Recherche Formative Sur Le Parcours de Soins de Santé Maternelle Et Infantile À Madagascar - Volume 1 - 2008

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MINISTERE DE LA SANTE,

DU PLANNING FAMILIAL UNICEF


ET DE LA PROTECTION SOCIALE

Recherche Formative sur le Parcours de Soins


Santé Maternelle et Infantile
- Madagascar –

Connaissances, Attitudes, Croyances, Pratiques et Coûts


relatifs aux soins de la femme enceinte et de l’enfant

Programme Survie et Développement de la Mère et de l’Enfant


Programme de Coopération 2008-2011
Gouvernement de Madagascar – U N IC E F

RAPPORT FINAL
VOLUME 1

Décembre 2008

Focus Development Association et Annick Wouters


Recherche Formative sur le Parcours de Soins
Santé Maternelle et Infantile
- Madagascar –

Connaissances, Attitudes, Croyances, Pratiques et Coûts


relatifs aux soins de la femme enceinte et de l’enfant

Par

Rabearimisa Andry Fanantenana


Rahenintsoa Rindra
Rakotoarindrasata Mina Harivola
Rasoanindrainy Solo
Rasolofomanana Haingo
Ravaozanany Noroarisoa
Razafindrabe Léon
Razafindrabe Noro Tiana
Wouters Annick
ACN Agent Communautaire de Nutrition
ASBC Agent de Santé à Base Communautaire
ASDE Accélération de la Survie et du Développement de l’Enfant
ASDME Accélération de la Survie et du Développement de la Mère et de l’Enfant
ASV Agent de Santé Villageois
AT Accoucheuse Traditionnelle
CACP Connaissances, Attitudes, Croyances et Pratiques
CCS-C Communication pour un Changement Social et de Comportement
COSAN Comité de Santé
CPN Consultation Pré Natale
CSB Centre de Santé de Base
CVA Comité Villageois d’Animation
DIJE Développement Intégré du Jeune Enfant
DRS Direction Régionale de la Santé
DSME Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant
EDS Enquête Démographique et de Santé
EPM Enquête Permanente auprès des Ménages
GDD Groupe de Discussion Dirigée
IDH Index du Développement Humain
MAP Madagascar Action Plan
MSPF Ministère de la Santé, du Planning Familial et de la Protection Sociale
NAC Nutrition à Base Communautaire
OMD Objectifs du Millénaire pour le Développement
PCIME Prise en Charge Intégrée des Maladies de l’Enfant
PCIME-C Prise en Charge Intégrée des Maladies de l’Enfant à base Communautaire
PEV Programme Elargi de Vaccination
PHAGECOM Pharmacie à Gestion Communautaire
SMNN Soins Maternels et Néo Natals
SRO Solution de Réhydratation Orale
SSD Service de Santé de District
SSME Semaine de la Santé de la Mère et de l’Enfant
SIDA Syndrome de l’Immuno Déficience Acquise
TRO Thérapie par Réhydratation Orale
VIH Virus de l’Immunodéficience Humaine

 
1. Under Five Mortality Rate / 1,000 LB (For year 2006, SOWC 2008) 115
2. Maternal Mortality Ratio / 100,000 LB (For year 2006, SOWC 2008) 470
3. Low birthweight incidence (For year 2003/2004, DHS) 4.6
4. Vitamin A supplementation rate - at least 1 dose & 2 doses – (For year 2003/2004, DHS) 76.2
5. Underweight prevalence (<5) (For year 2006, SOWC 2008) 42
6. Stunting prevalence (<5) (For year 2006, SOWC 2008) 48
7. Wasting prevalence (<5) (For year 2006, SOWC 2008) 13
8. Early initiation of breastfeeding (within one hour of birth) (For year 2003/2004, DHS) 62.4
9. Exclusive breastfeeding (0-5 months) (For year 2006, SOWC 2008) 67
10. Complementary feeding (6-9 months) (For year 2003/2004, DHS) 77.8
11. Births attended by skilled health personnel (For year 2003/2004, DHS) 51.3
12. Antenatal care coverage - at least one visit 5.8
13. Antenatal care coverage - 4 or more visits (For year 2003/2004, DHS) 39.9
14. Postnatal visit within 3 days of birth (TBC : within 2 days or 3 days of birth) 32.1
(For year 2003/2004, DHS)
15. Neonatal tetanus protection (NEW) (For year 2003/2004, DHS) 39.7
16. Careseeking for pneumonia
17. Antibiotic use for pneumonia
18. ORT (ORS or RHF) or increased fluids, with continued feeding (For year 2003/2004, DHS) 58.1
19. Children sleeping under ITNs (ITN Survey, June 2008) 60.4
20. Children with fever receiving any anti-malarial medicines (For year 2003/2004, DHS) 58.9
21. HIV prevalence rate among pregnant women aged 15-24 years (capital city) (ESB 2007) 0.14
22. HIV+ children using ArT (Rapport PTME/Medecins Référent, 2007) 3
23. HIV+ pregnant women receiving ArVs for PMTCT (Rapport PTME/Medecins Référent, 2007) 25
24. Orphan school attendance ratio (For year 2003/2004, DHS) 60.8
25. Measles immunization (children 12-23 months) (EPI Survey, February 2008) 81
26. Hib immunization (children 12-23 months)
27. DPT3 immunization (children 12-23 months) (EPI Survey, February 2008) 81.9
28. Use of improved drinking water sources 47
(UNICEF/WHO JMP Progress Report on Drinking Water and Sanitation, July 2008)
29. Use of improved sanitation facilities 12
(UNICEF/WHO JMP Progress Report on Drinking Water and Sanitation, July 2008)
30. Primary school enrollment/attendance ratio (total, male, female) 75
(For year 2003/2004, DHS)
31. Percentage of women aged 20-24 years who had one or more births before 18 years of age (For 35.7
year 2003/2004, DHS)

 
32. Superficie 587 041 km²
33. Nombre estimé de population (INSTAT/DDSS, 2007) 18,8 millions
34. Taux d'accroissement démographique annuel (INSTAT/DDSS, 2007) 2,5%
35. Population résidant en milieu rural (INSTAT/DDSS, 2007) 78%
36. Nombre de Régions 22
37. Nombre de Districts 111
38. Nombre de Communes 1549
39. Nombre de Fokontany 17222
40. Revenu moyen par habitant (INSTAT/DSE, 2006) 308 USD
41. Classement selon IDH (en 2006) 143è / 177
42. Population vivant en dessous du seuil de pauvreté (en 2005) 69%
43. Population vivant en dessous du seuil de pauvreté absolue (en 2005) 27%
44. Taille moyenne d’un ménage (EPM 2001) 5,1
45. Ménages dirigés par une femme (EPM 2001) 18,8%
46. Taille moyenne d’un ménage dirigé par une femme (EPM 2001) 3,8
47. Taille moyenne d’un ménage dirigé par un homme (EPM 2001) 5,4
48. Femmes chef de ménage sans instruction (EPM 2001) 44,1%
49. Hommes chef de ménage sans instruction (EPM 2001) 33,9%
50. Femmes chef de ménage ayant un niveau d’instruction du Primaire (EPM 2001) 47,7%
51. Hommes chef de ménage ayant un niveau d’instruction du Primaire (EPM 2001) 47,7%
52. Population vivant à moins de 5 km de centres de soins (Mspf, Plan de Développement Secteur < 65%
Santé 2007-2011)
53. Taux d’utilisation des services de santé de base publics (Mspf, Plan de Développement Secteur 50%
Santé 2007-2011)
54. Taux de consultation des agents de santé par les enfants de moins de 5 ans (EPM 2005) 47,8%
55. Ménages urbains cultivant du riz (EPM 2005) 17,6%
56. Ménages ruraux cultivant du riz (EPM 2005) 43,6%
57. Principales causes de morbidité chez les enfants de moins de 5 ans (Mspf, Plan de Développement IRA : 34%
Secteur Santé 2007-2011) Fièvre : 21%
Diarrhée : 13%
58. Couples mariés légalement (EPM 2001) 40%

 
Résumé exécutif

Introduction

Chapitre 1. Méthodologie

1.1. Eléments de base de l’étude


1.2. Déroulement de l’étude
1.3. Traitement et analyse des données
1.4. Difficultés et contraintes rencontrées

Chapitre 2. Résultats

2.1. Consultations prénatales (CPN)


2.2. Soins néonatals (kangourou, colostrum et allaitement précoce, soins du cordon ombilical,
enregistrement des naissances)
2.3. Allaitement exclusif
2.4. Soins aux enfants malades (nouveau-nés et enfants de moins de 5 ans)
2.5. Diarrhée /TRO
2.6. Vaccination
2.7. Utilisation de la moustiquaire imprégnée
2.8. Coûts consentis
2.9. Implication des hommes dans la santé de la mère et de l’enfant
2.10. Sources et canaux de communication

Chapitre 3. Modélisation des pratiques

3.1. Consultations prénatales (CPN)


3.2. Premier contact mère-enfant
3.3. Colostrum et allaitement précoce
3.4. Enregistrement de naissance
3.5. Allaitement maternel exclusif
3.6. Soins aux nouveaux-nés et aux enfants malades
3.7. Prise en charge de la diarrhée
3.8. Vaccination
3.9. Utilisation de la moustiquaire imprégnée

Chapitre 4. Conclusions et recommandations générales

4.1. Impact des variables sur les CACP


4.2. Conclusions générales
4.3. Recommandations générales

 
 i
Ce résumé exécutif présente les principales CACP identifiées pour chaque pratique investiguée.
Il a été rédigé de façon à éviter les répétitions entre les thèmes et favoriser les liens entre eux.

Soins prénatals (CPN)


Les hommes et les femmes réservent le terme de CPN à la consultation prénatale au centre de
santé, par un personnel formé, selon une périodicité définie par ce dernier, et pour un
ensemble de prestations dont ils sont conscients que seul le centre de santé est en mesure de
les délivrer. Le degré de connaissances des femmes sur la CPN (fréquence, timing, prestations
délivrées) est plus élevé que celui des hommes mais restent parcellaires parce que reposant
essentiellement sur leur expérience personnelle de la CPN. Les connaissances sur la CPN sont
généralement transmises par la mère/belle mère, les agents de santé et les Accoucheuses
Traditionnelles qui exercent chacun une influence majeure sur la façon de gérer la 1ère
grossesse, la femme se basant sur son expérience personnelle pour les grossesses suivantes. Les
signes de danger pendant la grossesse sont mal connus, les participantes aux GDD n’en ayant pas
ou peu fait l’expérience.
Les attitudes des hommes et des femmes par rapport à la CPN sont favorables, celle-ci étant
perçue comme utile et présentant de nombreux avantages. La femme enceinte est considérée
comme particulièrement fragile, vulnérable aux maladies qui peuvent affecter le fœtus. Les
principaux éléments de motivation pour aller en CPN sont ainsi le souci de mener la grossesse à
terme et de mettre au monde un bébé en bonne santé.
La fréquentation du centre de santé par les femmes enceintes pour la CPN est une pratique
courante (sauf dans le Sud-Ouest). Elles s’y rendent sur le conseil de l’Agent Sanitaire, de la
mère/belle-mère ou de l’Accoucheuse Traditionnelle ou parce qu’elles ont des malaises ou sont
malades. Le timing de la 1ère consultation semble relativement bien connu mais cette dernière
n’est pas toujours faite dans les délais, ce qui a pour conséquence de réduire le nombre des CPN
suivantes. Les délais rencontrés dans la 1ère CPN sont généralement dus à la distance par
rapport au centre de santé, la tendance des femmes à attendre que leur grossesse soit visible
pour aller en CPN et l’absence de malaise ou de maladie.
Les femmes suivent généralement les prescriptions de l’Agent de Santé quant à la médication,
exception faite du FAF qu’elles interrompent souvent en raison des effets indésirables. Les
Agents de santé et les Accoucheuses traditionnelles ont des compétences perçues comme
complémentaires. Elles sont vues en parallèle et la collaboration entre elles existe déjà par
endroit (référence mutuelle). Les hommes sont toujours consultés avant d’aller en CPN dans la
mesure où ils sont chargés d’assurer les frais des soins de la femme enceinte et en raison de leur
statut social, qui fait qu’ils sont ceux qui détiennent le pouvoir de décision au sein du ménage.
Ils considèrent généralement qu’ils participent ainsi pleinement dans le suivi de la santé de la
femme enceinte. Certains hommes s’impliquent cependant davantage dans le suivi de la
grossesse : ils encouragent leur femme à se rendre à la CPN, s’assurent du suivi des directives de
l’agent de santé en consultant le carnet de santé de la femme enceinte ou accompagnent celle-ci
à la CPN.

Soins néonatals

 i
Méthode kangourou

Les femmes ne connaissent pas la méthode kangourou dans la mesure où elle n’a fait l’objet
d’aucune campagne de communication et où les femmes n’ont jamais fait l’expérience de cette
pratique. La méthode kangourou n’a en effet pas non plus été promue auprès des
accoucheuses traditionnelles et des agents de santé qui sont les personnes qui conseillent les
femmes sur les soins au nouveau-né après l’accouchement.
Il ne devrait pas être difficile de promouvoir cette pratique pour l’inscrire dans les habitudes
des femmes accouchées. En effet, tenir l’enfant au chaud après la naissance fait partie de la
culture malgache et les femmes sont favorables à un contact corporel immédiat avec leur enfant
pour le protéger du froid et pour d’autres avantages tels la reconnaissance de sa mère par
l’enfant à son odeur, qui faciliterait l’allaitement, le développement de l’enfant, la création de
liens d’affection entre la mère et l’enfant.
Colostrum et allaitement précoce

La connaissance du colostrum est de nature empirique. Le colostrum est connu sous des
appellations qui varient selon les régions et est communément désigné comme le « premier
lait ». Il est décrit comme un liquide de couleur jaunâtre, qui présente un aspect concentré, a un
goût fade et précède le lait maternel. Ses avantages ne sont pas connus.
Comme le lait mature n’apparait que 30 à 40 heures après l’accouchement), les femmes
administrent généralement le colostrum à l’enfant mais en quantité variable. L’aspect du
colostrum et les représentations qui y sont associées (e.g. liquide qui passe par un canal
« rouillé », qui n’a plus servi depuis longtemps) font en effet qu’il est le plus souvent considéré
comme un « mauvais lait », indigeste, pouvant provoquer la diarrhée (particulièrement
redoutée). Il est, de ce fait, presque toujours évacué (quelques gouttes à 3 tasses, selon les
régions).
Le lait maternel est considéré comme l’aliment « naturel » pour le nouveau-né. Il est conçu
comme nécessaire à son alimentation et les femmes et les hommes insistent sur la nécessité de
fournir une alimentation appropriée à la femme pour stimuler la montée laiteuse. Ce rôle de
nourrir adéquatement la femme allaitante est traditionnellement dévolu à l’homme qui se sent
particulièrement concerné par cette question.
Cependant, peu savent qu’il est le seul aliment qui soit approprié à l’enfant et qu’il faut l’allaiter
dans la demi-heure qui suit la naissance. La plupart des femmes administrent à l’enfant un
fluide (eau bouillie, eau bouillie sucrée, thé, tisane, …) en attendant la montée laiteuse car elles
pensent que le bébé a besoin d’eau comme tous les êtres humains. La première tétée est
généralement donnée dans les 2 heures suivant la naissance. Il est courant que le bébé soit mis
au sein lorsqu’il est remis à sa mère, si celle-ci ne se sent pas trop fatiguée pour l’allaiter, et dès
qu’il pleure (signe qu’il a faim). Le retard dans la montée laiteuse (qui peut prendre jusqu’à
deux jours) peut occasionnet des délais dans la première tétée.
Les femmes reviennent généralement à l’AME après la montée laiteuse mais continuent
d’administrer des fluides additionnels à l’enfant lorsqu’elles pensent que leur lait est en quantité
insuffisante. Certaines femmes donnent également au nouveau-né des potions traditionnelles
avant de l’allaiter ou en parallèle, pour le rendre fort, résistant aux maladies.
Ces fluides additionnels sont parfois administrés aux nouveau-nés en dépit des objections de
l’agent de santé qui ne sont pas suffisamment argumentées pour contrer l’idée selon laquelles ils
sont parfaitement adaptés à l’organisme de l’enfant. Les femmes qui allaitent leurs enfants sans
leur administrer de fluide au préalable le font généralement sur la base des conseils donnés par

  ii
l’agent de santé et pour stimuler la montée laiteuse mais, même en ce cas, l’allaitement n’a
pour ainsi dire jamais lieu dans la demi-heure suivant la naissance.
Soins du cordon ombilical

La plupart des Accoucheuses Traditionnelles coupent le cordon ombilical avec une lame de
raseoir nouvelle ou désinfectée à l’alcool. Les soins sont donnés directement par l'Accoucheuse
traditionnelle qui fait un pansement avec de l'alcool et bande le ventre de l’enfant ou bien par
l'agent de santé à qui l’enfant est référé. Le pansement est généralement appliqué une seule fois
et conservé pendant une semaine, jusqu’à l’assèchement de la plaie. Les rougeurs ou
gonflement éventuels de l’ombilic sont mis au compte d’une infection passagère, sans gravité.
Enregistrement des naissances

Les attitudes des hommes vis-à-vis de l’enregistrement des naissances sont très positives. Ils sont
conscients de l’utilité de la copie de l’acte de naissance (scolarisation, citoyenneté) et ont une
opinion négative des parents qui n’enregistrent pas la naissance de leurs enfants. Ils considèrent
en effet que l’enregistrement de la naissance est une obligation des parents et une source de
fierté : les parents font quelque chose qui est utile pour l’avenir de l’enfant.

C’est le manque de connaissance sur le délai et les procédures d’enregistrement des naissances
qui rend compte des problèmes rencontrés au niveau de la pratique, essentiellement par les
parents dont l’enfant n’a pas été accouché dans un centre de santé. La méconnaissance des
procédures et du délai légal pour l’enregistrement des naissances ne semble en effet pas avoir
d’impact sur les enfants nés dans une structure sanitaire dans la mesure où les parents suivent
alors les instructions données par l’agent de santé pour faire enregistrer la naissance. La facilité
pour obtenir rapidement un acte de naissance représente d’ailleurs un élément motivationnel
pour accoucher dans un centre de santé, les parents redoutant la complexité des procédures
d’enregistrement des naissances en dehors des délais légaux, qui restent également mal
connues.

Allaitement maternel exclusif


Les connaissances de la définition de l’AME, de ses raisons ou de ses avantages et de sa
conduite sont lacunaires. De façon générale, les mères ne comptent pas les mois de l’enfant
mais évaluent son niveau de développement aux changements opérés dans son aspect ou
comportement. Le délai de six mois pour l’AME est donc remplacé par des signes censés
montrer que l’enfant est en âge d’être sevré (e.g. bébé qui peut s’asseoir, qui a sa première
dent). Les conduites à tenir face aux problèmes de l’allaitement maternel (et pas seulement
exclusif) sont inconnues, causant l’interruption de l’allaitement maternel en cas de maladie de la
mère, de refus de l’enfant ou de la malnutrition perçue ou réelle de la mère. L’allaitement
maternel à volonté est très peu connu, tout comme la Méthode d’Allaitement Maternel et
d’Aménorrhée ou MAMA dont l’efficacité est mise en doute.
Le lait maternel est conçu comme l’aliment naturel pour l’enfant mais la capacité des femmes à
assurer pleinement la nutrition d’un bébé avec son lait sur une période de temps plus ou moins
prolongée est mise en doute, légitimant l’administration de liquides supplémentaires ou
aliments mous. Les hommes et les femmes sont en effet très conscients de l’importance de
fournir à la femme allaitante une alimentation appropriée mais ne se sentent pas toujours
capable de le faire en raison de la pauvreté. L’AME est également considéré comme trop
contraignant.

  iii
L’AME n’est donc que très peu pratiqué. Comme indiqué plus haut, l’administration de liquides
à la naissance constitue la règle et si la plupart des ménages reviennent à l’AME après cette
première période, l’introduction d’aliments complémentaires solides ou liquides y met
généralement fin entre le troisième et le cinquième mois. Les femmes qui auraient pratiqué
l’AME sont celles qui ont suivi les consultations prénatales, donné le colostrum et pratiqué
l’allaitement précoce, en suivant les directives du personnel de santé.

Soins au nouveau né malade


Paradoxalement, en dépit des taux de mortalité infantile relativement élevés, les enfants de
moins de 1 mois ne sont pas perçus comme particulièrement fragiles et vulnérables aux
maladies. Ils sont traités de la même façon que les enfants plus âgés qui ne savent pas encore
parler.
Les signes de danger sont repérés mais minimisés ou ignorés lorsque qu’ils se présentent de
façon isolée. Ils ne sont pas non plus associés à des maladies précises. Ils sont parfois mis au
compte de la pauvreté, face à laquelle les gens se sentent impuissants. Dans la région du Sud
Ouest, les convulsions sont censées être provoquées par des esprits malveillants, nécessitant le
recours à un exorciste ou à un tradipraticien.
Deux types de recours sont appliqués en cas de maladie du nouveau-né, qui ne s’excluent pas
mais constituent le parcours de soins qui est habituellement appliqué dans l’espoir de parvenir à
une guérison – dans le cadre du premier recours – sans avoir à engager des dépenses auprès
d’un centre de santé.
Les pratiques traditionnelles (potions et tisanes, rituels pour les maladies causées par le
« mauvais esprit », remèdes de « grand-mères », parfois également utilisés en complément des
prescriptions du médecin) constituent le recours de 1ère instance. Ces pratiques traditionnelles
sont conçues comme efficaces et sans danger. Elles sont administrées en même temps que
l’automédication pour les maladies jugées « non graves » ou en attendant de pouvoir aller au
centre de santé, comme mesure d’urgence. Les femmes n’ont pas de difficulté pour se procurer
les médicaments et ont l’habitude d’automédiquer l’enfant en répétant la médication prescrite
par un agent de santé pour une maladie antérieure jugée similaire et n’ont pas de difficulté pour
se procurer les médicaments.
Le recours à un centre de santé constitue le recours de 2de instance. Ce recours d’extrême
urgence a généralement lieu 2 à 3 jours après l’apparition des signes de danger, après que les
ressources financières nécessaires pour faire face aux frais de consultation et pour les
médicaments aient pu être rassemblées (vente de bien, prêt) et pour autant que le centre de
santé soit ouvert (délai supplémentaire si la maladie s’aggrave la nuit) ou que le conjoint soit
présent pour donner l’autorisation d’aller au centre de santé avec l’enfant.
Soins à l’enfant malade
Les hommes et les femmes sont conscients de la réalité de la mortalité juvénile dans leur région
imputée à la prévalence de maladies mortelles – diarrhée, paludisme, IRA, rougeole - et aux
délais dans le recours aux soins au centre de santé. Ces délais qui sont pourtant légitimés en
termes d’éloignement du centre de santé et de non disponibilité des ressources financières sont
alors jugés comme le résultat d’une attitude “irresponsable” ou “négligente” des parents. En fait,
les parents font également la confusion entre signe de maladie et signes de danger et n’ont de ce
fait souvent recours au centre de santé (recours de 2ème instance) que lorsque la maladie s’est
fortement aggravée. L’obligation de devoir attendre le retour du conjoint absent pour obtenir
son autorisation d’emmener l’enfant au centre de santé et l’indisponibilité du personnel de

  iv
santé peuvent également constituer des causes additionnelles de délais dans le recours aux
soins.
Les hommes pensent que les femmes sont, en raison de leurs contacts rapprochés avec l’enfant,
les plus aptes à diagnostiquer s’il est malade. Les femmes attendent de l’enfant qui sait parler
qu’il leur dise qu’il est malade. Autrement, c’est plus au changement de comportement de
l’enfant (refus de jouer, de s’alimenter, affaiblissement, pleurs, humeur irritable, état amorphe)
qu’aux symptômes de maladie (fièvre, convulsions, toux, évanouissement, vomissements, selles
molles et fréquentes) qu’elles reconnaissent que l’enfant est malade. Ces signes de maladie sont
interprétés comme requérant un recours au centre de santé. Les femmes connaissent les
conduites à tenir pour les premiers soins d'urgence à domicile (e.g. utilisation de cataplasme
pour faire descendre la température de l'enfant, l'administration de liquides supplémentaires ou
de la SRO à l'enfant en cas de diarrhée). Les hommes se sentent impliqués dans le suivi de la
santé de leur enfant dans la mesure où ce sont eux qui décident en dernière instance de la
pertinence du recours aux soins et assument les frais de la consultation.
Le parcours de soin pour l’enfant malade de moins de 5 ans est en fait identique à celui du
nourisson de moins de 28 jours : potions populaires et/ou traditionnelles et automédication
pour les maladies jugées “simples” et recours au centre de santé en cas d’échec du recours de
1ère instance et pour les maladies “graves” (diarrhée, paludisme, toux, fièvre) mais, en ce cas,
toujours avec des délais d’au moins allant de 2 jours à une semaine, lors desquels les soins
d’urgence (potions traditionnelles et automédication) sont administrés, même si l’augmentation
du coût du traitement pour une maladie qui s’aggrave et la crainte de l’issue fatale de la maladie
représentent un facteur de motivation pour amener l’enfant au centre de santé aussi vite que
possible. Les parents dont l’enfant est référé par l'Agent de santé vers un autre centre de santé
plus compétent vont jusqu’à vendre le patrimoine familial pour faire face aux coûts des soins et
frais connexes (e.g. déplacements, hébergement). Les parents qui ont été au centre de santé
mais ne peuvent pas faire face aux dépenses pour les médicaments ont recours aux potions
traditionnelles ou à l’automédication alors conçus comme des soins palliatifs.
Les hommes et les femmes pensent généralement que les prescriptions de l'agent de santé
doivent être suivies jusqu'au bout pour éviter les rechutes mais de nombreux parents
abandonnent le traitement dès l'apparition de signes d'amélioration de l'état de l'enfant (e.g.
recommencer à jouer, à boire et à manger) pour réduire les dépenses car les médicaments sont
achetés au fur et àmesure de l’évolution de la maladie ou économisés pour une maladie
ultérieure ou par crainte des effets secondaires en cas d’utilisation prolongée des médicaments.
Les parents qui observent le traitement sont généralement ceux qui ont accès à des
médicaments bon marché dans les centres de distribution confessionnels, qui sont mieux
exposés à l'information et qui ont reçus des directives précises de l’agent de santé sur
l’observance du traitement.

Vaccination
Les femmes connaissent mieux la vaccination que les hommes dans la mesure où ce sont elles
qui sont chargées des soins aux enfants. Tous savent qu’elle protège contre les maladies mais
beaucoup pensent qu’elle réduit l’intensité de toutes les maladies (et non seulement la
rougeole) ou qu’elle protège contre des maladies autres que celles pour lesquelles le vaccin est
inoculé (paludisme, diarrhée). Le nombre de contacts nécessaires n’est pas toujours connu ni le
nombre de vaccins inocculés. Le BCG est présenté comme le premier vaccin de la série et le

 v
polio, parfois associé au DTCoq, est connu. C’est la protection contre les maladies qui constitue
la motivation principale pour faire vacciner l’enfant mais à l’exception de la polio, les groupes
ne font pas le rapprochement entre les vaccins et les maladies qu’ils permettent de prévenir ou
dont ils réduisent l’intensité. Les jours de vaccination au CSB sont connus mais non le calendrier
de vaccination (référence est faite au carnet de vaccination).
Les raisons données pour avoir achevé la série des vaccinations sont la santé et le bien-être de
l’enfant, la réduction de l’intensité des maladies qui facilite le traitement des enfants malades et
réduit la mortalité, la possibilité de fréquenter les centres de santé et d’inscrire l’enfant à l’école
(carnet de vaccination exigé) et les mesures incitatives (diplôme de fin de série des vaccinations
et moustiquaire imprégnée). Certains homme s’impliquent davantage dans le suivi de la santé
de l’enfant en encourageant leur épouse à aller à la vaccination et en s’informant de l’état
d’avancement dans les contacts.
Les raisons données pour ne pas faire vacciner l’enfant ou interrompre la série des vaccinations
sont le manque d’informations sur la vaccination (nombre et fréquence des vaccins, utilité des
vaccins, gratuité des vaccins), les défaillances du centre de santé (éloignement, disponibilité du
personnel de santé et des vaccins), les effets secondaires (hausses de températures, plaies)
auxquels les parents ne s’attendent pas (douleur, association des effets secondaires à une
maladie) et les croyances éronnées sur la fonction préventive des vaccins par rapport à
l’ensemble des maladies qui amène à conclure à l’inefficacité des vaccins quand l’enfant a de la
fièvre (généralement assimilée à un paludisme) ou la diarrhée.

Prévention et prise en charge de la diarrhée


Les connaissances sur la diarrhée sont essentiellement fondées sur l’expérience personnelle de
la maladie. Le lien qui existe entre diarrhée et déshydratation et l’existence de l’ODIVA et de ses
lieux de distribution sont relativement bien connus mais, comme pour les maladies en général,
certains ne distinguent pas toujours entre les signes de diarrhée et les signes d’aggravation de la
maladie, ce qui peut occasionner des délais dans l’administration de la SRO ou le recours au
centre de santé. La solution maison reste mal connue (existence et composition/dosage).

La gravité des conséquences de la diarrhée et le risque personnel sont bien perçus mais les
croyances erronées sur les causes de la diarrhée ou sur les signes d’aggravation de la maladie
font parfois obstacle aux pratiques préventives et curatives recommandées, d’autres mesures
étant alors adoptées.
Les enfants qui ont la diarrhée et qui sont encore nourris exclusivement au sein sont
généralement amenés au centre de santé mais avec des délais qui tiennent à la fois à la
confusion qui existe entre signe de diarrhée et signes d’aggravation de la maladie et à la
nécessité de se procurer les moyens financiers pour faire face aux dépenses pour le traitement.
L’ODIVA représente le principal recours pour les enfants qui ont été sevrés. Les délais dans
l’administration de la SRO tiennent à la méconnaissance de l’existence de la solution maison,
l’administration de la SRO après l’apparition de signes de danger (confusion entre signes de
diarrhée et signes de danger), le temps requis pour trouver de l’argent et aller acheter l’ODIVA,
la croyance selon laquelle l’ODIVA doit être prescrite par le médecin. La SRO est parfois
administrée en parallèle ou entre en compétition avec des remèdes locaux réputés aussi sinon
plus efficaces que l’ODIVA (parce qu’arrêtant les selles).
Les signes d’aggravation de la diarrhée donnent généralement lieu à un recours au centre de
santé mais après un délai d’au moins 24h pour des raisons d’accessibilité géographique et
financières et de disponibilité du personnel de santé et des médicaments. Comme pour les

  vi
maladies en général, l’automédication (Cotrim ou déparasitage) et l’administration de remèdes
traditionnels sont des pratiques courantes pour faire face à ces délais et constituent un premier
recours de fait.
Les remèdes populaires sont également utilisés en parallèle avec le traitement prescrit par le
médecin pour hâter le processus de guérison. Le recours aux guérisseurs ou à l’automédication
a généralement lieu si le traitement prescrit par le médecin n’a pas eu d’effet. Les médecins
privés sont plus rarement consultés et toujours en seconde instance, après avoir été au CSB, si le
traitement ne s’est pas avéré efficace. La déshydratation aigue est interprétée dans le Sud Ouest
comme un symptôme du « hevo », maladie démoniaque dont le traitement ne relève pas du
centre de santé mais du guérisseur.

Utilisation de la moustiquaire imprégnée


Les connaissances sur la prévention du paludisme sont essentiellement basées sur l’expérience
de la maladie et sont donc parcellaires. Le risque auquel sont exposés les femmes enceintes et
les enfants de moins de 5 ans est connu mais les préoccupations portent davantage sur les
conséquences du paludisme sur l’enfant que sur la femme enceinte. Le symptôme principal du
paludisme, la fièvre, est également bien connu, ainsi que la cause principale du paludisme (le
moustique), la nécessité du recours aux soins médicaux pour traiter l’enfant et les conséquences
parfois fatales des délais dans ce recours. Le lien entre la cause principale du paludisme et ses
mesures préventives (dont la moustiquaire imprégnée) est également connu.
Les connaissances sur les conséquences du paludisme sur la femme enceinte font presque
totalement défaut, se limitant au risque de fausse couche ; le lien entre paludisme et faible poids
à la naissance n’est que rarement évoqué. Le lien entre les causes et les conséquences du
paludisme sur la femme enceinte et sur l’enfant et l’utilisation de la moustiquaire comme
mesure préventive n’est pas systématiquement opéré. La connaissance sur les moments où
l’anophèle est actif est inexistante.
Le nombre élevé d’enfants morts du paludisme dans la région joue comme facteur de
reconnaissance du risque personnel. Les principaux avantages perçus de la moustiquaire sont la
protection contre le paludisme, la facilité d’entretien de la moustiquaire et la protection du
sommeil des enfants. Les inconvénients perçus renvoient essentiellement à des idées fausses sur
les effets secondaires (toxiques) du produit d’imprégnation. Les idées fausses sur les mesures
préventives font obstacle à l’utilisation de la moustiquaire imprégnée par les enfants de moins
de 5 ans : d’autres méthodes existent, plus faciles à adopter.
Les moustiquaires sont généralement disponibles mais utilisées de façon périodique dans la
majorité des cas. Le caractère saisonnier de la prolifération des moustiques et les attitudes des
hommes, moins favorables que les femmes à l’utilisation de la moustiquaire pour des raisons de
commodité, sont les principaux obstacles à son utilisation continue. L’attention se porte
davantage sur les mesures curatives que préventives.

Implication des hommes dans les soins de la femme enceinte et de l’enfant


Les principaux obstacles à une plus grande implication des femmes dans le processus de
décision pour les soins sont la dépendance économique de la femme par rapport à l’homme et
les normes socioculturelles qui font de lui celui qui décide en dernière instance. La division
sexuelle des tâches assigne à l’homme la responsabilité de pourvoir aux dépenses pour les soins
de la femme enceinte et de l’enfant et aux femmes, celle de prendre action en la matière.

 vii
Les femmes sont favorables à une plus grande implication des hommes dans les soins de l’enfant
mais considèrent qu’il s’agit là d’une utopie, en raison du partage des tâches dans le foyer conçu
comme correspondant à la « nature » des hommes et des femmes et éloignant l’homme du foyer
(activités génératrices de revenus).
Les femmes se conforment aux instructions données par les hommes pour les questions de
santé, particulièrement quand elles impliquent des dépenses financières. Les hommes qui
laissent parfois à la femme une certaine latitude pour prendre des décisions en leur absence et
qui se sentent déjà impliqués en statuant sur la nécessité du recours aux soins et en couvrant les
frais y afférents ne perçoivent pas toujours la pertinence d’un changement en faveur d’une plus
grande responsabilisation des femmes ou d’une plus grande participation de leur part dans le
suivi de la grossesse ou de la santé de l’enfant. La retenue dont certains hommes font preuve
quand leur femme est enceinte témoigne de l’existence de la violence verbale et physique dont
les femmes sont parfois victimes.
Les autorités administratives et leaders traditionnels reconnaissent l’existence de disparités aux
dépens des femmes dans le pouvoir de décision et dans l’allocation des tâches et responsabilités
et rendent compte de ces disparités en termes de norme socioculturelle. Les leaders
communautaires, surtout traditionnels, tendent vers le statu quo, ne concevant pas le rôle qu’ils
pourraient jouer pour introduire un changement normatif. Les autorités administratives et
certains leaders d’opinions (notables, enseignants,…) sont parfois déjà impliqués dans les soins
de la femme enceinte et de l’enfant et proposent des solutions basées sur la sensibilisation des
hommes ou du couple.
Coûts consentis
Le montant des consultations médicales au centre de santé est fonction de la gravité de la
maladie. Il varie également en fonction de la tarification propre à chaque centre de santé,
parfois pour des prestations ou commodités dont les usagers savent qu’elles sont gratuites mais
qu’ils payent, faute de pouvoir faire autrement pour bénéficier des soins.
Ce montant est jugé acceptable pour la CPN, la vaccination et les maladies « simples ». Le
déplacement n’entre en considération que lorsqu’il implique un coût financier ou en cas
d’éloignement du centre de santé, démotivant, en raison du temps perdu pour les tâches
domestiques ou activités génératrices de revenus. Le temps d’attente (de 2 heures à une
journée, en fonction du nombre d’usagers) ne semble pas constituer un obstacle même quand il
détourne des tâches quotidiennes (après 4heures), dans la mesure où les usagers sont conscients
qu’il est fonction du nombre de malades.
Le coût consenti semble dépendre de la disponibilité en ressources (cash ou biens
commercialisables) et du statut économique. Le problème qui se pose est davantage celui de la
disponibilité des ressources financières pour faire face aux dépenses, jugées difficiles à
supporter dans le cas des maladies « simples » pour les plus pauvres et dans le cas des maladies
« graves » pour les moins pauvres. Les alternatives qui sont alors explorées sont l’emprunt, la
vente de biens/récoltes et l’endettement.
Lorsque les ressources sont disponibles, les groupes « pauvres » parviendraient à supporter des
coûts inférieurs à 5000 Ar. Les groupes « moins pauvres » arriveraient à supporter des coûts de
10 000 Ar à 50 000 Ar. L’automédication et le recours au tradipraticien sont les solutions
empruntées par ceux qui ne peuvent faire face aux frais de la consultation.
Sources et canaux de communication
Il existe trois principales sources d’information, à savoir les sources modernes (médias, agents
de santé, agents communautaires etc.), les sources traditionnelles (tradipraticien, at) et les

 viii
proches et les pairs. Les femmes plus âgées reçoivent les informations dans des séances
d'éducation dans les centres de santé au cours des CPN ou des séances de vaccination de leur
enfant, de la famille proche et de l'entourage, des agents communautaires, et, de la radio. Celles
qui sont moins âgées ont moins l’expérience du centre de santé et tiennent davantage leurs
informations des prroches ou des pairs. Les hommes sont davantage exposés à l'information
fournie par les sources découlant de la stratégie avancée (sensibilisation dans les Fokontany par
les agents de santé et agents communautaires, cinémobile, etc.), par leur conjointe – avec en
appui le carnet de santé – et la famille proche et dans une moindre mesure, par la radio.
Les informations véhiculées par les canaux modernes de communication dont se souviennent
les hommes et les femmes sont focalisées sur les conduites à tenir ou actions attendues des
groupes cibles et sont, comme on l’a vu dans les sections relatives à chaque thémartique,
parcellaires. Les hommes et les femmes souhaitent avoir plus d'informations sur les maladies de
la femme enceinte et de l'enfant moins de cinq ans, l'allaitement maternel exclusif, la
vaccination, la prévention du paludisme et l'utilisation de la moustiquaire ainsi que la diarrhée.
A propos de l'allaitement maternel, une minorité au sein du groupe femme d'Alaotra Mangoro
souhaiterait obtenir des explications sur la nécessité de poursuivre l'allaitement jusqu'au bout de
la deuxième année de l'enfant.
La communication interpersonnelle est présentée comme une stratégie appropriée pour
transmettre les informations si elle prend la formme des GDD menés au cours de l'étude
(information détaillée). Les agents de santé sont considérés comme les sources les plus
indiquées, en raison des compétences qu’on leur reconnait : médecin pour les maladies en
général et sage-femme pour la santé de la femme enceinte. Le lieu considéré par les femmes
comme le plus approprié pour la communication interpersonnelle est le centre de santé
puisqu’on peut y aller à tout moment en cas de besoin mais pour autant que leur conjoint
puisse être présent. Les hommes souhaitent que les sessions de sensibilisation se tiennent dans
les Fokontany pour des raisons de proximité. Le chef Fokontany pourrait mobiliser les gens à y
assister. Les groupes ruraux insitent pour que la sensibilisation se fasse le jour de marché ou en
fin de la semaine, de préférence dans l'après-midi, quand les gens ont fini de travailler, mais pas
lors des jours de repos. La radio constitue le media préféré pour obtenir des informations. Les
groupes ruraux expriment leur préférence pour la tranche horaire de 18 heures à 20 heures qui
correspondrait au moment de repos de la famille au sein du foyer. Les groupes considèrent que
les affiches sont destinées aux personnes « lettrées » et trouvent que les projections par vidéo
sont efficaces.

  ix
Madagascar fait partie des quatre pays africains qui ont enregistré une réduction significative de
la mortalité infanto-juvénile, qui est passée de 159 à 94 pour 1,000 naissances vivantes entre
1997 (EDS II) et 2003/2004 (EDS III). Le rapport 2007 de Save the Children Fund, « Annual
State of World Mothers» 1 fait de Madagascar le 14ème pays le plus performant en termes de
réduction de la mortalité infantile au niveau mondial. Le taux de mortalité maternelle a
également connu une diminution, en passant de 488 à 469 pour 100,000 naissances vivantes
entre 1997 (EDS II) et 2003/2004 (EDS III).
Cependant, les Objectifs Millénaires du développement (OMD) qui visent à : « Réduire de deux
tiers, entre 1990 et 2015, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans » (cible 4, objectif
4) et « Réduire de trois quarts entre 1990 et 2015 le taux de mortalité maternelle » (cible 6,
objectif 5) sont encore loin d’être atteints. Les progrès accomplis et les efforts à fournir sont
illustrés dans le tableau suivant, tiré du Deuxième Rapport de Suivi des OMD – Madagascar,
PNUD, 2007 (p. 45) :
Tableau 1. Mortalité maternelle et infantile : Evolution et OMD 1997 (EDSII) 2004 (EDSIII) 0MD 2015
Taux de mortalité néonatale pour 1 000 naissances vivantes 40 31,6 21,0
Taux de mortalité post-néonatale pour 1 000 naissances vivantes 44 26,2 17,4
Taux de mortalité infantile pour 1 000 naissances vivantes 93 58 38,6
Taux de mortalité infanto-juvénile pour 1 000 naissances vivantes 159 94 62,6
Taux de mortalité maternelle pour 100 000 naissances vivantes 488 469 165

La présente étude a été menée dans le cadre de la préparation de la mise en œuvre d’une
stratégie renforcée pour l’Accélération de la Survie et du Développement de la Mère et de
l’Enfant (ASDME) développée par le Ministère de la Santé, du Planning Familial et de la
Protection Sociale (MSPF), Direction de la Santé de la Mère et de l’Enfant (DSME) avec l’appui
de l’UNICEF. La stratégie vise à couvrir au moins 90% des populations cibles (femmes
enceintes, femmes allaitantes, enfants de moins de cinq ans) par la mise à l’échelle
d’interventions ayant prouvé leur efficacité et qui portent sur cinq paquets d’activités (PEV+,
2
SMNN+, PCIME+ , WASH et Education-Protection) dans 10 Régions de convergence et de les
étendre ensuite aux 12 autres régions.
L’étude est de type qualitatif et a eu pour objectif de déterminer : (i) les pratiques habituelles
en matière de soins préventifs et curatifs des mères et des enfants de moins de 5 ans ; (ii) les
connaissances, attitudes et croyances sous-tendant ces pratiques ; (iii) les coûts consentis par les
groupes cibles par rapport aux pratiques recommandées pour les soins préventifs et curatifs
des mères et enfants de moins de 5 ans ; (iv) les facteurs susceptibles de faciliter ou
d’empêcher l’adoption de ces pratiques. Elle a permis de formuler des recommandations
pour l’élaboration d’une stratégie de Communication pour un Changement Social et de
Comportement (CCS-C) qui constitue un volet important de l’ASDME.
Les résultats de l’étude sont présentés dans sous forme de deux rapports. Le premier
comprend quatre chapitres : 1. la description de la méthodologie utilisée ; 2. la présentation des
résultats de l’enquête ; 3. la modélisation des pratiques habituelles en matière de soins de la
femme enceinte et des enfants ; les conclusions et recommandations générales tirées de l’étude.
1
State of the World’s Mothers 2007 - Feb 2008– Saving the lives of Children Under 5 – p. 27.
2
PEV : Programme Elargi de Vaccination ; SMNN : Santé Maternelle et NéoNatale ; PCIME : Prise en Charge Intégrée des Maladies de
l’Enfant.

 1
Le second rapport présente les implications de l’étude sur le plan de la communication. Il
comprend deux chapitres : 1. l’analyse des facteurs facilitant ou empêchant l’adoption des
pratiques recommandées ; 2. des recommandations opérationnelles pour la promotion des
comportements associés à chaque pratique recommandée.

 2
L’étude a eu recours à des techniques de type qualitatif : revue documentaire, interviews semi
structurées et groupes de discussion dirigée. Elle a porté sur des thèmes relatifs aux soins de la
femme enceinte et de l’enfant, en suivant une approche de cycle de vie. Elle a été menée dans
des sites choisis pour représenter les Régions de convergence du Programme et auprès de
groupes cibles identifiés sur la base de leur implication dans la recherche et la promotion des
soins de la mère et de l’enfant.
Eléments de base de l’étude
Ces éléments comprennent les thèmes, les sites et les groupes ciblés par l’étude.
1.1.1. Choix des thèmes de l’étude
Les thèmes de l’étude sont ceux qui ont été définis dans les termes de référence (TDR) sur la
base de 5 pratiques-clés sélectionnées pour leur coût-efficacité parmi les 18 pratiques
recommandées par le MSPF pour promouvoir la prévention et prise en charge des problèmes de
santé affectant la mère et l’enfant au niveau communautaire. Ils comprennent également ceux
qui ont été ajoutés dans le protocole de recherche pour satisfaire les besoins en informations de
l’UNICEF et du Comité de suivi de l’étude. Ils ont porté sur : (i) les soins prénatals ; (ii) soins
néonatals (méthode kangourou, administration du colostrum, allaitement précoce, soins du
cordon ombilical) ; (iii) enregistrement des naissances ; (iv) allaitement maternel exclusif ; (v)
soins aux nouveau-nés et aux enfants malades ; (vi) traitement de la diarrhée ; (vii) vaccination ;
(viii) utilisation de la moustiquaire imprégnée ; (ix) hygiène des mains aux moments critiques.
Les résultats attendus de l’étude ont été définis dans les TDR et précisés dans le protocole de
recherche. Ils se rapportent aux : (i) pratiques actuelles des groupes, éventuellement définies en
termes de recours de 1ère et 2de instance ; (ii) attitudes des groupes, définies à partir des
raisons données pour légitimer la pratique habituelle (comportement promu par le MSPF-PS ou
alternative) ; (iii) connaissances des groupes, définies par rapport aux connaissances de base
ciblées par le MSPF-PS ; (iv) perceptions relatives aux coûts associés au recours aux soins.
1.1.2. Choix des sites
L’étude ne pouvant couvrir les dix Régions de convergence du Programme, les régions où a été
menée l’enquête ont été sélectionnées sur la base des critères de sélection des Régions de
convergence utilisés par le MSPF-PS pour circonscrire les zones d’intervention du Programme,
de façon à représenter des aires socioculturelles ‘homogènes’. Les Régions retenues sont au
nombre de quatre :
(i) DIANA (représentant l’aire formée par les Régions de DIANA, Sofia, Boeny et Melaky) ;
(ii) Alaotra Mangoro (représentant l’aire formée par les Régions d’Alaotra Mangoro et
d’Analamanga – hors Capitale) ;
(iii) Atsimo Atsinanana (représentant l’aire Atsimo Atsinanana)
(iv) Atsimo Andrefana (représentant l’aire formée par les Régions d’Atsimo Andrefana,
Anosy et Androy).
(v) Antananarivo Renivohitra (la Capitale) qui représente une aire socioculturelle
particulière et fait partie de la Région d’Analamanga.

 3
Les sites de l’étude ont été choisis dans ces Régions pour permettre une représentation des
milieux urbains et ruraux mais en tenant compte de l’accessibilité de ces derniers. Ils incluent
les localités suivantes :
(i) Rurales : Beramanja (DIANA), Andilanatoby (Alaotra Mangoro), Lopary (Atsimo
Atsinanana), Ampanihy (Atsimo Andrefana) ;
(ii) Urbaines : Farafangana (Atsimo Atsinanana), Toliara (Atsimo Andrefana), Antananarivo
Renivohitra (Analamanga).
1.1.3. Choix des groupes-cibles
Les groupes des GDD ont été consisté en 7 groupes femmes et 5 groupes hommes dont la
composition a tenu compte des facteurs pouvant influencer les CACP :
(i) le niveau d’éducation de la femme : illettrée ou plus de 4 années d’études ;
(ii) l’âge de la mère : moins de 24 ans ou 25 ans et plus ;
(iii) le statut socio-économique du ménage : pauvre ou moins pauvre ;
(iv) le milieu de résidence : rural ou urbain.
Les hommes et les femmes ont été choisis comme cible des GDD en raison de leur implication
directe ou indirecte dans le parcours de soins. Les groupes constitués se présentent comme
suit :
Typologie et DIANA Alaotra Mangoro ATsimo Andrefana Atsimo Atsinanana Capitale
répartition des
GDD Rural Rural Rural Urbain Rural Urbain Urbain

Sites Beramanja Andilanatoby Ampanihy Toliara Lopary Farafangana Antananarivo


L MP– -24ans P-25ans + P–25ans +
Femmes
- -
NL P–25ans + P– 24ans P- 24ans MP–25ans+
L* MP P
Hommes
NL* MP P P
Nombre GDD 2 2 2 1 2 1 2
P : pauvre ; MP : moins pauvre ; L : lettré ; NL : non lettré/illettré ; (L* et NL* : concernent le niveau d’éducation de la conjointe de
l’homme) ; -24ans : âge inférieur ou égal à 24 ans ; 25ans + : âge supérieur ou égal à 25 ans.

Les cibles des entretiens semi structurés ont été identifiées sur la base de leur implication
actuelle ou potentielle dans la promotion des pratiques promues par le MSPF-PS au sein de la
communauté. Ils comprennent des autorités administratives, leaders traditionnels, notables et
agents communautaires de santé et de nutrition.
1.2. Déroulement de l’étude
L’étude a consisté à mener les tâches suivantes :
1.2.1. Revue documentaire
La revue documentaire a porté sur les études, enquêtes et revues internationales et nationales
ayant un rapport avec les thèmes de l’étude et sur la technique de recherche retenue. Elle a
permis d’identifier les informations à recueillir par l’étude et de retenir un modèle de
changement de comportement qui fait la synthèse des théories en la matière. Ce modèle a servi
à orienter le contenu des outils d’enquête vers la collecte d’information rendant compte des
facteurs facilitant ou pouvant faire obstacle à l’adoption des comportements recommandés
relatifs aux pratiques étudiées.
1.2.2. Elaboration du protocole de recherche

 4
Un protocole de recherche a été développé dans le but de définir des références communes au
MSPF-PS, à l’UNICEF et à FOCUS DEVELOPMENT dans les objectifs et la méthodologie de l’étude,
compte tenu notamment des thèmes additionnels requis par l’UNICEF par rapport aux termes
de référence (colostrum, vaccination) et du nombre élevé de connaissances de base et
comportements attendus à investiguer.
Le draft du protocole a été présenté au Comité de Suivi du MSPF-PS et à l’UNICEF afin de
recueillir les commentaires éventuels. Le protocole a été finalisé en tenant compte des
suggestions recueillies sur d’autres thèmes additionnels à investiguer ou aspects
méthodologiques:
(i) l’intégration des jeunes mères de moins de 15 ans dans les groupes cibles étant donné la
prévalence des grossesses précoces ;
(ii) les perspectives de soutien et support communautaire à travers les leaders
communautaires ;
(iii) l’observance dans la prise du FAF par les femmes enceintes ;
(iv) les attitudes des participants par rapport à la responsabilisation directe et implication
immédiate des hommes dans le suivi de l’état de santé de la femme et de l’enfant et
l’octroi à la femme d’un pouvoir de décision égal à l’homme quant aux dépenses
relatives aux soins de la mère et de l’enfant dans le ménage. Ce dernier thème a été
retenu en raison de la place de l’homme dans le pouvoir de décision pour des questions
touchant directement la santé de la mère et de l’enfant dont elle a la charge et qui peut
ou non rendre compte de délais dans la recherche des soins.
1.2.3. Elaboration des outils de collecte des données
Les outils de collecte des données ont consisté en guides de discussion et guides d’entretien. Ils
ont été élaborés en tenant compte des objectifs et résultats attendus de l’étude et donc, du type
d’informations à recueillir auprès des différents groupes.
Les thèmes abordés dans chaque guide sont ceux qui intéressent le groupe ou la catégorie de
personne concernés en raison de leur implication plus ou moins forte dans la recherche des
soins de la mère et de l’enfant. Ainsi, le guide de discussion destiné au groupe femmes a
couvert pratiquement tous les thèmes, les femmes constituant la cible primaire du Programme
en tant que bénéficiaires des soins et chargées des soins de l’enfant. Le guide destiné aux
hommes a également couvert l’ensemble de ces thèmes mais en les considérant comme ceux
qui détiennent le pouvoir de décision au sein du ménage pour le recours aux soins et en vue de
définir leur degré de participation actuelle et potentielle dans les soins de la femme enceinte et
de l’enfant. Les thèmes « méthode kangourou, colostrum et allaitement précoce » ont été traités
uniquement avec les groupes femmes dans la mesure où les hommes ne sont pas impliqués
dans ces pratiques. Le thème de l’enregistrement des naissances a été traité avec les hommes
uniquement dans la mesure où ce sont eux qui prennent cette initiative. Les guides d’entretien
ont portés sur les soutiens et les supports communautaires actuels et potentiels et sur les soins
au cordon ombilical (interview des accoucheuses traditionnelles).
Les différents guides ont été conçus en malgache parce qu’administrés dans cette langue. Ils ont
été ensuite traduits en français à l’intention des personnes intéressées par la recherche qui ne
parlent pas le malgache.
1.2.4. Formation de l’équipe de recherche
La formation de l’équipe de recherche a consisté en un exposé par l’UNICEF sur la situation de
la mortalité infanto-juvénile justifiant le choix des 5 pratiques clés, la présentation du modèle de
changement de comportement choisi pour déterminer le contenu du questionnement de la
recherche qualitative et l’analyse des données recueillies les outils de traitement des données.

 5
La formation théorique à l’utilisation du modèle de changement de comportement a consisté
en :
(i) définition de la pratique actuelle et normative vs. le comportement recommandé ;
(ii) traduction des 5 pratiques-clés en comportements recommandés ;
(iii) présentation des connaissances de base que le groupe-cible doit avoir pour pratiquer le
comportement recommandé ;
(iv) définition des étapes dans le changement de comportement et des facteurs positifs et
négatifs qui peuvent faciliter ou faire obstacle au passage à chacune de ces étapes
(connaissances, perceptions, croyances/idées fausses, influences de l’entourage et
aspects liés au service et aux produits de santé) ;
(v) implication pour la recherche : identifier le pourquoi des pratiques actuelles
(comportement recommandé ou non) soit, leurs déterminants.
Elle a été suivie d’une formation pratique des participants répartis en deux groupes de travail :
(i) application du modèle de changement de comportement à un cas personnel (intégration
du modèle à l’expérience vécue des participants) et au questionnement sur 4 thèmes :
CPN, TRO, enregistrement des naissances, allaitement exclusif ;

(ii) Mise en relation du modèle de changement de comportement avec les informations à


rechercher ;
(iii) Mise en relation des informations à recueillir avec les objectifs de l’analyse CACP.
L’élaboration des outils de collecte et leur pré test ont été intégrés dans la partie formation afin
de faciliter leur appropriation par l’équipe de recherche.
Pré test des outils de collecte
Les guides de GDD ont été prétestés dans des zones urbaines et rurales situées dans le district
d’Ambohidratrimo - Ivato et Imerimandroso - respectivement distantes de 20 km et 35 km
d’Antananarivo. Les groupes de prétest comprenaient un groupe Femmes-Moins de 24 ans-
Rural, Pauvres-Lettrées, un groupe Hommes-Rural, Pauvres-Conjointe Non Lettrée et un
groupe Femmes-25 ans et plus-Urbain-Moins Pauvres-Lettrées. Les guides d’entretien ont été
prétestés, en milieu rural, auprès d’une accoucheuse traditionnelle, un leader administratif et
deux agents communautaires, et en milieu urbain, auprès d’un agent communautaire et un
leader administratif.
Les résultats du pré test ont permis d’identifier les questions nécessitant une reformulation. Ils
ont également permis de se rendre compte de la longue durée des discussions en raison de la
multiplicité des thèmes traités, qui a occasionné le survol des thèmes traités en dernier.
Les leçons tirées du pré test ont amené l’équipe de recherche à repenser l’approche à mettre en
œuvre dans l’organisation des GDD, à savoir :
(i) réarranger dans le guide l’ordre des thèmes de manière à ce que ceux jugés « plus
déterminants » pour le Programme puissent être abordés en premier ;
(ii) prévoir l’insertion, dans le temps des discussions, d’une période de pause avec la
fourniture d’un repas aux participants.
Les réarrangements apportés ont principalement déplacé les soins au nouveau-né et enfant de
moins de 5 ans qui ont été traités avant les soins prénatals, l’ordre adopté pendant le pré test
ayant suivi le cycle de vie commençant par la grossesse.
1.2.5. Collecte des données

 6
La collecte des données a d’abord été menée à Antananarivo Renivohitra, avec la participation
de tous les membres de l’équipe, pour être poursuivie de manière parallèle, par des équipes
distincles, dans les quatre autres Régions de l’étude. Elle a porté sur un total de 99 participants
(60 femmes et 39 hommes) à travers les 12 GDD prévus et 41 personnes interviewées
individuellement ou en groupe3. Ces dernières comprennent : 11 autorités administratives, 6
leaders traditionnels, 16 agents communautaires et 8 accoucheuses traditionnelles. Des
rencontres ont également eu lieu avec 9 agents de santé (inspecteurs, adjoints techniques,
médecins, sages-femmes) dans le cadre de visites de courtoisie et pour connaître la
correspondance entre les signes de maladie décrits par les groupes cibles et les termes utilisés
dans le milieu médical. Un groupe nominal (panel) formé de 5 personnes4 a été organisé à
Toliara dans le but d’appréhender la pertinence et la faisabilité d’une stratégie d’approche
relative au changement social suggérée par une autorité interviewée.
Les groupes de discussion ont été menés par une équipe comportant un animateur, un
rapporteur et un observateur. Le recrutement d’interprètes locaux s’est avéré nécessaire dans
certains sites ruraux où les participants et l’équipe d’animation avaient des difficultés à
comprendre leurs dialectes respectifs. Toutes les discussions ont été enregistrées sur appareil
électronique (MP3).
1.3. Traitement et analyse des résultats
Les données recueillies ont fait l’objet d’un débriefing entre les membres de l’équipe afin de
dégager les premiers éléments d’information obtenus et d’identifier les points requérant un
ajustement. Ainsi, les résultats de débriefing sur les données recueillies à Antananarivo ont fait
ressortir la nécessité d’aligner le guide de discussion pour les groupes hommes sur celui des
groupes femmes afin de pouvoir comparer entre les deux types de groupe lors de l’analyse des
données. Dans les autres sites, le débriefing a permis de vérifier si les données attendues
avaient bien été recueillies et de recontacter le groupe enquêté pour des informations
additionnelles éventuelles.
Le traitement des données a suivi le processus suivant :
(i) transcription intégrale des discussions qui ont été enregistrées ;
(ii) saisie des transcriptions sur Word et édition des transcriptions sur Ethnograph ;
(iii) dépouillement manuel des données en les organisant en fonction des informations
recherchées ;
(iv) analyse de contenu des transcriptions.
L’analyse a porté sur chaque groupe de discussion et a ensuite comparé entre les groupes. Les
convergences, divergences et singularités relevées ont été prises en compte dans la restitution
des résultats par thème.
Les facteurs susceptibles de faciliter ou empêcher l’adoption des comportements recommandés
ont été identifiés à partir des données des GDD relatives aux connaissances et perceptions
relatives au comportement recommandé et raisons données pour légitimer les pratiques
actuelles (comportement recommandé ou non). Les résultats de cette analyse ont été combinés,
croisés et rapprochés des informations recueillies auprès des informateurs clés interviewés.
1.4. Difficultés et contraintes rencontrées

3
Les personnes interviewées étaient prises ensemble lorsqu’elles étaient de même catégorie et plus de deux à être disponibles. C‘était le cas
notamment des agents communautaires.
4
Un professeur d’université, un chef fokontany, un président de conseil municipal, un leader traditionnel (olobe) et un fonctionnaire retraité.

 7
Les difficultés et contraintes rencontrées découlent principalement de la multiplicité des thèmes
à traiter dans l’étude. Elles se sont traduites par une durée excessive des GDD et une quantité
énorme de données (1000 pages de transcription). Le traitement et l’analyse des données ont
dès lors pris plus de temps que pour une étude CACP standard. Dans certains groupes, les
dernières parties des discussions ont dû être accélérées pour permettre à quelques participantes
enceintes de rentrer tôt car ayant encore à faire une longue marche à pied. Ces contraintes
n’ont pas altéré outre mesure la qualité de la collecte des données et de leur analyse.

 8
Introduction
Les résultats de l’étude sont présentés par thème. Ils portent sur les connaissances, attitudes,
croyances et pratiques (CACP) des groupes cibles par rapport aux pratiques clés recommandées
par le MSPF-PS :
(i) soins prénatals : utilisation des moustiquaires imprégnées par les femmes enceintes dans
les zones d’endémie palustre ; quatre visites obligatoires pour la consultation prénatale
(vers le 3, 5, 7 et 9 mois de grossesse) ; reconnaissance des signes de danger et
recherche immédiate des soins cliniques ;
(ii) soins néonatals : gestion de la température (contact corps à corps ou méthode
Kangourou) ; administration du colostrum ; allaitement maternel dans la 1/2heure
suivant la naissance ; soins du cordom ombilical ; enregistrement des naissances dans les
délais légaux (12 jours) ;
(iii) allaitement maternel exclusif : à partir de la naissance et pendant les 6 premiers mois ;
(iv) soins des enfants malades : soins au nouveau-né de 0 à 28 jours ; soins aux enfants de
moins de cinq ans (reconnaissance des signes de maladie et de danger et recours aux
soins) ;
(v) vaccination : 5 contacts (à la naissance, à 1 mois 15 jours, 2 mois 15 jours, 3 mois 15
jours et 9 mois) ;
(vi) prévention du paludisme chez les enfants de moins de 5 ans : utilisation de la
moustiquaire imprégnée dans les zones d’endémie palustre ;
(vii) thérapie par réhydratation orale (TRO) : ODIVA, solution maison et administration de
fluides et aliments en plus du lait maternel pour les enfants de plus de 6 mois ;
(viii) lavage des mains aux moments critiques : avant d’allaiter/préparer le repas, avant de
manger et après avoir fait ses besoins ou évacué les selles de l’enfant/changé le bébé.
Les causes des délais dans le recours aux soins (1ère et 2nde instance) sont identifiées à partir des
données CACP recueillies.
Les résultats de l’étude portent également sur les coûts consentis par les groupes-cibles pour le
recours aux soins, sur les mécanismes de prise de décision au sein du ménage pour le recours
aux soins et sur le degré de participation des hommes dans les soins de la femme enceinte et de
l’enfant. Enfin, ils présentent les sources et canaux de communication par lesquels les groupes-
cibles reçoivent ou souhaitent recevoir des informations sur les soins de la femme enceinte et
de l’enfant.

2.1. Soins prénatals

 9
L’étude vise à analyser les Connaissances, Attitudes, Croyances et Pratiques (CACP) des
groupes-cibles interrogés par rapport à la consultation prénatale. Elle identifie les tendances
dans les connaissances, attitudes et croyances sous-tendant le recours aux soins. Elle prend
comme points de références les connaissances et pratiques promues par le MSPF : (i) Effectuer 1
CPN au CSB dès les premiers signes de grossesse et avant la fin du quatrième mois grossesse ; (ii)
Revenir au CSB aux RDV indiqués pour 3 autres CPN, avec environ 1 mois minimum et 2 mois
maximum d’intervalle entre chaque visite soit, idéalement, aux 5 mois, 7 mois et peu avant le
terme (9 mois) ; (iii) connaissance des signes de danger (maux de tête intenses, œdème du
visage, des mains et des pieds, pâleur des paumes de la main) ; (iv) Consulter le centre de santé
dès les premiers signes de danger.
2.1.1. Connaissances et attitudes des groupes sur la CPN
Définition de la CPN

Les groupes « hommmes » et « femmes » désignent la CPN par les termes ‘fisafoana’5 à
Analamanga et Alaotra Mangoro et ‘fitsapana’6 dans les autres régions. Les deux termes sont
indifféremment utilisés dans la région du Sud Ouest. Lorsqu’ils sont interrogés sur la
signification de ces termes, ces groupes renvoient aux soins donnés aux femmes enceintes
jusqu’à l’accouchement et les caractérisent par :
(i) le type de prestataires de soins : la sage-femme (‘rasazy’) ou le médecin (‘dokotera’) ;
(ii) le type de soins administrés, qui semble varier en fonction de l’expérience personnelle
des participants aux GDD : la mesure de la hauteur utérine, la prescription de
médicaments (fer, nivaquine ou autres médicament prescrit par la sage femme en
fonction de l’état de santé de la femme enceinte), l’écoute des battements du cœur de
l’enfant, la vaccination, la prise du poids et de la tension et le prélèvement des urines et
de sang ;
(iii) la fréquence et périodicité des consultations qui seraient fonction des ‘rendez-vous’ fixés
par l’Agent de Santé.
Timing et fréquence de la CPN

La majorité dans les groupes « hommes » et « femmes » disent qu’il est nécessaire de voir une
sage femme au cours du 2è ou du 3è mois de grossesse, après avoir constaté l’absence de règles.
Le Sud Ouest rural se distingue de l’ensemble des autres sites par l’utilisation d’expressions
locales distinguant entre les CPN précoces qui commencent vers le 3è-4è mois (‘misafo kely’) et
les CPN tardives qui commencent au-delà du 5è mois (‘misafo be’).
Dans tous les groupes, le timing pour la fréquentation de la 1ère CPN « On y revient souvent, c’est du
semble être fonction de la conception qu’ils se font de la grossesse : ils ‘centimètre’ (sic) qu’on observe. Il
grandit. » [F25ans -Rur-PNL, DIANA] +

auraient tendance à attendre pour aller en CPN que le fœtus se soit « Je suis allée chez la sage-femme pour
formé pendant les premiers mois de la grossesse. La raison invoquée faire la CPN, mon ventre avait 2 mois, mais
pour faire la 1ère CPN vers le 3è ou 4 è mois renvoie en effet elle m’avait dit de revenir au 3 mois, ‘je ne
è

peux pas encore mesurer ton ventre’


invariablement au fait que « le ventre est visible avec une grosseur qu’on m’avait-elle dit. » [F25ans -Urb-MP-NL, +

peut mesurer ». Le lien opéré entre le timing pour la 1ère CPN et la Atsimo Atsinanana]
grosseur du ventre est peut-être basé sur l’expérience personnelle des participantes aux GDD au
centre de santé. Les groupes « femmes » semblent en effet accorder une attention particulière à
la mesure de la hauteur utérine. Certains agents de santé encourageraient même les femmes à
5
‘Fisafoana’ : CPN ; ‘Misafo’ : faire de la CPN ; ‘Mpampisafo’ : le prestataire de CPN ; ‘Mpisafo’ : les femmes qui font de la CPN.
6
‘Fitsapana’ : CPN ; ‘Mitsapa’ ou ‘Mampitsapa’ : faire de la CPN ; ‘Mpitsapa’ : le prestataire de CPN.

 10
attendre qu’elles aient un ventre suffisamment développé pour aller en CPN. Les groupes
« femmes » disent également qu’elles suivent les conseils de la mère ou se basent sur
l’expérience des pairs « qui l’ont fait à cette période ».
« Moi, personnellement, si je suis en
Les groupes « hommes » semblent pouvoir situer le moment de la 1ère CPN bonne santé, je n’ai pas envie d’aller à
mais sont, dans la majorité, incapables de citer le nombre et la périodicité l’hôpital, j’ai la flemme d’y aller. Mais si
je ne suis pas en bonne santé, voilà qui
des CPN suivantes. Les connaissances des groupes « femmes » sur la m’amène à voir la sage-femme. Si je suis
fréquence et la périodicité des autres visites en CPN semblent être en bonne santé, j’y vais seulement à 7
meilleures que celles des groupes « hommes » mais seraient davantage mois, j’y reviens deux fois et à la
troisième fois, j’accouche. » [F25ans - +

basées sur leur expérience personnelle que sur une information reçue. La Rur-P-L, Atsimo Andrefana]
plupart des groupes « femmes » déclarent suivre les recommandations « Cela dépend de chacun. Si tu
données par la sage femme. En fait, le nombre des consultations supportes la maladie, tu attends quatre
mois, si tu ne supportes pas, tu te dis ‘je
prénatales semble être fonction de la période à laquelle la 1ère CPN a eu vais y aller à trois mois’.» [F25ans -Rur-
+

lieu : plus elle est tardive, moins il y a de consultations prénatales P-NL, DIANA]
suivantes. «Moi, je n’ai pas de maladies. Je n’ai pas
encore de maladies et, puis, mon ventre
est encore petit, alors je reste
Délais dans la fréquentation de la CPN simplement avec mon mari.» [F25ans - +

Urb-MP-NL, Atsimo Atsinanana].


Selon les groupes « femmes », c’est l’éloignement par rapport au centre de
santé qui rendrait principalement compte du retard dans la 1ère CPN et, par conséquent, dans le
nombre plus réduit des consultations prénatales suivantes. L’autre motif invoqué, qui renvoie
également à l’éloignement par rapport au centre de santé est la plus grande proximité
géographique des Accoucheuses Traditionnelles et la qualité de leur accueil, particulièrement
appréciée. Enfin, l’absence de malaise ou de maladie amènerait parfois la femme enceinte à
reculer sa première consultation. Certaines femmes n’iraient en fait en CPN que si elles ont des
malaises ou se sentent malades.
Les conceptions relatives au développement du fœtus pourraient « A quatre mois, on le sent battre,
également rendre compte de délais dans la 1ère CPN. Les groupes respirer, tandis qu’à trois mois dont
« hommes » et « femmes » semblent en effet considérer qu’avant le stade vous parlez, ce n’est encore que du sang
agglutiné, il n’y a rien mais c’est encore
du 3ème ou 4ème mois, le bébé ‘n’existe pas’ : le fœtus est parfois traité de un animal.» [F25ans -Rur-P-L, Atsimo
+

liquide (‘eau’, ‘sang’) ou d’animal (‘biby’). De façon générale, les femmes Andrefana]
éviteraient de révéler leur état avant que la grossesse ne soit visible pour des motifs qui peuvent
varier entre les régions. Ainsi, les groupes du Sud Ouest rural où le retard dans la 1ère CPN
semble être une pratique courante se réfèrent à la polygamie, pratiquée
C’est
dans la zone concerné : les coépouses se feraient concurrence sur le plan «communauté une honte devant la
et l’entourage si tu es vue
du nombre d’enfants qu’elles ont de leur partenaire commun et iraient en en CPN alors que les gens ne voient pas
CPN seulement à partir du moment où elles peuvent montrer leur ‘gros’ ton ventre augmenter de volume. »
ventre avec fierté, sans plus de risque d’être accusées d’avoir imaginé une [F25ans -Rur-P-L, Atsimo Andrefana]
+

grossesse en cas de fausse couche.


Nature des prestations délivrées lors de la CPN

Les prestations offertes en CPN sont, comme on l’a indiqué plus haut, relativement bien
connues par les groupes « femmes ». Cette connaissance semble reposer sur leur expérience
personnelle et varie ainsi en fonction des individus. De façon générale, les prestations les plus
fréquemment citées sont :
(i) la mesure de la « grosseur du ventre » (mentionné explicitement dans tous les groupes) ;
(ii) la prescription de médicaments : ‘fer’, ‘comprimé de couleur rouge’,
‘nivaquine’,‘paludar’,‘vitamine’, ‘médicament contre les vers intestinaux’,’comprimé de
couleur blanche’, ‘comprimé de couleur jaune’ (mentionnée par tous les groupes même

 11
si la nature des médicaments décrits varie parfois, en fonction de l’expérience des
participants aux GDD) ;
(iii) « l’écoute du ventre » (relevée dans quelques groupes) ;
(iv) la vaccination (relevée dans quelques groupes qui semblent savoir qu’elle a pour objectif
la prévention du tétanos) ;
(v) la prise de poids (relevée dans quelques groupes) ;
(vi) la prise de la tension (mentionnée de façon éparse dans quelques groupes) ;
(vii) le prélèvement d’urine (cas isolé) ;
(viii) le prélèvement de sang (cas isolé).
Par contre, la description des prestations par les groupes « hommes » semble traduire des
connaissances limitées en la matière. Elles concerneraient uniquement la prescription de
médicaments (souvent sans autres précisions), les conseils sur le régime alimentaire à suivre par
la femme enceinte (en raison de leur statut de chef de famille, les hommes ont pour rôle de
nourrir la femme enceinte et allaitante et les enfants, ce qui explique leur intérêt en la matière)
et, plus rarement, la vaccination.
FAF

Les effets positifs attendus du fer sur la santé de la mère et de l’enfant sont « C’est de ‘l’anti corps’ (sic), le Fer
dont vous parlez. Selon les dires des
la principale motivation rapportée par les groupes « femmes » pour gens, ce médicament est de l’anti
l’observance du traitement. Ces effets ne semblent cependant pas toujours corps, pour que ton corps soit épargné
connus ou compris, même par la majorité des femmes qui fréquente la de maladies pendant que tu es
enceinte. Ces personnes âgées en
CPN, reflétant peut-être un manque d’information de la part des agents de prennent aussi et ce sont elles qui
santé ou leur mésinterprétation par les femmes (aspect lié à l’offre de disent que c’est de l’anti corps. »
services, hors de l’objet de l’étude). La majorité des participantes aux GDD [F24ans -Urb-P-NL, Atsimo Andrefana]
-

soutiennent que le FAF a pour effet de prévenir les hémorragies lors de « Ça (le Fer) donne de la force à
l’enfant, dit la sage-femme. On doit les
l’accouchement mais de nombreuses participantes au GDD reconnaissent avaler parce qu’il se pourrait qu’on
qu’elles en prennent sans en connaître la raison. Une minorité pense que perde beaucoup de sang (à
le FAF « rajoute du sang ». La connaissance des groupes « hommes » sur le l’accouchement)… » ; « Si tu manques
de Fer, c’est l’hémorragie… » [F24ans --

Fer semble être encore plus nébuleuse. Rur-MP-L, Alaotra Mangoro].

Signes de danger pendant la grossesse

La connaissance des signes de danger pendant la grossesse semble faible dans les groupes
« femmes » et plus encore dans les groupes « hommes ». Les groupes « femmes » évoquent
principalement des douleurs dans le ventre, la perte d’eau précoce et les saignements. Le
danger que représentent les signes retenus par le MSPF (maux de tête intenses, œdème, pâleur
des paumes de la main) semble minimisé par la majorité des participantes aux GDD, y compris
celles ayant fréquenté la CPN, reflétant peut-être l’insuffisance de l’information fournie aux
femmes qui viennent au centre de santé pour la consultation prénatale (aspect lié à l’offre de
services, hors de l’objet de l’étude).
Raisons données pour faire la CPN « On va au centre de santé pour qu’on
puisse savoir qu’est-ce qu’il y a dedans, un
L’ensemble des groupes indique que la 1ère consultation prénatale serait être humain ou non, ou est-ce une
maladie » [F25ans -Rur-P-NL, DIANA]
+

motivée par le souci de confirmer la grossesse. Comme indiqué plus « Parfois, il se pourrait que ce ne soit pas
de la grossesse mais autre chose. Est-ce
vraiment de la grossesse ou non ? » [H-
Rur-P-NL*, Atsimo Andrefana]

 12
haut, elle devrait avoir lieu vers le 2è mois ou, parfois, le 3è mois pour connaître les raisons de
l’absence des règles.
La seconde raison donnée par les groupes pour aller en CPN consisterait à faire vérifier la santé
de la mère et du fœtus (position et croissance) pour déterminer les mesures ou médicaments
éventuels à prendre pour guérir les maladies identifiées ou corriger les anomalies détectées. La
prévention de la fausse couche et des autres problèmes pouvant affecter l’enfant à naître
constitue certainement l’élément de motivation le plus important pour « Pour qu’il (l’AS) sache comment va ta
aller en CPN pour les groupes « hommes » et pour les groupes santé et celle de l’enfant qui est dedans.
« femmes ». Cependant, les préoccupations sous tendant la Parfois, il a de la maladie pendant qu’il est
là-dedans » [F25ans -Rur-P-NL, DIANA] +

fréquentation de la CPN varient entre ces deux types de groupes. Pour


les groupes « femmes », c’est à la fois le souci de santé de la femme et de l’enfant qui
prédomine. Les groupes « hommes » semblent davantage s’inquiéter de la santé de l’enfant, la
santé de la mère étant considérée uniquement dans la mesure où elle porte l’enfant.
La fréquentation de la 1ère CPN serait motivée en troisième lieu par des événements
déclencheurs, les plus fréquemment cités étant les malaises ressentis par la femme ou les signes
d’une maladie qu’elle associe ou non à sa grossesse et dont la nature lui parait relever des
compétences de l’Agent de santé. Plus le malaise ou la maladie apparaît tôt, plus la 1ère CPN
serait précoce.
Enfin, les risques inhérents à l’accouchement semblent parfaitement perçus : ce serait
notamment en raison des appréhensions liées à l’accouchement (peur de son issue fatale) que
les femmes se rendraient en CPN. Elle permettrait ainsi non seulement de vérifier si l’état de
santé de la mère n’a pas d’incidence sur la santé de l’enfant à naître mais constituerait une
« assurance » pour être prise en charge par le centre de santé en cas de problème lors de
l’accouchement. La crainte des remontrances ou du refus des agents de santé de soigner la
femme enceinte lorsqu’elle tombe malade ou en cas de problème lors de l’accouchement
constitue en effet un motif invoqué par certaines femmes pour aller en CPN. Le personnel de
santé utiliserait en effet des méthodes coercitives, peu appréciées des femmes et des hommes,
pouvant parfois avoir des effets négatifs sur la fréquentation de la CPN : certaines femmes
craindraient les sages-femmes et éviteraient alors de recourir à ses services.
Les autres raisons invoquées pour aller à la CPN seraient, par ordre de prévalence décroissant :

- Influence de l’entourage
« Moi, dans mon cas, j’ai été forcée par ma
Le suivi des conseils donnés par l’entourage représente un facteur «Le docteur mère dem’avait
faire deditla de
CPNcommencer
au 3è moislescar CPN
déterminant dans la fréquentation de la CPN pour les femmes dont seulement c’est àlapartir du 3è mois,
première fois j’ai
quesimplement
j’allais
suivi accoucher.
son conseil »Elle
[F25ans+-Urb-p-l,
disait que je dois Analamanga]
faire de
c’est la première grossesse. La tendance générale voudrait en effet la mon (‘misafo’) à partir
ère « Dans CPN cas, ma femme allait du
chez3èl’at,
mois »
celle-ci
que les femmes dont c’est la 1 grossesse aillent en CPN au centre lui disait [F24ans -Rur-
d’aller MP-L, Alaotra
-
à l’hôpital Mangoro].
» [h-Rur-p- nl*, Atsimo
de santé non de leur propre initiative mais parce qu’elles suivent le Andrefana] « Je ne savais pas que j’étais enceinte mais
c’est ma mère qui soupçonnait quelque
conseil donné par : (i) la mère ou la belle-mère (conseil donnés chose. Alors, elle m’avait forcée d’aller
lorsque la grossesse est confirmée) qui aurait tendance à recommander chez le docteur » [F24ans -Rur-P-NL, -

à sa fille ou belle fille de faire la CPN quand elle a elle-même fait la CPN Atsimo Atsinanana]
ou accouché dans un centre de santé ; (ii) les agents de santé (conseil
donné lors d’une consultation médicale) ; (iii) l’AT (conseil donné lors des séances de massage).
La consultation prénatale au CSB se transformerait ensuite en habitude pour les grossesses
ultérieures.
« Dans mon cas, les gens nous disaient que les
- Confiance en les compétences des agents de santé femmes enceintes ne doivent pas prendre des
comprimés alors que ma femme en prenait, c’est
le docteur lui-même qui lui donnait, je crois, de la
nivaquine lorsqu’elle avait le paludisme. Mais mon
enfant était né indemne, sa santé était normale …
rien ne lui arrivait alors que la grossesse de ma
 13 femme était à son 6è mois quand elle tombait
malade... C’est pour ça que je dis qu’on a besoin
que la femme enceinte se fasse suivre sa santé
chez le docteur car nous, nous n’avons pas de
Le sentiment de sécurité inspiré par les compétences des agents de santé représenterait un
autre facteur rendant compte de la fréquentation de la CPN. La confiance en les compétences
des agents de santé serait généralement basée sur une expérience personnelle positive. Les
groupes justifieraient en effet le plus souvent le recours aux soins du personnel formé en se
référant à leur expérience des conséquences bénéfiques du traitement prescrit par l’agent de
santé.
Les groupes auraient également confiance en les compétences des Agents sanitaires en raison
de la formation qu’ils ont reçue et à cause des techniques modernes et médicaments ‘vazaha’
(étranger) qu’ils utilisent.
Enfin, la confiance des groupes à l’endroit des Agents de santé serait également fonction de
celle que leur accorde l’Accoucheuse Traditionnelle. Les femmes enceintes accepteraient en
effet d’aller voir un Agent de Santé lorsque c’est l’Accoucheuse Traditionnelle qui le leur
conseille. Cette dernière aurait tendance à les référer à l’agent de santé « pour s’assurer de
l’absence de risques » avant d’accepter de les assister lors de « Voilà comment j’aime aller à l’hôpital… Si je suis
l’accouchement. Cette attitude favorable de l’Accoucheuse enceinte, par exemple, et que l’enfant est en
mauvaise place, en train de descendre, la sage-
Traditionnelle vis-à-vis de l’Agent de Santé serait favorisée par son femme sait en donner la solution. Elle en voit les
exposition aux séances de sensibilisation et sa participation à la conséquences, elle te donne de la piqûre. »
formation menée par le Ministère de la Santé et les autres [F25ans -Urb-MP-NL, Atsimo Atsinanana]
+

intervenants.

- La perspective des avantages associés à la CPN au centre de santé


Les principaux avantages à retirer du fait d’aller faire la CPN seraient « De toute façon, on a besoin de l’hôpital
de pouvoir bénéficier de soins médicaux en cas d’accouchement lorsqu’on est enceinte car on y établit l’acte de
naissance de l’enfant. La vie est difficile si on
difficile et de pouvoir obtenir une copie de l’acte naissance de n’accouche pas à l’hôpital » [F25ans -Rur-P-NL, +

l’enfant. Ce dernier avantage est en effet lié à l’accouchement dans DIANA]


un centre de santé, qui est conditionné par la fréquentation de la CPN. La distribution de
moustiquaires imprégnées dans les CSB est également citée comme un facteur de motivation.

- Influence du partenaire
Le choix de l’Agent de Santé comme fournisseur de soins à la femme enceinte relèverait de
l’initiative de cette dernière mais le consentement et le soutien de l’homme seraient
incontournables pour passer à l’action. C’est, en effet, l’homme qui « Je lui en parle avant de partir (chez le docteur)
serait chargé d’assumer les frais des soins pour la femme enceinte. car l’argent est avec lui. Je lui dis que je me sens
De façon générale, l’homme se conformerait aux décisions prises par un peu malade et ai besoin d’aller chez le
docteur » [F24ans -Rur-P-NL, Atsimo Atsinanana]
-

son entourage quant au type de prestataire à visiter que ce soit dans le


cadre de la CPN ou pour toute autre maladie. Il admettrait généralement qu’une décision
commune est meilleure qu’une décision unilatérale, particulièrement dans le cas de la grossesse
qui concerne deux individus : la mère et l’enfant à naître.

Certains participants aux GDD ont déclaré vérifier le carnet de santé « C’est elle qui choisissait d’aller chez le docteur
de leur femme enceinte pour connaître le résultat des CPN et s’assurer car c’était déjà son deuxième enfant » [H-Urb-P-
NL*, Analamanga]
du suivi des recommandations de l’agent de santé. D’autres
« Si, par exemple, il y a quelque chose qu’elle
conseilleraient directement à la femme de faire la CPN. D’autres ne sent pas bien, il appartient à l’homme
encore penseraient que c’est à la femme que revient la responsabilité d’engager une concertation. C’est en fonction
de lui signifier ce qui lui est nécessaire. Tous s’accordent à reconnaître de son état de santé que je prends mes
responsabilités. Par exemple, si elle dit ‘je ne
qu’ils sont les premiers responsables des soins à donner à la femme me sens pas bien car je suis trop fatiguée’, alors
enceinte et seraient prêts à tenir leur rôle. je lui dis d’aller se faire masser. Ou bien, elle dit
‘je ne me sens pas en bonne santé car voilà ce
qui m’arrive’, alors je lui dis d’aller chez la sage-
femme ou le docteur » [H-Rur-MP-NL* Alaotra

 14
2.1.2. Pratiques des groupes en matière de CPN
Choix du prestataire de service pour le suivi de la grossesse

Le suivi de la grossesse semble constituer une pratique courante pour « Pour que ta santé soit suivie, y compris l’état
la majorité des groupes. Comme indiqué plus haut, il viserait à assurer physique de l’enfant qui est dans ton ventre. Par
exemple, moi, dès que mon ventre ne bouge
le suivi de la santé de la mère « qui a des conséquences sur celle du pas, je demande au docteur ‘est-ce qu’il bouge
bébé » et celle du fœtus lui-même. Les préoccupations des groupes là-dedans?’» [F25ans -Urb-P-L, Analamanga].
+

tourneraient ainsi autours d’un thème central, la viabilité du fœtus.


Le suivi de la grossesse uniquement par un Agent de Santé ou par une « La mère est suivie, la position de l’enfant est
Accoucheuse Traditionnelle est un cas rare. Tous les groupes également suivie, tous les deux sont suivis. S’il y
déclarent que les femmes enceintes ont l’habitude de recourir à la fois a quelque qui ne va pas, le docteur dit voilà ce
qui doit être fait » [H-Rur-P-NL*, Atsimo
(en parallèle) aux soins prodigués par le tradi-praticien et par l’Agent Andrefana]
Sanitaire et ce, indépendamment des caractéristiques
socioéconomiques, du milieu de résidence et des sites. Il existerait
« Elle (l’AS) te fait acheter des médicaments et te
d’ailleurs de nombreux cas de collaboration entre l’Agent de Santé et consulte, puis elle te dit d’aller chez l’AT »
l’Accoucheuse Traditionnelle qui se réfèrent mutuellement les [F25ans -Rur-P-L, Atsimo Andrefana]
+

femmes enceintes.
Le recours au CSB semble être le résultat des campagnes de « Toutes les mères vont chez l’AT. Même la
sensibilisation mises en oeuvre dans les zones concernées et, ainsi sage-femme va chez l’AT, elle y amène son
ventre pour être palpé et remis à sa place »
qu’on l’a souligné plus haut, un effet des conseils ou de mesures [F25ans -Rur-P-L, Atsimo Andrefana]
+

coercitives du personnel de santé et de l’influence de l’entourage


(mère/belle-mère) et Accoucheuse traditionnelle. Les agents de santé rencontrés dans le cadre
de l’étude ont d’ailleurs noté qu’il existe une évolution positive dans la fréquentation des centres
de santé par les femmes enceintes. La recherche des soins auprès de l’Accoucheuse
Traditionnelle serait quant à elle le reflet de la tradition transmise de génération en génération :
on va la voir parce que c’est ce qu’on a toujours fait.
Le recours « auprès de l’Agent de Santé uniquement » est justifié par « Quant à moi, (le massage chez l’AT) ce n’est
les groupes « femmes » en termes d’habitude de fréquenter les Agents pas dans mon registre » [F25ans -Rur-P-NL, +

de Santé et de manque d’habitude de recourir aux soins de DIANA]


l’Accoucheuse Traditionnelle. Certaines participantes aux GDD ne connaitraient pas
d’Accoucheuse Traditionnelle.
Les participantes aux GDD qui n’ont pas l’habitude de recourir aux « Aller chez l’Accoucheuse Traditionnelle est
soins de l’Agent de Santé expliquent le recours ‘auprès de « Moi, une habitude pour elles, comme celles qui
je n’ai pas fait de CPN car ma mère est une
habitent dans les contrées de campagne »
l’Accoucheuse Traditionnelle uniquement’ par l’habitude de se accoucheuse traditionnelle et c’est elle qui m’a
[F25ans -Rur-P-L, Atsimo Andrefana]
+

simplement massée » [F24ans -Rur-MP-L, Alaotra


-

faire soigner par elle ou par la peur de se faire consulter par un Mangoro]
médecin. Les cas isolés qui ont l’habitude de recourir aux soins de
l’Accoucheuse Traditionnelle uniquement évoquent des circonstances
particulières, dont des relations privilégiées.
L’absence de suivi de la grossesse par l’AS et par l’AT est considéré « Elles pensent, peut -être, que celles qui font de la
comme un cas hypothétique par les groupes qui expliquent ce qui CPNet celles qui n’en font pas accouchent quand
pourrait motiver un comportement aussi improbable en invoquant même de la même façon » [F25ans -Urb-P-L, +

Analamanga]
« la paresse » ou le fait de ne pas percevoir les bénéfices de la CPN.
Types de services offerts par les prestataires de service

 15
Les groupes « hommes » et « femmes » semblent associer des valeurs différentes aux soins
recherchés auprès des deux types de prestataire de service et l’importance accordée au recours
à l’Accoucheuse Traditionnelle varie selon les régions.
Dans les groupes, une grande majorité ferait appel aux deux types de prestataires de services
par habitude et pour les avantages retirés des deux types de consultation. Le plus souvent en
effet, les groupes “hommes“ et “femmes“ concevraient les rôles des Accoucheuse
Traditionelles et des Agent de Santé comme distincts, spécifiques. Comme indiqué plus haut,
l’attitude des accoucheuses traditionnelles (qualité de l’accueil) semble être une des raisons
principales pour leur fréquentation, avec la proximité géographique. Cette qualité de l’accueil et
la confiance que les femmes ont en leurs compétences feraient « Ton muscle raidit ; nous, ici, nous sommes des
qu’elles recherchent leur assistance pour accoucher. Les massages gens qui souffrent ; tu travailles dur en étant
(contre la fatigue) qu’elles font représentent également un motif de enceinte ; tu te sens mal car ton muscle raidit. Le
muscle de ton ventre pesant ne supporte pas le
consultation important, ces prestations n’étant pas délivrées dans travail que tu fais avec la pelle. Et voilà, tu vas chez
les centres de santé. Les Accoucheuses Traditionnelles sauraient, l’AT, elle assouplit ton muscle et tu as du sommeil
comme les Agents de Santé, diagnostiquer une grossesse. Enfin, pendant la nuit » [F25ans -Rur-P-NL, DIANA].
+

« Il n’y a rien d’autre. Il n’y a pas quelque chose à


les Accoucheuses Traditionnelles sauraient comment avaler mais seulement du massage » [F24ans -Rur- -

repositionner un foetus, compétence très appréciée, surtout en MP-L, Alaotra Mangoro]


milieu rural. En dépit de ces avantages des Accoucheuses
Traditionnelles, le CSB conserverait cependant une crédibilité plus grande, en raison de son
personnel formé et parce que délivrant des prestations plus complètes, la vaccination
notamment.
La perception par les groupes des compétences de l’Accoucheuse « Même si la grossesse n’a pas encore un mois,
Traditionnelle semble varier entre les régions. En effet, dans le elle (l’AT) la voit déjà. Même dès la fécondation
ou, disons, demi mois. Alors qu’à demi mois, le
Sud Ouest rural, on reconnait à l’Accoucheuse Traditionnelle des docteur ne la voit pas encore » [H-Rur-P-NL*,
compétences plus importantes que dans les autres régions, At i A d f ]
fortement valorisées, répondant aux attentes des femmes
enceintes. En plus des massages, du repositionnement du fœtus et « L’AT utilise de l’huile pour faire bouger le bébé
dans ton ventre, ce qui fait que le bébé dans ton
de l’accouchement, elles seraient capables de faire un diagnostic ventre évolue en s’améliorant. La sage-femme,
précoce d’une grossesse. Elles seraient également capables elle, ne fait qu’écouter simplement ce qui est
« d’entretenir » le fœtus. dedans. Chez l’AT, elle te fait vraiment bien
bouger et tu te sens bien lorsqu’elle te fait
bouger » [F25ans -Rur-P-L Atsimo Andrefana]
+

Pratique de la 1ère CPN

Effectuer la 1ère CPN vers le 3è ou 4è mois de grossesse semble constituer la pratique majoritaire
dans les groupes. Une minorité l’aurait fait plus tard, entre le 5è et 8è mois. Des cas isolés
situent leur 1ère CPN au 1er ou 2è mois. L’existence de femmes qui ne la font pas, ou la font très
tard, est mentionnée par certaines participantes aux GDD qui insistent qu’elles ne font pas partie
de ces femmes. L’initiative d’aller en CPN serait prise par la femme (conseillée par son
entourage lorsqu’il s’agit d’une première grossesse) ou par l’homme qui veut également
s’assurer que la femme est enceinte.
L’Agent Sanitaire et l’Accoucheuse Traditionnelles sont, comme on l’a indiqué plus haut, tous
deux considérés par les groupes comme capables de diagnostiquer une grossesse. L’agent de
santé semble cependant être davantage sollicité pour le faire. Une bonne partie des femmes
enceintes ne feraient cependant pas appel immédiatement à un Agent de Santé ou une

 16 « Je suis allée à l’hôpital pour une consultation


médicale, puis le docteur m’avait dit que j’étais
enceinte, de 2 mois. » [F24ans -Rur-P-NL, Atsimo
-

Atsinanana]
Accoucheuse Traditionnelle, concluant d’elles-mêmes qu’elles sont enceintes après un arrêt des
règles d’un mois ou en sentant des mouvements dans leur ventre « vers le 3è mois ». Des cas
isolés font état d’une grossesse (de un à deux mois) diagnostiquée par hasard au cours d’une
consultation médicale dans un centre de santé ou au cours d’un massage chez l’Accoucheuse
Traditionnelle.
Pratique des autres CPN

Dans tous les groupes, les femmes qui vont tôt à la 1ère CPN auraient tendance à faire au moins
cinq CPN. Certaines participantes aux GDD iraient jusqu’à en faire huit ou neuf. Comme indiqué
plus haut, c’est le timing de la 1ère CPN qui rend compte du nombre « C’est selon l’ordre qu’elle (la sage-femme)
de visites de suivi. Les participantes aux GDD qui fait la 1ère CPN donne qui te fait revenir là-bas. » [F24ans -Rur-P- -

plus tardivement en feraient moins de quatre. Bien que variant NL, Atsimo Atsinanana].
“C’est aux environs de 6 ou 5 fois (réf. CPN). Je ne
fortement, le nombre et la périodicité des CPN seraient fonction m’arrête que quand le docteur me dit d’arrêter. »
des rendez-vous fixés par l’Agent de Santé. [F25ans -Urb-P-L, Analamanga]
+

Administration et observance du traitement

Tous les groupes citent la vaccination et l’administration de « Moi, je n’ai pas eu ce chocolat (réf. comprimés
de couleur chocolat) dont vous parlez» [F25ans - +

vitamines et de médicaments comme faisant partie des prestations Urb-MP-NL, Atsimo Atsinanana]
fournies dans le cadre de la CPN. Il existe cependant des variations
dans le type de traitement reçu. Par exemple, certaines « Moi, je n’ai pas eu de déparasitage, mais je ne
sais pas qu’est-ce que c’est les trois comprimés
participantes aux GDD auraient reçu des vaccins mais pas de qu’on m’a dit d’avaler en une seule fois »
vitamines ; d’autre auraient reçu de la nivaquine. Ces différences [F25ans -Rur-P-NL, DIANA]
+

pourraient s’expliquer par la disponibilité ou non des


services/produits dans le centre de santé au moment où elles ont « Moi, j’en ai reçu deux (vaccins). Il paraît qu’il y
en avait un petit nombre, alors il m’en a
fait la CPN, par l’incapacité de la femme à identifier les produits administré deux seulement. » [F24ans -Rur-MP-L,
-

administrés et par l’appréciation par l’Agent de Santé de l’état de Alaotra Mangoro],


santé de la femme qui consulte et le traitement prescrit en
conséquence.
La majorité des groupes observerait le traitement prescrit par l’Agent de Santé. Les femmes
auraient l’habitude d’écouter ce qu’on leur dit en CPN et de le faire, d’où une bonne observance
du traitement, sauf pour le FAF. En effet, une majorité des femmes « Dans mon cas, je ne le supporte pas du tout,
rapportent avoir reçu du fer mais il semble que l’observance du j’ai le vertige. Alors, je n’ai rien pris du tout. »
traitement pose problème. Les groupes « femmes » fournissent [F25ans -Urb-P-L, Analamanga]
+

généralement comme raison pour expliquer l’arrêt dans la prise du produit ses effets
indésirables (sensation de vertige ou d’affaiblissement, vomissement). Le mauvais goût du
produit est également cité comme une cause de l’arrêt du traitement mais de façon isolée.
Recherche des soins lors de signes de maladie

Ce sont les signes de maladie qui semblent déterminer le type de recours aux soins. Lorsque
ces signes ne sont pas connus ou n’ont pas été expérimentés dans le passé, les groupes
« femmes » tendraient à choisir le type de recours aux soins sur la base de ce qu’on fait
habituellement dans la communauté. Dans le cas de signes connus ou déjà expérimentés dans
le passé, ce serait cette expérience qui déterminerait le type de recours : les pratiques adoptées
dans le passé seraient répétées si elles se sont avérées efficaces ou ajustées si ce n’est pas le cas.
Les pratiques des groupes semblent tendre majoritairement vers la recherche de soins auprès
de l’Agent de Santé (maux de tête, oedème, fièvre, vertiges, vision floue, douleurs dans le
ventre, mal au dos, pâleur, perte d’eau) mais souvent en seconde instance. Ne rien faire, s’auto
prescrire des médicaments ou prendre des médicaments conseillés par le pharmaciern ou

 17
l’épicier représentent des pratiques majoritaires de 1ère instance (maux de tête, oedème, fièvre,
vertiges, vision floue, douleurs dans le ventre, pâleur). Il existe également des signes dont ils
confient la prise en charge à l’AT ou au guérisseur traditionnel exclusivement ou en 1ère instance
(saignement, maux de tête et maux de dos).

2.2. Soins néonatals


2.2.1. Méthode kangourou

L’étude a eu pour objectif de relever les opportunités liées aux « Je n’ai jamais assisté à l’accouchement … Je
croyances, habitudes et pratiques des groupes pour introduire et ne vois le bébé que lorsqu’il est bien enveloppé
dans une couverture. » [H- Rur- PL, Atsimo
généraliser la méthode kangourou : « mettre chaque enfant sur la Atsinanana]
poitrine de sa mère (contact peau à peau) pendant les 2 premières
heures qui suivent la naissance ». Seuls les groupes « femmes » ont été interrogés : les hommes
qui ne sont pas présents lors de l’accouchement n’ont pas d’avis sur la question.
Le premier contact physique entre la mère et le nouveau-né : timing et pratiques

Le moment du premier contact physique entre la mère et l’enfant et « Cette chose (allusion à la méthode), on ne la
la façon dont il est opéré dépendent non de la mère mais de la connait pas encore mais si on nous dit que c’est
bien, alors on le fait ! C’est comme quand elle
personne qui est responsable de l’accouchement : agent de santé ou (l’accoucheuse) s’occupe du bébé : elle le lave,
accoucheuse traditionnelle. Les femmes feraient ce que leur le vêtit, … on ne fait qu’attendre sur le lit. »
recommande l’accoucheuse à qui elles font totalement confiance, [F25 ansUrb-MPNL, Atsimo Atsinanana] ;
« Je suis du même avis ! Pour nous, si c’est une
considérant qu’elles n’ont en vue que leur bien-être et celui de leur personne qui s’occupe de la santé, alors on
enfant. écoute et on suit ce qu’elle dit. » [F25 ans+-Urb-
MPNL, Atsimo Atsinanana]
Deux tendances se dessinent en matière de pratiques. La première,
représentée par la majorité des groupes, situe le premier contact avec le bébé après que la mère
et le nouveau né aient été lavés et habillés, que ce soit au centre de santé ou chez l’accoucheuse
traditionnelle. Ce premier contact aurait lieu entre 15 minutes et 2 heures après
l’accouchement. Au centre de santé, la disponibilité des services pourrait retarder davantage le
premier contact entre la mère et l’enfant. Des participantes du groupe de la capitale déclarent
en effet avoir dû attendre (parfois plus de 24 heures) qu’un lit se libère avant de se voir remettre
leur enfant.
Le contact « peau contre peau » ne semble pas être établi. Aucune consigne particulière pour le
contact « peau contre peau » ne serait donnée et l’enfant serait remis à la mère déjà habillée.
Une minorité du groupe « femme » d’Alaotra Mangoro, qui a accouché chez un agent de santé
rapporte une variante de cette pratique : le bébé serait placé près de sa mère juste après les
soins apportés à l’enfant mais avant ceux donnés à la mère, soit 15 à 30 minutes après la
naissance. Le contact entre la mère et l’enfant ne durerait que quelques minutes, le temps que
« la mère voie l’enfant et que celui-ci sente pour la première fois l’odeur de sa mère ».
La deuxième tendance, relevée chez une bonne partie des
participantes du groupe du Sud-est et, de façon isolée, dans celui « C’était mon cas pour mon premier enfant, dès
l’expulsion, la sage-femme a mis le bébé sur ma
du Sud-ouest inclut un bref contact peau à peau entre la mère et poitrine avant qu’elle ne coupe le cordon. »
l’enfant. Celui-ci serait placé sur la poitrine ou le ventre de sa [F25 ans+-Urb-MPNL, Atsimo Atsinanana] ;
mère tout de suite après la naissance avant de couper le cordon « On met le bébé sur le ventre, la poitrine contre
celle de sa mère … Non ! Il n’est pas encore
ombilical. Le contact peau à peau ne durerait que quelques habillé (…). » [F25 ans+-Urb-MPNL, Atsimo
minutes. Cette pratique permettrait de couper plus facilement le Atsinanana]
cordon ombilical : « comme cela, ce sera plus facile ! »
Tenir l’enfant au chaud : croyances et attitudes

 18
Les groupes avancent plusieurs raisons pour expliquer pourquoi l’enfant est placé à côté de sa
mère. Ces raisons sont, par odre décroissant :
- La conviction de la quasi-totalité des groupes que :
(i) « le nouveau-né a froid par nature » et aurait donc « On ne lui donne le sein que deux heures après,
besoin d’être réchauffé. La mère est considérée alors en attendant, on lui procure de la
comme la personne la plus naturellement indiquée chaleur » ; « (…) Le bébé a besoin de la chaleur
émanant de toi ! » [F25 ans+-Urb-PL, Analamanga]
pour lui donner de la chaleur ;
(ii) le nouveau-né est fragile, vulnérable, et a besoin d’être
protégé contre les refroidissements. Les coups de « On le couvre pour que son nombril n’attrape
pas froid car si c’est le cas, il pourra être malade. »
froids sont supposés provoquer des ballonnements du [F24 ans -Urb-PNL, Atsimo Andrefana]

ventre qui causent la diarrhée, maladie


particulièrement redoutée ;
(iii) l’enfant apprend à reconnaître sa mère par son odeur. « L’enfant a besoin de sentir l’odeur de sa mère !
La reconnaissance immédiate de la mère faciliterait ... Comme ça, il nous reconnaît ! Il a besoin
d’autre chose que de téter.» [F24 ans -Urb-PNL,
-

notamment l’allaitement de l’enfant. Enfin, sorti du Atsimo Andrefana]


ventre de sa mère, l’enfant a également besoin de se « L’enfant nouvellement né a besoin de sentir
retrouver dans un environnement sécurisant et le l’odeur de sa mère. Cela lui donne plus de
force !. » [F25 ans+-Urb-PL, Analamanga]
contact de proximité avec la mère favoriserait son
développement.
- L’importance du contact immédiat mère - enfant pour créer « J’aime bien qu’il dort sur ma poitrine ; comme
ça, il pourra sentir mon souffle ! » [F25 ans+ - Urb
des liens d’affection jouant un rôle primordial dans la survie de – MPNL – Atsimo Atsinanana]
l’enfant. Ce point de vue est partagé par tous les groupes
« femmes », sauf ceux de DIANA et d’Alaotra Mangoro ;
- Le caractère pratique de la chose : mettre l’enfant à côté de sa mère facilite l’allaitement du
nouveau-né. Cette opinion est partagée à l’unanimité par les participantes du groupe du
Sud-ouest rural.
Tenir l’enfant au chaud représente ainsi un souci dominant. Les mères ont même tendance à
surprotéger leur enfant contre le froid. Les pratiques traditionnelles pour tenir au chaud la
femme nouvellement accouchée et l’enfant nouveau né pendant la « Lorsque nous nous chauffons après
période du post-partum (mifana) restent de ce fait fortement l’accouchement (mifana), nous nous cloîtrons à
ancrées dans les régions. Dans la partie Sud Est de l’île, on les la maison. Nous ne pouvons pas approcher
place près d’un feu de bois alimenté toute la journée pendant notre mari. Ce dernier ne pourra pas non plus
entrer dans notre chambre, c’est défendu ! Nous
plusieurs jours sinon quelques semaines. Dans la partie Sud Ouest, nous couvrons tout le corps d’étoffe et seuls les
la femme se couvre de la tête aux pieds « misandimba » et ne sort yeux sortent pour qu’on ne prenne pas froid. »
pas de la maison pendant une période pouvant aller de 2 à 3 mois. [F25 ans+- Rur – PL – Atsimo Andrefana]
Dans les deux cas, l’enfant reste avec sa mère.
2.2.2. Allaitement précoce et colostrum

L’étude a cherché à identifier les connaissances et attitudes (avantages/inconvénients perçus)


relatives au colostrum et à les mettre en relation avec les pratiques habituelles en matière
d’administration du colostrum. Pour ce faire, l’étude a pris en considération les connaissances
de base suivantes : « un liquide visqueux de couleur jaunâtre, précurseur du lait maternel qui est
secrété pendant les quelques jours qui suivent la naissance ; c’est dans les 30 à 40 heures qui
suivent l’accouchement qu’elle parvient à la composition de lait mature » ; « ses principaux
avantages incluent : l’évacuation du placenta, la réduction des saignements, l’évacuation des
selles noires et la construction des défenses immunitaires de l’enfant » (OMS, 1989) . L’étude a

 19
ensuite identifié les CACP des groupes par rapport à la pratique promue par le MSPF-PS « allaiter
l’enfant de façon exclusive dans la demi-heure qui suit sa naissance ». Les groupes des deux
sexes ont été interrogés sur les deux thèmes.
Connaissances et attitudes relatives à l’allaitement précoce

Tous les groupes déclarent que le lait maternel est l’aliment naturel destiné au nouveau-né.
Cependant, seules de faibles minorités au sein des groupes des deux sexes d’Alaotra Mangoro
et des groupes « femmes » de DIANA et du Sud Ouest urbain semblent savoir que le lait
maternel est le seul aliment approprié pour le nouveau-né. Ces minorités déclarent que c’est
l’agent de santé qui leur aurait appris cela, en même temps que la façon d’allaiter, en les
sensibilisant sur l’allaitement maternel exclusif jusqu’au sixième mois. La recommandation
d’allaiter dans la demi-heure qui suit la naissance de l’enfant semble également être méconnue
par la grande majorité.
Tous les groupes admettent que le lait maternel est l’aliment naturel pour le nouveau-né et que
la mère doit recevoir une alimentation appropriée pour stimuler la montée laiteuse. En raison
de leur rôle social de « pourvoyeur » de la famille, la majorité dans
« Dans mon cas, il faut assurer une bonne
les groupes « hommes » considèrent que c’est leur devoir de alimentation à la mère. On lui donne du
fournir une alimentation appropriée à la femme allaitante et, par poulet … de bonnes choses car le lait destiné au
ricochet, à l’enfant. Les aliments conseillés à la femme allaitante bébé vient de sa mère. Il vient tout juste de
naître, il ne peut manger autre chose. » [H-Rur-
incluent le bouillon de poulet, les produits laitiers, le jus de papaye, MPNL, Alaotra Mangoro]
la chivaquine, mais aussi, des boissons et aliments chauds. Les
groupes sont également favorables à l’idée de donner du lait maternel à l’enfant comme
premier aliment. En même temps, des croyances coexisent telles celle en la nécessité d’allaiter
le nouveau-né uniquement après l’évacuation du colostrum et/ou de lui administrer des fluides
avant le lait maternel.
La première tétée pourrait n’avoir lieu qu’après plusieurs heures sinon plusieurs jours. Tous les
groupes, à l’exception de ceux de la capitale, pensent en effet qu’il est nécessaire de donner au
nouveau-né d’autres liquides que du lait maternel, principalement de l’eau bouillie sucrée, « en
attendant le lait », c'est-à-dire la montée laiteuse. Ces groupes signalent que la montée laiteuse
peut prendre de 2 heures à 3 jours. Les groupes des deux sexes du Sud Ouest et le groupe
« femmes » urbaines du Sud Est déclarent que ce sont les pleurs de l’enfant « signal marquant
qu’il a faim » qui déterminent le moment de la première tétée. Dans le groupe « hommes » du
Sud Ouest, une bonne partie des participants déclare qu’il est nécessaire d’attendre 2 à 12
heures, jusqu’à l’arrivée du « bon lait » (dès qu’il prend une apparence normale) avant d’allaiter
le bébé. Les groupes « hommes » de DIANA et d’Alaotra Mangoro déclarent donner des fluides
de substitution en cas d’insuffisance du lait maternel soit, par ordre décroissant : « du lait de
vache, du lait concentré ‘Nestlé’ (sic) ou à du lait en boîte ». Ils ne semblent pas savoir qu’elle
est favorisée par la sucion. Des cas isolés dans les groupes « femmes » de la capitale et du Sud
Ouest rural déclarent vouloir retarder le moment de la première tétée parce que n’ayant pas
encore récupéré assez de force après l’accouchement. Le groupe « hommes » d’Alaotra
Mangoro indique qu’il est nécessaire de recourir à un aliment de substitution car la mère est
dans l’incapacité physique d’allaiter juste après l’accouchement. Une minorité au sein du
groupe de la capitale a également fait part du problème de disponibilité de services qui
retarderait le moment de la 1ère tétée car l’enfant ne serait donné à sa mère que lorsqu’elle
dispose d’un lit.
Pratiques relatives à l’allaitement précoce

Les groupes des deux sexes ont une position quelque peu différente par rapport à l’allaitement
précoce. En effet, les groupes « femmes » qui sont directement concernés ont des opinions plus

 20
tranchées sur la question que les groupes « hommes », notamment ceux de la Capitale et du
Sud Est, qui ne sont généralement pas présent au moment de la première tétée ou estiment
n’avoir aucune influence en la matière. Comme le confirment les groupes « femmes » de la
capitale, d’Alaotra Mangoro et du Sud Ouest urbain, c’est l’accoucheuse (agent de santé ou
traditionnelle) et accessoirement la mère qui décideraient du moment de la première tétée. Les
femmes suivraient leurs recommandations parce que confiantes en leurs compétences.
Deux tendances émergent sur le plan des pratiques en matière d’allaitement du nouveau-né :
ceux qui donnent en premier du lait maternel à l’enfant dans les deux heures suivant la
naissance et ceux qui donnent d’abord un autre fluide au nouveau-né. La première tendance est
représentée par une grande majorité des participants des groupes « femmes » d’Alaotra
Mangoro et « hommes » du Sud Est, ainsi qu’une minorité au sein des autres groupes
« femmes » et des groupes « hommes » de DIANA et du Sud Ouest. Les groupes des deux sexes
justifient l’allaitement immédiat de l’enfant en termes de : (i) conscience de l’importance du lait
maternel pour l’alimentation du nouveau-né ; (ii) suivi des conseils de l’agent de santé sur
l’allaitement exclusif ; (iii) stimulation de la montée laiteuse par la succion de l’enfant ; (iv)
rapidité de la montée laiteuse. Une bonne partie des participantes du groupe « femmes » du
Sud Est urbain semble savoir que la succion de l’enfant stimule la montée laiteuse.
La seconde pratique qui consiste à retarder la première tétée de 2 heures à 3 jours après la
naissance du bébé semble être la plus répandue. En effet, la grande
majorité des groupes des deux sexes dans les sites de l’étude (à « On donne de l’eau bouillie au bébé mais on
doit le cacher à la sage-femme car elle n’aime
l’exception des groupes « femmes » d’Alaotra Mangoro et pas ça ! » [F25 ans -Urb-MPNL, Atsimo +

« hommes » du Sud Est) donnerait d’abord un fluide autre que le Atsinanana]


lait maternel au nouveau-né. Celui-ci diffère selon les régions :
simple eau bouillie, eau bouillie sucrée, thé. La région du Sud Ouest rural se distingue par
l’administration de tisanes « qui donnent de la force au bébé » avant ou pendant l’allaitement.
La majorité des participants du groupe « hommes » déclare que les mères attendent jusqu’à 12
heures l’arrivée du « bon lait » et donnent de la tisane au bébé en attendant. Ces tisanes sont
censées avoir des vertus préventives et curatives. Les groupes « femmes » du Sud Est urbain et
du Sud Ouest rural affirment que l’administration au nouveau-né d’autres liquides que le lait
maternel est désapprouvée par l’agent de santé. Les groupes mentionnent que les informations
fournies par certains agents de santé « sont très changeantes (miovaova) et sont parfois
contradictoires ». Ils auraient parfois conseillé les parturientes de donner de l’eau au nouveau-
né avant la première tétée.
Connaissances et attitudes relatives au colostrum

Le colostrum est connu par tous les groupes sous différentes appellations qui varient selon les
régions : « songo » ou « ranom-batsy » pour la capitale, « lotso » ou « sorona » pour Alaotra
Mangoro, « biba » pour DIANA et le Sud Ouest et « ronono matavy » (lait gras) pour le Sud Est.
Le colostrum est communément désigné par tous les groupes comme « premier lait ».
La connaissance du colostrum semble être de nature empirique. Tous les groupes savent que le
colostrum est un liquide qui précède le lait maternel et qui a une couleur jaunâtre, un aspect
concentré qui fait penser au « premier lait » de vache – le « songo » - et un goût fade « tsy
matsiro » [F24 ans—-Rur-PNL, Atsimo Atsinanana]. Les groupes savent aussi que colostrum est
de nature « passagère» ; les groupes « hommes » du Sud Ouest rural et de DIANA – les plus
éloquents sur le sujet – pensent qu’il est présent l’un, entre 2 et 12 heures et l’autre, pendant 24
à 48 heures. Ce serait à « l’aspect du lait maternel qui sort » que les groupes reconnaitraient que
le colostrum a été évacué.

 21
Deux tendances divergentes se dégagent au niveau des attitudes vis-à- « Ça ressemble à du pu ! » [F25 ans -Urb-PL, +

vis du colostrum. La première, prédominante, le considère comme Analamanga]


du « mauvais lait » par opposition au « bon lait » qui a l’aspect du lait « C’est un conduit qui n’a pas été utilisé
maternel mature. C’est à partir des caractéristiques qui lui sont pendant un long moment. C’est rouillé et ce
reconnues (aspect visqueux, goût fade, etc.) que la bonne majorité qui en sort doit être sale ! » [F24 ans -Urb-PNL,

Atsimo Andrefana]
des groupes porte un jugement négatif sur le colostrum. Différentes
croyances sont également associées à l’aspect du colostrum. Les groupes semblent
particulièrement craindre que le colostrum soit indigeste. Les groupes du Sud Ouest, Alaotra
Mangoro et DIANA pensent qu’il provoque la diarrhée.
La deuxième tendance, de loin minoritaire, renvoie à des attitudes positives vis-à-vis du
colostrum. Elle est représentée par la majorité des participantes des groupes « femmes » du Sud
Est et du Sud Ouest et de faibles minorités au sein des groupes d’Alaotra Mangoro et de la
capitale (contestées par leurs pairs majoritaires), qui évoquent les différentes qualités du
colostrum qui « est de toutes les façons l’aliment naturel destiné au nouveau-né ».
Ces participantes déclarent que le colostrum contient des « vitamines »
et du « calcium » et que ces apports nutritionnels renforcent les « Ce premier lait lui donne de la force parce
que celui-ci est très gras, il y a beaucoup de
défenses immunitaires du nouveau-né. Les répondantes au sein du choses là-dedans ! » [F25 ans+-Rur-PL,
groupe « femmes » de la capitale sont convaincues que le colostrum Atsimo Andrefana]
protège le nouveau-né contre la tuberculose et la rougeole.
Pratiques vis-à-vis du colostrum

Comme indiqué plus haut, la grande majorité des hommes n’assisteraient pas à la naissance de
leur enfant et ne seraient pas non plus présents lors de la première tétée. Leur point de vue sur
l’allaitement précoce est donc plus théorique que celui des femmes. Deux tendances opposées
dans les pratiques se dessinent : l’administration du premier lait et son évacuation, qui semble
être le fait de la majorité. Cependant, si l’on considère la durée de sécrétion du colostrum (le
lait mature n’apparait que 30 à 40 heures après l’accouchement), les femmes administrent
toutes le colostrum à l’enfant mais en quantité variable.
La grande majorité des groupes déclarent jeter le premier lait en « Moi, je le jette ! Cette première montée
laiteuse est fade mais c’est ce qui vient après qui
raison principalement de son aspect « anormal » et de son goût est gras. » [F24 ans -Rur-PNL, Atsimo —

« fade ». La quantité jetée varie : d’une demi-tasse à trois tasses Atsinanana]


environ. La première tétée aurait lieu « lorsque le lait a pris une apparence et un goût
normaux ».
Par contre, les groupes « femmes » de DIANA et du Sud Ouest rural déclarent, avec une bonne
partie des participantes du Sud Est urbain et des minorités dans les groupes du Sud Est rural et
de la capitale (y compris au sein du groupe « hommes ») donner le colostrum au bébé. Les
raisons avancées sont :
- Des raisons pratiques, notamment pour calmer les pleurs de « On voit que ce n’est pas bon mais on ne sait
pas comment l’éviter. Si on donne à la place
l’enfant qui ne pourrait pas attendre l’arrivée du « bon lait » et du biberon au bébé, ce mauvais lait ne sera
l’impossibilité d’éviter de donner le premier lait même si on pas évacué. » [H-Rur-MPL, DIANA]
considère qu’il n’est pas bon ;
- La perception du lait maternel, quel que soit son aspect, comme l’aliment naturellement
destiné au nouveau-né (« voajanahary »), la possibilité de « jeter du lait maternel » ne passant
pas par l’esprit (Sud Est) car ce geste est considéré comme tabou (« fadindrazana ») dans le
Sud Ouest rural ; dans ce cas, le groupe a recours à la tisane pour contrer l’effet diarrhéique
du « mauvais lait » ;

 22
- La perception des vertus du colostrum notamment ses apports en vitamines et calcium et sa
fonction protectrice renforçant les défenses immunitaires de l’enfant, suite à leur exposition
à l’information sur la question ; comme mentionné précédemment, les rares femmes ayant
participé à des séances de sensibilisation sur le sujet ont été critiquées par la grande majorité
de leurs pairs qui avait une opinion opposée.
Enfin, il est également apparu que les groupes « femmes » de plus de 25 ans, dont notamment
ceux du Sud Est urbain et Sud Ouest rural, semblent avoir plus d’expérience que leur cadettes
et être moins influencées par les idées fausses sur le colostrum. Ce sont celles qui donneraient
le premier lait et ce, en dépit de son aspect et de ses effets diarrhéiques supposés chez l’enfant.
Des données recueillies en marge de l’étude ont également montré que la pratique de l’hygiène
des seins avant la première tétée semble déjà avoir été vulgarisée parmi les femmes. Leur
source d’information serait le personnel médical qualifié pour celles qui accouchent en milieu
hospitalier et les accoucheuses traditionnelles pour les autres.
2.2.3. Soins du cordon ombilical

Les pratiques des Accoucheuses Traditionnelles en matière de soins du cordon varient selon
ces dernières et dans les régions. Dans la région de DIANA elles utiliseraient un morceau de
bambou aiguisé pour couper le cordon ombilical et du raphia pour attacher l'ombilic tandis
que dans les autres régions, elles utiliseraient une lame de rasoir (nouvelle ou désinfectée à
l'alcool). Les soins seraient donnés directement par l'AT qui ferait le pansement avec de l'alcool
et des bandages ou bien par l'agent de santé à qui l’enfant serait référé (cas du Sud Est urbain).
Les Accoucheuses Traditionnelles appliqueraient un pansement sur le cordon une seule fois,
juste après la coupure, et vérifieraient la plaie après une semaine, celle-ci devant alors s’être
asséchée. Dans le Sud Ouest urbain, les Accoucheuses traditionnelles vérifieraient la plaie trois
jours après la coupure du cordon ombilical. Aucune des Accoucheuses traditionnelles enquêtée
n’a déclaré avoir été confrontée à des problèmes de guérison de l'ombilic du nouveau-né.
Certaines femmes ont fait état de rougeur ou de gonflement mais semblaient considérer ce
phénomène comme passager et sans gravité.
2.2.4. Enregistrement des naissances

L’étude a eu pour objectif d’identifier ce qui dans les connaissances, attitudes et pratiques des
cibles peuvent représenter des opportunités pour favoriser « l’enregistrement des naissances
dans les délais légaux soit, dans les 12 jours suivant la naissance ». Seuls les groupes « hommes »
ont été interrogés puisque ce sont eux qui sont généralement chargés de faire enregistrer la
naissance de leur enfant.
Connaissances relatives à l’enregistrement de naissances

La femme étant encore en période de post-partum, c’est le père de famille qui se chargerait,
dans la plupart des cas, de faire enregistrer la naissance. La totalité des groupes « hommes »
dans les différents sites de l’étude savent qu’il se fait à la mairie et qu’accoucher au centre de
santé facilite la procédure d’obtention de l’acte de naissance, l’agent de santé donnant des
conseils aux parents sur les étapes à suivre et allant même, dans le Sud-Ouest, jusqu’à
s’impliquer dans les démarches auprès des autorités locales.
Les opinions recueillies auprès des participants aux GDD sur les
procédures à suivre en cas d’accouchement hors structure sanitaire « Si l’enfant est né ailleurs qu’à l’hôpital, on
passe par le chef quartier puis par le chef
reflètent une certaine confusion. En effet, certains participants aux Fokontany, et enfin à la commune. Il y a une
GDD pensent qu’il faut aller à la commune et d’autres, au tribunal. lettre à faire comme quoi c’est vraiment ton
enfant, il doit y avoir de témoins pour y
assister.» [H-Rur-PL, Atsimo Atsinanana]
 23
Des cas isolées dans les groupes des deux sexes du Sud Est et du Sud Ouest font mention des
complications rencontrées dans les procédures qui font passer les parents par toutes les étapes
de la hiérachie dans l’administration.
A l’exception d’un cas isolé rencontré dans le groupe rural du Sud « (…) en principe, je pense que c’est 15 jours
Est, le délai légal pour l’enregistrement des naissances n’est pas ou tout au plus un mois après qu’on doit
récupérer la copie. Et si le retard est d’un an,
connu par les groupes. Les participants aux GDD déclarent avoir fait on doit aller au tribunal à Ambatondrazaka car
enregistrer la naissance de leur enfant endéans ces 12 jours mais font ils ne s’en occupent plus.» [H-Rur-MPNL,
Alaotra Mangoro]
toujours référence à une naissance dans une structure sanitaire, où ils « (…) l’Etat accepte quand même que l’enfant
ont bénéficié des conseils de l’agent de santé sur les procédures à aille à l’école même sans copie mais là, il y a
une sorte d’arrangement. C’est le ‘jugement
suivre. Tous les groupes savent qu’en cas de retard dans supplétif’ (sic) » [H-Rur-MPL, DIANA]
l’enregistrement de la naissance, la procédure se complique puisqu’il
est nécessaire d’aller au tribunal. Ils déclareraient dès lors la naissance de l’enfant le jour même
ou dans les jours qui suivent. Ils savent qu’il existe un délai pour retirer l’acte de naissance établi
par l’administration.
Les groupes sont vaguement au courant des procédures à suivre en cas de retard dans
l’enregistrement de naissance. Sans en connaître les détails, ils mentionnent le « jugement
supplétif ».
Attitudes et pratiques relatives à l’enregistrement de naissances « Il y a même une affiche à l’hôpital où il y a la
photo d’un enfant avec le drapeau malgache. Il y
L’ensemble des groupes perçoit l’enregistrement des naissances a quelque chose d’écrit sur les droits de l’enfant.
comme une obligation des parents. Une minorité au sein du L’enfant doit avoir ses droits dès sa naissance !
Dès que l’enfant est né, on doit s’occuper de sa
groupe « hommes » rural d’Alaotra Mangoro va même jusqu’à ‘copie’ pour qu’il puisse jouir de ses droits. » [H-
déclarer que l’enregistrement des naissances est un « droit » de Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
l’enfant.
Les groupes perçoivent également l’utilité de l’acte de naissance. Ils se sentent tout d’abord
concernés par la scolarisation de l’enfant. Ils savent qu’il est possible de scolariser un enfant
sans acte de naissance mais précisent que « c’est quand même préférable que l’enfant ait sa
‘copie’ (sic) ! ». Ils sont ensuite conscients que l’enregistrement de la naissance ouvre les droits à
la vie citoyenne, sanctionnés par l’obtention d’une carte d’identité à
« La copie c’est l’acte qui prouve que tu es
la majorité, qui permettra nottament à l’enfant de passer des actes réellement un citoyen du pays car si tu ne l’as
administratifs, par exemple, pour l’achat d’un terrain. Les groupes pas, tu ne pourras pas avoir de carte d’identité»
de DIANA et de la capitale déclarent également que l’enregistrement [H-Rur-MPL, DIANA] ; « La raison pour laquelle
on doit enregistrer la naissance à la commune,
des naissances facilite l’accès aux soins, y compris pour la d’après les leçons apprises auparavant, c’est
vaccination, l’acte de naissance étant demandé aux parents par les pour qu’il devient un citoyen du pays. C’est
agents de santé. Cette information n’a pu être vérifiée auprès des pour que l’Etat reconnaisse que c’est réellement
un individu ! » [H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro].
centres de santé concernés.
Les groupes « hommes » considèrent l’enregistrement de la naissance de leur enfant comme
une source de fierté : ils font quelque chose qui est important pour l’avenir de l’enfant. Le
groupe d’Alaotra Mangoro s’est montré particulièrement éloquent.
« Il vaut mieux accoucher à l’hôpital ! C’est trop
La facilitation des procédures pour obtenir un acte de naissance contraignant d’aller au tribunal. » [H–Rur–PNL–
constitue un élément de motivation pour accoucher dans un centre Atsimo Andrefana] ; « Il vaut mieux accoucher à
de santé. Une bonne partie des participants du groupe du Sud l’hôpital, comme ça, on aura une copie en règle.
Je ne suis pas vraiment au courant de cette
Ouest affirme en effet préférer accoucher dans un centre de santé procédure à suivre en cas de retard. Tous mes
pour cette raison. enfants sont nés à l’hôpital et leurs copies sont
toutes en règle ! » [H-Rur-PNL, Atsimo
Les groupes semblent être favorables à l’enregistrement des Andrefana]

 24
naissances. Ils s’excluent des parents « défaillants » dont ils semblent avoir honte. Pourtant,
lorsque questionnés sur les raisons qui font que certaines personnes n’enregistrent pas la
naissance ou ne récupèrent pas la copie de l’acte de naissance de leur enfant, leur opinion sur
les parents « défaillants » divergent.
Les groupes de la capitale et d’Alaotra Mangoro ont tendance à « Ce sont des parents inaptes à s’occuper de leur
les critiquer, les qualifiant de parents « inconscients » et enfant…. Comment faire vivre (mamelona)
l’enfant, ils le savent mais s’occuper de son avenir
« irresponsables ». Ils signalent qu’il s’agit généralement d’enfants de ses études …, ça ils ne savent pas comment
dont la mère a accouché en dehors d’une structure sanitaire, ce faire ! Ils sont vraiment inconscients ! » [H-Rur-
qu’il semble désapprouver. MPNL, Alaotra Mangoro]

Certains participants parmi ces deux groupes trouvent cependant « C’est le nom du bureau qui prédomine dans sa
des excuses aux parents. Une faible minorité dans la capitale tête ! Dès qu’on parle de tribunal, il a en tête
l’emprisonnement alors que la radio fait déjà
invoque la peur de l’administration, surtout dans le cas du beaucoup de sensibilisation à ce sujet ! » [H-Urb-
jugement supplétif (tribunal). PNL, Analamanga]

Des cas isolés à Alaotra Mangoro font état des problèmes de survie auxquels les parents sont
confrontés les empêchant de remplir leur devoir. Les autres
groupes, qui représentent la majorité, ne blament pas les parents «2000
Il y en a qui demandent de l’argent. Je demande
Ar à celui-ci, 3000 Ar à un autre, 5000 Ar …
qui manquent à leur devoir. Les groupes de DIANA, du Sud Est et ! Demandez aux gens venant de la campagne, où
Sud Ouest rendent compte de leur attitude en référant aux petits est votre copie, ils vous répondront : ‘ils nous ont
« cadeaux » attendus des responsables de l’administration qui, demandé de l’argent, on n’en a pas alors on ne l’a
pas pris !’ » [H–Rur–PNL–Atsimo Andrefana]
autrement, feraient trainer la procédure. Une majorité des
participants de DIANA évoque ensuite l’ignorance des procédures à suivre. Enfin, des cas isolés
dans le groupe du Sud-ouest signalent que les parents ne connaissent pas l’utilité de l’acte de
naissance.

2.3. Allaitement maternel exclusif


De manière générale, l’allaitement maternel exclusif est très peu pratiqué : les familles où l’AME a
cours ne représentent jamais qu’une très faible minorité sauf dans le groupe « hommes » de la
capitale. L’administration de liquides peu après la naissance est une pratique généralisée et si les
mères reviennent ensuite à l’allaitement maternel exclusif, ce n’est que pour une période
inférieure aux 6 mois recommandés.
De toute évidence, les connaissances sont lacunaires qu’il s’agisse de la définition de l’AME, de
ses raisons ou ses avantages et de la conduite de l’AME. Les croyances relatives au lait maternel
qui en font l’aliment naturel par excellence pour l’enfant pourraient favoriser l’AME si elles
n’étaient pas accompagnées de perceptions négatives quant à sa valeur nutritionnelle. Les
femmes et les hommes doutent souvent de la capacité d’une femme à assurer pleinement la
nutrition d’un bébé avec son lait et considèrent, en outre, l’AME comme trop contraignant.
2.3.1. Connaissances en matière d’allaitement maternel

A part pour la petite minorité du groupe « femmes » du Sud Ouest qui pratiquerait l’AME suite
au conselling des agents de santé, les connaissances sur l’AME laissent à désirer.
Faible connaissance du contenu de la pratique recommandée
Seule la petite minorité du groupe « femmes » rural du Sud Ouest sait que l’AME exige de ne
donner aucun liquide aux bébés de moins de six mois. L’exclusion des aliments solides est un
peu mieux connue et a notamment été relevée par le groupe « hommes » d’Alaotra Mangoro
dont le niveau de connaissance sur la question est d’ailleurs remarquable par rapport aux autres
groupes.

 25
Le délai de six mois, fixé par des études scientifiques, est remplacé par des délais basés sur une
évaluation personnelle et variable du niveau de développement de l’enfant : pour certains, le fait
que l’enfant soit capable de s’asseoir marque le début de l’alimentation complémentaire, pour
d’autres l’apparition des dents, et pour d’autres encore la force de ses pleurs (signe qu’il a faim).
Connaissance parcellaire de la justification et des avantages de l’AME
Très peu de groupes et très peu de participants dans les groupes ont mentionné les avantages de
l’allaitement maternel exclusif autres que les avantages pour la santé de l’enfant. En général, tous
reconnaissent que l’allaitement maternel favorise la santé de l’enfant, par contre très peu savent
que bon nombre de ces avantages tiennent au fait que cet allaitement maternel est exclusif. Dans
le groupe « femmes » rural d’Alaotra Mangoro, une majorité des participantes semble savoir que
l’AME protège contre les maladies et la diarrhée en particulier et dans le groupe « hommes » de
la capitale, une petite minorité semble reconnaît les risques de contamination liés à
l’administration d’autres aliments liquides ou solides avant le sixième mois.
Ainsi, à une ou deux exceptions près, les participants ignorent ou n’accordent pas suffisamment
d’attention aux avantages qui justifient l’allaitement maternel exclusif : croissance de l’enfant,
résistance aux maladies (et pas seulement la diarrhée), développement psycho-affectif et
intellectuel de l’enfant, avantages pratiques et affectifs pour la mère, avantages économiques et
pratiques pour la famille. En fait, dans une proportion assez importante de cas, les participants
(surtout les hommes) pensent que le lait maternel est un aliment adapté à l’organisme de
l’enfant. Les autres liquides et aliments mous sont administrés à l’enfant pour la même raison :
leur caractère digeste.
Le rôle contraceptif (Méthode d’Allaitement Maternel et d’Aménorrhée ou MAMA) de l’AME
n’a été notée que dans un cas isolé chez les participantes du groupe « femmes » de la capitale
mais il s’agit là d’une connaissance toute théorique, la femme l’ayant rapporté affirmant que
cela ne marche pas.
Connaissances relatives à la conduite de l’allaitement maternel (exclusif ou non)
S’il y a une connaissance qui est largement répandue, c’est celle de la relation entre l’allaitement
maternel et la nutrition maternelle. Elle est citée spontanément par une majorité des participants
dans la majorité des groupes. Cependant, le sens qu’elle prend en rapport avec la pratique de
l’allaitement maternel diffère entre les groupes, notamment entre les pauves et les moins
pauvres :
ƒ Chez les moins pauvres, les femmes pensent qu’il faut qu’elles mangent le mieux possible
pour favoriser la production de lait. Les hommes partagent cet
avis. Il y a même une certaine connaissance des aliments « Les patates et les pommes de terres ne
contiennent pas beaucoup de vitamines. Si elle
considérés comme lactifères dans les groupes de femmes et des mange du poulet, du riz avec des haricots, elle
hommes. Il s’agit dans l’ensemble d’aliments traditionnels tels aura des vitamines et pourra alors donner le
que la chivaquine, la papaye ou le bouillon de poulet. sein. » [H–Rur–PL–Atsimo Atsinanana]

ƒ Chez les pauvres (notamment les zones à forte insécurité « Nos réserves d’aliments n’arrivent pas à
alimentaire), ces mêmes connaissances se retrouvent. Cependant, suivre… nous n’arrivons à nourrir
correctement notre femme que pendant deux
elles se doublent de la croyance selon laquelle en cas de pénurie ou trois semaines… C’est la pauvreté ! » [H–
alimentaire, il vaut mieux donner directement les aliments à Rur–PL–Atsimo Atsinanana]
l’enfant au lieu de les faire passer d’abord par la mère.
L’alimentation de la mère est censée déterminer non seulement la quantité de lait mais sa
qualité, ce qui rend compte de certains tabous alimentaires.
Les conduites à tenir face aux problèmes de l’allaitement maternel (et pas seulement exclusif)
semblent totalement inconnues de tous comme le prouvent les cas rapportés d’interruption de

 26
l’allaitement maternel en cas de maladie de la mère, de refus de l’enfant ou de la malnutrition,
perçue ou réelle, de la mère. L’allaitement maternel à volonté est très peu connu : à maintes
reprises les femmes et les hommes de tous les groupes ont mentionné que les femmes n’ont pas
suffisamment de lait, renvoyant sans doute à leur état nutritionnel, souvent jugé inadéquat.
Seul un cas isolé dans le groupe « femmes » de la capitale a mentionné le fait que le lait maternel
devrait suffire à partir du moment où la femme continue d’allaiter.
2.3.2. Croyances en matière d’AME

Deux types de croyances en rapport avec l’allaitement maternel (exclusif ou non) se dégagent :
les croyances culturelles relatives à l’allaitement maternel et les croyances sur la valeur
nutritionnelle du lait maternel.
Le premier type de croyances, rencontrées dans quelques groupes seulement, sont dans
l’ensemble en faveur de l’allaitement maternel : ainsi pour les femmes du Sud Ouest rural, le lait
maternel serait le seul aliment envisageable pour l’enfant, parce que le lait maternel est un don
de Dieu. Dans les deux groupes de DIANA7, l’allaitement s’inscrit dans la perpétuation d’une
tradition. Il est à noter que si ces croyances favorisent l’allaitement maternel, elles ne vont pas
obligatoirement dans le sens de l’allaitement maternel exclusif.
A l’encontre de ce premier groupe de croyance, les perceptions sur la valeur nutritionnelle du
lait maternelle sont fortement au désavantage de l’allaitement maternel exclusif. Ici encore, le
groupe « hommes » de la capitale se démarque des autres dans la mesure où la majorité de ses
participants sont convaincus du fait que le lait maternel couvre tous les besoins nutritionnels des
bébés. Sinon, tous les groupes où la question de la valeur nutritionnelle a été soulevée, croient
pour la majorité de leurs participants que le lait maternel n’apporte pas tous les nutriments
nécessaires à l’enfant. Cette croyance peut être déclarée explicitement. Elle est plus souvent
implicite lorsque les parents affirment donner d’autres aliments pour fortifier l’enfant ou pour
accélérer la croissance ou parce qu’ils estiment que l’enfant veut manger plus.
Il faut noter aussi la croyance assez répandue que la production de lait maternel est fonction de
la constitution physique de la femme. Finalement, le groupe « femmes » du Sud Ouest a des
croyances qui le distinguent de tous les autres groupes : en premier lieu, la majorité des
participantes estiment qu’il faut donner de l’eau à l’enfant pour étancher la soif (climat chaud),
ensuite, une minorité pense que le lait maternel est trop gras et qu’il faut en conséquence
donner de l’eau pour le diluer, finalement, un cas isolé mentionne la nécessité de donner de
l’eau pour expulser « les saletés » du ventre de l’enfant.
2.3.3. Attitudes en matière d’AME

Les attitudes sont dans l’ensemble peu en faveur de la pratique l’allaitement maternel exclusif.
Pour les femmes en milieu urbain et rural, cette pratique serait trop contraignante et fatigante
pour elles et les empêcherait de vaquer à d’autres occupations. Cette opinion est partagée par les
participants du groupe « hommes » de la capitale dans la mesure où leur femme exercerait une
activité rémunératrice.
Par ailleurs, les femmes et les hommes rencontrés dans la région de DIANA émettent en majorité
des doutes quant à la capacité des femmes à nourrir leur bébé. Cette attitude serait sans doute
liée à leur croyance quant à la valeur nutritionnelle du lait.
Finalement, la fierté parentale (et masculine surtout) d’avoir un enfant qui grandit bien peut être
à double tranchant :
7
Hommes – Rural – Moins Pauvres lettré(e)s –DIANA et Femmes 25 ans + – Rural –Pauvres Non Lettré(e)s – DIANA

 27
ƒ Elle favorise l’allaitement maternel exclusif lorsque les personnes sont bien informées sur les
avantages de l’AME (cas du groupe « hommes » Analamanga)
ƒ Elle va à l’encontre de l’AME lorsque les personnes sont peu convaincues de la valeur
nutritionnelle du lait maternel. En effet, elles veulent accélérer la croissance de leur enfant en
donnant d’autres aliments (cas du groupe « hommes » de DIANA).
2.3.4. Pratiques en matière d’allaitement maternel

L’AME n’a été rapporté que dans quelques rares cas, l’administration de liquides à la naissance
étant la principale déviance par rapport à la pratique recommandée. Si la plupart des ménages
reviennent à l’AME après cette première période, l’introduction d’aliments complémentaires
solides ou liquides vient y mettre fin dès le premier mois dans quelques cas, et entre le troisième
et le cinquième mois dans la quasi-totalité des cas. Par ailleurs, peu de ménages apportent un
soutien particulier à la mère allaitante.

Quelques rares cas d’AME « C’est la sage-femme qui m’a conseillé de ne


Le seul cas où l’AME est rapporté par une majorité des participants donner que du lait maternel à mon enfant de la
naissance jusqu’à combien de mois déjà ? Quand
d’un groupe est celui des hommes dans la capitale. Ce groupe j’ai suivi le conseil, mon enfant était en parfaite
affirme respecter les conditions de cette pratique et en être santé. » [F25 ans+-Rur-PL, Atsimo Andrefana]
satisfait. Sinon, les autres cas d’AME apparaissent chez des petites minorités dans les groupes
« femmes » du Sud Ouest. Il est à noter que dans ces groupes, la pratique de l’allaitement
maternel exclusif s’insère toujours dans le cadre de l’application de l’ensemble des pratiques
recommandées en relation avec la grossesse, l’accouchement et l’alimentation du nouveau-né :
les femmes qui rapportent l’application de l’allaitement maternel exclusif sont celles qui ont suivi
les consultations prénatales, qui ont donneé le colostrum et qui ont pratiqué l’allaitement
précoce.
A travers ces groupes où l’AME est observé, il semblerait que chez les hommes, l’accès à des
informations relayées par les médias détermine la conviction à pratiquer l’AME alors que chez les
femmes, l’influence des agents de santé est primordiale.
L’administration de liquides à la naissance : la principale déviance
A l’exception du groupe « hommes » de la capitale cité précédemment, tous les groupes
rapportent à la majorité de leurs participants l’administration de liquides à la naissance ou peu
après la naissance. Les liquides donnés varient d’une région à une autre. Les boissons les plus
fréquemment citées sont le thé sucré ou le bouillon de riz8. Mais il existe aussi des boissons
traditionnelles comme le « fakabe », une décoction de racine amère, rapportée par le groupe
« hommes » de DIANA, supposée fortifier l’enfant.
Cette pratique est due d’une part aux connaissances et aux croyances exposées ci-dessous mais
aussi à d’autres raisons :
- Pour les hommes de la région de DIANA, l’administration du
« Le fakabe, c’est une tradition en quelque
"fakabe" se justifie par la tradition : cette pratique aurait sorte. Il fortifie l’enfant. Quand il n’est pas très
toujours existé chez eux et n’aurait apparemment nui à fort, le fakabe permet de compenser cela. » [H-
aucun enfant. Cette opinion sur le rôle des traditions, Rur-MPL, DIANA]
clairement exprimée dans le cas de ce groupe, se retrouve

8
Par exemple, [Femmes 24 ans - - Urbain –Pauvres Non Lettré(e)s - Atsimo Andrefana] [Femmes 25 ans + – Rural –Pauvres lettré(e)s – Atsimo
Andrefana] [Femmes 24 ans - - Rural –Moins Pauvres lettré(e)s – Alaotra Mangoro] [Hommes – Rural – Moins Pauvres Non Lettré(e)s - Alaotra
Mangoro]

 28
de façon plus diluée dans tous les autres groupes.
- Dans les groupes « femmes », on évoque surtout l’attente de la montée laiteuse : les
pleurs du nouveau-né exerceraient sur les mères et la famille une telle pression que
même si elles savent que ce n’est pas indiqué, les mères donnent du thé sucré au bébé.
- Le groupe « femmes » rural de DIANA rapporte un cas où ce serait l’agent de santé lui-
même qui, face aux pleurs de l’enfant aurait recommandé à la mère de lui donner à
boire du thé sucré.
- Dans le groupe « femmes » du Sud Ouest, une petite minorité a indiqué que
l’administration de liquides autres que le lait maternel à la naissance a pour but de
nettoyer le ventre de l’enfant de toutes les « saletés ».

Retour à l’AME pour une courte durée à quelques exceptions près


La tendance générale est de revenir à l’AME après cette déviance des premiers jours. Cependant,
l’administration de liquides autres que le lait maternel persiste dans quelques cas :
- Dans les groupes ruraux du Sud Ouest, les parents continueraient à donner de l’eau au bébé
pour étancher la soif. Une opinion dans le groupe « femmes » dit également donner de l’eau
au bébé pour diluer le lait maternel qui est trop gras.
- Dans le groupe « femmes » de la capitale, il est rapporté l’administration d’un liquide à des
fins thérapeutiques : le jus de tomate permettrait de soulager l’enfant d’une constipation.
Poursuite de l’AME interrompue avant le sixième mois en général
La reprise de l’AME ne dure presque jamais jusqu’au sixième mois comme recommandé.
L’introduction d’aliments complémentaires se produirait dès le premier mois dans les cas
extrêmes mais généralement entre le troisième et le cinquième mois. Le bébé recevrait divers
types d’aliments selon les régions, la bouillie de riz étant une base commune :
- L’utilisation substituts du lait maternel (lait maternisé) n’est mentionnée que de façon isolée
dans le groupe « hommes » de la capitale. Le groupe « hommes » du Sud Ouest évoque
également l’éventualité de donner du lait maternisé mais semblent ne pas le faire pour des
raisons de coûts.
- Le critère de richesse semble jouer un rôle ici : alors que le groupe « hommes » de DIANA
affirme que leurs familles préparent des aliments spéciaux pour les bébés en choisissant parmi
ce qu’ils considèrent être les plus nutritifs, celui du Sud Ouest (une région où l’insécurité
alimentaire règne) dit que leurs enfants doivent se contenter des mêmes aliments que le reste
de la famille.
- Dans les deux groupes de l’Alaotra Mangoro, le choix des aliments de compléments est basé
sur le critère d’aliments mous et digestibles.
En plus de l’influence des connaissances et des croyances exposées ci-après, l’introduction
d’aliments complémentaires avant le sixième mois renvoit à des motivations ou des causes qui
varient selon les groupes.

 29
- Dans le Sud Ouest, chez les groupes pauvres (hommes et femmes)9, l’insuffisance de
l’alimentation de la mère (et sans doute la situation alimentaire en général) amènerait les
familles à préférer donner directement les repas aux bébés. Ici encore, l’insécurité
alimentaire et la pauvreté semblent jouer en défaveur de la pratique de l’AME.
- L’exercice d’un emploi rémunéré est évoqué par les
hommes et les femmes comme motif pour arrêter l’AME en « C’est son travail qui a fait qu’elle
n’a pas pu achever les six mois » [H-
milieu urbain, notamment à Analamanga. Par contre, dans Urb-PNL, Analamanga]
le milieu rural, les femmes rapportent Arrêter l’allaitement
maternel exclusif pour pouvoir vaquer à d’autres occupations.
- Au-delà de ces considérations pratiques, l’introduction d’aliments complémentaires est
également perçue comme une étape vers l’autonomisation de l’enfant. Cette attitude se
retrouve fortement dans les groupes de DIANA10 et dans une moindre mesure chez le groupe
« femmes » d’Alaotra Mangoro.
Peu de soutien à l’allaitement maternel
Une bonne connaissance de la relation entre allaitement maternel et nutrition maternelle aidant
(cf. section sur les connaissances), plusieurs groupes d’hommes ont rapporté faire des efforts
pour améliorer la nutrition de leur femme allaitante. Cependant, ici encore, le degré d’aisance
économique semble entrer en jeu : alors que cette amélioration est effective chez les hommes
moins pauvres de l’Alaotra Mangoro et de DIANA, elle serait un vœu pieu chez leurs homologues
pauvres du Sud Ouest.
Les groupes « femmes » ne mentionnent pas d’efforts particuliers en la matière, bien que leur
niveau de connaissance de la relation entre allaitement maternelle et nutrition maternelle soit
élevé. Seules les participantes de DIANA disent manger mieux et plus pendant la période
d’allaitement.
Finalement, l’allègement de la charge de travail pour la femme allaitante n’est mentionné par
aucun groupe. La seule fois où il est évoqué, c’est précisément pour dire que les femmes
n’arrivent pas à allaiter parce qu’elles sont trop fatiguées. [F25 ans+-Urb-PL, Analamanga].
Influences sur les connaissances, attitudes et pratiques
Bien que la question n’ait pas été traitée spécifiquement, les groupes de discussion ont permis de
mettre en évidence certaines tendances en matière d’influence dans le domaine de l’AME.
En premier lieu, le rôle des agents de santé semble être essentiel auprès des femmes : ce sont les
femmes conseillées par les agents de santé qui adoptent la pratique recommandée (cas groupe
« femmes » du Sud Ouest). Chez les hommes, les médias semblent être la principale source
d’informations (cas des groupes « hommes » de la capitale et de DIANA). Cependant, même si les
hommes dans les deux groupes accordent du crédit aux informations relayées par les médias,
seuls ceux de la capitale les traduisent en action. Ainsi le rôle des traditions, particulièrement
fortes dans la région de DIANA par rapport à toutes les autres régions, transparaît

2.4. Soins au nouveau-né et à l’enfant malade

9
[Femmes 25 ans + – Rural –Pauvres lettré(e)s – Atsimo Andrefana] [Hommes – Rural – Pauvres Non Lettré(e)s – Atsimo Andrefana]

10
[Femmes 25 ans + – Rural –Pauvres Non Lettré(e)s – DIANA] [Hommes – Rural – Moins Pauvres lettré(e)s –DIANA]

 30
2.4.1. Soins au nouveau-né malade
Les connaissances, attitudes et pratiques des groupes relatives aux soins donnés aux enfants de
moins de 28 jours qui sont malades sont étudiées par rapport au comportement recommandé
par le MSPF : «emmener immédiatement le nouveau-né qui présente des signes de danger vers
l’agent qualifié le plus proche». Tous les signes de maladie que présente un nouveau né sont
considérés comme signes de danger : (i) le refus du sein ; (ii) la respiration rapide et difficile ;
(iii) la fièvre ; (iv) le cordon ombilical rouge et gonflé ; (v) l’hypothermie ; (vi) la diarrhée. Ce
dernier signe n’est pas traité dans cette sous-section car faisant l’objet de la section 2.5.
Prévention et prise en charge de la diarrhée.

Connaissances et attitudes sur les soins au nouveau-né malade

Maladies du nouveau-né
Les groupes pensent que les maladies néonatales sont assez rares dans leurs régions. Pourtant,
lorsqu’interrogés sur « les maladies les plus courantes chez le nouveau-né jusqu’à un mois au
sein de leur communauté », ils citent, par ordre décroissant :
« Lorsqu’il a moins de 1 mois, on dirait qu’il y a
- la toux, accompagnée parfois de difficultés respiratoires, qui quelque chose qui le gêne dans sa respiration, il a
serait la maladie la plus prévalente chez le nouveau-né dans du mal à respirer comme si la voie respiratoire
tous les sites de l’étude ; cette maladie serait due aux efforts était étroite. » [H-Rur-PNL, Atsimo Andrefana]
physiques, accomplis par la mère durant sa grossesse. Selon « Parfois l’enfant devient bleu quand il tousse, l’air
des minorités au sein des groupes « hommes » d’Alaotra est bloqué car son nez est bouché, c’est souvent à
Mangoro et « femmes » de la capitale, les enfants auraient cause des fumées dégagées par les briques
brulées » [F25 ans+-Urb-PL, Analamanga]
parfois également une « rhinite ».
- La fièvre qui est citée, presque à égale prévalence. Les mères constateraient que l’enfant a
de la fièvre au contact de la bouche avec le téton lors des tétées (forte chaleur qui se dégage
de la bouche du bébé) et les pères, par le contact brûlant avec la peau du bébé. Les groupes
d’Alaotra Mangoro assimilent toute fièvre du nouveau-né au paludisme tandis que le groupe
« femmes » urbain du Sud Est pense que le paludisme ne concerne que les enfants à partir
du troisième mois.
- Des maux de ventre pouvant se manifester soit par la diarrhée soit par des ballonements.
Des faibles minorités au sein des groupes « femmes » ruraux du Sud Ouest et d’Alaotra
Mangoro prétendent que la diarrhée est causée par les premières tétées (colostrum) après la
naissance et les ballonements par les courants d’air.
- L’ombilic rouge et gonflé, cité par des cas isolés dans les groupes « Je crois que c’est parce que ce n’est pas
correctement coupé que ça gonfle, et puis
« femmes » du Sud Ouest et du Sud Est, qui ont tendance à certains enfants ont du mal à cicatriser et le
banaliser ce signe, l’imputant à une mauvaise section du cordon cordon devient alors rouge mais ensuite ça
qui provoquerait une infection passagère. passe, c’est souvent le cas de garçons »
[F25ans+-Urb-MPNL, Atsimo Atsinanana]
Les groupes ne font pas la distinction entre les soins à donner aux
enfants de moins de 28 jours et aux enfants plus âgés. En matière de soins, la seule distinction
opérée est celle qui se fait entre l’enfant qui ne parle pas encore et celui qui sait parler : lorsque
l'enfant est capable de parler il est plus facile de le traiter car il est capable de décrire ce qu’il
ressent et de dire ce qu'il veut manger pour reprendre des forces; lorsque l'enfant n'est pas
encore capable de parler, il est considéré comme beaucoup plus vulnérable, l’évolution de sa
maladie nétant pas prévisible. Les parents auraient alors plus facilement tendance à l’emmener
rapidement au centre de santé.

 31
Signes de danger selon les groupes
L’hypothermie est le seul signe de danger que les groupes n’arrivent pas à repérer chez le
nouveau-né. En effet, les groupes évoquent la haute température, le refus du sein et/ou les
pleurs incessants de l’enfant, sa passivité (état amorphe) ou au contraire un état agité qui
l’empêcherait de dormir la nuit. Mais ils les considèrent généralement comme des signes de
maladie et non des signes de danger nécessitant un recours immédiat au centre de santé.
Seuls de cas isolés considèrent la forte hausse de température comme un signe de danger.

Ils ont tendance à penser qu’un nouveau-né n’est gravement malade que s’il présente plusieurs
signes de maladie simultanément : fièvre et refus du sein, avec pleurs incessants et/ou
affaiblissement de l’enfant. Mais, même en cas de fièvre, tant que le nouveau-né continue à
téter et à réagir de façon « normale », la maladie ne présenterait aucune raison de s’alarmer et
de rechercher des soins dans un centre de santé.
Recours au centre de santé
Les attitudes face au recours au centre de santé en cas de signe de « Lorsque l’enfant est encore trop petit, on n’ose
pas lui donner des médicaments comme ça, c’est
danger chez l’enfant de moins de 28 jours sont contradictoires. trop difficile, il vaut mieux l’emmener chez le
Les groupes reconnaissent l’importance du recours à un centre de docteur » [F25ans+-Urb-PL, Analamanga]
santé pour soigner les maladies, surtout s’il s’agit du nouveau-né, en raison de sa fragilité et de
son incapacité à parler et à expliquer ce qu’il ressent. Seul un personnel qualifié serait capable
de diagnostiquer la maladie et prescrire le traitement adéquat. En même temps, le nouveau-né
semble être considéré comme appartenant à la même catégorie que les nourissons plus âgés et
est traité de la même manière. C’est uniquement dans les groupes « hommes » d’Alaotra
Mangoro et « femmes » de la capitale que de faibles minorités considèrent comme « grave »
toute maladie affectant un nouveau-né. La délicatesse des soins à prodiguer à ce dernier
requerrait alors un recours immédiat au centre de santé.

Une minorité dans les groupes a également tendance à rejeter les maladies néonatales sur le dos
de la pauvreté et des difficultés financières vécues par le ménage. Les participants évoquent en
effet la mauvaise alimentation de la mère allaitante, l’incapacité financière des parents à fournir
les soins nécessaires au nouveau-né (vêtements chauds, médicaments) ou la fatigue de la mère
pendant la grossesse. Les participants regrettent la situation dans laquelle ils se trouvent mais
tendent à penser qu’ils n’ont pas de solutions face au problème de la pauvreté.
Enfin, dans certaines régions, notamment le Sud Ouest et le Sud Est, les croyances et les idées
fausses sur les maladies en général – dont celles du nouveau né – sont encore fortement
ancrées. Elles sont associées à l’action des « mauvais esprits » et parfois à la sorcellerie
nécessitant, de ce fait, le recours à un exorciste ou à un tradipraticien.

Pratiques de soins en cas de maladie néo-natale


« On fait bouillir des feuilles d’eucalyptus dans
Trois types de recours sont appliqués en cas de maladie du nouveau- de l’eau, qui servira ensuite à laver la tête de
l’enfant malade, puis on lui applique de
né : les pratiques traditionnelles, l’automédication et le recours à un l’huile » [F25ans+-Rur-PL, Atsimo Andrefana] ;
centre de santé. A l’exception de la capitale, les pratiques
« Chez nous on utilise de l’os brûlé qu’on fait
traditionnelles et l’automédication constituent les premiers recours renifler aux enfants pour dégager le nez
bouché, c’est ce qu’on fait et les difficultés
des groupes. Le centre de santé vient généralement en second respiratoires de l’enfant disparaissent après
recours. Ces recours ne s’excluent pas ; ils constituent le parcours de ça. » [F24ans-Rur-PNL, Atsimo Atsinanana] ;
soins du nouveau-né malade habituellement appliqué par la quasi- « On applique le feuillage d’une plante spéciale
sur le corps des enfants malades pour baisser
leur température. » [F25ans+-Urb-MPNL,
Atsimo Atsinanana]
 32
totalité des groupes, dans l’espoir de parvenir à une guérison – à la première étape – sans avoir
à engager des dépenses auprès d’un centre de santé.

Les pratiques traditionnelles, recours de première instance


Les pratiques traditionnelles constituent le recours de première instance, qui semble le plus
répandu. Dans l’ensemble des régions et dans tous les types de groupes, la majorité des
participant(e)s déclarent avoir l’habitude d’y recourir en cas de suspicion de maladie ou de
maladie « avérée » du nouveau-né et en fonction des signes de maladie perçus. Ces pratiques
comprennent :

- des potions et tisanes « transmises par les ancêtres » préparées soi-même ou par les
guérisseurs traditionnels, destinées à alléger, voire éliminer certaines maladies ;

- des rituels utilisés contre les maladies causées par le « mauvais esprit » (fanahy ratsy), qui
semblent particulièrement répandus dans le Sud Ouest rural ;
« Nous gardons de la graisse de zébu en
- Des procédés et astuces de « grand-mères », parfois également réserve, à appliquer sur le corps du bébé après
le bain pour éviter les ballonnements, il paraît
utilisées en complément des prescriptions du médecin : que cela contribue également au
développement de son corps » [F25ans+-Urb-
PL, Analamanga]
Plusieurs raisons sont évoquées dans les groupes pour justifier ces
pratiques dont, par ordre décroissant :

- Leur accès facile, simple, pratique et de moindre coût, puisque les ingrédients sont à base de
plantes ou d’autres produits naturels faciles à trouver et pratiquement gratuits ;

- la conviction que ces remèdes sont efficaces et la confiance que les groupes ont en les
compétences du guérisseur qui « remédierait à toutes sortes de maladie » ; dans la région du
Sud Ouest, celui-ci est jugé capable de guérir des maladies dépassant les compétences de
l’agent de santé ;

- L’innocuité des substances naturelles qui seraient, selon les groupes du Sud Ouest,
beaucoup moins dangereuses pour le nouveau-né que les médicaments, « en cas d’erreurs
de diagnostic et de remède incompatible » ; dans la région, les pratiques traditionnelles
constitueraient alors des actions prioritaires pour apaiser les « malaises » du nouveau-né.

En fait, la gravité des maladies affectant le nouveau-né semblent minimisées, voire ignorées par
la grande majorité des groupes. Les croyances sur les causes des maladies néo-natales
mentionnées supra les amènent à recourir aux pratiques traditionnelles.

L’automédication, autre recours de première instance


L’automédication constitue également un recours de première « On achète les comprimés de nivaquine dans
instance pour les minorités des participant(e)s tous groupes les pharmacies, qu’on divise en 4 et c’est ce
confondus, sauf pour les groupes de la capitale qui redoutent les qu’on lui donne si la fièvre n’est pas trop
grave » [F25ans+-Urb-MPNL, Atsimo
effets des médicaments non prescrits surtout pour le nouveau né. Ce Atsinanana]
recours est surtout adopté pour les maladies jugées non « grave »,
« Quand la maladie n’est pas trop grave, on
peut lui donner du paracétamol ou du
chloroquine. » [F24ans-Rur-MPL, Alaotra
 33 Mangoro]
avec l’espoir de ne pas devoir faire appel à un personnel médical qualifié pour obtenir la
guérison escomptée. L’automédication serait également appliquée parallèlement aux pratiques
traditionnelles. Outre la faible perception de la gravité des signes de danger, les motivations qui
amènent les groupes à y recourir sont :
- la facilité d’accès aux médicaments dans les points de vente, notamment en raison de
l’existence, dans certaines régions, de structures confessionnelles (masera) de distribution de
médicaments à moindre prix par rapport aux prix dans les pharmacies ou dans les CSB ;

- la confiance en leur propre capacité à résoudre le problème de « Parfois, lorsque la température de l’enfant est
santé considéré comme « bénin », en appliquant les très élevée on pose un tissu imbibé d‘eau froide
sur son front » [F25ans+-Urb-MPNL, Atsimo
prescriptions et recommandations de l’agent de santé pour une Atsinanana] ;
maladie antérieure jugée semblable.
Pour dégager le nez bouché on y injecte de l’eau
salée.» [F25ans+-Urb-PL, Analamanga]
Le recours à un centre de santé, second recours
Bien que la majorité reconnaisse l’importance du recours au centre « Lorsqu’on constate que l’enfant se trouve dans
un état fébrile, il faut toujours l’emmener au
de santé pour le nouveau né, compte tenu de sa fragilité, seuls les centre de santé, ça a toujours été le cas pour
groupes de la capitale et de faibles minorités dans les autres groupes mes 3 enfants puisqu’on n’a jamais su ce qui
leur arrivait si ce n’était le médecin qui a fait le
semblent considérer cette alternative. En effet, dans la pratique, il ne diagnostic » [H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
s’agit, pour la majorité, que d’un second recours et/ou en cas
d’extrême urgence.

C’est généralement entre 2 à 3 jours après l’apparition des symptômes que ce type de recour
serait pratiqué par la majorité des groupes, si la maladie persiste après les autres recours. La
principale raison avancée pour justifier le délai rencontré est d’ordre financier. Ce délai servirait
à trouver l’argent nécessaire pour faire face aux frais de consultation
et pour les médicaments, en vendant des biens « commerçables » au « Dès que les symptômes de l’enfant
s’arrêtent, il reste à la maison, on ne l’emmène
sein du ménage ou en empruntant auprès de tiers. Si entre temps plus voir le docteur, mais on n’y va que si c’est
l’état de santé de l’enfant s’améliore, le recours au centre de santé vraiment
Mangoro]
grave » [F24ans-Rur-MPL, Alaotra

n’aurait plus lieu.

Par ailleurs, l’éloignement du centre de santé, notamment dans les régions rurales, et l’attente
de la levée du jour si la maladie s’aggrave pendant la nuit expliquent le délai dans le recours au
centre de santé. Si le centre de santé (privé) est proche, le recours serait immédiat pour les
« urgences », même la nuit. Dans le cas des groupes du Sud Ouest et du Sud Est, c’est la
nécessité d’attendre la décision du mari qui expliquerait le retard.

En définitive, le parcours de soins des enfants de moins de 28 jours n’est pas différent de celui
des enfants plus âgés. Il est tributaire de : (i) la reconnaissance des signes de danger que les
groupes confondent avec les signes de maladie et par conséquent de la faible perception des
risques liés aux maladies néonatales ; (ii) des croyances et des idées fausses sur la cause des
maladies néo-natales ; (iii) des difficultés financières des parents les amenant à postposer ou
éliminer la possibilité du recours immédiat aux services de santé.

 34
2.4.2. Soins aux enfants malades de moins de 5 ans
Cette sous-section porte sur les CACP des groupes relatives à la prise en charge des enfants de
moins de 5 ans malades, en se référant aux pratiques clés promues par le MSPF-PS sur la
question, à savoir : (i) la reconnaissance des signes de maladies (diarrhée; IRA, paludisme…) (ii)
la reconnaissance des signes de danger ; (iii) le recours aux services de soins formels appropriés.
Les signes de danger sont : (i) la forte fièvre et/ou les convulsions ou torpeur ou coma; (ii) la
respiration difficile; (iii) le refus de prendre le sein ou de boire ou de s'alimenter ; (iv) la
persistance des signes de maladie après 48 heures ; (v) la dégradation de l'état de l'enfant. Les
autres comportements étudiés en cas de maladie de l'enfant portent sur : (i) l'observance du
traitement et des recommandations données par l'agent de santé, y compris la référence ; (ii) la
continuation de l'allaitement et de l'alimentation de l'enfant, incluant l'administration de plus de
liquide à l'enfant.
Connaissances et attitudes relatives aux soins de l'enfant malade
Les points qui suivent traitent successivement des connaissances et attitudes des groupes sur : (i)
les maladies des enfants de moins de 5 ans, y compris la perception de leur prévalence dans la
localité ; (ii) les signes leur permettant de reconnaître la maladie, les signes de danger et le
recour aux soins.

Maladies des enfants de moins de 5 ans


Les groupes « hommes » et « femmes » sont conscients de la réalité de la mortalité infantile
élévée dans leur région. Ils sont également capables d’identifier les raisons de cette situation,
soit la prévalence élevée de maladies infantiles mortelles et les délais dans le recours au centre
de santé.

Trois principales maladies sont perçues par l'ensemble des groupes comme prévalentes dans
leur région respective. Il s'agit de la diarrhée et du paludisme dont les complications sont
assimilées par les groupes ruraux à des troubles démoniaques (Sud Ouest) ou à la sorcellerie
(Sud Est et Alaotra Mangoro) ainsi que de la toux et ses complications, le 'triky' (asthme),
affection sur laquelle les groupes du Sud Est insistent, et qui renvoit sans doute aux infections
respiratoires aigües. Les autres maladies des enfants qui sont mentionnées incluent la rougeole
qui est citée par tous les groupes sauf ceux d'Alaotra Mangoro, du Sud Est et du groupe
«hommes» de la capitale, et, et suivant les régions et/ou le sexe, la varicelle (groupes «femmes»),
la bilharsioze (Sud Ouest) et les «hémorroïdes» (DIANA).

Expection faite du groupe«hommes» d'Alaotra Mangoro pour qui toutes les maladies des
enfants sont mortelles, les groupes distinguent entre les maladies qui sont mortelles et les
autres. Les maladies perçues comme mortelles par tous les groupes sont la diarrhée, le
paludisme et leurs complications, y compris celles qui sont interprêtées comme démoniques ou
relevant de la sorcellerie. La rougeole semble être particulièrement redoutée par une bonne
majorité des groupes, surtout les femmes. Les IRA arrivent en quatrième position et sont
perçues comme meurtrières uniquement par les groupes du Sud Est, de DIANA, et du Sud
Ouest. Enfin, avec une prévalence moindre, les groupes de DIANA parlent de la varicelle et
des vers tandis que ceux du Sud Est évoquent la malnutrition des enfants de moins de 5 ans.

 35
Autrement, c'est le retard dans le recours aux soins qui est identifié comme étant la cause
principale de la mortalité infantile, opinion partagée à l'unanimité dans le groupe «hommes»
d'Alaotra Mangoro et par des proportions moins importantes au sein des groupes «femmes» de
DIANA et de la capitale. Le délai dans le recours aux soins est alors taxé par les répondant(e)
d' «irresponsabilité et de négligence de certains parents » même s’ils admettent en même
temps que l'éloignement des centres de santé et la non disponibilité de ressources expliquent
ces délais.

Connaissance des signes de maladie et de danger et des recours requis


La reconnaissance du moment où l'enfant a besoin d’être traité dans un centre de santé est
tributaire de la reconnaisance des signes de danger. La confusion entre signes de maladie et
signes de danger est cependant manifeste. A quelques exceptions près, les groupes reprennent
les mêmes signes pour les deux catégories.
Deux principales tendances se dégagent sur le plan de la description des signes de
maladie/danger : la première, prédominante, renvoie aux changements de comportement de
l'enfant et la seconde, à des symptômes de maladie. La majorité des groupes considèrent le
changement de comportement de l'enfant comme principal signe de maladie : refus de jouer et
de s'alimenter. Le groupe « femmes » de DIANA y ajoute l'état d'affaiblissement de l'enfant et le
groupe « femmes » du Sud Est urbain ainsi les groupes du Sud Ouest rural et d'Alaotra, les
pleurs incessants de l'enfant, son humeur irritable ou son état amorphe. Les groupes ruraux du
Sud Est et le groupe « femmes » de la capitale sont les seuls qui identifient ces changements de
comportement comme des signes de danger. Enfin, selon les groupes Sud Ouest, « hommes »
de DIANA et « femmes » d'Alaotra Mangoro, si l'enfant a déjà la capacité de parler, il
signalerait lui-même qu'il est malade. Les mêmes groupes signalent que l'enfant le ferait un peu
plus rarement en cas de gravité de la maladie : dans la plupart des cas, il serait déjà dans
l'incapacité de parler.

La seconde tendance, minoritaire, fait des symptômes de maladies le moyen permettant de


reconnaître que l'enfant est malade ou que son état s'aggrave. L'état fébrile de l'enfant constitue,
généralement pour les hommes, le symptôme de toute maladie infantile telle la diarrhée, le
paludisme, la rougeole, etc. Les hommes de la capitale et de DIANA déclarent que la
température élevée est un signe d'aggravation de la maladie et tous les groupes du Sud Est et
« femmes » d'Alaotra Mangoro y ajoutent les convulsions et l'évanouissement car « il se peut
qu'il ne revienne plus à lui. ». Pour les hommes du Sud Est, c'est la toux et les convulsions qui
représentent les principaux signes de danger, indiquant que la maladie a pris une tournure qui
peut s’avérer fatale. Dans les groupes « femmes » urbaines (25 ans+), les signes de maladie et
de danger sont ceux de la diarrhée (vomissement, selles molles et fréquentes) et des IRA.

Ces signes sont considérés par les groupes comme nécessitant un recours immédiat au centre
de santé. La confusion qui existe entre les signes de maladie et de danger constitue une raison
du retard observé dans le recours aux soins. Les groupes semblent connaître les conduites à
tenir pour les premiers soins d'urgence à domicile tels l'utilisation de cataplasme pour faire
descendre la température de l'enfant, l'administration de liquides supplémentaires ou le fait de
donner la SRO à l'enfant en cas de diarrhée etc. Les groupes savent également que les
prescriptions faites par l'agent de santé doivent être suivies jusqu'au bout.

 36
Les pratiques de soins
La tendance générale de tous les groupes est de citer le centre de santé comme recours
immédiat dès que les signes de maladie apparaissent, pour les « grandes » maladies comme la
diarrhée, le paludisme, la toux ou la fièvre. Les principales raisons données pour rendre
compte du recours aux soins dispensés par le centre de santé sont la confiance en la
compétence du médecin, l'importance accordée à la santé de l'enfant, la méconnaissance des
maladies (et donc de la manière de la traiter) et le coût du traitement, en général peu élevé, si la
maladie est prise à son début. Cependant, il existe un fort écart entre ce que les groupes disent
(recourir aux services des centres de santé) et leurs pratiques réelles. En effet, c'est
l'automédication, y compris les pratiques de soins à domicile, ainsi que les potions populaires
et/ou traditionnelles qui constituent le premier recours aux soins des groupes pour la quasi-
totalité des maladies. Le recours au centre de soins et/ou au tradipraticien constituent
généralement un recours de seconde instance, si les symptômes persistent ou s’aggravent.

L'auto-médication et les potions populaires et/ou traditionnelles, recours de première instance


La principale raison évoquée pour rendre compte de l'auto-médication et des potions
populaires et/ou traditionnelles comme recours de première instance sont les soins d’urgence à
donner à l'enfant en attendant de pouvoir aller au centre de santé. Ces pratiques sont
généralement combinées, sauf pour le groupe «hommes» de la capitale qui exclut, dans ses
réponses, le recours aux potions traditionnelles. Les pratiques de soins à domicile comme la
TRO, le cataplasme ou le massage de la poitrine avec de l'huile en cas de toux aurient été
recommandées par le personnel de santé et constitueraient de véritables pratiques «pivots» en
matière de recours d'urgence. En milieu rural, elles sont généralement associées avec les
potions remèdes traditionnelles et/ou populaires. En milieu urbain, elles sont combinées avec
des médicaments auto-prescrits par les participants.

Trois paramètres rendent compte de l'automédication, pratique « D'après ce que j'ai vu, il y a certains qui
dominante en milieu urbain : les connaissances empiriques, la facilité n'emmènent pas leur enfants qui ont la fièvre
chez le médecin parce que selon eux, ils
d'accès aux médicaments et le coût perçu comme moindre par n'auraient que des comprimés là-bas. À la
maison ils en ont déjà acheté et en ont donné
rapport aux prescriptions des médecins. L’'utilisation de remèdes à leur enfant avant d'aller chez le médecin,
traditionnels, pratique dominante chez les groupes ruraux est sous- alors si c'est pour avoir le même
médicament, ils ne voient pas l'intérêt d'y
tendue par la confiance que les groupes y accordent et sa gratuité. Les aller » [F 24ans--Rur-MPL-Alaotra Mangoro].
groupes du Sud Ouest, particulièrement les hommes, sont les plus convaincus de l’efficacité des
potions traditionnelles : le recours au centre de santé coûterait plus cher avec les mêmes
résultats.

Le recours au centre de santé ou au tradipraticien, recours de seconde instance


Les groupes urbains et/ou les groupes « moins pauvres » recourent au centre de santé entre
une demi-journée et deux jours en moyenne après la survenue de la maladie chez l'enfant. Un
délai allant de deux jours à une semaine est observé dans les groupes ruraux. Si pendant cette
période, l'état de santé de l'enfant s'améliore, sous l'effet de l'automédication, des « soins à
domicile » ou des potions populaires/traditionnelles, l'idée du recours au centre de santé est
abandonnée.

 37
Plusieurs raisons sont données par les groupes pour expliquer le retard dans le recours au
centre de santé dont, par ordre décroissant :

- L'indisponibilité des ressources nécessaires aux soins dans un « Quand je n'ai pas d'argent pour prendre soin
centre de santé, évoquée par tous les groupes, l'achat de de mon enfant, je travaille pour les gens pour
trouver de l'argent » [F 25ans+-Rur-PL-Atsimo
médicaments constituant un facteur dissuasif majeur ; des Andrefana]
délais sont alors requis pour permettre la vente des produits vivriers ( groupes ruraux),
pour faire de petits travaux journaliers (groupes urbains et cas isolé dans le groupe
« femmes» du Sud Ouest rural), pour emprunter chez des proches et, le cas échéant,
pour la vente de biens et du patrimoine familial ; le groupe «hommes» de DIANA
affirme que le parc bovin constitue pour eux leur banque ; la demande de facilités de
paiement chez le médecin serait également d'usage.
«Celà dépend des gens, il y en a qui vont chez le
Le groupe «hommes» rural d'Alaotra Mangoro signale qu’au médecin mais qui n'arrivent pas à réunir les
ressources nécessaires, par exemple le prix des
cas où ces démarches seraient infructueuses, les parents médicaments est de 10 000 ariary et il a essayé
reviendraient généralement aux potions traditionnelles comme d'emprunté ici et là mais sans succés, cette
situation se terminera par le mort car il n'y a
troisième et dernier recours en attendant la mort ou une plus rien à faire, il doit s'attendre à la mort. Il
n'y a plus qu'à recourir aux feuilles (aux potions)
guérison miraculeuse. » [H-Rur-Mpnl-Alaotra Mangoro]

- selon tous les groupes, mais avec une prévalence moindre, la


« (...) c'est pareil mais mon cas, j'ai failli
non disponibilité des services, généralement la nuit ou en fin l'oublier, mon enfant a été malade et je l'ai
de semaine et parfois pendant certains jours de la semaine emmené là-bas (...) non!non! me disait-elle (le
médecin) je suis sur le point de partir, l'enfant
selon le groupe «hommes» de DIANA
est malade depuis 7 heures en ce moment là, Je
dois partir à Ambilobe disait-elle et je ne peux
- L'éloignement du centre de santé, cité par tous les groupes pas (le consulter). On a quand même fait la
ruraux à l'exception de ceux des femmes de DIANA et du consultation mais quand je lui ai demandé
Sud Ouest ; apparemment, ce sont les groupes «hommes» qui l'ordonnance pour acheter le médicament, non!
me disait-elle, je ne peux plus le faire (je n'ai
semblent relativement plus sensibles à cette question, peut-être plus le temps). J'étais alors obligé d'aller à
parce qu'ils sont généralement amenés à assurer le tranport en Ambilobe moi aussi» [H Rur MPL DIANA]
cas de besoin ;

- L'incapacité des femmes à décider seules, en cas d'absence du mari, selon les groupes
«femmes » du Sud Ouest et « hommes» du Sud Est (voir implication des hommes) :
«Même si nous avons de l'argent, nous les femmes, nous devrions toujours attendre la
décision de l'homme et s'il dit qu'on emmène l'enfant chez le tradipraticien, nous
sommes obligées de suivre » [F24--Urb-Pnl-Atsimo Andrefana].

Les groupes signalent également que le recours au tradipraticien constitue une pratique
de soin de l'enfant malade mais s'excluent des parents concernés sauf dans le Sud (Sud
Ouest et Sud) et à Alaotra Mangoro. Trois principales raisons sont avancées pour
justifier cette pratique :

- La croyance selon laquelle le médecin n'a pas les compétences requises pour
traiter certaines maladies considérées comme relevant de mauvais esprits ou de
la sorcellerie telles le « hevo » (Sud Ouest), le « tambavy » (Sud Est), le
« maimbomaimbo» (Alaotra Mangoro) que seul le
« Tout à l'heure quand arrivera le soir, vous
tradipraticien pourraient guérir. Il s'agit en fait de l'emmènerez là-bas, emmène-le rejoindre le
démon » [H-Rur-PNL-Atsimo Andrefana].

 38
convulsions à la suite de complications (voir soins au nouveau-né malades).

- Le tradipraticien serait également plus compétent pour traiter le « triky »


(asthme) ou les allergies. Dans ce cas, le recours au tradipraticien se présenterait
comme un second recours parallèle ou comme alternative à celui du médecin ;

- L'habitude des « autres parents » à recourir au tradipraticien, découlant de la


peur des centres de santé et de tout ce qui a trait à l'Administration
(enregistrement des naissances, scolarisation des enfants, vaccination etc.)

Observance du traitement et pratiques d'alimentation de l'enfant malade


Deux tendances divergentes se dégagent. La première, relativement plus importante, se réfère
à l'observance du traitement. Elle est relevée dans les groupes de la capitale, du Sud Ouest
rural, d'Alaotra Mangoro et de DIANA sans toutefois avoir l'unanimité. Par contre, la seconde
qui consiste à abandonner le traitement dès l'apparition de signes d'amélioration de l'état de
l'enfant (commencer à jouer, à boire et à manger). Elle est retrouvée dans les groupes du Sud
Est, Sud Ouest urbain, chez des minorités dans les autres groupes et de manière relativement
plus prononcée dans les groupes «femmes».

Les principales motivations pour observer le traitement sont la confiance en les prescriptions du
médecin et la crainte d'une rechute évenuelle en cas d'abandon du traitement. Selon les régions,
des motivations spécifiques sont relevées. Chez les participants de DIANA, le recours à un
agent de santé et l'observance du traitement prescrit sont source de fierté car sont associés à un
signe de modernité. Ceux d'Alaotra Mangoro se conformeraient rigoureusement au traitement
parce que leur médecin le leur aurait demandé très clairement et sans équivoque de le faire,
systématiquement, à chaque consultation. Celui-ci l'inscrirait clairement par écrit dans le carnet
de soins.

Mais indépendament des réponses émises dans les groupes, l'étude relève que là où les groupes
semblent appliquer l'observance du traietment, soit les participants on accès à des
médiacaments bon marché dans les centres de distribution confessionnels (capitale et Sud
Ouest rural), soit il s'agit de groupes «moins pauvre» et «lettrés» (DIANA), soit les groupes
semblent plus exposés à l'information (Alaotra Mangoro).

Les premières raisons de l'inobservance du traitement sont d'ordre économique. En effet,


l'achat des médicaments prescrits ne se ferait pas d'un seul coup
mais suivant l'évolution de l'état de l'enfant pour réduire les «pasQuand on achète les comprimés, on n'achète
tout tout de suite, si ça va mieux, vous
«arrêtez
Je laissele tomber et si »jamais ça revient (la
dépenses. Si l'état de l'enfant s'améliore alors qu’il reste encore des maladie) je recommence
traitement [H-Rur-PL-Atsimo
simplement à lui en
médicaments, ceux-ci sont réservés pour une maladie ultérieure. Atsinanana]
donner » [F 24ans--Rur- PNL- Atsimo
Viennent ensuite la crainte des effets secondaires des médicaments, Atsinanana]
notamment des maux d'estomac à la suite d'une prise régulière de comprimés de façon
« prolongée», bien que les participant(e)s soient conscient(e)s des risques de l'inobservance du
traitement. Cependant, tous les participant(e)s qui arrêtent le traitement avant terme affirment
agir de la sorte lorsque l'Agent de santé ne donne pas d''indication claire sur la question. Ils
déclarent également que si celui-ci insistait, ils poursuivraient le traitement jusqu'à la fin ne

 39
serait-ce que par peur des conséquences éventuelles de la non observance du traitement prescrit
par un personnel qualifié.

Tous les groupes déclarent qu’ils se conformeraient à l’avis de l’Agent de Santé si celui-ci
décide de référer l’enfant vers un autre centre de santé plus compétent ; seule l'éventualité d'une
incapacité fianancière à faire face aux dépenses est envisagée pourrait faire obstacle à cette
décision. Lancés dans une dynamique de recherche de soins, les parents iraient cependant
jusqu’à vendre le patrimoine familial pour faire face aux coûts des soins et frais connexes
(déplacements, hébergement etc.). La confiance que les parents accordent au personnel de
santé qu'ils croient dans ce cas les seuls aptes à guérir leur enfant motiverait leur choix.

Prévention et prise en charge de la diarrhée


L’étude vise à analyser les CACP des groupes par rapport à la prise en charge de la diarrhée et
plus particulièrement, la connaissance des signes de la diarrhée et de leur aggravation, les
attitudes et pratiques relatives à la Thérapie de Réhydratation Orale (TRO) et les recours aux
soins en cas d’aggravation des symptômes. Ce faisant, elle s’est concentrée sur l’identification
des délais qui peuvent exister entre l’apparition de signes de diarrhée ou de leur aggravation et
le recours aux soins. Pour cette analyse, l’étude prend comme points de références les CAP
promues par le Ministère de la Santé : (i) « la consistance des selles plus molles que d’habitude
et le nombre de selles par jour est augmenté » ; (ii) « continuer d’allaiter au sein (pour enfant
allaité) et donner à manger et donner à boire des fluides supplémentaires comme de l’eau de
riz, de l’eau bouillie, du thé léger ; (iii) donner la solution de réhydratation orale (SRO ou
solution maison) après chaque selle liquide de l’enfant jusqu’à disparition de la diarrhée ; (iv) en
cas d’apparition de vomissement, ou de fièvre ou si la diarrhée s’aggrave, amener l’enfant au
CSB immédiatement ». L’étude envisage également la prévention de la diarrhée à partir de la
pratique promue par le MSPF : « se laver les mains avec du savon (à défaut, avec de la cendre)
avant de préparer la nourriture/allaiter et après avoir fait ses besoins ou touché ceux des
enfants ».
2.5.1. Connaissances et attitudes des groupes sur la diarrhée et la TRO

Les groupes sont unanimes à reconnaître que la diarrhée est une maladie courante qui
comporte un risque élevé de mortalité. Elle est citée par tous les groupes comme étant l’une des
maladies les plus fréquentes dans leur région et comme la première cause de mortalité infantile.
Les groupes d'Alaotra Mangoro disent que c’est non la diarrhée mais « En ce qui me concerne, c'est la diarrhée qui
la distance par rapport au CSB et le retard qui s’ensuit dans le recours affecte le plus souvent le mien (mon enfant) »
[H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
aux soins qui sont les véritables causes de la mortalité infantile.

Signes de la diarrhée

Les groupes pris dans leur totalité reconnaissent que l’enfant a la diarrhée à partir de signes qui
sont, par ordre décroissant : la fréquence des selles, leur consistance (selles molles ou liquides),
les vomissements, les pleurs fréquents (en raison, probablement, des maux de ventre), la perte
d’appétit et la fièvre.
Dans tous les groupes, les participants identifient la diarrhée sur la base de la fréquence des
selles plus élevée qu’à la normale (allant jusqu’à 6 fois par jour) et leur consistance (selles

 40
molles ou liquides) qui sont, l’une ou l’autre, considérés par les différents groupes comme le
premier et/ou le second signe de diarrhée. Ainsi, les groupes « pauvres et non lettrés » ont
tendance à considérer la fréquence des selles comme le premier signe de diarrhée. Dans les
groupes du Sud-ouest, « femmes » et « hommes », ce seraient les « selles liquides ». En général,
les groupes auraient cependant tendance à considérer les selles molles ou liquides comme étant
de même nature. Les groupes « femmes » précisent en effet que les selles molles ne font que
précéder les selles liquides. Les groupes du Sud-ouest, « femmes » et « hommes » auraient dès
lors tendance à ne considérer comme signe de diarrhée que les selles liquides (et non les selles
molles). Les groupes « hommes » de la capitale citent la fièvre comme un signe de diarrhée et
seul le groupe « femmes » de la capitale considère la consistance des selles (accompagnée de
vomissements) et les pleurs (sans doute provoqués par des maux de ventre) comme un signe de
diarrhée.
Une minorité des participants des groupes « femmes » de DIANA et des groupes « hommes »
d’Alaotra Mangoro semble cependant confondre les signes de la diarrhée avec ceux de son
aggravation, ce qui rendrait compte des délais rencontrés dans le recours aux soins au centre de
santé. En effet, ils citent comme signes de diarrhée : les vomissements, la perte de l’appétit,
l’état d’affaiblissement de l’enfant qui n’arriverait plus à jouer et aurait les yeux enfoncés ; et les
pleurs fréquents. Les vomissements sont cités comme étant le signe principal de diarrhée par le
groupe « femmes » de DIANA. Pour les participants du groupe « hommes » d’Alaotra Mangoro,
ce seraient les pleurs fréquents. Des cas isolés dans le groupe « hommes » de DIANA et dans le
groupe « femmes » de la capitale, citent également la couleur verdâtre des selles et le
ballonnement du ventre comme des signes de diarrhée. Enfin, un participant du groupe
« hommes » d'Alaotra Mangoro affirme reconnaître que son enfant a la diarrhée à la mauvaise
odeur de son pet. Un autre participant du même groupe affirme qu'il reconnaît la diarrhée au
bruit que fait le ventre de son enfant ; il pense que ces bruits sont à l'origine de la diarrhée et
des selles liquides, parfois accompagnées de sang. Les participants de ce groupe pensent que
lorsque quelqu'un a la diarrhée, le contenu de son ventre (de son estomac) est en désordre et
que c’est ce désordre qu’il faut Arranger.
Causes de la diarrhée « Souvent ce qui entraîne les vomissements et
la diarrhée, c’est que l’enfant a attrapé un
Les femmes pensent que la diarrhée est essentiellement causée par coup de froid (…) C’est là que survient la
diarrhée ! Dès que tu traines un peu en
un coup de froid. Les autres causes de la diarrhée qui sont identifiées changeant ses couches, il attrape froid. Si la
incluent, comme on le verra plus tard, la qualité du lait maternel qui sage-femme tarde à donner les soins, le bébé
serait fonction du type d’aliments que la mère a ingéré et le manque va attraper froid, en plus du fait que tu es
maladroite lorsque tu changes ses langes.
d’hygiène des mains, de l’enfant et du milieu. Alors, la diarrhée Arrive inévitablement. »
[F25 ans+-Urb-PNL, Analamanga]

Signes d'aggravation de la diarrhée

L’ensemble des groupes semblent s’accorder sur les signes d’aggravation de la diarrhée. Les
signes d’aggravation cités sont, par ordre décroissant de prévalence : l’état d’affaiblissement de
l’enfant, la fréquence plus élevée des selles, leur consistance plus liquide, la perte de l’appétit, la
persistance des signes après le traitement et la fièvre. Il y a cependant des nuances dans les
opinions exprimées quant aux manifestations de ces signes et des variations dans la prévalence
des réponses et dans les types de groupe.
Tous les groupes « femmes » sauf celui d’Alaotra citent comme « Ses yeux sont fatigués, ils deviennent tout
premier signe d’aggravation de la diarrhée l’état d’affaiblissement de blancs, c’est ça qui te fait savoir qu’il maigrit.
Lorsque l’enfant a des selles fréquentes, tu
vois toi-même que ça le fait maigrir et qu’il
s’affaiblit. » [F24ans -Urb- PNL, Atsimo
-

 41 Andrefana]
l’enfant qui ne parviendrait plus à bouger ni à jouer et perdrait rapidement du poids. Dans la
région d’Alaotra, de DIANA et du Sud-ouest ce sont les groupes « hommes » qui font de ce signe
le premier symptôme d’aggravation de la diarrhée. Dans la région du Sud-ouest, cet état
d’affaiblissement de l’enfant serait interprété comme le symptôme d’une maladie désignée
« hevo ». Les participants des groupes « hommes » du Sud-ouest affirment d’aillleurs que
« lorsqu'une diarrhée s'aggrave, elle devient systématiquement un ‘hevo’ ». La description du
« hevo » par les groupes renvoie à un état de déshydratation aigüe et les médecins consultés sur
place dans le cadre de l’étude semblent confirmer ce diagnostic. En effet, les groupes
« femmes » du Sud-ouest parlent de la voûte crânienne (ou la fontanelle pour les plus jeunes)
de l'enfant qui se creuse. Le « hevo » étant considéré comme d’origine démoniaque, la maladie
ne pourrait être traitée par la médecine moderne mais relèverait du tradi-praticien.
La plupart des groupes que l’on vient de citer reconnaissent que l’état d’affaiblissement de
l’enfant est causé par les selles fréquentes et/ou les selles liquides. Les groupes « femmes »
affirment que la diarrhée est grave lorsque l’enfant a dix à douze selles dans la journée. Les
groupes « hommes » ne sont pas toujours en mesure de déterminer la gravité de la diarrhée par
le nombre de selles. Dans les groupes « hommes », c’est généralement « Ce sont les selles liquides que nous
davantage la consistance des selles (liquide) que le nombre qui redoutons car c’est fatal. » [F25ans -Rur-PL, +

témoigne de l’aggravation de la maladie. Dans le groupe « hommes » Atsimo Andrefana] ;


de DIANA. Pour les participantes des groupes « femmes » ruraux « Il n’y a que ‘presque’ (sic) de l’eau qui sort,
DIANA et du Sud-ouest, la consistance des selles constituerait un signe il n’y a pas de selles du tout, rien que de
de danger « indépendant », c'est-à-dire, pouvant provoquer en elle- l’eau, c’est ça qui est dangereux… » [H-Rur-
MPL, DIANA]
même le décès de l’enfant. Pour certaines femmes du groupe
« Le nombre de selles d’un enfant dépend
d’Alaotra Mangoro les selles liquides de l’enfant feraient qu’il n’urine de la nourriture servie par sa mère ou que
plus, ayant déjà perdu beaucoup d’eau mais il s’agit là d’opinions celle-ci prend » [H-Rur-MPL, DIANA]
1

isolées.
Les groupes mentionnent d’autres signes d’aggravation de la diarrhée que la fréquence élevée et
la consistance liquide des selles, l’état d’affaiblissement, la perte de poids et la déshydratation
aigue de l’enfant, mais avec une prévalence moindre. Ce sont, par ordre décroissant :
(i) le refus de s’alimenter, cité par le groupe « hommes » de DIANA « (…) là il perd toujours l'envie de s'allaiter, et
et les groupes des deux sexes du Sud-ouest. Les autres groupes c'est ça qui…c'est toujours cette non envie de
considèrent que le refus de s’alimenter représente un signe s'allaiter, peu importe que ce soit la fièvre ou
autre chose, ça ne change pas, elle est
d’aggravation non seulement de la diarrhée mais de la maladie toujours là, c'est sa manière de prendre le
en général, principalement lorsqu’il s’agit d'un enfant qui ne sait sein qui est le vrai signal. » [H-Rur-MPL,
pas encore parler ; DIANA]

(ii) la persistance des symptômes de la maladie après un premier traitement, citée par les
groupes « hommes » et « femmes » d'Alaotra Mangoro, et qui nécessiterait d’emmener
immédiatement l’enfant au CSB.
Dans le groupe « femmes », ce signe n'est cité que de façon « Lorsque le traitement médical n'a pas
d'effet sur le symptôme au bout de deux à
accessoire, entre deux autres signes ou de façon isolée, tandis que trois jours, cela signifie que la maladie s'est
dans celui des hommes, il est décrit avec force détail comme s’il aggravée ou a déjà été grave » [H-Rur-MNPL,
constituait un signe majeur d’aggravation de la maladie. Le fait que Alaotra Mangoro]
seuls les groupes d’Alaotra Mangoro évoquent la persistance de la « C'est celle où l’enfant a des selles liquides
maladie après le traitement comme signe d’aggravation de la en même temps qu’il a des vomissements qui
diarrhée peut manifester une disparité régionale en termes est le plus meurtrière et que nous craignons
d’exposition aux messages de communication. Rappelons que ce le plus » [F25 ans+-Urb-MPNL, Atsimo
Atsinana]
sont également les groupes d'Alaotra Mangoro qui précisaient que

 42
la distance par rapport au CSB et le retard qui s’ensuit dans le recours aux soins sont les
véritables causes de la mortalité infantile.
(iii) la fièvre et les vomissements : les vomissements sont présentés « En fait c'est relatif! La fièvre de la diarrhée
comme signe d’aggravation de la diarrhée par le groupe est la plus meutrière pour les enfants. » [H-
Rur-MPL, DIANA]
« femmes » de la capitale et par leurs homologues du Sud-ouest.
La fièvre est évoquée à prévalence égale par les groupes « hommes » du Sud-ouest et de
DIANA.

Un participant du groupe « hommes » de la capitale a signalé que la diarrhée ne se manifeste


que le soir. Dans les autres groupes, au moins un participant a indiqué que ce sont les maladies
de l’enfant en général qui se manifestent à ce moment-là. Si cette croyance est généralisée, elle
peut être source de délais dans le recours aux soins, les groupes-cibles n’ayant pas la possibilité
de consulter pendant la nuit.
Solution de réhydratation orale

Dans l’ensemble, la Solution de Réhydratation Orale sous sa forme « Nous l'avons tous déjà vu (la SRO). Souvent
emballée, prescrite et fournie par les médecins, les centres de santé ou on l'obtient de l'hôpital. ODIVA c'est cette
chose dans un petit sachet n'est-ce pas? Nous
les pharmacies est bien connue. Deux grandes tendances régionales l'avons vu. Je les ai vu, nous en faisons usage
semblent cependant se dessiner : dans les groupes de la capitale, régulièrement. » [H-Rur-MPL, DIANA]
d'Alaotra Mangoro ou de DIANA (régions situées au nord par rapport à
la capitale), la connaissance au sein de chaque groupe serait très élevée. Dans les groupes du
Sud-est et du Sud-ouest, à l'exception du groupe femmes du Sud Est urbain, seule une faible
minorité a parlé de l'ODIVA. Cela ne signifie cependant pas que ces personnes ne connaissent
pas la SRO ; elles peuvent simplement ne pas l’avoir spontanément évoqué lors des discussions.
En effet, il n'y a que dans les groupes hommes du Sud Ouest et Femmes de la capitale qu’une
minorité a explicitement affirmé ne pas connaître ou n’avoir jamais vu ou utilisé la SRO.
La solution maison est moins bien connue dans tous les groupes hommes et femmes. Ainsi,
une majorité des groupes ignore qu’il est possible de préparer une solution maison. A
l'exception des femmes des groupes de Antananarivo et d'Alaotra Mangoro ou un plus grand
nombre connait la solution maison, les participant(e)s qui connaissent cette possibilité sont soit
vraiment minoritaires, soit des cas isolés.
La majorité des groupes qui connaissent la solution maison savent aussi quels sont les
composants nécessaires à sa préparation (eau, sel, sucre). Cependant, la plupart des groupes,
principalement les groupes « hommes », n’en connaissent pas les doses exactes. Ainsi, aucun
homme n'a pu citer les doses exactes des composants de la solution maison et seule une
minorité de femmes de la capitale, d'Alaotra Mangoro, DIANA et du Sud Ouest rural ont pu
citer les doses exactes de chaque composant.
Comme il est indiqué plus haut, la quasi-totalité des groupes hommes
"(…) c'est là qu'intervient l'ODIVA dont on a
et femmes savent où se procurer la SRO. L'hôpital et la pharmacie parlé tout à l'heure, je ne sais pas si on en
sont les endroits les plus fréquemment cités. Les deux groupes de la distribue encore ou non mais en 2003 il y en
capitale et les groupes hommes et femmes du Sud Ouest rural citent avait encore, même en 2004 (…) en ce qui le
concerne il y en avait chez nous mais je ne sais
également les centres caritatif de distributions de médicaments des pas s'il y en a encore aujourd'hui. [H-Rur-MPL,
sœurs (probablement parce qu’ils sont présents). Une participante DIANA]
isolée du groupe femmes du Sud Ouest affirme qu'on peut également « En ce qui concerne cet ODIVA, c'est à l'hôpital
s'en procurer dans certaines épiceries. Seules quelques participantes qu'on peut le trouver, il n'y en a pas dans les
du groupe urbain des femmes du Sud Ouest ont avoué qu'elles ne épiceries. C'est au centre de santé qu'on en
trouve…et chez les sœurs également » [H-Rur-
connaissaient pas les lieux de distributions de la SRO : « Nous PNL, Atsimo Andrefana]
ignorons (rires) » [F24ans- -Urb- PNL, Atsimo Andrefana]. Un

 43
participant du groupe hommes de DIANA a demandé si on en distribuait encore dans les
pharmacies.

La plupart des groupes hommes et femmes connaitraient le lien entre « L'ODIVA est un secours en attendant
diarrhée et déshydratation et le danger que cette dernière représente l'arrivée dans un centre de santé. D'ailleurs,
même dans un centre de santé, il devrait y en
pour l'enfant (mortalité). L’ensemble des groupes saurait également avoir » [H-Rur-MPL, DIANA]
que lorsque l'enfant a des selles liquides, il perd beaucoup d'eau. Ils
sauraient que la SRO sert à remplacer l'eau que l'enfant perd à chaque fois qu'il a des selles. Les
hommes de la région de DIANA affirment même que la SRO constitue un remède de secours
d'urgence avant de recourir aux soins du centre de santé.
Il peut exister des délais dans la réhydratation de l’enfant malade et ce, pour deux raisons : (i) la
méconnaissance de l’existence ou des modalités de préparation et administration de la solution
maison ; l’ODIVA constitue donc le seul recours, ce qui occasionne parfois un retard dans la
réhydratation de l’enfant en raison de la nécessité de se procurer de l’argent (en règle générale,
les personnes disposent rarement de cash ; elles se procurent l’argent nécessaire à l’achat des
médicaments lorsque c’est nécessaire) et du temps nécessaire pour aller se procurer le produit à
la pharmacie ou dans un autre lieu de distribution (s’il est ouvert) ; (ii) la tendance à attendre
que l’ODIVA soit prescrit par le médecin. Des femmes du Sud-est affirment en effet qu'elles
n'osent pas en donner à leurs enfants avant l’avis du médecin. Le coût de l’ODIVA pourrait
également représenter un obstacle. En effet, une participante du "En fait c'est par les prescriptions du médecin
groupe femmes du Sud Est rural a affirmé que l'ODIVA coûte trop qu'on l'obtient (la SRO) !" [F25 ans+-Urb-
MPNL, Atsimo Atsinana]
cher [citation].
Les connaissances sur l’ODIVA seraient également parfois confuses. Il y
"En fait je l'ignore parce que c'est du
a par exemple des hommes du Sud-ouest et des femmes de DIANA qui Malgache et du Français (la différence entre
connaissaient la solution ou son mode de composition et qui auraient iray sy valo et ODIVA). En Malgache c'est
utilisé le produit (prescrit par le médecin) mais qui ne connaissent pas iray sy valo (un sur huit) ensuite on dit ceci
et cela mais les gens la connait toujours sous
son nom. Un participant du groupe hommes d'Alaotra Mangoro a l'appellation de iray sy valo. Peut être que
déclaré que le fait de donner plusieurs noms à la solution (ODIVA et cet ODIVA c'est le même produit mais c'est
iray sy valo) prête à confusions. Une minorité du groupe hommes son nom en Français! C'est le iray sy valo"
[H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
d’Alaotra Mangoro affirme que ce n’est pas une poudre mais un "C'est un comprimé de la même taille que le
bonbon paperimanitra, on le met dans de
comprimé blanc effervescent, à diluer dans un litre d'eau, de goût l'eau et ça produit beaucoup de bulles
sucré-salé et servant à remplacer la quantité d'eau que l'enfant perd comme s'il y avait du gaz" [H-Rur-MPNL,
lorsqu'il a la diarrhée. Al t M ]

Enfin, il semblerait que des minorités dans les groupes pensent qu’il existe des remèdes locaux
qui peuvent remplacer l’ODIVA ou la solution maison et qui ont l’avantage d’arrêter les selles.
Ainsi, les hommes et les femmes du Sud-ouest, du Sud-est et d’Alaotra Mangoro disent qu’il
existe des potions ou des remèdes locaux qui joue le même rôle que l’ODIVA et qui arrêteraient
les selles liquides en même temps. Le groupe homme du Sud-ouest affirme connaître et utiliser
des potions traditionnelles en même temps qu'ODIVA et cite le nom des nombreuses potions
que l’on peut utiliser en cas de diarrhée (tongotr'akoho, sakoa, rondroa, sela, handatra,
vonindroho…etc.). Un cas isolé du groupe hommes d'Alaotra Mangoro décrit un remède
personnel : de l'eau de tournesol broyé11. Un autre cas isolé du même groupe affirme que le thé
chaud et sucré ''arrange'' le « désordre » qu’il y a dans le ventre de l’enfant quand il a la diarrhée
et stoppe les selles molles (les deux participants, en apparence plus informé que les autres en
matière de recours aux soins au centre de santé en général n’ont pas été contredits par les
autres participants).
11
Donner de l’eau de tournesol broyé n’est ni une médication traditionnelle ni un remède populaire. Le participant pris par une diarrhée
aigue alors qu’il était loin de son village et dans l’impossibilité de recourir aux soins, a essayé de manger du tournesol pour calmer son
malaise. Il a été guéri et traite aujourd’hui la diarrhée de ses enfants de la même façon.

 44
2.5.2. Les pratiques en cas de diarrhée

L'analyse des pratiques comprend deux parties : (i) les pratiques d'alimentation de l'enfant en
cas de diarrhée ; (ii) les recours aux soins.
L’alimentation de l'enfant en cas de diarrhée

Le premier réflexe de la quasi-totalité des groupes semble consister à


Quand il est aussi brûlant, on doit lui
donner de l'eau à l'enfant qui présente des signes de danger. Certains “donner de l’eau, c’est pour remplacer l’eau
groupes, et plus particulièrement le groupe hommes de DIANA, qu’il perd. Quand il a la diarrhée, on doit
précisent qu'on entend par eau, soit de l'eau bouillie refroidie, soit du lui donner de l’eau. Dans la diarrhée, s’il
thé, soit de l'eau en bouteille mais surtout pas l'eau qu'ils boivent au vomit, son intestin devient sec » [F25ans -+

U b PL A l ]
quotidien qui serait, selon eux, non potable. On verra par la suite que cette eau potable n’est
donnée aux enfants que lorsqu’ils sont malades. Lorsqu’ils sont en bonne santé, ils prennent la
même eau que les adultes.
Cette pratique est justifiée en termes de nécessité de stabiliser l'état de l'enfant en remplaçant
l'eau qu'il a perdu, pour qu'il ne s'affaiblisse pas trop avant de pouvoir aller au centre de santé.
L’administration de fluides additionnels aurait ainsi tendance à ne se faire que lorsque les signes
de diarrhée persistent ou s’aggravent, justifiant le recours au centre de santé.
Quelques groupes, notamment des groupes de femmes (Capitale, « Rien d’autre que du lait et de l’eau »
Alaotra Mangoro et Sud Ouest urbain) et le groupe hommes du Sud [F25ans -Urb-PL, Analamanga]
+

Ouest disent qu'on continue également à allaiter l’enfant lorsqu'il a la


diarrhée mais, apparemment, non exclusivement. Il s’agit, comme en lui donnant de l’eau, de
prévenir l'affaiblissement de l'enfant. Les participantes des trois groupes « femmes » précisent
que le lait maternel ne fait qu’accompagner l'eau et les autres aliments donnés à l’enfant pour
remplacer l'eau qu’il perd mais il s’agit de tendances isolées sauf pour le groupe « femmes » de
la capitale où elles sont majoritaires à le dire. Le groupe « femmes » de la capitale souligne par
ailleurs qu'on doit surtout allaiter l’enfant quand il refuse de manger car, en général, il ne
refusera pas le lait maternel, conçu comme l’aliment naturel par excellence. Seul le groupe
« hommes » du Sud-ouest affirme que l'allaitement doit être exclusif si l'enfant a moins de six
mois. Les autres groupes n'évoquent pas l'allaitement exclusif et le groupe « femmes » de la
capitale va jusqu’à affirmer qu'il est absolument nécessaire de donner autre chose à l'enfant
pour qu’il ne s’affaiblisse pas, et ce, même s'il a moins de six mois : « C'est-à-dire qu’il (autre
chose) est bien adapté aux enfants de moins de six mois ». Enfin, quelques participantes du
groupe « femmes » de la capitale affirment qu'on doit allaiter l'enfant quand il est malade car si
le lait de la mère est stocké, elle risque de tomber malade elle aussi (avoir la fièvre), ce qui
signifie un problème supplémentaire à gérer.
Selon les participantes du groupe femmes d'Alaotra Mangoro, on ne verrait que très rarement
des enfants de moins de six mois qui ont la diarrhée et ce, pour deux raisons. D’abord, cette
raison est également citée par les hommes de DIANA, parce que peu de mère prendraient des
aliments qui sont dangereux pour leurs enfants, les groupes pensant manifestement que
l’alimentation de la mère peut modifier la nature du lait maternel et provoquer la diarrhée chez
les enfants. Ensuite, parce que dès qu'un enfant aussi jeune a la diarrhée, soit on l'emmène tout
de suite à l'hôpital (donc on n’en voit que rarement), soit il meurt tout de suite (et on n’en
entend que rarement parler).
Quelques groupes disent, et avec une prévalence égale à celle de ceux qui insistent sur la
nécessité d’allaiter l’enfant, qu’ils donnent aussi des aliments liquides plus consistants que de
l'eau à l'enfant qui a la diarrhée : le bouillon de riz est le plus fréquemment cité, suivi par le
bouillon de maïs, le bouillon de manioc, la soupe, la carotte, la viande ou le poisson. Les

 45
raisons invoquées pour rendre compte de cette pratique sont multiples. Deux grandes
tendances se dessinent : d'abord celle du groupe femmes du Sud Ouest urbain et de la majorité
des participants du groupe hommes du Sud Ouest qui pensent que ces aliments devraient être
variés (carottes, viandes poissons…) et tendre progressivement vers une plus grande consistance
pour habituer l’estomac de l’enfant et stimuler son appétit - pour récupérer des forces, il a en
effet besoin de manger. Il y a ensuite la tendance représentée par un participant isolé de ce
même groupe hommes du Sud-ouest et d'une minorité de participantes du groupe femmes
d'Alaotra Mangoro qui pensent que les aliments qu'on donne à l'enfant qui a la diarrhée
devraient plutôt être des aliments qui apportent des vitamines et de l'énergie ; un participant du
groupe Sud Ouest a même indiqué que c'était le médecin qui lui avait dit quels étaient les
aliments qu’il fallait donner à l'enfant (carottes, pommes de terres, lait, etc.). Enfin, l’ensemble
de ces groupes et le groupe femmes de la capitale pensent qu’il faut donner beaucoup plus
fréquemment à manger à l'enfant - s'il ne refuse pas et si possibilité il y a - pour lui permettre de
récupérer plus vite. Selon le groupe femmes du Sud Ouest urbain, on irait jusqu’à lui donner à
manger six fois par jour.
Dans les groupes hommes de DIANA et Sud Ouest, quelques participants affirment qu'ils
donnent également des potions populaires à leurs enfants qui ont la diarrhée. La raison de cette
pratique serait, comme pour les autres, de remplacer l'eau que l'enfant perd (en plus des vertus
curatives de ces potions).
Comme il est indiqué plus haut, la quasi-totalité des groupes connaît et a déjà utilisé la SRO. Ils
savent qu’elle sert à remplacer l'eau perdue par l'enfant à cause de la diarrhée. Un participant
du groupe « hommes » de DIANA qui a cité la SRO l’a d’ailleurs assimilée à de l'eau, au même
titre que le thé ou l'eau en bouteille qui joueraient le même rôle. Cependant, seuls des cas isolés
dans les deux groupes de la région d'Alaotra Mangoro ont cité la SRO lorsqu'on a interrogé les
groupes sur ce qu’ils donnent à boire ou à manger à l'enfant qui a la diarrhée. Lorsqu'on leur a
demandé les raisons qui font que les "autres" ne donnent pas la SRO à leur enfant qui a la
diarrhée, c’est l'ignorance (et surtout celle de la possibilité d'une préparation maison) et la
paresse qui ont été invoquées. Selon des participantes du groupe « femmes » de DIANA, la
couverture de la radio est telle que l’information est disponible ; seuls ceux qui sont paresseux
restent ignorants.
Les recours aux soins en cas de diarrhée ou de signe d’aggravation de la maladie

Le centre de santé est considéré par presque tous les participants de tous les groupes comme le
tout premier recours pour les enfants de moins de 6 mois qui ont la diarrhée et pour les enfants
plus âgés qui témoignent de signe de persistance ou d’aggravation de la maladie : ils affirment
avoir l’intention de recourir aux soins dispensés par le centre de santé dès l'apparition de la
diarrhée chez les tout petits ou de signes d’aggravation chez les plus grands. Cependant, de
nombreux participants des groupes ne traduisent pas toujours leur intention d’agir en pratique.
Quatre grandes tendances se dessinent en effet parmi les groupes, particulièrement ce qui
concerne le recours aux soins pour les enfants de plus de 6 mois : (i) le recours au centre de
santé ; (ii) l'automédication et la thérapie populaire ; (iii) la TRO ; (iv) l’absence de recours.
Dans chaque groupe, à l'exception du groupe hommes de la capitale, une minorité de
participant(e)s affirme n'avoir jamais rencontré de cas de diarrhée. Dans le groupe hommes de
la capitale, la prévalence des participants qui n'auraient jamais vu de « En ce qui me concerne, mon enfant n’a
cas de diarrhée est identique à celle de ceux qui en auraient rencontré. jamais eu la diarrhée, je n’ai jamais rencontré
En général, si l’on exclut les discussions concernant la SRO sous forme de cas de diarrhée » [H-Rur-PNL, Atsimo
emballée et fournies par les centres de santé ou les pharmacies, ces Andrefana]

 46
hommes n’ont alors pas participé aux discussions.
Le premier recours préconisé pour les enfants de moins de six mois qui ont la diarrhée consiste
à aller au centre de santé pour consulter un agent de santé compétent. Les groupes rendent
compte de ce choix en termes de fragilité de l’enfant, particulièrement
« Parce que qu’on ne sait pas ce qu’il faut
vulnérable à cet âge et de son incapacité à parler (on est donc faire ; c’est le médecin qui sait qu’il faut faire
incapable d'estimer la gravité de sa maladie). Certaines femmes du ça ou ça » [F-25ans -Urb-PL, Analamanga]
+

groupe Sud Est urbain affirment qu'on peut donner du Cotrim à un enfant de moins de six
mois mais qu’on ne peut pas lui donner de la SRO car le médecin l'interdit. Il s’agit sans doute-là
d’une information partielle sur la nécessité de pratiquer l’allaitement exclusif, les femmes
interrogées ayant pour ainsi dire toutes l’habitude de donner de l’eau à l’enfant en plus du lait
maternel. D'ailleurs, dans de nombreux groupes (Alaotra femmes, "Six mois, c’est vers six mois que les enfants
DIANA femmes, Sud Est urbain femmes) les participantes tendent à peuvent avoir des maladies graves. S’il a
penser qu'en dessous du sixième mois, les maladies de l'enfant sont moins de six mois il n’y en a pas beaucoup»
[F25 ans+-Urb-MPNL, Atsimo Atsinana]
rarement graves.
Comme il a été dit plus haut, la SRO est bien connue des groupes et la grande majorité des
participants l’utilisent lorsque leur enfant a la diarrhée. Elle est cependant davantage considérée
par les groupes comme pratique alimentaire que comme une pratique de soin, rendant compte
de l’utilisation concomitante de potions traditionnelles ou
populaires. Certains participants (minorité) du groupe hommes du « Ça soigne rapidement » [H-Rur-PNL,
Atsimo Andrefana]
Sud Ouest qui utilisent les potions traditionnelles semblent
cependant penser que la SRO a aussi des vertus thérapeutiques. Les participantes du groupe
femmes de DIANA affirment que les enfants n'aiment pas le goût sucré-salé de l'ODIVA. Un cas
isolé a précisé qu'elle préfère donner à son enfant une potion populaire car son goût est plus
apprécié par l’enfant mais la majorité du groupe dit que lorsqu'on force l'enfant à en prendre, il
ne refuse pas. Une participante isolée du groupe femmes de DIANA affirme n’utiliser la SRO que
comme recours exclusif, lorsqu’elle n’a pas les moyens d’emmener son enfant dans un centre
de soins : elle maîtriserait bien la préparation de la SRO et ignorerait tout des potions
traditionnelles et des remèdes populaires.
Une majorité absolue des femmes des groupes de DIANA et d'Alaotra « Quand Zanahary ne veut pas encore de lui, il
Mangoro affirment qu'il y aurait "d'autres" personnes qui ne font rien se soigne tout seul (rires : tous le monde) c’est
ça la vérité!” [F25ans -Rur-PNL, DIANA]
+

du tout lorsque leur enfant a la diarrhée. Elles rendent compte de


cette pratique en termes de soumission à la volonté du Créateur et à l'incapacité financière
d’assurer un quelconque recours aux soins. D’après les femmes d'Alaotra Mangoro, il s’agirait
surtout des gens les plus démunis de la commuanuté.
Les soins prodigués par les agents du centre de santé constitueraient un premier recours
systématique pour un nombre relativement élevé de groupes en cas d’aggravation de la maladie
(lorsque les signes de diarrhée persistent ou s’aggravent). En effet, à l'exception du groupe
hommes du Sud Ouest, la tendance des groupes est de dire qu'à chaque fois que ces signes
apparaissent, ils emmènent directement leur enfant au centre de « On l’emmène chez le médecin ! Le médecin
santé. Cette tendance est présente en milieu urbain comme rural. En le soigne à l’hôpital » [F 25ans -Urb, Atsimo
+

Atsinanana]
effet, excepté le groupe femmes du Sud Est, tous les groupes des
milieux urbains (capitale hommes, capitale femmes, Sud Ouest urbain) auraient tendance à
recourir en premier aux services d’un personnel de santé qualifié. Tout comme dans les
groupes urbains, la prévalence des participants des autres groupes ruraux (hommes DIANA,
hommes Alaotra Mangoro, hommes du Sud Est) qui citent le centre de santé comme premier
recours en cas de diarrhée est très élevée (majorité écrasante ou « On n’a pas le droit de plaisanter avec la
grande majorité). La raison donnée pour justifier cette attitude est la diarrhée car l’enfant vomit et a des selles
conscience de la prévalence de la diarrhée et du danger qu’elle liquides en même temps ! C’est peut-être
différent pour la migraine ou l’angine, mais en
ce qui concerne la diarrhée avec vomissement,
on n’a pas le droit de plaisanter là-dessus »
 47 [Femmes de la capitale]
représente ; elle est conçue comme l’une des principales causes de mortalité des enfants dans la
région. Outre la conscience du danger que représente la diarrhée et la peur qu’elle inspire, en
raison notamment de la rapidité avec laquelle l’état de l’enfant peut se dégrader, les participants
sont conscients qu’ils peuvent faire un mauvais diagnostic (sous-estimer la gravité de la maladie)
et qu’en cas de recours inapproprié, la maladie risque encore de s’aggraver ou de provoquer
autre chose. Enfin, ils craignent que le coût du traitement n’augmente si l’on tarde à faire voir
l’enfant par le médecin. La crainte des remontrances des agents de santé si on a choisi de venir
tardivement joue également comme facteur de motivation pour encourager les personnes à
immédiatement référer l’enfant qui est malade.
Le groupe hommes du Sud-ouest constitue un groupe à part en ce qui concerne les pratiques
de soins. En effet, contrairement aux autres groupes, ils auraient moins tendance à recourir aux
services des centres de santé qu’à utiliser les potions populaires. Une majorité écrasante
associerait les potions populaires (ou traditionnelles) avec les médicaments prescrits par les
médecins et pensent qu’elles accélèrent le processus de guérison. Une petite minorité
n'utiliserait les potions qu'en deuxième recours lorsqu'ils perçoivent que les médicaments ne
parviennent pas à enrayer rapidement les symptômes. Enfin, seul un cas isolé à l'intérieur du
groupe affirme ne faire confiance qu'au médecin et tout ignorer des thérapies traditionnelles.
Seule une minorité dans le groupe hommes de DIANA affirme recourir à l’automédication ou
aux potions traditionnelles si les médicaments prescrits par les médecins ne sont pas efficaces.
En effet, même pour la majorité des groupes qui pratiquent l’automédication ou le recours aux
remèdes populaires, le centre de santé constitue toujours le principal recours souhaité. Les
quelques cas isolés de participant(e)s des groupes qui ont tendance à uniquement recourir à
l’automédication (femmes du Sud Est rural) ou aux remèdes populaires (hommes du Sud-
ouest) sont également plus attachés aux soins fournis par les agents de santé. Comme on le
verra, ce sont l’accessibilité et la disponibilité des services qui sont les principaux obstacles à la
fréquentation des centres de santé (ou qui rendent compte des délais rencontrés dans la
référence).
L’automédication et la thérapie populaire constituent essentiellement un recours d’urgence
avant d’aller au centre de santé ou sont utilisés en parallèle, en raison des vertus curatives
spécifiques qui y sont associées. A ce titre, ils font figure de premier recours de fait pour la
grande majorité des groupes. Les raisons données pour rendre compte de ces deux types de
pratiques sont quasiment les mêmes pour la quasi-totalité des groupes. D’abord, il s’agit là de
mesures d'urgence, avant qu’il ne soit possible d’aller au centre de « Parce que s’il faut attendre l’arrivée chez le
santé. Les délais invoqués pour rendre compte de ce traitement médecin, l’enfant sera trop fatigué » [H-Rur-
MPNL, Alaotra Mangoro]
d’urgence tiennent essentiellement à la nécessité de se procurer de
l'argent, d’organiser le déplacement, de se déplacer, surtout si le
C’est sur ce sujet que je veux venir, chercher
temps n’est pas bon, et à la disponibilité de l’agent de santé qui doit “des soins dans des hôpitaux publics pour ne
également être là. Ainsi, le groupe « femmes » de DIANA et les deux pas payer. Ce qu’il ya c’est que très souvent ils
groupes moins pauvres et non lettrés de l'étude (hommes d'Alaotra et disent qu’ils n’ont pas de médicaments ; ils
femmes du Sud Est urbain) citent la distance comme facteur vous envoient alors à Ambilobe, là vous êtes
perdus » [H-Rur-MPL, DIANA]
principal du délai dans le recours aux soins dispensés par le centre
de santé. Les groupes « hommes » de DIANA et « femmes » du Sud-
est rural rendent compte de ces délais non seulement par la distance par rapport au centre de
santé mais l’indisponibilité possible du prestataire de soins.
Ensuite, ce temps d’attente avant d’aller au centre de santé peut s’avérer rentable : si grâce au
recours d'urgence, l'état de santé de l'enfant le recours au centre de santé et les frais qui
s’ensuivent peuvent être évités.

 48
Enfin, le prix des médicaments peut s’avérer prohibitif. Ainsi, la quasi-totalité des participantes
des groupes ruraux et pauvres de DIANA (non lettrées) et du Sud Ouest (lettrées) qui sont plus
âgées et donc probablement relativement plus expérimentées affirment vouloir recourir aux
services d'un agent de santé qualifié mais, fautes de moyens, utilisent surtout un remède
populaire lorsque leur enfant a la diarrhée. Lorsqu'on n'a pas beaucoup d'argent, on craint en
effet que le prix des médicaments prescrits par le médecin ne soit trop élevé ou, pire, que l’on
se soit référé à un autre centre de soins plus compétent qui prescrit des soins plus coûteux.
Dans les groupes femmes moins pauvres d'Alaotra Mangoro (rurales, moins de 24 ans et
lettrées) et du Sud Est urbain (plus de 25 ans et non lettrées), le médicament auto-prescrit par la
quasi-totalité des participantes est le 'Cotrim' (sic.) associé à une cure d'eau ou à la SRO (pour
une minorité de participantes d'Alaotra Mangoro). Le délai d'attente
avant de recourir aux soins dispensés par le centre de santé est en « On attend une journée pour voir l’effet du
cotrim, si son état ne s’améliore pas le
moyenne de 24 heures (après l'apparition des premiers signes de lendemain, on l’emmène chez le médecin »
danger connus). La majorité des participantes du groupe « femmes » [H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
rural du Sud Est administrent à l’enfant un comprimé de déparasitage avant de recourir au
service du centre de santé si nécessaire. Selon la quasi-totalité de ces participantes, c’est
l'expérience personnelle (on se souvient du type de médicament prescrit par le médecin dans
un cas similaire) ou celle des proches ainsi que les conseils des pharmaciens ou des
responsables des centres de distributions de médicaments qui rendraient compte de ces
pratiques. De plus, comme une minorité de participants du groupe hommes de DIANA (moins
pauvres et lettrés également) qui admettent également recourir à l'automédication avant de
recourir aux soins du centre de santé (mais sans donner de précision sur les médicaments qu'ils
utilisent), toutes ces femmes sont convaincues lorsqu’on a des enfants, il est indispensable de
connaître les types de médication à utiliser pour les maladies les plus fréquentes.
Comme on l’a souligné plus haut, les groupes pensent que les potions populaires ont des vertus
curatives. Il semble que ce soit l’amertume du remède traditionnel qui soit associé à son
pouvoir curatif. Ainsi, les participantes du groupe femmes du Sud ouest rural utilisent une
potion à base de feuilles de goyavier pour stopper les selles liquides ; les participantes du
groupe de DIANA utilisent également des feuilles amères, massivement connues, mais plus ou
moins variées. C’est d’ailleurs en raison de la croyance en la vertu curative de l'amertume que le
participant isolé du groupe hommes d'Alaotra Mangoro aurait utilisé le tournesol comme
moyen de traiter la diarrhée. 'Sela', 'handatra', 'vonindroho',… (sic) seraient les types de potions
utilisées par la population. Les participants semblent être convaincus que les remèdes
populaires sont parfois plus efficaces que les médicaments prescrits par les médecins.
La tendance des groupes qui utilisent des remèdes populaires pour traiter la diarrhée est de les
accompagner du traitement prescrit par le médecin (lorsque c’est le cas) car ils pensent que les
remèdes populaires accélèrent le processus de guérison. De même, sauf dans les groupes
hommes d’Alaotra Mangoro et de DIANA, la prévalence des participantes qui recourrent soit à
l’automédication soit aux remèdes populaires pour traiter la diarrhée « Il y a aussi les médecins qui disent qu’il faut
est très élevée dans tous les groupes femmes qui viennent d’être cités leur donner telle ou telle chose (potion
(majorité écrasante dans chaque groupe). Le groupe hommes du traditionnelle). Comme cela a été mon cas
l’année dernière, la potion traditionnelle a été
Sud Ouest affirme qu'à un moment où la prévalence de la diarrhée fournie par le médecin. La prévalence de la
était très élevée (pandémie) dans la région, le médecin prescrivait diarrhée a été tellement élevée que plus de 50 à
des potions traditionnelles aux gens car tellement il était débordé et 60 enfants se ruaient en même temps chez les
sœurs en une matinée et on ne pouvait plus
parce que les médicaments manquait. compter ceux qui étaient au CSB » [H-Rur-
MPNL Sud-Ouest]
2.5.3. Prévention de la diarrhée

 49
Les connaissances, attitudes et pratiques relatives à la prévention de la diarrhée ont été
identifiées par l’étude en rapport avec le comportement promus par le MSPF soit : se laver les
mains avec du savon aux moments critiques. Cette question a été abordée avec les groupes
hommes seulement et de façon sommaire, en raison de la multiplicité des thèmes de l’étude et
du rapport d’étude détaillé qui existe déjà sur les connaissances, attitudes et pratiques en
matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène dans les provinces d’Antananarivo et Toliary
(UNICEF et WaterAid 2004) qui fournit suffisamment de données pour informer l’étude
quantitative, destinée à tester les hypothèses générées par les études qualitatives dans une
optique de planification et suivi-évaluation de l’impact de la communication. Dans le cadre des
discussions, les hommes ont spontanément évoqués la question des latrines.
Connaissances, attitudes et pratiques en matière d’hygiène des mains

Les groupes « hommes » savent tous que le lavage des mains


“Que ce soit par des projets ou par des
constitue un moyen de prévenir la diarrhée. Les participants du associations c’est bon car nous connaissons biens
groupe de la capitale ainsi que ceux du groupe DIANA affirment avec le lien entre la saleté, les vers et la diarrhée. Les
une très forte prévalence que ce sont les vers et les microbes microbes en fait!” [H-Rur-MPL, DIANA]
invisibles à l'œil nu qui se développent dans la saleté qui sont à
l'origine de la diarrhée. Il est donc important de se laver les mains.
Le groupe du Sud Ouest insiste quant à lui sur la nécessité de laver « Tout comme quand il fait froid, on est obligé
non seulement les mains de l'enfant mais aussi son corps, ses de lui laver les mains et les bras, on le lave avec
de l’huile. Dès le petit matin on prépare de
vêtements et les langes pour prévenir la diarrhée. Une minorité l’huile de palmier et il en est de même pour le
dominante de participants de ce groupe affirment que lorsque soir. Si l’eau est trop froide, elle entraîne une
l'enfant est trop jeune, on ne doit pas le laver avec de l'eau froide. diarrhée chez l’enfant lorsqu’il ne la supporte
plus”. [H-Rur-PNL, Atsimo Andrefana]
Ils pensent en effet, tout comme la participante isolée du groupe
femme Analamanga citée plus haut, que le froid cause la diarrhée (la pratique est de laver
l'enfant avec de l'huile de palmier ou de l'eau chaude). Si l’importance de l’hygiène des mains et
de l’enfant pour prévenir la diarrhée est parfaitement connue par les groupes « hommes »
interrogés, elle ne semble pas être traduite en pratique. Le lavage des mains par les adultes
semble en effet être une pratique peu répandue. A l'exception du groupe « hommes » de
DIANA, les participants affirment, avec une forte prévalence, ne se laver les mains que rarement.
Les hommes du groupe de DIANA qui sont musulmans affirment se laver les mains
systématiquement avant chaque repas car il s’agit d’une obligation religieuse.
Les groupes sont unanimes à reconnaître que, dans leur région respective, le lavage des mains
n'est que rarement pratiqué, en dépit de la connaissance impartie par les récentes campagnes de
sensibilisation qui vont en ce sens, qu’ils estiment encore insuffisante. Selon la quasi-totalité des
groupes, les gens souhaiteraient se laver les mains mais n'ont pas l'habitude de le faire et les
campagnes de sensibilisations qui vont dans ce sens sont trop peu
intenses pour vaincre cette habitude négative. L’accessibilité aux “Chez nous, puisque vous allez le rapporter en
haut, chez nous l’eau que nous consommons
points d’eau rendrait également compte de l’écart qui peut exister n’est pas bien potable “[H-Rur-PNL, Atsimo
entre connaissance et pratique. Andrefana]

A l'exception du groupe de la capitale qui n'a pas abordé le sujet, les groupes hommes savent
également que la mauvaise qualité de l'eau qu'ils boivent quotidiennement est une cause
importante de diarrhée. Ils pensent, avec une forte prévalence, que l'eau bouillie est la plus sûre
pour la consommation. Néanmoins, l'eau bouillie et refroidie n'est apparemment utilisée qu'en
cas de maladie pour remplacer l'eau que perd l'enfant. Quotidiennement enfants comme
adultes boivent de l'eau qu'ils savent ne pas être de bonne qualité pour la consomation. Enfin
un participant isolé, relativement dominant et non contredit au sein du groupe DIANA affirme

 50
qu'il y aurait un seuil de pollution considéré comme intolérable par les étrangers (surtout les
vazaha) et qui, pourtant, serait tout à fait supporté par les habitants de la région.
En dépit de l’importance qu’il accorde au lavage des mains et au suivi strict de l’hygiène de
l’enfant pour prévenir la diarrhée, un participant isolé du groupe DIANA insiste sur le fait les
fruits et surtout les mangues qui tombent par terre sont les principales causes de diarrhée chez
les enfants.
Evacuation des matières fécales

Deux groupes ont soulevé la question des latrines et de l'évacuation des matières fécales, à
savoir celui du Sud Est et celui du DIANA. Selon le groupe hommes du Sud Ouest, les gens de
la région refuseraient de construire des WC parce le milieu de vie comprend des espaces très
vastes et que leurs activités quotidiennes les amèneraient à effectuer de grands déplacements
journaliers. Les gens qui resteraient au village sont peu nombreux et ne verraient pas la
nécessité de construire une latrine. Ils affirment même que s'il leur fallait creuser la terre, ils
préfereraint y planter des maniocs ou du riz au lieu de faire une latrine que personne
n'utiliserait. De même une minorité dominante et non contredite affirme que faire ses besoins
dans une latrine est moins hygiènique que de le faire dans la nature : l'odeur y est plus intense
puisque dans un espace confiné.
Ce problème d'odeur est soulevé par le groupe DIANA comme principal obstacle à la
promotion et au developpement des latrines dans leurs régions. En effet, selon les participants,
les latrines traditionnels les nuiraient au bon voisinage et les gens, eux-mêmes y compris,
s'insurgeraient contre ceux qui utilisent des latrines traditionnelles qui polluent l'air et seraient
également source de maladies. Les latrines modernes seraient par contre appréciées mais trop
chères pour les familles. Si les participants du groupe hommes Sud Est proposent des "dina"
comme solution au problème d'évacuation des matières fécales (on obligerait les familles qui
n'auraient pas de latrines à verser une somme d'argent pour la communauté), les participants du
groupe DIANA proposent, quant à eux, des projets de constructions de plusieurs latrines
publiques modernes.

2.6. Vaccination
Dans cette section, l’étude s’attache à identifier les CACP des groupes par rapport aux pratiques
recommandées par le MSPF pour la vaccination : (i) 5 contacts auprès du CSB pour la
vaccination ; (ii) 7 séances de vaccination par enfant, soit à la naissance (BCG Polio 0), après 45
jours (DTC hép. B1, Polio1), puis à 2 mois 15 jours (DTC hép. B2, Polio 2), à 3 mois 15 jours
(DTC hép. B3) et au 9ème mois (VAR).
2.6.1. Connaissances relatives à la vaccination

Les groupes « femmes » semble mieux connaître la vaccination que les groupes « hommes » qui
ont des connaissances plus vagues et pour une minorité dans les groupes seulement.
Principe actif du vaccin

Tous les groupes savent que la vaccination protège contre les « C’est un virus administré et une fois que
l’enfant contracte ce virus, cela le protège
maladies mais, comme on le verra ensuite, la connaissance de ces contre toute éventuelle maladie. C’est le virus
maladies est très inégale dans les groupes. Dans les régions qui est à l’origine de la fièvre. » [F24ans—-Rur-
d’Alaotra Mangoro et de DIANA, les groupes « femmes » savent que MPL,Alaotra Mangoro]. « Il y a des personnes
qui ignorent que le vaccin est en fait un microbe
qu’on injecte et qui va servir pour protéger
contre des maladies(…) » [ F-25ans+-Rur-
PNL,DIANA]

 51
la vaccination consiste à inoculer un « virus » ou un « microbe » et y associent les effets
secondaires de la vaccination .
Les 5 contacts recommandés

La majorité des groupes « femmes » et des minorités au sein des groupes « hommes » des
régions du Sud-ouest et d’Alaotra Mangoro savent qu’il faut 5 contacts pour la vaccination. Ces
contacts correspondent au nombre de fois où il faut aller au CSB pour faire vacciner l’enfant.
Cependant, ces groupes ne connaissent pas le nombre exact de vaccins qui est administrés lors
de ces 5 contacts. Les groupes « hommes » ignorent le nombre de fois où il faut aller au CSB
pour la vaccination et le nombre de vaccins inoculés. Dans la région de DIANA, ils déclarent
avoir « oublié » le nombre de vaccins qu’il faut administrer à leurs enfants. Dans les autres
régions, la majorité des participants des groupes « hommes » affirment que c’est le diplôme qui
sert de repère pour situer la fin des vaccinations.

Les jours de vaccination

La majorité des groupes « femmes » de toutes les régions connaissent les jours de la semaine
consacrés à la vaccination dans les centres de santé et qui seraient fonction des régions et de
l’organisation au sein des CSB. Seul le groupe « hommes » d’Atsimo Antsinanana semble être au
courant
La périodicité des vaccinations

La majorité des groupes ne se rappelle pas exactement le calendrier “ Lorsque l’enfant est né, on lui fait des
pour la vaccination. Seules de faibles minorités savent que le 1er vaccins sur le bras, ensuite une autre fois
contact se fait dans la semaine qui suit la naissance de l’enfant et sur la jambe, puis la prochaine fois sur
l’autre jambe “ [ F-25ans+-Rur- PNL,DIANA]
pensent que les 3 suivants ont lieu mensuellement, le dernier se situant
« vers le 9ème mois ». De la même manière, seules des minorités dans les groupes « femmes »
de DIANA et d’Alaotra Mangoro sont capables de citer la périodicité exacte des vaccinations.
La majorité des groupes « femmes » et une minorité des groupes « hommes » déclarent en effet
que la périodicité des vaccinations est fonction des rendez-vous inscrits dans les carnets de
vaccination. Ainsi, dans la région de DIANA et du Sud Est, tous les groupes ne connaissent que
le moment de la première vaccination qui se situerait « juste après la naissance de l’enfant ».
Dans le groupe « hommes » de DIANA, une minorité déclare à cet effet, mais sans plus de
précision, que les vaccins doivent être administrés par étape et inscrits dans un carnet de
vaccination. Par contre, le groupe « hommes » de la région du Sud Est précise qu’il y a neuf
vaccins inoculés au cours des 5 contacts prévus dans le carnet de vaccination. Dans la région
d’Alaotra Mangoro, le groupe « hommes » pense que la 1ère vaccination se fait 1 mois après la
naissance de l’enfant et que celle-ci se fait tous les 3 mois ; pour une minorité, elle est
mensuelle.
Les types de vaccins

La majorité des groupes connaissent le BCG et le polio. Le BCG est présenté comme le premier
vaccin de la série. Une minorité dans les groupes « femmes » dans les régions d’Atsimo
Atsinanana, de DIANA et de la capitale a également cité le DTCoq. Les groupes semblent se
souvenir du polio, parfois associé au DTCoq, parce que désignant à la fois la maladie et le
vaccin. Cependant la totalité des groupes ne l’incluent pas dans les vaccins de la première série.

 52
Seule une minorité dans le groupe « femmes » dans la région de DIANA a parlé du Rouvax
comme du dernier vaccin à administrer au 9ème mois.
Les maladies que les vaccins permettent de prévenir.

De manière générale, les groupes « hommes » semblent être moins informés que les groupes
« femmes». Dans toutes les régions, ce sont les groupes « femmes » qui parviennent à énumérer
quelques maladies prévenues par les vaccins : « le polio, la tuberculose, la rougeole, le tétanos ».
Toutefois à l’exception de la polio, ils ne font pas le rapprochement entre ces maladies et les
vaccins qui permettent de les prévenir. Dans les régions du Sud-est et d’Alaotra Mangoro, des
participants au sein des groupes « hommes » incluent le paludisme parmi les maladies que la
vaccination permet de prévenir. Des minorités au sein des groupes des deux sexes des régions
d’Alaotra Mangoro, de DIANA et du Sud-est font mention du choléra et de la diarrhée. La
coqueluche est également citée de façon éparse dans les groupes.
2.6.2. Attitudes et pratiques relatives à la vaccination
La prévention des maladies

L’ensemble des groupes reconnait à l’unanimité que la vaccination prévient les maladies et
conçoit cette fonction préventive comme son principal avantage. Elle est ce qui motiverait les
parents à faire vacciner leur enfant.. Cette fonction préventive de la vaccination se manifesterait
de deux façons :
(i) la vaccination protègerait contre les maladies car elle « Ça rend en forme ! Si tu fais le vaccin, tu es
renforcerait les défenses immunitaires de l’enfant, tendance sain, sinon tu auras toute sorte de maladies, les
enfants ne sont pas protégés s’ils ne sont pas
retrouvée dans tous les groupes. L’enfant vacciné serait plus vaccinés. » [H-Rur-PNL, Atsimo Andrefana]
résistant et ne craindrait pas les maladies.
(ii) la vaccination atténuerait les effets de la maladie. L’ensemble des groupes semble
considérer que les vaccins ont le pouvoir de réduire l’intensité des maladies chez les
enfants vaccinés. Pour une minorité des groupes « femmes », dans les régions d’Alaotra
Mangoro, d’Atsimo Andrefana et de la capitale, sans la vaccination, les maladies seraient
mortelles. En atténuant l’intensité de la maladie, la vaccination rendrait également le
traitement plus facile. La grande majorité de ces groupes déclarent en effet que les
médecins auraient moins de difficultés pour soigner les enfants et que les parents
gagneraient également en temps, en énergie et sur le plan des dépenses.
Pratiques en matière de vaccination

La majorité des groupes affirme avoir fait les 5 contacts. Paradoxalement cependant, les mêmes
groupes signalent que la rougeole figure parmi les maladies les plus fréquentes chez les enfants
et figure parmi les plus meurtières dans leur localité repective (cf. Soins aux enfants malades).
Ceci amène à penser que la dernière séance de vaccination est peut-être omise (au cours de
laquelle le Rouvax est administrée), d’autant plus que les groupes ne maîtrisent pas toujours le
calendrier de vaccination.

Quoiqu’il en soit, dans la majorité des cas, ce seraient les mères qui « Comme nous avons trois enfants, ma femme a
déjà l’habitude de la vaccination. C’est surtout
se seraient chargées de la vaccination des enfants, les hommes ayant elle qui connaît les différents rendez-vous et les
d’autres occupations. C’est cette expérience personnelle qui rendrait trucs avec le docteur, puisque moi je suis
compte de leur plus grandes connaissances en la matière. Le rôle occupé au travail. Mais il y arrive qu’elle soit
occupée, alors j’y vais quand même.» [H-Urb-
des hommes se limiterait à encourager leur épouse à aller à la PL, Analamanga]
vaccination et à s’informer de l’état d’avancement dans la série des « C’est moi qui lui dit d’emmener les enfants se
faire vacciner pour le protéger contre les
maladies. » [H-Urb- PNL, Analamanga]
 53
vaccinations en consultant le carnet de vaccination.
Raisons données pour légitimer l’achèvement de la série des vaccinations

Deux tendances se dessinent dans les raisons données par les groupes pour avoir achevé la
série des vaccinations : (a) l’importance de la santé et du bien-être de leurs enfants ; (b) d’autres
avantages plus spécifiques :
- Réduction de l’intensité des maladies et prévention de la mortalité

C’est la crainte de la maladie qui inciterait la grande majorité des groupes à faire la vaccination.
La majorité des groupes « femmes » suivrait scrupuleusement les directives des agents de santé
pour achever la série des vaccins dans les temps afin d’assurer une couverture préventive
maximale.
Dans les régions du Sud ouest, de DIANA et de la capitale, une minorité des groupes « femmes »
pense que la vaccination protège contre la mortalité en réduisant « Lorsqu’un enfant est malade, s’il n’est pas
l’intensité de la maladie. Ces groupes déclarent en effet que de ne vacciné la maladie récidive et risque d’entraîner
la mort. » [F25 ans+-Rur-PL, Analamanga]
pas faire vacciner l’enfant pourrait lui être fatal. Un enfant non
vacciné n’aurait pas les défenses nécessaires pour faire face aux maladies qui seraient plus fortes
sans l’effet des vaccins. L’enfant non vacciné qui tomberait malade aurait besoin de beaucoup
plus de soins qu’un enfant non vacciné car la maladie risquerait de s’aggraver chez lui et de le
faire mourir.
- Réduction de l’intensité des maladies et facilité dans les soins aux enfants

La majorité des groupes trouverait une motivation pour terminer les 5 séries de vaccins dans ses
effets attendus soit, l’atténuation de l’intensité des maladies. Ces groupes soutiennent en effet
que la vaccination permet de renforcer les défenses immunitaires de l’enfant, les rendant plus
résistants. L’enfant vacciné serait alors plus facilement traité, que ce soit par le médecin ou par
les parents. Selon une minorité dans le groupe « femmes » de la région de DIANA, les dépenses
afférentes au traitement d’un enfant vacciné (frais de consultations, de déplacements et coût des
médicaments) seraient moindres. En outre, la charge des parents serait allégée (temps et
énergie).
- Fréquentation des centres de santé

La fréquentation des centres de santé serait également facilitée. La “... Lorsque vous ne vaccinez pas votre enfant,
majorité des groupes « femmes » déclarent que le carnet de ils ne le traitent pas, même s’il risque de
mourir, ils ne le soignent pas. C’est pourquoi
vaccination serait exigé pour pouvoir bénéficier des soins et obtenir nous nous empressons de vacciner notre enfant
les médicaments nécessaires. Selon le groupe « femmes » de la car s’il est malade, et que vous courez à
région du Sud Est, la carte de vaccination serait même exigée pour l’hôpital, ils exigeront le carnet de vaccination”
[F25 ans+-Rur- PNL, DIANA]
l’achat de médicaments dans des pharmacies privées et/ou
confessionnelles. Ces groupes feraient la vaccination pour éviter d’être confrontés à ces
problèmes.
- Inscription scolaire

Dans la région de DIANA, les groupes des deux sexes citent la facilitation des procédures
d’inscription scolaire. Certaines écoles exigeraient la carte ou le diplôme de vaccination pour
s’assurer que l’enfant ne risque pas de contaminer ceux qui seront en contact avec lui.
Les mesures incitatives

 54
En plus d’être animés du souci de protéger leurs enfants contre les maladies par la vaccination,
les groupes « hommes » des régions rurales de DIANA et d’Alaotra Mangoro considèrent
l’obtention du diplôme de vaccination comme une source de fierté :. Ils semblent le considérer
comme un trophée recompensant un parcours qu’il est nécessaire de faire pour assurer la santé
de l’enfant. Le groupe « hommes » de la région de DIANA et le groupe « femmes » de la région
du Sud Est considéreraient également la distribution de moustiquaires aux enfants vaccinés
comme un avantage.

Les obstacles à la vaccination

Ce sont essentiellement les groupes du milieu rural qui trouveraient des inconvénients à la
vaccination ; le milieu urbain identifie très peu de facteurs dissuasifs. On distingue deux
tendances principales dans les raisons données pour ne pas faire vacciner l’enfant ou
interrompre la série des vaccinations : le manque d’informations sur la vaccination et les
défaillances du centre de santé.
- Lacunes dans les informations sur la vaccination

Pour la majorité des groupes, c’est l’ignorance qui ferait que les mères ne font pas vacciner leur
enfant ou interrompent la série des vaccinations. L’influence de l’entourage serait déterminante.
Enfin, certaines femmes ne vaccineraient pas leurs enfants parce
que ne fréquentant pas les centres de santé. Ces femmes “Les vaccins sont récents, car du temps de nos
ancêtres, il n’y en avait pas encore et on utilisait
recourraient aux pratiques ancestrales pour soigner les maladies. toujours des feuilles pour guérir les maladies”
[H-Urb-MPL, DIANA]
Les groupes identifient les effets secondaires comme le principal
obstacle à la vaccination mais la majorité des participants aux GDD avancent qu’en dépit de ces
effets secondaires, ils auraient achevé la série des vaccinations. Les effets secondaires notés par
la grande majorité des groupes sont les hausses de températures et les plaies. Ces effets
secondaires seraient, dans la majorité des cas, inattendus, ce qui provoquerait une attitude
négative des parents face à la vaccination. La vaccination serait « D’après mes expériences sur mes 2 enfants, il
interrompue parce que les parents ne veulent pas que l’enfant me semble que celui qui a été vacciné est
beaucoup plus souvent malade par rapport aux
souffre à nouveau après la prochaine vaccination. Les rumeurs sur autres non vaccinés. Comme le vaccin n’a pas
les effets secondaires dissuaderaient alors ceux qui n’ont pas encore donné le résultat escompté, on a préféré
fait vacciner leurs enfants à les amener au centre de santé. s’abstenir de vacciner les autres enfants »
[F24 ans-Rur-MPL, Alaotra Mangoro]

Les idées fausses sur la vaccination constituent un autre obstacle à la vaccination. Elles
reposeraient sur une expérience personnelle mal interprétée en raison sans doute des croyances
sur les vertus préventives de la vaccination par rapport à l’ensemble des maladies en général.
Elle tendrait également à associer les effets secondaires à des « Il y a des personnes qui ignorent que le vaccin
est en fait un microbe qu’on injecte et qui va
maladies provoquées par la vaccination. Selon de faibles minorités servir pour protéger contre des maladies, et
au sein des groupes du milieu rural, c’est l’enclavement et le c’est ce qui provoque la fièvre, après ces
manque d’information sur les avantages de la vaccination qui personnes sont découragées parce qu’ils
pensent que le vaccin rend malade, et ne
rendrait compte des préférences de certaines familles pour les veulent plus continuer. » [F25ans+-Rur- PNL,
pratiques ancestrales. Ces minorités estiment que certains parents DIANA].
devraient également être davantage informés sur le nombre et la « Il y en a qui se disent pourquoi piquer mon
fréquence des vaccins car c’est leur ignorance qui rendrait compte enfant alors qu’il n’est même pas malade » [H-
de l’interruption dans la série des vaccinations. Les parents Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]

 55
devraient également être rassurés sur l’absence de risque de la vaccination. Par exemple, les
piqures les démotiveraient. Selon des minorités dans les groupes « hommes » du milieu rural,
certains parents ne sauraient pas que la vaccination est gratuite et craindraient les dépenses à
engager. Les mêmes répondants disent qu’ils ne connaissent pas le nombre des vaccins à
administrer et les périodes de rappel et que c’est la raison pour laquelle la vaccination des
enfants est interrompue.

- Défaillances reliées aux Centres de Santé

Selon une minorité dans les groupes ruraux, l’éloignement du centre de santé découragerait les
parents à faire vacciner leurs enfants : ils n’auraient ni le temps, ni le courage, ni les moyens
financiers de faire face au déplacement. Les avantages de la vaccination ne seraient pas perçus
et la vaccination ne constituerait dès lors pas une priorité face aux nombreuses autres
préoccupations de la vie quotidienne et les activités génératrices de revenus. Les absences
fréquentes et prolongées des agents de santé ainsi que les ruptures de stock de vaccin
constitueraient également des causes d’abandon de la vaccination pour une minorité dans les
groupes « femmes » du milieu rural.

2.7. Utilisation de la moustiquaire imprégnée


L’étude a eu pour objectif d’identifier les CAP des groupes en matière d’utilisation de la
moustiquaire imprégnée pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans, par
rapport aux connaissances et pratiques promues par le MSPF : « (i) le paludisme chez la femme
enceinte est une maladie grave qui peut provoquer une fausse couche, un accouchement
prématuré et une anémie ; cette dernière manifestation de la maladie contribue chez la femme
enceinte à la naissance de bébés de faible poids ; (ii) dans les zones d’endémie de paludisme,
les femmes enceintes sont incitées à dormir sous moustiquaire (imprégnée) toutes les nuits tout
au long de la grossesse ; (iii) dans les zones d’endémie de paludisme, s’assurer que l’enfant de
moins de 5 ans dorme sous une moustiquaire traitée par un insecticide. » Ce faisant, elle a
également porté sur la perception du risque personnel et de la gravité du paludisme ainsi que la
connaissance de ses causes et conséquences.
2.7.1. Connaissances et attitudes vis-à-vis du paludisme

Tous les groupes investigués dans les régions endémiques concernées par l’étude (DIANA,
Alaotra Mangoro, Sud-ouest et Sud-est) reconnaissent que : (i) le paludisme connaît une
prévalence élevée dans leur localité respective ; (ii) tout le monde, sans exception, est exposé au
risque d’attraper la maladie ; (iii) certaines personnes sont plus vulnérables que d’autres à la
maladie et à ses conséquences, dont les femmes enceintes et allaitantes
ainsi que les enfants. Les femmes enceintes, allaitantes et les enfants « La femme enceinte et les enfants en bas
âge sont vraiment très indolents lorsque le
sont en effet considérés comme plus fragiles, vulnérables aux paludisme les ‘attrape’…De plus, le lait de la
maladies. Ces groupes pensent également que les enfants qui n’ont pas femme allaitante ne monte plus... »
encore été vaccinés ou qui n’ont pas terminé leurs vaccins sont plus [F25 ans+-Rur-PL, Atsimo Andrefana] ;
« Ce sont surtout les enfants qui ont le
vulnérables que les autres au paludisme, ce qui signifie peut-être qu’ils paludisme chez nous ; c’est moins fréquent
pensent que le paludisme est une maladie qui peut être prévenue pour les adultes. » [F25 ans+ -Urb-MPNL,
grâce à la vaccination. Atsimo Atsinanana]

Cause du paludisme

La quasi-totalité des groupes sait que le moustique est le principal « C’est avec le ‘climat’ (sic) que le ‘danger’
vecteur de transmission du paludisme. Dans les régions endémiques (sic) arrive ! Chez nous, la ‘fièvre’ (sic) est très
redoutée. Après ces périodes, le paludisme
est moins virulent… » [H-Rur-MPL, DIANA]

 56
concernées par l’étude (DIANA, Alaotra Mangoro, Sud-ouest et Sud-est), les groupes identifient
également des périodes favorables à la « prolifération » des moustiques qu’ils considèrent
comme rendant compte de la prévalence plus élevée du paludisme. Il s’agit de la saison chaude,
la saison des pluies et la saison des fruits.
Il existe cependant, dans chaque région, un certain nombre d’idées
«Parmi les catégories sociales chez nous, ce
fausses sur les causes du paludisme. Ainsi, le groupe « hommes » rural sont les paysans qui travaillent le plus…Pour
de DIANA pense que, chez les paysans, le paludisme est causé par la cette raison, à tout bout de champ, ils sont
fatigue, leur surcharge de travail les rendant particulièrement ‘alourdis’ par cette maladie, c’est devenu une
‘mode’ (sic) qui n’étonne plus, c’est une
vulnérables à la maladie. Le paludisme est même appelé par eux « ‘la ‘mode’ qui va de soi chez nous (…) c’est ‘la
fièvre’(sic) des paysans ». Dans la capitale, un cas isolé dans le groupe fièvre’ (sic) des paysans résultant d’une
« hommes » qualifie le paludisme de « maladie propre à la femme fatigue excessive» [H-Rur-MPL, DIANA]
enceinte », mais en se référant à leur propre expérience. Dans le «Dans mon cas, je ne sais pas pourquoi, ma
groupe « femmes », c’est le milieu ambiant qui est considérée comme femme a toujours le paludisme chaque fois
qu’elle est enceinte. Je ne sais pas pourquoi
cause du paludisme et plus particulièrement la fumée des balles de c’est comme ça » [H-Urb-PNL, Analamanga]
riz12 brûlées pendant la période d’enfournements des briques. La
malnutrition est également citée comme un facteur favorisant la transmission du paludisme.
Dans le Sud-ouest, une minorité du groupe « femmes » rural pense que le paludisme se
transmet par les aliments, notamment les aliments gras. Dans le même groupe, des cas isolés
considèrent que le paludisme peut être transmis par tous les aliments. Dans la région d’Alaotra,
le groupe « femmes » rural tend à considérer comme un symptôme de paludisme toute fièvre
affectant l’enfant de moins de cinq ans. Ce groupe pense également que le paludisme est causé
par une allergie.
Conséquences du paludisme sur la femme enceinte

La quasi-totalité des groupes ont déclaré que, de façon générale, la grossesse constitue une
période délicate pour la femme et l’enfant qu’elle porte, en raison de sa plus grande fragilité et
vulnérabilité aux maladies. En ce qui concerne plus particulièrement le paludisme, mêmes si
ces connaissances sont parcellaires et non partagées par la majorité des participantes, ce sont
davantage les groupes « femmes » qui semblent savoir quelles sont les conséquences du
paludisme sur les femmes enceintes. C’est en effet uniquement dans la région du Sud Ouest
que l’ensemble du groupe « hommes » a semblé reconnaître que le paludisme a des
conséquences néfastes sur la femme enceinte et sur le fœtus. Autrement, seules de faibles
minorités à l’intérieur des groupes « hommes » y ont fait allusion.
Les groupes et/ou les participants au sein des groupes qui «Lorsque j’étais enceinte de mon deuxième
semblent savoir que le paludisme a des conséquences fâcheuses enfant, j’ai eu une fausse couche à la suite du
paludisme que j’ai eu ; le médecin m’avait alors
sur la femme enceinte évoquent uniquement le risque de fausse dit que paraît-il, lorsqu’une femme est enceinte,
couche. L’accouchement prématuré et l’anémie sont des risques elle ne doit pas attraper le paludisme car elle
apparemment méconnus. Comme on le verra plus bas, les groupes risque de faire une fausse couche ; c’est ce qu’il
m’avait dit… » [F24 ans -Urb-PNL, Atsimo
-

des deux sexes d’Alaotra Mangoro et du Sud Est semblent Atsinana]


reconnaître que le faible poids à la naissance peut être une
conséquence du paludisme affectant la femme enceinte mais sans faire le lien avec
l’accouchement prématuré et l’anémie. Les explications données sur les raisons de la fausse
couche varient et semblent être empiriques, basées sur « Dans le cas particulier de la femme enceinte, si
l’expérience propre des femmes. Ainsi, les groupes « femmes » elle a le paludisme, le fœtus l‘attrapera
automatiquement (…) puisque c’est encore le
pensent que c’est la température élevée de la femme enceinte qui même sang qui les fait vivre… Dès qu’un
nuit au fœtus. Les groupes « hommes » pensent quant à eux que moustique pique la mère, l’enfant qu’elle porte
ce sont toutes les maladies que la mère peut transmettre au fœtus, aura inévitablement le paludisme » [H-Rur-MPNL,
Alaotra Mangoro]

12
Les balles servent à brûler les briques.

 57
le paludisme étant considéré comme une maladie « grave » qui peut tuer l’enfant à naître. Bien
qu’ils appréhendent fortement le risque de fausse couche associé au paludisme, les groupes des
deux sexes sont convaincus qu’il peut être évité si la femme a recours à des soins médicaux. Ils
semblent être plus enclins à rechercher des soins curatifs qu’à prévenir la maladie.
Conséquences du paludisme sur les enfants de moins de 5ans

Trois tendances se dégagent quant aux connaissances relatives aux conséquences du paludisme
sur les enfants de moins de 5 ans. La première, qui concerne la majorité des participants dans
les groupes « femmes » de toutes les régions de l’étude mais aussi dans
les groupes « hommes » de DIANA et d’Alaotra Mangoro, identifie «tardent C’est une maladie qui tue si les soins
mais il faut tout de suite emmener
clairement le décès de l’enfant comme principale conséquence du l’enfant à l’ ‘hôpital’ (sic) car les enfants ne
paludisme, ce qui les amènent à qualifier la maladie de « meurtrière ». supportent pas les maladies » [F25 ans+-Urb-
, Atsimo Andrefana] ;
Les raisons avancées pour justifier ce point de vue sont : (i) le nombre MPNL
« Si l’enfant ne reçoit pas de médicaments
élevé d’enfants qui sont morts de la maladie dans leur localité dans les meilleurs délais, il meurt » [F24 ans - -

respective ; (ii) la vulnérabilité des enfants de cet âge ; (iii) le retard Rur-PNL, Atsimo Atsinanana]
dans le recours au centre de santé.
La deuxième tendance, relevée dans les groupes des deux sexes d’Alaotra Mangoro et du Sud
Est, renvoie à la précarité de l’état physique de l’enfant. Il s’agirait plus particulièrement
d’enfants dont la mère aurait eu le paludisme pendant qu’elle était enceinte et qui seraient nés
plus chétifs. Comme indiqué plus haut, référence semble faite à des enfants de faible poids à la
naissance qui ne sont pas identifiés comme tels.
« L’enfant risque de ne plus être robuste et
Plus que les autres, le groupe « hommes » d’Alaotra Mangoro insiste restera aussi frêle. Même à deux ans, il risque
sur les conséquences débilitantes du paludisme sur l’état physique de de ne pas marcher car il a attrapé la maladie
l’enfant. très tôt (…) il ne sera jamais vigoureux» [H-
Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
La troisième tendance, exprimée de façon minoritaire dans les groupes « hommes » d’Alaotra
Mangoro et du Sud Est, sous-estime les conséquences de la maladie sur les enfants de moins de
cinq ans. Celle-ci est considérée soit comme une maladie « inoffensive » (Alaotra Mangoro), soit
sans conséquences sur les enfants « forts et robustes », allusion étant ici faite aux enfants « bien
nourris » (Sud Est).
Connaissances relatives à la moustiquaire imprégnée

De manière générale, les groupes sont familiers avec la moustiquaire – imprégnée ou non – qui,
pour eux, a pour fonction de protéger contre le moustique et par conséquent, contre le
paludisme. Dans les régions du Sud Est, du Sud Ouest et d’Alaotra Mangoro, ces réponses sont
même données spontanément. Les groupes savent également que la moustiquaire imprégnée a
été traitée pour « renforcer » sa fonction protectrice contre le paludisme mais leur appréciation
de la moustiquaire imprégnée varie (voir attitudes).
Les groupes précisent que d’autres moyens existent pour lutter contre les moustiques et/ou le
paludisme. Ils évoquent les mesures d’assainissement du milieu (débroussaillage, assèchement
flaques d’eau), l’utilisation de serpentin et la chimio prophylaxie.
Des idées fausses sur les moyens de lutter contre le paludisme existent également, qui varient
selon les localités et sont fonction de leurs connaissances/croyances sur les causes du
paludisme. Il s’agit notamment de l’abstinence de matières grasses (Sud Ouest) et de la
diminution du rythme de travail (DIANA).

 58
Par contre, c’est uniquement dans la région de DIANA et dans le groupe « hommes » d’Alaotra
Mangoro que les consignes sur l’utilisation de la moustiquaire imprégnée pour la femme
enceinte semblent être connues. Ces groupes spécifient que dès l’apparition des premiers signes
de grossesse, moment à partir duquel le fœtus commencerait à prendre forme, et jusqu’à
l’accouchement, la femme enceinte doit dormir sous la moustiquaire imprégnée. La plupart des
autres groupes n’ont pas le réflexe d’évoquer la moustiquaire, bien qu’ils admettent que la
femme est vulnérable pendant la grossesse et court des risques si elle contracte le paludisme.
Comme le montreront les sections suivantes, les préoccupations des groupes sur la prévention
du paludisme portent relativement plus sur les enfants de moins de 5 ans que sur la femme
enceinte. Cependant, seuls les groupes de DIANA et celui des femmes rurales du Sud Ouest
évoquent la nécessité de faire dormir les enfants de moins de 5 ans en permanence sous la
moustiquaire. Comme dans le cas des femmes enceintes, les autres groupes n’ont pas le réflexe
d’associer les causes et conséquences du paludisme – connues - à l’utilisation de la moustiquaire
imprégnée. Ce sont ici les idées fausses sur les autres mesures préventives qui y font obstacles.
Les groupes présentent en effet la vaccination comme une mesure de prévention du paludisme.
Les groupes ont également tendance à faire mention des mesures « Le fait de vacciner l’enfant, c’est pour
curatives, telles le recours au centre de santé, alors que la question prévenir les maladies. Si on le vaccine et que
porte sur la prévention, ce qui semble dénoter une faible culture de la plus tard il tombe malade, ses soins
prévention, en raison peut-être de l’insuffisance de l’information en la prendront moins de temps. C’est pour
protéger l’enfant contre le paludisme ! » [H-
matière. Rur-PNL, Atsimo Andrefana]

2.7.2. Attitudes vis-à-vis de la moustiquaire imprégnée

De manière générale, les groupes perçoivent plus d’avantages que d’inconvénients à l’utilisation
de la moustiquaire imprégnée. Les groupes « femmes » sont, de loin, les plus sensibles à leurs
avantages. Les inconvénients rapportés semblent être de taille mais sont essentiellement basés
sur des idées fausses et préjugés sur la moustiquaire imprégnée et les causes du paludisme
Avantages perçus de la moustiquaire imprégnée

Dans l’ensemble, les groupes sont convaincus de l’efficacité de la moustiquaire imprégnée : une
majorité affirme qu’elle permet de protéger contre les moustiques qui sont cause de paludisme.
Cependant, ils ne considèrent pas que la moustiquaire imprégnée protège plus ou mieux que la
simple moustiquaire vendue sur les marchés : pour eux, toutes deux protègent contre le
paludisme et c’est ce qui leur importe. La tendance dominante qui ressort fait de cette fonction
protectrice la raison principale pour laquelle la majorité des groupes adhère à l’utilisation de la
moustiquaire. Les groupes « femmes » de la capitale et « hommes » d’Alaotra Mangoro
précisent en outre que la moustiquaire permet de protéger la femme enceinte et les enfants de
moins de 5 ans contre le paludisme. Les groupes « femmes » de la capitale et du Sud Est
insistent quant à elles sur le fait que la moustiquaire les rend moins dépendantes des
médicaments, qui constituent un recours obligatoire si elles n’utilisaient pas de moustiquaire. Le
groupe « hommes » rural du Sud Est affirme que « depuis qu’il y a ces ‘moustiquaires’ (sic), il y
a plus de gens qui accouchent à l’‘hôpital’ », mettant également en évidence l’aspect
motivationnel de la distribution gratuite de moustiquaire.
Les autres avantages perçus renvoient à des questions d’ordre pratique. Il s’agit, par ordre
décroissant de :
(i) L’éventail de choix en termes de produits offerts sur le « Chaque enfant en possède une (…) et nous
marché à des prix bon marché ou distribués gratuitement, qui avons une qui n’est pas encore utilisée.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, chaque fois
rend la moustiquaire accessible, avantage perçu comme le plus que la femme enceinte va à la CPN, elle en
attrayant. Les groupes du Sud Est et de DIANA semblent être gagne toujours (…) et lorsque les enfants vont
se faire vacciner, ils en acquièrent également
(…). » [H-Rur-MPL, DIANA]
 59
ceux qui de loin sont les plus exposés à la moustiquaire, en raison sans doute d’une
distribution massive du produit dans ces régions. Selon les groupes, dans ces localités,
chaque membre de la maisonnée dispose d’une moustiquaire au moins. Dans la région
de DIANA, les groupes rapportent qu’en plus de celles qu’ils utilisent, ils en ont en
réserve.
Les prix des moustiquaires commercialisés varieraient entre 2000 Ar (Sud Est) et
9000 Ar (DIANA), avec un prix moyen avoisinant les 3000 Ar. Les perceptions sur
l’accessibilité financière au produit varient. Les groupes de DIANA (moins pauvres
lettrés) estiment que les prix sont abordables et que cette échelle de prix permet à
chacun de s’en procurer en tenant compte de son budget. A l’inverse, ceux de la
capitale, en particulier le groupe « hommes » (pauvres non lettrés), qualifient la
moustiquaire de produit de luxe, en raison de son prix « hors de portée ».
(ii) La qualité des moustiquaires auxquelles la population a accès « (…) il y a des moustiquaires qui sont
(distribuées gratuitement et commercialisées) qui rendrait leur vraiment de qualité, ces moustiquaires qui ne
coutent pas cher, par exemple. Elles ne sont
entretien facile. Par contre, la résistance de la moustiquaire pas du tout difficiles à laver, juste un peu de
imprégnée est sujet à controverse dans les groupes « femmes » savon suffit et ça devient tout propre. »
qui sont les seuls à y attacher de l’importance. Le groupe [F25 R ]

d’Alaotra Mangoro la perçoit comme solide et résistante, ce qui motiverait les personnes
défavorables à leur utilisation pour la prévention du paludisme à s’en servir comme filet
de pêche.
« L’autre qui vient de l’‘hôpital’ (sic) est très
A l’inverse, les groupes de DIANA et de la capitale la trouvent fragile (…) c’est parce que les mailles sont
moins solide, comparativement à celles qui sont grosses ! » [F25 ans+ - Rur-PNL, DIANA]
commercialisées sur le marché ;
(iii) La tranquillité qu’elle procure aux femmes car l’utilisation « Le premier avantage c’est que pendant la
d’une moustiquaire assurerait un bon sommeil aux enfants ; période des moustiques, les enfants dorment
paisiblement sous la moustiquaire car il n’y a
ceci réduirait le temps requis pour s’occuper des enfants, au rien qui les gêne ; et c’est vraiment pendant
profit de leurs autres tâches quotidiennes. la saison des travaux qu’il y a le plus de
moustiques... Ca fait vraiment plaisir de voir
Les groupes ne distinguent pas entre la moustiquaire imprégnée leur sommeil paisible.» [F24ans -Rur-MPL,
-

Alaotra Mangoro]
distribuée et/ou commercialisée et la simple moustiquaire pour ce qui
concerne les avantages perçus. Cependant, comme on va le voir, lorsqu’ils évoquent les
inconvénients de la moustiquaire, ils focalisent leur attention sur la moustiquaire imprégnée.
Inconvénients perçus sur la moustiquaire imprégnée

En termes de prévalence, les inconvénients de la moustiquaire imprégnée se rapportent


majoritairement aux effets secondaires perçus, en raison, principalement, du produit utilisé
pour leur imprégnation. Cette opinion est répandue dans les groupes ruraux « hommes » et/ou
« femmes » d’Alaotra Mangoro, du Sud Ouest et du Sud Est mais pas à l’unanimité. Les effets
secondaires appréhendés vont d’une simple démangeaison au risque de décès, en passant par le
risque de contracter différentes maladies, y compris le paludisme. Ces appréhensions semblent
plus fortes dans la région rurale d’Alaotra Mangoro qu’ailleurs. Le
groupe « hommes » spécifie que les enfants sont particulièrement «qu’il C’est parce qu’il y a un médicament dessus
y a ces différentes maladies qui arrivent
sensibles au contact de la moustiquaire imprégnée qui provoquerait (…). Ils pensent qu’on distribue la
chez eux des irritations cutanées. Le groupe « femmes » rapporte que moustiquaire imprégnée de médicaments
dans sa localité, les gens (dont les répondantes s’excluent), se pour paraît-il tuer les gens. Il y a même des
gens qui l’utilisent comme filet de pêche.»
serviraient de la moustiquaire comme filet de pêche en raison de ces [F24 ans -Rur-MPL, Alaotra Mangoro]
-

effets secondaires supposés. Les répondantes mentionnent que cet

 60
usage abusif des moustiquaires imprégnées est réprimé par les autorités locales mais sans
résultat tangible.
Des questions pratiques liées pour la plupart au manque d’habitude à utiliser la moustiquaire
imprégnée sont ensuite évoquées de façon éparse et par de faibles minorités dans les groupes.
Ainsi, dans le groupe « femmes » de la capitale, l’opinion selon laquelle il est nécessaire de
prévoir un temps d’adaptation pour faire accepter le produit a été émise mais de façon isolée.
Ce temps d’adaptation serait nécessaire pour faire accepter la moustiquaire, permettant aux
bénéficiaires de s’habituer à l’utilisation de la moustiquaire qui représente encore quelque
chose de neuf.
Apparemment, ce sont les hommes qui ont le plus d’attitudes défavorables à l’utilisation de la
moustiquaire. Sans qu’une quelconque prévalence puisse être donnée, les raisons invoquées
incluent :
(i) L’absence de commodité dans l’utilisation de la moustiquaire : « Quand il fait chaud, dans cette chaleur extrême,
soit la moustiquaire augmenterait la chaleur ambiante, on s’en débarrasse car c’est insupportable» [H-Rur-
PL, Atsimo Andrefana]
notamment dans les régions où il fait extrêmement chaud, soit
elle serait trop petite pour la taille du mari. Dans les deux cas, le
« ‘Qu’on en utilise ou non, c’est la même chose’,
mari refuserait de l’utiliser et influencerait sa femme en ce sens. c’est ce que mon mari me dit…» [F25 ans+-Urb-PL,
Ces points de vue sont donnés par les groupes « hommes » ruraux Analamanga]
du Sud-ouest ainsi que d’Alaotra Mangoro et se retrouvent dans
les groupes « femmes » des autres sites ;
(ii) La nouveauté que représente le fait d’utiliser une moustiquaire en même temps que la
faible perception du risque de contracter le paludisme, citée de façon éparse parmi les
groupes ;
« (…) pendant la période des moustiques, au cours
(iii) La couverture préventive limitée de la moustiquaire puisque ne de la journée et le soir, (…) tu dois aller manger ou
t’asseoir pour discuter en famille, tu ne vas pas rester
couvrant que le lit pendant la nuit, point de vue exprimé dans les sous la moustiquaire…Bien évidemment tu dois
groupes de DIANA. Le groupe a lancé en boutade : « C’est peut- t’asseoir derrière la moustiquaire… C’est lorsque tu
être le village (allusion à la zone de résidence) qui doit être vas dormir que tu vas entrer sous la
moustiquaire…Alors à quoi bon ? » [F25 ans+-Rur-
couvert par la ‘moustiquaire’ (sic) ». PNL, DIANA]

Les groupes reprennent les inconvénients ainsi identifiés pour justifier le non recours à la
moustiquaire imprégnée et la pratique d’autres alternatives pour lutter contre le paludisme.
2.7.3. Pratiques relatives à la prévention du paludisme

Trois grands types de pratiques se dégagent des groupes en matière de prévention du


paludisme chez la femme enceinte et les enfants de moins de 5 ans, qui sont également
appliquées aux autres membres de la maisonnée. Ces pratiques sont : (i) l’utilisation d’une
moustiquaire imprégnée ou non et acquise gratuitement dans un centre de santé ou achetée
dans les points de distribution ; (ii) le recours à des mesures d’assainissement et/ou à des
serpentins comme moyens alternatifs ou complémentaires à l’utilisation de la moustiquaire
imprégnée ; (iii) le recours à des médicaments – la confusion entre prévention et soins curatifs
est ici manifeste et les pratiques populaires, qui correspondent aux croyances sur les causes du
paludisme - ce dernier « sous-groupe » de pratiques équivalent, en fait, à l’absence de
prévention effective.

Utilisation de moustiquaire

 61
De manière générale, dans tous les groupes, la majorité des participants déclarent utiliser une
moustiquaire. Ils affirment avoir reçu au moins une moustiquaire imprégnée au CSB lors de la
première CPN (celle de leur femme pour les groupes « hommes ») et/ou lors de la première
et/ou de la dernière vaccination de leurs enfants. Les groupes « hommes » ruraux de DIANA,
d’Alaotra Mangoro et du Sud Ouest et de faibles minorités au sein des groupes de la capitale
avancent également s’en être procurées sur le marché en complément ou en remplacement de
la moustiquaire imprégnée distribuée gratuitement.
« (…) D’habitude si la moustiquaire peut
L’utilisation de la moustiquaire s’étendrait à tous les membres de la héberger tout le monde, alors tout le monde y
famille nucléaire pour la majorité des utilisateurs. Au cas où la dort : moi, ma femme, mon enfant nouveau
famille ne dispose que d’une moustiquaire, elle serait utilisée en né. Ma femme enceinte, elle y dort dans la
mesure où la moustiquaire ne peut pas
priorité par la femme enceinte et son mari – par la force des choses accueillir tout le monde, les hommes doivent
– et par les enfants en bas âge, selon sa capacité d’accueil. se tenir à l’écart (…) » [H-Rur-MPNL, Alaotra
Mangoro]
Des nuances importantes sont cependant notées au niveau des modalités d’utilisation de la
moustiquaire : période et fréquence. Deux modes d’utilisation de la moustiquaire se dégagent
soit, par ordre croissant, son utilisation régulière et son utilisation épisodique.
Utilisation régulière d’une moustiquaire

Les groupes où les participants disent utiliser de façon régulière une moustiquaire imprégnée
pour la femme enceinte et/ou les enfants de moins de 5 ans représentent une faible proportion
par rapport aux groupes constitués. Il s’agit principalement des groupes des deux sexes de
DIANA et d’Alaotra Mangoro et des groupes « femmes » du Sud Ouest et de la capitale. Dans
ces groupes, seules de faibles minorités, sinon des cas isolés, affirment que les femmes
enceintes et/ou les enfants de moins de 5 ans dorment régulièrement sous la moustiquaire. Les
groupes semblent se préoccuper plus des enfants que de la femme enceinte.
Parmi ces « utilisateurs réguliers » de moustiquaire imprégnée, seule une infime partie,
retrouvée dans le groupe « femmes » rural de DIANA, affirme que la femme enceinte
commencerait à dormir sous la moustiquaire dès les premiers signes de grossesse et
continuerait à le faire après l’accouchement (pendant le post partum). Dans les autres cas, c’est
seulement après la première CPN, vers le quatrième mois de grossesse et parfois au cinquième
mois, que les femmes enceintes utiliseraient la moustiquaire imprégnée distribuée par le CSB.
Elles continueraient cependant à utiliser la moustiquaire jusqu’à l’accouchement. Les raisons
avancées pour justifier ces pratiques sont les conséquences du paludisme sur la mère et l’enfant
qu’elle porte.
Leurs nouveaux nés et leurs enfants de moins de 5 ans dormiraient également de façon
régulière sous la moustiquaire d’abord en raison de leur vulnérabilité. « (…) même un seul moustique non détecté
La moustiquaire les protégerait également en même temps contre les par les grandes personnes, s’il pique alors ce
insectes. Le groupe « hommes » affirme que le nouveau-né dort jour sera le paludisme assuré. » [H-Rur-MPNL,
et nuit sous la moustiquaire pour cette raison. Alaotra Mangoro]

Utilisation épisodique d’une moustiquaire

Dans tous les groupes, la majorité des participant(e)s qui disent utiliser la moustiquaire le
feraient de façon épisodique ou ponctuelle, y compris les femmes enceintes et les enfants de
moins de 5 ans. L’utilisation de la moustiquaire serait fonction de la profusion de moustiques :
moins il y a de moustiques, moins les groupes utiliseraient la moustiquaire. Les périodes où les
moustiques sont le plus nombreux se situeraient entre le mois de Juillet au mois d’Octobre
pour la région de DIANA et entre Janvier et Février pour la région d’Alaotra Mangoro. Les
questions liées au manque de commodité de la moustiquaire sont également évoquées,

 62
principalement la chaleur insupportable sous la moustiquaire. L’influence du mari serait
déterminante, la femme déclarant s’incliner devant sa volonté : elles renonceraient à utiliser la
moustiquaire - surtout de façon régulière – ou opteraient pour une autre type de prévention.
Les moyens alternatifs ou complémentaires à l’utilisation de la moustiquaire

Le recours au débroussaillage et au remblayage des flaques d’eau des alentours de la maison


d’habitation ainsi que l’usage de serpentins pour lutter contre les moustiques sont cités presque
à égale prévalence dans les groupes. Ces pratiques seraient appliquées, soit pour accompagner
l’utilisation de la moustiquaire, cas relativement moins fréquent et relevé de façon isolée dans le
groupe « femmes » rural d’Alaotra, soit à la place de la moustiquaire, cas plus courant évoqué
dans tous les groupes « hommes », sauf dans le Sud Est, et de manière isolée dans les groupes
« femmes » d’Alaotra Mangoro et de la capitale.
Ces deux moyens complémentaires ou alternatifs sont jugés efficaces par les participant(e)s
concerné(e)s pour se protéger contre le paludisme. Les mesures d’assainissement du milieu
auraient été prises suite aux directives des centres de santé dans le passé et seraient restées dans
les habitudes de certaines localités de l’étude, en l’occurrence dans le Sud Est et à Alaotra
Mangoro.
L’usage de serpentins serait également devenu une habitude. Son « L’utilisation du serpentin par exemple
lorsqu’on change de milieu, comme le
aspect pratique est évoqué par les participant(e)s comme une voyage. Dans ces circonstances, vous ne
motivation supplémentaire pour les amener à les utiliser. pouvez pas trimbaler une moustiquaire. Le
voyage nécessite un serpentin. » [H-Rur-MPL,
Les avantages des moyens alternatifs à la moustiquaire imprégnée DIANA]
cités par les répondant(e)s représentent, en fait, la contrepartie des inconvénients de la
moustiquaire imprégnée. Mais, contrairement à cette dernière, les groupes ne font pas mention
de l’odeur forte des serpentins ni de ses effets nocifs.
Les autres pratiques

Le recours à des procédés populaires pour lutter contre les moustiques constitue une autre
pratique préventive. Il s’agit de l’utilisation de « romba », des feuilles d’arbre qui ont une forte
odeur qui ferait fuir les moustiques. Les feuilles de « romba » seraient pilées et disposées un
peu partout dans la maison qui serait alors fermée pendant environ une heure puis rouverte, le
temps de laisser s’échapper les moustiques. Cette pratique traditionnelle se retrouve dans la
localité d’Alaotra Mangoro. L’étude a noté que le groupe « femmes » de cette région semble
avoir une perception élevée du risque de paludisme, même si la moustiquaire imprégnée n’est
pas utilisée – c’est dans ce site que son utilisation comme filet de pêche est rapportée – : des
alternatives à l’utilisation de la moustiquaire imprégnée sont recherchées pour se protéger
contre le paludisme.
Dans les autres régions, les moyens alternatifs évoqués autres que ceux cités supra témoignent
de l’absence de pratique préventive due à des idées fausses et une faible culture préventive. En
effet, les groupes « femmes » du Sud Ouest, Sud Est, DIANA et de la
« (…) la femme enceinte en fait, ne doit pas
capitale ainsi que les groupes « hommes » du Sud Ouest et d’Alaotra faire de l’automédication, consulter le
Mangoro évoquent le recours à des consultations médicales (soins docteur, et c’est lui qui prescrit après quel
curatifs) et la vaccination des enfants comme mesure contre le médicament doit-elle prendre (…). » [H-Rur-
PNL, Atsimo Andrefana]
paludisme. La pratique de la chimioprohilaxie est également évoquée
mais de façon théorique : peu de personnes semblent y avoir recours. Les groupes précisent
que son utilisation est irréaliste pour des raisons économiques (problème d’accessibilité
financière du produit).

 63
« Avant, il y avait la quinine par semaine. Mais
plus maintenant. Celle qui dit pouvoir donner
de la nivaquine à leurs enfants de manière
régulière ment. Ce n’est qu’une fois que l’enfant
attrape le paludisme que nous nous réagissons »
2.8. Coûts consentis [F25 ans+-Urb-MPNL, Atsimo Atsinanana]

Dans cette section, l’étude a pour objectif d’identifier le niveau de coût qui pourrait inciter ou
dissuader les groupes-cibles à recourir aux services de santé pour la santé de la femme enceinte
et de l’enfant. Pour ce faire, l’étude a cherché à connaître le niveau actuel des dépenses
effectuées par les groupes en la matière, y compris le temps consacré aux consultations dans les
centres de santé. Elle s’est ensuite attachée à appréhender leurs perceptions sur les dépenses
engagées. Enfin, elle s’est focalisée sur les coûts que les groupes sont prêts à consentir pour la
santé de la femme enceinte et de l’enfant.
2.8.1. Dépenses en matière de santé
Montant des dépenses
La majorité des groupes « femmes » et « hommes », à l’exception de ceux de la capitale, avance
que les dépenses en matière de CPN et de vaccination des enfants dans les CSB ne dépassent pas
les 600 Ar, y compris le coût du carnet, des médicaments et du nécessaire pour la vaccination
(alcool, seringue). Dans la capitale, les frais de déplacement sont ajoutés, les dépenses pouvant
alors monter jusqu’à 4 000 Ar. Selon les participantes, certaines prestations telles que la prise
de sang ou la mesure de la tension Artérielle sont également payantes (respectivement 500 Ar et
200 Ar).
Les coûts des soins pour les enfants malades seraient fonction de la gravité de la maladie et du
choix du recours. Les groupes des deux sexes du Sud Est ainsi que le groupe « femmes » urbain
du Sud Ouest paieraient entre 1 000 à 5 000 Ar lorsqu’ils vont au CSB pour les maladies
considérées comme « non graves ». Par contre, les groupes des deux sexes des régions de
DIANA et du Sud Ouest rural affirment que les dépenses pour les maladies « non graves »
peuvent aller jusqu’à 10 000 Ar sinon 15 000 Ar. Ces montants incluent le prix des
médicaments. Les groupes de la capitale, quant à eux, n’iraient au CSB que pour la consultation
et dépenseraient à cet effet entre 100 Ar et 200 Ar. Ils achèteraient les médicaments prescrits
dans les CSB chez les Sœurs pour un montant de 500 Ar à 600 Ar. Les groupes du Sud Ouest
rural précisent également qu’ils dépensent entre 1 000 Ar à 10 000 Ar en médicaments chez les
Sœurs.
Lorsque la maladie est « grave », tous les groupes affirment dépenser plus de 10 000 Ar.
L’hospitalisation coûterait entre 20 000 à 100 000 Ar pour la majorité et de 12 000 à 15 000 Ar
pour le groupe « femmes » de la capitale. Le groupe moins pauvre « hommes » de DIANA
déclare que les dépenses iraient jusqu’à 200 000 Ar lorsqu’ils ont recours à un médecin
spécialiste.
Lorsque les groupes recourent à l’automédication, ils dépenseraient généralement entre 200 à
1 000 Ar pour l’achat de médicaments tels que le «Paracétamol», le « Cotrim » ou le «Palustop»
dans les épiceries ou au marché. Une minorité dans le groupe « hommes » de la capitale
affirme dépenser 3 000 AR pour l’achat de sirop contre la toux.
Le recours aux méthodes traditionnelles mobiliserait moins de ressources. La majorité paierait
symboliquement la somme de 50 AR à 600 AR en contrepartie des soins donnés par les matrones/
guérisseurs ou pour l’achat du nécessaire pour les potions qu’ils composeraient eux-mêmes.
Seules des minorités au sein du groupe « hommes » de DIANA et celui de femmes d’Alaotra
Mangoro dépenseraient entre 1 000 à 5 000 Ar pour les mêmes « services ».
Le tableau ci-dessous résume les dépenses en matière de santé selon les groupes et les types de
soins.
Tableau 1 : Dépenses en matière de santé
Groupes CPN Vaccination Soins aux enfants malades

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Tableau 1 : Dépenses en matière de santé
Groupes CPN Vaccination Soins aux enfants malades
F-24 ans- -Urb-PNL, ∼ Suivi : 50 Ar à 200 Ar ∼ 50 à 200 Ar ∼ CSB : 5000 Ar (IRA)
Atsimo Andrefana ∼ Médicaments : 500 Ar à ∼ Diarrhée : 1200 à 5000 Ar
600 Ar ∼ Hospitalisation diarrhée : 20 000 Ar
∼ Massage : 200 à 600 Ar
F-25 ans+ -Rur-PL, ∼ 100 Ar ∼ Gratuit ∼ Chez les Sœurs : 5000 Ar à 10 000 Ar
Atsimo Andrefana ∼ 100 Ar lors pénurie ∼ Maladies graves : plus de 10 000 Ar
alcool ∼ Diarrhée : au moins 4000 Ar
∼ Diarrhée grave : 40 000 Ar
∼ Automédication (achat chez épicier) : 200 Ar à 1000 Ar
∼ Potion : gratuit
H-Rur-PNL*-Atsimo ∼ Gratuit ∼ gratuit ∼ Chez les sœurs : 1000 à 5000 Ar
Andrefana ∼ Diarrhée : 2000 à 5000 Ar chez les Sœurs
∼ Potion : gratuit
∼ Matrone : 2000 Ar
F-24 ans-Rur-PNL, ∼ Gratuit + 300 Ar carnet ∼ Gratuit + 200 Ar carnet ∼ CSB : maladies non graves : 5000 Ar
Atsimo Atsinanana ∼ Maladies graves : plus de 10 000 Ar
∼ Diarrhée grave : 100 000 Ar ; ODIVA : plus de 2000 Ar
∼ Automédication (Paracétamol) : 200 Ar
F-25 ans+-Urb- ∼ 400 Ar + 300 Ar carnet ∼ Gratuit ∼ CSB : 1300 à 1400 Ar
MPNL, Atsimo ∼ Maladies graves : plus de 10 000 Ar
Atsinanana ∼ Diarrhée simple : 2000 Ar
∼ Diarrhée grave : hospitalisation 20 000 à 50 000 Ar
∼ Automédication : 200 Ar (achat COTRIM)
∼ Tradipraticien, massage : participation symbolique (400, 600 Ar)
H-Rur-PL*, Atsimo ∼ 200 Ar ∼ Gratuit ∼ CSB (piqûre) : 1000 à 5000 Ar
Atsinanana ∼ Automédication (achat au marché) : 200 à 1000 Ar
∼ Tradipraticien : participation symbolique
F-25 ans+-Rur-PNL, ∼ Gratuit+ 100 Ar pour ∼ 100 Ar (alcool) ∼ CSB : maladie non grave 5000 à 10000 Ar
DIANA seringue vaccination ∼ Si médicaments non accessibles localement : frais de
déplacement 6000 Ar+ médicaments 3000 Ar
∼ Hospitalisation en cas de maladie grave : 40 000 à 60 000 Ar
∼ Diarrhée : 5000 à 18 000 Ar
∼ Hospitalisation diarrhée : plus de 60 000 Ar (dont frais de
déplacement 20000 Ar, location chambre 10 000 Ar/j, …)
∼ Potion : gratuit
H-Rur-MPL*- DIANA ∼ Gratuit ∼ Gratuit ∼ CSB local : 5000 à 10 000 Ar
∼ Médecin spécialiste (ville) : plus de 200 000 Ar (allergie)
∼ Hospitalisation : 40 000 à 50 000 Ar
∼ Hospitalisation diarrhée : plus de 200 000 Ar (dont échographie et radiographie)
∼ Automédication (secours : paracétamol, Palustop) : 1000 Ar
∼ Potion : 200 Ar
∼ Massage : 400 Ar à 5000 Ar
F-24 ans-Rur-MPL, ∼ Majorité : < 600 Ar ∼ 100 Ar ∼ CSB : 3000 à 15 000 Ar
Alaotra Mangoro ∼ Minorité : 1000 Ar ∼ Diarrhée : 7000 à 10 000 Ar
∼ Médicaments : 1600 Ar ∼ Tradi-praticien : 1000 Ar
∼ Massage : 50 Ar
H-Rur-MPNL*- ∼ Première CPN : 400 à ∼ Majorité : 100 Ar ∼ CSB : maladies non graves : 2500 à 10 000 Ar
Alaotra Mangoro 600 Ar ∼ Minorité : gratuit ∼ Maladies graves : plus de 10 000 Ar
∼ Autres CPN : 0 à 100 Ar ∼ Diarrhée : 1200 à 7000 Ar
∼ médicaments : 300 Ar
F-25 ans+-PL, ∼ Suivi : 500 Ar à 1000 Ar ∼ Carnet 200 Ar + ∼ Consultation au CSB : cotisation 100 Ar à 200 Ar
Analamanga ∼ Prise de sang : 500 Ar participation symbolique ∼ Achat médicaments chez les sœurs : 500 à 600 Ar
∼ Prise tension Artérielle : 200 Ar (total dépenses ne ∼ Diarrhée (début) : 200 à 1000 Ar (ODIVA et charbon)
∼ Frais de déplacement : 4000 Ar dépasse pas 1000 Ar) ∼ Médecin libre diarrhée : 6000 Ar
∼ Hospitalisation diarrhée : 12000 à 15000 Ar
H-25 ans+-PNL*- ∼ NSP ∼ Gratuit ∼ Médicaments chez les sœurs : 500 à 600 Ar
Analamanga ∼ Frais de déplacement : 1400 Ar ∼ Frais de déplacement : 1200 Ar ∼ Automédication (achat sirop) : 3000 Ar

Temps pour la consultation médicale

La majorité des participants du Sud Ouest rural, DIANA et Alaotra Mangoro passeraient une
journée au centre de santé (public ou confessionnel) pour une consultation tandis que ceux du
Sud Est, Sud Ouest Urbain et de la capitale, 2 à 4 heures. Les groupes du Sud Ouest rural

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DIANA et Alaotra Mangoro trouvent ce temps trop long et se plaignent de la situation mais, pour
la majorité, elle ne constituerait pas un obstacle à la fréquentation du centre de santé pour
autant. D’ailleurs, pour certains, le recours à d’autres centres, relèverait de la capacité
journalière du centre à prendre en charge tous les patients présents le même jour (Alaotra
Mangoro). Les groupes du Sud Est, Sud Ouest Urbain et de la capitale perçoivent le temps
qu’ils passent au centre de santé comme normal, leur permettant, de se consacrer à leurs tâches
quotidiennes après la consultation. Seul le groupe « moins pauvre » « hommes » de DIANA
affirme attendre un maximum de 5 heures pour les maladies « simples ». Ils attendraient
pendant une heure en cas d’urgence, lorsqu’ils disposent de moyens suffisants pour se rendre
dans le chef lieu de district pour aller voir un médecin privé ou pour se faire hospitaliser. Tous
les groupes comparent le temps passé au centre de santé avec celui qui est pris pour le recours
au tradipraticien, qui serait beaucoup moins long, ne dépassant généralement pas une demi-
heure.
Selon les participants aux GDD, la durée maximale de la consultation dans un centre de santé
devrait être de une à trois heures. La majorité serait cependant prête à patienter au-delà de 3
heures, faute d’alternative.
2.8.2. Perception des dépenses financières en matière de santé
Les dépenses pour la CPN et la vaccination sont estimées être d’un Dès qu’il s’agit de centre de santé, tu dois payer.
montant acceptable par tous les groupes. Toutefois, le groupe Rien n’est gratuit. Même si tu fais de la
planification familiale, tu paies. Ils disent que c’est
« femmes » de DIANA dénonce et se plaint du fait que les gratuit alors que tu paies toujours » [F25 ans+-Rur-
prestations ne sont pas gratuites dans leur localité. La majorité des PNL, DIANA]
groupes trouvent que le coût pour les soins donnés aux enfants «Ah ! Les dépenses au sein du ménage sont
dans le cas de maladies « simples » est également acceptable. Ils nettement plus importantes (que ceux liés à la
santé). Tu achètes du charbon, tu achètes les mets,
font alors la comparaison entre les dépenses pour ces soins et le riz, l’huile, … » [F24 ans -Urb-PNL, Atsimo
-

celles du ménage, notamment pour l’alimentation. Andrefana]

Le statut socio-économique des groupes rend compte des deux tendances observées dans la
capacité financière de faire face à ces coûts : les groupes « pauvres » s’estiment incapable de
faire face à ces coûts dans la mesure où les ressources nécessaires pour les couvrir ne seraient
pas souvent disponibles, surtout en période de soudure. Les mesures adoptées seraient alors,
par ordre de prévalence : (i) l’emprunt auprès d’un proche (famille ou ami) ou d’un usurier,
pour le cas du Sud Ouest, où le montant à rembourser serait doublé après un mois ; (ii) la
vente de biens ou de produits agricoles disponibles ; (iii) le recours au tradipraticien surtout en
milieu rural (Sud Ouest, Sud Est rural, « femmes » DIANA ; (iv) «Je ne dis pas quelque chose de mauvais
l’automédication (Sud Est et capitale) ; (v) la restructuration des mais voici la situation. Moi personnellement,
je suis pauvre, mais je ne suis pas pauvre
dépenses journalières de façon à dégager une « provision » pour le lorsqu’il s’agit de soigner mon enfant. Si
traitement de la maladie (Alaotra Mangoro). Les groupes « moins mon enfant est malade, j’arrive à prendre en
pauvres » pensent pour la majorité pouvoir supporter le coût des soins charge les dépenses. Mais en général, la
majorité des gens n’arrive pas à payer le coût
des maladies « simples », mais reconnaissent la difficulté pour la pour soigner les enfants. Une fois que cela
majorité de la population à faire face à ces coûts. dépasse les 100 000 Fmg (20 000 Ar), c’est
la mort». [H-Rul-MPL*, DIANA]
Dans le cas de maladies graves, les réactions des groupes tendent à «Si c’est 100 000 Ar en une seule fois,
être identiques, indépendamment de leur statut socio-économique. l’endettement est d’usage car il s’agit de vie,
tu dois le supporter car c’est pour qu’il soit
Leur principale difficulté à faire face aux coûts du traitement est en bonne santé» [H-Rur-MPNL*, Alaotra
l’indisponibilité des ressources au moment où la maladie se manifeste. Mangoro]
La majorité des groupes recourrait alors à la vente de biens et/ou «Tu n’as rien à vendre à la maison, les
l’endettement. Les groupes ruraux du Sud Ouest tendent à se parents ne peuvent pas t’aider, et l’enfant
meurt là, même s’il ne devrait pas mourir, il
résigner. meurt car tu n’as pas d’argent». [F-25 ans+-
Rur-PL, Atsimo Andrefana]
Coûts consentis

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Les participant(e)s ont montré des difficultés à évaluer les coûts consentis. Trois seuils peuvent
être définis :

- Les coûts sont supportables pour la majorité des participant(e)s lorsque :


(i) le montant nécessaire est disponible au moment de la
maladie ; « Par exemple, tu devais acheter 10 kapoaka de riz,
c’est la ration journalière, et quelqu’un tombe
(ii) une partie de l’argent consacré aux dépenses quotidiennes malade, tu dois diminuer la nourriture – Si tu dois
acheter de la bougie, tu achètes du pétrole, car le prix
peut être affectée aux dépenses en matière de santé ; du pétrole est moins cher que celui de la bougie. Tu
achètes le pétrole à 50 Ar alors que la bougie coûte
(iii) la vente des récoltes disponibles arrivent à couvrir les 200 Ar ». [F24 ans-Rur-MPL, Alaotra Mangoro]
-

dépenses [Groupes ruraux Sud Est, Groupe rural


« femmes » pauvre DIANA] ; « Le père et la mère cherchent de l’argent pour
améliorer les conditions de vie du ménage et font de
(iv) le montant requis ne dépasse pas l’épargne constituée l’épargne. La santé, la scolarisation, et le reste sont
pour les situations d’urgence [Moins Pauvre DIANA]. parmi les raisons de l’épargne. Alors, lorsqu’il est
malade, tu regardes ton épargne, tu as 50 000 Ar et
l’ordonnance est de 80 000 Ar. Tu ne le supportes
- Les coûts ne sont pas supportables mais des efforts peuvent être pas au-delà de 50 000 Ar. Qu’est-ce que tu fais ?
déployés pour y faire face, lorsque : (i) il est possible d’emprunter … » [H-Rur-MPL*, DIANA]
le montant à l’entourage ou auprès d’un usurier ; (ii) les dépenses peuvent être couvertes
par la vente de biens immobiliers (terrain, maison, …) et/ou de zébus. La majorité des
participant(e)s des groupes autres que ceux de la région du Sud « Vous voyez madame, il n’y a pas de
Ouest affirme chercher tous les moyens, indépendamment du combien ou combien, même si tu dois
montant, quand il s’agit de sauver la vie de la mère ou de l’enfant. emprunter de l’argent ou tu dois vendre
Aucune limite n’est alors avancée mais tout dépend pour eux, des quelque chose, tu aimes ton enfant et tu dois
chercher tous les moyens ». [F25 ans+-PL,
ressources mobilisables, qu’ils ont des difficultés à évaluer. A l ]

- Les coûts ne sont pas supportables et aucune solution n’est « Si ça monte (le prix des médicaments) à
10 000 Ar, je ne peux plus, je n’achète plus,
possible, lorsqu’il n’existe plus de ressources mobilisables. Cela 10 000 Ar c’est le prix de deux sacs de
concerne surtout les groupes ruraux du Sud Ouest qui manioc ». [F25 ans+-Rur-PL, Atsimo
abandonnerait au-delà de leur limite à mobiliser les ressources Andrefana]
nécessaires.
Le coût consenti semble dépendre non seulement de la disponibilité en ressources au sein du
ménage ou dans l’entourage (assistance au ménage en cas de problème de santé) c'est-à-dire, du
cash dont il dispose ou des biens commercialisables, mais aussi du statut économique. La
majorité des groupes pauvres affirment que les coûts actuels ne sont pas supportables pour eux,
même pour les maladies « simples », lorsque les ressources ne sont pas disponibles.
Lorsqu’elles sont disponibles, les groupes « pauvres » parviendraient à supporter des coûts
inférieurs à 5 000 Ar. Les groupes « moins pauvres » Arriveraient à supporter sans trop de
difficulté des coûts de 10 000 Ar à 50 000 Ar.

2.9. Implication des hommes dans la santé de la mère et de l’enfant


L’implication des hommes dans les questions relatives à la santé de la femme enceinte et de
l’enfant constitue un élément de stratégie que le MSPF veut développer afin d’améliorer la
fréquentation des centres de santé par la population et d'assurer une meilleure prise en charge
de la santé de la femme enceinte et de l’enfant. L’étude a donc cherché à connaître quelles sont
les responsabilités actuelles des hommes en la matière et, plus précisément, à déterminer leur
rôle dans la prise de décision pour les soins de la femme enceinte et de l’enfant ainsi que leur
participation dans le suivi de leur santé pour déterminer la faisabilité d’un changement normatif
sur ces questions. Pour ce faire, l’étude a analysé les données recueillies parmi les hommes,

 67
dans les groupes des deux sexes et dans le cadre des discussions avec les autorités locales et/ou
traditionnelles.
Responsabilités actuelles des hommes

Les données traitées dans cette sous-section ont été recueillies auprès des groupes « hommes ».
Elles témoignent de l’existence d’une division sexuelle des tâches et des responsabilités au sein
du ménage, y compris en matière de santé de la femme enceinte et de l’enfant. De façon
générale, les groupes « hommes » assureraient les dépenses relatives aux soins de santé,
responsabilité qui leur est imputée en tant que chef de famille. Les femmes, à qui est assignée la
responsabilité des travaux domestiques, assureraient de ce fait les soins aux enfants. Elles se
conformeraient aux instructions données par les hommes pour leur propre santé et celle de
leurs enfants, particulièrement lorsqu’elles impliquent des dépenses.
Responsabilités des hommes en matière de santé de la femme enceinte

La grande majorité des participants aux GDD de tous les groupes se sentent pleinement
impliqués dans la santé de la femme enceinte, renvoyant à leur intervention pendant la période
de grossesse.
Les hommes conseilleraient les femmes, et dans certains cas iraient jusqu’à « leur donner
l’ordre » de se rendre au centre de santé ou chez la matrone pour le suivi de la grossesse ou
pour des soins en cas de problème de santé. Le groupe d’Alaotra Mangoro et des minorités au
sein des autres groupes affirment « emmener » eux-mêmes leur femme au centre de santé pour
le suivi ou les soins dont elle aurait besoin. Les hommes accompagneraient leur femme au
centre de santé à cause de la distance (Alaotra Mangoro) ou parce que la femme oublie ses
rendez-vous ou n’est pas suffisament motivée pour se rendre au centre de santé.
Les groupes déclarent en second lieu, avec presque la même prévalence, que :
(i) ils interviennent dans les travaux domestiques. Ils aideraient les femmes enceintes dans
les tâches qui demande de la force physique telles que « piler le riz et/ou le maïs et/ou le
manioc, chercher de l’eau et du bois de chauffe, porter/soulever des choses lourdes »
[Groupes « hommes » de tous les sites]. Les principales raisons évoquées sont la fragilité
de la femme pendant la période de grossesse, celle-ci étant considérée comme
« lourde » (mavesatra) et éprouvant, de ce fait, des difficultés à accomplir ces tâches. La
durée de cette période de «vulnérabilité » varie selon les régions : à partir du 7è mois de
grossesse et jusqu’à une semaine avant l’accouchement, pour les hommes ruraux du
Sud Ouest, et à partir de 3 mois pour les hommes de DIANA.
(ii) ils sont des « pourvoyeurs » d’argent, chargés de subvenir aux besoins de la femme
enceinte, notamment en ce qui concerne l’alimentation, les médicaments, et le
nécessaire pour l’accouchement. Les hommes « pauvres » (Sud Ouest, Atsimo
Atsinanana et Antananarivo) sont très conscients des besoins « Ma femme ne mange pas bien, elle ne
alimentaires spéciaux de la femme enceinte et se sentent mange que du manioc sans rien d’autre, elle
est fatiguée, alors, lorsqu’elle va accoucher,
impuissants à les satisfaire en raison de leur pauvreté. elle aura un retour d’âge’ (sic) car elle
manque de vitamine » [H-Rur-PNL, Atsimo
Dans les sites de DIANA et du Sud Ouest Rural, les participants aux Andrefana]
GDD déclarent qu’ils changent de comportement lorsque leur femme est enceinte. Ainsi, les
groupes se garderaient d’être infidèles dès qu’ils sont informés de la grossesse et tout au long de
cette période. Ils traiteraient également leur femme différemment : les hommes du Sud Ouest
Rural s’abstiendraient de violence physique à l’égard de leur femme tandis que ceux de DIANA
les ménageraient en pesant leurs mots et leurs attitudes. Enfin, le groupe de DIANA assurerait

 68
régulièrement leur « devoir conjugal », ayant des rapports sexuels continus avec leur femme
pour « rendre fort l’enfant dans le ventre ».
Responsabilités des hommes en matière de santé de l’enfant

Les groupes semblent prendre relativement moins de responsabilité pour la santé de l’enfant
que pour celle de la femme enceinte. En effet, les réponses aux questions posées aux
participants des GDD montrent que cette responsabilité est impartie à la femme, les tâches liées
aux soins des enfants lui étant dévolues par suite de la répartition du travail selon les sexes au
sein du ménage (rôles de genre). Les groupes considèrent à « Si ce sont les enfants, c’est ‘presque’
l’unanimité que les femmes sont les mieux placées pour accomplir les toujours (sic) la mère qui s’en occupe. Lui
tâches liées aux soins des enfants et ce, en raison de leur absence du donner ses médicaments,… le père ne s’en
occupe pas chez nous mais c’est la mère qui
foyer au cours de la journée - allusion est ici faite à leur rôle de doit le faire. Il Arrive que le père doit l’aider
« pourvoyeur » d’argent pour le ménage (rôle de genre) qui les mais c’est la mère qui en est la ‘base’ (sic).
éloignent de la maison. C’est elle qui connaît tout ce qui concerne
l’enfant » [H-Rur-MPL, DIANA]
Il existe cependant des variations entre les régions. Les groupes d’Alaotra Mangoro et
d’Analamanga s’investiraient davantage dans la santé de l’enfant. En cas de maladie, la majorité
des participants aux GDD emmènerait les enfants au centre de santé, accompagnés ou non par
les femmes, en raison de l’éloignement (Alaotra Mangoro) ou inciteraient la femme à s’y rendre
(Analamanga). Le groupe d’Analamanga s’intéresserait particulièrement à la prévention des
maladies chez les enfants. La majorité des participants aux GDD s’assurerait de l’hygiène de
l’enfant (lavage et mains), superviserait la préparation des repas de l’enfant et inciterait les
femmes à emmener leurs enfants au centre de santé pour la vaccination, la supplémentation en
vitamine A et/ou le déparasitage. Les groupes d’Atsimo Andrefana,
« Concernant la santé de l’enfant, chez nous,
d’Atsimo Atsinanana et de DIANA déclarent que la contribution des nous n’avons pas de travail. Alors, lorsque
hommes est davantage d’ordre économique. Il leur appartiendrait l’enfant a environ un an, jusqu’à deux ans,
d’assurer à l’enfant une alimentation et des soins adéquats. En plus de trois ans, nous mettons du maïs de coté, c’est
ce qu’il mange, ou du riz mou, un kapoaka,
leurs responsabilités d’ordre économique, les hommes de ces régions car il ne mange pas de manioc. Mais si nous
participeraient, mais de façon sporadique, aux soins des enfants. Selon n’en trouvons pas, nous nous démerdons
des minorités dans les groupes, le père emmènerait l’enfant malade au (sic) ; il est obligé de manger du manioc ».
[H-Rur- PNL – Atsimo Andrefana]
centre de santé en cas d’absence de la mère. Il aiderait également la « Lorsqu’il vient de naître, il pleure, et nous
mère à s’occuper du nouveau né (DIANA). Des cas isolés affirment nous occupons de l’enfant à tour de rôle
contribuer aux tâches quotidiennes, telles que la préparation du repas parce que la mère est encore faible» [H-Rur-
MPL, DIANA]
de l’enfant et la lessive.
Prise de décision pour la santé de la mère et de l’enfant

Deux tendances majeures se dégagent en ce qui concerne la prise de « Nous ne pouvons pas décider même si nous
décision pour la santé de la mère et de l’enfant. Dans les régions du sommes malades, les femmes, mais, nous devons
Sud Ouest et Sud Est, la prise de décision serait un droit qui revient toujours rendre compte au mari avant d’aller se
soigner ». [F-25 ans+-Rur-PL, Atsimo Andrefana]
à l’homme pour la femme en union et à ses parents lorsqu’elle est
hors union, mais avec quelques nuances selon le milieu de résidence. A l’inverse, dans les
régions d’Analamanga (capitale), Alaotra Mangoro et DIANA, les femmes disposeraient d’une
plus grande latitude pour prendre des décisions pour leur santé et celle de leurs enfants.
Faible pouvoir de décision des femmes dans le Sud Ouest et le Sud Est

La majorité des participantes en union des groupes ruraux du Sud « Dès que nous faisons quelque chose que le mari
Ouest et du Sud Est affirment que c’est l’homme qui doit prendre les n’aime pas, il se pourrait même qu’on se sépare, les
problèmes ne sont pas résolus sauf si les parents de la
décisions pour les questions relatives à la santé. La transgression à femme emmènent un zébu. » [F25 ans+-Rur-PL,
cette règle donnerait lieu à des conflits au sein du ménage, pouvant Atsimo Andrefana]
« Si les enfants tombent malades, elles doivent
attendre notre retour des champs pour que mous
puissions leur dire s’il faut emmener l’enfant malade à
 69 l’hôpital ou non.
« Si l’ ‘hôpital’ (sic) est trèsPLéloigné,
» [H-Rur- , Atsimoelles sont obligées
Atsinanana]
d’acheter des médicaments à la ‘pharmacie’ (sic)
(allusion aux dépositaires de médicaments) pour
atténuer la maladie en attendant notre retour » [H-
aboutir à la répudiation de la femme dans le Sud Ouest. La presqu’unanimité des groupes
« femmes » de ces deux régions et les groupes « hommes » précisent que la femme doit attendre
que l’homme donne son accord même si celui-ci est absent. Seule une faible minorité des
hommes déclare laisser une certaine latitude aux femmes qui, sauf en cas d’éloignement du
centre de santé, pourrait prendre l’initiative.
Les raisons évoquées pour attendre la décision de l’homme avant de « C’est lui qui a l’argent donc, je dois le lui dire
avant d’y aller. Je n’ai pas d’autre rentrée
prendre action sont généralement liées à la dépendance d’argent propre. » [F24 ans Rur-PNL, Atsimo

économique des femmes vis-à-vis de l’homme. La suprématie de


l’homme fait également partie des normes ancrées dans les « Même si les femmes ont de l’argent, nous ne
mentalités et toute décision, y compris pour la santé, est conçue pouvons pas décider mais nous devons toujours
comme relevant des hommes, en particulier pour les femmes du attendre les avis de l’homme. Quand il dit qu’il
faut emmener l’enfant chez le tradipraticien, la
Sud Ouest Rural. femme est obligée de suivre ce qu’il dit » [F-
25 ans+-Rur-PL, Atsimo Andrefana]
En milieu urbain, la situation semble légèrement différente. Dans
les groupes « femmes » urbains des deux régions concernées (Sud Ouest et Sud Est), une
bonne partie des participantes affirme pouvoir décider des mesures à prendre pour leur santé
et de celle de l’enfant si le mari est absent. Leurs limites seraient cependant celles de leur
capacité financière à prendre en charge les dépenses car elles ne pourraient prendre de
décision que pour les questions qui impliquent des dépenses qu’elles peuvent elles-mêmes
assurer – avec des revenus généralement moindres que ceux de l’homme. La majorité des
femmes de ces deux régions pense cependant que leur participation au processus de prise de
décision au sein du ménage reste faible, y compris pour les questions liées à la santé, et
particulièrement dans le Sud Ouest. Elles déplorent la situation mais se sentent impuissantes à
changer la situation. La majorité des femmes hors union des deux régions auraient recours aux
parents et, en particulier, à la mère, lorsqu’un problème de santé survient. Elle serait alors la
première personne informée de la maladie et décideraient des mesures à prendre pour faire
face au problème.

Latitude des femmes à prendre une décision pour leur santé et celle de l’enfant
Dans les régions d’Alaotra Mangoro, DIANA et Analamanga, les femmes détiendraient un
certain pouvoir de décision en ce qui concerne les questions de santé. Seules des minorités au
sein des groupes femmes des trois régions affirment attendre l’homme en cas de maladie si
celui-ci est absent et si aucun moyen financier n’est disponible. La « C’est très rapide, et si le père est encore loin ou
majorité des groupes « femmes » des trois régions affirme qu’en absent, il ne faut pas lui donner tort si elle
cas d’absence du mari, elles décideraient des soins à apporter à dépense de l’argent, quelque soit le budget à la
l’enfant ou à elle-même, en utilisant les ressources disponibles ou maison, car c’est une vie que tu dois sauver, et ce
n’est pas celle d’une autre personne mais celle de
en trouvant d’autres alternatives (emprunts, vente de biens, …). ton enfant » [H-Rur-MPNL, Alaotra Mangoro]
Les groupes « hommes » affirment également ne pas avoir « Pour moi, il n’y a pas de problème, même si elle
d’objection à ce que la femme décide sur ce point. Les trois aNous emmené l’argent, il y aussi ses efforts là dedans.
l’avons cherché ensemble, je ne vois pas
groupes de ces régions considèrent que la santé de l’enfant ou de pourquoi je contesterai, et en plus elle ne l’a pas
la femme prime sur toute autre considération et qu’attendre dépensé « Tu connais
n’importe comment mais c’est pour se
à l’avance s’il y a de l’argent ou pas,
l’homme risquerait d’aggraver le problème de santé et soigner » [H-Rur- MPNL, Alaotra Mangoro]
c’est toi, la mère, qui doit gérer l’argent, et c’est toi
d’augmenter les dépenses. Selon les groupes des deux sexes, les qui dit au père s’il y en a encore ou pas, c’est toi
pères seraient même mécontents si aucune initiative n’est prise en qui le sais et non le père, car il doit te laisser
l’argent qu’il gagne» [F25 ans+- Urb-PL,
son absence. Analamanga].

« Tu essaies toujours de le convaincre et il finit par


accepter, mais s’il persiste à ne pas accepter, et
c’est rare, tu y vas quand même parce que c’est la
santé de l’enfant qui est en jeu » [F25 ans+-Rur-
PNL, DIANA]
 70
« C’est la mère qui est la première…lorsque
l’enfant est malade, l’enfant est la plupart du
temps avec elle, et elle est le premier responsable
D’autres facteurs contribuent également à renforcer la latitude des femmes à prendre une
décision sur les questions de santé : (i) la gestion du budget familial ; (ii) la reconnaissance par
l’homme de la contribution de la femme aux revenus du ménage (Alaotra Mangoro, selon les
participants hommes des GDD) ; (iii) la capacité de négociation des femmes; (iv) la conséquence
du partage des tâches dans le ménage.
Perception du changement normatif

La majorité des participantes aux GDD sont favorables à l’idée d’une plus grande
responsabilisation des hommes dans la santé des enfants : suivi rapproché de leur état de santé
et soins donnés aux enfants. Par contre, elles estiment que ce changement est utopique.
Lorsqu’elles ont été questionnées sur comment faire pour changer la situation, elles ont
répondu par des rires ou des gestes résignés. Les raisons avancées pour rendre compte de
l’impossibilité de changer la situation sont le partage des tâches dans le foyer, découlant des
rôles et responsabilités stéréotypés, et des contraintes d’ordre pratique. Pour la majorité des
groupes des deux sexes, les hommes seraient souvent absents à « C’est la mère qui remarque les détails. Comme
cause de leur travail et la femme serait plus proche de l’enfant. ceci (comme son auriculaire) et qu’est-ce qui a
changé chez mon enfant, mais l’homme ne voit pas
Leur éloignement du foyer rendrait la responsabilisation des beaucoup les choses » [F25 ans+-Urb-PL,
hommes sur la santé des enfants difficile. Analamanga]

Dans la région du Sud Ouest, la « polygamie » qui serait encore pratiquée la rendrait encore
plus difficile. Elle favoriserait la concurrence entre les femmes et limiterait de ce fait leur
capacité à exiger de la part des hommes encore plus de responsabilités vis-à-vis des enfants. Les
femmes se soumettraient au bon vouloir de l’homme et aux habitudes et aux normes qui
prévalent dans leur localité. Dans les groupes « femmes » du Sud Est, la majorité des couples ne
seraient pas mariés légalement. La fragilité de l’union réduirait également la capacité de
négociation des femmes sur toutes les questions qui touchent leur intérêt et celui des enfants. A
ceci s’ajoute l’insuffisance de modèle positif dans la région qui puisse atténuer l’appréhension
des femmes. Enfin, les participantes de la capitale trouvent ce changement impossible en raison
de leurs perceptions stéréotypées sur la capacité naturelle des hommes à s’occuper de la santé
de l’enfant.
Le point de vue des hommes varie selon les régions. Là où les hommes semblent prendre
moins de responsabilité dans le domaine de la santé (Sud Est, Sud Ouest, DIANA), ils citent des
contraintes et obstacles à la faisabilité d’un changement normatif à la place des solutions
alternatives demandées.
«Ce sont nous qui travaillons vraiment, nous
Ils évoquent leur manque de disponibilité en temps du fait de leur nous occupons de la nourriture plutôt que les
travail tout en minimisant le travail de leurs homologues féminins, femmes. Les femmes ne font que rester là
car elle n’on pas de travail. Les activités des
particulièrement dans le Sud Ouest. Une grande partie des femmes de chez nous, sont : de chercher
participants aux GDD se sent déjà impliquée dans la santé de la mère l’eau, préparer le repas, puis elles se
et de l’enfant et ne perçoivent dès lors pas la pertinence de ce reposent. Quand c’est cuit, elles mangent.
Nous les hommes, nous nous battons tous les
changement, optant pour le statu quo. Une partie du groupe de jours, nous cherchons les zébus … nous
DIANA considère la responsabilisation de la femme comme un cherchons tous les ‘moyens’ (sic) pour
honneur. trouver de quoi manger, c’est le travail des
hommes». [H-Rural, PNL, Atsimo Andrefana]
Par contre, les groupes hommes qui semblent les plus impliqués
(Alaotra Mangoro et Analamanga) sont favorables au principe. Ils proposent des formes
d’entraide et de participation de l’homme, telles que diagnostiquer l’enfant et, s’il est malade,
l’emmener au centre de santé, partager les tâches ménagères en fonction de la disponibilité de
chacun, informer la femme lorsque celle-ci a un niveau d’instruction bas. L’indisponibilité de
l’homme qui travaille à l’extérieur reste cependant un obstacle majeur pour la concrétisation
des propositions qui sont faites.

 71
Points de vue des autorités administratives et leaders traditionnels
Cette section analyse les données sur l’implication des hommes dans la santé de la mère et de
l’enfant qui ont été obtenues à partir des interviews des autorités locales et traditionnelles.
Appréciation de la situation actuelle
Les autorités administratives et leaders traditionnels reconnaissent « La femme est soumise à son mari « Par
l’existence dans leur localité respective de disparités aux dépens des exemple, lorsqu’il y a quelque chose à faire,
femmes dans le pouvoir de décision au sein du couple et dans c’est le mari qui s’y rend, et la décision du
mari, c’est la décision de la femme, c’est la
l’allocation des tâches et responsabilités pour les soins. Selon les réalité chez nous. » [Autorité administrative,
autorités interviewées dans les régions du Sud Est et du Sud Ouest, le Rural, Atsimo Atsinanana]
pouvoir de décision revient à l’homme et ce, sur tous les plans. La
femme serait contrainte de consulter l’homme avant de pouvoir
prendre action pour sa santé et celle de l’enfant, ce qui occasionnerait « Nous les hommes, nous ne toucherons pas
aux selles de l’enfant, jamais de la vie. Si la
des délais rendant compte de la mortalité maternelle et infantile élevée femme accouche, c’est toi la mère qui y va,
dans ces régions. En même temps, le fort attachement aux traditions moi, le père, je ne pourrais jamais assister à
dans ces deux régions maintient un partage stéréotypé des tâches entre un accouchement, parce que je suis un
homme ». [Leaders traditionnels, Atsimo
les femmes et les hommes. Il serait inacceptable pour la société de voir Andrefana]
l’homme donner des soins à l’enfant ou faire des tâches ménagères.
De nombreux autres facteurs contribueraient à favoriser et à maintenir cette situation, jouant
comme obstacles à l’implication effective de l’homme dans la santé de la femme et de l’enfant :
(i) la fragilité du mariage due au mariage précoce (vers 14 ans), au mariage arrangé et à la rareté
des mariages civils ; (ii) la mobilité des hommes qui travailleraient loin des régions durant des
mois, voire des années, délaissant leur femme et leurs enfants ; (iii) la polygamie qui inciterait à
la concurrence entre femmes et les placeraient dans une situation de dépendance bien que ce
soit souvent elles qui travaillent (Sud Ouest) ; (iv) le fait que les femmes n’héritent pas et n’ont
donc pas accès à la terre ni aux autres ressources, y compris le temps à consacrer à des activités
génératrices de revenus, ce qui favorise leur dépendance économique vis-à-vis de l’homme (Sud
Est).
Dans les régions d’Analamanga, Alaotra Mangoro et DIANA, les disparités relatives aux
responsabilités liées à la santé résultent également du partage des
tâches dans le ménage. L’absence du mari au cours de la journée « Regardez bien au centre de santé,
aujourd’hui c’est samedi. Toutes les mères
pour travailler comme « pourvoyeur » d’argent de la famille serait la s’assoient et ce sont les pères qui portent
raison principale qui expliquerait son manque d’implication dans la l’enfant. C’est parce que la route a été longue
santé de la mère et de l’enfant. Certain(e)s participant(e) aux GDD des et la femme est fatiguée après autant de
kilomètres, et elle emmène le panier par
groupes des deux sexes ont cependant évoqué la participation des derrière, c’est l’homme qui porte l’enfant par
hommes aux soins et au suivi de la santé de l’enfant dans leur localité. devant ». [Autorités administratives, Rural,
Alaotra Mangoro]
Position sur l’implication des hommes dans la santé de la mère et de
l’enfant
« Actuellement, les hommes et les femmes ont
Même s’ils reconnaissent qu’il existe des disparités dans le partage des droits égaux. Mais, par exemple, l’homme
du pouvoir de décision et des responsabilités en matière de santé, les ne saura pas tenir un nourrisson. C’est parce
que la façon de tenir quelque chose n’est pas
leaders communautaires, surtout traditionnels, tendent vers le statu pareille pour la femme et pour l’homme ».
quo. De manière générale, leurs perceptions sont similaires à celles [Leader traditionnel, Urbain, Atsimo
des groupes « hommes » et tendent à manifester une résistance au Andrefana]
changement : « le changement est difficile et impossible ». En effet, la majorité des leaders
approchés pense que les soins et la santé de la mère et de l’enfant est un domaine
naturellement réservé à la femme. Ils pensent également que les hommes sont déjà impliqués
dans la santé de la mère et de l’enfant, évoquant leur propre participation aux soins et dans le
suivi de la santé de l’enfant. Il s’agit notamment de la préparation du repas de l’enfant lorsque la
femme est absente ou des consignes qu’ils lui donneraient pour «Moi, je me réveille à 4h30 du matin, je suis
habitué depuis que j’étais étudiant jusqu’à
maintenant. C’est moi qui prépare le petit
déjeuner. Après, je termine les tâches
 72 ménagères et je ramène les enfants à l’école.
J’arrive à le faire parce que j’y suis déjà habitué
et on m’a élevé comme ça » [Autorité
administrative, Urbain, Analamanga].
qu’elle se rende au centre de santé en cas de maladie. Les autorités des régions d’Alaotra
Mangoro et de la capitale adhèrent au principe d’une meilleure implication de l’homme dans la
santé de la mère et de l’enfant. Certains affirment même que c’est déjà le cas dans leur foyer.
Cependant, dans les localités où les disparités sont flagrantes, des attitudes positives sont
relevées chez des leaders traditionnels, bien que façon isolée. En effet, la surcharge de travail de
la femme y est dénoncée et ouvertement désapprouvée par certains. La majorité des leaders
communautaires approuvent également le fait que la femme décide seule de l’utilisation des
ressources disponibles en cas d’urgence médicale pour éviter le retard dans les recours aux
soins, qu’ils reconnaissent comme une des principales causes de mortalité.
Suggestions pour impliquer les hommes dans la santé de la mère et de l’enfant
Les interviewés trouvent la situation difficile à changer mais ont des « Ce que je veux dire, c’est simple : ceci est
attitudes différentes par rapport aux solutions à apporter. Les leaders difficile pour moi car ce n’est pas adapté à
notre milieu. Ce n’est pas comme à
traditionnels ont tendance à baisser les bras en anticipant les Antananarivo, les hommes n’ont pas honte
résistances de la communauté sur la question. Ils se sentent de faire le marché, de porter l’enfant dans
impuissants à impulser des changements. Selon eux, ils ne peuvent ses bras, ils n’ont pas honte de… non, non,
non, jamais ils ne vont y adhérer, c’est la
prendre action car la question n’est pas de leur ressort. femme qui porte l’enfant dans ses bras »
[Leader traditionnel, Urbain, Atsimo
Les autorités administratives et certains leaders d’opinions (notables, Atsinanana]
enseignants,…) reconnaissent quant à eux que c’est un travail de
longue haleine mais font des suggestions pour faire face au problème. Les leaders
communautaires proposent des solutions basées sur la sensibilisation des hommes ou du
couple sur divers points : (i) l’importance de la place de la femme au sein du foyer et de la
communauté ; (ii) la lutte contre la polygamie en insistant sur ses conséquences sur la santé de
la femme et de l’enfant (Sud Ouest) ; (iii) les responsabilités des hommes et de la femme dans
le ménage et spécifiquement en matière de santé, en insistant sur les changements à introduire ;
(iv) les obligations des hommes, notamment leurs responsabilités économiques dans les cas où
les femmes sont seules à assurer la subsistance du ménage ; (v) les modalités pratiques des soins
à donner aux enfants, spécifiquement pour les hommes ; (iv) l’alphabétisation des hommes et
des femmes.
Les formes de sensibilisation proposées sont : (i) des séances de sensibilisation continue
notamment par des agents communautaires, afin d’ assurer un changement effectif de
comportement ; (ii) des témoignages / modèles positifs pour démontrer la faisabilité du
changement souhaité et les avantages perçus ; (iii) des saynètes afin de faire prendre conscience
aux hommes par eux-mêmes des inconvénients de la situation actuelle et pour qu’ils puissent
chercher et trouver des solutions adaptées ; (iv) des séances de sensibilisation par les agents de
santé lors des CPN qui cibleraient en même temps les femmes et les hommes ; (v) des séances
de sensibilisation lors des cérémonies de mariage civil, avec des supports comme des dépliants,
portant sur les responsabilités des hommes et des femmes au sein du ménage ; (vi) des
projections de film ou de chansons traitant spécifiquement du thème ; (vii) une campagne
dédiée à la responsabilisation de l’homme telle que « journée de l’homme qui s’occupe de
l’enfant ».
2.10. Sources et canaux de communication
La présente section traite les sources d'information auxquelles les groupes sont exposés par
rapport aux principales thématiques de l'étude, les messages qui en sont retenus et les canaux
souhaités pour le futur.
Sources d'informations actuelles et messages retenus
Les groupes recevraient des informations de trois principales sources, à savoir les sources
modernes (médias, agents de santé, agents communautaires etc.), les sources traditionnelles

 73
(tradipraticien, acoucheuses traditionnelles) ainsi que les proches et les pairs. Les sources
varient selon le sexe, la région et dans une moindre mesure, l'âge. En effet, par ordre
décroissant, les femmes tendent à être informées : (i) pour les 25 ans et plus par le biais des
séances d'éducation dans les centres de santé au cours des cpn ou des séances de vaccination de
leur enfant, de la famille proche et de l'entourage, des agents communautaires, et, par la
radio (diana, Alaotra Mangoro, capitale) ; (ii) pour les 24 ans et moins, l'ordre de la famille
proche et l'entourage, des centres de santé, est inversé. Par contre, les hommes seraient
davantage exposés à l'information fournie par les sources découlant de la stratégie avancée
(sensibilisation dans les Fokontany par les agents de santé et agents communautaires,
cinémobile, etc.), par leur conjointe – avec en appui le carnet de santé – et la famille proche et
dans une moindre mesure, par la radio (DIANA, Alaotra Mangoro, Capitale). Le groupe
« hommes » du Sud Ouest signale que le faible niveau d'instruction de la population dans leur
localité limite l'accès aux messages véhiculés par les affiches.
En isolant les informations véhiculées par les canaux modernes de communication, celles
retenues par les groupes varient quelque peu suivant les thématiques. Mais de manière
constante, elles restent focalisées sur des messages tactiques (conduite à tenir, actions attendues
des groupes cibles) : nécessité de faire de la CPN dans un centre de santé, d'équilibrer
l'alimentation de la femme enceinte, d'emmener l'enfant malade dans un centre de santé, de se
laver les mains avant les repas, ou de déparasiter régulièrement l'enfant, etc. Les informations
délivrées ou retenues semblent limitées, ne portant que peu sur le pourquoi et le comment des
conduites à tenir (cf. sous section connaissances pour chaque thématique).
Les groupes ont émis des souhaits d'avoir plus d'informations sur les maladies de la femme
enceinte et de l'enfant moins de cinq ans – avec un accent sur les mesures préconisées –
l'allaitement maternel exclusif, la vaccination, la prévention du paludisme et l'utilisation de la
moustiquaire ainsi que la diarrhée. S’agissant de l'allaitement maternel, une minorité au sein du
groupe femme d'Alaotra Mangoro a exprimé le souhait d’obtenir des explications sur la
nécessité de poursuivre l'allaitement jusqu'au bout de la deuxième année de l'enfant.
Canaux de communication souhaités
Deux principaux canaux sont suggérés par les groupes : la communication interpersonnelle par
le biais de réunions en petits groupes et la communication de masse par les ondes et ce, en
depit du fait que la majorité déclare ne pas disposer de poste de radio.
En effet, la majorité des groupes pense que les canaux de communication ne devraient pas se
présenter de manière linéaire. La communication interpersonnelle est alors présentée par les
groupes comme stratégie appropriée pour transmettre les informations à l'instar des GDD
menés au cours de l'étude. Pour ce faire, les agents de santé sont les personnes considérées
comme les sources les plus indiquées en raison de leurs connaissances et compétences
reconnues dans le domaine. Il s'agirait du médecin pour les maladies en général et de la sage-
femme en ce qui concerne la santé de la femme enceinte. La confiance que les groupes
accordent à la capacité du personnel de santé est totale.
Deux principales options sont données par les groupes pour le lieu de sensibilisation. Le centre
de santé est proposé par une bonne majorité des groupes car on peut s'y référer à tout moment
en cas de besoin. Cette alternative se ferait sous condition de la présence de leur conjointe pour
les groupes « hommes ». D'ailleurs, ces derniers souhaitent que la réunion de sensibilisation se
tienne davantage dans les Fokontany pour des raisons de proximité. Le rôle du chef Fokontany
serait incontournable puisqu'il peut mobiliser les gens à assister à la réunion, notamment par le
porte à porte. Le groupe « hommes » de DIANA a suggéré le recours au service des ONGs
locales en raison de leur meilleure connaissance du milieu. Il importe également aux groupes
ruraux que la sensibilisation se déroule le jour de marché ou en fin de la semaine, de

 74
préférence dans l'après-midi pour que les cibles aient achevés leurs activités quotidiennes. Le
respect des jours interdits serait de rigueur notamment dans la région de DIANA (jeudi et
dimanche).
Concernant la communication par la radio, à l'exception des groupes du Sud Ouest rural, tous
les groupes pensent qu'il s'agit d'un meilleur canal de communication pour s'approprier des
informations. D'ailleurs, une proportion des répondants-tes affirme avoir été exposée à des
informations transmises sur les radios (nationale et régionales). Les groupes ruraux expriment
leur préférence pour la tranche horaire de 18 heures à 20 heures qui correspondrait au
moment de repos de la famille au sein du foyer. Enfin, concernant les autres supports de
communication, les groupes insistent que les affiches sont destinées aux personnes « lettrées »,
tandis que la projection par vidéo s'avèrerait efficace.

 75
L’étude a eu pour objectif d’isoler, à partir des données CACP analysées, les tendances générales
dans les pratiques et les principaux facteurs qui les sous-tendent pour les modéliser. Elle
présente sous forme de schémas les différentes options pour le recours aux soins et met en
évidence les délais qui peuvent être rencontrés dans la pratique des comportements
recommandés par le MSPF.
3.1. CPN

L’automédication semble constituer le recours de 1ère instance pour les malaises ou maladies et,
notamment, quand se présentent des signes de danger pendant la grossesse. C’est le manque
d’efficacité du 1er recours (persistance des malaises ou signes de maladie/danger) qui détermine
le recours de 2de instance au centre de santé. Ce sont les implications de la santé de la mère sur
l’enfant à naître qui motivent ce recours de seconde instance.
L’accoucheuse traditionnelle est vue en parallèle avec l’agent de santé mais pour des prestations
différentes, à part la détection de la grossesse. La motivation principale pour consulter
l’accoucheuse traditionnelle est la qualité de son accueil et la compétence qu’on lui reconnait
pour les massages et le repositionnement du foetus.
Le non respect dans la fréquence des CPN (4 visites) serait à mettre au compte des délais
rencontrés lors de la 1ère CPN dûs à : (i) la détection de la grossesse par l’accoucheuse
traditionnelle ; (ii) l’éloignement du centre de santé (temps perdu qui pourrait être consacré aux
activités domestiques et génératrices de revenus) ; (iii) la tendance des femmes à attendre que
leur grossesse soit visible pour aller en CPN ; (iv) l’absence de malaise ou de maladies.
Dans le cas d’une première grossesse, ce serait l’influence de la mère, de la belle mère, de
l’agent de santé ou de l’accoucheuse traditionnelle qui serait déterminante dans le choix du type
de prestataire de service pour la consultation prénatale. La mère et la belle mère se basent sur
leur expérience personnelle pour recommander le type de recours. Dans le cas des grossesses
suivantes, ce serait la femme qui déciderait du type de recours sur la base de son expérience
passée (habitude prise). Le mari est toujours consulté pour le recours (AT ou CSB) parce que
détenant le pouvoir de décision au sein du ménage en tant que chef de famille et chargé
d’assumer les frais de la consultation.
Ce sont les signes de maladie qui déterminent le type de recours (AS, AT/ guérisseurs,
automédication). Lorsque les signes de maladies ne sont pas connus, le choix du recours
s’effectue sur la base du conseil de l’entourage (mère, belle-mère). Lorsque ces signes ne sont
pas nouveaux, c’est l’efficacité du recours précédent qui est déterminante (l’expérience réussie
est répétée et, dans le cas contraire, modifiée). Les groupes qui connaissent les signes de danger
priorisés par le MSPF ont tendance à aller directement au centre de santé quand ils souffrent de
maux de tête intenses et à s’automédiquer en cas d’œdème ou de pâleur (généralisée). Dans ces
deux dernier cas, ils ne recourrent au centre de santé que si l’automédication n’a pas eu d’effet.
Le traitement prescrit par l’Agent de Santé est généralement observé, sauf pour le FAF, en
raison de ses effets indésirables et, dans une mesure moindre, du mauvais goût des comprimés.
3.2. Premier contact mère enfant

 76
Deux tendances majeures se dégagent au niveau de la pratique du contact mère-enfant : (i) le
premier contact a lieu entre 15 minutes et 2 heures après la naissance, lorsque l’enfant et la
mère ont été lavés et habillés ; (ii) la seconde où l’enfant est mis nu sur la poitrine ou le ventre
de sa mère mais pendant quelques minutes seulement, le temps que l’on coupe le cordon
ombilical. Les délais rencontrés dans le premier contact mère enfant sont donc causés par les
soins préalablement donnés à la mère et à l’enfant
Le contact mère-enfant est un contact « corps à corps » et non « peau à peau ». Il est perçu
comme nécessaire pour donner de la chaleur à l’enfant perçu comme « naturellement » froid et
lui permettre de reconnaître sa mère à son odeur (ce qui est censé faciliter l’allaitement).
3.3. Colostrum et allaitement précoce

Le colostrum est administré dans la mesure où l’allaitement a habituellement lieu dans les 2
heures suivant la naissance, que la femme accouche au centre de santé ou chez l’Accoucheuse
traditionnelle. Il est le plus souvent évacué mais en quantité variable suivant la région (de
quelques gouttes à 3 tasses). C’est son aspect qui rend compte du jugement négatif qui y est
associé.
L’allaitement n’a pour ainsi dire jamais lieu dans la ½ heure suivant la naissance. Il est
quasiment toujours précédé de l’administration de fluides (eau, thé, …) en attendant la montée
laiteuse ou que la femme reprenne des forces après l’accouchement, parce que l’enfant pleure
(signal qu’il a faim), qu’on pense qu’il a besoin d’eau et qu’on ignore que la succion favorise la
montée laiteuse. Lorsque le lait est monté, il n’est administré exclusivement que si la mère
estime sa quantité suffisante. Dans le cas contraire, elle administre à l’enfant des fluides de
substitution. Les délais pour mettre l’enfant au sein peuvent prendre de 2 heures à 2 jours et
varient pour chaque enfant de la femme.
Les femmes qui allaitent l’enfant sans lui administrer de fluides au préalable ou lorsqu’elles
l’allaitent sont celles qui suivent les consignes de l’agent de santé sur l’AME. Ces consignes
peuvent être connues mais totalement ignorées.
3.4. Enregistrement des naissances

L’enregistrement des naissances pour les enfants nés dans une structure sanitaire se fait
généralement dans les délais légaux, suite aux instructions données par l’agent sanitaire qui
s’implique parfois personnellement dans la démarche. Les « petits cadeaux » que demande
l’administration pour faire enregistrer la naissance dans des délais relativement brefs constituent
cependant un déterrant. Les délais administratifs entre la demande d’enregistrement de la
naissance et la délivrance de l’acte feraient que certains parents ne vont pas le rechercher.
Les naissances en dehors d’une structure sanitaires ne semblent être que rarement enregistrées,
pour des raisons liées à : (i) l’ignorance des délais légaux et des procédures à suivre pour faire
enregistrer la naissance ; (ii) la méconnaissance de l’utilité de l’acte de naissance (pour que
l’enfant puisse exercer ses « droits ») ; (iii) l’ignorance des procédures lorsque le délai légal est
dépassé et la crainte de ces procédures dont on sait qu’elles sont très compliquées ; (iv) le
manque de temps, consacré aux activités génératrices de revenus (particulièrement parmi les
couches les plus défavorisées).
3.5. Allaitement maternel exclusif

L’AME n’est généralement pratiqué que pendant 3 à 5 mois, uniquement après l’administration
de fluides à la naissance jusqu’à la montée laiteuse, et pour autant que la femme estime qu’elle

 77
produit du lait en quantité suffisante. Dans le cas contraire, elle administre à l’enfant des fluides
de substitution. L’allaitement à volonté n’est pas pratiqué.
Le moment de l’interruption dans l’allaitement exclusif est décidé par la mère sur la base de : (i)
l’évaluation personnelle et variable du niveau de développement de l’enfant (première dent,
position assise, …) ; (ii) la perception du statut nutritionnel de la mère qui est fonction de la
quantité et qualité de son alimentation (moindre dans les couches défavorisées et
particulièrement pendant les périodes de soudure) ; (iii) les contraintes que l’AME fait peser sur
les tâches domestiques ou activités génératrices de revenus.
Les femmes qui pratiquent l’AME pendant 6 mois sont celles qui ont suivi les consultations
prénatales, ont donné le colostrum et ont pratiqué l’allaitement précoce.
3.6. Soins aux enfants malades (nouveau né et enfant de moins de 5 ans)

Les maladies des enfants de moins de 6 mois sont considérées comme très peu fréquentes
(absence de perception du risque personnel). Les signes de danger sont repérés mais minimisés
ou ignorés (absence de perception de la gravité des conséquences) parce que : (i) ; ils ne sont
pas considérés comme tels lorsque qu’ils se présentent de façon isolée (sauf la température très
élevée) ; (ii) ils ne sont pas associés à des maladies dont on sait qu’elles peuvent avoir une
conséquence fatale (paludisme, diarrhée) ; (iii) ils sont mis au compte de la pauvreté, face à
laquelle les gens se sentent impuissant.
Les nouveau-nés ne sont pas perçus comme plus fragiles et vulnérables aux maladies que les
enfants plus âgés qui ne savent pas parler. Ils sont classés dans la même catégorie et traités de la
même façon pour les soins. Lorsque ces enfants tombent malade, ils passent par trois types de
recours qui constituent chacun une étape successive dans le parcours de soin pour les nouveau-
nés malades. La séquence des recours est batie sur la reconnaissance des signes de maladies et
obéit à une logique d’économie dans les dépenses pour les soins.
Les pratiques traditionnelles constituent le recours de 1ère instance : (i) potions/tisanes dont la
recette est tirée de la tradition ; (ii) rituels pour les maladies causées par le « mauvais esprit »
(Alaotra Mangoro et Sud-ouest) ; (iii) remèdes de « grand-mères » également administrés en
même temps que les médicaments prescrits par l’agent de santé. Ces pratiques traditionnelles
sont percues comme efficaces et sans danger pour l’enfant parce que constituées à base de
plantes.
L’automédication constitue un autre recours de 1ère instance pour les maladies « simples » - les
maladies « graves » impliquant un recours immédiat au centre de santé. Les médicaments,
facilement obtenus dans les points de distribution, sont administrés à l’enfant en suivant la
presciption de l’agent de santé pour une maladie antérieure qui a présenté des signes
semblables.
Le recours au centre de santé constitue le recours de 2ème instance. Il s’agit d’un recours
d’extrême urgence et qui a généralement lieu 2 à 3 jours après l’apparition des signes de
maladie ou de danger (confusion possible). Ce délai est imposé par le manque de
cash/recherche des ressources nécessaires pour faire face aux dépenses (vente de biens/produits
agricoles, emprunt). Ce délai peut être prolongé si la maladie s’aggrave la nuit ou si le conjoint
est absent.
3.7. Prise en charge de la diarrhée

 78
C’est la fréquence plus élevée des selles et leur consistance molle ou liquide (premier et/ou
second signe de diarrhée) qui occasionnent le recours aux soins. L’ODIVA représente le premier
recours.
Les délais dans l’administration de la SRO tiennent à : (i) la confusion entre signes de diarrhée et
signes de danger ; (ii) la méconnaissance de la solution maison ; (iii) temps nécessaire pour
trouver de l’argent et aller acheter l’ODIVA ; (iv) croyance selon laquelle l’ODIVA doit être
prescrite par le médecin.
La SRO est parfois administrée en parallèle ou entre en compétition avec des remèdes locaux
réputés aussi sinon plus efficaces que l’ODIVA parce qu’arrêtant les selles dont on sait qu’elles
sont à l’origine de la perte d’eau/déshydratation de l’enfant.
Les signes de danger (état d’affaiblissement de l’enfant associé à la déshydratation, aggravation
dans la fréquence des selles ou leur consistance liquide, perte de l’appétit, persistance des signes
après le traitement, fièvre) sont perçus comme pouvant être fatals et donnent lieu, de ce fait, au
recours de 2nde instance, au centre de santé (CSB public).
Le recours de 2nde instance s’opère généralement avec un retard de 24h, pour les raisons
évoquées dans le cadre des soins aux nouveaux-nés et enfants malades (absence de
cash/recherche des ressources, disponibilité du personnel de santé). L’automédication (Cotrim
ou déparasitage) et l’administration de remèdes traditionnels sont alors appliquées pour faire
face à ces délais et constituent dès lors le second recours de fait.
Le recours aux guérisseurs ou à l’automédication est généralement en 3ème (ou 4ème instance de
fait) si le traitement prescrit par le médecin et les potions traditionnelles administrées en
parallèle n’ont pas eu d’effet. Les médecins privés sont plus rarement consultés et toujours
après avoir été au CSB.
La déshydratation aigue est interprétée dans le Sud-Ouest comme un symptôme du « hevo »,
maladie démoniaque dont le traitement ne relève pas du centre de santé mais du guérisseur.
3.8. Vaccination

Le vaccin est conçu comme prévenant ou réduisant l’intensité des maladies qui affecte l’enfant.
La protection contre les maladies et leurs conséquences (mortalité, coût du traitement)
représente le principal facteur motivationnel pour la vaccination.
Les délais dans la vaccination sont dûs au manque de connaissance sur la périodicité des
vaccins et au temps requis pour aller faire vacciner son enfant (déplacement, attente),
particulièrement pour les couches défavorisées qui doivent travailler à plein temps pour nourrir
la famille.
Les obstacles à la complétion de la série des vaccination sont : (i) l’accessibilité au centre de
santé (temps) ; (ii) la disponibilité du personnel de santé et des vaccins (temps) ; (iii) les idées
fausses sur la fonction préventive des vaccins pour d’autres maladies que celles pour lesquelles
les vaccins sont inculés (perception de l’inéfficacité des vaccins lorsque l’enfant tombe malade
de diarrhée ou de paludisme) ; (iv) les effets secondaires du vaccin (douloureux ou interprétés
comme les signes d’une maladie inoculée par le vaccin). Les rumeurs sur l’inefficacité des
vaccins ou leurs effets secondaires démotivent ceux qui n’ont pas encore été à la vaccination
pour le premier contact (effet boule de neige).
3.9. Utilisation de la moustiquaire

 79
La moustiquaire distribuée gratuitement ou achetée dans un point de distribution est
généralement disponible. Elle est habituellement utilisée de façon périodique, lors des périodes
de prolifération des moustiques et quand le conjoint ne s’y oppose pas (raisons de commodité).
L’utilisation régulière de la moustiquaire est moins courante et se fait habituellement à partir de
la première CPN (ou 4ème sinon 5ème mois) jusqu’à l’accouchement. Les croyances erronées sur les
effets toxiques du produit d’imprégnation rendent compte de sa non utilisation (ou utilisation
comme filet de pêche).
C’est la pratique des parents qui détermine l’utilisation de la moustiquaire par les enfants de
moins de 5 ans : régulière, périodique ou nulle. Les enfants en bas âge dorment généralement
avec leurs parents, en fonction de la place disponible.

 80
Allaitement précoce

Allaitement précoce
‐ directives agent de santé

DELAI
Attente montée laiteuse (2h à 12h) + administration
eau sucrée ou non/potions

DELAI Allaitement
Naissance de Récupération des forces après l’accouchement
l’enfant
(CSB / AT) DELAI éventuel
Pleurs de l’enfant (signal qu’il a faim)

DELAI
Attente du « bon » lait (lait qui n’est plus teinté par
le colostrum)

81  
Prise en charge de la diarrhée

Arrêt diarrhée

Automédication et
Constat ou remèdes CSB + continuation potion
signes de Administration fluides traditionnels + traditionnelles
danger additionnels fluides + Fluides

Continuation
Diarrhée
DELAI
• Aggravation pendant la nuit (indisponibilité du
personnel de santé) Médecin privé +
• Temps nécessaire pour se procurer l’argent fluides
pour la consultation au CSB
Automédication +
fluides

Déshydratation aigue ou “hevo” Guérisseur


dans le Sud-Ouest

82  
Vaccination DELAI
Méconnaissance de la
périodicité des vaccins Continuation de la
vaccination

Abandon vaccination
Effets secondaires • douleurs (effets secondaires)
• croyance erronée (le vaccin rend malade)

Continuation vaccination
CSB pour
vaccination Enfant tombe malade
(diarrhée, palu,…)
Abandon vaccination
• croyance erronée (le vaccin est ineffectif)
Perception de la
fonction préventive
des vaccins Abandon vaccination
• distance CSB
• indisponibilité des
agents de santé
Pas de vaccination
• rumeurs sur
l’inefficacité
des vaccins et
les effets
secondaires
• distance du
CSB

83  
Prise en charge diarrhée (SRO)

CSB si enfant de
moins de 28
jours
(1er recours)
Constat
Fréquence et Arrêt diarrhée
consistance Automédication et/ou
des selles potions traditionnelles
pour enfants de moins ODIVA + continuation
de 5ans (2nd recours) potion traditionnelles
(1er recours) censées “arrêter” les selles

DELAI
• Ignorance de la solution maison
• Temps nécessaire pour se procurer l’ODIVA
• Croyance que l’ODIVA doit être prescrit par le médecin

84  
Utilisation de la moustiquaire

Utilisée de façon continue à partir de la 1ere CPN jusqu’ à l’accouchement et pour les enfants de
moins de 5 ans

Moustiquaire Utilisation périodique pour la femme enceinte et les enfants de moins de 5 ans
disponible • Période de prolifération des moustiques
• Quand le mari ne s’y oppose pas (questions de commodité)

Pas utilisée ou utilisée comme filet de pêche


• Crainte des effets toxiques du produit d’imprégnation

85  
Recours aux soins en cas de signe de danger pendant la grossesse

Ne rien faire (attendre que ça passe)


Constat signes de
danger
Persistance Consultation mère
Automédication (1er recours) aggravation des pour le recours Recours au CSB
DELAI signes de danger (2e recours)

DELAI DELAI
Mari absent Temps nécessaire
pour se procurer
l’argent pour la
consultation

86  
Suivi de la grossesse
DELAI
• Timing et fréquence des CPN
est fonction de celui de la
1ere CPN

Consultation du Série des Accouchement


Consultation entourage Au CSB
Choix du mari pour aller au CPN pour assisté par personnel
(mère\belle mère)

Référence éventuelle
CSB en CPN suivi de la de santé formé
Constat pour 1ère grossesse recours soumis
absence de au mari pour Confirmation grossesse
règles Expérience personnelle approbation grossesse

éventuelle
Référence
pour grossesse suivante

massages Accouchement chez


Chez l’AT l’AT

DELAI
• Eloignement du centre de santé
• Absence de malaise/maladie
• Ventre encore trop « petit »

87  
Contact mère-enfant à la naissance

Coupure cordon
ombilical sur
Au CSB ventre/poitrine de la
mère (2mn)

Mère et enfant lavé et


habillé
DELAI Enfant place à côté de
Naissance sa mère
(15 mn à 2h)

Coupure cordon
Chez l’AT ombilical sur table DELAI
d’accouchement (Jusqu’à plus de 24h)
- Pas de lit disponible pour
la mère

88  
Enregistrement des naissances

Récupération de l’acte de
naissance

Directives données Enregistrement de


par l’agent naissance dans les
Au CSB
sanitaire délais
Non récupération de l’acte de
naissance

DELAIS
• Intervales de temps trop long entre la demande d’enregistrement et la
récupération de l’acte
Naissance
• Petits “cadeaux” à faire a l’administration pour hâter la procédure
de
L’enfant

Pas d’enregistrement
• Ignorance des procédures

Constat de la naissance par le chef de Fokontany Déclaration de la naissance par le chef de


Chez l’AT Fokontany
(expérimental)

DELAIS Pas d’enregistrement


• Ignorance des délais légaux • Méconnaissance et crainte des procédures
• Manque de temps (AGR) compliquées

89  
Comportement type en cas de maladie du bébé ‘qui ne sait pas encore parler’

Argent disponible

Recherche d’argent
- Rationnel : l’enfant a besoin
de soins et les médicaments Recherche de soins au
sont à acheter. CSB ou chez Tradi Achat de médicaments
- Action : vente de produit - Rationnel : choix du CSB ou - CSB
Un signe de agricole ou d’élevage (en du Tradi selon le type de - Pharmacie/Epicerie
maladie apparaît demandant l’autorisation des maladie perçue. - Chez les Sœurs
parents du mari si celui-ci est - Action : emmener l’enfant - Recette maison
absent) ; recherche de petits chez le prestataire.
boulots ; emprunt.

Temps d’attente
- Rationnel : attendre que le jour
se lève ou que lundi Arrive.
- Action : automédication, Argent disponible
recette maison, observation.

90  
Comportement type en cas de maladie du bébé ‘qui sait déjà parler’

Temps d’observation
- Rationnel : Peut-être que ça va
s’estomper et qu’on n’aura pas à
dépenser de l’argent.
- Action : automédication, Argent disponible
recette maison.

Recherche d’argent
- Rationnel : l’enfant a besoin
de soins et les médicaments Recherche de soins au
sont à acheter. CSB ou chez Tradi Achat de médicaments
- Action : vente de produit - Rationnel : choix du CSB ou - CSB
Un signe de agricole ou d’élevage (en du Tradi selon le type de - Pharmacie/Epicerie
maladie apparaît demandant l’autorisation des maladie perçue. - Chez les Sœurs
parents du mari si celui-ci est - Action : emmener l’enfant - Recette maison
absent) ; recherche de petits chez le prestataire.
boulots ; emprunt.

Temps d’attente
- Rationnel : attendre que le jour
se lève ou que lundi Arrive.
- Action : automédication, Argent disponible
recette maison, observation.

91  
Les différentes alternatives

Etat de santé/Pathologie

Automédication Médecine moderne Médecine traditionnelle

Ne rien faire Accoucheuse


traditionnelle
Recette grand-mère
(‘pratique populaire’)
Guérisseur
Médicaments autoprescrits traditionnel

Médicaments conseillés par un tiers

Médicaments conseillés par le vendeur

Structure Publique Structure privée

Centre de Santé de Base


(CSB 1-2) Cabinet privé

Agent de santé en privé


Service spécialisé dans le Centre
Hospitalier de Référence
(District ; Région)
Dispensaire/Hôpital confessionnel

Service spécialisé dans le Centre Hospitalier Dispensaire/Hôpital non confessionnel


de Référence (National)

 92
Ce chapitre comprend trois sections. La première présente les conclusions qui peuvent être
tirées de l’analyse des données en termes d’impact des variables sur les CACP. La seconde, les
conclusions générales et la troisième, les recommandations générales.
4.1. Impact des variables sur les CACP

Les variables prises en compte dans la collecte et l’analyse des données sont : la région, le sexe,
l’âge, la résidence, le statut socio-économique et le niveau d’instruction.
La région semble être la variable qui a le plus d’influence sur les connaissances, attitudes,
croyances et pratiques des groupes et ce, pour deux raisons : (i) l’accès à l’information qui
semble être fonction de la concentration des interventions dans certaines régions, par exemple,
à Alaotra Mangoro et DIANA ; (ii) le poids des normes et traditions qui rendent compte
d’attitudes et pratiques contraires à celles recommandées par le MSPF, par exemple, dans le
Sud-est et surtout, le Sud-ouest.
Le sexe rend également compte de différences notables entre les CACP et ce, dans toutes les
régions, et pour deux raisons : (i) l’information sur les pratiques de soins cible les femmes
plutôt que les hommes ; ainsi, les hommes d’Alaotra Mangoro et de DIANA qui semblent avoir
été davantage exposés à l’information semblent avoir plus de connaissances que leurs pairs des
autres régions ; (ii) les connaissances des pratiques de soins sont basées sur l’expérience
personnelle et la norme assigne la responsabilité des soins aux femmes et non aux hommes.
Le sexe se combine parfois avec la région pour expliquer un niveau de connaissance
paradoxalement plus élevé chez les hommes que chez les femmes sur certains thèmes, qui
s’expliquerait par une plus grande attention que les femmes aux messages diffusés par les media
de masse ou dans le cadre des séances de sensibilisation, les femmes étant davantage
préoccupées par leurs multiples tâches quotidiennes.
L’âge joue également un rôle chez les femmes, dans toutes les régions, dans la mesure où
l’expérience personnelle est fonction du nombre d’enfants que les femmes ont : lorsqu’il s’agit
d’une première grossesse ou d’un premier enfant, elles ont tendance à prendre l’avis de leur
entourage qui les conseillera en fonction de sa propre expérience personnelle.
Le niveau d’instruction ne semble pas avoir d’influence notable sur les CACP. Les lettrés et non
lettrés ont en effet accès aux mêmes sources d’information, exception faite des supports écrits
qui ne semblent pas faire une différence majeure.
La variable « résidence » semble avoir peu d’impact sur les CACP, l’étude s’étant focalisée sur
des zones rurales accessibles et donc, comme pour les zones urbaines, proche des services
(dont la disponibilité génère par elle-même une demande) et plus exposées à l’information que
les zones enclavées. Les zones rurales sont cependant plus marquées par les croyances (par
exemple, sorcellerie et possession démoniaque) et les idées fausses sur les causes des maladies,
ce qui semble traduire une information insuffisante par rapport aux besoins.

 93
Le statut socio-économique a une influence que sur la capacité des groupes à faire face aux
dépenses associées aux différentes pratiques et sur l’alimentation de la femme enceinte et
allaitante ainsi que de l’enfant. Les coûts considérés comme aborables pour les soins de santé
varient en fonction de la couche socio-économique et les périodes de soudure affectent
davantage les plus pauvres sur le plan de l’alimentation et des resources disponibles pour faire
face aux dépenses de santé.
4.2. Conclusions générales

1. Dans leur globalité, les pratiques actuelles des groupes cibles apparaissent encore assez
éloignées loin de celles promues par le MSPF-PS. Cependant, prises séparément, certaines
sont perfectibles tandis que d’autres semblent plus résistantes au changement. Quelques
pratiques promues constituent des nouveautés, même dans le langage courant, y compris
dans les centres de santé.
Les pratiques perfectibles

2. La fréquentation des centres de santé, l’allaitement précoce, l’administration du colostrum,


la vaccination, les soins du cordon ombilical, le traitement de la diarrhée et l’enregistrement
de naissance sont des pratiques qui présentent des insuffisances qui peuvent être
relativement facilement corrigées au vu de la prédisposition des groupes à les adopter et du
type de contraintes auxquelles ils font face pour les réaliser. Ces corrections pourraient se
faire au moyen d’une communication améliorée et renforcée et, parfois aussi, avec des
mesures d’accompagnement mieux ciblées.
3. La fréquentation des centres de santé concerne aussi bien les femmes enceintes que les
enfants de moins de cinq ans. Elle n’est cependant pas toujours systématique et connaît des
délais qui paraissent inévitables vu les conditions socioéconomiques de la majorité de la
population, qui rendent compte des pratiques d’automédication, courantes. En effet, la
distance par rapport au centre de santé et la méconnaissance des signes de danger sont
moins déterminants dans le timing du recours aux soins que le temps requis pour trouver
l’argent destiné aux soins et ce, pour les couches sociales pauvres et moins pauvres en
milieu rural et urbain. C’est dire que la communication doit être accompagnée de mesures
permettant de renforcer l’accessibilité financière des centres de santé pour les soins
d’urgence.
4. La viabilité du fœtus et la prévention des problèmes lors de l’accouchement constituent les
principaux facteurs de motivation pour le recours à la CPN. L’absence de malaise ou de
maladie, interprétée comme le signe d’une grossesse sans complication devient alors, pour
des femmes enceintes, une excuse pour ne retarder le 1er timing de la visite, réduisant ainsi
le nombre des visites en consultation prénatales subséquentes, et pour ne pas accoucher
avec l’aide d’un personnel de santé qualifié. Les informations dispensées ont déjà créé une
attitude positive vis-à-vis de la CPN et cette pratique fait maintenant partie des habitudes.
Elles doivent être complétées et précisées de façon à ce que les femmes enceintes et leur
conjoint prennent conscience que l’assurance qu’ils recherchent en fréquentant la CPN ne
peut leur être fournie que si la périodicité et le nombre prescrit des consultations sont
observés et en instant sur le fait que tout accouchement comporte un risque qui ne peut être
géré que par un personnel de santé qualifié.
5. Les femmes enceintes sont généralement enclines à se conformer aux prescriptions de
l’agent de santé, ne s’y dérogeant qu’en cas d’effets indésirables perçus, ce qui rend compte
de la non observance du FAF. Cependant, les soins et les informations (en termes de
suffisance) qu’elles reçoivent dans les centres de santé semblent varier selon le site et l’agent

 94
de santé et les femmes enceintes ont tendance à interprêter l’information incomplète qui
leur est fournie, ce qui est source de désinformation et de rumeur. L’harmonisation des
soins et des informations relatifs aux CPN représente un moyen de combattre ces dernières.
6. La précocité de l’allaitement est davantage tributaire des délais pris par les prestataires pour
remettre le bébé à sa mère – ces délais étant plus courts chez l’Accoucheuse Traditionnelle
et dans les centres de santé ruraux (de demi à deux heures) que dans les centres de santé
urbains (pouvant aller jusqu’à 24 heures) – et des délais de la première montée laiteuse,
variables selon l’état de la femme. Lorsqu’elle a du lait, la mère ne retarde pas le moment
de la première tétée sauf si elle se sent encore trop fatiguée pour donner le sein. De ce fait,
c’est au niveau des centres de santé qu’il y a lieu de prendre action pour un allaitement
précoce. Les Accoucheuses Traditionnelles peuvent également être mobilisées pour le
favoriser en expliquant que la montée du lait est favorisée par la succion de l’enfant.
7. L’administration du colostrum est unanime si l’on considère que « le colostrum se
transforme en lait mature dans les 3 à 14 jours qui suivent l’accouchement »13. En effet, la
pratique majoritaire consiste à jetter soit les premières gouttes, soit une quantité plus
importante, jusqu’à ce que le lait prenne un aspect mature, et à allaiter l’enfant dans les 2
heures suivant la naissance. Mais le « liquide visqueux de couleur jaunâtre » est
généralement évacué à cause des croyances14 qui y sont attachées. Les corrections dans cette
pratique pourraient relever avantageusement de la communication qui peut référer au fait
que « le créateur de l’être humain qui fait bien les choses, ne mettrait pas dans le sein de la
femme des choses mauvaises qui nuisent à la santé du bébé ». Le lait maternel est en effet
conçu comme un don de Dieu et l’aliment naturel par excellence pour l’enfant. Il devrait
également être relativement aisé de faire comprendre au groupe-cibles que l’aspect du
colostrum tient à toutes les bonnes choses qu’il contient pour fortifier l’enfant, le rendre
plus résistant contre les maladies, et que contrairement aux croyances, il est digeste et ne
provoque pas la diarrhée.
8. La diarrhée des enfants fait peur à leurs parents à cause de son évolution rapide et ses
conséquences fatales. Ces derniers la traitent, de ce fait, aussi rapidement que possible en
emmenant l’enfant malade au centre de santé, mais généralement, comme pour les autres
maladies, en confondant signes de maladie avec signes de danger et après avoir recourru à
l’automédication, avec toutes les limitations que leur impose leur degré de connaissance
limité sur la façon de soigner l’enfant malade. Une information qui fait la distinction entre
les signes de maladie et de danger, en précisant dans chaque cas le type de recours
préconisé est donc requise. Les soins d’urgence efficaces à domicile ne nécessitant pas l’avis
préalable de l’agent de santé, y compris l’administration de l’ODIVA, sont à vulgariser avec
encore plus de détermination.
9. Les soins du cordon ombilical par les Accoucheuses Traditionnelles semblent consister à
bander le ventre de l’enfant plutôt qu’à recommander à la mère de laisser la plaie sécher en
la désinfectant journellement avec de l’eau bouillie mais la pratique adéquate n’a pas été
promue chez ces dernières. Elles sont donc une cible privilégiée pour la promotion de la
pratique recommandée et doit s’accompagner d’information sur les mesures préconisées en
cas d’infection, généralement banalisées.
10. L’enregistrement de naissance dans les délais légaux est une pratique perçue comme tout-à-
fait positive mais semble être fonction de l’accouchement dans un centre de santé. Il

13
In OMS Bulletin : Supplément Vol. 67 1989, p. 26.
14
Ces croyances sont : la seule succion du bébé n’arrive pas à le faire sortir à cause de sa viscosité ; c’est du mauvais lait ; il est de goût
fade ; il provoque la diarrhée chez le bébé ; il est indigeste …

 95
pourrait être amélioré par une meilleure information sur les délais et démarches à suivre et
en mobilisant les chefs de fokontany et les accoucheuses traditionnelles à pousser les
parents d’enfant né hors centre de santé à faire enregistrer la naissance de ce dernier.
11. La perception, par les groupes cibles de l’étude, de la prévalence élevée de mortalité
infantile liée à la rougeole dans leur région, donne à penser que le dernier et 5è contact n’a
pas lieu pour une grande partie des parents, même s’ils s’excluent de ces derniers.
L’observance de la série complète des contacts pourrait être promue au moyen du
témoignage des parents ‘modèles’ et en diffusant des informations complètes sur les
maladies que la vaccination permet de prévenir ou dont elle réduit l’intensité, dans la
mesure où elles ne sont pas connues et, de ce fait, généralisées à l’ensemble des maladies, y
compris la diarrhée et le paludisme, ce qui peut faire obstacle à l’adoption des pratiques
préventives recommandées pour ces maladies.
12. L’utilisation de la moustiquaire est une pratique considérée comme nouvelle et qui de l’avis
même des groupes, peut rentrer dans les habitudes si elle fait l’objet de campagnes de
sensibilisation soutenues et répétées mais ces dernières doivent veiller à balayer les craintes
sur les effets toxiques du produit d’imprégnation.
Pratiques plus résistantes au changement

13. Les pratiques de l’allaitement maternel exclusif, de l’accouchement dans un centre de santé
et du lavage des mains avec du savon aux moments critiques mettront sans doute plus de
temps pour être effectives. Les obstacles y afférents les plus coriaces sont d’ordre culturel et
pratiques.
14. L’allaitement exclusif pendant 6 mois est une pratique relativement isolée. L’administration
de liquide à la naissance et l’arrêt de l’allaitement exclusif vers le 4ème ou 5ème mois sont la
règle. Les motifs les plus couramment invoqués sont l’insuffisance (en quantité/qualité) du
lait maternel et le besoin en eau/nourriture du bébé qui a les mêmes besoins qu’un être
humain. La communication sur l’allaitement doit donner des explications qui font
correspondre le stade d’évolution naturelle de l’être humain - soit bébé, enfant, adulte – et
son mode d’alimentation : « le bébé sait naturellement sucer le lait de sa mère, parce que ce
lait, et pas d’autre, est l’alimentation appropriée et suffisante qui lui est destinée ; cette
alimentation changera au fur et à mesure qu’il grandira ».
15. Cependant, il y a lieu de trouver également des réponses plausibles/crédibles aux situations
réelles évoquées par les femmes et les hommes et qui déterminent les limites de la
promotion de l’allaitement maternel exclusif. Ce sont l’insuffisance de la quantité de leur
lait en cas de sous alimentation ou de fatigue ou de maladie et l’impossibilité pour elles
d’emmener tout le temps leur bébé sur leur lieu de travail.
16. L’accouchement dans les centres de santé est un choix fait par les intéressées et leur
partenaire pour les avantages certains qu’ils y recherchent, plus particulièrement la sécurité
de l’opération et accessoirement l’acte de naissance et autres incitations. Mais d’autres
commodités et facilités, en plus de l’habitude, les attirent également vers les accoucheuses
traditionnelles, dont la proximité, les moindre frais et la discrétion (l’état des fournitures et
le type de nourriture apportées ne sont pas vus par d’autres personnes que la famille). La
balance entre les motivations respectives pour les deux choix a peut perdurer jusqu’à une
meilleure implantation des centres de santé pour être plus proches géographiquement des
groupes cibles.

 96
17. Le lavage des mains est une pratique qui ne semble pas faire partie des réflexes, l’utilisation
du savon le serait encore moins faute d’en disposer. Sa systématisation reposera sur une
stratégie innovante visant à introduire progressivement une habitude dans les localités où
l’eau est accessible.
Pratiques inconnues

18. La méthode kangourou n’est pas connue, même par le personnel médical. La
communication y afférente doit préciser les avantages comparatifs de la méthode kangourou
par rapport à la manière traditionnelle de garder le bébé et la mère au chaud, qui est
culturellement ancrée, et lever les appréhensions sur les risques qu’ont le bébé et la mère
d’attraper froid par l’application de cette nouvelle méthode.
19. La nécessité de faire soigner par le personnel médical toutes les maladies du nouveau-né ne
semble pas être perçue par les groupes cibles. En effet, les signes de maladie retrouvés chez
les nouveaux-nés tendent à être considérés comme si habituels qu’ils ne déclenchent pas de
réaction de la part des parents. L’idée qu’un nouveau-né puisse contracter une maladie est
difficile à concevoir par les groupes cibles, les rendant généralement peu méfiants à l’égard
de ces signes. La communication devra mettre un accent particulier sur les maladies du
nouveau né et le recours aux soins en faisant valoir sa fragilité et en créant une nouvelle
« catégorie » parmi les nourissons : les enfants de moins de 28jours sont considérés et traités
comme les enfants plus âgés qui ne savent pas encore parler.
20. Quoiqu’il en soit, les mères sont, en général, sensibles aux conseils de leur mère/belle-mère
ou de leur partenaire ou de l’accoucheuse traditionnelle chez qui elles vont en parallèle
pour le massage. Ces personnes influentes pourront devenir encore plus efficaces si elles
recevaient les informations correctes et suffisantes sur les CPN et les soins néo natals, y
compris les comportements promus pour la santé de la mère et de l’enfant.
Leçons tirées

21. Les groupes cibles sont sensibles aux informations qu’ils reçoivent sur la santé, notamment
celle de la mère et de l’enfant et ont particulièrement confiance en le personnel de santé qui
diffuse ces informations. Le passage à la mise en pratique semble cependant dépendre non
seulement de leur connaissance mais de leur appréciation du réalisme, de la faisabilité des
recommandations données. Ils se réfèrent surtout à la concordance qui peut exister entre
ces dernières et leurs croyances – qui leur tiennent parfois lieu de connaissance -, leurs
coutumes – qui peuvent aller ou non dans le sens de la pratique recommandée - et les
moyens à leur disposition pour les appliquer, qui représentent un facteur déterminant.
22. Les croyances qui vont à l’encontre des messages promotionnels se rapportent à
l’imputation à la sorcellerie et à la possession démoniaque des formes de complication
(convulsion, coma, torpeur, œdème, etc.) de certaines maladies (diarrhée, paludisme,
malnutrition, etc.). Elles contribuent à retarder ou à renoncer le/au recours au centre de
santé. La collaboration avec les guérisseurs traditionnels semble ici pertinente.
23. Le caractère contradictoire des coutumes relatives à l’accouchement chez une accoucheuse
traditionnelle et la division sexuelle des tâches qui donne la primauté des décisions à
l’homme tout en minimisant son implication dans la santé de la femme enceinte et de
l’enfant, constitue un obstacle à l’accouchement assisté par un personnel de santé et au au
recours immédiat au centre de santé en cas de maladie. Dans les régions où ces coutumes
sont particulièrement vivaces, des discussions sur la collaboration entre agent de santé et
accouceuse traditionnelle et sur le changement normatif avec les autorités traditionnelles,

 97
administratives et autres parties prenantes (universités, notables, etc.) méritent d’être
intégrées dans la communication sur la santé à titre de mesures d’accompagnement.
24. L’écart entre les exigences des pratiques promues et les moyens dont disposent les groupes
cibles constitue un frein à la mise en application de celles-ci. L’alimentation de la femme
enceinte et allaitante – sortant de l’ordinaire par rapport aux habitudes des groupes cibles –
et la disponibilité de cash pour les soins semblent constituer des contraintes majeures.
Les défis à relever

Les défis à relever sont les suivants :


25. Démentir les croyances afin d’améliorer l’observance des soins et augmenter la recherche
de soins auprès du personnel médical ; des efforts importants gagneraient à être investis
dans la communication sur cet aspect.
26. Une plus grande implication des hommes et un plus grand « empowerment » des femmes
afin d’améliorer la prise en charge, au sein du ménage, de la santé de la mère et de l’enfant ;
ceci implique de cibler les leaders traditionnels et autres « gardiens des coutumes » dans les
actions à mener.
27. L’uniformisation des services et des informations fournis par les centres de santé dans
toutes les régions afin de limiter la désinformation et les rumeurs créées par les usagers.
28. La coordination/convergence des interventions des différents intervenants pour réduire les
délais de recherche de soins (e.g : caisse sociale pour la santé ; alimentation des femmes
accouchées pendant la période soudure ; …).
29. La réduction de la réticence de certains agents de santé à collaborer avec les guérisseurs
traditionnels qui sont incontournables pour une partie importante de la population.
4.3. Recommandations générales

Les recommandations suivantes proposent des axes généraux de communication pour la


promotion de l’ensemble des pratiques préconisées par le MSPF. La partie II du rapport
« Implications des CACP pour la communication sur les soins de la femme enceinte et de
l’enfant » inclut des recommandations opérationnelles pour la communication spécifiques à
chaque pratique.
1. Les efforts de promotion de la fréquentation des centres de santé devraient être compagnés
de la révision du contenu des messages promotionnels à rassembler en un manuel du type
“Savoir pour sauver” adapté aux besoins en information des groupes-cibles définis par
l’analyse CACP, à tester quantitativement pour offrir une base statistiquement representative
à la planification en communication. Ce manuel “Savoir pour sauver” doit être développé
en suivant le cycle de vie pour assurer l’intégration des différentes pratiques.

2. Vu leur crédibilité, basée sur la technicité que les groupes-cibles leur reconnaissent, les
agents sanitaires doivent être considérés comme une cible prioritaire de la communication
pour constituer des sources d’informations complètes et standardisées sur le nom, la nature,
les bénéfices attendus, les effets indésirables éventuels et les conséquences de la non-
observance du traitement pour chaque type de soin et medicament pour la femme enceinte
et l’enfant.

3. La communication doit cibler les accoucheuses traditionnelles comme source

 98
d’information, étant donné leur influence majeure sur la façon de gérer la 1ère grossesse (la
femme a davantage tendance à se baser sur son expérience pour les grossesses suivantes) et
donnent les premiers conseils sur les soins aux enfants (contact mère-enfant, soins du
cordon ombilical, administration du colostrum, allaitement précoce et exclusif, AME, soins
au nouveau né malade).

4. Les femmes plus âgées doivent être ciblées en tant que sources d’information pour les
femmes plus jeunes, dans la mesure où celles-ci suivent leurs conseils pour le suivi d’une
première grossesse et de la santé de leur premier enfant et peuvent les influencer dans le
sens d’un rejet du recours préconisé par le MSPF (e.g. en cas d’inefficacité perçue de la
vaccination ou d’effets secondaires). L’éducation des enfants à l’école constitue une mesure
à plus long terme pour promouvoir les comportements recommandés.

5. Les cibles primaires de la communication doivent inclure non seulement les femmes mais
les hommes, dans la mesure où ce sont eux qui décident en dernière instance du recours
aux soins (pour éviter les délais) et assurer une plus grande participation de leur part dans le
suivi de la grossesse et des soins aux enfants en positionnant les hommes qui sont déjà
impliqués comme des modèles positifs (rôle modèle).

6. Les leaders administratifs et traditionnels représentent une cible privilégiée du plaidoyer


pour un changement normatif (participation de la femme dans la prise de decision,
participation de l’homme dans le suivi de la grossesse et de la santé de l’enfant, alimentation
de la femme enceinte et allaitante). Ils peuvent également être directement impliqués dans
la mise en oeuvre des pratiques (e.g. enregistrement des naissances, mobilisation sociale et
séances de sensibilisation).

7. Les pratiques qui requièrent une nouvelle “habitude” (e.g, utilisation de la moustiquaire
imprégnée, lavage des mains aux moments critiques, allaitement à la demande), la création
d’une nouvelle norme (e.g. culture de la prévention vs. traitement des maladies, recours
immediat au centre de santé vs automédication et délais) ou qui sont réfractaires au
changement nécessitent l’organisation de campagnes de communication intenses et répétées
à intervales réguliers en plus de leur intégration dans les contenus des séances de conseil ou
sensibilisation par les agents de santé et relais communautaires.

8. La communication doit promouvoir des comportements faisables dans le contexte local


sous peine de démotiver les groupes-cibles. Les obstacles rencontrés dans la mise en
pratique de l’hygiène des mains (manque d’eau) ou l’alimentation de la femme enceinte ou
allaitante (manque de resources financières/période de soudure) plaident pour une
décentralisation de la planification de la communication et la mise en place de mesures
d’accompagnement (e.g. convergence des interventions du PAM pour la distribution de vivre
et la promotion de l’alimentation adéquate pour la femme enceinte et allaitante) qui
peuvent également être définies en consultant les bénéficiaires (e.g, modalités de l’AME
tenant compte de l’emploi du temps des femmes allaitantes).

9. Etant donné le caractère empirique et donc, parcellaire, des connaissances des groupes-
cibles sur les soins de la femme enceinte et de l’enfant, la communication doit assurer la
diffusion d’informations complètes et précises sur les pratiques de soins préconisées par le
MSPF.

10. Les attitudes des groupes-cibles face aux mesures préventives ou curatives sont souvent
fonction de leur croyance en l’efficacité de la solution promue pour prévenir ou guérir la
maladie, parfois elles-mêmes fonction de la croyance en la cause de la maladie. La

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communication doit donc faire le lien entre causes de la maladie et mesures préventives
préconisées.

11. La communication doit également faire le lien entre conséquences de la maladie et mesures
préventives ou curatives préconisées. Ceci devrait permettre de renforcer la perception de
la gravité des conséquences qui, avec le souci de la santé et du bien être de la femme
enceinte, du foetus et de l’enfant – constituent des elements motivationnels puissants pour
faire adopter les pratiques préconisées.

12. L’approche des maladies par les groupes cibles étant encore très orientée vers l’aspect
curatif, préféré à l’aspect préventif, les campagnes d’informations sur les mesures
préventives doivent également inclure des recommandations sur les mesures curatives qui
sont mal connues, en insistant particulièrement sur les measures d’urgence à domicile.

13. La lutte contre l’automédication doit tenir compte des mesures de soins à domicile
promues par les programmes (e.g. Palustop) et présenter les différents recours préconisées
(à domicile et au centre de santé) en créant une nouvelle norme : celle du recours immédiat
au centre de santé en cas de maladie pour les enfants de moins de 28 jours et en cas de
signe de danger pour la femme enceinte et les enfants de moins de 5 ans.

14. Le coût (en temps et monétaire) représentant un désavantage majeur associé à la recherche
des soins préconisés par le MSPF, la communication peut les réduire en présentant les
avantages des pratiques promues et en mettant en balance le coût de la pratique curative ou
préventive avec celui – plus élevé - du traitement de la maladie ou de son aggravation et de
la conséquence – parfois fatale – de la maladie sur l’enfant (création d’un “trade off”
positif).

15. Dans la mesure où les groupes-cibles reconnaissent la prévalence de la maladie sur la base
du nombre de cas connus, la communication doit utiliser la fréquence des cas de morbidité
ou mortalité dans la localité/district comme « incidents critiques » pour créer une
personnalisation du risque pour les maladies affectant la femme enceinte et l’enfant.

16. Les croyances erronées et idées fausses qui sont partagées par les groupes enquêtés font
l’objet de recommendations opérationnelles pour chaque pratique. Celles qui sont
spécifiques aux régions doivent être investiguées au niveau décentralisé pour permettre de
développer des contre-arguments avec les sources d’information les plus appropriées pour
les diffuser.

17. La confusion qui existe parfois entre signes de maladie et signes de danger doit être
éliminée, dans la mesure où elle est source de délais dans le recours aux soins, qui peuvent
avoir des conséquences fatales pour la femme enceinte et pour l’enfant.

18. L’étude n’a pas porté sur la disponibilité des services mais les opinions des participants aux
GDD sur les obstacles à l’adoption des comportements promus font ressortir les problèmes
liés à l’accessibilité et la disponibilité des services et commodités et à la qualité de l’acceuil
dans les centres de santé, qui jouent un rôle majeur dans le choix du type de recours et ont
une influence sur le suivi des prestations qui rentrent dans le cadre d’une série de contacts
(CPN, vaccination). La qualité de l’accueil devrait faire l’objet d’une étude pour être définie
du point de vue des participants.

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