque de décès tionnels avec un recueil alimentaire pendant 3 jours. Il faudra
(Hoogeveen EK, Transplantation 2011). une définition des objectifs chiffrés (correspondant à 0,6 g/kg/j
La prise en charge nutritionnelle globale du patient est à 0,35 g/kg/j).
très intéressante en transplantation. Une étude a montré sur Plusieurs contraintes vécues par le patient doivent être expli-
46 patients greffés depuis moins de 1 an que les patients qui quées en des termes engageants au cours d’une information dite
respectent des conseils nutritionnels sont ceux qui vont avoir « positive et loyale ». Par exemple les arguments pourraient être
une prise de poids moins importante, une diminution de la que les céto-analogues vont permettre d’être moins fatigué, avec
cholestéro­lémie, une baisse de la glycémie à jeun et une dimi- plus d’énergie. La baisse du phosphore va améliorer le prurit et
nution significative du nombre d’antihypertenseurs (Guida B, le recours aux chélateurs. La lutte contre l’acidose va permettre
Nephrol Dial Transplant 2007). de diminuer les crampes…

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B.   Gon d o u in /Néph rologie & Th érapeutique 1 6 (2 0 2 0 ) 7 S1 0 -7 S1 5 7S15

La présentation continue par le témoignage d’une patiente exemple) ou lorsque la représentation symbolique des protéines
de 55 ans qui décrit une amélioration de son état général avec est trop importante.
une amélioration de sa fatigue depuis qu’elle respecte un régime Il y a donc un intérêt majeur dans la prise en charge de
hypoprotidique avec supplémentation en KA. Une autre patiente proposer une approche nutritionnelle pluridisciplinaire en y
de 40 ans a malheureusement eu un échec de DP. La patiente incluant tous les acteurs médicaux et non médicaux de la vie
a accepté de « tenter l’aventure » de faire un régime sVLPD du patient. Cette approche ne doit pas oublier les mesures
pour retarder son transfert en HD. La patiente témoigne d’une médicamenteuses et non médicamenteuses associées (activité
améliora­tion de son prurit et des crampes en quelques jours. Une physique, méditation, etc.).
des difficultés rencontrées par la patiente est de pouvoir varier À plusieurs on est meilleurs ! On peut rester sereins quand
les menus, mais la patiente a réussi à trouver des alternatives. on lâche les freins !
La contrainte est d’ailleurs intégrée dans une vie de famille
partagée. Une fois par semaine, la patiente s’autorise un repas
classique et ce jour-là elle ne prend pas les KA. Pour pouvoir Déclaration de liens d’intérêts
varier les repas, son équipe diététique lui a proposé des produits
hypoprotidiques qui sont sur prescription médicale. Au cours des 5 dernières années, BG a perçu des honoraires
Les livrets de recettes permettent de varier les repas. ou financements pour rédaction d’articles scientifiques par
Un patient de 61 ans décrit que pour lui la prise de nombreux Fresenius Medical Care.
comprimés de KA ne lui pose pas de problème et rentre dans sa
routine alimentaire. Celui-ci décrit son régime fait d’une prise de Cet article fait partie du numéro supplément Actualités du
viande ou poisson une seule fois par semaine comme très bien 5e  congrès de la Société francophone de néphrologie, dialyse et
toléré. transplantation (SFNDT) réalisé avec le soutien institutionnel de
Parfois, les situations sont plus complexes du fait de troubles Dr. Schär et de Fresenius Kabi.
psychiques ou de comorbidités (la problématique du cancer par

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