f82 - f63 - Brochure Pre Verger Web
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son pré-verger
et valoriser ses fruits
Concevoir
son pré-verger
et valoriser
ses fruits
Sommaire
2 Éditorial
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Concevoir son pré-verger et valoriser ses fruits
Éditorial
Le pré-verger constitue un système agricole productif unique en son genre qui associe pâturage et production de fruits. Il
ménage aussi des paysages identitaires, illustre des savoirs et des savoir-faire agricoles et enrichit notre patrimoine culinaire.
Ici, les arbres sont fruitiers et associés au pâturage. Tout est fait pour valoriser les synergies entre l’animal et l’arbre. L’animal
contrôle l’herbe et mange les fruits véreux. L’arbre lui fait de l’ombrage sans trop gêner la pousse d’herbe. Et au final le
paysan est gagnant au travers d’une double récolte. Ces vergers de plein vent, conduits sans pesticides et riches d’une
grande diversité variétale, sont à l’origine de boissons de qualité, tels que les jus de fruit, le cidre, le poiré ou des alcools
(calvados, pommeau, kirsch, etc.).
On déplore que ce système agroforestier soit totalement délaissé par la recherche agricole, à l’heure où l’agroforesterie
et ses aménités sont de plus en plus médiatisées ; à l’heure où, pour des raisons de santé, nous devons augmenter notre
consommation de fruits, mais non contaminés par les pesticides. Heureusement, des citoyens – agriculteurs ou non – sont
nombreux à mener des actions collectives pour restaurer, développer et valoriser ce patrimoine de nos campagnes.
Le pré-verger fait partie de la culture de nombreux territoires en France, mais aussi en Europe. Aujourd’hui encore, près de
20 000 agriculteurs français gèrent des vergers de haute tige. Par sa multifonctionalité, il est un atout pour mettre en place
une alimentation durable et des projets alimentaires territorialisés.
Philippe Pointereau,
directeur du pôle agro-environnement de Solagro
© Éric Péro
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Le pré-verger : une pratique
agroforestière toujours moderne
Le pré-verger est défini comme une prairie permanente, Majoritairement constitués de pommiers et de poiriers à
fauchée ou pâturée, plantée d’arbres fruitiers de haute tige cidre, ces prés-vergers produisaient aussi traditionnellement
mais où la production d’herbe est dominante. La densité des pommes « de bouche » (à couteaux), mais aussi des
des arbres est souvent inférieure à 100 arbres/ha. mirabelles (Lorraine) et des cerises (pays de Fougerolles).
On peut considérer que l’arbre est de « haute tige » si la L’arbre fruitier de haute tige est particulièrement interessant
hauteur du tronc est supérieure à 1,60 m. L’administration en système d’élevage, où les animaux peuvent valoriser
française retient la hauteur de 1,80 m, mais ceci ne l’herbe, mais aussi les fruits tombés au sol et les drèches
correspond à aucune norme. (marcs) obtenues par pressurage des fruits.
Les arbres fruitiers investissent nos paysages selon une Géré sans pesticide et sans engrais chimique, le pré-verger
grande variété d’organisations spatiales : isolés, alignés, est un système hautement productif basé sur une chaîne de
groupés dans un coin, ou occupant tout la prairie. savoir-faire.
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La présence simultanée de ces espèces en déclin constitue les prés-vergers. Parmi elles, le torcol fourmilier, la huppe
un identifiant du milieu remarquable que représente fasciée, le moineau friquet, la mésange nonette, le rouge-
le verger de haute tige, à la fois zone d’alimentation, et queue à front blanc, le bouvreuil, le gros bec et la chouette
aussi de reproduction et d’hivernage. En France, 14 des 27 chevêche. Emblématique, cette dernière affectionne les
espèces d’oiseaux désignées comme « en déclin » par le cavités présentes dans les vieux arbres fruitiers, où elle y
Museum national d’histoire naturelle sont présentes dans élève sa nichée.
© Nö Agrarbezirksbehörde
De grands prés-vergers Implanter une haie autour du verger
La faune spécifique du verger haute tige apparaît à partir de L’idéal est une mosaïque de petites parcelles de prés-
60 à 100 arbres. En deçà, les arbres favorisent uniquement vergers, de prés, de bois et de cultures dans un bocage
la nidification de quelques passereaux, mais pas leur nidifi- régulier. Plus les milieux aux abords du pré-verger sont
cation. A partir de 300 arbres, toutes les espèces spécialistes variés, plus les chaînes alimentaires sont complexes et
du pré-verger sont présentes. fonctionnelles, plus les mécanismes de régulation sont
La présence d’un réseau d’espaces écologiques (haies, performants. En Normandie, il est de tradition de border le
prairies naturelle, mares…) facilitera la circulation de cette pré-verger par une haie de poiriers sur le côté soumis au
faune spécifique entre les prés-vergers situés à proximité vent dominant.
(moins de 300 à 500 m).
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Intérêts agronomiques du pré-verger
La principale critique formulée à l’encontre du verger de Le coefficient de rendement équivalent (CRE) permet
haute est sa productivité fruitière moindre que celle d’un de calculer la performance agronomique des systèmes
verger cidricole spécialisé (basse tige). Mais ce constat omet agroforestiers, dont le pré-verger fait partie. Ce coefficient
de considérer la combinaison des produits du verger de est obtenu en comparant le rendement de toutes les
haute tige, et notamment le fourrage, c’est -à-dire la viande productions associées au rendement de ces mêmes
et le lait associés. productions cultivées séparément (en pur).
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Intérêts socio-économiques
Les vaches ruminent sous les cerisiers, profitant de leur ombre (Fougerolles).
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Elaborer son projet
La plantation, l’entretien ou la remise en valeur d’un pré- production de bois, usage des prés (pâture, fauche) selon le
verger nécessite une planification préalable garante de la type de cheptel (ovins, bovins équins...) et leur conduite (pro-
réussite du projet sur le long terme. Cette réflexion est très ductivité, période de mise à l’herbe, besoin d’ombrage, etc.).
importante car le pré-verger est une culture pérenne à très
Analyse socio-économique :
long cycle de vie (50 à 150 ans selon l’espèce fruitière) et
• Quels types de production fruitière sur la ferme (fruits
que la présence d’arbres de haute tige a des incidences très
frais, fruits destinés à la transformation) ?
fortes sur la conduite de l’exploitation.
• Définir les débouchés selon les produits transformés :
La première étape consiste à bien définir ses objectifs en
jus, cidre, eau-de-vie, vinaigre, apéritif), confiture,
menant la réflexion autour des thèmes suivants.
plat cuisiné, etc.
Domaine technique : • Quels modes de commercialisation (vente directe,
• La ferme est-elle favorable à la production fruitière circuit court, circuit long…) ? Quelle complémenta-
(climat, exposition, sol) ? Rechercher les témoi- rité avec la commercilaisation des autres produits de
gnages d’une histoire fruitière locale (lieux, espèces, la ferme ?
variétés...) peut fournir des clés de réussite du projet. • Planifier les investissements (plantation, matériel
• Quelles sont les contraintes techniques sur les tra- de transformation, formation...) à moyen terme,
vaux d’entretien et de récolte (pente…) ? identifier les services présents sur le territoire
• Quelle est la surface de l’exploitation à consacrer au (pépiniéristes, atelier de pressurage, etc.) et en-
pré-verger ? visager l’opportunité des démarches collectives.
• Quelle est la valeur de la production fourragère ? • Estimer les besoins en main d’œuvre, notamment au
Quel type de gestion (pâturage, fauchage) ? moment de la récolte, afin de s’assurer de pouvoir y
• Les productions doivent–elles respecter un cahier faire face.
des charges (AB, AOC, etc.) ? • Bien évaluer les charges de l’atelier ‘fruit’ (entretien
Il est important de bien envisager les possibilités de valori- des arbres, frais de récolte, frais de transformation,
sation des produits du pré-verger et des co-produits : etc.) et les recettes ?
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Espacer suffisamment les arbres fruitiers
Planter les arbres fruitiers trop près les uns des autres est le verger et la propagation des maladies (champignons,
une erreur majeure qui se manifeste tardivement quand viroses,…) entre les arbres. Un pré-verger aéré est gage de
les houppiers des arbres devenus adultes (15-18 ans) sont bon état sanitaire des arbres, d’une meilleure fructification
proches, voire se touchent. Les arbres se trouvent alors en des branches latérales, et de la qualité des fruits (composés
concurrence directe pour les ressources naturelles (lumière, organoleptiques, teneur en sucre, calibre supérieur…).
eau, minéraux du sol…) ce qui altère leur croissance et Pour chaque espèce fruitière, le tableau suivant donne les
leur production. Le manque d’espacement favorise aussi valeurs indicatives des distances de plantation qu’il est sou-
le développement des parasites (insectes ravageurs) dans haitable de respecter .
La plantation en carré est la plus habituelle ; elle convient bien à la forme généralement
rectangulaire des parcelles et permet de faucher dans les deux sens.
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L’AOC Poiré Domfront préserve le verger haute-tige et réclame des variétés locales.
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Gérer le pâturage dans le pré-verger
Une bonne combinaison arbre - animal
Le pâturage nécessite avant tout de bien étudier la compa- possible dans un pré-verger de densité moyenne (75 arbres/
tibilité de l’association entre l’animal et l’espèce fruitière, en ha). Mais il convient alors de bien protéger les arbres, car
fonction de l’âge des arbres et de la densité de plantation. seuls les arbres de plus de 20 ans sont capables de résister à
Les éleveurs de bovins réservent souvent les prés-vergers la poussée des vaches et des bœufs.
de pommiers et de poiriers aux jeunes (génisses, veaux). Certaines races de mouton, comme le Shropshire, a la parti-
Toutefois, le pâturage des bovins adultes est parfaitement cularité de ne pas s’attaquer à l’écorce des arbres.
La présence de jeunes bovins Salers dans un verger de 15 ans nécessite une protection efficace.
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© Denis Bringard
La subdivision du
pré-verger en sous-
unités de pâturage
de moins de 1 ha
aide à mieux gérer
le chargement.
Points de vigilance
• Pour préserver la qualité sanitaire des fruits, le pâturage doit s’interrompre au moins 2-3 semaines avant que la chute
des fruits, et ceci jusqu’à la fin de la récolte, soit environ 2 mois en verger de pommiers.
• Le fractionnement du pré-verger en petites sous-unités de pâturage (de 0,3 à 0,5 ha) permet d’ajuster au mieux le
chargement et faciliter la gestion des animaux. Le fait de regrouper les variétés ayant la même date de récolte dans
chaque sous-unité minimise la durée de l’interruption du pâturage.
• Le stationnement des animaux sous les arbres peut conduire au déchaussement des arbres. Attention aux vieux
arbres car ils sont plus fragiles.
• Retirer les animaux du pré-verger quand le sol est très humide : cela induit un tassement du sol avec un fort risque
d’asphyxie racinaire (pommiers et cerisiers y sont particulièrement sensibles).
En pré-verger, il importe de trouver un équilibre entre le nombre d’arbres et le nombre d’animaux, car plus il y a d’animaux
plus la pression sur le sol, le tronc et les branches basses est susceptible d’être forte sous un arbre.
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Protéger les arbres, un facteur essentiel de réussite du projet
La protection doit rester en place jusqu’à ce que l’arbre soit écorces) par le cheptel. Pieux, hursus ou corset : les
capable de résister au bétail, soit environ 20 ans pour le systèmes de protection fréquemment employés sont
poirier et le pommier. divers selon l’animal (ovins, jeunes bovins, vaches…).
La protection du jeune arbre planté est indispensable pour Mise en œuvre avec soin, il ne dédouane pas d’une surveil-
éviter l’abroutissement des jeunes arbres (bourgeons, lance régulière. Aucune solution n’est en effet infaillible.
Le corset en métal est fixé à un pieu (voire deux) d’environ 2,5 m de haut
(a) (b) et 10-15 cm de diamètre. Un grillage surmonte le corset afin de protéger
de la dent du bétail le point de greffe et les premières charpentières.
© Éric Péro
Les éleveurs normands privilégient les corsets métalliques pour protéger les jeunes arbres. Un investissement onéreux mais réutilisable car très durable.
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Concevoir son pré-verger et valoriser ses fruits
Désignation Coût
Frais de fonctionnement de l’atelier 0,30 €/l
Bouteille Fraicheur
0,50 €/l
(1 L en verre blanc) avec capsule
Étiquette 0,05 €/u
Main d’œuvre salariée
0,70 €/l
(Smic avec charges sociales)
Coût de production HT 1,85 €/l
Coût de fabrication du jus de pomme avec un atelier collectif.
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Produire du jus de pomme en montagne
C’est le projet de Laurence et de ses associés de la Ferme aux ânes, située sur les communes d’Unac et Appy dans la vallée de l’Ariège ;
une ferme diversifiée qui produit de la viande de race gasconne en vente directe et loue des ânes pour la randonnée. Laurence et
David ont entrepris en 2009 de relancer une production de jus de pomme pour valoriser tous les pommiers de plein vent situés sur
la ferme et sur la commune d’Appy. Plus de 20 variétés de pommiers ont été recensées sur ce territoire qui s’étale entre 700 m et
1 200 m d’altitude. La production de jus est d’environ 3 000 litres par an, vendu à 3 €/litre dans la vallée et lors de la distribution des
caissettes de viande. Cette production permet un revenu d’appoint non négligeable et arrive en octobre au moment où la dispo-
nibilité en main d’œuvre est plus importante. Les 5 à 9 tonnes de pommes sont ramassées à la main. La récolte des pommes écarte
aussi un danger de voir des bêtes s’étrangler. La fabrication de jus se fait à façon chez un autre agriculteur situé à 75 km qui possède
un pressoir et un pasteurisateur. Cette transformation coûte 1,05 € HT par litre de jus, incluant le prix de la bouteille. Chaque année
Laurence replante entre 5 et 10 pommiers fournis par un pépiniériste local qui réalise des greffes à partir des variétés de la commune.
Les jeunes arbres sont plantés hors parcours à cause de la difficulté à protéger les arbres par rapport au troupeau. Le mélange des
variétés acides, douces et amères assure un jus de qualité.
Cidre, jus et vinaigre de pomme élargissent la gamme de produits Cet atelier mobile de pressage de pomme d’Aveyron contribue aussi
vendus en direct sur les marchés ; ici, un boulanger-paysan des d’animation du territoire et de transmission des savoirs auprès des
Pyrénées. plus jeunes.
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Concevoir son pré-verger et valoriser ses fruits
renforcer la résilience des fermes avec un risque très limité de part le peu
de temps qu’il nécessite hors récolte. Il est totalement adapté à la demande
accrue en produits de qualité (AB, AOC), élaborés sans l’emploi de pesticides.
Les vergers de plein vent sont aussi bien adaptés à l’autoconsommation et
font l’objet de dynamiques collectives de revalorisation dans nos campagnes.
www.osez-agroecologie.org
© Éric Péro
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Contacts :
• Association Française Arbres Champêtres et Agroforesteries
3, la pépinière - Pôle de l’arbre - Route de Redon - 44290 Guéméné-Penfao
• Centre régional des ressources génétiques
Ferme du Héron - Chemin de la Ferme Lenglet - 59650 Villeneuve d’Ascq
• Conservatoire végétale régional d’Aquitaine
Domaine de Barolle - 47130 Montesquieu
www.conservatoirevegetal.com
• Croqueurs de pommes
Cité des Associations - Rue Jean-Pierre Melville - B.P. 80043 - 90001 Belfort cedex
www.croqueurs-national.fr
• Fédération des Parcs naturels régionaux
9 rue Christiani - 75018 Paris
www.parcs-naturels-regionaux.fr
• INAO
Délégation territoriale Ouest - 6 rue Fresnel – 14000 Caen
Siège : 12, rue Henri Rol-Tanguy - TSA 30003 – 93555 Montreuil-sous-Bois cedex
• Rénova
1, place du Dome - 09350 Daumazan sur Arize
Bibliographie :
• Etude des pratiques agroforestières associant des arbres fruitiers de haute tige à des cultures ou des pâtures.
Coulon et al., Solagro-INRA. Ministère de l’Environnement et de l’Aménagement du territoire. 2000. 179 p.
• Le pré-verger pour une agriculture durable. Guide technique. Coulon et al., Ed. Solagro, 2005 - 186 p.
• Les vergers traditionnels et les alignements d’arbres têtards. Jean-Luc Coppée et Claudy Noiret.
Coll. « Nature et Forêts » n°2. 2008. 74 p.
• Les vergers hautes tiges de l’Avesnois - Vidéo réalisée par le Ministère de l’Agriculture
http://agriculture.gouv.fr/dans-lavesnois-le-pre-verger-na-pas-dit-son-dernier-mot-0
• Projet Léonardo ESTO « spécialistes européens des vergers traditionnels »
www.esto-project.eu/
• Site Osae
www.osez-agroecologie.org/mettre-en-place-un-pre-verger