Publication COP22 A4
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SOMMAIRE
Les villes nouvelles au Maroc
Rabat-Salé
Premier tramway moderne du Royaume
Sala Al Jadida
Ben Guerir
L’université Mohammed VI à Ben Guerir
The Green City of Ben Guerir
Ben Guerir, ville politique ?
Tamansourt
Une ville qui peine à décoller
La médina : retour vers le futur
Zenata
La bataille du foncier
L’appropriation par les habitants
Une prise en compte de l’existant
Une évolution des pratiques très rapide
La coopération Franco-Marocaine
Une coopération renforcée ?
Un écho à l’histoire L’un des principaux défis du projet est l’adhésion des
habitants. D’après le Plan de Déplacements Urbain de
Il ne s’agit pas du premier tramway du Maroc. Le pre- 2009 la part modale piétonne est de 66 %, celle du bus
mier a été construit en 1917 à Rabat, déjà, et a fonctionné de 14 % et seulement 9 % pour les véhicules individuels.
13 ans. Mais la population de l’agglomération n’était que Les Marocains étant habitués à la marche, les zones
de 58 200 habitants (1926). La croissance démogra- d’influence de chaque station sont étendues. On ne peut
phique a complètement saturé les voies de transport pas calquer au Maroc une solution issue d’une ville fran-
(l’agglomération est passée de 1,3 à 2 millions d’habi- çaise. Mais en dehors de ces adaptations du design, le
tants entre 2004 et 2010). Aussi en 2007, ont été lancés vrai défi est de convaincre les futurs usagers de payer 6
les travaux du Tramway Rabat-Salé. dirhams (4dh au voyage en moyenne, compte tenu des
Rabat et Salé sont séparées par le fleuve Bouregreg avec formules d'abonnement) plutôt que de marcher gratuite-
un point de franchissement principal au pont Moulay- ment. Pour ce faire la qualité de service a été voulue très
Hassan. Véritable goulot d’étranglement, il a été détruit élevée : haut niveau de finitions, plancher bas intégral
en 2012, au profit du tout nouveau pont Hassan II qui pour l'accès des personnes à mobilité réduite, rames cli-
constitue le nouvel ouvrage d’art emblématique. Inaugu- matisées, design intérieur soigné et uniformisé sur les 2
ré en 2011, le tramway constitue une clé du développe- lignes. Ultime détail, l’intérieur des rames reprend le
code couleur utilisé sur le plan de réseau (rouge ou
Elle accueillera, ou plutôt, sera construite autour de l’université Mohammed VI polytechnique, qui constituera un
fleuron national de l’enseignement supérieur et de la recherche, offrant un cadre agréable et valorisant pour les
étudiants, les enseignants, les chercheurs et les hôtes de passage. De statut privé et à vocation internationale,
l’établissement proposera aussi l’incubation de projets innovants et une école de management industriel. Ce campus
de 23 ha comprend des résidences étudiantes (dont certaines déjà construites que nous avons visitées), un hôpital,
une clinique, des établissements de tourisme, d’une maison de la culture et du cinéma, des infrastructures sportives
et de loisirs, une centaine de villas, et des commerces de proximité. Sera également mis en place un lycée visant à
former dans des conditions d’excellence des jeunes étudiants boursiers sur concours réservé aux classes défavorisées,
dans le cadre d’une convention signée en 2014 entre le ministère de l’éducation nationale et l’OCP.
En choisissant un site semi-aride, les concepteurs du projet ont pris un risque élevé en voulant démontrer qu’on peut
faire la ville autrement dans un cadre de vie écologique. Son couplage avec l’université polytechnique Mohammed VI
lui donne une originalité structurelle et fait d’elle un espace dédié au savoir et à l’innovation.
Sources : Challenge - La nouvelle ville de Ben Guerir, la première ville verte en Afrique, 17 juillet 2014 / Telquel
Enquête. Le miracle Ben Guerir, 22 décembre 2012.
Territoire en plein essor qui va donner naissance à Cette croissance s’est opérée de manière déséquilibrée.
l’une des premières Eco-Cités marocaines, au cœur L’industrie s’est développée grandement sur une partie li-
d’un bassin de 11 millions d’habitants où vit 1 Maro- mitée du pays, notamment au sud et au nord de Casablanca
cain sur 3, cette ville nouvelle bénéficie de la proximi- sur une bande côtière de 140 km, qui recense aujourd’hui
té avec les deux plus grandes villes et poumons éco- les deux cinquièmes de la population urbaine. L’urbanisa-
nomiques du pays : Rabat et Casablanca. Située dans tion chaotique a généré des saturations paralysantes pour
la deuxième couronne Nord-Est du Grand Casablan- les grandes agglomérations.
ca, Zenata peut aussi profiter de la présence de hubs Des coopérations ciblées
d’infrastructures logistiques et de transport
(ferroviaires, routières, aériennes). Le site présente Tamansourt a vu le jour sous la direction d’un unique ac-
une énorme réserve foncière stratégique à même teur, qui ne peut pas jouer le rôle d’un écosystème complet
d’absorber beaucoup de pression urbaine du grand à lui tout-seul. Aujourd’hui, au Maroc, la conception de la
Casablanca. ville s’opère selon une démarche plus systémique et inté-
grée rassemblant tous les acteurs de la ville. La Société
La ville de Zenata devrait être livrée dans sa globalité
d’Aménagement de Zenata n’a ordonné le lancement de son
d’ici 2030 et y accueillir 300 000 habitants (en parti-
programme d’habitat qu’après 4 ans d’études en éco-
culier de classe moyenne) et 100 000 emplois. Le
conception (une des premières villes en Afrique axée sur le
projet vise aussi à promouvoir le tourisme dans la
développement durable).
région, offrir des plateaux de bureaux et renforcer le
pôle économique et industriel de Mohammedia- La réflexion menée a été similaire à l’Approche Environne-
Zenata. Le Maître d’ouvrage de Zenata est la caisse mentale de l’Urbanisme de l’ADEME (Agence de l’environ-
de dépôt et gestion (CDG du Maroc) ; sa filiale, la nement et de la maitrise de l’Energie) en France. Elle a dé-
société d’aménagement de la ville de Zenata (SAZ), buté par un état des lieux environnemental, social et écono-
qui a été fondée en 2006 pour porter ce projet phare, mique en s’appuyant sur une démarche aussi transversale
en assure le pilotage et le développement. Lors de et pluridisciplinaire que possible : mise en place d’un agen-
notre voyage d’études, nous avons pu découvrir le da 21, partenariats avec l’Agence Française de Développe-
projet Zenata au sein des locaux de la SAZ a Moham- ment et le Ministère de la santé, appels à manifestations
media. d’intérêts… Et aussi des concertations et négociations avec
les habitants.
Une ville verte
Cela reflète un niveau d’ambition sans précèdent au Maroc.
Zenata compte aussi devenir la première ville écolo- Le recours à des expertises internationales ciblées a réduit
gique marocaine. L’idée du projet Zenata selon la l’incertitude et l'ambiguïté du projet de développement
SAZ, est d’intégrer des enjeux lies aux contextes durable et le début de concertation l’a ancré dans le terri-
mondial et national : demande croissante d’énergie toire. Ces dispositions, qui peuvent paraitre incomplètes
(en grande partie due aux villes), augmentation des pour des pays plus procédurés comme la France, sont un
émissions en gaz à effet de serre, raréfaction des res- signe très positif témoignant des avancées du pays dans un
sources (notamment en eau), déséquilibres Est-Ouest des métiers les plus complexes qui soit, et dans un contexte
en termes de services dans le Grand Casablanca… La de développement très représentatif des défis qui attendent
SAZ vise donc une écoconception systémique de la l’ensemble de la planète.
ville, afin de développer un modèle d’Eco-cite du-
Sources : Ademe, Réussir la planification et l'aménage-
rable à la fois en termes sociaux, économiques, et
ment durables, guides méthodologique / R. Escallier, Uni-
environnementaux, dans une ville attractive mixités
versité de Nice - La croissance urbaine au Maroc, 1972 /
sociale et spatiale sont attendues.
Haut-commissariat au plan - Statistiques sur la croissance
de l’urbanisation au Maroc
De nombreux ménages restent réticents et insatisfaits par Mieux comprendre les habitants, proposer voire de Co-
rapport aux propositions de compensation, qui leur de- construire les solutions les plus adaptées, tout en tenant
mandent une contribution financière. Ils souhaiteraient compte d’une certaine urgence liée au contexte d’urbani-
plutôt bénéficier d’un logement gratuit. De plus, en ayant sation croissante et rapide : quoi de mieux pour une meil-
accepté le relogement, des dérives existent. Lors de notre leure appropriation du projet par les habitants ?
visite, on nous a par exemple relaté des cas ou certaines Sources : L’économiste, Les cabanoniers refusent de
familles acceptent le relogement, mais le sous-louent et déménager, 19 janvier 2012, Ville nouvelle de Zenata, l’ac-
continuent de vivre dans un bidonville. quisition du foncier entièrement verrouillée, 30 novembre
Néanmoins, malgré des abus, la SAZ ne souhaite pas aller 2011, Casablanca / ville sans bidonvilles, le programme
à la confrontation et essaie de trouver des solutions dans sera boucle en 2014, 28 janvier 2014 / Le Matin « Zenata,
l’intérêt de la paix sociale. Dans le cas des cabanons par une éco-cité qui équilibre le Grand Casablanca », 10 no-
exemple, elle propose des compensations financières vembre 2011 / Usine Nouvelle - Zenata : la ville nouvelle
voire même des logements à valeur de remplacement aux de Casablanca aux ambitions écolos –14 mai 2013 / La
résidents. Pour les résidents permanents des cabanons Vie Éco Maroc : des villes nouvelles pour rééquilibrer le
ayant peu de moyens et pour lesquels la compensation développement urbain – le 14 aout 2014, Villes sans bi-
financière ne suffirait pas, un relogement est aussi propo- donvilles : l’envers du décor, 9 septembre 2014
sé.
L’implication citoyenne
C’est un signal fort de la part des décideurs d’accorder
une telle place à la démocratie participative. Au-delà de
Les groupes français rencontrés ont aussi développé des Pour un démonstrateur Franco-Marocain
positions dans les grands projets urbains, avec des
La proximité de nos pouvoirs centraux est un atout ma-
collaborateurs marocains sous contrat local pour prendre
jeur, mais aussi la coopération décentralisée, entre col-
le relai des expatriés français. :
lectivités directement. La pertinence de nos offres inté-
·Autour de la filière du tramway (Rabat et Casablanca), grées pour les villes nouvelles Marocaines se construira
où Alstom vend ses modèles, Colas construit les lignes, et grâce à un partenariat étroit. La nécessité d’avoir un dé-
où l’exploitation est assurée par Transdev (Rabat) ou monstrateur emblématique en France semble une évi-
RATP (Casablanca). dence, mais un défi reste à relever : qu’il soit adapté aux
·Autour de la filière des opérations complexes, où problématiques des pays émergents. En effet les enjeux
Bouygues Construction s’est positionnée sur certains des sont différents. Smart city, énergies renouvelables et pro-
plus grands projets (mosquée, grands bâtiments ter- tection de l’environnement en France, exode rural, proxi-
tiaires, grands hôtels, ambassades, hôpitaux...). mité d’industries lourdes en plein développement, raré-
faction de l’eau et parfois insalubrité au Maroc. Il nous
·Autour de l’immobilier, où Bouygues Immobilier s’est est donc venu l’idée d’une coopération rapprochée autour
positionné sur de grands immeubles d’habitation haut de d’un démonstrateur Franco-Marocain de la ville durable.
gamme, et des bureaux d’études sur des expertises tech-
niques spécifiques. Par exemple sur la conception envi- Sources : La Tribune - Commerce mondial : la France
ronnementale, ou l’agence Franck Boute travaille sur les peut-elle regagner des parts de marche ? 27 mai 2015 /
villes nouvelles de Casa-Anfa et de Zenata. Challenges - Comment la France peut-elle regagner ses
parts de marche ? 27 mai 2015 / Metropolitiques - L’ex-
Un retour d’expérience utile portation au Maroc de la “ville durable” à la française, 16
juin 2014
Les villes nouvelles construites ces dernières années ont
été vécues comme un échec : véritables villes dortoirs
ayant des quartiers entiers presque inhabités et juxtapo-
sant les bidonvilles, ces projets n’ont pas rejoint les at-
tentes. Compte-tenu des difficultés similaires rencon-
trées en France quelques décennies plus tôt, l’expertise
de nos entreprises serait-elle utile à l’administration ma-
rocaine ? Possiblement, d’autant plus que l’ANRU a glo-
balement réussi les opérations de rénovation urbaine des
2 dernières décennies.
Selon l’Ambassade de France et la CFCIM, les offres ur-
baines intégrées ne se prêtent pas à la segmentation des
marches publics du Royaume, (comme en France avec
l’organisation silotée des collectivités !). Pourtant une
nouvelle Eco-cité est en création dans la Province du
Grand Casablanca et devrait accueillir 300 000 habitants