Catechisme Catho

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 213

L e C a t éc h i s m e

d e l ’ E gl i s e C a t h o l i q u e,

U N A U TR E E V ANG I L E ?

EGBERT EGBERTS
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 2

© 1998
www.croiretcomprendre.be
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 3

I N TR ODU C TI ON

L’apparition du Catéchisme de l’Eglise Catholique a été un point


marquant dans la vie religieuse de nos pays catholiques franco-
phones au début des années 1990. Ce fut un grand succès du
point de vue des ventes, avec environ un demi million
d’exemplaires vendus avant même sa sortie en édition de poche.
Les réactions dans le milieu protestant évangélique ont été sur-
tout limitées à des articles dans la presse. Le livre de Jacques
Blocher, Le Catholicisme à la lumière de l’Ecriture Sainte, a été
récemment réédité, augmenté d’un chapitre sur le Catéchisme,
mais c’est à peu près tout. Lorsque, il y a quelques années, j’ai
été invité par le Séminaire Biblique de Bruxelles à donner un
cours sur le Catholicisme, j’ai donc entrepris une étude détaillée
du Catéchisme. Le présent texte est le résultat de ce cours.

Le but initial du cours était bien sûr de donner une connaissance


exacte de ce qu’enseigne aujourd’hui l’Eglise Catholique. Dans
ce sens, le public visé était un public protestant évangélique. En
retravaillant le texte, j’ai voulu m’ouvrir en plus au public catho-
lique. Non pas dans une intention de polémique (le mot vient du
Grec et veut dire : guerre), mais dans un désir de dialogue autour
de la Bible.
Malgré la masse d’information que nous recevons, notre temps ne
nous pousse guère à la compréhension. Le Catéchisme a été un
effort de la part des autorités ecclésiastiques pour faire com-
prendre la foi catholique. Ce livre-ci se veut aussi un effort de
compréhension, tant pour les non catholiques dont je suis, que
pour les catholiques, et cela à la lumière de la parole de Dieu. Il
me semble essentiel que nous sachions ce qui est proclamé dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 4

nos milieux religieux et que nous apprenions à discerner dans


quelle mesure cela traduit la pensée de la Bible.

Les chapitres qui suivent sont construits d’une façon simple.


Après quelques mots d’introduction, l’enseignement du Caté-
chisme est résumé. Comme tous ceux qui liront ce livre ne possè-
dent pas forcément le texte du Catéchisme, j’ai cité ou résumé le
contenu des paragraphes essentiels. Mais il est clair que, pour une
question de place, cela n’a pas été possible partout. Pour ceux qui
veulent aller plus loin, il faudra donc consulter le texte même du
Catéchisme. J’ai ajouté des renvois au Catéchisme des évêques
de France pour une raison simple. Des personnes, dont des
prêtres, m’ont dit que ce texte était bien plus “évangélique” que
le grand Catéchisme publié “sous la pression du Pape”. Pour ne
pas laisser flotter l’idée qu’il y aurait donc deux Catholicismes
officiels, j’ai tenu à citer cet autre Catéchisme à plusieurs en-
droits.
Ensuite, vous trouverez un exposé de ce que la Bible dit par rap-
port aux points soulevés. La traduction utilisée est celle dite “à la
Colombe”, mais chaque lecteur est bien sûr libre de le comparer
avec n’importe quelle autre traduction de la Bible.
Plusieurs documents se trouvent en appendice pour servir de réfé-
rence.

Le Catéchisme ne jouit pas d’une bonne presse chez beaucoup de


catholiques, y compris chez beaucoup de ses représentants offi-
ciels. Sont-ils donc en désaccord fondamental avec ce que ce
Catéchisme enseigne ? Dans ce cas, l’ont-ils affirmé publique-
ment ? Peut-on, aujourd’hui, publiquement dire son désaccord
avec certains des points essentiels de l’enseignement traditionnel,
points qui se retrouvent dans cette étude ? Pour être clair, permet-
tez-moi de les énumérer :
 Le magistère, tel que le présente le Catéchisme, est-il ré-
cusé ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 5

 La papauté, telle que la présente le Catéchisme, est-elle


récusée ?
 L’enseignement sur la Vierge Marie, tel que le présente
le Catéchisme, est-il récusé ?
 La voie royale des sacrements, telle que la présente le Ca-
téchisme, est-elle récusée ?
 Le chemin du salut, tel que le présente le Catéchisme,
est-il récusé ?

Est-il possible de croire et d’enseigner publiquement des choses


foncièrement différentes sur ces points et de rester un représen-
tant officiel de l’Eglise ? Qu’il me soit permis d’en douter.

On a parfois reproché à des Protestants et à des Evangéliques


d’accuser l’Eglise catholique de tout et de son contraire. J’ai es-
sayé de démontrer que le reproche opposé est certainement tout
aussi juste : l’Eglise catholique enseigne tout et son contraire !
Cela ouvre la possibilité d’enseigner en tant que prêtre un grand
nombre de choses fort bibliques sans pour autant devoir être en
désaccord avec son Eglise de façon publique. L’Eglise catholique
a ainsi rejoint le Protestantisme dans le sens qu’elle est devenue
un hypermarché de la foi. Servez-vous de ce que vous voulez,
mais acceptez que d’autres catholiques y cherchent et y trouvent
des choses totalement différentes, voire opposées. Vous pouvez
être différents sans devoir être dissidents. Nous nous imaginons
sans peine l’attitude de l’apôtre Paul, telle qu’il l’a exprimée dans
sa lettre aux Galates : Si quelqu’un vous annonce un Evangile
différent de celui que vous avez reçu, qu’il soit anathème ! (1.8)
La réponse de ces enseignants auxquels l’apôtre fait référence
aurait très bien pu être : Mais nous sommes d’accord sur presque
tout ce que tu enseignes. Accepte que nous ayons une sensibilité
différente sur tel ou tel point ! Si le Catéchisme, sur un certain
nombre de points, enseigne un autre Evangile, pouvons-nous
béatement l’ignorer, ou devrions-nous nous attendre à un peu
plus d’honnêteté et de courage de la part de ceux qui réclament
pour eux la différence ? Car le Saint-Esprit ne peut enseigner tout
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 6

et son contraire. Est-ce que le Catéchisme enseigne un autre


Evangile ? Une comparaison patiente entre son enseignement et
les textes bibliques est la seule façon de le découvrir.

Que Dieu veuille utiliser ce livre modeste pour nous pousser à


une réflexion saine dans le désir de mieux le connaître afin de
mieux le servir. Dans ce but, il nous encourage à examiner toutes
choses et à retenir ce qui est bon (1 Thessaloniciens 5.21). C’est
un exercice difficile, parfois fastidieux, mais ô combien impor-
tant.

A Dieu seul la gloire.


Le Catéchisme, un autre Evangile ? 7

1 . P R E S E NTATI ON DU C ATE C H I S ME

Le Catéchisme de l’Eglise Catholique s’inscrit dans la continua-


tion du Concile Vatican II. Il en est à nos jours l’application la
plus systématique sur le plan de la doctrine catholique.

Le but du Catéchisme
La Constitution Apostolique Fidei depositum du pape Jean-Paul
II, datée du 11 octobre 1992, et qui figure en introduction du Ca-
téchisme, donne une bonne idée du but dans lequel l’Eglise a
entrepris ce travail énorme.
Elle a voulu créer un document répondant à quatre objectifs pré-
cis :
 Servir de texte de référence pour les futurs catéchismes
dans les divers pays, exposant une doctrine sûre et adap-
tée à la vie actuelle des chrétiens, mais sans qu’il rem-
place les catéchismes existants.
 De par le concours d’un grand nombre de collaborateurs
attester la catholicité de l’Eglise. Tout l’Episcopat catho-
lique a été engagé dans l’élaboration de ce texte, dont
l’idée provient du Synode des évêques, réuni en assem-
blée extraordinaire le 25 janvier 1985. Ce texte n’est
donc nullement l’expression de l’épiscopat d’un seul
pays, comme par exemple le Catéchisme des évêques de
France, publié presque en même temps.
 Etre un texte qui tient compte des explications de la doc-
trine que le Saint-Esprit a suggérées à l’Eglise au cours
des temps. C’est donc un texte qui, au-delà de l’autorité
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 8

de l’Eglise veut en appeler directement à l’autorité du


Saint-Esprit pour faire comprendre ce qu’il faut croire
depuis le dernier Concile.
 Etre un instrument valable et autorisé pour toute l’Eglise
afin d’y servir comme une norme sûre pour
l’enseignement de la foi. La foi et la doctrine qui y sont
exposées sont le fruit de l’Ecriture Sainte, de la Tradition
apostolique et du Magistère ecclésiastique.
En somme, nous avons ici un livre qui permet d’affirmer avec
exactitude ce que croit l’Eglise catholique aujourd’hui. Fini le
temps de la confusion depuis Vatican II. Fini le temps des ques-
tions du genre : Les enseignements des Conciles précédents, sont-
ils encore en vigueur ? Le Concile de Trente, faut-il encore en
tenir compte ? L’Eglise, a-t-elle évolué vers une doctrine plus
“protestante” ? Le Catéchisme offre des réponses claires à ce
type de questions. Et si nous voulons aujourd’hui comprendre et
évaluer la doctrine catholique, il nous faut absolument consulter
ce Catéchisme des temps modernes.

Le pape présente ce texte à quatre publics distincts :


 les pasteurs de l’Eglise et les fidèles engagés dans
l’enseignement de la doctrine catholique;
 ceux que nous appellerons les fidèles curieux, ceux qui
désirent mieux connaître leur foi;
 les chrétiens de tout bord engagés dans l’œcuménisme;
 tout homme qui veut connaître ce que croit l’Eglise.

Avons-nous le droit, en tant que chrétiens protestants évangé-


liques, de prendre ce Catéchisme comme critère de la foi catho-
lique afin de le comparer à l’enseignement Biblique ? Disons tout
de suite que pour l’Eglise catholique, cette question ne se pose
pas ainsi. Pour elle, comme nous le verrons au chapitre suivant,
l’enseignement de la Bible et de l’Eglise sont nécessairement en
accord. Le droit d’interpréter les Ecritures est limité aux succes-
seurs des apôtres et ces derniers en usent de manière infaillible,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 9

ils ne peuvent se tromper. Il n’y a donc aucun besoin de comparer


le Catéchisme et la Bible !
Pour le Protestant, la question est pertinente. Tout doit être éva-
lué à la lumière de l’Ecriture et c’est le droit, et même le devoir le
plus strict du croyant individuel de s’y activer selon Actes 17.11.
Mais est-ce juste de nous pencher ainsi sur la foi et les convic-
tions des autres ? N’est-ce pas terriblement prétentieux ? Nous
croyons que, d’une part, l’Eglise nous invite à le faire en nous
adressant ce Catéchisme dans les paroles mêmes du pape que
nous venons d’évoquer plus haut. Nous croyons que, d’autre part,
l’Eglise nous force à le faire en se présentant au travers de ce
Catéchisme comme l’unique dépositaire de la vérité. Invités et
forcés à entreprendre ce travail, nous ne sommes pas animés de
prétentions déplacées. Bien au contraire, ne pas le faire serait
manquer sérieusement à notre devoir. Nous sommes appelés “à
combattre pour la foi qui a été transmise aux saints une fois pour
toutes” (Jude 3), et “redresser avec douceur les contradicteurs
dans l’espoir que Dieu leur donnera la repentance” (2 Timothée
2.25). Nous devons veiller à ce qu’un autre évangile ou un autre
esprit ne remplacent pas la vérité par le mensonge (cf.
2 Corinthiens 11.4). Après tout, le Saint-Esprit ne peut pas dire
une chose aux uns et le contraire aux autres ! Avec humilité et
avec fermeté, nous voulons donc répondre à l’invitation du pape
et nous lancer dans une étude sérieuse. En plus, dans le climat
œcuménique actuel, refuser de le faire serait manquer de charité.

La structure du Catéchisme
Le Catéchisme est bâti sur quatre “piliers” :
 La profession de la foi. Deux questions y sont traitées.
D’abord celle de la Révélation qui est le fondement de la
foi et ensuite celle du Symbole des apôtres qui en résume
les points cardinaux.
 Les sacrements de la foi. Comment le salut est-il rendu
présent ? C’est le rôle des sept sacrements de l’Eglise.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 10

 La vie de la foi. Comment vivre ? Après une section sur


la liberté et la grâce, la place principale est laissée au dé-
veloppement des dix commandements.
 La prière dans la vie de la foi. Il s’agit essentiellement
d’une analyse de la prière du Seigneur, le Notre Père.

Notre approche
Quelle doit être notre approche de l’enseignement transmis par le
Catéchisme ? La question a son importance. On peut parcourir
ses pages et noter tout ce qu’il y a de positif selon notre point de
vue. Dans l’ensemble, lorsque le Catéchisme parle de Dieu, de
Christ, du Saint-Esprit, nous pouvons y donner notre assentiment
sans beaucoup d’hésitation. La même chose est vraie pour la plu-
part des questions éthiques. C’est ici que l’Eglise catholique est
sévèrement critiquée par beaucoup et où nous sommes plutôt de
son côté. Nous ne pouvons qu’approuver le jugement du Caté-
chisme sur l’avortement, l’homosexualité et sur des questions
semblables, dans les grandes lignes et souvent dans les détails.
Soutenant sur ces points un même combat, nous nous réjouissons
d’une telle attitude ferme contre une opposition qui ne désarme
pas.
Nous notons avec intérêt certaines expressions du Catéchisme sur
des points aussi importants que la doctrine de la justification de
la foi et l’attitude envers les chrétiens d’autres églises. Mais nous
relevons aussi que sur ces points, le Catéchisme dit parfois des
choses contradictoires !1
Cependant, il ne faut pas oublier que toutes les doctrines tradi-
tionnelles, qu’en descendants spirituels des apôtres et des réfor-
mateurs nous avons toujours contestées, sont maintenues et clai-
rement enseignées dans le Catéchisme. Nous serions tentés de
dire que la doctrine de Trente et de Vatican I s’y trouve exprimée
dans le langage de Vatican II.

1
Voir appendice 2.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 11

Nous reposons donc notre question : quelle approche faut-il pré-


férer ? Couvrir du manteau de la charité tout ce qui nous déplaît
Bible en main et nous concentrer sur le positif ? L’apôtre Paul,
n’a-t-il pas dit que l’amour croit tout (1 Corinthiens 13.7) et
l’apôtre Pierre que l’amour couvre une multitude de péchés
(1 Pierre 4.8) ? Mais l’amour, couvre-t-il l’erreur ? L’amour,
croit-il aux faux docteurs ? La crédulité, aurait-elle remplacé la
défense de la vérité ? La réponse doit être négative. Les apôtres
deviendraient les défenseurs du droit à la fausse doctrine à
l’intérieur de l’Eglise ! Manifestement, ils ne l’ont jamais été !
Faut-il alors décrire le positif et le négatif, Bible en main, en ac-
centuant le premier et en notant avec reconnaissance et avec un
espoir tout œcuménique que ce côté-là pèsera de plus en plus
lourd et qu’un jour, nous serons tous un ? Qu’un jour, l’Eglise
aura purgé toute doctrine anti-biblique ? Ou qu’un jour, on ne
s’en inquiétera plus ? Nous ne croyons pas que le Catéchisme
nous laisse cette option. Nous croyons qu’il faut procéder autre-
ment et nous en donnerons les raisons.

Notre approche sera déterminée par trois éléments :

L’importance d’être fidèle à la Parole de Dieu.


Aucun livre et aucun organisme, aussi spirituels soient-ils, ne
peut remplacer la Parole de Dieu. Par elle, nous devons juger de
tout. Elle est une épée à deux tranchants par laquelle nos senti-
ments et nos pensées sont jugés. Et par qui nous devons mettre à
l’épreuve tout système de doctrine et de foi, à commencer par le
nôtre. Sachant que les fausses doctrines allaient abonder, l’apôtre
nous exhorte à la vigilance, cf. 1 Timothée 4.1-5. Et plus loin, il
écrit :
“Voilà ce que tu dois enseigner et recommander. Si quelqu’un
enseigne autrement et ne marche pas selon les saines paroles de
notre Seigneur Jésus-Christ, et selon la doctrine conforme à la
piété, il est enflé d’orgueil, il ne sait rien; il a la maladie des
discussions et des disputes de mots. De là naissent l’envie, la
discorde, les calomnies, les mauvais soupçons, les contestations
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 12

interminables d’hommes à l’esprit corrompu, privés de la vérité,


et qui considèrent la piété comme une source de gain.”
(1 Timothée 6.3-5)

Il nous rappelle encore qu’un temps viendra “où les hommes ne


supporteront plus la saine doctrine” (2 Timothée 4.3). Nous au
contraire, nous devons rester attachés à ce que nous avons appris.
Et dans le contexte, il est clairement question de l’Ecriture, cf.
2 Timothée 3.14-17. Voilà donc le premier élément de notre ap-
proche.

L’importance de notre héritage historique.


Nous ne pouvons pas faire table rase de notre passé. Nous
sommes les descendants d’un peuple de martyrs et force nous est
de constater que l’Eglise romaine s’est pendant de longs siècles
comportée en persécuteur. Est-ce qu’un tel passé l’a poussée à la
repentance et lui a-t-il enseigné l’humilité ? Si les mêmes doc-
trines sont encore enseignées qui autrefois ont amené de nom-
breuses générations de chrétiens “dissidents” à la souffrance et à
la mort, pouvons-nous passer tout simplement l’éponge de la
charité ? Nous croyons que non. Nous devons rester lucides. Le
Concile Vatican II n’a pas transformé l’Eglise catholique pour ce
qui est de ses convictions profondes. Ce n’était pas son but2. Le
Concile était une “révision de vie”. Il a travaillé “à rajeunir son
visage” (Message du Concile aux jeunes, 8-12-1965). Mais ce
n’était pas une révision totale. C’était une “rénovation” (Vatican
II, UR6) et non un changement radical. Lorsqu’un tel passé est
assorti à l’orgueil d’être la vraie et unique Eglise de Jésus-Christ
(voir plus loin), nous avons le droit (le devoir ?) d’adopter une
approche critique. D’ailleurs, nous acceptons qu’on nous rende la
pareille ! Voilà donc le deuxième élément de notre approche.

L’importance de discerner l’essentiel.

2
Voir appendice 1, document 1.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 13

C’est le conseil de Paul aux Philippiens (1.10). Sans vouloir nous


perdre dans une foule de détails, nous avons choisi de nous limi-
ter à l’essentiel. Quatre grandes questions le résument :

 Que dit le Catéchisme (et donc l’Eglise) sur l’autorité de


la Parole de Dieu ?
 Quelle est sa conception de l’Eglise, et donc d’elle-
même ?
 Comment considère-t-il les sacrements ?
 Comment l’homme peut-il être sauvé pour l’éternité ?

Ces questions ont l’avantage de nous faire aller à l’essentiel, à


ces problèmes qui ont été et qui sont encore aujourd’hui la cause
de la division au sein de la Chrétienté.

Notre approche sera donc caractérisée par la fidélité à la Parole


de Dieu, interprétée d’une manière saine et non controversée, par
un regard critique mais honnête, sans complaisance et sans mé-
chanceté, et par le désir d’aller à l’essentiel, sans contourner au-
cune question gênante.

Dangers de notre époque


Le temps dans lequel nous vivons ne facilite pas la tache. Deux
attitudes modernes font que le climat spirituel n’est pas très favo-
rable à l’approche que nous nous sommes imposée. Ces attitudes
caractérisent beaucoup de nos contemporains et elles se sont glis-
sées également dans beaucoup de nos églises.

La démangeaison du dialogue.
Notre époque est celle du relativisme. Rien n’est absolu, rien
n’est vrai pour tout le monde. Personne n’est supérieur à l’autre
et aucune religion ne peut se considérer comme au dessus d’une
autre. Il faut respecter tout le monde et ne pas vouloir assommer
qui que ce soit avec ses propres opinions. Chacun sera sauvé à sa
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 14

façon. Cherchons donc à nous comprendre et à nous apprécier


d’égal à égal. Cette égalité dans la vérité est le présupposé du
dialogue. Les différences peuvent être aplanies par une meilleure
compréhension mutuelle, et l’idée que quelqu’un, ou qu’une reli-
gion puisse être dans l’erreur doit être bannie de notre esprit. La
voie royale du dialogue nous mènera ainsi à plus d’unité de tous
les chrétiens, et pourquoi pas, de tous les croyants, sans repen-
tance ni obéissance à la vérité.

A cela s’ajoutent les trois choses suivantes qu’ont remarquées les


auteurs du Regard sur le catholicisme contemporain de
l’Alliance Evangélique Universelle :
 L’utilisation intelligente des mass-média liée aux dons
médiatiques du pape actuel [Jean-Paul II] a “projeté sur
le monde une image complètement nouvelle de l’Eglise
catholique en tant qu’institution, qui est très séduisante”.
 L’ignorance de l’histoire et la lassitude de la raison par
de vastes couches de population de la société contempo-
raine. Souvent, cela correspond à une attitude semblable
dans bon nombre de nos églises et mouvements.
 L’acceptation sur des bases idéologiques de l’Eglise ca-
tholique due aux positions nettement anti-marxistes du
pape actuel [Jean-Paul II]. Cette acceptation “ne tient
souvent pas compte des exigences de la vérité évangé-
lique”.

Tout cela, disent les auteurs, conduit “à la confusion, à des pro-


grammes de coopération ambigus, à des activités trompeuses et à
l’abandon de la vérité évangélique” .3

Le dégoût de la doctrine.

3
Regard sur le catholicisme contemporain, Cachan : Alliance Evangélique Fran-
çaise, sans date, p.5. C'est la traduction française d'une étude entreprise par la
World Evangelical Fellowship et publiée en 1986.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 15

Le pendant logique de l’attitude que nous venons de décrire est le


dégoût de tout ce qui sent l’absolutisme doctrinal. L’amour unit,
la doctrine divise décrit assez bien la tentative œcuménique aux
yeux de beaucoup. Pour la tentative charismatique on le change-
rait en l’expérience unit, la doctrine divise. L’amour vient de
Dieu, tandis que la doctrine est perçue comme un effort purement
humain.
Notons tout de suite que les auteurs du Catéchisme ne partagent
pas ce dégoût. Ils ont produit un texte très doctrinal. Du coup, la
réponse se doit d’être au même niveau ! La parole de Dieu est la
vérité, dit Jésus en Jean 17.17. La saine doctrine n’est pas effort
humain mais révélation divine. Et toute doctrine présentée par les
hommes doit être passée au crible de la Parole de Dieu. Sans cela,
nous nous perdrions dans un brouillard religieux qui finirait par
nous égarer à des années-lumière du Christ des Ecritures.

Ce n’est pas la doctrine qui divise, mais la désobéissance. Ce sont


les opinions des hommes, aussi religieusement correctes qu’elles
soient, qui nous divisent quand celles-ci ne sont pas fondées sur
la Parole de Dieu. C’est une preuve d’amour que de dire à quel-
qu’un qu’il a tort quand la chose est évidente. Ce n’est pas de
l’amour que de dire oui à celui qui nous demande sur le quai
d’une gare si le train va bien à tel endroit quand nous savons per-
tinemment bien qu’il va en fait dans la direction opposée. Ce
serait de la cruauté. Qu’il n’y ait donc pas de fausse pudeur entre
nous, mais examinons toute chose à la lumière de la Bible et que
celle-ci soit notre juge. Le but des pages qui vont suivre n’est pas
autre.

(Note : Nous nous référerons également dans cette étude au Caté-


chisme pour adultes que les évêques de France ont produit
presque en même temps que le Catéchisme de l’Eglise Catholique
(l’approbation du Saint Siège date du 23 janvier 1991). Là où
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 16

c’est le cas, les renvois sont indiqués par l’abréviation CEF, sui-
vie du numéro du paragraphe.4)

4
Catéchisme des évêques de France, publié dans Le livre de poche LP 10, Paris :
1993.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 17

2 . L E P R OB LE ME D E L’ A U TOR I TE

Voici la question qui sous-tend toutes les autres : quel est le cri-
tère pour juger de la véracité ou de l’utilité de toute doctrine, de
toute pratique religieuse, de toute foi ? Chaque discussion avec
Rome finit par arriver à la grande question de l’autorité. Dès
qu’on nous dit : l’Eglise enseigne ceci ou cela, nous demandons
aussi vite, et sans méchanceté : mais que dit l’Ecriture ? Par
exemple, la phrase typique qu’on rencontre à bon nombre
d’endroits dans le Catéchisme : “La Sainte Eglise, notre mère,
tient et enseigne...” (§36) nous pousse d’emblée à la question :
Est-ce bien l’enseignement de l’Ecriture ? Pour nous, la phrase
“La Bible dit...” est bien plus pertinente. C’est toujours à elle
qu’il faut revenir.
C’est à cause de l’ancien principe du Sola Scriptura que nos dis-
cussions sont souvent si difficiles. Pour nous, chrétiens protes-
tants évangéliques, l’autorité de l’Eglise doit toujours plier de-
vant celle de la Parole de Dieu. Tôt ou tard, il faut se demander
qui a inspiré tel dogme, telle pratique. Si c’est le Saint-Esprit,
pourquoi semble-t-il inspirer chez une partie si importante de
l’Eglise des convictions diamétralement opposées sur ces mêmes
points ?

La Bible par l’Eglise

Que dit le Catéchisme à ce sujet ? Nous pourrions résumer sa


position par la phrase lapidaire : la Bible par l’Eglise. L’Eglise
enseigne l’importance de la Bible, mais fait clairement com-
prendre le rôle central de l’Eglise entre la Bible et le croyant.
Dieu nous parle de façon particulière par sa révélation, mais cette
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 18

révélation est transmise et interprétée par l’Eglise et seulement


par elle.

La Révélation.
L’Ecriture Sainte est la parole de Dieu par laquelle il entre en
conversation avec ses fils, §104. Avec la venue de Jésus, la Révé-
lation est achevée. Il n’y a donc pas d’autre Révélation après lui,
§66,73. L’Eglise vénère cette Parole au même titre qu’elle vénère
le Corps de Christ, §103, car ce livre enseigne “fermement, fidè-
lement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consignée
pour notre salut”, §107.
Jusque là, nous ne pouvons que marquer notre accord. Et encou-
rager tout un chacun à prendre au sérieux l’exhortation du Caté-
chisme “à acquérir, par la lecture fréquente des divines Ecritures,
la science éminente de Jésus-Christ”, §133.

Mais qu’est-ce qui fait partie de la Bible ? L’Eglise catholique a


toujours enseigné qu’il y a 46 livres canoniques (= figurant sur la
liste) dans l’Ancien Testament. Le Catéchisme les énumère, pré-
cisant que c’est la Tradition apostolique qui lui a donné le discer-
nement nécessaire pour savoir quels livres doivent être comptés
sur la liste. Y sont donc inclus ce que les Protestants appellent les
livres apocryphes (= non authentiques) : Tobie, Judith, I et II
Maccabées, Sagesse, Ecclésiastique et Baruch, §120. Pour un
Protestant, ces livres peuvent être intéressants à lire, édifiants
même. Mais ils ne font pas partie de la Parole inspirée de Dieu et
aucune doctrine de la foi ne doit donc être fondée sur eux. Cela
n’est pas parce que les Protestants ignorent ou rejettent la Tradi-
tion apostolique. Comme nous le verrons plus loin, cette Tradi-
tion est de toute façon sujette à toutes sortes d’interprétations les
unes encore plus subjectives que les autres. La raison est ailleurs.
L’Ancien Testament a été confié au peuple Juif. Ce sont leurs
Ecritures. Et ce peuple n’a jamais reconnu les livres apocryphes
comme faisant partie des Ecritures Saintes. Ce n’était pas le rôle
de l’Eglise de raccommoder par après le Canon de l’Ancien Tes-
tament. Toute Tradition ecclésiastique à ce sujet est donc sus-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 19

pecte. D’ailleurs, cette Tradition n’a aucun lien avec les apôtres.
L’appeler “apostolique” lui donne à tort un air de respectabilité
aux oreilles non averties.

La Tradition.
La Révélation divine, inspirée et unique, a été transmise par les
apôtres et leurs successeurs les évêques. Dans un sens, cette tra-
dition est déjà le fait que les apôtres ont mis par écrit le message
de salut, §76,77. Cependant, elle est beaucoup plus. Sous le vo-
cable Tradition est compris un ensemble d’enseignements trans-
mis au travers de l’histoire qui sont distincts de la Sainte Ecriture,
quoique étroitement liés à elle, §78.

Se pose alors la question du rapport entre la Tradition et


l’Ecriture Sainte.
Les deux proviennent de la même source divine : l’Ecriture par le
biais de l’inspiration du Saint-Esprit et résultant en un écrit, la
Tradition par celui de l’illumination du même Esprit Saint et
résultant en une série de prédications et d’enseignements. Il en
découle que l’Eglise “ne tire pas de la seule Ecriture Sainte sa
certitude sur tous les points de la Révélation. C’est pourquoi
l’une et l’autre doivent être reçues et vénérées avec égal senti-
ment d’amour et de respect”, §82. D’ailleurs, la Parole de Dieu
est autant écrite que transmise. La Bible et la Tradition sont donc
également Parole authentique de Dieu, cf. §85.

Les évêques de France dans leur Catéchisme pour adultes ajou-


tent à cela que l’Ecriture ne se comprend réellement qu’en lien
avec toute la réalité historique et vivante de l’Eglise. Elle est
donc inséparable de la Tradition apostolique. (CEF §58)

Cela, bien sûr, ne nous aide guère à discerner ce qui fait partie de
cette Tradition. Un si grand respect et une telle autorité accordés
à un ensemble d’écrits produits à travers les siècles de l’Histoire
chrétienne soulèvent des questions sérieuses. Comme l’écrit
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 20

Jacques Blocher : “la Tradition, étant orale, est pratiquement


indéfinissable”5. Quel critère faut-il appliquer pour savoir si telle
opinion doit être reconnue comme faisant partie de la Tradition ?
Qui détermine le critère et qui l’applique ? En lieu et place d’une
Ecriture Sainte aux contours bien définis, nous sommes ici en
face d’une entité vague, une nébuleuse d’opinions, qui permet
tous les dérapages. Les évêques de France nous disent trouver la
Tradition dans la prédication de ceux qui, avec la succession
épiscopale, reçurent un charisme certain de vérité et surtout dans
la liturgie de l’Eglise. (CEF §59) Le Catéchisme dans le §83, en
distinguant les “traditions” théologiques, disciplinaires, litur-
giques et dévotionnelles nées au cours du temps dans les Eglises
locales, semble ouvrir la porte assez largement aux opinions et
pratiques parfois bizarres que l’Histoire de l’Eglise a connues.
C’est dans le même paragraphe, en petites lettres, que le Caté-
chisme pose donc le rôle clé du Magistère de l’Eglise qui peut
maintenir, modifier ou abandonner les différentes expressions de
la Tradition. Les évêques de France, eux aussi en petites lettres,
prônent à la fois le recours à l’Ecriture et à la parole du Magis-
tère.

Le Magistère.
Nous arrivons ici au point essentiel de ce chapitre. Tout ce que le
Catéchisme et l’Eglise peuvent dire de beau et de vrai sur la Pa-
role de Dieu doit être compris et reçu au travers du filtre du Ma-
gistère. Ce filtre est hautement restrictif.
“La charge d’interpréter de façon authentique la Parole de Dieu,
écrite ou transmise, a été confiée au seul Magistère vivant de
l’Eglise...” Cette charge appartient aux évêques en communion
avec le successeur de Pierre, l’évêque de Rome, selon la formule
consacrée, §85. Le Magistère se place-t-il alors au-dessus de la
Parole de Dieu ? Non, dit le §86, mais il la sert. Ce service à la
Bible doit toutefois être reçu avec docilité par les fidèles. Le §87

5
Jacques BLOCHER, Le Catholicisme à la lumière de l'Ecriture Sainte, Nogent-sur-
Marne : Editions de l'Institut Biblique de Nogent, 1979, p.20.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 21

porte à cet endroit un renvoi au §1548 qui rappelle l’autorité du


prêtre qui agit en la personne du Christ. Cette docilité est alors
due non seulement aux évêques, mais aux prêtres. Il ne s’agit pas
pour les fidèles de discuter et de contester cet enseignement sui-
vant leur propre lecture de la Bible, mais de se plier et de donner
à cet enseignement “l’assentiment religieux de leur esprit”, §892.
Après tout, n’a-t-on pas vu se multiplier des mouvements fana-
tiques, “illuminés”, anarchisants là où on a voulu détacher la
Bible de l’Eglise catholique ? Et qui pourrait prétendre discerner
dans la Tradition tout seul les expressions fidèles et celles qui ne
le seraient pas ? (Cf. CEF §63) Le danger est donc grand et les
raisons de faire confiance au Magistère sont nombreuses et impé-
rieuses.

Le Catéchisme est encore plus précis. Dans les paragraphes 888 à


892, il revient sur la mission du Magistère. Christ a conféré à
l’Eglise “une participation à sa propre infaillibilité”. Conduit par
le Magistère vivant de l’Eglise, le peuple de Dieu s’attache indé-
fectiblement à la foi. Le Magistère veille donc à ce que le peuple
demeure dans la vérité qui libère et jouit pour ce faire d’un nou-
veau charisme, celui de l’infaillibilité en matière de foi et de
mœurs. Celle-ci est concentrée dans la papauté et dans
l’épiscopat catholique et requiert du peuple une adhésion dans
l’obéissance.

C’est donc le Magistère ordinaire et universel du Pape et des


évêques qui détermine ce que les fidèles doivent croire, pratiquer
et espérer, §2034. L’Eglise atteint le “degré suprême dans la par-
ticipation à l’autorité du Christ” à cause du charisme de
l’infaillibilité. Il n’est alors pas étonnant qu’il existe un devoir
d’obéissance, un devoir de docilité, §2037. Il ne convient pas, dit
le §2039, d’opposer la conscience personnelle et la raison (...) au
Magistère de l’Eglise. Après tout, celle-ci agit en tout par sollici-
tude maternelle et doit donc pouvoir s’attendre à un véritable
esprit filial à son égard de la part des chrétiens, §2040. Les com-
mandements de l’Eglise sont un genre de condensé de cet ensei-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 22

gnement infaillible dont le caractère obligatoire ne doit pas lais-


ser de doute. (“Les Dimanches Messes entendras et les Fêtes
pareillement; tous tes péchés confesseras à tout le moins une fois
l’an; ton Créateur tu recevras au moins à Pâques humblement; les
Fêtes tu sanctifieras qui te sont de commandement; le jeûne pres-
crit garderas et l’abstinence également”, §2041-2043.) Manifes-
tement, ils n’ont pas été modifiés ou abandonnés par le Magistère
infaillible.
Pourtant, le Catéchisme sait aussi que Dieu parle directement,
donc sans l’intermédiaire de l’Eglise et de son Magistère, au
cœur de l’homme, cf. §1706 et l’ensemble des paragraphes sur la
conscience morale6. S’il est vrai que “l’être humain doit toujours
obéir au jugement certain de sa conscience” et que “la Parole de
Dieu est une lumière sur nos pas. Il nous faut l’assimiler dans la
foi et dans la prière, et la mettre en pratique. Ainsi se forme la
conscience morale” (§1790, 1802), alors, que faire quand cette
conscience ainsi éclairée se trouve en contradiction totale avec le
Magistère ? C’est le cas des “schismatiques” que nous sommes
accusés d’être. Il y a ici une contradiction évidente dans le Caté-
chisme.

Le Décalogue (les Dix Commandements) forme la base privilé-


giée de l’exercice du Magistère en matière de morale. Il est certes
regrettable que dans la première édition du Catéchisme le hui-
tième commandement ait été omis, sans doute par erreur tech-
nique. Il est beaucoup plus regrettable, que le deuxième com-
mandement (l’interdiction des statues et des images) soit toujours
aussi malmené, au point que dans la version de Deutéronome 5
(page 423 du Catéchisme) il a été tout simplement rayé. Le trai-
tement que ce commandement reçoit plus loin laisse rêveur. Un
des commandements les plus élaborés dans l’Ecriture est com-
menté par quatre courts paragraphes (2129-2132), expliquant que
le Concile de Nicée en 787 a jugé bon de reconnaître une nou-

6
§1776-1802 : voir le détail dans l’appendice 2, point 1 : A qui obéir : à sa cons-
cience ou à l’église ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 23

velle économie des images et des statues dont la flagrante contra-


diction avec le deuxième commandement est évacuée par une
interprétation des plus scabreuses ! De toute évidence, le Magis-
tère a le bras long.

L’Eglise soumise à la Bible


Venons-en à quelques mots d’appréciation plus détaillés. Ici et là,
nous avons déjà laissé percer une note de critique. Celle-ci ne
provient pas simplement d’une compréhension protestante. La
question n’est pas : que croyons-nous ? ou, vu de l’intérieur de
l’Eglise romaine : que croient les Protestants ? La grande ques-
tion qui doit interpeller les Catholiques autant que les Protestants
est : que dit l’Ecriture ? Est-ce que notre façon de voir est cohé-
rente avec la Parole de Dieu ? Le problème de l’autorité spiri-
tuelle est trop important pour en faire une simple querelle ecclé-
siastique. Nous devons savoir ce que Dieu a dit... et dit encore
aujourd’hui.

La Parole de Dieu asservie


Quelle est l’autorité suprême dans l’Eglise de Dieu ? Malgré
beaucoup de choses positives dites au sujet de l’Ecriture Sainte,
l’Eglise se réserve à elle-même le dernier mot. C’est elle, et seu-
lement elle, par son hiérarchie établie, qui détermine de façon
authentique ce qu’il faut croire et comment il faut le croire.
Est-elle au-dessus de la Bible ? Le §86 dit non, mais dans la pra-
tique cela s’avère quand même être le cas. Il y a dans l’Eglise
catholique un triple fondement qui soutient tout l’édifice. Il y a la
Parole de Dieu qui vient à nous par la Bible et par la Tradition, et
au-dessus de cette double base se trouve le Magistère infaillible
qui est l’autorité finale et donc suprême. En citant Vatican II, le
Catéchisme écrit, §95 : “Il est donc clair que la Sainte Tradition,
la Sainte Ecriture et le Magistère de l’Eglise, par une très sage
disposition de Dieu, sont tellement reliés et solidaires entre eux
qu’aucune de ces réalités ne subsiste sans les autres, et que toutes
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 24

ensemble, chacune à sa façon, sous l’action du seul Esprit Saint,


contribuent efficacement au salut des âmes”. La Bible se trouve
bien encadrée dans cette phrase. Son autorité est diluée, endiguée
et apprivoisée. Son rôle est de confirmer tout ce que dit le Magis-
tère, plutôt que de le mettre en question. L’Eglise s’est affranchie
de la Bible. Du coup, elle se trouve soumise à d’autres maîtres et
qui dira que ce qu’elle prend pour être la voix du Saint-Esprit le
soit effectivement ?
Le lendemain du vote de la Constitution Dei Verbum (la Parole
de Dieu), l’Osservatore Romano du 19 novembre 1965 écrit :
“L’Eglise prolongement du Christ, dépositaire de la Révélation,
de l’économie du salut, est l’Evangile, la Parole Vivante, la vie
du Christ”7

Si d’un côté, pour savoir ce que dit l’Ecriture, les fidèles doivent
se laisser guider par la perception qu’en a eue l’Eglise dans sa
Tradition et si d’un autre côté la collectivité des fidèles ne peut se
tromper dans la foi lorsque, des évêques jusqu’au dernier des
fidèles laïcs, elle apporte aux vérités concernant la foi et les
mœurs un consentement universel, ne finit-on pas par raisonner
en cercle ? Le consentement est obligatoire et en même temps il
engendrerait l’infaillibilité ! C’est vraiment trop beau (§92, cf.
CEF §56, 64). Et qui dit que le grand nombre a nécessairement
raison ?
Dès que l’Ecriture est dite être lue “bien plus dans le cœur de
l’Eglise que dans les moyens matériels de son expression”, §113,
on soumet la parole incorruptible de Dieu à la faiblesse des hu-
mains. Elever cette faiblesse à l’infaillibilité relève d’une audace
affreuse. C’est ouvrir l’Eglise au risque de voir s’installer l’erreur
à la place de la vérité et l’arrogance à la place de l’humilité. C’est
en dernier ressort Dieu qui se trouve détrôné et domestiqué par
les hommes. Au lieu de dire : que veut le Seigneur ?, on n’entend
plus que : que dit l’Eglise ? Par exemple, que la mort soit la con-
séquence du péché, ce n’est plus avant tout la Bible qui l’affirme,

7
Jacques BLOCHER, Op.cit. p.20 C'est nous qui soulignons.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 25

mais c’est maintenant le Magistère de l’Eglise, en interprète au-


thentique des affirmations de la Sainte Ecriture et de la Tradition,
§1008. Il ne faut donc pas le croire parce que la Bible le dit clai-
rement, mais parce que l’Eglise le dit. “Car tout ce qui concerne
la manière d’interpréter l’Ecriture est finalement soumis au ju-
gement de l’Eglise, qui exerce le ministère et le mandat divine-
ment reçus de garder la parole de Dieu et de l’interpréter”, §119.
La citation est de Vatican II (Dei Verbum). L’épée à double tran-
chant qu’est l’Ecriture, Hébreux 4.12, s’en trouve quasiment
émoussée. Ce qui plus est, la Bible ne connaît rien à ce “mandat
divinement reçu”; c’est une invention humaine.

Il y a deux façons d’enlever la Bible au peuple. La première est


l’interdiction, la mise à l’index de la Parole de Dieu. De longs
siècles durant, cela a été la pratique officielle de l’Eglise, de sorte
que la Bible est devenue dans l’esprit de beaucoup de gens “un
livre protestant” et dangereux. Depuis le début du XX e siècle,
l’Eglise a commencé à changer de langage et à encourager la
lecture de la Parole de Dieu. Nous ne pouvons que nous en ré-
jouir ! Cependant, il est possible d’enlever la Bible au peuple
d’une autre manière. On peut en stimuler la lecture tout en stipu-
lant que l’interprétation de son texte doit rester le domaine privi-
légié de l’Eglise. Cela revient à dire : lisez la Bible, mais ne
croyez que ce que l’Eglise vous enseigne. Voilà en termes
simples et clairs le rôle du Magistère.

La Parole de Dieu libérée


Or, quelle était la pratique du temps des apôtres ? Où se situait
l’autorité finale dans les questions de foi et de morale aux débuts
de l’Eglise ? Regardons rapidement ce qu’en dit le Nouveau Tes-
tament.
Dans un texte que nous avons déjà cité, le livre des Actes rap-
porte la réaction des Juifs de Bérée lors de la prédication de
l’Evangile par l’apôtre Paul. Au lieu de le croire sur parole, ils
vont vérifier ses dires dans les Ecritures. Mauvaise foi que cela :
oser mettre en doute la Tradition apostolique vivante dans la
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 26

bouche même d’un apôtre qui devait incarner le Magistère de


l’Eglise ? Pas du tout ! Le texte dit : “Ceux-ci avaient de meil-
leurs sentiments que ceux de Thessalonique; ils reçurent la parole
avec beaucoup d’empressement, et ils examinaient chaque jour
les Ecritures, pour voir si ce qu’on leur disait était exact”, Actes
17.11. Ils reçoivent un compliment pour avoir pris la peine de
vérifier. Leur étude de la Bible témoigne du sérieux de leur foi.

En Actes 15, l’Eglise est devant un problème théologique majeur,


à la fois une question de foi et de morale. Elle se réunit en pré-
sence de Pierre et de Paul, bien que ce ne soient pas eux qui pré-
sident la rencontre mais Jacques, le (demi-)frère du Seigneur et
jusque là un inconnu dans le texte du livre des Actes. Qu’est-ce
qui va calmer cette assemblée agitée et la conduire vers une déci-
sion unanime ? L’appel aux Ecritures, Actes 15.15-19.

Jésus avait dit que la parole de Dieu est la vérité, Jean 17.17 et
que le fait de demeurer dans sa parole nous ferait connaître la
vérité et nous rendrait libres, Jean 8.31,32. Quelle est cette pa-
role ? Les dogmes de l’Eglise ? C’est ce que prétend le Caté-
chisme, §89, mais pour lire cela dans les paroles de Jésus il faut
s’adonner à une bien curieuse façon d’interpréter la Bible. Face
aux Juifs partisans de la Tradition, Jésus renvoie les gens à
l’Ecriture : “Vous êtes dans l’erreur, parce que vous ne compre-
nez ni les Ecritures, ni la puissance de Dieu”, Matthieu 22.29. En
fait, il accusait les Pharisiens d’annuler la Parole de Dieu par leur
tradition, Marc 7.13. Selon les paroles mêmes de Jésus, il est
donc possible d’annuler la parole de Dieu par la tradition. Que
dirait-il aujourd’hui ?

Il est tristement possible d’annoncer un autre évangile ou un autre


Jésus, 2 Corinthiens 11.4; Galates 1.8. Même un ange du ciel, et à
plus forte raison un homme d’Eglise, fût-il pasteur, prêtre ou
pape, ne doit pas être cru sur parole s’il devait annoncer un autre
évangile. Or, comment le savoir si on n’étudie et si on ne médite
pas cette parole ? Nous devons examiner toutes choses, surtout
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 27

quand quelqu’un se met à enseigner la Bible, 1 Thessaloniciens


5.21. Nous devons nous enraciner en Christ, nous affermir dans
la foi d’après les instructions que nous trouvons dans la Parole de
Dieu pour ne pas devenir la proie des hommes par leurs philoso-
phies et par leurs vaines tromperies selon leurs traditions, Colos-
siens 2.7,8.

Quand notre conscience, éclairée par la Parole de Dieu s’insurge


contre le Magistère de l’Eglise, nous ne devons pas la faire taire,
comme le suggère le §2039, déjà cité, parce que nous devons
avant tout garder la foi et une bonne conscience, 1 Timothée
1.19. Sans cela on risque fort de faire naufrage en ce qui con-
cerne la foi. Or, comment garder ces deux sans la connaissance
des Ecritures ? C’est par elles que l’homme de Dieu, tout homme
de Dieu, tout chrétien, devient adapté et préparé à toute œuvre
bonne. C’est encore par elles que l’on reçoit la sagesse en vue du
salut par la foi en Jésus-Christ, 2 Timothée 3.14-17.
Bien sûr, nous devons respecter nos conducteurs spirituels parce
qu’ils annoncent la parole de Dieu, Hébreux 13.7. La Bible ne
nous encourage pas à un individualisme sans bornes. Nous avons
besoin de l’Eglise. Ensemble, comme disciples de Jésus-Christ,
nous sommes l’Eglise. Mais cette solidarité essentielle ne va ja-
mais au prix de la responsabilité individuelle. “Tu ne suivras pas
la multitude pour faire le mal”, dit déjà l’Ancien Testament,
Exode 23.2. Nous ne sommes pas libres de faire dire n’importe
quoi à la Bible. C’est l’Esprit de Dieu qui seul peut nous conduire
dans toute la vérité, Jean 16.13. Et il le fait en général dans la
communauté des croyants comme en Actes 2.42. Mais si même
l’apôtre Paul ne croyait pas devoir dominer sur la foi des autres,
2 Corinthiens 1.24, quel homme d’Eglise oserait le faire ? Celui
qui prétend pouvoir le faire mérite notre suspicion, et non pas
notre obéissance docile !

Où réside l’autorité finale dans l’Eglise ? Est-ce la Bible par


l’Eglise et donc soumise à elle ou est-ce que l’Eglise se doit
d’être soumise à la parole de Dieu telle qu’elle nous vient à tra-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 28

vers la Bible ? Si c’est cela, et nous le croyons avec l’Eglise Pri-


mitive, alors, il nous faut soumettre toute doctrine d’Eglise à
cette Parole. Et en premier lieu cette doctrine par laquelle
l’Eglise se définit elle-même. Ce sera l’objet du prochain cha-
pitre.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 29

3 . Q U ’ E S T- C E QU E L’ E G LI S E ?

Après la question de l’autorité de l’Ecriture Sainte, il est logique


de parler de l’Eglise. Dans la mesure où l’autorité ecclésiastique
s’érige au-dessus de la Bible par le biais du Magistère, la concep-
tion de ce qu’est l’Eglise devient une question de première im-
portance. Dans l’Eglise catholique, la doctrine de l’Eglise a une
place de choix qui ressort d’ailleurs clairement lors de Vatican II.
La constitution sur l’Eglise, Lumen Gentium, est bien le premier
en rang et en importance de la liste des documents conciliaires.
Mais cela se voit aussi d’une autre façon.
Dans les églises protestantes, comme nous l’avons vu, l’autorité
de l’Ecriture Sainte est placée au-dessus de l’Eglise. L’Eglise et
ses structures sont donc soumises à la Parole de Dieu. L’unité de
l’Eglise n’y est donc pas primordiale. La fidélité à la Bible prend
le pas sur l’unité de l’Eglise. Dans un monde idéal, cela ne pose-
rait aucun problème et les deux iraient la main dans la main. Mais
notre monde n’est pas idéal. Le péché et la fausse doctrine exi-
gent toujours à nouveau que l’Eglise choisisse entre sa fidélité à
Dieu et à sa Parole ou son unité. Une église qui devient infidèle à
cette Parole sera appelée à se réformer sans quoi elle deviendra
une cause de division. Son infidélité aura porté atteinte à l’unité.
Il faut qualifier le mot infidèle. Aucune église, et aucune secte
chrétienne, n’est infidèle à 100%. Il s’y trouve toujours des restes
plus ou moins importants de la vérité biblique. Infidèle veut dire
qu’on abandonne plusieurs des fondements de l’enseignement
biblique. Il s’agit de questions comme : la Trinité, la personne et
l’œuvre de Christ, la voie du salut, la place de la Parole de Dieu
et l’autorité dans l’Eglise. Lorsque l’unité de l’Eglise se fait au
prix de la fidélité dans ces domaines, il faudra bien se poser la
question dans quelle mesure cette église est encore une église
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 30

chrétienne. D’ailleurs, nous nous posons tous cette question face


à certaines sectes, comme les Témoins de Jéhovah et les Mor-
mons. Leur abandon de l’un ou plusieurs des éléments des fon-
dements de la foi chrétienne les place hors du troupeau de Christ.
C’est bien pour cette raison que nous les appelons sectes.
Qu’observons-nous dans l’Eglise catholique ? L’Eglise se situe
de fait au-dessus de la Parole. Du coup, son unité prendra tou-
jours le pas sur la fidélité. Dans quel sens nous permettons-nous
de dire cela ? Pour elle, son unité ne saurait être mise en danger
par ce qui sera toujours perçu comme une interprétation particu-
lière de la Bible, et donc sans autorité. Le Magistère est le gar-
dien, nous sommes tentés de dire : le geôlier, de l’unité de
l’Eglise. Celui qui met en doute ce Magistère en enseignant autre
chose qu’elle sur ces questions fondamentales se met hors de
l’Eglise. Tôt ou tard, il sera repris, pressé de se mettre dans le
rang, sans quoi il sera exclu. Et hors de l’Eglise, il n’y a pas de
salut, nous y reviendrons plus loin. (Nous recommandons à ce
sujet la lecture du témoignage récent de l’ancien prêtre Gregor
Dalliard8)
En fait, l’Eglise admet une très grande diversité de pensée et de
vie en son sein, mais aucune liberté d’interprétation biblique pu-
blique. “Tu ne mettras pas l’unité de l’Eglise en danger” y est
quasiment élevé au rang de commandement majeur. L’unité est
devenue le nouveau chibboleth (cf. Juges 12.6).
Comment s’articule la conception catholique de l’Eglise selon le
Catéchisme ?

Le Credo
“Je crois en l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique” dit le
Symbole de Nicée-Constantinople, p 50 du Catéchisme. Les pa-
ragraphes 811 à 870 développent cette phrase. “L’Eglise, rappelle
le premier Concile du Vatican, en raison de sa sainteté, de son
8
Gregor DALLIARD, Je n’avais plus le droit d’être prêtre, Nyon (Ch) : Librairie
Chrétienne Carrefour, 1993.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 31

unité catholique, de sa constance invaincue, est elle-même un


grand et perpétuel motif de crédibilité et une preuve irréfragable
de sa mission divine”, §812. Cette quadruple définition de
l’Eglise est donc inextricablement liée à sa crédibilité.

L’Eglise est une.


Parce que Dieu est un, l’Eglise est une et cette unité est de son
essence même. Le Catéchisme cite à ce propos Clément
d’Alexandrie :
“Quel étonnant mystère ! Il y a un seul Père de l’univers, un
seul Logos de l’univers et aussi un seul Esprit Saint, partout
identique; il y a aussi une seule vierge devenue mère, et j’aime
l’appeler Eglise”, §813.
Cette unité est visible. C’est “l’Eglise comme société constituée
et organisée dans le monde” et qui “est réalisée dans (subsistit in)
l’Eglise catholique gouvernée par le successeur de Pierre et les
évêques qui sont en communion avec lui”, §816 qui cite les mots
même de Lumen Gentium. Dans ce même paragraphe figure aussi
un extrait du Décret sur l’Œcuménisme : “C’est, en effet, par la
seule Eglise catholique du Christ, laquelle est ‘moyen général de
salut’, que peut s’obtenir toute la plénitude des moyens de salut”.
Il était le but du Seigneur de constituer ainsi “sur la terre un seul
Corps du Christ auquel il faut que soient pleinement incorporés
tous ceux qui, d’une certaine façon, appartiennent déjà au Peuple
de Dieu”.
Bien sûr, l’Œcuménisme a créé une nouvelle situation sur la-
quelle nous reviendrons un peu plus loin. Mais les autres Eglises
puisent leur force dans la plénitude de grâce et de vérité que le
Christ a confiée à l’Eglise catholique, §819. Vues ainsi, elles ne
brisent plus l’unité, elles l’appellent. Cette unité visible “subsiste
de façon inamissible dans l’Eglise catholique”, §820 (= CEF
§340). Cela veut dire qu’il est impossible qu’elle se perde. Le
Catéchisme des évêques de France est à ce sujet encore plus clair
en ce qu’il inscrit dans ce cadre de l’unité de l’Eglise le rôle par-
ticulier du pontife romain avec son “pouvoir ordinaire, suprême,
plénier, immédiat et universel (...) Il est le principe perpétuel et
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 32

visible et le fondement de l’unité qui lie entre eux soit les


évêques, soit la multitude des fidèles”, CEF §304.9

Qu’en est-il de l’unité de l’Eglise selon le Nouveau Testament ?


Sans pouvoir écrire ici tout un traité sur le sujet, il nous semble
que les quatre choses suivantes sont fondamentales.

1. Jésus bâtit son Eglise sur le fondement de la confession de


Pierre et dit que les portes du séjour des morts ne prévau-
dront pas contre elle, Matthieu 16.16-18. L’Eglise qu’il bâti-
rait serait donc une entité durable. Est-elle bâtie pour autant
sur l’unité visible entre les successeurs de Pierre (le texte
n’en dit rien) et les masses de croyants de nom ? Il serait sur-
prenant que l’Eglise dont Jésus parle ici puisse être autre
chose que l’assemblée de ceux qui, à l’instar de Pierre, se
démarqueraient du climat religieux ambiant par un attache-
ment personnel et entier au Seigneur Jésus-Christ. Jésus sou-
ligne ici la pérennité de l’Eglise. Mais de quelle église ? Ma-
nifestement, elle serait davantage une communauté souffrante
qu’une église triomphante, une communauté pauvre qu’une
église riche, une communauté d’étrangers et de voyageurs sur
cette terre qu’une église d’état. Manifestement, elle serait da-
vantage un groupe de disciples qu’une église de chrétiens, un
groupe méprisé qu’une église respectée, un groupe peu nom-
breux qu’une église nationale. Le fait même que l’Eglise soit
tirée du peuple d’Israël constitue au moins un précédent. Ne
serait-elle pas souvent un petit peuple tiré de la foule reli-
gieuse, même si cette dernière continuerait à se prendre pour
“le Peuple de Dieu” ? Ainsi, l’unité sera plutôt intérieure et
réelle qu’extérieure et artificielle et la pérennité de cette unité
sera exprimée par la fidélité plutôt que par la visibilité, par la
discontinuité structurelle plutôt que par sa continuité.

2. En Jean 17, Jésus prie pour l’unité de ceux qui croient en lui,
vv. 11, 21-23. Mais qui sont-ils ? Quelle est leur foi ? Com-
9
Voir appendice 3 : Une église unie ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 33

ment leur unité s’exprime-t-elle ? Sont-ils les croyants de


toute église qui se dit ‘église chrétienne’ ? Suffit-il d’être
baptisé bébé pour être de ceux qui croient en lui ? Le texte dit
(c’est une prière et nous nous en approchons avec hésitation;
la terre sous nos pieds est sainte !) qu’ils sont sortis du
monde, qu’ils ne sont plus du monde. Ils ont reconnu Jésus
comme le Fils de Dieu et se sont mis à le suivre. Ils ont reçu
sa Parole qui est la vérité. Ils forment une communauté mis-
sionnaire car d’autres croiront par leur parole. Ils ne sont cer-
tainement pas des chrétiens de nom. Aussi leur unité ne peut
être en soi une unité extérieure, administrative. Elle est une
unité de vie, d’amour, de but, tout comme l’unité entre le
Père et le Fils. C’est une unité qui vient par la sanctification
par la Parole, plutôt que par la discussion des comités. Cette
unité ne crée pas le respect pour une organisation impres-
sionnante, mais l’envie d’une confiance personnelle en Jésus.

3. Cette unité est d’abord et avant tout exprimée au plan local.


Pratiquement tous les passages bibliques qui traitent de
l’unité sont concernés par ce qui se passe à l’intérieur d’une
église locale. Ce n’est pas autant l’unité entre plusieurs
églises que l’unité dans l’église qui prime. Cette unité est
donnée, Ephésiens 4.3, et nous devons la conserver de toute
notre force. Elle est donnée en vertu d’une vie commune re-
çue par la repentance et la foi. Et entretenue par l’amour fra-
ternel concret, elle peut faire envie au monde. L’Eglise est
appelée à être une société alternative, et non une copie con-
forme des structures humaines du passé ou du présent. Lors-
que l’apôtre Jean parle de l’amour qui manifeste l’unité, il est
question de l’amour du frère qu’on voit, avec qui on vit dans
le cadre d’une même communauté locale, 1 Jean 4.20,21.
L’unité administrative ne prouve rien à personne. L’unité qui
frappe est celle qui existe et qui s’exerce entre chrétiens qui
se côtoient.

4. Le Nouveau Testament mentionne assez souvent les atteintes


à l’unité. Il suffit de parcourir un texte comme Ephésiens
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 34

4.25-5.2 pour se rendre compte combien notre comportement


égoïste peut mettre en danger l’unité. Cependant, il semble
que l’erreur, la fausse doctrine, est un danger plus important
encore. Car la fausse doctrine sape le fondement même de
l’unité. L’infidélité dans l’enseignement nous place hors de
l’Eglise. Les Galates couraient ce danger, Galates 1.6-10;
Timothée le rencontrait, 1 Timothée 6.3-5; 2 Timothée 2.24-
26; 3.5. Quand des enseignements déviants se répandent dans
l’église, deux choix sont devant ses membres : soit ils exerce-
ront une saine discipline et écarteront ces doctrines, s’il le
faut en mettant dehors ceux qui les enseignent, soit ils ne fe-
ront rien par peur de porter atteinte à l’unité. Dans le deu-
xième cas, l’église toute entière risque d’abandonner la véri-
té. On assistera alors à la naissance d’une église infidèle,
même si elle est majoritaire dans telle ou telle région. Ce fut
le cas, entre autres, des églises ariennes au IVe siècle.

L’Eglise est sainte.


Cette sainteté de l’Eglise est encore imparfaite sur terre. Ses
membres ont donc besoin de se sanctifier en son sein. Car
“c’est en se soustrayant à sa vie qu’ils tombent dans les péchés
et les désordres qui empêchent le rayonnement de sa sainteté.
C’est pourquoi elle souffre et fait pénitence pour ces fautes,
dont elle a le pouvoir de guérir ses enfants par le sang du Christ
et le don de l’Esprit Saint”, §827.
L’exemple des saints, canonisés par l’Eglise, peut aider les
croyants et illustre dans quelle mesure la sainteté de l’Eglise sus-
cite la sainteté de ses membres, CEF §309. Parmi eux, la Vierge
occupe une place de choix : en elle, l’Eglise atteint déjà à la per-
fection, “en elle, l’Eglise est déjà la toute sainte”, §828,829.
Comment tendre au mieux vers cette sainteté ? En choisissant “un
état de vie qui est précisément, dans l’Eglise, signe de la sainteté
à laquelle... tous les disciples du Christ sont appelés”, à savoir la
vie religieuse célibataire, témoignage “d’une vie évangélique
dans l’esprit des béatitudes”, CEF §314.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 35

Qu’est-ce que le Nouveau Testament enseigne sur la sainteté de


l’Eglise ? Il est vrai que l’Eglise est un temple saint qu’il ne faut
pas détruire, mais Paul ajoute aussi vite : “car le temple de Dieu
est saint, et c’est ce que vous êtes”, 1 Corinthiens 3.17. L’Eglise
est sainte parce qu’elle est constituée de membres qui le sont. Et
parce que la sainteté de l’Eglise est inextricablement liée à la
sanctification de ses membres, cette sainteté ne sera parfaite qu’à
l’avènement de Christ quand il la fera paraître devant lui sainte et
sans défaut, Ephésiens 5.26,27. La sainteté est le propre de
chaque chrétien, cf. 1 Corinthiens 1.2. En Christ, il est sanctifié et
appelé à vivre dans la sainteté, séparé du péché, consacré au Sei-
gneur et incorporé dans l’Eglise.
La sainteté de l’Eglise n’est donc pas une donnée indépendante.
Ce n’est pas en se soustrayant à l’Eglise sainte que les gens tom-
bent dans le péché, mais en se soustrayant à la personne de
Christ. Et ce n’est pas la même chose ! Il est possible de devenir
infidèle à Christ tout en continuant à être fidèle à l’Eglise et vice-
versa ! Une église infidèle, est-elle encore un temple saint ? Une
communauté attachée à Christ, peut-elle être autre chose qu’un
temple saint ?
La Bible ne relie aucunement la sainteté et le célibat. Le célibat,
nous y reviendrons, est un charisme, 1 Corinthiens 7.7. Choisir
un état de vie célibataire en soi ne témoigne donc aucunement
d’une plus éclatante sainteté. Même la vierge Marie n’a pas eu
une sainteté diminuée après avoir vécu une vie mariée dans le
plein sens du mot. La sainteté se situe dans le cœur, dans le ca-
ractère. Ne cherchons pas à la situer ailleurs. D’ailleurs, où les
Béatitudes (Matthieu 5.1-12) exemplifient-elles ce genre de vie
célibataire ? Et depuis quand, la chasteté est-elle identique au
célibat ?

L’Eglise est catholique.


Le mot catholique, universel, s’applique à l’Eglise parce que
Christ est présent en elle, ce dont témoignent entre autres une vie
sacramentelle intégrale et un ministère ordonné dans la succes-
sion apostolique, §830. Elle est encore catholique parce qu’elle a
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 36

reçu une mission universelle et qu’en elle, tout le genre humain


est représenté.
Chaque église particulière est catholique parce qu’elle est en
communion avec l’Eglise de Rome, de laquelle Christ a dit que
les portes de l’enfer ne prévaudraient jamais sur elle, §834. Alors,
pour être vraiment catholique, une église doit être liée au pape
qui “garantit les légitimes diversités” et veille à ce qu’elles soient
profitables à l’unité, CEF §318. Cependant, par sa foi religieuse,
tout homme appartient à cette Eglise, que ce soit parfaitement ou
imparfaitement. L’Eglise se sent liée de cette manière à toutes les
religions du monde. Car toute l’humanité doit retrouver en elle
son unité et son salut. Car hors d’elle, il n’y a pas de salut. Ceux
qui savent l’Eglise catholique “fondée de Dieu par Jésus-Christ
comme nécessaire” et qui refusent d’y entrer “ne pourraient être
sauvés”, §846.

Il n’est guère étonnant que la notion de l’universalité de l’Eglise


et le nom propre d’Eglise catholique se voient mélangés dans ces
paragraphes. Ce mélange conduit le Catéchisme à une confusion
entre catholicité et unité. Ne considérer comme “catholiques” à
part entière que ceux qui sont unis à l’évêque de Rome est d’un
côté une somme d’orgueil et d’arrogance, de l’autre côté une
simple question de logique ! Tout dépend de la définition.
L’enseignement biblique est fort restreint à ce sujet. Il ne nous
permet pas d’aller au delà de la mission universelle de l’Eglise de
Jésus-Christ. Contrairement au peuple d’Israël, l’Eglise est une
entité supranationale. Elle est envoyée vers toutes les nations,
Matthieu 28.19, pour les appeler à la conversion et la foi en
Christ. Ceux qui refusent cet appel, peu importe leurs convictions
religieuses, sont séparés de Christ, Jean 3.36; Actes 4.11,12.
D’une catholicité liée de façon absolue et définitive à l’église de
Rome, la Bible ne sait rien. De toute évidence, la promesse de
l’invincibilité de l’Eglise en Matthieu 16.18 n’a aucun rapport
avec l’église telle qu’elle peut exister à un certain endroit. Bien
plus, cela semble aller contre l’esprit de ce texte. Toute église qui
marche humblement avec le Seigneur Jésus fait partie de l’Eglise
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 37

universelle dans le sens de l’Eglise de Dieu de tous les temps et


de tous les lieux. Toute église qui ne marche pas avec lui risque
de mourir spirituellement ou d’être vomie de sa bouche, cf. Apo-
calypse 3.1,16.
Comparer l’Eglise de Christ à l’arche de Noé, §845, est certaine-
ment justifié. Confondre l’Eglise catholique et l’arche de Noé
serait une erreur lamentable. C’est par ce genre de procédé que
les sectes arrivent à leurs conclusions exclusivistes.

L’Eglise est apostolique.


Ceci a un triple sens : elle est bâtie sur le fondement des apôtres;
elle transmet l’enseignement des apôtres et elle est enseignée par
les successeurs des apôtres, §857. La fidélité à cette foi aposto-
lique est garantie par l’Eglise dans son ensemble. Car “la collec-
tivité des fidèles... ne peut se tromper dans la foi”, CEF §321.
Tout comme la charge confiée par Jésus à Pierre était destinée à
être transmise à ses successeurs, de même aussi les évêques suc-
cèdent aux apôtres pour assurer la pérennité de leur charge, §862.
D’ailleurs, l’histoire de l’Eglise témoigne de cette succession
ininterrompue du ministère apostolique des évêques, qui, avec
celui des prêtres et des diacres fait partie de la structure essen-
tielle de l’Eglise, CEF §322,323.
L’importance de cette conception hiérarchique de l’Eglise saute
aux yeux lorsque l’Eglise se définit dans le chapitre sur le mys-
tère de l’Eglise, §771. Elle est à la fois, et notez bien l’ordre :
“société dotée d’organes hiérarchiques et Corps Mystique du
Christ...” Elle est pour ainsi dire l’Eglise de Pierre, avant d’être
celle du Christ.

Deux remarques suffiront ici, puisque nous aurons à revenir sur


cette question en parlant de la papauté.
Quelle garantie avons-nous que l’enseignement de notre église
particulière est “apostolique”, donc, fidèle à l’enseignement des
apôtres ? Sûrement, l’assentiment de la collectivité des croyants
d’une église donnée ne saurait nous offrir cette garantie ! Surtout
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 38

si cet assentiment est quelque peu forcé, comme nous l’avons


déjà vu, par le devoir de la docilité. De nouveau, nous voyons ici
comment l’unité de l’église a éclipsé la fidélité à l’Ecriture. Et
comment l’objectivité de la Parole de Dieu infaillible est rempla-
cée par la subjectivité des hommes faillibles.
Nous voyons cela très clairement dans la doctrine de la succes-
sion apostolique. Aucun texte de l’Ecriture ne peut être invoqué
pour la prouver. Même l’appel à l’histoire est malaisé. L’histoire
peut tout prouver, dépendant de la personne qui l’interprète.
Toute vérité et toute erreur trouvent des appuis dans l’histoire. Et,
parlant de cette histoire, est-il concevable que ne fut-ce qu’une
poussière de vérité soit transmise par plusieurs des “successeurs
de Pierre” à l’image des Borgia et d’autres de la même trempe ?
Si l’histoire doit trancher cette question, aucun des “successeurs”
actuels de Pierre ne peut se faire prévaloir de quoi que ce soit.
Est-ce que le ministère hiérarchique de l’Eglise fait partie de la
structure essentielle de cette Eglise ? De nouveau, un tel ensei-
gnement ne vient pas de l’Ecriture. Les apôtres ont bien eu un
ministère fondateur dont on retrouve les traces dans la nouvelle
Jérusalem d’Apocalypse 21. Mais y trouve-t-on aussi les traces
de leurs successeurs ? Une église, ne saurait-elle fonctionner de
façon biblique sans cette succession comprise à la manière du
Catéchisme ? Nous nous permettons d’en douter !

Ainsi, l’Eglise de Jésus-Christ est une, sainte, catholique et apos-


tolique. Mais dès qu’on commence à creuser un peu, les dires du
Catéchisme s’harmonisent plutôt mal avec la Bible.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 39

L’Eglise, notre Mère


L’Eglise se présente fort souvent sous le vocable de Mère. Cela
est à tel point fréquent qu’on ne s’y arrête guère. Sainte Mère-
Eglise n’est pas seulement une ville importante dans l’histoire du
Débarquement en Normandie, c’est une des idées fortes que
l’Eglise entretient sur elle-même.
Nous avons déjà cité les paroles de Clément d’Alexandrie (§813).
Plusieurs paragraphes expriment cette même idée (par exemple :
1141, 1163, 1667 et 2040) sans qu’elle soit développée pour au-
tant. L’Eglise y est appelée : “La Mère Eglise” ou “Notre Mère la
Sainte Eglise”. “Sa sollicitude maternelle” doit provoquer en ses
enfants “un véritable esprit filial”. La notion même de “fils” vis à
vis de l’Eglise provient de cette image. Tout le devoir de la doci-
lité dont nous avons parlé au chapitre deux est expliqué par le fait
que l’Eglise est mère et, donc, éducatrice.

D’où vient cette idée ? §757 cite Galates 4.26 en disant que
“l’Eglise s’appelle encore... ‘notre mère’”. Paul y parle de la Jé-
rusalem d’en haut qui est notre mère dans un passage allégorique
unique en son genre. Est-ce qu’il pensait à l’Eglise comme une
mère ? Rien n’est moins sûr. A aucun moment les chrétiens du
Nouveau Testament ne sont appelés à respecter l’Eglise comme
une mère. Le Catéchisme semble l’avoir bien compris et ne
pousse pas l’idée plus loin.
En fait, l’idée vient d’une autre source. La maternité de l’Eglise
est dérivée de la maternité de Marie qui constitue “la réalisation
exemplaire”, typus, de l’Eglise, §967. Les évêques de France sont
plus clairs : “Parler de Marie, c’est encore parler de l’Eglise”.
L’Eglise, quand elle contemple la sainteté de la Vierge “devient à
son tour une Mère... elle engendre, à une vie nouvelle et immor-
telle, des fils conçus du Saint-Esprit et nés de Dieu”, CEF
§343,354. Le dernier texte provient de Lumen Gentium.

L’Eglise comme mère est une image typiquement catholique.


Henri Blocher a sans doute vu juste lorsqu’il disait que cette
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 40

image stimulait une fidélité à toute épreuve envers l’Eglise.


Après tout, on peut critiquer sa mère et juger sa conduite, mais
elle reste ta mère. On ne la quitte pas10. Cela explique la grande
réticence qu’éprouve un catholique tenté de quitter le “giron” de
l’Eglise. On ne renie pas sa mère.
Marie et l’Eglise (y a-t-il encore vraiment une différence ?) pren-
nent la place qui, dans le Nouveau Testament, revient à Dieu.
C’est de lui que nous devenons les fils. C’est sa sollicitude qui
nous environne. C’est à lui que nous devons rester fidèles, même
si, à Dieu ne plaise ! toute l’Eglise devait devenir apostat. Il est
notre Père. Et dans ce sens lourd, nous n’avons pas de Mère, n’en
déplaise à Cyprien de Carthage (“Nul ne peut avoir Dieu pour
Père qui n’a pas l’Eglise pour Mère”, §181). Ce n’est pas “par
l’Eglise que nous recevons la foi et la vie nouvelle dans le Christ
par le Baptême”, §168,169. Elle n’est pas “la mère de notre nou-
velle naissance”. C’est lui conférer une place qu’elle n’a pas le
droit d’occuper.

Est-ce que cela veut dire que nous abaissons l’Eglise ? Loin de là.
Nous ne sommes pas les fils de la Mère Eglise précisément parce
que nous sommes l’Eglise. L’ériger en Mère, c’est créer la dis-
tance entre l’institution et ses membres, c’est diviser artificielle-
ment une certaine entité mystique et les chrétiens. Quand cette
entité est ensuite confondue avec l’église institutionnelle, avec la
hiérarchie vaticane, la relation mère-fils se transforme très vite en
relation maîtresse-esclave.
Mais le détournement va encore plus loin. L’Ecriture appelle
l’Eglise l’épouse de Christ, Ephésiens 5.25-27. En s’établissant
orgueilleusement comme mère, l’église-institution dégrade
l’épouse adulte et responsable que nous sommes collectivement
en enfants irresponsables et dépendants. L’Eglise, ce n’est plus
nous, c’est une administration qui a le pouvoir de nous unir ou de
nous séparer de notre Père céleste. Et parce que nous ne sommes

10
Intervention lors du Centre Evangélique à Nogent-sur-Marne en novembre
1991.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 41

plus épouse, la pureté devient une option, désirable mais non


indispensable. Il suffit de satisfaire aux demandes capricieuses de
cette mère autoproclamée, plutôt que de trembler aux exigences
de l’Epoux. Au lieu de sentir sur nous les lèvres brûlantes de
l’Amour, nous sommes emprisonnés dans les bras fétides de cette
grande dame envahissante qui croit pouvoir nous posséder. Nous
craignons fort qu’entre l’épouse de Christ et la Sainte Mère
l’Eglise il y ait un abîme infranchissable.

La Papauté
C’est plus loin que le Catéchisme traite du sacrement de l’Ordre,
et nous laisserons donc pour le moment la question plus générale
de la hiérarchie ecclésiastique. Dans le cadre de ce chapitre-ci, il
faut par contre évaluer l’enseignement de l’Eglise sur sa concep-
tion de la Papauté. Voici d’abord les points saillants de cet ensei-
gnement.
“Le Seigneur a fait du seul Simon, auquel Il donna le nom de
Pierre, la pierre de son Eglise. Il lui en a remis les clefs; Il l’a
institué pasteur de tout le troupeau. (...) Cette charge pastorale...
appartient aux fondements de l’Eglise. Elle est continuée par les
évêques sous la primauté du Pape”, §881. Voilà le texte clef,
fondé sur Matthieu 16.18,19.
Comment, cette charge s’exerce-t-elle dans l’Eglise ?
En tant que Vicaire (= remplaçant) de Christ et Pasteur de toute
l’Eglise, le Pontife romain a sur l’Eglise “un pouvoir plénier,
suprême et universel qu’il peut toujours librement exercer.” Il est
“principe et fondement de l’unité” de l’Eglise, §882. Cela veut
dire qu’à aucun moment, les évêques ne puissent s’établir en
autorité indépendante du pape. Ils ne peuvent agir “qu’avec le
consentement du Pontife romain”, §883. Même un Concile Œcu-
ménique ne peut exister légalement à moins d’avoir été “confirmé
ou tout au moins accepté par le successeur de Pierre”, §884.
Donc, même si la totalité des évêques devait se réunir, mais sans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 42

le pape, voire même contre le pape, leur rassemblement serait à


considérer comme nul et non avenu.

Quatre éléments constituent ensemble la fonction papale :


 La primauté de Pierre. Christ a bâti son Eglise sur Pierre et
c’est Pierre qui demeurera le roc inébranlable de l’Eglise,
§552. Bien que le Catéchisme enseigne ailleurs que Christ a
bâti son Eglise sur la foi de Pierre, §424, ce qui n’est vrai-
ment pas la même chose !, c’est sans doute ce premier sens
qu’il faut retenir.
 La succession apostolique. Il n’y a que cette succession qui
garantit la validité du Magistère et des ministères, qui assure
l’unité dans la pluriformité des traditions liturgiques et qui
garantit la vérité des sacrements (sans elle, par exemple, la
Sainte Cène “protestante” ne peut être un vrai sacrement), cf.
§77, 1209, 1399, 1576. Cela reflète bien Vatican II où
l’Eglise affirmait que “par l’imposition des mains et les pa-
roles de la consécration, la grâce de l’Esprit-Saint est donnée
et le caractère sacré imprimé, de telle sorte que les évêques,
d’une façon éminente et visible, tiennent la place du Christ
lui-même, Maître, Pasteur et Pontife, et jouent son rôle”, Lu-
men Gentium 21.
 Le pouvoir des clefs. Ce pouvoir “désigne l’autorité pour
gouverner la maison de Dieu, qui est l’Eglise”. Il est joint au
pouvoir de “lier et délier” qui “signifie l’autorité pour ab-
soudre les péchés...” Cette autorité est particulièrement re-
mise à Pierre, §553.
 L’infaillibilité. L’Eglise est “infailliblement tenue dans la
vérité : le Christ la gouverne par Pierre et les autres apôtres,
présents en leurs successeurs, le Pape et le collège des
évêques”, §869. Nous avons parlé de ce “charisme” de
l’infaillibilité en plus de détails au chapitre deux.

Il sera clair que l’institution de la Papauté est l’un des éléments


principaux de la doctrine catholique de l’Eglise. Elle est à la fois
le produit et le grand “façonneur” de son histoire. Le sacre de son
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 43

infaillibilité lors de Vatican I en 1870 a été l’aboutissement lo-


gique d’un processus historique inexorable. Aujourd’hui, est-ce
que ce développement est arrivé à sa fin ? Nous l’ignorons.
La Papauté porte l’Eglise. C’est le pilier central qui supporte tout
l’édifice. S’il devait s’écrouler, l’institution toute entière connaî-
trait l’implosion. Il est donc de première importance que ce pilier
soit solide ! Qu’en est-il ?

Le premier fondement du pilier de la Papauté doit se trouver dans


l’Ecriture. Pour prouver valablement que la fonction du chef de
l’Eglise découle effectivement de l’Ecriture, il faudrait :
1. Que Pierre ait clairement été institué le chef du collège aposto-
lique et de l’Eglise.
2. Que l’Eglise de Jésus-Christ ait été fondée sur lui.
3. Que le pouvoir des clefs désigne le pouvoir de gouvernement
et la gestion du pardon.
4. Que l’ensemble de ces choses aient été transférables à ses
éventuels successeurs.
5. Que cette transmission ait effectivement eu lieu.
6. Que l’infaillibilité ait été une caractéristique évidente du mi-
nistère de Pierre.
Le deuxième fondement se situe dans l’histoire. Il faudrait :
7. Démontrer que le développement de la Papauté dans l’histoire
ait été clairement guidé par le Saint-Esprit pour le plus grand bien
spirituel de l’Eglise.
Il faudrait en outre prouver :
8. Que ce développement n’ait pas été le produit de l’orgueil
humain.

Pourquoi faut-il prouver tout cela ? Parce que le fait même de


concentrer un si grand pouvoir entre les mains d’un homme pé-
cheur ressemble trop à un processus purement humain, une copie
conforme de ce qui se fait dans toutes les sociétés humaines. La
place de l’orgueil, de la confiance dans les hommes et les struc-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 44

tures, cadre mal, à prime abord, avec la façon d’œuvrer du Dieu


de la Bible. Et le résultat actuel de ce processus semble être con-
tradictoire avec l’image du simple Fils de Dieu, du moins, aux
yeux de tout lecteur (superficiel ?) du Nouveau Testament.
Il faut encore le prouver à cause des conséquences énormes des
enjeux. Si réellement la Papauté n’est pas fondée sur la Parole de
Dieu, il se peut qu’en nous y soumettant nous risquons nous trou-
ver entraînés dans un chemin que Dieu répugne. Croyant être
bons chrétiens, nous serions tout sauf de bon chrétiens ! Et si la
Papauté est fondée dans l’Ecriture, toute personne qui s’y attaque
s’oppose à la volonté de Dieu, entraînée par sa propre vanité. Ce
serait loin d’être innocent ! Nous avons déjà cité à ce sujet le
paragraphe 846 sur l’impossibilité d’être sauvé.

Développons donc les preuves nécessaires.

1. Pierre, a-t-il été institué chef des apôtres et de l’Eglise ?


A aucun moment, l’apôtre Pierre n’est considéré comme tel dans
le Nouveau Testament et pour une raison très évidente : Christ
n’a jamais prévu de remplaçant, il est lui-même le Chef de son
Eglise, comme le disent des textes comme Ephésiens 1.22; Co-
lossiens 1.18 et cf. 1 Corinthiens 11.3; 15.27. Mais, peut-être que
le fait qu’il est au ciel à la droite de Dieu rend nécessaire un chef
ici bas ? Après tout, par quel biais Jésus exerce-t-il son autorité
sur l’Eglise ? Il dit à ses disciples qu’il ne les laisserait pas orphe-
lins, mais qu’il leur enverrait son Esprit, Jean 14.18, 26; 16.13-
15. Le livre des Actes des apôtres montre comment cette direc-
tion s’est exercée, par exemple en Actes 13.2-4 et 15.14-22, 28.
Le premier texte concerne l’expansion missionnaire de l’Eglise,
le deuxième la solution d’une question doctrinale. Dans les deux
cas, le Saint-Esprit a dirigé et a été perçu comme étant souverain.
Aucun homme ne peut se poser en chef de l’Eglise sans dérober
l’autorité qui revient à Jésus seul et qu’il exerce par son Esprit.
S’il faut parler d’un Vicaire de Christ, le Saint-Esprit est le Seul à
entrer en ligne de compte.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 45

Ajoutons à cela que Pierre n’a jamais fonctionné comme chef de


l’Eglise. En Actes 15, ce qui a été appelé le premier Concile de
l’Eglise est présidé par Jacques. Pierre n’y est qu’un des interve-
nants. En Galates 2, Pierre et Paul se trouvent opposés sur une
question fondamentale et c’est Pierre qui doit se ranger à la con-
viction de Paul. Pierre lui-même ne s’arroge aucun pouvoir; il se
considère comme un ancien parmi les autres au service du souve-
rain pasteur qu’est le Seigneur Jésus, 1 Pierre 5.1-4.
Et, comme le souligne Jacques Blocher, à la question de savoir
qui est le plus grand parmi les apôtres, Luc 22.24-26, la réponse
de Jésus n’est pas : Mais c’est Pierre11. Et lorsque Jésus lui dit
après son reniement : Pais mes brebis, fait-il autre chose que de
rétablir son disciple à la place qu’il avait parmi les autres dis-
ciples ?
Il y a priorité, nous y arrivons, mais nullement primauté.

2. L’Eglise, est-elle fondée sur Pierre ?


Déjà, le Catéchisme donne deux interprétations de la parole de
Christ : “Tu es Pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise” en
Matthieu 16.18. D’une part, ce serait sur Pierre, d’autre part, ce
serait sur la foi de Pierre.12 Avec cette deuxième opinion, peu de
chrétiens auraient des difficultés, mais à ce moment-là, le fonde-
ment de la Papauté est miné à sa base. Ni Pierre, ni ses éventuels
successeurs, ne seraient le roc sur qui est fondée l’Eglise. La
première opinion rencontre de vrais problèmes dans l’Ecriture.
Sur quel fondement est bâtie l’Eglise ? Jésus, en Matthieu 7.24,
dit que le fondement de la maison du sage est l’écoute et la mise
en pratique de sa Parole. Paul dit que l’Eglise est édifiée sur le
fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même
étant la pierre de l’angle, Ephésiens 2.20.
En quel sens pouvons-nous parler du fondement des apôtres ? Le
même apôtre écrit en 1 Corinthiens 3.10,11 : “... j’ai posé le fon-

11
Op.cit. p.48.
12
Voir appendice 2, point 2 : Sur quel roc, l’Eglise est-elle bâtie ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 46

dement... Car personne ne peut poser un autre fondement que


celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ”. Le fondement des
apôtres est celui que les apôtres (notez le pluriel) ont posé. Dire
que l’Eglise est fondée sur Pierre est contredit par le reste du
Nouveau Testament. Pierre lui-même maintient que l’Eglise est
bâtie sur Christ, la pierre vivante, et que tous les chrétiens sont
des pierres vivantes, constituant ensemble une maison spirituelle,
1 Pierre 2.4,5.
Qu’est-ce que Jésus a voulu dire à Pierre ? La majorité des Pères
de l’Eglise qui ont parlé sur ce texte y ont lu une référence à la
foi de Pierre (44 sur 77 selon les chiffres cités par Jacques Blo-
cher13). Il serait pourtant possible de comprendre que, de par sa
confession, Pierre était la première pierre de l’édifice. Pour la
première fois, un homme exprime de façon aussi claire sa foi en
Christ comme le Messie et le Fils de Dieu. Pierre est ce premier,
mais le premier d’un nombre incalculable d’autres chrétiens, et
non le premier (en position hiérarchique) des apôtres. C’est
l’opinion de J. Blocher.
L’Eglise, est-elle bâtie sur Pierre ? Manifestement pas.

3. Que signifie le pouvoir des clefs ?


S’agit-il des clefs qui permettent d’ouvrir ou de fermer le
royaume de Dieu à l’un ou l’autre ? En Apocalypse 3.7, bien
après la mort de Pierre, Christ se présente à Jean comme celui qui
a la clé de David avec le pouvoir d’ouvrir et de fermer. Appa-
remment, il n’a pas prêté cette clé à Pierre et encore moins à ses
successeurs.
Ses clefs, représentent-ils la charge du gouvernement de l’Eglise
et le pouvoir de l’absolution des péchés ?
Faisons d’abord une distinction importante. Le pouvoir de “lier et
de délier” est donné à l’ensemble des apôtres en Matthieu 18.18,

13
Op.cit. p.49. Pour le détail, voir aussi Mgr PHOTIOS et l’Archimandrite PHILARETE,
Le nouveau Catéchisme contre la foi des Pères, Lausanne : L’Age d’Homme,
1993, p.36ss.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 47

et en Jean 20.23 Jésus semble donner aux mêmes le pouvoir de


pardonner. Est-ce le même pouvoir dans ces trois passages ? A
prime abord, cela ne semble pas le cas. Ce premier pouvoir
s’apparente davantage aux questions d’autorité telles que posè-
rent les Juifs à Jésus (“est-il permis...”, cf. Matthieu 19.3; 22.17).
Ce pouvoir moral, et non pas judiciaire, Christ le donne à
l’Eglise. Nous en voyons un exemple dans le traitement par
l’apôtre Paul de la question des viandes sacrifiées aux idoles en
1 Corinthiens 8-10. Le pouvoir du pardon en est distinct.
Et le groupe en Jean 20, ne comprend-il que les Onze ? Il paraît
assez probable que beaucoup plus de disciples étaient présents
dans la chambre haute; il y avait là au moins plusieurs des
femmes en plus. Ce pouvoir du pardon n’appartient donc pas qu’à
Pierre et il n’est pas limité à la communion avec Pierre. Il s’étend
à l’ensemble des disciples du Seigneur. Il faut aussi noter que,
dans la pratique, ce pouvoir n’est jamais exercé “à la première
personne” (“Je vous pardonne”). Il suffit de parcourir le livre des
Actes (2.38,39; 5.1-11; 7.59; 13.38; 22.16. 13.38 est assez repré-
sentatif : “par lui (Jésus) le pardon des péchés vous est annon-
cé..”). Là où le pardon est personnel, il s’agit d’une église locale
réunie qui pardonne un péché commis contre elle, 2 Corinthiens
2.10, ou d’un péché commis entre deux personnes, Ephésiens
4.32, cf. Matthieu 6.14,15. Mais la confession d’un péché précis
à quelqu’un d’autre qui n’y est pas impliqué et qui aurait pouvoir
de pardonner est inconnue dans le Nouveau Testament, cf. 1 Jean
1.9.

Cependant, les clefs du royaume sont données à Pierre seulement.


Comment en voyons-nous l’usage dans le Nouveau Testament ?
Comment ouvre-t-il les portes à qui que ce soit ?
En Actes 2, 8 et 10, l’apôtre Pierre est la personne clef dans
l’expansion de l’Eglise parmi les Juifs, les Samaritains et les
païens (cf. Actes 1.8). Ensuite, dès Actes 13, il disparaît du récit.
Ses lettres n’apportent aucune autre lumière sur cette question.
N’est-il pas alors évident que le pouvoir des clefs concerne le
rôle de l’apôtre dans l’évangélisation ? La discussion en Actes
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 48

11.1-18 ne va-t-elle pas dans ce sens ? Et en Actes 15.7, Pierre


semble tirer la même conclusion.
Personne en dehors de Christ n’a le pouvoir d’exclure quelqu’un
du royaume de Dieu. Personne n’a ce pouvoir judiciaire et spiri-
tuel dans l’Eglise universelle, sinon Christ seul par son Esprit.

4. Pierre, devait-il avoir des successeurs ?


Cette question est liée aux précédentes. Mais ce que nous avons
vu jusqu’ici enlève déjà beaucoup à l’importance de cette succes-
sion apostolique. Si Pierre n’a pas été institué le chef des apôtres
ou de l’Eglise, si l’Eglise n’a pas été bâtie sur lui, si le pouvoir
des clefs ne renferme aucun pouvoir central et universel, à quoi
bon de lui chercher des successeurs !
Bibliquement, la succession de Pierre ne prend pas beaucoup de
place. Nulle-part, le Seigneur n’a prévu que Pierre reçoive une
charge héréditaire. Ni son fils (s’il en a eu, puisqu’il était marié,
Marc 1.30; 1 Corinthiens 9.5), ni son enfant spirituel (Marc :
1 Pierre 5.13), ni aucune autre personne ne fait partie d’une éven-
tuelle succession. La question se corse parce que son successeur
est censé avoir été “comme lui” évêque de Rome, tandis que la
Bible ne mentionne aucun séjour de Pierre en cette ville.
Aucune promesse n’a jamais été donnée à Pierre à ce sujet.
L’Eglise ne s’attendait nullement à ce qu’un successeur soit dési-
gné ou découvert. Bibliquement, la question de la succession de
Pierre est close.

5. Une telle succession a-t-elle eu lieu ?


Ici, il nous faut sortir des textes bibliques. Que nous dit
l’histoire ? Imaginons pour un moment que Pierre ait été évêque
de Rome (en fait, il est à peu près sûr qu’il ne l’a jamais été). Y a-
t-il eu des successeurs ?
Un premier problème surgit aussitôt : quel genre de successeurs
faut-il chercher ? Manifestement, chercher une simple succession
administrative (l’évêque de Rome) ne peut pas nous suffire.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 49

Christ n’a pas donné une telle charge à l’apôtre et l’Evangile


nous préparerait plutôt à une succession spirituelle, quelqu’un qui
marche dans les traces spirituelles de Pierre. Nous nous atten-
drions à un successeur qui partage sa foi, et qui se servirait des
clefs de la même façon que lui, ouvrant à l’Evangile des peuples
et des nations là où Christ n’était pas encore connu.
Or, que trouvons-nous ? Une liste d’évêques de Rome qui, au fur
et à mesure, devient de plus en plus ambiguë. L’histoire de la
Papauté, qui ne commence vraiment qu’avec Léon le Grand au Ve
siècle, est une histoire sordide de politique, d’immoralité,
d’argent et d’orgueil. C’est l’histoire d’un chef ecclésiastique qui
cherche à imposer toujours plus son pouvoir sur l’ensemble de
l’Eglise et du monde, en faisant appel au texte de Matthieu 16
interprété à la manière “vaticano-centrique”. Cette interprétation
est d’ailleurs vivement contestée par ceux qu’on appelle les Pères
de l’Eglise.
Jacques Blocher, après un survol rapide de l’histoire de la Papau-
té au Moyen-âge, pose à juste titre la question : “Peut-on, à ce
point, séparer doctrine et vie ?” Est-il envisageable que ces papes
indignes aient transmis une quelconque dignité spirituelle ?14 Ne
faut-il pas en conclure que, non seulement la Papauté est dépour-
vue de tout fondement biblique, mais encore que le fondement
historique pour autant qu’il existe prouve le contraire de ce
qu’affirme l’Eglise ? Des meurtriers, des menteurs, des adultères,
et nous avons vu tout cela et plus sur le “trône de St Pierre”, ont
préparé une succession à tel point honteuse qu’oser s’en réclamer
défie le bon sens. La Papauté historique est en totale rupture avec
l’immaculé Fils de Dieu. En clamant une droite ligne de succes-
sion avec des hommes et des femmes animés par le diable, elle
prouve certainement quelque chose. Mais quoi ?

6. Le ministère de Pierre, a-t-il été caractérisé par


l’infaillibilité ?

14
Blocher, op.cit. p.55.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 50

Nous avons déjà traité de l’infaillibilité en parlant du Magistère


et nous renvoyons aux paragraphes citées à cet endroit. Lumen
Gentium 25, rappelle que “l’assentiment religieux de la volonté et
de l’intelligence est dû, à un titre singulier, au magistère authen-
tique du Souverain Pontife, même lorsque celui-ci ne parle pas Ex
cathedra...” Pourtant, le champ particulier de l’infaillibilité se
trouve dans les définitions prononcées Ex cathedra dans le do-
maine de la foi et des mœurs. Elles sont de par leur nature irré-
formables, non pas à cause de leur conformité à l’Ecriture, mais
“par elles-mêmes”, comme l’enseigne Vatican II.
Le ministère de Pierre était-il caractérisé par cette capacité re-
marquable ? De toute évidence, la réponse doit être négative. Là
où son jugement était mis en question en matière de foi et de
mœurs, en Galates 2, l’apôtre Paul le contestait et l’a forcé à
changer sa position. Et lorsque le “concile” de Jérusalem, en
Actes 15, s’est réuni pour une question grave de doctrine, Pierre
ne le présidait même pas; la question fut finalement tranchée, non
par un rappel de sa position à lui, bien que celle-ci était manifes-
tement juste, mais par un appel à l’Ecriture.
L’infaillibilité est-elle rétroactive ? Comme elle n’a été pronon-
cée qu’en 1870 (Vatican I), causant d’ailleurs une division dans
l’Eglise catholique, couvre-t-elle cependant les papes antérieurs,
y compris ceux qui ont été condamnés pour hérésie par des con-
ciles œcuméniques15 ?
Et si les définitions prononcées Ex cathedra sont irréformables de
par leur nature, l’Eglise catholique est-elle encore réformable ?
Et si un jour elle devait récuser cette infaillibilité, pourrait-elle
survivre à cette décision et rester sensiblement la même ?

7. La Papauté a-t-elle été développée par l’assistance manifeste


du Saint-Esprit ?
Il sera clair que si l’institution de la Papauté n’est pas un fruit de
l’enseignement biblique et si son histoire est une longue suite

15
Voir BLOCHER, op.cit. p.59.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 51

d’aberrations, cette question devient d’une importance capitale !


Sans fondement biblique et avec un fondement historique aussi
chargé, il faudrait vraiment trouver des preuves convaincantes de
l’assistance du Saint-Esprit ! Est-ce le cas ?
Une telle question en provoque de suite une autre : Est-il possible
que le Saint-Esprit collabore à des développements qui sont à la
fois non-bibliques et immoraux ? Y a-t-il une opposition possible
entre l’action de l’Esprit et celle de la Parole de Dieu ? Peut-on
encore invoquer l’assistance du Saint-Esprit après avoir manifes-
té si clairement son mépris de la Parole de Dieu ?

Dieu veille à sa parole pour qu’elle exécute sa volonté, Esaïe


55.11. Tout appel à consulter un autre que lui est confronté à
cette parole dans le même prophète : “A la loi et au témoignage !
Si l’on ne parle pas ainsi, c’est qu’il n’y aura point d’aurore pour
le peuple”, 8.20. Non, Dieu n’agit pas sans sa parole, ou contre sa
parole. “L’Esprit de vérité” nous “conduira dans toute la vérité;
car ses paroles ne viendront pas de lui-même”, dit Jésus en Jean
16.13. Et de quelle autre vérité peut-il être question que de celle
que Christ incarne, “Je suis la vérité”, 14.6, et qu’il annonce, “Ta
parole est la vérité”, 17.17 ?
Il nous est commandé d’être remplis du Saint-Esprit, Ephésiens
5.18, mais dans le texte parallèle, l’apôtre nous exhorte d’être
remplis de la parole du Christ, Colossiens 3.16. L’inférence est
claire : il n’y a aucune opposition entre l’Esprit et la Bible. Ce
qui est en désaccord avec les Ecritures, l’est aussi avec l’Esprit
Saint.
En plus, est-il concevable que le Saint-Esprit cautionne et assiste
un développement aussi teinté d’immoralité que l’histoire de la
Papauté ? On peut laisser une telle question sans plus de com-
mentaires.

8. Ce développement, n’a-t-il pas été le produit de l’orgueil hu-


main ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 52

Pourquoi, la Papauté s’est-elle tant développée ? Quel moteur a


donné la poussée nécessaire pour qu’une fusée aussi lourde soit
mise sur orbite ?
Curieusement, le Nouveau Testament nous livre l’illustration
d’un système semblable dans l’Eglise primitive.
A Corinthe, Paul s’est trouvé aux prises avec des hommes défen-
dant une conception “catholicisante” de l’Eglise (voir
2 Corinthiens 10-13). Ils attaquaient l’apôtre parce qu’il agirait
indépendamment de l’église mère à Jérusalem. F.F. Bruce ex-
prime leur position ainsi : “Si l’église de Corinthe voulait rece-
voir la bénédiction de l’Esprit, elle devait reconnaître l’autorité
de Jérusalem.”16. Leur attitude fidéiste et légitimiste vis à vis de
l’église mère allait radicalement à l’encontre des intérêts de
l’œuvre de Dieu. Ils préféraient une église branlante mais sou-
mise à Jérusalem (par leur entremise !) à une église vibrante et
autonome. Or, qu’est-ce qui les animait ? L’orgueil. Ils voulaient
être les premiers, diriger, légiférer, enseigner et se faire payer.
“Au lieu d’ouvrir de nouveaux champs missionnaires par eux-
mêmes (comme l’auraient fait de véritables apôtres de Christ), ils
préféraient entrer en parasites ‘dans le domaine des autres’
(2 Corinthiens 10.15,16)” conclut Bruce.
C’était un avant-goût du système centraliste qui allait peu à peu
se développer dans l’Eglise de Jésus-Christ. Et pourquoi ? On
n’échappe pas à la conclusion que la raison principale est
l’orgueil humain. L’évêque de la Rome impériale se croyait être
le premier parmi ses pareils. La place laissée vacante par
l’empereur devait revenir au prince de l’Eglise. Le titre païen de
Souverain Pontife, abandonné par l’empereur devenu chrétien
était aussi vite récupéré par le même évêque, couronné par la
tiare des divinités païennes17

16
F.F. BRUCE, Paul, Apostle of the Heart Set Free, Londres : Paternoster, 1977,
cité in Perspectives du ministère, Villeurbanne : ITEA, 1994, section 5D, p.14,15.
17
Voir à ce sujet l’excellent livre d’Alexandre HISLOP, The Two Babylons,
4
Londres : Partridge, 1916, 1965 (en français : Les deux Babylones). Il y décrit
dans le détail les origines lointaines des rites et coutumes romains.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 53

Quiconque se met à étudier l’histoire de la Papauté devra ad-


mettre le rôle prépondérant qu’y a joué l’orgueil humain, le désir
charnel de concentrer tout le pouvoir (religieux et profane) entre
les mains d’une hiérarchie de plus en plus tentaculaire et puis-
sante.
Cela est une conclusion embarrassante. Car “Dieu résiste aux
orgueilleux, mais il donne sa grâce aux humbles”, dit l’apôtre
Pierre (1 Pierre 5.5). Se soumettre à ce système reviendrait à se
ranger dans le camp de ceux auxquels Dieu résiste ! La voie du
progrès spirituel n’est pas dans l’évolution de ce système, mais
dans son abolition. “La doctrine de l’infaillibilité pontificale n’est
donc pas ‘un dogme de révélation divine’ que ‘tous les chrétiens
doivent croire’ [citation de Denzinger-Schönmetzer]. C’est plutôt
une idée qu’aucun chrétien ne peut accepter sans renier
l’enseignement des Ecritures qui sont infaillibles”.18

Une conclusion biblique.


Revenons une dernière fois à l’église de Corinthe du temps des
apôtres. Dans sa première lettre, Paul traite dans le détail un pro-
blème de hiérarchie. A Corinthe, les chrétiens étaient divisés
entre plusieurs clans, dont ceux de Pierre et de Paul. Ce que Paul
en dit a une portée directe sur la question de la papauté. Il rap-
pelle plusieurs principes qu’il nous faut appliquer avec soin.
1° L’opposition radicale entre la croix et le monde. Dans notre
monde, on cherche les choses qui impressionnent : les miracles,
la sagesse. Dans l’Eglise, Dieu agit par la folie de la prédication
de Jésus-Christ crucifié. “Dieu a choisi les choses faibles du
monde pour confondre les fortes”, 1.27. Si on veut nous con-
vaincre qu’une église est la vraie par sa grandeur, sa taille ou sa
durée, on se réfère en fait à des critères purement humains et
mondains. Dieu agit par la folie de la croix et ceux qui veulent le
suivre doivent accepter ce chemin-là. L’homme “naturel”, celui
qui n’a pas été transformé par le Christ, ne comprend ni ne reçoit
cela. Il le méprise. Et par son mépris, il prouve sa nature, 2.14.
18
Regard p.24.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 54

Or, la papauté méprise tous ceux qui désirent prêcher l’Evangile


de Jésus-Christ crucifié, sans se soumettre à son autorité.
2° La possibilité de bâtir une église de foin. L’importance, ce
n’est pas la personne, ou la position de cette personne, mais
l’œuvre qu’il fait. Les “ministres de Dieu” ne sont que des servi-
teurs sans grande importance. Un homme avec des titres élo-
quents, mais qui ne bâtit que pour sa plus grande gloire, ou celle
de son église, sera insignifiant dans le royaume de Dieu. Et son
œuvre ne subsistera pas dans la seule épreuve importante : la
dernière, lorsque Dieu sera le Juge, 3.13. Il aura bâti une église de
foin. Nous craignons fort que l’évêque de Rome, malgré ses titres
ronflants, bâtit une église de foin.
3° L’importance d’être fidèle. Les dirigeants de l’Eglise sont des
“administrateurs des mystères de Dieu”, 4.1. Il n’est pas question
ici des sacrements. Les mystères dans le Nouveau Testament sont
les vérités de l’Evangile, mises à la lumière par l’enseignement
fidèle de la Parole de Dieu. Il est donc d’une importance capitale
que ces personnes soient fidèles par rapport à “ce qui est écrit”,
4.6. Cela va de pair avec une vie difficile. L’église peut se leurrer
d’être riche, pas ses apôtres. Leur engagement comme disciples
de Christ est souvent caractérisé par la faiblesse, la vie errante, la
fatigue et le mépris. Contre l’orgueil, ils présentent l’humilité de
Jésus-Christ dont leurs vies témoignent. Force nous est de consta-
ter que face à cette même Parole, la papauté nous présente une
longue histoire d’infidélité. Elle s’est drapée dans la richesse et
dans l’orgueil, et au lieu de servir, elle se dresse en maîtresse du
monde.

Le jugement biblique est sans équivoque. Ces principes bibliques


condamnent la papauté.

Les relations œcuméniques


Le Catéchisme, un autre Evangile ? 55

Il sera clair que les relations entre l’Eglise catholique et les autres
Eglises n’ont jamais été simples. Nous avons déjà cité le §816 qui
enseigne que c’est
“par la seule Eglise catholique du Christ... que peut s’obtenir
toute la plénitude des moyens de salut. Car c’est au seul collège
apostolique, dont Pierre est le chef, que le Seigneur confia, se-
lon notre foi, toutes les richesses de la Nouvelle Alliance, afin
de constituer sur la terre un seul Corps du Christ...” (c’est nous
qui soulignons).
Cette “seule Eglise catholique” n’est pas l’Eglise universelle,
mais bien cette Eglise romaine à l’intérieur de laquelle seule,
selon elle, peut s’obtenir le salut, §846. C’est son unité qui serait
voulue de Dieu et qui est le but de tout processus de réunifica-
tion.
Car l’unité a été blessée. Des fautes de part et d’autre ont créé des
ruptures parmi lesquelles le Catéchisme distingue l’hérésie,
l’apostasie et le schisme, §817. Vatican II a introduit une nou-
velle façon de considérer ses ruptures. “Ceux qui naissent au-
jourd’hui dans des communautés issues de telles ruptures ‘et qui
vivent la foi au Christ, ne peuvent être accusés de péché de divi-
sion, et l’Eglise catholique les entoure de respect fraternel et de
charité’” en les appelant à bon droit “des frères dans le Sei-
gneur”, §818. Pourtant, ces Eglises séparées puisent leur force
dans “la plénitude de grâce et de vérité que le Christ a confiée à
l’Eglise catholique”, §819.
Comme l’unité “subsiste de façon inamissible dans l’Eglise ca-
tholique”, §820, la prière du Christ (“Que tous soient un”) trouve
son exaucement dans un mouvement de retour vers l’Eglise une,
sainte, catholique et apostolique qui est la mère de tous. Le fon-
dement de cette communion entre chrétiens de différentes Eglises
est le baptême validement reçu. Bien sûr, cette communion n’est
pas encore pleine, elle est imparfaite. Mais le baptême constitue
déjà le lien sacramentel d’unité entre ceux qui ont été régénérés
par Christ, §1271, cf. 818. Il est, comme le titrent les évêques de
France, “un trésor œcuménique”, CEF §403. Cependant, cette
communion est imparfaite, parce que tous ces chrétiens ne gar-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 56

dent pas “l’unité de communion avec le successeur de Pierre”,


§838. Or, c’est justement cela l’essentiel !

Il n’est pas aisé de savoir comment le Catéchisme considère les


frères séparés. D’un côté, nous l’avons déjà cité, ils sont des
“frères dans le Seigneur”, unis par le baptême, si toutefois ils
l’ont valablement reçu. De l’autre côté, ils sont hérétiques ou
schismatiques. “L’hérésie est la négation obstinée, après la récep-
tion du Baptême, d’une vérité qui doit être crue de foi divine et
catholique, ou le doute obstiné sur cette vérité. (...) Le schisme
est le refus de la soumission au Souverain Pontife ou de commu-
nion avec les membres de l’Eglise qui lui sont soumis”, §2089.
Or, manifestement, la plupart des chrétiens protestants et évangé-
liques sont sereinement coupables sur les deux points. Nous
croyons même pouvoir affirmer qu’un très grand nombre de ca-
tholiques sont pour le moins des hérétiques au sens que le définit
le Catéchisme !
Entre “frères dans le Seigneur” et “hérétiques ou schismatiques”,
acceptons qu’il y ait tout de même un écart qui relève de la con-
tradiction dans les termes !

Comment apprécier l’effort œcuménique que déploie l’Eglise


catholique ?
Le pape Jean-Paul II, en visite au Centre Œcuménique de Ge-
nève, le 12 juin 1984, s’exprimait de la façon suivante :
“Certes, lorsque l’Eglise catholique entre dans la rude tâche
œcuménique, elle le fait en étant porteuse d’une conviction. En
dépit des misères morales qui ont marqué la vie de ses membres
et même de ses responsables au cours de son histoire, elle est
convaincue d’avoir gardé, en toute fidélité à la tradition aposto-
lique et à la foi des Pères, dans le ministère de l’Evêque de
Rome, le pôle visible et le garant de l’unité. (...) Etre en com-
munion avec l’Evêque de Rome, c’est visiblement attester que
l’on est en communion avec tous ceux et toutes celles qui con-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 57

fessent cette même foi, qui l’ont confessé depuis la Pente-


côte...”19.
Ainsi est donc clairement et sans équivoque exprimé ce que le
Catéchisme reprendra plus tard : le mouvement œcuménique est
un mouvement à sens unique. Le but final est l’unité autour du
pontife romain, successeur de Pierre. Tout usage du mot Eglise
pour désigner les autres Eglises doit tenir compte du rôle unique
de l’Eglise catholique. Elle est la seule à avoir gardé le dépôt de
la foi d’une manière inamissible (cf. CEF §340). Parce que les
autres Eglises n’ont pas le sacrement de l’ordre, “elles n’ont pas
conservé la substance propre et intégrale du mystère eucharis-
tique” selon les mots mêmes de Vatican II (Unitatis Redintegra-
tio 22). Ce qui veut dire que les autres Eglises, selon Vatican II,
ne célèbrent pas valablement la Cène du Seigneur. Les para-
graphes 1399 et 1400 reprennent textuellement ces affirmations
de Vatican II. Il n’y a donc pas égalité, dans sa conception, entre
les autres Eglises et elle. Et la restauration de l’unité sera donc
nécessairement pour elle une réintégration dans son sein des
frères et/ou des Eglises séparés. Car elle seule est, de par la vo-
lonté du Christ, la “maîtresse de la vérité” (Dignitatis Humanae
14).

La méthode œcuménique se concentre sur la conversion inté-


rieure, la prière en commun entre chrétiens de différentes Eglises,
la connaissance mutuelle et l’engagement commun. Le dialogue
est prôné pour que, “s’il est mené comme il se doit, dans la fidéli-
té à la Révélation et l’accueil généreux de l’autre”, il puisse me-
ner progressivement à une “pleine communion”, CEF §342.
Mais est-ce que cette fidélité à la Révélation peut s’accommoder
de l’accueil généreux de l’erreur manifeste ? Est-ce que cette
fidélité peut conduire l’Eglise à récuser ce qui a été infaillible-
ment défini ? Que veut dire Vatican II, lorsqu’il affirme “qu’il y a
une ‘hiérarchie’ des vérités de la doctrine catholique, en raison de
leur rapport différent avec les fondements de la foi chrétienne”

19
Regard, p.8.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 58

(Unitatis redintegratio 11) ? Surtout qu’avant cela le même para-


graphe précise bien aux théologiens catholiques de rester fidèles
à la doctrine de l’Eglise. Dans cette “hiérarchie de doctrines”, où
se situent les doctrines du Magistère, de l’infaillibilité papale, de
la Vierge Marie, pour n’en nommer que ces trois ? Sont-elles
négociables ? Ou est-ce que cette “hiérarchie” veut dire qu’il faut
seulement les aborder à la fin, quand le désir de l’unité sera plus
grand que le désir de la fidélité ?20

Vatican II semble entrevoir assez clairement où se situe le vrai


problème, celui que nous avons traité en premier, quand le même
document à la section 21 soulève “l’amour et la vénération -
presque le culte - de nos frères pour l’Ecriture Sainte” qui résulte
dans une opinion différente “au sujet de la relation entre Ecri-
tures et Eglise” et notamment sur la place particulière du magis-
tère authentique. Est-ce que le mot ‘culte’ cache une pointe de
reproche ? Une certitude que cet amour rend impossible tout pro-
grès œcuménique selon les idées vaticanes ?
La prière ensemble, peut-elle être un instrument pour progresser
vers la pleine communion ? La pleine communion, n’est-elle pas
plutôt une exigence pour pouvoir prier ? La prière biblique, ne
sous-entend-elle pas une réelle unité en Christ ? Et une réelle
unité en Christ, n’implique-t-elle pas une obéissance à la Parole
de Dieu ? Le baptême, est-il fondement suffisant pour cela ? Le
fait d’appliquer un peu d’eau bénite sur le front d’un nourrisson,
crée-t-il le chrétien ? Nous aurons à y revenir plus loin.

L’effort œcuménique de l’Eglise catholique est vicié à la base.


Comme l’Eglise se sait irréformable, et pleinement dans la vérité,
tout rapprochement œcuménique doit résulter d’une acception de
ses doctrines à elle par les frères séparés et schismatiques.
L’Eglise y met une grande patience, nous le reconnaissons. Mais
n’est-ce pas un peu mince comme apport ? L’appel à l’Eglise
catholique est, doit être, un appel à la réforme. Réforme de sa

20
Voir appendice 1, document 2.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 59

conception d’elle-même. Réforme de ses égarements par rapport


à la Parole de Dieu. Tragiquement, cet appel n’est pas et ne peut
pas être entendu. Tout simplement parce que l’Eglise romaine est
peu encline à ce qu’elle soupçonne être un suicide. Elle veut à
tout prix rester elle-même.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 60

4 . L A V I E RG E M ARI E

Marie : Mère, Epouse, Coopérante


“Parler de l’Eglise, c’est aussi parler de la Vierge Marie. Parler
de Marie, c’est encore parler de l’Eglise. Marie n’est-elle pas
‘celle qui occupe dans la sainte Eglise la place la plus élevée au-
dessous du Christ, et nous est toute proche’ (Lumen Gentium
54) ?” (CEF §343)
Lors de Vatican II, il y a eu toute une discussion pour savoir si la
doctrine concernant la Vierge nécessitait un décret indépendant
ou si celle-ci devait être incorporée à la Constitution sur l’Eglise.
La Vierge, était-elle au-dessus de l’Eglise ou à l’intérieur de
l’Eglise ? Finalement, c’est la dernière opinion qui a prévalu et
c’est ainsi que les évêques de France présentent l’équation Marie-
Eglise. Les auteurs du Regard n’ont peut-être pas tort quand ils
disent qu’“en élevant Marie bien haut, l’Eglise catholique s’élève
aussi elle-même”21. Marie est “‘membre suréminent et absolu-
ment unique de l’Eglise’, elle constitue même ‘la réalisation
exemplaire’, typus, de l’Eglise”, dit le Catéchisme, §967.
Cela ne veut pas dire que la doctrine de Marie est limitée à la
doctrine de l’Eglise. Il est tout à fait intéressant d’analyser les
différents contextes dans lesquels la Mariologie est abordée dans
le Catéchisme. Une telle analyse permet d’évaluer avec plus
d’exactitude la place suprême que détient Notre Dame dans
l’édifice romain. Si la Papauté en est le pilier central, la Vierge
en est l’occupante centrale. Son domaine a fait de grandes incur-
sions dans le domaine propre de Dieu : Père, Fils et Saint-Esprit.

21
Regard, p.11.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 61

A ses côtés, nous croyons discerner une nouvelle trinité : Mère,


Epouse et Coopérante.
Voici donc un survol des trois contextes où apparaît ce rôle cen-
tral de Marie.

Christ et Marie.
“Marie est invitée à concevoir” le Christ (§484, c’est nous qui
soulignons). Son “consentement” devient l’acte crucial de
l’incarnation, avec la compréhension suivante : “‘ce que la vierge
Eve avait noué par son incrédulité, la Vierge Marie l’a dénoué
par sa foi’; comparant Marie avec Eve, ils [les Pères] appellent
Marie ‘la Mère des vivants’ et déclarent souvent : ‘Par Eve la
mort, par Marie la vie’.” (§494)
Pour que la Vierge puisse remplir ce rôle, il fallait bien sûr que
Dieu la prépare. “Le Père des miséricordes a voulu que
l’Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette
Mère prédestinée...”, §488. Cette préparation, essentielle selon
l’Eglise, est la raison derrière le dogme de l’Immaculée Concep-
tion, §490-493.
Ce dogme est fondé sur la traduction, erronée, de la parole de Luc
1.28 où l’ange Gabriel salue Marie comme étant “pleine de
grâce”, gratia plenam. Elle avait été “rachetée dès sa conception”
et “préservée intacte de toute souillure du péché originel”. Le
beau texte de Paul en Ephésiens 1.3,4 s’applique à elle “plus qu’à
toute autre personne créée”. Elle a été “pétrie par l’Esprit Saint,
et formée comme une nouvelle créature.” De la sorte, elle “est
restée pure de tout péché personnel tout au long de sa vie.” Elle
est ainsi l’unique exemple d’une personne sauvée “par anticipa-
tion”, CEF §349.
Le dogme date de 1854, proclamé par Pie IX en ces mots :
“...pour l’honneur de la sainte et indivisible Trinité, pour la
gloire et l’ornement de la Vierge Mère de Dieu (...) Nous décla-
rons... que la doctrine qui tient que la Bienheureuse Vierge Ma-
rie, dans le premier instant de sa conception, a été... préservée
et exempte de toute tache du péché originel, est révélée de
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 62

Dieu. (...) ...si quelqu’un avait la présomption... de penser con-


trairement à Notre définition, qu’il apprenne... que, condamné
par son propre jugement, il aurait souffert naufrage dans la foi
et cessé d’être dans l’unité de l’Eglise...” Constitution Ineffabi-
lis Deus22.
Nous avons déjà cité le passage où Marie est présentée comme la
nouvelle Eve. Plus loin, il est dit que “la Vierge Marie a ‘coopéré
au salut des hommes avec sa foi et son obéissance libres’ (Lumen
Gentium 56) Elle a prononcé son oui ‘au nom de toute la nature
humaine’ : Par son obéissance, elle est devenue la nouvelle Eve,
mère des vivants”, §511, cf. 975. Ceci est particulièrement intri-
guant du fait qu’au paragraphe 504 il est rappelé, à juste titre, que
Christ “est le Nouvel Adam qui inaugure la création nouvelle”.
Logiquement, la Mère de Dieu devient alors l’Epouse de Dieu,
confusion qui s’est déjà vue dans le paganisme23. Le paragraphe
411 entre pleinement dans cette logique avec la citation de Ge-
nèse 3.15. D’une part, “la tradition chrétienne” y voit une an-
nonce du “nouvel Adam” (ce qui correspond à l’interprétation
‘habituelle’ du texte). Mais par ailleurs, dit le Catéchisme, beau-
coup y reconnaissent l’annonce d’une femme, la mère du Christ,
Marie, comme “nouvelle Eve”. La contradiction est claire et non-
résolue, bien que l’Eglise semble pencher vers la deuxième inter-
prétation, appuyée sur le dogme de l’Immaculée Conception.

L’Eglise ajoute à cela la confession de Marie comme “vraiment


Mère de Dieu (Théotokos)”, §495. Cela reçoit son explication
historique au §466, citant le Concile d’Ephèse de 431 où la mal-
heureuse expression “Mère de Dieu” a été formulée officielle-
ment pour la première fois dans la discussion sur les deux natures
de Christ. Au §2677, la Catéchisme ajoute : “Parce qu’elle nous
donne Jésus son fils (sic), Marie est la Mère de Dieu et notre
Mère; nous pouvons lui confier tous nos soucis et nos demandes;
elle prie pour nous...”

22
Citée in Regard p.12.
23
Hislop y revient en détail dans son livre.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 63

Finalement sur ce point, l’Eglise confesse “la virginité réelle et


perpétuelle de Marie”, virginité que la naissance de Christ “n’a
pas diminué, mais consacré”. Elle est célébrée comme Aeiparthe-
nos, “toujours vierge”, §499. Les frères et sœurs de Jésus que
l’Evangile mentionne sont considérés comme les enfants de
“l’autre Marie” (Matthieu 28.1). ‘Frères et sœurs’ signifie qu’ils
étaient des proches parents, “selon une expression connue de
l’Ancien Testament” (cité en note : Genèse 13.8; 14.16; 29.15;
etc.), §500. Du fait que Marie est à la fois vierge et mère, “elle
est la figure et la plus parfaite réalisation de l’Eglise”. Cette der-
nière devient à son tour Mère et vierge, §507.

L’Esprit-Saint et Marie.
“Marie, la Toute Sainte Mère de Dieu, toujours Vierge est le chef
d’œuvre de la mission du Fils et de l’Esprit dans la plénitude du
temps. Pour la première fois dans le dessein du salut et parce que
son Esprit l’a préparée, le Père trouve la Demeure où son Fils et
son Esprit peuvent habiter parmi les hommes.” Les plus beaux
textes sur la Sagesse (dont Proverbes 8.1 à 9.6) sont lus en rela-
tion avec elle. Dans la liturgie, elle est chantée et représentée
comme “le Trône de la Sagesse”, §721. Cela correspond au texte
suivant de Lumen Gentium 53 : Marie est “la fille de prédilection
du Père et le sanctuaire du Saint-Esprit”.
Les paragraphes suivants, 722-726, y ajoutent les commentaires
suivants. C’est le Saint-Esprit qui l’a préparée pour que, conçue
sans péché, elle soit parmi les créatures “la plus capable d’accueil
au Don ineffable du Tout-Puissant”. C’est ainsi “avec et par
l’Esprit” qu’elle conçoit et enfante le Fils de Dieu. Le Saint-
Esprit manifeste en elle le Fils du Père. “Elle est le Buisson ar-
dent de la Théophanie définitive”. C’est “par Marie” que
“l’Esprit Saint commence à mettre en communion avec le Christ
les hommes... : les bergers, ...les époux de Cana et les premiers
disciples.” Et, “au terme de cette mission de l’Esprit, Marie de-
vient la ‘Femme’, nouvelle Eve ‘mère des vivants’, Mère du
‘Christ total’ (Cf. Jean 19.25-27). C’est comme telle qu’elle est
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 64

présente avec les Douze,... à l’aube des ‘derniers temps’ que


l’Esprit va inaugurer le matin de la Pentecôte...”

L’Eglise et Marie.
Le troisième contexte est celui de la doctrine de l’Eglise.
“Elle (Marie) est aussi vraiment ‘Mère des membres [du Christ]
(...) ayant coopéré par sa charité à la naissance dans l’Eglise des
fidèles qui sont les membres de ce Chef”. Elle est “Mère de
l’Eglise”, §963.24 “Comme la foi d’Abraham avait marqué le
début de l’Ancienne Alliance, la foi de Marie est située à l’aurore
de la Nouvelle Alliance. Marie, elle aussi, a cru et espéré contre
espérance”, CEF §346. Mieux (ou pire...), à la croix, “la Nou-
velle Eve, comme le suggère Saint Jean, enfante le monde nou-
veau qui naît du calvaire”, CEF §351.
Son rôle est d’abord et surtout maternel. Cela découle de son
union avec son Fils dans l’œuvre du salut qui se manifeste parti-
culièrement lors de la conception virginale du Christ et lors de la
passion. Effectivement, elle était là, “souffrant cruellement avec
son Fils unique, associée d’un cœur maternel à son sacrifice,
donnant à l’immolation de la victime, née de sa chair, le consen-
tement de son amour...”, §964, cf. 969. Ce rôle maternel ressort
encore après l’Ascension lorsqu’elle a “assisté de ses prières
l’Eglise naissante”, §965.
Cette maternité a été en quelque sorte couronnée lors de
l’Assomption. Elevée corps et âme à la gloire du ciel, elle est
“exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être
ainsi plus entièrement conforme à son Fils...”; “...Tu as rejoint la
source de la Vie, toi qui conçus le Dieu vivant et qui, par tes
prières, délivreras nos âmes de la mort”, §966.

24
Comme l’Eglise est sensée être la mère des chrétiens (“notre sainte mère,
l’Eglise”) et comme Marie est “Mère de l’Eglise”, est-elle donc la grand-mère
des chrétiens ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 65

La proclamation du dogme de l’Assomption par Pie XII, le 1er


novembre 1950 a été faite en les termes suivants, cités dans le
Regard :
“C’est pourquoi l’auguste Mère de Dieu, unie de toute éternité à
Jésus-Christ, d’une manière mystérieuse, par ‘un même et
unique décret’ de prédestination, ...Vierge très pure dans sa di-
vine maternité, généreuse associée du divin Rédempteur... a en-
fin obtenu comme suprême couronnement de ses privilèges
d’être gardée intacte de la corruption du sépulcre, en sorte que...
elle fut élevée dans son corps et dans son âme, à la gloire su-
prême du ciel où, Reine, elle resplendirait à la droite de son
Fils... Alors, puisque l’Eglise universelle, en laquelle vit l’Esprit
de vérité, cet Esprit qui dirige infailliblement pour parfaire la
connaissance des vérités révélées, a manifesté de multiples fa-
çons sa foi au cours des siècles, et puisque les évêques du
monde entier, d’un sentiment presque unanime, demandent que
soit définie, comme dogme de foi divine et catholique, la vérité
de l’Assomption au ciel de la Bienheureuse Vierge Marie - véri-
té qui s’appuie sur les Saintes Lettres, est ancrée profondément
dans l’âme des fidèles, approuvée depuis la plus haute antiquité
par le culte de l’Eglise, en parfait accord avec les autres vérités
révélées, démontrée et expliquée par l’étude, la science et la sa-
gesse des théologiens - nous pensons que le moment, fixé par le
dessein de Dieu dans sa Providence, est maintenant arrivé où
nous devons déclarer solennellement cet insigne privilège de la
Vierge Marie...
C’est pourquoi, après avoir adressé à Dieu d’incessantes et sup-
pliantes prières et invoqué les lumières de l’Esprit de vérité,
pour la gloire du Dieu Tout-Puissant... Nous proclamons... que
c’est un dogme divinement révélé que Marie, l’Immaculée Mère
de Dieu toujours Vierge, à la fin du cours de sa vie terrestre, a
été élevée en âme et en corps à la gloire céleste. ...si quelqu’un
...osait volontairement nier ou mettre en doute ce que Nous
avons défini, qu’il sache qu’il a fait complètement défection
dans la foi divine et catholique.” (Citation de Munificentissimus
Deus25).

25
Regard, p.12,13. Les évêques de France rappellent que l’Eglise interprète ici
les données du Nouveau Testament, CEF §350. Ils oublient de préciser les-
quelles...
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 66

Voilà donc la Mère que Dieu a daigné donner à l’Eglise. Sa


“coopération absolument sans pareille... pour que soit rendue aux
âmes la vie surnaturelle” lui a bien donné droit à cette place dans
l’ordre de la grâce, §968. D’ailleurs, “par son intercession répétée
elle continue à nous obtenir les dons qui assurent notre salut éter-
nel. (...) C’est pourquoi la bienheureuse Vierge est invoquée dans
l’Eglise sous les titres d’advocate (sic), d’auxiliatrice, de secou-
rable, de médiatrice (Lumen Gentium 62)”, §969. Est-ce que cela
offusque ou diminue l’unique médiation du Christ ? Le para-
graphe suivant nous explique que cela n’est pas le cas. Son in-
fluence “découle de la surabondance des mérites du Christ”.
Christ est le Médiateur unique; Marie n’est pas (pas encore ?)
Co-rédemptrice. Mais elle collabore déjà, §973.

La place unique de Marie résulte dans une piété envers elle qui
“est intrinsèque au culte chrétien”. Elle “‘est légitimement hono-
rée par l’Eglise d’un culte spécial. [Ce culte qui lui est d’ailleurs
rendu] depuis les temps les plus reculés... sous le titre de ‘Mère
de Dieu’ (...) bien que présentant un caractère absolument unique
(...) n’en est pas moins essentiellement différent du culte
d’adoration qui est rendu au Verbe incarné ainsi qu’au Père et à
l’Esprit Saint; il est éminemment apte à le servir’; il trouve son
expression... dans la prière mariale, telle le Saint Rosaire, ‘abrégé
de tout l’Evangile’”, §971. Cette attitude croyante à l’égard de
Marie s’est développée “spontanément” dans la tradition de
l’Eglise, CEF §355.

Finalement, en Marie, l’Eglise peut connaître son propre destin :


Marie est l’icône eschatologique de l’Eglise, §972.

__________________

Il ne semble guère possible d’aller plus loin dans la glorification


de la Vierge. Pourtant, le Catéchisme n’a pas encore épuisé le
sujet. Voici quelques autres citations.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 67

Le §2146 traite du deuxième commandement (le troisième selon


les textes bibliques) : “Tu ne prendras pas le nom de l’Eternel,
ton Dieu, en vain”, Exode 20.7. Ce commandement interdit
l’abus du nom de Dieu, “c’est à dire tout usage inconvenant du
nom de Dieu, de Jésus-Christ, de la Vierge Marie et de tous les
saints.”

Le §2617 revient sur la coopération de Marie à l’Annonciation et


ajoute : “Dans la foi de son humble servante le Don de Dieu
trouve l’accueil qu’Il attendait depuis le commencement des
temps.” Cette coopération est d’ailleurs étendue à la Pentecôte,
sans doute, dans l’esprit du §725.

La prière de Marie est un exemple pour les fidèles. Ainsi, à Cana,


elle prie son Fils pour un repas de noces, “signe d’un autre Re-
pas, celui des noces de l’Agneau donnant son Corps et son Sang à
la demande de l’Eglise, son Epouse. Et c’est à l’heure de la Nou-
velle Alliance, au pied de la Croix (cf. Jean 19.25-27), que Marie
est exaucée comme la Femme, la nouvelle Eve, la véritable ‘Mère
des vivants’”, §2618.

Les paragraphes 2673-2679 précisent que notre prière se fait en


communion avec la sainte Mère de Dieu. Comment cela ?
D’abord, notre prière filiale communie dans l’Eglise avec la Mère
de Jésus (la référence est à Actes 1.14).
A partir de la “coopération singulière de Marie à l’action de
l’Esprit Saint”, les Eglises “ont développé la prière à la sainte
Mère de Dieu, en la centrant sur la Personne du Christ manifestée
dans ses mystères”. Faisant cela, l’Eglise “confie à la Mère de
Jésus les supplications et les louanges des enfants de Dieu, puis-
qu’elle connaît maintenant l’humanité qui en elle est épousée par
le Fils de Dieu.”
L’expression privilégiée de cette prière se trouve dans l’“Ave
Maria”. Cette prière “ose” se réjouir de la joie que Dieu trouve en
Marie, selon l’interprétation mariale de Sophonie 3.17. Reprenant
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 68

les paroles de Gabriel (“Pleine de grâce...”), le Catéchisme com-


prend : “Marie, en qui vient habiter le Seigneur Lui-même, est en
personne la fille de Sion, l’arche de l’alliance, le lieu où réside la
gloire du Seigneur : elle est ‘la demeure de Dieu parmi les
hommes’ (Apocalypse 21.3).”
“Parce qu’elle nous donne Jésus son fils, Marie est la Mère de
Dieu et notre mère; nous pouvons lui confier tous nos soucis et
nos demandes... En nous confiant à sa prière nous nous abandon-
nons avec elle à la volonté de Dieu : ‘Que ta volonté soit faite.’”
C’est à elle que nous devons abandonner l’heure de notre mort :
“Qu’elle y soit présente comme à la mort en Croix de son Fils et
qu’à l’heure de notre passage elle nous accueille comme notre
mère pour nous conduire à son Fils Jésus, en Paradis.”
“Marie est l’Orante parfaite, figure de l’Eglise... La prière de
l’Eglise est comme portée par la prière de Marie. Elle lui est unie
dans l’espérance.”

Est-ce que les traditions diverses de piété mariale ont été abo-
lies ?
Lumen Gentium 54, déjà cité, dit : “...demeurent légitimes les
opinions qui sont librement proposées dans les écoles catholiques
au sujet de celle qui occupe dans la Sainte Eglise la place la plus
élevée au-dessous du Christ et nous est toute proche.” Et plus
loin : “...les formes diverses de piété envers la Sainte Vierge, que
l’Eglise a approuvées, en les maintenant dans les limites d’une
saine doctrine orthodoxe et en respectant les conditions de temps
et de lieu, le tempérament et le génie des fidèles, font que, à tra-
vers l’honneur rendu à sa Mère, le Fils... peut être comme il le
doit (sic; en latin : rite, selon le rite, légalement) connu, aimé,
glorifié et obéi dans ses commandements”, 66.
Dans cette optique, le Concile engage “tous les fils de l’Eglise à
apporter un concours généreux au culte, surtout liturgique, envers
la bienheureuse Vierge, à faire grand cas des pratiques et exer-
cices de piété envers elle, que le magistère a recommandées au
cours des siècles; il recommande de conserver religieusement
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 69

toutes les règles portées dans le passé au sujet du culte des


images du Christ, de la bienheureuse Vierge et des saints” 67.26

Terminons ce survol de la doctrine mariale avec une citation de


Jean-Paul II : “...ce cœur à la fois virginal et maternel... va vers
tous ceux que le Christ a embrassés et embrasse continuellement
dans son amour inépuisable. Et c’est pourquoi ce cœur doit être
lui aussi maternellement inépuisable”27.

Né de la vierge Marie
Une des accusations fréquentes que nous entendons comme chré-
tiens non catholiques est : “Vous ne croyez pas à la Vierge !”
Avant d’aller plus loin, il n’est alors pas inutile de dire ce que
nous croyons à son sujet. Comme d’habitude, nous nous tournons
vers la Parole de Dieu, unique source d’autorité que nous possé-
dons sur Marie.

La Bible dit que Christ est né de la vierge Marie. Le prophète


Esaïe l’a annoncé 700 ans plus tôt (“Voici que la vierge est en-
ceinte, elle enfantera un fils et lui donnera le nom d’Emmanuel”,
Esaïe 7.14), texte cité en Matthieu 1.23 par l’ange à Joseph.
L’apôtre Paul y ajoute : “Dieu a envoyé son fils, né d’une
femme”, Galates 4.4. Pour qu’il soit réellement Fils de Dieu et
Fils de l’homme, la naissance virginale est inévitable. Sans cette
conception surnaturelle, Christ ne serait qu’un homme et notre
salut un rêve.
Par Marie, Christ partage notre nature humaine, il est vrai homme
de vrai homme autant qu’il est “vrai Dieu de vrai Dieu” (La for-
mulation vient du Symbole d’Athanase).

26
Dans l'appendice 1, les documents 3 et 4 donnent deux exemples de ces
pratiques et exercices de piété mariale, visées par Vatican II; les documents 5 et
6 y ajoutent deux titres récents de la Vierge. Les évêques de France rappellent à
ce sujet la vénération de la Vierge à Lourdes, CEF §349.
27
Dans l’Encyclique Redemptor Hominis, cité par le Regard, p 14.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 70

De par cette maternité de Christ, Marie a une place particulière


dans le développement du plan de salut. Mais ce plan est pure
grâce du début jusqu’à la fin. A elle, “une grâce a été faite”, dit
l’ange Gabriel, Luc 1.28, car elle a “trouvé grâce auprès de
Dieu”, v30. Elle n’a rien mérité, mais elle a cru, v45; par la foi,
elle a accepté la volonté de Dieu pour elle. Et par la grandeur de
l’événement, elle devient “bénie entre les femmes”, v42. Toutes
les nations la diront “bienheureuse”, v48, parce que le Tout-
Puissant a fait pour elle de grande choses. Elle ne l’est pas pour
ou par elle-même, car comme Jean-Baptiste plus tard, elle doit
diminuer et son Fils doit croître.
Cela n’a pas été facile. A douze ans dans le temple, l’Enfant lui
échappe déjà et à Cana, lors de ces fameuses noces, elle reçoit ce
presque camouflet : “Femme, qu’y a-t-il entre toi et moi ?” Jean
2.4. Ce ne sera jamais “par Marie à Jésus”. Un jour, lorsque Ma-
rie cherche à lui parler (que cela !), Jésus demande : “Qui est ma
mère...?” et répond : “quiconque fait la volonté de mon Père qui
est dans les cieux, celui-là est ...ma mère”, Matthieu 12.46-50.
Comme Anne, la mère du prophète Samuel, qu’elle cite si abon-
damment dans le Magnificat, elle aura d’autres enfants, après la
naissance de Christ : Joseph “ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle
eût enfanté un fils, auquel il donna le nom de Jésus”, Matthieu
1.25. Ce “jusqu’à” est signe d’une vie maritale normale et de ce
couple sont nés des fils et des filles, parmi lesquels se trouvent
Jacques et Jude, auteurs de deux lettres du Nouveau Testament,
cf. Matthieu 13.55,56.
Si Jésus s’est refusé à toute ingérence de Marie dans sa vie, il n’a
pas moins honoré son père et sa mère. A la croix, il remet le soin
de sa mère, manifestement devenue veuve, à son disciple bien-
aimé, Jean 19.26,27. Comme fils aîné, il prend sa responsabilité
pour garantir l’avenir de sa mère, surtout que ses frères “ne
croyaient pas en lui”, 7.5.
Elle était probablement là, dans la chambre haute, lors de la ré-
surrection. Cependant, elle n’est même pas mentionnée dans ces
récits des apparitions de Jésus. Mais, d’après Actes 1.14, elle est
là avec les disciples, les femmes et les frères de Jésus, venus à la
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 71

foi entre-temps (cf. 1 Corinthiens 15.7). Ce n’est pas : ‘Marie et


les disciples’, ni même : ‘les Onze et Marie’. Elle est là, tout sim-
plement, comme une chrétienne parmi d’autres. Et avec eux, elle
a dû recevoir le Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte.
Et après cela ? Elle disparaît des pages du Nouveau Testament.
Nous ne savons rien d’autre sur elle. Qu’est-ce qui s’est passé ?
Nous l’ignorons. Ce n’est peut-être pas très satisfaisant pour
notre curiosité, mais Dieu n’a pas jugé utile de nous en dire plus.
Probablement, parce qu’il n’y avait rien à dire de plus. Comme
tout croyant, à l’image de David, son ancêtre, “après avoir, dans
sa génération, servi le dessein de Dieu”, elle est décédée, elle a
été réunie avec ses pères et elle a vu la corruption, Actes 13.36.
Et dans la présence de Christ, elle attend comme tout vrai croyant
le jour de la résurrection, lorsque Christ, son Seigneur et le nôtre,
reviendra.

Voilà donc l’enseignement biblique et le résumé de la foi évangé-


lique au sujet de la vierge Marie.

Heureux plutôt...
En Luc 11.27,28, on dit à Jésus : “Heureux le sein qui t’a porté et
les mamelles qui t’ont allaité !” N’est-ce pas l’accomplissement
des paroles mêmes de Marie (“toutes les nations me diront bien-
heureuse”) ? Pourtant, Jésus répond de manière très différente :
“Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la
gardent !” Cela nous pousse à poser la question suivante : Le
culte de la Vierge, est-il licite, est-il permis d’après la parole de
Dieu ? En la louant, honorons-nous celle que Dieu veut honorer ?
En refusant ce culte, aurons-nous fait défection de la foi divine ?
De nouveau, comme nous l’avons dit précédemment, la question
est d’une grande importance. Notre salut en dépend, si nous de-
vons croire les paroles de Pie XII, citées plus haut. Examinons
donc la doctrine mariale à la lumière de la Bible.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 72

Qui est Marie ?


Est-elle vraiment cette femme exceptionnelle, conçue sans péché,
nouvelle Eve qui par son obéissance ouvre la voie du salut à la
descendance d’Eve, la désobéissante ? Est-elle vraiment la Mère
de Dieu, toujours vierge, couronnée de gloire et d’honneur
comme la reine du ciel ? Est-ce que cette femme-ci est vraiment
la même que celle que nous avons rencontrée dans les pages du
Nouveau Testament ? Et si elle est la même, pourquoi la Bible en
dit si peu ? Si cette doctrine mariale est ignorée et refusée au prix
du salut de nos âmes, pourquoi a-t-il fallu autant de siècles pour
la développer et pour la définir ? Et pourquoi, ces doctrines sont-
elles rejetées par tant de chrétiens pourtant attachés à la Parole de
Dieu et vivant manifestement des vies chrétiennes pleinement
dignes du mot ? Sont-ils les oubliés du Saint-Esprit ? Dieu, au-
rait-il décidé qu’il vaut mieux parler au travers d’une hiérarchie
fossilisée, inspirée par des récits mystiques d’enfants illettrés que
par sa Parole, et par son Eglise désireuse de marcher selon cette
parole ?
Ou assistons-nous à quelque chose de très différente ? Est-il pos-
sible que le culte de l’antique déesse-mère (Sémiramis, Isis, la
reine du ciel de Jérémie 7.18; 44.18, la Diane des Ephésiens en
Actes 19.27) a commencé à pénétrer l’Eglise à partir du IVe et du
Ve siècle ? (On ne rencontre pas de culte marial avant cette pé-
riode) Peut-on y voir l’effort, d’une ampleur toujours plus
grande, d’intégrer dans la foi chrétienne des éléments de l’ancien
paganisme ? Si cela était le cas, nos questions posées plus haut
trouveraient une réponse à la fois lucide et troublante. Lucide, car
cela nous aiderait à comprendre ce qui s’est passé. Troublante,
car nous verrions dans l’histoire un développement profondément
déchristianisant à l’œuvre au sein d’une église qui pourtant conti-
nue à s’afficher comme l’héritière des apôtres du Christ.

Une chose est certaine : nous assistons à une évolution curieuse.


L’Eglise qui annonçait l’Evangile du Christ, se met progressive-
ment à diminuer le rôle de Christ en faveur de celui de Marie.
Reposons donc la question. Qui est-elle ? L’image que projette
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 73

d’elle l’Eglise, peut-elle se cadrer avec les affirmations de la


Parole de Dieu ?

Est-elle “l’Immaculée Conception” ?


Christ est le seul être humain à être conçu sans péché, le seul à
qui s’applique l’adjectif immaculé, cf. Hébreux 7.26. Or, voici
que le miracle de cette conception divine est déplacé vers Marie.
C’est elle qui est miraculeusement préservée du péché. Du coup,
que Christ soit sans péché devient normal : n’est-il pas le fils de
deux êtres sans péché, Dieu et Marie ? La raison invoquée par le
Catéchisme est quelque peu perverse : “...pour pouvoir donner
l’assentiment libre de sa foi à l’annonce de sa vocation, il fallait
qu’elle fût toute portée par la grâce de Dieu” (§490, c’est nous
qui soulignons). Faut-il donc pour toute obéissance libre à la
volonté de Dieu être “plein de grâce”, et donc être conçu sans
péché ? Nous serions tous sans péché, et le sacrifice de Christ
perdrait sa raison d’être !
Non, Marie n’est pas “pleine de grâce”. Une telle traduction est
une trahison. Littéralement, l’ange lui dit : “toi à qui une grâce a
été faite” (et les traducteurs catholiques le savent fort bien). Elle
parle de Dieu comme son Sauveur, Luc 1.47, car elle aussi avait
besoin d’être sauvée de ses péchés. Le “tous ont péché et sont
privés de la gloire de Dieu” de Romains 3.23 s’applique à elle
autant qu’à tout autre homme. A-t-elle été rachetée dès sa con-
ception ? N’a-t-elle donc jamais connu l’expérience du péché ?
Aurait-elle donc été sauvée dès la constitution de son être ? Et
donc sans la foi ? Mais peut-on être sauvé sans la foi ? Biblique-
ment, la réponse doit être : c’est impossible. Il n’y a aucune ex-
ception à la règle, aucune personne qui n’échappe au règne uni-
versel du péché. Tous ont péché, tous ont besoin du sacrifice de
Jésus, tous ont besoin de croire pour être sauvés.
Faut-il encore rappeler que St Bernard de Clairvaux, pourtant loin
d’être exempt de mariolâtrie) rejetait cette doctrine nouvelle de
l’immaculée conception parce qu’elle portait ombrage à la Parole
de Dieu faite chaire ? A-t-il fait naufrage dans la foi à cause de
cela ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 74

Comme un bonheur ne vient jamais seul, et comme le Seigneur


semble bien faire les choses, la définition par Pie IX de
l’Immaculée Conception est de très peu suivie par l’apparition à
Lourdes de la Vierge à Bernadette sous les mots curieux (et peu
français) : “Je suis l’immaculée conception”. Après une telle
confirmation céleste, qui oserait encore douter ? Mais une doc-
trine doit être jugée selon l’Ecriture (cf. 1 Corinthiens 14.29). Et
si elle échoue à cet examen, elle est fausse. D’où peut alors venir
une confirmation surnaturelle d’une doctrine anti-biblique ? Soit
elle n’est pas surnaturelle et le produit d’une imagination fertile,
soit elle est surnaturelle et diabolique. Il n’y a pas d’autre solu-
tion. Et les mots pesants de Pie IX se retournent contre lui-
même : celui qui adhère à cette doctrine est condamné par son
propre jugement, a souffert naufrage dans la foi et cessé d’être
dans l’unité de l’Eglise.

Marie, est-elle la nouvelle Eve ?


Cela semble si tentant ! Voilà une autre vierge qui obéit et de qui
naîtra une nouvelle humanité par son fils. Voilà vraiment la mère
des vivants ! Mais la définition est loin d’être sans problèmes.
Y a-t-il vraiment une comparaison possible ? Eve, était-elle
vierge au moment de la chute, §494 ? Nous l’ignorons, mais c’est
tout de même fort peu probable.
Genèse 3.15, annonce-t-il la venue d’une femme comme “nou-
velle Eve”, §411 ? Pas du tout ! Le texte annonce la venue d’un
Nouvel Adam, du Messie qui écrasera la tête du serpent. Ici en-
core, Christ est volé au profit de Marie.28
En devenant ainsi la Nouvelle Eve, la “mère de Dieu” devient
l’épouse de Dieu. Comme les antiques déesses dans les mystères
babyloniens, égyptiens et autres, les deux rôles deviennent iden-
tiques dans une confusion digne de celle de Babel. Et si Christ
devient homme, Marie, elle, est près d’être divinisée. Ce qui
28
Voir appendice 2, point 3 : Qui est la descendance de la femme en Genèse
3.15 ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 75

semble une illustration intéressante, devient une aberration dan-


gereuse. N’est-ce pas étonnant que Paul a omis de tirer tout le
profit de sa comparaison entre Christ et Adam (1 Corinthiens 15)
en “oubliant” de mentionner cette compréhension si lumineuse de
la nouvelle Eve ? Ou n’est-ce pas étonnant du tout ?

Est-elle vraiment la “mère de Dieu” ?


L’expression consacrée aux conciles d’Ephèse et de Chalcédoine
au Ve siècle était peut-être théologiquement correcte. Pourtant,
elle avait commencé à être utilisée au siècle précédent pour
mieux exalter Marie. Les conciles s’en servaient dans leur con-
damnation de Nestorius qui voulait s’en tenir au titre biblique-
ment plus juste de “mère de Christ”, Christotokos. Est-ce un cas
où pour les raisons peut-être bonnes, les uns (le concile) utilisent
une formulation mauvaise et ambiguë et où les autres (Nestorius),
pour des raisons peut-être moins bonnes, utilisent une formula-
tion pourtant meilleure ? A voir. (Encore que la condamnation de
Nestorius n’était pas avant tout une affaire de théologie mais de
politique ecclésiastique.)
Déjà avant 431, le titre “mère de Dieu” était utilisé pour accroître
la gloire de Marie. Et la dérive de ce mot s’est amplifiée durant
les siècles suivants. Comme mère de Dieu, Marie donne son fils,
§2677. Elle donne à l’immolation ce fils né de sa chair, §964.
Mais la Bible ne connaît rien à ce don. Dieu a donné son Fils,
Jean 3.16. Ce don n’a rien à faire avec un prétendu don de Marie.
Elle ne donne pas son fils, elle le porte. C’est là sa gloire, c’est
pour cela qu’elle est appelée bienheureuse. En suggérant qu’elle
donne son fils, l’Eglise vole Dieu de sa grâce et donne la gloire
du Créateur à la créature. Cela ne peut être, Esaïe 48.11.
Marie est “la mère de Jésus”, Jean 2.129. Elle est acclamée
comme “la mère de mon Seigneur” en Luc 1.43 (cf. §495). Et
bien que son Fils soit le Fils éternel du Père, elle ne sera jamais
appelée autrement que la mère de Jésus, la mère du Seigneur. En
29
Voir sur les noces de Cana le texte d'Augustin, dans l'appendice 1, document
7.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 76

faisant d’elle la mère de Dieu, l’Eglise dépasse l’Ecriture. Le


résultat est la mariolâtrie. Le résultat est une église qui vit davan-
tage de la maternité de Marie que de la paternité de Dieu.
Nous ne saurons sans doute jamais à quel point cette conception
des choses a contribué à la naissance de l’Islam. L’idée que Dieu
puisse avoir une mère fait vite de Marie l’épouse de Dieu avec
toutes les connotations que cela entraîne ! On a beau récuser ces
idées, mieux aurait valu de ne pas les provoquer par une exalta-
tion de Marie loin au-delà de ce que dit d’elle la Bible.

Est-elle restée toujours vierge ?


Nous avons déjà regardé le témoignage du Nouveau Testament,
mais l’idée mérite qu’on y réfléchisse. Pourquoi faut-il qu’elle
soit restée vierge ? N’est-ce pas parce que l’Eglise voit peu à peu
dans la vie maritale un état inférieur à la vie célibataire ? Parce
que vie sexuelle et vie impure finissent par être confondues dans
l’esprit d’une hiérarchie célibataire ? Nous assistons ainsi à la
curieuse contradiction entre la virginité perpétuelle et la materni-
té perpétuelle. Marie qui n’enfante plus et qui pourtant enfante le
monde nouveau qui naît du Calvaire, CEF §351; la Vierge de
toujours et la Mère de tous. En faisant d’elle la plus parfaite réa-
lisation de l’Eglise, le Catéchisme enseigne une double erreur :
celle qui fait de Marie une vierge perpétuelle et de l’Eglise une
mère.
Il est dommage que l’appel à la Bible que fait le §500 doit être
refusé. Mais “l’autre Marie” de Matthieu 28.1 n’est pas la mère
des frères de Jésus. Et l’usage occasionnel en l’Ancien Testament
du mot frère là où il s’agit d’autres liens de parenté ne nous per-
met pas d’introduire cet usage partout ailleurs où cela nous con-
vient. Le seul usage différent de ce mot dans le Nouveau Testa-
ment est au sens spirituel de frères et sœurs en Christ.

Est-elle la reine du ciel ?


Nous avons déjà parlé du culte de l’antique déesse-mère. En éle-
vant Marie à la royauté céleste, l’Eglise lui donne le titre antique
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 77

de reine du ciel (cf. Jérémie 7 et 44 déjà cités). Une fois encore,


Christ est volé. L’Assomption singe l’Ascension et donne à la
mère un rôle que seul Christ possède. Déjà “unie de toute éternité
à Jésus-Christ”, elle l’est maintenant aussi pour toute l’éternité à
venir. Venant dans la gloire, nous y verrons donc Christ à la
droite du Père et Marie à la droite du Fils. Nous voudrions éviter
tout langage propre à blesser qui que ce soit, mais peut-on aller
plus loin dans le blasphème ? Christ, règne-t-il donc entre son
Père et sa Mère ? A quand, la divinisation totale de cette dame ?
Pie XII rappelle que l’Assomption “s’appuie sur les Saintes
Lettres”, mais oublie, malencontreusement, de les citer. Ces
“saintes lettres” sont écrites par quel saint ? Sont-elles identiques
à la Bible ? Pourtant, aucun texte de l’Ecriture ne peut être cité
pour attester ce qu’il faut sans doute appeler un des plus grands
non événements de l’histoire
D’ailleurs, est-ce en devenant reine de l’univers, qu’elle devient
“plus entièrement conforme à son Fils” ? (§966) Comme nous
sommes tous, en tant que disciples de Christ, appelés à être con-
formes à l’image de Christ, Romains 8.29, allons-nous tous deve-
nir rois et reines de l’univers, assis à la droite de Christ ? Est-ce
cela ce que l’apôtre voulait dire ? L’Eglise, sait-elle lire la Bible ?
Est-ce cela l’effet du Magistère infaillible ? Mais si elle se
trompe ici, qui nous dira qu’elle ne se trompe pas partout ail-
leurs ?

Que fait Marie ?


Il sera clair que la réponse à la question : “qui est Marie ?” in-
fluence énormément la réponse à la question : “que fait Marie ?”
Son rôle dépend de sa nature. Ainsi, dans le Nouveau Testament,
nous avons vu que chaque fois qu’elle a essayé de s’affirmer
comme la mère du Messie, Jésus l’a clairement remise à sa place.
Son rôle dans les Evangiles est fort limité. Elle met au monde le
Christ, elle prend soin de lui dans son enfance, elle le suit comme
disciple plus tard. C’est tout.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 78

Son rôle selon le Catéchisme est très différent de cette sobriété


évangélique. Elle devient la personne clef dans le mystère de
l’incarnation et dans la passion du Christ. Son consentement est
essentiel. Elle coopère au salut des hommes et à la naissance de
l’Eglise. Cette coopération est encore accentuée par
l’Assomption : elle est maintenant notre médiatrice, notre avo-
cate, à la droite de son Fils.
Que faut-il en penser ?

Au centre de la compréhension du rôle de Marie se trouve l’idée


qu’en tant que mère, Marie a une influence sur son Fils, peu im-
porte que cette idée soit manifestement contraire à la Bible.
Christ, le Fils exemplaire, ne peut rien refuser à sa mère. Qu’elle
se fasse renvoyer dans sa médiation pour les époux de Cana,
l’Eglise n’en a cure. Non, c’est bien à cause d’elle que son Fils a
agi en faveur de ce couple. C’est par elle que le Saint-Esprit
commence déjà ici à mettre les gens en communion avec le
Christ. Le sous-entendu est que son amour maternel pour tous les
hommes est bien plus compréhensif que l’amour du Père ou du
Fils.
Ce n’est guère étonnant alors qu’il faut encore ce même consen-
tement d’amour pour que Christ meure sur la croix. A la croix, ce
n’est pas la souffrance du Père qui donne son Fils, ce n’est même
pas la souffrance du Fils qui se livre lui-même, mais c’est la souf-
france de la mère qui impressionne l’Eglise et qui, d’une façon
mystérieuse, ajoute à l’événement. Elle coopère avec Dieu dans
tout cela. En elle, le premier des hommes est une femme. Grâce à
Dieu, elle coopère encore à la naissance de l’Eglise. En la per-
sonne de Jean, elle reçoit toute l’Eglise pour fils. Curieux texte
d’ailleurs qui fait de Jean et non de Pierre le représentant de
l’Eglise. A cet instant, Marie remplit-elle le rôle de la nouvelle
Eve qui enfante l’Eglise ? Le langage mystique cache à peine le
vol qui s’opère une fois de plus. Car le monde nouveau ne naît
pas ici, mais plus tard, par le don du Saint-Esprit à la Pentecôte.
Mais après tout, comme le Père et le Fils avaient déjà été volés,
c’était bien le tour au Saint-Esprit...
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 79

Ainsi, nous dit-on, c’est autour de Marie, que l’Eglise est réunie
ce jour de la Pentecôte. Elle n’est pas avec les disciples, mais au
milieu d’eux. Ils sont tous sont autour d’elle. Elle les assiste de
ses prières. Assistance tellement efficace qu’ils reçoivent tous le
Saint-Esprit. Grâce à elle, sans doute !

Faut-il être étonné qu’elle continue au ciel son travail


d’assistance si bien commencé ? Elle y est notre avocate, notre
médiatrice. C’est à elle que nous sommes invités à remettre nos
soucis et nos demandes, §2677.
Malgré le fait que le Catéchisme dit que cela n’offusque ni ne
diminue l’unique médiation du Christ, nous avons difficile de
nous imaginer qu’il peut en être autrement. Christ est le seul mé-
diateur entre Dieu et les hommes, 1 Timothée 2.5. Où reste-t-il de
la place pour un autre ? Christ est notre avocat auprès du Père,
1 Jean 2.1. Avons-nous besoin d’un autre ? Christ, a-t-il trop de
travail ? Christ intercède en faveur de ceux qui s’approchent de
Dieu par lui, Hébreux 7.25. Faut-il quelqu’un d’autre qui inter-
cède auprès de lui ? Le chemin direct que Christ a ouvert pour
nous, Hébreux 10.19,20, a-t-il été fermé pour que nous ayons
besoin d’un autre chemin qui nous conduit jusqu’à lui ? Nous
devons faire connaître à Dieu nos demandes, sans nous inquiéter
de rien, Philippiens 4.6 et nous décharger sur lui de tous nos sou-
cis, 1 Pierre 5.7. Faut-il dire au Seigneur que nous n’avons plus
assez de confiance en lui et que nous préférons passer par sa
mère ?
Peut-on prier à Marie en centrant sa prière sur Christ ? N’est-ce
pas une pirouette du langage, une gymnastique impossible de
l’esprit ? Marie, peut-elle mieux nous comprendre que Jésus,
“puisqu’elle connaît maintenant l’humanité qui en elle est épou-
sée par le Fils de Dieu”, §2675 ? Christ est-il donc devenu “un
souverain sacrificateur incapable de compatir à nos faiblesses”,
Hébreux 4.13 ?
Pour un chrétien, mourir, c’est être avec Christ, 2 Corinthiens
5.8; Philippiens 1.23. Est-ce maintenant Marie qui nous accueille
à l’heure de notre mort “pour nous conduire à son Fils Jésus, en
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 80

Paradis”, §2677 ? Depuis quand a-t-elle été nommée à cette


place ? Et si la Bible n’en dit rien, comment l’Eglise peut-elle en
être si sûre ?

Nous l’avons déjà dit et il faut le redire : Dieu est volé. Son
amour est dénigré. Sa grâce est méprisée. Sa gloire est donnée à
un(e) autre. Suivre le Catéchisme dans ce domaine, c’est faire
naufrage en ce qui concerne la foi. Si le Catéchisme a raison, la
Bible peut être mise de côté. Manifestement, elle s’est trompée
dans ce qu’elle dit de Marie et elle nous trompe en ce qu’elle ne
dit pas de Marie. Bien plus, si le Catéchisme a raison, il faut
croire que la doctrine de la Trinité sera bientôt à mettre à jour.
Dieu la Mère arrive ! N’est-ce pas ce qui est déjà pressenti dans
les textes que nous avons cités ?

Notre Dame qui es au ciel ?


Cela peut paraître invraisemblable. Toucher à la Trinité ? Qui
oserait le faire ? Pourtant, que veulent dire les textes du Caté-
chisme que voici ?
Marie est en personne “l’arche de l’alliance, le lieu où réside la
gloire du Seigneur : elle est ‘la demeure de Dieu parmi les
hommes’ (Apocalypse 21.3)”, §2676. En elle “le Père trouve la
Demeure où son Fils et son Esprit peuvent habiter parmi les
hommes”, §721; elle est “le Buisson ardent de la Théophanie
définitive”, §724.
Cette place extraordinaire est encore soulignée par la façon éton-
nante que le troisième commandement est étendu à la Vierge,
§2146. C’est vrai qu’en même temps le Catéchisme l’étend à tous
les saints, mais cela ne peut nous enlever l’idée que c’est surtout
de la Vierge qu’il s’agit. Les saints semblent être là pour rendre
l’extension du commandement moins choquante.
Jean-Paul II paraît aller dans le même sens dans les paroles déjà
citées de l’encyclique Redemptor Hominis. Marie “va vers tous
ceux que le Christ a embrassés et embrasse continuellement dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 81

son amour inépuisable”. Cela implique qu’elle doit avoir “un


cœur maternellement inépuisable”.

Ces trois textes officiels sont remarquables ! Marie est le trône de


Dieu, la Tente de Dieu parmi les hommes, qu’Apocalypse 21
annonce. Elle est la Demeure, la localisation de la Shékina. En
elle, Dieu a habité parmi nous (Jean 1.14 !). Le Dieu qui se
nomme “Je suis celui qui suis” la fait briller de son éclat de sorte
que devant elle, à l’image de Moïse, il faille se déchausser à
cause de tant de sainteté. En elle, l’Esprit peut habiter parmi
nous. Cela a beau être vrai de tout chrétien authentique, ce n’est
pas ce qui est dit ici. Marie est dans un groupe à part. Un groupe
dans lequel nous n’avions jamais imaginé qui que ce soit en de-
hors du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Apparemment, nos ima-
ginations étaient trop limitées.
Il faudra donc faire attention de ne pas prendre le nom de la
Vierge en vain. Car son nom est maintenant au même niveau que
le saint nom de Dieu. Mais tout cela est logique. Après tout, Dieu
n’est-il pas lui-même avec nous en elle ?
Jean-Paul II aura, du moins pour le moment, le mot de la fin. La
voilà omniprésente. Elle va depuis bientôt 2000 ans sur toute la
terre vers tous ceux que Christ aime. Elle est, en même temps (ce
ne peut guère être autrement), en France et en Chine, en Papoua-
sie et en Alaska. Inlassablement, elle parcourt le monde pour
rencontrer tout homme avec son amour. Impossible ? Bien sûr
que non. Elle est dotée d’un cœur maternellement inépuisable.
Son cœur a pris une ampleur divine. Son amour égale celui de
son Fils. C’est normal. Après tout, n’est-ce pas elle sa mère ?

Ainsi, elle peut entendre et exaucer nos prières, même lorsqu’on


la prie de tous les côtés en même temps. Elle peut assister tous les
mourants, être présente à leurs derniers instants, comme elle
l’était à la croix de Christ pour l’assister. Elle peut le faire chez
des milliers de gens en même temps. Quelle dame remarquable,
seule créature à être omniprésente ! Et pas seulement cela. Elle
est également omnisciente, “puisqu’elle connaît maintenant
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 82

l’humanité qui en elle est épousée par le Fils de Dieu”, § 2675.


Elle nous connaît. Elle nous assiste parce qu’elle nous connaît. Et
par son influence décisive sur son Fils, elle est quasiment omni-
puissante. Quelle dame !

Notre Dame qui es au ciel (car c’est là que tu sièges),


que ton nom soit sanctifié (car ton nom ne doit pas être
abusé),
que ta volonté soit faite (car ton Fils ne peut rien te
refuser),
que ton règne vienne (car tu es vraiment la reine de
l’univers).
Donne-nous notre pain (car c’est à toi qu’il nous faut
quotidien présenter nos demandes et nos
soucis).
Pardonne-nous nos (car qui peut nous comprendre
offenses comme toi ?).
Ne nous induis pas (car tu peux nous préserver du
dans la tentation péché mortel),
mais délivre-nous du mal (car t’invoquer nous sauve du
malheur).
Car c’est à toi qu’appartiennent
le règne, la puissance
et la gloire (car Dieu t’en a fait la Demeure),
aux siècles des siècles (car pour toujours tu règnes à la
droite de ton Fils).
Amen.

Blasphématoire ? Bien sûr ! Mais c’est là que le culte de cette


dame aboutit. Ce n’est pas pour notre plaisir qu’il faut retourner à
la Parole de Dieu : c’est pour notre salut. Car Dieu ne se laissera
pas dérober impunément de sa gloire. Il est un Dieu jaloux, il ne
tolère aucun rival. Il chérit avec jalousie l’Esprit qu’il a fait habi-
ter en nous (Exode 20.5; Jacques 4.5). Remplacer “la gloire du
Dieu incorruptible par des images représentant l’homme corrup-
tible” et “la vérité de Dieu par le mensonge”, Romains 1.23,25,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 83

nous conduira nécessairement au jugement. Aussi charitables que


nous voudrions être avec les convictions religieuses des autres,
ici nous devons parler clairement. La religion de Notre Dame
n’est pas celle du Christ. Le fils de cette dame n’est pas le Christ
de la Bible.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 84

5 . L E S S AC R E ME NTS

C’est avec une certaine réticence que nous abordons le sujet des
sacrements. Pourquoi ? Parce que nous touchons ici à l’un des
domaines les plus intimes de la vie chrétienne. Notamment lors-
que le croyant se réunit autour de la table du Seigneur, il vit un
moment très particulier. Au milieu de ses frères, conscient de leur
présence, il est en même temps seul avec le Seigneur. Qui
sommes-nous à vouloir nous immiscer dans cette intimité ? Ne
faut-il pas une certaine hésitation avant de lancer la discussion ?
Pourtant, même l’apôtre Paul s’est senti forcé à le faire. Chez les
chrétiens de Corinthe, la rencontre autour de la table du Seigneur
s’était dégradée et Paul s’exprime en des termes très forts afin de
corriger leurs erreurs, cf. 1 Corinthiens 10 et 11.
Son exemple nous encourage dans notre démarche. Même ici, ou
plutôt, surtout ici, l’Eglise doit marcher comme la Bible lui dit de
marcher. Dans cette question, loin de nous d’imposer quoi que ce
soit qui serait seulement d’invention et de fabrication humaine.
Par leur nature, et par le sens que nous leur donnons, les sacre-
ments peuvent devenir de puissants moyens pour diriger et con-
trôler l’Eglise. Ils peuvent être manipulés dans le but d’asservir
les hommes au lieu d’être pour eux des moyens de servir Dieu et
de s’approcher de lui. C’est parce que les sacrements doivent
toucher l’homme dans son intimité la plus profonde que nous
devons être encore plus prudents d’agir selon la Parole de Dieu.
Selon notre habitude, regardons ce que dit le Catéchisme et puis,
au fur et à mesure, évaluons ses propos d’après l’Ecriture.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 85

Gestes du Christ
“L’Eglise est le grand sacrement de la communion divine”,
§1108. Au centre de cette Eglise se trouvent les signes visibles de
la grâce invisible, que sont les sacrements, CEF §359. Ici, et en
particulier avec le sacrifice de la Messe, nous entrons au cœur de
la vie catholique. L’Eglise est avant tout une assemblée sacra-
mentelle. Cela reçoit un sens œcuménique profond lorsque
l’Eglise est appelée “le sacrement de l’unité”, §1140. L’unité des
chrétiens passe nécessairement par l’Eglise qui prie dans les sa-
crements, §1126. La vie du Christ est communiquée par les sa-
crements. En recevant les offrandes devenues le corps et le sang
du Christ, les fidèles “deviennent eux-mêmes une vivante of-
frande à Dieu”, §1105. Les sacrements sont “les chefs-d’œuvre
de Dieu” dans la nouvelle alliance. C’est là que la force vivante
et vivifiante du Christ est disponible pour les croyants, §1116.
Plus encore, c’est dans les sacrements que Christ lui-même est
agissant. L’exemple donné est celui du baptême, §1087, 1127. Et
parce que Christ agit par eux, en eux, les sacrements sont effi-
caces. Ils communiquent la grâce qu’ils signifient sans dépendre
d’un instrument intermédiaire. Ils agissent, comme on dit, Ex
opere operato, par le fait même que l’action est accomplie. “Dès
lors qu’un sacrement est célébré conformément à l’intention de
l’Eglise, la puissance du Christ et de son Esprit agit en lui, indé-
pendamment de la sainteté personnelle du ministre”, §1128. C’est
en participant ainsi à l’œuvre de Christ que les fidèles récoltent le
fruit de la vie sacramentelle : ils sont “déifiés” par l’Esprit en
étant unis vitalement au Fils unique, Sauveur. On comprend
pourquoi les sacrements sont nécessaires au salut, comme l’avait
déjà affirmé le Concile de Trente, §1129.
Les sacrements sont aujourd’hui dans l’Eglise ce que furent les
signes et les miracles dans la vie du Christ, §1151,1152. Par eux,
le Christ tout entier (Christus totus) est à l’œuvre, le Christ avec
son Eglise au travers du ministère ordonné, §1136,1142. Car sans
ce dernier, il n’y a pas de sacrement.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 86

Le sacrement est “institutionnalisé”, il est lié au peuple de Dieu


rassemblé autour de ses prêtres et évêques, en général dans
l’église-bâtiment qui signifie et manifeste l’Eglise, et qui est donc
beaucoup plus qu’un simple lieu de rassemblement, §1180. Là,
entourée des saintes images de Christ, de la sainte Mère de Dieu
et des saints, et selon la forme approuvée, l’Eglise célèbre cette
liturgie des mystères du Christ qui marque l’essentiel de la vie
chrétienne.

Est-ce que cette façon de comprendre les sacrements est juste ?

Engagés avec Christ


Le sacrement est signe d’engagement. Le mot, qui ne figure pas
dans la Bible, vient du latin sacramentum, au sens du serment
militaire que prêtèrent les soldats romains. On comprend aisé-
ment comment ce mot a pris un sens chrétien. Par le baptême, le
nouveau croyant témoignait de son engagement pour Christ; par
la Cène, il renouvelait cet engagement. Nous sommes ici près du
sens biblique des sacrements. Ils sont les signes extérieurs et
visibles de l’engagement intérieur et réel du croyant. Mais ils ne
sont pas l’essentiel de la vie religieuse, tout comme pour le sol-
dat, le serment n’est pas l’essentiel de sa vie au service de l’Etat.
L’essentiel est dans le service, dans la fidélité journalière au ser-
ment prêté, dans la façon dont la valeur symbolique du serment
devient réalité concrète dans la vie active.
Lorsque le rite devient l’élément central de la vie chrétienne, il
perd son sens spirituel profond. Au lieu de servir de catalyseur au
service, il devient le service et le remplace. Il devient ritualisme
parce qu’il met à la place de la réalité d’une vie vécue avec et
pour Christ le simple respect d’une série de pratiques extérieures.
L’obéissance à Jésus-Christ devient l’obédience aux traditions
religieuses. La grâce coûteuse de Dieu devient la grâce à bon
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 87

marché de l’Eglise30. Il suffit de respecter religieusement les


commandements de l’Eglise (cf. §2041-2043) pour recevoir
l’absolution et la bonne conscience en prime, sans aucun vrai
engagement envers le Seigneur Jésus-Christ.
Dans l’Eglise, le sacrement est devenu un mystère essentiel avec
une valeur indépendante de toute relation intime entre le croyant
et Christ. Comme si la matière peut transmettre le Créateur !
Comme si la simple participation à un rite peut communiquer
Christ et déifier l’homme ! Comme si le fait de recevoir l’hostie
fait de quiconque une vivante offrande à Dieu ! La réalité est
toute autre. L’incarnation ne peut être étendue à l’eau, au pain, au
vin, à l’huile. Aucun automatisme ne saurait régir la communion
entre Dieu et l’homme. Aucun acte humain ne peut péremptoire-
ment disposer ainsi de Christ et déterminer qui le reçoit et sous
quelle forme. Aucune communion avec Christ ne peut être expé-
rimentée sans une foi vivante née d’une sincère repentance. Nous
ne devenons pas une offrande vivante par la simple ingestion du
Christus panis, le “Christ pain”. Nous sommes, bien au contraire,
appelés à offrir nos corps comme un sacrifice vivant, Romains
12.1. L’Ecriture nous exhorte à un engagement coûteux si nous
voulons suivre le Christ.

En plus, dans le sacrement, ce n’est pas Christ qui agit, mais


l’Eglise. Ce n’est pas Christ qui baptise, mais l’Eglise qui baptise
“en Christ”, Romains 6.3, Galates 3.27. Ce n’est pas Christ qui
partage son corps dans la Cène, mais l’Eglise qui par la Cène
commémore la mort de Christ. Et parce que ce sont les hommes
qui agissent et qui reçoivent, les sacrements ne peuvent pas être
efficaces de par eux-mêmes. En faisant du prêtre un autre Christ,
Rome accroît l’autorité de la hiérarchie en spoliant Christ et
l’Eglise. Loin d’avoir une doctrine élevée de l’Eglise, elle montre
son mépris profond de celle-ci. Elle n’aime l’Eglise que dans la
mesure qu’elle la domine et qu’elle peut dire “l’Eglise, c’est

30
L’expression vient de Dietrich BONHOEFFER, Le prix de la grâce, Genève-Paris :
Labor et Fides - Cerf, 1985.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 88

moi”. L’Eglise est spectatrice, assistante passive à ce que le cler-


gé met en scène pour elle. Elle est assurée que ce qu’on lui offre
ainsi est valide. Mais cette validité repose sur la seule parole de
la hiérarchie ! Sur du vent !
Qu’en est-il dans le Nouveau Testament ?
Qui baptise ? L’Eglise dans la personne de n’importe lequel de
ses responsables, pour ne pas dire de ses membres. Et le baptisé
est-il passif ? Loin de là ! Il “se fait baptiser” parce qu’il veut
s’engager derrière Jésus-Christ. Aucun baptisé ne fait que subir
son baptême.
Qui “donne le Saint-Esprit” ? Comme nous le verrons plus loin,
ce n’est pas non plus la prérogative des responsables. D’ailleurs,
cette “confirmation” est intimement liée à la conversion et au
baptême. Ce que nous avons dit sur le baptisé s’applique donc
également ici.
Qui célèbre la Cène ? L’Eglise toute entière. La communauté
locale semble bien être libre de désigner en son sein la ou les
personnes qui “conduiront” ce moment. Ce n’est jamais en soi
une des tâches principales du conducteur unique de cette com-
munauté. Et l’essentiel lors de la Cène ne se fait pas devant, entre
les mains de celui qui préside, mais dans l’Eglise.
Qui effectue la réconciliation ? Qui entend les confessions ?
C’est la responsabilité de tout croyant selon le Nouveau Testa-
ment et jamais seulement du responsable.
Ce sont bien les anciens qui oignent d’huile les malades qui le
leur demandent, mais même là ils sont plusieurs à l’intérieur
d’une même église locale.
Qui marie le couple ? Le silence de l’Ecriture à ce sujet doit nous
rendre prudent. Mais ici encore, les responsables ne peuvent agir
qu’en représentants de l’église locale.
Qui ordonne le conducteur spirituel ? Est-il le représentant de la
hiérarchie ? D’un groupe d’églises ? Ou est-il d’abord et avant
tout le responsable de la communauté locale ? Et donc “ordonné”
par elle ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 89

Où faut-il célébrer les sacrements ? Il est manifeste que dans les


temps du Nouveau Testament, les églises se rassemblaient princi-
palement dans les maisons (cf. notamment Colossiens 4.15; Phi-
lémon 2) Il faudra attendre au moins un siècle avant que les chré-
tiens commencent à avoir des bâtiments de culte. Du coup, la
question du lieu devient sans importance aucune. Les sacrements
sont liés à l’église (la communauté), et non à un bâtiment quel-
conque. Et certainement pas à un bâtiment où abondent les
images et les statues de cette dame dont nous avons déjà vu
qu’elle ne peut être la mère du Seigneur.

Quand est-ce qu’un sacrement est vrai ? La question peut paraître


étrange, mais le Catéchisme la pose. Pour lui, le critère de cette
véracité est la fidélité à la Tradition apostolique. Et seule la suc-
cession apostolique peut garantir cette fidélité, §1209. Là où cette
succession est présente, on trouve de vrais sacrements. Cela est le
cas dans les églises orientales, §1399, mais cela n’est pas le cas
dans les “communautés ecclésiales issues de la Réforme” qui, “en
raison surtout de l’absence du sacrement de l’Ordre, n’ont pas
conservé la substance propre et intégrale du mystère eucharis-
tique”, §1400. Ces églises ne peuvent donc pas avoir de vrais
sacrements.
Ce jugement montre une fois de plus où mène l’arrogance du
système romain. Toute vraie spiritualité est bannie tant qu’elle
n’est pas en communion avec la hiérarchie vaticane. Et tout ritua-
lisme, peu importe sa qualité spirituelle discutable, tant qu’il est
maintenu dans la dépendance hiérarchique, est reconnu comme
vrai. Et tout cela dans le silence le plus total de l’Ecriture !

Une église où le geste rituel l’emporte sur l’engagement spirituel


doit être regardée avec suspicion. Il n’est pas dans l’habitude du
Seigneur de laisser entre les mains des hommes un pouvoir tel,
qu’ils peuvent s’imaginer de lui forcer la main. Dans la Bible,
cela rappelle l’histoire des fils d’Eli, 1 Samuel 2.12-17; 4.1-21.
Ils croyaient pouvoir disposer à leur guise du Dieu vivant. Leur
mainmise sur le peuple était affreuse. Mais Dieu n’était pas dupe
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 90

et ils ont payé leur présomption de leur vie. Nous ne pouvons pas
non plus nous imaginer d’avoir Dieu dans notre manche. Comme
l’a dit Jean Calvin : “Lorsque je baptise, est-ce comme si j’avais
le Saint-Esprit en bout de manche pour le donner à tout moment ?
Ou le corps et le sang du Seigneur à offrir à qui me plaît ? Ce
serait bien présomptueux d’attribuer à des créatures mortelles ce
qui appartient à Jésus-Christ”31.

Les sacrements de l’initiation chrétienne

Le baptême
“Le Baptême est le sacrement de la régénération par l’eau et dans
la parole”. C’est par le baptême que “nous sommes libérés du
péché et régénérés comme fils de Dieu, nous devenons membres
du Christ et nous sommes incorporés à l’Eglise et faits partici-
pants à sa mission”, §1213.
Donné aux nourrissons, il constitue pour eux “un acte unique qui
intègre de façon très abrégée les étapes préalables à l’initiation
chrétienne”, §1231. L’Eglise demande à Dieu que l’Esprit Saint
descende dans l’eau baptismale, “afin que ceux qui y seront bap-
tisés ‘naissent de l’eau et de l’Esprit’ (Jean 3.5)”, §1238.
L’onction du saint chrême complète le rite et signifie que le bap-
tisé est devenu un chrétien, c’est à dire “oint” de l’Esprit Saint,
§1329. On parlera alors facilement de la “nouvelle naissance dans
le Baptême”. Et pour ne pas priver les enfants d’une telle grâce
inestimable, il faudrait conférer le baptême peu après la nais-
sance, §1250. D’ailleurs, cette tradition du baptême des nourris-
sons est “immémoriale”, attestée depuis le IIe siècle, §1252.
Qu’arrive-t-il si un enfant meurt sans baptême ? Notons que le
Catéchisme, §1261, a fait disparaître les Limbes. Cependant, il
faut prier pour leur salut, §1283. Et les évêques de France rappel-
lent que “l’Eglise a manifesté ne pas connaître d’autre moyen, en

31
Cité dans le Regard, p.35.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 91

dehors du baptême, pour assurer aux enfants l’accès à la béati-


tude éternelle : pour cela, qu’on se garde donc de négliger la mis-
sion reçue du Seigneur de faire ‘renaître de l’eau et de l’Esprit’
tous ceux qui peuvent être baptisés”, CEF § 394.
Comme le baptême est “le sacrement de la foi”, le rôle du parrain
ou de la marraine est très important. Ce sont eux qui demandent
la foi au nom du baptisé et qui doivent aider leur filleul à la déve-
lopper, §1253-1255.

Quels sont les effets du baptême ? Le Catéchisme y revient dans


les paragraphes 1262-1274. Plusieurs choses y sont énumérées :
 La rémission de tous les péchés, du péché originel jus-
qu’aux péchés personnels, ainsi que toutes les peines du
péché. Cependant, une inclination au péché demeure
qu’il faudra combattre.
 Le baptisé devient “une création nouvelle” (2 Corinthiens
5.17), un fils adoptif de Dieu, participant de la nature di-
vine (2 Pierre 1.4), temple de l’Esprit Saint. Il reçoit de
Dieu la grâce sanctifiante, la grâce de la justification, qui
le rend capable de croire et de vivre sous la motion du
Saint-Esprit.
 Incorporé à l’Eglise, il devient une pierre vivante de cette
Eglise, il entre au sacerdoce commun des fidèles (1 Pierre
2.5,9). De la sorte, il est appelé à participer à l’activité
apostolique et missionnaire du Peuple de Dieu.
 Par le baptême, s’il l’a reçu “validement”, le baptisé non
catholique se trouve dans «une certaine communion, bien
qu’imparfaite, avec l’Eglise catholique». Le baptême est
le lien sacramentel d’unité.
 Il reçoit une marque spirituelle indélébile, étant “configu-
ré au Christ”. Le “sceau du Seigneur”, qui est le sceau
du Saint-Esprit (Ephésiens 4.30) a été posé sur lui. Et
comme cela ne peut se répéter, le baptême ne peut pas
non plus être réitéré (cf. §1246).
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 92

Que dit la Bible ?


Un des textes bibliques le plus cité au sujet du baptême dans le
Catéchisme est Marc 16.16 (cf. §1223, 1253, 1256, 1257). Jésus
y dit : “Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui
qui ne croira pas sera condamné.” C’est un des versets qui fait
clairement ressortir le lien crucial entre la foi et le baptême.
L’unique condition biblique au baptême est la foi, la confiance
personnelle en Jésus-Christ en vue du pardon des péchés. Dans le
baptême des nourrissons, c’est justement cette unique condition
qui est battue en brèche. Appliquer aux nourrissons tout ce que
dit le Nouveau Testament de la conversion et du baptême des
adultes a des conséquences fâcheuses. C’est ainsi que se consti-
tue une église de non croyants ! L’appel de l’apôtre Pierre en
Actes 2.38,39 va dans le même sens : “Repentez-vous et que cha-
cun de vous soit baptisé au nom de Jésus-Christ, pour le pardon
de ses péchés; et vous recevrez le don du Saint-Esprit...” Que la
foi aura besoin de grandir après le baptême va sans le dire. Mais
il faut qu’elle soit présente et consciente. Un baptême où la foi
n’est pas présente chez le baptisé n’est pas un baptême chrétien
au sens biblique du mot. Quand une personne se convertit à Jé-
sus-Christ, il se fera donc baptiser, et jamais “rebaptiser”. On ne
peut pas réitérer le baptême, nous en convenons. Mais pourvu
qu’on parle du baptême biblique !

Est-ce le baptême qui fait le chrétien ? Autrement dit, suffit-il


d’appliquer quelques gouttes d’eau pour transformer un adulte ou
un bébé en chrétien, tant que ce rite soit accompli dans, par et
selon l’intention de l’Eglise ? Dans ce cas, l’évangélisation du
monde serait essentiellement une mission de baptême. Et la pa-
role du Christ serait tronquée : il n’y aurait plus vraiment besoin
de croire. Il suffirait d’être baptisé et de respecter tant bien que
mal les autres rites et pratiques extérieurs de l’Eglise. Au lieu de
faire des disciples, on ne ferait plus que des baptisés, ce qui est
contraire à Matthieu 28.20.
Est-ce le baptême qui nous obtient la rémission des péchés ?
Actes 2.38 et 22.16 pourraient nous le faire croire. C’est que dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 93

l’Eglise Primitive, le baptême était donné dans les heures ou les


jours (et encore, l’unique cas où il est question de jours est celui
de Saul de Tarse, le futur apôtre Paul) qui suivaient la conver-
sion. Pourtant, Actes 8.13,18-23 sont un exemple que le baptême
en soi, même accompagné d’une certaine foi (mais laquelle ?) ne
peut transformer l’homme. C’est la foi qui est agissante. Le bap-
tême constitue un témoignage visible de cette foi, et un engage-
ment concret dans une nouvelle vie. Pierre en dit autant en
1 Pierre 3.21 : “...du baptême qui vous sauve, ...par lequel on ne
se débarrasse pas de la souillure de la chair, mais qui est
l’engagement d’une bonne conscience devant Dieu.” Ce n’est
donc pas le rite en soi qui sauve, mais la foi qui s’exprime au
travers du baptême. Il est pour le moins curieux que le Caté-
chisme ne cite pas ce texte dans le cadre du baptême ! Et quand il
est finalement cité, au §1794, le commentaire va dans le même
sens que ce que nous venons de dire.
Est-on né de nouveau par le baptême, selon Jean 3.5 ? Jésus parle
ici avec Nicodème, docteur d’Israël, et un familier du ritualisme
juif. Pour lui, on entrait dans le royaume de Dieu par la circonci-
sion. Est-ce que Jésus échange maintenant un ritualisme contre
un autre ? Bien au contraire. Un peu plus loin, il lui fait com-
prendre que le salut est par la foi, 3.16 : “...afin que quiconque
croit en lui ait la vie éternelle.” Faire coïncider (ou presque) la
naissance physique et la naissance spirituelle, ce serait retomber
dans le ritualisme juif qui était, pour le moins, une compréhen-
sion erronée des données de l’Ancien Testament (cf. Genèse 15.6
et les remarques de l’apôtre Paul sur ce texte en Romains 4.9-12).
Reçoit-on le Saint-Esprit par le baptême ? Oui et non ! Dans le
Nouveau Testament, le baptême étant si étroitement lié à la con-
version, le don de l’Esprit de Dieu venait dans la même expé-
rience. Cependant, le cas de Corneille, Actes 10.44,47, montre le
vrai lien : la foi en Christ est accompagnée du don de l’Esprit. Là
où le baptême se fait plus tard, l’Esprit n’est pas absent avant le
baptême. Mais là où le baptême précède la foi (et où, dans beau-
coup de cas, la foi ne suivra jamais), le Saint-Esprit n’est pas
donné. Ce serait lier Dieu à des hommes inchangés, seulement
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 94

issus d’une culture “chrétienne”. Mais Dieu n’est jamais lié à une
culture. Il est le Père de ceux qui sont devenus ses enfants par
leur confiance personnelle en Jésus-Christ, son Fils. C’est eux
que Dieu a marqué de son sceau, après qu’ils ont entendu
l’Evangile et qu’ils ont cru, Ephésiens 1.13,14. L’Esprit de Dieu
ne descend pas dans l’eau du baptistère (vague souvenir de Jean
5.4), même si l’Eglise toute entière devait prier dans ce sens du-
rant des siècles. Il n’y a donc aucune magie dans l’eau du bap-
tême.

Le baptême est le signe visible, extérieur, de la mort. L’image est


très forte. Le nouveau chrétien disparaissait sous l’eau (le bap-
tême se faisait par immersion) pour ensuite réapparaître, symbole
d’une nouvelle vie. Revêtu d’un habit neuf, il montrait ainsi qu’il
avait enterré sa vie passée et qu’il était décidé de vivre désormais
par l’Esprit de Dieu et non par et pour lui-même (cf. Romains
6.1-14 et Galates 3.26). Cependant, et c’est l’évidence, l’image
de la mort (le baptême d’eau) était un témoignage de la réalité de
cette mort dans son for intérieur. Son vieux ‘moi’ était crucifié. Il
était devenu “une nouvelle créature”, 2 Corinthiens 5.17. Ce texte
parle d’ailleurs clairement des choses anciennes qui sont passées.
Mais quelles choses anciennes sont passées pour un nourrisson ?
Ce que nous disons ici n’est pas une chose nouvelle. Même le
Catéchisme y souscrit au §1214. C’est dommage qu’il l’oublie
par la suite !

La confirmation
Le baptême de par lui-même est insuffisant. La confirmation est
“nécessaire à l’accomplissement de la grâce baptismale”, §1285.
Bien que le baptême soit valide et efficace, “l’initiation chré-
tienne reste inachevée”, §1306. La confirmation, donnée une
seule fois, imprime “dans l’âme une marque spirituelle indélé-
bile, le ‘caractère’ qui est le signe de ce que Jésus-Christ a mar-
qué un chrétien du sceau de son Esprit en le revêtant de la force
d’en haut pour qu’il soit son témoin”, §1304, cf. §1295. Les
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 95

textes bibliques cités sont 2 Corinthiens 1.22; Ephésiens 1.13 et


4.30.
L’évêque, et lui seul (sauf de rares exceptions, §1313), est habili-
té à confirmer, §1299. Dans sa prière, il rappelle que les confir-
mands sont déjà nés de nouveau. Maintenant, il demande que
Dieu répande son Esprit sur eux. Suit alors l’imposition des
mains et l’onction avec le saint chrême, qui a été consacré le Jeu-
di Saint au cours de la Messe chrismale, §1297. L’effet est assu-
ré : “l’effusion plénière de l’Esprit Saint, comme elle fut accor-
dée jadis aux apôtres au jour de la Pentecôte”, §1302.
Les cinq résultats de la confirmation, §1303, se situent tous au
niveau de la croissance de la grâce baptismale. Dans ce sens, on
serait tenté de dire qu’elle n’apporte rien de nouveau. Elle donne
seulement plus de la même chose.
Qui peut recevoir ce sacrement ? Tout enfant baptisé dès “l’âge
de la discrétion” (en France : entre douze et dix-huit ans, CEF
§405). Dans ce but, l’enfant est préparé par la catéchèse. “En
danger de mort, on doit cependant confirmer les enfants même
s’ils n’ont pas encore atteint l’âge de la discrétion”, §1307, 1314.
L’âge adulte physique n’est pas à confondre avec l’âge adulte de
la foi. D’ailleurs, la seule raison que la confirmation est “tempo-
rellement” séparée du baptême tient du rôle essentiel de l’évêque,
successeur des apôtres, §1313. Après tout, la grâce baptismale
qui est ici approfondie “est une grâce d’élection gratuite et immé-
ritée qui n’a pas besoin d’une ‘ratification’ pour devenir effec-
tive”, §1308. Nul besoin donc d’être choqué par le bas âge des
confirmands. Leur préparation est achevée avec le recours au
sacrement de la pénitence, afin qu’ils soient en état de grâce pour
être purifiés en vue du don de l’Esprit, §1310. Finalement, l’aide
spirituelle d’un parrain ou d’une marraine est souhaitable, §1311.

Que dit la Bible ?


Avant de regarder le détail de certains textes, notons la contradic-
tion troublante entre le sceau du Seigneur reçu au baptême et le
sceau de l’Esprit reçu lors de la confirmation, avec citation du
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 96

même texte d’Ephésiens 4.30. Y a-t-il donc deux marques indélé-


biles ? Ou la première marque a-t-elle disparu ? Le langage même
de l’Eglise prête à une confusion lamentable. Trouve-t-elle diffi-
cile de faire comprendre pourquoi ce sacrement est essentiel ?
N’est-ce pas un peu l’enfant pauvre des sacrements ? Or, la con-
fusion est encore plus grande. On est sensé recevoir l’Esprit lors
du baptême. On le reçoit une nouvelle fois lors de la confirma-
tion. Et les nombreux Catholiques qui fréquentent le réveil cha-
rismatique le reçoivent encore une fois lors d’une imposition des
mains spéciale. Chaque fois, le don est sensé conférer quelque
chose d’indélébile. Si l’Eglise avait vraiment reçu
l’administration du Saint-Esprit, ce qui n’est pas le cas, il faut
conclure qu’elle s’en décharge avec une légèreté qui fait à la fois
rire et pleurer.

Il est indéniable que dans le Nouveau Testament, l’imposition des


mains afin de recevoir le Saint-Esprit a parfois suivi le baptême :
Actes 8.14-18; 19.5,6; Hébreux 6.2. Dans un autre texte,
l’imposition des mains a précédé le baptême, Actes 9.17,18 (mais
s’agit-il de la transmission de l’Esprit ?). Dans le cas des Samari-
tains au moins, Actes 8, des raisons particulières rendent néces-
saires l’intervention des apôtres. Ces raisons n’existaient pas
habituellement, cf. 8.38. La preuve biblique d’une confirmation
est donc très mince. D’autant plus que dans chaque cas, ce sont
des baptisés adultes et convertis à qui on impose les mains. Il ne
s’agit jamais d’enfants en bas âge. Et nous avons déjà vu que le
baptême des nourrissons n’a aucun fondement biblique. Il ne
reste donc pas grand chose des preuves bibliques.
A cela, il faut ajouter une considération d’un autre ordre. En
chargeant le sens de la confirmation au point d’en faire
l’équivalent total de la Pentecôte, l’Eglise crée une moquerie qui
frôle le blasphème. La confirmation rituelle et presque automa-
tique des enfants serait donc la même chose que l’effusion du
Saint-Esprit le jour de la Pentecôte ? Des enfants pour la plupart
pas plus convertis les uns que les autres seraient animés du même
Esprit que les apôtres autrefois ? Le Saint-Esprit serait-il donc
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 97

domestiqué ? Le vent, a-t-il été mis en cage (cf. Jean 3.8) ? Peut-
on rabaisser l’Esprit du Dieu vivant à une chrismation rituelle,
dispensée par un clerc ?

Faut-il l’imposition des mains d’un évêque successeur des


apôtres (ce qui soulève déjà deux questions parallèles : qu’est-ce
qu’un évêque ? et qu’est-ce que la succession apostolique ? Nous
en parlons ailleurs), pour valablement conférer l’Esprit Saint ?
Notons que déjà dans le Nouveau Testament, cela n’est pas le
cas. Dans de nombreuses situations, l’Esprit est reçu sans
l’intermédiaire d’un apôtre (cf. Actes 8.38; 9.17,18; 10.44;
11.21...). La croissance rapide des églises rendait de toute façon
impossible une telle intervention des apôtres. C’est Dieu qui
donne son Esprit. Et il le donne à tous ceux qui sont devenus
disciples du Christ; au point que l’apôtre Paul peut dire que celui
qui n’a pas l’Esprit de Christ, ne lui appartient pas, Romains 8.9.
Et celui ou celle qui a reçu l’Esprit en donne la preuve par la
réalité de sa vie chrétienne. C’est le moment où il choisit de re-
noncer à lui-même, Luc 9.23-26. Son repentir n’a pas besoin d’un
sacrement de pénitence. Ayant cru en l’Evangile, étant touché par
la grâce de Dieu et convaincu de son péché, il se donne à Christ
pour le suivre jusqu’au bout. Alors, Jésus le baptise de son Esprit,
en l’identifiant à sa mort. Et Dieu n’a pas honte de l’appeler son
fils. Il ne reçoit pas l’Esprit de la part de l’Eglise. Mais en rece-
vant l’Esprit, il est incorporé à l’Eglise, 1 Corinthiens 12.13, et
baptisé d’eau en signe visible de ce que Dieu a fait dans son
cœur.

L’eucharistie
L’eucharistie est présentée comme le sacrement qui achève
l’initiation chrétienne, §1322. Elle est bien sûr beaucoup plus.
C’est le rite central et essentiel de l’Eglise, “source et sommet de
toute la vie chrétienne”, contenant “tout le trésor spirituel de
l’Eglise”. Par l’eucharistie, “Dieu sanctifie le monde”,
§1324,1325. C’est ici le moment clef où l’Eglise transforme du
pain et du vin en le corps et le sang du Seigneur Jésus-Christ,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 98

§1333. “Toucher à l’eucharistie, c’est alors toucher au Christ et


toucher ainsi à l’unité de cette Eglise”, CEF §410. Christ aurait
institué ce sacrement “pour perpétuer le sacrifice de la Croix au
long des siècles”, §1323. L’annonce de ce sacrement, en Jean 6,
aurait divisé les disciples : “L’Eucharistie et la Croix sont des
pierres d’achoppement”, §1336.
La Cène, selon la conception de l’Eglise, est donc un sacrifice,
§1365, cf. §1388. Elle est célébrée par des prêtres, établis par le
Christ lorsqu’il a institué l’eucharistie, §1337. (Sans prêtre, il est
impossible de célébrer l’eucharistie, CEF §428) Pain et vin sont
“offerts par le prêtre au nom du Christ dans le sacrifice eucharis-
tique où ils deviendront le corps et le sang de Celui-ci. C’est le
geste même du Christ à la dernière Cène”, §1350. “Le prêtre,
faisant mémoire de ce mystère, présente au Père l’offrande de
Jésus”, CEF §424. Le repas devient donc le Saint Sacrifice, le
Très Saint Sacrement, qui actualise l’unique sacrifice du Christ,
et que le Catéchisme retrouve dans des textes comme Hébreux
13.15; Psaume 116.13,17; Malachie 1.11 et 1 Pierre 2.5, §1330.
C’est la communion à ce sacrement, appelé encore les choses
saintes, qui est “le sens premier de la ‘communion des saints’” du
Symbole des apôtres et qui est le médicament d’immortalité,
§1332.

L’Eucharistie est célébrée sur un autel, et non pas sur une table.
Elle y “représente (rend présent) le sacrifice de la Croix”. Christ
a voulu ainsi “laisser à l’Eglise, son épouse bien-aimée, un sacri-
fice visible (comme le réclame la nature humaine), où serait re-
présenté le sacrifice sanglant qui allait s’accomplir une unique
fois sur la Croix (...) et dont la vertu salutaire s’appliquerait à la
rédemption des péchés que nous commettons chaque jour”,
§1366. Plus encore, “le sacrifice du Christ et le sacrifice de
l’Eucharistie sont un unique sacrifice : ‘C’est une seule et même
victime, c’est le même qui offre maintenant par le ministère des
prêtres, qui s’est offert Lui-même alors sur la Croix. Seule la
manière d’offrir diffère’”, §1367, cf. CEF §419. “L’Eucharistie
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 99

est également le sacrifice de l’Eglise. (...) Avec Lui, elle est of-
ferte elle-même tout entière”, §1368.

L’eucharistie est offerte dans l’unité de toute l’Eglise : associée


au pape et à l’évêque, en communion avec la Très Sainte Vierge
Marie et en faisant mémoire d’elle. Dans ce sacrement, l’Eglise
se trouve avec Marie au pied de la Croix, unie à l’offrande et à
l’intercession du Christ, §1369,1370. Cette unité s’étend ensuite
aux fidèles défunts. Le sacrifice eucharistique est offert pour eux
“‘qui sont morts dans le Christ et ne sont pas encore pleinement
purifiés’, pour qu’ils puissent entrer dans la lumière et la paix du
Christ”, au bénéfice du pardon obtenu par la messe à leur inten-
tion, §1371, cf. CEF §420.

Sous quel mode, Christ est-il présent sous les espèces eucharis-
tiques ?
Son corps et son sang y sont “‘contenus vraiment, réellement et
substantiellement... conjointement avec l’âme et la divinité de
notre Seigneur Jésus-Christ, et, par conséquent, le Christ tout
entier’” Cette présence réelle est ainsi nommée “parce qu’elle est
substantielle”, §1374. Pain et vin sont convertis. Par la consécra-
tion “s’opère un changement de toute la substance du pain en la
substance du Corps du Christ notre Seigneur et de toute la subs-
tance du vin en la substance de son Sang; ce changement, l’Eglise
catholique l’a justement et exactement appelé transsubstantia-
tion”, §1375,1376. Ce changement est durable : il persiste aussi
longtemps que les espèces eucharistiques subsistent. Mieux en-
core, et contrairement à ce que laissent entendre les lignes précé-
dents, “le Christ est tout entier présent dans chacune des espèces
et tout entier dans chacune de leurs parties, de sorte que la frac-
tion du pain ne divise pas le Christ”, §1377. Cette présence dans
l’hostie (le mot veut dire : victime) a pour conséquence pour
l’Eglise qu’un culte d’adoration doit être rendu au Saint Sacre-
ment, conservé avec le plus grand soin parce qu’il s’agit mainte-
nant du Christ, présent sous les espèces eucharistiques, et logé
dans le tabernacle au fond des églises, §1378, 1379. C’est témoi-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 100

gner de gratitude et d’amour que d’aller lui rendre visite à cet


endroit pour l’adorer, §1418.
La visibilité de ces choses est “hautement convenable”. “Puisque
le Christ allait quitter les siens sous sa forme visible, Il voulait
nous donner sa présence sacramentelle”, §1380. “C’est là l’œuvre
de l’Esprit qui rend présent celui dont nous faisons mémoire. (...)
Ce même Esprit agit ainsi mystérieusement pour donner sacra-
mentellement au monde le Christ, par l’Eglise”, CEF §416, 417.

Comment participer à ce sacrement ? Tout d’abord, cette partici-


pation est obligatoire. Sans elle, il est impossible d’avoir la vie en
nous, selon la citation que fait le catéchisme de Jean 6.53, §1384.
Il faut se préparer sérieusement avant de communier : observer le
jeûne prescrit dans l’Eglise et se confesser dans le sacrement de
la Réconciliation, §1387,1389. Comme Christ est présent sous
chacune des espèces eucharistiques, il suffit de recevoir l’hostie
pour avoir part au Christ entier, §1390.

Les résultats de la communion, résumés dans les §1391 à 1401,


sont importants :
Elle accroît notre union au Christ, cf. Jean 6.56,57. “Ce que
l’aliment matériel produit dans notre vie corporelle, la commu-
nion le réalise de façon admirable dans notre vie spirituelle.”
Cette communion nous est nécessaire durant toute la vie et nous
servira comme viatique au moment de la mort.
La communion nous sépare du péché. “Comme la nourriture cor-
porelle sert à restaurer la perte des forces, l’Eucharistie fortifie la
charité qui, dans la vie quotidienne, tend à s’affaiblir; et cette
charité vivifiée efface les péchés véniels”. De la même manière,
elle nous préserve des péchés mortels futurs. Les évêques de
France vont encore plus loin : “l’eucharistie est en même temps
un sacrifice d’expiation et de propitiation pour les péchés”, CEF
§420.
Elle collabore à l’unité de l’Eglise, l’Eucharistie fait l’Eglise.
Comme nous avons déjà vu, pour devenir sacrement d’unité, elle
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 101

doit être célébrée dans le respect de la succession apostolique.


Avant de pouvoir donner ce sacrement aux chrétiens non catho-
liques qui le demandent, il faut que ces derniers manifestent la foi
catholique concernant ces sacrements.
L’Eucharistie engage envers les pauvres, qui sont les frères du
Christ. Cet engagement se traduit par la quête, ou la collecte,
durant la messe, CEF §428.

Que dit la Bible ?


L’Eglise de Jésus-Christ, se rencontre-t-elle devant un autel ou
autour d’une table ? Notons tout de suite que le Nouveau Testa-
ment ne fait jamais la moindre confusion entre les deux. Aux
Corinthiens, dans le texte sur la Cène, Paul parle de l’autel du
peuple d’Israël, 1 Corinthiens 10.18. Sommes-nous, les chrétiens,
aussi en communion avec un autel ? Non ! Nous avons part à la
table du Seigneur, v21. Il est vrai qu’Hébreux 13.10 fait mention
d’un autel pour l’Eglise. Mais l’unique fois que le Nouveau Tes-
tament se sert de ce langage, cela est appliqué à la croix sur la-
quelle Jésus a souffert “hors de la porte”. Et quand l’auteur relie
cela à l’expérience d’une vie de culte, il ne se réfère aucunement
à la Cène, mais à la louange et à la libéralité, v15,16. Romains
12.1 ajoute à cela l’offrande par le croyant de son corps au ser-
vice de Dieu, appelée “un culte raisonnable”. Nulle-part, l’Eglise
n’offre un autre sacrifice. Dieu ne nous convie pas devant un
autel; il nous invite à table. Nous sommes en tant que disciples de
Jésus-Christ “un saint sacerdoce, en vue d’offrir des victimes
spirituelles, agréables à Dieu par Jésus-Christ”, 1 Pierre 2.5. Con-
trairement à ce que maintient la Catéchisme au §1330, ce texte ne
parle ni du sacerdoce du clergé, ni de l’eucharistie. Les sacrifices
spirituels que Pierre mentionne sont de toute évidence du même
ordre que ceux de Romains 12.1 et de Hébreux 13.15,16.
Christ était à table avec ses disciples et la Sainte Cène est une
continuation de cette table. Dans l’Eglise Primitive, il est
d’ailleurs notoirement difficile de distinguer de façon absolue
entre la Cène et les agapes. On se réunissait pour manger et pour
rompre le pain. Il suffit de lire un texte comme Actes 27.35 pour
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 102

se rendre compte que le même langage est utilisé pour parler d’un
repas ordinaire ou pour la Cène. “Rompre le pain” signifiait tan-
tôt le sacrement, tantôt un repas quelconque. La Cène était alors
un moment de communion intense, au sens normal du mot : par-
tage, union avec le Seigneur et avec les autres, la koinonia expri-
mée autour de la table, comme elle l’était à d’autres moments par
d’autres manifestations.

Il suffit de poser un certain nombre de questions au Nouveau


Testament pour se rendre compte à quel point la “fraction du
pain” était peu ritualisée.
Qui doit présider la Cène ? Nulle part, il n’est question du rôle
attitré de quelqu’un. La première Cène est l’œuvre du Christ.
Dans un sens, il est l’unique “célébrant”. C’est lui qui donne sa
vie et qui institue le mémorial de sa mort. Dans les quelques
textes où la Cène est mentionnée en dehors des Evangiles (Actes
2.42,46; 6.2-4 ?; 20.7,11; 1 Corinthiens 10.16-33; 11.20-34), il
n’y a aucune indication sinon celle d’Actes 6 si ce texte inclut la
Cène, ce que nous ignorons. Là, Pierre et les apôtres se retirent de
ce service des tables pour avoir du temps pour la prière et pour la
Parole. S’il y a une conclusion à tirer, c’est que l’enseignement
de la Parole et la prière sont bien plus importants que la prési-
dence à la table du Seigneur ! La dernière cène dans la chambre
haute semble en accord avec cela. Ce fut un moment très dense
d’enseignement, comme nous le rapporte Jean dans son Evangile.
Actes 20.7,11 s’accorde entièrement avec cela. Cette rare men-
tion de la Cène dans les Actes souligne la place prépondérante de
l’enseignement de la Parole. C’est vrai que le passage de l’apôtre
rend ce culte quelque peu exceptionnel. Mais à quel point ? Il est
quand même remarquable que les quelques textes bibliques que
nous possédons sur le sujet vont justement dans le sens que nous
venons d’indiquer ! La conclusion de tout ceci doit bien être que
le Nouveau Testament ne se préoccupe pas de la question de la
présidence de la Cène, tant que cela se passe avec ordre. Ne faut-
il donc pas un prêtre pour cela ? Bien au contraire ! Mais tous les
chrétiens sont prêtres. Nous y reviendrons un peu plus loin.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 103

Quand faut-il célébrer la Cène ? De nouveau, les textes n’en di-


sent pas grande chose. La Cène s’inspire de la Pâque juive qui
était célébrée une fois par an. Mais l’Eglise du temps des apôtres
a manifestement célébré la Cène beaucoup plus souvent. Nous
pouvons peut-être détecter, dès la fin des Evangiles, la naissance
d’une habitude de célébrer la Cène le premier jour de la semaine.
Cela semble être le cas dans les Actes (20.7). Paul, en
1 Corinthiens 11.23-34, fait référence à un repas régulier de
l’église de Corinthe. Il est peu probable que celui-ci ait eu lieu
chaque jour. Les esclaves qui formaient peut-être la majorité des
églises apostoliques n’en avaient sans doute pas le loisir. Jean
parle du dimanche comme étant le “jour du Seigneur”, Apoca-
lypse 1.10. L’offrande en 1 Corinthiens 16.2 avait lieu ce même
jour. Tout cela va dans le sens d’une célébration hebdomadaire,
en général au soir du premier jour. Mais cela n’exclut pas une
célébration à d’autres moments. La question est tout simplement
sans importance dans le Nouveau Testament. L’accent tombe sur
le contenu, sur la réalité intérieure de ce repas. La forme exté-
rieure est donc laissée à la liberté des églises.

La Cène n’est pas un sacrifice. Cette conclusion s’impose à la


lecture du Nouveau Testament. Elle est encore moins un “sacri-
fice d’expiation et de propitiation pour les péchés”. Cela équi-
vaudrait à dérober le sacrifice du Christ sur la croix de Golgotha
de sa valeur unique et absolue. Si la Cène devait être un tel sacri-
fice, c’est que le sacrifice du Christ ne serait pas suffisant. C’est
que Dieu réclamerait encore aujourd’hui un complément à ce
sacrifice. C’est que nos péchés seraient pardonnés sur la base du
sacrifice apporté par le prêtre sur l’autel. Malgré toutes les belles
choses qu’on puisse alors dire sur le sacrifice du Calvaire et sur
l’explication qu’en fait la lettre aux Hébreux, on opère un dé-
tournement affreux. Le Christ vivant, mort et ressuscité pour nos
péchés, est évacué au profit du Christ offert à l’autel. Le Christ
que les gens vénèrent et servent n’est plus le Christ de la Bible,
mais le Christ mystique de la religion. Et la religion qui s’en suit
n’est plus la pratique d’une foi biblique et vigoureuse, nourrie des
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 104

Ecritures, mais la pratique plus ou moins suivie d’un ritualisme


mystique, nourrie de l’hostie. Cette religion n’est pas Christocen-
trique, mais “hostie-centrique”. On dira que cela n’est pas le cas
de tous les catholiques. Sans doute et heureusement ! Mais c’est
le cas de la grande majorité des gens qui sont pourtant “nés de
nouveau” par le baptême et “remplis du Saint-Esprit” par la con-
firmation ! Et c’est le résultat logique et normal du système.

Mais, lorsque le Seigneur dit : “Ceci est mon corps, ... ceci est
mon sang...”, ne voulait-il pas par là signifier que la substance de
ces éléments avait changé ? N’a-t-il pas réalisé un vrai sacrifice
dans la chambre haute ? Voilà deux verbes qui reviennent sou-
vent dans la discussion à ce sujet. Qu’est-ce que le Seigneur a
voulu dire ?
La dernière cène est la continuation et la transformation du repas
pascal. Or, le repas pascal n’était pas un sacrifice, mais un repas
fondé sur le sacrifice. En tant que tel, le repas ne réalisait rien. Il
commémorait, il faisait revivre. La phrase centrale et liturgique
“Ceci est le pain d’affliction que nos pères ont mangé...” ne
changeait rien à la substance du pain. Mais il aidait le Juif à re-
vivre la délivrance de l’Egypte. L’institution de la Pâque en
Exode 12.14-28 était faite pour enrayer l’oubli, pour aider le
peuple à se réaliser qu’il était peuple de Dieu et peuple de ce
Dieu terrible et puissant. Il devait en résulter une vie qui honorait
le Seigneur. Ce sacrifice répétitif qui était le fondement de la
Pâque a trouvé son accomplissement dans le sacrifice définitif du
Christ, cf. Hébreux 9.26-10.18. Voici quelques phrases clef de ce
texte : “Mais maintenant, à la fin des siècles, il (Christ) a paru
une seule fois pour abolir le péché par son sacrifice. (...) nous
sommes sanctifiés, par l’offrande du corps de Jésus-Christ, une
fois pour toutes. (...) Car par une seule offrande, il a rendu par-
faits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés. (...) Or, là où il y a
pardon des péchés, il n’y a plus d’offrande pour le péché.” Ainsi,
le sacrifice qui forme le fondement de la cène n’est pas, et ne
peut pas être, un sacrifice actualisé, une répétition sacramentelle
mais réelle du corps de Christ. La cène se fonde uniquement sur
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 105

le sacrifice que Christ a apporté en sa chair et en son sang. La


dernière cène n’était donc pas un sacrifice sacramentel, mais un
repas qui anticipait sur le sacrifice réel du lendemain. En ce sens,
cette cène était entièrement unique. Depuis, chaque cène est
commémoration, au sens de la cène juive. La parole de
l’institution dans la bouche du Christ n’est pas une parole créa-
trice qui convertit pain et vin en une substance nouvelle ou qui y
ajoute une autre substance. C’est une parole évocatrice, qui nous
fait réaliser à quel prix notre salut a été obtenu.
Ainsi, Christ ne vient pas à nous dans le pain et le vin, mais avec
le pain et le vin. Il est là où deux ou trois sont rassemblés, inté-
grés, en son nom, Matthieu 18.20. Sa présence est réelle, mais
elle n’est pas localisée dans les éléments de la cène. Elle est loca-
lisée dans les participants à la cène. Et si ces participants ne sont
pas de vrais chrétiens, au sens biblique du mot, il n’y a aucune
présence. Il ne reste qu’un rite dénué de sens et de vérité, et, dans
ce cas, Dieu n’est plus adoré “en esprit et en vérité”. Il sera de-
hors au sens que Christ était à l’extérieur de l’église de Laodicée,
Apocalypse 3.20. Aucune répétition de rite n’y peut changer
quelque chose : il faudra se repentir pour que Christ soit de nou-
veau présent.

Nos conclusions forment un tout. Il n’y a pas d’autel dans


l’Eglise de Jésus-Christ, sinon la croix où Christ a souffert pour
nous. Il n’y a pas non plus de prêtrise habilitée pour apporter le
sacrifice du Christ sur cet autel non existent. Il n’y a pas de sacri-
fice d’expiation dans la cène. Il n’y a pas de présence du Christ
concentrée dans les éléments de la cène. Il n’y a donc pas non
plus de culte à entretenir à l’encontre du Saint Sacrement. Christ
n’est pas présent sous les espèces eucharistiques. On ne peut
donc l’y adorer.
Cela laisse l’Eglise avec un culte spirituel. La “visibilité haute-
ment convenable” de ces choses est un argument fort douteux du
Catéchisme. Christ n’a jamais voulu donner à ses disciples une
présence sacramentelle visible du fait de la faiblesse de la nature
humaine. Il a dit, avant de quitter ses disciples : “Je ne vous lais-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 106

serai pas orphelins, je viens vers vous”, Jean 14.18. Dans le con-
texte, il est manifeste que c’est par son Esprit, et non par un sa-
crement, que Christ est présent dans son Eglise. Le grand pro-
blème des chrétiens hébreux, à qui s’adresse la lettre du même
nom, était le désir de retourner au culte juif visible. L’auteur ne
les encourage pas en leur rappelant la visibilité d’un quelconque
sacrement, mais en leur montrant que le visible était l’ombre des
réalités célestes, 8.5. Vouloir retourner vers ce culte de l’ombre,
c’était tourner le dos à Christ. L’appel même à la visibilité dési-
rable et nécessaire de l’eucharistie constitue une critique de ce
que le Seigneur a fait. Il est une négation de la parole de Jésus à
la Samaritaine que Dieu cherche des adorateurs “en esprit et en
vérité”, Jean 4.24.

Peut-on célébrer la cène en faveur de nos défunts en manque de


pardon ? Nous aurons à y revenir en parlant du sacrement de la
réconciliation.

Comment se fait-il que l’hostie, à elle seule, renferme et le corps


et le sang de Christ ? Si cela est vrai, pourquoi alors Jésus a-t-il
insisté sur la coupe ? Pourquoi, le prêtre, lui, boit-il de la coupe ?
Reçoit-il ainsi plus de Christ ? Les autres, en reçoivent-ils
moins ?32 A-t-on le droit de couper ainsi, et de façon arbitraire,
dans les paroles du Seigneur ? Ou est-ce que tout cela s’est glissé
dans l’Eglise catholique dans le mépris le plus total de la Parole
de Dieu ? D’ailleurs, en parlant de l’hostie, pourquoi est-elle
ronde, en forme de soleil ? Et pourquoi les ostensoirs sont-ils en
forme de soleil ? Hislop montre comment tout cela existait déjà
de longs siècles avant Jésus-Christ dans les religions païennes et
pour être ensuite introduit à partir de ces religions dans la chré-
tienté du Moyen Age. L’hostie ne vient pas du Nouveau Testa-
ment, mais du paganisme !33

32
Voir appendice 2, point 4 : Le pain, devient-il le sang de Christ ?
33
Hislop, Op.cit.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 107

Reste une dernière question. Comment célébrer la Cène ? C’est


quoi, participer à ce sacrement selon la Parole de Dieu ? Afin d’y
répondre, je me permets de citer deux passages que j’y ai consa-
cré ailleurs34.
“La table est celle de la communion. Mais elle ne parle pas seu-
lement de ma communion avec Dieu. Elle n’est pas une sorte
d’abreuvoir spirituel pour chrétiens individualistes. A cette
table, je ne suis pas l’unique invité : je m’y retrouve entouré de
mes frères et sœurs. La Cène doit être le signe d’une vraie
communion dans l’Eglise de Jésus-Christ. Non pas une commu-
nion de gens parfaits, mais une communion de gens pardonnés.
Le sang de Jésus qui purifie du péché établit cette communion.
Sans cela, elle resterait illusoire. Imparfaits, salis par le péché,
nous venons à la table sans mérite, souvent embrouillés les uns
avec les autres à cause de nos caractères bien humains. La table
nous rappelle l’unité qui doit régner parmi nous.
Unité de vie, parce que nous partageons une même vie, celle de
Dieu, éternelle, nouvelle. Nous l’avons reçue à la croix et elle
nous a été confirmée à la résurrection. Nous ne sommes pas des
étrangers, réunis ensemble par le hasard d’une rencontre. Nous
avons une même vie, une même origine, un même destin. En-
gendrés par la même Parole, nous sommes un, peu importe nos
différences. Nous ne devons pas chercher ou fabriquer cette
unité, elle est donnée à ceux qui sont en Christ, qui sont intégrés
en sa Personne. C’est l’unité du Saint-Esprit que nous devons
conserver par les liens de la paix, Ephésiens 4.3.
La table nous rappelle aussi notre unité de but. Ayant reconnu
Jésus-Christ et ayant reçu sa vie, la direction de notre existence
a changé. Maintenant, notre but est de le glorifier, et de le ser-
vir. Nous avons tourné le dos à notre propre gloire, et à cet
égoïsme inné du cœur humain. Nous avons reçu l’appel de
chercher d’abord le royaume de Dieu. Jésus est l’exemple de
cette unité de but. Il a refusé de se servir lui-même, d’avoir son
propre programme, son propre calendrier. A la table, sa table,
nous nous trouvons devant lui et devant la croix qu’il a accep-
tée. Cette table remet les choses en perspective dans nos vies et

34
Voir E. EGBERTS, La tente de Dieu dans le désert des hommes, Cléon d’Andran :
Excelsis, 1997, p.124,125 et 169,170.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 108

nous aide à redécouvrir ce qui est vraiment important. Nous


nous y retrouvons devant la médiocrité et parfois la mesquinerie
de nos petites vies à nous et nous voyons à nouveau le but que
nous devons suivre et qui nous unit.
Unité d’amour aussi. En priant que tous soient un, Jésus ne
parle pas seulement d’une unité de vie et de volonté, mais d’une
unité d’amour. L’unité de l’Eglise doit faire découvrir au monde
l’amour de Dieu. “Que tu les aimes comme tu m’aimes... pour
que l’amour que tu m’as témoigné soit en eux”, Jean 17.23,26.
Nous sommes appelés à cette table pour manifester cet amour.
Amour qui veut dire que je désire pour mon frère et pour ma
sœur ce qu’il y a de meilleur devant Dieu et les hommes; que je
suis prêt à diminuer pour qu’ils croissent, à les servir plutôt que
d’être servi; que je veux m’impliquer pour qu’ils puissent avan-
cer dans leur vie chrétienne. Sans cet amour-là, la table perd
son sens profond.
Paul avertit les Corinthiens contre le danger de manger en
égoïste à la table du Seigneur. Au lieu de considérer les autres,
et c’est déjà commencer à les aimer, ils ne pensaient qu’à eux-
mêmes. Sans doute, les divisions à Corinthe (1 Corinthiens
11.18) étaient les groupes divers dans l’église qui se manifes-
taient particulièrement lors des agapes. Les riches mangeaient
entre eux et ils mangeaient bien. Les pauvres, les esclaves, ve-
naient souvent en retard à cause de leur travail et n’avaient pas
grand-chose à se partager; ils restaient sur leur faim. La disposi-
tion des maisons romaines pouvait encore accentuer un tel état
de choses. Agir ainsi, c’est mépriser l’Eglise de Dieu. Celui, ou
ceux qui veulent manger seuls, qu’ils restent chez eux au lieu
d’être en scandale à l’église. Qu’ils apprennent à s’attendre les
uns les autres. La sainte Cène faisait partie de ce repas en com-
mun. En 10.16-22, Paul avait déjà souligné l’unité exprimée par
le même pain et la même coupe. En les partageant, nous décla-
rons former un seul corps. En 11.17-34, cette unité n’est pas en
cause. Mais Paul y traite des relations fraternelles dans l’église
locale. Participant au corps de Christ, frères d’une même al-
liance, scellée dans le sang de Christ, nous devons “discerner le
corps”. Quel corps ? Paul ne le définit pas. Au v27 il s’agit clai-
rement du corps de Christ, de sa Personne. Cependant, par leur
individualisme, les Corinthiens ne semblent pas discerner non
plus le corps que forme l’église. Ils pèchent contre l’unité et
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 109

contre l’amour. Il n’est pas suffisant de croire que nous sommes


un. Il nous faut encore le montrer par une prévenance réci-
proque et par un service mutuel. Faute de quoi, le repas de bé-
nédiction deviendra un repas de jugement. La table est pure.
Quand nous cherchons à marcher dans cette pureté, dans la lu-
mière, alors le sang de Christ nous purifie de tout péché et
ouvre la voie à la communion entre enfants de Dieu, 1 Jean 1.7.
L’unité d’amour n’est pas naturelle et facile. Elle n’est possible
que par la vertu du sang de Christ. Elle est faite à la croix.”
[…]
“Persévérer dans la fraction du pain constitue le troisième lien
[qui unit entre eux les chrétiens, Actes 2.42], lui aussi un reflet
de la table, ici en ce qui concerne la communion au corps de
Christ. L’Eglise autour de la table représente le règne de
l’espoir. Autour de cette table, elle voit ce qu’a coûté son salut,
elle voit combien il a été nécessaire que le ciel donne ce qu’il
avait de meilleur pour sauver ce que notre terre avait de pire.
Elle y est appelée à s’examiner. Le regard vers l’extérieur, vers
le corps brisé de Christ appelle à son tour au regard vers
l’intérieur, vers l’homme que je suis, vers l’église que nous
sommes. Ce regard nourri de la croix discerne quelque chose de
l’abîme de misère et de désespoir en nous et dans la croix. Ce
regard fait naître l’espoir, placé dans le pouvoir du Sauveur de
nous retirer de cet abîme. Nulle part ailleurs dans la vie de
l’Eglise cet espoir n’est aussi clairement exprimé qu’à la frac-
tion du pain. L’examen de conscience qui devrait aboutir à
l’impasse du jugement débouche tout à coup sur l’avenue de la
grâce.
Que pouvait représenter la table du Seigneur pour l’apôtre
Paul ? Que pouvait lui révéler l’examen de soi ? “J’ai persécuté
l’Eglise de Dieu. Mais (et ce “mais” figure dans le grec) par la
grâce de Dieu je suis ce que je suis, et sa grâce envers moi n’a
pas été vaine; loin de là, j’ai travaillé plus qu’eux tous; non pas
moi toutefois, mais la grâce de Dieu qui est avec moi”,
1 Corinthiens 15.9,10. La grâce qui pardonne engendre l’espoir.

Vu l’importance rituelle énorme que prendra la Cène par la


suite, il est curieux d’observer combien peu les Actes et les
épîtres la mentionnent. En dehors de 1 Corinthiens 10 et 11, le
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 110

silence est presque complet. Est-ce que cela veut dire que ce
troisième lien est donc peu important ? Loin de là ! Non seule-
ment Actes 2.42 nous montre l’égale importance des quatre
liens, mais l’Eglise a fidèlement continué à persévérer dans
cette fraction du pain. L’unique mention claire concernant le
culte dans le livre des Actes, 20.7, en fait même un des élé-
ments clefs du culte primitif. Les chrétiens se rencontraient
“pour rompre le pain”. Le culte, c’est la rencontre des croyants
autour de la table (et non devant l’autel). Ce fut un temps de
prédication et d’enseignement, de communion fraternelle et de
prière, mais le but était de rompre le pain, de se retrouver au-
tour du Maître crucifié et ressuscité. Cela était tellement évident
que la répétition dans le texte était superflue.
En plus, la discrétion même du regard vers l’intérieur peut diffi-
cilement soutenir l’œil scrutateur de l’extérieur. Le culte, au
sens propre, n’est pas un acte public; c’est l’Eglise dans
l’intimité du Seigneur. Cela est à des années-lumière des pro-
cessions du Saint Sacrement et autres manifestations publiques
de ce secret. Le mystère déambulé devant le grand public reste
de toute façon complètement méconnu, opaque. L’examen de
soi que requiert la table recule devant toute publicité. Loin des
projecteurs, il réclame pour unique éclairage la lumière de ce
Dieu qui est lumière. Sous cet éclairage, rien ne reste caché,
tout vient à la lumière; car seul ce qui vient à la lumière peut
être pardonné. L’espoir ne provient pas de notre réussite -à
avoir bien agi ou bien caché- mais de la confession qui té-
moigne de la confiance dans le sacrifice de Christ. L’espoir bi-
blique naît ainsi de la faillite humaine confessée comme telle et
du pardon de Dieu en Christ reçu comme tel. Cela n’a pas be-
soin d’une grande théologie, et donc d’un grand développement
“eucharistique”, mais d’une grande discrétion pour que
l’homme devienne honnête avec Dieu, avec les autres et avec
soi. Alors, et seulement alors, ce lien liera réellement les enfants
de Dieu dans une vraie communion.
La grandeur de la Cène, c’est la grandeur de la grâce qui ren-
contre la petitesse de l’homme. C’est la fraction du pain qui
trouve sa contrepartie dans le brisement du croyant.”
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 111

Les sacrements de guérison

La pénitence et la réconciliation
L’Eglise l’appelle aussi le sacrement de la confession, parce que
celle-ci en est l’élément essentiel. Ou encore : le sacrement de
conversion “puisqu’il réalise sacramentellement l’appel de Jésus
à la conversion”, §1423,1424. Les versets bibliques cités à
l’appui sont entre autres Marc 1.15 et 2 Corinthiens 5.20. Au
§1433, le Catéchisme y ajoute le texte de Jean 16.8,9, où Jésus
dit que l’Esprit Saint convaincra le monde de péché, et donne
ainsi au cœur de l’homme la grâce du repentir et de la conversion.
Et au §1442, il précise que le pouvoir d’absolution est confié au
ministère apostolique selon 2 Corinthiens 5.18,20. En Matthieu
18.18 et 28.16-20, ce pouvoir est donné “au collège des apôtres
unis à leur chef”, §1444.
Pourquoi a-t-on besoin de ce sacrement ? Les paragraphes 1425-
1429 expliquent que, bien que le baptême soit “le lieu principal
de la conversion première et fondamentale” (la référence est
Actes 2.38) cela ne suffit pas. Il faut une seconde conversion et
celle-ci a une dimension communautaire, comme en témoigne
l’expérience de Pierre en Jean 21.15-17. Cette conversion signifie
l’obtention d’un cœur nouveau d’après Ezéchiel 36.26,27, §1432.
Une des illustrations les plus frappantes de la conversion et de la
pénitence se trouve dans la parabole du fils prodigue en Luc 15.
Le pénitent passe de la mort à la vie “et il n’est pas soumis au
jugement” (Jean 5.24), §1470.
Ainsi, la pratique de ce sacrement permet aux croyants de retrou-
ver “la grâce baptismale”, appelée encore “la grâce de la justifi-
cation”, perdue à cause d’un péché grave (mortel ?). C’est une
véritable “seconde planche [de salut] après le naufrage qu’est la
perte de la grâce”, §1446.

Comment faire pour retrouver cette grâce de la justification ?


Il faut d’abord manifester de la contrition, de préférence d’une
façon parfaite parce que motivée par l’amour de Dieu. Cette con-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 112

trition permet le pardon des fautes vénielles. Si par contre elle ne


provient que de la crainte de l’enfer, elle est appelée “attrition”,
et n’a pas le même résultat. Cependant, rien n’est encore perdu :
l’attrition dispose à obtenir le pardon dans le sacrement de la
pénitence, §1451-1453.
La deuxième étape consiste à confesser ses péchés au prêtre. “Les
pénitents doivent, dans la confession, énumérer tous les péchés
mortels dont ils ont conscience après s’être examinés sérieuse-
ment, même si ces péchés sont très secrets...” (c’est nous qui
soulignons). Cette confession doit être faite au moins une fois
l’an. Elle est obligatoire avant de recevoir la Sainte communion.
La confession des fautes quotidiennes, vénielles, n’est pas stric-
tement nécessaire. Elle “est néanmoins vivement recommandée
par l’Eglise”, §1456-1458.
La satisfaction constitue la troisième étape de ce sacrement. Bien
qu’ayant reçu l’absolution, le pénitent “doit faire quelque chose
de plus pour réparer ses péchés : il doit ‘satisfaire’ de manière
appropriée ou ‘expier’ ses péchés. Cette satisfaction s’appelle
aussi ‘pénitence’”. Cette expiation privée aide le pénitent à se
“configurer au Christ qui, seul, a expié pour nos péchés une fois
pour toutes”. Ces pénitences lui permettent “de devenir les cohé-
ritiers du Christ ressuscité, ‘puisque nous souffrons avec Lui’
(Romains 8.17)”, §1459,1460 (c’est nous qui soulignons).

Le prêtre est le ministre de la réconciliation. Comme Christ a


confié le pouvoir de pardonner à ses disciples, comme les
évêques sont leurs successeurs et comme les prêtres sont les col-
laborateurs des évêques, c’est bien à eux qu’il faut s’adresser
pour obtenir l’absolution. Ils sont les serviteurs du pardon de
Dieu dans la fidélité au Magistère de l’Eglise. Ils doivent garder
un secret absolu au sujet des péchés qu’ils ont entendus, sans
quoi ils s’exposent à des peines très sévères. Ce secret n’admet
pas d’exceptions, §1461-1467.
La confession peut parfois être limitée à une célébration commu-
nautaire avec confession et absolution générales. Cela n’empêche
pas alors, pour la validité de l’absolution, que les fidèles doivent
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 113

avoir “le propos de confesser individuellement leurs péchés en


temps voulu”. “La confession individuelle et intégrale suivie de
l’absolution demeure le seul mode ordinaire par lequel les fidèles
se réconcilient avec Dieu et l’Eglise”, §1483,1484.

Qu’est-ce qui se passe au travers de ce sacrement ?


Le pécheur profite de l’échange des biens spirituels entre tous les
membres vivants du Corps de Christ, ceux qui sont encore en vie
et ceux qui sont “déjà dans la patrie céleste”, §1469. Ce profit est
cristallisé dans l’obtention des indulgences. La définition du Ca-
téchisme mérite d’être citée dans sa totalité : “‘L’indulgence est
la rémission devant Dieu de la peine temporelle due pour les pé-
chés dont la faute est déjà effacée, rémission que le fidèle bien
disposé obtient à certaines conditions déterminées, par l’action de
l’Eglise, laquelle, en tant que dispensatrice de la rédemption,
distribue et applique par son autorité le trésor des satisfactions du
Christ et des saints’”. “‘L’indulgence est partielle ou plénière,
selon qu’elle libère partiellement ou totalement de la peine tem-
porelle due pour le péché.’ Les indulgences peuvent être appli-
quées aux vivants ou aux défunts”, §1471.
Cette doctrine est directement liée à l’enseignement du Purga-
toire. C’est le lieu où sont purifiés ceux qui ne le sont pas encore
assez à leur mort. Ils sont assurés de leur salut éternel, mais ne le
reçoivent pas tout de suite. Le fondement biblique invoqué se
limite aux textes suivants : Matthieu 12.31; 1 Corinthiens 3.15 et
1 Pierre 1.7. A côté de cela, on fait appel au livre apocryphe de 2
Maccabées 12.46 où il est question d’un “sacrifice expiatoire
pour les morts, afin qu’ils fussent délivrés de leur péché.”
L’Eglise en conclut que le sacrifice eucharistique peut secourir
les défunts et les délivrer du purgatoire, cf. §1030-1032.
Le péché a une double conséquence : il nous prive de la commu-
nion avec Dieu. Cette privation s’appelle : la peine éternelle du
péché. Mais il y a aussi une peine temporelle qui nécessite une
purification, soit ici-bas, soit dans le purgatoire. Le pardon en-
traîne la remise des peines éternelles. “Mais des peines tempo-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 114

relles du péché demeurent”. Par les pratiques de la pénitence, le


croyant achève de se revêtir de l’homme nouveau, §1472,1473.
L’unité de l’Eglise a une conséquence “admirable” : la sainteté
des uns peut profiter aux autres dans un échange abondant de
tous biens. Comment ? Le surplus, pour ainsi dire, de cette sainte-
té des saints est placé dans le trésor de l’Eglise. Ce trésor “est le
prix infini et inépuisable qu’ont auprès de Dieu les expiations et
les mérites du Christ notre Seigneur, offerts pour que l’humanité
soit libérée du péché et parvienne à la communion, avec le Père”.
Mais à ce trésor de mérites appartiennent aussi “le prix vraiment
immense, incommensurable et toujours nouveau qu’ont auprès de
Dieu les prières et les bonnes œuvres de la bienheureuse Vierge
Marie et de tous les saints..., de sorte qu’en travaillant à leur
propre salut, ils ont coopéré également au salut de leurs frères
dans l’unité du Corps mystique”, §1474-1477.
L’indulgence est accordée par l’Eglise en vertu du pouvoir de lier
et de délier qu’elle a reçu du Seigneur. L’Eglise agit ainsi en
faveur de ses fidèles afin d’obtenir “du Père des miséricordes la
remise des peines temporelles dues pour ses péchés”. En plus,
cette façon de faire permet à l’Eglise d’inciter le chrétien “à des
œuvres de piété, de pénitence et de charité”. Les croyants peuvent
aussi, par le biais des indulgences, voler au secours des fidèles
défunts en vue de leur acquittement des peines dans le purgatoire.

Que dit la Bible ?


La pratique de ce sacrement soulève plusieurs questions de
grande importance.
Combien de fois peut-on se convertir ? Posez la question aux
apôtres, et la réponse claire et sans ambiguïté est : une seule fois.
On se convertit lorsqu’on accepte Jésus-Christ comme son Sau-
veur et Seigneur personnel. Le livre des Actes en donne un grand
nombre d’exemples. Qu’est-ce que la foule d’Actes 2, l’eunuque
éthiopien d’Actes 8, Saul de Tarse en Actes 9, Corneille en Actes
10, le geôlier en Actes 16 etc. etc. ont en commun ? Ils ont enten-
du et cru à l’Evangile et ils se sont convertis. Bien sûr, cette con-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 115

version a toujours un aspect communautaire. Elle est suivie du


baptême et être baptisé est toujours un acte communautaire, pu-
blic. Mais peut-on se convertir une seconde fois ? A quoi ou à
qui ? Est-ce dire que la première fois, ce n’était pas une vraie
conversion ? Mais dans ce cas, il n’y a pas non plus eu de vrai
baptême ! Car un non chrétien peut se faire baptiser autant de fois
qu’il le veut, il ne sera pas baptisé, au sens biblique, pour au-
tant !35

Peut-on perdre “la grâce de la justification” ?


C’est quoi, la justification ? Nous y reviendrons au chapitre sui-
vant. Limitons-nous ici à la définition suivante : être justifié,
c’est être déclaré juste par Dieu à cause de notre foi en Christ.
L’image évoquée ici est celle du tribunal. Nous étions des cou-
pables, condamnés à cause de notre péché. Dieu, notre Juge, ne
peut pas nous acquitter sans plus et rester juste. Mais Christ a pris
sur lui notre punition. La justice éternelle de Dieu a été satisfaite.
Maintenant, il peut déclarer juste toute personne qui place sa
confiance en Christ. Il est “justifié par grâce”, il est acquitté.
Pourquoi par grâce ? Parce qu’il n’a rien fait pour le mériter. Il
reçoit la justice divine gratuitement, par la foi. Et c’est la seule
façon de l’obtenir. Personne ne sera déclaré juste pour une autre
raison. Cette “grâce de la justification”, nous la recevons lors de
la conversion. (Le texte biblique classique sur cette question se
trouve en Romains 3.21-26; 4.1-5.)
Reposons notre question : peut-on perdre cet acquittement ? Au-
trement dit, si après avoir été ainsi “justifiés”, nous péchons à
nouveau, nous faut-il repasser devant ce tribunal divin ? La vie
chrétienne, est-ce donc un Yo-yo perpétuel entre ‘être sauvé’ et
‘être perdu’ ? Car, admettons-le, le péché nous colle tellement à
la peau que nous n’en serons jamais vraiment quittes de ce côté-
ci de la tombe. Il nous faudrait alors non seulement une “seconde

35
Voir appendice 2, point 5 : A quel moment se situe la conversion ou la nou-
velle naissance ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 116

planche de salut”, mais une troisième, une quatrième et ainsi de


suite !
A cela s’ajoute une autre considération. La Bible dit qu’il est
impossible d’être ramené à une nouvelle repentance, Hébreux
6.6. On ne peut pas devenir chrétien, ensuite tourner le dos à
Jésus-Christ de façon manifeste pour ensuite revenir. On ne peut
pas jouer avec Dieu. S’il est possible de perdre “la grâce de la
justification”, il est alors impossible de la retrouver.

Que se passe-t-il alors quand un chrétien pèche ?


Lorsque quelqu’un place sa confiance en Christ, Dieu devient son
Père. Dieu n’est plus son Juge, car “celui qui écoute ma parole et
qui croit à celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient pas
en jugement, mais il est passé de la mort à la vie”, Jean 5.24.
Ainsi, quand il commet un péché, il n’est pas reconduit devant le
Juge. Le procès est clos. Mais il attriste son Père et il doit rétablir
la communion avec lui. Cela passe par la confession et le pardon,
1 Jean 1.9.
Ce n’est pas seulement le cas suite à un péché grave. Toute la
distinction entre péché véniel et péché mortel, que les évêques de
France maintiennent, CEF §439, est artificielle et non biblique.
Dieu ne tient pas un catalogue des péchés et le pardon n’est pas
l’épicerie de la grâce ! L’apôtre Jean écrit sans aucune équivoque
possible : “Quiconque commet le péché, commet aussi une viola-
tion de la loi, et le péché, c’est la violation de la loi”, 1 Jean 3.4.
L’unique exception à cette absence de classement des péchés est
le mot suivant du même apôtre : “..il y a un péché qui mène à la
mort, ce n’est pas pour ce péché-là que je dis de prier”, 1 Jean
5.16. La question ici n’est pas de savoir de quel péché il s’agit.36
Ce qui est clair, c’est que ce péché “mortel” semble bien au-delà
de la repentance et du pardon. Il n’y a donc pas différentes façons
pour régler différents péchés. Une contrition qui n’est pas suffi-
sante pour un péché grave, ne suffira pas non plus pour un péché

36
Les avis sont divergents, mais un lien avec Hébreux 6.6 semble assez pro-
bable.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 117

dit véniel. Jésus, dans le Sermon sur la montagne, coupe court à


toute cette attitude pharisaïque, lorsqu’il refuse la manière facile
d’interpréter certains des dix commandements. Le meurtre, par
exemple, n’est pas que dans l’acte, il est déjà présent dans la
colère, même si cette colère n’aboutit jamais au meurtre au sens
propre, Matthieu 5.21-26. En fait, tout péché est mortel.

A qui faut-il confesser ses péchés ?


Dans l’Ancien Testament, le croyant pécheur venait amener son
sacrifice au temple pour que le sacrificateur l’immole sur l’autel
pour son péché. Cependant, le pardon, l’absolution, n’était pas
donnée par le sacrificateur. Dieu pardonnait à cause de la repen-
tance et du sacrifice. Le sacrificateur n’était pas un confesseur,
mais un intercesseur. Il portait les péchés des autres devant Dieu
par le sacrifice.
Dans le Nouveau Testament, Christ est à la fois sacrificateur et
sacrifice. Il n’y a plus de sacrificateur, de prêtre donc, à qui il
faut venir confesser ses fautes. C’est directement à Dieu qu’il
faut aller par l’intermédiaire de son Fils. Et devant Dieu, seul un
élan de cœur sincère et sans hypocrisie peut espérer être entendu.
Il n’est pas l’épicier qui pèse nos mots et nos sentiments et qui
calcule pour savoir si le juste prix a été payé pour obtenir
l’absolution. Il n’est pas intéressé par nos pénitences imposées,
que ce soit par nous-mêmes ou par les autres. Il regarde au cœur.
“Les sacrifices agréables à Dieu, c’est un esprit brisé : un cœur
brisé et contrit, ô Dieu, tu ne le dédaignes pas”, Psaume 51.19.
Il se peut que notre péché implique d’autres personnes. Par
exemple, le mensonge est normalement fait à quelqu’un d’autre.
Dans ce cas, la confession à Dieu ne peut pas être suffisante. Un
autre a été blessé par nous et nous devons réparer le mal que nous
avons fait. La règle suivante l’exprime de façon claire : la confes-
sion doit être aussi publique que le péché l’a été.
Le seul texte qui va plus loin est Jacques 5.16 : “Confessez donc
vos péchés les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin
que vous soyez guéris.” Cette confession spontanée ne concerne
pas une classe de gens qui confesse et une autre qui entend et
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 118

absout. Dieu pardonne. L’absolution est l’œuvre de Dieu, Marc


2.7-10. Il n’est pas possible à un homme de dire “Je vous par-
donne tous vos péchés” (CEF §435) à moins qu’il n’ait été lésé
lui-même par la faute en question. C’est le cas des Corinthiens,
2 Corinthiens 2.10. Bien que même là, il ne peut être question
d’un pardon de tous les péchés ! Mais la confession d’un acte ou
d’une faiblesse à un frère ou à une sœur en Christ, qui qu’il soit,
peut être d’un secours en vue de la guérison des maladies liées au
péché.
Pourquoi l’Eglise veut-elle que l’on se confesse devant un de ses
prêtres ? Plusieurs raisons peuvent être avancées.
 Elle sait que la plupart des gens n’ont plus aucune rela-
tion avec Dieu. Il faudrait alors un rite pour apaiser les
consciences.
 Elle sait que, de cette façon, elle peut contrôler tant bien
que mal les comportements de ses membres.
 Elle s’arroge ainsi un pouvoir énorme qui a été une
source importante de revenues. Le pardon qu’elle distri-
bue à petite dose n’est pas gratuit.
L’histoire de plusieurs pays a été changée par le biais de
l’obligation de la confession. Le pouvoir ainsi accumulé par
l’Eglise a été trop souvent utilisée pour avantager sa politique, et
pour persécuter et faire persécuter ceux qui ne croyaient pas
comme elle. La réponse à de tels abus n’est pas une meilleure
réglementation, mais un retour à la Parole de Dieu !

Qu’en est-il des peines temporelles occasionnées par le péché ?


Le traitement par le Catéchisme de cette question témoigne à la
fois de la confusion, de l’erreur et de l’horreur.

La confusion.
La peine éternelle, ce serait être privé de la communion avec
Dieu suite à tout péché grave commis en tant que chrétien. Cela
n’est pas vraiment l’enseignement de la Bible. La peine éternelle,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 119

c’est l’enfer. C’est être privé à tout jamais de la communion avec


Dieu. Elle est la suite logique et tragique du refus de venir à Jé-
sus-Christ pour devenir son disciple. Pour être délivré de cette
condamnation qui pèse comme une épée de Damoclès sur la tête
de toute l’humanité, il faut mettre sa confiance en Christ.
L’apôtre Paul dit : “Il n’y a donc maintenant aucune condamna-
tion pour ceux qui sont en Christ-Jésus”, Romains 8.1. Une fois
devenu chrétien (voir à ce sujet le chapitre suivant), le péché
brise la communion entre Dieu et le chrétien, c’est vrai, mais cela
n’a rien à faire avec la peine éternelle du péché ! Du coup, les
mots “peines temporelles” ne conviennent pas non plus. Tout
péché a des conséquences, que ce soit dans notre relation avec
Dieu, que ce soit, en plus, dans notre relation avec les hommes.
Dans certains cas, la confession sincère ne suffit pas; une répara-
tion est nécessaire. Par exemple, le voleur doit restituer ce qu’il a
volé. Mais cela n’entraîne pas d’autres peines de la part de Dieu.
Quand Dieu pardonne, la question est close en ce qui le concerne.

L’erreur.
Il faudrait “expier” ses péchés. Notons d’abord la contradiction :
Jésus Christ seul “a expié pour nos péchés une fois pour toutes”,
cependant, le pénitent doit lui aussi expier ses péchés. Autrement
dit, ce que Christ a fait sur la croix n’est pas suffisant ! L’Eglise
veut mettre un bémol à l’œuvre parfaite de Christ. Les versets
cités par le Catéchisme, Romains 3.25 et 1 Jean 2.1,2, sont suffi-
sants pour montrer l’impossibilité de l’affirmation. “Satisfaire”
ou “expier” ses péchés est impossible. D’ailleurs, pourquoi le
Catéchisme utilise-t-il des guillemets ? Faute de meilleur mot ?
Ainsi, tout l’effort que la hiérarchie a mis dans ce Catéchisme n’a
donc pu éviter une telle erreur de vocabulaire et de compréhen-
sion ? Et tout cela pour justifier la notion non biblique de la “pé-
nitence”. La Parole de Dieu parle de repentance. Ce n’est mani-
festement pas la même chose.

L’horreur.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 120

L’Eglise en tant que dispensatrice de la rédemption distribuerait


des indulgences afin de libérer des âmes du Purgatoire. Là, nous
quittons le domaine de l’erreur. Ce mot ne suffit plus pour décrire
l’enseignement de l’Eglise. Nous sommes en pleine horreur. Ad-
mettons un instant que le pouvoir de délivrer les croyants de la
souffrance du Purgatoire soit réel (il ne l’est pas); si l’Eglise dé-
tient ce pouvoir, pourquoi n’en use-t-elle pas d’un coup, avec une
générosité qui serait à l’image de l’amour de Jésus ? Pourquoi en
fait-elle un commerce ? Pourquoi se plaît-elle à tenir ainsi ses
membres dans l’esclavage de la peur et de l’incertitude ?

La Bible refuse chacune des trois affirmations de ce paragraphe.


L’Eglise n’est pas la dispensatrice de la rédemption. Les indul-
gences n’existent pas. Le Purgatoire est une invention humaine.

Nous avons la rédemption en Christ par son sang selon la ri-


chesse de la grâce de Dieu, que Dieu a répandue abondamment
sur nous, Ephésiens 1.7, 8. Il n’y a pas ici d’intermédiaire.
L’Eglise est née de la rédemption, elle en est le résultat,
l’assemblée des rachetés. Elle ne peut pas distribuer ou vendre
avec parcimonie ce que Dieu donne avec abondance à tous ceux
qui croient. Autrement dit, ce qu’elle prétend distribuer est du
vent. Christ n’a pas de trésor confiné dans les coffres de l’Eglise.
Le trésor de Christ, c’est sa grâce. Et tout vrai chrétien peut pui-
ser à pleines mains dans ce trésor. Sans passer par un quelconque
commis de la grâce.

Dieu n’est pas indulgent. Il est juste et il est amour; il est un Dieu
saint et il est un Dieu de grâce. Mais il ne sera jamais indulgent.
Il n’offre aucune indulgence. Pourquoi ? Parce qu’il offre infini-
ment mieux : Il offre un plein pardon ! Aucune action, aucune
pénitence, aucun paiement ne peut nous acheter la moindre in-
dulgence. Il n’y a pas de peine temporelle à régler. Après le par-
don, il ne subsiste aucun dû. Dieu n’est pas un marchand de ré-
duction de peines temporelles : il s’est spécialisé dans
l’acquittement à cause du sacrifice de son Fils.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 121

“C’est par la grâce en effet que vous êtes sauvés, par le moyen
de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce
n’est point par les œuvres, afin que personne ne se glorifie. Car
nous sommes son ouvrage, nous avons été créés en Christ-Jésus
pour des œuvres bonnes que Dieu a préparées d’avance, afin
que nous les pratiquions”, Ephésiens 2.8-10.
Entretenir l’illusion des indulgences a deux conséquences catas-
trophiques. C’est, tout d’abord, donner de Dieu une image in-
juste. Il devient un genre de père indulgent avec qui on peut tou-
jours s’entendre sans devoir devenir obéissant à Jésus-Christ.
Curieusement, ce dieu facile ne donne rien. Ce dieu indulgent
rend le salut autrement plus cher ! La deuxième conséquence,
c’est qu’on donne une fausse image de l’homme. Il pourrait, par
ses efforts, ajouter quelque peu à l’œuvre de Christ. Mais il n’est
pas appelé à diminuer sa peine par un bon comportement, comme
un criminel en prison. Il est pardonné, libre ! Il est maintenant
appelé à vivre en homme libre et pardonné, en agissant selon la
volonté de Dieu. Au lieu d’être un prisonnier toujours occupé de
lui-même et de sa peine à réduire, il est un fils de Dieu, respon-
sable des affaires de son Père.

Le Purgatoire est une attaque frontale contre le pardon et la grâce


de Dieu. On fait de lui un dieu cruel, jamais satisfait, qui prend
plaisir à la souffrance de ses enfants et qui les laisse peiner misé-
rablement jusqu’à ce qu’une âme charitable parmi les vivants
pense à lui et entreprend à raccourcir ses peines. Un dieu qui
admettrait un tel système serait un démon ! Cependant, la réalité
est toute autre. A sa mort, un chrétien entre dans la présence du
Seigneur, directement, sans aucun détour par l’antichambre in-
fernale d’un soi-disant Purgatoire. Paul pouvait dire : “J’ai le
désir de m’en aller et d’être avec Christ, ce qui est de beaucoup
le meilleur”, Philippiens 1.23. Le Purgatoire, est-il meilleur que
la vie sur terre ? Le pauvre Lazare part dans le paradis, Luc
16.22, 25. Le riche souffre, mais pas pour être admis plus tard
dans la félicité. Pour lui, c’est éternellement trop tard. L’abîme
qui le sépare du paradis est infranchissable, Luc 16.26. Le bri-
gand sur la croix serait le jour même avec Christ dans le paradis,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 122

Luc 23.43. La mort règle définitivement le sort d’un homme. S’il


n’est pas sauvé avant, il ne le sera plus jamais après, Hébreux
9.27. On a beau dire que le Purgatoire peut être nécessaire, CEF
§660, si on va jusqu’à dire des neuvaines pour le salut des papes,
il faut croire que le passage y est bien obligatoire pour pratique-
ment tout le monde !37

Les textes bibliques que cite le Catéchisme ne prouvent pas ce


qu’il avance. Matthieu 12.31 parle d’un péché impardonnable;
pas d’un péché pardonnable après la mort ! Le feu de
1 Corinthiens 3.15 n’est pas celui du Purgatoire, mais du juge-
ment. L’œuvre de la personne citée périt dans le feu. Il vient de-
vant son Maître honteux et les mains vides. Mais il sera sauvé
comme au travers du feu. Le feu de l’épreuve en 1 Pierre 1.7 est
une image des difficultés que subit le chrétien ici-bas. Il ne reste
qu’un texte, peu clair d’ailleurs, tiré des Apocryphes. Nous avons
déjà expliqué pourquoi nous ne pouvons pas admettre l’autorité
de ces livres. Un texte apocryphe ne peut pas déterminer une
doctrine biblique. Encore moins lorsque ce texte contredit
l’enseignement clair de la Bible. Pour le Magistère “infaillible”,
le constat est des plus accablants ! On sent d’ailleurs la gêne des
évêques de France. Pour eux, le Purgatoire n’est ni un lieu, ni un
temps, mais “on peut parler plutôt d’un état. En tout cas, le purga-
toire, qui est bien une peine, n’est pas à concevoir comme une
punition”, CEF §660. Comprendra qui pourra !

L’onction des malades


Anciennement, ce sacrement était intitulé ‘l’extrême onction’.
Les paragraphes 1512 et 1523 rappellent cela. Dans la compré-
hension plus récente, et plus “protestante”, il est devenu le sa-
crement des malades. Christ aurait institué ce sacrement en Marc
6.13, et Jacques, devenu pour la circonstance “le frère du Sei-
gneur” (!) l’aurait promulgué, Jacques 5.14, 15, §1511. C’est la

37
Voir appendice 2, point 6 : Vers la Maison du Père ou vers le Purgatoire ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 123

Tradition qui “a reconnu dans ce rite un des sept sacrements de


l’Eglise”, §1510.
L’effet de ce sacrement est de libérer les malades “de tous pé-
chés”, §1513. Il est à la fin de la vie “comme un solide rempart en
vue des dernières luttes avant l’entrée dans la Maison du Père”,
§1523. Dans ce sens, il est lié à l’Eucharistie comme viatique.
Bien que le rétablissement du malade soit une possibilité, §1520,
le sacrement a un autre effet plus certain : par l’onction, “la souf-
france, séquelle du péché originel, reçoit un sens nouveau : elle
devient participation à l’œuvre salvifique de Jésus”, §1521.

La Bible ne dit pas beaucoup sur ce “sacrement”. L’onction


d’huile, fut-elle utilisée partout dans l’Eglise primitive, ou était-
ce une pratique assez typique des communautés judéo-
chrétiennes auxquelles Jacques écrit ?
Il semble qu’en élevant cette pratique au statut de sacrement on le
rend impossible. Jacques envisage bien le relèvement physique
du malade comme la conséquence normale de l’onction. Mais
cela n’est pas effectué par l’onction en tant que telle. Il y a la foi
du malade qui appelle les anciens (voir la section suivante sur la
différence entre anciens et prêtres); il y a la foi des anciens, et
leur “prière de la foi”; et il y a le Seigneur. Or, selon le texte, ce
n’est pas l’onction, mais la prière qui sauve et le Seigneur qui
relève. Pourquoi l’onction ? Etait-ce un symbole de l’Esprit ou un
médicament, comme dans la parabole du Bon Samaritain, Luc
10.34 ? Nous l’ignorons.

Notre problème n’est pas l’onction d’huile. Elle est pratiquée


occasionnellement dans la plupart des églises qui se veulent fi-
dèles à la Bible. Le problème est dans sa compréhension. Déclaré
geste sacramentelle, on devrait s’attendre à des guérisons fré-
quentes. Car Christ serait présent et agissant de façon directe, ex
opere operato. Or, il n’en est rien. Ensuite, y a-t-il participation à
l’œuvre salvifique de Jésus ? Qu’est-ce que cela veut dire ?
Qu’on est donc sauvé ? Mais alors, soulevons de suite une
énorme contradiction : Si on passe ainsi dans l’éternité, muni des
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 124

saintes huiles et du viatique afin d’entrer dans la Maison du Père,


pourquoi alors parler du Purgatoire ? Soit le Purgatoire est vide
parce que les sacrements sont efficaces, soit il faut y passer et les
sacrements ne servent pas à grande chose. Faut-il encore prier et
faire dire des messes pour quelqu’un muni de ces sacrements à
l’heure de sa mort ? C’est en soi le plus impitoyable des juge-
ments sur les sacrements. Et ce jugement, c’est l’Eglise qui le
fait !
Le problème est encore plus grave. Est-il possible d’assurer à un
inconverti qu’il entrera dans la Maison du Père parce que muni
des sacrements ? Quelqu’un qui a été baptisé, et ils sont nom-
breux, mais qui n’est jamais devenu un disciple de Jésus, serait-il
sauvé et pardonné ? C’est impossible ! Ce serait faire une farce
de l’Evangile et de la mort de Christ. Et parce que ce n’est pas
vrai, parce qu’on pratique en face de la mort un mensonge, on
vole aux gens jusqu’à leur dernière possibilité d’être sauvé. On
leur donne une aspirine en lieu et place de la chirurgie indispen-
sable pour les sauver. Au lieu de leur présenter l’Evangile avec
ses exigences et ses promesses et de les supplier d’être réconci-
liés avec Dieu, on leur “fait les huiles” !
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 125

Les sacrements du service et de la communion

L’ordre
Ce sacrement a pour but de continuer la mission que Christ a
confiée aux apôtres. Ses trois degrés, évêques, prêtres et diacres,
constituent aujourd’hui le ministère apostolique, §1536. En-
semble, ils forment le sacerdoce ministériel, institué par Dieu,
qu’il faut distinguer du sacerdoce commun ou baptismal de tous
les croyants, §1546, 1547. Y a-t-il contradiction entre le sacer-
doce unique du Christ et celui des prêtres ? Non, dit le Caté-
chisme. Tout comme le sacrifice unique de Christ est rendu pré-
sent dans le sacrifice eucharistique de l’Eglise, de même le sacer-
doce des prêtres représente le sacerdoce du Christ, §1545. Il rend
visible la présence du Christ comme chef de l’Eglise, §1549.
Cette présence actualisée du Seigneur ne prémunit pas les prêtres
contre les faiblesses humaines. Bien que les sacrements donnent
cette garantie, “de sorte que même le péché ne peut empêcher le
fruit de grâce”, les actes des prêtres ne sont pas pour autant tou-
jours le signe de la fidélité à l’Evangile, §1550.

L’épiscopat tient la première place parmi les ministères. Les


évêques reçoivent la plénitude du sacrement de l’ordre. En tant
que successeurs des apôtres et membres du Collège, ils ont part à
la responsabilité apostolique et à la mission de toute l’Eglise sous
l’autorité du Pape, successeur de S. Pierre, §1594. Dans ce but,
ils reçoivent par leur consécration le don spirituel que les apôtres
ont reçu (à la Pentecôte ?) et qui se transmet par l’imposition des
mains, §1556. Ils portent en commun le souci de toutes les
Eglises, CEF §460.
Aucune église n’a le droit de consacrer un évêque sans interven-
tion spéciale du Pape, “en raison de sa qualité de lien suprême
visible de la communion des Eglises particulières dans l’Eglise
une et de garant de leur liberté”, §1559. L’évêque devient ainsi le
vicaire du Christ et l’eucharistie célébrée par lui “a une significa-
tion toute spéciale comme expression de l’Eglise réunie autour de
l’autel”, §1561.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 126

Les prêtres reçoivent leur consécration à l’initiative des évêques,


mais sans obtenir la plénitude du sacrement. Ils deviennent coo-
pérateurs des évêques. Leur tâche est de prêcher l’Evangile, de
paître l’Eglise et de célébrer le culte divin en vrais prêtres du
Nouveau Testament, §1564. L’essentiel de leur mission est
d’apporter “l’unique sacrifice du Nouveau Testament, celui du
Christ S’offrant une fois pour toutes à son Père en vie immacu-
lée”, §1566. C’est donc dans la messe que leur ministère trouve
son accomplissement, l’eucharistie en étant “le sommet et
l’aboutissement”, CEF §464, 465.

Les diacres sont un peu les enfants pauvres du sacrement. Ils en


reçoivent encore moins que les prêtres. Leur mission est de ser-
vir, “surtout” en assistant l’évêque et les prêtres dans
l’Eucharistie. Mais ils peuvent aussi assister aux mariages et les
bénir, prêcher et présider aux funérailles. Ils sont rattachés à
l’évêque, plutôt qu’aux églises, §1569, 1570. Ils reçoivent
l’imposition des mains pour être fortifiés des sept (= ?) dons de la
grâce, CEF 467.

Qui peuvent être ordonnés ? Seulement des hommes baptisés.


L’ordination d’une femme est impossible. En plus, ces hommes
doivent être célibataires, Matthieu 19.12, à l’exception des
diacres. Une fois reçu le sacrement de l’Ordre, en célibataire, on
ne peut plus se marier, §1577, 1579.
Ce sacrement confère un caractère spirituel indélébile; autrement
dit, un prêtre l’est pour toujours. On ne peut lui retirer son sacer-
doce, §1582.

Que dit la Bible ?


Il est indéniable que Christ a établi douze apôtres parmi ses dis-
ciples, Marc 3.13-19. Mais il est tout aussi indéniable qu’ils for-
ment un groupe complet. Judas est remplacé avant la Pentecôte,
mais aucun autre apôtre ne l’est après. Jacques est tué par Hérode
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 127

dès Actes 12.2. Puis, peu à peu, les autres partent dans leurs dif-
férents champs de mission. Le collège des apôtres n’existe plus
au-delà d’Actes 15. C’est vrai qu’il y a aussi d’autres apôtres :
Paul et Barnabas étant les plus connus. Mais ils n’ont pas été
établis par les Douze ! Et le “ministère apostolique” est dès le
début un ministère par définition itinérant. Ce sont des hommes
envoyés pour fonder des églises là où Christ n’est pas encore
connu. En ce sens, le ministère apostolique continue encore au-
jourd’hui dans le rôle de ces missionnaires qui s’acquittent de la
même tâche, étant envoyés par le Seigneur et les églises.

La direction des églises locales sera très vite confiée aux anciens.
En Actes 14.23, Paul les établit en Galatie. Pourtant, Paul n’a
jamais reçu l’imposition des mains des Douze ! Il opère hors
succession apostolique et en a été accusé à l’époque ! Dès Actes
15.2, 4 et 6, nous voyons des anciens à Jérusalem. Et il semble
manifeste que c’est un ancien, Jacques, le frère du Seigneur (cf.
§1511), qui dirige les débats. Nous voyons ainsi apparaître un
peu partout des groupes d’anciens comme conducteurs des
églises. Actes 20.28 les appelle du nom d’évêque et c’est “aux
évêques et aux diacres” de Philippes que Paul écrit sa lettre, Phi-
lippiens 1.1. Anciens et évêques sont au début de l’Eglise les
mêmes hommes. Sont-ils les successeurs des apôtres ? Pas vrai-
ment. Ils ont un tout autre ministère. Les apôtres voyagent; ils
fondent des églises, mais ils n’en sont pas responsables. Les
évêques/anciens ne voyagent pas. Leur ministère se limite à
l’église dans laquelle ils ont été établis. Il n’est donc pas juste de
dire que l’évêque a part à la responsabilité apostolique et à la
mission de toute l’Eglise.

Qui sont les anciens aujourd’hui ? Il est vrai que le mot ‘prêtre’
est dérivé du mot ‘presbytre’ du Nouveau Testament. Mais cela
ne veut rien dire. Les anciens, sont-ils les prêtres d’aujourd’hui,
des sacrificateurs dont la charge essentielle concerne les sacre-
ments et surtout l’eucharistie ? Nous avons déjà vu qu’il n’y a pas
de sacrifice de la messe. Personne dans l’Eglise du Nouveau Tes-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 128

tament ne préside devant un autel. Agir en vrais prêtres du Nou-


veau Testament, pour reprendre les mots du Catéchisme,
n’implique pas un tel sacrifice. D’ailleurs, il est pour le moins
étonnant que nulle part il n’est dit que cela fait partie de leur
ministère. En Actes 20, Paul définit le rôle des anciens (= pres-
bytres); en 1 Timothée 3.1-7 et en Tite 1.5-9, il y revient. Mais
aucune mention de la Cène ! Leur ministère se résume à
l’enseignement et à l’œuvre du berger. C’est un ministère impor-
tant et prenant. Mais ce n’est jamais appelé un sacerdoce. Sacri-
fier ne fait pas partie de leur mission spéciale. Ils n’appliquent
pas dans le sacrifice de la messe “l’unique sacrifice du Nouveau
Testament”. Les sacrifices dans l’Eglise sont mentionnés dans
des textes comme Romains 12.1; Hébreux 13.15 et 16 et 1 Pierre
2.5. Ce sont la louange et la libéralité. C’est surtout le sacrifice
vivant du chrétien qui s’offre lui-même à Dieu. Ce sont des sacri-
fices apportés par tous les chrétiens, devenus sacrificateurs pour
Dieu, Apocalypse 1.5. Il n’y a pas d’autre sacerdoce.

Les anciens dans le Nouveau Testament sont en général des


hommes mariés. Paul précise en 1 Timothée 3.2 et en Tite 1.6 que
l’évêque/ancien doit être mari d’une seule femme. Peu importe si
cela s’adresse à la polygamie ou au divorce, toujours est-il qu’il
doit normalement être marié. Avant même de pouvoir diriger
l’église, il faut qu’il dirige bien sa propre maison, 1 Timothée
3.5. Le célibat n’est exigé pour personne dans l’Ecriture. Aucun
ministère ne requiert le célibat. Pour un ministère d’ancien (pres-
bytre)/évêque, cela est même contre indiqué.
Le célibat, est-il “accepté d’un cœur joyeux”, §1579 ? N’est-ce
pas ajouter l’insulte à la cruauté ? La plupart des prêtres ne
l’acceptent pas avec joie. Ils seraient mariés si l’Eglise le permet-
tait. Beaucoup vivent des situations sexuelles tragiques à cause
de cette règle stupide et anti-biblique. Selon l’apôtre Paul, ce sont
les faux docteurs, attachés à des doctrines de démons, qui pres-
crivent de ne pas se marier, 1 Timothée 4.2,3. Une hiérarchie
célibataire est davantage l’héritage des religions païennes que de
la Bible. Bien sûr, il y a une place pour le célibat dans le royaume
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 129

de Dieu ! Pour certains ministères, cela permet un rayonnement


bien plus grand. Il suffit de penser à la vie de Paul. Mais le céli-
bat est un charisme, 1 Corinthiens 7.7. Jésus ne dit pas autrement
en Matthieu 19.12, cité par le Catéchisme. Loin de nous de dé-
crier le célibat vécu ainsi. L’œuvre de Dieu en a besoin.
Par ailleurs, il est clair que dans le Nouveau Testament on n’a
établi que des hommes comme anciens. Mais pour les diacres, ce
n’est pas la même chose. Phœbé était diaconesse, selon Romains
16.1-3 et dans 1 Timothée 3.11, Paul définit des conditions pour
devenir diaconesse.

Est-on ancien/évêque pour toujours ? La Bible n’en dit rien. Il


semble plutôt que cette soi-disant indélébilité est liée à une con-
ception particulière du sacrement. Le sacrement, et non le Sei-
gneur, conférerait ce caractère permanent, §1582. Cela trahit la
notion magique que l’Eglise a de ses sacrements. Mais cette no-
tion est étrangère à la Parole de Dieu. Aucun acte n’est efficace
de par lui-même. Aucune imposition des mains ne peut trans-
mettre une quelconque “semence apostolique”.
Cette magie ressort encore de la curieuse possibilité de recevoir
la plénitude de ce sacrement. Et donc, d’en recevoir aussi moins.
Est-ce qu’un sacrement est divisible ? Apparemment, c’est le cas.
Par exemple, la confirmation est sensée transmettre une pleine
effusion du Saint-Esprit, nous l’avons vu. Pourtant, les évêques
reçoivent cette même effusion à leur consécration. L’avaient-ils
perdue entre-temps, ou n’en reçoit-on qu’une petite parcelle lors
de la confirmation ? Qu’il nous soit permis de mettre un bémol à
toute cette construction sacramentelle. Elle est ingénieuse et ras-
surante, mais terriblement insuffisante à la lumière de l’Ecriture
sainte. Une fois de plus, le fait de s’éloigner de la Parole objec-
tive de Dieu ouvre la porte à tous les dérapages.

Le mariage
Le mariage a été élevé par Christ “à la dignité de sacrement”,
§1601. C’est un sacrement que les époux se donnent entre eux,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 130

§1623, mais qui requiert, pour être valide, la présidence du prêtre


ou du diacre, CEF §473. Le consentement libre en est l’essentiel.
S’il manque, le mariage n’existe pas et pourra donc être annulé
par un tribunal ecclésiastique compétent. Ce qui veut dire que le
mariage n’a jamais existé et que donc les contractants sont libres
de se marier, §1626, 1629.

Dans le cas d’un mariage mixte, par exemple entre un Protestant


et une Catholique, une permission expresse est requise de
l’autorité ecclésiastique. Cette permission suppose que les deux
partis connaissent “les obligations contractées par la partie catho-
lique concernant le baptême et l’éducation des enfants dans
l’Eglise catholique”, §1635 (on entend souvent dire que cette
obligation n’existe plus, ce paragraphe offre un démenti clair à
cette rumeur; et elle est toujours pratiqué). Dans le cas d’un ma-
riage entre une Catholique et un non-croyant, la joie du conjoint
croyant sera d’amener à une conversion libre à la foi chrétienne
le conjoint non-croyant, §1637.

Le mariage est indissoluble. En cas de divorce civil avec rema-


riage, les personnes concernées se trouvent exclues de
l’eucharistie “aussi longtemps que persiste cette situation”.
Même la réconciliation par le sacrement de Pénitence ne peut être
accordée qu’à ceux qui se sont réellement repentis et qui “se sont
engagés à vivre dans une continence complète”, §1650.

Qu’en est-il d’après la Bible ?


Notons d’emblée que la notion de l’engagement mutuel devant
Dieu est proche de la notion du sacrement dans son sens premier.
Cependant, où, Jésus a-t-il élevé le mariage à la dignité de sacre-
ment ? Le mariage a été institué par Dieu. C’est son invention,
son idée. C’est lui qui a créé l’homme et la femme et qui a prévu
que l’homme quitterait ses parents pour s’attacher à sa femme et
pour devenir une seule chair avec elle, Genèse 2.24. La sexualité
est créée par Dieu pour qu’elle fasse la joie des conjoints dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 131

une relation permanente. Jésus, en citant le texte de la Genèse,


ajoute : “Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a uni”,
Matthieu 19.6. Dans ce sens, tout mariage est fait devant Dieu, et
tout mariage trouve sa validité dans l’ordre que Dieu a imposé à
sa création. Un mariage exclusivement civil est alors tout aussi
valable devant Dieu qu’un mariage célébré en plus dans une
église.
Lorsqu’un couple chrétien veut prononcer cet engagement mutuel
devant l’Eglise, cela ne nécessite pas la présidence d’un membre
particulier du clergé ordonné pour être valide. Il l’est déjà. Car ce
n’est pas l’Eglise qui fait le mariage. Mais en tant que commu-
nauté, elle entoure les mariés de ses prières et de son amour. Elle
est témoin. Elle ne peut même pas donner sa bénédiction. Elle
prie pour que Dieu bénisse le couple. Et elle prie ainsi pour un
couple déjà marié. La cérémonie civile a déjà constitué le ma-
riage. L’Eglise en prend acte et s’en réjouit. Ce qui s’y ajoute,
c’est que le couple s’engage publiquement devant Dieu à vivre en
couple chrétien. Du coup, l’Eglise ne peut pas non plus prononcer
la nullité d’un mariage avec tous les risques de dérapage qu’on
connaît (annulations “à la tête du client” où la position et l’argent
peuvent parfois opérer des miracles !).

Le Catéchisme souligne à raison la permanence du mariage de-


vant Dieu. Dieu hait le divorce, Malachie 2.14-16. D’où
l’importance d’une vraie vie chrétienne des deux conjoints. En
acceptant le mariage des non-croyants (§1637), l’Eglise collabore
déjà au divorce potentiel. Un chrétien, au sens biblique du mot,
ne peut pas épouser un non-croyant et espérer que la vie spiri-
tuelle du couple sera une réussite. S’il se marie, que ce soit “dans
le Seigneur”, 1 Corinthiens 7.39. “Quelle part le croyant a-t-il
avec le non-croyant ?” (2 Corinthiens 6.15) Le texte que cite le
Catéchisme sur la conversion du conjoint non-croyant ne con-
cerne nullement un nouveau mariage, librement consenti, mais un
couple où l’un des conjoints devient chrétien, 1 Corinthiens 7.12-
16. Une fois de plus, nous voyons qu’une compréhension erronée
de la question : Comment devient-on chrétien ? rend toute la suite
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 132

impossible. Comment, l’Eglise peut-elle “bénir” un mariage entre


non-croyants ou impliquant un non-croyant ? Ce serait une comé-
die pleine d’hypocrisie ! Un non-croyant, peut-il s’engager de-
vant Dieu ? Peut-on le lui demander ?

Le mariage est indissoluble. Que l’homme ne sépare pas ce que


Dieu a uni. Cependant, le divorce existe. Il y a des mariages qui
échouent. Et la Bible admet deux causes réelles de naufrage du
couple. L’adultère brise le couple. Sans repentance, cette cassure
peut devenir irréparable. C’était le cas où dans l’Ancien Testa-
ment intervenait la peine capitale qui, du coup, mettait fin au
mariage. Le divorce a, en quelque sorte, pris la place de la lapida-
tion. Pour les Juifs, il impliquait la possibilité du remariage et ni
Christ, ni les apôtres ne mettent cela en question, cf. Matthieu
5.31, 32 et 19.9. L’apôtre Paul ajoute à cela la situation d’une
personne qui devient chrétien et dont le conjoint se sépare pour
ce motif. Dans ce cas, le conjoint chrétien n’est pas “lié”,
1 Corinthiens 7.15.
Souvent, on rencontre des situations maritales difficiles. Quelle
attitude faut-il avoir en face d’un couple divorcé et remarié pour
toutes les mauvaises raisons, et qui devient chrétien ? Faut-il leur
refuser une vie d’Eglise normale ? Faut-il les obliger à la conti-
nence ? (Qui peut vérifier cela ? Ne poussera-t-on pas les gens à
l’hypocrisie ? A-t-on le droit d’exiger cela ?) “Que chacun de-
meure dans l’état où il était lorsqu’il a été appelé” (1 Corinthiens
7.20), semble indiquer un meilleur chemin. A la conversion, le
couple, ou le conjoint, part avec le lien marital qu’il vit en ce
moment-là. C’est ce mariage qui, par la grâce de Dieu, peut de-
venir un mariage chrétien.
Est-ce qu’on peut donc divorcer “plus facilement chez les Protes-
tants” ? Il n’en est rien. Mais une écoute plus équilibrée de la
Parole de Dieu permet une attitude pastorale différente. On n’est
pas devant des décisions administratives prises par une hiérarchie
sclérosée, mais devant la Parole vivante du Seigneur. On est de-
vant Dieu lui-même. Il peut guérir le couple, et souvent, il le fait.
Dans une société déboussolée, où tous les repères moraux dispa-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 133

raissent, nous voulons essayer d’être des instruments entre ses


mains pour sauver ce qui peut l’être. Mais n’imposons pas une
règle plus lourde qu’il n’en a lui-même imposée.

Ajoutons une dernière remarque. L’œcuménisme du Catéchisme


est remarquable. On admet le mariage mixte entre Chrétiens de
confession différente. Mais à la condition que les éventuels en-
fants soient éduqués dans l’Eglise catholique. L’autre confession,
pour le Catéchisme, est toujours une église de deuxième classe,
une sorte de mal nécessaire que notre société moderne exige de
respecter. Mais qu’il s’agit d’extirper dès la nouvelle génération.
C’est très édifiant. Et cela démontre un orgueil qui va difficile-
ment de pair avec l’humble Charpentier de Nazareth.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 134

6 . Q U E FA I R E P OU R E TR E S A U VE ?

Comment devient-on chrétien ? Que faire pour être sauvé ?


Est-ce que ces deux questions sont les mêmes ? Tout chrétien
lisant la Bible n’a aucun problème d’y voir deux façons
d’exprimer la même chose. La question que pose le geôlier de
Philippes à l’apôtre Paul était extrêmement simple : “Que dois-je
faire pour être sauvé ?” La réponse de l’apôtre n’était pas plus
compliquée : “Crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé, toi et ta
famille.” (Actes 16.30,31) On devient chrétien par la foi. On est
sauvé par la foi.

Dans le Catéchisme, tout cela est à la fois plus simple et plus


compliqué. Plus simple, parce qu’on est sauvé par le baptême.
Dans l’Eglise, il n’y a que des sauvés. Dans nos pays catholiques,
il n’y a pratiquement que des chrétiens. Notre société est chré-
tienne dans la mesure qu’une large majorité des citoyens sont
baptisés. Pourtant, c’est aussi plus compliqué, parce qu’en fait,
on n’est jamais sauvé. Le salut baptismal ne suffit pas. Mais
qu’est-ce qui suffit ? Si on dit des neuvaines pour le salut d’un
pape après sa mort, si donc même lui n’est pas encore sauvé à ce
moment-là, qui sera sauvé sinon au bout d’un vrai parcours du
combattant ici bas et dans l’au-delà au Purgatoire ? Cependant,
en décrivant le salut, le Catéchisme dit des choses fort justes et
fort belles. C’est comme s’il décrit un merveilleux jardin, entouré
d’un mur infranchissable et dont la porte a été fermée à double
tour. Et Pierre, son gardien, n’y laisse entrer les gens qu’au
compte-gouttes.
Il y a déjà de gros problèmes dans le Catéchisme sur l’explication
du salut, sur sa compréhension. Mais dès qu’on se met à parler de
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 135

l’application du salut, de son appropriation, ces obstacles devien-


nent insurmontables.

Le Catéchisme traite cette question fondamentale de façon plutôt


disparate. La foi, le péché et l’œuvre de Christ sont décrits dans
la première partie sur le Symbole des apôtres. L’ensemble de la
question est ensuite concentré dans la deuxième partie sur les
sacrements. Cela est ainsi parce que, pour le Catéchisme, la clé
du salut se trouve dans les sacrements : “Ce que la foi confesse,
les sacrements le communiquent : par ‘les sacrements qui font
renaître’, les chrétiens sont devenus ‘enfants de Dieu’ (Jean 1.12;
1 Jean 3.1), ‘participants de la nature divine’ (2 Pierre 1.4)”,
§1692. Ce chemin du salut commence lors du baptême des bébés.
“Incorporés au Christ par le Baptême, les chrétiens sont ‘morts
au péché et vivants à Dieu dans le Christ-Jésus’ (Romains
6.11)”, §1694. Cela est l’équivalent de la justification qui fait des
chrétiens “le Temple de l’Esprit-Saint”, §1695.
Cependant, c’est seulement dans la troisième partie que sont pré-
sentées les questions de la grâce et de la justification par la foi, et
qu’est traité en détail celle du péché. Le salut n’est vraiment
abordé qu’à partir du paragraphe 1949. C’est la raison pour la-
quelle nous consacrons à ce sujet élémentaire non pas notre pre-
mier chapitre, mais seulement le dernier.

Le péché
Qu’est-ce qui s’est passé aux origines de l’humanité ?
Créé bon, l’homme a désobéi au commandement que le Créateur
lui a donné. A cause de cette désobéissance, il a plongé la race
humaine dans le péché. Il a perdu “la grâce de la sainteté origi-
nelle”, §399 qui se réfère à Romains 3.23. L’inclination au mal
dont souffre l’humanité est le résultat de cette chute. L’homme
naît avec ce péché qui est “mort de l’âme”. Pour l’en délivrer,
“l’Eglise donne le Baptême pour la rémission des péchés même
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 136

aux petits enfants qui n’ont pas commis de péché personnel”,


§403.
Adam et Eve vont transmettre à leur descendance une nature dé-
chue. Qu’est-ce que cela veut dire ? La nature humaine “n’est pas
totalement corrompue : elle est blessée [cf. §1707, 1714] dans ses
propres forces naturelles, soumise à l’ignorance, à la souffrance
et à l’empire de la mort, et inclinée au péché (...). Le Baptême, en
donnant la vie de la grâce du Christ, efface le péché originel et
retourne l’homme vers Dieu”. Les conséquences du péché dans
sa nature “l’appellent au combat spirituel”, §405. Une de ces
conséquences est que “le diable a acquis une certaine domination
sur l’homme, bien que ce dernier demeure libre”, §407.

C’est quoi le péché ?


Blessure de la nature humaine et atteinte à la solidarité humaine,
le péché est une offense à l’égard de Dieu, §1849,1850. Cepen-
dant, cette définition du Catéchisme est suivie de près par la dis-
tinction entre péché mortel et péché véniel, §1854. Le premier,
péché grave, commis en pleine conscience et de propos délibéré,
entraîne “la perte de la charité et la privation de la grâce sancti-
fiante, c’est à dire l’état de grâce. S’il n’est pas racheté par le
repentir et le pardon de Dieu, il cause l’exclusion du Royaume du
Christ et la mort éternelle de l’enfer”, §1861. Ce péché nécessite
“une nouvelle initiative de la miséricorde de Dieu et une conver-
sion du cœur qui s’accomplit normalement dans le cadre du sa-
crement de la Réconciliation”, §1856. Le péché véniel ne fait
qu’affaiblir la charité et mérite des peines temporelles. Mais il ne
faut pas pour autant le tenir pour anodin. Il peut nous conduire au
péché mortel. Le mieux est donc de le confesser au même titre
que les autres péchés, §1863.
La répétition des péchés engendre les vices, rattachés aux péchés
capitaux, appelés ainsi parce qu’ils sont générateurs d’autres
péchés, d’autres vices. Ce sont l’orgueil, l’avarice, l’envie, la
colère, l’impureté, la gourmandise et la paresse, §1866.

Que dit la Bible ?


Le Catéchisme, un autre Evangile ? 137

Reprenons cette question fondamentale si nous voulons com-


prendre quelque peu la situation spirituelle de l’homme : Qu’est-
ce qui s’est passé aux origines de l’humanité ?
L’homme a désobéi et perdu la sainteté originelle. Et à cause de
cela, tout homme est devenu pécheur : “tous ont péché et sont
privés de la gloire de Dieu”, Romains 3.23. L’homme a cons-
ciemment brisé la communion entre lui et son Créateur. Séparé de
Dieu, il est mort, comme Dieu le lui avait prédit : “le jour où tu
en mangeras, tu mourras”, Genèse 2.17. Il n’est pas seulement
blessé, il est mort. Paul le dit ainsi en Ephésiens 2.1 : “Vous étiez
morts par vos fautes et par vos péchés”. Le cœur de l’homme est
devenu corrompu, tortueux par-dessus tout, il est incurable, selon
ce que Dieu lui-même déclare en Jérémie 17.9. Il n’est pas seu-
lement incliné au péché, il en est devenu l’esclave.
En fait, ce que dit le Catéchisme du péché mortel, la Bible le dit
du péché tout court. Tout péché est une violation de la loi de
Dieu. “Quiconque commet le péché, commet aussi une violation
de la loi”, 1 Jean 3.4. Et cet état de péché est l’état de tout
homme. Perdu par un acte conscient, l’homme est racheté par un
acte conscient. Par un acte de foi consciente en Christ, il devient
membre de la famille de Dieu. D’esclave du péché, il devient fils
de Dieu, parce qu’il a “obéi de cœur à la règle de doctrine” qu’est
l’Evangile, Romains 6.17.
Il s’agit bien d’un esclavage personnel. Ce qui est vrai pour la
race, est vrai pour chaque membre de la race. Je commet le péché
parce que je suis pécheur. Et la libération de l’esclave que je suis
nécessite un acte personnel de ma part. Ma libération par la foi en
Christ ne libère pas pour autant mes enfants. Un chrétien
n’engendre pas des chrétiens; il engendre des pécheurs. Le bap-
tême, nous en avons déjà parlé, ne change rien à cet état.

N’est-ce pas là le problème du Catéchisme ? Ramenant tout aux


sacrements, il ne peut apprécier réellement ce qu’est le péché.
Pour lui, le péché est nécessairement et essentiellement l’affaire
des chrétiens. En le traitant seulement ici, après les sacrements, il
montre bien qu’il s’agit d’un problème chrétien. Cette multitude
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 138

de gens que l’Eglise a baptisée doit être christianisée. Ils sont


“entrés dans la vie”, parce qu’ils sont baptisés. Ils ne sont plus
esclaves, parce qu’ils sont baptisés. Alors, pour remédier à
l’erreur manifeste et visible d’un baptême au rabais (les gens sont
toujours aussi esclaves au péché après ce baptême qu’avant), on
propose une deuxième voie de salut par le sacrement de la péni-
tence. Quant au péché du non chrétien, ce n’est pas un problème
très grave : quelques gouttes d’eau par la main d’un prêtre et on
n’en parle plus.

L’accusation est souvent entendue que chez les Protestants, la vie


est facile. Il suffit de demander pardon et le péché est effacé.
Nous aurons à y revenir plus loin, mais notons que l’accusation
est un peu vite envoyée ! Pour être quitte du péché, selon le Caté-
chisme, il suffit de suivre la voie des sacrements. Il suffit d’être
baptisé, il suffit d’aller à confesse de temps à autre (préférable-
ment au moins une fois par an), il suffit d’être muni des sacre-
ments au moment de la mort, et le tour est joué. Le cœur humain
n’est pas incurable : l’Eglise propose une cure peu astreignante et
pourtant efficace. Cependant, faute de reconnaître le vrai pro-
blème, l’homme est abandonné à lui-même, tranquillisé par des
fausses solutions et, trop souvent, il finit par se dégoûter d’un
système dans lequel il ne voit que du cinéma.
Un bon traitement commence par un bon diagnostic. Et le mau-
vais traitement dispensé par l’Eglise trahit un diagnostic erroné,
et ce, malgré des paragraphes fort justes sur la libération de
l’esclavage du péché, cf. §1739.

Libre ou sous traitement ?


Jésus-Christ est le sacrifice unique pour nos péchés. “Par son
obéissance jusqu’à la mort, Jésus a accompli la substitution du
Serviteur souffrant qui ‘offre sa vie en sacrifice expiatoire’...
Jésus a réparé pour nos fautes et satisfait au Père pour nos pé-
chés”, §615 (cf. §602, 606-609, 613-615 et la fin du §616, qui
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 139

sont un excellent résumé de ce que dit la Bible sur la mort de


Christ).
Plus loin, le Catéchisme continue : Jésus a exprimé “suprême-
ment” cette offrande libre de lui-même dans l’eucharistie où il
“consacre” ses apôtres prêtres de l’Alliance nouvelle; il signifie
et réalise à l’avance le don de son corps en la cène, §610, 611,
621.
“C’est ‘l’amour jusqu’à la fin’ (Jean 13.1) qui confère sa valeur
de rédemption et de réparation, d’expiation et de satisfaction au
sacrifice du Christ”, §616. Et il veut associer à son sacrifice ré-
dempteur les premiers bénéficiaires. “Cela s’accomplit suprême-
ment en la personne de sa Mère, associée plus intimement que
tout autre au mystère de sa souffrance rédemptrice : En dehors de
la Croix il n’y a pas d’autre échelle par où monter au ciel”, §618.

“Appelé à la béatitude, mais blessé par le péché, l’homme a be-


soin du salut de Dieu”, §1949. Jésus a fait le sacrifice unique qui
a satisfait pour nos péchés. Cela doit ensuite devenir une réalité
dans la vie humaine. D’injuste qu’il est par nature, il doit devenir
juste. “La grâce du Saint-Esprit a le pouvoir de nous justifier,
c’est à dire de nous laver de nos péchés et de nous communiquer
‘la justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ’ (Romains 3.22) et
par le Baptême”, §1987. “La première œuvre de la grâce de
l’Esprit-Saint est la conversion qui opère la justification...”,
§1989. Et cette œuvre, rappelons-le, est réalisée dans le sacre-
ment de la conversion qu’est la pénitence, §1423.
La justification a été méritée par la passion du Christ et nous est
accordée “par le Baptême, sacrement de la foi. Elle nous con-
forme à la justice de Dieu qui nous rend intérieurement justes par
la puissance de sa miséricorde”. Cette justification établit la col-
laboration entre la grâce de Dieu et la liberté de l’homme. Du
côté de l’homme, elle s’exprime dans l’assentiment de la foi à la
Parole de Dieu qui l’invite à la conversion. (§1992, 1993)

“Notre justification vient de la grâce de Dieu”, §1996. Mais


qu’est-ce que la grâce ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 140

Elle est une participation à la vie de Dieu qui nous est donnée
par le Baptême. Elle est “le don gratuit que Dieu nous fait de sa
vie infusée par l’Esprit-Saint dans notre âme pour la guérir du
péché et la sanctifier : C’est la grâce sanctifiante ou déifiante,
reçue dans le Baptême” (le Catéchisme cite ici 2 Corinthiens
5.17,18), §1997, 1999. Elle est “d’abord et principalement”, le
don de l’Esprit qui nous justifie et nous sanctifie. Comme cette
grâce échappe à notre expérience, elle ne peut être connue que
par la foi. (§2003, 2005)

Est-on donc sauvé par la grâce, par le moyen de la foi ? Pas tout à
fait. Car il y a la notion du mérite. Bien sûr, entre Dieu et nous
l’inégalité est sans mesure. On ne peut donc pas parler, au sens
d’un droit strict, de mérite de la part de l’homme, §2007. Pour-
tant, Dieu a librement disposé d’associer l’homme à l’œuvre de
sa grâce. Il y a donc des œuvres bonnes qui produisent des mé-
rites, mais ils “doivent être attribués à la grâce de Dieu d’abord,
au fidèle ensuite”, §2008. “L’adoption filiale, en nous rendant
participants par grâce à la nature divine, peut nous conférer, sui-
vant la justice gratuite de Dieu, un véritable mérite. C’est là un
droit par grâce, le plein droit de l’amour... Les mérites de nos
bonnes œuvres sont des dons de la bonté divine”, §2009 qui cite
le concile de Trente. “Personne ne peut mériter la grâce pre-
mière, à l’origine de la conversion, du pardon et de la justifica-
tion. Sous la motion de l’Esprit-Saint et de la charité, nous pou-
vons ensuite mériter pour nous-mêmes et pour autrui les grâces
utiles pour notre sanctification, pour la croissance de la grâce et
de la charité, comme pour l’obtention de la vie éternelle. Les
biens temporels eux-mêmes, comme la santé, l’amitié, peuvent
être mérités suivant la sagesse de Dieu. Ces grâces et ses biens
sont l’objet de la prière chrétienne. Celle-ci pourvoit à notre be-
soin de la grâce pour les actions méritoires”, §2010. Ces mérites
ne sont pas perdus à notre mort. Ils sont accumulés par l’Eglise
dans son trésor, en vue d’une distribution ultérieure au travers des
indulgences, §1477.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 141

Que dit la Bible ?


Au centre de toute la question du salut se trouve le sacrifice de
Jésus-Christ sur la croix. Nous sommes ici au cœur de la foi chré-
tienne. L’originalité de la foi chrétienne n’est pas de nous dire
que l’homme a besoin d’être sauvé. Toutes les religions le disent
sous une forme ou une autre. Ce n’est pas non plus de nous en-
seigner que c’est par la foi que l’on accède à ce salut. Cela aussi,
on le retrouve dans beaucoup de religions, que ce soit explicite-
ment ou implicitement. Ce n’est pas non plus de nous dire qu’il
faut suivre le modèle du Christ. La plupart des religions nous
proposent des modèles plus ou moins bien réussis au niveau de la
piété personnelle, de l’exemple moral ou de l’enseignement spiri-
tuel. La nécessité de rites particuliers n’est pas non plus unique.
Et s’il est vrai qu’aucune autre religion n’a pu mettre sur pied une
organisation hiérarchique durable aussi imposante que le Vatican,
qui oserait y voir un signe manifeste de la bénédiction de Dieu ?

L’originalité de l’Evangile tient à ceci : partout ailleurs, le salut


dépend de l’effort de l’homme pour se mettre dans les bonnes
grâces de l’Etre suprême. L’homme doit monter vers Dieu; il doit
mériter l’approbation divine. Dans l’Evangile, c’est radicalement
le contraire : Dieu descend vers l’homme. Comme ce dernier est
dans l’impossibilité la plus totale de “se sauver”, Dieu, dans sa
grâce, vient le trouver, paie ses dettes, et l’adopte comme son fils.
Citons à ce sujet un texte de l’apôtre Paul :
“En effet, Moïse écrit à propos de la justice qui vient de la loi :
L’homme qui la mettra en pratique vivra par elle. Mais voici
comment parle la justice qui vient de la foi : Ne dis pas dans ton
cœur : Qui montera au ciel ?... ou : Qui descendra dans
l’abîme ?... Que dit-elle donc ? La parole est près de toi, dans ta
bouche et dans ton cœur. Or, c’est la parole de la foi que nous
prêchons. Si tu confesses de ta bouche le Seigneur Jésus, et si tu
crois dans ton cœur que Dieu l’a ressuscité d’entre les morts, tu
sera sauvé. Car en croyant du cœur on parvient à la justice, et
en confessant de la bouche on parvient au salut, selon ce que dit
l’Ecriture : Quiconque croit en lui ne sera pas confus.” (Ro-
mains 10.5-11)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 142

Il y a, en quelque sorte, deux justices, celle qui vient de la loi et


celle qui vient de la foi. La première, c’est la justice obtenue par
les efforts humains, celle qu’il pense pouvoir mériter par son
obéissance et atteindre par une vie pieuse. Mais ce chemin est
une impasse. Le mal est trop ancré dans l’homme pour qu’il
puisse ainsi parvenir à la justice qu’un Dieu juste exige.
Il y a donc une autre justice, celle de la foi. Elle est donnée parce
qu’elle ne peut se mériter. Elle vient du fait que Christ a pris sur
lui notre iniquité et que nous sommes déclarés justes, acquittés au
tribunal de Dieu, son Fils ayant subi notre condamnation à notre
place. Nous ne sommes pas en train de devenir justes, nous
sommes déclarés justes.

Malgré tout ce qu’il dit de beau et de juste sur le sacrifice de


Christ, le Catéchisme est très confus sur cette question. Nulle
part, il ne parle de la justification dans ce sens précis de
l’acquittement. Le langage judiciaire, que ce terme évoque pour-
tant, y est absent. Au lieu de cela, le Catéchisme utilise à plu-
sieurs reprises le langage de la guérison : “La justification... li-
bère de la servitude et guérit”, §1990; la grâce est donnée pour
guérir notre âme du péché, §1999. On pourrait résumer cette dis-
tinction de la façon suivante : Selon l’Eglise, nous ne sommes pas
acquittés au tribunal de Dieu, mais confiés à l’Eglise de Dieu;
nous ne sommes pas pardonnés parce que coupables, mais soi-
gnés parce que malades. Et si nous suivons la thérapie, prescrite
par l’Eglise, avec assiduité, y compris son complément nécessaire
dans le Purgatoire, alors nous serons (peut-être) sauvés.

Il est vrai que la terminologie du Nouveau Testament n’est pas


facilement comprise aujourd’hui. C’est ce que disent les évêques
de France quand ils écrivent que ces termes “demandent, pour
être bien entendus, des explications. Ainsi en est-il des mots ‘jus-
tification’, ‘expiation’, ‘satisfaction’, voire des mots plus cou-
rants de ‘rédemption’ et de ‘salut’” (CEF §269). Cependant, ils
ne donnent pas vraiment cette explication ! Et là où ils le font, le
sens donné n’est pas très convaincant ! Par exemple, l’expiation,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 143

qui veut dire que le sang du sacrifice couvre le péché commis,


afin de permettre le pardon, devient ceci : “Le terme d’expiation
souligne le côté souffrant du sacrifice et la nécessité de réparer le
désordre causé par le péché. (...) l’idée d’expiation est plutôt liée
à celle d’intercession...”, CEF §265.38 Le sens biblique que le
sacrifice détourne la colère de Dieu causée par notre péché, et
c’est ce que veut dire ‘propitiation’, est entièrement évacué. La
colère de Dieu (Romains 1.18) n’existe plus. Il n’y a donc plus
raison de nous affoler : l’Eglise est là pour nous soigner.

Qu’est-ce que la justification ?


Romains 3.21-8.39 est le passage classique sur le sujet. De 1.18 à
3.20, l’apôtre Paul traite de la culpabilité et de la responsabilité
humaine. Toute la race se trouve accusée devant son Créateur,
selon la conclusion de 3.20. Comment être “justifié” devant lui ?
Autrement dit, comment être délivré de cette culpabilité ? Com-
ment échapper à la condamnation ? C’est bien là le cadre de ce
grand texte.
Une fois justifiés, nous sommes en paix avec Dieu, 5.1, et libres
de la condamnation, 8.1. Le problème n’est pas de devenir juste,
mais d’être déclaré juste. D’être libéré devant ce tribunal impla-
cable. Le grand dilemme derrière cette question est : Comment
Dieu peut-il être juste tout en déclarant juste l’homme coupable
(3.26) ?
Jésus est la réponse à ce dilemme. Il est mort à notre place. Il a
versé son sang comme moyen de propitiation. Une victime inno-
cente, parfaite et volontaire a pris la place des coupables et, ainsi,
détourne d’eux la juste colère de Dieu. Il subit le châtiment méri-
té et nous recevons infiniment moins que ce que nous méritons :
nous recevons la grâce, nous sommes graciés et déclarés justes,
3.24-26. Dieu ne nous voit plus comme des pécheurs avec la
corde déjà au coup à moins que nous nous comportions selon les
indications de son vicaire ici-bas. Il nous reçoit comme ses fils et
ses filles, et il le fait gratuitement, 3.24. Ce qui veut dire : sans

38
Voir appendice 2, point 7 : Qui expie nos péchés ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 144

mérite aucun de notre part; sans raison de pouvoir attribuer ne


fut-ce que la moindre parcelle de gloire à nous-mêmes. Sans pou-
voir soumettre cela à la moindre condition suspensive. Nous ne
sommes pas libérés avec sursis.39

Mais qui sont les bénéficiaires de cette libération ? “Nous”, c’est


qui ?
“Nous”, ce sont “tous ceux qui croient”, 3.22. Ce sont “nous tous
qui avons été baptisés en Christ-Jésus” et qui marchons mainte-
nant “en nouveauté de vie”, 6.3,4. Ce sont “nous qui marchons,
non selon la chair, mais selon l’Esprit”, 8.4. Ce sont toux ceux
qui, à Rome, sont “saints par vocation”, 1.7.
“Nous”, ce sont ceux qui se sont convertis à Christ et qui ont
ensuite été baptisés. Le Nouveau Testament ne connaît aucune-
ment l’ordre inverse, où le baptême reçu nous inviterait à la con-
version (cf. §1993). Ce sont donc ceux qui ont concrètement et
sciemment choisi de suivre Jésus-Christ et qui ont reçu le pardon
de leurs péchés au moment de cette conversion. Ce sont ceux qui,
maintenant, ont pour premier but dans leur vie de vivre à la gloire
de Dieu et qui sont prêts à tout souffrir pour lui. Mais ce ne sont
pas les foules qui n’ont jamais rien choisi. Qui ont en tout et pour
tout été aspergées de quelques gouttes d’eau bénite au début de
leur vie. Qui sont certes invitées à la conversion par l’Eglise,
mais qui ne se sont jamais converties. Et qui, pour reprendre les
paroles de l’Ecriture, marchent encore “selon la chair” exacte-
ment comme Monsieur Tout-le-monde. La Bible met la barre très
haute. En voulant l’abaisser nous dénaturons l’Evangile. Nous
ferons de Dieu “le bon dieu” qui tolère béatement de ses enfants
tout ce qui leur passe par la tête, tant qu’ils se munissent de leur
brevet céleste par le baptême. Ce dieu-là est une idole et il faut
l’abattre sans pitié.

39
Voir appendice 2, point 8 : La justification : par le baptême, par la conversion,
plus tard, ou ...jamais ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 145

Non, l’homme n’est pas que blessé par le péché, §1949 : il a été
mortellement blessé. Aucun traitement ne peut encore lui rendre
la vie. Il n’a pas besoin de guérir : il doit revivre. Il doit venir à
Christ en sachant que c’est là le seul, l’ultime moyen pour échap-
per à la mort éternelle. Il sait qu’il est incapable de s’en sortir de
par lui-même. Il est impuissant et à bout de raison. Son péché lui
pèse et sa conscience l’accuse. Alors, l’Esprit de Dieu lui révèle
la croix où le Seigneur Jésus-Christ a payé jusqu’au bout la dette
de son péché. Incapable de mériter le moindre petit pardon, il
reçoit par la foi un plein pardon. Et il se relève libre. Plus de trai-
tement à suivre. Il est devenu fils de Dieu et l’Esprit de Dieu le
pousse à la prière, à l’espérance, à la persévérance et au service.

Peut-il encore mériter les grâces utiles pour sa sanctification ou


pour l’obtention de la vie éternelle ? Cela sous-entend tout
d’abord que la vie éternelle n’est pas encore obtenue et qu’elle
peut l’être à cause de nos mérites. Mais qu’est-ce qu’alors ce
salut obtenu lors du baptême ? Qu’est-ce que cette grâce première
à l’origine du pardon ? Est-ce donc moins que la vie éternelle ?
Peut-on être sauvé par le baptême sans avoir obtenu la vie éter-
nelle ? L’apôtre Jean a-t-il donc menti quand il écrit : “Et voici ce
témoignage : Dieu nous a donné la vie éternelle, et cette vie est
en son Fils. Celui qui a le Fils a la vie; celui qui n’a pas le Fils de
Dieu n’a pas la vie. Cela, je vous l’ai écrit, afin que vous sachiez
que vous avez la vie éternelle, vous qui croyez au nom du Fils de
Dieu” (1 Jean 5.11-13) ? Notez bien les temps présents dans ce
texte. Ce n’est pas une éventualité au cas d’un traitement réussi.
Celui qui a placé sa confiance en Jésus-Christ a la vie éternelle.
Aucun mérite ne peut y ajouter quoi que ce soit.
Deuxièmement, c’est quoi, une grâce qui se mérite ? Est-ce en-
core une grâce ? Parlant justement de ce sujet, l’apôtre Paul écrit
en Romains 4.4 : “A celui qui fait une œuvre, le salaire est comp-
té non comme une grâce, mais comme un dû.” Une grâce que je
mérite devient ipso facto un dû. Et Dieu ne nous doit pas la vie
éternelle. “C’est par la grâce en effet que vous êtes sauvés, par le
moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 146

Dieu. Ce n’est point par les œuvres (ou par les mérites), afin que
personne ne se glorifie.” (Ephésiens 2.8,9) Dieu a-t-il librement
disposé d’associer l’homme à l’œuvre de sa grâce ? La Bible n’en
dit rien. Parfois les silences de l’Ecriture, ne parlent-ils pas plus
fort que toutes les belles phrases du Catéchisme ? Nous le
croyons.

Nous l’avons déjà dit, et il faut le redire : Pour le Catéchisme,


tout se réduit aux seuls sacrements. Que Christ ait exprimé “su-
prêmement” l’offrande de sa vie à la dernière cène où il consacre
les apôtres prêtres de la nouvelle alliance, §610,611, nous en
doutons. Le mot ‘suprême’ ne peut pas être ainsi limité à la seule
cène. Aucun lecteur des Evangiles ne le comprendra ainsi. En
fait, c’est lire dans ces événements toute la théologie sacramen-
telle développée depuis. Ce n’est pas une très bonne méthode de
lecture ou d’interprétation !
Est-ce que Jésus a voulu associer ses disciples, et particulière-
ment sa mère, à son sacrifice ? Il nous semble que les auteurs du
Catéchisme n’arrivent pas à laisser toute la place au seul Sei-
gneur. Il leur faut toujours associer les hommes, ou plutôt, les
apôtres en prédécesseurs de la hiérarchie, et Marie en image de la
très sainte mère l’église. Agissent-ils ainsi par peur que Dieu
sauve sans l’Eglise ? Mais Dieu sauve sans l’Eglise ! Dans sa
grâce, il fait tout. Christ n’associe personne à son œuvre.
Cela nous fait penser au texte messianique d’Esaïe : “La vérité a
disparu, et celui qui s’éloigne du mal se fait piller. L’Eternel voit
et trouve mauvais que le droit n’existe plus. Il voit qu’il n’y a pas
un homme, il est désolé de ce que personne n’intercède; alors son
bras lui vient en aide et sa justice lui sert d’appui...”, 59.15,16.
Suit alors dans ce texte une description du Messie rédempteur.
Oui, Dieu a agi seul pour nous délivrer. Et quand un homme se
tourne vers le Christ pour être sauvé, il repart libre. Est-ce que
cela veut dire que l’homme n’a donc plus du tout besoin de
l’Eglise ? Non, bien sûr. Dieu le place dans sa famille pour qu’en
son sein, il puisse y grandir et le servir dans le monde.
La clé à cette transformation est la foi.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 147

La foi
Qu’est-ce que la foi selon le Catéchisme ?
A vrai dire, il n’en parle pas beaucoup. Plusieurs paragraphes y
sont consacrés au début; un court texte y revient plus loin avant
de parler du péché et de la grâce. Mais la foi n’a pas sa place
dans la discussion de la justification. L’homme est justifié par le
baptême. Il y ajoute ses mérites. Mais la foi n’y apparaît guère
comme nécessaire.

Une des premières mentions de la foi, en dehors des passages qui


se réfèrent à la ‘foi chrétienne’ dans sa généralité, se trouve au
§88 : Le peuple chrétien est obligé à “une adhésion irrévocable
de foi” à l’encontre des définitions du Magistère. Cette adhésion,
nous l’avons déjà vu, est sensée rendre l’erreur impossible :
“L’ensemble des fidèles (...) ne peut se tromper dans la foi...”,
§92. La foi chrétienne est donc tout d’abord cette réception do-
cile de l’enseignement de l’Eglise donné par ses évêques en
union avec le successeur de Pierre, à qui Dieu a conféré le cha-
risme de l’infaillibilité. Si quelqu’un devait nier volontairement
ces définitions infaillibles, il aurait fait défection de “la foi divine
et catholique”, cf. §2089 (voir aussi Pie XII, que nous avons cité
sur le dogme de l’Assomption).

Croire, c’est obéir. Nous le voyons dans l’exemple d’Abraham,


Hébreux 11.8, §145. C’est la vierge Marie qui “réalise de la façon
la plus parfaite l’obéissance de la foi”, en donnant son assenti-
ment à Dieu. L’Eglise vénère donc à juste titre en elle “la réalisa-
tion la plus pure de la foi”, §148,149. La foi, c’est obéissance;
c’est l’assentiment sans question à ce qui nous est révélé. C’est,
dit le Catéchisme, “d’abord une adhésion personnelle de
l’homme à Dieu; elle est en même temps, et inséparablement,
l’assentiment libre à toute la vérité que Dieu a révélée.” (§150)
Cette vérité est bien sûr celle que l’Eglise transmet. D’ailleurs, le
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 148

doute volontaire, c’est négliger ou refuser de tenir pour vrai ce


que Dieu a révélé et que l’Eglise propose de croire, §2088.
“La foi est un don de Dieu, une vertu surnaturelle infuse par
Lui”, dépendante de “la grâce prévenante et aidante de Dieu,
ainsi que des secours intérieurs du Saint-Esprit”, §153. En même
temps, elle est un acte humain : “Croire est un acte de
l’intelligence adhérant à la vérité divine sous le commandement
de la volonté mue par Dieu au moyen de la grâce.” La formule
vient de Thomas d’Aquin, citée au §155. Cependant, nous ne
croyons pas parce que “les vérités révélées apparaissent comme
vraies et intelligibles à la lumière de notre raison naturelle. Nous
croyons ‘à cause de l’autorité de Dieu...’” Néanmoins, Dieu vient
au secours de notre raison, entre autres par “la propagation et la
sainteté de l’Eglise, sa fécondité et sa stabilité”, §156.
Personne ne doit être contraint à embrasser la foi malgré soi,
§160. Mais sans la foi, “personne jamais ne se trouve justifié”,
§161. Cette foi, à n’en pas douter, c’est la foi catholique. C’est la
conclusion évidente d’un bon nombre de textes dans le Caté-
chisme, comme celui, déjà cité, du §2089 : “L’hérésie est la né-
gation obstinée, après la réception du Baptême, d’une vérité qui
doit être crue de foi divine et catholique, ou le doute obstiné sur
cette vérité. (...) Le schisme est le refus de la soumission au Sou-
verain Pontife ou de communion avec les membres de l’Eglise
qui lui sont soumis”.

La foi semble être, dans ces paragraphes, avant tout une question
personnelle, le fondement d’une piété personnelle manifestée
d’ailleurs par un certain nombre de catholiques. Pourtant, ce n’est
pas ce que veut dire le Catéchisme. Le “Je crois”, professé per-
sonnellement par chaque croyant, “principalement” lors du bap-
tême, est en fait la foi de l’Eglise. “Je crois” : c’est aussi
“l’Eglise, notre mère, qui répond à Dieu par sa foi”. Le “Je crois”
est fondé dans le “Nous croyons”, parce que “c’est d’abord
l’Eglise qui croit”, §167,168. La foi qui est don de Dieu, est don-
née par l’Eglise au travers du baptême. Dans le rituel romain, cité
par le §168, le ministre du baptême demande au catéchumène :
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 149

“Que demandes-tu à l’Eglise de Dieu ? Et la réponse : –La foi–”.


Dieu est le Père de notre foi. Mais il nous la donne au travers de
l’Eglise qui devient donc à juste titre “la mère de notre nouvelle
naissance” et l’éducatrice de notre foi, §169. Cette mère nous
apprend le langage de la foi, §170 suite à notre première “profes-
sion de foi” lors du baptême, §189.

“Le don de la foi demeure en celui qui n’a pas péché contre elle”.
Mais pour cela, il faut que les œuvres l’accompagnent. Sans cela,
“la foi n’unit pas pleinement le fidèle au Christ”. Cela
s’accompagne du témoignage devant les hommes : “Le service et
le témoignage de la foi sont requis pour le salut”, §1815,1816.

Que dit la Bible ?


Commençons par apprécier le lien étroit que le Catéchisme fait
ressortir entre la foi personnelle et la foi communautaire. La foi a
besoin de l’Eglise. L’Eglise la prêche et le croyant ne doit pas se
juger indépendant de l’Eglise, comme si tout se passe au seul
niveau individuel. C’est devenu à la mode de vouloir tout réduire
à l’individualité, mais la Bible n’en veut rien savoir. Il suffit de
regarder la naissance de la première église locale, celle de Jérusa-
lem en Actes 2.37-47 pour s’en convaincre. La foi personnelle, au
verset 41 : “ceux qui acceptèrent sa parole”, est aussi vite suivie
de l’incorporation dans l’Eglise par le baptême et pour une vie
communautaire réelle.
A cela, le Catéchisme ajoute cette belle phrase de Thomas
d’Aquin, qui souligne l’importance d’une foi intelligente et donc
librement consentie, bien que mue par la grâce de Dieu.
Est-ce que la foi personnelle précède alors l’Eglise ? Pour le Ca-
téchisme, cela est impossible. L’Eglise, comprenons la hiérar-
chie, est là avant la foi. Elle donne la foi par le baptême. Cette foi
ne peut donc pas mettre en question l’Eglise. Elle est adhésion,
obéissance. Elle trouve sa source dans l’autorité de Dieu. Cette
adhésion implique une docilité sans critique envers le magistère.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 150

Car l’intelligence n’est pas dans le libre examen des Ecritures,


mais dans la nécessaire adhésion aux dogmes.

Le Seigneur Jésus approchait cette question très différemment.


Enseignant à des Juifs, il n’a jamais fait état d’une quelconque
obligation de croire. Devant le refus de croire en lui il en appelle
au bon sens, au bon usage du raisonnement : “Si je ne fais pas les
œuvres de mon Père, ne me croyez pas ! Mais si je les fais, quand
même vous ne me croiriez pas, croyez à ces œuvres, afin de sa-
voir et de reconnaître que le Père est en moi, et moi dans le Père”,
Jean 10.37,38. Il faut croire au Seigneur Jésus pour être sauvé, dit
Paul au geôlier, et cette foi pousse au baptême, Actes 16.30-33.
Ce n’est nulle part l’Eglise qui transmet la foi comme un don
qu’elle est libre d’impartir à qui le lui demande. Lorsqu’elle bap-
tise, la foi est déjà présente. Sans cela, il n’y a pas de baptême.
Certes, cette foi, ou l’absence de cette foi, est pleine de consé-
quences. Le sort du croyant et le sort du non croyant ne sont pas
identiques. Celui qui croit en le Fils a la vie éternelle; celui qui ne
croit pas est déjà jugé parce qu’il n’a pas cru au nom du Fils
unique de Dieu (Jean 3.15-18,36). Et croire, c’est indéniablement
obéir : Christ reviendra entre autres “pour punir ceux qui ne con-
naissent pas Dieu et ceux qui n’obéissent pas à l’Evangile de
notre Seigneur Jésus-Christ”, 2 Thessaloniciens 1.8. Aimer
Christ, c’est garder ses commandements, Jean 14.15. Mais, et
quel ‘mais’ ! cette foi est placée dans le nom du Fils de Dieu. Ce
n’est pas l’adhésion à tout ce que l’Eglise peut enseigner, mais la
confiance totale et sans réserve en Jésus-Christ.40

Est-ce que Dieu vient au secours de notre raison par la propaga-


tion et la sainteté de l’Eglise, par sa fécondité et sa stabilité,
comme veut nous le faire croire le Catéchisme (§156) ?
Disons d’emblée que l’exemple de l’Eglise, et donc des représen-
tants de l’Eglise joue un rôle primordial dans la crédibilité de
l’Eglise. La sainteté de l’Eglise est, doit être, celle de ses

40
Voir appendice 4 : Le chemin.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 151

membres. Si leur comportement laisse à désirer, la foi en Christ


sera lésée. On dira : “Si c’est cela les chrétiens, alors, merci
beaucoup !” L’apôtre Pierre l’a formulé ainsi : “Au milieu des
païens, ayez une bonne conduite, afin que, là où ils vous calom-
nient comme faisant le mal, ils voient vos œuvres bonnes...”
(1 Pierre 2.12). Et plus loin : “Que nul de vous ne souffre comme
meurtrier, comme voleur, comme malfaiteur ou comme se mêlant
des affaires d’autrui; mais si c’est comme chrétien, qu’il n’en
rougisse pas; qu’il glorifie plutôt Dieu à cause de ce nom.”
(4.15,16) Par contre, si l’Eglise se rend coupable de toutes ces
choses, et l’histoire de l’Eglise est surchargée à ce sujet !, au lieu
de venir à la rencontre de notre raison, elle devient l’obstacle
majeur à cette même raison.
L’Eglise romaine, en parlant propagation, fécondité et stabilité,
cherche à impressionner les gens par le nombre important de ses
adhérents, par le fait qu’on la trouve partout, et qu’elle est dans
les affaires depuis bientôt deux mille ans. Mais au lieu d’attirer
les gens à Christ pour qu’ils mettent en lui leur confiance, elle
veut attirer les gens à elle-même. Nulle part dans la Bible,
l’Eglise ne s’est prêchée elle-même. Son attitude est mieux résu-
mée dans ces mots de l’apôtre Paul : “Je n’ai pas jugé bon de
savoir autre chose parmi vous, sinon Jésus-Christ, et Jésus-Christ
crucifié”, 1 Corinthiens 2.2.

Et les œuvres ? Si “le service et le témoignage de la foi sont re-


quis pour le salut” (§1816; c’est d’ailleurs exactement ce
qu’enseignent les Témoins de Jéhovah à ce sujet), combien y a-t-
il de sauvés dans cette Eglise ? Il est vrai que la foi sans les
œuvres est morte, Jacques 2.26. Mais l’absence des œuvres, fait-
elle avorter la foi ? Ou est-elle une indication que la foi dont il est
question est tout sauf la foi au sens biblique du mot, qu’elle n’est
qu’adhésion, croyance ? Au verset 19, Jacques parle de la foi des
démons. Soyons en convaincus : la foi des démons, accompagnée
ou non de toutes les œuvres possibles et imaginables, ne sauvera
jamais personne ! Ce qui sauve, c’est la confiance en Christ, mort
pour nos péchés, ressuscités pour nous déclarer justes. Cette foi-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 152

là, la vraie, sera toujours accompagnée d’œuvres, même si elle a


besoin d’y être encouragée de temps à autre. Comme l’a si bien
dit quelqu’un : “c’est la foi seule qui sauve, mais la foi qui sauve
n’est jamais seule”.
L’Eglise, serait-elle à tout hasard la grande dispensatrice ici-bas
de cette foi partagée par les démons ?

Comment vivre en chrétien ?


Qu’est-ce que vivre en chrétien ? Quels en sont les caractéris-
tiques ? Avant de nous tourner vers les textes du Catéchisme qui
traitent de “la vie dans le Christ” (dans la troisième partie, intitu-
lée ainsi), revenons un peu en arrière.

Pour le Catéchisme, l’essentiel de la vie chrétienne se joue dans


la participation aux sacrements. A la rigueur, une participation
pieuse aux sacrements peut remplacer toute exigence d’une vie
chrétienne. Mis à part certains actes particulièrement répréhen-
sibles, le comportement du chrétien ne semble avoir que très peu
de conséquences sur son rapport avec Dieu par l’intermédiaire de
l’Eglise. Tant qu’on passe par la voie royale des sacrements, tout
peut s’arranger. De toute façon, il y a le Purgatoire pour parache-
ver la sanctification !

Cela ne veut pas dire que l’Eglise est indifférente à la vie de ses
fidèles. Elle cherche à réglementer et à organiser leur vie jusque
dans ses moindres détails. Elle a produit (malgré elle ?) des
hommes et des femmes d’une spiritualité remarquable. Certains
de ses saints étaient des chrétiens exemplaires. Plusieurs de ses
règles sont dignes d’être suivies à la lettre et aptes à révolutionner
la société si seulement elles étaient respectées. Mais tout cela
reste, en dernière analyse, terriblement insuffisant pour deux
raisons.
1° Ce n’est pas vraiment nécessaire. Permettez-moi de le dire
dans un langage automobile : l’Eglise offre un modèle de base
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 153

avec des options. Le modèle de base, c’est le chrétien qui suit,


tant bien que mal, sa cure sacramentelle. C’est, il est vrai, un
modèle bas de gamme, mais en soi parfaitement suffisant pour
arriver au but désiré du salut éternel, si toutefois cela existe (car
tous ces “chrétiens” n’en sont pas nécessairement convaincus !).
Ce modèle de base est très courant. Bien sûr, il y a des options de
sanctification qu’on peut y ajouter, et que l’Eglise, comme tout
garagiste, encourage d’y ajouter. Mais ce ne sont que des options.
2° Ce n’est pas vraiment réalisable. Il manque la force, la capaci-
té, pour vivre une vie chrétienne réelle. Pourquoi ? Parce que
l’Eglise ne produit pas des chrétiens. L’Eglise se contente de
produire une chrétienté. Faute de prêcher et d’enseigner la con-
version telle que la Bible l’entend, elle est remplie de gens, très
convenables peut-être, avec des qualités humaines parfois plus
qu’enviables, mais qui ne sont jamais devenus des chrétiens. Au-
trement dit, l’Eglise demande qu’on vive une vie chrétienne, mais
elle ne fait rien pour que les gens commencent par devenir chré-
tiens !
En sapant le vouloir, autant que le pouvoir d’une vraie vie chré-
tienne, celle-ci reste une heureuse exception, un oasis de vie au
milieu d’un désert aride.

L’ordre de la troisième partie du Catéchisme est intéressant. La


première section traite de la vocation de l’homme à la vie dans
l’esprit. Partant du baptême qui fait le chrétien, l’Eglise va faire
la “catéchèse de la ‘vie nouvelle’”, §1697, sensée à aider le chré-
tien à progresser dans une voie chrétienne. Nous avons déjà vu
que le Catéchisme y traite du péché et du salut et nous n’allons
pas y revenir. Mais une fois justifié par le baptême, comment ce
“nouveau chrétien” va-t-il découvrir le chemin de la perfection ?
En se tournant vers l’Eglise, mère et éducatrice. C’est l’Eglise qui
saura lui enseigner comment pratiquer les commandements.
N’est-elle pas dotée du charisme de l’infaillibilité, §2032-2040 ?
Pour savoir comment vivre, le chrétien est conduit à se confier
avec docilité au jugement de l’Eglise. (Nous renvoyons le lecteur
vers notre premier chapitre qui entre dans le détail de ces para-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 154

graphes.) Il n’a pas avant tout besoin du Christ, de l’Esprit, de la


Parole de Dieu, mais de la sainte mère, l’Eglise, par laquelle il a
accès à tout le reste, sans risquer de se tromper. La vie chrétienne
est donc avant tout : suivre les sacrements et les commandements
de l’Eglise.
Pour les enfants que sont les chrétiens, ce chemin est rassurant. Il
n’y a qu’à avaler la nourriture pré mastiquée par l’Eglise. C’est
vrai, ils sont encouragés à aller plus loin, même à manifester une
vie authentiquement chrétienne, mais seulement dans la mesure
que cela ne contredit en rien les enseignements officiels de
l’Eglise. Découvrir dans la Bible que l’Eglise se trompe serait
évidemment faire preuve d’une énorme prétention.

Nous ne devons pas obéir parce que l’Esprit de Dieu nous y


pousse, mais parce que l’Eglise nous l’ordonne.
“Le Concile de Trente enseigne que les dix commandements
obligent les chrétiens et que l’homme justifié est encore tenu de
les observer. Et le Concile Vatican II l’affirme : ‘Les évêques,
successeurs des apôtres, reçoivent du Seigneur (...) la mission
d’enseigner toutes les nations et de prêcher l’Evangile à toute
créature, afin que tous les hommes, par la foi, le Baptême et
l’accomplissement des commandements, obtiennent le salut’”,
§2068.
Notons trois choses dans ce paragraphe qui vont à la racine de la
différence entre le Catéchisme et la Bible.
 L’homme justifié est tenu... Qui est cet homme ? Pour le Ca-
téchisme, il s’agit de tout baptisé. Pourquoi est-il tenu à
l’obéissance ? Parce qu’il n’est pas devenu chrétien, parce
qu’il n’a pas reçu l’Esprit de Dieu, parce qu’il est encore
étranger à Dieu, à Christ, à la vie éternelle; il faut donc
l’obliger. Est-ce que Christ était obligé d’observer les dix
commandements ? Non ! Il les vivait parce que c’était sa na-
ture. Et c’est ainsi pour l’homme justifié par la foi en Christ.
Il a reçu une nouvelle nature, l’Esprit de Dieu habite en lui, la
Loi est inscrite dans son cœur. Cette nouvelle nature vit selon
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 155

les commandements. Mais notre ancienne nature ne peut les


observer. Il s’en suit que ce qu’impose le Catéchisme, en sui-
vant les conciles, c’est du légalisme, c’est la Loi sans la
croix. L’impasse est obligatoire. S’il faut obliger “le chré-
tien”, la bataille est déjà perdue ! Faire la volonté de Dieu est
devenue sa vie. Ce n’est pas nécessairement facile, mais il ne
peut plus concevoir la vie autrement. Si cela est quand même
le cas, il faudra bien se demander s’il est devenu chrétien au
sens biblique du mot.
 Par la foi, le Baptême et l’accomplissement des commande-
ments... C’est effectivement l’ordre préconisé par les Ecri-
tures : d’abord la foi (devenir disciple), ensuite le baptême et
alors une vie d’obéissance active à Christ, Matthieu 28.19,20.
Pourtant, ce n’est ni ce que l’Eglise pratique ni ce que le Ca-
téchisme enseigne ! En fait, l’Eglise baptise sans la foi et
oblige à l’obéissance sans la foi. Le résultat n’est pas très
convaincant. Le salut est mis au prix d’une obéissance docile
au Magistère de l’Eglise. Et au lieu d’enseigner et de nourrir
la vie, l’Eglise ne fait que moraliser les gens. Dans un âge
plus docile, cela avait encore un peu de chance d’avoir cer-
tains résultats. De nos jours, acceptons-le, c’est plutôt démo-
ralisant.
 Le Concile de Trente enseigne ... Faut-il vivre d’une certaine
façon parce que Dieu le demande, ou parce que l’Eglise
l’impose ? Autrement dit, le chrétien est-il soumis à Dieu ou
à l’Eglise ? Est-ce la même chose ? Pas nécessairement,
même si ce devrait l’être. Dans un monde idéal, ce serait la
même chose, mais nous ne vivons pas dans un monde idéal !
Comment s’assurer que l’Eglise est d’accord avec Dieu, ou
que Dieu est d’accord avec l’Eglise ? Il n’y a qu’une seule
façon : il faut que l’Eglise et le chrétien se soumettent en-
semble à la Parole de Dieu. Or, c’est exactement ce que
l’Eglise refuse de faire.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 156

Pourtant, le Catéchisme dit bien que Dieu a gravé les dix com-
mandements dans le cœur de l’être humain, §2072, et que Dieu
rend possible ce qu’il commande, §2082.

La première affirmation est erronée. Dieu n’a pas gravé sa Loi


dans le cœur de l’être humain. L’antique promesse des prophètes
(“Après ces jours-là, dit l’Eternel, je mettrai ma loi au-dedans
d’eux, je l’écrirai sur leur cœur; je serai leur Dieu, et ils seront
mon peuple”, Jérémie 31.33) a été accomplie dans la Nouvelle
Alliance entre Dieu et les hommes en Jésus-Christ, selon Paul en
2 Corinthiens 3.3ss. Cette Loi n’est pas écrite dans le cœur de
l’être humain, mais dans le cœur de celui qui a reçu Jésus-Christ
comme son Sauveur et Maître, qui s’est converti, qui est cons-
ciemment devenu disciple de Jésus.
D’ailleurs, dans les paragraphes 2058-2063, le Catéchisme rap-
pelle à juste titre le rôle de l’alliance. “Les commandements re-
çoivent leur pleine signification à l’intérieur de l’alliance.” “Les
commandements proprement dits viennent en second lieu; ils
disent les implications de l’appartenance à Dieu instituée par
l’alliance.” (§2061, 2062) Les dix commandements s’adressent
bien à l’homme “sauvé”, à l’homme qui est volontairement entré
dans l’alliance. Dans le langage du Nouveau Testament, cela veut
dire : l’homme qui s’est converti, qui est devenu chrétien.
L’alliance n’est pas transmise de père en fils. Et parce que les
commandements suivent l’entrée dans l’alliance, ils ne peuvent
être inscrits dans le cœur de tout être humain.

La section sur la sainteté chrétienne est résumé par le §2029 qui


est une citation de l’Evangile : “Si quelqu’un veut venir à ma
suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa Croix, et qu’il
me suive” (Matthieu 16.24). Cet appel n’est pas adressé à ceux
qui sont déjà devenus chrétiens, mais à ceux qui veulent le deve-
nir. Ce n’est pas un appel supplémentaire, une option qu’on peut
éventuellement choisir. Cet appel fait partie du “modèle de base”.
Et tant que l’être humain n’y a pas donné suite, il n’est pas chré-
tien, et la Loi n’est pas écrit dans son cœur. S’il ne s’y soumet
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 157

pas, ce n’est que naturel. L’y obliger, c’est le mettre sous une loi
impossible. C’est revenir au Judaïsme.
C’est pourtant exactement ce que fait le Catéchisme au §2075. Il
s’agit d’un résumé de la section qui introduit les dix commande-
ments et il commence avec la question du jeune homme riche :
“Que dois-je faire de bon pour posséder la vie éternelle ? – Si tu
veux entrer dans la vie, observe les commandements” (Matthieu
19.16-17). Jésus, a-t-il voulu dire qu’en observant les comman-
dements, on peut être sauvé ? Mais c’est justement impossible !
C’est l’impasse à cause de la faiblesse et du péché du cœur hu-
main. Non, Christ est venu pour ouvrir un autre chemin : “Je suis
le chemin, la vérité et la vie; nul ne vient au Père que par moi”
(Jean 14.6).
Il est glorieusement vrai que Dieu rend possible par sa grâce ce
qu’il commande. Mais à condition d’avoir pris ce chemin nou-
veau. Dire que cela est vrai pour tout homme, c’est induire en
erreur les gens avec un enseignement bien cruel. Non seulement,
on les oblige à tenir la Loi, ce qui est impossible à l’homme “na-
turel”, mais, en plus, on leur dit que Dieu leur en donnera la
force. S’ils ne parviennent pas à tenir la Loi, ils seront donc dou-
blement coupables. D’abord pour avoir désobéi, ensuite pour
avoir fait obstruction à la grâce de Dieu.
Ce qui est peut-être encore plus dramatique, c’est que la plupart
des gens ne s’y intéressent même pas. Ils ont été baptisés et ma-
riés à l’Eglise, ils y ont fait baptiser leurs enfants, et cela leur
suffit amplement. De toute façon, ils seront “sauvés” (si toutefois
cela existe) et n’est-ce pas le principal ?

Croire et obéir
La vie chrétienne est une vie d’obéissance aux commandements,
ceux de l’Eglise d’abord, §2041-2043, ceux de Dieu, les dix
commandements, ensuite. Dans la longue section sur ces derniers,
le Catéchisme essaie de transmettre un projet de société à beau-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 158

coup d’égards enviable ...et utopique ! Plutôt que de les résumer,


limitons-nous à quelques remarques “Bible en mains”.

Le premier commandement (pas d’autres dieux, pas


d’images)
Le §2089 a déjà reçu l’attention plus en avant. Mais notons ici
avec étonnement que la soumission au Souverain Pontife est trai-
tée dans le cadre du premier commandement de la soumission à
Dieu ! Y aurait-il confusion dans les rôles ?
L’Eglise, peut-elle dispenser les chrétiens de leurs vœux et pro-
messes à Dieu, §2103 ? Là où des vœux étaient manifestement
contre la volonté de Dieu, exprimée dans la Bible, Dieu lui-même
nous en dispense. Dans les autres cas, n’est-ce pas davantage le
rôle de la conscience humaine, éclairée par la Parole de Dieu ?
Y a-t-il déjà des martyrs, “morts pour ne pas adorer ‘la Bête’” ?
La référence biblique est Apocalypse 13-14 où il est question de
la venue, avant le retour de Christ, de l’Antichrist. Mais il n’est
pas encore là !
Nous avons déjà remarqué la facilité avec laquelle le Catéchisme
réduit le deuxième (le vrai !) commandement à une peau de cha-
grin, pour ensuite l’annuler au profit des images. Faut-il croire
que beaucoup de paroisses font ce même constat et se mettent à
supprimer ces images dans leurs églises paroissiales ? Cela
semble être le cas.

Le deuxième commandement (ne pas prendre le nom de Dieu


en vain)
Ne pas prendre le nom de Dieu en vain, est-ce “le garder en mé-
moire dans un silence d’adoration aimante” ? (§2143) Est-ce que
Zacharie 2.17, cité en note, le prouve ? Certes, il y a une place
pour le silence, mais cela n’est guère en vue ici.
Dans cette section, c’est le nom de la vierge qui est mis au même
niveau que le nom de Dieu, §2146. Constatons qu’avec une facili-
té déconcertante, l’Eglise remplace la gloire du Dieu incorrup-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 159

tible par des images représentant l’homme corruptible, Romains


1.23.
“Il est encore blasphématoire de recourir au nom de Dieu pour
...réduire des peuples en servitude... L’abus du nom de Dieu pour
commettre un crime provoque le rejet de la religion” (§2148).
L’Eglise a une très longue expérience dans ce domaine et elle
parle donc ici avec un grand savoir. Mais un mot de confession
aurait été à sa place, reconnaissant ses erreurs énormes dans ce
domaine. D’autant plus que cela continue dans certains pays où
l’Eglise a possédé jusqu’à maintenant une place prépondérante.
Au nom de l’Eglise, on persécute encore aujourd’hui des non
catholiques (au Mexique par exemple).
Etait-ce judicieux de mêler le nom de Dieu aux noms et à
l’intercession des saints, §2156 ? Le signe de la Croix, a-t-il un
quelconque rapport avec ce commandement, §2157 ? Qu’on nous
permette le doute volontaire dans le sens du §2088 !

Le troisième commandement (se souvenir du sabbat)


L’amalgame se fait ici avec les jours des saints qui doivent rece-
voir le même respect que le sabbat du commandement, §2177.
Mais la Bible n’enseigne cela nulle part ! Bien au contraire.
L’apôtre Paul écrit : “Que personne ne vous juge ...pour une
question de fête, de nouvelle lune, ou de sabbats...” (Colossiens
2.16). Il n’y a donc aucune autorité spirituelle pour l’imposer.
Cela fait partie des commandements de l’Eglise, comme plus loin
au §2180,2181,2192 (on doit participer à la Messe), mais une
telle obligation ne provient pas du Seigneur. En plus, être obligé
à assister à la Messe montre bien à quel point l’Eglise se voit
forcée à imposer un certain comportement cultuel à ses fidèles.
Peut-on imaginer les premiers chrétiens à être obligés de la
sorte ? Quand il faut obliger, c’est que l’amour est parti depuis
longtemps. Et un culte rendu sans amour ne peut être acceptable
au Seigneur. Ce serait un insulte à son égard. Mieux vaut ne pas
venir en sa présence que de venir par obligation.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 160

Avec les commandements suivants, nous entrons dans le domaine


des relations horizontales. L’Eglise s’y sent manifestement plus à
l’aise, notamment depuis Vatican II. Cependant, quelques petites
remarques s’imposent.

Le quatrième commandement (Honorer ses parents)


Ce commandement, s’applique-t-il vraiment aux autorités civiles,
§2235-2237 ? L’Eglise, peut-elle leur imposer une loi chré-
tienne ? Nous sommes bien d’accord que des chrétiens ou des
gens influencés par le Christianisme auront une conception diffé-
rente du gouvernement que des non chrétiens. Mais l’Eglise n’est
pas et ne doit pas être la moralisatrice des peuples. Elle a une
autre vocation : celle de prêcher l’Evangile qui transforme les
hommes. Son souci n’est pas de faire d’eux de meilleurs citoyens,
bien qu’indéniablement, ils le deviennent. Elle désire que les
hommes deviennent citoyens du Royaume des cieux. Elle veut
qu’ils s’intègrent dans une nouvelle patrie; pas celle qui nous
appelle à prendre les armes pour la défendre, §2239, mais celle
qui fait d’eux des étrangers sur terre, Hébreux 11.13-16. Le pro-
blème du Catéchisme est de confondre le chrétien et le citoyen.
Cette confusion a entraîné de par le passé des guerres de religion
sans fin. Parce que l’Eglise se voit comme la maîtresse des
peuples, citoyen et chrétien, comprenez : catholique, se confon-
dent. Dans un monde soumis à son prince, le diable, Jean 14.30,
cela a donné naissance à d’étranges alliances. Au fond, l’Eglise
n’a jamais perdu ni l’espoir ni l’envie de lire la loi aux autorités
civiles.
Est-ce que les apôtres se sont efforcés de moraliser les chefs poli-
tiques de leur temps ? Ils avaient un autre but : les amener à Jé-
sus-Christ. Ils savaient que “hors des lumières de l’Evangile sur
Dieu et sur l’homme, les sociétés deviennent aisément totali-
taires”, §2257. Ils ont donc répandu cette lumière, là où l’Eglise
l’a étouffée durant de longs siècles.

Le cinquième commandement (ne pas tuer)


Le Catéchisme, un autre Evangile ? 161

“Ne pas commettre de meurtre” semble un commandement facile.


Il ne l’est pas. Il suffit de comparer les §2262 et 2264 pour s’en
convaincre. Christ nous demande de tendre l’autre joue, d’aimer
nos ennemis, Matthieu 5.22-39. Cependant, n’est-il pas néces-
saire de se défendre, même si cela entraîne la mort de l’ennemi ?
On est “davantage tenu de veiller à sa propre vie qu’à celle
d’autrui.” Comment lever la contradiction entre ces deux affirma-
tions ? Les chrétiens, ne seront-ils pas nécessairement les parti-
sans d’une résistance non-violente au mal, et par là les témoins de
la transformation radicale qu’opère le Saint-Esprit ? Ce n’est pas
en tant que telle une critique du Catéchisme. La même probléma-
tique se retrouve dans la plupart des églises et elle nous demande
une réflexion biblique peu encouragée dans notre monde ! Il est
bien plus facile de “bénir” les armes avant le combat que
d’excommunier quiconque, même durant une guerre dite juste,
prend les armes pour tuer son prochain. La parole de Christ a
perdu toute son autorité dans ce domaine.
Sur la même question, le §2308 évoque le besoin d’une “autorité
internationale compétente et disposant de forces suffisantes” pour
régler les conflits entre états. La Bible mentionne une telle autori-
té : l’Antichrist, Apocalypse 13, cf. 1 Thessaloniciens 5.3 et
2 Thessaloniciens 2.3-12. L’homme ne pourra instaurer un règne
de paix : Christ le fera lors de son retour, Apocalypse 20. Est-ce
que le Catéchisme a plus de confiance dans les organismes inter-
nationaux, que l’Eglise pourra influencer, qu’en Christ sur qui
l’Eglise n’a aucun pouvoir ? Et jusqu’au retour de Christ, y a-t-il
de guerre juste, §2309, guerre dans laquelle le chrétien pourra, la
conscience tranquille, tuer son ennemi ? Nous en doutons.
Et que dire de la violence utilisée par un gouvernement puissant
contre ceux qui pensent autrement ? L’histoire ne nous encourage
pas à être optimistes. L’Eglise s’est fait souvent l’allié zélé de
l’oppression, pour ne pas dire qu’elle a poussé l’état à supprimer
ceux qui osaient la défier. Le §2298 nous remplit de pessimisme
par sa manipulation de l’histoire : “L’Eglise a toujours enseigné
le devoir de clémence et de miséricorde; elle a défendu aux clercs
de verser le sang.” Comme commentaire sur des siècles
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 162

d’inquisition, il y a mieux. Les Juifs et les Protestants, pour ne


nommer qu’eux, apprécient autrement. A quand, une franche
repentance, à la fois dans les paroles et dans les actes ? A quand,
des enseignements qui nous permettent de croire que l’Eglise a
vraiment changé ?
Nous ne parlerons pas ici de l’avortement. Tout disciple du Christ
y est totalement opposé, non pas à cause de la loi morale, §2271,
mais à cause de la loi de Christ qui a été gravée dans son cœur.

Le sixième commandement (ne pas commettre d’adultère)


Les devoirs de la pureté et de la fidélité dans le domaine sexuel
sautent aux yeux. Mais quel catholique s’est engagé à rester pur
(nous préférons le terme biblique de la pureté à celui, plus rare,
de la chasteté) au moment de son baptême (et donc, en étant bé-
bé !) ? (§2340,2348) Cet engagement, bafoué comme nul autre de
nos jours, est propre à l’engagement conscient pour suivre Jésus-
Christ. Il est pris de façon particulière lors du mariage.
Qu’en est-il des enfants ? Le but du mariage est de créer un
couple. Genèse 2.24 en est la charte fondamentale : “L’homme
quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme et ils de-
viendront une seule chair.” Le couple se crée donc par ces trois
actions : quitter, s’attacher et devenir une seule chair. Mais ce
texte ne mentionne pas les enfants. Le couple existe, même sans
enfants. Ces derniers ne sont pas un droit, mais un don. Pour citer
le Catéchisme, et cette fois-ci avec un accord sans réserve :
“L’enfant n’est pas un dû, mais un don.” (§2378) Et parce qu’il
est don, don de Dieu, il a des droits absolus, dès sa conception.
L’enfant appartient aux parents, mais il n’est pas leur propriété.
Mais peut-on empêcher ou limiter leur naissance ? Pour le Caté-
chisme, la réponse est un ‘oui prudent’, à condition de se limiter
à la méthode de continence périodique, §2368 - 2370. C’est un
domaine où la Bible ne donne bien sûr aucune indication précise.
Il faut donc s’en tenir à son enseignement général. La Bible tient
la vie pour sacrée dès la conception, cf. Psaume 139.15,16. Tout
moyen de contraception qui détruit la vie en faisant avorter
l’enfant déjà conçu, ne peut donc être acceptable pour un chré-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 163

tien. Cela étant clair, le reste doit être laissé à la liberté et à la


responsabilité individuelle. Cela ne veut pas dire que tout va. Ni
que tout motif est bon. L’enfant est un don; pas une éventualité à
retarder à tout prix. Plusieurs, pour avoir usé des moyens contra-
ceptifs au demeurant tout à fait “légitimes”, ont, à leur consterna-
tion, découvert une stérilité très dure à supporter. Ne suivons
donc pas aveuglément ce qui se fait partout, mais usons des
moyens à notre disposition avec circonspection et prière.

Les septième et huitième commandements (Ne pas voler; ne


pas mentir)
L’honnêteté dans les choses matérielles et la véracité dans les
paroles caractérisent le chrétien. Ce que le Catéchisme écrit à ce
sujet est fort juste. L’Eglise a produit des exemples lumineux de
charité. Pourtant, notre société dite chrétienne ne reflète pas ce
caractère chrétien. C’est qu’il ne peut être produit que par
l’Esprit de Dieu dans le cœur du croyant qui a été transformé par
la grâce de Dieu. Nous pouvons fustiger la société pour ne pas
être plus juste et pour aimer les magouilles. Nous pouvons lui
dire de changer. Mais cela n’aura que très peu d’effet. La société
nouvelle doit se voir dans la vie des chrétiens et des églises. Nous
devons donner envie aux autres de connaître Celui qui la rend
possible et qui viendra pour l’établir à l’échelle globale. Notre
rôle n’est pas d’améliorer le monde, mais d’être témoins et de lui
annoncer l’Evangile. C’est ainsi que nous marchons dans les
traces de Jésus et des apôtres.

Les neuvième et dixième commandements (Ne pas convoi-


ter)
Le paragraphe 2534 dit fort justement que le dixième comman-
dement “dédouble” et complète le neuvième. Après tout, ces deux
commandements n’en forment qu’un dans le texte hébreu de
l’Ancien Testament.
Comment comprendre ce commandement ? Souvent, on donne
l’impression que la vie chrétienne est maussade. Qu’il me soit
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 164

permis de citer à ce sujet deux paragraphes de mon La tente de


Dieu dans le désert des hommes.
“Quel est l’enseignement de Jésus à ce sujet? Contrairement à
certaines idées populaires, il n’a jamais prêché un moralisme
maussade et moribond. Sa solution n’est pas la négation du dé-
sir pour supprimer la souffrance. Non seulement Christ et
Bouddha ne sont pas dans le même compartiment de train, ils
ne sont pas dans le même train. Jésus n’enferme pas ses dis-
ciples dans un monastère pour fuir tout désir malpropre. Le ciel
biblique n’est pas l’absence de jouissance. C’est même le con-
traire. La voie orientale est radicalement opposée à l’Evangile
dans sa compréhension du dilemme humain comme dans les
thérapies qu’elle propose. Le problème de l’homme n’est pas le
désir et encore moins l’existence. Le Christianisme n’est pas le
trouble-fête d’une vie de pénitence triste à mourir.
Jésus inspire quelque chose de tout autre. Il a rempli ses dis-
ciples d’un autre désir, celui dont il était animé lui-même. Il ne
prône pas la suppression du désir, mais sa sublimation. Jésus
prend cette capacité presque illimitée de l’homme de convoiter
et la canalise ailleurs. Il remplace la convoitise par la passion. Il
n’enlève pas le moteur pour changer la voiture de la vie en trot-
tinette. Mais il y injecte une bonne dose de son Esprit pour la
transformer en turbo pour le royaume de Dieu. Ce n’est pas
l’excès qu’il craint, mais une vie tellement bien rangée que plus
rien ne s’y passe. Une vie où la passion de Dieu a été progressi-
vement étouffée par la fermeture de toutes les fenêtres, celles
donnant sur le monde autant que celles donnant sur le ciel. Une
vie où la passion de Dieu a été éteinte par la douche froide de
l’indifférence d’une piété mal comprise. Jésus nous veut bouil-
lants, passionnés, convoitant le meilleur pour lui. C’est vrai
qu’il corrige vertement tout relent de convoitise terrestre. Les
“fils du tonnerre” qu’étaient Jacques et Jean ne reçoivent pas
des félicitations pour leur passion d’exterminer les Samaritains.
Et l’église qui suit leur exemple et qui se mue de persécutée en
persécuteur reçoit la même réponse : “Vous ne savez pas de
quel esprit vous êtes animés”, Luc 9.55. Mais une telle passion
peut être canalisée, et dans le cas de ces deux disciples, cela a
été le cas. Les mêmes encore viendront à Jésus, animés de cette
convoitise de la gloire qui se cache derrière les ambitions hu-
maines. “Donne-nous d’être assis l’un à ta droite, l’autre à ta
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 165

gauche dans ta gloire.” Une fois de plus, Jésus leur révèle leur
ignorance. “Vous ne savez pas ce que vous demandez. Pouvez-
vous boire la coupe que je vais boire...?” Marc 10.37,38. Cette
coupe, ils la boiront. Leur convoitise égoïste de la gloire s’est
transformée en une passion sans bornes pour le Fils de l’homme
qui est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa
vie en rançon pour beaucoup. La convoitise humaine n’est pas
échangée contre la neutralité et l’innocuité du bénitier. Elle est
d’abord crucifiée pour être ensuite remplacée par le feu de
Dieu.”41

Prier
La dernière partie du Catéchisme est consacrée entièrement à la
prière. Après tout, celle-ci est l’expression courante de la foi des
croyants de tous les temps. Le propre du chrétien, c’est de dialo-
guer avec son Père céleste. La prière revêt une grande importance
dans la Parole de Dieu, et le Catéchisme le souligne à raison.
Tant dans l’Ancien Testament que dans le Nouveau Testament,
nous voyons les hommes et les femmes de Dieu prier, parfois
avec des conséquences remarquables. Car Dieu aime répondre à
la prière.
Ce n’est pas à nous de critiquer la prière de quelqu’un, surtout
pas dans un monde où cela devient rare. Il faut pourtant se poser
des questions. Toute prière n’est pas également valable. La prière
de l’idolâtre devant sa statue n’est pas la même chose que la
prière d’un Juif croyant au Créateur. La prière musulmane, fré-
quente d’ailleurs, n’est pas la même chose que la prière chré-
tienne. Les moulins de prière des Tibétains ne peuvent être con-
fondus avec la prière personnelle qu’enseigne la Bible.
L’important n’est pas de prier, mais de parler à Dieu et de lui
plaire. Il y a des prières qui portent, qui sont percutantes, et
d’autres qui ne le sont pas. Où est la différence ? Dans le cœur,
comme le dit bien §2562 : “C’est le cœur qui prie. S’il est loin de
Dieu, l’expression de la prière est vaine.” Le psalmiste dit : “Si
j’avais vu de la fraude dans mon cœur, le Seigneur ne m’aurait
41
Op. cit. p.70,71.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 166

pas écouté” Psaume 66.18. La “prière” du Pharisien en Luc


18.10-12 reste sans réponse, tout Juif qu’il était. Et Jésus, en di-
sant qu’il nous faut demander “en son nom” (Jean 15.16 etc.),
nous rappelle que Dieu nous écoute à cause de son Fils et parce
que nous sommes “en lui”. Beaucoup de prières dans notre
monde restent tristement sans effet parce qu’elles ne répondent
pas à ces deux conditions.

A côté de choses fort justes et belles sur la prière, le Catéchisme


en dit qui sont très loin de ce que dit la Parole de Dieu.
D’abord la question fondamentale de la personne qui prie. “Cette
communion de vie est toujours possible parce que, par le Bap-
tême, nous sommes devenus un même être avec le Christ”, Ro-
mains 6.5, §2565. Nous l’avons déjà vu plusieurs fois : cette
phrase est erronée à cause du sens donné au baptême. D’ailleurs,
plus loin il est question du “cœur, ainsi décidé à se convertir”
§2609. En déliant conversion et baptême, ce dernier est entière-
ment vidé de sa substance. Du coup, la prière du cœur, le dia-
logue avec Dieu, devient, dans un grand nombre de cas, impos-
sible.
Cela est reflété dans le Catéchisme par l’introduction des formes
de prière “normatives de la prière chrétienne”, §2625. Ainsi le
“Kyrie eleison !”, la Prière à Jésus, et n’importe quelle autre for-
mule toute faite qui réduisent la prière à une récitation de simples
phrases apprises par cœur (“Deux Pater et trois Avé”), cf. §2688.
Par le biais de la prière du rosaire (§2678), nous sommes alors
bien plus près des moulins de prière du Tibet que du Fils de
Dieu ! Quand bien même le Catéchisme nous dit que le Notre
Père n’est pas “une formule à répéter machinalement” (§2766), le
Pater l’est pourtant bien devenue : une formule facile et sans vie.
“L’Eucharistie contient et exprime toutes les formes de prière :
elle est (...) ‘le sacrifice de louange’”, §2643. Cependant, nulle
part dans la Bible, la Cène en tant que telle est appelée une
prière, une offrande à Dieu. Et où dans la Bible est-il dit que la
puissance de la prière de l’Eglise se manifeste surtout dans
l’eucharistie (§2827) ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 167

A qui prie-t-on ? Pour le Catéchisme, la prière s’adresse autant au


Père qui voit dans le secret (Matthieu 6.6), qu’à Marie (§2673-
2679), qu’à l’hostie renfermée dans le Tabernacle (§ 2715).

L’Eglise n’encourage guère la prière libre, spontanée. Elle consi-


dère que c’est son rôle de définir les paroles dont se serviront les
croyants. “Dans la tradition vivante de la prière, chaque Eglise
propose à ses fidèles, selon le contexte historique, social et cultu-
rel, le langage de leur prière : paroles, mélodies, gestes, icono-
graphie.” (§2663). Qu’à peine une page plus loin, et après
l’invocation du Saint-Esprit, le Catéchisme puisse enseigner
l’invocation de Marie, indique bien le sens de cette paragraphe.
Que prier une personne morte soit sévèrement condamné dans la
Bible (“Un peuple ne consultera-t-il pas son Dieu et s’adressera-t-
il aux morts en faveur des vivants ?” Esaïe 8.19, cf. Lévitique
20.6 et Deutéronome 18.11), l’Eglise n’en a cure. Cette spirituali-
té (§2684), sortant de la longue histoire de l’Eglise et reconnue
par le Magistère mérite sa place dans la vie de prière. Là, dans le
lieu secret, ce n’est plus le Père qui est prié, mais la mère. Est-ce
cela qui constitue une source authentique de la prière chrétienne,
§2689 ?

Il est bien triste que ces questions perturbent, et parfois contredi-


sent, de beaux paragraphes sur ce sujet important. La tentation
moderne est de dire que tout cela est sans importance. Mais une
spiritualité coupée de son lien vivant et intime avec la Parole de
Dieu risque fort de nous égarer à des années lumière de la foi
biblique et de nous amener au naufrage de la foi sans même nous
en rendre compte. Jésus a dit : “Veillez et priez”, Matthieu 26.41.
Ne nous contentons pas d’une vie de prière sans vigilance, car
l’ennemi rôde comme un lion rugissant, 1 Pierre 5.8. Ne nous
contentons pas non plus d’une prière sans intelligence. Ce serait
indigne devant Celui qui a créé le cerveau humain.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 168

L E TTR E O U VE R TE A ME S LE C TE U R S C A TH OLI QU E S

En guise de conclusion, permettez-moi de m’adresser à vous de


cette façon peu habituelle.
Si vous m’avez suivi jusqu’ici, je tiens à vous remercier pour
votre patience et pour votre attention. (Certains commenceront
peut-être par cette lettre. Comme je les comprends, ayant moi-
même souvent la mauvaise habitude de lire la fin avant le début !
Mais l’intention est bien de la lire en conclusion, car elle est ba-
sée sur tout ce qui précède.) J’aimerais vous expliquer en
quelques mots les deux principales raisons qui m’ont poussé à
écrire ce texte.

En ces temps d’œcuménisme, on nous dit souvent que l’Eglise


catholique a beaucoup changé et que, heureusement, la collabora-
tion est maintenant largement possible et désirée. J’ai profité de
la publication du Catéchisme pour m’en convaincre moi-même.
Après tout, c’était là un des buts du Catéchisme d’après les
propres paroles du Pape, citées au début. Les quatre grands sujets
que j’ai passés en revue résument l’essentiel des enseignements
et pratiques qui divisent Catholiques et Protestants depuis de
longs siècles. Mon analyse, Bible en main, a montré que rien n’a
vraiment changé dans la doctrine officielle de l’Eglise telle que le
Catéchisme l’enseigne. Alors, l’œcuménisme devient un marché
de dupes.

Plusieurs me diront que tout cela n’a pas beaucoup d’importance.


Que l’essentiel est ailleurs : dans l’amour, dans la foi vivante,
dans la joie d’être ensemble et de prier ensemble. Dans la mesure
où l’on se respecte mutuellement dans sa différence, ne peut-on
pas progresser ensemble ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 169

Le problème d’une telle opinion, c’est que la foi chrétienne est


fondée sur la vérité objective de la Parole de Dieu.
Les apôtres devaient souvent avertir leurs lecteurs contre les faux
docteurs. L’apôtre Jean va jusqu’à refuser la communion frater-
nelle, exprimée par une simple salutation, aux faux docteurs.
Lisez des textes comme Actes 20.29-31; 2 Corinthiens 11.13-15;
Galates 1.6-9; 4.16,17; 1 Timothée 4.1-3; 6.3-5; 2 Pierre 2.1-3;
1 Jean 4.1-6; 2 Jean 9-11 et Jude 4. L’amour est important ! Mais
il doit être fondé sur la vérité. Sans cela, il n’est pas l’amour de
Dieu. Si les doctrines que nous croyons n’ont plus aucune impor-
tance, Jésus-Christ est venu en vain, Dieu a parlé en vain, la
Bible a été écrite en vain et nous avons cru en vain. Notre amour
sera un pur sentiment humain, appréciable certes, car il vaut
mieux ça que s’entre-déchirer, mais devant Dieu terriblement
insuffisant. Dans l’Eglise de Jérusalem, avant de se réjouir de la
communion fraternelle, les chrétiens étaient unis dans
l’enseignement des apôtres, Actes 2.42. Or, l’enseignement du
Catéchisme n’est pas l’enseignement des apôtres sur les points
essentiels que nous avons étudiés. Il est, au sens propre, un ensei-
gnement hérétique.

Il me semble qu’il existe plusieurs genres de Catholiques. Il y a


l’intégriste qui croit tout et le libéral qui ne croit plus rien. Il y a
l’engagé qui pratique fidèlement et l’indifférent qui ne pratique
plus grand-chose. Il y a celui qui réfléchit et qui se pose plein de
questions et celui qui accepte religieusement la quasi totalité de
l’enseignement de l’Eglise. Mais parmi eux, rares sont ceux qui
ont, réellement et à fond, analysé leur foi pour voir si elle corres-
pond à la Bible. Pourtant, beaucoup ont commencé à le faire et
ont été troublé par les divergences. Souvent, ils ont fini par
prendre les dires du pape avec une bonne dose de scepticisme.
Même des curés m’ont dit que le Catéchisme ne correspond pas
vraiment à leur foi personnelle. Ce ne sont pas nécessairement
des gens qui attaquent l’enseignement moral de l’Eglise. Ils ne
sont pas plus d’accord avec l’avortement que le Catéchisme.
Mais ils s’impatientent de l’absence de vrais changements dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 170

l’Eglise. Certains restent curés parce qu’il faut bien gagner sa vie,
et qu’ils n’osent pas (encore ?) quitter le sacerdoce. D’autres,
laïcs, restent catholiques parce qu’“on ne quitte pas son église”.
J’ai voulu montrer à ces croyants jusqu’à quel point le ver est
dans le fruit. Ce n’est pas que le célibat est à peu près le seul
grand problème ! C’est bien plus grave. Sur plusieurs des fonde-
ments de la foi, l’Eglise enseigne le contraire de la Parole de
Dieu. Mais dans ce cas, comment est-il possible de rester fidèle à
Christ en cautionnant par sa présence les opinions défendues dans
le Catéchisme ?

Que faut-il faire ? Rejoindre une Eglise Protestante Evangé-


lique ? Peut-être que pour certains, c’est à cela qu’il faudra se
résoudre. Mais il y a peut-être une autre possibilité. Permettez-
moi de rêver un peu.

Dans mon rêve je vois des milliers de gens qui prennent cons-
cience de leur situation délicate : ils sont dans une église dont ils
découvrent peu à peu qu’elle s’est irrémédiablement éloignée de
la Parole de Dieu. Par le moyen de petits groupes d’étude bi-
blique, ils se laissent interpeller par le Saint-Esprit et décident de
ne plus rester dans une église qui manifestement ne veut pas
changer. Ils commencent à former une vraie église alternative,
bâtie sur l’amour de Dieu et de sa Parole. Ils découvrent leur
vraie unité avec des frères et sœurs d’églises évangéliques et
protestantes autour d’eux. Dans certains cas, ils se feront aider
par ces églises. Dans d’autres cas, ils trouvent des curés qui par-
tagent leurs convictions et qui ont quitté le carcan ecclésiastique
avec eux. Ils deviennent les bergers de ces petits groupes, finan-
cièrement soutenus par eux. Dans d’autres cas encore, ils se dé-
brouillent comme les églises du Nouveau Testament ont souvent
dû se débrouiller, sans quelqu’un à temps plein pour les guider.
Mais dans tous ces cas, ils sont conscients du Saint-Esprit de
Dieu pour les conduire dans la fidélité à la Parole de Dieu. Le
résultat est que partout dans nos pays catholiques, l’Evangile de
Jésus-Christ commence à prendre un nouvel essor. Ce n’est pas
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 171

une nouvelle division qui s’opère, mais le réveil d’une vraie spiri-
tualité, un retour aux sources bibliques qui prend le risque de
laisser les structures bien rodées entre les mains de ceux qui pré-
fèrent la tradition à l’obéissance.

Un rêve ?
Ou un défi ?
Jésus-Christ est encore aujourd’hui le Chef de son Eglise. Il n’a
jamais donné les rênes de commande à qui que ce soit d’autre.
C’est lui qui dirige selon sa Parole et par son Esprit. L’état actuel
de la Chrétienté ne peut le réjouir ou le laisser indifférent. Que
des milliers, voire des millions de gens soient emprisonnés dans
un système religieux qui l’a exclu de fait si pas de nom, doit être
pour lui d’une souffrance permanente. Qu’au nom de Christ on
puisse tenir quelqu’un éloigné de Christ est une fourberie spiri-
tuelle qui caractérise bien l’ancien serpent. Que cela aille de pair
avec une critique facile des sectes ne fait qu’ajouter à la ruse.
Comme si tout est secte qui n’est pas en accord avec Rome !
C’est vrai qu’il y a des sectes ! Et le froid polaire de l’Eglise a
fait beaucoup pour les rendre attrayantes aux yeux de nombreux
croyants ignorants de ces vérités évangéliques qui auraient dû les
garder contre leur séduction.
Il est temps de revenir aux sources. Il est temps qu’une vraie ré-
volution spirituelle balaye nos pauvres pays. Ensemble, avec
l’aide de Dieu, nous pouvons changer la face de notre pays.
Après tout, c’est exactement ce qui s’est passé aux premiers
siècles du Christianisme, avant que le paganisme ait complète-
ment obscurci l’Evangile. Ne laissons pas le dernier mot au ser-
pent, mais agissons pour que nos contemporains puissent décou-
vrir cet Evangile !
Agissons maintenant !
“Il nous faut travailler, tant qu’il fait jour, aux œuvres de celui
qui m’a envoyé; la nuit vient où personne ne peut travailler. Pen-
dant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde.”
(Jean 9.4,5)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 172

A P P E ND IC E S

1 . D OC UM E NTS

1. LE SERMENT DES PERES CONCILIAIRES


Les membres du Concile Vatican II ont dû signer ce document. Il
commence avec l’énoncé des articles du Symbole de Nicée et
continue en ces termes :

Je reconnais fermement et j’embrasse les traditions apostoliques


et les autres coutumes et règlements de l’Eglise. De même, je
reconnais l’Ecriture Sainte, dans le sens où notre Sainte Mère
l’Eglise l’a tenue et la tient encore. A elle appartient le jugement
sur le véritable sens et l’explication des Saintes Ecritures. Jamais
je ne l’interpréterai et ne l’expliquerai autrement que d’après
l’interprétation des Pères.
Je confesse aussi qu’il y a, au sens propre et véritable du terme,
sept sacrements de la Nouvelle Alliance qui ont été institués par
notre Seigneur Jésus-Christ et qui sont nécessaires pour le salut
du genre humain, quoiqu’ils ne soient pas tous pour chaque indi-
vidu, à savoir : le baptême, la confirmation, l’eucharistie, la péni-
tence, l’extrême-onction, l’ordination, le mariage; qu’ils commu-
niquent la grâce, et que parmi eux le baptême, la confirmation et
l’ordination ne peuvent être renouvelés sans sacrilège. J’accepte
aussi et j’approuve tous les rites approuvés par l’Eglise lors de
l’administration solennelle des dits sacrements.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 173

J’accepte entièrement tout ce qui a été déclaré et décidé au Con-


cile de Trente sur le péché originel et la justification.
Je confesse encore que dans les messes est consommé un sacri-
fice véritable et expiatoire pour les vivants et pour les morts, que
dans le très saint sacrement de l’Eucharistie le corps et le sang, en
même temps que l’âme et la divinité de notre Seigneur Jésus-
Christ, sont réellement et véritablement présents, qu’il se produit
une transformation de toute la substance du pain dans le corps et
de toute la substance du vin dans le sang. Cette transformation,
l’Eglise catholique la nomme transsubstantiation. Je confesse en
outre que le Christ tout entier et le véritable sacrement sont pré-
sents même sous une seule espèce.
Je tiens fermement qu’il existe un purgatoire, et que les âmes qui
y sont renfermées trouvent un secours dans la prière des croyants.
Je crois fermement que l’on doit vénérer et invoquer les saints
qui règnent avec le Christ, qu’ils apportent pour nous des prières
à Dieu, que l’on doit vénérer leurs reliques. J’affirme fermement
que l’on doit avoir et conserver des images du Christ, de la mère
de Dieu toujours vierge, ainsi que des saints; qu’on doit leur té-
moigner le respect et la vénération qui leur sont dus.
Je dis aussi que le Christ a donné à l’Eglise pleins pouvoirs pour
les indulgences et que leur usage apporte une grande bénédiction
au peuple chrétien.
Je recommande la sainte Eglise romaine, catholique et aposto-
lique comme la mère et l’éducatrice de toutes les Eglises; je pro-
mets et jure vraie obéissance au pape romain, successeur de
Saint-Pierre, le prince des apôtres, et vicaire de Jésus-Christ.
J’accepte aussi sans élever aucun doute et je confesse toutes les
autres choses qui ont été transmises, décidées et déclarées par les
saints Conciles œcuméniques, avant tout par le saint Concile de
Trente et par le Concile œcuménique du Vatican, particulière-
ment en ce qui concerne la primauté de l’évêque de Rome et son
magistère infaillible. Et de même je condamne, je rejette et
j’anathématise tout ce qui est en contradiction avec cela et toutes
les fausses doctrines que l’Eglise a condamnées, rejetées et ana-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 174

thématisées. Cette véritable foi catholique en dehors de laquelle


personne ne peut être sauvé, que je confesse ici librement et à
laquelle je tiens fermement, je veux la conserver constamment et
la confesser, pure et sans mélange, jusqu’au dernier souffle de ma
vie, et je veillerai, dans la mesure où cela dépend de moi à ce
qu’elle soit conservée, enseignée et prêchée par mes subordonnés
et par ceux dont je dois avoir soin en vertu de mon office. Je le
promets, j’en fais vœu et je le jure. Que Dieu et ses saints Evan-
giles me viennent en aide.

2. EVANGELISATION MONDIALE COMMUNE ?


Dans La Bonne Nouvelle (N° 2/91, adresse : CP 87, CH-2732 Recon-
vilier) sous ce même titre, il a été fait mention du Congrès Interna-
tional d’Indianapolis et du prêtre catholique Tom Forrest, chargé
par le pape du projet “Evangélisation 2000”. Nous reproduisons à
ce sujet, ci-dessous, un extrait d’un texte de David Hunt, tiré du
CIB-Bulletin 12/90, traduit en allemand dans Fest und Treu, Heft
59 1/91 et que cite La Bonne Nouvelle :
“Le prêtre Tom Forrest qui dirige l’action ‘Evangélisation 2000’,
lancée par le Vatican, utilisa toutes les expressions courantes
propres aux évangéliques lorsqu’il s’adressa à l’auditoire compo-
sé de catholiques et de protestants. Aussi se fit-il applaudir par
les protestants quand il appela les chrétiens à s’unir dans
l’évangélisation mondiale. Mais il fut aussi applaudi lorsqu’il
s’adressa dans un atelier (workshop) aux seuls participants catho-
liques présents en ces termes :
C’est notre devoir de faire les meilleurs chrétiens possible en les
introduisant dans l’Eglise catholique... Nous devons les faire
entrer dans l’Eglise par l’évangélisation. Il ne suffirait pas que
tu invites quelqu’un à devenir chrétien, il faut que tu l’invites à
devenir catholique. Pourquoi cela est-il si important ? ... Il y a
sept sacrements et l’Eglise catholique les possède tous les sept...
Nous avons le Corps de Christ, nous buvons le sang de Christ.
Jésus est offert vivant sur nos autels... En tant que catholiques
nous avons Marie, la reine du Paradis... Comme catholiques - et
cela m’est particulièrement important - nous avons le purgatoire.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 175

Dieu merci ! Je suis de ceux qui sans le purgatoire ne verraient


jamais le glorieux bonheur. C’est le seul chemin praticable...
C’est notre devoir d’utiliser cette dernière décennie pour con-
duire par l’évangélisation autant d’âmes que possible dans
l’Eglise catholique... et dans le troisième millénaire d’histoire
catholique.
(...)”

3. LA MEDAILLE MIRACULEUSE DE LA RUE DU BAC


Voici un exemple d’un texte distribué encore aujourd’hui dans la
fameuse chapelle de la rue du Bac à Paris. Celui-ci date de 1991.

PRENEZ ET PORTEZ SUR VOUS LA ‘MEDAILLE MIRACULEUSE’

La médaille miraculeuse doit son ori-


gine aux apparitions mariales de la Cha-
pelle de la rue du Bac, à Paris, en 1830.
- Le samedi 27 novembre 1830, la
Vierge Immaculée apparut à Sainte Ca-
therine Labouré, Fille de la Charité et
lui confia la mission de faire frapper une
médaille dont Elle lui révéla le modèle.
“Faites frapper une médaille sur ce
modèle, dit la Vierge, les personnes qui la porteront avec con-
fiance recevront de grandes grâces, surtout en la portant au
cou.”

- La Médaille connut immédiatement une diffusion prodigieuse.


D’innombrables grâces de conversion, de protection, et de guéri-
son furent obtenues.
Devant tous ces faits extraordinaires, l’Archevêque de Paris, Mgr
QUELEN ordonna une enquête officielle sur l’origine et les ef-
fets de la Médaille de la rue du Bac. En voici la conclusion :
“La rapidité extraordinaire avec laquelle cette médaille s’est
propagée, le nombre prodigieux de médailles qui ont été frappées
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 176

et répandues, les bienfaits étonnants et les Grâces singulières que


la confiance des fidèles a obtenus, paraissent vraiment les signes
par lesquels le Ciel a voulu confirmer la réalité des apparitions,
la vérité du récit de la voyante et la diffusion de la médaille.”

- A Rome même, en 1846, à la suite de la conversion retentissante


du Juif Alphonse Ratisbonne, le Pape Grégoire XVI confirmait
de toute son autorité les conclusions de l’évêque de Paris.
- Si donc vous aimez la Vierge et si vous avez confiance en Sa
puissante intercession :
- Portez toujours sur vous la Médaille pour vivre dans la Grâce
de Dieu et jouir de la protection de la Vierge Immaculée.

- Dites chaque jour l’invocation de la Médaille. La Vierge a vou-


lu être ainsi saluée et invoquée : “O Marie, conçue sans péché,
priez pour nous qui avons recours à vous”.

- Propagez autour de vous la Médaille; donnez-la particulière-


ment aux malades et aux affligés.
(...)

4. CONFIANCE : MARIE EST LA PORTE DU CIEL !


(Extraits d’un traité belge datant de 1950.)

La Très Sainte Vierge Marie, l’Auguste Mère de Dieu et notre


Mère, veille sur le salut de ses enfants avec une sollicitude toute
maternelle. (...) C’est pourquoi la dévotion à la Très Sainte
Vierge est, sans contredit, un des plus puissants moyens de salut,
un des signes de prédestination les plus certains.
La Sainte Eglise applique, en effet, à Marie les passages suivants
de la Sainte Ecriture :
1. J’aime ceux qui m’aiment ! (Proverbes 8.17)
2. Bienheureux celui qui m’invoque tous les jours ! (Proverbes
8.34)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 177

3. Enracine-toi dans mes élus. (Ecclésiastique 24.13)


(...)
De nombreux exemples montrent combien cette dévotion est
agréable à la divine Mère, et quelles grâces particulières elle at-
tire pendant la vie et à l’heure de la mort à ceux qui ne
l’omettent jamais !
C’est pourquoi, dès aujourd’hui, devenez, vous aussi, enfant de
Marie ou augmentez vos titres à son amour et à sa protection en
récitant, désormais, ces trois Ave Maria matin et soir.
Ajoutez-y cette salutaire invocation qui résume et rappelle tant de
choses : “Jésus, Marie, Joseph, je veux sauver mon âme pour
l’éternité !” (7 années d’indulgences.)
(...)
Le Seigneur daigna révéler à Sainte Catherine de Sienne (= 1380)
qu’il avait eu la bonté d’accorder à Marie, en considération de
son Fils unique, dont Elle est la Mère, qu’aucun pécheur qui se
recommande à Elle ne devienne la proie de l’enfer.

(Ne disons pas trop vite que tout cela est d’une dévotion au-
jourd’hui révolue, car il n’en est rien. Notez aussi dans ce dernier
paragraphe la majuscule “Elle” pour Marie et le “il” minuscule
pour le Seigneur. La Mère de Dieu est devenue la divine Mère en
l’année du dogme de l’Assomption.)

5. MARIE, L’ETOILE DE L’EVANGELISATION !


Lors du congrès mariologique de Huelva (Espagne), les autorités
religieuses ont proposé aux fidèles d’évoquer Marie sous le titre
d’étoile de l’évangélisation.
(Selon l’ECHO, cité par la Bonne Nouvelle 4/93)

6. MARIE, PATRONNE DE L’EUROPE ?


Le Catéchisme, un autre Evangile ? 178

Au lendemain des élections européennes qui nous ont rassasiés


du drapeau aux 12 étoiles, voici le témoignage du dessinateur qui
a créé le nouvel emblème :
Inspiré par Dieu, j’ai conçu un drapeau bleu sur lequel se déta-
chent les douze étoiles de la Médaille Miraculeuse de la rue du
Bac. Si bien que le drapeau de l’Europe est le drapeau de Notre-
Dame : fond bleu, douze étoiles (Apocalypse 12).
Le drapeau de l’Europe a été adopté le plus officiellement du
monde. Toutes les nations de l’Europe ont voté. Les Anglais hési-
taient. Personne ne savait d’où venait cette idée : fond bleu,
douze étoiles; finalement, tout le monde a signé.
C’est un véritable miracle que ce drapeau ait procédé d’une telle
inspiration mariale. Tous, en apercevant ce drapeau, y ajoute-
ront par la pensée et par le cœur, au beau milieu de ce fond bleu,
la Reine du Paradis, qui était déjà Reine de France et devient
Reine de l’Europe.
(Vox Vitae, 16e année, n° 170, mai 1989)

Un arrêté royal qui date du début de cette année rend obligatoire


l’utilisation du drapeau européen sur tous les bâtiments publics,
selon le calendrier des solennités officielles. Notre Ministre de
l’Intérieur, M. Louis Tobback, connaissait-il le symbolisme de
l’emblème européen ? Il est franchement permis d’en douter. En
tout cas, le plus vieux bourgeois de Bruxelles a déjà étrenné son
costume aux couleurs européennes, sans déclencher de pèleri-
nage... Mais les fidèles de la Légion de Marie sont discrètement
enchantés, même si l’identification de la femme d’Apocalypse 12
avec Marie est considérée comme irrecevable par beaucoup
d’exégètes catholiques !
(Le pasteur Paul VANDENBROECK dans le Messager Evangélique,
5620 Flavion, Belgique, août 1989.)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 179

7. MARIE, “MERE DE DIEU”


VIIIe Traité sur St Jean. Evangile commenté par St Augustin, extrait de
ses œuvres (avec Imprimatur) par le R. P. Thomas Barthet des Augustins
de Malte (Lethielleux, Paris, 1930 )

“Invité aux noces, le Seigneur s’y rendit; certainement, ce n’est


pas sans mystère que Jésus, pendant le banquet nuptial, semble y
méconnaître sa mère en lui disant : Femme, qu’y a-t-il de com-
mun entre vous et moi ? Mon heure n’est pas encore venue.
Eh quoi ! Est-il venu aux noces pour enseigner aux enfants à mé-
priser leur mère ? Non, sous cette conduite du Sauveur il y a un
grand mystère.
Cherchons ensemble pourquoi le Seigneur a ainsi répondu à sa
mère. Notre Seigneur était Dieu et homme tout ensemble; en tant
que Dieu, il n’avait pas de mère; en tant qu’homme il en avait
une. Marie était donc la mère de son corps, la mère de son huma-
nité, la mère de l’infirmité qu’il avait prise à cause de nous.
Or, le miracle qu’il allait faire, il allait le faire selon sa divinité,
et non selon son humanité, en tant qu’il était Dieu, et non en tant
qu’il était né dans la faiblesse.
Sa mère lui demanda donc un miracle; mais comme il allait faire
une œuvre divine, il semble oublier qu’il était né d’elle et lui
dire : Ce qui en moi fait des miracles, vous ne l’avez pas enfanté;
ce n’est pas vous qui avez donné l’être à ma divinité; mais
comme vous avez donné le jour à mon infirmité, je vous recon-
naîtrai lorsque mon infirmité sera attachée à la croix; voilà le sens
de ces mots : mon heure n’est pas encore venue.
Alors, en effet, il l’a reconnue, quoiqu’il ne l’eût jamais mécon-
nue; avant de naître d’elle, et au moment où il la prédestinait, il
l’avait connue comme sa mère; avant de créer, comme Dieu, celle
dont il devait être formé comme homme, il la connaissait comme
sa mère; mais à une certaine heure, il la méconnaît mystérieuse-
ment, comme encore à une certaine heure qui n’était pas encore
venue, il devait mystérieusement la reconnaître.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 180

Alors, en effet, il la reconnut, lorsque mourait ce qu’elle avait


enfanté; car ce qui mourut en ce moment, ce fut, non pas ce qui
avait formé Marie, mais ce qui avait été formé par Marie; non
pas la divinité, mais l’infirmité de la chair.
Il a donc répondu ainsi, afin de distinguer en lui, dans la foi de
ceux qui devaient croire, ce qu’il était, de celle par qui il était
venu.
Donc, comme Marie n’était pas mère de la divinité, et comme
c’était la divinité qui devait opérer le miracle demandé par Marie,
il lui dit : Femme, qu’y a-t-il de commun entre vous et moi ?
Ne croyez pas cependant que je vous renie pour ma mère : Mon
heure n’est pas encore venue. Je vous reconnaîtrai au moment où
mon infirmité, dont vous êtes la mère, sera attachée à la croix.
Voyons si cela est vrai. Quand fut venue l’heure de la passion du
Christ, voici ce qui se passa : La mère de Jésus était là, près de la
croix, et Jésus dit à sa mère : Femme, voici votre fils; et au dis-
ciple : Voici votre mère (Jean 19.25-27).
Il recommande sa mère à son disciple, car il devait mourir avant
elle et ressuscite avant sa mort; il la recommande à Jean; homme,
il recommande à un homme l’humanité d’où il est sorti. Voilà ce
que Marie avait enfanté.
Alors était venu l’heure dont il dit aux noces de Cana : Mon
heure n’est pas encore venue.”

(C’est nous qui soulignons. Texte publié par le Centre de Culture Chré-
tienne, 9, rue des Charpentiers, 68100 Mulhouse.)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 181

2 . L E S C ON TR A DI C TI ON S DU C A TE C H I S M E

1. A QUI OBEIR : A SA CONSCIENCE OU A L’EGLISE ?


§1706 : “Par sa raison, l’homme connaît la voix de Dieu qui le
presse ‘d’accomplir le bien et d’éviter le mal’. Chacun est tenu de
suivre cette loi qui résonne dans la conscience et qui s’accomplit
dans l’amour de Dieu et du prochain. L’exercice de la vie morale
atteste la dignité de la personne.”
§1777 : “Présente au cœur de la personne, la conscience morale
lui enjoint, au moment opportun, d’accomplir le bien et d’éviter
le mal. Elle juge aussi les choix concrets, approuvant ceux qui
sont bons, dénonçant ceux qui sont mauvais. Elle atteste
l’autorité de la vérité en référence au Bien suprême dont la per-
sonne humaine reçoit et accueille les commandements. Quand il
écoute la conscience morale, l’homme prudent peut entendre
Dieu qui parle.”
§2002 : “La libre initiative de Dieu réclame la libre réponse de
l’homme, car Dieu a créé l’homme à son image en lui conférant,
avec la liberté, le pouvoir de Le connaître et de L’aimer. L’âme
n’entre que librement dans la communion de l’amour. Dieu
touche immédiatement et meut directement le cœur de l’homme.
Il a placé en l’homme une aspiration à la vérité et au bien que Lui
seul peut combler. Les promesses de la ‘vie éternelle’ répondent,
au-delà de toute espérance, à cette aspiration...” (suit une citation
d’Augustin).

Selon ces trois paragraphes, l’homme est pressé d’écouter, avant


tout, sa propre conscience, dans laquelle il lui est possible
d’entendre l’écho de la voix de Dieu. Cela lui permet de faire les
justes choix, celles qui s’accordent à cette voix divine. Il est évi-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 182

dent que cette conscience a besoin d’être renseignée et éduquée.


Elle peut nous tromper parce qu’elle n’est pas un instrument suf-
fisamment raffinée. Mais même là, elle reste libre. Elle n’est ja-
mais amenée à se soumettre aux diktats d’autres hommes, mais à
déterminer pour elle-même ce que dit le Seigneur. Le Saint-Esprit
vient au secours de nos consciences faibles et faillibles, mais sans
jamais forcer cette porte d’entrée à l’intimité humaine. Comme le
dit fort bien le §2002, l’entrée dans la vie éternelle doit être libre
afin d’être vraie.

Le Catéchisme dit exactement le contraire de ceci en d’autres


endroits. Il exempte un domaine de cette liberté essentielle :
l’autorité de la Sainte Mère Eglise. Devant elle, aucune liberté ne
peut être tolérée :
§87 : “Les fidèles, se souvenant de la parole du Christ à ses
apôtres : ‘Qui vous écoute, m’écoute’ (Luc 10.16), reçoivent avec
docilité les enseignements et directives que leurs pasteurs leur
donnent sous différentes formes.”
Cela se rapporte au fait que le prêtre agit en la personne du
Christ. Christ est présent dans le service ecclésial du ministre,
§1548. Il est clair que, si Christ est déjà présent dans le simple
prêtre de paroisse, à plus forte raison le sera-t-il en la personne du
successeur de Pierre, revêtu d’infaillibilité. Il faut donc adhérer à
ses enseignements “dans l’obéissance”, y “donner l’assentiment
religieux” de son esprit, §891,892. Cette observance des constitu-
tions et décrets “portés par l’autorité légitime de l’Eglise” est un
devoir, elle requiert “la docilité dans la charité”, §2037.
Faut-il se laisser conduire par sa conscience dans ce domaine,
selon les belles phrases des paragraphes cités plus haut ?
§2039 : “... En même temps, la conscience de chacun, dans son
jugement moral sur ses actes personnels, doit éviter de s’enfermer
dans une considération individuelle. De son mieux elle doit
s’ouvrir à la considération du bien de tous, tel qu’il s’exprime
dans la loi morale, naturelle et révélée, et conséquemment dans la
loi de l’Eglise et dans l’enseignement autorisé du Magistère sur
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 183

les questions morales. Il ne convient pas d’opposer la conscience


personnelle et la raison à la morale ou au Magistère de l’Eglise.”
Cela permet de développer parmi les chrétiens un véritable esprit
filial à l’égard de l’Eglise qui, après tout, manifeste envers eux
une “sollicitude maternelle” attendrissante, §2040.

Devant Dieu, il faut maintenir la conscience individuelle. Lui ne


peut être aimé que librement. Mais l’Eglise ne peut pas se payer
le risque de la liberté : elle oblige. A-t-elle peur de la liberté indi-
viduelle, du jugement personnel inspiré par la Parole de Dieu ?

La contradiction va encore un pas plus loin. Si Dieu ne peut être


aimé que librement, si on ne peut entrer dans la vie éternelle que
librement, à quoi rime le baptême de nourrissons qui fait entrer
de force des bébés dans cette vie éternelle ? Ont-ils choisi libre-
ment ? Et s’ils doivent encore choisir, à quoi sert leur “bap-
tême” ?

L’Eglise, aime-t-elle la liberté, et l’enseigne-t-elle ? Tout dépend


à quel page du Catéchisme vous choisissez librement de lire !
Ainsi, tout le monde a raison... au prix de la vérité.

2. SUR QUEL ROC, L’EGLISE EST-ELLE BATIE ?


§424 : “Mûs (sic) par la grâce de l’Esprit Saint et attirés par le
Père nous croyons et confessons au sujet de Jésus : ‘Tu es le
Christ, le Fils du Dieu vivant’ (Matthieu 16.16). C’est sur le roc
de cette foi, confessée par S. Pierre, que le Christ a bâti son
Eglise.” (En note, la référence à Matthieu 16.18 et aux écrits de
St Léon le Grand)

§552 : “Dans le collège des Douze, Simon Pierre tient la première


place. Jésus lui a confié une mission unique. Grâce à une révéla-
tion venant du Père, Pierre avait confessé : ‘Tu es le Christ, le
Fils du Dieu vivant.’ Notre Seigneur lui avait alors déclaré : ‘Tu
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 184

es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et les Portes de


l’Hadès ne tiendront pas contre elle” (Matthieu 16.18). Le Christ,
‘Pierre vivante’ (1 Pierre 2.4), assure à son Eglise bâtie sur Pierre
la victoire sur les puissances de mort. Pierre, en raison de la foi
confessée par lui, demeurera le roc inébranlable de l’Eglise. Il
aura mission de garder cette foi de toute défaillance et d’y affer-
mir ses frères.”

Sur quel roc est bâtie l’Eglise, sur le roc de la confession de


Pierre, ou sur le roc qu’est l’apôtre ? Le Catéchisme dit les deux.
La première interprétation a été soutenue au travers de l’histoire
et s’accorde avec le reste du Nouveau Testament. La deuxième
interprétation est l’apanage de la papauté naissante afin de mieux
asseoir son pouvoir. Mais le roc en question, peut-il être à la fois
la confession de Pierre et Pierre lui-même ? Dit à la même page,
cela choquerait. A une bonne centaine de paragraphes
d’intervalle, ça passe.

3. QUI EST LA DESCENDANCE DE LA FEMME EN GENESE 3.15 ?


§411 : “La tradition chrétienne voit dans ce passage une annonce
du ‘nouvel Adam’42 qui, par son ‘obéissance jusqu’à la mort de la
Croix (Philippiens 2.8) répare en surabondance la désobéissance
d’Adam43. Par ailleurs, de nombreux Pères et docteurs de l’Eglise
reconnaissent dans la femme annoncée dans le ‘protévangile’ la
Mère du Christ, Marie, comme la ‘nouvelle Eve’. Elle a été celle
qui, la première et d’une manière unique, a bénéficié de la vic-
toire sur le péché remportée par le Christ : elle a été préservée de
toute souillure du péché originel et durant toute sa vie terrestre,
par une grâce spéciale de Dieu, elle n’a commis aucune sorte de
péché.”

42
La référence donnée est 1 Corinthiens 15.21,22 et 45.
43
Romains 5.19-20. Pour les dernières affirmations, les références sont à Pie IX
et le Concile de Trente)
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 185

Que l’absence du péché chez Marie ne repose sur aucun texte de


l’Ecriture, et sur aucune révélation divine, mais uniquement sur
les fantaisies de certains “théologiens” catholiques est grave,
mais ce n’est pas en soi en contradiction avec l’enseignement du
Catéchisme. Que Marie soit présentée comme la nouvelle Eve est
tout aussi grave, et nous en avons déjà parlé en détail. Mais la
postérité de la femme, peut-elle être en même temps le Christ et
Marie ?
Notez que “la tradition chrétienne” n’est pas ici cette Tradition
dont se réclame le Catéchisme ailleurs (§78), mais le commen-
taire de Paul dans le Nouveau Testament. Cette “tradition” fait
donc partie de la Parole de Dieu. Tandis que les “Pères et doc-
teurs de l’Eglise” sont bien la Tradition non-biblique.

Le texte de la Genèse se lit ainsi : “Je mettrai une hostilité entre


toi (= le serpent, le diable) et la femme, entre ton lignage et le
sien. Il t’écrasera la tête et tu l’atteindras au talon.” (Bible de
Jérusalem) Le lignage promis, c’est le Messie, le Fils de
l’homme, le nouvel Adam. Mais il ne peut être en même temps la
nouvelle Eve. D’abord, parce que la Bible ne connaît rien à une
éventuelle nouvelle Eve, ensuite, parce que ce serait admettre que
Marie aurait également écrasé la tête du serpent. (J’en ai vu une
sculpture dans une cathédrale !) Cela équivaut pratiquement à un
blasphème. A quel moment l’aurait-elle fait ? Christ, aurait-il eu
besoin de Marie pour le faire ? Où est enseignée la victoire de
Marie sur Satan ? Les Evangiles présentent Jésus, et Jésus seul,
comme le Vainqueur de l’ennemi. Présenter le texte de Genèse
3.15 comme le fait le Catéchisme, c’est introduire une énorme
contradiction dans l’Ecriture. C’est remplacer “la vérité de Dieu
par le mensonge”, Romains 1.25. C’est vouloir absolument ac-
corder à une créature l’honneur due au Créateur.

4. LE PAIN, DEVIENT-IL LE SANG DE CHRIST ?


§1376 : “... par la consécration du pain et du vin s’opère le chan-
gement de toute la substance du pain en la substance du Corps de
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 186

Christ notre Seigneur et de toute la substance du vin en la subs-


tance de son Sang; ce changement, l’Eglise catholique l’a juste-
ment et exactement appelé transsubstantiation.”
§1377 : “La présence eucharistique du Christ commence au mo-
ment de la consécration et dure aussi longtemps que les espèces
eucharistiques subsistent. Le Christ est tout entier présent dans
chacune des espèces et tout entier dans chacune de leurs parties,
de sorte que la fraction du pain ne divise pas le Christ.”

§1390 : “Grâce à la présence sacramentelle du Christ sous cha-


cune des espèces, la communion à la seule espèce du pain permet
de recevoir tout le fruit de grâce de l’Eucharistie. ...”

La contradiction que nous voyons ici touche à la présence de


Christ dans les espèces eucharistiques. En ce sens, elle ne nous
concerne que très peu puisque la Bible ne l’enseigne de toute
façon pas. Cependant, il est utile de relever le manque de logique
du Catéchisme sur ce sujet. Cela montre que, plus on s’éloigne de
l’Ecriture, plus on se fourvoie dans des raisonnements étonnants.

Toute la substance du pain deviendrait corps de Christ, toute la


substance du vin deviendrait sang de Christ. Pourtant, dès le pa-
ragraphe suivant, le pain devient corps et sang de Christ. La con-
tradiction est évidente. Quelles en sont les implications ? Si
Christ est entièrement reçu dans l’hostie, pourquoi, le prêtre boit-
il de la coupe ? Reçoit-il ainsi plus de Christ ? Reçoit-il deux
christs ? Ou est-ce que l’église retire la coupe de façon arbitraire
au bon peuple en lui disant des sornettes ? Des sornettes qui, à
l’époque, étaient miraculeusement confirmées par des hosties
saignantes. Après tout, Dieu est toujours d’accord avec la Vati-
can...

Faut-il donc communier sous les deux espèces dans


l’eucharistie ? Comme nous l’avons dit, c’est toute l’eucharistie
qui doit être réformée selon les indications claires des Ecritures.
Cette question-ci n’en est qu’un tout petit détail...
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 187

5. A QUEL MOMENT SE SITUE LA CONVERSION OU LA


NOUVELLE NAISSANCE ?

§1423 : “Il (= le sacrement de la pénitence) est appelé sacrement


de conversion puisqu’il réalise sacramentellement l’appel de
Jésus à la conversion, la démarche de revenir au Père dont on
s’est éloigné par le péché...

§1426 : “La conversion au Christ, la nouvelle naissance du Bap-


tême, le don de l’Esprit Saint... nous ont rendus ‘saints et imma-
culés devant lui’... Ce combat (du chrétien contre le péché) est
celui de la conversion en vue de la sainteté et de la vie éternelle à
laquelle le Seigneur ne cesse de nous appeler.”
§1427 : “Jésus appelle à la conversion (citation de Marc 1.15)...
cet appel s’adresse d’abord à ceux qui ne connaissent pas encore
le Christ et son Evangile. Aussi, le Baptême est-il le lieu princi-
pal de la conversion première et fondamentale. C’est par la foi en
la Bonne Nouvelle et par le Baptême* que l’on renonce au mal et
qu’on s’acquiert le salut, c’est à dire la rémission de tous les pé-
chés et le don de la vie nouvelle.” (* Actes 2.38)
§1428 : “Or l’appel du Christ à la conversion continue à retentir
dans la vie des chrétiens. Cette seconde conversion est une tâche
ininterrompue pour toute l’Eglise qui ‘enferme des pécheurs dans
son propre sein’ et qui est donc à la fois sainte et appelée à se
purifier...
Le §1429 cite à l’appui la conversion de l’apôtre Pierre après son
triple reniement. Cela constitue sa seconde conversion.

§1433 : “Depuis Pâques, c’est l’Esprit Saint qui ‘confond le


monde en matière de péché’ (Jean 16.8-9), à savoir que le monde
n’a pas cru en Celui que le Père a envoyé. Mais ce même Esprit,
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 188

qui dévoile le péché, est le Consolateur qui donne au cœur de


l’homme la grâce du repentir et de la conversion.44”
Cette tâche de l’Eglise se concentre en son pouvoir d’absolution,
en vertu de la succession apostolique. Elle est chargée “du ‘mi-
nistère de la réconciliation’ (2 Corinthiens 5.18)”, §1442.

§1213 : “... Par le Baptême nous sommes libérés du péché et ré-


générés comme fils de Dieu... ‘Le Baptême est le sacrement de la
régénération par l’eau et dans la parole.’”
§1250 : “Naissant avec une nature humaine déchue et entachée
par le péché originel, les enfants eux aussi ont besoin de la nou-
velle naissance dans le Baptême...
§1265 : “Le Baptême ne purifie pas seulement de tous les péchés,
il fait aussi du néophyte ‘une création nouvelle’ (2 Corinthiens
5.17), un fils adoptif de Dieu qui est devenu ‘participant de la
nature divine’ (2 Pierre 1.4), membre du Christ et cohéritier avec
Lui (Romains 8.17), temple de l’Esprit Saint.”

Pour le Catéchisme, on est né de nouveau par le Baptême. Ce-


pendant, l’être humain régénéré, qui a donc reçu la vie nouvelle,
n’a pas pour autant reçu la vie éternelle. Il est converti, mais il
doit encore se convertir. Il est devenu une création nouvelle, mais
le ministère de la réconciliation qui y conduit fait partie du sa-
crement de la pénitence. La conversion par laquelle on entre dans
le royaume de Dieu, par la repentance et la foi, Marc 1.15, ac-
quise au Baptême, n’est pas la conversion du cœur, la pénitence
intérieure dont parle le §1430. Est-on chrétien après le Baptême ?
Oui et non. Est-on né de nouveau ? Oui et non. Est-on converti ?
Oui et non. Est-il devenu cohéritier avec Christ ? Oui et non (voir
§1460). Actes 2.36-38 s’adresse à la fois aux enfants qui vont
être baptisés et aux baptisés qui doivent faire pénitence.
Est-ce que cette contradiction est voulue ? Nous le pensons. Nous
l’avons dit précédemment, l’église a un problème énorme : d’un

44
La référence donnée est Actes 2.36-38.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 189

côté, elle assure que tous les baptisés sont nés de nouveau et, de
l’autre côté, elle voit bien qu’ils ne le sont pas. Plutôt que chan-
ger des doctrines qui ne sont pas bibliques, elle introduit et main-
tient une contradiction flagrante.

6. VERS LA MAISON DU PERE OU VERS LE PURGATOIRE ?


§1523 : “... Cette dernière onction munit la fin de notre vie ter-
restre comme d’un solide rempart en vue des dernières luttes
avant l’entrée dans la Maison du Père.”
§1524 : “... Sacrement du Christ mort et ressuscité, l’Eucharistie
est ici sacrement du passage de la mort à la vie, de ce monde vers
le Père*.” (* Jean 13.1)
§1689 : “... C’est alors (dans l’eucharistie lors du service des
funérailles) que l’Eglise exprime sa communion efficace avec le
défunt : offrant au Père, dans l’Esprit Saint, le sacrifice de la mort
et de la résurrection du Christ, elle lui demande que son enfant
soit purifié de ses péchés et de ses conséquences et qu’il soit
admis à la plénitude Pascale de la table du Royaume. C’est par
l’Eucharistie ainsi célébrée que la communauté des fidèles, spé-
cialement la famille du défunt, apprend à vivre en communion
avec celui qui ‘s’est endormi dans le Seigneur’, en communiant
au Corps du Christ dont il est membre vivant et en priant ensuite
pour lui et avec lui.”
§2677 : “(sur la présence de Marie à la mort du croyant) ...
Qu’elle y soit présente comme à la mort en Croix de son Fils et
qu’à l’heure de notre passage elle nous accueille comme notre
mère pour nous conduire à son Fils, Jésus, en Paradis.”

§1472 : “... D’autre part, tout péché, même véniel, entraîne un


attachement malsain aux créatures, qui a besoin de purification,
soit ici-bas, soit après la mort, dans l’état qu’on appelle Purga-
toire. Cette purification libère de ce qu’on appelle la ‘peine tem-
porelle’ du péché... Une conversion qui procède d’une fervente
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 190

charité peut arriver à la totale purification du pécheur, de sorte


qu’aucune peine ne subsisterait.” (C’est nous qui soulignons)
§1479 : “Puisque les fidèles défunts en voie de purification sont
aussi membres de la même communion des saints, nous pouvons
les aider entre autres en obtenant pour eux des indulgences, de
sorte qu’ils soient acquittés des peines temporelles dues pour
leurs péchés.”

Où va-t-on après la mort, selon le Catéchisme ? Ce n’est pas clair.


D’un côté, l’entrée dans la Maison du Père est promise aux
croyants dûment munis du “viatique”. Ils s’endorment “dans le
Seigneur” et sont conduits par la mère au Fils et ensuite (avant ?)
au Père. De l’autre côté, les “fidèles défunts” (lesquels ? Tous ?)
ne sont pas dans la Maison du Père. Apparemment, la mère a fait
un détour pour échouer dans le Purgatoire. Peut-on faire
l’économie de ce passage douloureux ? Techniquement, oui. Une
forme de conversion (mais le terrain est miné, nous l’avons vu au
point précédent) peut nous purifier totalement au point où aucune
peine ne subsisterait. Le conditionnel indique bien le doute mas-
sif du Catéchisme à ce sujet. Cela veut dire : “N’y pensez pas, le
Paradis n’est pas pour tout de suite.” Ainsi, en créant la contra-
diction, le Catéchisme est pris en flagrant délit de mensonge. Il
donne l’impression de promettre une chose qu’il sait bien être
toute autre.

Il faut y ajouter une autre contradiction. Dans le §1689, il est dit


que l’Eglise offre le sacrifice du Fils au Père (en soi, une impos-
sibilité totale) pour que le Père accepte son enfant dans sa mai-
son. Mais quel genre de Père est-il pour avoir besoin que l’Eglise
lui demande d’accueillir son propre enfant chez lui ? Est-ce là
l’image que Jésus nous donne dans la parabole du Fils Prodigue ?
S’il faut lui demander de recevoir quelqu’un, c’est que ce quel-
qu’un ne fait pas encore partie de sa famille. Dans ce cas, le de-
mander est inutile et peine perdue. Et s’il faut encore lui offrir le
sacrifice de la mort et de la résurrection de son Fils, c’est que
donc le sacrifice de Jésus sur la croix n’était pas suffisant. La
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 191

pensée est blasphématoire ! Et qu’est-ce donc le sacrifice de la


résurrection du Christ ? C’est déjà une contradiction dans les
termes !

7. QUI EXPIE NOS PECHES ?


§1459 : “... Il (= le pécheur qui vient de confesser ses péchés)
doit donc faire quelque chose de plus pour réparer ses péchés : il
doit ‘satisfaire’ de manière appropriée ou ‘expier’ ses péchés.
Cette satisfaction s’appelle aussi ‘pénitence’.”
§1460 : “... De telles pénitences aident à nous configurer au
Christ qui, seul, a expié pour nos péchés une fois pour toutes.
Elles nous permettent de devenir les cohéritiers du Christ ressus-
cité, ‘puisque nous souffrons avec Lui’ (Romains 8.17)...”

Si Christ a expié pour nos péchés, est-il encore possible pour le


pécheur de les expier ? La satisfaction de Christ n’est donc pas
suffisante ? L’œuvre du Christ est donc imparfaite ? Remarquez
que le verbe ‘expier’ est un des verbes théologiquement les plus
chargés de la Bible. Même entre guillemets, il ne convient nulle-
ment. L’utiliser ainsi ne fait que semer la confusion auprès des
lecteurs. L’expiation une fois pour toutes, que la Bible enseigne
clairement, est contredite, diminuée, banalisée par l’expiation que
nous serions sensés faire nous-mêmes.

Et si nous sommes devenus cohéritiers du Christ lors du baptême,


§1265, comment est-il possible que nos pénitences nous permet-
tent de le devenir ? La souffrance mentionnée en ce verset (Ro-
mains 8.17) serait donc la souffrance de la pénitence ? Serait-il
possible que les auteurs du Catéchisme comptent sur le fait que
personne n’ira vérifier dans la Bible ?
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 192

8. LA JUSTIFICATION : PAR LE BAPTEME, PAR LA CONVERSION,


PLUS TARD, OU ...JAMAIS ?

§1987 : “La grâce du Saint-Esprit a le pouvoir de nous justifier,


c’est à dire de nous laver de nos péchés et de nous communiquer
‘la justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ’ (Romains 3.22) et
par le Baptême ...”
§1989 : “La première œuvre de la grâce de l’Esprit Saint est la
conversion qui opère la justification selon l’annonce de Jésus au
commencement de l’Evangile : ‘Convertissez-vous, car le
Royaume des cieux est tout proche’ (Matthieu 4.17). Sous la
motion de la grâce, l’homme se tourne vers Dieu et se détourne
du péché, accueillant ainsi le pardon et la justice d’en haut. ‘La
justification comporte donc la rémission des péchés, la sanctifica-
tion et la rénovation de l’homme intérieur.’”
§1992 : “La justification nous a été méritée par la passion du
Christ qui s’est offert sur la Croix en hostie vivante, sainte et
agréable à Dieu et dont le sang est devenu instrument de propitia-
tion pour les péchés de tous les hommes. La justification est ac-
cordée par le Baptême, sacrement de la foi. Elle nous conforme à
la justice de Dieu qui nous rend intérieurement justes par la puis-
sance de sa miséricorde. Elle a pour but la gloire de Dieu et du
Christ, et le don de la vie éternelle... (suit la citation de Romains
3.21-26).”
§1993 : “La justification établit la collaboration entre la grâce de
Dieu et la liberté de l’homme. Elle s’exprime du côté de l’homme
dans l’assentiment de la foi à la Parole de Dieu qui l’invite à la
conversion, et dans la coopération de la charité à l’impulsion de
l’Esprit Saint qui le prévient et le garde : Quand Dieu touche le
cœur de l’homme par l’illumination de l’Esprit Saint, l’homme
n’est pas sans rien faire en recevant cette inspiration, qu’il peut
d’ailleurs rejeter; et cependant il ne peut pas non plus, sans la
grâce de Dieu, se porter par sa volonté libre vers la justice devant
Lui.”
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 193

§161 : “Croire en Jésus-Christ et en Celui qui L’a envoyé pour


notre salut est nécessaire pour obtenir le salut.45 ‘Parce que ‘sans
la foi (...) il est impossible de plaire à Dieu’ (Hébreux 11.6) et
d’arriver à partager la condition de ses fils, personne jamais ne se
trouve justifié sans elle et personne à moins qu’il n’ait ‘persévéré
en elle jusqu’à la fin’ (Matthieu 10.22; 24.13), n’obtiendra la vie
éternelle.’”

Le Catéchisme dit des choses fort belles sur la justification par la


foi. Tous les héritiers de Luther et de Calvin seront d’accord avec
le gros du §161. Mais nous avons déjà remarqué que la compré-
hension de cette justification n’est pas tout à fait celle du Nou-
veau Testament. L’acquittement devient dans le Catéchisme
communication de la justice. A quel moment, cette justification
est-elle accordée ? En fait, il n’y a pas un, mais trois moments
selon le Catéchisme. Du coup, il n’y a donc aucun moment cer-
tain.
Le baptême est le premier moment de la justification. En étant
baptisé dans l’Eglise, le nourrisson est justifié, selon la manière
que le comprend le Catéchisme. Si cela s’arrêtait là, tout serait
simple et sans contradiction. Mais rien n’est simple.
La grâce qui justifie s’exprime dans la conversion. Or la vraie
conversion, celle du cœur, s’opère dans le sacrement de la con-
version ou de pénitence, §1430. Cela est d’autant plus évident
que le §1993 affirme que l’homme peut rejeter l’action du Saint-
Esprit dans son cœur. Parce que son libre assentiment de la foi est
en cause, cela ne peut pas s’appliquer au baptême des nourrissons
qui, eux, n’acceptent ni ne rejettent quoi que ce soit. La consé-
quence est donc qu’un nourrisson baptisé n’est pas réellement
justifié. Le §1993 l’exclut. Mais à quel moment est-on alors justi-
fié ? Logiquement, quand on n’a plus besoin du sacrement de la
pénitence. Et donc ...jamais !
La question est liée à la précédente. Si nous sommes entièrement
conformes à la justice de Dieu, rendus intérieurement justes (=

45
Les références données sont : Marc 16.16; Jean 3.36; 6.40 e.a.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 194

§1992), est-il possible que Dieu nous refuse l’entrée dans sa Mai-
son ? Mais il nous refuse cette entrée selon le Catéchisme. Il nous
fait “antichambrer” dans le Purgatoire pour parfaire notre purifi-
cation. C’est que nous ne sommes pas si justes que cela. La justi-
fication a pour but la vie éternelle, mais quel parcours du combat-
tant pour y parvenir si déjà on y parvient !

Ainsi, le Catéchisme parle avec un double langage. Tout dépend


à quelle page vous lisez. Son oui n’est pas oui et son non n’est
pas non. Même en croyant strictement ce qu’il affirme, vous ne
savez pas où vous en êtes. Et l’image de Dieu qu’il véhicule ainsi
est à faire froid dans le dos.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 195

3 . U N E E G LI S E U N I E ?

Liste des églises catholiques dissidentes en France, parue en INFO-FEF,


N° 64, 2e trim. 1995.
(Reproduite avec l’autorisation de l’auteur)

On entend parler des nombreuses “sectes protestantes”, voire des


“sectes évangéliques”, mais le public français ignore tout des
innombrables “sectes catholiques”, séparées de Rome, et qui
rassemblent des dizaines de milliers de fidèles. Nous essaierons
de les présenter sommairement :

1. La Communauté catholique orthodoxe héracléenne ras-


semble ses fidèles à Lyon et dans sa région, sous la houlette
de l’évêque Gosselin.
2. La Communauté ecclésiale catholique est surtout active
dans le Var et dans les Alpes Maritimes.
3. La Communauté ecclésiale œcuménique veut regrouper
des catholiques dissidents dans la région d’Antibes, sous la ju-
ridiction de l’évêque Schaffner.
4. La Communauté catholique évangélique ne compte que
quelques fidèles qui suivent les enseignements de P. Ballard.
5. La Communion chrétienne universelle, malgré son nom,
n’est que peu active, derrière son unique prêtre, A.M.Bonnet.
6. L’Eglise ancienne-catholique suit H.P. Nicholson pour un
retour au catholicisme d’avant le Concile du Vatican II.
7. L’Eglise ancienne-catholique romaine du Christ et des
apôtres se regroupe autour de R. Martin, dans la région
d’Arcachon.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 196

8. L’Eglise apostolique arienne prétend remonter au catho-


licisme d’avant le Concile de Nicée et refuse la divinité du
Christ. Son principal animateur est J. Hess.
9. L’Eglise apostolique néo-gallicane possède une dizaine
de communautés. Elle est surtout active dans la région de
Bordeaux où elle vient d’acquérir une belle chapelle.
10. L’Eglise apostolique orthodoxe se rassemble à Marseille
autour de son évêque J.E. Deberque.
11. L’Eglise apostolique rosicrucienne veut introduire dans
le catholicisme l’enseignement de la Rose-Croix.
12. L’Eglise autocéphale syro-chaldéenne vient de
s’implanter à Lannion pour commencer un travail mission-
naire en Bretagne.
13. L’Eglise catholique ancienne est surtout connue à Tou-
louse et à Paris. Beaucoup de fidèles passent par sa chapelle
du 16, rue Duperré.
14. L’Eglise catholique ancienne gallicane pense que Jean
Fabre est capable de redonner au catholicisme sa forme tradi-
tionnelle d’avant le dernier Concile.
15. L’Eglise catholique apostolique vient de quitter la région
de Tours pour s’implanter à Agen.
16. L’Eglise catholique apostolique ancienne est active dans
la région de Gien, sous la direction de G.C.E. Hegger.
17. L’Eglise catholique apostolique johannite enseigne, à la
suite de Marcel Madoe, que l’évangile de Jean est le seul
évangile authentique.
18. L’Eglise catholique apostolique latine n’accepte pas les
innovations du dernier Concile et se réunit, avec son prêtre
Augusti, dans une chapelle de la rue Marcadet à Paris.
19. L’Eglise catholique apostolique libre veut nettement se
démarquer du système romain, avec L. Boynton.
20. L’Eglise catholique apostolique occidentale, sous
l’impulsion de son évêque J.H. Gautier, était assez active dans
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 197

les années 1980, elle semble en veilleuse et va changer de


nom.
21. L’Eglise catholique apostolique orthodoxe française
regroupe plusieurs paroisses à Sevran, à Angers et ailleurs.
22. L’Eglise catholique apostolique primitive refuse tous
les rites et le faste catholiques. Elle veut se réunir surtout dans
des familles.
23. L’Eglise catholique apostolique traditionnelle, elle, par
contre, veut un retour au faste et aux grandes cérémonies
d’autrefois, avec à sa tête l’évêque Y.O. Contamin.
24. L’Eglise catholique apostolique universelle vient
d’hériter la belle chapelle irvingienne, 27, rue François Bon-
vin, à Paris, mais elle possède d’autres chapelles dans la ré-
gion parisienne.
25. L’Eglise catholique autocéphale est active à Roscanval,
dans le Finistère, animée par G. Lamouche.
26. L’Eglise catholique celtique mélange le catholicisme aux
pratiques celtes. Elle est implantée en Bretagne et dans la ré-
gion de Bordeaux.
27. La Communauté catholique chrétienne de la Parole de
Dieu est surtout connue en Grande Bretagne, mais elle a
quelques membres en France.
28. La Communauté catholique chrétienne indépendante a
vu le jour à la suite de l’excommunication d’un évêque indo-
chinois, J.H.C. Dinh, qui a consacré de nombreux prêtres,
ayant chacun des fidèles.
29. La Communauté catholique de la divine présence in-
siste beaucoup, avec J.J. Rankin, sur l’importance des sacre-
ments.
30. L’Eglise catholique de Notre-Dame de la Miséricorde
et en train de constituer des communautés dans l’Eure, surtout
dans la région de Verneuil-sur-Avre.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 198

31. L’Eglise catholique de Saint-Jean rassemble de nom-


breux catholiques mécontents de la hiérarchie. Son siège est
dans l’Orne, à Exmes, où réside son évêque J.J. Stahl.
32. L’Eglise catholique de Saint-Joseph est présente dans le
Tarn-et-Garonne. Son siège se situe à Castelsarrasin.
33. L’Eglise catholique des Mariavites est une des nom-
breuses branches d’une église polonaise. Sous la juridiction
d’A. Prévost, elle se réunit à Saint-Brice-sous-Forêt.
34. L’Eglise catholique des serviteurs du Christ est connue
surtout dans les pays anglo-saxons, mais elle travaille timide-
ment en France.
35. L’Eglise catholique du Christ commence un travail en
France, où elle ne compte encore que quelques disciples à la
suite de Joseph Nevilloyd.
36. L’Eglise catholique du Sacrifice a vu le jour grâce à J.B.
Banks. Elle n’a encore que quelques membres ches nous.
37. L’Eglise catholique du sanctuaire veut travailler dans la
même optique que la précédente. F. James essaie de recruter
quelques disciples.
38. L’Eglise catholique du sanctuaire de la glose est très
mystique. Malgré le zèle de B. Franklin, elle ne semble pas
percer dans notre pays.
39. L’Eglise catholique épiscopale insiste beaucoup sur la
hiérarchie dans l’église. Son fondateur, R. Ramm, lutte contre
le laxisme de la doctrine traditionnelle.
40. L’Eglise catholique et apostolique d’Antioche reven-
dique la succession apostolique depuis l’apôtre Pierre. Dirigée
par J.B. de Cazenave, elle a son siège à Guichainville, dans
l’Eure.
41. L’Eglise catholique et apostolique de France, relancée
par les abbés Fatome et Perrier, utilise la chapelle, 1, rue de la
Hunaudais, à Nantes.
42. L’Eglise catholique eucharistique se regroupe autour de
C.A Hyde pour revaloriser la vie sacramentelle des fidèles.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 199

43. L’Eglise catholique évangélique voudrait, à la suite de


L.C. Winnaert, et ceci depuis plus de cinquante ans, éliminer
du catholicisme plusieurs dogmes récents.
44. L’Eglise catholique française suit l’enseignement des
abbés Julio et Châtel. Elle préconise un catholicisme détaché
de Rome.
45. L’Eglise catholique gallicane autocéphale avait connu
un certain essor du temps d’Irénée d’Eschevannes, elle est
moribonde aujourd’hui.
46. L’Eglise catholique gallicane Notre-Dame du Temple
est active dans la région de Brive sous l’impulsion de M. Car-
penet.
47. L’Eglise catholique gallicane traditionnelle, dirigée par
l’évêque Gras, rassemble ses principales troupes dans les
Alpes-Maritimes et le Var.
48. L’Eglise catholique gnostique se veut fidèle au gnosti-
cisme des premiers siècles, grâce à son évêque André Maurer.
49. L’Eglise catholique indépendante compte quelques
membres disséminés sur tout le territoire français que les ab-
bés Viguier et Enos essaient de regrouper dans leur chapelle
de Boulogne-Billancourt.
50. L’Eglise catholique indépendante gallicane. Créée en
1961, elle est active en Dordogne sous la direction de C.J.
Damge.
51. L’Eglise catholique intégriste est très connue à cause des
démêlés de Mgr M. Lefèbvre avec le Vatican. Elle a son siège
international en Suisse, à Ecône.
52. L’Eglise catholique latine est bien connue en Haute-
Garonne et dans le Tarn-et-Garonne. Son évêque, Jean Labo-
rie, demeure à Portet-sur-Garonne.
53. L’Eglise catholique libérale est solidement implantée en
Alsace, en Guadeloupe, en Normandie, dans le Nord et à Pa-
ris, 14 rue Tesson. Elle publie "Le lien de Fidélité".
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 200

54. L’Eglise catholique libérale internationale est un


schisme de la précédente, à la suite de J.L. Jenkins.
55. L’Eglise catholique libérale internationale indépen-
dante suit l’enseignement de J.P. Roberts et refuse les infiltra-
tions ésotériques de l’Eglise Catholique libérale.
56. L’Eglise catholique œcuménique Shalom s’ouvre aux
autres confessions, et même au Judaïsme, grâce à J.K. Larson.
57. L’Eglise catholique orthodoxe considère que la division
entre l’Orient et l’Occident doit être dépassée, selon les exhor-
tations de J.L. Peace.
58. L’Eglise catholique orthodoxe apostolique française
prône un catholicisme ouvert et accueillant. Son évêque de la
Thibauderie recherche des contacts avec plusieurs petites
églises catholiques.
59. L’Eglise catholique orthodoxe celtique regroupe les
membres français des catholiques celtiques rattachés au siège
de Glastonbury. Ils habitent essentiellement en Bretagne.
60. L’Eglise catholique orthodoxe de Bretagne regroupe
une autre partie des catholiques celtiques de la région de Lan-
nion. Leur responsable, J.M. Desevedamy habite à Ploermel.
61. L’Eglise catholique orthodoxe de France possède plu-
sieurs chapelles en France, la plus connue se situe au 96, bou-
levard Blanqui à Paris.
62. L’Eglise catholique orthodoxe indépendante ne ras-
semble que quelques fidèles, autour de M. Miller.
63. L’Eglise catholique orthodoxe libre de l’abbé Dalos-
Zimmermann n’a pu recruter que quelques membres.
64. L’Eglise catholique primitive est hostile à toute organi-
sation. Son évêque, Marcel Laemmer, préfère les réunions
plus intimes dans les familles.
65. L’Eglise catholique réformée, malgré le zèle de L.O.
Laughin, n’a pas rencontré en France autant d’enthousiasme
que dans les pays anglo-saxons.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 201

66. L’Eglise catholique rénovée du célèbre pape Clément


XV ne rassemble plus que quelques fidèles au Petit Vatican de
Clémery, près de Nancy.
67. L’Eglise catholique traditionnelle est présentée dans le
livre "Le prix d’une liberté" de Jean Saint-Clair. Sous
l’impulsion de son évêque Maurice Cantor, elle rassemble de
nombreux fidèles à la Chapelle Sainte-Marie, au 35, rue de la
Vatine à Mont-Saint-Agnan.
68. L’Eglise catholique traditionnelle œcuménique, de fon-
dation récente, regroupe ses membres au château de Nanthiat,
en Dordogne.
69. L’Eglise catholique tridentine suit l’abbé J.M. Breault
pour un catholicisme plus fidèle au Concile de Trente.
70. L’Eglise catholique universelle est un schisme normand
de l’Eglise catholique libérale. L’abbé Maurice Chardine re-
groupe ses fidèles au 9, rue Saint-Amand, à Rouen.
71. L’Eglise chrétienne catholique se veut ouverte aux
autres croyants et pense que J.A.M. Dennis présente le vrai vi-
sage du catholicisme d’aujourd’hui.
72. L’Eglise de la Nouvelle Alliance est une des nombreuses
branches de l’Eglise qui se veut gallicane. C’est Roger Caro
qui lui donne son orientation actuelle.
73. L’Eglise de l’Unité catholique et apostolique est une
forte communauté, animée par Michel Staffiero, dans la ban-
lieue est de Paris, surtout à Pantin.
74. L’Eglise des Pèlerins de la croix glorieuse de Dozulé
croit qu’une habitante de ce village du Calvados, Madeleine
Aumont, a été gratifiée d’apparitions de la croix, du Christ et
de l’ange Michel depuis le 28 mars 1972. Elle organise des
pélerinages annuels à Dozulé.
75. L’Eglise gnostique albigeoise suit L.F. Jean Maine dans
ses recherches des doctrines cathares du Moyen-Age.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 202

76. L’Eglise gnostique apostolique vient d’ouvrir sa chapelle


dans le dix-huitième arrondissement de Paris, au 96, rue Da-
mrémont.
77. L’Eglise gnostique néo-pythagoricienne, quant à elle,
suit l’enseignement du frère du fondateur de l’église gnostique
albigeoise, H.F. Jean Maine. Ces deux églises sont très
proches dans leurs doctrines et leurs rites.
78. L’Eglise gnostique universelle était très florissante dans
les années 1940-1950, avec J. Bricaud. Elle semble moribonde
aujourd’hui.
79. L’Eglise libre catholique pense que l’abbé E.M.J. Baker
fait une approche exacte de la doctrine catholique, en
l’actualisant pour l’homme moderne.
80. L’Eglise nouvelle libre catholique ne semble pas appré-
cier l’évolution de la précédente église et préfère suivre l’abbé
P.C.S. Singer.
81. L’Eglise orthodoxe chrétienne ne compte que quelques
membres en France, malgré le zèle de G. Basciu.
82. L’Eglise orthodoxe celtique de G.R. Le Mentec travaile
timidement en Bretagne où elle recrute difficilement quelques
adeptes.
83. L’Eglise orthodoxe épiscopale de Dieu vient des Etats-
Unis et son fondateur, R. Broshears, espère gagner une partie
de l’Europe à son église.
84. L’Eglise orthodoxe latine suit les ordres de K. Gensik en
vue d’installer une Orthodoxie orientale en Europe occiden-
tale.
85. L’Eglise orthodoxe libre vient de constituer un noyau de
fidèles à Paris autour de Valentin Morales.
86. L’Eglise orthodoxe rénovée lutte depuis 1987 pour
l’égalité des sexes dans la prêtrise et l’épiscopat.Elle a déjà
des prêtresses dans sa chapelle de Paris.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 203

87. L’Eglise orthodoxe vieille calendariste milite pour un


calendrier liturgique plus fidèle. Son prêtre officie dans sa
chapelle au 85, avenue Michelet à Saint-Ouen, près de Paris.
88. L’Eglise vieille catholique de l’Union d’Utrecht est une
Eglise établie dans de nombreux pays. Elle remonte au pre-
mier Concile du Vatican (1870), elle comprend plusieurs pa-
roisses bien organisées, comme celle de Paris, 15, rue de
Douai.
89. L’Eglise vieille catholique évangélique de Dieu est plus
connue outre Atlantique, mais elle désire s’implanter en
France, selon le vœu de J.M. Cooper-Matthew.
90. L’Eglise vieille catholique mariavite vient d’éditer une
brochure pour se faire connaître. Elle veut être la seule véri-
table église issue du mariativisme polonais. Son évêque, Le
Bec, officie au 7, rue Aubriot à Paris.
91. L’Eglise vieille catholique orthodoxe se regroupe autour
de son évêque James 1er, mais ne compte que quelques fidèles.
92. L’Eglise vieille catholique orthodoxe indépendante est
en désaccord avec la précédente. Elle préfère faire confiance à
son évêque D.M. Pyle-Bridges.
93. L’Eglise vieille catholique réformée se veut la seule hé-
ritière du catholicisme, selon l’enseignement de R.W. Morrell.
94. L’Eglise vieille catholique romaine de F.G. Linale pense
garder les dogmes de l’Eglise catholique romaine, tout en re-
fusant l’autorité du pape.
95. L’Eglise vieille catholique romaine canonique rejette,
sur les conseils de son fondateur, John Humphreys, les autres
églises qui ne seraient pas en accord avec le Droit canonique.
96. L’Eglise vieille catholique romaine traditionnelle fait
confiance à Gérard Greelay pour une liturgie pleine de faste.
97. L’Eglise vieille catholique théosophique affirme qu’elle
est capable d’exprimer les pensées théosophiques dans une
doctrine catholique cohérente, selon les écrits de A.L. Baker.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 204

98. L’Eglise universelle du verseau mélange ce qui reste en-


core de la doctrine catholique avec un ésotérisme très oriental,
selon la conception de Paul Mailley.
99. La Nouvelle Eglise Universelle croit que son animateur
J.I. Ford est capable de présenter un catholicisme acceptable
par tous.
100. La Petite Eglise remonte à la révolution française. Elle
existe encore dans la région de Lyon et en Vendée. Elle n’a
plus de prêtre depuis fort longtemps.
101. La Sainte église apostolique de France travaille dans la
région de Colombes, sous la direction de l’abbé Roger Ré-
gnier. Elle insiste beaucoup sur la guérison des malades.
102. La Sainte église catholique apostolique n’a su que ral-
lier quelques fidèles, ceux-ci suivent les enseignements de S.
Corradi-Scarella.
103. La Sainte église catholique apostolique de Dieu est
présente essentiellement aux Etats-Unis, mais elle commence
timidement ses activités en France, avec G. Saunders.
104. La Sainte église catholique apostolique de France de
Henry Plantagenet régresse de plus en plus, elle est sur le
point de s’éteindre.
105. La Sainte église catholique apostolique d’Orient veut
remonter au christianisme primitif, pensant que les traditions
venant des églises orientales sont plus fidèles que celle de
l’occident. M.A. Iktin a voulu implanter cette église en
France, sans grand résultat.
106. La Sainte église catholique apostolique et orthodoxe
est plus connue dans les pays anglo-saxons qu’en France,
malgré les efforts de J. Sayer-Richardson.
107. La Sainte église catholique celtique regroupe les amis
du fondateur W.J. Williams, surtout en Bretagne.
108. La Sainte église catholique charismatique du Christ
veut être, selon le vœu d’A.L.Z. Barbeau, une église de type
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 205

pentecôtiste, mais fermement attachée à l’enseignement catho-


lique.
109. La Sainte église celtique est une autre expression du ca-
tholicisme breton qui s’ouvre facilement aux influences cel-
tiques. L. Shortt et P.C. Distin ont contribué à l’expansion de
cette église.
110. La Sainte église vieille-catholique de Dieu n’est qu’un
petit groupe local de la région de Thionville qu’anime Louis
Canivet.

Ces 110 Eglises, toutes séparées les unes des autres, font leur
chemin dans notre pays. Chacune se réclame du catholicisme !
Nous avons là tout simplement une preuve que ce catholicisme
est varié et très divisé !

Gérard DAGON
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 206

4 . L E CH E MI N

La vie chrétienne est un chemin. Un chemin qui, par nature, nous


est étranger. Car nous ne naissons pas quelque part sur ce che-
min, mais nous sommes appelés à le chercher. Il n’est pas évident
de le trouver. Il y a même peu de gens qui le trouvent et qui se
mettent à le suivre. Pessimiste ? Certainement, mais ce pessi-
misme est celui du Fils de Dieu qui dit : “Entrez par la porte
étroite car large est la porte et spacieux le chemin qui mènent à la
perdition, et il y en a beaucoup qui entrent par là. Mais étroite est
la porte et resserré le chemin qui mènent à la vie, et il y en a peu
qui le trouvent” (Matthieu 7.13,14).

Ce chemin commence avec une porte. Où se trouve-t-elle ? Jésus


a dit ailleurs, dans la parabole du bon berger : “Je suis la porte. Si
quelqu’un entre par moi, il sera sauvé; il entrera et sortira et trou-
vera des pâturages” (Jean 10.9). En cherchant le chemin, rappe-
lons-nous de ce mot percutant du Christ qui dit : “Je suis le che-
min, la vérité et la vie; nul ne viendra au Père que par moi” (Jean
14.6).

Le salut, c’est le chemin de Christ. C’est le suivre. Car “si quel-


qu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il se
charge de sa croix et qu’il me suive. Quiconque en effet voudra
sauver sa vie la perdra, mais quiconque perdra sa vie à cause de
moi et de l’Evangile la sauvera. Et que sert-il à un homme de
gagner le monde entier, s’il perd son âme ? Que donnerait un
homme en échange de son âme ? En effet, quiconque aura honte
de moi et de mes paroles au milieu de cette génération adultère et
pécheresse, le Fils de l’homme aura aussi honte de lui, quand il
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 207

viendra dans la gloire de son Père avec les saints anges” (Marc
8.34-38).
Le salut, c’est la porte de Christ. C’est entrer par lui, par le che-
min nouveau et vivant (Hébreux 10.19,20) qu’il a ouvert par sa
mort sur la croix et par sa résurrection d’entre les morts.

Tous ceux qui ont cherché ce chemin, l’ont fait consciemment. Ils
ont rencontré le Christ, que ce soit directement, dans les Evan-
giles, que ce soit par le témoignage et la prédication des apôtres
et autres témoins du Christ par après.
Mais, ne faut-il pas d’abord croire en lui ? Et même, avoir la
chance de croire en lui ? En fait, la plupart des hommes viennent
à Jésus par un chemin détourné. Ce n’est pas lui qu’ils cherchent,
mais la vie, une raison de vivre, un but digne d’être poursuivi.
C’est qu’ils ont mal à la vie. Les autres ne le cherchent pas. Ils ne
ressentent pas le besoin de lui.
Prenez ce jeune homme et sa quête de la vie : “Que dois-je faire
pour obtenir la vie éternelle ?” (Voir Matthieu 19.16-26) C’est la
vie qu’il cherche et c’est Jésus qu’il trouve. C’est Jésus qu’il
vient trouver, mais ce n’est pas Jésus qu’il cherche. Il vient à
Jésus comme à une banque de données, un maître de plus sur le
marché des idées. Il ne croit pas encore, mais il croira peut-être.
“Observe les commandements de Dieu”, lui dit Jésus. “J’ai es-
sayé mais cela ne m’a rien apporté. Que me manque-t-il encore ?”
La vie doit avoir un autre secret, un chemin pour initiés peut-être.
Jésus, ne peut-il pas révéler ce chemin ? La réponse ne se fait pas
entendre. “Va, vends tout ce que tu possèdes, donne l’argent aux
pauvres et toi, viens et suis-moi !” Fin de l’entretien. C’est trop
simple et en même temps trop cher. Le jeune homme part ailleurs
avec sa quête. Il ne croira pas, parce qu’il ne le veut pas. Il ne
croira pas parce qu’il ne veut pas obéir à l’ordre de Jésus. La
porte étroite est vraiment trop étroite. Mieux vaut se perdre que
de perdre. Il n’a pas la chance de la foi parce qu’il refuse la grâce
de l’obéissance.
Que nous demande Jésus ? (Tout de même pas de vendre nos
biens ! Jésus n’est pas un communiste !) La réponse est bien sûr
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 208

que nous ne pouvons pas émettre une règle générale de ce que


Jésus nous demande. Mais ce qui est clair, c’est qu’il nous de-
mandera, à nous aussi et tout autant, un acte d’obéissance, un
acte de détournement. Nous devons nous repentir.

Pourquoi se repentir ?
Mais pourquoi cherchons-nous la vie ? Parce que nous allons
bien ? Parce que nous avons le sentiment d’avoir réussi et que
rien ne nous manque ? Mais dans ce cas, nous ne chercherons pas
et Jésus ne pourra rien nous apporter. Nous nous serons créés
notre propre ciel selon nos conditions à nous. Nous ne cherche-
rons pas et nous ne trouverons pas et nous serons à tout jamais
étrangers en ce qui concerne Jésus-Christ et son Père qui l’a en-
voyé. Nous serons perdus encore plus désespérément que le jeune
homme. Nous aurons été trop riches.
Pourquoi cherchons-nous la vie ? Mais bien sûr parce que nous
sentons que quelque chose nous manque, nous échappe. Parce
que malgré tout, ça ne va pas. Et Jésus nous appelle à nous repen-
tir, à nous détourner de notre chemin, pour pouvoir commencer à
marcher sur le sien. Christ nous appelle et nous devons obéir si
jamais nous voulons trouver la foi qui sauve. Concrètement,
qu’est-ce que cela veut dire ? “Que chacun de vous soit baptisé
au nom de Jésus-Christ, pour le pardon de vos péchés” (Actes
2.38-41).
Ah, ça alors ! Aussi vite, comme le jeune homme, nous partons
déçus. Trop cher, et trop sectaire. Après tout, n’avons-nous pas
déjà été baptisés ? On préférerait mourir ! Eh bien, justement, il
faut mourir ! La vie est à ce prix. Sans cela, nous chercherions
une vie nouvelle en refusant de délaisser l’ancienne. Comme le
jeune homme, nous ferions semblant de chercher. Nous vou-
drions la vie, mais seulement à notre prix... et donc à trop bon
marché. Nous ne la voudrions pas en échange de la nôtre mais en
plus de la nôtre. Et tristement, nous poursuivrons notre chemin
large et spacieux jusqu’à la perdition. Nous aurons préféré la
religion à la vie.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 209

Il nous faut mourir. Etre baptisé, c’est accepter la mort. C’est


recevoir le jugement de Dieu sur notre passé. C’est être intégré à
la mort de Jésus. C’est être enseveli avec lui par le baptême, par
l’eau qui nous couvre et d’où nous sortons pour vivre une nou-
velle vie. Nous nous détournons de notre chemin pour suivre
Jésus et aussi vite s’ouvre devant nos pieds un sentier qui nous
conduit à la croix et à la tombe. Il faut s’y engager. Il suffit de s’y
engager.
La croix de Christ n’a pas été dressée comme un exemple de
l’amour de Dieu, mais comme une preuve de cet amour. C’est
jusque là qu’il fallait aller pour sauver l’homme. La mort de Jé-
sus ne fut pas une erreur judiciaire tragique, une fin malheureuse
à une vie exemplaire. Il est venu pour mourir : “Le Fils de
l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et pour
donner sa vie en rançon pour beaucoup” (Marc 10.45). Il devait
mourir parce que nous devons mourir. Et nous devons mourir
parce que nous sommes coupables. La justice parfaite de Dieu ne
permet pas d’absoudre des coupables. Le mal ne peut triompher
définitivement. Tôt ou tard, il faut régler la facture. Mais que
donnerait l’homme en échange de son âme ? Que pouvons-nous
faire d’autre que de plaider coupable devant celui qui nous con-
naît mieux que nous nous connaissons nous-mêmes ? Notre idolâ-
trie et notre égoïsme nous condamnent. Que dit le Fils de Dieu ?
“Les hommes ont aimé les ténèbres plus que la lumière, parce
que leurs œuvres étaient mauvaises” (Jean 3.19). Ces hommes, ce
ne sont pas seulement les autres, si facilement pointés du doigt.
Ce sont, du temps de Jésus, les docteurs de la Loi divine, les pa-
rangons de la religion officielle. “Que celui qui est sans péché
jette la première pierre...” (Jean 8.7). Ces hommes, ces femmes,
ce sont vous et moi.
Christ est venu pour mourir à notre place. La rançon qui nous
libère, c’est sa vie, c’est son sang. Il prend sur lui notre dette
accumulée et nous donne en échange sa justice, son innocence.
En échange. Il ne la donne pas en plus. Il faut accepter l’échange,
et donc accepter la culpabilité responsable devant notre Créateur.
Sans cela, il n’y aura jamais d’échange. Sans cela, nous ne ver-
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 210

rons pas la vie, mais la colère de Dieu demeurera sur nous (Jean
3.36).

Le chemin part à la croix. Sa croix doit devenir notre croix. Sa


mort doit devenir notre mort. Sa tombe doit devenir notre tombe.
Le baptême, c’est cela : l’identification entière que nous accep-
tons. Christ nous appelle à mourir afin de vivre. A nous détourner
de nos chemins pour nous engager sur le sien. A échanger notre
passé sans lui contre un présent avec lui. Cela commence dans le
cœur, dans le secret absolu et inviolable de la vie intérieure. C’est
là que nous percevons l’appel et que nous entendons la Parole.
C’est là que nous décidons d’obéir. C’est là que le grand cham-
boulement commence. Mais cela ne peut y demeurer caché.
Christ a souffert au grand jour et nous devrons le suivre. Le bap-
tême nous force à la visibilité de notre engagement. Le chemin
n’est pas secret. Le baptême, c’est s’exposer au grand jour, au
risque du rejet, du ridicule, de la souffrance. C’est dire devant
tous l’obéissance qui nous a conduit à la foi. C’est montrer en
public la confiance que nous avons placée en Jésus.

Le chemin du salut, c’est celui de la croix et de la résurrection.


Christ est sorti de la tombe. Ce matin de Pâques, le tombeau était
vide. L’invraisemblable s’est réellement produit. Un homme s’est
libéré de l’attraction de la mort. Il est vivant. Il est le seul Vivant.
Et tous ceux qui le suivent vivront.
Il est écrit quelque part, sur un monument funéraire, une belle
leçon de Latin : Mors mortis morti mortem nisi morte dedisset,
aeternae vitae janua clausa foret. “A moins que la mort de la
mort ait donné la mort à la mort par la mort, la porte de la vie
éternelle serait fermée”. Mais maintenant, la porte est ouverte. La
mort a perdu. La mort est morte. Ceux qui suivent Jésus, il est
vrai, restent mortels. Mais la mort a perdu son aiguillon. Ils s’en
vont dans la présence du Christ. “Christ est ma vie et la mort
m’est un gain” (Philippiens 1.21). Et la mort éternelle, celle qu’il
faut craindre, n’est plus. Parce que ceux qui suivent Christ sont
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 211

passés de la mort à la vie (Jean 5.24). Ils marchent sur un nou-


veau chemin. Ils vivent.

Ils ne marchent pas seuls. Jésus les incorpore à son Eglise. Pas à
une institution vénérable et imposante, mais à l’Eglise faible,
sous la croix. Tout ce que peut dire la théologie sur le corps mys-
tique de Christ n’est pas entièrement faux. Il y a un corps de
Christ, une Eglise dont Christ est le Chef et dont ses disciples
sont les membres. Par ci, c’est une communauté nombreuse, par
là, ce sont quelques uns qui vivent la réalité du règne de Christ
ensemble. Leur unité ne dépend pas d’une puissante administra-
tion, d’un joli bâtiment, d’une hiérarchie bien huilée. Ils sont un
en Christ, au niveau le plus profond de leur être. Ils ont rencontré
Jésus en lui devenant obéissants. Maintenant, ils voyagent en-
semble sur le chemin. Et Dieu n’a pas honte de les appeler ses fils
et ses filles. Ils vivent dans le même monde que tout le monde.
Mais entre eux et ce monde se dresse la croix de Christ. Ils y
agissent et ils le connaissent, le subissent souvent, à travers Jésus.
Méprisables aux yeux des établissements religieux, souvent per-
sécutés, ils sont pourtant heureux. Ils acceptent cette vie autre
parce qu’ils sont étrangers, des gens de passage. Leur attente est
ailleurs. Ils attendent leur Maître qui doit revenir. Ils préparent
son retour.

Un chemin. Un voyage. Changer, partir, quitter, abandonner.


C’est vrai qu’il est tellement plus simple de rester comme avant,
comme toujours, comme tout le monde. Après tout, Jésus ne de-
mande-t-il pas de trop ? Mieux vaut continuer notre petit chemin.
Mais vers où ?

Non, mieux vaut changer.


Mieux vaut le suivre.
Maintenant.
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 212

S OMMA I RE

Introduction ………………………….………….….. 3
1. Présentation du Catéchisme ………………………. 7
Le but du Catéchisme ………………………………. 7
La structure du Catéchisme ………………………. 9
Notre approche …………………………...….. 10
Dangers de notre époque ……………..………. 13

2. Le problème de l’autorité …………………..………….. 17


La Bible par l’Eglise …………………..………….. 17
L’Eglise soumise à la Bible ……..……….……… 23

3. Qu’est-ce que l’Eglise ? ……………………………….. 29


Le credo ……………………………….……….. 30
L’Eglise, notre Mère ……………………………….. 39
La Papauté ………………………….…………….. 41
Les relations œcuméniques ………………………. 54

4. La vierge Marie …………………………….………….. 59


Marie : Mère, épouse, Coopérante ……………… 59
Né de la vierge Marie …………..…….……. 68
Heureux plutôt ………..……..………..…….………… 70

5. Les sacrements …………………………………..…… 83


Gestes du Christ ……………………..……….. 84
Engagés avec Christ …………………………….. 85
Le Catéchisme, un autre Evangile ? 213

Les sacrements de l’initiation chrétienne


(baptême, confirmation, eucharistie) …… 89
Les sacrements de guérison (pénitence, extrême onction)
110
Les sacrements du service et de la communion
(ordre, mariage) …………………….. 124

6. Que faire pour être sauvé ? ……………………………... 133


Le péché ……………………….……………… 134
Libre ou sous traitement ? …………………….. 137
La foi ……………………………….………………. 146
Comment vivre en chrétien ? …………………….. 151
Croire et obéir ……………………………………… 156
Prier …………………………………………….… 164

Lettre ouverte à mon lecteur catholique …………………….. 167

Appendices
1. Documents ………………………………….……………. 171
2. Les contradictions du Catéchisme ……………………. 180
3. Une Eglise unie ? ……………………………………… 194
4. Le chemin ………………………………….…………… 205

Sommaire ………..………………….……….………… 211

Vous aimerez peut-être aussi