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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Chapitre 1. Introduction

Définition
Il n’existe pas de définition unique du terme “ argile ”. Le mot “ argile ” englobe deux
connotations, l’une liée à la taille des grains et l’autre à la minéralogie. La définition
dépend de la discipline concernée. Le géologue ou le pédologue considèrent comme “ argile ”
tout minéral de faible granulométrie, la limite étant fixée à 2 ou 4 microns selon les cas. Les
ingénieurs s’attachent plutôt aux propriétés de plasticité des matériaux argileux quelque soit
leur taille. Les céramistes regroupent les matériaux selon leur comportement au chauffage...

Généralement, les minéraux argileux sont des phyllosilicates hydratés de petite taille.
Cependant (1) des minéraux comme les illites ou les chlorites sont fréquents dans la fraction
silteuse des roches magmatiques et métamorphiques; (2) tous les minéraux argileux ne sont
pas des phyllosilicates (e.g., quartz, feldspath), ni même des silicates (e.g., oxydes). Les
argiles sont généralement cristallisées, même si des argiles amorphes existent (e.g. allophanes
dans les sols développés sur substrat volcanique ou andosols). Dans les ouvrages de référence,
il existe différentes propositions de définitions. Par exemple, Eslinger & Peaver (1988)
proposent de définir les argiles comme un minéral qui domine dans la fraction fine < 2
microns des roches et des sols. Par contre, Weaver (1989) regroupe tous les minéraux
phyllosilicatés sans aucune connotation de taille et propose pour éviter les confusions
d’utiliser le terme de “ physils ”.

Domaines d’études
Les minéraux argileux et des argiles sont étudiés dans de nombreux domaines (Fig. 1.1).
Pour les géologues, les argiles apportent des informations sur les conditions
environnementales (source, condition de formation, diagenèse...). Les ingénieurs pétroliers
déduisent les conditions thermiques des gisements (degré de maturation). Les ingénieurs
civils s’intéressent aux propriétés des argiles en tant que matériel industriel (réfractaires,
matériaux de construction). Les agronomes analysent les propriétés d’hydratation et
d’adsorption des argiles pour concevoir les fertilisants. Quelque soit la discipline, la structure
cristalline des argiles est importante car elle est responsable des propriétés spécifiques du

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

minéral. Il existe une très vaste littérature concernant les argiles et les matériaux argileux,
dispersée selon l’orientation des revues (voir liste bibliographique annexée).

Figure 1.1 – Domaines d’études (Eslinger & Peaver, 1988).

Argiles et cycles
Dans le cycle géologique, les minéraux argileux sont restreints aux couches externes (Fig.
1.2). Ils sont principalement formés à partir de minéraux préexistants, par réactions de la
croûte terrestre au contact de l’hydrosphère ou de l’atmosphère. Les argiles sont généralement
absentes dans les roches de haut température (roches magmatiques et métamorphiques à des
T > 500°C). Par contre, elles sont abondantes dans les sols, sédiments, roches sédimentaires
ainsi que dans les zones d’altération hydrothermale.

Figure 1.2 – Les argiles et le cycle sédimentaire (Eslinger & Peaver, 1988)

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

La figure 1.3 illustre le lien existant entre la composition des assemblages argileux dans
des sédiments marins (Atlantique NW, W Thétys) et le cycle géodynamique.

Figure 1.3 – Les argiles et le cycle géodynamique (Chamley, 1989)

Nomenclature des roches argileuses


Si l’on excepte le quartz, les argiles sont les minéraux les plus abondants de la lithosphère.
En effet (Fig. 1.4):
- les roches sédimentaires sont les roches les plus abondantes en volume à la surface
de la lithosphère;
- les shales dominent les roches sédimentaires;
- les argiles sont les principaux constituants des shales.
Il n’existe pas de terme prédéfini pour décrire une roche composée principalement de
minéraux argileux (au sens minéralogique du terme). Les termes claystone, mudstone,
lutite et pélite ont une connotation de taille et non minéralogique alors que ces roches
sont dominées par des phyllosilicates. En pratique, l’identification est pourtant basée sur
la minéralogie (diffraction des rayons X) plutôt que sur la granulométrie. Dans de
nombreux cas, les minéraux phyllosilicatés appartiennent à la classe des silts. Par
conséquent, les roches appelées claystone, mudstone, lutite ou pélite sont généralement
des siltstones!

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Figure 1.4- Importance des argiles dans les roches sédimentaires (Beauchamp, 2002)

Le tableau (Tab. 1.1) résume la nomenclature en usage pour les roches riches en minéraux
argileux. Les pétrologues utilisent la texture de la roche non consolidée pour classer les
roches. Ils assument donc que la granulométrie des sédiments non consolidés est préservée
intégralement dans le sédiment enfouis, en ignorant les processus diagénétiques qui affectent
la minéralogie et la texture. Le terme shale implique que la roche à tendance à se débiter
selon des plans parallèles à la stratification. Dans les shales, la fissilité augmente selon la
proportion de phyllosilicates mais les phyllosilicates doivent atteindre une taille supérieure à 5
microns avant que la fissilité ne se développe. Généralement les propriétés de débitage
dépendent des conditions de dépôt, diagenèse ou de métamorphisme. Toutes les roches
constituées de matériaux de faible granulométrie sont massives sous des pressions élevées. La
fissilité ne se développe que lorsque la pression diminue. Les autres roches nécessitent une
altération (infiltration d’eau?) plus poussée pour que des clivages se développent. Par contre,
des roches comportant une forte proportion de minéraux gonflants (i.e., les bentonites) ne
développent pas de fissilité tant qu’elles n’ont pas perdu une fort quantité d’eau.

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Table 1.1- Nomenclature (Weaver, 1989)

Conditions de formation et stabilité des argiles


Les argiles résultent de l’interaction d’une solution avec une roche pré-existante (Fig.
1.5a, 1.5b). Les processus de dissolution et de recristallisation conduisent à la formation ou à
la transformation des minéraux argileux. La proportion d’eau par rapport au solide détermine
le degré, le type de réactions chimiques et finalement le type de minéral formé. Les argiles
sont instables en milieu anhydre. Lorsque l’eau est abondante, le solide devient instable et la
dissolution (congruente, complète) constitue la première étape d’interaction eau/roche.
Lorsque la proportion eau/roche avoisine 1, la dissolution est incongruente, c-à-d que certains

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

éléments sont dissous, d’autres restent en phase solide. Les minéraux argileux constituent
généralement la phase solide car ils sont généralement hydratés, caractérisés par une structure
physique particulière différente du minéral pré-existant (i.e., volume supérieur lié à
l’hydratation). Dans la figure 1.5b, la relation entre la proportion relative eau et roche est
mise en parallèle avec les différents processus de formation des argiles (i.e., altération, dépôt
ou sédimentation, enfouissement responsable de la diagenèse, altération hydrothermale).

Figure 1.5a – Conditions de formation et de stabilité des minéraux argileux (Thorez, 1989).

J. Thorez (1989) définit les argiles comme des mutants, il s’agit de minéraux en
continuelle évolution minéralogique pour atteindre un état d’équilibre thermodynamique selon
l’agent d’altération. Ces mutations modifient la présence, l’abondance et la composition des
minéraux argileux.

Figure 1.5b – Conditions de formation et de stabilité des minéraux argileux (Velde, 1995).

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

En ce qui concerne leurs conditions de formation (Fig. 1.5c,1.5d), les argiles ne sont
présentes qu’à proximité de la surface terrestre, dans un environnement limité à une certaine
gamme de température et de temps.

Figure 1.5c – Conditions de formation et de stabilité des minéraux argileux (Velde, 1995).

Pour la majorité des argiles, leur stabilité se limite aux quelques centaines de mètres
supérieurs de la croûte terrestre. Dès que la température dépasse 50-80°C, les argiles
deviennent instables et commencent à se modifier en d’autres minéraux argileux ou d’autres
structures (e.g., mica, feldspath). La figure donne la gamme d’évolution des argiles en
fonction de la température et du temps. Pour de faibles températures, de longues périodes de
temps sont nécessaires pour changer la minéralogie des argiles. Par contre, pour de courtes
périodes de temps, la température de formation peut atteindre quelques centaines de degré. Le
taux d’évolution est fortement influencé par la température ambiante. Une température élevée
accélère la réaction mais l’évolution de la température dans les phénomènes géologiques est
très variable. Les événements rapides sont généralement des phénomènes localisés, ils
déstabilisent les assemblages argileux et impliquent des changements chimiques (e.g.,
intrusion magmatique, percolation de fluide). Au contraire, des processus de sédimentation et
d’enfouissement sont des événements qui se produisent sur de longues périodes (1-100 Ma).
Les argiles sont transformées dans des bassins sédimentaires anciens et peu profonds (e.g.,
200 Ma, 2 km de profondeur, T basse +/- 80°C). Les argiles resteront intactes dans de bassins
plus jeunes, plus profonds et plus chaud (e.g., 2 Ma, 5 km, 180°C). La dimension temporelle
est donc essentielle, au même plan que la température, dans la stabilité et l’évolution des
argiles.

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Figure 1.5d – Conditions de formation et de stabilité des minéraux argileux (Velde1995).

Organisation du cours
Le cours de géologie des argiles est structuré en trois parties. La première partie décrit les
argiles en tant que minéraux (composition chimique, structure). Après une révision de la
nomenclature existante, nous développerons les propriétés physico-chimiques spécifiques aux
argiles ainsi que les méthodes particulières d’identification. La seconde partie concerne
l’étude des argiles au cours du cycle géologique. Nous aborderons les conditions de formation
des minéraux argileux, de transport, de sédimentation et d’évolution au cours de la diagenèse.
Ensuite la troisième partie sera consacrée aux applications, tant fondamentales qu’appliquées
des argiles.

Plan du cours (15H + 15H)

1. INTRODUCTION
2. METHODES D’ETUDES
3. CLASSIFICATION et NOMENCLATURE
4. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES
5. ORIGINES, PROCESSUS DE FORMATION
6. ENVIRONNEMENTS SEDIMENTAIRES
7. DIAGENESE
8. RECONSTRUCTIONS PALEOENVIRONNEMENTALES
9. ARGILES et INDUSTRIES
10. ARGILES et ENVIRONNEMENT

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Clay Geology

Structure
Classification
Physico-chemical Pedology
Analysis properties Origins
Methods Formation
processes
Sedimentary
Diagenesis
Mineralogy environments
Cristallography

Sedimentology
Clays
and
Applications Environmental
Fundamental
Environment
Reconstructions
and Applied Research
Clays
Paleoceanography
Paleoclimatology and Industry

Plan détaillé

1. INTRODUCTION
Définition
Les argiles dans le cycle géologique
Objectifs du cours

2. METHODES D’ETUDES
Diffraction des rayons X
Microscopie électronique à transmission (MET)
Microscopie électronique à balayage (MEB)
Analyse thermo-gravimétrique (ATG)
Analyse thermique différentielle (ATD)
Infrarouge

3. CLASSIFICATION et NOMENCLATURE
Structures des minéraux argileux
Critères de classification
Les familles argileuses
Kaolinite
Illite
Smectites
Chlorite
Palygorskite et sépiolite
Minéraux interstratifiés

4. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES
Forme et surface spécifique
Adsorption d’eau et gonflement

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

Capacité d’échange ionique

5. ORIGINES, PROCESSUS DE FORMATION


Introduction
Pédogenèse
Authigenèse
Hydrothermalisme

6. ENVIRONNEMENTS SEDIMENTAIRES
A. Environnements continentaux
Apports éoliens
Rivières
Lacs
Estuaires

B. Environnements marins
Introduction
Distribution des minéraux argileux dans l’Océan
Carte générale

7. DIAGENESE
Introduction
Réactions diagénétqiues
Modèles diagénétiques
Facteurs contrôlant la diagenèse

8. RECONSTRUCTIONS PALEOENVIRONNEMENTALES
Introduction
Reconstruction climatique
Influence de la mousson, exemple de la Mer d’Arabie
Reconstruction tectonique
Ouverture d’un bassin océanique, exemple de la Mer du Japon
Reconstruction des paléocirculations
Influence des courants profonds, exemple des bassins marginaux de l’Atlantique Nord

9. ARGILES et INDUSTRIES
Introduction
Kaolin
Bentonites
Argiles pour la construction
Minéraux réfractaires

10. ARGILES et ENVIRONNEMENT


Introduction
Rôle des argiles dans la rétention des éléments traces
Bio-disponibilité des métaux lourds
Centre d’enfouissement technique

II. TRAVAUX PRATIQUES


Diffraction des rayons X
Production des rayons X
Interactions avec les minéraux argileux
Spectres de diffraction des minéraux argileux
Comportements après saturation cationique
Interprétation des spectres de diffraction d’assemblages naturels: Exercice de dépouillement
Laboratoire
Séparation de la fraction argileuse d’un sédiment
Confection d’un agrégat orienté
Acquisition du spectre de diffraction
Traitement informatique des données et interprétation.

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Géologie des argiles Chapitre 1 Introduction

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
GENERALITES
Chamley, 1989. Clay sedimentology. Springer-Verlag.
Velde, 1992. Introduction to clay minerals. Chapman and Hall.
Velde, 1995. Origin and mineralogy of clays. Clays and the environment. Springer.
Weaver, 1989. Clay, muds, and shale. Developments in sedimentology 44, Elsevier.

ARGILES et ENVIRONNEMENT
Carretero, 2002. Clay minerals and their beneficial effects on human health. A review. Applied clay Science 21,
155-163.
Parker and Rae, 1989. Environmental interactions of clays, clays and the environment. Springer –
UD8504/AR:AP.003.

METHODES
Caillière, Hénin et Rautureau, 1982. Minéralogie des argiles. 1.Structures et propriétés physico-chimiques.
Masson.
Eslinger and Peaver, 1988. Clay minerals for petroleum geologists and engineers, SEPM Short course 22. Soc.
Economic paleontologists and mineralogists, Tulsa, USA.
Holtzapfell, 1985 - Les minéraux argileux. Préparation, analyse diffractométrique et détermination. Soc. Géol.
Nord, 12.
Moore and Reynolds, 1989. X-Ray diffraction and the identification and analysis of clay minerals. Oxford
University Press.
Tucker, 1991. Techniques in sedimentology. Blackwell.

STRUCTURES et CLASSIFICATION
Caillière, Hénin et Rautureau, 1982. Minéralogie des argiles. 2. Classification et nomenclature. Masson.

ORIGINE et ALTERATION
Allen, 1997. Earth surface processes. Blackwell.
La Nature, 1981. Le sol, un monde vivant, volume 10. Encyclopédie, Hachette.
Miller and Gardiner, 1998. Soils in our environment. Prentice Hall.
Thorez, 1985. Argillogenesis and the hydrolysis index. Miner. Petrogr. Acta 29, 313-338.
J. Thorez, 1976. Practical identification of clay minerals. A handbook for teachers and students in clay
mineralogy. Lelotte ed., Dison, Belgique.
J. Thorez, 1989. Argilloscopy of weathering and sedimentation. Bull. Soc. Geol. Belgique 98-2, 245-267.
White, 1999. Principles and practice of soil science. The soil as a natural resource. Blackwell.

ENVIRONNEMENTS SEDIMENTAIRES
Chamley, 1989. Clay sedimentology. Springer-Verlag.
Lisitzin, 1996. Oceanic sedimentation. Lithology and geochemistry. American Geophysical Union.
Weaver, 1989. Clay, muds, and shale. Developments in sedimentology 44, Elsevier.

ARGILES et INDUSTRIES
Grim and Guven, 1978. Bentonites. Developments in sedimentology 24, Elsevier.
Manning, 1995. Introduction to industrial minerals. Chapman and Hall, Cambridge University Press.

CHIMIE
Newman, 1987. Chemistry of clay and clay minerals. Mineralogical Society of Great Britain, Monograph 6,
Longmans, London.

APPLICATIONS ISOTOPIQUES
Clauer and Chaudhuri, 1995. Clays in crustal environments. Isotope dating and tracing

REVUES SPECIALISEES
Clay Mineral, Mineralogical Society of Great Britain, London.
Clay and Clay Minerals, Journal of the Clay Minerals Society, USA.

REVUES DIVERSES
American Mineralogist, Catena, Contributions to Mineralogy and Petrography, Geoderma,
Journal of Sedimentary Petrology, Marine Geology, Soil Sciences.

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