Le Fana de L'aviation Hors-Série N.11 Collection Avion Moderne 2018
Le Fana de L'aviation Hors-Série N.11 Collection Avion Moderne 2018
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des textes et illustrations qui lui sont envoyés
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sous la seule initiative de leurs expéditeurs.
90 DE TAILLES
INTRODUCTION
DE MANHATTAN À HIROSHIMA
5
CHAPITRE 1
Le canard du delta
Rafale : retour sur une
formule aérodynamique
gagnante. L’association
canard et aile delta offre
un compromis des plus
intéressants.
Par Michel Bénichou
Le démonstrateur du Rafale,
plus gros que l'avion de série,
mais avec un empennage
canard plus petit.
(Dassault Aviation K. Tokunaga)
6
P
ar son allure, le Rafale est Sans entrer le moins du monde dans sont bien moins efficaces que sur un
apparu comme une grande les détails, rappelons que, quand un bord de fuite droit, apportant à l'amé-
nouveauté. Si cela avait été mobile atteint la vitesse du son, il gé- lioration des performances, à basse
tout à fait le cas, cela aurait nère devant lui une onde de choc. Ceci vitesse, un maigre progrès.
signifié qu'avant de dispa- fut établi en 1871, peu après la guerre
raître en 1986, Marcel Dassault au- franco-prussienne, et mis en évidence Les avantages
rait fait une bien étonnante révolu- en 1887 par Ernst Mach grâce à la
tion, lui qui, depuis 1948, développait strioscopie. Depuis l'avant du mobile, de la voilure delta
pas à pas une même formule d'avion cette onde forme un cône. Epaisse de La si importante épaisseur rela-
de combat avec autant de prudence quelques microns, elle est créée par tive est l'épaisseur maximale de l'aile,
que de soin. Nous aurions bien des le changement d'état de l'écoulement exprimée en pourcentage de la lon-
raisons à ne pas croire à un tel bou- de l'air qui, de supersonique, rede- gueur de la corde moyenne (distance
leversement. En réalité, le Rafale est vient subsonique avec (donc et entre du bord d'attaque au bord de fuite
en parfaite continuité avec les avions autres) une sensible augmentation de mesurée parallèlement à l'axe de
de combat Dassault, alliant formules pression (transformée en boum par l'avion). Sur une aile en delta pré-
éprouvées et audace technique. nos tympans). De manière différente, sentant une très forte flèche, la corde
265 esquisses furent analysées par l'Allemand Adolf Busemann, peu étant très longue, une aile d'assez forte
le bureau d'étude entre 1978 et 1983 avant 1935, puis le Russe Vladimir épaisseur possède une faible épais-
avant que l'architecture générale de V. Strouminsky, et enfin, l'Américain seur relative (3% sur Concorde !) ;
l'ACX (avion de combat du futur) soit Robert Thomas Jones en 1945, étu- elle offre un volume utile important
figée. Presque toutes présentaient une diant ce phénomène dit alors de la pour les roues et le carburant. Une
voilure en delta assistée par un em- « compressibilité » (1), avaient défini charge alaire plus faible, favorable
pennage canard. Comme on sait, les l'aile en flèche et à faible épaisseur à la maniabilité, est plus facile à
canards, oies et cygnes ne ressemblent relative pour faciliter le vol superso- construire, ; elle est légère et plus
qu'à eux-mêmes lorsqu'ils volent avec nique. En schématisant, considérons robuste puisque son emplanture est
les ailes loin derrière un long cou, qu'une voilure en flèche reste à l'in-
comme aurait dit M. de La Fontaine. térieur du cône d'onde de choc, dans
Le plan canard est à l'origine, en 1912, un écoulement subsonique ; plus la (1) En vol lent (jusque vers 650 km/h,)
l'air s'écoule autour d'un mobile comme
un empennage positionné à l'extré- vitesse de l'avion est élevée, plus le s'il n'était pas compressible. Lorsque
mité du « bec », une formule inaugu- cône est étroit, plus la flèche doit être sa vitesse atteint la vitesse du son ou
rée (sans le savoir) par les frères accentuée, et plus ses inconvénients Mach 1, se produit l'onde de choc, comme
Wright en 1902 ! s'accumulent. Difficile à fabriquer, si l'air devenait soudain compressible.
La compressibilité est accompagnée
lourde, l'aile en forte flèche possède notamment par une brutale augmentation
Les imperfections de fâcheuses caractéristiques à basse de la traînée aérodynamique et un recul
du centre de poussée sur la voilure.
vitesse en décrochant à ses extrémi-
de l'aile en flèche tés ce qui provoque un moment ca- (2) En 1928, l'aérodynamicien suisse Jakob
Marcel Dassault l'a souvent ré- breur (autocabrage) et le décrochage Ackeret désigna « nombre de Mach », en
pété : s'il avait arrêté son choix sur de l'avion. Le tout est plus ou moins hommage à Ernst Mach, le rapport entre
l'aile en delta en 1952 – sans être le combattu par divers moyens plus ou la vitesse d'un mobile et la vitesse du son
(laquelle varie selon la température et
seul, loin de là –, c'est parce qu'elle moins lourds compliquant la fabrica- la densité du milieu). Mach 1 = vitesse du
offrait sur l'aile en flèche de précieux tion. En outre, sur un bord de fuite en son. Mach 0,8 = 80 % de la vitesse du son.
avantages dont celui de la légèreté. forte flèche, les volets d'atterrissage Mach 1,2 = 1,2 fois la vitesse du son.
longue. Grâce à la voilure en delta et dence, quand l'avion est très cabré sur partir de la fin de 1967, pour réduire
malgré un moteur jugé trop peu puis- sa trajectoire. Elle impose donc, entre les distances de décollage et d'atter-
sant, le Mirage III A fut, en octobre autres, une distance de décollage rissage et améliorer la maniabilité des
1958, le premier avion européen à longue et une vitesse d'atterrissage Mirage III S de la Troupe d'Aviation
dépasser Mach 2,2 (2), soit plus de élevée. Le Mirage III C, avec une voi- suisse, des « moustaches » rétrac-
deux fois la vitesse du son. lure de III A améliorée, atterrissait à tables de 0,59 m2 possédant bec et
180 nœuds (334 km/h) ; il avait en volet furent essayées par Dassault
Les inconvénients conséquence besoin de longues pistes. sous le nez d'un Mirage III R de série,
Or, dès les années 1950, rien qu'en surnommé Milan. En 1970, le proto-
de la voilure delta France, de nombreux projets d'avions type d'un futur Milan de série fut
Malheureusement, la voilure en de combat supersoniques avaient présenté aux Suisses qui, finalement,
delta a aussi un sérieux inconvénient. comporté une voilure principale en renoncèrent à acquérir un avion nou-
Sans se comporter aussi dangereuse- delta, avec, sous l'avant du fuselage, veau. A la même époque, les Suédois
ment à basse vitesse qu'une aile en une voilure secondaire, elle aussi en faisaient voler le Saab 37 Viggen, in-
forte flèche, elle ne permet pas le vol delta. Telle était l'architecture du tercepteur supersonique conçu pour
lent, parce qu'elle offre des capacités Nord 1 500 Griffon qui atteignit M 2 pouvoir atterrir et décoller en moins
manœuvrières réduites à forte inci- quelques jours après le Mirage III. A de 500 m avec une voilure principale
8
de 300 m, et c'est surtout la maniabi-
lité qui s'en trouva grandement amé-
liorée, car l'augmentation de l'angle
d'incidence limite de l'avion rédui-
sait de 500 m le diamètre du virage.
Même s'il n'est pas exhaustif, ce
rappel suffit à montrer que, si les em-
pennages canard étaient utiles aux
avions à voilures en delta, ils n'étaient
pas encore satisfaisants car leur
étaient substitués plus souvent sur
bien d'autres avions des surfaces
d'apex fixes. Pour être très efficace,
l'empennage canard des avions à ailes
delta devait être pilotable, ce qui
s'avérait très compliqué avec des com-
mandes de vol classiques. L'avène-
ment des commandes électriques,
c'est-à-dire du pilotage par ordina-
teur, permit de les manœuvrer auto-
matiquement pendant le vol sans
accroître la charge de travail du
pilote ; le calculateur détermine ins-
tantanément, selon les évolutions
demandées, la vitesse et la charge, la
position des empennages canard
comme des autres gouvernes. Néan-
moins, ce type d'empennage appor-
tait une solution légère et peu coû-
teuse au problème posé par les
militaires qui voulaient des avions très
agiles, supersoniques, emportant des
charges très lourdes avec d'excellentes
qualités de vol à basse vitesse. Ce qui
avait été essayé jusque-là ou était alors
expérimenté (ailes à géométrie va-
riable, tuyères orientables) avait plus
d'inconvénients que d'avantages.
La multiplication
des canards
C'est ainsi qu'apparurent en
Europe, coup sur coup, les Saab
Grippen, EFA/Typhoon, et Rafale
avec des empennages canard mobiles
pour améliorer la maniabilité, aug-
menter la capacité d'emport, et abais-
ser la vitesse minimale de vol, donc
pour décoller et atterrir sur des dis-
tances plus courtes. Sur certaines ver-
sions du Sukhoï 30 russe, des gou-
en delta couplée à un grand empen- des plans en forte flèche, placés un vernes canard furent même ajoutées
nage canard fixe muni de gouvernes peu plus haut, dont l'angle de calage aux apex existants.
au bord de fuite. pouvait être modifié manuellement Forts de l'expérience acquise avec
En 1976, les Israéliens présentè- et par incréments en vol. En 1982, les Mirage 4000 et III NG, les ingé-
rent le Kfir C2 (développement du Dassault fit voler son ultime amélio- nieurs de Dassault furent d'emblée
Mirage 5) doté de petites surfaces tri- ration du Mirage III, le Mirage III NG convaincus que, pour l'ACX, le « delta
angulaires en arrière de l'habitacle. Il (nouvelle génération), muni de com- + canard » était le plus prometteur, à
est difficile d'imaginer que la société mandes électriques et de plans ca- condition que ces empennages fus-
Dassault resta en dehors de cette mo- nards en delta, assez importants sent pilotables et de grandes dimen-
dification importante qui améliorait (1 m2 au total), mais fixes, en arrière sions (5% de la surface alaire). D'ores
sensiblement les performances de des entrées d'air, associé à un apex et déjà, leur position avait été déter-
l'avion. Les Mirage 2000 et 4000 fi- (prolongement) du bord d'attaque minée par de longs essais, proches de
rent l'actualité des années suivantes. des ailes à l'emplanture. En 1983, les la voilure principale pour interagir
Le premier, en vol à partir de 1978, Suisses modernisèrent leur Mirage avec celle-ci en accroissant la por-
possédait de petites surfaces rectan- III S avec des empennages canard co- tance aux basses vitesses ; l'empen-
gulaires fixes en arrière des entrées piés en plus petit sur ceux du Kfir C2. nage canard agit comme une sorte de
d'air, sur le second, en 1979, revinrent La distance de décollage était réduite bec de bord d'attaque. Cet empen-
9
LE CANARD DU DELTA
Vue du Mirage III NG, où apparaissent magnifiquement l'empennage canard, les apex du bord d'attaque, mais aussi les bords
d'attaque vrillés propres aux Mirage III pour ralentir la vitesse de décrochage aux grands angles d'incidence. (Dassault Aviation)
Le Mirage 4000 en vol. Ses petits empennages canard sont bien visibles. (Dassault Aviation)
10
La fumée met en évidence les tourbillons sur la voilure du Rafale, qui dynamisent la couche limite
en favorisant la portance aux grands angles d'attaque. (Dassault Aviation/Sébastien Mousty)
nage était placé en arrière de l'habi- pacité du Rafale d'emporter 9 500 kg des avions légers, la vitesse d'approche
tacle pour ne pas gêner la visibilité du de charges externes (presque la masse a été abaissée jusqu’à 90 nœuds
pilote, nécessairement bonne sur un totale d'un Mirage III C), d'atteindre (167 km/h), en deçà des limites im-
avion embarqué comme sur un avion M 1,8 et approcher à l'atterrissage à posées en exploitation normale.
polyvalent destiné autant à des mis- 120 nœuds (220 km/h, 100 km/h de Les ingénieurs, qui conçurent le
sions air-air qu'air-sol. L'empennage moins que le plus petit et plus léger Rafale, n’ont cessé d'affirmer qu'il
canard peut faire office d’aérofrein. Mirage III) pour, grâce à de puissants doit une grande partie de ses quali-
L'ACX devait réaliser les souhaits freins au carbone, s'arrêter normale- tés à sa formule aérodynamique :
exprimés par l'armée de l'Air depuis ment en 450 m sans avoir à utiliser de « Δ canard + entrées d'air semi-ven-
presque ses origines, avec une poly- parachute-frein. Lors des essais, avec trales. » ■
valence exceptionnelle. Les essais du
Rafale A démonstrateur le confir-
mèrent en tout point, indiquant aussi
l'utilité d'agrandir les empennages
canard sur les plus petits Rafale de
série. Comparaison fut alors facile-
ment et fréquemment faite avec l'ar-
chitecture moins avantageuse de
l'EFA/Typhoon, il est vrai conçu au
départ pour l'interception avec des
moteurs superbes, mais moins adapté
à d'autres missions à cause de sa confi-
guration.
La preuve
par l'évolution
L'efficacité notable de la formule
du Rafale se traduit de manière évi-
dente lorsque l'on a l'occasion d'as-
sister aux démonstrations en vol de
ces avions à la maniabilité époustou-
flante, le Rafale semblant d'ailleurs
de loin le plus agile. Elle est traduite Les canards et les entrées d'air semi-ventrales du Rafale :
de manière moins visible par la ca- une recette aérodynamique raffinée. (Safran/Anthony Pecchi)
11
CHAPITRE 1
Le train d'atterrissage
12
du Rafale
13
LE TRAIN D'ATTERRISSAGE DU RAFALE
14
L
e Rafale Air et le Rafale l'avion cabre pour s'envoler). Sur le les trois atterrisseurs et la crosse du
Marine sont les mêmes Rafale, celle-ci peut atteindre 19° par Rafale Marine sont liés par une barre,
avions à une différence prin- seconde. Un tel dispositif permet, à absente du Rafale Air.
cipale près : leur train d'at- masse égale, de décoller à une vitesse Voici donc pourquoi la masse du
terrissage. Celui du Rafale plus basse, ou, à vitesse égale, d'em- train d'atterrissage du Rafale Marine
Marine est plus lourd puisqu'il doit porter plus de charge, la distance du est environ quatre fois supérieure à
pouvoir absorber, à l'appontage et au catapultage (75 m) restant constante. celle du Rafale Air. Mais cela ne
catapultage, des efforts beaucoup plus L'atterrisseur avant braque aussi constitue, en vol, aucun handicap,
importants, et, puisqu’il apporte aussi beaucoup plus sur le Rafale Marine, car, comme le dit Yves Kerhervé :
une assistance à l'action des gou- pour faciliter le roulage sur le pont ; « En vol, on ne peut pas distinguer le
vernes au décollage. Cet excédent de une fois l'avion posé, il peut encore Rafale Air du Rafale Marine, sinon
masse a été jugé superflu sur le être déverrouillé pour pivoter de 70° par les cocardes. » Ainsi les pilotes
Rafale Air. par rapport à l'axe de l'avion quand des deux versions du Rafale peuvent-
Les Rafale se posent comme tous celui-ci est tracté ou poussé. Enfin, ils suivre la même formation. ■
les avions, selon la même technique,
en arrondissant la trajectoire de leur
approche à proximité du sol pour
prendre contact en douceur avec celui-
ci. Mais, sur un porte-avions, ils ap-
pontent sans arrondi – une technique
propre à tous les avions embarqués
donnant plus de précision au toucher
des roues afin d'accrocher les brins
d'arrêts avec la crosse. C'est pourquoi
le train d'atterrissage des avions em-
barqués est dimensionné pour absor-
ber beaucoup plus d'énergie.
Les Rafale Air disposent eux aussi
d'une crosse d'arrêt en secours, pour
être immobilisé sur les pistes où la
barrière d'arrêt, qui est levée pour
stopper un avion arrivant trop vite,
a été remplacée par des câbles dis-
posés près du sol comme les brins d'ar-
rêt sur un pont de porte-avions. Ce-
pendant, la crosse du Rafale Marine
est plus robuste parce qu'elle est
conçue pour absorber, une fois de plus, Pour le jeu des Sept différences ! L'atterrisseur avant du Rafale Air, ci-dessus
une énergie sensiblement supérieure. (Dassault Aviation/A. Bonfort), et du Rafale Marine, ci-dessous (Dassault Aviation/S.
Randé), une fois la barre de traction abaissée sur la catapulte (le hold-back
n'appartient pas à l'avion). La barre de contreventement est bien visible.
Un atterrisseur
multifonction
L'atterrisseur avant du Rafale
Marine est facile à reconnaître. Il est
plus long, ce qui donne au sol une as-
siette plus cabrée à l'avion, favorable
à l'envol sur courte distance, et, pour
la première fois sur un avion français,
il porte, devant les roues, la barre de
lancement qui s'accroche au sabot de
la catapulte. Et, comme cette dernière
peut tirer jusqu'à 80 tonnes comme
le rappelle Yves Kerhervé, un des pi-
lotes d'essais du Rafale chez Dassault,
l'atterrisseur doit être renforcé par
une grosse barre de contreventement
qui apparaît derrière lui. Enfin, une
innovation de Dassault : le « train sau-
teur », ce que la NASA a appelé «
Jump Strut » en expérimentant son
utilité sur un avion à décollage et at-
terrissages courts (STOL) au début
des années 1990. Au catapultage, l'at-
terrisseur avant du Rafale Marine
avant tend à s'écraser, mais lorsque
la barre de lancement se décroche du
sabot, il se détend comme un ressort
en aidant la rotation (l’instant où
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CHAPITRE 1
Drones de combat :
les guerres futures
Le 6 novembre 2002, au Yémen, un drone ne décennie plus tard, l’US
s’armer pour
extérieure, une
bombe guidée laser
Paveway fixée sous
l’aile droite. Apparu
en 2001, il peut
atteindre 480 km/h et
voler 30 heures, une
liaison satellite (sous
le radôme avant) lui
donnant une allonge
stratégique. (Usaf)
mation des années 1990, sa maturité temps de l’aviation militaire. La chute force est devenue la nouvelle grille
technologique et opérationnelle s’est du mur de Berlin en novembre 1989 de lecture de la géopolitique contem-
affirmée. Plus récemment, le drone annonce une révolution globale. poraine. La défense redevient priori-
de combat, avion d’arme sans pilote, Géopolitique, économique, taire.
est en plein développement. Dans un elle est aussi technologique. C’est celle Les premiers drones armés sont
univers inédit de violence mondiali- de l’information et du numérique. issus des nouveaux drones de rensei-
sée, ces deux systèmes répondent à Soutenus par une expansion écono- gnement à grande autonomie. Fixé à
un besoin de sécurité nouveau, étendu mique inédite, les drones armés s’ins- leurs frêles voilures, l’armement ne
à l’échelle planétaire. L’aviation crivent dans l’univers militaire anti- peut être composé que de munitions
pilotée, seule, ne peut y répondre. guérilla consécutif aux attaques du légères : des engins antichars ou des
11-Septembre 2001. Les années 2010 roquettes à guidage laser. La formule
Drones armés et drones restaurent les oppositions interéta- répond au besoin de neutralisation
tiques. Revendications régionales – des groupes terroristes qui trouvent
de combat : pourquoi Ukraine, Crimée, mer de Chine, am- refuge dans les zones reculées du
et comment ? bitions indiennes, prolifération nu- monde, à l’image d’Al Qaeda qui
cléaire, conflits persistants du Moyen- opère depuis l’Afghanistan. Le drone
Pourtant, le concept de drone armé Orient – et terrorisme territorialisé : armé vient appuyer les forces spé-
est ancien. Il remonte aux premiers l’expression violente de rapports de ciales, les hélicoptères et l’aviation de
19
DRONES DE COMBAT : S’ARMER POUR LES GUERRES FUTURES
combat sur des zones étendues face Ces systèmes apportent le nouveau autonome n’est pas contraint par les
à des adversaires bien dissimulés.Telle vocable de drone MALE (Moyenne limites physiques d’un pilote. L’ar-
est la leçon des opérations en Afgha- altitude et longue endurance), ou de mement est emprunté aux avions de
nistan déclenchées par l’Otan en sou- MALE armés lorsqu’on lui ajoute un combat. Le tout doit garantir le suc-
tien des Etats-Unis suite au 11-Sep- armement. cès d’une action offensive face à un
tembre. Plus encore, ces engins ont Le drone de combat prend la dé- adversaire étatique apte à protéger
toute liberté dans un ciel dépourvu signation d’UCAV (Unmanned com- son espace aérien au moyen de
de défenses sol-air sophistiquées bat air vehicle). Rapide, furtif, ma- défenses sol-air perfectionnées. Ils
(hors quelques missiles Manpads). nœuvrant, cet avion de combat auront aussi à opérer avec les avions
Drone BQM-34 Firebee de l’US Air Force en configuration de renseignement électronique, le capteur étant placé dans
la pointe avant. Ce système a également été déployé par l’armée de l’Air israélienne au début des années 1970. (Usaf)
20
Vol du premier RQ-1
Predator armé de
deux missiles anti-
char Hellfire. Les pre-
mières expérimenta-
tions de Predator
armés sont conduites
en 2001. (Usaf)
de combat pilotés, éventuellement en Quatre de ces bimoteurs décollent engins télé-pilotés sont cantonnés à
formations combinées.A ce jour, dans des îles Salomon en juillet 1944 pour un rôle très secondaire de ciblerie
les deux cas, l’homme est toujours frapper des navires japonais. Ils font pour l’artillerie sol-air. On citera, sur
dans la boucle de décision d’ouver- but sur les cargos Yamazuki et Maru, ces années 1950, les engins français
ture du feu. et 46 de ces engins interviendront en CT10 dérivés du V1 ou le Turana en
1944 à Guadalcanal. Il faut lire le Fana Australie. Ils sont les premiers pas
Le centenaire n°286 (septembre 1993) pour décou- timides d’une nouvelle révolution. Ils
vrir cet épisode. Au sortir de la Se- servent aussi au recueil de particules
du drone armé conde Guerre mondiale, les nouveaux radioactives lors des tests nucléaires
Victorieux, en 1918, des empires
centraux, Etats-Unis, France et
Royaume Uni se présentent déjà
comme des pionniers. La Marine na-
tionale veut exploiter la téléméca-
nique, une innovation qui permet le
pilotage à distance de plans aérody-
namiques. Elle est utilisée pour mettre
au point un biplan téléguidé armé
d’une torpille. Testé au large de Tou-
lon en 1920, c’est l’ancêtre tout à la
fois du missile Exocet et du drone
armé. Il n’est pas donné suite à ce sys-
tème, mais il permet de très nets pro-
grès en matière d’instruments de bord,
notamment le pilote automatique.
En 1936, l’US Navy lance le pro-
jet N2C-2, un biplan Curtiss télé-
commandé porteur de bombes.
Direction la guerre du Pacifique. La
marine américaine met sur pied le
Special task air group-1, une unité qui Drones BQM-34 Fireebee modifiés au début des années 1970 pour
met en œuvre des bimoteurs Factory l’emport d’armes air-sol de précision. On distingue, sur le chariot de
TRD-1, des bombardiers télépilotés. gauche, la bombe planante téléguidée Studdy Hobo. (Usaf)
21
DRONES DE COMBAT : S’ARMER POUR LES GUERRES FUTURES
22
Reaper armé de bombes Paveway et de missiles Hellfire. Cette configuration développée en vue de
limiter les engagements de troupes au sol répond aux nouveaux impératifs opérationnels imposés
par les guerres asymétriques consécutives aux attaques terroristes du 11-Septembre 2001. (Usaf)
atmosphériques, à partir d’avions pi- tant sur la transformation de l’engin et Mk-82. Chaque Firebee emportait
lotés B-17 ou T-33 dronisés. La guerre de reconnaissance BQM-34 A Fire- deux munitions, une sous chaque aile.
électronique leur donne aussi l’im- bee en un drone armé. Lancé par un Cet engin est bien l’ancêtre de
pulsion. Les B-47 puis B-52 du Stra- C-130 Hercules, opérant comme un l’UCAV d’aujourd’hui. Il aurait eu
tegic Air Command font appel à de missile récupérable, l’engin était dédié mission de détruire les sites sol-air
petits missiles pour leurrer les radars à la recherche de sites sol-air. Il em- adverses dans un scénario de conflit
soviétiques, les ADM-2C Quail. Ils barquait à cette fin une caméra ou un en centre-Europe. Le projet trouve
restent en service jusqu’en 1972. capteur Elint (Electronic Intelli- appui dans les leçons du Vietnam et
gence). Le premier essai du Firebee de la guerre du Kippour en 1973. C’est
Les premiers drones armé se tient le 14 décembre 1971 aussi l’année du choc pétrolier. Mal-
auprès du 6514th Test squadron de gré la menace du Pacte de Varsovie,
de combat : un héritage l’US Air Force. L’expérimentation les dépenses militaires sont regardées
de la guerre du Vietnam prévoyait le tir d’un missile téléguidé de près. Il devient impossible d’em-
Maverick qui parvient à frapper di- piler plus encore les lignes budgé-
De cette déroute, le Pentagone se rectement une cible au sol. En février taires. Déjà, s’agissant de l’arme aé-
relève en intégrant trois innovations 1972, l’exploit est renouvelé avec un rienne, les ambitions sont revues à la
majeures : les armements guidés, la Studdy Hobo, un engin guidé à auto- baisse : l’Elysée repousse le Mirage
guerre électronique, mais aussi les directeur optronique. Les expéri- 4000 et Londres ne remplace plus ses
drones. L’expert attitré de l’US Air mentations se succèdent avec les pre- bombardiers lourds, tout en renon-
Force est Teledyne Ryan. Basée à San mières armes guidées laser Paveway, çant aux grands porte-avions. Dans
Diego, la firme signe un contrat por- mais aussi des bombes lisses Mk-81 le pire des scénarios, la dissuasion
23
DRONES DE COMBAT : S’ARMER POUR LES GUERRES FUTURES
Vue d’artiste du projet Airbus Zephyr S, un drone géant. Sa propulsion solaire lui permettra de rester
plusieurs mois dans la stratosphère pour des missions de renseignements ou de télécommunications.
Un démonstrateur a réussi à tenir en l’air 25 jours entre juillet et août 2018. (Airbus)
vole en formation entre un Falcon 7X d’autres études montrent que les aux Etats-Unis une force de plus de
et un Rafale. La parité technologique drones auraient permis de réduire les 250 appareils, 300 Reaper étant com-
est démontrée et préfigure le futur dommages collatéraux de moitié. mandés ! L’avenir de l’UCAV est lui
SCAF (Système de combat aérien aussi fixé. Il apportera un surcroît de
futur) inscrit dans la loi de program- MALE armés et UCAV : puissance de feu dans un scénario
mation militaire française 2019-2025. d’ouverture d’itinéraires, par un usage
Dans son livre « Histoire de l’univers en expansion d’armes de précision air-sol tirés en
drones », Oceane Zubeldia dresse un des robots de combat appui des avions pilotés. Si le MALE
bilan contrasté. Selon la New Ameri- armé opère en contexte de guérilla,
can Foundation citée dans son ou- Les Reaper armés ont été em- l’UCAV est l’arme nouvelle conçue
vrage, les frappes de drones auraient ployés en Libye en 2011, notamment pour les conflits symétriques inter-
causé la perte de 1667 à 2614 per- pour frapper des missiles sol-air étatiques. On peut l’imaginer comme
sonnes, dont 20% de civils.A l’inverse, SA-8. En 2014, ils représentent déjà l’instrument d’une entrée en premier
Salon du Bourget 2015 : l’industriel chinois AVIC s’est très largement inspiré des drones américains
Predator et Reaper pour développer le drone armé Wing Loon. (P. Wodka-Gallien)
26
Vue d’artiste du futur drone de ravitaillement Stingray destiné aux porte-avions
de l’US Navy. Le Pentagone a accordé à Boeing une première enveloppe de 805 millions
de dollars pour le développement de quatre prototypes. (Boeing)
sur un théâtre dès lors que la supé- Dans une configuration très tactique, sion dans tous les champs des pos-
riorité aérienne n’est pas assurée. ce sont des engins lents et persistants sibles et des configurations. Vecteurs
L’éventail des missions est étendu au sur une zone d’action. Ces engins de supériorité technologique,
ravitaillement en vol, orientation létaux sont dotés d’une télémétrie pla- les drones, en leur qualité de robot
confirmée le 30 août 2018 par le choix çant l’homme dans la boucle de aérien, toutes catégories confondues,
du MQ-25 Stingray de Boeing comme décision d’engagement, d’une optro- portent une forte charge psycholo-
futur drone de ravitaillement en vol nique évoluée et d’une charge ex- gique, ce qui n’est pas le moindre
de l’aviation sur porte-avions. Cata- plosive. Dès la détection de la cible, de leurs atouts. ■
pulté comme un chasseur embarqué, sur ordre de l’opérateur, ils se trans-
il emporte une perche de ravitaille- forment en missile par impact direct.
ment en vol et des bidons sous voi- Les Israéliens, pionniers des drones Pour en savoir plus
lure, son avionique reposant large- de surveillance depuis les années 1970,
- Smart Weapons
ment sur l’intelligence artificielle pour ont beaucoup investi sur ces systèmes.
Top secret history of remote controlled
toutes les opérations de ravitaille- Cette troisième arme trouvera sa
airborne weapons. Hugh Mc Daid and David
ment. Un contrat de développement place dans un combat lacunaire en
de 805 millions de dollars a été signé. milieu urbain comme en terrain libre. Oliver. Barns & Noble books. 1997.
Quatre prototypes du Stingray sont L’US Army, pour sa part, imagine des - La Guerre à ciel ouvert
attendus pour août 2024. Anticipant drones rôdeurs légers pour en équi- Valéry Rousset. Edition Addim. 1995 (à consul-
sur un combat entre robots aériens, per ses véhicules blindés d’infanterie, ter notamment pour l’emploi des drones de
la DARPA, l’agence de recherche du pour l’éclairage rapproché et l’ou- leurrage durant la première guerre du Golfe).
Pentagone, vient de financer un pro- verture d’itinéraires. Le drone de com- - Les Interstate TRD
jet de système à énergie dirigée pour bat futur ne se résumera pas, dans les Alain Pelletier. Le Fanatique de l’aviation.
drones. Dans la foulée, les Russes, les décennies prochaines, à des géants du N° 286. Septembre 1993.
Chinois, les Britanniques et les Fran- ciel télépilotés, armés de missiles tac-
çais (dans l’espoir d’entraîner les Eu- tiques. Les innovations sont tous azi- - Dans le nid des Predator
ropéens) sont mobilisés sur des pro- muts et les combinatoires sont infi- Philippe Wodka-Gallien. Air Zone Magazine
jets UCAV. Au salon MAKS de nies. L’exercice d’anticipation nous n°32. Mars-avril 2001.
Moscou de 2007, MiG dévoile le Skat invite donc à imaginer une guerre fu- - Drones
(raie en russe). Shenyang Aircraft ture faite aussi de nano et de mini- Acteur incontournables de notre avenir ?
Design Institute, du groupe d’Etat chi- drones. Exploitant le potentiel de l’in- Jean-Christophe Damaisin d’Arès. Collection
nois AVIC, s’affiche avec le Sharp telligence artificielle, ils seront aptes Stratégie & Défense. Editions L’esprit du livre.
Sword 601-S qui effectue son premier à se regrouper en essaims pour frap-
- Drones de combat
vol le 20 novembre 2013. BAE per leurs cibles, véhicules ou person-
Systems est présent avec le démons- nels. Du très petit aux géants du L’Europe cherche sa voie. Guillaume Steuer.
trateur Taranis. ciel : des drones à propulsion solaire Air & Cosmos N° 2329. 5 octobre 2012.
resteront plusieurs semaines, voire - Histoire de drones
Percer le brouillard des années, en vol évoluant à très Oceane Zubeldia. Editions Perrin. 2012.
haute altitude (au-delà de 20 000 m) - Le Neuron, une coopération européenne
des guerres futures comme de pseudo-satellites. Ce futur fructueuse
Que dire en 2019 ? MALE armés se prépare dès aujourd’hui chez Air- Le Journal de l’aviation. 20 décembre 2012.
et UCAV se distinguent bien du mis- bus, à la NASA et à la DARPA. Dé-
sile au sens où ils ne font pas impact veloppé par Airbus, le démonstrateur - Drones
sur une cible. La synthèse entre les Zephyr S a déjà volé cette année en L’aviation de demain ? Michel Polacco.
deux objets a pris la forme de drones tenant 25 jours en l’air. Les drones Editions Privat. 2016.
rôdeurs, ou « Loitering amunitions ». sont désormais un univers en expan-
27
CHAPITRE 1
Guerre électronique
l’atout de la technologie
28
au XXI siècle
e
29
GUERRE ÉLECTRONIQUE : L’ATOUT DE LA TECHNOLOGIE AU XXIe SIÈCLE
Le CR-135 Rivet Joint est l’instrument majeur de collecte de renseignements d’origine électromagnétique de l’US Air Force.
La flotte comprend une douzaine d’appareils Sigint de ce type ; elle est basée à Offut Air Force Base dans le Nebraska. (Usaf)
E
n 1914, la tour Eiffel écoute confiée aux Jaguar du 3/3 Ardennes, d’un avantage militaire sur l’adver-
le trafic radio allemand. se conclut par le tir réussi d’un saire, tout en lui interdisant son usage.
Début septembre, elle repère, missile antiradar AS-37 Martel. Surfant sur les ondes qui traversent
avec l’aviation, l’évolution Dans la nuit du 17 au 18 septembre l’atmosphère, la GE se distingue
de la manœuvre ennemie. La 2018, un Iliouchine II-20 de rensei- donc de la guerre informatique, en
contre-attaque de la Marne peut être gnement russe est frappé par un termes d’objectifs comme de techno-
lancée. Le 7 janvier 1987, l’armée de missile au large de la Syrie. Entre ces logie. Apparu au début du siècle
l’Air française monte un raid com- trois événements, un point commun : dernier, ce nouvel espace de lutte ac-
plexe pour neutraliser le radar Flat la guerre électronique, ou « GE ». compagne l’émergence des techno-
Face de la base de Ouadi-Doum tenue Elle se définit comme la conquête, logies radioélectriques : la Télégra-
par les forces libyennes de Khadafi puis la maîtrise du spectre électro- phie Sans Fil en 1896, puis le radar
(déjà) au nord du Tchad. La mission, magnétique en vue de l’obtention dès 1935. Elle s’étend plus encore dans
B-17 de brouillage de la Royal Air Force. Durant la Seconde Guerre mondiale, il appuyait les raids
de bombardement alliés en brouillant les radars de la DCA allemande. (Royal Air Force)
30
Douglas EA-3B de l’US Navy. Destiné aux missions de renseignements au profit de l’aviation embarquée, il intervenait en
particulier dans la surveillance de l’activité radio-électronique au large de la Chine ou de l’Europe du Sud. (Us Navy)
les années 1960 dans le spectre infra- en Syrie encouragent les programmes tromagnétique. Aux côtés de l’Alle-
rouge et ultraviolet. Au XXIe siècle, de guerre électronique. Dans le cas magne, des Etats-Unis, du Royaume-
ce schéma reste toujours valable. français, la motivation en matière de Uni et de la Russie, la France est un
Le renseignement électronique est GE est stimulée par la guerre dans pays pionnier de cette discipline nou-
orienté sur les groupes armés terro- la bande sahélo-saharienne. En re- velle. On se plaira à rappeler que, peu
ristes, mais aussi sur les forces armées cherche constante de supériorité tech- avant la Seconde Guerre mondiale,
d’Etats constitués. Le retour des ten- nologique, la GE profite des derniers Maurice Deloraine et Henri Busignies
sions inter-étatiques observées au perfectionnements, pas tant du côté conçoivent un radiogoniomètre ré-
cours de l’actuelle décennie donne des plates-formes que du côté des ins- volutionnaire qui permet une locali-
désormais plus de légitimité encore à truments électroniques, les proces- sation instantanée des U-Boots trahis
ces dispositifs. Pour l’Otan, la crise seurs gagnant en puissance. par l’usage de leur radio. Suite à la
ukrainienne, ou la guerre persistante défaite de 1940, ils se réfugient aux
La guerre électronique : Etats-Unis avec les plans de leur
invention.
une guerre Adopté par l’US Navy, l’équipe-
de l’information ment est embarqué sur les navires
alliés, notamment les porte-avions
La GE comprend trois champs d’escorte. Il aura un rôle déterminant
d’intervention : le renseignement à dans la chasse aux sous-marins de
partir de l’écoute des émissions radio l’amiral Dönitz durant la bataille de
et radar adverses, l’autoprotection l’Atlantique. La RAF britannique est
électronique des plates-formes de pionnière en la matière. Elle met en
combat face aux menaces, pour l’es- place une unité spécialisée : le Bom-
sentiel les missiles guidés. On y ajoute ber support group 100. Avec mission
des actions offensives : le brouillage d’escorter les raids de bombardiers
et la destruction physique des défenses sur l’Allemagne.
anti-aériennes adverses. Chacun de Ses Handley Page Halifax ou
ces champs nécessite des systèmes B-17 embarquent des brouilleurs
d’armes spécifiques. afin de rendre inopérants les radars
Le premier champ est celui des aé- Freya et Würtzburg. Il y eut aussi des
ronefs de renseignement. Les experts Mosquitos dotés de détecteurs, dont
distinguent l’Elint (Electronique la mission était de neutraliser la chasse
Intelligence), qui vise les émissions de nuit allemande. Le groupe comp-
radars, et le Comint (Communication tera jusqu’à 260 appareils.
Intelligence), qui s’oriente sur les Cet épisode souligne que les
télécommunications. champs d’action de la GE évoluent
Les deux assemblés forment le peu. Simplement, les missiles ont
« Sigint », ou Signal Intelligence, que suppléé les Messerschmitt, alors que
les Français traduisent par ROEM, déjà le radar est en passe de rempla-
pour Renseignement d’origine élec- cer les yeux du pilote.
31
GUERRE ÉLECTRONIQUE : L’ATOUT DE LA TECHNOLOGIE AU XXIe SIÈCLE
Une guerre
du renseignement
La culture guerre électronique est
l’apanage des grandes nations tech-
nologiques qui ont bâti une politique
de défense souveraine. Outre les
membres permanents du conseil de
sécurité de l’ONU, on s’accorde à
ajouter Israël qui se forge une spé-
cialité en la matière suite à la guerre
du Kippour. Quant à l’Allemagne, elle
entretient une longue tradition dans
le monde électronique et celui des té-
L’Iliouchine 20 est l’équivalent russe de l’EP-3 Aries. (DR) lécoms. La France dispose pour sa part
d’une forte culture guerre électro-
nique, la discipline ayant accompa-
gné la constitution de la force de
frappe. Fondant une activité nouvelle,
derrière des sociétés comme Thom-
son ou Electronique Serge Dassault,
la France revendique son excellence
dans cette nouvelle course à la tech-
nologie, où les Etats-Unis font office
de superpuissance. Pour les aviateurs
et les marins, la guerre électronique
est à même d’assurer la crédibilité des
vecteurs porteurs d’armes nucléaires.
Cette discipline permet ainsi à un vec-
teur qui en est doté de déjouer les dé-
fenses adverses et de délivrer son
arme sur la cible à coup sûr. Cet es-
pace de bataille est un enjeu tel – la
survie d’un vecteur nucléaire en zone
hostile – qu’il inspire son titre au livre
du général Jean-Paul Siffre paru
en 2003. Celui qui sera « Maître des
Pod de brouillage d’autoprotection Barax NG sous l’aile du Mirage IV. C’est dans ondes » sera le « maître du monde ».
cette configuration que le Mirage IVP fut utilisé au-dessus de l’Irak en 2003 en appui Le renseignement d’origine électro-
des inspections de l’ONU. (P. Wodka-Gallien) magnétique reçoit alors une double
32
Un bombardier russe
Tu-95 intercepté par
un F-4D Phantom II
de l’Otan au temps
de la guerre froide.
La recherche de ren-
seignement électro-
nique est étroitement
associée aux mesures
de protection et de
dissuasions. (Usaf)
mission : anticiper une agression et œuvre le bâtiment Dupuy-De-Lôme. triels spécialisés. la mission d’organi-
connaître les performances des sys- Ce renseignement remplit deux ob- sation et de coordination de cet
tèmes de défense adverses de manière jectifs : suivre l’activité militaire ad- effort ayant été confiée à la DGA au
à élaborer les solutions de protection. verse et connaître les performances ministère de la Défense. La DGA
La GE est à cet égard un héritage électroniques des systèmes d’armes à s’appuie notamment sur le Centre
de la guerre froide qui a traversé les affronter, ceci en vue de développer d’Electronique de l’Armement à
débris du mur de Berlin. Les forces les contre-mesures adaptées. Le Rennes, désormais « DGA Maîtrise
aériennes se sont dotées d’impor- champ de bataille électronique opère de l’Information ». Pour l’avenir, en
tantes flottes d’appareils spécialisés. donc dès le temps de paix. Visant les opérations, l’action des forces de GE
L’US Air Force domine le ciel avec signaux électroniques, il est enrichi s’inscrira dans un cycle « observation,
les RC-135 Rivet Joint, la Navy met- par du renseignement sur les signa- orientation, décision, action » à un
tant en ligne des EP-3 Aries basés à tures infrarouges et sur les télémé- rythme soutenu. Le processus, piloté
terre. L’US Army dispose de sa propre tries (liaison entre missiles et stations par des états-majors interarmées ou
flotte, les RC-12 Guardrail. Ces flottes de contrôle). Le recueil fait donc l’ob- interalliés, pourra profiter d’une
sont renouvelées et modernisées : cette jet d’un traitement en temps réel ou connectivité accrue entre les diffé-
année, les forces spéciales américaines au retour des missions. Il implique une rents pions déployés sur un théâtre
ont pris en main un nouvel appareil, coopération étroite avec les indus- d’opérations. C’est tout le sens de
un Havilland Canada Dash 8 inté-
grant en soute une charge de rensei-
gnements. Opérant en mode auto-
matique, ces systèmes de recueil sont
également intégrés à des drones, en
particulier les Global Hawk. En
France, l’armée de l’Air tient à conser-
ver des moyens à la mesure des ob-
jectifs de défense. Elle reçoit dans les
années 1970 l’avion DC-8 Sarigue qui
vient compléter les avions Gabriel
(sur Noratlas, puis Transall) de la
Force aérienne tactique. L’aviation
française introduit une originalité
avec la nacelle ASTAC (Analyseur
de signaux tactiques) qui est montée
sous les Mirage F1CR de Reims, leur
électronique étant dérivée directe-
ment des systèmes intégrés aux
Gabriel. La mission est assurée aussi
par des satellites : ce sera la vocation
de Xerces, offrant de la sorte une cou- Mirage F1CR de l’armée de l’Air porteur d’une nacelle Elint ASTAC
verture mondiale. La Marine met en (Analyseur de signaux tactiques). (P. Wodka-Gallien)
33
GUERRE ÉLECTRONIQUE : L’ATOUT DE LA TECHNOLOGIE AU XXIe SIÈCLE
L’autre vocation de la GE :
l’autoprotection face
aux missiles
Les conflits modernes ont servi de
catalyseur à une technologie qui s’est
installée dans les forces armées mo-
dernes, sur tous ses champs d’action.
La vitesse ou l’altitude ne sont pas
suffisantes face aux missiles. La des-
truction de l’avion U-2 en 1959, au-
dessus de l’URSS, et les pertes subies
au Vietnam et durant la guerre du
Le C160 Transall Gabriel (deux ont été produits à la fin des années 1980 Kippour par missiles sol-air (SA-2,
sur la base du Transall NG) constitue l’ossature des moyens SIGINT SA-3, SA-6) imposent une solution.
aéroportés de l’armée de l’Air française. En centre-Europe, les Soviétiques ont
ajouté des missiles SA-4 et SA-5.
L’aviation militaire se tourne donc
vers la GE pour restaurer sa crédibi-
lité. Sur un avion d’arme, il faut quatre
éléments : un détecteur de menace
(électromagnétique, infrarouge,
laser), des contre-mesures sous forme
de leurres et de brouilleurs, une fonc-
tion de calcul pour faire le tri entre
les signaux détectés et, enfin, une in-
formation de l’équipage. Les der-
nières générations d’avions améri-
cains et russes (F-22, F-35, Sukhoï-57)
ont de ce point de vue rejoint le
concept français de systèmes intégrés
entièrement à la cellule, délaissant les
nacelles. L’électronique vient ainsi
compléter l’apport des architectures
furtives des cellules. Cette solution
élégante prend le relais des pods de
brouillage historiques que furent les
Tir d’un missile antiradar AS-37 Martel à partir d’un Jaguar. (CEV) AN/ALQ-131 et autres AN/ALQ-184.
L’US Navy avait déployé des EA-6B Prowler durant Red Flag 4-08, une session qui a également impliqué des Rafale de l’escadron
1/7 Provence. Leur présence souligne l’importance de l’entraînement des équipages au combat électronique. (P. Wodka-Gallien)
34
L’intégration poussée fut le choix fixé
pour le Mirage 2000, puis le Rafale,
ou encore l’Eurofighter. Le Mirage
2000 intègre un détecteur d’alerte Ser-
val, un détecteur de départ de mis-
siles, un brouilleur Sabre ou Camé-
léon, des lance-leurres (sur les Mirage
2000D, on les remarque de part et
d’autre du moteur et sur le fuselage).
Le Rafale reçoit Spectra, le « Système
de protection et d’évitement des
conduites de tir pour avion Rafale ».
Les lance-leurres électromagnétiques
plaqués sur les fuselages peuvent être
enrichis de leurres tractés (comme sur
le B-1 et le F-16), voire de leurres ac-
tifs largués. Les solutions ont été com-
plétées de brouilleurs directifs : des Un ATL2 de la Marine Nationale. On distingue en bout d’aile les pods de soutien
tourelles orientant un brouillage électronique. En enrichissant la connaissance de la situation tactique, la GE
infra-rouge ou laser en direction du permet d’orienter la conduite de la mission. (Marine Nationale)
missile assaillant. Désignés Dircm
(Direct infrared counter measures),
ces systèmes ont trouvé leur place sur
les avions de transport, typiquement
le C-17. On les retrouve sur les héli-
coptères de combat AH-64 Apache.
Au sujet des performances de ces
équipements, la communication s’ar-
rête là. L’escorte peut faire appel à
des brouilleurs offensifs. Ce fut la vo-
cation des nacelles AN/ALQ-99 sous
les voilures des EA-6B Prowler, jus-
qu’à leur remplacement récent par
des EA-18G Growler. Le brouillage
s’accompagne de missiles dédiés, les
engins AGM-45 Shrike développés
pendant la guerre du Vietnam, lais-
sant la place aux AGM-88 Harm et
AARGM (advanced Anti-radiation
Guided Missiles). En France, l’AS-37
Martel des Jaguar n’a pas eu de suc-
cesseur direct, l’aviation de combat
terrain ouvert, en plaine comme en tembre 2018 au-dessus de la Médi- Thales. Suite à une décision du mi-
montagne. Deux évolutions émer- terranée. L’entraînement donc est nistre des Armées du 1er mars 2018,
gent. La première touche au besoin plus que jamais sur l’agenda des uni- ces avions sont prévus pour 2023.
de neutralisation des nouveaux tés. Il s’appuie sur des centres d’ex- A dessein, la GE conserve une part
drones agressifs mis en œuvre par des pertise éprouvés : le range de Nellis de secret. Il en va de la survie des équi-
adversaires asymétriques, scénario ty- dans le Nevada pour les exercices Red pages et de la réussite des missions
pique des situations de guérillas anti- Flag, ou, plus près de nous, le Poly- confiées aux armées. La culture guerre
terroristes. L’innovation fait appel à gone de guerre électronique entre électronique est bien ancrée dans les
des brouilleurs en configuration por- Epinal et Ramstein où sont déployés forces françaises, armée de l’Air,
table ou véhicule. Dans une optique des simulateurs de systèmes sol-air. Marine Nationale, et armée de Terre.
de neutralisation, des lasers de puis- Le perfectionnement de l’autopro- Elle pénètre même notre culture po-
sance viendront à court terme se sub- tection profite depuis plus de 30 ans pulaire. Dans son volet Comint, elle
stituer aux mitrailleuses ou aux des essais de l’Otan : Mace pour est bien illustrée dans la série télévi-
canons de petit calibre. Un dévelop- les menaces électromagnétiques et sée « Le Bureau des légendes ». Ce
pement est d’ailleurs actuellement Embow, s’agissant des missiles infra- métier est aussi représenté par l’as-
financé par Qinetic, l’agence de re- rouges. L’édition Mace XIX, qui s’est sociation Guerrelec, chapitre français
cherche du ministère de la Défense tenue en Slovaquie en juillet 2018, a La Fayette de l’Association of Old
britannique. L’autre évolution nous été l’occasion de confronter le Rafale Crows, le réseau international de la
vient de la guerre en Syrie, particu- au missile du SA10, le très redouté GE. La guerre électronique trouvera
lièrement l’opération Hamilton S300, peut-on lire dans Air Actualités aussi un territoire de partage plus af-
conduite en avril 2018 par les Etats- d’octobre, le magazine de l’armée de firmé peut-être avec la guerre infor-
Unis, le Royaume-Uni et la France. l’Air. L’avenir du renseignement tri- matique. S’ajoutant à la maîtrise du
Elle tient à la grande complexité élec- colore repose, en partie, sur l’opéra- spectre, celle des réseaux est un des
tromagnétique des zones d’interven- tion CUGE (charge universelle de enjeux pris très au sérieux pour la me-
tion, où forces amies, ennemies et guerre électronique), qui a pour objet nace que le cyber fait porter à l’inté-
neutres s’entremêlent. Une telle de remplacer les capacités de ROEM grité d’un pays. Reflet d’une situation
jungle électronique impose en l’es- à l’arrêt des Transall Gabriel. géopolitique tout à la fois trouble et
pèce une identification précise de cha- Prévu par la Loi de programma- violente, la GE ouvre un domaine en
cun en vue d’éviter les incidents ami- tion militaire 2018-2025, ce pro- plein essor qui s’inscrit dans une dy-
ami ou ami-neutres, d’autant que les gramme, désigné Epicure, reposera namique nouvelle de course à la per-
systèmes d’armes gagnent tous en per- sur trois Falcon de Dassault Aviation. formance technologique, avec un ob-
formances… On songe à ce stade au Ceux-ci intégreront à leur bord un jectif final : la réussite des opérations
drame de l’Illiouchine II-20 en sep- système de mission électronique et la liberté d’action. ■
37
CHAPITRE 1
Ejection éjection !
D
L’éjection est un exercice « viril » et indis- « euxième tentative de ral-
lumage du moteur…
pensable pour qui veut évacuer un avion de Rien… La vitesse chute
doucement, je perds de
combat. Mais, en dépit des progrès considé- l’altitude. Je vais entrer
rables réalisés par les fabricants de sièges, dans la couche nuageuse. Dessous,
c’est la montagne. Mon ailier crie dans
ce n’est pas toujours une science exacte. la radio “ éjection éjection ! ” Plus le
temps de réfléchir, de tenter quoi que
Car le pilote, avec ses forces et ses faiblesses ce soir. Je tire la poignée. Tout explose
humaines, tient toujours une place centrale autour de moi et je suis instantanément
projeté vers le haut et vers l’avant. Pen-
dans le processus d’éjection… Par Frédéric Lert dant une fraction de seconde, je perds
38
Le Gloster Meteor T3 immatriculé vegarde de son avion ? Pendant la
WA638, propriété de Martin Première Guerre mondiale, quand les
Baker et toujours utilisé pour les morts se comptent chaque jour en mil-
tests en vol de sièges éjectables. liers, qui pourrait s’émouvoir de la
L’avion compte plus de 500 éjec- perte d’un pilote ? Il faut attendre
tions à son actif ! (Martin Baker) 1924 pour que l’armée américaine
rende le port du parachute obliga-
toire. Les autres pays emboîtent le
pas. A charge pour le pilote de se dé-
brouiller tout seul pour quitter son
avion. Mais bientôt, la vitesse aug-
mentant, la force des bras et de la vo-
lonté ne suffisent plus. Les ingénieurs
se mettent alors en chasse d’un mé-
canisme permettant l’évacuation ra-
pide d’un avion en perdition.
Un complément
indispensable au réacteur
Les premières études portant sur
un siège éjectable sont réalisées dès
1939 par la société Heinkel. En 1944,
des sièges équipent en série le He162.
Les premiers sièges testent différentes
méthodes : air comprimé, cartouche
de poudre. C’est finalement cette der-
nière solution, plus puissante, qui
l’emporte. Le Dornier Do 335 et le
Heinkel He219 seront également
équipés de ces premiers sièges rudi-
mentaires. Une soixantaine de pilotes
allemands en auraient fait usage pen-
dant la guerre, sans que l’on sache pré-
cisément combien survécurent…
Avec l’arrivée des premiers avions à
réaction, les Britanniques s’intéres-
sent également à la question : Sir
James Martin, le « Martin » de « Mar-
tin Baker », expérimente un premier
siège en janvier 1945. Une première
éjection humaine est réalisée le
24 juillet 1946 à partir d’un Meteor 3
volant à 2700 m et 590 km/h. Les Amé-
ricains se rapprochent des travaux bri-
tanniques et réalisent une première
éjection aux Etats-Unis quelques se-
maines plus tard. Terminons ce tour
d’horizon rapide avec la France : à
l’image de sa recherche sur les avions
à réaction, elle part de loin après la
Seconde Guerre mondiale ! Et comme
tant bien d’autres domaines, elle com-
mence par s’appuyer sur les équipe-
ments capturés à l’issue du conflit.
La SNCASO crée un département
tous mes repères. Ni haut ni bas, ni matismes. Tout allant trop vite pour chargé de travailler sur le sujet, en
gauche ni droite. Et puis aussi sou- l’esprit humain, il faut simplement prenant comme base de départ le siège
dainement qu’elle est arrivée, la tem- laisser faire la machine en ayant une du He162. La première éjection ex-
pête se calme. Je n’ai pas eu le temps confiance aveugle dans ses réglages. périmentale a lieu le 3 janvier 1951 :
de réaliser ce qui m’arrivait, je suis L’idée de sauver le pilote d’un le parachutiste d’essai s’appelle
déjà sous le parachute, enveloppé par avion en perdition n’allait pas de soi André Allemand et il est éjecté d’un
le silence… » Tous les témoignages dans les premières années de l’avia- Bloch MB175 modifié. Mais, à la fin
récents de pilotes éjectés concordent tion militaire. En donnant une bouée des années cinquante, les sièges
sur un point : le plus dur est de prendre de sauvetage aérienne à l’intrépide SNCASO sont abandonnés au profit
la décision de tirer la poignée. Après, pilote, n’allait-on pas l’inciter à révé- des créations de la société SEMMB,
l’espace d’une fraction de seconde, ler sa nature profonde : un être hu- une co-entreprise fondée en mars
c’est une affaire de violence absolue main plus préoccupé par le sauvetage 1959 entre Hispano Suiza et Martin
et d’enchaînement de divers auto- de sa pauvre vie plutôt que par la sau- Baker (voir encadré).
39
EJECTION ÉJECTION !
Mettre l’avion
en léger cabré…
Les sièges de cette époque fonc-
Doddy Hay, un autre employé de Martin Baker, réalisa les premières éjections tionnent en deux temps : sur le
0/0 (vitesse/altitude nulle) sur un siège de la compagnie. (Martin Baker) Mystère IV, la poignée haute déroule
un rideau devant le visage du pilote
et déclenche la mise à feu des bou-
lons explosifs qui libèrent la verrière.
En continuant à tirer comme un sourd,
le pilote fait partir le siège. « A ma
première éjection, je n’avais pas tiré à
fond. J’ai volé quelques instants sans
la verrière, en décapotable, avant de
me reprendre et de terminer la sé-
quence d’éjection », raconte Denis
Turina. Avec le siège du F-100, deux
manœuvres sont nécessaires : dans un
premier temps le pilote remonte les
accoudoirs pour éjecter la verrière.
Ce faisant, il dégage des détentes qu’il
doit alors serrer pour faire partir son
siège. En basse altitude, la consigne
est de mettre l’avion en léger cabré
pour grappiller quelques mètres à
l’ouverture du parachute. Sur la poi-
gnée du parachute, un bouton pous-
soir actionné par le pilote permet de
sélectionner un retard à l'ouverture.
Placé sur « 0 seconde » au-dessous de
2000 pieds, le parachute s’ouvre dès
la séparation avec le siège, immédia-
tement après l’éjection. Tout va plus
vite mais le risque existe que le siège
parte s’emmêler dans les suspentes
du parachute. Ce bouton est placé sur
« 2 secondes » au-dessus de 2000 pieds,
et ce retard automatique à l’ouver-
ture permet d’assurer une séparation
franche du pilote et de son siège.
Une deuxième génération de siège
introduit un peu de progressivité et
réduit d’autant le choc du départ : une
Quelques instants avant le tir, Doddy Hay est sanglé sur son siège première charge pyrotechnique fait
par ses collègues de Martin Baker. (Martin Baker) sortir le siège, une seconde prend
40
Le 24 juillet 1946, Bernard Lynch, employé de Martin Baker, se porte volontaire pour un essai en conditions réelles
à partir d’un Gloster Meteor 3. Il totalisera à la fin de sa carrière une trentaine d’éjections ! (Martin Baker)
L’éjection,
la seule solution
« L e problème de l’éjection se
concentre sur les secondes qui précè-
dent l’action sur la poignée, raconte
Denis Turina. L’éventualité d’une éjec-
tion est vécue comme une obligation
et non comme une solution. C’est une
action irréversible qui est ressentie
comme un échec : je dois m’éjecter
parce que je n’ai pas été capable de ré-
soudre le problème qui m’était posé…
Et une fois qu’il tire la poignée, le pi-
lote sait qu’il a perdu. P our ma
deuxième éjection, sur F-100, j’étais
très bas. J’avais relevé les accoudoirs
et éjecté la verrière et j’avais gardé les
mains crispées sur le siège. J’ai dû faire
un gros effort de volonté pour les
41
EJECTION ÉJECTION !
Sans perdre
une seconde
« Mourez, nous ferons le reste »
était le slogan innovant d’une entre-
prise de pompes funèbres. « Tirez la
poignée et nous ferons le reste » disent
aujourd’hui les fabricants de sièges
éjectables. Deux secondes s’écoulent
entre le moment où le pilote tire la
poignée et celui où il se retrouve sous
le parachute, hors de danger. Un tel
niveau de performance n’est possible
que par une succession d’automa-
tismes. Le temps est également trop
court pour éjecter la verrière avant le
départ du siège. Il faut donc la fragi-
liser ou la découper pour libérer
le passage.
C’est la tâche confiée à un cordeau
d’hexogène (un explosif dont la vi-
tesse de propagation atteint 7 000 m/s)
directement collé contre la verrière.
Unvrai travail d’orfèvre : il s’agit bien
Une des difficultés dans l’éjection est de franchir l’obstacle de la verrière. sûr de dégager un passage pour le pi-
Quand celle-ci n’est pas larguée, il faut passer à travers… (DR) lote, mais en évitant de le blesser au
42
cours de la séquence avec les nom-
breux éclats. Dans le même temps, le
harnais est serré, bloque le buste, et
les jambes – et les bras sur les sièges
les plus modernes – sont ramenés
et plaqués automatiquement contre
le siège à l’aide de sangles intégrées
dans le siège.
C’est la raison pour laquelle les L’accident du MiG-29 au salon du Bourget, en 1989, a prouvé
combinaisons de vol évoluent. Les toute la valeur des sièges éjectables russes… (Jacques Guillem)
rappels de jambe sont courants de-
puis quelques décennies : ils évitent
que le pilote soit écartelé ou vienne
heurter le tableau de bord pendant
l’éjection. Sur des avions les plus mo-
dernes, les sièges disposent également
de rappels de bras actifs. C’est par
exemple le cas du Rafale et du siège
Martin Baker MkF16F : le gilet de
combat du pilote ou du navigateur est
spécifique au Rafale et comporte des
accroches pour ces sangles.
Un dixième de seconde après avoir
tiré la poignée, la verrière est partie,
le pilote est correctement saucissonné
sur son siège qui est poussé le long
d’un rail jusqu’à totalement sortir de
l’avion. L’accélération pendant ces
0,2 seconde est de 14 à 16 G suivant
la masse du pilote. La puissance du
moteur fusée étant la même sur tous
les sièges et non réglable, plus le na-
vigant sera lourd, moins l’accéléra-
tion sera forte. Immédiatement après,
une fusée de sustentation prend le re- Le siège éjectable MkF16F du Rafale, dont la forte inclinaison permet au pilote
lais. Sa combustion dure également de mieux supporter les accélérations. (Frédéric Lert)
43
EJECTION ÉJECTION !
Une fiabilité
exceptionnelle
Les sièges Zvezda montés sur les
avions russes les plus modernes sont
plus complexes, avec sans doute un
domaine d’éjection plus large. Ils dis-
posent par exemple d’un gyroscope
déterminant sa position dans l’espace,
et d’un moteur fusée orientable ca-
pable de replacer le siège sur une tra-
jectoire ascendante quelle que soit
l’attitude de l’avion au moment de
l’éjection. Plus complexes, ces sièges
sont aussi plus lourds : si un Mk16F
de Rafale pèse environ 90 kg, un siège
Zvezda équivalent dépasse largement
les 100 kg.
Quoi qu’il en soit, les statistiques
récentes en matière de vies sauvées
sont éloquentes : UTAS revendique
par exemple 91,4% d’éjections réus-
sies et 654 vies sauvées avec les sièges
ACES II qui équipent la plupart des
avions de combat américains. Pour
Martin Baker, les chiffres sont encore
plus spectaculaires avec 7 580 vies
sauvées en près de 70 ans.
On pourrait croire alors la bataille
de l’éjection définitivement gagnée,
Depuis 1959, la co-entreprise créée par Hispano Suiza et Martin Baker a fourni les mais il n’en est rien. Les difficultés du
sièges de la plupart des avions de combat français, du Mirage III au Rafale. (Safran) développement du F-35 américain ont
44
placé sous le projecteur la contrainte
posée par la masse et la carrure in-
suffisantes de certains pilotes (parti-
culièrement des femmes), le tout étant
aggravé par l’augmentation de la
masse des équipements montés sur
les casques : JVN, viseurs de casques
et autres dispositifs d’affichage sur
la visière. L’augmentation du poids
au niveau du casque se traduit par des
risques croissants sur les cervicales au
moment de l’éjection.
La minceur
tue !
Des études menées en 2015 sur
le F-35 montrèrent que les pilotes de
moins de 74 kg couraient un sérieux
danger en cas d’éjection suivant l’al-
titude de l’avion. Le risque était
tel d’ailleurs que, pendant plusieurs
mois, les pilotes de moins de 61 kg
furent tout simplement interdits de
F-35.
Dans les faits, une seule femme fut
concernée par cette restriction. Selon
les chiffres officiels, le risque d’issue
fatale à une éjection en basse altitude
était tout simplement de… 98% !
Jusqu’à 74 kg, le risque d’issue fatale
restait excessivement élevé, à près de
25%. Après cette alerte, les sièges
Martin Baker US16 reçurent de nou-
velles protections offrant un meilleur
maintien du cou et de la nuque pen-
dant l’éjection, qui résolurent offi-
ciellement le problème. ■
Le siège MkF16F du Rafale dévoile ses dessous et
toute sa complexité. (Frédéric Lert)
45
CHAPITRE 1
Avions furtifs.
Plus efficaces et
plus discrets
L
a mort qui chuchote. » Tel Néanmoins, avec le perfectionnement tournées ; dans la pratique une petite
était, selon la Royal Air des systèmes de détection à grande partie des ondes émises sont ren-
Force, le surnom donné par portée, il est apparu nécessaire voyées. L'idée, née, semble-t-il, aux
les Allemands, pendant la d'adopter des méthodes de camou- États-Unis au cours des années 1970,
Seconde Guerre mondiale, flage radicalement nouvelles. est de réduire ce retour au maximum.
au Bristol Beaufighter parce que ses Avant d'aller plus loin, pinaillons Une première solution consiste à don-
moteurs étant peu bruyants. On ne un peu sur les mots : furtif, pas plus ner à l'objet susceptible d'être détecté
l'entendait pas venir... que camouflé, n'a jamais signifié par un radar, des formes qui renvoient
Rendre les avions aussi discrets invisible. La furtivité au sens où elle les ondes dans plusieurs directions,
que possible a toujours été la préoc- est entendue de nos jours est un sauf celle du radar. Un exemple, sim-
cupation des militaires. De nos jours, moyen de se rendre moins visible par pliste peut-être mais très compré-
on parle beaucoup de furtivité. Au les systèmes de détection en usage. hensible, est celui de la boule de billard
début du XXe siècle, on parlait de ca- Le principal est le radar auquel, dès qui rebondit contre une bande ; si
mouflage pour dire la même chose. son apparition, l'adversaire aérien a celle-ci est bien perpendiculaire au ti-
46
Le Lockheed F-117, dont
les formes furent étudiées pour
le rendre discret face aux radars.
Sur la photo ci-dessous, les tech-
niciens apposent le revêtement
spécial qui concourait à piéger
les ondes des radars. (Usaf)
Mettre les charges en soute, comme ici avec le F-35, permet d’assurer la discrétion
face aux radars. (Lockheed Martin)
concepteurs d'avions de combat se convénient. Par exemple, les compo- légers, « semi-furtifs », plus polyva-
sont efforcés de travailler dans le sites en matière plastique, moins ré- lents, moins complexes, mais moins
menu détail la forme des appareils, fléchissants, peuvent contenir aussi visibles au radar que leurs prédéces-
en adoptant des lignes plus souples, des éléments absorbants. seurs souvent encore plus petits.
plus arrondies, par ailleurs favorables Les Américains (Lockheed Mar- La furtivité a d'autres contraintes.
à la réduction des traînées aérody- tin F-22 et F-35) ont choisi d'aban- Depuis les origines de la radio, il est
namiques. La moindre aspérité fut donner les charges externes, en par- assez facile de localiser un émetteur.
dentelée pour éparpiller les ondes ; ticulier les munitions qui sont De même, un avion peut être repéré
les manches d'entrée d'air de réac- désormais contenues dans des soutes par ses émissions électromagnétiques.
teurs furent dessinées pour que les ouvertes au moment du tir et aussi- C'est pourquoi ont été créés divers
ondes ne puissent pas pénétrer jus- tôt refermées. Cela suppose des avions systèmes (dont la Liaison 16 de
qu'au premier étage du compresseur, plus gros, donc plus lourds et néces- l'OTAN) permettant la transmission
etc. Des matériaux et revêtements ab- sitant plus de puissance. Les Euro- rapide d'informations chiffrées. Les
sorbants furent adoptés, non sans in- péens ont opté pour des avions plus avions de combat peuvent être équi-
48
Le Northrop B-2 est le premier bombardier furtif. (Usaf)
49
CHAPITRE 2
Un avion,
combien
ça coûte?
50
Le prix des avions est
une donnée essentielle
pour comprendre l’aéro-
nautique aujourd’hui.
Lors des grands salons ,
des sommes farami-
neuses sont souvent
annoncées mais sont
peu compréhensibles
pour le grand public.
Les constructeurs néan-
moins communiquent
désormais plus
facilement leurs prix
« catalogue ». En voici
quelques exemples
indicatifs.
Par Frédéric Marsaly
51
UN AVION, COMBIEN ÇA COÛTE ?
Avions de ligne
Ce sont des prix catalogue. Il est très rare que les compagnies
aériennes achètent leurs appareils à l’unité. En général, lorsqu’il
s’agit du développement d’une flotte ou de la succession d’avions MODÈLE COÛT
d’une génération précédente, les contrats se signent pour des lots ATR42-600 : 23 millions $
significatifs et peuvent comporter d’innombrables options et Embraer 175-E2 : 46,8 millions $
amendements. Les compagnies et les constructeurs procèdent Sukhoi Superjet 100 : 50 millions $
donc à de complexes négociations. Plus la quantité d’appareils Embraer 195-E2 : 60,4 millions $
est élevée et plus les prix fondent. Airbus A220-100
Ces avions neufs ont une carrière, au sein des grandes com- (anciennement Bombardier
pagnies, qui tourne autour de 25 ans. Ensuite, le démantèlement CSeries CS100) : 79,5 millions $
les attend ou bien le marché de l’occasion afin d’équiper des com- Airbus A220-300
pagnies moins puissantes ou d’être convertis à de nouvelles mis- (ex-Bombardier CS300) : 89,5 millions $
sions comme pour le transport de fret. ■ Airbus A320 : 101 millions $
Boeing 737-800 : 102 millions $
Boeing 737-900ER : 108,4 millions $
Airbus A320neo : 110,6 millions $
Boeing 767-300ER : 209,8 millions $
Airbus A330-800neo : 259,9 millions $
Airbus A350-800 : 280,6 millions $
Boeing 787-9 : 281,6 millions $
Boeing 777-300ER : 361,5 millions $
Airbus A350-1000 : 366,5 millions $
Boeing 777-8 : 394,9 millions $
Boeing 747-8 : 402,9 millions $
Airbus A380 : 445,6 millions $
52
50 millions de dollars. Le Superjet 100 de Sukhoi, vendu aux alentours de 50 millions de dollars,
souffre de la concurrence directe des avions Embraer notamment. (Jacques Guillem)
53
UN AVION, COMBIEN ÇA COÛTE ?
54
En raison d’un prix élevé et d’un marché
vampirisé par les biréacteurs, la carrière 402 millions de dollars. Dernière version en date
commerciale de l’A380 reste décevante, de l’exceptionnel Boeing 747, le -8, disponible
mais un retournement de situation est en version passagers ou fret, devrait être produit
toujours possible. (Airbus) jusqu’en 2022 à moins que de nouvelles
commandes ne soient signées d’ici-là. (Boeing)
55
UN AVION, COMBIEN ÇA COÛTE ?
Avions
militaires
175 millions de dollars. Le premier des 6 MRTT, commandés par Singapour, a été livré au début du mois de septembre
2018, quelques jours avant la livraison du premier exemplaire à l’armée de l’Air. (Airbus)
56
Ces prix s’entendent « Fly Away »,
c’est-à-dire un appareil en condition
de vol avec son système d’armes fonc-
tionnel mais sans armement, hors coût
de développement. Les contrats
militaires s’entendent souvent avec
une importante part consacrée aux
contrats de maintenance. Pour un
C-130J, celui-ci peut approcher les
10 millions de dollars par avion et
par an. ■
MODÈLE COÛT
Rafale C : environ
70 millions €
F-35 : 94,3 millions $
(USAF 2018)
Gripen : environ
50 millions $
A400M : 152,4 millions €
(2013)
C-130J : 75 millions $
(Fly Away)
KC-46 Pegasus : env. 150 millions $
(USAF)
A330MRTT : 175 millions $
(Armée de l’Air)
57
UN AVION, COMBIEN ÇA COÛTE ?
59 millions de dollars.
Fer de lance commercial
des avions d’affaires
Dassault, le Falcon 8X.
(Dassault Aviation)
58
Avions d’affaires
L’aviation d’affaires est un marché cyclique, extrêmement sensible à la santé
économique générale. Les machines sont à la fois extraordinaires mais souvent MODÈLE COÛT
d’une praticité exemplaire. Si les avions sont souvent assimilés à des signes ex- Dassault Falcon 6X : 47 millions $
térieurs de richesse, ils sont aussi, et surtout, des outils au service des entre- Dassault Falcon 8X : 59 millions $
prises et participent à la réactivité des grands groupes. Ils sont, principalement, Gulfstream G650ER : 70,15 millions $
des outils de travail, des salles de réunion volantes et un mode de transport Bombardier Global
souple et performant. Express 6500 : 56 millions $
En dehors de quelques contrats de compagnies spécialisées, les ventes en Beechcraft
aviation d’affaires se font à l’unité. Il peut s’agir de négociations avec un par- King Air 250 : 6,5 millions $
ticulier mais en général ces acquisitions se font avec des entreprises organisées TBM 930 : 4,19 millions $
pour assurer l’exploitation de ces appareils. Le prix catalogue est rarement celui Pilatus PC-24 : 8,9 millions $
payé car les options peuvent très nettement alourdir le bilan. Pour ces gammes
d’appareils, elles sont sans limites. Souvent, le coût de la formation des équi-
pages chez le constructeur ou un sous-traitant officiel est compris dans le contrat.
À noter que les avions de ligne, Airbus, Boeing et autres, font de très beaux
avions d’affaires avec les gammes ACJ pour le constructeur européen et
BBJ pour les avions construits à Seattle. ■
55 millions de dollars.
Gulfstream possède
également une gamme
d’avions d’affaires
cohérente et perfor-
mante. Ici, le G500.
(Gulfstream)
480 500 dollars. Cousin musclé du Cessna 172, le Cessna 182 Skylane est proposé au prix sorti d’usine
à moins de 500 000 dollars. Plus de 23 000 exemplaires ont été produits depuis 1956. (Cessna)
60
Hélicos
3,2 millions de dollars. Sauvetage, lutte
contre les feux de forêt, missions de combat,
transport, les hélicos savent tout faire.
C’est ce qui explique la diversité des
Le marché de l’occasion : machines et donc des prix. Ici l’EC-135.
Les avions et les hélicoptères de toutes catégories peuvent avoir des carrières fort (Airbus Helicopters)
longues et changer de mains à de nombreuses reprises. Le marché des avions d’occa-
sion est extrêmement actif et permet de faire parfois d’excellentes affaires. Aujourd’hui,
un Boeing 747SP aménagé VIP est en vente pour 8 millions USD, un 747-400 de
66 000 heures de vol ne vaut plus que 13 millions, un Cessna 177 de 4000 heures
MODÈLE COÛT
de vol coûte 75 000 USD, mais le top du top, c’est quand même ce Grumman Mallard de EC-135 : 3, 2 millions €
1947 (J-18), actuellement en vente au Canada (12 000 heures de vol tout de même), qui EC-225 : 28 millions $
est affiché à 1 500 000 USD. Il faut écrire beaucoup d’articles dans le Fana pour pouvoir Bell 407 : 3,1 millions $
se l’offrir, mais nous ne désespérons pas ! ■ Robinson R22 : 288 000 $
3,1 millions de dollars pour le Bell 407. Des hélicoptères plus petits comme les Robinson
passent en dessous du million de dollars. (Bell)
61
CHAPITRE 3
Le monde vu à travers
l’affichage tête haute d’un
Falcon. Le HUD est avant tout
au service de la sécurité.
(Dassault Aviation - A. Daste)
L
Du viseur tête haute VTH, permet aujourd’hui chage de données utiles, le HUD est
aux projections sur la projection sur une surface
semi-réfléchissante d’infor-
un formidable progrès ainsi qu’un fac-
teur de sécurité essentiel. Et, para-
la visière des casques, mations essentielles devant doxalement, c’est une sorte de retour
les yeux du pilote. Celui-ci n’a plus à aux sources…
la présentation des regarder son tableau de bord : les in-
informations aux pilotes formations capitales, pour le pilotage
à court terme, lui sont présentées sur
Regarder dedans
est en évolution une surface transparente superposée ou dehors ?
à sa vision normale de l’environne- Les premiers pilotes ne pouvaient
permanente. ment extérieur. Les informations sont que regarder dehors pour apprécier
Par Frédéric Lert collimatées à l’infini et ne nécessitent les conditions de vol. Ils n’étaient alors
pas d’accommoder la vue. A condi- guidés que par la seule perception de
tion de savoir faire le tri et de se li- leur environnement, l’œil jouant un
62
calise son attention sur le tableau de
bord, en interprétant des chiffres et
des flèches. De temps en temps, il était
tout de même autorisé à risquer un
œil à l’extérieur pour essayer de voir
une piste ou bien assurer la veille
autour de son avion.... En s’affran-
chissant des limites naturelles, les in-
génieurs avaient d’une certaine ma-
nière multiplié la complexité des
situations et les sources d’erreurs po-
tentielles.
Avec le HUD, le mouvement s’est
donc inversé. Sans rien renier de la
sophistication des avions et de leurs
instrumentations, le pilote retrouve
la vision directe du monde extérieur,
enrichie des informations nécessaires
au pilotage. De jour comme de nuit,
par tous les temps, le HUD devient
l’instrument de vol principal per-
mettant de gérer toutes les phases du
vol : depuis le décollage jusqu’à l’at-
terrissage, en passant par la naviga-
tion et le combat... Sans surprise,
les premiers utilisateurs sont les pi-
lotes de chasse dont le besoin est
multiple : piloter l’avion, gérer le sys-
tème d’arme, surveiller le ciel et suivre
du regard la cible. Disposer des pa-
ramètres de pilotage essentiels, gérer
son système d’arme du bout des doigts
sans jamais quitter la cible des yeux
devient alors possible. Avec le HUD,
le pilote gagne en outre une repré-
sentation imagée et simple du bilan
d’énergie de son avion : dans les
situations extrêmes d’un combat aé-
rien, il visualise d’un coup d’œil le
comportement de son appareil et ses
possibilités.
C’est un progrès essentiel par rap-
port au collimateur qui équipait au-
paravant les appareils. Certes l’outil
pouvait être très sophistiqué, avec
l’apparition, au cours de la Seconde
Guerre mondiale, de réticules ados-
l’action…
sés à un calculateur mécanique pre-
nant en compte la vitesse de l’avion
et la distance estimée de la cible. Mais
le collimateur ne servait qu’à viser
et tirer.
Accroître la sécurité
rôle essentiel. « Les yeux dirigent l’ac- savoir interpréter et synthétiser les
tion », dit l’adage. La sophistication informations données. Mais la mé- à proximité du sol
croissante des appareils a ensuite daille avait un revers considérable : Une fois n’est pas coutume, les
ramené leur regard dans le poste de le pilote ne regardait plus son envi- choses ont été moins claires dans le
pilotage : il s’agissait de surveiller des ronnement, focalisant son attention domaine commercial. L’urgence
instruments toujours plus nombreux sur ses instruments. La charge de tra- d’abattre son prochain ne faisant pas
et complexes. Le vol aux instruments vail, déjà énorme, ne fit qu’augmen- partie des préoccupations de l’équi-
permit de franchir une étape impor- ter au fur et à mesure que l’on vou- page, le débat a été plus passionné sur
tante, rendue possible par le gyro- lait gagner en précision. L’arrivée des l’emploi du HUD. Bien évidemment,
scope capable de donner une réfé- écrans multifonctions à cristaux l’idée de base n’était plus de viser une
rence fixe dans l’espace. Les pilotes liquides ne changea rien sur le fond cible mais bien d’accroître la sécurité,
se fiaient alors pour leur vol à des ins- finalement : certes ils permettaient de particulièrement à proximité du sol,
truments leur donnant une représen- fusionner l’information et de la pré- et même de réduire les minima à l’at-
tation de la réalité. Ça marchait plu- senter de façon synthétique, mais ils terrissage. Mais en affichant quelles
tôt bien, à condition toutefois de exigeaient toujours que le pilote fo- informations ? Fallait-il faire du HUD
63
QUAND LES YEUX DIRIGENT L’ACTION…
Une pilote de F-35 enfile son casque à 600 000 dollars. Un casque endommagé est synonyme
de pilote cloué au sol… (US Air Force)
un simple répétiteur de la planche de sa prise de décision ? Les limitations aurait-il fallu lui fournir un équipe-
bord, sans valeur ajoutée sur la ges- initiales de la technologie firent de la ment lui permettant de le faire ? Le
tion de la trajectoire et du niveau première solution la plus simple à grand André Turcat avait beau expli-
d’énergie ? Ou bien profiter de l’af- mettre en œuvre. quer que « pour voir dehors, il faut
fichage synthétique pour offrir aux Le développement des approches commencer par bien nettoyer le pare-
pilotes un véritable collimateur de aux instruments automatisées porta brise », l’avenir passait selon lui par
pilotage pour en quelque sorte re- également de rudes coups à l’idée d’un l’atterrissage automatique. Et, dans
produire les conditions du vol à vue collimateur de pilotage. Le pilote cette logique, l’installation d’un affi-
et laisser libre l’esprit du pilote dans n’ayant plus à voir la piste, pourquoi chage devant le pilote n’aurait eu
d’autre effet que de gêner sa vision
extérieure… Sauf qu’en projetant les
informations en surimpression du
paysage extérieur, le HUD évite les
mouvements de tête entre la planche
de bord et le pare-brise. C’est un
confort doublé de plus de sécurité.
Le temps a passé et le HUD s’est
progressivement invité dans la plu-
part des cockpits.Air France reçut ses
premiers équipements lors de la fu-
sion avec Air Inter en 1997, lorsque
les A320 de la compagnie intérieure
équipés de HUD Sextant furent in-
tégrés à sa flotte. Les A380 de la com-
pagnie nationale sont aujourd’hui
équipés de deux HUD, systémati-
quement utilisés au décollage et à l’at-
terrissage. Les Boeing 787 et les Air-
bus A350 reçoivent également
l’affichage tête haute. Les avions sont
Le HUD des chasseurs modernes est de plus en plus large. Le chant du cygne avant précâblés mais l’équipement reste op-
le remplacement total par les affichages sur les visières ? (Dassault Aviation - S. Randé) tionnel : certaines compagnies ne
64
l’achètent pas, d’autres n’en installent
qu’un pour la place gauche, d’autres
encore choisissent d’équiper les deux
pilotes. Il faut toutefois garder à l’es-
prit que jusqu’à présent, le HUD n’est
vu que comme une aide au pilotage :
il ne s’agit pas d’un instrument pri- Bien visibles sous
maire de pilotage. Mais pour combien la coque du casque du
F-35, les deux projecteurs
de temps encore ? La sécurisation des
permettant l’affichage
affichages et la fiabilité de la tech-
des informations sur
nique devraient permettre aux affi-
la visière. (Frédéric Lert)
chages tête haute de prendre toute la
place qui leur revient.
Le Mercure de Dassault Aviation
est resté célèbre pour avoir été
construit à seulement une dizaine
d’exemplaires au début des années
1970 et pour avoir été équipé d’un
HUD pour les atterrissages tout
temps. Le savoir-faire de la maison
Dassault en matière de chasseur avait
compté pour beaucoup dans cette mi-
gration, unique et osée pour l’époque.
Le Mercure a été le seul avion de ligne
conçu par la maison de St- Cloud. Mais
l’idée de HUD n’a eu aucun mal à
s’imposer par la suite au sein de la
famille Falcon et on le retrouve au-
jourd’hui sur la plupart des avions
d’affaires, le Global Express canadien
ayant été un pionnier en la matière.
Mais les contraintes d’encombrement
et surtout de coût font que déjà de
nouvelles solutions se préparent, avec
le remplacement du HUD par une
simple projection des informations de
pilotage sur glace monoculaire pla-
cée devant l’œil directeur du pilote.
Plus simple, plus léger, moins cher…
Toujours plus d’informations ! Les écrans de l’avion, ici un Rafale, sont complétés par
une tablette numérique portée par le pilote. (Dassault Aviation - P. Sagnes)
65
QUAND LES YEUX DIRIGENT L’ACTION…
il perd de vue son HUD. Au milieu tion avec l’AIM 9X, il peut tirer « par- melles de vision nocturne. Le Scor-
des années 1970, les casques ont dessus l’épaule ». Il permet également pion est utilisé sur les F-16 et
d’abord reçu des viseurs mobiles pri- de pointer les nacelles de désignation les A-10. Outre la question de l’ac-
mitifs permettant de désigner des laser, d’afficher certaines des infor- commodation des deux yeux, une des
cibles au profit des missiles à guidage mations de vol en supplément du difficultés techniques posées par les
infrarouge. Il n’était donc plus né- HUD et de projeter des images vidéo viseurs de casque tient à leur posi-
cessaire de pointer l’autodirecteur du (notamment du FLIR) sur la visière. tionnement dans l’espace, afin de sa-
missile sur la cible pour l’accrocher. Thales propose de son côté un équi- voir précisément où le pilote regarde.
Les Sud-Africains furent parmi les pement plus simple, le Scorpion. Il Deux techniques sont principalement
premiers à doter leurs Mirage F1 de s’agit d’un monoculaire en couleurs utilisées : le JHMCS ou le Topowl bai-
ce système. En 1989, une fois le rideau avec un champ de vision de 26° par gnent dans un champ magnétique
de fer abattu et les deux Allemagne 20° et qui permet la visée et l’affi- dont la mesure très fine des pertur-
réunies, les MiG-29 hérités de l’Alle- chage des données de vol, mais qui bations, au gré des mouvements de
magne de l’Est firent également forte est aussi compatible avec l’utilisation tête du pilote, permet de déduire les
impression avec leur viseur de casque de JVN : l’écran très fin vient s’inter- déplacements du casque et donc de
couplé à l’utilisation du missile caler entre l’œil du pilote et les ju- savoir où regarde son porteur. La dis-
AA-11 « Archer » à guidage infra-
rouge. L’équipement était redoutable
pour l’ennemi, mais aussi pour le pi-
lote utilisateur qui souffrait de sa mau-
vaise ergonomie. Le casque était lourd,
mal équilibré. Par bonheur, les mis-
sions n’étaient jamais très longues avec
le MiG-29 à l’autonomie limitée…
Quoi qu’il en soit, le casque du
MiG-29 déboucha sur une prise de
conscience à l’Ouest et les équipe-
mentiers mirent les bouchées doubles
sur les systèmes d’affichage intégrés
au casque. Rockwell Collins (Etats-
Unis) et Elbit Systems (Israël) codé-
veloppèrent le JHMCS (Joint Helmet
Mounted Cueing System), qui équipe
aujourd’hui un grand nombre d’ap-
pareils au sein de l’US Air Force
(F-15C et E, F-16 block 40 et au-
delà…), de la Navy et des Marines
(F/A-18 Super Hornet). Le JHMCS
est en fait un viseur monochrome pro-
tégé par une visière bombée, qui
s’adapte sur le casque standard amé- Le casque Topowl de Thales, ici au service du Tigre,
ricain HGU-55. Utilisé en conjonc- avec la projection des informations sur la visière claire. (Frédéric Lert)
67
QUAND LES YEUX DIRIGENT L’ACTION…
Luxe, calme et… sécurité : le poste de pilotage du Falcon 8X est dominé par des écrans
à cristaux liquides et les deux HUD à champ large. (Dassault Aviation)
68
l’avion, dont les images sont trans- référencés. L’EVS apporte quant à lui
mises au casque, permettant ainsi au une vision synthétique du monde ex-
pilote de « voir » à travers les parois térieur en colorant et en renseignant
du fuselage quelle que soit la direc- les obstacles qui apparaissent. En croi-
tion vers laquelle il tourne la tête. Le sant les deux systèmes, SVS et EVS,
casque du F-35 permet également on obtient le CVS, pour Combined
d’afficher les capteurs de l’EOTS si- Vision System, qui promet d’offrir une
tués sous le nez de l’avion. Ce concept vision enrichie du monde extérieur
futuriste, qui rassemble sur une même propre à baisser encore les minimas
visière un très grand nombre d’in- et réduire les risques. Pour les avions
formations complexes, a été un défi d’affaires, qui ont d’abord bénéficié
permanent pour le programme. Le d’un affichage du CVS sur écran,
casque a été critiqué pour son coût avant que l’installation migre sur
(de 400 à 600 000 dollars par casque HUD, c’est par exemple l’idée de voir
selon les sources !), son poids (2,5 kg), de nuit comme en plein jour. Pour les
sa fragilité et surtout son manque de hélicoptères, on évoque la possibilité
maturité technique. On a reproché au d’évoluer près du sol dans des condi-
casque de surcharger le pilote en in- tions de vol dégradées, comme par
formations au point d’être gêné dans exemple dans les tourbillons de neige
sa vision du monde extérieur, de pré- ou de sable soulevés par les rotors.
senter des images de mauvaise qua-
lité ou encore de manquer de préci- Toujours
sion dans le cas d’un tir au canon. Sans
compter qu’une simple panne met- plus fort !
trait de facto son utilisateur sur la Si on pousse le raisonnement un
touche et incapable de voler le temps peu plus loin, on comprend que tout
de la réparation, le casque étant per- le champ de vision du pilote pourrait
sonnalisé avec une coque intérieure être prétexte à afficher des informa-
réalisée en moulage 3D sur la tête de tions de façon plus intuitive que sur
chaque utilisateur... des écrans : portée d’un missile, zone
Devant les problèmes qui s’accu- de létalité d’un site de défense sol-
mulent, l’USAF demande en 2013 à air, présence d’un relief… mais aussi
BAE Systems de développer une ver- paramètres du vol, images fournies
sion traditionnelle, pour le cas où la par les capteurs. Comme sur le bu-
mise au point du Gen II ne pourrait reau virtuel d’un ordinateur, le pilote
aller à son terme. En 2016, une co- aurait également la possibilité d’or-
opération entre l’Américain Rock- ganiser les renseignements en fonc-
well Collins et l’Israélien Elbit Sys- tion de l’importance qu’il voudrait
tems donne naissance au Gen III. leur donner : les plus utiles au centre,
Héritant de nouveaux affichages à les autres sur les côtés. On pourrait
cristaux liquides et de nouveaux aussi imaginer pouvoir utiliser la ges-
logiciels pour le système DAS, le tuelle du pilote pour lui permettre
Gen III promet de réussir là où le d’interagir dans son cockpit sans avoir
Gen II n’a pas su convaincre. à toucher physiquement les com-
D’ailleurs, pour Lockheed Martin mandes. A partir de là, pourquoi ne
la messe est dite et le système DAS pas penser non plus à éliminer la ver-
est une pièce essentielle du futur. L’in- rière, le pilote n’interagissant avec son
dustriel le propose également sur le environnement que par l’intermé-
cipline est complexe mais bien maî- V280 Valor, convertible de nouvelle diaire de capteurs et d’affichages ? La
trisée. Mais on trouve aussi plus simple génération proposé à l’US Army.Avec présence de la verrière oblige à des
maintenant : avec le Scorpion, la dé- le DAS, l’équipage disposera d’une compromis en termes d’aérodyna-
tection de mouvement est hybride et visibilité sur 360° autour de son ap- mique, de résistance, de furtivité.
fait appel à l’optique à l’inertie. Les pareil grâce à l’implantation de six ca- Attention toutefois : on a vu avec
mems fournissent les références iner- méras infrarouges dans le fuselage. le F-35 que le mieux était toujours le
tielles qui sont recalées optiquement Les images « recousues » pour pré- meilleur ennemi du bien. Le volume
par une micro caméra, fixée sur le senter une continuité d’une caméra à d’informations pouvant être recueilli
casque, qui utilise comme référence l’autre seront affichées sur les écrans est quasi infini, mais il finit toujours
des repères posés en cabine. en planche de bord ou bien sur les à un moment ou à un autre par tran-
Avec le F-35, Lockheed Martin a casques de l’équipage. siter par le goulet d’étranglement que
fait un choix radical en décidant d’éli- sont les deux rétines du pilote et sa
miner le HUD et de le remplacer par SVS + EVS capacité propre au traitement de l’in-
une projection sur visière extrême- formation. Entre l’ingénieur qui aime
ment innovante. En plus des fonctions = CVS résoudre les défis techniques, avec la
traditionnelles de pilotage et de com- La suite de l’aventure tient en deux capacité d’aller toujours plus loin dans
bat ayant migré du HUD, le casque abréviations magiques : SVS (Syn- l’innovation, et l’opérationnel qui doit
Gen II associé au F-35 utilise le sys- thetic Vision System) et EVS (En- faire avec les outils placés à sa dis-
tème DAS (Distributed Aperture Sys- hanced Vision System). Le SVS s’ap- position avec une charge de travail
tem). Il s’agit d’un ensemble de six puie sur une base de données pour raisonnée, l’équilibre n’est jamais
caméras placées à l’extérieur de afficher dans le casque les obstacles facile à trouver… ■
69
CHAPITRE 3
Les besoins pour la naviga-
tion sont différents entre
ce Cap 20 et cet Airbus A321.
Néanmoins, ils peuvent
utiliser parfois les mêmes
outils. (F. Marsaly)
Comment navigue-t-on
es premiers aéroplanes pou-
« Inventer un aéroplane n’est rien, le construire
est un début, voler c’est tout. » Ainsi Otto
Lilienthal évoquait-il les balbutiements
de l’aéronautique. Et si le célèbre
L vaient suivre des repères au
sol, les routes, les voies fer-
rées, les cours d’eau. Mais, dès
les années 1920, avec la nais-
sance de l’aviation commerciale, des
moyens de repérages plus précis se
vélivole allemand a plané à de nombreuses sont avérés nécessaires, la navigation
au compas ayant ses limites, condui-
reprises, il n’a jamais eu à aller d’un point à sant à l’apparition des phares aériens,
de repères spécifiques situés au sol
un autre, par tous les temps et en toutes et, bien sûr, puisque l’aviation doit
circonstances. Car, si les pionniers ont vite énormément à la marine, à la naviga-
tion astronomique. Puisque les as-
réussi à s’envoler, d’autres difficultés sont tronomes étaient capables de calcu-
ler et d’annoncer les positions des
venues se greffer ensuite dès qu’il s’est agi astres, il était possible de déduire une
de faire progresser l’aéronautique et de position en fonction de leur observa-
tion précise. Un chronographe pré-
la rendre utile au voyage. cis, des éphémérides à jour et un sex-
tant ont longtemps fait partie du lot
Par Frédéric Marsaly de bord des avions longs courriers.
Son enseignement s’est poursuivi en
fonction des écoles et des armes jus-
70
Les avions légers sont de
plus en plus souvent équi-
pés de suites avioniques
facilitant la navigation. Ici,
de l’avionique du fabricant
Dynon embarquée sur un
Cruiser PS-28. (F. Marsaly)
aujourd’hui ?
qu’à très récemment, 2005 pour l’avia- quence de 190 à 535 KHz), dont la ré- fréquence de 108 à 117,95 MHz elles
tion française, mais depuis longtemps, ception est assurée par l’Automatic apportent la possibilité de suivre une
c’était devenu un outil de tout der- Direction Finder (ADF) à bord de route vers ou depuis ces balises. Elles
nier recours, à la limite de la tradition l’avion. L’émission se faisant en sont souvent également équipées d’un
initiatrice. grandes ondes, la portée des NDB est (DME Distance Measuring Equip-
La Seconde Guerre mondiale et très longue. Le signal émis est l’iden- ment) qui permet à l’équipage de
ses opérations à très longue distance tification de la balise sur deux ou trois connaître la distance qui le sépare de
ont démontré l’intérêt de la radio- lettres, en morse, permettant aux équi- la balise, une information cruciale.
navigation, d’une précision équiva- pages de s’assurer qu’ils sont bien sur Les VOR, plus perfectionnées que les
lente à la navigation astronomique la bonne fréquence. NDB, autorisent des itinéraires plus
mais d’une plus grande simplicité de variés et plus fins. Elles constituent
mise en œuvre. Balises NDB des étapes importantes des routes aé-
Les radiophares émettaient un si- riennes. Les fréquences VHF qu’elles
gnal capté par les instruments de bord et VOR utilisent ont une portée dite « optique».
et en indiquaient la direction. Ainsi Les NDB vont disparaître petit à En raison de la rotondité de la Terre,
ces premières balises guidaient les petit, leur utilisation étant de plus en plus le récepteur est bas et plus la ré-
avions vers elles et, de repères radios plus marginale. Néanmoins, elles ception du signal est difficile. Néan-
en repères radios, permettaient de tra- demeurent intéressantes dans les ré- moins, à haute altitude, la portée utile
cer un itinéraire à longue distance et gions les plus reculées car elles sont est de plusieurs centaines de km. Elles
sans avoir besoin de garder le sol en peu onéreuses à faire fonctionner. sont, aujourd’hui encore, les balises
vue ni de garder un œil sur les étoiles. Les balises VOR, VHF Omnidi- de radionavigation les plus couram-
Ce type de balise existe toujours rectional Range, sont mises en ser- ment utilisées par l'aviation civile, en
sous la dénomination NDB, Non Di- vice immédiatement après-guerre aux raison de leur portée et de leur grande
rectional Beacon (gamme de fré- Etats-Unis. Opérant sur la gamme de précision, surtout lorsqu’on se sert de
71
COMMENT NAVIGUE-T-ON AUJOURD’HUI ?
deux balises en recoupement. Une va- connaître la trajectoire de l’aéronef de navigation, obligeant l’équipage à
riante des balises VOR est utilisée et donc, sa position précise à tout ins- enregistrer les points de navigation
pour les ILS (Instrument Landing Sys- tant, à partir du moment où celle de suivants au fur et à mesure de la pro-
tem) qui amènent avec précision les départ a été entrée avec précision dans gression du vol. Et une erreur de sai-
avions jusqu’aux pistes d’atterrissage. le calculateur. Néanmoins, ces ins- sie pouvait s’avérer dramatique. Une
Aujourd’hui, les GPS étant pré- truments ont une dérive naturelle et des hypothèses les plus sérieuses sur
sents dans tous les cockpits, ou il est nécessaire de recaler les cen- la déviation de trajectoire du
presque, les VOR tendent progressi- trales au cours du vol. Cette opéra- KAL007, le 1 er septembre 1983,
vement à laisser la place à d’autres tion peut se faire en prenant un re- l’ayant entraîné à l’intérieur de l’es-
normes de navigation. Néanmoins père connu comme les balises de pace aérien soviétique, et son inter-
pour qu’un avion puisse être capable navigation classiques. ception par un Su-15 (269 morts) se-
de voler aux instruments, la régle- Sur la première génération de cen- rait une erreur de frappe lors de la
mentation exige que deux récepteurs trales, un clavier permettait à l'équi- programmation d’un point de navi-
VOR soient à bord et fonctionnels. page d'insérer les coordonnées géo- gation.
Les VOR-DME ont cependant un graphiques d'un certain nombre de Les centrales actuelles sont inté-
coût opérationnel certain. Dans de «points tournants» vers lesquels le di- grées dans un système encore plus
nombreux pays, beaucoup sont donc recteur de vol/pilote automatique gui- complexe de gestion du vol qui pos-
démantelés pour ne laisser que les dait l'avion ; le «Carrousel» de Delco, sède en mémoire les coordonnées de
plus stratégiques. Avec l’émergence en service sur les premières versions toutes les balises et points tournants,
du GPS, de moyen primaire, les VOR du 747, permettait d’entrer 9 points la nomenclature de toutes les routes
ont basculé depuis les années 2000 au
statut d’outil de vérification.
Pour pratiques et efficaces qu’elles
fussent, les balises n’avaient toutefois
pas la portée requise pour les vols
transocéaniques les plus longs.
Pour l’Atlantique, la route-nord
permettait de suivre les routes aé-
riennes tracées au-dessus du nord du
Canada, du Groenland, de l’Islande
pour arriver en Ecosse, mais, pour les
vols trans-Pacifique, en l’absence de
terres où poser une balise entre la côte
californienne et Hawaï par exemple,
sur cette route alors assez fréquen-
tée, des navires étaient positionnés
sur l’itinéraire des avions. Équipés
d’une balise NDB ils assuraient aussi,
en cas de besoin, les opérations de se-
cours aux appareils en difficulté
comme le fit le Pontchartrain le 15 oc-
tobre 1956 en récupérant l’équipage
et les passagers d’un Boeing de la
PanAm victime d’une panne de mo-
teur. Mais ces moyens déployés
étaient lourds et coûteux.
Navigation inertielle
et satellitaire
Il fallait trouver une technologie
permettant aux avions de naviguer de
façon autonome. C’est la conquête
spatiale qui apporta la solution avec
les centrales de navigation inertielles,
développées à partir de la Seconde
Guerre mondiale et dont les premiers
exemplaires utilisables sur les avions
apparurent dans les années 1960. Ces
centrales font reposer leur principe
de fonctionnement sur des gyro-
scopes, des systèmes en mouvement
rotatif constant et permanent d’une
extrême stabilité naturelle, et des ac-
céléromètres.
Chaque mouvement de l’aéronef
porteur peut donc être calculé et
quantifié. En extrapolant les accélé-
rations subies, il devient possible de
72
aériennes, permettant à l'équipage de bilité de calcul de position corrélé.
charger à l'avance toute la route, Programme lancé par les Etats-Unis
quand elle n'est pas automatiquement à des fins militaires pendant les an-
téléchargée depuis les services de la nées 1970, le GPS, Global Positioning
compagnie. De plus, en augmentant System, ou système global de posi-
le nombre de centrales inertielles, trois tionnement, repose sur une constel-
la plupart du temps, on peut en com- lation de satellites équipés d’horloges
parer les dérives et calculer une po- atomiques dont les émissions per-
sition moyenne probable. mettent, schématiquement, par tri-
Les centrales inertielles demeu- angulation, de connaître une position
rent le mode de positionnement prin- avec une précision extrême, de l’ordre
cipal des avions de ligne modernes de quelques centimètres pour les uti- Les cartes VFR américaines
et des avions de combat et vont lisations militaires américaines, de sont déroutantes pour
sans doute le demeurer très long- l’ordre d’une dizaine de mètres pour les pilotes français habitués
temps. L’apparition d’un nouveau dis- les applications civiles. La constella- à celles de l’IGN ou de la
positif, dans les années 1990, le GPS, tion qui comprend un minimum de Cartabossy. Sur le secteur
leur apportant la précision qui leur 24 satellites permet qu’en tout point Santa-Rosa, Vallejo et
manquait en résolvant le problème du globe, il est possible de recevoir San Francisco, on ne compte
de la dérive, lorsque les aides radio les informations de quatre d’entre- pas moins de cinq balises
ne sont pas reçues, grâce à une possi- deux. Désormais très intuitif à omni-directionnelles. (DR)
73
COMMENT NAVIGUE-T-ON AUJOURD’HUI ?
utiliser sur un écran tactile, sous forme efficace, mais les objectifs des véhi- pés d’un ou deux récepteurs VOR,
de carte défilante, le GPS est présent cules aériens et de leurs équipages ne optionnellement d’un ADF, qui
dans tous les cockpits. sont pas les mêmes. L’application de constituent leurs moyens primaires
Néanmoins, la mainmise améri- ces divers outils est donc différente. de radionavigation.
caine sur le système fait qu’il existe Les aéronefs très légers, auto-
toujours le risque de voir le service gyres, ULM naviguent réglementai- Vol à vue ou aux
coupé ou dégradé à la demande du rement à vue et ne disposent d’aucun
gouvernement de Washington, ce qui, dispositif de navigation autre qu’un instruments, des objectifs
pour des raisons d’indépendance GPS qui doit être utilisé comme outil et des moyens différents
technique, amène les autres grandes de vérification de. Le principe de
puissances à mettre en place leurs navigation est simple : prendre des Souvent, voire systématiquement,
propres constellations satellitaires de repères au sol et aller de repères en ces instruments sont accompagnés
positionnement comme Galileo pour repères à basse altitude, sans avoir à d’un GPS, portable ou intégré puisque
l’Europe, en cours de déploiement et suivre une route imposée par le la fonction « moving map » ou « di-
qui sera bientôt totalement opéra- contrôle aérien, sauf dans certaines rect to » peut simplifier le suivi du vol
tionnel, mais aussi la Chine, l’Inde ou zones particulières. et surtout éviter de se perdre, tout
la Russie. Les avions légers volent selon ce simplement. De plus en plus souvent,
L’ensemble de ces systèmes per- même principe de règles de vol à vue la fonction GPS est prise en compte
met de naviguer en plein ciel de façon (VFR) mais peuvent être encore équi- sur une tablette tactile ou un télé-
74
phone moderne. Les avions les plus navigation en suivant les instruments avions légers peuvent aussi voler en
modernes intègrent une avionique radio et en utilisant le GPS pour le suivant les règles de vol aux instru-
qui rassemble l’ensemble de ces suivi de la trajectoire, il faut rester ments (IFR), selon les trajectoires
moyens. dans le cadre du vol à vue, en respec- imposées par les routes aériennes,
Des Cessna 172, 182, des Bonanza, tant les classes d’espace aérien, les mi- à haute ou basse altitude tracées gé-
des avions de construction amateur nima de visibilité, les hauteurs de vol néralement entre deux balises
volent depuis longtemps avec des et la distance par rapport aux nuages. VOR/DME, et le contrôle aérien.
suites avioniques très avancées dont Dans tous les cas, la bonne vieille carte Il devient possible donc de voler
les écrans sont d’une modernité et papier demeure obligatoire à bord. et d’atteindre sa destination par pra-
d’un confort sans équivalent. Par Mais les pilotes de loisir n’ont pas tiquement tous les temps. Même s’il
exemple, le PS28 dispose d’une avio- d’obligation d’atteindre l’endroit s’agit d’un déplacement d’agrément,
nique Dynon avec un écran pouvant prévu coûte que coûte. Quand la l’approche de la navigation IFR est
afficher les paramètres de vol, les in- météo ne le permet pas, il vaut mieux résolument plus professionnelle dans
dicateurs du moteur et les moyens de rester au sol et ranger les avions dans l’esprit.
navigation. VOR et GPS intégré s’af- les hangars. D’autres n’ont pas ce luxe. Comme on peut l'imaginer, les
fichent donc sur une carte pour per- Lorsqu’ils sont équipés du maté- vols commerciaux répondent à des
mettre le suivi de navigation le plus riel spécifique, dont un horizon arti- normes de navigation encore plus
précis et le plus compréhensible pos- ficiel, deux récepteurs VOR, un sévères.
sible. Mais, même dans le cadre d’une conservateur de cap, entre autres, les Sur un A380, trois centrales à
Un des satellites de la constellation GPS. Depuis les années 1990, elle est désormais
indispensable pour la navigation autour du monde. (Boeing)
77
CHAPITRE 3
C’est gonflé !
Pneus et avions,
le géant Michelin
78
Michelin équipa le Concorde après son accident avec le Air X. (Michelin)
C
En 2018, la moitié mencer ainsi : et l’aviation sol. La roue se généralisa de fait ra-
des avions commer- découvre la roue. Avant de
partir dans les airs, il fallait
pidement. Boudin et tubes de caout-
chouc cédèrent la place au pneuma-
ciaux chaussent déplacer l’avion au sol puis tique gonflé à l’air. Le pneu s’imposa
accélérer avant de pouvoir décoller. dans l’aviation après avoir accompa-
des pneus Michelin. Roues et skis se disputèrent comme gné l’essor de l’automobile. Ce fut
Présentation d’une moyens de déplacement. Clément
Ader installa des petites roues sur
dans ces temps anciens qu’entra en
scène André Michelin, qui ne tarda
réussite autour d’un Eole. Le 9 octobre 1890, le grand jeu pas à prendre une place importante
des témoins de la première tentative dans le petit monde des personnali-
équipement peu de vol d’Ader consista à chercher la tés de l’industrie qui militèrent acti-
connu et néanmoins disparition des traces de roues sur le
terrain pour prouver que l’appareil
vement pour que l’aviation joue un
rôle de premier plan (voir l’encadré
indispensable pour avait décollé. Les frères Wright optè- « Michelin et l’aviation »).
rent de leur côté en 1903, avec le Flyer Paradoxalement, si les frères
les avions : le pneu. I, pour des skis fabriqués en bois, Michelin avaient pris une grande im-
Par Alexis Rocher comme pour la cellule. Faciles à fa- portance dans la fourniture de pneus
79
PNEUS ET AVIONS, LE GÉANT MICHELIN
Radial
et avion
Michelin se fit connaître à partir
d’une innovation, le pneu radial as-
sociant gomme et acier. Partant de
l’automobile, la technologie radiale
passa aux poids lourds, aux engins
agricoles et à l’aéronautique au début
des années 1970. Il fallut peaufiner
les études et les essais tant les
contraintes sont ici nombreuses, par-
fois même contradictoires. L’aviation
suppose du matériel résistant et léger,
mariage souvent difficile. Il faut pou-
voir résister aux hautes températures
lorsque le pneu touche la piste, mais
aussi affronter le froid polaire à haute
altitude, le tout en étant le moins lourd
possible, en assurant le plus grand
nombre de décollages et d’atterris-
Les pneus sont une composante essentielle du train d’atterrissage. Les moyeux
sages. L’équation est particulièrement
contiennent les freins carbone. (Cyril Abad/CAPA Pictures/Safran)
difficile. Pour la petite histoire, sur
Mirage III, l’usure était calculée de
la façon suivante : chaque pneu dis-
posait d’un crédit de 80 points. Chaque
décollage et atterrissage, en fonction
de la masse de l’avion, coûtait un lot
de points. Arrivé à zéro, remplace-
ment obligatoire ! Le rechapage est
possible, parfois jusqu’à 15 opérations
de ce type sur les pneus actuels.
La conquête
de l’Amérique
Pour Michelin, la percée se fit
d’abord dans le secteur militaire. Le
28 avril 1981, un Mirage III fit pour
la première fois un vol d’essais à Bré-
tigny avec des pneus à carcasse ra-
diale. L’armée de l’Air passa ensuite
commande pour le « Mirage » 2000.
Puis l’Us Air Force suivit pour équi-
per d’abord les Mc Donnell Douglas
F-15E, puis les F-4 « Phantom » II,
avant de généraliser cet équipement
à pratiquement l’intégralité de sa
flotte. Ce fut aussi le cas de l’Us Navy
pour ses avions.
Dans le secteur civil, Airbus s’in-
téressa à la technologie radiale au
début des années 1980. En décembre
1983, la certification commerciale fut
L’un des plus grands pneus dans l’aviation. Il équipait obtenue pour l’Airbus A300. Air
le bombardier géant B-36. (Convair) France équipa sa flotte en Michelin.
80
Dès lors Bibendum va faire le tour du
monde sur les avions. Cette ascension
vers les sommets passa par la reprise
Michelin, un grand nom de l’aviation
de BF Goodrich en 1988/1989. La André Michelin, cofondateur avec son frère Edouard de la société
gamme s’étoffa des petits avions de éponyme, s'intéressa à l’aviation dès ses débuts. Il fit partie des
tourisme jusqu’à la navette spatiale. membres fondateurs de l'aéro-club de France en 1898. Il fut un gé-
Précisons en passant que, compte néreux donateur en finançant des compétitions –100 000 francs
tenu de sa vitesse d’atterrissage de pour celui qui rejoindrait Paris au sommet du Puy-de-Dôme. Il incita
400 km/h après un passage dans l’es- le gouvernement à développer une aviation militaire, éditant à un
pace, ses pneus servaient une seule et million d'exemplaires la brochure : « Notre avenir est dans l’air ».
unique fois. Autre avion très contrai- Pendant la Guerre, Michelin finança la production de bombardiers
gnant pour ses pneumatiques, le ainsi qu’une école qui bénéficia de la première piste en dur. Après le
Concorde. L’accident du F-BTSC conflit, André Michelin poursuivit ses encouragements, notamment en propo-
le 25 juillet 2000, suite à l’éclatement sant de nouveaux prix et, en 1930, en faisant paraître un guide aérien. La disparition d’André
d’un pneu après avoir heurté une la- Michelin en 1931 marqua un coup d’arrêt dans l’association du nom avec l’aviation. Le projet
melle métallique tombée sur la piste, de fabriquer des chasseurs VG 33 à Clermont-Ferrand resta sans suite en 1940. Le grand
souligne l’importance du pneuma- retour se fit avec l’introduction du radial et la reprise des activités au début des années 1980.
tique. Pour revoler l’avion a bénéfi-
cié d’une amélioration du pneu radial
sous la forme du système NZG (Near
Zero Groth - grandissement presque
nul), qui incorpore un composite fait
de nylon et de fibres d’aramide. Ces
fils renforcés réduisent l’extension de
la carcasse (structure) du pneuma-
tique (due aux effets de la pression et
de la force centrifuge au décollage) à
moins de 3 %, à comparer aux 8 %
observés dans un pneumatique radial
nylon et à 12 % pour un pneumatique
diagonal conventionnel.
Autre succès au début des années
2000 avec l’Airbus A380. Le NZG
équipe aujourd'hui le Dassault Fal-
con 8X et l’Airbus A350. Son fabri-
cant annonce jusqu’à 20 000 dollars
de gain par rapport à un pneu radial
classique, de quoi ravir les finances
des compagnies aériennes. Autre
atout et non des moindres : 10% de
masse gagnée, de quoi faire rêver les
81
PNEUS ET AVIONS, LE GÉANT MICHELIN
Le pneu
qui parle
Dans un monde de l’aéronautique
hyperconnecté, le pneu est désormais
Les pneus nécessitent une surveillance toute particulière, ici ceux branché en direct avec les équipes de
de l’Airbus A350-1000. (Cyril Abad/CAPA Pictures/Safran) maintenance. Selon ses promoteurs
82
Pneus d’avions, des chiffres
- 55°, chiffre le plus bas des températures rencontrées par un pneu d’avion
3 millions de pneus signés Michelin en 2017
15 bars, pression moyenne. Le pneu est testé jusqu’à quatre fois ce chiffre
18 roues pour un Boeing 747 et un Airbus A350-1000
22 roues pour un Airbus A380
24 kilos, masse du pneu du train principal du Rafale Marine
27 bars, pression de gonflage des pneus du Rafale Marine
28 bars, pression des pneus du SR-71
35 tonnes, masse supportée par un pneu
60 % de l'usure se fait au moment du touché de la piste
199°, température qui déclenche un fusible dégonflant le pneu
pour éviter une surpression
300 atterrissages pour le Michelin NZG sur Airbus
300 fois son poids - résistance du pneu
24 000 dollars, prix d’un pneu de F-18 Hornet
4 000 dollars, prix catalogue pour le plus cher
A la main !
Ces câbles sont regroupés en har-
nais qui doivent être déroulés, connec-
tés, et installés dans la cabine, sous le
plancher, sous les sièges, au plafond
et même dans les cloisons de l'appa-
reil. Cloisons qui sont elles-mêmes
isolées par une couche de laine de
verre. En usine, ils sont disposés sur
des tables appelées gabarits, où se
trouve dessiné préalablement le plan
général. Notons que 70% des petites
mains qui œuvrent dans l’assemblage
du câblage est féminin, car réputé plus
méticuleux.
Sur le Boeing 787, une cinquan-
taine de fournisseurs mondiaux ap-
provisionnent Safran avec plus de 180
km de câbles et de gaines protectrices,
et 330 000 composants (connecteurs,
contacts, coques, etc.), qui permettent
à l'équipe Safran d'installer environ
1 500 harnais, panneaux électriques,
boîtes de jonction et conduits de train
d'atterrissage sur chaque avion. Sa-
fran Electrical & Power a livré au prin-
temps 2017 son millionième harnais
électrique pour le Boeing 787. Sur
le Comac C919, il a fourni 52 km de
câblage et 725 harnais électriques.
Les avions de type A 320 ou A 330
étaient équipés de câbles 100 % en
cuivre. L'A 380 utilise des câbles 70%
Tous les câbles sont réunis en en cuivre et 30 % en aluminium, qui
usine sous forme de harnais est un matériau plus léger. L'A 350 a
installés sur des gabarits. Pas
des câbles 50 % en cuivre et 50 % en
d’avions modernes sans des
aluminium. Ainsi, alors qu'un A 320
kilomètres de câbles !
compte 200 km de câblage (contre
(Pierre Soissons/Safran)
67 km pour un 737 à commandes clas-
siques), l'A 350, qui est un grand ap-
pareil, en accueille 350 km, grâce au
gain de poids.
Boîtes noires,
pour plus de sécurité
Les boîtes noires sont
P
arler de boîtes noires c’est carrière en 1935 au Centre des maté-
évoquer la sécurité aérienne. riels aériens (CEMA) de Villacou-
toujours d’actualité en Au-delà de la compréhension blay. Il se spécialise dans l’étude, la
cas d’accident d’avion. des accidents, l’objectif visé
consiste à éviter d’autres
réalisation et le perfectionnement des
instruments utilisés aux essais en vol.
Présentation drames. Mais commençons par en-
foncer une porte ouverte : les fameuses
En 1939, il conçoit un enregistreur des
données de vol à partir de photogra-
d’un équipement boîtes noires sont orange. Néanmoins phies faites en chambre noire – d’où
indispensable pour elles furent bien noires à l’origine. l’expression de « boîtes noires » (les
Anglo-Saxons parlent de « flight re-
la sécurité aérienne. L’hussenographe corder »). L’appareil prend le nom
d’hussenographe. Pour la petite his-
Par Alexis Rocher Tout commence par les recherches toire, en juin 1940, craignant que les
d’un ingénieur français, François Hus- Allemands ne s’emparent de son
senot. Polytechnicien, il commence sa invention, Hussenot, en poste en
86
Les boîtes noires de l’Airbus A330 (vol 447) furent localisées
au printemps 2011. (BEA)
L’enregistreur des paramètres (ou FDR), qui renseigne sur les paramètres du vol. (BEA)
87
BOÎTES NOIRES POUR PLUS DE SÉCURITÉ
Il a fallu de longues recherches pour retrouver l’épave de l’Airbus A330 du vol 447.
Les boîtes noires n’émettaient plus mais purent quand même être analysées. (BEA)
Aquitaine, cache sa machine en l’en- Massy. Il fait alors breveter un nou- douin, ce dernier étant le fabricant
fouissant dans une dune du bassin vel enregistreur qui projette sur une qui aida l’ingénieur à mettre au point
d’Archacon. Sable et vent vont en- pellicule des paramètres comme la vi- le système. En 1999 la Sfim est ra-
gloutir le précieux hussenographe. tesse, l’altitude, les vibrations, les tem- chetée par Sagem, devenue ensuite
Heureusement la péripétie ne mit pas pératures. C’est le succès pour la Sfim, Safran. Si la fabrication des boîtes
un terme à la boîte noire. Hussenot qui fabrique en grande série ces en- noires a été arrêtée par Safran, l’éta-
fonda en 1947, avec son associé Mar- registreurs photographiques de vol blissement de Massy Safran porte le
cel Ramoflo, la Société de fabrication que les spécialistes connaissent sous nom de François Hussenot. D’autres
d’instruments de mesure (Sfim) à le nom de HB, pour Hussenot et Beau- ingénieurs travaillent sur des boîtes
noires avec enregistreurs magné-
tiques. Signalons aux Etats-Unis le
professeur James J. « Crash » Ryan de
l’université du Minnesota (par ailleurs
détenteur d’un brevet de ceinture
de sécurité pour voiture) et Edmund
A. Boniface. Ingénieur chez Lock-
heed il breveta un enregistreur de son
dans le cockpit.
ainsi que l'environnement acoustique treurs à technologie magnétique, qui relatifs au comportement de l'avion.
du poste de pilotage (bruits, alarmes devraient disparaître complètement Les données du CVR permettent
sonores). La seconde boîte dite FDR d'ici quelques années. aux enquêteurs de procéder à l'écoute
(Flight Data Recorder-enregistreur et à la transcription des enregistre-
de paramètres) enregistre les para- Le BEA enquête ments phoniques. Il est possible éga-
mètres de vol comme la trajectoire, lement d'effectuer, à partir de ces en-
l’altitude, la vitesse, ou encore la pres- En France, les boîtes noires arri- registrements audio, des analyses
sion intérieure. La durée totale d'en- vent au BEA (Bureau enquête et spectrales permettant d'identifier des
registrement est de 25 h pour le FDR, d’analyse), chargé de récupérer les alarmes ou des bruits dans le cockpit.
et de 2 h pour le CVR. Pendant le vol, données et de les exploiter. Avant Le décryptage des données est une
les données enregistrées viennent de même toute lecture des informations, étape souvent difficile, tant les sons du
façon continue remplacer les données il faut vérifier l’état des composants CVR sont parfois inaudibles. Plusieurs
les plus anciennes, permettant ainsi électroniques et éventuellement les logiciels concourent à recouper les
d'avoir en permanence des informa- réparer. Précisons que, devant l’im- données. Parallèlement des pièces sont
tions à jour. Les boîtes noires les plus portance que peuvent avoir les conclu- récupérées sur le lieu de l’accident
sophistiquées enregistrent jusqu’à sions d’une enquête, les ouvertures des avant d’être analysées en laboratoire,
1 300 paramètres ; elles peuvent ré- boîtes noires sont systématiquement là encore pour comprendre ce qui s’est
sister à une température de 1 100 °C filmées pour ne pas prêter à critique passé. Les enquêtes sont minutieuses
pendant une heure ou supporter la par la suite. Toutes les données sont et souvent longues, ce qui est parfois
pression jusqu’à 6 000 mètres sous la récupérées. difficile à admettre pour les familles
surface de l’eau. Ces caractéristiques Celles du FDR doivent d'abord des éventuelles victimes.
permettent aux enquêteurs d'ex- être converties en valeurs de para- La généralisation des transmis-
traire avec succès les données des en- mètres de l'avion. En effet, le fichier sions de données en temps réel va sans
registreurs de vol après un accident extrait de l'enregistreur est un fichier doute apporter de plus en plus d’élé-
dans presque 100% des cas selon le binaire appelé « fichier brut » ; le dé- ments pour analyser les accidents. A
BEA. Dans le domaine de l'aviation codage de ce fichier brut est réalisé à partir de 2019, tous les longs-courriers
civile, il existe aujourd'hui deux tech- partir d'un document de décodage qui sortiront des chaînes d’assemblage
nologies d'enregistreurs de vol : la propre à chaque avion. Les valeurs des d’Airbus seront équipés d’un enre-
bande magnétique et la mémoire élec- paramètres et leurs évolutions au cours gistreur de vol qui s’éjectera automa-
tronique. Cependant les enregistreurs du temps peuvent être ensuite repré- tiquement en cas de situation d’ur-
à mémoire électronique remplacent sentées sous forme de courbes ou gence. Les boîtes noires seront
progressivement tous les enregis- de tableaux, et faire l'objet de calculs toujours indispensables. ■
89
CHAPITRE 3
Cabines, histoire de
Pas de cabine prévue pour les premiers passagers, comme pour cette Canadienne en 1912. (DR)
90
Quatre milliards
de passagers ont
voyagé dans des
cabines d’avions en
2017. Celles-ci n’ont
pas toujours été
un empilement
de sièges…
Par Alexis Rocher
I
l faut bien le reconnaître, pour le
passager moyen ivre de vacances
à prix modiques, la cabine d’un
avion c’est un siège pas confor-
table tant il devient vite étriqué,
un espace réduit au minimum vital.
Pour peu que les voisins s’endorment
et bloquent le passage, alors c’est un
pénible périple de plusieurs heures
qui s’annonce. Les compagnies aé-
riennes les plus généreuses proposent
un écran sur le siège de devant, qui
recèle une ribambelle de films et de
jeux. Mais pas de mètre carré en plus.
Les plus chanceux bénéficient du pay-
sage offert par un hublot. Boeing et
Airbus font le maximum pour agran-
dir ledit hublot sur leurs longs-cour-
riers mais décidément la cabine prend
assez vite des airs de cage. Le trans-
port de passagers ne fut pas toujours
un concours d’empilement de sièges
dans un minimum de place, le tout
tailles
pour un coût réduit.
La gigantesque
cabine de
l’Airbus A380. Le nez au vent
Onze sièges de
Avant la Première Guerre mon-
front. (Airbus)
diale pas de cabine. Le transport aé-
rien existe sous la forme de baptêmes
Fin des années 1920 : salon dans le Dornier X et bar pour le Laté 631. (DR/Fondation Latécoère)
91
CABINES, HISTOIRE DE TAILLES
92
de l’air pour curieux. Le passager
s’installe sur un siège rudimentaire,
non loin du pilote. Tout change après
la fin du conflit. Des esprits ambitieux
bâtissent des compagnies aériennes
et proposent des liaisons régulières.
Le billet est cher, le confort réduit à
sa plus simple expression. Prière de
s’équiper de vêtements chauds ! D’an-
ciens bombardiers remplacent les
bombes par des passagers. Guère
confortable. Pour des raisons de poids
pas question d’installer autre chose
que des sièges en osier. Impossible de
tenir une conversation, le bruit des
moteurs est assourdissant. Il n’est pas
rare que les passagers soient vraiment
malades tant les avions sont instables,
promenés dans le ciel par les turbu-
lences. Le sac à vomi est probable-
ment le premier objet que connaît le
passager.
Néanmoins la notion de confort
n’est pas oubliée. Il faut augmenter
la puissance des moteurs pour agran-
dir la cabine et surtout mieux l’équi-
per. Le service à bord des trains avec
les wagons Pullman et des paquebots
sert alors de référence. Cependant les
premières hôtesses de l’air, au milieu
des années 1920, sont des infirmières
tant il faut d’abord s’occuper de la
santé des passagers avant même de
leur confort. L’idée de proposer des
cabines dignes de celles des paque-
bots va finir par prendre forme avec
les grands hydravions de la fin des an-
nées 1920. Le Dornier X marque ainsi
les esprits avec ses quelque soixante Le Laté 631 jouait la carte du luxe et du confort
passagers - au prix de 12 moteurs et pour ses passagers. (DR/Fondation Latécoère)
une paisible vitesse de croisière de
170 km/h. L’avion resta au stade de
l’exemplaire unique mais l’élan était
donné.
Un air de paquebot
de luxe
Les constructeurs français se lan-
cèrent aussi dans le grand hydravion.
Beaucoup de prototypes, de petites
séries mais pas véritablement de ré-
volution dans les aménagements des
cabines. Le Latécoère 631 en est le
dernier représentant. Les neuf exem-
plaires de série proposent à 54 pas-
sagers des traversées de l’Atlantique
dans un confort proche de celui du
Normandie qui avait marqué les es-
prits avant guerre. L’heure n’était
pourtant plus aux paquebots du ciel
après 1945. Les Britanniques l’appri-
rent à leur dépens avec le Saunders-
Roe P rincess, un colosse capable
d’accueillir 100 passagers. Las, les hy-
dravions transatlantiques sont passés
de mode. Apparaît à cette époque, au
sein des compagnies aériennes, de Fin des années 1940. Boeing poursuit l’idée
grands quadrimoteurs, les Lockheed du salon volant avec le 347. (Boeing)
93
CABINES, HISTOIRE DE TAILLES
94
Le Princess poussa
à son paroxysme
le concept de palace
volant. A la fin des
années 1940, l’ère
des hydravions
était passée, et le
Princess tout comme
le Laté 631 furent
abandonnés. (DR)
95
CABINES, HISTOIRE DE TAILLES
Voyager conforta-
blement ? Voilà
l’idée avec les
avions d’affaires !
(Dassault Aviation)
96
Exercice d’aménagement de cabine en réalité virtuelle pour des
la même veine on trouve l’Airbus ingénieurs. (Frank Rogozienski/CAPA Pictures/Safran)
A380. Mais le gigantisme a ses limites.
853 passagers maximum en théorie.
Les compagnies aériennes restent
relativement assez prudentes avec le
plus souvent autour de 550 passagers.
Il faut en effet vendre un maximum
de sièges, ce qui n’est pas toujours évi-
dent sur nombre de destinations où
des avions plus petits font l’affaire.
Les généreuses proportions de l’A380
permettent au bar de réapparaître.
Offrir un confort
maximum
La course au nombre de sièges
est aussi ralentie par la volonté de
proposer des sièges plus rentables à
destination d’une clientèle plus for-
tunée, habituée des classes business.
Cette fois-ci le critère est bien d’of- Casse-tête chinois. Comment installer le plus d’éléments possible dans le
frir un confort maximum - toujours plus petit espace disponible ? (Frank Rogozienski/CAPA Pictures / Safran)
en prenant le moins de poids pos-
sible ! Les compagnies rivalisent
d’installations princières, et notam-
ment des cabines privatives. Reste
pour les plus fortunés la solution de
l’avion d’affaires. Vous pensez que
tout est possible pourvu que le bud-
get suive ? Que nenni ! Très rapide-
ment des problèmes de poids et de
sécurité limitent les ambitions d’ins-
taller des baignoires en marbre. Mul-
tiplier les jeux de lumières à bord ?
Possible, mais il ne faut pas oublier
que l’alimentation électrique empê-
cha un jour d’utiliser une cafetière
faute de pouvoir la brancher sans
provoquer un court-circuit.
Alors à quoi ressemblera la ca-
bine passagers du futur ? Airbus pro-
pose des cloisons pouvant reproduire
le paysage extérieur et faire du
voyage aérien un grand spectacle.
Chiche ? ■ C’est le retour du bar à bord de certains A380. (Airbus)
97
LE TOME 2 A POSSEDER ABSOLUMENT !
ICACÉ R !
D
DÉ ’AUTEU
L
PAR
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