Les Entretiens D'épictète (Nouvelle Édition) (... ) Épictète (0050 - 0130) bpt6k5683545w PDF
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ENTRETIENS D'ÉPIflTÈTE
MXUKILLIS
Vgg^ÂR AMUEN
TRADUCTION NOUVELLE KT COMPLÈTE
V. COUKDAVEAUX
Professeur à la Faculté îles Lettres do Douai
NOUVELLE ÉDITION
PARIS
LIBRAIRIE ACADÉMIQUE
PERRIN ET O, LIBRAIRES-ÉDITEURS
3S, QUAI DES CnANDS-.VLCUSTIXJ, 35
1908
Tous droits de traduction et de reproduction réserves pour tous pajs.
Nous reproduisons, presque sans changements, la
préface que nous écrivions il y a vingt ans en tête do lu
première édition do ce livre. Quelques progrès que le
Positivisme- ait pu faire depuis dans l'opinion publi-
que, et non sans des raisons sérieuses, nous croyons
aujourd'hui comme alors que les doctrines après tout
les plus satisfaisantes pour l'esprit, comme elles lo
sont bien évidemment pour le coeur, sont encore celles
qui permettent à ia raison humaine d'entrevoir au-
dessus du monde matériel une réalité supérieure, et
qui, au-delà do cette vie, entr'ouvrent à l'homme de
bien au moins d'autres horizons que ceux d'ici-bas. Et
aujounL hui comme alors notre plus grand regret, notre
seul presque même, à l'endroit du Stoïcisme d'Epictèto'
est qu'à sa foi profonde en Dieu il n'ait pas joint polir
l'honnête homme ces espérances d'au delà de la tombe.
Par ces deux côtés seulement, par cette foi en Dieu
i nie à celte négation de quoi que ce soit au delà de
cette vie, la doctrine d'Epictète aujourd'hui a comme
un renouveau d'actualité, vu qu'elle répond par l'une
et par l'autre aux plus vives préoccupations de notre
époque ; et c'est sur ce point particulièrement que
nous voudrions ici attirer l'attention.
Des hommes, qui appartiennent aux partis politi-
ques ou religieux les plus divers, se trouvent d'accordé
aujourd'hui pour affirmer qu'il est impossible d'éta-
blir une morale sans la croyance aux peines et auxr
-VI PRÉFACE DE L\ SECOXDI: ÉDITION.
récompenses d'une autre vie. Eli bien, voici un philo-
sophe qui n'a cru ni à ces peines nia ces récompenses,
et nul n'a clé plus attaché que lui au devoir; nul n'y a
plus adhéré de toute la force do sa conscience et de sa
raison ; nul ne l'a proclamé plus haut, et n'a fait plus
que lui aux hommes une obligation stricte de la justice
et du dévouement. Il n'était pas le premier à marcher
dans cette voie, cela est vrai. Socrate, dans Xénophon
au moins, lui en avait donné l'exemple {Antbthènc et
Diogènô avaient imité leur maître; Platon lui-même
l'avait suivi, dans les moments au moins où son- ima-
gination ne l'emportait pas sur les traces du Pythago-
rismc'ct des tnystères', Aristoto avait reproduit la
même doctrine d'une façon plus catégorique et plus
nette ; les premiers Stoïciens avaient fait comme lui ;
Cicéron avait enfin hautement reproduit leurs idées
dans le De Ipgibus et dans le De qfficiis, si bien qu'il "
n'est pas d'assertion à laquello dans l'antiquité, pour ne
rien dire des temps modernes, l'histoire ait donné plus
de démentis qu'à cette affirmation de nos moralistes à
courte vue. Mais de tous ces démentis nous n'en con-
naissons pas de plus éclatant que celui d'Epictète dans
SC9 Entretiens, si ce n'est peut-être celui do Marc-Aii-
rele dans ses Pensées cinquante ans plus tard ; et nous
ne saurions 'trop engager tous les gens qui pensent,
tous les gens sérieux et de bonne foi, à peser la force
do ces deux exemples. Comment persister à soutenir
ci t'dce d'eux que, si nous donnons jamais trois sols à
un pauvre, ce n'est que dans l'espérance d'en recevoir
six là-haut, ou que, si nous ne volons pas à l'occasion
le foulard de notre voisin, ce n'est que par la crainte
des gendarmes dans une autre vie ?
.
Vis-à-vis du Positivisme, à son tour, la situation
d'Epictète est p" eût-être meilleure encore. Nous cbm>
prenbns certes autant que qui que ce soit les raisons
PRÉFACE DE LA SECONDE ÉDITION ^ Vïj|8
d'être du Positivisme. En face de toutes lès difllculté^J
dont se hérissent les problèmes métaphysiques; e|l*|
face do l'impuissance bien constatée do toutes les doc-jjj
tri^s qui ont prétendu dépasser les phénomènes partir "
atteindre la cause, et remonter jusque la source prè-^
mière pour nous montrer comment tout en découle-}"*
en face des contradictions, des pétitions de principe^ ;
des non-sens, auxquels chacune d'elles a abouti, nous*;
comprenons ceux qui viennent nous dire ! « Tenons^
nous en aux faits observables,généralisons, induisons^
constatons les lois, poursuivons-y l'unité aussi lolt)^
que nous pouvons le faire, mais arrêtons-nous là^
Entre nous et l'au-delà, entre les faits et leur causô^
première, il y a un rideau que Et.9 mains ne pourront-'*
jamais soulever, nos yeux jamais percer ! » Mais, eAj>,
dépit de toutes les difficultés, la nature humaine est-,
ainsi faite que cet au-delà qu'elle no pourra jamais '
saisir, elle en a soif; que ces problèmes qu'elle ne,
pourra jamais résoudre, elle est haletante après lenf^
solution. Elle çst ainsi faite aussi que, se sentant capa-
ble d'être morale et sainte, elle ne se repose dans au-,-*
cune doctrine aussi bien que dans celles qui lui mon-
trent au-dessus d'elles une cause morale et sainte,
comme elle peut l'être elle-même. Or, c'est là au fondl
tout le stoïcisme d'Epictète. ^ "<
Pour établir une loi morale, le positivisme n'a qûe>
deux voies !
Ou faire de cette loi, avec Spencer et l'école anglaise)
la résultante d'expériences accumulées, la transmission»
héréditaire des plis que la société nous a fait prendre'
pour son plus grand avantage ou pour le nôtre, ce qui
est ramener, quoi que l'on en dise, et si haut que Ton
prétende remonter dans les générations humaines, le"
sens moral à la prudence, le devoir au calcul, l'homme'
à l'animal;
XllI PRÉFACE DE LA SECONDE ÉDITION;!
Qu bien avec la majorité des Positivistes français,
accepter l'idée du bien moral dans l'homme commo un
fait> irréductible, aussi incontestable que tout' autre,
quelque contrariant qu'il soit pour certains systèmes ;
^^tjt^iriii.àlappuyaut d'un côté sur ce sentiment de notre
i^igMté^propre, sur ce besoin de valoir toujours plus
-qlii".cet inséparable du fond de notre être, et de l'autre
;sui\çë,s instincts affectueux et désintéressés qui ne sont
pasHmoins. .nôtres que les instincts égoïstes, montrer
pour, loi naturelle à l'individu la double obligation de
progresser sans cesse lui-même et l'aider sans cesse
au progrès des autres. :
,:
.
II y à> loin certes do cette doctrine, Positiviste à la
.
V. COURDAVEA.UX.
PRÉFACE
DE LA PREMIÈRE ÉDITION.
M' Prêvost-Paràdol.
XXVI PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION.
pourrait-il bien s'appoler un précoptodo soumislon ? Et,
si l'on entend par l'honneur autre choso que la préoc-
cupation do l'opinion publique, qu'est-coquo l'honneur,
si ce n'est l'àlj'wjjia, co sentiment de notre dignité indl-'
vtdueile, cette volonté de no pas déchoir, qui ost la rè-
gle de conduite d'Hclvidius et de Socrato ?
Voilà à grands traits cette doctrino célèbre, avec ce
qu'elle a tout à la fois d'élevé et d'incomplet. Telle
qu'elle est, il nous a paru utile de la mettre à la portée
de tout lo monde, malgré l'aridité du livre qui la con-
tient. Nous no sommes pas, du reste, le premier à l'es-
sayer. Dès 1630, le père Goulu traduisait l'ouvrage en-
tier d'Arrien ; Dacicr on extrayait ensuite deux volu-
mes, sous le nom do Nouveau Manuel d'Epictète ;
enfin, en 1832, M. P. Thurot eu publiait, aux frais de
l'imprimerie royale, uno traduction estimable, à laquel-
le ne manquent pour être complète, qu'une trentaine
de pages sans importance majeure. Mais la traduction
du père 'Goulu a singulièrement vieilli, sans compter
l'incorrection du texte qui lui a servi ; Dacier a fait des
1 emprunts, non une traduction : et M. Thurot, malgré les
;
incontestables qualités de son oeuvre, laisse trop sou-
vent échapper l'enchaînement des idées, et n'a pas de
l'ensemble du systèmo une intelligence suffisante pour
donnera chaque expression sa valeur vraie. Sa traduc-
tion est celle d'un Helléniste ; elle n'est pas celle d'un
philosophe. Voilà pourquoi nous avons cru pouvoir pu-
\ L?îer la nôtre après la sienne.
^-Traduire un philosophe ancien, c'est le commenter
Jsàiis en avoir l'air. Pour qui a suivi l'histoire intellec-
tuelle de l'humanité et la marche naturelle des idées
dans les peuples comme dans les individus ; pour qui
Ig^bservé comment elles so forment et se transfor-
frnéht; pour qui les a vues passant petit à petit do la
^synthèse à l'analysé;, d'une extension énorme d'abord»
PRÉFACE DE LA PREMIÈRE ÉDITION, XXyiI >"
l Une extension de plus en plus restreinte, .de l'indé-
ermination et du vagué à une précision de plus eh
plus grande, Il est bien clair quo les idées des anciens -
étaient autrement faites que les nôtres et so compo-
saient d'autres éléments. Lors donc que nous préten-
dons traduire une de leurs idées par une Idée équivalente
>rise dans les nôtres, lorsque nous croyons qu'un de
10s mots répond exactement à un des leurs, nous nous
rompons lo plus souvent : nous sommes presque tou-
ours en deçà ou au delà de leur conception exacte. On
i dit avec raison que la plupart de nos erreurs sur les
isages et sur les opinions de l'antiquité étaient des er-
reurs de dictionnaire ; et quo bon nombre de mots an»
îiens ressemblaient à des pièces de monnaie dont le
naximum et le minimum seraient fixes, maïs dont il
audrait déterminer chaque fois la valeur d'occasion.
Cela est doublement vrai des mots do la langue mo-
rale. Eu dedans de leur valeur générale, ces mots ont
presque chaque fois une valeur accidentelle, que l'on
ne peut déterminer qu'en les rapprochant de tout ce
qui les précède et de tout co qui les suit. Trouvez, par
exemple, un mot français qui soit l'équivalent cons*
tant des mots Xiyoî, xl'/vrit WV»[«Î» çxv-a?(a,* voir
;
Pattehtlon sur certains points particuliers, quo jus-
qu'ici, ce nous semble, on n'avait pas assez mis en lu-
ornière. Y sommes-nous parvenus, et qu'adviondra-t-il
de notre traduction, elle aussi ? Nous n'avons, à co su-
jet, qu'à répéter pour notre compte coque dit Arrien
lui-mêmo, à la fin de sa préface :
« Si nous échouons, peut-être sera-ce de notre faute
peut-être était-il inévitablo qu'il en fût ainsi. »
V. COURDAVEAUX.
LES
ENTRETIENS D'EPICTÈTE
LES
ENTRETIENS D'EPICTÈTE
Adieu.
LIVRE PREMIER
Des choses qui sont en notre pouvoir, et do celles qui n'y sont pas.)
— «
Quoi donc, jo serais lo seul qu'on décapiterait-
aujourd'hui f » — Eh bien ! veux-tu quo tous soient
décapités, pour quo lu aies une consolation? Ne pré-
fères-tu pas tendre le cou, comme à Rome, co Latéra^.
nus, dont Néron avait ordonné de couper la tête? Il la;
tendit, et fut frappé, mais lo coup était trop faible ; il là'j
retira un instant ; puis la tendit do nouveau. Déjà au-^
paravant, comme Epaphrodito, affranchi do Néron,;
ctait venu l'interroger sur le motif de sa haine pour,
l'empereur, il lui avait répondu : « Si jo veux lo dire,
ce sera à ton maître »
Quo faut-il donc avoir présent à l'esprit dans ces cir-
constances? Rien autre chose quo ces questions:
Qu'est-co qui est à moi? Et qu'est-ce qui n'est pas à
moi ? Qu'est-ce qui m'est possible ? Et qu'est-co qui ne
m'est pns possible ? 11 faut que je meure Eh bien I fuUt-
il donc que co soit en mo lamentant? Il faut quo je
parte pour l'exil. Eh, qui m'empêche do partir en riant,
le coeur dispos et tranquille? — « Dis-moi tes secrets.
—
Jo ne to les dis pas, car cela est en mon pouvoir.
—
Mais je t'enchaînerai. — O homme, que dis-tu?
m'enchaîner, moi I Tu enchaîneras ma cuisse ; mais
ma faculté do juger et de vouloir, Jupiter lui-même ne
peut en triompher. — Jo to jetterai en prison. — Tu
y jetteras mon corps. — Jo to couperai la tête. —
Quand t'ai-jo dit quo j'étais lo seul dont la tête ne pût
être coupée ? » Voilà co que devraient méditer les phi-
losophes, ce qu'ils devraient écrire tous les jours, co à
quoi ils devraient s'exercer.
Thraseas avait coutume de dire : « J'aime mieux être
tué aujourd'hui qu'exilé demain. » Que lui dit donc
Rufus ? « Si tu choisis la mort comme plus pénible,
quel est co choix absurdn ?.Si comme plus douce, qui te
l'a permis ? No veux-tu pas l'exercer à être satisfait de
co qui t'est échu ? »
C'est pour cela qu'Agrippinus disait : « Jo ne m'en-
trave pas moi-même » On lui annonça qu'il était jugé
dons lo sénat. « Au petit bonheur t dit-il. Mais, voici
la cinquième heure (c'était celle où il avait l'habitude
|6 COMMENt ON PEUT CONSERVER
:
do s'exercer, puis do so baigner dans l'eau froide) ; sor-
tons et exerçons-nous. » Quand il s'est exercé, quel-
quelqu'un vient lui dire qu'il a été condamné. — « A
l'exil, dit-il, ou à la mort? — à l'exil. — Qu'arrive-t-il
de mes biens? — On no to les a pas enlevés. — Al-
lons donc à Aricie, et dlnons-y. »
Voilà ce que c'est quo d'avoir médité ce qu'il faut
méditer, do s'être placé au-dessus de tout obstacle et
de tout accident, pour les choses qu'on désire ou qu'on
veut éviter. « Il faut que je meure. Si tout,do suite, jo
; meurs ; si bientôt, jo dinc maintenant que l'heure en
est venue ; jo mourrai ensuite — Comment? — Comme
il convient à quelqu'un qui rend ce qui n'est pas à
lui. »
CHAPITRE II
CHAPITRE III
f t
Quelles conclusions peut-on tirer de ce que Dieu est le père des
hommes ?
•
Si on pouvait partager autant qu'on lo doit cette
croyance, que nous sommes tous enfants do Dieu au
premier chef, quo Dieu est lo pèro des hommes et des
divinités, jamais, je pense, on n'aurait do sol des idées
qui nous amoindrissent ou nous rapetissent. Quoi, si
César t'adoptait, personne no pourrait supporter ton
orgueil ; et, quand tu sais que tu es fils do Dieu, lu ne
t'en enorgueilliras pas I Nous no lo faisons guère au-
jourd'hui I Bien loin do là ! Commo à notre naissance
deux choses ont été unies en nous, le corps qui nous
est commun avec les animaux, la raison et le jugement
qui nous sont communs avec lc9 dieux, uno partie d'en-
tre nous so tourne vers ectto funeste parenté do mort,
un très petit nombre vers cette bienheureuse parenté
divine. Or, commo il est impossible do ne pas user de
chaque chose suivant l'opinion quo l'on s'en fait, co pe-
tit nombre, qui so croit né pour la probité, pour l'hon-
neur, pour lo bon usago des idées, n'a jamais do lui-
même uno opinion qui lo ropctlsso ou l'amoindrisse,
mais la foulo fait lo contraire. « Quo suis-je, en effet
(dit-on)?un homme misérable et chétlf. » — Ou bien
encore : « Pitoyable chair quo lu mienne I » — Oui,
bien pitoyable en effet I mais tuas quelque chose de
mieux que cette chair I Pourquoi to négliges-tu, pour
t'ottacher à ello ? '
!
DE CE QUE DIEU EST LE PÈRE DES HOMMES ? Il'
Par suite de cette parenté, nous qui nous tournons-
vers ello, nous devenons semblables, les uns aux loups.,
trompeurs; traîtres et méchants; les autres, aux lions ;
sauvages, cruels et barbares; le plus grand nombre^
aux renards et à tout co qu'il y a de vil parmi les bêtës.
Qu'est-co en effet qu'un homme' méchant dans ses pa-
roles ou dans ses actes, si ce n'est un renard ou quel-
que chose de plus vil et do plus abject encore? Ouvrez
donc les yeux et faites attention, pour no pas devenir
quelqu'une de ces saletés.
CHAPITRE IV
Sur lo progrès.
CHAPITRE V
CHAPITRE VI
Sur ta Providence,
CHAPITRE VII »
CHAPITRE VIII
CHAPITRE IX
CHAPITRE X
CHAPITRE XI
CHAPITRE XII
Du contentement de l'esprit.
•
No veux-tu donc pas placer ton bien dons co qui te
fait l'égal des dieux? — « Malheureux que josuU,diE-tu,
d'avoir un pareil père et uno pareillo mère I » — Quoi
donc ? est-co quo, à ton entrée dons la vio, il t'a été
donné do choisir, et do dire: « Jo veux qu'à cetto
heure-ci un tel ait dos rapports avec uno telle, pour quo
jo vienne au mondo? » Cela no t'a pas été donné. Il a
fallu, au contraire, quo tes parents existassent d'abord,
et qu'ensuito tu naquisses. — Mais do qui ? d'eux, tels
qu'ils étaient." Et, tels qu'ils sont, crois-tu qu'aucun
moyen do défenso no t'ait été donné contre eux ? Tu
serais malheureux et bien à plaindre, si tu ignorais
pour quel usago la vuo t'a été donnée; et si tu fermais
les yeux en faco dos couleurs. Combien n'es-tu pas plus
malheureux et plus à plaindre encore, toi qui no sais
pas quo contre tous les Inconvénients tu as reçu la
Srandour d'fttno et la générosité des sentiments ! En faco
o toi no sont quo des choses on rapport avec les moyens
quo tu as reçus ; mots tu détournes les yeux, au mo-
ment mémo où tu devrais les avoir ouverts et bien
voyant. Pourquoi no pas rendre plutôt grâco aux dieux,
de t'avolr place au-dessus des chosos qu'ils n'ont pas
mises dans ta dépendance, et do n'avoir donné d'action
sur toi qu'à colles qui dépendent do toi ? Ils n'ont point
donné action sur toi à tes parents, point à tes frères,
point à ton corps, point à la fortune, à la mort, a la vie.
A quoi donc ont-Us donné action sur toi ? A la seule
choso qui dépendo en toi, au bon usago des idées. Pour-
quoi te mettre sous lo joug do tant do choses dont tu es
*V
' 39<
DU COMENTEMENT DE L'ESPRIT,
Indépendant ? C'est co qu'on oppollo so créer à soi-même
des embarras.
CHAPITRE XIII
CHAPITRE XIV
CHAPITRE XV
CHAPITRE XVI
Do la Providence.
CHAPITRE XVII
De la nécessité de la logique.
—
Soit ; mats il est plus pressant de guérir ses pas-
sions et tout le reste. — Veux-tu donc m'écouter sur ce
sujot-là? Ecoute-moi ; mais ne va pas me dire : « Je ne
sais pas si tu raisonnes bien ou mal ; » et, au cas où je
prononcerais une parolo ambiguë, ne me dis pas non
plus : « Précise: » car jo ne to supporterai pas, et je le
dirai : a Mats il est plus pressant de..., etc. » C'est en
effet, je crois, pour cette raison quo l'on place la Lo-
gique en tête comme nous voulons qu'on opprenno à
connaître les mesures avant do se mettre, à mesurer le
blé. Car, si nous ne commençons pas par savoir co que
c'est qu'un boisseau et par savoir co quo c'est qu'une
balance, comment pourrons-nous mesurer ou peser
quoique ce soit? Ici do même, si nous n'avions pas
étudié et ne connaissions pas exactement co qui nous
sert à juger et à connaître tout le reste comment pour-
rions-nous connaître exactement quelque autre chose?
Est-co quo cela so pourrait? — Non ; mais un boisseau
n'est que du bois stérile I — Oui, mais c'est par lui que
nous mesurons lo blé. — La Logique aussi est stérile!
— C'est ce quo nous verrons ; mais, alors mémo qu'on
l'accorderait, co serait encore assez pour elle quo de
servir à juger et à discuter lo reste, et d'y tenir lieu,
pour ainsi dire, do poids et de mesure Et qu'est-ce qui
parle ainsi ? N'cst-co quo Chrysippo, quo Zenon, que
Cléanlho? N'cst-co pas aussi Antlsthènes ? Et quel est
celui qui a écrit quo lo point do départ de l'éducation
était l'étude des mots? N'est-ce pas aussi Socrato qui
parle ainsi ? Et do qui Xénophon a-t-il écrit qu'il com-
mençait par étudier la signification des mots?
La grande choso, la chose digne d'admiration, serait-
elle donc de comprendre ou d'expliquer Chrysippo?
Eh, qu'est-co qui dit cela? Quctlo est donc la chose
dlgno d'admiration ? C'est do comprendre la volonté de
la nature. Or, peux-tu la démêler par toi-même? De
quoi aurais-tu besoin alors ? Car s'il est vrai qu'on ne
faillisse jamais quo malgré soi, et si tu as su découvrir
la vérité, il est impossible quo dès lors tout no sottpas
bien chez toi, « Mais, par Jupiter, jo ne sais pas dêcou-
DE LA NÉCESSITÉ DU LA LOGIQUE, 47
vrir la volonté de la nature Qui donc'sait l'oxposer?
On dit que c'est Chryslppe. » Jo vais, et jo cherche co,,
que dit cet interprète de a nature. Contrarié de ne pas j
comprendre ce qu'il dit, jo chercho quelqu'un qui rti<M
l'explique. «Vois, mo d t-on, et examine co qui est;;
écrit là, commo si co l'était en latin. »
Mais de quoi donc l'expllcatcur pcut-ll s'enorgueillir
ici? Chrysippo lui-même n'aurait pas lo droit do s'enor-
gueillir, s'il n'arrivait qu'à m'cxpllquer la volonté de
la nature, sans la comprendre lui-môme. A combien
plus forto raison, celui qui oxpliquo Chrysippo I Car ce:
n'est pas pour Chrysippo lui-même que nous avons
besoin do Chrysippe, mais pour comprendre la nature.,
Nous n'allons pas trouver lo devin pour l'amour do lut-;
même, mais parce que nous croyons apprendre par lui,
l'avenir, et co quo présagent les dieux. Co n'est pas non
plus pour l'amour d'elles-mêmes quo nous allons regar-'
der les entrailles, mais pour co qu'elles présagent. Ce
n'est ni le corbeau ni la corneille quo nous honorons ;
c'est lo Dieu qui nous avertit par eux.
Jo vais trouver celui qui expliquo tout cela, lo devin»
et je lut dis : « Examine pour moi les entrailles. Que
mo présogent-ellcs ? » Il les prend, les ouvre, les Inter-
prète, et mo répond : « O homme, tu as en loi uno fa-
culté do juger et do vouloir, dont la nature est de no
pouvoir étro enlravéo ni contrainte ; voilà co qui est
écrit ici, dans ces entrailles. Jctolo montrerai d'abord
au sujet du jugement. Quelqu'un peut-il t'empêcher
d'adhérer à la vérité ? — Personne — Quelqu'un pout-
il to forcer à recovoir pour \lrai co qui est faux?— Pcr»
sonne — No vois-tu pas alors quo sur co terrain ton
libre arbitre est au-dessus do touto entrave, do.tout©
contrainte, do tout empêchement ? Eh bien sur le ter-
1
CHAPITRE XVIll
gens qui so trempent sur ce qui est bon et sur ce qui est
mauvais. Par suite est-ce l'indignation ou la pitié qu'ils
doivent t'inspirer? Montre leur qu'ils se trompent, et
tu verras comment ils cesseront do faire mal. S'ils nei
voient pas leur erreur, ils n'ont rien qu'ils puissent
préférer à leur opinion.
—
Quoi donc !
ce voleur et cet adultère ne devraient-
ils pas périr? — No parle pas ainsi ; mais dis plutôt.
« Cet
homme qui s'égare et qui so trompe sur les su-
jets les plus importants, cet homme aveugle, non dans
ces yeux du corps qui distinguent lo blanc du noir,
mais dans ces yeux de l'esprit qui distinguent le bien,"
du mal, no devrait-il pas périr? » Et si tu parles ainsi,
tu reconnaîtras combien ton dire est inhumain, com-.
bien il ressemble à celui-ci : « Cet homme aveugle et
sourd no devrait-Il pas périr ? » Car si le plus grand
de tous los dommages est d'être privé des plus grands
bleus, et si lo plus grand do tous les biens est un juge-
ment droit, pourquoi t'emporter encore contre celui
qui en est privé ? 0 hommo, il ne faut pas que les torts
des autres produisent sur toi un effet contraire à la
nature ; aio pitié d'eux plutôt Laisse-là ces mots de
colère et de haine, ces exclamations do la multitude:
Quel monstre ! Quelle canaillo I Quel être odieux ?
« »
Ks-tu donc, pour ta part, dovenu sago en un jour ! Te
voilà bien sévère! Pourquoi donc nous emportons-
nous? Parce quo nous attachons du prix à co qu'on
nous enlève N'attache pas do prix à ton manteau,
et tu no t'emporteras pas contre son voleur ; n'at-
tache pas do prix à ta femme, s! belle qu'elle soitj et
tu ne t'emporteras pas contre son amant. Sacho que lo
voleur et l'amant n'ont pas de prise sur co qui est à toi,
qu'ils n'en ont quo sur les choses qui ne sont pas à' toi,
et qui no dépendent pas de toi. Si tu te détaches de
ces choses-là et n'en fais aucun cas, contre qui auras-
tu encoro à t'emporter ? Tant quo tu y attacheras quel-
que prix, c'est de toi quo tu devras être mécontent, et
non pas des outres.
Vols un peu s tu as do beaux vêtements, tandis que
"oti IL NE FAUT PAS S'EMPORTER. !
'
ton voisin n'en a pas, et tu as une fenêtre ; veutf-tu les
- 'y
CHAPITRE XIX
;
elles me servent pour quelque usage, et c'est pour cela
que j'en prends soin. Est-ce que je ne prends pas
soin do mon âne? Est-ce que jo ne lui lavo pas et ne
lui nettoie pas les pieds ? Né vois-tu donc pas quo c'est
de lui-même que tout homme a soin, et qu'on n'a des
soins pour toi quo comme on en a pour son âne?
Qui donc en effet a des soins pour toi à titre d'homme?
Montre-moi celui-là. Qu'est-co qui veut te ressembler ?
Qu'est-ce qui veut marcher sur tes traces comme sur
celles dé Sbcrate ? — « Mals'jo puis to faire couper la
tête! » — Tu as raison ; j'oubliais qu'il me fallait des
soins vis-à-vis de toi commo vis-à-yisdo la fièvre et du
choléra, et que jo devais t'élever un autel commo il y
a dans Romo un autel élové à la fièvre.
Q'est-coqut troublo donc lo vulgaire et qu'est-ce qui
l'effraie ? Lo tyran et ses gardes ? Comment cela scrall-
11? Et à Dieu ho plaise quo cela soit ! Il n'est pas pos-
sible quo l'être né libre soit troublé, entruvé par un
autre que pnr luUmôme. Co sont ses jugements seuls
qui causenttson trouble. Car, lorsque le tyran dit: « Je
chargerai dô fers ta jambe, » celui qui attache du prix
à sa jambe, s'écrie : « Non I par pitié I » mais celui qui
n'attacho do prix qu'à so libre décision, dit : « Charge-
la de fers, si cela te semble bon. — Cela no to fait rien.
— Cela no mo fait rien. -- Jo to montrerai quo je suis
le maître — Comment lo pourrais-tu ? Jupiter m'a fait
libre Crois-tu qu'il oit pu permettre quo son propre
fils devint esclave? Tu es le maître do. ma carcasse;
prends-la. •— Co n'est donc pas mol qui BUIS l'objet de
de tes soins lorsque tu m'approches? — Non, mais
moi-même. Et, si tu veux mo faire dire quo tu l'os aussi,
entends-moi bien : R TU l'es comme lo serait une cru-
che. »
Co n'est pas là de l'égoïsmo, car l'être animé est fait}
pour agir toujours en vue do lut-môme. C'est pour lui-
même quo lo soleil fait tout, et Jupiter aussi. Mais,
quand co Dieu veut élro lo distributeur de la pluie, lo
producteur des fruits, lo père des dieux et des hom-
mes, lu peux voir qu'il n'en obtient et lonom et la
A L'ÉOARD DÉS TÏRANS? 63
chose qu'en étant utile à la communauté. H a donné à
tout étro raisonnable une nature telle, qu'aucun d'entre
eux ne peut trouver son bien particulier qu'en faisant
quelque chose d'utile à tous. C'est ainsi qu'on n'est pas
l'ennemi de là communauté, tout en n'agissant qu'éjtf
vue do soi-même Qu'attends-tu, en effet? qu'un être;
renonce à lui-même et à son intérêt propre ? Comment
donc alors la première loi de tout étro indistinctement/
sera-t-ello l'amour do lui-même ? • :/}\
Quo diral-jo donc? quo, lorsque nous avons, ausviv
eûtes choses qui ne relèvent pas do notre libre arbitre^
'opinion absurde qu'elles sont dos biens ou des mauj*,;
1 nous faut de touto nécessité faire la cour aux tyrans,*
64 COMMENT LA RAISON
.
' CHAPITRE XX
. CHAPITRB XXI
CHAPITRE XXII
CHAPITRE XXIII
Contre Épicure.
CHAPITRE XXIV
CHAPITRE XXV
CHAPITRE XXVI
CHAPITRE XXVII
CHAPITRE XXVIII
v
Eh bienl dans nos actions avons nous quelque chose
|d'aHalogue à ce qu'est ici la vérité ou l'erreur? Oui:
ce qui convient et ce qui ne convient pas, ce qui nous
est bon et ce qui nous est nuisible, ce qui dépend de
moi et ce qui n'en dépend pas, et toutes les choses de
ce genre Quelqu'un peut-il donc croire qu'une chose
lui est bonne et ne pas la choisir? 11 no le peut. Com-
ment donc une femme a-t-elle dit :
« Je comprends tout le mal que je vais faire ; mais
ma colère est plus forte que toutes mes réflexions? »
; C'est parce que ce fait même de
céder à sa colère et
de punir son mari lui paraissait préférable à la vie de
ses enfants. — Oui ; mais elle se trompait. — Montre-
lui clairement qu'elle se trompe, et elle agira autre-
ment. Mais, tant que tu ne le lut auras pas montré, que
veux-tu qu'elle suive, si ce n'est ce ou'elle croit voir?
Rien. Pourquoi
— la malheureuse
—
donc t'cmporttr contre elle, parce
que s'est trompée sur les points les plus
importants, et parco quo de femme elle est devenue vi-
père? Pourquoi donc, s'il en est ainsi, nous qui avons
pitié des aveugles et des boiteux, n'avons-nous pas
plutôt une égale pitié do ceux qui sont aveugles et
boiteux pour les choses les plus importantes?
Si donc on sait clairement que l'homme n'a d'autre
mesure do ses actions que ce qu'il lui semble voir (que
cela lui semble à tort ou à raison d'ailleurs : si à raison,
Il est sans reproches ; si à tort, il est le premier à en
Souffrir; car il no se peut .pas que l'erreur soit d'un
Côté et la soull'rance do l'autre), on n'aura de colère ni
CONTRE LES HOMMES. ?J3„t-
— MaUj
comment appclle-t-on ceux qui obéissent à toutes leurs;
idées? des insensés. Or, faisons-nous autre chose? •
^
CHAPITrE XXIX
De la force d'âme.
CHAPITRE XXX
LIVRE DEUXIÈME
CHAPITRE l"
L'assurance n'est pas incompatible avec les précautions.
.
Cetto maxime des philosophes parait peut-être un
paradoxe à quelques personnes ; examinons pourtant,
dans la mesure de nos forces, s'il est vrai do dire qu'il
est toujours possible d'agir à la fois avec assurance et
avec précaution. "Les précautions, en effet, semblent
contradictoires à l'assurance ; et les contradictoires ne
peuvent coexister.
Si bien des gens croient ici à un paradoxe, cela me
semble avoir une raison quo voici : c'est que l'on aurait
en effet lo droit do nous accuser do réunir des choses
inconciliables, si nous prétendions qu'on peut réunir
les précautions et l'assurance dans uno même affaire.
Mais qu'y a-t-il de choquant dans ce quo nous disons
maintenant? Car, s'il est vrai, comme on l'a dit tant de
fois, et démontré tant de fois, que lo vrai bien, et le
Vrai mal sont également dans l'usage quo l'on fait des
idées, et quo tout ce qui ne relève pas de notre libre
arbitre ne peut être ni un bien ni un mal, quel paradoxe
soutiennent les philosophes, quand ils disent : « Dans
tout Ce qui ne relève pas do ton libre arbitre, sois plein
d'assurance : mais dans tout co qui en relève, tiens-toi
sur les gardes » ? Car, si lo mal est dans un jugement
ou dans une volonté coupables, c'est uniquement contre
ce jugement et cetto volonté qu'il faut se tenir en
AVEC LES PRÉCAUTIONS. 85
garde; et, si toutes los choses qui no relèvent pas de
notre libre arbitre, et qui no dépondent pas do nous, ho"
sont rien par rapport à nous, il nous faut user d'assu-
rance vis-à-vis d'elles. C'est ainsi que nous réunirons
les précautions et l'assurance ; et, par Jupiter! c'est à
nos précautions quo nous devrons notre assurance Car
c'est parce quo nous nous tiendrons on garde contre les
maux réels, que nous pourrons avoir de l'assurance
contre ce qui n'en est pas.
Du reste il nous arrive la même chose qu'aux cerfs,
Quand ils prennent peur et fuient devant des plumes,
du côté do quoi so tournent-ils? Où vont-ils so jeter
commo dans un asile sûr? dans les filets. Et ils péris-
sent ainsi pour avoir préféré co qu'ils auraient dû
craindre à ce qui no pouvait leur nulre.Nous de mente.
De quoi avons-nous crainte? des choses qui ne relèvent
point de notre libre arbitre. Où sommes-nous, au con-
traire, pleins d'assurance, commo en l'absence de tout
péril ? dans co qui relève de notre libre arbitre. Ainsi
il nous est indifférent do nous tromper, d'user de pré-
cipitation, d'agir sans pudeur, do nous passionner hon-
teusement, pourvu que nous réussissions dans ce qui
no relève pas de notre libre arbitre Mais la mort, l'exil,
la peine, l'infamie, voilà où nous allons nous jeter,
quoique ce soit aussi ce quo nous redoutons, Puis, par
une conséquence touto naturelle après une aussi grosse
erreur, nous transformons ce qui de sa nature est l'as-
surance en témérité, en désespoir, en effronterie, en
impudence ; et ce qui do sa nature est la prudence, en
une lâcheté et en une bassesse do coeur, toutes pleines,
de terreurs et de trouble. Car, si nos précautions s'ap-
pliquent à notre faculté do juger et de vouloir et à ses
actes, aussitôt que nous avons la résolution do nous
tenir sur nos gardes, nous avons en nous la puissance
d'éviter le mal ; mais, si nos précautions s'appliquent
5
GIIAPITRB II
Du calme de l'âme.
CHAPITRE III
CHAPITRE IV
CHAPITRE V
CHAPITRE VI
CHAPITRE VII
CHAPITRE VIII
De la nature du bien.
CHAPITRE IX
CHAPITRE X
CHAPITRE XI
CHAPIRE XII
Des discussions.
Notre école a exposé dans le dernier détail tout co
qu'il faut apprendre pour savoir discuter; mais elle
' Avons nous besoin de fatre remarquer l'analogie qu'il y a
entre les idées de ce chapitre et celles que Descartes exprime,
dans les deux premières parties de son discours sur la mé-
thode?
116 DES DISCUSSIONS.
CHAPITRE XIII
De l'inquiétude.
CHAPITRE XIV
A Nason.
CHAPITRE XV
CHAPITRE XVI
Nous ne nous préparons pas aux Jugements que nous por-
tons sur les choses bonnes ou mauvaises.
Où est lo bien? dans notre libre arbitre. Où est le
mal? dans notro libre arbitre. Quelles sont les choses
^i'éê ;;'"' Y I JUGËMËNTSYQUB ffbtlS PORTONS ''
E'Ufîérèntes? celles qui ne relèvent point de notre
rê arbitre. Mais quoi? hors do l'école, est-il quel-
qu'un qui se souvienne de ces principes? Est-il quel-
.
CHAPITRE XVII
CHAPITRE XVIII
CHAPITRE XIX
i
Homme pourquoi trembles-tu? De quoi est-il ques-
tion pour toi ici ? Est-ce que César met la vertu ou je
«
I
CHAPITRE XX
CHAPITRE XXI
Des choses dont on ne convient pas.
CHAPITRE XXII
De l'amitié.
CHAPITRE XXlll
CHAPITRE XXIV
A quelqu'un qu'il n'estimait pas.
CHAPITRE XXV
Nécessité de la logique.
CHAPITRE XXVI
Quelle est la vraie nature de nos fautes?
CHAPITRE 1«
Sur la parure.
CHAPITRE II
' J'ai
passé dans cet endroit deux ->î*l qui ne peuvent se rap-
porter qu'à Epletète, d'après,l'ensemble du chapitre, et qui
partant ne sont que des pléonasmes dé rédaction ne servant
qu'à embrouiller les Idées.
18Î DES CHOSES AUXQUELLES
montrerai qui jo suis et quo je suis un grand philoso-
pho I » Cela so voit rien que par là. Quello autro dé-
monstratton veux-tu en donner ? Diogèno (ne lo sais-tu
pas?) montrait un jour un sophiste, en étendant lo doigt
du milieu. Celui-ci s'en fâcha. « Voilà ce qu'est un tell
dit lo philosophe; je vous l'ai montré, » C'est qu'en
effet ce n'est pas avec le doigt quo se montre un homme,
commo uno pierre ou un morceau de bois; mais mon-
trez ses façons do voir, et alors en lui vous aurez montré
l'homme, i i
Voyons tes façons do voir à toi aussi, N'ost-il pas
évident quo tu comptes pour' rien ta faculté do juger et
de vouloir, quo tes yeux so tournent hors de toi sur ce
qui no dépend pas de toi, sur ce quo dira un tel, sur ce
qu'il pensera do toi ? Tolrouvc-l-il savant? Croit-il que
tu as lu Chrysippe et Antlpater? Car, s'il va jusqu'à
Archédémus, to voilà au comble du bonheur ! Pourquoi
meurs-tu encore de peur do no pas nous montrer ce
que tu es ? Veux-tu quo je to diso ce que tu nous mon-
tres ? Tu nous' montrés devant nous un hommo sans
coeur et qui so plaint toujours, un hommo toujours en
colère, un lâche, qui blâme tout, qui accuse tout le
monde, qui n'est jamais tranquille, un homme qui n'a
rien do solldo en lui. Voilà ce que tu nous as montré,
Va-t'en donc liro Archédémus; puis, si un rat tombe
chez toi et fait du bruit, te voilà mort ! Ce qui t'attend,
c'est une mort semblable à cello de... quel est-il?
à cello de Crinis. Lui aussi était fier, parce qu'il savait
tout Archédémus, Malheureux I ne vèux-lu pas renon-
cer à toutes ces connaissances, qui no sont pas faites
pour toi? Elles conviennent à ceux qui peuvent les ac-
quérir, étant déjà au-dessus do tous les troubles de
l'âme; à ceux qui peuvent dire : « Je n'ai ni colère, ht
chagrin, ni haine ; il n'y a pour moi, ni entraves, ni
.
contrainte, Que me reste-t-il àfaire?J'aidu loisir, et je
suis en repos. Voyons comment on doit so tirer de. la
conversation des syllogismes; comment, après avoir
posé une hypothèse, -on évitera de tomber dans Tab-
suirde. » Voilà ceux auxquels ces études conviennent.
IL FAUT EXERCER L'ÉLÈVE, YJfclQ
Quand on a une navigation heureuse, on a le droit d'al-
lumer du feu, do dtner, et même à l'occasion, do chan-
ter et do danser; mais toi, c'est quand le navire est eii
danger do sombrer quo tu viens déployer tes plus
hautes voiles.
CHAPITRE III
CHAPT1RE IV
CHAPITRE V
Contre ceux qui partent parce qu'ils sont malades.
CHAPITRE VI
Mlscellanées.
CHAPITRE VII
CHAPITRE VIII
CHAPITRE IX
A un rhéteur qut s'en allait à Home pour un procès,
CHAPITRE X
CHAPITRE XI
Miscellanées.
CHAPITRE II
De l'exercice.
CHAPITRE XIII
i i
Qu'est-cs quo c'est que l'abandon? Et qu'est-ce qui est
abandonnât
CHAPITRE XIV
Ç& et là.
CHAPITRE XV
CHAPITRE XVI
CHAl'lTRK XVII
Sur la Providence.
Quand tu reproches quelque clioso à la Providence,
examine bien, et tu verras que co qui est arrivé était
logique. — Oui ; mais co malhonnête hommo a plus
que moi! — De quoi? —D'argent. —C'est qu'au point
de vue do l'argent il vaut mieux que toi; car il flatte,
il estimpudent, il travaille jusque dans la nuit. Pour-
quoi t'étonner dès lors ? Mais regarde s'il a plus que toi
de conscience et d'honneur. Tu trouveras que non. Au
contraire, tu trouveras que tu as plus que lui de co pour
quoi tu vaux mieux que lui.
Moi aussi j'ai dit un jour à quelqu'un qui s'indignait
de la prospérité de Philostorgus. « Voudrais-tu donc
coucher avec Sura ? — Que jamais un pareil jour n'ar-
rive I me répondit-il. — Pourquoi donc t'indignes-tu,
lui dis-je, s'il reçoit quelque chose en échange do ce
qu'il vend? Ou pourquoi le trouves-tu si heureux d'a-
voir gagné sa fortune par des moyens dont tu no veux
pas ? Ou bien encore, quel mal fait la Providence en
accordant ce qui vaut le mieux à qui vaut le mieux?
Est-ce que l'honneur ne vaut pas mieux que la richesse? »
Il en tombait d'accord. « O hommo, pourquoi donc t'in-
digner, puisque tu as ce qui vaut le mieux I »
Rappelez-vous donc toujours, ayez toujours présent
à l'esprit, que la loi de la naturo est que celui qui vaut
mieux ait plus que celui qui vaut moins de ce pour-
quoi il vaut le mieux ; et jamais vous no vous indigne-
rez. — Mais ma femme se conduit mal avec moi!:—'
C'est bien. Si quelqu'un'te demande ce qu'il y a là, ré-
ponds : « Ma femme se conduit mal avec moi. » Y a-t-jl
là autre chose? Non. — Mon père ne me donne rien.
— Qu'y a-t-il là? Il y n0 mon péri
1 ne me donne HeriX
mais y a-t-il autre chose? Non. Pourquoi ajouter dû
216 H. NE FAUT PAS SB TROUBLER DES NOUVELLES.
dehors que c'est là un mal? Pourquoi co mensonge?
Aussi n est-ce pas la pauvreté qu'il faut repousser,
mais l'idée quo l'on s'en fait ; et do cette façon nous
serons heureux.
CHAPITRE XVIII
CHAPITRE XIX
De l'homme ordinaire et du philosophe.
CHAPITRE XX
i !
On peut tirer profit de toutes les choses extérieures
CHAPITRE XXI
:
Il y a des gens qui, dès qu'ils ont reçu ce qui s'en-
seigne, et rien do plus, se hâtent do lo rendre, comme
ceux qui ont mal à l'estomac rendent leur nourriture.
Commence par lo digérer, puis no lo rends pas. Autre-
ment, ce sera un vrai vomissement, une chose dégoû-
tante, et qui ne pourra servir à nourrir personne. Di-
gère-le, et fais-nous voir ensuite une transformation
dans ta partie maîtresse, comme les athlètes nous mon-
trent leurs épaules transformées par l'exercice et le
A DONNER DES LEÇONS DE PHILOSOPHIE. 221
genre do nourriture ; comme ceux qui ont étudié un
métier so montrent transformés par co qu'ils ont ap-
pris. L'architecte no vient pas dire ! « Ecoutez-mot
disserter sur l'architecture » ; mais il so chargo dé
construire une maison, et il montro, en la bâtissant,
qu'il possèdo son métier. Fais do mémo dans ton genre :
mange, comme doitlo fatro un hommo ; bols, habille-
toi, mai'ie-toi, procrée des enfants, remplis tes devoirs
docitoyon, comme doit lo faire un hommo. Accepte les
injures, supporte les torts do ton frèro, do ton père, de
ton fils, do ton voisin, de ton compagnon do route.
Fais-nous voir tout cela, pour quo nous nous aperce-
vions quo les philosophes t'ont réellement appris quel-
que choso. Tu no fais rien de tout cela ; mais tu dis i
« Venez m'entendre faire des commentaires, » — Va-
t'en, et cherche sur qui vomir.
Tu ajoutes : « Jo vous expliquerai les livres de
Chrysippe comme personne ; j'aurai lo style le plus
doux et lo plus pur; j'y joindrai môme, par moment,
l'impétuosité d'Antipater et d'Archédémus, » Ainsi les
jeunes gens auront quitté leur patrio et leurs parents
à cette seule fin devenir l'entendre débiter de jolies
petites leçons I No faut-il donc pas qu'ils retournent
chez eux patients, secournbles, calmes, tranquilles,
emportant des provisions do route pour la YIO entière,
équipés de façon à pouvoir supporter bravement tout
ce qui arrivera, et à en tirer de la gloire ? Et comment
pourras-tu leur communiquer co quo tu n'as point ?
Car, qu'as-tu fait autre choso depuis le commence-
ment, quo do t'occupera analyser les syllogismes, les'
sophismes, et les raisonnements par interrogation? j
—
Mais tel
un a uno écolo ; pourquoi n'en ,
aurais-je
pas une moi aussi ? — Esclave ce n'est pas là utië:
1
CHAPITRE XXII
CHAPITUE XXlll
Eh
-
plaudir? Dis-moi: « Ah! »et « C'est merveilleux I »
bien! jo lo dis. Mats, si les applaudissements
—
doivent porter sur quelque chose quo les philosophes
placent dans la catégorie du bien, qu'est-ce quo' j'ai à" ,
applaudir en toi? SI c'est uno bonne choso quo de bien
parler, prouvc-lo moi et je t'applaudirai.
.
CHAPITRE XXIV
CHAPITRE XXV
CHAPITRE XXVI
CHAPITRE I"
De la liberté.
mes libres ! »
Laissons cependant César pour lo moment, si tu lé
veux bien. Réponds-moi à ceci: N'as-tu jamais été
amoureux ? N'as-tu jamais eu de maltresse, quelle fût
libre ou csclavo ? — Et quels rapports cela a-t-il avec
ma servitude ou avec ma liberté? — Ccllo que tu ai-
mais no t'n-t-cllc donc jamais rien commandé contre
ton gré ? N'as-tu jamais flalté ton esclave ? Ne lui as-
tu jamais baisé les pieds ? Certes, si quelqu'un t'avait
forcé do baiser ceux do César, tu aurais vu là un ou-
trage, et lo comble do la tyrannie. Qu'est-ce donc que
ta servitude, si co que tu faisais là n'en était pas?
Pour elle n'as-tu jamais été de nuit où tu no voulais
pas? N'as-tu jamais dépensé plus que tu no voulais?
N'as-lu jamais rien dit avec des gémissements et des
208 DE LA LIBERTÉ.
pleurs ? N'as-tu jamais dû to laisser injurier et mettre à
la porte? Si tu rougis d'avouer ta propre histoire, vois
co quo dit et fait Thrasonidès, après avoir fait plus de
campagnes que toi probablement. D'abord il sort de
nuit, à uno heure telle quo Géta n'ose pas y sortir, ou
no sort, quand son maître l'y contraint, qu'avec force
cris, force lamentations sur son dur esclavage. Puis
que dit-il?
« Uno misérable fillette m'a fait son esclave, quand
aucun ennemi ne l'avait pu I »
Malheureux, qui es l'esclave d'une fillette, et d'une
misérable Illicite! Pourquoi to dis-tu libre encore?
Pourquoi vantes-tu tes campagnes? Puis il demande
une épéc, et se fâche contre ceux qui la lui refu-
sent par Intérêt pour lui-même. Il envole des cadeaux
à celle qui le déteste; il la supplie; il pleure. Par con-
tre, qu'il obtienne d'elle la moindre faveur, et lo voilà
hors de lui ! Mais à ce moment même encore comment
est-il? N'a-t-il plus rien à désirer ?* plus rien à crain-
dre? Et voilà comment il est libre I
Vois comment nous appliquons l'idée de la liberté,
quand il s'agit des animaux. Certaines gens entre-
tiennent des lions apprivoisés ; il les enferment, les
nourrissent, et les emmènent partout avec eux. Qui dira
qu'un tel lion est libre? N'est-il pas d'autant plus es-
clave qu'il a une vie plus douce ? Quel est l'être doué de
sens et do raison, qui voudrait être un do ces lions?
Vois, par contre, ces oiseaux que l'on prend, que l'on
enferme, et que l'on nourrit. Quo no souffrent-ils pas
pour essayer do s'échapper? Il en est même qut se lais-
sent mourir de faim plutôt que do supporter ce genre
de vie. Quant à ceux que l'on conserve, c'est à grand'-
peine, avec bien de la difficulté, et encore ils dépéris-
sent! Et dès qu'ils trouvent la moindre ouverture,
les voilà partis ! Tant ils aiment la liberté, pour la-
quelle ils sont faits? Tant ils ont besoin d'être indé-
pendants, et affranchis de touto entrave ?« Etes-vous
' Le texte Ici est interpole.
DE LA LIBERTÉ. 269.
donc mal ici ? » leur dites vous. Ils répondent : « Quo
dis-tu là? Nous sommes nés pour voler où bon nous
semble, pour vivre au grand air, et chanter quand
nous le voulons ; tu nous enlèves tout cela, et tu dis :
fttoi-vous mal ici? «Aussi nous n'appellerons races
libres que celles qui ne supportent pas d'être prises,
et qui, sitôt prises, échappent à la captivité par la mort,
C'est ainsi quo Diogènc dit quelque part: «lln'yaqu'un
moyen d'être libre, c'est d'être toujours disposé à moit-;,
rfr. » C'est ainsi encore qu'il écrit au roi de Perse : « Tu}
ne pourras pas plus réduire en servitude les Athéniens,
quo tu n'y'peux réduire les poissons. — Comment;
cela? No puis-je pas les prendre? •— Si tu les prends,
ils auront bientôt fait de te quitter et de s'en aller,}
commo les poissons. Si tu prends un poisson, il}
meurt; et si eux meurent aussi, quand tu les auras
pris, quel profit tireras-tu de ton expédition ? » Voilà
le langage d'un homme libre, qui a soigneusement
examiné la question, et qui a trouvé la solution, comme
cela devait être. Mais, si tu la cherches ailleurs qu'où
elle est, comment s'étonner que lu ne la trouves jamais ?
L'esclave souhaite bien vite d'êtie affranchi. Pour-
quoi ? pour to plaisir do donner de l'argent aux fer-
miers du vingtième? Non, mais parce qu'il s'imagine
que c'est faute d'avoir obtenu cet affranchissement,
qu'il n'est ni libre ni heureux. « Que l'on m'affran-
chisse, dit-il, et à l'inslaut mon bonheur est complet
je n'ai plus à faire ma cour à personne, je parle à qui
que ce soit comme son égal et son semblable, jo
vais ou je veux, jo pars d'où jo veux et pour où je
veux.» On l'affranchit: aussitôt, n'ayant plus où
manger, il cherche quelqu'un à flatter, quelqu'un chez
cul dîner. Il fait argent do son corps et se prête aux
dernières infamies. Qu'il trouve un râtelier, et lo
voilà retombé dans uno servitude bien plus dure quo
la première. Ou, s'il fait fortune, lo goujat qu'il est, le
voici qui s'éprend d'une femme de rien, et alors il
souffre, il pleure, il regrette son temps d'esclavage.
« Quel mal y avais-jo? dit-il. C'était un autre qut
^270 " :'' :'
DE LA; LÏBERTÉV-^---'^-}p':%_ }"
m'habillait,.qui me chaussait, qui mo nourrissait, qui
me soignait quand j'étais malade ; et mon service chez
lui était bien peu de chose. Mais aujourd'hui, hélas,
que do misères ! Que do maîtres j'ai au lieu d'un seul t »
Et il ajoute : « Si pourtant j'obtenais les anneaux, quelle
vie facile et heureuse j'aurais alors ! » Et pour les ob-
tenir il commence par endurer mille choses dont il
est digne ; puis, quand il les a obtenus, il en endure
encore de pareilles. Puis il se dit : « Si je faisais eam-
pagne, je couperais court à toutes mes misères. » Il
fuit campagne ; il souffre comme un vaurien ; et il
n'en demande pas moins une seconde et une troisième
fois à faire campagne. Puis, quand il a mis lo comble
à son élévation, quand il est devenu sénateur, qu'cst-il
alors? un esclave qit se rend aux séances. Ses chaînes
sont plus belles ; elles sont les plus brillantes de toutes,
mais ce sont des chaînes.
Qu'il cesse de n'êlrc qu'un sot. Qu'il apprenne,
comme lo disait Socratc, la nature vraie de chaque
chose; et .qu'il n'applique pas sans réflexion ses
notions premières aux objets particuliers. Là, en effet,
est la cause de tous les malheurs des hommes : ils ne
savent pas appliquer leurs notions premières et gé-
nérales aux faits particuliers. Nous croyons les uns à
une cause de nos maux, les autres à une autre. L'un se
dit : « C'est quo je suis malade ! » l'as du tout ; c'est
qu'il applique mal ses notions premières. Un autre :
« C'est quo jo suis pauvre! » Celui-ci : C'est que j'ai
un méchant père ou une méchante mère! » Celui-là:
« C'est que César no m'est pas favorable ! » Mais la
seule et unique cause, la voici : ils no savent pas appli-
quer leurs notions premières. Est-il quelqu'un, en effet,
qui n'ait pas sur lo mal cette notion première, qu'il
est funeste, qu'il est à fuir, qu'il est à écarter do toutes
les façons? Personne, car il n'y a jamais d'opposition
entre les notions premières des uns ou des autres. Les
oppositions ne commencent que quand on en vient aux
applications. Par exemple, qu'est-ce qui est co mal si
funeste, quo l'on doit si bien éviter? On dit : « C'est
DE LA LIBERTÉ. 271
de né pas être l'ami de César. » C'en est fait ; on est à
côté de l'application vraie ; on est aux aboi*. ; on va
chercher des choses sans rapport avec la question ; car
on aura beau obtenir l'amitié do César, on n'aura pas
obtenu pour cela co qu'on demandait. Qu'est-ce quo
l'homme demande en effet? à vivre calme et heureux,
atout faire comme il le veut, à ne jamais ôtro empêché
ni contraint. Or, une fois l'ami de César, n'est-il plus
jamais empêché ? plus jamais contraint? vit-il toujours
calme et heureux ? Oui interrogerons-nous là-dessus ?
Et quelle autorité p. . : digne de fol que celle de l'ami
même do César ? « Avance donc au milieu de nous, toi,
et dis-nous quand est-ce que ton sommeil était le plus
tranquille. Est-ce aujourd'hui, ou avant que tu ne
fusses l'ami de César ? » Aussitôt tu lui entends dire :
Cesse, par tous les dieux ! de to railler do mon sort.
«
Tu ne sais pas ce que je souffre, hélas Le sommeil ne
1
CHAPITRE H
CHAPITRE III
Quelles choses faut-il échanger, et contre quelles aulres? •'
CHAPITRE IV ;«
Sur ceux qui voudraient vivre dans l'inaction,
CHAPITRE V
CHAPITRE VI
CHAPITRE VII
Comment on s'élève au-dessus de la cralnle.
CHAPITRE VIII
CHAPITRE IX
CHAPITRE X
Quelles sont les choses quo l'on dott mépriser? Ht quelles sont
celles pour lesquelles on doit faire autrement ?
pour cela que rien de ce qui est dans la vlo n'est péni-
ble : lorsque tu le veux, tu pars, et la fumée no to gêno
plus. Pourquoi donc te tourmentes-lu? Pourquoi restes-
tu sans dormir? Pourquoi no dis-tu pas tout de suite,
en considérant où sont tes biens et tes maux : « Les
uns cl les autres dépendent de mot. Personne ne peut
m'entever ceux-là ; personne no peut me jeter malgré
moi dans ceux-ci. Qui m'empêche donc de m'étendre à
terre et do ronfler? Ce qui est à moi est en sûreté.
Quant aux choses qui ne sont pas à moi, leur soin re-
garde qut les a obtenues, selon quo les distribue celui
au pouvoir do qui elles sont. Qui suis-jo donc, mot,
pour vouloir qu'elles soient do cette façon-cl ou de
cetto façon-là? Est-ce que le choix.m'en a été donné?
Est-ce quo quelqu'un m'en a fait l'administrateur? Il
mo suffit de ce qui ost en ma puissance. Voilà co qu'il
mo faut arranger le mieux possible Mais pour lo reste,
à la volonté de celui qui en est le maître !»
Quand on a tout cela devant les yeux, restc-t-on
sans dormir, à so retourner do çà, do là? En vue de
3uot le ferait-on? Ou dans lo désir dé quoi? Dans lé
êslr de posséder Patrocle, Antiloquo ou Ménélas?
Mais quand a-t-on cru ses amis immortels? Quand n'a-
t-on pas eu devant les yeux que, demain on après-
demain, il nous faudra mourir, nous ou notre ami?
« Oui, dit Achille ; mats je pensais qu'il me survivrait
et qu'il élèverait mon fils. » C'est quo tu états un sot, et,
quo tu croyais ce qut n'était nullement évident. Pour-
quoi no pas t'en prendre à tot-môme, au lieu de rester
assis à pleurer, comme uno femmelette? — Mais c'était
tut qui m'apportait ma nourriture I — C'est qu'il vivait
alors, sot quo tu es ! Maintenant II ne peut plus te
l'apporter ; mais Automédon lo fera ; et, si Automédon
meurt/tu tiouveras qui le remplace. SI la marmite
où cuisait ta viande est venue à se briser, te faut-il mou-
rir do faim, parce quo tu n'as plus ta marmite habituelle?
Pourquoi n'envotes-tu pas en acheter une nouvelle?
,'830 " DE LA PROPRETÉ.
"N
>
1 — « Mais,
.
dit Achille, il ne pouvait rien m'arriver
dé plus fâcheux. » — Est-ce que c'est là un mal pour
toi? Vas-tu donc, loin d'écarter tes regrets, reprocher
à ta mère de ne t'avoir averti, et passer désormais ta
vie dans les larmes?
Quo vous en semble? Homère n'a-t-il pas composé
ce morceau tout exprès pour que nous vissions que les
pius nobles, les plus forts, les plus riches, les plus
beaux, quand ils n'ont pas les principes qu'Us doivent
avoir, n'ont rien qui les préserve d'être très malheu-
reux et très misérables ? ' '
CHAPITRE XI
De la propreté.
CHAPITRE XII
De l'attention.
CHAPITRE XIII
Pour ceux qui parlent trop aisément d'eux-mêmes.
.
'338 s PÔ\JR CEUX' QUI 'PARLËNT'TROP AISÉMENT :
lui révéler nos secrets ; et nous croyons quo cela est
tout simple : d'abord parce qu'il nous parait contraire
à l'équité d'écouter les affaires do notre prochain, sans
lui faire part à son tour dos nôtres; puis parce quo
iïéus croyons quo nous, no ferions pas aux autres l'effet
d'un hommo franc, si nous nous taisions sur nous-
mêmes. Quo do fois certes on nous dit : « Moi, je t'ai
dit toutes mes affaires; et toi, tu no veux me rien dire
des tiennes ! D'où cela vient-il ? » Ajoutez-y qu'on croit
pouvoir so confier en toute sûreté à qut vous a déjà
confié ses affaires; car la pensée nous vient que cet
homme no contera jamais les nôtres, do peur que nous
aussi nous no contions les siennes. C'est ainsi qu'à
Rome les gens trop prompts à parler so font attraper
par des soldats. Un soldat vient s'asseoir auprès do toi
sous l'habit d'un bourgeois ; il so met à parler mal do
César, et toi, commo s'il t'avait donné un gage do sa
bonne foi, en étant lo premier au dénigrement, tu dis
à ton tour tout ce que lu penses; on to garotto alors, et
on t'emmène C'est là l'Imago de co qui nous arrive à
tous. Parce 'qu'un hommo s'est confié à moi en toute
sûreté, puis-jo do môme, moi, mo confier au premier
venu? Si je suis co quo je suis, jo me tais, mol, sur co
qu'il m'a dtt. Mais lui, il va conter à tout lo monde co
quo je lui al.dit. Cela fait, st je lui ressemble, je veux
mo venger, quand j'apprends la choso, et jo conté ses
affaires ; je l'abîme, et il m'abîme. Si je me dis, au
contraire, quo personno no'peut nuire à un autre, et
qu'il n'y a que nos actes propres qui nous nuisent ou
qut nous soient utiles, jo parviens bien à ne pas faire
comme lut, mais co qui m'est arrivé par suite de mon
bavardage, no m'en est pas moins arrivé.
—Soit I Mais il est contraire ù l'équité d'écouter les.
secrets de mon prochain, sans lui faire part à son tour
dé quoi que ce soit I — O homme, est-ce quo jo t'ai pro-
voqué à parler? Lorsque tu m'a livré tes secrets, y a-t-
il eu convention que tu entendrais les miens à ton
tour? Si tu es bavard, et si tu prends pour des amis
tous ceux quo tu rerîcontres, veux-tu que je te res-
semble ? Quoi donc Si tu as pu sans danger te confier
1
'
PRÉFACE de la seconde édition •
— de la première édition,
ARRIEN A LUCIUS 0KLL1US
.
. .
P»gei.
'
vj
ix"
i
LIVRE PREMIKR
CHAPITBB
—
I"
II. —
de cilles qui n'y sont pas ...
— Des choses qui, sont en noire pouvoir et
6
.-
III. Quelles conclusions peut-on tirer de co
—
—
—
—
IV.
V.
VI.
—
—
—
—
Sur le progrès .........
que DU'U est le père des hommes?
.....
Contre les Académiciens.
Sur la Providence
10
11
14
16
— VII. — De l'usage des raisonnements appelés
captieux et typolhêtlqucs, et autres ., ?;.
semblables
.........
âO
— VIII. — Les talents des ignorants ne sont pas
sans périls 23
— IX. — Des conséquences que l'on peut
tirer de
notre parenté avec Dieu . . . . . îS
..........
.
......
'
— — ceux a
honneurs. 20
— De l'amour des siens .
— XI. 31
— XII. — Du contentement de l'esprit 38;
—
-
nière agréable aux Dieux. .....40,
XH.I. — Comment peut-on tout faire d'une ma-
39
—
—
—
XIV. Dieu voit tout
XV. *• — A quoi s'engage la philosophie.
XVI.'. '— . Do la Providence
XVII,—l De la nécessité de la Logique
... 4Î
43;
4$\
— XVÎÎI. il ne faut pas s'emporter contre. ceux
. . .
qui
— —
font nul 48
— XIX. - Que devons-nous étro à IVgard des ty-
î. Kl
rans
..........
;
.
— XX. — Comment la raison se contemple elle-
même •? bt
—
— XXII. — Des notions ft priori......
XXI. — Contre ceux qui veulent se faire admlrevi
.M: 86
,?3«s i ^AB^Ë Î)ES >;Afi!BRES.r ' ~ i,'J\
" *
'' '
„,
" Pajei.
CfUmnn XXIII. — Contre Eplcure >
' B9
—
—
XXIV. — Comment doit-on lutter contre les cir-
constances difficiles
XXV. — Sur le mémo sujet .
. . . . . . '
?.....,
66
63
'.•.-•— XXVI. — Quefaut-il faire pour apprendre avlvreî 66 i
.
<
''' — XXVII.— Delà diversité des idées, et des secours .'
que nous devons nous ménager con-
tre elles 69
— XXVIII.— Il no faut pas s'emporter contre les
hommes. — Et qu'y a-t-11 de grand,
qu'y a-t-il de petit dans lés ehoses
humaines ? ' .' 71
,
—
- XXIX.
XXX. — Quo
-
De la force de l'ame.
faut-il avoir
.
présent à
. .
.
.
l'esprit
.'
dans
.
. ,
78
—
—
1".
II.
III.
les précautions
— Du calmo de l'ame
.......
— L'assurance n'est pas Incompatible avec
.....
—
prit untr le soin de ses affaires 94
. .
— VI. — Des choses Indifférentes 98
— VIL — Comment faut-Il consulter les oracles î. 101
— Vltt. — De la naluro du bien 103
IX. On n'est pas de force a.rempllr son rôle
......
— —
d'homme, et l'on se charge encore do
celui de phllosopho 106
— X. — Comment de nos différents titres on
.
peut déduire nos différents devoirs . 109
— XL — Quel est lo commencement de la philo-
sophie 112
.
XII. — Des discussions US.
—
—
—
XIII.
XIV.
--De l'inquiétude
ANasort
118
122
—
—
XV.
XVI.
dans co qu'ils ont décidé
— Nous ne nous préparons pas aux Juge-
....
— Sur les gens qui persistent obstinément
;:,
;
'jf- t—'.
iV'".'
'',--','—
—
'
XX.
XXL
.
que pour en discourir
~
....
XIX. — Sur ceux qui n'embrassent la philosophie
14ï!;
ContrelesEplcurlensetlcsAcadèmlclens. • 14!?.':
Des choses dont on ne convient pas. . 182^
-
—
—
XXII. -
XXIII.—
Do l'amitié
Sur le talent do la parole . . . .'.
186/
16.1;
— XXIV.— A quelqu'un qu'il n'estimait pas . 167;;
171 j
. .
XXV. — Nécessité de là Logique
—
— XXVI. — Quelle est la vraie nature de rr- fautes î 172
LIVRE TROISIÈME.
....
—
l'élève, et de notre négligence de co
qu'il y a do plus important 186
— III. — Do cç qui sert de matière à l'homme de
bien, et du principal but de ses efforts. ' 183
' iv. Contre ceux qui au théâtre donnent des
— —
marques Inconvenantes de faveur. . 188
:
_ V. — Contre ceux
malades
qui pattentparco qu'ils sont '
187
— » VI. — Miscellanécs 190
—, VIL — A un disciple d'Eplcuro qui était chargé
do réformer des villes libres. . 19l,
—
—
VIII. —
IX. —
un procès.
.....
Commo il faut s'exercer contre ce que
les sens nous montrent
.........
. .
190
'
.
— XIII. —
XIV. -
qu'est-co qui est abandonné î
Ça et ta.
...
Qu'est-ce que c'est quo l'abandon! Et
206
2Ô>
—
—
—
XV.
XVI. —
—
der chaque choso .......
C'est après more réflexion qu'il faut abor-
213::
;. - XVIL - Sur la Providence 2tïP
344> .
?*"
-:-,.' ' TABLE DES MATIERES. r* ~> S -.-**
,
*
* ~
- ! ht».
CHANTRE XVI1L — H no faut pas se troubler des nouvelle**. 216',
' — XIX. — pe l'homme ordinaire et du philosophe. 217
— XX. — On peut tirer profit du toutes les choses
extérieures 2,18
. . . . . . . . .
'
Contre ceux qui se mettent trop aisé-
*
— ' XXI.' — - ;•;
; ment à donner des leçons do philoso-
':
—
—
XXII. —
XXIII.—
phie
Sur l'Ecole cynique .......
Contre ceux qui lisent ou discutent par
désir de se montrer . . . _•'. . .
22ÔV
223.
237
— XXIV. — II ne faut pas s'attacher à ce qijl ne dé-
'..—
—
.
XXV. —
XXVI. —
pend pas de nous. .
LIVRE QUATRIÈME
CBAPIÎRR I". — De la liberté 266
— 11.
— Sur nos liaisons . . . 290
— III. — Quelles choses faut-Il échanger, et contre
quelles autres ? 291
. —
—
—
IV.
V.
VI.
<
-r
—
—
l'inaction.........
Sur ceux qui voudraient vivre dans
—
Vil.
VIII. —
—
..........
Comment on s'élèvo au-dessus de la
crainte.
.......
Sur ceux qui se hâtent trop de Jouer lo
rôle de philosophe
.
311
317
— IX. — A un homme qui était tombé dans l'im-
pudence 323
— X. — Quelles sont les choses que l'on doit mé-
priser 1 Et quelles sont celles pour les-
quelles on doit faire autrement î, 323
. .
XL De la propreté 830
—
—
—
XII.
XIII.
-
—
—
De l'attention
Pour ceux qui partent trop aisément
.
335
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J.-J. AMPÈRE, de t'Acni#le fwîalso; : '
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Philosophie des,deux Ampère. 1 yot, Jn-IÔ..'......>;,*
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Vie deSocratY.'l,yol. tn-16.v..-
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VIOTOB COUSIN.'-;
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Histoire générale de la Philosophie, depuis les temps les plus anciens.; :
V * Jus&ùrau xix' siècle. W édition définitive, avec les deYnlères" hôtes'v
', s,uamentéo d'un chapitré Inédit sur M t'hiloiophie Aei&i
i•:.''-..de i auteur*PEgiisë
Pem de et accompagnéeti'uné'tabté analytique. -ïvOI/A/jM
>y. in-t6...M..^.^î.v.1....i.....;..A,i.;i)^iA.......... y5 îp|-
££h' ' ,\' .':"''' PAUL DEÙSSEN. ""''"••'.'''' ••'.'.;'-;*^;-
Le» éléments de la métaphysique, traduction dudocteurE. NvssRi<tg.^'
Revue et approuvée par l'au^eur^l vol. tn-.16i.>>. .;.y. .s..'. 4 $/>&
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La yté tutttfô rf«fo«l h
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anliqut tt la MMéé rfibâef'tft, kr. VS
Sagem H
>'ik Sàgéss'Cantlque, — L'Idée de; la survlvan0e,djBS lei. (SiyjUsaKotisv.\
^^^hllCiifàM^traditlons et monuments ..pWhlètèrittQfi$.';fe:^|'!^;,
.vTpiSttbièrsaùVages.— Les Chinois.—Les Egyptiens;—-JJB^HindOu's.ft'.ï
^y Les RÔiflatris,' ktf Le Christianisme. -: •fllfo'MflaUtô èohclÏÏlôB^&
VfielledàW lesjgjlsei protestantes. — u'spMtlsme'et.là théosùtiv;
,\'lpm,--iiM Sefénàè moderne, Déductions"tirées dèâ sçléne|ï4
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.'^ifot^am.«tntW|«.\i!^-l(>HWn^'*'l vpL lh-lÔ(f.|v...'..../^;3jM!)f
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Selenc» âVpolït dé '
philoiophlque.'4-JÈexôsmoi 'd'Aléa';'
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5 ^ Là philosophie naturelle itfHerschéll. ^iLM*:*;:
''étoile'* flla'nïes.'.-* Àmpefè.ë't l'électro-maBhétlsm'e, -é L4 ehàw.)'^''
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