Titre Du Mémoire:: Parcours Administration Publique Spécialisée
Titre Du Mémoire:: Parcours Administration Publique Spécialisée
Titre Du Mémoire:: Parcours Administration Publique Spécialisée
Titre du mémoire :
Sous la direction de
Dr Aboubakry SY
Conseiller pédagogique en économie et finances publiques
à l’ENA
Soutenu par
Mr ALI AHAMADA Abdérémane
CIP Promotion Louis Pasteur (2017-2018)
Juin 2018
Dédicace
A mes enfants :
A mon cher ami, BEN MOHAMED Djamal (MOPAO), pour tous ses
sacrifices et sa permanente disponibilité pour mes enfants,
durant toute cette période ;
2
Remerciements :
Je tiens tout d’abord à remercier très sincèrement mon encadreur : Dr Aboubakry SY,
Conseiller pédagogique en économie et finances publiques à l’ENA, pour avoir accepté de
guider mes pas dans ce travail et pour sa constante disponibilité.
3
Sommaire
Introduction
Conclusion
4
Liste des sigles et abréviations
ACCT Agence comptable centrale des services du trésor
AFSS Afrique subsaharienne
BM Banque mondiale
CDMT Cadre des dépenses à moyen terme
CEMAC Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale
CFA Anciennes colonies françaises
COMESA Marché commun de l’Afrique orientale et australe
CUT Compte unique du trésor
DGCP Direction générale de la comptabilité publique et du trésor
DPGECP Document prévisionnel de gestion des emplois et des crédits de
personnel
FEC Facilité élargie de crédits
FMI Fonds monétaire international
GISE Gestion intégrée des structures et des effectifs
HAFOP Haute autorité de la fonction publique
IADM Initiative d’allègement de la dette multilatérale
INSEED Institut national des statistiques et des études économiques et
démographiques
IPPTE Initiative pays pauvres très endettés
KMF Franc comorien
LOFE Loi portant opérations financières de l’Etat
LOLF Loi organique relative à la loi de finances
PAS Programme d’ajustement structurel
PEFA Programme d’examen des dépenses et d’évaluation de la responsabilité
financière
PIB Produit intérieur bruit
TADAT Tax administration diagnostic assessment tool
UEMOA Union économique et monétaire ouest africaine
SCA2D Stratégie de croissance accélérée et de développement durable
5
Introduction
Le début du XXI ème siècle a été marqué, de part le monde, par une grave insuffisance des
ressources financières, laquelle sera amplifiée par la crise financière de 2008. Cette situation
met les autorités chargées de la politique budgétaire devant des choix difficiles à opérer, entre
une augmentation ou une réduction des dépenses ou des recettes. Il est important de noter que
chaque option comporte ses propres conséquences.
Pendant la période qui a suivi la crise, certains pays européens ont mis l’accent sur une
augmentation de la dépense publique pour relancer l’activité. Cette situation rendrait difficile
par la suite sa baisse 1 , avec comme conséquence une détérioration du déficit public,
l’augmentation de la dette et du poids des prélèvements obligatoires.
Pour ROBERT Hertzog, 2 « la maladie infantile » des pays de l’Union européenne remonte
en 1992 quand les pays ont préféré réduire la dette et le déficit par une hausse des impôts au
lieu de diminuer la dépense publique alors qu’ils devraient se préparer à être plus compétitifs
surtout avec les risques de concurrence fiscale qui se profilaient.
Face à cette situation, une politique de maîtrise de la dépense publique reste le seul moyen
pour donner confiance aux agents économiques sur une soutenabilité à long terme des
finances publiques
En France, la grande majorité des dirigeants politiques s’accorde sur la nécessité de baisser la
dépense publique pour résorber le déficit, diminuer la dette et engager une politique de baisse
des prélèvements obligatoires afin de rendre la France plus compétitive. L’ancien Président de
la République, le socialiste François HOLLANDE3 dans un discours disait « Pourquoi faut-il
réduire la dépense ? Parce que c’est le passage obligé pour réduire les déficits publics. Parce
que c’est le préalable à toute baisse d’impôt ». Cette approche est loin d’être remise en cause
avec l’actuel gouvernement à travers son programme « Action publique 2022 » dont la
commission des experts « Cap 2022 » serait sur le point d’annoncer 30 Milliards d’euros
d’économies durant le quinquennat.
1 Loi de l’économiste allemand ADOLPHE Wagner formulé dès les années 1870 dite « loi
d’accroissement des dépenses publiques et de l’activité de l’Etat »
2 Robert Hertzog, « Les ressources publiques sous tension : victimes ou causes de la crise des
6
Pour ce qui est de l’Afrique subsaharienne, les pays ont connu ces dernières années un
ralentissement de l’activité économique avec une dette publique qui est à la limite du
soutenable (en moyenne 50% du PIB en moyenne) et des déficits publics qui s’aggravent,
dans un contexte de légère reprise avec 2,6% de croissance estimée pour 2017.
Pour la plupart de ces pays, surtout ceux exportateurs de pétrole, un assainissement budgétaire
devrait être une priorité afin de garantir une stabilité macroéconomique et réaliser une
croissance durable.
Cependant, la région a connu une histoire douloureuse des assainissements budgétaires avec
les programmes d’ajustements structurels (PAS) imposés par le Fonds monétaire international
(FMI) dans les années 90. Ces politiques ont produit les effets inverses avec une contraction
de la production associée à une dégradation des conditions de vie des populations. Ainsi tout
assainissement envisagé doit désormais tenir compte de la spécificité du pays et du
comportement de la production.
Les études du FMI4 estiment, compte tenu du faible taux de pression fiscale des pays, qu’une
augmentation de recettes serait la méthode la plus appropriée. Cependant comme il faut
souvent du temps pour augmenter les recettes, une politique de baisse de dépense est
inévitable.
Ainsi, pour les pays exportateurs de pétrole qui possèdent des taux d’investissement publics
élevés, l’ajustement peut se faire par une baisse des dépenses d’investissements,
contrairement aux autres dépourvus de ressources naturelles comme l’Union des Comores qui
doit procéder à un ajustement par une maitrise des dépenses courantes.
En effet, l’Union des Comores constitue un petit pays insulaire, classé parmi les pays
fragiles5. Avec 759 dollars Américains par habitant par an, elle est placée dans le dernier
quintile mondial, au 160 ème rang sur 188 en matière de développement humain. Après son
accession à l’indépendance le 06 juillet 1975, l’histoire de l’archipel a été marquée par des
instabilités politiques rythmées par des coups d’états et des crises institutionnelles ayant
fortement hypothéqués son développement. La dernière en date est la crise séparatiste de l’île
d’Anjouan ayant conduit à la constitution du 23 décembre 2001 accordant une large
attribué par l’Evaluation des politiques et institutions (calculé par la BM) est inférieur à 3,2
ou s’il accueille une mission régionale de maintien ou de construction de la paix de l’ONU.
7
autonomie aux îles. Ces dernières ont parmi leurs domaines de compétence la santé de base et
l’éducation primaire et secondaire. La gestion budgétaire est organisée avec le vote d’un
budget consolidé par l’assemblée nationale qui fixe, pour les îles autonomes, des plafonds de
dépenses par nature économique (salaires, biens et services, transferts et contributions-
investissements). Ces enveloppes sont ensuite reparties par destination au sein de chaque
organe délibérant des îles (Conseil de l’île) et mises à la disposition des exécutifs des îles.
Elles perçoivent, au niveau des recettes, celles dites propres et des recettes à partager avec
l’Etat central selon une clé de répartition6 fixée par une loi organique.
Depuis 2005, le pays s’est lancé dans un long processus de reformes économiques et
financières qui ont permis de renouer avec les instituions financières internationales que sont
le FMI et la Banque Mondiale (BM). Ainsi l’Union des Comores a réussi à négocier, en 2009,
un programme triennal soutenu par la Facilité élargie des crédits avec le FMI. La bonne
exécution de ce dernier lui a permis d’atteindre en 2012 le point d’achèvement et pouvoir
ainsi bénéficier d’un allègement de la dette de plus 57,9 Milliards de Frans Comoriens
(KMF)7 au titre de l’initiative pays pauvre très endetté (IPPTE) qui a été renforcé plus tard
par l’initiative d’allègement de la dette multilatérale (IADM). En dépit de l’allègement de la
dette, les situations macro budgétaires des années qui ont suivi cet allègement sont restées
trop décevantes. En 2016, la croissance a été de 2,2% après 1% en 2015, le déficit public de
7,7% et les arriérés intérieurs et extérieurs ont continué de s’accumuler.
Les nouvelles autorités en place depuis mai 2016, ont procédé à une révision de la stratégie de
la croissance accélérée et développement durable (SCA2D) qui table sur un objectif de
croissance moyen de 6,2% sur la période 2015- 2019. Elle intègre un volet important de
consolidation de la gestion des finances publiques avec une priorité à la maîtrise de la dépense
publique qui s’est révélée non maitrisée. C’est ce qui justifie le choix de notre sujet.
Pour les besoins d’une démarche méthodologique, il convient de s’interroger sur les concepts
clés «maîtrise et dépense publique » pour mieux cerner notre sujet.
Ainsi, selon le petit Robert, le terme maîtrise signifie domination incontestée, sureté
d’exécution dans un domaine technique ou artistique alors que pour le petit Larousse il
signifie contenir. Quand au terme dépense publique, une tentative de définition est donnée par
le dictionnaire encyclopédique des finances publiques selon laquelle, «les dépenses publiques
6 Clé de répartition des recettes à partager : Union 37,5%, Ngazidja 27,4%, Anjouan 25,7%,
Mohéli 9,4%t
7 1 Euro= 491,96775 KMF
8
sont l’ensemble des dépenses réalisées par les administrations publiques. Leur financement
est assuré par les recettes publiques (impôts, taxes et cotisations sociales) et par le déficit
public ».
Dans le cadre de notre étude, la maitrise de la dépense publique doit être comprit dans le sens
de la maitrise du volume et des procédures d’exécutions des dépenses publiques.
Cette étude se limitera à l’Etat central et aux îles autonomes, elle ne prendra pas en compte la
sécurité sociale (caisse de retraites et caisse de prévoyance sociale). Aussi, compte tenu de
l’allègement de la dette extérieure (35% du PIB en 2016) intervenue en 2012, cette dernière
ne fera pas partie de notre étude.
sur le plan théorique : Il s’agit pour nous de présenter l’état des lieux de la dépense
publique en Union des Comores en tenant compte de l’environnement juridique (textes
législatifs et règlementaires) et des pratiques internationalement admises en matière
d’exécution budgétaire ;
sur le plan pratique : Il s’agira pour nous de démontrer le décalage qui existe entre les
textes et leur application par les acteurs tout en mettant un accent particulier sur leur
méconnaissance d’une part et leur inapplication d’autre part avec comme conséquence
la hausse effrénée de la dépense et des déficits publics associés.
C’est dans cette perspective que nous nous interrogeons pour savoir, dans quelle mesure, une
maitrise de la dépense publique peut contribuer à libérer un espace budgétaire pour des
investissements intérieurs afin de relancer la croissance.
C’est sous ce rapport que nous avons envisagé notre démarche qui se présente de façon
duale : d’une part, identifier l’ensemble des enjeux de la maîtrise de la dépense (Première
partie) et d’autre part, mobiliser l’ensemble de leviers nécessaires à la maitrise de la dépense
publique (Deuxième partie).
9
Partie I. La maitrise de la dépense publique : un enjeu central
du système financier Comorien.
Après 2012, avec la fin du programme Facilité Elargie de Crédit (FEC) qui avait été conclu
avec le FMI, la situation des finances publiques en Union des Comores s’est fortement
dégradée, et ce malgré le point d’achèvement et l’obtention de l’annulation de la dette dans le
cadre de l’initiative pays pauvres très endettés (IPPTE).
Cette situation appelle de la part des nouvelles autorités en place, depuis le mois de Mai
2016, une maitrise de la dépense publique afin de retrouver une crédibilité perdue auprès de
partenaires (Chapitre I) et aussi rééquilibrer les comptes publics afin d’assurer une viabilité
budgétaire à long terme (Chapitre II)
Chaque année, dans le cadre de sa surveillance au titre l’article IV, le Fond monétaire
international (FMI) évalue la performance économique des Comores (Paragraphe I). Ces
derniers font également l’objet d’une autre évaluation (Paragraphe II) relative à la
surveillance multilatérale dans le cadre des pays de la zone Franc et du Marché Commun de
l’Afrique Orientale et Australe (COMESA).
Au titre de l’article IV de ses statuts, le FMI exerce au même titre que la surveillance
multilatérale, une surveillance bilatérale sur les économies des pays membres.
A ce titre, les Comores à l’instar des autres pays membres font l’objet de cette surveillance
dont l’objectif au niveau budgétaire et financier est de garantir le manque de risque pouvant
peser sur la stabilité intérieure 8 , le cas échéant proposer des mesures d’ajustements
De la même manière, retrouver de la crédibilité auprès des partenaires régionaux est aussi
important.
Les Comores font partie avec les pays de l’Union économique et monétaire ouest africain
(UEMOA)10 et de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC)11
des quatorze (14) pays qui constituent la Zone franc. Selon la Banque de France12 « cette
zone résulte de la volonté de ces pays de maintenir un cadre institutionnel qui contribue à la
stabilité du cadre macroéconomique ».
Ainsi suite à la dévaluation du Franc CFA intervenu en 1994, il a été mis en place des
processus régionaux d’intégration économiques et de convergence. Un cadre de surveillance
multilatéral de la zone est mis en place au sein de la CEMAC et de l’UEMOA. Il existe des
critères de convergences dont la plupart sont d’ordre budgétaire. Parmi ceux-ci, il existe ceux
Sénégal, Togo
11 CEMAC : composée du Cameroun, Congo, Gabon, la Centrafrique, Tchad
12 Banque de France, note d’information ; sep 2017 ; pp.12.
11
qui sont classés de premier rang13 et d’autres de second rang14. Depuis septembre 1999, il a
été instauré un Comité de coordination de la convergence dans la zone dont les Comores font
partie. Parmi les missions de ce comité, figure celles qui consistent à informer les Ministres
des Finances « des résultats de la surveillance multilatérale dans chaque zone, de l’évolution
récente de la convergence et programmes mis en œuvre pour s’y conformer… ». Selon la
Banque centrale des Comores15, les critères de premier rang, dans le cadre de la convergence
de la zone, se présentent durant la période allant de 2012 à 2016 selon le tableau suivant :
En ce qui concerne les critères de second rang, le rapport masse salariale sur recettes fiscales a
été de 69,7% en 2016 pour une norme de moins de 35%. Pour ce qui est de la pression fiscale,
elle a été de 13,7% pour une norme d’au moins égal à 17%.
Force est de constater qu’aucun critère budgétaire n’a été respecté à part l’encours sur la dette
extérieure qui ne se justifie que par l’allègement de la dette, obtenu depuis 2012, dans le
cadre de l’IPPTE.
respecté en 2012 et 2014 mais par expérience ce critère n’a jamais été respecté au moins en
ce qui concerne les arriérés intérieurs.
12
étape importante de la création, en 2021 au plus tard, d’une Communauté économique
africaine avec une monnaie unique et une Banque centrale africaine selon le protocole
d’Abuja révisé. Au niveau des critères de convergences d’ordres budgétaires, on retrouve
presque les mêmes qu’au sein de la zone CFA. Seulement pour les critères de premier rang, il
est plutôt question d’un objectif de réduction du financement du déficit par la Banque centrale
pour atteindre o% et au niveau des critères de second rang, on retrouve un nouveau critère qui
est celui du taux d’investissement sur ressources intérieurs qui doit être supérieur ou égal à
20%.
Le COMESA s’est doté d’un cadre de surveillance constitué de trois organes régionaux que
sont le conseil des chefs d’Etats et de gouvernements, le conseil des ministres et le comité des
gouverneurs. De façon pratique, c’est le comité des affaires monétaires et financières qui est
chargé du suivi de la mise en œuvre du programme. Il élabore des recommandations au
comité des gouverneurs qui à son tour se charge de faire les recommandations au conseil des
ministres sur l’adoption des nouvelles mesures.
On peut aisément se rendre compte que dans le cas des deux zones, les critères de
convergences sont loin d’être respectés par les Comores. En dépit du dispositif de
surveillance moins contraignant, les pays ne peuvent se soustraire en vertu du principe
« pacta sunt servanda ».
Cependant ces règles ont le mérite d’exister mais pour qu’ils donnent plus de résultats, les
pays doivent se doter de règles nationales de responsabilité budgétaire et d’organes
indépendants chargés de les évaluer. Cela ne ferait que renforcer la capacité des Etats à se
conformer aux normes et standards internationaux en matière budgétaire
Depuis plusieurs années, les autorités comoriennes font appel à des évaluations
d’organisations internationales pour avoir leur regard sur la gestion budgétaire comme c’est
le cas du Programme d’examen des dépenses publiques et d’évaluation de la responsabilité
financière (PEFA)17 qui porte sur la gestion des finances publiques en générale (Paragraphe I)
17Le PEFA est un outil d’évaluation de la gestion des finances publiques. Le programme a été
lancé en 2001 par sept partenaires internationaux : la commission européenne, le FMI, la
BM, la France, la Norvège, la Suisse et le Royaume uni.
13
et du Tax administration diagnostic assessment tool (TADAT)18 qui porte sur l’administration
fiscale plus particulièrement (Paragraphe II).
Au cours de ces dernières années, entre 2007 et 2016, le PEFA a conduit trois évaluations
(2007, 2013 et 2016) de la gestion des finances publiques en Union des Comores. Il n’est pas
question de faire l’état des 31 indicateurs du PEFA mais plutôt de quelques uns, dont leur
pertinence intéresse notre étude. Il s’agit plus précisément des ceux récapitulés selon le
tableau ci dessous :
En somme, sur 31 indicateurs, 2 sont notés B, 8 notés C, 1 noté C+, 10 notés D et 10 notés
D+. Pour qu’une administration soit jugée comme ayant atteint l’objectif de bonne
gouvernance, au moins la moitie des 28 indicateurs relatifs à l’administration doivent être
notés au minimum B.
L’outil TADAT vise à évaluer l’état des grandes composantes du régime d’administration
fiscal d’un pays et de son niveau de maturité par rapport aux meilleures pratiques
internationales. Il comprend 9 domaines d’analyses et 28 grands indicateurs, essentiels pour
évaluer la performance de l’administration fiscale. Les domains d’analyses sont les suivantes:
Pour les Comores, cette évaluation a été menée en janvier 2016. Le graphique ci-dessous
récapitule les résultats obtenus.
Indicator Score
D1-1 D
D1-2 D
D2-3 D
D2-4 D
D2-5 D
D2-6 D
D3-7 D
D3-8 C
D3-9 D
D4-10 D
D4-11 D
D5-12 D
D5-13 B
D5-14 D
D5-15 C
D6-16 D+
D6-17 D
D6-18 D
D7-19 A
D7-20 B
D7-21 D
D8-22 D
D8-23 D
D8-24 0
D9-25 D
D9-26 D
D9-27 D
D9-28 D+
Ce tableau, avec plus de 80 % d’indicateurs notés D, c’est -à -dire la plus mauvaise note, est
assez éloquent pour prouver l’état lamentable de l’administration fiscale comorienne à un
moment crucial de cette dernière, suite aux pertes de recettes douanières attendues avec
l’intégration progressive au marché commun du COMESA.
Au delà des indicateurs classiques d’une administration fiscale, certains ont retenu notre
attention. On peut citer le D8-22 « Contribution au processus de prévision de recettes fiscales
de l’Etat » noté D parce que l’administration ne possède pas de personnel qualifié et dédié à
cette tâche. Cet état de fait justifie largement les tensions de trésorerie en cours d’année
budgétaire et les accumulations d’instances de paiements associés qui occasionnent le déficit
budgétaire et participe à la non maitrise de la dépense publique. D’autres indicateurs comme
le DA-2 « Gestion de risque » et D9-25 « Mécanisme d’assurance interne « sont notés D, Ce
16
qui est assez logique si effectivement l’administration n’est pas sensibilisée à la notion de
risque opérationnel et ne dispose d’aucun mécanisme de contrôle interne et encore moins
d’audit interne. Dans ces temps modernes, il n’est pas admissible qu’une telle direction avec
des enjeux aussi considérable ne soit sensible à la maitrise des risques, au minimum des
risques comptables et financiers.
En somme, le constat du TADAT fait avant tout la lumière sur l’absence d’une réelle
politique managériale dans l’organisation mais aussi dans celle d’une animation et d’un
pilotage au niveau ministériel.
S’il est vrai que la maitrise de la dépense publique présente pour l’Etat un enjeu de crédibilité,
elle est avant tout un levier de bonne gestion budgétaire.
La gestion budgétaire a été essentiellement marquée ces dernières années par une hausse de
la masse salariale malgré des ressources en baisse (Section 1) mais aussi par un manque de
régulation budgétaire en cours d’exécution (Section 2).
La masse salariale en Union des Comores présente presque le même profil que celui des
autres pays insulaires comme les Seychelles. Seulement dans ces pays la relation entre la
masse salariale et les recettes fiscales est souvent maintenue stable contrairement à ce qui est
observé aux Comores où la masse salariale peut augmenter (Paragraphe I) alors que les
recettes fiscales sont en baisses (Paragraphe II).
Les Comores enregistrent une évolution de la masse salariale très dynamique qui pèse
lourdement sur l’équilibre budgétaire. Les salaires et traitements ont augmenté de 13% entre
2014 et 2016 passant de 21,4 millions KMF à 24,6 millions KMF. Cette évolution est
21
inégalement repartie entres les entités avec une plus grande part au niveau de
Le ratio masse salariale rapporté aux recettes fiscales a été de 69,7% en 2016 contre 81,9% en
2015 pour une norme de moins de 35% au niveau de la zone Franc.
Selon un rapport du FMI22, « les Comores présentent le ratio masse salariale sur recettes
fiscales le plus élevé parmi les pays comparables (pays d’Afrique subsaharienne, pays à
faible revenu, pays insulaires) ».
Deux situations expliquent de façon générale une hausse de la masse salariale : une hausse du
traitement ou/et les effectifs. Pour le cas des Comores, la valeur indiciaire a été gelée depuis
1985 et le dernier avancement remonte aux années 2000. La seule valorisation qui a eu lieu
concerne les enseignants en 2014 après une grève qui a trop duré.
L’explication se trouve donc plus dans les effectifs. Il nous semble que cette situation est
beaucoup plus complexe qu’elle n’en donne l’air. En effet, pour trouver l’origine du
problème, il faut remonter en 2001 avec la nouvelle Constitution qui accorde une large
autonomie aux iles avec des compétences propres et un pouvoir de recruter. L’Etat central n’a
pas mis en place une structure qui contrôle la régularité encore moins la légalité des actes de
recrutements des iles autonomes. Cela a occasionné des recrutements la plupart du temps
injustifiés de la part des gestionnaires des îles autonomes surtout que le paiement est assuré
par le gouvernement central.
Un autre projet sensé être structurant résidait dans la mise en place d’un progiciel de gestion
intégré des structures et des effectifs (GISE) de la Fonction publique. En ne faisant pas les
reformes administratives préalables et en se focalisant sur l’aspect informatique, le
La dernière raison se trouve dans le manque d’un dialogue de gestion et d’un pilotage de la
masse salariale entre les gestionnaires d’une entité eux-mêmes d’une part et entre le
gouvernement centrale et les entités autonomes d’autre part, entrainant des fois des
dépassements de crédits par rapport à ceux initialement prévus dans la loi de finances.
Tout cela pour dire que le problème de la masse salariale en Union des Comores doit être pris
avec beaucoup de sérieux car une dépense de salaire est un engagement de l’Etat pour au
moins 45 ans (carrière professionnelle et retraite pour une espérance de vie de 63 ans). Une
réforme en profondeur est donc nécessaire surtout dans un contexte de ressources intérieures
de plus en plus insuffisantes.
Ainsi en 2016 les recettes intérieures étaient de 43,1 millions KMF contre 39,5 millions en
2015 soit une variation de plus 9,1%. Cela s’explique par l’enregistrement en recettes non
fiscales, en 2015, de la vente de la licence sur la téléphonie mobile à un second opérateur. Les
recettes fiscales quand à elles ont varié de 28,9 millions à 35,3 millions pour la même
période, soit une variation de + 18,13% faisant passer la pression fiscale de 11,7% à 13,7%
ce qui est toujours assez bas par rapport à la norme de la zone Franc (taux de pression fiscale
>=17%) ou du COMESA (taux pression fiscale >=20%).
Il ressort de l’analyse de ces graphiques que les Comores présentent la possibilité de pouvoir
mobiliser davantage de ressources surtout fiscales. Si la plupart des causes de cette
insuffisance sont liées au manque de management, aux capacités institutionnelles et au
24 Graphique fait par nous mêmes sur la base des données du FMI (article 4, Comores 2014)
20
manque de volonté politique, d’autres causes culturelles et historiques ne peuvent être
occultées.
Ainsi dans une lettre de janvier 1907, le Gouverneur de Mayotte écrivait au Ministère des
colonies en ces termes : « Le recouvrement de l’impôt personnel à la Grande Comore
continue à présenter les plus grandes difficultés, tant à cause de la pauvreté des indigènes,
d’une part, que de leur mauvaise foi d’autre part …. »
Dans le même ordre d’idée, dans la course vers l’indépendance du pays, les leaders politiques
de l’époque ont fait campagne sur la promesse de libérer la population de l’impôt. Tout cela
montre, si besoin en est, l’ampleur de la question de la mobilisation des ressources qui ne
peut donc être traitées seulement sous le seul angle organisationnel et administratif.
Malgré les dispositions juridiques existantes, la gestion budgétaire en cours d’année connaît
une régulation assez limitée (Paragraphe I). Cette situation s’accompagnant d’une gestion de
trésorerie très inefficace (Paragraphe II) constitue les sources des dépassements de crédits et
d’accumulations d’instances de paiements en fin d’année.
Cependant ces dispositifs ne sont pas suffisant pour garantir l’équilibre budgétaire et financier
défini à l‘article 2 de la loi N° 12-009/AU portant opération financière de l’Etat qui stipule :
« Pour l’Union, es lois de finances déterminent pour un exercice, la nature, le montant et
l’affectation des ressources et des charges de l’Etat. Elles tiennent comptent d’un équilibre
économique et financier qu’elles déterminent sur la base des objectifs et des résultats des
programmes définis dans le cadre des missions de l’Etat ».
A part les conférences budgétaires annuelles sur la préparation du budget, il n’existe pas de
dialogue de gestion formalisé entre la direction du budget, la direction du contrôle financier et
les ministères dépensiers en cours d’exécution. Le contrôleur financier fait plus des contrôles
de régularité pourtant assurés par le comptable au lieu de se déployer pour une réelle
21
soutenabilité budgétaire. Pour autant le cadre législatif et réglementaire existant prévoit des
mesures nécessaires pour assurer une meilleure régulation budgétaire.
Les deux évaluations PEFA de 2007 et 2013 avaient attribué les notes D et D+ aux deux
indicateurs 25relatifs à la gestion de la trésorerie. Le PEFA 2016 les a finalement évalués à C+
et C (des notes moyennes).
A titre d’illustration, un rapport sur la dette intérieure allant de 1995 à 2008, réalisé par un
cabinet financé par l’Union européenne en 2009 a recensé pour la seule entité Union, des
arriérés intérieurs s’élevant à 11 907 millions KMF toute nature confondue alors que les
balances de comptes du Trésor font ressortir au 31décembre 2015 un montant de 32 712
millions soit une progression de 63% en 6 ans. Cela montre ainsi l’ampleur du phénomène qui
ne cesse de s’amplifier.
Cette situation continue de détériorer la confiance des fournisseurs dans l’Etat et présente un
coût pour le gouvernement et l’économie du pays. Dorénavant les fournisseurs refusent de
Pour améliorer véritablement le système financier comorien, une réelle politique de maitrise
de la dépense publique est plus que nécessaire.
Dans le cadre de sa stratégie décennale de reforme de la gestion des finances publiques (2009-
2018), l’Union des Comores s’est montré attentive aux pratiques internationales dans la
gestion budgétaire (Section I). Néanmoins, pour une meilleur maitrise de la dépense, il est
indispensable de l’encadrer et d’assurer une meilleure prévisibilité à moyen terme (Section
II).
La nécessaire maitrise de la dépense publique suppose, selon Michel Paul 27 , « que l’Etat
hiérarchise ses besoins afin d’opérer des choix pour savoir le type de dépense incompressible
et celle à diminuer ». Une telle situation n’est pas possible dans le cadre d’un budget de
En effet dans le cadre de son programme de reforme de gestion des finances publiques (2009-
2018), l’union des Comores a adopté depuis le 21 juin 2012 la loi 30 N° 12-009/AU portant
opération financière de l’Etat. Les dispositions transitoires de la loi prévoyaient sa mise en
application effective en 2018. Elles prévoyaient en même temps des prérequis et des phases
transitoires comme la nécessité de renforcer les capacités dans la gestion de budgets de
moyens ou son expérimentation dans certains ministères avant sa généralisation. Six ans après
sa promulgation, on ne peut que constater qu’aucune action n’est engagée pour sa mise en
place progressive. Cette loi se voulait pourtant ambitieuse en matière de modernisation de la
gestion publique ainsi que de l’Etat en général.
Ainsi, elle vise de passer d’un budget axé sur les moyens à un budget orienté vers les
résultats avec une justification de la répartition des allocations au Franc près par rapport à la
réalisation d’objectifs définis et déclinés en programme et actions.
Elle introduit des notions comme le responsable de programme, lequel parmi ses missions est
chargé de la gestion du personnel du programme dans le respect des dépenses de personnel et
du plafond d’emploi alloué (des notions aussi nouvelles). Elle introduit également la notion
de fongibilité asymétrique ainsi que de celle de cadre budgétaire pluriannuelle qui permettrait
Il est fort évident que la mise en place effective de cette réforme par les autorités politiques
permettrait de mettre les Comores dans les standards internationaux en matière de gestion
budgétaire et pourrait éventuellement contribuer à la maitrise de la dépense publique. Elle
nécessite pour cela certains prérequis comme le renforcement des capacités des gestionnaires,
la mise en place d’un nouveau règlement général de la comptabilité publique (RGCP) et
l’élaboration de l’ensemble des référentiels et guides pratiques nécessaires à une meilleure
compréhension de l’ensemble des acteurs. Elle pourra s’appuyer sur des acquis existant
comme le nouveau plan comptable de l’Etat qui passe d’une comptabilité de caisse à une
comptabilité en droits constatés. En plus de ces acquis, on peut noter le renforcement par le
logiciel intégré de gestion des finances publiques 31(SIMBA) déjà opérationnel. L’exploitation
optimum de ce logiciel pourrait permettre de faire de la nouvelle comptabilité de l’Etat un réel
support de contrôle, un vecteur de l’information financière et un vrai outil de pilotage des
politiques publiques.
Au niveau du cadre réglementaire, nous nous limiterons à deux décrets, l’un relatif au
contrôle financier et l’autre mettant en place les pièces justificatives de dépenses de l’Etat.
Longtemps étant considéré comme structure de la Direction générale du budget sans réelle
autonomie dans ses missions, le contrôle financier devrait avoir connu une mutation profonde
suite au décret N° 12-159/PR du 08 août 2012 portant institution et organisation du contrôle
financier des dépenses budgétaires de l’Union des Comores.
31Le logiciel Simba est opérationnel depuis 2016. Elle est acquise sur financement mixte
Banque Mondiale et Banque Africaine de Développement et est développé par l’Association
internationale des maires francophones (AIMF).
25
En plus d’être érigé en direction autonome, la direction a pour mission au niveau national
d’assurer la coordination de l’ensemble des activités des contrôleurs financiers insulaires, tout
en recentrant le rôle du contrôle financier sur la soutenabilité budgétaire.
Ainsi le décret précité stipule dans son article 6 que : « Le contrôleur financier participe à la
maitrise de l’exécution budgétaire tant en crédit qu’en emplois budgétaires et concourt à
l’identification et à la prévention des risques financiers ». Les alinéas qui vont suivre vont
être plus précis en lui confiant, entre autres, un rôle d’assureur du caractère sincère des
prévisions des dépenses, d’anticipation sur les conditions d’exécutions financières du budget
et de conseil au Ministre des finances dans la « mise en œuvre des mesures destinées à
prévenir toute détérioration éventuelle de l’équilibre budgétaire et participe à la régulation
budgétaire ».
Malgré ce cadre règlementaire existant, le Contrôleur financier continue de mettre l’accent sur
sa mission dans le contrôle de la régularité de la dépense en négligeant celle relative à la
soutenabilité. Ce même contrôle est pourtant assuré valablement par le comptable public, ce
qui rend ainsi redondant les contrôles.
Pour permettre au contrôleur financier de jouer son rôle dans la maitrise de la dépense, il
serait intéressant que le secrétariat général puise mobiliser l’expertise nécessaire, pour
sensibiliser ce dernier sur les enjeux et les avantages attendus de la reforme, le familiariser
avec la pratique et les outils associés.
En tout état de cause l’introduction d’un dialogue de gestion (avec des comptes rendus de
gestion trimestriels et une préparation de l’atterrissage budgétaire) entre la direction du
contrôle financier, celle du budget, de la comptabilité publique et les gestionnaires de
programme reste un élément essentiel d’un bon pilotage de la dépense publique.
Un autre texte réglementaire mérite d’être mentionné dans le cadre de cette étude, il s’agit du
décret N° 09-083/PR en date du 20 juillet 2009 portant établissement de la nomenclature des
pièces justificatives de dépenses de l’Etat.
26
En effet, dans un monde de plus en plus mondialisé avec une économie en profonde mutation,
le règlement général de la comptabilité publique devenait insuffisant pour un contrôle efficace
de la dépense publique. Beaucoup de pays développés à l’exemple de la France ont mis en
place les pièces justificatives de dépenses.
Pour ce qui est des Comores, le décret précité dispose en son article 3 : « le tableau joint en
annexe précise les pièces justificatives devant être exigées par les ordonnateurs avant de
liquider les droits des créanciers de l’Etat et par les comptables avant de procéder au visa de
paiement ». L’article 3 précise que l’absence d’un ou plusieurs pièces justificatives dans la
phase d’ordonnancement comme dans celle de paiement justifie la suspension de
l’ordonnancement ou du visa de paiement.
Comme les autres dispositions juridiques énumérées ci-dessus, la nomenclature des pièces
justificatives est méconnue et donc inappliquée par les gestionnaires. Ce n’est que ces
derniers temps avec le projet de renforcement des capacités de l’administration financière32
(PROCAF) que des formations adressées aux agents du Trésor public sur le sujet sont
organisés. Cependant la question concerne aussi d’autres acteurs comme ceux du budget, du
contrôle financier et des autres départements ministériels.
Nous pensons qu’il serait préférable de se servir de l’expérience qui sera acquise par le
Trésor afin d’organiser un séminaire national regroupant l’ensemble des acteurs avec pour
missions, entres autres, d’adapter le modèle existant au contexte comorien.
En définitive, il s’avère crucial pour les Comores de rendre effectif le cadre législatif et
règlementaire existant et ainsi penser à mettre en place des règles de responsabilités
budgétaires et un cadrage macroéconomique à moyen terme.
Les études ont montré que la fixation de règles budgétaires au niveau d’un espace
communautaire n’a toujours pas suffit à maitriser efficacement la dépense publique. Malgré
32 Le PROCAF est financé par l’AFD et mis en ouvre par Expertise France. Il vise à renforcer
les capacités de la Direction de la comptabilité publique, de la Direction des marchés
publiques et de l’Administration générale des impôts et domaine.
27
leur nécessité, elles ne sont pas réellement contraignantes 33. Elles ont donc besoin d’être
renforcées par le recours à des normes nationales d’encadrement de la dépense (Paragraphe I)
et nécessitent en même temps une prévisibilité à moyen terme de la dépense publique
(Paragraphe II).
Durant la période allant de 2008 à 2014, les Comores ont enregistré des recettes importantes
mais éphémères, liés à un programme dit de la citoyenneté économique 35. Selon un rapport de
la Banque Mondiale36, cela a eu pour effet une augmentation en termes réels de 26% des
dépenses durant la période et à « servi à financer l’extension du budget ordinaire. 86% de
l’augmentation étaient attribués à cette extension … le budget d’investissement ayant absorbé
qu’une petite partie sur la période (14%) ». Cet état de fait justifie de la nécessité pour les
Comores d’instaurer une règle de plafonnement de dépense pour parer à ce type de dérapage.
33 Lire à ce sujet ; Fiche Fipeco « Faut il des règles budgétaires et lesquelles ? » ; site
https://www.fipeco.fr consulté le 04/04/2018
34 Laurent PAVOL, Jeanine PAVOT, « La maitrise de la croissance des dépenses : un facteur
clé pour des finances publiques saines », Bulletin de la Banque de France ; N°154 –octobre
2006, pp 47
35 Le programme de la citoyenneté économique consistait à donner aux bédouins apatrides
la possibilité de devenir citoyens dans leur pays d’accueil. Les Comores leur accordaient la
nationalité en contrepartie d’une somme d’argent, sous la supervision du Qatar.
36 Banque Mondiale, « Union des Comores-Revue des dépenses publiques et de la gestion
budgétaire », 2015, pp 17
28
La norme de dépense a été définie37 comme « un instrument permettant de s’assurer de la
bonne maitrise des dépenses de l’Etat, en déconnectant l’évolution des dépenses… , de
l’évolution des recettes, très sensible à la conjoncture ».
Ainsi, nous proposons l’instauration d’une norme de dépense exprimée en volume plus
précisément la norme zéro volume c’est à dire tenant compte de l’inflation prévisionnelle.
Elle prendra en compte dans son champ les dépenses de l’Etat central ainsi que celles des îles
autonomes.
Cependant l’ensemble des dépenses ne peut être concernés par la norme. C’est le cas par
exemple des charges de la dette qui dépendent des taux d’intérêt et donc en dehors de la
discrétion du gouvernement. Aussi les dépenses sociales (santé et éducation) doivent
bénéficier d’un traitement préférentiel. Il en est de même des dépenses d’investissements qui
à terme sont censés s’autofinancer par une hausse du PIB.
Nous estimons, sur la base du budget 2016, que 86,6%38 des dépenses totales pourront être
concernées par la norme de dépense.
Enfin pour donner plus de crédibilité à un engagement de l’Etat de maitriser la dépense à long
terme, il nous paraît indispensable d’introduire la norme dans le cadre d’une programmation
des lois de finances à moyen terme.
Le budget de l’Etat adopté dans un cadre annuel n’offre pas une vue à moyen terme et
présente beaucoup d’incertitudes sur le cadre macroéconomique. Il présente des moyens de
corrections limités et est plus axé sur l’administration que sur une allocation des ressources
basée sur une stratégie de politiques publiques. Cela démontre de la nécessité pour les pays,
surtout en développement, de recourir à un cadre de programmation budgétaire à moyen
terme.
Ainsi, le cadre des dépenses à moyen terme (CDMT) 39 « permet de fournir un cadre de
cohérence pour la planification des dépenses publiques à moyen terme en fonction des
Dans ce cadre, nous estimons que les dispositions nécessaires doivent être prises pour
engager les Comores dans la démarche des CDMT. Elle se trouve d’ailleurs facilitée par
l’existence d’un cadre macro-budgétaire à moyen terme 2015-2017 mis en place avec l’appui
technique du Centre régional d’assistance technique du FMI basé à Maurice (AFRITAC-Sud).
Ce cadre qui est la mise en cohérence des agrégats des cinq secteurs macroéconomiques
(secteur réel, secteur budgétaire, extérieur, monétaire et privé) devait constituer selon ce
rapport 41 une ébauche ou une préfiguration du CDMT. L’appropriation du cadre macro-
budgétaire à moyen terme par l’organe institutionnel déjà mis en place depuis 2014 mais non
fonctionnel, constitue une étape importante de la mise en place des CDMT.
L’expérience des autres pays Africains a montré que la mise en place des CDMT n’a pas
toujours été un exercice facile. Elle doit être effectué de façon progressive et nécessite pour sa
réussite un système de finance publique crédible, transparent et fiable. Elle se manifestera par
Nous pouvons à ce stade affirmer que le système des finances publiques en Union des
Comores, nécessite une appropriation effective du cadre juridique existant par le renforcement
des règles pertinentes d’encadrements de la dépense. Seulement, pour bâtir de façon pérenne
un système des finances publiques viables, un renouveau de la gouvernance est indispensable.
L’un des grands défis de l’Etat Comorien en matière de gouvernance financière réside en sa
capacité à pouvoir libérer un espace budgétaire afin d’améliorer les investissements sur
ressources intérieures et ainsi relancer la croissance. Une telle approche nécessite avant tout
d’améliorer la programmation budgétaire et sa réalisation (Section I) ainsi qu’une maitrise de
la masse salariale et des choix efficients dans la dépense publique (Section II).
Maitriser la dépense, c’est avant tout mieux prévoir les recettes et les dépenses (Paragraphe I),
c’est à dire être réaliste et sincère dans la prévision. Cela n’est toujours pas facile quand l’on
sait que la recette dépend plus de la conjoncture économique, d’où la nécessité de pouvoir
anticiper les évènements en cours d’exécution budgétaire pour réguler la dépense en fonction
des ressources disponibles (Paragraphe II).
Pour maitriser la dépense, il faut avant tout être capable de mieux prévoir la recette car c’est
la recette qui va financer la dépense à moins de recourir à l’emprunt considéré par le
Professeur ROBERT HERZOG 42 comme « la ressource la plus flexible mais la plus
dangereuse puisqu’elle se mue en charge pour l’avenir ». Ainsi, cela reviendrait à ni
surestimer les recettes ni les sous estimer, car chacune des deux options présentent ses propres
conséquences. Surestimer les recettes a pour conséquence de faire augmenter les dépenses,
difficile par la suite de les faire baisser, compte tenu de la théorie de l’expansion continue de
42 ROBERT HERZOG « Les ressources publiques sous tension : victimes ou causes de la crise
financière publique ? », RFDA 2012/4 N° 144 ; p 915
31
la dépense publique formulé depuis les années 1870 par Adolphe WAGNER alors que sous
estimer les recettes peut agir négativement sur les agents économiques.
Au même titre que les recettes, les dépenses doivent être évaluées de façon réaliste et sincère
surtout que l’exercice est moins compliqué que pour les recettes. Elles ne doivent pas être
surestimées car les administrations auront tendance à tout engager sinon il y’a selon elles, un
risque que les crédits ne soient pas reconduits l’année qui va suivre.
Enfin, l’objectif ici n’est pas de présenter des modèles de programmation financière, mais
nous pensons que la prévision des dépenses doit se baser sur les priorités stratégiques en
privilégiant après les dépenses obligatoires (dette, salaires…), certaines dépenses dites
sociales (santé et éducation).
En tout état de cause, pour avoir une meilleure prévision des recettes et des dépenses, il est
nécessaire de mettre en place au sein de la Direction générale de la comptabilité publique,
l’Agence comptable centrale du trésor (ACCT) afin de permettre la production d’une
information financière agrégée et consolidée, issue de l’exécution budgétaire de l’ensemble
des entités (Union et îles autonomes). Il est également important de renforcer les capacités de
l’Institut national des statistiques, des études économiques et démographiques (INSEED) à
produire des comptes nationaux crédibles et dans des délais raisonnables. Enfin, il serait
important de faciliter la coordination de l’ensemble des services en charge de la production
de l’information et de la prévision budgétaire (Banque centrale, INSEED, Services du Trésor,
Budget, Douane et services des impôts).
En effet, la politique de dépenser parce que les crédits sont disponibles qui prévaut jusqu’à la
date d’aujourd’hui dans l’administration comorienne doit céder la place à une logique de
43 ROBERT HERZOG, « Les ressources publiques sous tension : victimes ou causes de la crise
financière publique ? », RFDA 2012/4 N° 144 ; p 915
32
régulation de la dépense en fonction de la ressource disponible. Dans ces conditions, il existe
deux approches qui doivent être cumulatives.
-La première consiste à assurer une régulation à partir des crédits budgétaires afin de
s’assurer d’une meilleure exécution budgétaire. C’est le sens de l’article 70 de la LOFE qui
confère au Ministre des finances « un pouvoir de régulation budgétaire qui lui permet, en
cours d’exécution d’annuler un crédit devenu sans objet…ou d’annuler un crédit pour
prévenir une détérioration de l’équilibre budgétaire ». Le décret portant attribution du
contrôle financier renchérit en confiant au contrôleur financier la mission d’assister le
Ministre « dans la mise en ouvre des mesures destinées à prévenir toute détérioration de
l’équilibre budgétaire et participe à la mise en œuvre de la régulation budgétaire ». Au delà
de ces dispositifs, nous pensons que de façon pratique la rubrique « dépenses imprévues » du
budget ne doit pas servir qu’à financer des dépenses qu’il était réellement impossible
d’anticiper lors de la préparation du projet de la loi de finances. On devrait ainsi mette en
terme à l’usage qui s’est développé d’utiliser cette rubrique pour des dépenses qui ne sont pas
vraiment imprévues.
Aussi dans chaque programme pourrait être constituée une réserve de précaution aux
alentours de 3% de l’ensemble des crédits du programme.
33
Si pour Régis LANNEAU 44 , « maitriser la dépense publique, c’est respecter l’équilibre
budgétaire » afin de ne pas recourir à l’emprunt même si tout emprunt n’est pas nocif (selon
les Keynésiens, il est même recommandé en temps de crise), pour les Comores, cela se justifie
plus dans une logique de ne pas engranger des instances de paiements.
En tout état de cause, la recherche d’une solution au problème de l’accumulation des arriérés
doit préoccuper les responsables politiques. L’absence de canaux de financement privé
empêche les autorités de financer le déficit par l’emprunt. La seule possibilité de financement
reste l’avance statutaire45 de la Banque centrale. Ce sont donc les arriérés intérieurs et/ ou
extérieurs 46qui vont financer le déficit. Il apparaît donc clairement qu’un bon fonctionnement
du comité de trésorerie contribuerait largement à rétablir l’équilibre budgétaire, la crédibilité
de l’Etat auprès des fournisseurs ainsi que le principe du service fait.
Face à des ressources extérieures qui deviennent de plus en plus difficile à mobiliser et des
recettes intérieures insuffisantes, l’Etat Comorien se trouve confronté à un véritable défi qui
est celle de créer un espace budgétaire pour des dépenses capable de relancer la croissante et
ainsi lutter contre la pauvreté (Paragraphe II). Cela passe nécessairement par la capacité de
trésorerie à l’Etat à hauteur de 20% de la moyenne des recettes fiscales des trois dernières
années.
46 Arriérés : Le manuel de statistique des finances publiques 2001 du FMI considère
Avec un ratio masse salariale rapportée aux recettes fiscales de 69,7% en 2016, la masse
salariale en Union des Comores reste l’une des plus élevée d’Afrique subsaharienne47. Même
si l’on ne peut pas occulter l’importance de l’emploi public aux Comores, comme c’est
d’ailleurs le cas pour les autres Etats insulaires, la maitrise de la masse salariale doit
constituer selon un aide mémoire d’Afritac-sud 48 « le levier prioritaire pour dégager les
marges de manœuvres recherchées ».
Il est indéniable que l’évolution des effectifs constitue la principale cause de la dynamique de
la masse salariale en lien avec d’autres facteurs analytiques. Ainsi, plusieurs solutions sont
envisageables pour arriver à contenir la masse salariale.
En effet, nous pensons que l’action prioritaire serait d’encadrer l’autonomie accordée aux îles
dans le recrutement de ses fonctionnaires. Dans ce sens, la loi N° 04-006/ AU portant statut
général de la fonction publique prévoit en son article 25, la création d’un organe dénommé
Haute autorité de la fonction publique ( HAFOP) avec pour mission de « coordonner et
garantir la mise en application de la règlementation en matière de fonction publique sur
l’ensemble du territoire de l’Union… en tant qu’organe régulateur, elle donne en outre, des
avis conformes sur tous les actes et mesures relatifs à la carrière de agents de l’Etat
conformément aux autorisations budgétaires ». Ainsi, on peut imaginer que cet organe soit
chargé d’un contrôle de légalité sur l’ensemble des actes ayant une incidence financière
(décisions de recrutements, d’avancements, de reclassements …) des directions des fonctions
publiques des îles. A ce titre, ces décisions doivent faire l’objet d’une transmission préalable à
la HAFOP pour contrôle de légalité avant d’avoir un caractère exécutoire. Le contrôle pourra
porter sur la présence d’un poste budgétaire (poste de travail) ouvert dans le cadre de la loi de
finances, l’adéquation entre le poste de travail et le profil de l’agent prévu dans les cadres
organiques de la fonction publique, ainsi que les crédits budgétaires disponibles. Cette
transmission ainsi que le visa de la HAFOP pourrait se faire de façon dématérialisé pour ne
pas entrainer des retard dans la gestion. Les autorités pourraient profiter du projet e-
Ensuite, une autre action serait de réviser les cadres organiques de la fonction publique, mis
en place depuis 2012, pour les adapter aux effectifs des fonctionnaires déjà existants, comme
le gouvernement n’envisage pas des licenciements de ceux qui n’ont pas été retenu par ces
derniers. Par la suite, une règle devrait être posée de façon claire, en interdisant tout
recrutement sans que le poste soit prévu ou vacant dans les cadres organiques. Ces mesures
devraient contribuer à mettre fin aux recrutements par contrat, souvent injustifiés, et au
paiement par états manuels. Le recrutement par contrat de travail devrait être envisagé comme
un outil de gestion plus souple de la masse salariale et doit être pris en compte dans le cadre
de prévision des effectifs en loi de finances de l’année et non comme un outil discrétionnaire
à la disposition du Ministre des finances.
Aussi, compte tenu du sureffectif des agents de la fonction publique, on pourrait envisager le
non remplacement des départs à la retraite, sauf pour les enseignants et le personnel médical
(à différencier avec l’enseignement et la santé).
Egalement, pour une efficacité du suivi de la masse salariale, il est nécessaire que la section
des comptes52 de la cour suprême dans son rôle d’assistance au parlement et au gouvernement
dans l’exécution des lois de finances évalue la maitrise des salaires par la production des
notes spécifiques d’exécution budgétaire sur la masse salariale.
Enfin, une dépense salariale est une dépense inéluctable et constitue un engagement de l’Etat
pour le long terme (carrière professionnelle et retraite), sa maitrise revêt une importance
capitale, surtout pour le cas des Comores, pour libérer les marges de manœuvres nécessaires
pour des dépenses plus productives.
52
Lire à ce sujet, Hervé Boulanger, « Les institutions supérieures de contrôle à l’heure de la
maitrise des dépenses publique », géoéconomie 2013/4 N° 67, p. 207-221
37
Paragraphe II. Mieux dépenser en privilégiant les dépenses productives et de lutte contre la
pauvreté.
Les études empiriques sont assez contrastées sur l’effet de la dépense publique sur la
croissance économique. Pour certains, une hausse de la dépense publique a un effet quasi
nulle sur la croissance alors que d’autres prouvent l’inverse. C’est le cas de NUBUKPO54
(2003) dans son étude sur l’impact de la dépense publique sur la croissance économique dans
les pays de l’UEMOA (1965-2003), qui établit qu’à long terme une hausse des dépenses a un
impact positif sur la croissance nettement différenciée par pays. Par ailleurs, il note un effet
positif des dépenses d’investissements sur les économies des pays de l’UEMOA à court et à
long terme. Les études de B. Mansouri (2003) pour le Maroc, prouvent que c’est plus la
structure des dépenses qui compte en définitive mais pas les dépenses à un niveau plus ou
moins agrégé. Une étude du FMI 55 démontre également « qu’une variation du PIB de
l’investissement public fait varier la production d’environ 0,1% dans le même sens de
l’année du choc et de 0,7% après 3 ans ». Cette étude montre en même temps, que dans le cas
de politique d’assainissement consistant à réduire les dépenses courantes, comme c’est le cas
Pour le cas de l’Union des Comores, les services de santé de base et l’éducation primaire et
secondaire relèvent de la compétence des îles autonomes. Ainsi des services à la charge des
îles comme les matériels d’enseignements, l’inspection scolaire, les médicaments, la
formation et l’assainissement sont déficients car sous financés. Malgré l’insuffisance de leur
ressource, une priorité est plus donnée aux salaires des fonctionnaires et aux frais de
fonctionnements des administrations insulaires. Les recettes à partager reçues sont affectées
au paiement de salaires de fonctionnaires. Nous proposons donc de changer le système actuel,
d’allocation des ressources sous formes globalisées vers des subventions plus ciblées sur
l’éduction et la santé (dotation de fonctionnement pour la santé de base et pour l’éducation
surtout primaire). Nous pensons même qu’à terme, il faudrait revoir la loi relative aux
partages des recettes entre l’Union et les îles pour l’adapter au contexte actuel et s’assurer
d’une meilleure allocation des ressources aux services sociaux et de lutte contre la pauvreté.
L’éducation et la santé d’un pays sont si important et ne peuvent être laissées par l’Etat à la
seule bonne volonté des partenaires comme l’UNICEF et l’OMS ainsi qu’aux communautés
villageoises.
En outre, une étude de la Banque Mondiale57 montrent que « des projections de scenario
budgétaires indiquent que les reformes d’assainissement pourraient accroitre la marge de
manoeuvre budgétaire sur trois ans d’une valeur pouvant aller jusqu’à 6,2% du PIB alors
qu’un statu quo pourrait occasionner un déficit de financement pouvant aller jusqu’à 1,6% du
PIB ». Nous pensons que cette marge de manœuvre, une fois dégagée, pourrait ainsi être
orienté vers des investissements intérieurs productifs et des dépenses sociales jusqu’à présents
sous financés. A ce titre, nous pensons que le programme qui avait été mis en place entre
2013 et 2016 par l’ancien exécutif de l’île de Ngazidja, mais abandonné par l’actuel, qui
consistait à offrir gratuitement des fournitures scolaires et une couverture médicale totale pour
l’ensemble des élèves du primaire devrait être poursuivie et même généralisé sur l’ensemble
des îles. Aussi certaines dépenses relatives à la fourniture de matériels didactiques, à
Comores, 2015
39
l’inspection scolaire, aux médicaments et aux équipements médicaux, à l’accès à l’eau
potable, à l’assainissement et à l’électricité devront être privilégiées.
Cependant la grande difficulté pour les politiques d’assainissement visant à réduire les
dépenses courantes et privilégier celles d’investissement repose généralement sur le choix à
faire : quelles dépenses courantes faut- il comprimer et quelles dépenses d’investissements
faut-il privilégier car certains investissements publics peuvent être couteux et improductifs.
Cela rejoint ainsi la nécessité de mettre en place les cadres des dépenses à moyen terme
développés dans le chapitre précédent.
En tout état de cause, pour des dépenses publiques efficientes capable de relancer la
croissance et lutter contre la pauvreté, la qualité de la gouvernance, de la gestion de
l’investissement public en général et dans la sélection ainsi que celle de l’exécution et du
suivi des projets sont nécessaires.
40
Conclusion
Au terme de notre étude, il serait important de noter que six ans après le point d’achèvement
du programme FEC avec le FMI, l’allègement de la dette obtenu dans le cadre de l’IPPTE et
de l’IADM, le cadre budgétaire Comorien n’est toujours pas stabilisé.
Ainsi, dans un contexte de recul de l’aide extérieure, les autorités se trouvent confrontées à
des véritables défis en matière de lutte contre la pauvreté et du chômage des jeunes, de santé
et d’éducation ainsi qu’aux infrastructures nécessaires pour le développement du pays.
C’est dans ce cadre que ces autorités ont révisé le SCA2D pour intégrer un volet de
consolidation de la gestion des finances publiques en donnant une priorité à la maitrise de la
dépense publique.
Ainsi, avec ce poids de la masse salariale qui absorbe la presque totalité des ressources, la
maitrise de la dépense publique reste le véritable levier qui permettrait de libérer un espace
budgétaire pour faire face aux divers défis du développement.
En effet, l’enjeu est d’autant plus important qu’il permet à l’Union des Comores de retrouver
une crédibilité perdue auprès des organisations internationales et régionales comme le FMI, le
COMESA ou l’organisation de la Zone franc. Il permet également de se conformer aux
procédures d’exécution de la gestion des finances publiques souvent décriées par des
organismes internationaux d’évaluation comme le PEFA et le TADAT.
41
confiance des fournisseurs dans l’Etat, le non respect du principe de service fait et du coût
économique associé.
En dépit de cette situation, avec une réelle volonté politique, une mobilisation de l’ensemble
des leviers possibles peut contribuer efficacement à maitriser la dépense. Elle nécessite en
priorité une appropriation effective du cadre juridique existant, capable de moderniser non
seulement la gestion budgétaire mais aussi l’Etat en mettant les principes de performances et
de compte-rendu (accountability) au cœur de l’action de l’Etat. Ce cadre juridique pourrait
être renforcée par un encadrement de la dépense par une norme de dépense et l’instauration
progressive des cadres de dépenses à moyen terme. Ainsi la mise en place de règles
budgétaires crédibles et des cadres de dépense à moyen terme permettront de créer un espace
budgétaire et limiter de recourir à l’avenir à des assainissements abrupts.
Egalement, le véritable défi pour les autorités comoriennes réside dans leur capacité à
maîtriser la masse salariale en la ramenant à des proportions raisonnables par rapport aux
recettes fiscales. Une telle volonté impliquerait tout d’abord l’encadrement de l’autonomie
des îles dans la procédure de recrutement et d’avancement en confiant à la HAFOP, un rôle de
contrôle de légalité des actes des fonctions publiques insulaires. Aussi une règle de non
remplacement des fonctionnaires partant à la retraite pourrait être instauré pour un temps
limité. Seulement, le véritable levier qui contribuerait à maitriser la masse salariale est le
schéma d’emploi associé au document de prévision de gestion des emplois et des crédits de
personnel dans un cadre d’un dialogue de gestion entre l’ensemble des acteurs associés à la
gestion de la masse salariale.
Enfin, une attention particulière doit être portée à ce que une fois libéré, l’espace budgétaire
sert à financer des dépenses d’investissements productives capables de relancer la croissance
et lutter contre la pauvreté. Il doit également privilégier les dépenses de santé et d’éducation
en raison de leur impact direct sur le bien être et aussi sur leur caractère d’investissement.
Effectivement ces dépenses fournissent des avantages directs aux bénéficiaires et peuvent
aussi fournir des avantages indirects à la société dans son ensemble.
42
Au delà de ces mesures, il nous semble nécessaire que les recommandations suivantes soient
mise en œuvre en vue d’améliorer la gestion de la dépense publique ou la gestion des
finances publiques de façon générale:
mettre en place une centrale des achats publics, favorisant ainsi des économies
d’échelles ;
introduire des contrats d’objectifs engageant les responsables des administrations
centrales du Ministère des finances sur les objectifs à atteindre annuellement avec les
indicateurs associés qui peuvent être quantitatifs et/ou qualitatifs ;
accorder une liberté aux responsables des administrations centrales dans le choix de
leurs collaborateurs ;
faire évoluer l’organisation du secrétariat général du Ministère des finances et du
budget en lui dotant de plus de personnel qualifié et expérimenté pour une meilleure
animation et un meilleur pilotage de l’ensemble des missions des directions centrales
du Ministère ;.
mettre en place un indispensable système de maitrise de risque au sein des directions
centrales du Ministère des finances afin de s’assurer de l’atteinte des objectifs des
structures et d’un risque raisonnable, compte tenu des enjeux, avec un responsable
maitrise de risque rattaché au secrétariat général du Ministère pour lui donner plus
d’indépendance ;
En un mot, de façon générale, pour réussir à stabiliser son cadre macro budgétaire et faire face
aux défis immenses de son développement, l’Union des Comores doit s’engager sans délai
dans les réformes structurelles nécessaires. Pour leur réussite, une ferme volonté politique,
une mise en place d’un organe institutionnel chargé du pilotage de la reforme, une
mobilisation de l’ensemble des acteurs et du financement adéquat et un renforcement des
capacités institutionnelles sont indispensables.
43
Bibliographie
1. Ouvrages :
Michel Pau, L’essentiel de la LOLF : La nouvelle constitution financière de la France,
Gualiano éditeur, 2ème édition, Paris 2007, 190 p.
Mohamed Moindze, Les budgets nationaux au service du développement et de la réduction
de la pauvreté, Edition Herman, 2012, 218 p.
2. Articles :
Hervé Boulanger « Les institutions supérieures de contrôle à l’heure de la maitrise des
dépenses publiques », Editions choiseau « Géoéconomie », 2013/4 N° 67 Pages 207-221
Jean –Michel HUET, DIANNE DE Pompignan et Julien BATT « Les pionniers de la
nouvelle gestion publique », l’expansion Management Review, 2013/2, Pages 113-121
Laurent PAUL, Jeanne PAVOT « La maitrise de la croissance des dépenses publiques : un
facteur clé pour des finances publiques saines », bulletin de la Banque de France, N° 154,
octobre 2006
Michel BOUVIER « La maitrise de la dépense publique au cœur d’un projet de société ? »,
RFFP N° 125-Février 2014
Régis LANNEAU, « QU’entend-on par la maitrise de la dépense publique », RGFP N°
11/2013, pages 16-20
Robert Hertzog « Les ressources publiques sous tension : victimes ou causes de la crise des
finances publiques » RFAP, 2012/4 N° 144, P 915 à 928
3. Mémoire
Hidaya Binti MOHAMED, Dépense publique et croissance au Sénégal, Mémoire de Master,
Université Cheikh Anta Diop de Dakar, 2015, 76 p.
4. Rapport.
Banque Mondiale,
-« Revue de la dépense publique et de la gestion budgétaire-Union des Comores », 2015
-« Evaluation de la gestion des finances publiques dans l’Union des Comores pour la
période 2013-2015 selon la méthodologie PEFA », Mai 2016
Fond Monétaire International
-« les dépenses publiques improductives : Analyse pragmatique de l’action des pouvoirs
publics », Département des Finances publiques, Washington, 1996
-« Cadrage macro-budgétaire à moyen terme 2015-2017 », Département des finances
publiques, Afritac-sud, 8-22 Mai 2014
-TADAT « Outil d’évaluation de l’administration fiscale : Union des Comores, rapport
d’évaluation de la performance », Janvier 2016
-Consultation du FMI au titre de l’article IV, N° 16/393, Décembre 2016
-« Consolider les finances publiques pour accompagner la stratégie de développement de
44
l’Union des Comores : conditions de réussite et actions prioritaires », Afritac-sud, janvier
2017
-Perspectives économiques régionales « Afrique subsaharienne : ajustement budgétaire et
diversification économique », Etudes économiques et Financières, octobre 2017
5. Textes juridiques :
Lois
-Loi N° 04-006/AU portant statut général de la Fonction publique
-Loi N° 12-009/AU du 21 juillet 2012 portant opérations financières de l’Etat.
Décrets
- Décret N°09/083/PR du 29 juillet 2009 portant établissement de la nomenclature des pièces
justificatives de dépenses de l’Etat
-Décret N°12-159/PR du 08 août 2012 portant institution et organisations du contrôle
financiers des dépenses budgétaires de l’Union des Comores
6. Entretien et allocution
Entretien avec Lionel SIRET, Chef du département du contrôleur budgétaire, service
budgétaire et comptable ministériel.
François HOLLANDE, discours du 14 janvier 2014
7. Sites internet
-www.imf.org
-https://www.fipeco.fr
-https://www.performance.publique.budget.gouv.fr
45
Table des matières :
Dédicace ...................................................................................................................................................... 2
Remerciements : ......................................................................................................................................... 3
Sommaire .................................................................................................................................................... 4
Liste des sigles et abréviations .................................................................................................................... 5
Introduction ................................................................................................................................................. 6
Partie I. La maitrise de la dépense publique : un enjeu central du système financier Comorien. ............. 10
Chapitre I : La maitrise de la dépense publique : levier de crédibilité de l’Etat auprès de ses partenaires.
................................................................................................................................................................... 10
Section I : Un environnement international normé. ........................................................................... 10
Paragraphe I : La surveillance du FMI au titre de l’article IV. ............................................................ 10
Paragraphe II : La surveillance budgétaire multilatérale au titre des pays de la zone Franc et du
COMESA............................................................................................................................................. 11
Section II : Des écarts par rapport aux normes internationales. ........................................................ 13
Paragraphe I : Le regard du PEFA. ..................................................................................................... 14
Paragraphe II : Le regard du TADAT .................................................................................................. 15
Chapitre II : La maitrise de la dépense publique : levier de bonne gestion budgétaire. ............................ 17
Section 1 : Une masse salariale en constante augmentation malgré des ressources en baisse. ....... 17
Paragraphe I : Une masse salariale en constante augmentation ...................................................... 17
Paragraphe II : Une mobilisation des ressources intérieures insuffisantes. ..................................... 19
Section II : Un pilotage de l’exécution budgétaire à affirmer. ............................................................ 21
Paragraphe I : Une régulation budgétaire limitée............................................................................. 21
Paragraphe II : Une gestion de la trésorerie inefficace. .................................................................... 22
Partie II. La diversité des leviers possibles de maitrise de la dépense publique........................................ 23
Chapitre I. La nécessité d’un cadre juridique renforcé de la dépense publique. ...................................... 23
Section I. L’indispensable renforcement de l’effectivité des règles juridiques d’exécution de la
dépense publique. ................................................................................................................................ 23
Paragraphe I. Moderniser la gestion par la loi portant opération financière de l’Etat. .................... 23
Paragraphe 2 : Un cadre réglementaire comme outil de maitrise de la dépense. ........................... 25
Section 2. Faire émerger des règles pertinentes de maitrise de la dynamique de la dépense
publique. ............................................................................................................................................... 27
Paragraphe I. La nécessité d’un recours à des normes de dépense ................................................. 28
Paragraphe II. Mettre en place les cadres de dépense à moyen terme. .......................................... 29
Chapitre II. La nécessité d’un renouveau de la gouvernance. .................................................................... 31
Section I : Une amélioration de la programmation budgétaire et de son suivi.................................. 31
Paragraphe I : Une nécessité de mieux prévoir les recettes et les dépenses ................................... 31
46
Paragraphe II : Mettre la dépense sous contrainte de la recette ..................................................... 32
Section II. Mieux maitriser la dépense et privilégier les dépenses efficientes. ................................. 34
Paragraphe I : Maitriser la masse salariale : un véritable enjeu. ...................................................... 35
Paragraphe II. Mieux dépenser en privilégiant les dépenses productives et de lutte contre la
pauvreté. ........................................................................................................................................... 38
Conclusion................................................................................................................................................. 41
Bibliographie ............................................................................................................................................. 44
Table des matières : .................................................................................................................................. 46
47