La Fin Des Temps Modernes
La Fin Des Temps Modernes
La Fin Des Temps Modernes
Certes l'erreur est un mal, un mal qui s'est répandu depuis quelques siècles dans toutes les
parties du monde au point de donner l'impression qu'il n'y a plus rien hors de lui. C'est bien là
le signe extrême que quelque chose a été caché.
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Salat al-mashashîyyah,
Le soufi marocain ‘Abd al-Salâm Ibn Machîch vécut isolé sur une
montagne au Maroc. Son renon s’était répandu, de son vivant, dans le monde
islamique tout entier. A cette époque, Abû al-Hasan al-Shâdhilî, dans le but de
trouver le Qutb, suivait les enseignements d’un Shaykh nommé Abû al-Fath al-
Wâsitî. Ce dernier lui conseille de se rendre au Maroc pour rencontrer ‘Abd al-
salâm Ibn Machîsh de Fès qui était retiré dans le Rif sur la montagne « Jabal
‘Alâm ». Lors de leur première rencontre, le maître lui demanda d’accomplir le
Ghusl (la grande ablution) ; quand Abû al-Hasan se fut exécuté, il lui demanda
de recommencer ; la troisième fois, Al-Shâdhilî dit : « Je me purifie de toutes les
connaissances que j’ai acquis auparavant ».
LE SHAYKH
SHÂ’A BAHÂ AD-DÎN NAQSHABANDÎ
Extrait traduit de l’ouvrage : JAILLISSEMENT DE LA SOURCE DE VIE (Rishahât al-
‘ayn al-hayât)* du Sheykh ‘Alî bin Usîn al-Wâ’idh al-Hurwy.
Sa naissance eut lieu au mois de muharram de l’année 718 de l’Hégire du
vivant de Khawâja Alî Ramatâni dit Hazrat Azîzân. Selon certains biographes,
ce dernier disparait en 721.
À propos de Bahâ ad-dîn, il est dit que la lumière de la guidance et de la
proximité divine émanait de son front dés son enfance. Sa mère relate que
lorsqu’il eut quatre ans, il pointa son doigt en direction de l’une des vaches de
la ferme et prédit que celle-ci aurait un veau au front brillant, ce qui fut le cas.
Khawâja Bahâ ad-dîn eut, dés sa naissance, le privilège d’être regardé et accepté
comme son fils spirituel par Bâbâ as-Samâssî ; son éducation dans la voie, du
point de vue formel, fut l’œuvre d’Amîr Kulâl (le khalif de Bâbâ as-Samâssî).
Pour ce qui est de la réalité spirituelle (haqîqah), il fut un Uwaysî (1) ,
instruit par l’esprit d’Abd al-Khâliq al-Ghujdawânî, comme cela est bien
connu, de la vision dont il fut gratifié dans les débuts de sa voie et dont le livre
des Mâqâmat donne les détails. Il n’échappe à personne que plusieurs Shuyûkh
de la silsilah des Khawâjagan pratiquaient aussi bien le dhikr khafî (2) que le
dhikr à voix haute, cela depuis l’établissement du Khawâja Mahmûd al-Angîr
Faghnawî jusqu’à l’époque d’Amîr Kulâl. On les appelle dans cette noble
chaîne, ceux qui pratiquent le dhikr à voix haute.
Lorsque vint le temps de la manifestation du khawâjah Bahâ ad-dîn –
qadas Allâh sirra hu – lequel reçut de la Rûhâniyah (de l’esprit) du Khawâjah
Abd al-Khâliq l’ordre d’agir selon la « décision ferme » (bi -l-’azimah) (3)
dans les œuvres. Par conséquent, il choisi le dhikr al-khafî et s’écarta du
dhikr à voix haute (dhikr al-‘alâniyah). Ainsi, chaque fois que les disciples
(ashâb) d’Amîr Kulâl pratiquaient le dhikr jahrî (à voix haute), il se levait et
sortait. Ce comportement gênait Emîr Kulâl. Mais le Khawâjah ne se
préoccupait pas de ce fait et ne cherchait pas à se justifier. Par contre, il ne
négligeait rien pour ce qui concernait le service à l’égard de son maître. Il
travaillait et restait toujours près de lui, ne sortant jamais du taslîm (4) ni de
l’acceptation du joug de la servitude envers le shaykh.
Chaque jour, Amîr Kulâl se tournait davantage vers le khawâjah.
Certains disciples se sont laissés aller à critiquer Bahâ ad-Dîn en exposant
quelques uns de ses états pour en souligner l’imperfection. Cependant Amîr ne
leur répondit rien en cette circonstance jusqu’à ce que soient rassemblés
dans le village de Sûkhâr tous les disciples anciens et nouveaux, c’est à dire à
peu près cinq cent personnes, remplissant de la sorte la mosquée et d’autres
demeures.
Une fois réunis autour d’Amîr, celui-ci s’est tourné en direction de ceux
qui médisaient sur le Khawâjah et dit : « Vous avez eu de mauvaises pensées
concernant mon fils Bahâ ad-Dîn et vous vous êtes égarés en assimilant ses états
à l’imperfection, alors que vous ignorez tout de son cas spirituel (amr). Vous
n’avez pas pris la juste mesure de sa valeur car le regard du Vrai (haqq)
enveloppe constamment tout son être et le regard de l’élite des serviteurs
d’Allâh se conforme au regard du Vrai. Ainsi, c’est sans effort ni choix de ma
part que je maintiens mon regard sur lui ».
À ce moment là, le Khawâjah était occupé. Amîr le fait demander et
s’adressant à lui, il dit : « Ô mon fils, Bahâ ad-Dîn, j’ai rempli mon devoir
concernant l’ordre de Bâbâ as-Sammassi à ton sujet, lorsqu’il m’a dit “J’ai fait
tout mon possible pour t’éduquer, de même toi, ne sois pas défaillant quant à
l’éducation de mon fils Bahâ ad-Dîn. J’ai accompli ce qu’il m’a ordonné” ».
Puis, pointant son doigt vers sa noble poitrine, il a dit : « J’ai vidé les seins de la
connaissance pour toi et ainsi a été délivré l’oiseau de ta nature spirituelle
(ruhânîya) de l’œuf de la nature humaine (basharîya). Mais le faucon de ta
himmah (ferveur spirituelle), évolue dans les hauteurs et je t’autorise à présent
à visiter les contrées. Si te parviens le goût des connaissances venant des turcs
et des tadjiques, prends-le et n’hésite pas à le demander par le moyen de ta
himmah ». Le khawâjah a dit : « Ces paroles, venant de la présence d’Amîr
Kulâl, ont été la cause de mon épreuve, car si j’étais resté dans l’obéissance
convenue à son égard, je me serais tenu éloigné de l’épreuve et rapproché de la
sérénité ».
Après cela, il fréquenta Mawlana Arifân durant sept années puis s’astreignit à
la compagnie du Sheykh Qatham et de Khalîl Atâ (durant douze ans pour ce qui
concerne ce dernier). Il se rendit à la Mecque deux fois, la deuxième fois en
compagnie de Mohammad Parsâ.
Arrivé au Khorasan, il envoya Mohammad Parsâ et ses disciples (âsahâbu
hu) par la route de Bawrad vers Nishapur tandis que lui-même se rendit à Hérat
afin de rencontrer Mawlânâ Zîn ad-Dîn Abu Bakr at-Tâ’îbâdî auprès duquel il
resta trois jours. Il se dirigea ensuite vers le Hijaz et retrouva les disciples à
Nîchâpûr. Il demeura un temps à Merv et rentra enfin à Boukhara pour y rester
jusqu’à la fin de sa vie. Le détail de ses états est mentionné dans ses Mâqâmat.
Lorsqu’Amîr Kulâl, durant la maladie qui lui fut fatale, fit une allusion et
indiqua aux disciples de suivre Bahâ ad-Dîn, ceux-ci dirent : « Il ne t’a pas
suivi dans le dhikr à voix haute, comment pourrions-nous le suivre ? ». Amîr
Kulâl leur répondit : « Tout acte venant de lui est fondé sur la Sagesse
divine (5), sans aucun choix individuel de sa part ». Puis il déclara, citant un
vers de poésie persane : « Ô Toi dont j’exécute toutes les actions en conformité
avec ce que Tu sais ! ».
Parmi les aphorismes des Khawâjagân, il y a celui-ci : « Si Il te fait
paraître sur la scène publique sans ta volonté propre, ne crains rien ; mais si tu
décides de te manifester selon une initiative individuelle, alors, soit dans la
crainte ».
Evocation de la disparition de Bahâ ad-Dîn par notre maître
mawlânâ Muskîn (pauvre) qui fut l’un des grands de ce temps là.
NOTES
(1) D’après le nom du célèbre contemporain du Prophète qui fut éduqué par ce dernier sans
jamais l’avoir rencontré dans ce monde. Ce terme désigne ceux qui bénéficient d’une
éducation spirituelle prodiguée par l’esprit d’un maître qui n’est plus dans le monde sensible.
(2) C’est à dire caché ou silencieux. Le dhikr khafî est spécifique à la tarîqah
Naqshabandiyyah.
(3) La’azimah consiste à ne pas choisir la facilité dans l’accomplissement des œuvres, mais à
s’astreindre au maintient du niveau demandant le plus d’exigence.
(4) Taslîm : acceptation joyeuse et volontaire de la Volonté divine
(5) Nous avons ici l’expression de « sagesse divine » (al-hikmah al-ilâhiyyah) que René
Guénon avait signalé comme étant l’équivalent numérique du mot sûfî (valeur 186). Le
Sheykh indique de cette manière indirecte la réalisation de son disciple.
(6) Il est intéressant de noter le commentaire d’A. K. Coomaraswamy à propos d’un texte
hindou sur le voyage posthume de l’être vers l’immortalité : «...“ Partant d’ici avec le Soi
Prescient (prajnâtmanâ), il est re-né (samabhavat) immortel ” ; en général, il est admis
qu’une pleine vie ici-bas, comprise de manière sacramentelle, doit impliquer une pleine vie là-
bas ; et pour cette raison la mort est traditionnellement une occasion de réjouissance plutôt
que de doléance. Pour ceux qui connaissent leur Soi, il ne peut y avoir aucune peur de la
mort. La manifestation d’un chagrin lors des funérailles (crémation) indienne est
exceptionnelle ; lorsque a lieu une telle manifestation, même un paysan dira ; “ pauvre homme,
il ne connaît pas mieux” ». [notes du traducteur]
(7) Il s’agit du maître de l’auteur, à savoir Mawlânâ Naçîr ad-Dîn Khawâjâh ‘Ubaîdul-Llâh.
(8) La « table » est ici une simple nappe sur laquelle on dispose les mets.
(9) Remarquons comment par un simple passage du pronom personnel au pronom
impersonnel, le sheykh assiste efficacement son disciple…exemple d’un enseignement très
direct.
(10) i.e., la fonction de guide spirituel.
(11) « Al-kalimatu-tayba », Litt. : « Il n’y a pas de dieu si ce n’est Dieu » .
Silsilah al-tariqah al-Naqshabandiyyah
ALLÂH – ta‘alâ –
MOHAMMAD – ‘alayhi al-salâm –
al-Siddîq ; Salmân; Qâsim ; Ja‘far ; Tayfûr ; Abû-l-Hassan ; Abû ‘Alî ; Abû-l-
‘Abbas ; ‘Abdu-l-Khâliq ; Ârif ; Mahmûd ;’Alî ; Mohammad Bâbâ al-Samâsî ;
Sayyid Amîr kulâl ; Kwawâjakî Mohammad Bahâ’al-Dîn Naqshaband.
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1) D’être dans le même état de crainte que s’il se rendait chez un sultan
tyrannique dont l’injustice est telle que tuer devient licite.
* Extrait d’un écrit du Shaykh sayyid Sharaf al-dîn al-Dâghastânî (le shaykh de Mawlâna
‘Abdu-Llâh al-Fâ‘iz al-Dâghastânî, le shaykh de Mawlana shaykh M. Nâzim Adil al-Haqqânî
al-Qubrusî al-Naqshabandî).