Le Provencal Pour Les Nuls - Philippe, BLANCHET
Le Provencal Pour Les Nuls - Philippe, BLANCHET
Le Provencal Pour Les Nuls - Philippe, BLANCHET
untitled
Page de titre
Page de Copyright
Sommaire
Avant-propos
Ce que vous trouverez et ce que vous ne trouverez pas dans ce livre…
Soyez décomplexé
Une langue, ce n’est pas une technique…
Le provençal, c’est bon pour tout le monde
Et on ne vous prendra plus pour un « Parisien » !
Du provençal bio même pour les accros
Introduction
À propos de ce livre
Conventions appliquées dans ce livre
Découvrez une langue « polynomique »
Suppositions risquées
Les icônes utilisées dans ce livre
Et maintenant
© Éditions First-Gründ, Paris, 2011. Publié en accord avec Wiley Publishing, Inc.
Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement réservée à l’usage privé du
client. Toute reproduction ou diffusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de
tout ou partie de cette œuvre, est strictement interdite et constitue une contrefaçon
prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle.
L’éditeur se réserve le droit de poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété
intellectuelle devant les juridictions civiles ou pénales.
ISBN numérique : 9782754038485
Dépôt légal : mai 2011
© Éditions First-Gründ
60, rue Mazarine
75006 Paris – France
Tél. 01 45 49 60 00
Fax 01 45 49 60 01
E-mail : [email protected]
Internet : www.editionsfirst.fr
Page de titre
Page de Copyright
Avant-propos
À propos de ce livre
Conventions appliquées dans ce livre
Découvrez une langue « polynomique »
Suppositions risquées
Les icônes utilisées dans ce livre
Et maintenant
Chapitre 1 - Le provençal, c’est quoi ?
Le provençal rhodanien
Le provençal maritime et intérieur
Le provençal gavot ou alpin
Le provençal de la Drôme
Ces variétés forment un tissu continu et changeant
Le provençal, une langue en danger
Combien d’usagers du provençal ?
Quels usages du provençal aujourd’hui ?
Le rôle clé des acteurs associatifs et culturels
L’enseignement du provençal
Chapitre 2 - Invitation au voyage à travers la Provence
Les moyens de transport
Le Rhône
La Drôme provençale
Orange
Le Comtat Venaissin
Le Lubéron et Avignon
Le pays d’Arles
Le pays nîmois
La Provence maritime, de Marseille à Nice
Martigues
Marseille
Aix
La Sainte-Baume et Toulon
Les Maures et l’Estérel
L’arrière-pays varois
La « Côte d’Azur »
La Provence montagnarde, de Digne à Sisteron
Les rivières
Autour de Manosque
Les Alpes provençales
Chapitre 3 - Rencontrer les Provençaux
L’habitation
La ville et le village
La cuisine provençale
Quelques jeux…
Musique et chants de Provence
La littérature provençale
Chapitre 7 - Un peu de grammaire et d’orthographe
Les écritures
Les consonnes
Les voyelles
Les voyelles nasales
L’accent tonique
Chapitre 8 - Lexique français-provençal
A
B
C
D
E
F
G
H
I
J
L
M
N
O
P
Q
R
S
T
U
V
Annexe - Pour aller plus loin dans la découverte de la langue…
SOYEZ DÉCOMPLEXÉ
Il va quand même falloir accepter d’abandonner quelques idées préconçues
qui risquent de faire obstacle à vos progrès. La plus répandue et la plus
fausse est de croire que le modèle de celui ou de celle qui parle « bien » (il y
en a même qui disent « parfaitement ») une langue, c’est le « monolingue
natif » (qui ne parle qu’une seule langue et depuis sa naissance) et qu’il faut
essayer de lui ressembler. Objectif inatteignable et inacceptable. C’est une
idée répandue par des monolingues, souvent ceux, favorisés, qui ont le
pouvoir d’imposer cette idée, pour placer leur minorité « au-dessus » des
multitudes plurilingues. Le seul modèle acceptable, c’est celui du plurilingue
décontracté qui se jette à l’eau sans se soucier de « parler bien » mais en se
souciant d’entrer en bonne relation avec les autres. Et les autres sont
toujours plus intéressés par ce que vous dites que par comment vous le
dites ; et ils sont presque toujours ravis des efforts que vous faites pour
parler leur langue, même à votre façon, à condition que vous le fassiez de
façon sympathique. Et s’ils font la grimace devant votre façon de parler leur
langue plutôt que d’apprécier vos efforts et ce que vous dites, rangez-les dans
la catégorie des grincheux et laissez tomber : adressez-vous à quelqu’un
d’autre ! Cela dit, il faut quand même être prudent : les langues sont aussi
des choses pour lesquelles les gens ont des attitudes très affectives et qui,
souvent, les concernent profondément. Ils peuvent être insécures,
susceptibles, militants… C’est d’ailleurs assez souvent le cas pour les usagers
de langues en situation de difficulté, comme le provençal. Nous le verrons
plus loin, mais on ne s’adresse pas en provençal à n’importe qui n’importe
quand n’importe comment : ça peut provoquer des réactions… inattendues.
Mais ce n’est pas une condition et il faut savoir prendre ses aises avec les « règles »
pour privilégier la pratique et ce pour quoi sont faites les langues : être au monde et en
relation avec les autres. Et là, vous verrez, personne n’est nul (sauf ceux qui sont
définitivement grincheux et antipathiques, on l’a déjà dit, mais ce livre n’est pas pour
eux).
Ph. Blanchet
INTRODUCTION
Évitons les malentendus ! Ce guide n’est pas une méthode de langue à part
entière. Il n’a pas de support audiovisuel, ce qui est de nos jours la moindre
des choses pour enseigner une langue qui se parle, qui s’écoute, qui s’écrit et
qui se lit. Et n’oubliez pas que la capacité de reconnaitre et de comprendre
une langue est toujours plus grande et plus importante que celle de produire
des messages dans cette langue, la première étant la condition de la seconde.
Je vous le redis ? On comprend toujours plus de choses que ce qu’on est
capable de dire et il faut d’abord comprendre pour parler.
À PROPOS DE CE LIVRE
Ce petit livre vous propose une initiation pour vous débrouiller et créer un
lien en provençal, il vous propose une ouverture vers une autre façon, plus
intime, plus profonde, plus authentique, de rencontrer la Provence, les
Provençaux (on verra plus loin qui ils sont), leur culture et leur façon de
vivre. Ce qui n’est déjà pas si mal… Je connais des gens qui viennent en
Provence chaque année depuis… pfff, si longtemps ! et qui ont uniquement
envisagé la Provence comme un endroit où l’on parle français, sans même
prêter l’oreille ou le regard à cette autre langue qui affleure un peu partout (y
compris dans le français des Provençaux). Ils ont raté quelque chose.
L’objectif de ce livre, c’est que vous ne le ratiez pas.
Allez, venez, je vais vous accompagner… Zou, venès, vous fau
l’acoumpagnado…
Vous pouvez bien sûr utiliser ce livre à votre rythme et dans l’ordre qui vous
convient. Et si vous y tenez, vous pouvez commencer par la partie consacrée
à la grammaire et à l’orthographe, mais vous aurez remarqué qu’elle a
volontairement été placée après l’« immersion » dans la Provence, ses usages
linguistiques et ses repères culturels. La conviction généralement partagée
aujourd’hui par les spécialistes de l’enseignement-apprentissage des langues
est que c’est par la pratique en situation avant tout que cela se passe.
CONVENTIONS APPLIQUÉES DANS CE
LIVRE
Pour faciliter la navigation dans ce livre, quelques conventions ont été
établies :
Les termes en provençal sont en caractères gras pour une meilleure visualisation.
La prononciation est indiquée en italique, à la suite des mots et phrases en provençal,
en utilisant les lettres du français et leurs valeurs habituelles. Les accents aigu et grave
marquant la fermeture ou l’ouverture des voyelles. Les consonnes ont été doublées
quand il faut les prononcer et qu’une lecture « à la française » risquerait de les faire
oublier : c’est notamment le cas pour les n et m devant des consonnes : entèndre
énntènndré (entendre), escàmbi éskammbi (échange), c’est-à-dire qu’il n’y a pas en
provençal de voyelles nasales comme il y en a en français non méridional.
La traduction des termes en provençal précède ou suit précisément la prononciation.
Les syllabes accentuées (prononcées plus fortement, avec un « accent tonique ») sont
soulignées.
Attention, ce qui s’écrit en/èn ou parfois em/ èm en provençal se prononce avec un é
ou è suivis d’un -n ou parfois d’un -m : entèndre énntènndré et pas antandré
(entendre), tempouro témmpoulò et pas tampouro (saison). Et ce qui s’écrit in ou im
se prononce réellement avec un i comme dans parking ou Tim : couquin kouking
(coquin), timbre timmbré (timbre).
Une chose simple : écoutez les Provençaux parler français, ils le prononcent
comme du provençal (quand ils ont gardé leur célèbre « accent »).
N.B. : L’auteur applique l’orthographe française rectifiée selon le Journal
officiel de la République française du 6 décembre 1990 et les programmes
scolaires français de 2008.
N’oubliez pas que chaque langue correspond à une façon particulière de dire les
choses, d’être au monde et donc que passer d’une langue à une autre, ce n’est pas
« calquer » une façon de dire sur une autre. C’est apprendre à vivre et dire les choses
autrement.
SUPPOSITIONS RISQUÉES
Pour élaborer ce livre, nous avons dû faire certaines hypothèses sur vous et
ce que vous attendez d’un livre intitulé Le provençal pour les Nuls. Voici
quelques-unes de nos suppositions :
Cette icône signale des points de langue ou des informations qui ne sont pas
essentiels mais qu’il est utile de connaitre.
Recherchez cette icône pour trouver des informations ou des conseils sur la culture
des Provençaux, sur la façon de vous comporter avec eux ; plus généralement aussi de
mieux comprendre les rapports entre langue et société.
Vous rencontrerez cette icône pour signaler des variations régionales : expressions,
phrases, prononciations ou particularités culturelles propres à certaines régions
provençales.
ET MAINTENANT
Pour apprendre une langue, il faut se lancer et tout simplement essayer de la
pratiquer. Démarrez tout de suite (le provençal « en courant ») ! Vous pouvez
commencer à lire le début ou choisir un chapitre qui vous intéresse. Qui sait, d’ici peu de
temps, vous demanderez peut-être à un Provençal qui vous parle en français ou
(beaucoup plus rarement !) en anglais : Siéu en trin d’aprene lou prouvençau,
parlas prouvençau emé iéu siouplè ! syéw ènn tri-nn dapréné lou prouvènnsaw,
parlas prouvènnsaw émé yéou syouplè (je suis en train d’apprendre le provençal, parlez
provençal avec moi s’il vous plait !)
La Provence à travers l’histoire
Le nom « langue d’oc » est un nom littéraire donné depuis le Moyen Âge à un
ensemble linguistique du sud de la France actuelle. Son invention est attribuée à
l’écrivain italien Dante, au XIIIe siècle (qui écrivait « lingua d’oco »). Dante distinguait
trois principales langues littéraires issues du latin, par la façon dont on y disait « oui » à
l’époque (il nommait aussi de cette façon le vaste ensemble des langues d’Europe du
Nord et du centre : langue de « yo » !) : langue de « si » (en toscan, qui deviendra
l’italien), langue d’« oc » (celle des troubadours, sur une zone limitée au pourtour
méditerranéen mais jusqu’en Aragon), langue d’« oïl2 » (dans toute l’actuelle France du
Nord et du Sud-Ouest !). Comme on le voit, la géographie linguistique de Dante était
fantaisiste.
Cet usage était évidemment rare, limité à des discours littéraires et savants ;
et il l’est resté : aucun usager spontané d’une « langue d’oc » (par exemple du
provençal) ne dit parler en « langue d’oc », sauf s’il en a une culture
littéraire, savante, ou militante. Pas plus qu’un usager d’une langue « d’oïl »,
de « si » ou de « yo » !
le fait qu’au Moyen Âge l’aire culturelle de l’expression littéraire des troubadours
couvrait l’ensemble du tiers sud de l’actuelle France, sous une ligne Poitiers-Valence
(elle débordait même sur l’Italie du Nord et sur la Catalogne aujourd’hui espagnole) ;
le fait que ces écrivains-chanteurs s’exprimaient dans des variétés linguistiques qui
partageaient à l’époque beaucoup de ressemblances (et aujourd’hui encore un certain
nombre) au point qu’on puisse les considérer comme une seule et même langue
(d’autant que les manuscrits qu’on en a conservés proviennent pour la plupart de deux
centres de copies – manuscrites à l’époque ! – en Provence et en Italie, où ces textes ont
été linguistiquement mélangés et unifiés par les copistes) ;
le fait de considérer qu’une langue se définit comme différente d’une autre par la
somme de certaines caractéristiques linguistiques (de prononciation, de vocabulaire, de
grammaire) qui lui sont plus ou moins propres et que, pour être viable, une langue doit
être la plus étendue, la plus grande, la plus englobante possible.
D’ailleurs, jusqu’au début du XXe siècle, c’est sous le nom de « provençal » (Eh
oui !) que tous ces parlers étaient principalement désignés par les savants et les
dictionnaires, à cause du prestige du provençal de Provence et de la Provence elle-
même, perçue comme l’héritière principale de l’ancienne « Provincia » des Romains. Au
début, on disait aussi « Limousin » parce que les troubadours les plus célèbres étaient
originaires de cette région. Le nom « langue d’oc » restait très peu diffusé. Mais du coup
le nom « provençal » était ambigu, parce qu’il désignait en même temps l’ensemble des
variétés linguistiques romanes du sud de la France (catalan compris) et la langue
régionale de la Provence en particulier.
LES TEMPS CHANGENT… ET LES LANGUES AVEC !
Avec, au XXe siècle, l’évolution des langues régionales de France, l’évolution
de la façon dont elles sont perçues et utilisées à un niveau surtout local, le
nom « provençal » a fini par se spécialiser définitivement pour désigner la
langue régionale historique de la Provence uniquement. C’est ainsi que les
Provençaux, en grande majorité, nomment leur langue régionale, et depuis
des siècles. Pour parler de l’ensemble des pratiques linguistiques
apparentées que sont le provençal, le niçois, le cévenol, le languedocien, le
gascon, le béarnais, le limousin, l’auvergnat méridional…, on a gardé
« langue d’oc », ou mieux « langues d’oc » au pluriel, parce que dans les faits
il s’agit bel et bien de langues différentes les unes des autres (c’est-à-dire
nommées, identifiées, vécues, pratiquées, massivement reconnues comme
des langues distinctes). Mais ça reste des termes abstraits, savants, militants,
peu répandus dans les populations.
L’OCCITANISME
Un mouvement revendicatif (et même parfois vindicatif) s’est développé au cours du xxe
siècle, d’abord en région Languedoc (entre Montpellier et Toulouse) pour défendre et
promouvoir l’ensemble de « la langue d’oc » (au singulier). Ce mouvement l’a alors
rebaptisée « occitan », à partir d’un mot encore plus rare retrouvé dans quelques textes
en latin médiéval pour désigner le comté de Toulouse, devenu français suite à la
croisade contre les albigeois. C’est d’ailleurs une latinisation du « lingua d’oco » de
Dante, sous la forme « lingua occitana », que l’on pourrait traduire par « langue
occitaine » ou « occitane ». Ce comté était alors désigné comme « pays de langue d’oc »,
en latin, d’où son nom ultérieur en français : le Languedoc. Considérant que son action
de promotion n’avait de chance d’aboutir qu’en unifiant une grande langue occitane qui
aurait du poids, ce mouvement aux acteurs divers a tenté d’attirer à lui les promoteurs
de toutes les langues d’oc, pour n’en faire qu’une seule, qui aurait une norme standard
unique, une orthographe commune, et un seul nom : « occitan ». Ce mouvement s’est
beaucoup inspiré de la politique de « normalisation » du catalan en Espagne. Et son
succès dans le grand Sud-Ouest, de Montpellier à Bordeaux, a diffusé largement le nom
« occitan » depuis les années cinquante, sinon auprès des populations (qui l’utilisent
peu), en tout cas auprès des médias, des décideurs, des savants…
La première, c’est par le fait que les Provençaux n’ont tout simplement jamais adopté
ce nom ni cette vision pour leur langue, sauf quelques rares militants. La plupart des
gens en Provence ignorent ce mot ou, quand ils le connaissent, le comprennent comme
désignant la langue régionale que l’on parle vers Toulouse, ce en quoi ils ont finalement
raison dans les faits.
La deuxième c’est, justement, que la plupart des mouvements de défense et de
promotion du provençal, bien installés en Provence où ils sont très actifs depuis
longtemps, ont explicitement refusé ce qu’ils perçoivent comme une annexion
languedocienne et une grave erreur de stratégie ; et ils ont conservé au provençal son
nom, son orthographe, ses normes, ses usages. C’est du reste le cas, également, de la
plupart des décideurs, savants, acteurs culturels en Provence (et ailleurs à propos de la
Provence).
C’est surtout dans les zones dépeuplées et les grandes villes que l’on rencontre du
provençal occitanisé, à Marseille ou dans les Alpes provençales par exemple : c’est là où
la langue locale s’est le plus perdue, là où les usagers spontanés d’une langue bio ne sont
plus là ou plus assez présents, que ce provençal OGM a, du coup, le champ (presque)
libre.
Si vous voulez éviter une réaction très vive chez vos interlocuteurs, faites comme
tout le monde, respectez les gens d’ici en respectant leur langue, et ne vous laissez pas
abuser : pour la plupart des gens, les usagers, les savants, les acteurs culturels, les
responsables politiques, le provençal, c’est du provençal, c’est pas de l’occitan.
Cela peut choquer certains si vous parlez du provençal en disant « patois », même si
pour ceux qui utilisent ce dernier terme, le mot « patois » évoque aussi souvent un
attachement affectueux. Dans le doute, s’abstenir !
NOMMER LES LANGUES SANS NOM
Comme ailleurs en France et dans le monde, il y a des zones où la langue locale ne reçoit
pas de la part de la population une identification suffisamment forte et où elle n’a tout
simplement pas de nom. Les gens ont une « façon de parler » locale qu’ils ne nomment
pas. Dans ce cas, le terme « patois » est très usité, en France, pour combler ce manque.
Pour ce qui concerne l’aire de langue provençale, on rencontre surtout cela en très haute
Provence, région dont les habitants, montagnards, et leur parler le provençal « gavot »,
ont de tout temps fait l’objet de moquerie de la part des Provençaux de basse Provence.
Guerre de clocher et mépris du voisin aussi répandus qu’imbéciles à la surface de la
terre. Mais du coup une partie des Gavots ne considère pas vraiment ce parler comme
du « provençal » et le terme « patois » y est plus répandu qu’ailleurs en Provence.
Il ne nous en reste sur le plan linguistique que des noms de lieux anciens, de
montagnes surtout, et notamment des noms de lieux et d’habitants dont une
caractéristique fréquente est d’avoir le groupe prononcé ESK, OSK ou ASK, dans leur
terminaison, comme Tarascoun, Greasco, Venasco (prononcés taraskoung,
gréaskò, vénaskò, et francisés en Tarascon, Gréasque, Venasque) ou des noms
d’habitants comme Monégasque (de Monaco, qui se dit en provençal Mounègue
prononcé munègué et en monégasque Mùnegu prononcé mounégou). Il y a aussi toute
une série de mots qui sont parvenus du ligure jusqu’au provençal en passant par le grec
et le latin, comme clapo, garrigo (klapò, garigò) qui signifient pierre plate et…
garrigue (emprunté par le français au provençal) !
LE PROVENÇAL SE MODERNISE
À partir du XVe siècle, les évolutions du provençal par rapport au latin
s’accélèrent et le provençal prend son visage moderne, celui qu’on lui connait
aujourd’hui. C’est aussi ce qui le distingue de plus en plus des autres langues
« d’oc » comme le languedocien (ou occitan), le gascon ou le limousin.
Si l’on réécrit le texte ci-dessus en provençal d’aujourd’hui, on a à peu près ceci (les
mots ayant disparu sont entre crochets, les mots nouveaux en italique) :
ET LE FRANÇAIS DÉBARQUE…
À partir du XVIe siècle, la couronne de comte de Provence échoit par héritage
au roi de France (sauf Avignon et le Comtat Venaissin –en gros, l’actuel
Vaucluse –, qui restent terres du Pape). La Provence reste un état distinct et
le nouveau comte s’engage par une sorte de « constitution » à respecter cette
autonomie, ce que les gouverneurs successifs feront plus ou moins, sauf pour
lever des impôts ou placer ses armées, sa marine, sur la côte provençale. En
1789 encore, les États de Provence rappelleront qu’ils constituent une nation
à part et ne sont pas concernés par les décisions prises à Paris, mais en vain :
la Provence sera définitivement et pleinement intégrée à la France, Comtat
Venaissin compris, en 1790.
L’arrivée au XVIe siècle d’une administration en partie française à Aix,
capitale de la Provence, va amplifier un mouvement déjà perceptible :
l’adoption du français, à la place du provençal, comme langue écrite
administrative, puis progressivement comme langue de prestige pour les
élites aristocratiques et bourgeoises. Mais cela prendra deux siècles et ne
réduit en rien les autres usages du provençal, qui reste langue dominante de
l’oral et même de l’écrit littéraire jusqu’au XIXe siècle.
Certains emprunts sont très anciens et ne sont pas le résultat de ce contact intense
avec une langue dominante (comme meme ou mume mémé, meumé pour « même »).
La plupart concernent surtout des techniques non traditionnelles, des termes de
politesse et de prestige, des termes politiques et religieux, bien que dans ces domaines
des pans entiers de vocabulaire soient restés non empruntés au français. Les emprunts
au français ont aussi créé des doublons, soit synonymes, soit distingués, comme (selon
les variétés de provençal) paire païlé (père) réservé aux animaux mâles distinct de
pèro pèlò emprunté au français pour le « père de famille » ou encore isclo isklò réservé
aux ilots sur les fleuves et rivières, distinct de ilo ilò, désignant les iles sur la mer.
Certains mots ont aussi été empruntés par le français, d’autres par l’italien et
surtout l’espagnol ou le catalan (à cause de la longue présence maure en Espagne),
d’autres uniquement par le provençal. Par exemple : argeiras ardjéïlass (genêt
épineux), cachofle katchòflé (artichaut), chifro (nom féminin) tchifrò (chiffre,
nombre, calcul), carfata karfata (calfater), damo-jano damò-djanò (bombonne),
malu4 malu (tête du fémur, articulation), merenjano mélénndjanò (aubergine),
quitran kitrang (goudron).
VOISINAGES ET MIGRATIONS
Ces échanges ont eu lieu de deux façons principales. D’une part, par les
relations de voisinage : entre pêcheurs, marins, colporteurs, bergers
transhumants, voire négociants ou artistes, on se côtoie depuis toujours dans
les Alpes du Sud, dans les terres du Pape à Avignon, sur la côte et dans les
ports (n’oublions pas que la Provence est une ancienne province de Rome).
Cela a été facilité par des pratiques culturelles et des langues proches, par
des aléas territoriaux entre Provence et États italiens de certaines zones
comme la vallée de Barcelonnette, le pays niçois ou le Comtat Venaissin
(Avignon). Il y a même toute une partie montagneuse du Piémont méridional
où les populations ont une variété de provençal alpin comme langue
première.
D’autre part, la Provence a été la destination principale des grandes vagues
d’émigration italienne qui a fui la misère puis le fascisme entre 1850 et 1940.
Entre 1870 et 1930 un quart de la population de Marseille était, en
permanence et malgré les naturalisations nombreuses, de nationalité
italienne et un autre quart avait au moins un ascendant direct qui y était né.
La proportion est d’environ 15 à 20 % d’Italiens dans le reste de la Provence
en 1920, des centaines de milliers de personnes. Si l’on y ajoute la moitié des
Italiens de Tunisie venus en Provence lors de l’indépendance de ce pays en
1956, on mesure l’ampleur du phénomène et, forcément, de ses effets
linguistiques et culturels.
Même s’il est souvent difficile d’en distinguer les origines corses, il suffit de prendre
aujourd’hui un annuaire téléphonique d’un département provençal pour être frappé par
la quantité de noms d’origine italienne.
LE PROVENÇAL EN ITALIE
Dans les hautes vallées du sud du Piémont, en Italie, le long de la frontière française qui
descend de Barcelonnette à Tende, les parlers historiques ressemblent beaucoup à du
provençal alpin, même si en général ils ne portent pas ce nom. Il est assez fréquent que
les habitants de ces montagnes identifient leur langue comme « une sorte de
provençal », car ils ont l’habitude depuis des siècles de se rendre en Provence (emplois
saisonniers, colportage) et de parler « en provençal » avec les Provençaux. En Italie ces
parlers font l’objet des mêmes débats qu’en France (langue provençale ou occitan ?). Ils
sont désormais pris en compte par la loi italienne de 1999 qui couvre les communes se
déclarant de l’une des langues minoritaires prévues par cette loi (dont l’occitan). Cela
entraîne d’ailleurs des dérives : des organismes locaux s’inventent un occitan artificiel
ou habillent en « occitan » des parlers, par exemple liguriens, pour bénéficier des
avantages de cette loi.
PRATIQUES ET PERCEPTION DU
PROVENÇAL AUJOURD’HUI
C’est d’ailleurs ces marquages territoriaux qui sont les plus présents à l’esprit
des gens lorsqu’ils pensent à la diversité interne de la langue provençale et à
ses caractéristiques contemporaines les plus marquantes. D’autant qu’ils y
associent des « valeurs » identitaires : le provençal de basse Provence, au sud
d’une ligne d’Avignon à Fréjus, est perçu comme plus prestigieux que le
provençal parlé plus au nord, vers les Alpes et la Drôme provençale ; et au
sein même du provençal méridional, le cœur de référence est le pays d’Arles,
avec ses marges avignonnaises. Juste à côté, il y a aussi la région Aix-
Marseille-Toulon dont le provençal est prestigieux, mais déjà moins que
celui d’Arles-Avignon. En gros, car tout est question de point de vue, on
distingue donc plutôt les variétés suivantes.
LE PROVENÇAL RHODANIEN
C’est le provençal de la basse vallée du Rhône, sur un territoire qui s’étend
d’Orange à la Camargue, englobant Avignon, le pays d’Arles et, sur la rive
droite du fleuve en Languedoc, le pays nîmois.
C’est le provençal le plus prestigieux, perçu comme élégant, distingué. Il a été mis
en gloire par les écrivains provençaux les plus célèbres, Frédéric Mistral, Théodore
Aubanel, Joseph d’Arbaud, Max-Philippe Delavouët, etc. On le considère souvent
comme le type même du provençal littéraire (et d’ailleurs ses variantes écrites sont un
peu différentes de ses variantes parlées).
LE PROVENÇAL DE LA DRÔME
Le provençal parlé dans la Drôme provençale, entre Montélimar, Die et
Valréas, ressemble beaucoup au provençal d’Avignon, mais il a quelques
ressemblances avec du provençal alpin. L’annexion de cette ancienne terre
provençale par le Dauphiné (comme pour la région de Gap et d’Embrun),
lorsque cette province devient française aux XIVe et XVe siècles, a un peu
séparé cette zone linguistique du reste de la Provence. Son identité
linguistique est moins bien connue en Provence, même si les échanges
locaux ont perduré. Localement, en revanche, on se revendique provençal
haut et fort !
Les « usagers symboliques » du provençal, ceux qui y sont attachés y compris tous
ceux qui ne le parlent pas ou même ne le comprennent pas, représentent entre 70 et 80
% de la population, toutes origines confondues. Toutes les enquêtes le prouvent.
L’ENSEIGNEMENT DU PROVENÇAL
Enfin, il ne faut pas oublier l’enseignement. Les retrouvailles avec cette
langue qu’on était en train de perdre se font beaucoup par des adultes qui
décident d’en réactiver la pratique, ou de passer de la compréhension à
l’expression active, ou d’en débuter l’apprentissage. Les cours de provençal
sont nombreux partout en Provence dans les associations locales.
La langue est bien outillée pour son apprentissage : manuels, grammaires,
dictionnaires, supports sonores et ressources sur Internet. Il y a même maintenant un
« provençal pour les Nuls » (si ! si !). Le provençal est aussi enseigné à l’école, dans le
cadre dit d’« occitan-langue d’oc », de la maternelle à l’université mais de façon souvent
limitée.
Une des particularités des Provençaux est de désigner fréquemment les lieux par
des noms locaux qui ne sont pas les noms administratifs français, même en français. Il
faut dire que la francisation des noms de lieux en Provence a été une catastrophe. On va
vite s’en rendre compte et nous y reviendrons au chapitre 5.
des réponses incom - prises pour les lieux-dits qui s’appellent désormais par exemple
Justamont (juste là-haut), Surlacolle (sur la colline), Les Opies pour lis Aupiho(liz
ówpiyò = les Alpilles, nom de la chaîne de montagnes à l’horizon), Sabipas (je ne sais
pas), Mar Vivo (mer agitée), Enco de Botte (chez Botte)…
des adaptations fantaisistes comme Beau Cours pour baus court baw cour (falaise
courte), le Bau de Quatre Heures pour lou baus dei quatre auro lou baw déï
quatrawlò (la falaise des quatre vents), les Crottes pour lei croto léï kròto (les caves),
Le Vallon Sourd pour lou valoun sour lou valoung sour (le vallon sombre), Les Hoirs
pour leis ouart léïzwar (les jardins potagers)…
des transformations complètes comme la Sainte-Victoire pour lou Mount Ventùri
lou moung vénntuli (le mont des vents), l’Arc pour la rivièrelou Larlou lar… ; et le
même nom écrit de plusieurs façons différentes plus ou moins provençales ou
françaises…
Aujourd’hui , vous verrez de plus en plus de communes afficher leur nom ou celui des
rues en provençal. Parfois ce n’est hélas qu’une retraduction du nom français et non son
nom authentique en provençal.
Poudès tambèn veni ‘mé lou trin poudèss tammbèng véni mé lou tring
vous pouvez aussi venir par le train. D’autant que le TGV arrive maintenant à
grande vitesse jusqu’à Aix-TGV, puis à Marseille et jusqu’à Fréjus. Et
pourtant les Provençaux n’en voulaient pas d’aquéu camin de fèrri
dakéw kaminn dé fèri de cette voie ferrée qui a balafré toute la Provence de
Montélimar à Aix. À l’époque où elle était en projet, de nombreux maires ont
pris des arrêtés interdisant au TGV de traverser leur commune. Un écrivain
provençal de Maillane, René Moucadel, a même écrit une pièce de théâtre en
provençal intitulée Aquéu putan de TGV akéw putann dé té dzé vé ce
putain de TGV. La pièce a eu un franc succès.
Poudès tambèn veni ‘mé la veituro poudèss tammbèng véni mé la
véïtulò vous pouvez aussi venir en voiture : notre région a été l’une des
premières équipées en autoroutes, avec la célèbre autoroute du Soleil qui a
doublé la fameuse nationale 7 qui va de Paris à Menton en passant par Lyon,
Avignon et Aix-en-Provence. Comme dit notre proverbe, bèu camin
camino bèw kaming kaminò (littéralement « beau chemin chemine »),
c’est-à-dire sur un beau chemin, on chemine bien. Mai mèfi, aro, a passa
de modo maï mèfi alò a passa dé mòdò, mais attention, maintenant, ce
n’est plus à la mode : la veïturo empouiouno la naturo la véïtulò
émmpouyounò la natulò, la voiture pollue la nature…
Dans ce petit texte on remarque diverses choses sur le provençal. D’abord c’est du
provençal maritime (on est près de Toulon) : les formes li, pouàdi, respouande, mi
(lui, je peux, il répond, me) seraient par exemple ié, pode, respond, me yé, pòdé,
réspong, mé en provençal rhodanien. À l’exception du mot em’oucò et de détails de
prononciation non notés par l’écriture, tout le reste serait identique en rhodanien : on
voit que les différences entre variétés du provençal sont minimes. L’expression
em’oucò, littéralement « avec ça », se dit em’acò émakò dans d’autres coins de
Provence. Elle indique une légère opposition, un genre de « mais » atténué. Elle était si
fréquente dans le parler toulonnais que les Bretons qui faisaient l’aller-retour entre les
deux grands ports militaires français Brest et Toulon ont surnommé les Provençaux les
« Moko ». On retrouve ce sobriquet dans le titre du célèbre film de Julien Duvivier avec
Jean Gabin Pépé le Moko (1937).
LA PROVENCE RHODANIENNE, DE
MONTÉLIMAR À LA CAMARGUE
LE RHÔNE
Le Rhône (en provençal Lou Rose lou ròzé) a toujours été une frontière au
long de l’histoire de la Provence. Avec la mer au sud, c’est sa frontière la plus
stable et la plus claire, alors que vers le nord (entre Provence et Dauphiné ou
Savoie) et vers l’est (entre Provence et Ligurie ou Piémont), les frontières ont
toujours bougé et n’ont jamais été nettes. De l’autre côté du Rhône, depuis le
Moyen Âge, c’est un autre pays : le comté de Toulouse et, très tôt, la France
(aujourd’hui la Région Languedoc, lou Lengadò lou léng-gadò). En
revanche, le Rhône a toujours été une voie de communication vers le nord,
par Lyon. De l’époque où la Provence relevait de l’Empire romain
germanique, on a longtemps gardé l’habitude d’appeler la rive gauche du
Rhône empèri émmpèli (empire) et la rive droite reiaume réyawmé
(royaume, sous-entendu « de France »). Le Rhône a beaucoup inspiré de
contes, chansons, légendes populaires et d’écrivains provençaux de langue
provençale et/ou française comme Frédéric Mistral, Joseph d’Arbaud, Max-
Philippe Delavouët, Henri Bosco…
La Provence rhodanienne commence en fait dans la Drôme provençale, vers
Montélimar. D’aqui, se davalas lou Rose daki sé davalass lou ròzé, de là,
si vous descendez le Rhône, vous rencontrerez des lieux emblématiques de la
Provence.
LA DRÔME PROVENÇALE
Le sud de la Drôme est constitué d’anciens territoires de la Provence passés
au Dauphiné (lou Dóufinat, lou dòwfina) au XVesiècle. N’en reste pas
moins que le territoire de la commune de Valréas (en provençal Vaurias,
vòwliyass) toujours rattaché à la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et au
département du Vaucluse, connue sous le surnom d’« Enclave des Papes »
car c’était une terre du Pape comme Avignon et l’ensemble du Comtat
Venaissin. Mai se regardas li païsage, li vilage, la naturo, l’èime, li
noum dis endré tambèn sus li panèu en prouvençau veirés bèn
que sias en Prouvènço maï sé régardass li pa-i-zadzé li viladzé, la
natulò, li nounn diz énndré tammbèng seu li panèw émm prouvénnsaw
véïléss bèng ké siaz émm prouvènnsò, mais si vous regardez les paysages, les
villages, la nature, l’atmosphère, les noms des lieux (aussi sur les panneaux
en provençal), vous verrez bien que vous êtes en Provence. D’ailleurs c’est ici
que l’on cultive les olives parmi les plus réputées de… Provence, tout comme
l’huile qu’on en tire : lis oulivo e l’òli de Nioun liz oulivélòli de niyoung,
les olives et l’huile de Nyons.
Dans certains cas et dans certaines variétés du provençal, c’est plutôt l’autre voyelle
qui disparait, celle du mot qui suit, par exemple dans : vèni ‘mé lou trin vèni mé lou
tring et non vén’emé lou trin (je viens en train) ou dans canto ‘no cansoun (kanntò
nò kannsoung) plutôt que canto uno cansoun (kantunòkannsoung), il/elle chante
une chanson. Mais dans tous les cas, en provençal, quand deux voyelles se suivent, on en
fait sauter une, et davantage encore quand c’est la même : Siéu na à Maussano se
prononce siéwnamòwssanò (je suis né à Maussane). L’alternative consiste, dans
certains cas, à ajouter une consonne pour séparer les deux voyelles et faciliter la
prononciation, par exemple en ajoutant un n comme dans à-n-aquéu trin
(anakéwtring, à cette vitesse) ou encore un z comme dans à-z-Ate (azaté, à Apt).
ORANGE
Juste au sud se trouve Orange, en provençal Ouranjo (oulanndzò), qui a
longtemps été une principauté indépendante gouvernée par… des
Hollandais ! Ce n’est qu’en 1713 qu’elle est rattachée à la France et en 1790
qu’elle est intégrée au nouveau département du Vaucluse. Ouranjo es
celèbro pèr soun tiatre rouman oulanndzès sélèbrò pèr sounn tyatré
roumang Orange est célèbre pour son théâtre romain e pèr èstre l’endré
lou mai caud de Franço é pèr èstré lénndré lou maï caw dé frannsò et
pour être le lieu le plus chaud de France (en température moyenne).
LE COMTAT VENAISSIN
En poursuivant votre descente du Rhône vers le sud (on appelle cela en
provençal ana à desciso anadéssizò), vous ne pourrez pas ne pas voir sur
votre gauche Lou Ventour lou vénntour, en français le mont Ventoux,
surnommé Lou Gigant de Prouvènço lou dzigann dé prouvènnsò (le
Géant de Provence) avec ses 1 912 mètres d’altitude, ses cailloux, sa
couronne de neige l’hiver, son sommet spectaculaire et son espèce de vipère
unique au monde… La ville principale des montagnes du Comtat Venaissin
(en provençal la Coumta de Venisso la kounnta dé vénissò, notez le
féminin) est Carpentras (qui se prononce en provençal karpénntra).
Avignon et le Comtat Venaissin ont abrité à partir du Moyen Âge les Juifs de
Provence, chassés du comté de Provence quand le roi de France y a pris le pouvoir en
1486. Une partie d’entre eux avaient des origines dans le Languedoc voisin, dont ils
avaient déjà été chassés lorsque le comté de Toulouse était devenu français en 1271. Ils
étaient tolérés en terre papale, sous réserve d’habiter dans un quartier spécial, la
jutarié la dzutalyé (littéralement la juiverie), nom que l’on retrouve dans des rues de
diverses villes provençales, par exemple Aix, la capitale de la Provence. Regroupés dans
cette sorte de ghetto, les Juifs provençaux ont développé une variété particulière de
provençal, que les spécialistes appellent le judéo-comtadin ou judéo-provençal. Ce
provençal a disparu au cours du XIXesiècle lorsque les Juifs sont devenus des citoyens
comme les autres et que les ghettos ont été abandonnés. On n’en a que quelques traces à
travers quelques chansons dont on a retrouvé les textes écrits en alphabet hébreu et
quelques témoignages de leurs descendants installés partout en Provence. Quelques
traits de prononciation et quelques mots hébraïques provençalisés liés aux traditions
religieuses semblent en être les seules particularités.
LE LUBÉRON ET AVIGNON
Après le Ventoux, on arrive sur les riches plaines agricoles du Comtat
Venaissin, dont n’émerge qu’une autre montagne, Lou Leberoun lou
lébéloung ou leubéloung, le Lubéron. C’est une montagne allongée où sont
nichés des villages parmi les plus célèbres de Provence ainsi que les falaises
d’ocre de Roussillon (en provençal Roussihoun, roussiyoung) tout aussi
renommées. Comme beaucoup de beaux endroits de Provence (les Alpilles, la
côte varoise…), le Lubéron est un peu envahi par les résidences de stars…
C’est dans les plaines comtadines qu’est cultivée la plus grosse partie de la
production fruitière de France ; et c’est à Cavaillon (en provençal Cavaioun,
kavayoung) que se trouvent non seulement les plus célèbres melons de
France (li meloun de Cavaioun li mélounn dé kavayoung) mais aussi le
plus important marché en gros de fruits et légumes de France et de Provence.
Arrivarés pièi à-n-Avignoun, ciéuta di Papo arivaréss pyèï
anavinyoung syéwta di papò, vous arriverez ensuite à Avignon, cité des
Papes. À Avignon (c’est comme ça qu’on dit en Provence), vous pourrez voir :
li bàrri li bari les remparts, lou pont Sant Beneset lou pong
sammbénézé le pont d’Avignon, lou palai di Papo lou palaï di papò le
palais des Papes, lou festenau de tiatre lou fésténaw dé tyatré le festival
de théâtre (et surtout ne manquez pas le festival de théâtre provençal !).
LE PAYS D’ARLES
Et puis aussitôt, c’est le pays d’Arles (en provençal Arle, arlé), le cœur
symbolique de la Provence. Voici Lis Aupiho liz ówpiyò les Alpilles,
littéralement « les petites Alpes » avec à leur sommet Li Baus li baw les
Baux (dits de Provence), à leur pied d’un côté Sant Roumié sang roumyé
Saint-Rémy et Maiano mayanò Maillane, le village de Frédéric Mistral ; de
l’autre côté la Crau la kraw la Crau, vaste plaine de galets déposés par
l’ancien lit de la Durènço la dulènnsò, la Durance, qui coule depuis la haute
Provence. Arles est célèbre pour ses arènes bâties par les Romains, où l’on
pratique toujours li courso de biòu li koursò dé byòw les courses de
taureaux à la camarguaise ou la corrida espagnole. Les taureaux sont
l’emblème de la Camargo la kamargò la Camargue, vaste zone humide
située dans le delta du Rhône, où courent aussi li chivau camargue li
tsivaw kamargué les chevaux camarguais, que montent li gardian li
gardyang les « gardiens » des troupeaux de taureaux que l’on appelle ici
uno manado unò manadò. Au bord de la mer voici Li Santo li sanntò Les
Saintes (de son nom officiel français la commune Les Saintes-Maries-de-la-
Mer), lieu de pèlerinage pour les Gitans (en provençal li boumian li
boumyang).
Toute une mythologie s’est créée autour de ce monde à part qu’est la Camargue,
dont le bref roman La Bèstio dóu Vacarés la bèstyò dów vakaréss La Bête du
Vacarès de J. d’Arbaud est le chef-d’œuvre le plus accompli.
LE PAYS NÎMOIS
On ne peut pas quitter la Provence du Rhône sans évoquer la région de
Nîmes (en provençal Nime ou parfois Nimes nimé ou niméss), qui bien
qu’historiquement languedocienne a toujours regardé vers le Rhône, la
Camargue et la Provence. Au point qu’entre Uzès, Nîmes et Lunel, on parle
traditionnellement un provençal vécu et souvent nommé comme tel. L’une
des plus célèbres chansons provençales est A la font de Nime a la fònn dé
nimé, à la fontaine de Nîmes, qu’on retrouve avec d’autres paroles dans le
reste du Languedoc. À mi-chemin entre Avignon et Nîmes se trouve le pont
du Gard, aqueduc romain très bien conservé que l’on croit très souvent situé
en Provence. C’est presque vrai, soyons accueillants pour nos frères Nîmois !
MARTIGUES
Martigues doit son surnom de Veniso prouvençalo vénizò prouvénnsalò,
Venise provençale, aux canaux de son centre ancien, à cheval sur l’isthme qui
fait communiquer l’étang de Berre avec la Méditerranée.
MARSEILLE
La capitale économique (et aujourd’hui administrative) de la Provence est
Marseille, en provençal Marsiho marsiyò. Ville à part, typée, cosmopolite,
populaire, attachante, virulente, Marseille est protégée par la Boueno
Maire la bwénò maïle littéralement « la Bonne Mère », nom de la Vierge
Marie en provençal, dont la statue domine toute la ville au-dessus du Vieux-
Port (en provençal lou Port-Vièi, lou pòr vyèï ).
On dit aussi la Boueno Mèro la bwénò mèlò sous l’influence du français, forte en
provençal marseillais, où l’on trouve aussi beaucoup de mots d’origine italienne et corse.
AIX
La véritable capitale historique de la Provence, c’est z-Ais zaï, en français
Aix, dit « en Provence ». Dans le vieil Aix, tóuti lei carriero an soun
noum en prouvençau touti léï karyélò ang soung noung éng
prouvénnsaw, toutes les rues ont leur nom en provençal, à commencer par
la plus célèbre, lou Cous lou kouss, le Cours (dit « Mirabeau »). z-Ais vilo
d’aigo zaï vilò d’aïgò, Aix ville d’eau, qui lui doit son nom, est riche en
fontaines superbes (z-Ais vient du latin aquae sextiae, les eaux de Sextius,
du nom du Romain qui l’a fondée). En provençal, les habitants d’Aix
s’appellent d’ailleurs li Sestian li séstyang et li Sestiano li séstyanò, de
Sextius.
Le pays d’Aix est dominé par la montagne Sainte-Victoire, nom issu d’une
mauvaise adaptation (voir plus haut) du provençal lou Mount Ventùri lou
moum vénntuli, mais superbe massif qui a tant inspiré Cézanne, le peintre
aixois. Au sommet se trouve la Crous de Prouvènço la krouss dé
prouvènnsò, la Croix de Provence.
LA SAINTE-BAUME ET TOULON
En redescendant vers la mer et vers Toulon, on longe la Santo Baumo la
sanntò bawmò, la Sainte-Baume, montagne qui doit son nom à une grotte
(en provençal, uno baumo), dans laquelle se serait réfugiée Marie-
Madeleine, la disciple de Jésus-Christ, pour y finir sa vie. Du sommet à mille
mètres d’altitude, on embrasse la côte de Marseille jusqu’à Hyères.
Toulon, en provençal Touloun touloung, port militaire, marque le début de
la côte provençale au climat le plus privilégié, où poussent en plus de la vigne
et de l’olivier (la vigno e l’óulivié la vinyélówlivyé), le citronnier et le
palmier (lou citrounié e lou paumié lou sitrounyé lou pòwmyé ).
L’ARRIÈRE-PAYS VAROIS
Lou couar prouvençau lou kwar prouvénnsaw : « le cœur provençal ».
C’est ainsi qu’on appelle l’arrière-pays varois, qui s’étend entre Aix et
Draguignan, avec Saint-Maximin (en provençal Sant Meissimin sang
méïssiming), Brignoles (Brignolo, brinyòlo). Au nord, il englobe le plateau
de Canjuers (lou plan de Canjuès lou plann dé canndjuèss) jusqu’aux
gorges du Verdon, où commence la haute Provence. Pays de vallées, de
montagnes et de forêts, relativement protégé de l’urbanisation touristique
qui a rogné la côte, ne comptant aucune grande ville, lou couar
prouvençau a conservé ses villages typiques, sa vie rurale organisée autour
de la vigne et de l’olivier, sa culture, ses fêtes, ses traditions.
Le haut Var est l’un des bastions de la pratique du provençal avec le pays d’Arles et
les montagnes du Vaucluse. C’est là que vous entendrez le plus facilement des gens du
pays parler provençal entre eux et, peut-être, accepter de vous aider à le parler.
LA « CÔTE D’AZUR »
L’essor du tourisme a donné à la côte méditerranéenne, de Saint-Tropez (en
provençal Sant Troupés sann troupé ou sann troupéss) jusqu’à Menton
(en mentonasque Mentan ménntang) une célébrité mondiale, sous le nom
de Côte d’Azur (qu’on ne sait pas bien dire en provençal !). La partie
provençale de cette côte s’étend jusqu’à Antibes et Vence. Quand on traverse
le fleuve Var, on arrive à Nice et dans l’ancien comté de Nice. Ici, leis Aup
cabusson dins la mar leïz aw kabussounn ding la mar les Alpes plongent
dans la mer, les montagnes sont hautes, les villages perchés plus haut, les
routes suivent des gorges et des corniches vertigineuses, le climat est encore
plus doux mais plus humide que vers Marseille. Et la côte est envahie de
palaces, de villas de luxe, de stars… Le Festival de Cannes en attire chaque
année.
C’est parce qu’on a créé en 1860 le département des Alpes-Maritimes lors du
rattachement du comté de Nice à la France qu’on a séparé les arrondissements de
Grasse et de Cannes du reste du Var et des départements provençaux. Voilà pourquoi le
fleuve Var ne coule plus dans le département qui porte son nom !
LES RIVIÈRES
Durènço, Ubaio e Blèuno dulènnsò ubayò e blèwnò Durance, Ubaye et
Bléone, sont les trois principaux cours d’eau dont les vallées ont permis la
circulation entre haute et basse Provence. C’est par eux que sont descendus
les Gavots quittant leurs montagnes, que sont remontées dans les Alpes les
façons de parler le provençal du sud, tout cela au détriment du provençal
alpin qui a reculé sur les hauteurs, au nord et à l’est de Sisteron et Digne,
vers Gap, Barcelonnette et Embrun.
AUTOUR DE MANOSQUE
Entre Forcalquier, Manosque et Castellane (Fourcauquié, Manosco,
Castelano fourkòwkyé, manòsko kastélanò), lou plan de Valensolo lou
plann dé valénnsòlo le plateau de Valensole s’étend au-dessus des gorges du
Verdon et du lac de Sainte-Croix (lou lau de Santo Crous lou law de
sanntò krouss). Es lou païs de la lavando èss lou payiss dé la lavanndò,
c’est le pays de la lavande et d’une Provence plus austère, celle de Giono. On
y trouve les ciels les plus purs de France, raison pour laquelle y a été installé
l’Observatoire de haute Provence, que miro leis estello ké milò léïs éstèlò
qui regarde les étoiles. On y parle un provençal méridional proche de celui
d’Aix ou de Draguignan, mais on s’y sent gavot, et comme dit le proverbe
Gavouot, l’es pas qu vouò gavwò lèsspa ku vwò Gavot, ne l’est pas qui
veut !
Saluer, se présenter
Engager une conversation en provençal
Formules de politesse
Si vous voulez réellement rencontrer des Provençaux pour espérer découvrir leur
langue avec eux, il va falloir abandonner quelques stéréotypes, surtout qui proviennent
d’une mauvaise compréhension de leur(s) langue(s) et de leur(s) culture(s).
Nous allons voir juste après que pas mal des conventions culturelles propres
à la politesse provençale et aux règles d’usage linguistiques sont différentes
de celles des autres Français, surtout de ceux « du Nord » comme on dit en
Provence, c’est-à-dire de tous ceux qui sont au nord de la Provence,
Auvergnats, Lyonnais et Grenoblois compris !
Mais commençons par quelques stéréotypes non linguistiques. Les
Provençaux seraient (comme la plupart des Méditerranéens) des gens lents,
fainéants, peu fiables… Eh bien, sachez que les Provençaux ont effectivement
en commun avec beaucoup d’autres Méditerranéens… un rythme de
comportement rapide, une façon d’être énergique et que c’est cela qui est
valorisé dans leur culture. Ils trouvent souvent les « gens du Nord » (au sens
provençal, les Chtis en étant d’ailleurs exemptés) mous, lents, pas assez
énergiques (par comparaison, tout étant relatif !). Il suffit de regarder la
conduite automobile ou une conversation à Marseille, Alger ou Naples pour
voir de quoi il s’agit…
Il y a en provençal de nombreux mots et expressions pour se moquer des
gens peu actifs. La condamnation qui tombe le plus souvent étant que
santoun ! ké sanntoung littéralement « quel santon ! » (ce qui se dit
d’ailleurs tel quel en français de Provence), allusion à ces « petits saints »
(sens étymologique) de plâtre toujours immobiles et les pieds collés dans
leur socle.
Quant à la question de la fiabilité, elle nous amène déjà vers les pratiques
linguistiques. Une règle de politesse de base, encore plus développée au sud
de la Méditerranée, est d’être amical et accueillant pour ses interlocuteurs. Il
est grossier, en Provence et en provençal, de se montrer distant avec les gens.
Alors on leur parle comme à des amis, on les embrasse, on rit, on parle de
façon très imagée (d’où la réputation erronée d’exagération chronique)…
mais ce ne sont pas pour autant de vrais amis, de ceux qui ont le droit
d’entrer à la maison et à qui l’on peut parfois confier des sentiments moins
gais.
La maison provençale est un espace de grande intimité : les relations
« ordinaires » ont lieu dehors, sur la place publique ; et les Provençaux, sous
l’apparence d’une parole exubérante, sont des pau-parlo pòwparlò des
« parle-peu » dès lors qu’il s’agit de sentiments, d’états d’âme sensibles.
Sachez respecter cette grande pudeur, un peu fière et susceptible, et faire la
part des choses.
Ve coumo va ?
vé koumò va
Tiens, comment ça va ?
Fèn ana !
fèng ana
On fait aller !
En provençal, on se touche ! On ne peut pas parler aux gens sans faire des gestes ni
sans maintenir le contact physiquement, par une main sur le bras, une tape sur l’épaule,
voire plus si affinités… C’est d’ailleurs surtout le cas entre personnes du même sexe (y
compris entre hommes). On a plus de retenue entre sexes différents, sauf si…
Adiéu, ma bello !
adyéw ma bèlò
Salut, ma belle !
Les salutations Hòu et Adiéu ne s’emploient qu’avec des personnes que l’on
tutoie. Attention, adiéu veut dire bonjour. On peut y répondre par le même mot, seul
ou accompagné du prénom ou encore comme ci-dessus d’un terme affectueux.
Me dison…
mé dizoung
Mi dien…
mi dyéng
Je m’appelle…
Rèste à…
rèsté a
Rèsti à…
rèsti a
Tambèn pèr vous tammbèmm pèr vous À vous aussi (à une personne que l’on vouvoie)
Tambèn pèr vautro tammbèmm pèr vawtrò À plusieurs personnes de sexe féminin
Se touca la man
sé touka la mang
Se serrer la main
Pour les pronoms équivalant au français me, te, se, on dit dans la plus grande partie
de la Provence me, te, sé (mé té sé). Tout le long de la côte de Marseille à Fréjus, on dit
mi, ti, si. Le provençal maritime a donc les deux formes et tout le monde les comprend
bien sûr partout.
S’embrassa
sémmbrassa
Se prendre dans les bras (sans forcément un contact des lèvres)
Tè, vous fau un poutoun
tè, vou fòw um poutoung
Allez, je vous fais une bise
ENTAMER LA CONVERSATION
Fasès escuso…
fazèz éskuzò
Fès escuso…
fèz éskuzò
Excusez-moi…
Siouplè
syouplè
S’il vous plait
Ce mot emprunté au français est parfois remplacé par son calque en provençal se
vous plais sévouplaï.
PARLER PROVENÇAL…
On l’a déjà dit : ça ne se fait pas (ou plutôt, ça ne se fait plus) de parler
provençal à quelqu’un qu’on ne connait pas, car on n’est pas sûr que la
personne l’accepte ou en soit capable. Il faut donc tâcher de faire
comprendre petit à petit à la personne qu’on souhaite passer au provençal.
Pour cela, on parsème la conversation de petits bouts de provençal (dans les
salutations, à propos du temps qu’il fait…), expressions, dictons, et on voit si
la personne se prend au jeu. On rencontre alors souvent les phrases
suivantes :
Héu, sabès parla prouvençau ?
éw sabèss parla prouvénnsaw
Hé ! vous savez parler provençal ?
Iéu lou coumprene bèn mai lou parle gaire.
yéw lou koummpréné bèng maï lou parlé gaïlé
Iéu lou coumprèni bèn mai lou pàrli gaire.
yéw lou koummprèni bèng maï lou parli gaïlé
en provençal alpin : Iéu lou coumprènou bèn mai lou pàrlou gaire.
yéw lou koummprènou bèng maï lou parlou gaïlé
En provençal, le verba ama ama (en maritime eima éïma) n’est employé qu’à
propos des gens, parfois des animaux de compagnie. Pour le reste, pour exprimer un
goût plus qu’un amour, on emploie le verbe agrada agrada (plaire). On peut bien sûr
insister sur un très grand amour pour telle ou telle chose en utilisant à sa place le verbe
ama/eima.
Fai fre
faï fré
Il fait froid
Boufo lou vènt
boufò lou vèng
Le vent souffle
M’agrado pas la plueio
magradò pa la pluèyò
Je n’aime pas la pluie
Fai un brave levant, tout aro vai plòure
faï umm bravé lévang toutalò vaï plòwré
Il fait un sacré vent d’est, il va bientôt pleuvoir
Uno raisso
unò raïssò
Une averse violente
Fai un mistrau à derraba la co is ase
faï um mistraw a déraba la kò iz azé
Plòu de farrat
plòw dé fara
Il pleut à verse (« des seaux »)
Toumbo de pèiro de moulin
toumbò dé pèïlò dé mouling
Il pleut énormément (« il tombe des pressoirs de moulins »)
Lou cèu se tapo, se destapo
lou sèw sé tapò, sé déstapò
lou jour
lou dzour
lou jou
lou djou
le jour
lou matin
lou mating
le matin
l’après-dina ou l’après-dinado
laprédina, laprédinadò
l’après-midi (littéralement l’après-repas du midi)
lou vèspre ou lou sero
lou vèspré, lou sélò
le soir
On dit aussi lou souar swar avec un emprunt au français fréquemment utilisé.
la niue
la nyeu
la nue
la nué
la nuit
La semano la sémanò la semaine
Dans certaines parties des Alpes, les noms des jours ne sont pas composés avec di-
(du latin dies, le jour). On a donc les noms suivants : luns, mars, mècres, jòus,
vèndres, sandes, mais on garde en général dimenge ou dimenche sous influence du
français comme langue religieuse.
mounnta tou dré aprè la placètò lou kastèw sala mann dretchò
Montez tout droit après la placette, le château sera sur votre droite.
Pèr ana à…
pèr ana…
Pour aller à…
Es aqui.
ézaki
C’est ici.
Ounte ? Mounte ?
ounnté mounnté
La drecho vo la gaucho ?
la drétchò vò la gawtchò
La droite ou la gauche ?
Darrié o davans ?
daryé o davang
Derrière ou devant ?
Ce qui a changé, c’est l’arrivée du T-shirt, que l’on a bien du mal à nommer
autrement en provençal. Certains disent la camiseto la kamizètò mais ça
veut surtout dire la chemisette. Finalement le mieux est sans doute de garder
leur nom franglais : es tant coumode lou T-shirt éss tang koumòde lou
ticheurt, c’est si pratique le T-shirt.
Autres innovations aux noms empruntés à l’anglais, le slip et le short. En
provençal, on nomme tout ça li braieto, qui signifie au départ caleçon (ci-
dessus). On ne porte plus guère la jargo la dzargò ou djargò, sorte de
grande cape de laine. Si les hommes portent parfois encore lou courset lou
koursé (le gilet sans manches) c’est dans un costume de ville à trois pièces et
plus dans l’habit de travail du paysan ou du pêcheur. La cravate nouée en
lavallière les jours où on se fait beau est maintenant nouée à la française ou à
l’américaine. Et leur ancienne taiolo tayòlò (large ceinture de tissu) a été
remplacée par une ceinture de cuir… Quant aux esclop éssklò (sabots)
autrefois réservés aux gens de la terre (c’est pas pratique sur un bateau !), ils
ont quasiment disparu sauf pour les amateurs de jardinage.
UNE JOURNÉE
La journado coumenço pèr lou dejuna.
En provençal, les noms et verbes renvoyant aux repas sont déjuna (au lever), dina
(à midi), gousta (en milieu d’après-midi), soupa (le soir). Cet usage a été transféré sur
le français de Provence, où l’on dit toujours déjeuner (au lever) et encore assez souvent
dîner à midi et souper le soir. Attention aux confusions ! Pour les éviter, les Provençaux
ont pris l’habitude de dire tout simplement « manger à midi » ou « manger le soir ».
Mais il y a des Francihot ou Francihoto frannsiyò frannsiyòtò (littéralement « les
petit(e)s Français(es) », ceux et celles qui singent les « Français » c’est-à-dire les
Parisiens) qui désormais « déjeunent » à midi… On suppose qu’ils se lèvent tard !
Ve, siéu creba, mi vau coucha, bouano nue e fai de bèu pantai !
vé syéw kréba mi vòw koutcha bwanò nué é faï dé bèw panntaï
Oh, je suis crevé, je vais me coucher, bonne nuit et fais de beaux rêves !
L’HABITATION
Les habitations sont différentes selon la partie de la Provence : la basse
Provence rhodanienne ou côtière, la Camargue, la haute Provence
méridionale, la très haute Provence montagnarde…
l’oustau
loustaw
la maison
lou mas
lou mass ou lou ma
le « mas » (maison rurale, pays d’Arles)
la bastido
la bastidò
la « bastide » (maison rurale, côte et arrière- pays)
la granjo
la granndzò
la « grange » (maison rurale, Comtat Venaissin)
uno campagno
unò kammpanyò
une maison de campagne
lou cabanoun
lou kabanoung
le cabanon (petite maison sans confort à la campagne ou au bord de mer)
La partido de cabanoun partidò dé kabanoung (journée de repos passée
au « cabanon ») est une tradition très vivante à Marseille et sur la côte.
Il n’y a pas de terme pour désigner en provençal de façon précise ce que l’on appelle
aujourd’hui un immeuble (construction de grande taille abritant plusieurs appartements
ou locaux professionnels). Soit on emploie un calque du français : un immoble (sur le
modèle de moble, meuble) unn imòblé, soit on utilise un mot provençal courant : un
oustalas unn oustalass (littéralement « une grande maison ») qui reste un peu ambigu.
Cela dit, en provençal, le terme oustau désigne habituellement les maisons provençales
traditionnelles de ville ou de village, hautes, à trois ou quatre étages et deux ou trois
fenêtres en façade, abritant plusieurs appartements… L’immeuble, on connait donc ça
depuis des siècles en Provence ! Simplement, on ne lui donne pas de nom qui le
distinguerait particulièrement de la maison individuelle. D’ailleurs même pour son
appartement, on dit d’ordinaire moun oustau, qui finalement signifie tout lieu
d’habitation en général.
lou jardin
lou dzarding
lou djarding
le jardin
Il existe un mot particulier pour désigner le jardin potager : l’orto lòrtò (mot
féminin, ici en rhodanien, ailleurs on dit l’ouarto lwartò ou son équivalent masculin
l’ouart lwar).
la porto
la pòrtò
la pouarto
la pwartò
la porte
la fenèstro
la fénèstrò
la fenêtre
Tanco lou paro-vènt ‘mé la petugo
tang-kò lou palòvèng mé la pétugò
Bloque le volet avec le crochet
la téulisso
la téwlissò
la toiture (littéralement l’ensemble de tuiles, téule téwlé en provençal –
attention mot masculin)
Ai tres membre dins moun apartamen.
aï tréss mémmbré ding mounn partamèng
J’ai trois pièces dans mon appartement.
Ai un oustau nòu.
aï unn oustaw nòw
li paret (féminin)
li palé
la tchaminèyò
la cheminée (le foyer, le conduit, la sortie de toit)
l’armàri (masculin)
larmali
l’armoire
la taulo
la tawlò
la table
la cadiero
la kadyélò
la chaise
lou lié
lou yé
lou lyé
le lit
Venès au miéu.
vénèzòw myéw
Venès à moun oustau.
vénèza mounn oustaw
Venez chez moi.
Anan encò de Felipe.
anang éng-kò dé félipé
Anan acò de Felipe.
anang akò dé félipé
Anan à l’oustau de Felipe.
anang a loustaw dé félipé
Nous allons chez Philippe.
En Provence, la maison familiale est un espace intime. On n’y est pas facilement
admis. On voit les gens plutôt à l’extérieur et c’est là que l’homme méditerranéen joue
les seigneurs. Dans les villages et les quartiers villageois, on voit encore les habitants
sortir une chaise sur le trottoir devant chez eux pour y faire la causette avec les voisins,
éplucher les légumes ou lire le journal. Mais ça a presque disparu dans les grandes villes,
où les voitures et la télévision ont vidé les trottoirs de ces relations à l’ancienne.
LA VILLE ET LE VILLAGE
La Provence est un pays de vilo vilò de villes. Même les vilage viladzé ou
vilàgi viladji villages sont ici de vraies petites villes, conçus depuis des
siècles avec une structure urbaine. Il n’y a guère que dans lou vilajoun lou
viladjoung (le hameau, le tout petit village), dépendant d’un village ou d’une
ville, que l’on a vraiment un habitat rural. Les plaines de la Provence
rhodanienne connaissent un habitat dispersé où les mas isolés et villajoun
sont fréquents. Dans tout le reste de la région, les villages sont en habitat
groupé sur les hauteurs ou au bord des rivières et de la mer. Sauf que… la
multiplication des villas dans ce pays si attractif, où les résidences
secondaires sont très nombreuses, donne souvent une image de tissu semi-
urbain continu, surtout sur la côte entre Toulon et Nice où seuls les baus
baw (les falaises) et les calanques empêchent la construction (et la loi
littorale depuis peu !).
Une caractéristique des monuments provençaux est l’ouratòri loulatòli
l’oratoire, petite construction romane contenant en général une statuette
religieuse et marquant les étapes d’un chemin ou un croisement.
Ainsi, dans tout village on trouvera la glèiso la glèïzò (l’église), des plaço
de plassò (des places) et de placeto dé plassètò des petites places, des font
fòng (fontaines), et souvent même lou cous lou kous (le cours, boulevard
central servant aussi de promenade). Certains ont même des bàrri bari (des
remparts).
Pour dire l’église on dit très souvent l’egliso léglizò, mot emprunté au français.
Dans le Var, le mot local est glèio glèyò. Attention, le mot font (en maritime et gavot la
fouont, la fouant la fwòng la fwang) qui désigne la fontaine veut aussi dire la source.
Si le trottoir se dit parfois lou trepadou lou trépadou, le mot le plus usuel est lou
troutouar lou troutwar, emprunté au français.
la veituro
la véïtulò
lou balouard
lou balwar
le boulevard
la carriero
la karyèlò
la rue
la routo
la Routò
la route
la platano
la platanò
le platane
féminin en provençal
la coumuno
la koumunò
la mairie
DE L’ÉVÊCHÉ À LA PLAINE…
À Marseille, certains lieux très connus ont des noms usuels différents des noms officiels
, d’abord en provençal et en conséquence même en français. Ainsi l’hôtel de police
s’appelle l’evescat lévéska, c’est-à-dire l’évêché (son nom usuel en français), parce que
c’est l’ancien bâtiment de l’évêché de Marseille. Quant à l’évêque, il faut le chercher à la
Major (du provençal la majou la madjou ) nom (original !) de la cathédrale. De l’autre
côté du Vieux-Port, la célèbre statue qui domine la ville, Notre-Dame-de-la-Garde, porte
le nom usuel de Bonne Mère, traduction du provençal local boueno mèro bwénò mèlò,
nom usuel de la Vierge Marie. Pour finir, cas célèbre avec lequel les Marseillais jouent
beaucoup : la place Jean-Jaurès (dont la plupart des gens ignorent le nom officiel) et
tout son quartier sont appelés la Plaine, calque du provençal la plano la planò, qui
signifie le plateau (la vaste place constitue le sommet plat d’une colline). Et en plus, ce
n’est pas une « plaine » au sens du français commun !
(Voir aussi chapitre 2)
LA CUISINE PROVENÇALE
La cuisine provençale est très célèbre. Ses recettes typiques, associant
ingrédients méditerranéens et herbes aromatiques, des vins réputés, des
confiseries, etc., portent souvent des noms en provençal, plus ou moins
francisés. La plupart des pâtes et certains plats ont emprunté ou conservé un
nom italien dans cette cuisine plus proche de l’italienne que de la française.
On a déjà écrit de nombreux livres sur ce sujet et… ce n’est pas le sujet de
celui-ci ! Quelques exemples de plats typiques et les recettes tout en
provençal de deux sauces et de leurs supports favoris vous ouvriront
l’appétit.
L’AIÒLI
Receto de l’aiòli réssètò de layòli (en provençal maritime)
Escrachas e trissas bèn sièis à vue veno d’aiet dins un mourtié.
Boutas mai un pessu de sau. Quouro avès uno pasto fino, ajustas
un rous d’uou que souarte pas de la fre dóu frigò. Vueidas plan-
plan entre un quart e un mié litre d’òli sènso cala de vira ‘mé lou
trissoun fìn qu’aurés uno pasto que tèngue soulide.
Sarvès acò ‘mé de liéume (garoto, tartiflo), de bacalau dessalado,
tout acò bouli à l’aigo-sau, e tambèn d’uou bouli. N’a que li mèton
de cauletflòri crus, d’autre de limaçoun, de pèis blanc, de biéu…
Prenguèsse mau, l’aiòli, entamenaslou em’uno cuiero d’òli de
pistacho de terro, qu’es mai fin e que pren miés. Em’oucò,
chùtou ! Va digués pas e, degun !
Recette de l’aïoli
Pilez et mêlez 6 à 10 gousses d’ail dans un mortier. Ajoutez une pincée de sel.
Lorsque vous obtenez une pâte fine, ajoutez 1 jaune d’œuf à température
ambiante. Versez lentement de 1/4 à 1/2 litre d’huile sans cesser de tourner
avec le pilon jusqu’à obtenir une pâte très ferme.
Servez avec des légumes (carottes, pommes de terre), de la morue dessalée,
cuits au court-bouillon, et des œufs durs. Certains y mettent du chou-fleur
cru, des escargots cuits au court-bouillon, d’autres des poissons blancs, ou
encore des gros bigorneaux ; si l’aïoli prend mal, commencez-le avec une
cuillerée d’huile d’arachide qui est plus fine et prend mieux. Mais, chut ! Ne
le dites à personne !
LE PISTOU
Receto dóu pìstou réssètò dów pistou (en provençal rhodanien)
Dins un mourtié trissas prin tres veno d’aiet, vinto-dos fueio de
balicot, dos poumo d’amour pelucado (trempas-li dedins d’aigo
boulissènto pèr ajuda) e cènt gramo de parmejan. Pastrouias en ié
boutant d’aise de rajado d’òli.
Servès acò sus de pasto o dins la soupo de liéume d’estiéu que lié
dison just-e-just « soupo au pìstou ».
Bada : sigués pas tant Parisen de coumta li fueio de balicot, he ?
N’en fau un bon proun, pas mai !
Recette du pistou
Dans un mortier, pilez finement 3 gousses d’ail, 22 feuilles de basilic, 2
tomates épluchées (trempez-les dans de l’eau bouillante pour faciliter
l’épluchage) et 100 g de parmesan. Malaxez en incorporant des filets d’huile
d’olive.
Servez sur des pâtes ou dans la soupe de légumes d’été qu’on appelle
justement « soupe au pistou ».
N.B. : Ne comptez pas les feuilles de basilic, hein ? C’est un piège à
Parisiens. Il en faut beaucoup, c’est tout !
CHAPITRE 6
LA CULTURE PROVENÇALE
Dans ce chapitre :
La période de Noël est caractérisée aussi par l’emploi très répandu d’une formule
rituelle pour quitter les gens en leur présentant un vœu. On dit à l’an que vèn… a
l’ang ké vèng, à l’année qui vient…, ce à quoi les initiés répondent e se sian pas mai,
que siguen pas mens é sé siamm pa maï ké siguémm pa méng, et si nous ne sommes
pas plus, ne soyons pas moins. Et quand un(e) initié(e) répond, c’est un signe que peut-
être il sait en dire davantage en provençal et que l’on peut essayer de poursuivre dans
cette langue.
Parmi les autres fêtes de Provence, il faut citer carnava karnava (carnaval)
où l’on brule l’effigie de Caramentran kalaménntrang ; la Sant Aloi
sanntaloï, qui donne lieu à des courses et défilés variés de chevaux et de
carreto karètò (charrettes) selon les régions de Provence ; la Sant Piarre
sammpyaré (Saint-Pierre), fête des pêcheurs partout sur la côte ; tout autour
de la Camargue, li courso de biòu li koursò dé byòw, les courses de
taureaux ; et les très nombreuses fêtes propres aux villages et aux quartiers,
que l’on appelle en provençal voto vòtò, surtout lorsqu’elles ont une origine
religieuse. C’est dans ces fêtes que l’on voit se manifester plus visiblement
des traditions provençales et des usages du provençal.
QUELQUES JEUX…
Les sports provençaux les plus populaires sont les courses de taureaux dont
on vient de parler (entre Nîmes, Avignon et la Camargue) ainsi que les joutes
nautiques appelées la targo la targò, sur la côte et sur le Rhône. De nos
jours, le plus populaire de tous est bien sûr… lou baloun lou baloung, c’est-
à-dire le football, autour de l’équipe phare pour toute la Provence qu’est
l’Olympique de Marseille.
Dans les villages et les quartiers, on joue beaucoup :
au loto (lou lotò), avec pour chaque nombre une devinette en provençal ;
aux cartes (li carto) et surtout à la beloto (qui se passe de traduction !) ;
aux boules (li bocho ou lei bocho li bòtsò, léï bòtchò).
5. Coupo santo
koupò sanntò
Coupe sainte
6. E versanto
é vérsanntò
Et débordante
8. Vuejo abord
veudzabòr
Verse à flots
9. Lis estrambord
liz éstrammbòr
Les enthousiasmes
Texte écrit par Frédéric Mistral pour remercier des poètes catalans qui auraient
offert une coupe à Mistral et ses amis qui les ont hébergés quand les Catalans luttaient
pour leur langue en Espagne.
LA LITTÉRATURE PROVENÇALE
Avec la littérature, on entre dans un domaine qui mériterait un ouvrage
entier (au moins !). C’est du reste le domaine d’expression provençale le plus
connu en Provence et ailleurs, étudié dans des universités du monde entier.
D’autant que certains auteurs provençaux, très célèbres pour leurs œuvres en
français, ont aussi écrit en provençal, comme Henri Bosco, Louis Brauquier,
René Char, Alphonse Daudet, Germain Nouveau… Qu’il vous suffise pour
l’instant de citer les titres des œuvres et les auteurs les plus connus pour
engager des conversations passionnantes sur le sujet :
Mirèio de Frederi Mistral
milèyò dé frédéli mistra
Mireille de Frédéric Mistral
La Bèstio dóu Vacarés de Jóusè d’Arbaud
la bèstyò dów vakaléss dé dzówzé darbau
La Bête du Vacarès de Jospeh d’Arbaud
Lei Cansoun prouvençalo de Vitou Gelu
léï kannsoung prouvénnsalò dé vitou djélu
Les Chansons provençales de Victor Gelu
Li Quatre Sèt de Carle Galtier
li katré sè dé karlé galtyé
Les Quatre Sept de Charles Galtier
Li pouèmo de Mas-Felipe Delavouet
li pouèmò dé mass félipé délavoué
Les poèmes de Max-Philippe Delavouët
CHAPITRE 7
UN PEU DE GRAMMAIRE ET
D’ORTHOGRAPHE
Dans ce chapitre :
SOYONS NÉGATIFS
En provençal, mettre un verbe à la forme négative ressemble au français, en
plus simple. Il suffit d’ajouter la négation pas pa après le verbe : es
partido/es pas partido elle est partie/elle n’est pas partie. En fait c’est
comme en français parlé, sans le « ne » qu’on nous impose à l’école. Le
provençal, c’est une langue de liberté.
Il y a juste quelques complications. Par exemple, on met pa avant les
participes présents (et non après) : en pas lou sachènt, n’a pas tengu
comte emm pa lou satchèng na pa téng-gu kònnté, en ne le sachant pas, il
n’en a pas tenu compte.
3 Tres trèss
4 Quatre katré
5 Cinq sing
6 Sièis syèï
7 Sèt sè
8 Vue, vuech (devant une voyelle) vœ, vœtch (vué, vuéch en maritime)
10 Dès dèss
17 Dès-e-sèt dèzéssè
18 Dès-e-vue dèzévœ (dèzévué en maritime)
19 Dès-e-nòu dèzénòw
20 Vint ving
30 Trento trénntò
31 Trento-un trénntung
40 Quaranto kalanntò
50 Cinquanto sing-kanntò
60 Sieissanto syéïssanntò
70 Setanto sétanntò
22 Quatre-vint katréving
90 Nounanto nounanntò
Attention !
dous va avec un mot masculin, dos avec un mot féminin (douas en maritime) ;
les consonnes finales de cinq, sièis, sèt et dès se prononcent uniquement devant une
voyelle (z pour le s final de sièis et dès) ;
le mot milioun a un équivalent milien milyéng en provençal maritime.
RESPECTONS LA NEUTRALITÉ
Il existe en provençal maritime et gavot un pronom complément neutre, ni
masculin ni féminin. Il s’agit de va (va) en maritime et de òu (òw) en gavot.
On s’en sert pour renvoyer à une chose abstraite à la place de lou, la, lei. Par
exemple, on dira : mi va fara saupre mi va fala sawpré ou en gavot m’òu
fara saupre mòw fala sapé pour « il me LE fera savoir ». Attention,
lorsqu’il se trouve après le verbe, le va devient vo : va counouisses ?
digo-vo puei ! « tu le connais, dis-le alors ! ».
TABLEAUX DE CONJUGAISON
éu éw lui
LE PRÉSENT DE L’INDICATIF
Siéu je suis
Siés tu es
Es il/elle est
Ai j’ai
As tu as
A il/elle a
An ils/elles ont
Parles tu parles
Fenisse je finis
Fenisses tu finis
Coumprene je comprends
Coumprenes tu comprends
LE PASSÉ COMPOSÉ
Le passé composé se forme avec un auxiliaire, soit èstre soit agué (être ou
avoir) et le participe passé du verbe. C’est souvent le même auxiliaire qu’en
français mais ne soyez pas étonné par des exceptions !
L’IMPARFAIT
èstre : ère, ères, èro, erian, erias, èron èloung
LE FUTUR
On peut exprimer le futur de trois façons. La plus simple, c’est le présent
accompagné d’une précision de temps, comme en óutobre que vèn ai un
nouvèu mestié (en octobre prochain j’ai un nouveau métier). On peut
aussi employer le verbe ana (aller) au présent avec un verbe à l’infinitif,
comme vau neteja la veituro (je vais nettoyer la voiture). Il vous suffit de
savoir conjuguer ana : vau, vas, vai, anan, anas, van. Facile, hein ?
Reste le futur proprement dit dont voici les principales conjugaisons :
èstre : sarai, saras, sara, saren, sarés, saran.
agué : aurai, auras, auran, auren, aurés, auran.
1er groupe, parla : parlarai, parlaras, parlara, parlaren, parlarés,
parlaran.
2e groupe, feni : fenirai, feniras, fenira, feniren, fenirés, feniran.
3e groupe, coumprene : coumprendrai, coumprendras,
coumprendra, coumprendren, coumprendrés, coumprendran.
LE SUBJONCTIF
En provençal le subjonctif est très vivant, non seulement au présent, mais
aussi au passé. L’accord d’un subjonctif passé dans une phrase au passé est
très généralement pratiqué, de façon spontanée, au contraire du français où
le subjonctif passé est devenu archaïque (et snob !) et où même le subjonctif
présent a des usages de plus en plus réduits.
Mais bon, l’emploi du subjonctif, ce sera pour plus tard… Pour l’instant, vous
n’en êtes probablement pas à faire des phrases si élaborées ?
LES ÉCRITURES
En gros, on rencontre trois façons d’écrire le provençal. La plus spontanée
consiste à l’écrire de façon plus ou moins phonétique en adaptant
l’orthographe du français. C’est ce que font tous ceux et celles, très
majoritaires, qui n’ont jamais appris à écrire en provençal. On trouve cela
fréquemment sur les noms des maisons, des bateaux, des commerces. La
façon la plus répandue est celle qui est utilisée dans cet ouvrage. On l’appelle
orthographe provençale moderne ou orthographe mistralienne (parce que
c’est l’écrivain F. Mistral qui l’a rendue célèbre). C’est celle qu’utilisent la
grande majorité des enseignants, des écrivains, des écrits institutionnels, des
dictionnaires, grammaires, manuels… Elle est plutôt phonétique, facile à
utiliser, avec quelques petites complications ici ou là. Enfin, il y a une
orthographe concurrente à l’orthographe moderne qu’on appelle occitane ou
classique. Elle n’est que très peu utilisée en Provence, uniquement dans le
milieu militant occitaniste (voir chapitre 1). C’est une adaptation des
graphies moyenâgeuses qui vise à unifier l’ensemble des langues dites d’oc
pour en faire un occitan. Elle est difficile à utiliser sans un apprentissage
détaillé et il est difficile pour la plupart des gens de reconnaitre du provençal
une fois habillé à l’occitane (on dirait plutôt du catalan ou du portugais).
LES CONSONNES
LES VOYELLES
Les seules différences avec le français sont : l’absence totale du y, les valeurs
phonétiques de e, u et de ue. Il faut quand même se rappeler que le a et le o
sont toujours prononcés très ouverts et que le u peut toujours être prononcé
eu.
Attention, en provençal, quand deux voyelles sont collées à l’écrit, cela
signifie qu’on les prononce toutes les deux d’une seule émission de voix (se
sont des diphtongues) : ai, ei, oi, òu, oui, oua correspondent à aï, éï, òï,
òw, ouï, wa comme si c’était écrit en français aille, eille, oille, owe, ouille, oi.
Les seules exceptions sont ou pour écrire ou comme en français et le ue en
rhodanien (voir juste après).
Le e ou é correspond toujours à la prononciation é, le è à la prononciation è.
Mais que vous prononciez le e comme é fermé ou è ouvert n’a pas grande
importance, du moment que vous ne le prononcez pas eu comme en français.
Le u correspond au son u ou eu (indistinctement), sauf quand il suit une
voyelle, auquel cas il correspond à ou et forme une diphtongue comme au,
èu, òu aw, èw, òw.
Le groupe ue correspond à ué, sauf en rhodanien où il correspond à eu (ainsi
cuecho, qui signifie cuite, transcrit le kuétchò du maritime et le keutsò du
rhodanien).
L’ACCENT TONIQUE
En provençal, l’accent tonique est important. Il donne la musique de la
langue, le rythme, contribue à l’identification des mots. On entend bien ses
effets dans la façon dont les Provençaux prononcent le français : cet accent
« chantant » avec des e maintenus partout… En provençal, il permet souvent
de distinguer des mots qui seraient identiques sans lui et qui ont des sens
différents, comme fenisses fénissèss, tu finis différent de fenissès
fénissèss, vous finissez ou resse réssé, je scie différent de resset réssé, la
sciure.
L’indication de la place de l’accent tonique est pourtant, hélas, un peu
compliquée…
Si le mot se termine par e ou o qui ne porte pas d’accent écrit, on accentue l’avant-
dernière syllabe.
Si le mot contient une avant-dernière syllabe dont la voyelle porte un accent grave
écrit, on accentue cette voyelle dans la prononciation.
Si le mot se termine par a, i, u, ou, é, è, ò ou par toute consonne prononcée ou non,
on accentue la dernière syllabe.
Il y a deux exceptions importantes :
LISTE ALPHABÉTIQUE
Quand le genre n’est pas le même que celui du mot français, il est indiqué par [m]
ou [f]. Quand il y a une différence entre le provençal rhodanien et le provençal
maritime-intérieur, la forme en maritime est donnée en deuxième position précédée de
l’indication [M]. Pour éviter de surcharger ce lexique, la variation n’est que suggérée de
façon réduite (voir dans le reste du livre pour plus d’information). Certaines formes
typiquement alpines sont quand même données avec l’indication [G] pour « gavot ».
Quand il y a plusieurs équivalents possibles de manière générale, ils sont donnés un
après l’autre sans indication de variété locale. Les formes masculine et féminine sont
données avec barre oblique / si nécessaire.
A
à, à, de
abeille, abiho
abîmer, esquinta
abri, sousto [f]
accident, auvàri
acheter, croumpa
accueillir, aculi
Afrique, Africo
agneau, agnèu
agriculteur, païsan
aider, ajuda
ail, aiet
aimer, eima
aîné(e), einat/einado
Aix, z-Ais
Algérie, Argerìo
algue, augo
allée, lèio
aller, ana
allez !, zou !
alors que, mentre que
alors, alor
Alpes, Aup
amande, amelo, [M] amendo
amandier, amelié, [M] amendié
ami(e), ami/amigo, coulègo [m & f]
amour, amour
ancêtre, àvi
âne, ase, [M] ai
année, annado
anniversaire, anniversàri
annonce, anóunci [m]
août, avoust, aoust
appareil, besougno [f]
appeler, souna
apprendre, aprene, aprèndre
après, après
après-midi, après-dina [m], après-dinado [f]
arbre, aubre
argent, argènt, sòu
arménien(ne), armenian/armeniano
armoire, armàri [m]
arracher, derraba
arrêter, arresta
arriver, arriva
asseoir, asseta
assiette, sieto
atelier, ataié
attendre, espera
attrapper, aganta
au revoir, au revèire
aube, aubo
aubergine, merinjano
aujourd’hui, vuei, [M] encuei
aussi, tambèn
automne, autouno [f]
autoroute, autorouto
avancer, avança
avec, emé
averse, raisso
Avignon, Avignoun
avoir, avé, agué
avril, abriéu
B
bagarre, batèsto, garrouio
bal, balèti
balader (se), barrula
balai, escoubo [f]
balance, balanço
balançoire, balançaire [m]
balayer, escouba
ballon, baloun
bandit, brigand
banquier, banquié
bar-tabac, bar-taba
bateau, batèu
batteuse, batuso
bavarder, barjaca
bazar, pàti
beau temps, bèu tèms
beau/belle, bèu/bello
beaucoup, forço, [M & G] fouaço
bébé, nistoun
bêche, luchet, lichet
belle-mère, bello-maire, bello-mèro
belote, beloto
benjamin, cago-nis, caganis
bernique, arrapèdo
bête, bèsti
beurre, burre, [M] buèrri
bibliothèque, biblioutèco
bien, bèn
bienveillance, benvoulènci
bienvenue, benvengudo
bijou, beloio
bille, biho
bise, poutoun [m]
blanc/blanche, blanc/blanco, [G] blanc/blancho
blé de Sainte-Barbe, blad de Santo Barbo
blé, blad
bleu(e), blu/bluio
boire, béure, buoure
bois (forêt, matière), bos, [M & G] bouas
bol, bolo [f]
bon(ne), bon/bono, [M] bouan/bouano
bonbon, sucrèu, bono [f]
bonjour, bonjour, [M] bounjou
botte, boto
bouche, bouco
boucher, bouchié
boucher, tapa
bouger, boulega, [G] bouleja
bouillabaisse, boui-abaisso [m]
boulanger, boulengié, fournié
boulangerie, boulenjarié
boule (à jouer), bocho
boule, boulo
bouteille, boutiho
bras, bras
brebis, fedo
brise, auro
brume, nèblo
bureau, burèu
but (pétanque), bouchoun
C
ça alors !, aquelo tubo !
ça, acò
cadeau, presènt
cahier, caié
calamar, tóuteno [f]
calcul, carcu, chifro [f]
camarade, coulègo [m & f]
Camargue, Camargo
camionnette, camiouneto
canapé, radassié
canicule, calourasso, [G] chalourasso
carnaval, carnava
cartable, saco
carte, carto
casser, roumpre, peta
casserole, oulo
ceinture, centuro, taiolo
celui/celle, aquéu/aquelo
cent, cènt
cerise, ceriso, [M] cerieio, [M] grafien [m]
chacun(e), cadun/caduno
chaise, cadiero, [G] chèiro
chambre, chambro
chamois, chamous
champ, champ
chanter, canta, [G] chanta
chapeau, capèu, [G] chapèu
charcutier, car-saladié, charcutié
charnu(e), poupu/poupudo
charrette, carreto, [G] charreto
charrue, charruio, araire [m]
chasse-neige, coucho-nèu
château, castèu, [G] chastèu
chaud(e), caud/caudo, [G] chaut/chaudo
chauffeur, menaire
chaussette, dabasset [m]
chaussure, soulié [m]
chemin, camin, [G] chamin
chemise, camiso, [M] camié, [G] chamiso
chercher (prendre), querre
chercher (rechercher), cerca, [G] cercha
cheval, chivau, [M oriental] cavau, [G] chavau
cheveu, péu, chivu
cheville, caviho, [G] chaviho
chèvre, cabro, [G] chabro
chez, acò de, à l’oustau de
chien, chin, [M oriental] can
chiffre, chifro [f]
chocolat, choucoulat, chicoulat
choisir, chausi
chose, causo, [M] cauvo, [G] chauvo
ciel, cèu, ciel, [M] ciele
cigale, cigalo
cinéma, cinema
cinq, cinq
cinquante, cinquanto
clé, clau
client(e), cliènt/cliènto
clientèle, pratico
clignoter, parpeleja
clôture (barrière), cledo
coiffer, couifa
coiffeuse, couifuso
coin, caire
col, còu
collant, bas, debas
colline, colo, [M] coualo
combien, quant
commencer, coumença
comment, coume, [M & G] coumo
Comores, Coumoro
Comtat Venaissin, Coumtat de Venisso [f]
conduire, mena
congre, fielas
connaitre, counèisse, [M] counouisse [G] counouishe
construire, basti
coq, gau, [G] jau
coquillages, couquihage, cruvelu [pluriel]
corde, cordo, [M & G] couardo
Corse, Corso
costume, coustume, àbi
côte (maritime), coustiero
côte (montée), costo, [M & G] couasto
côté, coustat, caire
coton, coutoun
cou, còu, [M & G] couale
coucher, coucha
coude, couide
couleur, coulour
coup, cop, [M] còup
cour, court
courant, courrènt
courgette, cougourdeto
courir, courre
course, courso
cousin(e), cousin/cousino
couteau, coutèu
coûter, cousta
couvrir, curbi, tapa
crabe (petit), favouio [f]
crâner, faire d’esbroufe
cravate, gravato
crayon, creioun
crépuscule, calabrun
crever, creba
crier, crida
crique, calanco
croc-en-jambe, gambeto [f]
crochet, crouchet, [M] gànchou
croire, crèire
cube, cube
cuillère, cuièro, cuié [m]
cuisine, cousino, [M] couïno, cousino
cuisinier, cousinié, [M] couïnié, cousinié
cuisinière, cousiniero, [M] couïniero, cousiniero
cuisse, cueisso
culture en terrasses, restanco
cyprès, ciprés
D
d’abord, proumié
dans, dins
danseuse, dansarello
daube, adobo
Dauphiné, Dóufinat
de, de, à
dé, dat
débrouiller (se), s’adouba
décembre, desèmbre
déjeuner (midi), dina
demander, demanda
dent, dènt, [pour les enfants] ratouno
depuis, despièi, [M] despuei
déranger, destourba
dernier(ère), darrié/darriero, darnié/darniero
dérober, rauba
derrière, darrié, darnié
descendre, davala, descèndre
dès que, tre que
dessin, dessin
dessous, dessouto
dessus, dessus
deux, dous [m]/dos [f], [M & G] douas [f]
devant, davans
devinette, devinaio
devoir, déure, duoure
diable, diable
dictionnaire, diciounàri
Dieu, Diéu
dimanche, dimenche, [M] diminche
dîner (soir), soupa
dînette, tarraieto
dispute, garrouio
dix, dès
dix-huit, dès-e-vue
dix-neuf, dès-e-nòu
dix-sept, dès-e-sèt
doigt, det
donc, dounc, puei
donner, douna, baia
dormir, dourmi, [M] durmi
dos, esquino [f]
douze, douge
dragon, drac, dragoun
droit(e), dre/drecho
Drôme, Droumo
Durance, Durènço
E
eau, aigo
éclair, lamp, uiau
école, escolo
écouter, escouta
écrire, escriéure
écriture, escrituro
écrivain, escrivan
écurie, estable [m]
église, glèiso, egliso, [M] glèio, egliso
élève, escoulan/escoulano
emmener, mena
employé(e), emplega/emplegado
encore, encaro, mai
enfants, pichot, [M] pichoun, [M jeunes enfants] móussi
enlever, leva
enseignant(e), ensignaire/ensignarello
entendre, entèndre, ausi, [M] entèndre, auvi
entre, entre
entrée, intrado, [G] intraio
entrer, intra
épaule, espalo
épée, espaso
épicier, espicié
équipé, atrenca
erreur (grosse), àrri [m]
escalier, escalié [pluriel]
escargot, cacalaus, [M] cacalauvo [f], limaçoun
espace, espàci
Espagne, Espagno
essayer, assaja, [G] assaia
étalage, banc, taulié
été, estiéu
étoile, estello
étranger(ère) (inconnu), estrangié/estrangiero
étranger(ère) (autre pays), fourestié/fourestiero
être, èstre
étude, estùdi [m]
Europe, Éuropo, Uropo
évier, lavabo, pielo [f], pilo [f]
extraterrestre, estra-terrèstre
F
façon, biais [m]
faire partir, coucha
falaise, baus
farandole, farandoulo
fée, fado
femme, femo, fumo, [M] fremo, frumo
fenêtre, fenèstro
ferme (agricole), bastido, mas [m], [G] bastié
fermeture, barraduro
fermier(ère), bastidan/bastdano, meinagié/ meinagiero
fesse, gauto dóu quiéou
fête des Mères, fèsto di Maire, [M] … dei Maire
fête nationale, fèsto naciounalo
fête religieuse, voto
feu, fiò, [M] fue
feux de Saint-Jean, fiò de Sant Jan, [M] fue de…
février, febrié
fiancé(e), nòvi [m & f]
ficher, garça
fichu (foulard), fichu
fifre, galoubet
figue, figo
filet, arret
fille, fiho
filleul(e), fihòu/fiholo
fils, fiéu, enfant
finir, feni, fini
fleur, flour
foin, fen
fois, cop, [M] còup
fonctionnaire, founciounàri
fontaine, font, [M] fouont, fouant
football, foutobalo, baloun
Forcalquier, Fourcauquié
forêt, bos, [M & G] bouas
fort(e), fort/forto, [M & G] fouart/fouarto
fourchette, fourqueto, [G] fourcheto
frais, frès
français(e), francés, franceso
France, Franço
frère, fraire, frèro
froid(e), fre/frejo
fromage, froumage, froumàgi
fruits, frucho [f singulier]
fumer, tuba, fuma
G
gagner, gagna
galet, code, [M] còdou
garçon, drole, pichot, [M] pichoun
gare, garo
gâteau, pastissarié [f]
gel, gèu
gendarmes, gendarmo
gendre, bèu-fiéu
gêne, crento
généreux(euse), generous/generouso, [M] generous/generoua
génois(e), ginouvés/ginouvéso
genou, ginoui, ginous
gens, gènt
gentil(ille), brave/bravo
géographie, geougrafìo
gilet, courset
goudronnée, enquitranado, [G] enquitranaio
goûter (un aliment), tasta
goûter (n. m.), gousta
gouvernement, gouvèr
grammaire, gramatico
grand-mère, grand-maire, grand [f]
grand-père, grand-paire, grand [m]
grand(e), grand/grando
grange, feniero
gratin, tian
grec/grecque, gregau/gregalo, [M] grègou/ grego
gros/grosse, gros/grosso
gym, ginastico
H
habiller, abiha, vesti
haie, baragno
haricot, faiòu
haut (en), damount, adaut
haut(e), aut/auto, naut/nauto
Haute-Provence, Gavoutino, Nauto-Prouvènço
hélas, pecaire, pechaire
herbe, erbo
héros, erò
heureux(euse), urous/urouso, [M] urous/uroua
histoire, istòri
hiver, ivèr, [G] uvèrt
homme, ome
hôpital, espitau
horloge, reloge, relògi [m]
huile, òli [m]
huit, vue
hurler, brama
I
ici, eici
il était une fois…, un cop èro…, [M] un còup èro…
il faut, fau, [G] chau
île, ilo, isclo
imbécile, bedigas/bedigasso, couioun/couiouno
immeuble, oustalas
index (doigt), det dóu signe
industrie, endustrìo
informaticien(ne), enfourmatician/ enfourmaticiano
ingénieur(e), engeniour/engeniouro
inviter, counvida, envita
Italie, Itàli, Italìo
italien(ne), italian/italiano
J
jamais, jamai
jambe, cambo, [M] gambo, [G] jambo
jambon, cambajoun
janvier, janvié
jardin, jardin
jaune, jaune/jauno
jean, bloujin
jeudi, dijòu
jeu électronique, jo eleitrouni, [M] jue eleitrounique
jeune, jouine/jouino, [M] jouèine/jouèino, [G] jouve/jouvo
je vous en prie, vous n’en prègui
joli(e), poulit/poulido
joue, gauto
jouer, jouga, [M] juga
jour, jour, [M] jour, jou, [G] jour, jout
jour de l’an, jour de an
journaliste, journalisto
joutes nautiques, targo [f singulier]
juillet, juliet, juiet
juin, jun
jupe, jupo
jusque, jusco, finco, [M] jusco, fìncou
L
là, aqui
laine, lano
lait, la
langue, lengo
Languedoc, Lengadò
lapin, lapin
lavande, lavando
laver, lava
lécher, lipa
lecture, leituro
légume, liéume
lentement, plan
lettre, letro
lever, leva, dreissa
liberté, liberta
libraire, libraire
lire, legi
lit, lié
littérature, literaturo
livre, libre
long/longue, long/longo
longtemps, longtèms, loungtèms, de-longo
lorsque, quouro
loup, loup
Lubéron, Leberoun
lundi, dilun
lune, luno
lyonnaise, liouneso
M
maçon, maçoun, muraire
madame, mesdames, madamo, midamo
mademoiselle, madamisello, damisello
magasin, boutigo
maghrébin(e), maugrabin/maugrabino
mai, mai
main, man
maintenant, aro
mairie, municipe [m], coumuno
mais, mai
maître/maîtresse, mèstre/mestrèsso
maître nageur, mèstre-nedaire
maîtrise, gàubi [m]
mal, mau
malade, malaut/malauto
malin/maligne, finocho/finocho, [M] finòchou/- ocho
maman, ma, mama
manège, viro-viro
manger, manja
manteau, mantèu
marchande, marchando
marché, marcat
marcher, camina, marcha, [G] chamina
mardi, dimars
Mardi gras, Caramentran
mariage, maridage, maridàgi
marier, marida
Maroc, Marò
marraine, meirino
mars, mars
Marseille, Marsiho
maths, matematico
matin, matin
Maure et Esterel, Mauro e Esterèu
mauvais(e), marrit/marrido
méchant(e), michant/michanto, marrias/ marriasso
médecin, dóutour/dóutouresso
Méditerranée, Mieterrano, Mediterragno
meilleur(e), meiour/meiouro, [M] meiou/ meiouro
melon, meloun
mémé, mamie, mamet, mameto
même, meme/memo, mume/mumo
mer, mar
merci, gramaci, merci
mercredi, dimècre
mère, maire, mèro
mettre, metre, bouta
meuble, moble
midi, miejour, [M] miejou
miel, mèu
mieux, miés
milieu, mitan
militaire, sourdat
mille, milo
milliard, miliard
million, milien
mini-jupe, gounello
miraud, calu
mistral, mistrau
moins, mens
mois, mes
moitié, mita
mollasson, santoun, sànti-bèlli
mollet (jambe), boutèu
mollo !, d’aise !
monde, mounde
monnaie, mounedo
monsieur, messieurs, moussu, missiés
monstre, moustre, [M] mouastre
montagnard, gavot, [M & G] gavouot, gavouat
montagne, mountagno
montée, mountado, [G] mountaio
monter, mounta
montre, mostro, [M & G] mouastro
moquer (se), se trufa, [M] si trufa
morceau, moussèu
mot, mot
moulin à huile, moulin d’òli
mourir, mouri
mouton, moutoun
mur, muraio [f], paret
mûr(e), madur/maduro, [G] maür/maüro
murette, mureto
musique, musico
N
narine, narro
neige (la), nèu
neige (il), nèvo
neuf (chiffre), nòu
neuf/neuve, nòu/novo
nez, nas
nid, nis, [M] niéu
Noël, Nouvè, Calèndo, [G] Chalèndos
nœud, ganso
noir(e), negre/negro
non (familier), noun
non (poli), nàni
novembre, nouvèmbre
nuage, nivo, [M] niéu
nuit, niue, [M] nue
O
octobre, óutobre
œil, iue, [M & G] uei
offrir, pourgi
oignon, cèbo [f]
oiseau, aucèu
olive, óulivo
olivier, óulivié
oncle, ouncle
ongle, ounglo [f]
onze, vounge
or (nom), or
orage, chavano [f]
orange (couleur), aranja/aranjado
orange (fruit), arange [m], aràngi [m]
oratoire, ouratòri
ordinateur, ourdinatour
oreille, auriho
orteil, artèu
où, ounte, mounte
oublier, óublida, [G] eissublia
oui, o, vo, vouei
oursin, óussin
ouvrier, oubrié
ouvrir, durbi, [M] dorbi, dourbi
P
pain, pan
paire, parèu [m]
panier, coufin
pantalon, braio [f]
pantoufle, pantouflo
papa, pa, papa
papillon, parpaioun
Pâques, Pasco
par, pèr
parasol, paro-soulèu
parc, pargue
parce que, perqué
parfois, de-cop, [M] de còup
parler, parla
parrain, peirin
pas beaucoup, gaire
pas vrai ?, parai ?
passer, passa
pastis, anis, pataclet
pâtes, pasto
patron(ne), patroun/patrouno
pauvre, paure/pauro
payer, paga, [G] paia
pays niçois, Coumtat de Niço [f]
paysage, païsage, païsàgi
paysan(ne), païsan/païsano
pêche (fruit), pessègue [m]
pêcheur, pescaire, pescadou
peindre, pinta
peinture, pinturo
pendant que, dóu tèms que, entanto que
penser, pensa
Pentecôte, Pandecousto
pépé, papy, papet
perdre, perdre
père, paire, pèro
pétanque, petanco
petit déjeuner, dejuna
petit(e), pichoto/pichoto, [M] pichoun/ pichouno
peu, pau, gaire
phare, faro
pharmacien(ne), farmacian/farmaciano
pied, pèd
pieds-paquets, pèd-paquet
Piémont, Piemount
piémontais(e), piémountés/piemounteso
pin, pin
pire, pège, [M] piègi
place, plaço
plage, plajo
plaire, agrada
plaisanterie, talounado, galejado
platane, platano [f]
plein(e), plen/pleno
pleurer, ploura, se ploura
pleut (il), plòu
pluie, plueio
plus, plus, mai
plutôt, pulèu
poêle, sartan
poignet, pougnet
pointe, pouncho
poire, pero
poison, pouisoun [f], [M] pouioun [f]
poisson de mer, pèis
poisson de rivière, peissoun
poissonnière, peissouniero
poissons (petits), peissaio [f singulier]
poitrine, pitre [m]
police, pouliço
policier(ière), poulicié/pouliciero
pomme, poumo
pomme de terre, trufo, tartiflo
pompiers, poumpié
pont, pont, [M & G] pouant
porc, porc, [M & G] pouarc
port, port
porte, porto, [M & G] pouarto
porter, pourta
possible, poussible/poussiblo
pouce, gros det, póuce
poule, galino, [G] jalino, poulo
poulpe, pourpre
poupée, titèi, titèio
pour, pèr
pourquoi, perqué
pourtant, pamens
pouvoir, poudé, pousqué
pré, prat
précipiter (se), se rounsa
premier mai, fèsto dóu travai
prendre, prene, prèndre
préparer, alesti, prepara
près, proche, pròchi
prince/princesse, prince/princesso
printemps, printèms, primo [f]
procession, roumavage, roumavàgi, roumiage
professeur(e), proufessour/proufessouro
promenade, proumenado, passejado, [G]
proumenaio
prononciation, prounounciacioun, [M]
prounounciacien
provençal(e), prouvençau/prouvençalo
Provence, Prouvènço
publicité, reclamo
puisque, bord que
puits, pous
pull, tricot
Q
quand, quand, quouro
quai, quèi
quarante, quaranto
quatorze, quatorge
quatre, quatre
quatre-vingt, vuetanto, vuechanto, quatre-vint
quatre-vingt-dix, nounanto
qui (interr.), quau, [M] qu
qui (relatif), que
quincaillerie, quincaio
quinze, quinge
quoi, que, dequé
R
raisin, rasin, [M] rin
rascasse, rascasso
rat, gàrri
râteau, rastèu
rater, caga
récolte, recordo, recloto, [M & G] recouardo
regarder, regarda, aluca
région, regioun
reine, rèino
remercier, remarcia, gramacia
remonte-pente, tiro-quiéou
rencontrer, rescountra
rendre, rèndre
renseignement, rensignamen
répondre, respondre, [M & G] respouandre
ressentir, senti
retraite aux flambeaux, pegoulado
retraité (e), retira/retirado
réussir, capita, ruissi
réveiller, reviha, dereviha
réveillon, veillée, vihado
rêver, pantaia
Rhône, Rose
riche, riche/richo
rire, rire
rivière, ribiero
robe, raubo
robinet, grifoun
roche, roco, [G] rocho
rocher, roucas
roi, rèi
romarin, roumanin, [M] roumaniéu
rond-point, rountoundo
rouge, rouge/roujo
route, routo
rue, carriero, [G] charriero
ruisseau, valat
S
sable, sablo [f]
Saint-Éloi, Sant Aloi
Sainte-Estelle, Santo-Estello
saison, sesoun
salade, ensalado
salle à manger, salo pèr manja
salle de bains, gabinet de teleto
salon, sejour
salut ! (au revoir), adessias !, chau !
salut ! (bonjour), adiéu !, hòu !
samedi, dissate
sans, sènso, sèns
santé (en bonne), gaiard/gaiardo
santon, santoun
sapin, sapin
sarcloir, eissadoun
sauce, sausso
savoir, saupre, [M] saché, sapé
science, sciènci
sec/sèche, se/seco
sécheresse, secaresso
secrétaire, secretàri
seize, sege
sel, sau
semaine, semano
sentier, draio [f]
sentir (odeur), nifla
sentir (ressentir), senti, sènte
sept, sèt
septembre, setèmbre
serpent, serp [f]
serrer, esquicha
serrer la main, touca la man
serveuse, servicialo
serviette, servieto, touaioun [m]
seule, soulet/souleto
short, braieto [f pluriel]
si (autant), tant
si (condition), se
s’il vous plait, se vous plais, siouplè
six, sièis
slip, caleçon, braieto [f pluriel]
sœur, sorre, [M & G] souarre
soir, vèspre, sero [m & f], souar
soixante, sieissanto
soixante-dix, setanto
sol, sòu
soleil, soulèu, [G] sourèu
sommet, cimo
sorcière, masco
sortir, sourti
soudain, tout d’un tèms
souffrir, soufri, pati
soupe, soupo
source, font, [M & G] fouant
sous, souto
souvenir, remembranço [f], souveni
souvent, souvènt
stade, estàdi
stylo, estilò
suivre, segui, suivre
supermarché, supermarcat
sur, sus, dessus
sûr(e), segur/seguro, [M] segu/seguro
T
table, taulo
tableau, tablèu
tablier, faudau, faudiéu
tante, tanto
tata, tatie, tata
tâter, chaspa
taureau, bœuf, biòu, [M] tau, buou
téléphone, telefone, telefono
télévision, telé
tenir, teni
tenture, tibanèu [m]
terre, terro
tête, tèsto
thym, ferigoulo, farigoulo [f]
tirée, estirado, [G] estiraio
toilettes, pàti [m]
toit, téulisso [f]
tomate, poumo d’amour
tomber, toumba, se toumba
tomber (bien), bèn encapa
tonneau, bouto [f]
tonnerre, tounèro
tordre, torse, [M] touarse
tôt, lèu
toucher, touca, [G] toucha
toujours, toujour, sèmpre, [M] toujou, de-longo, sèmpre
Toulon, Touloun
touriste, touristo [m & f]
tournée, virado, [G] viraio
tourner, tourna, vira
Toussaint, Toussant
tout à l’heure (futur), tout aro
tout à l’heure (passé), tout escas
tracteur, tratour
tradition, tradicioun, [M] tradicien
train, trin
tranche, lesco
transhumance, amountagnage, amountagnàgi [m]
transporter, carreja
travail, obro [f], travai
travailler, travaia
travers (à), au travès, de-tras
travers (de), de bescànti
treize desserts, trege dessert
treize, trege
trente, trento
trois, tres
tromper, engana, troumpa
trop, trop, [M] tròu
troupeau, troupèu, escabot, [M & G] escabouat
trouver, trouva
Tunisie, Tunisìo
U
un/une, un/uno
usine, fabrico
V
vache, vaco, [G] vacho
vague, erso
vallée, valado, valèio
vendanges, vendèmi, [M] vendùmi, endùmi
vendeur(euse), vendèire/venduso
vendre, vèndre
vendredi, divèndre
vent, vènt
vent d’est, levant
ventre, vèntre
verre, vèire
versant, pèndo [f]
versant nord ou sud, uba ou adré
vert(e), vèrd/vèrdo
veste, vèsto
vétérinaire, veterinàri
viande, viando
vie, vido
vieux/vieille, vièi/vièio
vigne, vigno
village, vilage, vilàgi
vin, vin
vingt, vint
vingt-deux, vinto-dous
vingt-et-un, vint-un
vingt-trois, vinto-tres
violet(ette), vióulet/vióuleto
virage, recouide, tournant
visage, caro [f], fàci [f]
vite, vite
vivre, viéure
vocabulaire, voucabulàri
voilà, vaqui
voir, vèire
voisin(e), vesin/vesino
voiture, veituro
volet, contro-vènt
voleur, voulur, raubaire
vouloir, voulé, vougué
voyou, maufatan
vrai/vraie, verai/veraio
ANNEXE
POUR ALLER PLUS LOIN DANS LA DÉCOUVERTE DE LA
LANGUE…
Revue culturelle Li Nouvello de Prouvènço, site avec cours du soir de provençal dans
toute la région :
http://www.nouvello.com
MÉTHODES D’INITIATION ET
D’APPRENTISSAGE POUR LE PROVENÇAL
Ariès A., Lou prouvençau à l’oustau, Escandihado Aubagnenco, 1971 [méthode audio-
visuelle de provençal].
Barthélemy-Vigouroux, A. et Martin, G., Manuel pratique de provençal contemporain
(avec CD), Édisud, 2000 (en graphie occitane).
Bigonnet, V., Calamel, S. et Blanchet, Ph., Le provençal de poche, Assimil, 2005.
Blanchet, Ph., Parlons provençal ! Langue et culture, L’Harmattan, 1999 (avec K7
audio).
Blanchet, Ph. et Gasquet-Cyrus, M., Le marseillais de poche, Assimil, 2004.
Blanchet, Ph., Parle-moi provençal / Parlo-me prouvençau, Méthode Assimil
complète avec livret complet de 260 p. et 2 CD, 2010.
Simian-Seisson, N., et collaborateurs, Camin de lengo, Lou Prouvençau à l’Escolo,
2003 (activités pédagogiques pour l’apprentissage du provençal pour les enfants, 3
niveaux).
Vouland P., Se parlaves prouvençau ?, Manuel de provençal 1er niveau, Nice, CRDP,
1986.
Vouland P., Parlèsses clar !, manuel de provençal 2e niveau, Nice, CRDP, 1988.