La Promotion Des Ventes Et Les Entreprises Publiques

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1998.

04
La promotion des ventes et les entreprises publiques
Géraldine Michel
Maître de conférences à l’IAE de Paris

Résumé : Les entreprises publiques se trouvent à un tournant historique : privatisations,


ouverture des marchés, compétitions européennes et mondiales. Autrefois préservées, elles se
retrouvent confrontées de plein fouet à une concurrence omniprésente et inédite. Toute la pano-
plie des armes marketing est employée pour s’adapter au marché et pour assurer l’intérêt et
l’adhésion des consommateurs. La promotion des ventes constitue alors un outil pertinent dans
le cadre d’une politique de communication des entreprises publiques. Toutefois, afin de rester
cohérentes avec la culture des entreprises publiques ces actions promotionnelles révèlent
quelques particularismes.

Mots-clés : promotion des ventes, entreprises publiques.

Abstract : At the present time, public companies are on an turning point of their history :
privatisations, opening markets, european and world-wide competition have overturned the
historical situation. All the marketing methodes are useful, especially sales promotion inte-
greted in a powerful marketing plan. However, to be fit with the culture of public companies
these sales promotions are specific.

Key words : sale promotion, public companies.

1 Introduction
De nombreuses définitions s’accordent pour dire que la promotion des ventes est " une modi-
fication temporaire et tangible de l’offre dont l’objectif est d’avoir un impact direct sur le
comportement des clients de l’entreprise et sur la force de vente " [3]. Cette pratique, qui cible
non seulement les consommateurs mais aussi les distributeurs et la force de vente, a connu un
développement considérable au cours de ces dix dernières années. La progression des actions
promotionnelles a ainsi atteint en 1993 un accroissement de 43 % par rapport à 1992 (BIPP).
L’essor d’une telle pratique a alors suscité un nombre important de recherches théoriques et
empiriques. Toutefois, l’analyse de la promotion des ventes a généralement été réalisée dans le
domaine des produits de grande consommation [1]. Du fait de cette concentration sur les
produits des entreprises privées une question légitime se pose : étant donné la spécificité des
entreprises publiques, existe-t-il des particularités dans les actions promotionnelles engagées
par de telles entreprises?
L’objectif de l’article consiste alors, dans un premier temps à confronter les concepts d’entre-
prise publique et de promotion des ventes, et consiste dans un second temps, à étudier les spéc-
ificités de la promotion des ventes dans le domaine des entreprises publiques. Dans la mesure
où aucune recherche, à notre connaissance, n’a jusqu’à ce jour étudié cette problématique, notre
démarche est de type exploratoire. Nous avons mené des entretiens auprès de professionnels
concernés par cette question (France Télécom, La Poste, RATP, SNCF) et nous avons analysé
les pratiques promotionnelles de ces différentes entreprises.
L’article s’organise autour de trois parties. La première partie propose une définition des
entreprises publiques et présente les spécificités marketing de telles entreprises. La seconde
partie concerne la description des actions promotionnelles engagées par ces entreprises. Enfin,
la troisième partie est consacrée à l’analyse du particularisme et des limites de la promotion des
ventes pour les entreprises publiques.
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2 Les entreprises publiques

2-1 Définition
Pour des raisons qui tiennent autant à l’histoire qu’à la politique, l’État français a toujours
été présent dans la plupart des rouages de la vie publique, autant dans le paysage économique
que dans celui de la culture ou des activités sociales. Le service public n’est pas une notion a
priori évidente et immuable. Il s’agissait à l’origine d’activités d’intérêt général, relevant d’une
personne publique et soumises à un régime spécifique de droit public. Outre les services publics
administratifs, il existe depuis la fin de la première guerre mondiale, des entreprises publiques
à caractère industriel et commercial (EPIC) qui sont des personnes morales de droit public
gérant des activités de service public [2]. Nous allons ici nous attacher à décrire la promotion
des ventes des entreprises publiques à caractère industriel et commercial et non des administra-
tions qui constituent l’autre visage du service public (les écoles, les hôpitaux, la justice…).

2-2 La spécificité de l’activité commerciale des entreprises publiques


Créées spécialement pour gérer un service public, les EPIC ont une activité commerciale qui
leur est spécifique. On peut toutefois noter, que l’activité commerciale des entreprises que nous
étudions se caractérise par trois principes : une mission d’intérêt général, des contraintes tari-
faires et un principe de spécialité.
Mission d’intérêt général : les entreprises publiques sont soumises à des missions d’intérêt
général (télécoms, transport, courrier) qui consistent à proposer " le même service au même prix
partout ". Investies d’une mission de service public les entreprises publiques doivent alors
répondre entre autre à des principes tarifaires.
Contraintes tarifaires particulières : l’égalité de traitement et la neutralité tarifaire sont deux
grands principes de la politique tarifaire des entreprises publiques. Le principe d’égalité
implique l’accès au service public sans distinction entre les clients. La plupart des tarifs sont
ainsi fixés sous l’autorité de l’État ou d’un organisme assujetti à l’État. Le principe de neutralité
implique que deux services ayant les mêmes caractéristiques de coût pour le fournisseur doivent
être facturés au même prix aux clients. Ainsi, il fait obligation aux entreprises publiques de
respecter la même politique de prix sur les marchés concurrencés et non-concurrencés. Toute-
fois, depuis quelques années, pour certains produits très concurrencés, des EPIC s’alignent sur
les prix du marché avec l’accord de l’État (ex : SNCF).
Spécialité de l’activité : parce qu’elles sont créées pour gérer une activité précise, les entre-
prises publiques ont une spécialité à laquelle, sauf exceptions, elles doivent se cantonner. Cette
obligation signifie donc que l’entreprise publique doit respecter le champ d’activités qui lui est
assigné [9]. Cependant, depuis quelques années la diversification des activités de certaines
EPIC, notamment par le biais des filiales, remet en cause cette spécialité. voir

2-3 Internationalisation et diversification : la nouvelle donne


commerciale
Monopole limité : le "monopole naturel" des entreprises publiques a volé en éclat dans de
nombreux secteurs autrefois préservés. Ainsi n’apparaît plus clairement et incontestablement le
caractère monopolistique, pas davantage qu’un statut juridique commun. Cette " nouvelle donne
" est principalement le fait de l’ouverture des marchés européens et de la mondialisation du
commerce. Cela représente aujourd’hui un enjeu économique de taille. La répartition des
risques aboutit alors à des plans de développement stratégique d’envergure, orientés vers la
diversification et l’internationalisation des activités de certaines entreprises publiques.
Nouvelles actions marketing : depuis le début des années quatre-vingt-dix, le terme de client
a remplacé celui d’usager ou d’abonné. Cette évolution du vocable traduit la volonté des entre-
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prises publiques de promouvoir des relations plus commerciales à l’égard des consommateurs.
Afin de mieux répondre à la demande de la clientèle, elles ont élargi leur gamme de produits et
de services. Cette évolution est d’autant plus forte qu’elle s’appuie sur l’innovation technique
et qu’elle incorpore un niveau de service croissant.
Parallèlement, le développement de la gamme de produits est renforcé par l’évolution de la
politique de communication. Au cours des dernières années, afin de mieux répondre aux
demandes de leurs clients, les entreprises publiques ont porté une attention particulière à l’infor-
mation du consommateur. Le client souhaite mieux connaître la gamme de services ou de
produits proposés par l’entreprise. Désormais, les entreprises portent leurs efforts sur la commu-
nication au quotidien et sous différentes formes. Les actions menées en matière de formation du
personnel en contact avec les consommateurs témoignent de cette nouvelle attitude, notamment
dans le domaine de la sécurité (ex : RATP). L’apparition des techniques promotionnelles montre
également l’évolution de la politique commerciale des entreprises publiques. L’enjeu de cette
évolution du marketing est simple : peut-on utiliser les mêmes techniques promotionnelles pour
promouvoir des services publics que pour inciter l’achat des produits des entreprises privées?

3 La stratégie promotionnelle dans les entreprises publiques


" La promotion des ventes consiste à associer à un produit un avantage temporaire destiné à
faciliter ou à stimuler son utilisation, son achat et/ou sa distribution " [7]. Cette définition soul-
igne la diversité des orientations liées à la promotion des ventes. En effet, la promotion des
ventes concourt, à la fois à la stimulation des achats et à l’efficacité des distributeurs et de la
force de vente. En réalisant un changement ponctuel, voire exceptionnel de la proposition
d’échange, elle est également un outil communicant [5] qui présente un impact sur l’image de
la marque ou de l’entreprise.
Aujourd’hui, face à de nouvelles contraintes concurrentielles, les entreprises publiques
manient les techniques promotionnelles non seulement en intégrant l’action sur les ventes et sur
l’image, mais aussi en orientant leurs actions vers les clients, les distributeurs et le personnel de
l’entreprise.

3-1 La promotion pour agir sur la clientèle des entreprises publiques


Les entreprises publiques cherchent à inciter les consommateurs à changer leurs habitudes
(les transports en communs contre la voiture et l’avion) ou à faire connaître leurs produits qui
sont de plus en plus différenciés. Confrontées à ces différents objectifs, les entreprises publiques
ont compris que pour se rapprocher du consommateur, leur communication devait davantage
cibler, informer et expliquer. La communication des entreprises publiques a alors évolué à partir
des années soixante-dix jusqu’à l’apparition récente de la promotion des ventes.
Le jeu concours organisé par La Poste sur le produit distingo, les primes offertes par la RATP
lors de l’achat de la carte orange, et la proposition " satisfait ou remboursé " faite par France
Télécom lors du lancement d’un nouveau service téléphonique montrent clairement le dével-
oppement de la promotion des ventes au sein de la politique de communication des entreprises
publiques. A travers ces différents exemples (voir tableau 1 de la page 4) la promotion devient
un moyen de susciter l’achat du produit. Elle est également en mesure d’agir sur le moyen et le
long terme en privilégiant les rapports entre l’entreprise et les citoyens, et en améliorant l’image
de l’entreprise publique.

3-2 La promotion pour agir sur le personnel et les distributeurs des


entreprises publiques
La promotion des ventes adressée au personnel : comme les entreprises privées, les EPIC se
fixent des objectifs de ventes. Dans cette perspective, la promotion des ventes est alors un des
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Tableau 1 : Exemples d’actions promotionnelles auprès des consommateurs


Afin de mettre en valeur le nouveau produit distingo, un produit relativement banalisé (enveloppe pré-affran-
chie), et afin d’informer le public des avantages de ce service, La Poste a organisé un jeu-concours auprès des
consommateurs : « participez au grand jeu distingo, et gagnez une des trois twingo ou l’un des 320 autres
cadeaux! »
Dans l’objectif d’inciter les citadins à choisir les transports en commun, mais aussi afin d’améliorer l’image de
la RATP, qui s’était dégradée depuis la grève des transports de l’automne 1995 et depuis des vagues d’attentats
successives, la RATP a lancé la campagne « les invitations cartes orange ». D’avril à décembre 1996, des cou-
pons de réduction valables chez différents partenaires (Quick, Gaumont, Naf-Naf, etc.) étaient associés à l’achat
de la carte orange.
Les entreprises publiques manient également, mais plus rarement, les réductions de prix. Ainsi, dans l’objectif
de remplir massivement les trains en période d’été, la SNCF a proposé durant l’été 1996 « le billet 1re classe au
prix du billet 2e classe + cinquante francs ». Durant cette période l’opération a permis d’augmenter de 10 % à
15 % les ventes de billets 1re classe.

outils utilisés pour stimuler la force de vente. Mais, afin d’améliorer la qualité des services, les
opérations promotionnelles ne ciblent pas uniquement les agents commerciaux, elles cherchent
également à motiver et à impliquer l’ensemble du personnel de l’entreprise publique. Le
concours d’idées auprès des postiers, l’opération lancée auprès des contrôleurs de la SCNF
destinée à récompenser la courtoisie du personnel en contact avec le client, montrent l’utilisa-
tion accrue de la promotion des ventes pour motiver le personnel des entreprises publiques (voir
tableau 2). Ces actions promotionnelles sont toutefois mal acceptées par les syndicats. Ces
derniers estiment en effet, que ce type d’actions entraîne des inégalités entre les individus, et
qu’il serait plus juste de distribuer ces budgets à l’ensemble des salariés. Les actions promotion-
nelles sont alors définies dans un cadre compatible avec la culture de l’entreprise publique. Afin
de ne pas générer d’inégalités au sein du personnel, les challenges sont dans la plupart des cas
des challenges d’équipe et non individuel. De plus, tout en restant attractifs, les cadeaux offerts
au personnel restent en général modestes.

Tableau 2 : Exemples d’actions promotionnelles auprès du personnel


La Poste pour conquérir de nouveaux marchés et pour améliorer la compétitivité des services financiers a utilisé
le potentiel créatif des postiers en organisant en avril 1993 " banco sur vos idées ". Ce concours d’idées a
récompensé les 250 meilleures idées par de nombreux cadeaux (une twingo, un voyage, des micro-ordinateurs,
etc.).
La SNCF a organisé en 1996 l’opération " premiers de cordées " consistant à récompenser les meilleures initia-
tives et actions dans les différents métiers de l’entreprise. Afin d’améliorer la courtoisie des contrôleurs, la
SNCF a lancé en 1994, une opération promotionnelle. Celle-ci récompensait la qualité d’accueil des contrôleurs
par un cadeau surprise (carte de téléphone) qui était délivré par un " voyageur mystère ".

La promotion des ventes adressée aux distributeurs : les entreprises publiques comme les
entreprises privées détiennent leur réseau de distribution. Les titres de transport de la RATP sont
ainsi en vente dans les bureaux de tabac, les papeteries et les marchands de journaux. Les
produits de la SNCF sont vendus, eux, dans plus de deux mille agences de voyages. Confrontées
à des objectifs en termes de vente, et afin d’agir sur les distributeurs, les entreprises publiques
utilisent aussi des actions promotionnelles. Ces dernières ont plusieurs finalités. Elles sont
mises en place afin de gagner la fidélité des distributeurs, pour encourager les distributeurs à
mettre en avant les produits, et afin de resserrer le partenariat avec les distributeurs. Mais des
exemples (voir tableau 3) montrent que l’action promotionnelle, en délivrant aux distributeurs
les moyens de convaincre les consommateurs, permet également une information plus précise
auprès du public. Et à terme, c’est en utilisant les promotions appropriées aux différentes phases
du cycle de vie du produit, que les entreprises publiques transformeront leurs distributeurs en
partenaires efficaces.
En résumé, on peut noter que les entreprises publiques tendent à proposer des services
adaptés à chaque type de consommateurs et désirent enrichir leur relation avec les citoyens.
Dans cette perspective leur discours commercial a évolué et la promotion des ventes fait
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Tableau 3 : Exemples d’actions promotionnelles auprès des distributeurs


Afin de convaincre les dépositaires de l’intérêt de la carte orange et par-là d’augmenter les ventes, la RATP a
lancé le challenge " suivez le coupon " auprès des 1600 dépositaires de l’île de France (bureaux de tabac et
marchands de journaux). Durant le trimestre novembre-janvier 1996, les dépositaires les plus performants dans
la vente mensuelle des coupons " carte orange " ont été récompensés par des cadeaux allant du magnétoscope,
à l’ordinateur et en passant par des vélos tout terrain.
Dans certaines régions, afin d’améliorer la vente des billets SNCF, l’entreprise a organisé des challenges tri-
mestriels auprès des agences de voyages. Les gagnants se sont vus offrir de nombreux cadeaux (budget
20000 F), mais d’une valeur modeste comparée à celle des cadeaux offerts par les concurrents privés.

aujourd’hui partie intégrante de leur nouvelle politique de communication. L’action promotion-


nelle leur permet ainsi, de rapprocher le consommateur du produit, d’influencer l’image de
l’entreprise, de motiver le personnel et de convaincre les distributeurs du succès des services
proposés. Toutefois, les différents exemples révèlent quelques spécificités de la pratique promo-
tionnelle des entreprises publiques par rapport aux sociétés privées. La partie suivante sera donc
consacrée à l’analyse des particularités et des limites de cette pratique dans les entreprises
publiques.

4 La spécificité et les limites de la promotion des ventes pour les


entreprises publiques
Par nature, les entreprises publiques sont différentes des entreprises privées. En premier lieu,
elles sont investies d’une mission de service public et sont en partie financées de façon collec-
tive. En second lieu, dans la plupart des cas leurs tarifs sont contrôlés par l’État. Ces contraintes
conduisent à la définition d’actions promotionnelles spécifiques aux entreprises publiques. En
effet, bien que les exemples cités précédemment révèlent des objectifs promotionnels proches
de ceux généralement suivis par les entreprises privées, des différences apparaissent entre les
promotions " privées " et " publiques ".

4-1 La spécificité des objectifs des actions promotionnelles des entreprises


publiques
La spécificité des objectifs de la promotion adressée aux consommateurs : la plupart des
recherches distinguent six objectifs de la promotion des ventes adressée aux consommateurs
[8] : 1- faire essayer un produit, 2- inciter au rachat du produit, 3- fidéliser le consommateur, 4-
créer un événement aux yeux des consommateurs, 5- entretenir les ventes, 6- attirer de
nouveaux consommateurs. Toutefois, les objectifs poursuivis par l’action promotionnelle des
entreprises publiques consistent plus particulièrement à : 1- inciter les consommateurs à
changer leurs habitudes, 2- faire connaître les avantages des nouveaux produits de plus en plus
différenciés, 3- créer une relation forte entre l’entreprise et le consommateur que l’on vise à
sécuriser.
Premièrement la plupart des entreprises publiques sont confrontées à une concurrence " indi-
recte " qu’elles doivent surmonter en modifiant les habitudes des consommateurs. Par exemple,
afin d’inciter les personnes à prendre le métro, les actions promotionnelles de la RATP révèlent
les avantages de ses services par rapport à la voiture. De même, afin de modifier les comporte-
ments des voyageurs, la SNCF communique sur les intérêts du train par rapport à l’avion. Deux-
ièmement, les entreprises publiques, qui proposent aujourd’hui des produits de plus en plus
différenciés, utilisent la promotion des ventes afin de faire découvrir leurs avantages. Troisième-
ment, la plupart de entreprises soumises à une mission de service public font partie intégrante
de la vie de la société. Elles possèdent une image forte et une relation privilégiée avec les
citoyens. Les actions promotionnelles engagées tentent alors de renforcer et d’enrichir ce lien
entre les consommateurs et les entreprises publiques.
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La spécificité des objectifs de la promotion adressée au personnel : Les entreprises


publiques, comme les entreprises privées, doivent impliquer leur personnel pour obtenir une
meilleure efficacité. Traditionnellement la promotion adressée à la force de vente a trois
objectifs : 1- inciter la force de vente à conquérir de nouveaux clients, 2- inciter à vendre davan-
tage certains produits, 3- soutenir un produit face aux actions menées par la concurrence. Les
objectifs de la promotion-réseau des entreprises publiques rejoignent ces trois thèmes. Toute-
fois, les entreprises publiques, fondées sur un fort capital humain, engagent l’implication de la
force de vente et celle du personnel lié directement au service. Ainsi, afin d’augmenter la vente
des produits, les actions promotionnelles de telles entreprises cherchent non seulement à
stimuler les ventes mais aussi à améliorer la qualité des services proposés.

4-2 La spécificité des techniques promotionnelles utilisées par les


entreprises publiques
Une promotion des ventes informative et valorisante : dans la mesure où les entreprises
publiques sont soumises à une mission de service public et sont financées en partie par l’impôt,
il en résulte un problème de légitimité à l’égard du citoyen. Les actions de communication
peuvent constituer à ses yeux un gaspillage de fonds publics, alors que par exemple la réalisation
d’un équipement collectif est plus facile à justifier. La nécessité de la légitimité de l’action
commerciale implique donc que les actions promotionnelles soient essentiellement informa-
tives et valorisantes. En effet, le rôle principal de la communication de telles entreprises est
d’informer les citoyens des projets en cours, des avantages des services et du rôle de l’organi-
sation. Elles ne peuvent se permettre de véhiculer une image ou un concept qui ne caractérise
pas véritablement l’entreprise. Afin de s’intégrer au sein de la communication des entreprises
publiques, la promotion des ventes doit se rattacher à cette culture d’entreprise. Afin de valoriser
l’institution et de se légitimer vis-à-vis des citoyens, les actions promotionnelles mettent alors
en valeur les avantages réels des produits (confort, sécurité, etc.). De plus, grâce à l’utilisation
de techniques " porteuses de signes " [6], les actions promotionnelles des entreprises publiques
permettent de renforcer une confiance tangible avec les clients. À l'inverse des entreprises
privées qui utilisent massivement les techniques " mécanistes " (BIPP), de type réduction de
prix, les entreprises publiques utilisent davantage les techniques valorisantes qui contribuent à
enrichir l’image de l’entreprise (cf. tableau 4 de la page 9).
Une promotion des ventes limitée par les principes tarifaires des entreprises publiques : Les
recherches concernant la promotion des ventes identifient généralement quatre types de tech-
niques (l’essai gratuit, la réduction de prix, les primes et cadeaux, les concours et jeux). Elles
distinguent les techniques porteuses de signes de celles mécanistes qui se révèlent bien moins
souvent employées par les entreprises publiques. Mais, plus précisément, quelles sont parmi les
quatre techniques, celles qui ont la préférence des entreprises publiques?
- L’essai gratuit consiste à mettre gratuitement à la disposition des consommateurs un
produit ou un service afin d’en faciliter la consommation ou l’utilisation. Cette technique
est très peu utilisée par les entreprises publiques. Dans la mesure où la technique d’essai
gratuit dénature le prix de vente du produit elle n’est pas toujours conciliable avec les
principes tarifaires des entreprises publiques (elle demande l’accord de l’État ou d’une
commission régionale). Cependant, une opération menée par France Télécom durant la
première année de lancement du Minitel se rapproche de cette technique. En effet, afin de
faciliter l’essai du nouveau service, l’entreprise avait mis gratuitement l’appareil à la
disposition des citoyens, toutefois les communications étaient facturées. Pour atteindre ce
type d’objectifs, les entreprises publiques privilégient plutôt l’opération " satisfait ou
remboursé " (ex : La poste et France Télécom).
- La réduction de prix peut revêtir différentes formes : vente temporaire du produit à un prix
inférieur au prix normal, distribution de bons donnant droit à une réduction de prix sur
l’achat du produit, remboursement différé sur présentation de preuves d’achat, ou bien
encore rabais sur quantité. Toutes ces techniques modifient le prix de ventes et sont donc
peu utilisées par les entreprises publiques. Par exemple, la RATP, dont les tarifs sont fixés
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par le syndicat des transports parisiens " STP ", n’a pas la liberté de réaliser des réductions
de prix temporaires. Pour d’autres entreprises comme la SNCF, le prix du produit peut
varier jusqu’à plus ou moins 40 % autour d’une tarification de base fixée par l’État. Dans
ces conditions, la technique de réduction de prix temporaire est peu employée par les
entreprises publiques non seulement parce qu’elle n’est pas valorisante pour l’image de
l’entreprise, mais aussi parce que les EPIC sont soumises à des contraintes tarifaires.
- Les primes et les cadeaux sont associés à l’achat du produit. Cette technique fait appel a
beaucoup plus de créativité que les précédentes dans la mesure où le thème peut être défini
selon l’image de l’entreprise. Les primes représentent un outil promotionnel privilégié par
les entreprises publiques. Cette technique s’inscrit parfaitement au sein de leurs objectifs
qui consistent entre autre à stimuler l’achat, la vente et à améliorer l’image de l’entreprise.
L’opération " les invitations carte orange " de la RATP n’offre pas seulement une prime
mais améliore également l’image de l’entreprise. Elle illustre tout à fait les avantages de
cette technique pour les EPIC.
- Les concours et les jeux consistent à faire patronner par une marque ou le nom d’une
entreprise, un concours ou un jeu doté de prix (voyages, voitures, téléviseurs, etc.). Cette
technique est très utilisée par les entreprises publiques dans la mesure où elle permet en
même temps de valoriser leur image et d’informer le public des nouveaux services
proposés. Le succès du jeu " produit distingo ", organisé par La Poste, reflète les attraits
de ce type d’action pour les entreprises publiques. Cette analyse révèle que les entreprises
publiques privilégient les actions promotionnelles porteuses de signes (primes, cadeaux,
concours, jeux) et utilisent plus rarement les techniques qui modifient temporairement le
prix de vente du produit (cf. tableau 5 de la page 9).

4-3 Les entreprises publiques face aux faiblesses de la promotion des


ventesf
Les risques de saturation des offres promotionnelles : Lorsqu’une entreprise utilise trop
souvent, ou à tort et à travers, l’outil promotionnel, elle ne communique pas seulement, elle
remet également en cause la structure même de l’offre aux yeux des consommateurs [4]. Toute
opération de promotion répétée induit nécessairement, auprès des individus, des attentes plus
fortes en termes d’offre (syndrome du toujours plus) par déstabilisation par rapport à une offre
" normale ". Ceci peut entraîner alors une dérive des ventes des produits habituellement achetés
vers les produits en promotion. Toutefois, cette limite de la promotion des ventes concerne peu
les entreprises publiques étant donné qu’elles utilisent encore avec modération ces opérations
auprès des consommateurs.
Les risques d’une image floue de l’entreprise : En dehors même des risques de saturation face
à la multitude des actions promotionnelles, il apparaît un autre danger important, celui de ne pas
maîtriser précisément le positionnement de l’entreprise dans l’esprit du consommateur [4]. Les
entreprises publiques sont concernées par cette limite de la promotion des ventes. Afin d’enrayer
ce biais, elles semblent utiliser la promotion des ventes beaucoup plus comme un outil
stratégique que comme un outil tactique. Les actions promotionnelles des entreprises publiques
définies selon la culture et l’image de l’entreprise, permettent en effet de mettre en avant le
produit, mais aussi de tenir un discours cohérent avec l’image de l’entreprise.
L’insuffisance d’une communication axée sur le produit : La promotion des ventes représente
une communication adaptée pour promouvoir les produits des entreprises publiques. Mais cette
communication " produits ", qui joue allégrement sur les modes de vie pour séduire les consom-
mateurs, révèle peu de chose de la personnalité de l’entreprise. Or, le rôle de l’entreprise
publique n’est pas seulement économique : ne contribue-t-elle pas non plus à l’amélioration de
la vie sociale (transport en commun, courrier)? Dans cette perspective, les entreprises publiques
ne peuvent se limiter à une communication promotionnelle, elles doivent également mener des
communications institutionnelles. Ces dernières en s’appuyant sur les concepts d’identité, de
culture et de projet d’entreprise, permettent de rentrer dans l’univers de la politique générale des
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EPIC. L’utilisation de ce type de communication évoque la nécessité de déborder de la cible des


consommateurs pour toucher d’autres publics (fournisseurs, prescripteurs, étudiants, pouvoirs
publics…). Les différentes actions de communication jouent donc en complémentarité et c’est
l’ensemble de l’architecture qui aboutit à des résultats concrets. Ainsi, pour les entreprises
publiques, la promotion des ventes incite les clients potentiels à l’achat et valorise l’image de
l’entreprise auprès de la cible visée, alors que la communication institutionnelle contribue à
l’image de l’entreprise auprès de l’ensemble des citoyens.

5 Conclusion
À l’heure de l’Europe et face aux attentes d’une société en rapide évolution, les entreprises
publiques sont de plus en plus confrontées à la concurrence et se comportent quasiment comme
des entreprises classiques. Leur politique de communication fait alors partie intégrante de la
stratégie commerciale. Face à un environnement de plus en plus segmenté où les comportements
des individus sont totalement dispersés, les entreprises publiques ont su adapter leur communi-
cation en intégrant les techniques de la promotion des ventes. De ce point de vue, la communi-
cation promotionnelle, plus ciblée, plus proche du consommateur, provoque cette réaction
concrète et immédiate de l’interlocuteur qui représente un atout considérable pour les entre-
prises publiques à la recherche d’une compétitivité immédiate. Toutefois, les exemples cités tout
au long de cet article révèlent certaines spécificités de la création promotionnelle des entreprises
publiques. En premier lieu, afin de pouvoir être légitime aux yeux du public la promotion des
ventes reste proche de la réalité sociale en tenant un discours valorisant et informatif. En second
lieu, afin de rester cohérente avec la culture de l’entreprise, la promotion des ventes est définie
de façon à ne pas générer d’inégalités au sein du personnel. Dans ces conditions et en ne se
substituant à aucune autre forme de communication ou d’encadrement du personnel, la promo-
tion des ventes apparaît tout à fait intégrée au sein de la communication des entreprises
publiques.

6 Bibliographie
[1] R. Blattberg, R. Briesch & E. Fox, Les questions en suspens dans le domaine de la
promotion des ventes, Recherche et Applications en Marketing, 9, 3, 109-123, 1994.
[2] J.P. Buffelan-Lanore, Entreprises publiques : création et organisation, Techniques Juris-
Classeurs, Fascicule 155, 1994.
[3] P. Chandon, Dix ans de recherches sur la psychologie et le comportement des consom-
mateurs face aux promotions, Recherche et Applications en Marketing, 9, 3, 83-108, 1994.
[4] M.L. Gavard-Perret, Vices et vertus du hors-média, Nouvelles du Marketing, 26, 1992.
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promotion, Revue française du Marketing, 134, 4, 5-24, 1991.
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[7] J. Lendrevie & D. Lindon, Mercator, théorie et pratique du marketing, Ed. Dalloz, 1997.
[8] B. Taïeb, La promotion des ventes : une communication au coeur du marketing mix, Ed.
Dunod, 1991.
[9] J.P. Théron, Établissements publics, Techniques Juris-Classeurs, Fascicule 135, 1993.
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Tableau 4 : Les spécificités de l’activité commerciale, du marketing et des actions


promotionnelles des entreprises publiques.
Exemples
Mission d’intérêt général Les services téléphoniques de France Télécom sont accessibles
Spécificité de

commerciale
l’activité

Les tarifs de la RATP sont fixés par le Syndicat des Transport


Contraintes tarifaires
Parisiens.
Les entreprises publiques ne peuvent s’étendre, sauf exception, sur
Spécialité de l’activité
des activités différentes de leur mission de service public.
Communication informa- La communication " nous vous ferons aimer l’an 2000 " permet
Types d’actions

tive afin de légitimer les d’informer les consommateurs des nouveaux services télépho-
et contraintes
marketing

actions face au public. niques proposés par France Télécom.


Différenciation des ser- La SNCF élargit ses services en proposant aux clients le billet à
vices afin de s’adapter aux domicile, le service d’accompagnement d’enfants; et la SNCF
nouvelles attentes des cli- répond aux nouvelles attentes en proposant les cartes Kiwi, 12-25,
ents.- le modulopass, etc.
Des actions promotion-
" Les invitations carte orange ", action promotionnelle organisée
nelles informatives et valo-
promotionnelles et contraintes

par la RATP pour inciter les citadins à choisir les transports en


risantes pour améliorer
commun et afin d’améliorer l’image de l’entreprise.
l’image de l’entreprise.
Types d’actions

La RATP, ayant ses tarifs fixés par le " STP ", n’utilise pas la tech-
Très peu de réductions de nique de réduction de prix temporaire.
prix face aux contraintes Pendant les périodes de vacances scolaires, la SNCF a offert des
tarifaires. cartes Kiwi 2 trajets, mais localement avec l’accord de la commis-
sion régionale.
Des cadeaux modestes afin Une action promotionnelle de la SNCF a récompensé la qualité
de ne pas générer d’inégal- d’accueil des contrôleurs par des cartes téléphoniques. Un cadeau
ités au sein du personnel. modeste comparé à ceux des entreprises privées.

Tableau 5 : Les objectifs et les techniques de la promotion des ventes des entreprises
publiques†
Inciter à Informer sur les Améliorer
Motiver le Agir sur les
changer les avantages des l’image de
personnel distributeurs
habitudes produits l’entreprise
Essai gratuit * *
" satisfait ou remboursé "
Réduction de prix *
Jeux, concours ** ** * **
Primes, cadeaux ** * ** ** **
†. * signifie « peu utilisé »; ** signifie « très utilisé »
1998.04
La promotion des ventes et les entreprises
publiques
Géraldine MICHEL
Maître de conférences à l’IAE de Paris

Les papiers de recherche du GREGOR sont accessibles


sur INTERNET à l’adresse suivante :
http://www.univ-paris1.fr/GREGOR/
Secrétariat du GREGOR : Claudine DUCOURTIEUX ([email protected])

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