Thermo PDF
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Une théorie est d’autant plus admirable que ses fondements sont simples,
qu’elle se rapporte à des domaines variés et que son domaine d’application est étendu.
En ce sens, la thermodynamique classique m’impressionne beaucoup.
C’est la seule théorie physique de portée universelle dont je suis convaincu que,
tant qu’on s’en tient à son champ d’application, elle ne sera jamais remise en cause.
Albert Einstein, 1949, Notes for an Autobiography
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2
Table des matières
2 Échanges d’énergie 19
2.1 Conservation de l’énergie, travail, chaleur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
2.2 Quelques exemples d’échange d’énergie par travail . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.2.1 Travail des forces de pression . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
2.2.2 Travail élastique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.2.3 Travail électrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.2.4 Travail chimique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
2.3 Quelques exemples d’échange d’énergie par chaleur . . . . . . . . . . . . . . 23
2.3.1 Échanges de chaleur par contact (conduction) . . . . . . . . . . . . . 23
2.3.2 Échanges de chaleur via un fluide (convection) . . . . . . . . . . . . . 23
2.3.3 Échanges de chaleur par rayonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
3
4 Fonctions et potentiels thermodynamiques 37
4.1 Les potentiels thermodynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
4.1.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37
4.1.2 Utilisation du potentiel pour déterminer l’équilibre . . . . . . . . . . 38
4.1.3 Première introduction des fonctions thermodynamiques . . . . . . . . 39
4.1.4 Le cas des variables internes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
4.2 Transformation de Legendre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
4.2.1 Présentation mathématique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
4.2.2 Application à la thermodynamique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
4.2.3 Relation de Gibbs-Duhem . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
4.3 Coefficients calorimétriques d’un fluide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
4.3.1 Définitions des coefficients calorimétriques . . . . . . . . . . . . . . . 45
4.3.2 Relations de Clapeyron . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
4.3.3 Relations entre les coefficients . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
4.3.4 Coefficients isentropiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
4.3.5 Les inégalités thermodynamiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
4
7.4 Enthalpie de changement d’état . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 79
8 Mélanges binaires 83
8.1 La règle des phases . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83
8.2 Mélanges binaires sous une seule phase . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 84
8.2.1 Mélange de deux gaz parfaits, mélange idéal . . . . . . . . . . . . . . 84
8.2.2 Mélange dilué . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86
8.3 Diagramme de phases d’un mélange binaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
8.3.1 Diagramme isobare . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 90
8.4 Taux d’humidité, évaporation, ébullition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
8.4.1 L’évaporation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
8.4.2 L’ébullition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94
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6
Avant propos et bibliographie
La thermodynamique est une branche de la physique qui étudie les systèmes macrosco-
piques (c’est-à-dire constitués d’un grand nombre de particules) dans le cadre d’une ap-
proche énergétique. C’est une théorie qui s’applique à de nombreux systèmes et qui permet
d’établir des relations très générales entre les coefficients décrivant les états de la matière.
La physique statistique donne une interprétation microscopique aux quantités étu-
diées en thermodynamique. Dans les cas simples, les postulats de la physique statistique
permettent de retrouver, comprendre et interpréter les lois de la thermodynamique.
Ces notes de cours s’adressent à des étudiants ayant déjà quelques notions de thermody-
namique. Après trois chapitres de rappels des notions essentielles (premier et second prin-
cipe, énergie, entropie, travail, chaleur, ...), des notions plus avancées de thermodynamique
sont abordées (potentiels et fonctions thermodynamiques, coefficients thermo-élastiques, dia-
grammes de phases, mélanges binaires, ...). Au milieu de ce cours, deux chapitres exposant
les notions de bases de la physique statistique permettent de mieux comprendre comment
les propriétés macroscopiques de la matière (telles que décrites pas la thermodynamique)
sont reliées au comportement microscopique des atomes et molécules ; nous y parlons (entre
autres) du facteur de Boltzmann, de l’équipartition de l’énergie, de l’interprétation statis-
tique de l’entropie, de la théorie cinétique des gaz...
Ces notes sont accompagnées d’une quarantaine de vidéos de quelques minutes permet-
tant d’expliquer les points les plus délicats et les plus importants de ce cours.
Bibliographie sommaire
• Lhuillier et Rous Introduction à la thermodynamique, Dunod (1996)
Livre concis, idéal pour revoir les notions de base de la thermodynamique
• Jancovici, Thermodynamique et physique statistique, Nathan (1999)
Un autre livre concis, qui aborde également la physique statistique
• Simon, Énergie et entropie, Armand Colin (1979)
Une référence pour approfondir les concepts et les bases de la description microscopique
• Diu, Guthmann, Lederer et Roulet, Thermodynamique, Hermann (2007)
Ouvrage de référence, très épais, très complet. Contient de nombreux compléments et suppléments.
• Landau et Lifshitz Physique Statistique, Ellipses (1994)
Plus difficile (en deuxième lecture) : Un classique, indémodable, extrêmement concis !
• Callen Thermodynamics and an introduction to thermostatistics, Wiley (1985)
Livre en anglais, dont la lecture est hautement recommandée.
• Reif Cours de Physique de Berkeley. Tome 5 : Physique Statistique, Dunod (2000)
Un autre classique, détaillé, avec des illustrations, dont vous apprécierez la lecture !
• Reif Fundamentals of statistical and thermal physics, Mc Graw-Hill (1964)
Livre en anglais du même auteur que le précédent, plus avancé et rapide dans sa présentation.
7
8
Chapitre 1 Vidéo 1
Il suffit donc de quelques cm3 à quelques dizaines de cm3 de solide ou de liquide pour
avoir une mole de matière. Pour un gaz parfait à pression atmosphérique et à une température
de 0°C, une mole occupe 22,4 `.
La thermodynamique étudie les propriétés de la matière macroscopique, c’est-à-dire ayant
tellement de particules qu’on ne peut pas envisager de suivre toutes leurs trajectoires.
Un système thermodynamique est l’objet de l’étude considérée. Ce qui n’est pas dans
le système est appelé l’extérieur. Un système peut être
• ouvert ou fermé, selon qu’il peut échanger ou non de la matière avec l’extérieur,
• non isolé ou isolé, selon qu’il peut échanger ou non de l’énergie avec l’extérieur,
• déformable ou rigide.
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1.2 Équilibre thermodynamique
On constate que si l’on attend suffisamment longtemps, un système tend vers un état
d’équilibre thermodynamique.
Encadré 1.3 : Équilibre thermodynamique
Exemple 1 : dans une baignoire remplie de 100 ` d’eau, on prélève un verre de 10 c`. Il y
a dans le verre mille fois moins de particules, de moles, de volume, d’énergie, d’entropie que
dans la baignoire ; ces quantités sont extensives. Par contre, la température, la pression, le
potentiel chimique de l’eau sont les mêmes dans la baignoire et dans le verre ; ces quantités
10
sont intensives. La surface de contact entre l’eau et l’air dépend de manière compliquée de
la géométrie du verre et de la baignoire ; cette surface est une quantité qui n’est ni intensive,
ni extensive.
Exemple 2 : on considère comme système le contenu d’une bouteille à moitié remplie, à
savoir un liquide (en bas) et du gaz (en haut). L’énergie du système est égale à l’énergie du
liquide plus l’énergie du gaz ; cette quantité est additive. Il en est de même pour le volume,
l’entropie, etc.
Remarque : en général, les variables additives et extensives sont les mêmes.
Certaines variables sont faciles à mesurer (volume, température, pression dans un fluide,
etc.) et d’autres ne peuvent être obtenues que par un calcul (énergie interne, entropie, po-
tentiel chimique, etc.).
On distingue les variables externes et internes.
• Les variables externes sont celles que l’opérateur contrôle, soit en la bloquant (masse
m d’un système fermé, du volume V d’un système rigide), soit en exerçant une action
sur le système (pression d’un pressostat p0 , température d’un thermostat T0 ).
• La variable est interne (ou libre) lorsque l’opérateur n’y a pas accès directement (même
s’il peut la définir, la mesurer). C’est par exemple le cas du nombres de particules des
réactifs dans un système fermé, siège d’une réaction chimique. La valeur de ces variables
n’est fixée que par les conditions de l’équilibre thermodynamique.
Pour un fluide pur sous une seule phase, l’état d’équilibre du système est entièrement
déterminé par trois variables thermodynamiques, par exemple n, V et T ou, au choix, n, V et
U . Les valeurs des autres variables sont alors obtenues en utilisant l’équation d’état (relation
entre p, n, V et T ) et d’autres relations, voir l’exemple du gaz parfait dans l’encadré 1.5 et
celui du gaz de van der Waals dans l’encadré 1.10.
Encadré 1.5 : Le gaz parfait
Le gaz parfait est un système thermodynamique idéal où l’on néglige les interactions
entre particules. Pour un gaz parfait classique (où l’on néglige les effets quantiques),
l’équation d’état est
p : pression (Pa) V : volume (m3 )
pV = nRT n : quantité de matière (mol) T : température (K)
où R = 8,31 J/K/mol est la constante des gaz parfaits. On écrit aussi parfois
pV = N kB T N : nombre de particules
R = NA kB .
11
n/V , l’approximation des gaz parfaits décrit mal la réalité : la distance moyenne entre
les particules diminue et le potentiel d’interaction entre elles a alors une contribution
non négligeable à l’énergie totale du gaz. On peut alors utiliser une approximation plus
fine, celle du gaz de van der Waals, voir encadré 1.10.
Une transformation est dite quasistatique quand elle se déroule suffisamment lentement
pour que le système puisse être décrit par une succession continue d’états d’équilibre
(internes).
Au cours d’une transformation quasistatique, toutes les variables d’états X1 , X2 , . . .
du système sont définies et varient de manière continue. On peut alors exprimer la
différentielle de toute fonction d’état Φ({Xn }) sous la forme
X ∂Φ X ∂Φ
dΦ = dX n = Yn dXn , avec Yn = ,
n
∂Xn Xm6=n
n
∂Xn
12
Encadré 1.7 : Transformation réversible
On dit qu’une transformation est réversible lorsque le chemin suivi peut être parcouru,
dans le même environnement extérieur, en inversant le sens du temps (autrement dit, la
transformation obtenue en inversant le film est crédible). À l’inverse, une transforma-
tion qui n’est réalisable que dans le sens normal de l’écoulement du temps est qualifiée
d’irréversible.
Pour qu’une transformation soit réversible, il faut contrôler pas à pas l’évolution du sys-
tème au cours de son évolution, donc toutes les variables d’état doivent être en perma-
nence contraintes par l’opérateur (i.e., ne relaxent pas sans le contrôle de l’opérateur).
Pour qu’il en soit ainsi, non seulement le système suit une transformation quasistatique,
mais de surcroît le système est en permanence à l’équilibre avec l’extérieur.
Toute transformation réversible est donc quasistatique, la réciproque est fausse dans le
cas général (mais néanmoins vraie dans un grand nombre de cas).
13
L’énergie interne est la somme de plusieurs termes :
Encadré 1.8 : Différents types d’énergie interne
l’énergie cinétique de translation Etrans qui est l’énergie cinétique d’agitation des
particules. Pour un système classique au repos, elle s’écrit
N
X 1 la somme porte sur les N particules du système
Etrans = mi vi2 mi : masse de la particule i,
i=1
2 vi : vitesse (vectorielle) du centre de masse de la particule i
(voir l’encadré 1.9 pour plus de détail sur le potentiel d’interaction u(r).)
l’énergie de rotation Erot qui représente l’énergie cinétique due à la rotation des
particules sur elles-mêmes.
l’énergie de vibration Evib qui représente l’énergie cinétique et l’énergie élastique
dues aux vibrations internes des particules.
d’autres termes d’énergie peuvent contribuer selon les applications. Il peut y avoir
de l’énergie dans les excitations du nuage électronique (à haute température), de
l’énergie d’interaction avec le champ magnétique, etc.
L’énergie interne est la somme de tous ces termes :
L’énergie d’interaction Eint est importante dans les liquides et les solides, mais est faible
(et souvent négligeable) dans les gaz. Par définition, elle est nulle dans le gaz parfait.
Encadré 1.9 : Le potentiel d’interaction
Le potentiel d’interaction u(r) entre deux particules séparées par une distance r (voir
la définition de Eint dans l’encadré 1.8) a souvent un graphe qui ressemble à ceci :
u(r)
−u0
0 r0 rmin 2r0 3r0
r
• rmin est la distance pour laquelle l’énergie est minimale : l’interaction est répulsive
pour r < rmin et attractive pour r > rmin .
14
• La force de répulsion est extrêmement importante pour r < r0 ce qui fait que
pratiquement toutes les distances entre deux particules sont supérieures à r0 .
• Les deux distances rmin et r0 sont typiquement de l’ordre de quelques ångströms.
• Pour r grand, la décroissance du potentiel est très rapide : elle est en 1/r6 . (L’ori-
gine de cette force est l’interaction dipôle-dipôle entre atomes, aussi appelée force
de Van der Waals ; c’est donc une force d’origine électrostatique.) En pratique,
l’interaction entre deux particules devient négligeable lorsque la distance est su-
périeure à environ trois fois r0 , c’est-à-dire typiquement un nanomètre.
La prise en compte du potentiel d’interaction conduit, en première approximation, au
gaz de van der Waals, voir encadré 1.10.
Lorsque la densité de matière est trop importante et que l’approximation du gaz par-
fait fonctionne mal, il faut prendre en compte le potentiel d’interaction décrit dans
l’encadré 1.9. Les deux effets principaux sont les suivants :
• La partie répulsive du potentiel limite le volume total offert au gaz d’un terme
proportionnel au nombre de particules.
• La partie attractive du potentiel fait que les particules qui vont cogner sur la paroi
sont retenues par le reste du gaz ; on montre que cet effet revient à diminuer la
pression d’un terme proportionnel au carré de la densité.
Pour rendre compte de ces deux effets, van der Waals a proposé en 1873 une équation
d’état qui s’écrit
n2 a
p + 2 (V − nb) = nRT,
V
où a et b sont deux constantes dépendant de la nature du gaz. À l’inverse de l’équation
d’état des gaz parfaits, l’équation d’état de van der Waals est donc propre à chaque gaz.
Cette équation, encore relativement simple, permet d’interpréter un grand nombre de
propriétés, jusqu’à la transition gaz-liquide. Dans cette approximation, l’énergie interne
d’un gaz monoatomique s’écrit
3 n2
U = nRT − a
2 V
Dans toutes les situations que nous considérons dans ce module, l’énergie interne est une
quantité additive. Cela signifie que si l’on considère un système composé de deux parties A
et B, que l’on définit UA (ou UB ) comme l’énergie qu’aurait le système A (ou le système B)
s’il était tout seul, et UA+B comme l’énergie du système complet, alors
UA+B = UA + UB . (1.2)
Pour comprendre ce résultat, on décompose l’énergie interne comme dans l’encadré 1.8 :
U = Etrans +Eint +Erot +Evib +· · · . Les termes Etrans , Etot , Evib , etc. sont clairement additifs.
Le seul terme problématique est l’énergie d’interaction Eint . Cette énergie d’interaction s’écrit
habituellement comme une somme sur toutes les paires de particules (i, j) du potentiel
15
d’interaction u entre les deux particules. Dans cette somme il y a trois types de termes : les
termes où les deux particules sont dans A, les termes où les deux particules sont dans B, et
les termes où une particule est dans A at l’autre dans B :
X X X X
Eint,A+B = u(ri,j ) = u(ri,j ) + u(ri,j ) + u(ri,j ). (1.3)
(i,j) (i,j) (i,j) (i,j)
i∈A,j∈A i∈B,j∈B i∈A,j∈B
(Rappelons que ri,j est la distance entre les particules i et j.) Le premier terme dans le
membre de droite est Eint,A , l’énergie d’interaction de la partie A. Le deuxième terme est
Eint,B . Le troisième terme est habituellement négligeable. En effet, en supposant que le
potentiel d’interaction u(r) ressemble à celui de l’encadré 1.9, alors les seules paires de
particules (i, j) avec i ∈ A, j ∈ B pour lesquelles u(ri,j ) n’est pas négligeable sont celles qui
sont de part et d’autre de la frontière entre A et B, sur une bande de largeur de l’ordre du
nanomètre. Ce troisième terme concerne donc très peu de particules par rapport aux deux
premiers, il est négligeable, on trouve que Eint est une quantité additive et, donc, l’énergie
interne U l’est également, comme annoncé.
Il y a deux types de situations (que nous ne considèrerons pas dans ce cours) où l’énergie
interne n’est plus additive :
• Lorsque les dimensions du système sont du même ordre de grandeur que la portée de
l’interaction, c’est-à-dire en gros le nanomètre. (Mais est-on alors en train de faire de
la thermodynamique ?)
• Lorsque le potentiel d’interaction ne ressemble pas à celui de l’encadré 1.9 et décroît
lentement avec la distance (force à longue portée). C’est le cas par exemple si le système
a une charge électrique non-nulle (le potentiel électrostatique décroît en 1/r seulement),
ou si on étudie la thermodynamique d’une galaxie : l’interaction entre deux « parti-
cules » (c’est-à-dire entre deux étoiles) est gravitationnelle et a un potentiel qui décroît
en 1/r.
1.6 La pression p
Un fluide exerce sur un élément de surface dS de la paroi une force de pression perpen-
diculaire à dS, dirigée vers l’extérieur et de norme p dS, où p est par définition la pression
du fluide.
Ne pas confondre la force de pression, qui est une force, quantité vectorielle dont l’unité
! SI est le Newton, et la pression, quantité scalaire dont l’unité SI est le Pascal.
À l’équilibre thermodynamique, le système doit en particulier être à l’équilibre mécanique.
Considérons trois exemples :
16
Deux fluides A et B sont séparés une paroi mobile coulissant de
A B
manière horizontale. L’équilibre mécanique impose pA = pB .
Si la paroi entre A et B n’est pas mobile, cela signifie que quelque chose la maintient en
! place quelles que soient les pressions des deux compartiments. En particulier, on peut
avoir pA 6= pB .
Du point de vue microscopique, la pression peut se comprendre comme l’effet des chocs
des particules sur les parois. Un calcul, détaillé en vidéo, donne pour un gaz parfait classique
constitué de N particules identiques :
1 N p : pression (Pa) m : masse d’une particule (kg) Vidéo 6
p = m vq2 . N : nombre de particules V : volume (m3 ) (1.4)
3 V vq : vitesse quadratique moyenne (m/s)
Vidéo 7
La vitesse quadratique moyenne vq est une estimation de la vitesse typique d’une particule.
Sa définition précise est
v
u
u1 X N
(1.5)
p la somme porte sur les N particules du système
vq = t vi2 = hv2 i, vi : vitesse (vectorielle) de la particule i.
N i=1
(La notation hv2 i se lit « valeur moyenne de v2 » et vaut par définition N1 i vi2 .)
P
L’énergie cinétique de translation s’écrit Etrans = N × 21 mvq2 (voir encadré 1.8 et (1.5)).
On en déduit que pour tout gaz parfait, on a
2 Pour tout gaz parfait
pV = Etrans . p : pression (Pa) V : volume (m3 ) (1.6)
3 Etrans : énergie cinétique de translation (J)
17
1.7 La température T
La température d’un système thermodynamique est une quantité qui doit vérifier la
propriété suivante :
Lorsque deux systèmes A et B de températures TA et TB différentes sont mis
en contact, alors de l’énergie (sous forme de chaleur) s’écoule spontanément du
corps ayant la plus grande température vers le corps ayant la moins grande tem-
pérature.
Cette propriété n’est cependant pas suffisante pour définir la température sans ambiguïté. Il
existe plusieurs manières de définir la température :
Par une échelle de température. Si on connaît la température d’un système donné, on
peut en déduire la température de tous les autres systèmes par comparaison. Par
exemple, on peut définir la température d’un gaz parfait par
pV
T = . (1.9)
nR
(Voir l’encadré 1.5.) La température de n’importe quel système peut alors être définie
comme étant la température du gaz parfait avec lequel il est en équilibre thermique.
Le problème de cette définition est que le gaz parfait est un objet théorique, et que les
gaz réels ne sont qu’approximativement des gaz parfaits.
Par l’agitation microscopique. Dans un gaz parfait classique, on a la relation simple (1.8)
entre l’énergie cinétique de translation et la température :
3
Etrans = nRT. (1.10)
2
On peut montrer que cette relation reste valable pour tout système classique (c’est-
à-dire pour tout système où l’on peut négliger les effets quantiques et relativistes),
et on peut donc l’utiliser comme définition de la température. De ce point de vue, la
température est une mesure directe de l’agitation moléculaire. En introduisant l’énergie
cinétique de translation moyenne par particule trans = Etrans /N = 12 mvq2 et en se
rappelant que nR = N kB , on peut aussi écrire, au niveau d’une particule :
3
trans = kB T. (1.11)
2
Cette définition fonctionne pour les gaz, les liquides, les solides aux températures
usuelles. Cependant, elle ne fonctionne pas pour les systèmes fortement quantiques.
Si on essayait de déterminer la température des électrons de conduction dans un métal
à température ambiante à l’aide de (1.11), on trouverait une température entre 104 et
105 Kelvin !
Par dérivation de l’entropie. De manière abstraite, on définit la température par
1 ∂S
= . (1.12)
T ∂U n,V,...
Bien qu’étant très abstraite, cette définition est valable dans toutes les situations. C’est
la manière la plus correcte de définir la température.
18
Chapitre 2 Vidéo 1
Échanges d’énergie
19
• U est une fonction d’état, une propriété du système. ∆U = UB − UA est la diffé-
rence de U entre deux états différents A et B et dU est la différence (infinitésimale)
entre deux états infiniment proches. La quantité ∆U ne dépend que des états A
et B, et ne dépend pas des états intermédiaires.
• W et Q sont deux propriétés de la transformation. Ils dépendent de A, de B
! et de tous les états intermédiaires (c’est-à-dire de la transformation suivie). Ils
ne s’expriment pas comme la différence d’une quelconque quantité prise en B
et en A. De même, δW et δQ sont des gains infinitésimaux d’énergie lors d’une
transformation entre deux états infiniment proches. Ils ne correspondent pas à
une différence.
Remarque : il est possible d’avoir des transformations sans échange de chaleur ni de
travail. L’exemple typique est la détente de Joule (décrite en plus grand détail dans la
section 3.1.1) : un gaz est dans une enceinte adiabatique ; on ouvre un robinet qui permet au
gaz de s’écouler dans une autre enceinte adiabatique où régnait le vide initialement. Lors de
la transformation le gaz ne reçoit ni chaleur (toutes les parois sont adiabatiques) ni travail
(il n’y a aucune force extérieure). On a donc Q = 0, W = 0 et, bien sûr, ∆U = 0. Si le gaz
est parfait, comme U ne dépend pas de V , cela implique ∆T = 0. Si le gaz est réel, U est
une fonction croissante de T et de V (voir par exemple l’expression de U pour un gaz de van
der Waals, encadré 1.10), et ∆U = 0 implique ∆T < 0.
poulie
manivelle
thermomètre règle graduée
pales masse
eau
20
2.2 Quelques exemples d’échange d’énergie par travail Vidéo 2
21
2.2.2 Travail élastique
Si on tire sur un fil élastique avec une force de norme fext , le système reçoit un travail
δW = fext dL,
δW = φext dq,
où µext dépend des propriétés de l’extérieur, ici le liquide. µext est appelé potentiel chimique.
Nous reviendrons dans plusieurs chapitres de ce cours sur cette quantité très importante.
La généralisation à des mélanges d’espèces différentes est immédiate. Imaginons que le
système contient différentes espèces chimiques avec un nombre de moles ni (i est l’indice des
22
différentes espèces) pour chacune. Nous supposerons qu’il n’y a qu’une phase pour simplifier.
Lors d’une transformation infinitésimale de la quantité de matière de chaque espèce (par
exemple, lors d’une réaction chimique), le travail infinitésimal vaut
X (i)
δW = µext dni . (2.3)
i
23
vers la surface, se refroidit au contact de l’atmosphère et redescend pour se réchauffer
au fond de la casserole.
Modéliser les phénomènes de convection est en général difficile. Un cas simple est celui d’un
corps X de température TX en contact avec un fluide Y (par exemple, l’atmosphère) à une
température TY différente. Des phénomènes de conduction et de convection se mettent en
place dans une couche de fluide à la surface de l’objet, l’épaisseur de cette couche dépendant
des propriétés du fluide. Les échanges de chaleur peuvent alors encore se modéliser par
l’équation (2.4), où le coefficient h s’appelle maintenant le coefficient conducto-convectif.
C’est la loi de Newton.
24
Chapitre 3 Vidéo 1
Le premier principe (conservation de l’énergie) pose des limites sur les transformations
thermodynamiques acceptables : pour un système isolé, une transformation de l’état (a) à
l’état (b) n’est possible que si U (a) = U (b) ou, dit autrement, si ∆U = 0. D’après le premier
principe, si la transformation de (a) vers (b) est possible, alors celle de (b) vers (a) l’est
également.
Cependant, l’expérience montre qu’il n’existe pour chaque système (et chaque choix de
U , V , N , etc.) qu’un seul état d’équilibre bien déterminé, et que tout système isolé évolue
spontanément et de manière irréversible vers cet état d’équilibre. Le premier principe de
la thermodynamique ne suffit pas pour expliquer cette observation, et l’on a besoin d’un
second principe pour déterminer l’état d’équilibre. Prenons deux exemples de transformations
irréversibles.
25
La transformation inverse ne peut avoir lieu spontanément.
T1 Tf
T2 Tf
Pour chaque système, il existe une quantité S définie à l’équilibre, appelée entropie,
qui est :
Une fonction d’état
La valeur de S dépend seulement de l’état (macroscopique) du système, et non
pas de son histoire. Dans les cas simples, on écrira
S = S(U, V, n).
Dans des cas plus compliqués (plusieurs compartiments, plusieurs espèces, ...),
l’entropie peut dépendre de plus de variables.
Maximale à l’équilibre
Un système isolé (U , V , n sont constants ; il n’y a ni échange de travail ni échange
de chaleur avec l’extérieur) évolue vers un état d’équilibre, compatible avec les
contraintes extérieures, pour lequel S est maximum. En particulier, lorsqu’on lève
26
une contrainte dans un système isolé (on met deux parties du système en contact
thermique, on ouvre un robinet pour laisser passer des particules, etc.), le système
cherche un nouvel état d’équilibre et son entropie ne peut qu’augmenter.
Une quantité additive
Pour un système composé de deux sous-parties, on a
Extensive
Dans la plupart des applications, l’entropie est une quantité extensive, voir l’enca-
dré 1.4. Cependant, cette propriété n’est pas essentielle et peut-être perdue quand
on étudie certaines propriétés comme les effets de surface (tension superficielle)
et les effets gravitationnels (thermodynamique d’une étoile ou d’une galaxie).
S = S1 (U1 ) + S2 (U − U1 ), (3.1)
∂S1 ∂S2
dS = − dU1 . (3.2)
∂U1 ∂U2
On voit donc sur cet exemple que ∂S/∂U doit être une fonction décroissante f (T ) de la
température (puisque la chaleur va du corps ayant le ∂S/∂U le plus petit vers le corps ayant
le ∂S/∂U le plus grand). Pour chaque choix de f (T ), on obtient ainsi une définition de la
température. Pour que cette définition coïncide avec les définitions usuelles de la température,
il faut choisir (et c’est loin d’être évident !) f (T ) = 1/T .
De la même manière, en considérant un système constitué de deux parties séparées par
un piston, on montre que ∂S/∂V est relié à la pression. Enfin, en considérant une paroi
poreuse, on trouve que ∂S/∂n est relié au potentiel chimique. Pour faire le lien avec ce qui
est déjà connu de p et de µ, on doit avoir les relations suivantes :
27
Vidéo 4 Encadré 3.2 : Dérivées premières de l’entropie
Pour un système de n moles dans un volume V avec une énergie U , les dérivées pre-
mières de la fonction S(U, V, n) sont
∂S 1 ∂S p ∂S µ
= , = , =− , (3.3)
∂U V,n T
∂V U,n T
∂n U,V
T
Remarques :
• On a précisé que l’on considérait la fonction S(U, V, n). Donc, plutôt que d’écrire
∂S/∂V U,n , on aurait pu se contenter d’écrire ∂S/∂V qui signifie, sans ambiguïté,
« dérivée par rapport V en gardant toutes les autres variables constantes. »
• La différentielle (3.4) est une description des propriétés de la fonction S : si on considère
deux états voisins (U, V, n) et (U + dU, V + dV, n + dn), alors on peut calculer la
différence d’entropie dS entre ces deux états. La différentielle (3.4) ne décrit le résultat
d’une transformation que lorsque celle-ci est quasistatique.
• Les quantités T , p et µ ainsi définies sont également des fonctions de U , V et n.
• Ces égalités impliquent que l’unité de S est le joule par kelvin et que l’unité de µ est
le joule par mole.
• En physique statistique, le potentiel chimique est souvent écrit à l’aide d’une dérivée de
S par rapport à N (nombre de particules) et non par rapport à n (nombre de moles) :
µ = −T ∂S/∂N ; l’unité de µ est alors le joule. Le rapport entre ces deux définitions
de µ est le nombre d’Avogadro.
• Il faut savoir adapter ces propriétés à des systèmes plus compliqués. Par exemple, si
on considère un mélange de deux espèces (1) et (2), alors l’entropie dépend de U , V ,
n1 et n2 , et il y a deux potentiels chimiques µ1 et µ2 .
Historiquement, le postulat n’est pas apparu ainsi comme par enchantement. L’entropie
a été découverte au 19e siècle, dans le cadre de l’étude des machines thermiques (moteurs, ré-
frigérateurs). On peut citer comme grands noms associés à ces découvertes : Carnot, Clausius
et Kelvin. Le postulat était alors exprimé sous la forme de principes qui énoncent tous une
impossibilité, c’est-à-dire mathématiquement une inégalité. (Cette inégalité est évidemment
28
équivalente à l’énoncé du postulat, même si ce n’est pas évident.) Nous renvoyons le lecteur
au supplément A du livre de thermodynamique de Diu, Guthmann, Lederer et Roulet. La
lecture des cours de Physique de Feynman, Mécanique 2, chapitre 44 est également très in-
téressante sur ce sujet. La présentation sous forme de postulat, exposée par exemple dans le
livre de Callen, a l’avantage très notable d’être très claire et concise.
3.3 Applications
3.3.1 Expression de dU
On obtient la différentielle de U en inversant (3.4) :
Encadré 3.3 : Différentielle de U
Pour un système dont les seules variables n, V et U , on a
dU = T dS − p dV + µ dn. (3.5)
Remarques :
• Cette expression doit être adaptée lorsque le système dépend de variables différentes.
• Lors d’une transformation infinitésimale à n fixé, on a en toute généralité dU = δQ +
δW . Si la transformation est réversible, alors dU correspond à la différence d’énergie
interne entre deux points d’équilibre voisins et l’on a aussi dU = T dS − p dV . Pour
une transformation réversible, on a de plus δW = −p dV ; on en déduit que
3.3.2 Positivité de CV
On reprend l’exemple de deux corps en contact thermique. Quand le corps (1) a l’énergie
U1 et le corps (2) l’énergie U2 = U − U1 , l’entropie est donnée par (3.1) :
S = S1 (U1 ) + S2 (U − U1 ).
29
On se place à l’équilibre, c’est-à-dire que
1 ∂S1 ∂S2 1
= = = .
T1 ∂U1 ∂U2 T2
On suppose comme avant que la partie (1) gagne une énergie dU1 venant de la partie (2)
et l’on veut calculer dS. L’écriture (3.2) de dS n’est pas suffisante puisque le terme en dU1
est nul, et l’on est obligé de développer au second ordre :
1 ∂ 2 S1 ∂ 2 S2
2
dS= + (dU1 )2 .
2 ∂U12 ∂U22
Cette quantité est forcément négative : on a supposé le système à l’équilibre, l’entropie est
maximale et toute modification de l’état du système (un dU1 non nul) doit conduire à une
diminution de l’entropie.
Un raisonnement sur l’extensivité permet de montrer que dans la limite où la taille du
corps (2) tend vers l’infini, on a ∂ 2 S2 /∂U22 → 0 (voir aussi le calcul plus bas). On en déduit
que pour le corps (1), quel qu’il soit, on doit avoir
∂ 2S
≤ 0,
∂U 2
où l’on a écrit S et U plutôt que S1 et U1 , pour simplifier. La fonction S est nécessairement
concave en U . En fait, on peut généraliser cet argument et montrer que
S est une fonction concave de toutes ses variables.
Terminons le calcul. Pour un système quelconque, on a
∂ 2S
∂ 1 1 ∂T 1
2
= =− 2 =− ,
∂U ∂U T T ∂U CV T 2
3
S(U, V, n) = nR ln U + nR ln V + f (n). (3.8)
2
Il est important de bien comprendre que cette fonction inconnue f (n) ne dépend que de la
quantité de matière n, et surtout pas de U ou de V .
Pour aller plus loin dans la détermination de l’entropie, on va utiliser la propriété d’ex-
tensivité : si le système (A) est de même nature que le système (B) mais est λ fois plus
grand, c’est-à-dire si (A) a λ fois plus de matière que (B), occupe λ fois plus de volume, et
dispose de λ fois plus d’énergie, alors l’entropie de (A) est λ fois plus grande. En équation :
3
S(λU, λV, λn) = λnR ln(λU ) + λnR ln(λV ) + f (λn),
2
3
= λnR ln λ + ln U + λnR ln λ + ln V + f (λn),
2
h3 i 5
= λ nR ln U + nR ln V + λnR ln λ + f (λn).
2 2
En comparant avec l’expression de λS(U, V, n), on trouve que la fonction f doit vérifier
5
λnR ln λ + f (λn) = λf (n).
2
On trouve la solution à cette équation en choisissant λ = 1/n. On obtient
h 5 i
f (n) = n f (1) − R ln n .
2
f (1) est une constante, indépendante de U , V ou n. Elle peut encore dépendre du type de
gaz monoatomique utilisé. On pose f (1) = Rc pour pouvoir factoriser par R et on obtient,
dans (3.8),
3 5 3 U V
S(U, V, n) = nR ln U + ln V − ln n + c = nR ln + ln + c . (3.9)
2 2 2 n n
31
(La deuxième écriture permet de voir immédiatement que S est bien extensif.)
En général, l’argument d’une fonction mathématique (exp, sin, tan, ...) doit être un
nombre sans dimension : l’expression exp(1 kg) n’a aucun sens. Pour cette raison, cer-
tains considèrent qu’on devrait écrire non pas ln U , mais plutôt ln uU0 où u0 est une
énergie constante (par exemple : u0 = 1 J.) Mais, formellement, les propriétés du lo-
! garithme permettent d’écrire ln uU0 = ln U − ln u0 et, en un sens, d’intégrer ln u0 dans
la constante inconnue c. On s’autorise donc à écrire ln U , sachant qu’il y a quelque
chose dans c qui permet de corriger cette expression. Du coup, la constante c ne peut
pas s’analyser dimensionnellement, et sa valeur dépend de l’unité d’énergie choisie pour
calculer ln U .
dTR = 0, dµR = 0 quels que soient δQR et dnR µR : potentiel chimique du réservoir
dnR : matière reçue par le réservoir
On suppose toujours qu’un réservoir est en équilibre interne (toutes les variables ther-
modynamiques sont donc bien définies). Les transformations subies par un réservoir
sont donc toujours supposées quasistatiques.
Remarques :
• Les réservoirs sont des systèmes idéaux, on ne peut en fabriquer que des approxima-
tions.
• En général, un réservoir physique est un « gros » système. Par exemple, l’océan fait
un excellent thermostat (si on réalise une réaction exothermique dans une éprouvette
plongée dans l’océan, l’océan va recevoir de la chaleur mais sa température ne va pas
changer). De même, l’atmosphère fait un excellent pressostat.
• Un exemple de « petit » thermostat est un mélange d’eau et de glace, qui est donc
forcément à 0◦ C : si on fournit de la chaleur à ce système, un peu de glace fond, mais
la température ne change pas. De même, quand on fait la cuisine, un « bain Marie »
est un thermostat à 100◦ C.
32
Imaginons un système d’étude (dont les variables sont notées S, U , V , p, T , etc.) qui
échange de l’énergie et du volume avec un réservoir de chaleur R (de
variables SR , UR , TR ,
etc.). On peut choisir de considérer l’ensemble système + réservoir comme isolé.
δQR
dSR = ,
TR
avec δQR la chaleur reçue par le réservoir. Comme l’ensemble système+réservoir est isolé,
on a
δQ + δQR = 0,
δQ Q
dSR = − et ∆SR = −
TR TR
(On a utilisé le fait que TR est constant pour intégrer. Attention, Q est bien la chaleur reçue
par le système ; la chaleur reçue par le réservoir est −Q.)
En utilisant ∆S + ∆SR ≥ 0 (l’entropie de l’univers ne peut qu’augmenter), on obtient
finalement
Encadré 3.5 : augmentation minimale d’entropie
Remarques :
• Cette inégalité et ses généralisations s’appellent « inégalités de Clausius. »
• Cette inégalité reste valable si le réservoir de chaleur est aussi un réservoir de volume
et/ou de matière.
• Si le système fait une transformation quasistatique à température constante T , on a
∆S = Q/T ≥ Q/TR . On retrouve Q ≥ 0 si T ≤ TR et Q ≤ 0 si T ≥ TR .
• Si le système est en contact avec trois réservoirs de températures T1 , T2 et T3 , et qu’il
reçoit les chaleurs Q1 , Q2 et Q3 de ces trois réservoirs, le raisonnement ci-dessus se
généralise en
Q1 Q2 Q3
∆S ≥ + + .
T1 T2 T3
Encore plus généralement, s’il y a une infinité de réservoirs, on pourra écrire
Z
δQ
∆S ≥ .
Text
33
Vidéo 5 3.4 Interprétation microscopique
L’interprétation microscopique de l’énergie interne se fait configuration microscopique par
configuration microscopique : si je connais la configuration microscopique de mon système,
c’est-à-dire si je connais toutes les positions et impulsions des particules, alors je peux calculer
l’énergie (mécanique) qui en découle comme une somme de l’énergie cinétique et du potentiel
d’interaction. On peut parler de l’énergie d’une configuration.
L’entropie n’a pas d’interprétation équivalente : ce n’est pas une quantité mécanique, et
on ne peut pas parler de l’entropie d’une configuration microscopique. L’entropie est une
quantité reliée à toutes les configurations microscopiques accessibles au système, et à leur
probabilités : c’est une quantité statistique.
L’idée de base est la suivante : pour un gaz, à U , V et n fixés, il y a énormément
de configurations microscopiques accessibles, c’est-à-dire de manières de décider où sont les
particules et quelles sont leurs vitesses, sachant qu’on ne compte que les configurations ayant
la bonne énergie et le bon nombre de particules dans le bon volume. Si on observe le système
à un instant donné, on verra une configuration. Si on part prendre un café et qu’on revient
observer le même système, on verra une autre configuration, complètement différente. Bien
sûr, les lois de la mécanique classique permettent, en théorie, de calculer quelle doit être
la seconde configuration à partir de la première, mais ce calcul n’est pas réalisable et, en
pratique, à chaque observation, on a une configuration qui a l’air d’être tirée au hasard. La
question importante est donc de savoir quelle est la probabilité de chaque configuration.
L’interprétation statistique de l’entropie se fait en deux postulats
Encadré 3.6 : Interprétation statistique de l’entropie
On considère un système isolé (donc U , V et n sont fixés, dans les cas simples) et on
pose " #
Ω = Le nombre de configurations microscopiques .
accessibles au système étant donnés U , V , n, . . .
Alors, à l’équilibre thermodynamique,
• Toutes les configurations microscopiques accessibles sont équiprobables.
• L’entropie du système est
S = kB ln Ω.
Remarques :
• Si l’on change U , V ou n, le nombre de configurations microscopiques accessibles
change. Ω et S sont donc des fonctions de U , V , n, . . . .
• Puisque les Ω états sont supposés équiprobables, la probabilité de chacun d’entre eux
est, par normalisation, 1/Ω.
• En mécanique classique, il y a, mathématiquement, une infinité de configurations mi-
croscopiques : chaque coordonnée est un nombre réel, et il y a une infinité de nombres
réels dans chaque intervalle. Pour obtenir un Ω fini, il faut faire l’hypothèse physique
que les positions et impulsions sont connus avec un nombre fini de chiffres après la
virgule. En mécanique quantique, Ω compte le nombre d’états propres du hamiltonien
d’énergie (environ) égale à U , qui est fini.
Ces axiomes sont souvent assez troublants de prime abord : on est en train de dire que
dans le système de l’exemple 3.1.1, les deux configurations microscopiques suivantes sont
34
équiprobables à l’équilibre :
Pourtant, on sait qu’il est essentiellement impossible que toutes les particules soient à
gauche. Il est important d’en comprendre la raison :
Chaque configuration individuelle à la même probabilité, mais il y a beaucoup
plus de configurations où les particules sont bien réparties que de configurations
où elles sont toutes à gauche.
Faisons le calcul : soient
• Ω le nombre total de configurations microscopiques,
• Ωgauche le nombre de configurations où toutes les particules sont à gauche,
• N = nNA le nombre de particules présentes dans le système.
La probabilité d’avoir toutes les particules à gauche est d’une part 1/2N (parce que
chacune des N particules a une chance sur deux d’être à gauche) et d’autre part Ωgauche /Ω
(nombre de cas favorables divisé par nombre de cas total). On a donc
Ω = 2N Ωgauche .
En choisissant alors une configuration au hasard, on est essentiellement sûr d’en choisir où
les particules sont bien réparties parce que ces configurations sont très majoritaires. Le fait
d’avoir ouvert le robinet a conduit à une évolution irréversible du système vers un nouvel état
d’équilibre où les particules sont bien réparties. Cette évolution irréversible s’accompagne
d’une augmentation d’entropie donnée par
∆S = kB ln Ω − kB ln Ωgauche = kB ln 2N = N kB ln 2 = nR ln 2.
On vérifie facilement que c’est bien le résultat qu’on obtient en faisant ∆S = S(U, 2V, n) −
S(U, V, n) à partir de l’expression (3.9) de l’entropie du gaz parfait.
35
36
Chapitre 4
Vidéo 1
Fonctions et potentiels
thermodynamiques
Dans ce chapitre, nous présentons les premières applications des deux principes : les
potentiels thermodynamiques, les fonctions d’état issues des transformations de Legendre et
la définition des coefficients calorimétriques.
37
un pressostat de pression p0
Φ = U − T0 S + p0 V. (4.3)
En effet, la chaleur reçue par le thermostat est T0 ∆Stherm , donc la chaleur reçue par le
système est Q = −T0 ∆Stherm .
• Dans le cas d’un système en contact avec seulement un thermostat, on a W = 0 (il n’y
a pas de travail) et donc ∆U = Q = −T0 ∆Stherm . On obtient alors ∆Φ = ∆U −T0 ∆S =
−T0 (∆S + ∆Stherm ) = −T0 ∆Suniv comme attendu.
• Dans le cas d’un système en contact avec un thermostat et un pressostat, le système
reçoit un travail W = −p0 ∆V ; on a donc ∆U = −T0 ∆Stherm − p0 ∆V . On en déduit
∆Φ = ∆U − T0 ∆S + p0 ∆V = −T0 (∆S + ∆Stherm ) = −T0 ∆Suniv comme attendu.
Remarque : Le potentiel Φ dépend de T0 , p0 (dans le cas avec le pressostat) et de l’état du
système que l’on peut caractériser par les variables de son choix, par exemple (U, n, V, . . .),
ou (S, n, V, . . .) ou (T, n, V, . . .).
dΦ = dU − T0 dS = 0.
Pour aller plus loin, il faut choisir quelle variable on utilise pour caractériser le système.
• Si on choisit U , alors on écrit dS = T1 dU et
T0
dΦ = 1 − dU = 0.
T
• Si on choisit S, alors on écrit dU = T dS et
dΦ = (T − T0 ) dS = 0.
T = T0 .
38
Cas d’un contact avec un thermostat et un pressostat
On considère un fluide homogène en contact avec un thermostat et un pressostat. Le
potentiel thermodynamique adapté est Φ = U − T0 S + p0 V . On suppose le fluide déjà en
équilibre interne et on cherche ici les conditions d’équilibre avec l’extérieur. À l’équilibre
thermodynamique, Φ est minimal et donc sa différentielle est nulle :
dΦ = dU − T0 dS + p0 dV = 0. (4.4)
Pour aller plus loin, il faut choisir quelles variables on utilise pour caractériser le système.
Si on choisit U et V (et d’autres variables comme n), on utilise l’identité thermodynamique
dU = T dS − p dV et on obtient
dΦ = (T − T0 )dS − (p − p0 )dV = 0. (4.5)
La condition d’équilibre entre le système et le thermostat est donc, naturellement,
T = T0 , p = p0 .
Comme dans le premier cas, d’autres choix de variables sont possibles. Par exemple, si on
choisit T et V et, en anticipant un peu la suite du chapitre, qu’on utilise dans (4.4) les
définitions des coefficients calorimétriques (4.21) et (4.22), on arrive à
T0 T0
dΦ = 1 − CV dT + 1 − ` − p + p0 dV = 0. (4.6)
T T
L’annulation des termes en facteurs de dT et dV redonne bien les conditions T = T0 et
p = p0 . Le potentiel thermodynamique est donc bien minimum quel que soit le jeu de
variables retenu.
39
• L’énergie libre F est une fonction de trois variables : T0 , V et n. En effet, la valeur
Uéq de l’énergie à l’équilibre est elle-même une fonction de T0 , V et n. L’énergie libre
caractérise un système à l’équilibre avec un thermostat.
Par définition, F est la valeur minimale de Φ sur tous les choix possibles de U ; on a donc
(4.7)
F (T0 , V, n) = min Φ(T0 , U, V, n) = min U − T0 S(U, V, n) .
U U
La première condition donne comme avant que l’énergie interne d’équilibre Uéq est telle que
T = T0 . En reportant cette valeur de Uéq dans Φ, on obtient l’énergie libre F et la deuxième
condition devient :
∂F
= 0.
∂X V,n,T
On obtient donc le résultat suivant et sa généralisation :
40
Encadré 4.2 : Équilibre thermodynamique en terme de F et G
• L’équilibre d’un système en contact avec un thermostat seulement est tel que la
température est égale à la température du thermostat et que les variables internes
minimisent l’énergie libre F .
• L’équilibre d’un système en contact avec un thermostat et un pressostat est tel
que la température est égale à la température du thermostat, la pression est égale
à la pression du pressostat, et que les variables internes minimisent l’enthalpie
libre G.
Mais le défaut de cette opération est qu’il y a une « perte d’information ». Essayons en effet
de faire l’opération inverse : soit g(y) connue, on cherche la fonction f (x) telle que
Outre que l’équation différentielle f (x) = g f 0 (x) n’est pas forcément facile à résoudre, se
(4.11)
h(y) = min f (x) − xy .
x
En pratique, pour calculer h(y), il faut trouver la valeur x(y) qui minimise f (x) − xy, la
valeur de y étant fixée. La dérivée de f (x)−xy par rapport à x doit être nulle quand x = x(y)
(parce que c’est un minimum) et l’on obtient donc
En pratique, pour pouvoir mener à bien efficacement des calculs, on gagne à être un peu
flous sur les notations : les variables y et x sont conjugués par l’égalité y = f 0 (x). Dans
certains cas, on pourra penser à y comme une fonction de x, et d’en d’autres cas on pensera
41
à x comme une fonction de y (c’est-à-dire que l’on note simplement x ce qu’on notait plus
haut x(y)). On écrit alors tout simplement
où x doit être compris comme une fonction de y. Pour calculer h0 (y), le plus simple est de
considérer la différentielle ; en utilisant que df = y dx, on obtient
a b
)
(x
b ef
ur
co
pente
y
f (x)
h(y) = f − xy
42
4.2.2 Application à la thermodynamique
Encadré 4.3 : Les fonctions thermodynamiques Vidéo 2
Soit un système où l’énergie interne s’écrit U = U (S, V, X1 , X2 , . . .), telle que
dU = T dS − p dV + Y1 dX1 + Y2 dX2 + · · ·
Remarques :
• Des différentielles (4.16) on peut déduire un grand nombre de relations. Donnons
quelques dérivées premières :
∂F ∂G ∂H ∂G
S=− =− V = =
∂T V,{Xn } ∂T p,{Xn } ∂p S,{Xn } ∂p T,{Xn }
∂F ∂H ∂G
Yn = = =
∂Xn T,V,{Xm6=n } ∂Xn p,S,{Xm6=n } ∂Xn p,T,{Xm6=n }
et quelques relations de Maxwell (une pour F , une pour G et une pour H)
∂p ∂S ∂S ∂Yn ∂S ∂V
= − = − =
∂T V,{Xn } ∂V T,{Xn } ∂Xn T,{Xm6=n } ∂T {Xn } ∂p T,{Xn } ∂T p,{Xn }
• On peut bien sûr définir l’énergie libre F d’un système qui ne dépend pas du volume V .
• L’énergie libre F est la transformée de Legendre de U pour le couple de variables
(S, T = ∂U/∂S). L’enthalpie H est la transformée de Legendre de U pour le couple
de variable (V, −p = ∂U/∂V ). L’enthalpie libre G peut être vue au choix comme
la transformée de Legendre de F pour le couple de variables (V, −p = ∂F/∂V ), ou
comme la transformée de Legendre de H pour le couple de variables (S, T = ∂H/∂S).
F
S V
p
T
U G
V S
p
T
H
• La relation (4.15) appliquée à F et à G constitue les relations de Gibbs-Helmholtz :
2 ∂(F/T ) 2 ∂(G/T )
(4.17)
U = −T H = −T
∂T
V,{Xn } ∂T p,{Xn }
43
• L’énergie libre reçoit l’interprétation suivante. Soit un système échangeant de la chaleur
avec un thermostat de température T0 , et recevant un travail W . D’après le premier
principe, ∆U = Q + W , avec Q = −T0 ∆Stherm . On suppose que, dans l’état initial
et l’état final, le système est à l’équilibre avec le thermostat, et donc de température
T = T0 . Alors,
d’après le second principe. On suppose que l’opérateur veut récupérer du travail (et
donc que W < 0). L’inégalité ci-dessus met une limite au travail récupérable : |W | <
−∆F . Au cours d’une transformation monotherme, l’énergie « libérable » d’un système
est la variation d’énergie libre, d’où son nom.
• L’enthalpie reçoit l’interprétation suivante. Soit un système échangeant de la chaleur
et évoluant en contact avec un pressostat de pression extérieure p0 . D’après le premier
principe, ∆U = Q + W , avec W = − p0 ∆V . On suppose que dans l’état initial et l’état
final, le système est à l’équilibre avec le pressostat, donc de pression p = p0 . Alors,
∆H = ∆U + ∆(pV ) = Q + W + p0 ∆V = Q. (4.18)
La chaleur échangée par un système au cours d’une transformation monobare est donc
sa variation d’enthalpie (d’où le nom issu du grec θάλπειν, thalpein, chauffer).
• L’enthalpie libre reçoit l’interprétation suivante. Soit un système évoluant en contact
avec un thermostat de température T0 et un pressostat de pression extérieure p0 , et
dont on cherche à récupérer un travail W 0 autre que celui exercé par le pressostat.
En écrivant W = −p0 ∆V + W 0 , le premier principe donne ∆U = Q − p0 ∆V + W 0 ,
avec Q = − T0 ∆Stherm . On suppose que dans l’état initial et l’état final, le système
est à l’équilibre avec le thermostat et le pressostat, donc de température T = T0 et de
pression p = p0 . Alors,
∆G = ∆U + ∆(− T S + pV ) = Q − p0 ∆V + W 0 − T0 ∆S + p0 ∆V
= W 0 − T0 (∆Stherm + ∆S) = W 0 − T0 ∆Suniv < W 0 ,
d’après le second principe. On suppose que l’opérateur veut récupérer du travail (et
donc que W 0 < 0). L’inégalité ci-dessus met une limite au travail récupérable : |W 0 | <
−∆G. Au cours d’une transformation monotherme et monobare, l’énergie « libérable »
autre que le travail du pressostat, autrement dit l’enthalpie libérable d’un système, est
la variation d’enthalpie libre, d’où son nom.
On prendra garde à ne pas confondre l’énergie libre F = U − T S et le potentiel Φ = U − T0 S
adapté à l’étude d’un système en contact avec un thermostat. De même, il ne faut pas
confondre l’enthalpie libre G = U − T S + pV et le potentiel Φ = U − T0 S + p0 V adapté à
l’étude d’un système en contact avec un thermostat et un pressostat :
• Les fonctions d’état F , G et H, obtenues par transformation de Legendre, servent à
manipuler commodément les variables retenues. À chaque jeu de variables correspond
une fonction d’état adaptée, indépendamment de l’environnement extérieur du système.
• Le potentiel thermodynamique Φ est choisi en fonction de l’environnement extérieur du
système, il sert à trouver son équilibre thermodynamique. Il est minimum par rapport
à n’importe quel jeu de variables du système.
44
4.2.3 Relation de Gibbs-Duhem
Un fluide homogène est caractérisé par trois variables : U = U (S, V, n), et donc F =
F (T, V, n) et G = G(T, p, n). La différentielle de G est alors
dG = −S dT + V dp + µ dn.
On suppose ici que G (ainsi que U , S, F , . . . ) est extensive ; c’est toujours le cas sauf lorsqu’on
traite certains problèmes bien particuliers comme les problèmes de tension de surface.
La propriété d’extensivité signifie que si on multiplie par λ la taille du système (c’est-à-
dire si on remplace n par λn sans changer T ou p), alors G est multiplié par λ. On a donc
G(λn, T, p) = λG(n, T, p). En particulier, en prenant λ = 1/n, on trouve que G(n, T, p) =
ng(1, T, p). En comparant avec la différentielle, on voit que g(1, T, p) = µ(T, p) et, finalement,
dµ = −s dT + v dp, (4.19)
avec s = S/n et v = V /n qui sont l’entropie et le volume molaire du fluide. C’est la relation
de Gibbs-Duhem.
Les coefficients calorimétriques permettent d’exprimer les variations d’entropie d’un sys-
tème en fonction de sa température T et d’autres variables données. Au cours d’une trans-
formation réversible, la chaleur échangée par le système étant donnée par δQrév = T dS, ces
coefficients permettent de quantifier les échanges de chaleur, d’où leur nom.
Nous allons présenter les coefficients calorimétriques d’un fluide homogène pour un sys-
tème fermé. Le nombre n de moles est fixé une bonne fois pour toutes, et on n’écrira pas les
termes en dn dans les identités thermodynamiques. Il reste alors deux variables pour décrire
le fluide, et l’identité thermodynamique s’écrit au choix, voir encadré 4.3 :
dU = T dS − p dV, dF = −S dT − p dV,
(4.20)
dH = T dS + V dp, dG = −S dT + V dp.
45
Vidéo 3 Encadré 4.4 : Les coefficients calorimétriques
CV `
dS = dT + dV ⇐⇒ T dS = CV dT + ` dV. (4.21)
T T
Avec l’identité thermodynamique (4.20), on obtient
dU = CV dT + (` − p) dV, (4.22)
et donc
∂S ∂U ∂S ∂U
CV = T = et `=T =p+ . (4.23)
∂T V ∂T V ∂V T ∂V T
Cp h
dS = dT + dp ⇐⇒ T dS = Cp dT + h dp. (4.24)
T T
Avec l’identité thermodynamique (4.20), on obtient
dH = Cp dT + (h + V ) dp, (4.25)
et donc
∂S ∂H ∂S ∂H
Cp = T = et h=T = −V + . (4.26)
∂T p ∂T p ∂p T ∂p T
Attention : dans les deux cas, dS est une différentielle, mais T dS = δQrév n’en n’est pas
une.
Pour une transformation isochore (dV = 0) du fluide, on a δW = 0 et (4.22) donne
Z Tf
δQ = dU = CV dT, ⇔ Q = ∆U = CV dT. (4.27)
Ti
46
ne présentons ici que la plus efficace, qui repose sur la remarque suivante. Faisant le choix
d’un jeu de variables, il est judicieux de trouver la « bonne » fonction d’état, celle dont la
différentielle exprime l’identité thermodynamique dans les variables retenues. Les relations
de Maxwell écrites avec cette fonction d’état aboutissent alors aux calculs les plus simples.
CV et ` en fonction de (T, V )
On veut exprimer ` = T ∂S/∂V |T , voir (4.23). D’après (4.20), il apparaît clairement que
la « bonne » fonction d’état est l’énergie libre. La relation de Maxwell associée à dF =
−S dT − p dV donne
∂S ∂p
= .
∂V T ∂T V
D’où immédiatement
∂p
`=T , (4.29)
∂T V
qui est la première relation de Clapeyron. Ensuite, écrivant que dS en (4.21) est une diffé-
rentielle,
∂ 2 p
∂(CV /T ) ∂(`/T ) ∂CV
= ∂T =⇒ =T , (4.30)
∂V T V ∂V T ∂T 2 V
qui est la seconde relation de Clapeyron. La connaissance de l’équation d’état (relation entre
p, T et V ) permet donc de calculer le coefficient ` et de trouver le dépendance de CV en
volume. Par exemple, pour le gaz parfait, on trouve que ` = p et que CV ne dépend pas de
V , c’est-à-dire que CV ne dépend que de T .
Cp et h en fonction de (T, p)
On veut exprimer h = T ∂S/∂p|T , voir (4.26). D’après (4.20), il apparaît clairement
que la « bonne » fonction d’état est l’enthalpie libre. La relation de Maxwell associée à
dG = −S dT + V dp donne
∂S ∂V
− = .
∂p T ∂T V
D’où immédiatement
∂V
h = −T , (4.31)
∂T p
qui est la première relation de Clapeyron. Ensuite, écrivant que dS en (4.24) est une diffé-
rentielle,
∂ 2 V
∂(Cp /T ) ∂(h/T ) ∂Cp
= =⇒ = −T , (4.32)
∂p T ∂T p ∂p T ∂T 2 p
qui est la seconde relation de Clapeyron. La connaissance de l’équation d’état V (T, p) permet
donc de calculer le coefficient h et de trouver le dépendance de Cp en pression. Par exemple,
pour le gaz parfait, on trouve que h = −V et que Cp ne dépend que de T .
47
Relations entre les coefficients thermoélastiques et calorimétriques
On rappelle les définitions suivantes :
Encadré 4.5 : Coefficients thermoélastiques
qui indique à quel point il est facile ou difficile de comprimer le fluide en aug-
mentant la pression. χT est une quantité intensive qui est toujours positive.
• Le coefficient de dilatation thermique
1 ∂V
α= en K−1 ,
V ∂T p
qui indique comment le volume évolue avec la température. α est une quantité
intensive qui est généralement positive, mais pas toujours. (Par exemple, si on
étend la définition de α aux solides isotropes, alors le α du caoutchouc est négatif.)
mais ce coefficient est redondant. En effet, comme p, T et V sont reliés par l’équation d’état,
on doit avoir
∂V ∂p ∂T
× × = −1.
∂p T ∂T V ∂V p
(Propriété mathématique générale valable dès que trois quantités sont reliées entre elles).
On en déduit que
α = βpχT .
En comparant ces définitions aux relations de Clapeyron (4.29) et (4.31), on a immédia-
tement
αT
` = βT p = et h = − αT V. (4.33)
χT
En particulier,
h ∂V
= −V χT = . (4.34)
` ∂p T
48
volume
∂V ∂V
dV = dT + dp
∂T p ∂p T
dans la relation de définition (4.21), on arrive à
∂V ∂V ∂V ∂V
T dS = CV dT + ` dT + dp = CV + ` dT + ` dp.
∂T p ∂p T ∂T p ∂p T
Cp
γ= . (4.36)
CV
γ est un nombre sans dimension dont on verra qu’il prend pour la plupart des fluides des
valeurs simples. Avec par exemple la relation de Mayer (4.35a), le rapport γ permet d’expri-
mer
1 γ
CV = αV ` et Cp = αV `. (4.37)
γ−1 γ−1
T dS = CV dT + ` dV = Cp dT + h dp = 0
49
et donc
` h ∂V CV h CV
dT = − dV = − dp =⇒ = =− V χT ,
CV Cp ∂p S Cp ` Cp
où l’on a utilisé (4.34). Avec la définition (4.36) de γ, on obtient finalement
χT Cp
= = γ, (4.39)
χS CV
qui est le formule de Reech.
Sous-entendu, les trois dérivées secondes sont évaluées en (T0 , Véq ). Les termes d’ordre 1 sont
nuls : c’est comme ça qu’on a trouvé T0 et Véq . Les termes d’ordre supérieur sont négligeables
lorsque t et v tendent vers 0.
Le minimum de Φ est bien atteint en (T0 , Véq ) si pour tous t et v on a Φ(T0 + t, Véq + v) ≥
Φ(T0 , Véq ). En prenant t et v petits, on trouve que le crochet dans (4.40) doit être positif.
En particulier, en prenant successivement v = 0 et t = 0, on trouve que nécessairement
∂ 2 Φ ∂ 2 Φ
Au point (T0 , Véq ), on a ≥0 et ≥0 (4.41)
∂T 2 V ∂V 2 T
(En général, la condition (4.41) est nécessaire mais non suffisante pour garantir que le crochet
dans (4.40) est positif.)
Il ne reste plus qu’à calculer les dérivées ; d’abord en V :
∂Φ ∂U ∂S ` T0
= − T0 + p 0 = (` − p) − T0 + p 0 = 1 − ` − p + p0
∂V T ∂V T ∂V
T T T
et
∂ 2 Φ
T0 ∂` ∂p T0 ∂` 1
2
= 1− − = 1− + .
∂V T T ∂V T ∂V T
T ∂V T V χT
Et puis en T :
∂Φ ∂U ∂S CV T0
= − T0 = CV − T0 = 1− CV
∂T V ∂T V ∂T V T T
50
et
∂ 2 Φ
T0 ∂CV T0
2
= 1− + 2 CV .
∂T V T ∂T V T
La condition (4.41) devient alors CV /T0 ≥ 0 et 1/(Véq χT ) ≥ 0 soit, plus simplement,
CV ≥ 0 et χT ≥ 0.
Cp ≥ CV ≥ 0 (4.42)
Cp
et donc γ = ≥ 1. La relation de Reech montre ensuite que
CV
χT ≥ χS ≥ 0. (4.43)
Les deux jeux de relations (4.42) et (4.43) constituent les inégalités thermodynamiques du
fluide. Elles reçoivent les applications immédiates suivantes.
• Soit une transformation où le fluide reçoit une quantité de chaleur Q > 0. Supposons
par commodité les capacités calorifiques CV et Cp constantes. Si la transformation est
isochore, l’élévation de température ∆TV est donnée par (4.27) : ∆TV = ∆U/CV =
Q/CV . Si la transformation est monobare (ou isobare), l’élévation de température ∆Tp
est donnée par (4.28) : ∆Tp = ∆H/Cp = Q/Cp . D’après l’inégalité (4.42), il vient
∆TV ≥ ∆Tp : l’augmentation isochore de température est plus élevée que l’augmenta-
tion isobare.
• Par définition des compressibilités, l’inégalité
p
(4.43) impose
∂p ∂p
≤ ≤ 0.
∂V S ∂V T
ourb c
Dans le diagramme de Clapeyron (V, p), les pentes e isot
co herme
des courbes isothermes et adiabatiques sont donc urb
e ad
négatives et, en valeur absolue, la pente de l’adia- i a b a ti
que V
batique est plus élevée que la pente de l’isotherme.
D’après la formule de Reech (4.39), le rapport des Comparaison des courbes isothermes et adia-
batiques dans le diagramme de Clapeyron.
deux pentes est donnée par le coefficient γ ≥ 1.
51
52
Chapitre 5 Vidéo 1
S = kB ln Ω.
Remarques :
• Pour les exemples simples que nous traitons dans la suite de ce chapitre, Ω est natu-
rellement un nombre fini, et la formule S = kB ln Ω s’interprète naturellement.
• Si l’on veut traiter le gaz parfait en mécanique classique, décrire un microétat consiste
53
à donner la position et l’impulsion de chacune des particules constituant le gaz. On a
alors un problème : comme il y a une infinité de positions possibles, Ω est infini. On s’en
sort en supposant que positions et impulsions ne sont connues qu’avec une précision
donnée, petite mais non nulle ; il y a alors un nombre fini de positions différentes, et Ω
est fini. Bien sûr, les expressions de Ω et de S dépendent alors des précisions choisies,
mais on trouve que les variations ∆S d’entropie entre deux états n’en dépendent pas.
• En réalité, la mécanique classique n’est qu’une approximation. Dans une approche
quantique, le nombre Ω de microétats doit être compris comme le nombre d’états
propres de l’hamiltonien. C’est un nombre fini qui dépend de la constante de Planck h.
Pour chacune de ces neuf possibilités, il y a huit manières de placer la particule 2 . Par
exemple, en partant du troisième choix ci-dessus, on a :
54
2 1 2 1 1 1 1 1 1 1
2 2 2
2 2 2
L’effet de numéroter les boules a donc été de compter chaque microétat six fois. On
corrige ce surcomptage en divisant notre résultat par 6, où 6 = 3! = 3 × 2 × 1 est le nombre
de permutations de { 1 , 2 , 3 }, c’est-à-dire le nombre d’ordres dans lequel on peut lister ces
trois éléments. On trouve finalement :
9×8×7
Ω= = 84.
6
N termes
z }| {
αV × (αV − 1) × (αV − 2) × · · · × (αV − N + 1)
Ω(N, V ) = .
N!
55
5.2.2 La formule de Stirling
Pour pouvoir considérer le gaz sur réseau comme un système thermodynamique, on a
besoin de calculer (5.1) pour des valeurs grandes de N et de αV . La formule de Stirling
donne un équivalent de N ! et de ln(N !) quand N est grand.
Encadré 5.2 : La formule de Stirling
et donc
ln(N !) ∼ N ln N − N. (5.3)
Remarques :
• Cette formule est due à James Stirling, mathématicien écossais du XVIIIe siècle, qui
n’a rien à voir avec Robert Stirling, écossais lui aussi, et inventeur du « moteur de
Stirling » au XIXe siècle.) √
• On obtient (5.3) en prenant le logarithme de (5.2) et en négligeant le terme ln 2πN .
Ce√terme est effectivement négligeable : pour N = 1020 , on a N ln N ≈ 46 1020 et
ln 2πN ≈ 24.
• Les approximations (5.2) et (5.3) sont très bonnes :
√
N N! 2πN N N e−N ln(N !) N ln N − N
100 9,333 10157 9,325 10157 363,7 360,5
1000 4,0239 102567 4,0235 102567 5912 5908
1 000 000 8,263932 105 565 708 8,263931 105 565 708 1,281552 107 1,281551 107
Voici un argument rapide permettant d’obtenir (5.3). (Obtenir (5.2) demanderait un peu
plus de travail...)
ln(N !) = ln N × (N − 1) × (N − 2) × . . . × (N − [N − 1])
= ln N + ln(N − 1) + ln(N − 2) + · · · + ln(N − [N − 1]).
En utilisant ln(N − k) = ln N + ln 1 − k
, on a
N
h 1 2 N − 1 i
ln(N !) = N ln N + ln 1 − + ln 1 − + · · · + ln 1 −
Z 1 N N N
≈ N ln N + N dx ln(1 − x)
0
où l’on a reconnu dans la somme entre crochets l’approximation habituelle d’une intégrale
par une somme discrète prise sur un grand nombre de valeurs très rapprochées. Le calcul de
l’intégrale donne le résultat.
56
5.2.3 L’entropie et la pression du gaz sur réseau
On est maintenant en mesure de calculer l’entropie de notre système :
(αV )! h i
S = kB ln Ω = kB ln = kB ln[(αV )!] − ln[N !] − ln[(αV − N )!]
N !(αV − N )!
h i
= kB αV ln(αV ) − (αV ) − [N ln N − N ] − [(αV − N ) ln(αV − N ) − (αV − N )] ,
où l’on a utilisé trois fois la formule de Stirling. Les termes sans logarithme se simplifient, et
l’on obtient finalement :
h i
S = kB αV ln(αV ) − N ln N − (αV − N ) ln(αV − N ) . (5.4)
Pour ce système très simple sans énergie, on peut faire assez peu de thermodynamique.
On peut tout de même calculer la pression :
p ∂S h i αV − N h N i
= = kB α ln(αV ) + α − α ln(αV − N ) − α = −αkB ln = −αkB ln 1 − .
T ∂V αV αV
On remarque en particulier que si on prend la limite α → ∞, on obtient l’équation des gaz
parfaits :
p N
= kB . (5.5)
T V
Ce n’est pas étonnant de retrouver un gaz parfait : si α → ∞, c’est-à-dire si le nombre de
cases disponibles par unité de volume diverge, le système devient semblable à un système
où les particules ont des positions continues et n’interagissent pas, c’est-à-dire à un gaz
parfait. Ce qui est remarquable, c’est qu’il est possible de retrouver aussi facilement cette
loi empirique de la thermodynamique à partir du seul postulat de Boltzmann, S = kB ln Ω.
(En fait, il est délicat de parler de température dans un système sans énergie. Pour compléter le calcul,
il faudrait prendre en compte l’énergie cinétique des particules ; on trouverait que Ω est multiplié par une
fonction de E et de N (pas de V !) et l’expression de p/T serait inchangée.)
57
Si l’on considère le système complet, il y a beaucoup de microétats compatibles avec σA .
En voici quatre
A B A B A B A B
Ω(N − NA , VB )
Proba(σA ) = , (5.6)
Ω(N, V )
Ω(NA , VA )Ω(N − NA , VB )
Proba(NA ) = . (5.7)
Ω(N, V )
Avec l’expression (5.1) de Ω(N, V ), on peut calculer les probabilités (5.7) pour les valeurs
58
de l’exemple (αVA = 10, αVB = 15, N = 10). On trouve
59
Ces fluctuations, bien que grandes en valeur absolue, sont négligeables comparées à la valeur
moyenne de NA . D’ailleurs, si on exprime maintenant la quantité de matière et la masse dans
notre système, on obtient
Il n’y a aucun espoir de mesurer ces fluctuations, et la théorie thermodynamique est am-
plement justifiée pour des systèmes aussi grands. Cependant, si on considère un volume
Vidéo 4
VA = 1 µm3 ou plus petit, l’effet des fluctuations peut commencer à se faire sentir.
1 ∂S kB N − U
= = ln . (5.14)
T ∂U U
60
On peut alors inverser cette relation pour avoir l’énergie interne U (N, T ) du système, puis
calculer la capacité thermique C = ∂U/∂T , etc. Dans le cas où le système à deux niveaux
est un système magnétique, on peut aussi déterminer l’aimantation du système en fonction
de la température et retrouver la formule de Curie : dans la limite des faibles champs B ~ et
des hautes températures T , l’aimantation est proportionnelle B/T ~ .
5.4 Résumé
La démarche à suivre pour étudier un système en microcanonique est toujours la même :
Encadré 5.3 : La démarche à suivre
Pour un système donné,
• Calculer le nombre Ω de microétats en fonction des variables macroscopiques
(U , V , N , etc.) Ce calcul fait intervenir des problèmes de combinatoire et, très
souvent, des binomiaux et des factorielles apparaissent.
• Calculer l’entropie S = kB ln Ω. On utilise souvent la formule de Stirling.
• Calculer les paramètres thermodynamiques. À l’aide de l’identité thermodyna-
mique dS = T1 dU + Tp dV − Tµ dN + · · · , on peut calculer T , p, µ, etc. en dérivant
l’entropie par rapport à ses paramètres.
• À l’étape précédente, on a calculé T (U, V, N, . . .). En inversant cette relation, on
obtient U (T, V, N, . . .), ce qui est plus pratique. On peut alors calculer d’autres
quantités thermodynamiques comme la capacité thermique CV = ∂U/∂T .
On considère un système isolé que l’on découpe en deux parties A et B. Pour une
quantité thermodynamique X quelconque (le nombre de particules, l’énergie, etc.), on
s’intéresse à la valeur XA de cette quantité dans la partie A. Alors
• La quantité XA est aléatoire, et sa distribution est décrite par une gaussienne.
• La valeur moyenne de XA est égale à la prédiction de la Thermodynamique.
• En supposant de plus que la partie A est beaucoup plus petite que la partie B,
les fluctuations de √
XA sont typiquement égales à sa valeur moyenne divisée par
un facteur d’ordre NA ; c’est la loi des grands nombres.
61
62
Chapitre 6 Vidéo 1
Système Thermostat
Rappelons qu’un thermostat est un système idéal, supposé tellement grand que sa tempéra-
ture ne change pas, même lorsqu’il reçoit (ou donne) de l’énergie sous forme de chaleur (voir
encadré 3.4). En particulier, le thermostat impose sa température au système. On consi-
dère que le système ne peut échanger de la chaleur qu’avec le thermostat, et que l’ensemble
{système + thermostat} est isolé.
L’objet d’étude est le système, et on s’intéresse aux microétats du système (et non ceux
du thermostat). Comme le système n’est pas isolé, son énergie peut fluctuer et tous les
microétats, quelle que soit leur énergie, sont accessibles. (Par comparaison, en microcano-
nique, l’énergie du système a une valeur constante fixée par l’expérimentateur, et seuls les
microétats ayant cette énergie sont accessibles.)
On note les microétats du système par la lettre σ, et on utilise les notations suivantes :
(
Eσ l’énergie du système lorqu’il est dans le microétat σ,
Pour un microétat σ donné :
Pσ la probabilité que le système soit dans le microétat σ.
63
6.1.2 Le facteur de Boltzmann
Le résultat fondamental, qui sera démontré à la fin de ce chapitre, est le suivant :
Vidéo 2 Encadré 6.1 : Le facteur de Boltzmann
Pour un système à l’équilibre thermodynamique en contact avec un thermostat à la
température T ,
Eσ
Pσ est proportionnel à exp − . (6.1)
kB T
Remarques :
• L’expression (6.1) est bien sûr valable pour un système thermodynamique constitué
d’un grand nombre de particules. De manière peut-être surprenante, elle reste valable
pour un système, composé d’un petit nombre de particules, voire d’une seule particule !
• Dans l’expression (6.1), le thermostat n’intervient que par l’intermédiaire de sa tem-
pérature T ; la manière dont il est construit n’a aucune influence sur la statistique du
système.
• Pour un système quantique, les microétats que l’on considère sont, comme en microca-
nonique, les états propres de l’hamiltonien. C’est un ensemble discret et on peut définir
la probabilité (6.1) de chacun de ces états.
• Pour un système classique, l’ensemble des microétats est continu. Il faut alors remplacer
la probabilité Pσ par une densité de probabilité ; voir la section 6.2.6 pour plus de
détails.
• En physique statistique, on introduit souvent, pour simplifier les notations, la tempé-
rature inverse
1
β= .
kB T
• Le facteur de proportionnalité est souvent noté Z1 , où Z s’appelle la fonction de parti-
tion. L’équation (6.1) s’écrit alors
1 −βEσ
Pσ = e .
Z
La fonction de partition dépend de la température T du thermostat, des propriétés du
système mais, bien évidemment, elle ne dépend pas de σ.
6.2 Applications
Vidéo 3 6.2.1 Le système à deux niveaux
Le système le plus simple que l’on puisse imaginer en physique statistique est le système
à deux niveaux (ou deux états), c’est-à-dire un système où il n’y a que deux microétats dif-
férents possibles. Ces deux niveaux peuvent par exemple être les deux orientations possibles
du moment cinétique selon l’axe des z pour une particule de spin 1/2, ou les états symé-
trique et antisymétrique d’une molécule d’ammoniac (NH3 ), etc. Selon le système considéré,
on peut noter ces deux niveaux {↑, ↓}, ou {+, −}, ou {A, S}, etc. Ici, de manière générique,
on décide de les noter tout simplement {1, 2} :
σ ∈ {1, 2}.
64
On parlera donc de E1 , l’énergie du système dans l’état σ = 1, de E2 , l’énergie du système
dans l’état σ = 2. Les probabilités des deux états sont notées P1 et P2 .
On suppose que le système est en équilibre avec un thermostat à la température T .
D’après (6.1), en notant 1/Z le facteur de proportionnalité et β = 1/(kB T ), on a
1 −βE1 1 −βE2
P1 = e , P2 = e . (6.2)
Z Z
On détermine Z par normalisation des probabilités :
et donc
e−βE1 e−βE2
P1 = , P 2 = .
e−βE1 + e−βE2 e−βE1 + e−βE2
Une fois qu’on a les probabilités des états, on peut calculer des propriétés statistiques comme
l’énergie moyenne dans le système :
E1 e−βE1 + E2 e−βE2 E2 − E1
hEi = E1 P1 + E2 P2 = −βE −βE
= E1 + . (6.3)
e 1 +e 2 1 + eβ(E2 −E1 )
L’énergie moyenne hEi, pour une particule unique, n’est jamais l’énergie du système : celle-
ci, à un moment donné, est soit E1 , soit E2 . Cependant, si on fait de nombreuses mesures
de cette énergie et qu’on moyenne ces mesures, on obtient une quantité qui tend vers hEi.
La moyenne d’une somme est égale à la somme des moyenne. La moyenne de n’importe quel
terme du membre de droite est donnée par (6.3). On en déduit que l’énergie moyenne totale
est
E2 − E1
hénergie totalei = N hénergie d’une particulei = N E1 + . (6.4)
1 + eβ(E2 −E1 )
L’expression (6.4) est une moyenne, et l’énergie du système à un instant n’est jamais exac-
tement égale à cette valeur. Cependant, si N est très grand, la loi des grands nombres nous
apprend que la différence entre l’énergie du système et sa valeur moyenne est négligeable.
En thermodynamique, avec N ∼ 1020 , la différence entre l’énergie du système et sa valeur
65
moyenne est quasiment impossible à mesurer, et on identifie (6.4) avec l’énergie interne du
système :
E2 − E1
U = N E1 + . (6.5)
1 + eβ(E2 −E1 )
Cette énergie interne est une fonction croissante de la température (rappelons que β =
1/(kB T )) et, en dérivant par rapport à T , on obtient la capacité thermique C du système.
Nous vous invitons à faire le calcul et à vérifier que
C
0,44 N kB
X 2 eX E2 − E1
C = N kB X 2
avec X = . (6.6)
(1 + e ) kB T
0
0 E2 − E1 T
2,4 kB
• En physique statistique, on peut considérer des systèmes « petits » (avec une seule
particule, ou quelques-unes). On peut alors calculer des probabilités et des valeurs
moyennes, comme dans (6.3).
• Pour faire de la thermodynamique, il faut que le système considéré soit « grand »
! (avec 1020 particules). On peut alors calculer l’énergie interne ou la capacité ther-
mique, comme dans (6.6).
Calculer des quantités thermodynamiques (énergie interne, entropie, capacité ther-
mique, etc.) pour un système « petit » n’aurait pas de sens.
66
Les notions de « basse température » et « haute température » dépendent du système
considéré. Par exemple :
• Dans un modèle simple de l’atome, le nuage électronique est dans sa limite basse
température si (typiquement) T 105 K, c’est-à-dire : toujours.
• L’aimantation d’un métal paramagnétique est dans sa limite basse température
si (typiquement) T 1 K, même pour un champ très fort, c’est-à-dire : jamais.
! Ces notions dépendent même de quelle propriété du système on regarde. Par exemple,
pour un gaz diatomique, en plus de son déplacement du centre de masse, une particule
peut tourner et vibrer. On trouve que
• Les propriétés liées à la rotation sont dans la limite basse température si (typi-
quement) T 100 K, c’est-à-dire : presque jamais.
• Les propriétés liées aux vibrations sont dans la limite basse température si (typi-
quement) T 2 000 K, c’est-à-dire : toujours dans les conditions habituelles.
Pour avoir l’énergie E, il faut que le système soit dans un microétat σ tel que E(σ) = E.
La probabilité d’un de ces microétats est Pσ = Z1 e−βEσ = Z1 e−βE , mais il ne faut pas oublier
qu’il y a a priori plusieurs microétats ayant l’énergie E. Posons donc :
(6.7)
ln P (E) = −β E − T S(E) − ln Z,
67
reliée au potentiel thermodynamique Φ pour un système en contact avec un thermostat, voir
l’encadré 4.1. On avait vu en thermodynamique que Φ devait être minimale à l’équilibre, ce
qui est cohérent avec (6.8).
Appelons E ∗ l’énergie qui minimise (6.7). En faisant un développement limité autour de
E ∗ , le premier ordre est nul (puisque E ∗ est un minimum) et on obtient
(E − E ∗ )2
ln P (E) ≈ −β E ∗ − T S(E ∗ ) − ln Z − (6.9)
+ ···
2kB T 2 CV
σ = {~r, ~v } = {x, y, z, vx , vy , vz }.
Eσ = E(x, y, z, vx , vy , vz ). (6.10)
La difficulté ici est que les variables utilisées pour décrire la particule varient continûment.
Il faut alors renoncer à donner la probabilité de chaque microétat, et raisonner en terme
de densité de probabilité. Pour une seule variable q, on définit la densité f (q) de manière
suivante : quels que soient a < b, on a
Z b
f (q) dq = probabilité que la variable aléatoire q soit entre a et b.
a
68
Pour un intervalle [a, b] infiniment petit, on obtient
f (q) dq = probabilité que la variable aléatoire q soit entre les nombres q et q + dq.
Ici, ces deux intégrales portent sur le domaine où R ∞peut varier la variable aléatoire
RL q. Par
exemple, selon les cas, ces intégrales peuvent être −∞ si q est une vitesse, ou 0 si q est une
R 2π
coordonnée dans une boîte, ou 0 si q est un angle.
Dans le problème qui nous intéresse, il y a six variables. On introduit une fonction densité
fσ = f (x, y, z, vx , vy , vz ) telle que
Sans surprise, le résultat fondamental de l’encadré 6.1 s’adapte directement aux systèmes
classiques avec des variables continues :
Encadré 6.3 : Le facteur de Boltzmann pour des variables continues Vidéo 5
Pour un système classique à l’équilibre thermodynamique en contact avec un thermo-
stat à la température T ,
Eσ
fσ est proportionnel à exp − . (6.11)
kB T
Prenons un exemple. Dans une boîte cubique de côté L, on considère une particule clas-
sique non-relativiste de masse m soumise au champ de gravité. Son énergie est
1
Eσ = E(x, y, z, vx , vy , vz ) = mgz + m~v 2 , (6.12)
2
où x, y et z sont dans l’intervalle [0, L].
On applique (6.11), avec β = 1/(kB T ) et en utilisant « ∝ » pour « est proportionnel à » :
1 2
fσ = f (x, y, z, vx , vy , vz ) ∝ e−βmgz e−β 2 m~v
Du point de vue des probabilité, cela signifie que la position et la vitesse de la particule sont
des variables aléatoires indépendantes : on peut déterminer d’abord la position grâce à la
densité fpos puis, de manière indépendante de cette position, déterminer la vitesse grâce à la
densité fvit .
69
La densité fvit est examinée en détail dans la section suivante. Ici, intéressons-nous à la
densité fpos .
La première chose qu’on remarque est que fpos ne dépend que de z. Cela signifie que les
variables x et y sont choisies de manière uniforme dans l’intervalle [0, L] : aucune valeur
n’est favorisée. Par contre, la densité de probabilité fpos décroît avec l’altitude z : a priori,
les particules ont plus tendance à être en bas plutôt qu’en haut. Voyons à quel point :
• Pour une molécule de diazote (masse molaire 28 g/mol) à température ambiante, on
trouve βmg = 1/(8 700 m). À moins que la boîte ne fasse plusieurs kilomètres de haut,
on trouve que βmgz 1 et e−βmgz ≈ 1 pour toutes les valeurs de z. On trouve donc
que fpos est, avec une très bonne approximation, également indépendant de z, toutes
les valeurs de z sont équiprobables et on conclut que l’on peut négliger la gravité pour
étudier un gaz dans une boîte.
• Pour un petit grain de sable fin ayant une masse m = 1 µg à température ambiante, on
trouve βmg = 1/(4 10−13 m). On voit que fpos ∝ e−βmgz est quasiment nul sauf pour
z = 0 ; les grains de sable, même très légers, restent au fond de la boîte ; l’agitation
thermique n’est pas suffisante pour les faire décoller.
l’on a utilisé (6.13) pour la moyenne de l’énergie cinétique. (Exercice : sauriez-vous calculer
V (x, y, z) dans le cas simple V = mgz pour une particule dans une boîte ?)
Eσ = · · · + bq 2 + · · · ,
où q est l’une des variables permettant de décrire le système (q peut être une position, une
vitesse, un angle, un moment cinétique, ...), alors on vérifie que l’énergie moyenne s’écrit
1
hEi = h· · · i + kB T + h· · · i.
2
C’est le théorème d’équipartition de l’énergie.
Encadré 6.5 : Théorème d’équipartition de l’énergie Vidéo 7
Pour un système classique à l’équilibre en contact avec un thermostat à la tempé-
rature T , chaque terme quadratique dans l’énergie du système a une valeur moyenne
égale à 12 kB T .
Remarques :
• 21 m~v 2 = 12 mvx2 + 12 mvy2 + 12 mvz2 . Il y a trois termes quadratiques dans l’énergie cinétique
d’une particule, d’où le résultat (6.13).
• Pour un système classique quelconque constitué de N particules, l’énergie cinétique de
translation moyenne est donc hEtrans i = 23 N kB T .
• Pour un gaz parfait monoatomique, U = hEtrans i = 32 N kB T .
• De manière similaire, on peut retrouver l’énergie interne d’un gaz parfait diatomique
à l’aide du théorème d’équipartition de l’énergie ; voir la vidéo.
dU = T dSth .
71
Mais la température d’un thermostat reste constante même lorsque son énergie interne
change. On peut donc intégrer la relation entre dU et dSth :
U
∆U = T ∆Sth c’est-à-dire Sth (U ) = + Cste.
T
En combinant avec (6.14), on obtient
h U Cste i h U i
Ωth (U ) = exp + ∝ exp . (6.15)
kB T kB kB T
On suppose maintenant que le système que l’on veut étudier est en contact avec le
thermostat. L’ensemble {système + thermostat} est isolé, on note Etot l’énergie (constante !)
de cet ensemble et Ωtot son nombre total de microétats. Selon le postulat de Boltzmann,
tous les microétats de l’ensemble système + thermostat sont équiprobables, et
leur probabilité est 1/Ωtot .
On se donne un microétat σ du système seul (sans le thermostat), c’est-à-dire (pour
prendre un exemple) qu’on se donne toutes les positions et impulsions de toutes les particules
du système. Pour ce microétat, l’énergie du système est Eσ (que l’on peut calculer à partir des
vitesses et positions) et, par conséquent, le thermostat a une énergie Etot −Eσ . Le thermostat
peut donc être dans n’importe lequel des Ωth (Etot − Eσ ) microétats correspondant à cette
énergie.
On voit donc que, sur les Ωtot microétats de l’ensemble {système + thermostat}, il y en
a Ωth (Etot − Eσ ) tels que le système est dans l’état σ. La probabilité Pσ s’écrit alors comme
(nombre de cas favorables)/(nombre total de cas), c’est-à-dire
Ωth (Etot − Eσ )
Pσ = .
Ωtot
Il suffit alors d’utiliser (6.15) pour obtenir le résultat recherché.
72
Chapitre 7 Vidéo 1
Un corps pur ne contient par définition qu’une seule sorte de molécule (H2 O, Fe, C,
éthanol, etc). Il peut se présenter sous une phase solide, liquide ou gazeuse.
Cependant, la nature est plus riche que cela. Un corps pur peut avoir différentes phases so-
lides, qui correspondent à des ordres cristallins différents (au niveau microscopique les atomes
sont disposés dans l’espace de manière différentes selon les phases). L’eau, par exemple, a
cette propriété (en plus de la glace ordinaire, il existe plus de dix types de glace à haute
pression). Un autre exemple célèbre est celui du carbone : selon la température et la pression,
le carbone se trouve en phase diamant ou graphite !
De plus, les phases d’un corps ne se limitent pas aux phases solide, liquide ou gazeuse :
• Selon la température ou le champ magnétique appliqué, un matériau peut avoir une
aimantation permanente (être un aimant). On parlera alors de phase ferromagnétique
lorsque le matériau a une aimantation non nulle en l’absence de champ magnétique,
et de phase paramagnétique lorsqu’il n’en a pas. Le domaine du magnétisme contient
d’ailleurs beaucoup d’autres phases dont l’exposé dépasse largement les objectifs de ce
cours.
• Lorsqu’on diminue leur température, certains corps (comme le mercure, le plomb, l’alu-
minium par exemple), voient leur résistance électrique s’annuler. Le matériau est un
supraconducteur (phase supraconductrice). Un fil électrique supraconducteur parcouru
par un courant ne chauffe pas, il n’y a donc pas d’effet Joule ! Ce phénomène se passe
en dessous d’une certaine température, appelée température critique, qui est générale-
ment très proche de 0 K. Elle vaut 4 K pour le mercure, 7 K pour le plomb et 1 K pour
l’aluminium. L’étude expérimentale et théorique des matériaux supraconducteurs est
un domaine de recherche en physique très dynamique.
• La phase superfluide a été observée pour la première fois dans l’hélium-4 liquide à très
basse température (autour de 2 K). Dans cette phase, l’hélium s’écoule sans viscosité !
• Pour finir cette introduction, mentionnons également d’autres phases de la matière
telles que les cristaux liquides, les ferroélectriques, les plasmas, etc.
73
chimiques dans les deux phases. L’identité thermodynamique à T et p fixées s’écrit dG =
µα dnα + µβ dnβ . Cependant, puisque la quantité de matière totale nα + nβ reste constant
(pour le système fermé que nous considérons), on a dnα = −dnβ et
Or, nous avons vu qu’à l’équilibre, G doit être minimum. Trois cas se présentent.
• Si µα (T, p) > µβ (T, p). Alors, nécessairement dnα < 0 : la matière va de la phase
α vers la phase β jusqu’à ce que nα = 0. À l’équilibre, seule la phase β est présente.
• Si µβ (T, p) > µα (T, p). Par le même raisonnement, la phase β se vide et seule la
phase α est présente à l’équilibre.
• Si µβ (T, p) = µα (T, p). Alors dG = 0, quelle que soit la valeur de nα .
Nous aboutissons donc aux conclusions suivantes :
p
Dans le plan (T, p), voir figure ci-contre, la pression de
α seule
pα
Pour un corps pur, on trouve expérimentalement trois phases possibles : solide, liquide
et gaz, et un diagramme de phase ressemble typiquement à ceci :
p
pC solide
liquide
p3
gaz
T
0 T3 TC
• Le point triple (T3 , p3 ) est le point de rencontre des trois lignes de coexistence de
phases (liquide-gaz, liquide-solide et solide-liquide). C’est le seul point où les trois
phases peuvent coexister. Les coordonnées du point triple s’obtiennent comme la
solution (unique) des équations µsolide (T3 , p3 ) = µliquide (T3 , p3 ) et µsolide (T3 , p3 ) =
µgaz (T3 , p3 ). (Deux équations pour deux inconnues.)
• Un autre point remarquable est le point critique (TC , pC ) où s’arrête la ligne de
Vidéo 3
coexistence (liquide-gaz) : à droite du point critique, il n’y a qu’une seule phase.
On parle alors de fluide (ou de gaz) supercritique.
• À titre d’exemple, pour l’eau, T3 = 0,01◦ C, p3 = 611,2 Pa, TC = 374,15◦ C et pC =
22,12 MPa. Pour le dioxygène, T3 = −218,8◦ C, p3 = 146 Pa, TC = −118,67◦ C
et pC = 5,04 MPa. En particulier, le dioxygène à température ambiante est su-
percritique (T > TC ) et ne peut pas être liquéfié simplement en augmentant la
pression.
Dans un diagramme de phase, les lignes de coexistence solide/gaz et liquide/gaz ont tou-
jours une pente positive. La ligne solide/liquide a habituellement une pente très importante
positive (la ligne est presque verticale, mais penche légèrement à droite). Il existe cependant
un nombre limité d’exceptions, pour lesquelles la ligne solide/liquide a une pente négative (la
ligne penche légèrement à gauche) : l’eau (H2 O) dont le diagramme est représenté figure 7.2,
le silicium (Si), le gallium (Ga), le bismuth (Bi), l’antimoine (Sb), le germanium (Ge) et le
plutonium (Pt).
Remarquez, sur le diagramme de phase de l’eau, figure 7.2, le grand nombre de phases
solides différentes à haute pression.
Pour finir, le diagramme de phase de l’hélium-4 est représenté dans la figure 7.3. avec sa
phase superfluide. Vous noterez que l’hélium a ceci de remarquable que sous une pression de
1 atm, il reste liquide, aussi basse que soit la température ! Il faut appliquer un pression de
25 atm pour qu’il passe dans une phase solide.
75
104
Solide
3
10
Point critique:
Liquide T = 31◦ C
Fluide supercritique
100 p = 73 atm
p
(atm) Point triple:
10 T = −57◦ C
p = 5 atm
Gaz
0,1
−100 −80 −60 −40 −20 0 20 40 60
T (◦ C)
Figure 7.1 – Diagramme de phase du CO2 . Notez l’échelle logarithmique de la pression qui
permet de porter sur une même figure des pressions très différentes.
106
105
104 Point critique:
3 p = 220 atm
10
T = 374◦ C
Fluide supercritique
100
p Eau liquide
10
(atm)
1 Glace
0,1
Vapeur
0,01 Point triple:
10−3 p = 0,006 atm
T = 0,01◦ C
10−4
−100 −50 0 50 100 150 200 250 300 350 400 450
T (◦ C)
Figure 7.2 – Diagramme de phase de l’eau, avec une échelle logarithmique pour la pression.
Il y a plusieurs phases solides différentes dans la région en orange.
76
100
Solide
Point triple:
T = 1,8 K Point critique:
10
p = 30 atm T = 5,2 K
p = 2,2 atm
Liquide II Liquide I
Fluide supercritique
p
(atm) 1 (superfluide)
Gaz
0,1
Point triple:
T = 2,2 K
p = 0,05 atm
0,01
0 1 2 3 4 5 6
T (K)
Figure 7.3 – Diagramme de phase de l’hélium 4, avec une échelle logarithmique pour la
pression. À basse température, l’hélium est dans la phase superfluide.
77
p
Liquide seul
C
ML M MG
pS (T2 ) T1
Liquide + Gaz
Gaz seu TC
l
T2
v = V /n
vL (T2 ) v vG (T2 )
Figure 7.4 – Trois isothermes dans un diagramme (v, p). Le plateau de pression indique la
coexistence des phases liquide (L) et gazeuse (G).
Sur le plateau, comme il y a coexistence des phases liquide et gazeuse, la pression est la
pression de vapeur saturante pS (T2 ) à la température T2 considérée, voir encadré 7.1. Sous
ces conditions de température et de pression, les volumes molaires du gaz et du liquide sont
respectivement vG et vL , les abscisses des points MG et ML .
Considérons un système dont l’état est représenté par un point M de ce plateau. On
cherche à déterminer la fraction molaire xG =(nombre de moles de gaz)/(nombre total de
moles) du gaz. (La fraction molaire du liquide est bien sûr xL = 1 − xG .) En posant n la
quantité de matière dans le système, le volume occupé par le gaz est nxG vG , et le volume
occupé par le liquide est n(1 − xG )vL . Le volume total s’écrit donc
V = nxG vG + n(1 − xG )vL = nv,
avec v l’abscisse du point M . On en déduit que
v − vL (distance entre ML et M )
xG = = . (7.4)
vG − vL (distance entre ML et MG )
C’est la règle des moments, qui permet de déterminer la fraction en vapeur en lisant sur
le diagramme 7.4 les longueurs ML M et ML MG . En faisant varier la température, on peut
dessiner dans le plan (v, p) les différentes régions correspondant aux différents états du sys-
tème : liquide, gazeux, ou coexistence des phases liquide et gazeuse ; voir la figure 7.5. (On
y a aussi tracé les isothermes de la figure 7.4.) Plus la température est basse, plus la phase
de coexistence est large. Au sommet de cette courbe en cloche se trouve le point critique
(vC , pC ), à la température TC . Au dessus de l’isotherme critique, les différences entre liquide
et gaz disparaissent et le fluide est dit supercritique. La courbe à gauche de C s’appelle la
courbe d’ébullition, celle de droite la courbe de rosée.
Jusqu’ici, cette étude ne considérait que les phases fluides, mais en abaissant la tem-
pérature, ou en augmentant la pression, la phase solide doit apparaître. Les régions des
différentes phases ressemblent alors à celles indiquées sur la figure 7.6. Saurez-vous y trouver
le point triple ? (Indice : le point triple n’est pas un simple point sur le diagramme (v, p),
mais correspond à une ligne.)
78
p
Fluide supercritique
C
Liquide
Gaz
TC
courbe courbe
d’ébullition de rosée
Liquide + Gaz
v = V /n
Figure 7.5 – Dans le diagramme (v, p), les régions correspondant au différents états du
système.
p
Liquide + Solide
Fluide supercritique
Liquide
C
Solide
Liquide + Gaz
Gaz
TC
Solide + Gaz
v = V /n
Figure 7.6 – Régions de coexistence des phases solide, liquide et gaz dans un diagramme
volume-pression.
∆h = T ∆s.
79
Vidéo 5 Encadré 7.3 : Enthalpie de changement d’état
lα β = hβ − hα = T (sβ − sα ) . (7.5)
Remarques :
• ∆H = T ∆S peut aussi s’écrire (puisque T est constant) ∆G = 0 et, puisque G = µn,
on retrouve µα = µβ , voir encadré 7.1.
• Pour les transformations gaz→liquide, gaz→solide ou liquide→solide, la chaleur à four-
nir est négative et égale à l’opposé de, respectivement, l’enthalpie de vaporisation, de
fusion ou de sublimation.
• Une exemple de valeur numérique est la chaleur latente de vaporisation de l’eau à
1 bar. Pour la chaleur latente molaire on a lvap = 40,7 kJ.mol−1 . En se rappelant que
la masse molaire de l’eau est Meau = 18 g/mol, on obtient la chaleur latente massique
de vaporisation Lvap = lvap /Meau = 2, 26 103 kJ.kg−1 . Il faut donc fournir plusieurs
millions de Joules pour évaporer un litre d’eau !
dp
• Une conséquence de la formule de Clapeyron est que si lα β > 0, alors vβ −vα et dTα β ont
le même signe. Pour la plupart des corps purs, on a vsolide < vliquide < vgaz et, comme
lfusion , lvaporisation et lsublimation sont positives, on en déduit que les pentes des lignes de
coexistence du diagramme de phase sont positives, voir encadré 7.2. Cependant, pour
l’eau, on a vglace > veau liquide ce qui implique que la ligne de coexistence solide-liquide
du diagramme de phase de l’eau a une pente négative.
• On peut également estimer dpdT fusion
pour l’eau près de 0◦ C à l’aide de (7.6), de la
masse volumique de la glace Mglace = 0,92g cm−3 et de la chaleur latente de fusion
Lfusion = 334 kJ.kg−1 . Le résultat est dpdT fusion
≈ −1,4 107 Pa.K−1 , ce qui veut dire qu’il
faut augmenter la pression de 140 bar pour que la température de fusion baisse de 1◦ C.
Saurez-vous refaire le calcul ?
Pour prouver la formule de Clapeyron (7.6), on part de l’égalité des potentiels chimiques
des deux phases le long de la ligne de coexistence p = pα β (T ) :
µα T, pα β (T ) = µβ T, pα β (T ) .
80
Dérivons cette équation par rapport à T :
∂µα ∂µα dpα β ∂µβ ∂µβ dpα β
+ × = + × ,
∂T p ∂p T dT ∂T p ∂p T dT
et utilisons la relation de Gibbs-Duhem (4.19) qui donne les dérivées partielles du potentiel
chimique par rapport à la pression et la température : (∂µ/∂T )p = −s et (∂µ/∂p)T = v.
dp dp
Nous trouvons −sα + vα dTα β = −sβ + vβ dTα β , soit
dpα β
sβ − sα = (vβ − vα ) .
dT
En utilisant (7.5), on obtient la formule de Clapeyron (7.6).
Comme expliqué dans une vidéo, on peut essayer, à partir de la relation de Clapeyron et
en faisant qualques hypothèses, de calculer la ligne pS (T ) de coexistence liquide/gaz. Vidéo 6
81
82
Chapitre 8 Vidéo 1
Mélanges binaires
Nous considérons dans ce chapitre des mélanges de deux constituants, d’abord dans une
seule phase, puis dans des phases différentes. Des exemples classiques sont l’eau (H2 O) et le
sel (Na Cl) (la saumure), l’eau et le sucre, l’eau et l’alcool (éthanol) dans les phases liquides,
mais aussi dans les phases liquide et gaz.
On se donne comme paramètres extensifs les φ valeurs nα ; les paramètres intensifs du pro-
blèmes sont donc p, T , et tous les xαi . En prenant en compte la condition (8.2), pour chaque
phase α, il y a c − 1 valeurs indépendantes de xαi . Le nombre de paramètres intensifs est
donc égal à 2 + φ (c − 1).
Pour être à l’équilibre thermodynamique, on doit de plus avoir, pour chaque constituant i,
égalité des potentiels chimiques dans les différentes phases : µαi = µβi . Cela fait φ − 1 égalités
pour chacun des c constituants, soit c(φ − 1) équations au total. On en déduit que le nombre
v de variables intensives indépendantes, appelé variance, vaut v = 2 + φ (c − 1) − c (φ − 1),
d’où
83
Encadré 8.1 : Règle des phases, ou règle de Gibbs
v = 2 + c − φ. (8.3)
Exemples :
• Cas du corps pur : c = 1. On trouve v = 3 − φ.
• Si φ = 1 (le système est sous une seule phase), alors on a v = 2 variables inten-
sives : la pression p et la température T .
• Si φ = 2 (le système est en équilibre sous deux phases), alors il n’y a que v = 1
variable intensive libre, par exemple T . Pour chaque T fixé, il n’existe (au plus !)
qu’une seule pression pour laquelle l’équilibre entre les deux phases est possible ;
c’est la pression de coexistence des deux phases, voir encadré 7.1.
• Si φ = 3, alors v = 0 : il n’y a aucune variable intensive libre. La pression et la
température sont fixées ; c’est le point triple.
• Cas du mélange binaire : c = 2. On trouve v = 4 − φ.
• Si φ = 1, alors v = 3. On peut choisir indépendamment les valeurs de p, T et
x1 (ou x2 = 1 − x1 ). À T fixé, l’état du système peut être représenté dans un
diagramme p en fonction de x1 .
• Si φ = 2, alors v = 2. Les deux variables intensives libres sont par exemple la
température T et xα1 (fraction molaire du composé 1 dans la phase α) ; la pression
p et xβ1 (fraction molaire dans l’autre phase β 6= α) sont fixées. Un autre choix
possible est d’imposer les valeurs de T et de p ; dans ce cas là, les fractions molaires
dans les deux phases α et β sont fixées : xα1 (p, T ) et xβ1 (p, T ). Nous reviendrons
en détail sur ce cas.
• Si φ = 3, alors v = 1. Pour chaque T donné, il n’y a qu’une valeur possible de la
pression est des trois fractions xα1 , xβ1 et xγ1 de l’espèce 1 dans les trois phases α,
β et γ. Dans le plan (p, T ), on a une ligne de point triple.
• Si φ = 4, alors v = 0. Il n’y a qu’une seule valeur possible de p, T et des {xα1 }.
84
l’entropie, et donc pour l’énergie libre :
avec µ01 le potentiel chimique d’un gaz parfait constitué de l’espèce 1 seule.
Pour aller plus loin, nous avons besoin d’en savoir plus sur le potentiel chimique µ0
d’un gaz parfait constitué d’une seule espèce. La relation de Gibbs-Duhem (4.19) donne
85
∂µ0 /∂pT = V /n = RT /p pour un gaz parfait. En intégrant par rapport à p en gardant T
Remarque :
• Pour un mélange idéal de liquides, par exemple, le µ0i (T, p) dans (8.9) est bien sûr le
potentiel chimique du liquide no i, pas le potentiel chimique d’un gaz parfait.
• Dans un mélange de gaz réels, si les interactions sont négligeables, on pourra bien
sûr souvent considérer que le mélange est idéal (limite des gaz parfaits). Plus surpre-
nant, beaucoup de mélanges de liquides dont les molécules ont des tailles et structures
similaires sont bien décrits par l’équation du mélange idéal.
• Exercice : à partir de (8.9), montrer que si on mélange (à p et T fixés) un volume V1
de l’espèce 1 pure et un volume V2 de l’espèce 2 pure et que le mélange est idéal, alors
le volume total est V1 + V2 .
• Si on mélange 1 ` d’eau et 1 ` d’éthanol, le mélange fait 1,92 `. Ce mélange n’est donc
pas idéal.
86
Notons que, formellement, on aurait pu obtenir (8.10) en écrivant RT ln(x1 ) = RT ln(1 −
x2 ) ≈ −RT x2 dans (8.9). Cependant, le résultat de cette section n’est pas restreint aux
phases gazeuses ni aux mélanges idéaux. On l’applique souvent aux phases liquides, par
exemple.
soluté 2 dans les deux compartiments. En supposant les deux systèmes dilués, (8.10) donne
µ01 (T, pA ) − RT xA 0 B
2 = µ1 (T, pB ) − RT x2 . (8.12)
On peut relier les deux potentiels chimiques en utilisant le fait que dans un liquide ordinaire,
le volume molaire v dépend peu de la pression (c’est l’incompressibilité). On part de la
relation de Gibbs-Duhem (4.19) : ∂µ01 /∂pT = v. En intégrant cette relation entre pA et pB
trouve alors une pression osmotique de 1,4 bar, ce qui est loin d’être négligeable. Si la mem-
brane de A n’est pas très solide, il y a risque de rupture.
87
Vidéo 4 Application : Déplacement de la température de transition à pression fixée
À pression p fixée, supposons que nous cherchions la température d’équilibre liquide/vapeur
T ∗ d’un mélange dilué. On appelle T0 la température d’équilibre liquide/vapeur du solvant
pur à la pression p ; c’est-à-dire que p = pLG (T0 ), voir encadré 7.1. Le soluté 2 est en phase
gazeuse avec une fraction molaire xG 2 et en phase liquide avec une fraction molaire x2 , et on
L
Par définition de T ∗ , les potentiels chimiques pour le solvant 1 dans les phases liquide et
gazeuse sont égaux à cette température :
µL1 (T ∗ , p, xL2 ) = µG ∗ G
1 (T , p, x2 ).
µL,0 ∗ ∗ L G,0 ∗ ∗ G
1 (T , p) − RT x2 = µ1 (T , p) − RT x2 ,
∂µ1α,0
α,0 α,0
∗
µ1 (T , p) ≈ µ1 (T0 , p) + (T ∗ − T0 ) = µα,0 α ∗
1 (T0 , p) − s1 (T0 , p)(T − T0 ),
∂T p
où sα1 (T0 , p) est l’entropie molaire du solvant pur dans la phase α. Puis, en utilisant que
1 (T0 , p) = µ1 (T0 , p) (parce qu’on a supposé que T0 était la température d’équilibre
µL,0 G,0
liquide/gaz du solvant pur à la pression p) et que sG 1 (T0 , p) − s1 (T0 , p) = lvap /T0 , avec lvap
L
l’enthalpie molaire (la chaleur latente molaire) de vaporisation, voir l’encadré 7.3, on trouve
2 L G
RT 0 x 2 − x 2
T ∗ − T0 = . (8.15)
lvap
augmente. En particulier, la température d’ébullition (voir section 8.4.2 plus bas) augmente
elle aussi. C’est la loi de Raoult de l’ébullioscopie.
Nous pouvons reprendre le même type de raisonnement pour la fusion du solvant (tran-
sition de phase entre un solide et un liquide). Si on suppose que xS2 xL2 , la température
de fusion diminue selon la loi de Raoult de la crysoscopie :
RT02 xL2
T ∗ − T0 = − . (8.16)
lfusion
Prenons l’exemple de l’eau à pression atmosphérique. Si on ajoute 16 g de sel (NaCl) dans
1 ` d’eau, on trouve que la fraction molaire de soluté dans le liquide est xL2 = 10−2 (un pour
cent de soluté). Pour l’abaissement de la température de congélation, nous trouvons 1◦ C.
Pour l’augmentation de la température de vaporisation, nous trouvons 0,3◦ C.
88
On suppose que l’on a n1 moles de solvant et n2 moles de soluté dans un volume V à la
température T . Si on négligeait entièrement les interactions entre les espèces 1 et 2, l’énergie libre
serait donnée, comme dans (8.4) par
avec F1 et F2 les énergies libres des deux composés seuls. Ici, on suppose que n2 est suffisamment
petit pour que l’espèce 2 seule puisse être considérée comme un gaz parfait : le F2 dans l’équation
ci-dessus est donc celui du gaz parfait. Il faut maintenant prendre en compte les interactions entre
les particules de l’espèce 1 et les particules de l’espèce 2. Les particules de l’espèce 2 sont isolées,
chacune d’entre elles interagit avec les particules de l’espèce 1 qui l’entourent, loin de toutes les
autres particules de l’espèce 2. Cela signifie que le terme d’interaction doit être proportionnel au
nombre de particules de l’espèce 2, et donc proportionnel à n2 . On écrit donc, en utilisant la propriété
d’extensivité pour simplifier la dépendance en n1 et en V ,
n
1
F (T, V, n1 , n2 ) = F1 (T, V, n1 ) + Fgaz parfait (T, V, n2 ) + n2 fint ,T (avec interaction), (8.17)
V
où fint est une fonction non spécifiée et où on a remplacé F2 par l’énergie libre du gaz parfait.
Dérivons cette équation par rapport à n1 :
n2 0 n1
µ1 (T, V, n1 , n2 ) = µ01 (T, V, n1 ) + fint ,T . (8.18)
V V
Le membre de gauche est le potentiel chimique que l’on cherche à calculer. µ01 est le potentiel
0 pour
chimique de l’espèce 1 seule dans le volume V . On a utilisé la notation un peu abusive fint
désigner la dérivée de fint par rapport à sa première variable.
On cherche à obtenir le potentiel chimique en fonction de la pression. On a
µ1 (T, p, x2 ) = µ1 (T, V, n1 , n2 ),
où p1 est la pression du solvant seul correspondant aux paramètres T, V, n1 . Attention, p1 est proche,
mais pas tout à fait égale à p. En utilisant une relation de Gibbs-Duhem, on a comme dans (8.13)
V
µ01 (T, p1 ) ≈ µ01 (T, p) + (p1 − p) ,
n1
où le volume molaire du solvant V /n1 était noté v dans (8.13). En mettant les trois dernières
équations dans (8.18), on trouve
V n2 0 n1
µ1 (T, p, x2 ) ≈ µ01 (T, p) + (p1 − p) + fint ,T . (8.19)
n1 V V
On cherche maintenant à estimer p1 . Pour cela, il suffit d’utiliser p = −∂F/∂V ; en dérivant (8.17)
par rapport à V et en multipliant par -1, on obtient
n1 n2 0 n1
p = p1 + p2 + f ,T ,
V 2 int V
où p et p1 ont déjà été définis et où p2 est la pression qu’aurait le soluté seul dans le volume V .
Cette relation entre les pressions permet de simplifier (8.19) ; on obtient
V
µ1 (T, p, x2 ) ≈ µ01 (T, p) − p2 .
n1
89
Mais p2 est la pression du soluté seul, c’est-à-dire la pression d’un gaz parfait : p2 V = n2 RT . En
écrivant n2 /n1 ≈ x2 , on retrouve (8.10).
Passons maintenant au calcul de µ2 . On dérive (8.17) par rapport à n2 et on trouve
n n
1 1
µ2 (T, p, x2 ) = µgaz parfait (T, p2 ) + fint , T = RT ln(p2 ) + f (T ) + fint ,T , (8.20)
V V
où l’on a utilisé (8.8) pour exprimer le potentiel chimique du gaz parfait. Le volume du mé-
lange est une fonction de p, T , n1 et n2 . En fait, comme n2 n1 , on a au premier ordre
V = V (p, T, n1 , n2 ) ≈ V (p, T, n1 , 0) = n1 v(p, T ) par extensivité. On a alors p2 = n2 RT /V ≈
n2 RT /[n1 v(p, T )] ≈ x2 RT /v(p, T ). En reportant ces expressions de p2 et de V dans (8.20), on
1
retrouve bien le résultat attendu (8.11) avec Ψ (T, p) = f (T ) + fint v(p,T ) , T + RT ln[RT /v(p, T )].
90
T
région I: gaz
T2
G
x2
L
x2
T1
région II: liquide
x2
0 1
Figure 8.1 – Un diagramme de phase isobare d’un mélange binaire typique. Pour la pression
considérée, T1 est la température de coexistence liquide/gaz de l’espèce 1 seule et T2 est la
température de coexistence liquide/gaz de l’espèce 2 seule.
T
D gaz
C
CL
MG M
BG ML
B
liquide
A x2
0 1
reste la dernière goutte de liquide, dont la fraction molaire de l’espèce 2 xL2 est l’abscisse du
point CL . À plus haute température, le système est totalement en phase gazeuse (point D).
Remarque : contrairement à ce qui se passe pour un corps pur, la température du mélange
binaire évolue pendant le changement de phase.
Pour un système de n moles dans la région de coexistence liquide/gaz, par exemple au
point M de la figure 8.2, on peut facilement calculer le nombre nL de moles dans la phase
liquide. Il suffit d’écrire que le nombre total de moles de l’espèce 2 est d’une part donnée par
x2 n et d’autre part donné par xL2 nL + xG 2 (n − nL ), où n − nL est bien sûr le nombre nG de
moles dans la phase gazeuse. On obtient la règle des moments :
91
Encadré 8.6 : Règle des moments
nL x2 − xG distance entre M et MG
= L 2
= , (8.21)
n G
x2 − x2 distance entre ML et MG
2.
où les points ML , M et MG indiqués sur la figure 8.2 ont pour abscisses xL2 , x2 et xG
Application : la distillation
92
8.4 Taux d’humidité, évaporation, ébullition Vidéo 5
8.4.1 L’évaporation
L’évaporation est le processus par lequel un liquide se vaporise progressivement par sa
surface libre. Si l’évaporation se produit en milieu atmosphérique, au moins la phase gazeuse
est un mélange de corps purs. En conséquence, comme on va le voir, l’évaporation peut
s’observer à une température nettement inférieure à celle du changement d’état du même
corps pur à la même pression : sous pression atmosphérique, l’eau peut en effet s’évaporer à
20°C.
Étudions l’évaporation d’un corps donné (par exemple l’eau, ou l’alcool) en présence
d’atmosphère, à la pression (totale) patm . La condition d’équilibre entre les phases liquide et
gazeuse du corps étudié s’écrit toujours µG = µL , mais l’expression des potentiels chimiques
dans les mélanges est complexe. Pour simplifier le problème, nous allons faire quelques hy-
pothèses.
• La phase gazeuse est un mélange de gaz parfait, de sorte que d’après (8.7), le potentiel
chimique du corps s’écrit
µG (T, patm , x) = µ0G (T, pvapeur ) = µ0G (T, xpatm ), (8.22)
où µ0G est l’expression du potentiel chimique pour le corps pur gazeux et pvapeur = xpatm
sa pression partielle dans le mélange, x étant sa fraction molaire.
• On néglige la dissolution des gaz de l’atmosphère dans le liquide, qui est donc considéré
comme pur. Puis, se plaçant loin du point critique, on néglige le volume molaire du
liquide devant celui du gaz. Cette hypothèse signifie qu’on néglige la dépendance en
pression dans le potentiel chimique du liquide, et il vient :
µL = µ0L = µ0L (T ). (8.23)
où µ0L est l’expression du potentiel chimique pour le corps pur liquide.
La condition d’équilibre µG = µL devient dans ces conditions µ0G (T, pvapeur ) = µ0L (T ) ce qui,
par comparaison avec (7.2) et (7.3), mène à
ps (T )
pvapeur = ps (T ) =⇒ x= = xs (T, patm ), (8.24)
patm
où l’on rappelle que ps (T ) est la pression de vapeur saturante à la température T , c’est-à-dire
la pression de l’équilibre liquide/gaz dans un corps pur. Par exemple, ps (20°C) = 0,023 bar
pour l’eau. À l’équilibre, sous pression atmosphérique p = 1 bar et à cette température
de 20°C, l’eau s’évapore donc avec une fraction molaire de 2,3 % de vapeur. À T = 0 °C,
ps (0°C) = 0,006 bar et la fraction molaire tombe à 0,6 %. Ces valeurs montrent que, si de
l’air chargé en humidité à l’équilibre se refroidit, la vapeur en excès se liquéfie sous forme de
fines gouttelettes, formant le brouillard ou la buée.
Lorsque l’évaporation a lieu en milieu ouvert, la vapeur produite par le liquide est diluée
ou évacuée, de sorte que l’équilibre n’est jamais atteint, et l’évaporation se poursuit jusqu’à
l’assèchement du liquide. En dehors de l’équilibre, on définit le degré hygrométrique φ de la
phase gazeuse (supposée homogène), ou taux d’humidité relative, comme étant le rapport
du taux observé x = pvapeur /patm sur le taux à l’équilibre xs (T, patm ) = ps (T )/patm :
x pvapeur
φ= = 6 1. (8.25)
xs ps (T )
93
L’évaporation d’un élément de masse dm du liquide, à température et pression données, se
fait avec un apport de chaleur δQ = dH = dm Lv au liquide ; cette chaleur est forcément
communiquée par le reste du système. L’évaporation d’un liquide provoque donc le refroi-
dissement de son environnement. Ce mécanisme est utilisé par le corps humain pour réguler
sa température en cas de forte chaleur, avec l’évaporation de la transpiration. Cette évapo-
ration est d’autant plus efficace que l’atmosphère n’est pas saturée en eau, c’est-à-dire que
l’hygrométrie est faible, d’où l’impression de plus forte chaleur en milieu humide.
8.4.2 L’ébullition
L’ébullition est une manifestation de la vaporisation avec
0 apparition tumultueuse de bulles au sein du liquide. C’est
un phénomène quotidien, mais fort complexe en raison des
multiples effets qui interviennent. En premier, il faut signa-
Pℓ ler qu’un liquide en ébullition n’est pas à l’équilibre ther-
z
Pv modynamique : son état varie rapidement avec le temps et,
de plus, il est le siège d’un gradient de température et de
mouvements de convection.
Ensuite l’ébullition du liquide se fait généralement à
l’air, donc les phases ne sont pas constituées d’un seul corps
pur : il y a des gaz dissous dans le liquide, et la vapeur déga-
gée par la vaporisation se mélange à l’air. Pour simplifier, on
Schéma de l’ébullition dans un liquide.
peut négliger l’évaporation, de sorte que la vaporisation se
produit essentiellement au niveau des bulles. Au début de l’ébullition, ces bulles contiennent
un mélange de la vapeur avec des gaz libérés par le liquide. Rapidement cependant, ces gaz
dissous libérés sont minoritaires et on peut considérer que les bulles ne contiennent que de
la vapeur pure. Le problème se ramène donc à celui d’un corps pur.
En première approximation, le raisonnement est le suivant : l’atmosphère, le liquide et
les bulles dans le liquide sont (environ) toutes trois à la même pression. Au niveau de la
bulle, la condition d’équilibre du potentiel chimique concernant le corps qui se vaporise reste
exacte, et la pression du système doit être égale à la pression de vapeur saturante ps (T ) du
corps. La température d’ébullition s’obtient donc par
ps (T ) = patm
avec patm la pression de l’atmosphère au dessus du système.
En réalité, la situation est plus complexe : si, malgré la convection, on admet la loi
hydrostatique ; alors la pression dans le liquide à la profondeur z doit s’écrire
pL (z) = patm + ρgz,
ρ étant la masse volumique du liquide et g l’accélération de la pesanteur. De plus, la surface
S de l’interface liquide/gaz intervient de manière non négligeable dans les paramètres du
système, ce qui ajoute un terme σ dS dans l’identité thermodynamique, où σ est la tension
superficielle. Admettant que les bulles sont sphériques, on montre qu’il en résulte que la
pression pbulle à l’intérieur de la bulle est plus grande que la pression pL (z) du liquide ; plus
précisemment
2σ
pbulle − pL (z) = (8.26)
r
94
(loi de Laplace), où r est la rayon de la bulle. La condition d’existence des bulles pbulle = ps (T )
devient alors
2σ
ps (T ) = patm + ρgz + .
r
Dans cette formule, il faudrait aussi prendre en compte le gradient de température (par
exemple T = T (z)), la dispersion et la variation du rayons des bulles quand elles montent, et
même le fait que la quantité de vapeur dans les bulles augmente. L’exploitation quantitative
de ce résultat est donc fort complexe. Néanmoins, on en déduit qualitativement que l’ébul-
lition peut s’observer sur une plage de température T dans le liquide et de pression patm au
dessus du liquide, autour de la loi ps (T ), la pression patm étant toujours plus faible que la
valeur de ps (T ) à la même température.
95