Résumé Livre Colette Chiland
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L’entretien clinique peut se situer dans le cadre d’une relation de soins. On parle souvent de
manière plus large d’une relation d’aide ou de conseil. Il est vrai que le psychologue clinicien
va s’efforcer d’aider son client, c’est ce que celui-ci lui demande mais ce n’est pas du
bénévolat.
Dans l’entretien clinique, il y a deux personnes qui « échangent des paroles » ; ces deux
personnes n’occupent pas des positions symétriques. L’un vient demander quelque chose à
l’autre qui n’a rien demandé, il vient en raison de la fonction que l’autre occupe, fonction qui
suppose une formation, laquelle permet de prendre une certaine position dans le dialogue. On
parlera plus volontiers de patient : celui qui souffre et qui demande à être soulagé de sa
souffrance.
Le client est venu trouver un professionnel et l’asymétrie du dialogue est liée à la fonction
même du clinicien. Parce qu’il s’agit d’un entretien avec un professionnel, le client ne parle
pas de la même manière qu’à un parent, un ami, …
Le terme qui prévaut pour caractériser l’entretien clinique est non – directif. Le clinicien doit
interférer le moins possible avec ce discours tel qu’il s’organise spontanément, il ne doit pas
entraver la parole mais la faciliter. Il n’a pas non plus de hâte de communiquer ce qu’il
comprend ; l’important est de le communiquer au moment profitable pour le client. Cette
attitude, Freud l’a caractérisée de neutralité bienveillante. Etre neutre, c’est d’abord ne pas
émettre de jugement, de critique. Le patient est aux aguets du moindre signe négatif ; il ne
peut pas imaginer qu’on le condamnera pas comme les parents de son enfance, les instances
morales extérieures, son Sur – moi.
Si nous étions cuirassés pour ne plus rien sentir, nous ne serions plus utiles au patient. C’est
avec ce que nous ressentons que nous pouvons le servir, à condition de ne pas être débordés.
Dans l’entretien clinique, il peut être utile ou nécessaire de poser une question. Mais il faut
veiller à ne pas coincer le patient par une question trop précise ou systématique. Le clinicien
laisse se déposer en lui des indices qu’il perçoit consciemment ou non : le vêtement, la
démarche, …
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Le patient vient rarement en connaissance de cause. Il vient par pression, par hasard, par
erreur ou sur sa demande mais dans une certaine méconnaissance de ce qu’il demande et de ce
qui peut lui être apporté. L’image du clinicien est défigurée par la peur et grandie par
l’espérance.
La prise en compte de ce qui se joue dans l’interrelation est essentielle. Il devient évident que
l’un des partenaires n’a pas affaire à la réalité de l’autre, mais à la représentation qu’il s’en
fait, d’où l’intérêt porté au transfert du sujet et au contre – transfert du clinicien. Ces
phénomènes vont rapidement apparaître comme des outils donnant des indications précieuses
sur le mode de fonctionnement psychique du sujet.
Il faut situer l’œuvre de Carl Rogers qui est centrée sur l’entretien clinique et propose une
théorie fondée sur le vécu concret de la relation. La démarche de Rogers comporte une double
polarité :
- importance de l’expérience immédiate et vécue dans ce qu’elle a de plus personnel
- exigence d’objectivité, d’universalité, de vérifiabilité
Lacan attire notre attention sur l’importance du signifiant ou de ce qu’on pourrait appeler la
corporéité du langage et du rôle dynamique qu’il joue au niveau de notre inconscient. Un
contenu psychique ne s’inscrit pas indifféremment dans n’importe quel mot. Il ne suffit pas au
clinicien comme au patient de dire, mais aussi de trouver ou retrouver les mots pour le dire.
Selon Watzlawick : « la théorie des groupes nous fournit un modèle pour penser le type de
changement se produisant à l’intérieur d’un système qui lui-même reste invariant. Au cours
d’un cauchemar, le rêveur a la possibilité de fuir, de se cacher, de se battre, mais pour sortir du
rêve, il faut qu’il passe à l’état de veille. C’est un changement de changement, ou méta
changement. Sur le plan de l’entretien clinique, à visée diagnostique ou thérapeutique, le
problème va être de repérer dans quel système un sujet, un couple, une famille fonctionne, et
de dépister ainsi les impasses dans lesquelles ils se fourvoient parce qu’ils poursuivent un but
dans un registre où il ne peut être atteint.
Les théories de l’Ecole de Palo Alto laisseraient supposer qu’il suffit de modifier l’équation
du problème en changeant les modes de comportement du sujet avec son entourage sans tenir
compte du fait que ses comportements sont depuis longtemps intériorisés, et cela
inconsciemment, et que même si ces comportements sont modifiés ou qu’on intervient sur
ceux de son entourage, il continuera le plus souvent à les vivre à travers le prisme déformant
de ses projections.
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CH III : ce qui est mobilisé chez les deux interlocuteurs dans l’entretien clinique
Pour que l’entretien soit le plus satisfaisant possible pour les deux partenaires, il est
souhaitable de comprendre les principaux processus psychiques qui les touchent l’un à l’autre.
I. L’identification :
II. La projection :
3. l’identification projective
Lorsque les pulsions agressives de l’enfant sont projetées sur la mère, il va ensuite s’identifier
à cet objet, qu’il perçoit alors comme un persécuteur. Lorsqu’il projette ses pulsions
destructrices, c’est pour s’en débarrasser, contrôler le mauvais objet ou le détruire. Il est
souhaitable que le psychologue perçoive le mécanisme psychologique de cette agressivité
défensive pour ne pas en être blessé et pressentir ainsi les tendances latentes qu’elle exprime.
Ce processus psychologique de projection de l’agressivité surmoïque sur l’autre est souvent
celui qui pourrait expliquer l’attitude hostile de certaines personnes envers la psychologie.
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III. Le contre – transfert :
1. la sérénité
Il est nécessaire que celui qui mène l’entretien puisse faire face à ces problèmes avec sérénité.
S’il ne peut les affronter avec calme, il ne pourra plus que les occulter, régresser ou en
projeter la totale responsabilité sur les autres.
- préoccupation excessive d’un bon et rapide résultat
- le respect rigide d’une technique
Il est souhaitable d’acquérir une sérénité intérieure qui permette de faire face aux problèmes
de l’autre sans anxiété, d’accepter le rythme d’évolution de l’interlocuteur et de ne pas avoir
besoin de se protéger par la rigidité d’une technique.
2. la bienveillance
La sympathie bienveillante favorise l’acceptation de l’agressivité du patient et permet d’en
percevoir la signification profonde. Parfois un individu est antipathique par ses actions
passées ou son contact présent ; cependant cette sympathie bienveillante est absolument
indispensable pour comprendre l’autre et se permettre d’ouvrir ses propres horizons.
3. la haine
Celui qui mène un entretien le mènera d’autant mieux qu’il aura lui-même bien compris et
analysé les sentiments de haine qu’il aura refoulés ; c’est ce qui permet de percevoir la
signification agressive de quelques comportements, que ce soient des paroles en apparence
gentilles, des silences, des sentiments hostiles non formulés.
4. le contre – transfert
La parole de l’interlocuteur peut évoquer une situation passée que le clinicien a eue avec une
connaissance. Celui-ci peut inconsciemment réagir comme il l’aurait fait autrefois ou aurait
voulu le faire, mais alors il n’est plus disponible pour l’identification passive, l’empathie, qui
lui permet de comprendre l’autre ; il est emporté par sa propre subjectivité et devient
inadéquat pour mener un entretien efficace pour le client ou pour lui-même.
IV. Le transfert :
Le transfert est la répétition d’une relation d’objet du passé à l’égard d’une personne présente.
Il s’agit d’un processus psychique totalement inconscient. Une personne va vivre des
sentiments, prendre des attitudes, ressentir des craintes, employer des moyens de défense et
avoir certains comportements, comme elle les a eus dans son enfance ou sa jeunesse, avec
certaines personnes de son entourage avec qui elle a vécu une relation très impliquante. Elle
va déplacer cette relation sur une autre personne ; c’est pourquoi son attitude sera souvent
inadéquate et la communication risquera d’être biaisée, l’entretien inutile.
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1. transfert positif
Le transfert positif est celui où la relation aimante pour un parent de l’enfance se répète et
prend le clinicien comme substitut. Il est souvent nécessaire même au cours d’un entretien
unique pour aller le plus loin possible, pour atteindre la visée souhaitée par l’un comme par
l’autre.
2. transfert négatif
Le transfert négatif est basé sur toutes les formes de la haine : hostilité, colère, esprit critique
systématique, peur du jugement négatif, du rejet, voire même de la persécution. Ce transfert
est tout à fait nuisible quand il est non exprimé et non surmonté ; il empêche toute authenticité
dans la relation ; l’approfondissement et la communication restent impossibles. L’entretien est
inutile ou encore l’interlocuteur interrompt la séance avant qu’elle ne soit terminée.
Chaque être humain appartient à des groupes divers : non seulement il fait partie
inévitablement de groupes, mais en outre il a des attitudes conscientes et inconscientes à leur
égard.
L’entretien clinique doit prendre en compte non seulement le discours explicite, mais aussi la
somme totale des réactions de l’interviewé et de l’interviewer à un moment donné dans un
environnement donné. La relation qui s’établit va dépendre du lieu où elle se situe, du temps
de la rencontre et des caractères propres de la personnalité des protagonistes de l’entretien.
Cela se déroulera différemment selon que la personne viendra de son plein gré, si elle en est
contrainte ou si elle est dans l’urgence.
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La mimique garde sans doute de ses origines lointaines sa capacité élective d’exprimer les
affects et les émotions, et de traduire parfois involontairement les affleurements de notre
conscient.
Le silence laisse peu de place à l’interprétation. C’est la raison pour laquelle il doit être
suffisamment respecté pour se donner le temps d’en percevoir le sens et ne pas courir le risque
d’y projeter nos propres sentiments.
Les modalités de contact de l’enfant, ses jeux, ses productions graphiques, ses propos nous
conduisent peu à peu à avoir une idée de son intelligence, de son insertion dans le réel, de son
acceptation de son sexe, de la manière dont il imagine son avenir, de sa richesse
fantasmatique, de ses rêves, de son angoisse, de sa souffrance. Nous pouvons souhaiter revoir
l’enfant et souvent il en est d’accord, intéressé par ce qui s’est passé.
Pour que l’échange de paroles ait finalement lieu, il faut la médiation d’une activité concrète
correspondant aux intérêts de l’enfant derrière laquelle il s’abrite et à travers laquelle il se
révèle, une activité qui extériorise son monde interne.
Dans une consultation thérapeutique telle que Winnicott la conçoit, on s’avance jusqu’à un
moment où l’enfant peut dessiner ses rêves et en parler ; c’est alors que prennent leur sens les
indices recueillis dans les squiggles par la répétition d’un thème ou un détail insolite.
Il est préférable de parler à l’enfant avec les mots qu’il emploie et qu’on emploie dans sa
famille. Il faut être prêt à laisser l’enfant et à lui parler. Mais il ne faut pas s’attendre à ce qu’il
puisse faire un exposé de son problème à la manière d’un adulte.
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CH VI : L’entretien avec l’adolescent
L’adolescent est tributaire, dans son évolution, de l’enfance et des modalités d’investissement
qu’elle a suscitées : la puberté est « la première répétition de la période sexuelle infantile ».
l’adolescence doit être ce qui couronne l’attente incluse dans la période de latence. Des
conflits et des souffrances inéluctables, dus aux frustrations affectives de l’enfance par rapport
aux objets privilégiés que sont les parents, trouvent un dépassement et un exutoire au moment
de l’adolescence, à condition bien sûr que celle-ci offre des possibilités d’ouverture et
d’investissement satisfaisantes.
Winnicott dit très bien que « le développement des méthodes contraceptives a rendu
l’adolescent libre d’explorer tout le domaine de la vie sensuelle sans souffrir cette effroyable
inquiétude qu’implique la conception accidentelle ».
L’adolescent a besoin d’être protégé contre sa dépression ; cette dépression est plus ou moins
consciente, plus ou moins ressentie comme telle ; l’adolescent dit qu’il n’a pas demandé à
venir au monde et qu’il veut fuir cette vie. L’accroissement des tendances suicidaires trahit la
difficulté des adolescent de travailler leur dépression, de la surmonter.
L’adolescence n’est pas une maladie mais une crise normative, c’est-à-dire une phase normale
d’un conflit accru, caractérisé par une apparente fluctuation de la force du moi, aussi bien que
par un potentiel de croissance élevé. L’adolescent a besoin qu’on l’écoute en interlocuteur
valable, qu’on accueille avec intérêt ce qu’il dit, qu’on soit prêt à apprendre quelque chose de
lui. Il est alors disposé à accepter quelque chose de nous.
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Ainsi le chercheur a le choix entre plusieurs types d’entretiens :
Si l’entretien clinique se définit entre autres par l’attention portée à une personne dans son
intégralité, son originalité et son unicité, alors c’est l’entretien de recherche non directif qui
est sûrement le plus clinique.
1. consigne
- il faut utiliser des mots simples, dont le sens est clair et univoque
- pas de mots précieux, pas de surcharge littéraire
- pas de mots savants : il faut éviter les termes scientifiques
- il s’agit aussi d’utiliser des mots qui n’implique pas de jugement de valeur
2. la conduite de l’entretien
A partir du moment où la consigne est donnée, l’interviewer s’efface et n’interrompt pas le
sujet par ses questions. Tout au plus, si l’interviewé reste trop longtemps silencieux et n’arrive
pas à sortir d’une situation de gêne ou de perplexité, il le relance en énonçant en d’autres
termes sa pensée ou en revenant en arrière sur un mot ou une phrase de lui particulièrement
significatifs.
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4. l’étude de l’entretien au cours de l’entretien et après – coup
1. étude de l’entretien au cours de l’entretien (non enregistré, enregistré)
2. l’étude de l’entretien après – coup (le point de vue sur un entretien peut être éclairé par
la confrontation avec d’autres personnes présentes à l’entretien)
3. l’analyse de contenu et les différents types d’entretiens (mise en évidence de certains
paramètres : thématique, vocabulaire, degré d’anxiété, trouble de la parole, …)
Tout entretien clinique, même si sa visée est strictement diagnostique, même s’il n’est engagé
qu’en vue d’un travail de recherche, a nécessairement une incidence thérapeutique. Ce qui
spécifie l’entretien clinique, ce qui le différencie d’un entretien ordinaire, c’est qu’il prend en
compte l’inconscient. De ce fait, l’entretien clinique va nécessairement mobiliser et modifier
l’équilibre dynamique du psychisme de celui avec qui l’entretien a lieu.
Lorsque l’entretien clinique a été « rectifié » par tout en travail d’ajustement sur l’instrument
que nous sommes et pouvons devenir, il peut être l’outil privilégié et précis qui permettra
d’aboutir à un diagnostic valable ou de conduire une recherche à valeur scientifique.
Ce n’est qu’à partir de son interrelation avec le consultant que le clinicien peut découvrir
quelque chose de l’organisation dynamique interne de l’autre, à condition de ne pas oublier
qu’il est partie prenante de ce qu’il observe, et se trouve de ce fait à l’intérieur et à l’extérieur
de cette interrelation.
Pour le jeu de rôle, il ne s’agit pas d’explorer nos fantasmes, nos associations libres, notre
inconscient, mais de découvrir ce qui, dans telle situation précise, peut nous gêner , nous
angoisser, faire obstacle à la compréhension de l’autre, à une perception plus objective de son
problème, et bloquer la communication. Il permet une découverte de nos modes relationnels
avec autrui.