Geol 25

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Dr CHABOU Moulley Charaf

Université Ferhat Abbas, Sétif 1


Département des Sciences de la Terre
LMD -Sciences de la Terre et de l’Univers- Géosciences -
Module : Géologie 2. 1ère année – Semestre 2.

V. La stratigraphie et l’échelle des temps géologiques

V.1. Définitions

La stratigraphie (du latin stratum, « couche », et du grec graphein, « écrire ») est la


science qui étudie la succession, dans l’espace et dans le temps, des couches de terrains ou
strates et des événements qu’elles ont enregistrés. Elle permet d’établir une chronologie
stratigraphique relative et a pour objectif de retracer l’histoire de la Terre.

On appelle strate une couche de terrain homogène possédant une individualité nette.
Son épaisseur peut varier de quelques centimètres à plusieurs dizaines de mètres. Les strates
sont séparées par des joints de stratification horizontaux. La strate est l’unité de base de la
stratigraphie.

La stratification désigne la disposition de dépôts successifs et horizontaux de


sédiments en couches ou strates.

Strates
Joints de stratification

Figure 1 : Schéma représentant des strates séparées par des joints de stratification
horizontaux.

V.2. Les principes de la stratigraphie

Les fondements de la stratigraphie et l’établissement de la datation ou chronologie


relative se basent sur de principes simples, appelés principes de la stratigraphie.

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V.2.1. Le principe de l’uniformitarisme

Le principe de l’uniformitarisme a été évoqué pour la première fois par James Hutton
(1726-1796), qui en étudiant des roches en Ecosse avait conclut que les mêmes processus
géologiques qui opèrent actuellement sur Terre sont ceux qui existaient dans le passé. Ce
principe est souvent résumé par la phrase célèbre : « le présent est la clé du passé ». Dans sa
version moderne, ce principe stipule que les lois de la nature n’ont pas varié au cours du
temps, les lois physiques et chimiques actuelles étaient valides dans le passé de la Terre.

V.2.2. Le principe de la superposition (Nicolas Sténon, 1669)

Dans une succession de couches ou strates déposées à l’horizontale les unes sur les
autres et non déformées ou renversées par la tectonique, la couche la plus ancienne est à la
base et la plus jeune au sommet.

Figure 2 : Schéma du principe de


superposition. La couche a est la plus
ancienne, la couche e la plus jeune.

V.2.3. Le principe d’horizontalité primaire

Les couches sédimentaires se sont déposées horizontalement, parallèlement à la


surface de la Terre. Une couche sédimentaire actuelle inclinée ou plissée a été déformée
postérieurement à son dépôt.

V.2.4. Le principe de continuité

Une même couche a le même âge sur toute son étendue. Par exemple, les strates
horizontales exposées de part et d’autre d’une vallée fluviatile formaient des couches
continues et ont ensuite été érodées par la rivière (figure 3).

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Figure 3 : Schéma illustrant le
principe de continuité. Les strates
sont corrélées de part et d’autre de
la vallée fluviatile

V.2.5. Le principe de recoupement

Les couches ou strates sont plus anciennes que les failles, dykes et roches qui les
recoupent.

Dans l’exemple de la figure 4, le dyke


basaltique recoupe les couches de calcaire,
grès et argile. Sa mise en place est donc
plus jeune que le dépôt des trois couches.
Le dyke rhyolitique recoupe les couches
de calcaire et de grès mais ne recoupe pas
la couche d’argile. Il est donc plus jeune
que la couche de calcaire et de grès. La
couche d’argile est plus jeune que le dyke
rhyolitique.

Figure 4 : premier schéma illustrant


le principe de recoupement
(cas de dykes).

Dans l’exemple de la figure 5, la


faille recoupe la couche de
calcaire et d’argile, mais ne
recoupe pas le basalte. La faille
est donc plus jeune que les
couches de calcaire et d’argile,
mais plus ancienne que le basalte.

Figure 5 : second schéma illustrant le principe


de recoupement (cas d’une faille)

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V.2.6. Le principe de l’inclusion

Un fragment de roche trouvé à l’intérieur d’une autre roche s’appelle inclusion. Si le


fragment de roche est trouvé à l’intérieur d’une roche magmatique, on l’appelle xénolite.
Dans les deux cas, les fragments de roche inclus dans une couche sont plus anciens que la
couche.

Dans l’exemple de la figure 6, la coulée de basalte a arraché des fragments de grès en


remontant à la surface. Elle est donc plus jeune que la couche de grès. De la même manière, la
coulée de rhyolite contient en son sein des inclusions de basalte. Elle est donc plus jeune que
la coulée de basalte.

Figure 6 : schéma illustrant le principe de l’inclusion.

Le principe de l’inclusion peut être utilisé pour reconnaître si une couche de roche
magmatique interstratifiée est un sill ou une coulée. Dans l’exemple de la figure 7, la couche
basaltique contient des inclusions de grès sus-jacents et de rhyolite sous-jacente. Elle est donc
plus jeune que la coulée de rhyolite et la couche de grès. C’est donc un sill, qui s’est mis en
place entre la coulée de rhyolite et la couche de grès.

Figure 7 : schéma illustrant la détermination du mode de gisement d’une couche de roches


magmatiques en utilisant le principe d’inclusion.

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V.2.7. Le principe d’identité paléontologique

Ce principe stipule qu’un ensemble de strates de même contenu paléontologique


(mêmes fossiles) est de même âge.

Pour l’application de ce principe, on défini la notion de « fossiles stratigraphiques » qui


doivent avoir un certain nombre de caractères :
 Evolution rapide de l’espèce dans le temps (l’espèce doit avoir une courte période de
vie sur Terre).
 Vaste répartition géographique.
 Grand nombre d’individus et grand potentiel de fossilisation.

V.2.8. Le principe de la succession des faunes

Ce principe stipule que les organismes fossiles se succèdent dans le temps dans un
ordre défini et reconnaissable et que l'âge relatif des strates peut donc être
déterminé à partir de leur contenu en fossiles.

V.3. Les discordances (prises ici dans le sens anglo-saxon « unconformity »)

V.3.1. Définitions

Une discordance est une surface d’érosion ou de non-dépôt séparant deux ensembles
de strates. Elle représente l’intervalle de temps pendant lequel aucun sédiment n’a été
conservé. Cet intervalle de temps est appelé hiatus ou lacune.

V.3.2. Différents types de discordances

a. Disconformité

Une disconformité est une discordance où les couches supérieures et inférieures sont
parallèles et séparées par une surface irrégulière d'érosion. Après le dépôt, l’érosion enlève
des couches, puis la sédimentation reprend sur la surface d’érosion (fig. 8).

Figure 7 : Séquence d'événements conduisant à la formation d'une disconformité.

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b. Non-conformité

Discordance où les couches supérieures (sédimentaires ou roches/sédiments volcaniques)


recouvrent des roches métamorphiques ou magmatiques. On parle de non-conformité lorsque
les couches supérieures se sont déposées sur une surface d’érosion au dessus de roches
magmatiques ou métamorphiques (figure 8).

Figure 8 : Séquence d'événements conduisant à la formation d'une non-conformité.

c. Discordance angulaire

Une discordance angulaire se produit lorsqu'il y a interruption de la sédimentation, suivie


d'une déformation (basculement ou plissement) et d'une érosion partielle (figure 9). La
discordance s’observe entre les couches les plus anciennes déformées (basculées ou plissées)
et celles plus récentes, horizontales. Une discordance angulaire existe donc entre deux
couches superposées dont les pendages sont différents de part et d'autre de la surface de
discordance.

Figure 9 : Séquence d'événements conduisant à la formation d'une discordance angulaire.

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d. Paraconformité

Discordance où les couches supérieures et inférieures sont parallèles et séparées par une
surface plane ne présentant aucune apparence d'érosion. Très difficile à reconnaître, la
discordance doit être établie par la différence d'âge des strates (figure 10).

Une bioturbation dans les couches situées juste au dessous de la surface de discordance
peut être un indicateur d’une paraconformité (figure 11).

Figure 10 : Schéma montrant un exemple d’une paraconformité

Figure 10 : Schéma d’une paraconformité avec une bioturbation affectant les couches situées
juste au dessous de la surface de discordance.

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V.4. La datation absolue et méthodes radiochronologiques

Les méthodes stratigraphiques vues précédemment permettent de donner un âge


relatif aux roches. Pour donner un âge absolu, on utilise les méthodes radiochronologiques.

Les méthodes radiochronologiques sont basées sur la désintégration des éléments


radioactifs. Soit un isotope radioactif Père (P) qui se désintègre en élément radiogénique fils
(F). La quantité d’atomes de l’élément père (P) en un temps (t) est donné par l'équation
exponentielle:

P = P0 e-λ.t

P0 est la quantité de l'élément père au temps t = 0. λ est un coefficient de


proportionnalité (λ > 0) appelé : constante de désintégration radioactive qui s’exprime en a-1
(inverse du temps).

On définit également la période d’un élément radioactif (T) ou demi-vie comme étant
le laps de temps pendant lequel se désintègre la moitié de l’isotope radioactif.

Ln2 0,693
T= =
 
La période est exprimée en unité de temps, en milliers, en millions ou en milliards
d’années. Elle permet d’évaluer d’une manière simple la vitesse avec laquelle tel ou tel
isotope radioactif se désintègre.

Si on démarre avec 1 gramme de l'isotope parent, il ne restera que 0,5 gr après une période
d'1 demi-vie, 0,25 gr après une période de 2 demi-vie, et 0,125 gr après 3 demi-vie ... (figure
11).

Plusieurs méthodes radiochronologiques sont utilisées en géologie. Pour dater des


matériaux jeunes, on utilise la méthode du Carbone-14 qui possède une période ou demi-vie
très courte (à l'échelle des temps géologiques) : 5370 ans. Cette méthode est cependant limitée
: elle ne peut pas être utilisée pour des roches ou matériaux dont l'âge est supérieur à 70000
ans, car au bout de cette période, pratiquement toute la quantité de l'élément père se sera
transformée en élément fils. Par ailleurs, elle n'est applicable que pour des matériaux et roches
contenant de la matière organiques. Pour dater des roches anciennes, on utilise des méthodes
où la demi-vie de l'isotope père est grande. Cependant, ces méthodes ne peuvent être utilisées
pour des matériaux très jeunes, car la quantité de l'élément fils accumulée durant une courte
période sera négligeable et non mesurable avec les instruments. Par exemple, la méthode
Rubidium 87 - Strontium 87 a une demi-vie de 47 Ga : elle ne peut pas être utilisée pour des
roches dont l'âge est inférieure à 10 millions d'années.

Les principales méthodes radiochronologiques utilisées en géologie et leurs


caractéristiques sont données dans le tableau 1.

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Figure 11 : Diagramme montrant la décroissance de l'isotope radioactif père et la
croissance de l'isotope radiogénique fils.

Isotopes Demi-vie ou Intervalle de temps Type de


Parent Fils période du daté par la méthode matériel daté
parent (en
années)
238 206
U Pb 4,5 Ga 10 Ma - 4,6 Ga Roches
40 40
K Ar / 40Ca 1,3 Ga 50000 ans - 4,6 Ga magmatiques et
87 87
Rb Sr 47 Ga 10 Ma - 4,6 Ga minéraux
14 14
C N 5730 ans 100 ans - 70000 ans Matière
organique

Tableau 1 : principales méthodes radiochronologiques utilisées en géologie.

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V.5. L’échelle des temps géologiques

Au cours des deux derniers siècles, les géologues ont réussi à réaliser des corrélations
stratigraphiques de roches qui se sont accumulées tout au long des temps géologiques à
travers le monde. Les résultats de ces études ont permis d'établir la colonne de l'échelle des
temps géologiques (figure 12). Les géologues divisent les temps géologiques en unités. Tout
comme une année est divisée en mois, les mois en semaine, et les semaines en jours, les unités
des temps géologiques sont divisées en petits intervalles.

La plus grande unité des temps géologique est l'éon, qui est divisé en ères. Les ères sont
subdivisées, à leur tour, en périodes, qui sont subdivisées en époques. La colonne de l'échelle
des temps géologiques est basée sur des âges relatives. Lorsque les méthodes de datation
géochronologiques ont été mises au point, les âges absolus ont été ajoutés à l'échelle des
temps géologiques.

Les éons sont divisés en 4 parties (du plus ancien au plus récent) :

 L'Hadéen : très peu de roches de cette période existent à la surface de la Terre.


 L'Archéen (Anciennes roches).
 Le Protérozoïque (Proteros : premier, zoique : vie - ce qui veut dire début de la vie)

Les trois divisions précédentes sont souvent regroupées sous le terme de : Précambrien (car
elles précédent la période du Cambrien où les formes de vie se sont diversifiées et les fossiles
ont été bien conservés dans les roches).

 Le Phanérozoïque (qui veut dire vie apparente).

Notons que le phanérozoïque, qui représente les dernières 538 millions d'années de l'histoire
de la Terre contient la plupart des subdivisions de l'échelle des temps géologiques. Le
Précambrien, qui représente plus de 4 milliards d'années de l'histoire de la Terre, 8 fois plus
long que le Phanérozoïque, ne présente pratiquement aucune subdivision. Ceci est du au fait
que les subdivisions des temps géologiques sont basées principalement sur les fossiles
trouvées dans les roches. Ces derniers sont très rares dans les roches du Précambrien, et ne
permettent pas de réaliser des subdivisions en son sein.

La subdivision des éons en ères ne concerne, sur l'échelle des temps géologiques, que le
Phanérozoïque. On distingue, de la plus ancienne et à la plus récente :

 Le Paléozoïque (qui veut dire: vie ancienne).


 Le Mésozoïque (qui veut dire la vie moyenne, cette ère est aussi appelée l'âge des
dinosaures)
 Le Cénozoïque (qui veut dire la vie récente, appelée aussi l'âge des mammifères).

Le Paléozoïque comprend les périodes suivantes:

 Le Cambrien.
 L'Ordovicien (qui a vu l'apparition des premiers organismes vertébrés : les poissons)
 Le Silurien (qui a vu l'apparition des premières plantes sur la terre ferme)
 Le Dévonien (apparition des premiers amphibiens)

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 Le Carbonifère (apparition des premiers reptiles).
 Le Permien.

Le Mésozoïque comprend les périodes suivantes:

 Le Trias (apparition des premiers dinosaures)


 Le Jurassique.
 Le Crétacé (apparition des premiers mammifères. Cette période se termine par la
disparition des Dinosaures).

Le Cénozoïque comprend les périodes suivantes:

 Le Tertiaire.
 Le Quaternaire.

Les subdivisions des périodes sont appelées : époques. Sur la colonne de la figure 12, seules
les époques du Cénozoïque ont été indiquées (figure 12).

La période est l'unité de temps la plus utilisée par les géologues. Le nom des périodes fait
souvent référence à la localité ou la région où les roches de cette période ont été décrites pour
la première fois (exemple, le Jurassique qui fait référence au Jura, région de France). Elle
peuvent faire référence aussi à une roche abondante de cette période (exemple, le Crétacé qui
fait référence à la craie qui est abondante durant cette période, le mot Creta veut dire craie en
latin).

Notons enfin que l'échelle des temps géologiques est régulièrement révisée et mise à jour.

V.6. L'âge de la Terre

Les plus anciennes roches sur Terre ont été datées à 4 milliards d'années (le gneiss d'Acasta,
situés dans les Territoires du Nord-Ouest au Canada, est daté à 4,03 milliards d’années).

Des grains minéraux de zircons trouvés en Australie sont encore plus anciens. Ils proviennent
de la formation de Jack Hills et ont été daté à 4,404 milliards d’années. Il s’agit du plus
ancien matériel daté sur Terre. Mais il s’agit là de minéraux et non pas de roches : les roches
mères qui contenaient ces zircons ont été probablement détruites.

Il est peu probable de trouver sur Terre des roches plus vieilles que 4 milliards d'années. Pour
remonter à l'âge de la Terre, on utilise les météorites, qui sont les matériaux de base à partir
desquels se sont formées les planètes du Système solaire. La majorité des météorites qui
tombent sur Terre proviennent de la ceinture des astéroïdes, située entre les planètes Mars et
Jupiter. L'âge le plus ancien obtenu sur des minéraux de météorites est de 4,566 milliards
d'années. Cet âge est considéré comme celui de la formation du Système solaire et de la
Terre.

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Figure 12 : L'échelle des temps géologique
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