Droit Administratif Légalité Et Crise
Droit Administratif Légalité Et Crise
Droit Administratif Légalité Et Crise
1 Historique
o 1.1 Théorie du droit naturel
o 1.2 Passage de l’État despotique à l'État de droit
o 1.3 Du légicentrisme au constitutionnalisme
2 Principe de soumission de l'administration à la règle de droit
o 2.1 Miracle de la soumission de l'administration à la règle de droit
o 2.2 Distinction entre État de droit et État de police
o 2.3 Caractéristiques de l'état de droit
2.3.1 Juridicisation des rapports entre l’administration et les
administrés
2.3.2 Extranéité des règles applicables à l’administration
3 Sources de la légalité administrative
o 3.1 Sources écrites
3.1.1 Sources écrites nationales
3.1.1.1 Constitution
3.1.1.2 Loi
3.1.1.3 Règlement
3.1.2 Sources écrites internationales
3.1.2.1 Déclarations internationales
3.1.2.2 Conventions ou traités internationaux (article 55 de la
Constitution)
3.1.2.2.1 Traités et lois antérieures (arrêt Dame
Kirkwood, 1952)
3.1.2.2.2 Traités et lois postérieures (arrêt Nicolo, 1989)
3.1.2.2.3 Traités et Constitution (arrêt Sarran, 1998)
3.1.2.2.4 Traités et interprétation (arrêt GISTI, 1990)
3.1.2.3 Traités et droit dérivé (arrêt Boisdet, 1990)
3.1.2.4 Traités et droit dérivé communautaires (arrêt Dame
Perreux, 2009)
o 3.2 Sources non écrites
3.2.1 Coutume
3.2.2 Principes généraux du droit (arrêt Aramu, 1945)
3.2.3 Principes à valeur constitutionnelle
4 Non-respect du principe de légalité
o 4.1 Actes de gouvernement
o 4.2 Mesures d'ordre intérieur (MOI)
5 Notes et références
6 Annexes
o 6.1 Articles connexes
o 6.2 Bibliographie
INTRODUCTION
Dans un régime d'État de droit, l'État est soumis au droit. Plus particulièrement, le pouvoir
exécutif n'est pas entièrement maître de son action : il est au contraire subordonné à des règles
de droit, qui déterminent les modalités de cette action ou des contestations que les administrés
peuvent opposer à cette action. Une telle subordination constitue, en droit administratif, le
principe de légalité. Elle ne s’est pas imposée sans difficulté ; historiquement, l’État a
manifesté une réticence à être soumis au droit et plus encore au contrôle d’un juge1. Encore
aujourd'hui, il existe des espaces de « non-droit » où l’administration n’est soumise
qu’imparfaitement au droit : c’est le cas, en droit administratif ivoirien, des actes de
gouvernement, qui ne peuvent être soumis au juge administratif, ou des mesures d’ordre
intérieur.
Historique
Théorie du droit naturel
La théorie du droit naturel soutient qu’il existe des droits essentiels qui préexistent à la raison
humaine ou procèdent des mêmes sources qu'elle et que l'homme ne peut donc modifier,
pouvant seulement les découvrir puis les énoncer ou améliorer leur énonciation. Cette thèse a
été reprise par les défenseurs des droits de l’homme pour affirmer que ces derniers étaient,
précisément, des droits naturels et ne pouvaient donc être remis en cause par l'État, s'imposant
au contraire à lui en toute circonstance.
Pour Léon Duguit, le passage d'un État despotique à un État de droit s'explique par la
découverte et la mise en œuvre de la théorie du droit naturel, venant imposer des règles de
droit à l'État qui jusqu'à présent en fixait pour autrui sans devoir en suivre lui-même. Une telle
transition ne peut advenir que dans un certain contexte économique et social le
développement d'une démocratie politique, qui soumet l’administration et les autorités
nationales à la « conscience sociale » (que l'on pourrait appeler aujourd'hui opinion publique).
Cette conscience s'incarne dans la loi : elle est donc, initialement, légicentriste.
Du légicentrisme au constitutionnalisme
Au cours du XXe siècle, les sources du droit administratif sont devenues plus nombreuses,
particulièrement en Europe. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, les systèmes juridiques
européens continentaux s'inspiraient le plus souvent de la doctrine du légicentrisme ; par la
suite, ils ont adopté celle du constitutionnalisme qui prévoit le respect effectif, c'est-à-dire
juridictionnalisé, d'une constitution.
L’État de police est affranchi d’une obligation de respecter le droit : c’est un système
dans lequel l’administration peut appliquer, de manière discrétionnaire, toutes les
mesures qu’elle juge utile (ce qui la rapproche d'un gouvernement arbitraire ou
despotique car, s'il existe encore une règle de droit, l’État peut changer cette règle à sa
guise) ;
Au contraire, l’État de droit, dans ses relations avec les administrés, se soumet au
droit : au cœur de la relation entre administration et administrés, il y a le principe que
ses différents organes ne peuvent agir qu’en vertu d’une habilitation juridique
spéciale ; elle ne peut faire usage de la force publique que dans les cas prévus par la
règle de droit ; la puissance se transforme ainsi en compétence instituée et encadrée
par le droit.
Les administrés doivent avoir les moyens juridiques de forcer les autorités à respecter les
règles de droit : l’État doit permettre de recourir à un juge indépendant pour faire sanctionner
ses propres abus.
Sources écrites
Les sources écrites sont nationales, internationales ou, dans le cas particulier du droit
communautaire, mixtes.
Les sources écrites nationales sont la Constitution, la loi stricto sensu ou le règlement.
Constitution
Loi
Historiquement, en vertu du principe de légalité stricto sensu, les actes administratifs devaient
respecter la loi : cette obligation s'est étendue à d'autres normes juridiques, hiérarchiquement
organisées. L'ensemble de ces normes est généralement qualifié de loi au sens large du terme
ou lato sensu.
Règlement
Dans l'ordre juridique interne, régi sur ce point par l'article 34 de la Constitution, les
règlements (adoptés par le Gouvernement) sont inférieurs aux lois (adoptées par le
Parlement). Cependant, il faut distinguer les règlements autonomes des règlements
d'exécution :
Les premiers sont adoptés par le Gouvernement dans le cadre des compétences
normatives qu'il tire directement de la Constitution : ils ne peuvent donc être contrôlés
que par rapport aux normes supra-législatives (c'est-à-dire aux normes
constitutionnelles et internationales) ; à cet égard, ils se situent au même niveau que
les lois ;
Les seconds peuvent au contraire être contrôlés par rapport à la loi dont ils mettent en
œuvre l’application.
Par ailleurs, les actes administratifs réglementaires ont toujours une valeur supérieure à celle
des actes administratifs individuels, quelle que soit l’autorité ayant pris l’acte (ainsi, l’acte
réglementaire d’un préfet a une valeur supérieure à celle de l’acte individuel d’un ministre).
Déclarations internationales
Les déclarations internationales n'ont pas d'effet contraignant : elles sont uniquement
déclaratoires (Déclaration universelle des droits de l'homme, Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne avant sa reprise par le Traité de Lisbonne en 2007...). Cependant, le
juge administratif peut énoncer des principes généraux du droit qui s'inspirent de leurs
stipulations.
Les conventions ou traités internationaux ont un effet contraignant qui pesait initialement sur
le seul État signataire, c'est-à-dire sur les organes extérieurs de cet État (chefs d'État ou
ambassadeurs, notamment) chargés d'assurer ses relations avec les autres États signataires.
Cependant, diverses évolutions ont permis de diffuser l'effet contraignant des conventions ou
traités internationaux vers les organes intérieurs de l'État puis vers ses administrés :
Ces évolutions se sont appuyées sur l’article 55 de la Constitution, qui donne aux traités une
valeur supérieure à celles des lois (Conseil d'État, 30 mai 1952, Dame Kirkwood) : sur cette
base, le juge administratif se déclare compétent pour apprécier la légalité d'un acte
administratif au regard de la norme conventionnelle postérieure à une loi contraire.
Traités et lois postérieures (arrêt Nicolo, 1989)
Cependant, lorsque c'est la loi contraire qui se trouve postérieure au traité, le juge
administratif n'a admis que tardivement la supériorité du traité : alors que la Cour de cassation
l’a admise dès 1975 (arrêt Jacques Vabre), le Conseil d’État ne l’a fait qu’en 1989 (l’arrêt
Nicolo), suivant ainsi la jurisprudence de l'arrêt Costa c/ Enel de la CJCE en 1964 qui
consacre le principe de primauté du droit communautaire sur les législations nationales.
Traités et Constitution (arrêt Sarran, 1998)
Le Conseil d’État a affirmé avec l'arrêt Sarran, Levacher du 30 octobre 1998 que la
Constitution primait sur les traités (il a été suivi par la Cour de cassation avec son arrêt
Fraisse du 2 juin 2000).
Traités et interprétation (arrêt GISTI, 1990)
L’interprétation des traités revient au Conseil d’État depuis l'arrêt Gisti du 29 juin 1990 : il est
donc mis fin à la précédente situation; condamnée par la CEDH, où l’interprétation en était
faite par le Gouvernement. Pour les traités communautaires, cependant, le Conseil d’État doit
demander l’interprétation à la CJUE par un renvoi préjudiciel : après avoir utilisé la théorie de
l’acte clair pour s’y soustraire, il accepte ce renvoi préjudiciel en 1990, en conséquence de son
revirement jurisprudentiel de l'arrêt Nicolo en 1989.
Le droit dérivé des traités est le droit édicté par les organes institués par ces traités. Il a, selon
l’arrêt Boisdet du Conseil d’État (1990), la même valeur que les traités.
La question est plus complexe pour le droit communautaire dérivé, divisé entre règlements,
directives et décisions individuelles.
Les règlements européens sont directement applicables en droit national et par le juge
national.
En principe, les directives ne sont pas directement applicables et doivent être transposées par
l'État membre. Cependant, leur effet direct, c'est-à-dire leur invocabilité devant le juge
national, a longtemps divisé la CJUE et le Conseil d’État :
Les sources non écrites de la légalité administrative sont la coutume, les principes généraux
du droit ou les principes à valeur constitutionnelle.
Coutume
En ce qui concerne la coutume internationale, elle peut être invoquée mais, selon l’arrêt
Aquarone du C.E de 1997, sa valeur est inférieure à celle de la loi.
Les principes généraux du droit sont des normes énoncées par le Conseil d’État. Ils lui
permettent de contrôler un acte qui n’est pas soumis sinon au respect de la loi (ordonnances,
règlements autonomes). Le juge administratif leur a donné valeur supra-réglementaire et
infra-législative par l'arrêt Aramu (C.E., !@#$%^&*., 26 octobre 1945), qui les rend
opposables à l'administration mais non au législateur. La doctrine est partagée à leur sujet.
Actes de gouvernement
3 arrêts :