Chapitre 04

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COURS TUNNELS ET OUVRAGES SOUTERRAINS

CHAPITRE 04 : Pathologie et techniques de confortement des tunnels

1. introduction :
Les tunnels routiers sont construits afin de permettre le passage de la circulation des véhicules dans de
bonnes conditions de sécurité et de confort. Or, comme tous les ouvrages d'art, ils sont soumis à un
vieillissement et des évolutions qui peuvent mettre en péril leur stabilité, leurs fonctionnalités, la sécurité des
usagers ou le niveau de service assuré.
Selon l'âge du tunnel (et donc les méthodes utilisées à l'époque de la construction, mais aussi les évolutions
survenues depuis cette époque), les désordres constatés sont différents. Le point commun à tous les tunnels
tient au fait que leur comportement est directement influencé par celui du terrain dans lequel ils ont été
creusés, car le massif rocheux fait vraiment partie intégrante de l'ouvrage en imposant souvent le rythme et
l'intensité des évolutions. Les venues d'eau sont aussi la cause de nombreux désordres et constituent une
gêne à l'exploitation. Les évolutions sont presque toujours prévisibles sur des échelles de temps de quelques
années. La prévision se fonde, d'une part sur la connaissance générale des désordres et des pathologies
susceptibles d'être rencontré et, d'autre part sur l'inspection détaillée périodique des ouvrages.
a) Nouveaux tunnels, nouveaux désordres :
Le génie civil des tunnels tend à devenir de plus en plus complexe. Les techniques actuelles permettent de
réaliser des ouvrages répondant aux exigences accrues imposées pour l'exploitation et la sécurité. Les
équipements de génie civil (second œuvre) comme les plafonds et les cloisons de gaines de ventilation
peuvent présenter des désordres ou des défauts inhérents à la conception, la réalisation et au mode de
fonctionnement.
b) L'héritage du passé, toujours présent :
Parallèlement, si la rénovation des tunnels anciens les plus dégradés tend à faire disparaitre progressivement
certains désordres ou défauts autrefois courants, ceux-ci perdurent cependant sur d'autres tunnels, il est donc
important de ne pas en perdre la connaissance.
c) Savoir voir et savoir quoi voir :
L'inspection d'un ouvrage est une démarche fondée d'abord sur l'observation et la description. Le choix a
donc été fait d'approcher les désordres et les défauts par leur apparence plutôt qu'au travers des facteurs qui
les déclenchent. Les désordres, comme les défauts, peuvent être discrets ou au contraire spectaculaires, aussi
bien dans leurs manifestations visibles que dans leur extension; mais leur gravité n'est pas obligatoirement
fonction de leur "visibilité". Aussi, il est parfois difficile d'établir une hiérarchie, qui constitue le premier pas
vers un diagnostique puis la recherche d'un traitement.
d) Comprendre :
Il est nécessaire de chercher l'origine de ces désordres ou défauts, si possible pendant l'inspection. Leur
gravité et leur évolution dépendent d'une combinaison variable entre les deux types des causes suivants:
 Les causes dites "internes", liées aux caractéristiques intrinsèques des matériaux d revêtement
(composition, porosité, texture, microfissuration,..)que l'on pourrait assimiler à des "faiblesses";
 Les causes dite "externes", liées au milieu ambiant, au comportement du massif encaissant, aux
fonctions de l'ouvrage, que l'on pourrait qualifier d'"agression" et qui peuvent être d'ordre physique,

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chimique, fonctionnel, non exclusives les unes des autres. L'influence de l'eau est présente dans bon
nombre de ces "agressions".
Contrairement aux défauts, l'apparition tardive de désordres impose toujours de revenir à la conception et
aux conditions de réalisation de l'ouvrage. Il est donc primordial de consulter l'intégralité du dossier
d'ouvrage établi par le maître d'ouvrage constructeur et complété au cours de sa vie par le service
gestionnaire.

2. Terminologie :
De nombreux termes sont employés dans la littérature technique pour évoquer les "anomalies" (au sens
large) affectant les ouvrages. Tous ne sont pas normalisés et certains sont synonymes. Ils reflètent le plus
souvent la culture de chaque corps de métier. Quelques définitions simples, applicables dans le cadre des
inspections de tunnels, sont proposées ci-après.
2.1 Défaut ou malfaçon :
Un défaut (ou une malfaçon) résulte d'une tâche manifestement mal exécutée ou de spécification non
respectées. C'est une imperfection, visible ou invisible, ponctuelle ou systématique, affectant une partie
d'ouvrage. Il est également sans conséquence mais peut aussi participer à un désordre, le provoquer ou
l'aggraver. La plupart des défauts rencontrés en tunnel n'ont aucune incidence sur la sécurité ou la pérennité
des structures. Exemple: ségrégation ou reprises de bétonnage trop fréquentes en béton coffré.
2.2. Désordre :
On appelle désordre tout problème affectant un élément ou une partie d'ouvrage, se manifestant
progressivement ou brutalement et qui dénote une évolution; c'est un symptôme. Il se distingue au défaut,
qui est une imperfection ponctuelle ou systématique, le plus souvent acquise lors de la construction. Un
synonyme est le terme d'avarie, employé plus particulièrement par la SNCF.
Les causes des désordres sont multiples. Outre l'évolution défavorable de défauts ou malfaçons, les
principaux pourvoyeurs de désordres sont l'altération des matériaux et des structures, le comportement du
terrain encaissant et l'action de l'eau. Il est important de rechercher assez tôt, pendant l'inspection de
l'ouvrage, les causes probables des désordres constatés.
Exemples:
 apparition de fissures, de déformations,
 Altération de mortiers, éclairage, ruptures,
 Apparition ou déplacement de venues d'eau.
Les désordres évoluent de façons différentes et les termes ci-après l'illustrent:
- Désordre "éteint" : des réparations ont supprimé la cause du désordre bien que ses traces soient encore
visibles (par exemple, maçonnerie régénérée mais déformation toujours apparente);
- Désordre "dormant" : le désordre existe et est susceptible d'être réactivé par une modification des
conditions locales (par exemple, reprise d'un glissement à une tête, gonflement liés à une hydratation des
argiles,…);
- Désordre "actif" : le désordre existe et les conditions courantes l'entretiennent. Cette activité peut se
manifester:
- De façon continue (par exemple, altération chimique),
- Par à-coup (par exemple, déformation, fissure, écaillage),
- Par cycles (par exemple, désordres liés aux variations thermiques saisonnières du revêtement), avec
ou sans dérive dans le temps.

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2.3. Pathologie :
On peut définir la pathologie comme étant la synthèse de tous les désordres reconnus, des facteurs qui les
déclenchent ou les entretiennent et de l'évolution probable de la situation. Une bonne connaissance de la
pathologie permet d'orienter efficacement les choix des réparations. Autrement dit, la pathologie d’un tunnel
découle souvent d’une association de désordres, rarement d’un seul d’entre eux.

3. facteurs de désordres :
L'inspection d'un tunnel a pour but de mettre en évidence les désordres que subit un tunnel dans le temps
afin d'établir un diagnostic de l'état de l'ouvrage. Les désordres constatés sont ainsi les conséquences d'un
problème qui peut avoir des origines diverses:
3.1. Les conditions géologiques, géotechniques et hydrogéologiques :
Du massif qui entourent la section du tunnel peuvent agir sur celui-ci, soit en extrados si un revêtement
existe soit directement en paroi;
3.2. La construction :
Lorsque des défauts de conception, de réalisation ou encore de nature des matériaux constituant le tunnel
sont avérés;
3.3. Le vieillissement des matériaux :
Induit par les différentes agressions chimiques aux quelles est soumis l'ouvrage.

Le diagnostique a ainsi pour but d'identifier la part relative de chacun de ces facteurs. Lorsqu'un revêtement
existe, seul son intrados sera révélateur de désordres. Une bonne connaissance de la constitution d'une
section revêtue de tunnel ainsi que la compréhension de son fonctionnement sont alors indispensables.

4. l'analyse des désordres :


L'analyse de l'état d'un ouvrage ou de l'une de ses parties doit pouvoir répondre aux quatre questions
suivantes (d'après les recommandations de l'AFTES):
 Quelles sont les causes des désordres?
 Comment les désordres peuvent-ils évoluer?
 Quel est le degré d'urgence des actions à entreprendre?
 Quels investigations, études ou travaux faut-il prévoir?
Après l'observation et le levé des désordres, l'analyse menant au diagnostic comporte les étapes suivantes:
Le pré-diagnostic, qui doit lister les hypothèses sur les causes des désordres et apporter les premiers
éléments de réponses;
L'identification de la pathologie, qui permet de hiérarchiser les conséquences pour la structure et pour les
usagers;
Le diagnostic proprement dit (diagnostic final), basé sur l'ensemble des reconnaissances et études et qui
conduit à définir, s'il y a besoin, un mode de réparation adapté.

4.1. Cadres schématiques pour l'analyse des désordres :


4. 1.1. Cas des excavations non revêtues :
Les réseaux routiers comportent quelquefois des tunnels (ou des tronçons de tunnel) non revêtus. Si le type
de désordres est clairement défini (chute de blocs au sens large), sa prédiction est parfois difficile. De plus,
ce type de désordre représente l'un des risques majeurs pour les usagers. Les terrains évoluent souvent par à-
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coups, provoquant des chutes de grandes masses, particulièrement dans les roches dures bien structurées.
Une étude géologique et structurale spécifique peut aider à cerner le potentiel de risque.

Figure a: état lors de la première inspection Figure b: état trois ans plus tard

Figure : chute de masses rocheuses (ces deux illustrations montrent la difficulté d'estimer la stabilité
de grandes masses rocheuses: la première inspection n'avait pas décelé de risque immédiat, sauf
pour la partie inférieure de la masse tombée; il est en fait tombé environ.

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4. 1.2. cas des excavations revêtues:


Ce type de revêtement cumule des désordres de différentes natures, compliquant souvent le diagnostic des
pathologies. Les plus mauvaises maçonneries ont progressivement disparu ou ont été remplacées. D'autres
qui subsistent encore atteignent parfois un tel degré d'altération, malgré des réparations périodiquesn qu'il
serait illusoire de vouloir les prolonger encore lontemps. Par ailleurs, les tunnels en maçonnerie sont
souvent de petite section, ce qui en fait des secteurs d'étranglement sur les itinéraires d'importance. Les
réparations immédiates peuvent se limiter à ce qui est strictement nécessaire pour la sécurité si une
réfection totale, incluant en particulier une augmentation de la section transversale, est rapidemment
programmée.

« Revêtement en maçonnerie »

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« Revêtement en béton non armé »

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« Revêtement en béton armé »

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« Revêtement en béton projeté »

Cas particulier des venues d'eau:


Elles peuvent nécessiter d'être traitées, quelque soit le type de revêtement, soit parce qu'elles ont un effet
néfaste sur la structure, soit pour des raisons liées à la sécurité des usagers ou aux contraintes d'exploitation
qu'elles engendrent.

Source: CETU (2015) : Guide de l'inspection du génie civil des tunnels routiers. Livre1: des désordres à
l'analyse, de l'analyse à la cotation. Centre d'étude des tunnels. Janvier 2015.France. pp120.

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5. Gestion du patrimoine et mise en sécurité :


Tous les Ouvrages d’Art en Algérie doit être l’objet d’une surveillance et d’un entretien réguliers. Pour les
tunnels et le réseau routier national, cela est réglementé par l’instruction technique pour la surveillance et
l’entretien des ouvrages d’art.
5.1 Le rôle des inspections :
Pour les tunnels, les principales dispositions concernant la surveillance du génie civil sont les suivantes :
– La surveillance continue prend une importance particulière : elle est formalisée par un relevé permanent
d’événements, tenu en subdivision territoriales de la DTP et des 500 maisons cantonnières.
– Le contrôle annuel est constitué d’un bilan annuel des événements, complété par un examen sommaire
des têtes et des parties non circulées, réalisé par des agents de la subdivision ou du Département.
– L’inspection détaillée périodique (IDP) porte uniquement sur le génie civil des ouvrages et consiste à
observer la nature des revêtements et les défauts qui les affectent (fissures, écaillages, déformations, zones
sonnant le creux, venues d’eau).
Le tout est dessiné sur des plans représentant la développée de la voûte. Ces relevés d’intrados sont exploités
informatiquement afin de réaliser des analyses sur la répartition et l’évolution des dégradations d’une visite
à l’autre. Les observations visuelles sont complétées au besoin par des auscultations métrologiques
(nivellement, convergences, fissuro-mètrie) ou l’endoscopie des forages. L’IDP reste la base de la
surveillance. C’est un constat exhaustif sur un tunnel à un moment donné, une sorte de bilan de santé. Dans
le rapport et sur les relevés d’intrados sont précisés s’il y a lieu les points à observer lors des examens
annuels. La périodicité normale est de 6 ans.
– L’évaluation IQOA (polycopie spéciale) est une cotation détaillée de l’ouvrage qui permet de définir
rapidement l’état du tunnel selon des classes. C’est un outil essentiel pour répartir les budgets de réparation
selon les priorités. Pour les tunnels, cette évaluation est effectuée uniquement lors des IDP. On distingue 5
classes:
– Classe 1 : Bon état ;
– Classe 2 : Nécessite un entretien spécialisé ;
– Classe 2 E : Evolution à surveiller ;
– Classe 3 : Structure affectée de désordres importants ;
– Classe 3 U : Intervention urgente (insécurité, ou évolution rapide). Une notation S peut s’ajouter à toutes
les classes, si la sécurité est menacée.
Ces modalités particulières comparées aux autres ouvrages d’art résultent de la spécificité des tunnels, à
plusieurs titres :
– difficultés d’intervention (nécessité de moyens d’accès en tout point de la voûte, éclairage puissant,
interruption du trafic, etc.) ;
– implication du terrain encaissant : même s’il n’est pas visible, il exerce une influence liée à sa nature et
à son évolution, qu’il faut avoir à l’esprit à travers les manifestations visibles à l’intrados (face intérieure du
revêtement).
5.2 L’entretien, la réparation et la mise en sécurité des ouvrages :
Dans la plupart des cas, les travaux de réparation sur un ouvrage doivent être précédés d’une inspection
détaillée, qui permet de déceler une ou plusieurs pathologies affectant la structure du tunnel. Le projet de
réparation prendra en compte les évolutions de l’ouvrage au fil des années grâce aux rapports d’inspection
périodiques.
Entretien courant :
L’entretien courant est une action demandant peu de moyens et peu de technicité. Il doit être réalisé de façon
régulière en liaison étroite avec la surveillance du réseau routier. Il est à la charge du service responsable de
la gestion de l’ouvrage (Département, Etat, ville, société d’autoroute, etc.). Les principaux travaux
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d’entretien courant sont : – le nettoyage des dispositifs d’écoulement des eaux (barbacanes, fossés,
caniveaux, drains, etc...) ; – le nettoyage de la chaussée, l’enlèvement des dépôts qui se créent sur les rives
de la chaussée ; – le nettoyage des trottoirs et dallettes ; – le lavage des piédroits dans le cas où le revêtement
a été prévu à cet effet ainsi que le cas échéant le remplacement des parties détériorées de celui-ci ; –
l’entretien des têtes (élimination de toutes végétations, blocs éboulés...) ; – le maintien en état des accès de
visite.
Réparation, mise en sécurité et amélioration :
Toute opération consistant à remettre partiellement ou totalement un tunnel dans son état de service
constitue une réparation. Le terme de mise en sécurité s’applique aux travaux dont l’objectif est
principalement d’adapter l’ouvrage aux exigences nouvelles de sécurité21. Enfin les améliorations sont des
opérations souvent très lourdes qui visent à améliorer le niveau de service et de sécurité d’un tunnel à travers
la modification de certaines caractéristiques (élargissement, augmentation de gabarit, création d’une
étanchéité générale, creusement d’un deuxième tube, etc.), et qui peuvent requérir l’établissement d’un
dossier de sécurité à présenter devant le comité national d’évaluation de la sécurité des ouvrages routiers
(CNESOR).
Il est à noter qu’à l’occasion de l’étude de réparation, l’opportunité de réaliser une amélioration est
pratiquement toujours envisagée. Dans tous les cas, l’étude et les travaux de réparation d’un tunnel
s’effectuent en différentes étapes successives dont l’ordre chronologique est important. La démarche qui suit
est valable quel que soit le maître d’ouvrage. Elle comprend :
1. le diagnostic ;
2. la définition du programme des exigences et les études préliminaires;
3. le projet de réparation ;
4. les travaux ;
5. la remise en service de l’ouvrage.
Voici quelques exemples de réparations selon la nature du revêtement :
– Tunnels non revêtus : purges, boulonnage, béton projeté ;
– Revêtements en maçonnerie : rejointoiement, remplacement localisé de matériaux, chemisage, injections
d’intrados ;
– Revêtements en béton : injections internes, injections d’extrados. En conclusion, la surveillance
systématique des ouvrages apparaît comme une démarche sécuritaire et rentable dans la mesure où elle
permet d’effectuer en temps voulu les opérations d’entretien et de remise en état nécessaires. Des
améliorations ont été apportées au cours des dernières années dans les méthodes de surveillance,
d’auscultation et de réparation, en tirant profit des évolutions dans les domaines de l’informatique, du
traitement des signaux ou des nouvelles technologies. Dans le domaine des réparations, de nouvelles
techniques, telles que les coques en béton projeté armé indépendantes, sont utilisées. Ces avancées
technologiques pour les tunnels en service sont nécessaires dans la mesure où le patrimoine de ces ouvrages
est en constante progression et qu’il importe de le maintenir en état.

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