Jean-Baptiste YON - Les Notables de Palmyre
Jean-Baptiste YON - Les Notables de Palmyre
Jean-Baptiste YON - Les Notables de Palmyre
PAR
Jean-Baptiste YON
BEYROUTH
2002
(voir le sommaire détaillé p. 335) D - Intégration des notables dans le cadre de l'Empire ........ 118
PRÉFACE ................................................................................... V E - Activités non commerciales ............................................ 125
AVERTISSEMENT .................................................................... v1 CHAPITRE I V : L'INFLUENCE SOCIALE DES
NOTABLES ............................................................................ 131
INTRODUCTION ....................................................................... 1
A - Modes de vie ................................................................... 131
CHAPITRE PREMIER : L'IDENTITÉ CIVIQUE DE PALMYRE .. 9 1 - Le_ costume et les prêtres ............................................... 132
A - Le style des décrets de Palmyre .......................................... 9 2 - Palmyre et la Haute-Mésopotamie ................................ 134
1 - Les décrets : des résumés ................................................ 10 3 - La culture des notables et le cercle de Zénobie ............ 135
2 - Le style épigraphique officiel .......................................... 13 B - Clientélisme et relations sociales .................................... 139
3 - Le vocabulaire de l'éloge ................................................ 16 1 - Les dédicaces « pour la vie de ... » ............................... 139
B - Le bilinguisme officiel ......................................................23 2 - Le vocabulaire des relations sociales ............................142
1 - Le latin à Palmyre ........................................................... 24 a. Autour d'Odainat ......................................................... 143
2 - Les premiers textes grecs et le trilinguisme .................... 25 b. Le vocabulaire de l'amitié ........................................... 145
3 - Le vocabulaire officiel des cités sémitiques .................... 28 c. Worod et la famille d'Odainat ...................................... 148
4 - Les décrets du Conseil et du Peuple ................................ 31 C - L'évergétisme et les monuments de Palmyre .................. 150
C - Les carrières civiques et les familles prédominantes ........ 36 1 - Les constructions religieuses ........................................ 151
1 - Le faible nombre de magistrats connus ........................... 36 2 - Les changements urbanistiques et la présence
2 - Les rapports entre les magistratures et la symposiarchie .. 40 des notables ...................................................................... 155
3 - Des familles prédominantes ........................................... 43 3 - Les notables de Palmyre et l'évergétisme ..................... 159
a. Famille de Bônnê ........................................................... 43
CHAPITRE V : FAMILLES, AFFRANCHIS ET ESCLAVES
b. Famille de Nashûm ........................................................ 47
DES NOTABLES .................................................................... 165
c. Famille des Bené Aabeî .................................................. 50
4 - Les groupes tribaux ......................................................... 51 A - Les femmes et les familles .............................................. 166
5 - La participation civique .................................................. 54 1 - La force des traditions ................................................... 166
2 - Stratégies familiales ...................................................... 174
CHAPITRE II : L'IDENTITÉ ETHNIQUE DE PALMYRE .... 57 3 - La place des familles ..................................................... 181
A - L'appartenance des habitants au système tribal ................ 57 B - Affranchis et esclaves ..................................................... 186
1 - Les généalogies des Palmyréniens .................................. 57 1 - L'onomastique des affranchis ........................................ 186
2 - Les noms étrangers .......................................................... 59 2 - Les variations locales .................................................... 188
3 - Surnoms et subdivisions familiales ................................. 63 3 - Les relations avec les maîtres ........................................ 192
4 - Les Bené Mazîn et les Bené Iedîbel ................................ 65
CHAPITRE VI : DES MONUMENTS POUR L'ÉTERNITÉ .. 197
B - Tribus et organisation de la cité ........................................ 66
1 - Tribus civiques et tribus traditionnelles .......................... 66 A - La différenciation sociale dans les hypogées .................. 198
2 - Les quatre tribus .............................................................. 69 1 - Les sépultures des classes moyennes ............................ 198
3 - Les Bené Zabdibôl .......................................................... 72 2 - Les subdivisions des hypogées ..................................... 201
4 - Les Bené Mathabôl ......................................................... 75 B Les tours funéraires ......................................................... 204
C - Les différents niveaux de la topographie religieuse .......... 78 1 - La tour de la famille d'Elahbel ..................................... 204
1 - Le sanctuaire de Bel : centre civique ? ........................... 79 2 - Les concessions dans les tours ...................................... 206
2 - Le sanctuaire de Nabû et les grandes fa1nilles ................ 81 3 - Origines sociales et familiales ....................................... 207
4 - Reconstructions et prestige familial .............................. 210
D - Arabes et Araméens à Palmyre ......................................... 87
1 - Questions d'onomastique ................................................ 88 C - Les temples funéraires .................................................... 211
2 - Nomades et sédentaires à Hatra ...................................... 89 1 - Un nouveau type de monument .................................... 211
3 - Le peuplement de la Palmyrène ...................................... 91 2 - Temples funéraires et notables ...................................... 212
4 - La Palmyrène entre nomades et sédentaires ................... 95 D - Les subdivisions des nécropoles ..................................... 215
-1 - Nécropoles et différenciations sociales ......................... 215
CHAPITRE III : LES ACTI VITÉS DES NOTABLES ............. 99
2 - Nécropoles et conscience tribale ................................... 218
A - Les caravanes, leur organisation ..................................... 100
E - Langue et formulaire des inscriptions funéraires ............ 222
B - Les relations internationales ........................................... 106 1 - Langue ........................................................................... 222
C - La police du désert .......................................................... 112 2 - Formulaire et vocabulaire ............................................. 226
Il Les notables de Palmyre
Dans la transcription des noms propres sémitiques, j'ai Pour citer les textes de Palmyre en facilitant la tâche
suivi généralement l'orthographe simplifiée de l'araméen, des lecteurs, on a suivi l'ordre de priorité du corpus de
selon l'usage que suit par exemple le Recueil des tessères D. R. Hillers et E. Cussini (Palmyrene Aramaic Texts) : les
de Pabnyre et le Corpus des textes du Sanctuaire de textes sont cités d'abord par leur numéro dans le Corpus
Baalshamîn par C. Dunant (avec quelques modifications), lnscriptionum Semiticarum (= CIS), sinon par celui de
mais en notant systématiquement par l'accent circonflexe l'Inventaire des Inscriptions de Palmyre I-XII (= lnv) quand
les matres lectionis. Quelques exceptions ont été faites pour ils existent. On a essayé aussi de donner les références et les
certains noms (Zénobie par exemple), pour lesquels existait concordances avec les corpus récents : Le Sanctuaire de
un usage courant. La translittération des textes araméens et Baalshamfn III. Les inscriptions par C. Dunant BS),
grecs, faite de manière courante au fil du texte, permettra Recueil d'inscriptions palmyréniennes par M. Gawlikowski
au lecteur de s'y retrouver plus aisément. Il faut reconnaître (= RSP).
que le système a quelques lacunes, et que l'espoir d'une On trouvera à la fin plusieurs tables de concordance entre
totale unification était illusoire. les différentes éditions des textes utilisés.
'O 'AvîCOVlOÇ bcqLTCE îOÙç ircrcfoç Ticx),µupcx rcÔÀlV, où situation de Palmyre, à l'écart du monde romain, et même
µcxKpàv o'iScrnv àrcà Eù<j)pcàou 8lcxpn:âcrn1, µn:pà �LÈV syrien, et le rôle commercial de la cité, si ce n'est à l'époque
ÈmKcxÀmv cxù101ç, 011 'Pco�LCXicov KCXl Ticxp8ucxicov ovTEç d'Antoine, au moins à celle d'Appien (vers 160).
Ècpop1m k EKmÉpouç Ém8El;1.coç dxov (Ë�mopo1 yàp ovTEç C'est la prospérité liée au commerce qui a d'ailleurs
Koµ1.Çoucn µÈv ÈK TIEpamv îCX 'lvfaKà 17 'Apcx�lCX, faml8EVîCXl permis à cette ville située aux confins du désert et d'une
8'Èv 111 'Pco�LCX{cov), Ëpyo;> 8'Èmvoèov 10Ùç ircrcÉ cxç chaîne de montagnes (pl. 2) de connaître un tel
rcEplOU0l0'.0CXl. TicxÀ�LUp11véov OÈ rcpo�LCX8ÔVîCüV KCXl î(X développement urbanistique, lors des premiers siècles de
àvcxy1mîcx Éç 1à rcÉpcxv 1oû n:01cx�LoÛ µETEVE)'KCXVîCüV TE notre ère. Cette position, ainsi que la présence d'une source
KCXl Èn:l îllÇ ox811ç, El îlÇ ÈmXEPOlll 0KEUCXCTCXµÉvcov îOÇOK, (source Efqa), explique aussi qu'une installation ait pu se
rcpàç a TCE(pDKCXCTlV ÈçmpÉîCüÇ, Ol lTITCÉEç, îllV TCOÀlV KEVllV maintenir jusqu'à l'époque contemporaine. Comme le notait
KCXîCXÀCX�OVîEÇ UTCÉ0îpE\jfCXV, O'\JîE Èç XElpcxç ÈÀ8ÔVîEÇ O'\JîE déjà Pline, l'environnement était plutôt favorable, assez en
îl ÀCX�OVîEÇ.
1
tout cas pour que l'agglomération puisse nourrir de manière
aisée une population encore réduite. La ville, située à mi
Palmyra urbs nobilis situ diuitiis soli et aquis amoenis, chemin d'un raccourci transdésertique qui conduit de Homs
uasto undique ambitu harenis includit agros, ac uelut terris à !'Euphrate, a mis à profit cette situation pour contrôler le
exempta a rerum natura, priuata sorte inter duo imperia commerce entre l'Orient et l'Empire de Rome et en tirer
summa Romanorum Parthorwnque, et prima in discordia assez de richesse pour son développement monumental. La
semper utrimque cura. 2 vocation commerciale de Palmyre est donc le fondement de
sa richesse, mais aussi de sa réputation dans l'Antiquité.
Le texte d'Appien, souvent cité, rapporte la vaine
tentative du pillage de Palmyre en 41 avant notre ère par les Un des points communs entre les témoignages d'Appien
soldats d'Antoine, devant lesquels les habitants de l'oasis et de Pline est le caractère général et abstrait de la mention
se réfugièrent de l'autre côté de !'Euphrate en emportant de la ville : elle est considérée dans son ensemble, sans
leurs biens. Il fait référence au moment qui marque l'entrée aucune précision, sans que ses habitants apparaissent
de Palmyre dans le monde gréco-romain, alors que la Syrie, autrement que comme une collectivité. De fait, avant Odainat
depuis peu province romaine, est en pleine mutation. La ville et Zénobie, le seul Palmyrénien connu dans les sources gréco
située dans les frontières de l'Empire, mais loin de toutes latines est peut-être un certain Zabdibelos, chef d'un
les grandes agglomérations, semble une sorte d'isolat (pl. 1). contingent« d'Arabes et de soldats des contrées voisines»
Cette dimension apparaît aussi dans le fameux passage où au service des Séleucides, à la bataille de Raphia en 217
Pline fait de Palmyre une cité pratiquement indépendante av. J.-C. (Polybe, Histoires II, 79). Tous les autres, jusqu'à
des Parthes et des Romains, ce qui a dû être sa situation la fin du me siècle, apparaissent exclusivement dans les
avant l'annexion de la ville en 19 de notre ère. inscriptions, découvertes sur le site lui-même ou dans le reste
Même si la ville a eu une longue existence avant l'attaque de l'Empire. Faute de textes littéraires, et donc d'un point
des cavaliers d'Antoine au 1" siècle avant notre ère, c'est à
1
de vue extérieur sur la société palmyrénienne, il faut se
ce moment qu'elle apparaît vraiment dans les sources contenter des documents que les habitants de l'oasis ont eux
historiques et ce texte a l'avantage de mettre en évidence la mêmes fournis 3• Ces témoignages sont d'ailleurs très
1 - « Antoine envoya ses cavaliers à Palmyre, ville située non loin de 2 - « Palmyre est une ville remarquable par sa situation, la richesse de son
! 'Euphrate, avec ordre de la piller. li n'avait pas d'autres reproches à adresser sol et l'agrément de ses eaux; ses terres sont encerclées par les sables sur
aux Palmyréniens, placés entre Romains et Parthes, que leur adroite un vaste pourtour et, comme séparée du reste du monde par la nature, elle
politique.C'étaient des marchands qui cherchaient en Perse les produits de est placée par son destin particulier entre les cieux grands empires, celui
l'Inde et de l'Arabie pour les revendre chez les Romains. En fait, Antoine des Romains et celui des Parthes, en cas de conflit le premier sujet de
voulait procurer un profit à ses cavaliers. Mais les Palrnyréniens eurent préoccupation pour l'un et pour l'autre.» (PLINE L'ANCIEN, Histoire
vent de l'affaire; ils traversèrent !'Euphrate avec leurs biens et. par mesure Naturelle V, 88)
de sécurité placèrent des archers le long de la rive.C'étaient de très habiles 3 - Pour les témoignages littéraires plus nombreux qui concernent la période
tireurs. Les cavaliers tombèrent sur une ville abandonnée : ils s'en d'Odainat et Zénobie, voir l'utile compilation de M. H. DoooEON et
retournèrent les mains vides et sans coup férir. » (APPIEN, Guerres S. N. LIEU, 1991 ( § 4 « The rise and fall of Palmyra» ).
ch·iles Y, 9)
2 Les notables de Palmyre
nombreux, et, comme le notait E. Will, il est peu de cités L'arrivée au pouvoir à Rome d'une dynastie en partie
antiques dont on connaisse autant d'habitants par leur nom, d'origine syrienne (les Sévères), ainsi que la présence accrue
même si souvent on ne peut guère en dire plus. des empereurs en Orient (avec le passage à Palmyre
d'Alexandre Sévère vers 230 ?), est contemporaine du
changement de statut de la ville, qui devient colonie dans
HISTOIRE DE PALMYRE
les premières années du m e siècle, comme un certain nombre
À cause de l'absence de sources extérieures et du d'autres villes de la région. Le commerce continue, même
caractère propre aux sources épigraphiques, l'histoire s'il semble en déclin, ce qui n'empêc h e pas une
événementielle de Palmyre elle-même est fort difficile à transformation en profondeur du centre monumental de
reconstituer. Les limites chronologiques sont imposées par Palmyre, en particulier les colonnades, ou le développement
les sources disponibles : les premiers témoignages des quartiers du nord de la ville qui prend alors la forme qui
épigraphiques, tout comme les premières données est conservée aujourd'hui. À partir de ce moment apparaît
archéologiques clairement interprétables (avant les travaux la famille d'Odainat qui fait passer la ville du rang de ville
en cours de publication de l'équipe dirigée par A. Schmidt importante à celui de capitale d'un empire éphémère, capable
Colinet), remontent vraisemblablement au premier siècle de défier le pouvoir de Rome. La question des fondements
avant notre ère, ce qui coïncide avec le récit d'Appien. À de sa puissance n'est toujours pas réglée et on ne sait pas
l'autre extrémité de l'histoire de Palmyre, les données précisément sur quelles forces Odainat s'est appuyé pour
postérieures à la chute de Zénobie, en 272, sont assez vaincre les Perses, avant que son épouse Zénobie qui lui
fragmentaires et surtout, pour ce qui nous concernera ici, succéda, puisse conquérir la partie orientale de l'Empire
l'étude des notables de l'oasis redevient très difficile, voire romain. C'est à l'occasion de ces événements que Palmyre
impossible. prend une place importante dans les récits des historiens
Dans l'intervalle (entre le (' siècle avant notre ère et la classiques, récits malheureusement souvent confus et
fin du m e siècle), de grands personnages apparaissent, sont difficiles à interpréter. Cette partie de l'histoire est la mieux
cités par quelques inscriptions, puis disparaissent, ainsi que connue. Ensuite, la ville sombre dans l'oubli, malgré la
leur famille, pour être remplacés par d'autres sans qu'on en présence d'une garnison, d'un évêché et les travaux d'époque
connaisse les raisons. On possède au total peu d'éléments justinienne sur les remparts. Il faudra attendre le xvr!" siècle
avant Odainat et Zénobie : ensuite les sources littéraires pour que Palmyre fasse sa réapparition dans les travaux
existent, mais renseignent plutôt sur les événements qui ont historiques.
lieu loin de l'oasis. On ne peut de toute façon plus considérer
les princes de Palmyre comme de simples notables, à partir
L'HISTORIOGRAPHIE DE PALMYRE
du moment où leur statut change et en fait des rivaux,
potentiels puis déclarés, des empereurs. La documentation fournie par le site est vaste, mais si
On possède aussi quelques jalons et les grandes étapes les fouilles ont été menées de manière relativement poussée
de l'histoire de Palmyre sont claires ; même si on ignore le depuis le début du xx" siècle, on s'est concentré
statut de Palmyre avant l'intervention de Germanicus, à une essentiellement sur un certain nombre de bâtiments :
date comprise entre 17 et 19, on sait que la ville est une quelques temples et les monuments du centre ville ont ainsi
rcÔÀ1ç au moins à partir du milieu du (' siècle, et la �ouÀ11 été privilégiés par la recherche, parce qu'ils étaient assez
apparaît dans la seconde partie du siècle. À partir de ce bien conservés, donc plus attirants pour les chercheurs et
moment, la cité de Palmyre connaît un régime d'un type spectaculaires pour les touristes. Une partie encore plus
relativement classique, commun aux cités grecques de importante de la surface reste à explorer, en particulier les
l'Empire. Les grandes constructions, à commencer par le quartiers d'habitation. Les nécropoles qui entourent la
sanctuaire de Bel, reçoivent l'empreinte très nette de l'art et ville sont aussi assez bien connues, même si les tombes
de l'architecture de la Syrie romaine. C'est aussi dans les fouillées de manière complète ne sont finalement pas très
premières années du siècle que le commerce caravanier nombreuses.
apparaît dans les sources épigraphiques, pour connaître son Ce sont les découvertes faites dans les tombeaux (bustes
apogée sous Hadrien et ses successeurs immédiats. Le funéraires) qui ont donné la documentation la plus importante
passage de cet empereur est souvent considéré comme le et la mieux connue sur l'art et la civilisation palmyréniens,
moment où Palmyre entre définitivement dans la civilisation avant que la fouille des temples ne permette de repérer de
de l'Empire. La présence d'une garnison romaine, et manière plus fine les influences qui se faisaient jour. Mais
inversement, l'enrôlement de soldats palmyréniens dans ce qu'on connaît de l'art funéraire n'est pas seulement le
l'armée romaine (en Dacie, en Afrique) renforcent cette résultat de fouilles, et la majeure partie des œuvres connues
évolution, qui se manifeste aussi dans l'art, l'architecture et est la preuve d'un pillage commencé sans doute dès
la vie publique en général (temples funéraires, culte l'Antiquité, mais dont l'apogée remonte à la seconde partie
impérial). du x,xe siècle. C'est dire qu'elles sont trop souvent privées
Introducticm 3
de leur contexte architectural et épigraphique qui seul temps, les textes araméens sont aussi l'objet cl' études
permettrait de tirer des conclusions sûres. Or ces documents nombreuses, en particulier à partir de la seconde partie du
sont souvent accompagnés de textes : les épitaphes qui étaient XIX" siècle.
gravées à côté de la représentation des défunts. Grâce à ces À partir de cette date, les découvertes n'ont cessé de se
noms, aux généalogies qui les accompagnent, avec les textes multiplier. Les publications les plus significatives sur
nombreux qui proviennent de la ville elle-même et rappellent l'épigraphie de Palmyre ne sont pas consacrées de manière
les honneurs rendus aux différents bienfaiteurs, ou spécifique à l'épigraphie classique. L'œi1vre majeure est le
commémorent les constructions, on peut ainsi reconstituer C01pus lnscriptionum Semiticarum (II, 3 par J.-B. Chabot)
des familles, mais beaucoup d'éléments restent toujours publié entre 1926 et 1947, mais il se fonde seulement sur
obscurs. des données connues avant 1920. Il comprend évidemment
l'ensemble des textes araméens connus à cette date, mais
À partir de son intégration dans la province, la ville donne aussi les textes grecs et latins des bilingues et trilingues.
montra de plus en plus de signes d'une forte influence gréco L'Inventaire des inscriptions de Palmyre (12 fascicules de
romaine, aussi bien institutionnelle qu'artistique, même si 1930 à 1975) a complété le dossier, en recueillant assez
un certain nombre de caractéristiques sont particulières à systématiquement tous les types de texte. Depuis, les fouilles
Palmyre ; c'est ainsi un des rares cas de ville indigène qui faites sur le site ont donné lieu à d'importantes publications
conserve tout au long de la période sa propre langue et qui d'inscriptions découvertes lors de ces travaux 5• À chaque
l'emploie, en concurrence avec le grec, tant dans les actes fois, comme clans les publications ultérieures, de nombreux
officiels que clans l'épigraphie privée. Ce particularisme est textes grecs et latins ont été publiés, mais il manque pour ce
bien visible clans des domaines aussi divers que les coutumes type d'inscriptions une publication d'ensemble, que cette
funéraires ou l'onomastique. En même temps, ce n'est qu'un étude sur les notables contribue à préparer.
élément d'une civilisation mixte : selon les cas, on a tenté Dernièrement, la compilation de tous les textes écrits
de cerner sa personnalité, en insistant sur les composantes clans le dialecte araméen de Palmyre reprend les versions
gréco-romaines de plus en plus affirmées, ou bien plutôt sur grecques et latines des bilingues et trilingues 6• Mais il s'agit
son appartenance à une culture proprement sémitique, seulement cl'un recueil qui utilise toutes les publications
recouverte ça et là d'un vernis d'hellénisation. Ce n'est pas antérieures, sans commentaire ni traduction et, sauf en un
le lieu ici de rouvrir le débat, mais, comme on pourra le petit nombre de cas, les textes n'ont pas été revus par les
voir, il est difficile d'apporter une réponse. éditeurs. De plus, un certain nombre de fautes d'impression
Il est donc assez malaisé de cerner avec précision la doivent inciter l'utilisateur à la prudence.
civilisation palmyrénienne, faute de textes narratifs. La Cet ensemble de textes présente clone la particularité
source principale reste l'étude de l'art et de l'architecture. cl'être partagé entre au moins deux langues principales, le
Si on veut étudier les notables, c'est-à-dire en fait les grec et l'araméen, et accessoirement le latin. L'étude qui va
habitants de l'oasis qu'on peut le plus aisément saisir, les suivre, même si elle a pour objectif de départ la préparation
sources sont principalement de deux ordres : d'abord les du C01pus des inscriptions grecques et latines, a bien entendu
monuments funéraires, les grands bâtiments et plus élargi son propos à l'ensemble de la documentation fournie
généralement tout ce qui reflétait la présence et l'influence par le site, pour essayer cl'obtenir la vision la plus complète
des notables clans le paysage urbain; ensuite l'épigraphie possible des notables de Palmyre. Il serait en effet absurde de
qui permet de mettre les noms des bienfaiteurs sur les se priver de l'énorme documentation en langue araméenne,
constructions, de relier entre eux les différents monuments d'autant plus que l'existence d'inscriptions bilingues et
construits par telle famille, ou de suivre l'évolution d'une l'apparition des mêmes personnages clans des textes en
autre famille à travers les décennies. diverses langues permettent cl'effectuer des recoupements et
des comparaisons. Les inscriptions en différentes langues ne
Heureusement le site de Palmyre s'est montré représentent pas plusieurs mondes, mais les différentes faces
particulièrement fertile en données de ce type, et cela dès sa du même monde. Les textes utilisés clans cette étude sont ceux
redécouverte au xvn" siècle. On connaît depuis ce moment que l'on connaît par les publications, mais on a aussi pris en
des inscriptions grecques et latines de Palmyre, ce qui fait compte ceux qu'a publiés A. Bounni clans sa thèse, en cours
qu'on retrouve certains textes clans les grandes collections de publication, mais consultable sur les microfiches éditées
d'inscriptions du xrx" et du début du xx" siècle ·1• En même par l'Atelier national des thèses de l'université de Lille.
Une des voies les plus généralement retenues pour de l'art de la région. On peut rappeler enfin l'œuvre de
étudier les habitants de l'oasis a été de reconstituer autant H. Ingholt, dont le classement chronologique et stylistique
que possible les différentes familles et les clans ou tribus de la sculpture palmyrénienne est celui qui prévaut encore
représentés dans la population. La plupart des éditeurs aujourd'hui (H. lNGHOLT, Studier over Palmyrensk Skulptur
d'inscriptions palmyréniennes ont ainsi tenté de compléter PS], Copenhague, 1928).
au moins partiellement la prosopographie des Palmyréniens
connus par les inscriptions. C'est sans doute dans l'ouvrage Mais si plusieurs études ont tenté de reconstituer des
de J. T. Milik (Dédicaces.faites par des dieux(= DFD), Paris, familles palmyréniennes, il semble qu'il manquait une étude
1972) qu'on trouvera la tentative la plus ample. Mais les d'ensemble sur les Palmyréniens eux-mêmes, sur leur
données prosopographiques ne sont qu'un aspect de ce livre, identité, sur les moyens qu'ils utilisaient pour influencer leurs
très brillant, fondé sur une connaissance immense de contemporains et proclamer leur position sociale. De grands
l'épigraphie palmyrénienne et sémitique en général. Malgré personnages sont connus par les sources ; il a paru intéressant
quelques conclusions qu'on sera parfois tenté de discuter, de rassembler de manière systématique les données qui les
l'ouvrage est extrêmement stimulant, et on verra tout ce que concernaient, ce qui permet d'effectuer des comparaisons.
les pages qui suivent lui doivent. Les notables de Palmyre n'apparaissent que dans les
La recherche prosopographique a été simplifiée depuis sources épigraphiques du site, et on se trouve d'ailleurs
le début des années 1970 par la parution du livre de confronté à une sorte de paradoxe quand on veut étudier la
J. K. Stark qui reprend les données de toutes les inscriptions population, sa vie quotidienne, ses activités, sa culture. En
araméennes publiées à cette date 7• L'ouvrage présente un effet, ce sont des notables qui ont fait graver les inscriptions,
inconvénient : il tient insuffisamment compte des inscriptions et qui ont eu les moyens de faire construire les monuments
non sémitiques, ce qui réduit un peu son utilité, au moins qui sont les seules sources sur la ville et qui permettent d'en
quand il s'agit de reconstituer des familles. Les publications parler. Et si l'on considère que seules les catégories les plus
de textes parues après cette date ont généralement utilisé aisées de la population avaient la possibilité de bâtir des
ces résultats pour reconstituer les généalogies des tombeaux et de s'y faire enterrer, qu'eux seuls pouvaient
personnages cités par les nouvelles inscriptions. recevoir les statues honorifiques qui ornaient la cité, alors il
Enfin, dernièrement, P. Piersimoni a consacré sa thèse est clair qu'on trouvera d'abord dans les inscriptions le reflet
de }'University College (The Palmyrene Prosopography, de ce que les notables de la ville voulaient montrer. On pmma
Londres, 1995) à une prosopographie générale des ensuite essayer d'en déduire ce qu'ils pouvaient réellement
Palmyréniens. L'existence de ce travail explique qu'on ne penser. Car, et c'est le sujet principal de cette étude, c'est
trouvera pas ici de liste générale des Palmyréniens et de leur sans doute seulement à travers les divers moyens
famille, mais seulement des listes thématiques, en particulier d'expression des notables de Palmyre qu'on peut essayer
celles des personnages mentionnés directement dans le corps d'avoir prise sur la société palmyrénienne des premiers
du texte. Il m'a été impossible, malgré de nombreux efforts, siècles de notre ère.
de consulter la thèse de P. Piersimoni, mais on peut se faire Une définition relativement large du terme («personne
une idée de ses principales conclusions (ainsi qu'une liste à laquelle sa situation sociale confère une certaine autorité
de grandes familles) dans deux articles parus il y a peu dans les affaires publiques » selon Le Robert) autorise à faire
(P. PIERSIMONI, 1994b et 1995). de la plupart des Palmyréniens qu'on connaît par les textes
Plus généralement, l'histoire de Palmyre a été le sujet des «notables ». Cela signifie donc que les parties de la
de deux synthèses principales, celle de J. Starcky et population les plus importantes numériquement échapperont
M. Gawlikowski (1985) et celle plus récente d'E. Will dans une large mesure à la recherche : il faudra en tenir
(1992). Ces deux ouvrages sont à compléter pour certains compte dans les conclusions qu'on pourra tirer de la
aspects par l'ouvrage de J. Teixidor (1984) et un article de documentation existante. Cet état de fait n'est bien sür pas le
M. Gawlikowski (1994) sur le commerce, et par l'article de propre de Palmyre, et on a souvent remarqué à propos de la
M. Sartre sur les institutions de la rcoÀK de Palmyre (1996b). littérature gréco-romaine qu'il s'agissait généralement de
Enfin, les synthèses régionales récentes de M. Sartre (1991) notables écrivant pour cl'autres notables, et que l'on ne pouvait
et surtout de F. Millar ( 1993) accordent bien sür une large clone y trouver qu'un témoignage partial et partiel sur la
place à la ville et à ses relations avec le reste de l'Empire. À société antique. Seule l'archéologie, qui prête plus d'attention
cela s'ajoute un grand nombre d'études partielles, qu'on à la vie matérielle et aux données de la vie quotidienne, peut
trouvera citées à leur place dans les notes de ce travail ; on contribuer à modifier cette image, mais, on y reviendra, cet
mentionnera en particulier les différents articles qui aspect de la recherche a sans doute été encore trop négligé
composent les Antiquités syriennes d'Henri Seyrig, et qui pour permettre de dresser un tableau cohérent de la vie de
sont un des fondements de la connaissance de l'histoire et ceux qui n'appartenaient pas au monde des notables.
7 - J. K. STARK, 1971.
Introduction 5
En fait, les recherches sur Palmyre ont porté Une étude des notables permet ainsi d'effectuer dans
principalement sur la splendeur architecturale et artistique l'histoire de Palmyre une sorte de coupe transversale en
de la ville, splendeur qui a survécu à des siècles d'oubli. regroupant de nombreux aspects qu'on trouve souvent de
Palmyre est d'abord une des villes pour lesquelles a été créée manière éparse et non synthétique.
la notion d'art parthe, et cette ville caravanière a aussi été
une ville étape pour l'art et l'architecture entre Orient et
RECHERCHES RÉCENTES SUR LES NOTABLES
Occident. On a donc eu des études très importantes sur ces
domaines, sur le commerce des caravanes entre l'Empire Or la place des notables dans les cités de la partie
romain et le golfe Arabo-persique, et au delà l'Inde et la orientale de l'Empire romain est justement un aspect qui a
Chine, mais on possède finalement très peu de travaux été mis en valeur depuis un certain nombre d'années. Dès
approfondis sur les habitants eux-mêmes, ou même sur la l'époque hellénistique se met en place dans les cités grecques
partie de la population la plus présente dans les inscriptions, une société dans laquelle une oligarchie domine la vie
ceux qu'on peut appeler les notables. politique et économique. Leur supériorité est fo ndée sur un
La documentation épigraphique est très riche, mais, à poids économique qui leur permet de détenir les rênes du
de rares exceptions, ce n'est pas dans cette direction qu'elle pouvoir et de remplir les charges et fonctions publiques
a été exploitée. Les chercheurs ont préféré s'intéresser soit principales. L'ouvrage de P. Veyne sur l'évergétisme contient
à une petite partie de ces notables (par exemple ceux qui ainsi une définition des notables qui paraphrase un texte
font partie de la famille de Zénobie et Odainat, ou qui lui célèbre de M. Weber 8 : « Politiquement, les notables sont
sont liés), soit à un aspect particulier, très bien représenté des personnes qui, par leur situation économique, sont en
dans l'épigraphie palmyrénienne et dans l'iconographie: la mesure, en guise d'activité secondaire, de diriger une
religion de Palmyre. collectivité quelconque sans recevoir de salaire ou contre
Deuxième point, et non le moindre, les études un salaire purement symbolique ; la direction du groupe leur
palmyréniennes ont privilégié le cadre de vie des est confiée parce qu'ils jouissent de l'estime générale, à
Palmyréniens, leurs croyances: elles laissaient ainsi de côté quelque titre que ce soit. Un notable vit pour la politique et
certains caractères de la vie publique de la cité, oubliant, au non de la politique ; il faut donc qu'il ait des revenus par
profit des traits originaux et spectaculaires qui font la ailleurs, qu'il soit propriétaire de terres ou d'esclaves ou qu'il
spécificité de Palmyre, ce gui faisait de la ville une cité parmi exerce une profession libérale, c'est-à-dire une activité
d'autres de l'Empire romain. L'originalité du destin de socialement estimée. » 9 Cette définition est valable en
Palmyre, sa grandeur à la fin du nr° siècle font oublier que, particulier pour la période pendant laquelle les cités grecques
plus d'un siècle auparavant, dans les cadres de l'Empire, la sont sous la domination de l'Empire romain. Ce qui
ville connaissait déjà une prospérité exceptionnelle. En caractérise aussi les notables, c'est le fait qu'ils monopolisent
parallèle, il importe de bien montrer que ces notables les fonctions publiques, et qu'ils ont une tendance toujours
appartiennent à une civilisation où se mêlent divers courants, plus forte à transmettre de génération en génération leur
orientaux et occidentaux. Se posent en particulier les statut, au point de devenir une classe héréditaire.
problèmes de l'origine ethnique de la population, et de Or ces notables se définissent surtout, du point de vue
l'identité des habitants, telle qu'elle apparaît dans les textes des sources, comme les gens qui apparaissent dans les
et les manifestations artistiques. inscriptions, en particulier parce que les textes honorifiques
semblent attester d'un ensemble assez homogène de
Il faut donc montrer de quelle mamere Palmyre comportements : ils touchent des personnages qui
appartient à l'Empire romain, et insister en même temps sur accumulent fonctions et honneurs et ont une tendance accrue
l'importance de la vie municipale en mettant justement en à se placer dans des traditions familiales.
relation avec le développement urbain de la ville cette classe Cet aspect a bien été mis en lumière par F. QuaB, dont
de notables qui apparaît dans les inscriptions. Ce qui en fait l'ouvrage sur cette classe de notables (die
des notables - et qui s'apparente en ce sens à ce qu'on peut Honoratiorenschicht) dresse un bilan méthodique des titres
voir ailleurs dans le monde gréco-romain -, c'est cet et fonctions attribués par les cités grecques des époques
ancrage dans une ville et la manifestation de cette classe à hellénistique et romaine à ceux qui les dirigeaient. À la
travers les monuments et les inscriptions. Encore faut-il bien lumière des recherches de ce type sur la manière dont les
le mettre en valeur ! cités étaient gouvernées et sur le personnel qui les
8 - Voir aussi F. QuAss, 1993. p. 11 (qui cite M. WEBER, Wirtschqft und page de P. Veyne, cette définition: « aux élites des cités autonomes convient
Gesellschqft, Grundr(f] der \!erstehenden Soz.iologie, 5' édition revue par le nom de notables». Voir aussi M. SARTRE, 1991, p. 176: « Dès la fin du
J. Winckelmann, Tübingen. 1972. p. 170). u' siècle, les notables, c'est-à-dire tous ceux qui sont plus riches que les
9 - P. V EYNE, 1976, p. 110 avec une référence à M. Weber à la note 132, autres. constituent à la fois une classe sociale. définie par sa richesse, et un
pour la suite du paragraphe. Voir aussi un peu plus haut, clans la même ordre. lié par des obligations de nature juridique. »
6 Les notables de Palmyre
administrait se dégage une image relativement homogène grec et du latin. Il en est ainsi pour les listes de noms étrangers
de la société qui peuplait les cités de l'Orient romain. à Palmyre ou celles des principaux personnages connus par
les inscriptions.
Il n'est pas question ici de négliger les fortes différences Un certain nombre des textes encore présents à Palmyre
entre les lieux et les époques; l'exemple même de Palmyre ont été revus (sur le site et au musée) et photographiés. Ce
prouve à l'envi qu'il existait tout un spectre de situations, travail n'est pourtant qu'une étude préliminaire au corpus,
selon des variables multiples. Néanmoins, les recherches on n'y trouvera pas d'édition des textes à proprement parler,
récentes sur ces notables montrent certains traits communs, même si parfois des corrections aux textes édités ont été
qu'il convient de rechercher aussi à Palmyre, malgré des introduites.
différences. À ce propos, on peut partir d'une remarque de Enfin, le matériel qui permet d'étudier les Palmyréniens
P. Veyne qui revient sur la définition des notables au sujet est aussi archéologique : je m'appuie donc sur les travaux
de la situation en Grèce, au v" et au 1v0 siècle : « Le régime nombreux qui ont été menés sur place depuis la redécouverte
des notables est l'aboutissement normal d'une démocratie du site. Même si plusieurs séjours à Palmyre ont permis de
directe, en l'absence d'une tyrannie ou d'une caste mieux connaître les monuments ou l'organisation de la cité,
aristocratique qui exercerait une autorité traditionnelle. » 10 je n'ai pas entrepris de recherches archéologiques à
Cette dimension est évidemment à prendre en compte à proprement parler et j'ai surtout utilisé les recherches
Palmyre où la société semble assez traditionnelle, au moins inestimables de mes prédécesseurs à Palmyre (liste dans les
au début de la période. Comme on le verra, au fur et à mesure notes). Ce matériel archéologique et monumental a été mis
que le temps passe, un monde fondé sur des références en rapport avec le fichier épigraphique de la manière la plus
tribales paraît laisser la place à une société plus proche de complète possible 11• On en trouvera quelques reflets au cours
ce qu'on connaît ailleurs dans l'Empire romain. Il faudra de ce travail.
d'ailleurs s'interroger sur la manière dont la société
palmyrénienne se transforme, peut-être sous l'influence de Les notables apparaissent principalement en tant que
ce qui se passait plus à l'ouest. Mais si on prend le terme de tels dans un type particulier d'inscriptions, celles qu'il est
notable selon la définition la plus simple, les grands convenu d'appeler honorifiques : le Conseil et le Peuple de
caravaniers, les magistrats, les grands dignitaires religieux Palmyre, ou un groupe de citoyens, y expliquent qu'en raison
de la ville, et plus généralement tous les personnages dont de ses bienfaits ou de son action exemplaire tel ou tel citoyen
l'importance sociale apparaît dans les inscriptions, ont en s'est vu dresser une statue, généralement dans un lieu public,
tant que groupe droit à cette qualification. Il est clair que dans un centre géographique de la vie civique. De nombreux
Palmyre est une cité où se mêlent des caractéristiques exemples de cités de l'Empire romain où on retrouve ce type
sémitiques et orientales, en même temps qu'une influence de texte fournissent un très bon point de comparaison. Ils
gréco-romaine très forte. Ce qui fait l'intérêt d'une étude permettent de montrer ce qu'il y a de commun (et de
des grands personnages de la ville est justement de voir avec différent) dans le vocabulaire et les thèmes abordés avec le
précision de quelle manière se fait ce mélange, quelles formes reste de l'Empire, en particulier avec l'Asie Mineure, riche
il prend, et quelle en est l'évolution chronologique. en sites qui ont fourni des inscriptions grecques de ce genre.
D'autre part, les carrières des citoyens de Palmyre permettent
C'est donc à partir de l'important corpus des inscriptions de mettre en valeur des familles qui monopolisent la scène
de Palmyre qu'il convient d'étudier les notables. J'ai utilisé publique (chapitre 1).
pour cela l'ensemble des textes connus du site, ainsi que les
témoignages sur les Palmyréniens qui proviennent d'autres Mais l'identité civique des notables n'est qu'un aspect
parties du monde antique. J'ai pour cela élaboré un fichier de leur personnalité, et il s'accompagne de caractères tout à
(logiciel FileMakerPro) qui regroupe l'ensemble des textes fait originaux, à commencer par l'onomastique et les
grecs et latins de Palmyre (en ajoutant les textes araméens divisions tribales qui apparaissent encore au début de la
des bilingues), ainsi qu'un fichier des textes connus hors période. Ces traits sont sans doute à mettre en rapport avec
des limites de la Palmyrène. Plusieurs raisons expliquent l'origine ethnique très mélangée de la population, question
que l'on n'en ait pas fait de même pour les textes araméens : à étudier de près (chapitre 11).
d'abord leur nombre beaucoup plus important, ainsi que leur
regroupement récent et exhaustif dans le recueil Palmyrene L'image de Palmyre est intimement liée au commerce
Aramaic Texts de D. Hillers et E. Cussini. Mais les différents caravanier contrôlé par certains grands personnages. Comme
tableaux et indices, qu'on trouvera en annexe, comportent on le verra, l'organisation du trafic caravanier nécessitait
aussi bien les données fournies par l'araméen que celles du tout un ensemble de pratiques, qui permettaient de contrôler
l O - P. VEYNE, 1976, p. 202. ce type de méthode et m'ont initié à certains outils informatiques qui ont
11 - Qu'il me soit permis de remercier ici M. Jean-Marie Dentzer, permis cette partie de l'étude.
M"" Catherine Saliou et M"" Laïla Nehmé, qui ont attiré mon attention sur
Introduction 7
une reg1011 qui connut aussi une exploitation agricole dans les inscriptions non funéraires, tout comme les
relativement intense. Plus généralement l'influence de affranchis. Il faudra essayer de rendre compte de la place
certains Palmyréniens ne s'arrêtait pas à la banlieue de leur réelle de ces catégories un peu marginales d'après les
cité, et on retrouve au Moyen-Orient et dans tout l'Empire témoignages épigraphiques, mais qui ont joué un rôle dans
romain des gens originaires de l'oasis, même s'il ne s'agit la société de Palmyre (chapitre v).
pas toujours de notables (chapitre m).
Situer les notables dans leur cité, au milieu de leurs pairs,
Les activités au sein de la cité même leur permettaient en relation avec les autorités romaines, ne doit pas faire
de bien signifier au reste de la population leur position sociale oublier une autre dimension très importante, qui apparaît de
privilégiée. Dans les sources, celle-ci apparaît aussi bien par manière privilégiée dans un autre type d'inscriptions, les
le costume que par ce qu'on sait de la culture des inscriptions funéraires. Grâce à elles, on saisit assez bien de
Palmyréniens. Au premier chef pourtant, c'est le vocabulaire quelle manière les notables, par delà leur propre vie,
des inscriptions et les raisons invoquées pour l'érection des mettaient en scène la puissance de leur famille, par des
statues honorifiques qui permettent de donner une image un constructions de tombeaux. Ces monuments sont aussi le
peu plus complète des milieux dirigeants de Palmyre, et d'en signe d'une pénétration peut-être de plus en plus forte de
discerner les caractères originaux, particulièrement en ce qui coutumes qui ont leur origine dans l'Empire romain, sans
concerne leurs activités de bienfaiteurs et de constructeurs que disparaissent en aucune manière certaines traditions
(chapitre 1v). originales, en premier lieu l'usage de l'araméen (chapitre vr).
Enfin, les notables de Palmyre sont entourés de ceux En définitive, on peut considérer cette étude comme une
qui participent d'une certaine manière à leur mode de vie, contribution à l'histoire sociale et politique du Proche-Orient
mais en sont aussi assez éloignés, pour des raisons diverses. syrien à l'époque romaine, combinant les données de
En se servant comme point de comparaison d'autres cités l'épigraphie gréco-latine (dont elle fournira par la suite un
du même type, on peut tenter de comprendre quelle est la corpus exhaustif) avec celles de l'épigraphie sémitique
place réelle des femmes, ou celle des affranchis, dans la palmyrénienne et les informations archéologiques fournies
société palmyrénienne. On sait ainsi que les femmes avaient par le site, pour mettre en relief les caractères originaux de
parfois un rôle important dans la vie publique des cités Palmyre, ville très marquée par l'origine sémitique de ses
grecques 12• De même, le personnage le plus connu de l'oasis habitants et les influences extérieures, occidentales comme
est sans conteste Zénobie. Pourtant les femmes sont rares orientales.
A - Le style des décrets de Palmyre: p. 9. documentation la plus riche et la plus variée de toute la région.
1 - Les décrets résumés: p. 10. Mais il est possible de trouver des parallèles éclairants en Asie
2 - Le style des décrets: p. 13. Mineure ; ils permettent de voir comment les notables
3 - Le vocabulaire de l'éloge: p. 16. palmyréniens se comportaient à l'égard des institutions de leur
B - Le bilinguisme officiel: p. 23. cité. Les textes syriens 2, même s'ils sont moins nombreux,
1 - Le latin à Palmyre: p. 24. permettent eux aussi un certain nombre de conclusions.
2 - Les premiers textes grecs: p. 25. Le texte le plus fameux de l'oasis, le très célèbre Tarif 3,
3 - Le vocabulaire officiel: p. 28. est à cet égard exemplaire, puisque son préambule (en fait
4 - Les décrets du Conseil et du Peuple: p. 31. le décret de promulgation de la loi fiscale : Myµa �ou11.11ç)
C Les carrières civiques et les grandes familles: p. 36. rappelle exactement quelles sont les institutions qui comptent
1 - Le faible nombre de magistrats: p. 36. au sein de la cité. Le préambule du Tarif commence par une
2 - Les rapports magistrats-symposiarques: p. 40. date donnée selon l'ère séleucide (18 avril 137), mais
3 - Des familles prédominantes: p. 43 l'ensemble du texte (c'est-à-dire des deux versions, grecque
(a. Famille de Bônnê, p. 44; b. Famille de Nashûm, p. 47 ; et araméenne) commence par quelques lignes de grec qui
c. Bené Aabeî, p. 50) donnent la date d'après la titulature de l'empereur Had1ien
4 - Les groupes tribaux: p. 51. et la date consulaire (L. Aelius Caesar pour la seconde fois
5 - La participation civique: p. 54. et Publius Coelius Balbinus). Ce qui est original dans ce
texte, et qu'on ne retrouve qu'une seule fois dans les
inscriptions de Palmyre, c'est l'utilisation d'une quatrième
A. LE STYLE DES DÉCRETS DE PALMYRE
manière de donner la date, d'après les archontes éponymes
Depuis le milieu du (1 siècle après Jésus-Christ au moins, (avec la préposition Èni + le génitif). En 137, ceux-ci sont
Palmyre fonctionne comme une cité grecque dont elle a les Ma11.1xoç OÀawuç (mlkw br 'lyy br mqymw) et ZE�aoa
institutions. Les textes, en grec comme en araméen, sont NEcm ( zbyd' br ns'). Ces deux personnages ne sont
1
formels et attestent de l'existence d'une n611.1ç de Palmyre • malheureusement pas connus par ailleurs, mais l'impmtance
Ce qui sera étudié pllls particulièrement ici est le rôle et la de la charge occupée est un signe indubitable de leur
place des notables dans ce fonctionnement civique. À cet effet, appartenance aux classes les plus élevées de la société
on trouvera en annexe une liste des notables dont la palmyrénienne -1_
documentation prouve la participation aux fonctions civiques Seul le texte Inv III, 5 fournit un autre exemple
traditionnelles des cités grecques, ainsi qu'à quelques autres. d'éponymie, avec cependant une différence de taille. Il date
Il faut essayer de voir en quoi la situation à Palmyre est en effet de 224-225, Palmyre est devenue colonie, et comme
conforme à ou différente de ce qui se passe dans le reste du il est naturel dans ce cas, les magistrats éponymes ne sont
monde grec. La comparaison avec le reste de la Syrie romaine plus les archontes, mais les stratèges (équivalents des
n'est pas aisée, car c'est de loin à Palmyre que nous avons la duumviri des textes latins) 5• Le texte utilise une formule
1 - La première attestation du terme se trouve dans le texte C/S 3923 2 - En prenant la Syrie au sens large, c'est-à-dire en fait les textes édités
(lnv IX, 8) daté de mars 51. Sur ces problèmes, l'article de M. SARTRE, dans les IGLS depuis 1929.
1996a, p. 385-405, fait un bilan complet de la documentation. Ces éléments 3 - Texte édité clans le CIS au numéro 3913. La version grecque est aussi
permettent de conclure que Palmyre est une cité grecque. Mais cette clans OG/S 629, IGRR III, 1056. On peut trouver des traductions clans le
appellation concerne principalement le domaine institutionnel, politique CIS (traduction en latin des deux versions); J. TEIXIDOR, 1984, p. 99-104
on peut dire que Palmyre possédait des institutions et émettait des décisions (traduction française du palmyrénien); J.F. MATTHEWS, 1984, p. 174-180
qui sont caractéristiques des cités grecques telles qu'on les connaît ailleurs. (traduction anglaise du texte grec); K. BRODERSEN, 1987, p. 153-159
Comme on le verra au cours de ce travail, cela ne signifie évidemment pas (traduction en allemand d'une version combinée des deux textes). Les
qu'il faille considérer les Palmyréniens comme des Grecs. De plus, si principales études sur le Tarif sont celles de D. ScI-ILUMBERGER, 1937;
Palmyre est une n6?c1ç sur un modèle commun au monde grec, il faut H. SEYR!G, 1941 a; A. PIGANIOL, 1945; J.F. MATTHEWS, 1984; J. TEIXIDOR,
souligner que ce monde n'est pas unifié et qu'il existe de grandes différences 1983a et 1984; M. ZAHRNT, 1986.
entre les cités. Enfin, on aura l'occasion de rappeler que si les formes 4 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 390 : « comme éponymes, ils étaient les
politiques sont grecques, cela ne permet aucune conclusion sur les premiers en honneur, sinon en importance réelle ».
conceptions des Palmyréniens eux-mêmes, ni sur le pourcentage de la 5 - M. SARTRE, 1996a, p. 394-395.
population qui participait réellement à la culture « grecque ».
10 Les notables de Palmyre
classique avec le génitif absolu (cnpmrnouvHov 'IouÀ(icov) pas le cas des textes funéraires dont l'objectif est de mettre
Aup17(ÀlWV) LEl�CX A817cxKCX�OU KCXl TmCXVOD 'A817vo8ropou en évidence une lignée et des liens familiaux.
Ëîouç çÀ<j>' « pendant la stratégie de Iulius Aurelius Seiba, Il est peu probable que ces deux Alexandre, fils
fils de Ateaqab et de Iulius Aurelius T itianus, fils d'Alexandre, aient un quelconque lien entre eux. Le nom
d'Athènodôros, l'année 536 », soit 224-225). 11
est d'ailleurs relativement courant à Palmyre en particulier ,
Pour revenir au Tarif, les autres magistrats nommés sont pour des Palmyréniens, et il n'indique pas nécessairement
le proèdre (président du Conseil) 6 et le secrétaire du Conseil l'origine étrangère du personnage. Mais il est remarquable
et du Peuple. Le proèdre est le seul personnage cité dans le que ce soit un Palmyrénien visiblement influencé par la
préambule dont on puisse aisément reconstituer la civilisation gréco-romaine qui occupe un poste de cette
généalogie. Il s'appelle en effet Bônnê, fils de Bônnê, fils importance. Cela n'empêche pourtant pas des gens aux noms
de Haîran. Il appartient à une famille importante des années sémitiques d'occuper la fonction de secrétaire, comme
50-150, famille sur laquelle on reviendra en détail un peu Zcx�ôlÀcxç LcxµmyEpcxµou Ioucrcx, zbdlh br smsgrm 'ys'
plus loin. Il est sans doute le petit-fils du fameux Haeranes (Jnv X, 39 de 75-76). Les autres magistrats cités dans le
Bonne Rabbeli f connu par plusieurs textes 7, et qui a été préambule du Tarif portent des noms sémitiques sans aucune
honoré à plusieurs reprises par le Conseil et le Peuple et par trace d'influence hellénique.
les prêtres de Bel. Son fils, père du proèdre de 137, a sans Pour en finir avec le Tarif, il faut souligner le caractère
doute été symposiarque au témoignage de la tessère RTP 463 tout à fait classique du décret qui en constitue le début. On
( bwn' br bym) 8• Tout cela fait de la famille de Bônnê une trouve d'abord l'intitulé: la date du document, le nom du corps
famille importante de Palmyre au cours des années qui délibérant, puis celui des personnages responsables (proèdre,
suivent l'arrivée de Rome dans l'oasis. secrétaire et archontes). Vient ensuite la formule de sanction
Le secrétaire du Conseil et du Peuple, dont le rôle est on a ici È\j/17<j)1cr817 1:à Drc01:E1:exy�LÉvcx (« a été décrété ce qui suit »
plus important, même s'il n'est nommé qu'en deuxième au lieu du Ë8oçE classique). Les considérants sont introduits
position, n'est pas connu par ailleurs 9• Son onomastique, par ÈrcE1817 ( « attendu que »), ce qui n'est pas très surprenant ;
aussi bien en araméen qu'en grec, n'est en rien sémitique. Il ils sont suivis de la formule de résolution (8E8ôx8m... « plaise
s'appelle 'AÀÉçcxv8poç 'AÀEçav8pou 'COD <I>1Àorca1:opoç, nom - sous-entendu "au Conseil et au Peuple" - que ») qui introduit
qui est simplement transcrit en palmyrénien : 'lksdrs br les décisions du décret (à l'infinitif, dépendant de 8E8ôx8m).
'lksdrs brplptr. Malgré le caractère très grec de ses noms, il La fin du décret précise le nom des magistrats chargés de faire
n'est pas du tout impossible qu'il soit originaire de Palmyre ; appliquer les décisions, comme dans tout décret d'époque
cela est même tout à fait probable. Un texte un peu plus hellénistique 12• Tous ces détails sont valables pour tous les
récent (avril 191) en est une preuve. Dans l'inscription de décrets des cités du monde grec, et il n'est pas de meilleure
concession d'une partie d'un tombeau, lnv IV, 7b, le vendeur preuve du caractère hellénisé des institutions de Palmyre. Cela
se nomme 'AÀÉçcxv8poç 'AÀEçav8pou 'COD 'ArcoUwviou. ne signifie pas que l' ensemble de la population de la ville était
Mais le texte est plus développé et il donne des précisions profondément hellénisé, mais cela montre suffisamment le
st1r la gé11éalogie dt1 perso11nage, com1ne c'est la co11t1une poiàs àe cette influence sur la viïle.
pour ce type de document. Or, à partir de l'arrière-grand
père, l'onomastique prend un aspect fort différent et révèle
1. LES DÉCRETS HONORIFIQUES : DES RÉSUMÉS
qu'il s'agit, sans nul doute, de quelqu'un dont l'origine est
locale : 'AÀÉçcxv8poç 'AÀEçav8pou 'COD 'ArcoUwviou 'COD Les inscriptions honorifiques araméennes et grecques
NE�ouÇcx�cx8ou WD 8m�tcx17 1:0D Ayyo8oµou 10• Le texte du suivent en général le formulaire des inscriptions grecques
Tarif, qui est un document officiel, n'entre pas dans les détails de même type, dans l'ensemble de l'Orient romain. Ce sont
généalogiques, son but n'est pas là ; ce n'est évidemment souvent des documents officiels : décisions du Conseil et
6 - Liste des proèdres connus dans M. SARTRE. 1996a. p. 400. n. 48. à tous les cas la dualité. car il a pu y avoir réunion accidentelle des deux
laquelle il faut ajouter le personnage mentionné dans le Tarif. titres sur la même tête ». Il est en tout cas très vraisemblable gu' à Palmyre,
7 - M. RooINSON, 1950. p. 137 ; lm· IX. 20 ; J. C!\NTINEAU, 1933, p. 175. l'office de secrétaire soit unique et que tous les personnages qui portent ce
n" 2b et p. l 83-184 (?) ; lm 1 XII, 42 (?). titre exercent la même magistrature.
8 - Voir DFD, p. 226-227. 10 - Ce qui donne en araméen: 'Jksd1ys br 'Jksdqs br 'plnys nbwzbd br
9 - Le terme est ypaµ�tCXîEÛç en grec et grmty en araméen. M. SARTRE, lym" br 'gdm.
l 996a, p. 390-391 (avec une liste des titulaires de la fonction à Palmyre) l l - Voir l'annexe IX. 2. Il faut ajouter les personnages des textes CJS 3932
fait l'hypothèse de l'équivalence entre secrétaire de la cité et secrétaire du (l'empereur Sévère Alexandre) et Inv IX, 36 (architecte du temple de Bel)
Conseil et du Peuple (n. 78, p. 401 ; voir aussi M. SARTRE, 1995, p. 225, gui ne sont pas originaires de l'oasis.
n. 133). I. LÉVY, 1899, p. 267, n. 9, écrit que« les deux fonctionnaires étaient 12 - J'ai suivi pour cette description le modèle donné clans le Choix
certainement distincts dans les villes importantes comme Éphèse et d'inscriptions grecques de J. Pouilloux (Paris, 1960, p. 17-18) à propos
Magnésie du Méandre. L'étaient-ils toujours? Cela est douteux, mais des décrets athéniens du lll' siècle avant J.-C.
l'emploi d'une formule comme yp. �ouÀ17ç 81iµou ne prouve pas dans
Chapitre I: L'identité civique de Pczlmyre 11
du Peuple, ou du Conseil seulement. Mais, le plus slmy') est un des rares cas de textes honorifiques où l'objet
généralement, ces textes ne sont que les versions réduites, de la dédicace est précisé en grec 14•
résumées des décrets pris par le Conseil u_ Cela est normal Un seul texte, le Tarif, peut permettre d'imaginer à quoi
pour des textes gravés sur des surfaces assez réduites. La ressemblaient les décisions prises par le Conseil de Palmyre.
surface était d'autant plus réduite, d'ailleurs, qu'il fallait Cet unique exemple de décret (presque) complet permet de
laisser de la place pour une version araméenne du texte. On penser que ces mentions ont existé dans les versions originales
peut prendre comme exemple la version grecque du texte des autres décrets. De toute façon, et Palmyre ne fait pas
CIS 3921 (Inv IX, 31 ), daté de 120-121 apr. J.-C. exception, l'absence d'une mention ne signifie pas qu'elle
n'a pas existé, cela veut dire simplement qu'on n'a pas jugé
'H �ouÀ11 Ka't 6 811µoç MaÀ1xov utile de la graver sur la pierre 15•
Oua�aÀÀa0ou 'WU Mavvmou Les décrets honorifiques du Conseil (et du Peuple le plus
1:El�lllÇ xap1v souvent) représentent environ un dixième des textes grecs de
Palmyre 16, mais cela n'est en rien propre à l'oasis. Il suffit de
« Le Conseil et le Peuple (honorent) Malikû, fils de prendre un recueil de textes de la période romaine, aussi bien
Wahballat, fils de Manaî, en témoignage d'honneur. » en Asie Mineure qu'en Grèce propre, pour avoir affaire à un
Le bénéficiaire de ces honneurs fait partie de la famille nombre important d'inscriptions du même type. Le recueil
d'Elahbel, il est l'un des quatre frères qui ont fait construire récent de P. J. Rhodes et D. M. Lewis 17 permet d'effectuer
la fameuse tour (n° 13) de la vallée des Tombeaux en 103 facilement ces comparaisons. Le formulaire tel qu'il existe à
(CIS 4134 = Inv IV, 27a; voir fig. 1 et pl. 9). Le caractère Palmyre est représenté dans l'ensemble du monde grec. Il se
très laconique de cette inscription est particulièrement caractérise par l'absence très régulière du verbe 18 et, en règle
frappant à la première lecture. La version araméenne générale, par un laconisme assez systématique 19•
également conservée ajoute la date (mois et année), et, pour À Palmyre, les textes conservés sont surtout des résumés
des raisons qui tiennent aux traditions de la langue utilisée, sur les bases de statues, et ce sont presque uniquement ces
précisent que l'objet de la dédicace est une statue (slm' en bases qui ont survécu, contrairement à d'autres cités, en
araméen). Comme il est d'usage en grec, le terme qui signifie particulier dans l'ouest de l'Asie Mineure. On a sans doute
statue n'apparaît pratiquement pas dans les textes grecs de très rarement jugé utile de faire graver en entier les décrets
Palmyre. L'inscription CIS 3914 (lnv IX, 25) qui mentionne qui honoraient un bienfaiteur de la cité, comme cela arrivait
1:oÙç àv8p1âv1:aç ( « les statues », traduit en araméen par par exemple à Pergame, à Xanthos ou à Priène 20• Sauf dans
13 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 389:« il manque l'intitulé faisant apparaître nom d'une ville ou d'un peuple, sans aucune indication de verbe, personne
le magistrat éponyme, l'auteur de la proposition et les divers magistrats ne pouvait se tromper sur le sens qu'on avait voulu exprimer. Tels sont,
éventuellement impliqués dans la prise de décision. Mais la forme raccourcie entre autres exemples, les milliers d'inscriptions où se trouve un nom à
qu'on observe à Palmyre est banale partout». l'accusatif précédé de T] n:ÔÀ1ç ou de 6 8rj�Loç sans être suivi d'aucun
14 - On retrouve le terme dans sept autres inscriptions honorifiques de verbe.» (J. A. LETRONNE, 1850, p. 208) La formule classique comprend le
Palmyre: CIS 3924 (Inv IX, 6a) ; BS 11° 45 ; H. J. W. DRIJVERS, 1995a, nom du déclicant (nominatif), un verbe (souvent sous-entendu clone), le
p. 34-37; J. CANTINEAU, 1936, p. 277, n° 20; Inv X, 24; CIS 3948 (Inv III, nom du personnage honoré (accusatif). Ces éléments peuvent se trouver
28); H. INGHOLT, 1932, p. 278. Le premier texte (et le plus ancien) date de clans des ordres divers et être accompagnés d'autres précisions, comme
19 apr. J.-C. Le plus récent (celui édité par H. Ingholt) date de 198. Ce qui d'une motivation (àpi:'CÎjç ËVEKEV « en raison de sa valeur») ou d'une
est remarquable, et explique dans la plupart des cas la présence du terme, apposition au nom de l'honoré (participe ou substantif) qui illustre le mérite
est qu'il s'agit de l'érection de plusieurs statues, en plusieurs endroits. La ou la relation entre ] 'honoré et le clédicant.
raison de l'emploi du mot est alors d'ordre syntaxique, puisqu'il faut préciser 20 - Dans le cas de Priène, par exemple, les éditeurs des Inschriften von Priene
qu'il n'y a pas qu'une seule statue. Ce qui n'empêche pas que le mot séparent les deux types de documents: d'une part les Staatsurkunden
n'apparaisse pas dans le texte Inv X, 115, où il s'agit de trois statues, comme (« archives de l'État»), cl ' autre part les Ehrenstat u en (« statues
le dit explicitement le texte araméen: $1Iny' 'ln tlt' (« ces trois statues»). honorifiques»). Les premiers sont les transcriptions sur pie1Te des textes
15 - Voir à ce sujet les remarques préliminaires de P. J. RHODES et (intégraux ?) des décrets; ceux-ci précisent parfois que la décision du Conseil
D. M. LEWIS, 1997, p. 5-7. comporte l'érection d'une statue (par ex., le n" 103, l. 10-11: Kat 01:110m
16 - Plus de quarante textes sur les quelque 440 qui contiennent du grec et/ 'CT]V ElKÔVO: auwu ÈV 'ClJ àyop� Èv 'CC[) f:7Cl�ŒVECHCX'C(? 'COTI:(?« de placer sa
ou du latin. statue dans l'agora en l'endroit le plus visible»). Les seconds sont en général
17 - P. J. RHODES et D. M. LEWIS, 1997 avec un catalogue qui couvre très courts. Ils ont pour principale fonction de servir de légende aux statues
l'ensemble du monde grec, p. 65-472. de bienfaiteurs dressées dans les lieux publics. C'est surtout ce type de texte
18 - On trouve principalement le verbe àvé,01:1101: (-crav), « il(s) a (ont) qu'on rencontre à Palmyre. Une inscription cl'Acraiphia en Béotie (IG V II, 2,
dressé» : CIS 3924 (Inv IX, 6a); CIS 3933 (Inv III, 21) ; CIS 3948 (Inv III, 2712, lignes l 03-105) explique de manière très claire comment s'élaboraient
28); CIS 3970; Inv X, 24 ; BS 11° 45; H. J. W. DRIJVERS, 1995a, p. 31-42; ces épigraphes. En effet, aux dernières lignes de ce décret honorifique très
on a aussi deux attestations de àvtjyapi:v « il a érigé» (M. GAWLIKOWSKI, détaillé, on trouve cette phrase: 1:11v Èmypa�T]v n:owuµÉvrov 1:tjv81:· 'O
1970a, p. 66, 11° l et J. CANTINEAU, 1936, p. 277, 11° 20 = BS 11° 48). Le seul ùî]�Lüç K(o:1]\ 11 �OUÀT] 'COY ùElVO: aplCT'CO: TCOÀEHEUCTCXµ�VOV [àpE'CT]Ç ËVEKO'.
autre verbe connu est È'CEl�lllCTŒV « ils ont honoré» (CIS 3960 = Inv X, Kat Euvoi.ad « en faisant cette inscription: le Conseil et le Peuple (honorent)
87-88) mais la restitution est douteuse et on peut aussi penser à une formule un tel qui a été bon citoyen, en témoignage de valeur et de reconnaissance».
du genre 1:aµ�ç xâptv. On a un autre exemple, IG V II, 190 (repris par Ad. WILHELM, « Inschrift aus
19 - On peut citer un texte de J. A. Letronne qui, dès 1850, définissait le Pagai», Jahreshefte 10, 1907, p. 17; cité par P. VEYNE, 1962, p. 65, n. 1).
style elliptique des inscriptions grecques:« Ainsi, quand sur la base d'une Les décrets de Palmyre devaient comporter la même précision et ce sont ces
statue, on écrivait le nom d'une personne à l'accusatif suivi ou précédé du « épigraphes» seules qui sont conservées.
12 Les notables de Palmyre
quelques cas exceptionnels, les textes sont en fait simplement La coutume d'élever des statues honorifiques n'existe
les légendes qui servent à donner un commentaire minimum pas seulement à l'ouest de Palmyre. Il est tout à fait possible
aux statues qui ornaient les espaces publics de la ville. Le de comparer ce qui se passe là à des faits de même ordre
texte C/S 3921, cité plus haut, trouve des parallèles presque dans les limites de ce qui était l'Empire parthe à la même
exacts dans d'autres villes de l'Orient romain : on peut période. De ce point de vue, le spectacle qu'offrait le centre
comparer avec le texte /GLS VII, 4008, qui se caractérise monumental de Hatra ne devait pas être très différent de
aussi par un certain laconisme. celui de Palmyre. Le formulaire honorifique est certes
marqué par des influences orientales encore plus fortes qu'à
'O 811µoç Palmyre. Mais si on excepte les dédicaces de statues qu'un
,Mxµov AaÎÀwv tel« fait pour sa vie et pour la vie de ...» 22, il existe aussi à
LlÉKµou u'tôv, Hatra des inscriptions honorifiques fort semblables à celles
Ëmxpxov crtÔÀou de Palmyre. On y trouve, en outre, un autre genre de textes :
EÙVOlO'.Ç ËVEKEV des bases de statues qui portent seulement le nom du
personnage représenté. À Palmyre, on ne trouve ces textes
« Le Peuple (honore) Decimus Laelius, fils de Decimus, que dans un contexte funéraire, ce n'est apparemment pas
préfet de la flotte, en raison de son dévouement.» le cas à Hatra 23• Les textes de dédicaces de statues dans cette
Cette inscription, sur une base de statue, provient de dernière ville mentionnent parfois le dédicant : on en connaît
l'île de Rouad, l'antique Arados, sur la côte syrienne. La un certain nombre d'exemples 24• L'expression /yqr (« en
différence la plus remarquable entre ce texte et celui de l'honneur de ...»), si caractéristique des textes honorifiques
Palmyre est la mention des fonctions du personnage honoré. palmyréniens, manque à Hatra 25, où tous les textes de ce
Cette précision est assez rare à Palmyre 21, sans doute parce type suivent le même schéma:« statue de X, fils de ... qu'a
que la plupart des personnages honorés dans l'oasis le sont faite pour lui Y, fils de ...» 26• Le nom des différents
à cause de bienfaits accomplis en tant que personnes privées, personnages est suivi d'un titre ou d'un nom de fonction,
et non dans l'exercice de fonctions officielles. Cette peut-être plus systématiquement qu'à Palmyre. Mais le
fréquence d'honneurs attribués par le Conseil et le Peuple à nombre total de ces dédicaces est relativement faible, si on
des bienfaiteurs qui ne semblent pas participer outre mesure le compare au nombre total des textes araméens qu'a livrés
à la vie civique de la ville constitue une des particularités Hatra.
les plus sensibles de la ville. En tout cas, ils ne mentionnent De même, si la statuaire de Hatra n'a sans doute pas
pas de manière systématique cette participation. beaucoup de points communs avec celle qu'on trouve en
Curieusement, on a au contraire, de manière systématique, Asie Mineure, on peut pourtant y trouver une manifestation
des généalogies assez développées. Visiblement, lorsqu'on des influences helléniques qui ont marqué les civilisations
résume les décrets, on préfère faire inscrire de la généalogie de l'Orient après les conquêtes d'Alexandre. Il est intéressant
plutôt que les fonctions civiques. de trouver des parallèles à ces statues honorifiques et à ces
Dans le monde grec, et même en Syrie, on a des inscriptions dans les civilisations qui ont marqué le Proche
exemples d'utilisation sur les bases de statues de formulaires Orient avant la conquête gréco-macédonienne. Il n'est bien
plus proches du texte original des décrets. Mais ce genre de sûr pas de mon ressort de faire cette enquête, mais il est
texte est absent de Palmyre. Le texte IGLS IV, 1349 possible à la lecture de textes disponibles en traduction de
commence par une invocation à la Bonne Fortune ('Aya8Ïj faire quelques remarques 27•
TÛX1J) avant de reproduire la formule classique ËOOçE ti:\ Il est clair à la lecture des inscriptions gravées sur leurs
�ouÀ1J KO'.l têp 81îwP« il a plu au Conseil et au Peuple». Le bases que les statues, même quand il s'agit de la
texte provient d'Apamée, une cité proche de Palmyre, mais représentation d'un être humain, sont généralement dédiées
on est apparemment dans un contexte culturel où l'utilisation à une (ou plusieurs) divinité. On peut prendre quelques
du grec dans les inscriptions est plus naturelle et n'est pas exemples, comme ce texte de Mari : « Pour la vie d'Iblul-Il,
seulement l'application plus ou moins automatique de roi de Mari [ ...] Wardasu, prévôt du palais a voué sa statue
formules. à !nana», ou encore une base de statue découverte à Suse :
21 - M. SARTRE ( 1996a, p. 389) souligne cette rareté pour les inscriptions Hatra n" 105 au texte très simple : $1111' dqp' ( « statue de qp' ») sur une
funéraires. Mais les différents titres apparaissent néanmoins dans les base de statue.
inscriptions honorifiques, en particulier dans celles de l'agora: voir par 24 - Hatra n'" 38, 112, 188, 193, 203,224,286.
exemple Inv X, 13 (secrétaire), 29 (bouleute d'Antioche). 34 (légat et 25 - Sur ce point, voir K. DuKSTRA, 1995,p. 22-23.
curateur),39 (secrétaire). 26 - En araméen, slm' dy X, br. .. d' qym lh Y. br... Le dédicant de la statue
22 - Pour ce type d'inscriptions à Hatra,à Palmyre et dans le reste du Proche du n" 38 est une divinité (voir DFD, p. 337).
Orient, voir K. DuKSTRA, 1995. 27 - J'ai utilisé les recueils de J. C. L. GrnsoN, 1975 (araméen) et 1982
23 - Voir par exemple, l'inscription Hatra n" 56 qui donne seulement la (phénicien), et de E. SoLLBERGER et J.-R. KUPPER, 1971 ( sumérien et
généalogie du personnage et son titre : rb smy' ( « chef de l'enseigne »),ou akkadien).
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 13
« Man-istûsu, roi de Kis: Espum, son serviteur a voué(cette 2. LE STYLE ÉPIGRAPHIQUE OFFICIEL
statue) à Narundi» 2x. Ce sont des textes akkadiens, mais il
Quelques exemples montrent qu'il existe pourtant à
existe des formulations proches dans des textes plus récents
(début I"' millénaire), comme la dédicace araméenne d'une Palmyre des textes détaillés, ainsi C/S 3932 (= lnv III, 22 ;
statue par Bar Hadad(Damas) : « Statue que Bar Hadad ( ...) 2). Or tout clans ce texte prouve qu'on suit les traditions
a dressée pour son seigneur, Melcarth, à qui il avait fait un helléniques. Le nom du personnage honoré Iulius Aurelius
vœu». Comme le remarque J. C. L. Gibson, il s'agit là de Zénobios dit Zabclilah,n'est certes pas entièrement grec, mais
l'adaptation d'un formulaire connu aussi en phénicien 29• son patronyme est précédé de 8k, ce qui signifie que son
Dans cette langue, on a pu identifier une formule typique père portait le même nom que son grand-père, MaÀ.xoç ,::_
qui se retrouve dans un assez grand nombre de textes. Elle C'est une formulation tout à fait classique dans le monde
se caractérise par cinq éléments : 1° le nom de l'objet dédié, des cités grecques à l'époque impériale. Ce personnage a
2" un pronom relatif qui fait référence à l'objet, 3° un verbe, exercé les plus hautes fonctions clans la colonie de Palmyre
4" le nom du dédicant, et enfin 5" le nom de la divinité ou de et le texte permet de reconstituer quelques étapes d'un
la personne destinataire de l'objet 30• Comme on le voit, ces véritable cursus honorum. Iulius Aurelius Zabclilah a été
textes ne sont pas tout à fait comparables à ceux de Palmyre. stratège de la colonie. C'est cette fonction qu'il exerce au
En effet, dans les textes de l'oasis, tous ces éléments sont moment de la visite de l'empereur Sévère Alexandre en 231.
dans un ordre un peu différent, puisque le 5 ° est placé juste À cette occasion, il prête son aide aux troupes romaines qui
après le 1" et vient le qualifier. On peut cl'ailleurs émettre passent clans la ville et à leur commandant Rutillius
l'hypothèse que la fonction de la formule lyqrlz dans les textes Crispinus. Il a été auparavant agoranome et a dépensé de
palmyréniens est justement de prendre la place du nom du grosses sommes pour la cité. Il s'est aussi conduit en bon
destinataire. Celui-ci a changé de position clans le texte, mais citoyen ( KaÀ.mç 1wÀ.a Trncra�Œvov) ce qui lui a valu de
on reste marqué par les formules et les structures anciennes. recevoir le témoignage du dieu Iarhibôl et du préfet du
Je laisse pour l'instant de côté un type de textes qui prétoire Iulius Priscus. Avec le nom même du personnage,
comprend la formule « pour la vie de ...», assez courante cette mention du dieu Iarhibôl est le seul détail exotique du
dans les dédicaces de statues à Hatra. Ces textes mettent décret qui pour le reste est semblable à beaucoup de textes
généralement en scène trois personnages, le cléclicant, la du monde grec.
personne représentée et la personne pour la vie de laquelle La construction syntaxique du décret ne pose aucun
la dédicace est faite 31• problème clans sa version grecque. Elle est tout à fait
Néanmoins, pour comparer ces textes avec les données conforme à ce qu'on peut attendre. Il n'y a qu'une seule
de l'épigraphie grecque, il faut rappeler ce que dit P. Veyne phrase, le verbe est sous-entendu. Le cléclicant est au
de l'origine des inscriptions honorifiques grecques : « (elles) nominatif(� �ouÀ.11 Kat 6 817µoç) et il est suivi d'une longue
ont originellement la forme d'une consécration aux dieux proposition à l'accusatif qui énumère les qualités de la
de la statue d'un personnage à honorer». On a donc personne honorée, après avoir donné son nom. La phrase se
exactement la même origine clans les deux cas. On peut se termine par le terme Tàv �1À.orcaTp1v « patriote» qui vient
demander si les inscriptions araméennes de Palmyre sur les indiquer le rapport du cléclicant avec la personne honorée.
bases de statues sont seulement une marque d'influence L'expression TEl�LÎ'k xap1v(« en son honneur»,« en marque
grecque, ou bien, si le formulaire très ancien, qu'on retrouve d'honneur») qui suit, vient résumer tout ce qui précède. La
dans les premiers textes araméens, a connu la même date du texte (242-243) clôt l'ensemble.
évolution à Palmyre qu'en Grèce. Il faut reconnaître qu'à Plusieurs textes honorifiques sont d'une longueur
1 'origine, les inscriptions honmifiques ont comme but de comparable. Ce ne sont pas seulement des décrets du Conseil
consacrer un objet à une divinité en faveur d'un personnage et du Peuple, mais ils sont aussi le fait de caravaniers ou
qu'on veut honorer. bien de simples particuliers 33• Ils suivent généralement le
schéma classique et présentent le grand intérêt de donner ont fait disparaître la formule 1:E1�t11ç xâplV ou lyqrh. C'est le
quelques détails plus ou moins précis sur la manière cas par exemple du texte Inv X, 62, très incomplet 36•
dont les notables de Palmyre menaient leurs carrières. De plus, une formule comme EÙvoicxç ËVEKCX est très
On en sait ainsi un peu plus sur les raisons qui motivaient courante dans l'épigraphie honorifique grecque. À titre
les honneurs reçus par ces gens. Mais le nombre de ces d'exemple, on la trouve dans les inscriptions IG XII, 9,
textes est néanmoins réduit, et la grande majorité des n°' 276-277 en Eubée (àpE1:17ç ËVEKEV KCXl EÙvoicxç). La
textes honorifiques ne donne qu'un minimum de consultation de l'index des /G IIF, 1 (inscriptions d'Athènes
renseignements sur les notables qui constituaient l'élite de et de l' Attique à l'époque romaine) est tout à fait révélatrice
la cité. de cette extrême fréquence. C'est aussi l'expression utilisée
On trouve dans l'ouvrage de Klaas Dijkstra, Life and àArados, dans l'inscription IGLS VII, 4008, citée plus haut.
Loyalty, aux pages 335-343 (Appendix G) 3"1, une liste On trouve concurremment à ces termes Eùxcxp1cndcxç ËVEKEV
chronologique complète des inscriptions honorifiques de (/G XII, 3, 11° 273, ou à Palmyre CIS 3944 = Inv III, 16) ou
Palmyre. Parmi elles, 118 comprennent les expressions lyqr d'autres formules encore 37•
(«en l'honneur de ...») ou ses équivalents grecs (comme Ce serait une erreur d'en faire de simples équivalents.
inµ17ç xcip1v, ou bien ËVEKEv). Cinquante-trois autres Chacune d'entre elles a sa propre signification et s'applique
n'emploient pas ces expressions, mais le contexte à des cas précis. Airisi le texte publié par H. INGHOLT, 1932,
épigraphique et archéologique en assure le caractère p. 279 (fig. 4), mentionne la valeur et le courage (àpE1:17ç
honorifique : par exemple, Inv XI, 100, la plus ancienne Kcx't àvopdcxç ËvEKEv) du personnage honoré (Aelius Bôrrâ,
inscription palmyrénienne datée (44 av. J.-C. ; fig. 3). Le bloc fils de Titus Aelius Ogeîlû) 38• Ces qualificatifs s'appliquent
de pierre (base de statue ?) porte un court texte araméen qui, tout à fait naturellement à un personnage qui a été stratège
après la date, dit que «les prêtres de Bel ont dressé cette et a ramené la paix dans le territoire de la cité. On a également
statue à grymy br nbwzbd (Goraîmî, fils de Nebûzabad) de àdeux reprises µEycxÀocppocruv11ç ËVEKEV («en reconnaissance
la tribu des Benê Kohennabû (bny khnbw) » 35• Même si le de sa noblesse », BS n° 45 et M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 100)
texte est laconique, il est tout à fait clair qu'il s'agit d'un et cr1: opy17 ç Ë VEKEV ( « en marque d'affection »,
texte honorifique qui commémore l'érection de la statue. M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 257, n° 13). Tous ces qualificatifs
Les textes honorifiques de Hatra emploient le même font partie du vocabulaire classique de l'éloge dans le monde
formulaire très simple. Comme à Palmyre, on est bien en grec et on n'aurait aucune difficulté à prouver que, de ce
peine de découvrir pour quelles raisons la statue a été dressée. point de vue aussi, Palmyre fait partie d'une koinè culturelle
De même, les relations entre les différents protagonistes qui comprend les cités grecques d'Asie Mineure.
restent mystérieuses. Mais d'autres textes, comme le suivant Il faut néanmoins donner sa place àl'existence de modes
de la liste de K. Dijkstra ( dans l'ordre chronologique : locales. Sinon comment expliquer la fréquence de la formule
J. CANTINEAU, 1936, p. 268, n° 17), peuvent être plus 1:aµ17ç xâp1v à Palmyre, qui est seulement concurrencée
explicites : dans ce cas, le don d'un autel et d'objets pour le par son équivalent 1:aµ11ç ËVEKEV, sans que la signification
culte permet d'expliquer qu'une statue ait été élevée par les change («en son honneur, en marque d'honneur»). Or cette
prêtres de la déesse Hertâ. expression n'est apparemment pas très courante dans le
La distinction qu'établit K. Dijkstra entre les deux types monde grec, les différents index des IG en font foi. Elle existe
de textes peut sembler en fait un peu arbitraire. Il place ainsi hors de Palmyre, mais il n'est pas inutile de rappeler que,
dans la catégorie des textes honorifiques qui ne comportent dans le manuel d'épigraphie grecque de W. Larfeld ( l 914,
pas la fameuse formule, l'inscription Inv IX, 12, dans laquelle p. 438-439), les huit exemples cités proviennent tous de
un certain Malikû, fils de Neshâ, est honoré par les trésoriers Palmyre. On trouve pourtant la formule àThéra, par exemple,
et le Peuple de Palmyre. Or le texte est fort clair, et explicite dans les textes IG XII, 3, n°' 526, 527 et 529 39• Là aussi, on
les raisons de l'érection de la statue, aussi bien en grec (EÙvoiaç peut remarquer que la formule est relativement rare dans
ËVEKCX, «en raison de son dévouement») qu'en araméen (mn ces îles, et qu'elle apparaît trois fois, au même endroit, sur
dy spr lhwn, «parce qu'il leur a été agréable»). On peut des monuments apparentés.
d'ailleurs soupçonner que certains textes n'appartiennent à la La formule apparaît aussi en Syrie, àArados (IGLS VII,
seconde catégorie que parce qu'ils présentent des lacunes qui 4013), à Nicopolis, en Syrie du Nord (IGLS L 167) ou à
d'une statue à un empereur. Voir dans/. Selge, n" 7, une dédicace à Hadrien, 44 - Même si elle utilise le possessif dydh, un peu rare par ailleurs, mais bien
au datif. Sur ce sujet, l'étude classique reste celle de P. V EYNE, 1962, attesté. L'article de P. V EYNE, 1962, p. 49-98, cité plus haut, met justement
p. 49-98, et en particulier p. 68-69 et 77-79 (voir aussi le BE 1966, p. 220). l 'accent sur la fréquence du datif clans les textes bilingues grecs-latins.
16 Les notables de Palmyre
par le formulaire des inscriptions votives et funéraires. On a propositions indépendantes : «Le Conseil honore (avec le
ainsi un cas curieux d'inscription qui mélange les cas verbe souvent sous-entendu) un tel (accusatif). Il a érigé la
grammaticaux. Dans Inv X, 115, le nom de la première statue ( iàv àv8pîavia àvÉcn11 cn::v)» 51• Si parfois un des
personne honorée est à l'accusatif, après la mention du terme est au datif,c'est plutôt le mot qui signifie statue. Dans
Conseil et du Peuple au nominatif. Mais la deuxième les textes de Lycie, TAM II,15,18-19,289-290,le nom de
personne honorée,père de la première,voit son nom ajouté la personne honorée est à l'accusatif,le verbe est È'LE1µ1icrt:v,
à la fin,au datif,alors que,grammaticalement,on attendrait et le mot statue est au datif.
que les deux soient au même cas,donc à l'accusatif. On ne La présence de Ek 1aµ11v m'Hou, à la fin du texte
sait s'il s'agit d'une eITeur,ou d'un effet de style,pour mettre CIS 3948,est de la même manière assez explicable. Là encore,
en relief l'ajout du deuxième personnage. Dans le texte la raison est syntaxique. La statue est celle du père mais la fin
araméen, la partie qui correspond à cette phrase a du texte précise qu'il s'agit aussi d'un honneur rendu aux
malheureusement disparu et rend toute comparaison deux fils,Iaddaî et Zabdibôl. Il est facile en araméen de répéter
impossible 45• lyqr pour exprimer cette notion une deuxième fois (lyqrh vvlyqr
L'édition récente des inscriptions de Prusias ad ydy wz.bdb1vl, «en son honneur et en l'honneur de Iadclaî et
Hypiurn -16 donne deux exemples de cette indétermination Zabdibôl»),mais il n'est pas possible qu'une formule comme
entre les genres : dans les textes n'JS 58 et 59,classés parmi 1a�n1ç xap1 v porte sur des personnages différents de celui qui
les textes honorifiques, le nom des personnes honorées est est nommé au début du texte. Il a donc fallu remplacer la
au datif. Or,comme le précise l'éditeur,les deux textes sont formule habituelle par une autre formule qui permettait une
peut-être plutôt funéraires (c'est-à-dire qu'il les considère expression plus précise et plus conforme à ce qui était peut
ainsi, sans doute justement à cause de ce datif). De même, être un original pensé en araméen.
on soupçonne que la dédicace au roi Hérode (OG/S 415),
trouvée à Si'a dans le Hawrân -17, tient son datif de l'influence
3. LE VOCABULAIRE DE L'ÉLOGE
des inscriptions votives. Un texte célèbre, la dédicace de
Gélon de Syracuse à l'Apollon delphique -18, est un bon On peut aussi s'intéresser à l'expression des différents
exemple de ce genre de textes,qui abondent dans le domaine motifs qui justifient les honneurs reçus par les notables de
religieux. D'ailleurs, c'est sur ce modèle qu'à Palmyre Palmyre,la manière dont ces derniers sont qualifiés par les
même, sont rédigées les nombreuses dédicaces au dieu textes, et étudier le vocabulaire employé. On sait que le
anonyme (par exemple CIS 3994, 3998, 4003,4031,etc.) vocabulaire de 1'éloge,sans être entièrement fixé,a des règles
ou encore la dédicace d'un sanctuaire aux dieux Bôl,Isis et assez précises, à l'époque impériale. Le meilleur exemple
Aphrodite,dieux ancestraux (DFD, p. 54). Il faudra revenir en est la transformation,à partir du second siècle,de termes
sur ces rapports ambigus à Palmyre entre les dédicaces comme clarissime ou pe1jectissime en titres qui servaient à
religieuses et les inscriptions«simplement» honorifiques -19_ fixer le rang clans la société de leurs titulaires. De ce point
de vue,Palmyre fonctionne comme le reste de l'Empire,et
Pourtant, il existe dans le monde grec des textes on retrouve ces titres dans les textes officiels. Ainsi,dans un
honorifiques qui précisent en toutes lettres que«le déclicant texte daté de 262, on a l'expression «illustre colonie» (11
a érigé une statue en l'honneur d'un tel». Ces textes Àa�mpo1a111 KoÀcovEÎa) pour qualifier la cité 5 2. De même,
n'utilisent pas le datif (pour qu'on ne les confonde pas avec Odainat est appelé 6 Àa�mpôimoç («illustre»),terme qui
des textes de caractère religieux ? 50), mais contournent est l'équivalent grec de «cfarissimus» et s'applique aux
systématiquement la difficulté en séparant la formule en deux personnages de rang sénatorial sJ_
45 - Même si la restitution de l'éditeur (J. Starcky) essaie de reproduire la 49 - Un cas un peu particulier est fourni par le texte lnv IX,22. clans lequel
rupture de construction du grec, avec la particule/ («pour») qui introduit le nom du cléclicant et celui de la personne honorée sont tous les deux au
le nom du père. Il se peut aussi qu'il ne s'agisse pas cl'une statue du père ou nominatif. Comme le note H. Seyrig ( 1933a,p. 160),il s'agit peut-être d"une
d'honneurs faits au père, mais qu'on rappelle que ce dernier, comme son confusion avec une formule cléclicatoire. Il s · agit cl'un texte qui honore un
fils, a reçu des témoignages de la part du dieu et du gouverneur. Cette militaire romain.
interprétation est possible. mais ne supprime pas la rupture de construction. 50 - Ou bien parce que le formulaire de l'inscription suit ce qu'il y avait
On retrouve d'autres exemples de rupture de construction clans les textes clans le décret. avec la mention de la statue seulement à la fin du texte.
JGRR III, 147 et 1424 et ILS 8849 (cités par P. VEYNE, 1962, p. 81, n. 1 ). 5 l - Grand nombre d"exemples: à Selge. 1. Se/ge, n"' 15, 18; à Prusias,
Dans ce dernier texte (en Épire), la personne honorée est nommée au datif, 1. Prusias ad Hypium, n" 30; en Lycie. TAM II,145-146; à Athènes,le mot
puis, après le nom du clédicant, on a îOV EÙEpyÉîllY. C'est clone l'inverse îOV àv8p1cxvîa. n'apparaît pas toujours, mais on a, de la même manière,
de ce qui se passe clans le texte de Palmyre. deux propositions: JG Iff,1,n"' 635,682 (îOV ô. + qualificatifs,11 �ouÀ17
46 - J. Prusias ad Hypiwn, n" 58 : 'AvîWVl([) 1 0aUép I KÀ. 'Apicrn1 1 KaÎ. 6 8î7µoç àvfoî110av EÙvoiaç ËVEKŒ),708,709,745,839. Voir aussi,
àvÉcm1CTEV. à Palmyre même, CJS 3933 (lm, III, 21).
47 - Cité par M. GUARDUCCI, 1975, p. 96: [Ba]CTtÀEl 'HpWôEl KUpl ([) 52 - CIS 3939 ( Jn\'III, l 0). On n'aurait pas de mal à trouver des parallèles,
O�mcrmoç I:aoôüu te111Œ îOV àv8p1âvîa îO'.tç ÈJlO'.tç 8an:âvm[d par exemple SEC 42,1143 (mais on a surtout 11 Àa.µn:püîCXTll 11:0ÀK,comme
48 - J. MARCADÉ, Rerneil des signatures de sculpteurs grecs, I, 9 (= Choix le prouve l'index des JGRR Ill, passim). Voir aussi Jnv X, 114: i:]n:'t îllç
d'inscriptions grecques, 1960,p. 155-156,n" 43): ÏÉÀov 6 L'.ÎElVWLÉv[wd KpaîlCTîllç �ouÀ17k, une autre formule fréquente en Asie Mineure.
1 àvÉ011KE wn:6Uov1. .. 53 - Par exemple, CIS 3945 et 3946 ( Jnv III, 17 et 19).
Chapitre I: L'identité ciFique de Palmyre 17
Plus qu'une longue analyse, l'index du vocabulaire de développés (voir supra, en note), on remarque une forte
l'éloge dans les inscriptions honorifiques de Palmyre montre corrélation entre les mots qui sortent de l'ordinaire et les
que ce vocabulaire est très présent. Or ces textes vont du textes que leurs auteurs ont pris la peine de faire inscrire de
milieu du r"1 siècle jusqu'à la chute de Zénobie. Le vocabulaire manière plus ou moins détaillée. Cela signifie que, si la
utilisé est tout à fait conforme à ce qu'on peut attendre d'une plupart des textes sont assez courts et emploient un langage
cité grecque 54• Un détail peut pourtant surprendre. On a à stéréotypé (avec toujours les mêmes termes), les
peu près cent cinquante inscriptions honorifiques grecques Palmyréniens étaient capables de rédiger des décrets détamés
encore assez longues pour qu'on puisse en dire quelque chose. en employant un vocabulaire choisi. Il n'y a d' ailleurs rien
Mais le vocabulaire utilisé est étonnamment semblable, quelle cl' étonnant à ce que les décrets longs soient plus précis.
que soit la période prise en compte. Certes, le genre ne se Peu de détails sont connus sur les conditions clans
signale pas obligatoirement par une invention verbale lesquelles la plupart des statues ont été dressées. Il est doric
débordante. Néanmoins, on remarque que les occurrences difficile d'en faire un commentaire. Il est clair pourtant que
de certaines des formules sont particulièrement nombreuses. le choix de tel ou tel mot n'était pas arbitraire. Ainsi le texte
Le cas particulier de l'expression îEl�L17ç xâp1v a été CIS 3966 RSP n" 156) qualifie Shalamallat, fils de Iarhibôl,
étudié plus haut. La formule est absente de l'index, car elle de EÙCTE�llç («pieux»): cela n'a rien d'étonnant pour une
est trop fréquente. L'expression EÙCTE�17ç KCÙ cp1ÀorcmpK Ka't inscription dont les dédicants sont la déesse Allât et la tribu
<plÀüîEl�Loç, elle aussi, est intéressante. Ces trois termes, tous des Bené Mazîn. La version araméenne n'est pas exactement
ensemble ou combinés différemment, sont présents dans la équivalente. On remarquera l'utilisation d'une proposition
plupart des inscriptions honorifiques plus ou moins subordonnée, avec trois verbes (au moins), au lieu de
développées. Il y a bien sûr des variations : on a par exemple l'emploi de substantifs par la langue grecque: bdyl dy qm'
cp1À01:E1µoç, ou bien le substantif abstrait <plÀOîEl�d.a, ou wbn' wqrb [. .. wsprl]lm bkl gns klh «parce qu'il a entrepris,
encore 1'adverbe correspondant, cp1Ào1Et�L(J)Ç. La signification bâti et construit [ ... et les a favorisés] de toute manière»
de ces mots («pieux», «qui aime sa patrie », «ami de la répond au grec EÙGE�ll Ka't [apfolavm aù101ç EV rcoU01ç
gloire» 55) montre l'attachement des notables de Palmyre rcpây�LCXm, [Ë]v îE K1:{µamv Ka't ava8tjµamv, avaÀm�Lam îE
aux valeurs civiques courantes 56• Mais il faut étudier aussi oÙK ÔÀ1ymç, «pieux et agréable à eux en beaucoup d'affaires,
l'aspect résolument original de Palmyre, c'est-à-dire la des constructions, des offrandes et des dépenses non
présence, en parallèle, de versions araméennes, dont le sens négligeables». La phrase utilise une tournure accumulative
est tout à fait semblable au grec. assez courante en grec et se sert de l'expression oÙK 6Ai yoç,
Toutes ces formules, sans être entièrement stéréotypées, un euphémisme qui signifie évidemment « beaucoup, très
donnent fortement l'impression d'être l'application de certains nombreux». On notera donc qu'il n'y a pas exacte
schémas types. Ce qui est, en fait, le plus curieux n'est pas équivalence et que chaque version respecte plus ou moins le
l'utilisation de ces termes, mais leur présence dans les génie de sa langue.
inscriptions de Palmyre à la quasi-exclusion de toutes les autres Il est possible que la formule qui utilise le participe
expressions. De plus, l'emploi de ces trois adjectifs dans la aoriste de apfoKco ne soit pas tout à fait courante hors de
même inscription semble assez rare dans le reste du monde Palmyre 58• En ce lieu, elle répond généralement à l'araméen
grec. À ma connaissance, c'est principalement dans le sud de spr Jh, comme on peut s'en rendre compte d'après les
l'Asie Mineure (Pamphylie, Pi sidie) qu'on trouve quelques nombreux parallèles. Ils assurent la restitution de cette partie
exemples de l'expression, ou bien des formules plus ou moins de la version araméenne 59•
proches, mais avec une fréquence moindre qu'à Palmyre 57• Dans le texte C/S 3914 (/nv IX, 25), on retrouve les
Le caractère stéréotypé du vocabulaire de la plupart des trois adjectifs dont on a parlé. Les deux premiers reçoivent
textes est sans doute une conséquence de leur aspect résumé. une traduction périphrastique. Le premier (EDCTE0rîç) est
Si on étudie de plus près l'index (annexes II et III), et si on traduit par dbl 'lhy' («celui qui craint les dieux»), ce qui
le compare par exemple à la liste des textes relativement rend le concept d'EÙCTE�Eta de manière peut-être un peu
54 - M. SARTRE, 1996a, p. 396: « Ce vocabulaire, tout entier emprunté aux ôEKârcpCDîOV, cp1Àorcâîp1v.. (]. 7-9) àpx1EpaCTâµEvov îoÏ.k IE]i�amoÏ.ç
traditions civiques grecques, montre bien la diffusion du système des valeurs EÙCTE�mç Kat c!nÀ[o]iîd.µwç_ Voir aussi en Pisiclie, à Termessos (sans
de la cité grecque à Palmyre.» qnMrcmpK), TAMII, SS: <:XPXlEpCÔ�LEVOV EÙCTEl�ck K<Xl EVôÔÇOK I K<Xl
55 - Mais l'adjectif<jnÀÔîEl�Loç signifie aussi« zélé»,« généreux». Il ne <jHÀOîElµOK ....
semble pas qu'à Palmyre, ce mot et ses variantes aient un sens technique 58 - Elle n· est pas clans les inscriptions publiées par Waddington, en dehors
particulier. Ce sens, en rapport avec les concours et les jeux du cirque, qui de Palmyre. Dans les différents tomes de !GLS, il ne me semble pas non
existe ailleurs, ne trouve à Palmyre aucun appui dans la documentation plus que le terme apparaisse.
existante. Il n'y a apparemment pas de concours à Palmyre. 59 -À commencer par CIS 3923 daté de 51 , mais aussi CIS 3930 ou 3933.
56 - On peut citer cette remarque de L. Robert, BE 1968, 572, à propos de Voir la liste des attestations de àpÉCTKm clans l'index. Cette traduction est
la notion cl'EDCTE�Eta: « tout magistrat ou tout citoyen peut en être loué. systématique, pour toutes les occurrences de àpÉCTKW dans des bilingues
Les exemples en sont innombrables». complètes, entre 5 let 247. Cette stabilité est remarquable quand on compare
57 - En Pamphylie, SEG 35, 1416: EDCTE�ll, <jnÀorcaîpt8a .......... les variations de traduction pour d'autres mots (voir ci-dessous).
cp1ÀOîfl�LOK : à Siclé : G. E. BEAN, 1965, n" 194b : (1. 1-4) îàv 8. ........
18 Les notables de Palmyre
partielle. <D1Àon:a"t"p1ç a comme traduction 1J1ym mdyth dbl 'Jh', qui a peut-être une existence indépendante, il semble
(«celui qui aime sa ville»). C'est en fait la traduction bien que 111ym mdyth soit uniquement ml mot créé pour
canonique de ces termes en palmyrénien, qu'on retrouve traduire, de la manière la plus exacte possible, un mot grec.
dans les textes bilingues, du moins quand ils sont traduits 60• Que la version première du texte soit en grec ou en araméen,
La crainte des dieux est une notion qui n'est pas absente l'on sait qu'on peut utiliser ce mot, qu'il le faut même dans
de la sensibilité religieuse de Palmyre. On peut citer un texte certains cas, et l'on n'hésite pas. L'hésitation est plus
de la Palmyrène avec la phrase kl gbr dy ydb] l' bgl («tout compréhensible dans les cas d'utilisation de vocabulaire
homme qui craint Abgal») 61• L'expression elle-même est préexistant dans la langue. On a dans ces cas-là fréquemment
courante en syriaque, mais évidemment à une date plus plusieurs solutions qui se présentent à l'esprit, sans que l'une
tardive. On reconnaît aussi dans cette formule une des d'entre elles soit forcément la meilleure.
manières dont on nommait les païens attirés par le judaïsme Il subsiste aussi des traces d'une période où se met en
au ni" siècle. Ils ne sont bien sûr pas EÙO"E�Ek, mais on les place le système d'équivalence. Le texte Inv X, 39 exprime
appelle 0EOCTE�Ek, «craignant-Dieu» 62• À Palmyre, on a cette idée d'amour de la patrie, puisque la personne honorée,
des exemples du mot et de sa traduction depuis 7 4 un secrétaire du Conseil,«a démontré tout son zèle pour les
(J. CANTINEAU, 1933, p. 175, n° 2b) et le texte CIS 3914 est affaires de la cité» (micrav qnÀma[µiavl Èv8E1çâ�L[Ev]ov Èv
la dernière attestation de l'équivalence. Ensuite, le mot n'est wÎ.ç "t"llç rroÀEOç [sic !] [rrp]âyµam). Le mot cplÀon:mpK lui
plus traduit (C/S 3952) 63• même n'apparaît pas. Ce qui est curieux, c'est l'emploi dans
Curieusement le terme dbl 'lhy' est, à ma connaissance, le texte araméen d'une formule périphrastique différente,
absent des inscriptions unilingues. Les exemples comme mais équivalente à celle utilisée habituellement : rbym
Inv X, 62 sont discutables car la pierre qui porte le texte est mbwzh. On sait que le terme mbwz signifie «cité» 66 ou
fragmentaire et comportait sans doute aussi une partie en «port» ; J. Teixidor a élargi le sens de«port»,«entrepôt»,
grec (de même sans doute pour Inv X, 76) 6 Il est possible -1. à celui de «centre douanier» 67• Sous l'influence du mot
que cela tienne au hasard des découvertes épigraphiques. latin équivalent portus qui signifie«entrepôt », il aurait été
Au cas contraire, cela pourrait signifier que les inscriptions remplacé par le mot grec À1µ1iv, translittéré dans le Tarif
bilingues emploient une langue spéciale, qu'on pourrait ( lmn ') et qui a la même signification.
appeler « le palmyrénien de version grecque ». En Ce point de vue a été contesté et on préfère souvent en
palmyrénien, dans les textes unilingues, on trouve en faire un simple équivalent de mdyth dans le sens de
revanche la formule ...dy spr l'lhyhwn («parce qu'il a plu à «ville» 68• La proposition de J. Teixidor partait de l'analyse
leurs dieux ») qui a sans doute la même signification de ce texte (lnv X, 39), qui a la particularité de comporter
(cf. CIS 3929 par exemple) et qui est traduite dans les aussi le mot mdyth, une ligne après mbwz: Zabdilah, fils de
bilingues par le verbe àpÉ:crKco et le mot«dieux» au datif 65• Shamshigeram,«a été agréable à sa ville en toutes choses»
Il peut aussi sembler curieux que cette notion de piété (wbkl $[b]w klh spr lmdyth). J. Starck.y, dans sa traduction
n'apparaisse pas dans les nombreuses dédicaces à des du texte (lnv X, p. 26), fait la différence entre«cité» (mj1wz)
divinités (voir par exemple CJS 3972-4108). Mais, il n'est et « ville » (mdyth). Il est probable en effet que cette
sans doute pas de bon ton de se vanter de sa piété quand on répétition a une signification précise, et que les deux termes
s'adresse directement aux dieux. Le terme n'apparaît ont chacun un sens spécialisé, mais on a peu d'indices.
que dans des textes honorifiques. Les dédicants (et les Le mot mbwz apparaît dans un autre texte bilingue
rédacteurs) de ceux-ci sont en théorie différents des (lnv IX, 12), mais la version grecque est très résumée et ne
personnes honorées. donne pas d'équivalent 69• C'est sans doute en pensant à
La traduction de qnMn:mpK par ij1ym mdyth est plus l'opposition classique entre acr"t"u et n:0À1ç que l'on a pu
systématique ; on traduit ce terme en araméen dans traduire les deux termes par«ville» et«cité». Quant à savoir
pratiquement toutes ses occurrences dans les bilingues, sans si cela correspond à l'idée des Palmyréniens qui ont eu à
doute à cause de son caractère de calque. Contrairement à adapter des concepts gréco-romains, le problème reste posé.
60 - Voir le tableau en annexe IV. mdyth. Dans les textes unilingues Jnv IX, 29 ; X. 62 et 98, où elle apparaît.
61 - PNO. p. 144, n" 2ter (édition du texte par J. Starcky et H. Jngholt). on ne peut assurer qu · il n · a jamais existé de version grecque.
62 - Sur ce sujet, voir le dossier d'inscriptions d'Aphrodisias réunies par 65 - Ainsi en CJS 3930, par àpfoavrcxç wÏ.ç 0rnÏ.ç. Mais on a deux lignes
J. REYNOLDS et R. TANNENBAUM, 1987. Comme me l'a fait remarquer plus haut l'équivalence dbl 'lhy' - EÙCTE�EÏ.ç.
F. Villeneuve, le terme se retrouve, à propos du judaïsme, dès avant le m' 66 - Le dictionnaire abrégé de J. PAYNE-SMITH, 1903, p. 263, donne le sens
siècle. de « a little fort(fïed town, smaller than a krk'» (un k1k' étant une place
63 - Il n'est pas traduit non plus quand il fait partie des titulatures impériales fortifiée).
(CIS 3970 et Inv X, 64 pour Septime Sévère) ; CIS 3947 utilise pour la 67 - J. TEIXIDOR, 1983b, p. 309-311. Voir aussi, id., 1984, p. 59.
reine Zénobie le mot zdqt', qui signifie plutôt« juste», en face du EÙcrE�17ç 68 - Par exemple G. W. BoWERSOCK, 1987, p. 180-181. Voir F. BRIQUEL
du texte grec. Mais le texte est postérieur de près d'un siècle à la dernière C!-IATONNE T, 1995b, p. 124-126.
attestation de l'équivalence dN 'lhy' - EÙCTE�17ç. 69 - J. Cantineau, lnv IX, p. 21, traduit aussi par« cité».
64 - On peut d'ailleurs faire la même remarque pour l'expression 1)1ym
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 19
Le texte est daté de 75-76, mais l'on a une attestation plus l'omission d'un troisième urcô par le lapicide, que Zénobios
ancienne de l'équivalence,qui devient courante ensuite,entre Zabdilah a aussi reçu un témoignage de sa patrie. C'est loin
<plA07CO'.îplç et rbym mdyth (texte J. CANTINEAU, 1933,p. 175, d'être impossible, il suffit de comparer avec le texte
11 2b); il est plus ancien que Inv
°
39 d'un an,ce qui prouve H. INGHOLT, 1932,p. 278. On y remarque la même omission
que le système est à ce moment en cours de stabilisation. de urrô, puisqu'on a µcxpTup110Évm urrô TE 10'.pl�COAOU 1:0Û
Plusieurs expressions se font concurrence,mais l'un des mots îCO'.îplOU 0EOÛ K0'.1. TWV ll)'llCTO'.�LÉVCOV KCXl. UîCO TÎ7ç îCO'.îplôOÇ
a fini par l'emporter et supplanter l'autre. C'est le terme le «(dont les mérites) ont été reconnus par le dieu ancestral
plus général qui est utilisé, et il faut noter que l'équivalence Iarhibôl et par les gouverneurs et par sa patrie». La première
n'est pas complète puisque 1)1ym mdyth signifie proprement préposition porte sur deux objets différents (le dieu et les
«qui aime sa ville»; la notion de rcaTpk, présente dans le gouverneurs), mais elle est répétée avant le troisième (la
composé grec, disparaît. Néanmoins cette création verbale patrie). Pourtant J. Cantineau dans Inv III (p. 29) semble faire
permet de simplifier la tâche des rédacteurs d'inscriptions de rrO'.îpk au génitif,le complément de nom de cp1ÀÔrcO'.îp1ç,
honorifiques,et l'on retrouve cette formule pendant presque c'est-à-dire une simple redondance et ne le traduit pas
deux siècles 70• («qui a aimé sa cité»). Il fait comme si le rédacteur n'avait
Le dernier exemple de la triple formule se trouve dans pas vu que la formule périphrastique araméenne était
le texte CIS 3932,daté de 242-243. Pourtant,la construction un calque et avait éprouvé le besoin de répéter le mot,
de la fin de ce texte pose un léger problème de sens; la pour créer, en grec aussi, une formule en deux parties 71•
signification générale est assez claire, tout comme la C'est aussi une possibilité, car on ne voit pas pourquoi
construction. Comme il arrive souvent à Palmyre, le texte le texte araméen n'aurait pas mentionné ce témoignage
grec commence par la mention des dédicants (Conseil et de la cité. Il n'est sans doute pas possible de trancher,bien
Peuple) avant d'énumérer à l'accusatif les qualités et les que la première solution soit plus satisfaisante en grec
belles actions de la personne honorée. La liste s'achève par et qu'une expression 6 cp1Àorr0'.îp1ç T17ç naTpiôoç soit
un mot qui résume sa personnalité et son rapport au dédicant curieuse. Elle peut s'expliquer, me semble-t-il, par le désir
(ici TOY cp1ÀÔrcO'.îp1v), suivi de la formule Taµ17ç xâp1v et de de faire un calque grec de ce qui était déjà un calque en
la date. Cela est fort normal, tout comme la version araméen; on peut émettre l'hypothèse qu'on aurait essayé
araméenne qui suit,elle aussi, un schéma classique («statue de «réveiller» une formule trop stéréotypée pour la rendre
de Zénobios Zabdilah» + liste de ses actions + proposition plus expressive.
relative : «que lui ont fait le Conseil et le Peuple en son Le dernier des trois adjectifs, <plÀÔTEl�LOç,est traduit par
honneur + date»). nhyr («illustre,brillant») dans CIS 3914 . Mais dans ce
On a en araméen à la fin de la liste de ses actions,mtlkwt cas,le texte grec aussi utilise une périphrase, cp1À0Td�nm Èv
shd lh y1)1bwl 'lh' w'p ywlys [p1ysqws rb'] dy sp' w1)1ym noÀÀoÎç rrpây�LCXcn, ce qui est rendu par une traduction
mdth (il a fait telle et telle chose «de telle sorte qu'il a reçu araméenne qui n'est pas tout à fait littérale,nhlyn bmgdyhwn
un témoignage du dieu Iarhibôl et aussi du préfet du prétoire sgy'[y']:« illustres par de nombreux dons» (d'où sans doute
Iulius Priscus et qui a aimé sa ville»),suivi de la proposition « généreux » ). Le texte araméen doit donner des explications,
relative. Le sens ne fait pas difficulté, on remarquera là où le grec utilise des expressions idiomatiques.
seulement que rf1ym mdth est un qualificatif qui peut Contrairement au texte CIS 3966 cité plus haut, l'araméen
dépendre du nom du personnage à la première ligne ou du de CIS 3914 a recours à des calques,d'où peut-être le besoin
verbe hw' («était»,3" personne du singulier accompli) à la d'expliquer des expressions ou des connotations un peu
ligne suivante, ce qui ne change pas le sens. C'est en grec nouvelles 73• Néanmoins, on remarque, en regardant les
que se trouve l'ambiguïté. Le texte est le suivant: différentes traductions araméennes du mot et des termes de
(J)Ç füà 1:0'.Û'CO'. µapTup1181îvm uno 0rnû Icxp1�coÀwu Kcx't la même famille,qu'il existe plusieurs équivalents (voir plus
U7CO 'IouÀiou [ llpElCTKOU] 1:0Û È�OXCOT(XTOU Ènapxou 1:0Û lEpoû bas sur l'adverbe <plÀOTEl�Lcoç). Il ne s'est apparemment
npmTcopiou Kcx't T17ç n0'.îpl<5oç, TOV <plÀÔrcO'.îplv jamais fixé de traduction qu'on aurait p u utiliser
«de telle sorte que, pour cela, il a reçu un témoignage systématiquement. Cela peut être une conséquence de la
du dieu Iarhibôl et de Iulius Priscus, très éminent préfet du polysémie du terme. Son emploi (la recherche des honneurs,
prétoire sacré et de sa patrie (?), (lui qui est) patriote. » mais aussi le zèle ou la générosité) est parfois de caractère
On voit la difficulté qui s'élève, avec la présence d'un assez général ( « avec zèle » ), et peut décrire non un
mot en plus qui est T] nO'.îpk. Si on suit la ponctuation du comportement particulier, mais un état d'esprit. Ce sont
texte édité dans l'Inv III, 22, avec une virgule entre T17ç d'ailleurs souvent les versions araméennes qui permettent
rcO'.îptfoç et Tov <p1ÀÔrccxTp1v,on peut comprendre,moyennant de préciser dans quel sens le concept est utilisé.
70 - Voir le tableau dans l'annexe IV. 72 - C'est cl' ailleurs le mot utilisé par l'araméen pour traduire« clarissime »
71 - Pour autant qu'on puisse interpréter sa traduction « des deux textes ou Àcxµrcpfrcmoç (voir C/S 3944 et 3945 par exemple).
combinés » ! La ponctuation du C/S semble favoriser une interprétation du 73 - Pour autant que notre connaissance de l'araméen contemporain
même type. permette de le dire.
20 Les notables de Palmyre
On comprend que le Conseil et le Peuple dressent des leur prête beaucoup de sens, simplement parce que ce sont
statues de Iarhibôlâ, fils de Ogâ et deAwîdâ, fils d'Haddûdan, des choses courantes dans les décrets honorifiques, surtout
puisqu'ils ont fait construire les propylées du sanctuaire de quand il y a aussi EÙCJE�1iç et <plÀOîEtµ(t)Ç.
Bel. Il s'agit du sanctuaire principal de la cité, et il est donc Mais il est possible que deux choses différentes soient
normal que ces deux bienfaiteurs soient qualifiés de EÙCJE�Etç décrites par cette répétition. On constate d'ailleurs que
Ka't qnÀ.orcâîplôEç, ce qui désigne bien une action ayant àpfoavîaç îi} rcmpîfü correspond en araméen à sprw lhwn
concouru à l'embellissement d'un sanctuaire civique. Le « ils les (c'est-à-dire le Conseil et le Peuple, sujet de la
troisième terme (Ka't cp1À.oîEÎ�no1) est explicable dans ce principale) ont favorisés». Ils ont pu agir en faveur de leur
contexte, car il s'agit visiblement de la motivation de leur patrie de manière générale, et, plus particulièrement, faire
action. Cette précision montre aussi le zèle des deux quelque chose qui leur a apporté les faveurs du Conseil. De
personnages envers la cité qui les remercie. Le qualificatif toute façon, il est inutile de chercher à tout expliquer, car les
est d'ordre général 7-+, alors que les deux premiers décrets sont résumés ; les allusions, qui avaient un sens pour
s'appliquaient particulièrement à l'action décrite dans les les contemporains, l'ont perdu de manière presque
lignes 6-8 du texte. irrémédiable dix-neuf siècles plus tard.
D'autre part, ces adjectifs apparaissent surtout dans des La piété est présente explicitement, par l'utilisation de
textes émanant du Conseil (et du Peuple). Cela n'a rien l'adjectif lui-rnême (EÙCJE�éi.ç), mais aussi, parce qu'il s'agit
d'étonnant. En effet, le Conseil pouvait désigner qui était bien de cela, quand on se rend agréable aux dieux. Les deux
patriote ou qui ne l'était pas. De même la piété d'un notable adjectifs sont traduits de la manière habituelle : 1)1ymy
envers les sanctuaires ou sa générosité pouvaient rejaillir mdythwn et db]y 'lhy', mais l'adverbe <plÀ.OîElµ(t)Ç disparaît
sur la cité et motiver des remerciements de la part des à la traduction : « parce qu'ils les ont favorisés, eux et leurs
autorités. Pourtant il y a quelques exceptions comme le texte dieux, en toute chose» 77•
Inv IX, 22 dans lequel un particulier, Aurelius Mareas, honore La triple expression apparaît aussi dans les textes grecs
un militaire romain, en l'appelant « pieux et patriote» de bilingues, sans être traduite en araméen. L'inscription de
(EÙCJE�11ç Ka't cp1À.ÔrcmpK). Il n'apparaît pas que le dédicant la Colonnade transversale C/S 3952 (Jnv V, 3) est un
soit un magistrat de la ville, on peut se demander alors à troisième exemple de cette formule. Le texte date de
quel titre il honore ce Iulius Iulianus. Mais les exceptions mars 179, soit seulement quatre ans après C/S 3914, mais,
sont plutôt rares et l'emploi des adjectifs de ce type est cette fois, les trois adjectifs ne sont pas traduits en
généralement réservé aux textes du Conseil 75• palmyrénien. Le texte sémitique est en fait beaucoup plus
Dans le texte C/S 3930 (Inv II, 2), la raison de l'honneur précis. L'impression qui se dégage est qu'on a utilisé des
accordé à Aaîlamî, fils de Haîran et à son père, Haîran, fils formules grecques courantes pour faciliter le travail du
de Moqîmû, reste inconnue. Le texte de l'inscription, quoique lapicide ou du scribe.
détaillé, reste vague 7(,. Le mot qui décrit le zèle apparaît Les exemples cités précédemment indiquent que EÙCJE�1iç
cette fois sous sa forme adverbiale (<plÀOîEÎ�t(t)Ç) et n'est donc n'est probablement pas là par hasard. Shoraîkô, fils de Haîran,
pas sur le même plan que les deux autres qualificatifs a accompli certaines actions en rapport avec un sanctuaire.
habituels qui le précèdent. Là encore, on a l'impression que, La Colonnade transversale est d'ailleurs souvent qualifiée
des trois, c'est le plus général. Les deux personnages « ont de monument religieux 7 8, ce qui correspond bien à l'adjectif
été pieux et patriotes et agréables à la patrie et aux dieux EÙCJE�1iç. On voit que l'explication est vraiment limitée. On
ancestraux, avec zèle, de toutes les manières». Ce qui est aurait quelques difficultés à aller plus loin, si on n'avait pas
intéressant aussi, c'est l'impression de redondance donnée le texte sémitique : celui-ci est beaucoup plus clair, puisqu'il
par le texte. Le mot « patrie» apparaît deux fois, dont une précise que Shoraîkô a fait construire sept colonnes du
en composition. Comme cela se produit dans C/S 3932, il se portique et leur ornementation, ainsi qu'un pyrée 7'>, objet sans
peut que le composé cp1À.Ôrcmpiç et 1'expression figée qui doute cultuel. Par comparaison avec d'autres textes, les deux
lui correspond en araméen aient perdu un peu de leur sens versions combinées ici permettent de mieux comprendre ce
premier dans l'esprit des rédacteurs du décret. Ils seraient qui se dissimule derrière des éloges qui paraissent parfois
utilisés de manière pratiquement automatique, sans qu'on bien obscurs.
74 - Le texte dit d'ailleurs: Èv 1roÀÀoÏ.ç n:pciy�ta<Jl, « en de nombreuses 76 - EucrE�Êiç Ka't cplÀon:ci1p18aç Ko:\ n:aVît 1pôm:9 q>lÀOîEi�Lmç
affaires». àprncivrnç 11:1 n:mpi8l Ka't 101.ç n:mpioK 8rnÏ.ç.
75 - Mais contrairement à ce qu'écrit H. SEYRIG, 1941b, p. 250, l'expression 77 - Traduction J. Cantineau, lm' II, p. 24. La« traduction des deux textes
E1J<JE�17ç KŒl cp1ÀÔîEl�toç n'est pas seulement l'élément commun aux combinés» est ici plutôt celle de l'araméen.
dédicaces faites par le Conseil à des synèdres. Ce n'est le cas que pour 78 - Voir J. Cantineau, 1111' V, p. 18-19.
ln\! X. 57. 59 et 69. On verra en consultant l'index que l'expression est 79 - Le mot knwn' est traduit p,u- « brûle-parfum» dans J. Cantineau, lnv V,
beaucoup plus courante. De même, <)nÀÔn:aîpK n'est pas ajouté aux deux p. 8-9. Le texte araméen dit: 'bd bslq' dnh 'mwclyn fü" wt;;bythwn klh
autres adjectifs seulement dans les dédicaces où le Peuple est joint au Conseil w'bd knwn' dy nb.�' ( « il a fait dans ce portique sept colonnes et toute leur
(voir ClS 3952 et lm' X, 114). ornementation et il a fait un brûle-parfum de bronze»)
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 21
En fait, un terme comme <p1ÀoîEl�Lcoç avait pour les surpris de la répétition de ce terme, au demeurant si rare
rédacteurs de textes honorifiques le même genre d'utilité clans les inscriptions de Palmyre. Curieusement, la version
que l'expression îE1�L17çxcxp1v. Il permettait de résumer et palmyrénienne (DFD, p. 37) ne donne pas l'équivalent de
d'englober un certain nombre de connotations qu'il aurait cette formule récurrente du grec. Le texte sémitique est
parfois été difficile d'exprimer de manière précise. beaucoup plus court et seule la formule J' 'b[yJs npsh (« il
Le texte CIS 3952 éclaire certaines inscriptions qui n'a pas épargné son âme», trad. J. T. Milik, ce qui équivaut
comportent le mot E'Ùcn::�1iç, mais qui proviennent de l'agora, à « il a payé de sa personne» ?) permet de penser que le
monument laïc, s'il en est 80• Le domaine religieux et la vie rédacteur de la partie araméenne a tenté de rendre un peu
civique ne sont pas séparés, comme dans le reste du monde des développements du grec. Ce dernier est remarquablement
antique, d'ailleurs. La cité, le Conseil peuvent honorer un détaillé, même si le début manque sur ce fragment de
bienfaiteur dont l' œuvre a principalement concerné les colonne. La rédaction du texte est assez soignée et certains
sanctuaires de la cité. Il est néanmoins sans doute illusoire passages sont tout à fait clignes des cités grecques cl' Asie
de vouloir trouver à tout prix une signification précise à toutes Mineure. Il suffit pour s'en rendre compte de citer les lignes
les occurrences du terme. Il fait partie du vocabulaire de 10-12 : ...È<j)'ok O'.�LEl�O�LÉVll CX'\JîOV 11 nmpk î(XÇ 7CpÉ7COUCTCXÇ
l'éloge, et une personne honorée se doit d'être pieuse. cx'Ùîcp îEW<k È\jfll<pt0cxw Ë<j)rnrcov àv8picxvm... 81•
De la même manière, Zénobie est appelée 17 Àcxµnpo1:ci1:11 La même remarque est valable pour d'autres textes, qui ne
EÙCTE�17ç �cx01À100cx (« la reine très illustre et pieuse») dans sont pas forcément très longs : la formule EÙvoicxç Kat cmou[817ç
le texte CIS 3947 (Inv III, 20). La présence de ce terme n'a ËVEKEV llç È]VcSÉbElKîCXl rcpoç [wÙç È�LJCÔ]pmK du texte Jnv
sans doute rien à voir avec un geste de la reine en faveur 127 (septembre 86) est moins convenue qu'à l'habitude 82• Elle
d'un sanctuaire de Palmyre, mais il s'agit bien évidemment correspond en araméen à une formule assez difficile que
d'une adaptation des qualificatifs présents dans certaines J. Starck.y (lnv X, p. 79-80) transcrit et traduit ainsi lbsbn bpywt'
titulatures impériales : pius en latin qui devient EÙCTE�llç en wb,s' tb['J dy 'st<k>Jl lh lwt tg1y', « pour la protection et la
grec. Il suffit de renvoyer aux dédicaces impériales de bienveillance qui a été constatée en lui à l'égard des
Palmyre, comme le texte CIS 3970. Sans être lié à un cmmnerçants» 83• La comparaison des deux versions semble
événement précis, l'adjectif est la manifestation d'un état indiquer que le grec a été calqué en araméen. Dans cette langue,
d'esprit général qui serait celui de la reine. la plupart des mots utilisés pour le texte sont des hapax 84•
À l'opposé de ces mots très courants, on trouve par La restitution des deux lignes précédentes est discutable
exemple le mot àv8pdcx qui signifie« courage». Il n'apparaît (Icxp[mov Zcx�blÀcx <j)1ÀÔ1tmp1v KCXl <j)111.61:n�Llov). En effet, il
que clans deux textes de Palmyre (Inv X, 44 et H. lNGHOLT, est possible que le texte palmyrénien ne soit pas tout à fait
1932, p. 27 8). Il sert à qualifier Ogeîlû, fils de Maqqaî, dans identique au grec et ne répète pas la formule ; néanmoins,
le premier texte, et, en particulier sa vaillance, lors de ses on attendrait plutôt à cet endroit du texte grec le nom du
stratégies contre les nomades (8t 'àpE1:11 v na0cxv KCXl grand-père. La première ligne sur le listel était peut-être plus
àv8pdcxv). Il est fait allusion à des événements du même longue que la suite du texte, il est néanmoins fort probable
type pour Aelius Bôrrâ, clans le second texte. Il est curieux qu'il n'y ait eu au maximum qu'un seul de ces deux adjectifs.
que le terme y apparaisse à trois reprises, comme pour mieux Le v qui permet à l'éditeur la restitution [<j)111.61:a�L]ov est sûr,
souligner la valeur et le courage de la personne honorée : alors qu'on préférerait un u pour l'éventuel génitif d'un
« ayant montré tout son courage et son activité» (no11.11.11v patronyme, mais cela ne fait que restreindre le champ des
àv8pdcxv KCXl 0nou817v Èv8al;ci�LEvov), « conservant ce possibilités sans le clore (surnom, titre honorifique, nom de
courage et cette valeur» (1:17v cxù1:iiv àv8pdcxv KCXl àpE1:17v fonction civique ?).
0ffi0cxv1:cx), et enfin « en raison de sa valeur et de son Le reste des textes de Palmyre est souvent plus terne 85•
courage» (àpE1:17ç Kcx't. àv8pEicxç ËVEKEv). On ne peut qu'être Un détail en particulier montre l'écart qui existe avec cl'autres
80 - Voir dans l'index, s.l'., les textes de l'lnF X. donateur, alors que la version grecque s'intéresse surtout à son état cl' esprit
81 - « Pour ces raisons, la patrie le remercia en lui votant les honneurs qui et résume son action. Il est difficile de dire que l'une d'entre elles est la
lui revenaient, une statue équestre ...» version originale.
82 - « pour la bienveillance et l'empressement qu'il a montré à l'égard des 85 - Curieusement un type de textes qui a connu une grande popularité
commerçants » (trac!. J. Starcky, lnv X. p. 79). La seconde restitution est dans tout le monde grec est presque totalement absent de Palmyre : les
assez sûre, contrairement à celle de la première ligne. épigrammes. Pourtant l'épigraphie contemporaine de Syrie en donne des
83 - Pour la correction 'st<k>b. voir aussi DFD, p. 311. D. Hillers (PAT, exemples assez nombreux (de Basra à Zeugma). On croit savoir que des
p. 366-367) propose de corriger bpywt' en f1pytwt', qui serait un meilleur recueils de textes circulaient et il devait être possible à un Palmyrénien de
équivalent du grec 0n:ou8r\, en particulier cl' après des exemples connus en composer un poème de ce genre en se servant de modèles. De manière
syriaque. caractéristique. le seul exemple connu est un texte gravé sur un pilastre de
84 - Remarquer seulement la traduction de [KO./'CECTn:o]ÛôCXCTEV Ek îllV l'agora (/m' X, 28). Or, cette inscription métrique de quatre lignes honore
[KîlCTtV 1]où vcxoù B11Àou par qm wsms bmgd' r[b' lbt bl} («parce qu'il un dénommé Manilius Fuscus. le fils cl 'un légat de Syrie-Phénicie, à
s'est mis à les aider par un grand don pour le temple de Bel» avec qm au l'époque de Commode, c· est-à-dire qu'il s· agit d'un texte qui a pour sujet,
sens inchoatif, voir PAT, p. 405) en CJS 3924 (= lm' IX, 6a). La version non un Palmyrénien, mais un étranger à l'oasis.
araméenne de ce texte ancien est plus précise à propos de l'activité du
22 Les notables de Palmyre
régions plus profondément hellénisées. Sans être jamais araméen épigraphique 89• Mais il serait aventureux d'en tirer
incorrect, le grec de Palmyre ne fait qu'un usage modéré des conclusions dans le cas de chaque texte en particulier.
des particules, spécialement dans les énumérations. Le texte On utilisait des adverbes en grec, la pratique en est passée
C/S 3942, par exemple, se contente d'une énumération en araméen ; cela ne signifie pas que chaque adverbe araméen
scandée par KaÎ...Kai, ce qui est, certes, classique. Les correspond à la traduction d'un adverbe grec, mais plutôt
balancements �tÉv...8É, si typiques du grec n'apparaissent qu'à qu'on savait qu'il fallait des adverbes pour rédiger un texte
une seule reprise dans l'épigraphie de Palmyre, aux lignes honorifique.
18 et suivantes du texte BS 11 ° 45. Même dans les La traduction des adverbes n'est pas systématique et il
énumérations, qui sont nombreuses, la simple utilisation de arrive souvent que les lacunes des textes ne permettent pas
la particule 8É est assez rare 86• On comprend son absence de prolonger l'étude (voir le tableau des traductions à propos
dans les textes très courts, elle est plus étonnante dans les de �lÀOîEεwç). L'adverbe Èmcrtjµwç par exemple apparaît
inscriptions détaillées. De même, sa présence dans le texte dans plusieurs textes unilingues (/nv IX, 24 ; Jnv X, 55).
publié par H. J. W. DRIJVERS, 1995a, p. 34, est surprenante, Dans lnv X, 115, Èmcrtj�twç Ka't �lÀOîEεwç devient dy spr
car on se demande pourquoi 8É n'apparaît qu'une seule fois, lhwn wbsr lhwn « parce qu'il leur a été agréable et a fait des
alors que l'énumération comporte quatre éléments. Mais il dépenses pour eux», ce qui éloigne du sens premier de
ne s'agit que d'un point de détail. Au contraire, la formule l'adverbe Èmm7µwç. Dans le texte p. 34 de H. J. W. DRJJVERS
courante, "CE...Kai est assez fréquente à Palmyre 87• 1995a, bydy'w[t')traduit le même adverbe. Le mot araméen
Ces remarques de vocabulaire peuvent s'achever par une signifie « avec science » et il est probable que
remarque sur le faible nombre des adverbes. Certes, des mots H. J. W. Drijvers a raison de noter le caractère étrange de la
comme ayviJJÇ, Èmmiµwç, Èm�u1Àmç, yvricriwç, Àa�mpmç, formule npq bydy'w[t'] « il sortit avec science » pour
ÈvMçwç, KaÀmç ou encore qnÀoîEÎ�twç sont présents, mais, traduire le grec rcpocopµricrt:v Èmcrtjµwç 90• Il s'agit clairement
semble-t-il, avec une fréquence moindre que dans les textes d'un calque du grec, mais l'inscription Jnv X, 115 prouve
du monde grec plus traditionnel (Égée ou Asie Mineure), ou que les inscriptions araméennes n'avaient pas que ce moyen
pour être plus précis, ils apparaissent seulement dans un de traduire les textes grecs, parfois au détriment de la
nombre limité de textes. précision. Le dernier exemple, KaÀmç traduit par skytyt,
On peut citer, à ce propos, une remarque stylistique de « calmement», dans le texte C/S 3932, prouve quel'araméen
J. T. Milik, qui concerne ces adverbes et leurs traductions. au contraire était peut-être plus précis. Le sens de l'adverbe
Quand les adverbes vont par paire, il note une inversion araméen est si curieux que l'on a parfois voulu corriger le
systématique des termes grecs et de leurs correspondants texte. Il semble bien que, dans ce cas-là, il s'agisse non d'une
sémitiques 88• Il cite 1'expression Àaµrcpmç Ka't ÈvMçwç erreur, mais d'une difficulté d'adaptation d'un adverbe de
( « avec éclat et gloire») de lnv X, 44, rendue par sbybyt sens très général comme KCXÀmç. KaÀmç TCOÀElîEUO'CXµEvoç
WlliJWryt « avec gloire et éclat ». Il ajoute ayvmç KCXl devient dbr 'mrh skytyt (« il a conduit sa vie avec calme»).
Èmcrtj�Lû)Ç d'Jnv X, 55 et ayvmç KCXl ÈmµEÀWÇ d'lnv X, 85 L'adverbe araméen pourrait être en fait une glose du texte
qu'ii oppose à une expression composée d'un adverbe suivi grec et décrire la manière dont le personnage a mené sa
de wbdkyw (« et avec pureté», donc l'équivalent de ayvmç) carrière (sans à-coup ?).
qu'il veut restituer dans le texte J. CANTINEAU, 1933, p. 176- La cité semble isolée au fond du désert syrien. À part
177, n° 3, 1. 5. Il croit reconnaître le même phénomène (DFD, un Nabatéen (C/S 3973), des soldats et fonctionnaires
p. 33) dans un texte qu'il reconstitue avec plusieurs romains, et quelques autres 91, la ville n'a pas livré beaucoup
fragments (Jnv X, 91 et 95, J. CANTINEAU, 1933, p. 187-188, de traces d'étrangers. On trouve encore moins de preuves
11° 10) : [m:xm1 rcpo0uµi�] Kat rccim] crrcou8rj du grec de rapports avec d'autres cités. Or ces relations entre cités,
correspondrait à [bkl bpyw] wsky. L'inconvénient de cette qu'elles soient d'amitié ou de rivalité, forment une partie de
théorie, on le voit, est qu'elle ne repose que sur un seul la substance de la vie civique en Anatolie. Il suffit de penser
exemple formel et que toutes les autres occurrences qu'il à la rivalité entre Nicomédie et Nicée étudiée par L. Robert
cite ne s'appuient que sur des restitutions, parfois un peu dans un article devenu classique 92• On connaît un homme
aventureuses. originaire de Beyrouth, mais ce n'est justement pas une cité
L'utilisation des adverbes est classique en épigraphie grecque, puisque la ville est colonie romaine. On connaît
grecque, il est donc probable que l'usage est passé de là en aussi les rapports anciens de Palmyre avec une Séleucie (du
86 - On la trouve pourtant,en particulier pour les énumérations de statues devient 111ymy mdythwn wdbly 'lhy'. Je ne crois pas que cela fournisse des
J. CANTINEAU, 1936,p. 277,n" 20 ; BS n" 45. arguments pour décider de la langue originale du texte.
87 - C/S 3923, 3932, 3942, 3959 et 3966 ; H. INGHOLT, 1932, p. 278 ; 90 - H. J. W. DRIJVERS, 1995a,p. 38.
/nvX,115. 91 - Voir annexe XII.
88 - DFD, p. 314-315. 92 - L. ROBERT, 1977, p. 1-39. Voir M. SARTRE, 1995, p. 261-270 avec un
89 - On peut noter en passant que le texte C!S 3930 fournit un exemple de bilan pour 1'Asie Mineure et plus généralement, M. SARTRE, 1991,
cette inversion,mais dans le cas d'adjectifs: EÙ<JE�Etç KO'.l cp1Àorcciîp18aç p. 190-198 sur les rivalités entre cités.
Chapitre l: L'identité civique de Palmyre 23
Tigre ?), dont le nom même est une preuve de l'hellénisation couronnes caractéristiques du monde grec. Seules les
( CIS 3924 = lnv IX, 6a). Mais ce texte date des premières mentions d'un rapport favorable fait par un dieu, un
années de la cité de Palmyre, il lui est même sans doute gouverneur ou même l'empereur sortent de cette norme
antérieur. Il ne fait en tout cas aucune allusion à des rapports étroite. On peut penser que ces statues sont ce qui pouvaient
possibles entre cités. le mieux correspondre à un goût local et à des traditions
C'est seulement avec Antioche que se tissent peut-être dans lesquelles l'offrande de statue était une pratique connue.
des liens de ce genre, puisqu'en juillet 161, un bouleute Au total, on est partagé entre deux sentiments. D'un
d'Antioche, par ailleurs fonctionnaire du quart, Marcus côté, on peut considérer qu'à cause du faible nombre des
Aemilius Marcianus Asklépiadès est honoré par une textes longs, Palmyre ne présente qu'un vernis superficiel
caravane. On ne sait pas à quel titre il est honoré, mais il est d'hellénisme, et que le grec qui y était écrit n'utilise que des
une des seules preuves de rapports entre Palmyre et Antioche formules stéréotypées, vides de toute substance.
pendant les trois siècles étudiés. D'un autre côté, cet aspect se justifie assez bien si on
Cet isolement de Palmyre est visible par l'absence de prend en compte le caractère fortement résumé de cette
concours, mais aussi par l'absence de concurrents épigraphie. Il faut dire l'essentiel et l'on ne peut se perdre
palmyréniens dans les concours organisés par les autres cités dans les détails, mais, en même temps, le texte ne doit pas
du monde grec. Le monde du spectacle et des concours ne donner moins de qualificatifs à la personne honorée qu'à
reçoit pas beaucoup d'attestations à Palmyre. Certes, il y a celle honorée par la statue voisine. Il existe un formulaire,
un théâtre, mais il est difficile de penser qu'il n'ait pas été et il est suivi par ces gens dont le grec n'est pas la langue
réservé à une élite. Il est en effet de taille trop réduite pour natale. Il reflète ce qui semblait important aux notables de
avoir pu contenir une grande partie de la population. Palmyre : piété, patriotisme, générosité... Ces qualificatifs
De manière générale, il semble que le vocabulaire de la rentrent tout à fait dans la liste de ce qui comptait pour les
compétition soit absent des inscriptions de Palmyre, que ce notables du monde gréco-romain. De plus, les exemples de
soit pour un individu ou pour toute la communauté. Les textes développés prouvent que le grec écrit à Palmyre est
qualificatifs élogieux qui accompagnent souvent les noms tout à fait digne de ses contemporains des cités grecques
des cités grecques sont ici absents. Or les titres dont se situées plus à l'ouest.
vantent les cités d'Asie Mineure sont tous porteurs
d'avantages concrets. Faut-il croire qu'on les passe sous
B. LE BILINGUISME OFFICIEL
silence à Palmyre ? Sans doute pas, mais il faut plutôt
conclure que Palmyre n'a connu qu'un titre, celui de L'aspect le plus original de Palmyre quand on l'observe
Métrokolônia. Néanmoins l'utilisation de l'ethnique du point de vue de l'historien de Rome est le bilinguisme
'Aopu:xvoç llaÀ�LUpT)V0Ç 93 prouve qu'on attachait quand officiel de la cité, jusqu'à la fin du me siècle. Il n'est pas la
même une certaine importance aux appellations honorifiques, marque d'une éventuelle réaction anti-romaine, mais il est
au moins d'origine impériale. Mais comme le rappelle constitutif de l'identité de la cité. La langue et l'écriture
M. Sartre (1996a, p. 393), il serait fort étonnant que, si araméennes sont utilisées avant l'arrivée de Rome, d'abord
Palmyre était devenue au même moment une cité libre, elle seules puis en concurrence avec le grec. Celui-ci prend certes
n'ait pas fait état de cette qualité sur les documents officiels. beaucoup d'importance au ne siècle, mais sans jamais
C'est peut-être en raison du contexte particulier dans remplacer totalement l'araméen. Même à cette époque, on
lequel se trouve la cité, qu'elle n'a jamais eu de relations trouve toujours des inscriptions entièrement en araméen dans
suivies avec d'autres cités. C'est justement la proximité et le domaine public. Certes, on distingue avec raison
le nombre élevé de cités de taille approximativement l'épigraphie privée principalement funéraire et religieuse
semblables qui fait la particularité de l'Asie Mineure. Cette (dédicaces au dieu anonyme en particulier), qui serait
concurrence proche a peut-être manqué à Palmyre pour majoritairement araméenne, de l'épigraphie civique, surtout
pouvoir participer à la compétition et à l' agôn si bilingue.
caractéristiques du monde grec. Le schéma est sans aucun doute assez vrai dans
On s'intéressera de plus près aux raisons pour lesquelles l'ensemble. Mais comme tout schéma, il a l'inconvénient
des honneurs sont décernés à des citoyens dans le chapitre de dissimuler une foule de nuances. Il est intéressant
sur l'évergétisme (chapitre 1v). On peut se contenter, pour justement d'essayer de comprendre comment fonctionnait
l'instant, de quelques remarques sur la forme que prennent ce bilinguisme et quelles étaient les nuances qui faisaient
ces honneurs. Il s'agit toujours de statues ou de récompenses préférer, dans certains cas, l'emploi du grec, et dans d'autres,
honorifiques, telle la proèdrie, mais on ne retrouve pas les celui de l'araméen.
93 - lnF X, 38 (131 apr. J.-C.), mais aussi clans des inscriptions découvertes (voir respectivement AE 1984, 925 et SEC 34, 1585). En palmyrénien, la
ailleurs en Syrie (WADDINGTON 2440 à Ahiré en Trachonicle), à Rome (C/S formule est transcrite à la première ligne du texte du Tarif (I, 1, au-dessus
3902), ou en Égypte: textes de Coptos: A. BERNAND, 1984, n°' 85 et 103 des colonnes 1-3): hd1yn' tdmr.
24 Les notables de Palmyre
J. Cantineau a exposé sa théorie clans sa Grammaire du qui doit guider quand on veut tenter d'identifier la langue
palmyrénien épigraphique. Il y eut apparemment une originale. De plus, la relative brièveté de la plupart des textes
e
évolution : le grec était plus rare au I , siècle et était souvent empêche souvent de savoir quelle dédicace est le résumé de
un résumé du palmyrénien ; c'est ce dernier qui était le l'autre. La position la plus mesurée est celle de S. Broek. Il
résumé du premier à partir du II° siècle 94• Il faut pourtant montre la difficulté de reconnaître le texte original en prenant
bien souligner qu'à toutes les époques, on a des textes dont l'exemple du texte C/S 3921. Dans les deux versions, le contenu
le contenu est le même clans les deux langues, et qu'il est est identique (à l'exception de la date pourtant) mais la
souvent bien difficile de savoir quelle est la langue originale phraséologie est différente 97•
(par exemple C/S 3925 de 17, C/S 3931 de 139, ou C/S 3936 Il est néanmoins difficile de donner un traitement
de 257). Dans un article récent, H. J. W. Drijvers est revenu entièrement cohérent du bilinguisme de Palmyre, même si
sur ce thème et a étudié les techniques de traduction, en on en reste aux documents officiels 98• Comme l'a rappelé à
s'intéressant en particulier aux inscriptions honorifiques. plusieurs reprises F. Millar, Palmyre offre pratiquement la
Selon lui, il est clair que les versions palmyréniennes sont seule image d'une cité qui était à la fois sémitique, grecque
des essais de traduction littérale des textes grecs, qui et aussi romaine, au moins à l'époque de la colonie. Mais
essaieraient de rendre au mieux les différentes tournures les langues d'expression de cette triple culture étaient
idiomatiques. Cela aurait pour conséquence de forcer la seulement l'araméen et le grec, et les quelques textes latins
syntaxe et le vocabulaire correct en araméen et aboutirait à connus sont tous antérieurs au changement de statut de la
des formulations parfois incorrectes 95• ville 99• Les cas de figure sont très différents selon les
Cette théorie est peut-être convaincante pour certains contextes, les époques et sans doute les personnalités des
des exemples cités par l'auteur (voir plus haut), mais ne tient déclicants et des gens honorés.
pas compte du fait qu'on connaît beaucoup mieux la syntaxe
du grec que celle de l'araméen : certaines formules
1. LE LATIN À pALMYRE
idiomatiques peuvent sembler bizarres ou grammaticalement
incorrectes, simplement parce qu'elles ne sont pas attestées La question du trilinguisme 100 et de l'utilisation du latin
clans le corpus de l'araméen connu à l'heure actuelle 96• est plus simple car l'épigraphie latine de Palmyre compte
D'autre part, les Palmyréniens qui ont rédigé les textes grecs un peu moins de quarante textes, certains extrêmement
savaient cette langue, mais cette connaissance avait parfois des fragmentaires (voir tableau en annexe VII). Le groupe le
limites. C'est ce qu'on a essayé de montrer plus haut en mettant plus important est constitué par des textes qui sont à mettre
l'accent sur le caractère très stéréotypé du vocabulaire employé en rapport avec la garnison de Palmyre : ce sont
dans la plupart des cas. De grands pans du vocabulaire principalement les épitaphes de militaires et de gens qui en
honorifique grec n'apparaissent presque pas dans l'épigraphie dépendaient. On les a retrouvées surtout clans la nécropole
de Palmyre. Le vocabulaire qui apparaît a été en grande partie nord de la ville ; il faut ajouter à ce groupe les textes militaires
intégré par divers procédés (calque, traduction ... ) au vocabulaire proprement dits 101 et les dédicaces impériales latines qui sont
araméen. Mais cela ne signifie pas que les textes eux-mêmes le fait de militaires romains. On regroupera aussi un certain
soient des calques. On a très bien pu utiliser des mots pris au nombre de dédicaces de construction, assez difficilement
grec pour rédiger des décrets en araméen, avant de procéder à étucliables (les quatre derniers textes du tableau).
une sorte de rétroversion pour obtenir un texte grec. Sauf dans Il reste en fait un petit nombre d'inscriptions
le cas d'exceptions flagrantes, c'est plus le contenu que la forme honorifiques en latin (les cinq premières du tableau), qui en
94 - J. CANTINEAU, 1935, p. 5. Il faut toutefois souligner la prudence de Wahballat, fils de Manaî, qu'ont faite pour lui le Conseil et le Peuple, en son
J. Cantineau, qui rappelle la fréquence des inscriptions rédigées en honneur. Cette statue a été érigée au mois de[ ....], l'année 432»).
palmyrénien seulement, à toutes les époques. 98 - Le terme «officiel» lui-même appellerait un commentaire. en
95 - H. J. W. DRI.JVERS, 1995a, p. 31-42 ; par exemple. p. 38:«The Aramaic particulier à cause du nombre de textes honorifiques dont les clédicants
is a litteral translation of the Greek, b11t the res11lt qf the Ferbum e verbo sont des particuliers. On verra aussi au dernier chapitre qu'il est possible
rendering is o grammatically incorrect sentence» (à propos des lignes 15 que les inscriptions de fondation et de concession des tombeaux de famille
du grec et 8 de l'araméen du texte qu'il publie p. 34-36). Mais. comme me ne soient en fait que des extraits d · actes officiels conservés dans les archives
l'ont fait remarquer J. Teixiclor et F. Briquel-Chatonnet. que je remercie publiques.
pour cette indication, alors que H. J. W. Drijvers note que «One would 99 - F. MILLAR. 1990, p. 42 ; 1993. p. 327 et 1995, p. 409 et 414.
expect at least the preposition I be.fore the i,lfïnitive ml)( », cette préposition 100 - Voir dernièrement sur ces textes, F. MrLLAR, 1995, p. 409-414 ; il faut
est bien lisible sur la photo qu'il publie (voir ici fig. 20) ! ajouter cieux textes aux cinq qu'il cite: une découverte récente. publiée par
96 - On verra au chapitre II pour l'onomastique le même genre de M. Gawlikowski et Kh. As'ad dans !MP, n" 113, et un texte anciennement
phénomène: on connaît trop mal l'araméen pour être sür qu'un nom connu, mais récemment réédité et complété, même s'il reste mystérieux
sémitique qui n'est pas attesté en araméen n'a pas existé. (lnv IX, 5 repris par Z. T. FIEMA, 1986, p. 81-83); il s'agit d'un texte en
97 - S. BRocK, 1979, p. 69-87: 'H �ouÀ.17 KO'.Î. 6 8iiµoç MaÀ.1xov rapport avec la construction du temple de Bel.
Oua�O'.À.À.0'.0ou îOÛ Mavvawu îEl�L17ç XCY.Plv et .5]111' dnh dy mlkw br I O1 - Comme le texte publié par H. SEYRIG, 1933a. p. I 64, n" 8: il
whblt br m'ny dy 'b{d]w lh bwl' wclms lyqrh qm 0Jm' dnhb[y1)1 .... ] fol commémore l'établissement d'un champ de manœuvres du camp romain.
[CCJCCXXXII («Le Conseil et le Peuple[honorent] Malikü, fils de Wahballat, On ajoutera à ce groupe les quelques dédicaces à des divinités faites par
fils de Manaî, en témoignage d'honneur» et«Cette statue de Malikü, fils de des militaires. Certaines sont assez lacunaires.
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 25
général font intervenir des notables de Palmyre. Il est cela explique qu'on use du palmyrénien, mais non qu'on y
remarquable que quatre de ces textes aient été retrouvés dans joigne deux textes, dont un latin.
l'agora. On reviendra plus loin sur le premier de la liste, Il s'agit en effet d'un des exemples les plus tardifs de
après quelques remarques rapides. Le seul texte bilingue l'usage de cette langue à Palmyre, dans un contexte non
latin-araméen ( CIS 3962 = lnv 17) est une dédicace militaire. si on comprend généralement l'usage du latin
honorifique à un centurion de l'armée romaine, qui se dans les textes qu'on vient de citer, en particulier à cause de
trouvait en garnison en Syrie, et qui avait dû avoir affaire la personnalité de l'honoré, il est curieux que L. Antonins
aux Palmyréniens aux alentours de l'Euphrate 102• Le même Kallistratos soit tellement attaché au trilinguisme, alors qu'il
personnage a reçu une autre dédicace (lnv X, 22), en latin est lui-même originaire de la partie grecque de l'Empire.
seulement. Les deux dédicants sont des Palmyréniens, un Les bilingues grec-palmyrénien sont tout à fait habituelles.
certain Saturninus-Elahbel dans le premier cas, et un certain On comprend aussi qu'on honore un militaire romain par un
Taimi... dans le deuxième. Saturninus appartient peut-être à texte latin, éventuellement araméen-latin si le dédicant est
la grande famille d'Elahbel 103, et la lacune est trop importante palmyrénien 1n9• Ce qu'il faut expliquer dans ce cas, comme
pour qu'on puisse identifier le second personnage. D'après dans celui de la plupart des trilingues, est l'usage du latin,
le lieu de découverte (agora) il est probable que la dédicace concurremment aux deux autres langues. En effet, il n'y a
Inv 25 à un préfet de cohorte a été elle aussi faite par un pas à Palmyre d'exemple de bilingues grec-latin, un type de
Palmyrénien. Quelques textes grecs du même endroit texte qui existe pourtant dans le reste de l'Empire.
présentent un cas de figure identique (dédicace à un militaire Contrairement à ce qui se passe ailleurs, le latin ne vient
par un Palmyrénien) 10 -i_
pas s'ajouter à une épigraphie grecque déjà ancrée dans les
Le seul texte de l'agora qui soit trilingue (lnv X, 113) mœurs, mais arrive seulement un peu après le grec qui venait
est une dédicace à un publicain par son agent (npcxywx1E1m1ç concurrencer une première langue, l'araméen, dont les
ou actor), en 174. Les deux personnages portent des noms premiers témoignages écrits remontent au moins au milieu
gréco-latins (Lucius Antonins Kallistratos et Galenus). Le du l°' siècle av. J.-C. 110• Au moment de l'anivée de Rome à
publicain est citoyen romain, originaire de la partie grecque Palmyre, il y avait déjà eu des inscriptions grecques 111, mais
de l'Empire et appartient sans doute au même milieu social on peut difficilement dire qu'il existait une tradition
que son collègue Marcus Aemilius Marcianus Asklépiadès, épigraphique grecque fortement implantée. Ce fait peut
bouleute d'Antioche et publicain (lnv X, 29) \Ils. Son agent, expliquer les premiers textes latins, mais la situation a
Galenus, est sans doute un affranchi. Un autre texte t1ilingue, beaucoup évolué quand ont été gravées les deux inscriptions
quoique lacunaire, semble mentionner le même personnage, qui mentionnent L. Antonins Kallistratos. Elles posent donc
puisque le texte grec porte le prénom AouKrnç et qu'on a le un problème difficile à résoudre.
nom 'ntnys q[. ..] en araméen, qu'on peut aisément restituer
q[lstrts] 106• La date (176) est donnée par le texte grec, selon
2. LES PREMIERS TEXTES GRECS ET LE TRILINGUISME
l'ère séleucide, mais aussi par le latin avec la date consulaire,
une rareté à Palmyre. Il est curieux que ce personnage ait eu Du point de vue épigraphique aussi, Palmyre semble
besoin de faire graver les textes qui le concernent en latin avoir été un peu à l'écart du monde hellénisé, au moins en
aussi, à un moment où cette langue était devenue rare. Il marge, même si la ville était en contact avec la Mésopotamie
était vraisemblablement bien intégré dans la ville et où existait un certain nombre de cités aux communautés
participait à ses coutumes religieuses, ce que montrerait grecques importantes. Le texte CIS 3924, dédié par des
l'utilisation en latin du mot gub, qui est apparemment une commerçants palmyréniens et grecs de Séleucie, prouve
translittération du mot araméen gby' qui signifie qu'au moment même de l'aiTivée de Germanicus à Palmyre,
« cratère» 11n. Ce serait l'objet d'un don fait à une divinité \()8. il existait des rapports avec les Grecs de Mésopotamie. Mais
Comme le prouvent les autres textes religieux, il s'agit d'un les textes grecs ne sont pas nombreux avant cette date, et la
domaine assez fortement marqué par les coutumes locales ; tradition épigraphique grecque de Palmyre ne commence
102 - Voir H. SEYRIG,1941b,p. 236-240. 108 - Les autres exemples sont le texte Inv XII, 39 (dédicace à Aglibôl et
103 - DFD. p. 245 ; sur cette famille et ce Saturninus,voir chapitre vr. Malakbel) et le texte publié par F. Briquel-Chatonnet, une dédicace pour
104 - Ce sont les textes Inv X, 1, 81, 99, 108, 117, 125 et 128. Le texte « les génies,dieux bons ».
lnl' X, 79 est une dédicace à un officier, peut-être palmyrénien, par les 109 - Qu'il n'y ait qu'un seul exemple de ce type de texte prouve seulement
hommes de sa uexillatio. L'exception n'est qu'apparente, car ces soldats que, même dans les rapports entre indigènes et autorités de l'Empire, le
sont sans doute des Palmyréniens engagés dans l'armée romaine. Enfin,on grec était la langue de communication de l'Empire en Orient.
peut ajouter à la liste Jm, IX,22,dont le dédicant est sûrement palmyrénien. 110-InvXI, 100 de 44 av.J.-C.J. T. Milik(DFD,p. 172-173)propose de
105 - H. SEYRIG,1941b, p. 263-266. remonter la date du texte InvXI,87 jusqu'à 82 av. J.-C., ce qui en ferait le
106 - Kh. As' AD etJ. TEIXIDOR,1985a, p. 279,n° 9. texte le plus ancien connu. Mais cette date repose sur une restitution, qui
107 - Voir Kh. As'AD etJ. TEIXIDOR,1985a, p. 279-280 ; dernièrement une est peut-être discutable.
nouvelle attestation du terme a été publiée par F. 8RIQUEL-CHATONNET,1995a, 111 - H. SEYRJG,1939,p. 321-322,11"' 27-28.
p. 155.
26 Les notables de Palmyre
véritablement qu'avec ces quelques textes datés entre 1 7 et soulignée, avec toutes les limites que cela suppose. Il est
25 apr. J.-C. 112• possible d'ailleurs que ce soit pour cette raison précisément
Il est d'ailleurs remarquable que des membres des qu'on n'ait pas jugé utile d'ajouter une version grecque pour
mêmes familles soient attestés par des inscriptions ces textes, au moment où il a fallu les regraver, au u" siècle.
araméennes, aussi bien que par des bilingues. C'est un En fait, si l'on tient compte des remarques de H. Seyrig, les
phénomène qui marque toute l'histoire de Palmyre, et il trilingues seraient parmi les premiers textes grecs de Palmyre.
débute avec les premières inscriptions de la ville. Ainsi Enfin, ce rapide bilan de l'épigraphie grecque de
Hashash, fils de Neshâ (bss br ns' br bwlb' i)ss) de la famille Palmyre avant le milieu du 1"' siècle ne doit pas négliger deux
des Benê Hashash est remercié par deux tribus en 21, donc dédicaces religieuses datées respectivement de 30-31 et de
après le passage de Germanicus. Le texte est seulement en 39 apr. J.-C. 120• Il existe, en ce qui concerne les textes
araméen (C/S 3915 = Inv IX, 13) 113• En même temps, son honorifiques grecs, une lacune chronologique entre 25 et 51
frère Malikû est honoré par deux textes bfüngues qui sont (voir en annexe VI, une liste des textes honorifiques bilingues
justement les premières attestations du Mi µo ç des du {' siècle), et il est intéressant de voir que pendant cette
Palmyréniens (lnv IX, Il et 12 de 24 et 25 apr. J.-C.). Il n'y période on trouvait encore nécessaire d'utiliser cette langue.
a sans doute rien que de très naturel à ce que le premier Il est curieux que ce soit dans le domaine de la religion qu'on
texte qui fasse allusion à une institution d'origine grecque la trouve attestée, mais le premier texte grec daté (6 av. J.-C.)
(?) à Palmyre soit aussi dans cette langue. Il y a concomitance était lui aussi une dédicace à une divinité. On pourra
entre l'utilisation de la langue grecque et l'adoption s'interroger sur ce qui a poussé à utiliser cette langue à ce
d'institutions de la même origine, mais il n'est pas possible moment, alors qu'on attendrait plutôt le palmyrénien dans
de dire dans quel sens le mouvement s'est fait. Le texte un contexte religieux, comme les textes du sanctuaire de
Inv IX, l l est d'ailleurs fort probablement le résultat du Baalshamîn l'attestent amplement. Un phénomène de mode,
rapprochement de deux textes séparés à l'origine 114• comme pour les textes honorifiques, a peut-être joué un
Au même moment, un certain nombre de textes certain rôle.
araméens sont dédiés à diverses personnes, en particulier Le texte publié par H. Seyrig est une dédicace au Soleil
dans les deux sanctuaires de Bel (lnv IX, 7 de 24 ; CIS 3922 ('HÀiw1 820 �t2yicr1:w1) en accomplissement d'un vœu
de 28) et de Baalshamîn (BS n" 10 de 23 et n" 37 de 32). Là (2ùx1iv). L'onomastique du dédicant est sans doute une
encore, il semble assez naturel que ces textes de nature indication, car il se nomme MÔ'.pKoç KÀŒÛô10ç, sans doute
religieuse 115 ou privée 116 aient été rédigés dans la langue d'origine étrangère. Comme le remarquait H. Seyrig, l'image
locale, sans passer par le grec. Celui-ci est au contraire utilisé ressemble à celle d'Aglibôl sur les poutres du temple de
dans des textes de nature publique, qui concernent parfois Bel 121, mais il est dédié explicitement à Hélios (fig. 5).
des gens étrangers à Palmyre ( CIS 3924) 117• L'ensemble du monument d'ailleurs pose des problèmes
Il est vrai qu'une autre hypothèse peut être avancée, en iconographiques qui incitent à la prudence. De plus, la pierre
tenant compte du fait que les textes datés du 1"' siècle dans le proviendrait de Homs 122, ce qui fait qu'on peut se demander
sanctuaire de Bel sont en fait des regravures d'inscriptions s'ii s'agit vraiment d'un relief de Palmyre, ou seulement
plus anciennes 118• Comme H. Seyrig l'a remarqué, il est « de style palmyrénien ». Il faut sans doute mettre en rapport
possible que le grec ait été ajouté au moment où l'on regravait le nom même d'Hélios avec la probable origine romaine
les textes sur leur support actuel, pour satisfaire à la mode (ou grecque) du dédicant. L'image est en revanche celle d'un
de cette langue 119• Reste que la correspondance assez grande dieu solaire local, que Marcus Claudius aurait appelé Hélios
entre textes privés et utilisation de 1' araméen mérite d'être par une inte,pretatio graeca assez naturelle. Il aurait ainsi
I I 2 - Outre les deux textes « hellénistiques» cités supra, le texte grec le néanmoins qu'à Palmyre, comme ailleurs souvent, il est impossible de
plus ancien de Palmyre semble être une dédicace à Allât et Artémis, datée trouver un système totalement cohérent qui pourrait expliquer toutes les
(?) de 6 av. J.-C. (306 de l'ère séleucide). On y reviendra plus bas. Ensuite, variations par rapport à une règle qu· on voudrait stricte. Il est possible que
le premier texte (daté) dans une langue non sémitique est /m 1 IX, 2, une le grec ait été employé clans ce cas pour des raisons de parallélisme avec le
dédicace latine à Germanicus par un légat de légion (clone entre 14 et I 9 texte CIS 3924. ou en raison de liens de la famille avec le monde
apr. J.-C.). hellénophone. [] faut noter aussi la présence de l'ethnique ncû1.�tup11voç
I 13 - Le texte grec, que la tradition lui accolait faussement depuis la copie dans le texte grec. après le nom du père. On reviendra plus loin sur ce fait.
de R. Wood. appartient en fait au texte /111 1 IX. l l. comme ra montré ainsi que sur cl' autres textes du même genre.
J. Cantineau, lnv IX, p. 20 et 23. 118 - J. Cantineau clans /111• IX, p. 17-29. Voir le tableau des inscriptions
114 - De plus la remarque de H. Seyrig, citée plus bas, à propos des honorifiques bilingues du I'' siècle en annexe VI.
regravures, invite à la prudence. 119 - Cité par C. Dunant, BS, p. 12.
115 - Le texte BS n" 10 est une dédicace qui commémore la construction de 120 - H. SEYRIG, 1959, p. 58 (AE 1960, 403; la pierre est aujourd'hui au
colonnes et le n" 37 était« destiné à récompenser un acte de piété envers le musée de Damas n" inv. 7939), et J. CANTINEAU, I 938, p. 78, n" 31.
sanctuaire», selon le commentaire de C. Dunant (BS, p. 49). I 21 - Dont il est presque exactement contemporain. C'est le seul texte
I 16 - ln\! IX, 7 et CIS 3922 (= 1111' IX, 9) sont des dédicaces à un père par palmyrénien où l'iota du datif soit adscrit (deux sur trois: 'HÀlCül 0ECJ)
ses enfants. µ2yicrtco1).
117 - Le texte CIS 3925 est une dédicace bilingue au même personnage, 122 - Voir Sculptures of Pa/myro I, p. 22 avec l'illustration n" 121.
par son fils, ce qui semble contredire cette théorie. Il faut remarquer
Chapitre 1: L'identité civique de Palmyre 27
préféré ce nom qu'il connaissait aux éventuels Aglibôl, la cité 127, mais il s'agit aussi de l'unique attestation de l'usage
Iarhibôl ou Baalshamîn qui apparaissent dans les textes du latin par cette même assemblée. Tous les autres textes
gravés sur des monuments semblables. Cette hypothèse, bien latins retrouvés à Palmyre sont le fait de militaires ou de
qu'invérifiable, permettrait aussi d'expliquer l'inscription particuliers.
gravée en grec uniquement sur ce monument étrange. L'arrivée de Rome à Palmyre et les bouleversements
La question est plus curieuse pour l'autel publié en 1938 qui s'en sont suivis sont peut-être à l'origine de la position
par J. Cantin eau. En effet, la version palmyrénienne de ce sociale de Haîran. De son point de vue particulier, on peut
texte est beaucoup plus longue que le texte grec. Il s'agit croire que l'utilisation du grec et du latin est une
d'une dédicace au dieu El-Qônerâ 123 («El créateur de la manifestation d'un rapport privilégié entretenu avec les
terre»), traduite simplement par la formule TI00n8éôv1 8Ecp autorités romaines. Cela n'est d'ailleurs pas contradictoire
(«au dieu Poséidon»). On ne reviendra pas sur la question avec l'interprétation que F. Millar donne du texte funéraire
de l'assimilation des deux noms divins. Ce qui est étonnant, relatif au même personnage 128• Ce qui était en effet
c'est que ce personnage au nom tout à fait araméen ait exhibitionnisme envers ses concitoyens pouvait aussi servir
ressenti le besoin de traduire sa dédicace, même de manière à Haîran de manifestation de loyalisme vis-à-vis des
très résumée rn_ Mais les contacts avec Rome sont déjà Romains.
anciens en 39, même s'ils ne sont peut-être qu'épisodiques. Le personnage manifeste un certain attachement à Rome,
La présence de Grecs de Syrie ou de Mésopotamie est aussi d'une manière qui semble généralement l'apanage des
probable, elle peut expliquer ce texte, comme celui de fonctionnaires romains qui veulent s'intégrer à la société de
6 av. J.-C. qui assimile Artémis à la déesse d'origine arabe, l'oasis, puisque deux des textes qui le concernent sont des
Allât 125• Il s'agit d'un autel, décoré avec des volutes ioniques inscriptions trilingues. Sur les cinq autres textes trilingues
et un bucrane, qui porte l'inscription AÀÀa811 T[E Kat connus, trois concernent presque sûrement des fonctionnaires
'A]p1É�L18[1] («À Allât, qui est aussi Artémis » ). On romains, sans doute liés au fisc impérial 12'1, et un quatrième
remarquera que la décoration semble clairement influencée a de fortes chances de concerner un personnage du même
par des modes occidentales, en particulier le bucrane, comme genre 130• On voit donc l'importance que peuvent avoir ces
par exem ple sur l'Ara Pacis, presque exactement textes dans la définition des liens entre Palmyre et l'Empire.
contemporain (9 av. J.-C.). Il ne semble pas que cette En fait, on peut même se demander s'il n'y a pas là
dédicace ait été bilingue, on aurait donc là un exemple très l'ébauche d'une tradition qui a été interrompue. Palmyre
ancien, peut-être adressé spécialement à (ou par) des aurait pu être une ville trilingue, ce qui était sans doute trop
étrangers de passage à Palmyre. compliqué, et comme cela arriva même dans les colonies
On reviendra dans le chapitre VI sur les cas de trilingues romaines d'Asie Mineure, le grec a fini par supplanter le
dans un contexte funéraire. Mais on voit dans le tableau (voir latin 131• Le texte émane d'ailleurs des autorités de la ville,
annexe VI) qu'il s'agit d'une mode extrêmement limitée dans pas de la personne honorée. On imagine pourtant que la
1
le temps (années cinquante du 1" siècle). L'autre texte personnalité de ce dernier a pu jouer dans le choix de la
trilingue de cette période date d'av1il 7 4 et honore Haîran forme utilisée pour lui rendre hommage.
bar Bônnê. Il s'agit de la première mention de la Boulè de Ce qui est patent néanmoins à la lecture de cette trilingue
Palmyre. La version grecque semble primer puisque le terme est que la version latine n'est qu'un résumé des autres textes.
est translittéré dans les deux autres versions. Mais comme Les concepts utilisés sont grecs, comme la Boulè. Le thème
l'a noté F. Millar 126, la version latine translittère aussi le mot de l'amour de la patrie (qnÀonmp1ç), tout à fait classique
philopatris, alors que le palmyrénien utilise une périphrase dans l'épigraphie grecque, ne lui est bien sûr pas propre,
pour le traduire (rbym mdynth, « qui aime sa ville »). mais il est exprimé dans cette langue, sans doute parce que
Avant de revenir sur les questions de vocabulaire et de c'est par cet intermédiaire qu'il est parvenu à Palmyre. Le
traduction, il faut ajouter une remarque à propos du texte. seul ajout dans le latin est la précision de l'ethnique
Ce n'est pas seulement la première mention du Conseil de Palmyrenorwn après le Conseil et la Cité, pour une raison
123 - J. Cantineau ( 1938. p. 78, n'' 31) lisait 'Jqwnd' au lieu de 'Jqwnr'. La p. 137) « might be taken as a piece of'exhibitio11is111 by a promi11e11t citizen
lecture est corrigée par A. Caquot, RTP, p. 181. Sur cette divinité, voir in the early period of Ro111cm do111inatio11 ».
J. TEIXIDOR, ]979, p. 25-28. 129 - Voir les textes lnl' X, 113 et Kh. As'AD et J. TEIXIDOR, 1985a, p. 271,
124 - Tl s'appelle mqymw br khylw br ::,bdbl [dy] mtqrh br ::,bydy (Moqîmû, n" 9 cités ci-dessus à propos cle L. Antonins Kallistratos, fonctionnaire clu
fils de Kohaîlû, fils de Zabdibel, qui est surnommé Bar Zebîdaî) et dit quart; IMP, 11° 113 est l'inscription cle fondation clu tombeau cle deux
appartenir à la tribu des Benê Gaddîbôl (dy 11111 pbd bny [gd]ybwl). affranchis en rapport avec le fisc (voir chapitre vr).
125 - H. J. W. DRUVERS, 1978, p. 340; sur l'identification entre Allât et 130 - CIS 4235 concerne un certain Lucius Speclius Chrysanthus qui n'est
Artémis, dont c'est l'unique témoignage, voir M. GAWUKOWSKI, 1990a, sans cloute pas originaire de Palmyre et que le service cle l'Empire aurait
p. 2640. conduit clans cette ville, où il se fait enterrer. Mais F. MILLAR, 1993, p. 324,
126 - F. MrLLAR, ]995, p. 413. pense avec raison qu'il peut aussi bien être un publicain travaillant pour Le
127 - Comme l'avait déjà noté J. Cantineau (1933, p. 176). fisc romain, qu'un fermier au service cle la cité.
128 - F. MILLAR, 1995, p. 413, pense que le texte cle 52 (M. RüD[NSON, 1950, 131 - M. SARTRE, ]995, p. 212.
28 Les notables de Palmyre
qu'on ignore (peut-être la reprise d'une expression de textes M. G. BertinelliAngeli, que c'est par cet intermédiaire qu'ils
officiels en latin). Il semble bien qu'ensuite, pour les textes sont arrivés ensuite en palmyrénien 138• Néanmoins, la
bilingues qui émanent des organes institutionnels de la cité, question mérite d'être posée, car les habitants de Palmyre
le schéma soit grosso modo le même. Même quand la version étaient en contact direct avec des soldats romains, dont la
araméenne est plus détaillée, le vocabulaire institutionnel et langue était le latin. Les textes qui émanent de la garnison
politique est inspiré du grec et même à l'époque de la colonie, de la ville le prouvent. La transcription du terme latin ala
le vocabulaire latin passe souvent par le filtre du grec avant est en grec EÏÀ17 ou ÏÀ17 et '1' en araméen, l'origine de ce
d'arriver dans les inscriptions araméennes. C'est ainsi que dernier peut-être aussi bien le grec que le latin et même plutôt
le terme bthporcoç, traduction du procurator latin est celui-ci. Le terme est certes attesté dans le texte Jnv X, 128,
simplement transcrit en araméen par 'ppp' 132• bilingue grec-palmyrénien. S'il était prouvé que la version
originale du texte était le grec, cela pourrait éventuellement
indiquer que le terme a été calqué sur la transcription grecque.
3. LE VOCABULAIRE OFFICIEL DES CITÉS SÉMITIQUES
Mais je ne sais pas si la question est susceptible d'être réglée.
L'adaptation du vocabulaire institutionnel romain par La deuxième voie pour adapter les termes gréco-latins
les langues sémitiques et en particulier le palmyrénien a été était de leur trouver des équivalents en araméen. On a vu
étudiée par M. G. Bertinelli Angeli 133• F. Rosenthal et que cela avait été fait pour des qualificatifs comme
J. Cantineau, en leur temps, avaient aussi donné des listes <)nÀ0TCaîplç OU EÙCTE�llÇ. Il en était de même pour le
1
du vocabulaire adapté du grec "�. vocabulaire institutionnel. Il y avait en fait au moins deux
En fait, plusieurs cas de figure se présentent, avec des possibilités différentes. La première était de créer un calque
variations souvent sans raison apparente. Le plus simple est du terme à adapter, en utilisant un ou plusieurs mots araméens
bien sûr la simple translittération. BouÀ17 devient bwl' en qui avaient la même signification au sens premier, mais ne
araméen, dès le I °r siècle, mais au n( siècle par exemple, le possédaient pas le sens spécialisé acquis par le vocable. Le
grec crnyKÀ17nK6ç (senator en latin) est adapté en snqltyq'. meilleur exemple qui vienne à l'esprit est l'utilisation du
Comme on vient de le dire, c'est généralement du vocabulaire mot nhyr', « brillant, lumineux» pour traduire le titre de
grec que s'inspirent les Palmyréniens, même quand la clarissimus, devenu en grec, par le même procédé de calque
fonction est romaine à l'origine. C'est le cas pour le mot Àa�mp61a1oç. Un autre cas clair est fourni par l'inscription
cr1pœn7y6ç translittéré 'strtg. Comme l'a montré encore ES n" 51 : à la place de la transcription 'l' du mot latin a/a,
dernièrement M. Sartre, ce terme pouvait désigner à Palmyre on a le mot araméen 'br qui signifie à l'origine« aile » (d'un
soit des responsables militaires (magistrats ?), soit à partir oiseau) ; c'est ce sens premier qui est attesté en syriaque,
de la transformation en colonie, l'équivalent des duumuiri par exemple u9• C'est sans doute par un processus de ce genre
des colonies de langue latine rn_ M. G. Bertinelli Angeli qu'a été créé le mot rbym mdyth qui sert à traduire
pousse sans doute trop loin l'analyse quand elle argue que <)nÀ6rca1piç. Le fait que ces mots ne soient pas normalement
l'utilisation du terme avant la colonie pour désigner des utilisés en araméen dans ce sens, ou que l'expression soit
charges locales a préparé le terrain à l'emploi de cr1pa117Y6ç créée pour l'occasion, est ce qui distingue ce procédé du
pour désigner les premiers magistrats de la colonie 136• suivant.
Comme on le sait depuis longtemps, il s'agit en fait de la Il existe en effet une autre manière d'adapter le
version normale du terme en grec. vocabulaire étranger, il suffit de renommer des fonctions
Il existe cependant des mots latins utilisés par le d'origine grecque ou latine avec des noms de fonctions qui
palmyrénien en translittération 137; en général, il s'agit de existent déjà dans la langue locale. C'est ce qui se passe
vocabulaire militaire, et dans une moindre mesure de dans les cités d'Afrique du Nord où le mot duumuir devient
vocabulaire administratif. Une remarque s'impose. Tous ces spt (suffète), parce que les deux fonctions ont beaucoup de
mots latins existent aussi en grec et on peut croire, avec points communs. Il est clair que plus les mots sont courants,
132 - Voir par exemple dans le texte C/S 3939. fomi!ior ») ; pour les titres cl'Odainat et de sa famille, dans une période de
133 -M. G. BERTINELLI ANGEL!. 1970. mutations, la situation est un peu plus compliquée (voir chapitre 1v ). même
134 - F. RoSENTHAL, 1936, p. 91-92 etJ. CANTINEAU, 1935. p. 154-157 (où s'il est possible que les cieux termes soient deux traductions d'un même
26 des 46 mots cités se rapportent à l'organisation administrative,politique titre. Savoir sïl s'agit bien d'une fonction confiée par un empereur est un
et sociale). Un débat récent a opposé les tenants d'une grande régularité autre problème.
clans la traduction des termes administratifs grecs et romains (S. SwAJN, 135 -M. SARTRE. 1996a, p. 391-392 et 394-395 (voir ici le chapitre III oü
1993, p. 161. mais il fait, p. 159, une exception pour les termes militaires) cette question est développée).
à ceux qui pensent que, clans le domaine de l'administration impériale au 136 -M. G. BERTINELLI ANGEL!, 1970, p. 66-67.
moins, on trouve un certain nombre d'irrégularités (D. S. PoTTER, 1996, 137 -J. CANTINEAU,1935,p. ]57,etM. G. BERTINELLIANGELI, 1970.p. 76-83
p. 273). Ce débat tourne en fait autour de l'interprétation correcte des termes qui donne un certain nombre d'exemples.
mtqnn' (pour Oclainat, C/S 3946) et 'pnrt/' (pour Wahballat, C/S 3971). Il 138 -M. G. BERTINELLIANGELI, 1970, p. 79, à propos du mot lgywn, adapté
semble assez sûr que, pour les termes qui concernent l'administration de la du grec Àqu.!Jv.
ville, les traductions sont très régulières (cf. D. S. PoTTER, 1993, p. 273: 139 - Pour la question du statut exact de l'unité ainsi désignée, voir le
« with greater consistency in the case cd' institutions that are more chapitre 111.
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 29
plus ce phénomène, qui est celui de la véritable traduction, Les termes dont on a noté la récurrence dans les
est facile. Il est par exemple inutile de translittérer des mots inscriptions palmyréniennes (<)nÀÔrcmp1ç et EÙCTE�1iç en
comme deus ou 8EÔç, ou bien dominus, qu'un simple mrn particulier) apparaissent dès les premiers textes bilingues.
« notre maître» suffit à traduire. À Palmyre, on a par exemple Des textes palmyréniens accompagnent presque
rb swq qui est l'équivalent d'àyopavôµoç_ Conune le note systématiquement les inscriptions honorifiques grecques,
M. G. Bertinelli Angeli 1·H1, il est probable que cela avec les réserves qu'on a pu signaler sur les phénomènes de
corresponde à une charge proprement indigène qu'on a fait regravure. Ce sont apparemment les textes qui concernent
rentrer dans le cadre des fonctions civiques. Dans ce cas, on Haîran, fils de Bônnê qui forment le premier groupe cohérent
traduit le mot et on adapte la fonction. de textes sûrement datables de la seconde moitié du 1 ' siècle. c
On trouvera dans l'ouvrage de M. G. Bertinelli Angeli Ce qui est remarquable, et du coup justifie amplement le
de multiples exemples de ces différents phénomènes, ainsi mot <)nÀÔrcœcp1ç qui apparaît précisément dans ces textes,
que les équivalences et les traductions du vocabulaire c'est le souci des Palmyréniens de toujours utiliser leur
institutionnel, ce qui explique qu'on ne s'y attarde pas ici. propre langue, en parallèle avec le grec, langue de culture
Néanmoins, il est utile de faire quelques remarques sur de l'Empire auquel ils appartiennent. Cette fierté de sa propre
certains mots. On étudiera en même temps que le commerce langue est un phénomène unique dans le monde romain par
de Palmyre le mot cmvofüâpx17ç et ses différentes traductions. son ampleur et sa durée.
Si sa construction est claire, le terme semble propre à Palmyre Néanmoins on peut trouver dès l'époque hellénistique
et il semble avoir été créé pour désigner ce que les textes des parallèles éclairants pour ce genre de phénomène.
araméens appellent parfois rb syrt'. On verra néanmoins que L'installation de Phéniciens dans le monde grec, et en
la question est plus difficile qu'il ne semble au premier abord particulier à Athènes, est un signe des relations commerciales
et que le témoignage des textes est parfois contradictoire. prospères entre les deux mondes, qui ont eu aussi des
Les variations chronologiques ne semblent pas jouer un conséquences culturelles. Un des exemples les plus parlants
grand rôle dans l'utilisation des différents procédés. On a, à peut-être est une inscription bilingue découverte au Pirée, et
la même époque, le dnis de Palmyre qui c01Tespond au 81î�Loç conservée maintenant au Louvre 143• La partie grecque est
et le rb mrzb' en face du crwmocr1âpx17ç. On translittère ce très courte (1:0 KOlV0V îWV LlôCOVlCOV �lOTCEl817v L18rov10v),
qui n'existe pas à Palmyre. On traduit les noms des fonctions alors que la version phénicienne est au contraire développée
existantes, quand il est inutile de créer des mots nouveaux et précise. Jusque là, il n'y a rien de bien étonnant pour un
qui feraient double emploi. Il est possible que ce ne soit texte qui émane d'une autorité phénicienne. Ce qui est
qu'à partir du me siècle qu'on commence à traduire des termes remarquable, c'est que le phénicien suit le formulaire des
comme Àa�LrcpÔ'-cm:oç, au lieu de les transcrire, comme on le inscriptions honorifiques grecques 144• En même temps, on
ferait pour des mots qu'on ne comprend pas totalement. Peut peut repérer dans ce texte certains détails qui permettent de
être maîtrise-t-on le grec un peu mieux et on peut alors jouer conclure qu'il a été«pensé en phénicien» 145, et qu'il porte
avec ses concepts 141• Néanmoins, au même moment, on l'empreinte de traditions propres aux Phéniciens 146• Cet
continue à transcrire une partie du vocabulaire ; la exemple a donc l'intérêt de rappeler que même dans les cas
comparaison entre l'équivalence q11sts - Kpâncrwç (pour où un formulaire grec est copié et transposé dans une langue
egregius qui désigne principalement les membres de l'ordre sémitique, cela ne signifie évidemment pas qu'on oublie ses
équestre), et l'équivalence nhyr' - Àa�mp61:œcoç prouve qu'il propres coutumes.
n'y avait pas de règle absolue. Il devait sembler plus bizarre Le bilinguisme de Palmyre et l'emploi du grec semblent
à un Palmyrénien d'entendre qu'on qualifiait quelqu'un de fort différents de ce qui se passe dans les cités d'Arabie
«fort» que de«brillant» dans ce sens honorifique. Le mot comme Pétra. Il faut noter la rareté des textes bilingues dans
qrtsts avait au moins l'avantage de l'exotisme, s'il n'était cette dernière ville, et l'utilisation rapide de termes
pas compréhensible immédiatement par tout le monde 142• institutionnels grecs (dans les inscriptions grecques), alors
140 - M. G. BERTINELL! ANGEL!, 1970. p. 67-68, 11. 4 . en grec une valeur presque officielle ; voir S. SwAIN, 1993, p. 160, n. 12).
141 - Plutôt que par une éventuelle réaction indigène que l'utilisation 143 - AO 4827. Le texte a été publié à plusieurs rep1ises: on peut citer
courante de ces termes vient contredire. Pourquoi se vanter d'être dernièrement J. TEIXIDOR, 1980b, p. 453-454 (repris par W. AMELING, 1990,
« clarissime», si on veut renoncer à tout ce qui est romain ? p. 190): J. C. L. GmsoN, 1982, p. 148-150, n"41. Le texte grec (cité par
142 - Mais le terme Kpcincrcoç a pour équivalent un autre mot dans le les éditions précédentes) est dans les/GIF, 2946 .
texte du Tarif( CIS 3913, 1. 121 de l'araméen) : ksyr' ( « excellent»), pour 144 - Cela a été bien remarqué par tous les commentateurs du texte (voir
traduire 6 Kpcincrwç (1. 196 du grec; le terme s'applique à Corbulon : par exemple, J. TEIXIDOR, 1980b, p. 454-457).
qrblwn/Koup�oÛÀCDV). Pourtant à la même époque sans doute(« écriture 145 - Voir M.-F. BASLEZ et F. BRIQUEL-CHATONNE T, 199 1 , p. 378.
semblable à celle du Tarif». J. Starcky, lnv X, p. 62, ad !oc.), le texte lnv X, 146 - Ibid., p. 386. Les auteurs soulignent « l'importance fondamentale du
102 donne le mot [q1]tsts pour un gymnasiarque anonyme. Mais il est fort banquet dans la vie de leur communauté : dans le texte du Pirée, apparaît
possible que la traduction attestée dans le Tarif remonte à une période plus une des rares mentions du marzeab en phénicien». C'est aussi le terme
ancienne(celle où Corbulon était gouverneur de Syrie; voir annexe XII), qui est employé en palmyrénien pour les banquets (voir chapitre 1v).
avant que l' équivalence ne soit fixée (et même avant que le terme ne prenne
30 Les notables de Palmyre
que les textes nabatéens deviennent beaucoup plus rares 147• qui leur sont subordonnés. Ces derniers sont appelés Illluiri
Néanmoins, à Pétra, comme à Palmyre, on trouve un terme aedilicia potestate dans les textes latins postérieurs à 77. Il
inédit ailleurs, celui de �t111poK0Àwvia l r- n, sans que cela est remarquable d'ailleurs que le terme est alors transcrit en
renseigne beaucoup sur la valeur et l'origine du titre. Mais punique sous la forme 'ydls qw'trbr, dans laquelle on
la rareté des inscriptions du II° siècle trouvées à Pétra montre reconnaît aisément les mots latins (voir IRT 305). Mais le
que la ville est sans doute moins bien intégrée que Palmyre mot« suffète» survit jusqu'au moment où Leptis devient
et que la culture grecque semble moins bien ancrée, même colonie au début du IIe siècle et jusque-là spt sert à traduire
si le grec est devenu la langue officielle de la nÔÀK 149• duumuir. Il est d'ailleurs caractéristique que ce soit le dernier
On peut également indiquer d'utiles parallèles entre la suffète qui devienne le premier duumuir 154• On peut fournir
situation palmyrénienne et celle qui prévaut dans certaines un dernier exemple avec une bilingue de 92 (JRT 318 et 347)
régions d'Afrique du Nord, en particulier au cours du!"' siècle. qui atteste d'une équivalence entre lejlamen pe1petuus et le
L'exemple le plus frappant est celui de Leptis Magna, ville zbb lk{l b ']t «
( [prêtre] qui sacrifie à vie» ).
dans laquelle on trouve jusqu'à la fin du siècle une importante La principale différence avec Palmyre est bien sûr que,
quantité d'inscriptions bilingues en latin et en néo-punique dans le cas de la ville syrienne, l'intégration à l'Empire s'est
et même des monolingues néo-puniques 150• Des familles de faite d'abord par l'hellénisation, bien avant la transformation
notables aux noms doubles 151 se distinguent au premier rang en colonie qui n'a pas modifié de manière considérable le
de l'élite urbaine et jouent en particulier un rôle important caractère hellénique de la ville 155• De plus, les coutumes et
dans le programme de construction qui remodèle les langues indigènes de Palmyre se sont maintenues
complètement le centre urbain. Parmi eux, les Tapapi (ou beaucoup plus longtemps, y compris dans la langue écrite,
Tafapi, tbbpyen punique) se distinguent particulièrement 152• ce qui fait une grande différence, mais n'a pas empêché le
On les connaît par une dizaine d'inscriptions dont la plus fonctionnement d'une cité grecque. Là comme ailleurs, la
ancienne date de 8 av. J.-C. ; ils remplissent un certain nombre civilisation grecque, et surtout son expression qui est la cité,
de fonctions civiques, sont par exemple suffètes, jouent un sont une condition sine qua non de l'appartenance au monde
rôle important dans la promotion du culte impérial, et par civilisé 156• Mais comme le rappelle à juste titre P. Le Roux,
leur évergétisme contribuent aux constructions de la cité. Il « en pays grec et hellénistique il ne fut pas question de
est curieux que ces familles qu'on avait réussi à suivre modifier par la municipalisation et le droit latin le système
disparaissent de la documentation à cause du changement poliade en vigueur. Celui-ci servit longtemps de creuset à
(de la latinisation) de leur onomastique. Celle-ci ne permet une romanisation multiforme et plus ou moins profonde» 157•
plus de faire la différence entre les immigrés de langue latine Du point de vue romain, l'étape importante pour Palmyre
et les gens d'origine locale 153• était l'organisation en cité. La ville était en retard du point
La ville de Leptis Magna, qui a commencé comme de vue civique, c'est ce retard sur les autres cités grecques
installation commerciale phénicienne au vil" siècle, est qu'il fallait combler. Le passage à la colonie était en quelque
romaine depuis 46 av. J.-C. Elle devient municipe aux sorte secondaire. Mais cela éclaire aussi ce qui se passa à
alentours de 77, et coionie en 109. La cité est également Leptis Magna ; la tolérance romaine est visible aussi dans
célèbre comme lieu d'origine de l'empereur Septime Sévère. l'évolution institutionnelle de la cité, qui conserve des
Avant 77, la cité est gouvernée comme une cité punique, magistratures au nom punique, même après la transformation
avec deux suffètes annuels ( spt) et quatre mabazim (m/1zm) en municipe.
147 - Voir par exemple les remarques de F. MILLAR, 1993. p. 407 sur le J1mlkt tN1py rwps bn 'rm. Son nom est typiquement indigène, mais rll'p s
rapide abandon du nabatéen dans les archives de Babatha (« the q11ite abrup t est une transcription clu R1ifi1s latin ( JRT 319). Un autre s'appelle ... Jarinis
sh!ft m1'ct_\' .fi'mn Nabatean in the "archil'e of' Babatha ", as .won as the (l) Tupc1fïus Diodoms Ni::.a::. (!RT 273).
p roFincia/ regime 11'a.1· imp osed »; voir aussi p. 417-418). Comme le 152 - M. G. AMADASI Guzzo. 1983. p. 377-385. Il faut noter que le nom
remarque M. Sartre (dans/GLSXXI, 4, p. 90, à propos cle la bilingue n" 54): lui-même n'est ni punique, ni romain bien sür, mais d'origine inconnue,
« cette inscription funéraire est le seul texte écrit en grec enArabie qui soit vraisemblablement libyque ou peut-être égyptienne.
sûrement antérieur à la conquête romaine». De plus. comme me l'a fait 153 - E. BIR.LEY. 1988. p. 1-19.
observer F. Villeneuve les inscriptions (nabatéennes et grecques) sont rares 154 - C. LEPELLEY, 1998. p. 84-85. Ce même personnage est aussi le grand
ù toutes les époques. père de l'empereur Septime Sévère.
148 - JGLS XXI, 4 (Pétra), n" 48 (et 24). ] 55 - F. MILLAR, ] 990, p. 42-46.
149 - Il suffit cle comparer clans le recueil de M. G. BERTINELLIANGEL!, 1970 ] 56 - M. SARTRE, 1991, p. 126.
le petit nombre de termes institutionnels gréco-latins utilisés en nabatéen 157 - P. LE Roux. 1998, p. 272-273 qui ajoute : « on commence à mettre
(p. 57-64) au nombre beaucoup plus important des attestations en en exergue l'attitude romaine cl'aclaptation aux interlocuteurs, héritiers ici
palmyrénien (p. 65-83). cle civilisations méditerranéennes dont Rome prenait en quelque sorte le
150 - Voir D. MATTINGLY, l 995, en particulier le chapitre 3 ; les textes latins relais ». Voir les remarques similaires de M. SARTRE, 1991, p. 124 : « On
de Tripolitaine sont rassemblés clans les lnscrip tions cd'Roman Trip olitania ne se trompera pas en affirmant que Rome n · a jamais cherché à imposer en
( JRT), et les textes néo-puniques dans G. LEVI DELLA V IDA et M. G.AMADASI Orient les modèles cl' organisation municipale qui prévalaient alors en
Guzzo, 1987. Occident.»
151 -Ainsi un des membres cle la famille des tbbpy s'appelle Jmb'J bn
Chapitre I: L'identité cil'ique de Palmyre 31
De plus Palmyre n'a pas fourni de dynastie à l'Empire d · autres aspects, elle fait partie de la province et en partage
et la carrière d'Odainat et de sa famille se déroule dans un les évolutions.
cadre géographique plus limité. En règle générale, Leptis Le patriotisme local de Palmyre est comparable sans
Magna et la région qui 1'entoure ont fourni de plus nombreux doute à celui qui existe ailleurs. Mais faute de rivales proches,
membres du Sénat et de l'aristocratie romaine que Palmyre. les luttes entre cités ne marquent pas l'histoire de Palmyre,
Mais il suffit de penser au cas de la ville d'Émèse, toute comme elles ont marqué les cités d'Asie Mineure. Ce
proche, pour voir qu'il était possible à des notables syriens, patriotisme s'est exprimé par la langue et le bilinguisme
dès la fin du ri" siècle, d'accéder à des rôles importants dans officiel permettait de bien marquer les différences avec les
l'Empire. On assiste à Palmyre à la formation lente, mais grandes villes de Syrie, comme Antioche, et avec les
continue, d'élites municipales qui aboutit au m" siècle à nomades de la steppe qui entourait Palmyre. De manière
l'envoi de notables palmyréniens au Sénat. Comme à Leptis, consciente ou inconsciente, la cité se sentait en marge de
même si c'est de manière plus affirmée ici, le maintien des l'Empire auquel elle appartenait. Elle avait une culture propre
institutions et de la langue locale n'a pas empêché une bonne et en faisait usage. Cela ne signifie pas nécessairement une
intégration dans l'Empire. volonté quelconque d'indépendance de la part des habitants.
On peut s'interroger sur ce qui a fait la différence entre La fameuse phrase de Pline sur la position de Palmyre entre
les deux cités : d'un côté, l'abandon du punique et la deux empires n'est pas entièrement hors de propos. La ville
romanisation qui semble totale; de l'autre, le maintien de la de Palmyre est en contact constant avec ces deux puissances.
langue, de l'onomastique et d'un certain nombre de Il aurait été étonnant qu'elle ne fût pas touchée, du point de
coutumes. Il ne faut certes pas sous-estimer la vigueur de vue culturel au moins, par des mélanges de civilisations. Il
l'implantation punique, encore au cours du r"' siècle 158• est probable que 1 'araméen devait servir aux marchands lors
L'abandon du punique (au moins dans le domaine civique) de leurs échanges commerciaux dans les diverses villes de
dans les années qui suivent n'en est que plus étonnant. Il est Basse-Mésopotamie qu'ils fréquentaient. Il avait même
possible que la présence de l'élément libyque (dont sont en parfois le statut de langue officielle. Cela peut contribuer à
partie issues certaines familles de notables) ait joué un rôle. expliquer son succès clans l'oasis. De plus, ce qui est
Après tout, quelle que soit l'ancienneté de la présence marquant dans la culture palmyrénienne, telle qu'elle
punique, on avait déjà affaire à un milieu mixte quand les apparaît dans les textes, est l'importance des ancêtres et des
Romains sont arrivés. Pourtant la présence de nombreux lignées familiales. Ce respect des pères a dû s'étendre à leur
éléments ethniques est aussi manifeste à Palmyre (araméen culture et à leur langue. Les premiers textes araméens sont
et arabe au moins), ce qui réduit cette différence. L'étude contemporains ou antérieurs aux textes grecs. L'habitude
des religions de 1 'Afrique romaine a montré que la épigraphique s'est peut-être étendue à Palmyre sous
romanisation n'est pas complète, même si la situation est l'influence du grec, mais d'abord ou en même temps en
extrêmement complexe 159• araméen 162• Cela n'a pas cessé jusqu'au ni" siècle, sans doute
C'est peut-être la position géographique marginale de par une sorte de fierté locale dont on ne trouve pas d'exemple
Palmyre 100 qui a joué le plus grand rôle, en même temps comparable dans l'Empire romain.
que l'absence d'une immigration importante 161• Septime
Sévère appartient à une famille africaine indigène par son
4. LES DÉDICANTS : LES DÉCRETS DU CONSEIL ET DU PEUPLE
père, mais le côté maternel comprend aussi des immigrés
italiens. De plus, une branche de la famille paternelle, après À la lecture des textes, une évidence s'impose. Une
l'acquisition de la cité romaine, s'était installée en Italie. majorité de textes est le fait de dédicants qui sont des groupes
C'est un type d'évolution familiale qu'on ne retrouve et des collectivités, et au premier chef, le Conseil et le Peuple.
apparemment pas à Palmyre, même dans le cadre plus Cela est vrai pour les deux groupes d'inscriptions que
restreint de la province de Syrie. La ville reste à l'écart, même distingue K. Dijkstra. Mais, dans les deux groupes, on trouve
si du point de vue culturel et institutionnel, ainsi que par aussi les marchands (˵rcopm ou tg1y') ou les caravanes
158 - C. LEPELLEY, 1998, p. 85 compare à juste titre ce phénomène au refus 161 - De plus, le nombre relativement élevé de noms d'origine iranienne
des cités grecques d'adopter le statut de municipe plutôt que celui de cité semblerait prouver que l'immigration à Palmyre provient au moins en partie
libre. « On pourrait plutôt comparer l'attitude de beaucoup cl' Africains à d'Orient (voir annexe X). fi est de plus difficile cle tenir compte de
celle des Grecs. maintenant fièrement et jalousement durant tout le Haut l'installation possible de populations sémitiques pendant toute la période
r.�........-: .. ,..,, J ,... ,-, ..... .--...--1: ...: ,...,
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romaine (Arabes bien sûr, mais aussi Araméens ou Mésopotamiens en un
159 - P. LE Roux, 1998, p. 359-361, souligne cet aspect. sens plus large).
160 - Leptis Magna n' est pas loin du désert. mais sa position géographique l 62 - Voir les remarques de M. SARTRE, 1998, p. 555-562 sur la cohabitation
la place au cœur de la province romaine, sur les routes qui longent la côte. des cultures et le fait que le développement de l'utilisation épigraphique
Palmyre est plus à l'écart des parties utiles de la province du point de vue des langues locales semble souvent lié et au moins concomitant à l'usage
de la civilisation urbaine grecque. du grec (les cieux langues se renforcent. au lieu cle s'affaiblir).
32 Les notables de Palmyre
(cruvo8ia ou bny syrt'), les diverses tribus et les clans qui mauvais état. Il était naturel, et prudent, que le Conseil honorât
composent la population de Palmyre (parfois en association ce curateur d'une manière adaptée à son pouvoir et le
avec une divinité 163), ou encore des militaires 164• remerciât d'avoir remis de l'ordre dans les affaires de la cité.
Que le Conseil et le Peuple (parfois seuls) soient les Les inscriptions qui émanent des tribus, par décret du
corps les plus souvent représentés correspond sans doute à Conseil et du Peuple, débutent clans les deux langues par le
leur importance dans la cité de Palmyre. Cela n'a rien de rappel de ce décret (par exemple Inv X, 44, npocrTay�m-n
bien étonnant car la situation est fort semblable dans le reste �ouÀ11ç Ka't 81i�wu et btwbyt bwl' wdms), pour se placer
du monde grec. D'ai11eurs, cette prééminence se marque dans sous l'autorité de ces institutions. L'expression n'apparaît
la mise en forme des décrets sur les pierres. Très souvent, la que clans ces cas précis et montre bien la manière dont
mention du Conseil et du Peuple (au nominatif) précède le fonctionnaient les institutions de Palmyre et la subordination
nom de la personne honorée, comme pour respecter l'ordre des tribus au Conseil et au Peuple 170• La raison de l'emploi
de préséance 165• Il est remarquable que l'ordre de l'araméen d'une formule équivalente (mn twbyt bwl' wdms) clans le
ne change que rarement, quel que soit le type de texte. Au texte C/S 3959 (= BS n" 44) n'est, au premier abord, pas très
début de la période étudiée, il y a sans doute une étape claire, car le grec se contente d'un simple 11 �ouÀll Ka't 6
intermédiaire, où l'araméen suit parfois l'ordre du grec, mais 811µoç. Malê Agrippa a été deux fois secrétaire et a accueilli
ce n'est pas systématique 166• Ce n'est ensuite qu'à certains Hadrien et son armée en 129, ce qui en fait un personnage
moments que l'araméen suit le modèle du grec. Ainsi autour important. Le texte araméen apporte cette précision qui
des années 130, trois textes bilingues commencent par la s'explique si on pense à l'endroit où est placé le texte : sur
mention du Conseil et du Peuple clans les deux versions une colonne du temple que Malê a fait construire clans le
( CIS 3930-3931, 3959), mais un texte contemporain (Jnv X, sanctuaire de Baalshamîn (fig. 6). Le Conseil et le Peuple
114) montre que cette coïncidence chronologique peut n'être ont honoré ce personnage par un décret; celui-ci raconte la
que l'effet du hasard des découvertes 167• Il est difficile de carrière de Malê Agrippa. Le texte C/S 3959, un résumé de
dire si le statut des personnes honorées entre en jeu clans ces ce décret, a été placé à cet endroit sur la décision du Conseil
différentes positions ; rien ne permet de conclure ni clans un et non sur celle des autorités du sanctuaire. Les deux autres
sens ni dans l'autre. Soados, qui a sauvé des caravanes et a textes du sanctuaire de Baalshamîn qui mentionnent le
été h onoré de plusieurs statues en différents lieux Conseil et le Peuple (BS 11° 45 et J. CANTINEAU, 1936, p. 277,
(R. MouTERDE et A. PomEBARD, 1931, p. 101) 16 8, ne semble n" 20 = BS n" 48) sont des décisions prises par ces institutions
pas tellement inférieur en gloire à Iarhibôlâ, fils de Lishamsh, et appliquées par les tribus. La tribu des Bené Mazîn avait
d'Inv X, 114, qui a été ambassadeur en Élymaïde et a aidé justement comme sanctuaire tribal celui de Baalshamîn. C'est
les commerçants palmyréniens. On peut aussi supposer que seulement par cet intermédiaire que le Conseil pouvait faire
ce choix stylistique en araméen a comme raison principale ériger des statues de bienfaiteurs dans les sanctuaires tribaux.
l'imitation du grec, en rompant avec ce qui constitue une Même si la tribu n'apparaît pas dans le texte CIS 3959, c'est
certaine norme dans les textes araméens. Dans ce cas, les après une décision de ce genre que la statue du bienfaiteur
variations dépendraient des personnes qui devaient rédiger du sanctuaire a été dressée à cet endroit précis, et c'est sans
les textes et qui peuvent être restées en poste pendant une doute à cause d'une imprécision du texte grec (par habitude
période assez longue. de la formule 11 �oUÀTJ Ka't 6 811�Loç ?) que le mot décret
Il n'y a qu'un exemple dans lequel le grec place le nom apparaît uniquement en araméen. Peut-être aussi dans ce cas
du Conseil et du Peuple en deuxième position (Jnv X, 34). n'y avait-il qu'une statue (ce que semble montrer le texte),
Ce fait s'explique par le statut exceptionnel du personnage qu'on avait choisi de placer là en souvenir des liens très étroits
honoré : il s'agit d'un légat de l'empereur venu à Palmyre en qui unissaient la famille de Malê au sanctuaire 171• Cela peut
tant que curateur de la ville (curcztor reipublicae) 169• Ce expliquer l'hésitation du formulaire clans une décision du
personnage de rang sénatorial était chargé par l'empereur de Conseil et du Peuple dont la version lapidaire ne se trouve
remettre de l'ordre clans les finances de la cité, sans cloute en pas dans les endroits habituels à ce genre d'inscriptions.
163 - Sur ce type d'inscriptions. voir J. T. Milik. DFD. passim. 167 - Autres exemples. R. MouTERDE et A. POIDEBARD. 1931. p. 10 l :
164 - lin• X, 79: dédicace par 01. àrcà îüU rcpmrnl u] aÙîOU OÙllSÜÀÀ]ou CIS 3914; CJS 3934.
« ceux de sa première vexillation ». 168 - Les textes BS 11" 45, et H. J. W. DRI.IVERS, 1995a, p. 34-36. légèrement
165 - À 1·inverse.pour les dédicaces entre particuliers, le nom de la personne antérieurs, concernent d'autres honneurs rendus au même personnage.
honorée est généralement en première position. Celui du (ou des) obligé 169 - Sur cette fonction, voir G. P. BURTON, 1979, p. 465-487; sur le cas de
qui l'honore le suit (voir par exemple la liste des textes caravaniers: le Palmyre. M. SARTRE, 1996a, p. 396.
nom du bienfaiteur précède celui des caravaniers qu'il a aidés). 170 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 387-388: « Cet honneur institué par les
166 - J. CANTINEAU, 1933, p. 175, n" 2b ( où dans les trois langues, le texte quatre tribus n'est pas laissé à leur appréciation mais décidé par le conseil
débute par le Conseil et le Peuple) et lnv X, 127 de 74 et 86 apr. J.-C. d'un et le peuple ».
côté, et de l'autre Jnv X, 39 et J. CANTINEAU, 1938, p. 76, n" 29 où chaque 17 l - Voir en particulier, BS, p. 46 et les textes BS 11"' 1-2 gui concernent le
langue suit sa tradition. L'original du premier de ces textes est sans cloute père de Malê Agrippa.
la version grecque.
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 33
Le texte a en effet le très grand intérêt cl'attirer l'attention du m e siècle, en l'honneur de Septimius Worod ( C/S 3942
sur la localisation de ces statues honorifiques. Si on excepte d'avril 266 = Inv 7; Cela prouve que ces
les statues placées clans les sanctuaires tribaux 17", il est très institutions survivent, même au moment où Palmyre est sous
net que c'est surtout à 1'agora (de la fin du (1 siècle au début la coupe cl'Oclainat et de sa famille. En effet, Haîran, fils
c
du lll siècle) et ensuite clans la Grande Colonnade gu'on les cl'Oclainat est appelé exarque des Palmyréniens dès octobre
retrouve 173• L'agora (fig. 7) était toute proche du lieu de réunion 251 ( CIS 3944) 175• Il y a clone coexistence des deux systèmes
du Conseil, ce gui explique sans mal gu'on ait placé les statues et le règne des princes de Palmyre n'a pas supprimé la colonie
à proximité. La Colonnade 8) a pu devenir par la suite le de Palmyre et ses institutions civiques. On connaît cl'ailleurs,
nouveau centre de la vie urbaine, au fur et à mesure de son en décembre 262, un stratège de la colonie (' louÀ.wç
développement (c'est clans cette zone qu'on place parfois le Aùp17tc1oç Në�ouÇcx�cx8oç Iocx8ou mû A1pa de C/S 3939
«palais» des princes de Palmyre). Le dernier lieu privilégié = Inv 10). Or ce dernier dédie une statue à ce même
pour ces statues est bien entendu le sanctuaire de Bel (fig. 9), Septimius Worocl. Le fait qu'un magistrat de cette importance
et ce jusgu'au m e siècle : Inv 29 de 239 est en remploi et soit l'auteur d'une telle dédicace est sans cloute révélateur
provient peut-être cl'ailleurs m_ On ne voit pas toujours la d'un certain état de fait à Palmyre pendant cette période ...
raison de cette localisation (lnv IX, 23 par exemple), mais il Les nombreuses attestations du Conseil et du Peuple
s'agit d'un sanctuaire de l'ensemble de la cité gui pouvait y (voir l'annexe III à �ouÀ.1i et 8riµoç) ont une particularité, si
honorer ses bienfaiteurs, même si ces derniers n'avaient pas on les compare avec des mentions semblables dans le reste
contribué directement à l'embellissement du sanctuaire du monde grec. En effet, à ma connaissance, il n'existe
(comme c'est le cas avec C/S 3914). aucune attestation de la formule 11 �ouÀ.17 'Ccov TiaÀ.�rnp17véov,
La signification de l'érection cl a ns la Colonnade dont les équivalents sont pourtant courants ailleurs m_ En
transversale du texte C/S 3952 est assez claire. Il se trouve fait, c'est seulement la version latine d'un texte trilingue gui
sans cloute à proximité du sanctuaire embelli par Shoraîkô, offre une formule proche, même si on peut à la rigueur
fils de Haîran. De même, les honneurs rendus à Soaclos dans considérer que l'ethnique ne porte que sur le dernier terme
un caravansérail (Umm el-Amad) où il a pu agir en faveur (J. CANTINEAU, 1933, p. 175, n° 2b: Bu[le et ciui]tas
des commerçants ne sont pas très étonnants. Les deux Palmyrenorwn en 74 apr. J.-C.). La version grecque et la
derniers textes dont il faut rendre compte de ce point de vue version palmyrénienne se contentent d'un simple « Le
sont les inscriptions sur les colonnes honorifiques dites Conseil et le Peuple » (11 �ouÀ.17 Ka't 6 8ri�Loç transcrit en
B et C ( CIS 3930 et 3931). On a signalé plus haut leurs araméen selon l'habitude bwl' wdms). Cette absence d'une
particularités communes de rédaction. Il faut ajouter gu'elles formule, somme toute, relativement courante, est d'autant
portent la même date (avril 139). Elles sont cependant plus surprenante que certaines des plus anciennes inscriptions
éloignées l'une de l'autre (à 500 mètres du sanctuaire de de Palmyre mentionnent TiaÀ.�rnp17vÔ)V 6 817µoç (lnv
Bel, respectivement au nord et à l'ouest) et rien ne permet 11-12 de 24 et 25 apr. J.-C.) 177• L'équivalent palmyrénien
de savoir pour quelles raisons précises ces localisations semble être gbl tdmry' ( « la communauté des
avaient été choisies par le Conseil et le Peuple. Palmyréniens » ), formule qu'on retrouve clans une
On retrouve ces deux institutions tout au long de la inscription de mars 51 ( CIS 3923), qui rappelle qu'une statue
période considérée. La première mention du Peuple remonte a été érigée par [TiaÀ�rnp17]véov Y] rcoÀ.[1d, traduit en araméen
à novembre 24 apr. J.-C. (lnv IX, 11) et le Conseil est attesté gbl td1111y' klhn ( « l'ensemble de la communauté des
depuis avril 74 (J. CANTINEAU, 1933, p. 175 n° 2B ; Inv X, 39 Palmyréniens ») m_ Cette disparition de l'ethnique, au
date de l'année suivante). Le dernier décret honorifique du moment où justement la rcoÀ.K de Palmyre s'établit, est pour
Conseil et du Peuple qui est conservé date de la seconde partie le moins étonnante. Néanmoins si le Conseil et le Peuple
172 - C'est-à-dire surtout les textes cités ci-dessus pour Baalshamîn et le KO'.l 6 8î7�Loç 'Apa8{wv. Au même endroit, on a d'ailleurs en latin
texte H. INGHOLT. 1932, p. 279 (avec DFD, p. 36) qui provient de l'est du ([GLS VII. 4009), ciuitas et bule Arada, qui est un bon parallèle pour le
sanctuaire de Bel, zone où l'on pourrait chercher, selon une proposition texte de Palmyre de 74 cité ensuite ; voir le commentaire de
intéressante de J. T. Milik ( DFD, p. 15-16), le Bois sacré des clieuxAglibôl J.-P. Rey-Coquais, IGLS VII, ad foc. sur l'utilisation du terme de bute en
et Malakbel (voir aussi M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 51 ). latin littéraire à partir de l'époque de Pline.
173 -Les textes cl'Env X proviennent de l'agora ( on peut ajouter le premier 177 - Le témoignage de l'inscription CES 3966 (= RSP n" 156) est plus
texte de la liste qui a été gravé à proximité de cette zone, cf. supra), ceux douteux, malgré les restitutions de J. T. Milik, DFD, p. 82-83, n" 7.Le texte,
cl'lm• III, de la Grande Colonnade. daté de 64 apr. J.-C., semble mentionner. d'après J. T. Milik, [crn]µm:k
174 - Les textes cl'lm• IX viennent du sanctuaire de Bel. L'autel qui porte 81î�Lok Ilo:À�rnp17vêôv.
l'inscription CES 3927 a été découvert en remploi clans ce sanctuaire. sans 178 - Il faut noter que le sens de gbl est établi cl'après les textes grecs
qu · on puisse rien assurer de son origine. parallèles.L'origine et le sens exact du mot restent inconnus. Il a peut-être
175 - Il porte les titres de ËÇœpxov IlaÀ�rn]p17vêôv et rs tdmwren araméen été créé pour l'occasion, ce qui serait un exemple assez rare pour l'époque ;
(«chef de Palmyre»). le palmyrénien se contente ensuite de transcrire : dms ou bwl'. Un autre
176 -L'expression n'est pas systématiquement utilisée clans les inscriptions. texte (de 11 de notre ère) publié récemment donne une nouvelle attestation
mais ce qui est étonnant est son absence totale à Palmyre. À Araclos, par de l'expression gbl tdmiy' (M. GAWLIKOWSKI et Kh. As'Ao, 1993, p. 164).
exemple, on la trouve quelques fois, comme en IGLSVII, 4014: 17 �ODÀ11
34 Les notables de Palmy re
n'ont pas ce qualificatif, l'expression 11 IlaÀ�rnp17vcov rcÔÀK puisque l'un des trois textes en question (Jnv IX, 12) est une
réapparaît vers 1 55-160, dans le texte Inv X, 128 179• Si le dédicace commune de ce 8� �Loç et des trésoriers ( 01.
terme rcÔÀ1ç n'est pas très courant, il est attesté tout au long àpyupornµim, en araméen 'nws 'nwst', c'est-à-dire « les
de l'histoire de Palmyre puisqu'il est vraisemblable que hommes du trésor ») et que le plus ancien est une
l'inscription Inv III, 1 8 date de l'époque de Zénobie 180• réglementation de péage à l'entrée de la ville 18�.
Il se peut que l'absence de l'ethnique soit un des aspects De toute façon, certains textes, dits hellénistiques 185, du
de l'isolement de Palmyre décrit plus haut. Étant donné qu'il temple de Bel le prouvent, Palmyre n'était pas totalement
n'y a que peu de relations avec d'autres cités grecques, il hors des courants culturels du monde grec avant la venue de
n'est jamais besoin de préciser quand on parle du Conseil. Germanicus, au plus tard vers 1 9 . Les premiers textes grecs
De plus, la ville est éloignée géographiquement de ses plus datés (Jnv IX, 6a et b = CIS 3924-3925) font état de l'existence
proches voisins, ce qui limite d'autant plus les risques de de gens qui s'appellent « Palmyréniens », sans qu'on sache
confusion. Pour reprendre le cas du texte Inv X, 128, c'est bien sûr si cette appellation correspond à des institutions
sans nul doute parce que la personne honorée est un militaire précises. Tout semble tourner autour du sanctuaire de Bel ;
romain qu'il est nécessaire (et flatteur pour les Palmyréniens) c'est de là que proviennent les inscriptions Inv IX, 6 et 11-12 ;
de préciser qu'il est aussi citoyen de la rcÔÀ1ç des ce sont les prêtres de ce dieu qui ont fait la plus
Palmyréniens. De même, Iarhaî Nebûzabad (Jnv X, 38), ancienne inscription palmyrénienne datée (Jnv XI, l 00 de 44
satrape pour le roi de Mésène, a besoin de préciser, en 1 31 , av. J.-C.). Il est tout à fait probable qu'existait à Palmyre,
qu'il est Palmyrénien, malgré sa brillante carrière hors de avant même la conquête romaine, plus qu'une ébauche
l'oasis. C'est d'ailleurs sans doute pour cette raison qu'il a cl'organisation municipale. Il est impossible de savoir si elle
pu aider ses compatriotes, commerçants à Spasinou Charax. est un héritage de la période séleucide ou une forme
Les autres textes dans lesquels 1'ethnique (IlaÀ�rnp11voç ou cl'organisation propre aux Palmyréniens. Ce qui est sûr,
tdm1y') est appliqué à une personne privée 181 datent tous, au cl'après les textes du début de notre ère, c'est l'existence de
plus tard, des années quatre-vingt. Comme on le verra aussi, la notion d'un gbl tdm1y', qu'on ne savait sans cloute pas
il est fort possible que les citations de 1'ethnique se fassent tout à fait traduire en grec 186• Cette communauté s'est
plus nombreuses à cette période, parce que c'est justement stabilisée au moment de l'arrivée de Germanicus et des
le moment où la cité de Palmyre se met en place. Romains. C'est à partir de ce noyau que s'est développée
On pourrait penser que les inscriptions antérieures aux l'organisation civique clans laquelle le Conseil tient une part
années soixante-dix ne mentionnent pas le Conseil pour la si importante. Mais, on le voit bien, il n'est pas possible de
raison simple que celui-ci n'existait pas encore. La première donner plus de précisions sans s'aventurer cl a ns des
mention est de 74 (l'inscription trilingue de Haîran bar hypothèses peu fondées 187•
Bônnê), il est clone fort possible que cette institution ait été La liste des textes émanant du Conseil et du Peuple est
mise en place entre 51 et 74, sans cloute plutôt vers 50 que assez longue. Les dates sont comprises entre 7 4 et le dernier
vers 70, mais le vide épigraphique d'une vingtaine d'années quart du 111" siècle, soit les deux siècles où les inscriptions
ne permet pas de le préciser 182• Il faut néanmoins souligner bilingues sont les plus nombreuses. C'est clans cette catégorie
que 1' existence, peut-être depuis mars 51 (le texte a été qu'on retrouve la plupart des textes longs et détaillés. Comme
regravé), d'une rcÔÀK de Palmyre implique sans nul cloute on l'a noté, ce sont les textes du Conseil qui utilisent de
l'existence d'institutions qui lui permettent de fonctionner 183• manière privilégiée le vocabulaire le plus précis, mais aussi
Le problème qui se pose néanmoins est l'existence bien le plus varié 188• Ils représentent la catégorie de textes
attestée depuis 10-11 apr. J.-C. d'une communauté (gbl traduit honorifiques la plus proche de ce qu'on trouve ailleurs clans
ensuite par 8i7µoç) des Palmyréniens, avec des institutions le monde grec. Il y a sans cloute derrière ce phénomène des
179 - Ce sont les années où le cléclicant, Marcus Ulpius Iarhaî, est bien propose F. Villeneuve). De plus, comme l"avait vu H. Seyrig (cf. supra, à
attesté (cf. chapitre III). On peut se demander si cette formule n'est pas propos des premiers textes grecs), il est fort possible que les textes grecs
l'équivalent du ci11itos Po/111yre11oru111 du texte de 74. soient des versions apocryphes ajoutées au cours du II' siècle. au moment de
180 - Voir J. C-1.NTJNEAU. !m• III, p. 24. la regravure des textes. Ce doute interdit de conclure de manière définitive.
181 - En laissant de côté le cas de Septirnius W o rod. « bouleute 187 - De plus comme me ra fait remarquer M. SARTRE, le terme 811poç
palmyrénien ». en 258-259 (CJS 3937). lui-même ne prouve pas l"existence d'une ville, puisqu'il est employé pour
182 - D"inscriptions datées tout au moins ... des villages, en particulier en Syrie du Sud (par exemple WADDINGTON 2188 :
183 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 388. voir M. SARTRE, 1985, p. 78, n. 102).
184 - M. GAWLIKOWSKI et Kh. As' AD, 1993, p. 164. 188 - La plus grande partie des textes cités clans l'index du vocabulaire
185 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 56, n'" 1 et 2. honorifique sont aussi ceux du tableau des textes du Conseil et du Peuple. La
186 - Cela ne signifie pas qu'à l'origine, on ne connaissait pas les notions plupart des exceptions, qui apparaissent clans l'index, mais non clans le tableau,
grecques et les mots 8i7�Loç et 11:ÔÀ1ç sans pouvoir tout à fait les appliquer appartiennent à des textes dont les lacunes ont fait disparaître le 110111 des
au cas de Palmyre. gbf pouvait être un calque du grec 811�Loç qu'on traduisait déclicants. De plus, un texte comme H. J. W. DRIJVERS, 1995a, p. 41-43, qui
selon le cas 8îi�Loç et 11:ÔÀiç, parce qu'on savait que ces mots existaient, émane d'une« caravane de tous les Palmyréniens » peut être à juste titre assimilé
sans savoir précisément ce qu'ils recouvraient. D'autre part, gbf peut aussi à une décision du Conseil, au moins en ce qui concerne sa forme et son style. Il
être l'expression d'une réalité communautaire sémitique (comme me le en va de même pour les textes qui mentionnent les quatre tribus de Palmyre.
Chapitre I: L'identité cil'ique de Palmyre 35
raisons financières. La cité pouvait facilement financer les très bien venir se placer dans ces lacunes. Elles rendent
services d'un ou plusieurs rédacteurs pour ces textes ; il difficile toute explication simple.
lui était plus facile qu'à un particulier d'honorer quelqu'un Les textes en différentes langues sont aussi répartis de
d'une statue et de faire graver en plus un texte long en deux manière assez régulière. Il y a en particulier des textes
langues. unilingues grecs à toutes les périodes. Il n'est pas toujours
À quelques exceptions près (voir tableau en annexe V), possible d'expliquer les raisons de l'absence d'une version
les textes du Conseil sont aussi présentés comme des araméenne. Le texte Inv 34 relate les honneurs accordés
décisions du Peuple. Comme le rappelle M. Sartre, il n'y a par le Conseil et le Peuple à un légat de l'empereur, curateur
pas lieu de tirer de conclusions particulières des inscriptions (rcprn�Em11ç LE�acr1où Ka't À(oy1m1îd), nommé Fulvius
clans lesquelles le Conseil est mentionné seul. Ces textes Titianus. Son nom et sa fonction permettent d'être sûr qu'il
sont contemporains de ceux qui mentionnent côte à côte s'agit d'un étranger à Palmyre, l'absence d'un texte araméen
Conseil et Peuple, ils n'indiquent clone pas une évolution s'explique donc assez facilement. L'explication est la même
des institutions de Palmyre 1 ô9• Néanmoins il est curieux que pour C. Vibius Celer de Inv IX, 23 : il était normal d'honorer
les textes qui mentionnent le Conseil seul soient parfois ce préfet d'aile de cavalerie clans une langue qu'il pratiquait
groupés chronologiquement. C'est en particulier le cas clans couramment ( autre cas cl' étranger à Palmyre honoré
les années 110-120, pour une raison qu'on ignore. Mais il seulement en grec avec Inv 5). Mais il n'y a pas non plus
est fort possible qu'il ne s'agisse que d'une coïncidence. Il de texte araméen clans les inscriptions lnv 55, 59 ou
ne semble pas qu'il y ait des différences sensibles entre lm• III, 26. Or les personnages honorés portent des noms
les personnes honorées selon les textes, avec parfois tout à fait locaux, comme le Zebîclâ, fils de Taîmê, fils
quelques exceptions. Les textes lnv 57 et 59, de la de Moqîmû (ZE�a8a 0aw11 wù MoKtµou), cl'Inv 26.
même période, honorent deux membres du clan des Aabeî Le problème est encore plus important pour Inv 109. Le
(' 'by en araméen), avec les mêmes qualificatifs élogieux texte est seulement en grec. À première vue, cela peut
(dont EÙŒE�1îç). Pourtant le premier est une décision du sembler normal puisque le personnage en question est un
Conseil, alors que le second mentionne aussi le Peuple. militaire, deux fois tribun (légion et cohorte). Ce qui
J. Cantineau (cité par J. Starcky, Inv p. 41) remarque que, complique tout est le nom qu'il porte, M . Acilius
clans les textes qui honorent les synèdres, le Peuple ne Athènoclôros, fils de Acilius MoqfmlÎ. Le nom de son père,
s'associe pas au Conseil; c'est le cas d'lnv X, 57 entre autres citoyen lui aussi, indique avec de fortes probabilités qu'il
(voir aussi Inv X, 69). Cela lui fait préférer la restitution était lui-même d'origine palmyrénienne. On a alors plus de
[rcpÔ]Eôpov pour Inv X, 59 (comparer Inv X, 55). Il s'agit difficultés à expliquer l'utilisation exclusive du grec au
cl' une hypothèse très vraisemblable, qui peut expliquer détriment de l'araméen.
certaines variations. Inversement il n'est pas toujours possible de trouver une
L'étalement chronologique de ce type de textes est explication de l'usage exclusif de l'araméen par certains
également remarquable. Il y a peu d'intervalles pendant textes, rares à vrai dire. Dans le texte CIS 3919, c'est à la
lesquels aucune inscription ne soit attestée. Les périodes les rigueur explicable par la personnalité et les fonctions du
plus remarquables sont situées autour de l'année 200. personnage honoré, un symposiarque. Dans le domaine
Pendant vingt ans avant 198, et à nouveau vingt ans après religieux, on s'attend plus facilement à ce que les
199, le Conseil et le Peuple ne semblent pas avoir rendu particularismes locaux ressortent. Mais cette explication n'est
d'honneurs. Il peut être tentant de mettre en relation ces pas valable pour les textes Inv IX, 29 et Inv X, 13. Le dernier
lacunes avec les événements qui ont conduit à l'avènement cl'entre eux honore un secrétaire, qui a de plus donné une
de Septime Sévère et les luttes qu'il a menées contre ses somme de 500 deniers, peut-être comme summa honoraria.
rivaux. Cela est d'autant plus frappant que clans le texte On pourrait s'attendre à l'usage du grec clans ce cas, puisque
H. INGHOLT, 1932, p. 279 (DFD, p. 36), le dénommé Aelius le personnage (Taîbbôl) semble participer à la vie civique
Bôrrâ est félicité pour avoir rétabli la paix aux frontières de manière assez active. À la rigueur la mention de dons
(ou clans le territoire) de la ville. Cela peut faire allusion à faits au profit d'un sanctuaire (celui de Bel) fait ressembler
des troubles internes, conséquences des différentes ce texte à CIS 3919 et permettrait le même genre
usurpations, mais il est néanmoins curieux que la lacune d'explication. Mais on aimerait quelque chose de plus solide.
commence plus de dix ans avant la mort de Commode. Le Pour conclure sur ce point, il faut souligner la grande
texte cl'Aelius Bôrrâ est trop imprécis pour permettre de variété des situations, dont il est souvent difficile de rendre
savoir ce qu'il en est exactement (troubles entre nomades et compte. Des étrangers sont honorés, aussi bien avec des
sédentaires; luttes de factions pro- et anti-sévèriennes). De textes grecs unilingues qu'avec des textes bilingues (Inv X,
plus, un certain nombre d'inscriptions mal datées peuvent 29 pour un bouleute cl'Antioche). Il en est de même pour les
Palmyréniens, avec cette réserve qu'ils reçoivent aussi des Mais il ne semble pas probable qu'on ait procédé de manière
textes dans lesquels le grec est absent. systématique à une traduction d'un texte original. On
L'absence fréquente de mentions des fonctions qui élaborait concurremment deux versions à partir d'un canevas
auraient été remplies par les personnages honorés n'éclaircit prédéfini et le rédacteur utilisait ce qu'on lui avait fourni 193•
pas la situation. Cela est habituel à Palmyre, mais entrave
souvent la compréhension des tenants et des aboutissants. Il
C. LES CARRIÈRES CIVIQUES ET LES FAMILLES
est d'ailleurs remarquable que le Conseil honore tant de gens
PRÉDOMINANTES
qui n'ont apparemment pas eu de fonctions officielles.
Néanmoins cette catégorie de textes (les décrets du Conseil) 1. LE FAIBLE NOMBRE DE MAGISTRATS CONNUS
possède une originalité dans le corpus palmyrénien : elle
mentionne les fonctions beaucoup plus souvent que les autres On a pu repérer dans les inscriptions de Palmyre
textes, en particulier celles qui sont en rapport avec les l'existence d'un certain nombre de magistrats, qui portent
autorités de la ville. Ainsi tous les synèdres, proèdres, la plupart du temps des titres d'origine grecque. Par
secrétaires, agoranomes et stratèges qui sont honorés le sont comparaison avec ce qu'on connaît ailleurs dans le monde
par le Conseil (et souvent le Peuple) 190• gréco-romain, il est facile de voir que pratiquement tous ces
Cela correspond à une situation courante dans le monde titres, au moins jusqu'au milieu du m e siècle, sont
grec, où les magistrats, à leur sortie de charge, sont félicités parfaitement ordinaires dans une cité.
par les assemblées et conseils pour avoir mené leur tâche à Ce qui est le plus frappant de ce point de vue à Palmyre
la satisfaction de tous. Plus généralement, c'est le sens du est le nombre relativement réduit de magistrats. Cela rejoint
mot rcoÀEÎ 111ç et des mots de la même famille (en particulier ce qu'on a pu dire sur la structure de la documentation. On a
rcoÀneûoµm) dans un certain nombre de textes 191• Il ne s'agit beaucoup de textes, mais peu d'entre eux donnent des
pas seulement de décrire un statut personnel, mais aussi de renseignements suivis sur une famille précise qu'on pourrait
résumer l'activité civique et politique d'un citoyen. Un suivre au long des années. La famille du proèdre de 137 19\
àya8oç rc0Àeh11ç est celui qui a mené une carrière civique Bffivvawç, fils de Bffivvmoç, est un des rares cas où l'on
digne d'être remarquée par ses concitoyens et c'est par peut suivre une véritable dynastie de notables sur plusieurs
l'intermédiaire du Conseil que ces derniers l'honorent. générations. Mais il est généralement difficile de le faire.
Si on s'intéresse aux problèmes posés par la traduction Il faut rappeler que la mention des charges honorifiques
de ces textes, il apparaît que dans ce domaine au moins le est assez rare dans le type d'inscriptions le plus fréquent, les
grec semble généralement prédominer. Mais il subsiste inscriptions funéraires (voir sur ce point le chapitre vr). De
quelques réserves. Ainsi l'araméen prête plus d'attention à plus, les familles palmyréniennes qu'on peut reconstituer
certains particularismes locaux. Le texte J. CANTINEAU, 1938, de manière développée sont assez peu nombreuses. Malgré
p. 76, n" 29 (fig. 11) est visiblement plus développé et contient le nombre important d'arbres généalogiques reconstitués
des indications plus précises en grec 192• Pourtant l'araméen dans les différents recueils de textes (en particulier dans le
seul donne le nom de la tribu d'Abgar, fils de Patroklos. rT<:::) Pt ]pi;: PtnrlPs: s:nr P�lrnyrp (DF?n s:11rtrmt), 1� plnp�rt
De plus, tout cela n'est pas systématique ; si l'araméen cl'entre eux sont très incomplets et souvent peu sûrs. La
d'lnv X, 129 est visiblement un résumé du grec, c'est peut fréquence des homonymies et la coutume de donner à l'aîné
être le contraire pour C/S 3921. En fait, dans bon nombre de le nom de son grand-père paternel expliquent ces difficultés,
cas, les deux versions disent exactement la même chose, à alors que beaucoup de textes ne sont pas datés. Il suffit de
quelques différences près. Il s'agit de résumés de décisions comparer les arbres généalogiques d'une même famille
plus longues. Celles-ci étaient rédigées dans une langue qu'il dressés par deux auteurs différents pour le comprendre. En
est difficile d'identifier. Il y avait peut-être deux rédacteurs outre, on ne connaît que rarement les noms de la mère et de
dont la coordination (et les talents littéraires?) n'était pas l'épouse des personnages importants de Palmyre. Ce fait,
obligatoirement bonne ; cela peut expliquer de petites ajouté aux difficultés de remonter au-delà d'une ou deux
différences, quelques erreurs de langue et des imprécisions. générations 195, interdit toute étude de stratégie lignagière.
190 - D'après les inscriptions honorifiques suffisamment complètes pour « un Romain» ( e.\J)()sitor) qui était lù pour expliquer les difficultés, quanu
qu'on connaisse la fonction de la personne honorée et le nom du dédicant. le texte à traduire était détaillé. On ne sait rien sur l'existence éventuelle à
191 - CJS 3932 ; J. CANTINEAU, 1936, p. 277, n" 20 (= BS n" 48) ; ln\! X, 44 Palmyre de « dogmatographes », comme ceux qui existent en Phrygie
et 129 ; J. CANTINEAU, 1938, p. 76, n" 29. Dans les autres cas, on emploie ce (I. LÉVY, 1895, p. 226, et S. MITCHELL, 1993, p. 198-226). Comme leurnorn
mot pour distinguer les citoyens de Palmyre de ceux d'autres cités (voir l'indique, ils étaient chargés de la rédaction des décrets.
index en annexe III). 194 - Qu'on appellera pl us simplement famille de Bônnê.
192 - On a bdyl dy §pyr lhwn («parce qu'il leur a été agréable») en face 195 - Les généalogies sont parfois beaucoup plus développées, mais cela
de àya00V 7WÀElîl,V K<Y.l EÙVOUV n:poç îllV lÔl<Y.V n:mpl6<Y., plus précis ne signifie pas qu'on sache autre chose que le nom de l'arrière-arrière
( «excellent citoyen, plein de bon vouloir pour sa propre patrie» trad. grand-père. Ce dernier a pu exercer des fonctions civiques, il est bien rare
J. Cantineau, ad foc.). qu'on le sache.
193 - S. Broek (1979, p. 69-87) fait la supposition qu'il y avait sur place
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 37
Les alliances entre grandes familles sont certes Shamshigeram (Jnv 39) 197• C'est sans doute à l'occasion
probables, mais sauf pour de rares cas qu'on étudiera d'un de son secrétariat qu'il est honoré par le Conseil. L'inscription
peu plus près, on a peu d'exemples précis. D'autre part, la est datée de 75-76, ce qui doit correspondre au moment où il
place des femmes dans la société de Palmyre n'est pas bien a exercé ses fonctions (probablement sa sortie de charge).
connue (voir chapitre v). Sans anticiper, il semble par Cela explique qu'on ne parle pas d'éventuelles autres charges
exemple que l'état actuel de la documentation ne permet que le personnage aurait pu remplir. De plus, il est certain
même pas d'avoir des renseignements clairs sur les coutumes qu'on avait plus de chances de se distinguer quand on
matrimoniales des Palmyréniens. Cela permettrait pourtant s'élevait clans la hiérarchie civique. Il faut avoir atteint un
un certain nombre de conclusions sur la société certain niveau social et économique pour être capable d'agir
palmyrénienne, et pas seulement sur le statut de la femme. en faveur de la cité clans ses fonctions et mériter ainsi d'être
Un des premiers notables de Palmyre qui apparaisse (et honoré par elle 198• Il est probable qu'on ne mentionnait pas
dont on connaisse la famille) est Haîran, fils de Bônnê. Il a les premières étapes de la vie municipale qui ne pouvaient
été honoré par les plus hautes autorités civiques et religieuses beaucoup ajouter à la gloire de la personne honorée.
de Palmyre, il fait partie des plus hauts notables de la ville La première attestation de cumul des fonctions n'est pas
au moment même où se mettent en place toutes les réformes directe, mais on peut essayer de la reconstruire en utilisant
institutionnelles qui en font une nÔÀK. Cependant quelque deux textes séparés par une quinzaine d'années. Le premier
chose manque: à aucun moment de sa carrière, on ne possède date de mars 98. Dans un groupe de textes palmyréniens
le moindre indice qui pourrait laisser penser que Haîran a trouvés dans le Wadi Hauran en Iraq, on a la mention d'un
lui-même été magistrat. Or ce n'est pas un cas isolé. Il arrive stratège, peut-être Zebîdâ, fils de Haurnal 199, sans doute
souvent que des notables soient honorés, sans qu'à aucun chargé de la police du désert. Le texte n° 8 de ce groupe fait
moment, on ne fasse état de charges publiques. On sait qu'il mention de quelques personnages, dont un certain Zebîclâ,
en est de même pour les inscriptions funéraires, et on peut fils de Taîmoameclu ( zbyd' br tym 'md mskw). Il est possible
citer à nouveau ce qu'écrit M. Sartre : « il est plus que que cette liste contienne le nom d'auxiliaires du stratège.
probable que les riches Palmyréniens qui ont fait construire Quoi qu'il en soit, on retrouve le même Zebîdâ parmi les
les plus grands et les plus coûteux tombeaux de la ville, ont noms des dédicants d'un autel au dieu anonyme en 114
exercé des charges municipales diverses, l'archontat, le 3994). Le texte provient de Palmyrène (el-Kerasi), il s'agit
secrétariat, l'agoranomie ou la gymnasiarchie, sans parler d'une dédicace faite par la ville aux frais des quatre trésoriers
de la symposiarchie des prêtres de Bel. Or il est très rare (àpyupo1:aµ{m ou en araméen b 'nwst' : « pendant leur
qu'il en soit fait état» (M. SARTRE, 1996a, p. 388). charge de trésorier»). Un de ces quatre fonctionnaires est
Cette réflexion appelle une remarque: s'il est vrai que zbyd' br tym'md mskw, l'identification est certaine. Ce qui
les riches notables ont constitué le milieu où se recrutaient est moins sûr, on l'a vu, c'est le rôle d'auxiliaire de police
les magistrats principaux de la cité, il est néanmoins frappant qu'il aurait rempli dans les dernières années du r"' siècle.
de trouver clans les textes peu d'exemples de cursus On peut donner un autre exemple de reconstruction,
développés. Un peu moins de quarante Palmyréniens peuvent mais, cette fois, beaucoup plus hypothétique, à partir d'une
être identifiés comme magistrats d'après les textes tessère et d'un texte araméen de l'agora. Ce dernier (lnv
conservés 196• Mais il est rare de savoir quelles étapes de la 106) est daté de mai 119, et le personnage qui est honoré
carrière civique ils ont effectivement franchies, à part un ou (... br mlkw nswm) par le Conseil a été proèclre ou synèdre 2011•
deux titres dans le meilleur des cas. En fait, comme on peut Il est possible que la même personne soit mentionnée sur la
aisément le vérifier sur le tableau, il est très rare qu'on tessère RTP 773 (Nashûm Malikû Nashûm nswm mlkw
mentionne même plus d'un titre ou fonction dans les textes. nswm): si on accepte cette identification, et, si on admet
Le premier magistrat civique connu (en laissant de côté avec J. T. Milik que le personnage désigné sur la tessère a
les symposiarques) est un secrétaire, Zabclilah, fils de bien été symposiarque 201, on aurait alors un synèdre qui a
196 - En comptant parmi les magistratures les différentes charges de stratège l'emplacement originel des activités civiques de Palmyre était proche de
antérieures à la colonie (cf. M. SARTRE, 1996a, p. 391-392), aussi bien que l'agora.
les ambassades et les liturgies (gymnasiarchie). Le tableau (en annexe I) 198 - P. LE Roux. 1998, p. 294: « Il était exceptionnel de mériter l'hommage
regroupe tous les Palmyréniens qui ont eu des charges publiques à Palmyre, de la cité dès l'édilité. Plus on s · était élevé clans la hiérarchie. plus on avait
c · est-à-dire aussi les symposiarques et les curateurs de la source Efqa. Vu de chances cl'obtenir les honneurs d'une statue... ». Ce qui était valable en
le caractère ostentatoire de l'épigraphie palmyrénienne. on pourrait pourtant Occident l'était aussi en Orient.
s'attendre à ce qu'il soit fait état des magistratures clans les inscriptions, ce 199 - Voir M. SARTRE. 1996a, p. 391 et n. 102. avec les références. Sur la
qui signifie peut-être que beaucoup des personnages honorés d'une fonction de stratège, voir il;fra, le chapitre HI.
inscription n'ont effectivement pas rempli de fonctions officielles. 200 - La partie supérieure de la console avec le texte grec est perdue. Le
197 - Le texte, comme plusieurs autres, a été récrit clans la deuxième moitié mot araméen qui désigne la fonction est: mwtb'. On le retrouve clans le
du n' siècle (clans le deuxième tiers. selon J. Starcky, hn• X. p. 27-28), sans texte lnl' X. 63. dont la version grecque est lacunaire. ce qui ne permet pas
cloute lors d'une (re)construction de l'agora. Si ces statues honorifiques de préciser la traduction.
sont restées plus ou moins au même endroit, cela confirmerait que 201 - Voir DFD, p. 235-237.
38 Les notables de Palmyre
aussi exercé les plus hautes fonctions religieuses de la cité. funéraires de la tombe représente justement Bôlanos, et
On voit ce que tout cela a d'hypothétique ! l'inscription qui 1'accompagne précise qu'il est symposiarque
En 131, Malê Agrippa qui a été deux fois secrétaire et a des prêtres de Bel (cruvn:omcipx17ç tEpÉmv [111]oç B17[Àoul) 206•
accueilli l'empereur Hadrien est honoré par le Conseil et le C'est un des rares exemples où un texte funéraire mentionne
Peuple 202• Mais il n'est pas fait état d'autres fonctions une fonction publique. Celle-ci a visiblement été exercée
publiques. Certes les bienfaits accomplis sont sans aucun par quelqu'un dont la place dans ce tombeau était réservée ;
doute des conséquences de sa carrière municipale. C'est en il est probable que le texte a été gravé pendant la
tant que magistrat qu'il a fourni de l'huile lors de la venue symposiarchie de Bôlanos.
d' Hadrien, mais ce n'est sûrement pas le cas pour la Il est curieux que ce premier exemple tout à fait sûr de
construction du temple de Baalshamîn. Il fait en effet partie quelqu'un qui exerce plusieurs charges publiques différentes,
d'une famille de bienfaiteurs du sanctuaire 203• ne concerne justement pas un magistrat municipal, mais des
Il a exercé une fonction municipale, il a été évergète, fonctions religieuses. Certes, il y a toutes les chances que
mais une fois de plus, on ne peut aller plus loin dans son les carrières municipales et religieuses soient fortement
cursus. La longueur de la description des bienfaits accomplis liées 207• De plus, les fonctions de prêtres de Bel ont un
par Malê différencie ce texte d'autres dédicaces honorifiques. prestige ancien, puisqu'on a vu plus haut que la première
Il est honoré en raison de son comportement au moment de inscription honorifique de Palmyre (Jnv XI, 100), qui est
la présence de l'empereur et des troupes qui aussi le plus ancien texte daté de 1'oasis, est justement une
1'accompagnaient, lorsqu'il était secrétaire pour la seconde dédicace des prêtres de Bel à un certain g,yrny br nbvvz.bd
fois. C'est probablement aussi à cette occasion qu'il a fait (Goraîmî fils de Nebûzabad). Il est même probable que les
dédier le temple de Baalshamîn. Comme dans le texte institutions de Palmyre, depuis le début, ont eu des rapports
lnv X, 39, déjà cité, la statue est une manière de 1'honorer étroits avec le sanctuaire de Bel, qui, dès son origine, a dû
en une occasion précise, et on ne fait pas état de sa carrière avoir un poids prépondérant dans la ville et qui se trouve
dans son ensemble. C'est en tout cas une hypothèse, qui être la première organisation structurée qui ait laissé des
expliquerait l'a bsence de cursus complet clans la traces dans la documentation.
documentation. En fait, un seul notable de Palmyre a exercé des charges
De plus, la fonction de secrétaire est la plus élevée dans nombreuses et variées : il s'agit bien sûr du fameux Septimius
la hiérarchie municipale. Il pouvait donc sembler inutile de Worocl. C'est un des personnages sur lequel on a la
mentionner cl'autres fonctions, précédemment occupées et documentation la plus fournie 208, avec les textes C/S 3937-
qui semblaient de moindre importance. Il est pourtant 3943 (lnv III, 12 à 6), tous découverts clans la Grande
étonnant que le Tarif soit la seule occasion où les archontes Colonnade. S'y ajoutent une inscription dédicatoire,
soient nommés. Certes il s'agit d'une charge principalement C/S 41OS ter, très mutilée, le texte H. SEYRIG, 1963, p. 161 20'\
honorifique, aux pouvoirs limités, mais étant donné qu'elle et surtout le texte Inv III, 3 210, sur le triple arc qui marquait
semble couronner une carrière municipale, on aurait pu 1' articulation entre les sections B et C d e la Grande
l'attendre plus fréquemment. Colonnade. Malgré cela, sa carrière municipale n'est pas
Ce n'est que clans la deuxième moitié du n" siècle qu'on extrêmement développée dans les textes ; on connaît un
trouve vraiment des attestations de cumul des fonctions. certain nombre de ses titres, en particulier son intégration à
Bôlanos, fils de Zénobios est épimélète de la source Efqa, un rang élevé dans l'ordre des chevaliers et sa carrière dans
choisi par le dieu Iarhibôl, en 1 62. Cette fonction est attestée l'administration de l'Empire 211•
par deux textes contemporains 20 Le même personnage est
-1_ Comme le souligne E. Will, dans son article sur le
sans nul doute le fils du Zénobios Zebîdâ, qui a fondé, avec personnage, à travers tous ces textes Worod apparaît
son frère Aaîlamî, fils de Haîran, la tombe de famille, à « comme le représentant normal, pour ne pas dire banal du
l'entrée de la vallée des Tombeaux 205• Or un des reliefs système administratif romain, tout comme Odénat [ ...] »
20'.2 - CIS 3959 = lm• L 2 = BS n" 44. quïl ait été magistrat. à moins qu'on ne considère la synodiarchie (quïl a
203 - Voir C. Dunant dans BS. ad /oc. peut être accomplie) comme une magistrature. Sur ce point, voir le
204 - RSP n'" 125 et 126. chapitre Ill.
205 - Temple funéraire 85b ; le texte de fondation est daté d'avril 149 209 - = M. ÜAWLIKOWSKI, 1985, p. 254, n" 6 ; il est à noter que J.-P. Rey
( CIS 4168 [lnv IV, 9a]). Coquais (dans M. SARTRE, 1985, p. 80, n. 125) propose de restituer à la
206 - J. CANTINEAU, 1930b, n" 14 : si on accepte la restitution de son nom dernière ligne du texte 0ouÀ.Eu[n Kod plutôt que 0ouÀrn[-cîïd, ce qui
dans le texte. correspondrait à sa qualité de pérégrin, puisque clans ce texte il n · est que
207 - En ce sens, M. SARTRE, 1996a, p. 393 : « ... en ce domaine comme Oùopw811ç.
dans les autres, P almyre se conforme exactement aux modèles civiques 210 -Avec les compléments de D. Sc1-1LUMBERGER, 1942-1943a, p. 35-50
gréco-romains où il n'est pas de carrière municipale qui ne soit consacrée et 1972, p. 339 et M. ÜAWLIKOWSKI, 1985, p. 255, n" 1O.
par quelques sacerdoces municipaux prestigieux ». 211 - Sur tout cela. voir E. WILL, 1996, p. 109-115, en particulier p. 112
208 - II n'y a que Marcus Ulpius larhaî, un siècle plus tôt, qui semble avoir pour le cursus.
été honoré par des inscriptions plus nombreuses. Mais il n'est pas attesté
Chapitre l: L'identité civique de Palmyre 39
(1996, p. 112). Mais on reviendra plus loin sur la carrière désinence casuelle ; on ne peut clone savoir si le Iulius
«extra-municipale» de ce personnage, en même temps que Aurelius qui a construit un bâtiment quelconque et la
sur son contemporain Odainat. Pour l'instant, on se personne qui a été agoranome sont un seul et même
contentera de ses fonctions au sein des institutions de la personnage (on aurait un nominatif àyopavo�nîcraç). Il est
colonie de Palmyre. Or celles-ci sont finalement peu possible aussi que le bâtiment ait été construit en l'honneur
nombreuses. Il a été agoranome et stratège de la colonie d'un agoranome (on pourrait alors avoir un datif) ou bien
( CIS 3942), ce sont les fonctions les plus hautes de la pendant les fonctions de l'agoranome (auquel cas il faudrait
métrocolonie. Elles sont connues par ailleurs dans les textes restituer un génitif 217). Le texte ne peut donc en apprendre
de Palmyre, ce qui n'est pas le cas pour les titres d'argapet beaucoup plus surfa personnalité de ce magistrat anonyme.
et de dikaiodotès qui apparaissent dans des inscriptions Pour le reste, les trois agoranomes connus après 212
datées de 265 à 267, et que ce personnage est le seul à ont été aussi stratèges. Outre Septimius Worod, il s'agit
porter 212• Suivant en cela la proposition de Th. Mommsen, d'abord de Iulius Aurelius Zabdilah Zénobios, stratège au
on peut éventuellement admettre l'équivalence de ces deux moment de la visite de l'empereur Sévère Alexandre qu'il a
termes 213• Le premier des deux termes est d'origine perse ; accueilli ( CIS 3932 = Inv 22). L'inscription est postérieure
il signifie «gouverneur de la ville», ce qui correspondrait d'une dizaine d'années à la venue de l'empereur (elle date
au «dikaiodotès de la métrocolonie» du texte C/S 3942. de 242-243) et relate tous les bienfaits accomplis par
Pourtant dikaiodotès désigne plutôt une charge provinciale, Zabdilah. Le Conseil et le Peuple l'honorent visiblement à
ce qui pose problème. Il est possible aussi que, comme on la fin de sa carrière alors qu'il a accompli tout le cursus
l'avait fait pour l' «exarchat», on ait utilisé à Palmyre un classique. Or, on a finalement peu de détails sur le
terme existant (dikaiodotès), mais en lui donnant un sens déroulement de sa carrière. Il a donc été stratège et
différent de son usage administratif normal. De plus, le texte agoranome, il a dépensé de l'argent (oÙK 0À1yov dit le texte)
CIS 3942 n'est pas facilement datable et si, comme le croit et exercé son métier de citoyen de belle manière (KaÀwç
D. Schlumberger, il est postérieur à 267, on ne peut rien noÀElTEU<JCX�LEvov). Pour cela, il a reçu des témoignages du
conclure de l'alternance entre les deux titres 21�. E. Will pense dieu Iarhibôl, du préfet du prétoire Iulius Priscus et de sa
pourtant que le premier des deux disparaît à un certain patrie. Mais il n'y a aucune trace de fonctions antérieures,
moment parce que son domaine d'attribution se trouve inclus même moins importantes. Si, comme on l'a dit plus haut, on
clans celui de dikaiodotès. pouvait croire que certaines inscriptions honorifiques avaient
Comme Worod, la plupart des agoranomes connus à pour cause un événement particulier et ne mentionnaient pas
l'époque de la colonie de Palmyre ont été aussi stratèges. Le les étapes de la carrière qui n'avaient rien à voir avec les
titre est l'équivalent d'aedilis des inscriptions latines, comme raisons précises du décret pris par le Conseil, le cas est
stratège équivaut à duwnuir. Mais il y avait à Palmyre des différent ici. C'est sans doute pour l'ensemble de sa carrière
agoranomes avant la promotion au rang de colonie, c'est ce que Zabdilah est honoré, et pourtant, on n'a pas tellement
que prouve le texte Inv X, 85 215• Ensuite, un seul agoranome de détails sur celle-ci. Le laconisme des inscriptions de
n'a peut-être pas été aussi stratège de la colonie, au Palmyre, à toutes les époques, est donc assez général.
témoignage d'un texte assez mutilé, non daté (Inv XII, 29). Dernier cas d'agoranome et stratège, celui de Iulius
Un personnage cité par le texte porte un nom qui commence Aurelius Malichos (Inv X, 115). Les deux titres sont sûrs,
par Iulius Aurelius. Cela suffit pour placer l'inscription après puisque l'un apparaît dans la version grecque et l'autre dans
212 et la Constitutio Antoniniana. Or Palmyre est devenue la version araméenne du texte. Les noms du personnage
colonie sous Septime Sévère ou Caracalla, clone sans doute prouvent que l'inscription est postérieure à 212 218 ; elle date
avant le texte en question 216• Le nom 'IoÛÀwç Aùp17Àwç est de toute façon de l'époque de la colonie (ligne 1 du texte).
au nominatif, le participe tiré du verbe àyopavo�Lm (restitué Comme Iulius Aurelius Zabdilah, il a reçu des témoignages
avec b eaucoup de probabilité par les éditeurs du dieu ; le texte dit cette fois unô TE 1:0u nmpêpou 8rnu : il
àyopavoµ17 cr[avTal) a perdu sa terminaison et donc sa s'agit peut-être encore de Iarhibôl, mais le texte araméen a
212 - CIS 3940 de 267 (ou 264 ?): cxpycxTCETr)V et 'rgb(; CIS 3941 de 265 : p. 391-392, le personnage honoré par lnv X, 85 n'a pas été stratège de la
cx[pycxTC]ETllV et ['1g]bf'; CJS 3943 de 267: cxpyCXTCETllV et '1gb(; Worocl colonie, puisque le texte date de 193, mais (si on accepte la restitution)
est aussi mgapet clans une dédicace non datée, C!S 4105 ter: [...J wrwd seulement stratège, c'est-à-dire responsable militaire.
'rgb(. Le texte C/S 3942 lui donne le titre de ôlKEOôOTllV TÎ7ç 216 - F. MILLAR, 1990, p. 42-46, et M. SARTRE, 1996a, p. 394.
�lllTp[OKOÀCO]VEl.CXÇ. 217 - Même si on peut clouter d'une datation par l'agoranome éponyme.
213 - Pour la proposition cle Th. Mommsen, voir D. Sc1-1LUiVIBERGER, l 942- Néanmoins l'exemple des synocliarques qui servent peut-être à dater certains
l 943b, p. 61, n. 7. L'idée est admise par F. MILLAR, 1990, p. 45 avec des textes caravaniers (texte H. J. W. DRUVERS, 1995a, p. 34-37) pourrait prouver
réserves que partage M. SARTRE. 1996a, p. 395. que clans les domaines d'attribution particuliers des magistrats, on datait
214 - D. Sc1-1LUMBERGER, 1942-1943b, p. 60. Dans un sens contraire, les événements cl' après le nom du magistrat en fonction.
A. SARTRE-FAURIAT, 1997, p. 259. 218 Pour une datation cl'après la paléographie du palmyrénien, voir lnv X,
215 - Sur la fonction et le titre. voir M. SARTRE, 1996a. p. 391 (avant la p. 73 : J. Cantineau proposait la seconde moitié du m' siècle, et J. Starcky,
colonie) et p. 395 (de la colonie). Comme l'a montré M. SARTRE, ibid. qui cite cet avis, pense que la première moitié n'est pas non plus impossible.
40 Les notables de Palmyre
seulement « le dieu » ( 'lh '). De même, il a reçu témoignages c'est le cas par exemple dans les textes CJS 3927 221 et lnv X,
des autorités romaines (le gouverneur) et de celles de la cité 119 222 permet de douter du décès du fils. Le père a accompli
(le Conseil). Autre point commun avec CIS 3932, il a effectué toutes les liturgies (nàcmç À.Et1:oupyt:iaç) 223, c'est cela qui
des dépenses, sans doute en faveur de la cité, pendant sa lui a valu les honneurs que lui confère le Conseil, mais on
stratégie et son agoranomie : à <jnÀ.01:dµ(l)Ç du grec ( « avec ne sait pas s'il a droit à sa statue à cette occasion, ou bien si
générosité » ), répond bsr mn kysh ( « il a fait des dépenses on se contente de rappeler qu'il a été honoré, pour augmenter
de sa bourse » ). En fait, ce texte pose un certain nombre de l'honneur fait au fils. On ne peut qu'essayer de décrypter ce
problèmes. On a vu plus haut que le premier est d'ordre qui se cache derrière ce terme de liturgie 224, sans pouvoir
syntaxique : la deuxième personne honorée, le père de décider.
Malikû, est nommée au datif, au lieu de l'accusatif attendu. Comme dans les autres cas, l'agoranomie et la stratégie
De plus, l'inscription araméenne mentionne explicitement sont les seules fonctions attestées. Si les deux vont souvent
l'érection de trois statues ( f)lmy' 'ln tlt', « ces trois statues » ), de pair, elles ne sont jamais accompagnées d'autres fonctions.
alors qu'il n'y a que deux personnages nommés. D'après Il y a peu de choses à ajouter de ce point de vue sur ce texte,
J. Starcky (lnv X, p. 73), qui propose éventuellement d'en comme sur la plupart de ceux du même genre. Les fonctions
attribuer une au père, il est probable que les trois statues municipales accomplies par les notables palmyréniens, et
représentent Malikû. Il cite comme parallèle le texte lnv X, citées par les inscriptions, semblent être seulement les plus
44, où en effet les quatre tribus dressent chacune une statue importantes. De plus, il semble bien que les textes se
d'Ogeîlû, fils de Maqqaî. On a d'autres exemples de statues contentent de l'essentiel, et qu'on ne fasse généralement pas
multiples dressées par les tribus, parfois associées à d'autres état de toutes les fonctions, mais seulement de celles qui
dédicants 219• motivent l'honneur accordé.
On voit pourtant ce que ce parallèle a de gênant. D'abord,
il faudrait que la mention des t1ibus apparaisse dans le texte ;
2. LES RA PPORTS ENTRE LES MAGISTRATURES ET LA
or celui-ci est formel, ces honneurs sont conférés par le
SYMPOSIARCHIE
Conseil et le Peuple, sans intermédiaire. De plus, il y a quatre
tribus civiques à Palmyre, or le texte lnv X, 115 ne fait état Le mot liturgie, on l'a vu, peut désigner aussi une
que de trois statues. Il n'est pas difficile évidemment de fonction religieuse dans les différents sanctuaires de Palmyre.
trouver des combinaisons possibles pour les trois effigies La racine araméenne utilisée pour traduire le mot liturge ('bd)
(par exemple une de Malichos pour l'agoranomie, une autre est par exemple appliquée aux curateurs de la source Efqa
pour la stratégie et une pour le père) mais on voit que le et à leurs employés 225• Il n'est apparemment pas attesté que
problème risque fort de rester entier. le terme s'applique aussi aux fonctions religieuses les plus
La version palmyrénienne donne une indication, importantes de Palmyre, celles de symposiarque 226• Mais il
puisqu'elle précise que c'est à l'occasion de l'agoranomie 220 faut noter que cette fonction ne semble pas accompagner
et de la stratégie que le Conseil et le Peuple ont dressé les d'autres magistratures civiques. Contrairement à ce qu'on
statues. Cela ne signifie pas, bien sûr, que la troisième statue pourrait croire, il ne semble pas que les carrières des notables
ne représentait pas le père. On a pu dresser une statue du palmyréniens aient de manière courante mélangé les deux
père, sans doute défunt comme l'indiquerait la formule types d'activité.
µvT)µ11ç xcip1v, pour honorer le fils. Il est possible que le fils On a pourtant au moins un cas de magistrat qui a aussi
soit mort lui aussi, et que ce soit à cette occasion que le été prêtre au cours du ni° siècle, c'est Septimius Worod,
Conseil et le Peuple aient pris cette décision. Néanmoins d'après le texte CIS 3942. Un autre cas possible est fondé
l'absence d'une formule équivalente en araméen, comme sur une reconstruction plus hasardeuse. Le texte lnv X, 13
219 - En particulier les honneurs adressés au grand caravanier Soados: ES religieuses très diverses dans les sanctuaires palmyréniens que de liturgies
n° 45, R. MüUTERDE et A. Pü!DEBARD, 1931, p. 101-105, etH. J. W. DRIJVERS, de tradition civique grecque».
1995a, p. 34-37. 225 - DFD, p. 255-256 et 286-287, à propos du texte RSP 11 ° 127.
220 - On a en effet brbn .i;qwth à la ligne 2 ( « pendant son office 226 - L'importance de cette fonction (la symposiarchie) a été bien mise en
d'agoranome» ). La formule «pendant sa stratégie de la colonie» est valeur par J. T. Milik (DFD, p. 110). Il conclut que «la symposiarchie du grand
seulement restituée: [b 'strtgwt' dy] qlny'. prêtre de Bel s'étendait en principe à tous les thiases de la ville», ce qui est
221 - Dans lequel btr dy myt Jyqil1, «après sa mort, en son honneur», peut-être discutable, et en tout cas n'est pas prouvé, ne serait-ce que parce que
répond à 'tttµi)ç Kat µvtjµ11ç xâptv. les symposiarques sûrs (attestés par des inscriptions explicites) ne semblent
222 - Avec l'expression btr mwtlm [... ] Jyqrhyn, «après leur mort[ ... ] en pas en rappmt avec d'autres cultes que ceux du sanctuaire de Bel. I..: argument
leur honneur» en face de 'ttµ11ç Kat µvtjµ11ç xâptv, formule à laquelle ne peut donc être qu'a silentio. Par bien des aspects, la symposiarchie
s'ajoute quelques lignes plus bas µE'tà 't'T\V 'tEÀEmtjv. fonctionne comme une magistrature : elle est en particulier annuelle. Son
223 - C'est aussi de cette manière que J. T. Milik (DFD, p. 286) traduit les titulaire appartient d'autre part aux plus grandes familles de la cité, comme le
mots araméens bkl 'bydw klh («dans toutes les liturgies») que J. Starcky, prouve la liste de l'annexe I (on trouvera à cet endroit les critères utilisés pour
lnv X, ad foc., traduisait «en toute chose ». reconnaître les symposiarques sur les tessères - voir DFD, p. 221-222). Voir
224 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 392: «il peut aussi bien s'agir de fonctions aussi les références données par M. ÜAWLIKOWSKJ, 1990a, p. 2652.
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 41
est daté d'avril 218. Un certain Taîbbôl, secrétaire ( bgrmty', Le seul cas vraiment explicite de mélange des fonctions
« à l'occasion de son secrétariat»), est honoré par le Conseil civiques et religieuses est fourni évidemment par Septimius
et le Peuple. L'inscription est très lacunaire, on ne connaît Worod, personnage sur lequel il faut revenir dès qu'il s'agit
donc pas les noms de ses ancêtres, ni à quelle occasion il de la Palmyre des dernières années du me siècle. Des dix
aurait offert une somme de 500 deniers pour une textes qui le concernent, CJS 3942 est le plus développé et
construction. M. Sartre fait l'hypothèse que cette somme le plus explicite sur ]es nombreuses fonctions qu'il a
représentait peut-être la summa honoraria du magistrat, à exercées. On a parlé de la caffière municipale du personnage
son entrée en charge. Mais, il ajoute que l'insc1iption semble (stratège et agoranome), mais il a aussi eu un rôle important
bien tardive pour une charge de secrétaire, «car la fonction dans la direction des caravanes. On apprend en outre aux
de grammateus semble étrangère aux colonies». Or Palmyre lignes 14-16 du texte grec ( seul conservé) qu'il a été
a reçu ce statut au plus tard en 217, donc au moins un an symposiarque des prêtres du dieu Bel (vuvE't Àaµnpcoç
avant l'inscription. Il est donc vraisemblable que le texte crnµnocriapxov 1:COV w[u ernu] L�1àç B17Àou lEpÉrov). Le
fait allusion à une charge et à des événements distants d'un texte est daté d'avril 267 par le CIS, ad lac., d'après sa place
certain nombre d'années 227• À paitir de ce texte, J. T. Milik dans la Grande Colonnade entre des colonnes qui portent
proposait une reconstruction assez intéressante : en effet, il des textes des années 576 et 578 de l'ère séleucide. Cette
identifiait Taîbbôl avec un certain tybwl br Jsms tybwl rb' date a été remise en question par D. Schlumberger 232, car
(CJS 4288 = PS 251 ; fig. 12), qui est représenté avec sur la les colonnes ne suivent pas d'ordre chronologique strict. La
tête le mortier caractéristique des prêtres 228• Or, ce buste date de la symposiarchie de Worod est donc comprise entre
appaitient au groupe IIDc défini par H. Ingholt, et date donc 267 et 271 ; il est probable d'ailleurs que, la fonction débutant
sans doute de la deuxième moitié du n e siècle 229• Le en avril, le texte date du premier mois d'exercice de Worod,
rapprochement entre les deux inscriptions est donc possible à moins qu'il ne l'ait exercée plusieurs années de suite.
chronologiquement, à la seule condition que le buste date
plutôt de la fin du rl° siècle et que la fonction de secrétaire ait Il semble donc que Worod soit le seul notable de Palmyre
été remplie de nombreuses années avant que Taîbbôl ne à avoir participé à ces deux types de carrière, auxquelles
reçoive les honneurs rendus par le Conseil et le Peuple 130• s'ajoutent de plus des fonctions importantes dans l'Empire
Une difficulté se présente : le buste a été restauré romain. Il est d'autre part étonnant que la famille d'Odainat
(l'araméen emploie le verbe bdt 211) par un certain Azîz, fils semble attestée pour des fonctions religieuses seulement sur
de Taîbbôl ('zyz br tybwl dy mtqr' 'bd'), peut-être un fils des tessères (RTP 485, 736, 746 et 787). Il semble pourtant
du prêtre, ou bien plutôt un parent quelconque. Cela signifie que ce ne soit pas en tant que symposiarques, mais à leur
donc qu'il y a de fortes chances que le buste ait été plus entrée dans le corps sacerdotal, que les fils d'Odainat ont
ancien, soit que la restauration ait été en fait la fourniture fait éditer ces tessères qui portent leur nom 233• H. Seyrig
d'un nouveau buste, soit qu'on ait réparé le buste endommagé pense que le nom d'Odainat est le patronyme commun aux
pour une raison ou une autre. Mais, ce qui est en fait le plus deux donateurs de banquet, et non le nom du prêtre. Il est
gênant est que, sur le buste funéraire, le nom de tybwl est possible pourtant que la tessère 746b qui représente deux
suivi du mot bbl («hélas») qui indique généralement que la prêtres, avec les noms de Haîran et Odainat, soit l'indication
personne représentée est défunte. Si Taîbbôl était déjà mort d'une éventuelle prêtrise de ce dernier 234• Le problème qui
à la fin du II siècle, il ne peut avoir été honoré en 218. Or il
e
se pose est celui du statut des noms inscrits : soit patronyme,
est peu probable que le texte lnv X, 13 lui confère des soit nom du personnage représenté 235• Il est vrai que sur les
honneurs à titre posthume. En effet, si le texte est lacunaire, 485a, 736a et b, le nom d'Odainat est inscrit dans le coin
une comparaison avec d'autres textes du même genre montre gauche, donc en position de patronyme dans le sens de la
que la formule btr dy myt ( «après sa mort») ne semble pas lecture (de droite à gauche), ce qui concorde avec
pouvoir trouver sa place dans ce qui reste de l'inscription. l'interprétation de H. Seyrig. Le problème est plus difficile
Les deux solutions (identification ou non) sont donc au moins pour le 746b, où le nom d'Odainat est à droite, donc en
aussi probables. On ne peut affirmer que ce prêtre a aussi première position dans le sens de la lecture. Or, Odainat est
été un magistrat important dans les institutions civiques de non seulement père d'un Haîran, mais lui-même fils d'un
la cité de Palmyre. autre Haîran 236•
(CIS 4105 ter), 'louÀ,rnç Aùp17À,10ç I:rn1:iwoç Oùopco817ç (lnv symposiarque, Malikü dit Mezabbanâ, dédie aussi une statue
III, 3 revu par D. ScHLUMBERGER, 1942-1943a, p. 35) et d'un empereur, qui est cette fois sans doute Pescennius Niger.
I:rn1:1.�L10ç Oùopw817ç sptmyws wrwd (CIS 3938 à 3943) 23'1• Le nom de la personne honorée a en effet été martelé dans
Qu'il s'agisse d'un seigneur parthe ou perse, réfugié à les deux versions du texte, ce qui a fait supposer, à cause de
Palmyre lors des événements qui ont suivi l'arrivée au la date, qu'il s'agissait de Niger 2 5_ En avril 203, c'est un
-1
pouvoir des Sassanides, est une possibilité non négligeable. certain I:aÀ,�n7ç MaÀ,1xou 1:oû BmÀ,m8ouç (slm' br mlkw br
Mais les noms iraniens sont assez courants à Palmyre (voir blyd') qui remplit ces mêmes fonctions de grand prêtre et
ici le chapitre n), et rien ne prouve de manière définitive symposiarque (CIS 3970). Lui aussi fait dresser des statues
237 - Il serait intéressant de voir si l"exemplaire de Berlin (n" 746ter). sur entre 258 et 267 (et même avant. si la tombe 36 est bien celle de sa famille.
lequel les deux prêtres reposent sur le coude gauche. a la même inscription. cf. chapitre v1) et on se demande comment il pouvait en même temps être
ou si celle-ci est inversée. clans l"entourage de Sapor vers 260. Ce n"est pas totalement impossible. si
238 - E. WILL, 1996. p. 109-115. on considère par exemple qu'il était chef d'un parti« pro-perse» ù Palmyre.
239 - Idée déjà exprimée par H. SEYRIG, 1963, p. 167. et clone, qu'il pouvait être stipendié par les Perses à ce moment (voir
240 - Plutôt, bien sùr, que l'indication d'une origine non libre, comme c'est A. SARTRE-FAUR!AT. 1997, p. 259, 11. 2).
le cas pour un certain nombre de personnes à Palmyre, dont le nom simple 242 - Par exemple les n'" 60. 102. 123, 144, 189. 233. 261-263. 266-267.
(sans patronyme) indique qu'il s'agit d'affranchis. 243 - Voir F. QUASS, 1993, p. 150-151.
241 - Le fameux Worod, l'agoranome des Res Gestae Diui Saporis (ligne 244 - G. W. BowERSOCK, 1976, p. 349-355. On sait seulement qu'un des
67 du grec) ne porte pas, lui non plus, de patronyme. On ne peut ni affirmer, ancêtres du symposiarque s'appelait LWLCDvoç.
ni exclure qu'il s'agisse du même personnage. Le problème de date, 245 - lnv IX. 26; le nom du syrnposiarque est très mutilé ; en grec, on a
récemment souligné par E. Will (E. WILL, 1996, p. 111-112), est en effet ...Kat MEÇa��[ava...] wù MaÀ1xo-u rnù Zë�El ... et en araméen, mlk{w]
difficile ù résoudre. Il semble que Worocl était présent à Palmyre au moins ... mtqr' mzbn' br b ...
Chapitre l: L'identité c'Ïl'ique de Palmyre 43
impériales, pour six membres de la famille des Sévères. C'est On sait qu'au cours de la seconde moitié du III e siècle, le
d'ailleurs grâce à ces deux dernières inscriptions que culte impérial a tendance à disparaître 51 : cela rend moins
='
G. W. Bowersock justifie, de manière tout à fait étonnant son absence à Palmyre à la fin de la période et
convaincante, la restitution du titre de symposiarque dans le explique sans doute que de grands notables, comme en
texte de 166 2�6• particulier Worocl, n'y soient pas associés. Néanmoins, ce
Un cas un peu particulier est celui de Soados, fils de dernier apparaît à un moment où, semble-t-il, Palmyre rentre
Bôlîadâ, dont un texte de 145 indique qu'il aurait fondé à clans une certaine norme. Le principal magistrat de la cité
Vologésias un temple des Augustes ( « Ka\ KTtCTO'.VîO'. [È]v devenue colonie est en même temps grand prêtre de la
OÀoya[mafü vaov 1éôv L:.l�a01éôv ») . On reviendra au principale divinité. Bien qu'il n'y ait pas cl'attestation de ce
chapitre III sur le caractère surprenant de cette fondation, alors cumul avant les années 260-270, il faut sans cloute ajouter
que Vologésias appartient, semble+il, à l'Empire parthe. que cela est tout à fait attendu clans le cadre d'une colonie 252•
Ce qui peut arrêter ici est le fait que Soados n'exerce aucune De ce point de vue, comme E. Will l'avait parfaitement vu,
fonction publique et qu'il semble agir de sa propre autorité. Worocl est un des exemples les plus classiques fournis par
Le lien entre cet événement et le culte officiel des empereurs Palmyre, parmi les notables. C'est un haut magistrat de la
à Palmyre est difficile à faire. La première attestation colonie qui occupe tout à fait normalement de hautes
formelle du culte impérial à Palmyre date de 166, soit vingt fonctions religieuses. Il est en même temps intégré clans
ans après le texte de Soaclos 2�8• ll est curieux que ce culte l'administration impériale 253• Par comparaison avec les
apparaisse clans la documentation cl'abord hors de Palmyre autres notables connus à Palmyre, son cas peut sembler
(le texte a été de plus trouvé à Umm el-Amacl, à une atypique, mais il correspond par bien des aspects à un modèle
vingtaine de kilomètres au sud de l'oasis) et soit le fait d'un courant clans le reste de l'Empire. Certes, on ne peut réduire
personnage, certes important, mais qui, semble-t-il, n'a pas totalement son originalité et une fonction comme celle
de fonctions officielles. Il est probable que Je culte impérial cl'argapet n'a pas cl'équivalent clair ailleurs, quelle que soit
existait déjà à Palmyre avant 145, mais rien ne peut le l'interprétation du terme que l'on choisisse. D'ailleurs, les
confirmer. fonctions cl'Oclainat, au même moment, sortent aussi de ce
Il y a sans cloute des comparaisons à faire avec le reste cadre colonial, même s'il est difficile de les définir.
de l'Empire, où les grands prêtres du culte impérial sont
aussi des grands personnages, soit de la vie civique, soit
3. DES FAMILLES PRÉDOMINANTES
encore des prêtres de grandes divinités locales. On peut
prendre un exemple de ce dernier cas, à Assos, en Asie On voit clone qu'il est plutôt difficile de décrire de manière
Mineure. Le prêtre cl'Auguste à vie, Q. Lollius Philetairos détaillée la majorité des carrières de notables palmyréniens.
est en même temps roi (fonction religieuse : m:hprnç Pour éluder la difficulté, il faut s'intéresser, cette fois, non
�cxmÀEuç), prêtre de Zeus Homonoios et gymnasiarque au plus à des individus isolés, mais à des familles, au sens strict
témoignage du texte 1. Assas, 15 . Même si les textes ne comme au sens large. Pour la plupart des notables dont les
renseignent pas toujours sur cl'autres fonctions religieuses noms apparaissent dans le tableau, il est possible de retrouver
des prêtres impériaux, ceux-ci sont la plupart du temps aussi au moins une partie des familles auxquelles ils appartiennent.
magistrats ou liturges, et occupent des places élevées clans On pourrait ainsi arriver à définir un milieu de notables, clans
les hiérarchies locales. Ainsi à Salamine de Chypre 250, clans lequel se recrutaient de manière privilégiée les magistrats,
la seconde moitié du l"' siècle apr. J.-C., Servius Sulpicius mais aussi les symposiarques et l'ensemble de l'élite de la
Panclès Veranianus est honoré à plusieurs reprises, ainsi que ville qui apparaît clans la documentation. Même si tous les
différents membres de sa famille, pour les services qu'il a notables de Palmyre ne participent pas au même degré à la
rendus à la cité ou au koinon de Chypre (Kmvov Kurcpiwv). vie civique, et plus généralement aux activités publiques, il
Il a en effet été gymnasiarque, agonothète, a fait construire semble clair que les magistrats de Palmyre se recrutaient clans
le théâtre, peut-être le gymnase et l'amphithéâtre. Enfin, il a le même milieu que les fondateurs des grands tombeaux ou
été à trois reprises grand prêtre des Augustes pour l'île. les évergètes connus par les textes.
a. Famille de Bônnê angle ouest, que se réunissait sans nul doute le Conseil au
cours du II" siècle rn,_ Il est d'ailleurs symbolique que
Chronologiquement, un des premiers exemples de
l'évolution des honneurs reçus par ce personnage conduise
dynastie familiale est constitué par la famille de Bônnê. Elle
du temple de Bel à cette zone de l'agora, alors que cette
est attestée par un certain nombre d'inscriptions entre le milieu
dernière devient peu après un centre de l'activité de Palmyre.
du (1 siècle et le milieu du second 254• L'ancêtre le plus ancien
Cela ne signifie pas qu'on abandonne le sanctuaire de Bel
qui apparaisse dans les textes est un certain tymy, qui semble
pour honorer les bienfaiteurs de la cité 257, mais il est clair que
être l'arrière-arrière-grand-père du Bônnê dont le fils construit
la position de cette colonne, à cette date, n'est pas l'effet du
une tombe vers 52 de notre ère. En comptant 25 à 30 ans par
hasard. Certes l'agora date sans doute du début du II siècle 258•
e
254 - Le texte M. RoDINSON. 1950, p. 137 est daté d'avril 52 et C/S 3927 sanctuaire de Bel sont datées du 11' siècle, en particulier cle la première
de juillet 140. moitié.
255 - Outre M. RODINSON. 1950. p. 137 ; fm, IX, 20 ; J. CANTINEAU, 1933, 258 - E. WILL, 1992, p. 123.
p. 175 n" 2b déjà cités, il est probable qu'il apparaisse aussi clans les cieux 259 - Comme d'ailleurs la version latine qui traduit E'ÙCTE�17ç par« pius »
textes suivants : J. CANTINEAU, 1933, p. 183-184, n" 7a ('?), et lnv XII, 42 ce qui est normal, mais utilise comme traduction cle <plÀorca1p1ç une pure
('?). et simple transcription, « philopatris ». Ce mot est inconnu en latin (voir
256 - Cf. J.-C. BALTY, 1991, p. 50-56 et 591-593. F. MILLAR, 1995, p. 413, à propos de ce texte).
257 - Un grand nombre des inscriptions honorifiques qui proviennent du
Chapitre I: L'identité ci1 1ique de Palmyre 45
palmyrénien est tout à fait clair : Haîran est félicité par le magistrat). Le second, Bônnê, fils de Haîran est apparemment
Conseil et le Peuple pour « avoir fait des décorations dans symposiarque au tournant du siècle, et marque l'emprise de
les édifices de leurs dieux». Le texte grec, restitué grâce à la famille sur le culte le plus important de Palmyre. Enfin,
l'araméen, utilise le mot K[o0µ11îhiv. J. T. Milik, après son fils est proèdre en 137, au moment où le Tarif renouvelle
J. Starcky, propose la correction éventuelle de : « les édifices 1'organisation douanière de la cité. Il ne faut certes pas
de leurs dieux», par : « les édifices de Bel, le dieu» 2 1• Cette 6(
exagérer l'importance de ce texte. Il l'est surtout pour la
correction est tentante, car elle correspond tout à fait au texte recherche moderne, pour des raisons qui n'auraient pas
de 56, qui est le fait des prêtres de Bel. Néanmoins, si elle frappé les contemporains de Bônnê, fils de Bônnê 265• Ce
est aussi probable que l'autre, elle ne semble pas tout à dernier, en tout cas, occupait une fonction importante dans
fait assurée. De toute façon, il est clair que Haîran a les institutions de Palmyre, à la tête du Conseil qui regroupait
contribué à l'embellissement et la décoration du temple de probablement les notables de la cité. Néanmoins, cela ne
Bel 261• Il a peut-être aussi agi en faveur d'autres bâtiments signifie pas qu'il détenait par là un pouvoir énorme. On n'a
religieux mais il est impossible d'entrer dans les détails sur jamais retrouvé de texte le concernant, mais son nom est
ce point. cité dans une inscription, seulement parce qu'il se trouvait
Étant donné la place prééminente de Haîran clans la diriger la séance alors que le Conseil prenait une décision
société palmyrénienne, ainsi que ses relations importante. Certes, un grand nombre cl' inscriptions
privüégiées avec le sanctuaire de Bel, il est tout à fait tentant honorifiques qui concernent les notables de Palmyre ont
d'identifier le dénommé bw[n]' br bym de la tessère RTP 463 disparu, et rien n'interdit que les recherches futures fassent
avec un membre de la même famille. Les éditeurs du recueil connaître une inscription par laquelle le Conseil le remercie
des tessères (RTP, p. 203) en font le père du proèdre pour tel ou tel bienfait.
mentionné par le Tarif, bwn' br bwn' br byrn (BCDvvrnç La succession de ces trois membres de la famille est
Bcovvrnuç îOÙ A1pavou). Bônnê, fils de Haîran aurait donc tout à fait caractéristique et sans cloute significative du
été symposiarque aux alentours de la fin du l"' siècle 262 et il fonctionnement de la cité. C'est en effet le premier,
pourrait être le chaînon manquant entre Haîran des années apparemment sans fonctions officielles, qui semble être le
50-70 et le proèclre de 137 (voir l'arbre généalogique en personnage le plus important des trois. Les deux autres,
annexe XVII). L'onomastique correspond assez bien, tout symposiarque et proèclre, clone au sommet de la hiérarchie
comme les dates, car il est peu probable qu'il se soit écoulé civique, ne semblent pas avoir eu le même rayonnement.
plus d'une génération entre ces deux personnages. Un On peut même soupçonner que leur position sociale est une
possible frère du symposiarque est un personnage connu par conséquence de l'action de leur père et aïeul, véritable
une inscription de Cos 263• Il s'appelle en effet Pa��llÀ fondateur de la fami11e. La mère et le père de Haîran bar
A1pavou (rb' 1 br byrn), ce qui correspond bien à Bônnê sont connus par le texte de fondation du tombeau de
l'onomastique familiale 264, mais l'inscription est difficilement famille (en 52 apr. J.-C.) 266, mais rien ne permet cl'affirmer
datable. que leur situation particulière dans la société de Palmyre a
Les différents membres de la famille illustrent presque pu contribuer à la position de leur fils.
tous les cas de figures mis en lumière. Le premier, Haîran Inversement, il n'est pas possible non plus de parler pour
dit Rabbel, est indubitablement un notable, il est lié aux celui-ci cl'ascension sociale ; on peut éventuellement penser
grands bouleversements institutionnels et religieux qui que la construction par Haîran d'un tombeau pour ses parents
touchent la ville de Palmyre, mais il ne semble pas participer est le signe cl'une arrivée récente parmi les gens assez riches
directement aux activités civiques (au moins en tant que pour pouvoir payer la construction d'une tombe. Mais sa
260 - J. Starcky, clans lnv X, p. 16 et J. T. Milik, DFD, p. 226. une traduction du texte palmyrénien, mais penche pour le I" siècle av. J.-C.
26 l - Il faut faire état ici de la théorie intéressante cle M. Pietrzykowski (à cause de l'aspect archaïque des lettres clu palmyrénien). Ce serait clans
(1997, p. 119-133): selon lui, la construction clu temple s'est faite en ce cas un ancêtre de Haîran, fils de Bônnê. Vu la fréquence de ces noms
plusieurs étapes, et la dédicace de 32 (lnv IX, l) n'est que celle de l'aclyton clans l'onomastique palmyrénienne, son appartenance à la famille est
nord. Haîran bar Bônnê se serait distingué clans la seconde phase de seulement possible, mais n'est en rien assurée.
construction. Les travaux se seraient achevés (en particulier le toit) avant 265 - Parmi celles-ci, la plus importante est sans cloute qu'il s'agit du plus
108. long texte épigraphique connu en araméen cl'époque romaine et qu'il permet
262 - Selon l'interprétation assez convaincante de J. T. Milik, DFD, cle connaître de cette langue autre chose que des formules stéréotypées.
p. 226-227. Mais, comme on l'a vu, il constitue aussi un témoignage de première main
263 - G. LEVI DELLA VIDA, l 939, p. 883-886 avec la lecture corrigée de R. Du sur le caractère hellénisé de Palmyre et sur ses institutions. Il renseigne de
MESNIL DU BUISSON. 1942-1943, p. 133-134 qui fait ce rapprochement plus sur les proclui ts qui étaient l'objet du commerce local.
prosopographique. 266 - M. RoDINSON, 1950, p. 137. La mère de Haîran se nomme BcxcxÀ8rncx
264 - D'après M. Segre, clans G. LEVI DELLA VIDA, 1939, p. 883, lïnscription b' !tg; on donne son patronyme (brt bl./;wry, « fille de Belshûrî ») uniquement
est datable (d'après l'écriture cle la version grecque) des alentours de 100 en araméen et elle n'appartient pas à la même tribu que son mari. Ce dernier,
cle notre ère (lettres d'aspect ancien, mais la barre du 0 incite à penser à comme ses enfants, appartient aux bny myt' (« Bené Mîtâ »), alors qu'elle
l'époque de Trajan). Il pourrait clone s'agir d'un deuxième fils de Haîran est dite dy 11111 pbd bny gdybwl (<< de la tribu des Bené Gaclclîbôl »). Sur
bar Bônnê. peut-être commerçant en Égée. Le critère de datation est cela. voir iJifi·a, sur les tribus et chapitre v. sur la place de la femme.
néanmoins assez douteux. J. STARCKY, 1952. p. 90, n. 11 donne seulement
46 Les notables de Palmyre
généalogie assez longue permet de penser qu'il appartient à vraisemblablement d'un décret en l'honneur d'un personnage
une famille plutôt ancienne, même si on sait aussi que ces dont le nom est perdu. 11 est remercié d'avoir instauré une
longues lignes de parenté ne sont pas forcément fiables. fondation, avec des dons d'objets pour le culte (Àaµncxç),
Le dernier membre connu de la famille s'appelle un sacrifice et une Èniôocnç TlJ �ouÀ1J atfüoç (« un don au
Ahophalî, fils d'Haîran. Il est honoré par le Conseil, pour Conseil pour toujours»).Comme dans le texte C/S 3927, le
avoir promis à celui-ci un don perpétuel (bd.8ocnç a1.covia), décret émane vraisemblablement du Conseil. Le reste du
ainsi qu'un sacrifice (8ucria) 267• L'inscription rappelle texte donne une date qui est celle du sacrifice prescrit (le
1 'ensemble des bienfaits accomplis pendant sa vie. L'araméen 26 janvier) et rappelle les autres preuves de générosité du
comporte la formule classique btr dy myt (« après sa mort»), personnage, déjà honoré par le passé (npoç 1ak cxÀÀaK
qui devient en grec, tout aussi habituellement, �tv11�n7ç xcxp1v. [m'n]ou cjnÀOTE[l�llO'.K à]vElÀlW�tÉv[l7v ?]).
C'est au moment de sa mort qu'il a dû être honoré, et la liste Il se peut aussi qu'Ahophalî ait voulu remercier le
des bienfaits qui lui valent cet honneur concorde bien avec Conseil pour une raison qui reste inconnue (peut-être d'autres
l'âge relativement avancé qu'on peut lui accorder d'après honneurs antérieurs) et que ce soit la raison de ce don. Le
des critères généalogiques. Il a promis ces dons, et cette fait qu'on précise qu'il s'agit cl'un don ( Èni8omç) mais aussi
promesse se trouve peut-être réalisée au moment de sa mort d'un sacrifice peut être une indication. Il faut sans doute
(par le biais de dispositions testamentaires à cet effet ?), ce chercher la solution dans le domaine religieux, mais cela
qui entraîne de la part du Conseil le décret dont on a ici le laisse un vaste champ de possibilités. Qu'il ait promis de
résumé. faire un don auConseil est certain, mais seul le texte araméen
On peut s'interroger sur les fonctions qu'il a pu avoir à est explicite et met sur le même plan le don au Conseil et le
Palmyre.Aucune n'est signalée dans le texte, mais il semble sacrifice (mgd br[m]' l'Jm' w [m}qlwt'), en les opposant
avoir eu des relations étroites avec le Conseil, puisque ce nettement aux objets sacrés offerts à trois divinités ( w' qm
dernier le remercie d'un don fait en son honneur (mhîj [m]br[m]n). Sans cela, on aurait pu penser qu'il y avait, d'une
désigne évidemment 11 �ouÀ1i, qui est le dédicant de part un don au Conseil, et de l'autre un sacrifice et des dons
l'inscription). À quel titre Ahophalî a-t-il été bienfaiteur du aux dieux. En fait, il est possible que les trois soient sur le
Conseil ? La question mérite d'être posée. C'est une des même plan et que le sacrifice fait par les autorités du Conseil
seules attestations d'une telle générosité envers une doive être perpétuel et en l'honneur des divinités pour
institution de la cité de Palmyre. Une éventualité serait qu'il lesquelles Ahophalî a fait ces dons.
a fait partie de cette assemblée, peut-être même en tant que Un texte découvert dans les ruines du camp de
proèdre, et qu'il a fait cette promesse pendant l'exercice de Dioclétien a été rapproché de celui-ci par différents
ses fonctions. commentateurs. Il s'agit d'une inscription grecque sur une
Ce qui est sûr, si on compare le vocabulaire utilisé avec stèle à édicule en bas-relief . Un sacrifice holocauste
celui de décrets contemporains du monde grec, c'est que ([6ÀÔ]K[a]ucr1[o]v 8[ucria]v) est prescrit chaque année, le jour
l'expression employée est courante.C'est de cette manière bon (Kaî'Ëîoç îÎ] àya8îj 11�tÉp�), pour toujours. Le décret
qu'on décrit l'activité de notables qui font des dons résumé en C/S 3927 rappelait un événement de ce type, et la
volontaires à leur cité, parce que celle-ci n'a pas les moyens seule chose qui puisse étonner est que la fondation ait été
de subvenir à tel ou tel poste de dépense.C'est en particulier faite en faveur du Conseil et non d'un collège de prêtres ou
le cas pour la construction de bâtiments publics 26�. Il faut d'un thiase.
ajouter qu'il arrivait souvent que les notables n'étaient La deuxième partie de l'action de Ahophalî est beaucoup
volontaires que nominalement et qu'ils étaient forcés de plus courante à Palmyre : il a fait des offrandes aux dieux
céder à la pression« amicale» de leurs concitoyens.Ce type Malakbel, Gad Taîrnaî (en grec Tux11 0m�ternç et
de don perpétuel (fondation pour un sacrifice périodique), Atargatis, que le grec appelle« dieux ancestraux» (rcmpcpoi.ç
en faveur d'une assemblée est connu par plusieurs textes 8rn1ç). On remarquera, après J. T. Milik, DFD, p. 73, que
d'Asie Mineure 269• l'ancêtre le plus éloigné de la famille porte le nom de tymy
On a aussi un exact parallèle de ce genre d'attitude dans (voir l'arbre ci-dessus). La famille de Bônnê qui appartient
un texte très lacunaire publié par H. Seyrig 2111• Il s'agit au clan des bny .s't, de la tribu des bny myt', participe donc
267 - CIS 3927. daté de juillet 140. Le personnage s'appelle AoqlCXÀ.Etç dans un cadre plus général. Pour tout ce qui concerne l"évergétisme civique
Atpcxvou wû :I:cx�cx wû Atpcxvou wû Bcovvrnuç en grec. et '/Jply br et les constructions religieuses, voir le chapitre 1v.
�1yrn .sb' br byrn bwn' .s't en araméen. 270 - H. SEYRIG, 1939, p. 319-320. On a un autre exemple de don au Conseil
268 - Voir F. Qw,ss, 1993. p. 200-229 et les exemples qu'il a rassemblés avec le texte H. SEYRIG, 1937, p. 372 (voir chapitre 1v).
aussi bien pour l'époque hellénistique que pour !"Empire. Pour la situation 271 - lnl' VI. 13 (complété par H. SEYRIG, 1933c. p. 277-279, et
à Palmyre et l'évergétisme en général clans cette cité. voir le chapitre 1v. ci M. GAWLIKOWSKL 1973a. p. 96-97 qui cite la bibliographie).
clessous. 272 - Il faut comprendre 0ext�LEtoç comme correspondant au nom courant
269 - Voir 1. L1�vY. 1895, p. 228-229. On trouvera de nombreux exemples Taîmaî (tymy), et cette divinité est donc la« Fortune de Taîrnaî ». souvent
de fondations en faveur du Conseil clans le recueil de B. Laum (1914, L associée à Malakbel sur des tessères ( RTP 135, 273-277, 279).
p. 160-161) : le vocabulaire de 1'inscription de Palmyre entre tout à fait
Clwpitre l: L'identité cil·ique de Palmyre 47
encore au 11" siècle à ce culte ancestral, bien qu'aucun des politique à Palmyre pendant plusieurs générations. Certes,
deux descendants connus à cette période ne juge utile de deux frères sont honorés dans les années 10 et 20, on l'a vu
rappeler le nom de la tribu. Le nom du clan particulier ( bny plus haut. Néanmoins, ils n'ont pas de fonction officielle
s' t) fonctionne comme un éponyme et il n'apparaît que clans dans les textes. On pourrait aussi prendre l'exemple de
la version araméenne de CJS 3927, accolé au dernier nom l'oncle et du neveu, tous deux symposiarques en 30-31 et
cité dans la lignée d'Ahophalî. dans une des années qui suivent 276• Mais cette identification
Par un phénomène courant, la généalogie de ce est seulement hypothétique, surtout dans le cas du neveu.
personnage remonte jusqu'à l'ancêtre qui semble le plus
important, celui qui a donné son lustre à la famille. Il n'est
b. Famille de Nashûm (nswm)
pas étonnant que ce soit justement Haîran, fils de Bônnê.
Les versions araméenne et grecque de la généalogie sont Le cas le plus remarquable peut-être est celui de la
différentes ; dans la première, on peut noter 1'omission famille de Nashûm (nswm), qui est attestée entre 11 9 et 265,
fréquente du mot bar (br) qui signifie« fils de » : ainsi entre et qui fournit à la cité au moins deux symposiarques, un
le nom du père et celui du grand-père et entre celui de Haîran proèdre et un stratège-agoranome. C'est à cette famille
et ceux de son père et de son grand-père. L'article est au qu'appartient le personnage honoré en Inv 106. C'est de
contraire présent partout dans le grec, comme il est normal. lui qu'on a parlé un peu plus haut pour douter de son
Il faut sans doute, au moins en ce qui concerne identification avec le symposiarque nswm mlkv1' nswm
l'onomastique, donner la préséance à la version sémitique. 773). Si on peut clouter de l'identité des personnages
Il est probable que les Palmyréniens ont mieux su donner cités par ces deux documents, il est en revanche indéniable
leur nom clans leur langue natale, ou du moins qu'ils savaient qu'ils appartiennent à la même famille. Le nom nswm est
mieux exprimer ce qu'ils voulaient montrer de leurs assez rare à Palmyre 277, et J. T. Milik a montré qu'il était
généalogies, selon leurs propres catégories. À chaque fois, possible que toutes les attestations du nom se rapportent à la
le nom simplement en apposition est à comprendre comme même famille, car l'alternance mllüv et nswm est présente
le nom de famille, celui qui permettait de reconnaître le clans toutes les généalogies 21K. Le texte lnv pour un
personnage clans la foule des homonymes 2n. Haîran n'était proèdre ( ... brmlkw nswm), est la première attestation datée.
pas un nom rare, et il fallait ajouter Shabâ ( sb') ou Bônnê Si vraiment il ne manque qu'un mot au début de la première
( bwn ') pour permettre de savoir à qui on avait affaire. Il est ligne cl'lnv X, 1 06, l'inscription publiée par M. GAWLIKOWSKI,
tout à fait probable que Shabâ soit le père de Haîran et donc 1976, p. 200 a été faite en l'honneur de son père (MaÀ1xoç
le grand-père de Ahophalî, de même que Bônnê est le père NaacrnwLOu) et de lui-même, ou d'un de ses frères
de l'autre Haîran, mais cela n'est pas entièrement certain. (Naaaouµoç). Son grand-père Nashûm a sans doute vécu
Ce qui est absolument exclu, en revanche, est que Haîran, au !"' siècle apr. J.-C. et il est le fils d'un certain
fils de Bônnê soit le petit-fils du Shaat ( s't) dont le nom suit Law1nyEPWL0ç. Nashûm est apparemment devenu1'éponyme
le sien clans la généalogie de CJS 3927. Comme on l'a vu, du clan, peut-être parce qu'il était un personnage important
c'est un nom de famille qui est aussi bien celui de Haîran, le mot br, « fils de » n'est en tout cas pas dans le texte lnv
fils de Bônnê, que celui de Ahophalî lui-même. l 06 et c'est ensuite ce nom qui clôt toutes les généalogies
Il semble bien que l'histoire de la famille s'achève ici, de la famille, alors qu'il n'est plus fait de référence à
avec la mort cl'Ahophalî vers l'année 140 de notre ère 274• Sampsigeram 279•
Les descendants qu'ils ont peut-être eus, ou bien n'ont pas En 119, ... br mlkw nswm est donc honoré d'une statue
laissé de traces épigraphiques 275, ou bien n'ont pas jugé utile par le Conseil, sans doute à cause de son action en tant que
de rappeler l'existence de leurs glorieux ancêtres. proèclre. Il est fort possible que le personnage dont la tessère
On éprouve quelques difficultés à trouver d'autres RTP 773 rappelle le nom soit un frère du proèdre, mais cela
exemples de familles qui occupent le devant de la scène est incertain, car1'alternance des noms mlkw et nswm rend
273 - Voir J. T. Milik, DFD. p. 87 : il pense pouvoir répartir les « tribus 275 - À moins qu · elles n · aient pas encore été retrouvées. La seule exception
palmyréniennes en fractions. clans, grandes familles. en partant des est peut-être un certain Hélioclôros Iarhibôlâ. fils de Haîran Bônnê (hlyclwrs
"surnoms". indiqués comme tels. formellement. par l'expression cly mtqr'. yrbbw/' br byrn bwn ') dont on connaît un affranchi en 213 par le texte
ou bien sous-entendus par l'omission de bar, "fils" ». Il faut noter néanmoins H. lNGHOLT. 1935. p. 99. n" V III. On ne sait rien de plus sur ce personnage.
la prudente remarque qui suit ce développement: « soit dit en passant, la 276 - Voir les deux premières lignes du tableau. en annexe I : /.sms br 1ybwl
présence ou l'absence de ce terme de parenté devient parfois d'interprétation br.skyb! serait le syrnposiarque de 30-3 l. année de la consécration du temple
assez délicate. Son absence est en particulier frappante sur les courtes de Bel ([111• IX. 1); son neveu. 'bl'ly br mqymw br tybwl, lui succéderait
épigraphes funéraires (légendes de buste. etc.) ». Voir chapitre 11. peu de temps après (RTP 93 et 638).
274 - li s'agit aussi de la dernière trace qu·on ait d'un descendant des 277 - J. K. STARK. 197 l . p. 40.
membres de la tribu des Bené Mîtâ ( bny my(). tribu dont la dernière 278 - DFD. p. 235-237. Sur la famille. voir aussi M. GAWLIKOWSKI. 1976.
attestation datée est de 84 (J. CANTINEAU, 1938. p. 76-77. n" 29). Le texte p. 200-201. On trouvera clans l'annexe XVH un essai de reconstitution de
cle Doura-Europos. qui mentionne les Bené Mîtâ. archers, date peut-être du l'arbre généalogique de la famille.
milieu du u' siècle. Mais il ne cite aucun nom de personne (R. Du MESNIL 279 - Il est possible aussi que le nswm éponyme soit un ancêtre encore
DU Bu1ssoN. 1939. p. 18. n" 33 = Pre/. Rep. VII/VIII. p. 279. n" 909). plus éloigné.
48 Les notables de Palmyre
toutes les combinaisons possibles. Il est de même possible des indigènes, sans qu'il soit besoin de faire intervenir des
que les tessères RTF 778 donne le nom d'un symposiarque carrières militaires. Celles-ci ne sont évidemment pas exclues,
('Io'ÛÀrnç Bc:iacroç, nswm br zbd' mlkw nswm) qui serait le comme le prouve le texte latin Inv VIII, 204, épitaphe latine
neveu de nswm mlkw nswm, en même temps qu'un citoyen d'un cavalier de l'Ala Ulpia singularium. Mais il y a de fortes
romain. On peut en rapprocher également la tessère 837 qui chances qu'il ne s'agisse pas d'un Palmyrénien, mais d'un
donne le nom complet en araméen et les numéros 847 et 872 soldat venu d'une autre partie de l'Empire, mort à Palmyre à
qui donnent simplement le nom Bcicrcroç en grec. La 1'époque de Commode 284•
tessère 778 présente la particularité cl'être une des rares à Le texte WADDINGTON 2572, daté d'avril 178, donne une
porter une inscription en grec, et un des deux seuls cas de autre date (fig. 13). Comme il s'agit d'un affranchi d'un
tessère bilingue ('Io'ÛÀ1oç Bâcrcroç et sur l'autre face nswm C. Iulius Bassus, on peut sans mal remonter dans leu" siècle
[br zbd]' mlkw nswm). L'autre exemple (RTP 669) porte sur pour la date du patron. On retrouve le même cas de figure
une face le nom Z11v6�10ç et sur l'autre br'th zbd'. Comme avec le texte Inv XI, 5. Une affranchie d'un certain Bassus
le note A. Caquot 280, à propos du nom de Z11v6�1oç, celui-ci (bss en araméen) fait une dédicace à« celui dont le nom est
« correspond souvent au palmyrénien zbyd'». Il est possible béni à jamais», en février 1 65. Ce Bassus semble être
qu'il s'agisse clans les deux langues du nom du personnage. d'origine sémitique, puisqu'il est fils de Manû (m'nw), mais
Cependant, le patronyme sur la face araméenne devient le nom du grand-père est occidental 285• Comme on le voit,
apparemment le nom sur la face grecque, ce qui est curieux. les dates correspondent assez bien et il est tentant de placer
C'est pourtant la solution la plus simple et le nom le symposiarque du même nom vers le milieu de ce siècle. Il
zbyd' fonctionnait peut-être comme une sorte de nom de faut cl' autre part rappeler que le nom Bassus est fréquent
famille, qui était utilisé couramment. Ce peut être une clans les inscriptions grecques de Syrie; il s'agit d'une
indication pour RTF 778, qui donnerait alors les deux noms conséquence de l'homophonie entre deux noms courants en
du personnage. latin et en sémitique. L'adaptation a dû être facile et explique
La principale difficulté posée par le rejet de la popularité du terme 2N6•
l'identification entre les personnages de Inv X, 106 et RTF 773 Le dénommé nswm br zbd' nzlkw nswm (RTF 778) a
est cl'ordre chronologique. Si le symposiarque de la tessère clone vécu au milieu du n" siècle, et l'on a du mal à établir
n'est pas le proèdre honoré en 11 9, on perd alors toute quelle est sa relation précise avec le proèclre d'Inv X, 106.
indication de date. Il est néanmoins possible cl'en avoir une D'après les dates, celui-ci peut être son oncle ou bien son
idée assez précise, grâce aux noms grecs du second père. Dans ce dernier cas, on aurait le même type cl'alternance
symposiarque. 'Io'ÛÀ1oç Bcxcrcroç n'était peut-être pas un père-fils entre fonctions religieuses et fonctions civiques que
vétéran, comme le pense J. T. Milik 281 ; il y avait cl'autres clans la famille de Bônnê. Il est tentant aussi de faire du
moyens de devenir citoyen, et on ne peut assurer que le service symposiarque nswm mlkw nswm l'oncle de nswm brzbd',
militaire soit la seule voie cl' accès des notables palmyréniens en particulier à cause des relations bien connues entre oncle
vers cet honneur. Ce savant a rassemblé les exemples de Ju/i; paternel et neveu 287• Mais il faut répéter que cet oncle n'est
Bas.si, assez fréquents à Palmyre . Cette fréquence est sans pas nécessairement la même personne que le proèclre, car il
cloute à mettre en rapport avec la présence en Syrie, aux est tout à fait possible qu'il y ait un autre frère 2N8• On est de
alentours de 116, du légat propréteur C. Iulius Quaclratus toute façon clans le domaine de l'hypothèse, mais celle-ci a
Bassus 283• Cette présence clans la province dont dépend pour but principal de montrer que la reconstruction proposée
Palmyre explique suffisamment que ce nom soit porté par par J. T. Milik, sans être aucunement impossible, est loin
280 - « Remarques linguistiques» clans RTP, p. 179. zbd' et zbyd' ne sont arabe utilisé comme nom propre a pu par contre être facilement hellénisé
pas la même chose: le premier est un hypocoristique d'un nom théophore, grâce à une quasi-homonymie avec Boss11s!Bâ00oç. »
et le second un participe passif(ibid.. p. 172). Néanmoins Z17vô�1oç pouvait 287 - Sur ce point, voir la succession de Jsms br tybwl br iJkybl et ùe son
être choisi comme équivalent en grec pour les cieux noms, comme il l'était neveu 'bl ïy br mqymw br tybwl, aux cieux premières lignes du tableau en
aussi parfois pour zbdl' (voir par exemple C/S 3932 et plus généralement annexe I (voir aussi DFD, p. 222, n'" 1 et 2) ou bien encore zbycl' br 'Jhs'
le chapitre 11). Comme le fait remarquer F. V illeneuve, zbyd' est peut-être br ::,'dy (RTP 775 et C/S 4187) et son neveu 'Jh<i' br lym.s' br 'JM' (CJS
en rait unclirninutifcle zbd' (schème arabe.fi,·ur/u). 4187 et RTP 695 et 725). dans DFD. p. 253. 11"· 25-26. Enfin. il faut rappeler
281 DFD. p. 235. le texte lm· X. 24: Haclclùclan. fils de Hagegù a consacré au dieu Bel. à ses
282 - DFD. p. 236-237: WADDINGTON 2572 (=AAESIII. B. 353): lnl' VIII, frais, son neveu. Hacldùdan, fils de Alaîshâ. Ce neveu, fils de son frère. est
204: /m• XI, 5; BS n" 47. sans cloute devenu prêtre à cette occasion(cf. H. SEYRili, 1941b, p. 267-270).
283 - H. SEYRIG, 1941a. p. 174. Voir chapitre v, infi·o.
284 - Voir pourtant, H. SEYRIG. 1933a, p. 161-162, qui ne semble pas exclure 288 - Il y aurait clone trois ou quatre frères à cette génération : le
totalement l'origine locale. symposiarque niiwm mlkw n.swm, le proèclre ...br mlkw n.swm, le père de
285 - 'rq/ws pour l'éditeur cl'/nl' XI: J. K. Stark (1971. p. 73) l'interprète n.<iwm br zbd' (peut-être le même que le proèdre) et enfin sm.<igrm br mlkw
comme la transcription du 110111 grec Arktos. J. T. Milik préfère la lecture br n.<iwm. père de lm' de C/S 4508 (PS 376). Ce dernier appartient sans
'clmtws. transcription ùu nom latin Aùmetus ( 'clmtws, DFD, p. 237 est une cloute lt la même génération, pour des raisons stylistiques. Le portrait de sa
erreur typographique). Quelle que soit l'interprétation qu'on retienne. fille, aujourd'hui au British Museum. est daté de la première moitié du 11'
l'origine non sémitique ùu 110111 semble indéniable. siècle, ce qui correspondrait assez bien avec les dates des autres membres
286 - A. Caquot.« Remarques linguistiques» clans RTP, p. 167 : « Le terme de la famille.
Chapitre l: L'identité cfrique de Palmyre 49
cl'être assurée. De plus, l'absence cle cumul des fonctions peut ne pas désigner un ancêtre précis. Son père s'appelait
religieuses et civiques, clans la documentation connue jusqu'à Malôkâ, il est possible que son grand-père se soit vraiment
présent, renforce cette impression 289• appelé Nashûm, mais on aurait du mal à l'assurer. Il est clone
Ce qui est remarquable ensuite est l'apparente disparition difficile de savoir à quelle branche de la famille il appartenait,
cle la famille. Il est probable que pendant un certain nombre et il peut descendre de n'importe lequel des quatre frères
cle générations, aucun cle ses membres ne s'est distingué, à des années 120. On peut même le rattacher à une autre lignée
moins qu'on ait perdu tous les textes les concernant. D'une éventuelle qui descendrait aussi du nswm qui aurait vécu
manière étonnante, elle réapparaît au premier plan, un peu sans cloute au I"1 siècle.
avant le milieu clu m" siècle, sans que rien ne l'ait annoncé, Comme son cousin Zénobios Zabclilah, il fait partie de
mais c'est un phénomène assez courant à Palmyre. Les l'élite des notables de Palmyre, mais le texte résume sa
familles cle notables semblent avoir des parcours plus ou carrière à cette épithète de Kpancrwç qui désigne souvent,
moins chaotiques et il est difficile de les suivre de manière mais pas exclusivement les chevaliers 293• Il s'appelle Iulius
continue. Il suffit peut-être d'une alliance matrimoniale Aurelius, ce qui est classique à Palmyre, mais il a ajouté à
heureuse, pour que la famille retrouve son lustre. Or c'est son nom Septimius. Comme l'a montré D. Schlumberger 294,
un type cl'événement sur lequel on ne possède pratiquement il doit ce nouveau nom à Oclainat et à sa famille; c'est un
aucun renseignement. privilège réservé par ce prince à un groupe restreint cle
En 242-243, le Conseil et le Peuple honorent Iulius collaborateurs proches et de clients.
Aurelius Zénobios, dit Zabclilah 290 qui a effectué une carrière Il faut aussi souligner que, dès le début, la famille semble
civique particulièrement brrnante (stratégie de la colonie, avoir intégré une culture hellénisée suffisante pour être l'une
agoranomie...). On compte parmi ses ancêtres plusieurs des rares à utiliser le grec sur des tessères. En même temps,
Malikû, dont son père et son grand-père et un NacrcrmJ�Loç elle a toujours conservé une onomastique sémitique, parfois
nswm. Ce dernier nom est plutôt le nom du clan auquel il avec des noms doubles. Même si elle disparaît pendant un
appartient, comme le prouve l'absence du mot br ( « fils de ») certain temps, elle est au premier plan, à chaque fois qu'il
dans sa généalogie. Il est clone inutile cle le considérer comme en est question. Indubitablement la famille qui avait occupé
un degré clans ses ascendants. Mais cette répétition des noms le devant de la scène vers 120 fait à nouveau partie des toutes
portés par les symposiarques et le proèdre du 11" siècle prouve premières familles de l'oasis, alors que celle-ci atteint le faîte
qu'il appartient indéniablement à cette famille. cle sa puissance. C'est cl'ailleurs un des rares cas de familles
En 242-243, Iulius Aurelius Zénobios Zabclilah est à la anciennes encore présentes au moment où les princes de
fin cl'une carrière pendant laquelle il a atteint le sommet de Palmyre arrivent au pouvoir.
la hiérarchie civique et accueilli l'empereur Sévère On a parfois proposé de faire de la reine Zénobie une
Alexandre. C'est ce qui lui vaut les témoignages des plus descendante de Iulius Aurelius Zénobios, ce qui pourrait
hautes autorités. Son âge doit être assez avancé à ce moment, expliquer cette permanence de la famille. On rapproche en
ce qui aide à le replacer clans la généalogie de la famille. Il effet les deux noms Zénobie et Zénobios (Zénobios est
est sans cloute né à la fin du rr° siècle, on peut clone placer la pourtant un des noms grecs les plus courants à Palmyre;
date de naissance de son grand-père aux environs de 130 ou voir annexe IX. 2).
140. Celui-ci pourrait clone appartenir à la génération des Certes, les textes qui les concernent ( CIS 3932 et 3947)
enfants du proèclre de 119, ou plus probablement à celle de sont situés en face l'un de l'autre clans la section B de la
ses petits-enfants 291• Grande Colonnade; mais il s'agit du nouveau centre de la
Un autre membre de la famille est Iulius Aurelius ville, là où sont honorés les membres de l'aristocratie locale.
Septimius Malikû qui, vingt-deux ans plus tard, en avril 265, Ainsi le personnage honoré par la dernière inscription
honore son ami et patron, Septimius Worocl (cpiÀoç Ka't. caravanière (CIS 3933 de 247), un certain Iulius Aurelius
npocr1â111ç) 292• On retrouve les deux noms mlkw et nswm Zebîclâ Astôr appartient à une famille connue par ailleurs,
qui prouvent l'appartenance à la famille. Une fois cle plus, qui n'a sans cloute pas de lien avec celle de Nassoumos, ni
le nom nswm semble fonctionner comme un patronyme et avec celle de Zénobie. Pourtant son inscription est sur une
289 - Cette hypothèse dépend de l'état actuel de la documentation ; il n · en Ncxcrcrowwu et ywlys '1vrlys sptmyws mlkw br mlwk' nswm. Voir PIR' I
reste pas moins que l'unique exception est Septimius Worod, à l'extrême 194.
fin de la période. 293 - Dans PIR' I 194 (p. 151), il est considéré comme un chevalier:
290 - CIS 3932 : 'IoÛÀ1oç AùptjÀ10ç Z17vô�wç 6 Kat Zcx�ôlÀcxç 8'tç « egregius pi,; PCl!myrenus, ho11orot ut C1!ii PC1!myre11i nobi!es ordinis
McxÀxou 'WU Ncxcmou�tou et ywlys 'wrlys zbdlh br mlkw br mlkw nswm. equestris [. .. ] Septimiwn Voroden », comme au moins cieux autres dédicants
29 l - Selon l'âge auquel on arrivait à cette charge. On peut clone suivre d'inscriptions au même personnage: 'IoÛÀwç Aup17À10ç I:rn-ri�Ltoç
J. T. Milik, qui fait de Zénobios Zabclilah un arrière-petit-fils de nswm br Icx817ç I:rnn�Liou 'AÀEç,cxv8pou TOU 'HpoJôoD de C/S 3940 (cf. hifiYI)
zbd'. La parenté des noms Zabclilah et Zabdâ peut éventuellement renforcer et 'IoÛÀlOÇ AùptjÀlOÇ L(XA�L17ç KcxCTCTlCXVOU TOU MCXEV(Xl01) de ers
cette théorie. Dans ce cas, le nom n.swm serait en même temps le nom d'un 3943. Le premier est \.rem KÔç et le second \.nnEÙç 'Pm�Lcximv.
ancêtre précis et le nom générique d'une partie du clan. 294 - D. SCHLUMBERGER, [ 942- l 943b, p. 62.
292 - CIS 3941 : 'IoÛÀlOÇ A ùp17ÀtOÇ LEJCTl�llOÇ MCXÀXOÇ McxÀmxcx
50 Les notables de Palmyre
colonne voisine de celle de Zénobios Zabdilah. De plus, le de la Colonnade transversale, datées de mars I 79 ( CJS 3950-
texte CJS 3932 est antérieur d'une trentaine d'années à celui 3954), mais aussi par le texte de fondation du tombeau de
de Zénobie qui a été gravé en même temps qu'un texte pour famille en novembre 138 29x. Un de leurs clescenclants, Julius
Odainat ( CJS 3946). On voit difficilement Zénobie associer Aurelius Septimius Iadê, entretient des rapports d'amitié et
son époux défunt à une célébration d'un de ses ancêtres. de patronage avec Worocl 299 ; les termes sont les mêmes que
L'identification pose aussi un problème d'onomastique. ceux employés par Julius Aurelius Septimius Malikû clans
Chronologiquement, Zénobie, qui est née sans doute vers 240, l'inscription CJS 3941. Iadê, qui a été officier dans l'armée
peut être la petite-fille de Iulius Aurelius Zénobios, mais il romaine (il est àno mpmiwv), est de plus fils d'un Septimius
faut pour cela admettre que ce dernier a eu un fils appelé Alexanclros 30u, ce qui montre sans doute son niveau social.
Antiochos (en CJS 3971, Zénobie est appelée bt 'ntywkws 295) ; Il est de rang équestre, ce qui apparaît sous la forme 1.nm Koç,
ce serait le premier exemple de ce nom dans la famille. Si transcrit hpqtvs en araméen. Il est manifeste que ce
Zénobie appartient bien à cette famille prestigieuse et ancienne, personnage est de même rang social que les cieux cousins de
on voit mal pourquoi elle ne s'en réclame pas : il est vrai que la famille nswm, mais il existe une différence importante
2
ce ne serait pas le seul cas à cette période De plus, si, comme
')(,. entre les deux familles. En effet, il n'apparaît à aucun moment
le propose J. T. Milik avec vraisemblance, l'expression « bt qu'un membre de la famill e de Shoraîkô exerce une
+ nom propre » peut signifier l'appartenance à un groupe ou quelconque charge civique. Il semble au contraire que
un clan, on ne comprendrait pas l'apparition soudaine et tardive certains cl'entre eux se distinguent par des relations avec
de ce nom clans une famille dont on connaît de nombreux l'armée et l'aclministrati on romaine. ladê est vétéran ; vers
représentants 297• La question est clone loin cl'être réglée, faute l 94, son grand-père Hérode Haîran ('Hpcô81w fopmxou) a
de documents assez précis pour permettre une conclusion. honoré le fils du légat de Syrie-Phénicie. Pour le reste, c'est
Ce qui est particulier clans le cas des nswm, c'est de trouver son activité religieuse qui a valu au père de Hérode Haîran
plusieurs membres de la même famille tenir les premiers rôles de se voir ériger une statue par le Conseil.
à quelques années d'intervalle. Néanmoins, entre Malikû et
Zénobios Zabdilah, il s'est écoulé une vingtaine d'années qui
c. Famme des Bené Aabef (' 'by)
sont justement celles de l'arrivée au premier plan de la famille
des princes de Palmyre. On ne sait quelles ont été les La famille des Bené Aabeî (' · by) a fourni à Palmyre
modifications et les bouleversements au sein des notables de un certain nombre de personnages qui se sont distingués
la ville. Il faut remarquer que, si Zénobios était vraiment au et ont été honorés. Elle est connue par plus de quinze
premier rang clans la colonie, Malikû rend hommage à un inscriptions et quelques tessères 301• Deux des membres
personnage qui est son patron. Sa famille, une des plus de la famille, au moins, ont eu des rela tions avec
anciennes de Palmyre, est apparemment clans un rapport de les caravanes auxquelles ils ont rendu des services (tymrsw
subordination avec un nouveau venu qui ne prend même pas brl.sms brmlkw ''byde CIS 3963 [= Jnv X, 47] ; y1jJbwl' br
la peine de mentionner ses ancêtres. Jsms de Jnv X, 114, ambassadeur en Élymaïde). L'un de ces
La famille de Shoraîkô est un autre cas de famille qui cieux-là, à moins qu'il ne s'agisse d'un autre de leurs cousins,
reste au premier plan, mais elle semble moins ancienne. Elle a été archonte en Mésène (D. ScHLUMBERGER, 1961,
est surtout attestée par quelques inscriptions honorifiques p. 256-260).
295 - On retrouve apparemment la même généalogie sur le revers d'une 300 - D. Schlurnberger pense que ce nom est une preuve de fierté familiale,
tessère en plomb d'Antioche lue par J. T. Milik (DFD. p. 318): [s(p/ymy') parce que le père aussi avait le droit de s'appeler ainsi (D. Sc1-1LUMBERGER,
b]tzby {bt} '/yks ( « Septimia Batzabbai. fille d'Antiochos»). On a sur r avers I 942-l 943b. p. 59. n. 2). Ce gentilice est donné dans des textes postérieurs
I'.E[rrî(l�ticx.) Z17]vo�icx. 11 �cx.01Ài0(0)cx. « Septimia Zenobia, la reine». ù 262 (ibid. p. 59) ; Septimius Alexandros le possède donc depuis très peu
296 - Voir au chapitre 1v. pour quelques cas de personnages importants sans de temps puisque l'inscription qui honore son fils date de 167 (ou de 264,
patronymes. si on suit le palmyrénien). On ne répète pas Julius Aure!ius. que tout le
297 - Voir DFD. p. 258. D'autre part. le nom araméen cle Zénobie est Bat monde possède depuis 212. Il est possible aussi, mais beaucoup moins
Zabbaî (ht;,h_\'). ce qui pourrait signifier que le clan (ou la famille) auquel probable que le nom Septirnius remonte en fait, comme celui cl'Odainat. ù
elle appartient s·appelle Zabbaî en palmyrénien et Antiochos en grec. Or, Septime Sévère. Vue la différence chronologique. il faudrait alors quïl
on n·a aurnne attestation de familles de ce 110111 ù Palmyre. ni de traces de s'agisse du grand-père de ladè. le Hérode llaîran
- nommé dans la généalogie
cette onomastique dans la famille de Nashùm : voir la discussion au du personnage. Mais on ne comprendrait pas qu'il ne mentionne pas ce fait
chapitre v. dans 1 'inscription CIS 3940. Hérode Haîran est la personne honorée en 179
298 M. G,\\\ LII(UWSKI. 1970a. p. 74 (= RSP n" 167 ). Le fondateur s'appelle par la tribu des Zabdibôl ( C!S 3953 ). en même temps que son père est
'/yn' br byrn br '/yn'. ce qui fait remonter au milieu du(' siècle. C'est le honoré par le Conseil ( CJS 3952). Il devait être assez jeune à ce moment
frère de Shoraîkô qui semble être une des principales personnalités de la puisque son petit-fils est encore vivant et actif. même si c'est un vétéran.
famille ( CIS 3952 = lm· V. 3 ; voir le chapitre 11). Voir l'arbre généalogique en 267.
en annexe XVII. 301 - La liste de ces textes a été établie par J. Starcky. /111• X, p. 34-36. à
299 - CJS 3940 (= lm• III. 9). Son nom complet est 'loÛÀtoç Aùp17À1oç compléter par DFD. p. 233-235 qui ajoute le texte J. CANTINEAU. 1930b.
LErrîl�llOÇ Icx.817ç I:rnn�tiou 'AAEscxv8pou îOU ']-lpco8ou et ywlys n" 36. Voir aussi /17\' XII. 48-49. Les tessères citées dans l'/17l' X
'wrlys sp/myws ycf' br '/ksndrws byrn sqkw. Ce dernier nom est une correspondent aux numéros 763. 770. 31 et 34 de RTP. Voir aussi
variante du ,,;1ykwcles inscriptions clu 1( siècle (voir .1. K. STARK. 1971. p. l 02 K. D11KSTRA, 1995. p. l 06-107. L'arbre généalogique est dans
et 116). l'annexe XVII.
Chapitre I: L'identité cil'ique de Palmyre 51
Un symposiarque est représenté sur deux tessères ( slmn La principale différence entre ce clan et la famille de
yrbbwl' mlkw "by de RTP 31 et 34) 302• Son grand-père nswm est évidemment la période relativement restreinte
MaÀlXOç AH:m�LCTou 1oû EÀap17Àou mû Aapa a été honoré pendant laquelle on le rencontre au premier plan. lnv 131
par la tribu des Bené Agrûd (bny 'grwd), selon le texte Inv date de 81 etlnv 114 de 138. Plusieurs textes ne sont pas
131. Le père du symposiarque est lui aussi associé à un membre datés et ne permettent pas plus de précisions. La symposiarchie
de la même tribu dans la dédicace du temple de Belhammôn de slmn y1)1bwl' date sans doute de 120 et son père a pu être
(Inv 48) et à nouveau pour l'érection d'une colonne proèdre quelques années avant. Tout se passe donc dans ces
honorifique (J. CANTrNEAU, 1930b, n° 36). Ce fait a permis à années et la dernière mention du clan est la dalle funéraire du
J. T. Milik de supposer que le clan des bny '' by appartenait à symposiarque (?) en 146-147. La prospérité de la famille dure
cette tribu ,m_ Ce personnage, y11Jbwl' br mlkw br lsms bl)mbl à peu près un demi-siècle, un peu moins que celle de Haîran
''by Iap1pcoÀ1W MaÀlXOU AHmw:rnu mû Aapa apparaît dans bar Bônnê, dont elle est plus ou moins contemporaine.
deux autres textes : la tessère RTP 763 et surtout le texte
honorifique Inv 59 qui le décrit comme proèdre (ou
4. LES GROUPES TRIBAUX
synèdre). Il date du début du 11" siècle, comme Inv X, 57 dans
lequel le Conseil honore un synèdre, fils de 0mµapcrnç Un groupe familial avait d'autres moyens d'asseoir sa
MaÀ1xou 1oû Awaw:rnu. Celui-ci appartient peut-être à la prédominance politique. Les familles et les clans familiaux
famille, si l'on en croit la fréquence de ces noms dans le clan appartenaient à des structures plus larges, les tribus. Le
Aabeî. système s'est transformé au moment de la transformation
La manière dont ces personnages sont liés entre eux, en rrÔÀtÇ, avec l'instauration de quatre tribus civiques, mais
ainsi qu'avec les autres membres du clan, n'est pas toujours il y a eu coexistence des tribus civiques avec les structures
claire ,o-1_ La reconstruction de J. Starcky, illustrée par un familiales et sociales traditionnelles. De plus les tribus
arbre généalogique, est aussi sûre que le permettent civiques ont été très certainement choisies dans l'ensemble
l'abondance des homonymies et les lacunes des textes, très des groupes tribaux préexistants.
rarement datés. Il semble que certaines branches du clan sont Pourtant, à part peut-être pour les symposiarques de la
fort éloignées de celle qui s'achève par le symposiarque. deuxième partie du n" siècle, il est difficile de classer les
Il est néanmoins sûr que des membres de la famille magistrats et symposiarques de Palmyre d'après des critères
occupent, à plusieurs générations cl'écart, les principales tribaux. De toute façon, les mentions de la tribu à laquelle
fonctions qui caractérisent les notables de Palmyre. On observe appartiennent les différents personnages deviennent
à nouveau l'alternance entre fonctions civiques (proèdrie) et rapidement assez rares. Les premières inscriptions
fonctions religieuses (symposiarchie Comme dans la honorifiques du Conseil donnent rarement ces détails. Seul
famille de Bônnê bar Haîran, un notable honoré par des groupes le texte J. CANTINEAU, 1938, p. 76, 11° 29 (fig. mentionne
de la population de Palmyre a comme descendance un la tribu de la personne honorée, et, de surcroît, seulement en
symposiarque et un proèdre. Cela correspond à un mode araméen 307• Il est parfois possible de retrouver à quelle tribu
d'ascension sociale somme toute normal: il fallait s'imposer appartient un personnage, soit parce que le texte le dit
clans son groupe restreint avant de pouvoir briguer des fonctions explicitement, soit par recoupement : le premier
civiques. La famille s'est aussi distinguée dans le commerce symposiarque connu, Lishamsh bar Taîbbôl (Inv IX, l )
caravanier, en particulier par l'intermédiaire de Iarhibôlâ, fils appartient d'après le texte aux bny kmr'. Un de ses
de Lishamsh, qui, entre autres bienfaits, a mené une ambassade successeurs, Iamlikû appartient sans doute aux bny zmr',
en Élymaïde auprès du roi Worocl, pour laquelle il s'est porté parce que son grand-père en faisait partie (d'après Inv
volontaire (aù8mpÉ1coç) 306• Il s'agit peut-être du même 145) 308• Mais il ne s'agit sûrement pas d'une des tribus
personnage que celui qui, à une date comprise entre 88 et 188, civiques. Le tableau qui regroupe les magistrats et
a été satrape en Mésène pour le compte d'un roi local. Le rôle symposiarques note à la suite des noms la tribu, quand on a
de la famille en Basse-Mésopotamie est en tout cas clair clans pu la retrouver (entre parenthèses, précédé de bny, « les fils
la première moitié du u" siècle (Inv X, 114 date de 138). de... » ). Seule sort du lot la fréquence des membres de bny
302 - Le même personnage est peut-être aussi représenté sur le buste prouve le buste coiffé du modius correspondant au texte ers 4458
funéraire d'un prêtre ers 4458, mais le nom manque : il ne reste que son (lacunaire : ... mlkw br lsms br)mbl "by).
patronyme et sa généalogie. Il peut aussi bien s'agir d'un frère ou d'un 306 - Voir M. SARTRE. 1996a, p. 392.
cousin qui serait prêtre lui aussi. Le buste fournit une date 146-147 qui 307 - Le texte ers 3959 (= BS n" 44) mentionne en araméen les bny ydy'bl
correspondrait assez bien à une symposiarchie clans les années 120. qui sont sans cloute une subdivision de bny m'zyn: le contexte est peu clair
303 - Voir J. T. Milik, DFD, p. 233-235. C'est possible. mais non prouvé et ne permet pas de savoir quelle est la fonction de ce clan clans les honneurs
(contra, M. GAWUKOWSKl, 1973a, p. 39). rendus au personnage. Celui-ci appartient aux bny m 'zyn. comme son père
304 - Voir les textes eIS 3988 (= RSP n" 128). 3990 et 4456-4457 ; et la plupart des fidèles du sanctuaire de Baalshamîn.
H. lNGHOLT, 1930, p. 192 (= PAT000!); RTP 770. 308 - Voir DFD. p. 222-225.
305 Mais il y avait peut-être d'autres prêtres clans la famille, comme le
52 Les notables de Palmyre
mtbivl parmi les symposiarques dans la seconde partie du Mav8�mÀamv); CIS 3966 de 64 apr. J.-C. (slmlt br[. .. ] br
ne siècle (DFD, 11° 25-27, p. 253-255). Mais on situe mal dans ydy'bl tdmry' dy mn [bny] m'zyn) 314•
le temps les deux premiers (166 ou 1 36); ils appartiennent Il faut remarquer cette double appartenance des
à la même tribu parce qu'ils sont oncle et neveu, selon une personnages, à la cité de Palmyre et à leur tribu. À cela s'ajoute
tradition dont on a vu d'autres exemples. Le troisième aurait le souci de donner les deux appartenances en parallèle, sans
été symposiarque en 170, selon la reconstruction de préférer l'une à l'autre. Un autre texte, cité par
J. T. Milik (DFD, p. 254), mais il n'est attesté qu'en 193, D. Schlumberger 315, montre que le phénomène pouvait parfois
dans un texte de concession. La coïncidence de date est moins avoir des modalités un peu différentes. Dans le texte bilingue
flagrante dans ces conditions. Ce rapprochement est bien lnv X, 40 de l'agora, Zabdibôl, fils de Ogeîlû, est honoré par
sûr intéressant, mais ne permet pas de tirer de conclusions. des marchands de Palmyre. Il est appelé TiaÀµup11v6ç dans la
Les tribus se partageaient apparemment les grandes partie grecque, mais on a dy 11111 bny m'zyn dans le texte
fonctions et magistratures, y compris la symposiarchie de araméen. Comme le dit D. Schlumberger, « dire qu'on était
Bel 309• Les variations chronologiques, les baisses de prestige, des BNY M'ZYN, ou dire qu'on était Palmyrénien étaient
les disparitions même (celle des bny myt' après 84) échappent deux façons de dire la même chose». En fait, non seulement
en grande partie à la recherche. L'étude de ces tribus donne cette inscription entre dans la même série que les textes cités
quelques pistes à propos de la mise en place des institutions plus haut - elle date d'ailleurs de 81 apr. J.-C. -, mais elle
de Palmyre. On ne peut qu'être intrigué par la manière dont montre aussi comment les réformes institutionnelles de
le système tribal s'est transformé au cours du l"' siècle pour Palmyre sont entrées dans les mœurs. En effet, à moins qu'on
aboutir à celui qu'on peut définir principalement grâce à des ne considère simplement qu'il s'agit d'une eneur de lapicide,
inscriptions datées entre 132 et 199 310• Plus généralement, cette différence entre les deux versions tient peut-être à la
on s'intéressera à la manière dont se définissaient les diversité des publics visés. Le texte en grec, langue de la polis
différents personnages mentionnés par les inscriptions. de Palmyre, met en valeur l'appartenance de Zabdibôl à cette
Certains détails des textes sont intéressants. Dans cité; l'autre, en langue locale, met en valeur son appartenance
plusieurs textes du l"' siècle de notre ère, on trouve, après le à une lignée, une tribu, en somme son enracinement local. En
nom et la généalogie du personnage, le terme tdm1y', quelque sorte, on n'est citoyen palmyrénien que par rapport
« palmyrénien », mais aussi la mention de la tribu. Il s'agit au monde extérieur à la cité, monde qui parle grec. Mais si au
d'abord de deux textes funéraires, le premier publié par contraire on écrit en palmyrénien, on est sûr d'être compris
M. Rodinson (] 950, p. 137 de 52 apr. J.-C.: Haeranes Bonne par ses semblables, Palmyréniens; on a donc moins besoin
Rabbelif Palmirenus phyles Mithenon ; A1pav11ç Bmvvawu de le préciser, car ce qui les intéresse est justement ce qu'on
mû Pa��11Àou TiaÀ�rnp11voç <jrnÀ17ç Ma811vmv ; bym brbwn' trouve dans ce texte : l'appartenance tribale.
brrb'l brbwn' br'tntn brtymytdmry' dy mnpbd bny myt'); C'est de cette manière qu'on peut comprendre une
le second dans le CIS (au numéro 4119, daté de 57 apr. J.-C.: différence du même ordre dans les textes CIS 3924 et 3925
'gylw br 'wsy br khylw tdmry' dy mn pbd bny myt'). On (lnv IX, 6a et b), un peu plus anciens (17 et 19 apr. J.-C.) 316•
peut ajouter un texte bilingue (CIS 4123 de 83 apr. J.-C.: À ce moment qui marque les vrais débuts de l'influence
ymlkw br mqymw 'qlys br mlkw 'bynt br bl'qb br myk' br gréco-romaine sur Palmyre, il n'est pas besoin, en
mt' tdmry' 311) où se trouve le terme« palmyrénien », mais palmyrénien, de dire qu'on est de cette ville. Ce n'est qu'en
sans la mention de la tribu, comme d'ailleurs dans CIS 4193 grec que cela est nécessaire, pour les étrangers, pour leur
daté sans doute de 73 312• À la même époque, on trouve prouver l'appartenance à la ville de Palmyre. Mais, il s'agit
l'expression complète (« Palmyrénien» + tribu) dans des d'une époque où selon toute vraisemblance la cité (rcoÀlÇ)
textes honorifiques comme CIS 3924 et 3925 de 17 et 19 de Palmyre n'existe pas encore.
apr. J.-C. m (non dans la version palmyrénienne, mais dans Le problème est différent avec les textes cités plus haut
le texte grec, par exemple dans CIS 3925 : AÇaÇov pour au moins une raison : la présence, dans la version
lEùEl�llÀOU îO'\J Bapxcnou TiaÀµUpllVOV <j>U Àllç palmyrénienne cette fois, du terme qui signifie palmyrénien
309 - Mê111e re111arque chez J. T. Milik. DFD. p. 309. qui l'explique par le la restitution de la date par J. CANTINEAl' (sur des critères strictement
fait que le sanctuaire de Bel « constituait le temple essentiellement urbain paléographiques) est correcte. Le terme s'applique au mari, 'gylw br 'g' br
et municipal et, à la rigueur, le temple fédéral Jes tribus ». mqymw br bdwdn (Ogeîlü, fils de Ogâ, fils de Moqîmû, fils de Hacldûclan)
310 - BS n" -1-5 de 132 ; R. MouTERDE et A. PomEBARD, 1931. p. 101-115 de et àsa femme, 'mtb' brl bwn' (Amatbê, fille de Bônnê). On peut se clemancler
J
150 ; . . CANTJNEAU, 1936, p. 277, n" 20 ( = BS n" 48) de 171 ; H. lNGHOLT, si cette dernière n'est pas une sœur du fameux Haîran bar Bônnê (?).
1932, p. 278 (ara111éen clans DFD, p. 36-37) de 198: lnF X, 44 de 199. Ces 313 - Avec cette différence qu'il s'agit de textes regravés plus tardivement.
textes sont commodément regroupés par M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 26-31. 314 - C/S 3966 = lnv II, 1 et RSP n" 156.
Il faut leur ajouter maintenant le texte H. J. W. DRIJVERS, 1995a, p. 32-37, 3]5 - D. SCHLUMBERGER, 197], p. 126.
qui donne de nouvelles indications sur les sanctuaires tribaux (voir 316 - Contrairement àd'autres dédicaces honorifiques du sanctuaire de Bel,
chapitre 11). Sur le système clans le cadre de la n:OÀK de Palmyre, voir ces cieux textes sur une base de statue n'ont sans cloute pas été regravés à
dernièrement M. SARTRE, 1996a, p. 386-388. une date plus tardive. D'autres l'ont été parce qu'il fallait les mettre sur les
311 - Le terme équivalent à lchmy' est absent du texte grec. consoles de colonnes des portiques du sanctuaire, érigés dans le courant du
312 - La présence du mot tdmry' ( « Palmyréniens ») permet de penser que 1( siècle.
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre 53
(« tdm1y' » ). La concordance des dates est étonnante ; après C'est surtout en latin qu'on trouve le mot, à Rome , à
les années 50-80, on ne trouve plus de textes qui mentionnent South Shields en Angleterre 325, en Afrique 326, et en Dacie 327•
en langue locale l'ethnique des citoyens de Palmyre 317• Les Ces deux dernières régions correspondent évidemment aux
autres attestations du terme dans l'épigraphie araméenne de zones où les Palmyréniens sont nombreux dans les troupes
Palmyre servent soit à qualifier une institution de la ville de romaines, mais cela n'exclut pas la présence de civils. Ces
Palmyre m, soit à distinguer les Palmyréniens des étrangers inscriptions, en majorité des épitaphes, sont parfois celles
à leur ville 319• de vétérans, qui sont morts là où ils s'étaient installés, mais
On remarque aussi que ce terme est utilisé de manière en gardant une certaine fidélité à leur origine syrienne. Dans
assez récmTente lorsque les Palmyréniens sont en dehors de d'autres cas, il s'agit de civils (parfois des femmes) qui ont
leur cité. Ce n'est évidemment pas surprenant. Le cas se accompagné leurs compatriotes. À Rome, on peut
produit à proximité immédiate de l'oasis, comme pour une soupçonner qu'il s'agit de marchands venus pour des raisons
inscription de dédicace de colonne à Qaryatein où cinq frères commerciales en Italie.
se disent« Palmyréniens » 320• Mais ce terme est précisé par Il faut souligner la relative rareté des textes araméens.
« qui sont à Nazala » (« [dy} bnzly » ). Ils tiennent à se Certes les traditions palmyréniennes étaient parfois
distinguer des gens originaires de Qaryatein-Nazala, alors conservées clans des textes bilingues dont le formulaire
qu'ils sont en train de faire une dédicace au grand dieu de est conforme aux épitaphes comparables de Palmyre 328•
Nazala («'Jh' rb' dnzly»), mais aussi à montrer qu'ils sont Mais ce qui domine dans ces textes, c'est l'impression que,
partie prenante dans la communauté qui les accueille. En hormis la présence de l'ethnique ( « Palmirenus » ou
Syrie du Sud, un texte très lacunaire atteste la présence d'un « Palmira »), ils pourraient provenir de gens originaires de
'A3ptavoç ITaÀµuprivôç 321• n'importe quelle province de l'Empire. On trouve en effet
L'ethnique « palmyrénien » se trouve, aussi et surtout, pour des formules comme « Dis Manibus » qui n'ont rien de
désigner les Palmyréniens dispersés dans l'Empire romain 322• particulièrement palmyrénien, et qui prouvent au
On peut exclure les attestations du terme Palmirenus en latin contraire que ces gens ont bien intégré au moins certains
lorsqu'il est utilisé clans les noms d'unités militaires romaines, aspects superficiels de la culture romaine. On peut même
comme, à Doura-Europos, la XX Cohors Palmyrenorum, ou soupçonner que dans un certain nombre de cas, l'illettrisme
en Afrique, le Numerus Palmyrenorum Sagittariorum 323• de ces gens d'origine sans doute modeste explique l'usage
En palmyrénien, le terme apparaît hors de Palmyre très répandu du latin. Il devait être plus facile de trouver
seulement à deux occasions: un texte de Rome (C/S 3903) et un lapicide connaissant le latin clans ce milieu militaire,
un autre d'el-Kantara en Algérie ( C/S 3908 et CIL VIII, 2515). alors qu'il s'agissait de régions fort éloignées de la steppe
Dans ce dernier texte, bilingue latin-araméen, le mot apparaît syrienne.
dans les deux langues. C'est l'épitaphe d'un soldat, mais le Ces exemples datent tous du IIe siècle au plus tôt. Les
mot sert aussi d'ethnique (pal[mirenus] sag[ittarius]). Le soldats palmyréniens sont assez nombreux clans l'armée
terme apparaît aussi une fois en grec dans un texte de Rome romaine, mais surtout à partir du milieu de ce siècle. C'est
(C/S 3902 = IGUR I, n° 119: le personnage est 'Abprnvoç ce qui fait la différence avec les attestations de l'expression
ITaÀµuprivôç dans cette dédicace de 236). Le texte est bilingue à Palmyre même au cours du r"r siècle.
mais la précision n'apparaît pas en palmyrénien : qui d'autre L'utilisation du terme à Palmyre dans un autre contexte,
qu'un Palmyrénien pourrait utiliser cette langue à Rome? dans cette période comprise entre 52 et 83 apr. J.-C., est sans
317 - Le terme apparaît pourtant dans deux textes mal datés, mais sans le texte CIS 3923 en 51 apr. J.-C. (ou de TiaÀ�LDPllVWV 6 817�LOç dans le
doute plus anciens (r" siècle av. J.-C. ?) : lnv XI, 97 et J. CANTINEAU, 1936, texte Inv IX, 12 de juin 25). Ou bien, beaucoup plus tard, en 259-260. dans
p. 350, n" 25 (ligne 9). Dans le second, le mot [t]dnuy' est isolé et il y a le texte CJS 3937, Septimius Worod est appelé bylw( tdm1y' (en grec
trop de lacunes pour qu'on sache ce qu'il désigne: M. Gawlikowski pense pouÀE1YCTJç TiaÀ�rnp1ivôç).
qu'il s'agit de membres de plusieurs tribus, ce qui expliquerait l'emploi de 319 - Par exemple les marchands palmyréniens (tg1y' td1111y') de Inv X,
l'ethnique (1973a, p. 57, n" 3; voir aussi J. T. Milik, DFD, p. 303-304). Ce 114 (voir aussi les textes lnv X, 7 et 38).
serait un premier signe d'une conscience« civique», par opposition aux 320 - CIS 3911 de juillet 146 (cf. DFD, p. 89).
références tribales (voir plus haut sur le gbl tdm1y'). Dans le premier texte, 321 - WADDINGTON 2440 (cf. DFD, p. 94); le texte provient cl'Ahiré.
le terme vient terminer une liste de noms assez lacunaires. J. Teixidor 322 - Sur les Palmyréniens de l'étranger, voir l'annexe XIII. 1-4.
(lnv XI, p. 58, ad lac.) émet l'hypothèse probable qu'il s'agit de 323 - Sur cette unité, voir Y. LE BoHEC, 1989, p. 120-140.
« Palmyréniens habitant hors de Palmyre », peut-être des commerçants, ce 324 - JGUR 11° 117 (= CIL VI, 50; ILS 4334); CIL VI, 19134 (= CIS 3905);
qui expliquerait la mention de l'ethnique, afin de les distinguer d'étrangers CIL VI, 3174 (DFD, p. 229).
non palmyréniens (voir ù?fi·a). Les deux inscriptions, ainsi que J. CANTINEAU, 325 - CIS 3901 = RIB I 065.
1936, p. 352, n" 26, sont peut-être en fait trois parties du même texte (voir 326 - À Lambèse, CIL VIII, 3917 (= 18202 ; CIS 3909) ; à el-Kantara, ILS
M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 58). P. Piersimoni ( 1995, p. 257) se demande 9173 ;AE 1933, 44 et 104 (= J.-B. CHABOT, 1932, p. 266); CIL VIII, 2505
si le terme n'est pas utilisé dans cette sorte de loi sacrée (J. CANTINEAU, (= 18005); à Timgad, AE 1936, 33.
1936, 11° 25) pour bien spécifier que ces fonctions religieuses sont réservées 327 - CIL III, 907 (= 7693); !DR III/2, 348.
aux Palmyréniens de souche, mais elle conclut que rien n'est sûr sur ce 328 - Par exemple, la version palmyrénienne du texte AE 1933, 104 (avec
point ( « This possibility slzould not be excluded »). J.-B. CHABOT, 1932, p. 266 pour le palmyrénien).
318 - Par exemple, gbl tdm1y' équivalent de TiaÀµup11vmv 11 nÔÀK dans
54 Les notables de Palmyre
doute un signe que c'est le moment où, du point de vue Une proposition récente à propos de la chronologie du
institutionnel, beaucoup d'événements se produisent 329• C'est temple de Bel permet de faire coïncider une théorie déjà
en 51 apr. J.-C. qu'apparaît pour la première fois la polis de ancienne de D. Schlumberger avec celle qui placerait les
Palmyre 330, soit un an avant le texte qui concerne Haîran, débuts de la noÀ.K de Palmyre clans les années 50-70. Selon
fils de Bônnê (byrn br bwn '), et en 74 apparaît pour la D. Schlumberger 334, sur une même poutre (poutre B) sont
première fois la Boulè 331• On a vraiment l'impression que, représentés les quatre ancêtres des tribus (face a) ainsi que
pendant cet intervalle d'une vingtaine d'années, les quatre groupes de prêtres (donc un par tribu) qui sacrifient
institutions de la cité telles qu'on les connaît plus tard sont sur quatre autels (fig. 14). On se sert parfois de cet argument
mises en place et que la cité de Palmyre tend à devenir tout à pour prouver l'ancienneté du système tribal civique, qui
fait gréco-romaine. Le rôle d'un personnage comme Haîran, remonterait au moins à 32 apr. J.-C., comme le prouverait
fils de Bônnê est à mettre en valeur : il occupe des fonctions l'inscription de dédicace du temple (Jnv IX, 1 ). Mais si, comme
importantes dans la cité - il est honoré par les prêtres de le croit M. Pietrzykowski 335, les poutres ont été mises en place
Bel 332 -, et deux des six textes trilingues conservés le à une date qui est plus proche de 80, cela correspondrait assez
concernent. Or ce personnage, au moins dans le texte de bien à ce que révèlent les premiers textes qui font état
fondation de la tombe, juge nécessaire de préciser à quelle d'institutions civiques à Palmyre 330• Le seul argument qui va
tribu il appartient, et ce, clans les trois langues qu'il utilise. contre cette théorie est l'existence d'une qrnÀ.11 KÀ.aufüÔ'.ç en
La cité vient cl'être instaurée, mais l'appartenance tribale 79-80 (CJS 4122 = Inv VII, 6). Or Claude ayant été au pouvoir
conserve pourtant son pouvoir. Peut-être faut-il plutôt entre 41 et 54, il est nécessaire que le nom de la tribu ait été
interpréter cela comme un désir de se nommer de façon donné à cette période 337• Cela incite à faire remonter la date
complète : on se dit citoyen de Palmyre et on précise ensuite de la mise en place des institutions plus près de 50 que de 80,
à quelle tribu civique on appartient. Cette explication rend en tout cas pendant la période où Haîran bar Bônnê domine
aussi compte de l'ordre dans lequel les termes sont placés. apparemment la vie politique de Palmyre.
De manière tout à fait naturelle, on commence par le général
avant de passer au détail. Comme ailleurs, on précise sa tribu
5. LA PARTICIPATION CIVIQUE
après sa citoyenneté. En effet, les deux tribus qui sont
explicitement mentionnées dans ces textes correspondent Un certain nombre de familles semblent avoir dominé
sans cloute aux tribus civiques. Ce sont les bny m 'zyn et les la vie civique de Palmyre à différentes époques. Celles
bny myt' qui ont de grandes chances d'être deux des quatre décrites dans ce chapitre ne sont pas les seules connues et
tribus principales. C'est sans doute le fait du hasard que les on aurait pu facilement multiplier les exemples 338• Certains
bny myt' soient nommés deux fois dans les deux textes personnages ont aussi été présents au premier plan sans
funéraires de ce type qui sont connus, mais cette tribu avait nécessairement assumer de charges officielles (comme
peut-être une raison particulière de mettre en valeur son Haîran bar Bônnê). On verra dans les chapitres suivants qu'il
appartenance à la cité de Palmyre. Haîran, fils de Bônnê, y avait cl'autres domaines dans lesquels se distinguaient les
dont on a noté le loyalisme, était alors un personnage notables de Palmyre (commerce caravanier, constructions
important à Palmyre, et on peut soupçonner qu'il fait partie diverses) et par lesquels ils mettaient en valeur leur
de ceux qui ont mis en place le système, cl'où une forte prééminence. Il semble bien, en ce qui concerne la vie civique
propension à l'appliquer jusqu'au moindre détail 333• de la ville, qu'un nombre limité de familles soit représenté
329 - Ce qui s·accorde avec la théorie de M. GAWLJKOWSKI. 1973a, p. 47- 335 - M. PIETRZYKOWSKI, 1997, p. 132.
48. 336 - En ne tenant pas compte des textes regravés et peut-être réécrits.
330 - C!S 3923 = lnl' IX. 8. 337 - Voir au chapitre II. pour le problème de cette tribu au nom romain.
331 - J. CANTINEAU. 1933. p. 175. n" 2. Il faut noter que c'est le même byrn 338 - Par exemple la famille de Hagegû, synèclre en 112 (lnv X. 69) ; la famille
br bwn' qui est honoré clans ce texte. est connue aussi par une série de bustes funéraires ( CIS 4336, 4468. 4537),
332 - lnl' IX. 20. de 56 (grec) et 60 (araméen) apr. J.-C.: sans cloute pour une dédicace au dieu anonyme (/111• XI, 2) et surtout par l'un de ses membres.
avoir contribué ü la décoration du temple de Bel (en quelle fonction. artiste un certain Shoadû bar Taîmê. connu pour avoir honoré son père à Palmyre en
ou commanditaire '?) ; voir Îl(fi·u et le texte J. CANTINEAU, 1933. p. 175. 127 ( CJS 3920 = /111' IX. 32) et pour un autel dédié aux dieux ancestraux ü
n" 2. Son fils est sans doute symposiarque au début du siècle suivant (RTP. Rome (CIS 3904). Il s"agit très certainement du fils d"un cousin germain du
p. 203. à propos du n" 463). et son petit-fils proèclre du Conseil en 137 lors synèclre. Les témoignages sur cette famille ont été rassemblés par J. T. Milik,
de la promulgation du Tarif ( CIS 3913). Sur ce point. voir supra et DFD. DFD, p. 266-268. Il les rattache à un clan Ieclîbel auquel appartiendrait aussi
p. 72-73 et 226-227. le syrnposiarque Iarhaî Agrippa de l"inscription H. INGHOLT, 1926, p. 128-141
333 - Le premier mot de la troisième ligne du texte grec K[...lHN est restitué en 243 (DFD, p. 261-266, n" 31). Ce rapprochement ü plus d"un siècle de
K[OCTprJîhiv par J. CANTINEAU. 1933. p. 175 et K[n0117]v par J. T. Milik, distance est seulement possible. Le clan Ieclîbel de Hagegû et Shoaclû n'a
DFD. p. 226. Bien quïl soit tentant de mettre en rapport la restitution de sans cloute rien à voir avec les bny ydy' bl des textes C!S 3959 / BS n" 44) et
J. T. Milik avec la réforme des institutions de Palmyre. le texte palmyrénien BS n'" 23 et 34, fraction de la tribu des bny m 'zyn, connus surtout au sanctuaire
prouve que c·est parce que Haîran. fils de Bônnê. a fait des décorations de Baalshamîn, mais attestés aussi clans le secteur du sanctuaire cl' Allât
clans les édifices de dieux que le Conseil et le Peuple de Palmyre !"honorent. (C/S 3966). Ce clan tiendrait son nom du Ieclîbel du texte BS n" 60. né sans
334 - D. SCIILUMBERGER. 1971, p. 128-13). cloute vers 170 av. J.-C. (voir M. GAWLIKOWSKI, 1990b, p. 101-108).
Chapitre I: L'identité civique de Palmyre SS
clans la plupart des charges officielles. En raison du caractère notabilité dans le monde grec. Sur ce point au moins,
lacunaire des sources épigraphiques, on n'a pu retrouver l'exemple de Palmyre est en partie conforme à ce modèle.
aucun parent de certains des magistrats connus. Néanmoins les exceptions (personnages dont on ne connaît
Néanmoins, pour les personnages les plus importants, pas la famille) sont suffisamment nombreuses pour qu'on
il est bien rare qu'on ne connaisse pas au moins un membre s'abstienne de tout jugement définitif. Un autre trait
de leur famille qui se serait distingué d'une manière ou d'un caractéristique est l'accumulation des charges et des
autre. Les Palmyréniens qui sont connus par plusieurs honneurs par des notables qui gèrent l'ensemble des
inscriptions font régulièrement partie de familles bien magistratures civiques 344• Or ce phénomène n'apparaît pas
attestées. L'exception la plus marquante est Worod, dans la dans la documentation à Palmyre avant lem" siècle. Quelques
deuxième partie du m" siècle. Sa famille n'est connue que magistrats ont certes eu des fonctions à plusieurs reprises
par la tombe familiale (tombeau-temple 11 ° 36), mais cette depuis le I"' siècle 345 et eu des carrières civiques bien remplies
attribution a été contestée récemment par E. Will, avec de (en particulier Malê Agrippa, même s'il n'agit pas seulement
bons arguments. Worocl est représentatif d'une période de en tant que magistrat 346).
changement à Palmyre, puisqu'il est aussi le seul exemple D'autres personnages ont aussi eu une présence
sûr de cumul de la symposiarchie avec une fonction civique. marquante à Palmyre, au milieu du 11° siècle, mais n'ont pas
Les informations sont très lacunaires sur la participation eu de fonctions civiques officielles. Soados, fils de Bôlîadâ
du reste de la population. On connaît les notables, et sans et Marcus Ulpius Iarhaî ont peut-être eu des fonctions
cloute surtout la partie la plus aisée, mais on ne sait pas à officielles (la dynasteia du premier, ou l'éventuelle
quoi précisément correspondait le 8i7�toç. Or, il accompagne synocliarchie du second), mais semblent avoir été à l'écart
souvent la �ouÀtj des inscriptions honorifiques. des institutions proprement politiques, pour se consacrer
Le Conseil lui-même est une institution dont la surtout au commerce caravanier (voir chapitre m).
composition reste difficile à saisir. En effet, comme le Il faut en fait attendre le milieu du m" siècle, après la
remarque J. Teixidor 33'\ il y avait peut-être à Palmyre, une transformation de Palmyre en colonie romaine, pour trouver
Boulè sans bouleutes, puisque ce terme apparaît seulement des décrets qui décrivent des carrières civiques un peu
en 258-259 pour Worocl. Sa suggestion sur la constitution développées. Ils concernent Zénobios Zabclilah de la famille
du Conseil (président, secrétaire, archontes, décaprotes) a de Nassoumos nswm (CJS 3932 de 242-243), Septimius
été rejetée par M. Sartre 340 qui conclut que « l'explication Worocl (C/S 3937-3943, après 258) et enfin Julius Aurelius
de cette absence de bouleutes dans les textes funéraires nous Malikû (lnv X, 115) qui a mené sa carrière sans doute au
échappe». Ce qui est curieux justement est que cette absence milieu du m" siècle. Sans atteindre la précision de certains
ne se limite pas aux textes funéraires, mais concerne aussi textes cl'Asie Mineure, on peut croire qu'à ce moment les
les textes honorifiques. Aussi peut-on penser avec M. Sartre inscriptions prennent pour modèles les décrets détaillés des
qu'il n'est pas impossible que « la boulè de Palmyre soit régions proches d'Asie 347• Les précédents concernent parfois
peuplée de synedroi, à moins que ceux-ci ne forment une des magistrats, mais en général ceux-ci ne voient
commission spécialisée au sein de la boulè » 341• Il est mentionnées qu'une ou deux étapes de leur carrière.
vraisemblable que, là comme ailleurs, ce Conseil était formé Le processus semble en fait commencer à la fin du
de membres nommés à vie 342, mais rien ne permet de n" siècle, avec le texte H. lNGHOLT, 1932, p. 278. Le dénommé
conclure sur ce point. Aelius Bôrrâ est lcnpm17Yoç bù 1:17ç] dp11v11ç (restitution
En tout cas, une grande partie des membres attestés du assurée par la version palmyrénienne, 'strtg' dy 'bd slm'
Conseil (synèdres et proèdres) appartiennent à des familles « stratège qui a fait la paix») et il a assumé cette charge de
importantes, même s'il y a des exceptions. Celles-ci stratège plusieurs fois. L'année suivante, Ogeîlû, fils de
empêchent de conclure à la formation de cercles fermés de Maqqaî est aussi remercié pour ses stratégies contre les
notables qui monopoliseraient les fonctions au sein de la nomades ; il a aussi été plusieurs fois synodiarque et a mené
cité 343• C'est probable, à l'exemple des cités cl'Asie Mineure, toute sa carrière politique avec éclat et gloire (Jnv X, 44). Le
mais l'étude des carrières municipales seules ne permet pas texte C/S 3932 est le seul autre exemple dans lequel cette
de savoir si ce monopole est réel. M. Sartre met en particulier notion de carrière politique est précédée de titres de fonctions,
l'accent sur le caractère familial, « quasi dynastique » de la qui en sont comme le couronnement. Si le texte Inv X, 115
339 - J. TEIXIDOR, 1984. p. 63. 346 - Celui-ci (voir note précédente) a fourni de l'huile aux Palmyréniens
340 - M. SARTRE, 1996a, p. 388. et aux étrangers, ce qui aurait pu faire penser éventuellement à la
341 - M. SARTRE, 1996a, p. 389. gymnasiarchie ou à l'agoranomie; c'est en fait pendant son secrétariat qu'il
342 - M. SARTRE, 1991, p. 129. agit comme évergète. La construction du temple de Baalsharnîn est un autre
343 - Pour l'Asie Mineure, voir F. QuAss, 1993. p. 382-394. de ses bienfaits, mais elle est détachée de toute fonction civique.
344 - M. SARTRE. 1995, p. 252-257. 347 - Le seul exemple syrien a été retrouvé à Apamée: inscription en
345 - Un anonyme, secrétaire au moins deux fois au r" siècle (J. CANTINEAU, l'honneur de L. Iulius Agrippa. publiée par J.-P. REY-COQUAIS, 1973,
1933. p. 177, 11° 3; date d'après M. ÜAWLIKOWSKI. 1973a, p. 72); Malê p. 41-46, n" 2 (début du 1!' siècle).
Agrippa. deux fois secrétaire (C/S 3959 = BS n" 44).
56 Les notables de Palmyre
entre dans la série, c'est en partie parce que la carrière du Quoi qu'il en soit, peu de textes renseignent sur les
fils est complétée par celle du père. Le fils, Malikû, a été éventuelles différences de statut au sein de la population
stratège et agoranome et son père a exercé toutes les liturgies. palmyrénienne. La présence cl'affranchis ( br br' en araméen,
Les deux critères de la notabilité (l'exercice de plusieurs à1tEÀEÛ8Epoç en grec) est bien attestée et on en connaît un
fonctions et l'aspect dynastique) sont présents dans le même certain nombre. Les esclaves apparaissent clans le texte du
texte, ce qui en fait un modèle 3•18• Tarif (C/S 3913, II, 2, 4-6 par exemple) et clans certains textes,
Mais le texte le plus caractéristique de ces comme C/S 4115bis (/nv IV, 18b). Au sein de la population
comportements (au moins au point de vue épigraphique) est libre, il n'existe pas de différences attestées par l'épigraphie.
C/S 3942 (= Inv III, 7) dans lequel la carrière de Septimius En fait, ce qui semble probable, à la suite des études
Worod est décrite avec un soin du détail inégalé à Palmyre. prosopographiques faites plus haut, est l'existence d'une
Au moment où Palmyre semble sortir du cadre civique véritable spécialisation des fonctions, au moins jusqu'à la
traditionnel est gravé le texte peut-être le plus conforme aux fin du nl° siècle. Il existait peut-être deux types de carrières
usages des notables d'Asie depuis au moins le I"r siècle distincts pour les enfants des notables dePalmyre. Ceux qui
(carrière civique complète en plus des fonctions clans le étaient consacrés aux dieux devaient devenir prêtres, mais
domaine religieux et clans l'administration impériale 3�9). En ne pouvaient sans cloute pas entrer dans la carrière« civile »
effet, au moment où Worocl est honoré de cette manière par municipale. Si cette hypothèse se vérifiait, ce serait
le Conseil (sans cloute vers 270), cela fait longtemps que assurément une grande différence avec les carrières de
Haîran, le fils cl'Ocl a inat, est appelé exarque des notables clans le reste du monde hellénisé 352•
Palmyréniens (Ëçapxoç TiaÀµ up11vwv, équivalent de Toute théorie sur le fonctionnement des assemblées ou
l'araméen, rs tdm wr, « chef de Palmyre »), au témoignage sur la participation civique se heurte à l'absence de sources,
de C/S 3944 (octobre 251). ce qui n'est pas une preuve de leur inexistence, mais prévient
L'assemblée duPeuple est encore plus mystérieuse que toute discussion à ce sujet. Les décrets honorifiques sont
le Conseil. Le mot È K K À 11 cr{ a lui-même ou ses l'essentiel de notre documentation ; la seule exception est le
dérivés n'apparaissent pas épigraphiquement 350• Aucune décret qui se trouve au début du Tarif. Or les inscriptions
information n'existe sur cl'éventuelles réunions du Peuple, honorifiques ne formaient sans cloute qu'une partie
excepté les mentions de décisions du 817 �Loç clans les minoritaire des décisions prises par les assemblées. Comme
inscriptions. L'existence cl'un secrétaire du Conseil et du clans les cités cl'Asie Mineure, on peut penser que le rôle de
Peuple (C/S 3913, Tarif, I, 3) implique aussi l'existence l'assemblée était principalement formel, même si le Peuple
cl'une assemblée du Peuple, que ce personnage dirigeait. pouvait s'exprimer, principalement par des manifestations
On sait qu'en Asie Mineure, le 8ihtoç, l'ensemble des de sa satisfaction ou de sa mauvaise humeur m_ Il ne faut
citoyens, ne correspondait pas nécessairement à la pas se laisser tromper par le caractère unique du texte, mais
population libre de la cité, en particulier les ruraux 351• On peut-être est-il nécessaire de souligner que le Tarif est
ignore totalement ce qu'il en était à Palmyre, mais c'est promulgué par un décret du Conseil seul, sans que soit
peut-être pour cette raison que certains tiennent à préciser mentionné le Peuple. Il se pouvait que certains honneurs
clans les inscriptions qu'ils sontPalmyréniens (td1111y'), donc viennent de l'initiative d'un membre de l'EKKÀ1101a mais fü'
qu'ils appartiennent à la communauté civique, au gbl td1111y', il semble que les décisions importantes étaient prises par le
des premiers textes. Conseil, expression des notables de Palmyre.
348 - Mais l'inscription est aussi remarquable par son caractère unique. Si laborieuses». Ce qu'il écrit est bien entendu valable surtout pour l'Asie
les notables palmyréniens étalent avec complaisance la liste de leurs Mineure. Les sources sont beaucoup moins nombreuses pour la Syrie.
ancêtres, lm• X. l l 5 est le seul cas clans lequel les fonctions d'un aïeul sont 352 - Comme tous les arguments u silentio. il suffirait d'une seule
mentionnées.C'est une grande différence avec r Asie Mineure (M. SARTRE, découverte pour apporter une contradiction définitive. Néanmoins. ce qui
1995. p. 254). augmente la probabilité de cette théorie est le fait que le seul contre-exemple
349 - Voir M. SARTRE, 1995, p. 256-257 et la note 252 qui donne la d'un corpus assez important apparaisse à l'extrême fin de la période, à un
bibliographie sur 1• accession des notables provinciaux aux ordres moment où le contexte civique a visiblement évolué.
sénatoriaux et équestres. 353 - F. QuAss. 1993, p. 395-416 : selon l'auteur, r ekk/esia est surtout un
350 - Sur cette institution qui s'est maintenue partout à l'époque romaine, forum pour les débats entre notables. Le peuple, lui, réagit. Le fait qu'il
même si elle a perdu de sa souveraineté, voir I. LÉVY, 1895, p. 205-218 et s · exprime seulement par ces démonstrations est une autre preuve de sa
F. QuASS, 1993, p. 353-422 (surtout p. 394-418). faiblesse et de sa dépendance. On n'a aucune preuve de manifestations de
351 - Voir F. QuAss. 1993, p. 355 sur la question du nombre de présents aux ce type en ce qui concerne Palmyre.
assemblées. Il avance l'hypothèse que les ruraux participent peu aux 354 - F. QUASS, l 993, p. 4 l 2.
délibérations, même si on a des exemples de la présence des « classes
ETHNIQUE DE
A - Le système tribal : p. 57. Leur domination est souvent mise en rapport avec
1 - Les généalogies des Palmyréniens: p. 57. l'existence de tribus, bien attestée par les textes et des
2 - Les noms étrangers: p. 59. parallèles aussi bien historiques qu'ethnographiques. On a
3 - Surnoms et subdivisions familiales: p. 63. montré au premier chapitre que la création de tribus civiques
4 - Les Bené Mazîn et les Bené Iedîbel: p. 65. est à mettre en rapport avec l'instauration d'une rcÔÀtç à
B - Tribus et organisation civique: p. 66. Palmyre selon un modèle connu ailleurs dans le monde
1 - Tribus civiques et traditionnelles: p. 66. grec Mais il existe, en parallèle, des tribus qui sont a priori
1
•
2 - Les quatre tribus : p. 69. indépendantes des institutions de la cité et qui semblent être
3 - Les Bené Zabdibôl: p. 72. des survivances de la période antérieure. Elles représentent
4 - Les Bené Mathabôl: p. 75. l'organisation qui prévalait à Palmyre avant la conquête
C - Les différents niveaux de la topographie religieuse : p. 78. romaine et ont sans doute des rapports étroits avec les tribus
1 - Le sanctuaire de Bel: p. 79. qui nomadisent en Palmyrène (et ailleurs) à la même période.
2 - Le sanctuaire de Nabû : p. 81. Avant d'étudier les relations entre Palmyre et le monde
D - Arabes et Araméens à Palmyre: p. 87. proche qui l'environne, il importe surtout d'étudier le
l - Questions d'onomastique: p. 88. contexte dans lequel vivait la population de Palmyre. Outre
2 - Nomades et sédentaires à Hatra: p. 89. les différences institutionnelles qu'on a pu noter, Palmyre
3 - Le peuplement de la Palmyrène: p. 91. avait une identité propre, en particulier à cause de l'origine
4 - La Palmyrène entre nomades et sédentaires: p. 95. ethnique de ses habitants, pour une partie sédentarisés depuis
peu. L'importance qu'on accorde à cet aspect fait qu'on a
La civilisation de Palmyre est marquée par le mélange souvent tenté de retrouver dans les sources des traces des
entre un modèle gréco-romain prégnant et des traditions structures tribales dans lesquelles se regroupait la population.
locales fort vivaces. Si Palmyre est une cité grecque, elle Ainsi, les longues généalogies qui apparaissent dans les
inscriptions funéraires et honorifiques sont souvent
est, aussi et surtout, une ville sémitique aux traditions
comparées à celles du monde arabe de l'époque islamique.
profondément ancrées. Un des enseignements principaux du
Or justement, c'est sans doute par l'étude des noms que
chapitre I est de montrer de quelle manière s'effectue le
portaient les habitants qu'on peut essayer d'avoir la vue la
mélange au sein des institutions de la cité.
plus juste possible du fonctionnement de ces structures. C'est
Ainsi, le fait que les carrières « municipales » sont
en particulier dans les généalogies et les mentions
apparemment différentes, selon qu'il s'agit des magistratures
d'appartenance tribale que peuvent se manifester les relations
civiques ou bien des fonctions religieuses, est un des points
entre les différents groupes qui constituaient la population
par lesquels Palmyre se différencie des cités d'Asie Mineure.
de Palmyre. Cet ensemble de données onomastiques et
Les fonctions de grand prêtre, sans même parler de l'asiarque
familiales permet de saisir de manière un peu plus précise
ou du prêtre impérial, sont le sommet de la carrière de leurs
le fonctionnement de la société palmyrénienne.
magistrats ; ce n'est pas le cas à Palmyre. Certes, des prêtres
du culte impérial sont attestés ; il ne s'agit cependant pas de
magistrats, mais de prêtres du culte qu'on pourrait qualifier A. L'APPARTENANCE DES HABITANTS AU SYSTÈME
de « poliade », celui de Bel. « TRIB AL » À P ALMYRE
S'il y a un point commun avec le reste de l'Empire,
1. LES GÉNÉALOGIES DES pALMYRÉNIENS
c'est que là comme ailleurs, des familles dominent la vie
publique et forment de véritables dynasties. Il semble La documentation épigraphique offre de nombreux
important de mieux définir cette domination en posant en renseignements sur les liens tribaux ou claniques et les
particulier la question des moyens dont disposent ces relations familiales à Palmyre. En effet les familles et les
notables pour ancrer leur pouvoir. grandes traditions familiales sont une des bases de
1 - Sur l ïnstitution de la rrÔÀK. cité composée de tribus, une caractéristique aussi M. PIÉRART, 1985, p. 169-190, avec les références bibliographiques
du monde grec, voir par exemple Éd. WILL, 1991, p. 64 et suivantes. Voir qui y sont citées.
58 Les notables de Palmyre
l'organisation sociale ; comment expliquer autrement de Shoadü, et que le nom de ce dernier est en fait au génitif
l'importance des généalogies dans une grande partie du (on a dans le texte yuvàiKa foa8ou EÀa011Àou Bap011). On
corpus épigraphique de l'oasis ? On peut donc partir de ces peut se demander dans ce cas combien de générations
éléments et de l'onomastique des habitants pour essayer de séparent réellement Ioa8oç et sa femme de l'ancêtre Bap011 6,
reconstruire une partie du système de relations sociales et puisque le texte funéraire lnv IV, 12 (daté de 164) qui
familiales dans lesquelles vivaient les Palmyréniens. En concerne le père de Shoadû ajoute un nom à la liste : le père
effet, leur nom ne se réduisait pas au nom personnel, mais s'appelle en effet 'lhbl br mlkw br zbdbwl brt' (« Elahbel,
comprenait aussi la liste des ancêtres. Cela replaçait le fils de Malikü, fils de Zabdibôl Bartê » ). Cette généalogie
personnage dans une lignée qui permettait au lecteur fait remonter ::in mnin..;; :m miliPn rlu 1" siècle. 1
contemporain du texte de déterminer la position dans la Les généalogies peuvent parfois être très longues,
société de celui dont il avait l'inscription sous les yeux:_ comme dans le texte C/S 4130: mtny br nwrbl br mlkw br
L'importance que les généalogies palmyréniennes semblent tymb' br mtny br bwn' br mtny dy mtqrh mhwy (« Matnaî,
généralement prendre dans les textes mérite qu'on s'y attache fils de Nûrbel, fils de Malikü, fils de Taîmhê, fils de Matnaî,
un peu plus, en essayant de déterminer quelle est la confiance fils de Bônnê, fils de Matnaî qui est surnommé MHWY » ).
qu'on peut leur accorder 3• Ce fondateur d'un tombeau de famille, en 95, juge utile de
Un Palmyrénien est généralement désigné par son nom préciser le nom de son ancêtre à la septième génération,
suivi du nom de son père, mais il est très rare qu'on se sans doute parce qu'il est fier de cette longue lignée, qui
1
contente du patronyme; on remonte souvent jusqu'au grand remonte au r" siècle avant notre ère. Il semble que les
père et parfois plus loin. Les filiations sont généralement généalogies extensives soient le cas le plus courant dans
indiquées en araméen par la présence du mot br. De même l'épigraphie palmyrénienne, même s'il est rare qu'on
les versions grecques emploient, d'une manière normale, remonte au-delà de la cinquième génération. Mais à toutes
l'article, sauf si le nom du personnage est aux cas directs les époques, jusqu'à la fin de la période, se trouvent cités
(nominatif et accusatif), comme c'est la règle. des ancêtres aussi lointains que le Shîlâ, arrière-arrière
Mais on peut citer d'assez nombreux textes qui semblent grand-père de Ogâ Séleukos de CIS 3934 ( « Julius Aurelius
suivre une autre règle, sans qu'elle soit toujours Ogâ qui est surnommé Séleukos fils d' Azîzü Azîzû
compréhensible. Un texte (Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI, Shîlâ 'ywlys 'wrlys 'g' dy mtqr' slwqws br 'zyzw 'zyzw
1986-1987, p. 165, n° 3) donne les noms suivants: foa8oç s'yJ').
EÀa011Àou MaÀ1xou 1:0û Bap011. En araméen, on a s'dw br Pourtant, il existe au moins une série de textes qui
'lhbl mlkw brt' (« Shoadû, fils d'Elahbel Malikü Bartê »). remontent rarement au-delà de la deuxième ou de la troisième
En araméen, le mot br (« fils ») est absent au-delà de la génération : ce sont les inscriptions gravées sur les autels au
deuxième génération. 11 est remplacé par une simple dieu anonyme 7• Ces textes sont d'une nature plus privée, ce
apposition, tandis qu'en grec l'article se trouve seulement qui peut expliquer la taille réduite des généalogies. Leur
avant le nom de celui qu'on peut considérer comme l'ancêtre date peut être un autre facteur, puisqu'ils sont généralement
dt1 cla11, J?t1isqt1e so11110111 acl1èvc les géï1éalûgies de tû11s lês assez larùifs (III° siècle le pius souvent), c'est-à-dire à un
membres connus de la famille .j. moment où les mentions de tribus et de groupes familiaux
Dans un autre texte proche de la Grande Colonnade, le étendus sont devenues plus rares, et où on assiste à un certain
même personnage est appelé Ioaôoç EÀa011Àou Bape11 5• recentrage sur des cercles familiaux réduits.
Une génération, celle du grand-père, MaÀ1xoç, a disparu. On a souvent tenté d'interpréter les variations qui
L'article a lui aussi entièrement disparu, alors qu'on aurait existent dans l'expression des généalogies. Ainsi, il apparaît
pu l'attendre, puisque le texte est une dédicace pour la femme que les généalogies ne sont pas toujours complètes, et qu'il
2 - Voir K. 0JJKSTRA, 1995, p. 13 avec les références de sa note 14. Il explique the word br in a genea/ogica/ sequence \lery ofien coincides with the
que, dans une société segmentée (tribale). plus la généalogie d'un omission cd' u number cd'generations so that the fast name ucls as a c/an
personnage est longue. plus ses possibilités d'associations sociales sont indication. » Page 96, il résume bien les difficultés qui rendent difficiles
nombreuses. La longueur de la généalogie exprimée dépend en fait du but les reconstitutions de généalogies d'après les inscriptions de Palmyre:
recherché par le rédacteur et k nombre de parents plus ou moins éloignés « .. . the.fàct tlwt sel!mi11g/_y al mndom one or more 11u111es ure dropped f ... }.
qu'il désire irnpliquer. Mais on ne peut négliger d'autres contraintes cornrne lt indicatl!s that geneu/ogies ure highlr 11111"l!!iC1b!e CIS C/11 inslrw11ent for
la place disponible sur la pierre, ou le désir de rernonter à un ancêtre ident(fïcation pwposes, especiu//y as no clue is prol'icled on the criteriafor
particulièrement important. "te/escoping ", apartfiw11 the suggestion that renc)l\'lled ancestors retained
3 - On trouvera clans P. P1ERSJMONI, 1995, p. 254-255. un court exposé their position more easi/y than less promi11ent ones. » La suite de l'ouvrage
systématique de la question. de K. Dijkstra prouve d'ailleurs que son constat est sans doute un peu
4 - La généalogie du fils de Shoadû s'achève aussi par ce norn (Kh. As'AD pessimiste, et qu'il est possible dans un certain nombre de cas de reconstituer
et M. GAWUKOWSKI, I 986-1987, p. 165. n" 4, sans version grecque): mlkw des généalogies avec de fortes probabilités de véracité.
br {;'dw br 'lhbl brt'. 7 - Voir K. DIJKSTRA, 1995. p. 142-143 qui les appellent « minor
5 - K11. As'AD et M. GAWLIKOWSKJ, 1986-1987. p. 165, n" 2 (sans version dedicatio11s » par opposition aux « mqjor c/edicarions » gravées sur des
palmyrénienne). temples, des autels de grande taille. ou d'autres objets de dimensions
6 - Voir aussi les remarques de K. DJJKSTRA, 1995, p. 123 : « Leul'ing out monumentales (voir ibid., p. 89).
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 59
arrive souvent qu'elles soient plus ou moins abrégées, c'est exprimer cette double appartenance. Peut-être parce que cela
à-dire qu'on omet une ou plusieurs générations, ce qui peut paraissait plus « chic », ou pour sembler mieux intégrés dans
être signalé par la suppression de br entre deux noms l'Empire, les Palrnyréniens ont adopté des noms gréco-romains,
1
propres 8• Par ce plincipe de télescopage des générations, il soit seuls 2, soit en plus d'un deuxième nom, indigène celui-là.
arrive souvent que, pour simplifier, on ait tendance à Dans le cas des noms d'origine perse, le procédé semble
remonter directement à l'ancêtre important ou éponyme : assez différent. Il s'agit dans ce cas toujours du nom principal,
ainsi, s'il arrive que br soit omis pour le dernier élément, on sans concurrence avec un nom sémitique (voir les exemples
considère que c'est de l'ancêtre du clan qu'il s'agit: son rassemblés dans le tableau 13) et ils ne semblent pas être
nom est celui qui est utilisé pour désigner la famille dans utilisés comme surnoms. Deuxième point à souligner, il n'y
son ensemble 9• C'est un cas assez courant, mais br est parfois a pas à Palmyre de généalogie homogène d'origine iranienne
111,
oublié dans une généalogie ou omis par manque de place les personnages de nom iranien ont des ancêtres ou des
bien qu'il s'agisse d'une succession père-fils, attestée par descendants aux noms sémitiques. La principale exception
un autre texte, ou par la version grecque du même texte : est Septimius Worod, qui lui n'a ni ancêtre, ni descendant.
ainsi ml' br yrby lsms r'y ( « Malê, fils de Iarhaî Lishamsh Mais il suffit de prendre l'exemple de mlkw br 'g' br 'rtbn
Raaî », BS n° 44 = CJS 3959) a fait construire le temple de (« Malikû, fils de Ogâ, fils d'Artaban », SFP n° 27) ou de
Baalshamîn. En grec, son nom est Ma11.11 6 Ka't 'Aypüma mzbn' bry1J1bwl' 1pbwl bgdn (« Mezabbanâ, fils de Iarhibôlâ
Iapawu wû Pamou : comme on peut le voir, le grec omet Refabôl Bagdan », PS 11° 210) pour voir que les noms iraniens
une génération et va directement au nom de l'ancêtre sont très rarement accompagnés d'autres noms de même
important. Plus intéressant encore est le nom du père de origine, ce qui ne renforce pas la thèse de l'origine iranienne
Malê Agrippa. Ce personnage est connu non seulement par de ceux qui portent ces noms. En fait, il apparaît que ce type
la généalogie de son fils, mais aussi par le texte BS n" 1 de noms est assez fréquemment en dernière position dans
dans lequel il est appelé yrby br lsms br r'y. Le texte reprend les généalogies, comme le prouvent les deux exemples cités
les mêmes noms que pour le fils, mais cette fois précise les ci-dessus (mais ce n'est pas exclusif 1 -1). Il semble ainsi
filiations par le mot br. On voit que son absence peut être fonctionner souvent comme un nom d'ancêtre qui sert à
interprétée de manières différentes 11• définir un clan.
Un des clans les plus importants de Palmyre a aussi un
ancêtre éponyme au nom probablement iranien. Il s'agit du
2. LES NOMS ÉTRANGERS
clan pnnwn (<1>1p�Lwv en grec) qui compte parmi ses membres
La situation de Palmyre au carrefour de la culture plusieurs bienfaiteurs de divers sanctuaires (portes du
araméenne et de la culture gréco-romaine a fait que certains sanctuaire de Bel 15 bain d'Aglibôl et Malakbel 1), ainsi
; 1(
habitants de l'oasis ont porté des noms doubles, comme pour que d'autres personnes mentionnées par des inscriptions 17•
8 - On a dans le monde grec d'assez nombreux exemples de généalogies 2:WLWVOU îOÙ BaÇEKTl, mais en araméen le mot br a totalement disparu :
longues. On cite directement l'ancêtre cligne cl'être rappelé et on remonte fmbl sm'wn bzq'. Parfois les liens de parenté sont assez difficiles à restituer
souvent à un personnage célèbre de l'histoire générale ou de l'histoire locale, précisément, comme clans le cas du texte H. INGHOLT, 1926, p. 129 : y1J1y
en omettant parfois les chaînons intermédiaires peut-être moins glorieux. 'g1p' yrby ydy'bl 'g' y't. Agrippa ('g1p') est sans cloute un autre nom de
Voir F. QuAss, 1993, p. 62-67 sur les longues généalogies qui témoigne du Iarhaî (yrby), fils de Iarhaî; les noms suivants doivent désigner les
« Selbstbewt!/Jtsein» des notables. Ce phénomène qui prend de l'ampleur générations précédentes. Mais on peut aussi considérer que 1'omission du
à l'époque impériale, est repérable surtout en Asie Mineure méridionale à mot br signifie que des étapes sont omises, même s'il est peu probable que
partir du 11' siècle avant notre ère (avec l'exemple de Palmyre, p. 67, n. 232). ce soit à chaque génération.
9 - On peut comparer le cas des documents juridiques babyloniens 12 - Par exemple Alexandre. fils cl' Alexandre, fils de Philopatôr du
(A. UNGNAD, « Babylonischen F amiliennamen», Festschr!ft A. Deimel, préambule du Tarif ( C/S 3913), avec les remarques du chapitre I sur la
Analecta orientalia 12, 1935. p. 319-326, cité par A. CAQUOT, 1962, p. 234, possibilité de son origine locale.
n. 1) : dans la formule « X fils de Y fils de Z », Z ne désigne pas l'aïeul, 13 - Annexe X. Dressé à titre de comparaison, ce tableau inclut tous les
mais l'ancêtre et fonctionne comme un nom de famille. noms dont l'origine iranienne est au moins possible, même si clans beaucoup
l O - C'est souvent le cas pour les tessères, comme RTP 31 et 34 : slmn de cas elle est douteuse.
y111bwf' mlkw · 'by (voir sur ce personnage de la famille Aabeî, le chapitrer ; 14 - Voir par exemple H. lNGHOLT. 1962. p. 104 ( 'prl1t br 'gylw). On retrouve
DFD, p. 233-235, n" 13 et lnl' X, p. 34-36). On a peut-être un cas particulier le père du même personnage ywlys 'wrlys 'gylw br 'prht br bq zbdbwl
avec les affranchis pour lesquels l'expression br f11yqui signifie« affranchi» clans plusieurs textes de la même tombe (H. lNGHOLT, 1935. p. 98, n" V II et
semble parfois omise : voir DFD, p. 274 où est cité le cas de nrqys br bq 1962, p. 106).
'gylw («Narcisse, affranchi d'Ogeîlû», CIS 4174 clans la tombe des« Trois 15 - CIS 3914 = lm' IX, 25.
frères») qui semble le même que le nrqys 'gylwclu texte CIS 4185 de la ] 6 - H. lNGHOLT, 1936, p. 109-112, n" 11.
même tombe. Néanmoins, la juxtaposition de deux noms peut recevoir 17 - Voir DFD, p. 31-35 avec un arbre généalogique et p. 237, n" 13 pour
d'autres explications. Cela signifie rarement qu'il s'agit d'affranchis. Sur un possible symposiarque (RTP 35 : y1hbwl' prmn). L'identification de ce
l'onomastique de ces derniers, voir le chapitre v. personnage repose sur l'équivalence entre le nom de la famille prmwn et
11 - On peut comparer. par exemple, les textes CIS 4030 et 4050 : le même prmn inscrit sur la tessère, selon la lecture de J. T. Milik. Néanmoins,
personnage est appelé bggw br yhyb' br yrby dk' dans le premier et bggw l'interprétation de RTP, ad/oc. donne /mm; la photo de la tessère (RTP,
br yhyb' y1J1y dk' clans le second, sans qu'il faille y voir de différence sans pl. III) est trop sombre pour permettre de décider; le dessin sur le frontispice
doute. Voir aussi le texte H. J. W. ÜRI.JVERS, 1995a, p. 34-36. Un des (ici fig. 15) favorise la lecture de RTP (comparer le/ du nom yrf1bwl').
synocliarques qui remercient Soaclos, fils de Bôlîadâ, s'appelle EVVl�17Àoç
60 Les notables de Palmyre
La famille semble avoir connu son apogée dans la seconde le nom est relativement peu courant (voir le tableau), il est
moitié du n" siècle. D'après l'arbre généalogique, tel qu'il fort probable qu'il n'est pas porté dans tous les cas par des
est reconstitué par J. T. Milik, l'ancêtre Firmôn a dû vivre cousins de bb' br bgsw br zbdbwl ou de rb'1 br J1y111 bgsw.
1
au 1" siècle avant notre ère. Il est intéressant de constater En effet, le reste de l'onomastique ne correspond pas, que
que de l'époque de Firmôn à celle de Worod, l'influence ce soit entre la famil1e de rb'1 et celle de bb', ou bien entre
iranienne semble se maintenir. Elle résulte peut-être plus ces deux familles et ce11es qui apparaissent en lnv VII, 1 4 et
d'une influence culturelle du monde iranien que d'origines CIS 4395.
familiales. Il n'est peu probable que tous les Worod soient Néanmoins si ces noms sont bien attestés dans les classes
vraiment iraniens et l'on n'est pas sûr non plus de l'origine les plus élevées de la société de Palmyre, ils y sont plutôt
du nom Firmôn. rares. On les rencontre surtout dans les catégories modestes
Quelques familles palmyréniennes se rattachaient donc ou moyennes de la population, comme les affranchis ywlys
à un ancêtre au nom iranien, soit qu'il ait été un immigré à 'wrlys 'gylw br 'prht' 23 et pmk br b1y lsms br smsgrm
Palmyre, soit que les contacts commerciaux nombreux avec ( C/S 3996). La plupart des textes où ils sont attestés ne sont
le monde iranien aient rendu populaire ce type pas de grandes dédicaces honorifiques ou des inscriptions
d'onomastique 18• Quoi qu'il en soit, ces familles ne semblent de fondation, mais des documents plus modestes, comme
pas avoir eu de traditions iraniennes particulières, et hors des épitaphes ou des textes de concession de partie de
certains cas de papponymie, comme dans la famille de Sasan, tombeaux. On peut mettre en relation avec ce fait le faible
dont l'hypogée a été fouillé 19, les noms de ce type ne se nombre de textes grecs (bilingues ou autres) qui comportent
répètent généralement pas au cours des générations. des noms iraniens (les noms bgsw/BayEcroç et pnnwn/
L'exemple de Worod montre que cette partie de la <!>1p�twv étant justement des exceptions).
population atteignait des positions parfois très en vue. Certes, les raisons peuvent en être diverses, ethniques
L' anthroponyme bgsw est un autre cas de nom très (il s'agit là d'un milieu plus proche de ses origines iraniennes,
vraisemblablement iranien porté par des membres des classes donc plus oriental), mais aussi sociales. Il est possible en
supérieures. Ce nom (sous la forme BayEcroç en grec) est effet que la partie hellénisée de la population corresponde
celui du père d'un notable honoré par les Benê Hashash aux couches supérieures, auxquelles n'appartiennent pas la
dans le sanctuaire de Bel en 1 28 (lnv IX, 33, jJb' br bgsw br plupart des Palmyréniens aux noms iraniens. Il est probable
zbdbwl, « Habbê, fils de Bageshû, fils de Zabdibôl »), ainsi que les deux facteurs ont joué, même s'il est impossible de
que celui de son fils honoré au même endroit, sans doute conclure à cause de la faiblesse de l'échantillon connu.
dans les mêmes années (Inv IX, 34, bgsw brbb[' bJ] bgsw,
« Bageshû, fils de Habbê, fils de Bageshû »).Ce dernier est Tout autre est la situation pour les noms grecs qui,
également connu pour la construction d'une exèdre dans la semble-t-il, avaient été adoptés par les notables de Palmyre,
Grande Colonnade (nymphée A) 20 et parce qu'il a peut-être souvent concurremment à un nom sémitique 24• Plusieurs
été symposiarque en 132- 1 33 21• Il s'agit donc d'une famille méthodes ont été suivies pour transformer les noms indigènes
de premier plan dans ces années qui c01Tespondent à la venue en noms gréco-romains qui gardaient souvent des traces de
de l'empereur Hadrien.J. T. Milik rattache à la même famille leur adaptation 25• La fréquence des noms théophores dans
rb'l brbym bgsw(« Rabbel, fils de Haîran Bageshû », dans l'onomastique sémitique et grecque a favorisé ce travail,
DFD, p. 247 à propos de CIS 3968 = RSP n" 1 57), épimélète car il suffisait de trouver l'équivalence entre les panthéons
du sanctuaire de Malakbel et Aglibôl en 134 22• Pourtant, si indigène et classique. Ainsi Wahballat est devenu
18 - Il ne semble pas possible de définir une période particulière pendant 22 - La fille de ce personnage apparaît en C!S 4455, si on en croit la lecture
laquelle ces noms auraient été particulièrement en vogue : aucun exemple de A. Caquot, RTP. p. 169. reprise par J. T. Milik, DFD, p. 247: ·1_y brt rb'J
ne semble pourtant très ancien, signe peut-être que les échanges avec le bg[sw).
monde iranien ont pris de l'ampleur seulement à partir du début de notre 23 - H. lNGHOLT, 1935, p. 98, n" V II et 1962, p. 106. II est intéressant aussi
ère. Mais la faible part de l'onomastique iranienne dans le total et le petit de voir l'importance der onomastique grecque clans ce mi I ieu cl'affranchis
nombre d'inscriptions anciennes en général sont d'autres points i:t prendre (voir iqji-u).
en compte dans ce raisonnement. 24 - Néanmoins si un certain nombre de notables de Palmyre portent des
19 - Les meilleures lectures sont celles de PAT n'" 10 l 5-1061. Voir les noms grecs. cet usage est loin de leur être réservé. Ce qui est plus rare clans
éditions originales dans SFP. p. 41-69, n"' 44-94 (arbres généalogiques) et les classes supérieures est le port d'un nom gréco-romain simple, sans nom
N. SALIBY, 1992, p. 267-292 et certains textes (avec des lectures différentes) sémitique, ni en grec, ni en palmyrénien. Ce phénomène semble fréquent
clans P. PIERSIMONI, 1994a, p. 298-316, n'" 5, 7. 10-17, 30-34 et 42-45 (avec en revanche clans les franges les plus modestes de la population, qui
un arbre généalogique plus réduit). emploient surtout l'araméen, langue clans laquelle ils transcrivent de manière
20 - Texte reconstitué à partir de divers fragments (/1111 III, 2 et lm· XII. assez systématique leurs noms, même quand ceux-ci sont grecs ou romains
19): voir DFD, p. 241-242 et en dernier lieu, E. WILL, 1983. p. 69. (voir des exemples au chapitre v1. i:t propos des hypogées). C'était de toute
21 - RTP 32, selon J. T. Milik, DFD. p. 238, n" 18 dont la lecture U1b') est façon un privilège des notables d'avoir plusieurs noms et de pouvoir les
en effet possible d'après la planche II1 du RTP. Voir aussi M. ÜAWLIKOWSKI, faire connaître par des inscriptions visibles par tous.
1973a. p. 33, n. 17. 25 - Voir F. RosENTHAL, 1936. p. 92-94.
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 61
Athènodôros ; les équivalences entre 'HA1ô8wpoç, Iarhaî ou les contacts des habitants de Palmyre avec des habitants
(yrby) et Lishamsh (Jsms) sont attestées plusieurs fois 26• des zones plus hellénisées de l'Empire. Ainsi en CIS 3934
Parfois, c'est plus par une certaine ressemblance phonétique (en 254), un certain ywlys 'wrlys 'g' ( « Iulius Aurelius
que par un rapprochement sémantique qu'un nom sémitique 0gâ >>) est aussi appelé (dy mtqr') « Séleukos » (slwqws),
est devenu grec ; on peut ainsi citer l'équivalence bien ce qui donne en grec : [ · IlouÀwv Aùp1i[A10v 0yyav 1:ov Ka'tl
attestée de Z17vô�1oç et de zbyd' (ou des noms apparentés) . I:ÉAEDKOV [8k mû AÇ1Çou] 1:oû I:mÀa. Il est difficile de
C'est sans doute aussi la raison pour laquelle Z11vô�wç sert trouver un lien entre les deux, si ce n'est que le nom grec
à traduire d'autres noms formés sur la racine zbd, comme devait être plus pratique à utiliser, ou mieux vu, dans les
zbd'th (RSP n" 35). Cette fois, le nom divin n'est plus celui contacts entre les Palmyréniens et les « Grecs » de la région,
d'un dieu, qu'on traduit habituellement par Zeus (Bel ou cela d'autant plus que le personnage avait exercé de hautes
Bôl), mais celui d'une déesse ('th) 28• Un autre exemple de charges à Palmyre (stratège de la colonie) et qu'il était sans
rapprochement phonétique est attesté dans le texte CIS 3953 doute chevalier romain. L'autre texte honorifique en faveur
avec l'équivalence A1pav11ç 6 Ka't 'Hpcô811ç. Le même du même Iulius Aurelius 0gâ pose un problème épigraphique
personnage est appelé byrn dans la version araméenne du (fig. 16) 33• Il a été restitué de manière différente, justement
même texte et 'Hpcô81w I:opmxou dans le texte Inv 27 29• dans la partie qui concerne son nom. La solution de ce
C'est en vertu d'une équivalence du même genre que le fils problème pourrait renseigner sur l'usage fait par les notables
d' 0dainat, appelé Hérôclès par les sources classiques 30 et palmyréniens des noms romains.
Hérodien par l'inscription Inv III, 3, pourrait en fait être un Le débat porte sur les lignes 2-4 du grec et sur le début
Haîran U1y111), peut-être celui qui est amplement attesté par du palmyrénien 3 J.-B. Chabot dans le CIS restitue ainsi :
-1_
l'épigraphie 31• C'est d'ailleurs le nom de son grand-père, "I[É]NEDKOV Oy11Aovl 1 [8\ç AÇ1Çou wû I'.EElÀa] 1 [........ \.rcrcfo
ce qui correspond tout à fait aux traditions qu'on peut 'P]w�mi.wv. Dans l'Inv III, 15, J. Cantineau préfère ['IloûA[wv
connaître à Palmyre 32• 0yyav 1:0Û] 1 A[Ç1Çou I:mÀa] 1 [.... lTCTCÉa 'P]w�LCXlCOV. Le
Parfois enfin la raison de la traduction échappe palmyrénien n'est que de peu de secours, puisque les lettres
totalement et devait s'expliquer par une mode particulière visibles des deux côtés de la lacune de la première ligne
26 - L'équivalence Héliodôros Lishamsh est explicite dans le texte 31 - CIS 3944 (= lm• III,16); deux textes clans H. SEYRIG,1963,p. 161.
J.CANTINEAU, 1930a, n" 13b où le personnage s'appelle IE8ap17Àoç Voir aussi les tessères RTP 485 et 736. avec le commentaire et la
'HÀlOôcopou wù KCÙ Arna�LCTou. On a en lm· X, 34 un personnage dont bibliographie au chapitre 1 (C 2). Les textes (sans les tessères) sont
l'un des ancêtres porte les noms de 'HÀlOôcop[ou] îOÙ Kat Iapcx[lüul.Ce rassemblés par M.GAWLIKOWSKI,1985,p. 254 (n"' 4, 5 et 6), qui propose la
procédé est pourtant assez rare en Syrie,à l'époque romaine,et l'exemple même identification (p.261),malgré les objections de H. SEYRJG, 1963,
de Palmyre connaît peu de parallèles contemporains (voir M. SARTRE,1998, p.171-172 (voir aussi DFD, p.319).Ce (ou ces ?) personnage est un demi
p. 559). frère de Wahballat,fils de Zénobie. La présence dans l'Histoire Auguste
27 - En ClS 4201,Z17V6�l0ç est zbyd'; en C/S 3932,on a en grec Z17v6�1oç d'un Herennianus (Histoire Auguste, Vita Gall., XIII. l et Ty1: trig., XV,2;
6 KCXÎ. Zcx�8lÀcxç, mais seulement ::,bdlh en araméen. Cette même XV II; XXVII; XXX, 2), autre fils de Zénobie, vient compliquer le
équivalence est aussi celle qui fait d'une certaine bt::,by une Z1iv0Pîa,nom problème, puisque clans ce cas aussi la transcription du nom Haîran est
sous lequel on connaît la plus célèbre des habitantes de l'oasis,dans les assez lisible. On ne sait pas quel crédit on peut accorder à cette source,
sources littéraires classiques (et aussi clans l'épigraphie).Sur la signification notoirement assez peu fiable.
de ces noms formés sur la racine sémitique ::,bd« donner»,voir J.K.STARK. L'identification est acceptée sans discussion par E.W ILL, 1992, p. 177-178,
1971. p.85-86 et A.CAQUOT,1962,p. 244 (voir pourtant supra. n.280 du comme par E. EQUIN! Sc1-1NEIDER, 1993,p. 22-23. Un des arguments de
chapitre 1 : zbyd' peut être éventuellement un diminutif de zbd': schème D.S.PoTTER, 1990, p.387 pour la rejeter est que ni Wahballat, ni Odainat
arabe.fit 'ayla). L'explication philologique de toutes les formes (zbdl', zbdy n'ont jamais utilisé cle noms grecs. Pourtant, si la proposition est vraie
ou zbyd' par exemple) n'est pas la même. bien qu'il s'agisse pour Oclainat, tous les milliaires de Wahballat,aussi bien en latin qu'en
d'hypocoristiques. mais il est clair que la signification générale: « don de grec ou même qu'en araméen,l'appellent Wahballat Athènoclôros (whbh
la divinité». « donné par la divinité» est proche dans tous les cas. Les 'tndr[ws] en ClS 3971; Ouapana[8oul 'A817vo8copou en OGlS 647;
formes proches -;,bdbw! « don de Bôl »,-;,bdbl « don cle Bel» sont aussi Vaballatho Athenodoro en AE 1904,60). Certes,la formule équivalente
susceptibles cle la même « traduction» en grec sous la forme Z17v6pl0ç Haîran Héroclien n'apparaît jamais,mais Odainat,lui n'a jamais cle nom
clans lequel l'élément « Zeus» était apparemment bien reconnu. grec.Si deux membres de la famille utilisent deux manières différentes de
28 - C'est un des éléments qui composent le nom cl'Atargatis ('tr'th). Voir donner leur nom, on ne voit pas pour quelle raison Haîran n'en utiliserait
J. TEIXIDOR,1979. p. 75-76. pas une troisième.
29 - On trouve la même équivalence clans un texte qui concerne son petit 32 - J. T. Milik (DFD, p.265) propose un autre cas de ressemblance
fils (CIS 3940): ywlys' wrlys sptmyws yd' br 'fksndrws byrn s1ykw et phonétique possible, quoique un peu lointaine,Ogâ/Ogeîlü et Agrippa.Le
ÏODÀlüç AÙp17Àl0ç LETCîl�llüç Io:817 LE7Cîl�llOU 'AÀE/;cxv8pou îüÙ personnage (un symposiarque) s'appelle y1tJy 'g1p' (Iarhaî Agrippa clans le
'Hpco8ou.Julius Aurelius Septimius Iaclê,fils cl' Alexandre, fils cl'Hérode texte H. lNGHOLT, 1926,p. 129) et un de ses ancêtres s'appelle 'g': c'est
H,ûran. J.T. Milik donne d'autres exemples (DFD, p. 246,250 et 319), sans cloute ce qui autorise le rapprochement fait par J. T. Milik. On
mais il faut noter qu'il s'agit clans tous les cas de restitutions ou cle remarquera que clans le texte ClS 3934, un certain 'g' est appelé L'.ÉÀEUKOç
reconstructions de textes (respectivement lnl' V III, 124 + 186; J.CANTINEAU, (voir ilifi·a).
1930b,11° 14) qui sont seulement probables : de plus,il fait entrer en compte 33 - CIS 3935 (cle 259) = lnv III, 15.
(p. 246) l'exemple de Héroclien Haîran,qui justement est prouvé p.319 34 - Voir aussi D. ScI-ILUMBERGER. l 942-l 943b,p.82, 11. 18 qui restitue
par les exemples rassemblés à la p.246 ! Même s'il se peut bien qu'il ait 'loÛÀt[ov AÙp(17ÀlOV) Oyy]-1 C/,V A[Ç1Çou îOÙ] 1 AÇ[1Çou îOÙ LfflÀCX
raison (voir note iJifi·a), son raisonnement est un peu circulaire. 'i.rcrcÉcx 'P]coµcxiwv. La césure non syllabique est rare à Palmyre,mais n'est
30 - Histoire Auguste, Vita Gall., XIII. 1, et Ty,: trig., XV, 2 et XVL pas impossible.
62 Les notables de Palmyre
($lm[. ........] 'g' bi) permettent aussi bien de restituer slwqws Un dernier ensemble regroupe principalement des épitaphes
( C/S) que dnh dy (démonstratif + particule introduisant le funéraires, sur des bustes ou des sarcophages. La majorité
complément de nom dans lnv). des inscriptions de ce type (voir le tableau onomastique)
Au vu des lacunes et de l'espace disponible, il semble sont seulement en araméen.
que le texte ne puisse pas mentionner en même temps le Il faut pourtant souligner l'extrême rareté de ce type de
nom de I:ÉÀEUKOç (ni en araméen, ni en grec) et la mention noms dans les textes funéraires. Très rares aussi sont les
de la citoyenneté (les prénoms Iulius Aurelius), qui est noms qui apparaissent plus d'une fois. Pour chaque exemple,
pourtant très rarement omise à cette époque, dans les textes on est amené à soupçonner qu'il s'agit en fait de la même
officiels. Si les prénoms Iulius Aurelius étaient inscrits sur famille, et parfois du même personnage qui peut être à la
la pierre, peut-être sous une forme abrégée, alors cela fois le père, le grand-père, le mari des différents membres
pourrait signifier que la version grecque du nom du de la famille et apparaître à ce titre dans leurs généalogies
personnage n'apparaît pas dans ce texte. Dans ce cas, il respectives. Ainsi, la fréquence de dynys (Li1ovucr1.oç) ou de
apparaîtrait clairement que le nom grec n'est que secondaire qrbwln/qrbl' ( Corbulo) est la conséquence de la conservation
pour ce Iulius Aurelius Ogâ. Resterait à expliquer pourquoi particulièrement bonne des reliefs d'une tombe. Tous les
il n'apparaît pas dans ce texte, alors qu'il est présent dans le textes mentionnant dynys concernent en fait la même famille,
premier. dont un ou deux membres (grand-père et petit-fils)
On peut noter aussi que bwln' br 'zyzw br 'zyzw br s'y]' apparaissent dans une grande partie des généalogies. C'est
( « Bôlnâ, fils d' Azîzû, fils d'Azîzû, fils de Shîlâ », C/S 3976) exactement le même cas pour la famille de Corbulo. On
qui est peut-être son frère et a été deux fois épimélète de la peut rappeler que la relative fréquence des noms iraniens
source ( 'pmlwtn) ne porte apparemment pas de nom grec. 'rtbn et ssn (Artaban et Sasan) a exactement la même cause.
Là comme dans d'autres cas, il faut tenir compte de la Pour le reste, les noms iraniens sont encore plus rares que
disparition de nombreux textes : on n'est renseigné que par les noms gréco-romains, surtout si on limite la liste aux noms
une petite partie du corpus, qui dissimule peut-être l'usage dont l'origine est totalement assurée.
de noms grecs dans certains cas. Peut-être faut-il aussi Seuls quelques noms non sémitiques sont plus courants.
considérer le genre du texte. Cette dédicace au Gad de la Le premier est Z11vo�1.oç dont on a déjà parlé amplement.
source (gd' dy 'yn ') est uniquement en araméen. Dans un Mais à la différence des noms gréco-romains qui
domaine plus conservateur comme le domaine religieux, apparaissent dans les textes unilingues, ce n'est peut-être
l'absence de noms grecs et de version grecque du texte que la traduction d'un ou plusieurs noms très courants à
n'étonne pas outre mesure. D'ailleurs, les textes dédicatoires Palmyre. Les Z11vo�1.0ç connus à Palmyre portaient peut
sont assez rarement dans une langue autre que l'araméen'". être aussi un nom sémitique 36• Il semble au contraire que
Mais l'usage des noms étrangers, et en particulier gréco les gens appelés dynys, mrql' ou typyls ne portaient que ce
romains, donne des renseignements très précieux sur la nom. On peut envisager pour eux une origine étrangère, et
culture et la civilisation de Palmyre. Comme on le voit sur en faire des immigrants suffisamment bien intégrés dans la
le tableau qui résume l'usage de ces noms, ce n'est qu'à société locale pour en utiliser la langue à l'exclusion de leur
partir du II° siècle qu'apparaissent en nombre réduit, mais langue d'origine. C'est en effet une possibilité, mais il en
néanmoins remarquable, des noms d'origine gréco-romaine. existe d'autres, comme on le verra au chapitre v1.
C'est même un sujet d'étonnement que, dans l'ensemble de La relative fréquence de 'wtk' (Eùrux1w) et de hrms
la documentation, il n'y ait que deux inscriptions datées qui ('Epµîiç) est plus intrigante, car on voit mal quel équivalent
attestent de l'usage de noms gréco-romains avant les peut se dissimuler derrière eux. Le second de ces noms est
premières années du 11° siècle. Et même dans la première utilisé de manière privilégiée par les affranchis qui
moitié de ce siècle, les témoignages ne sont pas très apparaissent dans l'épigraphie de Palmyre (voir chapitre v),
nombreux. ce peut être une raison de sa présence : il est possible que ce
On trouve des noms gréco-romains dans tous les types soit un nom traditionnel à Palmyre (comme ailleurs) pour
de textes. Si ces derniers sont surtout honorifiques, on peut les esclaves et les affranchis. Eùrux11ç est assez courant,
aussi noter un groupe particulier d'inscriptions funéraires mais ne semble pas réservé à des étrangers 37 : ainsi dans le
(RSP 11° 51 ou CIS 4168 par exemple), souvent bilingues texte CIS 4211 (texte bilingue de concession daté de 237),
(inscriptions de fondation et de concession, voir chapitre VI). 'IouÀ.1.oç Aùp11Àwç EÙîÛXllç est fils de Ayymoç, dans lequel
35 - Principalement dans le CJS, 3972-4108. Voir aussi RSP n"' 106-151. Il faut rappeler aussi que le nom, sans être rare. est relativement peu fréquent
En tout, sur environ cent cinquante textes, moins d'une dizaine sont clans le monde grec (voir par exemple les volumes parus du LGPN).
bilingues. 37 - Comme me l'a fait remarquer M. Sartre, la popularité de ce nom est à
36 - Voir l'annexe IX. 2 : une grande partie des Zénobios connus à Palmyre mettre en rapport avec celle des gad en milieu sémitique (voir M. SARTRE,
portent aussi un nom sémitique. On notera aussi qu'il n'existe pas de 1985, p. 201 ). Sur les gad à Palmyre, voir T. KAIZER, 1997, p. 147-166 (qui
transcription sémitique du nom grec Zénobios, seulement des traductions. laisse entièrement de côté l'aspect onomastique, cf. p. 151, n. 17 ).
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 63
on reconnaît le nom sémitique bgy 38• Le personnage est le premier, 'Hpü'.>817ç 6 KCXl A1pav17ç devient simplement
apparemment d'origine locale, pourtant son nom est l)ym. Dans le second, la mère d'Hérode Haîran, mrt_v est
d'origine grecque (à moins qu'il ne s'agisse d'un affranchi? fille d'un Alexandre Iadê ('AÀÉçcxv8poç 6 Kcx't la817), qui
Voir chapitre v). C'est le seul exemple daté, ce qui ne permet est appelé simplement yd' en araméen. Le problème se
pas de savoir si ce nom s'est répandu à Palmyre à un moment complique encore quand on prend en compte les traductions
précis, par l'effet d'une mode. Il faut noter pourtant que ces des noms qui parfois sont assez différentes et plus ou moins
deux noms sont répandus dans 1 'ensemble du monde gréco longues selon la langue utilisée. Il semble qu' assez
romain, et en particulier à Rome. Hermes y est d'ailleurs le régulièrement les généalogies en grec sont plus courtes que
nom grec le plus courant, et est utilisé en grande partie par leurs contreparties araméennes. Ainsi dans Inv IV, 7a:
des affranchis et des esclaves, tout comme Eutuclzes et IE8a�17Àoç 0m�La17 îOÙ Ayyo8o�Lou devient en araméen
Eutuchus qui sont par leur fréquence en 8 e et 9" positions ydy'bl br tyml)' br ydy'bl br 'bd'th 'gdm. Les générations
dans la liste établie par H. Solin pour Rome 39• intermédiaires entre le nom du père et celui de l'ancêtre du
Néanmoins, même dans les textes bilingues, clan sont omises en grec. Le texte grec dans ce cas semble
l'onomastique d'origine orientale prédomine très largement. second et pour ainsi dire d'apparat. Le texte qui comporte
Même quand apparaissent des noms gréco-romains, c'est un véritable contenu et qui est destiné aux compatriotes du
toujours au milieu de noms sémitiques caractéristiques. De personnage mentionné est le texte palmyrénien.
plus, la fréquence de Z17vô�10ç ou d'autres noms facilement Tout concorde donc à faire de Palmyre et de ses notables
transposables indique clairement qu'il faut souvent lire une ville où le vernis onomastique gréco-romain est somme
derrière le nom grec un équivalent sémitique. Les textes toute assez faible. Même quand ils exercent des charges
bilingues sont à ce titre révélateurs et permettent de restituer civiques typiques des cités grecques, les magistrats de
ce qui était le nom d'usage courant. Palmyre portent surtout des noms d'origine locale (voir
Ces noms pouvaient servir dans les deux langues. Ainsi, tableau en annexe I). Et quand les Palmyréniens proclament
certains textes donnent les deux noms dans les deux le nom de leurs ancêtres dans leurs inscriptions, il en va de
versions : ydy' bl br hlydrws lsms br ydy'bl devient en grec même ; ces noms sont la manifestation d'une fierté de leurs
IE8a�17Àoç 'HÀ.w8c6pou mû KCXl AlCTCX�lCTOU mû IE8a�17Àou·10• origines, qui devait être le propre de l'aristocratie marchande
Seul le grec précise qu'il s'agit d'une équivalence et que les de la cité.
deux noms servent à désigner le père de Iedîbel. On trouve
aussi un cas symétrique en Inv IV, 7b: 'Jksd1ys br 'Jksd1ys
3. SURNOM S ET SUBDIVISIONS FAMILIALES
br 'plnys nbwzbd br tym" br 'gdm devient dans le texte
grec 'AÀÉçav8poç 'AÀEçcxv8pou îOÛ 'ArcoUwviou îOÛ L'expression dy mtqr' (« qui est appelé ») ou son
NE�ouÇa�a8ou îOÙ 0m�La17 îOÙ Ayyo8o�wu. Dans ce équivalent grec 6 Kcxi peuvent aussi indiquer un deuxième
dernier, Apollônios semble être le fils de Nebûzabad. On type de surnom à Palmyre. Leur raison d'être est un peu
peut en être intrigué, car l'équivalence Apollon/Nabû est différente et tient au faible nombre des noms utilisés par les
..ri
bien connue et le texte palmyrénien prouve apparemment habitants de la cité. Tout lecteur d'inscriptions de Palmyre a
qu'il s'agit bien du même personnage, puisque le mot br pu aisément se rendre compte de la popularité de certains
n'apparaît pas entre les deux noms. Il apparaît donc dans noms, comme mlkw ou mqymw. Cette fréquence a entraîné
les deux textes qu'on vient de citer que certains habitants de de nombreuses homonymies qui ont peut-être conduit les
Palmyre utilisaient les deux noms, selon le contexte ou pour Palmyréniens à avoir recours à des surnoms pour distinguer
bien montrer leur double attachement. De toute façon, même les différentes personnes. De là vient la relative fréquence
quand le nom grec est utilisé, c'est très souvent en parallèle de dy mtqr' qui sert à introduire le surnom, et pas seulement
avec le nom araméen : cette relation est généralement le deuxième nom d'origine grecque. D e manière
précisée en grec par îOÙ Kat ( « et aussi»), alors que systématique, semble-t-il, le surnom utilisé est le nom d'un
l'araméen utilise parfois la simple apposition ou l'expression ancêtre plus ou moins éloigné. On a un bon exemple de
dy mtqr' («qui est appelé»). l'usage de cette expression et de son équivalence avec
Bien plus couramment l'araméen ne mentionne pas le l'omission de br dans deux textes bilingues qui concernent
nom grec et se contente de la version locale du nom. Le le même personnage, Malikû, fils de Neshâ. En Inv IX, 11,
grec est de son côté plus fidèle à cette double appartenance: il est appelé mlkw br ns' br bwl�1' dy mtqr' Ms ( « Malikû,
on peut prendre l'exemple des textes CIS 3953-3954. Dans fils de Neshâ, fils de Bôlhâ, qui est appelé Hashash»).
38 - Voir J. K. S TARK, 1971, p. 87. classement par fréquence du volume Ill. p. 1348. Voir supra sur les rapports
39 - H. SouN, 1982. f. p. 342-353 pour Hermes ; IL p. 796-806 pour le entre le nom cl' origine non sémitique et l'éventuelle origine sociale et plus
couple Eutuches-Euluchus, tous les deux susceptibles de la transcription loin, au chapitre v, sur la place des affranchis clans la société palmyrénienne.
'wtk'. Ce n"est peut-être pas un hasard si Eros (I, p. 328-335) et Alexander, 40 - J. CANTINEAU, 1930a, n" 13b.
noms connus également à Palmyre. apparaissent en 2' et 3' position clans le 41 - Cf. A. BOUNNI. 1976. p. 46-52 et M. GAWLTKOWSKI, 1990a. p. 2645.
64 Les notables de Palmyre
Hashash est présenté explicitement comme un surnom. Dans Le clan des bny bss est connu par un certain nombre de
le texte Inv IX, 12, daté de l'année suivante (25 de notre textes. Il appartient visiblement à la tribu des bny kmr' et se
ère), le même personnage est appelé mlkw br ns' br bwlb' rattache à un certain Bôlhâ dit Hashash (bwlb' dy mtqr'
bss. L'expression est plus courte, on a omis de préciser que bss) Il est possible clans le cas de ce personnage que le
-1-1 _
Hashash est un surnom, mais l'absence de br entre les deux surnom n'ait pas été porté à l'origine par lui, mais ait été
derniers noms joue en quelque sorte le même rôle que celui d'un de ses ancêtres et qu'on le lui ait ensuite attribué
l'expression dy mtqr'. par souci de simplicité en sautant une ou plusieurs
Sans doute comme cela s'est passé dans d'autres générations.L'étude des textes concernant cette famille peut
langues, le surnom qui servait à distinguer les homonymes renseigner sur la manière dont les noms de clans se
a aussi joué le rôle d'un véritable nom de famille et a pu transmettaient. On a parlé plus haut de Malikû Neshâ, fils
servir pour l'ensemble des membres de la famille ou même de Bôlhâ appelé Hashash (mlkw br ns' br bwlb' dy mtqr'
du clan, c'est-à-dire en fait les descendants d'un même bss) qui se voit honoré de deux statues en 24 et 25 (Jnv IX,
personnage, qui avait dû marquer les esprits ou occuper une 11-12). Dans ces textes, et en particulier le premier, c'est
place particulièrement importante dans la vie publique de Bôlhâ qui est appelé Hashash. La proposition introduite par
la cité. le pronom relatif dy a pour antécédent Bôlhâ, comme semble
Il existe suffisamment cl' exceptions pour qu'on puisse l'indiquer le texte grec dans lequel on a McxÀ1xoç Nrncx WD
penser que de multiples considérations (place disponible, BcoÀcxcx WD ÈmKCXÀOWtÉvou Aacxaou. La proposition avec
accent mis ou non sur la généalogie), ainsi qu'une certaine le participe ÈmKcxÀoÛ�tEvoç joue le rôle de la relative du
fantaisie sans doute, devaient jouer un certain rôle quand palmyrénien. Elle est au génitif et complète BcoÀcxcx.
on notait les noms d'un personnage. Il serait inutile donc de Grammaticalement, il n'y a aucune ambiguïté, c'est BcoÀcxcx
chercher un système qui puisse expliquer 1'ensemble des qui est appelé Aacxaoç. Le nom de clan porte donc
données onomastiques transmises par 1 'épigraphie directement sur le nom du grand-père. C'est aussi le cas
palmyrénienne. Néanmoins certaines règles sont assez bien pour le frère de Malikû, Hashash, qui avait été honoré en 21
respectées comme la présence à la fin des généalogies d'un pour avoir fait la paix entre deux tribus ( dont la sienne, les
nom cl'ancêtre qui permet parfois de définir un clan ou des bny kmr') -1:,_
subdivisions tribales. On a très peu cl'éléments sur la manière La question se complique si on passe aux générations
dont les différents clans, et éventuellement même les tribus, suivantes. Il est fort probable que les deux personnages
étaient liés entre eux. Certains clans ou familles sont des représentés sur les reliefs funéraires qui portent les textes
subdivisions de tribus, on en a quelques exemples comme CJS 4559-4560 soient de la même famille. En effet le premier
les Bené Baâ qui appartiennent aux bny knbt - 12• Mais il est s'appelle Bôlhâ, fils de Neshâ Hashash (bfb' br ns' b§s) et
vraisemblable aussi que certaines tribus ne soient en fait l'autre Bôlhâ Hashash. L'onomastique concorde tout à fait
que des segments cl' autres tribus dont elles se seraient et permet de les identifier comme des descendants cl'un des
séparées. deux frères des années 20, Malikû et Hashash. D'après le
style, il semble bien qu'on puisse dater leurs deux portraits
J. T. Milik a essayé de repérer ainsi un certain nombre de la première moitié du 11" siècle 6• Au mieux, ils-1
de « fractions, clans, grandes familles » qui pouvaient servir appartiendraient alors à la génération des petits-enfants. Nés
pour la répartition des tribus palmyréniennes Il s'appuie
-1,_ vers 80, avec des parents nés vers 40 ou 50, ils peuvent
sur l'inscription CIS 4124 (= lnv IV, 3 ; fig. 17). Dans ce avoir eu des grands-parents nés dans les premières années
texte, les fondateurs de la tombe sont descendants à la de notre ère. En adoptant une chronologie basse, on pourrait
cinquième génération de rcx88cxpaou TOD ÈmKCXÀOWtÉvou ainsi se raccrocher aux deux personnages connus clans les
Bcxcx (« Gaddarsos surnommé Baâ » ). En araméen, ce sont années 20. blb' br ns' bss serait alors le petit-fils du Hashash
les fondateurs eux-mêmes« qui sont surnommés Bené Baâ » honoré par les bny mtbwl et les bny kmr' ( CIS 3915). Il peut
( dy mtqm bny b' '). Le surnom de l'ancêtre est ainsi devenu néanmoins paraître préférable cl'ajouter une génération, ce
le nom du clan tout entier, sans doute parce qu'il s'appliquait qui les ferait appartenir à la génération des arrière-petits
à une personnalité particulièrement marquante de la tribu enfants.
des bny kn/Jt. On n'aurait pas de mal à trouver d'autres On le voit, toutes ces reconstruct i ons restent
exemples, car c'est en effet une coutume bien attestée à hypothétiques. Or, il est possible aussi, et sans cloute
Palmyre d'utiliser le nom d'un ancêtre comme véritable nom préférable, de considérer le bss du texte C/S 4559, non
de famille. précédé du mot br (bar, « fils » ), comme un véritable nom
42 - CJS 4114 = lm• IV, 4. Voir M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 421-423 et 1973, 45 - li faut faire cle ce personnage le frère cle Malikû, malgré J. Cantineau,
p. 37. lnl' IX, p. 20. Voir DFD. p. 38 et K. ÜJ.JKSTRA, 1995. p. 101-102 avec la
43 - DFD, p. 87. note 23.
44 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 33, et DFD, p. 38-39. 46 - Voir PS n" 117 avec des parallèles entre 130 et 140.
Chapitre If: L'identité ethnique de Palmyre 65
de famille, qui ne désignerait donc pas un ascendant précis, le matériel archéologique de la fouille de la tombe 511• Les
mais servirait à identifier le clan, ou le groupe, au sein de la Bené Mazîn ne sont attestés que plus récemment, puisque
tribu et de la population de Palmyre. De même, blb' bss de le premier texte daté remonte à 32 (BS n" 37).
CIS 4560 appartiendrait au même clan. On voit tout de suite Un autre élément de lien entre les deux groupes est qu'on
le problème que cela pose, car on pense que la suppression les retrouve aussi autour du sanctuaire cl' Allât, situé à
du mot br en fin de généalogie signifie généralement qu'on l'extrémité ouest de la ville 3). Une inscription datée de
passe directement à l'ancêtre éponyme de la famille. 115 (RSP n" 143) 51 découverte dans ce sanctuaire peut très
il est très rare qu'on passe à cet ancêtre sans même donner bien concerner la même famille que celle de BS n" 60, selon
le nom du père du personnage dont on parle. Une autre la démonstration convaincante de M. Gawlikowski. D'après
explication se présente donc à l'esprit: il s'agit là d'une le texte cl'Allât, gdr$W br y1J1y brgdr$w br 'ty qui dédie un
sorte d'abréviation de la formule sur un relief dont la surface autel à la Dame du Temple (Allât) est un descendant de mtny
était réduite et il faut développer blb' bss en blb' br b§s. brqynw br'ty rb'. Or il est très tentant de reconnaître cette
Peut-être, comme dans d'autres cas -n, bss sert-il à la fois de séquence dans le texte BS n" 60 où on a whblt br mtny br
patronyme et de nom de famille, pour éviter la répétition, gdr$W br111tny brqynw br 'dty brydy' b/. Le passage de 'ty
parce qu'on savait qu'un bss appartenait forcément au clan à 'dtyest en effet possible. Et on sait depuis assez longtemps
du même nom. que les bny 111'zyn sont présents autour du temple cl'Allât,
par le texte C/S 3966 RSP n" 156) notamment. Le
personnage cité dans l'inscription appartient aux Bené Mazîn
4. LES RELATIONS DES BENÉ MAZÎN ET DES BENÉ lEDÎBEL
(dy 11111 [bny] m'zyn), mais est aussi descendant d'un Iedîbel
Pourtant, même dans les cas les mieux documentés, il (ydy' bl). On peut donc se demander s'il appartient à la même
est difficile de définir avec précision les relations existantes famille et descend du même Iedîbel. Dans ce cas, les Bené
entre des tribus ou des clans proches et peut-être apparentés. Iedîbel seraient une subdivision des Bené Mazîn, ou en tout
L'exemple le mieux connu est celui des différents groupes cas, auraient des liens familiaux avec eux: on ne sait pas
qui fréquentent le sanctuaire de Baalshamîn (pl. 3 et 7). On comment se transmettait l'appartenance à une tribu. Il est
sait que les textes qui en proviennent attestent de la possible, mais malheureusement non prouvable, que ce texte
coexistence en ce lieu des bny m'zyn et des bny ydy'bl. Il daté de 64 atteste d'une situation créée par la réforme
n'y a pas d'éléments qui permettent de conclure institutionnelle de ces mêmes années. On a vu au chapitre 1
définitivement que les seconds ne sont qu'un groupe des la fréquence des mentions conjointes de l'ethnique (td1111y'I
premiers, mais c'est une forte probabilité -rn_ Pourtant on TTaÀ�rnprivoç) et de la tribu ( bny 111 ' zyn ici) dans ces années.
aimerait en avoir la confirmation par un texte explicite. Les L'intégration des Bené ledîbel dans le groupe des Bené
bny ydy'bl sont connus par plusieurs textes du sanctuaire Mazîn aurait pu se faire à cette occasion. L'autre explication
de Baalshamîn (BS n'" 34 et 44) qui sont malheureusement possible est que la fréquentation du sanctuaire par les Bené
fragmentaires. Mazîn et l'importance locale de Iedîbel, fondateur éponyme
Il est tentant de les rapprocher du texte BS n" 60. Ce d'une famille qui a marqué l'histoire du sanctuaire, a pu
texte, découvert dans une tombe à l'emplacement du être une circonstance favorable à l'adoption par des membres
sanctuaire, commémore la fondation de la sépulture en 1 1 des Bené Mazîn du nom Iedîbel pour certains de leurs
apr. J.-C., par les descendants d'un certain Iedîbel (ydy' b/) 49• enfants.
On en conclut généralement que la famille propriétaire du Un autre texte du sanctuaire de Baalshamîn (BS n" 37)
terrain a accueilli à cet endroit les bny m'zyn, immigrés de peut permettre cl'envisager 1'appartenance des Bené Iedîbel
fraîche date (ou encore que dès l'origine Iedîbel appartenait aux Bené Mazîn, et cela, dès une époque sûrement antérieure
aux Bené Mazîn). Ceux-ci ont alors fondé le sanctuaire de à la mise en place des institutions civiques, puisque
Baalshamîn, une divinité qu'ils avaient importée avec eux. l'inscription date de 32 apr. J.-C. Un certain z bdlh br b1yky
Cette reconstruction permet d'expliquer les relations de la br nwrbl qynw, qui appartient aux Bené Mazîn (dy 11111 bny
tribu des Bené Mazîn avec la famille la plus anciennement m' zyn), est honoré d'une statue par cette même tribu. C'est
attestée à Palmyre, puisque la généalogie permet de donner le plus ancien texte qui mentionne la tribu et il a l'intérêt de
pour Iedîbel une date aux environs de la première moitié du donner le nom de l'arrière-grand-père de Zabdilah, Qaînû.
11" siècle av. J.-C. Cette date correspond à celle fournie par Or ce nom est très rare à Palmyre ; il est surtout connu en
47 Par exemple, zbyd' br bwml, dans le texte F. SAFAR, 1964, p. 16,n" 5. Benê Ma'zîn ».
48 - J. TErxmoR (1980a, p. 279: voir aussi 1987, p. 52) conclut même 49 - On trouvera la discussion sur la généalogie de la famille cl' après BS
fermement à ce sujet : «Il est très vraisemblable que, à l'origine, des n" 60 et RSP n" 143 dans M. GAWLIKOWSKI, 1990b,p. 103-106.
membres de cette tribu [les Benê Mazîn] achetèrent la terre pour ensevelir 50 - R. FELUvIANN, 1976. p. 215.
leur ancêtre Yedi'ebêl ». J. T. Milik (DFD, p. 98-99) émettait l'hypothèse 51 - Avec une traduction corrigée clans M. ÜAWLIKOWSKI, 1990b, p. 103.
que ledîbel était l'ancêtre d'une fraction des Benê Mazîn. M. ÜAWLIKOWSKI, Le nom br'ty («Barataî ») qui apparaît 1. 2 et 3 est en fait à lire br 'ly
1990b, p. 104 préfère en faire un «clan allié mais distinct de la tribu des («fils de Attaî »),ce qui rajoute une génération à la généalogie.
66 Les notables de Palmyre
nabatéen et n'a, outre ce texte, qu'une seule attestation à civique fondé sur des tribus (au sens de subdivision politique
Palmyre : le personnage mentionné par BS 11° 60 et RSP de la cité) avec l'organisation sociale préexistante pose
11 ° 143, descendant de Iedîbel. Dès la publication du texte problème, car cette dernière a pour base des tribus (au sens
RSP 11° 143, M. Gawlikowski avait fait ce rapprochement 52, ethnologique). L'ambiguïté du terme tribu (qmÀ11 en grec et
qui pourrait permettre d'affirmer que les Benê Iedîbel, dès p]Jd en araméen) fait qu'il est souvent impossible de
le début du!"' siècle, ne sont en fait qu'un sous-groupe des distinguer les deux dans la documentation. La liste jointe
Benê Mazîn. Le texte BS 11° 37 pmmait aussi témoigner d'un en annexe se limite aux groupes dont le nom (bny X, « fils
glissement dans les références généalogiques de cette partie de...») est précédé de l'un des termes qu'on peut traduire
de la famille. La fidélité au groupe tribal des Benê Mazîn par« tribu», ou bien encore de l'expression dy 11111 (suivi du
s'est en quelque sorte substituée à la fidélité à l'ancêtre nom de la tribu, bny X) qu'on peut traduire dans ce cas par
Iedîbel qui n'apparaît plus dans la liste des ancêtres de « ceux qui font partie des » 53• Les deux types de formules
Zabdilah. Néanmoins, la difficulté est qu'une des attestations sont d'ailleurs utilisés en araméen pour une même tribu 5·\
du clan, BS 11° 44 (C/S 3959), est beaucoup plus tardive, de le premier étant le plus rare. Trois groupes présents dans le
près d'un siècle (130-131 ). Une explication possible est que tableau malgré l'absence du terme pbdlui-mêrne sont peut
certaines branches du clan se sont fondues complètement être bien des tribus. Leur appartenance à cet ensemble est
dans les Benê Mazîn, alors que d'autres ont pu conserver un peu douteuse, mais il pourrait s'agir d'une conséquence
leur fidélité aux ancêtres et continuer à former un groupe du petit nombre des textes qui les concernent 55• Du point de
distinct, peut-être au sein de la tribu qui dominait le vue de ce vocabulaire, il paraît difficile de trouver une
sanctuaire et qui formait selon toute vraisemblance une des manière cohérente de rendre compte de toutes les variations.
quatre tribus civiques. Néanmoins tant qu'un texte ne Il est sans doute plus prudent de conclure à une relative
prouvera (ou n'infirmera) pas d'une manière définitive la indifférenciation des termes qui étaient utilisés (dy mn ou
théorie très probable qui fait des Benê Iedîbel les descendants dy mn pbd) quand on voulait parler des membres d'une tribu,
du Iedîbel de BS n" 60, il sera difficile de conclure sur les sans qu'on puisse savoir si une intention particulière se
rapports exacts de ce(s) groupe(s) avec les Benê Mazîn. dissimule derrière chaque usage.
On voit là un exemple des difficultés qui se présentent Le cas de Palmyre n'est pas isolé, et on connaît en Syrie
quand on veut établir les relations éventuelles entre les et dans les régions proches d'autres cas où des cités indigènes
différents groupes qui apparaissent dans la documentation. transformées en rroÀK voient leur population répartie en
La présence parallèle des tribus civiques, qui reprennent tribus. Ainsi, après la provincialisation de l'Arabie en 106,
apparemment le nom de certaines des tribus antérieures, ne le 817µoç de Bos ra est divisé de cette manière 56• L'origine
contribue pas à clarifier la situation. des noms adoptés n'est pas ambiguë, puisque les tribus
connues sont la qrnÀ17 'Pm�Lavâ et la qruÀ17 LiÎoç. Il ne s'agit
B. TRIBUS ET ORGANISATION DE LA CITÉ donc pas de groupes d'origine indigène, mais bien d'une
création d'époque romaine.
1. TRrnTT<s l'TVTQTTP<s PT TRHUT<s TR À f)TTTnl\Tl\TPT T pç Eile correspond aussi à ce que Pon sait àe ia naissance
L'existence de tribus à Palmyre est bien attestée, dès le des tribus civiques dans le monde grec. Comme l'a prouvé
début de la période, comme le montre la liste en annexe D. Roussel à propos des cités ioniennes, les tribus des cités
(annexe VIII). On a vu précédemment qu'il était fort grecques ne sont pas issues de tribus primitives, mais existent
probable qu'un certain nombre de textes du milieu du seulement dans le cadre de la cité dont elles sont partie
l"' siècle soient le signe de la mise en place des institutions intégrante . Il s'agit d'un modèle de répartition des citoyens,
civiques, parmi lesquelles la division de la population en qui s'est répandu dans l'ensemble du monde grec, l'exemple
quatre tribus occupe une place importante. La répartition le plus connu étant celui d'Athènes. Les réformes de
des citoyens en tribus est un phénomène connu dans les cités Clisthène sont d'ailleurs un exemple de ce mode de
du monde gréco-romain. La coexistence d'un système répartition plus ou moins arbitraire, les tribus devant
52 - Dans RSP, n" 1--1-3. p. 73. Voir aussi K. D1.1Ksr1u. 1995, p. 124. groupes voient leur nom précédé de dy 11111. sans que le terme pJ1cl apparaisse
53 - M. Gawlikowski ( 1973a, p. 34) en dresse la liste après avoir éliminé jamais. Mais les deux derniers ne sont attestés qu · une fois chacun. Le
les groupes qui ne sont sans cloute pas des tribus. même en prenant le terme premier est connu par quatre textes. mais trois de ces textes (C!S 3950-
au sens large. Sur les critères de distinction entre les tribus et les groupes 3951 et 3953) sont rigoureusement parallèles : les bny zbdbwl en tant que
familiaux de niveau inférieur. voir aussi DFD, p. 16-17 (présence du mot groupe sont le sujet de la phrase, il n'y est pas question d'un membre du
pbd). Plus récemment, P. Piersimoni (1995. p. 252-254) après une tentative groupe, ce qui ne permet pas de savoir si quelqu'un peut être dy mn pbd
de définir théoriquement tribu. clan et famille. choisit de ne pas distinguer bny zbdbwl. L"emploi du mot yÉvoç dans ces trois textes est un sujet sur
entre clan et famille. à cause de l'impossibilité pratique de faire les lequel on reviendra en détail plus loin.
différences. 56 - Au témoignage du papyrus P. Ory. 3054. Voir M. SARTRE, 1982a.
54 - Comparer par exemple C/S 3922 (le personnage est dy JJJn bny kmr') p. 77-91.
ou encore /111• IX. 11-12 et lnl' IV, 7a ( dy JJJn pbz bny kmr'). 57 - Voir D. RoussEL, 1976 et M. Pn�RART, 1985, p. 169-190.
55 - Ce sont les bny zbdbwl. les bny zbwd et les bny /JtJy Seuls ces trois
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 67
comprendre des districts qui appartenaient aux trois reconnaît à la première ligne le mot 'qymw (« ils ont
composantes fondamentales de l'Attique : la ville, la côte, dressé ») ; généralement on retrouve le mot dans des
l'intérieur 58• On ne sait ce qu'il en était pour Palmyre, mais formules du type, « la statue de Y que lui ont dressée les
cela permet d'envisager plusieurs scénarios possibles, surtout X » 62• À la ligne suivante, on a {t]lt pbzy' (« les trois
si, comme cela a pu arriver, l'impulsion est venue d'en haut, tribus » ). La restitution du premier mot est assez sûre. En
c'est-à-dire des autorités romaines. effet, on voit mal quel mot finissant en -/t pourrait précéder
D'autre part, les tribus athéniennes avaient reçu le nom le pluriel du mot pbz, à part le numéral« trois ». À la lecture
d'un ancêtre fictif; on voit le rôle que joue cet éponyme et de ce texte, non daté, M. Sartre se demande s'il ne peut pas
quelle est la conception sous-jacente. Le modèle de la s'agir des tribus civiques. Le texte ferait alors référence à
famille, fictive dans ce cas, est ce qui sous-tend la une époque qui aurait précédé la division en quatre tribus.
construction de Clisthène. Appartenir à un groupe social, Dans cette hypothèse, il y aurait eu clans un premier temps
c'est se rattacher à un clan, une famille ou un lignage 59• seulement trois tribus civiques. Certes, il est tout à fait
C'est le point commun entre les différentes conceptions de possible de contester cette reconstruction, ne serait-ce que
la tribu. Le but à Palmyre, comme ailleurs, était peut-être du point de vue épigraphique, à cause de l'état très
de créer de nouvelles solidarités, au besoin en rompant avec fragmentaire de la pierre. Le verbe est au pluriel, mais les
celles qui existaient auparavant. Néanmoins, on ne peut trop parallèles qu'on peut citer font suivre immédiatement le
s'avancer clans cette direction, pour une raison au moins, le verbe par le sujet. Ici, ce dernier est rejeté à la ligne suivante,
maintien des noms anciens des tribus. En effet, même si la et comme on ignore quelle était la dimension de la pierre,
liste des quatre tribus civiques n'est pas totalement sûre, la on peut tout aussi bien imaginer que la lacune est importante,
plupart des candidats possibles sont attestés avant les laissant la place pour un certain nombre de compléments
premières traces de la présence romaine, vers 19 apr. J.-C. qu'on ne peut restituer.
Sans même tenir compte des textes de Doura-Europos, les On peut utiliser comme parallèle le seul texte qui donne
bny myt', les bny kmr' ou les bny mtbwl sont présents dans le nom d'une tribu civique 01• Le verbe au pluriel s'accorde
l'épigraphie de Palmyre dès les dernières années du 1 siècle er
avec bny kmr', qui est un sujet pluriel et ensuite le texte cite
av. J.-C. (voir le tableau en annexe VIII). À ce moment, il le reste des tribus (s' wr pbz '). Il peut clone être question
n'est bien entendu pas possible d'envisager l'existence d'une dans le texte lnv X, 61 des membres d'une tribu qui ont dressé
rcÔÂK de Palmyre, même si l'agglomération pouvait avoir une statue ( 'qymw), et ensuite, clans une autre proposition,
des institutions au moins embryonnaires, qui annonceraient des trois autres tribus 6"' qui ont fait autre chose (ou la même
le gbl tdnuy des années 20 du 1°1 siècle. chose de leur côté). On peut difficilement décider entre ces
deux possibilités (trois tribus seulement ou une tribu plus
Le problème à Palmyre est qu'on ne voit pas bien trois autres). La datation du texte sur des critères
comment s'est fait le passage entre des groupes préexistants paléographiques ne peut guère aider puisque tous les textes
(c'est-à-dire les groupes attestés avant l'arrivée de Rome), de l'agora ont été gravés ou regravés après la construction
dont le nombre était supérieur à quatre et les quatre tribus de cet ensemble, à l'époque d'Hadrien, donc à un moment
civiques des textes du 11" siècle. C'est sans aucun doute dans où vraisemblablement les quatre tribus existaient 65•
cette liste de tribus anciennes que les concepteurs du système Comme le remarque aussi M. Sartre, le fait qu'il y ait
ont choisi les tribus qui devaient former le 811µoç. Le nombre peut-être eu à 1'origine seulement trois tribus contredit la
de quatre peut être la conséquence de traditions locales qu'on théorie de D. Schlumberger sur la poutre B du temple de Bel
ignore, comme par exemple la prééminence de quatre qui représenterait symboliquement les quatre tribus par quatre
tribus 60• hommes et quatre femmes sur sa face a 66• D'autre part,
Il faut faire ici une place à une hypothèse proposée par comme on l'a vu au chapitre 1, il faut peut-être placer
M. Sartre à partir de l'inscription araméenne Inv X, 61 61• l'achèvement du temple aux environs de 80, selon la
Le texte n'est en fait qu'un fragment très abîmé (fig. 18). On reconstitution assez probable de M. Pietrzykowski 67• Le
58 - Éd. WILL. 1991, p. 68-71. 65 -L'examen des quelques lettres préservées permet de penser qu'une
59 - Je reprends largement les conceptions de M. P1ÉRART, 1985. p. 169-190. date clans la première moitié du II' siècle est possible. L'écriture brisée.
60 - M. SARTRE, 1996a, p. 387. assez évoluée, pour reprendre la terminologie de J. Cantineau (1935,
61 - M. SARTRE, J 996a. p. 399, n. 35. p. 25-30), ne peut en tout cas remonter à une date plus ancienne.
62 - Par exemple C/S 3928: :;;lm mrqs 'lpy[s] yr[f1y br byrn br 'Jbgr dy 66 D. SCHLUMBERGER. 197 l . p. 129-131. On peut résumer ainsi
'qymw lh bny syrt' (« statue de M. Ulpius Iarhaî que lui ont dressée les J'argumentation de l'auteur : si la date de l'achèvement du temple est 32. et
caravaniers »).L es exemples de la formule sont très nombreux ( CIS 3923. que les quatre tribus sont représentées symboliquement sur les poutres,
3950-3951, 3953, 3960,Inl'I X. 11-12, lm• X, 40 et 131, etc.) cela signifie alors que le système était déjà en place à ce moment, et clone
63 - H. lNGHOLT, 1932, p. 279 avec DFD, p. 36. que l'instauration de la rcÔÀlç de Palmyre est antérieure à 32.
64 - On aurait alors une expression du type tlt pbzy' 'brny' ( « les trois autres 67 - M. PIETRZYKOWSKI. 1997, p. ] 32.
tribus»).
68 Les notables de Palmyre
problème qui se pose est l'existence d'une qrnÀ11 KÀcxu8lÔ'.ç un) de la tribu à laquelle se rattachait le clan.L'existence du
qui force à remonter l'instauration du système aux années nom local est néanmoins probable parce que c'est la seule
41 à 54, c'est-à-dire au règne de Claude. Le système a pu mention d'une tribu au nom latin pour quelqu'un qui n'est
être mis en place dès cette période avec seulement trois tribus, pas citoyen romain et que les tribus civiques sûres ou
dont la qrnÀ11 KÀcxu8loc, pour se voir modifier dans les années probables ont toutes des noms sémitiques. D'autre part, la
80 avec l'ajout d'une quatrième tribu 68, et acquérir ainsi sa qrnÀll KÀcxufüÔ'.ç est de manière à peu près sûre une des tribus
forme définitive, telle qu'on la connaît au 11" siècle. On le civiques, car on voit mal une tribu traditionnelle adopter un
voit, il ne s'agit que d'une hypothèse, une de plus à propos nom impérial et le conserver aussi longtemps après la mort
de l'instauration d'un système qui conserve son mystère. du souverain.
En fait, le texte C/S 4122 (= Jnv VII, 6a) pose plusieurs Dans le cas où Claudias aurait un équivalent sémitique,
problèmes : c'est en effet le seul qui nomme la qrnÀ11 il faudrait aussi pouvoir savoir si les deux noms ont coexisté,
KÀcxu8uk en 79-80 de notre ère (fig. 19). Le fondateur du ou s'il y a eu un pur et simple remplacement. Dans ce cas
tombeau McxÀ1xoç MoKa�tou wu BmÀ�cxcxpcxxou appartient une tribu recevrait son nom latin dans les années 40 ou 50
à la qrnÀ11 KÀcxu8lÔ'.ç, selon le texte grec. Il est curieux que la puis reprendrait son nom indigène à une date quelconque
version araméenne ne donne pas le nom araméen de la tribu, après 79-80. De toute façon, même si les deux noms ont été
ni même une transcription, mais précise que mlkw br utilisés simultanément, il semble probable que le nom
mqymw br blbJk appartient à un clan assez bien connu à indigène ait rapidement supplanté le nom latin et 1'ait
Palmyre, celui des bwml Le personnage est donc sans
Ci'). remplacé entièrement, ce qui expliquerait la rareté de
doute palmyrénien, puisqu'on connaît des membres de ce Claudias dans l'épigraphie de Palmyre.
clan sur place et qu'il ne précise pas son ethnique éventuel, Il est clair que si les deux appellations étaient utilisées
contrairement à ce que ferait un étranger. C'est précisément indifféremment au même moment, tout au long de la période,
à cette époque (fin r"' siècle) que les Palmyréniens cessent à moins d'un texte bilingue ou de la réapparition d'un
de donner systématiquement le nom de la tribu à laquelle ils personnage connu pour son appartenance à une tribu, on
appartiennent dans les textes araméens 70• En même temps, n'a pratiquement aucun moyen de résoudre le problème.
C/S 4122 contraste avec la plupart des textes mentionnant Ce qui peut être une indication, c'est que les membres
les tribus, car c'est 1'unique cas où la tribu n'est précisée du clan Haumal ne mentionnent dans aucun autre texte la
qu'en grec dans un texte bilingue 71• On peut comparer avec tribu à laquelle ils appartiennent. Certes, tous les textes qui
le texte Jnv X, 40 dont on a parlé au chapitre précédent. On les concernent sont plutôt tardifs, en général après la fin du
avait l'équivalence entre l'ethnique« Palmyrénien » en grec r"' siècle, moment pendant lequel les tribus disparaissent
(ITcxÀ�rnp11voç) et le nom de la tribu en araméen ( bny m 'zyn). progressivement de l'épigraphie palmyrénienne : seuls sont
Pour D. Schlumberger, cela signifiait en fait la même chose, peut-être antérieurs au n" siècle, les textes Jnv X, I-2 de
mais le public auquel on s'adressait était différent. Le texte l'agora. Jnv X, 1, où apparaît le nom d'un officier de la
C/S 4122 est à peu près de la même date (81 pour Jnv X, III" Légion Gallica, peut dater de la période postérieure au
40), mais œtte fois c'esl le grec qui mentionne la tribu. Le règne de Vespasien, pendant lequel cette unité s'installa en
nom Haumal (bwml) devait suffire pour les contemporains Syrie pour y rester plusieurs siècles, mais peut aussi être
qui savaient sans doute à quelle tribu un clan appartenait. plus ancien, puisque la légion est passée à plusieurs reprises
Il n'en est pas de même pour le lecteur moderne et on par la région auparavant . Le texte Jnv X, 2 doit être
aimerait bien savoir quel était le nom local (s'il y en avait sensiblement de la même époque, puisqu'il s'agit des mêmes
68 - On a des exemples nombreux clans le monde grec de tribus cités. le terme fonctionne non comme un nom de tribu, mais comme un
surnuméraires venant modifier un système préexistant. Ainsi des dix tribus nom « de famille», qui désigne un clan. Il est possible que tous les klcly'
athéniennes de la réforme clisthénienne, on se retrouve à l'époque d 'Hadrien ou 'klcly soient cle la même famille, mais pas du clan Haumal U1wml). En
avec trei'::.e tribus. effet les cieux seuls noms communs aux cieux familles sont mqymwet b,v/)1 ·.
69 - Sur ce clan. voir DFD, p. 257-261 avec l'arbre généalogique. On ne tous deux courants à Palmyre (voir .J. K. STARK. 1971, p. 8 et 35-37). La
voit pas sur quoi l'auteur se fonde pour écrire (p. 17) que « la <)rnÀ.17 reconstitution de l'histoire du clan Haumal. p. 260, n'est pas très
KÀ.a.u8tek se rattache au pbcl bny /7111111! • ». En effet. il n'y a aucune convaincante. comme le notent M. Gawlikowski ( 1973a. p. -1-7) et M. Sartre
attestation du mot p/1cf pour ce clan. Il est même plus probable que le clan ( 1996a. p. 387 ).
Haurnal soit en fait une subdivision de la <pU!cll KÀO'.Uôtcxc,. Parmi les textes 70 - Par exemple CJS 4 l 21 de 7lJ. ou 4193 de 73.
que cite J. T. Milik. seules les inscriptions RSP n'" 42 et 127. CIS 4236 7 l Voir par exemple dans le tableau en annexe le petit nombre de textes
(= /111' V II, 6b), F. SAFAR. 1964. p. 13-27, n'" 1, 3 et 5, /111' X, 1-2 sont à où le nom de la tribu est donné en grec. On a une exception apparente avec
prendre en compte. L'hypothèse cle la transcription de Clauclias par le texte A. BoUNNI, 1986, n" 18, clans lequel la tribu Se1xia du grec n'a pas
l'araméen 'k/cfyou klcfy' (DFD. p. 260 citant les textes H. INGHOLT, 1934. de correspondant en araméen (comparer avec n" 3 où elle est transcrite en
p. 38-40, n" 4; C/S 4357-4359 et 4621 ; J. SABEH, 1953, p. 24-26) est en araméen: s[rg]y'). La différence est évidemment quïl s'agit ici d'une tribu
effet possible. mais n'est pas assurée; H. Ingholt proposait une autre de citoyens romains, statut que ne possède pas Malikü. fils de Moqîmü, fils
signification pour le terme: klcfy' aurait signifié« Chaldéen» (H. INGHOLT, cle Bôlbarak, de la <pUÀll Iüa.ufücxç.
1934, p. 38-40, suivi par .J. K. STARK, 1971, p. 67 qui est plus affirmatif 72 - Voir H. SEYRIG, 1941 b, p. 242. Sur la légion III Gallica. voir
pour la forme klcly' que pour la forme 'klcfy; voir annexe IX. 2, avec la E. RITTERUNG, 1924, col. 1517-1532 (plus particulièrement col. 1519-1523
discussion cle cette théorie par R. Degen). De toute façon, dans les textes sur la présence en Syrie avant Vespasien).
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 69
personnages. Les deux textes ont pu être regravés au moment au premier siècle avant notre ère et ne pourrait donc être le
de la construction de l'agora au cours du rr" siècle. De toute père d'un stratège de la fin du premier siècle après. En fait,
façon, étant unilingues, ils sont moins susceptibles de donner il y a de fortes présomptions pour que Haumal soit bien le
le nom de la tribu. nom du père de Zebîdâ; mais c'est peut-être aussi le nom
Des textes araméens (ou araméens-safaïtiques) de l'ancêtre du clan, même s'il n'est pas répété, justement
découverts dans le Wadi Hauran donnent aussi le nom parce qu'il est possible que ce soit le même 7(,.
Haumal. Ils datent vraisemblablement tous de 98 73• Si aucun Les autres textes sur les Haumal sont plus tardifs et
ne donne la tribu des personnages, il faut remarquer permettent peut-être de préciser la datation d'lnv X, 1-2.
néanmoins que Haumal ne semble pas un nom de clan, mais Inv VII, 6b porte la date de 185 et provient de la même tombe
qu'il est le nom du père d'un certain Zebîdâ (zbyd' brbwml). que CIS 4122 . Il s'agit sans doute d'un descendant de la
Il est bizarre que justement le mot br soit là, alors qu'on famille Haumal; son nom complet est y11Jy brmlkw bry1J1y
attendrait plutôt son omission, s'il s'agissait vraiment d'un bwml. J. T. Milik en fait un petit-fils d'Héliodôros d'Inv X,
nom de clan. Inversement dans le texte n" 1, où on a zbyd' 1-2 ('HÀ168mpoç), en s'appuyant sans doute sur l'équivalence
br bwml, on a aussi un personnage appelé b' Jy ml' 'Jhw: le sémantique de Iarhaî et de Héliodôros 78• Dans ce cas, qu'on
mot br a disparu. De plus, un des textes du même endroit préfère la date de 185 ou celle de 169, cela signifie que Inv X,
(n" 8) donne systématiquement le nom de la famille ou du 1-2 datent du début du ri" siècle, ce qui correspond à la
clan, apposé au patronyme. On a ainsi par exemple un zbyd' proposition de J. T. Milik de faire l'équivalence entre
br tym'md swyr', qu'on peut comprendre comme Zebîdâ, 0Eo8mpoç et zbyd', stratège en 98. Mais il s'agit seulement
fils de Taîmoamed, du clan Shewîrâ ( ou descendant de d'une probabilité, qui se heurte à la manière bizarre dont le
Shewîrâ après un nombre indéterminé de générations), ce nom de l'ancêtre du clan Haumal serait indiqué dans le texte
qui est un cas relativement classique, malgré les exceptions. du Wadi Hauran 79•
Cela peut amener à dater les textes Jnv 1-2 d'une Quoi qu'il en soit, l'exemple de ce texte CIS 4122 montre
période beaucoup plus tardive, si ce zbyd' br bwml est le qu'on peut proposer un certain nombre d'hypothèses fondées
même que ZE�n8a A wtaÀou du texte lnv X, 2. Cela sur des probabilités : cela a pu se passer ainsi, sans être
signifierait que le personnage actif en 98 serait le grand aucunement assuré. Un membre du clan Haumal faisait partie
père du 0Eo8mpoç honoré par ses enfants à une date aussi de la c)rnÀ11 KÀaufück. Celle-ci, attestée par cet unique
indéterminée, qui ne peut être que tard dans le II siècle. La e
texte, peut difficilement être autre chose qu'une tribu civique
même hypothèse est faite par J. T. Milik 74• Il est surprenant de Palmyre. Son absence quasi totale dans les sources peut à
que cet auteur semble un peu plus loin identifier 0Eoômpoç la rigueur s'expliquer par l'existence parallèle d'un nom
avec Zebîdâ, le stratège de 98 75• Cette dernière hypothèse indigène qui a pu totalement remplacer le nom d'origine latine.
est possible, car on peut considérer zbyd' comme un
diminutif de zbdlh et ce dernier comme l'équivalent de
2. LES QUATRE TRIBUS
0Eo8mpoç : leur signification (« don de dieu ») est la même
(voir J. Starcky, Jnv X, 1, ad foc., p. 11). Dans ce cas lnv X, Comme on ne sait pas comment s'est construit le
1-2 daterait environ du début du rr" siècle. Mais la possibilité système, on ne peut pas savoir si des gens ont changé de
qu'il s'agisse d'une autre branche de la famille ou même tribu ou si les gens qui mentionnent leur tribu mettent en
d'une autre famille non apparentée n'est pas totalement à valeur leur place dans la société de la cité de Palmyre ou
exclure. Car si le père de zbyd' br bwml a donné son nom celle qu'ils ont en parallèle dans le système tribal qui
au clan, cela n'explique pas le texte CIS 4122 d'une date préexistait. Même si on écarte les mentions antérieures au
antérieure, dans lequel Haumal est le nom d'un ancêtre de milieu du J"r siècle 80, le nombre de tribus mentionnées dans
mlkvv br mqynrw br bwlbrk. Dans ce cas Haumal aurait vécu les textes (cf. tableau en annexe VIII. 3) est toujours supérieur
73 - F. SAFAR, 1964, p. l3-20, n'" 1. 3 et 5. Mais ces remarques sont valables 78 - L'équivalence est faite clans le tableau généalogique de la page 261,
pour les sept autres textes découverts à cet endroit. sans explications. Elle s'appuie sans doute sur la remarque faite par
74 - Dans DFD, p. 258, mais il place lm• X, 1-2 au milieu du Ir' siècle, ce J. Starcky, ln\! X. 1, p. 11. qui propose comme exemples cl· équivalences
qui semble encore un peu tôt. pour 'HÀtÔôwpoç. Iarhaî (y1)1y) ou Lishamsh (1.sms). Voir plus haut à la
75 - DFD, p. 260. note 26 clans ce même chapitre.
76 - Le palmyrénien semble pourtant être moins rebuté que le grec par les 79 - Les textes RSP n"' 42 et 127 présentent cieux autres membres du clan.
répétitions de noms. Ainsi dans le texte C/S 3934 (lm• III, 14) 'Io]DÀlOV b'' brt 't'qb btbwml du premier texte est sans cloute la tante de bwlb' br
Aùp17[À10v Oyyav -càv Kaî.l LÉÀEDKOV [wù AÇtÇou 8kl wù LEaÀa /1yrn br 't'qb bwml du second texte, qui est daté de 205. [l est difficile de
(avec des restitutions assez sôres) est équivalent de ywlys 'wrlys 'g' dy les rattacher à l'arbre généalogique de la famille.
mtqr' slwqws br 'zyzw 'zyzw s'y]'. D'ailleurs CIS 3935 (Jnv III, 15) donne 80 - Cela en supposant que la mise en place du système est antérieure à la
pour le nom araméen du personnage la même répétition. ainsi que le texte mort de Claude en 54. cf. M. SARTRE, 1996a, p. 387. Sur la date cl'instauration
CIS 3976 pour quelqu'un qui est peut-être son frère, bwln' br 'zyzw br du système, les avis divergent: après Hadrien pour J. T. Milik, DFD, p. 12
'zyzw br s'yl'. Voir aussi CIS 3932 (= Jm, III, 22) où zbdlh br mlkw br et 30; au moins au moment de la construction du temple de Bel d"après
mlkw nswm est en grec Za�ôlÀav 8k MaÀxou wù Na00owLou. D. SCHLUMBERGER, 1971, p. 13 1 ; clans le courant des années soixante du
77 Le texte CIS 4236 semble le même que lm• V II, 6b à l'exception de la 1" siècle pour M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 47-48.
date (169).
70 Les notables de Palmyre
à quatre, ce qui est bien une preuve de la coexistence des Pour D. Schlumberger, qui pense que les tribus sont
deux systèmes. Mais il faut aussi prêter attention au fait qu'il celles désignées par le mot qru1c1i en grec, les quatre tribus
n'y a jamais de conflit d'appartenance. Si on trouvait un sont les bny kmr'/Xo�Lap11vm/XmvHîOl, les bny myt'/
texte du début du 1"' siècle qui signale qu'un tel est membre M1811vm, les bny rntbwJ/Ma88a�mÀElOl et enfin les bny
d'une tribu et si un autre texte, un siècle plus tard, désignait m'zyn dont le nom grec est peut-être Mayt:pi,vo1 8 4.
ses petits-enfants comme membres d'une autre tribu (si J. T. Milik, quant à lui, pense plutôt que les quatre groupes
possible une des .quatre), on pourrait alors tirer des sont les bny kmr', les bny 'tr 85, les bny mtbwl 86 et les bny
conclusions 81• Le lait qu'on n'ait jamais encore rencontré m'zyn 87• Pour M. Gawlikowski, enfin, ce n'est que pour les
ce cas de figure invite à la prudence dans les commentaires bny kmr' et les bny m 'zyn que la question est claire, cl'après
qu'on fait sur l'appartenance tribale des Palmyréniens et le les textes 8x. Pour les deux autres tribus civiques, il propose
passage aux quatre tribus civiques. Ce peut être le fait du avec des réserves la <1m1c11 KÀau8u:k, mais estime que le
hasard, et alors il est possible qu'une découverte future problème reste jusqu'à nouvel ordre insoluble w!_
vienne modifier nos conceptions. Même si les inscriptions, Depuis, quelques découvertes sont venues un tant soit
et donc les attestations de tribus, ne sont pas très nombreuses peu modifier l'état des connaissances. La découverte du
avant le milieu du!"' siècle, il est curieux qu'on n'ait jamais sanctuaire cl'Arsû en soi n'apporte rien sur les tribus qui en
découvert jusqu'à présent de cas de ce type. dépendaient. Néanmoins on a trouvé sur place un autel qui
D'après la documentation qu'on a pu rassembler, il est a permis l'identification du temple, parce qu'il portait une
possible d'avoir quelques idées sur l'identité des quatre dédicace àArsû ')11• Cette divinité est honorée en même temps
tribus. Néanmoins, il est clair que cela correspond peut-être que << Qismaya et les filles du dieu » par un personnage qui
aussi au hasard de la transmission des textes. Les seuls appartient à la tribu des bny mtbwl, br'' br mqymw br tw1y
éléments à peu près certains jusqu'à présent étaient le fait br br'' ( « Baraâ, fils de Moqîmû, fils de Tauraî, fils de
que les bny kmr' (Bené Komarê) étaient une des quatre tribus Baraâ»). Mais de manière plus indiscutable, la présence des
(d'après l'inscription H. INGHOLT, 1932, p. 278) et que les bny mtbtvl parmi les quatre tribus et leur lien particulier avec
sanctuaires sont ceux de Baalshamîn, cl'Arsû, d'Atargatis le dieu Arsû ont été prouvés par la découverte clans la Grande
et le« Bois sacré», sanctuaire des dieux Aglibôl et Malakbel. Colonnade de huit textes mentionnant la tribu 91• Ce sont
Le texte BS n" 45 donne en effet la liste des quatre sanctuaires surtout les textes n'" 7-8 qui permettent ces conclusions : un
clans lesquels sont dressées les quatre statues de Soaclos, personnage est honoré pour la reconstruction du toit du
fils de Bôlîaclâ. Ces quatre sanctuaires ont toutes les chances sanctuaire cl'Arsû, « dieu ancestral», par la tribu des bny
de correspondre aux sanctuaires de chacune des quatre tribus mtbwl. La date très tardive du deuxième de ces textes (279-
des textes 82• La situation semblait relativement simple au 280) est un sujet cl'étonnement, car il s'agit de loin de la
moins de ce point de vue, même si on ne connaissait la mention la plus récente d'une tribu à Palmyre 92•
localisation que d'un seul, puis de deux des sanctuaires en Ce phénomène s'explique mieux d'ailleurs si les bny
question 83• Quelques découvertes récentes sont pourtant mtbwl forment une tribu civique. Tout indique que la cité de
venues faire évoluer la vision qu'on a des choses. On peut Palmyre a survécu, avec ses institutions classiques, après
reprendre le problème tel qu'il a été présenté généralement l'intermède constitué par la révolte de Zénobie et la prise de
(voir en annexe VIII. 2 le tableau avec les différentes la ville par Aurélien. On a cl'ailleurs vu au chapitre I que même
hypothèses). au moment où Worod est au faîte de son pouvoir à la fin des
81 - Le seul cas sur lequel on peut attirer l'attention est celui des rapports et cl'une cléclicace à ce dieu par des membres de la tribu (C/S 3975). Voir
entre Benê Iedîbel et Benê Mazîn. Comme on l'a vu plus haut, il est possible plus loin des confirmations de cette hypothèse par cles découvertes des
d'interpréter certains textes comme le passage du premier groupe au sein années 1980.
du deuxième. Mais, comme le note K. Dijkstra (1993, p. 83-84) : « as 1he 87 - DFD. p. 15-16.
nell'fy imposed slntcture rough!y .fèJ!!owed exisling dil'iding fines, it die! 1101 88 - On a vu ce qu'il en était pour les seconds, et les premiers sont maîtres
sffiousfy aff'ccl w1 i11di1·id11uf \ JJersonuf s1u111s ». du sanctuaire de Baalshamîn qui est un des quatre sanctuaires civiques.
82 BS n" 48 (= J. CANTINE\LI. 1936. p.280. n" 20) et H. IN<,11on. 1932. 89 - M. GAWLIKOWSKI. 1973a, p.51 : « L'identité des deux autres tribus du
p. 278 (avec DFD. p. 36). quatuor, dont l'une était peul-être la Claudia, est inconnue». Sur ces
83 - Le sanctuaire de Baalshamîn était connu depuis longtemps grâce à des hypothèses, voir annexe VIII. 2.
inscriptions ( C/S 3959, connu depuis R. Wood) et celui cl" Arsü a été identifié 90 - Kh. As'AD et J. TEIXID0R, 1985b, p. 287-288.
plus récemment (voir E. W ILL, 1983, p. 69-81 et Kh. As'AD et J. TEIXIDOR, 91 - Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI, 1986-1987, p. 164-171, n'" 1-8. Voir
1985b. p. 285-293). Voir pl. 7. pl. 7.
84 - D. ScI-ILUiVIBERGER, 1971. p. 132 avec des doutes sur l'équivalence bny 92 - Avant la découverte de ces inscriptions, le texte le plus tardif était
m'zyn/Mcx.y1:p17vot. H. lNGHOLT, 1932, p. 278, de 198. Le texte lm• X. 44, daté de l' année suivante,
85 - DFD. p. 30 en rapprochant leur nom de celui de la déesse Atargatis ne donnait pas de nom tribal, mais prouvait que le système existait toujours.
( 'tr'th en araméen). Or cinq des textes récemment publiés sont datés du m' siècle (n'" 2-4, 6
86 - DFD, p. 29 : à cause de la fréquence parmi eux de noms théophores et 8), et la même chose semble probable pour cieux autres (n'" 1 et 7), cl'après
formés sur Arsü, dont le sanctuaire est un des quatre sanctuaires civiques, les données prosopographiques. Le dernier (n" 5) est daté de 197.
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 71
années 270, les institutions semblent fonctionner comme connus (ou au moins soupçonnés), il faut rappeler qu'on ne
auparavant. Il est donc normal que dans ce cadre la référence connaît même pas le nom de la tribu qui se rattachait au
à chacune des quatre tribus civiques se fasse toujours. La sanctuaire cl'Atargatis.
fidélité aux tribus traditionnelles de la population semble au Un texte récemment publié au sujet du grand caravanier
contraire s'être fortement affaiblie après la fin du J"1 siècle. Soados vient confirmer l'identité de trois des quatre
C'est en ce sens qu'il faut interpréter la disparition progressive sanctuaires mais vient ajouter quelques questions à celles
des mentions d'appartenance à une tribu dans les textes. qu'on se posait déjà 97• En effet, la version palmyrénienne
On peut faire une comparaison avec un cas plus (le grec a une lacune à cet endroit) ne mentionne pas le
contemporain, celui de la petite ville caravanière de SulJné, sanctuaire de Baalshamîn, mais donne comme quatrième
étudiée dans les années 1930 par A. de Boucheman 93• Cet sanctuaire le temple d'Allât : 'bd dnh bt 'lt (en grec, [Ëval
exemple montre que, même si dans un premier temps les 1ournv 10v Èv ['IEpQ) 'A817v]Ù_ç), « une (statue) clans ce temple
anciens nomades sédentarisés conservent le souvenir des d'Allât», endroit où le texte a été découvert, ce qui est rendu
tribus auxquelles ils appartenaient, très vite ils ne savent explicite par le démonstratif dnh. Le texte mentionne aussi
plus à quelle fraction de la tribu ils se rattachent, ce qui est les autres sanctuaires, et malgré les lacunes, l'existence des
sans doute un premier pas vers l'oubli de l'appartenance deux versions, grecque et araméenne, permet de restituer
tribale 9-+. Il semble qu'à Palmyre comme ailleurs la tout à fait sûrement : [w'bd bgnt' 'lym] w' bd bt 'T$W w' bd
sédentarisation s'est accompagnée de la création de bt 'tr'th, et Ëva 16v Èv 1EpQ) cx.Àcra, Ëva 8È 10v [Èv 1EpQ)
nouvelles solidarités qui ont rendu inutile de rappeler la tribu "Aprnk Ka't Ëva 10v Èv 1EpQ) 'Ampya1"El0ç ( « une (statue)
à laquelle on appartenait (et donc de s'en souvenir). dans le jardin sacré, une dans le sanctuaire d'Arès/Arsû,
Comme on peut le voir par l'exemple de l'identification une dans le sanctuaire d'Atargatis »).
des Bené Mathabôl comme une tribu civique probable, dans Tout cela modifie notre conception des sanctuaires
le cadre de ces discussions sur les tribus, la recherche dépend tribaux. Il est possible néanmoins d'envisager une
forcément du hasard des découvertes. On a parfois tendance explication : la tribu des Bené Mazîn est attestée dans le
à poser l'équivalence entre les quatre tribus les plus secteur ouest de la ville, à proximité du sanctuaire d'Allât
fréquemment attestées et les quatre tribus civiques. Les bny qu'elle a contribué à construire. Elle est aussi citée dans
kmr', les bny myt', les bny mtbwl et les bny m'zyn sont en beaucoup d'inscriptions du sanctuaire de Baalshamîn. Elle
effet des candidats probables à ce titre, selon l'hypothèse de lui est apparemment associée de manière étroite. Le
D. Schlumberger. Mais on peut noter que la tribu des bny sanctuaire cl'Allât constituerait clans ce cas un deuxième
111 'zyn ne serait pas aussi bien connue sans la fouille du centre (concurrent ?) du sanctuaire de Baalshamîn.
sanctuaire de Baalshamîn d'où proviennent seize des vingt La situation est en tout cas encore plus compliquée
trois témoignages qui la concernent. Seuls trois d'entre eux qu'elle ne l'apparaissait jusqu'à présent : la notion de
étaient connus avant le dégagement dans les années 1950 95• sanctuaire tribal est ainsi à envisager avec prudence. On
De même, la découverte des huit textes de la colonnade, aimerait savoir s'il y a eu un changement de sanctuaire tribal,
puis de celui du sanctuaire d' Arsû, vient pratiquement entre février 132 et juin 144, dates des deux textes donnant
doubler le nombre de textes sur les bny mtbwl. De plus, on y les noms des quatre sanctuaires ou bien si les deux sanctuaires
a découvert plusieurs centaines de tessères, qui sont restées étaient utilisés plus ou moins indifféremment par la tribu,
inédites. Avant la découverte du sanctuaire, on connaissait selon les occasions. Il est vrai que ces deux textes n'émanent
seulement un très petit nombre de ces tessères 96• pas d'institutions politiques, mais de caravanes. Celles-ci ont
C'est dire ce qu'une découverte archéologique peut peut-être été organisées par la cité, c'est ce que laisserait
encore apporter sur un site comme Palmyre, dont seulement entendre l'expression 11 cruvoôia rcav1mv TiaA�rnp17Vwv 98•
une petite partie a vraiment été fouillée. Or deux sanctuaires Les statues doivent être dressées rcapà 101ç rcpw101ç
tribaux n'ont pas encore été retrouvés et explorés (celui de îÉCTCTapm àv8ptâm îülÇ àvEyEp0ElCTl '\JTCO îllÇ rcpro111ç
Malakbel et Aglibôl, autrement dit le Bois sacré, et celui cruvoôiaç (Jwt 'rb'[t' qdmy' dy] 'qymw lh bny syrt' qdmyt'),
d'Atargatis). Leur découverte pourrait amener à de nouvelles c'est-à-dire « auprès des quatre premières statues dressées
perspectives sur la place des quatre tribus, mais mise à part par la première caravane». Il est fort probable que la première
la probabilité de l'identification du Bois sacré avec au moins caravane soit celle qui a honoré Soados en 132 (BS 11° 45),
une partie des jarclins de l'oasis, rien n'est assuré. Si les puisque le texte concerne le même personnage et que c'est
rapports entre les bny kmr' et le Bois sacré sont assez bien le seul autre cas connu d'honneurs rendus au moyen de quatre
statues par une caravane. On voit tout de suite quel est le Baalshamîn et Allât. En effet, les deux étaient situés clans
problème. Si l'inscription de 132 fait référence aux quatre un premier temps loin du centre de la cité, hors les murs, ce
statues des quatre sanctuaires, dont celui de Baalshamîn, qui convient bien pour des groupes qui sont arrivés
comment la nouvelle statue de 144 dans le sanctuaire d'Allât tardivement à Palmyre 101• C'est un autre point commun entre
pourrait-elle être à côté de la première ? Un doute peut les deux, et cela peut contribuer à expliquer l'étroitesse de
subsister puisque le texte BS 11 ° 45 est restitué à cet endroit 99, leurs liens clans les textes épigraphiques.
mais on comprendrait mal que la console de colonne ait été Mais on a pu aussi établir des correspondances entre
déplacée aussi loin de son lieu d'origine, d'autant plus qu'à les colonnades qui bordent les rues de Palmyre et les tribus.
chaque fois le texte utilise ou bien le démonstratif ou bien Cela n'est pas forcément étonnant, si l'on considère que
un adverbe de lieu pour insister sur le fait que la statue est l'installation urbaine de Palmyre, oasis de la steppe syrienne,
bien celle dont on parle. Certes, il n'est pas totalement a pour origine la sédentarisation de nomades araméens et
impossible que Soados ait été honoré une autre fois de la arabes. La ville a pu rester marquée par les divisions tribales
même manière par les caravanes, mais cela semble un peu des habitants. Or, les rues à colonnades constituent des
improbable à la lecture des deux inscriptions qui éléments structurants de l'espace urbain, mais aussi des
correspondent assez bien, avec en particulier la même éléments de manifestation des structures urbaines 101• Dans
référence à Vologésias comme lieu de départ de la caravane. certaines zones, des clans et des tribus sont plus
Le texte découvert dans le sanctuaire d'Allât est en tout particulièrement représentés clans les inscriptions
cas un argument de plus pour faire des bny m 'zyn une des honorifiques.
tribus civiques, puisque, dans les deux sanctuaires où ils
apparaissent et qu'ils dominent, sont attestés des honneurs
3. LES BENÉ ZABDIBÔL, UN EXEMPLE DE LOCALISATION
rendus par les tribus civiques. Quel que soit leur sanctuaire
PRÉFÉRENTIELLE
principal, même s'ils en avaient deux, il semble désormais
hors de cloute que les Benê Mazîn sont une des quatre tribus Trois des quatre textes qui concernent les Benê Zabclibôl
civiques. Il est même logique que ce soit une tribu civique (bny z.bdbwl) ont été découverts le long de la Colonnade
officielle qui domine, non un, mais deux des sanctuaires les transversale 103• Ce groupe a d'ailleurs la particularité de
plus importants de la cité, en manifestant ainsi son pouvoir n'être attesté de manière indubitable qu'à cet endroit. En
sur différents quartiers de la cité (voir pl. 7). effet, l'autre texte qui comporte peut-être ce nom provient
du portique est du sanctuaire de Bel, mais le mot est restitué
La découverte de ce texte peut amener à considérer en araméen (::.b[ dbwl}) et n'apparaît pas dans le grec
autrement la manière dont les tribus se répartissaient clans ( CJS 3923 lnv IX, 8 ; fig. 22) 104• Si on utilise le critère
la cité. On a souvent essayé cl'attribuer aux différentes tribus constitué par l'expression dy mn bn_v X, il faut remarquer
des zones urbaines clans lesquelles elles prédominaient 100• que les bny z.bdbtvl ne sont peut-être pas une tribu, alors que
Cette division de la cité en zones cl'influence pourrait être les bny z.bwd, autre restitution possible, en seraient une.
visible dans la manière dont étaient distribuées les Certes, il y a trois attestations des bny ::.bdbwl et une seule
inscriptions mentionnant les tribus (voir un essai de des bny z.bwd, mais il faut mettre l'accent sur le fait que ces
représentation pl. 7). Deux ou trois quartiers sont susceptibles trois textes concernent les membres de la même famille, au
de fournir des informations de ce type. On a parlé même endroit, sans cloute à l'occasion cl'honneurs conférés
longuement du sanctuaire de Baalshamîn. Le cas est un peu par les autorités civiques au chef d'une famille de notables
particulier, car il s'agit là cl'un sanctuaire tribal, clans lequel (C/S 3952 = Inv V, 3). Ces textes de la Colonnade
devait se réunir la tribu. On a vu que les Benê Mazîn avaient transversale, tous datés de mars 179, présentent la
aussi des liens très étroits avec le sanctuaire cl'Allât et que particularité cl ' utiliser l'expression oi È v yÉ vouç
les deux fonctionnaient apparemment en parallèle, selon des Za�fü�coÀacov en face de bny z.bdbvvl klhwn en araméen
modalités encore peu claires. Il faut considérer le fait que ( « ceux du genos des Zabdibôliens » et « tous les Benê
cette tribu est représentée particulièrement clans les deux Zabclibôl » ). C'est la seule occurrence du terme yÉvoç
sanctuaires extra-urbains que sont les sanctuaires de (« origine », « race », « famille », « clan » ou même« tribu »)
99 - On a en grec Ëv[cx] �tÈ[v È]vmù0[cx Èv 1.Epép �1ôd et en araméen 'M certain nombre de tessères.
tnn bt [b'lsmn], « une ici dans le sanctuaire de Zeus/Baalshamîn ». La 104 - La restitution est de Ch. CLERMONT-GANNEAU. RAO VII, Paris, 1906.
restitution est évidemment fondée sur le lieu de découverte du texte et la p. 13. Il a été suivi par la majorité des éditeurs postérieurs de l'inscription.
mention du « ici » lisible dans les cieux textes : elle semble difficilement La restitution était logique à l'époque, puisque la seule tribu dont le nom
discutable. commençait par ::,b- était celle de bny -.:,bdbwl : depuis, au moins un texte
100 - Sauf si le sanctuaire tribal n'appartient pas au quartier de la tribu atteste de l'existence d'une autre tribu dont le nom commence de la même
correspondante. façon: les bny-.:,bll·d (1111 1 IX, 7). Voir les cloutes de J. T. Milik, DFD, p. 116
101 - Sur ce point, voir M. GAWLIKOWSKI, 1995a, p. 105. et 154, qui préfère cette deuxième possibilité. Toutefo is. comme me le
102 - Pour reprendre une expression de C. SAuou, 1996, p. 324. signale F. Villeneuve, zbwd peut-être un diminutif ( schème fa "IÎI) de
103 - C/S 3950, 3951 et 3953 ( = /111• V, 1-2 et 4 ). Il faut rajouter à la liste un zbdbwl.
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 73
dans l'épigraphie palmyrénienne. À y regarder de plus près, Zabclibôl 110, ce qui ne veut pas dire que la famille n'appartient
01 Èv yÉvmK Zcx�fü�wÀawv ressemble à un décalque d'une pas à un groupe de ce nom. Certes, des honneurs accordés
formule sémitique d'un type assez courant, qui justement par un groupe à des individus ne signifient pas forcément
pourrait être dy 11111 bny X ( « ceux qui font partie des fils de qu'ils appartiennent au groupe, même si on a souvent
X») 105• Le terme normal en grec, <)n)Àll, n'apparaît pas, alors tendance à le supposer. Selon toute apparence, les Benê
qu'on pourrait l'attendre. À la même époque, il est toujours Zabclibôl portaient un intérêt particulier à un ensemble
utilisé, par exemple en 182 pour la �UÀll XwvE1 îWV (dans le monumental que les dons de la famille de Shoraîkô ont pu
texte H. INGI-IOLT, 1936, p. 109, n" 11 ). On retrouve à cet endroit embellir. Peut-être s'agissait-il cl'un sanctuaire dont ils étaient
un calque de la même expression sémitique, plus proche les responsables. Cependant il faut bien voir que le Conseil
encore, puisqu'il en rend tous les éléments, y compris le 11111, honore Shoraîkô (CIS 3952) pour avoir « fait clans cette
par Ol cxno �UÀllÇ XmVEl îWV 1116• Le cas est un peu différent, basilique (= portique) sept colonnes, ainsi que toute leur
puisqu'il est question d'une des tribus civiques, pour laquelle ornementation» (w'bd bslq' dnh 'mwdyn sb" wtJbythwn
le vocabulaire pouvait être plus formel que pour une autre. klhwn). C'est clone une œuvre cl'évergétisme civique qui est
Néanmoins, il est probable que l'absence du terme �uÀ11 honorée, et non pas seulement la générosité envers un
a une signification particulière, peut-être parce qu'il était sanctuaire, qui pouvait dépendre des Benê Zabclibôl.
réservé à un nombre restreint de groupes. On retrouve là la Cette œuvre évergétique peut aussi se lire dans le don
théorie de D. Schlumberger qui pensait que l'utilisation du par le même Shoraîkô d'un knwn' de bronze (lrnwn' dy nJ1s'),
mot était le critère pour identifier les quatre tribus civiques sans cloute une sorte de brûle-parfum 111• Cet objet, quel qu'il
à Palmyre 1117• Le principal obstacle qu'on peut y voir est soit, ne prenait pas forcément place clans un sanctuaire, mais
que les bny m'zyn, très liés à l'un des quatre sanctuaires pouvait se trouver clans la colonnade. Il a néanmoins une
civiques (voir plus haut) et à l'une des tribus les plus souvent valeur religieuse assez claire. De même, le frère de Shoraîkô,
représentées, ne sont jamais appelés qrnÀll, alors qu'une tribu Alaînê ( 'lyn' br bym br 'Jyn' Jpr'), connu aussi pour avoir
pratiquement inconnue, la qrnÀll MœyEp17vwv ( CIS 4120) fondé son tombeau de famille à proximité 11 2, est honoré par
l'est. D. Schlumberger résolvait la difficulté en proposant les Benê Zabclibôl (CIS 3951) pour un don au sanctuaire du
de manière tout à fait hypothétique l'identification des deux dieu du soleil Shamash (sms). Il a ainsi offert des qlstr[' dy]
groupes. Cette proposition, difficile du point de vue ksp' («des portes-ou des corbeilles-cl'argent») au dieu 113•
philologique, a été rejetée par M. Gawlikowski et J. T. Milik Ce texte est à rapprocher de CIS 3955 (= Inv V, 8) clans lequel
a préféré identifier la �uÀ11 McxyEp17vwv avec les bny ,ngrt un bienfaiteur anonyme, ainsi que son frère Lishamsh, est
(CIS 3978 et RTP 105) 108• remercié par tous les membres d'un groupe, lui aussi
Les Benê Zabclibôl n'étaient vraisemblablement pas une anonyme, pour avoir offert «clans ce portique, six colonnes,
tribu civique. Comme cl'autres groupes du même type, ils leur entablement et leur toiture en l'honneur de Shamash,
portent un nom de personne. C'est même un des plus Allât et Rahirn » (b'st[w'] dnh 'mwdyn st' wsiythwn
courants à Palmyre 109• Ils font probablement partie d'un wttlylhwn (...) lyqr sms w'lt w1j11n).
groupe dont le fondement est 1 'origine commune de ses Cet ensemble de textes a fait décrire à J. Cantineau la
membres, qu'on peut appeler clan ou tribu, selon l'ampleur Colonnade transversale comme un édifice religieux 114 ; il est
du groupe concerné. Dans ce cas, il est remarquable que les probable que la zone même de la colonnade était en effet
attestations sont assez peu nombreuses et surtout très sacrée, comme celle, à proximité, où l'on a découvert le
concentrées clans le temps et l'espace. sanctuaire cl'Allât. C'est en s'appuyant sur ce texte CIS 3955
Les rapports entre la famille de Shoraîkô, honorée par que J. T. Milik fait des Benê Zabclibôl les prêtres du culte
ce groupe dans la Colonnade transversale, et les Benê cl' un sanctuaire situé au débouché de la Colonnade
Zabclibôl sont assez mystérieux. Une chose est sûre, aucune transversale, sans doute celui du Soleil (Shamash), associé à
des généalogies conservées de la famille ne mentionne de Allât et Rahim 115• Les découvertes ultérieures (sanctuaire
105 Le relatif dy sans antécédent a le sens de« ceux qui », comme le oi encens», « objet dressé» (en citant C/S 3952 pour lequel il ·accepte la
grec. Hors de Palmyre, on connaît par exemple cet usage en syriaque : dbyt traduction « brüle-parfum»). Voir aussi les interrogations de J. T. Milik.
'ys1yl signifie« ceux (qui sont) de la maison d'Israël» (Exode III, 12). DFD, p. 115.
106 -« Ceux de la tribu des Chôneites». Plus que le simple Èv, la préposition 112 - Voir A. SADURSKA, 1977 et M. GAWLIKOWSK[, 1970a, p. 74.
àrco exprime la notion d'origine qui est rendue en araméen par mn. C'est 113 - Selon M. GAWLIKOWSKl, 1970a, p. 75, il faut plutôt lire 'bd qlstr' 11111
peut-être d'ailleurs pour cette raison que les textes de la Colonnade ksp' dy qrb 51115 'Jh': « il a fait les c!C1ustra de l'argent qui a été offert par
transversale emploient le génitif (normal après àno) au lieu du datif régulier le dieu Shamash ». La traduction du mot qlstr' est cliffici le. C'est
après Èv. M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 76 qui propose le sens de vantail d'une porte.
]07 - D. SCHLUMBERGER, 1971, p. 132. R. Moutercle avait proposé le sens de corbeille (dans lm• V. p. 7) ;
108 - M. GAWUKOWSKl, 1973a, p. 37-38 ; J. T. Milik, clans DFD. p. 306. J.-B. Chabot clans le C/S (Cid foc.) préfère le sens de c!C1ustrwn, « barre
109 - J. K. STARK, 1971, p. 16-17 avec plus de soixante attestations. pour fermer une porte».
110 - Sur la famille, voir chapitrer (p. 50). Les textes qui la concernent 114 - Dans Jnv V, p. 18-l 9. Voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 87.
sont CIS 3940, 3950-3955, 4028 et 4066 ; Jm, X, 27 ; M. GAWUKOWSKl, 115 - DFD. p. 115-116 en restituant[bny ::,bdbwl] klhwn comme les auteurs
1970a, p. 76 et RSP 11° 167. de la dédicace au bienfaiteur anonyme.
111 - M. GAWLIKOWSKl, 1973a, p. 85 traduit le mot k.mvn' par « autel à
74 Les notables de Palmy re
d'Allât) ainsi que le peu de probabilité de l'installation du ans. Il est de même possible que le Lishamsh de C/S 3955
tombeau 173d sur l'emplacement d'un temple plus ancien appartienne à cette famille, mais ne soit qu'un neveu ou un
conduisent à rejeter en partie cette interprétation 116• De plus, cousin, qui aurait reçu un nom courant dans la famille.
il ne semble pas que l'on ait trouvé d'autres mentions du La famille de Shoraîkô n'est connue qu'à partir d'une
clan des Bené Zabdibôl dans les fouilles du sanctuaire d'Allât, période où il est très rare qu'on mentionne l'appartenance
mais qu'au contraire les Bené Mazîn et les Bené Iedîbel (voir tribale. À ce moment, l'attestation des Bené Zabdibôl, qui
supra) ont eu la haute main sur ce culte. En revanche, la peuvent difficilement être une des tribus civiques, peut
fréquence des mentions des Bené Zabdibôl en association seulement signifier qu'il s'agit d'un groupe réduit au sein
avec Shamash sur les tessères (RTP 138 et 141) ne peut que de la population palmyrénienne. Il s'agit peut-être cl'une
renforcer la théorie qui en fait des desservants de ce culte 117• famille ou d'un clan de prêtres, chargés plus particulièrement
Les sanctuaires du Soleil et de Rahim devaient en fait du culte « civique » de Shamash n. La dernière inscription
1
116 - M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 87 et 101-102. 121 - C'est ce qu'on peut conclure de la mention du grand dieu de la ville,
117 - On peut s'interroger de ce point de vue sur l'association de sm.s avec Bel. sur les tessères mentionnant les bny -::.bdb11•/. Voir J. TEIXIDOR. 1979,
le dieu Bel (b/) sur les mêmes tessères et quelques autres (RTP 138-142). p. 64-65.
Voir J. TE1x100R, 1979, p. 64-65. sur r opposition entre ces tessères, qui 122 - Il s'appelle AÀmv17ç A1pa.vou toû AÀmv17 LEcpcpEpa. 'lyn' b1)1ym
peuvent comporter aussi le nom lm_,, -;_/)(/h1l'I. et celles qui ne portent que le br· Jyn · ::,pr' ( C/S 3951). L'aîné des enfants porte régulièrement le 110111 de
nom .i;1n/;. son grand-père. mais il devait souvent arriver qu'il meure en bas âge et que
118 - M. GAWLIKOWSKI, 1990a, p. 2643. Néanmoins, un texte du sanctuaire le même nom soit donné à un de ses frères puînés (voir chapitre v1 pour le
de Baalsharnîn associe Rahirn avec ce dieu, ainsi qu'avec Durahlûn et la cas de la famille d'Elahbel).
Fortune de Ieclîbel (gd dy ydy'bl, BS n" 23). 123 - Texte publié par M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 74.
119 - Comme le remarque K. DIJKSTRA, 1995, p. 103-104, l'expression« de 124 - li est relativement rare que les tombeaux soient fondés par un
la maison de leurs pères» n'est peut-être pas tant la manifestation d'un personnage pour lui-même et ses frères. Ce qui est plus courant est la
lien particulier entre ce clan et le dieu (même si ce lien existe) qu'une fondation commune d'un tombeau par cieux frères: c'est peut-être
épithète du dieu (voir CIS 3979 dédié ù 'HÀtQ) TTCXîp(t)Q) et le texte publié l'explication du pluriel du verbe « faire» ( 'bdw. « ils ont fait») dans le
par M. G".WLIKOWSKI.1973a, p. 100 : [ tlov m:iplvov 'HÀiou TTCX.tp(t)OU ). texte de fondation du tombeau cl' Alaînê, alors que ce dernier est le seul
Pour le sens de hamana, voir M. GAWLIKOWSKI, 1997b, p. 837-849. et fondateur mentionné. Une autre personne (pourquoi pas Shoraîkô ?) était
H.J. W. DRJJVERS.1988.p. 165-180. prévue sur l'inscription, et pour une raison ou une autre son 110111 n'a pas
120 - C'est ce que propose J. TEJXID0R, 1979, p. 64. été inscrit.
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 75
commémorée de mamere formelle qu'à l'occasion des le texte araméen était beaucoup plus précis et permettait seul
honneurs rendus à son frère par la cité. De plus, le formulaire de connaître les véritables raisons des honneurs accordés à
de ce texte est un peu différent de celui qui concerne les ce notable palmyrénien. Il en est de même pour les autres
deux fils de Shoraîkô, Iadê et Haîran, les deux autres textes de cet ensemble, à l'exception de CIS 3954, dont les
membres de la famille à avoir été honorés par les Benê deux versions ont sensiblement la même signification 128•
Zabdibôl. Ces deux fils reçoivent une statue en l'honneur Mais seules les versions araméennes de CIS 3950 et 3953
de leur père, ce qui renforce l'importance qu'on peut permettent de savoir que les statues ont été dressées en
accorder à celui-ci. Alaînê est aussi honoré pour ses propres l'honneur de leur père Shoraîkô (Jyqr siykw 'bwhy). Les
mérites, parce qu'il a plu aux Benê Zabdibôl (bdyl dy spr deux textes sont cl'ailleurs exactement identiques, sauf pour
lhwn). On a rajouté après la date la mention des qlstr' le nom du personnage honoré. De même, en CIS 3951, seule
d'argent, vraisemblablement ce par quoi il leur a plu. la version araméenne comporte l'ajout qui mentionne
La concomitance des honneurs rendus à toute la famille l'offrande d'un objet en argent au dieu Shamash. Comme
par différents dédicants est curieuse. On comprend que la l'ont noté différents éditeurs de ces textes, le grec ne semble
construction d'une partie de portique dans une rue soit être qu'un résumé du palmyrénien, ce qu'on explique par le
l'occasion d'honneurs rendus par le Conseil, et qu'un don à fait que ces textes concernent le domaine religieux, sans
un sanctuaire n'entraîne d'honneurs que de la part d'un doute plus conservateur et attaché aux traditions locales.
groupe lié à ce culte. Cela expliquerait la différence entre Pourtant, la place relative des deux versions est curieuse.
CIS 3951 (les Benê Zabdibôl honorent Alaînê) et CIS 3952 En effet, le grec semble avoir la place d'honneur, puisqu'il
(le Conseil honore Shoraîkô). Néanmoins, cinquante ans plus est inscrit sur la face principale, et non sur le côté gauche
tôt, la construction de six colonnes par Lishamsh et son frère (quand on regarde la console), comme le texte araméen 129:
ne leur a valu que des honneurs tribaux, pour autant qu'on la disposition est la même pour les cinq textes bilingues, ce
puisse restituer le texte CIS 3955 125• Les statues des deux qui est normal puisqu'ils ont été gravés en même temps,
fils de Shoraîkô font partie des honneurs rendus au père, sans doute selon un plan d'ensemble.
mais peut-être aussi à l'oncle. Cela n'apparaît pas dans le Il semble que deux logiques s'affrontent. L'araméen,
texte, mais il faut tenir compte de la position de leurs deux mieux compris par la majeure partie de la population de
inscriptions, qui dans la Colonnade transversale entourent Palmyre, donne les renseignements véritablement signifiants
les deux autres. La cinquième inscription ( CIS 3954 = Inv V, qui permettaient aux passants de comprendre pour quelle
5), pour la femme de Shoraîkô, mrty/Map0aç, mère de Iadê raison Shoraîkô et sa famille avaient été honorés. Le caractère
et Hérode Haîran 126, est située un peu plus loin, et se religieux de leur générosité ne prenait sa véritable
différencie des autres parce qu'elle a été dédiée après la mort signification que dans le contexte indigène de Palmyre, mais,
de mrty, par son mari, la faisant participer en quelque sorte en même temps, le grec était utilisé à la place d'honneur,
aux honneurs qui lui étaient rendus. non seulement pour expliquer aux étrangers de passage
On a donc en fait trois groupes de textes différents, même l'honneur fait à Shoraîkô et aux siens, mais aussi, vis-à-vis
si la date est la même. Le texte pour Shoraîkô semble être le de la population de Palmyre, pour exprimer le rang social
plus important. Les Benê Zabdibôl ont dû simplement de cette famille qui, parce qu'elle faisait partie des premières
compléter ce premier texte par trois dédicaces à d'autres familles de l'oasis, utilisait le grec. Le texte du Conseil était
membres de la famille. Il était peut-être inutile d'ajouter une en grec, comme la très grande majorité des inscriptions
dédicace en leur nom à Shoraîkô déjà honoré par le honorifiques officielles, et la puissance de la famille ne
Conseil 127• Le seul moyen d'honorer ce bienfaiteur était peut pouvait mieux se proclamer qu'en utilisant la même langue
être d'honorer sa famille, ce qui prouve d'une part la pour tous les textes qui la concernaient.
puissance de la famille, d'autre part l'importance des liens
du sang dans la vie civique de la ville.
4. LES BENÉ MATHABÔL
Le décret en faveur de Shoraîkô utilise un vocabulaire
tout à fait courant dans les textes du même type à Palmyre Les inscriptions qui concernent les Benê Mathabôl clans
(EÙCJE�îi Kat cplÀÔrrmptv Kat cptÀÔ'îEl�LOv). On a vu aussi que la partie ouest de la Grande Colonnade sont un autre cas
125 - À moins qu'il ne faille restituer aux cieux premières lignes, {'?lm' dnh Conseil les engageait et rendait inutile une décision propre de leur part.
dy X dy 'qymw lh bwf' wbny X] klhwn... ( « [statue de X que lui ont dressée 128 - Avec btr dy mytt lyqrh («après sa mort en son honneur») traduit en
le Conseil et la tribu des Bené X] tout entière... »).Il est tout aussi possible grec par µv17�u1ç ËVElŒV (« en mémoire»). La même expression est aussi
que le dieu lui-même ait participé, ou bien encore la tribu seule. traduite littéralement par �LE1:CX 1:17v 1:EAEU1:TjV, 1:El�L17ç XCXPlV (CIS 3920
126 - Haîran porte le nom de son grand-père paternel, Iaclê celui de son = 1111• IX, 32) ou surtout panaµ17ç Kat �LVll�lllç XCXPlV (C/S3927 etlnv X,
grand-père maternel ; il est tentant de voir en eux l'aîné et son cadet. 119) ; voir les remarques sur cette formule au chapitre 1 (p. 14-15).
L'onomastique des descendants de Haîran (voir arbre généalogique en 129 - Il semble naturel de considérer que l'inscription gravée sur le devant
annexe XVII) prouve qu'il est sürement fils de Martheî. de la console occupe la position« d'honneur». La meilleure preuve en est
1 '.27 Parce que les Bené Zabclibôl appartenaient à la cité. peut-être en tant que quand il n'y a qu'une face inscrite, c'est toujours celle-ci (par exemple
que groupe reconnu ( prêtres du sanctuaire de Shamash ?), un décret du sur les consoles de l'agora, comme /111' X, 1-2).
76 Les notables de Palmyre
dans lequel une famille et une tribu semblent avoir des liens On connaît par certains textes d'autres membres de la
très étroits 130• La tribu des Benê Mathabô] (bny mtbwl) est famille. Le père de Shoadû et de Iarhibôl, Elahbel, a construit
presque sans aucun doute l'une des quatre tribus qui forment le tombeau de la famille à l'extrémité est de la vallée des
le corps civique de Palmyre. C'est aussi la tribu Tombeaux en 1 64 (Inv IV, 12). La famille de BE00EK est
palmyrénienne attestée le plus tardivement, puisque le texte aussi assez bien connue. Il semble qu'elle soit l'arrière-petite
n" 6 date de 247 131• Beaucoup des inscriptions qui la fille d'un certain Avav1ç Ma1cxou ('nny br mlkw 'nny),
concernent sont funéraires 132 et on ignore la provenance de trésorier en 114 d'après le texte CJS 3994 137• Son frère
la plupart des autres textes. En fait, hormis trois textes qui (Ma1cxoç MouK1avoû wû Avavu5ou) est connu par la
viennent du sanctuaire de Bel ( CJS 3915 et 3925-3925) et dédicace d'un autel au dieu anonyme dans les mêmes années
un autre qui vient du sanctuaire d'Arsû (Kh. As'AD et (texte 11° 5a). Le nom de leur père MouK1avÔç (le nom latin
J. TEIXIDOR, 1985b, p. 286), tous les textes « civils » (non Mucianus) est sans doute une adaptation du nom sémitique
religieux ou funéraires) qui concernent les bny mtbwl mqymw. Le procédé d'adaptation choisi a visiblement été la
proviennent de cette section réduite de la Grande Colonnade. ressemblance phonétique. On retrouve peut-être la même
Comme dans l'exemple de la Colonnade transversale, la tribu chose dans le texte CJS 4212 (lnv VII, 1 3), assez lacunaire,
honore les membres d'une seule famille, celle de Bartê (si et dans le texte n" 7 de cette partie de la Grande Colonnade,
on met à part le rhéteur T. Fl. Cerealius d' lnv III, 24 ). De 011 a [Mou]Klavo[v] MaÀxou îOÛ MoKl[�lOU .. .l. La partie
plus, il n'est nullement assuré que cette famille appartenait araméenne de1'inscription est trop mutilée pour qu'on puisse
elle-même à la tribu, même si, comme pour celle de Shoraîkô assurer que cette alternance entre les deux noms (grand-père
et Alaînê, c'est probable. et petit-fils) présente simplement les deux versions (nom
Toute reconstruction de 1' arbre généalogique de la grec et nom sémitique) du même nom.
famille de Bartê se heurte à l'existence d'une coupure d'au Il est en tout cas difficile, à partir des textes n'" 7 et 8, de
moins deux générations entre un ensemble de textes qui comprendre à quelle partie de la famille on a affaire. Il est
datent des années 200 rn et le texte daté de 279 -280 1.1-1_ Le visiblement question d'un père Malikû (n" 8) et de son fils
texte de 247 qui provient du même ensemble (n" 6) n'a pas Mucianus (n" 7). Seule la date des honneurs rendus au père
conservé le nom de la personne honorée et permet seulement est conservée, mais il est probable que la statue du fils a été
de savoir que la tribu continue à être active à cette époque. dédiée à la même période. Ils ont contribué à leurs frais (Èi;
Shoadû, fils d'Elahbel, est honoré en 201 par les Benê i8imv) à la construction du toit de la basilique du dieu
Mathabôl (texte n" 3). Le texte parle d'une statue« qui a été ancestralArès/Arsû (cn1hcxç [urcÈp 'î11vl �l[EyaÀ11vl �acnÀ11<l11v
dressée pour lui par la tribu » ( dy 'qymt lh pbzh dy bny 'ApÉmç rcahpcôou 0rn[û] dans le texte 11° 8) ; le texte 11° 7 est
mtbwl). Or ce texte présente une ambiguïté grammaticale, pratiquement identique et assure les restitutions.
puisque le mot pbz« tribu » se termine par le pronom affixe L'onomastique de ces deux personnes incite à en faire des
h (3" personne du singulier : « son ») qui peut être traduit de descendants du 'nny/'nnwde l'inscription CJS 3994. De plus,
deux façons. Il peut s'agir de « sa tribu », mais il est tout comme l'ont remarqué les éditeurs de1'inscription n" 8, après
aussi possible que le pronom ne soit là que pour anticiper le le nom du personnage mlkw mqynnv, et avant une lacune,
nom de la tribu, selon une formule courante en syriaque par apparaît un « ' » qui pourrait être le début du nom 'nny. Le
exemple 115• Les autres textes ne permettent pas de conclure nom complet du père serait donc à restituer mlkw mqy1mv
sur l'appartenance tribale des membres de la famille. La 'nny. C'est aussi le nom du frère de BE00EK tel qu'il apparaît
femme de Shoadû, BE00aç (texte n" 2 de 208) 11 6, leur fils en grec dans le texte n" 5a (en admettant l'équivalence
(textes n" 4 de 203 et n" 1 ), sont aussi honorés par cette tribu. MouKmvôdmqymw). Néanmoins, la généalogie de BE00aç
Son frère, Iarhibôl, l'avait été quelques années auparavant est un peu différente de celle de son frère, puisqu'une
(texte 11° 5 de 197). génération est venue s'intercaler (BE00av MouK1avoû
130 - La plupart de ces textes ont été publiés assez récemment par Kh. As' AD 135 - Voir les remarques it ce sujet de M. Gawlikowski (Kh. As'1-\D et
et M. GAWLIKOWSKJ.1986-1987.p. 164-171 (textes n'" 1-8).0n connaissait M. GAWUKOWSKI. 1986-1987. p. 165-166). Le fait que le pronom soit au
déjà un texte concernant la tribu �t proximité de cette zone (/nl' III , 24): la singulier. alors que le 110111 qui se trouve après la particule dy est au pluriel
Mcx08cx�wÀtwv <jluÀ17 honore le rhéteur T. FI. Cerealius (T. ct>À. (les bny mtbll'/) invite à préférer la première solution, ce qui fait de Shoaclû
KëpëÛÀtoç). (et de ses descendants?) un membre de la tribu des Benê Mathabôl. Je
131 - Le texte n" 8 daté de 279-280 a perdu les premières lignes dans remercie M. J. Teixiclor, d'avoir bien voulu me renseigner sur ce point.
lesquelles se trouvait peut-être le nom de la tribu. 136 - Le nom transcrit comme Bë08Etv en grec (accusatif) est sans cloute
132 - Dans l'ordre chronologique (voir le tableau en annexe VIII. 1 et 3), en araméen bty, connu par CJS 4383 et 4384.
CIS 4113, 4115 : 1111 1 VII, 3 : J. CANTINEAU, 1930a, p. 545, n" 13 : CIS 4187: 137 - Si on suit J.-B. Chabot à propos de CIS 4238 (CIS. ad /oc.), mrlhwn
Jnv VII. 5. brl Jsms bry1)1bwl ,skybl serait la mère de ce personnage. Cette proposition
133 - Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI, 1986-1987 n"' 5, 3. 4 et 2. est rejetée par J. T. Milik, dans DFD, p. 114. Le 110111 de AvcxvK apparaît
134 - Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI. 1986-1987 n" 8, auquel se rattache une fois comme 'nnw et deux fois comme 'nny sur ces trois autels au texte
sans doute le n" 7. identique pour le reste.
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 77
Mcûuxou 1où Avcxv18ou). D'après les dates, il est ornementation clans une autre « basilique » ( bslq '), la
extrêmement probable qu'il s'agit bien du frère et de la sœur ; Colonnade transversale. De même, cette portion de la
il n'est pas non plus étonnant que les listes d'ancêtres ne Colonnade transversale pouvait être dédiée à une divinité,
correspondent pas tout à fait, qu'on supprime ou qu'on sans cloute Shamash, comme le prouverait le texte ClS 3955.
ajoute, selon les cas, une génération. D'un autre côté, ce n'est que par des preuves indirectes qu'on
On peut se demander si la date du texte 11° 8 (ex ? cp ', peut penser que la construction financée par Shoraîkô lui
c'est-à-dire 591 de l'ère séleucide, soit 279-280 de notre même avait des rapports avec le culte solaire.
ère), dont la lecture est indubitable d'après l'éditeur, n'est Pour reprendre 1 'exemple de la Grande Colonnade, on
pas le fruit d'une erreur du lapicide. La lacune chronologique ne peut manquer d'être frappé par le relatif éloignement du
serait alors supprimée. Si McxÀxoç MoKrnvoû 1oû Avcxv18ou temple cl'Arsû lui-même. La concomitance de la découverte
du texte 11° 5a est le même que le mlkw mqymw 'nny du du temple et des inscriptions de la Grande Colonnade ne
texte n° 8, son fils (MODKlCXV0Ç MCXÀXOD îOÛ MOKl�LOD), doit pas dissimuler la distance entre les deux lieux. On peut
dans le texte 11° 7, serait le neveu de Shoadû et Betheî, ce qui pourtant penser que du point de vue urbain les deux
placerait l'activité de la famille au plus tôt au milieu du monuments appartiennent au même quartier, qui pourrait être
m" siècle. Néanmoins, en l'absence de photos publiées du dominé par la tribu des bny mtbvvl. On voit par cet exemple
texte, il est difficile de contester l'editio princeps sur ce qu'il n'est pas nécessaire que le sanctuaire de Shamash soit
point rn_ à proximité immédiate de la Colonnade transversale. Un
Tous les membres de la famille sont honorés par la tribu, portique, ou seulement une partie, peut lui être dédié ailleurs
ce qui est une première différence avec les textes de la qu'aux abords du lieu de culte.
Colonnade transversale dans lesquels trois dédicants Quoi qu'il en soit, malgré les différences (honneurs
différents apparaissaient. Autre différence, les cléclicants groupés ou échelonnés clans le temps), il est manifeste qu'on
appartiennent à deux familles liées par au moins un mariage. a affaire clans ces deux cas à un phénomène du même type
D'autre part, les raisons des honneurs restent très une famille, ou un groupe de familles, en relation étroite
mystérieuses, sauf clans les deux derniers textes (n'" 7 et 8). avec un sanctuaire, est honorée par le groupe tribal qui gravite
Comme dans le cas de la Colonnade transversale, il est autour de ce sanctuaire 139• Le processus est assez semblable
probable que la générosité d'un membre de la famille envers pour ces deux tribus qui n'ont apparemment pas le même
le sanctuaire du dieu particulièrement vénéré par la tribu statut au sein de la cité de Palmyre. Les Bené Zabclibôl, autant
(clans ce cas, Arsû/Arès) a conduit cette dernière à étendre qu'on puisse en juger par le petit nombre de textes connus,
les honneurs aux autres membres de la famille. Il se peut sont un groupe relativement restreint, peut-être un groupe
aussi qu'une des raisons de l'alliance des deux familles soit familial réunissant des prêtres du dieu Shamash. C'est
justement une communauté de culte et que l'importance de cl' ailleurs un autre sujet cl' étonnement que ce nom
ce groupe clans le sanctuaire cl'Arsû soit reconnue d'une proprement araméen pour le culte d'un dieu arabe, honoré
manière formelle par la tribu. en même temps que Allât et Rahim dont l'origine arabe est
On a un bon exemple de cette générosité familiale, avec aussi assurée. Ce fait peut amener à reconsidérer les
les deux textes parallèles de Malikû et de son fils Mucianus. conclusions qu'on tire habituellement sur l'origine de la
L'identité du formulaire a permis de restituer de manière population cl'après ses cultes.
assez sûre le nom de la tribu à la première ligne du texte Les Bené Mathabôl au contraire sont une des tribus les
n° 8, daté de 279-280. La nature des offrandes faites par ces mieux connues ; les textes de la Grande Colonnade
personnages et l'endroit où a trouvé place leur activité de fournissent la preuve de leurs liens étroits avec Arsû, et en
construction éclairent d'un jour particulier les textes de la font un exemple de tribu civique. Malgré leur nom, ils se
Colonnade transversale. L'aménagement de cette partie de regroupent autour du culte d'un dieu tout à fait arabe.L'autel
la Grande Colonnade, avec l'édification cl'« un toit au-dessus découvert sur le site du sanctuaire ne peut que renforcer cet
de la grande basilique cl'Arsû » (�LEycxÀll �cxmÀ1K17 et [bjslk' aspect ethnique, puisque, outre Arsû, y sont mentionnés
en araméen) rappelle évidemment la construction par « Qismaya et les filles du dieu», dont l'origine arabe est
Shoraîkô, fils de Haîran, de sept colonnes et de leur probable i.w_
138 - Même si la date séleucide de 591 était confirmée, il serait intéressant rendent inutiles l'intervention du Conseil. D'un autre côté, il se peut très
de faire intervenir des critères paléographiques, pour voir si les écritures bien qu'un texte mentionnant une dédicace du Conseil apparaisse un jour.
utilisées pour les inscriptions n'" 7 et 8 permettent une datation aussi tardive. D'autre part, le siècle qui s'est écoulé entre les textes de la Colonnade
139 - Dans la comparaison de ces deux dossiers épigraphiques, il faut sans transversale et les derniers de la Grande Colonnade peut être une explication
cloute éviter de faire comme s'ils étaient complets et qu'on possédait possible de ce changement clans les manières de procéder.
l'ensemble des textes concernant les deux familles. Les inscriptions de la 140 - Publication du texte par Kh. As' AD etJ. TEIXIDOR, 1985b, p. 285-293
Grande Colonnade sont le fait d'une tribu, et le Conseil n'apparaît pas, avec commentaire. Voir aussi les remarques de M. GAWLIKOWSKI, 1990a,
comme il le fait en CIS 3952 (Colonnade transversale). On peut être tenté p. 2623.
cl'en conclure que les honneurs rendus par une tribu civique (les bny mtbwf)
78 Les notables de Palmy re
On a donc au moins trois exemples de familles liées à Pourtant, certains ensembles religieux paraissent être en
un ou plusieurs sanctuaires, et comme déléguées par une dehors de ce système tribal et, dans certains cas, sont une autre
tribu pour le culte. Que ce soit dans le cas des Bené Mazîn, occasion pour des grands notables cl'exprimer leur richesse et
clans celui des Bené Zabclibôl ou dans celui des Bené sans cloute leur prééminence clans la société palmyrénienne.
Mathabôl, il apparaît qu'une famille de notabilités de la cité De toute façon, à cause de notre ignorance de l'habitat à
est au premier plan. Le parallélisme entre les trois n'est Palmyre, c'est surtout clans le domaine religieux qu'on dispose
évidemment pas total, ne serait-ce que par le fait que les de documents. De même les inscriptions renseignent en
1 1
Benê Zabdibôl ne sont pas une tribu civique mais ces -1 , majorité sur les activités des notables au sein des grands
exemples ont l'avantage de prouver la survivance de sanctuaires, à l'exception évidemment des activités édilitaires
structures préciviques qui ont sans doute été reprises et ou caravanières, aspects sur lesquels il faudra revenir en détail.
rationalisées au moment de la transformation des institutions Comme on a pu le voir, il existe des liens très forts entre la
de la communauté. Ainsi les différentes composantes de la topographie urbaine de Palmyre et sa topographie religieuse,
population ont pu s'installer au fur et à mesure de leur arrivée du moins quand on se place au niveau des tribus. Cette
dans certaines zones en se regroupant par origine et conclusion est évidemment plus difficile à établir pour des
éventuellement par tribu. Comme on l'a vu, cela ne signifie familles individuelles, ou même des classes sociales. On tentera
nullement que ces subdivisions aient été reprises lors des d'éclairer ces problèmes aux chapitres 1v et v.
1
réformes du !" siècle. Mais si on connaît les liens de certains groupes tribaux
On peut reprendre l'exemple de SulJné à ce propos. avec des sanctuaires, il semble pourtant que ce ne soit qu'un
Comme le prouve le plan établi par A. de Boucheman, les des aspects de la question. Il est possible aussi cl'étudier la
habitants de cette petite cité se regroupent clans un premier manière dont se faisait la relation entre la population de
temps selon leur origine tribale (voir pl. 5). Cette localisation Palmyre (soit dans son ensemble, soit pour des groupes de
préférentielle s'affaiblit normalement au fur et à mesure que taille plus réduite) et les monuments religieux qui
la sédentarisation s'ancre dans les mœurs, mais ce qui semble constituaient son cadre de vie.
original à SulJné est la permanence de ces groupements 1 2• -1
141 - Surtout parce que leur sanctuaire ne fait pas partie des cinq sanctuaires le grec est lacunaire et a perdu le verbe dont le complément (îov vaov îÔV
mentionnés comme civiques clans les textes de Palmyre. [wù1 �lOÇ cr[-ù]v îQ) mpo]vaî. cp [KCÙ cr-ùv î]O'.lÇ aUaJtç ...] « le temple de
142 - A. DE BoucI-IEMAN, 1939, p. 30 et 46, 11. 1. Zeus avec son pronaos et avec les autres ... ») donne de manière sûre le
143 - A. DE BouCHEMAN, 1939, p. 17 (plan de la ville). nom grec de Baalshamîn. Connu depuis longtemps, il a été découvert sur
144 - Le texte araméen est très clair : bn' hyk/', « il a construit le temple » ; une console de colonne appartenant au pronaos du temple.
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 79
construction de portiques ou de parties de portiques par divers terminé avant le début du n" siècle, la théorie de 1'intervention
personnages. Malê Agrippa est à l'évidence un grand notable impériale (la rapidité cl'exécution) n'est plus valable. De plus,
puisqu'il a été deux fois secrétaire du Conseil, et qu'il a même si les ouvriers qui ont construit le temple venaient de
fourni de l'huile lors de la visite de l'empereur Hadrien. De l'Empire, ce qui est fort probable, le plan même du temple
plus, on connaît un peu sa famille. Son père, y1J1y br lifms br et tout ce qui fait son originalité sont plus compréhensibles,
r'y, est le cléclicant d'au moins un des portiques du sanctuaire. si on en fait une œuvre de conception locale.
Il appartient aux Bené Mazîn, alors que, une cinquantaine De plus, un certain nombre de textes sont la marque de
cl' années plus tard, son fils ne mentionne pas cette l'intervention cl'évergètes palmyréniens, en particulier pour
appartenance. Malgré cela, on peut supposer qu'il fait partie les portes du sanctuaire (C/S 3914). Mais dès le premier
de la tribu de son père et il n'est pas étonnant qu'il participe quart du !"' siècle des notables de la ville font des offrandes
à l'embellissement d'un sanctuaire auquel sa famille devait qui permettent la construction du temple. Ainsi en 24, un
être particulièrement attachée. membre du clan Hashash (des bny kmr'), Malikû, est honoré
par « tous les marchands qui sont à Babylone » 1 -+7 pour avoir
Toutefois le texte qui le concerne n'est pas une décision « aidé à la construction du temple de Bel, à ses frais, ce que
autonome de la tribu pour le remercier de ses bienfaits, mais personne n'avait fait» ('[d]r bnyn' dy h[y]kl' dy bl wyhb
comme on l'a déjà noté au chapitre 1 (p. 32), il s'agit d'une 11111 kysh dy l' 'bdh 'ns). Même si on pouvait prouver
décision des autorités de la cité, appliquée sans cloute par l'intervention impériale, elle n'est pas incompatible avec la
les autorités propres au sanctuaire 1-+5_ Le début du texte participation de l'élite de la vi11e aux travaux.
palmyrénien est très clair : « par décision du Conseil et du Quoi qu'il en soit de l'histoire architecturale et artistique
Peuple» (mn twbyt bwl' wdmws). Ce n'est plus seulement du monument qui ne nous retiendra pas ici, il semble bien
en tant que bienfaiteur du dieu de sa propre tribu que Malê que le grand temple était une sorte de centre religieux de
est remercié, mais aussi parce qu'il a accompli clans Palmyre, où les différentes tribus pouvaient se trouver
l'exercice de ses fonctions des actions clignes d'éloges représentées. Ainsi on a pu voir au chapitre, (C 2) qu'il ne
civiques. semblait pas que la symposiarchie de Bel (charge sans cloute
Le système des regroupements tribaux constitutifs de la annuelle) ait été réservée à une tribu particulière. Cette
cité de Palmyre semble ici se doubler du rôle plus ou moins fonction, couplée à la grande prêtrise du culte de Bel,
autonome d'évergètes. Cette caractéristique place plutôt le constituait sans cloute le sommet de la hiérarchie religieuse
cas de Malê Agrippa clans une tradition gréco-romaine, ce de Palmyre. D. Schlumberger voit clans le décor d'une poutre
qui expliquerait la disparition des constantes références aux du temple de Bel la preuve de l'union en ce lieu des quatre
tribus. Cela correspond aussi à la même époque à la tribus : on voit en effet sur cette poutre un quadruple sacrifice,
disparition progressive des mentions de la tribu clans les ce qui correspondrait au nombre de tribus I-ls. Cette
inscriptions de Palmyre, même si les quatre tribus honorent conception acceptée par la majorité des historiens manque
ensemble des bienfaiteurs jusqu'en 199 (Jnv X, 44). néanmoins de preuves formelles ; on a plutôt un faisceau
Parallèlement, il existe au moins un endroit où les différentes d'indices et de déductions ingénieuses.
parties de la population de la cité se regroupent, et où sont Il est certain que la place centrale du sanctuaire au sein
attestées la plupart de ses composantes. de l'urbanisme palmyrénien, à 1'origine de la Grande
Colonnade, ainsi que l'énormité du complexe qui abrite le
temple ne peuvent que renforcer la théorie qui fait du
1. LE SANCTUAIRE DE BEL, CENTRE CIVIQUE ?
sanctuaire le centre religieux de la ville (fig. 23). De plus,
On situe le centre primitif de Palmyre sur le tell où se les inscriptions honorifiques de notables palmyréniens qu'on
trouve le sanctuaire de Bel depuis au moins le début du trouve sur les colonnades qui entourent le temple, sont le
(' siècle de notre ère. Ce sanctuaire construit en plusieurs signe qu'à cet endroit l'ensemble de la cité honorait ses
années est une telle nouveauté pour le site de Palmyre que bienfaiteurs. Il s'agit en outre, comme l'agora, d'un espace
certains savants ont soutenu que le temple avait été construit public, utilisé par les autorités de la cité.
grâce à des fonds fournis par Rome, comme pour marquer Mais toutes les inscriptions ne sont pas le fait de la cité,
la puissance de l'Empire à Palmyre 1-+6• Néanmoins, si on c'est-à-dire du Conseil, parfois avec le Peuple. L'une d'elles
accepte les changements proposés par M. Pietrzykowski à qui mentionne la réconciliation de deux tribus grâce à
l'histoire de la construction du temple, on est amené à l'intervention d'un notable, mérite d'être rappelée (C/S 3915
reconsidérer les événements. Si le temple n'est en fait pas = lnv IX, 13). b§s br ns' br bwlb' bsif (« Hashash, fils de
145 - Ce peuvent être les prêtres ou encore une tribu (bny m'zyn ou bny A. Bounni et M. al-Maqdissi n'ont pas encore été publiées.
ydy'bl'?). l 47 - lm' IX. 11 : tg1y' klhwn dy bmdynt bbl. Le texte grec est une dédicace
146 - Voir M. A. R. CoLLEDGE, 1976b. p. 50-52. Plus généralement sur le au même personnage par le 81îµoç de Palmyre, mais sans aucun détail.
sanctuaire, voir R. AMY, H. SEYRIG et E. WILL, 1975; M. PrETRZYKOWSKI, 148 - D. Scr-!LUMBERGER, 1971. p. 129.
1997 : R. Du MESNIL ou BurssoN. 1966 : des fouilles récentes menées par
80 Les notables de Palmyre
Neshâ, fils de Bôlhâ Hashash») est honoré par les bny kmr' être son frère, de la tribu des bny kmr'. D'autres textes
(«Bené Komarê») et les bny mtbwl («Bené Mathabôl») montrent l'importance de cette dernière tribu dans le
« parce qu'il s'est tenu à leur tête et a fait la paix entre eux» sanctuaire dans les années qui suivent. En 28, la dédicace
(mn {dy] qm brshwn w'bd slm' bynyhwn). On connaît le CIS 3922 (= lnv IX, 9) est le fait de fils qui honorent leur
clan Hashash et on sait par les textes lnv IX, 11-12 qu'il père 'gylw br tymy br zbdbwl. Ils appartiennent aussi aux
appartenait aux bny kmr'. Selon toute vraisemblance, bien bny kmr'. Surtout le texte lnv IX, 1 daté de 45, commémore
que le texte ne le dise pas, on peut faire de Hashash un la dédicace du temple de Bel en 32 par Jsrns br tybwl br
membre de cette tribu, qui est celle de son frère 149• Ce skybl, membre de la même tribu. Comme son nom l'indique
personnage était visiblement influent. Il était possible clans («les fils des prêtres»), il n'est pas surprenant outre mesure
certains cas de faire une sorte d'union des tribus autour d'une que la tribu soit bien représentée à cet endroit.
personnalité particulièrement charismatique. L'absence de Néanmoins, cl' a utres tribus participèrent à la
mention de la tribu du personnage lui-même est intéressante construction du temple. Ainsi MoKa�Loç OyaÀou 1ou Kat
soit parce que clans un texte de ce type, il était inutile de Oxxmaou (mqymw br 'gylw br P$Y'1 br tymy dy mtqrh
rappeler que l'arbitre était en même temps juge et partie, bkysw, «Moqîmü, fils de Ogeîlü, fils de Pasaîel, fils de
soit pour la simple raison qu'il était à la tête des deux tribus. Taîmaî, qui est surnommé Hokaîshû») est honoré en 51 par
Ce type de fonctions a des parallèles clans le monde arabe la rcÔÀK, gbl, pour ses dons envers le sanctuaire (C/S 3923).
préislamique où l'existence cl'arbitres chargés de régler les Il appartient aux bny z.b[...J. Quelques années plus tard, le
conflits, aussi bien entre tribus qu'au sein de celles-ci, est fameux Haîran bar Bônnê participe aussi à l'embellissement
bien attestée 150• Le rôle de Hashash entre deux tribus a aussi du temple. Il est honoré par les prêtres de Bel en 56 (lnv IX,
l'intérêt de montrer qu'il y avait des conflits internes à la 20) et un texte de 74 rappelle son activité dans la maison des
population de Palmyre 151• Cela n'est cl' ailleurs pas dieux (J. CANTINEAU, 1933, p. 175, n" 2b). Ces deux textes
surprenant, mais il faut souligner que c'est l'unique exemple suffisent à rattacher ce membre des bny myt' (« Bené Mîtâ»)
de ce genre clans l'ensemble de la documentation au sanctuaire de Bel.
palmyrénienne. On voit qu'il y a une sorte de succession, qui correspond
Le texte renforce l'idée qu'on se fait du sanctuaire de peut-être à la succession de l'influence des différentes tribus
Bel comme du centre religieux de la cité, unificateur des à la tête du sanctuaire. De même, avant que les bny bss
tribus : une sorte de sanctuaire national. Ce qui est intéressant occupent le devant de la scène, un membre des bny mtlxwl
du point de vue de l'évolution institutionnelle de la cité est est remercié par des marchands pour avoir contribué à la
sa date : 21 apr. J.-C. Il est clone très probablement antérieur construction du temple (rk 111v [1ccia1vl 1ou vaoû B11Àou,
à l'instauration de la rcÔÀK de Palmyre. Parallèlement aux CIS 3924 de 19). La plus ancienne inscription palmyrénienne
inscriptions presque contemporaines (mais légèrement datée (lnv XI, 100 de 44 av. J.-C.) est une dédicace faite par
postérieures) qui nomment le Peuple (6 811�Loç ), les trésoriers les prêtres de Bel à un membre des bny khnbw (« Bené
(01 àpyupo1o�Lim 'nws 'nwst') ou le gbl (communauté?) Kohennabû»).Enfin un certain nombre de textes archaïques
des Palmyréniens (lnv IX, 11-12 de 24 et 25), l'existence de du sanctuaire de Bel mentionnent des membres des bny
tribus est attestée comme éléments quasi autonomes de la m'zyn («Bené Mazîn», lnv XI, 88 et 92; J. CANTINEAU,
vie politique de la ville. Quand il s'agit de ramener la paix 1936, p. 349, n" 24). D'autres tribus encore apparaissent aussi
au cours d'un conflit entre deux éléments constitutifs de la au cours des années qui suivent.
population, c'est à un personnage influent qu'on fait appel, Tous ces textes indiquent clone bien que le sanctuaire
et non à des institutions. Même si le gbl de Palmyre existe de Bel, beaucoup plus que les autres lieux de culte, était
déjà, comme le prouve un texte de 11 apr. J.-C. 152, il ne fréquenté par les membres de nombreuses tribus. Le grand
semble pas intervenir clans les affaires des deux tribus. nombre d'inscriptions honorifiques faites par des fils à leur
Les deux tribus qui apparaissent clans C/S 3915, ainsi père 153, ainsi que le nombre d'inscriptions caravanières,
que quelques autres, sont déjà connues depuis un certain montre aussi que le sanctuaire était utilisé comme le lieu de
temps à ce moment de l'histoire de Palmyre (voir le tableau manifestation publique de l'influence de certains notables
en annexe VIII. 3 ). Par une curieuse coïncidence, alors que de Palmyre. Néanmoins, il semble qu'il ait subi la
la tribu des bny mtbH'1 semble au premier plan dans le concurrence d'autres lieux, surtout l'agora, à partir du
sanctuaire ( C/S 3924-3925), dans un second temps, après 11" siècle de notre ère, au moins pour les textes officiels (voir
l'intervention de Hashash, le personnage important semble chapitre 1). Il faut pourtant répéter qu'à la différence des
149 - On devait hériter cle cette appartenance tribale. au moins en ligne av. J.-C. à Palmyre (voir tableau en annexe V III. 3). ce qui prouve qu'il
masculine. D'autre part, il semble peu probable que deux frères de même s'agit bien de cieux groupes sans cloute rivaux au sein de la population qui
père aient pu appartenir à cieux tribus diftërentes. s·est installée clans la ville.
150 - Voir J. HENNINGER, 1959, p. 83 sur la fonction du frnkam («juge ou 152 - M. GAWLIKOWSKI et Kh. As' AD, 1993. p. 163-172.
plutôt arbitre auquel on s'adresse pour le règlement des différends »). 153 - Par exemple, C!S 3922 et 3925 ou /m 1 IX. 7 ( voir chapitre v).
151 - De plus, ces deux tribus sont amplement attestées dès la fin du 1" siècle
Chapitre II: L'identité ethnique de Polmyre 81
autres sanctuaires, dans lesquels on a découvert des textes 80 et 180 après J.-C. Ce qui est très intéressant dans
qui concernent seulement certains groupes de la le cas de ce sanctuaire, c'est de voir que deux grandes
population 15·\ le sanctuaire de Bel se signale par la présence familles semblent prédominer, celle de Belshûrî et celle
d'une grande variété de tribus. À l'agora, la situation est un cl'Elahbel. Toutes deux sont connues depuis longtemps par
peu différente, car la date plus tardive de la majorité des des inscriptions découvertes ailleurs clans la ville. La famille
textes fait que les mentions de tribus sont plus rares. De cl'Elahbel est propriétaire d'une des plus belles tours de la
plus, il s'agit là d'un lieu public, où il était naturel que soient vallée des Tombeaux, dédiée en 103 par Elahbel et ses trois
honorés tous les personnages qui contribuaient au bien de la frères. Les inscriptions de ce tombeau donnent cl'amples
cité, quelle que soit leur origine. Le sanctuaire de Bel jouait renseignements sur la famille (voir chapitre v1) 158• La famille
donc sans doute le même rôle, car il était le lieu où se de Belshürî est connue par plusieurs textes funéraires 159• Son
rassemblait la cité, peut-être à l'occasion de fêtes religieuses. surnom ( bny b'' « Bené Baâ » ), présent clans ces textes, ainsi
De plus, si Bel était la divinité principale du sanctuaire, que clans le texte CIS 3929, n'est, curieusement, pas utilisé
d'autres divinités étaient honorées en ce lieu. Ainsi aux clans le sanctuaire de Nabü. Il faudra revenir sur cette
témoignages de plusieurs textes, le temple de Bel était appelé particularité. On a vu aussi que la tribu appartient aux bny
« maison de leurs (= les Palmyréniens) dieux » (bt knbt ( C/S 4 114 = Inv IV, 4a), mais cette appartenance à une
'lhyhwn) 155• I1 se peut donc que cette pluralité de divinités tribu attestée par un seul texte n'a pas non plus de
ait été une raison de plus pour attirer dans le sanctuaire les confirmation clans le sanctuaire 160•
fidèles de cultes divers. Les donateurs n'appartiennent pourtant pas tous à ces
On a donc un système à deux niveaux, avec d'une part deux familles 161, comme le prouvent un certain nombre
un sanctuaire « national », et d'autre part des sanctuaires cl'inscriptions de type évergétique ( « un tel ou un tel a donné
tribaux, subdivisés eux aussi en deux groupes principaux. une ou deux ou trois colonnes ») 162• On retrouve un schéma
Les plus importants sont ceux des quatre grandes tribus semblable cl a ns le sanctuaire de Baalshamîn, pour la
civiques. Parallèlement existent sans doute aussi des construction de portiques par tronçons de quelques colonnes.
sanctuaires qui peuvent être ceux des tribus antérieures aux À la différence de Baalshamîn pourtant, on ne connaît pas
réformes administratives du l"' siècle.C'est le cas par exemple le nom de celui qui a fait construire le temple lui-même
du sanctuaire de Shamash, autour duquel se rassemblent les (l'équivalent du Malê Agrippa de Baalshamîn). Nul doute
bny zbdbvvl. Pourtant ce système ne constitue pas l'ensemble qu'il devait s'agir cl'un personnage important, car ce bâtiment
de la vie religieuse de Palmyre, et en marge, il semble que (appelé longtemps « temple Corinthien ») est une
certaines familles de notables sont en rapport particulier avec construction importante. Il est possible néanmoins qu'il
des sanctuaires 156• s'agisse d'un membre de la famille d'Elahbel, peut-être
Elahbel lui-même, si on en croit un texte lacunaire publié
par M. SosERNHEIM, 1905, p. 24, n" 19 163• Il est possible que
2. LE SANCTUAIRE DE NABÛ ET LES GRANDES FAMILLES
ce fragment provienne du fronton du temple. On y lit le mot
On sait depuis longtemps que le sanctuaire de Nabû 157, I.Epy[{ Q'.], or c'est la tribu à laquelle appartenait Elahbel (voir
clans le centre monumental de Palmyre, s'est développé entre A. BouNNI, 19 86, 11 ° 18 = DFD p. 163). D'autres
154 - Comme les bny m'zyn clans le sanctuaire cle Baalshamîn. Mais cela 159 - Les monuments funéraires de la famille sont les tours n'" 21.67 et 68
est vrai même en dehors des sanctuaires.puisqu'on a vu que les lmy z.bdbll'! de la vallée des Tombeaux. Voir le chapitre v1 pour une analyse d'un certain
sont surtout attestés dans une zone étroite, de même que les bny mtbll'l. nombre de ces textes (CIS 4114, 4124-4129. M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 82
155 - lm· lX, 8 et 12. Voir M. ÜAWLIKOWSKI, 1973a, p. 63-64 et 71. De même. et Ill\' IV, 26). Voir aussi M. GAWLIKOWSKI, 1971. p. 423 (avec un arbre
les portiques du sanctuaire étaient dédiés à diverses divinités. généalogique). Un autre membre de la famille. un prêtre, apparaît clans un
156 - C'est peut-être déjà le cas pour les bny ::,bdbll'l avec le sanctuaire du texte récemment publié (J. TEIXIDOR, l997, p. 65-68). Daté de 138. c'est le
Soleil, mais on sait finalement peu de chose sur ce clan.qui est peut-être un dernier texte daté qui concerne la famille.
groupe sacerdotal, avant d'être familial.D'autre part, on connaît par d'autres 160 - Sur les liens éventuels de lmy knbt avec les XEvva�cx[011vm] des
textes les familles de Belshûrî et cl'Elahbel qui sont représentées clans le textes IGLS 2698-2699 de Qaryatein, voir DFD. p. 89-90.
sanctuaire de Nabû.ce qui permet de pousser l'analyse plus loin. 16 l - Certains éléments permettent de repérer des familles éventuellement
157 - Le sanctuaire de Nabû a été fouillé clans les années 1960 par le service liées à ce culte. CIS 4231 (= lm• V III, 194) est gravé sur le relief d'un
des Antiquités de Syrie, ce qui a permis son identification. Le rapport final personnage coiffé du 111odi11s des prêtres. Son nom est Barateh. fils de
i
(par A. Bounni et olii) n'a pas encore paru. mais on peut se référer utilement Barnabû, f ls de Barnabù ( br' th br bmbw br bmbw) ; un de ses frères
à la thèse inédite de A. Bounni (Paris I. 1986). Ont paru aussi quelques s'appelle Barnabû et un autre Nabûgadclaî. L'onomastique fortement
rapports préliminaires. A. BouNNI et N. SALIBY, 1965. p. 121-138 (sur le influencée par ce dieu peut être le signe c1·un attachement non seulement
sanctuaire. p. 126-135) et plus récemment A. BouNNI. 1990b, p. 157-167. au culte, mais aussi au sanctuaire, comme le montrerait peut-être la présence
Enfin quelques textes ont été publiés par J. T. Milik, DFD, p. 86 (n" 1 de d'un prêtre (mais c'est le seul dont le nom n ·est pas un théophore de Nabù).
A. BoUNNl, 1986) et p. 162-163 (n'" 10, 18 et 20 de A. BüUNNI, l 986). Voir 162 - Par exemple le texte A. BouNNl, 1986, n" 10 (= DFD. p. 162) clans
aussi E. WILL, 1992. p. 123 et 140. lequel le personnage est honoré pour le don d'une seule colonne, avec son
158 - li s'agit des textes CIS 4134-4158 de la tour n" 13. On trouvera aussi entablement et sa toiture.
de plus amples renseignements sur les autres branches de la famille au 163 = A. BoUNNI. 1986. n" 37 ; voir aussi DFD p. 164.
chapitre VI.
82 Les notables de Palmyre
Palmyréniens citoyens romains appartenaient aussi à cette cas de construction de colonnes dans la même zone
tribu, mais Elahbel est le seul qui soit attesté dans le (C/S 3955 de 129) n'entraîne pas d'honneurs publics, mais
sanctuaire de Nabû. D'autre part il apparaît aussi qu'Elahbel seulement des honneurs tribaux. Le texte est en effet
est le seul des quatre frères à être citoyen. Caius Iulius Haîran, lacunaire, mais à la troisième ligne, la présence du mot klhwn
fils d'Elahbel, qui est peut-être un de ses cousins éloignés, ( « tous») invite à restituer comme sujet du verbe (sans doute
appartient à une famille de citoyens : il est honoré par le 'qymw « ont dressé») un nom de tribu (bny X qui est un
Conseil et le Peuple en 108 (lnv X, 129). Mais il est inscrit pluriel), et non le mot Conseil (bwl') 165• Comme pour Malê
dans la tribu Fabia. Agrippa, on peut penser que Shoraîkô n'est pas seulement
Pour essayer de comprendre les rapports de ces familles honoré pour le bienfait décrit dans le texte, mais aussi en
avec le sanctuaire de Nabû, on peut commencer par l'étude raison d'une certaine prééminence sociale. Cette dernière
d'une inscription grecque et palmyrénienne trouvée à cet se traduit aussi par les honneurs conférés aux deux fils de
endroit (A. BouNNI, 1986, n" 2) dans laquelle Shokayaî, un Shoraîkô par les Benê Zabdibôl. Dans les deux cas ( C/S 3950
des frères d'Elahbel, est honoré par le Conseil. La console et 3953 ), la formule utilisée par l'araméen est sans
de colonne gui porte l'inscription a été découverte en remploi équivoque : lyqr s1y[kw] 'bwhy ( « en l'honneur de Shoraîkô,
dans les propylées du sanctuaire, mais il est difficile son père » ).
d'identifier le lieu d'origine de la pierre. Il serait tout à fait Tout cela peut conduire à émettre l'hypothèse que,
hâtif de conclure que Shokayaî est honoré par le Conseil comme Malê Agrippa ou Shoraîkô, Shokayaî est honoré non
parce qu'il a fait construire le temple de Nabü. Néanmoins seulement pour d'éventuelles constructions dans le
il est vraisemblable que seul un bienfait très important a pu sanctuaire, mais aussi à cause de sa position sociale, de celle
valoir cet honneur. Il faut utiliser les parallèles donnés par de sa famille. Il faut rappeler que, si on suit l'identification
les autres sanctuaires, en particulier celui de Baalshamîn, et proposée par les éditeurs de RTP et reprise par J. T. Milik 16°,
aussi les textes de la Colonnade transversale. Shokayaî a été aussi symposiargue. Son frère Elahbel est
Parmi les textes de Baalshamîn, BS n° 44 (C/S 3959) est citoyen romain et apparaît dans plusieurs inscriptions du
le seul dans lequel un membre de la tribu présente dans ce sanctuaire 167• Un autre frère Malikù a lui aussi été honoré
sanctuaire (Benê Mazîn) est honoré directement par les par le Conseil ( CJS 3921 du sanctuaire de Bel) vers 120-121 .
autorités civiques. L eur intervention dans deux autres Shokayaî est clone bien clans la tradition de la famille : celle
textes du sanctuaire (BS n'" 45 et 48 = J. CANTINEAU, 1936, d'importants notables de Palmyre. Ce qu'il fa ut clone bien
p. 278-280, n° 20) est explicable parce qu'il s'agit de statues voir est que même si les textes sont très peu précis, quels
dressées par les quatre tribus civiques. Il est donc naturel que soient leurs mérites réels, les notables honorés par le
que les bny m'zyn soient concernés, à ce titre. On a vu au Conseil hors des zones « publiques» le sont aussi pour leur
chapitre I que le cas est un peu différent pour Malê. Ses liens appartenance à un milieu particulièrement en vue dans la
anciens et particuliers avec le sanctuaire expliquent la cité, et que leur famille et leur clan sont en rapport étroit
présence de la statue à cet endroit, mais aussi la nature du avec l'endroit où ils sont honorés.
don qu'il a fait au sanctuaire. L'inscription pour ce bienfaiteur T ,a famille d'Elahbe! utilisait, scrnble-t-il, lê sancluaire
est placée sur une colonne du temple qu'il a fait construire. comme une sorte de tribune pour exposer les mérites de ses
II faut peut-être comprendre aussi que pour un don de cette membres. En effet, on retrouve dans le sanctuaire un certain
importance, gui contribuait à embellir la cité dans son nombre d'inscriptions honorifiques érigées pour des proches
ensemble, seules les autorités civiques avaient compétence parents d'Elahbel. En fait, sur la quarantaine de textes du
pour un décret honorifique 164• sanctuaire, une dizaine a rapport avec la famille. Certains
Ce même phénomène permet aussi d'expliquer C/S 3952 sont mutilés, ce gui interdit de connaître les tenants et les
(honneurs pour Shoraîkô). L'importance du don (sept aboutissants, mais plusieurs textes assez bien conservés
colonnes et leur entablement) a peut-être causé l'intervention permettent de reconnaître la prééminence de la famille
du Conseil. Deux remarques s'imposent pourtant. D'abord, d'Elahbel 168• D'une certaine manière, les statues érigées par
à la différence du texte de Baalshamîn, la partie de basilique Elahbel à ses enfants morts (on a en grec µv17µ17ç xcip1v)
construite par Shoraîkô est apparemment située hors du font double emploi avec les portraits préparés dans la tour
sanctuaire de Shamash. L'intervention des autorités de la funéraire familiale de la vallée des Tombeaux. En fait
cité est alors plus compréhensible, tout comme la place du C/S 4154 représente la fille cl'Elahbel nommée Hadîrat
texte (] ui aussi hors du sanctuaire). Deuxièmement, l'autre (hdyrtet A8npa817), connue par le texte n" 18 (DFD, p. 163)
164 - Sans compter que Malê Agrippa a accompli bien d'autres bienfaits années du n' siècle.
qui peuvent tout aussi bien expliquer des honneurs civiques. 167 - A. BouNNI, 1986, n'" 3 et 18 (= DFD, p. l 63).
165 - Sur le modèle de C/S 3953 : d[y] 'qymw /h bny [zbjdbw/ k/hwn ( « que 168 - Les textes n"' 3 et 18 (= DFD. p. 163), dans A. BouNNI, 1986, sont
lui ont dressé tous les Bené Zabdibôl »). cles cléclicaces par Elahbel pour cieux de ses enfants. Dans les textes n'" 13
166 - DFD, p. 227-228, n" 5 à propos des tessères RTP 376 et 825 (voir et 36, il s'agit visiblement d'enfants du même. Le n" 2 est la dédicace du
RTP, p. 203). Voir le tableau des magistrats en annexe I, pour les premières Conseil à son frère Shokayaî.
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 83
et CIS 4138 était inscrit sur le relief de m'ny-Mavvmoç, Taîmarsû, fils de Nebûlah ») confirment ce lien
connu par le texte n° 3. Le caractère privé des textes est anthroponymique. De plus, ces deux cousins font deux
frappant. Le parallèle le plus exact est le texte CIS 3954 de dédicaces au dieu Nabû ; le premier restaure un pyrée de
la Colonnade transversale, clans lequel Shoraîkô honore sa métal (bdt knwn dy przl'), ainsi que cl'autres objets mal
femme Martheî, là aussi après la mort de cette dernière. identifiés (texte lacunaire à cet endroit), alors que le second
Pourtant les autres textes de ce dossier,dont ceux cités plus offre plusieurs autels ( 'hvt' 'ln). Enfin le dernier texte de la
haut ( C/S 3950 et 3953), sont le fait d'un groupe, alors que série concerne l'aîné des quatre frères, sby, qui est honoré
clans le sanctuaire de Nabû, c'est Elahbel 1ui-même qui agit par le dieu Nabû lui-même, sur une console de colonne 171•
le plus souvent, sans qu'il y ait d'intermédiaire, ce qui On voit clone que le cas est différent selon les familles. Elles
renforce le caractère « privée» de son action. ne semblent pas accorder le même intérêt au culte de Nabû.
L'autre grande famille du sanctuaire de Nabû, celle de Certes, il est probable que de nouveaux textes pourraient
Belshûrî est moins souvent nommée : six textes seulement modifier notre manière de voir. Il est néanmoins clair que
la concernent 169• On retrouve clans ces textes les quatre frères leur implication clans le sanctuaire et ses affaires était
fondateurs du tombeau de famille (n'" 1 et 43) : sby wnbwzbd différente. Cette impression est encore renforcée par les
wt[ymyJ wnbwlh bny blsw1y b[l] byrn br blswiy gdr0w autres textes qui proviennent du sanctuaire. Même en laissant
(« Shabî et Nebûzabacl et Taîmaî et Nebûlah,fils de Belshûrî, de côté les textes inédits, il faut bien constater que les
fils de Haîran, fils de Belshûrî Gaclclarsû»). La fin de leur inscriptions publiées par J. T. Milik semblent prouver
généalogie est la suivante clans le texte CIS 4124 (lnv l'attachement des cléclicants en général au culte du dieu 172•
3) : ... br blsw1y br gdr0w dy mtqrn bny b" (« ... fils de De même on retrouve clans ces deux textes les mêmes
Belshûrî,fils de Gaclclarsû qui sont surnommés Bené Baâ»). théophores de Nabü (nbwlh et nbwz.bd). Or, il n'y a pas
On voit bien par là qu'une même famille,selon les contextes, d'indices d'offrandes à Nabû parmi les textes de la famille
avait plusieurs solutions pour présenter sa généalogie. cl'Elahbel (si l'on excepte le témoignage douteux du n° 37 rn),
L'omission de br avant gdr0 w s'explique peut-être par ni, non plus, de noms formés sur Nabû.
l'absence du nom générique Bené Baâ, que le nom de
l'ancêtre éponyme remplace 170• On peut penser aussi qu'il Certes,un certain[' An:]oU6[8]copoç E11.cx�1111.ou représenté
était inutile à cet endroit de rappeler l'appartenance clanique sur un relief funéraire est aussi membre de la famille,même
et tribale de la famille de Belshûrî,parce qu'elle était connue s'il s'agit cl'une autre branche,apparemment non représentée
de tous. Dans la vallée des Tombeaux où l'on trouve clans le sanctuaire m, ce qui conviendrait assez bien du point
représenté l'ensemble de la population de Palmyre, il n'en de vue onomastique, puisqu'Apollon est l' interpretatio
était peut-être pas de même. D'autre part,clans un sanctuaire graeca de Nabû 175• Or, de manière curieuse, clans la version
presque familial, les quatre cléclicants du texte 11° 1 agissent araméenne, son nom est bgdn br 'lhbl br mllcw, bgdn
en quelque sorte en leur nom propre, alors que pour leur signifiant « Don de dieu» en perse (DFD, p. 245). Le nom
tombe ils agissaient au nom du clan. de Nabû n'apparaît pas non plus à cet endroit, alors qu'on
La famille a visiblement des liens assez étroits avec le aurait pu l'attendre.
culte de Nabû. Les textes des quatre frères sont des dédicaces Au total,beaucoup cl'éléments semblent opposer les deux
sur des tambours de colonnes du sanctuaire. Ce qui est familles principales du sanctuaire,qui restent étrangères l'une
frappant au premier abord est la fréquence parmi eux des à l'autre. Il n'apparaît pas cl a ns l'ensemble de la
noms théophores formés sur Nabû. Le deuxième frère et le documentation qu'il y ait des mariages entre les deux
quatrième s'appellent Nebûzabacl (« Nabû a donné») et familles : de toute façon, les mariages qu'on peut identifier
Nebûlah (« Nabû est dieu»),ce qui permet aussi de conclure cl'après les textes de la tour cl'Elahbel concernent surtout des
que les liens de la famille avec le culte de Nabû sont cousins et des oncles et nièces (voir chapitre v). L'intégration
antérieurs à cette période. Les textes n'" 14 et 20 clans lesquels à un sanctuaire (mais sous quelle forme ?) n'implique clone
apparaissent les petits-enfants de Nebûlah (byr' br blsw1y pas des liens entre les familles qui y sont bien représentées.
br nbwlh, « Haîrâ, fils de Belshûrî, fils de Nebûlah », en Tout se passe comme si la famille de Belshûrî avait un intérêt
130 et nbwlh br tymr0w br nbwlh, « Nebûlah, fils de cultuel clans ce sanctuaire,alors que celle cl' Elahbel s'en sert
169 - A. BouNNI.1986.n'" l. 12, 14. 16.20 et 43. On ne peut guère tirer de d'une même famille, soit pour des constructions, soit parce que la tribu des
renseignement du n" 12 trop lacunaire. Le texte n" 1 a été copié Bené Mazîn (et les dieux) honore certains d'entre eux. Voir K. DuKSTRA,
«rapidement» et publié par J. T. Milik (DFD, p. 86) qui a oublié le nom 1995.p.114-115.
du troisième frère.qu'il convient de rajouter entre nb11.·�bd et nbwlh ( wtymy, l 72 -DFD.p.162(=A.BouNNl, 1986.n'" 10 et 20).
« et Taîmaî» ). 173 - Celui publié par M. SoBERNHEIM en 1905 : voir DFD p. 164.
170 - Comme le montre le texte grec de CIS 4124.Gaddarsû est en même 174 - Le texte est C/S 4402(au musée du Louvre AO 4086).Pour ses liens
temps celui qui est surnommé Baâ(ïcx88cxp[0]ou wù ÈmKCXÀOWLÉvou avec la famille d'Elahbel, DFD. p.245 et arbre généalogique entre les p.246
Bcxcx).même si le surnom s'applique à toute la famille. et 247: il serait fils de Elabelus qui et Saturninus Malichi f (CIS 3962
171 On a plusieurs parallèles clans le sanctuaire de Baalshamîn, avec en = lm• X. 17).
particulier les textes BS n"' 6. 7, 38, 40 et 43 qui concernent les membres l 75 - Voir M. GAWLIKOWSKI. 1990a.p. 2645.
84 Les notables de Palmyre
comme lieu de représentation : peut-être possédait-elle le sanctuaire est situé à proximité de la troisième section de la
terrain sur lequel a été installé le culte ? Grande Colonnade, mais il lui est antérieur. Or, lorsqu'au
Un autre fait peut servir aussi à définir l'opposition début du Ill siècle on a installé la colonnade, ce fut aux
e
culturelle entre les deux familles. Alors que la très grande dépens du sanctuaire qu'il fallut écorner, en démontant de
majorité des textes qui concernent la famille d'Elahbel sont plus le portique nord (voir pl. 4). On suppose que les fidèles
bilingues ou grecs seulement rn,' le grec n'apparaît pas pour de Nabû ont dû le ressentir comme une agression. Il est à
les textes de celle de Belshûrî. Le fait qu'Elahbel a été citoyen noter qu'à ce moment on a perdu toute trace des familles
romain a pu jouer dans cet état de fait. Parmi les textes qui connues au début du ne siècle 180•
concernent Belshûrî et ses descendants, seule la dédicace de E. Will met en rapport ce recul du sanctuaire et la
fondation du tombeau de famille est bilingue (C/S 4124 disparition de la famille d'Elahbel avec « les événements
= Inv IV, 3), et cela à une date où la pratique n'est pas encore qui ont entouré l'arrivée au pouvoir de Septime Sévère ».
très courante (voir chapitre VI). On ne sait clone pas s'il faut Mais on perd toute trace de la famille plus tôt vers 150. Pour
faire de cette famille un tenant de la tradition, opposée à des le reste, on ne connaît pratiquement personne de la famille
familles montantes, qui apparaissent brusquement, avant de après la génération des petits-enfants des fondateurs du
disparaître tout aussi soudainement. En tout cas les bonnes tombeau : les deux petits-enfants qui sont nommés à cet
relations avec Rome marquées par l'obtention de la endroit (C/S 4139 et 4140) le sont sans cloute parce qu'ils
citoyenneté ont pu jouer clans la prospérité de la famille étaient nés au moment de l'installation du tombeau, et qu'on
cl'Elahbel dans les premières années du n e siècle 177• La avait donc prévu une place pour eux, mais rien ne prouve
fortune des Benê Baâ était plus ancienne, et ils ont pu faire qu'ils aient survécu, ni même qu'ils aient été enterrés à cet
construire au moins trois tours funéraires clans le cours du endroit 181• De plus, en 192, ils devaient être assez âgés, si
I"1 siècle (entre 9 et 83). On reviendra au chapitre VI sur ces leur naissance est à placer clans les premières années du
événements et sur ces deux familles, à propos de leurs Il siècle (la fondation du tombeau est de 103). Les textes les
e
176 - Au moins dans le sanctuaire. À part le texte Je fondation. les textes membres de la famille admis à être enterrés là à leur décès. et non comme
grecs sont absents clu tombeau cle famille. de véritables bustes funéraires (voir chapitre VI).
177 - Mais malgré cette apparente romanisation, on notera qu'un membre 182 - On tentera au chapitre 1v d'étudier plus en détail la question de
possible de la famille. 'ArroÀ.AÔ8copoç, fils cl'Elahbe]. s'appelle clans la l'évergétisme des notables de Palmyre et des processus de construction des
version araméenne bgdn, un nom perse (CIS 4402; voir supra). principaux monuments.
178 - E. WILL, 1992, p. 140. C est pour cela que le temple est appelé 183 - J. T. Milik, DFD, p. 88 propose de voir en 'IoÛÀtoç Aùp1iA1oç
corinthien, foute de mieux, clans la publication allemande de Th. Wiegancl NE�ouwnoç 0m�tlCiO'.�tcrou wû Bcovvrnuç I:a�El ywlys 'wrlys nbwmy
( 1932, p. 108-121). Le temple date de la fin du 1" siècle. br lymsm.i; bwn' .sby. synodiarque après 214. un descendant de la famille
179 - Voir le dessin clans E. WILL, 1992. p. 141. (Jnv IX. 30). Il porte en effet un nom théophore de Nabü (nbll'm_r) et un de
180 - Voir sur cette question A. BouNNI, 1990b. p. 157 et E. WILL, 1992. ses ancêtres s'appelait füy, comme plusieurs des Bené Baii et un autre bwn ',
p. 123. nom qui apparaît aussi dans l'arbre généalogique ( CJS 4129 ). Il reste qu'on
181 - Les bustes installés clans le rez-de-chaussée de la tombe, sans la n'a plus de trace cl'action de lafarnille dans le sanctuaireaprès 131 (n" 14).
mention f1bl ( « hélas » ), sont plutôt à comprendre comme une liste des
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 85
au sanctuaire (quelles qu'en soient les raisons) pour installer textes du sanctuaire de Baalshamîn mentionnent à de
une grande rue à portiques dans un quartier alors en plein nombreuses reprises la tribu des dédicants (bny m 'zyn) ; mais
développement. Comme le note d'ailleurs le fouilleur du il s'agit de la deuxième moitié du !"' siècle. Quelques années
sanctuaire, dès avant cette période, la partie du nord du plus tard, au moment où se développe le sanctuaire de Nabû,
sanctuaire avait reçu un premier aménagement qui permettait cette référence a totalement disparu. Bien plus, il n'y a aucune
l'accès à cette zone. En effet, l'entrée principale du sanctuaire mention de tribu ou même de clan dans l'ensemble des textes
avec des propylées avait été aménagée vers le sud, de Nabû, alors qu'on sait par ailleurs que la famille de
conformément à l'orientation générale de la ville dite Belshûrî est dite Bené Baâ. Pourtant, dans la deuxième partie
hellénistique (pl. 8) 18 -1.
du rr" siècle, alors que cette famille a disparu, les Bené
Néanmoins, même après la disparition (au moins Zabdibôl interviennent dans un contexte qui peut sembler
documentaire) des deux familles principales, toute activité similaire. On peut voir à cela deux raisons principales.
n'est pas interrompue dans le sanctuaire. La meilleure preuve D'abord une raison contextuelle : comme on l'a dit, préciser
en est le déplacement du portique nord, reconstruit pour tenir sa tribu était peut-être inutile à l'intérieur du sanctuaire, alors
compte de l'installation de la Grande Colonnade. Le dernier qu'il fallait plus de précisions pour des textes placés clans la
texte daté (en fait seule la date est conservée) est postérieur Colonnade transversale, c'est-à-dire un lieu public et ouvert.
à 258. Par ailleurs, on sait que l'activité de construction s'était Deuxièmement, il n'existait peut-être pas dans le sanctuaire
poursuivie au milieu du II siècle, par la dédicace d'un certain
e
de Nabû de groupe équivalent aux Bené Zabdibôl, surtout si
Ovmvoç A88ou8avou wu M[aÀ1xou] qui a fait construire on les considère comme une tribu de prêtres 187•
un bâtiment dont le nom a disparu 185• Pourtant, le texte se On a l'impression que l'avènement de la famille
trouve sur une architrave: il est fort probable qu'il s'agisse d'Elahbel et la place prédominante qu'elle occupe sont le
du portique nord du sanctuaire, qui a été détruit à la fin du signe d'une relative autonomisation des notables de Palmyre
siècle. Or ce personnage a de bonnes chances d'être le par rapport à leur origine tribale. Il est possible qu'Elahbel
Ovmvoç A88ou8avou, propriétaire d'un navire qui a fait le soit le prototype de l'homme nouveau, arrivé au premier
voyage de Scythie d'après un texte de 157 (lnv 96). Cela plan grâce aux liens avec Rome. Venant peut-être d'une tribu
permet donc de dater assez précisément le portique, preuve dévalorisée ou d'une fraction peu noble d'une tribu, il
de l'enrichissement de Honaînû (bnynw en araméen). préférerait passer sous silence cette éventuelle origine.
Comme le sanctuaire de Bel, celui de Nabû est donc peut L'utilisation du sanctuaire comme une tribune, sur laquelle
être un lieu qui profite de l'argent gagné dans le commerce la famille met en scène sa propre gloire et la noblesse de ses
lointain. membres, est beaucoup plus claire.
D'autres personnages influents ont continué à fréquenter D'autre part, ce tournant qui met en valeur les notions
le sanctuaire. On a ainsi un texte postérieur à l'an 500 des de familles au sens étroit trouve une confirmation dans les
Séleucides (après 188-189) qui mentionne les honneurs travaux de K. Dijkstra, sur les dédicaces offertes pour la vie
civiques (par le Conseil et le Peuple) rendus à un personnage du dédicant et d'un certain nombre de ses proches 188• Hormis
qui a été secrétaire du Conseil et du Peuple 18". Même si l'on une douzaine de textes, sur lesquels on aura l'occasion de
ne connaît pas la date de la destruction du portique nord revenir, il faut souligner que parmi les bénéficiaires de ces
(avant ou après 188-189), ce texte prouve que le sanctuaire textes sont nommés en grande majorité les membres de la
continue à avoir une certaine importance, pour que le Conseil famille proche, soit principalement le dédicant, ses enfants,
y place une dédicace officielle. ses frères, parfois son père, ou sa femme ou d'autres parents
Le sanctuaire de Nabû peut donc être vu comme un lieu proches 189•
où se marquent l'influence, mais aussi 1'opposition de Comme le fait K. Dijkstra, il faut distinguer sans doute
plusieurs familles. De plus, il s'agit d'un endroit où s'affirme les grandes dédicaces ( « mqjor dedications » : à l'occasion
un nouveau mode d'expression des réalités sociales. de constructions d'importance) des petites ( « minor
L'absence totale de mentions des tribus est caractéristique dedications » : surtout les petits autels au dieu anonyme).
de ce point de vue, tout comme le peu de références à des Les secondes, qui appartiennent presque à un domaine privé,
groupes plus réduits se réunissant autour du sanctuaire. Les sont centrées sur la famille, d'où comme on 1'a vu plus haut
184 - A. BouNNI, 1990b, p. 160-161 (voir chapitre 1v et pl. 8). pourtant dans RTP 301 la formule bny 1111zb' dy nbw (lu bny 1111z{1' ... bw
185 - A. BouNNI. 1986. n" 31. Les restitutions sont de E. Will. A. Bounni clans RTP). c'est-à-dire « les thiasites de Nabù ». Mais. comme pour la
fait quelques allusions à ce texte ailieurs (A. BouNNI, 1990b, p. 162. n. 19). tessère RTP 304 (nbw ybrk m.sm.sy p{1dy', « Que Nabù bénisse les officiants
Voir ibid.. p. 160-161, sur l'histoire monumentale du sanctuaire. des tribus » ). il rattache plutôt ces groupes au sanctuaire de Bel : il ne
186 - A. BouNNI, 1986, n" 42. Le texte est antérieur à la transformation en s'agirait donc pas d'associations de fidèles de Nabû. Celles-ci restent clone
colonie (vers 212). pour l'instant assez mystérieuses.
187 - Voir DFD, p. 157-163 pour différents groupes qui tournent autour du 188 - K. DuKSTRA, 1995. passim. La formule araméenne est '/ byy ( « pour
sanctuaire. À propos de RTP 306-308 (les tessères 287-310 concernent la vie de ») ; dans les rares bilingues, la formule est traduite en grec par
Nabû). J. T. Milik pense qu'il faut interpréter l'expression nbw qnyt' comme urrÈp 0w117picK (par exemple CIS 3902 de Rome= IGUR L n" 119).
« Nabù le citharède ». au lieu de<< Nabû, r association » de RTP. Il reconnaît 189 - K. DUKSTRA, 1995. p. 148-149. Voir ici le chapitre IV.
86 Les notables de Palmyre
la relative brièveté des généalogies. On peut donner comme Certes, on a des exemples du sanctuaire de Baalshamîn,
exemple de ce type de texte ClS 4008 daté de 191. Il est dit où une construction dédiée pour la vie du donateur et celles
que le donateur (Wahbâ, fils de Malikû [fils de] Malê whb' de ses fils et de ses frères (BS n" 7) entraîne en retour une
br mlkw ml') a érigé cet autel à« celui dont le nom est béni statue et une inscription honorifique érigées par les dieux
pour toujours» (lbJyk smh l'lm '), « pour sa vie et celle de Baalshamîn et Durahlûn et par les Bené Mazîn (BS n" 40) 193•
son frère» ( 'J bywh wby' 'bwy) 1'JO. Le personnage (mlkw br 'g' br whby br blbzy) tentait
Dans les grandes dédicaces, comme clans les inscriptions apparemment cl'associer sa famille proche à sa dédicace.
honorifiques, les généalogies sont assez développées, comme Implicitement, même si c'est lui qui est honoré, l'honneur
pour replacer les personnages cités clans leur environnement devait aussi retomber sur ses fils et ses frères. La différence
tribal 191• En effet, si on cite des ancêtres jusqu'à des entre les deux textes tient peut-être seulement à ce qu'il n'y
générations éloignées, cela signifie qu'on a plus de chance a pas d'attestation clans le sanctuaire de Nabû de groupe
cl'avoir parmi les lecteurs du texte des descendants cl 'un de appelé Bené X qui puisse honorer quelqu'un pour un don.
ces ancêtres au moins : remonter au père ne permet On a d'ailleurs vu que le dieu Nabû lui-même intervenait
cl 'impliquer que les frères, alors qu'un degré de plus implique pour honorer 1'aîné des quatre frères de la famille de Belshûrî,
au moins implicitement les cousins germains, et ainsi de Shabî (A. BouNNI, 1986, n" 16), ce qui est un point commun
suite ; de cette manière, des parents très éloignés sont avec BS n° 40. Il faut d'autre part constater qu'aucun des
impliqués, car ils peuvent reconnaître facilement leurs liens textes honorifiques de Baalshamîn (BS nos 37-55) n'est le
avec le donateur. fait cl'un des parents de la personne honorée, alors qu'on en
Néanmoins, cet élément est difficilement vérifiable a cité plusieurs exemples à Nabû. C'est peut-être un signe
aujourd'hui, et, au-delà de ce qui est exprimé clans les du caractère plus structuré et officiel du sanctuaire de
inscriptions, il n'est pas vraiment possible de reconstituer Baalshamîn, où semble s'exercer de manière assez forte
ce que pensaient les Palmyréniens quand ils faisaient l'autorité de la tribu, au moins jusqu'au !°' siècle, au détriment
construire une portion de portique « pour leur vie et celle de de celle de la famille.
leurs fils >>. On peut prendre 1'exemple cl'un texte de Nabû Comme dans le sanctuaire de Baalshamîn, la période
d'avril 146 publié par J. T. Milik (DFD, p. 162 = A. BouNNI, de prospérité du sanctuaire de Nabû attestée par l'épigraphie
1986, n° 10). Moqîmû, fils de Nebûzabacl, fils de Barikaî est relativement courte, et à partir de la deuxième moitié du
Abshaî a été honoré d'une statue par ses fils, en son honneur 11" siècle, les sources écrites disparaissent presque
(lyqrh), et le texte continue en expliquant que le même entièrement. Ce qui reste permet seulement de constater la
Moqîmû a construit une colonne au dieu Nabû pour sa vie et disparition des anciennes familles, sans que se dégagent
celle de ses fils ( '1 J1ywhy wbyy bnwhy). On peut d'ailleurs d'autres groupes prédominants. On a le même phénomène à
considérer la copule w (w'bd mqymw dnh 'mwd' dnh, « et Baalshamîn, avec seulement six textes datés postérieurs à
ce même Moqîmû a fait cette colonne») qui introduit la 150 et deux ou trois seulement pour le m" siècle. Parmi ces
deuxième proposition, comme un H' explicatif, et traduire textes, at1ct111 11e co11cer11e des co11str11ctio11s da11s le
« parce qu'il a fait» 192• Il apparaît là qu'il existe un rapport sanctuaire, mais il s'agit d'autels dédiés à une divinité
étroit entre la dédicace d'une construction« pour la vie d'un (BS n'" 27, 30-31) ou de simples dédicaces honorifiques pour
tel», et 1'inscription honorifique qui vient commémorer cet lesquelles les liens avec le sanctuaire ne sont pas toujours
acte. On remarquera que clans le cas présent, il s'agit du clairs (BS nos 48, 51-52) 194•
cercle familial étroit, alors même que le lieu de la dédicace On a clone vu que plusieurs familles de notables de
est public ou parapublic. Palmyre se regroupaient autour de sanctuaires qu'on pouvait
190 - On trouvera une liste de ces textes dans r ouvrage de K. DuKSTRA. qui puisse appuyer cette hypothèse, comme il le reconnaît cl' ailleurs quelques
1995, Appendix F. p. 322-334. lignes plus bas, ce qui rend sa théorie beaucoup moins crédible.
191 -Les théoriesàce sujet deK. DuKSTRA, 1995.p. 151-152 semblent un 192 - VoirK. DuKSTRA, 1995, p. 111, 11. 35.
peu difficiles à admettre clans leur ensemble. Selon lui, même si clans les 193 - Dans la dernière phrase de ce texte BS n" 40, on trouve la mention
111cijorcfecficutio11s. les bénéficiaires sont principalement les fils et les frères explicite de la construction faite par mlkw br ' g ' : la statue a été érigée« en
(comme dans les 111i11orcfecficotio11s). ce qui est visé est la tribu(« the scope son honneur parce quïl kur (les Bené Mazîn) a plu.ainsi qu·ü leurs dieux
c?f' 'l byy-inscriptions referring to mojor cleclirntions is tribu!». p. 151 ). Il (Baalshamîn, Durahlùn), et a fait ce portique central en entier» (]yqrh bdy!
pense aussi que ces différents bénéficiaires représentent chacun une unité dy .(pr Jhwn wl'lhyhn w'bd mtlt' dh m;;'yt' klh). C'est sans cloute la
économique et sociale distincte. ce qui est loin d'être prouvé. Et lors d'une construction d'un portique qui est mentionnée clans le texte n" 7, mais il
dédicace d'un objet important,àtravers eux c'est la tribu clans son ensemble comporte une lacune àcet endroit. La restitution est pourtant assurée, non
qui est visée. Il s'agit peut-être plus d"une pétition de principe, car, comme seulement par le nom du donateur. mais aussi par la date, qui est la même
il le remarque plus loin,« 1101 one 'I ]Jyy-inscription lists the "Beni X" as pour les deux textes (septembre 90).
benejïciaries ». Dans ses remarques de conclusion (p. 290-291 ), il résume 194 - À ] 'exception de BS n" 48 où le texte est placé à cet endroit parce
ses conceptions à ce sujet : les généalogies de ceux qui font les 111qjor qu'il s'agit c1·u11 des quatre sanctuaires civiques. Le cas est différent pour
cledirntions sont longues, ce qui signifie qu'ils représentent des groupes le texte BS n" 51, dédicace faite par une aile de cavalerie de Ala et Gamlaà
tribaux étendus (ce qui est possible, mais pas prouvé). De plus. il juge zb' br mqy' br blf1zy (Zebâ. fils de Maqqaî, fils de Belhazaî) et pour le BS
possible que« the stotus of'the declicator \t'as so exalted thm he is allmved n" 52, dédicace à Sept. Odainat. clarissime consulaire, par le symposion
to describe some c?f'hisfellm1·-tribcs111en as sons». Or on n'a aucun élément des konetoi (îü crn�mocnov îWV KOVEîWV).
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 87
qualifier de tribaux, mais qu'il existait aussi des sanctuaires celle d'Odainat) est l'existence de liens tribaux sous-jacents,
propres à des clans ou à des familles en un sens plus étroit. même s'ils sont devenus presque invisibles clans la
Or les différents sanctuaires sont consacrés à des divinités documentation après le IIe siècle. À ce point de vue correspond
d'origines diverses 195• C'est d'ailleurs à partir de ces cultes, la théorie qui fait de l'ascension politique d'Odainat et de
aussi bien qu'à partir des données onomastiques, qu'on a Zénobie un simple événement dans la lutte entre tribus
souvent tenté de retrouver l'origine ethnique des habitants d'origine arabe, pour le contrôle du désert syrien 199• Palmyre
de Palmyre. De ce point de vue, il peut être intéressant de est vue comme une confédération de tri bus 2 Son (1().
voir si cette origine a une quelconque influence sur le monde expansionnisme, au moment de la crise de l'Empire romain
des notables tel qu'on peut le saisir à Palmyre. Il est sans au rrr" siècle, est dirigé aussi bien contre Rome que contre
doute difficile de conclure qu'une ethnie domine la cité, et ses voisins arabes, en particulier la confédération Tanukh
on a pu voir à propos des tribus que les membres des qui dominait le nord de l'Arabie, à l'ouest de l'Euphrate.
différentes tribus ont participé au pouvoir selon les époques. Son chef Gadhima (ïafü�ta0oç en grec) 201 aurait été le grand
Il y a eu sans nul doute des évolutions, mais il est relativement rival de Zénobie qu'elle aurait fini par abattre, selon les
difficile de les définir, surtout à partir du moment où traditions rapportées par Tabari 202• Le neveu de Gadhima,
l'instauration des tribus civiques est peut-être venue modifier 'Amr ibn 'Adi, premier de la dynastie des Lakhmides, aurait
l'ensemble du système. alors vengé la mort de son oncle et conquis Palmyre 203•
On ne peut rejeter de manière catégorique l'ensemble
de cette vision des événements et il est fort probable que
D. ARABES ET ARAMÉENS À PALMYRE
l'émergence de Palmyre et le contrôle exercé sur le désert
La place réelle des Arabes à Palmyre est un sujet de aient indisposé une partie des nomades qui fréquentaient la
débat depuis longtemps 196• H. Seyrig, dans un article qui a région. Or la prospérité de la ville dépendait en partie du
fait date, avait tenté de « saisir les réalités de Palmyre, contrôle des voies qui traversaient le désert, domaine des
masquées par la langue des inscriptions et par la mode des nomades, et permettaient à son commerce de s'effectuer de
costumes» 197• Ces réalités sont bien sûr l'importance de manière süre.
l'élément arabe. Or si celui-ci est très présent, on a plutôt On a parfois pu penser que les fouilles archéologiques
tendance aujourd'hui à relativiser son influence, et à à Umm al-Jimal pourraient apporter un appui à cette théorie
souligner les permanences araméennes dans la religion et le site voisin de al-Herri a été détruit, mais sans qu'on puisse
l'onomastique. Ainsi un des articles récents sur le sujet émet donner de date précise (m"-1v" siècles) et c'est à proximité
l'hypothèse que certains des nomades des tribus de la steppe quel'inscription mentionnant Gadhima a été découverte 20\
autour de Palmyre étaient sans doute araméens plutôt accréditant l'idée que l'agglomération pouvait être le centre
qu'arabes 198• autour duquel la confédération de Tanukh était organisée.
Pourtant une hypothèse souvent avancée pour expliquer Ce centre aurait pu être détruit par les Palmyréniens, à
l'écrasante suprématie de quelques familles (en particulier l'occasion de leur expédition en direction du sud et de
195 - Sur le panthéon de Palmyre, voir principalement J. T E1x100R, 1979 et 198 - M. GAWLIKOWSKI, 1995a, p. 103-108 sur la présence arabe à Palmyre
M. GAWLIKOWSKI, 1990a. et aux alentours (p. 108 pour l'existence de nomades araméens à 1'époque
196 - Il est entendu qu'on utilisera« arabe» en un sens linguistique plutôt de l'apogée de la ville).
qu'ethnique. Les populations décrites comme arabes par les auteurs antiques 199 - G. W. BowERSOCK, 1983, p. 129-137. Sur la définition de Palmyre
le sont à cause de leur mode de vie (nomadisme, vie sous la tente, comme « the dominant A rob force in the area », voir la discussion ilifi·a.
pastoralisme), sans qu'aucun critère ethnique n'entre forcément en ligne Voir aussi les remarques de E. WILL, 1992, p. 199-201, en particulier à
de compte. À ce sujet, voir B. AoooULA, 1995, p. 78-79 : à propos du mot propos de la théorie exposée par G. W. Bowersock.
'rby' attesté clans les inscriptions de Hatra (voir iltfi·a), il conclut que le 200 - G. W. BOWERSOCK, 1983, p. 131.
terme désigne un « bédouin » ou un « nomade » sans aucune référence 201 - Inscription PAES IVA, n" 41 d'Umm al-Jima!, qui mentionne un
ethnique. Voir aussi le chapitre m de P. BRIANT, 1982 ou F. V ILLENEUVE, 1:po�EÛç (précepteur) de Gaclhima, roi de Tanukh. Sur ce Gaclhirna, voir
1989, p. I 24, n. 3 : les Arabes des sources classiques, au moins jusqu'à M. SARTRE, 1982b, p. 134-136.
PI ine l'Ancien, sont définis au sens descriptif (« = mode de vie nomade »). 202 - TABARI, auteur cl' Une histoire des prophètes et des rois (traduction
Le terme de « bédouin » est lui-même à exclure : voir M. MACDONALD, partielle par Th. Nolcleke, 1879), a vécu entre 839 et 923. Une de ses sources
1993, p. 102-103, n. 2 et B. lsAAc, 1993, p. 107. principales sur la période est Hicharn al-Kalbi, mort vers 819 (sur ce
197 - H. SEYRIG, 1970, p. 77-112 (la citation est à la page 87). L'auteur personnage et son œuvre, voir W. CASKEL, I 966).
pense que l'araméen était plus la langue du commerce que celle de la 203 - G. W. BowERSOCK, 1983, p. 137 estime avec quelques probabilités
population, alors que l'arabe devait être prépondérant, parce que le noyau que certaines tribus arabes (celle de 'Amr ibn 'Acli) se seraient faites les
originel de la population le pratiquait majoritairement. Partant de cette auxiliaires cl'Aurélien clans sa lutte contre Palmyre. Incidemment, il est
théorie, il justifie la rareté des faits linguistiques arabes par un effet de possible que 'Amr ibn 'Acli soit le père de Imru' al-Qays de la fameuse
purisme et pense que le témoignage du panthéon de Palmyre est ambigu, inscription de an-Namarâ (voir sur l'inscription la notice de P. Borclreuil,
car les nouveaux arrivants arabes ont adopté les cultes locaux en se A. Desreurnaux, Ch. Robin et J. Teixiclor clans Y. CALVET et Ch. ROBIN, 1997,
sédentarisant (p. 87-88). Il est intéressant de noter, comme le fait J. Teixidor p. 265-269, n"205).
(1998, p. 717 et 725) que la confusion entre Arabes et Araméens a des 204 - M. SARTRE, CAH XfII (sous presse). Sur Umm al-Jima!, voir B. DE
précédents illustres, puisque Cicéron ignore la différence entre les deux au V RIES, 1998, p. 232.
l'' siècle avant notre ère.
88 Les notables de Palmyre
l'Arabie 205• Néanmoins les incohérences du récit de Tabari, Il ne semble pas qu'on puisse faire de différence entre les
quand on le compare aux textes des historiens classiques, classes sociales ou les époques. Deux remarques s'imposent
ou même aux textes de Palmyre, rendent difficile son à ce sujet. La première est d'ordre historiographique: un
utilisation comme source historique. Il est intéressant certain nombre de noms sont explicables par l'arabe, mais
toutefois de voir que le souvenir de l'aventure palmyrénienne tout aussi bien par les autres langues sémitiques parlées dans
s'est maintenu dans la steppe et a donné naissance à des la région. Ce n'est que par choix a priori qu'on peut se décider
légendes qui, semble-t-il, perduraient plusieurs siècles après pour l'une ou l'autre solution 208• La deuxième remarque est
la chute de Palmyre devant Aurélien. Le fait même de liée à la première: les liens qu'on peut établir entre
l'existence de cette légende renseigne assez sur le poids réel l'onomastique d'un personnage et son origine ethnique
de Palmyre dans la région. Elle présente aussi l'avantage de supposée ne sont souvent qu'illusoires. Il arrive souvent qu'à
correspondre au poids de Palmyre d'après les sources Palmyre la généalogie d'une personne mêle de manière
classiques, même si les détails diffèrent 200• indifférenciée noms typiquement arabes et noms plutôt
Quoi qu'il en soit, il est un peu étonnant qu'il n'y ait araméens. C'est le cas par exemple de la famille d'Odainat,
pas plus de références dans les sources à une opposition arabe mais les exemples sont nombreux. Ainsi, le symposiarque
à Palmyre, si celle-ci a été importante. En l'absence zbyd' br s'dw br tymsms ( « Zebîdâ, fils de Shoadû, fils de
d'éléments déterminants, il vaut mieux rester prudent sur la Taîmishamsh », CJS 3919 = Inv IX, 19) en avril 119, oncle
nature exacte des relations entre Palmyre et ses voisins du grand caravanier Soados, porte un nom araméen, alors que
nomades. Il est sûr que les relations n'étaient pas toujours son père et son grand-père ont des noms plutôt explicables
pacifiques, l'existence de « stratégies contre les nomades » par 1'arabe 209• Il existe en fait sans doute très peu de familles
exercées par certains Palmyréniens le prouve amplement 21n. dans lesquelles l'onomastique soit homogène, et cela même
C'est un autre problème de savoir si ces nomades étaient dans un corpus qui ne documente que sur une petite partie de
forcément arabes ; il faudra y revenir. Pour la majorité d'entre la population de l'oasis 210•
eux, ce devait être le cas, mais il pouvait y avoir des La question de l'éventuelle correspondance de l'origine
exceptions. D'autre part, il est tout à fait probable qu'une ethnique (au moins celle des noms) et de la situation sociale,
partie des tribus aient été en bonnes relations avec Palmyre, trouve par là même une partie de sa réponse. Du point de
et même plus, que la population de Palmyre, y compris ses vue social, les noms arabes sont très présents clans les couches
notables, ait eu des relations étroites (de famille ?) avec les plus élevées de la population. La fréquence des noms
certains groupes qui nomadisaient dans la région. comme 'bgr ( « Abgar ») ou mqym w ( « Moqîmû ») clans les
inscriptions honorifiques est notable. De même Odainat et
son fils Wahballat, au me siècle, portent des noms explicables
1. QUESTIONS D'ONOMASTIQUE
par l'arabe, et non par l'araméen. Parallèlement, les noms
Un des points de départ de la recherche sur l'identité arabes d'une partie des populations connues par les
ethnique de Palmyre est bien sûr à trouver dans l'onomastique. inscriptions de Palmyrène attestent de l'existence de gens
Le constat qu'on peut faire est limité par l'étendue des lacunes modestes parmi eux 211•
de notre documentation. L'importante proportion de noms Au-delà des données onomastiques individuelles, il faut
explicables par le recours à la langue arabe est claire pourtant. aussi souligner que parmi les noms tribaux, l 'immense
205 - Voir aussi pour le passage des Palmyréniens à Bosra, IGLS XIII, 9107 apparaissent bien amalgamés»).Je retrouve les mêmes critiques contre la
et le commentaire. position de J. K. Stark chez M. GAWLIKOWSKI, 1995, p. 105 et P. PIERSIMONI.
206 - Sur l'ensemble du problème. la position assez tranchée deF. Millar l 994b, p. 90 et 96. En effet, l'arabe est beaucoup mieux connu que
semble jusqu'à nouvel ordre la meilleure (F. MILLAR, 1993, p. 431-436); l'araméen ; il est clone beaucoup plus probable de découvrir des parallèles
en particulier p. 435 : « It is better here to admit our ignorance». onomastiques en arabe. li est aussi fort possible que, si le nom était aussi
Néanmoins, les sources manichéennes (M. TARDIEU, 1992, p. 16-20) araméen, toutes les occurrences aient aujourd'hui disparu. En ce sens, voir
semblent confirmer l'historicité des liens entre Palmyre et al-Hira, à !"époque J. CANTINEAU, « Nabatéen et Arabe». Annales de l'Institut d'études
de Zénobie. Pour les relations entre Zénobie et les Arabes. voir aussi orientales I. 1934-1935. p. 77-97: « nous ne connaissons pas assez
E. EQUINI ScI-INEIDER, l 993, p. 45-52. ) 'onomastique araméenne pour être en mesure d'affirmer qu ·un nom propre
207 - lm' X. 44 : -rà.ç KCY.TO'. -rêùv vo�tcx8wv cnpcx-r17yicxç ( voir chapitre III). nabatéen. attesté en arabe. ne peut pas aussi avoir existé en araméen » (p. 83,
208 - Voir à ce sujet la position de J. K. STARK, 1971, p. 62 ( « Whenever a cité par J. TEIXIDOR, 1995, p. 13-14). P lus généralement sur 1· onomastique
name coule! be explained fiwn either C/17 Aramaic or an Arabie root, arabe, voirF. ISRAEL, 1995, p. 47-57.
preference lws in general been gi1•e11 ta the latter»). A. Caquot (1962, 209 - Sur ces noms, voir J. K. STARK, 1971, respectivement aux pages 86,
p. 233-234) a, de son côté, une position plus mesurée: « Un répertoire 115 et 117.
complet révélerait que plus de la moitié des noms propres trouvent dans 210 - Certains faits incitent de toute façon à la prudence, comme la présence
l'arabe leurs parallèles les plus sûrs et leur étymologie la plus vraisemblable. de noms formés d'un verbe considéré comme arabe et d'un nom de dieu
Si l'on tient compte des fréquences, la balance penche encore nettement en local, comme tybwl ( « Serviteur de Bôl», .1. K. STARK, 1971, p. 116).
faveur de l'arabe: c'est lui qui a fourni les anthroponymes les plus souvent L'inverse est sans cloute aussi possible. Voir P. PIERSIMONI, 1994b, p. 94-95
attestés, mlkw, mqynnv, f1yrn». D'autre part, de nombreuses remarques du et n. 47.
même article prouvent qu'il y a amalgame des onomastiques arabe et 211 - Voir les textes rassemblés dans PNO (voir ii1/i·o et le chapitre v). Mais
araméenne (p. 235, « les apports constitutifs de ce fonds mixte nous là aussi les noms araméens existent (par exemple nlJ\l'::,bd, n" l 6).
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 89
majorité est araméenne: il est intéressant d'ailleurs qu'une des populations de cette origine, qui se seraient installées à
des seules exceptions (les bny 111 'zyn) soit associée d'une Palmyre pendant l'époque hellénistique 218•
part à une déesse arabe, Allât, et d'autre part à un dieu, Ces considérations ne signifient en aucun cas qu'il faille
Baalshamîn, qui fait partie depuis longtemps des panthéons sous-estimer ou négliger la part de population cl'origine arabe
ouest-sémitiques (cananéens et phéniciens) 212• Le dieu avait clans le peuplement de Palmyre à l'époque considérée. Il est
sans doute été importé à Palmyre par cette tribu anciennement toutefois nécessaire de définir de manière plus précise ce
nomade, qui avait dû identifier Baalshamîn avec Durahlûn qu'on peut entendre par proprement arabe et la manière dont
(«Celui de Rahlé » dans l'Hermon) son dieu propre 213• Cela cette présence peut être visible dans la société palmyrénienne.
ne suffit évidemment pas pour faire de Baalshamîn un dieu Le caractère mixte des généalogies, ainsi que les données
arabisé. Il faut ici faire état d'une intéressante proposition religieuses,montre en fait surtout les processus de mélanges
de M. Gawlikowski, qui distingue deux types différents de culturels qui ont cours à Palmyre. De même, clans le
Baalshamîn, « un type de Ba'alsamîn du type de Zeus vocabulaire des inscriptions araméennes, ont pris place
olympien, adoré à Palmyre avec l'énigmatique Durablûn» quelques mots arabes, mais si on fait le compte,on peut voir
et « un type de Ba'alsamîn arabisé [ ... ] vénéré dans la qu'ils sont en réalité peu nombreux 219• Pour en revenir au
Palmyrène [ ...] en grand uniforme» 21-+. On peut ainsi se problème des tribus, il est intéressant de constater que le
demander comment le dieu était vraiment considéré à mot employé dans les textes palmyréniens est emprunté à
Palmyre, dans son sanctuaire, en tenant compte en outre de l'arabe: pbd qui signifie « cuisse », « jambe » et donc
la présence à cet endroit de la famille des Bené Iedîbel, au désigne une subdivision d'un ensemble 220• On se retrouve
nom tout à fait araméen. Une chose est sûre pourtant, c'est clone devant une situation paradoxale : clans ce milieu où la
que le dieu d'une tribu au nom arabe (Bené Mazîn) n'est seule tribu cl'origine sûrement arabe s'est installée à une date
pas propre à une composante arabe de la population -' 15• On relativement récente, le mot qui sert à désigner ce concept
peut d'ailleurs citer la plus ancienne mention de cette divinité est arabe.Cela tendrait à prouver que l'influence arabe n'est
clans son sanctuaire (BS n ° 10 de novembre 23). Il est pas seulement religieuse, mais qu'elle est aussi
caractéristique que parmi les trois donatrices,l'une,Attâ ( 't') institutionnelle. Ce fait avait déjà été noté par J. Cantineau
soit la fille d'un certain Perdesh (prds) dans lequel on (J. CANTINEAU, 1935,p. 15l)qui remarquait que les emprunts
reconnaît un nom persan (Firdusi). à l'arabe se situaient surtout clans les domaines de la religion
Inversement si un dieu ouest-sémitique est le dieu tribal et de l'organisation politique et institutionnelle. La
des Bené Mazîn, il est caractéristique que le dieu Arsû soit concurrence gréco-romaine a peut-être eu pour effet de la
celui de la tribu des Bené Mathabôl au nom proprement local freiner ou de la dissimuler,mais il en reste quelques éléments
(cf. supra) : or Arsû est un dieu cl'origine arabe 210• J. Teixiclor clans la documentation.
explique cela par un changement de nom de la tribu entre le
moment où elle aurait quitté l'Arabie centrale et celui où
2. NOMADES ET SÉDENTAIRES À HATRA
elle arriva à Palmyre, à cause de contacts avec des
populations sémites non-arabes 217• Il se peut aussi que la L'exemple parallèle de Hatra peut être révélateur de la
tribu ait adopté le culte d'une divinité arabe sous l'influence manière dont pouvaient se passer les rapports entre
212 Voir J. TEIXIDOR, 1979, p. 18-25 et M. GAWLIKOWSKI, 1990a, p. 2625- propos cle RSP n" 159 et RTP 165), les Bené Nürbel sont la famille
2636. sacerdotale qui dessert le temple. Cette vue est confirmée par les inscriptions
213 - Voir J. TEIXIDOR, 1979, p. 21 : « the gocl of the Ruble region had been publiées ou citées par H. J. W. DRuVERS, 1995b, p. 111 et 115. Là encore
accepted by the priests cd' Baal Shamin because he was thought to be an une divinité arabe voit son culte dirigé par une famille au nom araméen.
a\!atar of' the Lord cd' Heal'en [= Baalshamîn] ». On peut aussi rappeler la 219 - J. CANTIN EAU, 1935, p. 149-152 et F. ROSENTHAL, 1936, p. 94-96.
remarque de H. Seyrig sur la fréquence des invocations à Baalshamîn dans 220 - On trouve toujours cette acception du mot dans les dictionnaires
les textes safaïtiques (H. SEYRIG, 1970, p. 90). d'arabe contemporains (par exemple, H. W EHR et J. M. CowAN, Ambic
2] 4 - M. ÜAWLIKOWSKI, ] 990a, p. 263 J. Eng/ish Dictionary r4Modem Written Arabie, New York, 1960, s. v. «fbçl »:
215 - Voir les remarques cle J. TEIXIDOR, 1980a, p. 280-281 sur les tribus au tëminin,« tlzigh; leg (q{mutton, etc.)»; au masculin,« subdivision c�f'a
araméennes et arabes adoratrices de Baalshamîn avec lesquelles le dieu tri be » ). Au contraire le mot n'existe pas en ce sens dans les textes
voyagea jusqu · à Palmyre: « l'onomastique des inscriptions nous montre épigraphiques ouest-sémitiques ou clans les lexiques syriaques. La seule
qu'au l" siècle de notre ère les familles araméennes et arabes de la tribu exception possible se trouve clans un texte araméen de Deir Alla daté cles
s'étaient déjà mélangées et que leurs traditions respectives avaient formé environs de 700 av. J.-C. (voir le DNWSI, S.\'. avec les références): le sens
un patrimoine commun... » social du mot avait été préféré par le premier éditeur du texte ; ensuite
216 - Kh. As'AD et J. TEIXIDOR, 1985b, p. 288. A. Caquot et A. Lemaire (1977. p. 204) ont préféré un sens tout différent
217 - Kh. As'AD et J. TEIXIDOR, 1985b. p. 291. Le changement a cl'ailleurs (autre racine): « insolent »cl'après le syriaque pabzâ, avant que A. Lemaire
pu se faire à Palmyre même. comme le prouverait la formation du nom ( 1985. p. 276) ne revienne à une signification plus proche du sens premier
avec l'élément -bôl, du nom de la divinité ancestrale de l'oasis, Bôl du mot, tel qu'il est connu en arabe : « hanches ». li semble donc bien que
(M. GAWLIKOWSKI, 1990a. p. 2609). le mot n'ait pas d'équivalent en araméen clans le sens social, d'autant que
218 - On a encore un exemple cle ce type de processus clans l'importance les textes de Deir Alla sont beaucoup plus anciens que les attestations
de la famille Nûrbel dans le sanctuaire cl'Allât; d'après DFD (p. 81-82 à palmyréniennes du mot.
90 Les notables de Palmyre
sédentaires et nomades 221• Certaines données statistiques Hatra et son territoire, qui devait être livré aux nomades. Le
montrent les points communs et les différences qui existent mot tribu n'apparaît pas dans le texte, ni même leur nom,
entre la situation de Palmyre et c elle de la cité de mais les deux personnages (deux frères Yahbarmarên et
Mésopotamie. D'après les inscriptions araméennes du site, Elkûd) dont le texte donne la généalogie sont sans nul doute
on trouve à Hatra une centaine de noms araméens (cent huit), membres (et mêmes chefs) d'un groupe ou un clan qui a eu
pratiquement autant de noms arabes (cent six), vingt-deux maille à partir avec la famille du roi Sanatrûq. Yahbarmarên
noms iraniens, neuf noms akkadiens et trois noms grecs. et Elkûd font remonter leur généalogie à la cinquième
Enfin, quarante-quatre noms sont d'origine indéterminée 222• génération (y hbnrnyn w'lkwd b n'smsbrk br 'Jkwd brsmsbrk
La faiblesse du nombre de noms grecs n'est pas surprenante br 'lkwd, « Yahbarmarên et Elkûd, fils de Shamshbarak, fils
en ce lieu situé longtemps hors de la zone d'influence de d'Elkûd, fils de Shamshbarak, fils d'Elkûd »); les règles de
Rome, d'autant plus que l'épigraphie grecque est papponymie sont strictement appliquées. Le texte se
pratiquement inexistante (à part quelques graffiti) et qu'on distingue par la longueur inhabituelle de la généalogie : on
connaît seulement trois textes latins. De même, la forte se contente en général de remonter au grand-père. De plus,
présence parthe est bien connue, et il faut signaler que les les descendants sont eux aussi intégrés dans les termes du
noms iraniens comme Worod, Sanatrûq ou Vologèse sont traité, puisqu'il est fait référence à leurs fils (bnyhwn) 225•
ceux de certains des princes de Hatra. Le grand nombre de Comme le note K. Dijkstra, l'allongement des généalogies
noms araméens est curieux, alors qu'on a souvent tendance a l'avantage d'augmenter la taille du groupe concerné 22r'.
à faire de Hatra une ville arabe. Comme à Palmyre, rien Même s'il n'y a pas dans le texte de tribu au sens strict, on a
n'empêche des Arabes de porter des noms araméens (ou le néanmoins affaire à un groupe de type familial assez étendu.
contraire). De même, les princes de Hatra, malgré leurs noms Même si on ne suit pas entièrement l'interprétation de
iraniens, n'étaient pas forcément des nobles parthes installés K. Dijkstra, l'opposition entre l'extérieur de la cité et
à la tête de la cité ; leurs généalogies mêlent cl' ailleurs des l'intérieur est à noter 227• Elle est confirmée par deux textes
noms de différentes origines. parallèles datés deux de 151-152, les inscriptions Hatra
Quelques inscriptions hatréennes renseignent sur les n"' 336 et 343. Ces textes rappellent qu'une loi a été acceptée
relations entre les habitants de la ville et les populations des par un magistrat de Hatra « et les Hatréens vieux et jeunes et
alentours 223• C'est en particulier le cas de l'inscription Hatra tous leurs Arabes (?) et tous ceux qui sortent et entrent à
11° 79, qui, cl'après K. Dijkstra, relate une sorte de traité de Hatra et tous ceux qui habitent à Hatra » ( w'1{1y' qsys' wdrdq'
non-agression entre les habitants de Hatra et les chefs (peut w 'rb y ' klhwn wkl dy '] npwq lbtr' wkl dy ' mr b btr') 228• Là
être sédentarisés) de tribus nomades. Le texte pose un certain encore le sens du texte est loin d'être entièrement clair, mais
nombre de problèmes d'interprétation, en particulier pour il semble désigner les différents groupes qui constituaient la
la définition exacte du mot 'rb (Arab) qui, semble-t-il, population de la cité 229• On voit donc qu'en plus des habitants
désigne les territoires qui entourent Hatra 224• Néanmoins, de Hatra, on considérait comme partie prenante des affaires
l'opposition entre l'intérieur et l'extérieur (dlbr wlgw) est de la ville les Arabes (au sens de nomades sans doute), mais
claire dans le lexte, c'est-à-dire l'opposition entre la ville de aussi les étrangers de passage. La dernière partie de la phrase
221 - Sur ce sujet, voir dernièrement la thèse italienne (Tesi di Dottorato) la ligne 8 par« and ll'hoe\'er be!ongs to tlzem ll'ith their possessions». Le
de R. BERTOLINO. 1997-1998. Les textes araméens de Hatra ont été numérotés mot nkyhwn fait problème et plusieurs traductions ont été proposées, mais
clans l'ordre de découverte au fur et à mesure de leur publication. Ce sont elles vont généralement dans le même sens « descendants» ou« parents»,
ces numéros qui sont cités. La dernière publication d'ensemble est celle de à part celle de A. Caquot qui propose de lire nk(s)yh11·n: « leurs
B. AGGOULA, Inventaire des inscriptions hatréennes (IIH). BAH CXXXIX, possessions» (voir les références, F. VATflONI, 1981, p. 50). B. Aggoula
Paris, 1991. de son côté (l!H, ad !oc., p. 56) propose « leurs femmes», mais cette
222 - R. BERTOLINO, 1997-1998, p. 93. Sur la probabilité de l'existence de signification semble improbable.
noms akkadiens à Palmyre, voir J. TEIXJDOR, 1991, p. 220-221. 226 - K. DJJKSTRA, 1990. p. 93 : « the longer the group that is required, the
223 - Voir en particulier les articles de K. DuKSTRA, 1990, p. 81-98 et de longer the genealogy».
J. B. SEGAL, 1986, p. 57-80. Il est curieux que ce dernier article utilise les 227 - Plusieurs commentateurs, dont B. Aggoula (IIH, ad !oc.). envisagent
inscriptions du Wadi Hauran publiées par F. SAFAR, 1964, p. 9-27. mais en plutôt un traité de non-agression de la part des souverains de Hatra qui
les considérant comme des textes hatréens. Un coup d'œil aux photos prouve promettent de ne pas attaquer 'lkwd et yhbnmyn et leurs clescenclants.
néanmoins qu'il s'agit bien de textes palmyréniens (voir la restitution de 228 - Le texte n" 343 est légèrement différent et omet dans cette phrase la
M. Gawlikowski. in BES, 1967, n" 78 pour le texte n" l O où il propose à la proposition « et tous ceux qui sortent et entrent à Hatra».
ligne 5 : [']lhy t[dm1]-« les dieux de Palmyre» -, permettant de rattacher 229 - K. DuKSTRA, 1995, p. 183-184 pour le sens de q.syi';' (peut-être les
de manière plus assurée ce groupe de textes à la civilisation de Palmyre). membres d'un collège équivalent à la yEpoucrta. des cités grecques?).
224 - Voir la discussion clans K. DuKSTRA, 1990, p. 94-97: le terme semble Néanmoins, l'aspect qui ressort le plus nettement des expressions utilisées
désigner, soit le territoire qui entoure Hatra, soit, de manière plus générale est que l'ensemble de la population semble englobé. K. Dijkstra revient
toute région livrée aux nomades ; du point de vue urbain, chaque cité a son aussi sur la signification exacte de 'rby' klhwn (« tous leurs Arabes») : le
'rb, peuplé de nomades. Cela correspond assez bien à un usage dont on pronom affixe -hll'n renvoie sans aucun doute aux noms qui précèdent (les
trouve des traces encore au xx' siècle : « Arabe» désigne les Bédouins Hatréens vieux et jeunes) et il semble penser que sont désignés par ces
nomades par opposition aux sédentaires (voir par exemple A. DE BoucHEMAN, mots des collèges formés par les chefs de tribus (les m1y' « seigneurs»,
1939, p. 15, 11. 2). voir ilifi·a) qui seraient les représentants de tous les 'rby'.
225 - K. Dijkstra ( 1990, p. 83 et 94) traduit les mots wbnyh11·n wnkyln1·n de
Chapitre II: L'identité ethnique de Palmyre 91
semble reprendre l'ensemble de ce qui précède, à moins qu'il modernes (peut-être exactes d'ailieurs), mais les sources
ne faille comprendre qu'il existait parmi les résidents de Hatra anciennes,quand elles parlent des familles sur lesquelles on
des groupes d'étrangers (Iraniens ?), ce qui est loin d'être est le mieux renseigné ( Odainat et sa famille), les désignent
exclu. 11 faut souligner que le magistrat 2311 cité dans les deux sous le nom de Palmyréniens, pas d'Arabes. De plus,
textes se nomme '$( br ,smsbrk ; son père porte donc le même Wahballat a reçu le titre d'Arabicus Maximus ; on voit mal
nom que celui de 'lkwd et yhbmu�vn : la coïncidence est comment il aurait pu 1'accepter et l'utiliser, s'il s'était senti
remarquable, mais l'absence de datation sûre pour le n" 79 profondément appartenir à une population arabe 233• Encore
interdit de conclure qu'il s'agit de leur frère. Si c'est bien le une fois, cela ne signifie pas qu'ethniquement il n'ait pas
cas, les groupes nomades qui ont peut-être enlevé le fils du été au moins en partie arabe, mais il faut rappeler que dans
roi seraient en même temps le milieu d'origine d'un bien des cas, et en particulier clans les cas de métissage,
«ministre» du roi précédent. Non seulement on aurait donc l'appartenance ethnique est au moins autant une affaire de
un exemple dans lequel l'élite d'une tribu nomade est installée choix que cl'appartenance par le sang.
en ville, pendant qu'une autre partie de la tiibu poursuit sa La difficulté à Palmyre est qu'on ne sait pas vraiment
vie nomade,mais on aurait aussi peut-être un témoignage de comment les habitants se désignaient eux-mêmes (sans doute
1'existence de factions au sein de la population de Hatra. simplement «Palmyréniens»),et qu'on ne sait pas non plus
Quelques textes semblent également montrer que comment ils appelaient les populations qui entouraient la
l'incorporation des Arabes dans le domaine des princes de ville. Quand un texte bilingue utilise en grec les mots tek
Hatra ne s'est pas faite sans difficulté et qu'elle peut être le Kmà téov VWLCXbffiV cnpm1w1.aç («les stratégies contre les
résultat de luttes entre ces princes et les nomades. C'est en nomades» ), l'équivalent dans la version palmyrénienne est
tout cas la théorie de J. B. Segal (J. B. SEGAL,1986,p. 63-64) simplement b's.trtgwn sgy'n (« par des stratégies
qui interprète ainsi quelques textes de Hatra. On aurait alors nombreuses»,lnv 44). De même dans un autre texte qui
clans le texte n" 79 un souvenir de ces luttes, qui n'étaient relate 1' attaque d'une troupe de brigands contre une caravane,
peut-être pas entièrement éteintes. Il faut enfin rappeler que on aurait pu attendre un mot générique qualifiant ces
ces Arabes sont appelés ainsi parce qu'ils sont nomades plutôt nomades du point de vue des citadins. On a vu que c'est une
que pour les distinguer des habitants de la ville qui seraient des interprétations possibles du mot 'rb à Hatra, même si ce
des Araméens. n'est pas toujours en mauvaise part. Or le texte s'abstient de
D'autre part, l'existence du titre de miy' («seigneur») préciser et se contente de désigner le groupe de pillards
à Hatra peut être un autre signe de l'existence de tribus dans comme «Abdallat Abitaya et de ceux qu'il avait réunis»
la ville. C'est en tout cas la théorie proposée par K. Dijkstra ([A�]8aUa0ffi Ea0llVCü KCXl îOlÇ urc'aùtoÜ Cî'UVCXX0EÎCH) et
il conclut de l'existence probable de plusieurs seigneurs en dans la version araméenne parallèle «Abdallat Abitaya et
même temps qu'ils peuvent être considérés comme des chefs les voleurs qu'il a réunis» (' bdlt 'byty' wgysy' dy kns)
de tribus (« their function may have resembled that of an Ces deux textes sont pratiquement les seules occasions où
Arabian shékh, a paramowzt tribal leader») 231• sont désignés par un nom certains des habitants de la steppe
La présence d'un groupe nommé Arabes à Hatra est sans qui entoure Palmyre 235• Dans le reste de la documentation,
parallèle à Palmyre. Le mot 'rb 1ui-même n'apparaît pas dans les textes qui proviennent de Palmyre même donnent tout
l'épigraphie palmyrénienne, ce qui ne veut pas dire qu'une au plus l'appartenance tribale des personnages cités.
partie de la population de Palmyre ne soit pas
«ethniquement» ou au moins «linguistiquement» cl'origine
3. LE PEUPLEMENT DE LA p ALMYRÈNE
arabe. Comme le note B. Isaac, on ne sait pas de quelle
manière se désignaient les grands notables de Palmyre, y En ce qui concerne les textes trouvés hors de Palmyre, à
compris à l'époque de Zénobie : il ne semble pas y avoir part deux textes de Doura-Europos (R. Du MESNIL DU BurssoN,
d'équivalent aux m1y' ou aux rbyt' de Hatra 232• Les noms de 1939, n"' 1 et 33) et peut-être un texte qui provient de la
«Cheikh» qu'on trouve parfois sont le fruit de théories dépression de Qa'ara (en Iraq; voir pl.1) 23\ on n'a jamais
230 - Un rbyt' était apparemment chargé du maintien de l'ordre. Dans forme arabe. Malgré les hésitations de H. J. W. Drijvers clans le commentaire
l'inscription n" 223, ce magistrat est rbyt' dy 'rb. J'ignore s'il s'agit vraiment du texte. il semble qu'il s'agisse d'un nom tribal, plutôt que d'un nom
de la même fonction. Voir K. D1.1KSTRA, 1990, p. 90 et 1995. p. 185, n. 37. cl' origine géographique.
231 - 1995, p. 181 (suivant une hypothèse de H. J. W. Drijvers) et 184. 236 - Le texte de Qa'ara (J. TEIXIDOR, 1963, p. 34) mentionne un certain
232 - Si ces noms désignent des fonctions officielles plutôt que des chefs Moqîmû Mazîn (mqymw m 'zyn) qui est peut-être membre de la tribu des
tribaux. alors leur absence est tout à fait compréhensible à Palmyre, où. au bny 111 'zyn. Comme le note M. Gawlikowski (1973a, p. 38), il serait étonnant
moins à partir du milieu du (' siècle. le fonctionnement institutionnel est que ce mot soit un anthroponyme, puisqu'il a une forme de pluriel.
celui d'une cité gréco-romaine (voir chapitre 1). Néanmoins, il faut noter que tous les autres personnages de l'inscription
233 - B. ISAAC, 1992. p. 120-128. sont cités avec leur patronyme et le nom de leur grand-père. li est possible
234 - H. J. W. DRIJVERS, 1995a, p. 34-38. que Moqîmû fasse exception à cause de sa fonction, puisqu'il est héraut
235 - Voir la remarque cle M. GAWUKOWSKI, 1995. p. 108 sur le nom 'f1y1y' (krwz'), ce qui peut expliquer aussi qu'on donne le nom de sa tribu.
qui est exprimé sous une forme araméenne, alors qu'Abclallat a déjà la
92 Les notables de Palmyre
de mentions sûres de tribus 237, à ma connaissance du moins. une partie de 1' année dans des reg10ns de peuplement
On peut penser que cela tient au petit nombre de textes connus sédentaire, et participent à l'exploitation de zones
hors de Palmyre et à leur date assez tardive. Néanmoins ce intermédiaires entre la montagne et la steppe, où la proximité
fait est assez surprenant, puisqu'on considère généralement est grande entre pâturages et teITes agricoles.
que c'est la vie urbaine qui a distendu 1es liens tribaux et fait Un autre argument des tenants de la forte arabisation de
disparaître les mentions de ces groupements. Or, les textes la région est la présence d'inscriptions safa ïtiques dans ces
des zones montagneuses de la Palmyrène du nord-ouest montagnes, de même que dans le Wacli Hauran, à l'autre
(pl. 2), qui proviennent d'un milieu a priori plus proche des extrémité de la Pal myrène 242• Ce dernier groupe
origines tribales et plus «arabe» 23 8, ne font aucune allusion d'inscriptions est un peu différent des textes de Palmyrène
à d'éventuels groupements de ce type. Les deux seules du nord-ouest par lesquels on peut commencer 243•
formules qui comprennent l'expression bny X («Fils de Comme dans un grand nombre de textes safaïtiques, les
2
X») sont des références à un genre différent de relations mentions cl'appartenance tribale (nom de la tribu précédé
1
3)
sociales : en PNO 11° 2ter, on a les bny byth («gens de sa de ']), sans être systématiques, suivent souvent le nom des
maison » ). Le pronom possessif -h se rapporte à un certain personnages cités 1-1..i_ C'est une grande différence avec les
Abgal ( 'bgl) à qui le dieu Iarhibôl a donné le pouvoir dans le textes araméens. Les tribus ( ou familles ?) citées sont
lieu entier (y111bwl dy yhb I'bgl sltn' b'tr' klh). Le terme 'tr', généralement connues, en particulier la 'J 'wçj qui apparaît
traduit par «localité» par l'éditeur du texte (H. Ingholt), au moins deux fois. Mais il ne semble pas y avoir de rapports
désigne sans doute l'agglomération (village; le nom moderne étroits entre les deux groupes de population et l'absence de
est Khirbet Semrine ; voir pl. 2) où a été découverte vraies bilingues (c'est-à-dire le même texte dans les deux
l'inscription. Un autre texte, PNO 11 ° 78, mentionne les bny langues) renforce cette impression. On a d'un côté des
qyrt', «gens du village». Cette expression, ainsi que le mot villages habités par des (semi- ?) sédentaires à l'onomastique
qyrt' qui apparaît seul dans trois autres textes (PNO nos 39, arabe et araméenne, et cl' un autre des safaïtes pasteurs
42 et 51 ), prouvent sans doute que cette population est plus nomades sans doute (en admettant que tous ces documents
ou moins sédentarisée, en tout cas regroupée autour de sont contemporains). La présence de nombreux reliefs
villages 2-1°_ Ici le pouvoir semble être aux mains de chefs de représentant des dieux arabes en costume guerrier, les
familles, mais l'absence cl'allusion à des groupements tribaux, dédicaces à ces mêmes dieux prouvent bien sûr que cette
la référence à un pouvoir local (b'tr') montrent nettement population, même si elle était de langue araméenne, était
qu'on a affaire à une structure intermédiaire entre les nomades culturellement sous influence arabe. On peut reprendre les
et les populations urbaines. Cela n'exclut nullement remarques cl'H. Seyrig et de D. Schlumberger sur la
l'existence de liens familiaux avec des nomades, alors que civilisation qui avait cours en Palmyrène.
les chefs de clans sont peut-être sédentarisés, mais cette Il manque pourtant clans ces textes araméens de
dimension n'apparaît pas clairement clans les textes. Palmyrène, non seulement les mentions tribales, mais aussi
On a sans cloute affaire à ce que M. B. Rowton appelle les longues généalogies. Or celles-ci sont justement un des
« enclosed nomaâism » -1:, dans iequel les nomades vivent
2
arguments employés dans le sens de cette interprétation, en
237 - Les exceptions possibles sont au nombre de trois. D'abord les bny 241 - M. B. RowTON, 1976b. p. 17-31 : le meilleur moyen c1·obtenir une
tym' du Wadi Hauran. mais il s'agit plutôt du nom du père des personnages certaine survie économique est cette symbiose étroite entre l'agriculture et
Ensuite les bny mi;kn' dans les mêmes textes (n" 5); c"est apparemment le nomadisme pastoral.
une tribu qui vient de Teima au nord de l"Arabie (bny mifkn' dy tym') et 242 - Parmi ces inscriptions, on trouve une safaïtique et cieux bilingues en
qui n'est pas attestée à Palmyre (sur ces deux cas, cf. il;fra). Enfin les bny palmyrénien et safaïtique, sur un total de quatorze textes. Le terme de
knbt connus à Palmyre et que J. T. Milik (DFD, p. 88-90) croît reconnaître « safaïtique» est employé ici, parce qu'il est le plus commode, sans préjuger
à Nazala-Qaryatein dans les Xëvva�al017V01] (JGLS V, 2698-2699). Il est d'une unité ethnique quelconque des populations qui ont laissé des
notable que les textes de Doura-Europos mentionnent trois des tribus qu'on inscriptions en une écriture qu'on a pris l"habitucle d'appeler« safaïtique».
connaît par ailleurs à Palmyre (bny myt', bny gdybw/ et bny kmr'). Sur les problèmes de définition, voir 1'article de M. MACDONALD, 1993,
238 - Voir les remarques de D. Schlumberger, dans PNO, par exemple p. 303-413 (en particulier, p. 305-3 l l). On notera qu'on a trouvé aussi
p. 133 : « Il est clair que nous sommes, à la campagne, dans un milieu quelques textes palmyréniens au sud-ouest de la Palmyrène (en Jordanie et
beaucoup moins occidentalisé qu'à la ville. Et il est clair aussi que nous Arabie saoudite actuelle: voir annexe XIII. 4). mais ils sont assez rares, et
sommes dans un milieu plus fortement arabisé» et il prend appui sur les ne font que confirmer les contacts entre nomades et quelques parties cle la
divinités arabes qu ·on retrouve dans le panthéon de ces régions et sur la population palmyrénienne. Parallèlement, Palmyre apparaît dans quelques
présence de textes safaïtiques ( 10 sur les 93 inscriptions découvertes clans inscriptions safaïtiques (tdmr: CIS V, 663 ou dans la formule s{r tdmr
cette zone). H. Seyrig pensait que ces dix textes émanaient« probablement traduite« iterfecit Tadmoram » par l'éditeur du C/S V, G. Ryckmans pour
de l'époque où le pays était redevenu désert après la ruine de Palmyre» les textes 1649, 1664-1665). Enfin, on notera aussi qu'un certain Halafû
(H. SEYRIG, 1970, p. 88, n. 1 ). Il est pourtant tout à fait possible qu'ils datent U1lpw br qdm) qui se dit originaire de Palmyre (mn tdmr) apparaît clans une
plutôt de l'époque de l'apogée de Palmyre, mais je ne sais pas si ce débat inscription nabatéenne (R. DusSAUD, 1935, p. 324: voir annexe XIII. 4 ).
est susceptible d'être tranché. Mais J. Starck.y ( 1978, n" 41) donne une nouvelle lecture clu texte et supprime
239 - Non comptés les cas où les bny X sont les fils, au sens naturel, d'un toute référence à Palmyre.
habitant de la Palmyrène. L'expression peut aussi prendre un sens figuré et 243 - Textes publiés clans la thèse de D. Schlumberger (PNO).
désigner « les gens de». 244 - Voir PNO n'" 60, 63bis, 63quater, 80-82.
240 - Sur ces villages et leurs productions agricoles, cf. chapitre 111.
Chapitre II: l'identité ethnique de Palmyre 93
partie par comparaison avec celles qui ont eu cours à l'époque simplement bwml. II semble probable qu'on préfère désigner
islamique. Elles existent en fait surtout dans les inscriptions les gens par le nom du clan que par le patronyme. Il semble
de la ville de Palmyre, sur les tombeaux ou pour les donc que les structures tribales, ou au moins familiales, sont
inscriptions honorifiques. On est peut-être en face de deux plus importantes clans les traditions propres aux nomades
aspects de cette influence « arabe ». En Palmyrène se que pour les milieux plus aramaïsés. En tout cas, aussi bien
refléterait la mentalité d'une classe rustique, selon s1ykw que yrby sont des noms fréquents à Palmyre et le
l'expression d'H. Seyrig, laquelle, quelle que soit son origine second est sûrement araméen et même palmyrénien
( araméenne ou arabe), ressentait principalement le besoin (hypocoristique du nom divin Iarhibôl). Il est donc assez
de sécurité (d'où le recours aux dieux armés; fig. 25) 245• À étonnant que ce personnage appartienne à une tribu qu'on
Palmyre, au contraire, à cause de la concurrence entre peut appeler safaïtique 2-1H_
notables, il était nécessaire de pouvoir se distinguer. Dans Il semble qu'il y ait du point de vue de l'appartenance
un milieu où les changements sociaux étaient sans doute tribale la même différence entre les textes araméens et les
accélérés par la prospérité économique, il fallait se rattacher textes safaïtiques qu'entre les textes grecs et les textes
à une lignée d'ancêtres. araméens. La dimension tribale et clanique n'a pas la même
Plusieurs faits distinguent les textes du Wadi Hauran importance selon les contextes et les publics visés. Elle a
de ceux de Palmyrène du nord-ouest. On a d'abord toujours été rare en grec, l'est devenue en palmyrénien, mais
l'impression qu'il s'agit dans la steppe de gens de passage, a conservé son importance en safaïtique. Cela ne signifie
alors que les villages de montagne semblent plutôt avoir une pas pourtant que la conscience qu'on en avait, quant à elle,
population permanente. Cela explique peut-être qu'on ait disparu; ces textes en sont une preuve. La conscience
retrouve clans quelques textes du Wacli Hauran des noms et tribale pouvait être sous-jacente, et elle devait être prise en
des clans connus à Palmyre(voir supra sur le clan Haumal). compte par les lecteurs contemporains. Cela donne peut
On reviendra au chapitre m sur les raisons de la présence être une clé de lecture pour la généalogie de Zebîclâ Haumal
de ces Palmyréniens, sous la direction de Zebîclâ Haumal, à (ou Zebîclâ bar Haumal selon les textes). Le fait qu'il soit
cet endroit. appelé bn bwml dans la version safaïtique du texte n" 3
Mais un autre aspect mérite de retenir 1'attention. On a prouve peut-être que c'est cette partie de son nom qui compte
souligné la rareté des mentions de tribus dans ces textes, vraiment, parce qu'elle le rattache à un clan connu clans la
pourtant les deux bilingues araméennes-safaïtiques prouvent région(?).
que certains des personnages cités appartiennent bien à des Le milieu mixte, à la langue double, qui peuple la steppe
groupes de ce type, mais ne le mentionnent que dans la au sud-est de la Palmyrène, présente donc quelques
version safaïtique. Dans le texte n" 3, on a en araméen tymb' particularités. L'onomastique des personnages cités dans le
br tyms'[dw} 2-16 et qwp' br siykw y111y (« Taîmhê, fils de Wadi Hauran, ainsi que celle des autres textes de la même
Taîmshaclû et Qûpâ, fils de Shoraîkô Iarhaî »). Or le texte zone, est assez courante à Palmyre : ce sont ces noms qui
safaïtique correspondant porte tymb' wqpn d'l n'mn sont utilisés en safaïtique par les membres des groupes
(« Tayyiml;a et Qupan de la tribu(ou famille) de Ni'man »). familiaux ou tribaux (' 1) 249• Quelles qu'aient été les
Les deux textes se terminent ensuite de la même manière : circonstances exactes clans lesquelles ces textes ont été
snt zbyd' bwml en araméen(« l'année de Zebîclâ Haumal ») gravés, ils sont une nouvelle preuve de l'existence d'un
et snt bn bwml en safaïtique (« l'année de [Zebîclâ] fils de bilinguisme clans cette région. La question qui se pose, et
Haumal »).Le deuxième de ces personnages réapparaît dans qui peut recevoir des réponses diverses, est de savoir s'il
une autre bilingue du même lieu(n° 6), avec une généalogie s'agit d'une preuve cl'aramaïsation d'une population qui
légèrement différente selon les versions : qwp' br s1ykw en adopte une onomastique araméenne, tout en conservant en
araméen et qpn bn yii1 en safaïtique, où on rajoute aussi partie sa langue, ou au contraire, s'il s'agit d'une arabisation
qu'il appartient à la tribu de Ni'man(d'1 n'mn), comme clans de la population araméenne des steppes.
le n" 3. Le patronyme de qwp' est différent dans les deux Pour définir le contexte particulier de la région, il faut
langues, peut-être comme le note F. Safar parce qu'il portait aussi signaler qu'on a, clans le texte n" 5, l'attestation d'un
un nom double 247• Mais le nom utilisé en safaïtique est peut groupe tribal apparemment originaire de l'oasis de Teima,
être plutôt le nom de clan, comme pour l'éponyme appelé dans le nord de l'Arabie saoudite actuelle, les bny mskn'.
245 - H. SEYRIG, 1970. p. 81-83 : « (Les dieux armés) répondent au danger ailleurs qu'en Palmyrène du nord-ouest (cf. M. SARTRE. 1982a, p. 77-91),
permanent qui a de tout temps obsédé l'habitant des steppes». on ne connaît rien sur ce groupe. Or, comme le remarque M. Macdonald
246 - J. K. STARK, 1971. p. 56 préfère la lecture tyms', nom attesté plusieurs (1993. p. 345), le mot ']peut désigner n'importe quel groupe, quelle que
fois à Palmyre. Le nom (difficilement lisible) du premier personnage de soit sa taille.
l'inscription araméenne (n" 3) n'est pas pris en compte, car il n'apparaît 249 - Tous les noms de ces textes sont assez courants à Palmyre (cf.
pas clans ce qui est conservé clu texte safaïtique. ]. K. STARK. 1971, ad !oc.). Le plus rare est qwp' qui n'apparaît qu'en
247 - F. SAFAR. 1964, p. 17. n. 1. CIS 4198. Il s'agit d'un nom araméen qui signifie << singe» (J. K. STARK,
248 - Avec cette restriction. qu'à la différence des '/ 'wçJ. qui sont connus 1971. p. 110).
94 Les notables de Palmyre
C'est la seule attestation palmyrénienne d'un groupe de ce dans les régions de l'est de la Palmyrène dont on vient de
nom 250, mais elle prouve que des relations existent entre les parler. Il apparaît cl'ailleurs possible que ce soient justement
différentes populations de la steppe, même si l'inscription des parties non arabes de la population qui soient concernées.
ne permet guère d'interpréter la nature de leurs rapports (et
en particulier de savoir s'ils sont les auteurs du texte araméen Parmi les quelques tribus mentionnées à Hatra (pas
qui les nomme). toujours avec l'expression bny X ?), il ne semble pas qu'on
Au total, la distribution géographique des inscriptions trouve de noms attestés à Palmyre 251• Mais les textes du Wacli
safaïtiques montre sans cloute que ces nomades sont des Hauran mentionnent des bny tym' (F. SAFAR, 1964, p. 18,
populations un peu en marge, qui entrent rarement en contact n" 8) qu'on peut être tenté de rapprocher des bny tymw des
avec les sédentaires. Les contacts devaient être plus inscriptions hatréennes 254• Néanmoins, il est plus simple de
nombreux avec les composantes semi-nomades de la considérer que les deux personnages tymr.5w et bggw sont
population de Palmyre, celles qui apparaissent clans les textes les fils d'un tym '. Le même genre d'interprétation est
palmyréniens découverts clans l 'Iraq actuel 251• Ils donnaient envisageable pour les textes de Hatra 255• D'autre part, les
clone lieu à la formation de populations mixtes. Pourtant, noms tymr$W et bggw sont très courants à Palmyre, alors
comme clans le Hawrân, ces nomades « safaïtiques » ne qu'ils ne sont pas attestés à Hatra. De leur côté, les bny bl'qb
participent pas à proprement parler à une société climmvhe 252, de Hatra portent aussi un nom très courant à Palmyre, mais
mais semblent exister à côté des établissements sédentaires ; totalement absent à Hatra à l'exception des textes n'" 214
c'est ce que semblent révéler les textes de Palmyrène du et 293 ; la chose est vraie aussi pour les lmy tymll'. Si on
nord-ouest. En ce qui concerne ces nomades, la symbiose n�oute que des bas-reliefs inscrits en palmyrénien ont été
ne se fait peut-être qu'avec les populations des régions où découverts à Hatra 251\ cela permet cl'affirmer que les relations
l'agriculture est seulement d'occasion, c'est-à-dire clans les entre les deux métropoles du désert n'étaient sans cloute pas
HYtdi du sud-est de la Palmyrène, seul cas possible de groupes seulement épisodiques, mais que des liens artistiques,
appartenant réellement à une société dimorphe. Toutefois, à commerciaux, et peut-être aussi familiaux les unissaient 257•
la différence des zones situées plus au sud-ouest, la présence Pourtant cela ne donne aucun renseignement sur cl 'éventuels
safaïtique, ou même nomade, est fort réduite, cl'après les liens entre les tribus qui habitaient les deux villes.
données épigraphiques. Si des nomades en grand nombre En fait, si on peut affirmer, avec peu de chance de se
fréquentaient la région, ils n'ont pas laissé autant de textes tromper, qu'un certain nombre de tribus nomadisaient entre
que les tribus connues clans les steppes et les déserts du sud. les deux villes, on est beaucoup plus embarrassé quand il
Curieusement, la rareté des mentions tribales n'est pas s'agit de préciser l'importance de ces groupes. Il semble aussi
propre à la Palrnyrène. En ce qui concerne le domaine nabatéen que la présence des tribus safaïtiques soit, somme toute, assez
par exemple, il est assez rare que soit donné le nom de la réduite, hors de quelques zones où elles sont en contact avec
tribu clans les inscriptions. On peut aussi appliquer la même des sédentaires ou des avant-postes palmyréniens. La
rcn1arque aux i11scrÎiJtions cle Hatra. Potutant, 1Jot1r des raisons situation sernhle la même que ce soit à Dourn ou à Hatra.
de proximité géographique, on peut être tenté de trouver des Dans l'ensemble, ces populations nomades sont
liens entre les populations de Hatra et de Palmyre, justement finalement remarquablement peu nombreuses clans les
250 - Voir les inscriptions n'" 50 et 79 de Hatra : J. T. Milik. DFD. p. 358-359 dont le nom est peul-être formé sur celui d'une tribu : ceux qui sont désignés
(après .1. T1:1xrnoR. l 964. p. 28 l ) fait de msf..:n · dans les textes de Hatra le par 1· expression« tous ceux de rmgw » (n" 408 : l'expression complète est
nom d ·une ville de Mésopotamie. au nord de Séleucie-du-Tigre (J. Teixidor w'J {1y' rmgw k/h w'f {1y' bny ddh kwlhwn « pour la vie de nngll' tout
la place au sud de la Mésopotamie: interprétation différente et bibliographie entier el pour la vie de tous ceux qui lui appartiennent »).On a aussi dans
dans B.Aggoula. IIH. p. 40. ud n" 50). mais pour le texte du Wadi Hauran le n" 406 le gel' cly rmgw(« La Fortune de nngll' »).Cet ensemble de textes
(F. Sr\FAR. l 964. n" 5). il traduit« camp bédouin ». donc bny m�f..:n · dy tym · l'incite à faire de rmg,1· le nom d'une entité tribale. mais l'identité de ce
signifie « gens du Camp de Taimé ». groupe reste mystérieuse (voir aussi ihid.. p. 207-208).
25 l - C'est-à-dire principalement les textes publiés par J. TE1x100R. 1963: 254 - C'est ce que fait sans hésitation J.B. SEGAL. 1986. p. 57-80. Cette
J. STr\lWKY. l 963 el F. S.\I\R. 1964. On reviendra au chapitre 111 sur les proposition a\'ait déj'.1 été faite par .1. Teixidm. BES l %7. n" 78.
références qui y sont faites à des activités pastorales et agricoles temporaires. 255 - Comme par exemple K. DuKSTR.\. 1995. p. 186 et 190- l 91 : son
252 Voir M. M \CDON·\LI). l 993. p. 3 l l : le domaine de ces nomades est argument principal est que les deux groupes sont unis pour la construction
extérieur à la zone de peuplement urbain. Vision complémentaire de d'une tombe (n" 293). ce qui est plutôt la tâche d"un groupe familial. el non
F. Villeneuve. �t propos de la Provincia Arabia (1989. p. 134-138) : les celle d'une tribu dans son ensemble.
pasteurs nomades sont« résiduels à] 'intérieur de 1 ·Arabie des sédentaires ». 256 W. r\L-S.\LIHI, ] 987. p. 53-61.
« les inscriptions safaïtiques et thamoucléennes n · existent jamais dans les 257 - Mais Hatra est aussi en relation avec Doura-Europos où le nom bl'q b
villages. ni même clans la zone des villages ». est aussi attesté parmi les Palmyréniens en garnison à cet endroit
253 - R.BERTOLINO. 1997-1998. p. 91-92 donne une liste des inscriptions (C.B.WELLES el olii. 1959. n" 21 : B17Àa.Kcx�oç: n"' l 00-102: Beloocolms).
qui comportent !"expression« lmy X» et clone peuvent être des tribus: lmy Sur les relations entre Hatra et Dourn. voir P. LERICIIE et R. Br:1m)L1No. 1997.
lynrn' et bny bl'qb(textes n"' 214 et 293): bny 1p.(m.�(n" 107 et R.BERTOLINO. p. 207-214. Le nom bf'q b est relativement courant (voir J. K. STARK. l 971.
1996. p. 143-146) : lmy 1m11y (texte inédit de l l 0-111). Voir les remarques p. 10): on le retrouve sous la forme B17Àa.Kcx�oç pour un cavalier
de K. DuKSTRA, 1995. p. 185-188 qui conclut que seuls les bny 1psm( sont palmyrénien à Coptos (Égypte) en 216 (A. BERN AND. 1984. n" 85:
une vraie tribu.Parmi les candidats possibles. il ajoute les '.�y/y' (n"' 242-244) cf. SEC 34. l 585).
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 95
sources épigraphiques, concerne les Comme on l'a vu, l'identité des nomades est elle-même un
groupes ethniquement et différents des
n,,cc.n,,nn1'
de doute. Les sources les concernent sont
habitants de On a et ne laissent apparaître que que1c1ut�s éléments de l'ensemble.
vraisemblance que ces derniers n'étaient pas n1�qor1,t'.:1',r'"' 'r,on Vus sans cloute ,,,�, ..J,_.,�.,,,�,.c selon
même si élément arabe une tradition constante en ont une vision
importante, jusque dans les classes les plus élevées. nomades apparaissent donc surtout comme des
Néanmoins, le à souligner avec le plus de fermeté est nuisibles au bon fonctionnement des caravanes.
1' impossibilité de tirer des conclusions de l'onomastique du Pourtant il est possible cl' avoir un de vue moins
point de vue ethnique. Le nombre de noms du type partial sur les nomades de la steppe, en essayant de définir
br fils deAzîzù», CIS leurs .l 'L.:>U\..I U\..,C:,
/�C\l'C\C't\..�
1
autant que nos sources le
,fJ.,,U., n
,, ���"l·:,',':,�u,
br byrn 'bgr (« fils de Haîran », fm, permettent. Comme le notait déjà J. -------,�-- il est
interdit toute conclusion de ce genre 258• Personne ne probable qu'il ait pas eu, à l'époque en question, de
doute qu'il en soit de même pour les ,-,ci,,n,'\/1'Ç•n1'=>nC' qui portent société de type «bédouin» . Le même auteur donne une
des noms grecs comme Malê dit ( C!S 3959 BS bonne définition de ce une société bédouine : «nous
1 0
n" 44). Il faut faire état ici d'une remarque d'H. qui devons relever ce que la notion de Bédouin ° à celle 11
11 ·"
1
'" 11 '
notait que « (la) proportion (des noms arabes) n'est fondée de nomade pasteur en général. C'est surtout le caractère
que sur l'épigraphie, où n'apparaît couche privilégiée guerrier, intimement lié à du ..... et une uuu.lvl.lL<,
de la population : les gens vivaient et mourraient sans certaine forme d'organisation tribale[ ...]»
inscriptions» 259• S'il est hors de cloute que clans une bonne forme d'organisation tribale se caractérise par une structure
partie du corpus les noms cloub les grecs et ,Jv JlLHLH.•j L<\.n) verticale assez ,.,,·,o·,1'0',1·..:P..:f'�, avec une forte hiérarchie sociale
correspondent aux classes les plus en vue, il au sein de la tribu («une échelle comportant cl'innombrables
de reconnaître une telle différence pour les noms araméens degrés de noblesse ») et « un
ou arabes. Il ne paraît pas du tout assuré non plus que les infiniment ramifié qui relie chaque individu par famille, clan,
gens modestes aient été plutôt arabes qu'araméens. Il faut fraction de tribu, tribu, confédération, et ainsi de suite»
de plus ajouter qu'une grande partie des témoignages sur 78-80).
eux a disparu parce qu'ils étaient inscrits sur des matériaux On voit ce qui différencie la société ainsi décrite des
périssables 2 (1().
Bédouins préislamiques de la société de Palmyre telle qu'on
Il paraît clair que d'une manière ou d'une autre les élites peut la saisir cl'après les inscriptions. Même si les ancêtres
de Palmyre exerçaient leur influence sur les sociétés qui de beaucoup des Palrnyréniens étaient ,,,...,n-,r,ru,,c il est clair
peuplaient la steppe aux alentours. On verra au chapitre que ceux qu'on peut saisir clans les textes sont surtout des
suivant, à propos du fonctionnement du commerce, qu'il sédentaires. De même, leur caractère guerrier n'est pas très
fallait bien par un moyen ou un autre qu'il existât des clair, malgré le costume militaire de certains reliefs. Mais
relations relativement pacifiques entre les sédentaires et les l'absence de vocabulaire belliqueux est notable dans la
nomades. Le problème du point de vue historiographique plupart des textes, si on excepte une ou deux inscriptions
est qu'en raison de la maigreur de la documentation, on peut caravanières (lnF 44 ou H. J. W. DRIJVERS, 1995a,
surtout procéder par analogie avec des situations semblables, p. 34-37). D'une manière générale, la documentation
à des époques différentes. conservée est trop lacunaire pour permettre d'étudier tous
les phénomènes de hiérarchisation sociale au sein des tribus.
On verra qu'il est possible cl'émettre quelques hypothèses
4. LA pALMYRÈNE ENTRE NOMADES ET SÉDENTAIRES
sur les différences sociales au sein de la société clans son
On a vu qu'à partir de la fin du!"' siècle, il devient difficile ensemble, en particulier par l'étude des monuments
de déterminer quelle est 1' appartenance tribale des funéraires (chapitre vr). Il est aussi possible de mettre en
Palmyréniens. Il n'est donc pas possible de savoir s'il existe évidence des relations de clientèles entre les Palmyréniens,
des relations cl'ordre tribal entre les notables de Palmyre et mais en ce qui concerne précisément les tribus, cela apparaît
les nomades de Palmyrène, même si on peut le supposer. bien impossible. De même, les ramifications généalogiques
258 - De 1·avis même del K. Stark. yrbyetycly'blsontdes noms araméens 261 - Voir par exemple P. BRIANT. 1982. chapitre 1. On a vu que le terme
(J. K. STARK. 1971. p. 90-91). Les autres sont assez sûrement arabes, «nomade» des inscriptions palmyréniennes (cf. supm) est principalement
259 - H. SEYRIG. 1970. p. 88. utilisé en mauvaise part, et désigne surtout ceux des habitants de la steppe
260 - On peut être tenté d"établir un lien entre l'habitude épigraphique et qui menaçaient les intérêts caravaniers de Palmyre (en ce sens. J. TEIXIDOR.
l"arabisation relative des populations. On a ainsi lïmpression que des 1987. p. 49).
Nabatéens aux Édesséens. en passant par les Safaïtes. les Palmyréniens et 262 - J. HENNINGER. 1959. p. 84-85. F. V illeneuve me signale le texte de
les Hatréens. le nombre dïnscriptions est plus important quand la présence Ibn Khaldoun sur le bédouinisme el les Bédouins arabes (caractérisés
culturelle arabe est la plus forte. et cela dans l'ensemble des couches de la notamment par l'élevage des chameaux): M11qaddi11wh. livre I. chap. 2. � 2.
population. y compris les plus modestes.
96 Les notables de Palmyre
existent, puisqu'on connaît un certain nombre de clans qui d'une partie importante du territoire de la Palmyrène ne
appartiennent à des tribus plus larges, mais l'image qu'on pouvait être que temporaire : l'oasis qui en formait le centre
peut en avoir est seulement lacunaire. Les ramifications se lui donnait clone naturellement son nom 26H.
limitent de toute façon à deux ou trois des niveaux définis La faible importance politique des nomades en tant que
par J. Henninger, sans qu'on puisse savoir duquel il s'agit groupe autonome n'empêche pas qu'ils aient joué un rôle
clans la plupart des textes. De plus, il faut rappeler que les clans les activités des Palmyréniens. Au contraire même, on
longues généalogies ne sont pas le propre des nomades. Les imagine que les notables devaient se servir de leurs relations
exemples qu'on connaît clans le monde grec prouvent que le tribales avec certains nomades pour asseoir leur pouvoir, au
phénomène est plus général 263• À Palmyre, on retrouve de sein même de la cité, mais aussi sans cloute au-delà. C'est
grandes listes cl'ancêtres clans les inscriptions honorifiques, une hypothèse faite, avec toutes les apparences de la
au moment même où, de l'avis général, les liens tribaux vraisemblance, par un certain nombre de travaux récents sur
traditionnels se sont beaucoup affaiblis et ont disparu de la Palmyre 2r19• La seule preuve directe qu'on ait de l'existence
documentation 26�. d'une société dimorphe est peut-être justement l'inscription
Ainsi, soit que ce type d'imbrication des groupes du Wacli Hauran qui mentionne Zebîclâ Haumal 270• Un
généalogiques n'ait pas existé à Palmyre à cette époque, soit membre d'un clan de notables bien connu à Palmyre a des
que la documentation conservée empêche de la reconnaître, activités clans la steppe qui le mettent en contact avec des
les moyens cl'analyse doivent être différents, si l'on veut nomades. Il semble occuper clans ce contexte, une position
tenter de définir pour Palmyre le type de rapports qui bien en vue, puisqu'il sert d'éponyme clans un texte.
pouvaient s'établir entre les différents groupes, et en Cela correspond parfaitement à ce que M. Rowton a
particulier, entre nomades et sédentaires. défini comme société dimorphe clans plusieurs articles 271• Il
En fait, il semble bien, selon une théorie admise par faut noter néanmoins que son point de départ est ou bien
J. Henninger, que la béclouinisation n'a peut-être commencé plus ancien (textes de Mari), ou bien plus récent (nomades
(ou recommencé) qu'à partir des 11°-III" siècles de notre ère, contemporains du Balouchistan, cl' Iran et du Croissant
« après la décadence des cités commerçantes dont les fertile), ce qui n'exclut pas un certain nombre de
nomades avaient été dépendants au point de vue politique et rapp rochements. Selon lui, l'intégration nomades/
culturel» Cette théorie concorde bien avec l'image qu'on
2 15
( • sédentaires, la complémentarité entre les deux états qui est
peut se faire d'un monde où les nomades sont certes un à la base du dimorphisme est conditionnée par
élément à prendre en compte, mais où ils n'occupent pas l'environnement physique (ce qu'il appelle« topology » ).
une place prédominante. Les sources classiques qui parlent La proximité géographique, et même l'imbrication des zones
des nomades clans la région citent seulement des tribus dont de pâturages et de celles où est pratiquée l'agriculture font
le domaine semble être hors de la Palmyrène 26 De même, ri.
que les nomades sont forcés de passer une partie de l'année
quand Appien relate l'attaque sur Palmyre par les cavaliers à proximité immédiate des sédentaires. Il est tout à fait
cl'Antoine ( Guerres ciPiles V, 5), il en désigne les habitants concevable clans le cas de la Palmyrène que ce soient
par le terme « Palmyréniens », et non par un autre différentes parties des mêmes tribus qui ont rempli les deux
ethnique 267• La population de la Palmyrène semble avoir été rôles. De plus, comme le note M. Rowton, l'élite tribale a
considérée comme un ensemble, groupé autour de la ville souvent tendance à se sédentariser, en partie pour se
sédentaire (ou en cours de sédentarisation). De toute façon, rapprocher des centres de pouvoir, auxquels elle participe
les conditions climatiques étant ce qu'elles sont, il était parfois ; mais cela ne signifie pas non plus que tous les liens
impossible d'installer des établissements sédentaires en soient nécessairement rompus avec les fractions tribales
dehors des zones cl'oasis ou de montagnes. L'occupation restées nomades.
263 - F. QUASS, 1993, p. 62-68. des contrées voisines». JI est probable quïl considère Zabclibelos, au nom
264 - Voir CIS 3932 ou 3934 qui remontent à la quatrième ou cinquième si proche des noms palmyréniens, comme un Arabe, mais plus sur des
génération (milieu 111' siècle). Il me semble quïl n'a jamais été courant de critères ethnologiques qu'ethniques au sens propre.
remonter plus loin it Palmyre. 268 - Le terme «arabe» n'apparaît pour désigner les Palrnyréniens qu"ü
265 - J. l-lENNl'.'JGl"R. 1959. p. 84 (citant une théorie de W. Caskel). Voir aussi partir de Malalas.
p. 85: « les nomades guerriers, indépendants, furent peut-être dans une 269 J. T1:1xmoR, 1987, p. 49: « Une société dimorphe habitait clone la
certaine mesure soumis ou refoulés pendant la période de prospérité des Palmyrène romaine où s·associaient les traits de la vie urbaine el de la vie
états commerçants, puis reconquirent et augmentèrent leur pouvoir après nomade» : E. WILL, 1992, p. 31.
la décadence de ceux-ci». C'est en reprenant en partie cette théorie que 270 - On a parfois quelque mal ü établir de manière non équivoque les
B. Isaac (1992. p. 68-77) place à cette époque le début réel de la menace liens existant entre les établissements de Palmyrène du nord-ouest et les
nomade. notables de Palmyre (cf. chapitre 111). De plus une société dimorphe doit
266 - Les Arabes scénites dont parle Strabon habitent au nord et à l'est de avoir une population en partie nomade: c'était très probable dans cette
!'Euphrate (XVI, l, 26). Pline l'Ancien cite les Orroei (en Osrhoène donc) région. mais pas entièrement assuré, même si la sédentarisation est
et les Pmetm•i dans la même zone (HN V. 21 ). certainement récente. On verra au chapitre suivant ce que l' on peut déduire
267 - Quand Polybe parle du contingent que commandait Zabdibelos à la du fonctionnement du commerce caravanier tel qu'il apparaît clans les textes.
bataille de Raphia en 217 (V, 79), il les appelle« les Arabes et les soldats 271 Par exemple, M. RowTON, 1976a et 1976b.
Chapitre Il: L'identité ethnique de Palmyre 97
Au total, même s'il est impossible parfois d'identifier surtout plus éloignés. Ceux-ci sont parfois le fondement de
les liens exacts qui unissaient entre elles les familles et les théories qu'on peut tenter d'appliquer à malgré les
tribus, on a pu voir néanmoins que se mettait apparemment lacunes de la documentation.
en place un système dans lequel des groupes familiaux plus
restreints prenaient le pas sur les anciennes En on se trouve en face cl' un certain nombre
subdivisions de la population de l'oasis. Il est possible d'hypothèses probables, comme de modèles théoriques
d'interpréter ce phénomène comme une forme d'influence peuvent en partie s'appliquer au cas de Palmyre et de ses
occidentale, mais un certain nombre de faits mettent habitants. C'est pour cette raison qu'il faudra au cours du
également en évidence la force des coutumes locales à chapitre suivant tenter de déterminer sur quelles bases sont
Palmyre, en particulier en ce qui concerne 1'onomastique et fondées la fortune et l'influence des notables. Le rôle de
la manière dont se présentaient les généalogies. Mais la leur influence clanique semble clair, bien qu'il soit difficile
notion de coutume indigène ne signifie pas non plus qu'il cl'apporter des preuves formelles. Mais elle s'exprime aussi
s'agissait d'une population homogène: se mêlaient en fait par des éléments concrets dont on peut essayer de retrouver
des groupes d'origines ethniques diverses, même si l'élément la trace: agriculture, élevage, maîtrise des routes, implication
sémitique (araméen et arabe) était prédominant. Il est difficile dans le fonctionnement des caravanes. Enfin, cette influence
de préciser les proportions de chacun des groupes, en est, au premier chef, celle de grands notables, qui, comme
particulier pour l'élément arabe, qui, même s'il est bien Soados ou Marcus Ulpius Iarhaî, n'ont apparemment jamais
visible, n'était sans doute pas majoritaire, au moins parmi exercé de fonctions officielles au sein de la cité (ou qui en
les habitants sédentaires de la région. La question est plus tout cas n'en font pas état). Pour eux aussi l'existence de
compliquée pour les éléments nomades, car malgré liens tribaux peut permettre cl'avancer une explication à leur
l'existence de quelques textes, on est forcé de recourir à des domination apparente sur la société palmyrénienne.
parallèles parfois proches et contemporains (Hatra), mais
ACTIVITÉS DES NOTABLES
A - Les caravanes, leur organisation : p. 100. On a affaire aux résumés des décisions prises en faveur de
B - Les relations internationales: p. 106. tel ou tel, et non aux copies complètes des décisions telles
C - La police du désert: p. 112. qu'elles se trouvaient dans les archives officielles 5• Ce
D - Intégration des notables dans le cadre de : p. 118. sont clone ces formes raccourcies qui sont notre source
E - Activités non commerciales: p. 126. principale. On a vu plus haut (chapitrer) ce qu'on pouvait
dire d'après les textes sur ces carrières et les activités
Les notables sont ceux à qui leur richesse laisse civiques. En fait, les renseignements précis sur les activités
suffisamment de loisirs pour s'occuper des affaires « professionnelles» quotidiennes sont très épars 6• On peut
publiques; cela fait même partie de la définition du terme : seulement essayer de remplir quelques-uns des blancs de
on a pu voir au chapitre I que les Palmyréniens participaient notre documentation.
en nombre à la vie civique, comme dans d'autres cités de Dans cette perspective, ce sont parfois les activités des
l'Empire. Pourtant, en particulier à Palmyre, il arrivait aux dédicants, qui peuvent être eux-mêmes anonymes, qui sont
notables d'exercer d'autres activités, qu'on peut tenter de le mieux connues. Ces gens peuvent appartenir à des groupes
décrire, autant que les sources le permettent. Une liste de constitués. Il s'agit par exemple des corporations d'artisans
métiers connus à Palmyre a déjà été faite 1 ; elle s'appuie citées dans plusieurs textes (cruvi:Éxvux 7 ou cru�m6cnov 8 en
d'abord sur l'épigraphie et principalement sur le fameux grec, tgm' 0 en araméen) ou de groupes de marchands. Pour
« Tarif» - mais, comme on l'a remarqué depuis longtemps, les corporations, le problème de la présence de leurs membres
les textes ne sont pas extrêmement précis sur ce sujet 2• On dans les rangs des notables tels qu'on les a définis se pose. A
aurait d'ailleurs du mal à mettre beaucoup de ces métiers en priori, ce devraient être des non-notables qui remercient des
relation avec des notables. Certes, les notables sont a priori gens de catégories sociales plus élevées. Mais on ne peut
les gens dont on connaît les noms par les inscriptions, mais exclure l'existence parmi eux d'une« bourgeoisie» moyenne,
celles-ci sont rarement précises sur leurs activités. Si l'on stade inférieur de la notabilité. En tout état de cause, la
étudie des inscriptions funéraires, on peut lire des maigreur de la documentation ne permet pas de définir, pour
généalogies, on peut reconstruire des familles, mais l'on l'instant, les différenciations sociales à l'intérieur de ce
n'apprend que peu de chose sur les activités que les défunts groupe. Le fait que la situation de ces artisans a de grandes
ont exercées pendant leur vie. Comme le note M. Sartre 3 en chances d'être similaire à celle des marchands, catégorie où
reprenant une remarque de J. Teixidor � sur les fonctions de justement ces différences existent, constitue néanmoins un
bouleutes, on ne fait pas étalage des titres et charges, même indice. De plus, l'existence d'artisans n'implique pas une
prestigieux (archontat, secrétariat, agoranomie, etc.), dans séparation totale des fonctions de marchands et de celles de
les inscriptions funéraires. C'est encore plus vrai pour les revendeurs. Beaucoup d'artisans ont donc quelques
métiers qu'ils ont exercés. Or les Palmyréniens fondateurs probabilités de faire partie eux aussi de la catégorie des
des grands tombeaux qui entourent la ville ont sans doute marchands. Le cas de ces derniers peut sembler plus clair;
pour une partie d'entre eux exercé des fonctions importantes en effet, on peut en considérer certains, à leur manière, comme
au sein de la cité. Il en va de même pour les inscriptions des notables, certes d'un rang inférieur parfois iti, mais faisant
honorifiques, quoique peut-être dans une moindre mesure. partie d'une aristocratie marchande.
l - A. BouNNI, 1990a. Le même article dresse aussi une liste des fonctions 7 - CIS 3945 où le terme est restitué avec assez de sûreté.
attestées clans les inscriptions. Ce point a été traité clans le chapitre 1. 8 - H. SEYRIG, 1963, p. 161. BS n" 52, et Jnv XII, 37. Ce n'est que clans le
2 - Quelques reliefs et représentations figurées (navires, chameaux, ou premier de ces textes qu'il s'agit à coup sür d'artisans. La signification de
instruments pour les activités féminines) permettent de compléter notre KOVEcCXl (BS n" 52) et ou(cx)vvcov (lnv XII, 37) reste mystérieuse. H. Ingholt
documentation. Je renvoie au chapitre v pour les activités des femmes clans en donne une explication (H. INGHOLT, 1976, p. 133-134, n. 170 et 171)
la maison et au dehors. qu"on aimerait croire (KOVE"C<Xt signifierait « artisans du stuc», et
3 - M. SARTRE, 1996a. p. 388. Sur cette situation qui différencie Palmyre ou(cx)vvcov «vanneurs» en le faisant dériver du latin Fannus), mais le
clu reste du monde grec, voir le chapitre I et les annexes correspondantes. problème n'est sans cloute pas résolu. Les quatre inscriptions datant du
4 - J. TEIXIDOR, J 984, p. 63-64. même moment. on ne peut en tirer cl'arguments sur une éventuelle évolution
5 - M. SARTRE, 1996a. p. 389. de la terminologie.
6 - J'entends traiter ici cles activités publiques non politiques ou religieuses 9 - CIS 3945. Il est curieux que ce terme qui est une transcription d'un mot
des notables (clans le cadre de la cité ou de la tribu). On traitera plus loin grec (,ciy�m) serve à traduire un autre mot grec ( CTUVîÉXVl<X).
tout ce qui est du domaine privé et culturel. 10 - Mais pas toujours : cf plus bas à propos de M. Ulpius Iarhaî.
100 Les notables de Palmyre
Quand les dédicants sont des particuliers, sauf pour les confirmer de manière expresse ces hypothèses. Les trajets
inscriptions caravanières 11 (cf.plus bas), où les choses sont sont connus de manière superficielle, puisqu'on connaît
un peu plus claires, on retrouve les mêmes difficultés que quelques étapes sur la route, mais les reconstitutions qui en
pour les personnages honorés. C'est à partir du vocabulaire ont été faites sont encore en grande partie hypothétiques.
utilisé pour qualifier les relations mutuelles qu'il faut Elles permettent en tout cas, avec l'aide des inscriptions
raisonner. Les mots «patron», «évergète», «ami» sont trouvées ça et là, cl' établir une ébauche de géographie
bien sûr révélateurs de rapports sociaux, mais renseignent palmyrénienne à travers les implantations, les «postes»
peu sur l'activité quotidienne des gens concernés. Prenons commerciaux. On verra, clans le point suivant, ce que cette
le cas de 'IoÛÀlOç Aùp17À10ç Z17vô�10ç, honoré par le Conseil géographie implique pour les «relations internationales»
et le Peuple 12 en 242-243. Il a été stratège, agoranome, et des notables de Palmyre. La documentation que l'on a, on
s'est distingué lors du passage d'Alexandre Sévère et des l'a vu plus haut, est essentiellement épigraphique ( et
troupes commandées par Rutillius Crispinus. Bon citoyen archéologique, clans une moindre mesure, comme pour les
( «KaÀmç rroÀa 1:2ucra�tEvov ») et n'ayant pas reculé devant tissus). Or, et c'est l'objet de cette étude, ce sont les grands
la dépense, il reçoit les félicitations des autorités provinciales notables, caravaniers, qui sont souvent les sujets et parfois
romaines. les commanditaires de certaines des inscriptions les plus
L'inscription est une des plus détaillées qu'on ait: on détaillées qu'on a trouvées à Palmyre. Cette fois, c'est du
voit ce qu'on peut en apprendre sur le fonctionnement point de vue des notables qu'il faut tenter d'étudier ce
civique de Palmyre, sur les relations avec Rome ou commerce caravanier, en prêtant attention aux relations,
l'évergétisme, mais on cherchera en vain à en savoir plus entregent, agents à l'étranger qui entrent en jeu, et surtout
sur ce que le personnage a réellement fait pour sa cité. Il en ce qui en apparaît dans la documentation 16•
est donc de même pour les dédicants et leurs activités, à la Jadis, Ernest Will avait décrit et analysé les conditions
différence près qu'on n'a même pas l'assurance que ces gens du commerce en montrant bien la différence entre les patrons
qui remercient leurs évergètes ou patrons sont eux-mêmes et les chefs de caravane (archemporoi ou synodiarques). Ces
des notables. On apprend ce qu'ils sont (clients d'un patron derniers étaient des professionnels chargés de mener les
qu'ils remercient, bénéficiaires d'un évergète) seulement de expéditions à bon port, tout en s'occupant aussi des tâches
manière indirecte, mais presque rien ne filtre sur leur statut d'organisation 17• Les premiers, quant à eux, étaient les
social en sus de cette relation de dépendance. On a plus de commanditaires qui, par leur richesse et leur pouvoir clans
renseignements quand les mêmes personnages sont dédicants les tribus nomades de la région (cf.chapitre n), permettaient
de certaines inscriptions et dédicataires dans d'autres cas. l' existence même des caravanes ix_ Ils n'ont pas de titre
Par recoupement, on peut arriver alors à mieux définir leur particulier clans les textes, mais sont néanmoins remerciés
position dans la société 11• De même la chronologie relative comme des bienfaiteurs sans lesquels les caravanes
de ces textes n'est pas indifférente. Peut-être assiste-t-on à n'auraient pu fonctionner. Le texte lnv X, 90 par exemple,
une évolution de la terminologie, lorsqu'il s'agit d'exprimer par sa simplicité même (son obscurité?), est révélateur. Daté
des relations entre individus. S'agissant des participants aux de janvier 157, il s'agit de la dédicace d'une statue de Marcus
expéditions commerciales palmyréniennes, encore une fois Ulpius Iarhaî, par une caravane remontée de Spasinou Charax
le cas le plus clair, on verra comment se définissent les sous la direction de Iaclclaî Zabdilah. Rien ne dit que Iarhaî
relations d'autorité et de subordination entre les différents ait participé lui-même à l'expédition, on ne donne aucune
peïsonnages connus. précision, pourtant c'est bien en son honneur (TEl�tîiç ËvEKEV
ou lyqrh en araméen) que la statue est érigée. Il faut lire
entre les lignes : les raisons de ces remerciements étaient
A. LES CARAVANES, LEUR ORGANISATION
tellement évidentes pour les contemporains qu'il était inutile
Même si le commerce caravanier est la première activité de donner des détails. Comme l' avait vu E. Will, c'est sans
à laquelle on pense quand on s'intéresse à Palmyre, on en aucun cloute comme des financiers, des entrepreneurs qu'il
sait finalement peu de chose 14• Même les marchandises faut considérer ce Iarhaî et ses pairs. C'est le seul moyen
transportées sont pour une grande part inconnues. On a bien d'expliquer leur place clans le commerce, alors qu'ils n'ont
sûr fait quelques suppositions très probables, mais sauf pour pas de fonctions officielles. D'autres textes permettent cl'aller
les textiles (soie 15), seuls de rares documents viennent plus loin Ue suis toujours les conclusions d'E. Will): des
0
11 - Cf. l'article de M. GAWLIKOWSKJ, 1994, avec une liste des inscriptions 15 - Cf. A. Sc11MJDT-CouNET et Kh. As AD, 1995, p. 28-53, et J. TEIXJDOR,
caravanières p. 32-33 (auxquelles on peut ajouter CIS 3928 et lnl' X, 97). 1984.
12 - CJS 3932 (= ln\' lIL 22). 16 - On trouvera clans l'annexe XI. la liste des grands caravaniers classés
13 - Pour le cas de Marcus Ulpius larhaî. voir infi,1 et le chapitre 1v. chronologiquemenl.
14 - Voir surtout. E. WILL, 1957 et 1992, p. 57-85, J. TEIXIDOR, 1984. et 17 - E. W1LL. 1957. p. 268-269: c'est-à-dire conduire les caravanes,
M. GAWLIKOWSKJ, 1994. Plus généralement tous les travaux sur Palmyre organiser les préparatifs, réunir les bêtes et le personnel...
abordent plus ou moins en détail ce sujet. 18 - E. WILL, 1957. p. 269-27 I.
Chapitre III: Les actfrités des notables 101
19 - Terme peut-être impropre si on considère leur absence probable de la '.21 - Ceux que E. WILL, 1957, p. '.269 appelle« protecteurs».
plupart des voyages, mais que je conserve faute de mieux, vu leur importance 2'.2 - Sur tous ces problèmes de définition des notables, voir plus
pour l'existence même de ce commerce. généralement [' introduction.
'.20 - Sur les générosités de ces personnages, CIS 3936, 394'.2 et lnv X, 44.
102 Les notables de Palmyre
avec lui, mais plus tard, c'est en tant que patron qu'il est particulier clans le domaine caravanier (voir annexe XI). Les
honoré par les synodiarques. Il est possible qu'on ait là un personnages qui sortent du commun, on l'a vu, sont en
cas où justement l'appartenance familiale ou clanique compte général connus pour leurs rapports étroits avec le commerce
plus et fait plus la notabilité que la fonction à proprement caravanier, qui est le signe direct (ou peut-être la cause) de
parler. C'est peut-être plus comme membre d'une famille leur poids politique dans la cité. C'est vrai pour M. Ulpius
en vue que comme chef de caravane en tant que tel qu'il est Iarhaî, pour Soados, pour Worod ou quelques autres, mais
honoré. Ce qui expliquerait que sur le petit nombre de chefs ce n'est pas le cas pour la famille d'Odainat. Il faut tenter
de caravane connus, il apparaisse deux fois. La mention, d'élucider ce problème. Quelques signes peuvent laisser
dans le nombre relativement limité d'inscriptions penser que le domaine commercial n'a pas été entièrement
caravanières, de membres de la même famille me fait préférer négligé par cette famille. On a d'abord le cas des fabricants
cette interprétation (plutôt qu'un changement de statut social d' « asconautes » (àcrKovauwrrmrov, « fabricants cl'outres à
d'un caravanier parmi les autres). De plus des dédicaces lui bateaux») qui ont choisi Haîran comme patron en 257-258.
sont faites, quelle que soit sa fonction 23• Indubitablement Comme l'a montré brillamment H. Seyrig, l'éditeur de ce
cette famille avait une influence dans la vie publique, au texte, ces fabricants d'asconautes sont à mettre en rapport
moins économique, de Palmyre, et se placer sous son avec la navigation, par exemple sur }'Euphrate, où les outres
influence devait être considéré comme un gage de réussite au x1x" siècle encore servaient à la construction de bateaux 26•
au milieu du n" siècle. Or, on a pu prouver qu'une partie des trajets entre Palmyre
Outre la famille de Soados sur laquelle on reviendra et la Basse-Mésopotamie se faisaient p ar eau, sur
pl us loin, il existe à Palmyre des familles dont la l'Euphrate 27• Le lien entre cette famille et le commerce existe
spécialisation caravanière est claire. On a parlé au chapitre 1 donc, permettant d'entrevoir qu'à ce moment une évolution
des Bené Aabeî, mais on peut aussi citer le cas d'un père clans les modalités du transport des marchandises a lieu, avec
(Taîmarsû) et de son fils (Iaddaî) qui à quelques années par exemple un développement du commerce sur les cours
d'intervalle conduisent des caravanes 2-+. Cet aspect d'eau.
dynastique est renforcé par le fait que dans le premier texte, Il y a encore une remarque à faire sur ce commerce et
Iaddaî et Zabdibôl, les deux fils du caravanier, sont honorés Oclainat. Le texte caravanier connu le plus récent est un décret
en même temps que leur père. Dix-huit ans plus tard, le même du Conseil qui honore Septimius Worocl (encore le même
Iaddaî est à son tour devenu caravanier, succédant sans doute personnage) pour avoir ramené à ses frais une caravane
à son père. L'appartenance de la famille aux notables de (C/S 3942). Or ce Worocl, on l'a vu, est un personnage bien
Palmyre est prouvée par les honneurs accordés par le Conseil connu, la moindre de ses gloires n'étant pas cl' être considéré
et le Peuple à ZE�Elôa 00'.l�lll rnù MoKl�tou 1:où rap�a, comme « un collaborateur direct cl'Odénat » 2H. Même si
frère de Taîmarsû, en 158 (/nv III, 26 ; fig. 27), parce qu'il a Oclainat n'est pas impliqué directement dans le commerce
été « fondateur et patriote » (16v K11m17v Ka'i. <jnÀÔrrmplv). caravanier, ses proches le sont et il s'intéresse à des activités
Les inscriptions de cette famille sont situées clans la même qui ne s'expliquent que par les nécessités des caravanes.
zone (section C de la Grande Colonnade), à mi-chemin entre Avant de s'intéresser à la zone d'influence sur laquelle
le tétrapyle et les tombes 86 et 173d. Or l'inscription Inv III, s'étendait le commerce de Palmyre, on peut faire quelques
26 fournit la date la plus ancienne pour la section C : cette remarques sur des particularités de vocabulaire, dans les
fondation est peut-être tout simplement le début de la inscriptions caravanières. Si on prend les deux derniers textes
construction de cette partie de la colonnade. On manque caravaniers connus 2\ on remarque qu'apparaît un terme
néanmoins de preuves, et il peut tout aussi bien s'agir d'un inconnu jusqu'alors, le verbe àvaKo�tiÇm (ramener). Il
autre bâtiment 25• désigne de manière plus précise que le terme àva�aivm
11 est intéressant à ce propos de voir qu'un certain (remonter), qu'il remplace, l'action de ces hommes qu'on
nombre de familles importantes de la cité se manifestent en remercie. On peut se demander à quoi correspond ce
23 - Par exemple lm· X. 8 I où il s'agit de M. Ulpius Abgar fils de Haîran. être attesté comme caravanier (voir M. GAwu1<ows1<1. 1975, p. 131-133 pour
24 - CIS 3948 (/m· III. 28) de 193 pour le pèreTaîmarsü (Gmw:xpacx 0mp17 la fondation d'un tombeau par son oncle, les références ü d'autres membres
toü MoKt�Lou toü rcxp�cx t_ymr8W br tym' br mqymw grb') et CIS 3949 de la famille et un arbre généalogique : C!S 4015. 4059. 4210 et 3909 avec
(1111• lll, 29) de 211 pour son fils laddai (lcÛlôcxtoç ydy). Dans le cas de ce dans ce dernier cas une restitution/ k}y/ /}y au lieu de/ 1Jyf m}y du C!S).
dernier, la restitution de la deuxième ligne [0uvo8tcxpx17v] est discutable 26 - Voir 1-1. SEYRIG, 1963, p. 159-166, malgré les réserves de M. TARDIEU.
car !'expression CTUVOôlCXPXllV îû)V È�l1CüpCûV « synocliarque des 1990, p. 71-102.
marchands» n'est pas attestée (restitution de J. STERRETT, 1888, n" 641, 27 - M. GAWLIKOWSKI, 1983b el (surtout) 1988.
reprise par presque tous les éditeurs dont le CIS. mais pas dans lnl' III. 29; 28 - E. WILL, 1992, p. 180.
voir fig. 28). 29 - CIS 3936 et 3942, datés respectivement de 257-258 et d'après 260. Le
25 - Voir chapitre 1v. Nesâ bar Halft (ns' bd1J' br ns' br /11' bnp'1 br 'bsy terme apparaît dans un troisième texte (/m• IX. 30), qui n · est pas daté, mais
Nrn17 AÀcx îO'll Nrn17 îO'll AÀcx îO'll PE�Cl.t'.AOU îO'll A�tCTCTEOU) connu est probablement de la même période, en tout cas du 11( siècle (cf. DFD
par cieux textes en 142 et 150 ( CIS 3916 = /111 1 IX, 14a; ln\! X, 124) est un p. 88). C'est sans cloute pour cette communauté de vocabulaire que
autre cas de caravanier dont on peut suivre la carrière sur plusieurs années. M. Gawlikowski le place entre les deux premiers clans sa liste des
On connaît cl'autres membres de sa famille, mais il est le seul d'entre eux ü inscriptions caravanières (M. GAWLIKOWSKI, 1994. n"' 32-34).
Chapitre Ill: Les octÏl'ités des notables 103
changement de vocabulaire, reflet peut-être d'une implication différence de vocabulaire recouvre des différences clans
plus grande dans le retour de la caravane. Le mot àva�aivw 1'organisation des expéditions. Certes, parfois, le terme
est toujours utilisé au 111" siècle jusqu'en 247 3949 et << marchands » est utilisé pour décrire des gens qui sont sur
; donc, si ce changement de vocabulaire correspond à place clans les comptoirs palmyréniens (/111' 6 de 19
quelque chose de précis dans les faits, c'est du milieu du apr. J.-C., lnv 114 de 138 ou CIS 3949 de 211 ). Mais il
m" siècle qu'il faut le dater. Il est bien sûr tentant de le mettre sert aussi à décrire des gens qui visiblement ont effectué le
en rapport avec l'ascension d'Odainat dans la vie politique trajet depuis la Haute-Mésopotamie (lnv 7 ou 29). Le cas
de Palmyre, mais aucun élément ne permet de le faire. Sur de l'inscription Inv 29 est peut-être significatif, puisque
les trois textes en question, le premier est pour un l'inscription, en indiquant que les marchands ont été conduits
archemporos 3936), le second (Inv IX, 30) pour un par Neshâ, fils de Bôlîaclâ, utilise la forme de génitif absolu
synocliarque, et le dernier est une dédicace au fameux Worocl avec le participe« 1tp011YOWLÉvou » et non le terme qu'on
qu'on retrouve une nouvelle fois. Il s'agit clans tous les cas attend régulièrement à cette place « crnvo8uxpx11ç » . Le
de décrets du Conseil et du Peuple, alors que cela était assez mot « crnvo8uxpx11ç » désigne sans cloute une fonction
rare jusqu'à présent. En effet, on ne voit cela se produire officielle (au moins au sein cl'une caravane) et, dans ce cas,
qu'à quatre reprises avant le milieu du III° siècle et, chaque ne peut pas être utilisé par n'importe quel accompagnateur
fois ou presque, les raisons de l'intervention du Conseil sont de caravane. Les lignes 22-23 du texte BS 11° 45 (et la fin du
claires, si on met à part le texte le plus ancien 30• En Inv nouveau texte cl'Allât) qui mentionne les deux synocliarques
114 (de 138), c'est pour son aide aux marchands à Charax et en poste à ce moment au génitif absolu (comme pour
sans cloute surtout pour son ambassade auprès du roi n'importe quelle magistrature) en sont une preuve.
d'Élyma'icle, que le Conseil honore Iarhibôlâ. Dans D'ailleurs, l'expression correspondante parfois utilisée en
les deux derniers textes p. 12-14 cl'Umm el-Amacl et araméen ( brbn wt syrt', « clans ses fonctions de chef de
Inv 44), il s'agit de grands bienfaiteurs, honorés de caravane ») est construite sur le même modèle que celle
plusieurs statues. Même si ce n'est pas la règle 31, il n'est employée pour décrire les fonctions du syrnposiarque ou du
pas étonnant que le Conseil intervienne clans ces cas chargé de la source Efqa Je,_ La question se pose en fait de
exceptionnels. Si l'on revient à nos textes tardifs, on peut savoir pourquoi clans la plupart des textes, il ne s'agit que
être conduit à penser que là encore se voit l'influence de d'un seul synocliarque, alors qu'il devait normalement y en
certains grands notables, cette fois institutionnalisée et avoir deux, si on en croit les deux textes cités ci-dessus .
reconnue par les autorités de la cité, dont ils sont proches, On peut sans cloute l'expliquer par le rôle prédominant d'un
au moins clans le cas de Worocl, procurator et argapet. La d'entre eux. L'influence personnelle de certains notables
différence pour ce dernier est peut-être qu'il est honoré pour serait clone plus importante que leur fonction officielle.
avoir ramené des caravanes, alors que clans tous les autres Le texte du sanctuaire de Baalshamîn, BS n" 45, prend
textes où il est question de caravanes, il s'agit d'une caravane soin de bien distinguer, parmi les bienfaits de Soados, ceux
en particulier 32• C'est encore un signe de sa position qu'il a accomplis en faveur des marchands et ceux qu'il a
prééminente ! accomplis en faveur des caravanes. Il ajoute ensuite une
Les caravanes ramenées par ces différents personnages troisième catégorie, « les (con)citoyens à Vologésias »,
ne sont pas, comme cela arrive parfois, des caravanes« de prouvant par là que les marchands en question ne sont pas
tous les Palmyréniens 33 », mais pour ce point au moins, elles seulement les Palmyréniens résidents clans les fondouqs
ressemblent à celles qui les ont précédées. Il est curieux aussi palmyréniens. Sans être systématiques 38, ces différences
de constater que le terme lui-même de « caravane » peuvent recevoir diverses explications, comme par exemple
n'apparaît pas avant le milieu du 11" siècle 34• Avant, et encore la nature des rapports entre les divers participants au
assez souvent après, il n'est fait mention que des marchands commerce. La fonction de synocliarque, une tâche de
(ËJL1wpm ou lg1y'). La question se pose de savoir si cette professionnel comme on l'a vu, ne devait pas pouvoir être
30 - lm' X. 127 (daté de 86 apr. J.-C.). peu différent des textes où ce sont 35 - Cf aussi ers 3960 ou 3933. Dans ce dernier cas. le palmyrénien semble
les membres de la caravane qui honorent quelqu'un. moins systématique que le grec puisquïl utilise les deux termes 1g1y' et
31 - Cf. par exemple BS n" 45 ou le texte cl' Allât (H. J. W. DRUVERS. 1995a) bny /;yrt'.
où ce sont les caravaniers qui font dresser les quatre statues. 36 - eIS 3928 pour les caravanes; brbnwt mrzb' (RTP 34) pour la
32 - À 1 'exception apparente de BS n" 45 : si. ù la ligne 5 du grec. on remercie symposiarchie et brbmvt 'yn' (lm, XIL 44) pour la source.
Soados d"avoir aidé. en général. les marchands et les caravanes. c'est une 37 - Il n ·y a pas non plus cl' attestation la même année de deux synodiarques
caravane particulière. à !"occasion d"un haut fait particulier. qui lui fait ce différents. honorés par deux textes différents. ce qui ne signifie pas que le
texte. cas ne se soit jamais présenté.
33 - Dans le texte H. J. W. DRI.JVERS. 1995a. 1. 11-12 : « 17 crnvo8î.a rrav10N 38 - Le texte eIS 3916 (= Jn1, IX. 14a) par exemple mentionne un
TTaÀ�LUp17vêôv ». Voir aussi llll' X. 7: [ .... oi cxva]�cxnrç cxrrà .I:rramvo[u synocliarque ayant accompagné des marchands depuis Phorat et Vologésias.
XapmcJoç TTcxÀ�rnp17vcov Ëp[-v;opot.. .. ] et [1g1y]' dy tdm[w1] (si les Voir aussi le texte ers 3948 ([Ill' III. 28) où. à la ligne 4. la restitution
restitutions sont justes). �rnopm dans la lacune est possible quoiqu"un peu trop longue.
34 - lm' X. 81. de 135 apr. J.-C.
104 Les notables de Palmyre
tenue par n'importe qui. Ce terme a d'ailleurs un concurrent, mentions de cette dernière. À part dans les années 30 et 40
le mot CLrchemporos, qui, quoique plus rare, est bien attesté. du 11° siècle, les mentions de caravane venant ou allant vers
Le terme synodiarque est attesté pour la dernière fois dans cette ville sont rares, puisqu'on les trouve seulement en 211
la première partie du m" siècle (lnv IX, 30 postérieur à 214) (C/S 3949) et 247. Le commerce avec Charax est attesté,
et la dernière date précise qu'on peut donner est 199 apr. J.-C. quant à lui, depuis la première moitié du 1"" siècle (lnv X, 7
(Inv X, 44). Il y a un espace d'incertitude d'une cinquantaine et J. CANTINEAU, 1930b, 11 ° 34), et s'achève à la fin du siècle
d'années avant que le mot archemporos ne prenne la relève. suivant (C/S 3948 de 193 apr. J.-C.) après un vide de 32
Comme l'avait déjà noté E. Will, le terme apparaît donc ans -1s, et certains textes citent les noms des deux villes ; les
3').
tardivement Or c'est justement dans deux des textes cités statues de Soados, par exemple, d'après l'inscription cl'Umm
plus haut qu'on le trouve: l'un qui concerne Iulius Aurelius el-Amacl, ont été érigées à Palmyre, au caravansérail de
Shalamallat et l'autre Worod. Il vaut sans doute la peine d'y Gennae, à Charax et à Vologésias. Le texte lnv X, 112 est
regarder d'un peu plus près, car les deux textes ont en une dédicace faite par les membres d'une caravane qui est
commun une autre particularité. En effet, dans les deux, on partie de Charax pour aller à Vologésias et Palmyre. Les
remercie la personne honorée d'avoir ramené la (ou les) deux villes ne sont clone pas tout à fait sur le même plan, et
caravane(s) à ses.fi·CLis (rrpo1.Ka Èç ifücov ou Èç ifücov; mgn Vologésias, près de Babylone, semble plutôt être une ville
11111 kysh). De même Ogeîlû (lnv X, 44) a dépensé de grandes étape sur la route qui vient d'Asie Centrale, alors que Charax
sommes sur sa fortune. Avec raison, sans nul doute, E. Will est l'endroit où arrivent, depuis la mer, les marchandises
y voit des manifestations d'évergétisme plutôt que la misère depuis }'Extrême-Orient (l'Inde du nord-ouest qui est la
du temps et l'insécurité invoquées par M. Rostovtzeff-111• Scythie des textes lnv X, 96 ou DFD p. 32).
C'est sans doute cet évergétisme que le Conseil reconnaît et On aimerait aussi avoir plus de détails sur la manière
récompense. Mais on ne peut assimiler les faits relatés dans dont Palmyre contrôlait ou ne contrôlait pas le commerce et
les deux inscriptions tardives et en particulier le rôle des les trajets clans cette région. Il est clair que les relations
CL rchemporoi. Shalamallat est 1 ui-même qualifié privilégiées entretenues par Rome avec les rois de Mésène,
cl' CLrchemporos, et à ce titre, il a ramené une caravane. Le et une possible place de ce royaume dans la sphère
cas est tout différent pour Worod ; les CLrchemporoi cités clans d'influence romaine dans les années qui suivirent le règne
le texte sont ceux qui ont reconnu son rôle (« �mp1:up118Évta -lh
de Trajan jusqu'en I 51, jouent pour beaucoup clans la
1mo 1:Ô)v àpxqmôpcov») et sa position. Ce fait est cité dans fréquence des inscriptions caravanières à ce moment. Ces
les listes des bienfaits qui justifient le décret du Conseil et bonnes relations doivent aussi permettre aux Palmyréniens
du Peuple, il n'est pas central pour l'inscription. Worod est l'utilisation des ports de Mésène sur le golfe Arabo-Persique.
un personnage d'un statut social plus élevé que Shalamallat. De là, ils prennent la mer pour rejoindre la« Scythie» (Inde
Celui-ci ramenait les caravanes en tant que guide, du nord-ouest).
organisateur ; c'est sans cloute surtout grâce à son influence Les premiers textes mentionnent des marchands
personnelle que Worocl les ramenait et on peut se demander palmyréniens de Séleucie (CIS 3924) et de Babylone (lnv IX,
si sa présence physique était vraiment nécessaire. 11 où l'expression t[g]1y' klhwn dy bmdynt bbl, « tous les
marchands qui sont clans la ville de Babylone », désigne sans
Ces inscriptions caravanières ont l'intérêt de renseigner doute des Palmyréniens clans cette ville). On a identifié avec
sur les limites de l'extension du domaine commercial de vraisemblance cette Séleucie avec celle du Tigre, mais cela
Palmyre. On peut ainsi faire une géographie des n'est que probable, sans preuve formelle -17• Les Grecs de
commerçants connus -1i. Les grandes lignes en sont bien Séleucie s'associent aussi aux marchands palmyréniens pour
connues. Les villes de Vologésias et Spasinou Charax sont honorer un Palmyrénien qui les a aidés et qui est un
apparemment les lieux les plus fréquentés par les bienfaiteur du temple de Bel (comme Malikû, fils de Neshâ,
commerçants venus du désert syrien, et ce, tout au long de de l'inscription des Babyloniens). Il est intéressant d'abord
la période (voir pl. 1). de voir que des marchands non-palmyréniens (grecs)
On a, entre le milieu du l"' siècle et la fin du 11", quinze participent aux honneurs d'un bi enfaiteur du sanctuaire
mentions de Spasinou Charax et huit de Vologésias-12; mais principal de Palmyre -1�_ Certes ce n · est pas la raison
c'est seulement entre 132 -1.1 et 247 -i-i qu'on trouve des principale invoquée, et c'est plus parce qu'« ils les (c'est-à-
39 - E. WILL, 1957, p. 264 n. 1. Les occurrences sont C/S 3936 et 3942. 44 - CIS 3933.
40 - E. WILL. 1957. p. 270. 45 - Vide expliqué par G. W. BowERSOCK, 1989b, p. 167-168. par la reprise
41 - Voir par exemple clans les dernières synthèses, J. STARCKY et de l'offensive par Vologèse III à la mort de l'empereur Antonin.
M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 74-81 ; E. WILL, 1992, p. 64-81. 46 - G. W. BowERSOCK, 1989b. p. 159-168.
42 - Sur la position géographique de la ville, M.-L. CHAUMONT, 1974, 47 - M. GAWLIKOWSKI. 1994. p. 28.
p. 76-89 (la ville a été fondée vers 70, et elle prit le nom de son fondateur, 48 - Si c'est bien du sanctuaire de Bel de Palmyre qu'il s'agit. mais rien ne
un roi parthe). permet de penser le contraire (en particulier le lieu de découverte des deux
43-BS n"45. Mais le texte CIS 3917 (daté de 108) mentionne déjà des textes: le sanctuaire lui-même).
relations avec cette ville.
Clwpitre III: Les octi1 1 ités des notables 105
dire les marchands) ont favorisés de toute manière», que participant à un projet auquel les Romains attachaient une
ces personnages sont honorés. certaine importance.
Ces marchands de l'oasis, malgré leur éloignement et On retrouve tout au long de la période des notables
une installation permanente à l'étranger, conservent palmyréniens à des postes importants et pas toujours liés au
néanmoins assez de patriotisme pour participer à la commerce dans les villes du Golfe et de la région. Un texte
construction du sanctuaire principal de la ville ou considérer du début de notre ère apprend qu'un envoyé de Germanicus,
cet événement comme assez important pour figurer dans une un Palmyrénien du nom d'Alexandros, se rendit auprès du
inscription honorifique. Ce fait est à rapprocher de ce qu'on roi de Mésène 50• Ce fait, ainsi que le texte CIS 3924, sont
a pu dire plus haut sur l'usage de la langue à Palmyre. Seule des signes de la présence et de l'influence palmyréniennes
de toutes les populations recrutées dans l'armée romaine, la dans la région dès le début de l'ère chrétienne. Les
population palmyrénienne a conservé sa langue et l'a utilisée témoignages épigraphiques confirment que cette influence
et écrite, jusqu'aux extrémités de l'Empire. C'est pour cette peut se mettre au service de Rome, comme le montre le cas
raison qu'on trouve des inscriptions en araméen en de Soados, dont on reparlera en détail.
Angleterre, en Afrique ou en Dacie. De même les cultes de Pourtant certains des notables connus par les textes se
Palmyre ont été emportés par leurs fidèles, comme à Rome mettent aussi au service des souverains des royaumes du
par exemple. Mais dès le début de notre ère, le sentiment Golfe. C'est le cas de Iarhaî, fils de Nebûzabad (y1/1y br
palmyrénien est assez fort pour que la construction du temple nbwzbd) 5 1, qui, en 131, est remercié par les marchands de
semble concerner les gens originaires de 1'oasis, où qu'ils Spasinou Charax. Ce qui est plus intéressant encore, ce sont
se trouvent. les titres que le texte donne à ce personnage. Il est appelé
La participation des marchands non palmyréniens a peut satrape de Thilouana, pour le compte du roi Méerédate de
être aussi des buts propres, par exemple un souci bien naturel Spasinou Charax (0mpa[rc]l7v 01Àouavwv MEEpaoawu
de se concilier les nomades, que ces bienfaiteurs, Malikû �a01ÀÉwç Lnamvou XcxpaKOç). Thilouana est à identifier
Neshâ et Iedîbel, fils d'Azîzû (MaÀ1xoç Nwa 'CoÛ BwÀcm avec la moderne île de Bahrein dans le Golfe 52 et le roi est
en Inv 11 et ydy'bl br 'zyzwen CIS 3924), comme leurs le dernier roi connu de Mésène, avant l'attaque de
successeurs grands caravaniers, ont pu contrôler. Comme Vologèse III. Mais Iarhaî est néanmoins citoyen de
toujours les termes employés ( « favoriser ») sont assez Palmyre (['Ao]pmvov TTaÀµup17v6v) et c'est là que la statue
obscurs, mais dans le cas du premier personnage, son a été érigée par des marchands qui sont vraisemblablement
importance n'est pas à sous-estimer puisqu'il semble bien ses concitoyens, mais qui résident à Charax.
avoir eu des responsabilités importantes dans cette ville de Un autre personnage au nom palmyrénien, Iarhibôlâ,
Séleucie : il a été à la tête des marchands grecs et fils de Lishamsh, semble avoir effectué une mission officielle
palmyréniens, ce qui équivaut peut-être à une sorte de chef (pour le compte de qui ?) dans une ambassade de marchands
des marchands étrangers installés là. Le fait qu'un homme mésèniens auprès d'un roi de l'Élymaïde voisine 53• Un autre
de cette origine ethnique ait exercé ces fonctions est texte cité parfois à cette occasion est moins clair. En effet en
révélateur du poids que Palmyre a pu avoir (?), dès ce Inv X, 112 qui date de 140, un anonyme, fils d'un
moment-là (19 apr. J.-C.), dans la région. Alexandros 5·\ qui est peut-être magistrat (archonte?) de la
On peut aussi mettre cela en relation avec la présence ville de Phorat, est honoré par une caravane de Charax. Son
probable de Germanicus au même moment en Syrie et patronyme grec a fait soupçonner qu'il s'agissait d'un
probablement à Palmyre. Si 1' on croit, avec Romain (Inv X, p. 68), mais il peut aussi bien s'agir d'un
M. A. R. Colledge ·1 9, que les fonds nécessaires à la Grec de Mésopotamie, comme il y en avait dans les cités
construction du temple de Bel ont été fournis par les autorités grecques de la région.
romaines, on peut alors chercher de ce côté là une autre Le personnage le plus influent parmi les Palmyréniens
explication à la participation des marchands de Séleucie et ayant résidé dans la région semble bien être Soados, fils de
de Babylone. Au moment où Rome s'implique dans la vie Bôlîadâ. C'est pour les honneurs qu'il reçoit à Palmyre qu'on
de Palmyre et par conséquent dans le commerce entre la a le plus de détails, car c'est à cet endroit qu'on a découvert
Médite1rnnée et la Mésopotamie, il a pu sembler utile à des les inscriptions ; on y trouve aussi une documentation sur
marchands de ces régions de rappeler leur existence, en son influence en Mésopotamie et principalement à
49 - M. A. R CoLLEDGE, 1976b. p. 50-52. Mais la construction du temple 52 - M. GAWLIKOWSKI , 1994, p. 29 ; voir aussi les remarques de
n'a pas obligatoirement nécessité l'intervention de Rome. La théorie récente G. W. BowERSOCK, 1989b, p. 160 et n. 7 avec la bibliographie afférente.
de M. Pietrzykowski (1997) sur la construction en étapes du temple entre 53 - lnv X, 114 de 138. Il a en tout cas attiré 1'attention des gouverneurs
le début de notre ère et le Il" siècle correspond à ce qu'on sait des procédés romains.
de construction et de financement des monuments publics à Palmyre (voir 54 - L'identification éventuelle avec un fils de l' Alexandros cité plus haut
chapitre rv, p. 159-160). ne repose que sur la proximité géographique et onomastique. Il est possible
50 - J. CANTINEAU, 193], p. 139-]4], n" 18. qu'il s'agisse d'un Palrnyrénien, mais on peut difficilement être certain de
51 - ln1' X, 38. ce fait (comme par exemple, G. W. BowERSOCK, 1989b, p. 160-16 l ).
106 Les notables de Palmyre
Vologésias. Il construisit un temple des empereurs dans cette tous ceux qui sont au-dessous des grands notables
ville et il y exerça sans doute une dynasteia sur laquelle on a n'apparaissent qu'en groupe dans les textes caravaniers. Il
peu de détails 55• L'importance des honneurs qu'il reçut à faut, je crois, bien faire attention à la manière dont les
plusieurs reprises 5 6, montre bien que cet homme a dü avoir inscriptions sont rédigées, et en particulier à la question
une place prépondérante dans les relations entre la des dédicants. Comme on l'a vu, les possibilités sont
Mésopotamie et Palmyre. nombreuses, il peut s'agir du Conseil, des marchands ou
Le plus étonnant est justement que ce notable des caravanes et les deux derniers cités, par exemple, ne
palmyrénien réside à l'étranger d'où il aide et favorise ses sont pas toujours équivalents.
compatriotes. On pourrait penser à l'existence de Un dernier point est à mettre en valeur: ces notables
représentants « officiels » de la cité, en poste dans les sont en général concernés par le commerce caravanier et on
différentsfondouqs 57• En fait ces représentants sont justement en fa it souvent la raison de leur résidence hors de Palmyre.
les notables en vue, et il faut sans doute plus les considérer C'est très probable, mais cela ne doit pas faire oublier que
comme des chefs nomades itinérants et faisant des séjours certains ont des responsabilités plus larges. C'est justement
plus ou moins prolongés dans les différentes villes. Leur statut ce qui fait le rôle de personnages comme Worod, Soados ou
<< officiel» fait pourtant problème et le rôle de « dynaste» M. Ulpius Iarhaî, qui ont des intérêts commerciaux
de Soados est éventuellement un moyen de le résoudre et importants (le dernier nommé a même été chef de caravane)
d'expliquer comment les marchands palmyréniens étaient mais qui ont aussi un rôle et une influence politique à
défendus en pratique dans le Golfe et en Mésopotamie. On Palmyre. Iarhaî a des liens étroits avec Palmyre (d'où les
peut le considérer comme une sorte d'ethnarque, avec un rôle nombreuses statues qui lui sont dédiées), mais aide des
similaire à celui joué par Malikû, fils de Neshâ, de marchands à Charax (et pas seulement sur la route) ; Worod,
1 'inscription Jnv IX, 1 l à Babylone, mais cette fois avec un d'origine iranienne, joue un rôle majeur à Palmyre, mais
titre (voir ci-dessus). Que ce titre de «dynaste» lui ait été s'occupe des caravanes et a peut-être fini sa carrière dans le
conféré par le souverain de Mésène n'est pas non pl us royaume sassanide. Plus que les autres notables qu'on
complètement improbable, si l'on considère l'importance que connaît, ils semblent posséder une stature internationale et
devaient avoir, pour le petit royaume de Mésène, les bonnes faire le lien entre Palmyre et cl'autres régions.
relations avec Rome et le commerce avec Palmyre (et donc
l'Empire romain dans son entier). Il serait en tout cas hâtif
B. LES RELATIONS INTERNATIONALES
de tirer des conclusions définitives sur ce problème, en
espérant qu'une nouvelle découverte permettra de faire Si les raisons de la présence de notables palmyréniens
quelques nouvelles hypothèses 58• en Mésène au 11" siècle ont reçu un éclairage récent avec la
Un point semble sûr pourtant: l'existence, parmi les découverte de l'inscription de l' Héraclès de Séleucie-clu
Palmyréniens vivant hors de Palmyre, d'une stratification Tigre, un problème, celui de Doura-Europos, reste posé.
sociale importante qui rejoint celle qu'on a essayé de décrire Curieusement, c'est au moment où la Mésène sort de la
pour 1a ville elle-même. On a, d'un côté, une classe sphère d'influence romaine que Doura-Europos y entre pour
supérieure de notables, qui ont une forte influence, et de n'en sortir qu'au moment de la disparition de la ville en 256.
l'autre, un ensemble de marchands et émigrés qui leur Pourtant, si les Palmyréniens ont été présents clans la ville
doivent beaucoup et qui sont sous leur protection. Mais les dès le J"' siècle av. J.-C., la question de leur statut exact est
fonctions occupées par tel ou tel n'expliquent pas tout, un difficile. Doura, à la différence des villes de Mésène, n'est
synodiarque par exemple peut avoir une position plus ou pas un poste économique important, au point qu'on cloute
moins importante, selon la puissance de sa famille. du passage du commerce palmyrénien par cette ville. On
De plus les différences sociales laissent sans doute la pourrait en caricaturant un peu opposer les deux villes, en
place à des statuts intermédiaires, et il est clair aussi que faisant de l'une (Palmyre) une ville de notables, au décor
SS - Texte de Umm el-Arnac! dans R. MmTERDE et A. PrnDEB,\RD. 1931. faut mentionner la découverte sur l'île de Kharg d'une nécropole d'environ
p. 101-115. M. Gawlikowski traduit ce terme par« special poll'er,1· » ( 1994. 85 tombes. parmi lesquelles cieux ont été qualifiées cle palrnyréniennes
p. 33 ). On peut s'interroger sur la nature de ce pouvoir. et en particulier. (E. 1-L-\ERINCK, 1975. p. l 3c+- l 67). Par leur plan et à cause de la présence de
son origine. L'expression du texte grec[mxcrn'.]V ÈVXElplCT8ÉVCX ôUVO'.CTîElO'.V loC1t!i. cette identification est possible. même si un certain nombre
semble impliquer un caractère officiel. mais le caractère lacunaire du passage d'éléments sont visiblement empruntés à la tradition iranienne. Elle a été
incite à une grande prudence. rejetée par E. EQUIN! Sc11NEIDER (1993. p. 101-102. n. 2 ). qui trouve que les
56 - Outre le texte cité ci-dessus, voir BS n" 45 et H. J. W. DRI.JVERS, 1995a, parallèles les plus proches sont plutôt à trouver en Mésopotamie
p. 34-37 : en tout, au moins seize statues. plus des lettres impériales et des septentrionale (avec un renvoi à un de ses articles,« Su alcuni rilievi funerari
gouverneurs. entre 132 et 146. della necropoli di Hilar. nella Mesopotamia Settentrionale ». RdA 16. 1992.
57 - L'inscription J. CANTINEAU. 1938. p. 75-76. n" 28c. à propos de p. 28-35). Néanmoins. il semble bien que la présence des /orn/i soit ce qui
M. Ulpius larhaî. apprend quïl a aidé un certain 1--Iaddûdan à Charax, où, différencie Palmyre et l'île de Kharg des autres exemples qu'elle cite. ce
peut-être, il résidait. qui inciterait ù faire de ces tombes de Kharg la sépulture de Palmyréniens.
58 - Pour être complet sur la présence des Palrnyréniens dans le Golfe, il M.-J. Steve ( 1999, p. 75-76) y voit au contraire des hypogées nabatéens.
Chapitre III: Les octil'ités des notobles 107
urbain magnifique, mais n'ayant presque rien livré de ce qui de l'apparition d'inscriptions en cette langue à Dourn avec
faisait la vie quotidienne, alors que l'autre, moins riche celle de textes équivalents à Palmyre, ville, qui, justement,
(surtout à cette période) est notre principale source sur la commence à se développer, serait étonnante, s'il ne s'agissait
manière dont les gens vivaient au bord de l'Euphrate aux de la même population.
premiers siècles de notre ère. La situation de ce sanctuaire hors les murs est un
La ville est sans nul doute dans la sphère d'influence de argument allant dans ce sens. Cette position en effet semble
Palmyre, en même temps qu'elle appartient jusqu'en 163 à impliquer que la présence palmyrénienne est un tant soit
l'Empire parthe. La question des rapports de Doura avec peu considérée comme étrangère, en tout cas pas tout à fait
Palmyre après la conquête romaine se pose avec moins intégrée dans la cité de Doura-Europos. On peut ensuite
cl'acuité, puisqu'à ce moment, il est moins étonnant que des émettre toutes sortes d'hypothèses sur cette présence
soldats romains cl' origine palmyrénienne y soient en palmyrénienne, la plus simple étant qu'elle correspond aux
garnison 59• De plus, les documents le prouvent 60, les centres débuts du commerce de Palmyre et au développement de
avec lesquels la ville semble avoir des relations soutenues celle-ci. Le fameux texte cl'Appien °5, qui mentionne le raid
sont plutôt situés au nord, à Antioche surtout, le centre manqué des cavaliers cl' Antoine, apprend que les
administratif et la capitale régionale ou bien, dans une Palmyréniens se réfugièrent de l'autre côté de l'Euphrate.
moindre mesure, à Édesse, en Mésopotamie. C'est à Le texte évoque aussi la richesse de la cité, tirée (déjà !) du
Antioche, dont on utilise le numéraire, qu'on va déposer commerce avec l'Orient. Le trajet vers l'Euphrate, nécessaire
une supplique auprès du gouverneur, pendant la période pour le commerce, même s'il évite Doura, pour rejoindre le
romaine de la ville. Mais jusqu'à cette date, Doura-Europos fleuve plutôt vers Hit ou Ana, a toutes les chances de passer
appartient sans nul cloute à l'Empire parthe (depuis la fin du clans une zone plus ou moins contrôlée par Doura, qui à
11" siècle av. J.-C.), alors que Palmyre est une ville de l'Empire l'époque parthe semble jouer un rôle administratif important
romain depuis au moins le règne de Tibère. Pourtant les en Parapotamie 66•
relations existent, et ce depuis au moins 32 av. J.-C., Certes les deux personnages qui fondèrent ce temple de
puisqu'une inscription palmyrénienne datant de ce moment la nécropole sont inconnus par ailleurs. Cela n'est pas très
a été retrouvée clans la nécropole de Doura 61• étonnant pour cette période où la documentation
Ce texte est la dédicace d'un temple de Bel et Iarhibôl, épigraphique est assez faible à Palmyre. Il s'agit, en tout
divinités bien connues à Palmyre. Les deux cléclicants sont cas, vraisemblablement de notables, qui avaient l'influence
Zabdibôl, fils de Baaîahû (zbdbwl br b'ybw), des Bené et la richesse suffisantes pour fonder ce temple. Un des points
Gadclîbôl, et Malikû, fils de Remû (mlkw brnnw), des Bené sur lequel achoppe l'étude des relations entre ces villes, est
Komarê. Ce texte pourrait tout aussi bien provenir de l'absence (ou presque) de personnages attestés dans les deux.
Palmyre. Le caractère palmyrénien ( outre la langue et Sur la cinquantaine d'inscriptions en palmyrénien de Doura,
l'écriture) est flagrant. Les deux principales divinités de la plupart sont très courtes, souvent seulement quelques
Palmyre sont ici citées. Les deux noms des cléclicants sont noms, et on n'y retrouve que peu d'inscriptions longues
attestés très souvent à Palmyre, seul le patronyme du premier permettant de reconstituer des généalogies. Certes, un certain
est un hapax 62• On pourrait certes considérer qu'à Doura, nombre de textes grecs citent des noms palmyréniens, mais
cette partie de la population n'était pas véritablement là encore, beaucoup datent de l'époque de la présence
palmyrénienne, au sens géographique (c'est-à-dire originaire romaine, et les liens entre les villes ne sont pas très bien
de l'oasis), mais en serait proche ethniquement et aurait donc attestés. Parmi les temples dits « palmyréniens » de Doura,
une langue et une écriture similaires à celles de l'oasis 63• deux sont écartés avec de bons arguments par E. Will 67• En
C'est possible, certes, mais les deux personnages effet, bien que dans le temple de Bel (parfois appelé« temple
appartiennent à des tribus bien attestées à Palmyre, les Bené des Dieux palmyréniens ») ou clans celui de Zeus Mégistos,
Komarê et les Bené Gaclclîbôl <i-i_ De plus, la concomitance on ait des preuves que des dieux connus à Palmyre sont
59 - Voir C. B. WELLES et alii, 1959. Dernièrement, sur les relations de témoignages numismatiques.
Doura-Europos et de Palmyre, E. WILL, l 992, p. 88-93 et L. DIRVEN, l 996. 61 - R. Du MESNIL DU Bu1ssoN, 1939, n" 1 = Pre!. Rep. VII/VIII , p. 318,
p. 39-54 (je n'ai pu consulter du même auteur le récent livre The Palmyrenes n" 916. C'est clans ce volume qu'on trouve aussi la publication des fouilles
of' Dura-Europos, Leyde, 1999) : cet auteur conclut que Doura-Europos du sanctuaire; le texte n" 917, p. 318-320 est un texte grec des environs de
participait au commerce caravanier de Palmyre, en même temps qu'elle lui 100 apr. J.-C. avec une dédicace lacunaire à Bel.
fournissait une partie de ses besoins alimentaires. Comme elle le note tl 62 - R. Du MESNIL ou Bu1ssoN, 1939, p. 59 propose une lecture alternative :
plusieurs reprises, on manque totalement de preuves formelles, et il ne Baayasou (b'y,5w) au lieu de Baayahou (b'ybw).
peut s'agir que de déductions ingénieuses (par exemple, p. 42 : « The major 63 - E. WILL, 1992, p. 89. Voir aussi les remarques de E. Will. clans
prob!em with the supposed CCll"Cll'C/11 route _fi-om Pa!m_vra towards Dura A. BOUNNI, 1994, p. 18.
Europos is t!wt 110 traces ofïts existence have beenfèJllnd » ). 64 - Voir annexe VIII . 1.
60 - Voir les textes civils clans C. B. WELLES et a!ii, 1959, n''" 18 à 44 et 65 - APPIEN, Guerres cil'i!es V, 9 (voir supra l'introduction).
surtout les textes de !'Euphrate découverts récemment, D. FEISSEL et 66 - P. ARNAUD, 1986, p. 146.
J. GASCOU, 1989 et 1995, D. FEISSEL, J. GAscou et J. TEIXIDOR, 1997 et 67 - E. WILL, 1992, p. 90-91.
J. TEIXIDOR, 1990. textes syriaques, ou bien A. BELLINGER, 1949 pour les
108 Les notables de Palmyre
vénérés 68, rien ne montre que des Palmyréniens aient pu whblt 11$Wr). On retrouve la même généalogie dans le texte
fréquenter ce lieu. Au contraire, l'onomastique des fidèles publié en 1985 par M. Gawlikowski (M. GAWLIKOWSKI, 1985,
ressemble beaucoup à celle de l'ensemble de la ville 69, et 11 ° 13). On voit qu'on retrouve deux des noms présents dans
on y reconnaît des noms courants dans l'aristocratie le texte de Doura-Europos. La généalogie abrégée à partir
douréenne (Séleukos, Lysias, Conon 70), alors que les noms du grand-père donne le nom de l'ancêtre lointain, fondateur
palmyréniens sont rares. Ces notables de Doura-Europos de la famille, Nasôr.
fréquentent des sanctuaires où l'influence palmyrénienne se Cette hypothèse, invérifiable, mais assez probable, a
fait sentir, mais rien ne vient donner l'impression qu'il y a l'avantage de laisser penser que des liens autres que purement
des relations entre les notables des deux cités. linguistiques ou religieux ont existé entre les deux villes.
De même, on trouve des textes palmyréniens (ou en grec Sans cela, l'onomastique prouve ces relations, mais ne
avec des noms palmyréniens) dans le reste de la ville, mais montre pas si celles-ci étaient continues ou concernaient
rien ne prouve que ces textes (en particulier à proximité de seulement l'émigration vers Doura de quelques citoyens de
la porte principale de la ville) ne datent pas de l'époque l'oasis du désert syrien. On a aussi fait du sanctuaire des
romaine où des troupes de cette origine sont stationnées en Gaddé unfondouq palmyrénien 76, où se serait regroupé une
ville (comme on le verra plus loin). Néanmoins, en plus du sorte de conseil de la communauté des Palmyréniens de
temple de la nécropole, un autre sanctuaire est, avec de bons Doura-Europos. On aimerait avoir des preuves plus positives
arguments, qualifié de palmyrénien. Le sanctuaire des de l'existence effective de cette communauté, ce qui n'est
Gaddé 71, en effet, a fourni non seulement des dédicaces à pas le cas pour Vologésias ou Charax. L'inexistence même
des dieux comme Iarhibôl , mais aussi un certain nombre de Doura dans les textes de Palmyre (plus de trois mille en
de noms de bonne facture palmyrénienne, comme Haîran, tout) incite à une grande prudence quand on s'intéresse à
fils de Malikü 73• Ce Haîran, fils de Malikü, a consacré deux leurs relations mutuelles.
reliefs en 159, soit à l'époque de la domination parthe. Le En fait, c'est du point de vue militaire qu'on a, à Doura
premier relief représente la fortune (tyché en grec ou gad en même, la documentation la plus importante, et donc la preuve
araméen, d'où le nom du sanctuaire) de Doura, et le second, d'une présence assez importante de notables palmyréniens
la fortune de Palmyre, de l'autre côté d'une représentation d'un rang non négligeable. Un texte du temple des Gaddé,
du dieu Malakbel. malheureusement non daté, mentionne les Benê Mîtâ, « les
Le rapprochement entre ce nom palmyrénien typique, archers » 77 qui offrent une statue à Iarhibôl. La présence
la date relativement haute et la mise en parallèle des tyclwi d'archers, appartenant à une tribu bien connue à Palmyre,
des deux cités montre bien que les liens ne sont pas seulement est intéressante : elle les montre, en tant que corps constitué,
culturels, mais que certains habitants manifestent un double dédier une stèle à un dieu lui aussi typiquement palmyrénien.
attachement à l'une et l'autre ville. Le notable qu'était sans Cette présence d'un corps d'archers est confirmée par un
doute cet Haîran, puisqu'il a contribué au renouveau du texte du Mithraeum 78 de 168 apr. J.-C., donc cette fois, à
sanctuaire, semble avoir eu des intérêts des deux côtés de la l'époque de la présence romaine, qui mentionne un stratège
frontière. Il faut faire état sur ce point d'une théorie ayant autorité sur ces« archers qui (sont) dans Doura» (qst'
séduisante de M. Gawlikowski 7-+' qui verrait dans cet Haîran, dy bdwr') 79• Cette fonction de stratège, commandant ce
fils de Malikü, fils de Nasôr, un ancêtre des princes de qu'on appelle parfois des « troupes irrégulières», pose le
Palmyre, d'Odainat et de sa famille. En effet, dans le texte même problème que les autres mentions du terme à
du linteau du tombeau familial à Palmyre 75, Septimius Palmyre 811 (voir § C). On a du mal à savoir si ces officiers
Odainat s'appelle Lrn1{�L1oç '08a{va0oç A1pavou palrnyréniens font partie de l'armée romaine ou d'une milice
Oua�aÀÀa0ou 1où Nacrmpou (en araméen 'dynt br byrn proprement palmyrénienne. La théorie habituelle est que ces
68 - Dans le temple de Bel, on trouve les noms de Iarhibôl (F. CUMONT, 74 - M. GAWL!KOWSKI, 1969a, p. 107-109 et 1985, p. 260.
1926, texte n" 12) et Arsû, et on identifie sur une peinture la triade de Bel 75 - C/S 4202 = /11\1 Vlll, 55.
(Bel. larhibôl et Aglibôl), accompagnée cr Arsû et peut-être d'une déesse 76 - E. WILL 1992, p. 92. qui conclut que « clans l'état actuel de nos
( F. CLIMONT, 1926. fresque XVII). Dans ce! ui de Zeus Mégistos ( peut-être connaissances. une preuve décisive fait défaut». prudence qu·on ne peut
Baalshamîn), on reconnaît encore Iarhibôl, Arsû (R. F RYE et ulii, 1955, n" 5 que partager.
= R. DL MESi\IL DU Bu1ssoN, 1939. n" -1-7) et sans Joute Azîzü. CL 77 - Pre/. Rep. Vll/Vlll, n' 909 (= R. Du MESNIL ou Bu1ssuN, 1939, n' 33).
C. B. WELLES, 1970, p. 62-63, sur les dieux palmyrénien à Doura-Europos. Sur cette tribu, DFD. p. 62-63 et 72-75. K. D1.1KSTRA, 1995. p. 95-98 sur le
69 - R. F RYE et ulii, 1955, n" 5. rôle des Bené Mîtfi clans le développement de Palmyre. Comme l'a vu
70 - Pour le temple de Bel, par exemple, F. CurvroNT, 1926, textes n'" 1 ou 24. F. MILLAR, 1993. p. 115, une attestation des archers n'implique pas forcément
71 - Pre/. Rep. VII/Vlll, p. 218-283; E. WILL, 1992, p. 91-92. une présence militaire régulière avant la période cl'occupation romaine.
72 - Pre/. Rep. VII/VIII, n" 901(0EQ) Iëpa�Àco). 78 - Pre/. Rep. VII/VIII, n" 845(= R. Du MESNIL DU BUISSON, 1939, n" 19 et
73 - Pre/. Rep. VII/VIII, n'" 902 et 903 : A1pav17ç MaÀtXOU; n'" 907 p. 41-42).
et 908 : byrn br mlkw br n.5wr ; ces différents textes sont autour des reliefs 79 - Mais il n·est pas sûr que les archers du texte de 168 appartiennent
dont il est question plus bas(= R. Du MESNIL DU BUISSON, 1939, n'" 28-32). aussi aux Bené Mîtfi.
Voir encore cl'autres noms de même origine, Pre/. Rep. VII/VIII, n'" 910- 80 - Par exemple, lnv X, 44. Cf. sur cette fonction, M. SARTRE, 1996a.
913 (et R. Du MESNIL DU BUISSON, 1939, n'" 34, 38-46). p. 391-392(citant H. lNGHOLT, 1976, p. 123-127).
Chapitre Ill: Les octil'ités des notables 109
archers sont peut-être à l'origine de l'unité régulière de reste de l'Empire. En effet, les Palmyréniens sont rares à
l'armée romaine, stationnée à Doura-Europos depuis au des postes de commandement dans l'armée romaine. En tout
moins 208, la Cohors XX Palrnyrenorum 81• Avant cette état de cause, le problème des relations entre Doura-Europos
transformation, on a une troisième mention de ces archers, et Palmyre reste posé, et il est à espérer que la découverte de
avec, encore au Mithraeum, un certain Zénobios, appelé aussi documents nouveaux dans l'une ou l'autre des villes
Iahibâ, fils de Iarhibôlâ 82, qui, en 170-171, est stratège des permettra d'éclaircir encore le problème. Mais comme le
archers. Comme son prédécesseur Etpenî de 168 83, il semble prouve le petit relief découvert en 1993 dans le « sanctuaire »
bien qu'on ait affaire, avec eux, à des officiers supérieurs de la rue principale de Dourn (fig. 29), des découvertes sont
palmyréniens chargés de contrôler pour le compte de Palmyre encore possibles ; d'autre part le caractère étrange du
(et de Rome) la région, quel que soit leur statut exact. Le monument permet de clouter de son caractère strictement
fait que la version grecque (abrégée) du texte soit rédigée palmyrénien 87• Son aspect rustique le rapproche sans doute
en une langue hésitante : Eecpcxva 1crrnpi:17ycx (sic), laisse plus des reliefs découverts en Palmyrène 88• On peut se
penser qu'il n'appartient pas à l'aristocratie la plus haute de demander si, par certains côtés, Doura-Europos n'est pas
Palmyre (ni de Doura-Europos d'ailleurs). Si le second mot une « province » de Palmyre, dont elle se différencie par un
signifie bien qu'il s'agit d'un stratège (et on ne voit pas bien certain nombre de points, la présence massive grecque puis
ce que cela pourrait être d'autre), il s'agit sûrement d'une parthe n'étant pas les moindres.
rétroversion maladroite à partir de la transcription
palmyrénienne du terme grec ('strtg' tiré de cri:pm1iyôç). Alors qu'on pouvait considérer que géographiquement
Cette absence de culture grecque chez un personnage appelé Doura-Europos faisait partie de la zone d'influence directe
à traiter avec des militaires romains relativement souvent de Palmyre, les villes dont on a parlé plus haut (Charax,
peut sembler étonnante, mais n'est après tout qu'une faible Vologésias surtout) sont au dehors de celle-ci. Il est
preuve de l'éventuelle origine modeste du personnage. intéressant de montrer comment ces villes sont pourtant
L'unité, avec des chefs portant de tels noms, semble donc d'une certaine manière dans l'orbite de Palmyre. Pour cela,
entièrement palmyrénienne, ce qui ne sera pas tout à fait le le contre-exemple de Doura, proche géographiquement mais
cas de la Cohors XX Palmyrenorum. Cette dernière, sur dont les relations mutuelles avec Palmyre sont assez
laquelle on a une importante documentation (plus en fait obscures, sera utile. Les notables dont on a parlé dans le
que sur la plupart des autres unités de l'armée romaine), point précédent, sont certes souvent résidents dans des villes
n'est plus commandée par des officiers d'origine étrangères, mais conservent leur influence à Palmyre, où les
palmyrénienne. La liste des tribuns, officiers commandant dédicaces, les statues, sont faites (au moins en partie). Or à
l'unité x-1 montre qu'ils portent tous des noms latins (ou Doura, à part le relief des Fortunes, il y a un seul texte où
parfois grecs). Il en va de même pour les centurions 85 où les quelqu'un se dit palmyrénien, et encore en 228, donc à
quelques Malchus ou Mocimus (ou même Heliodorus ou l'époque de la présence militaire romaine 89• Bien sûr le mot
Marinus) sont noyés au milieu des noms latins. Certes un lui-même existe, dans le nom de la principale unité militaire
nom latin n'est pas une preuve de leur origine, mais il y a de en garnison, mais c'est bien différent du cas d'un simple
fortes présomptions, si on compare ces noms avec citoyen. Il faut donc essayer a contrario de comprendre
l'onomastique contemporaine à Palmyre, que ces officiers comment s'exerçait l'influence des grands notables
n'en soient pas originaires.L'étude de la liste des décurions palmyréniens dans les zones où ils étaient particulièrement
donnerait le même genre de résultats 86• présents. On peut reprendre le cas du fameux Soados, qui
Même si c'est plutôt l'inverse pour les hommes du rang, justement réside au moins une partie du temps à l'étranger,
il n'en reste pas moins qu'alors qu'on avait peut-être des mais dont l'influence à Palmyre semble incontestable, ou
notables de Palmyre à la tête de l'unité militaire stationnée bien celui de M. Ulpius Iarhaî. C'est sur ce dernier
à Doura, on retrouve maintenant ce qui est la règle dans le personnage que le plus grand nombre de textes renseigne 90•
81 - Sur cette unité, C. B. WELLES et alii, 1959, p. 22-46 et les textes 85 - Ibid., p. 29.
n'" 54-l 50. Sur le nom de l'unité, dernièrement. D. L. KENNEDY, 1983, 86 - Ibid., p. 30.
p. 214-216. Un élément parle en faveur de la continuité entre les cieux unités. 87 - E. Will clans A. BouNNI, 1994, p. 17.
L'inscription de 168 (Pre!. Rep. VII/VIII, n" 845) a été découverte clans le 88 - D. Schlumberger clans PNO. E. Will (note précédente) le rapproche
,nithraeum. et se trouve sous un relief de Mithra taurochtone. On sait la du relief mithriaque de Zénobios, cité plus haut (Pre!. Rep. VII/VIII, p. 95,
popularité de ce culte clans l'armée romaine. On peut voir ce texte, de peu pl. VI).
postérieur à l'annexion de Dourn à l'Empire, comme une preuve de loyauté 89 - Pre!. Rep. I. p. 19 et 62 sq. (=R. Du MESNIL DU BUISSON, 1939. n" 12).
de la part des archers. Et encore est-il bien probable que ce 'loÛÀlüç Aùp17À1oç McxÀCDXCY.ç
82 - Pre!. Rep. VU/VIII, n" 846 (= DFD, p. 336-337): Z17vo�wç 6 KCÙ 2:ouomou soit lui aussi un soldat.
Elcxa �cxç Icxp1�wÀrnuç I mpm17Yoç wl;océôv. 90 - CIS 3928, lm' X, 77, 78, 87-88 (= C/S 3960). 89 (= CIS 3961), 90, 96.
83 - Celui du texte Pre!. Rep. VII/VIII, n" 845 (= R. Du MESNIL DU BurssoN, 107, 111, et J. CANT!NEAU, 1938, p. 75-76, n" 28c (J. T. Milik ajoute à la
1939, n" 19 et p. 41-42). liste /111' X, 95 et 91 = DFD p. 32). Sur ce personnage et sa famille, voir
84 - C. B. WELLES et a!ii, 1959, p. 28. entre autres. J.-B. YoN, 1998.
110 Les notables de Palmyre
Dans cette tentative de caractériser plus précisément les haute (douze ans avant la suivante qui est de 144), avant le
notables dont les relations sont transfrontalières, un effort moment où l'influence de Soaclos est à son sommet.
particulier doit porter sur la manière dont ces gens ont formé Le fait que les membres d'une caravane puissent dédier
leurs réseaux de relations hors de Palmyre (ce qui est difficile des statues clans chacun des sanctuaires particuliers des
faute de documentation). On s'intéressera aussi à la manière quatre tribus constitutives de la cité peut être le signe que
dont on fait état de ce pouvoir et de cette influence clans les cette caravane est une sorte de représentation en miniature
textes qu'on a conservés. Dans ce but, une comparaison entre de la cité, avec, pourquoi pas, des membres de chacune des
les textes consacrés aux deux personnages cités ci-dessus tribus. La caravane (une seule par an ?) représente l'ensemble
peut être un bon moyen. de la cité, dont elle signale la richesse. À l'appui de cette
Le premier, Soaclos, exerce son activité entre 132 et interprétation, il faut noter le souci présent clans le texte de
145-146 apr. J.-C. Il a sans cloute résidé une partie de cette mettre en valeur le patriotisme du personnage. Certes des
période en Mésopotamie, à Vologésias en particulier, où était termes comme <j)1ÀorraîpK font partie du vocabulaire courant
sans cloute sa« dynasteia ». On a sur lui moins de documents de ce genre de texte 97• Mais ce thème est répété tout au long
que sur M. Ulpius Iarhaî, mais certains d'entre eux ont des premières lignes du texte; l'énumération des gens qu'il
l'intérêt d'être très détaillés 91• C'est en partie grâce à eux a assistés avec noblesse et générosité est une liste de
que D. Schlumberger a pu établir le fonctionnement des différentes catégories de citoyens de Palmyre : les
quatre tribus de Palmyre qui regroupaient la totalité du corps marchands, les caravanes, tous sans aucun cloute
civique 92 et qu'on a pu identifier les quatre sanctuaires palmyréniens, comme le sont aussi ces gens qui résident à
correspondant aux quatre tribus. Trois textes de Palmyre Vologésias. C'est encore pour les intérêts de la patrie, qui
mentionnent explicitement ces quatre tribus 93, qui honorent est la sienne, qu'il n'a pas ménagé sa personne et sa fortune.
un notable chacune clans son sanctuaire ( cette dernière Le texte fait par les membres de la caravane se place
précision est absente clans Jnv X, 44). Aucun de ces textes, d'emblée sur le plan de l'intérêt général de la cité; il existe
certes, ne parle de Soaclos, mais les trois longs textes qui lui de plus une forte ressemblance avec l'inscription de Umm
sont dédiés mentionnent tous l'érection de quatre statues, el-Amacl, de plusieurs années postérieure. Les cinq premières
soit clans le tétrodéion de la cité 0 soit clans quatre sanctuaires
-1, lignes de BS n" 45 ont cl'ailleurs été restaurées cl' après ce
de la ville 95• Or, bien que, selon toute apparence, ce soit au texte, dont le début est identique 98• Des statues lui avaient
nom des tribus que les honneurs sont rendus, on ne connaît déjà été faites par le Peuple (àv8pléicn 81wocr1.mç) en vertu
pas le nom de la tribu à laquelle appartenait Soaclos, ce qui de décisions et de décrets publics, et la décision de la
correspond à la disparition progressive des mentions tribales caravane vient s'inscrire clans une sorte de tradition.
au cours du temps')(,_ Le personnage lui-même suit déjà un modèle familial.
On peut faire une comparaison avec les honneurs rendus Il n'est en effet pas tout à fait inconnu puisque sa famille est
à M. Ulpius Iarhaî. Pour celui-ci, on n'a aucune trace connue par au moins deux textes. Le premier est un texte
d'honneurs de cette nature. Certes les textes sont en moyenne araméen du temple de Bel, publié depuis longtemps 99• Un
de dix ou vingt ans postérieurs, mais les honneurs rendus symposiarque des prêtres de Bel est honoré par le Conseil et
par les quatre tribus sont attestés bien après le dernier texte le dieu Iarhibôl lui rend témoignage. Le texte est daté cl'avri1
qui le nomme. Ils n'ont clone pas disparu avec lui. C'est la 117 100• Son nom est Zebîclâ, fils de Soaclos, fils de
cité clans son ensemble, représentée soit par le Conseil et le Taîmishamsh. On retrouve des noms familiers et son
Peuple, soit par une caravane de tous les Palmyréniens qui identification avec un oncle de notre Soaclos est tout à fait
décerne à Soaclos des honneurs exceptionnels, et c'est ce vraisemblable 101• Il faut constater que la famille est bien
qui fait la différence majeure clans deux des textes. Comme ancrée clans la ville même, où elle remplit une des fonctions
on le voit, l'inscription du sanctuaire de Baalshamîn fait les plus prestigieuses, et ce, une vingtaine cl'années avant
exception, car, on l'a rappelé plus haut, elle est le fait cl'une son membre le plus connu. La famille a aussi cl'autres liens
caravane particulière et non des autorités de la cité. Cette avec les caravanes, puisque si Soaclos n'est pas synocliarque,
différence est peut-être explicable par la date relativement un texte atteste ce métier en 161, pour son frère 1112, qui
91 - Textes détaillés : BS n" 45. R. MouTERDE et A. PomEBARD. 1931, 95 - BS n" 45 et H..l.W. DRI.IVERs. l 995a. restitué c1· après BS n" 45. Voir
p. 101-115 (et DFD p.13 pour l'araméen); H. J.W.DRI.IVERs. 1995a. chapitre II sur ces quatre sanctuaires.
p.34-37 : autres mentions du personnage : M. G.l\WLIKOWSKI, 1970a, n" 1 et 96 - D.SCHLLIMBERGER. 1971, p. [ 26. n. 1.
lm• X, 56. 97 - Par exemple. CIS 3914 ou 3930.Voir le chapitre 1.
92 - D. SCl·ILUMBERGER, 1971 ; M. SARTRE, ] 996a, p.386-387. 98 - À l" exception bien sùr de la mention 17 �OUÀT) KCÙ 6 817µoç.
93 - D. SCIILUMBERGER, 1971, p. 124 : texte J. CANTINEAU. 1936. p. 278, n" 20, 99 - CIS 3919 (= lm• IX. 19).
qui précise bien CY.l ÔÈ î[17]ç n:[o]ÀE[co]ç îÉcî<JO'.pEç �ï.JÀO'.l (171 apr. J.-C.) : 100 -.1.Cantineau (ad /oc. lm•IX. 19) trouvait !"écriture un peu récente
DFD p. 36 ( 198 apr.J.-C.): lm· X, 44 (199 apr. J.-C.). pour cette date.Une regravure au moment ou après l"apogée de Soaclos est
94 - R. MouTERDE et A. PoIDEBARD, l 931. Le parallélisme entre lnl' X, 44 possible pour expliquer ce fait.
provenant de l'agora et le texte de Umm el-Arnac! a conduit D. Schlurnberger 101 - DFD. p. 228-229.
(1971, p. 125) à identifier l'agora au tétrctdéion. 102 - lm• X, 29.
Chapitre III: Les actii'ités des notctb!es 111
accompagne une caravane depuis Charax. Mais cette fois, d'une famille ancrée clans ce milieu commerçant. Son fils,
1
la grande période de Soados est terminée. C'est peut-être un Abgar, est attesté en 159 soit en plein milieu de la période
(1(',
premier signe de déclin de la famille qui n'apparaît plus la plus florissante de la famille. Il porte le même nom que
ensuite. Ce texte, où un d'Antioche est son oncle de Marcus Iarhaî; lm' 81 de 135
peut être le signe de liens avec cette mais est, plus apr. et que son arrière grand-père 1117• le texte
probablement, à mettre en rapport avec la fonction de Inv X, 73, très fragmentaire et non daté, semble mentionner
publicain du personnage. soit un petit-fils de Iarhaî, soit plutôt son père (A1pav17ç
L'impression d'ubiquité que donne Soaclos est frappante. A�yapou). De cette succession de noms, on peut tirer au
Palmyrénien de premier plan, il est le seul de cette classe moins deux conclusions. D'abord que Iarhaî, qui ne porte
qu'on retrouve clans plusieurs des villes avec sa
l\..n.lLILlvllLnO pas le nom de son grand-père, n'est sans cloute pas 1' aîné.
ville commerce. Les autres personnages connus résident en C'est peut-être seulement après la disparition de son frère,
Mésène ou à Doura-Europos (comme on l'a vu), ou à attesté comme conducteur de caravane quelques années plus
Palmyre et se déplacent avec leurs caravanes comme tôt et qui porte ce nom cl'Abgar, qu'il a pu prendre la tête de
synodiarques. Dans le cas particulier de Soados, on parle de la famille. Ensuite, son fils Abgar n'a pas lui non plus le
lui à plusieurs endroits (Palmyre, Gennae, Vologésias et nom de son grand-père, signe qu'il est possible que, lui non
Charax), comme s'il était en quelque sorte itinérant. La liste plus, ne soit pas l'aîné. Il est en effet honoré vingt-quatre
de ces lieux permet de dresser une géographie de son ans après son oncle; son âge permet aussi de supposer qu'il
influence, et celle-ci semble recouvrir la zone couverte par porte ce nom en signe d'hommage à un membre disparu de
l'activité commerciale palmyrénienne au milieu du 1( siècle. la famille.
Le tableau est différent quand on passe à M. Ulpius Le resserrement chronologique des inscriptions en
Iarhaî. Il ne reçoit qu'une statue à chaque fois, dédicacée l'honneur de Iarhaî est remarquable. Alors que les trois textes
soit par une caravane ou ses synodiarques, soit par des principaux de Soados sont séparés de plus de dix ans, c'est
marchands. À la différence de Soados 1113, il a été lui-même en quatre ans que se déroule la carrière de Iarhaî, telle, du
chef de caravane ( et son frère aussi). Certes, il réside peut moins, qu'on peut la reconstituer cl'après les textes qui sont
être à Charax, d'où il aiderait de si nombreux marchands, conservés. L'année 157 apr. J.-C. se distingue, puisque sur
mais ce qu'on sait des trajets caravaniers et des manières les onze ou douze textes connus, cinq (ou six 1°K) sont datés
dont un grand marchand peut aider une caravane n'implique de cette année. Comme le remarque G. W. Bowersock dans
pas fortement sa présence permanente à cet endroit. Seul un son article sur la Mésène antonine, « on a l'impression que
texte llH mentionne qu'il a aidé un certain Hadclûclan, fils de Yarhai était un bienfaiteur exceptionnel clans une époque
Hadclûclan Firmôn (bdwdn br bdwdn prmwn) à Charax. Il exceptionnelle, dangereuse même » 109•
fallait clone bien qu'il y soit. Lui seul est remercié dans les Les textes de l'année 157 ont 1' intérêt de présenter un
deux seuls textes 105 qui renseignent sur le commerce éventail assez large. Les deux premiers (lnv 77 et 78)
maritime de Palmyre avec la Scythie (Inde du nord-ouest). sont des textes honorifiques simples, non caravaniers, où
C'est une preuve supplémentaire de son influence clans le Iarhaî est appelé évergète et ami. Les trois suivants sont
sud de la Mésopotamie, d'où vraisemblablement caravaniers mais concernent trois genres différents de
appareillaient les bateaux vers l'Orient. Pourtant il y a une commerce. lnv X, 87-88 est le fait de marchands qui
différence d'échelle avec Soados, pour la variété des lieux remontent de Choumana (o't àva�âv[1Ek [àrr]ô [X]ou[�La]vwv
géographiques ou pour le niveau des honneurs reçus. On Ëvrropm ... ), clone apparemment pas une caravane, mais des
peut cl'ailleurs considérer que cette diversité géographique marchands indépendants de retour cl'expédition 110• Inv X,
est une des explications des honneurs exceptionnels rendus 90 est le plus classique, une dédicace faite par Iaclclaî, fils de
à Soaclos. Zabdilah, pour le compte d'une caravane remontée de
On a vu qu'un certain nombre de textes mentionnaient Spasinou Charax. Les raisons invoquées sont très courtes
des membres de la famille de Iarhaî et qu'il faisait partie ici encore (1n�u1ç xcxptv et 1yqrh), mais on peut imaginer
103 - Pour autant qu'un texte nouveau ne vienne pas modifier ce qu'on 107 - lnl' X. l 07 où la généalogie de son père (notre Iarhaî) s'établit ainsi :
i
connaît de la biographie de ce personnage. M. Ulpius Iarhaî. f ls de Haîran. fils de Abgar.
104 - J. CANTINEAU, 1938. p. 75 n" 28c. 108 - Six. si on prend en compte le texte restitué par J. T. Milik, DFD,
105 - Ill\' X, 96; DFD. p. 32 (si on accepte la restitution de J. T. Milik à p. 32. Notons quand même que le texte ln\' X. 78 est daté de 157 clans notre
partir de J. CANTINEAU. 1933, p. 187 n" 10 et Ill\' X. 91 et 95 ). J. T. Milik calendrier. mais cle l'année séleucide 469. Les autres textes sont tous datés
rattache les deux textes. et donc les deux bateaux. au même voyage ( « sans de l'année séleucide précédente.
aucun doute». DFD, p. 32). On voit mal sur quoi il se fonde pour affirmer 109 - G. W. BowERSOCK, 1989b. p. 167. Voir les remarques cle K. DuKSTRA,
que ce voyage de Scythie n'a pu avoir lieu qu'une fois. Il restitue clone la 1995. p. 87-88, qui établit un lien entre le grand nombre d'inscriptions à
date de son texte d'après /Ill' X, 96. M. Gawlikowski ( 1994. p. 33, n" 24) certaines périodes et des dangers accrus.
accepte la restitution, mais met en cloute et la date et le personnage honoré. 110 - Le texte palmyrénien est légèrement différent.
106 - lnl' X. 107.
112 Les notables de Palmyre
que, comme pour les autres, cela signifie qu'«il les a aidés de dangers pour ceux qui ont à le traverser, pour comprendre
en toutes choses». Enfin le dernier (lnv X, 96, mais c'est le comment les grands caravaniers ont cherché à 1'apprivoiser.
même cas dans DFD, p. 32), on l'a vu un peu plus haut, est
une dédicace de marchands de retour d'un voyage maritime
C. LA POLICE DU DÉSERT
depuis la Scythie.C'est aussi le texte le plus développé, non
qu'il donne des détails sur la navigation, mais parce que, à Tous les notables connus par les inscriptions caravanières
la différence des deux textes précédents, les termes employés, sont remerciés souvent de manière bien vague pour avoir
quoique classiques ([m:xcnJ rcpol0WllQ'. �01181icravm ŒtYmÎç été utiles aux marchands ou aux caravanes. Qu'ils soient
Ka't cruvÀa�Ô�LEvov «les ayant secourus et assistés avec grands caravaniers ou guides accompagnant réellement les
beaucoup d'empressement»), semblent indiquer qu'il ne marchands, le vocabulaire est assez peu original : les mêmes
s'agit pas de simples remerciements de pure forme, mais termes reviennent, comme 1:a�nîç Ka't i::ùxap1cr1:i::1aç Ëvi::1Œv
que ces marchands ont réellement eu besoin de l'aide de (« en témoignage d'honneur et de reconnaissance » ;
Iarhaî. La carrière de Iarhaî est clone courte (tous les textes CIS 3916). De rares textes entrent parfois clans les détails et
datés sont compris entre 155 et 159), et on ne peut la renseignent sur ce que signifiait réellement « être utile» à
prolonger par celle de son fils, attesté seulement en 159, en une caravane. Plus rares encore sont les personnages qui
même temps que son _père. comme Soados, fils cle Bôlîaclâ 112, ont droit à des inscriptions
Incidemment, le fait que plusieurs textes sont datés de très développées, où leurs mérites sont e xposés avec
cette même année 157 pourrait laisser penser à l'existence précision. Détail révélateur, dans le texte BS n" 45, les mots
cle plusieurs expéditions par an. Pourtant une seule caravane mêmes de la formule avec xcxp1v ou ËvEKEV («en raison de»)
est attestée pour cette année (lnv X, 90) ; les autres textes sont moins convenus que d'habitude. On trouve en effet une
parlent de marchands ou de navires, non de caravanes formule plus variée : [àpi::1:hîç Ka't �Li::yaÀotpocruv11ç lim't
(cruvofüa ou syrt'). Dans l'état actuel de la documentation, EÙCTE�EÎaç Ëvo:la («en témoignage de sa valeur, de sa
on peut émettre l'hypothèse qu'une seule caravane, pouvant noblesse et de sa piété»). Par rapport aux textes habituels,
utiliser officiellement ce nom, avait lieu chaque année 111• Si le vocabulaire est plutôt varié et original 111•
cette interprétation est juste, cela ne peut que renforcer tout Pourtant, à y regarder de près, on ne peut qu'être déçu
ce qu'on a dit sur le pouvoir des grands notables. Certes par ce que le texte révèle. On apprend certes que la caravane
d'autres expéditions, moins importantes, ont lieu, parfois a été sauvée cl' un grand danger par notre homme
sous leur protection, mais ils sont surtout chargés de la ( ÔlCXCTWCTCXVîCX îllV CTDVOÔlCXV ÈK 1:01) TCEplCTîCXV'îOÇ �lEyCXÀOD
défense et de la sauvegarde des intérêts cle l'expédition Ktvôuvou aux lignes 12-15). On aurait pourtant aimé savoir
commerciale principale, vitale pour la vie de la cité. Les quel a été ce danger, sur lequel seules des conjectures sont
quatorze textes comportant le mot cruvofüa ne permettent possibles. Certes, les possibilités ne sont pas infinies, et
pas de situer le moment précis cle l'année (s'il y en avait un) l'aventure des marchands anglais qui sur la route de Palmyre
où avait lieu cette caravane. Le mois de 11Îsa11 (avril) est en 1678 furent repoussés par les Bédouins n'est qu'un
certes le plus fréquent, mais il n'apparaît que trois fois, ce exemple parmi cl'autres des dangers que peuvent faire courir
qui n'est pas suffisant pour en tirer une règle. Notre ignorance ces habitants du désert. Car, dans les textes, il s'agit
de la manière dont se faisaient ces remerciements empêche probablement de ce genre d'incidents, plutôt que cle
de toute façon de conclure de manière définitive. On voit difficultés liées aux conditions climatiques parfois
que les dédicaces ne se faisaient pas apparemment à un redoutables de la région, mais contre lesquelles on voit mal
moment précis de l'année, et rien ne renseigne sur les quel rôle Soaclos aurait pu jouer malgré toute sa bonne
éventuels délais entre le retour heureux d'une caravane et le volonté.
texte qui en résulte. Jusqu'au x1x" siècle au moins, le contrôle des Bédouins
Quels que soient leurs rapports avec les caravanes et le et donc des routes du désert a été un des enjeux principaux
commerce caravanier, le fait est qu'on retrouve des clans ces régions désertiques. À vrai dire, certains textes sont
Palmyréniens à des positions importantes clans une partie même assez explicites, comme Jnv X, 44 qui, dans son éloge
de l'Orient mésopotamien (de Doura-Europos au Golfe et du personnage honoré, commence par dire quïl a été
au-delà). Pour la plupart, ils sont liés à des caravanes, comme plusieurs fois stratège contre les nomades, avant de le féliciter
le montrent les dédicaces qui renseignent sur eux. Il reste cl'avoir toujours assuré la sécurité des marchands et des
maintenant à étudier la zone comprise entre Palmyre et la caravanes. La succession des deux phrases n'est sans doute
Mésopotamie, le désert, qui est souvent associé à des idées pas fortuite, et on peut assurément introduire un lien de cause
111 Même conclusion clans J. T1:1x1DoR. 1984. p. 16. où on trouvera or Soaclos a droit ù au moins trois textes de cette taille (BS n" 45, Umm el
quelques points de comparaisons plus tardifs (vil' et v111' siècles. avec Amad. et H . .1. W. DRI.IVERS, 1995a).
références à H. LAMMENS. « La Mecque à la veille de !'Hégire». MUS.! 9. 113 - Même si ce vocabulaire peut sembler parfaitement convenu quand
1924. p. 99-439). on le compare avec celui des décrets contemporains dans le reste de
112 - Les textes honorifiques de plus de vingt lignes sont rares ù Palmyre; l'Empire.
Chapitre III: Les actii•ités des notables 113
à effet entre les deux propositions. Mais ce lien n'est que plus courte. .:.'.�'::"�:",;",:'.-�1
c·, suivant
suggéré, ces belles actions ne sont que des étapes dans l'Euphrate de plus ou moins puis vers Antioche, à
1'énumération des qualités de cet ancien synodiarque. l'endroit où le cours du fleuve est le plus proche de la
à ma connaissance, la seule occasion où cette fonction de Méditerranée (Zeugma), constitue le trajet habituel. C'est
« stratège » est mise en relation avec le commerce caravanier cl'ailleurs la route que Strabon décrit (Géographie 1,
(et la seule attestation d'un« stratège contre les nomades » ). 27) pour la fin du (1 siècle av. J.-C. et celle qui, avec des
L'intitulé même de la fonction est significatif (Ka·nx 1cov variantes (mais toujours avec le souci cl' éviter une traversée
vo�Lâ8cov 11-+), mais rend plus aiguë la question qui se pose trop longue du désert), a cours après la chute de Palmyre, à
alors. Pourquoi, alors que ce danger semble être la fin du III" siècle.
officiellement pris en compte, est-il si rarement mentionné Or on a un certain nombre de textes provenant du désert
dans les textes ? qui entoure Palmyre. Ils sont une source de renseignements
Un seul texte donne quelques détails sur la manière dont sur 1a surveillance que des troupes palmyréniennes
un grand notable sauve une caravane. C'est le texte du effectuaient dans le désert. Palmyre, après son intégration
sanctuaire d'Allât 115, qui rappelle l'attaque d'une caravane clans l'Empire romain, assure la police du désert sur une
par un certain Abdallat Abitaya, chef de brigands. Il date de surface étendue. On a retrouvé les bornes de la Palmyrène
144 et trouve sa place entre les deux autres grands textes en vers l'ouest (à Khirbet Bi1aas, voir 2) ; ces inscriptions
l'honneur de Soados. L a grande originalité du texte est de mentionnent la restauration sous Hadrien de bornes,
donner des noms tout en décrivant ce que Soados a fait contre datent de l'époque de Creticus Silanus, gouverneur de
ces bandits (rcpocopµ1702v rcapaÀâ�cov �LE8' Éamoù rcoÀÀ11v entre 11/12 et 16/17 117• Un autre légat, M. Ulpius Trajan, le
8uva�Llv « il avança en prenant avec lui une force père de l'empereur Trajan, en 75, borne la route qui
importante »).Mais cette inscription est bien seule dans son conduisait de Palmyre à l'Euphrate (Soura) vers le Nord 118•
genre, et peut-être ne peut-on extrapoler à partir de ce seul Palmyre est clone dès cette époque au cœur du dispositif
cas ; de plus, les situations devaient être différentes pour défensif romain. Ce dispositif est dirigé bien sûr contre les
toutes les caravanes. En tenant compte de ces différences Parthes, l'ennemi presque héréditaire de l'Empire clans la
éventuelles, mais aussi des textes où des militaires (soldats région, mais, sauf à de rares périodes, ce danger parthe n'est
romains ou stratèges palmyréniens) sont remerciés, on peut pas très pressant, et on peut croire que le souci principal de
essayer de voir comment les notables de Palmyre assuraient Rome dans le contrôle de Palmyre était en fait la mainmise
(ou participaient à) la sécurité des marchands et des caravanes sur le commerce caravanier. Ce dernier d'ailleurs semble
qui reliaient le sud de la Mésopotamie et leur ville. Il faut profiter de 1a présence romaine, puisque c'est bien à ce
essayer de comprendre ce que le vocabulaire étonnamment moment qu'il connaît son développement le plus important.
peu varié des remerciements 116 peut dissimuler comme jeux L'abaissement définitif du commerce nabatéen y contribua
de relations, interventions armées. L'hypothèse de départ est aussi. L a stabilisation de la situation clans la région au nord
que ces honneurs ne sont pas simplement de pure forme et de Palmyre et la présence de soldats romains clans le désert
que derrière eux se dessine une activité réelle des notables a sans doute aussi permis de donner aux marchands des
(avec des rivalités internes ?) pour le contrôle des routes conditions favorables au commerce.
commerciales du désert. Pourtant, si on est renseigné sur la présence de soldats
Même si la question est loin d'être réglée précisément, romains à Palmyre au moins temporairement dès 19
on sait depuis longtemps que les Palmyréniens possédaient apr. J.-C. 119 et si la présence en 58 du publicain L. Spedius
des troupes qui leur permettaient de surveiller et de contrôler Chrysanthos 120 peut difficilement se concevoir sans
le désert. Seule la sécurité du désert et la résolution des l'existence aussi cl 'au moins une petite garnison romaine
problèmes de logistique pouvaient faire préférer la route du sur le site, leur intervention active pour la défense des
114 - Le titre cn;pcx1:17yoç Kcx1:à 1:mv vo�tcx8wv n'est pas attesté ailleurs. pourquoi seuls les textes pour Soados ont été transmis sous cette forme
On connaît seulement des exemples de cnpcx1:1woç VO�L(Xôü)V dans le longue. Certes, peut-être ces raisons sont-elles prosaïques et tiennent-elles
Hawrân, en particulier le texte W ADDINGTON 2196 : voir M. SARTRE, 1982b, seulement à une volonté particulière du personnage honoré ou de celui
p. 122-126 et M. MACDONALD, 1993, p. 368-377 avec des vues sensiblement chargé de l'érection des statues et des inscriptions. Il faudrait alors faire
différentes. Pour M. Sartre, le terme désigne un« chef de troupes auxiliaires attention de ne pas trop tirer les textes. Mais le contraste est trop fort entre
recrutées chez les nomades » et ce rôle est en fait rempli par les chefs de Soados et ceux qui sont presque ses contemporains M. Ulpius Iarhaî ou
tribus ou de clans, appelés ethnarques (p. 124). M. Macdonald préfère voir Neshâ. fils de Halâ ( CIS 3916 et ln l' X, 124) pour qu'on ne soit pas tenté cle
clans le titre de « stratège des nomades» une fonction purement militaire chercher par là des renseignements sur Je rôle de ces notables clans la sécurité
qui n'a rien à voir avec les chefs de tribus, ethnarques ou autres (p. 375 en du commerce et plus généralement sur la manière dont s'exerçait leur
particulier). Quoi qu'il en soit, la fonction attestée à Palmyre est une stratégie influence.
« contre les nomades» ce qui signifie tout à fait autre chose. 117 - Voir annexe XIV ; D. ScHLUMBERGER. 1939a, p. 43-73.
115 - H. J. W. DRIJVERS, 1995a. 118 - H. SEYRIG, 1932, p. 276 (AE 1933, 205): milliaire cl'Erek (Aracha
116 - Ces textes sont certes des résumés de décrets développés (chapitre 1), dans l'Antiquité).
mais leur concision et le vague qui les caractérisent peuvent parfois avoir 119 - fm, IX. 2.
d'autres raisons plus profondes. Il faut en tout cas essayer de comprendre 120 - ers 4235.
114 Les notables de Palmyre
caravanes a laissé peu de traces dans nos sources. Seuls deux malheureusement inconnus. De plus son unité, qui n'apparaît
textes peuvent être interprétés dans ce sens : dans le texte pas clans le texte, ne semble pas être une aile de cavalerie ou
lnv X, 81, le frère de M. Ulpius Iarhaî, Abgar et la caravane de méharistes, la transcription sémitique de son grade est
qu'il a accompagnée depuis Spasinou Charax, remercient claire, il s'agit d'un centurion ( « qt1yn' ») et non d'un préfet
(îa�n1ç xâp1v) un certain Iulius Maximus, centurion d'une ou d'un tribun. On ne peut même pas être sûr que son
légion indéterminée (celle stationnée à Palmyre selon toute intervention a été liée à sa fonction militaire en Palmyrène,
vraisemblance). Le texte est daté de 135. Une vingtaine mais on peut tout aussi bien imaginer que M. UlpiusAbgar,
d'années plus tard (entre 155 et 159), Tiberius Claudius citoyen romain, a pu faire jouer ses liens d'amitié avec un
Phi(lippus ?) est remercié par son ami, M. Ulpius larhaî 121• militaire romain pour un problème local.
Cet officier est préfet de la première aile ulpienne de Tout cela ne veut bien sûr pas dire que l'armée romaine
méharistes palmyréniens. se désintéressait des événements susceptibles de se dérouler
Il est tentant de faire de cette unité, bien adaptée aux dans le désert. Il en était de même pour les Palmyréniens
conditions locales, une unité spécialisée dans la protection dont une milice était présente clans le désert, commandée
des caravanes. On connaît de plus les rapports entretenus par un stratège. Le statut de cette unité et de son commandant
par la famille de Iarhaî avec le commerce. Avec ces textes, a été l'objet de nombreux commentaires 125• On a vu pour
un lien particulier de la famille avec l'armée romaine semble Doura-Europos qu'il s'agissait d'un corps d'archers, dont
se dessiner, et on peut aussi rappeler le texte lnv X, 99 où un au moins deux stratèges sont connus 126• On a parlé plus haut
certain M. UlpiusAbgar, commandant d'une unité d'archers cl'Aelius Bôrra qui a été plusieurs fois stratège. Cette fonction
palmyréniens se voit dresser une statue par ses fils. Rien ne est celle cl' un responsable militaire, non permanente,
prouve qu'il s'agisse d'un membre de la famille, mais le puisqu'on peut l'exercer plusieurs fois 127• Elle constitue donc
nom d'Abgar est celui d'au moins un frère et un fils de Iarhaî, une sorte de magistrature civique. On ne doit pas la confondre
et la date du texte (141) convient. Pourtant le texte lnv X, avec la stratégie, magistrature principale de la cité de Palmyre
128 ne fait aucune allusion au trafic caravanier, et s'il n'y après sa transformation en colonie au début du lll" siècle 128•
avait le nom du dédicant, il ne différerait pas d'autres textes Cette dernière magistrature, collégiale et éponyme, fait partie
où des Palmyréniens remercient des militaires romains, sans des institutions classiques d'une colonie en Italie. Le mot
préciser les raisons de leur geste 122• lui-même est la traduction en grec du terme duumviri
Cette aile de méharistes palmyréniens n'est pourtant employé en latin.
jamais citée dans un contexte de caravanes. Elle a certes son Mais l'apparition de ces stratèges de la colonie n'entraîne
utilité propre et c'est à juste titre que E. Will y voit la pas la disparition de la première acception qui subsiste. En
démonstration d' « une exploitation méthodique par Rome fait foi un texte daté de 225 et provenant de Umm el-Salabikh
des possibilités militaires locales et un contrôle du désert à (115 km à l'est de l'oasis) 129• Il mentionne un stratège,
l'aide de formations spécialisées telles que cavaliers et anonyme à cause de l'état du texte, chargé de la défense de
méharistes » 123• Mais on ne peut en faire une unité chargée Ana et Gamla, localités de !'Euphrate au sud de Doura
spécialement des caravanes 124, et un seul texte sur les quelque Europos Do_ Au moins deux autres textes provenant de
quarante attestations plus ou moins précises du commerce Palmyre (BS n" 51 et CIS 3973) font état d'une présence
établit l'existence d'un lien direct entre l'armée romaine et armée palmyrénienne à Ana ui. On a une liste de sept
la protection de marchands. Ce texte (lnv X, 81), comme stratèges (à fonction militaire), plus l'anonyme dont on vient
beaucoup cl'autres, est désespérément imprécis, et les détails de parler. Ils permettent aussi de dresser une carte de la
de l'intervention du centurion Iulius Maximus restent présence palmyrénienne clans le désert s'étendant à l'est de
121 - !nl' X, 128. Il ne reste qu'une partie de la transcription sémitique de dire avant la transformation cle Palmyre en colonie. Il fait de ce mot un
son nom: « /biys qlwdys py[...J ». équivalent d'archonte, ce qui en effet arrive parfois (I. L1�vY, 1899. p. 268),
122 - Par exemple lm· X, 1 ou 125. mais serait à Palmyre la seule attestation clu mot clans ce sens. Il est plus
123 - E. WILL. 1957, p. 267-268. cité par J. TE!XIDOR, 1984, p. 30-31. simple de faire de ce notable chargé apparemment de la pacification du
124 - Voir J. TEIXIDOR, 1984, p. 30. territoire de Palmyre un des stratèges militaires. L'autre objection de E. Will
125 - Voir dernièrement E. W111. l 992. p. 52-50 et M. S \RTRE. 1996a. contre cette hypothèse est que" leurs activités (i.e. d'Ogeîlü etAelius Bôrrü)
p. 391-392 ( avec des positions parfois différentes). se placent clans les mêmes années 1- .. ] et (qu îil n · est guère probable qu'ils
126 La qutstion tsl dt savoir s· ils· agit de troupes régulièrts rornaints ou se soient occupés concurremment des mêmes problèmes». Mais on en sait
de la« milice» dt Palmyrt. Les deux textes datant dt 169 tt dt 170-171. et trop peu sur ces deux personnages (leur âge ou leurs activités précises sont
1· occupation romaine de 165, lès cieux solutions sont possibles ( H. INGHrn:r. inconnus) et sur cette fonction de stratège (annualité ou non, étendue du
1976, p. 126, cité par M. SARTRE, 1996a, p. 402, n. 105, opte pour la pouvoir) pour être sùr qu'ils n'ont pu être en concurrence ou agir à la même
seconde). Quoi qu'il en soit. ces troupes sont selon toute probabilité à époque. De toute façon. ce qu'on sait sur les grands notables de Palmyre
l'origine de la fameuse Cohors XX Palmyrenorum, en garnison par la suite (M. Ulpius Iarhaî ou Soaclos) montre qu'ils n · ont pas toujours eu besoin de
à Doura-Europos. titres officiels pour exercer leur influence. La situation de ce point de vue
127 - Comme Aelius Bôrrâ ou Ogeîlû (DFD p. 36). n'est pas forcément très différente une cinquantaine d'années après eux.
128 - M. SARTRE, 1996a, p. 394-395 ; E. WILL, 1992, p. 55-56 différencie 129 - Texte publié par J. CANTINEAU, 1933, p. 179, n" 4.
les cas d'Ogeîlû et d' Aelius Bôrrâ et considère ce dernier comme un stratège 130 - En araméen: « 'sfrfg 'J' wgml' ».
premier magistrat de la ville, ce qui est douteux vu la date (198). c'est-à- 131 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1988, p. 165-166.
Chapitre li!: Les octfrités des notables 115
l'oasis. On a vu que le cas de Doura-Europos n'est pas tout Selon ce texte, une unité plus ou moins irrégulière dépendant
à fait assuré, il est clair néanmoins que la démarcation entre de 1' armée romaine pouvait peut-être employer ( en araméen
troupes romaines et milice de Palmyre ne pouvait être du moins) des noms de grades et de fonctions sémitiques,
toujours très nette et que la seconde devait parfois accomplir sans références directes à la hiérarchie militaire romaine.
certaines des tâches que les officiers des premières pouvaient Doura, nouvellement conquise, mais où des liens anciens
lui confier ou lui laisser. Le terme même de milice n'apparaît existaient avec Palmyre, a pu être un lieu où la présence
pas dans les textes, on a affaire à des archers à Doura, à des dans un premier temps de ce type de soldats pouvait être
132•
cavaliers à Ana préférable. La présence palrnyrénienne au sud de cette région
Les autres stratèges cités clans la documentation ont est attestée, depuis au moins la fin du !" 1 siècle, par un
vraisemblablement avec eux des troupes, soit unités ensemble de textes en araméen et en safaïtique provenant
auxiliaires plus ou moins irrégulières de 1'armée romaine, du Wadi Hauran et publiés par F. Safar en 1962 et l 964
soit troupes de«gendarmes» proprement palmyréniens. Ces (pl. 1). Un de ces textes, daté de 98, mentionne un stratège
troupes sont manifestement marginales par rapport à 1'armée anonyme rn', et un autre stratège Iarhaî est encore attesté dans
régulière, et leurs membres ne portent pas de titres et de la même région par un autre texte au milieu du siècle
1-11•
grades romains. suivant Cette fonction ne me semble pas être liée à une
Cela pose bien sûr le problème du statut précis de ces région précise 11\ mais plutôt à des opérations ponctuelles,
troupes. Ainsi la dédicace d'un cavalier nabatéen ayant servi archers à Doura, contre les nomades comme Ogeîlü, ou peut
au camp de Ana en 132 ( CJS 3973) a fait supposer à être encore « préposé à la paix », comme Aelius Bôrrâ
133•
J. Teixidor qu'il était en fait au service des Parthes Le ([cnpm1iyoç 6 bù 1"11d Eip17v11ç), si on accepte la restitution
proposée cl'après le palmyrénien (« 'strtg' dy 'bd slm' »)
1"1•
terme employé pour décrire s a fonction est en effet curieux
pour un militaire romain, puisqu'il est seulement appelé prs Cette fonction peut cl'ailleurs trouver plusieurs parallèles
«cavalier». C'est le terme utilisé également par le texte BS intéressants dans la région. À Palmyre même, l'inscription
n" 51 cité plus haut pour les cavaliers en poste au même CIS 3915 (= lm' IX, 13), datée de 21 apr. J.-C., mentionne
endroit 114• On a pourtant au moins un exemple de soldat déjà un notable palmyrénien qui a permis la paix entre deux
indubitablement romain qui donne sa fonction en utilisant tribus (voir chapitre Il). L'expression utilisée est la même
un mot sémitique : en C!S 3944, le personnage se dit en ('bd .{lm' bynyhwn, «il a fait la paix entre eux»), ce qui
grec c:r-cpano'n11ç Àt:y[EÔ}voç Kup11vcxJ1Kiîç (« soldat de la peut placerAelius Bôrrâ dans une certaine continuité. D'autre
légion Cyrénai'que») et en araméen plb' dblgywn' dy b$r part, à Ruwwafa, le texte sémitique de ]a fameuse bilingue
(«soldat de la légion qui est à Bosra»), ce qui signifie sans gréco-nabatéenne porte à la fin wrm$hm («il a fait la paix
1 1
doute la même chose, mais n'a pas les mêmes implications us_ entre eux» ; cette partie du texte grec a disparu) • 1). Le
132 - Dédicace par des cavaliers stationnés à Ana et Gamla après 188: p. 25).
prsy' b' br['] cly gmf' w' n' («les cavaliers de raile de Ala et Garn la». BS 137 - J. STARCKY, 1963. p. 48.
n" 51 ). Comme le remarque C. Dunant (BS. p. 65). le terme utilisé pour 138 - J. TE!XIDOR. 1984. p. 25, écrit que«Zebida était le stratège de la région
«aile» est 'br' au lieu du mot transcrit du latin ulu ('l') plus couramment en 98 ».
utilisé (mais le terme sémitique a la même signification). Ce texte, comme 139 - H. INGHOLT, 1932. p. 279 et DFD p. 36 pour le texte palmyrénien. On
CIS 3973, mentionne des cavaliers à Ana et cite les deux mêmes localités peut penser ù une fonction du type de celle de lïrénarque. connu ailleurs
que le texte J. CANTINEAU, 1933. p. 179 cité plus haut. Ce faisceau de faits clans le monde grec (indication dont je remercie M. Sartre). On remarquera
concordants montre la continuité de l'occupation palmyrénienne de cette que les irénarques peuvent être choisis par le gouverneur sur une liste de
région de 132 à 225. dix noms : Aetius Aristide L. 72. cité par M. Sartre (1995. p. 290. n. 210).
l 33 - J. TEIXIDOR, 1984, p. 24. mais on hésite à faire de cet Obaîclû le ce qui semble aussi le cas cl'Aelius Bôrrâ (KCXîCY.G"tCX8Év1cx urco îE
commandant de la garnison de Ana. dont il n·est vraisemblablement qu'un MCXVElÀlOD (])Ql)0KOD KCY.l OÙEVlOlOD 'Pou<pou UTCCY.îl KCDV«a été installé
simple cavalier. par Manilius Fuscus et Veneclius Rufus. les deux gouverneurs»). H. lngholt.
134 - Et comme on l'a vu (chapitre 1). le même texte utilise un terme clans l'édition princeps. fait ce rapprochement, en citant le texte de Smyrne
sémitique pour donner le nom de l'unité, mais ce terme n'est qu'une C/G 3151 où l'on retrouve la même formule, mais écarte réquivalence
traduction littérale du mot latin communément employé. Le même mot irénarchie/stratégie chargée de la paix. car lïrénarchie est une« fonction
(pri�) a été lu dans rinscription de an-Namftra pour désigner des soldats au municipale subordonnée» (p. 282).
service de Rome (avec l'expression prsw lrwm:«cavai iers pour Rome»). Pour ces charges de maintien de l'ordre sur le territoire des cités, avec des
Mais cette lecture està rejeter: voir l'édition de 1· inscription par P. Bordreuil. noms variés (clans les campagnes: 01pcx117yoç ÈTit 111ç xcôpcxç ou bien.
A. Desreurnaux. Ch. Robin et J. Teixidor clans Y C,ô,LVET et Ch. ROBIN, l 997. plus généralement, 0îpCY.îl7Y0Ç ÈTil îllÇ E1p17v17ç ou Etp17vcxpx17ç), voir
p. 265-269, n" 205 (avec le commentaire de ce passage. p. 268: la nouvelle 1. LÉVY. 1899. p. 283-289 (avec les références) ; voir aussi J. et L. ROBERT,
lecture, présentée avec réserve. donnerait la traduction suivante « [les 1954. p. 41-43.
troupes auxiliaires des Perses] et des Romains»). Le mot lupn;wà rorigine 140 - Je dois ce rapprochement ù M. Sartre. Sur l'inscription. voir
serait donc le nom propre«les Perses» et la copule 11· («et»). G. W. BOWERSOCK. 1975. p. 512-522 et M. SARTRE. 1982b. p. 27-29
l 35 - Pour une discussion plus complète sur ce personnage et ses fonctions. (et l 30-13 l) qui reprennent de manière générale le texte republié par
voir le chapitre 1v. J. T. Milik, clans P.J. PARR, G. L. HARDING et J. E. DAYTON. «Preliminary
136 - C'est J. T. Milik. DFD, p. 258. qui fait du Zebîclâ cité clans le texte Survey in North-western Arabia. l 968», Bull. ln.1·t. Arch. London I O. l 971.
un stratège. J. Teixidor, après avoir refusé cette interprétation (BES 1967. p. 23-60 (publication du texte par J. T. Milik aux pages 54-57). Voir aussi
78. comme H. lNGHOLT. 1976. p. 126). semble 1·accepter (.T. TEIXIDOR. 1984. le BE l 976. 739.
116 Les notables de Palmyre
personnage en question est cette fois le gouverneur romain l'hypothèse formulée par R. Dussaud selon qui Palmyre
( dans les années 166-169). La désignation d'Aelius Bôrrâ possédait « un plein droit de police sur les tribus du désert
par le gouverneur serait là encore un signe de l'évolution de aussi bien en accord avec Rome qu'avec les Parthes» 143•
la situation institutionnelle de Palmyre qui passe sous la Ces stratèges, honorés d'inscriptions longues et
dépendance de Rome de manière plus marquée au cours du détaillées, faisaient visiblement partie des notables, mais on
n" siècle ( CJS 3915 datant des premières années du !" siècle). 1
a jusqu'à présent peu de preuves formelles de ce fait.
La désignation à plusieurs stratégies contre les nomades, J. T. Milik, DFD, p. 258 fait du personnage principal de
à la fin du 11" siècle, semble indiquer qu'existait alors de ce plusieurs inscriptions du Wadi Hauran, Zebîdâ, fils de
côté un danger particulièrement pressant. C'est peut-être en Haumal, un stratège et propose de le retrouver dans le texte
tenant compte de cet aspect intermittent et ponctuel de la lnv X, 2, où il serait l'arrière-grand-père des dédicants
fonction qu'on peut le mieux rendre compte des aspects si («militaires, vu leur rapport avec un officier de l'armée
variés qui apparaissent dans les inscriptions. Pour cette romaine », dit-il à propos des mêmes personnages pour
raison, cette charge de maintien de la paix a pu prendre une Jnv X, I i.i.i). Toujours d'après le même auteur (DFD, p. 24),
importance qu'elle n'avait pas forcément à l'origine. Il était on retrouve, parmi les compagnons du stratège Zebîdâ, un
naturel qu'à Palmyre cette fonction ait plus de prestige et de certain Hagegû i.is, qui serait un ancêtre du stratège Ogeîlû,
pouvoir que dans des cités d'Asie Mineure situées loin des mentionné en lnv X, 44 i.i<,_ Si swyr' est bien le nom de
frontières et au territoire moins étendu. Cela peut aussi l'ancêtre du clan 147 et qu'il s'agit donc de la même famille,
expliquer 1' utilisation du terme de cri-pcrc1iyck, aux il est intéressant de voir qu'un siècle avant la stratégie
connotations militaires marquées, plutôt que celle d'un mot d' Ogeîlû, un de ses ancêtres a déjà eu des fonctions
qui évoquait de simples opérations de police. On manque semblables. Un autre de ces stratèges, Aelius Bôrrâ, est
malheureusement un peu trop de détails pour arriver à membre d'une famille de notables. Par le même texte 1 -18, on
discerner des évolutions de la fonction au cours des quelque connaît son père, Titus Aelius Ogeîlû. Ce dernier ( ou son
125 années où elle est connue. père) s'est vu conférer la citoyenneté romaine par Antonin
C'est parce qu'ils s'occupaient de la défense contre les le Pieux. En 198, date du texte, l'appartenance de la famille
nomades et de la surveillance du désert qu'on trouve les aux notables de l'oasis est donc établie depuis au moins une
stratèges aux marges du territoire de Palmyre. Aelius Bôrrâ quarantaine d'années. Il peut s'agir d'une famille de soldats,
a fait la paix« btbwmy mdyt' », et cela peut signifier«dans ce qui expliquerait les activités de notre stratège et cadrerait
le territoire », mais aussi «dans les frontières de la cité». Il assez bien avec ce qu'on sait d'un certain nombre de
est normal que ce soit vers l'est et non vers le côté où les Palmyréniens, citoyens romains à ce moment 149•
troupes régulières romaines avaient de grandes chances Pourtant quand on lit les textes où apparaissent les
d'être très présentes qu'on retrouve les attestations les plus stratèges, la quasi-absence des caravanes est étonnante. Une
nombreuses de la milice de Palmyre. Un problème n'est pas seule fois, un stratège est remercié pour avoir favorisé le
résolu : celui de la présence de cette milice dans la partie trafic commercial. Ogeîlû (lnv X, 44) a procuré la sécurité
sud-est de la région, où, en 98 du moins, la domination parthe aux marchands et aux caravanes chaque fois qu'il a été
était établie. synodiarque. Mais les fonctions sont séparées, il a été stratège
Il faut peut-être voir dans ces garnisons palmyréniennes contre les nomades, et il a été synodiarque : c'est en exerçant
installées dans des régions frontalières une conséquence de ce métier qu'il a protégé le commerce. Certes le savoir et les
ce qu'aussi bien dans le désert que le long du fleuve, les relations acquis pendant ses stratégies lui ont été utiles, il
conditions géographiques rendent impossible l'existence n'est pas étonnant qu'un spécialiste des choses du désert
d'une frontière, selon le modèle actuel. En fait, le fleuve devienne synodiarque, mais le rapport entre synodiarchie et
sert plus de route que de frontière i.ii et le désert qui l'entoure stratégie n'est que suggéré, pas fortement exprimé.
permet peut-être de comprendre comment un Nabatéen Si donc le commerce n'a que des rapports distants avec
pouvait être au service de Palmyre en 132 aux confins du l'armée romaine et les troupes palmyréniennes, c'est qu'il
territoire parthe 142• Peut-être peut-on aussi reprendre devait y avoir d'autres moyens d'assurer le passage dans
I 4I - Voir M. GAWUKOWSKI, I988. p. I65-166. même zone (J. STARCKY, 1963, p. 48) comporte lui le mot en toutes lettres.
142 - Dans ce sens. M. GAWLIKOWSKI, 1988, p. 165. Voir aussi lnl' XII. 55 pour un autre .�wyr' en 153 apr. J.-C. clans la même
143 - Cité par E. WILL, I992, p. 54. région.
144 - Voir au chapitre li la discussion sur le clan Haumal et sa généalogie 148 - H. INGHOLT. 1932. p. 279 et DFD p. 36.
difficile: comme le dit J. T. Milik (DFD, p. 260) « néanmoins leurs liens 149 - Dans la liste de citoyens romains établie par D. Schlurnberger
généalogiques ne se laissent guère deviner ». (D. ScIILUMBERGER. 1942-1943b, p. 67-68). parmi les numéros II à 19.
145 - F. SAFAR. 1964. n" 8: « Lymr.�w wbggw bny Lym' .<;wyr' ». Aelius Bôrrâ (= n" 14) est le seul qui ne serve peut-être pas dans l'armée
146 - Où sa généalogie s'établit comme suit: Oy17Àov MCY.KKCY.lüll tou régulière romaine. Il est néanmoins stratège de la milice de Palmyre et
Oy17Àou wu Ayqou tOD Î:EOlllpCY.. Voir le tableau dans DFD, p. 25. surtout a été installé par cieux gouverneurs et par la cité (KCY.TCY.CTtcx.0Évtcx.
147 - Et s'il s'agit bien d'un stratège, puisque la seule attestation du mot {mo îE Mcx.vaÀtüll c[)oÛCTKOll KCX.l ÜÙEVlôlüll 'Poûcpou UTCCY.îlKO)V KCY.l
dans ces textes (F. SAFAR, 1964, n" 1) est douteuse. Un autre texte de la {mà t�ç rcmpi8oç).
Chapitre Ill: Les actiFités des notables 117
ces territoires où assurément des dangers existaient. De plus, ou Iarhaî, ou les synodiarques, n'étaient peut-être pas non
cela a été noté depuis longtemps, les caravanes ne s'arrêtaient plus très éloignés de ce genre de vie et devaient avoir une
pas aux frontières de l'Empire romain, mais pénétraient certaine expérience du combat contre les nomades.
,.... ,.,,+r,1'rilàn-.a,·,t dans le territoire des Parthes. est ,,.,..,,....,.... h..... hlc. Ce n'est cas de extraordinaires
que ces derniers aient vu d'un bon œil des troupes venant du pouvait faire appel à des forces différentes, nombreuses,
côté occidental de la frontière entrer en toute liberté avec ou mieux armées et entraînées. Là encore 1'exemple d'Ogeîlü
leurs armes jusqu'au cœur de la Mésopotamie 150• Certes on renseigne peut-être sur un cas exceptionnel, où la lutte contre
ne connaît pas très bien la situation territoriale réelle dans la les nomades, entendons ceux qui empêchent 1e trafic
région et la position excentrée de la Mésène a pu permettre commercial de Palmyre, est organisée de manière
d'utiliser un territoire « neutralisé » pour les relations systématique, à un moment où, sans doute, ce danger se fait
commerciales. On sait aussi que les souverains de Mésène sentir de manière particulièrement aiguë.
ont eu, au cours du li siècle des relations privilégiées avec
e
On a vu pourtant que le lien entre ces stratégies et la
Rome et avec Palmyre (voir le point suivant). sécurité des caravanes n'est pas fermement établi. Il est certes
On peut dire tout d'abord, en s'appuyant sur une probable, mais cette lutte d'Ogeîlû contre les nomades a pu
iconographie assez constante, que le costume normal de prendre d'autres formes que l'accompagnement
nombreux Palmyréniens comporte des armes 151• C'est sans systématique des caravanes. Une lutte contre leurs camps,
doute encore plus vrai pour ceux qui parcourent le désert. Il leurs troupeaux et leurs bases a pu elle aussi avoir pour effet
est en effet assez logique de penser qu'il vaut mieux ne pas ultime de procurer une certaine sécurité aux caravanes. La
s'aventurer sans arme dans une région où les dangers « pacification » de tribus jusqu'alors agitées a pu être
abondent (ne serait-ce que les animaux). Les remarques l'occasion des stratégies citées clans le texte. Celui-ci présente
d'H. Seyrig sur le costume des dieux des Arabes du désert un cas unique dans notre documentation et le gros des
(Arsû ou Allât par exemple), armés pour rassurer leurs fidèles caravanes avait sans nul doute cl'autres moyens d'effectuer
avec des lances et des boucliers 152, vont bien évidemment un parcours sans trouble vers et depuis la Mésopotamie. On
tout à fait dans ce sens. Les gens, dont D. Schlumberger a peut s'appuyer sur les théories de E. Will sur le sujet, telles
étudié les installations et les sanctuaires en Palmyrène du qu'il les a exprimées, par exemple dans sa récente synthèse
nord-ouest, fournissaient sans doute aux caravanes une partie sur les Palmyréniens. Certes, le problème de la relative
de leurs animaux et pourquoi pas aussi de leur personnel. imprécision des textes demeure, et il faut interpréter au
Ce costume militaire avait aussi parfois influencé celui des mieux, en s'appuyant sur toute la documentation disponible.
dieux ancestraux de Palmyre (Bel ou Baalshamîn), même Or un texte publié récemment, celui du sanctuaire cl'Allât
quand ils n'étaient pas d'origine arabe. Pourtant le costume (H. J. W. DRIJVERS, 1995a), apporte des précisions très
militaire des dieux n'est pas forcément celui qu'on attribue importantes. On y apprend par exemple que Soados intervient
aux Arabes, mais on retrouve aussi des éléments gréco lui-même, en force (noÀÀllV 8-ûva�uv), contre des brigands.
romains (épées ou cuirasses) 15". Pour la première fois (et la seule jusqu'à présent), on a la
En tout cas, la défense des caravanes se faisait d'abord preuve formelle du rôle« militaire » de ces grands notables.
par leurs membres, si ce n'est par les marchands eux-mêmes, Mais ce rôle militaire n'était apparemment pas le principal
au moins par une partie des gens qui y participaient 15 On -1 _ moyen qu'avaient les notables cl'agir en faveur des caravanes
suppose qu'une escorte réduite devait suffire à repousser et de les aider en toutes choses. Les remerciements des
l'attaque de quelques brigands et qu'une partie des habitants marchands sont motivés par des interventions qui pouvaient
de l'oasis, qui aimaient à se faire représenter sous le costume être de tout ordre, et on ne peut que suivre E. Will, quand il
militaire, devait avoir un certain entraînement militaire, fait de Soados un cheikh, un chef de tribu 155• Son autorité,
suffisant pour les dangers habituels du désert (rôdeurs, qui repose sur des liens tribaux, lui permet d'intervenir à
animaux sauvages, etc.). Une caravane de plusieurs centaines toutes les étapes de l'organisation d'une caravane, non
de chameaux devait mobiliser un personnel nombreux, ne seulement pour les détails matériels et la fourniture des
serait-ce que pour la surveillance et l'entretien des bêtes, et animaux, mais aussi pour la négociation avec les nomades,
ces gens, appartenant sans nul doute aux tribus nomades, peut-être maîtres du désert mais aussi en relations avec ces
devaient être habitués aux diverses conditions de vie dans le grands caravaniers. Comme le note encore E. Will,« ce n'est
désert. Les grands commerçants eux-mêmes, comme Soaclos sans doute pas un hasard si les inscriptions caravanières les
150 - E. WILL, l992. p. 60. par exemple. 154 - Voir J. TEIXIDOR, l984, p. 16. n. 24 : « cl' après les sources arabes, les
151 - E. WILL, 1992, p. 94-100. caravanes qorayshites pouvaient compter jusqu'à 2 500 chameaux et la
152 - H. SEYRIG, 1970. p. 77 . compagnie variait de 100 à 300 hommes », et p. 18 sur les tarifs à payer
153 - H. SEYRIG, 1970, p. 86 : « Sans doute les sculpteurs copiaient-ils pour avoir droit à une protection armée en 90 à Coptos ; les gens capables
simplement les officiers de la milice, ou même les grands marchands quand de se protéger eux-mêmes payent moins ( cl' après une inscription de Coptos :
ils guidaient leurs convois dans les périls du désert», cité par J. STARCKY et A. BERNAND, 1984, 11° 67 = OGIS 674 = IGRR L 1183).
M. GAWLIKOWSKI, 1985. p. 102. 155 - E. WILL, 1992, p. 61 .
118 Les notables de Palmyre
plus anciennes, tout au long du!"' siècle et jusqu'en 107 [?], genre de pratiques. Pourtant il ne s'agit visiblement pas d'un
mentionnent toujours le nom de la tribu dont le bénéficiaire grand caravanier.
de la dédicace est issu » 156• Ce n'est pas par la force, mais Certains d'entre eux sont remerciés pour avoir épargné
par leur influence, que les grands caravaniers servaient les aux caravanes des dépenses ou pour les avoir ramenées à leurs
marchands, ce qui explique qu'on ait si peu de mentions de propres frais. On peut citer Inv III, 28 (= C/S 3948) où la
leurs interventions dans nos textes. caravane revenant de Spasinou Charax (en 193) honore son
Il est probable aussi qu'ils ont toujours gardé une partie synodiarque pour lui avoir épargné une dépense de 300 deniers
de leurs activités dans le désert et que, comme l'a montré d'or poids ancien (xpucrà 11:cxÀmà 817vâp1[cx] 1pwKÔmcx), soit
M. Rowton 157, l'élite tribale se soit installée en milieu urbain, 7 500 deniers cl' argent iw_ Deux autres grands personnages,
tandis que le reste de la tribu continuait à vivre clans son Worod (lnv III, 7 = C/S 3942) ou lulius Aurelius Shalamallat
milieu traditionnel 158• Ce partage des rôles permet de servir (lnv III, 13 = C/S 3936) ont ramené des caravanes à leurs
au mieux les intérêts tribaux au plus près des autorités propres frais. Ces deux textes tardifs (tous les deux postérieurs
sédentaires, tout en ne se coupant pas des avantages de la à 255), ainsi que le texte cité précédemment, sont les seuls où
vie nomade dans le désert. Bien sûr ce contrôle du désert se manifeste de manière aussi explicite l'évergétisme de
par une élite urbaine n'était pas complet et des troubles, des grands notables. Comme il arrive fréquemment dans le reste
rivalités pouvaient survenir. C'est dans ce type de cas que de 1 'Empire, on donne des chiffres ou on dit au moins
l'intervention des grands caravaniers était nécessaire. clairement quïl s'agit d'argent. Pour une fois, on peut dire
L'absence de noms et de précisions dans les textes (sauf dans avec précision en quoi consistent les bienfaits. L'insistance
le cas du texte d' Allât) tire peut-être son explication de ce sur ces bienfaits peut indiquer leur caractère exceptionnel,
rôle de pacification des notables. Une fois la conciliation car le financement n'était sans doute pas offert par les grands
obtenue entre les nomades et les autorités de la caravane et patrons caravaniers de manière courante.
le libre passage de cette dernière assuré, il devenait inutile Ceux-ci offraient sans doute une aide différente, en
de citer des noms et d'expliquer en détail ce qui s'était passé, raison de leur puissance, de leur influence diplomatique et
en risquant de rouvrir le débat ; on préférait sans doute de leur capacité à mobiliser les ressources en animaux et
remercier le conciliateur sans risquer de se brouiller de personnel. Ils étaient les seuls à pouvoir rendre ce type de
nouveau avec les nomades ou une partie des habitants de services, alors que l'argent, sans doute nécessaire pour l'achat
l'oasis (dont la population est ethniquement assez mélangée). des marchandises orientales qu'on ramenait, pouvait provenir
Une hypothèse moins optimiste pour expliquer ce flou de différentes sources.
entretenu autour des « bienfaits » des grands notables peut
aussi être envisagée.C'est peut-être pour ne pas avoir causé
D. INTÉGRATION DES NOTABLES DANS LE CADRE DE
cl'ennuis à la caravane et aux marchands que certains grands
L'EMPIRE
personnages étaient remerciés. L eur bienveillance est louée,
sirrnf': nnssihlP: nn'P:llP: n'ét�1it mi-; svsth11Mirn1P:
--a--- 1- ------- -1-· ---- -- - ----- 1---- -..1 - - ---------1 -- - · On c1 vu quelles ét0ient les activités civiques des notables
L eur aide n'était sans doute pas gratuite, et ils en tiraient dans leur cité 1<,i, mais il existe un cadre plus large où ces
aussi des bénéfices sur lesquels les textes ne s'étendent pas gens pouvaient (auraient pu ?) se distinguer. Se pose en fait
non plus. Leur éventuelle participation financière (prêts par la question du degré d'intégration des notables de Palmyre
exemple) aux expéditions est de la même manière dissimulée dans l'Empire romain au cours des trois premiers siècles de
par les textes conservés. Un seul texte 15\ selon notre ère. Il convient de se demander pourquoi on ne retrouve
l'interprétation de son éditeur, fournit des renseignements pas ces notables dans d'autres régions, pour exercer
sur un homme cl'affaire palmyrénien qui aurait prêté au taux principalement des fonctions provinciales ou dans un cadre
de 30 % un total de 7 400 deniers à quatre personnes plus large. Ce qui surprend, c'est justement cette relative
différentes. M. Gawlikowski compare ce taux à celui pratiqué indifférence des Palmyréniens au service impérial. Certes
clans le commerce maritime, et pense qu'on peut faire des Palmyre suivait assez généralement le modèle des cités
quatre débiteurs des marchands caravaniers. En tout état de grecques dans son fonctionnement intérieur et ses
cause, cet homme craffaire est le seul connu de ce institutions. Elle a de plus de nombreuses spécificités, dont
156 - E. WILL 1992. p. 62. Par exemple. le texte /111' X. 40. Néanmoins la 157 M. RowmN. 1976a. p. 219-257. Voir ici le chapitre II sur les problèmes
tribu n ·est citée que dans le texte araméen et omise dans la version grecque. posés par la structure tribale à Palmyre et l'intégration des nomades clans la
plus courte. D'autre part, ce trait (mention des tribus dans les inscriptions cité.
les plus anciennes) n·est pas propre aux inscriptions caravanières. mais est 158 - La principale difficulté à laquelle se heurte cette théorie très probable
commun à tous les types de textes: la remarque de E. Will est en fait valable est qu'on n'a aucune attestation directe. ou presque. de ce type de lien:
pour l'ensemble de la société palmyrénienne et ne permet pas de tirer de voir chapitre 11.
conclusions particulières au commerce caravanier. Ensuite. avec la création 159 - M. GAWLIKO\VSKI, 1986, p. 87-99.
des quatre tribus officielles. les mentions disparaissent. Les honneurs 160 - Chiffres tirés de M. GAWLIKOWSKI. 1988, p. 170.
décernés par les tribus le sont alors sur décision du Conseil et du Peuple 161 - Dans le chapitre 1.
(voir M. SARTRE. 1996a, p. 390).
Chapitre III: Les activités des notables 119
les autorités romaines tiennent compte 162• Ce qui reste du dans les affaires impériales. Or à Palmyre, on a, jusqu'à la
caractère tribal de la société, on l'a dit, rend difficile la totale fin, peu cl'exemples à citer 166• Les Palmyréniens, dont les
assimilation de la ville et de sa population à ce qui se passe voyages dans l'Empire sont attestés, appartiennent à des
dans les zones les plus hellénisées de1'Asie Mineure. catégories sociales différentes, on le verra.
Mais dans le processus général d'intégration des Le service impérial est parfois choisi, surtout par de
provinces orientales dans l'Empire, on a, en Syrie même, de simples soldats, et l'on a peu d'attestations cl'officiers
bons exemples de carrières effectuées par des notables des supérieurs originaires de Palmyre. On a pourtant de
cités hellénisées de la région. L'inscription citée plus haut nombreux exemples de Palmyréniens hors de la cité, clans
(CIS 3932), sur Iulius Aurelius Zénobios, apprend que le le reste de l'Empire 167• Si on en reprend la liste, on s'aperçoit
préfet, qui reconnaît ses mérites, est le fameux Iulius Priscus, que ce sont essentiellement des militaires. Que ce soit en
à la carrière brillante. Sa famille, pourtant originaire d'un Dacie, en Afrique du Nord ou même à Rome 168, les textes
lieu beaucoup moins riche que Palmyre, a un destin hors du ne laissent pas de doute sur ce fait et apprennent de plus
commun. Son frère, Philippe l'Arabe, est empereur un an qu'il y est surtout question de postes subalternes et qu'il
après les événements relatés dans l'inscription et le s'agit rarement d'officiers.
développement civique et monumental de la région de C'est en Dacie, qu'on a les plus nombreuses attestations
Shahba, jusque-là obscure localité du sud de la Syrie, n'est de militaires palmyréniens 169• Certains d'entre eux ont aussi
possible que grâce à cela. des fonctions civiles dans les établissements locaux. Le plus
Plus près même de Palmyre, dans une région proche à important, connu par au moins trois textes, est un certain
bien des égards, trente ans avant Philippe l'Arabe, une autre Publius Aelius Taimé, citoyen romain sous Hadrien,
famille se distingue jusqu'à atteindre la pourpre impériale. duumviralis de la colonie de Sarmizegetusa, où il a fait
À Émèse, en effet, étape possible sur la route des caravanes, construire un temple (!DR III/2, 18), mais on peut aussi citer
et dont la prospérité à cette période a été mise en rapport Aurelius Bassinus, magistrat et prêtre, auteur d'une dédicace
avec le commerce de Palmyre 163, la famille des grands prêtres à Iarhibôl-Soleil, à Alba-Iulia en Dacie(= Apulum; CIL
du Soleil donne deux empereurs et plusieurs femmes et mères 1108). On retrouve des Palmyréniens aussi à Tibiscum :
d'empereurs. Il est difficile d'affirmer qu'il s'agit de beaucoup appartiennent à l'armée romaine (voir
descendants de la famille des Samsigeramos, dynastes et annexe XIII. 1), mais on a au moins une attestation de famille
prêtres d'Émèse sous les Julio-Claudiens, mais ce sont des installée sur place (!DR III/1, 161). Si l'origine militaire de
notables provinciaux, d'origine plus ou moins ancienne, sans la plupart d'entre eux est de toute façon assurée, leur
doute araméens 16 qui se distinguent dans le cadre de
-1, installation semble parfois définitive, car certains (outre
l'Empire et qui aboutissent à des fonctions de premier plan. P. Aelius Taimé) exercent des fonctions importantes dans
Il n'apparaît pas qu'à Palmyre une famille sacerdotale les colonies de la région. Plusieurs exemples de constructions
domine de cette manière la vie publique, et malgré l'existence de temples montrent qu'ils pouvaient atteindre à leur sortie
de familles dominantes jusqu'à Odainat, la situation de l'armée une aisance certaine.
intérieure à Émèse semble différente. Néanmoins, on aurait D'autres Palmyréniens étaient stationnés dans la région
tort de négliger les rapprochements entre les deux cités, vu du Danube; ainsi un certain Marcus Acilius Alexander est à
leur appartenance au même domaine ethnique et culturel. la tête d'une cohorte en Mésie Inférieure en 134 (CIL XVI,
Plus généralement, depuis longtemps, on connaît des dipl. 78) 170•
sénateurs, originaires de Syrie et du Proche-Orient 165 ; Mais la seconde région dans laquelle les Palmyréniens
certains font carrière et parfois brillamment. Avant les sont utilisés en grand nombre par l'armée romaine est la
exemples cités du m e siècle, Avidius Cassius a eu des Numidie (annexe XIII. 2). La raison en est sans cloute la
fonctions importantes jusqu'à sa tentative d'usurpation et proximité des conditions naturelles. Néanmoins, il semble
sa fin brutale. Sans même parler d'Antioche ou de villes bien que 1 'intégration locale de ces Orientaux soit moins
très anciennement hellénisées comme Apamée, on a des forte qu'en Europe centrale. On a moins d'exemples de
attestations de prises de responsabilité de notables orientaux notables palmyréniens 171 installés clans les agglomérations
162 - Voir ce que dit M.S ARTRE, 1996a, p.396, sur la présence à Palmyre année de la chute de Palmyre devant Aurélien.Non attesté à Palmyre même,
du préposé, justifiée par « le caractère excentré de la ville par rapport au on a aussi L. lulius Septimius Vaballathus Athenodorus, le fils cl'Odainat
reste de la province ». et Zénobie (AE 1904, 60 ; P. Oxy. 1264 ; BG U III, 946 ).
163 - H.SEYRIG, 1959b, p. 184-192, mais voir les remarques de P.-L.ÜATIER, 167 - Annexe XIII ; voir aussi J. STARCKY et M. ÜAWLIKOWSKI, I 985, p. 45-49
1996, p. 431-436. (pour les soldats) et p. 80-81 et E.WILL, 1992, p. 48-51. Pour le cas particulier
164 - Sur ce point, voir J. TEIXIDOR, 1998, p. 717 et le chapitre 1v, i11fi·o. de Doura-Europos, cf. supra. Pour la Palmyrène, voir le chapitre n.
165 - Voir !"article de G. W. BowERSOCK, 1982, p.651-668. 168 - CJS 3903 avec le commentaire de G. W.HousTON, 1990, p. I 89-193.
166 - Oclainat et son fils Haîran sont appelés CTUVKÀ.11îlKÔç (snqltyq') en 169 - Voir annexe XUI.1.
CIS 4202 (Odainat) et CIS 3944 (son fils).Hadclüdan, fils cl"Ogeîlü U1dwdn 170 - Voir annexe XIII.4.
br 'gyfw) est lui aussi snqltyq' en fm, IX, 28.Ce dernier texte date de 272, 17 I - On pourrait dire plutôt « de Palmyréniens devenus notables ».
120 Les notables de Palmyre
de Numidie, à part un décurion attesté dans un texte du On retrouve à Rome même une des plus importantes
111" siècle, M. Herennius Urbanus, fils de Nurbelus, qui est colonies de Palmyréniens 178• Autant qu'on puisse le savoir,
sans doute un Palmyrénien, d'après son onomastique (AE les militaires ne sont pas majoritaires parmi eux, mais on
1933, 36). Sous Commode, on retrouve aussi un centurion serait bien en peine de savoir ce qu'ils font à Rome, et les
palmyrénien, Agrippa, fils de Taimé, en Numidie cette fois, textes sont peu clairs sur les activités et statuts sociaux des
àel-Kantara (AE 1900, 197 = ILS9173) 172• Comme en Dacie, dédicants. Sans doute, comme nombre d'Orientaux,
l'origine militaire de la plupart d'entre eux est sûre, mais exercent-ils des fonctions commerciales, mais les textes ne
certains peuvent être des commerçants, ou même des enfants le précisent pas. Comme à Sarmizegetusa, la construction
de militaires, installés définitivement sur place. d'un temple semble prouver que le Héliodôros des textes
De même, les Palmyréniens qu'on retrouve à Coptos ou CIL VI, 50-51 appartenait àune frange aisée de la population.
Denderah (en Égypte, dans les limites de l'Empire) sont des On a d'ailleurs une autre preuve de notabilité pour certains
soldats (IGRR I, 1169) ou des particuliers, généralement des des Palmyréniens de Rome : un certain Shoadû connu par le
marchands 173• Le texte de Denderah (CIS 3910) est une texte CIS 3904 est sans doute le même que le Shoadû qui
dédicace de marchands à leur synodiarque. Pour honore son père, àPalmyre même, dans le texte CJS 3920 179•
M. I. Rostovtzeff, il est fait référence dans 1'inscription à un Mais c'est pratiquement la seule fois où l'on peut mettre un
fondouq palmyrénien en Mésopotamie 1
7-l. Mais l'existence émigré en relation avec une famille notable de Palmyre 180•
d'un établissement de ce type en Égypte même n'est pas Dans l'ensemble pourtant, la classe « moyenne » semble
totalement impossible. La découverte àCoptos d'autres textes plus concernée que les notables à proprement parler par ces
laisse penser que les Palmyréniens, au moins à partir du vagues d'émigration et le service militaire n'attire pas de
ne siècle, étaient assez présents en Égypte 175• Les événements façon privilégiée les plus illustres des Palmyréniens 181•
de l'époque de Zénobie renforcent cette interprétation 176• Plus À Palmyre même, le préfet de l'aile de méharistes
qu'à Rome, où le statut réel des personnages était sans doute palmyréniens (lnv X, 1 28), Tiberius Claudius Phi(lippus ?),
assez modeste, il peut s'agir ici de marchands de rang élevé, ami de Marcus Ulpius Iarhaî, n'est sans doute pas originaire
de notables, qui comme ailleurs sont honorés pour leur aide de l'oasis, même s'il en possède la citoyenneté 181• On peut
aux caravanes. Selon le principe qu'on a vu plus haut, Soados aussi s'interroger sur l'origine de 1'officier honoré en In v X,
reçoit des honneurs àPalmyre aussi bien que dans les centres 79 et dont le nom principal est perdu (il ne reste que Titus
commerciaux de Mésopotamie; d'autres ont également pu Aelius) 183• Marcus Acilius Athènodôros, fils de Moqîmû
recevoir ces honneurs en Égypte, où les conditions étaient (M. 'AniÀ, 1ov 'AKEl/\-lOU MOKl�LOD u{ov I.Epy{q
un peu semblables. 'A017v68wpov), tribun de la Cohors la Petraeorum, honoré
Les Palmyréniens attestés à Cos ou en Angleterre sont par le Conseil et le Peuple (lnv X, l 09) est indubitablement
aussi des marchands ou au moins des civils 177, mais leur palmyrénien. Il sert dans l'armée romaine, à la tête d'une
présence a sans doute plus à voir avec le hasard qu'avec unité recrutée en Nabatène, au peuplement proche de celui
1 'f'.XÏStf't1rf'. rl::m.s rf'S f't1nrnits nf' rnlnt1lf'S nrigim1Ïrf'S nf'] 'n::ic;Ïs de sa cité ; il est aussi honoré en lnv X, 108, par son ami
syrienne. Le texte provenant de South Shields dans le sud Marcus Ulpius Malikû. Ce dernier a reçu l'honneur d'une
de l'Angleterre (CIS 3901 ) est ainsi le fait d'un petit statue clans le sanctuaire de Bel,« après avoir accompli avec
commerçant ou d'un artisan qui a dû suivre une unité de distinction les trois milices équestres » (TÔ'k] îpËiç 1rrmKÙ.ç
1'armée romaine. CTTpmEÎa.ç [Èmcrhî�Lwç [crTpmEumx�LEvod, Inv IX, 24). On a
172 - L'existence d'un décurion (AE I 933, 36) et d'un medirns (AE I 933, I 78 - Voir annexe XIII. 3.
44) peut constituer d'autres exceptions. mais il est difficile d'en faire des 179 - Cf. DFD, p. 266-267 pour d'autres membres de la famille: un frère
notables de cette province, faute d'autres informations. de Shoadü apparaît en Inv XI, 2 où il dédie un autel au dieu anonyme. Un
173 - Voir annexe XIII. 4. J. SCHWARTZ, I 953, p. 64-65 ; J. BINGEN, 1984, autre membre de la famille a été synèdre en 1 I 2 à Palmyre (/111' X, 69).
p. 355-358. 180 - On peut sans cloute ajouter les deux militaires nommés Marcus Acilius
174 - M. 1. RüSTOVTZEFF, 1932, p. 795, n. 2. (Alexander du Cil XV I, dipl. 78 en Dacie et Athènoclôros, fils de Moqîmü
175 - Et pas seulement en tant que soldats. même si la présence sur place d'fm, X. 108 et 109 à Palmyre). sans doute parents.
d'archers palmyréniens a pu faciliter l'implantation ultérieure de marchands, I 81 - Un cas particulier est constitué par les Juifs de Palmyre enterrés ù
et pourquoi pas('?) d'unjèmdouq. Ce dernier a pu exister, même s'il ne s'agit Beth Shearim en Galilée. Leur présence ù cet endroit s· explique sans doute
pas de celui dont H. Seyrig (H. SEYRIG, 1972) a récusé l'origine palmyrénienne. par des raisons religieuses. On a peu de renseignements sur l'activité
Liste des textes palmyréniens d'Égypte clans l'annexe XIII. 4. économique qu'ils ont pu avoir de leur vivant, malgré la présence d'un
176 - L'existence de Palmyréniens assez nombreux en Égypte et leur banquier (voir chapitre v1 et annexe XIII. 4).
intégration clans le commerce local sont sans cloute une cause de la relative 182 - Il est possible que ce personnage soit syrien, car les Ti. Clauclii sont
facilité avec laquelle l'Égypte a été soumise par les troupes de Zénobie. nombreux clans la région (je remercie M. Sartre cl'avoir attiré mon attention
Les contacts avec l'Égypte sont aussi attestés par l'ethnique que porte une sur ce point). Voir aussi M. SARTRE. 1996b, p. 243.
femme sur une plaque funéraire de Palmyre ( C/S 4547) : elle est dite mn;rl 183 - J. STARCKY et M. GAWLIKOWSKI, I 985, p. 47, en font« sans cloute» un
(« Égyptienne », voir annexe XII. 3). Son nom et son patronyme sont Palmyrénien. Rien ne le prouve. Il se peut qu'il soit le père de Aelius Bôrrâ
courants à Palmyre (i{gl brt bw1p', « Shegel, fils de Bôrefâ»), ce qui peut connu par l'inscription H. INGHOLT, 1932, p. 278 (avec DFD p. 36-37), mais
signifier qu'elle fait partie cl'une famille de Palmyréniens installés en Égypte. cette identification de J. Starcky (/m X, p. 51) est seulement possible.
1
ainsi quelques exemples de Palmyréniens qui sont ou ont été sphère d'influence des notables de l'oasis. Il faut noter aussi
au service de Rome et qui sont attestés à Palmyre même 18�. que les inscriptions caravanières mentionnent souvent le lieu
Comme le prouve le cas du Shoadû, fils de Taîmé, de de leur départ (Vologésias ou Charax), mais jamais le lieu
CIS 3904 et 3920, l'installation éventuelle à l'étranger de de leur arrivée. On en conclut généralement que c'était
membres de familles de notables ne signifiait pas que tous Palmyre, mais rien ne le prouve 189•
les liens étaient rompus. Il a d'ailleurs dû en être de même On le voit tout au long de cette étude, les notables locaux
pour une partie des soldats qui, à la fin de leur service, ont sont souvent des marchands. Ils ont donc peu de relations
pu s'installer sur place, mais aussi retourner dans leur patrie. avec les lieux où ils ne commercent pas, ce qui pourrait
Cela explique par exemple la mention d'un vétéran dans expliquer leur absence à l'ouest. Après tout, l'organisation
une inscription funéraire de Palmyre 185• Le petit nombre de et le contrôle du commerce entre Palmyre et l'Inde est déjà
cas connus peut s'expliquer par la bonne intégration des une tâche suffisante, et s'il y a un sujet d'étonnement, c'est
anciens militaires dans leur région de garnison : le cas est plutôt la puissance des commerçants palmyréniens clans cette
patent pour la Dacie isr,_ Il est en tout cas assez étonnant que zone que leur absence ailleurs. On peut ajouter, et c'est peut
le nombre relativement élevé de soldats d'origine être le plus important, que, comme on l'a vu plus haut, la
palmyrénienne ne corresponde pas à Palmyre à une puissance de ces notables doit reposer en grande partie sur
augmentation progressive du nombre de citoyens romains : des liens tribaux, liens qu'il est difficile de faire jouer hors
or le vétéran cité plus haut se fait nommer simplement sbyn' des territoires occupés par des populations arabes et nomades,
br tym ', sans préciser s'il est citoyen. Même après 212, le à l'ouest d'Émèse. Certes ces liens jouent moins clans le Golfe
cas n'est pas très courant : on aurait au moins attendu Iulius et vers l'Inde, mais la concurrence a pu être moins rude, ou
Aurelius. Le fait qu'il s'appelle sans doute Sabinus incite à bien encore, il a pu être plus facile de remplacer les
penser qu'il est vraiment vétéran de l'armée romaine, mais commerçants nabatéens (d'autres Arabes). À l'ouest, après
cela reste une hypothèse. la révolte de Mithridate, aucun événement tragique n'est
venu contrecarrer l'influence des commerçants italiens.
L'absence de notables palmyréniens du service impérial On ne peut non plus faire de cette faible intégration un
n'est donc pas complète, mais elle reste remarquable 187• La argument pour dire que Palmyre, finalement, est peu
prospérité même de la cité peut paradoxalement expliquer hellénisée, et n'a pas sa place parmi les poleis de l'Empire
cela. Tout est sur place, honneurs, richesse et point n'est romain. Ce serait, je crois, confondre deux choses ; un ce1tain
besoin comme c'est le cas pour un habitant de Shahba de déficit d'esprit« romain» (au sens d'impérial) ne conduit
quitter sa pat1ie pour faire fortune dans l'armée. Cela n'est pas à une absence cl'esprit hellénique. De ce déficit, nous
pas aussi vrai pour les Palmyréniens qui n'appartiennent pas n'avons même pas de preuve positive, on le reconnaît
aux familles de notables. Ce sont eux qui servent dans seulement à des absences. Il faut rappeler à cet endroit toutes
1'armée en Dacie ou en Afrique. En effet, on ne peut arguer les difficultés d'interprétation qu'un sujet aussi souvent traité
de l'éloignement de Palmyre ; certes la ville est à l'écart, que la révolte de Zénobie a entraînées. S'agit-il, comme le
mais les relations avec Antioche et la Méditerranée devaient pensent certains, d'une révolte par essence indépendantiste,
être plus intenses que dans le sud de la Syrie 188• Cette question preuve d'un désir séparatiste palmyrénien, qu'on peut
des relations commerciales avec l'ouest ou plutôt de retrouver dans toute l'histoire de la ville depuis ses débuts ?
l'absence de relations est un problème qu'on a depuis Ou bien au contraire, faut-il y voir, comme pour les
longtemps tenté d'expliquer. Les inscriptions caravanières empereurs gaulois à la même période, une prise de pouvoir
sont nombreuses pour les trajets Mésopotamie-Palmyre, mais dans un contexte local troublé, mais clans le cadre des
absentes pour les trajets vers la Méditerranée, car, les peuples institutions d'un Empire, qu'on remplace, faute de mieux 190 ?
heureux n'ayant pas d'histoire, on n'a pas jugé utile de Quelques faits mêmes, sur lesquels on n'a pas assez attiré
remercier des bienfaiteurs qui n'auraient rien eu à faire. Autre l'attention clans ce contexte, permettent de penser à un
solution possible, le commerce, à partir de Palmyre, était enracinement d'au moins certains notables, ne serait-ce que
pris en charge par les commerçants de la côte et sortait de la pour des raisons d'opportunisme politique.
184 - Les exemples sont regroupés dans l'annexe XIII. 5. inscription latine pour un soldat (decurio e:œrc[itator] n[umeri} : H. SEYRIG,
185 - H. INGHOLT, 1938, p. 104. Le mot latin uetercmus est transcrit w/rn'. 1933a, p. 164, n" 8 = AE 1984, 900).
On a aussi un exemple de bene.ficorius (bnpyqr') en 189 (C/S 4292). 187 - Autant que la documentation permette de le dire.
186 - Une inscription de concession mentionne un decurio, transcrit en 188 - Les trouvailles monétaires de Doura-Europos, qui mettent bien en
araméen dq1ywn' (H. lNGHOLT, 1935, p. 93 III, 1. 1 daté de 186); on est valeur le rôle d'Antioche, renforcent cette idée, quand on connaît les liens
amené à se demander si ce personnage au nom araméen (b'ly br dywn entre Palmyre et Dourn.
mlkw) n'est pas un décurion revenu d'une ville de Dacie ou de Numidie 189 - Peut-être les mêmes marchands continuaient-ils vers l'ouest, vers leurs
pour finir ses jours à Palmyre: clans ce cas, on attendrait pourtant qu'il clients potentiels.
donne le nom de cette ville. Il s'agit peut-être plutôt du grade militaire, 190 - Voir les conclusions cl'E. WILL, 1992, p. 203-204, qui met l'accent
comme le supposait déjà H. Ingholt (H. lNGHOLT, 1935, p. 94 avec la note sur l'opposition entre la latinité de l'Empire gaulois et l'hellénisme,
214): le mot est utilisé dans ce sens à Palmyre, mais clans le cas d'une caractéristique pour lui, de la révolte de Zénobie (voir aussi le chapitre IV).
122 Les notables de Palmyre
Si on ne retrouve pas dans le reste de l'Empire des BS 11° 48, qui date de novembre 171, mentionne l'érection
preuves de la loyauté des habitants de l'oasis, il n'en est pas d'une statue équestre (Ë<jmmov) dans le Caesarewn de la
de même sur place. Commençons d'abord par la preuve la ville 19 Elle a été découverte dans le sanctuaire de
-1_
plus exotique, un sujet dont une découverte récente à Baalshamîn, où une autre statue se dressait donc, et la version
Séleucie-du-Tigre permet de donner une interprétation assez palmyrénienne mentionne aussi l'érection d'une statue dans
convaincante. Le fameux Soados, dont on a parlé en détail le sanctuaire de Bel, dieu principal de la cité, au nom du
plus haut, a passé du temps hors de l'Empire, à l'est. Conseil et du Peuple ; la fin du texte sémitique apprend que
L'inscription d'Umm el-Amad dit qu'il a fondé à Vologésias chaque tribu doit lui dresser une statue dans le sanctuaire de
un temple des empereurs (K-rîcmvm [È]v OÀoya[mafü vaov son dieu, d'où sans doute la découverte du texte dans le
-réov I1::l�mnéov K[a't K[a.]81[1::pm]crav[m....l). On s'est pendant sanctuaire de Baalshamîn, où une des tribus avait son centre
longtemps étonné de cette fondation dans un territoire cultuel 195•
étranger, à plus forte raison chez l'ennemi héréditaire parthe, On voit donc bien ce qui se passe : le Caesareum est un
dont les relations avec Rome, même au milieu du ne siècle, lieu de cérémonies civiques importantes, impliquant la cité
n'étaient pas les meilleures. dans son ensemble et à travers toutes ses composantes
Le texte bilingue gréco-parthe, découvert à Séleucie, (tribus) ; il est cité d'ailleurs en premier, avant le grand
gravé sur la cuisse d'une statue d'Héraclès, a permis à temple, qui est le cœur religieux de Palmyre. En 171 donc,
G. W. Bowersock de proposer une solution très probable 191• moment de l'apogée du commerce caravanier à Palmyre
Le roi de Mésène, Mérédatès (ou Mithridate), chassé de son (d'après les inscriptions), c'est d'abord à cet endroit qu'on
trône par Vologèse III en 150-151, fut un souverain très honore un citoyen prééminent.
favorable à Rome et il semble que Vologèse, pour ne pas Le bénéficiaire reste malheureusement anonyme, mais
rompre de façon définitive avec les Romains, ait d'une on apprend par le même texte qu'Avidius Cassius, gouverneur
certaine manière maintenu de bonnes relations (de façade ?) de Syrie de 169 à 175, a reconnu ses mérites, signe très clair
avec ceux-ci après avoir chassé leur protégé. Quoi qu'il en de liens directs entre la capitale provinciale et Palmyre 196• Il
soit, la fondation, par un notable palmyrénien parmi les plus s'agit de toute évidence d'un citoyen de Palmyre (-ra�â1ç Ka't
illustres, d'un temple des Augustes est une preuve irréfutable �EÀTlCTWU TCOÀElTEÛ[µmoç XCXPlV]), mais, d'après la manière
d'attachement à la famille impériale. On peut trouver toutes dont on 1' honore ( au Caesa reum et surtout avec les
les raisons possibles à cela, mais il est remarquable qu'un félicitations du gouverneur), on peut sans doute conclure à
marchand dont les intérêts sont pour la plupart hors de un rôle important (au niveau provincial ?) du personnage en
l'Empire, juge utile de se placer sous la protection des question, qui est peut-être d'ailleurs citoyen romain.
empereurs jusque dans cet endroit reculé. On sait que ces félicitations, cette reconnaissance par
À Palmyre, l'existence d'un temple des Augustes, dans les autorités romaines de la valeur d'un citoyen, n'étaient
lequel on dédie des statues honorifiques 19", montre que la pas spontanées, mais étaient le résultat d'une transmission
dévotion impériale, si présente en Asie Mineure 193 par au gouverneur des félicitations décernées par ses
exemple, n'y est pas absente. Comme dans le reste de concitoyens. Jadis, H. Seyrig avait réuni le dossier des textes
l'Empire, les empereurs ont droit à un culte. concernant les témoignages de satisfaction pour les citoyens
On trouve ce sanctuaire placé, dans les textes, sur le de Palmyre 197• Comme lui, on peut distinguer différents types
même plan que ceux des grands dieux de la cité. L'inscription de félicitations : celles décernées par des dieux 198 ; celles
191 - G.W.BowERSOCK, 1989b, p. 162-168. Le texte est SEC 37. 1403. 196 - Sur Aviclius Cassius, voir annexe XII. 1.
192 - Palmyre I, n" 2 de l'époque d'Odainat, et J.CANTINEAU, 1936, p.280, 197 - H. SEYRIG, 1941b, p. 245-248.Ces exemples avaient été rapprochés
n" 20 (= BS n" 48) de 171 (repris et revu par DFD, p.309-312).Ajouter de celui d'Opramoas d'Oinoanda (TAM II, 3, 905) par H. Seyrig; voir par
peut-être J. CANTINEAU, 1933, p. 177 (Tctdmorea n" 3) avec les corrections exemple TAM Il, 905, I F: 'Orrpa.µôa.[v 'Arr]oUmvîou ok wu
de DFD, p. 312-315 (« une mention certaine des "Césars", mais [KaÀ]ÀlO'.0OD �LŒprnpo[u�lEVO]V 1)cp' U�tmv « Opramoas, fils et petit-fils
difficilement de "la maison des Césars", "Césaréum"». p.312). Cf. cl'Apollonios, fils de Kalliaclès, ayant reçu un témoignage de vous (les
G.W.BowERSOCK, 1976, p.353-354 pour une inscription, sans doute de habitants de Rhodiapolis)»; II A: 1[ap178Év-rrnv où p]ôvofv urr]o --cêi:iv
Palmyre et sans doute d'un prêtre du culte impérial. Ce personnage a reçu rrm[piornv rrÀEOVCY.Ktk, a[Uà] KO'.l urrà Au1dimv îOU KOlVOU]« ayant
une lettre de félicitations de l'empereur.Le texte H. SEYRIG, 1937. p.372. été honoré non seulement par ses patries à plusieurs reprises, mais aussi
fait aussi une allusion au culte impérial. Mais voir M.ÜAWLIKOWSKI, 1973a, par le koinon des Lyciens »; Il B: �mp8up178Év--coç KŒt urrà -roù
p. 49. qui paraît clouter de cette interprétation (voir aussi p.7): un don fait Kpa-ri010u l7YE�tôvoç 'IouÀÎou (J)pouyi« qui a reçu un témoignage aussi
pour « ... [lacune] ... et pour la conservation perpétuelle des empereurs» der excellent gouverneur Julius Frugi»; on pourrait multiplier les exemples
([rmvhàç Kat aimviou 8!ta�wv17ç -rmv Kupim]v aÙîOKpmôpmv) (en particulier les lettres à Antonin du koinon des Lyciens, avec réponse de
n'implique pas forcément un culte impérial.On place parfois le sanctuaire l'empereur), qui permettent de mettre en évidence les points communs avec
impérial à proximité de la section B de la Grande Colonnade, au sud de Palmyre (sur le personnage, voir aussi le chapitre Iv).
l'endroit où se trouvent toutes les statues de Worod et de l'entourage 198 - Il s'agit en fait du dieu Iarhibôl, comme le montrent les textes Jm, X,
cl'Odainat, en particulier les colonnes qui portent les textes CIS 3946-3947. 85 et 115, C!S3919 et 3932, 1-I.INGHOLT, 1932, p.279.On peut en rapprocher
193 - Cf.S.R.F.PRICE, 1984; M. SARTRE, 1995, p.191-192. les onze textes cités par J. T.Milik clans son livre sur les« dédicaces faites
194 - = J.CANTINEAU, 1936, p.278, n" 20. par des dieux» (DFD: ln\! XI, 68, 80, 83, 84 et 85 ; Palmyre V, n'" 3 et 14 ;
195 - Voir le chapitre II. CIS 3929 et 3966; BS n'" 40 et 41).
Chapitre III: Les activités des notables 123
faites par le Conseil ou par le Conseil et le Peuple 199 avec (mlkw dy mtqr' mzbn ') fait une dédicace à un empereur
parfois envoi d'une copie au gouverneur (lnv 114 = dont le nom a disparu 20-1_ Ensuite vient une dédicace de
µEl�mp[rû]p17KEV [Km]à KmpoÙç 8tà \j/llcplCT�tci1wv rcapà [...] l'époque des Sévères, de 203, par La[Àµ11ç Ma]À1xou 1[ou
KCXl BpüDHl Q) I1patCTEV1'l KCÙ 'IüDÀl Q) M[...u]TCmlKOlÇ « (le Bw]Àm8ouç àpx1EpEÙç Ka\ cru[�mocrialpxoç tEpÉwv �tëyÎcHou
Conseil) a témoigné à plusieurs reprises par des décrets 8rnu Li1oç B11[Àoul 205• Comme le cléclicant anonyme de
auprès de Bruttius Praesens et Iulius Maior, les l'inscription trouvée à Qasr el-Heir el-Sharqi 206, celui-ci aussi
gouverneurs» ; BS n° 48, à Avidius Cassius). Dans le cas est prêtre de Bel. Pour les trois personnages qu'on vient de
des textes CIS 3932 et Inv 115, même si cela n'est pas citer, le lien qui existe entre la prêtrise de Bel et le culte
précisé, il y eut sans doute démarche préliminaire de la ville impérial est remarquable, puisque Malikü dit Mezabbanâ
avant les félicitations du légat. On retrouve le légat dans est sans cloute en plus prêtre de ce culte impérial à Palmyre,
d'autres textes 200, et dans un cas exceptionnel l'empereur 201• alors que Malikü honore un empereur et que Shalmê Malikü
D'autres Palmyréniens enfin se sont vus féliciter, ou bien dédie des statues à Septime Sévère et cinq membres de sa
par une autorité anonyme ( CIS 3934), ou par les archemporoi famille 2117• Un autre texte fragmentaire 20 8, peut-être en
dans le cas de Septimius Worod ( CIS 3942). l'honneur de Marc Aurèle et Lucius Verus 209, fait mention
Pour être tout à fait complet, il faut ajouter un ou deux du culte impérial. Dans ce même texte sont aussi cités le
textes, où les félicitations n'ont pas de rapports directs avec Bois sacré, le sanctuaire de Bel et des dons faits en l'honneur
Palmyre (lnv 22, et peut-être Inv 102): à l'occasion de ces sanctuaires.
d'honneurs qu'un Palmyrénien rend à un militaire romain, Les faits se précisent: à nouveau, on trouve évoqués
l'inscription rappelle que celui-ci a été honoré par les des liens entre un des cultes principaux de la cité et
empereurs. l'attachement à l'Empire. Ce sont bien des notables qui se
On ne peut que souscrire à la conclusion exprimée distinguent au service des souverains, et même si on ne les
fortement par H. Seyrig, et rien, depuis la date où il écrivait, retrouve pas aux premières fonctions clans les provinces, sur
n'est venu contredire ses propos: « On voit, par les textes place, les preuves de leur attachement existent. Mais ce
que nous avons cités, combien la brigue, la soif et le snobisme dévouement aux empereurs et à leurs familles n'est pas
de l'approbation romaine ressemblaient chez les seulement le fait de notables, c'est la cité clans son ensemble
Palmyréniens à ce qu'ils étaient dans le reste de l'Empire ; (11 rcÔÀ1ç) qui érige une statue à 'IouÀi.a Maicra, sœur
et combien la vie publique y était liée à celle de la province d'impératrice ('IouÀÎaç LE�acrTÎÏç à8EÀcprî) 2 1• 1(
de Syrie» (p. 248). On en a une autre preuve, si besoin était, Ce n'est peut-être pas un hasard si c'est à l'époque des
dans l'existence des dédicaces impériales faites à Palmyre 202• Sévères, dynastie proche de la Syrie à bien des égards, que
On a un certain nombre de ces dédicaces faites par des les liens semblent le plus forts et les preuves de dévouements
militaires ou des officiels romains. Celles qui nous intéressent le plus nombreuses. Plus prosaïquement, on peut également
ici sont celles des notables, palmyréniens cl'origine. On mettre cela en rapport avec la présence des empereurs dans
s'intéressera plus loin à la place des fonctionnaires romains la région au moment des guerres parthiques, fréquentes de
parmi les notables de Palmyre, mais il faut commencer par l'époque cl'Avidius Cassius jusqu'à la fin des Arsacides en
ces gens aux noms typiquement locaux. 224. On ignore aussi la position de la cité lors de la prise de
On ne connaît pas les cléclicants de chacune des dix-huit pouvoir par Pescennius Niger, mais on sait qu'une partie de
dédicaces impériales en grec ou latin, mais parmi ceux qu'on la Syrie s'est ralliée (là encore pour des raisons de proximité)
connaît, trois sont de Palmyre. Le texte le plus ancien est à ce dernier et que si Palmyre a fait de même, les autorités
une dédicace à Hadrien, évergète et maître du monde, par locales ont peut-être eu tendance à vouloir se rattraper et à
un certain ïa1.oç 'IouÀÎoç MaÀ1xou u'toç... , citoyen romain faire du zèle pro-sévèrien. La situation est semblable à ce
(?) au patronyme typiquement arabe 203• Au mois d'août 193, qui se passe en Asie Mineure, ou clans le reste de l'Empire,
un prêtre et symposiarque de Bel, Malikü dit Mezabbanâ ce qui est une première chose à retenir. D'autre part, on
199 - Cf. textes cités ci-dessus : C!S 3931 (Conseil et Peuple + Iarhibôl Chalciclenorum.
+ lulius Priscus) ; lnv X, 115 (Conseil [et Peuple en araméen] + dieu 203 - H. SEYRIG, 1939, p. 321, n" 25.
n:mpo)oç [= Iarhibôl] + gouverneur); H. lNGHOLT, 1932, p. 279 (larhibôl 204 - lnv IX, 26; cf G. W. BowERSOCK, 1976, p. 352 sur le nom à restituer
+ patrie + gouverneurs). qui n'est pas forcément celui de Pescennius Niger.
200 - lnv X, 114; R. MoUTERDE et A. PornEBARD. 1931; H. INGHOLT, 1932, 205 - C!S 3970.
p. 279; lnv X, 55; BS n" 48 (= J. CANTINEAU, 1936, p. 278, n" 20); BSn" 45. 206 - Cf G. W. BowERSOCK, 1976, p. 350 (texte de 166 apr. J.-C.).
201 Pour! 'influent Soados, un des citoyens palrnyréniens les plus honorés : 207 - Sur les liens entre la symposiarchie et le culte impérial, voir chapitrer.
texte publié par R. MouTERDE et A. PornEBARD, 1931 (= SEG 7, 135; araméen 208 - H. SEYRIG, 1937, p. 372: O:lCûVlO'\.l 8[tO:�lOV1ÎÇ 1:èôv KDptco]v
dans DFD, p. 13); c'est pour ses actions entre 132, date de BS n" 45, oü on ŒÙ1:0Kpo:1:6pcov. Voir les remarques de M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 49.
ne mentionnait pas ce fait, et 144/145, qu'il s'est vu honoré de lettres 209 - G. W. BowERSOCK, 1976, p. 353.
impériales par Antonin et Hadrien. 210 - lnv X, 67. Voir au chapitre 1v pour les rapports entre Palmyre et les
202 - Voir en annexe XV, la liste de ces textes. On notera la place prise par membres de la famille impériale originaires cl'Érnèse.
l'unité de 1'armée romaine stationnée à Palmyre, la cohorte I Flauia
124 Les notables de Palmyre
retrouve le culte impérial dans les endroits où sont attestés manifeste d'attachement à Rome. Un cas est particulièrement
des notables palmyréniens (donc a priori commerçants). significatif, celui de Haîran, fils de Bônnê, qui, à moins de
Plus simplement, la citoyenneté romaine est un signe, vingt ans de distance, se voit honoré de deux trilingues. On
avant 212, des bonnes relations entre certains citoyens peut en faire sans doute un personnage en relations étroites
palmyréniens et Rome. Elle n'est pas très répandue, mais avec les Romains au milieu du(' siècle 215•
elle a des chances de s'appliquer principalement à des
notables (sauf peut-être dans le cas de vétérans des troupes Le degré d'intégration des fonctionnaires et militaires
auxiliaires) 211• Avant 212, sur les vingt-cinq attestations de romains dans la société palmyrénienne est une autre question
citoyens romains d'origine palmyrénienne rassemblées par de grand intérêt 216• Les seuls étrangers (ou presque 217) qui
D. Schlumberger, dix ne proviennent pas de Palmyre. On peut sont attestés dans les inscriptions trouvées en ville font partie
douter de leur retour éventuel à Palmyre 212• Si on enlève aussi de ces deux catégories. On a vu plus haut à propos des
de la liste les simples soldats, le nombre total de citoyens est militaires que des citoyens palmyréniens remerciaient à
assez maigre, pour presque deux cents ans d'appartenance à plusieurs reprises des militaires romains comme leurs
l'Empire. Ceux-là sont des notables qui ont dû rendre service bienfaiteurs ou amis. Ces derniers, en particulier les officiers
à l'Empire (D. SCHLUMBERGER, 1942-1943b, p. 53-54); on des unités stationnées à Palmyre, comme les préfets de l'Ala
trouve parmi eux différents gentilices, qui renseignent sur Thracum Herculianum 218 ou Tiberius Claudius Phi(lippus ?),
les souverains sous lesquels cette citoyenneté leur a été préfet de l'Ala I Ulpia des méharistes de Palmyre 219 par
accordée. C'est d'Hadrien que cinq familles tiennent ce droit exemple, ont des fonctions assez importantes pour être
de cité, c'est le chiffre le plus élevé, à mettre en rapport, bien honorés. On peut se demander si le fameux « préposé à
sûr, avec le passage de cet empereur à Palmyre 213• On peut Palmyre» 2211 du Tarif n'est pas justement l'officier
ajouter à cette liste les quatre familles le tenant de cet commandant l'unité en garnison sur place. Cela semble la
empereur ou de son successeur Antonin le Pieux. Trois solution la plus probable, même si on ne possède pas de
familles doivent ce privilège à Trajan (les Marci Ulpii). Pour preuve. Ainsi Tiberius Claudius Phi(lippus ?) est aussi un
le reste, on a à chaque fois seulement un ou deux exemples. citoyen de la cité (rroÀ2Î1:17]v TÎ7ç TiaÀ�rnp17[v]ëôv rro[À]Ecoç).
Notons quand même qu'une des familles de Marci Ulpii est C'est aussi le cas de C. Vibius Celer, préfet d'aile 221 qui est
celle du fameux Iarhaî 211• Il est dommage que l'inscription aussi synèdre (îov rroÀEÎT17v KO'.l crnvÉ8pov). C'est peut-être
Jnv X, 73 qui mentionne sans doute son père soit lacunaire, une fonction militaire, mais aussi administrative
et ne puisse renseigner sur l'éventuelle citoyenneté romaine ( « préposé» ?), qui les avait mis en relation avec les autorités
de ce personnage. Cette dernière est néanmoins possible, de la cité et qui était la cause des honneurs accordés.
sinon probable, puisque c'est seulement une vingtaine D'autres aussi semblent bien insérés dans la société de
d'années après la mort de Trajan qu'apparaissent des Palmyre. Julius Maximus, honoré par M. Ulpius Abgar en
mentions de membres de la famille (lnv X, 81, daté de 135, 135 (lnv X, 81), a été l'auteur d'une dédicace bilingue en
po11r le frère de 1\1. Ulpit1s Iarl1aî, 1A1.bgar). Les inscriptions ] ] 5 au 0E4) Èïn7KÔ4), preuve de son intégration aux cultes
trilingues, assez peu nombreuses, sont aussi un signe locaux (lnv XII, 33).
21 l - Ceux-ci, même non notables à l'origine, le deviennent sans doute, Antonin le Pieux (mentionné aussi en lm· X. 102).
une fois citoyens. Cf. la liste des citoyens romains de Palmyre dressée par 214 - On notera cependant que Marcus Ulpius Iarhaî appartient à la tribu
D. Sc1-1LUMBERGER, l 942-l 943b. On peut ajouter à cette liste un texte de Sergia, celle d'Hadrien, pour une raison difficile à identifier (délai entre
Rome, CIL V I, 3174: un certain Publius Aelius Annius eques sing(ularis) 1·obtention de la citoyenneté et l'inscription dans la tribu ?). Il est intéressant
Aug(usti), Palmyrenus. Depuis l'article de D. Schlumberger, la liste s'est que la seule inscription (/m X, 128) qui mentionne la tribu soit justement
1
allongée : avec la famille de Marcus Ulpius Elahbel, fils de Wahballat une dédicace à un officier de l'armée romaine.
(A. BoUNNI, 1986, textes n'" 3 et 18) ; RSP n" 136 (Publius Aelius) ; peut 215 - Il s'agit des textes M. RoDINSON, 1950, p. 137 et J. CANTINEALI, 1933.
être un Titus Aelius en RSP n" 119; H. SEYRIG, 1950, p. 242, n" 6 (Flavius p. 175 (= Tadmorea n" 2b). Sur le personnage et sa famille, voir le chapitre 1
Domitianus). Ce dernier, comme le Marcus Claudius (H. SEYRIG, 1959a, et les remarques de K. DuKSTRA. 1995, p. 97.
p. 58 = SEC !8, 618 = BE 1960, 403; cf. fig. 5) de 30-31 apr. J.-C. n·est 216 - Voir annexe XII.
sans doute pas un Palmyrénien. mais plutôt un militaire de passage. Après 217 - Si on excepte quelques cas particuliers (voir annexe XII. tableau cles
.
212, on a quelques Iulii Aurelii: le fils d'un Taîmarsû (Kh. As AD et étrangers à Palmyre) comme le cavalier nabatéen de CJS 3973 (mais à une
J. T1-::1x1uoR. 1985a. n" 5): Ateaqab (M. GAWLIKOWSKI. 1985. n" 13): un en époque où la Nabatène fait partie de l'Empire) et le fameux Worod. peut
lm• XII, 29; deux clans le texte M. GAWLIKOWSKI, 1970a, n" 5; un en RSP être cl' origine iranienne (cf. dernièrement A. SCHMIDT-COLINET. 1992 et
n" 163; un en PAT 1657; deux en PAT 2729 (et trois Aurelii); enfin trois E. WILL, 1996).
dans H. INGHOLT, 1962, p. 106. Pour les militaires, voir l'annexe XIII. 218 - lnl' IX, 22 et X, 125. Cette unité reste en poste à Palmyre jusque vers
212 - D. SCHLUMBERGER, l 942-l 943b, p. 53: « soldats qui, pour la plupart, 170.
n · ont jamais revu Palmyre ». 219 - /nl'X, 128.
213 - Même si deux bénéficiaires sur cinq ont fait au moins une partie de 220 - CIS 3913, Il. 129-130 : îü) Èv CTaÀ�l'llpülç n:-rantÉvq:>. Voir
leur carrière en Dacie. C'est aussi à cet empereur qu'ont été faites trois M. SARTRE. 1996a, p. 396.
dédicaces, un des ensembles les plus nombreux à Palmyre: H. SEYRIG, 1939, 221 - lm• IX, 23 =AE 1933, 207. L'unité en question est simplement appelée
p. 321, n" 25 (cité supra), lnv X, 103, et J. EuTING, 1887, p. 418, n" 119 « l'aile qui est stationnée ici » (-r17ç Èv8â8E EÏÀ17ç) : il s'agit probablement
(d'où JGRR III, 1026; Ch. CLERMONT- GANNEAU, RAO V II, p. 164-167). L e de l'ala I Ulpia singularium (cf. H.-G. PFLAUM, 1960, Ln" 155).
texte H . SEYRIG, 1939, p . 321, n " 2 6 est une dédicace à son successeur,
Chapitre III: Les actiFités des notables 125
Si ce ne sont pas des militaires, ce sont des fonctionnaires C'est un étranger, de haut rang, chargé par l'empereur de
romains, principalement financiers, comme par exemple remettre de l'ordre dans les finances troublées d'une cité 227•
MarcusAemilius Marcianus Asklépiadès, collecteur d'impôt C'est justement cette puissance et ce pouvoir sur les finances
et bouleute d'Antioche 222• Par ses fonctions et son statut de la cité qui sont la raison des remerciements du Conseil et
social, il peut inspirer des sentiments de respect aux plus du Peuple à ce bienfaiteur et sauveur de la cité, pour sa
grandes familles de la ville. C'est un membre de la famille bienveillance. Il n'y a plus d'autonomie financière de la cité
de Soados (son frère Neshâ, synodiarque), qui, avec sa en cas de difficultés et cet envoyé de l'empereur n'accomplit
caravane de retour de Spasinou Charax, lui dédie ce texte. pas une simple tâche de surveillance, mais il s'agit bien
Le statut de bouleute dans la capitale provinciale lui donne de remettre de l'ordre. C'est donc une fonction différente de
sans doute un prestige que vient renforcer son pouvoir de celle des fermiers des impôts et publicains dont on a parlé
collecteur d'impôt. On peut se demander laquelle de ces plus haut. Mentionnons encore, parmi les fonctionnaires
fonctions lui vaut la reconnaissance des caravaniers. Il est financiers, un affranchi de César, Kilix 228, dont la place parmi
probable qu'une caravane avait affaire de manière privilégiée les notabilités locales n'est pas assurée. Un nouveau texte
aux douaniers e t c ollecteurs romains à son retour trilingue, publié par M. Gawlikowski 22'\ mentionne les
d'expédition, et qu'une faveur d'un fonctionnaire romain publicains G. Virius Alcimus et T. Statilius Hermès, qui ont
n'était peut-être pas à négliger, mais les textes sont construit leur tombe en 56/57. Il faut noter le fait qu'une fois
désespérément muets sur ces sujets. Le fameux Tarif lui de plus il s'agit d'un texte trilingue dans le cas de ces
même n'a qu'une portée strictement locale. On peut aussi publicains. Le Titus Statilius Hermès en question est peut
imaginer que le bouleute d'Antioche a pu profiter de ses être bien celui à qui Germanicus a envoyé une lettre citée dans
relations dans la capitale syrienne pour faciliter les le Tarif 230•
transactions des marchands de la caravane à l'ouest de La présence romaine à Palmyre, sans être extrêmement
Palmyre 223• La maigreur de la documentation sur ces deux visible dans l'épigraphie (il n'en est pas de même
domaines empêche de conclure. dans l'architecture par exemple), est donc assez sensible
Treize ans plus tard, en 174, un autre fermier pour la taxe dans les domaines administratif ou militaire. Ces fonctionnaires
du quart est attesté. Petite différence, ce Lucius Antonins semblent dans de nombreux cas être bien intégrés dans
Kallistratos est remercié par un de ses agents au nom grec. la population de l'oasis et, au premier chef, parmi les
Le fait pourtant que cette dédicace d'un étranger à un autre notables. Dans le cas contraire, on voit mal quelles preuves
étranger soit trilingue (la langue officielle, celle des deux de tensions entre ces gens pourraient subsister. Ce qui
personnages concernés, celle du lieu), est la preuve d'un certain est conservé permet de dresser le tableau d'une cité dont
effort d'adaptation de la part des deux parties. Les les notables sont certes assez rares à aller chercher fortune
fonctionnaires financiers sont bien attestés depuis le I siècle à er
dans le reste de l'E mpire, mais manifestent pourtant
Palmyre ; dès 58, une trilingue est gravée pour un certain un attachement certain aux institutions et aux personnes
Lucius Spedius Chrysanthos, publicain qui consacre un qui symbolisent l'Empire, en particulier les empereurs.
tombeau pour lui et sa famille. Deux faits sont à considérer, Bien sûr tout cela n'est pas en contradiction avec le
d'abord la bonne intégration de cet étranger qui se fait faire un patriotisme local, que nous avons noté dans les deux
tombeau selon les mêmes modalités que les locaux, et une premières parties et qui se comprend aussi bien au sein
dédicace faite en partie dans la langue locale. Mais il faut bien de la polis grecque que dans une principauté sémite
voir aussi que c'est encore un étranger, un Grec, peut-être (sans exclure l'existence des deux à la fois). Encore une fois,
Syrien, qui représente le fisc impérial 225• Ce dernier, donc, il faut bien voir que ces notables sont d'origine sémitique, dans
utilise de préférence des étrangers dans ses relations avec la une cité aux institutions grecques et dans le cadre de
ville. l'Empire romain. Essayer de supprimer une de ces composantes
De même Fulvius Titianus, envoyé de l'empereur et ne peut conduire qu'à des contresens sur la spécificité de
logistès, n'appartient pas à l'administration municipale 226. Palmyre.
222 - lin• X, 29. On trouvera clans les annexes XII. 1-3 la liste de ces fils, Iamlikû, à qui l'assemblée avait donné à ferme le péage pour l'entrée
fonctionnaires, ainsi que celle des militaires attestés à Palmyre (ou au moins des chameaux clans la ville (M. GAWLIKOWSKI et Kh. As' AD, 1993,
cités par les textes). p. 163-172: inscription de 10/11 apr. J.-C.).
223 - Bien qu'on considère souvent que la route passant par Palmyre ait 226 - M. SARTRE, 1996a, p. 396. lnv X, 34.
court-circuité celle d'Antioche (M. GAWLIKOWSKI, 1988, p. 164). Mais on 227 - Sa présence est cl'ailleurs peut-être à mettre en rapport avec des
sait en définitive peu de chose sur les itinéraires empruntés par les désordres financiers dus aux nombreux travaux édilitaires qui caractérisent
marchandises à l'ouest de Palmyre. cette période à Palmyre (début 11' siècle).
224 - lnv X, 113 (inscription trilingue). 228 -Tarif (C/S 3913): 1. 93 du grec et 1. 62 de l'araméen. VoirJ . TEIXID0R,
225 - Voir F. M1LLAR, 1993, p. 324: il s'agit peut-être d'un publicain 1984, p. 101, 11. 255.
collecteur des impôts indirects romains, ou tout aussi bien d'un fermier 229 - JMP n" 113 (= M. GAWLIKOWSKI, 1998, p. 145-151).
collecteur des taxes locales pour le compte de la cité. Dans ce cas-là, il 230 - CIS 3913, II, 102-105 en araméen, et III, 181-183 en grec.
remplirait le même genre de fonctions que Atenatan, fils de Kafatùt et son
126 Les notables de Palmyre
E. ACTIVITÉS NON COMMERCIALES foncière. En tout cas, les sources sont pratiquement aussi
silencieuses qu'ailleurs sur ce point 233•
Le territoire de la Palmyrène, assez vaste, fournissait
La région dans son entier a été marquée par la présence
une partie au moins de la subsistance quotidienne des
d'une grande ville en son centre et de nombreux
habitants de la cité 231• On ne sait quelle part était confiée aménagements, qu'on met en rapport avec le développement
aux importations, mais il est clair que celles-ci ne pouvaient et l'apogée de Palmyre aux premiers siècles de notre ère, ont
subvenir à la majorité des besoins. Palmyre était certes une été repérés. Certains de ces aménagements sont en rapport
cité caravanière et commerçante, mais ses habitants ne direct avec ce qui a fait la gloire de Palmyre, le commerce. On
pouvaient pas tous être des marchands 232 et il y avait parmi a vu plus haut qu'on pouvait suivre la géographie de la présence
eux un certain nombre d'agriculteurs, dont les champs étaient palmyrénienne hors de 1 'oasis dans les inscript ions
soit dans l'oasis même, soit dans les environs. Plus loin de caravanières où des noms comme Spasinou Charax et
la ville, on sait par un certain nombre de textes et de Vologésias reviennent assez souvent 23�. À l'intérieur des
découvertes archéologiques qu'existaient aussi des limites de la région, il en est de même avec, par exemple, le
exploitations agricoles ou d'élevage. caravansérail de Gennae, qui est très certainement à identifier
Le problème qui se pose pour Palmyre est le même que avec le site moderne de Umm el-Amacl, où a été découverte
pour les autres cités de 1 'Antiquité. Les bases de la fortune l'inscription mentionnant ce nom. Situé à 22 km de la ville,
des individus restent inconnues : à Palmyre, les inscriptions c'est un site idéal pour une première étape sur la route vers
caravanières fournissent quelques éléments de réponses (ce 1'est 235• Il est clone en rapport direct avec les caravanes, mais
qui est déjà une originalité de la cité), mais le commerce lui ce n'est pas le cas de tous les sites qui sont connus en
même semble être en partie dépendant de la bonne Palmyrène. Ce n'est pas le lieu ici de faire la liste de toutes les
exploitation des zones rurales de Palmyrène. Pourtant, installations agricoles de la région, qu'on puisse ou non les
comme on le verra, il n'y a pas de documents qui mettent mettre en relation avec les nécessités du commerce
explicitement en rapport le commerce caravanier et caravanier 236• Ce qui importe plutôt, c'est d'essayer de
l'exploitation de la Palmyrène. D'autre part, les caravaniers déterminer la part d'influence des notables dans ces
ne sont pas tellement nombreux, surtout si l'on rapporte leur aménagements. Les textes sont ou inexistants ou peu explicites
nombre à celui des notables connus. Or, à part les textes qui sur le sujet, mais on peut malgré tout tenter cl'avancer quelques
les concernent, les sources sont, comme en Asie Mineure, hypothèses étayées par la documentation existante. En allant
muettes sur 1'origine des fortunes. On peut ainsi imaginer plus loin, il faut voir si on a affaire à un développement plus
qu'il en était pour une bonne part des notables de la ville, ou moins concerté, et si toutes ces initiatives, qui sont en même
comme pour ceux des villes d'Asie Mineure: une grande temps causes et conséquences du succès de Palmyre, ont connu
partie de leur richesse devait être fondée sur la propriété un essor similaire sur 1'ensemble du territoire de la cité.
231 - La population a été estimée à 150 000 ou 200 000 à l'apogée de la le commerce (voir chapitre IV). Si certaines villes d'Asie Mineure ont pu
cité (D. P. CRoucH, 1972, p. 241-250). Mais ces chiffres ont été discutés. bâtir leur fortune sur les campagnes qui les entouraient. il est probable
E. Will (E. WILL. 1990b. p. 104) parle de JO 000 à 20 000 habitants. La qu'il en a été de même pour Palmyre, avec en plus un apport certain du
population a pu augmenter de façon sensible au cours de la période pour commerce : comme on le verra plus loin, la Palmyrène a été mise à
atteindre un maximum à l'époque de Zénobie. Mais les chiffres de la contribution, et son exploitation devait suffire aux besoins d'une ville comme
population de Palmyre doivent tenir compte des ressources en eau de 1· oasis. Palmyre (voir ci-dessus pour la population de Palmyre). Voir aussi
même en faisant entrer en jeu les aqueducs et les qanats (voir aussi J.F. MATTHEWS, 1984, p. 170 (avec références), ü propos du commerce et
A. SCHMIDT-COLINET, 1992, p. 14, n. 44). Les chiffres de D. P. Croucl1 de la vie économique. Il établit une comparaison avec Ostie, un des seuls
semblent en tout cas élevés, quand on les compare avec ceux des grandes exemples où, à cause de la petite taille de la cité et de l'importance du port,
villes contemporaines, comme Antioche ou Apamée. les intérêts commerciaux permettaient d'acquérir une place clans l'élite
232 - Cf. J.F. MATTHEWS, 1984, p. 170-173. qui, àjuste titre, met l'accent civique. Il y a de fortes chances qu'à Palmyre plus qu'à Ostie la part de
sur l'importance de l'agriculture dans la vie et l'économie de Palmyre. Il l'agriculture et de l'élevage soit importante.
rappelle aussi que le fameux Tarif ( CIS 3913) a peu de rapport avec le 234 - Un cas particulier est peut-être celui de la localité de Qaryatein-Nazala
grand commerce caravanier, mais qu'il s'agit plutôt d'une loi dïntérêt local. au sud-ouest de Palmyre. sur une voie conduisant vers Damas (pl. 2). Cinq
233 - Sur les fondements de la richesse des notables de l'Orient romain (et frères se disent« Palmyréniens » (C/S 3911 de juillet 146; cf. DFD. p. 89
sur la faiblesse des sources), voir M. SARTRE, 1991, p. 169-174; P. Veyne et chapitre I) : la raison de leur installation à cet endroit reste inconnue.
( 1976, p. 105-106) souligne I ui aussi la primauté de l'agriculture comme Elle prouve en tout cas que les Palmyréniens n'étaient pas seulement
source de richesse, en citant W. Sombart : « le non-spécialiste ne se présents à l'est et au nord de Palmyre, mais occupaient l'ensemble de la
représente pas clairement que le flot de marchandises qui entre dans une région (voir plus loin pour le cas du barrage de Kharbaqa. à mi-chemin
ville et en sort ne nourrirait pas un seul moineau » (sur les ressemblances, entre Palmyre et Nazala).
en volume d'affaires au moins, entre les marchands médiévaux et antiques, 235 - R. MOUTERDE et A. POIDEBARD, 193 J, p. ] 05-] J 5.
voir H. W. PLEIŒT, 1983, p. 131-144). L'Empire romain n'était certes pas 236 - Voir par exemple E. WILL, 1992, p. 20-24, ou J. F. MATTHEWS, 1984,
nourri par le commerce caravanier (ni même Palmyre), ce qui ne signifie p. 162-163 et 171-174. Dans la même lignée, il faut tenir compte des travaux
pas que les marchandises transportées par les caravanes n'avaient pas de faits autour cle la ville pour l'adduction d'eau (qanats oufoggaras).
valeur : on n'a malheureusement aucune idée réelle des profits dégagés par
Chapitre Ill: Les actii•ités des notables 127
Contrairement à ce qu'on croit parfois, la steppe qui térébinthes notamment» 2-12• C'est l'activité humaine qui est
entoure Palmyre ne constitue pas un environnement en grande partie responsable de la désertification actuelle
totalement hostile à l'homme. On a longtemps cru que, sauf même si ont existé, « dans un passé plus ou moins reculé,
à les antérieurs à romaine étaient des 1J.e1·1::;,1��s plus humides».
rares. La rareté des fouilles ayant conduit à la découverte de Il semble bien que l'époque romaine ait justement profité
vestiges antérieurs à l'époque hellénistique (ou même d'une de ces périodes, particulièrement favorable,
romaine) dans la ville est sans doute une raison de cet état caractérisée par « une avancée des cultures vers le sud, une
de fait 237• Pourtant le site est attesté dès le début du second densification de la couverture végétale et une meilleure
millénaire et l'existence d'une route à travers le désert permet alimentation des nappes» 2-1'. On a en tout cas des preuves
de penser qu'un aménagement minimal du désert (sources, textuelles de ]a plus grande densité végétale à l'époque
haltes) devait avoir eu lieu. On peut même penser que la romaine :-1-1_ Tout cela explique que la Palmyrène ait connu à
ville et ses habitants avaient une certaine importance sur les ce moment un développement exceptionnel, conséquence
routes commerciales entre la Mésopotamie et la côte à mais aussi cause de sa prospérité économique due au
]' époque du Bronze moyen (par l'intermédiaire de Qatna). commerce. Ce dernier n'aurait sans doute pu avoir un tel
La route a connu une importance particulière au moment de essor sans l'existence sur place de conditions matérielles
la rivalité entre le royaume de Haute-Mésopotamie et favorables.
d'Assyrie et celui d'Alep 238• L'environnement de la ville se caractérise aussi par une
C'est à la fin de cette période, semble-t-il, que les grande diversité, et par conséquent, par des ressources
Amorites sont remplacés par les Araméens. Ce sont ces variées : montagnes autrefois boisées au nord-ouest, steppe
derniers que le roi assyrien Tiglat-Pileser vient combattre désertique (mais exploitable sous certaines conditions
au début du xi" siècle avant notre ère, en empruntant une comme à el-Kowm) au sud et au sud-est, mais aussi les terres
route qui traverse le désert depuis !'Euphrate, franchi à la cultivables de la plaine de l'ouest. La présence à Palmyre
hauteur du site de Deir ez-Zor. On sait aussi que le site de même de la source Efqa, non potable 2-15, mais condition sine
Nazala (Qaryatein aujourd'hui) est occupé 2'�, l'occupation qua non de 1'existence de l'oasis et de ses cultures, a permis
de la région ne se limite donc pas à Palmyre. la création d'une agglomération au contact des différentes
Bien plus, on sait depuis quelques années (fouilles à el zones qu'on vient de définir. C'est cet ensemble (la ville et
Kowm depuis 1965) que l'occupation de la région remonte son territoire, mais les limites en sont imprécises) qui forme
au moins au Paléolithique. La localité d'el-Kown, située à une unité dans le texte du Tarif, ce que le texte appelle aussi
égale distance de Palmyre, Deir ez-Zor et Raqqa, a donné « la ville et sa banlieue » 2-16• On a peu d'idées sur ce
son nom au bassin qui l'entoure (400 km2 ) et sur lequel près qu'étaient les relations mutuelles entre ces différentes parties
de 150 sites paléolithiques ont été découverts 2-1°. Il s'agit du du territoire et sur la manière dont les notables pouvaient
site le plus riche découvert jusqu'alors, mais il en existe avoir un ancrage local dans telle ou telle localité ou zone.
d'autres, comme, plus près de Palmyre, un site du De même, on sait que la Palmyrène du nord-ouest
Paléolithique moyen (grotte de Douara à une quinzaine de étudiée dans les années 1930 par D. Schlumberger avait un
kilomètres de l'oasis) 2-1 1• peuplement antique en grande partie semi-nomade, et en
Ces travaux ont également l'intérêt d'attirer l'attention partie arabe. C'est ce qu'on conclut du moins au vu de
sur le fait que la végétation de la région était beaucoup plus l'onomastique locale et des noms de divinités vénérées dans
développée, en particulier dans les zones de montagnes qui les temples fouillés dans ce massif montagneux 2-17• Mais on
caractérisent une grande partie du nord de la Palmyrène. On aimerait avoir quelques renseignements sur ]e peuplement
en a des preuves pour l'époque historique, avec l'existence d'autres zones, parfois plus proches de Palmyre, comme celle
d'un « assez grand nombre d'arbres, les pistachiers- du barrage de Kharbaqa à 60 km à l'ouest (pl. 2).
237 - R. Du MESNIL DU BUISSON, 1966, p. 181. semblable ». Il é:�joute plus loin que le Djebel Muntar qui surplombe Palmyre,
238 - H. KLENGEL, 1996, p. ] 59-163. était autrefois connu sous le nom de « Montagne des térébinthes », ce qui
239 - Il est cité dans une lettre publiée par G. Dossin, Archii•es royales de est une preuve de l' existence d'une couverture végétale plus dense
Mari, XV, 1954, p. 135, n" 2 (xvm' siècle). qu'aujourd'hui.
240 - J.-M. LE TENSORER, 1996, p. 43-61, et M. MousT, M.-C. CAUVIN et 245 - Voir pourtant le texte cité par D. P. Crwurn, 1975, p. 155, n. 17.
alii, 1996, p. 75-84. Voir ici pl. 2. 246 - « Banlieue » est la traduction utilisée par J. TEIXIDOR, 1984, par
24] - T. AKAZAWA, ] 996, p. 63-73. exemple p. 103, ligne 112. Le mot araméen « qq' » est l'équivalent du
242 - P. SANLAVILLE et M. TRABOULSI, 1996, p. 32. grec << xcopi.ov » et signifie proprement ville ou village. C'est en tout cas
243 P. SANLAV!LLE et M. TRABOULSI, ] 996, p. 32-33. un signe que clans les environs de Palmyre existaient un certain nombre cle
244 - Remarques de J.F. MATTHEW S, 1984, p. 171, sur la référence localités en relation de dépendance économique avec l' oasis.
surprenante cl a ns le texte du Tarif ( CIS 3913, II. 114 du texte araméen) à 247 - PNO, p. 124-128 et 133-134. Voir, sur la question de l' origine ethnique
une taxe sur les pommes cle pin ('strbyfy") et « tout ce qui leur est des habitants de Palmyrène, le chapitre rr.
128 Les notables de Palmyre
L'occupation de la reg10n n'a pas que des raisons de fait, on peut essayer d'établir certains de ces liens d'après
pastorales et militaires (voir chapitre 11) ; comme ailleurs, quelques textes.
on a sans doute pratiqué aussi l'agriculture pendant les années Le premier est gravé sur un autel et mentionne un certain
où les précipitations le permettaient 248• Or, ces pratiques sont Obaîan, fils d'Hermès 25\ Or on connaît dans l'épigraphie
toujours en cours à l'époque moderne 249• Dans ce cas-là, le de Palmyre un Malikû, fils d'Hermès Obaîhan 255• Certes
principal danger couru par les récoltes provient des troupeaux l'orthographe des noms diffère, on a 'byn br IJJmy dans un
et des ·nomades, et il est clair qu'une présence permanente cas et ]11111s 'bylm dans l'autre, mais il est possible qu'il
de troupes ne peut que favoriser les entreprises s'agisse des mêmes noms 256• De même, ce rapprochement
d'agriculteurs 250• pose un problème de date puisque le texte de Palmyre porte
Comme on l'avait déjà noté pour les stratèges une date précise (août 249), alors que celui de Palmyrène
commandant ces détachements, il faut malheureusement (malheureusement aussi sans provenance connue) n'en a pas.
reconnaître qu'on n'aiTive à établir aucun lien entre les noms Néanmoins une date tardive n'est absolument pas à
connus par ces inscriptions et des familles de Palmyre. Alors exclure 257, ce qui fait qu'on peut au moins proposer de
qu'on présuppose des liens familiaux entre les grandes rattacher ces deux personnages à la même famille, sans
familles notables et les tribus établies en Palmyrène, peu de pouvoir beaucoup plus préciser.
preuves concrètes viennent appuyer ces théories (voir supra Un autre rapprochement prosopographique a été fait, à
le § C pour le cas de Zebîdâ et le clan Haumal). Le cas est partir d'un texte de Palmyrène sans provenance précise. On
flagrant pour les textes découverts par D. Schlumberger lors a pu avec vraisemblance l'utiliser pour compléter un texte
de son exploration de la Palmyrène du nord-ouest. Les plus anciennement connu à Palmyre même (PNO n" 73 et
statistiques sont révélatrices : on a quatre-vingt-six textes texte C/S 4022) êsg. À partir de ces textes et de quelques autres
araméens, quelques textes latins et grecs 251, mais une dizaine se rattachant à la même famille (H. INGHOLT, 1926, p. 129 et
de textes safaïtiques 252• Les seuls textes bilingues sont les textes funéraires C/S 4322-4326), on a pu dresser un
araméens-safaïtiques, c'est dire si on a là aussi affaire à un tableau généalogique de la famille 259 que J. T. Milik a
milieu sémitique peu touché par l'hellénisme. Les auteurs complété 260• Or dans le texte publié par H. Ingholt
de ces textes ont de grandes chances d'être en majorité des (H. INGHOLT, 1926, p. 129) apparaît un Iarhaî Agrippa (y1J1y
pasteurs, éleveurs de chevaux, et de n'avoir que des rapports 'g1p') symposiarque et honoré par cette inscription en 243,
lointains avec les grandes familles notables de Palmyre. qui est un cousin éloigné des gens mentionnés dans
Pourtant si, comme on le dit souvent, ces installations l'inscription de Palmyrène. On est là incontestablement dans
ont été rendues possibles grâce aux capitaux fournis par les la même famille, car les rapprochements prosopographiques
grands marchands de l'oasis 251, il est étonnant qu'on n'en sont certains 261, et qui plus est, dans une famille de la bonne
retrouve aucune trace dans les textes qui sont conservés, soit notabilité, puisque, outre une tombe semble-t-il assez
parce qu'un membre de ces familles aurait été chargé de la riche 262, il y a dans la famille un symposiarque (le Iarhaî
s11r,leillai1ce cle ces élcvrages, soit pot1r toL1te a11tre raiso11. Et Agrippa déjà cité) et au moins un prêtre (son grand-père).
248 - Voir le témoignage de D. Schlumberger (PNO. p. 131 ). sur la ([Ka]Q'îWp) et visiblement importé (p. 56 et 133). Les textes militaires
possibilité de cultures non irriguées en Palrnyrène du nord-ouest. En ce qui (p. 86-87) comportent des noms qu'on peut identifier comme thraces.
concerne ] 'est de la région, il faut noter que la lecture b:;,c!y ' indication de l'origine ethnique de certain.� des soldats en garnison clans la
(«moissonneurs») de la ligne 2 de l'inscription J. TEIXIDOR, 1962, p. 63, région (voir annexe XJI. 2).
n" 1 (provenant de la dépression de Qa'ara en Jraq) a été contestée par 252 - Liste clans PNO, p. 134.
l'éditeur lui-même. Il préfère maintenant lire f?.-;ny' («magasiniers ») et met 253 - Par exemple D. Schlumberger, clans PNO, p. 132-134.
le terme en rapport avec le commerce caravanier (J. TEIXIDOR, 1984. p. 25). 254 - PNO n" 77, p. 173-174: 'byn br hnny. Lïnterprétation cle J11111y
Dans ce cas. on ne peut pas tirer les mêmes conclusions que comme une transcription du nom grec Hermès est acceptée par J. K. Stark
G. W. Bowersock sur les pratiques agricoles des Palmyréniens (1971. p. 84).
(G. W. BowERSOCK, 1989a. p. 68). Un texte funéraire de Bazuriyye à 24 km 255 - H. INGHOLT, 1935, p. 102. X.
au sud de Palmyre (J. CANTINEAU, 1930a, p. 548. n" 14 = M. GAWLIKOWSKI, 256 - Ce rapprochement est fait par J. Starcky (in PNO, p. 173-174), mais
1970b. p. 206. n" 6) est utilisé par J. Teixiclor (1984. p. 71) comme preuve J. K. Stark (1971. p. 63) distingue les cieux noms. sans mentionner la
de la prospérité due à ragriculture dans les régions agricoles de la possibilité d'un rapprochement.
Palmyrène. La concession de sépulture mentionnée dans le texte se fait en 257 Les dates de ces textes. lorsqu'elles sont indiquées. sont comprises
effet pour une somme. importante. cle 120 deniers. On peut certes parler de entre 147 et 270 apr. J.-C.
prospérité pour cette famille. le lien avec l'agriculture est plus ténu. 258 - PNO, p. 170-171 avec les explications des auteurs du recueil
249 - Voir clans le livre d'O. D'Hont (1994), le chapitre lll sur ragriculture épigraphique (H. Ingholt et J. Starcky):«les personnages sont les mêmes,
pratiquée par les tribus semi-nomades du Moyen-Euphrate. Ce n'est qu'en et s'il y eut deux autels, leurs dédicaces furent sans cloute semblables».
cas de précipitations exceptionnelles (au moins 250 mm au lieu des 130 mm 259 - J. Starcky in PNO, p. 172, avec corrections de H. Ingholt, p. 177.
qui sont celles de la région en moyenne) qu'on pratique ces cultures d'hiver 260 - DFD, p. 261-266 avec tableau généalogique à la page 265.
(ibid., p. 54). 261 - Même si le degré exact de parenté est moins sûr:voir les différentes
250 - Sans compter que les soldats sont eux-mêmes des nomades et que les propositions de J. T. Milik, H. Ingholt et J. Starcky.
«agriculteurs » de même peuvent provenir cle leurs rangs. 262 - Voir les reliefs sur les plaques de fermeture de /ocu!i portant les textes
251 - Voir PNO ; ce sont soit des textes concernant des soldats en poste CIS 4322-4326.
clans des fortins cle la région, soit un relief portant un seul mot grec
Clwpitre Ill: Les actÎl'ités des notables 129
La principale restriction à l'interprétation tentée plus haut La construction de citernes n'était de toute façon pas
est que l'origine en Palmyrène du nord-ouest du texte n" 73 susceptible de nécessiter des capitaux importants. Ce n'est
n'est pas assurée et qu'on en est réduit à des conjectures sur pas le cas pour cl'autres ouvrages cl'irrigation repérés dans
la présence éventuelle de cette famille. Certes il ne provient la steppe et autour de Palmyre. Là encore il faut citer ce
apparemment pas de Palmyre même (à la différence de l'autel qu'écrivait D . ...,,,_,.,1 t.1 r.11,Je.�rrrF•r
1 voulait savoir« cl'où venait
CIS 4022 ?), mais on ne peut guère aller au-delà. De toute l'argent qui a permis la construction d'ouvrages d'art tels
façon, la relative imprécision du texte (accomplissement d'un que le barrage de Kharbaqa ou l'aqueduc de Qasr el-Heir
vœu) ne permet pas de le mettre en relation avec les ech-Charqi » ; il conclut que « les capitaux qui se sont
éventuelles activités spécifiques à la région des membres de investis là sont ceux que concentrait à Palmyre le commerce
la famille. C'est pourtant un des seuls rapprochements qu'on international » 265• Le barrage de Kharbaqa, construit à
puisse faire. l'époque romaine, irriguait une région rurale située à 50 km
On voit par là que la situation est loin d'être claire. au sud-ouest de la ville. Long de plus de 350 mètres, il
Pourtant D. Schlumberger conclut avec des arguments pouvait contenir environ 5 millions de mètres cubes d'eau,
vraisemblables à l'influence des notables installés en ville qu'on emmagasinait pour l'utiliser pendant la saison sèche
cl a ns le développement de la région 26}. L'absence en C'est « un système complexe de réserve cl'eau,
Palmyrène du nord-ouest de vestiges datant d'une période destiné d'une part à l'usage domestique (bain, habitation,
antérieure à l'époque romaine n'a pas été contredite par des château), cl'autre part à l'irrigation (jardin), enfin à la force
découvertes récentes. Pourtant ce qu'on a vu des découvertes motrice (moulin) » 2 Il s'agit là de monuments d'une autre
{,(i.
de vestiges paléolithiques en différents endroits de la ampleur que les simples citernes des régions montagneuses.
Palmyrène montre qu'une occupation assez dense du pays a Ils n'ont d'équivalent que les installations complexes qui
pu avoir lieu sans forcément faire rentrer en jeu une influence furent construites à Palmyre même pour l'approvisionnement
urbaine extérieure. La situation est peut-être différente dans en eau des habitants de l'oasis 2r'7•
la zone montagneuse, où la présence de nomades sédentarisés Un système cl' aqueducs, de conduites souterraines
a été rendue possible par la construction en grand nombre (f'oggoras et qonots) 268 avait été créé pour alimenter non
de citernes, indispensables dans une région caractérisée par seulement la population, mais aussi des fontaines publiques,
l'absence de points cl'eau permanents. Devenue habitable comme les trois nymphées de la Grande Colonnade, ou
de façon durable, la région est devenue le royaume de encore des thermes (par exemple sur la Grande Colonnade,
l'élevage 26 et peut-être aussi de l'exploitation des bois. On
-i un peu après le sanctuaire de Nabû). Pourtant l'absence de
est très mal renseigné sur l'existence, probable, d'une toute fouille ou publication détaillées ne permet pas de
agriculture au moins de subsistance en certains endroits. Ces donner des dates et des précisions sur l'01igine de ces diverses
constructions de citernes furent suivies de l'établissement canalisations. C'est seulement pour l'aqueduc occidental
de villages. Une quinzaine ont été repérés par qu'on possède quelques renseignements complémentaires
D. Schlumberger. À ceux-ci s'ajoutent quelques sites daté de la deuxième moitié du ne siècle, il serait indépendant
occupés par des fortins. C'est de ces derniers que proviennent du système des qo11ats et.f'oggoras 269• Ce qui est sûr c'est
les rares textes gréco-latins de la région. Ils ont moins à voir qu'un apport d'eau ne se limitant pas à la source Efqa et aux
avec l'exploitation agricole de la Palmyrène qu'avec un désir quelques sources du site était nécessaire. Quant à savoir
bien compréhensible de surveillance de cette partie de la comment s'étaient décidées ces constructions, on ne peut
région par les autorités romaines. Ce n'est peut-être pas un qu'en rester à des conjectures.
hasard si une des rares mentions de soldats réguliers (hors La place des notables dans ces aménagements reste.donc
de Palmyre) se trouve justement à l'ouest de la ville, dans un mystère. Comme on le verra quand on parlera
une région jamais citée dans les inscriptions caravanières. cl'évergétisme, il est difficile de donner beaucoup cl'exemples
263 - D. Schlurnberger clans PNO. p. 130-134: « (cet aménagement des !'Euphrate en 1934.« lorsque des investisseurs citadins étrangers au groupe
citernes) se fit certainement lui aussi, avec le concours des capitaux des ageclat installent cle lourdes pompes[... ] pour étendre les surfaces cultivées »
grands marchands palmyréniens [ . . . ] : seule !"existence, au désert même, (O. D'HüNT.1994. p. 46). Dans ce cas aussi le développement urbain dépend
d'un centre urbain de première importance pouvait les rendre rentables» de la richesse urbaine. On regrette cl'autant plus de ne pas avoir de documents
(p. 132). Que la présence dePalmyre et ses besoins en animaux de trait ou explicites sur les constructeurs de ces barrages antiques (et sur leurs
chevaux aient été une incitation à l'installation de nomades est peu financiers... ).
discutable. Qu'on puisse en conclure à une intluence directe de notables de 266 - Sur ce barrage, voir Y. CALVET et B. GEYER, 1992. p. 79-87, et
Palmyre est autre chose.Voir pourtant les notations parallèles de J. Weulersse D. SCHLUMBERGER, 1986, p. 2-3.
(J. WEULERSSE, 1946, p. 88) qui met en évidence la domination des villes 267-D.P.CROUCH, 1975,p. 151-186.
sur les campagnes. 268 - Sur ces termes. voir D. P. CROUCH. 1975. p. 160-173, et
264 - C'est grâce à cela qu'on explique l'existence de la cavalerie lourde J.F. MATTHEWS, 1984, p. 171.
qui, au m' siècle, fait la force de l'armée dePalmyre. 269 -VoirM. BARANSK1.1997.p. 7-17. L'aquecluc amenait de l'eau depuis
265 - PNO, p. 13 l. On peut établir un parallèle intéressant avec la situation une colline située à 12 km à l'ouest de la ville.
du xx' siècle.où la modernisation de l'agriculture débute sur les berges de
130 Les notables de Palmyre
à Palmyre de ce genre de bienfait de l'aristocratie marchande Il est difficile de dire là encore que les notables jouaient un
locale. On sait qu'à l'époque de Dioclétien, les thermes ont rôle quelconque. L'exemple des salines de !'Euphrate ne
été rebâtis, mais ce n'est pas le fait d'un notable local 270• permet pas de préciser si la récolte était le fait de gens
Pour le reste, on peut procéder par analogie : la construction modestes ou aisés.
des colonnades a donné lieu à un certain nombre
d'inscriptions dédicatoires de la part de généreux Dans beaucoup de ces domaines, l'intervention des
évergètes 271• On peut supposer que les nymphées et les notables, si elle est probable, est difficilement prouvable.
canalisations qui y conduisaient ont été aussi construits grâce De manière peu surprenante, c'est pour le commerce
à des dons de citoyens de l'oasis. Peut-être en a-t-il été de caravanier que notre documentation est la plus riche. Dans
même pour les aqueducs divers qui parcourent la Palmyrène. son cas, on peut établir que l'intervention des notables est
D'un autre côté, comment ne pas considérer le fait que au fondement même du fonctionnement du système. Mais
l'investissement devait être beaucoup plus important pour certaines comparaisons ethno-archéologiques (cf. les travaux
un édifice qui pouvait conduire de l'eau sur plusieurs cl'O. D'Hont) ou d'époque préhistorique utilisées plus haut
kilomètres? Dans ce cas, on ne comprend pas qu'on n'en montrent comment les nomades, presque sans intervention
ait aucune trace épigraphique, alors qu'un évergète, s'il y des milieux urbains, ont leur part propre dans l'exploitation
avait participé, aurait eu toutes les raisons de s'en glorifier. des ressources naturelles. Il faut donc conclure avec prudence
En fait, nous n'avons de précisions sur l'exploitation et sur l'extension de l'influence réelle des notables (ne serait
la mise en valeur des ressources de la Palmyrène que pour ce qu'à cause des limitations de notre documentation).
le sel, grâce au Tarif. On sait qu'existent vers le sud-est de D'autre part une question se pose après l'étude des
Palmyre, à une dizaine de kilomètres, de vastes salines, principales activités « professionnelles » des notables. Il
toujours exploitées aujourd'hui 272• Elles sont une source s'agit de savoir quelle part ces activités occupent réellement
importante de gain pour les habitants de l'oasis 273 dans le : clans les relations entre le notable et la communauté qui
Tarif au moins une douzaine de lignes sont consacrées à la l'entoure. N'existe-t-il pas des éléments plus fondamentaux
taxation du sel . « La vente du sel à Palmyre est l'objet qui définissent le statut de notable en tant que tel? On a
cl' un monopole spécial : le fisc impérial devait exiger des surtout vu la manière dont les notables agissaient vis-à-vis
Palmyréniens un gros impôt sur les salines de la ville et de de l'extérieur (Rome, les nomades ou la Mésopotamie), mais
la région et le fermier était chargé d'obtenir la somme prévue toutes leurs actions ont aussi en toile de fond un effort pour
en prélevant un as par modius de sel» 275• Mais l'exploitation acquérir ou conserver une position sociale. On peut donc
elle-même dépendait des propriétaires du sol qui pouvaient essayer de pousser la recherche clans une autre direction et
vendre leur sel. On n'a pas dans l'épigraphie de Palmyre étudier la manière dont les textes rendent compte de
d'autres mentions de ce commerce; tout au plus peut-on l'influence des notables dans la société clans laquelle ils
supposer que les fermiers du sel étaient des publicains du vivaient et quels sont les moyens qu'ils utilisaient pour rendre
même type que ceux dont on a parlé plus haut (le Lucius visible cette influence.
Speclius Chrysanthos de l'inscription CTS 4235 par exemple).
270 - J. CANTINEAU, 1930b, n" 49, et H. SEYRIG, 1931, p. 321-323. 273 - J. TEIXIDOR, 1984, p. 78-80.
271 - Par exemple CIS 3955 pour quelques colonnes de la Colonnade 274 - C/S 3913, II, 69-73 et 130-136 du texte araméen, et 116-120 du texte
transversale. grec.
272 - Sur cette activité, pratiquée dans la zone de !'Euphrate par des jeunes 275 - J. TEIXIDOR, 1984, p. 78.
filles et des femmes qui en ont l'exclusivité, cf. O. D'HoNT, 1994, p. 37.
INFLUENCE NOTABLES
connues à ce jour, l'aspect le plus évident semble être la On peut évidemment tenter de mettre en rapport les
manière dont ces personnages sont représentés sur les différents types de costume avec des pratiques culturelles,
1
documents figurés, et en particulier leur costume • voir politiques, différentes. Il semble pourtant difficile de
tirer des conclusions, en particulier parce qu'il est très rare
qu'on possède les portraits et les statues des personnages de
1. LE COSTUME COMME SIGNE D'APPARTENANCE SOCIALE:
premier plan dans la cité. Ainsi, on ne connaît pas d'images
LES PRÊTRES
d'Odainat, ni de Septimius Worod, ni de Marcus Ulpius
Les nécropoles ont en effet livré un des ensembles Iarhaî, et la liste pourrait être bien plus longue. H. Ingholt a
artistiques les plus importants fournis par la Syrie et même certes proposé de reconnaître Odainat dans une tête barbue
l'Empire dans son ensemble. La vogue de la sculpture connue en au moins deux exemplaires ( ig. 34), mais, en
f
palmyrénienne depuis sa redécouverte au xv11° siècle a permis l'absence de preuves, il ne peut s'agir que d'une hypothèse 2•
aux musées du monde entier d'exposer des bustes et des Comme l'a proposé récemment A. Schmidt-Colinet 3,
reliefs provenant de Palmyre. Cet art permet aussi de toucher un même personnage est peut-être représenté sur le couvercle
du doigt certains aspects de la civilisation de la Syrie romaine. d'un sarcophage des années 225-250, couché en habit perse,
Les vêtements ornés que portent les personnages sculptés, et sur la face antérieure, habillé en toge (fig. 35). Mais aucun
combinés aux plus rares découvertes de vestiges de textiles détail ne permet de déterminer les fonctions précises du
dans les tombeaux de Palmyre et de Doura-Europos .j.
personnage du couvercle Celui du grand côté est
renseignent sur le luxe de certains costumes. explicitement désigné comme un prêtre par le modius sculpté
Comme l'ont montré toutes les études sur ces sculptures, à côté de lui 5• Si on accepte l'identification des deux
Palmyre est un exemple tout à fait représentatif d'un monde personnages, cela implique en tout cas que les différents
mixte où se mêlent les influences grecques et latines, costumes peuvent être portés selon les circonstances. De plus,
sémitiques mais aussi iraniennes, comme par exemple comme l'a montré R. Stucky 6, les prêtres de Palmyre
l'usage du pantalon associé à la tunique à manches (fig. 31). peuvent être représentés vêtus de costumes syrien, iranien,
Ce costume d'origine iranienne semble caractériser les grec ou romain. Il est intéressant de constater que, selon la
notables de Palmyre qui le portent concurremment à la théorie de A. Schmidt-Colinet, les prêtres peuvent ne pas
tunique grecque à manches courtes qui s'arrête aux genoux porter les insignes sacerdotaux dans certaines circonstances.
ou bien à la toge (fig. 32). On peut porter par-dessus Or cette interprétation est tout à fait vraisemblable, à la
l'himation, manteau couvrant tout le corps. Un costume plus réserve près que l'on ne sait pas vraiment quels étaient les
proprement local est souvent représenté dans les sculptures thèmes des représentations sur les sarcophages, et s'il n'y
montrant des hommes et des dieux en armes, à Palmyre et avait pas, par exemple, des figures imposées, limitant
aux alentours (fig. 25). La tunique à manches longues est l'autonomie des décorateurs. Quoi qu'il en soit, on peut se
portée au-dessus d'une grande pièce d'étoffe roulée autour demander quelles sont les conditions dans lesquelles un
cle la taille et qui tmïïbe sur les jambes, mais est ûuverte sur prêtœ n'était pas présenté en tant que tel sur un relief,
le devant. Ce dernier détail permet de monter à cheval. Le principalement un relief funéraire. Ce qui fait peut-être la
costume féminin est plus simple, d'origine locale sans doute. différence dans le cas de ce sarcophage est que la structure
Les cheveux, souvent retenus par un diadème, sont couverts particulière de ce monument en fait un objet sur lequel on
par un morceau de tissu, c'est l'élément le pl us peut représenter sous plusieurs aspects le même personnage.
caractéristique. Il devait sans doute être possible de s'en Cela permet bien sûr d'augmenter le nombre de manières
servir pour cacher le visage, mais on ignore ce qu'il en était dont les notables palmyréniens pouvaient mettre en valeur
dans la vie quotidienne (fig. 33 ; voir chapitre v). leur propre image. De plus, la combinaison des modes
1 - Pour un bilan sur le costume des Palmyréniens, E. WILL, 1992, p. 95-102 5 - C est l'interprétation la plus probable de cette coiffure particulière. Voir
et 106-111. Voir aussi M. A. R. CoLLEDGE, 1976a, p. 139-152. les remarques de R. Stucky (R. STUCKY, 1973): « Comme le mortier
2 - H. lNGHOLT. 1976. p. 115-119 et 136 (pl. Ill. 1-4) à propos d'une tête de n'apparaît jamais clans les scènes profanes et comme les bustes coiffés du
Copenhague et d'une d'Istanbul. Voir la discussion ü ce sujet de E. WILL, mortier portent souvent la boîte ù encens et le balsarnaire, qui sont
1992. p. 183-185 avec photos de la tête de Copenhague. E. Equini Schneider dïncontestables instruments de sacrifice, il est permis de reconnaître clans
( 1993, p. 131, légendes des fig. 33-34) les date de la fin du II' siècle. ces images celles de membres du clergé palmyrénien. La statue du
Récemment, semble-t-il, d'autres têtes du même type ont été découvertes ü personnage vêtu ü la romaine, rend probable que les personnages tête nue,
Palmyre (communication personnelle de M. Gawlikowski), sans qu'on dont le mortier est posé sur un coussin ou un pilier, sont aussi ü considérer
puisse assurer qu'il s'agit bien d'Odainat. Voir aussi E. EQUIN! Sc1-INEIDER, comme des prêtres. Il se peut que la différence tienne à la provenance
1993, p. 137, fig. 37-38, pour œ qui est peut-être un autre portrait d'Oclainat. ethnique du prêtre ; le Romain couvrait lors du sacrifice sa tête d'un pan de
3 - A. Sc1-1M101-CouNET et Kh. As'Ao, 1995, p. 40-42. Le sarcophage sa toge ; l'Arabe, lui, sacrifiait tête nue. » (p. 175)
provient du temple funéraire n" 176 et est exposé ü présent clans la cour, 6 - R. SrncKY, 1973, p. 170-171. Pour l'iconographie des prêtres, J.-C. Balty
devant l'entrée du Musée de Palmyre. (J.-C. BALTY, 1996, p. 441, n. 37) ajoute aux signes caractéristiques énumérés
4 - A. Sc1-IMIDT-COLINET et Kh. As'Ao, 1995, p. 41 y voient un caravanier par R. Stucky « la présence du lourd manteau agrafé par une fibule sur
( « einheimischer KarmFl//lenherr »). Néanmoins, la présence du costume ]"épaule droite et celle d'une large ceinture portée très haut sur la tunique,
iranien et du cheval ne suffit pas ü appuyer cette déduction. qui paraissent exclusivement caractériser les prêtres ».
Chapitre IV: L'ùifluence sociale des notables 133
romaine et parthe permet de proclamer cette double reliefs funéraires ne le font pas pour les mêmes raisons que
appartenance, dont aucun des deux aspects n'est les autres habitants de la ville, justement parce que c'est un
véritablement privilégié par rapport à l'autre 7• signe d'appartenance à l'élite de la cité. En effet, il n'y a
1 1 1
La place des dans la société ,,,u,·,� ,1 ,e,n,n,e pose aucun moyen de savoir s'il n'existait pas des pauvres,
d'ailleurs un problème assez intéressant 8• C'est le seul cas sans moyens de s'offrir des tombeaux avec reliefs funéraires.
à peu près sûr où la fonction du personnage peut se déduire À ce sujet, on pourrait considérer que les prêtres font partie
de son costume, ou au moins d'une partie du costume. Le de l'élite de la cité, en tout cas du monde des notables,
mot qui signifie « prêtre» (kmr) est entièrement absent dans justement en raison de leurs fonctions. Mais une théorie très
9
•
les épitaphes des nécropoles On est donc forcé de se tourner différente peut être proposée, qui verrait clans la hiérarchie
presque uniquement vers les plaques funéraires pour en des prêtres un calque de la hiérarchie sociale de la cité en
identifier un certain nombre grâce à leur coiffure particulière général. Dans cette dernière hypothèse, ce ne serait pas à
(fig. 37) 10• C'est seulement sur certaines tessères qu'on peut cause de leurs fonctions, mais parce qu'ils appartiennent à
pousser l'enquête un peu plus loin. Quelques-unes peuvent telle ou telle famille que les prêtres trouvent une place
donner le même type d'indication que les plaques funéraires d'honneur dans les nécropoles de Palmyre. Les prêtres
puisqu'on peut y reconnaître des prêtres à leur coiffure, sans pauvres seraient inconnus comme le sont en général les
que leur fonction soit indiquée épigraphiquement 11• Seul un catégories les moins élevées de la population.
petit nombre d'entre elles comporte l'expression kn11y' dy Sans permettre de trancher entre les deux solutions, une
bl (ou kmiy bl) qui signifie « prêtres de Bel», avec, en remarque s'impose. Le nombre de bustes qui représentent
12
général, un nom sur l'autre face • On peut en déduire des prêtres est relativement important, comme peuvent le
sans trop de risque d'erreur qu'il s'agit du nom d'un des montrer les exemples cités en note, sans souci d'être
prêtres, sans doute le premier d'entre eux. D'ailleurs d'autres exhaustif. Cela permet au moins de mieux mesurer
tessères précisent que le personnage dont le nom est inscrit l'importance sociale de ces fonctions (mais difficilement le
est le rb mrzb', le « chef du thiase», ce qui se traduit en rang dans l'échelle sociale). D'autre part, les familles de
grec par symposiarque 13• premier plan de la ville ont pratiquement toutes des
En s'intéressant aux prêtres de rang plus modeste plutôt représentants qui exercent des fonctions sacerdotales ; ce
qu'aux symposiarques, on peut être amené à un certain nombre qui distingue les couches les plus élevées est que leurs
de constatations sur leur statut. Comme on l'a vu au premier représentants sont symposiarques, plutôt que simples
chapitre, il ne semble pas y avoir de prêtre qui ait aussi eu des prêtres 15• Il est bien sûr difficile de tirer un bilan global cl ' une
fonctions et des magistratures civiles. Dans l'ensemble des documentation somme toute lacunaire, mais on ne peut
textes qui vont avec des reliefs de prêtres, on peut reconnaître s'empêcher de penser que les prêtres sont sur-représentés
un certain nombre de membres de grandes familles : en clans l'échantillon connu, peut-être parce que ces fonctions
CIS 4458, le personnage appartient aux Bené Aabeî En i-1_ permettaient cl'acquérir ou de maintenir sa place dans l'élite
CIS 4402, il s'agit d'un cousin de Marcus Ulpius Elahbel, de manière relativement aisée. Il faut pourtant rapprocher
bien connu par la tour funéraire familiale, comme par sa cette forte présence des prêtres clans la documentation des
contribution aux constructions du sanctuaire de Nabû (fig. 38). faits mis en évidence à propos de l'évergétisme de Palmyre.
Comme on le voit, les prêtres appartiennent clone assez Les Palmyréniens n'étaient peut-être pas les plus religieux
souvent aux bonnes familles de notables de Palmyre. En fait, des hommes, ils n'en consacraient pas moins une grande
on peut se demander si les prêtres qui apparaissent sur les part de leurs occupations aux activités religieuses 10•
7 - En ce sens,A. SCHMIDT-COLINET et Kh. As'AD,1995. p. 42. 12 - RTP 10-29. Comme on peut le vérifier aux planches I et II cle RTP,
8 - On remarquera que les attestations épigraphiques et iconographiques cette formule est accompagnée cle la représentation cle personnages coiffés
ne semblent concerner que des prêtres,mais qu'il n'est jamais question cle clu moc/ius.
prêtresses. Il s'agit bien sûr d'une différence majeure avec le monde gréco 13 - Le mot araméen apparaît sur les tessères RTP 27 et 30-35. En traduction
romain, clans lequel des femmes jouent un rôle religieux cle premier plan. grecque, l'expression complète, qui n'existe pas sur les tessères, est
On reviendra sur cet aspect clans le chapitre suivant. Il semble pourtant que cruµnocrî.apxoç tmv toù 8rnù Litàç B11Aou tEpÉrov (<< symposiarque des
certains cultes sémitiques aient eu des desservants de sexe féminin. mais prêtres clu dieu Bel »),par exemple en CES 3942. Le même personnage est
ces dernières ne sont pas attestées à Palmyre. Les seules femmes cle aussi àpXtEpEÛç du grand dieu Bel (voir un autre cumul cle fonctions clans
l'iconographie religieuse (les femmes voilées cle la poutre du temple de G. W. BowERSOCK, 1976,p. 349-355 = AE 1976,687). Sur ces fonctions et
Bel) assistent seulement à la cérémonie, dissimulées derrière leur voile. les divers titulaires cle la fonction,autant que les sources permettent de le
9 - La seule exception concerne non un prêtre, mais un symposiarque, savoir,voir chapitre 1.
Bôlanos Bôlaî (BmÀavoç Z11vo�wu bwly br zbyd'), cle la famille cl'Aaîlamî 14 - Son nom a disparu,mais sa généalogie est conservée (à partir clu père
et Zebîdâ, clans le texte J. CANTINEAU.1930b,n" 14. ou du grand-père): [...] mlkw br lsms br fmbl "by (« Malikû, fils cle
10 - En feuilletant les planches clu C/S, par exemple les numéros 4118. Lishamsh,fils cle Hennibel Aabeî » ). Comme on l'a vu au chapitre 1,il peut
4231,4243,4250.4285,4288,4298,4322-4324,4364,4395,4402,4458, s'agir du même personnage que le proèdre de fm, X,59,mais rien ne l'assure.
4465,4497,4504. 4561-4562. 4576. 4589,4607. Mais on pourrait en trouver 15 - Voir le cas des familles étudiées au chapitre 1.
de nombreux autres exemples. 16 - Voir par exemple DFD, p. 107 : « ces modestes documents [les
11 - Par exemple,RTP 177-178. On trouvera clans les tables alphabétiques tessères],qui témoignent de façon éloquente de l'intense activité des thiases
de RTP. la liste des tessères en rapport avec le « Personnel sacré » (p. 198). et des collèges religieux,professionnels. familiaux,de la ville caravanière ».
134 Les notables de Palmyre
Il est dommage qu'on ne puisse mettre en rapport de différent (voir chapitre v1). De même, la forme générale des
manière précise les différents costumes et les signes sépulcres est distincte. On a en fait l'impression à Zeugma
distinctifs qui apparaissent cl a ns l'iconographie avec les d'être en présence d'une société beaucoup moins
divers cultes connus à Palmyre. Comme l'avait remarqué hiérarchisée, beaucoup moins fière de ses généalogies (très
R. Stucky, il est tout à fait probable que la nature variable courtes et souvent absentes).
des feuillages qui constituent les couronnes des prêtres L'impression de richesse qu'on peut ressentir devant les
correspondait à des cultes différents 17• De même les monuments funéraires de Palmyre est bien moins accentuée
empreintes des tessères donnent des renseignements sur les dans les nécropoles qui entourent la ville double de Séleucie
liens entre certaines familles de Palmyre et les nombreux et Apamée. Les grands tombeaux monumentaux, tels les
sanctuaires de la cité 18• Mais le caractère extrêmement concis tours ou les temples funéraires, n'existent qu'en petit nombre,
des textes des tessères rend cette recherche assez difficile dans la région de Zeugma, et sauf quelques exceptions, les
dans l'ensemble. tombes souterraines sont plutôt plus petites. Seules quelques
tombes, surtout celles situées au pied de l'acropole de
Séleucie-de-1' Euphrate, présentent des dimensions
2. pALMYRE ET LA HAUTE-MÉSOPOTAMIE : ORIGINALITÉ ET
comparables à celles des hypogées de Palmyre (avec des
RESSEMBLANCE
plans forts différents), mais comme on le verra ceux-ci
Même si le décor monumental de Palmyre se rapproche n'appartiennent pas forcément aux classes les plus élevées
de manière croissante au fi l du temps de celui des villes de de la population. On a pu retrouver pour ces quelques tombes
l'Orient romain, il faut encore une fois souligner la de Zeugma des traces de peinture, qui prouvent qu'elles
permanence des caractères indigènes. Comme l'usage de la pouvaient avoir des décors assez somptueux. Mais les restes
langue, ces phénomènes ont été mis en rapport avec la fierté de reliefs, à l'entrée de ces tombeaux, sont du type le plus
des notables de Palmyre, qui se glorifiaient sans cloute autant courant. D'une manière générale, les personnages figurés
de leur culture impériale commune (monuments, inscriptions sur les stèles elles-mêmes semblent être plus modestes : on
grecques) que de leur prestige local et de la vigueur de la n'a jamais le même déploiement de richesse que dans certains
culture palmyrénienne. De fait, l'art typiquement portraits de femmes de Palmyre, en particulier au m" siècle 20•
palmyrénien, tel qu'il apparaît en particulier sur les stèles Même si le contexte est moins riche et moins
funéraires, possède des caractéristiques propres, qui impressionnant qu'à Palmyre, il faut souligner l'utilisation
empêchent toute confusion, même avec des œuvres d'art de de la langue locale dans une région très proche de l'Empire
régions proches. À Doura-Europos, certes, un certain nombre romain : en effet, Zeugma (sur la rive droite) est, depuis au
de monuments peuvent prêter à confusion, mais ils se moins le l"' siècle av. J.-C., sur la frontière, mais du côté
rattachent peut-être plus aux courants qu'on retrouve en romain. Il s'agit très nettement d'une cité grecque, puisqu'on
Palmyrène qu'à ceux de Palmyre même. connaît des habitants de la ville dans des inscriptions de
l\1ag11ésie- d11-l\1éanclre. l'Jéa11111oins, on 11e connaît
moins une zone dans laquelle les reliefs funéraires ont une pratiquement rien des institutions et les textes funéraires sont
parenté assez forte avec ceux de Palmyre. Il s'agit bien sûr muets sur ce point 21• On n'y a pour l'instant trouvé que des
du groupe qui provient des environs de la vallée de inscriptions grecques, même si l'onomastique est très
!'Euphrate, dans la région de Zeugma et Hiérapolis 19• La fortement marquée par les composantes sémitiques de la
confusion est facilitée non seulement par le style en effet population de la ville.
très proche, mais aussi par l'utilisation d'un calcaire dont Il est pourtant tout à fait significatif qu'ait pu se
l'aspect et la couleur sont très semblables à celui qui était développer à proximité (de l'autre côté du fleuve) une culture
utilisé à Palmyre (fig. 39). Néanmoins, les ressemblances araméenne propre, puisqu'on a trouvé des inscriptions
n'empêchent pas de fortes distinctions que ce soit dans le araméennes dans la nécropole d'Apamée, la ville jumelle
style, dans l'usage d'une symbolique absente à Palmyre située en face de Zeugma, du côté mésopotamien. Il s'agit
(aigles et corbeilles), ou d'un formulaire épigraphique d'une forme ancienne de syriaque, comme celle employée à
17 - R. STUCKY, 1973, p. 178. présentent comme palmyréniens des bustes funéraires qui proviennent
18 - Pour un certain nombre de ces rapprochements prosopographiques, manifestement cles villes proches de la vallée de l 'Euphrate (voir
1
voir RTP. p. 203 ; . . T. Milik clans DFD (passim) s'est aussi beaucoup servi K. PARLASCA, 1982, p. 9). C'est le cas de quelques reliefs inscrits
cles tessères pour reconstituer un certain nombre de familles palmyréniennes (inscriptions clans SEG 39, 1590 et 40. 1420-1421) proposés à la vente en
(voir à lïnclex épigraphique de DFD, p. 465-469). 1989-1990 par la firme Sotheby.
19 - SurZeugma, voir principalementJ. WAGNER, 1976,D. KENNEDY, 1998 20 - Pour les bijoux qui recouvrent certaines Palmyréniennes, voir entre
et sur les fouilles actuellement en cours, la« Chronique des fouilles » dans autres D. MAcKAY. 1949, p. 160-187 et M. A. R. CoLLEDGE, 1976a, p. 96-98
Anoto!ia An1iq11u. Plus particulièrement sur la sculpture funéraire, outre et 150-152.
l'ouvrage de J. Wagner et celui cle K. Parlasca (1982), on peut citer 21 - Voir M. SARTRE, 1997, p. 153-174. Une inscription découverte en
1. SKUPINSKA-LOVSET, 1985, p. 120-129. Cette parenté et la popularité de la octobre 1998 permet peut-être de lire le mot 0ou11.11, ce qui en ferait le
sculpture palmyrénienne ont fait que très souvent les catalogues de vente premier témoignage d'institutions civiques découvert sur place.
Chapitre IV: L'iTzfluence sociale des notables 135
Édesse et dans sa région ( nord de la Mésopotamie) à la même funéraire , ou le maintien de traditions indigènes même pour
époque 22• On peut même penser que cette forme d'écriture des bâtiments très influencés par 1'architecture occidentale
a des traits communs avec la cursive palmyrénienne, ce qui on peut prendre l'exemple du temple funéraire 11° 36, dans
serait un signe de l'influence de l'oasis jusque dans cette lequel la présence de loculi typiques des tombes
région. L'existence d'un dénommé Zabdibôl dans une palmyréniennes plus anciennes est combinée avec un plan
inscription grecque d'Édesse pourrait aussi signaler la qui comporte une cour à péristyle 2". II est clair que c'est ce
présence à cet endroit de gens originaires de Palmyre, même genre de phénomène qu'on peut retrouver dans la culture
si le monument lui-même n'a rien de palmyrénien 23• des notables, autant qu'on puisse le dire cl' après la
On retrouve de toute façon des points communs avec documentation existante.
Palmyre, mais si l'on considère l'art palmyrénien comme
une manifestation d'indépendance, on est amené à se
3. LA CULTURE DES NOTABLES ET LE CERCLE DE ZÉNOBIE
demander ce qui fait la différence avec Zeugma, ou encore
le Hawrân, deux zones assez fortement individualisées de L es phénomènes culturels étant inconnus dans leur
ce point de vue, mais dans lesquelles, du fait des ensemble, on ne peut que faire des suppositions sur
circonstances politiques, on n'a pas souvent parlé de l'éducation des Palmyréniens et son contenu 26• Il semble
tentatives autonomistes. Ce qui frappe avant tout à Palmyre, clair que les parties les plus cultivées de la population et
c'est l'unité de style, surtout pour une période qui s'étend sans doute l'élite en général devaient savoir parler le grec,
sur presque trois siècles. L'ampleur de la documentation, mais on ignore ce qu'il en était dans la vie quotidienne. Peut
ainsi que la constance des caractéristiques propres à la être parlait-on grec avec ses pairs et araméen avec ses
sculpture funéraire palmyrénienne, ne peut que confirmer domestiques, mais il ne peut s'agir que de suppositions, et
l'impression d'un style qui exprime le désir de représentation l'usage de l'araméen, excepté avec les étrangers, semble,
des notables de Palmyre, peut-être aux dépens de somme toute, plus normal. On a vu par différents exemples
l'originalité. On pourrait faire le même type de remarques que le grec peut apparaître comme la langue des gens qui
pour les inscriptions dont le formulaire est souvent assez veulent faire preuve de leur culture et montrer qu'ils ont
répétitif. C'est sans doute aussi le signe que la société intégré la civilisation hellénique. Pourtant, à aucun moment
palmyrénienne se reconnaissait dans un certain nombre de cela ne signifie qu'ils ont pour cela abandonné leur langue
valeurs qu'elle maintenait autant qu'elle le pouvait. propre, bien au contraire.
Il faut attendre la fin de la période pour qu'avec Comme on peut le regretter, on ne possède aucun
l'apparition de la famille d'Odainat, la situation change. À témoignage sur ce qui se faisait au théâtre de Palmyre, ni sur
ce moment, les formes culturelles et politiques gréco l'éventualité d'une culture littéraire (en araméen ou en
romaines semblent atteindre leur apogée à Palmyre, mais grec) 21• On sait que de grands écrivains et intellectuels de
c'est un mouvement constant depuis le début de notre ère, culture grecque sont sortis de villes proches comme Émèse,
au moins dans l'élite sociale. En même temps, cela n'a pas Apamée ou même Damas. L'émergence quasi contemporaine
fait disparaître tous les éléments locaux de la culture des de la littérature syriaque aurait pu avoir des parallèles à
notables, ce qui explique aussi la grande constance de Palmyre, ou à tout le moins on peut supposer que les
certaines formes d'expression, comme la sculpture parchemins syriaques de !'Euphrate ont eu des équivalents
22 - Sur les inscriptions syriaques anciennes en général, H. J. W. DRIJVERS Aranwic, the existence c�f the practice c!oes not necessarily imply any
et J. F. HEALEY, 1999. L es inscriptions syriaques d' Aparnée-de-l'Euphrate training abol'e eleme11tC11y le Fel. After ail, the tribesmen who le.fi thouscmc!s
sont en cours de publication par A. Desreumaux. CJf Sqf'aitic inscriptions in the Syrian desert sure/y never went to school. »
23 - Le texte est le suivant Ètouç 17TCD ' (ou t ') �t11[v]oç yopmcxî.ou On ne peut néanmoins exclure le fait qu'il a pu exister à Édesse et ailleurs
Zcx�[E?]fü�wÀoç « L'année 488 (ou 388). mois de Gorpiaios, Zabclibelos». des écoles où l'on apprenait aussi la langue locale, mais peut-être aussi un
Il a été publié par J. B. SEGAL, 1970, p. 30. n. 5 et pl. 14b (cf. peu plus, et pas seulement en grec. Après tout, c · est pendant ces années
H. J. W. DRIJVERS, 1980. p. 24, 11. 18 et pl. 8 cl'où notre texte ; K. PARLASCA, que se mettent en place les structures qui permirent les grands courants de
1982, p. 15 et n. 151-152). La date correspond à 76-77 ou 176-177 (solution traduction du grec en syriaque: voir J. TEIXIDOR, 1992, p. 119-126.
préférée par J. B. Segal). L'existence d'un écrivain comme Bardesane (né au![' siècle) pourrait le
24 - Cela ne signifie pas qu'il n'y ait pas eu cl'évolution des formes. mais il prouver, car il est l'auteur d'une des premières œuvres syriaques connues,
semble bien que les composantes et leurs proportions restent en grande même s'il savait le grec. L'influence hellénique sur lui est forte, mais il a
partie les mêmes. pu créer une œuvre syriaque (F. MILLAR, 1993, p. 474-475). D'autre part. il
25 - A. SCHMIDT-COLINET et Kh. As'Ao, 1995. p. 43-44 (voir ici fig. 40 et est vrai qu'on aimerait bien savoir quelle place avait vraiment à Palmyre
chapitre v1). « l'éducation formelle» dont parle M. Gawlikowski. Même sur la culture
26 - Voir clans JRS (84, 1994, p. 244-245), les remarques de M. Gawlikowski hellénique, il n'existe pas cle sources à Palmyre. à la différence de
clans son compte rendu de F. MILLAR. 1993 : « The formai edurntion nombreuses autres villes de Syrie.
dispensed in Syria was entirely Hel/enic, and standard. With the o!Jl'ious 27 - On peut citer par exemple l'opinion de F. Millar ( 1993, p. 329): « It is
exception of the Jewish com11111nity, there is no reason to suppose the essential to stress that in this sense we lwl'e no comprehension at al/ c�f the
existence c�f'sc/100/s maintaining nati1•e !iterary traditions (if'any). EFen in culture CJf Palmyro, or el'en cl whether tlzere was ct Polmyrene culture in
Palmyra, \l'here the "epigmphic habit" exceptionally produced texts in ll'hich on educoted Pct!myrene 11·ould lzm•e been brought up. »
136 Les notables de Palmyre
dans l'oasis : il est tout à fait possible que des actes juridiques et de sa fonction d'argapet, mais aussi dans 1' adoption par
ou des contrats aient été rédigés en araméen 2H. On en a une Odainat du titre de« roi des rois », typique des grands rois
preuve indirecte par certains textes de caractère légal qui iraniens. Il faut pourtant noter que l'appellation n'est pas
concernent principalement le domaine religieux. Il n'est bien forcément caractéristique des seuls souverains de Ctésiphon
sûr pas étonnant que ce type de règlement soit rédigé en et qu'elle peut être l'écho d'influences indirectes 33•
araméen, et on a vu qu'une partie considérable des L es signes de l'influence iranienne sont en fait assez
inscriptions religieuses sont dans cette langue, ce qui est limités à ce moment. L'art « parthe », c'est-à-dire l'art de
normal dans un domaine assez conservateur 29• L e droit des l'Empire parthe ou de style gréco-oriental pose un autre type
tombeaux donne une impression plus contrastée, puisque les de problème. Il est prédominant dans la sculpture, on le voit
formules employées en araméen et en grec pour empêcher très bien pour les œuvres découvertes dans le sanctuaire de
les aliénations et fixer le montant des amendes correspondent Bel 34• L'importance du costume dit« parthe » prouve aussi
assez bien aux formulaires connus par des parallèles dans que l'influence iranienne touchait la population jusque dans
les deux langues (voir chapitre vr). son mode de vie. De même, les données de l'onomastique
Néanmoins, les parchemins de la vallée de l'Euphrate permettent de penser qu'une partie de la population de
proviennent d'une région (en particulier Édesse) dans Palmyre pouvait être en relations étroites avec le monde
laquelle la langue officielle n'est le grec que de manière iranien. Mais, comme on 1'a vu, il est impossible de prouver
récente. Au contraire, Palmyre appartient à l'Empire depuis qu'un habitant de Palmyre est vraiment d'origine iranienne,
le début du r" siècle de notre ère, ce qui peut être une cause
1
ethniquement.
de différences dans les usages administratifs. L es textes Il y a pourtant un problème, qui empêche de passer du
officiels qu'on connaît à Édesse, ou du moins ceux qui sont domaine artistique et culturel au domaine socio-politique
en rapport avec la famille royale, comme celui de la reine (au sens d'une influence iranienne qui tendrait à détacher
Shalmat 30, sont en syriaque (fig. 41), alors qu'à Palmyre les Palmyréniens de l'Empire romain, pour les rapprocher
l'usage du grec (au moins en bilingue) est constant, et en des Empires arsacide puis sassanide). Parmi les influences
particulier pour les inscriptions qui concernent la famille « orientales » (au sens géographique) qui arrivent à Palmyre,
d'Odainat. il est quasiment impossible de faire la différence entre ce
C'est de toute façon à propos de cette famille qu'on a qui est proprement iranien, et ce qui est plutôt sémitique :
les seules sources extérieures sur ce que pouvait être la pourtant Babylone devait être différente de Ctésiphon et de
culture des notables de Palmyre. Récemment J. Teixidor a Séleucie-du-Tigre. Faute d'une connaissance suffisante de
soumis la personnalité de Zénobie, et en particulier son rôle ce(s) milieu(x), on peut pointer des directions, établir des
culturel, à une réévaluation convaincante 31• Dans la seconde comparaisons (avec Hatra en particulier), mais il est souvent
partie du m" siècle, ce milieu est marqué par des influences difficile d'être vraiment précis. Or on n'a sans doute pas
d'origines diverses. L'influence perse, quoique la plus faible, assez prêté attentionjusqu'à présent à la diversité des cultures
est néanmoins bien visible 32, non seulement dans la orientales, aussi bien dans les régions qui sont à l'intérieur
personnalité de Worod, ne serait-ce qu'à cause de son nom des frontières de l'Empire romain qu'en dehors. Tout comme
l'hellénisation et la romanisation n'avaient pas le même nouveau arrive à Palmyre, mais justement pas en provenance
visage et pouvaient connaître elles-mêmes diverses du monde gréco-romain.
modalités, les phénomènes d' orientalisation ( ou de D'autre part, comme on l'a signalé déjà à plusieurs
réorientalisation !) doivent prendre en compte cette possible le monde sémitique n'est pas unifié. Même si elles
variété cl'origines. font partie du monde sémitique et partagent un certain
Un autre point souligné par J. Teixiclor est la probable nombre de coutumes communes, les populations arabes et
présence de Manichéens à Palmyre et le bon accueil que araméennes de l'oasis sont ethniquement différentes, au
Zénobie réserva à des missionnaires lors de leur passage moins à l'origine. S'y ajoutent des populations d'origine
dans la ville 35• Il ne s'agit certes pas d'un courant iranien, ni moins précise (Amorites, Phéniciens, Babyloniens ?) qui se
par l'origine de son fondateur, ni par ses liens avec des sont installées clans l'oasis à des dates indéterminées. Les
doctrines j ucléo-chrétiennes 36, mais par l'origine mariages communs, ou au moins les échanges culturels entre
géographique, il se rattache au monde perse. Les les diverses tribus qui ont peuplé Palmyre, ont fait qu'il est
missionnaires qui passèrent à Palmyre devaient ainsi venir devenu difficile à l'époque envisagée de déterminer qui était
de l'Empire sassanide, à un moment où les liens entre l'oasis arabe et qui était araméen. De plus, les différentes coutumes
et cet empire restent mystérieux. La période où Zénobie est ont certainement connu des évolutions, sous l'influence
au pouvoir est marquée par une atténuation de la tension gréco-romaine ou iranienne, mais aussi à cause des relations
est-ouest, ce qui explique aussi que les Palmyréniens aient nouvelles entre tribus, et des contacts entre Arabes et
pu se tourner vers l'Égypte, l'Asie Mineure et la Syrie, sans Araméens. L'aspect des divers panthéons et le nombre des
risque du côté oriental. Cela peut expliquer l'arrivée facile sanctuaires, preuves des mélanges religieux, démontrent ce
de Manichéens à Palmyre, sans compter qu'à ce moment, il caractère hétérogène de la culture palrnyrénienne, même si
se peut que le mouvement se soit déjà répandu depuis on ne tient pas compte des éléments gréco-romains.
quelques années clans le territoire de l'Empire romain. De plus, d'autres cultures sémitiques ont pu toucher
Les documents manichéens qui mentionnent Zénobie l'oasis, même si on en a moins de preuves. Des témoignages
proviennent aussi bien d'Égypte que cl'Asie Centrale, ce qui chrétiens tardifs comme celui d'Athanase d'Alexandrie ,
prouve la large influence de la secte et la popularité gagnée ainsi que le témoignage contemporain de Longin, s'il est
par la reine. D'un autre côté, plus encore que pour les authentique 3\ mentionnent d'hypothétiques tendances
témoignages sur le «cercle de Zénobie», les sources sont judaïsantes de Zénobie. Pourtant, aucun élément à Palmyre
toutes extérieures à Palmyre et ne mentionnent la ville qu'au même ne peut venir renforcer cette idée. Même si l'existence
sujet de la propagation de la f oi manichéenne. Sur le site d'une communauté juive est attestée, on.ne sait pratiquement
lui-même, les preuves de cette influence sont inexistantes. rien de son importance et de la profondeur de son
Le cas du manichéisme permet d'attirer l'attention sur cette implantation dans la ville 39• De plus, il semble que les
caractéristique essentielle de la culture de Palmyre. On met relations de Palmyre avec les communautés juives de
souvent l'accent sur l'arrivée progressive dans l'oasis de Mésopotamie aient été plutôt mauvaises à ce moment -io_ Les
courants gréco-romains qui viennent se greffer sur un substrat expéditions des princes de Palmyre contre les Sassanides
sémitique local. Le caractère sémite de la ville n'est bien ont pu ruiner certaines places commerciales de la région, et
entendu plus à prouver et l'usage du palmyrénien est à placer parmi elles des villes où l'implantation juive était forte. Il
en haut de la liste des preuves de ce caractère. Mais ce est probable aussi que des raisons économiques ont pu depuis
«sémitisme» ne signifie pas obligatoirement qu'il s'agit de longtemps opposer les marchands juifs de Mésopotamie à
maintien strict des coutumes ancestrales, et on assiste au leurs concurrents venus de l'Empire, et particulièrement les
contraire à de profondes évolutions tout au long de la Palmyréniens -ii _ Dans ce cas, les armées palmyréniennes ont
période : le cas du manichéisme est un cas où un courant pu en profiter pour régler quelques vieux conflits.
35 - J.TEIXIDOR. 1998. p. 728-729, avec en particulier des références à tradition rapporte qu'elle aurait adopté les coutumes juives et abandonné
M.TARDIEU, 1992, p.15-24 et à I.GARDNER et S. LIEU, 1996, p.146-169. la superstition païenne». Que Zénobie soit considérée comme une reine
36 - Sur le caractère non iranien. mais sémitique du manichéisme, voir cl'Osrhoène amène évidemment à quelques réserves sur la crédibilité du
I.GARDNER et S. LIEU, 1996, p.146 et 168. témoignage.
37 - F.MILLAR. 1971, p.12 et J.TEIXlDOR, l 992, p. 52-56 et 1998. p. 730- 39 - Voir au chapitre YI pour le cas de la seule famille dont l'onomastique
731. ATHANASE. HislorioArianorwn 71, 1. est presque certainement juive au m' siècle ( CIS 4201). On ne possède pas
38 - Cité par PHOTIUS (Bib. 265, éd. Bekker. p. 492a ; éd. R. Henry, CUF. cl' exemples antérieurs. Les cieux textes hébraïques antiques découverts sur
1977, t. V III. p.60): Kcx't 1à rcoHà crnvrncovî.Ç210 (i.e. Aoyy1voç) le site sont datés par J. Starcky de l'époque byzantine, sur des critères
Z11vo�Î.Ç( îD îWV 'Oup011vmv �O'.CTlÀl8t, îllV àpx11v KCX7:EXODCT1] paléographiques (J.STARCKY, 1960, col. 1099).
'O82và8ou îO'U àv8poç O'.llîllÇ îEÀEDîllK0îOÇ, 1ïv KCÙ �lEîO'.�CXÀEÎ.V Ek 40 - Voir F. MILLAR, l 971, p. 12.Le texte égyptien souvent cité ( OGIS 129
HX 'lou8cxî.wv E811 àrco îllÇ 'EÀÀllVlKllÇ ÔElûlÔCXl�lOVlO'.Ç 7[()'./1,(Xl()Ç = ILS 574 = CIJ 1449) est à exclure du débat, car il concerne sans cloute
àvcxypà<pEl Àoyoç « et il (Longin) plaida souvent pour Zénobie, reine plutôt Cléopâtre et Césarion (voir J.TEIXIDOR, 1998. p. 728-729).
cl'Osroène, qui régnait depuis la mort de son mari Oclénathos : une vieille 41 - E.EQUIN! SCHNEIDER. 1993, p.14-15 et 38-44.
138 Les notables de Palmyre
À partir de ces données, on peut être amené à se poser prospérité d'Émèse a correspondu à celle de Palmyre, parce
un certain nombre de questions sur les éléments qui que le commerce caravanier en provenance de l'oasis passait
constituaient vraiment le « cercle de Zénobie». De toute par cette route avant d'atteindre la Méditerranée. On aimerait
façon, il semble difficile de faire de ses membres des en avoir plus de preuves. C'est en fait surtout à partir du
Palmyréniens au sens strict : il est fort probable que,pendant me siècle qu'on peut citer quelques faits caractéristiques :
une partie du règne de Wahballat et Zénobie, la cour se soit ainsi les descriptions contemporaines du costume de
trouvée à Antioche plutôt qu'à Palmyre et que Longin n'ait Élagabale,qui choqua les Romains,correspondent assez bien
pas eu d'influence « philosophique » sur d'autres à ce qu'on connaît de certains costumes palmyréniens .is_ La
Palmyréniens que le cercle étroit qui entourait la reine. Sa présence de Longin dans 1'entourage de Zénobie s'explique
présence est sans doute un élément à mettre en rapport avec d'ailleurs en partie parce qu'il était peut-être originaire
l'émergence assez ancienne en Syrie d'une classe d'Émèse. Il est en effet le neveu du rhéteur Fronton d'Émèse.
relativement cultivée qui exerce des responsabilités au sein Il existait de toute façon une tradition intellectuelle dans cette
de l'Empire. Ce n'est pas un hasard, si c'est au moment où ville,et c'est à l'exemple du« cercle de Julia Domna»,qu'on
les impératrices puis les empereurs sont d'origine syrienne a pu parler du « cercle de Zénobie» 46• Ce n'est pas le lieu
qu'on voit les premiers Palmyréniens entrer dans l'ordre de s'attarder sur la personnalité de Longin,ni même sur celle
sénatorial. Le gentilice Septimius porté par la famille de Callinicos de Pétra,membre possible du même groupe 47,
d'Odainat est assurément un signe de relations privilégiées parce qu'il est très difficile d'en faire des « notables de
avec la famille impériale. Après 212, l'adoption par la quasi Palmyre ». On peut quand même faire quelques remarques,
totalité des Palmyréniens des noms Julius Aurelius est à en utilisant en particulier des témoignages archéologiques
comprendre comme une forme d'hommages aux impératrices contemporains. Même si les mosaïques de Palmyre (celles
syriennes de la famille sévèrienne. C'est d'ailleurs un point de Cassiopée et d'Achille : fig. 42) ne sont pas la preuve de
commun avec les habitants d'Émèse, qui pour des raisons la présence de Longin et ne valent pas titre de propriété, il
semblables ont peut-être adopté les mêmes noms 42• n'en reste pas moins que les courants intellectuels qu'il
Cette fidélité à la dynastie des Sévères apparaît aussi représente ont incontestablement eu une influence à Palmyre,
plus directement dans l'épigraphie de Palmyre, par le fait au moins pour ces mosaïques. On ne connaît pas les
qu'au moins trois textes sont des dédicaces à un ou plusieurs commanditaires de ces œuvres,mais il serait étonnant qu'ils
membres de la famille impériale Les deux premiers sont
-1,_ aient seulement payé sans se préoccuper du contenu
des dédicaces d'un type courant qui associent à l'empereur hautement symbolique, qui devait correspondre à un
sa femme et ses enfants. Il s'agit après tout d'un type de programme précis, iconographique aussi bien que
texte courant dans l'ensemble de l'Empire. Plus intéressante phi] osophique.
peut-être est la troisième dédicace. C'est un texte officiel, Ce qui ajoute encore à l'intérêt des mosaïques, c'est
puisqu'il est fait par la cité (11 rroÀK), mais il est dédié à l'origine probable de l'atelier,que J. Balty propose de placer
Julia Maesa, non comme impératrice, mais en tant que sœur à Émèse, plutôt qu'à Antioche .ix_ Comme on le voit, on se
de l'impératrice (Julia Domna): 'IouÀia Maîcra 'louÀiaç trouve avec un ensemble assez consistant de faits cohérents
IE�acr1îîç à8EÀ<jn7. La statue correspondante devait faire qui pointent dans la même direction,Émèse. Même si Longin
partie du même groupe que celles présentées par le texte ne s'est jamais installé à Palmyre, même si le cercle de
Jnv X, 64, mais elle en était distincte. Elle prouve une Zénobie n'a fonctionné qu'en dehors de l'oasis, il est clair
dévotion particulière envers cette famille d'Émèse qui a dû que, par quelques aspects, une partie des notables
avoir un rôle important dans 1'élévation de Palmyre et de participaient à la même culture que leurs contemporains à
certains Palmyréniens dans les structures impériales. Émèse ou ailleurs. La différence réside peut-être dans la
Pourtant, comme on 1'a remarqué souvent, à la suite de profondeur réelle de cette culture à Palmyre, et comme le
H. Seyrig,on a très peu d'indices des relations entre Palmyre prouve l'exemple des maisons, la situation devait être
et Émèse Beaucoup de choses semblent indiquer que la
-1-1_ profondément contrastée. On a à la fois des maisons de plans
42 - Voir D. Sc11LU�!RERGLR. 1942-1943b. p. 58. n. 2 : le seul exemple connu dédicaces aux Sévères. mais par la garnison de Palmyre, non par des
à Émèse est fourni par les monnaies d'Uranius Antoninus. Cet usurpateur habitants de la ville. Seul Hadrien. qui a donné son nom �1 la ville et ses
s'appelle en effet Lucius Iulius Aurelius Sulpicius Uranius Antoninus ( voir habitants ('A8p1avoç TTŒÀJLUp11voç) semble avoir reçu plus de dédicaces.
H. SEYRIG, 1958. p. 55-56 et dernièrement H. R. BALDUS, 1996, p. 373). Mais 44 - H. SEYRIG, 1959b, p. 190-19 l. Voir aussi F. MILLAR, 1993, p. 300-309.
le double gentilice n'apparaît pas dans le tome V des !GLS, consacré à la 45 - H. SEYRIG, 1959b, p. 191 et E. WILL. 1992, p. 108-109 citant
région d'Émèse. On connaît par ailleurs un L. Julius Aurelius Hermogenes HÉRODIEN V, 3, l 2.
(H.-G. PFLAUM. 1960, J. p. 759-762. n" 293) qui honore un anonyme qui a 46 - Sur le cercle de Julia Damna, J. Sm1NELLI, 1993, p. 364-365. Sur celui
été préfet du prétoire à] "époque d"Élagabale. Il faisait sans nul doute partie de Zénobie, en particulier sur la figure de Langin, J. SIRINELLI, l 993,
de l'entourage de cet empereur, de Julia Maesa et de Julia Soaemias. p. 427-430.
43 - C/S 3970; lm• X, 64 et 67 (cf. H. SEYRIG, 1941b, p. 266-267, n" 26); 47 - Voir J. SJRINELLI, 1993, p. 430.
les textes AE l 969-1970, 610-611 (= M. GAWLIKOWSKI. 1984, n"' 40-41) et 48 - J. BALTY, 1996. p. 41O. Le même atelier pourrait aussi être à l'origine
AE 1991, 1573 (H. E. HERZIG et A. Sc1-1MJDT-COLINET, 1991, n" 1) sont des des mosa"i"ques de Shabba-Philippopolis, au milieu du rn' siècle.
Chapitre IV: L'ilifluence sociale des notables 139
à péristyle tout à fait classiques et des maisons parfois famille, au sens réduit, du donateur (principalement ses fils
plus modestes qui présentent le même type de plan que et ses frères). Au contraire dans les textes nabatéens, les
beaucoup des exemples connus clans des zones moins bénéficiaires semblent appartenir surtout à la famille royale,
hellénisées (Doura, Assour, Coche) -r0_ alors qu'à Hatra, i1 s'agit d'un ensemble moins bien défini
Du point de vue culturel clone, les rares documents qui de personnes en relation de famille ou de clientèle avec le
subsistent sur la culture des Palmyréniens donnent des donateur s-1_
renseignements contrastés. On peut certes considérer une À Doura-Europos, les textes de ce type existent surtout
grande partie de 1'art palmyrénien comme une manifestation en grec 55• Ils emploient les formules urcÈp uydcxç ou
cl' indépendance des habitants. Mais comme toujours en ce cHoTr]pÎaç, qui sont les équivalents de l'expression 'J byy
domaine, même si les faits sont assez bien établis, et prouvent («pour la vie») en grec. Mais le plus intéressant est qu'ils
une coexistence tout au long de la période entre art local et utilisent généralement le même schéma qu'à Palmyre, c'est
influences extérieures 50 (avec une prédominance croissante à-dire que les bénéficiaires, outre le donateur lui-même, sont
de l'art gréco-romain), les conséquences qu'on peut en tirer des membres de sa famille proche (fils et frères). On verra
sont moins claires. D'autre part, il est aussi possible de voir là une preuve de plus de liens assez étroits entre les deux
clans l'histoire de Palmyre clans la deuxième moitié du villes (cf. chapitre m).
m e siècle une étape d'un affrontement entre l'hellénisme Seuls deux textes s'écartent de cette norme : dans le
défendu par Zénobie (et Langin) contre Rome aux mains premier (Pre!. Rep. II, p. 92, H4), le seul bénéficiaire est le
des empereurs pannoniens 51• stratège et épistate de la ville, Séleukos, fils de Lysias (urcÈ[pl
TllÇ LEÀEUKOU 1:01) A[u]ofou ''COD LEAEUKOU cn:[pah:rnou K[a't.
B. CLIENTÉLISME ET RELATIONS SOCIALES Èmcn]ciwu îllç noÀEwç [crwî11Piad), mais le donateur
n'appartient visiblement pas à sa famille 56• Le même
1. LES DONATEURS « POUR LA VIE DE » LEUR EN TOURAGE
Séleukos, fils de Lysias, est mentionné dans le texte Pre!.
Comme le montre le travail récent de K. Dijkstra Rep. V, p. 113-114, 11° 418, mais il n'est que le premier
(K. DrJKSTRA, 1995), un certain nombre de données sur les bénéficiaire, en même temps que les donateurs (d'un temple
relations sociales à Palmyre peuvent être dégagées des pour le dieu Aphlad) et leurs enfants.
dédicaces de constructions faites « pour la vie» ( 'J byy) du Quelles que soient les raisons de ces exceptions, il n'y a
donateur et celles de membres de sa famille. Certes, on ne aucun exemple de ce type de variation par rapport à la norme
peut sans cloute le suivre clans toutes les conclusions qu'il à Palmyre. Même pendant la deuxième moitié du me siècle,
tire de 1'étude de ces textes, mais son étude sur les c'est-à-dire lors de la montée en puissance de la famille
inscriptions sémitiques du Proche-Orient à 1'époque romaine cl' Odainat, il n'apparaît pas que les p ersonnages
(principalement nabatéennes, hatréennes et palmyréniennes) institutionnellement à la tête de la cité aient été honorés avec
a l'intérêt de bien mettre en évidence le rôle capital joué par ce formulaire. La seule exception possible citée par
les relations familiales dans l'épigraphie de Palmyre 52• K. Dijkstra est le texte C/S 3971, sur une borne milliaire 57•
En effet, les inscriptions de cette ville se distinguent un L'inscription a été faite « pour la vie et la victoire de
peu de l'ensemble du corpus qui emploie cette formule. Les Septimius Wahballat Athènodôros [ ... ] et pour la vie de
bénéficiaires 53 paraissent appartenir généralement à la Septimia Batzabbai (Zénobie)» ('J b[ywh] wz[kwth dy]
49 - E. EQUIN! Scr-INEIDER, 1993, p. 104 et n. 10 (voir plus loin à propos de le cas de l'épigraphie nabatéenne relève plutôt de la coïncidence que d'autre
la place des maisons dans le développement urbain en général et la place chose. Deux des trois textes qu'il cite (Pre!. Rep. V, p. 227, n" 561 = AE
des notables dans ce cadre). 1934, 280 et VII/VIII, p. 85, n" 847 =AE 1940, 220) sont des dédicaces
50 Voir par exemple J.-C. BALTY, 1996, p. 437-441 : « Mon propos est ici impériales. « pour le salut de l'empereur », par des corps militaires romains,
volontairement limité à Palmyre, dont le caractère de culture mixte a certes selon un modèle tout à fait courant clans l'ensemble de ! 'Empire (le troisième,
toujours été noté, les éléments orientaux étant peut-être plus souvent mis Pre!. Rep. IX, 3, p. 107, n" 970 =AE 1954, 264, est une dédicace à un
en évidence que les éléments grecs et romains, au-delà de cette hellénisation officier par son affranchi). Au contraire, les textes grecs sont tous le fait
de surface qui a été relevée à maintes reprises. » (p. 437) d'habitants de la ville, pour d'autres habitants, et non pour des militaires
51 - En ce sens par exemple, J. Sm.INELLI, 1993, p. 429-430. ou des souverains de Rome.
52 - Même s'il semble difficile de le suivre, quand il propose de voir clans 56 - Le mot CH01:l7Ptaç, comme on le voit, est entièrement restitué à cet
les termes bny ( « fils ») de ce type de texte, un terme « classificatoire » endroit. Or la lacune est en fait plus longue, et on peut se demander si,
(classzfïcatory), c'est-à-dire pouvant désigner a priori n'importe quel comme clans le second texte, il n'est pas éventuellement possible d'ajouter
membre de la tribu en relation de clientèle avec le donateur, et non pas une formule du type KCÙ Éamoù KŒl 1:ÉKvmv (ou équivalent) à la ligne
seulement ses fils au sens naturel. Comme on l'a vu au chapitre li, il renonce suivante. Cela rapprocherait le formulaire de ce texte de celui qui est assez
cl' ailleurs assez vite à cette théorie (voir K. DuKSTRA, 1995. p. 291). courant à Doura, et en tout cas du deuxième texte qui mentionne Séleukos
53 - Au sens de ceux pour la vie de qui la dédicace est faite. K. Dijkstra parmi les bénéficiaires.
parle plutôt de recipient pour désigner la divinité ( ou parfois la personne) à 57 - Il est étonnant que K. Dijkstra n'ait pas reconnu que ce texte était inscrit
qui la dédicace est faite. sur une borne milliaire (K. DI.JKSTRA. 1995, p. 168, n. 102 : « the designation
54 - K. ÜIJKSTRA, 1995, p. 243-244. "111 f 4" (!. 7) is rather pe,plexing » !) à quatorze milles de Palmyre, au
55 - K. DuKSTRA, 1995, p. 259-281. Les remarques de l'auteur sur les textes lieu-dit el-Kerasi. Sa référence à la page 293 de DFD ne s'applique pas à
latins avec l'expression pro salute (p. 276-281) semblent négliger ce que ce texte, mais à CIS 3994, qui provient du même endroit, mais date de 114.
1· expression a de courant clans l'épigraphie latine. Leur rapprochement avec
140 Les notables de Palmyre
sptymyws whblt 'tndr{ws] [ ...] w'l byh dy sptymy' btzby). dédicaces au dieu anonyme qui semblent de nature plus privée
La restitution z[kwth) est assurée par des parallèles latins et qui ne renseignent pas sur les activités évergétiques
(pro salute et victoriis) ou grecs (urcÈp crmî17picxc KcÙ v1K17ç). éventuelles des donateurs. Comme le note K. Dijkstra, « in
Le texte grec est malheureusement très abîmé, mais on peut spite of their public cüsplay, the minor dedications to the
lire les dernières lignes : [ .. .K]a!'t {mÈp crmh17Piaç I:rnnµiaç "Anonymous Gad" are not distinguished by the prestige
Z17vo�iaç î17ç Àa�mpoîaT17ç �amÀicrcr17ç �t17îpàç îOÛ vvhich they may have imparted to the dedicotors» (p. 154).
�amÀÉmç 58• Ce n'est pas le cas des grandes dédicaces et des inscriptions
Le texte araméen montre le poids de l'influence gréco honorifiques, qui, selon cet auteur, mettent en évidence des
romaine sur le vocabulaire officiel de Palmyre, même relations de patronage entre les donateurs de construction et
pendant cette époque cl'autonomie de la ville. On reconnaît leur entourage. Mais les deux types de texte sont pourtant
pour Wahballat un formulaire courant pour les empereurs, différents, car« in short : 'l byy [« pour la vie de»] is by the
même si sa présence sur un milliaire est un peu curieuse. patron; lyqr [« en l'honneur de»] isfor the pntron» (p. 167).
Les titres honorifiques sont ainsi adaptés en araméen et le De plus, le groupe des « grandes dédicaces » est en
mot nhyr' (nhyrt' au féminin, « lumineux») qui qualifie moyenne plus ancien que celui des dédicaces au dieu
Wahballat et Zénobie est bien évidemment la traduction pure anonyme, ce qui pourrait être un signe de progression des
et simple du mot clarissimus en latin (Àa�mpé>îaîoç en grec ; coutumes du monde classique à Palmyre 62 aux dépens cl'une
voir chapitre 1). tradition (une formule) qui se maintient, mais reste confinée
Néanmoins, le fait même que ce texte ait compris une au domaine de la religion, clans une de ses expressions les
version sémitique est révélateur de la force des traditions plus privées et personnelles.
locales 59 ; de même, le texte est sans doute une preuve de Quand on veut repérer la structure sociale de la société
syncrétisme entre une formule d'origine latine et la formule palmyrénienne, ce qui apparaît le plus clairement, dès
sémitique 'J byy, qui est employée seule pour Zénobie. En l'abord, c'est l'existence d'un nombre réduit de personnages
tout cas, l'existence d'une formule sémitique bien attestée qui semblent dominer la vie publique, à chaque période. Que
dans l'épigraphie de Palmyre a pu favoriser l'emploi de la ce soit clans le domaine institutionnel (chapitre 1) ou le
formule dans ses équivalents grecs ou latins par les domaine commercial (chapitre III), on a vu qu'existaient de
souverains de Palmyre. Mais l'absence de tout donateur ou grands notables qui parfois exerçaient des fonctions
de mention de divinité, si elle s'accorde bien avec la fonction publiques importantes et étaient honorés pour cette raison
de milliaire de la pierre, est un élément totalement inédit ( Septimi us Worocl par exemple), mais parfois aussi
clans le corpus des inscriptions « pour la vie de X ou Y». recevaient des honneurs nombreux sans qu'on puisse définir
Or, le texte palmyrénien semble bien complet. De plus, ce quelles fonctions officielles ils avaient pu remplir (Haîran,
texte est une des mentions les plus tardives de la formule 60• fils de Bônnê), ni même s'ils avaient effectivement occupé
Il est clone probable qu'on soit clans un cas où une expression ce type de charge. Les chapitres 11 et m ont montré que les
L,VU1·c111k CU :-.C::rn;t;LjllC, llld;:'! de:u1:-. Llll CUlllt:XLt: diffé1t:lll, sen structures lribales anciennes de la population pouvaient
à traduire une formule normale en grec et en latin. expliquer en partie certains de ces faits. Il faut souligner
En fait, une des conclusions les plus révélatrices de aussi le caractère un peu aléatoire de la documentation :
l'étude de K. Dijkstra concerne les rapports entre les l'ensemble des textes d'une période donnerait une image
« grandes dédicaces» (mqjor dedications) 61 et les inscriptions peut-être moins déséquilibrée, et permettrait de voir si la
honorifiques d'un type beaucoup plus courant dans le monde domination de Haîran, fils de Bônnê, au milieu du fr siècle,
gréco-romain. On laissera de côté, pour 1' instant, les était tellement écrasante.D'autre part, le hasard des fouilles
58 -« Et pour le salut de Septirnia Zenobia, la très illustre reine, mère du son frère et ses enfants. On retrouve le même dédicant clans le texte
roi». Ce texte a été aussi édité par Ch. CLERMONT-GANNEAU, 1920, C/S 4030, de 232. avec les mêmes bénéficiaires, saufles enfants, sans cloute
p. 391-399 qui propose après �aCHÀÉOK. 8uy(mpoç) wù 'Avnôxou parce qu'il n'en avait pas encore. La dédicace la plus récente au dieu
« fille d'Antiochos». ce qui répond au bt 'ntywkws du texte araméen. anonyme, avec la même formule (lm· XI, 20 de 263) présente la particularité
59 - Il semble pourtant que ce soit le seul cas et que les milliaires de de ne pas avoir été faite pour la vie du donateur. mais seulement pour celle
Wahballat (et de Zénobie) découverts ailleurs en Syrie comportent un de son père et de« tous les gens de sa maison» (bny byth klllll'n ).
formulaire beaucoup plus classique (voir tableau des bornes milliaires en 61 - Pour la différence entre minor et mc(jor dedicutions, voir K. D1.1KSTRA,
annexe XIV). La présence de l'araméen s' explique peut-être par la proximité 1995, p. 88-89 : les premières se trouvent principalement sur des pyrées de
de la ville de Palmyre. Il faut réserver le cas de certains textes grecs que dimensions modestes souvent dédiés au dieu anonyme. Les autres se
Ch. Clermont-Ganneau (1920, p. 414) propose de restituer de la même rapportent à des offrandes plus importantes, comme des temples, des
manière que C/S 3971 (= OG/S 649: il s'agit des textes A. Mus1L et portiques ou encore des autels de grande dimension. Mais elles datent surtout
E. KALINKA, 1900, n'" 11-12 = OG/S 650-651). Au cas où la proposition des deux premiers siècles de notre ère. alors que les dédicaces au dieu
serait justifiée. il faudrait alors vérifier si les bornes ne comportaient pas en anonyme ont été faites en majorité au 111' siècle (K. DI.IKSTRA, 1995, p. 143).
plus un texte araméen. 62 - Phénomène rapproché par K. Dijkstra (K. D1.1KSTRA. 1995, p. 167) clu
60 - Le texte le plus récent à comporter l'expression clans sa formulation la petit nombre de grandes dédicaces bilingues, alors que les inscriptions
plus courante est le texte C/S 4050 de 261. Il s'agit d'une dédicace au dieu honorifiques le sont majoritairement: « this trend tommls bilinguulism,
anonyme, comme la plupart des textes de ce type à une époque tardive, indeed, may illustrate the waxing Roman influence in Palmyra ».
pour la vie du donateur Hagegû U1ggw br yhyb' y111y), celle de son père,
Chapitre IV: L'iT1fluence sociale des notables 141
a fourni une assez bonne documentation sur certains notables, question que le poids social des deux personnages était très
sans que cela soit en rapport avec leur importance réelle différent. C'est plutôt par l'étude des dons respectifs qu'on
dans la cité. On peut s'interroger par exemple sur peut arriver à une conclusion de ce genre : 1 'un a offert une
l'importance de la famille de Bartê, bien connue par les seule colonne, l'autre un portique. De plus, Moqîmû, fils de
inscriptions de la Grande Colonnade et bienfaitrice du Nebûzabacl, ne semble pas avoir de parents connus par
sanctuaire d'Arsû. ailleurs à Palmyre 6-1. Malikû, au contraire, appartient à une
Toutefois quelques cas, comme celui d'Agrippa Malê, famille bien connue dans le sanctuaire pour ses nombreuses
prouvent qu'il y a des rapports entre les bienfaiteurs des constructions 65• Ses deux frères Belhazaî (BS 11° 43 en 103)
différents sanctuaires et ceux de la cité : il s'agit visiblement et Wahbaî (BS 11° 6) ont offert chacun un portique. Les deux
là d'une tradition familiale, dans laquelle les bienfaits, textes ne comportent pas l'expression « pour la vie de ». Dans
d'abord limités au sanctuaire de Baalshamîn, sont étendus à le premier cas, il s'agit du texte honorifique gravé en
la génération suivante (celle de Malê) à toute la cité remerciement, parce que « lui et ses fils ont fait ce
(BS n ° 44 = CJS 3959). Ainsi, s'il est clair que tous les portique... » et dans le deuxième, le texte est une version
notables de premier plan n'apparaissent pas dans la abrégée de l'inscription de dédicace 66• On peut penser,
documentation, il semble assuré qu'on peut en repérer comme K. Dijkstra, qu'il est possible de restituer des
quelques-uns qui sont connus par un certain nombre dédicaces originelles avec une formule du même type que
d'inscriptions et qui appartiennent vraisemblablement aux « pour la vie de » : c'est un texte de ce genre auquel
couches les plus élevées de la population. C'est à partir de répondrait le texte honorifique BS 11° 43 et que le texte BS
ces données qu'on peut essayer de repérer leurs cercles 11° 6 résumerait. On peut reconstituer un schéma du même
d'influence, pour tâcher de définir la manière dont ils type pour le cousin des trois frères, Zebâ, fils de Taîmnâ
exerçaient leur « autorité » sur la cité et ses habitants. (zb' br tymn ') qui avait été honoré par les prêtres de
Les données ne sont pas très nombreuses, car il est rare Baalshamîn un demi-siècle plus tôt (BS 11° 38 en 49) 67• Ainsi
qu'on ait beaucoup de renseignements sur la personnalité les trois membres de la famille attestés clans le sanctuaire se
des clédicants, lorsqu'il ne s'agit pas du Conseil et du Peuple. sont distingués par des dons importants. Ils sont sans doute
L'étude de K. Dijkstra évitera de refaire ici la liste des parmi les plus grands bienfaiteurs de Baalshamîn, ce qui
inscriptions qui concernent ces dédicaces pour la vie du explique que les inscriptions honorifiques soient faites par
donateur et des membres de sa famille. Pour un certain les prêtres du dieu, les dieux Baalshamîn et Durahlûn et la
nombre de ces dons, on connaît à la fois l'inscription du tribu des Bené Mazîn.
donateur et un texte de remerciement 63: en DFD, p. 162 Comme on le voit, il ne s'agit clone pas de véritables
(A. BouNNI, 1986, n" 10), le don et le remerciement sont sur réponses et les dédicaces pour la vie du donateur et de
la même pierre. Moqîmû, fils de Nebûzabad, fils de Barîkaî membres de sa famille proche ne semblent pas vraiment
Abshaî (mqymw bT nbwzbd bT b1yky 'bsy ) a fait une colonne engager ces derniers. Ce qui compte apparemment davantage
et le toit du portique pour Nabû, pour sa vie et celle de ses est le récipiendaire divin du don, puisque c'est lui-même ou
fils ( 'J bywhy wbyy bnwhy). Pour cette raison, ces derniers ses agents qui répondent, en laissant de côté les aspects
lui ont élevé une statue (slm' dnh [...] dy 'qymw lh bnwhy). familiaux.
Le cas est différent pour les deux textes BS n'" 7 et 40, Du point de vue du formulaire, il est probable que des
qui pourtant se répondent visiblement, cl'autant plus sûrement textes de dédicaces aient existé avec la même formule, mais
qu'ils portent la même date (septembre 90). Dans le premier, rien ne l'assure vraiment. Si toutes les i nscriptions
mlkw br 'g' br whby br blbzy (Malikû, fils de Ogâ, fils de honorifiques sont des réponses à des dons de ce genre, on
Wahbaî, fils de Belhazaî) offre un portique à Baalshamîn et peut s'étonner du nombre relativement réduit des textes de
Durahlûn pour sa vie et celle de ses fils et de ses frères. Or dédicaces, surtout si on le compare aux inscriptions
ce sont les deux dieux et la tribu des Bené Mazîn (à laquelle honorifiques, beaucoup plus nombreuses. Le rapport
Malikû appartient) qui offrent en retour une statue « en son numérique entre les deux types de textes est trop
honneur, parce qu'il leur a été agréable » (BS n" 40). disproportionné pour qu'on puisse croire qu'il y a là une
La différence entre ces deux cas permet sans doute de simple coïncidence, même si les dédicaces ne concernent
confirmer la différence entre le sanctuaire de Baalshamîn que le domaine religieux, alors que les inscriptions
aux mains d'une tribu influente et celui de Nabû dominé par honorifiques sont la conséquence cl 'activités clans tous
des familles de notables (chapitre H). Mais, en tenant compte les domaines (constructions religieuses et civiles,
de ce fait, il semble difficile de conclure des inscriptions en caravanes ...).
En fait, ce qui apparaît avec le plus d'évidence, c'est moment, parce qu'il n'a pas eu à se rendre particulièrement
que les fameuses dédicaces « pour la vie de» donnent peu utile (ou encore si aucune inscription n'a été retrouvée). Il est
de renseignements sur les notables de Palmyre ; elles peuvent après tout possible que les notables influents dans tous les
simplement servir d'indices de notabilité, car seuls les domaines de la vie publique palmyrénienne n'aient pas exercé
Palmyréniens les plus aisés avaient les moyens de faire des d'hégémonie, et que le pouvoir ait été partagé entre les
dons de cette importance. Il semble difficile de les utiliser différentes familles. On peut d'ailleurs tout aussi bien imaginer
pour définir avec précision les cercles ou les clientèles qui que certains de ces notables aient été alliés ou associés. Il ne
entourent certains personnages importants de la cité. Elles s'agit là que d'hypothèses, mais il faut surtout retenir qu'il
indiquent seulement l'importance du cercle constitué par la n'y a apparemment pas d'hégémonie sans partage d'une
famille réduite autour d'eux. famille ou d'un groupe de notables, avant la fin de la période.
L'étude comparée des trajets des familles de Soados et
de Marcus Ulpius Iarhaî est révélatrice à cet égard, car il s'agit
2. LE VOCABULAIRE DES RELATIONS SOCIALES
des deux caravaniers les plus influents de la période, comme
Si on s'intéresse aux clientèles des grands notables, il le prouvent aussi bien le nombre de textes que l'importance
faut donc surtout se concentrer sur les inscriptions des honneurs qui leur sont accordés. Le cas du deuxième est
honorifiques et en particulier sur la personnalité des à mettre un peu à part, car les textes datés s'étalent sur une
dédicants. On a pu voir au chapitre 111 l'exemple des période très courte, ce qui expliquerait qu'il soit le seul à
marchands qui par nécessité étaient dans une relation de apparaître pendant ces quelques années du milieu du
dépendance envers les grands caravaniers : dans les sources li siècle
e 68
• Mais son frère, M. Ulpius Abgar, est attesté dès
conservées, leur existence est seulement collective. Il est 135 (lnv X, 81), au milieu des années qui sont marquées par
impossible de savoir précisément qui étaient les marchands, la prééminence de Soados. La famille de ce dernier fait partie
une fois qu'on a fait la liste des grands caravaniers cités des premières de la ville dès le début du Il siècle, puisque son
e
nommément dans les inscriptions. Ce n'est qu'un exemple, oncle paternel est symposiarque en 117 ( CJS 3919 = Inv IX,
mais on n'en sait pas plus sur les autres métiers, puisque les 19). Et inversement, au moment où s'achève la série des
inscriptions funéraires ne renseignent pas sur les activités inscriptions de M. Ulpius Iarhaî (entre 157 et 159 pour les
des défunts. Seuls apparaissent les quelques corps de métiers textes datés), apparaît Neshâ, fils de Bolîadâ (Nrn11 Bco'A1a8ouç
dont on a parlé au début du chapitre m. et ns' br blyd' en 161 : Inv X, 29), frère de Soados. Les deux
L'existence même de cette différenciation nette entre familles sont donc plus ou moins contemporaines et ne sont
collectivités et notables dignes d'être appelés par leur nom pas du tout attestées hors de cette courte période (entre 117 et
est sans doute un signe de la nature des relations sociales à 161). On envisagerait bien des relations de rivalité entre les
Palmyre. On peut tenter de retracer une évolution deux, mais aucun élément de la documentation (à part la
chronologique des pratiques qui reflètent les rapports coïncidence des dates) ne permet d'aller dans ce sens. Elles
sociaux. Si on prend par exemple la liste des textes ne semblent pas avoir eu de lien, alors qu'elles étaient
caravaniers, on constate que tout au long de la période concernées par le même domaine d'activité.
apparaissent ces marchands, qui collectivement remercient On peut d'ailleurs considérer comme un trait
leur synodiarque ou un autre grand notable. Hormis caractéristique des notables de Palmyre l'absence apparente
l'apparition du terme «caravane» lui-même, au cours du de liens entre les groupes familiaux qu'on peut repérer. Il
uc siècle, le vocabulaire ne semble pas évoluer de manière est assez rare que soient cités dans la même inscription les
importante au cours de la période, mais, à certains moments, membres de familles différentes. Les textes funéraires de
des personnages à l'influence prépondérante apparaissent. concession font bien sûr exception, ainsi que quelques
Elle ne leur permet pourtant pas d'occuper toute la place dédicaces au dieu anonyme : les relations qui apparaissent
disponible et de faire disparaître toute concurrence. dans les textes sont la plupart du temps des relations
Si on reprend la liste des textes datés, on voit bien qu'entre d'inégalité. Cela explique que les groupes constitués de
les textes faits pour Soados (entre 132 et 145), s'intercalent membres anonymes soient si nombreux clans les inscriptions
des textes honorifiques pour d'autres grands caravaniers. honorifiques : face au grand notable n'existe souvent qu'une
Ainsi, Nrn11 A'Aa 1:où Nrn11 (ns' br bl' brns') est remercié en masse anonyme.
142 ( C/S 3916) pour avoir été synodiarque. Or, ce même On a d'autres exemples de familles importantes de la
personnage, qui apparaît pendant une éclipse de Soados, ville qui exercent une influence de ce genre et se posent en
réapparaît quelques années plus tard, en 150 (lnv X, 124), protecteurs d'une catégorie ou d'une autre. Les corporations
pour les mêmes raisons (synodiarque remercié par une sont elles aussi, comme les caravanes (bny syrt' ou syrt'),
caravane). On peut se demander si l'éclipse de Soaclos est susceptibles de remercier leur patron ou leur maître. Elles
réelle, c'est-à-dire si son influence a réellement baissé, ou si, reconnaissent par là la prééminence d'un individu et
plus simplement, aucune inscription n'a été faite pour lui à ce implicitement la protection que celui-ci exerce.
68 - Liste des textes clans lm• X, p. 49-50 et G. W. BowERSOCK, 1989b, p. 167. Voir iiifi-a, index des Palmyréniens, s. v. « larhaî ».
Chapitre IV: L 'ù;fluence sociale des notables 143
On peut commencer par1 'étude de ces textes concernant n'y a pas d'ambiguïté et il est clair qu'au moment du second
les groupes constitués, avant de passer aux textes dans texte (en 271 ), Zénobie a revêtu une titulature impériale
lesquels interviennent des individus de statut différent. Pour classique. Le terme mrlnvn (« leur maître») est d'ailleurs
l'étude des relations de clientèles à Palmyre, le plus facile employé, à titre posthume, pour Oclainat clans le texte
est sans doute de débuter par la fin de la période,à un moment CIS 3946, parallèle et contemporain à C/S 3947. La version
où ce type de fonctionnement de la société apparaît avec le grecque a disparu,mais elle devait comporter le mot 8mn6111ç.
plus de netteté dans les sources. Un autre terme utilisé pour décrire ces relations
(« ncx1pwv») est sans ambiguïté 75• Il faut noter que le mot
est assez rare à Palmyre, mais que c'est justement aux
a. Autour d'Odainat
membres de la famille cl'Oclainat qu'il s'applique 76: deux
En effet, une famille se détache particulièrement, celle fois à Oclainat lui-même (ES 11° 52 et Inv XII, 37), les deux
d'Odainat, ce qui n'est pas surprenant. Les membres de cette autres à son fils Haîran. Un seul de ces textes est bilingue
famille, ainsi que certains personnages considérés souvent (C/S 3944 : fig. 44) : la version palmyrénienne est moins
comme leurs alliés reçoivent un certain nombre de titres développée et ne donne pas cl'équivalent au ncx1pwv du grec,
d'honneurs inconnus jusque-là à Palmyre. Parmi les termes de même d'ailleurs que la formule îEl�LÎÎç Ka't 1:,ùxaprn1daç
qui s'appliquent à eux, un des plus révélateur s est ËvE1Œv est seulement rendue par lyq rh (« en son honneur») 77•
« 8rnn6111ç» 69• On sait qu'il est utilisé en particulier pour Dans les autres textes, surtout ceux faits pour Worocl
l'empereur ou les membres de la haute administration ( CIS 3940-3941 et 3943),le même concept est plutôt exprimé
provinciale, comme par exemple le gouverneur 711• Sa par le mot npocr1cx1:11ç, traduit en palmyrénien par qywm 78•
traduction sémitique en CIS 3945,« mm» (« notre maître»), Worocl, grâce à sa puissance et à son influence, est entouré
ne laisse pas de doute sur la nature des relations envisagées. d'un cercle de clients, comme c'est le cas pour Oclainat. La
Ce vocabulaire correspond en tout cas à la position d'Odainat, différence clans les mots utilisés est sans doute de peu
appelé dans les mêmes textes iman KÔç, ce qui ne signifie d'importance,mais on ve1Ta plus loin quels éléments on peut
pas forcément qu'il était gouverneur,mais que sa prééminence tirer de la comparaison entre les cercles de Worod et
avait été reconnue par Valérien et honorée d'un titre officiel 71• cl'Oclainat. Le terme n'apparaît clans le corpus,avant la chute
Le mot araméen formé sur la racine mr' n'est bien sûr de la ville, que clans le cas de Worocl, ce qui renforce le
pas réservé à la traduction du mot 8Ecrn611w, mais sert aussi caractère exceptionnel de ce dernier.
à rendre des mots équivalents, comme KÛp10ç . C'est le En fait, un seul autre personnage reçoit ce titre de
cas par exemple en CIS 3938 (= Inv III, 11), où l'expression npocr-ccx111ç, Septimius Apsaios (lnv III, 18 : fig. 45), qui est
araméenne 'pt1p' dwqnr' dy qsr mm(« procurateur ducénaire peut-être à identifier avec le A \jfawç cité par Zosime (I, 10).
de notre seigneur César») doit être l'équivalent d'une Apsaios est l'instigateur de la seconde révolte de Palmyre,au
formule grec du type Èniîponov [I:ë�lacrw[u 1ou 1rnpiou 11�Léovl moment où Zénobie vaincue est emmenée par Aurélien qui
8ou[K11vcxp10v] 73• De même dans le texte ES n° 45, Poblicius rentre à Rome. L'inscription en l'honneur de ce personnage,
Marcellus le gouverneur de Syrie ([1ou 8lacrhwo1cx1ou ennemi du pouvoir romain vainqueur,se trouve sur un fût de
Kupwô unanK[ou) est appelé en araméen hgmwn' mm(« le colonne clans la section B de la Grande Colonnade. Mais sa
gouverneur notre maître»). conservation n'est pas plus étonnante que celle des textes qui
La forme féminine du même mot,« 8Écrnmva»,est aussi concernent Zénobie et Oclainat, à proximité.
connue clans deux textes,où elle qualifie Zénobie 7-1_ Dans les Septimius Apsaios,quelle que soit son identité,est le seul
deux cas, le terme s'applique à Zénobie en tant que reine, il cas de ce type de relations entre la cité de Palmyre et un patron.
69 - CIS 3945. Pour tous ces mots. voir l'index du vocabulaire en annexe terme a le sens courant de maître, comme clans le texte Jm, XI, 13 où il
et les remarques du chapitre 1. s'agit visiblement du maître d'un serviteur. Le terme est surtout utilisé clans
70 - Pour l'application du terme << ôECHCOîT]Ç » à la famille impériale, voir les textes religieux et désigne en particulier le dieu Baalshamîn (mr' 'lm',
à Palmyre CJS 3970. L'équivalent sémitique est mm« notre maître» voir « maître du monde», C/S 3912 ou 3986) et le dieu anonyme (mr' Id,« maître
par exemple pour Aurélien, la restitution [m]r[n) très probable de de tout», C/S 3998 == RSP n" 130).
M. Gawlikowski (M. ÜAWLIKOWSKI, 1971, p. 420). Le terme est aussi attesté 73 - Pour l'équivalence entre le latin dominus et le grec Kup1oç ou
clans un texte publié par le même savant (1970a, p. 68-69): [ ... ] A�LElKOÇ 8rnrr6117ç, voir D. MAGIE, 1905. p. 66-67.
i-àv ôE<JTCOîY]V. L'identité de la personne qui porte le titre de« 8Eurrô117ç» 74 - C!S 3947 (avec clans le texte araméen parallèle la traduction mrthwn.
reste, clans ce cas, mystérieuse. « leur maîtresse») de 271 (fig. 43) et lm• III, 3 ([8E]<J(rr)oi v17ç, sans version
71 - Cf. par exemple E. WILL, 1992, p. 174. La position de M. CHRISTOL, araméenne) antérieur à 267-268. Le titre peut être porté à ce moment par
1997. p. 148 est plus tranchée: « Ce titre (consu/aris) ne peut signifier Zénobie, comme le font aussi les mères des empereurs.
qu'il ait été gouverneur de province, comme on l'a parfois affirmé: on 75 - CIS 3944 (/111• III, 16), BS n" 52, lnl' XII. 37 et H. SEYRIG, 1963. p. 161.
peut hésiter entre l'admission parmi les anciens consuls, par adlectio, et 76 - Comme clans le texte I-1. SEYRIG, 1963, p. 161.
l'octroi des ornements consulaires». Voir aussi F. Millar qui remarque que 77 - Si le grec semble plus précis pour les termes institutionnels et
l'utilisation des mots ôECTTCÔîY]ç/mm clans C/S 3945 n'est pas forcément honorifiques, seul le palmyrénien précise le mois (nysn 563. soit avril 251).
une allusion au rôle dynastique cl"Oclainat (F. MrLLAR, 1995, p. 418-419). 78 - ITpocr1cin1ç est cl' ailleurs une traduction possible et même courante
72 - Sans compter que clans un contexte non institutionnel et officiel, le du patronus latin.
144 Les notables de Palmyre
Certes, Worocl a eu des fonctions très honorifiques et a été L'existence de relations de patronage à Palmyre est bien
honoré au moins deux fois par le Conseil et le Peuple évidemment un signe d'influence romaine 81• La coexistence
( CIS 3938 et 3943), mais le terme rcpocrîdî17ç (ou un des mots « patron » et « maître » clans le même contexte rend
équivalent) apparaît seulement clans des textes de caractère assez évidente la puissance de la famille cl'Odainat clans le
privé, et non clans des décrets officiels. Septimius Apsaios, courant du 111" siècle et ne permet pas d'hésiter sur le sens à
peut-être faute de concurrent, est ainsi devenu le patron de la donner à ces relations de patronage. Comme l'ont proposé
cité (11 rcÔÀ1ç) de Palmyre, dont il est aussi le citoyen M. Gawlikowski et F. Millar récemment, cette prédominance
(rcoÀ.Elîllç). Il ne semble pourtant pas avoir exercé de fonctions ne veut pas dire qu'ils exercent déjà un pouvoir de type royal,
officielles. Il est possible que l'influence romaine ait joué clans comme par la suite 82• Bien plutôt, il apparaît qu'à Palmyre,
l'octroi de ce titre, surtout à un moment où la ville, après le comme clans d'autres régions de l'Empire, les coutumes et
passage de l'armée cl'Aurélien, avait besoin plus que jamais les méthodes romaines cl' exercice du pouvoir semblent
d'un protecteur. Il faut clone mettre cette situation sur le compte s'installer, et cela est visible clans le vocabulaire employé.
de l'abaissement de Palmyre après la chute de Zénobie. De Pour la première fois, clans la cité, il est possible d'identifier
toute façon, la vie de la cité ne s'est pas arrêtée au pillage de des phénomènes de clientélisme au sens propre du terme,
l'armée cl'Aurélien, même si on n'a que peu de détails sur les hors des relations tribales. Le rang sénatorial cl'Odainat et
institutions après cette date (sans compter les textes du Haîran leur permettait d'avoir une influence qui pouvait
ive siècle). 11 y a visiblement une continuité institutionnelle dépasser les limites de la province.
dont la meilleure preuve est le texte M. GAWLIKOWSKI, 1971, Ces textes posent pourtant un double problème : pourquoi
p. 420, daté de mars 273. Un certain Septimius Haclclûclan cette famille est-elle la seule à être en rapport avec des
(sptmyws bdwdn br sptymyws 'gylw mqy), symposiarque, a corporations, et pourquoi seulement pendant l'année 569 de
apporté son aide à Aurélien César (qsr) 79• l'ère séleucide ? En effet, clans les quelque trois siècles sur
Un point commun entre trois des textes avec le lesquels porte la documentation épigraphique, il faut attendre
mot mhpo)V et C!S 3945 qui emploie le mot 8rnrc6î1lç est les derniers moments de la période pour qu'au cours d'une
d'avoir pour auteur des corps de métier de la cité. De plus, seule année quatre textes fassent mention des corporations et
ces quatre textes dédiés par des ŒDVîÉXVHX et crwm6crwv de ces relations de patronage. Les causes de cette éclosion de
portent exactement la même date, l'année 569 de l'ère textes pendant les années 257-258, en même temps que se
séleucide (soit 257-258). Le mois est précisé seulement en bâtissait la fortune cl'Oclainat, restent mystérieuses. En fait,
CIS 3945, '5...avfoKodnysn 569 (soit avril 258). Or, ce sont Oclainat et sa famille apparaissent au milieu du IIIe siècle, déjà
les seuls textes connus à Palmyre qui parlent de corps de puissants, sans que rien n'ait laissé supposer cette montée.
métier de ce type. Le métier qui apparaît principalement clans Une inscription un peu plus ancienne que les textes des
la documentation est celui de marchands. Pour le reste, on a corporations est en fait la première mention datée de la
seulement affaire à des fonctions administratives, religieuses famille ( C!S 3944 ; fig. 44). Ce texte bilingue de la Grande
ou n1ilitaires. I\1ê111e le texte dt1 Tarif ( CIS 3913) clo11ne pet1 Colonnade est une dédic:.:ice faite par un soldat de la Légion
de précisions clans ce domaine. Il est probable pourtant que cyrénaïque en octobre 251 à Haîran, fils d' Oclainat, son
des associations de métiers existaient à Palmyre, avant le patron (îov rcchpcova, sans équivalent araméen). Le soldat
milieu du Ille siècle, sur le modèle de ce qui existait clans s'appelle clans le texte grec, Aùp11À1[oç cD1ÀÊivok [Aù]p(11Àiou)
d'autres villes de l'Empire 811• En effet, on a ailleurs des 'HÀ.108wpo [u mû Pamoul. Hélioclôros p ourrait être
exemples de relations du même genre entre un bienfaiteur l'équivalent d'un nom sémitique, par exemple Lishamsh 8',
et des associations professionnelles. Ce type de texte peut nom très commun à Palmyre (voir chapitre II). Ce qui est
éclairer le cas de Palmyre, où les témoignages sont, comme curieux, c'est que, clans la version en araméen, ce soldat est
à l'habitude, concis, voire obscurs. La réciprocité clans les 'w1Jys plynws br mq' plyn' r'y (« Aurelius Phileinos, fils
relations entre patrons et clients apparaît certaine, elle entre de Mariâ Phileinos (?) Raaî ») s.,; l'onomastique est plutôt
clans la définition même du patronage. sémitique, si l'on excepte plynws/plyn', ce qui semble
79 - On n:trnuvc: œrtains de: ces personnages dans le tex.le /m· IX, 2.8 (avec [c!)ÀCJ.�lCY.VÔlc: cle DFD. p. 2.32. (reprise par H. hr;11rnr. 1976. p. 130) est
les lectures de [YI, G,\WLIKU\\SKL 1971, p. -J.13--J.2. l : voir ici la fig. 46) moins probable: le nom latin. Ffuuiunus (C!)ÀO'.j31CY.voç en grec) est transcrit
antérieur il la chute de P almyre. JJfw,·m1·s en ara111éen en /m• X, 130. Si plyn' el pfym1·s sont vraiment deux
80 - Sur les associations professionnelles en Asie Mineure, voir par exemple transcriptions différentes du 111ême 110111. on peut se demander sïl n'y a pas
M. SARTRE, 1995, p. 2.58-259 avec les références antérieures.L'ouvrage de là un des rares cas où la transcription tiendrait compte du cas utilisé en grec
O. M. VAN NuF, 1997 fait un bilan sur le sujet clans l'Orient romain, en (no111inatif cJ)1ÀÉivoç, puis génitif c])tÀEivou ), mais cela est peu probable.
particulier du point de vue des relations avec les cités. Ce qui est curieux aussi est que1'équivalent grec du nom plyn' n'apparaisse
81 - P. GARNSEY et R. SALLER, 1994, p. 235-2.51. pas clans le texte clans cette langue. Il est en fait possible que le 110111 de
82. - M. GAWLIKOWSKI, ] 985, p. 251-26] et F. MILLAR, 1995, p. 4 l-J.-419. l'ancêtre r'y ne figure pas dans la version grecque et quïl faille plutôt
83 - Cf. par exemple J. CANT I NEAU, 1930a, p. 546-54 7, n" 13 restituer cJ)tÀEl vou dans la lacune, à la place de PO'aCY.lOU. Cela expliquerait
(= M. GAWLIKOWSKL ] 970b, n" 26, p. 2]]). aussi les deux for111es du 110111 en araméen, qui auraient été simple111ent
84 - J. K. Stark donne pour les 110111s plyn' et pl_,·m1·s la même explication copiées sur la version grecque (ce qui ne signifie pas que celle-ci soit
équivalence avec le grec cJ)tÀÊi voç (cr. J. K. STARK, 1971, p. l 08 ).La forme l'original de l'ensemble du texte!).
Chctpitre IV: L'il;fluence sociale des notables 145
une ongrne locale 85• Le nom de son habitants. On a là un modèle qui assez bien sur la
vll,)vJL,:;;,Llv
'HÀ108copoç, n'est pas l'équivalent de h!drs, mais de manière dont fonctionnait l'Empire. Palmyre, comme
m1y'. Ce nom n'est sans doute pas une forme du nom latin ai11eurs, le pouvoir romain s'appuie de manière privilégiée
Marius, ni un nom féminin, comme le pense J. Cantineau sur les gens en place, les notables 90• Les premiers citoyens
(fnv p. mais plutôt un dérivé de la racine mr', romains originaires de l'oasis 1' ont sans cloute été en raison
« maître» 8 (i. cl'une carrière brillante clans l'armée ou 1'administration
D'autre part, ce soldat de la légion III Cyrenaïca 87 donne, romaine, mais aussi parce que leur familiale leur
IJ�'-'u,.�u
dans la version sémitique, uniquement le nom araméen de permettait de rendre service ou de se faire remarquer par les
sa fonction, plb ', mot qui est utilisé par exemple en syriaque. autorités romaines.
Pourtant, il n'y a aucun doute qu'il appartient à une unité de
l'armée régulière romaine, même si c'est peut-être un corps
b. Le vornbulclire de l'amitié
auxiliaire. Il est tout à fait étonnant que ce mpa:no'm1ç soit
en rapport avec un des fils d'Odainat 88• On aurait plutôt L'étude cl'autres textes peut donner un certain éclairage
attendu un officier, plus capable cl'avoir les moyens de faire sur l'utilisation de ce vocabulaire 91, en particulier une
dresser une statue sur la Grande Colonnade. Une solution formulation assez courante à Palmyre, où le personnage
avait été envisagée par H. Ingholt. Ce dernier proposait de honoré est clans un rapport d'amitié (10v ql1Àov) avec le (ou
voir dans ce personnage le bene.fïciarius Flcwianus chargé les) déclicant(s) 92• Sur une douzaine de textes de ce genre,
de surveiller la construction des murailles cl' Aclraha en trois sont dédiés à des militaires romains (Inv 1, 108 et
Arabie vers 260 Aussi tentante que soit cette théorie, la
8
'). 128) ; lnv 108 est d'ailleurs une dédicace d'un
correspondance entre 1>Àa�tav6ç et plynws tenue pour établie Palmyrénien à un autre Palmyrénien qui a fait carrière clans
par ce savant, n'est pas assurée. C'est pourtant sans doute l'armée impériale 93•
clans ce sens qu'il faut chercher, car il est probable que, Si l'on met de côté les trois textes qui impliquent des
malgré son grade apparemment modeste, A ù p1i h[oç militaires et où plus qu'ailleurs peut jouer l'influence romaine,
1>1ÀE1vo]ç 'HÀ108côpo[ul devait faire partie d'une manière ou on remarque que les autres sont dédiés, pour cinq cl'entre eux
d'une autre de 1'élite de la cité. à Worocl 3937, 3939-3941 et 3943), un à Odainat
La famille cl' Oclainat entretient donc des rapports GAWLIKOWSKI, 1 985, n° 13), un à M. Ulpius Iarhaî (Jnv
privilégiés avec un certain nombre de corporations, et avec 78) et un à Soados GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 66, n" l ). Ce
au moins une certaine partie de la population de la cité. On n'est sans doute pas le fait d'une simple coïncidence qu'on ait
ne peut, je crois, dire, comme le fait l'éditrice du texte venant là mention des personnages parmi les plus importants et les
du sanctuaire de Baalshamîn, qu' « Oclainath était alors plus influents ayant marqué la vie publique à Palmyre depuis
gouverneur de Syrie [ ...] (et que) l'importance qu'il avait le milieu du 11 siècle. Les notables y sont remerciés pour ce
°
ainsi revêtue, et qui avait rejai11i sur sa famille, avait peut qu'ils sont plus que pour ce qu'ils ont fait 9�. Peut-être un
être incité les diverses associations professionnelles ou, mouvement s'amorce-t-il vers l'émergence à Palmyre de
éventuellement, ethniques de Palmyre à solliciter « super-notables » dominant de très haut le reste de la société.
massivement son patronage ou celui de son fils» (p. 67, Ce processus atteindrait son point culminant avec Oclainat (et
commentaire du texte BS n° 52). Worocl), ce qui expliquerait la brusque multiplication des textes
C'est, à mon sens, le contraire qui s'est produit; c'est à propos des relations d'amitié et de patronage 95• Il est tout à
parce que cette famille avait une position de prééminence à fait remarquable que cette montée des notables de Palmyre se
Palmyre qu'elle a été choisie par l'empereur, comme elle fasse par l'affirmation de relation entre des patrons et leurs
avait été choisie comme protectrice par une partie des obligés, donc selon un modèle romain.
85 - En tout état de cause, il est le fils d'un r'y, nom sémitique, attesté par 88 - Le terme sémitique COITesponclant semble avoir les mêmes connotations
ailleurs à Palmyre (cf. .1. K. STARK, 197 L p. 50 auquel on peut ajouter le que le terme grec cnpcxno'n17ç.
texte BS n" 2). 89 - H. INGHOLT, 1976, p. 133 citant les textes cl' Aclraha (Der'a) publiés
86 - Voir le commentaire de .1. Starcky et H. Ingholt, clans PNO. p. 174, à par H.-G. PFLAUM, 1952, p. 307-330.
propos du même nom qui apparaît clans le texte n" 79 de leur recueil. On 90 - Voir par exemple, P. A. BRUNT, 1976, p. 161-173.
aurait clone un autre cas où il n'y a pas totale correspondance entre les 91 - Le formulaire des inscriptions honorifiques, classique dans l'épigraphie
noms sémitiques et grecs, alors même qu'on aurait pu l'attendre. Cela incite grecque, est relativement constant : voir le chapitre r.
une nouvelle fois à la prudence, quand on essaie de trouver des équivalences 92 - Voir l'index du vocabulaire honorifique pour les mots grecs et leur
à des noms grecs portés par des Palmyréniens. traduction éventuelle en araméen.
87 - On a en grec cn:pcx:TlCDTllç À.Ey[Eéovoç Kup17vcxh11:rjç ( « soldat de la 93 - Un quatrième texte (/m' X, 117) semble être une dédicace à un militaire
Légion cyrénaïque ») et pH1' dblgywn' dy b$r ( « soldat clans la légion qui romain de I' ala Thracum Herculianae par un membre du clan HaurnaL autant
est à Bostra »).Si comme l'écrit .1. Cantineau, lm• III, p. 23, le mot« légion» qu'on puisse en conclure des restes d'une inscription très abîmée.
doit être en abrégé, parce qu'il n'y a de la place que pour six ou sept lettres 94 - D'où les mentions de la « reconnaissance» clans les autres textes, ou
clans la lacune (contre onze clans sa restitution), on peut restituer des mots cle ce genre avant xcx.ptv ou ËVElŒV.
éventuellement Aq[ y' Kup17vcxh K17ç comme en lnl' X, 1 ou 108-109 par 95 - Cette hypothèse a lïnconvénient (entre autres) de négliger la part de
exemple. hasard clans les découvertes.
146 Les notables de Palmyre
On ne voit pas bien la raison pour laquelle le terme qui Certes, le mot cptÀoç reçoit clans les textes bilingues une
indique la relation cl' amitié n'est pas traduit traduction littérale : 111111' (« ami ») ou J11111h ( « son ami»)
systématiquement, alors qu'on l'attendrait. Ainsi, clans la et il est possible que les occurrences du terme rassemblées
série des textes pour Worocl, le premier (C/S 3937), dédié à clans l'index doivent toutes être traduites en tenant compte
Aurelius Worocl (et non Septimius Worocl comme les textes de l'existence de la formule grecque, c'est-à-dire que l'ami
suivants), ne donne pas d'équivalent araméen. Il s'agit du devrait en fait être la personne honorée. Néanmoins, il faut
texte le plus ancien de la série, ce qui est une explication bien voir que ce n'est pas le sens le plus conforme à la
assez maigre 06• Il arrive aussi clans certains cas qu'une des grammaire araméenne qui rattacherait plutôt 111111h ( « son
deux versions soit trop endommagée pour qu'on en tire des ami») au cléclicant dont le nom précède : clans le texte publié
conclusions. par M. Gawlikowski (M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 257, n" 13),
On aurait pourtant bien aimé savoir quel était comme le fait remarquer l'éditeur, selon la grammaire, 111111h
l'équivalent grec de la formule J11111why (« ses amis») du désigne le cléclicant ('t' q b br ' gylw br zbdbwl Ateaqab, fils
texte araméen de C/S 3960 97• Ces deux amis de Marcus de Ogeîlû, fils de Zabclibôl), alors que le cpÎÀov du texte grec
Ulpius Iarhaî sont Haîran, fils de Iarhaî, fils de Taîmê et est Oclainat JOo_ La présence du mot lyqrh (« en son honneur»)
Habîbî, fils de Iarhaî, fils de Haîran (bby by br yrby br bym juste après, clans quatre des cinq cas attestés 101, peut appuyer
et bym br y111y br tym ') 98• Ces deux personnages ont clone cette interprétation, puisqu'il semble inutilement compliqué
dressé une statue de Iarhaî, avec les marchands qui sont de rapporter le possessif affixé -h, clans le premier cas au
remontés en leur compagnie (wtgiy' dy sl q 'mhwn). Mais, clédicant ( « son ami »), puis clans le second à la personne
alors qu'on attendrait que Iarhaî soit qualifié cl'ami ( -rov cp1Àov honorée ( « en son honneur»).
ou 111111h), le terme s'applique aux deux cousins. Il y a clone Un autre argument va clans le même sens, c'est l'emploi
en quelque sorte inversion du formulaire habituel aux clans le texte grec de l'inscription M. GAWLIKOWSKI, 1970a,
inscriptions honorifiques. Dans le cas courant, le mot p. 66, n" 1 du nominatif 6 cpÎÀoç : on a peut-être clans ce cas
s'applique à la personne honorée, qui est « l'ami » du un exemple d'une adaptation araméenne d'une formule
cléclicant, c'est-à-dire qui lui est supérieur. Il est possible grecque retranscrite en grec. L'ami qui est habituellement
que cette relation n'ait pas été comprise de la même manière en grec la personne honorée est devenu en araméen le
en araméen, ce qui expliquerait le cas de C/S 3960. On voit cléclicant et clone, en grec (qui dépend apparemment du texte
mal en effet comment ces deux personnages, qui honorent palmyrénien), il est mis au nominatif. On voit que, comme
Iarhaî, ne seraient pas en quelque sorte des débiteurs de celui toujours, la question du bilinguisme joue sur plusieurs degrés.
ci. Il serait aussi sans exemple que le supérieur dresse une Visiblement pour ce texte, l'original est plutôt araméen, cl'où
statue en l'honneur d'un de ses clients 99• l'emploi du nominatif, et peut-être aussi du verbe
En réalité, il faut tenir compte d'une ambiguïté présente conjugué 102• Mais l'araméen dépend très fortement de modes
clans les textes araméens. En grec, l'usage des cas (accusatif grecques et cl' un formulaire particulier à cette langue (même
pour la personne honorée et nominatif pour le cléclicant) rend s'il est cl'origine latine).
les choses très ci aires, mais il n'en est pas de même en L'ambiguïté vient visiblement à l'origine d'une copie
araméen, clans lequel les cas grammaticaux n'existent pas. trop fidèle des modèles grecs, jusque clans l'ordre des mots.
96 - Mais on a pu voir par ailleurs que les traductions ne se signalent pas désigne le clédicant. et non la personne honorée. Il s'agit peut-être d'une
toujours par leur fidélité et leur précision, et dans le cas de C!S 3937. c'est influence du formulaire grec comme à Palmyre, ou alors d'un formulaire
sans doute une explication de ce type qui est la meilleure. araméen propre sur lequel on n · a aucune information. On peut penser aussi
97 - Le texte araméen est publié dans Jm, X, 87 et le grec /111' X. 88. ü l'institution hellénistique des «amis royaux », les philoi. Dans ce cas, les
98 - La généalogie du second s'achève par bny 'nwbl. J. Cantineau amis sont en relation de dépendance avec le souverain. On peut imaginer
(J. CANTINEAU. 1930b. p. 35, n" 9 suivi par J. Starcky, /171' X, ad /oc.) propose que ce type de pratiques s'est développé à Hatra sous l'influence de la cour
de restituer le mot 11111 entre le nom du grand-père et bny 'nwbt; il comprend arsacicle (sur les philoi des rois parthes, voir I. SAVALLI-LESTRADE, 1998,
donc que le (ou les) déclicant(s) appartiennent à la tribu jusque-là inconnue p. 205-212). D'ailleurs le texte Hatra n" 36 concerne Dûshparî (dw.ijp1y).
des bny 'nwbt. Il est plus simple pourtant de faire de 'mvbt l'arrière-grancl fille du roi Sanatrûq. signe quïl s'agit peut-être bien de l'écho de pratiques
père commun aux cieux déclicants (voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 32). de cour. Le contexte palmyrénien semble fort différent. et plus proche de
99 Voir par exemple la liste d'exemples donnés par R. SALLl:R. 1982. ce qu·on connaît ü la même période dans l'Empire romain.
p. 195-199 pour1· Afrique du Nord (inscriptions latines avec principalement 101 - li s'agit des textes M. GAWLIKOWSKI. 1985. n" 13: M. G"-WLJKOWSKI,
les mots potm1111s et u111ic11s). Même si les relations d'amitié peuvent l 970a. p. 66, n" 1 ; lm• X, 78 et 128 clans lesquels on retrouve diverses
fonctionner clans les cieux sens, et si le terme peut être employé par le patron variantes de la formule 1)1111/J Jyqrh (« son ami. en son honneur »). en face
pour ne pas froisser son client par un terme dépréciatif (voir R. SALLER. du î0V <)>lÀov grec (sauf clans le cas de M. G"-WLIKOWSKI, 1970a, p. 66, n" 1
1982, p. 11-15 ), 1'apparition des termes clans l'épigraphie semble toujours où 1 · on a 6 cpi.Àoç). Le texte CIS 3939 (/m' 111. l O) présente un cas semblable :
aller clans le même sens (remarque similaire de R. SALLER, 1982, p. l 0-11 Julius Aurelius Nebûzabad, fils de Shoaclû est stratège de la colonie : on a
sur l'usage différent de putronus dans les sources littéraires et en grec [cr-cpmhnoç [-c17ç] Àa�mpoîCXîllç KoÀm�Eiaç, [îlov Éauwü
épigraphiques : potro1111s est présent surtout clans ces dernières, car elles cpiÀov avec l'opposition nette marquée par les cas grammaticaux. et en
sont le fait de clients, alors que les sources littéraires produites par des araméen, où cette opposition n'existe pas. 'str</>g' dy qlny' 1)1mh («stratège
patrons ne mentionnent pas le terme, par politesse envers leurs protégés). de la colonie. son ami » ). L'ambiguïté est grande, mais on doit pouvoir
100 - Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI. 1986-1987, p. 170. On peut remarquer proposer les cieux interprétations.
qu'en hatréen, on retrouve la même formule avec rbmh (Hatra n" 36) qui 102 - Voir chapitre I pour cette question.
Chapitre IV: L'ilifluence sociale des notables 147
Cela a certes pour effet de rendre l'araméen difficilement soit le même Marcus Ulpius Iarhaî qui est lui-même honoré
compréhensible sans l'aide du texte grec, mais le sens serait comme ami en lnv 78. Les deux textes proviennent
en réalité plus ou moins le même qu'en grec. Une chose est à'ailleurs du même endroit, l'agora. Jnv 128 prouve en
c'est qu'à la fin de la période, on emploie une autre tout cas le re1xese1nte à par la
formule, clans laquelle !yq r précède le mot 1)1mh. On trouve parmi les gens qui font office de patron, on trouve seulement
cette expression attestée clans les trois textes les plus récents les notables les plus importants et les officiers, et qu'il arrive
qui font état de cette notion cl'amitié : tous trois concernent même que les premiers soient les clients des seconds 105•
103
Septimius Worod La formule est donc sans ambiguïté, le
• I1 est regrettable que le cléclicant de Jnv 78, Belshûr
texte est fait par le dédicant « en l'honneur de son ami » (B11À0oupoç Iapmou bl§wr bry1)1y) soit inconnu par ailleurs,
(lyqr rbmh). Toutefois, une remarque s'impose: à chaque ce qui aurait peut-être permis d'éclairer ses relations avec
fois, le texte précise et ajoute un qualificatif pour désigner Iarhaî. J. Cantineau (J. CANTINEAU, 1930b, p. 34, n" 8)
la personne honorée (Worocl) ; il est non seulement « son propose d'en faire le frère du Haîran (J1yrn bJ·y1)1y br tym')
ami » mais il est aussi« son patron » (rcpo0"CÔ'.î17ç ou qywmlz). connu par C/S 3960 (J,n, 87-88). Malheureusement la
Le texte est donc fait en l'honneur de l'ami et du patron. On lecture 0EH pour le nom du grand-père de B11À0oupoç
comprend alors qu'il était nécessaire de préciser et que toute semble assurée et il est difficile cl' en faire un
ambiguïté devait être levée : Worod est le patron et l'ami et équivalent (ou une erreur du lapicide) pour le nom sémitique
on ne pouvait laisser penser que 1'ami pouvait être le tym' 106• De plus, l'équivalent grec de tym' serait plutôt un
déclicant. nom du type 0m�Lll, avec un alpha (voir par exemple
D'après cet exemple, on peut penser que la formule CIS 3920). Cette correction nécessite donc au moins le
habituellement (dans les autres cas) a bien le même sens changement de deux lettres : une telle erreur de gravure
qu'en grec, mais qu'on était conscient de l'ambiguïté, et semble difficile à concevoir.
qu'on précisait quand elle pouvait être gênante. Plus Ce texte ne montre clone pas Iarhaî seulement comme
probablement, on employait couramment une formule qui un caravanier, mais aussi comme un notable pourvu d'un
disait le contraire de ce que disait l'original grec. On ne jugea cercle de clients peut-être plus large. Certes, les motifs de
utile de rectifier qu'à la fin de la période, dans un cas très 1'érection de la statue ne sont pas précisés et il se peut qu'il
particulier où la formule araméenne habituelle aurait conduit s'agisse encore d'une affaire de trafic caravanier. De même,
à un non-sens complet sur l'état des relations sociales à les honneurs rendus par Iarhaî à un officier romain stationné
Palmyre à ce moment. Néanmoins, la première interprétation à Palmyre peuvent aussi avoir des rapports avec l'activité
(« l'araméen quoique d'une formulation ambiguë a le même marchande et le trajet des caravanes en Palmyrène. Pourtant,
sens que le grec ») est possible et ne peut être écartée il est probable que le pouvoir détenu par les grands
-1.
absolument 10 caravaniers devait s'exercer en cl 'autres domaines.
Toutefois, le contresens vraisemblable de l'araméen sur Cette émergence de grands notables peut permettre de
la nature des relations d'amitié, et surtout sur leur expression faire un bilan provisoire sur la place qu'on peut accorder à
épigraphique, n'empêchait pas les Palmyréniens cl'être Oclainat et à son fils Haîran dans la cité de Palmyre après
pleinement conscients de la signification sociale de ces 250-251. On a vu plus haut qu'il faut sans cloute éviter de
relations. surestimer 1'influence de cette famille à ce moment :
En effet, les relations d'amitié (dans l'épigraphie grecque néanmoins, elle est en position prédominante. À la différence
et latine) ne sont pas des relations entre amis de même niveau des grands notables du siècle précédent, ses membres sont
social, mais bien plutôt des relations dissymétriques ; il suffit affublés de titres locaux dont la définition fait difficulté
pour s'en convaincre de voir la liste des bénéficiaires des (exarque en particulier). De plus, ils font partie de l'ordre
textes. L'ami qui est honoré est en fait à considérer comme sénatorial, ce qui est inédit à Palmyre 107• Néanmoins, la
un patron. Il n'est d'ailleurs pas étonnant que les amis nouveauté de cette agrégation clans le premier des ordres de
honorés dans les inscriptions de Palmyre soient des l'Empire ne doit pas dissimuler que cet accroissement des
personnalités connues, ou encore des militaires romains. honneurs est également une conséquence de l'évolution
Parmi ces derniers, on compte un centurion (Inv X, 1) et générale de la société romaine provinciale. En effet, par
deux commandants d'unité (tribun de cohorte et préfet comparaison avec le reste de la population de Palmyre, il
cl'aile). Il est cl'ailleurs tout à fait remarquable que le clédicant devait être presque aussi honorifique pour Marcus Ulpius
du texte Jnv X, 128 en l'honneur de Ti. Claudius Phi[ ...] Iarhaî cl'être citoyen au milieu de II° siècle que pour Oclainat
103 - C/S 3940-3941 et 3943 (= 111\' III, 9, 8 et 6) datés entre 264 et 267. III' légion. mais. comme on vient de le voir, le gracie de celui-ci n'est pas
104 - Il est notable que J. Starcky, clans Ill\' X, semble hésiter. puisqu'il fait très élevé (C/S 3944).
du texte araméen d' ln\! X, 78 une « traduction exacte» du grec (p.51). 106 - On connaît clans le texte J. CANTINEAU, 1930b. n" 79 le nom féminin
alors qu· il traduit différemment les deux versions d' f,71, X. 128 (le clédicant tyk.s'. J. K. Stark pense quïl s'agit d'une erreur du lapicide pour le nom
« à son ami» pour le grec; le clédicant est lui-même l'ami en araméen). lyms' (J. K. STARK. 1971. p. 117).
l 05 - Le cas est différent pour Septimius Haîran. patron cl'un soldat de la 107 - G. W. BüWERSOCK. 1982. n'" l 9-24.
148 Les notables de Palmyre
d'être sénateur un siècle plus tarcl. Parce que tous les avec beaucoup de probabilités, le même Worocl que le
Palmyréniens étaient devenus citoyens en 212, ce qui était bouleute. Les titres cl'Héroclien dans ce texte sont
un privilège réservé à une élite locale avait perdu une partie intéressants, car il se fait appeler roi des rois ([B]acnÀE1
de sa valeur. D'autre part, le rang de sénateur permettait en �amÀÉ.cov), titre qu'il a apparemment revêtu près de !'Oronte,
même temps aux grands notables de Palmyre cl'élargir leur après une victoire contre les Perses. Selon toute
influence au moins au niveau provincial, ce qui pouvait avoir vraisemblance, le texte est à dater entre 260 et 262 114•
des conséquences à Palmyre même, éventuellement pour la L'appellation roi des rois n'est attestée pour Odainat lui
prospérité des corps de métiers qui existaient à cet endroit. même qu'après sa mort, clans une inscription posthume de
la Grande Colonnade (en 271, C/S 3946: mlk mlk', « roi
des rois» 115). Il ne fait pas de doute pourtant que le père a
c. Worod et lc!fèzmille d'Odcânat
dû recevoir la même titulature, au moins au même moment
Ce type de texte peut permettre de mieux comprendre que le fils. Quoi qu'il en soit, Worod est à nouveau dans
un des rares cas où sont attestées précisément des relations l'entourage d'un fils d'Odainat.
entre grands notables. La comparaison entre les clients de On peut se demander quel est le motif de ces liens entre
Worocl et ceux cl'Oclainat et de sa famille contribue sans cloute les deux personnages, mais il est possible que Haîran et
à éclairer les relations entre les deux personnages. Seuls deux Worod aient appartenu à la même génération, alors que
textes les mettent en relation indirecte, et à chaque fois, il Odainat serait né vers 220. Il apparaît clairement que, quelle
est clair que Worocl est en situation de dépendance vis-à-vis qu'ait été sa puissance, Septimius Worod a eu un destin
de la famille des princes de Palmyre ; cependant, il ne semble étroitement lié à celui d'Oclainat et sa famille. Il n'est sans
pas entrer en relation directement avec Oclainat, mais toujours doute pas indifférent que Worod disparaisse de nos sources
avec ses fils 1118• L'intérêt de ces deux textes est aussi de se vers 267-268, c'est-à-dire approximativement à la date à
situer aux deux extrémités de la carrière de Worocl 1
09
• laquelle meurent Odainat et son fi ls Hérodien 116• Il semble
Dans le premier texte, celui qui n'est encore que pourtant au faîte de sa puissance à ce moment, comme le
Oùopm811ç le bouleute (�ouÀcu[·nîd) dresse la statue du prouve l'étalage de titres dans les textes ( en particulier
clarissirne Septimius Haîran, fils du clarissime consulaire CIS 3942). Il apparaît donc probable que la chute d'Odainat
Septimius Oclainat ('08mvci0ou 1oû Àa�t n:p o1ci1ou a entraîné celle cl 'un de ses plus anciens fidèles.
1
1
unanKoÛ) La fin du texte n'est pas conservée: on a ainsi
() . Mais il est possible aussi que l'allégeance de Worod ait
perdu les motifs de l'honneur et surtout les termes de relations été au fils plutôt qu'au père, bien qu'il semble que les deux
(ami ou patron?) qui peut-être figuraient à cet endroit. Le personnages aient des titres relativement semblables dès le
texte n'est pas daté, mais C/S 3937 (Jnv III, 13) montre qu'en début de la période. Ainsi, Haîran a été associé à son père
258-259, il porte le nom cl' Aurelius Worocl (A ùp1i À1oç depuis au moins 251 ( CIS 3944), date à laquelle il est sénateur
Oùopm811ç). Haîran et son père portent les mêmes titres clans et exerce une souveraineté mal définie sur Palmyre : il est
un :mtre texte de la Grande Colonnade qui porte la date de îOV ÀaµnpÔîŒîOV GUVKÀllîlKOV Ëça[pxov TicxÀ�tu]p11vcov. Le
257-258 111• Les autres attestations du terme una1:1KÔç pour titre est à 1'accusatif et porte clone sur son nom, et non sur
Oclainat sont de la même année 112• Cela peut donner une idée celui de son père (on a en araméen snqltyq' nhyr' wrs tdmwr,
de la date du texte, sans cloute très proche de 257 de toute « sénateur clarissime et chef de Palmyre » ). Le terme
façon. Elle indique en tout cas qu'assez tôt clans l'ascension cl'exarque n'apparaît que dans cette inscription (il est restitué
cl'Oclainat, Worocl fait partie de son entourage. Mais, Oclainat en partie) et peut-être dans le texte daté de 252 (on a [Ëçapxov
n'apparaît que parce qu'il est le père de Haîran. TiaÀµu]p11vcov), publié récemment par M. Gawlikowski
L'autre texte, qui présente beaucoup de lacunes, est une (M. ÜAWLJKOWSKI, 1985, p. 257, n" 13 = SEG 35, 1497). Dans
dédicace des deux stratèges éponymes de la colonie ce dernier cas, le mot est entièrement restitué par
(à�t<pÔ1Epo1 <Hpa[11wo't 111ç Àaµ]npo1â111ç ![K]oAmlv]EUad) à comparaison avec le texte araméen. La forme araméenne du
Héroclien, fils cl'Oclainat et Zénobie 113• Le nom du second terme (rs tdmwr ou rs' dy tdmwr) qui signifie « chef de
des deux cléclicants a presque entièrement disparu, mais le Palmyre» apparaît dans ces deux textes, et aussi clans un
premier est · IouÀ10ç A ùp11A10ç [IEmil�tlOç O[ùlo[plwô11ç, donc, texte non daté (seulement en araméen) 117• Le titre désigne
108 - Ou bien son fils. sïl s'avérait que Haîran et Hérodien sont la même précédemment ( voir chapitre 11).
personne (voir infi·o et chapitre 11 pour ce débat). 114 - Cf. M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 255-256.
109 -À condition qu'on accepte ü la suite d'E. Will (1996, p. 109-115). et 115 - Voir aussi, C/S 3971. sans date, mais qui accorde le titre de roi des
de quelques autres. qu'il s'agit bien toujours du même personnage. rois à Wahballat, « fils de Septirnius Oclainat. roi des rois» (brsp/[ymy]ws
110 - H. SEYRIG. 1963. p. 161 (= M. GAWLIKOWSK1. 1985. n" 6). ['dynl mlk} mfk'). Comme on le voit. le nom d'Odainat est seulement
111 - H. SEYRIG, 1963. p. 161 (= M. GAWLIKOWSKI, 1985. n" 5). restauré, mais il est assuré qu'il était le père de Wahballat.
112 - BS n" 52; lm' XII. 37 et sans cloute CIS 3945 (= M. GAWLIKOWSKI. 116 - La dernière inscription de Worod dont la date est süre est C/5 3943
1985. n'" 7. 8 et 9). d'avril 267. Pour Odainat et son fils, voir M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 261.
113 - Jm, III. 3 (la lecture la plus complète est celle de D. SCI·ILUMBERGER. 117 - J. CANTINEAU, 193 J, p. 138. n" 17 (= M. GAWLIKOWSKI, J985, p. 253,
l 942- l 943a, p. 35-50 ; cf. M. GAWLIKOWSKI, 1985. p. 255. n" 10). Cet n" 1).
Hérodien est peut-être le même que Haîran de l'inscription citée
Chapitre IV: L'il{fluence sociole des notobles 149
Haîran en 251 et Oclainat clans les deux autres cas, ce qui qu'on a pu le dire. On a souvent fait remarquer qu'il
prouve sans cloute une association du père et du fils, car il présentait la particularité de ne jamais donner le nom de ses
est difficile d'imaginer que le père ait pu succéder au fils ancêtres 121 or, à bien regarder la documentation, c'est un
;
par leur rôle personnel et contemporain que par le poids de Vraisemblablement d'origine locale (ou au moins orientale
leur famille qu'ils se distinguent. D'ailleurs Odainat, lorsqu'il pour Worod), cette nouvelle aristocratie entretient des
dédie son tombeau ( CIS 4202 = Inv VIII, 55) prend la peine relations assez étroites avec les autorités impériales, ce que
de préciser sa généalogie. Le texte publié récemment par prouveraient les titres officiels portés par certains de ses
M. Gawlikowski (M. GAWLIKOWSKI, 1 985, n" 13) est plus membres. En même temps, elle fait preuve d'une certaine
curieux, puisqu'il fait aussi état des ancêtres d'Odainat, ce autonomie clans la manière dont elle exprime sa domination
qui va à l'encontre de la pratique observée. Sa date sur Palmyre, surtout à partir des années 260, pendant
relativement ancienne peut constituer un facteur d'explication. lesquelles le pouvoir romain en Orient est parfois vacillant.
Les autres personnages en rapport avec ces très hautes Il est impossible de se tromper sur la nature des relations
personnalités suivent l'usage habituel et donnent au moins sociales que les textes étudiés mettent en scène. On a d'un
leur patronyme, voire plus quand il s'agit de membres de côté des notables qui dominent et de 1'autre le reste de la
familles anciennes, comme par exemple Julius Aurelius population. Cette hiérarchie existe bien sûr entre les notables,
Septimius Iadê, fils de Septimius Alexandre, fils de Hérode mais également, au sein même des familles, comme le
Shoraîkô ('IouÀlOÇ Aùp17À1oç LETCTlµlOç Ia817ç LETCTl�llOU prouvent les inscriptions « pour la vie de ... ». Celles-ci,
'AÀE[çâ]v8pou Tou 'Hpcô8ou et ywlys 'wrlys s[p]tmyws yd' comme les autres, sont une preuve de l'existence de familles
br 'Jks[nd]rws byrn siykw) qui honore Septimius Worod puissantes et riches, mais ne sont pas en elles-mêmes une
( CIS 3940). La différence est sensible et mérite donc une illustration de liens de clientélisme. Elles montrent plutôt
explication. Outre leur puissance et leur renommée dans le l'importance des familles patriarcales au sens réduit. Même
contexte palmyrénien, il faut aussi souligner la proximité si ces textes disparaissent au 11" siècle, l'exemple des relations
géographique de la majeure partie de ces textes. À l'exception entre Odainat et Hérodien peut montrer que des relations
de BS 11 ° 52, tous proviennent de la Grande Colonnade et hiérarchiques subsistent au sein des familles.
qui plus est des environs du tétrapyle. Il conviendra de revenir On assiste au cours de la période à l'émergence de
sur ce fait. On peut déjà dire qu'il y a manifestement là un relations sociales dont on trouve des parallèles exacts dans
phénomène d'appropriation de l'espace par un groupe qui le monde romain, en particulier avec l'accent mis sur l'amitié
semble plus se définir par ses relations mutuelles et son ou les liens patrons-clients. On peut sans doute retrouver ce
influence sur la cité, que par son inscription dans des type de rupture dans les traditions propres à l'oasis, lorsque
traditions familiales. l'on se tourne vers un domaine particulier de l'activité des
Pour la première fois à Palmyre, les titres et fonctions notables, aussi bien en Orient que dans le reste de l'Empire,
des différents personnages sont cités systématiquement (pour l'évergétisme.
Worod, avec un certain luxe de détails, pour Oclainat, mais
aussi pour les généraux Zabclas et Zabbai). Il faut sans doute
C. L'ÉVERGÉTISME ET LES MONUMENTS DE PALMYRE
y voir l'ancrage dans les mœurs des pratiques administratives
impériales, De plus, ces fonctions comptent apparemment S'il ::ipp::in1ît cl::iir (]lle 1::i cité de Pr1lrnyre ::i connu des
plus dans la position sociale que la lignée et la généalogie. Il cas d'évergétisme, cette tradition ne s'est peut-être pas
y a certes plusieurs exemples antérieurs de textes qui donnent implantée à Palmyre avec la même vigueur que dans le reste
la ou les fonctions des personnages mentionnés, y compris de l'Empire romain d'Orient 129• Certes, il semble bien que
les Palmyréniens, mais ce qui frappe maintenant, c'est l'évergétisme bâtisseur et urbanistique a existé en tant que
l'aspect systématique de ces mentions. La principale tel à Palmyre, mais selon des modalités particulières qui en
exception est Septimius Apsaios (Jnv III, 18) : on ignore la font un exemple à part. On peut même douter de la validité
date exacte du texte et le déroulement de sa carrière ; on ne du terme d'évergétisme dans un certain nombre de cas.
peut donc en tirer de conclusions, car si sa primauté de fait Pour simplifier le propos, il faut séparer, au moins dans
semble assurée entre les deux passages de l'armée d'Aurélien, un premier temps, l'évergétisme bâtisseur des autres formes
on ignore totalement que11es en furent les modalités. d'évergétisme. La raison en est simple, on a beaucoup
Plus qu'aucun autre moment clans l'histoire de Palmyre, d'exemples de bâtiments construits, mais très peu de dons
le troisième quart du rn'· siècle met en valeur la puissance d'autre nature. L'exemple le plus clair est celui de Malê
cl' un groupe assez réduit de la population, qui semble s'être Agrippa qui fournit de 1 'huile aux Palmyréniens, aux soldats
assuré une mainmise assez complète sur la cité. romains et aux étrangers lors de la visite de l'empereur
129 - On trouvera dans M. Si\RTRE. 1996a. p. 397 une liste assez complète dans d'autres villes. se manifeste avec moins d'ampleur à Palmyre». Sa
des exemples d'évergétisme à Palmyre. Sur ce sujet, il faut rappeler les conclusion est que les revenus des caravanes n'étaient peut-être pas aussi
doutes exprimés par E. Will ( 1992. p. 129) sur la réalité et l'ampleur de importants qu'on l'a cru. On reviendra plus loin sur ces conclusions. Pour
l'évergétisme dans cette cité: « mais ce qui frappe, c'est la médiocrité 1· évergétisme en général. M. S1\RTRE. 1991, p. 147-166. avec commentaire
relative de la majorité des édifices publics ou privés et l'absence de certains de la bibliographie antérieure (en particulier Ph. GAUTHIER, 1985 et P. VEYNE,
autres » et plus loin « la munificence de certains particuliers. bien attestée 1976).
Chapitre IV: L'hifluence sociale des notables 151
Hadrien 3959 = BS n" Il s'agit malheureusement fils de Taîbbôl a sans doute été symposiarque (Jnv l ),
d'un exemple assez isolé à Palmyre. Pour l'essentiel, on a mais les magistratures « civiles » sont extrêmement rares.
surtout affaire à des cas où les notables de la ville offrent Malê Agrippa est un des seuls exemples (C/S 3959 = BS
des édifices ou des parties d'édifice. n" 44) ; on peut aussi penser à un membre de la famille Aabeî,
connu par un certain nombre de textes : Iarhibôlâ, fils de
Malikû (y1J1bwl' br mlkw br lsms brJmbl "by; Icxp1�coÀ17ç
J. LES CONSTRUCTIONS RELIGIEUSES
Mcx1c1xou Awcxwrnu 'îOÙ Acx�El) rn_ Ce personnage a été
Mais si l'on s'intéresse à leurs activités édilitaires, on synèdre (ou proèdre) du Conseil et a été honoré par le Conseil
constate que de manière frappante, elles concernent surtout et le Peuple (/nv 59). Mais en même temps, il a contribué
des sanctuaires, et ce dans toutes les zones pour lesquelles à la construction du temple de Belhammôn qui domine
nous avons des documents. Tous les sanctuaires fouillés ont Palmyre (Jnv XII, 48) et sans doute aussi à l'érection de
fourni des preuves de cet engagement des notables 130• plusieurs statues honorifiques (J. CANTINEAU, 1930b, n" 36).
Que ce soit par sa taille ou par le nombre de textes Antérieur de quelques années à celui de Malê, cet exemple
consacrés, le monument le plus important est évidemment le prouve que la séparation entre domaine religieux et fonctions
sanctuaire de Bel (fig. Quelle que soit la date qu'on lui publiques n'est pas totale.
attribue maintenant 131, il apparaît clairement que tout au long De même, un secrétaire anonyme de la fin du !°' siècle a,
de sa construction, des habitants de Palmyre, par leurs dons, semble-t-il, contribué d'une manière ou d'une autre à des
ont contribué à 1 'embellissement du temple et des bâtiments constructions dans le sanctuaire de Bel 135• Si on excepte le
adjacents. Comme pour la plupart des monuments de la ville, cas peu clair du secrétaire Taîbbôl, au début du me siècle,
il ne faut pas imaginer une construction se faisant en une c'est à peu près tout pour les constructions auxquelles
seule fois, mais bien plutôt une succession de chantiers, pour participent des magistrats. Par ailleurs, certaines dédicaces
chaque portion, selon un plan d'ensemble, mais parfois avec de construction sont probablement le fait de notables qui
des reprises (par exemple pour les installations annexes de la ont exercé des fonctions publiques, mais on n'a aucun moyen
cour 13�) ou des arrêts plus ou moins longs dans le cours de la de le savoir dans l'état actuel de la documentation. Étant
construction. La documentation épigraphique ne permet d'en donné qu'ils ne sont pas mentionnés d e manière
reconstituer que quelques étapes 133• La dernière mention de systématique, une grande partie des « cursus honorwn »
travaux pour le sanctuaire date de 17 5 : deux cousins sont palmyréniens échappent à la recherche.
honorés par le Conseil et le Peuple pour avoir fourni les portes Dans l'étude des dédicaces de construction de bâtiments
de bronze doré du sanctuaire (C/S 3914). religieux, il faut peut-être tenir compte de la position
Ailleurs clans la ville, on a vu l'exemple du sanctuaire spécifique clans la cité d'un certain nombre de sanctuaires.
de Nabû. Les dédicaces de colonnes, parfois même d'une Ainsi, le sanctuaire de Bel est le sanctuaire principal de
seule colonne, sont le fait de grandes familles de la ville, Palmyre. À cet endroit se retrouvait toute la communauté,
mais aussi de personnages moins connus. Dans les deux cas, ce qui permet d'interpréter aussi de manière différente les
on n'a pas de traces cl'autres procédures pour la construction dons en sa faveur ; on pouvait peut-être faire coup double
des monuments religieux : ce sont toujours des Palmyréniens, quand on contribuait à la construction d'un portique : on
sans doute assez aisés, mais pas forcément toujours très faisait certes œuvre de piété, mais on agissait aussi en faveur
riches (d'où les dédicaces d'une colonne seulement). D'autre de la cité 136• On trouverait évidemment des parallèles dans
part, les constructions se font la plupart du temps par petites cl' autres cités de ] 'Empire. De manière assez naturelle,
sections, mais sans doute selon un plan cl'ensemble, encore certains des bienfaiteurs du sanctuaire de Bel reçoivent des
que la question puisse être posée, par exemple pour les dédicaces du Conseil et du Peuple, comme CIS 3914
différentes cours du sanctuaire de Baalshamîn. Inv IX, 25), qui établit un rapport direct entre la
Il y a parmi les bienfaiteurs assez peu de gens qui ont construction des p ortes et l'honneur fait aux deux
exercé des fonctions officielles dans la cité. Certes Lishamsh, bienfaiteurs.
130 - Sur ces problèmes, voir J.-B. YoN, 2001, p. 173-181. p. 268, n" 17 et p. 274, 11° 19; 1931, p. 130-132, n° 11).
131 - Voir M. PIETRZYKOWSKI, 1997, p. 132-133. 134 - Sur le personnage et sa famille, voir le chapitre 1 (C 3c).
132 - E. WJLL, 1992, p. 141-145. 135 -J. CANTlNEAU, 1933, p. 177, n" 3: le personnage a été secrétaire au
133 - Les principaux textes du sanctuaire ont été publiés clans /m• lX et XI. moins cieux fois; il est honoré d'une statue. Le texte rappelle aussi qu'il a
On notera en particulier lnF IX, 1 (dédicace de la cella en 32), 6a fait des dépenses en faveur du sanctuaire et des prêtres de Bel et qu'il s'est
(= CIS 3924; aide à la construction du temple en 19), 8 (= C/S 3923; don sans cloute rendu en Mésopotamie (voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 72).
cl' objets de culte en 5 l ). 11 (aide à la construction du temple en 24), l 5 136 - Cette ambiguïté est notée par M. Sartre (M. SARTRE, 1996a, p. 397)
(= C!S 3917; construction de la porte et du toit de la cella en l 08, au moins quand il rappelle qu'existent de « nombreux donateurs en faveur du
d'après M. P1ETRZYKows1<1, 1997. p. 133), 25 (= CIS 3914; portes des sanctuaire de Bel et d'autres sanctuaires de la ville, mais, (qu')en ce domaine,
propylées en 175). Pour d'autres constructions de portiques dédiés à diverses on ne sait comment départager ce qui découle de la piété et ce qui relève de
divinités clans la cour du sanctuaire, voir les textes réunis par l'évergétisme municipal». En fait cette ambiguïté existe pour l'immense
M. ÜAWLIKOWSKI, 1973a, p. 61-64 (J. CANT[NEAU, l 933, p. 177, n" 3 ; 1936, majorité des dédicaces de construction de Palmyre.
152 Les notables de Palmyre
Le sanctuaire de Baalshamîn, quant à lui, dépend Alexandre. Il a aussi rempli l'ensemble de la canière publique
étroitement d'une des quatre tribus civiques de la cité. de la cité, « sans ménager sa bourse» ( CJS 3932 = Jnv III,
L'inscription qui honore Malê Agrippa, datée de 13 1 , permet 22; oÙK ÔÀ1ywv à�a817cmvî0'. xp1wci-rwv). Le caractère
d'étudier un cas limite ( CIS 3959 = BS n° 44; fig. 49): d'une évergétique de son action ne peut être mis en doute, on peut
part, ce personnage a été secrétaire du Conseil et a fourni de supposer qu'il y a eu dans l'ensemble de son œuvre des
l'huile lors de la visite d'Hadrien sur le site, d'autre part, il a constructions, mais le texte ne le dit pas.
fait construire le temple de Baalshamîn, celui qui se dresse Il est remarquable d'ai11eurs que les autres cas non
encore sur le site à l'heure actuelle. L'inscription ambigus d'évergétisme concernent ou bien le commerce
commémorant ces deux événements a justement été caravanier ( C JS 3948), ou bien restent très vagues
retrouvée sur une colonne de ce temple. Comme on l'a vu (C/S 3942: rrÀËicna 01Ko8Ev àvaÀCÔcmvîO'. «qui a beaucoup
plus haut (p. 32), c'est une décision du Conseil et du Peuple, dépensé de sa propre fortune» ). Dans C/S 3948 (= Jnv III,
appliquée par une des quatre tribus civiques (les Bené 28), il est probable que la somme de 300 deniers cl' or
Mazîn), qui est à l'origine des honneurs qu'il reçoit à cet ( « ancien poids » ; xpucrà rraÀmà 811vcip1[a] -rprnKoma)
endroit. De manière assez significative, un des rares cas corresponde à un don fait par le synodiarque Taîmarsû, fils
d'évergétisme classique (la fourniture d'huile) n'est connu de Taîmê. Comme on l'a vu (chapitre III), l'argent est
que parce que le même personnage a contribué à la rarement fourni par les grands caravaniers eux-mêmes. Et
construction d'un temple, raison pour laquelle l'inscription clans les rares cas où ils font revenir les caravanes à leurs
se trouve à cet endroit. Cela ne signifie pas que ce bienfait frais 13 8, le fait est souligné pour en montrer le caractère
soit le seul de son espèce, mais il faut souligner qu'il est lié exceptionnel. L'originalité de ces textes est clone de donner
épigraphiquement à des constructions religieuses, et qu'il des précisions d'ordre financier sur les bienfaits accomplis
est le seul exemple connu jusqu'à présent. par les notables.
Le cas de Malê Agrippa est d'ailleurs intéressant. Il Quelques cas de construction de bâtiments civils
prouve que 1'activité des notables est attestée dans 1'ensemble permettent d'illustrer plus amplement les traditions
des quartiers de la ville, même dans des zones qu'on peut particulières à Palmyre. Ainsi, quand une certaine
définir comme extra-urbaines. Le cas du sanctuaire de Thomallachis, fille de Haclclûclan (8o�taUax1ç A88ou8avou
Baalshamîn, au nord de la zone occupée au début de 1'époque wu Iap1�wÀrnukl -roû A88ou8avou -roû ct:>1p�twvoç) donne
romaine, est caractéristique de ce fait, comme l'est celui de une somme pour la construction des bains en 182, il s'agit
Belhammôn, sur une colline qui domine la ville. Or la plupart en fait de bains appartenant au sanctuaire des dieux Malakbel
des textes découverts dans les deux endroits sont des et Aglibôl (fig. 50) 139• Or la donatrice appartient à la famille
dédicaces religieuses en araméen. Elles utilisent un Firmôn. Cette dernière est un clan de la tribu des Bené
formulaire particulier, que K. Dijkstra a analysé 137, mais qui Komarê dont les liens avec ce culte sont bien attestés i-w, ce
n'a rien à voir avec le vocabulaire grec de 1'évergétisme. qui permet de penser que là encore sa piété a dû jouer un
Certes, on ne peut dire que 1' évergétisme au sens rôle majeur clans cette construction. On se retrouve clans le
classique soit inconnu à Palmyre, 1'exemple de Malê Agrippa même cas que pour Malê et sa famille. Un des quatre
le prouve suffisamment. De fait, l'activité des notables clans sanctuaires « civiques » de Palmyre est embelli par des
les constructions religieuses n'est évidemment pas étonnante membres de familles liées au culte. Le rapport privilégié entre
en soi, mais ce qui différencie Palmyre du reste du monde des familles et certains cultes a donc des conséquences sur
romain, c'est la rareté des constructions civiles dont on peut le plan civique, c'est un phénomène connu.
dire à coup sûr qu'il s'agit du don d'un grand personnage de On peut aussi s'interroger sur la manière dont ce genre
Palmyre. Cela ne signifie nullement qu'il n'y en ait pas eu, de don pouvait être considéré par les contemporains :
mais il s'agit plutôt d'une question de mise en valeur: même évergétisme civique« classique» ou œuvre pieuse, mais on
si des notables ont par leurs dons contribué à la construction a peu d'éléments de réponse. Quoi qu'il en soit, il faut surtout
du théâtre de Palmyre ou bien encore de l'agora, il est frappant souligner ici qu'un des moyens d'expression privilégiés des
qu'on n'ait pas jugé utile de le commémorer. On peut prendre rapports entre les notables et la cité est justement de
1'exemple de Julius Aurelius Zénobios, qui se charge de construire des bâtiments religieux.
l'accueil des militaires romains lors du passage de Sévère
Autre exemple, le Conseil honore un secrétaire, Taîbbôl, il est fort possible que Hatra ait été en fait un centre de
qui a donc exercé une fonction importante. Le décret rappelle pèlerinage, ce que Palmyre n'est pas. Il apparaît néanmoins
entre autres que ce personnage a fait don d'une somme que les deux cités appartiennent à des degrés divers à un
pour la construction d'un bâtiment. Selon une même monde, clans lequel les bâtiments comme les gymnases
restitution convaincante (Inv 13), il s'agirait d'un bâtiment ou les thermes ont moins d'importance que les temples. La
dédié au dieu Bel i-ri. Ce serait clone un autre exemple de principale différence est qu'il existe à Palmyre des thermes,
magistrat participant à la construction d'un bâtiment un gymnase (puisqu'il y a un gymnasiarque i-rs) et d'autres
religieux. M. Sartre voit clans ce texte une attestation d'une monuments, comme le théâtre, dont les équivalents manquent
swnma honoraria de 500 deniers, somme versée lors de son à Hatra.
entrée en fonction par le secrétaire 1 -r2• Ce serait tout à fait De manière frappante, ces pratiques particulières ne sont
conforme aux traditions gréco-romaines 1 -r3_ Il est possible pas limitées aux périodes les plus anciennes, mais concernent
aussi que le texte ne mentionne cette somme que comme également la dernière période de la ville. De plus, il s'agit
autre motif de l'honneur fait à cet ancien secrétaire, plusieurs non seulement de constructions clans les sanctuaires, mais
années après sa sortie de fonctions. Aucun élément du texte aussi clans l'ensemble de la ville.
ne permet de faire un lien entre les fonctions du personnage Ainsi, la construction de plusieurs secteurs de la
et le don (ce qui est normal pour une sumnw honoraria), Colonnade transversale est explicitement mise en rapport
mais, surtout, la somme paraît bien faible pour un poste de avec le culte de dieux cl'origine arabe. Le dieu Shamash est
cette importance au début du me siècle i-r-r_ Comme beaucoup mentionné par les textes CIS 3951 et 3955 ; clans le second,
d'autres Palmyréniens, Taîbbôl est honoré« parce qu'il leur il est associé à Rahim et à Allât. Le fait s'explique bien sûr
(au Conseil et au Peuple) a plu» (b[d}yl dy [s]pr lhn). Le par la proximité des sanctuaires (voir chapitre JI). C'est pour
texte présente l'avantage de donner des explications et de cette raison cl'ailleurs qu'on a fait depuis longtemps de cette
montrer en quoi il leur a plu. Mais, si la statue a été érigée colonnade un monument plus religieux que civil.
en partie à cause de sa charge de secrétaire (bgnnty' dydh), L'exemple des installations liées au culte du dieu Arsû
il n'est pas sûr que les belles actions de Taîbbôl, celles qui clans la Grande Colonnade prouve sans nul cloute que les
lui ont valu cet honneur, datent toutes de la même période. liens entre les colonnades et les cultes ne se limitent pas au
En tout cas, il y a de grandes chances que cette construction seul cas de la Colonnade transversale. Le vocabulaire
soit un bâtiment dédié à une divinité, même si les lacunes employé pour les portiques, quelle que soit leur localisation,
du texte sont trop importantes pour permettre cl'en décider est le même. C'est cl'abord clans les sanctuaires que la
cléfinitivement. fonction de représentation de ces portiques avait joué, avant
S'il y a des parallèles à trouver, c'est plutôt du côté de de se développer aussi clans les grandes avenues si typiques
cités comme Hatra qu'on pourra les reconnaître. Dans la des villes de la Syrie hellénisée 1 -r6•
cité mésopotamienne aussi, la plupart des inscriptions sont Les textes découverts relativement r écemment
des dédicaces de construction de monuments religieux : mais renseignent sur l'aménagement de ce secteur de la Grande
141 - Le texte est le suivant [w]m[g}d Jbnyn' dy b[..... ]. J. Starcky (Jnv X, l'exercice d'une fonction de prêtre civique est de 50 000 drachmes. Comme
p. 16) propose de restituer b[I}, « car les expressions BNYN' DY HYKL' le remarque pourtant l'éditeur (W. Ameling, ad /oc., p. 85-86), il s'agit
DY EL et BNYN' DY BL se lisent sur deux consoles du temple de Bel » d'une somme inhabituellernent élevée. À propos du même texte, l'éditeur
(lm• IX, 11 et .1. CANT!NEAU, 1933, p. 176, n" 3). Il semble bien que le terme cite une inscription de Titeiphyta clans le territoire de Hypaipa ([. Eplzesos
bnyn' (bâtiment) se rapporte surtout à des constructions religieuses dans V II, 2, n" 3854 ; texte cité par L. ROBERT, 1966, p. 75, n. 2). Ce texte, qui
les inscriptions de Palmyre, on en a un autre exemple avec le texte RSP provient d'un village, atteste de l'existence d'une summa lzonoraria de
n" l 27 qui mentionne une construction pour la source Efqa ( bnyn' dnh dy 1 000 drachmes pour la fonction de kômarque, somme qui servit à la
'yn), mais peut-être parce que, comme on l'a vu, il s'agit surtout de bâtiments restauration de bains. On voit que la somme de 500 drachmes à Palmyre
de ce type dans les textes connus. Le mot a pu avoir un sens plus large, et pour le secrétariat peut sembler singulièrement faible; néanmoins, le texte
on peut se demander si le b- qui finit la ligne 5 du texte Inv X, 13 désigne de Titeiphyta date sans doute des environs de 272-273 (cf. n" 3856), moment
forcément Bel (bwl'. la Bou/è ?). où l'inflation avait pu changer un certain nombre de choses : quelques
!42 - M. SARTRE, 1996a, p. 392. Un autre texte (CIS 3934 = lnl' III, 14) au inscriptions montrent l'évolution des prix au cours du Ill" siècle. On passe
moins atteste peut-être d'un don au Conseil clans des circonstances qui de 250 deniers en 213-214 (!. EplzesosVIT, 2, n" 3855) à 500 en 224-225
pourraient faire penser aussi à une summa honoraria. Julius Aurelius Ogâ (n" 3858), puis I 000 en 272-273 (n" 3856; voir P. V EYNE, 1976, p. 360-361,
Séleukos est honoré par le Conseil et le Peuple, en particulier pour avoir n. 280). Pour les sommes payés par les bouleutes, on peut citer le cas d'une
offert dix mille drachmes au Conseil (<lnÀ]on:1p1icro:�LEv[ov 1:îj KpcxlîicrnJ cité de Macédoine (Parthicopolis ?) fondée par Antonin le Pieux. Le
�ouÀÎJ &hn1dxd �rnpicxç; mgd lbwl' zwzyn rbw). D'autres dons au Conseil souverain fixe le nombre des bouleutes (80) et la somme qu'ils doivent
sont attestés clans trois textes CJS 3927, H. SEYRIG, 1937, p. 372 et 1939. verser : celle-ci s · élève à 500 drachmes attiques, ce qui donne un ordre de
p. 3 l 9-320, n" 23 (voir chapitre I et infi·a). grandeur pour le milieu du 1( siècle ([GBu/g. IV, 2263, 1. 9-12; cf. BE l 956,
l 43 -Voir M. SARTRE. l 991, p. l 40-141 et les exemples rassemblés par 159).
L. ROBERT. I 936, p. 196-197 (= OMS II. p. 903-904). 145 - lnl' X. 102.
!44 -VoirM. SARTRE. 1991,p. 140-141 (auquelj'ernprunteces références). 146 -Voir dernièrement C. SALIOU, 1996, p. 319-330, qui montre le lien
Si la somme payée par les bouleutes est souvent peu élevée, les magistrats qui existe entre les portiques de rues et ceux des sanctuaires (voir C. Dunant,
doivent donner une somme beaucoup plus importante : il cite le cas de BS,p. 13).
l'inscription /. Prusias ad Hypium. n" 60 où la somme versée lors de
154 Les notables de Palmyre
Colonnade (section C, portique sud), avec l'édification famille impériale à Palmyre. Le premier exemple est une
cl'« un toit au-dessus de la grande basilique cl'Arsû » (µqaÀll dédicace faite entre autres pour la conservation perpétuelle
�aCHÀlKll et [b]slk' en araméen). Comme dans le cas déjà des empereurs 153• Comme l'a vu J. T. Milik (DFD, p. 7), la
cité de la Colonnade transversale, le mot basilique désigne particule oÉ à la fin de la ligne 2 (oubliée par H. Seyrig) est
en fait la colonnade elle-même i-n_ Ces constructions sont le signe que la dédicace de deux colonnes de marbre avec
financées par deux généreux bienfaiteurs, Malikû et son fils leur entablement et leur couverture (KEt0vaç rcapivouç Mm
Mucianus 1•18• Surtout, un des deux textes qui éclairent sur aùv Èm0îuÀ1mç Ka't Cî"CÉ')'l]) n'a peut-être pas de lien avec
ces constructions comporte une date : 279-280, ce qui l'empereur (fig. 51) 15-1_ L'objet de la dédicace pour le
prouverait que, même après la chute de Palmyre, les souverain devait être dans la partie supérieure du texte. Or,
traditions propres à la cité se poursuivaient. Mais en même celle-ci a disparu : on n'a donc aucune idée de la nature de
temps, on assiste à une sorte de transfert : la tradition des cet objet. Les colonnes sont certainement en rapport avec le
constructions religieuses se maintient, mais cette fois hors Bois sacré de Malakbel et Aglibôl, comme l'avait reconnu
des sanctuaires. Certes, il ne s'agit sans doute que d'un l'éditeur du texte 155• Un autre texte en rapport avec ces deux
phénomène de survivance, puisque cinquante ans plus tard, divinités est une dédicace faite pour la victoire de l'empereur
en 328, un certain <l>À(a�wç) �10yÉv17ç Oùpaviou, logistès, Hadrien (urcÈp vE1.K11ç) qui a fait un don en argent 156• On
fait restaurer le toit de quelques colonnes i-19, à proximité de voit donc que ces deux cas ne sont pas très clairs, et que
la basilique d' Arsû : il ne fait aucune allusion à un dans le deuxième cas, il s'agit plus d'un texte de
quelconque sanctuaire (Jnv III, 27) 150• remerciement à l'empereur, qui a contribué au financement
D'autre part, des portiques sont dédiés à une divinité cl'une construction 157•
ailleurs qu'à Palmyre ; ainsi, en Asie Mineure, on peut citer Il n'y a pas non plus d'exemple de monuments dédiés à
plusieurs cas. À Halicarnasse, un portique est consacré à des institutions, comme le Conseil ou le Peuple, mais on a
Apollon et au roi Ptolémée, entre 279-8 et 221 av. J.-C. (selon principalement des dédicaces à des divinités. En effet, à la
qu'il s'agit de Ptolémée Philaclelphe ou Évergète) 151• On lecture des textes cl'Asie Mineure, qui accumulent souvent
connaît aussi plusieurs cas à Ilion (/. Ilion 11 ° 90 : stoa pour les bénéficiaires, on ne peut manquer cl'être frappé par le
la famille de Claude, le Sénat, Athéna Ilias et le Peuple ; fait que les textes de Palmyre ne citent que quelques dieux.
I. Ilion n" 152 : dédicace d'une stoa à Dionysos par un de On peut avoir d'un côté (en Asie Mineure) une sorte de
ses prêtres). On pourrait en fait multiplier les exemples de déclaration de fidélité à la cité et à ses divinités protectrices,
ce genre de pratique qui tendraient à prouver que le cas de et, de l'autre, une manifestation plus simple de piété. La
Palmyre n'est pas totalement original 152• colonnade de Palmyre est cl'ailleurs appelée « la grande
Néanmoins les cas palmyréniens présentent l'intérêt de basilique du dieu ancestral Arès » ("CllV �tE)'[aÀ11vl �acnÀ1KllV
s'insérer dans une série très claire cl'évergétisme religieux. 'ApÉmç rcmpwou [8rnù]). Un monument public dans une rue
D'autre part, la différence principale est qu'il y a peu de cas semble clone appartenir à une divinité, alors que dans les cas
possibies de dédicaces de construction à des membres de la cités pûtlr Ili011, ils'agit de clédicaces e11 fav'et1r d 't111e divi11ité,
147 - Voir le texte palmyrénien de C/S 3952 (= Jnv V, 3) pour la Colonnade purement gréco-romaine) capable de financer la restauration d'une partie
transversale.. Le terme est aussi employé dans le sanctuaire de Bel ( CIS 3914 cl'tm portique de colonnade.
= lnv IX, 25: ÈV îl] �tqÛÀl] �O'.CHÀtKij mÛ BT]ÀOU et bbsfq' rbt' dy bt 151 - Le texte portet11v crtoàv r\v 6 817µoç àvmÎ.8T]CïtV têot 'An:ôUcovt
bl). Le texte dit plus précisément que les trois portes (celles des propylées K0'.1. �O'.CHÀEl TTtoÀEµaî.cot « le portique que le Peuple a dédié à Apollon et
du sanctuaire) se trouvent clans la grande basilique. Comme clans les au roi Ptolémée». Le texte a été publié dernièrement par L MIGEOTTE, 1984,
colonnades, le terme désigne en fait l'ensemble formé par le mur de péribole p. 322-323, n" 103.
(ou des boutiques clans les rues) et les colonnes du portique ouest du 152 - Pour en donner quelques exemples: à Assos, /. Assas n" 15 (stoa à
sanctuaire.. Auguste et au Peuple dédiée par un prêtre d'Auguste).. Le n" 16 est une
148 - Les textes sont publiés par Kh.. As'AD et M.. GAWLIKOWSKI, 1986-1987, dédicace d'un bain à Aphrodite Iulia (sans doute la fille de Marcus Agrippa)
n'" 7 et 8 (SEC 38, 1578-1579).. et au Peuple. À Pergame, un texte publié par H. YON PrwTT et W .. KoLBE
149 - 111v nà..cmv mÉ y11v �llFPC�)V 11' 111cr 8E tiîç crtoa..ç ÈK naÀEcov (« Die Arbeiten zu Pergamon 1900-1901: Inschriften ») clans les !VJDAI
xpôvcov (1)80'.picr av CTÙV TI:O'.Vîl KÔcr µcp ÈmCTKEUCXCTO'.C, KO'.îÉCïîllCTEV « il (A) 27, 1901, p. 93, n" 83 (cf. L. ROBERT, 1936, p. 194 = OMS II, p.. 901)
a remis en état en la restaurant avec toute son ornementation toute la toiture mentionne la ùéùicace c1· une partie de portiquetCÎtç 8Eo1-ç Ka't tÎlt JTO'tpî.8t
..
de 8 entrecolonnements de ce portique, détruite depuis longtemps».. par un prytane.
150 - Ce texte pose un problème particulier, car il mentionne un Àoywt17ç. 153 - Dans un texte publié par H.. SEYRIG, 1937, p.. 372. À cela s'oppose
c'est-à-dire un curator rei pubficae.. Mais alors que ce type de fonction une tradition repérée par exemple par P.. Veyne (1962. p. 81-82) : « bains,
échoit pendant longtemps à des fonctionnaires impériaux chargés de remettre portiques, exèdres, portes de villes, théâtres, temples[ .... ], rien n"échappe
de l'ordre dans les finances d'une cité (voir M. SARTRE, 1996a, p. 396), à cette obligation morale dïnscrire partout le nom impérial».
après les réformes de Dioclétien et Constantin, ces personnages sont recrutés 154 - Même remarque clans M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 49.
dans les élites locales. Malheureusement la date précise de ce changement 155 - Voir H. SEYRIG. 1937, p. 373 et DFD, p. 7 : on peut restituer à la ligne 3
reste controversée : on peut difficilement préciser les choses pour ce [... lEpüV UÀCTOd
FI. Diogénès (F. MILLAR, 1993, p. 336, pense qu'il s'agit d'un membre de 156 - J. EuTING, 1887, p. 418. n" 119 (= IGRR III, 1026) : cf. DFD. p. 9.
l'élite locale). Il aurait pourtant été intéressant de pouvoir prouver qu'il 157 - D'où sans cloute le titre d' « évergète de la ville » (EÙEpyÉtllç tllç
subsistait encore à Palmyre en 328 une élite locale (à l'onomastique n:ÔÀEcoç) que porte Hadrien clans le texte H. SEYRIG, 1939, p.. 321, n" 25.
Chapitre IV: L'ilifluence sociale des notables 155
qui n'est d'ailleurs pas toujours seule concernée. Il ne faut sur la fonction et l'utilisation des rues à portique, le problème
peut-être pas exagérer les différences, car le texte CIS 3955 posé étant évidemment de savoir dans quelle mesure on peut
de Palmyre est par son formulaire assez semblable aux textes considérer les colonnades comme des monuments religieux.
d'Asie Mineure : la formule utilisée« un tel et un tel ont fait Si la Colonnade transversale, à l'ouest de la ville, a été définie
ces colonnes » Jyqr 51115 w' Jt w111111 'lhy' tby' («en l'honneur ainsi, c'est parce qu'elle était bordée de sanctuaires et parce
de Shamash et A11ât et Rahim, dieux bons ») paraît qu'un certain nombre de colonnes étaient dédiées
finalement assez proche de l'usage du datif dans les textes directement à des divinités (cf. supra). De même, on a pu
grecs (8rn1ç). considérer la Grande Colonnade comme jouant un rôle dans
On veut peut-être souligner l'aspect honorifique dans la vie religieuse de Palmyre, puisqu'on pense que s'y
les rapports avec les divinités. Deux solutions sont possibles : déroulaient les processions lors de grandes fêtes (fig. 53).
on peut penser d'une part que le vocabulaire utilisé à Palmyre On estime même parfois que la Grande Colonnade a été créée
est moins formel; on peut penser aussi que, bien qu'il à cause de l'encombrement de l'ancienne artère principale
s'agisse des mêmes formules qu'ailleurs, on ressentait le qui longeait le wadi au sud, pour permettre le passage des
besoin de les expliciter à Palmyre, ce qui n'était pas le cas grandes processions 160• Les textes de la basilique d'Arsû sont
ailleurs. un argument de plus dans le sens d'une interprétation
En fait, les exemples les plus ressemblants peuvent sans religieuse du rôle de la colonnade.
doute être trouvés dans les régions proches, comme par D'autre part, il est tout à fait probable que la colonnade
exemple à Gerasa en Arabie. L'inscription n° 60 du recueil d'Arsû et les boutiques qui s'y trouvaient étaient louées pour
édité par C. B. Welles 158 est une dédicace pour le salut (unÈp le plus grand profit de la caisse du temple. On sait en tout
0co11wiaç) de l'empereur Antonin le Pieux (le texte est daté cas que la Grande Colonnade était bordée de boutiques, et
de 150) et celui de la famille impériale, et pour son pouvoir un texte du me siècle semble commémorer la construction
(Kat Kpchouç aù1oû), ainsi que celui du Sénat et du Peuple d'ateliers dans ce secteur 161• La croissance des boutiques,
romain, par la cité (17 nÔÀK). Les objets dédiés sont les ainsi que l'oubli des règlements d'urbanisme a d'ailleurs
propylées du sanctuaire d'Artémis avec le portique attenant. conduit à l'envahissement de la chaussée par des boutiques,
On retrouve donc la fameuse formule qui sert parfois à puis à la création d'une sorte de souq oriental à cet endroit
traduire '1 {1yy («pour la vie de... »); on a peut-être ici un (fig. 54). Des fouilles récentes ont permis de reconnaître que
type de dédicace typique du monde sémitique, selon la cet état a dû être celui de Palmyre jusqu'à une date tardive
théorie de K. Dijkstra (1995). Comme le prouve amplement dans l'époque islamique.
la liste dressée par cet auteur (Appendix I, p. 345-349), ce
genre de dédicace à l'empereur est assez courant dans le
2. LES CHANGEMENTS URBANISTIQUES ET LA PRÉSENCE DES
Croissant fertile (Gerasa, Baalbek, Doura-Europos en
NOTABLES
particulier) 159• Pourtant, dans le reste de la partie grecque de
l'Empire, ce type de textes est connu, même s'il s'agit En fait, il existe manifestement un lien entre les nouvelles
rarement de dédicaces de construction importante. formes prises par les monuments religieux (utilisation des
On peut tirer d'autres enseignements des textes d'Arsû. colonnades de rues) et les changements urbanistiques de
On a déjà noté l'éloignement du temple d'Arsû, qui a été Palmyre, deux phénomènes contemporains. Comme on le
retrouvé au sud de l'agora (fig. 52). Comme on le voit sur le sait en paiticulier depuis les travaux de E. Will 162, la ville de
plan, il y a plusieurs centaines de mètres entre les deux zones. Palmyre à l'époque hellénistique et au début de l'époque
De plus, Malikû et Mucianus appartiennent à une famille romaine se trouvait principalement dans la zone située au
dont ce1tains membres ont été honorés dans ce secteur depuis sud du wadi (voir pl. 8). L'orientation principale des
la fin du 11° siècle, c'est-à-dire le moment où on a commencé monuments est d'ailleurs claire, que ce soit l'entrée de l'agora
la Grande Colonnade. Les deux textes mentionnant Arsû ou celle du sanctuaire de Nabû dont les propylées font face
doivent aussi être compris dans la tradition familiale de au sud. De même, l'entrée principale du sanctuaire de Bel, à
présence dans ce secteur, qui remonte au moins au a" siècle. l'est de l'agglomération, ouvre vers cette zone, donc
Même si le dieu Arsû n'est mentionné qu'à une date tardive, entièrement en décalage avec celle où se trouvent
ses fidèles (la tribu des Bené Mathabôl et ses membres) actuellement les ruines de la ville. La ville hellénistique
fréquentaient régulièrement cette zone (pl. 7). (selon 1'appellation devenue traditionnelle) était bâtie
Avant de revenir sur la signification de l'installation du principalement en brique crue et a entièrement disparu en
culte d'Arsû loin de ses bases, il faut s'arrêter un moment surface. La découverte au début des années 1980 du
158 - C.B.WELLES. 1938, p. 402-403 (= OGIS 625 et!GRR Ill, 1353). 161 - ln1' XII, 29, découvert clans le portique sud de la section B.Le texte
159 Curieusement les textes de Gerasa publiés par C.B.Welles ne sont mentionne un lulius Aurelius, on est clone après 212. La première ligne est
pas pris en compte par K.Dijkstra, qui citent seulement des textes publiés lacunaire, mais on peut y lire ...ElKOCH 0ùv Epya011w[10ld, ce qui
plus récemment. prouverait peut-être la présence cl' ateliers à cet endroit.
160 - Voir M. GAWLIKOWSKI. 1973a. p.83. 162 - E.WILL, 1983, p.69-81 et 1992, p.120-130.
156 les notables de Palmyre
sanctuaire d'Arsû est venue pourtant confirmer l'importance du milieu du li" siècle. Néanmoins on ne sait pas vraiment à
ancienne de ce secteur. À la même époque ancienne, les quelle construction appartenaient les aménagements en
sanctuaires de Baalshamîn ou d'Allât étaient donc situés dans question, et ils ont pu appartenir à n'importe quel type de
des zones extérieures et marginales de la cité. Mais les monument, y compris religieux. Comme on peut le voir
modifications ultérieures de l'urbanisme de Palmyre les ont (fig. 55), le texte est lacunaire à droite et à gauche et il peut
intégrés dans l'urbanisme de la cité à partir du Ir° siècle en manquer une bonne partie. L'interprétation complète du
(construction de la Colonnade transversale). texte est donc difficile. En particulier, on ignore totalement
En effet, un des grands changements qui touchent quelles explications accompagnaient la dédicace. Le nom
Palmyre à partir de ce moment concerne la trame urbaine de du personnage est au nominatif (Bayrnoç), il a donc toutes
la ville. On assiste progressivement, surtout au rn e siècle, à les chances d'être le sujet du verbe Èrcoi17cr2v à la ligne
un mouvement général vers le nord, au moins du point de suivante.
vue monumental, car l'habitat est moins bien connu. Ce À Palmyre, le seul parallèle complet, en grec, pour ce
mouvement s'accompagne de la construction par étapes des texte de dédicace de construction a un caractère religieux
différents portiques des grandes rues, depuis l'ouest marqué, puisqu'il s'agit d'un bâtiment dédié à Bôl, Isis et
( Colonnade transversale 163), vers l'est. Chronologiquement, Aphrodite (DFD, p. 54-55). On connaît aussi un texte
la section C de la grande Colonnade vient ensuite, avec une lacunaire, la dédicace du portique nord du péribole de
première attestation en 158 (Inv III, 26 ; fig. 27). Ce décret Nabû 166• Outre la mention probable d'une divinité, comme
du Conseil et du Peuple honore un certain ZE�n8a 0m�n7 dans le texte de Bôl, Isis et Aphrodite, on retrouve la formule
TOÙ MoKt�tou TOÙ rap�a qui est appelé K1Î.cr117ç. Cette partie {mÈp crw117piaç («pour le salut») du donateur et de ses
de la colonnade est donc antérieure à 158, mais cela ne proches, qui est l'équivalent de la formule araméenne
signifie pas que le terme «constructeur » ou «fondateur » courante 'J byy («pour la vie de»). Or rien ne permet de
soit la conséquence d'une construction dans la colonnade restituer cette formule dans le texte de Bageshû, fils de
elle-même. On peut penser que Zebîdâ Taîmê a seulement Habbê, ni d'ailleurs clans le texte de 219 reconstitué par
contribué à un bâtiment quelconque à proximité. Ce peut E. Will. Dans ce dernier, si 1'on a sans doute bien le mot
être la colonnade, mais tout aussi bien autre chose. Quoi {mÉp, il est fortement restitué ([u]rcÈ[pl) et ne précède pas un
qu'il en soit, on sait que les travaux se sont poursuivis au mot comme crw117piaç. E. Will propose de lire [u]rcÈ[pl
moins jusqu'en 328, même s'il ne s'agit que de restaurations. a[ùwù .... KaÎ. nJ rcmpilfü, la restitution étant assurée par la
Comme ailleurs, les constructions se faisaient par courtes formule mgd' Jmdyth du texte araméen correspondant (publié
sections, sans doute selon un plan directeur. Il faut souligner cl' abord comme Inv XII, 23) 11'7 : «il a fait un don à sa ville».
aussi qu'une partie de cette section C n'a jamais été achevée Ce don fait à la cité est un cas assez unique à Palmyre, mais
(vers l'est). le sens général du texte est sûr. De plus, il est fort probable
Les sections B et C semblent avoir débuté plus que le don fait par le grand-père Neshâ, fils de Nebûzabacl
tardivement, puisque les textes les plus anciens sont du début soit bien antérieur à celui du petit-fils, Iulius Aurelius... (le
du me siècle. Pour la section A, on a au mûins un texte daté reste a disparu), qui date de 219, ce qui permettrait de faire
d'aoüt 219 16\ Il y a quelques textes plus anciens dans la remonter de quelques années la construction de cette portion
même zone : en particulier un certain Bageshû, fils de Habbê, de la colonnade.
fils de Bageshû (Bayrnoç A��rnuç wù Bayrnou) 165, d'une Même si le bâtiment dédié par Bageshû, ainsi que celui
famille bien connue à Palmyre (cf. chapitre II, A 2), fait de Neshâ, est purement civil, ils seraient des exemples
construire une exèdre dans cette zone. Autant qu'on puisse relativement isolés, qui fourniraient au moins une preuve de
en juger, à cause de son caractère lacunaire, il ne s'agit pas la montée en puissance de modèles plus classiques dans la
d'une dédicace de construction religieuse. On serait donc ville de Palmyre, concurremment à la floraison des
en présence d'un des rares cas de constructions civiles. Le constructions religieuses qui marquent la même période
cas est d'autant plus intéressant que la date est relativement (sanctuaires de Bel, de Baalshamîn et de Nabû entre autres).
haute, car le père de Bageshü a été honoré en 1 28 d'après La date de la section centrale B doit être sensiblement
une inscription découverte dans le sanctuaire de Bel (lnv IX, la même que ce1le de la section A, avec un grand nombre de
33), ce qui placerait la construction de l'exèdre aux alentours textes du troisième quart du Ill" siècle dans la partie qui va
163 - Le texte le plus ancien date de 110 : ClS 3984 = lnv V, 9. p. 240 et M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 80-81). Le personnage est connu aussi
164 - Le texte a été reconstitué par E. Will (E. WILL, 1983, p. 71) à partir par lm• IX, 34.
de plusieurs textes déjà publiés et d'autres fragments (lnv III, 1; lm' XII, 166 - A. BouNNI, 1986. n" 31.
18 et lnl' XII, 23). 167 - On retrouve une mention de la patrie dans le texte malheureusement
16S - C'est un texte republié par E. Will (E. WILL. 1983, p. 69 = SEC 3S, assez mutilé qui rappelle la construction d'ateliers dans la section B de la
1499). Il a déjà été publié plusieurs fois (/17l' III, 2 = lm• Xll, 19; voir DFD, colonnade (lnv XII, 29).
Chapitre IV: L ÏT{fluence sociale des notables 157
du tétrapyle au théâtre (en particulier CIS 3932-3947) 168• Le très particulier du sanctuaire de Nabû clans ces mêmes
point commun entre les deux sections, au moins dans les années. Il est tentant de mettre en relation cette amputation
zones qui entourent l'arc monumental, est le caractère d'une partie du téménos avec l'apparition et l'installation à
fractionné de s'est déroulée en d'un évergétisme civique classique. Le quartier en
étapes, selon un plan d'ensemble. Il faut aussi prendre garde plein développement a profité du recul de l'influence des
aux particularités de certains des textes, qui dans plusieurs fidèles de Nabû et une grande rue à portiques s'est installée
cas appartiennent en fait au sanctuaire de Nabû : par exemple à sa place, ce qui permettait de respecter plus ou moins une
In v 21 , comme le prouve l'onomastique des sorte de plan général d'urbanisme. D'autre part, ce secteur
donateurs 169• devient central dans la ville de Palmyre telle qu'elle apparaît
Il est clair que, dès sa construction, le nouvel axe urbain au ni" siècle, sous Oclainat puis Zénobie.
a été réintégré dans les traditions locales anciennes, aussi De toute façon, il est difficile de mettre en rapport 1a
bien comme lieu religieux que comme zone commerciale destruction du portique nord de Nabû avec une quelconque
(ce qu'était déjà la Colonnade transversale, selon toute baisse d'influence des notables face à des autorités
vraisemblance). Dans le nouveau « schéma directeur» de municipales puissantes. Si tel était le cas, ce serait sans doute
1'urbanisme palmyrénien, on peut donc comprendre la seulement parce que des familles puissantes tenaient le
construction de la basilique d'Arsû comme une sorte de pouvoir, mais non par l'influence perse des institutions de
compromis entre les nouveautés introduites par l'adoption la cité. L'exemple de quelques tombes situées aux limites
des formes architecturales gréco-romaines et les traditions de1'espace urbain peut en donner une bonne illustration (voir
locales. Les promoteurs de ces constructions utilisent les chapitre vr) et montrer que les notables employèrent cl'autres
nouvelles possibilités fournies par l'évolution des moyens que ceux du domaine purement religieux pour
monuments de Palmyre. affirmer leur présence, selon des méthodes dont on peut
On assiste donc dans les premières décennies du m" siècle trouver des parallèles clans différentes cités de l'Empire.
(peut-être dès le n" siècle) à une évolution, un passage à une D'autre part, les notables et l'élite de la cité connaissent une
autre stratégie de la part des notables : les constructions se sorte d'apogée au cours du m" siècle (au moins avant 272 !).
poursuivent, les buts religieux de certaines d'entre elles n'ont La famille cl'Oclainat, ceux qu'on a appelés les princes
pas changé, mais, au lieu d'être limitées par les enceintes de Palmyre, est, par certains aspects, caractéristique du
des sanctuaires, on peut leur reconnaître une tendance à nouveau visage de Palmyre. Son intégration assez forte aux
envahir 1'espace civique, en profitant des nouvelles formes structures de 1'Empire est sensible, il s'agit en effet de la
monumentales. Sans modifier la localisation du sanctuaire première famille sénatoriale de l'oasis. À Palmyre, elle est
lui-même, la création de cette sorte d'annexe permet aux honorée par un nombre jusque-là inégalé d'inscriptions,
fidèles du dieu Arsû de tenir compte du nouvel aspect de la qu'on a retrouvées clans l'ensemble de la cité, mais surtout
topographie urbaine. Comme toujours à Palmyre, on réutilise clans les quartiers du centre ville qui se développent à la
des 111odèles classiqt1es, e11 les tra11sfor1na11t et e11 les t1tilisa11t même époque. Alors qu'auparavant, on trouvait les
avec une autre syntaxe. inscriptions honorant les membres des grandes familles
Néanmoins le contexte général est celui d'une évolution surtout clans les temples et à l'agora, de manière
du décor et de certaines formes institutionnelles vers des impressionnante les princes de Palmyre et leurs proches
formes courantes dans le reste de l'Empire, évolution peut (Septimius Worocl, Septimius Zabclas) sont honorés dans la
être plus accentuée qu'auparavant. Le passage à d'autres même zone de la Grande Colonnade, à proximité immédiate
stratégies de la part des notables va de pair avec une du tétrapyle (pl. 4).
transformation des mentalités. On a peut-être à ce moment Incontestablement ce « clan», apparu récemment clans
des exemples de constructions d'un type évergétique plus 1 'épigraphie, s'est installé au nouveau centre de la ville, et
classique : certains des textes de la Grande Colonnade sont l'arrivée de ce personnel dirigeant a accompagné les
peut-être à comprendre ainsi, comme on l'a vu plus haut, modifications de l'espace urbain. On peut rappeler aussi qu'une
même si les éléments classiques sont parfois réinterprétés théorie très séduisante place le palais cl'Oclainat et Zénobie
d'une manière tout à fait particulière. justement dans cette zone, à l'emplacement des thermes de
Certains exemples montrent en tout cas que le rôle Dioclétien, connus par une inscription de 284 171). D'une
prédominant des sanctuaires et des constructions religieuses certaine manière, cette zone a été désacralisée, mais a acquis
connaissait des limites au m" siècle. On se souvient du destin une importance politique. On ne peut que penser aux centres
168 - Le texte lm' XII, 35 date de 51 de notre ère. Cette inscription est la retrouvé approximativement à mi-chemin de l'arc et du tétrapyle.
preuve que la zone était sans cloute déjà partiellement occupée, ce qui ne 169 - Voir DFD. p. 244-246.
signifie pas qu'une colonnade se trouvait à cet endroit. De même Inv XIL 170 - H. SEYRIG, 1931, p. 321-323 (SEC 7, 152). La localisation du palais
33 date de 115, mais il s'agit d'un cippe de pierre qui n'est peut-être pas en des princes de Palmyre à cet endroit a été proposée par R. FELLMANN, 1987,
place. Les premiers témoignages sûrs d'aménagement de la zone sont p. 131-136. Le palais a pu inclure les bains dont le premier état date du II' s.
d'abord le texte très fragmentaire publié parE. Will (E. WtLL, 1983, p. 74-75, (voir n. 223).
n. 10) qui porte la date de 206 et surtout le texte lm' III, 5 de 224-225,
158 Les notables de Palmyre
des villes romaines, dans lesquels les positions centrales étaient ce qu'on connaît du « cercle de Zénobie», même s'il est
réservées aux élites de la cité, avec des règles plus ou moins malaisé de les mettre en rapport direct avec cet entourage de
formelles 171• La situation est donc assez caractéristique de ce la reine de Palmyre, tel qu'il apparaît clans les sources
qui se passe ailleurs dans l'Empire romain. En même temps, littéraires 177• Cette découverte montre en tout cas qu'on est
la cité n'a bien sûr pas perdu ses fortes traditions locales: les encore loin de bien saisir le fonctionnement de l'urbanisme
ü1scriptions de la basilique d'Arsû, ainsi que l'usage maintenu civil de Palmyre, et la place des quartiers d'habitation: on
de l'araméen en sont de bonnes preuves. ne sait pas en l'état actuel des recherches où se trouvaient les
D'autre part, les princes de Palmyre ne semblent avoir habitations des notables de Palmyre. Seules quelques grandes
participé à aucune construction religieuse. Il est plus curieux maisons, dont justement celles cl' Achille et de Cassiopée,
en fait qu'on ne retrouve leur nom pour aucune construction, ont été repérées. Elles ne permettent pas de tirer un bilan,
sauf de manière indirecte, puisqu'un texte publié tout mais il peut paraître curieux qu'elles soient situées ainsi
récemment mentionne une construction faite par un affranchi à l'écart du centre, peut-être du palais de Zénobie, et en tout
d'Odainat, pour le dieu Abgal 172• Comme le note l'éditeur, cas à l'ombre du sanctuaire de Bel qui les domine de sa masse.
tout laisse à penser que cette dédicace de 263 provient plutôt Pourtant si on compare avec cl' autres exemples
des zones rurales de Palmyrène que de la ville même, ce contemporains, il n'y aurait rien cl 'étonnant à ce que les riches
serait donc un cas un peu particulier. Le seul autre exemple villas des notables de Palmyre se trouvent clans une zone
n'est pas très clair. Dans un texte où le nom d'Odainat est périphérique de la ville 178• Si on prend le plan de Palmyre,
restitué ([l:rn-ci�LWD '08mva]8ou �amÀÉOK �acnÀÉwv), il est on retrouve justement un certain nombre de maisons clans
fait mention d'un temple du Soleil et aussi d'un temple du les zones qui se trouvent à proximité du tracé (postérieur)
culte impérial 173: [àva817crav-ca -clàv rcap1vov 'HÀÎou de la muraille de Dioclétien. La présence de la nécropole
rca-cpo5ou [8EOÙ ...va ]ôv -cmv CTE� a cr-cmv Kai prouve que les maisons situées à l'ouest et au nord de
Ka81Epw[crav-ca.... ]vvou Kat A DîüKpchopoc Le nom l'agglomération sont en limite des installations urbaines à
d'Odainat est au génitif, il peut donc s'agir cl'un de ses fils, l'époque de leur construction (pl. 3 ).
ou de sa femme, à moins que comme dans le texte de La question est différente pour les maisons aux
Palmyrène, ce ne soit un affranchi ou un proche D'autre
17-l_ mosaïques, car on ignore totalement le plan de la ville de ce
part, il est difficile de dire s'i 1 s'agit bien d'une construction côté. La distance à laquelle se trouve la nécropole sud-est
nouvelle, ou bien d'une simple restauration ou adjonction. est un signe que l'agglomération s'étendait peut-être assez
Il est évidemment tout à fait dommage que le bâtiment loin clans cette direction. On a aussi proposé de placer le
que R. Fellmann a identifié comme le palais de Zénobie n'ait sanctuaire de Malakbel et Aglibôl (« le Bois sacré») clans
pas été fouillé et publié de manière complète 175• En effet, du les jardins qui sont à l'est de l'oasis. Les inscriptions qui
point de vue de la topographie urbaine de Palmyre, les seules mentionnent ce sanctuaire ont en effet été trouvées clans la
maisons luxueuses assez bien connues du site sont situées à partie du mur de Dioclétien qui passe à cet endroit 17''. Il est
l'est du sanctuaire de Bel. en marge, pourrait-on dire, du donc difficile de dire si ces maisons étaient situées hors de
centre monumental: or le décor des mosaïques qui y ont été 1 'agglomération. E. Frézouls propose cl' en faire 1 a
découvertes a été rapproché avec de bons arguments des terminaison du quartier cl'habitation installé peut-être à l'est
spéculations néoplatoniciennes caractéristiques du « cercle du sanctuaire de Baalshamîn 180• La présence clans cette zone
de Zénobie» (avec en particulier Longin) Il ne s'agit certes
17(,_ d'un portique avec une colonne honorifique peut en effet
pas de dire que c'est la maison de Longin. Pourtant, les être un argument en ce sens.
maisons cl'Achille et de Cassiopée (fig. 42) sont assurément La proximité du sanctuaire de Bel, même si son
représentatives de courants de pensée, sans doute proches de importance peut paraître moins grande à ce moment 181, est
171 - Des parallèles intéressants ont été étudiés par G. Alfüldy en Italie et 176 - Sur les mosaïques, cf. H. STERN, 1977. Dernièrement. J. Balty (1996,
en Espagne. même s'il a peut-être exagéré le côté formel des choses p. 407-416) a proposé une nouvelle interprétation (que je suis ici). Voir
(G. ALFôLDY, 1984). Voir à ce sujet les critiques d'O. VAN NuF, 1997). Le supra sur le« cercle de Zénobie » et la culture des riches Palmyréniens.
cas de Priène a été étudié par W. Raeck qui a mis en valeur 1'existence de 177 - Voir E. EQUIN! SCHNEIDER. 1993 et F MILLAR. 1971. p. 1-17.
localisations préférentielles pour les inscriptions et les statues (W. RAECK. 178 - Voir le cas cr Aparnée-de-Syrie ou de Zeugma.
1995. p. '.231-240). À ce sujet. on peut rappeler l'existence assez courante 179 - Voir en particulier DFD. p. l 5-16.
dans les décrets de formules qui fixent la position des inscriptions dans un 180 - E. FRÉZOULS. ] 976. p. 31.
lieu bien en vue (voir chapitre 1), par exemple à Priène: KO'.l 01:110m 1:11v 181 - Il y a peu d'inscriptions du Ill' siècle à cet endroit. Néanmoins.
EÎ.KÔva ainoû Èv TÏJ àyopéx Èv 1:ép Èm<)lavrn1:6.1;cp 1:Ôrrü)(/11schrffte111•011 Septimius Worod a été symposiarque des prêtres de Bel ( C/S 3942), tout
Priene n" 103, 1. 10-11). comme Septimius Hadclûdan connu par le texte lm• IX. 28 de 272 (voir
] 72 - J. TEIXIDOR, ] 998, p. 68-71. DFD, p. 270 et M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 413-414) et par celui publié par
173 - M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 100 (avec restitution) ; voir DFD. M. GAWLIKOWSKI. 1971, p. 420 (en 273). Ces textes prouvent que les grands
p. 315-316 et BE 1964, 496. Mais le mot rr6.p1 voç pourrait aussi désigner prêtres et symposiarques de Bel ont encore une importance certaine. De
une statue. plus, Septimius Hadclûdan est honoré clans les propylées du sanctuaire lui
174 - Il est à noter que M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 251-261, ne cite pas cette même (/111• IX, 28). Un autre texte découvert au même endroit date de 239
inscription dans la liste des textes qui concernent Oclainat et sa famille. (lm• IX, 29). mais il était remployé, et on ne peut assurer de son origine
175 - R. FELLMANN, 1987, p. 131-136. réelle.
Chapitre IV: L'iltfluence sociole des notables 159
un autre signe du caractère central de la zone. De fait, la Néanmoins, l'exemple d'une maison fouillée clans les années
construction de la section A de la Grande Colonnade devait 1990 par la mission polonaise peut donner un certain nombre
lier de manière au moins théorique le nouveau centre de la d'indications 11". Selon les fouilleurs, cette maison, située
ville au tell historique, origine de l'agglomération de non loin de la section C de la Grande Colonnade, date de la
Palmyre. L'existence toujours attestée des fonctions de deuxième moitié du 11" siècle dans son état premier. Cela
symposiarque pour des personnages de premier plan peut correspond clone assez bien à la date fixée pour le début des
signifier aussi que le sanctuaire conservait sa primauté travaux clans cette zone pour la colonnade. D'autre part, la
religieuse. Il restait sans doute le point central de la vie famille qui possède la maison devait être « certes aisée, mais
religieuse de Palmyre, surtout si on considère qu'il demeurait pas très riche » 186• Un autre élément intéressant est le
un point d'aboutissement des processions. Or on a vu que caractère plus oriental de cette demeure caractéristique cl'un
c'était peut-être pour faciliter le passage des processions « mode de vie qui ne doit pas nécessairement beaucoup à
qu'avaient été construites les sections de la grande rue à l'hellénisme», avec une forte séparation entre la zone de
colonnades. La date des maisons cl' Achille et de Cassiopée résidence familiale et la zone de réception (pl. 10. 3). On peut
(vers la fin du ri ° siècle selon E. FRÉZOULS, 1976, p. 50) difficilement savoir s'il en était de même clans les grandes
correspondrait cl'ailleurs bien aux dates connues pour la maisons riches qui sont situées en périphérie de la ville.
colonnade à l'ouest du sanctuaire. Néanmoins, on pourrait peut-être opposer ces maisons de la
Au total, ces maisons, comme celles situées à l'autre périphérie, plus riches et plus« occidentalisées» des maisons
extrémité de la ville, à l'autre bout de la Grande Colonnade, plus proches du centre où l'urbanisme était plus« dirigé».
ne sont peut-être pas tellement éloignées des zones centrales
du fonctionnement urbain, en tout cas moins qu'on pourrait
3. LES NOTABLES DE PALMYRE ET L'ÉVERGÉTISME
le croire. Il n'est pas très étonnant que les notables aient
voulu s'installer dans des zones où leurs nouvelles On voit qu'une bonne partie des notables de Palmyre
constructions pouvaient avoir de la place d'une manière assez au cours du m" siècle apparaissent relativement proches de
facile : c'est un phénomène connu ailleurs et à d'autres leurs contemporains des autres cités de la région, et même
époques, il suffit de penser aux faubourgs de Paris, qui ne de l'Orient romain. Les exemples d'évergétisme existent,
sont pas tous des quartiers cl'artisans.D'autre part, certaines même s'ils ne sont pas particulièrement nombreux et
découvertes faites à proximité de la source Efqa, lors de la concernent surtout le domaine religieux. On peut pousser
construction de l'hôtel Méridien, prouvent qu'à cet endroit plus loin la comparaison avec le reste du monde romain, en
aussi devaient se trouver une ou plusieurs maisons assez partant des remarques cl'E. Will sur l'évergétisme de
luxueuses 182• Or il semble fort probable que la source ait été Palmyre, et en particulier son jugement sur la faiblesse des
située en dehors de la zone urbanisée et construite de moyens des notables de la ville. Bien que les textes qui
Palmyre 183• fournissent des données chiffrées ne soient pas nombreux,
À propos de ces maisons, on peut souligner le caractère on tentera pourtant cl'en tirer un bilan.
tout à fait hellénique de leur décor, que ce soient les On peut partir de données plus générales. Un sujet
mosaïques ou les stucs qui ornaient les murs. Il en va de cl'étonnement à Palmyre est le fait que les bâtiments que
même pour le plan adopté, avec péristyle, clone d'un type financent les notables sont construits par fragments. Ainsi,
grec (pl. 10). Comme le souligne E. Will, de ce point de vue, Thomallachis donne seulement une contribution pour les bains
les notables de Palmyre ne sont probablement pas différents d'Aglibôl et Malakbel (<j)ElÀ01:aµ11mxµÉv11v 811vâpux 810xdÀta
de ceux d'Antioche ou cl'Apamée 184• 7tEV'CO'.K0CTlO'. Ek oi Ko8o�L11v �O'.ÀŒvEiou). Les dons qui
Les maisons plus anciennes sont en général mal connues, consistent seulement en une ou quelques colonnes d'un
il est donc difficile de dire s'il y a eu une évolution clans le portique sont très nombreux ; on en a déjà signalé un certain
décor ou des modifications dans le plan général des maisons. nombre, en particulier à propos du sanctuaire de Nabû. Comme
182 - En particulier la découverte de stucs, dont des têtes : voir E. WILL, l'aristocratie de Palmyre, au me siècle au moins, n'est pas forcément
1992, p. 114, K. PARLASCA, 1985a, p. 201-206 et 1996, p. 291-296. marchande.
183 - E. WILL, 1992, p. 121. Je retrouve des conclusions similaires aux 184 - E. WILL, 1992. p. 114 qui remarque avec raison que c'est sans doute
miennes clans l'article de E. Frézouls (1976, p. 51): « de sorte que c'est à Doura-Europos qu'on peut avoir la meilleure idée des formes adoptées
peut-être finalement sur la différence de contexte urbanistique et de par les maisons locales, alors que les maisons connues pour l'instant à
destination qu'il faut surtout mettre l'accent : cl'un côté des demeures Palmyre suivent un modèle premier qui« est la maison hellénistique avec
cossues, mais construites à l'intérieur d'une trame urbaine, selon un principe cour à péristyle». Voir aussi la remarque de K. Parlasca à propos des stucs
de lotissement, nullement étriqué mais néanmoins contraignant ; de l'autre, qu'il qualifie de« rein romische» (K. PARLASCA, 1996, p. 292).
de véritables petits palais, utilisant l'espace en toute liberté pour constituer 185 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1997a. p. 161-166 et en particulier p. 164.
de vastes ensembles autonomes, et qui ne pouvaient guère être habités que 186 - M. GAWLIKOWSKI, 1997a, p. 164 (comme pour ce qui suit). La taille
par les plus riches familles de l'aristocratie marchande de Palmyre». Les de la maison est pourtant cl'au moins 900 1112 (p. 161), ce qui tendrait à
travaux récents de la mission polonaise clans une zone finalement assez prouver la richesse de la famille, mais l'absence cl'un certain nombre
centrale et contenue clans la nouvelle trame urbanistique de la ville d'éléments (cuisine. salle de bain, latrines) contribue à faire admettre la
confirmeraient plutôt ce point de vue (voir ùi/m), à la seule restriction que théorie des fouilleurs.
160 Les notables de Palmyre
l'a montré C. Saliou, la construction des portiques de Palmyre 11 apparaît clairement qu'il n'existe pas à Palmyre
s'est faite par tronçons, suivant un plan d'ensemble. Mais cela d'évergètes du type d'Hérocle Atticus 190, d'Opramoas de
n'a en fait rien d'extraordinaire et ne signale pas non plus une Rhocliapolis 191 ou de l'évergète anonyme de Xanthos 19 Les è.
absence de moyens étonnante. Si l'on prend les cas connus de sommes dépensées par ces personnages n'ont pas
constructions de rues à portiques clans le reste du monde gréco d'équivalents. Alors qu'on compte en millions ou en
oriental, on s'aperçoit aisément qu'on procède plus souvent centaines de milliers de deniers dans plusieurs cités d'Asie
par tronçons qu'autrement. Une des principales exceptions, le Mineure, il ne s'agit au maximum que de dizaines de
portique de la grande rue cl'Antioche, s'explique par la milliers de deniers à Palmyre 193• Il est bien sûr dommage
personnalité du donateur, le roi Hérode le Grand 187• Pour le qu'on ne connaisse pas les chiffres qui correspondent aux
reste, il s'agit beaucoup plus régulièrement de dons moyens, bienfaits des notables les plus en vue, comme Soaclos,
de contributions à un ensemble, et non de portique complet. Marcus Ulpius Iarhaî ou Septimius Worocl. De même, on
Les exemples de construction par petits tronçons sont n'a pas idée des sommes dépensées par Malê Agrippa pour
nombreux, aussi bien en Asie Mineure qu'en Syrie, comme le une distribution d'huile, ni pour la construction du temple
prouvent un certain nombre de textes 188• de Baalshamîn.
À partir des rares données chiffrées fournies par On peut néanmoins prendre certains points de
l'épigraphie de Palmyre, on peut tenter de tirer quelques comparaison dans les textes contemporains d'Asie
conclusions 189• 1
'J-1_
Mineure Ainsi, Opramoas a payé 12 000 deniers pour de
l'huile donnée à la cité de Myra en Lycie. Les limites
Texte Som.me Date Objet de cette comparaison sont évidentes, bien que les
CIS 3923 Au moins 270 deniers 51 Objets de culte deux personnages soient contemporains : on peut
pour Bel penser que la population de Palmyre était plus
INGHOLT, 2 500 deniers 182 Bains cl'Aglibôl et importante que celle de Myra, et que clone la
1936, p. 109, Malakbel quantité d'huile devait être plus grande. On ne
11° 1 1 (participation) connaît rien non plus des différences de prix pour
CIS 3948 300 deniers anciens * 193 Don à une l'huile à Palmyre et à Myra. La fourniture d'huile à
caravane Apamée Kélainai de Phrygie pouvait monter
h71' X, 13 500 deniers 218 Participation à un jusqu'à 34 000 deniers certaines années (IGRR IV,
bâtiment pour Bel
788). À Iasos, la somme atteint 450 deniers par mois
(don au Sénat)
pour un gymnase 195•
CIS 3934 l 0 000 drachmes 254 Don au Sénat
Le prix du temple a dû aussi entamer la fortune
SEYRIG, 1937, Deux fois 6 000 deniers ? Don aux prêtres de
de Malê, mais il est difficile d'en chiffrer le coût
p. 3 7 2 plus 400 (pour une Bel et pour des
fondation), plus 4 500 par cérémonies d'après la liste des bienfaits d'Opramoas, on
les fils (en p1us d'autïes religieuses (et au s' :::iperçoit que les sommes fournies pour les
bienfaits non chiffrés) Sénat par les fils) constructions connaissent de très grandes variations
* Pour la signification de ces xpucrà rcaÀmà 011vcxp1a, voir J. GuEY. 1961, p. 268- qui dépendent de la taille du bâtiment, de son type
274, pour qui ces deniers sont en fait des uurei, ce qui donne une somme ou de la décoration envisagée. De plus, il est fort
équivalente à 7 500 deniers d"argent. C'est la solution la plus probable.
probable que certains chiffres de ces listes
L'é1•er,gétisme à Palmyre. correspondent en fait à une participation plutôt qu'à
187 - FLAVIUS loSÈPHE. BJ I, 425 (cf. M. SARTRE. 1991. p. 137 et 345). 192 -A. BALLAND. 1981. p. 185-186. n" 67 qui conclut (p. 186-187) qu'il
188 - Outre les exemples rassemblés par C. SAuou. l 996, voir L. ROBERT. s·agit d"Opramoas. Cette identification a été contestée par J. J. CouLTON,
1936, p. 194 (= OMS IL p. 901 ). 1987, p. 171-178.
189 - À titre de comparaison. les amendes prévues en cas d'usurpation clu 193 - On trouvera dans M. SARTRE. 199 l . p. 154-155 plusieurs autres
droit d"enterrer dans un tombeau de famille sont comprises entre l ()()() (au exemples de donatiuns supérieures à 1()() 000 deniers.
moins. chiffre mutilé) cl 5 ()()() deniers (.î. C\NTINE\Li. 1933. p. 18..J. et 194 - Ces comparaisons ne sont évidemment quïndicatives. et il faut tenir
CIS 4215 ). Selon le texte publié par M. Gawlikowski (M. GAWUKOWSKI. compte des ordres cle grandeur plutôt que des chiffres précis tels qu'ils
1986, p. 89), des marchands ont emprunté à un homme d"affaires une somme apparaissent clans les textes. T. R. S. Broughton (1938. p. 746-794) dresse
de 7 400 deniers (vers 240 cle notre ère). Il semble que les sommes de une liste des constructions clans les villes d"Asie Mineure. en citant les
l O 000 deniers environ sont équivalentes à des fortunes asse1. élevées. mais données chiffrées quand elles existent. La liste n"a cessé cle se rallonger
nullement à celles des plus riches palmyréniens. depuis. De plus. il faut évidemment tenir compte cle l'inflation, surtout au
190 - Qui selon P1-11LOSTRATE, Vie des Sophisles. IL I a dépensé 4 millions 111'" siècle.
cle drachmes pour un aqueduc àAlexandrie-de-Troade. 195 - 1. losos IL n" 248 (= Th. REINACH. REG 6, 1893, p. 157-166, n" 3).
191 - La liste cle ses bienfaits, tels qu · ils étaient connus en 1938 a été dressée Selon le calcul de M. Sartre (M. SARTRE. l 991. p. 132 où ce texte et JGRR
par T. R. S. BROUGHTON, 1938, p. 780 (d"après TAl'vl II. 905). Elle est à IV. 788 sont cités). cela fait 21 000 deniers en tout pour les quatre gymnases
compléter par le texte publié parA. BALLAND, 1981, p. 173-174, n" 66. Ces de la ville pendant un an. Voir aussi M. SARTRE, 1991, p. 136 où ces deux
documents sont rassemblés et traduits par M. SARTRE, 1995, p. 251-252. cas sont comparés avec celui cle Myra.
Chapitre !V: L ï1ifluence sociale des notables 161
196 - Ainsi la somme de 10 000 deniers donnés à Oinoanda pour la 197 - A. SCHMIDT-CouNET, 1992 et E. WILL. 1996, p. 109-115. De toute
construction cl'un bain (ou encore 1 025 deniers à Iotapé pour la restauration façon, la tombe a été construite avant l'apogée du pouvoir de Septimius
de bain, cf L. ROBERT, 1966, p. 74-77 à propos de IGRR IV 833a). Comme Worod.
dans le cas de Thomallachis à Palmyre, on peut penser qu'il s'agit seulement 198 - On ne connaît pas le prix de ce monument dont on trouvera la dédicace
cl 'une participation. Il en est de même pour les 20 000 deniers donnés pour clans!. Ephesos VII, 5 l O1. Néanmoins, le texte/. Ephesos VII, 5113 donne
le théâtre de Limyra ou les 10 000 deniers pour un odéon « semblable à un le montant de la somme laissée pour une fondation destinée à l'entretien et
théâtre» (Ek -cà K-cicrµcx, wu 0E<Xîpon8ouç co8Eiou) dépensés par à l'achat cle livres: 25 000 deniers (dont 2 000 pour finir la construction),
Marcus Ulpius Lysias à Canatha (IGRR rn, 1235). On peut comparer avec ce qui peut au moins donner un ordre de grandeur.
certains chiffres donnés par Pline pour l'Asie Mineure (même s'il semble 199 - Sur les monuments funéraires et leur rôle dans l'auto-affirmation des
s'agir de maxima) : une dépense de dix millions de sesterces pour un théâtre notables, voir le chapitre v1.
inachevé à Nicée (PLINE, Lettres, X, 39) ; des centaines de milliers pour un 200 - Cité par M. SARTRE, 1995. p. 255, tout comme le suivant.
bain public à Claudiopolis (ibid.). Les bâtiments peuvent être très différents, 201 - TAM II, 910.
mais ces chiffres prouvent que les sommes dépensées à Palmyre sont 202 Pour la K<XHX<JKEDll 1Î7ç CHOÜç, c'est-à-dire soit une construction
relativement faibles, soit que le bfttiment concerné soit seulement médiocre, totale, soit une restauration d'ampleur.
soit qu'il s'agisse de contributions très modestes à l'ensemble. 203 - Voir M. SARTRE, 1995, p. 253, avec bibliographie.
162 Les notables de Palmyre
même conduit plus loin toutes ces générosités (ék m:xcr[cxd distribution le 16 août (Ek çi' Amou). Enfin était instituée
qnÀOTEl�llO'.Ç �LETCX TllV TEÀE'lHllV [a]ùwû Ol Dlül bù rcÉpaç une fondation (avec un capital de 400 deniers) dont les
[1hayovl 2111), en faisant don au nom de leur père de 4 000 deniers. revenus (cocrTE àrco mu TÔKou yavfo8E [ Th1v Kprnvoµiav)
On est clone bien ici clans la même tradition. Les devaient servir à une distribution de viande pour ceux qui
bienfaiteurs par des fondations, ou par d'autres moyens, étaient reçus au banquet devant le dieu Mannos (rrcxvTcov Twv
cherchent à pérenniser leur influence familiale. Cette ÉCTîlCO�lÉVCOV TÎ] O'.ÙTÎ] ll�lÉpQ'. Ë�trcpocr8EV Mavvou 8rnu), le
pérennisation se manifeste aussi par l'existence de fondation même jour (le 16 août) 2119• Viennent ensuite les bienfaits des
perpétuelle, sur un modèle parfaitement courant en Asie fils, déjà mentionnés 2111•
Mineure, même s'il ne s'agit jamais de concours à Palmyre Ce texte appelle plusieurs commentaires : cl'abord,
(voir ù1.f1·a.) 205• On a déjà cité quelques exemples de l'existence de nombreux parallèles à ce type de pratique en
fondations (voir chapitre 1) : C/S 3927 où un don perpétuel Asie Mineure et clans le monde égéen 211, même s'il faut
et un sacrifice ont été offerts pour le Conseil, en même temps souligner le caractère apparemment fermé du banquet, réservé
que des offrandes sont faites à des divinités (fig. 59) ; Inv VI, aux seules personnes invitées et non ouvert à l'ensemble de
13 2116 qui prévoit un holocauste au« jour bon » ; l'inscription la population. Mais on a ailleurs aussi des exemples de
H. SEYRIG, 1939 , p. 319-320 , n" 23 est aussi assez lacunaire, banquets ou de distributions à des corps réduits (conseil,
mais on peut comprendre qu'une largesse perpétuelle doit corporations...). Comme l'a montré P. Schmitt-Pante!, on peut
être versée au Conseil à une date fixe. Enfin Inv X, 54 de dresser un « tableau diversifié et nuancé des bénéficiaires »
mars 122 doit concerner le même type d'offrande. des banquets offerts par des bienfaiteurs 212• Elle différencie
Un dernier texte de ce type est le plus complet et donne de manière nette les banquets publics des banquets réservés à
un grand nombre de renseignements sur lesquels il est quelques individus 211• Les cas connus à Palmyre semblent
intéressant cl'attirer l'attention 2117• Comme on le voit clans le plutôt entrer clans la catégorie des banquets réservés à un
tableau, les sommes versées par le personnage en question groupe strictement défini, même si on ne sait comment définir
sont relativement importantes. Les dons (ceux dont la les Écrnco�tÉvcov du texte H. SEYRIG, 1937 , p. 372. Peut-être
mention est conservée sur la pierre) montrent l'importance l'invitation concernait-elle seulement une partie des citoyens,
des bienfaits de type religieux pour les évergètes connus à ceux qui étaient concernés par ce culte particulier ? Comme
Palmyre. En effet, ce bienfaiteur a fait construire des colonnes l'a montré E. Will, à propos des salles de banquet de Palmyre,
pour le Bois sacré et « recouvert cl'argent entièrement le celles-ci ne pouvaient contenir plus cl' une centaine de
pavillon du brancard du dieu Bôrroaônos » 20 :s (trad. personnes, ce qui impliquait que le reste de la population
H. Seyrig : rcEpmpyupo)cravTa TllV micrav circmv1v <j)opdou s' insta11ait ai11eurs, peut-être sous les portiques de la cour 211•
Bcoppoacovou ewu). Il a contribué à une construction pour L'existence même des tessères (jetons cl' entrée) implique
le dieu Bel (qnÀoTEl�t11crâ�tEvov Ek TO KTÎÇ�ta wû 1Epou cl'ailleurs que l'admission à ces banquets était l'objet de
�tEyimou 8wu B11Àou àpyûpwv Ën rccxÀm), et ensuite donné restriction. On peut aussi se demander si la population pouvait
6 000 rlP:niP.r, :rnx pri'>tœ, rlP RPl ::m nnm rlP c;:pc;: fik, pn11r rJpc;: réelle111e11t 1Jartici per, car les set1ls textes faisant allt1sio11 à
distributions perpétuelles en des jours fixés (Ek 8mvo�u1v des fondations et des distributions précisent, comme on l'a
CXEtfüov TOlÇ lEpEUCTl "COU B11Àou Èç, ov[ô]�lO'."COÇ Iapl�COÀEOUÇ dit, qu'elles étaient destinées à des groupes restreints 215•
Ka\ I:aÀa�taÀa8ou u1wv aùrnu 811vâp1a Éç,mncrç,aÀia Les distributions de nourriture et les banquets publics ou
11�tÉpmç [ TlaKTcxiç) et la même somme en son nom pour une semi-publics font aussi partie des traditions religieuses
204 Avec une lecture et des restitutions de L. Robert (clans H. SEYRIG, hellénistique et romaine. la troisième partie« Demothoinia et évergétisme ».
1937. p. 372). Le vocabulaire est tout à fait classique. La disparition du p. 255-420), mais le cas de Palmyre est évidemment marginal clans son
début et de la fin du texte rend impossible de savoir s'il y avait en outre une étude (il semble d'ailleurs que les textes de Palmyre cités dans l'annexe 3
version araméenne de cette inscription honorifique, ce qui est probable. (=index épigraphique), p. 543, n · apparaissent pas clans les notes du texte).
205 - On trouvera dans le recueil ancien de B. LALIM, 1914, un bon nombre La principale curiosité fournie par le texte de Palmyre du point de vue du
d'exemples de fondation. vocabulaire est le mot KpEovwticx qui est un hapax clans le Liclclell-Scott
206- Lecture améliorée par H. SrYRIC,. 1933c. p. 277. (S11ppfe111enl). mais le concept est clair. et correspond à des pratiques
207 - H. Sl:YR!t,. 1937. p. 372. courantes (voir L. Rrnmn. 1945. p. ...J.8-50).
208 - Sur cette divinité, voir DFD, p. 48 et .J. T1:1xmoR, 1979. p. 7. Autre 2]2 P. SC!IMITT-PANTEL ]992. p. 380-381.
hypothèse sur l'étymologie dans M. GAWLIKOWSKI, 1973a. p. 49-50. 213 - P. Sc11M1TT-P ANTEL, 1992. p. 385 : « Les banquets réguliers des
209 cr. H. SEYRIG, I 937, p. 376. magistrats entre eux, comme les banquets au prytanée, qui ne sont jamais
210 - Les deux textes assez complets qui donnent des détails sur ce genre ouverts il l'ensemble du corps social. mais au mieux à quelques individus
de fondation ont comme autre point commun de préciser qu'ils ont été que 1· on veut honorer. ne sont pas des banquets publics. Les repas où les
gravés après la mort du bienfaiteur ( btrdy myt« après la mort» en C/S 3927 notables représentent en fait toute la population, qui pour des raisons
et pnà. n1v tEÀEm1iv clans le texte du père de Iarhibôlâ et Shalamallat). diverses. fortune des évergètes en particulier. n'est pas reçue, sont des
211 - Cf. M. SARTRE. 1991, p. 152 ù propos d'un texte d'Acraiphia en Béotie, banquets publics».
/G VIL 2712 (texte traduit dans P. VEYNe. 1976, p. 285-286). La thèse de 21-1- - E. WILL. 1992. p. 877-878.
P. Schmitt-Pante! (1992) permet de faire le point sur les différentes pratiques 215 Le Conseil en C/S 3927. les prêtres de Bel clans le texte H. lNc;1101:r.
des banquets publics clans le monde grec (en particulier, pour les époques 1926. p. 129, ou les invités clans l" inscription H. SEYRIG, 1937, p. 372.
Chopitre IV: L ï1(/lue11ce sociale des notables 163
sémitiques, on en a de très nombreux exemples dans la place des monuments funéraires ne doit pas être
l'ensemble du Proche-Orient 2 ui_ Le rôle prédominant du mésestimée. Leur nombre, leur taille et bien souvent leur
symposiarque qui est aussi grand prêtre du dieu Bel peut qualité peuvent faire penser qu'une bonne partie de la
illustrer cette importance des banquets et des distributions de richesse des Palrnyréniens, quelle qu'en soit l'origine, se
nourriture et de boissons à Palmyre même. Il suffit de citer retrouve dans les nécropoles qui entourent la ville 218• Le
un texte de 242-243 (H. lNGHOLT, 1926, p. 129), à propos d'un même vocabulaire se retrouve dans l'épigraphie funéraire
symposiarque félicité parce qu'il a« servi du vin vieux aux et clans les inscriptions qui mentionnent des dons, en
prêtres pendant une année entière » ( w' sq bmr' 'tyq' lkm1y' particulier avec l'usage de Èç 18icov (ou ÈK téov i8icov) 21".
st' klh) 211• Or les symposiarques semblent être à l'écart des On retrouve la même fierté de personnages proclamant qu'ils
activités civiles. S'ils sont responsables de la plupart des ont les moyens financiers suffisants pour faire partie de l'élite
distributions, cela peut signifier qu'il existe de ce point de de la cité. D'autre part, ce type de formule est tout à fait
vue une grande différence avec les autres cités grecques. Dans courant dans le reste du monde grec et prouve, s'il en était
celles-ci, ce sont plutôt les magistrats qui offrent à la besoin, l'appartenance à une même koinê culturelle.
population des banquets, du vin, de la viande ou même du Les caractéristiques et le nombre des monuments
numéraire. Ainsi, un certain Épaminondas, à l'occasion de la funéraires rachètent en partie« la médiocrité relative » des
fête des Ptoia (à Acraiphia en Béotie), fait des distributions monuments de la ville 2211• Ce jugement dépréciatif n'est pas
et offre des banquets (dans le texte IG VII, 2712 cité plus partagé par tous d'ailleurs, comme le prouvent par exemple
haut). Or, comme le précise le texte, il a revêtu la magistrature les remarques de P. Gros à propos de l'arc de Palmyre« le
suprême. Il s'agit d'une fête religieuse qui accompagne des sommet de la série est atteint avec l'arc sévèrien de Palmyre »,
concours, mais c'est un magistrat qui s'en occupe, ce qui est et plus loin« tout cela définit cette création des années 215-
naturel dans le monde grec, mais non à Palmyre, où, autant 216 apr. J.-C. comme l'objet urbain le plus sophistiqué que
que les lacunes des textes permettent de le dire, on ne trouve nous aient transmis les provinces orientales » =' 21•
pas de cas de magistrats qui pratiquent ce genre de distribution. D'autre part, une partie des revenus de la ville devait
Certes, les données sur les bienfaiteurs sont moins provenir des terres agricoles de Palmyre et de Palmyrène,
nombreuses qu'en maintes cités d'Asie Mineure: mais on a mais la part de ces revenus fournie par le commerce
vu que le même phénomène se produisait pour cl'autres types caravanier ne devait pas être négligeable. Dans ces
de textes sans qu'on puisse conclure à l'inexistence de la conditions, il est possible que l'organisation des caravanes
vie civique. On peut aussi tirer un certain nombre de et l'entretien des animaux, même pendant les périodes où
conclusions des bâtiments eux-mêmes ; pour définir le ces animaux étaient inemployés, aient pu immobiliser une
niveau de richesse des notables, il faut se servir en particulier partie des capitaux de certains notables palmyréniens. Dans
du témoignage des monuments funéraires. ce cas, ceux-ci ne pouvaient donc utiliser une grande partie
Si les bienfaiteurs« multimillionnaires » sont absents à de leur fortune, qu'ils auraient pu employer par exemple
Palmyre, les quelques exemples explicites prouvent au moins pour des constructions dans la ville.
que les bienfaiteurs palmyréniens étaient les équivalents de Palmyre apparaît donc comme une grande ville, sans
beaucoup des bienfaiteurs connus par les textes cl'Asie être une très grande ville comme Éphèse ou Antioche. La
Mineure. I l est fort probable d'autre part que les médiocrité de la cité est toute relative, et aussi bien les
Palmyréniens ont pétrifié leur richesse, comme les notables sanctuaires que les monuments comme l'agora ou les
du reste de l'Empire, mais qu'ils ont plus contribué à des différentes colonnades soutiennent bien la comparaison avec
constructions religieuses qu'à des bâtiments civiques. Enfin, les édifices connus ailleurs 22='. E. Will souligne avec raison
216 - Voir M. ÜAWUKOWSKI, 1990a, p. 2650-2651. Sur ce phénomène dans Marc ; elle n'offrait pas l'équivalent des riches palais bordant les canaux».
l'ensemble du monde sémitique et en particulier à Palmyre, il faut bien sûr On peut se demander pourtant si ce rôle n · était pas joué par les monuments
aussi renvoyer à J. T. Milik, DFD. p. 108-llO et surtout p. 141-217. Le funéraires. On peut renvoyer sur ce point à l'article de J.-C. Balty à propos
même mot pour<< banquet» (nrnrzeab) est utilisé en phénicien et on a pu des rapports entre architecture et société à Pétra et à Hégra. Il montre que la
voir (chapitre I. à propos du bilinguisme officiel) que la présence cle ce mot ville et ses rues sont le lieu privilégié de la compétition entre les différentes
dans un texte phénicien, qui copiait pour le reste le formulaire grec des familles de l'aristocratie. Les nécropoles permettent la transposition dansle
décrets, est un signe de la permanence des coutumes sémitiques pour une domaine des morts de cette compétition, et reflètent les aspirations sociales
communauté pourtant bien insérée clans le monde grec (voir en particulier de ceux qui les ont érigées (J.-C. BALTY, 1983, p. 303-324; voir plus
M.-F. BASLEZ et F. BRIQUEL-C!IATONNET, l 991, p. 386. à propos du texte généralement sur les monuments funéraires le chapitre v1. infi·a).
phénicien du Pirée : J. C. L. GrnsoN, 1982, n" 4l ). À Palmyre. on assiste 219 - Pour les exemples dans les textes grecs et bilingues, voir l'index du
mutatis mutandis au même type cle phénomène. vocabulaire en annexe II.
217 - Sur les fonctions de symposiarque, voir le chapitre I et les références 220 - Je reprends la formule employée par E. Will (E. WILL. 1992, p. 129).
citées à cet endroit. Les tessères font aussi mention à de nombreuses reprises 221 - P. GROS, 1996, p. 92.
de distributions de vin : par exemple RTP 160. 694-70 l . 703-704, 706-708 222 - Voir par exemple la comparaison faite par E. Will entre la Colonnade
(sur les distributions d'huile, voir infra). transversale de Palmyre et la colonnade qui conduit, à Éphèse, du port à
218 - Voir pourtant les formules de E. W1LL, 1992, p. 130 : « Avec le 1· agora-marché. La fonction (entrepôts et magasins) et la forme se répondent
sanctuaire de Bêl la Venise des sables s'était dotée de sa cathédrale de Saint assez bien clans les deux cas (E. WILL. l 992. p. 127).
164 Les notables de Palmyre
le risque d'illusion rétrospective qu'on court à Palmyre, les parallèles cl'Asie Mineure, la fourniture d'huile par Malê
puisque c'est un des seuls sites sur lequel on connaisse autant Agrippa avait aussi à voir avec les activités du gymnase,
de monuments, ce qui permet difficilement de faire des d'autant plus que ce don n'était pas destiné aux seuls
comparaisons. Mais il serait peut-être aussi dangereux de Palmyréniens, mais aussi aux étrangers et aux soldats
surévaluer les autres sites, justement à cause de leur présents dans la ville à l'occasion de la visite d'Haclrien 227•
disparition. Elle devait donc conespondre à des traditions connues par
Certes, l'urbanisme de Palmyre est marqué par l'absence les étrangers, plus hellénisés que les Palmyréniens. On peut
d'un certain nombre d'édifices : il n'y a ni stade, ni cl'ailleurs se demander si ce bienfait, seul exemple de son
hippodrome. Ces monuments ont pu exister et ne pas être espèce à Palmyre, à l'occasion de la venue de l'empereur,
attestés. Pourtant, malgré le grand nombre de textes, n'était pas destiné à rester isolé: c'est peut-être seulement
l'absence totale de mentions est curieuse. D'autres activités l'événement constitué par la visite d'Hadrien qui l'a motivé,
typiques des cités grecques sont présentes, même si la alors qu'il ne correspondait pas aux coutumes locales. Dans
documentation est parcellaire. On a vu qu'il y avait au moins cette hypothèse, le bienfait de Malê Agrippa est effectivement
un exemple de gymnasiarque, mais qu'on ne savait rien de à comprendre sur le modèle des exemples connus ailleurs,
l'existence d'un gymnase. Les bains de Malakbel et mais aussi comme quelque chose d'exceptionnel, sans
d'Aglibôl sont les seuls connus épigraphiquement, mais une précédent, ni parallèle à Palmyre. On peut néanmoins le
installation de ce type devait se trouver à l'emplacement des comparer aux distributions d'huile qui sont attestées dans le
thermes de Dioclétien 221• Le théâtre de Palmyre, qui n'a, cadre des thiases (donc un cadre plus réduit) à de nombreuses
semble-t-il, jamais été achevé, a sans cloute été commencé reprises 22\ mais c'est encore une fois dans un contexte qui
au début du 111" siècle 224• On ne sait pas quel genre de a plus à voir avec des traditions locales qu'avec l'évergétisme
spectacles s'y déroulaient (pantomimes, récitals musicaux, gréco-romain.
cérémonies civiques ou religieuses ?), mais il existe et il Il est difficile de conclure à l'absence d'hellénisation à
devait être utilisé d'une manière ou d'une autre (fig. 61). Palmyre, au moins pour les formes institutionnelles et pour
Pourtant Palmyre se distingue par l'absence de concours certaines pratiques. Mais on comprend bien que l'existence
athlétiques, musicaux et poétiques 225• C'est en effet un type de monuments construits selon des normes gréco-romaines
d'évergétisme qui manque totalement à Palmyre, alors que et la présence d'une boulè ne signifient pas nécessairement
c'est une catégorie tout à fait courante clans l'ensemble des que clans la vie quotidienne les notables de Palmyre avaient
cités grecques, même dans ce qu'on pourrait parfois qualifier un comportement identique à celui des notables des villes
de villages 221'. Sauf si l'on découvrait dans une ville très hellénisées cl'Asie Mineure, ou même à celui de certains
quelconque cl 'Asie Mineure une inscription qui relate les de leurs pairs cl' Antioche ou cl' Apamée. Même si les
exploits agonistiques d'un citoyen de 1'oasis, il faut conclure bâtiments de Palmyre ont été construits selon des procédés
sur ce point à la spécificité du comportement des identiques ( don des notables), il faut souligner que l'accent
Palmyréniens. est mis sur les édifices religieux. La culture rle Palmyre, qui
Pourtant, les activités gymniques (au sens cl'« activités a beaucoup emprunté au monde gréco-romain, a conservé
du gymnase») sont peut-être à déduire d'au moins deux jusqu'à la fin des traits propres qui sont bien mis en lumière
textes. Le premier est la mention d'un gymnasiarque, clans par l'étude des relations sociales et de 1'évergétisme, tels
un texte malheureusement mutilé (Jnv X, I 02). Si on en croit qu'ils apparaissent dans la documentation.
223 - Sur les thermes de Dioclétien fouillés de 1959 à 1962 puis en 1970 Palmyre. on lit des centaines d'inscriptions grecques: la ville n'est pas
et 1977. voir A. BouNNI. 1995. p. 18. La construction date pour la plus grande hellénisée: il n'y a pas de grand concours stéphanite où inviter les cités
partie de la fin du n' siècle. comme la section correspondante (B) de la grecques». On avait déjà noté ce relatif isolement de la cité clans le
Grande Colonnade. li est possible qu·un texte araméen clu milieu du II' siècle chapitre 1: c·est sans cloute une des raisons principales du développement
(RSP n" 162) mentionne un responsable du L·haulTage des bains ( 111�1111 my· spécifique de la cité. même alors qu'elle fait partie de l'Empire.
«chauffeur d'eau» qui serait équivalent à urroKCY.Ûcn:11ç). Dans cette 226 Il suffit de renvoyer aux exemples réunis par M. S,\RTRI:. J l)l)1.
éventualité. ce serait la preuve de r existence de bains, justement clans le p. 151 152 : on pense en particulier au cas cle.s Démosthéneia à
sanctuaire de Malakbel et Aglibôl, avant ceux construits (ou reconstruits?) Oinoanda-de-Lycie (voir M. WèiRRLE, Stcrdt und Fest in kaiser�eitlichen
par Thomallachis. Le texte est en fait une dédicace à ce personnage 1(/eina sien. Münich. 1988 et M. SARTRE, 1995, p. 234-239 avec
(larhibôlâ. fils de Awîdâ) par les Bené Komarê, pour un don fait aux deux bibliographie).
divinités (un jardin gnt'). 227 - C!S 3959 (= BS n" 44): on a en grec çÉVOK îE KCÙ TCOÀElîO'.[td et
224 - Sur le théâtre de Palmyre. la seule publication est à peu près en araméen Ibny md[ynt' wl]'str[twm'J w/'ksny dy 't' 'mh («aux citoyens
J.-P. FüLIRDRIN, 1989. p. ]7]-174. et à r armée et aux étrangers qui sont venus avec lui [Hadrien] »).On notera
225 - Voir dernièrement M. SARTRE. 1996a. p. 385-386 (et p. 397) avec la la translittération des mots grecs cnp<hEWlO'. et çÉvoç_ Sur les distributions
citation fameuse du discours de L. Robert au Congrès international d"huile. outre les exemples cités plus haut. voir J. et L. ROBERT. 1954. p. 320
d'épigraphie cl' Athènes (L. ROBERT, 1984, p. 40) : « Les limites de et L. RoBEiff, Hel!enicu VI. p. 127.
l'hellénisme sont marquées par l'absence assurée d'un tel concours: à 228 - Par exemple sur les tessères RTP 160 ou 709.
AFFRANCHIS ET ESCLAVES DE NOTABLES
A Les fenunes et les fmnilles des notables : p. 166. publique, il est paradoxal que l'aventure palmyrénienne dans
1 - La place des femmes : p. 166. sa partie la plus célèbre et la plus extraordinaire se soit
2 - Stratégies familiales : p. 174. déroulée sous le règne (la régence) d'une femme. C'est un
3 - La place des familles : p. 181. aspect qui n'a peut-être pas été assez remarqué à sa juste
B Affranchis et esclaves à Pahnyre : p. 186. valeur. Or on sait par de nombreux textes que les femmes
1 - L'onomastique des affranchis : p. 186. occupaient une place plus en vue dans la vie publique des
2 - Les variations locales : p. î 88. cités cl' Asie Mineure et du monde égéen. La situation
3 - Les relations avec les maîtres : p. 192. palmyrénienne semble assez différente : comme l'a souligné
M. Sartre, « il doit s'agir du maintien de traditions locales
On a tenté aux chapitres précédents de voir de quelle qui n'accordent à la femme aucune place dans la vie
1
manière les notables de Palmyre se comportaient dans la vie publique » •
publique. Mais cette image extérieure des notables, celle On a vu pour cl'autres domaines que les coutumes locales
qu'ils présentaient à l'extérieur n'est évidemment qu'un et les influences extérieures coexistaient à Palmyre : la place
aspect et on peut être enclin à s'intéresser de plus près à leur des femmes et de certaines valeurs familiales semble devoir
mode de vie. Pourtant, on l'a vu au chapitre précédent pour être un domaine dans lequel le conservatisme a plus
la vie culturelle, le plus frappant peut-être est la date qu'ailleurs un rôle prédominant. Pourtant plusieurs exemples
relativement tardive à partir de laquelle on peut parvenir à montrent que des femmes jouaient un rôle certain dans les
une description un peu détaillée.C'est seulement à l'époque relations sociales, en particulier pour les alliances entre
d'Odainat et de Zénobie que cela est possible, et il .s'agit familles. D'autre part, les statues honorifiques de femmes
d'une période marquée par de nombreuses ruptures. En ce sont une manifestation de leur place clans la vie publique de
qui concerne leur vie quotidienne, le bilan est marqué par Palmyre, puisqu'on en trouve un certain nombre aussi bien
les mêmes difficultés, et il est difficile de sortir de quelques clans des sanctuaires que clans les grandes rues à colonnades
généralités dès qu'on veut dire quelque chose de concret à de la cité. Dans le même ordre d'idée, se pose aussi le
propos du monde des notables. problème de la participation des enfants et des descendants
À défaut de pouvoir saisir leur mode de vie, il est tentant des notables à la vie civique. La question de l'hérédité, et
de se tourner vers ceux qui n'étaient pas des notables au sens donc de la manière dont se transmettait le patrimoine social,
strict, mais qui partageaient leur existence.Cette partie de la permet d'étudier un certain nombre de comportements des
population que des liens familiaux principalement, mais aussi Palmyréniens et de les comparer avec ce qui se passe ailleurs,
économiques, rattachaient aux classes les plus élevées, est en particulier en Asie Mineure.
peu présente clans la documentation épigraphique disponible. Dans l'entourage des grandes familles de Palmyre, on
Néanmoins, l'ensemble des textes qui les concernent peut devait aussi trouver des esclaves, des affranchis et différents
permettre de mieux comprendre le fonctionnement de la serviteurs. On a malheureusement peu de sources sur ces
société de Palmyre. catégories : le terme araméen qui désigne les esclaves
Parmi eux, on peut placer les femmes qui appartiennent apparaît dans le texte du Tarif et on connaît un certain nombre
aux mêmes classes que leurs parents et maris, mais qui, à de représentations de serviteurs figurés aux côtés de leur
cause de leur dépendance sociale et économique, ne maître sur des reliefs funéraires, ce qui fait peu de chose
participent que peu à la vie publique, sauf pour des raisons (fig. 35). En fait, c'est sans cloute pour les affranchis que la
familiales. L'exception est évidemment Zénobie. Ce documentation est la plus riche 2• On les identifie par le
personnage est cl'ailleurs tout à fait symbolique de certains qualificatif br J11y ( « fils de liberté ») qui suit leur nom et
changements qui affectent Palmyre à cette époque. Alors qui précède celui de leur ancien maître, mais il est souvent
que les femmes sont presque totalement absentes de la vie difficile de les mettre en rapport avec un maître connu dans
l - M. SARTRE, 1996a, p. 397. Il faut clone donner une explication aux clans les cités du monde grec aux époques hellénistique et romaine, voir
quelques cas recensés, peut-être comme un signe de l'influence croissante maintenant R. V AN BREMEN, 1996.
des valeurs du monde grec à Palmyre ; cl' autres hypothèses sont pourtant 2 - Voir le tableau en annexe XVI. L'équivalent grec est àn:EÀFU0Epoç suivi
possibles. en particulier en ce qui concerne Zénobie. Sur la place des femmes du nom du maître.
166 Les notables de Palmyre
la prosopographie palmyrénienne. De plus, même s'ils sont des Palmyréniens pour s'apercevoir de la domination
connus, ils n'appartiennent pas toujours aux familles les plus masculine sur la société -1_ La transmission du nom, par
en vue de l'oasis. exemple, est la plupart du temps patrilinéaire, c'est-à-dire
On essaiera pourtant de rassembler les données de que les fils comme les filles ont comme patronyme le nom
manière à voir comment les grandes familles de l'oasis de leur père, et non celui de leur mère. La rareté des femmes
transmettaient leur influence dans les classes qui dans l'épigraphie publique est une preuve suffisante du
n'appartenaient pas à proprement parler à l'élite de la cité. caractère masculin de la société, même si cette rareté n'est
On a vu aux chapitres précédents que cette influence pouvait pas une totale absence.
parfois être repérée de manière relativement large, dans En effet, sans même aller jusqu'à l'époque de Zénobie,
certains groupes de la population, comme les marchands ou on peut constater que si les femmes sont peu présentes dans
certaines corporations, mais il faut maintenant passer à la vie publique, elles ne sont toutefois pas entièrement
l'entourage immédiat des notables, à ceux qu' i 1 s absentes. On peut s'intéresser d'un peu plus près à ces
fréquentaient plus quotidiennement. quelques textes, qui ont comme point commun d'être tous
postérieurs au J"' siècle 5• Le plus anciennement daté est un
A. LES FEMMES ET LES FAMILLES DES NOTABLES texte dont le type précis est un peu difficile à déterminer 6• Il
s'agit d'une inscription du sanctuaire de Nabû qui correspond
1. LA PLACE DES FEMMES ET LA FORCE DES TRADITIONS à une statue dressée par M. Ulpius Elahbel pour sa fille
LOCALES Hadîrat (hdyrt A8apcx817), « en souvenir éternel », donc après
La place des femmes dans la vie publique des cités la mort de celle-ci (Jdkrnh dy 'lm' et �lVll�lllÇ xapl V). Le
grecques a été étudiée récemment par R. Van Bremen, pour texte semble à mi-chemin entre une inscription honorifique
l'époque hellénistique et romaine 3• Dans cet ouvrage, dont et une épitaphe. Comme on l'a vu au chapitre II, la famille
le titre (Limits q{ participation) est éloquent, elle montre d'Elahbel utilise le sanctuaire comme lieu de représentation
qu'il ne s'agit pas d'une période pendant laquelle les femmes et célèbre les membres de la famille qui ont par ailleurs leur
prennent subitement un rôle politique un tant soit peu place dans la tour (n" 13) de la vallée des Tombeaux. D'après
comparable à celui des hommes, mais qu'elles restent en nos connaissances sur la famille, on peut dater le texte des
fait subordonnées, et cela même pour celles qui appartiennent premières années du 11" siècle.
aux élites locales. Elle met néanmoins l'accent sur le rôle On peut sans doute donner une date similaire à un texte
proéminent et visible de certaines femmes dans les élites publié par H. Ingholt 7• Il s'agit d'une dédicace faite en
locales. Elles sont bienfaitrices et remplissent un certain l'honneur de deux sœurs par leur frère m 'ny (Manaî). Le
nombre de fonctions très honorifiques, même s'il ne s'agit nom de la première a disparu, mais la seconde s'appelle hgr
jamais de magistratures avec des devoirs administratifs et brt mqy 'mby (Hagar, fille de Maqqaî Ambaî). L'inscription
politiques. Surtout, R. Van Bremen souligne qu'à partir de se trouve sous les deux statues des deux femmes figurées en
l'é'.11uL1ue liel lt;11Î::.tique le::, fe111111e::, ::,u11t imJu::,e::, de rncu1iè1e bas relief s11r la colo1111e. Ce type de représentation est
croissante comme une part intégrante de l'identité publique d'ailleurs assez rare à Palmyre (fig. 60). On n'a aucune
de la cité. Elle note que des femmes aussi bien que des enfants indication des motifs du frère. Contrairement à d'autres
jouent un rôle dans les évergésies et les fondations dans le textes, il ne s'agit pas d'une dédicace de construction de la
contexte de l'importance croissante des traditions familiales colonne qui serait faite pour la vie des deux sœurs. Le
et dynastiques. Cet aspect familial est sans doute un des formulaire est fort différent. Manaî est le frère ( 'bwh), mais
points les plus importants et il explique la majeure partie c'est la seule précision donnée par le texte; il semble donc
des cas recensés. bien que le motif est d'ordre familial, non religieux, comme
Bien qu'il s'agisse surtout de conséquences de la position dans les textes « pour la vie de ...». Il est possible, par
sociale des familles concernées, il n'en est pas moins clair exemple, que le texte ait servi à commémorer la mort des
que la situation des femmes dans les cités d'Asie Mineure deux sœurs. Il ne peut s'agir que d'une hypothèse, car
semble assez différente de ce qu'on arrive à saisir à Palmyre. habituellement une formule précise l'indique (btr dy myt ou
Dans l'oasis syrienne, les femmes ne sont présentes une formule équivalente x).
pratiquement que dans les domaines «privés». En effet, il Le texte est en tout cas unique, puisque c'est le seul
n'est pas besoin de beaucoup observer les us et coutumes exemple dans lequel un frère honore ses sœurs; on verra
3 - R. V AN BREMEN. 1996 Ut ce propos, voir aussi le compte rendu de ( CIS 3969 = lnF XL 84 ; voir DFD, p. 62).
L. MIGEOTTE, TOP0/7-1. 1997, p. 375-379). 6 - DFD, p. 163 (= A. BouNNI, 1986, n" 18).
4 - Cela est bien sûr vrai aussi pour la société gréco-romaine dans son 7 - H. INGHOLT, 1936, p. 96, n" 5 (= DFD, p. 325). Texte moins complet
ensemble, mais le phénomène semble peut-être plus accentué [1 Palmyre, dans fm, Vlll, 200 à cause de la dégradation de la pierre survenue entre
comme le prouverait la rareté des attestations de femmes dans la vie 1924 (lecture de H. Ingholt) et la lecture de .1. Cantineau.
publique. 8 - Voir les textes cités ci-dessus (A. BouNNI, 1986, n" 18) et ci-dessous
5 - Je reviendrai plus loin sur le premier cas connu de statue honorifique de (J. CANTINEAU, 193], p. ]17, n" 8).
femme (datée de 17 av. J.-C.). car le texte présente quelques particularités
Chapitre V: Familles, qffi·anchis et esclm•es de notables 167
qu'on a, avec le texte lnvX, 119, un cas d'honneurs texte précise qu'elle est la femme de Shoadû, fils d'Elahbel
posthumes rendus par une fille à son père et à son frère, (yuva1.Ka I:oa8ou EÀa�11Àou Bap811), c'est-à-dire qu'elle
mais c'est le contraire pour Manaî. Si 1'on a de nombreux appartient par son mariage à la famille de Bartê dont d'autres
cas de fils qui font une statue pour leur père, les honneurs membres sont honorés sur les colonnes environnantes. On
entre frères sont rares, à l'exception du texte Inv 24 (voir trouve en effet à ses côtés la statue de son fils Malikû 13 et
iJ�fra sur ce texte). Pour en revenir au texte des deux sœurs, surtout celle de son mari Shoadû, antérieure de quelques
s'il n'est pas question d'honneurs posthumes, cela signifierait années i-i_ On se retrouve dans un cas de figure qui ressemble
que Manaî était en quelque sorte le dépendant de ses sœurs, beaucoup à celui des textes de la Colonnade transversale 15•
pour une raison non précisée. À cet endroit, Martheî est aussi entourée de membres
Le texte suivant est postérieur à 168 9• Il s'agit là encore de sa famille, en particulier de son mari et de ses fils. S'y
d'honneurs posthumes («en témoignage d'honneur et de ajoute un frère de son mari. L'aspect purement familial de
souvenir», 1aµ1îç Kat µv1î�L11ç xcxplv et «en son honneur, sa présence est renforcé par le fait que le dédicant de sa
hélas l », lyqrh bbl) rendus à une certaine Tammê, fille de statue est son mari, alors que ce dernier reçoit une statue du
Nebûzabad (tm' brtnbwzbd br zbdbwl sm'wn), par son père Conseil et que les deux fils et le frère sont honorés par un
et sa mère Ambaî ( 'mby brt bgdn br mlkw). La principale groupe clanique.
différence avec l'inscription d'Hadîrat est que la mère L'épigraphie honorifique montre que les femmes
participe avec le père à la dédicace. Cela signifie peut-être semblent dépendre du groupe familial. Cette impression est
qu'elle appartenait à une lignée importante qu'il était donc renforcée par un autre texte, daté de 216 et découvert dans
nécessaire de mentionner 10, ou bien qu'elle avait un rôle de l'agora 1(J. Là encore, il s'agit d'honneurs posthumes («après
poids dans la famille. On en sait trop peu sur cette famille leur mort» btr nnvthn), rendus par une femme (Haggê bg')
pour pouvoir en décider, mais c'est un des rares cas où une à son père (Taîmê tym' br blpt' br' th 'lty) et à son frère
femme dédie une inscription honorifique à titre personnel. (Halaftâ h]pt'). En 216, Haggê était peut-être la dernière
La série se poursuit avec une autre dédicace posthume, survivante de la famille, ce qui serait une explication de son
celle d'une épouse cette fois (Map0EK 'AÀEÇcxv8pou 10û Kat rôle. Il est possible de reconnaître une autre branche de la
Ia811 mrty brt yd'), honorée par son mari en 179 dans 1a famille dans un petit groupe de textes funéraires, mais ils
Colonnade transversale 11• Le mari n'est autre que le fameux datent d'une période plus ancienne 17•
Shoraîkô (s1ykw br byrn), et ce texte appartient au dossier Il s'agit de la seule attestation d'une dédicante dans
des Bené Zabdibôl. Comme dans le cas d'Elahbel, il s'agit l'agora, lieu public s'il en est. On ne peut donc faire intervenir
visiblement d'un autre exemple d'appropriation de l'espace ici, comme dans la Colonnade transversale ou dans la Grande
public par une famille importante, ce qui rejoint les Colonnade, de grandes familles auxquelles une zone serait
conclusions du chapitre 11 à propos de cette famille. plus ou moins réservée. On est cette fois dans le cadre plus
Dans un texte de la Grande Colonnade qui concerne la strict d'honneurs rendus dans un lieu public, même s'ils sont
famille de Bartê, on trouve à nouveau le même phénomène décernés par les membres de la famille. On a d'ailleurs dans
d'appropriation privée, même si le dédicant est cette fois l'agora d'autres exemples de ces honneurs rendus entre
une tribu et non un membre de la famille et que la personne proches, par exemple entre deux frères, dans le texte Inv X,
honorée est apparemment encore vivante 12• Betheî, fille de 24 cité plus haut. Toutefois, même si on ne connaît pas bien
Mucianus (BE00aç MouKmvoû MaÀlXOD 10û Avavl8ou) est les activités de la famille de Haggê, on peut soupçonner que
honorée par la tribu des Bené Mathabôl qui, comme on le son père devait appartenir à l'élite de la cité, ce qui lui permet
sait, est présente dans cette zone. Mais, même si à la de recevoir une statue à cet endroit, en compagnie de son
différence des textes précédents, elle n'est pas honorée par fils. D'autre part, il faut souligner qu'elle n'a qu'un rôle de
son père ou son mari, c'est néanmoins au titre d'épouse que second plan, puisqu'elle n'est pas honorée, mais érige des
la tribu lui érige une statue. En effet, après la généalogie le statues. Ainsi, la seule femme qui apparaisse dans les
9 - J. C.".NTINEAU, 1931. p. 127, n" 8 (on peut peut-être corriger la lecture 15 - Il est à peine besoin de souligner que si Betheî est appelée « épouse
bgm de J. Cantineau par bgc/11). L'inscription se trouve aujourd'hui, de ... ». ni son mari. ni son fils n'éprouvent le besoin de mentionner son
apparemment en remploi, dans le mur du sanctuaire de Bel, dans le coin existence.
sud-est. 16 - lm• X. 119. La date du palmyrénien est janvier 214, au lieu cl'aoùt 216
10 - On peut d'ailleurs rappeler à ce propos que la famille cl'Elahbel est la pour le grec.
seule famille dans laquelle on trouve les cieux noms bgdn et 111/kw. 17 - On trouve un certain nombre de personnages dont la généalogie
Néanmoins le nom m/kw est extrêmement fréquent à Palmyre, ce qui limite comporte la séquence lym' brblpt' clans les textes C/S 4265-4268. Ce dernier
un peu la portée de ce rapprochement. est le seul daté (150 apr. J.-C.). ce qui sert d'argument à J. Starcky pour
11 - CIS 3954 = lnF V, 5. rejeter l'identification entre les deux familles. Halaftâ, fils de Taîmê, fils de
0
12 - Kh. As AD et M. GAWLIKOWSKI. 1986-1987, n" 2 (SEC 38. 1574) daté Halaftâ de C/S 4267 « ne peut être l'ancêtre du nôtre, dont les ascendants,
de 208. à cette époque, se nommaientAllatai et Bar'ateh » (/Ill' X, p. 76). CIS 4265
13 - Kh.As'AD et M. GAWLIKOWSKI. 1986-1987, n" 1 (SEC 38, 1573). (= PS n" 99), 4266 et 4267 appartiennent sans cloute au tournant des I'' et
14 - Kh. As'Ao et M. GAWLIKOWSKI. 1986-1987. n" 3 (SEC 38. 1575) daté II' siècles.
de 201.
168 Les notables de Palmyre
inscriptions de 1'agora ne semble être là que pour rendre peut pas tirer de conclusion de ce point de vue, bien qu'elle
hommage, par défaut pourrait-on dire, aux membres défunts ait personnellement de l'argent. Rien dans la documentation
de sa famille, mais non pour elle-même. conservée à Palmyre ne peut permettre de dire qu'elle a reçu
Seuls deux textes donnent peut-être une preuve que cet argent autrement que par héritage ; on n'a aucun
certaines femmes échappaient au moins en partie à la force témoignage sur un éventuel rôle des femmes dans le
des structures familiales. Le premier est l'inscription de commerce, ou une autre activité 20•
Thomallachis dont il a été question au chapitre précédent Le fait qu'on connaisse peut-être un affranchi de
(fig. 50) 18• C'est pour ce qu'elle a fait, et pas seulement parce Thomallachis en la personne de Haddûdan, affranchi d'une
qu'elle appartient à une grande famille, qu'elle est honorée Bat-Firmôn (bdwdn brb1y btpnnwn) 21 semble confirmer son
par les membres des Bené Komarê (appelés Chôneites dans poids social, si on accepte d'identifier Thomallachis avec Bat
ce texte : 01 àno cpuÀ11ç XmvaTCDV ). Même si la qualification Firmôn («fille de Firmôn ») de ce texte 22• Cela est loin d'être
de son geste comme de l'évergétisme au sens propre pose certain, mais on a au moins la preuve que certains membres
problème 19, elle est mentionnée seule, certes comme la féminins de la famille avaient des esclaves et pouvaient les
descendante de la grande famille Firmôn (prmwn <P1pµmv). affranchir. On verra pourtant qu'il s'agit d'un phénomène
Elle est pourtant la sœur de Aoua8oç A88ou8avou et la assez courant et que d'autres affranchis dépendaient ainsi de
cousine de Iap1pmÀ17ç Ey11 cités dans le même texte femmes (voir infra et le tableau dans l'annexe XVI).
(C/S 3914 = Inv IX, 25) comme bienfaiteurs du sanctuaire Selon J. T. Milik, 1'origine de son anthroponyme « Bat
de Bel. Il existait donc, peu d'années auparavant, d'autres + nom masculin » est à trouver dans sa « situation ethno
membres de la même famille, mais ils ont pu disparaître sociale lorsqu'une femme devenait la seule survivante et
dans l'intervalle, ce qui expliquerait que Thomallachis soit héritière d'une famille ; cela semble être le cas de Bat-Firmôn,
ainsi au premier plan. de Bat-Malekê » (DFD, p. 259) 23• La dernière mention de
La seule restriction qu'on puisse apporter est qu'il est membres mâles de la famille remonte à 175 et après 182, le
toujours possible qu'on retrouve un jour un texte jumeau, clan Firmôn n'apparaît plus dans la documentation.
par exemple une dédicace à son mari, pour un don du même Le cas de Thomallachis est particulier à un autre titre au
ordre (Thomallachis ne fournit qu'une partie de la somme moins. En effet, comme on l'a vu au chapitre précédent, les
nécessaire et quelqu'un d'autre pourrait compléter). On se exemples d'évergésie sont assez rares à Palmyre. De plus,
retrouverait alors dans le même cas que pour Betheî ou celui-ci est très précis, car la somme donnée par Thomallachis
Martheî, qui sont honorées seulement en tant que membres figure en toutes lettres. Il s'agit aussi d'un exemple à mi
d'un groupe familial. La différence est pourtant que ces deux chemin entre l'évergétisme classique et les manifestations
dernières sont présentées comme épouses de personnages de piété communes à Palmyre. D'autre part, on a également
connus par ailleurs, alors que Thomallachis est honorée seule, des exemples de constructions proprement religieuses
comme le serait un homme. offertes par des femmes dans le sanctuaire de Baalshamîn,
D'autre part, elle fournit pour la construction des bains mais ces dons n'ont pas donné lieu à l'érection de statues
d'Aglibôl et Malakbel une importante somme d'argent ce honorifiques, ou en tout cas, celles-ci n 'ont pas été
qui signifie qu'elle est peut-être maîtresse de sa fortune. retrouvées, ce qui rend le cas de Thomallachis encore un
Comme on ne sait pas ce qu'il est advenu des autres membres peu plus singulier 2 -1.
de la famille, on peut tout aussi bien penser qu'elle a hérité Le texte honorifique le plus récent qui mentionne une
d'une partie ou de toute la fortune de ses ancêtres. On ne femme concerne évidemment Zénobie, ce qui n'est pas très
18 - H. lNGHOLT, 1936, p. 109, n" 11 daté d'août 182. fils de Shoadî»). 4 l 76b. c et e et 4184 (btmlkw bt zbdbwl br zbdbwl br
19 - Voir chapitre 1v. s'dy « Bat-Malikü, Bat-Zabclibôl. fils de Zabdibôl, fils de Shoadî»). Ces
20 - On verra plus loin les cas clans lesquels des femmes possèdent des quatre derniers textes précisent qu'elle est « héritière de la maison et cle
tombes ou des parties de tombe. l'hypogée » ( w1Jt' dy byt' wm 'rt'). On voit la question qui se pose à propos
21 - H. lNGI-IOLT, 1936, p. 88, n" 2. Ce personnage est appelé br dkt' dy twn', de ce personnage. Son nom personnel peut sans doute être mis à part, et on
expression qui a été interprétée cle diverses manières. Il s'agit sans doute peut considérer qu'il fonctionne comme un nom propre normal. bien que
d'une fonction religieuse (M. GAWLIKOWSKI, 1973a. p. 79 : « le "purifié'' composé. Ce qui vient compliquer le problème est qu'elle est ù la fois fille
cle la chambre»: contra: DFD, p. 274 (membre de « l'association des d'un Zabdibôl (son vrai père?) et Bat-Zabdibôl (son nom cle clan ?). Or.
[surveillantsJ des troncs d'aumône»); cf. DNWSI, s. \'. c/kh ). quand elle est appelée b1111/k\1' bt::.lxlbw/, ce deuxième nom est suivi du mot
22 - Identification proposée par .T. T. Milik. DFD, p. 35. br ( « fils»), ce qui doit signifier que le Zabclibôl dont le nom est précédé
23 - Cette interprétation clu mot Bat est acceptée, entre autres, par de bt est bien son père. Les noms composés en Bat- devaient en quelque
H. lNGI-IOLT, 1974, p. 43-45 ; voir aussi RSP n" 42, texte qui fonde la théorie sorte se figer en une sorte de nom propre, sans toutefois perdre leur valeur
de J. T. Milik: on a une certaine Baâ. fille deAteaqab Bat-Haumal (b'' brt descriptive réelle (au sens de « fille d'un personnage réel» et non d'un
't' qb bt/1wml). L'expression Bat-Haumal fait référence à son clan cl· origine. clan). De plus, les deux termes bt et brt alternent parfois sans qu • on note cle
Autre exemple cité par J. T. Milik (DFD, p. 259), CJS 4548 : Hertâ. fille cle différence cle sens: ainsi l'expression brl /11y « affranchie de» est parfois
Baîdâ Shegel Bat-Habbê (brt' brt byd' sgl bt bb'). La dénommée Iulia orthographiée bt /11y ( CJS 3901, 4339-4340), ce qui prouve que ce mot (ou
Aurelia Bat-Malikü, fille de Zabdibôl. pose un certain nombre de problèmes plutôt cette orthographe) peut être employé sans qu'il faille y voir une
de ce point de vue. Elle apparaît dans les textes C/S 4175 (ywly' 'wrly' intention particulière.
btmlkw brt zbdbwl br ,�'dy « Iulia Aurelia Bat-Malikü, fille de Zabdibôl, 24 - Sur les textes BS n"' 10 et l l , voir inji·a.
Chopitre V: Fomilles, q[fi·cmchis et escloFes de notables 169
surprenant 25• Daté de 271, c'est une dédicace faite par n'en pas clouter, sa personnalité explique que les sources
Septimius Zabdas et Septimius Zabbai (Lrn'Ci�nm ZaP8cxç postérieures se concentrent sur elle, et qu'on ne sache rien
Kat zappmoç), généraux des armées palmyréniennes. La du destin de son fils Wahballat qui dut mourir jeune peu après
date correspond à l'apogée du pouvoir des princes de la chute de Palmyre 27• Ce destin exceptionnel, qui plus est
Palmyre et surtout de celui de Zénobie. La reine (Pcxa01.100cx pour une femme, rend difficile la recherche des causes de
et mlkt' dans le texte araméen) est en fait sans cloute régente son ascension, mais les textes épigraphiques de l'oasis et des
pour son fils Wahballat Athènodôros. On est pourtant bien environs la rattachent assez fortement à sa famille, sans cloute
clans un nouveau cas de figure, car depuis la mort d'Odainat la cause première de son influence. Il semble pourtant qu'elle
(vers 268 ?), c'est une femme qui semble dominer Palmyre: sache s'en détacher, ou en tout cas l'utiliser pour asseoir son
le texte ne mentionne d'ailleurs que Zénobie, sans faire état propre pouvoir, à la mort de son mari, au nom de son fils.
de son mari. Mais comme auparavant, on peut comprendre Si l'exemple de Zénobie, comme dans une moindre
que les raisons de sa prédominance sont toujours mesure celui de Thomallachis, montre que les femmes ne
essentiellement familiales. Deux textes viennent confirmer sont pas totalement absentes de l'épigraphie de type civique
cette impression. En fait le texte CIS 3947 est gravé sur un et public, il faut souligner qu'elles ne sont pas très
fût de colonne, juste à côté d'un texte tout à fait similaire nombreuses dans la documentation ( en dehors de
des mêmes déclicants pour son époux Septimius Odainat l'épigraphie funéraire). Il faut sans cloute en chercher la cause
( CIS 3946 26). Daté aussi de 271, ce deuxième texte est donc dans des traits culturels locaux, et dans u n certain
posthume ; néanmoins, il a été apparemment érigé et rédigé conservatisme des coutumes, qui se laissent influencer moins
sans tenir compte de la mort d'Odainat. qu'ailleurs par les mœurs gréco-romaines.
L'autre inscription à citer dans ce contexte est Si on étudie les traditions culturelles de Palmyre de ce
évidemment le milliaire CIS 3971, qui date de la même point de vue, on ne peut manquer d'être frappé par un fait
période. Odainat est mort et son fils Wahballat Athènodôros qui différencie fortement les pratiques religieuses de celles
est le personnage nommé en premier. Zénobie vient ensuite, du monde grec, l'absence apparemment totale de membres
et en relation avec son fils, puisque, si elle est reine, elle est féminins du clergé 28• La situation en Asie Mineure et dans
aussi« mère du roi» (µTl'CllP wù PcxmÀÉcoç ; « mère du roi le monde égéen est assez bien connue : même si les prêtresses
des rois» en araméen 'rnh dy mlk mlk'). Il ne faut pas se sont rarement très nombreuses, elles existent avec
dissimuler ce que ces appellations peuvent avoir de formel, d'importantes variations selon les cultes, et ont parfois un
et la reine, même quand elle apparaît en deuxième position, rôle prédominant.
pouvait fort bien exercer la réalité du pouvoir. Il s'agit en Dans le monde sémitique aussi, on connaît des femmes
effet d'un texte officiel, par opposition à CIS 3947 d'une qui participent à la vie religieuse de manière active, comme,
nature plus privée, même si les personnages concernés par exemple, à Hatra, mrtbw (Martabû) qui est k.mrt'
appartiennent aux cercles dirigeants. (« prêtresse») de la déesse 'srbl (Isharbel) 29• Or ce mot
La mention de Wahballat en tête s'explique aussi pour (kmrt') n'apparaît jamais dans l'épigraphie araméenne à
cela, parce qu'il est l'héritier de son père, mais ce dernier Palmyre, alors qu'il s'agit de l'équivalent féminin d'un terme
n'est pas nommé. Néanmoins, on reste dans la tradition qui qui est bien connu sur le site, kmr'.
est celle de Palmyre depuis les débuts, c'est-à-dire que les Comme à Palmyre, on trouve à Hatra des statues
femmes apparaissent surtout comme fille ou épouse d'un honorifiques de femmes 30, même si les raisons de leur
tel. Ce qui est nouveau d'une certaine manière pour Zénobie, présence peuvent parfois sembler assez différentes de ce
c'est que clans le milliaire elle apparaît surtout en tant que qu'on a à Palmyre. Pour le texte n° 30, par exemple, il s'agit
mère, et c'est ce qui semble fonder son pouvoir. On aurait une statue honorifique posthume érigée par un mari, après
pourtant pu attendre une référence plus nette à Odainat. l'assassinat de sa femme : l'inscription et la statue constituent
Le reste de la carrière de Zénobie s'effectue totalement en fait un ex-voto qui appelle à la malédiction divine (la
hors du cadre de la ville de Palmyre et de ses notables. À triade hatréenne, Baalshamîn et Atargatis : mm wmrtn
25 - CJS 3947. Je laisse de côté le texte publié par H. lNGHOLT, 1936, p. 106, 28 - Pour un cas possible, mais douteux, voir SFP n" 22, p. 27-28 avec la
n" 1O. Il s'agit visiblement d'un texte honorifique, sans doute en l'honneur fig. 151 : une femme représentée sur un buste « tient des ustensiles
d'une certaine Ba8 MaÀEX1l dont le nom apparaît sur le listel, mais le texte liturgiques (?)et (elle) est coiffée à la garçonne. Nous croyons que Be'eltagâ
est trop mutilé pour pouvoir être inte1vrété. Les lettres lisibles à la seconde est une prêtresse ». Il n'est pas impossible en soi qu'il existe des prêtresses
ligne (ATPQNAN) ont été interprétées par H. Ingholt comme l'ethnique à Palmyre, mais on manque de parallèles dans les inscriptions et les
« Hatréenne », ce qui semble douteux. La restitution de J. T. Milik (DFD, monuments du site. Les auteurs de SFP citent une autre Beeltagâ sur un
p. 15) [�Llcrcpwvav, transcription du mot latin matrona, est difficile, car aucune relief publié par J. Teixidor (1966, p. 178-179 et pl. IL 7) : elle possède en
trace du M n'apparaît dans l'espace conservé avant le premier A ( fig. 62). effet un certain nombre de traits communs avec celle de SFP n" 22 (coiffure
26 - Dans son état actuel ce texte est uniquement en araméen, mais il semble et ustensiles à la main), mais, là non plus, rien n'indique qu'il puisse s'agir
assuré qu'à l'origine, il était bilingue, comme C/S 3947. d'une prêtresse.
27 - Si la mère et le fils apparaissent conjointement sur les monnaies et les 29 - Dans le texte Hatra n" 34. La même personne apparaît aussi dans le
milliaires, c · est seulement Wahballat qu'on trouve avec Aurélien clans les texte Hatra n" 31.
titulatures officielles sur les papyrus (par exemple P 0.,y 1264 ou BGU 946 ). 30 - Textes Hatra n'" 5. 30, 34-37, 228.
170 les notables de Palmyre
wbnmyn wb'Jsmyn w'tr't) contre le meurtrier. Néanmoins, don. Il doit en être de même pour le texte de Attéemm, qui est
que ce soit comme appel à la vengeance, ou simplement en la preuve d'une implication des femmes dans la vie religieuse
mémoire de la défunte, on retrouve en fait aussi bien à de Palmyre. Mais il y a aussi des exemples explicites de
Palmyre qu'à Hatra un procédé semblable pour ces statues femmes qui participent par des dons aux divinités aux
honorifiques posthumes : la différence vient aussi de ce que constructions dans les sanctuaires. Si ces activités ont donné
le texte de Hatra qu'on vient de citer est beaucoup plus précis lieu à des inscriptions honorifiques, les textes n'en sont pas
que ses équivalents palmyréniens. conservés, mais on a les dédicaces de plusieurs portiques du
Dans le cas du texte n" 36, on se retrouve dans un cas de sanctuaire de Baalshamîn, offerts par une ou plusieurs femmes.
figure qui ressemble à celui des textes pour Haîran, le fils Le premier cas date de novembre 23 (BS n" 10), c'est le
d'Odainat à Palmyre : c'est sans doute parce qu'elle est fille texte le plus ancien en rapport avec le sanctuaire : trois
du roi Sanatrûq que Dûshparî ( dwsp1y brt sntrwq) reçoit une femmes, Attaî et Shebhaî, filles de Shahrâ et Attâ, fille de
statue d'un« ami» (111111h 31). Comme à Palmyre, mais sans Perdesh ( 'ty wsbJ]y bnt sJ1r' w't' brt prds) offrent deux
doute aussi comme dans le monde grec, les femmes sont colonnes à Baalshamîn, « pour leur salut et celui de leurs
d'abord des filles, mères ou épouses, et cela explique la fils et de leurs frères» ('1 byylm wJ1yy bnyhn w'byhn).
majeure partie de Jeurs apparitions sur la scène publique. Comme dans le texte BS n" 11, daté de janvier 52, il n'est
pas question du mari parmi les bénéficiaires de la dédicace.
Pourtant les femmes sont loin d'être absentes de la vie Pourtant, dans ce second texte, la donatrice, Amtallât, fille
religieuse de Palmyre et plusieurs documents J 'attestent dès de Baraâ, fils de Atenatan ('mtlt brt br" br 'tntn) précise
une époque assez ancienne. En effet, un texte daté de mars 17 aussi qu'elle est épouse de Taîmê, fils de Belhazaî (tym' br
av. J.-C. est la dédicace d'une statue à une certaine 't'm blbzy). Le texte, dédicace d'une seule colonne au dieu
(Attéemm) par les dieux Aglibôl et Malakbel, associés aux Baalshamîn, est fait pour le salut de ses fils et de son frère.
Bené Komarê 32• Cette coutume d'associer dieux et mortels Comme toutes les donatrices ont des fils, on peut
comme dédicants est propre au monde sémitique, mais il supposer qu'elles ont été mariées, et que devenues veuves,
faut souligner que c'est le seul cas à Palmyre où une femme elles font ces donations, ce qui expliquerait que les maris
est honorée de cette manière. n'apparaissent pas parmi les bénéficiaires. Leur relative
À Hatra, un certain nombre de statues faites pour des indépendance en tant que veuves, explique aussi que des
femmes par des divinités sont connues. On peut citer d'abord femmes participent à des constructions de ce type (comme
le texte Hatra n" 35 33• Une statue a été promise par la déesse Thomallachis vraisemblablement). Certes Amtallât précise
Isharbel à une certaine Qaîmaî, fille de Abdsimîâ (qymy brt qu'elle est femme de Taîmê, mais celui-ci n'est pas cité
'bdsmy'). C'est cette dernière qui dresse elle-même la statue ensuite.L'explication en est relativement simple sans doute ;
pour son salut et celui des membres de sa famille (son mari, Amtallât précise en effet qu'elle appartient aux Bené Mîtâ
son frère et « la maisonnée tout entière, intérieure et (dy mn bnt myt'). Comme on le voit par l'expression
extérieure, de Bar-Marên et de quiconque les aime, de chaque employée (littéralement « des filles de Mîtâ»), il s'agit bien
(personne)» Un autre exemple connu à Hatra est fourni d'elle, et non pas seulement de son grand-père Atenatan. Or
par le texte 11 ° 228 35 : l'inscription est fragmentaire, mais il le sanctuaire de Baalshamîn appartient en propre aux Bené
s'agit de l'érection d'une statue par le dieu Bar-Marên àAbû, Mazîn, une autre des grandes tribus de Palmyre, et pas aux
fille de Damîôn (c5/mt' dy 'bw brt dmywn dy 'qym lh bnmyn Bené Mîtâ (voir chapitre JI). Il faut donc que d'une certaine
['}Jh' ....). manière elle justifie sa présence en cet endroit : elle a besoin
On sait qu'à Palmyre, ces dédicaces faites par des dieux alors de mentionner son mari, qui, lui, appartenait bien aux
correspondent en général à des dons aux divinités faits par Bené Mazîn ( dy mn pbd bny m 'zyn), comme les autres
les personnes ainsi honorées. On peut citer 1'exemple du fidèles qui fréquentaient le sanctuaire.
texte BS n" 40, déjà cité (chapitre 1v) 36: Malikû, fils de Ogâ De la même manière que pour les différents textes
(mlkw br 'g') est honoré par Baalshamîn et Durahlûn et les honorifiques qu'on a pu citer, il semble donc bien que seules
Bené Mazîn pour avoir fait construire un portique. Cette des conditions particulières, comme le décès des membres
inscription honorifique répond à la dédicace pour Ja vie du mâles de Ja famille, peuvent permettre à des femmes de
bienfaiteur BS n" 7, qui est la dédicace du portique. prendre des initiatives de caractère honorifique ou religieux.
Même si les textes de Hatra ne sont pas très clairs, on Il faut aussi attirer l'attention sur les variations
peut penser que souvent ils commémorent le même type de chronologiques. Les textes les plus anciens concernent
31 - Sur ce mot, voir le chapitre 1v. restituée par le C/S. J. T. Milik (DFD, p. 62) suit la proposition de J. Teixidor.
32 - Il s · agit du texte /111' XI, 84 qui reprend en fait CIS 3969 (texte plus 33 - Voir DFD. p. 353.
complet dans DFD, p. 62 : c'est la troisième« dédicace faite par des dieux » 34 - dyr' klh gwyt' wblyt' dbnmyn wmn dy 111m lhwn kwlh. Traduction
étudiée dans cet ouvrage ; voir aussi M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 50). La J. T. Milik. DFD, p. 353.
date est restituée par J. Teixidor (éditeur d'fnl' XI) qui préfère, pour des 35 - Voir DFD. p. 324.
raisons paléographiques, la date de 17 av. J.-C. à celle de 83 apr. J.-C. 36 - Voir DFD, p. 95.
Chapitre V: Familles, affiw1chis et esclaves de notables 171
principalement le domaine religieux, alors que les suivants anonyme, comme c'est le cas pour Makkaî, fille de Ogâ (mky
sont plutôt honorifiques et funéraires. Mais cela correspond brt 'g' en CJS 4014). Elle est la femme de Malê, fils de Malikû
aussi à une évolution plus générale de 1' épigraphie (ml' br mlkw) : or, on connaît peut-être le frère de celui-ci,
palmyrénienne dans laquelle les mentions de constructions Wahbâ, fils de Malikû Malê ( whb' br mlkw ml' en CIS 4008),
religieuses se font plus rares avec le temps. par une autre dédicace du même type. Cela fait peu pour
Cela ne signifie pourtant pas que les femmes cessent de espérer reconstituer la famille, et juger précisément de sa
faire des dédicaces de caractère religieux, mais simplement place dans la société de Palmyre .i.i_
qu'il ne s'agit plus de constructions de bâtiments importants, C'est en fait dans les inscriptions funéraires que l'on
mais de simples autels dédiés à Baalshamîn ou au dieu trouve les mentions les plus nombreuses de femmes. Les
anonyme. C'est cl' ailleurs une évolution générale, et les exemples d'hypogées qu'on trouve clans l'ouvrage récent
autels de ce type se multiplient au cours du me siècle 37• de A. Saclurska et A. Bounni sur les sculptures funéraires de
Comme l'a remarqué K. Dijkstra, le nombre de femmes, Palmyre (SFP) sont révélateurs à cet égard, tout comme peut
comme celui des affranchis, est beaucoup plus important l'être une lecture des pages consacrées aux textes funéraires
parmi les déclicants d'autel de petite taille que pour ce qu'il de Palmyre clans le CJS. Même si les hommes sont de loin
appelle les mqjor dedications 38• Ce culte est en effet de nature majoritaires parmi les personnages représentés sur les stèles
plus privée et concerne des catégories de la population qu'on funéraires, il existe suffisamment de bustes féminins pour
pourrait qualifier de « moyennes ». Il ne s'agit probablement qu'on soit bien renseigné sur leur présence et leur costume.
pas d'influence gréco-romaine à proprement parler, mais On considère généralement que les sculptures funéraires
plutôt du développement de nouvelles formes religieuses qui sont conçues pour n'être vues que par les membres de la
laissent plus de place au sentiment individuel. À ce famille, en tout cas ceux qui pouvaient pénétrer dans les
phénomène correspond aussi la disparition ancienne des tombes. Il n'en reste pas moins qu'on y trouve représentés
mentions tribales qui sont remplacées par une importance les Palmyréniens, et spécialement les femmes, vêtus de
plus grande accordée à la famille au sens réduit : les manière sans cloute assez voyante. Les bustes funéraires ont
bénéficiaires de ces textes« pour la vie de ... » sont d'ailleurs manifestement une fonction de représentation, quel que soit
en majorité de proches parents du donateur 39• le public amené effectivement à les contempler. On ne peut
Ce qu'on peut tirer de l'identification des donatrices expliquer autrement les bijoux et les broderies si visibles
conduit à penser qu'elles n'appartiennent généralement pas que portent les défunts. Les notables de Palmyre se font
aux classes les plus élevées de la cité. La principale exception sculpter, sans cloute avec l'aspect sous lequel ils
est représentée par le texte le plus ancien La donatrice .l(). apparaissaient lors des grandes occasions.
Até[ ...], fille de Malikû ('t[. ...J brt mlkw br whblt br 'rgn) En fait, à cause de la disparition des statues honorifiques
est l'épouse de Malikû, fils de Ogâ Aabeî (mlkw br 'g' qui étaient placées sur les consoles de colonnes clans les
''[by]). Par alliance au moins, elle appartient donc à une des monuments publics, ce qu'on connaît d u costume
familles les plus importantes de Palmyre .ii_ Ce texte est daté palmyrénien provient presque exclusivement des tombeaux.
de la fin du l"' siècle d'après la généalogie de la famille 2, -1 Mais, si les statues honorifiques d'hommes devaient être
mais la principale différence avec les textes plus tardifs est nombreuses, il n'en était pas de même pour les femmes.
que la divinité honorée est le dieu Baalshamîn (lb' Jsnm rb' Dans les tombeaux au contraire, on a plutôt affaire à
wrl_nnn': « à Baalshamîn grand et miséricordieux»). C'est des scènes de caractère familial, en particulier des scènes de
le seul exemple de ce type; il est fort probable qu'ait eu lieu banquets où sont rassemblés les membres de la famille (mère
une transformation des coutumes après cette période : par la et enfants) autour du père. Dans les autres cas, les différents
suite, les dédicaces d'autel ont surtout concerné des femmes /oculi des tombes semblent accueillir toute la famille, aussi
qui n'appartenaient pas aux familles les plus huppées de la bien les hommes que les femmes, même si celles-ci sont
population 3• -1 peut-être moins nombreuses, en particulier en ce qui
Quand on arrive à reconstituer certaines familles, on concerne les enfants : on trouve sans doute moins de plaques
retrouve cl'autres personnes qui dédient des autels au dieu funéraires de petites filles que de petits garçons, ce qui est
37 - Liste des textes clans K. DI.JKSTRA, 1995. p. 322-334 (Appenclix F). de dimensions modestes (entre 40 et 60 cm de haut): voir la fig. 13.
38 - K. DuKSTRA. 1995. p. 143 avec une liste des textes clans lesquels les 39 - K. DUKSTRA. 1995, p. 148-152.
femmes sont cléclicantes: ers 4006, 4014. 4020, 4027, 4042. 4067, 4080, 40 - ers 3988 (=ln\' VI, 3 = RSP n" 128).
4083, 4087 : bn· XI. 5, 23 ( = eIS 4010) et 24 ; D. AL- HASSAN! et J. STARCKY, 41 - Voir le chapitre r et l'arbre généalogique en annexe, ainsi que celui de
1957. p. 97 ( =RSP n" 123) : H. lNGHOLT. 1936. p. 99. n" 7. Des femmes sont J. Starck.y (lm• X , p. 34).
cocléclicantes clans les textes suivants: ers 4081, Kh. As'Ao et J. TErxrooR, 42 - Voir RSP. p. 64.
1985c, p. 39. n" 6. Il faut ajouter à la liste le texte ers 3988 (=lm· VI, 3 43 - C'est-à-dire celles dont certains membres ont eu des fonctions
= RSP n" 128) qui est une dédicace à Baalshamîn par une femme. importantes clans la cité.
On peut rappeler la définition des mqjor cledications cl' après K. Dur<:sTRA, 44 - K. DuKSTRA, 1995, p. 144 pour ce rapprochement et quelques autres
1995. p. 89 ( « refers to temples cmd altors as \\'el! os otlzer ol�jects cd qui ne concernent pas des femmes. On reste apparemment toujours en dehors
monumental dimensions»); les nzinor dedications portent sur des autels de r élite de la cité.
172 Les notables de Palmyre
aisément explicable par la structure patrilinéaire de la société les statues palmyréniennes aient été fort différentes, si ce
qui favorise les héritiers masculins 45• La transmission du n'est pour une influence gréco-romaine plus visible.
nom n'en est qu'une preuve plus manifeste que les autres. La coutume de se voiler n'est pourtant pas typiquement
Comme on l'a vu au chapitre précédent, le costume des palmyrénienne, ni même typiquement sémitique. On en
hommes, y compris dans certains cas pour les prêtres, peut connaît d'autres exemples ailleurs dans le monde grec ;
avoir plusieurs origines différentes : orientale (iranienne et L. Robert en a rassemblé des exemples qui concernent la
sémitique), grecque ou même romaine. On y trouve une assez côte sud de l'Asie Mineure (Cilicie, Pamphylie) 51• Ainsi, à
grande variété, et le costume, comme les coiffures et les barbes Tarse, les femmes « se drapent et elles marchent de telle
suivent plus ou moins les modes occidentales -16• Seuls les façon qu'on ne voit pas une partie d'elles ni de leur visage,
prêtres, qui sont toujours glabres et dont la tête est recouverte ni du reste du corps, et qu'elles-mêmes ne voient rien en
du modius, échappent en partie à ces influences, mais celles dehors du chemin» (traduction L. Robert) 52• On le voit, les
ci sont néanmoins visibles pour le costume. On peut sans doute régions cl'Asie Mineure parmi les moins hellénisées sont
mettre cela sur le compte d'un certain conservatisme, qui est concernées, ce qui correspond évidemment à cette résistance
valable aussi pour les femmes, comme J.-C. Balty l'a montré des coutumes locales à certains phénomènes d'hellénisation.
récemment -17• Ces catégories particulières de la population Il en est sans doute de même à Palmyre, ville en marge
semblent résister aux influences et aux modes gréco-romaines, des zones plus profondément hellénisées (Antioche ou même
en particulier dans l'art du portrait féminin .ix. Séleucie-du-Tigre). La population de la ville participe en
Les fameuses femmes voilées de la poutre du temple de partie au mode de vie hellénique en conservant en même
Bel ont souvent été un sujet d'interrogation, en particulier temps ses caractéristiques propres. Et dans une des parties
parce que c'est le seul cas connu à Palmyre de ce type de de la population la moins susceptible d'être en contact avec
vêtement. Tous les autres exemples de représentation les éléments étrangers, on peut donc repérer des traits sans
féminine figurent les visages des personnages. Les femmes doute proprement palmyréniens.
ont souvent la tête recouverte d'un voile (fig. 33), mais elles Comme l'a montré J.-C. Balty, les représentations
sont parfois tête nue. Les imitations des coiffures à la mode, féminines telles qu'on les connaît dans les tombeaux
comme celles des impératrices sont certes relativement permettent aussi de tirer des conclusions sur les domaines
rares 49, et les coiffures locales se maintiennent tout au long plus proprement réservés aux femmes. Il montre en
de la période. Du reste, il semble que les figures voilées sont particulier le lien qui existe avec le monde domestique, ce
présentes uniquement sur des reliefs qui représentent des qui est prouvé par différents attributs qui valorisent le rôle
cérémonies religieuses publiques (processions ; fig. 53). C'est de la femme comme gardienne du foyer. La présence par
un argument de plus pour faire des reliefs funéraires un art exemple de la quenouille et du fuseau, ou de la clé 53, ou
représentatif de la vie privée: les femmes n'étaient pas encore les portraits de femmes allaitant ou accompagnées
voilées chez elles. de leurs enfants (fig. 63) suffisent à définir des domaines
Le costume public des femmes est plus difficile à d'activités féminines. Celles-ci apparaissent relativement peu
connaître, et seuis quelques exempies de scènes de sacrifices touchées par les influences extérieures. J.-C. Balty note en
peuvent donner des indications 50• La rareté des statues particulier que les représentations de femmes qui tiennent
honorifiques de femme permet peu de conclusions. Il est la quenouille et le fuseau sont un point commun entre les
raisonnable de penser que ces statues devaient représenter stèles de Palmyre et celles de Zeugma, ainsi que celles qui
le visage des personnes honorées. Surtout, on a l'exemple proviennent de la région du Danube, aux confins de la
parallèle de Hatra, où l'on a conservé ce type de statues avec Pannonie et du Norique. Or, il s'agit de régions dont « les
les inscriptions correspondantes. Il y a peu de raisons que substrats indigènes étaient fort vivaces » 54•
45 - Les petites filles devaient être enterrées sans plaque funéraire, peut latini I, 1893 (traduit aux pages 66-67 d'Hellenica V par J. Sauvaget).
être remplacée par un simple graffita. 52 - D10N CHRYSOSTOME, Dise. 33, Tarsica I, 48 cité par L. ROBERT.
46 - M. A. R. CoLLEDGE, 1976a, p. 141-144. Voir cependant J.-C. BALTY. Hellenica V : i-o îOÛîOV i-à i-pôrcov KO'.îECïîCY.À.80'.l KCXt �cx8iÇElv CD<HE
1996. p. 438 qui note une adoption « plus timide » des modes p178Évcx p178È Ëv cx{néôv �LÉpoç i8Éiv p17n:. i-oû rrpoawrrou �lllîE 1ou
iconographiques cl e l'Empire pour les portraits: l'influence est vague. et Àmrcoû môpmoç, �u78È CY.Ùi-cx.ç 6péiv Ëçrn i-17ç 68oû p178Év.
« se limite souvent à l'arrangement général de la coiffure et n'affecte que 53 - Bien qu·on puisse attribuer aussi ü ces clés une interprétation plus
plus rarement la coupe même du visage». mystique, comme le prouverait l'existence d'inscription du type bt 'lm'
47 - J.-C. BALTY, ] 996, p. 438-439. « maison d'éternité». Cf. H. J. W. DRIJVERS, 1982, p. 709-733. Voir aussi
48 - Savoir si cette résistance est passive ou active est une autre question, à K. PARLASCA, 1988, p. 216-221 qui distingue plusieurs types: les petites
laquelle il semble difficile de donner une réponse. clés qui pendent à une fibule portée par les femmes sont en fait celles cle
49 - Mais peut-être pas autant que le dit J.-C. Balty. leurs coffrets ü bijoux, alors que les grandes sont peut-être celles clu tombeau.
50 - Par exemple, un relief du musée de Palmyre (M. A. R. CoLLEDGE, Mais, comme le fait remarquer J.-C. Balty, les tombeaux sont justement
1976a, fig. 26) qui représente des porteuses d"offrandes. fondés par des hommes, alors que précisément ce sont cles femmes qui
51 - L. ROBERT, Hel!enica V, p. 64-69: il cite le cas de Palmyre (p. 68-69) portent les clés (J.-C. BALTY, 1996, p. 438).
ainsi qu'un texte de Palémon à propos de Pergé, texte conservé seulement 54 - J.-C. BALTY, 1996, p. 439.
en arabe et édité par R. FoERSTER, Scriptores Physiog110111011ici graeci et
Chapitre V: Familles, affirn1clzis et esclaves de notables 173
Les femmes, dont la présence publique est faible, voient honorifiques de femmes. Il suffit de reprendre le tableau (en
leurs activités centrées sur le monde domestique, qui annexe IX. 2) des noms grecs et latins pour s'apercevoir que,
n'apparaît pratiquement qu'à travers elles. Leurs portraits sur le nombre relativement réduit de noms de ce type, seule
permettent peut-être de définir au sein de la population de une infime minorité concerne des femmes. Outre le cas de
Palmyre différents groupes plus ou moins touchés par les Zénobie, on peut citer 'brnyq qui est sans doute une
influences extérieures. Pourtant la prédominance des modes transcription de BrprvÎKll (PAT 1047 et 1051), ou bien
locales laisse penser que la vie privée des notables de Palmyre dwmnyn' ( C/S 4020) pour Domnina, ainsi que quelques
était sans doute relativement indépendante des courants autres, qui ne sont généralement attestés chacun qu'une ou
gréco-romains. deux fois 57• Il faut mettre à part pourtant un nom féminin
Il est pour le reste difficile de savoir quelles en étaient · qm' ( « Aqmê » ), sans doute transcrit 'A K�lll en grec, autant
les conséquences réelles sur le comportement quotidien de qu'on puisse le dire, puisqu'il s'agit à chaque fois de
ces personnages, y compris pour les femmes. La reine restitutions. Le nom est attesté dans les textes araméens une
Zénobie, dont la culture hellénique est connue, se trouve vingtaine de fois, ce qui en fait un des noms les plus courants
nettement en dehors de ces groupes. D'ailleurs, d'après ce pour lès femmes. Il est malheureusement difficile de savoir
qu'on sait d'elle, on l'imagine mal avec la quenouille et le s'il s'agit véritablement d'un nom grec, ou bien seulement
fuseau. Pour les autres femmes connues (un peu) à Palmyre, d'un nom sémitique (d'étymologie difficile), rendu courant
il est difficile de faire la part des habitudes de représentation. par sa proximité phonétique avec un mot grec 58•
On n'a malheureusement pas d'images de Thomallachis, On peut faire une autre remarque sur l'onomastique des
dont l'action publique pouvait se combiner avec un rôle dans femmes, en soulignant que, selon toute apparence, ces noms
la sphère du privé. Il est impossible de savoir si ce rôle, dans grecs sont caractéristiques d'une période plutôt tardive de
le cas précis de Thomallachis, cmTespondait à ce qu'on l'histoire de Palmyre et sont attestés seulement vers le milieu
connaît en général des femmes. du n" siècle. D'autre part, sauf pour KaÀÀ.tcn:11, femme d'un
D'autre part, la rareté des femmes dans la vie publique symposiarque (J. CANTINEAU, 1930b, 11° 14) et bien sûr pour
contraste avec la situation en Asie Mineure. Pourtant, les Zénobie, ces noms sont plutôt portés par des femmes qui
conclusions que tire R. Van Bremen semblent valables aussi à appartiennent au mieux à une classe moyenne de la
Palmyre. Elle note en effet que, paradoxalement, l'apparente population. On retrouve le même phénomène que pour les
augmentation du pouvoir et de l'importance des femmes, noms grecs et romains en général (cf. chapitre u): les noms
visible en particulier dans les honneurs qui leur sont rendus, doubles (en particulier grecs et sémitiques) sont typiques
cmTespond en fait à une baisse de statut du point de vue civique, des élites de la cité, alors que les personnages qui pm1ent
car ce sont d'abord les valeurs familiales qui sont mises en uniquement des noms grecs font souvent partie de classes
avant 55• De même, à Palmyre, l'accent mis sur de semblables moyennes, et on peut souvent soupçonner pour eux une
valeurs, dans le domaine funéraire, incite à penser que la origine servile qui remonte à peu de générations.
femme est d'abord considérée comme appartenant à une On remarquera aussi que la proportion des noms
famille. Le témoignage des quelques inscriptions honorifiques d'origine latine est plus forte que pour les hommes, ce qui
qui concernent des Palmyréniennes va dans le même sens. peut être l'écho de relations entre le personnel du camp
L'onomastique féminine, elle aussi, est marquée par cette militaire romain et certaines parties de la population de
résistance à 1'acculturation, ou du moins cette permanence Palmyre, soit par des mariages, soit simplement par une
des coutumes locales : ainsi, il semble bien que la reine influence culturelle qui se marquerait dans l'onomastique.
Zénobie soit le seul exemple connu à Palmyre de femme au On peut tout aussi bien imaginer que d'anciens soldats
nom double, grec et sémitique (Z11vo�{a et btzby) 56• palmyréniens ont amené avec eux des habitudes
L'onomastique des autres femmes est de manière tout à fait onomastiques différentes de celles qui avaient cours
prédominante d'origine sémitique, comme le prouvent habituellement dans l'oasis ; se pose alors pour la période
d'ailleurs les exemples cités plus haut à propos des statues antérieure à 212, le problème de leur éventuelle citoyenneté.
55 - R. V AN BREMEN, 1996, p. 302 (conclusion): « The great pctradox is plus de cas cl'alternance de nom grec en grec et de nom sémitique en
rather thctt the apparent increase in po1Fer and stcttn1· (greoter l'isible weolth, araméen, alors que les hommes peuvent être ZllVÔ�toç et zbdlh (par
an increase in femo!e civic rdfïce-holcling, and ct multiplirntion of civic exemple en C/S 3932) ou bien byrn br bwn' dy mtqr' rb'](« Bônnê qui est
lwnours fèJr v1•omen) was accompctnied b_v a loss c�f citi::,en-stutus and ct appelé Rabbel » ; M. RüDINSON. 1950, p. 137).
JJub!ic image that emphctsi::.ed, abo,,e ail, the fami!iul aspects of' 57 - Pour compléter la liste : 'tny' (Antonia ? ; RSP n" 67); KaÀÀtG"Cll
womanhood ». Voir aussi le compte rendu du livre de R. Van Bremen par (J. CANTINEAU, 1930b, n" 14); nyq' sans doute équivalent de NlKT]
L. Migeotte (TOP0/7-2, 1997, p. 377-378): le rôle public des femmes est ( CIS 4085); TTpt�La/piym' (Jnv IV, 13 avec M. GAWLIKOWSKI, 1975. p. 129);
en même temps un phénomène d'élite et un phénomène familial. Les charges prstn' qui transcrit Pristina (RSP n"' 24 et 29); sym' (= L-Î.µ17 ? ; J. Starcky
et les évergésies féminines ont moins d'importance en tant qu'actes in D. MACKAY, 1949, p. 185), ce qui fait en définitive un nombre peu élevé
individuels que comme manifestation des intérêts familiaux. (voir annexe IX. 2).
56 - Les noms doubles du type« surnom » ( dy mtqrt' « qui est surnommée ») 58 - Voir la discussion dans l'annexe IX. 2.
ne sont pas attestés pour les femmes. À part pour Zénobie, il n'y a pas non
174 Les notables de Palmyre
La prédominance de l'onomastique sémitique signale femmes sont sans doute veuves, mais cela semble certain
sans doute, même dans les couches les plus hautes de la pour Amdabô, qui a la charge de son fils 62• Un texte est
société palmyrénienne, un attachement véritable aux même explicite : après la mort de Shalamallat, fondateur
traditions propres à ces populations, sans que la pénétration d'une tombe, (slmlt br mlkw), son fils Hennibel Umbl br
indéniable de l'hellénisation vienne les changer en slmlt), ainsi que sa mère Pristina (prstn' brt tymrsw), femme
profondeur. Néanmoins, l'existence du cercle de Zénobie, de Shalamallat, prennent comme associé un de leur cousin 63•
tout comme l'intégration de certains des notables dans les C'est sans aucun doute parce qu'elle est veuve que Pristina
cadres de l'Empire romain, permet de conclure qu'une partie peut ainsi participer à cette vente.
de la population de Palmyre pensait appartenir à une société Le cas est plus obscur pour une certaine Shalmê, fille
hellénisée. On trouve ce phénomène au moins parmi l'élite, de Bôlhâ (sJm' brt bwlb') qui agit au lieu de (bmqmwt)
mais cela ne lui est pas propre, comme pourrait le prouver Ogeîlû, fils de Bôrefâ, son mari ('gylw br bw1p' b'lh) Le ri-1_
l'existence d'une onomastique grecque et romaine, y compris mari est apparemment incapable de prendre part à la
dans des familles dont aucun membre n'a exercé de fonctions transaction (vente d'une partie d'hypogée), parce qu'il est
de premier plan dans la cité 59• mort ou absent, mais sa femme n'agit qu'en présence d'un
témoin (gnsts), un certain Iaddaî, fils de Kîlaî (ydy br kyly).
La présence de ce dernier, dont le rôle n'est attesté autrement
2. STRATÉGIES FAMILIALES
que par une seule inscription (sur une soixantaine de textes
Si les femmes apparaissent peu sur la scène publique, de concession: voir chapitre vr), est peut-être le signe que
elles n'en sont pas moins présentes, et les exemples cités les femmes ne sont pas égales du mari dans ce type de
plus haut prouvent qu'il leur était possible d'acquérir une transactions commerciales 65• Son absence dans les autres
indépendance certaine, et de se servir de leur fortune en leur textes qui concernent des femmes peut être un argument pour
nom propre. On a des exemples comparables dans les conclure que le mari est absent pour une raison ou une autre,
inscriptions funéraires: certaines tombes appartiennent ou mais qu'il est bien vivant, et qu'il se fait donc représenter
sont achetées par des femmes. Selon toute vraisemblance, par un témoin, alors qu'une veuve peut apparemment agir
leur statut est un peu particulier et il y a de fortes chances librement. De plus, l'expression « au lieu de » (bmqnrwt)
qu'il s'agisse de veuves: il n'est fait aucune mention du n'est attestée que par ce texte dans un contexte funéraire 66•
mari, alors qu'elles sont souvent accompagnées cl'enfants. Pourtant aucun lien particulier n'est établi par le texte entre
C'est par exemple le cas de Aurelia Sammaî, fille de le témoin et Shalmê: il n'est donc pas sûr que la mention
Lishamsh, qui acquiert deux travées de l'exèdre sud de la d'un témoin soit uniquement une conséquence du sexe de la
tombe de Julius Aurelius Malê 60• Le texte, daté de 237, est vendeuse.
tout à fait explicite: c'est bien Aurelia Sammaî qui achète On trouve encore d'autres cas de femmes qui participent
cette concession, « pour elle, et pour ses enfants et pour les à des transactions commerciales pour des monuments
enfants de ses enfants », selon un formulaire qui est le même funéraires, par exemple en C/S 4206 (:::::: Inv IV, 1 ; le nom de
que celui utilisé habituellement pour des hommes 61• l'acheteuse a disparu) ou en C/S 421 2 (:::::: lnv VII, 13). Dans
L'absence des hommes pour un certain nombre de ces un autre groupe de textes, une certaine Iulia Aurelia Amatê,
transactions est un phénomène qu'on peut clairement mettre fille de Bôlhazaî Moqîmû (ywly' 'wrly' 'mt' brt bwlbzy
en évidence. Ainsi, quand deux femmes, Julia Aurelia mqymw; 'IouÀ{a Aùp17À{a A�La817 BcoÀaÇmou 1oû
Shalmat, fille de Abdastôr et Amdabô, affranchie de Lucius Mo1nµou) achète successivement plusieurs exèdres et
Aurelius Barsamaîâ cèdent en commun l'exèdre nord d'un quelques travées de l'hypogée de Nasrallât entre 263 et 265 67•
tombeau, la seconde d'entre elles précise qu'elle est À chaque fois, les textes précisent qu'elle achète pour elle,
protectrice de Bônnê, fils de Rabbel, son fils ( 'mdbw brt b1y ainsi que pour ses enfants et les enfants de ceux-ci (lh wlbnh
Jwqys 'wrlys brsmy' mpmsyt' dy bwn' brrb'J bil1). Les deux wlbnh bnh dans le premier texte et lh wlbnh wlbn' bnwhy
59 Sur ce point. voir le chapitre v1. à propos de la différentiation sociale père, sans doute à cause du décès de ce dernier.
dans les hypogées et la place que les « classes moyennes » y occupent. 63- RSP n" 24 (et également, M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 196-197. n" 50).
60- H. lNGHOLT, 1935, p. 88, n" IX. 64- J. CANTINEAU, 1930a, p. 548, n" 14.
61 - Voir plus généralement le chapitre VI, pour ce formulaire et pour les 65 - On retrouve des témoins dans un texte publié par H. lNGHOLT, 1962,
monuments funéraires en général. p. 106, mais le concept est exprimé par un mot araméen, /';hd. Le point
62 - H. lNGHOLT, 1938. p. 124-125, n" II. L'éditeur (p. 130) propose plutôt commun avec l'autre texte qui mentionne des témoins, est que là aussi un
de voir en Amdabô la mère adoptive de Bônnê, car ce dernier est libre. ce des contractants n'agit pas directement : alors que dans le premier texte,
qui ne serait pas possible si sa mère était esclave. On peut pourtant remarquer une femme agissait en lieu et place de son mari, ici, un homme écrit à la
qu'au moment de la transaction au moins, Amdabô est libre, et que cela place du contractant, parce qu'il ne sait pas écrire (bdyl dy I' yd' spr). C'est
pouvait déjà être le cas à la naissance de son fils. La traduction« protectrice» sans aucun doute pour cette raison que des témoins sont nécessaires.
est celle de M. GAWLIKOWSKI, 1970b. p. 215, n" 41. Quel que soit le statut 66 - Cf. DFD, p. 301 qui traduit le terme par« par délégation légale».
exact de Amdabô, il est clair qu'elle est chargée de son fils en l'absence du 67- H. INGHOLT, 1935. p. 110, n" II et p. 112, n" III.
Chapitre V: Familles, qtfi·anchis et esclal'es de notables 175
dans le second) 6K. On se trouve clone dans le même cas de d'hériter de leurs parents ou de leur au cas où il
figure que précédemment, et Iulia Aurelia Amatê est fort aurait pas d'héritiers mâles proches (frères). Cette conclusion
probablement une veuve. On remarquera pourtant que le peut permettre aussi cl'expliquer certaines alliances entre des
nrPn,uc•r texte, dans Sa version grecque, est encore plus familles 71•
et qu'on a en fait aù1:1J TE Ka't u101ç Ka't uwvoic:: « pour elle Les alliances matrimoniales clans les
et pour ses fils et ses petits-fils ». C'est aussi le sens littéral inscriptions permettent certaines hypothèses sur les relations
des formules araméennes, mais elles sont plus ambiguës et entre les grandes familles, et le rôle que peuvent y jouer les
on préfère souvent traduire par « enfants » plutôt que par femmes. Les textes disponibles indiquent qu'il est fort
« fils ». On réserve plutôt cette dernière traduction pour les improbable qu'on ait pratiqué la polygamie à Palmyre. Les
cas où le mot « bny» (avec différents pronoms personnels cas de deuxième mariage existent, mais à chaque fois, le
affixes) est précisé par l'adjectif « dk1y » (« mâles») 6 l). décès de la première épouse n'est pas impossible 72• D'après
Même si une femme peut acheter un tombeau, c'est clone SFP 13, Ogâ, fils cl'Artaban ( 'g' br 'rtbn), a eu pour épouse
apparemment parce qu'elle agit pour ses enfants, et ses une certaine Shalmat, ainsi qu'une dénommée Bartê. La
enfants mâles en priorité. D'ailleurs, 1e texte de fondation reconstitution proposée est confirmée pour la seconde cl'entre
du tombeau en question (celui de Nasrallât donc) fait elles par le texte 11° 41 (4). Elle est en effet appelée brt' brt
justement partie du groupe de ceux qui emploient le mot yrby br' 'tth (« Bartê fille de Iarhaî Barâ, sa femme ») sur le
dloy 70 (en 142 ; lh wlbnwhy dkiy' wlbn' bnwhy dk1y' « à monument funéraire (représentant un groupe au banquet avec
lui et ses enfants mâles et aux enfants de ses enfants mâles»). quelques figures annexes). Or presque tous les personnages
La version grecque emploie une expression similaire, de la scène se définissent par rapport à Ogâ, fils d'Artaban
soulignant bien que les descendants à toutes les générations en employant des noms de parenté (« son fils », « sa fille »,
doivent être mâles (afrcép K<Xl UlOlÇ apCTECTl K<Xl UlCDVOlÇ K<Xl etc.). Il est plus difficile de voir pour quelle raison Shalmat
ÈyyôvoK aù1:0u 6µ01wç apcm::n « à lui et ses enfants mâles serait la femme de Ogâ. Son buste funéraire porte
et à ses petits-enfants et à ses descendants également l'inscription suivante: slmt brt smsgrm br bl'qb 'byb
mâles»). Étant donné qu'il n'y a apparemment pas de lien (« Shalmat, fille de Shamshigeram, fils de Belaqab Ahaîb» ;
entre celui qui vend la concession à Iulia Aurelia Amatê et SFP n" 32). Un certain Shamshigeram est fils de Ogâ, fils
le fondateur Nasrallât, il semble difficile de conclure qu'il cl'Artaban (smsgnn br 'g' br 'rtbn; SFP n" 20) ; on peut
s'agit d'une sorte de tradition familiale ou même d'un statut éventuellement en conclure que, selon les règles habituelles
particulier de cette tombe. On peut tout aussi bien penser de papponymie, Shamshigeram est fils de Shalmat, et
que le formulaire de la deuxième inscription est inspiré de s'appelle comme son grand-père maternel : Shalmat pourrait
l'inscription de fondation du tombeau qui est située juste clone être l'épouse de ce Ogâ 7�. Néanmoins, aucun élément
au-dessous. explicite ne permet cette conclusion sur l'identité de la mère.
Quoi qu'il en soit, cette évidente priorité donnée aux De toute façon, rien ne permet de conclure que Shalmat et
héritiers mâles n'empêche visiblement pas une femme de Bartê ont été en même temps épouses de Ogâ, et la première
prendre ses affaires en main. Ses propriétés doivent pourtant était peut-être morte au moment où le monument funéraire
être transmises ensuite à ses fils. Il semble donc que les (avec le banquet) a été fait.
femmes ont la possibilité cl'agir légalement comme des Un autre cas douteux de double mariage est représenté
hommes, mais seulement clans certaines conditions précises. dans l'hypogée de Sasan. La dénommée 'qm' brt syg' brt
D'autre part, il est clair qu'elles ont aussi la possibilité blsw1y (« Aqmê, fille de Sîgâ, fille de Belshûrî ») 75 est-elle
68 - La seule exception est le texte H. lNGHOLT, 1974. p. 38 (PAT 2727 ; C!S 4159, H. lNGHOLT, 1935, p. 60, n" II, p. 109, n" I, C/S 4196 et 4214
cf. BES 1979, 175): il s·agit d'un contrat d'association entre deux femmes (= Jnv VIL 2). Dans les textes bilingues, le mot équivalent est cxpcn7v
pour la possession d'un tombeau. Ce texte, daté de 95 de notre ère. est (cf. H. lNGHOLT, 1935, p. 109, n" I; C!S 4217 = lm• IV, 21; C!S 4214).
unique clans le corpus des textes funéraires, par sa date et par son contenu 70 - H. lNGHOLT, 1935, p. ]09. 11 l.
°
(voir chapitre v1). De plus, les noms des deux femmes, désignées seulement 71 - Voir A. SARTRE-FAURIAT, 2001, vol. II, p. 188-190 pour le cas du
comme bt mtJy et bt 'ylyd (Bat-Mitmî, « Fille de Mitraî » et Bat-Eîlîad, Hawrân. Cet auteur note que les femmes semblent agir le plus généralement
« Fille de Eîlîacl ») ne sont pas autrement attestés à Palmyre, même sous en tant que membre d'une famille. li y a pourtant des exceptions, comme
leur forme simple (mtry ou 'ylyd). Sur les noms féminins formés avec Bat-. clans le texte CIS II, 198 de Hégra (cité par A. SARTRE-FAURIAT, 2001. p. 188).
voir supra (p. 168 et n. 23), à propos de Bat-Maleké et de Bat-Firmôn. 72 - Il suffit de penser à Zénobie qui n'était pas la première épouse
L'éditeur du texte (H. Ingholt) donne une étymologie des noms Bat-Mitraî cl'Odainat: voir l'Histoire Auguste. T_v1: trig., XVI-XVII (Non Zenobia nwtre
et Bal-Eîlîad (p. 47-48), mais n'explique pas pourquoi le patronyme sec! priore uxore genitus Herodes,« Héraclès était le fils non pas de Zénobie
n'apparaît pas. En fait, le texte donne uniquement ce qu'on suppose être un mais d'une précédente épouse crOclénath », tracl. A. Chastagnol, p. 888-889).
nom de famille. Pour Bat-Firmôn ou pour Bat-Maleké, les textes sont un 73 - Dans l'hypogée cl' Artaban; les arbres généalogiques de la famille sont
peu particuliers : le second est très mutilé (H. lNGI-IOLT, 1936. p. 106, n" 10), aux pages 23-24 de SFP.
alors que le premier ne mentionne Bat-Firmôn qu'en tant qu'ancienne 74 - C'est sans doute le raisonnement suivi dans SFP, bien qu'aucune
maîtresse de l'affranchi (H. lNGHOLT, 1936, p. 88, n" 2): on comprend que. explication ne soit fournie.
dans ce cas, on puisse se passer du patronyme. Dans le cas du texte funéraire 75 - PAT 1041 dont la lecture ' qm' semble, d'après la photo (fig. 144 cle
de 95. on se demande quelle en est la raison. SFP). plus vraisemblable que le lm' de SFP n" 74 (lecture reprise dans
69 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 185. L'adjectif est utilisé par les textes N. SALIBY, 1992, 11° 31).
176 Les notables de Palmyre
vraiment fille de Sîgâ (nom féminin) et de Belshûrî (nom donne un nouveau cas de matronymie. De plus, il est
masculin), comme le voudraient les éditeurs de SFP qui intéressant de voir que Shegel est surnommée Bat-Habbê,
suppléent la copule w ( « et») avant brt blsw1y ? Dans ce ce qui indiquerait peut-être l'appartenance à son clan
cas, Belshùrî serait le mari de Sîgâ et aussi de Aqmat (SFP cl'origine. Ce surnom s'applique sans doute aussi à Hertâ.
11° 76: 'qmt brt bwrq' br tyms' 'ttblsw1y).On peut tout aussi Le clan (ou la famille) de Shegel était peut-être plus illustre
bien comprendre que Aqmê est fille de Sîgâ, qui est elle que celui du père de Baîclâ, ce qui expliquerait que ce nom
même fille de Belshürî 76• (Bat-Habbê) se soit transmis, au moins aux descendants
D'autre part, même si l'on accepte l'interprétation féminins. Néanmoins, la rareté des cas attestés prouverait
proposée, il y a un autre Belshûrî (blswiy br ssn en SFP que cette catégorie de la population était soit peu nombreuse,
n" 73) clans l'hypogée, et l'on ne voit pas pour quelle raison soit trop peu reconnue pour prendre place de manière
ce dernier ne serait pas le père cl'Aqmê. Certes, d'après la régulière clans les grands tombeaux de famille.
reconstruction de SFP, il y a une génération de différence Le seul cas dans lequel un mari est représenté avec deux
entre les deux Belshûrî, mais ce calcul repose uniquement femmes provient de l'hypogée de Bôlbarak. Les textes,
sur des critères stylistiques qui ne peuvent être précis à vingt gravés sur un même sarcophage, ont d'abord été publiés par
ans près. J. Teixidor et A. Bounni dans l'lnv XII, 2-13. Or les textes
Pour en revenir au cas cl'Aqmê, on peut noter que, selon lnv XII, 6 et 5 SFP n'" 195 [3] et [4]) sont assez clairs. Le
J. T. Milik, les exemples de rnatronyrnie sont rares et premier présente 'mtd'th brt bwlbrk 'tt bwlb1k ( « 'MTD'TH
concernent souvent des enfants en bas âge 77, ce que n'est (Amatclatheh ?), fille de Bôlbarak, épouse de Bôlbarak ») et
pas Aqmê, cl'après son buste funéraire. L'exemple du l'autre slmt brt bw1p' 'tt bwlbrk ( «Shalmat, fille de Bôrefâ,
lieutenant du stratège de Ana et Gamla, kptwt br slwm épouse de Bôlbarak »).Comme le remarquent les différents
( «Kafatüt, fils de Shalôm » ), est peut-être une exception, éditeurs, il s'agit d'un cas de figure inédit à Palmyre. Il est
car, comme le note J. Cantineau 78, Shalôrn est d'habitude en effet possible de suivre l'interprétation de SFP selon
un nom féminin (cf. CIS 4363) : il en conclut qu'il peut s'agir laquelle il y aurait eu en fait succession des deux femmes ;
d'un bâtard, ce qui peut aussi être le cas d'Aqmê. Même s'il 'MTD' TH serait morte au moment de la fabrication de la
est possible que Shalôm soit éventuellement masculin, cette sculpture, mais elle serait représentée parce qu'elle était la
explication (bâtardise) est peut-être la meilleure, et elle est mère des enfants de Bôlbarak.Ce dernier, devenu veuf, aurait
valable aussi pour les autres cas connus de rnatronymies. épousé Shalrnat. Cette solution permettrait en effet de
On peut en effet ajouter quelques textes à la liste de sauvegarder la théorie très probable selon laquelle il n'y a
J. T. Milik. Un certain Iarhibôlâ est fils de Tammê (y1)1bwl' pas de polygamie à Palmyre. On peut néanmoins s'étonner
br tm') clans le texte C/S 4535 7'l_ Le dénommé Iarhibôlâ n'est qu'il n'y ait aucun signe de 1'éventuel décès de la dénommée
visiblement pas un nouveau-né. Le nom de Tammê, féminin 'MTD'TH au moment où le monument a été sculpté. Mais
clans tous les exemples cités par J. K. Stark est suivi du mot il faut répéter qu'il s'agit d'un exemple unique, et qu'on
'11th ( « sa sœur » ), qui renvoie évidemment à l'autre peut trouver des explications relativement simples au cas
personnage présenté sur le relief et qui est donc le frère de la des hommes qui ont plusieurs épouses.
mère de Iarhibôlâ (J. K. STARK, 1971, p. 56). Une autre Il n'y a cl'ailleurs pas à s'étonner outre mesure de
Tarnmê, appelée «infortunée» ( byst gd'), est la mère d'un l'existence de ces hommes remariés. Les parallèles connus
Moqîrnü (mqym w br tm ') en C/S 4486. L'absence de pour cl'autres sociétés anciennes indiquent qu'il devait arriver
représentation des deux personnages interdit toute conclusion souvent que des femmes meurent en couches ou pendant
sur l'âge éventuel des défunts 80• cette période de leur vie. De plus, l'espérance de vie en
Les mères de « bâtard» ne donnent généralement pas général était assez faible, même si les données sont
le nom de leur père. Sîgâ, mère cl'Aqmê (PAT 1041), serait extrêmement peu nombreuses à Palmyre. Les remariages
une exception, si elle est bien fille de Belshürî. On a un cas de veufs devaient donc être relativement fréquents. On a de
un peu particulier en C/S 4548: Hertâ, fille de Baîdâ Shegel plus quelques attestations d'un phénomène contraire. Dans
Bat-Habbê (brt' brt byd' ,sgl bt bb'). Si on admet avec le texte de fondation de tombeau lnv IV, 7a ( daté de 67),
J. T. Milik (DFD, p. 259) que Baîclâ est fils de Shegel, cela leclîbel, fils de Taîrnhê (IE8E1�11Àoç 0mpm1 ydy' bl br tymf1 ')
76 - De plus, l'expression br/ bl.i';w1y se trouve à droite de la tête. c·est-à hommes appelés br ,i';Jwm, qu'il traduit « fils de Salomé», un nom juif
dire avant 'qm' brl syg' dans le sens de lecture du palmyrénien. Cela peut courant (p. 64).
bien sûr s·expliquer par un remords du lapicide qui a ajouté du« mauvais» 78 - J. CANTINEAU, 1933, p. 178-180.
côté la fin de la généalogie. Néanmoins, dans les cas où I ïnscription occupe 79 - Sur un buste funéraire aujourd'hui au Portland Art Museum ; voir aussi
les deux côtés du buste. c·est plutôt à droite qu'on trouve le début du texte E. Cuss1NI. 1992, avec une bonne illustration. p. 424.
(cf. SFP, n" 207). 80 - On peul ajouter aussi quelques autres exemples clans les textes
77 - Voir DFD. p. 64-66 et 251 : plusieurs de ces exemples sont H. I NGIIOLT, 1938. p. 135, n" 4ab. C!S 4594. 4604 el RSP n"' I 5 et 93. Il
malheureusement fortement restitués. Les exceptions citées par .1. T. Milik s'agit clans tous ces cas d'enfants en bas âge.
(C/S4368: J. CANTINEAU, 1933, p. 178) concernent principalement des
Chapitre V: Familles, ci{fiwzchis et escla\'es de notables 177
fonde ]e tombeau pour son père Taîrnhê et pour sa mère p. 50 = : on voit donc que l'onomastique familiale
Maîshâ (Mawa mys'), ainsi que pour Ogeîlû et Taîmhê et est restée assez constante. L'affranchi Wardan, qui a pris
Attaî (Oy11Àoc: 0m�LŒ11 Ka\ A88ma 'gylw w · tymb' w'ty), une concession dans la tombe de Lishamsh, ne s'est
enfants de Haîran en araméen : bny byrn), ses
''"'·"'"""-"L manifestement pas fait enterrer dans la même tombe que
frères de la même mère (101.c: 6�Lo�u11p1mc: afaoû cxôi::Àcpoic: son ancien maître. Néanmoins, son nom apparaît dans la
'bwhy bny mys'). Au décès de son p1�emier mari, Maîshâ, généalogie des descendants de la famille à laquelle il
veuve avec enfants, s'est remariée et a épousé le père de appartenait, ce qui peut poser un problème.
Iedîbel 81• Pour résumer ces données onomastiques, on peut
Le texte CIS 4056 présente un cas un peu semblable 82 supposer que le Refabôl, fils cl 'Ateaqab de 123, fondateur
deux personnages dont le patronyme diffère, Lishamsh, fils du tombeau de famille est le grand-père du Refabôl
de H[...], et Iaddaî, fils de Sh[...] (ydy br h[. ..J et Mms br Antiochos, fils d'Ateaqab, qui affranchit un Wardan avant
s[. ..j) dédient un autel à « Celui dont le nom est béni à 186. Ce dernier acquiert une concession clans le tombeau de
jamais ». Pourtant Lishamsh semble être le frère de Iaddaî Lishamsh à cette date et la revend en 228. Il est probable
( '[bJwh« son frère »). Il faut donc sans doute en conclure qu'après cette date il n'ait plus de rapport avec le tombeau
qu'ils sont frères de la même mère et que celle-ci s'est mariée de la famille de son ancien maître. Il est possible qu'en 243,
deux fois. On peut citer encore le cas d'une certaine Hagat une fille de Refabôl soit encore en vie, mais on imagine que
(bgt brt bwlb' 'tntn 'bytw1� C!S 4287) qui est« la mère de Refabôl (Antiochos), adulte avant 186, est mort depuis un
Aqmê, fille de Dionysios Saeclî et la mère de Ateaqab, fils certain temps. Il a pu avoir un fils Wardan qui serait le (vrai)
de Shaclî » ( 'm 'qm' brt dynys $'dy w'm 't'qb br sdy). Une père de Bat-Ateaqab K,_ On peut aussi penser que ce Wardan
espérance de vie limitée, normale à cette époque, rend très a adopté sa demi-sœur Aqmê. Celle-ci serait ainsi devenue
facilement explicable ce type de phénomène. Les couples la sœur de la fille de son frère, Bat-Ateaqab, selon le schéma
qui atteignaient ensemble un âge avancé devaient être suivant:
relativement rares.
La cession par Iulia Aurelia Aqmê, fille de Refabôl et
Ateaqab
Iulia Aurelia Bat-Ateaqab, filles de Warclan, fils de Refabôl 83
d'une rangée de quatre niches clans un hypogée montre bien 1
Refabôl (en 123)
les difficultés que présentent parfois les données 1
onomastiques des textes de Palmyre. Il peut paraître curieux Ateaqab
que Aqmê soit fille de Refabôl et que les deux soient aussi 1
filles de Wardan, fils de Refabôl. H. Ingholt (p. 52-53) en X2 "" Refabôl (Antiochos) "" Xl
propose une explication: on connaît un Wardan, affranchi 1 1
cl'Antiochos Refabôl, fils de Ateaqab ( wrdn bd11y 'ntykys Aqmê Wardan
1pbwl br 't'qb) qui cède une concession dans l'hypogée de 1
81 - On peut ajouter que la fami11e appartient aux Bené Komarê. li est 83 - H. lNGHOLT, 1974, p. 50 (= PAT2729) de 24 3: ywly' 'wrly' 'qm' brl
intéressant que le nom de la tribu apparaisse en grec (cpuÀ17ç Xowxpr1vcov) 1pbwl wbt't'qb bnt wrcln br 1pbwl.
après le nom de Ieclîbel, mais en araméen (dy mn pbz bny kmr') à la fin du 84 - Il inverse sans cloute Refabôl et Warclan : sinon, on ne voit pas pourquoi
texte, après celui de ses demi-frères. Aqmê serait aussi fi11e de Warclan, comme clans le texte.
82 - Le rapprochement entre les cieux textes est fait par K. DIJKSTRA, 1995, 85 Refabôl a pu donner ce nom à son fils, comme il l'avait peut-être donné
p. 146. à son esclave, avant de l'affranchir.
178 Les notables de Palmyre
86 - D'autres générations de la famille apparaissent en /111• IV. 7b (plus tardif familiales font que le stock de noms utilisés n·est pas très étendu.
puisque daté de 191). J. T. Milik (DFD. p. 39-40) ajoute au dossier /111· XL 89 À cela près. qu'il s·agit seulement de différences de générations : on
86 qu· il restitue largement pour faire de Maîshâ. une petite-nièce de Abdatch. n·a aucune donnée sur l'âge de tous ces personnages. et l'on sait bien qu'il
père de son premier mari. Haîran. C'est possible théoriquement. et en accord peut y avoir de grandes différences cl'fige entre deux frères, et que les enfants
avec ce qu·on connaît des coutumes matrimoniales. mais cela repose sur de l'aîné peuvent avoir un âge proche cle celui de son frère.
des restitutions un peu libres. 90 - Cette théorie a J'avantage de n'utiliser que des gens attestés dans la
87 - Par exemple clans le texte CIS 423'.2 (mieux que lm· IV. 17): comme le tour. Mais il n'est pas impossible que .(k_,y hr 11 hhll soit en fait le fils d'un
montre !"arbre généalogique de J.-B. Chabot (ClS. p. 333). Hagegü. fils de des nombreux Wahballat de la génération des fils des fondateurs. En ce
Malê Wahballat U1ggw br ml' whb/t). est le père de Pasaîel (p.�f !). dont la cas, Amatê épouserait son neveu. ce qui est moins probable. Elle peut aussi
mère est Pasâ. fille de Neshâ Hagegü (p8' br/ n.;' bggw). Il est fort possible être la fille d'un autre Elahbel. fils de Wahballat. sans lien direct. ce qui est
que Pasâ soit en fait la fille d'un cousin de son époux. possible car ces noms sont courants. mais n'est pas attesté dans les textes
88 - L'arbre généalogique de la famille a été reconstitué dernièrement par connus. Il est curieux que l'identification cl'Amatê avec une fille d'un des
M. GAWLJKOWSKI, 1969b. p. 5'.2 et par J. T. Milik. DFD. face à la page '.246 quatre fondateurs ne soit pas faite dans l'arbre généalogique du CIS. p. '.269,
(avec quelques variantes: voir ici clans l'annexe XVII). Les textes concernés ni dans celui de M. G."WLIKOWSKI. 1969b. p. 52. mais seulement par
sont CIS 4134-4158 (= /111· IV. 27a-y), avec un arbre généalogique p. '.269. J. T. Milik, DFD. p. '.246.
La fréquence des homonymies rend nécessaire une extrême prudence pour 91 - Autre exemple clans le C!S 423 l où le grand-père, le père. un fils (et
ces reconstitutions : ainsi les quatre frères fondateurs de la tombe ont un un fils de ce dernier?) s'appellent brnb11'. Voir sur les généalogies de ce
fils appelé Wahballat, clu nom de son grand-père paternel. Les traditions texte. H. INGHOIT, 1974. p. 40-43.
Chapitre V: Familles, affi·anchis et esclm'es de notables 179
J. T. Milik retrouve la famille de cette femme 2 en CIS 4113,l) que leurs cousins, le décalage chronologique peut être à la
ainsi qu'en C1S4115a et b lnv 56etIV, 18a et ce rigueur acceptable. Les deux fils du couple, Lishamsh et
qui pose certains problèmes. On peut résumer ces textes par Shalman (lsms et {;/11111), sont théoriquement de la même
les deux arbres généalogiques suivants génération que Elahbel et ses alors que ces derniers
sont sans doute nés une vingtaine d'années plus tard.
Shokayaî Dans l'ensemble, il faut sans doute un peu forcer la
1 chronologie pour arriver à en tirer une image cohérente.
Taîmarsû (= Taîmarsû l'ancien) _ (?) Taîmhê l'ancien Il est possible que les deux familles soient apparentées,
1 1 mais le lien précis échappe faute de sources plus
Shalman Kîtôt précisément datées.
1 1 Si on accepte le rapprochement, au moins pour les
Shokayaî Taîmarsû
ancêtres de Shegel, cela peut aussi permettre un autre
1 1
type de conclusion. En effet à la fin de la généalogie du
Shegel Kîtôt "" Maîshâ
grand-père de Shegel, le texte précise la tribu à laquelle
ce Shalman appartient : dy mn pbd bny mtbwl (« de la
Shalman Lishamsh
tribu des Bené Mathabôl » ). dans les quelques années
93 où la famille cl'Elahbel est attestée, aucune mention
ClS 4113 et CIS 4149 C!S4115
tribale ne lui est attachée. Bien plus, comme on l'a vu
Dans le premier arbre, on a deux dates à peu près sûres. au chapitre Il, cette famille se distingue justement par son
Shalman est vivant en 9 après J.-C., et Shegel l'est au début détachement des sanctuaires tribaux, et son utilisation plus ou
du ri" siècle.Il est possible qu'une génération ait été oubliée moins personnelle du sanctuaire de Nabû. Elle est d'autre part
dans la généalogie, ce qui expliquerait l'écart relativement connue seulement à partir de la fin du l"' siècle. On peut se
important entre ces deux personnages. Pour le reste, les noms demander s'il ne s'agit pas justement de l'événement qui a
correspondent assez bien car on retrouve clans les deux textes permis à la famille de sortir d'une relative obscurité sociale.
(C/S4113 et CIS 4149) la séquence slmn br tymr$W et le Cette alliance avec une famille dont1'origine tribale est connue
nom skyy. (une des quatre tribus principales) peut être comprise comme
Il n'est pas très facile cl'arriver à intégrer dans cet arbre une stratégie cl'ascension sociale. La famille cl'Elahbel apparaît
l'autre branche de la famille, comme le propose J. T. Milik peut-être trop tard clans la documentation pour qu'oi1 juge
(DFD, p. 18). L'équivalence entre tym$' et tymr$west possible, nécessaire cl'ajouter la précision, mais il est tentant de voir en
car le premier est un hypocoristique du second, mais n'est pas elle une famille nouvelle alliée à une famille plus ancienne
attestée à ma connaissance. Mais tymr$W est un nom très qui se faisait déjà construire un tombeau au début du!"' siècle.
courant à Palmyre 9�, cette identification n'est donc pas assurée. Les alliances entre familles n'étaient pas limitées aux
Surtout, la lecture tym$' de J. T. Milik (DFD, p. 17) qui est membres de mêmes tribus, et on en a quelques exemples
aussi celle d'Inv 18a est sans doute à remplacer par tymf1' explicites pour le premier siècle de notre ère. En fait les
lu par le CIS, suivi par M. Gawlikowski et J. K. Stark 95• Dans deux textes qui renseignent sur des alliances matrimoniales
ce cas, l'équivalence est impossible, puisqu'un« serviteur de entre membres de tribus différentes sont tous deux datés du
Arsû » (tymr$WOU son hypocoristique tym$') ne peut devenir milieu du siècle.
« serviteur de Hertâ » ( tymb ') % • En avril de cette année, Haîran, fils de Bônn ê,
Ce rapprochement pose aussi u n problème personnage fameux, fonde un tombeau pour lui-même, son
chronologique. Kîtôt et Maîshâ sont encore vivants vers père, sa mère et ses enfants 97• Le texte palmyrénien, plus
1'année 40, ainsi que leurs deux fils qui sont sans cloute assez développé et précis que le grec ou le latin, donne la
jeunes à ce moment-là. Si l'on admet que les membres de généalogie de Haîran et ajoute qu'il est« Palmyrénien de la
cette famille se sont systématiquement mariés plus jeunes tribu des Bené Mîtâ » (tdm1y' dy mn pbd bny myt') 98• Haîran
92 - DF!l. p. 17-18. Shegel (§g]) du texte C/S 4149 (= lm· IV, 27 q) est au plutôt de -{1. Les cieux noms (tymb' et lym.;;') existent de toute façon clans
moins l'épouse de leur père. Wahballat. au moment de la fondation du l'onomastique palmyrénienne (cf. J. K. STARK, 1971. p. 55).
tombeau. Le fait qu'un des fils s'appelle Shokayaî (comme le père de Shegel) 96 - Sur le sens de ces noms. voir J. K. STARK, 1971, p. 117.
tendrait à prouver qu'elle est bien la mère de celui-ci, sans qu'on puisse 97 - Texte publié par M. RüDINSON, 1950, p. 137.
rien assurer pour les autres. 98 - L'inscription lnv IX, 20 (daté de 56 en grec et de 60 en palmyrénien)
93 - Les généalogies de ces textes son t les suivantes. CIS 4113 donne les mêmes précisions: Haîran est de la q>uÀllç M1811vmv dy 11111 bny
(de 9 apr. J.-C.): ,i;Jmn br lymr,5w br,i;kyy; CIS 4115 (de 41): kytwt br Lymr,5w myt'. Elles manquent clans le troisième texte qui concerne le même
br kytwt br Lymb' rb'; C!S 4149: ,sgl brl ,skyy br ,i;Jmn br 1ymr,5w rb'. personnage (.1. CANTINEAU, 1933. p. 175, n" 2b) et qui ne donne qu'une
94 - J. K. STARK, 1971, p. 55-56. généalogie simplifiée (A1pcxv11ç Bmvvrn[uç 10v Kcx't PlcxBB11Ào[vL bfr]rn
95 - CIS ad foc., p. 244 ( avec la reproduction clu fac-similé cle br bwn[' dy mtqr' rb '1], Hairanes Bo[nnaef J qui et Rabbi/um). On retrouve
W. H. Waclclington), M. GAWUKOWSKI. 1973a. p. 185, 11° 6 et J. K. STARK, cette même généalogie clans le texte de 52. à l'exception de la version
1971, p. 55. Le fac-similé publié par le CJS montre que le cloute est possible palmyrénienne beaucoup plus précise.
à cause cle la forte ressemblance des cieux lettres. même s'il s' agit peut-être
180 Les notables de Palmyre
a donc fait ce tombeau pour son père Bônnê et pour Mais on peut aussi penser qu'ils le font parce qu'ils
« Baaltegâ, fille de Belshûrî, de la tribu des Bené Gaddîbôl, veulent mettre en avant cette alliance entre deux tribus,
sa mère» (b'Jtg' brt blsw1y dy mnpbd bny gdybwl 'mh). Sa comme ils le feraient d'un événement inhabituel. Dans ce
mère appartient donc à une tribu différente de celle de son cas, on pourrait alors soupçonner qu'il y a à l'origine de
fils. Selon toute probabilité, l'appartenance tribale de Haîran cette alliance des raisons de stratégie familiale, mais aussi
a été héritée de son père, Bônnê. Ce dernier a épousé tribale, et la même conclusion peut valoir pour la famille de
quelqu'un qui n'était pas de sa tribu. Bônnê 101• La position privilégiée de Haîran pourrait faire
L'autre cas est attesté par le texte BS n\) 11 dont on a pencher dans ce sens. Pourtant c'est de son père Bônnê qu'il
parlé plus haut : une femme des Bené Mîtâ, Amtallât, fille est question, et on ignore tout du poids politique de ce dernier,
de Baraâ ( 'm tlt brt br''), dédie une colonne dans le sanctuaire quelques années avant que son fils ne reçoive les honneurs
de Baalshamîn. Elle est la femme d'un membre des Bené les plus hauts.
Mazîn, Taîmê, fils de Belhazaî (tym' br blbzy). Même si l'on pi·end en compte l'ensemble de la
Les deux textes relatent donc des événements parallèles, documentation, il y a peu de grands personnages dont on
mais non identiques: la première chose à noter est qu'il est connaisse les épouses. Et clans ces rares cas, on ne peut
fait allusion dans les deux cas à des mariages qui sont souvent rien dire de leur origine: on peut prendre le cas de
antérieurs à la date de 52 apr. J.-C. Taîmê, le mari d'Amtallât Martheî, fille cl'Alexandros Iadê (Map0EK 'AAEçavôpou îOÙ
était vraisemblablement mort au moment où sa femme offre KCXl Ia811 wu Oua�aUa8ou îOÙ I.wmvou mrty brt yd' br
la colonne au sanctuaire de Baalshamîn. De même, Haîran, whblt br sm'wn en C/S 3954 ), femme de Shoraîkô, honorée
fils de Bônnê, est visiblement adulte à la même date, puisqu'il par son mari d'une statue dans la Colonnade transversale.
peut faire construire un tombeau et qu'il est honoré par le J. T. Milik reconnaît son grand-père dans Wahballat Shimôn
Conseil et le Peuple quelques années plus tard (Jnv IX, 20). des tessères RTP 696 et72 4 (respectivement whblt sm'[wn]
Il apparaît donc clairement que la première partie du et whblt br sm'wn). Il propose avec quelques réserves de
!"' siècle est marquée par des relations assez étroites entre voir dans ce personnage un symposiarque 102• Il serait assez
les différentes tribus qui occupent l'oasis. On en a un bon normal que la femme d'un notable tel que Shoraîkô soit issue
exemple avec le texte C/S 3915 (= /1111 IX, 13, daté de 21 de de la famille d'un symposiarque, ou au moins de quelqu'un
notre ère) dans lequel Hashash, fils de Neshâ est honoré pour chargé de distributions pendant les repas sacrés im, c'est-à
avoir fait la paix entre les Bené Mathabôl et les Bené Komarê. dire un autre notable. Malheureusement, même si les noms
Pourtant, le statut des tribus concernées par ces textes diffère. Shimôn et Wahballat sont fréquents dans l'onomastique
Ainsi, la femme de Haîran, fils de Bônnê, n'appartient palmyrénienne, il n'y a pas d'autres cas connus où ils
certainement pas à une des quatre tribus principales de la apparaissent tous les deux dans une généalogie. On ne peut
cité. Les Bené Gaddîbôl apparaissent pourtant jusqu'en 108 clone guère aller plus loin, et il est par exemple impossible
( CJS 3917 = lnv IX, 15), mais les témoignages sont de savoir si ce Shimôn était de la même tribu que Shoraîkô,
relativ'en1ent rares 9• D'autre IJart, on ne co1111aît aucui1
l) ou s'il avait un quelconque n1pport avec les Bené Zabdibôl.
Belshûrî (nom du père de Baaltegâ: b'ltg' brt blsw1y) parmi En fait, peu de femmes sont connues, excepté dans les
les membres attestés de la tribu. monuments funéraires. On a également peu de
La place des Bené Mîtâ semble plus centrale, car ils documentation sur les monuments funéraires des grands
apparaissent dans deux de ces inscriptions. Cela correspond notables et, en général, sur leur famille, mis à part parfois
aussi au rôle bien attesté de Haîran, fils de Bônnê à cette leur descendance en ligne masculine. Les quelques exemples
époque. Mis à part ce dernier, on en sait trop peu sur les étudiés ici montrent que les mariages étaient souvent
personnages concernés (Amtallât, son mari Taîmê, ou même contractés au sein même de la famille proche, malgré des
Baaltegâ, mère de Haîran) pour pouvoir tirer des conclusions. exceptions. Il est assez facile de repérer ces cas d'unions
On peut penser, par exemple, que ces personnages citent entre proches, principalement pour des raisons
leurs tribus respectives, parce qu'il s'agit d'une mode propre d'onomastique. Ce n'est pas le cas pour l'identification du
à ces années Comme on l'a vu pour1'inscription BS n\) 11,
11111•
statut social, ou même tribal des époux dont l'onomastique
on donne le nom des deux tribus sans cloute parce que diffère. Il serait pourtant intéressant de pouvoir connaître
Arntallfü n'appartenait pas aux Bené Mazîn, maîtres du les relations exactes entre deux familles de tribus différentes
sanctuaire de Baalshamîn, mais aux Bené Mîtâ. qui se lient par un mariage, ce qui renseignerait sur leurs
99 - Voir annexe VIII. l . J. T. Milik («lise peut qu'il fût symposiarque »).
100 - Voir clans l'annexe VIII. 3 (liste chronologique des mentions tribales) l 03 - Sur la formule {1111r mkl wplg q1/cf.ij bsmk' ( «vin, une mesure et demie ;
le nombre important d'attestations de tribus autour du milieu du l'' siècle. [vin] lourd [?] clans le banquet » pour A. Caquot et « vin, pain et la moitié
10 l - C" est l'interprétation adoptée. entre autres, par K. ÜIJKSTRA, 1995, de la (nourriture) sacrée, pendant un symposion» pour J. T. Milik) qui
p. 97. apparaît sur la tessère RTP 696 (et avec des variantes sur les tessères
102 - DFD. p. 231-233 : ce symposiarque porte le n" 12 clans la liste de RTP 694-704, voir RTP, ud /oc. et DFD, p. 191-192).
Chapitre V: Familles, q[franchis et esclm•es de notables 181
motivations. On peut supposer que les mariages suivaient contradictoire avec le rôle qu'elle joua. En ce prestige
généralement certaines règles et avaient parfois des raisons culturel pouvait être cumulé avec celui dont elle avait hérité
de stratégies familiales ; ils ne devaient pas être laissés au à la mort d'Odainat. Enfin, elle était la mère de l'héritier,
libre choix des époux, mais être le résultat de transactions peut-être même le seul survivant de la famille.
entre les familles : la fréquence des mariages entre cousins Cette dernière dimension doit être mise en relief de
et oncles et nièces en serait une bonne preuve, mais on manière plus générale. En effet, les relations entre parents
manque malheureusement d'éléments pour une conclusion et enfants apparaissent de manière assez faible dans la
définitive icl-i_ documentation. On peut néanmoins s'interroger sur la
Comme on l'a noté au début de ce chapitre, Zénobie manière dont se transmettait le statut des notables : on sait
apparaît donc comme exceptionnelle clans cette société très que 1 'héréditéjouait un rôle primordial. Quelques exemples
visiblement dominée par les hommes. La position spéciale précis permettent peut-être d'aller un peu plus loin.
des veuves, qui ont une existence légale autonome et exercent
une tutelle sur leurs enfants, peut bien sûr permettre de fournir
3. LA PLACE DES FAMILLES
quelques éléments de réponse, mais ils sont sans cloute
insuffisants. On a au moins un parallèle proche pour le destin L'hérédité nejouait pas uniquement en ligne patrilinéaire
de Zénobie, celui de Mavia, reine des Saracènes au cours du directe, mais elle pouvait aussi concerner oncle et neveu
1v" siècle 105• Comme Zénobie, Mavia devint reine à la mort (surtout du côté paternel). On a d'ailleurs vu que pour les
de son mari et comme elle, resta célèbre dans la poésie arabe mariages, il en était un peu de même et que les nièces
préislamique. Mavia ne semble pas avoir eu de fils, au nom épousaient de manière privilégiée leurs oncles et cousins
de qui elle aurait régné, comme Zénobie le fit pour Wahballat. paternels. On retrouve moins de liens étroits avec le côté
Quelle qu'ait été la réalité du pouvoir de la reine de Palmyre maternel, sauf pour de rares exceptions. Quelle qu'en soit la
(régente plus ou moins associée à son fils, ou bien véritable véritable cause, il faut aussi l'expliquer pour des raisons de
maîtresse du pouvoir), le fait qu'elle ait été une femme a documentation. Comme on connaît rarement l'identité des
contribué à sa gloire et a permis d'ancrer son souvenir aussi mères et encore moins leur généalogie, on n'a pas de moyens
bien chez les écrivains classiques que chez les poètes de retrouver leur onomastique chez les époux. Il n'est donc
arabes 100• Ces événements sont d'ailleurs comparables à pratiquementjainais possible de savoir si certaines des unions
d'autres révoltes menées par des femmes à l'autre bout de qu'on considère comme exogamiques ne concernent pas en
l'Empire (on peut penser au cas de Boudicca en Bretagne) 107
• fait des cousins ou des parents par le côté maternel !Os_
Sans cloute les conditions sociales produites par le choc Les relations étroites entre neveux et oncles paternels
de cultures différentes conduisent-elles à un bouleversement apparaissent clone de manière assez fréquente : le cas le plus
des structures de la société, et permettent l'émergence de clair est fourni par le texte Inv X, 24 (daté d'avril 164) 109
•
personnages charismatiques, qui ne correspondent pas Un certain Haddûdan, fils de Hagegû (bdwdn bggw), est
entièrement au modèlejusque-là admis parmi les nomades. honoré par son frère Alaîshâ ( 'lys'). Il a en effet consacré, à
Cela peut expliquer l'émergence de femmes dans ces ses frais, son neveu Hadclûdan, fils de Alaîshâ, au dieu Bel
circonstances, au sein de sociétés hiérarchisées et très (1.Epfocxvm B11Àcp 0Ecp È� iôimv A88ou8cxv11v bdyl dy qds lh
masculines. On a vu par ailleurs que Zénobie, sous bien des bdwdn brh mn [k]ysh). Haddûdan est sans doute l'aîné des
aspects, était sans cloute plus « hellénisée » que bien des deux frères ; il se charge en effet de l'éducation religieuse
Palmyréniens contemporains, mais cela n'est pas de son neveu, et, surtout, il est le premier nommé dans le
l 04 - On peut prendre comme point de comparaison la situation clans le <j)pov1i�tcxn 8È àv8p2icp xpm�1Év17 Kat 8tà 1éov ÈKEi.vcp cruvôv1mv
monde arabe médiéval : « Les grandes lignes de la tradition bédouine et 117v fo17v EÎ.mpÉpoucra 1oiç :n:pay�LCXO'lv Èm�LÉÀEtcxV ( << Zénobie s'empare
méditerranéenne furent maintenues pour la conclusion du mariage. La du pouvoir clans la région: en tant que femme cl'Oclainat, grâce à ses
personne physique de la jeune fille appartenait à sa famille qui l'avait nourrie capacités viriles et à l'appui des compagnons de son mari, elle prend à
jusqu'à sa puberté, famille représentée par le père ou le tuteur màle, oncle gouverner un souci tout pareil», trac!. F. Paschoucl). C'est bien parce qu'elle
paternel, frère aîné... Celui-ci pouvait décider de la marier à l'intérieur de est une femme que Zosime éprouve le besoin de souligner qu'elle agit
la famille : le mariage avec un cousin paternel, ibn 'amm, était le plus comme un homme.
pratiqué dans l'Orient arabe, chez les musulmans comme chez les chrétiens 107 - Comme M. Sartre me l'a fait remarquer, on peut penser aussi aux cas
et les juifs. Pour des raisons de convenance politique et économique, le modernes de pays comme le Pakistan ou l'Inde qui, malgré la structure
mariage pouvait être conclu hors de la famille» (Th. BIANQUIS, 1986, p. 407). rigoriste de leur société, ont été parmi les premiers à avoir des dirigeants
Ces conclusions semblent pouvoir s'appliquer sans grandes modifications femmes. Or ces femmes appartiennent à des familles qui avaient déjà donné
au cas de Palmyre. des hommes politiques à leur pays : elles prennent clone place clans des
105 - Voir G. W. BoWERSOCK, 1980 et M. SARTRE, 1982b, p. 140- 144. lignées familiales, ce qui peut expliquer leur rôle politique.
106 - Je retrouve la même conclusion chez M. SARTRE, 1982b, p. 140. En l 08 - II existe un seul cas, à ma connaissance, de mariage avec une nièce
ce qui concerne Zénobie, le fait qu'elle soit une femme, qui de plus se du côté maternel : mais ce cas repose seulement sur une reconstitution de
comporte comme un homme, est aussi un point souligné par les sources J. T. Milik (DFD, p. 250).
antiques. On peut citer par exemple Zosime (1, 39): îCÔV ÈKE-icrE 109 - Sur ce texte, voir aussi DFD, p. 275 et H. SEYRIG. 1941b, p. 267-270.
:n:pay�LCXîWV O'.VîlÀCX�l�CXV!:è.îCXl Zl7VO�l.CX, O'UVOlKODO'CX �tÈV '08m vcx0cp,
182 Les notables de Palmyre
texte CIS 4213 (= Inv VII, 11), qui célèbre la fondation du caractéristique qu'il s'agisse de manière privilégiée d'oncle
tombeau de famille. Le texte est très lacunaire, mais leurs et de neveu, alors qu' apparemment aucu n fils de
noms sont conservés en grec (A88ou8av11ç Ka\ AÀmcmkl) 110• symposiarque connu ou soupçonné n'exerce les mêmes
Ce type de relations est d'ailleurs surtout repérable dans fonctions que son père. L'intérêt de la liste des symposiarques
le domaine religieux, comme J. T. Milik l'a souligné 111• Il de J. T. Milik (reprise clans l'annexe I), sans aucun cloute
l'a mise en évidence pour certains prêtres et symposiarques trop large, est justement de montrer qu'un tel cas de figure
Lishamsh, fils de Taîbbôl (Jsms br tybwl br .s:kybl), d'Inv IX, ne se présente pas.
1 (daté de 45), a dédié le temple de Bel en 32 de notre ère. Dans un genre un peu différent, on peut citer aussi le
J. T. Milik le considère comme le premier des symposiarques texte d'un autel découvert près de la source Efqa (RSP
connus. Il rapproche de ce nom celui de 'bl'Iy mqymw tybwl n° 117), qu'un prêtre dédie« pour sa vie, pour la vie de son
(Abelaalî [fils de] Moqîmû [fils de] Taîbbôl) qui apparaît père, de son oncle paternel et de son frère» ( 'J bywhy wby
sur la tessère RTP 638 et qui peut, en effet, être le fils d'un 'bwhy wddh w'bwhy) 116• Quand ils n'appartiennent pas au
frère de Lishamsh 112• Il est difficile de savoir si ces deux cercle familial étroit (père, mère, femme, frères et sœurs,
personnages ont vraiment été symposiarques, comme enfants), les bénéficiaires de ces inscriptions « pour la vie
l'estime J. T. Milik. En l'absence d'attestation explicite de de ...» sont souvent, comme dans le cas de RSP 11° 117, des
cette fonction, il vaut peut-être mieux réserver son jugement. oncles ou des neveux 117• Ainsi en C/S 4052, l'oncle maternel
Néanmoins, il est indéniable que Lishamsh aussi bien que (b}h« son oncle maternel») fait partie des bénéficiaires de
Abelaalî ont exercé des responsabilités de nature religieuse. la dédicace d'un autel (les noms des autres bénéficiaires ont
Il est aussi très vraisemblable qu'il existe un lien familial disparu clans les lacunes du texte). Dans les textes C/S 4007,
entre eux. On peut sans cloute suivre J. T. Milik, quand il 4017 et 4050, ce sont les fils des frères qui sont nommés 11�.
propose de faire de Hannâ, fille de Moqîmû, fils de Taîbbôl Si l'on met à part le cas de CJS 4052, la famille paternelle
Um' brt mqymw br [tyb]wl, CIS 4493) une sœur cle Abelaalî. semble privilégiée dès qu'on sort du cercle des parents les
Or cette Hannâ est l'épouse cl'un Lishamsh Shakaîbel 1 1 : il 1.
plus proches 119• Néanmoins, les cousins et les oncles du côté
est évidemment tentant de 1'identifier avec le Lishamsh opposé ne sont pas entièrement absents. On en a deux
attesté en lm• IX, 1. exemples parmi les textes funéraires de concession : une
C'est visiblement d'une affaire de famille qu'il s'agit, partie de tombeau est vendue à des neveux ou à des cousins
puisque Lishamsh est l'oncle paternel de sa femme et que du côté maternel. En 229, Iulius Aurelius Bôlmâ, fils de
son neveu, frère de sa femme, exerce lui aussi des fonctions Zabdibôl (ywlys 'w1lys bwlm' br zbdbwl br bwlm' nyny')
religieuses. On peut ajouter qu'une centaine d'années plus cède à Iulius Aurelius Ogâ et Iulius Aurelius Shalmê, fils de
tard, un descendant de la famille Taîbbôl, fils de Lishamsh Shalmê (ywly' 'wily' 'g' w.slm' bny slm' br tym' br nbwmr)
Taîbbôl, est aussi prêtre ( C/S 4288) 11-i. Malgré cela, la famille une moitié de tombeau ( C/S 4206 = !11v IV, 1). Ogâ et Shalmê
semble n'avoir jamais retrouvé la splendeur qu'elle avait à sont les fils de l'oncle maternel de Bôlmâ ( bny blh). Cinq
1'époque de Lishamsh, fils de Taîbbôl. ans plus tard (même texte), le même Bôlmâ vend un quart
Deux personnages, Zebîdâ, fi ls de Elahshâ et son neveu du tornbeau à une femme dont le nom a disparu, fille de
Elahshâ, fils de Taimshâ, fils de Elahshâ sont un autre exemple Nebüzâ, fils de Taîmê, fils de Nebümar ([bIJt nbwz' br tym'
de ce type de relations, puisque tous deux ont des fonctions br nbwmr). Après une lacune, le texte se poursuit par
religieuses et apparaissent comme prêtres sur des tessères 115• l'expression bt blh (« la maison de son oncle maternel » ).
Certes, il n'est pas très étonnant que deux membres cl'une L'affixe -h (« son») se rapporte sans cloute à Bôlmâ. Comme
même famille soient représentés sur des tessères. Il est on peut le voir, en comparant l'onomastique des deux frères
110 - Voir aussi DFD. p. 275-276. Sur le sens du mot del «oncle paternel » en araméen (par exemple en
111 DFD. p. 276-277. syriaque). ibid.. p. l 59.
112 - DFD. p. 222. n'" 1 et 2. On trouve un arbre généalogique général de 117 - Comme on peut le voir cl' après la liste de K. D1.1KSTRA, 1995, p. 148-149.
la famille à la page 114 de DFD. 118 - Voir K. D1.1KsTRA. 1995. p. 149. n. 79: en CIS 4007, l'inscription est
113 DFD. p. 112. Le rapprochement entre la tessère RTP 638 et CIS 4493 faite en particulier pour«la vie des fils de ses frères» (byy bny 'bwhy);
est déjù dans RTP. p. 203. en CIS 4017 et -1-0.50. pour« la vie de leurs fils» Uiy' bnyhwn). Dans ces
114 - ldentilïé par J. T. Milik (/JFD. p. 113 et 147) avec le Taîbbôl d"/m· X. deux derniers cas. la formule est précédée de « pour la vie de ses frères »
13. ce qui est sans doute discutable : voir la discussion au chapitre 1. (by ' '/1why). On peut donc supposer. comme le fait K. Dijkstra. que le
115 - L"oncle est zbyd' br '/hi;' br .�·dy (RTP 775 et CIS 4187) et le neveu suffixe pluriel (-hwn «leurs») désigne le dédicant et ses frères. Il s"agit
'IM' br tym.s' br 'JM' ( CIS 4187 et 4191 et RTP 725). Voir les tableaux donc de neveux en ligne masculine. On peut comparer CJS 4030 où apparaît
généalogiques. CIS. p. 297 (textes CIS 4187-4188 et 4191) et DFD. p. 29 le même dédieant qu"en CJS 4050 : vingt-neuf ans plus tôt. ses frères n ·ont
(textes CJS 4187-4191): il fait peu de cloute que Zebîcld est le frère du père apparemment pas encore eu d'enfants.
de Alashd. Sur leurs fonctions religieuses (symposiarchie pour J. T. Milik). 119 - On peut <�jouter un dernier exemple de relations entre cousins. avec
voir DFD. p. 153. n"' 15-16. CIS 3914 (= Jrn, IX. 25): deux cousins. fils de deux frères. sont honorés
116 Dans la première édition (D. AL-HASSAN! et J. STARCKY. 1953. p. 159 ensemble par le Conseil et le Peuple, parce qu'ils ont fait de grands dons,
et pl. II. 4bis) une photo du monument est publiée. À !"arrière de celui-ci. en particulier pour le portail du sanctuaire de Bel.
deux prêtres sont figurés debout, ce qui renseigne sur le statut du dédicant.
Chapitre V: Familles, a.ff1·a11chis et esclaves de notables 183
Ogâ et Shalmê et celle de la femme, ces trois personnages Wahballat, fils de Malikû. On n'avait pas besoin de préciser
sont cousins, mais cette fois par le côté paternel 1211• qui étaient leurs cousins, puisqu'ils étaient les mêmes, aussi
L'expression bt b]h, non attestée ailleurs, vient apparemment bien du côté paternel que du côté maternel, au moins pour la
préciser le statut de cette femme, en la rattachant, même si moitié cl'entre eux. Mais, comme on peut le voir, il n'en est
c'est par les femmes, à la famille de Bôlmâ, dont elle est la pas de même pour l'autre moitié: les cousins de Shegel du
cousine germaine, comme le sont Ogâ et Shalmê. côté maternel, ainsi que ceux de Wahballat, restent ainsi
L'expression employée, aussi curieuse soit-elle, se justifie inconnus. Comme, dans le cas le plus général, sauf opération
sans doute parce qu'il s'agit d'une femme. Dire que son père de concession ( comme en C/S 4206), ils sont enterrés
Nebûzâ est l'oncle maternel de Bôlmâ, ou dire que sa fille ailleurs, il est alors inutile de préciser qu'ils sont les cousins
appartient à la maison de l'oncle maternel de Bôlmâ revient du côté maternel de Wahballat ou de Shegel.
au même. On préférait peut-être simplifier les choses en se Cela ne facilite pas les recherches, mais explique la rareté
contentant de cette dernière expression, car le lien du terme bl' (« oncle maternel ») clans les textes funéraires
généalogique d'une femme avec une famille requérait sans palmyréniens, hormis quelques cas particuliers (concessions).
doute moins de précision que s'il s'était agi d'un homme. Le fait qu'une seule dédicace« pour la vie de ... » implique
Ceux qui achetaient des concessions de tombeaux de un oncle maternel est néanmoins un signe d'une concentration
famille appartiennent souvent à la famille des revendeurs ; on des relations familiales du côté patrilinéaire. Cela correspond
semble en tout cas y attacher une certaine importance, évidemment à tout ce qu'on sait par ailleurs de la société
puisqu'on le mentionne, quand c'est le cas. On a la même palmyrénienne 122. Le même type de dédicace concerne de
impression à la lecture d'un deuxième texte, qui fait état d'une manière tout à fait prédominante les pères et leurs fils 123,
autre concession, vendue à un cousin maternel. Séleukos, fils comme les fondations de tombeaux, toujours faites pour les
de Théophilos, fils de Séleukos (slwqs br typyls br slwqs) vend enfants et leurs descendants rn_
dix travées à Iarhibôlâ, fils de Sabinus, vétéran, fils de Taîmê Parmi les inscriptions honorifiques, on trouve de même
(y1J1bwl' br sbn' wtm' br tym') 121• Iarhibôlâ serait l'oncle un petit groupe de textes qui commémorent les honneurs
maternel U1 ') de Séleukos, c'est-à-dire le frère de sa mère, qui rendus par des fils à leur père, ou bien qui restent clans le
aurait épousé Théophilos. Une fois encore, lors d'une opération cercle familial 125• Comme toujours, ils restent assez discrets
de concession, on éprouve le besoin de préciser que la vente sur les raisons précises de ces honneurs familiaux, et on en
se fait au sein de la famille, parce que l'onomastique des revient aux habituels n:1µ11ç xciptv et lyqrh. Un certain
personnages ne le laisse pas forcément supposer. nombre de ces textes sont consécutifs à la mort d'un membre
Cette dernière conclusion peut aussi permettre de revenir de la famille, ce qui correspond à un phénomène déjà étudié
sur une des questions posées plus haut : il semble bien que à propos du texte lnv X, 119 126• On remarquera néanmoins
ce besoin de précision se soit appliqué seulement pour les que plusieurs cas de figures se présentent. Il arrive parfois
textes de concession ou les textes de dédicaces au dieu que la mort du père soit le motif du texte (C/S 3920), mais
anonyme. Dans les tombeaux en général, le problème ne se ce peut être au contraire la mort d'un des enfants 127• Ce qu'on
posait pas de la même manière, puisque les femmes suivaient a dit sur les honneurs familiaux à propos du cas des femmes
généralement leurs maris dans la tombe. Les cousins du côté s'applique aussi ici.
maternel ne se trouvaient donc pas dans les mêmes sépultures Pourtant, il ne semble pas qu'il faille chercher
collectives. Quand les mariages se faisaient entre proches, systématiquement les causes de 1'érection des statues dans
seule comptait 1'identité du père, et les lignées féminines le décès d'un membre des grandes familles. Ces honneurs
n'entraient pas non plus en compte. sont aussi plus simplement une manifestation du pouvoir des
Ainsi, pour reprendre un exemple clans la famille notables : on a vu ce qu'il en était clans le cas du sanctuaire
cl'Elahbel, les enfants de Wahballat, fils de Malikû et de de Nabû ou dans celui de Bel. Il n'est pas très étonnant que
Shegel, fille d'Elahbel sont désignés comme les enfants de des fils honorent leurs pères, on a des exemples similaires
120 - On trouvera un arbre généalogique correspondant à cette famille. DFD, courante comme nom propre (la transcription grecque est AÀa) : voir par
p. 295 d'après les textes C/S 4206 et RSP n" 142 (= Palmyre V, p. 114, exemple CIS 3916 (= lm• IX, 14a); lnl' X, 124 (même famille).
n" 6). 123 - Voir clans K. DuKSTRA, 1995, p. 322-334, Appenclix F « Palmyrene
121 - H. INGHOLT, 1938. p. 104, dont je suis ici la lecture. M. Gawlikowski Declicatory Inscriptions on lncense-Burners », la liste de ces textes, avec
préfère lire « Iarhibôlâ, fils de Sabina et Tarnâ, fils de Taîmê », en faisant une écrasante majorité de textes qui impliquent les fils du cléclicant.
de wtrn', la copule 11· « et » précédant le nom propre « Tarnâ » trn' 124 - Voir chapitre v1.
(M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 2 I 6, n" 44 ). Dans ce cas-là. Tarnâ serait clone 125 - Il faut rapprocher ces textes cl' un autre groupe clans lequel sont honorés
l'oncle maternel de Séleukos. Le problème qui se pose est que la suite de la un père et son fils, par exemple en lnv X, 115 : le père de la personne
phrase (lh wlbnwhy wlbny bnwhy « pour lui et pour ses enfants et pour les honorée est mentionné à la fin du texte.
enfants de ses enfants ») implique un singulier (Iarhibôlâ), au lieu de cieux 126 Par exemple, CIS 3920 (lm• IX, 32) avec l'expression habituelle en
(Iarhibôlâ et Tarnâ). De plus le nom propre Tarnâ (non attesté clans grec (�LE'TCX 117v 'TEÀEu117v) et en araméen (btr dy myt).
J. K. STARK, 1971) semble bizarre. 127 - Comme le texte fait par M. Ulpius Elahbel pour son fils Manaî
122 - On notera pourtant que le mot {11' (Halâ) est utilisé de manière assez (A. BouNNI, 1986, n" 3 ).
184 Les notables de Palmyre
ailleurs que dans le sanctuaire de Bel 128• Il faut souligner sa femme. Le phénomène est donc toujours plus ou moins
particulièrement la relative fréquence de ces textes : cela le même. Une famille profite d'une prééminence reconnue
s'explique par le statut particulier de ce sanctuaire, où étaient par la société de Palmyre, ou au moins par un des groupes
honorés tous les bienfaiteurs de la cité. On retrouve d'ailleurs qui la compose, pour se servir des espaces publics comme
le même phénomène à l'agora, autre lieu où l'on trouve en lieu de proclamation qui sert à l'ensemble du groupe familial.
grand nombre ce type de textes familiaux 129• On en a vu un certain nombre d'exemples au chapitre II (Bené
Dans le groupe des textes de l'agora, Inv X, 53 est assez Mathabôl, Bené Zabdibôl, famille cl'Elahbel). D'autre part,
original. Un certain Iamlikû, fils de Wahballat (ymlkw br il est possible que les familles aient pu se réserver certaines
whblt brgwmy) élève une statue de Iarhibôlâ, fils de Moqîmû parties des espaces publics, pour s'en servir. C'est ainsi que
(y111bwl' br mqymw br siykw). Le motif donné par le texte les trois frères qui honorent leur père en Inv X, 2 (texte
est intéressant et peu habituel dans l'épigraphie découvert à proximité de la colonne 1 de l'agora) peuvent
palmyrénienne : Iarhibôlâ est honoré après la mort de aussi honorer au même endroit un centurion romain (/nv X,
Wahballat (père de Iamlikû), parce qu'il s'est bien comporté 1 ). On ignore évidemment quelles en étaient les modalités
avec lui (bdyl dy hlk 'mh spyr). On ne sait rien des pratiques, mais il y avait évidemment une sorte de priorité
circonstances précises, mais l'on peut supposer que la statue familiale sur cette zone 130•
avait été prévue par le père, en faveur d'un bienfaiteur, et Il faut souligner ici que cet ensemble de textes familiaux
que le fils a accompli ce que son père avait commencé. mettent en relief des habitudes semblables à celles que
D'ailleurs certains honneurs sont prévus par testament montrent les textes de dédicaces« pour la vie de ... », et que
une des inscriptions du sanctuaire de Bel le mentionne les familles qui sont concernées sont toujours des familles
expressément (Inv IX, 24). La statue du père de quatre frères au sens étroit. En effet, si l'on fait le bilan des parents qui
(OÜÀmm Oùhiou MaÀxou u101. Z:Epyiq. MouKmvàç Ka\ apparaissent dans les textes, on s'aperçoit qu'il s'agit
0EÔ�ouÀoç Ka\ 'An:0À1vaprnç Ka\ Mapicov) est installée clans principalement du père ou des fils, plus rarement de femmes
le sanctuaire de Bel (?), selon les termes du testament du (filles, sœurs ou épouses). Malgré ce qu'on a pu voir sur
père M. Ulpius Malikû (ÈK 8mmyi7ç MapKou OùÀn:iou l'importance des oncles paternels, ceux-ci n'apparaissent que
MaÀxou n:m:pàç aù1wv), qui est chevalier romain (1à(ç) îpE1ç rarement en tant que tels clans les textes honorifiques de
'Ln:mKàç a1pm:EÎaç [Èmahîµcoç [a1pm:Eucrcx�LEvod). L'accent groupes familiaux. Seules quelques inscriptions, comme
mis sur la citoyenneté du père, ainsi que sur sa carrière cl'un Inv X, 24, font exception. Cette dernière met cl' ailleurs aussi
type rare à Palmyre, permet de penser qu'il faut voir aussi en cause le fils de l'un des frères : c'est à cause des bienfaits
comme une manifestation de fierté familiale les honneurs qu'il a accomplis envers son neveu que Hacldûdan est honoré
rendus par ses fils. par son frère 131•
Un autre élément peut renforcer cette interprétation. Il Les textes honorifiques palmyréniens, comme
arrive en effet souvent que les textes familiaux fassent partie l'ensemble de l'épigraphie de l'oasis, mettent l'accent sur
d'un ensemble, avec d'autres inscriptions d'un type plus les relations familiales, et en particulier les longues lignées
habituel (décret du Conseil ou d'un groupe), comme par cl'ancêtres auxquels on se rattache et dont on est fier de
exemple les textes C/S 3924-3925 (= Inv IX, 6a et b). Dans descendre. D'autre part, comme on vient de le voir, un certain
le second daté de 17 de notre ère, Iedîbel, fils de Azîzû honore nombre d'inscriptions (honorifiques ou dédicaces« pour la
son père Azîzû, fils de Barkaî. Dans l'autre, de deux ans vie de ... » 132) mettent l'accent sur l'importance de la famille
plus tardif, Ieclîbel est honoré par les Palmyréniens et les étroite.
Grecs de Séleucie. La conjonction de ces deux tendances pourrait faire
Mais la concomitance d'honneurs publics et d'honneurs penser qu'on se rapproche d'une coutume assez courante
familiaux n'est pas unique. On connaît par exemple le cas clans les inscriptions honorifiques du monde grec, celle
de la Colonnade transversale, pour la famille de Shoraîkô. d'honorer un personnage en rappelant non seulement ses
Ce dernier est honoré par le Conseil, ses deux fils et son qualités, mais aussi celles de ses ancêtres 133• Curieusement,
frère par les Bené ZabdibôL et lui-même dresse 1a statue de cette dimension n'apparaît pas de manière aussi explicite
128 - Enfants honorant leur père clans le sanctuaire de Bel : CIS 3920, princes de Palmyre. Pourtant les inscriptions qui concernent une famille
CIS 3922 (lnl' IX, 9), CIS 3925 (JnF lX, 6b), fm, IX, 7 et 24. sont souvent regroupées : par exemple, pour la famille de Bageshü. les
129 - lnv X, 2 et 99 (des fils pour leur père) ; lnl' X. 119 cité plus haut (une textes lnl' IX, 33 et 34 pour un père et son fils sans cloute sont voisins clans
fille pour son père et son frère); lnv X, 4 (un père pour ses enfants). Inv X, le portique est du sanctuaire de Bel.
107 est un peu à part : une caravane conduite par Abgar honore le père de 131 - CIS 395 1 en l'honneur cl' Alaînê. frère de Shoraîkô est un autre
ce dernier, Marcus Ulpius Iarhaî. exemple. Les honneurs sont généralement réservés à la famille étroite et il
130 - Le phénomène est évidemment un peu différent pour les inscriptions est remarquable que les exceptions à cette règle concernent habituellement
de la famille d'Odainat clans la section centrale de la Grande Colonnade. li des frères du père.
n'y a pas de commune mesure entre. d'une part, les trois frères des textes 132 - On verra au chapitre suivant que la situation n · est pas très différente
lnv X, 1 et 2, qui appartiennent certes à un clan important (Haumal), mais clans le cas des textes funéraires.
n'ont, semble+il, exercé aucune fonction officielle et, d'autre part, les 133 - Cf. F. QUASS, 1993, p. 40-75.
Chapitre V: Familles, C(tf1·m1chis et esclm•es de notables 185
dans les textes de Palmyre. Peut-être considérait-on que les En fait, dans les sources conservées sur Palmyre, seul
listes d'ancêtres étaient suffisantes, sans qu'il soit besoin de l'écrivain d'époque byzantine Zosime donne une indication
préciser que la valeur de la famille se transmettait de père précise de ce type, à propos d'Odainat, à la première mention
en fils: le fait même d'avoir des ancêtres devait être un gage de son nom (I, 39): 'Oocxtvcxeov [.. .l avopcx TicxÀ�LDp11vov KCXl
de la noblesse, sans qu'ils aient eu besoin d'agir d'une ÈK rcpoyôvwv Tiîç ncxpà 'tffiV pcxCîlÀÉwv açlW0Évm n�u1ç
manière particulière. Un seul texte de Palmyre fournit peut ( « Odainat [ ...] un Palmyrénien que les Empereurs avaient
être une exception à cet état de fait: en lnv X, 115, Iulius jugé digne d'honneur à cause de ses ancêtres », trad.
Aurelius Malikû, fils de Wasehû ('IouÀrnç Aùp1iÀrnç F. Paschoud). On peut d'ailleurs s'interroger sur la valeur
McxÀ1xoç Oucxcrrnu McxÀixou 'toÙ Oucxcrrnu NEPouÀcx ywlys historique du témoignage de Zosime, car la gloire des
'wllys mlkw br wsbw br mlkw br wsbw nbwl') est honoré ancêtres d'Odainat n'est pas spécialement attestée par les
par le Conseil et le Peuple pour l'ensemble de sa carrière sources épigraphiques.
civique. À la fin du texte, son père Wasehû/Oucxcrrnç est En effet, cette famille est sans doute connue au cours du
mentionné également, pour avoir accompli toutes les liturgies ne siècle à Doura-Europos (voir chapitre m), mais surtout,
( OucxcrEw 1tmp1 cxùwù nâcrcxç Àawupytcxç ÈK'tEÀÉCîcxV'tl elle apparaît brusquement au milieu du me siècle, alors qu'elle
[wlwsZ1w 'bwh] dy spr bkl 'bydw ldh lmdyth rn). On ne sait est déjà à la tête de Palmyre. On a d'ailleurs le témoignage
pas s'il a reçu lui aussi une statue, mais il est certain que le d'Agathias qui, au contraire de Zosime, fait cl'Odainat un
rappel des liturgies du père, après le récit de la carrière du personnage d'origine obscure 137• Il est vrai que le gentilice
fils a pour effet de souligner la continuité entre les deux Septimius accolé à son nom prouve sans doute que la valeur
personnages. de la famille avait été reconnue par Septime Sévère et que
Ce qui est présent dans les cités d'Asie Mineure et du ce gentilice avait été accordé par cet empereur, sans doute
monde égéen, et exceptionnellement à Palmyre, est peut au père d'Odainat, Haîran, autant qu'on puisse le dire 138•
être l'image d'un idéal civique qui est hérité de génération On ne connaît malheureusement rien sur Haîran, ni sur les
en génération par les notables: il s'agit d'un principe raisons de ses relations privilégiées avec la dynastie
aristocratique, fondé sur la lignée 135• Même si les principes sévèrienne. Il est sûr que la théorie ancienne qui faisait
sont sans aucun doute semblables à Palmyre, les modalités d'Odainat, mari de Zénobie, le fils ou le petit-fils du premier
sont généralement différentes. Comme le note F. QuaB, les Septimius Odainat avait l'avantage de correspondre mieux
longues listes d'ancêtres deviennent courantes en Asie au texte de Zosime, puisqu'on avait dans ce cas un ancêtre
Mineure, y compris dans les îles de la côte (Cos ou Rhodes) qui, de source sûre, était Septimius 139•
dès le IVe siècle, mais le mouvement s'amplifie à partir des Néanmoins, même s'il reste mystérieux, Haîran devait
n° et 1°1 siècles avant notre ère 136• L'exemple de Palmyre n'est bien avoir une position relativement importante pour être
donc pas isolé, mais les références aux valeurs civiques ainsi honoré par les empereurs. Comme dans le cas de
manquent, ce qui est évidemment encore un signe du Zénobie, pour qui on propose parfois une origine
particularisme palmyrénien et sans doute aussi du caractère égyptienne on peut imaginer qu'Odainat et ses ancêtres
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superficiel de l'hellénisation. Il ne devait pas sembler étaient installés hors de Palmyre. La possibilité du passage
nécessaire de donner les fonctions officielles, de citer les à Doura-Europos d'un de leurs ancêtres renforcerait cette
honneurs civiques accumulés par les ancêtres, alors que ces hypothèse. On peut en particulier penser qu'un des aïeux
mentions sont systématiques en Asie Mineure. Ce qu'on d'Oclainat a effectué une partie de sa carrière dans l'aimée
ressentait comme véritablement important était seulement romaine, et a été récompensé pour cette raison. On peut aussi
le fait de s'inscrire dans une lignée familiale, et non la vertu mettre cela en rapport avec les événements qui ont
civique et les charges remplies par les autres membres de la correspondu aux luttes pour le pouvoir entre Pescennius
famille. Cette absence de référence à la vertu des ancêtres Niger et Septime Sévère. Le premier Septimius de la famille
(1tpoyov1Kll àpE'tT)) contraste donc fortement avec ce que l'on (Haîran) a peut-être choisi le bon parti et a su en tirer profit.
connaît dans le reste du monde grec. Malheureusement aucun document du site ne vient confirmer
134 -« À Ouaseos son père qui a accompli toutes les liturgies » (grec) et ont écrit à son sujet», tracl. d'après la version anglaise de A. Cameron,
« et à son père Wasehû, qui a été agréable à la cité clans toutes ses liturgies» citée clans M. H. DoDGEON et S. N. C. LIEU, 1991, p. 75).
(araméen). Voir le chapitre 1 sur la syntaxe et le formulaire particulier cle ce 138 - M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 258. Voir aussi D. S. PoTTER, 1990, p. 380-
texte; pour la traduction du mot 'bydw, «liturgies», voir DFD, p. 286. 394 pour des vues un peu différentes, même s'il accepte la généalogie
135 - F. QuAss, 1993, p. 43 et suivantes. proposée par M. Gawlikowski.
136 - F. QuASS, ] 993, p. 60-67. 139 - Voir les deux arbres possibles dans D. S. PoTTER, 1990, p. 383
137 - AGATHIAS, IV, 24, 4: 'O8Éva8oç 6 TTaÀ�rnp1wck, cxv11p cx<j)aVTjÇ (versions « traditionnelles») et la version proposée, après la découverte
µÈv 1:Ù. npêina KŒl ayVCû01:0Ç, 1:ŒlÇ ôÈ Lamopou ÇUµ<\lüpcxiç KŒl d'un nouveau texte, par M. Gawlikowski (M. G AWLIKOWSKI, 1985,
01-Ç ÈôpauEV /:,n' CXÙ1:0.), �LfYl.01:llV CXpCX�LEVOÇ ôÔÇCXV KŒl TCOÀÀOlÇ 1:WV p. 260-261). Voir 1· arbre généalogique« nouveau» (qui suit les propositions
rccxÀO'.l ç,uyypa<j)Éwv CXÇla<p1h111:oç ysysv1wÉvoç (« Odainat, homme de M. Gawlikowski) dans D. S. PoTTER, 1990. p. 388.
inconnu cl'abord et obscur, gagna ensuite une grande réputation à la suite 140 - C'est-à-dire qu'on peut imaginer qu'elle appartient à une famille
des désastres qu'il infligea à Sapor, et beaucoup parmi les historiens anciens palrnyrénienne installée en Égypte.
186 Les notables de Palmyre
l'existence de cette famille, ou même de luttes particulières seuls dans ces textes correspondent assez souvent aux noms
1 1
à cette période C'est pour cela qu'il est peut-être
.j • qui sont portés par les affranchis. Ces noms ne sont
préférable de croire qu'une partie de la carrière de la famille évidemment pas portés seulement par des gens de condition
s'est effectuée hors de Palmyre, par exemple au service de servile, mais cette concordance est frappante. Il est toujours
l'année de Rome. possible que les affranchis reçoivent un nouveau nom à leur
Odainat est donc le seul personnage pour lequel les libération, mais on peut penser plutôt qu'il garde leur nom
sources font allusion à des honneurs conférés à des ancêtres. suivi de celui de leur ancien maître, comme cela est la coutume
Comme on l'a vu, cette source n'est pourtant pas entièrement ailleurs, et en particulier dans l'Empire romain. Néanmoins le
fiable. Il faut donc conclure sur ce particularisme rapport des affranchis palmyréniens à leur ancien maître est
palmyrénien, qui n'est évidemment pas contradictoire avec tellement explicite qu'on peut se demander s'ils ne restaient
l'accent mis sur les relations familiales et la famille étroite pas en relation de dépendance avec eux 1 5• Avant de se pencher
.j
dans l'ensemble de la documentation. sur la présence des affranchis et autres dépendants (esclaves,
serviteurs) dans l'entourage des notables, il est nécessaire donc
de faire quelques remarques sur leur onomastique, en
B. AFFRANCHIS ET ESCLAVES À PALMYRE
particulier sur l'origine des noms.
Pourtant il serait peut-être un peu réducteur de limiter
les familles palmyréniennes à leurs membres les plus
1. L'ONOMASTIQUE DES AFFRANCHIS
proches. En effet, l'influence des notables de la ville avait
aussi une autre manière de s'afficher, tout en transmettant le Les textes où apparaissent des affranchis ont d'abord
nom de la famille. Un nombre important de textes atteste de un intérêt d'ordre onomastique. Le tableau, en annexe,
l'existence à Palmyre d'affranchis (bi)1r' en araméen). Ceux permet de se rendre compte de la répétition d'un certain
ci conservaient dans leur nom celui de leur ancien maître nombre de noms, qui semblent propres à cette catégorie
par exemple Wardan, affranchi de Refabôl Antiochos, fils sociale. En fait, on peut sans doute distinguer plusieurs
de Ateaqab ( wrdn brJ11y 'ntyks 1pbwl br 't'qb), dont on a groupes.
parlé plus haut. L'épigraphie palmyrénienne livre le nom La première catégorie de noms d'affranchis regroupe
d'une trentaine au moins d'anciens esclaves affranchis 1 2• .j les noms d'origine gréco-latine: on trouve ainsi un nombre
C'est peu par rapport au nombre total de textes fournis par assez important de nrqys (NapKlm::rnç) ou de hrms ('Epµ1-k).
l'oasis, néanmoins ces inscriptions permettent de tirer On peut compléter ce groupe de noms étrangers par quelques
quelques conclusions sur ce groupe social. noms d'origine iranienne comme wrdn (Wardan), prnk
D'autre part, même si les données sont beaucoup moins (Pharnak) ou 'p111t (Aphrahat).
précises, l'existence d'affranchis signale 1'existence d'esclaves Malgré la fréquence relative de ces noms parmi les
dans la société de Palmyre. Ce groupe est extrêmement difficile affranchis, plusieurs remarques s'imposent. Il faut d'abord
à définir et à repérer d'après les textes conservés. Le mot souligner que l'immense majorité des textes qui les
esclave lui-même n'apparaît presque pas dans les inscriptions cmîcernent sont seulement en araméen. Cela tient peut-être
de Palmyre, à l'exception principale du Tarif et d'un texte de au genre particulier des inscriptions concernées, c'est-à-dire
la vallée des Tombeaux (C/S 4115, voir chapitre suivant) 1 3• .j des épitaphes et des dédicaces au dieu anonyme, qui
Il est vraisemblable que certains des personnages qui comprennent rarement une version grecque. Néanmoins,
apparaissènt sans patronymes dans les inscriptions (en comme on le verra au chapitre suivant, les inscriptions de
particulier sur des dédicaces à des divinités) soient eux-mêmes fondation et de concession sont parfois bilingues ; or celles
des esclaves I.J.J. Malheureusement, cette hypothèse n'est qui concernent des affranchis sont unilingues, à une
1.j11
confirmée par aucun document explicite. Néanmoins, ce qui exception près, qui malheureusement est un peu lacunaire •
peut aller dans ce sens est le fait que les noms qui apparaissent L'onomastique gréco-romaine ne doit pas dissimuler le fait
141 - Il s'agit bien évidemment seulement d'un argument a silelllio. et concernent les esclaves. ce qui peut être considéré comme un signe de
comme tel, il est susceptible d"être infirmé par une nouvelle découverte. 1 • importance des transactions qui les concernent. Comme le remarque aussi
142 - Liste dans 1'annexe XVI. Tl faut ajouter à cette I iste les affranchis J. Tcixiclor, il est surprenant qu'il n'y ait nulle allusion clans le Tarif à une
impériaux ou autres qu· on trouvera clans la liste des fonctionnaires romains taxe sur les affranchissements. Due directement aux services fiscaux
connus sur le site (annexe XII. 1 ). impériaux. il est possible que par là même, elle n'ait pas eu à apparaître
143 - Le mot araméen est 'lym. clans le texte du Tarif, règlement d'octroi local.
144 - Par exemple, CIS 4096 et 4103 (zbwdet 'wtk'), ou bien encore PNO 146 - !nl' rv. 13. complété par M. GAWLIKOWSKI, 1975, p. 129, après la
n"' 42 et 48 ( · bdbl et hnns). découverte d'un nouveau texte. Il est peu étonnant que cette unique
145 - Les aspects légaux de la question et les allusions aux esclaves dans le exception soit justement la seule inscription du groupe qui concerne une
Tarif sont traités par J. TEIXIDOR, 1984, p. 82-86. Voir en particulier sur le fondation et non une concession. Comme on le verra au chapitre suivant,
problème de la paramonè (les anciens esclaves affranchis restent attachés les inscriptions de fondation sont bilingues de manière plus courante que
à leur maître), aux pages 84-86. On peut noter que le texte du Tarif, après les textes de concession.
le décret de promulgation commence justement par les articles gui
Chapitre V: Familles, qtfi·anchis et esclaves de notables 187
qu'il s'agit de catégories de la population dont la culture est deux noms, par leur sens premier, conviennent tout à fait à
majoritairement i ndigène. Les anciens esclaves qui des esclaves et leur utilisation est donc tout à fait
s'appellent Hermès ou Narcisse sont peut-être originaires compréhensible. Néanmoins, siAbnergal semble plutôt réservé
du monde grec (Syrie ou même Asie Mineure), mais, à aux affranchis, ce n'est pas le cas de Abclâ 1•18• En effet, un seul
Palmyre, ils se meuvent dans une partie de la population qui des personnages qui portent ce nom est affranchi d'après la
n'a accès que de manière partielle à l'hellénisation et sans liste fournie par J. K. Stark (J. K. STARK, 1971, p. 41).
doute à l'écriture. De même, on connaît aussi un grand nombre de Iarhaî
Parmi l'ensemble des noms grecs et latins d'affranchis ou Shegel dans les familles palmyréniennes, bien que ce soit
de Palmyre, un seul, relativement rare, semble commun à aussi le nom de quelques affranchis (Inv VIII, 94 ou 1 1 4).
ce groupe et aux notables: Agrippa, qui est porté par de On peut d'ailleurs penser que ces esclaves ont reçu des noms
grands personnages, dont le plus célèbre est le fameux Malê qui avaient la faveur des familles de leurs maîtres, plutôt
Agrippa ( CIS 3959), et aussi par un certain Iulius Aurelius que des noms caractéristiques d'un statut. De même, les noms
Agrippa, fils de Agathopous, affranchi de Héliodôros grecs et latins peuvent être un signe de culture grecque de la
Iarhibôlâ, fils de Haîran Bônnê (ywlys 'wrlys 'g1p' br 'gtps part des maîtres, ou au moins d'une tentative de le faire croire,
br J11y hlydwrs y1)1bwl' br bym bwn') 117• Agathopous est sans que cela veuille dire que les esclaves sont vraiment
sans doute l'affranchi, à moins que Iulius Aurelius Agrippa, d'origine occidentale 1-19_
pour mieux souligner son nouveau statut d'homme libre, D'autre part, les textes prouvent que les noms des
tienne à insérer son patronyme entre son nom et celui de son affranchis avaient des origines variées au sein d'une même
maître. On notera aussi que, dès 213, les affranchis avec famille. Ainsi, un des Abnergal attesté par les inscriptions
autant de constance que les autres Palmyréniens ajoutent est le frère d'un Méherdate (mhrdt), nom iranien bien
Iulius Aurelius à leur nom. connu 150• On a vu d'ailleurs que certains affranchis portaient
Les autres noms, comme Hermès ou Narcisse, ont des noms de ce type. On peut supposer que ce frère était, lui
d'ailleurs la particularité de ne pas être propres aux affranchis aussi, cl'origine servile.
de Palmyre. Comme on 1'a vu au chapitre 11, ils sont en effet Le terme « affranchi» lui-même n'apparaît à Palmyre
très courants dans le reste de l'Empire et en particulier à pratiquement que sous sa forme araméenne ( br br' ou b1y).
Rome, de même que d'autres noms courants à Palmyre Le terme grec correspondant est beaucoup plus rare,
comme Eutychès ou Alexandre. Or dans la capitale de puisqu'on ne connaît que deux attestations du mot
l'Empire, ils sont assez majoritairement portés par des àrcEÀEÛ0Epoç dans l'épigraphie palmyrénienne 151• Dans ces
affranchis ou des esclaves, ce qui ne semble pas le cas à cas précis, on peut comprendre assez facilement les raisons
Palmyre. Il importe donc de poser la question du statut de qui motivent l'emploi du grec. Le premier texte, connu depuis
certains de ces personnages (cf. ir�fra), car il est possible longtemps, est une dédicace à« Zeus très haut et secourable »
que parfois la désignation précise du statut soit absente, soit (Liù U\JflCTîcp Ka't. ÈmlKÔcp) par Iulius Erôs, affranchi de
par manque de place, soit pour toute autre raison. On verra C. Iulius Bassus ('louÀwç "Epwç àrcEÀEu0Epoç ïaiou(ç)
aussi que le même type de question peut se poser pour des 'IouÀiou Bâ00ou), pour le salut de son fils Iaa�aç (avril
gens dont les noms ne sont pas étrangers à Palmyre. 1 78) 152• C'est d'ailleurs un des cas où un autel de ce type ne
On retrouve pour les affranchis beaucoup de noms porte pas de texte araméen. Ce n'est pas le cas général;
sémitiques qui servent aussi au reste de la population. Seul un néanmoins les autels à « Zeus très haut » sont assez
anthroponyme semble propre à cette catégorie de la nombreux, avec des inscriptions, soit en grec seulement 153,
population: il s'agit de 'bnrgl, Abnergal (« Serviteur de soit, pour un certain nombre d'entre elles, bilingues gréco
Nergal»). On trouve également unAbdâ, 'bd' (CIS 4482). Ces palmyréniennes 151• Néanmoins, c'est le seul affranchi qui
147 - H. INGHOLT, 1935, p. 99, n" VIII. Le même apparaît dans le texte complétée par M. GAWLJKOWSKI, 1975, p. 129.
H. lNGHOLT, 1962, p. [ 06. 152 - DFD, p. 236-237 qui suit la lecture de AAES III, n" 353 (même texte
148 - Le seul autre Abnergal apparaît clans le texte RSP n" I l l ; il s'agit du moins complet dans Ch. CLERMONT-GANNEAU, RAO VI, p. 31; voir aussi
père du personnage concerné (qui dédie un autel), ce qui fait qu'on ne WADDINGTON 2572) ; voir ici fig. 13.
précise pas son statut: il est clone possible qu'il soit lui aussi un affranchi, l 53 - Les autres cas de dédicaces à �ù U\jflC:>1:cp en grec seulement sont
mais rien ne le prouve. Voir aussi le nom Abclsîarâ ( 'bd.';iyr') clans C/S 4172 H. SEYRIG, 1933c, p. 263-264, n" 3 (deux textes) ; p. 275-276, n" 6 ;
(pour la signification discutée du nom, voir J. K. STARK, 1971, p. l 03). p. 279-280, n" 7 ; lm• VL 8; WADDINGTON 2573, 2574 (= H. SEYRIG, I 939,
149 - Julius Aurelius Agrippa, fil s cl' Agathopous (ywlys 'wrlys 'g1p' br p. 3 I 8, n" 21 ), 2577 (= H. SEYRIG, 1939, p. 317, n" 20) ; H. INGHOLT, 1936,
'glps), dont on a parlé plus haut, est l'affranchi d'un Hélioclôros Iarhibôlâ, p. l 04-105, n'" 8-9 ; BS n" 31 (de 302 de notre ère); M. GAWLIKOWSKI, 1984,
fils cle Haîran Bônnê. Le double nom du maître signale peut-être une famille n" 36; Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI, 1986-1987, n" Sa.
clans laquelle l'influence hellénique avait une place privilégiée. 154 - Dédicaces bilingues : CIS 3998, 4003, 4022, 4031, 4066; lnv XII,
150 - J. STARCKY. 1949-1950, n" 1: Méherclate est appelé 'bwh (« son 46; RSP n"' 125-126; J. CANTINEAU, l 930b, n" l O : J. CANTINEAU. 1933,
frère») sur la stèle funéraire de Abnergal. Un certain gmfy' est appelé bbrh p. l 88, n" I 1 (SEC 7, 146) ; l 936. p. 346, n" 21 (= BS n" 25). On trouvera
(« son associé » ? ) sur le même monument. clans K. ÜIJKSTRA. 1995, Appenclix F, p. 322-334 une liste de- toutes les
15 I Le terme est de plus à restituer clans I · inscription bilingue /111• IV, 13, dédicaces sur ce type cl'autel.
188 Les notables de Palmyre
apparaisse dans un texte grec de ce type. Même si les simplement juxtaposés : cela peut signifier qu'on a omis le
personnages concernés par cette dédicace sont sans doute mot br« fils de» et qu'il s'agit d'une simple patronymie. Il
d'origine syrienne, et même palmyrénienne pour l'affranchi peut aussi y avoir dans certains cas, sans doute plus rares,
et le fils, on peut penser que le statut de citoyen romain l'omission de br b1y « affranchi de». Il est très difficile de
explique à lui seul que le texte ait été gravé en grec. Le nom trancher, sauf si d'autres documents éclairent sur le
du fils est typiquement sémitique, alors que celui du maître personnage en question. Le texte CIS 4185 est un des seuls
fait partie de la catégorie des noms doubles, explicables par cas pour lequel on peut conclure qu'il est question d'un
le latin et aussi par une langue sémitique. affranchi (cf. chapitre 11). Le nrqys 'gylw qui apparaît dans
L'autre occurrence du mot àrcEÀEÛ0Epoç se trouve dans ce graffito de la tombe des « Trois frères » est très
un texte encore inédit du sanctuaire de N abû, sans doute la vraisemblablement le même que nrqys br f11y 'gylw des
dédicace du portique nord 155• C'est le seul cas connu dans textes CIS 4173-4174 de la même tombe 158•
lequel un affranchi est associé à son ancien maître, de plus La même conclusion est peut-être possible pour le lulius
dans la dédicace d'un monument important. Le nom de Aurelius Eutychès Haggaî qui apparaît dans le texte
l'affranchi 'spys/Am)n1 pose évidemment un problème, même CIS 4211. Le texte araméen (ywlys 'wrlys 'wtk' bgy) laisse
s'il faut sans doute pencher pour une origine iranienne 156• l'ambiguïté sur le nom Haggaî qui peut être en position de
On notera d'ailleurs que les deux affranchis qui patronyme ou simplement un équivalent du premier nom 15'1,
apparaissent dans des textes grecs portent des noms mais le texte grec porte [' IouÀi.oç A'ù]p17À10ç [Eù1ûx11ç
non sémitiques, ce qui est aussi le cas de Iulius Aurelius Ayymo]u. La finale -u permet de supposer que le second
Hermès et lulia Aurelia Prima de l'inscription de fondation nom est au génitif et qu'on peut l'interpréter comme une
citée plus haut. Néanmoins la majorité des textes sont en sorte de patronyme. D'autre part, dans les deux versions la
araméen, comme une grande partie de l'onomastique des généalogie s'achève à cet endroit. Le nom du personnage,
personnages qui y apparaissent. Eutychès, ainsi que celui de l'un de ses frères, Hermeias
( 'Epµdaç), sont courants parmi les affranchis, ce qui fait
qu'il est tentant de considérer au moins Eutychès comme
2. LES VARIATIONS LOCALES
l'affranchi d'un certain Haggaî. Les mots àrrEÀEÛ0Epoç et br
Si certains noms pouvaient être portés indifféremment b1y auraient simplement été omis, peut-être pour dissimuler
par des affranchis et par des notables de la cité, d'autres le statut réel des deux personnages 160•
pouvaient pourtant être propres à certaines catégories de la La confusion entre les deux types de noms semble
population, en particulier parmi les noms d'origine souvent inextricable, peut-être plus encore que pour les noms
occidentale. Prima, Asphis (?) ou Erôs sont plutôt rares à qui apparaissent sans patronyme. Néanmoins, la question
Palmyre, ce n'est pas le cas d'Hermès. Or ce nom, comme ne se pose que pour les noms juxtaposés en première position
Eutychès ou Narcisse, portés parfois par des affranchis, est dans la généalogie (comme dans le cas de Narkissos Ogeîlû).
aussi celui de personnages dont la position sociale est moins Dans les autres cas, on peut supposer que les noms juxtaposés
clairement définie 157• À la différence de certains noms, après un premier br sont simplement les différents degrés
comme Zénobios par exemple, ils ne servent visiblement de la généalogie du personnage.
pas à des notables de premier plan. Sans que cela soit précisé Plus souvent encore, apparaissent dans les textes des
dans leur nom, il est possible que certains d'entre eux soient noms simples, non suivis de patronymes. On a reconnu
à considérer comme des esclaves ou des affranchis. depuis longtemps dans ce phénomène un signe qui permettait
C'est en particulier le cas pour tous ceux qui apparaissent d'identifier esclaves et affranchis. Néanmoins, le témoignage
dans les textes sans donner explicitement leur patronyme. Il des textes n'est pas univoque, et certains exemples peuvent
faut réserver une place particulière aux noms qui sont être d'interprétation difficile. Ainsi, en 272, un Narcisse
155 - A. BouNNI, 1986, n" 31. Voir le chapitre 11 sur ce texte et plus palmyrénienne. comme par exemple Malê Agrippa ( CIS 3959 = BS n" 44 ).
généralement sur !"histoire du sanctuaire de Nabù. Zénobios Zabdilah ( C/S 3932). Néanmoins. les noms doubles des notables
156 - On retrouve le même nom Am!n1ç sous la forme AmpmK (génitif) de Palmyre apparaissent assez rarement clans les versions araméennes des
clans le texte A. BouNNI, 1986, n" 48. Amjn1ç ou Am!n1 ( 'spys en araméen) textes, et leurs généalogies sont plus développées que celles des affranchis
est difficilement explicable, sauf peut-être par1· iranien *asp- (« cheval ») (voir l'exemple de CIS 4211 cité ensuite).
mais qui, semble-t-il, apparaît seulement clans des composés (voir les 159 - On aurait alors une formule du type« Eutychès qui est appelé aussi
exemples rassemblés par Ph. GIGNOUX, Iranisches Personnamenbuch II, 2. Haggaî », mais clans ce texte, cette interprétation est moins possible, parce
Noms propres sassanides en moyen-perse épigraphique. Vienne. 1986. qu'il n'y aurait alors pas de patronyme.
p. 48-49). 160- Si l'on accepte cette hypothèse, il faut renoncer à la restitution de
157 - On peut comparer les annexes IX. 2 et XV I pour avoir une idée des Ch. CLERMONT-GANNEAU, RAO III, p. 160-162, suivi par le C/S, qui fait de
ordres de grandeur. Hermeias un Gaius Iulius. Ce nom serait d'ailleurs étrange à la date du
158 - Voir CIS, ad !oc. et DFD, p. 274. On voit aussi que ce type de nom texte (237). C'est d'ailleurs l'opinion de D. SCHLUMBERGER, l 942- l 943b,
ressemble beaucoup aux noms doubles propres à l'aristocratie p. 81, 11. 6.
Chapitre V: Familles, qffiw1chis et esclaves de notables 189
(nrqys) apparaît parmi les desservants du sanctuaire de Bel il ne juge pas utile de donner son patronyme. Dans 1'autre
dans 1'inscription lnv 28 (fig. 161
• Dans cette liste de texte, il fonde un temple (hyld) pour le dieu Abgal. Ce chef
«custodes» de Bel, tous les noms sont suivis d'un patronyme de village n'est donc apparemment pas un affranchi, mais
au moins, sauf clans le cas de Narcisse. Il est tentant de le semble, comme ses concitoyens, ne pas avoir l'habitude de
considérer comme un esclave ou un affranchi, mais cette donner de manière régulière son patronyme.
théorie est rejetée par M. Gawlikowski, qui pense que ce En fait, un élément peut paraître contradictoire: on n'a
statut ne peut correspondre à la fonction remplie par ce jusqu'à présent jamais découvert dans ce milieu rural
personnage 162• Au contraire, J. T. Milik (DFD, p. 274-275) cl 'attestation d'affranchis. On peut se demander si le statut
estime que ce Narcisse est un affranchi, responsable de la servile n'existait pas dans cette région, ou s'il est simplement
surveillance des « garçons ». La présence cl'affranchis parmi difficile à repérer, parce qu'il n'apparaît pas explicitement
ces fonctionnaires sacrés n'est à vrai dire pas entièrement dans les textes. À moins de considérer que ces villages
étonnante, tout comme l'existence d'esclaves pourrait aussi avaient une population essentiellement servile et affranchie,
être concevable dans ce contexte. il faut sans doute conclure qu'il y avait des variations. Il est
On trouve aussi à plusieurs reprises des Hermès ou des fort possible que certains des personnages qui apparaissent
Eutychès sans patronyme dans l'épigraphie palrnyrénienne 163• sans patronymes étaient effectivement des affranchis ou des
Comme le note l'éditeur d'un des derniers exemples publiés, esclaves, sans qu'on puisse faire la différence, ni les
l'absence du patronyme laisse penser qu'il pourrait s'agir distinguer des hommes libres.
d'un affranchi 161• Ces inscriptions appartiennent assez La formule br b1y n'est pourtant pas réservée aux
souvent à des autels ou des reliefs qui proviennent de inscriptions de Palmyre même, puisque la stèle funéraire de
Palmyrène du nord-ouest. Or, les textes de cette région se 'bnrgl br b1y mqy br ytm' (« Abnergal, affranchi de
distinguent justement par une fréquence élevée de noms seuls Maqqaî ») vient du désert au sud de la ville et que
(sans patronyme) 165• On peut éventuellement y voir une l'expression apparaît aussi dans un graffito palmyrénien
tradition culturelle différente de celle de la ville de Palmyre découvert à Hatra ('bylm br J11y 'dy « Obaîhan, affranchi de
même. Ce milieu particulier attachait moins d'importance Addaî») 169•
aux lignées familiales et à l'inscription systématique des Il ne fait aussi aucun doute que l'absence de patronyme
généalogies. Beaucoup de ces textes ont le caractère de graffiti cl a ns les textes de Palmyre même n'a pas une seule
et sont sans cloute peu formels, en particulier ceux qui explication. On peut penser que Baalaî (b'Jy) de CIS 4105
comportent une formule du type dkyr («qu'un tel soit ou Eutychès ('wtk') de CIS 4103 sont eux aussi esclaves ou
commémoré »), comme par exemple PNO n" 24. On trouve affranchis, mais il est possible que, comme en Palmyrène,
d'ailleurs le même phénomène à Hatra, pour un bon nombre dans des milieux modestes ou ruraux, on n'ait pas jugé utile
des inscriptions griffonnées sur les murs des différents d'adjoindre le patronyme. De plus, ce phénomène rend
sanctuaires 166• Là aussi, les noms sans patronyme alternent impossible ou presque tous les rapprochements
avec ceux qui en comportent un 167• Par leur genre même, ces prosopographiques qui ont pour fondement principal les
inscriptions s'accommodent très bien d'un formulaire court filiations indiquées dans les textes. Tout cela rend difficile
et relâché : cela ne signifie sans doute pas qu'il s'agisse à l'étude poussée de ce milieu social, qu'on imagine modeste,
chaque fois d'esclaves ou d'affranchis. même si l'existence des autels et des reliefs dédiés à des
D'autre part, on peut noter certaines variations dans la divinités prouve qu'on peut les placer dans une classe
formulation des textes de Palmyrène: ainsi, le dénommé moyenne aux contours mal définis.L'exemple cité plus haut
Abgal ('bgl) qui apparaît en PNO n" 2 ter est peut-être bien du (ou des) Abgal prouve que des notables villageois
le même que celui de PNO n" 3 168• Or dans ce second texte, participent à cette vie culturelle et font faire des reliefs et
Abgal est fils de Shaarû ('bgl br s'rw). S'il s'agit bien du des sculptures du même type que leurs concitoyens peut
même personnage, cela signifie qu'il n'était pas affranchi, être moins fortunés.
puisqu'il a un patronyme. De plus, dans les deux textes, Le cas de Palmyre est loin d'être unique, et c'est peut
Abgal est un personnage important. Dans PNO n" 2ter, il être plutôt leur précision généalogique qui tranche, par
s'est apparemment vu donner le pouvoir (sltn ') sur le village rapport à de nombreux sites de Syrie ou du Proche-Orient.
par le dieu Iarhibôl ; malgré cette fonction de premier plan, Si l'on prend le c01vus des textes funéraires grecs de Zeugma,
161 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 413-419. Voir aussi DFD. p. 274-275. 166 - Par exemple les inscriptions Hatra n"' 309, 317 ou 320.
162 - M. GAWLIKOWSKI, 197 L p. 419. Selon cet auteur, il n'est pas sûr qu ïl 167 - Textes Hatra n'" 3 I 1, 3 l 8 ou 321.
s'agisse d'un nom propre. 168 - Voir PNO, p. 144, avec le commentaire« il s'agit peut-être d'un même
163 - Par exemple CIS 4103 et PNO n" 50 pour Eutychès, ou PNO n" 48 personnage ».
pour Hermès. 169 - J. STARCKY, 1949-1950, n" 1 et W. AL-SALIHI. 1987, p. 57 (pour ce texte,
164 - F. BRIQUEL-CHATONNET, 1995a, p. 156-157. je suis la lecture de PAT 1604 ).
165 - Par exemple, PNO n'" 2ter, 5, 33, 38, 42, 51, 55, 57.
190 Les notables de Palmyre
on ne peut manquer d'être frappé par ce type de qu'ailleurs, on recourt à ces longues généalogies, et pas
phénomène 171>_ La majorité des stèles funéraires porte seulement chez les notables de haut rang, pour bien marquer
seulement le nom du défunt, avec parfois son patronyme : les différences sociales et l'existence de familles anciennes.
on ne dépasse toutefois jamais la seconde génération. Ce Il est fort possible qu'à cet endroit les deux traditions aient
phénomène est peut-être compréhensible en partie, si l'on coexisté, sans qu'on puisse toujours savoir quelles en étaient
tient compte des conditions d'inhumation. Le tombeau de les origines.
Zénon, seul cas dans lequel on a conservé une bonne partie Pour en revenir aux affranchis de Palmyre, il faut peut
de la documentation, est situé dans la nécropole occidentale être en compléter la liste par les attestations de serviteurs,
de la ville : il constitue un exemple assez éclairant 171• Une ceux dont le nom est précédé de tly'. Mais ce terme est
inscription à l'entrée rappelle que le tombeau ('ro µviî�m) polysémique et d'interprétation parfois difficile. Le mot tly',
appartient à un certain Zénon (et sans doute à sa famille), qui signifie proprement « garçon », « jeune homme », a,
sauf la partie gauche (xcopk îOÙ àp10îEpoù �LÉpou). d'après H. Ingholt, un sens technique 173• Ce savant propose
Tous les bustes et les reliefs funéraires qui sont installés de traduire dans certains cas, « (temple-) boy » (en particulier
dans cette sorte de hall sont accompagnés d'une inscription. Inv IX, 28, CIS 4139, et lnv VIII, 160, nouvelle lecture de
Cette dernière est constituée du nom du défunt, parfois suivi C/S 4125). Sa proposition est discutable pour CIS 4139 (un
de xciipE ou cxÀurcE xcx1pE, et rarement de termes qui indiquent membre de la famille d'Elahbel) et il est plus simple de
la relation de parenté avec d'autres membres de la famille comprendre que le terme s'ajoute après le nom du personnage
ensevelis au même endroit. Il est possible que ces reliefs et signifie«le jeune», pour le distinguer d'un de ses aînés
gravés sur la paroi de la pièce d'entrée de la tombe aient qui porte le même nom. Le cas est sans doute le même pour
pour fonction principale d'être une sorte d'acte de propriété : le troisième texte, où le sens « enfant » paraît assez
seules les personnes représentées avaient le droit d'être vraisemblable. H. Ingholt reconnaît d'ailleurs cette
ensevelies dans ce tombeau de famille. interprétation dans un article plus récent 17 En revanche, le
.j.
On verra que c'est la fonction des bustes du rez-de contexte et le sujet de lnv IX, 28 laissent bien penser que
chaussée de la tour d'Elahbel à Palmyre (voir chapitre v1). des jeunes gens recevaient une partie de leur éducation dans
Dans ce cas, le nom des membres de la famille n'est pas suivi le temple 175• Il faut rappeler à ce propos le texte lnv X, 24
de l'expression bbl « hélas », alors que l'expression cxÀurcE qui fait allusion à un statut particulier, puisqu'on y apprend
xa1pE est parfois présente dans la tombe de Zénon. Quoi qu'il qu'un jeune homme est consacré par son oncle paternel au
en soit, ce tombeau semble se définir avant tout comme un dieu Bel. Il s'agit sans doute de recevoir la prêtrise et les
tombeau de famille, ce qui explique sans doute que l'on n'ait deux textes font allusion au même type cl'événement.
pas ressenti le besoin de préciser les liens de parenté, puisque, L'inscription Inv IX, 28, tout comme un texte publié plus
par définition, tous les membres de la famille les connaissaient. récemment par M. Gawlikowski 176, renseignent ainsi sur
Les autres reliefs funéraires connus, sur des stèles l'existence de serviteurs et de préposés aux différentes
indépendantes, devaient à l'origine appartenir souvent à ce fonctions en rapport avec le culte et les thiases. Il existe donc
genre de tombeau, où il n'était pas nécessaire d'indiquer certains groupes d'hommes libres ou d'affranchis et
précisément qui était qui, puisque tous le savaient. On veille cl'esclaves qui ont des liens étroits avec un sanctuaire 177, mais
parfois à donner quelques détails, mais cela n'est pas général. il est difficile d'en tirer des conséquences du point de vue de
Cette explication n'est peut-être pas unique, et il faut leur statut civique.
sans doute aussi penser que les traditions différentes faisaient D'autre part, il existe apparemment un troisième sens
qu'à certains endroits, ou dans certains milieux, on n'avait pour le mot tly', celui de«serviteur». Les attestations de
pas l'habitude de donner le patronyme du défunt, sans que ce troisième sens sont relativement rares, mais un texte publié
cela signifie qu'il s'agissait d'esclaves ou d'affranchis 112• récemment est venu s'ajouter aux cas connus précédemment.
L'existence de tradition locale ressort d'ailleurs bien du cas On peut d'ailleurs se demander si la même signification n'est
de Palmyre, où, de manière beaucoup plus systématique pas possible pour le texte lnv XI, 13 178 : le texte porte byrn
l
170 Voir . . W.\C,NER. 1976: à compléter par les textes découverts depuis 174 - 1-l. INCilltllT. ] 966. p. 474. 11. 75.
par la mission française dirigée par C. Abadie-Reyna! (R. ERGEÇ et 175 - Le texte a été repris et complété par J. T. Milik. DFD. p. 270 et par
J.-B. YoN, à paraître). M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 4l 3-415. Voir aussi les commentaires du texte
171 - Le dossier complet clans !GLS I, 94-105 ( = J. WAGNER, 1976. par J. C AN TJNEAU, 1930b, n" 31, J. T. Milik, DFD, p. 270-275, et
p. 254-259, n" 140). M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 76. Un certain Ogeîlù. fils de Mithridate ( ' gylw
172 - On trouverait le même type de phénomène clans les nombreuses br mhrdd), est préposé aux« jeunes gens» (dy hw' 'J tly ').
épitaphes cl'Antioche rassemblées clans le tome III des IGLS. Mais il apparaît 176 - M. GAWLIKOWSKI, 1971. p. 412-421 et 1973, p. 76-80 qui cite aussi le
clans cl' autres régions, voir par exemple clans !GLS XIII pour Bostra. Les texte H. INGHOLT, 1936, p. 88 où apparaît un « affranchi, "purifié" de la
noms seuls sont assez nombreux , il ne s'agit sûrement pas à chaque fois chambre (i.e. de la cella du temple) ».
d'esclaves ou d'affranchis. 177 - Voir Narcisse dont on a parlé plus haut (lm, IX, 28).
173 - H. INGHOLT , 1936, p. 90, n. 66 (auquel fait référence J. Starcky clans 178 - Je retrouve la même inteqxétation chez B. A GGOULA, 1979, p. 111.
lnv X, p. 21).
Chapitre V: Familles. ccf}"i-mzchis et esclm•es de notables 191
tly' dy [. . .] yd' br m'y' (« Haîran le jeune [ou le serviteur] bâtiment. On en ignore malheureusement toutes les
de/qui [ ...] Iadê, fils de M'Y'»). L'éditeur propose de caractéristiques architecturales, tout comme la signification
suppléer une formule du type dy mtqr' « qui est surnommé» exacte du terme tblh Il est fort probable qu'il soit question
après tly'. Pourtant, si l'on compare le formulaire d'Inv clans ce texte cl' une salle de réunion pour des assemblées
13 avec celui des deux textes de Palmyrène cités plus loin, religieuses, comme le prouverait le patronage d'Abgal.
on peut se demander si leur grande ressemblance ne permet La présence de cette divinité tout comme l'écriture du
pas la même traduction : comme pour le texte PNO 11° 14 ou texte conduisent à penser que l'origine de la pierre est sans
J. TErxmoR, 1997, p. 68, on a un nom simple sans patronyme cloute la Palmyrène du nord-ouest. L'inscription elle-même
suivi de tly' dy puis un nom propre, cette fois avec et son formulaire présentent cl'ailleurs cl'autres similitudes
patronyme. La photo du monument n'est pas publiée, mais avec l'inscription de Shalman citée plus haut. D'après la
la longueur des lignes qui précèdent et qui suivent laisse nouvelle lecture que J. Teixidor propose pour la dernière
penser que la lacune après dy n'est pas très longue, et il ne ligne du palmyrénien de PNO n" 14, on aurait dans les deux
manque peut-être rien avant le nom yd'. D'autre part, la fin textes la même formule finale: wywm btb « et un jour en
du texte apprend que le monument est dédié « pour sa vie» bien» clans l'inscription de Shalman et ywm btb « un jour
(au singulier, 'J bywh, donc Haîran) et« la vie des fils de ses en bien» clans celle de Nebûzâ. L'expression signifie
maîtres» ( wby' bn' mrwhy). La présence de maîtres apparemment qu'il s'agit d'un jour spécial dans le calendrier
s'explique évidemment très bien clans le cas d'un serviteur liturgique du village d'où provient la pierre 182•
et renforce cette interprétation 179• De plus, il est curieux que les deux textes soient si
Les exemples ]es plus clairs de tly' clans le sens de exactement parallèles et soient justement le fait de ces tly'
« serviteur» ou « dépendant» proviennent en fait de « serviteurs». On est évidemment amené à se demander si
Palmyrène et peuvent renseigner sur les relations sociales clans ces deux personnages n'étaient pas chargés d'un service
cette région. Le premier cas connu est celui de Shalman, religieux quelconque dans un des villages de la région, ce
serviteur de Ogeîlû Kîlaîûn (.5]11111 tly' dy 'gylw kylywn, PNO qui amènerait à reposer la question de la signification de
11 14). Ce personnage dédie un autel aux Génies (gny') et y tly'. Dans l'état actuel de la documentation, ce n'est pas
°
associe ses frères (en 270). On ne connaît rien sur le maître, possible : la différence principale entre les deux textes réside
mais il porte un patronyme, peut-être une sorte de nom de en fait surtout dans la nature de l'offrande. Cela doit bien
famille. En fait, comme clans le cas des autres dédicaces sûr tenir à la personnalité des maîtres. Il est naturel que le
d'autel, on s'aperçoit que ce type d'actes concerne serviteur d'un personnage comme Oclainat ait un rôle plus
apparemment aussi bien des hommes libres que des affranchis, important que celui d'un inconnu, même s'il s'agit d'un chef
aussi bien des gens indépendants que des serviteurs. Rien clans de village. Les dates des deux inscriptions sont assez proches
le type d'offrande ou dans le formulaire ne se signale pour permettre cette comparaison.
spécialement à l'attention du lecteur, sauf le fait que Shalman D'autre part, le second texte ( celui d u serviteur
est appelé tly'. On aurait aimé savoir si ses frères, pour lesquels cl'Oclainat) permet peut-être quelques conclusions sur les
il ne fournit pas de patronymes, étaient eux aussi serviteurs modifications qui ont cours à Palmyre clans la deuxième
du même Ogeîlû, ou si leur statut était différent. partie du me siècle. On a vu clans le texte cité plus haut que
On possède un texte parallèle à celui-ci, publié la construction du temple cl'Abgal à Khirbet Semrine était
récemment par J. Teixiclor (fig. 64). Il s'agit cette fois encore apparemment l'œuvre d'un certain Abgal, qu'on pouvait
cl'une dédicace à une divinité (Abgal), mais l'objet dédié est qualifier de chef de village (PNO n'" 2ter et 3). Les dédicaces
plus important qu'à l'habitude, puisqu'il est question d'une de constructions sont assez rares dans cette région, où la
salle de réunion (bt mwtb') et d'une tabula (tblh) selon majorité des textes est plutôt gravée sur de petits pyrées. Ce
l'interprétation de l'éditeur 180• Le personnage en question qui est frappant quelques années plus tard, si l'on admet que
est un certain Nebûzâ, fils de Kafatût, mais 1 'intérêt principal le texte publié par J. Teixiclor provient de la même zone,
du texte tient surtout à la personnalité de son patron qui n'est c'est que la seule autre construction attestée est justement le
autre qu'Odainat, le clarissime consulaire (nbwz' br kptwt fait d'un serviteur d'Odainat (J. TEJXIDOR, 1997, p. 68-69).
tly' dy 'dynt hptyq' nhyr'). Comme le note J. Teixidor, ce On a peut-être là un signe que la situation a évolué, et que
Nebûzâ devait clone être titulaire d'un poste d'une certaine toute cette région est passée sous la domination directe de la
importance. En effet, en 263, date du texte, Oclainat est au famille des princes de Palmyre. On a au moins une preuve,
sommet de sa puissance 181• De plus, Nebûzâ ne dédie pas pour la première fois, qu'Odainat intervenait directement
un simple autel, comme dans nombre d'autres cas, mais un clans les affaires de Palmyrène.
179 - On noterapourtant que les deux textes parallèles ne font pas intervenir exacte de cette tabula (p. 70).
les maîtres parmi les bénéficiaires de la dédicace. [81-J. TEIXlDOR, 1997.p. 70.
180 - J. TEIXIDOR, 1997. p. 68-7 l qui marque ses interrogations sur la nature 182 - J. TEIXIDOR, 1997, p. 71.
192 Les notables de Palmyre
Cela correspond à ce qu'on suppose depuis longtemps, (c'est-à-dire l'Inde du nord-ouest; o'i. àv[axl8Évc2ç àn:o
à propos de la puissance militaire palmyrénienne dans ces I:Ku8[iaç i::vl n:ÀÛq:> Ovahvlou A88ou8avou).
années. Cette dernière était fondée au moins en partie sur la Le texte mentionnant Asphis semble appartenir à une
cavalerie et les haras de Palmyrène lui fournissaient sans tradition étrangère à Palmyre. C'est en effet plutôt dans le
doute ses montures, et peut-être ses cavaliers. Cela permet monde situé à l'ouest de la ville que l'on voit de riches
de voir aussi que les soutiens d'Odainat semblent venir de affranchis faire de brillantes carrières et devenir très riches
différentes parties de la population, non seulement des (comme le Trimalchion de Pétrone). On peut supposer que
différentes corporations, mais aussi des populations de c'est au service de Honaînü qu'Asphis s'est enrichi assez
Palmyrène : il cherchait au moins à asseoir sa popularité dans pour pouvoir participer à cette construction.
cette zone. On peut noter que, parmi les gens qui soutiennent Le Iulius Aurelius Hermès du texte lnv IV, 13 est la
explicitement Odainat et sa famille, il n'existe pas preuve qu'un ancien esclave pouvait acquérir une relative
d'attestations de grandes familles de notables. Ces derniers aisance (au moins), puisqu'il peut se faire construire un
semblent plutôt liés à Worod, comme on 1'a vu pour la famille tombeau. Les affranchis ne se faisaient vraisemblablement
de Nashüm. On peut pourtant difficilement considérer Worod pas enterrer clans le tombeau de leur maître de manière
autrement que comme un proche cl'Odainat, mais cette systématique (voir chapitre v1). On a vu par exemple ce qu'il
absence reste mystérieuse. Elle tient peut-être aux lacunes en était pour Warclan, affranchi de Refabôl Antiochos, fils
de la documentation : le fait qu'on ne connaisse pas la famille de Ateaqab ( wrdn brJ11y 'ntyks 1pbwl br 't'qb). Il n'a pas de
de Ateaqab Ogeîlü (A817aKa�oç Oy17Àou Za�8t�coÀou wù concession clans la tombe fondée par la famille de Refabôl 185,
Ka't Kcopa 't'qb br 'gylw br zbdbwl br mqymw dmqr' qr'), mais clans la tombe de Lishamsh, alors qu'il n'a, selon toute
qui dresse une statue d'Odainat en avril 252 , ne signifie pas apparence, aucun lien de famille avec ceux qui sont enterrés
qu'il n'appartenait pas à l'aristocratie de la ville 183• à cet endroit 186• Warclan possède une partie de la tombe de
Lishamsh depuis 186 avant cl'en céder une partie en 226.
On connaît peut-être un autre affranchi de la même famille
3. LES RELATIONS AVEC LES MAÎTRES
avec Abclsîarâ, affranchi de Ateaqab, fils de Refabôl ( 'bd$yr'
L'autre grand intérêt des quelques textes de Palmyrène br J11y 't'qb br 1pbwl clans C/S 4172 de 160). Vu la date,
dont on vient de parler est qu'ils fournissent quelques Ateaqab est sans doute le père du Refabôl qui a affranchi
lumières sur les relations qui pouvaient exister entre les Warclan. Abclsîarâ, comme Warclan, prend une concession
maîtres et les affranchis, ou plus généralement leurs clans une tombe (celle des « Trois frères ») où n'apparaît
dépendants. Car les textes qui donnent des noms d'affranchis pas l'onomastique de son ancien maître. Le texte C/S 4173
permettent assez rarement de comprendre qui étaient de 19 1 de même provenance prouve qu'il ne s'agit pas d'un
vraiment les maîtres, souvent parce qu'ils sont inconnus. cas isolé. Là encore, l'ancien esclave n'a pas appartenu à la
Dans un certain nombre de cas, il peut s'agir effectivement famille des propriétaires. Il est bien évident que si les
de lacunes documentaires, c'est-à-dire de familles notables affranchis devaient de manière normale être enterrés clans
dont le nom est inconnu par ailleurs. Mais on est souvent les tombes de leur ancien maître, il n'était pas nécessaire
amené à se demander si de nombreux affranchis n'ont pas qu'ils prennent de concession. Néanmoins, il faut attirer
été libérés par des maîtres de médiocre envergure. 1'attention sur l'absence cl'attestations cl'affranchi clans la
À Palmyre même, un seul exemple montre clairement tombe de leur ancien maître 187, ce qui peut être une
qu'un ancien esclave pouvait participer avec son maître à conséquence de lacunes clans la documentation, mais aussi
une activité cl'une certaine importance. Le dénommé Asphis le signe que, généralement, l'affranchi menait une existence
est associé avec son maître dans la dédicace d'un portique entièrement indépendante.
du sanctuaire de Nabü 184• On peut être suqxis de l'association La relative indépendance financière (et légale) des
d'un simple affranchi à une dédicace de cette importance, affranchis est cl'ailleurs prouvée aussi par un cas curieux, bien
mais l'affranchi cl 'un notable tel que Honaînü, fils de qu'unique. Dans le premier texte conservé de la tombe de
Haclclüclan, pouvait sans cloute être lui-même un personnage Ma1ikü, une concession est cédée par les propriétaires à deux
important et jouer un rôle dans les affaires de son maître. En affranchis, dont l'un Rauhibel (rwbbl) est affranchi d'une
effet, Honaînü est bien connu, car il apparaît dans un texte certaine Amatshalman, elle-même affranchie d'une Shegel,
honorifique pour Marcus Ulpius Iarhaî (lnv X, 96). On fille de Zebîclâ (rwbbl br fuy 'mtslm bt J11y sgl brt zbyd') 1"'.
apprend que les marchands qui remercient M. Ulpius Iarhaî On peut sans cloute conclure de ces quelques textes que
ont voyagé clans le navire de Honaînü depuis la Scythie le comportement des affranchis devait être fort semblable à
183 - Le texte. découvert récemment. a été publié plusieurs fois : 185 - H. lNGHOLT, 1974, p. 50.
M. GAWLIKOWSKI. 1985. p. 257. n" 13; Kh. As'AD et M. GAWLIKOWSKI, 1986- 186 - Textes H. lNGHOLT, 1938. p. 106, n'" I et 11O. n" III.
1987 n" 10 (SEC 35. 1497 ; 38, 1580). 187 - Voir sur ces questions le chapitre suivant.
184 - A. BüUNNI, 1986, n" 31. 188 - H. JNGHOLT, 1935, p. 91, n" 11.
Chapitre V: Familles, qffiw1chis et esclares de notables 193
celui de leurs contemporains de naissance libre, au moins Ce qui permet cette conclusion est le fait que les pronoms
dans les classes moyennes de la population. En effet, seul personnels affixes des textes araméens sont ambigus. Ils
1'exemple de 1'affranchiAsphis permet de penser que certains peuvent en effet se rapporter aussi bien au dédicant lui-même
""-"'"�,..- à un mode de vie semblable à celui des notables. qu'à son maître. Le problème se pose en fait dans tous les
EncoreAsphis n'est-il mentionné qu'en seconde position dans cas où apparaissent des affranchis qui donnent le nom de
le texte, et en compagnie de son maître. Mais il faut répéter leur maître à la suite du leur. Quand Abnergal, affranchi de
que ce texte est un exemple pour l'instant unique. Au Taîmê ( 'bmgl br /11y tym' br 'nn), fait un autel« pour sa vie
contraire, aucun affranchi n'apparaît dans les inscriptions de et pour la vie de son fils» ('J bywh wby' brh), on peut
type officiel, ce qui signifie sans doute qu'ils ne participaient comprendre que « sa» et « son » se rapportent à Abnergal,
pas à la vie civique au même titre que les grands notables 189• mais cela peut aussi signifier que Taîmê est le bénéficiaire
On peut aussi penser que dans les cas où ils le faisaient, on ( CIS 4000). Cette seconde interprétation, qui est celle de
préférait ne pas mentionner leur éventuelle origine servile. J.-B. Chabot dans le Corpus Inscriptionwn Semiticwwn, est
On n'a en tout cas aucun indice de ce genre de faits 190• donc celle de J. T. Milik 193• Pourtant, comme le note
On peut aussi rappeler que le seul texte de Palmyre dans K. Dijkstra, la première hypothèse est aussi possible 191• Elle
lequel il est fait allusion à un cas d'analphabétisme concerne est peut-être même plus probable, si l'on compare les textes
justement un fils d'affranchi : Iulius, fils d'Aurelius Ogeîlû, qui concernent les affranchis avec l'ensemble des inscriptions
fils d'Aprahat, affranchi de Zabdibôl (ywlys br 'wrlys 'gylw de ce type. Dans tous les autres cas, il apparaît clairement
br 'prht br {ny zbdbwl) est obligé d'avoir recours à un garant que le dédicant fait partie des bénéficiaires et qu'il faut donc
dans une affaire de concession, parce qu'il ne sait pas écrire 191• sans doute traduire 'J /1ywh par « pour sa propre vie». La
Cela tendrait à prouver que le niveau social de certains même question peut se poser pour l'unique exemple de texte
affranchis n'était pas très élevé, ce qui est une conclusion grec qui fait intervenir un affranchi dans ce contexte 195•
assez attendue. Elle correspond en tout cas assez bien au type 'IouÀrnç "Epû)Ç àrcEÎŒÛ0Epoç raiou 'louÀÎou Bci00ou dédie
d'inscriptions dans lesquelles ils apparaissent surtout : les l'autel pour le salut de son fils Iaa�<:xç (urcÈp 0m1:11p1.aç
inscriptions de concession et les autels au dieu anonyme. Iaa�aç u1.o[û] a1YcoÛ). Selon cette interprétation, il est donc
Ce dernier type de texte présente d'ailleurs un problème question du fils de C. Iulius Bassus. Mais on peut aussi
intéressant. Comme on le sait sur ces pyrées est gravée une comprendre a{n:oû, c'est-à-dire que Iaeibas est le fils de
inscription dont le texte suit un formulaire très régulier : en Erôs 196, même si cette solution est contredite par la position
général après le nom ou l'appellatif de la divinité (souvent du pronom, qui ne convient pas à un réfléchi 197• Toutefois
« à celui dont le nom est béni à jamais» b1yk smh l'lm '), ce texte diffère aussi des dédicaces en araméen, car l'autel
vient le nom du dédicant qui fait l'autel « pour sa vie et pour n'est pas fait pour la vie du donateur et celle d'autres
celle d'un tel ou d'un tel», habituellement celle de ses personnes, mais seulement pour la vie du fils.
proches parents. Pourtant ce formulaire n'est pas sans On peut remarquer aussi que généralement le statut
ambiguïté dans le cas où le dédicant est un affranchi. En social du dédicant est supérieur ou égal à celui des autres
effet, J. T. Milik pense que« les affranchis n'offraient jamais bénéficiaires, cela incite à conclure que les fils mentionnés
de dédicaces pour leur salut à eux, mais pour le salut de dans ces quelques textes sont bien ceux des affranchis.
leurs maîtres et de leurs familles» 19::i. Cette conclusion, pour Certes, il y a quelques exceptions comme Inv XI, 13 déjà
laquelle il renvoie en particulier aux textes C/S 3996, 4000 cité où apparaît le fils du maître, ou bien C/S 4011 clans lequel
et 4013, met l'accent sur la solidité des liens entre les maîtres les maîtres sont cités comme seconds bénéficiaires ( 'J bywh
et leurs anciens esclaves. wby mrwhy « pour sa vie et pour la vie de ses maîtres»).
189 - Je laisse de côté Haddüdan, affranchi de Bat-Firmôn, car on ne connaît interprétation est d"ailleurs celle du C/S (à propos du texte C/S 3996): « Non
pas le dédicant du texte honorifique sur lequel il apparaît (H. INGHOLT, 1936, pro semetipsis sed pro heris libertos oblaticmenzfecisse ueresimile est. »
p. 88). Selon toute probabilité, il s'agit d'un texte de nature religieuse, plutôt 193 - Comparer pourtant avec DFD, p. 248: il semble cl"après ce qu'écrit
que civique. J. T. Milik, à propos du même texte que l'autel a été fait pour la vie de
190 - À moins qu'on ne considère certains personnages qui ne donnent pas l'affranchi Abnergal et pour celle du fils de son maître. Le latin est moins
de patronymes comme cl'anciens esclaves, ainsi le fameux Worocl; comme ambigu que le français ou l'araméen, comme le montrent les traductions
on l'a vu plus haut, clans l'état actuel de la documentation, le problème de de ces textes clans le CIS: le CIS traduit le 3996 (]'autel a été fait par les
l'origine de ce personnage n'est pas susceptible cl'être résolu. affranchis de Malê et de Lishamsh) 'l hyyhn wjJyy bnyhn « pro so!ute eorum
191 - H. INGHOLT, 1962, p. l 06. « Iulius, fils cl'Aurelius » est sans cloute et solute.fï!iom111 eorum », donc par les affranchis pour la vie des maîtres.
une erreur pour« Iulius Aurelius» : le nom apparaît d'ailleurs sous cette 194 - K. DuKSTRA. 1995. p. 150-151 à propos du même texte CIS 4000.
forme dans 1' autre texte qui concerne le même personnage (H. lNGHOLT, 195 -AAES III, n" 353 (= DFD. p. 236-237).
1935, p. 98, n" VII). On notera d'ailleurs que ce dernier texte (antérieur 196 - C'est la traduction que donne pour ce texte Ch. CLERMONT-G.t,NNEAU,
d'un mois) ne fait aucune allusion à l'analphabétisme de Iulius Aurelius RAO V. p. 178 : « Érôs a fait cet autel pour son fils».
Ogeîlû. 197 - Comparer avec WADDINGTON 2577 : ]a dédicace est faite UTCÈp uyd_ac;
192 - DFD. p. 179. à propos du texte C/S 4001, très lacunaire. La même au-mû Ka['t 0w1�]î.ou Ka't îÉKvcclvl.
194 Les notables de Palmyre
Ces textes sont peut-être aussi explicites parce qu'on voulait sont peut-être donc plutôt des clients que des serviteurs au
être sûr de bien préciser le sens du texte. Cela peut signifier sens strict.
aussi que dans les autres cas il n'y avait pas d'ambiguïté et Ces derniers semblent donc apparaître rarement en
que même s i le nom du maître apparaissait dans compagnie de leurs maîtres, à l'exception de certains reliefs
l'onomastique de l'affranchi, ce n'était pas de lui qu'il où le personnage principal est visiblement entouré par des
s'agissait. Cette interprétation semble correspondre assez serviteurs. Ainsi sur le sarcophage du musée de Palmyre
bien à l'ensemble du corpus des dédicaces « pour la vie» et mentionné au chapitre 1v, il est possible d'interpréter
au fait vérifiable pour les inscriptions funéra ires de certaines des figures comme la représentation de l'entourage
concession que les liens entre affranchis et maîtres sont assez domestique du maître (voir fig. 35). Pourtant leur absence
peu attestés. quasi totale des textes épigraphiques est un phénomène
Les relations directes entre maîtres et serviteurs telles général dans le monde antique, et on a très peu de sources
qu'elles apparaissent par exemple en Inv XI, 13 sont en fait sur cette catégorie de la population. Excepté les quelques
très rares à Palmyre 198• Le principal exemple est celui du exemples qu'on a cités, les serviteurs n'apparaissent vraiment
texte RSP n° 161, texte honorifique fait par Ogeîlû, fils de dans la documentation épigraphique de Palmyre que dans
Moqîmû pour un personnage dont le nom a disparu. Mais à un seul cas, celui des nourrices.
la fin du texte, une phrase est ajoutée : «et il a fait pour On a plusieurs exemples de nourrices qui sont d'ailleurs
Malikû, fils de Haîran, fils de Ogeîlû Aîtîbel son maître, une assez différents les uns des autres. Un des derniers parus est
statue dans le sanctuaire de Baalshamîn» ( w'bd lmlkw br à mettre un peu à part 201• Comme le note l'éditeur, si le relief
byrn br 'gylw ['yt]ybl b'lh :;;lm bt b'J[s]mn). Le texte n'est est de style plutôt palmyrénien, le texte (en latin) est sans
pas très clair et le pronom personnel -h peut aussi bien se doute l'œuvre d'un lapicide d'origine étrangère. D'après
rapporter à Ogeîlû qu'à la personne honorée par le texte. Là l'onomastique de la nourrice (Annia Nice) et celle de la
encore, il est très difficile de trancher et il faut sans doute se personne qui a fait le monument (Baebia Baebiana), on n'a
contenter de cette alternative. La signification précise du pas affaire à des Palmyréniennes, mais plutôt à des femmes
terme b 'lh est assez obscure et l'on a du mal à imaginer venues à cet endroit en relation avec la garnison romaine.
qu'elle pouvait être précisément la nature de leurs Même si Annia Nice est une affranchie, comme le conclut
relations 199• On sait que Malikû (ou plutôt son frère) apparaît avec vraisemblance l'éditeur du texte, elle n'a pas appartenu
dans l'inscription BS n" 34, sans doute parce qu'il a été à une famille de l'oasis. Le cas est tout différent pour un certain
nommé archonte, ce qui indique bien son statut social 200• nombre de nourrices, qui apparaissent souvent sur les mêmes
On ne sait rien sur les deux autres personnages, mais reliefs que leurs maîtres 202, par exemple l'inscription Jnv VIII,
leur onomastique semble ne pas permettre de les considérer 63 sur une plaque de pierre 203• Le texte énumère les membres
comme des affranchis. Le mot«serviteur» n'apparaît pas de la famille, à commencer par le père, puis ses trois fils ;
non plus. Il est éventuellement possible qu'il ait été contenu ensuite viennent la mère des fils et leur nourrice (mrbythwn).
dans la lacune du début du texte, mais rien ne permet de On notera qu'elle n'a pas de patronyme, ce qui serait normal
1' affirmer. On a peut-être ici le même genre de phénomène pour une esclave. Le cas est le même pour Annâ ('n') qui
que pour les textes qui mentionnent des«amis», tels ceux apparaît dans le texte PSn° 210 ou pour la mystérieuse zqtrty
).1.
qu'on a étudiés au chapitre 1v. Les deux autres personnages du texte publié par M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 422 21
198 - On ne considérera pas ici les textes qui utilisent le mot mr' « maître», 'gylw 'ytybl) clans un autre texte du sanctuaire de Baalsharnîn (ES n" 23)
mais qui concernent des personnages dont le rôle politique dépasse Palmyre. daté de 62-63 de notre ère. ce qui permet cle donner une date pour le texte
On emploie en effet le terme pour Oclainat et sa famille ou pour les empereurs RSPn" 161.
ou encore pour les gouverneurs. Le terme est clans ce cas l'équivalent du 201 - H. Heinen, clans K. PARLASCA, 1982, p. 35-37 (voir aussi les remarques
grec c/espotès. terme qui n · est bien sûr pas propre à Palmyre. On a vu ce de K. Parlasca lui-même, p. 21-22).
qu'il en était au chapitre rv. Au contraire. l'utilisation du mot par les habitants 202 - On trouvera clans K. PARLASCA, 1982. p. 31-32, n. 238-247. un certain
de l'oasis pour désigner un des leurs.clans le cadre propre à la cité, relevait nombre de références. Voir aussi H. INGHOLT, 1938, p. 130-132 ; DFD.
d'un autre usage. qui avait peut-être moins à voir avec les traditions gréco p. 176 ; M. GAWLIKOWSKJ, 1971. p. 422-423 avec la note 11.
romaines. 203 - Le texte avait été publié une première fuis par J. C\NTINE.\L'. 1930a.
199 -À moins qu'il ne faille comprendre que le personnage honoré est une p. 542-543. n" 11 .
femme el qu'il faille restituer au début une formule du type ,>lml dh (« cette 204 - Malgré les remarques de H. INGHOLT. 1938. p. 131-132, qui propose,
statue ,, au féminin). comme pour les textes dont il a été question au début de avec réserves.d'y voir dans certains cas des « parents adoptifs ».le sens de
ce chapitre (il manque en effet au moins une ligne d'après l'éditeur). Dans ce « nourrice» au féminin (ou cl'« éducateur» au masculin pour C/S 4478)
cas. on pourrait peut-être comprendre que b'Jh signifie « son mari ». ce qui semble le plus probable pour les inscriptions citées supra (voir l'exemple
est un sens bien attesté de ce mot(voir par exemple C/S 4518 ou ES n" 63). suivant).
Ogeîlû aurait clone dressé une statue de l'épouse et rappellerait qu'il avait fait La même signification(« nourrice») a été reconnue par J. Starcky (voir
la même chose auparavant clans le sanctuaire de Baalshamîn pour le mari. DFD, p. 176 et M. GAWLJKOWSKI, 1971. p. 423. n. 1 I) pour le texte
Le même mot (b'ly) qui avait été lu clans le texte J. CAN TINEAU, 1933, p. 188. CIS 4479 ; en sens contraire, R. Degen. clans K. PARLASCA, 1982, p. 32.
n" 10 a été corrigé et il faut lire plutôt le nom propre b'ly, comme l'ont vu 11. 246.qui préfère suivre le sens clu C/S (nwiordomus). Pour être complet,
J. Starcky (in H. SEYRIG. 1941b. p. 260) et J. T. Milik, DFD. p. 32-33. il faut ajouter à la liste le texte RSP n" 172, même si la lecture du mot
200 - On a un autre fils de Haîran, fils de Ogeîlû Aîtîbel ([. .. br by1]11 br nourrice (mrbt ?) est donnée comme douteuse par l'éditeur.
Chapitre V: Familles, qf!i·anc!zis et esc!m•es de notables 195
Dans ces cas,il est donc tentant de les considérer comme de sa famille,et non,comme c'est le cas ici,clans celui de la
des esclaves restées au service de la famille jusque dans la famille pour laquelle elle travai11e. La même conclusion
tombe. Elles pourraient éventuellement être affranchies,mais s'applique cl'ailleurs pour zqtrty, car elle apparaît sur le relief
on attendrait peut-être qu'elles le précisent dans l'inscription, avec la mère des deux enfants dont elle est la nourrice. Or si
alors qu'il est plus rare que le mot esclave apparaisse. On ceux-ci sont morts (leur nom est suivi de bbl « hélas »),les
notera que dans le troisième cas au moins,la nourrice est au deux femmes sont apparemment toujours vivantes,puisque
service d'une famille de notables, puisqu'il s'agit de la le relief les représente en train de pleurer les défunts 2 1().
famille de Belshûrî, bien connue par de nombreux textes Il y a donc apparemment assez peu de rapports,au moins
(voir l'arbre généalogique dans l'annexe Il est épigraphiques,entre les affranchis et leurs anciens maîtres.
possible que le monument qui la représente soit originaire Le cas est évidemment un peu différent pour les nourrices,
cl' une des tours funéraires de la famille (n os 67 et 68) 205• puisque par leur métier même,elles doivent rester attachées
L'origine étrangère de zqtrly est un autre argument qui à la famille. Mais le cas de la seule nomTice affranchie connue
pourrait inciter à la considérer comme une esclave 206• à ce jour montre qu'elle agit comme les autres affranchis.
Un seul texte pour l'instant présente une nourrice en Ceux qui entourent les notables eux-mêmes apparaissent
faisant état de son statut cl'affranchie. Ce relief de 1'hypogée donc relativement rarement clans la documentation
de Barîkaî (SFP n" 141) est le buste funéraire d'une certaine palmyrénienne. Les exceptions n'en sont que plus
affranchie de Zabdâ, nourrice de Barîkâi Barâ ( 'my remarquables. Il faut noter une très nette différence entre les
brt J11y zbd' mrbyt bzyky br') 207• On notera qu'il n'y a membres de la famille proche (femmes et enfants surtout) et
apparemment pas de Zabdâ dans les membres de la famille ceux qui peuplent l'entourage des notables, en un sens plus
attestés dans le tombeau, mais seulement des Zebîdâ (par large. Ces derniers apparaissent surtout seuls, et excepté
exemple SFP n')S 147-149). Cela incite à penser queAmî n'est certains cas précis,comme celui du serviteur cl'Oclainat,ne
pas une affranchie de cette famille, ce qui correspond aux sont pas en relation explicite avec les notables clans les textes
exemples cités plus haut : les affranchis ne sont pas enterrés qui les concernent. Il y a cl'ailleurs sans cloute une relation
dans la tombe de leur ancien maître,alors que les nourrices de cause à effet, et c'est parce qu'ils étaient
le sont. (momentanément ?) en dehors de la sphère d'influence de
Comme le notent les éditeurs du relief,ce buste présente leur (ancien) maître, que ces serviteurs ou ces affranchis
plusieurs particularités. Les clés attachées à une fibule que peuvent faire inscrire leurs propres textes. Ce milieu apparaît
porteAmî peuvent sembler étonnantes,si l'on considère qu'il relativement indépendant et il permet de donner une image
s'agit de l'insigne cl'une maîtresse de maison 208• Peut-être partielle de catégorie de la population qu'on a peu l'habitude
faut-il considérer le fait qu'on trouve clans la même tombe de voir. Il est en particulier intéressant de noter que les autels
un fils de cette nourrice,Abnergal (SFP n" 140). Le nom ne au dieu anonyme sont souvent le fait de gens modestes
semble pas étonnant pour un fils cl'affranchie. De plus, le cl'origine ethnique variée qui peuvent être des hommes libres,
texte ne fait pas état du père,mais donne seulement le nom des affranchis ou même des femmes. Ces textes renseignent
de la mère, puisqu'on a seulement 'bnrgl br 'my bbl peut-être sur l'autonomisation croissante d'une partie de la
( « Abnergal,fils de Amî,hélas »). De cette matronymie,on population favorisée par la prospérité économique de la ville,
peut comprendre qu'elle n'a pas de mari et queAbnergal est ainsi que par la disparition apparente des références tribales.
peut-être un enfant illégitime. D'autre part, son statut et Au contraire,les femmes de l'élite de la société semblent
l'absence de mari, au moins au moment du texte, peuvent sortir rarement du cercle de famille. Comme on l'a vu,c'est
signifier qu'elle connaît une certaine indépendance : cela toujours en relation avec les hommes de la famille, ou pour
expliquerait la présence des clés. Même si elle appartient à pallier leur éventuelle absence que les femmes apparaissent
une catégorie sociale peu élevée, elle peut néanmoins être clans les textes honorifiques. Le cas de Zénobie est bien sûr
considérée comme une maîtresse de maison à part entière 2119• un peu différent,mais peut en grande partie être expliqué de
On peut aussi ajouter que le sens « nourrice » semble cette manière. La légitimité de son pouvoir est celle qu'elle
s'imposer de lui-même, plutôt que celui de « mère tient cl'Oclainat,et il n'est pas étonnant que les deux textes
adoptive ». On pourrait admettre ce dernier sens seulement jumeaux de la Grande Colonnade ( CIS 3946 et 3947) aient
si Amî était enterrée clans son propre tombeau ou clans celui été inscrits après la mort cl'Oclainat 211, en plaçant ainsi
205 - Sur ces tombeaux de famille, voir au chapitre vr. 209 - Dans son cas, on peut difficilement considérer que la clé est celle du
206 - M. ÜAWLIKOWSKr, 1971. p. 424, n. L propose une origine thrace tombeau : si on peut penser qu'elle était maîtresse de sa propre maison, son
éventuelle. relief funéraire a été découvert clans le tombeau qui appartenait à une autre
207 - Et non« Amî, fille de Harî Zebiclâ » de l'éditeur. famille.
208 - Voir SFP, p. 104 et 106 (où Amî est considérée comme une nièce du 210 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1971, p. 425-426.
fondateur, ce qui repose sur une interprétation erronée de l'épitaphe). Sur 211 - Ces cieux textes sont datés de 271 : les cieux devaient être bilingues.
la clé comme insigne des maîtresses de maison, voir la première partie de mais le grec de CIS 3946 a disparu. Le premier est une cléclicace à Odainat,
ce chapitre. roi des rois, et le second à Zénobie.
196 Les notables de Palmyre
Zénobie dans une continuité dynastique. Les deux textes ont ensemble de signes qui montrent que la situation de Palmyre
été dédiés par Septimius Zabdas et Septimius Zabbai, les dans la seconde partie du 11( siècle a beaucoup évolué, et
deux généraux de l'armée de Palmyre, et leur témoignage que peut-être on a en partie quitté le monde des notables tel
confirme ce que le texte de Zosime (1, 39) dit sur l'appui des qu'il apparaissait depuis le début de la période. Pourtant, le
compagnons d'Odainat à la reine 21 2. D'autre part, l'autre texte du tombeau de famille fondé par Odainat (C/S 4202)
fondement de la légitimité de la reine, comme on 1'a vu, est est tout à fait classique et de ce point de vue, il se comporte
son rôle de« mère du roi des rois» ( 'mh dy mlk mlk'), c'est comme les notables contemporains. Or, peut-être plus que
à-dire de mère de l'héritier d'Odainat (C/S 3971). Mais tout autre construction, les monuments funéraires sont le
Zénobie est un cas isolé, et seule Thomallachis peut lui être lieu d'expression de l'élite de Palmyre et ils placent donc
comparée, mais si 1'on en sait très peu sur elle. On notera Odainat dans une certaine continuité.
néanmoins que ces deux exemples sont situés à un moment Ces monuments ont la particularité d'être familiaux,
où l'influence romaine se fait sentir de manière assez forte à c'est-à-dire un reflet des relations dont on a parlé dans ce
Palmyre (construction de la GrandeColonnade par exemple). chapitre v, et en même temps d'être destinés à être vus par
Du point de vue chronologique d'ailleur s, il est l'ensemble de la population. Ils permettent ainsi d'établir
remarquable que la famille de Odainat, qui est la seule à être un lien entre le domaine privé et le domaine public de
en relation avec des corporations, apparaisse aussi en 1'existence des notables, tout en renseignant sur les relations
Palmyrène avec un de ses serviteurs et donne une des seules entre les notables et leur entourage, ainsi qu'entre les notables
femmes de premier plan dans l'histoire de la ville.C'est un eux-mêmes.
212 - Zos1ME I, 39, cité supra: l'expression grecque est füà 'TWV ÈKElVQ) cn.lVÔVîO.lV avec ÈKElVQ) qui désigne Oclainat.
MONUMENTS POUR
L'étude des monuments funéraires de Palmyre peut pas partie des grandes nécropoles de Palmyre, il sert à mettre
donner une image globale de la société, selon le principe en perspective l'évolution de ces dernières. Il a existé, bien
que la ville des morts est un reflet de la ville des vivants 1
• avant l'apparition des tombeaux des nécropoles, un type de
Le but est de voir de quelle manière les notables de la ville monument funéraire construit qui est en quelque sorte leur
se servent de ces constructions, mais aussi des inscriptions ancêtre. La tradition d'ériger un tombeau pour sa famille est
qui s'y rattachent pour manifester leur pouvoir et leur clone très ancienne et on ne saisit à Palmyre que la fin d'une
influence. On peut partir de l'étude des hypogées, clans longue évolution. Le texte du sanctuaire de Baalshamîn qui
lesquels les catégories sociales sont plus mélangées, avant renseigne sur cette tombe est daté de 11 apr. J.-C. (BS n" 60) 3.
de passer ensuite à celle de formes plus exclusives : dans Si on remonte la longue généalogie, on peut arriver assez
l'ordre chronologique, les tombeaux-tours et les temples haut clans l'époque hellénistique ; cet hypogée du sanctuaire
funéraires. Mais l'étude doit aussi être topographique, et il de Baalshamîn remonte donc au tournant du II e et du(' siècle
faut essayer de comprendre 1a manière dont sont organisées av. J.-C., alors c1ue le premier monument daté dans les
les quatre nécropoles qui entourent la ville, en particulier si différentes nécropoles est une tour, celle d'Atenatan (tour
on y retrouve les structures tribales, caractéristiques de n" 7), à l'extrémité ouest de la vallée des Tombeaux (fig. 65).
certaines étapes de la société de Palmyre. Plus largement, Le premier hypogée dont on ait l'inscription de fondation
Palmyre appartient à l'Empire romain et celui-ci exerce son date des années 81-82 de notre ère ( CIS 4197 Inv VII, 15).
influence sur certaines parties de la population. Les notables Dans l'inscription BS n" 60, la généalogie remonte jusqu'à
cherchent à marquer leur influence sur la société par la septième génération, ce qui prouve sans nul doute la ferme
différents moyens qu'il faut tenter cl'identifier. L'usage du volonté de souligner l'ancienneté de la famille. Cette tombe
grec ou de l'araméen, ou une combinaison des deux, tout est d'un type unique, sans parallèle connu à Palmyre, mais
comme l'utilisation d'un formulaire funéraire et d'une elle prouve l'existence en ce lieu de tombeaux réservés à
architecture inspirés par le monde grec peuvent sans cloute des familles depuis une époque assez ancienne. On verra
s'expliquer par des raisons culturelles (volonté de s'intégrer plus loin des exemples à des périodes plus classiques pour
à la culture dominante, plus valorisante), mais aussi Palmyre. Pourtant un certain nombre de cas montrent que
politiques (volonté de former une élite). Au total, il importe ce principe cl'exclusivité n'était pas la règle absolue, et qu'il
de bien mettre en valeur les moyens employés par les couches existe des exceptions. Les textes de concession attestent ces
sociales les plus élevées de la ville pour différencier leurs partages ; ils sont en particulier relativement nombreux pour
monuments funéraires de ceux du reste de la population, à les hypogées.
un moment où la prospérité économique de Palmyre entraîne
un enrichissement généralisé de l'ensemble des habitants
1. LES SÉPULTURES DES CLASSES MOYENNES
de l'oasis.
Cet exemple prouve clone qu'il a existé, dès les périodes
les plus anciennemenl connues ùe 1 'hisloire de la ville, au
A. LA DIFFÉRENCIATION SOCIALE DANS LES
moins un et sans doute plusieurs monuments funéraires
HYPOGÉES
importants, probablement déjà caractéristiques de différences
Les monuments funéraires sont bien connus et étudiés 2• sociales clans la société de Palmyre. Mais on sait aussi
On y retro uve évidemment les différences sociales qu'existent à la même période des tombes beaucoup moins
caractéristiques de la société qui s'expriment clans ce prestigieuses : les tombes à fosse. Selon M. Gawlikowski,
domaine comme elles s'expriment clans la vie publique de les stèles funéraires simples qui marquent ces tombes
la ville de Palmyre. individuelles à fosse 1 sont les monuments des catégories
On sait par un exemple, dont on ignore malheureusement modestes de la population (p. 35 : « les classes les plus
la date exacte, qu'il existait à Palmyre depuis longtemps des pauvres de la population» ), celles qui, par définition, n'ont
tombeaux construits, appartenant sans doute aux familles et pas accès aux tombes riches des notables que sont les
aux clans prédominants clans la «ville» et sa région. Le tombeaux-tours. On peut déjà parler de différenciation
tombeau découvert clans le sanctuaire de Baalshamîn est situé sociale pour ces stèles, selon le prix relatif des différentes
clans un quartier un peu à l'écart de la ville telle qu'on la catégories en usage simultanément. Ce sont les stèles les
connaît aux premiers siècles de notre ère. Bien qu'il ne fasse plus simples, sans relief, avec seulement une inscription
I - On peut évidemment penser aux cimetières modernes où existent des 3 - Sur cette tombe, voir la publication de R. FELLMANN, 1970 (avec des
phénomènes similaires. compléments, id., I976, p. 213-231 ).
2 - Voir surtout M. GAWLIKOWSKI, I 970b. chapitres II à v. dont les conclusions 4 - M. GAWLIKOWSKI. I 970b, p. 33-40. Sur ce type de monument, voir aussi
sont toujours valables. Poui· la sculpture funéraire et sa chronologie. l'étude M. GAWLIKOWSKI. I972, p. 8-9 et K. PARLASCA, 1976, p. 33-43 et I982.
fondatrice et toujours utilisable est celle de H. lngholt (= PS). Elle a été p. 21-22. On trouve les textes principalement dans Jm, VIH, 1-54 et I75 ;
affinée et précisée sur certains points. en particulier par M. A. R. 0JLLEDGE, voir aussi CJS 4486 et 4487 ; H. INGHOLT, I938. p. II6-I 17 : RSP n"' 2, 6,
1976a. K. PARLASCA, I 976, p. 33-43 et 1982, p. 21-22, et A. Sadurska ( 1977 I73. 179, 184, I87. I 91, I95 et 196. Études des stèles par H. SEYRIG, I 936.
et SFP). Voir aussi G. PLOUG, 1995. p. 137 et M. MoREHART, 1956-1957, p. 68.
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 199
sont rares. Des loculi étaient en vente publique pour le cl' être vendus ou partagés. De plus, ces hypogées
bénéfice du propriétaire, mais on peut clouter que les gens indépendants constituent un système beaucoup plus souple
réellement modestes aient eu accès à ces concessions. que les autres types de tombeaux collectifs.
5 - M. GAWLIKOWSKI. 1970b. p. 164, n. 41 à propos clu texte édité par rapport avec les fonctions sépulcrales de la tour, ce qui n'est pas sûr pour
J. CANTINEAU, 1930a, p. 529. l'ensemble d'entre eux.
6 - On a quelques cas cle stèles de ce genre découvertes clans des tombeaux 8 - H. TAKAYASU et I. TAKURA (éd.), 1994 pour la tombe C de la nécropole sud-est.
familiaux. Comme l'expliquent M. Gawlikowski (1972, p. 8-9, n. 28) et 9 - W. ECK, 1987, p. 67.
K. Parlasca (1982, p. 21). il s'agit sans cloute cle membres cle la famille 10 - Voir M. Gawlikowski qui cite les textes des tours funéraires n'" 21, 67
morts avant la construction de la tombe et dont on a ensuite déplacé le et 68 (M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 175). Sur ces problèmes, voir ù ifàt et
monument funéraire (exemple des textes RSP n'" 2 et 6). aussi l'article de K. MAKOWSKI, 1985, p. 69-117.
7 - M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 77, n. 41, dit d'ailleurs qu'ils n'ont aucun 11 - M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 11O.
200 Les notables de Palmyre
Comme on peut le voir par un certain nombre local de cette forme et le rôle nouveau qu'elle joue dans ces
d'exemples, les hypogées connaissent des histoires tombeaux comme élément de luxe et donc de statut social.
discontinues où les partages et les constructions de nouvelles Le nombre relativement important des textes de
galeries se succèdent 12• K. Makowski émet l'hypothèse que concession (52 textes clans le recueil de M. Gawlikowski)
la plupart des exèdres découvertes clans les hypogées est sans doute à mettre en rapport avec l'enrichissement accru
explorés ont en fait été creusées postérieurement à la mise de cette catégorie de la population de la ville, car la plupart
en service des tombes. L'aménagement entrepris par les cl'entre eux sont postérieurs à 170 ; on en connaît maintenant
fondateurs ne concerne qu'une partie limitée du tombeau, un nombre trop important pour penser que leur répartition
celle qui va être utilisée par ces fondateurs et leur famille chronologique tient seulement au hasard des découvertes. Il
immédiate. Les dates de concession sont les dates auxquelles faut donc essayer de rendre compte de ce changement clans
des travaux sont effectués, souvent en prévision directe d'une les coutumes funéraires des Palmyréniens et d'en trouver
vente. Dans le type primitif des hypogées, on trouvait une une explication. L'étude de quelques exemples d'hypogées
simple galerie avec une seule exèdre et des travées latérales. où ont eu lieu des concessions peut conduire à une image
Ce n'est que clans un second temps que sont ajoutées plus claire des types de différenciations sociales clans les
des galeries et des annexes. Dans les années 130-140, on nécropoles de Palmyre. Ces exemples sont choisis en
constate une rupture 13 avec l'arrêt de la construction de particulier en raison du nombre important de textes trouvés
nouveaux hypogées à galerie simple. Le dernier exemple clans ces tombes. La documentation conservée est néanmoins
daté est l'hypogée de Iarhaî, Atenûrî et Zabclibôl fondé en presque toujours parcellaire.
i-1_
133-134 C'est au même moment que sont construites les On ne connaît qu'un exemple de tombe qui a sans doute
dernières tours funéraires : la plus tardive est celle de conservé l'ensemble de sa documentation épigraphique et
Moqîmû, fils de Zebîclâ, clans la vallée des Tombeaux (lnv IV, figurée. Elle permet cl'avoir une image assez complète des
19 de 128 apr. J.-C.). Par une curieuse coïncidence, c'est de différents événements qui ont marqué son histoire. La
cette période que datent les premiers textes de concession principale difficulté est que la tombe en question, la tombe C
(en 95 pour un hypogée de la nécropole sud-ouest fouillé de la nécropole sud-est, n'a été utilisée apparemment que
par H. Ingholt 15 ; hypogée de Zabdateh, en 131, RSP 11 ° 51), pendant deux générations 16 et ce, par une seule famille. Elle
mais la grande masse des textes est plus tardive. On trouve a dû très vite être abandonnée en raison de risques
encore après les années 130-140 des textes de fondation d'inondations. Elle avait déjà été endommagée avant une
d'hypogées, mais ces derniers sont d'un type nouveau, en première restauration : on y a trouvé seulement sept
forme de T. sculptures funéraires, alors que les restes humains découverts
La troisième période architecturale des hypogées (selon permettent de reconnaître qu'au moins soixante et une
K. MAKOWSKI, 1985, p. 100) commence en même temps que personnes ont été inhumées cl a ns l'hypogée. Comme le
les grandes séries de concession de parties d'hypogées (vers remarque l'éditeur, c'est une grande différence avec cl 'autres
17�-1 RO). PllP Ps:t rn,irqnPP p,ir lP rlPuPlnpppmp1,t rl'11n l1J,,pogées, co1n1ne celui de Iarl1aî (reco11stitué at1 n111séc de
nouveau type d'aménagement: les niches avec triclinium et Damas), dont les parois sont recouvertes de reliefs (fig. 68).
l'emploi du sarcophage. Mais ces tric li nia restent On ne sait pas si, dans le cas de la tombe C, on doit imputer
exceptionnels, ils sont en fait de véritables petits tombeaux cette rareté des sculptures à des difficultés économiques ou
familiaux, à l'intérieur des hypogées communs à plusieurs à une autre cause.
familles. Ces divisions à l'intérieur des tombes qui se Le fondateur et ses deux fils reçoivent une position
généralisent à cette période sont intégrées dans l'art et la prééminente dans la tombe, au fond de la galerie principale,
mentalité des Palmyréniens des classes qu'on pourrait appeler avec leurs bustes funéraires sculptés sur les plaques de
« moyennes ». Le lieu de la différenciation sociale n'est plus fermeture de leur !oculus. Il est étrange que l'un de ces deux
tellement, dans ce cas, la tombe elle-même, mais fils, Shalmê ( slm') soit représenté sur la plaque en compagnie
l'aménagement particulier à la famille, avec une décoration cl' un petit personnage debout au-dessus de son épaule, sans
et des sculptures qui dépendent souvent de la forme aucun doute un enfant. Or le texte gravé donne d'abord son
préexistante du tombeau. On peut prendre l'exemple du nom et son patronyme ( slm' br yrby btl' ), suivis de
sarcophage. C'est une invention occidentale, adaptée par les l'expression habituelle bbl : il ajoute ensuite une formule
Palmyréniens, mais on peut prouver sans mal que ce sont des qui se rapporte à sa mère, mais au lieu de donner le nom de
artistes locaux qui sculptent et décorent ceux qu'on a retrouvés celle-ci, il donne seulement son patronyme (brt ml') et 'm'
dans les hypogées de Palmyre. Cela confirme l'enracinement qui signifie « sa mère ». L'enfant qui est représenté n'a pas
12 - K. MAKOWSKI, 1985, p. 77 : « changer les plans de l' hypogée au fur et le style des sculptures ou l'inscription justifierait une datation antérieure à
à mesure que les besoins ou la mode l'exigeaient». On trouve p. 78-82 du l'an 130. »
même article une liste des hypogées où des aménagements et des travaux 14 - H. INGHOLT, 1938, p. 93-103 ; voir K. MAKOWSKI, 1985, p. 82-83.
ont été effectués après la construction. 15 - H. lNGHOLT, 1974, p. 38.
13 - K. MAKOWSKI, 1985, p. 88 : « La liste des hypogées fouillés et datés 16 - H. TAKAYASU et J. TAKURA (éd.), 1994, p. 139.
[ ...] nous apprend aussi qu'il n'y a aucune galerie latérale ou exèdre dont
Chapitre VI: Des nwnwnents pour/' éternité 201
de nom et la mère qui est nommée n'est pas représentée. Ce ainsi que dans le suivant p. 84) Iulius Aurelius Malê, fils
qui est encore plus étonnant et va contre un certain nombre de Haîran, fils de Malê Haîran Sasan (ywlys 'wrlys ml' br
d'idées reçues, c'est qu'à l'intérieur de ce !oculus, derrière /1yrn br ml' bym ssn).
la plaque, on a découvert les restes de quatre défunts. Il Il faut sans doute comprendre que Malê est le petit-fils
s'agissait de deux hommes adultes (dont un placé là après du Malê qui cédait les concessions entre 193 et 223, et non
crémation), d'une femme et d'un enfant, ce qui, sauf pour le même personnage. Cela expliquerait les différences dans
l'un des hommes, correspond assez bien avec ce qui était l'écriture de la généalogie et l'apparition d'un Malê et d'un
annoncé sur la plaque de fermeture. Il faut noter que ce n'est Haîran avant le nom Sasan qui est celui de l'ancêtre de la
pas le seul loculus de la tombe où plusieurs corps étaient famille. Il apparaît naturel que le fils du premier Malê porte
placés, mais que la plupart cl'entre eux n'étaient pas annoncés le nom de son grand-père (Haîran), tout comme c'est le cas
par une inscription. Ainsi les reconstitutions de l'histoire pour le second Malê : de cette manière, on a clone deux Malê,
des hypogées restent souvent hypothétiques, surtout quand fils de Haîran, à quelques années de distance. Le Haîran,
la tombe a été pillée et n'est pas parvenue intacte jusqu'à père du second Malê, a dû mourir dans les mêmes années
l'époque contemporaine. que son père, cela explique que son fils possède le tombeau
de famille dans les années qui suivent.
Il semble aussi raisonnable de penser que le Iulius
2. LES SUBDIVISIONS DES HYPOGÉES
Aurelius Malê des textes V-VII (p. 82-85) datés de 234-235
Pour l'étude des relations entre les acheteurs des est un unique personnage, même si le dernier texte abrège la
différentes subdivisions dans les hypogées, on peut partir du généalogie et ne l'appelle que Iulius Aurelius Malê, fils de
cas d'un hypogée de la nécropole sud-ouest, celui de Iulius Haîran Malê (ywlys 'wâys ml' br byrn ml').
Aurelius Ma1ê. Rien ne permet d'affirmer que celui-ci Le premier Malê porte les noms de Iulius Aurelius dès
appartienne à la famille des fondateurs 17• L'inscription de 215, ce qui est normal. Il est plus surprenant que, dans les
fondation est de toute façon très lacunaire, seule la date (109 généalogies, son fils soit appelé Haîran, fils de Malê Haîran
apr. J .-C.) est conservée. Les différentes parties du tombeau Sasan en 234 et simplement Haîran Malê en 235, mais qu'un
sont concédées par leurs propriétaires à au moins neuf familles autre texte de 2351'appelle Aurelius Haîran, fils de Sasan 20•
entre 193 et 237 18• Si l'on suit le commentaire de l'éditeur, Cet exemple peut surtout servir à attirer l'attention sur
H. Ingho1t, le propriétaire principal à l'époque des textes l'imprécision des textes palmyréniens (en particulier les
conservés est Iulius Aurelius Malê, fils de Haîran (ywlys inscriptions funéraires) : ce n'est pas parce qu'un personnage
'w1-Jys 1111' br bym). Il faut en fait sans doute distinguer deux n'est pas appelé IuliusAurelius qu'il n'est pas citoyen romain 21•
Malê, fils de Haîran, qui seraient le grand-père et le petit-fils Le cas est un peu semblable pour Iulius Aurelius Maqqaî
(voir l'arbre généalogique de la famille en annexe XVII). Le (ywlys 'wâysmqy), père des acquéreurs de l'exèdre gauche.
premier cède les trois premières concessions (textes II-IV entre Il est appelé Iulius Aurelius en 215, alors qu'il vient de
193 et 223). Il porte dans les trois textes le même nom (Malê, devenir citoyen. Mais dans les deux derniers textes de la
fils de Haîran, fils de Sasan). On notera seulement que dès tombe 22 (mai et décembre 237), il est redevenu simplement
215, selon une habitude bien connue, il ajoute Iulius Aurelius Maqqaî, peut-être parce qu'il est mort ou pour toute autre
devant son nom (textes III-IV en 215 et 223). Le cinquième raison (par manque de place ?). Dans le second des textes,
texte de la série (V, p. 82), suite à une faute d'impression dans son fils a perdu le Iulius pour ne plus être qu'Aurelius Haîran,
l'édition originale, a été mal compris 19• En effet, le texte ne pour une raison ignorée, mais qui a sans doute plus à voir
mentionne pas la cession de trois niches par Iulius Aurelius avec un oubli du lapicide ou un manque de place qu'avec
Haîran, comme le dit le texte imprimé (ywlys 'wrlys byrn), une décision réfléchie.
mais par Iulius Aurelius Malê, fils de Haîran (ywlys 'w1-Jys L'étude des textes de cet hypogée renseigne aussi sur la
ml' br bym). Ce Iulius Aurelius Malê s'appelle dans ce texte, manière dont s'effectuaient ces concessions. C'est à un
17 - On ne voit pas sur quoi se fonde P. PIERSIMONI, 1994a, p. 313, pour 18 - H. lNGHOLT, 1935, p. 75-89 avec les remarques de M. ÜAWLIKOWSKl,
l'affirmer. Sa proposition de voir en Sasan, l'ancêtre de luliusAurelius Malê, 1970b. p. 113-114 (et les textes avec leur traduction, p. 212-213, n'" 28-35).
un membre de la même famille que le Sasan connu pour avoir fondé un Le tombeau s'est écroulé, ce qui a rendu son exploration impossible. Seule
hypogée dans la nécropole sud-est est un peu plus séduisante (sur cette tombe, une chambre a pu être atteinte et étudiée par les archéologues. Toutes les
N. SALIBY, 1992, p. 267-292; SFP, p. 41-69, n"' 45-49 = PAT 1015-1061; inscriptions de concession se trouvent sur le linteau de la porte et clans
voir aussi P. P1ERSIMONI, 1994a avec un arbre généalogique [p. 315] l'entrée de la tombe.
légèrement différent de celui de K. Makowski dans SFP, p. 42). Ce sont en 19 - H. INGHOLT, 1935, p. 82, V corrigé par J. K. STARK, 1971, p. 120 (voir
effet les deux seules occasions où ce nom cl'origine perse, Sasan, est attesté. PAT 0039). La traduction en anglais de H. Ingholt donnait déjà le sens
Néanmoins on ne peut dépasser le stade de l'hypothèse à cause de la grande correct.
fréquence d'un nom comme Malê. Il s'agit peut-être du même «clan», 20 - H. lNGHOLT, 1935, p. 82 et 85, textes V et VII d'une part, et p. 84, VI
descendant du même ancêtre, mais les deux familles ne sont sans doute pas d'autre part.
très proches. Malê Haîran Shoqanâ, époux de Abinft, fille de Tiriclat, fils de 21 - Voir aussi sur la répétition (ou non) de Iulius Aurelius dans les
Iarhaî (m/' byrn ,;qn' et 'bn' brt lyrdt bryr�1y: J. STARCKY et B. DELAVAULT, inscriptions, D. SCHLUMBERGER, l 942- l 943b, p. 59, 11. 2.
1974. p. 70, n" 3) peut aussi appartenir à la même famille: c'est le seul cas 22 - H. lNGHOLT, 1935, p. 86 et 88, VllI et IX.
connu d'association des noms Malê et Haîran.
202 Les notables de Palmyre
parent 23 (q1yb), Taîbbôl (tybwl br 'bd' br tybwl), que la des exèdres droite et gauche, celle du fond étant sans doute
première partie de l'hypogée est cédée (exèdre à droite). Celle conservée par ]a famille de Iulius Aurelius Malê. Les autres
de gauche est donnée, une vingtaine d'années plus tard, à acquéreurs doivent se contenter de parties plus réduites et
d'autres parents, deux frères, Iulius Aurelius Haîran et Iulius on peut sans mal distinguer des niveaux de richesse.
Aurelius Abbâ, fils de Iulius Aurelius Maqqaî, fils de Iarhaî La famille de Abisaî est sans doute assez aisée
(ywlys 'wrlys bym wywlys 'wrlys 'b' bny ywlys 'wrlys mqy puisqu'elle peut se permettre de faire creuser une nouvelle
br yrby). Ce sont les deux plus importantes cessions exèdre et de la décorer avec un certain luxe, alors que les
(H. lNGHOLT, 1935, p. 76-77, textes II-III). Dans ces deux familles de Aurelia Sammaî et Julius Aurelius Zabdibôl sont
premiers cas, ni la terminologie, ni la généalogie ne sans doute beaucoup plus modestes puisqu'elles se
permettent d'identifier exactement les liens de parenté entre contentent d'un petit nombre de travées. Le cas de Halaftâ
les diverses personnes mentionnées comme parentes (ou est révélateur aussi d'une certaine forme d'ascension sociale,
proches) de Malê. puisqu'après des débuts modestes (trois travées), il agrandit
C'est ensuite à des étrangers à la famille que se font les ses possessions dans la tombe. Le reste de l'histoire est
concessions. Il ne s'agit plus d'exèdres complètes, mais malheureusement perdu. On ne peut q ue regretter
seulement d'un certain nombre de travées. Un des acheteurs, l'impossibilité de l'exploration complète de l'hypogée et
Iulius Aurelius Abisaî (ywlys 'wrlys 'bsy br /myn' br bnyn' donc l'absence de tout plan d'ensemble qui aurait rendu plus
br 'g' yrq) s'est vu céder une partie de la paroi droite de la clair le détail des transactions.
galerie où il a fait creuser une niche, sans doute après 223 2�. Les exemples étudiés dans l'ouvrage Les Sculptures
C'est la seule salle de l'ensemble de la tombe qui ait été funéraires de Palmyre(= SFP) par A. Sadurska et A. Bounni
explorée. On y a retrouvé trois sarcophages disposés en sont aussi révélateurs de faits de ce genre. L'hypogée de
triclinium, avec des inscriptions araméennes qui permettent Zabdateh et Moqîmû 29 comporte une exèdre principale dans
d'identifier une partie de la famille de Iulius Aurelius Abisaî 25• l'axe de l'entrée et deux exèdres latérales au nord et au sud
Iulius Aurelius Haîran est le bénéficiaire avec son frère (fig. 69). Le texte de fondation et un texte de concession pour
Abbâ du second transfert de propriété attesté ; à son tour, il l'exèdre nord ( dy m'Jk 'J ymynk, « qui est à ta droite quand
cède des parties de son exèdre de gauche, soit des parois tu entres ») sont conservés 30• Mais en combinant ces textes
entières, soit parfois même deux travées seulement, à des et les épitaphes, on remarque que cette exèdre nord est en
gens qu'on peut identifier comme plus modestes : une fait partagée entre deux familles, celle de Marcus et celle de
femme, Aurelia Sammaî, fille de Lishamsh ( 'wrly' smy brt Sîônâ ; le fils du premier est mentionné dans le texte de
lsms), acquiert deux travées 21'. Halaftâ, fils de Moqîmû Zabdâ concession comme l'acquéreur de l'exèdre nord.
(ywlys 'wrlys /llpt' br mqymw zbd'), acquiert du même Même s'il n'est pas possible de trouver un lien
Haîran une partie de l'exèdre. Il est intéressant de voir que, prosopographique entre elles, il faut noter que l'occupation
deux ans auparavant, Halaftâ avait déjà acquis de Iulius par les deux familles semble plus ou moins contemporaine.
Aurelius Malê trois travées sur la paroi gauche de la tombe 27• La vente à Barateh, fils de Marcus, s'est faite en octobre
D'après les textes, il semble que ces acquisitions permettent 131 (RSP n" S] ), alors que le buste de Malikû, fils de Sîônâ,
à Halaftâ de posséder plusieurs travées d'un seul tenant dans est daté par A. Sadurska et A. Bounni du milieu du ne siècle
cette tombe. Ce personnage prend donc petit à petit une place (RSP n° 69 = SFP 11 ° 179). Les raisons de la revente d'une
plus grande dans l'hypogée. On peut s'interroger sur ce qui partie de l'exèdre par la famille de Marcus restent inconnues.
pousse Malê et Haîran à vendre progressivement une grande Cette dernière conserva pourtant la place d'honneur au fond
partie de leurs propriétés dans cet hypogée. de l'exèdre où se trouvait le lit funéraire. L'autre famille
Ces études de ce qu'on pourrait appeler une micro occupait une place plus modeste dans l'hypogée, sans doute
topographie d'un hypogée de Palmyre permettent d'établir quelques travées seulement. Une quatrième famille possédait
un certain nombre de données sur le niveau social des au moins en partie l'exèdre sud, celle de Corbulon.
possesseurs de cette tombe : sans que ce soit le cas de manière L'onomastique de deux de ces familles est
systématique dans les nécropoles palmyréniennes 2 8, il faut particulièrement intéressante par la présence de noms d'origine
remarquer le rôle prépondérant dévolu à ]a famille (au sens latine. Le père de Barateh s'appelle Marrns (br'th br mrqs,
très large) qui est la première et la mieux servie dans ces RSP 11° 51) ainsi qu'un de ses petits-enfants 11 (mrqs ou mrc1ws
concessions. Ce sont des proches qui prennent possession en transcription araméenne) 12• Un autre petit-fils porte le nom
23 - Mais le terme peut désigner plus simplement un proche. 30 - C!S 4159 et RSP n" 51.
24 - H. lNGHOLT, 1935, p. 78, IV ; voir aussi M. G.4WLIKOWSKI, 1970b, p. 112. 31 - Ou cieux si on suit l'arbre généalogique de K. MAKOWSKI, 1985, p. 120
25 - H. INGHOLT, 1935, p. 79-82, textes a-i. (= n" 2 de SFP, p. 123) qui se fonde sur des raisons de chronologie stylistique.
26 - H. INGHOLT, 1935, p. 88, IX. La reconstruction de M. Gawlikowski dans RSP, p. 36 est différente. Il fait
27 - H. INGHOLT, 1935, p. 84-86, VI-VIII. du deuxième Marcus enterré dans la tombe(= RSP n" 72) un arrière-arrière
28 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 173 : « [ ... ]plus souvent les acquéreurs petit-fils du père du fondateur.
restent étrangers à la famille du propriétaire ». 32 - RSP n'" 51, 63 et 72.
29-SFP,p. 122-136.
Chapitre VI: Des monwnents pour l'éternité 203
de wls (transcrit Walis par l'éditeur du texte), ce qui correspond A. Bounni en font un signe d'influence romaine, sans doute
à une transcription du nom Valens 13• Enfin le texte RSP n° 67 parce que la crémation est une pratique courante à Rome
mentionne une certaine 'tny', sans aucun doute la transcription aux premiers siècles de notre ère, même si elle ne reste
du nom latin féminin Antonia. Il s'agit peut-être de la femme prédominante que jusqu'au milieu du n e siècle. Elle est de
du Marcus figuré sur le lit funéraire avec Walis (= Valens). Ce toute façon assez rare en Syrie, bien qu'on en ait des
dernier serait leur fils, à moins qu'Antonia ne soit en fait une exemples aussi bien dans le Hawrân qu'à Doura-Europos 38•
sœur de Marcus et Valens. Quoi qu'il en soit, le premier Marcus Néanmoins, de quelque manière qu'on reconstruise les
peut être un étranger à Palmyre, venu d'Occident. Ce n'est arbres généalogiques, au bout d'un certain temps l'élément
apparemment pas un citoyen. romain disparaît, effacé par les noms d'origine sémitique.
On peut faire le même genre de remarques pour la famille Les membres des dernières générations connues portent des
de Corbulon qui occupe l'exèdre sud. Le nom Corbulon noms comme Abdastôr, Beeshegâ, Haîran ou Martâ 39• Il est
(transcrit qrblwn dans les textes) 3-+ est celui d'au moins deux d'ailleurs curieux que tous les textes de cet hypogée soient
membres de la famille, le grand-père et son petit-fils. uniquement inscrits en araméen. On aurait pu attendre du
Indubitablement, le nom n'est pas d'origine palmyrénienne, latin ou au moins du grec. L'absence de ces langues incite à
il a peut-être été popularisé dans la région par le général de préférer une origine locale des familles. On pourrait aussi
e
Néron dans la seconde moitié du l , siècle. Avant d'en faire en conclure que les membres de cette famille appartenaient
des« Romains» installés à Palmyre, il faut noter qu'il n'est à des classes moyennes de la société, susceptibles de posséder
pas impossible qu'un nom latin soit adopté par une famille une petite partie d'un tombeau, mais étrangers en grande
locale par un phénomène de mode, à l'exemple des nombreux partie à la culture gréco-latine. Même si Marcus, ancêtre de
noms d'origine iranienne présents dans les textes de Palmyre la famille, est d'origine occidentale, il n'était apparemment
(Worod ou Artaban) 35• pas citoyen romain, en tout cas ses enfants à Palmyre ne
L'existence de trois noms latins dans la famille de l'étaient pas (ou ne s'en vantent pas) et tous les éléments
Marcus peut éventuellement être un argument pour une concordent pour conclure qu'il était bien intégré à Palmyre,
origine étrangère, voire occidentale. Ces noms sont ceux de dans un milieu tout à fait sémitique.
plusieurs membres de la famille (trois Marcus et deux Certains exemples de fonctionn aires romains
Valens). D'autre part, dans l'ensemble des deux familles, (publicains), à partir du milieu dur"' siècle, montrent qu'on
Antonia ('tny') est la seule femme qui ne porte pas un nom est en présence dans plusieurs cas d'un véritable effort
local. Cela peut signifier qu'elle est étrangère (on ne connaît d'intégration -w, puisqu'il s'agit de textes honorifiques ou
pas le nom de son père), car il est plus rare que des funéraires trilingues. Pour ces Romains, l'utilisation de
Palmyréniennes portent des noms non sémitiques. Mais les l'araméen, en particulier dans un contexte funéraire ( comme
traces de romanité s'arrêtent à l'onomastique de certains c'est Je cas pour CIS 4235 et IMP, 11° 113) marque nettement
membres de la famille, si on excepte le buste de Valens, fils leur volonté d'appartenance à la communauté dans laquelle
de Marcus 36, qui serait vêtu à la romaine. ils ont choisi de s'installer définitivement. Néanmoins à la
La présence dans la tombe d'un vase en terre cuite rempli différence des familles de Marcus et de Corbulon, le latin
de cendres et d'ossements humains est une découverte peu résiste peut-être à cause du rapport étroit entre les auteurs
fréquente à Palmyre où la crémation est rare. On en trouve des textes et l'administration impériale. Ce qui est différent
pourtant d'autres exemples, dans la tour de Kîtôt ou bien dans le cas des familles de Marcus et Corbulon, c'est que
dans la tombe C de la nécropole sud-est 37• A. Sadurska et les textes sont unilingues araméens ; les inscriptions
33 RSP n'" 63 et 72. Le nom est absent du recueil de J. K. STARK, I 971. mais cela n'empêche pas qu'il ait été le père d'un Corbulon avant de mourir
La transcription Julius (M. GAWLIKOWSKI, 1987, p. 301, n" 21) est moins (voir ici en annexe XVII deux possibilités de reconstitution).
probable. Voir M. SARTRE, 1985, p. 225-227 sur le nom Valens et sa proximité 35 - Voir le chapitre Il (supra) et E. WILL, 1996, p. 109-115 sur l'exemple
phonétique avec des noms sémitiques (w'/ ou w'f; voir ici, annexe IX). du ou des Worod. Liste d'occurrences clans l'annexe X.
Dans ce même hypogée, une femme s'appelle d'ailleurs w'l'. même s'il 36 - RSP n" 63, p. 131 et fig. 42 ; K. PARLASCA, 1987, p. 280, et
semble qu'elle n'ait aucun lien avec les autres familles (RSP n" 56). M. GAWLIKOWSKI, 1987, p. 301, fig. 21.
34-RSP n'"55, 58-62. Cf. C/S3913 (Tarif), II, 121. Il n'y a qu'un seul 37 - H. TAKAYASU et I. TAKURA (éd.), 1994, p. 140, où des restes de crémation
Corbulon cl' après la reconstruction de SFP, p. l 23, n" 4. Les deux Atetan, fils sont mélangés à des inhumations simples dans les mêmes loculi.
tous deux de Corbulon, peuvent être soit grand-père et petit-fils, soit encore 38 - Voir F. DE VrssrnER, 1963, chapitre III « [nhurnation et crémation»,
cieux frères. Si le premier frère est mort avant la naissance du second, celui-ci p. 17-42. J. M. C. TOYNBEE, 1971, p. 39-42. Pour le Hawrân, A. SARTRE
peut naturellement porter le même nom. C'est l'hypothèse de A. Saclurska et FAuRIAT, 2001, vol. II, p. 227. Pour Doura-Europos, Pre/. Rep. IX, 2 (tour D).
A. Bounni, clans SFP, p. l 24. Mais cela supposerait que le premier ait trouvé 39 - Pour un autre exemple d'homme avec un nom romain (Mucianus) et
la mort très jeune, ce que ne prouve pas absolument le portrait funéraire (ibid., une descendance portant des noms araméens (Aµa8m7ç), voir le texte
fig. l 08), d'autant plus qu'un autre frère Haîran (RSP n" 60) vient ensuite. lm• IV, 9c, sans cloute à la même période que celle où a vécu Barateh, fils
Les datations proposées pour les deux bustes (le premier entre I 50 et 170 et de Marcus.
le second aux alentours de 200) ne permettent pas de trancher clans un sens 40 - li s'agit des textes publiés par IMP, n" 1 I 3 (57/58), par le CJS 4235
ou clans l'autre, on peut seulement dire que le premier Atetan est mort jeune, (58), et pour le II" siècle, lnl' X, 113 ( 174).
204 Les notables de Palmyre
trilingues marquaient un effort d'adaptation par l'utilisation (et à quel âge). De plus l'exemple du portrait de Malikû
de la langue locale, mais conservaient néanmoins le grec et prouve que les bustes attendaient parfois un certain temps
le latin, signe de leur attachement au reste de l'Empire. Ici, avant cl'être employés, ce qui réduit d'autant la précision
ces deux langues ont disparu. des critères chronologiques pour les généalogies.
Toutes les sculptures représentant la famille de Marcus
semblent appartenir à la période qui suit immédiatement la
B. LES TOURS FUNÉRAIRES
concession de l'exèdre -ii_ On peut supposer que tous ou une
partie de ces gens sont morts assez rapidement aux alentours Un des points qui semble le plus assuré dans l'étude des
de 131 . Si on suit la reconstruction généalogique de nécropoles de Palmyre est que les tours funéraires étaient
K. Makowski, on voit que la famille est limitée à trois en général réservées à des familles qui se glorifiaient de leurs
générations, et la dernière, celle d'Abdastôr et de Beeshegâ, ancêtres nobles et mettaient un point d'honneur à rappeler
n'est constituée que d'enfants, morts en bas âge, avant leurs leur lignée. C'est peut-être là que les solidarités claniques,
parents. La famille n'a peut-être pas occupé l'hypogée plus cl'origine nomade, se conservent le mieux, et on peut opposer
d'une trentaine d'années, et semble avoir disparu ensuite. ce phénomène au monde plus mélangé des hypogées
L'autre famille, celle de Sîônâ, qui occupait une partie plus indépendants où les relations sociales sont plus proches de
réduite du tombeau, s'est sans doute installée à peu près à la ce qu'elles sont ailleurs dans l'Empire. Les textes de
fin de cette période. Bien que la famille de Marcus ait fondation des tombeaux rappellent qu'un tel a fait cette tombe
apparemment disparu, 1'installation d'une autre famille au pour lui et pour ses enfants,« à jamais». On a pu aussi établir
même endroit ne signifie pas que la première perde sa place à l'intérieur des tombes quels étaient les ordres de préséance.
prééminente dans l'exèdre. La chronologie de la sculpture
permet en effet de placer l'arrivée de la famille de Sîônâ
1. LA TOUR DE LA FAMILLE D'ELAHBEL
vers les années 160-170. Le seul buste un peu plus ancien,
celui de Malikû, fils de Sîônâ 2 est en effet datable des années
-1 La tour d'Elahbel fournit un bon exemple de tombeau de
130-140, mais le portrait lui-même est postérieur au buste. famille (fig. 1 et 70). Il a été possible de reconstituer la
Il s'agit en fait d'une réfection effectuée vers 160-170, d'un généalogie de la famille et cl'en dresser un arbre, qui regroupe
buste qui avait peut-être attendu quelques années clans les membres enterrés dans cette tour n" 13, car l'inscription
l'officine avant d'être retraité pour être placé dans la tombe de fondation ( C/S 4134 en 1 03) et vingt-quatre textes
comme représentation de Malikû. funéraires (C/S 4135 à 4158) sont conservés -ii_ C'est sans doute
Seule une partie minoritaire de ces quatre familles est pour cette famille qu'on a le plus de renseignements de cet
connue et la majorité des occupants des travées de l'hypogée ordre. On a vu par ailleurs (chapitre u) qu'elle avait participé
n'a pas laissé de traces. Le tombeau a sans cloute été violé à la construction et au fonctionnement du sanctuaire de N abû.
dès l' Antiquité et les quarante-trois travées n'ont fourni que Le principal membre semble bien être l'aîné des quatre
vingt et une sculptures. Cela limite la validité des conclusions frères, Elahbel. Il est citoyen romain (Marcus Ulpius) ; il ne
qu'on peut tirer des vingt-cinq inscriptions conservées, étant le mentionne pas en i û3 lors de ia fondation du tombeau,
donné qu'on ne connaît évidemment même pas la proportion mais il a, de toute façon, reçu la citoyenneté avant 117,
des textes qui ont disparu. De plus, à part la date de fondation comme le prouve son nom. Dans le C/S, J.-B. Chabot
(114 de C/S 4159) et celle de la concession à Barateh (131 explique qu'Elahbel n'est pas l'aîné; il ne porte pas le nom
de RSP 11° 51), toutes les dates sont fondées sur des critères de son grand-père paternel et il est cité en premier dans le
stylistiques. Certes, ceux-ci sont assez bien établis, mais ils texte de fondation en raison de son rôle dirigeant dans
ne donnent pas de date aussi précise qu'une inscription. De l'édification de la tombe. Pourtant il est possible cl'expliquer
plus, les dates données par l'analyse stylistique ne permettent assez facilement pourquoi l'aîné des quatre fondateurs de la
que rarement de donner un âge approximatif pour les tombe porte le nom de son arrière-grand-père paternel et
personnages représentés. Même s'il s'agit de portraits, ils non celui de son grand-père On peut tout cl'abord rappeler
-1-1 _
ne permettent pas de savoir combien de temps après (ou que la mortalité infantile était sans cloute assez importante à
même avant) le personnage représenté est réellement mort Palmyre comme elle l'était clans le reste de l'Empire -is_ Le
41 - SFP, p. 124,et K. MAKOWSKI, 1985,p. 120-122. Le premier né porte le nom de son grand-père paternel. Le suivant prend le
42-RSPn"69(=SFPn" 179,p. 133-134.fig. 78). nom de son grand-père maternel. Le troisième,enfin,porte le nom de son
43 - Différents arbres généalogiques existent pour cette famille. Voir dans arrière grand-père paternel.
le CJS p. 269 ; DFD entre les pages 246 et 247 ; M. GAWLIKOWSKI, 1969b, 45 - P. GARNSEY et R. SALLER,1994,p. 221-222 : l'espérance de vie moyenne
p. 54 avec à chaque fois un certain nombre de variantes tenant aux chez les Romains,comme dans les sociétés préinclustrielles,était cl'environ
incertitudes liées à la fréquence de certains noms clans les familles de 25 ans. « La mortalité infantile devait être très courante,avec un quart des
P almyre et aux mariages entre proches parents. nouveau-nés ne dépassant pas l'âge cl'un an,et peut-être encore une moitié
44 - On trouve dans le CJS, p. 269,un résumé des règles de transmission ne dépassant pas dix ans. »
des noms,établi, entre autres, d'après l'exemple de la famille d'Elahbel.
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 205
premier fils de Wahballat, fils de Manaî Elahbel a dû de Caïus Iulius Haîran qui a obtenu ce privilège " 8• Là aussi,
effectivement s'appeler Manaî comme son grand-père la raison de cet honneur reste inconnue, et on ne peut que
paternel ; le fils suivant a pris le nom de Shokayaî comme suivre D. Schlumberger lorsqu'il écrit que « nous sommes
son grand-père materne1. Ensuite c'est le nom de l'arrière en présence soit de soldats qui, pour la plupart, n'ont jamais
grand-père paternel, Elahbel, qui a servi pour nommer celui revu Palmyre, soit de notables de la ville, qui ont dû rendre,
qui est devenu en 103 le fondateur de la tombe. Si ensuite eux ou leurs pères, des services à l'Empire » "9• Ce rôle
les deux premiers nés sont morts en bas âge, Elahbel est militaire de la famille est peut-être prouvé par l'inscription
devenu l'aîné des enfants survivants et il n'est pas étonnant lnv X, 17 CIS 3962) où un certain E1ahbel appelé aussi
que les noms de Manaî et Shokayaî aient été réutilisés pour Saturninus, fils de Malichus (Elabelus qui et Saturninus
des enfants nés ensuite, c'est-à-dire deux des fondateurs de Maliclû f[ilius]), effectue une dédicace pour un centurion
la tombe. Cette reconstitution est certes hypothétique mais romain. Le nom latin Saturninus et la dédicace en latin à un
au moins aussi probable que celle que propose J.-B. Chabot. militaire romain sont des indices convergents pour donner
La prééminence d'Elahbel semble aussi marquée par le une fonction en liaison avec l'armée impériale à un certain
fait qu'un de ses fils, Belaqab, est nommé dans une des nombre de membres de la famille ( où les noms Elahbel et
inscriptions 'pmlt' du monument funéraire (Inv IV, 27b Malikû sont courants) 50•
= CIS 4157). Ce terme qui n'apparaît pas ailleurs dans les Pourtant il faut rester prudent et noter que les trois
nécropoles de Palmyre est une transcription du grec légions dans lesquelles a servi Celesticus, le centurion
ÈmµEÀ111:11ç («curateur», «chargé de ...») "6• Il s'agit sans honoré, étaient stationnées en Syrie et aux abords de
doute d'une fonction pratiquement officielle. Le cas de l'Euphrate. Il a clone pu avoir des rapports avec des habitants
Belaqab est malheureusement le seul exemple qu'on ait de de l'oasis qui n'étaient pas nécessairement des militaires.
cette fonction, mais on voit assez bien à quoi elle On peut par exemple comparer les textes lnv 22 et X,
correspondait. Il fallait veiller à l'entretien de la tour et à 125. Dans le premier, le dénommé Aurelius Mare as
son bon état et sans doute aussi véiifier que les gens qu'on (AùpriÀwç Mapwç) qui honore un officier romain est lui
plaçait dans la tombe correspondaient bien aux critères même citoyen et peut-être aussi militaire. Dans le second,
d'admission ( appartenance à la famille en particulier) établis Zabdibôl, fils de Zabdibôl (Za�fü�wÀoç Za�fo�roÀou 1:où
par les fondateurs. On ne sait pas si Belaqab eut des Za�8aa8ouç 1:oû AKKa�EÀou), n'est certainement pas
successeurs dans cette fonction ni s'il s'agissait d'une charge citoyen, et rien n'indique non plus qu'il soit militaire.
courante dans les nécropoles de Palmyre. Pourtant, il honore un préfet d'une aile de cavalerie stationnée
Pour le reste, on ne connaît pratiquement rien de la à Palmyre. On le voit, différents cas de figure peuvent se
carrière d'Elahbel, à part son élévation à la citoyenneté dans présenter et les militaires ne sont pas les seuls à honorer des
les premières années du ne siècle. J. T. Milik (DFD p. 228) officiers romains 51•
explique qu'Elahbel paraît avoir accompli vingt-cinq ans de Deux des frères d'Elahbel occupent également des
service militaire avant de se marier et d'avoir des enfants. positions prééminentes clans la cité. Le dernier, Malikû est
C'est possible, mais aucun indice ne permet de le confirmer ; honoré par le Conseil et le Peuple de Palmyre clans le
un certain nombre de parallèles familiaux apportent pourtant sanctuaire de Bel (CIS 3921) en 120-121. Comme souvent,
quelques éléments. on ne connaît pas les raisons de ces honneurs, mais ce texte
En avril 108, un certain Caius Iulius Haîran, fils fait partie d'une série de dédicaces placées dans le sanctuaire
d'Elahbel, de la tribu Fabia, très certainement un cousin des de Bel, centre religieux de la cité, ce qui ne pouvait que
quatre frères, est honoré par la Conseil et le Peuple. Il fait renforcer les honneurs ainsi conférés. Un autre des frères,
partie de la première famille à avoir reçu la citoyenneté Shokayaî était d'ailleurs sans cloute le symposiarque
romaine à Palmyre H_ Même s'il s'agit sans doute d'une Shokayaî fils de Wahballat des tessères RTP 376 et 825 52•
citoyenneté qui remonte à l'empereur Caligula et non à Ce même personnage est honoré par le Conseil dans un texte
Auguste, cela prouve quand même que la famille fait partie encore inédit du sanctuaire de Nabû 53 en 113-114.
de la notabilité de Palmyre depuis longtemps ( depuis la Malheureusement bien peu des textes concernant la
première moitié du!°' siècle). C'est sans cloute le grand-père famille sont datés, et on ne la connaît en fait de manière
46 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. l 75. Le mot apparaît sous la forme comme date (cl' après l'écriture), lem' siècle, ce qui exclurait l'identification
abstraite ( 'pmltw =«curatelle ») clans les textes CIS 3968 (Inv V I, 6) et de J. T. Milik, mais leur conclusion est fondée uniquement sur des critères
3976 pour désigner des charges apparemment religieuses. paléographiques.
47 - Inv X, 129. Ce personnage porte d'ailleurs le numéro I clans la liste de 49 - D. ScI-ILUMBERGER, ] 942- J 943b, p. 53-54.
D. ScHLUMBERGER, l 942-l 943b, p. 66. La famille tient sa citoyenneté soit 50 - Pour la date de ce texte, voir annexe XII, à propos de Celesticus.
cl'Auguste. soit de Caligula. 5 l - Voir aussi le texte lnv X, 128 où Marcus Ulpius Iarhaî dédie une statue
48 - Même conclusion clans DFD, p. 244-245 ; l'identification faite par à un préfet d'aile, ou encore, le texte fm, X, 81 où c'est son frère, Abgar,
J. T. Milik entre ce grand-père et le père du Elahbel Haîran du texte Palmyre qui fait la même chose pour un centurion.
IL n" L p. 237-238 (fig. 288 et M. GAWLIKOWSKI, 1987, p. 306 n" 27) est 52 - RTP p. 203 et DFD, p. 227-228.
tentante. Les premiers éditeurs du texte du camp de Dioclétien donnent 53 - A. BouNNI. 1986, n" 2.
206 les notables de Palmyre
précise que pendant une cinquantaine d'années. Le tombeau Deux des plus belles tours funéraires de Palmyre,
est fondé par quatre frères en 103. Ils sont, à ce moment-là, construites entre 83 (pour celle d'Elahbel, 11° 13) et 118 (pour
âgés sans doute d'une quarantaine d'années. On suit ensuite celle d'Obaîhan, 11° 164) sont aussi l'œuvre de citoyens
la famille jusqu'à la fin du premier tiers du ne siècle. Ensuite romains. La richesse, la notabilité s'expriment par ce biais,
elle disparaît des documents.C'est le lot courant des grandes et parallèlement elles sont reconnues par le pouvoir
familles de Palmyre de disparaître sans laisser de traces.C'est provincial. On a vu que la famille d'Elahbel est connue par
le sort qui a touché aussi bien celle de Marcus Ulpius Iarhaî ailleurs ; ce n'est pas le cas pour celle de Publius Aelius
que celle de Soados quelques décennies après celle Obaîhan, mais il n'est pas étonnant qu'il y ait des rapports
d'Elahbel. Pour cette dernière, on aurait cependant pu espérer étroits entre les gens honorés de la citoyenneté et les grands
continuer à suivre les descendants des quatre frères. L'arbre monuments funéraires. Même si, sans doute par le hasard
généalogique tel qu'il peut être reconstitué est en effet de la documentation, Obaîhan n'est pas connu, le fait qu'il
particulièrement bien fourni ; on connaît au moins quatorze soit citoyen romain le place parmi les notables de l'oasis au
enfants des quatre frères et encore trois ou quatre moment où il fonde la tour n° 164 et son souvenir reste vivant
représentants de la génération suivante. parmi ses descendants. En effet ceux-ci rappellent que leur
Inversement, on peut identifier un certain nombre des aïeul (sans doute leur grand-père ou leur arrière-grand-père)
ancêtres d'Elahbel et de ses frères, au moins pour des était déjà citoyen un siècle auparavant puisqu'ils mentionnent
branches collatérales qui apparaissent aussi ailleurs à ses tria nomina dans le texte araméen de concession 55• Il y a
Palmyre (voir plus haut pour la branche de Caius Iulius sans nul doute une certaine fierté de la part de ces
Elahbel). On a vu aussi au chapitre précédent que la mère Palmyréniens à rappeler que leur ancêtre était déjà citoyen
d'Elahbel appartenait à une famille connue depuis la romain, alors que cette citoyenneté a touché la majorité des
première moitié du (' siècle. habitants de l'Empire à partir de 212, ce qui la rend alors
Dans l'ensemble, on a du mal à avoir des renseignements beaucoup moins exceptionnelle. Il suffit de rappeler le faible
précis sur les activités et le statut social de la famille nombre de citoyens connus à Palmyre pour les années qui
d'Elahbel avant les dernières années du I"' siècle. Ensuite, la précèdent le m e siècle. Cet honneur devait donc représenter
famille est bien intégrée parmi les notables de Palmyre. Il quelque chose d'important dans la société palmyrénienne,
est intéressant pourtant de noter que les années dans et même si on ne connaît personne de la famille d'Obaîhan
lesquelles la famille se distingue du point de vue civique qui se soit distingué particulièrement entre 118 et 212, la
sont postérieures à la construction de la tombe. famille a dû garder de ce fait un certain prestige, y compris
dans les années qui suivirent immédiatement la décision de
Caracalla en 212.
2. LES CONCESSIONS DANS LES TOURS
Après cette date, les descendants d' Obaîhan
On a vu l'importance des phénomènes de concession et abandonnèrent apparemment les tria nomina de leur ancêtre
de revente dans les nécropoles de Palmyre pour les hypogées, pour adopter comme tous les citoyens palmyréniens connus
mais la question se posait aussi pour les tours funéraires ; à l'heure actuelle les noms de Iulius Aurelius 56• Mais ce
on peut prendre l'exemple de la tour n" 164, fondée en avril souci de rappeler la gloire de leur ancêtre peut laisser penser
118 s..r_ La tour est située dans la nécropole nord, au pied et à que le texte de concession Inv VII, l b est sans doute de peu
l'est du Djebel el-Husayniyet. Le texte de concession n'est postérieur à 212. En effet, la famille, pour sa gloire
malheureusement pas daté, mais il est postérieur d'au moins personnelle, rappelle qu'elle est de noblesse ancienne face
un siècle à la fondation de la tour puisque les différentes aux « parvenus de la citoyenneté » qui l'entourent. C'est un
personnes dont les noms sont conservés s'appellent Iulii phénomène connu. Face à Iulius Aurelius Taîmarsû qui ne
Aurelii. La concession de ces quelques loculi est donc peut se porter acquéreur que d'un ou deux loculi, la famille
postérieure à 212. La tour reste ainsi une possession de la a besoin de se remettre sous le patronage de son ancêtre
famille pendant toute cette période. La tour, très abîmée à célèbre. Le nom et la citoyenneté de ce dernier sont d'ailleurs
l'heure actuelle, était l'une des plus somptueuses de Palmyre. affichés dans l'inscription bilingue qui est sur la même pierre,
C'est l'avant-dernière tour datée (la dernière est la tour 11 ° 34 juste au-dessus.
de 128 dans la vallée des Tombeaux). Le fait qu'elle soit On a affaire ici à une manifestation claire d'un certain
grande et riche s'accorde bien avec le statut de citoyen romain snobisme des notables de Palmyre quand il s'agit des signes
du fondateur. Celui-ci, Publius Aelius Obaîhan, fait partie extérieurs de la notabilité. On se vante non seulement d'avoir
des plus anciens citoyens romains de Palmyre. eu un ancêtre portant un nom célèbre mais aussi, ce qui est
54 - Texte de fondation, /m 1 VII, 1 a ( C/S 4162) et texte de concession lnv VII, Taîmarsû et à un Iulius Aurelius dont le nom a disparu).
1 b (il faut tenir compte de la correction apportée par M. GAWLIKOWSKI, 1970b, 55 - lnv VII, 1 b, ligne 2: pplws 'lys 'bhyn brifm'wn, c'est-à-dire« Publius
p. 93, n. 87: l'araméen ywly' 'wrly' [des lignes 1 et 2] est un pluriel, il Aelius Obaîhan, fils de Shimôn ».
s'agit donc de deux descendants du fondateur, Iulius Aurelius Obaîhan et 56 - S ur ce phénomène et ses expl ications, voir entre autres
Julius Aurelius Malikû, qui vendent une partie de la tombe à Julius Aurelius D. SCHLUMBERGER, l 942- l 943a et b.
Chapitre VI: Des monuments pour /'éternité 207
peut-être au moins aussi important dans le cas de la tour On connaît des cas où des affranchis et des esclaves
11° 164,on se vante du fait que cet ancêtre est le fondateur de accompagnent leurs maîtres. En 40 de notre ère, la tour de
la tour ; celle-ci a donc toujours appartenu à la famille. Kîtôt (n" 44) est construite et, sur la façade, son fondateur
Quelles que soient sans doute les difficultés de la famille installe une niche à relief avec les images (sans doute
(qui conduisent cl'ailleurs à cette vente), ce fait est à rappeler $1my' en araméen,mais le texte C/S 4115b lm• IV, 19b est
dans l'inscription, sans doute pour montrer la différence de lacunaire) de son fils, de sa femme et la sienne propre. Il
statut entre l'acheteur et le vendeur. Quand ils veulent ajoute celle de son serviteur (ou esclave: 'lym) 58• Il s'agit
désigner Publius Ae1ius Obaîhan,ses descendants l'appellent peut-être d'ancêtres de la mère d'Elahbel (voir l'arbre
juste de son nom suivi de« fils de Shimôn ». généalogique en annexe mais ce qui peut arrêter au
On peut comparer avec la généalogie plus longue du premier chef ici, c'est cette mention cl' un serviteur ou
texte de fondation, où ce même personnage rappelle ses esclave. Le mot 'lym se trouve aussi clans le Tarif municipal
ancêtres jusqu'à son arrière-grand-père Nûrbel, donc la (C/S3913, 2,4,6 et86).
quatrième génération (si aucune génération n'a été omise Dans le texte de la tour n° 44, la mention de l'esclave se
comme cela arrive parfois) 57• Le principe consiste trouve sur le relief dans une niche extérieure, mais pas clans
généralement à remonter jusqu'à un ancêtre célèbre, une l'inscription de fondation proprement dite. Il y a clone une
figure importante qui a marqué les esprits et qu'on donne différence entre la théorie (]a destination officielle de la tour)
comme figure fondatrice du clan. On peut se demander si et la pratique,c'est-à-dire la présence parmi les défunts placés
justement dans le cas de cette famille, il n'y a pas eu une clans les tombeaux de membres du cercle familial un peu élargi.
sorte de transmission de cette fonction entre les générations. Ce texte apporte un argument supplémentaire à la théorie qui
La figure prééminente qu'était P. Aelius Obaîhan a remplacé voit clans ces tombeaux des tombes destinées en fait à la famille
l'ancêtre Nûrbel,et on n'éprouve plus le besoin de remonter au sens large, avec non seulement les descendants directs du
plus haut. De plus le texte de fondation de la tombe avec la fondateur, mais aussi tous les gens qui dépendaient de lui,
liste des ancêtres plus anciens est tout proche,juste au-dessus. esclaves,affranchis et même peut-être clients. On peut rappeler
On se contente de donner le nom du père cl'Obaîhan pour à ce sujet que clans les grands tombeaux,les tours en particulier,
lever toute ambiguïté mais ce dernier devient en quelque plus de 200 défunts pouvaient trouver place sY_ Certains
sorte l'ancêtre tutélaire de toute la famille. voudraient même tirer argument de ces chiffres pour calculer
On voit ce que cela peut apprendre sur les phénomènes la population de Palmyre.
cl' attribution du nom clans les familles de Palmyre. Le nom du Pourtant 1' examen des textes présents clans les
clan peut changer facilement selon les mérites respectifs des tombes ne permet que rarement de telles conclusions sur
ancêtres et aussi selon l'éloignement plus ou moins grand et le nombre d'habitants de la viUe. En dehors du texte cité
l'oubli qui en découle parfois. Le nom Nûrbel n'évoquait sans plus haut et qui parle d'un serviteur, les mentions de
cloute plus rien sept ou huit générations plus tard,quels qu'aient dépendants des familles de fondateurs sont extrêmement
été ses mérites à l'origine. Obaîhan, lui, était beaucoup moins rares. On trouve quelques affranchis clans les textes
éloigné,et possédait le double avantage cl'avoir été le premier funéraires (voir le chapitre précédent), en particulier parmi
citoyen romain de la famille et cl'avoir fondé la tour funéraire les gens qui prennent des concessions dans le
qui justement était en question dans la transaction. C'est clone fameux hypogée de Malikû fouillé par H. Ingholt clans les
tout naturellement qu'il devenait l'ancêtre important de la années 1924-1925 60• Mais comme on l'a vu, ces affranchis
famille. Il faut ajouter que le premier personnage nommé lors qui achètent à un propriétaire une ou des places clans la
de la transaction, Iulius Aurelius Obaîhan tirait justement son tombe pour eux et pour leurs enfants, ne sont jamais
nom de cet ancêtre ; il était peut-être l'aîné des petits-fils,et il cl'anciens esclaves du propriétaire de la tombe. On voit ce
était facile pour quelqu'un portant ces noms de se mettre sous que cela peut apprendre sur le statut des affranchis, c'est-à
le patronage symbolique d'un tel ancêtre. clire leur autonomie assez grande par rapport à leur maître,
puisqu'ils n'ont pas à dépendre de lui clans sa dernière
demeure (ou au contraire n'ont pas le droit de partager la
3. ÜRIGINES SOCIALES ET FAMILIALES
même sépulture que lui !) et qu'il existe des limitations. Tous
L'appartenance sociale des différentes personnes qui ont les affranchis ne sont clone pas susceptibles cl'être ensevelis
trouvé leur dernier séjour dans les tombes est révélatrice. clans la tombe de leur ancien maître 61•
57 - Le grec donne ITémÀwç AÏÀ1oç O�mcxvriç I:u�Lwvou wû O�mcxvou 60 - Textes clans M. ÜAWL!KOWSKl, 1970b. p. 207-211, n° 12 (H. INGI-JOLT,
wû Noup�llÀOU, et l'maméen 'byhn brsm'wn br 'byhn brmvrbl. [935, p. 91, Il), 17 (H. lNGHOLT, 1935, p. 98, VII), 18 (H. lNGHOLT, 1962,
58 - On peut rappeler à ce sujet les remarques de K. Makowski ( 1985. p. 73) p. 106), 19 (H. lNGHOLT, 1935, p. 99, VIII).
sur la double fonction du banquet sculpté de Kîtôt (à l'extérieur, à 10 m de 61 - Pour la situation clans le Hawrân, voir A. SARTRE-FAURIAT, 2001, vol. II,
haut) : décorative et commémorative («glorifier la mémoire du fondateur, p. 177-180. Là aussi, les sépultures sont exclusivement familiales. mais
sa richesse et générosité »). contrairement à Palmyre, elles ne mentionnent pas les générations après
59 - Voir M. GAWUKOWSK!, 1970b, p. 91. qui donne le chiffre d'environ les petits-enfants.
300 pour la tour cl'Elahbel.
208 Les notables de Palmyre
C'est une différence assez grande avec d'autres parties et les siens» (sibi et suis, et EŒDîQ) ica't 101ç ifümç), mais le
du monde romain, en particulier l'Italie. On peut citer texte araméen modifie la formulation traditionnelle : « pour
l'exemple d'Ostie où une grande majorité des inscriptions de lui et ses enfants et les enfants de sa maison» (Jh wlbnwhy
fondation de tombeaux de « famille» se distingue par la wlbny byth). On peut sans doute expliquer l'originalité de
formule« sibi et suis et libertis libertabus posterisque». La ce texte par l'origine étrangère de Chrysanthos et la formule
fréquence de la formule semble bien indiquer qu'il s'agit araméenne qui signifie en fait « sa famille » comme une
quand même d'une famille assez élargie dont les affranchis traduction plus ou moins fidèle du suis latin. Les mêmes
font partie 62• En Asie Mineure, la situation décrite par termes sibi et suis et ÉamoÎç ica't 101-ç 181mç sont d'ailleurs
J. Kubinska semble aussi sensiblement différente de celle de utilisés dans un texte presque exactement contemporain 68
Palmyre:« On s'aperçoit que la majorité des tombeaux sont qui, lui aussi, est le fait d'étrangers à Palmyre, plus
des tombeaux de famille, et cela clans le sens le plus large précisément de deux affranchis, sans doute présents à cet
du mot : les enfants recueillis, les affranchis et les esclaves endroit pour le service impérial. L'un cl' entre eux, C. Virius
en font partie r ...
l. Les affranchis et les enfants Alcimus est sans aucun cloute un des co11ecteurs d'impôt
recueillis occupent beaucoup de place dans les inscriptions mentionnés dans le Tarif (C/S 3913, 1. 78 de l'araméen).
funéraires ; les esclaves sont mentionnés d'une manière Les exemples d'hypogées cités plus haut montrent aussi
relativement rare.» 63 Néanmoins beaucoup des textes cités que la spéculation avait peut-être sa place lors de la conception
par l'auteur limitent l'usage du tombeau au fondateur, à sa de certains tombeaux souterrains. Pourtant, que la famille
femme et à leurs enfants et petits-enfants 64• Certains même réduite soit la première visée renseigne en outre sur l'idéologie
nomment précisément quelques personnes qui n'appartiennent des grandes familles palmyréniennes. On a vu l'importance
pas directement à ce cercle relativement étroit, mais qui très grande pour e11es des ascendants, le souci continu de se
peuvent pourtant« profiter» du droit à la sépulture 65• rattacher à des ancêtres célèbres, à un clan. En parallèle, il
Les textes de fondation, tout comme les textes de semble donc bien que le souci de la descendance qui vient
concession sont clairs. Les tombes sont construites par une perpétuer la famille se manifeste de cette manière et que l'un
ou plusieurs personnes apparentées, pour elles-mêmes, leurs des buts de ces fondateurs de tombeaux, en même temps
enfants et les enfants de leurs enfants (lhwn wlbnyhwn wlbn' fondateurs, ou refondateurs, de famille, soit cl'avoir une
bnyhwn), formule classique dont on trouve p arfois descendance la plus nombreuse possible. On pense bien sûr
l'équivalent grec (i:améi) icaî. uio1ç icaî. uiwvoiç icaî. au fameux passage de la Genèse où Yahvé promet à Abraham
Èyyôvmç) 66• La formule est donc sans doute à prendre dans que ses descendants seront aussi nombreux que les grains de
un sens assez strict, et il faut surtout expliquer l'ampleur sable (Gen. 22, 17), mais ce trait n'est évidemment pas propre
extraordinaire des tombeaux par le souci de faire de la place aux sociétés sémitiques anciennes.
à cette descendance pour les générations à venir. Il ne s'agit Au fur et à mesure que le temps s'avance, les mentions
pas tant de la fami11e au sens large, contemporaine du de la tribu se font plus rares m ; cela est vrai aussi pour les
fondateur, que de 1'ensemble des descendants, �� pour textes funéraires. Mais on peut, je crois, a11er plus loin et noter
toujours» (Ek 10 rravîEÀÉç ou l'Jm '). Certes, le texte de que même les textes de fondation les plus anciens ne
fondation est parfois un peu plus précis et restreint le cercle mentionnent la tribu du fondateur que de façon épisodique 70•
familial aux seuls descendants mâles 7 ou bien l'élargit à
ri Ce qui est mentionné le plus souvent, c'est le nom de l'ancêtre,
certaines personnes comme la mère ou les frères (/m' IV, 7) membre le plus éloigné de généalogies p arfois assez
ou encore l'oncle (1. CANTINEAU, 1 930a, p. 536, n" 6). développées. On assiste, clans le domaine funéraire comme
Une des exceptions les plus marquantes, clans le texte ailleurs, à une sorte de recentrage sur la famil1e étroite. C'est
trilingue CIS 4235 (= lnv VIII, 57), est le fait d'un étranger un lieu privilégié pour observer comment les vieilles solidarités
à Palmyre (fig. 71). Ce texte précise quels sont les tribales, claniques avant d'être familiales, disparaissent pour
bénéficiaires du tombeau, en latin et en grec : « pour lui laisser la place à une conception de la famille plus proche de
même (c'est-à-dire le fondateur Lucius Spedius Chrysanthos) ce1le qu'on connaît à Rome (voir plus loin).
62 - Voir CIL XIV 4759 et suivants. 67 Voir par exemple les n'" 33. 49. 57. 62. 67. 69 et 79 clans
63 - J. KL BINSK.\, ] 968. p. ] 62-] 63. M. GAWLIKOWSKI,1970b, p. 192-204 (textes de fondation). On retrouve des
64 - Par exemple TAMII. 938, 939. 941, 949-950 pour la Lycie ; ou encore exemples du même type pour les textes de concessions.
/v!A/v!A VIII . n" 534 à Aphrodisias. 68 - //v!P,n" 113.
65 - TA/vl II. 951-953. 69 - Voir par exemple D. Sc111.utv1BERGER. 1971. p. 126, n. 1 .
66 - M. G..\WLIKOWSKI. 1970b, p. 169-171, sur la formule et ses variantes. 70 - Dans M. GAWLIKOWSKI, 1970b. p. 184-204, parmi les 12 premiers textes
Parmi les sept textes cités par l'auteur qui ne mentionnent pas la de fondation (avant 70 de notre ère). un seul (pour un publicain affranchi)
descendance, trois font partie des plus anciens témoignages sur ces ne mentionne pas la tribu. Ensuite la tribu n'est mentionnée que rarement.
fondations (n"' 1. 3 et 5,p. 184-185) , avant peut-être que la formule ne soit Le texte n" 15 (/m' VII. 6 = CIS 4122) donne en grec cpuÀ.llç KÀ.cxu8la8oç
fixée et entièrement entrée clans les mœurs. Une formule à peu près mais ne donne pas d'équivalent en palmyrénien. Les textes n'" 20. 27, 53
équivalente existe dans les inscriptions nabatéennes. par exemple �t Hégra, (lm· VII, 5 de 159) sont les seuls par la suite à indiquer la tribu. Celle-ci ne
CIS II. 202 : lnp.;h wbnwhy pbnth wylclhm ( « pour lui-même et ses enfants figure jamais dans les textes de concession.
et ses filles et leurs descendants » ).
Chapitre VI: Des monwnents pour l'éternité 209
Tout ce qui précède ne veut pas dire que seuls les Il est seulement étonnant dans ce cas que les linteaux des
membres de la famille étroite trouvaient réellement place autres pièces n'aient pas été inscrits de la même façon.
dans les tombeaux des grandes familles palmyréniennes. Inversement les hypogées sous les tours pouvaient
Rien n'empêche que des esclaves ou des serviteurs aient pu recevoir les membres les moins importants du clan ou de la
reposer dans la tour d'Elahbel ou de tel ou tel notable de famille. Tout cela reste du domaine de h"potLlt-':=:;e. , mais
l'oasis. Pourtant, seules quelques rares inscriptions comme le nombre de textes funéraires conservés est
mentionnent explicitement leur présence ou même, ce qui considérable, il faut conclure que ces éventuels cousins
est plus important, la possibilité de leur présence. Seuls les n'avaient sans cloute même pas droit à la mention de leur
membres importants de la famille sont dignes d'être nommés nom dans les inscriptions du tombeau. Il faut noter
dans les textes de fondation (il en est de même dans les textes qu'apparemment la crypte située sous la tour de Jamblique
de concession). n'a jamais été utilisée 73•
L'exemple de la tombe C prouve qu'au moins dans Les quelques textes de malédiction et d'interdiction
certains tombeaux, une grande partie des défunts étaient qu'on a conservés prouvent qu'on tentait parfois de mettre
placés dans les loculi de manière anonyme. Il s'agit dans ce des étrangers dans ces tombes. Cela devait arriver
cas-là d'un hypogée, mais il semble hautement probable qu'il relativement souvent quand la famille du fondateur avait
en ait été de même dans certaines tours. Pourtant, seuls les disparu, mais, là encore, on n'a pas de textes qui pourraient
membres de la famille au sens étroit sont nommés et permettre d'éclaircir l'histoire des tombeaux à ce moment
représentés par les bustes et les inscriptions funéraires : c'est là. L'histoire de la famille d' Elahbel - on l'a vu
à eux qu'on accordait de l'importance, et non aux autres. précédemment- n'est connue que de 103 à 121 7·\ soit en
Il se peut aussi qu'il y ait eu une différenciation au sein raison de l'état actuel de la documentation, soit parce qu'on
des familles et que certains des cousins moins fortunés aient n'a pas pu ou su reconnaître d'autres branches de la famille,
trouvé place à l'étage, alors que la pièce d'entrée la plus ou encore parce que certains des descendants des quatre
décorée était réservée aux fondateurs et à leurs descendants frères ne mentionnent plus tous leurs ancêtres.
directs 71• L a disposition hiérarchique des membres de la En tout état de cause, les fouilles pratiquées dans la
famille est la plus probable, et le luxe de la décoration de tombe 75 ont prouvé d'abord que la tour n'a jamais été utilisée
certains étages des tours appuie cette interprétation. de manière complète (en particulier l'étage souterrain), mais
Cette disposition pouvait se retrouver à tous les étages. aussi que certains des tissus retrouvés sont peut-être plus
L'existence dans plusieurs des tours les plus luxueuses de récents que la première moitié du u" siècle. Rien n'exclut a
chambres réservées à des sarcophages aux différents étages priori que la famille ait survécu au-delà des dates limites
en est une preuve. Cette pratique est attestée pour la tour de connues par les inscriptions, et qu'elle ait donc continué à
Kîtôt (n" 44), mais seulement pour les deux derniers étages placer ses morts dans la tombe de leurs ancêtres, sans qu'il y
conservés ; elle semble systématique ensuite comme dans ait d'ailleurs de remplacements des vieux corps par de plus
les tours de Jamblique (n° 51) et d'Elahbel (n° 13) 72• Les récents. En effet, on n'a pas d'attestations d'ossuaires où les
membres de la famille les plus en vue prenaient probablement anciennes momies auraient pu être déposées, ni dans les tours,
place dans les sarcophages installés dans ces chambres. Il ni dans les temples funéraires 76• Il serait étonnant que les restes
est bien sûr impossible de savoir si ces pièces d'honneur décomposés des ancêtres aient été dispersés en plein vent. Cet
étaient toutes utilisées par les membres d'une seule argument renforce la théorie de l'utilisation assez courte de
génération ou si certaines étaient réservées aux gens des certains monuments funéraires, même si la faible conservation
générations postérieures. de la plupart d'entre eux interdit des conclusions fermes sur
Un seul texte peut mettre sur la piste d'une solution. ce sujet 77• Néanmoins, les exemples d'utilisation d'un seul
L'inscription CIS 4158 (Inv IV, 27y) est l'épitaphe d'un des !oculus pour plusieurs corps (probablement de personnes
quatre fondateurs de la tour n° 13 (d'Elahbel), mort en 121. décédées à intervalle réduit) montrent là encore que toute
Elle se trouve au premier étage, sur le linteau de l'entrée statistique trop précise sur ce sujet risque d'être dangereuse.
d'une des chambres mentionnées ci-dessus. Elle prouve que Il faut de plus ajouter que le tombeau d'Elahbel comme
cet étage au moins avait été utilisé rapidement, moins de beaucoup d'autres a été très tôt l'objet de pillage et qu'on
vingt ans après la fondation. Il a pu en être de même des n'en a conservé aucun buste ou relief funéraire 78• Il est donc
trois autres étages au fur et à mesure que les frères mouraient. très difficile de faire l'histoire de la famille, alors qu'on n'en
71 - C'est une idée proposée par R. PFISTER, 1937. p. 7-10. Baalshamîn : le !oculus 11° 2 aurait été vidé et remanié au moment cle l'avant
72 - M. ÜAWLIKOWSKI, ]970b, p. 96. dernière inhumation (R. FELLMANN, 1976, p. 230). Voir néanmoins les
73 - R. PFISTER, 1937, p. 8. remarques extrêmement prudentes de R. Fellmann, ibid., à propos clu texte
74 - M. ÜAWLIKOWSKI, 1970b, p. 91, 11. 82. BS n" 60 et de l'interprétation qu'en a faite M. ÜAWLIKOWSKI, 1973a, p. l 7-19.
75 - R. PF!STER, 1937, p. 7-10, seule publication des fouilles effectuées clans 77 - Sur les ossuaires mentionnés clans des inscriptions clu Hawrân, voir
les années 1934-1937 par R. Amy et H. Seyrig (voir M. ÜAWLIKOWSKI, A. SARTRE-FAURIAT, 2001, vol. II, p. 92 et 94.
l 970b, p. 9 Ln. 82). 78 - M. ÜAWLIKOWSKI, 1970b, p. 9], 11. 82.
76 - Le seul exemple probable est celui cle la tombe clu sanctuaire cle
210 Les notables de Palmyre
connaît pratiquement que les membres qui étaient en vie à n'a clone été utilisée que par deux générations, celle de
l'époque de la construction du tombeau en 103. Haîran et celle de son fils Belshürî qui est cl'ailleurs mentionné
Il subsiste bien évidemment une autre possibilité, non clans le texte de fondation. On peut se demander si ce Belshûrî
exclusive de la première d'ailleurs, qui est la réutilisation est bien le père des quatre fondateurs de la tour 11° 68, ou bien
de la tour par des gens n'ayant rien à voir avec la famille. si c'est un frère aîné mort jeune. Le Belshûrî de l'inscription
Ces différentes possibilités sont aussi valables pour la plupart de fondation de la tour n" 67 était sans cloute mort en 33. Il
des tombes des nécropoles de Palmyre, avec des réutilisations avait peut-être eu auparavant des enfants qui, cinquante années
possibles et attestées jusqu'à l'époque islamique. plus tard, auraient fondé la tour 11° 68 à un âge clone avancé
pour l' époque (plus de cinquante ans).
On ignore en général quel sort était réservé aux tombes
4. RECONSTRUCTIONS ET PRESTIGE FAMILIAL
ainsi abandonnées. On sait seulement qu'un(e) certain(e) Zeqâ
En 1937, clans le deuxième volume de sa publication (zq') fut enseveli(e) en 129-130 clans la tour de Haîran (tour
des textiles de Palmyre, R. Pfister expliquait qu'on pouvait 11 ° 67), soit une cinquantaine cl'années après la construction
conclure du nombre important de tombeaux clans les du nouveau tombeau de famille ; il s'agit vraisemblablement
nécropoles de Palmyre que leur temps d'utilisation avait dû d'un(e) esclave, puisqu'il (elle) est clépourvu(e) de patronyme,
être assez court. L'argument est sans cloute valable, mais il a et ce serait clone le signe que la tour était désormais consacrée
aussi des conséquences pour la conception qu'on peut se aux dépendants de la famille (et peut-être aussi aux branches
faire des grands tombeaux de famille et de l'idéologie qui mineures) 83• Ce zq' est identifié par M. Gawlikowski avec
présidait à leur construction. La tour n" 70 par exemple, une certaine zqtrty, nourrice des enfants cl 'un des quatre
fondée vers la fin du!"' siècle, est un tombeau de dimension fondateurs de la tombe 11 ° 68, tymy (Taîmaî) 8 La nourrice -1.
moyenne. Le texte de fondation a disparu, mais on connaît apparaît sur un relief aux côtés de deux fils de Taîmaî, Alaîshâ
deux textes de concession (Inv IV, 1 = CIS 4206) datés des et Belshûrî ('lys' et blswJY) et de leur mère Attaî ('ty). On
années 30 du rn" siècle. peut supposer qu'il ne s'agit pas du relief funéraire de la
Comme le signale M. Gawlikowski 7'1, « trois quarts de nourrice, mais seulement de celui des enfants, ce qui
ce tombeau [ ... ] restaient libres et pouvaient être cédés ». expliquerait qu'elle soit enterrée ailleurs, clans ce cas précis
Le cas n'est pas unique, et on peut se demander pour quelles dans une tombe plus ou moins abandonnée par les membres
raisons ce tombeau a été peu utilisé. La famille a pu principaux de la famille (voir chapitre v).
s'éteindre, mais une autre explication est possible. Elle Les familles devaient ainsi garder une sorte de droit de
s'appuie sur certains textes qui montrent que des familles regard sur le tombeau de leurs ancêtres. Dans le cas de la
ont abandonné le tombeau traditionnel et ancien pour en famille des Benê Baâ, tant que le nom de l'ancêtre (Baâ) a
refoncler un autre, plus riche et plus cligne de ce que la famille été préservé, le tombeau sur lequel son nom est inscrit a dû
estimait être son rang. Le désir de paraître, de fonder un être l'objet des soins des descendants. Le nom apparaît sur
sépulcre familial a sans doute été plus d'une fois la cause de les deux tours 11°' 67 et 68 qui sont voisines (fig. 72 et pl. 6).
l'abandon et de l'arrêt de l'utilisation d'une tombe. Il peut Cela a pu faciliter le souvenir de l'appartenance à la famille
s'expliquer de diverses manières. de la plus ancienne des deux tours. Il est en tout cas sûr que,
Il est clair cl'après la généalogie des fondateurs que la étant donné la disparition rapide des familles de notables,
tour 11 ° 68 a été fondée en avril 83 (C/S 4124 = Inv IV, 3), les tombeaux devaient devenir libres.
pour remplacer la tour n" 67 fondée seulement 50 ans On peut aussi s'engager clans une autre direction et
auparavant par le grand-père des fondateurs, Haîran, membre rappeler qu'on est réduit surtout à des suppositions, en ce
des Benê Baâ (lnv IV, 4a = CIS 4114) 80• Bien que certains qui concerne la famille de Haîran, les Benê Baâ (voir l' arbre
des petits-fils aient peut-être eu leur effigie clans la tour n" 67 81, généalogique en annexe). On sait seulement qu'un frère de
ils ont néanmoins fondé une nouvelle tombe, qui, Haîran, bggw (Hagegû), était sans cloute le père des
paradoxalement, est bâtie cl'après les procédés traditionnels, dénommés mqymw (Moqîmû) et blswJY (Belshûrî) dont on
car il s'agit du dernier exemple du type ancien 81• Haîran lui a retrouvé les noms sur des graffiti de la tour n" 21 ( datés de
même avait déjà abandonné le tombeau de sa famille (tour 24 apr. J.-C.) 85, et que le deuxième des deux frères était sans
n" 21, antérieure à 8-9 de notre ère) pour faire construire sa cloute le même que le personnage à qui une statue est offerte
tombe. Celle-ci, qui pouvait contenir au moins 150 sépultures, au début du J'"' siècle 8 Il est naturel selon les règles normales
(1.
79 - M. GAWLIKOWSKI. ] 970b, p. 99. 86 - CJS 3929. Le personnage s'appelle Belshürî bli;w1y brbggw br b/lw1y
80 - M. GAWLIKOWSKI. 1969c, p. 59-69 et 1970b, p. 69-71 et 81-83. b'' ce qui rend son identification avec un neveu de Haîran certaine. Il est
81 - Textes publiés par M. GAWLIKOWSKI. 1970a, p. 82. moins sùr qu'il s'agisse du même que Belshùrî blsw1y br bggw du texte
82 - M. GAWLIKOWSKI, ]970b. p. 94. foi, IV, 26 car les deux noms sont assez courants. Les dates correspondent,
83 - C'est l'opinion de M. GAWLIKOWSKI, l 970b, p. 81 ü propos du texte mais on s'explique mal que ce soit seulement sur des graffiti muraux qu'on
fil\, IV. 4b. retrouve l'épitaphe de ce personnage important (Ü qui une statue a été offerte)
84 - M. GAWLIKOWSKI. ] 971. p. 422-426. et. qui plus est, dans ce qui devrait être la tour familiale. On peut néanmoins
85 - lnl' IV. 26. expliquer ce fait par la date relativement haute de l'inscription.
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 211
de transmission du nom que deux des cousins, sans doute clesciiption est encore plus valable pour les temples funéraires wJ.
les aînés, se soient appelés Belshûrî. 11 est plus remarquable L'avènement de ce type de monument, qui semble remplacer
qu'apparemment on ne retrouve pas dans les noms de Haîran au milieu du 11" siècle les tours funéraires, marque aussi une
et Hagegû le nom d'un ancêtre connu ; on a donc peu de présence massive de l'influence romaine, puisque ces tombeaux
moyens de savoir lequel d'entre eux est l'aîné, ou si même connaissent de nombreux parallèles contemporains et plus
l'aîné n'est pas un autre frère qui est resté inconnu clans la anciens dans le reste de l'Empire. La principale difficulté que
documentation. l'on rencontre dans une recherche sur ces temples funéraires
En partant de ces conclusions, on peut facilement est leur mauvaise conservation. Ils sont pour la plupart réduits
franchir un pas de plus et se demander si la tour n" 21 n'était à l'état de ruine parce que leur structure, à la différence des
pas aux mains d'une branche aînée de la famille pendant tours, était beaucoup moins massive et solide. De plus, la
qu'Haîran, appartenant à une branche cadette, fondait le richesse des matériaux utilisés, le décor et la relative fragilité
tombeau de sa propre famille, la tour 11° 67. De même entre de la construction ont favorisé leur démantèlement par des gens
Haîran et ses quatre petit-fils, fondateurs de la tour 11° 68, il désireux de remployer ces matériaux.
manque une génération. Belshûrî, père des quatre frères est
sans cloute l'aîné puisqu'il porte le nom du père de son père;
1. UN NOUVEAU TYPE DE MONUMENT
il devrait clone s'agir de la branche aînée des descendants
cl'Haîran 87• Cela n'empêche pas que la tour 11° 67 ait pu rester Les recherches récentes menées par A. Schmidt-Colinet
aux mains d'une branche mineure de la famille, les enfants à propos du tombeau n° 36 (vallée des Tombeaux) 90 ont
d'un autre fils de Haîran, plus jeune que Belshûrî, ou bien montré quelles étaient les différentes influences qui
servir uniquement aux esclaves et aux serviteurs de la famille. apparaissaient clans la construction et le décor de ces
Mais on notera qu'il n'y a pas de mélanges. La tombe ne tombeaux. L'identification proposée de la famille des
semble utilisée par les dépendants qu'à un moment où la fondateurs de ce temple funéraire avec celle de Septimius
famille proprement dite l'a abandonnée. Worod, un des plus grands notables de l'entourage cl'Odainat,
On ne peut clone pas conclure que les anciens tombeaux est séduisante. La comparaison entre le décor somptueux de
de famille servaient aux branches les moins nobles des la tombe et la richesse et l'influence du personnage est
grandes familles palmyréniennes. Il semble en tout cas que tentante. Plusieurs inscriptions donnent des renseignements
le souci de certains membres de branches cadettes de fonder sur sa carrière et prouvent son pouvoir dans la société
leur propre lignée puisse être un motif de la fondation de palmyrénienne (C/S 3937-3943). Pourtant cette identification
nouveaux tombeaux. qui repose sur une restitution du texte de fondation de la tombe
De plus, on ne sait pas réellement comment se transmettaient (C/S 4217 = Inv IV, 21) proposée par J. Starcky 91 est certes
les héritages à Palmyre 8 8, et il n'est pas entièrement impossible probable quant au nom restitué, mais rien n'assure que le
que certaines branches lointaines de familles en voie d'extinction Worocl, fondateur de la tombe, soit bien celui-là même qui
se soient vues en possession de plusieurs tombes, d'autant plus se distingua dans la dernière grande période de Palmyre 92•
que les femmes pouvaient parfaitement être propriétaires d'un Quelle que soit l'identité du propriétaire et des
tombeau. Le dénommé Iulius Aurelius Bôlmâ, propriétaire de la fondateurs de la tombe, cela n'entame en rien les conclusions
tour 11° 70 qui vend à deux de ses cousins la moitié de la tour et qu'on peut tirer de l'étude de la décoration de la tombe.
de l'hypogée enjanvier 229 (C/S 4206 = Inv IV, 1), possède peut L'influence occidentale est très présente, les principes
être encore, par héritage, un autre tombeau où il compte se faire architecturaux sont clairement gréco-romains, même s'ils
enterrer ainsi que ses enfants. n n'est pas très utile de multiplier servent à exécuter un programme qui, par certains côtés, est
les hypothèses, mais cet exemple prouve bien qu'en 1'état actuel très marqué par les coutumes locales. En effet, malgré la
de la documentation les tombeaux de familles conservent une présence cl' un péristyle par exemple, l'introduction des
partie de leur mystère. loculi, si typiques de Palmyre, montre bien qu'on a affaire à
une forme architecturale plus ou moins mixte qu'il faut
analyser dans cette perspective.
C. LES TEMPLES FUNÉRAIRES
A. Schmidt-Colinet reconnaît dans la tombe n° 36 cette
Si on peut décrire les tours funéraires comme des combinaison de formes funéraires locales avec une forte
monuments qui mettent en valeur de manière exceptionnelle influence de l'architecture sacrée et palatiale occidentale. Le
le désir de représentation des notables de Palmyre, cette « vocabulaire» architectural romain est utilisé par l'architecte
87 - Voir néanmoins plus haut les incertitudes liées au droit d'aînesse 89 - Sur ce type de monument, M. GAWLIKOWSK!, 1970b, p. 129-146 (avec
d'Elahbel. les remarques critiques de M. Eisner pour son compte-rendu dans Gnomon
88 - Le sens du terme araméen wrst' ( C!S 4176b et c et 4184) est difficile à 36, 1974, p. 800-805) ; K. MAKOWSK!, 1983, p. 175-187 (tombeau cl' Aaîlamî
préciser. Tl semble signifier« héritière» (J. CANT!NEAU, 1935, p. 150 et et Zebîclâ) ; A. SCHMIDT-COLINET, 1992 (tombe 11° 36).
M. GAWL!KOWSKI, 1970b, p. 176). Cette interprétation est contestée par 90 - A. SCHMIDT-COLINET, 1992.
F. RosENTHAL, 1936, p. 24, suivant en cela LrnZBARSKI, Eplzeme ris IL p. 275 91 - Ibid., 1992, p. 4 1, n. 114.
qui voit plutôt un terme signifiant«maîtresse», «propriétaire». 92 - Voir E. WILL, 1996, p. 109-115.
212 Les notables de Palmyre
dans une syntaxe orientale (fig. 57) 93• Qui plus est, pour ce qui La part d'influence gréco-romaine est sans doute plus
est des fondations, les seuls parallèles qu'il cite dans son importante que dans le cas des hypogées ou des tours
ouvrage sont les palais d'époque parthe de Hatra et surtout funéraires. Ce qui est visible dans la décoration l'est aussi
d'Assour.Tout ce qui précède concorde évidemment assez bien du point de vue épigraphique.Un seul des textes de fondation
avec la théorie qui voit en Worod, le fondateur de la tombe, un ne comporte pas de version grecque. Ces textes, dont on
notable d'origine perse, cité dans les Res Gestae Diui Saporis 94• connaît assez souvent la date, donnent deux limites
Au contraire, E. Will ne voit rien d'iranien dans la chronologiques pour la construction des temples funéraires.
décoration du tombeau, mais le considère seulement comme Le dernier texte daté est de 253 ; on peut rappeler que les
un représentant de l'art impérial dans sa version syro derniers textes funéraires remontent à 265 97• Le premier
anatolienne 95• Ces parallèles anatoliens ont d'ailleurs été bien temple funéraire remonte, lui, à 143, soit quelques années
reconnus par A. Schmidt-Colinet. Il cite en particulier des après la dernière tour funéraire datée.Il s'agit donc du dernier
éléments décoratifs architecturaux pamphyliens de l'époque siècle de la période de prospérité de la ville.
des Antonins et des Sévères 96• Le plus frappant et le plus
indubitable, au-delà du débat sur les proportions de chaque
2. LES TEMPLES FUNÉRAIRES ET LES NOTABLES
composante, est qu'on retrouve un schéma déjà bien connu
à Palmyre. Cette tombe, construite vers 210-220, n'est pas Répartis dans toutes les nécropoles, ces temples
le dernier monument connu à Palmyre, mais elle fait funéraires sont, comme les tours funéraires, placés de manière
néanmoins partie de la dernière phase de ces constructions. à être bien en vue.Le désir d' autoreprésentation des notables
Or elle a un point commun avec un bâtiment qui est en même a trouvé là le domaine par excellence de son expression. Un
temps un des plus anciens et un des mieux étudiés du site, le des exemples les plus extraordinaires est la localisation d'un
temple de Bel ; dans les deux cas, une structure générale groupe de quelques tombeaux à ]'extrémité de la Grande
cl'origine gréco-romaine est utilisée dans un cadre nettement Colonnade: c'est en particulier le cas du tombeau n" 86 qui,
oriental. Celui-ci se voit aussi bien dans ce qui n'est que de à cet endroit, en ferme la perspective.C'est aussi à proximité
l'ordre du détail (par exemple, les merlons du toit) que dans de ce lieu (pl. 6) qu'arrivait la Colonnade transversale qui, à
des constituantes plus essentielles du monument (orientation ] 'endroit précis où elle rejoignait la Grande Colonnade,
et présence de deux adytons). aboutissait aussi sur ce tombeau.
Le tableau qui suit est une autre preuve de la forte Ce dernier a été pendant longtemps le mieux connu de
composante gréco-romaine présente dans les temples funéraires. ce type de monument, grâce à la publication de
Référence date numéro langue(s) C. Watzinger 98 ; il a été fortement restauré depuis. Son
CIS 4167 143 n" 188 bilingue apparence extérieure en fait un exemple classique de ce que
CIS 4168 149 n " 85b bilingue peut être un temple funéraire (fig. 58). Un simple coup d'œi]
CIS 4170 l 50 n" 38a araméen donne d'ai]]eurs la raison de cette appellation. Précédé par
/111·VIII. 5 159 et 172 n" 149 bilingue les six colonnes de son pronaos, il mesure en tout 18, 50 sur
CIS 4192 171 n " 38 bilingue 15, 50 mètres (] 4 x 14 mètres pour la cella).Il est placé sur
CIS 4196 * 184 n" 191 bilingue un socle, qui servait à mettre en valeur son élévation, et en
GAWLIKOWSKI. 1970a n" 4 185 inconnu bilingue particulier ]'étage. En dessous, existait une crypte où sont
CIS 4201 212 n" 175 bilingue instaHées des travées de lornli '>9_ Dix-neuf travées de cinq
CIS 4209 236 n" 150 bilingue loculi étaient installées à l'étage principal. Au fond de la
/11v VII, l l 253 n" 144 bilingue cella, un emplacement était réservé pour un banquet
CIS 4214 ? Il" 173d bilingue funéraire. L'aménagement du premier étage est moins clair,
CIS 4215 ? n" 187 bilingue mais il est évident que son décor devait être aussi complexe
/111 1 IV, 21 (= CIS 4216- et raffiné que celui du rez-de-chaussée.
? n" 36 bilingue
L'impression d'ensemble est ce]]e d'un monument très
;;,,, date de 184 est celle du C/S et M. GAwLIKÔ\VSKI, 1970b. p.199. 111t.j riche, dont la décoration d'inspiration nettement occidentale
d"ailleurs le texte il cette place clans la liste chronologique des textes de
fondation. Dans la liste de C. Watzinger (dans Th. WIEGAND. I 932. p. 7Cl). la devait faire une impression puissante à ce croisement de deux
date est I 04. de toute fai;on sans doute trop ancienne pour un monument de
ce genre (cf. M. G-\Wl.lKOWSKI. 1970h. p. .'il). des axes principaux de la vi11e. Des critères stylistiques
permettent de le dater du tournant des 11" et m" siècles,
Textes de fondation de te111plesfi111éraires à Palmyre.
93 A. Sc111v1mT-CouNET, 1992, p. 40-4 I. 98 - C. Watzinger clans Th. W1r-:GAND. 1932, p. 71-76 et pl. 38-44. Voir aussi
94 - D. SCHLUMBERGER, ] 972. p. 339. M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 140-144. Sur le problème cle l'emplacement
95 - E. W ILL, 1996. p. 115. clu tombeau, voir J.-B. YoN, 1999.
96 - A. Sc11MIDT-CouNET, 1992. p. 103. L'ornementation des sarcophages, 99 Cet étage inférieur est aussi attesté pour un autre temple funéraire, le
quant à elle, provient cr Occident sans doute par l'intermédiaire cle la côte n" 150 clans la nécropole nord. Il n'a pas été fouillé. mais le texte cle fondation
phénicienne (p. 104). (CJS 4209) indique son existence: c'est d'ailleurs l'unique attestation à
97 - Il s'agit de cieux textes cle concession: H. INGHOLT. 1935, p. 112 et Palmyre cle ce mot en grec (î0 �tV17PÉi.ov îOÛîo uùv urroyEicµ).
/m·VII. 15.
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 213
c'est-à-dire sans cloute quelques années avant le tombeau voir sur le site 4214). Encore plus que ses voisins, il
n" 36. Il est malheureux que ce tombeau qui fait partie des est placé au cœur du système urbanistique, en bordure du
l()l)
plus grands n'ait pas livré d'inscription de fondation. Il carrefour des deux colonnades.
aurait été intéressant de savoir quel notable de la cité avait La situation de ces monuments est révélatrice sans doute
les moyens de marquer autant de son empreinte ce quartier de relations de concurrence au sein de l a société
de la ville. Si on considère, comme on le fait généralement, palmyrénienne. Elle permet de penser qu'en parallèle au
que la Colonnade transversale s'est mise en place vers le « schéma d'urbanisme» (dont les promoteurs sont inconnus),
début du ne siècle 101, et que la section correspondante de la de riches personnages ont lutté entre eux pour placer de la
Grande Colonnade lui est juste postérieure, cela signifie que manière la plus voyante possible leurs tombes. Ils ont déployé
la tombe n" 86 est postérieure à l'organisation du quartier. dans l'architecture et la décoration de celles-ci toutes les
Sa position a donc été choisie en parfaite connaissance de possibilités offertes par les traditions occidentales mais aussi
cause. Il a fallu tenir compte des programmes de construction, orientales. Il n'est pas indifférent néanmoins que l'art gréco
qui sont d'ailleurs plutôt la juxtaposition d'éléments séparés romain domine nettement dans la structure et la décoration
qu'un véritable plan d'ensemble. de ces monuments. C'est en effet à ce moment, en particulier
Les plans de Palmyre qu'on connaît aujourd'hui sont dans les colonnades, que la ville se couvre d'édifices qui
trompeurs: ils font tous figurer à ce point d'articulation des sont précisément très influencés par ce monde occidental.
deux nécropoles le camp de Dioclétien, avec ses bâtiments Les notables de Palmyre qui ont fait construire ces tombeaux
dont certains datent d'une époque assez tardive de l'histoire appartiennent comme leurs contemporains d'Antioche ou
de la ville. Cette zone située à l'ouest de la Colonnade d'Apamée à une élite dont la culture et les références
transversale était occupée, au moins en partie, depuis une architecturales et artistiques sont communes.
époque assez ancienne. Les différents états du temple d'Allât Mais la présence de leurs tombeaux à cet endroit appelle
en sont une preuve puisqu'il semble bien que le sanctuaire se aussi une autre remarque. Leur position est en quelque sorte
soit installé dans la deuxième moitié du !"' siècle av. J.-C. sur en conflit avec toute 1'organisation urbanistique de la ville,
ce qui n'était alors qu'un terrain vague 1112• L'existence de dont ils auraient dü être bannis. Leur existence même prouve
plusieurs hypogées, dont celui de la famille d'Alaînê, en que, dans l'opposition qui existe entre les grands notables et
bordure du camp de Dioclétien, prouve que la limite extérieure les institutions civiques, ce sont vraisemblablement les
de la ville était déjà très proche du sanctuaire d'Allât. premiers qui l'emportent, au moins à ce moment. Certes, on
Très vite cependant, ce qui n'était qu'une zone extra n'en sait pas plus, mais ce qu'on a vu par exemple pour le
urbaine est devenu un quartier important : c'est en effet là commerce caravanier, montre qu'à certains moments des
qu'on place le quartier des entrepôts, c'est par là que notables acquièrent une position absolument prépondérante
passaient sans doute les caravaniers. Ce n'était pourtant pas sur la scène politique et civique locale. On a visiblement affaire
un lieu prédisposé à recevoir des monuments d'apparat, mais à quelque chose de ce genre avec cet exemple.
plutôt un quartier de commerçants et de magasins. Il faut En ce qui concerne ce quartier de la nécropole (aux
souligner que les premières constructions funéraires sont confins de la nécropole nord avec la vallée des Tombeaux),
postérieures à la construction des deux colonnades. C'est à on doit pourtant se contenter de ces remarques assez
cause du changement de fonction du quartier que les temples générales: l'absence de textes empêche toutes les recherches
funéraires se sont installés à cet endroit. Certes, la zone a précises sur le statut et la iichesse sans doute importante des
été perturbée aussi bien par la construction des monuments notables qui ont fait construire dans cette zone. On peut
que par l'érection du rempart à l'époque tardive, ce qui a pu supposer, comme on l'a fait, qu'ils étaient entre eux en relation
faire disparaître des tombes. Mais l'hypogée d'Alaînê ou de concurrence, mais rien n'empêche qu'ils aient au contraire
les tombeaux n'lS 83 et 84 sont situés nettement à l'extérieur appartenu au même clan ou à des familles apparentées.
de ce secteur. Au contraire, les temples funéraires nos 86, Néanmoins, il ne faut pas exagérer les différences entre
173a-d ont été construits dans une zone qui était vide de les temples funéraires et les monuments qui les ont précédés
tombes, et après la construction des monuments publics. dans leur fonction (tours funéraires). Si le changement est
Il n'y a pas meilleure preuve de cette volonté de très important du point de vue architectural, leur rôle social
localisation en plein cœur de l'organisation urbanistique de est tout à fait semblable. Comme pour les hypogées, et comme
Palmyre que le tombeau 11 ° 173d dont on a conservé pour quelques tours funéraires, on connaît au moins un
partiellement l'inscription de fondation. On n'en connaît pas exemple d'opérations de concession dans un temple funéraire.
non plus le nom du fondateur, car seule la fin du texte est Il s'agit de la tombe 11° 150, bâtie d'après le texte de fondation
conservée sur les fragments du linteau qu'on peut encore en mars 236 103• Son fondateur portait le nom de 'IouÀwç
100 - À titre de comparaison, le temple de Baalshamîn mesure environ 101 - E. WILL, 1992, p. 123.
8,50 x 15 m. Le temple funéraire 11° 173, tout proche, mesure 10 m de côté. 102 - M. GAWLIKOWSKI, 1983a, p. 61.
Le temple funéraire n" 36 a des dimensions proches, ainsi sans cloute que le 103 - CIS 4209 qui contient aussi le texte cle concession.
tombeau dit« cle l'aviation».
2J4 Les notables de Palmyre
Aup1p.,1oç Mapcova MaÀ11 rnù Kat MeÇa��ava 1où appartiennent à la même génération. Comme dans d'autres
'Aopmvoû (et en araméen ywlys 'w11ys mrwn' br ml' dy cas, il est tout à fait possible que les deux textes ne donnent
mtqr' mzbn' br 'd1ynws). On peut noter le nom porté par un pas toutes les étapes de la généalogie ; il est donc préférable
de ses ancêtres : le nom Hadrianos doit sans doute remonter de s'abstenir de conclure sur leurs relations de parenté.
aux années du n" siècle pendant lesquelles l'empereur a rendu Un autre point mérite d'être souligné. Comme on l'a
visite à Palmyre. Le tombeau lui-même est assez bien dit, le texte C/S 4209 est le seul exemple de concession
conservé même si des réutilisations ont complètement fait pour un temple funéraire. Cela tient peut-être à la structure
disparaître l'aménagement intérieur qui reste inconnu (fig. 73). de la documentation et au nombre extrêmement réduit
Les textes de fondation et de concession prouvent qu'il y d'inscriptions concernant ce type de monument. Cependant
avait un hypogée sous le temple funéraire. On en connaît un il est curieux que le texte mentionne, non un partage ou
peu plus sur les propriétaires du tombeau par le texte de la vente d'une partie de la tombe, mais la cession de
concession. Le propriétaire qui vend l'ensemble du tombeau l'ensemble du monument avec ]'ensemble des droits. Il
(hypogée compris) n'est pas le fondateur. Pourtant, en raison n'est peut-être pas anormal que ce type de construction
de la date relativement tardive de la fondation, ]a concession ait été vendu en entier, sans partage. Les temples funéraires
qui a dû se faire avant 272, selon toute vraisemblance, n'est étaient vraisemblablement destinés à des groupes plus
pas de beaucoup postérieure à la mise en service du tombeau. réduits et plus exclusifs que les vastes hypogées. Certes,
C'est un certain 'IouÀwç A ùp11À1oç Z11v6�10ç Acr8copou leur taille était parfois très importante, mais leur
wü Zë�noou ({ywlys 'wilys zbyd'] br 'stwrzbyd') qui cède structure ne devait pas faciliter les partitions 10s_ De plus, s'ils
le monument à quelqu'un dont le nom est tout à fait grec représentent, comme on le croit, la manifestation du pouvoir
'IouÀ1oç 0rnocôpoç 'Aypirrou rnù MapKÉÀÀou. Son et de la richesse d'une famille, il était peut-être plus facile
onomastique et l'absence des noms Iulius Aurelius, de les vendre que de les diviser. On ne pouvait songer à en
remplacés par un simple Iulius permettent de penser que ce faire un objet de spéculation. C'est sans doute aussi ce qui a
personnage est un étranger à Palmyre. Pour s'ancrer eu lieu pour les tombeaux-tours, qui n'ont changé de statut
définitivement dans la région, il achète un tombeau. La que longtemps après qu'on eut cessé d'en construire.
mention de son grand-père dans son nom complet est peut On peut prendre un dernier exemple, celui du tombeau
être la seule particularité; comme l'utilisation de l'araméen, d'Aaîlamî et Zebîdâ (n" 85b), situé à l'entrée de la vallée
c'est sans doute une influence des mœurs palmyréniennes. des Tombeaux, non loin de la porte dite de Damas et de
Cela était probablement nécessaire pour annoncer l'extrémité sud de la Colonnade transversale (fig. 74). Il a
publiquement le changement de propriétaire. été le premier monument de ce type à être fouillé et publié 1116•
Le texte n'est pas daté, on ne sait donc pas au bout Il occupe une localisation privilégiée, sur le chemin des
de combien de temps le fondateur a cédé son tombeau à voyageurs qui sortaient de Palmyre pour se diriger soit vers
Iulius Aurelius Zénobios avant que celui-ci le cède à son tour le sud, soit vers l'ouest. Le tombeau était précédé d'un
à Julius Théodôros. Il a même pu exister un propriétaire portique sur terrasse, ouvert vers le nord, dans la direction
intermédiaire avant Zénobios. La généalogie du fondateur de J a route, ce qui confirme ce qu'on a dit de son
Iulius Aurelius Marônâ prouve en tout cas qu'il n'était pas un emplacement. Il s'agit du temple funéraire de deux frères,
proche parent de Zénobios. Celui-ci appartenait à la Aaîlamî et Zebîdâ (Zénobios en grec), fils de Haîran, fondé
même famille qu'un Iulius Aurelius Zebîdâ, connu pour avoir en 149 (/m' IV, 9 = C/S 4168).
accompagné des marchands à Vologésias. Il est remercié pour Cette famille est bien connue à Palmyre puisque le
cela en 247 et on lui érige une statue sur une console de la premier des deux frères et leur père sont honorés en l 39 par
111-1.
Grande Colonnade Dans ce texte sa généalogie s'établit le Conseil et le Peuple qui leur dressent une colonne
ainsi : br mqymw brzbyd' 'stwr byd'. On note que la répétition honorifique (C/S 3930 = Inv II, 2). Un des fi ls de Zebîdâ a
des noms Zebîdâ et Astôr ne laisse pas de doute sur leur été symposiarque et curateur de la source Efqa 107• La famille
parenté. Si on prenait au pied de la lettre les indications est donc très en vue à Palmyre dans les années où elle fait
généalogiques qui précèdent, on pourrait faire du Zénobios construire son tombeau. Cette concomitance de dates est
de la tombe n" I 50 le grand-père du caravanier. Mais le texte intéressante. Dans ce cas, il semble bien que c · est au moment
porte une date qui permet de penser plutôt que les deux où les membres de la famille sont bien intégrés dans les
personnages n · ont que quelques années d'écart ou bien même institutions de Palmyre, qu'ils font construire un tombeau
l 04 - CIS 3933 = Im1 Ill. 21. doute que des monuments anciens, qui avaient dù perdre une grande partie
105 - Il devait en être de même pour les tours funéraires, d'où le nombre du prestige que les familles leur avaient attaché.
relativement réduit de concessions les concernant: C/S 4206 (= lm• IV, l a) l 06 - J. C.-\NTINEAU, 1929, p. 3- l 5. Le tombeau a aussi été étudié par
pour la tour n" 70: lm' VII. 13 pour le n" 118: lm· VII, l b pour la tour C. Watzinger dans Th. WIEGAND, 1932. p. 59 ; par M. GAWLIKOWSKI, 1970b.
n" 164. Il est à noter que les deux premiers textes sont datés (229 et 252) et p. 135-136; par K. MAKOWSKJ, 1983. p. 175-187.
que les /11/ii Aurelii du troisième permettent de placer le texte après 212. l 07 - Voir DFD. p. 249-252 et K. MAKOWSKI. 1983, p. 182 avec des arbres
C'est donc à un moment où on ne construisait plus de tours mais des temples généalogiques presque semblables. Le second cl'entre eux propose des dates
funéraires qu'on a cédé et subdivisé ces tours. Elles n'étaient alors sans plus ou moins vraisemblables pour chaque génération.
Chapitre VI: Des monuments pour/ 'éternité 215
luxueux et sans doute très coûteux. C'est aussi un des plus vrai comme on l'a vu à propos de la zone où se dresse
anciens exemples datés de monument de ce genre ; le plus aujourd'hui le camp de Dioclétien. La division entre
ancien est le tombeau n" 188, daté de 143, soit six ans nécropole nord et vallée des Tombeaux n'était peut-être pas
auparavant ( CIS 4167). aussi tranchée avant l'installation de monuments importants
Comme le rappelle K. Makowski, la période qui suit la dans ce quartier. La prudence est clone de mise clans ces
visite d'Hadrien à Palmyre constitue une importante césure considérations, ce qui n'empêche pas bien sûr d'utiliser les
dans l'histoire de l'art et de l'architecture clans la ville 108• dénominations conventionnelles qu'on retrouve clans
C'est en fait un changement culturel qui se produit et ces l'ensemble des publications qui concernent Palmyre.
temples funéraires en sont une preuve indubitable. Cela La plus vaste des nécropoles s'étend à l'ouest de la ville
correspond probablement aussi à des changements sociaux. c'est la fameuse vallée des Tombeaux, qui borde des deux
Les élites de la cité, dont les monuments typiques étaient les côtés la route se dirigeant vers Homs (Émèse). On connaît
tours funéraires, ont sans doute connu à cette époque une les liens de cette dernière avec Palmyre au moment du plus
concurrence de la part de classes sociales montantes. La grand développement du commerce caravanier.La nécropole
prospérité croissante de la ville en serait la cause. Il leur a sud-ouest, au sud de la source Efqa, longe une route se
clone fallu découvrir un nouveau moyen de se différencier dirigeant vers Damas, route qui devient à partir de la
de ces gens qui commençaient à se faire construire eux aussi Tétrarchie la fameuse Strata Diocletiana. Toujours au sud,
des monuments funéraires coûteux.C'est au moins de cette mais cette fois plus à l'est, la troisième nécropole (sud-est)
manière qu'on peut expliquer l'apparition des temples est sans doute la plus récente ; on peut suivre ici le tracé de
funéraires à Palmyre.Le modèle choisi, qui était sans cloute la route partant vers Hit et dont une branche va peut-être à
particulièrement prestigieux, est un modèle cl'inspiration Doura-Europos.C'est sur cette route qu'a été découverte la
occidentale.Cette période pendant laquelle Palmyre s'ouvre célèbre inscription cl'Umm el-Amed au sujet du grand
au monde occidental est aussi celle où la langue grecque caravanier Soados. Enfin la dernière, la nécropole nord 109
s'installe définitivement clans l'épigraphie funéraire. La comprend comme les autres des tombeaux monumentaux
culture gréco-romaine a manifestement été utilisée par les (tours, hypogées et temples) mais aussi, en particulier clans
élites pour se différencier de ceux qui n'en faisaient pas sa partie est, un certain nombre de sépultures individuelles.
partie.L'effet était double. Non seulement le monument par C'est là, à l'emplacement de la ville moderne de Palmyre
sa taille et sa localisation était offert à la vue de tous ; cela (Tadmor), qu'on a découvert les sarcophages de plâtre et les
était déjà vrai des tours funéraires. Mais la décoration inscriptions sur stèle qui sont la trace de l'ensevelissement
110
d'inspiration grecque devait aussi se présenter comme une de membres de classes moins huppées Dans cette
•
manifestation de culture et d'intégration de la culture direction, la route qui quittait Palmyre se dirigeait vers le
dominante par les notables de Palmyre. nord et l'Euphrate à la hauteur de Sura. Il est possible que,
comme le fait la route actuelle, un embranchement ait conduit
D. LES SUBDIVISIONS DES NÉCROPOLES vers !'Euphrate et le confluent du Khabour (Circesium et
Deir ez-Zor actuel). On peut ajouter que dans la ville actuelle,
1. LES NÉCROPOLES ET LES DIFFÉRENCES SOCIALES
là où s'élève aujourd'hui le jardin du musée, les fouilles
Toutes les nécropoles se trouvaient sur les pistes menées par Kh.As'ad ont mis au jour des tombes d'époque
s'éloignant de Palmyre suivant les grands axes routiers byzantine, preuve d'une certaine continuité dans
utilisés dans l'Antiquité. On distingue traditionnellement l'occupation.C'est aussi dans cette zone nord qu'était situé
quatre nécropoles principales (pl. 9). Mais les dénominations le camp militaire romain. De là proviennent des textes latins
que les historiens utilisent (nécropole nord, vallée des honorifiques et en liaison avec le camp 111, mais aussi des
Tombeaux [ou nécropole ouest], nécropoles sud-est et sucl textes funéraires 112, qui concernent des civils et des militaires.
ouest) sont modernes.Ce n'est que par commodité que les La garnison était clone assez développée, comme on le
historiens parlent de la nécropole ouest. Mais il est possible savait depuis les travaux d'H. Seyrig 113, et elle avait sa propre
qu'on ait alors distingué plusieurs nécropoles, autour d'un nécropole ou, en tout cas, ses morts étaient regroupés dans
certain nombre de centres (une nécropole sur Umm Belqis, une partie de la nécropole. On peut regretter que les vestiges
une autre près des tours cl'Atenatan et d'Elahbel), et que le visibles sur les photos aériennes des années 1930 n'aient
passage de certaines familles de l'une à l'autre ait vraiment pas été mieux exploités lors des fouilles et explorations
été un changement de nécropole.L'inverse est cl'ailleurs aussi menées pendant la construction du nouveau village par les
108 - K. MAK0WSKI, 1983, p. 185. 111 - Par exemple H. SEYRIG, 1933a, p. 166, n" 10 (= AE 1933, 216), et les
109 - Après de Vogüé, on distingue aussi parfois une nécropole nord-ouest. cieux textes publiés par H. HERZIG et A. ScHMIDT-CouNET, 1991, n'" 1 et 2.
La majorité des travaux sur Palmyre parlent pourtant d'une seule nécropole 112 - Quelques textes clans lnl' VIII (203, 208 et 209), et dernièrement
au nord de la ville (voir J. Cantineau dans lm• VII, p. 1). Sur cette nécropole H. Heinen clans K. PARLASCA. 1982. p. 35.
et son histoire, voir M. GAWLJKOWSKI, 1970b, p. 162-165. 113 - H. SEYRIG, ] 933a, p. 152-168.
110 - Voir !111 1 VII. p. 4 et I,n, VHI, p. 4-5.
216 Les notables de Palmyre
autorités françaises 114. Cette nécropole nord est moins riche modestes se trouvaient plus au nord et à l'est. Le temple
que sa voisine de l'ouest. Son principal intérêt réside funéraire de cette famille juive est situé en plein cœur de la
justement dans cette juxtaposition d'au moins trois éléments partie occidentale de cette nécropole, là où celle-ci ne se
qui se succèdent d'est en ouest, la nécropole de gens différencie pas des autres nécropoles. La richesse du monument
modestes, celle des gens liés d'une manière ou d'une autre montre bien que la famille devait appartenir aux notables de
au camp militaire romain (avec probablement un Palmyre, même si l'état ruiné du bâtiment empêche de savoir
recouvrement partiel avec la nécropole précédente), enfin s'il s'agissait de notables de premier plan ou plus simplement
la nécropole des notables avec les mêmes caractéristiques de gens enrichis par leurs activités à Palmyre.
que les trois autres nécropoles de Palmyre. Les différenciations sociales sont clone aussi
En ce qui concerne cette nécropole, on peut aussi noter géographiques, et on a bien l'impression que seules certaines
l'existence d'une inscription qui mentionne une famille sans catégories sociales peuvent être ensevelies clans les grandes
doute juive ( C/S 4201 ). Le temple funéraire en question nécropoles. Mais on ne voit pas clairement comment ce
(n" 175) a été englobé dans le rempart dit de Justinien. Il système se perpétuait, et de quelle manière on empêchait le
s'agit de la famille de Zebîdâ (Zénobios en grec) et Samuel, reste de la population de se mélanger aux notables. Dans le
fils de Levi, fils de Jacob (Z11vo�1oç Ka't l:a�tou17Àoç A11ou't cas de la nécropole nord, il faut tenir compte de la disparition
wù 'laKoÛ�ou etzbyd' wsmw'I bny lwy bry'qwb brsmw'I). des vestiges funéraires de la majorité de la population de
Le texte de l'inscription est pour le reste tout à fait semblable Palmyre. Deux hypothèses sont possibles. Il se peut qu'il n'y
à celui des textes de fondation faits par les Palmyréniens ait rien eu la plupart du temps 118 : clans ce cas, seules sont
dont l'onomastique est purement araméenne ou arabe. Il connues les tombes des classes les plus aisées (c'est-à-dire
s'agit en fait de la seule inscription clans laquelle on puisse de ceux qu'on peut appeler classes moyennes), qui placèrent
reconnaître une famille qui semble juive. On trouve à des stèles sur leur tombe pendant une partie de la période.
Palmyre des noms comme Shimôn (sm'wn en araméen) à Une autre hypothèse est possible : ces gens ont pu
de nombreuses reprises 115, mais souvent mêlés à des noms profiter de certains des grands tombeaux construits par (et
arabes ou araméens. On peut ici parler d'une famille juive pour) les familles importantes de la ville et les classes
grâce à la généalogie homogène du point de vue moyennes ont seules pu profiter des concessions clans les
onomastique 11 On peut se demander si la présence de cette
ri.
hypogées. Seuls les gens modestes qui appartenaient à
tombe juive clans ce qui semble la nécropole la moins l'entourage des grandes familles (esclaves, serviteurs ...) ont
homogène de Palmyre est un pur hasard. pu trouver place clans les grands tombeaux, au cas où ces
En fait, pour peu qu'on admette que la pierre vient bien de familles ont ouvert les tombeaux à leurs dépendants. On a
la tour où elle a été trouvée et qu'elle n'a pas été apportée pour vu précédemment que cela n'est pas assuré. Ils ont peut-être
les fortifications, il faut bien avouer que la tombe et l'inscription aussi pu, plus généralement, profiter des tombeaux
sont en tout point semblables aux autres monuments de la abandonnés par des familles qui avaient oublié leurs liens
nécropole nord 117• Le camp romain et la nécropole des gens avec leurs ancêtres ou qui avaient disparu.
114 - À ce sujet, voir J.-M. DENTZER. 1994, et J.-M. DENTZER et R. SAUPIN, B. LIFTSHITZ, 1974. p. 80, n" 100 = C!J II, 1011). Enfin des noms comme
1996. Mokimos, Zenobia, Ogâ sont courants, comme ils le sont aussi ü Palmyre.
115 - Liste clans J. K. STARK, 1971. p. 53 avec l'explication, p. 115 : « Je11·ish et ils alternent parfois clans les généalogies avec des noms plus typiquement
name ». juifs comme Isaac (par exemple M. Sc1-IWABE et B. L1FTSHITZ, 1974, p. 15.
116 - Sur la tendance à considérer comme seulement juifs des noms aussi n"' 18 et 19 = C!J II, 994 et 995 avec un Isaac, fils de Mokimos). Tout cela
·
courants à Palmyre que sm wn (Simon) ou zbyd' (Zebîclà), on trouvera une est la preuve de l'existence d'une communauté juive importante à Palmyre.
mise en garde utile de J.-B. Frey, C!J II, (Asie-Afrique), p. 67. Ces noms Mais une partie d'entre eux se faisaient enterrer clans leur terre d'origine;
pour être juifs cl'origine, n'en sont pas moins populaires à Palmyre parmi ce n'est pas le cas de Zebîc!â Zénobios et Samuel qui font construire leur
le reste de la population. Le texte C/S 4201 ( C!J II, n" 820) est le seul tombeau à Palmyre suivant les coutumes locales et sans aucune référence
exemple cité par lui d'inscription juive. Postérieurement à la publication (autant qu'on puisse le dire aujourd"hui) à leur éventuelle judaïté. De même.
de son recueil, on peut noter le texte H. lNGHOLT , 1974, p. 50 (PAT 2729): si l'onomastique de deux frères et du père du texte H. lNGHOLT, I 974, p. 50
clans ce texte de concession, les trois frères s'appellent Aurelii Shimôn, est indubitablement juive, ces personnages observent les mêmes coutumes
Mezabbanâet Ishaq. fils de Iaqüb ( 'wrly' ifm'wn wmzbn' w'sbq bnyy'qwb). funéraires que les Palmyréniens. Sur les Juifs palmyréniens enterrés ü Beth
Trois inscriptions hébraïques anciennes, trois citations bibliques Shearim, voir annexe XIII. 4.
1
(Deutéronome 6, 4-9 et 7. 14 et 15) ont été découvertes ü Palmyre sur des 117 - Voir iVIAMA III, 1931 où les éditeurs (. . Keil et A. Wilhelm).
linteaux et montants de portes ( C!J IL n"' 821-823 ). Elles sont datées du remarquent ü propos des inscriptions de Korykos (p. 131) quïl n ·y a pas
111' s. d'après C!J II, p. 70, mais sont, en fait, sans cloute byzantines: voir de séparation entre les tombes chrétiennes et les tombes juives, sans cloute
J. STARCKY, 1960, col. 1099. parce que. même avant l'ère chrétienne, les tombes n · étaient pas séparées
À Beth Shearim, en Galilée, clans une nécropole où viennent se faire enterrer les unes des autres. Mais ü la différence de la tombe de Zebîdft Zénobios et
les Juifs de la Diaspora, on possède un certain nombre d'inscriptions en de Samuel, fils de Levi. les sarcophages des Juifs de Korykos portent des
araméen de Palmyre (voir M. SARTRE, 1991, p. 390: les textes sont clans signes distinctifs comme des chandeliers à sept branches.
B. MAZAR, 1973, p. 198-207 : voir PAT0! 32-0141 et annexe XIII. 4). On y 118 - Rien, c'est-à-dire une inhumation directement clans une fosse. sans
trouve aussi des textes grecs pour des Juifs de Palmyre, en particulier un objets pour l'accompagner et avec, au plus, un tas de pierres pour signaler
banquier, Léontios (M. SCHWABE et B. L1FTSHITZ, 1974, p. 72, n" 92 = C!J ll, la tombe.
1010). On a aussi un D::pµavoç 'IcraKiou ITaÀ.�Lup11voù (M. Sc11wABE et
Chapitre VI: Des monwnents pour l'éternité 217
Il faut rappeler qu'aux endroits où indubitablement les Une partie de la population s'est enrichie et l'exemple
gens modestes sont repérables dans un contexte funéraire, il de cette nécropole prouve l'existence d'une classe de notables,
y a juxtaposition et non pas mélange des différentes classes possesseurs de ces tombes riches, mais aussi celle d'une classe
sociales des habitants de Palmyre. La situation évolue peut qu'on pourrait qualifier de moyenne. C'est cette catégorie de
être à partir du ne siècle où les classes moyennes enrichies la population qui cherche à marquer son ascension sociale
trouvent place dans les grands hypogées concédés en partie par la construction de tombeaux qui prennent pour modèle ce
par leurs propriétaires. I1 faut noter pourtant que le nouveau que font les gens riches de la cité. Les différences de
type de tombeau qui emporte à partir de cette période les localisation sont un point intéressant dans ce cas, comme dans
suffrages des notables de Palmyre, le tombeau-temple, est celui de Palmyre. Apparemment, les classes sociales
beaucoup plus exclusif encore que les tours funéraires. Dans différentes ne pouvaient pas se mélanger à Elaioussa-Sebasté.
ce genre de monument, seuls les membres de la famille À Palmyre, on l'a vu, hormis dans le cas de la nécropole nord
avaient leur place (peut-être avec certains serviteurs ?). Les (au début de la période), le mélange s'est fait de manière
gens modestes ont dû se tourner vers d'autres formes de beaucoup plus accentuée, à la faveur des concessions faites
tombeaux pour trouver le lieu de leur dernier repos. Ce par les propriétaires dans leurs tombeaux de famille. Mais
problème de la dernière demeure des gens les plus pauvres 1'absence de textes dans la ville cilicienne dissimule peut
se pose aussi ailleurs, par exemple à Rome. Dans ce cas, il être des phénomènes de ce genre, que seule l'épigraphie
semble bien qu'à l'époque républicaine, la plupart des peut révéler. Les dates données pour les nécropoles
habitants de Rome ont été enterrés ou brûlés de manière dépendent en grande partie de critères stylistiques établis
anonyme. Seuls sont connus les gens, même modestes, qui pour les différents types de monuments, elles ne sont donc
avaient quelques prétentions à un statut social : les autres pas tout à fait assurées 123• De plus, on ignore tout ou
ont entièrement disparu 119• presque des phénomènes de réutilisation de tombes dans
On a ailleurs dans le monde gréco-romain des exemples ces différentes nécropoles, même si on soupçonne que
clairs de cette différenciation sociale au sein des nécropoles. de nombreux tombeaux ont été réemployés à l'époque tardive.
À Elaioussa-Sebasté, en Cilicie Trachée, une des nécropoles Incidemment, on peut faire quelques remarques sur ces
les plus importantes qui entourent la ville date des premiers nécropoles qui peuvent éclairer le cas de Palmyre. Il semble
siècles de l'ère chrétienne 120• Or il semble bien que cette bien qu'à Elaioussa-Sebasté, au moment de la grande
nécropole (N 6) ait été divisée en deux groupes principaux le prospérité économique (ri° et me siècles), les tombes rupestres,
long de la route. Les monuments funéraires qu'on y trouve qui étaient jusqu'alors la norme, ne suffisent plus aux élites
sont surtout des tombeaux-temples et des tombeaux-maisons enrichies. C'est ce qui explique qu'on soit passé aux
( Grabtempel et Grabhèiuser). On retrouve les deux types dans tombeaux à la structure architecturale élaborée comme les
les deux parties de la nécropole, mais la différence réside tombeaux-temples 12-1, forme qui a des antécédents dans
dans une séparation forte entre la nécropole des riches et celles d'autres parties de l'Asie Mineure.
des pauvres du point de vue de la complexité des monuments. Comme à Palmyre sans doute, et comme ailleurs, c'est
Dans la partie sud de la nécropole, les tombes de formes dans un contexte de prospérité générale que se développe le
simples sont absentes et les tombeaux-temples et maisons souci de se mettre en valeur et surtout de souligner
sont construits de manière assez riche. Au contraire, au nord, les différences sociales. C'est aussi dans un tel contexte
on retrouve certes les mêmes formes, mais les tombes sont que les membres des « classes moyennes » éprouvent le
moins riches et plus petites. La différenciation sociologique besoin d'imiter les gens plus riches qu'eux et de se lancer
se voit dans la dimension et la qualité variées des tombeaux. dans la construction de monuments importants, même si,
Les inscriptions de cette nécropole sont rares, sans doute malgré tout, leur fortune moins grande ne leur permet pas
comme le soupçonnait A. Wilhelm parce qu'elles étaient d'avoir des tombes aussi riches. À Palmyre, ce phénomène
peintes et qu'elles ont disparu 121• On n'a donc pas de preuves conduit ces mêmes gens à se faire enterrer dans des
épigraphiques de ces différences sociales, mais on sait par monuments semblables à ceux des grands notables, mais en
ailleurs que la cité d'Elaioussa-Sebasté a connu une période les partageant à plusieurs, ce qui permet de participer de façon
de grande prospérité qui a duré environ du règne du roi plus économique aux modes de vie (et de mort) de l'élite.
Archelaos, à la fin du(' siècle av. J.-C.,jusqu'auxAntonins 122• I1 peut exister une véritable rivalité et une concurrence
La résidence d'Archelaos et de son fils dans la ville et l'arrivée entre les membres de l'aristocratie locale qui, chacun à leur
de nombreux étrangers à la faveur de la paix romaine sont tour, essayent d'avoir la meilleure position pour dominer leurs
autant de facteurs qui ont sans doute permis le développement voisins et les écraser de leur luxe. Ce désir de rivaliser est
de cette cité. visible dans la manière dont les tombeaux sont installés au
] 19 - N. PURCELL, 1987, p. 32-33. 122 - Ibid .. p. 12-14.
I 20 - Cf. A. MACHATSCHEK, 1967, p. 27-28. L'auteur parle p. 28 de«Nnbel 123 - Sur les datations, cf. ibid., p. 56-6 I et 100-1 I O.
und Elend.1'\'Îertel » («quartiers nobles et miséreux »), ce qui est sans cloute 124 - Ce n'est sans cloute pas un hasard si à Palmyre clans les mêmes
un peu exagéré pour le deuxième de ces qualificatifs. conditions. c · est le même type de tombeaux qui devient typique des couches
121 - Cf. ibid., p. 23. les plus élevées de la population.
218 Les notables de Palmyre
sein des nécropoles. La situation des différentes tombes la ville 120• Si on pouvait prouver que les membres de telle
placées au sommet de la butte Umm Belqis, à l'entrée de la tribu sont tous regroupés dans telle nécropole, cela pourrait
vallée des Tombeaux, en est un bon exemple (fig. 72 et 75). apporter un certain nombre cl'enseignements sur ces divisions
En effet, sur cette éminence qui domine la route conduisant tribales qui restent en grande partie mystérieuses. La question
vers l'ouest, on trouve un certain nombre de tombes. est sans cloute difficile à résoudre en raison de l'état actuel
Leur localisation dans cette position privilégiée a sans doute de la documentation, mais le tableau suivant donne pourtant
les mêmes causes que celle des tombes qu'on peut trouver déjà quelques éléments de réponse.
dans les nécropoles lyciennes comme, par exemple, à Myra 125• Tribu référence lieu * date
On a aussi des exemples du même genre à Elaioussa
bny gdybwl RODINSON, 1950, p. 137 Agora 52 apr.
btry **
Sebasté en Cilicie. La localisation des tombes obéit à un
bny CIS 4164 (Jnv IV, 19) VT 38
certain nombre de critères qu'on peut essayer de déterminer.
bny kmr' CIS 4112 VT 4 av.
L'orientation des tombes se fait en grande partie en fonction
bny kmr' Jnv IV, 7a VT 67
de la route que longe la nécropole. Mais dans certains cas,
se fait jour aussi ce qu'on pourrait qualifier de souci bny knbt CIS 4114 •1••1••!•
VT 33 apr.
personnel. Des positions plus ou moins aberrantes par rapport bny mgrt CIS 4120 Mosquée 59 apr.
à la route, mais bien en vue, s'expliquent peut-être par la bny myt' CIS 4109 (Jnv IV, 28) VT 9 av.
présence d'un paysage ou d'une vue particulièrement aimée. bny myt' CIS 4116 ? **** 41 apr.
Et, en effet, la position de la nécropole, non loin de la mer et bny myt' CIS 4119 ? 59 apr.
en surplomb, peut facilement accréditer cette théorie 126• Mais bny myt' RODINSON, 1950, p. 137 Agora 2 apr.
on peut aussi penser au désir de rivaliser avec ses semblables bny mtbwl CIS 4113 Mosquée 9 apr.
et cl'être clans la position la plus en vue possible. bny mtbwl CIS 4115 VT 41 apr.
Ainsi, la nécropole de l'Isola Sacra, près d'Ostie, est bny mtbwl CIS 4187 VT 66 (?)
située le long d'une route qui est la condition déterminante bny mtbwl CANTINEAU, 1930a, n" 13 Dj. Antar 101
de la naissance de la nécropole. Dans cette dernière, le bny mtbwl Jnv VII, 3 Nécropole N 89
principe de la plus grande visibilité possible pour le passant bny mtbwl /111• VII, 5a Nécropole N 159
conditionne l'organisation de l'espace. Il n'y a pas bny 'grwd Inv VIII, 71 Bel ?
d'isolement de la cité des morts clans un espace cultuel défini, bny ·tr Inv IV, 14 VT 179
mais ce qui est privilégié, c'est le rapport avec le monde des bny m'zyn CJS 4197 Nouveau village ?
vivants 127• Il faut être vu, et pour l'être, la tendance naturelle <pUÀ1l CIS 4122 Nécropole N 79
est de se placer soit en position dominante (sur Umm Belqis KÀO'.UOlÔ'.ç •...
à Palmyre), soit à proximité du passage obligé de la route ;i;yf::;;vallée des Tombeaux: NécroôôtëN; ".:� VJJVIC ,rel
** Utilisé comme nom de personne, CIS 4483-4485.
(tours cl'Atenatan et d'Elahbel). *** Sur la famille, M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 81-83 et 1971, p. 421-423.
**** D'après le CIS « regione australi cil'itatis » (p. 245). M. DE VOGLIË,
1868, p. 38, n" 32 écrit : « groupe de tombeaux au sùd de la ville».
2. NÉCROPOLES ET CONSCIENCE TRIBALE Liste des textes.fiméraires mentionnant des tribus
L'existence des trois tombeaux attestés successivement (d'après M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 34-41 et DFD).
pour la même famille 128 clans la vallée des Tombeaux peut On peut tirer certains enseignements de ce tableau à
amener aussi à s'intéresser de manière plus précise à la propos de la répartition topographique des tribus clans les
répartition des différentes tombes des grandes familles nécropoles de Palmyre. Il faut commencer par quelques
palmyréniennes. En particulier, il est intéressant de voir de remarques préliminaires qui ont trait d'abord à la structure
quelle manière les différentes tribus palmyréniennes de la documentation. Le fait qu'on trouve des tribus réparties
qu'on connaît par les textes sont réparties dans les différentes entre nécropole nord et vallée des Tombeaux n'a pas
nécropoles qui entourent la ville. De même qu'il existait forcément une valeur absolue, si l'on considère, comme on
des localisations privilégiées de certaines de ces tribus au l'a rappelé plus haut, que les deux nécropoles se touchent et
sein de la ville même de Palmyre, on peut se demander si ces qu'il est après tout possible que les Palmyréniens les aient
1:111_
localisations n'ont pas des correspondances aux alentours de considérées comme ne formant qu'une seule entité
125 - Voir J. BoRCHARDT et ulii, 1975. sépultures anciennes des Bédouins. Ce dernier phénomène trouve des échos
126 - C'est l'explication proposée par A. MACHATSCHEK, 1967, p. 23. pour les nécropoles antiques de Palmyre avec l'installation de tombes sur
127 - J. BALDASSARE, 1987, p. 13 J. la colline Umm Belqis.
128 - Les tombeaux n'" 21, 67 et 68, tous trois situés dans la vallée des 130 - Leur lien était sans cloute beaucoup plus visible avant la construction
Tombeaux. du camp de Dioclétien et l'érection du rempart qui séparent nettement les
129 - Les localisations par clans des défunts sont attestées par exemple à cieux zones clans le paysage. Les cieux monuments recouvrent d'ailleurs en
Su!Jné. L'étude menée par A. de Boucheman ( 1939, p. 33, fig. 7) a montré plusieurs endroits des tombeaux. Voir des notations parallèles par E. WILL,
qu'il existait des groupements par clan des défunts. De plus sur le monticule 1949, p. 88.
qui domine la nécropole et la ville, clone à la meilleure place, on trouve les
Chapitre VI: Des nwnwnents pour 1 'éternité 219
Le tableau ne comporte que vingt lignes, ce qui signifie mentionnées plusieurs fois dans un contexte funéraire. Il
que seule une très faible partie des textes funéraires s'agit des Bené Mathabôl (six fois), des Bené Mîtâ (quatre
mentionne les tribus. Cela n'est pas étonnant; si on prend le fois) et enfin des Bené Komarê (deux fois). Elles font
corpus des textes de fondation tel qu'il a été établi en 1970 d'ailleurs parties des tribus les plus représentées à Palmyre
par M. Gawlikowski, on peut remarquer que seul un petit et il n'est pas étonnant qu'il s'agisse de trois des quatre
nombre de textes comporte le nom de la tribu. Ce sont les candidats proposés pour les quatre tribus civiques de
numéros 1 à 9, 11-12, 15-16, 20, 27, 53, 55 et 81 131, soit Palmyre rn_ Le quatrième candidat souvent retenu par les
dix-huit textes sur les quatre-vingt-un que contient la liste. historiens, les Bené Mazîn n'apparaît qu'une fois dans le
Aucun texte ne contient cette mention dans la liste des tableau 134• Les deux attestations des Bené Komarê
cinquante-deux textes de concession, tous postérieurs à 160 proviennent de la vallée des Tombeaux. On ne peut pas dire
apr. J.-C. La documentation sur ce sujet apparaît très réduite, grand-chose des Bené Mîtâ car, à l'exception d'un des quatre
ce qui restreint d'emblée la portée des conclusions qu'on textes, retrouvé dans la vallée des Tombeaux, l'origine des
pourrait en tirer. De plus, ce1tains de ces textes ont été trouvés inscriptions est malheureusement inconnue.
après leur remploi soit dans les environs de l'agora, soit C'est seulement dans le cas des Bené Mathabôl qu'on
encore dans des constructions d'époque islamique. Dans le peut aller plus loin. On se trouve en effet en présence de
premier cas, on peut soupçonner que la présence de ces textes dont on connaît l'origine et en assez grand nombre
pierres à cet endroit est à mettre en rapport avec la pour pouvoir juger qu'il ne s'agit pas seulement de simples
construction du rempart qui s'appuie sur l'agora dans cette coïncidences. Or il faut bien conclure à une grande variété
section de son parcours. On peut même penser que la pierre d'origine. Si on peut laisser de côté le texte qui a été
n'a pas dû être apportée de bien loin, et que la vallée des découvert dans une maison islamique, les membres de la
Tombeaux est un candidat tout désigné pour la localisation tribu ont trouvé leur dernier séjour dans trois lieux différents
du tombeau et de l'inscription qui s'y rattache. La question au moins : la vallée des Tombeaux, la nécropole nord, et,
est plus complexe pour les monuments découverts dans le plus surprenant, le Djebel A ntar, à une vingtaine de
sanctuaire de Bel, puisque les nécropoles en sont assez kilomètres au nord de Palmyre 135•
éloignées et que la longue présence du village arabe a favorisé Ce n'est pas le seul cas où un texte provient non de Palmyre
le rassemblement en ce lieu de pièces d'origines diverses. même, mais des environs immédiats. Outre celle citée clans le
Certains textes, enfin, sont aujourd'hui perdus ( CJS 4116) tableau 136, deux autres inscriptions sont publiées par
ou bien sont conservés dans des musées ( C/S 4119 au J. Cantineau dans le même article (avec quelques autres textes
Louvre) 132 sans qu'on en connaisse l'origine précise. funéraires palmyréniens). La première provient aussi de la zone
Il faut, je crois, s'en tenir aux faits bien établis dans le du Djebel Antar 137• C'est un texte grec très mutilé qui contient
commentaire de ce tableau. On remarque d'abord la la concession d'une tombe par un propriétaire à des parents. Il
prédominance très grande de la vallée des Tombeaux, d'où porte la date d'octobre 249. Une autre inscription provient de
proviennent environ la moitié des textes. On trouve ensuite Bazmiyye, à environ vingt-cinq kilomètres au sud de Palmyre 138•
la nécropole nord, avec trois textes ; on peut sans nul doute Il s'agit aussi d'un texte de concession, daté de mai 171. Le
ajouter le texte CJS 4197 qui provient de la zone du nouveau texte est très détaillé et on apprend ainsi que la vendeuse ne
village où il était remployé, donc à proximité immédiate, ou possédait qu'une partie de l'hypogée, qu'elle en cède une moitié
peut-être même, dans la nécropole. Les deux autres pour 120 deniers, qu'elle agit à la place de son mari, et qu'enfin,
nécropoles de Palmyre (sud-est et sud-ouest) ne sont pas Iadclaî, fils de Kîlaî (ydy br kyly), était témoin 139•
représentées. Ces deux nécropoles sont d'ailleurs moins bien Enfin, quelques pierres proviennent de Qaryatein-Nazala,
connues, et la nécropole sud-ouest au moins est considérée à environ 120 km au sud-ouest de Palmyre, sur la route de
comme plus récente. Cela s'accorde bien avec l'absence de Damas. C'est le cas d'un linteau d'hypogée (C/S 4199), sur
mention de tribus dans les textes qui en proviennent. lequel une inscription de fondation est datée de mars 193, et
Si on prend le tableau en commençant par la colonne du texte CJS 4130 daté d'août 95. Ce dernier fait partie d'un
« tribu », il est frappant que seules trois tribus soient groupe avec les inscriptions CJS 4131-4133, dispersées dans
131 - Soit les textes CIS 4109; 4112 Al 13; Palmyre V, n" 2 (= DFD, p. 268), p. 30). Cette tribu est aussi présente une seule fois clans le tableau (Jnv IV, 14).
mais le nom de la tribu a disparu; C/S 4114; 4115; M. RoDINSON, 1950, 135 - On parle généralement du Djebel Antar pour l'origine de ce texte.
p. 137; CJS 4116; 4119; 4120; Inv IV. 7a; CIS 4122; 4197; Inv V II, 3; Elle provient en fait de 8 km plus au nord, d'un lieu appelé Gawâ'ecl
J. CANTJNEAU, 1930a, n" 13; lnl' V II, Sa; IV, 14; et VlII, 71. Le texte le (J. CANTINEAU, 1930a, p. 545).
plus récent est le texte lm· IV. 14, daté d'avril 179. On peut rappeler qu'à la 136 - J. CANTINEALI, 1930a, p. 545-547. 11° 13.
i
même date, les bny zbdbwl dédient des statues à Shoraîkô, f ls de Haîran et 137 - Ibid.. p. 543-545, 11° 12. Republié clans IMP, n" 108.
aux membres de sa famille ( CJS 3950-3951 et 3953). On trouvera à la fin de 138 - J. CANTINEAU, 1930a, p. 548-549, n" 14.
l'index épigraphique une table de concordance pour M. ÜAWUKOWSKI, 1970b. 139 - Sur ce mot (gns/s en araméen, transcription du grec yvcoc vc11ç,
132 - AO 2203; clans le catalogue de J. DENTZER-FEYDY et J. TE!XIDOR, 1993, « garant »), voir F. RosENTHAL, 1936. p. 20-21 (cl· après E. Littman clans
p. 187, n" 188. Th. W!EGAND, 1932, p. 11) et la traduction de M. ÜAWLIKOWSKI, 1970b,
133 - Voir sur cette liste, le chapitre 11 (p. 69-72). p. 206, 11° 6. Sur cette fonction, voir supra, chapitre v. Ce texte fournit aussi
134 - CJS 4197; J. T Milik propose aussi les bny 'lrcomme candidat (DFD, l'unique mention d'une somme d'argent pour une concession.
220 Les notables de Palmy re
diverses collections, en particulier au Danemark et en Turquie. ci s'est faite par un choix de quatre groupes privilégiés. Le
Mais ces monuments ( CIS 4199 et 4130) proviennent à choix n'a sans cloute pas été entièrement arbitraire, et peut
l'origine de Palmyre et ils ont été transportés ensuite pour être même a-t-il été fait par les Palmyréniens eux-mêmes 145•
être réutilisés à Qaryatein (nom moderne de l'antique Le système est bien entré clans les mœurs, on en a une bonne
Nazala) 140• C'est sans doute le même phénomène pour le texte preuve clans la mention de ces tribus clans les textes. Mais
bilingue C/S 4403 141, signalé pour la première fois aussi à on peut aussi penser que les tribus qui sont mentionnées
Qaryatein. Cette plaque de fermeture de !oculus est en tout clans les inscriptions funéraires le sont parce qu'elles sont
cas séparée du tombeau auquel elle appartenait et qui, selon les tribus traditionnelles des personnages en question, et non
toute vraisemblance, se trouvait dans une des nécropoles de pas parce qu'elles sont les quatre tribus civiques.
Palmyre. Il semble au contraire que le texte CIS 4358, sur un On trouve clans ces textes un exemple assez intéressant
relief funéraire avec les p01iraits d'un homme et d'une femme, de la manière dont ont disparu les mentions cl'appartenance
provienne bien de Qaryatein. Or, on a vu qu'il existait à à la tribu. Le texte CIS 4197 lnv VII, 15) est une
Qaryatein une communauté originaire de Palmyre 142. inscription de fondation, faite par un anonyme, fils de Haîran
Cette question de l'origine peut se poser pour d'autres et petit-fils de Malikû, membre de la tribu des Benê Mazîn
textes cités. Le cas d'une inscription publiée par (... br bym br mlkw 11111 bny m'zyn). Le texte est daté de
G. W. Bowersock est assez semblable. Ce texte, réutilisé à l'année séleucide 393, soit 81-82 de notre ère, époque où il
Qasr el-Heir el-Sharqi, provient en fait de Palmyre 143• On est encore tout à fait naturel et courant de trouver le nom de
peut considérer que certains des textes funéraires découverts la tribu du personnage après sa généalogie (voir par exemple
en Palmyrène, en particulier à Qaryatein, ont en fait été lnv VII, 3 de 89 après J.-C.). Or la porte de cette tombe a été
apportés de Palmyre un certain temps après la désaffection restaurée après 188 de notre ère 146 par deux parents, Malê,
des tombeaux auxquels ils appartenaient. Dans certains cas, fils de Ogâ (ml' br 'g'), et Ogâ, fils de Shalmê ('g' br slm'),
pourtant, les tombeaux étaient installés et construits dans tous deux descendants d'un certainAîtîbel ( 'ytybl). Ils n'ont
cette zone à l'écart de Palmyre. C'est dans les ruines d'un apparemment aucun lien de parenté avec les fondateurs de
tombeau de la région du Djebel Antar, qu'a été découvert le la tombe, mais ils ne mentionnent pas leur tribu et cette partie
texte de concession en grec cité plus haut 144• Mais clans la de l'inscription est complète. Les critères et la mentalité ont
description du lieu de découverte des autres textes, rien ne complètement changé en l'espace d'un siècle.
laisse penser que des tombeaux se trouvent à proximité. Un On peut pourtant faire un rapprochement
seul exemple pour l'instant montre qu'il a pu en exister, mais prosopographique. En effet, le donateur d'un autel clans le
on n'en a aucune autre preuve. sanctuaire de Baalshamîn en 62 apr. J.-C. (BS n" 23) i-1ï est
Le texte qui mentionne les Benê Mathabôl vient peut-être un ancêtre de ces personnages. On ne connaît pas
peut-être du Djebel Antar: rien ne s'y oppose formellement; son nom, mais on a conservé la fin de sa généalogie ( {br
cela prouverait simplement qu'il n'y a pas de préférence byr]n br 'gylw 'ytybl) 148• Or la généalogie de Malê d'lnv VII,
tribale pour telle ou telle nécropole, mais au contraire une 15 en fait un petit-fils de Malê, fils de OgeîlûAîtîbel (hrml'
grande variété de localisations. Inversement, les nécropoles br 'gylw 'ytybl). À condition de considérer que, là comme
(au moins les deux qui sont représentées dans le tableau) ne ailleurs, la généalogie est télescopée et qu'on a sauté des
sont pas réservées à telle ou telle tribu, mais on peut y trouver générations en ne mentionnant que le nom de l'ancêtre du
des membres des Benê Mathabôl aussi bien que des membres clan, on peut, je crois, accepter ce rapprochement. On peut
effectuer un autre rapprochement 14 ) entre l'anonyme de BS
(
de Benê Komarê.
On peut proposer quelques explications (non exclusives) n" 23 et le personnage nommé 'ytybl br tym' br 'ytybl br
pour ce phénomène. D'abord, seul un faible nombre 'gylw du texte lnv VIII, 4. Le nom 'gylwest aussi celui d'un
cl'exemples est attesté, ce qui empêche de généraliser ces des ancêtres de Malê. Il s'agit sans doute d'une simple
conclusions. D'autre part, les tribus les plus représentées coïncidence, mais on peut remarquer qu'on est toujours dans
sont les tribus civiques. Or on sait que l'instauration de celles- la nécropole nord. La date du texte de Baalshamîn et celle
140 - Voir dans le CIS. ad foc.C'est aussi le cas de C!S 4194 qui provient pm1'ec! w1 irresistih!e quc11T\' to !mer lmi!c!ers in the c!esert. » (p. 355)
sans aucun doute de l'hypogée de Lishamsh fouillé par H. Ingholt, dans la 144 - Voir J. C\NTINEAll. 1930a. p. 543: « On voit El les ruines. rasées au
nécropole sud-ouest. Le texte cite d'ailleurs ce personnage : voir H. lNGHOLT, niveau du sol, d'un grand tombeau palmyrénien. »
l 938, p. !09. 145 - Voir M. SARTRE, 1996a, p. 387.
141 - Voir dans le CIS, ad foc., oü il est rapproché du texte C/S 4402, 146 - Seul le chiffre des centaines est conservé, il s'agit de 500; la date est
aujourd'hui au Louvre (AO 4086), mais qui provient, quant à lui, de Palmyre donc postérieure à l'année 188-189 de notre ère.
même. 147 - Voir aussi BS n" 34: il s'agit de Haîran, fils de Ogeîlû, le père du
142 - Voir chapitre 11 ; le texte C/S 3911 est une dédicace de colonne au donateur anonyme de BS n" 23.
grand dieu de Nazala ('Jh' rb' dnzly) faite par cinq frères qui se disent 148 - Il s'agit peut-être de Malikû, fils de Haîran. fils de Ogeîlü Aîtîbel du
« Palmyréniens de Nazala » (tdn11y' {dy] bnzly). texte RSP n" 161 (mlkw brf1yrn br 'gylw 'ytybl) dont on a parlé au chapitre
143 - G. W. BowERSOCK, 1976, p. 349-355. On peut citer une de ses précédent, ou bien d'un cousin.
conclusions qui s'applique aussi bien au cas des textes funéraires : « It 149 - Rapprochement déjà fait par C. Dunant, BS, p. 36, ad foc.
shou!d not be a source ci wonder that the vast ntin.s· of a city !ike Pa!myra
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 221
du texte funéraire Jnv VIII, 4 concordent assez bien. En effet de textes datés qui permettent de retracer l'évolution de
les dernières stèles du même type sont datées au plus tard l'installation à cet endroit 153• De plus, grâce au nombre
de 140. relativement important de textes et à quelques
Cette inscription du sanctuaire de comme
JIJL'lUüJHl-lllJUl, rapprochements prosopographiques, on connaît les tribus
pratiquement toutes les autres, est celle d'un membre de la d'un certain nombre de familles dont les tombes sont sur la
tribu des Bené Mazîn ( dy 11111 bny m 'zyn). Si le colline. On a vu un peu plus haut que les trois tombes de
rapprochement est valable, il faut souligner que la tombe ne Bené Baâ sont situées dans la vallée des Tombeaux. La plus
reste peut-être pas dans la même famille, mais ancienne est la plus éloignée du centre monumental de
qu'apparemment des membres de cette même tribu en restent Palmyre, à proximité de l'extrémité ouest de la vallée (tour
les propriétaires. n ° 21 ). Les deux autres (n')S 67 et 68), plus proches
Le texte de Baalshamîn et la stèle peuvent appuyer la chronologiquement, sont voisines et précisément sur la butte
théorie qui fait des stèles funéraires une expression des Umm Belqis. Or on sait par les textes que les membres de
classes moyennes ou même relativement aisées au sein de cette famille étaient appelés Bené Baâ, mais aussi qu'ils
la société palmyrénienne. Cette inscription funéraire a été faisaient pmtie de la tribu des bny knbt (CIS 4114 = Inv 4)
considérée« sans intérêt » par J. Cantineau (Jnv VIII, p. 8) en 33 après J.-C. On peut supposer que les petits-enfants
elle est sans aucune décoration 150• Il s'agit pourtant du qui sont surnommés Bené Baâ cinquante plus tard, lors de
monument funéraire d'un membre d'une famille importante, la fondation du tombeau-tour 11° 68 (CIS 4124 = Inv IV, 3),
au moins au sein du sanctuaire de Baalshamîn. En effet, appartiennent toujours à la même tribu. C'est à ce moment
Haîran, fils de Ogeîlû, fils de Aîtîbel, a peut-être été choisi que les mentions de la tribu disparaissent progressivement,
par la tribu des Bené Mazîn pour être archonte. C'est du il n'y a donc pas à s'étonner de leur absence clans ce texte.
moins 1'interprétation du texte BS 11° 34 que propose son Au même moment, la même année et le même mois
éditeur (p. 47). Certes, on ne connaît pas les relations précises (avril 83), une autre tombe est fondée à proximité immédiate
entre tous ces personnages, et Aîtîbel, fils de Taîmê de la de celle des Bené Baâ. C'est une des tombes les mieux
stèle funéraire (Jnv VIII, 4), est peut-être un membre tout à connues de Palmyre, celle de Jamblique (11° 51) ; là non plus,
fait mineur de la famille. Néanmoins, il est intéressant de on l'a vu, la tribu à laquelle il appartenait n'apparaît pas
voir par ce rapprochement que certaines personnes clans le texte (Inv IV, 6 = CIS 4123), il est appelé Jamblique
appartenant à des familles importantes ont sans cloute été fils de Moqîmû, qui est appelé Aqqalîs, fils de Malikû, fils
inhumées avec pour seul monument funéraire une simple de Belaqab, fils de Mîkâ, fils de Matâ, Palmyrénien (ymlkw
stèle. Les monuments imposants qui caractérisent les grandes brmqymw dy mtq111 'qlys brmlkw brbl'qb brmyk' brmt'
familles de Palmyre auraient donc laissé à l'écart les tdm1y'). Or Malikû, fils de Belaqab, fils de Mîkâ (mlkw br
membres les moins importants des clans. C'est au moins bl'qb br myk') est connu par ailleurs pour avoir offert un
une interprétation qu'on peut proposer de ces textes. bammanâ aux dieux Shadrafa et Duanat vers l'an 30 de notre
ère is-1_ Il est dit mn pbd bny zmr', c'est-à-dire qu'il appartient
La situation évolue rapidement au tournant des I°' et à la tribu des bny zmr'. C'est la seule attestation de cette tribu
n siècles. Lorsque, en 83, Jamblique fonde son tombeau, il
e
à Palmyre. Néanmoins, on peut avec M. Gawlikowski 155 et
a seulement besoin de dire qu'il est palmyrénien : la mention J. T. Milik 156 en faire une tribu avec assez de sûreté, quelle
de la tribu commence peut-être à devenir inutile que soit la signification de son nom. Jamblique a sans cloute
(C/S 4123) 151• Mais il y a dans ce texte presqu'une tonalité été symposiarque, comme le proposent les éditeurs de
de revendication, en tout cas une certaine fierté de ce statut RTP 157 ; c'est une preuve de plus que les notables de Palmyre
au sein de la communauté de Palmyre. En effet, l'ethnique faisaient bien partie de ceux qui se faisaient construire des
n'apparaît qu'en araméen et non dans la version grecque du tombes dans les nécropoles qui entourent la ville.
texte 15 2, ce qui indique peut-être que, cette fois, cette Quoi qu'il en soit, on a ici au moins deux tribus
précision s'adresse aux Palmyréniens eux-mêmes. représentées dans une proximité très grande, les bny knbt et
On peut d'ailleurs tenter d'expliquer ce texte et la les bny zmr'. Il est toujours possible qu'elles n'aient été que
position topographique de la tombe de Jamblique par un des subdivisions d'une autre tribu 15 8, mais il faut pour
phénomène de rivalité entre notables. On a la chance cl'avoir, l'instant en rester à des hypothèses et constater que la butte
pour cette zone de la vallée des Tombeaux, un certain nombre Umm Belqis est partagée entre plusieurs tribus.
150 - Voir le dessin dans lnv VIII , p. 8. 154 - lnF X, 145, repris par J. STARCKY, 1949, p. 44-46 et arbre généalogique
151 - À moins qu'il ne parle pas de sa tribu civique. parce que sa tribu p. 48.
ancestrale (bny zmr') n'a pas été l'une des quatre choisies au moment de 155 - M. GAWLlKOWSKr, 1973a, p. 35.
l'instauration du système. 156 - J. T. Milik, DFD, p. 55-56 et '.222-225.
152 - Voir aussi le texte CIS 4123bis (= lm• IV, 6a): le texte grec est 157 - RTP, p. 203 : voir J. T. Milik, DFD, p. 222.
identique, le texte araméen un peu différent. mais le terme tdm1y' suit 158 - Ou que l'une soit une subdivision de l' autre, comme les Bené Baâ le
toujours la généalogie de Jamblique. sont par rapport aux bny 'nbt.
153 - Voir J.-B. YoN. 1999.
222 Les notables de Palmyre
Les deux tombeaux des Benê Baâ sont pratiquement dynamique dont les membres rivalisent entre eux pour
l'un contre l'autre (pl. 6). Cela peut s'ajouter à ce qu'on a s'affirmer. Les monuments funéraires ne sont qu'une modalité
dit sur la concurrence et la lutte pour obtenir la meilleure de cet affrontement (qui, dans le cas de Rome au moins, n'a
place. Il est possible que la propriété de ce clan n'ait pas pas toujours été seulement symbolique). C'est vrai dans la
consisté seulement dans la tour, mais se soit étendue quelques Rome républicaine, c'est vrai à Elaioussa-Sebasté, ça l'est
mètres autour et c'est là que la seconde tour a été construite, aussi à Palmyre. Mais l'évolution que connaissent les
sans doute pour pouvoir rester sur le terrain de la famille. nécropoles de Rome est différente de celle qui a lieu à Palmyre.
Comme le montre l'aspect très différent des deux tombes, À Rome, la fin de la République et l'avènement de
c'est sans doute parce qu'ils n'étaient pas satisfaits de la l'Empire modifient profondément les conditions. Au début
tombe de leur grand-père (= n" 67) que les petits-enfants de de l'ère impériale, le souci de la concurrence et de la
Haîran ont construit la tombe n" 68. La tour n" 67 159 a été la recherche des honneurs fait place à un souci d'ordre et
première à s'installer sur ce versant de la colline Umm Belqis. d'appartenance au groupe. Ce caractère égalitaire du groupe
Mais dans les dernières décennies du I siècle, plusieurs tours
er
« bourgeois » est manifeste dans l'apparence monotone des
furent construites dans cette zone. On pense à la tour n" 51 façades. Les tombes prennent des aspects de plus en plus
de Jamblique bien sûr, mais on sait aussi que la tour n" 63 uniformes. On peut noter d'ailleurs l'opposition entre les
lui est antérieure de quelques années (79 apr. J.-C. d'après extérieurs sobres et les intérieurs richement décorés 162• La
le texte CIS 4121 = Inv IV, 5); les tours n°' 62, 69, 70, 7 1 situation est bien différente à Palmyre, où l'absence du
appartiennent elles aussi aux dernières années du 1"' siècle 160• pouvoir central, trop proche et trop puissant à Rome, a permis
On peut soupçonner que, devant cette concurrence, les le développement des monuments funéraires dont la richesse
propriétaires de la tour n" 67 ont décidé de construire une et le luxe sont visibles aussi à l'extérieur. Cette concurrence
autre tour qui permette à leur famille de faire meilleure figure. entre notables qui s'était plus ou moins tue à Rome après les
Ces raisons de prestige familial expliquent dans bien des guerres civiles de la fin de l'époque républicaine, a, au
cas les décisions de construction de nouveaux sépulcres par contraire, été un fait prédominant à Palmyre pendant les trois
les familles de Palmyre. On a ici la chance d'avoir un exemple siècles qui ont suivi Actium.
où certains détails sont connus, ce qui permet de reconstruire
les faits de manière hypothétique, certes, mais assez
vraisemblable. En tout cas, l'exacte concordance des dates E. LANGUE ET FORMULAIRE DES INSCRIPTIONS
pourrait être la conséquence d'un souci de concurrence des FUNÉRAIRES
familles de Jamblique et de celle de Benê Baâ, pour avoir la 1. LANGUE
priorité sur cette colline. Un coup d' œil sur le plan montre
assez la position privilégiée qu'elle occupe, dans le L'ensemble de la documentation épigraphique sur les
prolongement exact de la Colonnade transversale. Elle se nécropoles de Palmyre est formé de deux types principaux
trouve non seulement en surplomb de ln route qui va vers de textes. Une première catégorie comprend les textes
l'ouest, mais à proximité immédiate de la route vers le sud, individuels dans lesquels le nom du défunt est mentionné;
avant que celle-ci n'atteigne la nécropole sud-ouest. Selon il peut s'agir de stèles pour les inhumations individuelles,
toute vraisemblance, la ville de Palmyre était située au sud aussi bien que de plaques de fermeture de loculi à l'intérieur
de la zone occupée actuellement par le site archéologique et des caveaux de famille. La seconde catégorie est constituée
ses monuments, donc au sud du rempart de Dioclétien. de textes qui équivalent plus ou moins à des titres de
L'agora et le sanctuaire de Nabû ouvrent d'ailleurs de ce côté. propriété. Ce sont soit des rappels de la fondation par une
Or depuis cette partie du site, on a une très belle vue sur la famille, soit des attestations de la concession d'une partie
colline, et en particulier sur ces quelques tours funéraires, de la tombe à une autre famille.
comme celle de Jamblique ou les numéros 67 et 68 (fig. 72). Les textes de la première catégorie sont de loin les plus
Du point de vue chronologique, on notera la concomitance nombreux, puisque chacun des défunts qui trouvaient place
entre, d'une part, la date de ces constructions et, d'autre part, dans les tombeaux pouvait avoir le sien, alors qu'il n'y avait
la prospérité économique, mais aussi le dynamisme de ce qui qu'un texte de fondation par sépulture collective. On a pourtant
n'était, un siècle plus tôt, qu'une modeste oasis du désert pu recueillir un certain nombre de ces textes de fondation et
syrien. Le développement de la nécropole de Palmyre suit un de concession. Le bilan fait par M. Gawlikowski en 1970 en
schéma classique qu'on retrouve ailleurs dans le monde gréco dénombrait 81 du premier type et 52 du deuxième 163• Depuis
romain. La formation de ces véritables rues à tombes cette date, quelques autres textes ont été publiés (voir tableau
(Grüberstrafien) est toujours liée à la vita1ité d'un lieu ci-contre), mais sans changer de manière radicale l'image
donné 161• Leur éclosion nécessite la présence d'une classe qu'on pouvait en avoir il y a trente ans.
159 - Voir M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 69-71 et plan m. p. 49. 162 - H. V ON HESBERG et P. ZANKER, 1987b, p. 14.
160 - M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 99-102. ] 63 - M. GAWLIKOWSKI, ] 970b, p. 184-219.
161 - Voir H. VON HESBERG et P. ZAN KER, I 987b, p. 17.
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 223
RSP n" 51 araméen 131 Ces textes sont pourtant assez longs pour qu'on puisse
après les mettre en série avec les autres textes du même type. Ils
AS'AD et TEIXlDOR,1985a, 11 ° 7 araméen ont en fait le grand intérêt d'utiliser le grec comme beaucoup
188/18 9
GAWLIKOWSKI,1970a, n" 5 bilingue 215 de textes de fondation. Le recueil de M. Gawlikowski et le
TAKAYASU et TAKURA (éd.),1994, tableau ci-dessus qui le complète permettent de faire une
araméen 220 statistique rapide des langues utilisées dans les textes de
n" 8
GAWLIKOWSKI, 1987, p. 306, fondation et de concession dans les nécropoles de Palmyre.
araméen 222
n ° 28
TAKAYASU et TAKURA (éd.),1994, 222 araméen trilingue bilingue grec
araméen
n" 7 Fondation 51 3 41 3
AS'AD et TE!XIDOR, 1985a, 11 ° 5 bilingue 238/239 Concession 52 0 l1 1 **
As· AD et TEIXlDOR,1985a, 11 ° 8 bilingue 240/241 * Soit un total de 98 textes de fondation. qui représentent
approximativement le même nombre de tombeaux, à l'exception du
GAWLIKOWSKI, ]975, p. 129 araméen 242 texte ln l' IV, 9b qui vient du même tombeau que CIS 4168 et qui est
lNGHOLT, 1974, p. 50 araméen 243 sans doute une reprise de ce dernier texte. Une très grande partie de
ces inscriptions ont été découvertes hors contexte et ne peuvent donc
CANTINEAU, 1930a, 11° 12 grec 249 être reliées au tombeau auquel elles appartiennent.
Textes defcmdation et de concession ** Soit un total de 64 textes de concession. pour seulement 35 tombes
concernées par ces inscriptions de concession, ce qui vient un peu
absents du recueil de M. GAWLIKOWSKI, 197Gb. fausser les chiffres.
Le principal enseignement qu'on peut tirer de ce tableau Du point de vue de la langue, la grande différence entre
est que les textes de concession sont plus anciens qu'on ne les deux types de textes est frappante. Il y a beaucoup plus
le croyait jusque-là. En effet, le texte publié par H. Ingholt d'inscriptions de fondation que de concession, mais les
permet d'avancer d'une soixantaine d'années la date du premières comportent une partie en grec, beaucoup plus
premier texte de concession attesté puisqu'il remonte à 95 souvent que les autres.Certes, parmi les textes qui sont utilisés
apr. J.-C. (H. INGHOLT, 1974, p. 38). En fait, cette inscription clans ces statistiques, un certain nombre est très mutilé, et on
est fort différente des textes de concession habituels, et il ne peut exclure que, pour une proportion non négligeable
faut sans cloute la mettre un peu à part, même si, par cl'entre eux, un des deux textes ait disparu. Ainsi par exemple,
commodité, on peut la désigner aussi comme une inscription le texte araméen Inv VIII, 67 165 est décrit par J. Cantineau,
de concession (voir chapitre v). son premier éditeur, comme un fragment de plaque de pierre.
164 - M. GAWUKOWSI<I, 1970b. p. 40. 165 - Dans le recueil cle M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 203. n" 71.
224 Les notables de Palmyre
Rien n'interdit de penser qu'une autre partie de la plaque dernières demeures, ils aient utilisé leur langue de tous les
portait une inscription grecque. L'inverse est vrai pour un jours. C'est donc tout naturellement qu'on se servait de
texte grec du camp de Dioclétien 166 : ce fragment de plaque l'araméen pour inscrire son nom sur la plaque funéraire qui
de quelques centimètres de côté a pu comporter aussi un texte servait à fermer le !oculus dans lequel on devait reposer.
araméen. Mais il y a de grandes chances que, pour un nombre Des parallèles à ce genre cl'attitude sont attestés dans
de textes qui atteint approximativement 150, la proportion d'autres régions de l'Empire où les langues locales ont gardé
de textes grecs disparus soit sensiblement égale à celle des leur importance. Ainsi à Leptis Magna, on connaît un certain
textes araméens perdus. nombre de textes soit bilingues (latin et punique) soit
Or la moitié environ des textes de fondation comprend unilingues (néo-punique). De même l'onomastique d'origine
au moins du grec (surtout en combinaison avec l'araméen, sémitique reste longtemps en vigueur, s eule ou en
mais aussi parfois avec du latin, ou seul). Mais cette composition avec des noms latins. Or il est intéressant de
e
proportion tombe à un sixième en ce qui concerne les textes voir qu'au cours du II siècle principalement, il existe en fait
de concession. Ces chiffres sont éloquents en eux-mêmes, deux strates d'inscriptions. Les noms locaux sont absents
mais il peut être utile de les comparer avec ceux de des monuments publics, mais ils réapparaissent sur les
l'ensemble des textes funéraires qui comportent du grec et/ monuments privés, c'est-à-dire en particulier les tombeaux.
ou du latin dans l'épigraphie de Palmyre. Environ 115 textes Même si la situation est différente de celle de Palmyre, parce
de ce type ont été publiés, plus quelques inédits. que les survivances sémitiques sont moins fortes et qu'elles
De ce nombre, il faut soustraire dix textes byzantins 167, sont limitées en partie aux couches moins huppées de la
et une quinzaine de textes dont le caractère funéraire est population, ce qu'on voit à Leptis Magna montre bien la
seulement probable. Il faut aussi compter les huit épitaphes différence de statut linguistique du domaine funéraire (privé)
latines provenant de Palmyre même : elles ne sont pas le et du domaine public. L'onomastique des grands personnages
fait de Palmyréniens à proprement parler, et ce sont des stèles est, quant à elle, entièrement latine 173•
funéraires n'appartenant pas à une sépulture collective 16K. À Palmyre, la situation est un peu différente, et la langue
Les textes funéraires proprement dits en grec ( ou locale prédomine plus nettement. Ce sont plutôt les quelques
bilingues) se limitent donc à une cinquantaine de textes de reliefs qui portent des inscriptions grecques ou bilingues qu'il
fondation et une dizaine de textes de concession, auxquels faut expliquer. Un seul cl'entre eux trouve une explication
s'ajoutent une inscription métrique (lnv X, 28) 169 et un peu très simple, c'est le relief funéraire qui porte l'inscription
plus d'une vingtaine d'inscriptions sur des reliefs funéraires CIS 4401 17\ puisque ce personnage (inconnu par ailleurs),
ou des plaques de fermeture de loculi 170• On a cité plus haut Marcus Iulius Maximus Aristeides, était colon à Beyrouth
le nombre de ces plaques recueillies dans le Co17rns (fig. 76). Son nom n'est pas palmyrénien, mais correspond
Inscriptionwn Semiticarum (plus de quatre cents dont bien à celui d'un Grec (ou d'un Oriental) originaire d'une
seulement trois bilingues). colonie latine du Proche-Orient. De même, le nom de sa
Pn11rt:cint, ]ps; tPxtP-: grPrs: (Pt htin-:) rPprPs:PntPnt Pnvirnn fillP (T nrillia) Pt rPlni rlP -:on gPnrlrP (PPi-tin:iv) nP cnnt p�c
un quart du nombre total de textes sémitiques 171• D'après le moins du monde inattendus pour des gens originaires d'une
ces chiffres, le domaine funéraire est du point de vue cité dont le latin était la langue officielle. Pour cette raison,
linguistique un domaine tout à fait particulier. La grande l'absence du latin pour la double épitaphe est relativement
prédominance de la langue locale dans l'épigraphie funéraire étonnante. Les deux versions (grec et araméen) disent
est un phénomène qu'on a remarqué depuis déjà exactement la même chose, même si le texte grec semble
longtemps 172• Les Palmyréniens parlaient l'araméen chez eux avoir la priorité. En effet, il est inscrit dans un cadre qui
et entre eux ; ils réservaient le grec pour les occasions semble prévu à cet effet au-dessus de l'épaule gauche du
officielles et s'en servaient aussi comme langue de personnage. Le texte palmyrénien est inscrit de manière plus
communication avec les autres habitants de l'Empire. Il est cursive de l'autre côté, dans le champ resté libre 175• Ces deux
assez naturel que clans un domaine aussi privé que les textes marquent sûrement une volonté d'intégration du
coutumes funéraires, et qui plus est à l'intérieur de leurs personnage qui a fait appel sans aucun doute à des artisans
] 66 - M. GAWLIKOWSKI, ] 984. p. ] 24, n" 34 (= M. GAWLIKOWSKI, 1970b, 171 - Environ 2 000 textes palmyréniens proviennent de la ville de Palmyre
p. 203, n" 72). même (tessères non comprises); environ 450 textes comprennent du grec
167 - Plus les textes récemment publiés par S. P. KowALSKI, l 997. p. 39-62. et/ou du latin. Au total. 210 textes sont bilingues grec-araméen (ou dans un
l 68 - /m• VIII, 203-205, 207-209; H. SEYRIG, 1933a. p. 161, n" 3 (AE 1933. seul cas. latin-araméen : C!S 3962 = lnl' X. 17) ou trilingues (7 cas).
209); H. Heinen, dans K. PARLASCA, 1982. p. 35. l 72 - Par exemple, M. A. R. CoLLEDGE. 1976a, p. 68.
169 - Mais le texte est en l'honneur du fils d'un légat de Syrie. 173 - G. DI VITA-ÉVRARD, 1993. p. 293-314.
170 - Les textes SEC 40. 1420 et 43. 1037. parfois présentées comme 174 - Aujourd'hui au musée du Louvre (AO l 556) ; dans le catalogue
palmyréniens. en particulier dans des catalogues de vente. sont en fait plus J. DENTZER-FEYDY et J. TEIXIDOR, 1993, p. 162. n" l 66.
probablement originaires de la région de I 'Euphrate (Hiérapolis ou Zeugma). 175 - Même si selon l'usage habituel ù Palmyre, les textes araméens ne
Il est ù la rigueur possible que le texte SEC 39, 1590 vienne de Palmyre, reçoivent que rarement des cadres. Dans ce cas. on peut se demander si
mais rien ne l'assure (voir chapitre IV et i1ifi·o). chaque inscription n'est pas gravée selon les coutumes propres à sa langue.
Chapitre VI: Des monuments pour 1 'éternité 225
locaux pour réaliser ce buste 176• Il est bien évidemment s'il est cl'origine sémitique (on pense bien sûr à la cité voisine
dommage qu'on ne sache pas à quel monument cette plaque d'Émèse), mais il s'agit seulement d'une hypothèse 1811•
appmienait, il aurait été intéressant de savoir si ce personnage Parmi ces textes grecs, un petit groupe appelle quelques
avait un tombeau ,--.o,•cr'1,,'"le>I QU 0bable111ent, il avait remarques particulières. Il s'agit des textes où le nom et le
profité de la concession d'une partie d'une tombe construite patronyme du défunt sont suivis de la formule &AurŒ xàipE 181•
182
par une famille locale. On sait que cette formule est assez courante en • Les
Les autres inscriptions grecques du même genre sont inscriptions funéraires de Zeugma -', cl' Apamée is-i,
18
différentes. En effet, les gens qui y sont représentés portent d'Émèse 185 ou encore cl' Antioche 186 attestent amplement de
généralement des noms arabes ou araméens ; selon toute la faveur de la formule en Syrie du Nord ainsi que sur la
vraisemblance, ils sont palmyréniens dans un grand nombre côte phénicienne 187• Elle est aussi attestée ailleurs clans le
de cas. On a par exemple, dans le texte RSP n" 33, un certain monde grec, par exemple dans l'Égée, mais elle y est assez
Iapmoç Za�8a8ouç 1:où Av1�17Àou, ce qui correspond clans la rare 188• Il est intéressant de voir que Palmyre est incluse clans
version araméenne à yrby br zbd' th bnbl. Le cas du texte cette sphère culturelle de la Syrie-Phénicie, même si c'est
CIS 4402 est plus compliqué puisqu'on y voit un'AnoU68wpoç de manière marginale.
EÀa�17Aou être appelé en araméen bgdn br' lbbl. Malgré l'avis Certains détails pourtant prouvent que cette intégration
contraire de J. K. Stark 177, il est tentant de considérer culturelle à la Syrie romaine n'est pas sans limite. La moitié
'AnoAM8wpoç comme une traduction du nom d'origine perse, de ces textes sont ainsi doublés d'une version palmyrénienne
Bagclan, qui signifie justement « don de dieu» 178• De « don (la formule est traduite, si l'on peut dire, par bbl « hélas » ),
cl'Apollon» à « don de dieu», le chemin à franchir n'est pas tout à fait conforme aux usages locaux. Comme on l'a vu
très long. La présence courante de noms perses à Palmyre et le aussi (chapitre v), le nom du défunt est toujours accompagné
nom du père purement palmyrénien assurent de toute façon d'au moins un patronyme; or, l'usage est tout différent clans
l'origine locale du personnage (voir chap. n). le reste de la Syrie, où, aussi bien à Zeugma qu'à Antioche,
Le phénomène le plus étonnant est l'existence de plaques le nom du défunt est inscrit seul iwJ_ Le texte Palmyre n° 1
inscrites, où l'araméen est absent, alors que l'onomastique des où la généalogie du défunt remonte jusqu'à l'arrière-grand
personnages est purement palmyrénienne. À vrai dire, ces père est caractéristique de ces inscriptions palmyréniennes
textes sont rares 179, mais l'explication en est difficile. On peut clans lesquelles le plus important est bien de se replacer clans
toujours penser à un certain snobisme de la part de quelques une famille et une lignée, en mentionnant les noms de ses
uns cl'entre eux qui, malgré leurs noms peu grecs (EÀa�17Àoç ancêtres : c'est en fait le sujet fondamental de ces textes et
A1pavou 1:où EÀa�17Àou wù Mavvou clans le texte Palmyre les Palmyréniens, même quand ils utilisaient un formulaire
n° 1 ), préféraient utiliser cette langue plutôt que l'araméen de gréco-romain, n'avaient garde de l'oublier. On traduisait les
Palmyre. Le problème reste insoluble clans la plupart des cas. textes palmyréniens en prenant comme modèle ce qui se
Certes, le Samsigeramos de l'inscription lnv VIII, 202 faisait chez les plus proches voisins, mais sans se couper
(LEµmyEpaµoç) est peut-être un étranger à Palmyre, même totalement des traditions locales.
176 - Le portrait néanmoins ne trouve pas de parallèle proche clans les autres 2001, vol. Il, p. 173 pour le Hawrân.
bustes funéraires connus à Palmyre. Peut-être cela vient-il du souci de 183 - J. WAGNER, 1976: exemples trop nombreux pour qu'on en fasse ici
l'artiste cl'individualiser le personnage. la liste, entre les pages 175 et 265.
177 - Qui fait dériver le nom de l'arabe bUcîd, « vêtement» (J. K. STARK, 184 -/GLSIV, 1363, 1365, 1368-1370.
1971, p. 74) en arguant de l'extrême rareté des noms perses à Palmyre. On 185 - !GLS V, 2301sq.
trouve pourtant suffisamment de Worocl, Artaban ou Sasan, pour pouvoir 186 - Voir dans le tome III des !GLS, l'index des tomes I-III, s. \'., p. XIII.
penser autrement (voir annexe X). qui donne une longue liste des attestations du terme (pour Antioche et
178 - Voir J. T. Milik, DFD, p. 245. On retrouve ce nom clans une des Daphné, 76 exemples).
inscriptions de concession du tombeau F de la nécropole sud-est 187 - Par exemple, !GLS V II, 4022-4023 (Tartous) ou à Beyrouth
(H. TAKAYASU et I. TAKURA [éd.]. 1994, n" 8). (WADD!NGTON 1850a, 1851 et 1853), mais on a surtout de nombreux
179 - Par exemple. In l' V III, 120, 164 et 202 ; S. RoNZEVALLE, 191O. p. l 79. exemples à Sidon (par exemple clans G. CoNTENAU, 1921, n'" 5, 7, 9-11, 15,
n" 33 ; H. INGHOLT, 1936. p. 106, n" l O ; Palmyre II, n" 1 et V, n" 1. Certains 17). D'après un calcul que je dois à C. Apicella, environ 45 % des
cas sont douteux car les pierres sont parfois fragmentaires. inscriptions de Sidon comportent cette formule.
180 - Il faut noter la gravure relativement grossière de ce qui est presque 188 - Par exemple !G XH, 1, 967 près de Rhodes; !G XII, 3, 850 à Théra.
un graffiti sur une plaque de calcaire (voir dessin, ln1' V III, p. 122) et Il est curieux que cette expression relativement rare clans la région soit
remarquer l'absence de patronyme, ce qui est relativement rare à Palmyre attestée 7 fois pour la seule petite île cl'Anaphé au nord-ouest de Rhodes
(esclave ou étranger?). (!G Xll, 3, 311-317). On mesure là encore le poids de traditions très locales.
181 - Ce sont les textes CIS 4402 (Louvre); CIS 4403 (collection privée); 189 - Ce détail pousse à écarter l'origine palmyrénienne pour Je texte
S. RoNZEVALLE, 1910, p. 179, n" 33 (Boston); Z. BEN-HAY YlM, 1947, p. 142 SEG 40, 1420, épitaphe de 'louÀlE Ztjvov. De plus la formule n'est pas
( collection privée) ; Inv V III, 164, Palmyre II, n" 1 et Kh. As'AD, 1993, cxÀurcE xcxîpE mais cxopE xciipE qui est connue en Syrie (par exemple à
p. 294-295 (Palmyre). À ces sept textes s'ajoutent quelques inédits conservés Zeugma: J. WAGNER, 1976, n'"22b, 34, 38, 143, 163) mais n'est jamais
au musée de Palmyre (sur ce sujet, voir un article en préparation, dans les attestée à Palmyre. D'après A. SARTRE-FAUR!AT, 2001, vol. II, p. 140-142,
actes de ]a journée d'études IGLS, Lyon. novembre 2000). Pour la traduction le nom seul est assez rare en Orient, et il est à mettre en rapport avec des
d'aÀUrcE, voir !GLS V I, p. 152, n. 1 et M. N. Too, 1951, p. 187. familles moins traditionnelles.
182 - Mais pas partout avec la même fréquence, voir A. SARTRE-FAUR!AT,
226 Les notables de Palmyre
On a d'ailleurs peut-être fait appel à des artisans non linteau de la porte 1')8• Les deux plaques de fondation qu'on
palmyréniens pour certains des reliefs qui portent cette vient de citer sont toutes les deux bilingues. Le cas est
formule. C'est la théorie de K. Parlasca qui pense que trois semblable pour les temples funéraires. On connaît en effet
de ces défunts appartiennent à la même famille. En effet, onze exemples d'inscriptions de fondation bilingues pour ce
NacrpaUa8oç est fils de MaÀxoç (il est appelé en araméen type de monument ; toutes sont sur des linteaux de porte 199•
m�r' br mlkw br 11$r') 190, A88ma est fille de MaÀxoç 191, et
Mo1C1µoç est aussi fils d'un MaÀxoç 192• Les ressemblances
2. FORMULAIRE ET VOCABULAIRE
stylistiques, l'utilisation du grec et la présence du nom
Malchos rendent probable leur identification comme deux De la part des propriétaires-fondateurs des tombeaux, ces
fils et une fille de ce Malchos. 11$r' du texte C/S 4403 serait textes sont des manifestations de fierté, et aussi, d'une certaine
de plus le fondateur de la tombe de Nasrallât dans la nécropole manière, des manifestations de culture. Non seulement ces
1
sud-ouest, comme l'avait déjà vu H. Ingholt 'n. Une tradition familles étaient capables de réunir les fonds considérables
familiale et 1'origine étrangère des artistes expliqueraient la nécessaires à la construction de tels monuments, mais en plus
répétition de la formule et 1'usage assez constant du grec elles pouvaient en inscrire les dédicaces en grec. De plus,
dans ces textes, mais aussi dans le texte de fondation. cette fonction de publicité des textes funéraires était renforcée
Si l'usage du grec dans les textes funéraires n'est pas par la position de ces tombeaux, en particulier les tours et les
majoritaire, il est donc très répandu dans les inscriptions de temples funéraires de la vallée des Tombeaux, sur la route
fondation de sépulcre. On peut se demander si la raison n'en qui conduisait vers la côte syrienne. C'est sur cette route que
est pas simplement que ces textes sortent justement du passaient les marchands étrangers qui venaient commercer à
domaine privé. Il faut souligner que les textes de fondation Palmyre. Ces inscriptions grecques étaient placées à des
proviennent des parties extérieures des monuments, inscrits endroits où les gens qui pouvaient comprendre le grec avaient
par exemple sur une plaque encastrée dans la façade aussi la possibilité de les lire.
(CIS 4134 = lnv IV, 27a pour la tour d'Elahbel). Mais ce genre On peut comparer la fonction de ces textes à celle des
de texte est souvent difficilement lisible 19�. Cela explique textes honorifiques qui ornent les rues et les espaces publics
qu'il en ait quelques fois existé une autre version, parfois de la ville de Palmyre. La présence répétée du terme araméen
légèrement différente, sur les linteaux de porte 195• On a qui signifie « en son (leur) honneur » ( lyqI11) à la fin des
relativement peu de plaques p01iant l'inscription de fondation, textes de fondation montre bien quelle est la fonction de ces
mais beaucoup d'entre elles ont disparu, et il ne reste plus monuments : célébrer la famille du fondateur. La formule
maintenant que leur emplacement sur les façades 106• reçoit parfois - mais c'est loin d'être systématique - une
Dans le cas de nombreux tombeaux, il y avait peut-être traduction littérale grecque sous la forme Ek -cnµ17v aurnù.
un seul texte, celui du linteau.C'est la série la plus nombreuse Ce n'est pas une expression très courante clans l'épigraphie
qui ait été conservée. De toute façon, les plaques de façades funéraire grecque et il s'agit vraisemblablement d'une
sont un phénomène bien compréhensible dans le cas des tours adaptation directe des coutumes locales clans la langue
funéraires. Pour les hypogées dont la seule partie qui d'apparat des notables. Les raisons de l'usage du grec sont
apparaissait à l'extérieur était la porte et le massif qui la les mêmes clans le cadre funéraire que dans le cadre civique :
contenait, le problème était différent.C'était généralement sur elles marquent une volonté d'intégration dans les cadres de
les linteaux qu'étaient gravées les inscriptions de fondation, l'Empire romain, dont la langue en Orient est le grec. Il est
mais on connaît des exceptions, tel le texte RSP n' 25, plaque 1
190 - C!S 4403. Cette théorie est développée dans K. P.\RL\SCA, 1985b. 197 Même si M. G.\WLIKOWSKI. 1970b, p. l 96. en parle comme c1·un
p. 351-353. linteau. Cest en fait le texte c le concession (RSP n" '.?.4) qui se trouvait sur
191 - S. RoNZEVALLE, 191o. p. 179. n" 33. le linteau.
19'.?.- Z. BEN-HAYYIM, 1947, p. 14'.?.. 198 - H. lNGHOLT, 1935, p. 60.
193 - H. lNGHOLT, 1935. p. 109. 199 - Le seul exemple avec texte araméen seul est aussi sur un linteau :
194- Voir par exemple les remarques de J. Cantineau à propos du texte de C/S 4170 (= lm• IV, 23) pour le temple funéraire n" 38a.
la tour d"Elahbel, 1111• IV, p. 33. Mais les lettres étaient peintes en rouge '.?.00 - Par exemple le grec du texte CIS 4123 (lm• IV, 6) comporte une version
clans l' Antiquité ce qui avait pour effet de les rendre beaucoup plus lisibles. abrégée de la généalogie de .Jamblique, complète en araméen. Il n'en est
195 - Voir C/S 4123 et 4 l '.?.3bis (/nF IV, 6a et b ; textes de la tour de évidemment pas de même des textes honorifiques pour lesquels on peut
Jamblique). Dans ce cas les deux textes grecs sont identiques mais les textes soupçonner que le contraire se produit. Sur le vocabulaire des tombes en
araméens présentent des variantes. et J. Cantineau (/nF IV, p. 13) propose araméen, voir M. GAWLIKOWSKI. 197'.?., p. 5-15.
de voir clans le texte b (sur le linteau) un simple résumé de !"autre texte. 20 l - Version complète de CIS 4163 = lm• Vlll. 61.
196 - Voir les remarques de J. Cantineau dans /nF IV, p. 5 et 8.
Chapitre VI: Des monwnents pour /'éternité 227
simplement «tombeau», alors que le grec emploie les mots Le mot �LVlWElOV qui souligne la fonction de mémoire de la
crn:1i)1,mov 1a<j)ECüvoç («1 'hypogée du tombeau » ), ce qui est tombe traduit certes parfois dkrn («mémorial») ou nps (qui,
beaucoup plus précis et renseigne sur la nature du monument. du sens de «âme», «personne», est passé au même sens
Il existe d'autre part des parallèles en grec dans les textes de « mémorial » de cette personne 207). Mais il arrive aussi
funéraires des provinces d'Asie Mineure. Ainsi, le texte qu'il soit équivalent du simple qbr' («tombe»), qui
lnv VIII, 58 trouve un parallèle presque exact dans un texte s'applique à n'importe quel type de tombeau .:'oK_
de Telmessos en Lycie II, 55), mais la formule, à
l'identique ou presque, est de toute façon usitée de manière À la différence des inscriptions d'Asie Mineure, les
répétée 202. Le terme utilisé (tà �LVlWElOV) est un des plus textes de Palmyre sont finalement assez peu précis. Comme
courants pour désigner tout type de monument funéraire 203• on l'a déjà remarqué à plusieurs reprises, il n'y a jamais de
L'autre terme très courant est tmpfow .:,o-1 (surtout sous la fonne précisions sur la carrière des personnages ou leurs éventuelles
to �L VlWEÎ ov tou ta<pEwvoç 21 ou tà 0mi Àmov tou
)5 fonctions honorifiques ou civiques. De même les qualificatifs
taq>Eêovoç 206). Le tableau ci-dessous détaille les différentes moraux sont absents des épitaphes funéraires 211(). Seule la
équivalences imaginées par les Palmyréniens entre les formule ahrrE xciipE apparaît, mais elle joue simplement le
expressions sémitiques et leurs versions grecques. On rôle d'un équivalent de l'exclamation bbl en araméen. Elle
remarque qu'il n'y a pas vraiment de traduction automatique. fonctionne apparemment comme une formule standardisée
202 - À titre d'exemple, TAM JI, 52-57 et passim (Lycie): TAM V, 1056, (voir L iddell-Scott, s. 1•.). E. WtLL. 1990a. p. 437 et n. 21 pense que la
1113 et passim (Lydie): TAMIV, 117 (Bithynie): ou encore W. H. BucKLER terminaison en -cov avait un sens collectif, ce qui en fait un équivalent
et M.ROBINSON, 1932, 11° 153. exact de bt qbwr' ( « maison de sépulture »).
203 - VoirJ. KUBINSKA, 1968. p. 18-23 et A. SARTRE-FAURIAT.2001, vol.II. 205 - Par exemple CIS 4202.
p. 21 (le mot est attesté 131 fois dans le Hawrân). Sur l'ensemble du 206 - H. lNGHOLT, ] 935, p. 109.
vocabulaire funéraire (en grec et en araméen) à Palmyre. voir E. WILL, 207 - Voir sur ce terme, M. GAWLIKOWSKI, 1970b. p. 23.
1990a, p. 433-440. Voir aussi pour la situation dans le sud de la Syrie 208 - C'est le mot le plus courant à Palmyre avec ses variantes mqbrt' et bl
(Hawrân), A. SARTRE-FAURIAT, 2001. vol. IL p. 21-35. mqbrt' (E. WILL, 1991, p. 436-437).
204 - Les mots nxqioç et TCY.<jl17 sont beaucoup plus courants (cf. J. KustNSI<a, 209 - Comme. par exemple, le texte CIL F. 1221 qui qualifie une femme
1968. p. 23-25) ; la forme nx<jJÉcov n'est apparemment attestée qu'à Palmyre de « costo, pudens, fic/a uiro ».
228 Les notobles de Polmyre
sans qu'on prête attention à son sens littéral. Je ne sais part, les versions grecques assez nombreuses ne sont pas
comment interpréter cette tradition, mais elle diffère assez très différentes d'inscriptions contemporaines de Lycie ou
fortement de ce qui se passe dans d'autres régions du monde d'ailleurs en Asie Mineure, mêmes si elles sont plus
romain. Elle a pourtant des parallèles dans le reste de la Syrie. imprécises à Palmyre. On peut supposer que le prototype
La plupart des inscriptions funéraires d'Antioche, pour ne palmyrénien était en araméen, mais que les versions grecques
prendre que cet exemple, sont laconiques 210• ont été à l'origine conçues par des gens qui avaient une
Il serait difficile de reconstruire les tombeaux de ces certaine familiarité avec les textes grecs équivalents, tout en
nécropoles, si l'on n'avait que ces textes pour le faire. L'oasis essayant de tenir compte des habitudes locales.
partage d'ailleurs cette particularité avec cl'autres régions Il faut souligner l'omniprésence des mentions de dates
syriennes. Le caractère laconique des textes funéraires a déjà clans les textes de fondation, comme à Hégra 213• Il s'agit sans
été remarqué clans le Hawrân 211• Les seuls termes spécifiques doute de donner plus de poids à cette déclaration de propriété
à Palmyre sont les mots qui désignent les grottes et les pour l'éternité. Et ce thème de l'éternité des monuments, qui
hypogées. Le mot hypogée lui-même n'apparaît qu'une fois apparaît bien dans un des termes sémitiques qui désignent le
(CIS 4209) pour désigner vraisemblablement la crypte du tombeau, trouve sa traduction en grec. La formule bt 'lm'
temple funéraire n° 150 ( 1:à µv1iµÈiov wûw aùv {moydcp). Le ( « maison cl' éternité») est en effet fréquente dans les textes
mot courant pour désigner ces sépultures enterrées est surtout palmyréniens, tout comme des formules équivalentes (bt
0m7Àmov (la grotte) 212• Il correspond généralement à l'araméen 'lm' ou bien dy 'lm', c'est-à-dire« pour l'éternité») 21 Or -1.
m'rt' qui signifie «grotte» et par extension désigne clone les on a souvent cherché à rendre cette notion en grec, soit par la
hypogées. Mais le tableau prouve que ce type de tombe est formule Ek 1:àv ŒTCCXVîCX xpovov 21\ Ek 1:àv CXlffiVCX 21 6, Ek 1:à
TCCYaVîEÀÉç (la plus courante) ou encore Ek îO rrcxpârrcxv 218,
217
parfois désigné par des termes beaucoup plus généraux comme
bt 'lm' ou bt qbwr'. Il n'y a, semble-t-il, pas d'évolution du ou bien par un équivalent de bt 'lm' comme µv1wE1ov
vocabulaire pendant la période d'un siècle et demi au cours de cxicôvwv. Là, comme ailleurs, on constate pourtant que les
laquelle la documentation est utilisable ; tous ces mots (à part équivalences ne sont pas faites de manière systématique,
les termes spécifiques qui désignent les tombeaux enterrés) même s'il faut noter cet effort pour rendre une notion
sont utilisés indifféremment pour tous les types de tombeaux particulièrement importante dans les textes araméens 219•
tours et temples funéraires aussi bien qu'hypogées. Le texte Or, à ma connaissance, cette notion cl'éternité n'est pas
RSP n" 25 par exemple, texte de fondation de l' hypogée de extrêmement courante clans l'épigraphie funéraire du monde
Shalamallat, utilise dans les deux langues des termes généraux gréco-romain avant l'époque chrétienne 220• Comme 1'avait
et ne précise pas la nature de la tombe. remarqué E. Will 221, les notions d'héroïsation des morts sont
Il est au total difficile de savoir si la version originale totalement absentes à Palmyre, comme le prouve 1'absence
est vraiment le texte araméen. C'est vraisemblable, car les du terme 11pq:>ov si courant en Asie Mineure. Les croyances
parallèles nabatéens attestent de fortes traditions locales. Il traditionnelles n'avaient sans cloute pas été supplantées par
est possible que les deux versions aient été généralement les influences gréco-romaines, comme la croyance en
conçues en même temps. Quoi qu'il en soit, les l'immortalité de l'âme. Cela est vrai au moins pour une grande
rapprochements qu'on peut faire aussi bien avec des textes majorité de la population de Palmyre ; à vrai dire, seules
grecs cl'Asie Mineure qu'avec ceux du domaine nabatéen quelques tombes, par leur décor, prouvent que ces croyances
(en particulier Hégra) montrent que les deux influences se ont fait leur chemin chez certains des habitants de l' oasis 222•
font sentir, avec quelques particularités locales. Ces textes Un des exemples les plus célèbres (et les plus riches) de décor
restent marqués par la culture sémitique locale dont ils qui peut être mis en rapport avec la croyance en l'immortalité
suivent d'assez près les coutumes et les habitudes. D'autre de l'âme est celui de la tombe« des Trois frères» (fig. 77).
210 - Avec des exceptions, e.g. le texte !GLS III, 844. J. CANTINEAU, 1938, p. 155, n" 36c; H. INGHOLT, 1935, p. 110 et p. 115;
211 - A. SARTRE-FAURIAT. 2001. vol. II. p. 21 et 37. Kh. As'Ao el J. TEIXIDOR, 1985a. n" 5.
212 - Le terme 6puy1î (désigne une cavité creusée) présent dans les textes 218 - C!S 4203; !nl' IV. 7b; M. GAWUKOWSKI, 1970a, p. 71, n" 5.
J. CANTINEAU. 1938, p. 155-156, n" 36c. et Kh. As'AD et J. TEIXIDOR, 1985a. 219 - Ainsi clans le texte lnl' Vll, 5. la formule Ek i:ov O'..lWVO'.. à la fin du
n" 5. désigne plutôt une partie seulement de la tombe (l'emplacement d'une texte complète �tVlWÊiov i:rn)>EÙ)VC(. qui. il est vrai. n·est pas équivalente
exèdre). au qhr' dh bt 'lm' cle l'araméen. De même dans le texte IMP. n" 115. to
213 - Dans 1·épigraphie cle langue grecque. cette habitude est assez courante 0m7Àa10v tov îO'..<pEmva complète Ek i:ov &mxvi:a xpôvov en face du
en Syrie (par exemple pour les éj11itaphes cl'Émèse. voir JGLS V, 2301- m ·r1h dh bt 'lm' araméen. Comme 1· écrit E. Will.« la variété des formules
2427 avec seulement quelques exceptions : elle reste courante à l'époque ne saurait cacher la permanence des conceptions fondamentales » (E. WILL
chrétienne). En Égypte, c'est surtout l'âge clu défunt qu·on retrouve de 1990a. p. 438).
manière assez systématique. 220 - On en a néanmoins des exemples en Syrie où 1'adjectif aicov1oç est
214 - Voir M. Gl\WLIKO\VSKI, 1970b. p. 169. 11. 19 et 20: et surtout E. WILL, ajouté pour qualifier la tombe: par exemple IGLS XIII, 9209, 9403 (une
1996. p. 433-440. L'expression est connue ailleurs clans le monde sémitique, mention cl'oî: 1rnç ai.cov1oç à Bosra); voir A. SARTRE-FAURIAT, 2001. vol. IL
CJJ 1418 (Édesse-Urfa), ou C/S l, 24 (Malte). Voir DNWSJ. s. l'. p. 23, 30-31 et 225. Elle apparaît clans 70 % au moins des textes araméens
215 - C/S 4201: J. CwnNEAU, 1938 p. 160. n" 39: !MP, n" 115. de fondation à Palmyre.
216 - C!S 4120; /111 VII, 5.
1 221 - E. WILL, 1990a, p. 439.
217 C/S4192, 4202. 4209, 4212. 4215; lm• IV, 12; lnF Vlll. 58; 222 - Voir les exemples cités par E. WILL, 1990a. p. 439-440.
Chapitre VI: Des monwnents pour l'éternité 229
il s'agit justement d'une des tombes dans lesquelles aucun D'autre part, l'interdiction d'introduire dans le tombeau
texte grec n'apparaît. M. A. R. Colledge se demande si les le corps d'un étranger à la famille allait de soi. Elle était la
fondateurs de la tombe n'avaient pas fait ce décor justement conséquence directe des précisions des textes funéraires :
pour attirer le client 221• Ce serait un signe de la popularité à « pour lui-même, ses enfants et leurs enfants ». Or cette
Palmyre de ce genre de croyance, et ce, clans les classes formule est commune aux textes de fondation et aux textes
moyennes, clientèle privilégiée de ces hypogées partagés par de concession. Cela prouve que cette restriction est différente
leurs propriétaires et leurs fondateurs. Pourtant le caractère des défenses d'aliéner proprement dites. Elle fonctionne
pratiquement unique de ce type de décoration rend cette plutôt comme un rappel du droit de propriété de la famille
hypothèse difficilement vérifiable. qui est mentionnée dans le texte.
Mais ce qui fait la plus grande originalité des textes de Il est possible que les textes de fondation soient des
Palmyre par rapport aux textes d'Asie Mineure ou à ceux de sortes de textes honorifiques. Comme ces derniers, ils sont
Nabatène, c'est l'absence presque totale de formules peut-être seulement des abrégés de textes plus longs
d'interdiction (dont M. Gawlikowski avait fait la liste) ou conservés clans les archives. Le nom du propriétaire et celui
de malédiction. Elles ne se retrouvent que dans trois de ses ancêtres apparaissent sur les façades et les linteaux
inscriptions, dont une est très lacunaire 22 On sait que les
-1. des tombeaux, car c'est cela qui était vraiment intéressant
tombeaux n'étaient pas ouverts à tous, les textes de pour les notables. Que les interdictions aient été exprimées
concession en sont une preuve suffisante, puisqu'ils ou non dans les textes archivés n'a finalement que peu
accordent une partie précise d'un tombeau à des gens qu'on d'importance, parce que les monuments funéraires des
prend soin de nommer et d'énumérer. Généralement, seuls Palmyréniens étaient en principe réservés à la fami11e. Cela
les membres proches de la famille recevaient cet honneur. représente peut-être une grande confiance clans les
Pourtant trois ou quatre textes seulement 225 interdisent institutions de Palmyre et dans 1'autorité reconnue aux
explicitement d'aliéner les tombeaux, et menacent ]es grandes familles qui aurait protégé les tombeaux. Peut-être
contrevenants d'une amende à payer au trésor public. faut-il y voir le contraire de ce qui se passe ailleurs dans le
Le premier point à noter est la mention des archives (bt monde romain, où la multiplication des textes et des amendes
'rie', c'est-à-dire« la maison des archives») dans le texte est sans doute la preuve d'un certain affaiblissement des liens
publié par J. Cantineau. La formule trouve un unique familiaux et de la piété populaire 211• Ce ne serait pas le cas à
parallèle à Palmyre 226, mais, dans les deux cas, les textes Palmyre, où il était sans doute important d'être placé après
sont assez difficiles à interpréter. Certes, on peut penser que la mort avec les membres de sa famille.
les archives publiques conservaient des preuves de propriété La difiërence principale entre les textes honorifiques et
aussi bien pour les habitations que pour les tombes, mais les textes funéraires est pourtant que ]es premiers sont
rien ne le prouve vraiment . Les textes fixent même le généralement officiels alors que les seconds ne le sont pas
montant des amendes pour certains d'entre eux. vraiment. Certes, ils sont le reflet d'actes de propriété qui
Or ces interdictions funéraires et ces malédictions sont devaient être reconnus par la loi et dont une version existait
un phénomène très courant dans l'épigraphie d'Asie sans aucun doute dans les archives de la cité (voir supra),
Mineure 228 et du monde sémitique 229• C'est une différence avec mais ils ne sont pas l'expression de la cité, ni même d'une
Palmyre. M. Gawlikowski l'explique en différenciant deux « classe dominante » de notables. Ils sont seulement le fait
types de textes. Les textes de fondation courants permettaient des propriétaires et des fondateurs de tombes, et l'expression
les aliénations, tandis que quelques textes seulement les de leur fierté.
interdisaient explicitement. Les aliénations existaient Les textes de concession sont un peu différents,
indubitablement à Palmyre, les quelque soixante textes de puisqu'on a vu que l'écrasante majorité d'entre eux était
concession conservés en sont une preuve suffisante 230• composée de textes araméens. Du point de vue formel, ils
223 M. A. R.CoLLEDGE, 1976a, p.84-87. des actes d'interdiction funéraire sont déposées dans les archives publiques.
224 - M. ÜAWUKOWSKI, J 970b, p. 169 et 219 ; H. INGJ-IOLT, 1938, p. 133 ; 228 - Voir l'index du BE. s. \'. « Interdiction funéraire » : par exemple, BE
lnl' V III. 86: C/S 4218. 1959, 237: « C'est par centaines ou par milliers peut-être que l'on compte
225 - J. CANTINEAU, 1933, p.184.n" 7b: C/S 4215 et 4217 (voir A.ScHMIDT les inscriptions funéraires de l'époque impériale avec des clauses
CoLINET, 1992, p. 41-42): RSP n" 105. L'intérêt de ce dernier texte d'interdiction sous peine d'amende». Pour les textes de malédiction, voir
(interdiction simple sans malédiction) est qu'il provient de la nécropole maintenant le recueil de J. S TRUBBE, 1997, qui concerne l'Asie Mineure.
nord et qu'il recouvrait une tombe à inhumation simple (RSP p. 50). Cest 229 - Voir par exemple pour Hégra, C!S fl, 197-224, avec amendes et
un texte très archaïque, qui prouve l'existence de ce genre de textes hors malédictions ; M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p.169, qui note la rareté de ces
des sépultures collectives. textes en Syrie. On en a un seul exemple clans le Hawrân, voir A. SARTRE
226 - J.CANTINEAU,1933,p.183, n" 7a, mais le texte très mutilé ne permet FAUR!AT, 2001, vol.II, p. 216-217.
pas cl· en dire plus.La restitution du texte J. CANTINEAU, 1936, p. 350-352, 230 - M. ÜAWUKOWSKI, ] 970b, p.172.
n" 25 est contestée et ne semble reposer sur rien de précis : voir 231 - Voir F.DE V1sscHER, 1963, p.118: M. Sartre, clans IGLS xm. p. 41
M. GAWLIKOWSKI, 1973a. p.56-57, et J. T. Milik, DFD, p. 303-304. à propos de Basra:« Il semble que l'on ait eu généralement assez confiance
227 - Un certain nombre de textes de Carie publiés par J. et L.Robert ( 1954, en la piété générale à l'égard des morts pour se passer de cette protection» ;
p.192-198.n'" 101. I03.107, 110,112, 114-115, 119) précisent quecles copies A. SARTRE-FAURIAT, 200 L vol. II. p.190-192.
230 Les notables de Palmyre
sont pourtant très semblables aux textes de fondation puisque, fondation. Sans que cette oppos1t10n soit bien sûr
comme eux, ils jouent le rôle de publicité d'un acte de systématique, on peut considérer que les textes grecs et
propriété. De même, ils sont placés de manière très visible, bilingues sont le fait d'une partie de la population plus
dans les parties extérieures des tombeaux, celles qui hellénisée, qui correspond largement aux notables de la cité.
apparaissaient à tous les passants. Quand les actes de Les textes de concession, quant à eux, sont plutôt attribuables
concession se multipliaient, tout l'espace disponible sur les à une autre partie de la population, qui a certes tendance à
linteaux (et y compris sur les montants de porte) était vouloir imiter le mode de vie des couches sociales plus
utilisé 232• Ces exemples démontrent le désir de rendre ces élevées, mais n'en possède pas entièrement la culture gréco
textes visibles à tous. On peut alors se demander pourquoi, à romaine. L'existence de textes grecs prouve néanmoins que
la différence des textes de fondation, cette exigence ne passe la séparation n'est pas complète entre ces catégories ; il est
pas par la composition de versions grecques de ces textes 233• clair que des gens des classes moyennes pouvaient tenir à
Une première remarque s'impose : un seul texte bilingue avoir une inscription en grec, de même que tous les notables
de concession correspond à une inscription de fondation n'étaient pas forcément intéressés par ce genre de chose.
uniquement en araméen 23�. On a certes un total relativement À cela peuvent s'ajouter des circonstances plus
faible d'inscriptions bilingues de concession, mais cela signifie contingentes : il devait être moins cher de faire écrire à un
que, presque à chaque fois, ces dernières correspondent à des seul lapicide un seul texte araméen que cl 'en engager un
textes de fondation bilingues eux aussi. Il est possible qu'il y second pour le grec ( ou de faire graver au premier deux
ait donc eu clans des familles certaines traditions linguistiques textes). Enfin une autre explication peut rendre compte de
qui pouvaient être conservées au fil des générations. certains cas : c'est sans cloute aussi par manque de place
Mais on peut pousser plus loin l'analyse et proposer qu'on a dû parfois renoncer à inscrire une version grecque.
d'établir une c01Télation entre les différences sociales et ces Les textes de concession pouvaient être très nombreux et
différences linguistiques. Les tombes pour lesquelles on s'accumuler sur les linteaux et les montants des portes des
connaît le plus de textes sont a priori des tombes divisées tombeaux; il fallait de plus garder de la place pour de futurs
de nombreuses fois, clone en subdivisions assez petites, qui textes toujours possibles.
convenaient bien pour des gens modestes. Ces hypogées, Une étude du prix des tombeaux et des moyens financiers
celui « des Trois frères » 235, celui de Lishamsh 23\ celui de nécessaires pour leur construction n'est malheureusement
Malikû 237, celui de Iulius Aurelius Malê enfin 23\ ont été pas possible. Elle permettrait pourtant de situer au moins
divisés un nombre considérable de fois et les concessions se approximativement le niveau social des fondateurs. En
font souvent au profit de gens des classes qu'on pourrait fait, un seul texte précise le prix payé lors de l'achat d'une
appeler « moyennes » au sein de la population de Palmyre. partie d'un tombeau 2411• La somme est relativement modeste
Or les textes découverts dans ces tombes sont pratiquement puisqu'il s'agit de 120 deniers payés à une femme pour
tous en araméen. La seule exception est un graffito grec sur la vente d'une partie de tombeau. Les seules autres
un montant de la porte de la tombe de Malikû ; mais il s' agil sorn1îïes d' argeï1t LJUÎ aiJIJaraisse11t cla11s ce co11texte so11t
de la signature d'un personnage qui n'a apparemment pas les amendes. Celles-ci, à payer, si l'on aliénait la tombe ou
de rapports avec les gens inhumés à cet endroit 239• Pour des si l'on y faisait entrer un défunt étranger, ont un montant
textes écrits très majoritairement dans la langue locale, ce compris entre 1 000 et 5 000 deniers. À titre de comparaison,
sont clone des gens modestes qui sont en cause. on peut citer des cas semblables aussi bien en Syrie qu'en
On comprendrait mieux dans ces conditions les Asie Mineure. Par exemple clans le Hawrân, quatre textes
différences entre les textes de concession et ceux de sans doute antérieurs au 1v" siècle fixent le montant des
'.23'.2 - Voir dans l'article de H. lNGHOLT. 1935. les planches XXXVI-XXXVIII 60); pour les nombreux textes de concession: ibid.. p. 91-107 (II-XIII);
pour les neur inscriptions de concession sur le linteau et les montants de la H. !NGHOLT, 196'.2, p. J 06.
porte de la tombe de Julius Aurelius Malê. '.238 - H. INGHOLT, 1935, p. 76-88 (II à IX).
'.233 - On connaît ailleurs clans r épigraphie grecque des partages et des '.239 - H. INGHOLT, 1935. p. 108: Ba.pÀa.a.ç ËypmjfEC:. Il s'agit sans cloute
concessions de monuments funéraires. En Lycie. par exemple. il Telrnessos. de la signature d'un passant. À moins qu'on ne considère qu'il s'agisse de
le texte TAM II. 46: pFTOXllV tciic: [i:Kylôvoltk tou l 'Ep�mi?]ou Elc: tlà la signature de celui qui a dessiné les plans: voir A. SARTRE-FAURIAI, 2001.
crnvlyEVl K[ov '?] �LvliwlE[io]v. On voit que. dans le cas de ces textes. le vol. IL p. 87. il propos d\111 texte du Hawrùn ( w . \DDINGT0N '.2"1-65 = !GLS XV,
formulaire est fort différent de ce quïl est il Palmyre. Or celui des textes de '.268). Cela semble pourtant peu probable pour cet hypogée de Palmyre. Le
fondation. on l'a vu. est tout proche. Cette différence est peut-être explicable nom Ba.pÀa.ac; formé sur bret 'Jh n'est pas attesté ailleurs à Palmyre. On
par une plus grande force des traditions locales dans ces opérations de trouvera des références pour la Syrie dans H. WürnNow, 1930. p. 34 et
concession (cf. infi·u). H. lNGHOLT, 1935, p. 108, n. 3'.29 (auxquelles on peul ajouter .1. WAGNER,
'.234 - J. CANTINEAU, 1930a, p. 546-547. n" 13. 1976. p. 189. n" '.27. à Zeugma).
'.235 - Texte de fondation : J. C-\NTINEr\U. 1936. p. 355. n" '.27 ; textes de '.240 - J. CANTINEAU, 1930a. p. 548-549. n" 14. Traduction légèrement
concession : C/S 4171-4175. Les autres textes ( C/S 4176-4186: sur les différente clans M. GAWLIKOWSKI. 1970b. p. '.206, n" 6. Ces mentions cle prix
plaques des lornfi) sont aussi en araméen. sont attestées ailleurs comme dans le Hawrùn. mais clans ce cas-là surtout
'.236 - Textes de concession: C/S 4194-4195 ; H. INGHOL:T. 1938. p. l 06 (I). après le II( siècle: huit cas entre 3'.23 et 390 (A. SARTRE-FAURIAT, '.2001,
109 (Il) et 110 (Ill). vol. II, p. 193-197).
'.237 - H. ING11ou, 1935. p. 90 pour le texte de fondation (mieux que /111• VIII,
Chapitre VI: Des monuments pour l'éternité 231
amendes à des sommes qui vont de 600 à 2 500 deniers 2"'1• proches parents, qui avaient le même intérêt à la gloire
Les textes d'Asie Mineure portent des chiffres semblables, familiale et à la pérennité du nom des ancêtres.
entre 500 et 3 000 deniers généralement 2"'2• Les chiffres En tout cas, 1'importance des dépenses occasionnées par
semblent donc comparables, même si l'absence de date dans les monuments funéraires peut être une explication à la
l'ensemble de ces textes empêche de poursuivre l'analyse relative faiblesse de l'évergétisme des notables au sein de la
économique de manière plus précise. ville de Palmyre (voir chapitre 1v). La richesse des familles,
Les amendes montent jusqu'à pratiquement cinquante aussi importante qu'elle ait pu être, a souvent dû être
fois le prix d'une partie relativement importante d'une tombe, largement entamée par ces dépenses. Cette pétrification des
puisque la seule transaction attestée porte sur la moitié de la richesses, apportées entre autres par le commerce, a pu aussi
part de la vendeuse. Or celle-ci possède apparemment « une contribuer à la prospérité économique de Palmyre, au moins
part parmi les trois parties de l'hypogée» (traduction par les emplois créés clans les entreprises de construction.
M. Gawlikowski). Mais le texte est trop peu sûr pour qu'on On ne sait presque rien du temps que prenait l'édification
puisse faire de ce qu'elle possède l'équivalent d'un sixième des monuments funéraires. Il semble bien pourtant qu'il y ait
du tombeau. On peut seulement dire que 120 deniers valent dans un certain nombre de cas des constructions en plusieurs
à peu près une partie modeste mais substantielle d'une tombe. étapes. On l'a vu pour les hypogées : le cas le plus clair est
Pourtant de nombreux Palmyréniens tiennent à préciser celui de l'hypogée de la famille d'Alaînê (ou famille de
dans les deux langues qu'ils ont financé de leurs propres Shoraîkô), clenière le camp de Dioclétien; le texte funéraire
deniers (mn kysh et Èç 18imv) la construction de leur tombeau. est inachevé et clans la dédicace de fondation, on a laissé de
Une première remarque s'impose: il n'y a pas d'attestation à la place pour qu'un éventuel successeur du fondateur puisse
Palmyre de tombeaux érigés par la cité pour un citoyen faire inscrire son nom 2"'6• C'est sans doute aussi vrai pour
particulièrement méritant. C'est pourtant une pratique qui certaines tours funéraires, même si, en général, elles doivent
existe ailleurs clans le monde grec, en particulier en Asie appartenir à des gens plus riches qui avaient les moyens de
Mineure 2--+· • Ce fait prouve sans cloute que le domaine funéraire
1
tout construire en une seule fois. Si la décoration pouvait
appartient à Palmyre à la sphère du privé ; en tout cas, ce moyen attendre, il n'était pas possible cl'agrandir la tour quelques
d'expression est plus utilisé par les notables pour affirmer leur années plus tard, alors qu'on pouvait le faire pour un hypogée.
_ position sociale dans la communauté que par la cité dans ses Les monuments funéraires importants de Palmyre
relations avec les citoyens : elle se sert plutôt des textes appartenaient indubitablement aux familles riches de l'oasis,
· honorifiques au sein même de la ville et de ses monuments. mais certains d'entre eux ont été construits par des familles
D'autre part, on peut penser que, quel que soit le p1ix dont la richesse n'était pas tout à fait suffisante pour leur
des monuments funéraires, ils sont l'œuvre de Palmyréniens permettre de tout achever en une seule fois. D'ailleurs, si
assez riches, car ceux qui font construire les tombeaux sont ces monuments prouvent le souci de ces familles cl'affirmer
dans la majorité des cas propriétaires uniques 2"'"'. La famille leur statut social, ils ne prouvent pas qu'elles appartenaient
d'Elahbel, qui se distingue déjà par ses dons au sanctuaire toutes aux plus hautes couches de la société palmyrénienne.
de Nabû, en est un bon exemple, mais il faut noter que c'est Le cas de Leptis Magna éclaire sur certaines familles qui
un des cas où ce sont des frères qui s'associent pour une n'appartenaient pas aux couches les plus élevées de la
fondation. En général, ces associations sont familiales, mais population, et dont l'onomastique était composite (punico
au moins deux textes funéraires mentionnent des associations latine et parfois même libyque), mais qui jouissaient d'une
de gens qui n'ont apparemment pas de liens familiaux 2"'5• aisance suffisante pour se faire construire des tombeaux
Les deux textes sont datés de 114 et de 138. On peut faire de monumentaux w_
cette pratique une variante plus coûteuse des concessions. Cette concurrence effrénée entre les familles pour
Celles-ci avaient en effet comme avantage que des gens d'une posséder un monument funéraire digne de l'image qu'on
richesse moyenne pouvaient accéder à la propriété et ainsi voulait affirmer de soi et de ses ancêtres fait qu'il y eut
participer au mode de vie des notables de Palmyre. Les d'ailleurs sans doute des cas où des familles se ruinèrent
associations, qu'elles soient ou non le fait de parents, ont la pour cette marque de statut social. L'utilisation relativement
même conséquence, mais elles occasionnaient sans doute courte de certaines tours, les partages et les reventes en sont
plus de dépenses, ce qui peut expliquer leur rareté. Elles peut-être une preuve.
étaient évidemment moins difficiles à mettre en place entre
l
241 - Voir A. SARTRE-FAURIAT, 2001, vo . Il, p. 191-192. Ils' agit d'un texte 243 - Voir A. SARTRE-FAURI AT, 2001, vol. II, p. 183, avec référence à
de Qanawat ([GLS XVI/1, 234), du texte PAES III A, 785' (IGLS XV, 267) L. ROBERT, J-Jellenica XIII, p. 164-165 pour le cas cl' Aphrodisias.
(tous deux avec 2 500 deniers) ; du texte de Bosra IGLS XUI. 9397 ( 1 000 244 - Chiffres et références clans M. GAWLIKOWSKI, 1970b, p. 171-172.
deniers) ; et enfin d'un texte de Hit (P. SÉJOURNÉ, RB 7, 1898, p. 104, n" 2. 245 - CIS 4159 et J. C ANTINEAU, 1930a, p. 538, 11° 8. Voir M. GAWLIKOWSKI,
avec 600 deniers = IGLS XVI/2, 607). 1970b. p. 172.
242 - En Lycie, TAM II. passim ou à Éphèse./. Ephesos, VL n"' 2211. 2212 246 - RSP 11° 167; A. SADURSKA, 1977, p. 31-35.
et 2222 (de 1 000 à 2 500), ou bien encore à Sarcles. W. H. BucKLER et 247 - G. Dr VITA-ÉVRARD, ] 993. p. 293-314.
M. ROBINSON, 1932. n" 153 ( 1 500).
232 Les notables de Palmyre
Il manque beaucoup d'éléments qui permettraient de maintient tout au long de la période n'en sont que quelques
connaître plus précisément la position sociale de tous les preuves parmi d'autres.
gens qui apparaissent dans les inscriptions funéraires. On On ne peut pas assimiler de manière systématique les
peut mesurer les différences en étudiant la diversité des types familles de fondateurs de tombeaux avec l'élite de Palmyre.
de tombeau ou la manière dont ceux-ci sont décorés, mais Cela n'est même pas vrai pour les plus grands et les plus
l'image qu'on peut en tirer est parfois impressionniste. On luxueux monuments qu'on connaisse. Mais le lien entre les
peut mesurer néanmoins des différences relatives comme notables et les grands tombeaux est absolument sûr, à
on a tenté de le faire pour les divers acquéreurs de l'exception de certains hypogées, à partir du milieu du
subdivisions du tombeau de Iulius Aurelius Malê. Les n e siècle. Les é léments manquent pour permettre de
conespondances qu'on a notées entre les niveaux de richesse différencier plus nettement les niveaux sociaux parmi les
et d'influence et la présence de textes grecs sont vraies d'une notables de Palmyre.
manière générale, mais il peut exister des contre-exemples. Les lacunes de la documentation jouent en fait de deux
Le mouvement général est clair : les premiers textes de manières complémentaires. On serait bien en peine de faire
fondation sont tous en araméen, mais, à partir de la deuxième une liste suivie des notables qui ont eu des fonctions
1
partie du 1" siècle, le grec est présent dans une proportion importantes dans l'administration de la cité de Palmyre. De
importante des textes. Il faut souligner qu'à partir de cette même, on ne connaît qu'une partie réduite des propriétaires
période, il occupe une place importante, sans pourtant des tombeaux des nécropoles. Il est bien sür encore plus
remplacer le palmyrénien. C'est seulement dans la deuxième difficile de faire correspondre ces deux listes. On peut noter
partie du Il" siècle qu'il semble prendre définitivement sa par exemple qu'on n'a aucune indication sur les tombeaux
place auprès de l'araméen, mais on a à partir de ce moment de gens comme Soados, fils de Bôlîadâ, ou Marcus Ulpius
là trop peu de textes pour que le tableau suivant permette de larhaî, qui s'illustrent dans le commerce caravanier et font
tirer des conclusions assurées. partie des grands notables du ri" siècle. Certes, on a le linteau
de la tombe de famille d'Odainat (C/S 4202 = Inv VIII, 55) :
avant 50 50- I 00 100-150 150-200 après 200 il a été découvert par hasard, remployé dans les fortifications
1 araméen 6 12 19 l 3 médiévales du sanctuaire de Bel, et rien ne le distingue
1 grec/bilingue 0 12 12 8 5 d'ailleurs des autres textes.
Date et langue des tex:tes de fondation.
La construction de ces « monuments d'éternité» permet
de délimiter une élite sociale à Palmyre. Faute de textes de
L'opposition entre les deux moitiés du rr" siècle est nature différente (textes honorifiques ou bien même tessères),
marquée par une inversion totale des proportions. Il semble il n'est guère possible d'établir de manière précise le statut
qu'à partir de ce moment, les influences occidentales exact d'une famille, si on ne connaît que le monument funéraire
s'ancrent définitivement dans les mœurs de l'élite sociale qui lui a appartenu. Ces monuments témoignent parfois de
de Palmyre. C'est à ce moment aussi que commence la série JJhé1101nè11es co1111111111s à l'e11se1nble 011 à une grande iJartie de
des temples funéraires. On a vu plus haut que ce type de la société palmyrénienne plutôt que de pratiques propres aux
monument est fortement influencé par des modes notables de Palmyre au sens strict. Certes, ces notables sont
occidentales et que les textes conservés (peu nombreux mais imités par les classes nouvellement enrichies, mais la
presque tous datés) sont dans leur immense majorité en documentation n'est souvent pas suffisante pour qu'on puisse
araméen et en grec. Il en est de même pour les hypogées; dire qui est original et qui n'est qu'un vulgaire «suiveur»
l'hellénisation apparente des mœurs, visible dans l'utilisation parmi les constructeurs de tombes à Palmyre. Le vocabulaire
épigraphique du grec, est accompagnée d'une permanence est de plus trop standardisé et imprécis pour permettre de le
de l'araméen jusqu'aux derniers textes datés (lnv VII, 11). faire. Faire construire un tombeau exige des moyens qui ne
Ce mouvement« d'occidentalisation» va de pair avec peuvent être que ceux de la partie la plus riche de la population.
les effets de la sédentarisation auxquels il est d'ailleurs lié. Celle-ci regroupe les membres de familles anciennes aussi bien
Les vieilles structures tribales disparaissent, tandis que croît que les« nouveaux riches».
l'importance de la famille au sens réduit qui rassemble des Il est possible d'interpréter l'histoire de Palmyre au cours
enfants autour d'un père. Les premiers auront le droit de des trois siècles qui suivent le début de notre ère comme
reposer après leur mort dans la tombe fondée par leur père. une conséquence de la lutte de différents notables pour
Mais il ne faut pas négliger l'importance des influences gagner ou maintenir leur influence et leur prépondérance
locales qui sont tout à fait explicables dans un ,domaine tel sur la société palmyrénienne. Dans ce cas-là, les phénomènes
que celui des coutumes funéraires. Le mouvement de qui se font jour dans les nécropoles et les monuments
sédentarisation qui a conduit au développement de l'oasis funéraires, tels le choix du grec ou de l'araméen, les
de Palmyre ne signifie pas un abandon des coutumes localisations, la construction d'un hypogée ou d'un temple
anciennes par les populations qui s'y installent. La funéraire, sont à expliquer dans ce contexte de rivalité plus
permanence de l'araméen et celle d'un formulaire qui se ou moins pacifique entre les notables.
CONCLUSION
Il n'est pas que vous n'ayez. ouy parler d'une contrée, petite à pouvoir distinguer de manière plus nette si c'était possible
la vérité., mais si fameuse pour les grands hommes qu'elle a entre ce qui est proprement romain et ce qui est hellénique.
produits, et pour l'estime qu'en ont to1�joursfait les Romains et les Il serait également intéressant d'arriver à saisir le degré
Parthes, ou les Perses, c'est-à-dire les seuls maîtres du monde, d'hellénisation de Palmyre avant l'arrivée de Germanicus 1
;
que l'on peut tirer vcmité d'en être. Cette Provincefaict en quelque on a malheureusement peu de documents qui le permettent,
sorte partie de la Syrie: mais elle est tellement à soi, et par les même si quelques inscriptions datent visiblement de cette
déserts, et par les montagnes dont elle est naturellementfortifiée, période. Dans le sanctuaire de Bel, la découverte récente
que son gouvernement, ni ses peuples ne dépendent d'Estat, ni de d'un temple qui a précédé le grand temple du premier siècle
Prince qui vive. La ville capitale s'appelle Palmyre, et le pays de notre ère est un signe de l'étendue de notre ignorance au
Palmirenie, comme si par une conformité du nom avec l'humeur sujet de cette période.
des habitans une sagesse plus clair voyante que celle des hommes, À l'autre extrémité de la période, on peut noter la
eust voulu que ce mot qui ne sign(fïe autre chose que force et présence de traits plus proprement romains que révèle
victoire, fitt un avertissement aux Palmireniens d'être toujours l'existence du clientélisme, en même temps que le
vainqueurs. développement de courants helléniques, en particulier autour
de la cour de Zénobie. On a vu que c'était une des
Histoire de Parisatis et Zenobias
interprétations possibles du rôle de Longin dans l'entourage
(cinquième partie de l'Astrée)
des princes de Palmyre.
par Marin le Roy de Gomberville,
Paris, 1625, p. 311-312
Malgré ces influences occidentales, si l'on considère
de manière plus large la société de Palmyre, on ne peut
La société de Palmyre, pendant les quatre siècles au manquer d'être frappé par la permanence de la culture locale,
cours desquels elle nous est mieux connue, se caractérise visible aussi bien dans l'usage de l'araméen, que dans
par un mélange unique d'influences venues des mondes l'onomastique ou la religion.C'est sans doute le trait le plus
« oriental » et« classique ».Comme on a pu le noter au cours significatif, celui qui fait toute l'originalité de la ville au
de cette étude, la diversité des influences ne permet pas de cours des premiers siècles de la présence romaine en Syrie.
donner une image unique de la culture des habitants de la Avec environ quatre cent trente inscriptions, Palmyre est
ville. Il faut donc mettre l'accent sur la variété et la pourtant une des villes du Proche-Orient romain qui a livré
complexité des courants culturels et artistiques. Ils mêlent le plus de textes grecs, mais ceux-ci sont moins nombreux
les influences arabes, araméennes, iraniennes, que les inscriptions araméennes.
babyloniennes, et d'autres encore. Faute de pouvoir toutes Certes, du point de vue artistique ou politique, la ville
les différencier, on est amené à parler de manière plus ou partage beaucoup de traits avec le reste de la province
moins générale, mais il est nécessaire d'être conscient de romaine. Elle a les institutions et les magistratures d'une
ces différences et d'en tenir compte, autant que possible. cité grecque, ses notables recherchent l'approbation et les
On peut par exemple se demander comment les Palmyréniens honneurs conférés par les autorités impériales. Néanmoins,
considéraient le monde iranien. Était-il pour eux un monde il est difficile de considérer que Palmyre est une cité comme
étranger ou au contraire une partie de leur monde ? Les noms les autres. Sans doute à cause de sa position excentrée, peut
iraniens étaient-ils parfaitement intégrés dans l'onomastique être aussi en raison de ses contacts constants avec des zones
des Palmyréniens, ou ces derniers les considéraient-ils peu ou moins hellénisées du monde antique, elle conserve
comme le signe d'une origine étrangère à l'oasis ? La même un caractère particulier.Cela peut expliquer que, malgré les
question, quoiqu'à des degrés divers, se pose aussi pour bons rapports qu'entretient la cité avec les autorités
certains noms sémitiques rares à Palmyre, ou même pour provinciales, malgré le passage de Germanicus, ou celui
les autres noms indo-européens (grecs et latins). d'Hadrien, les citoyens romains sont fort peu nombreux et
Il en est de même pour les influences qu'on pourrait les premiers sénateurs originaires de l'oasis ne sont attestés
appeler« occidentales » ou« classiques ». Il faudrait là aussi que tardivement. De même, un phénomène qui fait
l - Le terme d'hellénisation désigne seulement l'influence grecque en général. Il ne doit pas être pris clans un sens trop strict.
234 Les notables de Palmyre
l'originalité de la période hellénistico-romaine, pouvoir est l'existence de liens tribaux sous-jacents, qui sont
l'évergétisme, connaît à Palmyre des modalités particulières, le fondement même de l'organisation de la société
qui sont à mettre en relation avec la permanence de coutumes palmyrénienne. On imagine aussi, en particulier pour le
religieuses spécifiques. commerce caravanier, qu'il existe des relations étroites entre
Il est difficile également d'estimer quelle était la part de les grands notables et les nomades qui occupent la
la population de Palmyre qui était vraiment touchée par ces Palmyrène. Pourtant, comme on l'a vu, cette situation, qui
phénomènes de romanisation; il semble bien que l'utilisation fait qu'on peut définir la société de Palmyre comme une
de la langue grecque, la plupart du temps, était surtout le société dimorphe, n'est que peu attestée dans les textes,
fait des élites de la ville, et dans certaines circonstances même si c'est le meilleur moyen d'expliquer le
seulement. De plus, comme pour tous les phénomènes fonctionnement du commerce et le développement de la cité.
historiques, la progression n'est pas régulière et un type de Ces notables de Palmyre appartiennent souvent à des
culture ne disparaît pas totalement pour laisser la place à un familles dont on connaît d'autres membres, mais il est parfois
autre. Même si Palmyre a acquis au cours du temps des difficile d'en retrouver les généalogies sur plus d'une ou deux
caractères helléniques et romains indéniables et sans doute générations. On a tenté au cours de ce travail de signaler les
bien ancrés dans les mœurs, cela ne signifie nullement qu'elle plus importantes. L'image qu'on peut en tirer est celle d'une
ne soit pas en même temps restée profondément orientale. société dans laquelle les familles partagent les rôles en leur
Cette culture orientale elle-même a évolué, non seulement sein. Ainsi, dans la famille d'Elahbel, on trouve des militaires
sous l'influence occidentale, mais aussi par des contacts avec et des hauts fonctionnaires religieux. Curieusement il ne
le monde iranien, le monde arabe et le jucla'isme. Du point semble pas y avoir dans cette famille de magistrats, même si
de vue social, 1 'élite de la ville a sans doute en partie perdu plusieurs des frères d'Elahbel sont honorés par le Conseil.
son caractère tribal, mais elle est restée largement On a peut-être là une des grandes différences de Palmyre
« orientale» tout au long de la période : les nombreux avec les autres cités de l'Orient romain, au moins pendant le
parallèles qu'on peut faire avec Hatra en sont une preuve. début de la période. En effet, les personnages les plus
influents qu'on peut citer au cours du !"' siècle et encore
e
Ce qui apparaît clairement, c'est l'existence de grands largement au Il siècle n'exercent pas de fonctions civiques.
notables qui dominent la société palmyrénienne. Des Aussi bien Haîran, fils de Bônnê, que Soados ou Marcus
personnalités comme Haîran, fils de Bônnê, Soados ou à la Ulpius Iarhaî reçoivent un nombre inégalé d'inscriptions,
fin de la période Worod semblent d'un tout autre niveau mais aucun texte ne signale de magistratures à Palmyre. Cela
social que bien de leurs contemporains. Il existe de plus un ne signifie pas que les magistrats contemporains ne sont pas
milieu assez fourni de notables qui exercent un certain influents, mais les sources sont moins abondantes à leur
nombre de fonctions, mais qui souvent sont en relation de propos, ce qui peut être un signe de leur moindre importance.
dépendance envers les grands notables. Ce sont eux par De même, les magistratures religieuses les plus importantes,
exemple qui érigent des statues de Marcus Ulpius Iarhaî ou comme la symposiarchie des prêtres de Bel, n'accompagnent
de ses semblables. La société palmyrénienne apparaît ainsi pas les hautes fonctions civiques.
fortement hiérarchisée, d'autant plus qu'on peut aussi définir On a donc à Palmyre plusieurs catégories parmi les
des catégories« moyennes», qui apparaissent en groupe face grands notables : les caravaniers, qui parfois, comme
aux grands notables (par exemple« les marchands», tgry' M. Ulpius Iarhaî, n'ont aucun contact apparent avec les
ou Ë�rnopm). On peut penser que les mêmes catégories autorités civiques de Palmyre; les magistrats ; les prêtres. À
moyennes apparaissent nommément dans les opérations de ces trois groupes s'ajoutent d'autres personnages qui, comme
concessions de tombeaux, ou pour les dédicaces de petits M. Ulpius Elahbel, n'ont pas de lien avec le commerce, n'ont
autels. On constate d'ailleurs que les monuments funéraires pas été magistrat, ni prêtre, mais pourtant semblent occuper
permettent aussi de définir dans la société palmyrénienne une position de premier plan dans la société de Palmyre.
des lignes de partage entre différentes catégories de la La situation évolue, semble-t-il, au cours du II" siècle, et
population, mais aussi entre différentes traditions culturelles. on connaît des magistrats qui ont un rôle en vue dans les
Ils donnent également une image de l'évolution artistique et activités de la cité, c'est le cas de Malê Agrippa en particulier.
économique de Palmyre, car le développement des À la fin du siècle un personnage comme Ogeîlû, fils de Maqqaî
nécropoles est à comprendre aussi comme une conséquence est honoré par les quatre tribus sur décision du Conseil et du
de la prospérité de la cité. Peuple : il est félicité pour avoir exercé plusieurs stratégies
contre les nomades, mais il a aussi été synodiarque de manière
On a parfois du mal à comprendre comment s'exerçait profitable aux caravanes, et il a accompli une belle carrière
la domination des grands notables et sur quelles ressources civique. Cette évolution voit son point culminant à la fin de
elle était fondée, mais le fait est, à en croire les sources la période, avec Worod en particulier, qui seul de tous les
épigraphiques, qu'ils occupent une position prééminente Palmyréniens exerce les premières fonctions civiques et
dans la cité. On suppose qu'un des fondements de leur religieuses, tout en jouant le rôle de protecteur des caravanes.
Conclusion 235
En même temps, il est frappant de constater que le plus ville. Malgré la personnalité hors du commun de la reine de
haut personnage de 1 'époque, celui qui se fait appeler clans Palmyre, qui est une des seules Palmyréniennes à apparaître
les inscriptions « chef de Palmyre » est lui tout à fait en clans les sources de manière un peu indépendante, on a peu
dehors du système civique, comme l'étaient aussi Haîran, d'indication sur elle. Il est d'ailleurs difficile de faire de sa
fils de Bônnê ou M. Ulpius Iarhaî. Odainat ajoute une autre famille une famille de « notables » au sens strict, tellement
légitimité puisque sa prééminence à Palmyre est reconnue le destin qu'elle s'est choisi semble en partie indépendant
par les autorités impériales (gentilice Septimius, titre de de Palmyre.
sénateur). Le pouvoir d'Odainat est donc quelque chose Les activités, les relations, les rivalités des notables de
d'inédit à Palmyre, par son ampleur et par ses conséquences ; Palmyre nous les montrent passant au cours des siècles d'une
il est nécessaire néanmoins de le replacer dans la lignée de société à base tribale à une civilisation qu'influence de plus
grands notables qui exerçaient une souveraineté, au moins en plus l'Empire romain. Les Palmyréniens ont néanmoins
de facto, si ce n'est de iure, sur la société palmyrénienne. su conserver leur culture et leur langue, tout en faisant de
À cause de la nature même de la documentation, bien leur cité une éphémère rivale de Rome. Le destin de la cité,
souvent on entend parler des notables seulement à leur entre le règne cl'Oclainat et la défaite infligée par Aurélien, à
apogée. I1 est bien rare qu'on puisse retracer l'évolution d'une la fin du me siècle, et le silence des sources documentaires
famille et sa montée vers le pouvoir et les honneurs. Le cas qui retomba sur les notables, rendent impossible tout
est patent pour la famille d' Odainat, qui apparaît jugement sur la société palmyrénienne au rve siècle. Il est
brusquement dans toute sa grandeur au milieu du al" siècle. frappant néanmoins de constater que c'est au moment où
Par définition, en effet, les sources épigraphiques donnent chute Palmyre, et avec elle, la langue palmyrénienne que
surtout le nom des personnages puissants au moment de leur réapparaissent clans le reste du Proche-Orient sémitique les
gravure, mais ont peu d'égards pour les familles montantes cultures, les langues et les écritures locales, avec des
ou les anciennes gloires. De plus, le vocabulaire officiel et modalités différentes de celles qui avaient été utilisées par
public, assez stéréotypé, permet bien rarement de discerner les Palmyréniens, et en particulier l'abandon du modèle
les motifs réels des honneurs, même si la nature des relations civique grec. Mais cette évolution est en partie parallèle à
sociales et des rapports de force peut être déduite. celle du reste du monde hellénisé, elle ne signifie pas que
C'est seulement à l'époque d'Odainat et Zénobie que l'influence grecque ait disparu clans cette partie du monde
quelques sources littéraires renseignent sur l'histoire de la la littérature syriaque en est un bon exemple.
ANNEXES
1 - La tessère est pourtant datée de l'époque cl' Hadrien par H. Seyrig (clans D. AL-HASSAN! et J. STARCKY, l 957. p. 111. n. 2).
244 Les notables de Palmyre
Remarques sur le tableau: peut rappeler que J. T. Milik pense pouvoir reconnaître les
- les dates sont celles données précisément par les textes symposiarques selon plusieurs critères (DFD, p. 221-222):
cités, ou, à défaut, des approximations calculées d'après mention nominale dans une inscription, mais aussi plus
des données prosopographiques ou onomastiques ; généralement les «prêtres qui figurent sur les tessères de
- certains personnages, comme C. Vibius Celer (lnv IX, 23, Palmyre » et qui sont, «selon toute vraisemblance, les
vers 150), sont compris dans cette liste, bien que leur "chefs du thiase" des prêtres de Bêl, sans que cela soit dit
présence parmi les notables de Palmyre soient seulement explicitement, en particulier les personnages dont les noms
une conséquence de leurs fonctions militaires en ce lieu ; apparaissent sur les tessères des "prêtres de Bêl", RTP 10 à
- la liste des symposiarques est celle que donne J. T. Milik, 29, ou ceux dont les tessères comportent l'empreinte d'un
DFD, p. 221-277, à quelques exceptions près: les n'" 6, 8 ou deux cachets ». Le premier critère est en effet fort
el 2û, anonymes, n'ont pas été mis dans la liste. On a exclu probable, car il semble naturel que ce soit le chef des pïêtœs
aussi les symposiarques non datés. Enfin, les symposiarques de Bêl qui apparaisse sur leurs tessères. L'argument du
des inscriptions G. W. BowERSOCK, 1976 (de 166 apr. J.-C.) «cachet» est peut-être plus discutable. S'il semble probable
et PAT 1128 (mi-III° siècle) ont été ajoutés. Cette liste est que les noms inscrits sur les tessères soient ceux des
loin cl' être sûre, mais elle donne une bonne idée des personnages qui organisaient des banquets semi-publics ou
personnages importants dans les thiases de Palmyre (voir des distribution, cela ne signifie pas obligatoirement qu'ils
les remarques sur les différents éléments de la liste de étaient syrnposiarques, ni même prêtres d'un culte
J. T. Milik clans le texte, principalement au chapitre 1). Les quelconque.
numéros de M. Gawlikowski conespondent à la liste établie J'ai néanmoins intégré dans le tableau les symposiarques
par ce savant (M. GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 74-77). Elle est que J. T. Milik a tenté de reconnaître, pour donner une
beaucoup plus courte que celle de J. T. Milik. Elle comporte idée des personnalités qui se distinguaient clans le domaine
dix symposiarques (pour onze textes), dont au moins un religieux, et qui avaient les moyens financiers, mais aussi
anonyme (n" 7) et un absent de la liste de DFD (le 11° 9, 1'influence sociale nécessaire pour organiser des banquets.
cl'après une nouvelle lecture du texte lnv XI, 78). Mais on Il faut noter d'ailleurs que la théorie que j'essaie de
n'a qu'une partie de la généalogie de ce dernier. La développer (sur une séparation assez générale des
principale différence entre les deux listes est que domaines religieux et politique, au moins jusqu'aux
M. Gawlikowski n'utilise pas le témoignage, à dire vrai, dernières années de Palmyre) est valable quelle que soit
peut-être douteux, des tessères pour établir la sienne. On la liste qu'on utilise.
Annexes 245
On trouvera en gras le vocabulaire qui a trait au moins en partie aux autorités impériales extérieures à la cité.
ayv ôc; : lnv III, 5 et 23 (a. KO'.l oh:moç) E'\JVOUÇ : CANTINEAU, 1938, p. 76, n" 29 (rcpoç îllV lOlO'.V
rcmpioa)
ayvwç : Inv X, 39, 55 (a. KO'.l Èmcni�LCùÇ) et 85 (a.
KO'.l Èm�LllÀWç) EÙcrE�ElO'. : RSP n" 160 (1:aµ11ç KO'.l E. XŒPlV)
CXVüpElO'. : fm, X, 44 (ot' cxpEîllV mXCîO'.V KO'.l CX.);INGHOLT, E'ÙO'E�tjç : C/S 3966, Inv X, 63
1932, p. 278 (rcoU11v à. Ka't crrcouo11v
: C/S 3970 et Inv X, 64 (Septime Sévère); CIS
ÈVOElÇCX�LEVOV;î11V O'.ÙîT)V CX. KO'.l CXpEî11V
3947 (E. �acrÎÀrncra = Zénobie)
crmcrav1:a;àpEîllÇ KO'.l à. ËVElŒV)
: C/S 3914, 3952; lnv X, 59; X, 105 (E. KO'.l
cxpÉCTKCù : C/S 3923 (cité et dieux);3930 (patrie et dieux <plÀOTCO'.îpK KO'.l <plÀÔîEl�LOç)
ancestraux) ; 3933 et 3948 (marchands) ;
3942 (Conseil et Peuple);3966 et RSP n° 160 : CIS 3930 (E. KO'.l cp1ÀÔrcmp1ç KCXl TCO'.Vîl
(dieux et tribus);SCHLUMBERGER, 1961, p. 256 îpümp <plÀOîEl�LCùÇ)
(patrie et marchands);/111 1 IX, 30 (cité) CIS 3931, 3963, Inv IX, 22 ; X, 109 ;
àprni : fnv X, 44 (CX. TCacra KO'.l CXVopEÎa) ;INGHOLT, CANTINEAU, 1933, p. 175, n" 2b; MoUTERDE
1932, p. 278 (îllV O'.ÙTT)V CXVüpElO'.V KO'.l et PornEBARD, 1931, p. 101-115; BS n" 45;
à. crmcravm;à. KO'.l àvopElO'.Ç ËVEKEV); DRIJVERS, 1995a, p. 34 (E. KO'.l <plÀÔTCO'.îpK)
DRIJVERS, 1995a, p. 34 (lŒKOcrµlWÉVQ) CX. : lnv X, 57;X, 69;X, 129 (E. KO'.l <ptÀÔîEl�Loç)
Ka't �LEyÎm:mç 1:aµa1ç)
KatpÔç : lnv X, 114 (TCO'.Vîl Kat pep);BS n" 45 (TCOÀÀOÎ.ç
: BS n" 45 ; MouTERDE et PornEBARD, 1931, KO'.l �LEyŒÀOlç KO'.lpülÇ)
p. 101-115
: C/S 3932
ôêO'TCÔ't'llÇ : C/S 3945, 3947;GAWLIKOWSKr, 1970a, n" 3
: Inv III, 26
OlKO'.lOÇ : voir ayvÔç
: CIS 3942;Inv X, 44 (Ka't Èv8oçeoç)
oÛvaµK : DRIJVERS, 1995a, p. 34 (rcapaÀŒ�CùV �LE8'
ÉO'.UîOU rcoU11v o.) µap,:upÉco-ro : C/S3932 (Iarhibôl, préfet du prétoire, patrie ?),
3934, 3942 ( archemporoi) ; Inv X, SS
Èv8oçeoç : Inv X, 44 (Àaµrcpwc; Ka't È.) (gouverneur) ; X, 85 (Iarhibôl) ; X, 114
ÈÇ lülCùV : inscriptions honorifiques : C/S 3914, 3923, (patrie [?] et [?] consuls) et 115 (dieu
3936, 3942, 3959 (ÈK 1:wv ioîcov); Inv III, ancestral, Conseil, gouverneur);CANTINEAU,
2, X, 24 et 44;As' AD et GAWLIKOWSK!, 1986- 1936, p. 277, n" 20 (= BS n" 48) (Avidius
1987, n'" 7 et 8;INGHOLT, 1932, p. 278 (avec Cassius); INGHOLT, 1932, p. 278 (Iarhibôl,
DFD, p. 36); DFD, p. 54-55; Inv IX, 11 et dieu ancestral, gouverneurs, patrie) ;
X, 115 (seulement en araméen : mn kysh) MoUTERDE et PoIDEBARD, 1931, p. 101-115
(empereurs Èmcr1:0Ài;gouverneurs, dont en
: inscriptions funéraires : C/S4201 (nm kyshvvn), particulier ÈmcrwÀi Ka't otmciyµan de
4202, 4203 (mn [kysh]), 4209, 4211, 4215; Publius Marcellus).
Inv IV, 7a;IV, 11;IV, 13-14;VIII, 58;RSP
n" 25 µEyaÀocppocrûv17: BS n" 45;DRIJVERS, 1995a, p. 34 (EÙVOlO'.Ç KO'.l
�L. î llV rcpoç îOÙç TC O À ElîO'. Ç ) ;
: dédicaces religieuses : RSP n"' 125-126; GAWLIKOWSK[, 1973a, p. 100 ( [...1:aµ]rjç KO'.l
SEYRIG, 1933c, p. 275 et 1950, p. 242, 11° 6 µ. ËVEKEV)
: Inv IX, 24 ( cr1:pa1:EucraµEvoç) ; lnv X, SS rcpocrcptÀOîEl�LOÙµm : SEYRIG, 1937, p. 372
(ciyvcoç KO'.l È.) ; Inv X, 115 (È. KO'.l
cjnÀ01:dµeoç);DRIJVERS, 1995a, p. 34 crrcouorî : INGHOLT, 1932 p. 278 (TCOÀÀT)V CXVüpElO'.V KO'.l
cr. Èvoal;ci�LEvov);Inv X, 127 (EÙvoiac; Ka't
bct�LEÀwç : lnv X, 85 (ayvwç KO'.l È.) cr. ËVElŒV]);CANTINEAU, 1933, p. 187, n" 10
E'ÙEpytj1:11c; : Inv III, 23; X, 34; X, 77; X, 130; SEYR!G, (rccicr1J cr.);CIS 3924 ([Kmrnrco]ûoacrEv)
1939, n" 25 (1:ov E. KO'.l 1:ov KÛpwv wu : Inv III, 23 (et X, 34 ?)
KÔcr�LOU : Hadrien)
: INGHOLT, 1932, p. 278 (1:àç rcpÉrcoucraç aù1:cp
EÙVOlO'. : C/S 3923, Inv IX, 20 et 23 (1:aµrjç KO'.l E. 1:aµcxç);passim (îÊl�ll7Ç xciptv)
ËVElŒV) ;InvIX, ll-12(E. ËVEKO'.);C/S3952
nµcico-w : Inv IX, 22 (Empereurs);BS n° 45 (gouverneur
(îEl�Lllç KO'.l E. XCXPlV);fnv X, 127 (E. KO'.l
Publius Marcellus, e[mcr1:0À]a1ç Kat
mcou[811c; ËvEKEv]) ;Inv X, 34 ([EÙ](v)oÎaç
8tmciyµan)
KO'.l µv11µ17[ç XCXPlV]);DRIJVERS, 1995a, p. 34
(E. KO'.l �Lf:YO'.ÀO<ppocrÛV17V îllV rcpoç îOÙç îpOTCOÇ : C/S 3928, 3930;Inv X, 107;DRUVERS, 1995a,
TCOÀEtîO'.ç) p. 34 (TCO'.Vîl îpüTCQ))
246 Les notables de Palmyre
FONCTIONS ET TITRES IMPÉRIAUX Procurateur impérial (Ère{ îporroç IE�aCTîOÛ) : CIS 3938 ;
CJS 3939; CJS 3940; CIS 3941; CJS 3943;
chevalier : CIS 3937; CIS 3940 : CIS 3943 (1.rrmKoç et Jm, X, 23 (= Procurator Augusti) [en aram.,
lzpq1Fslhpq) JJ/lp' et en CJS 3938 'pt1p' dy qs1j
curateur : Inv X, 34 (ÀoyrnT1iç) sénateur (0uyKÀ17nKc:k) : CJS 3944 (snqltyqh); CIS 4202
(sqltyc{); lnv IX, 28 (avec GAWLIKOWSKI,
: CJS 3942 (= iuridirns)
1971, p. 413;araméen seulement: sqltyq)
ducénaire : CIS 3938-3943 (en aram., dwqnr' ou dqnr)
gouverneur CIS 3932 et lNGHOLT, 1932, p. 278 ( o
ACTIVITÉS CIVIQUES
llYllCT<XµEVOÇ traduit par hygmwn' dans le
premier); Inv X, 55 (6 llYEµovoç); lm 1 X, activités financières: CIS 3913 8n:arrpm î0l ( ·,�rt)
115 (6 llYOÛ�LEvoç); CJS 3968 (RSP n" 157)
: Inv X, 113 rrpayµaîEUîllç (actor en latin et
[araméen seulement: hgmwn]
p1gmtt)
: urranKOÇ CJS 3945 (et en araméen hptyq);
: Inv X, 29 et 113 Tnapîmv17ç (= dy 1-b'' en
lnv X, 27; lnv X, 114; Inv XII, 37;
araméen et dans le deuxième texte, en latin,
GAWLIKOWSKI, 1985, p. 255, n" 5 (SEYRIG,
manceps)
1963, p. 161, 11" 1 ), 6 (SFYRIG, 1963, p. 161,
n" 2) et 7 (BS n" 52); INGHOLT, 1932, p. 278 : CJS 3913 CTÛVblKOl (sdqy)
(et DFD, p. 36) ; BS n" 45 (en araméen :
: Jm, IX, 12 (àpyupmo�tim et 'nw,s 'nw,ff); CJS
hgmwn); MüUTERDE et PoIDEBARD, 1931,
3994 (àpyuporn�üm et b'n( w)st)
p. 101-115 avec DFD, p. 13 (îCDV Éç,17ç
urranKCDV et hgmnyn dy b'{tl11}) ;TEIXIDOR, agoranorne : 1111' X, 85 (ayv mç Kal Èrr[t�LEÀWd); ln\' XII,
1997, p. 68 (araméen seulement: hptyq) 29 ; CJS 3932 (et rb swq) ; Inv X, 115
([Èm]miµüK KCXl <plÀOîEl�Lw[d; en araméen
Kpancrrnç : CJS 3938-3943 (Worod; en araméen qrtsts ou
brbnswqth); CIS 3942
qrtstws en CJS 3939-3941 et 3943); CIS
3946-3947 (Zabdas et Zabbaios ; qrts( et ambassadeur : rr[prn�EÛcravTa] : Inv X, 114
qrtsfwÏKpancrTOl); CJS 3934 et lnv X, 114 archonte : CIS 3913 (Tarif) : 'rkwny' au pluriel en
(�ouÀ17 ; grec seulement); Inv X, 102 araméen ; Inv X, 112 (?) ; BS n" 34 (en
(araméen) araméen)
Àa�rnpoîarnç : CJS 3939 et lm' Ill,3 (avec GAWLJKOWSKI, 1985, wgapet : àpyarrH17ç CIS 3940, 3943 et 4105ter (avec
n" 10) [colonie]; CJS 3944-3945 (nhyr); CJS aram. 'igbt); CJS 3941
3947 et 3971 ( nhyrt'); CIS 4202 (sans
équivalent araméen) ; Inv XII, 37 ; boulè (conseil) : �OUÀll : araméen seul : lnl' X, 11, 13 (bwJ'
GAWLIKOWSKI, 1985, n'" 5 (= SEYRIG, 1963 wdmws); CJS 3919, ]11\1 X, 74, 98 et 106
p. 161), 7 (= BS n" 52) et 13;TEIXIDOR, 1997, (bwl)
p. 68 (araméen seulement: nhyr) [CJS 3944 : 11 �-: CJS 3913,3927 et 3952 ;Inv X,37,39,46
et suivants pour la famille d'Odainat];Jm, X, (?),57,60,63,69,114, ]27;CANTINEAU, ]938,
55 et 115 (gouverneurs) p. 76, n" 29; SEYRIG, 1937, p. 372 et 1939,
: lnl' X, 34 p. 319, n" 23; BS n" 91; BouNNI, 1986, n" 2
Anne.res 247
: 17 p. KO'.l 6 8îi�Loç: CIS 3914, 3921, 3930, : rcchpü)V : CJS 3944: Jn,, XII, 37 ;
3931, 3932, 3934. 3935, 3936, 3938, 3942, ÜAWLIKOWSK!, 1985 11 ° 5 ( = SEYRlG, 1963,
3959 : Jm, IIL 5 et 26 ; lm' IX, 23 et 30; lnl' X, p. 161) et 7 (= BS n" 52)
14, 34. 44.SS. S9. 80, 109 (?), l 15, 120 (?),
peuple : 81Î�loç : l,11• IX.11-12 (TiaÀ�rnp11vmv 6 8.);
129; ]711, 20; CANT!NEAU, 1933, p. J 75.
CIS 3966 ôÎl�lok
n" 2b (en latin: Bu[le et ciui]tos
restitution d'après Milik, DFD. p. 82-83, n" 7,
Polmyrenorum) et 1936, p. 277, 11° 20 (= BS
mais voir RSP n" 156)
11° 48) ; lNGHOLT, 1932.p. 278; ÜAWL!KOWSKl,
1973a.p. 100 : 17 pouÀll Kal 6 8.: voir à PouÀ17
bouleute : CJS 3937 (et bylw(); ln\' X, 29 (blwj); : 81wômoç: BS n" 45 (8. àvopuk)
ÜAWLIKOWSKI, l 985, 11 ° 6 ( = SEYR!G, 1963, proèdre : Jm, X, 45; lm• X, SS(ayvôx Kat Èm017�Lcoç).
p. 160-161)
Voir aussi à synèdre.
cité et citoyenneté: rcÔÀ1ç : CJS 3923 ; lm X, 39, 67 et 128
secrétaire l,11• X, 39 (y pa�l�l a î EUÇ et ciyvwç
(TCOÀElîllç îÎlç TiaÀ�lUpllVCüV TCOÀÉCDç); ypa�l�La1:EÛ0av1a ; en aram. grm.tws et
Inv IX, 30; llll' III, 18
bgrmty) : CIS 39S9 (= Jm, I, 2 et BS n" 44;
: TC O À El ît'.U 0�lCXl : CJS 3932 (KO'. Àû)Ç) ; ypa�l�LO'.îEÛç et grmtws): CJS 3913(Tarif:
CANT!NEAU, 1936. p. 277, n" 20 (= BS n" 48) grec et araméen) [voir aussi bgnnty"clans les
(n:wîiç KO'.l PEÀîl0îOU TCOÀElîEU[wu!:vou] textes araméens, CANTINEAU, 1933. p. 177.
XO:plV) n" 3; lnl' X, 13]
: TCOÀEl îElO'. : lm• X, 44 (rca0av TCOAEl îlaV stratège : avant la colonie: SAFAR, 1964, p. 13, n" 1 (voir
Àa�LTCpCüç Kal ÈVôÔÇCDÇ ËKîEWEV = w'bcf DFD, p. 258 et lNGHOLT. 1976, p. 127) ;
plty· ,füyf1yt wnhw1yt) STARCKY, 1963, p. 48 (strtgwt); Pre!. Rep.
VII/VIII.p. 82-83, n" 845( '.s,tr,tg') ; lnv X, 85
: TCOÀElîllç : CIS 39S9 (et bny mclynt) : ln\' IIL
(Èmm7�LCDç 01pann1i0av1a); INGHOLT,
18 : Jm, IX, 23; lnv X, 128-129(sans équivalent
1932, p. 279 (= DFD, p. 36;
ararn.); CANT!NEAU, 1938, p. 76, n" 29(cxycx8ov
cn:pm1iy170av1a et strtg) ; 1111 1 X, 44(1àç
rcoÀd111v et sans équivalent en aram.)
cnpa11iyiaç 0uvapciµEvov et b:strtgwn) ;
colonie : KOÀCÔv : CIS 4401 (de Beyrouth; qw/1,1·11) CANT!NEAU, 1933, p. 179, n" 4 (sfrtg)
: KOÀCDvda: CIS 3939; lm· III, 3 (?) ; lm• X, : de la colonie: ln,, m. 5(éponymes) ; CJS 3932
115 (araméen seulement: qlny) (01pm1iy170av1a et :'itrtg); lm' X, 115 et
CIS 3942 (01pm1iy170av1a) ; CJS 3934
: �L11îPOKOÀCDVEÎa: CIS 3942; lm• X, 12
(0îpO'.îl1Yî)0aVm et b'.sfrtgwth); CJS 3939
décret : 810:1:ay�la: BS n" 45; MouTERDE et PomEBARD, ( 01pcx11iyoç et :'itrJg') ; Inv III, 3 (avec
1931, p. 101-115 ÜAWLIKOWSKl, 1985, p. 2 55, n" } 0 :
: My�la: CJS 3913(et en aram. clgm) ; BS n" 45 01pm1iyoi)
symposiarques : 0u�mo0iapxoç: CIS 3942(0. 1:êov 1o[û 8rnûl
: \JflÎ<pW�la: lnv X, 114 : BS n" 45; CANTINEAU,
1936, p. 277, n" 20 (= BS n" 48) (mais en �l0Ç BllÀOD 1.EpÉCDV); C/S 3970(CXPXlEpEÙç
Kal 0. lEpÉCDV µEyl0îO'U 8EOÛ �lQÇ
aram. clgm) ; MOUTERDE et PoIDEBARD, 1931,
p. 101-11S (mais en aram. clgmyn); INGHOLT, B 11[Àou] ; brbnwt mrzbwt); Inv IX, 26
1932, p. 278 (= DFD, p. 36 pour l'araméen) (CXpXlEpEÙç K[al] 0. [1.EpÉCDV] µEyl0îOD
0rnù �1oç B11A[ou] ; bmrzbth cly km[r' cly
: rcpô01:ay�la : /111' X, 44 (et en aram. twbyt) ; bl...}) et 27(CXTCXlEpEJùç Kat 0.); CANT!NEAU,
INGHOLT, 1932, p. 278 (= DFD, p. 36 pour 1930b, n" 14 (0. iEpÉcov [�1Joç B11[Àou);
l'araméen) (le texte est lacunaire, mais porte SEYRIG, 1939, p. 320, n" 24a(È1tt CXPXlEpÉ(l)Ç
twf1yt en araméen) Kal 0.) et p. 321, n" 24b (àpx1EpÉcoç [Kat
: twbyt: CJS 39S9 (= BS n" 44), sans grec 0. [iEpÉwv] B11Àou) ; BoWERSOCK, 1976,
correspondant p. 349-355 (àpx1EpEÙç 1m[1] 0. iEpÉwv
µqi01ou ewû �1àd B11Àou) 1
1 - Le nominatif est !a plupart du temps 0wmo0{cxpxoç, avec une variante principale : J. CANTINEAU. l 930b, n" 14 ( 0uvn:001apx1w).
248 Les notables de Palmyre
Sans traduction CIS 3947, 3952, 3963 et 3966; Inv X, Inv X, 39 rriiacxv cp1Ào,n[�t1cxvl 111ym mbwzh wbkl
63-64 et 129 Èv8n;ciµ[i:v]ov Èv ,Ôiç [$bW k]hj spr
ûjçrroÀÉoç lmdyth
d/11 'Jhy CIS 3914, 3930-3931; Inv X, 69 et
[rrpJayµcxm
105; DRIJVERS , 1995a; MOUTERDE et
POIDEBARD, 1931 SEYRIG, 1937, <plÀOîEl�llCX 0
p. 372 et 1939,
111$bth bbnyby CANTINEAU, 1933, p. 175, n° 2b
p. 319-320, n° 23
[1J[hy1 -
Sans traduction CIS 3952; Inv X, 96 (?), 127 et 129 rrmpi8t Kcx't ,Ôiç
rrcx,pioK 8rn1ç
111ym mdyth (avec CJS 3914, 3930, 3931, 3932; lnv X. 54
des variations et 69; CANTINEAU , 1933, p. 175, MOUTERDE et <ptÀOîEl�lûK nhw[Iyt} ?
Monolingues Inv III, 26; Jnv IX, 22; Inv X, 59 et CIS 3934 (254) [<ptÀOTEε](l)Ç dy .sms w.spr Jhwn
Pour l'expression araméenne 1j]ym mbwzh (lnv X, 39) On remarquera que l'adverbe nlrwryt est de même racine
et ses équivalents en grec, voir le commentaire dans le cours que le mot nhr utilisé en C/S 3914 pour traduire �ü61a�wç
du texte, chapitre 1. clans une expression. Il est néanmoins la traduction de
Àcxµnp(DÇ en lnv X, 44. J. T. Milik se sert de ce parallèle pour
restituer la notion de Àcx�mp(DÇ clans le texte R. MouTERDE et
C. MOTS DE LA FAMILLE DE �lÀ0îHµoç A. PomEBARD, 1931 '. Il semble plutôt que, comme en C/S
- �1Ào1aµoç 3914, il s'agisse d'un équivalent de �1Ào1E1.µwç.
Traduction Textes
Les textes sont rangés dans l'ordre chronologique ; les les variations par rapport à cette norme sont citées : texte en
textes non datés (n.d.) sont à la fin. grec, nom de la tribu avec simplement bny X (généralement
Les dates sont toutes situées après le début de notre ère, quand le nom n'est pas là pour désigner un personnage, mais
sauf mention spéciale (av.). parce que la tribu en tant qu'entité a fait telle ou telle chose)
Quand la formule est la plus courante (dy mn bny ou bien sûr l'expression dy mn p/ld bny X.
elle n'est pas indiquée, sauf pour les textes bilingues. Toutes
Anne.tes 253
/111· XL 100 (bny khnbw) ...................................................... 44 av. lm· IV, 7a (bny kmr') et BSn" 1 (lm• I, 5) [bny m'zyn]_ 13
Du MESNIL DU BUISSON, 1939, n" 1 (bny kmr' et bny gdbwl) 32 av. (CES3983 = lm· I, 4) [bny m'zyn], et 14 (bny m'zyn) .............. 67
!111· XII, 22 (bny zmr') ......................................................... 18 av. CANTINEAU, 1930b, n" 34 (lmy mtbwl) .................................. 50-70
CIS 3969 (bny kmr') ........................................................... 17 av. BSn" 24 (bny m'zyn) ................................................................. 73
CIS 4109 (bny myt') .............................................................. 9 av. CJS4122 (<pUÀll KÀcxu81 (XÇ) ............................................... 79-80
CANTINEAU, 1936, p. 268, n" 17 (bny kmr') ........................... 6 av. ESn" 49 = C/S 3958= lm• I, 3 (bny m'zyn) et lnl' X, 13 l
(bny 'gr1vd) ................................................................................ 81
CIS 4112 (bny kmr') .............................................................. 4 av.
Inv X, 40 (bny m'zyn) et lm• VII, 15 (= C/S4197)
CIS4113 (bny mtbwl) .................................................................. 9
[bny 111'zyn] ......................................................................... 81-82
ÜAWLIKOWSKI et As'AD, 1993, p. 163-172 (bny myt') ................ 11
CANTINEAU, 1938, p. 76, 11 29 (bny myt') .................................. 84
°
Inv IX. 24 OÜÀmm Oùhiou MCY.ÀXOU Ulül LEpyi.� MOUKlCY.Vàç ire moitié
KCY.l 0EÔ�ouÀoç KŒl 'AnOÀlVCY.plOç KCY.l Mapicov [le siècle
BOUNNI, 1986, n° 4 'A817vo8wpou whblt 154
CIS 4001 hrms[. .. ] 161
RSPn ° 125 BcoÀavoç Z11vo�i.ou wû Atpavou wû MoKlµou 1oû bwly br zbyd' br J1yrn br mqymw mt' 162
Ma00a
Inv XL 5 td'l brt J11y bss br m"J1w br i·qrws 165
As'AD et GAWLIKOWSKI . swyr' bt yrJ1y 'cipws 169 ou 170
1986-1987, n" 9
Inv VII, Sb Koûpwç 0CY.lµapaou wû Bcopocpa 3 172
CIS 4003 Kaamavàç Z11vo�i.ou 1oû CPtÀ011cx1opoç ... br zbyd· 'pyn 173
* Ce tableau, comme le suivant, a pour base les listes dressées par Palmyre, voir les tableaux correspondants.
J. K. STARK, 1971, p. 131-132 (Appendix III, A et B ), complétées par les 1 - Il ne s'agit pas forcément d'un Palmyrénien.
textes grecs et latins et les inscriptions publiées depuis 1971. Ils ne donnent 2 - Pour la date, voir annexe XII, à propos de Celesticus.
que les noms utilisés par et pour des Palmyréniens. Pour les étrangers à 3 - Koûp1oç (lnv) est corrigé en Bouppoç par J. T. Milik, DFD, p. 238.
Annexes 255
CIS 3914 lo:ptP(l)ÀllÇ Eyq KCÙ Aounooç Aooouoo:vou yrbbwJ" br 'g" w·wyd· br bdwdn bny 175
lo:ptP(l)ÀEOUÇ îOÛ Aooouoo:vou îOU zo:p01p(l)ÀOU yrbbwl' br bdwdn br zbdbwl br bdwdn
Aooouoo:vou cI>1p�l(l)VOÇ prmwn -+
WADD!NGTON, 2572 'loÛÀlOÇ "Epcoç CXJCEÀEÛ8Epoç ro:iou 'IouÀLOU BcxcïüOU 178
IÀc:1po:çou lo:n�cxç
CIS 3953 A1po:v11ç 6 KO:l 'Hpcôo1iç I:opmxou îOU Atpo:vou îOÛ f1yrn br sqkw br byrn br 'Jyn $pr 179
AÀmVll LE<jl<j)Epcx
CIS 3954 Mo:p8nç 'AÀc:sâvopou 1oû Ko:\ l0:011 1oû mrly brt yd· br whblt br sm'wn 179
Ouo:po:ÀÀo:8ou rnû I:up(l)vou
lNGI-IOLT, 1936, p. 109, 00�10:Ucxx1ç Aooouocxvou îOÛ lcxpt�O)ÀEOUÇ îOÛ 182
11° 11 AôôOUOCXVOU îOU <l)tp�LCOVOÇ
GAWL!KOWSK!, 1970a. 0wowpoç 6 KO:Î. Mo:prnvcxç Mmco:p{ou îOÛ 0wocôpou 1hbl dy mtqr· mrwn · br mqymw br ]hbl 185
p. 69, n ° 4 rnû Ko:Î. Ho:P11Àou
lNGI-IOLT, 1935, p. 93, 11° III b·Jy br dywn mlkw 186
INGHOLT, 1938, p. 106 i1tyks 1pbwl br 'nfyks 'rqb br 1pbwl 186
(n° 20 I)
RSP n" 106 mqymw br 'wtk· 190-191
Jnv IV, 7b 'AÀÉscxvopoç 'AÀc:sâvopou rnû 'ArcoÀÀcov{ou rnû ]kscbys br 'Jksd1ys br 'plnys nbwzbd br 191
Nc:�ouÇcx�cxoou 1oû 0m�LŒ1l rnû Ayyooo�Lou tym "' br 'gdm
CIS 4173-4 et 4185 nrqys br fny 'gylw br mlkw 191
CANTINEAU, 1930b, 11 14 °
Ko:Uicrn1 8uycx11w 'Hpq'Joou MouKto:voû Vers 200
As'AD et GAWL!KOWSK[' Mo:Àxoç MoUKlCXVOÛ îOÛ A vo:v1oou Vers 200
1986-1987, 11° Sa
CIS 4013 hrms bsm br f11y mlkw br whb" 205
CIS 4016 rdwn br hrmsyn · 212
CIS 4201 Z11vô�1oç A11ouî. rnû 'lo:Kou�ou zbyd' br lwy br y'qwb br smw'I 212
lNGI-IOLT, 1935, p. 99, ywlys 'wrlys 'g1p · br 'gfps br J11y 214
11 ° VIII (+ 1962, p. 106) hlydwrs y1tibwf" ( 'gfps est 'gfpws dans le
second texte)
lNGI-IOLT, 1962, p. 106 ywlys 'wrlys ydy'bl dy mtqr' mzbn' br 214
ywlys 'wrlys 'nynws
RSPn° 108 dms 216
Inv XI, 16 bwn' 'g' gbyns 217
CIS 4020 dwmnyn 220
PAT 1657 ywlys wrlys mtly br blpt' br dygns 222
Inv lII, 5 'louÀ1oç Aùp11À10ç Tnio:voç 'A811voowpou 224-225
INGHOLT, 1938, p. 110 'ntykys 1pbwl br "t'qb (même personnage 228
(n° 20 III) en 186)
CIS 4024 mqymw b[i] gy? (lecture douteuse) 228
Inv IV, 13 [ 'louÀ10ç Aùp11À1oç 'Ep�tî7çJcxrcEÀc:u8c:poç Aùp11À1ou ywlys \vrlys hnns br f11y 'wrlys 232
Inv IV, 13 (avec ['loÛÀlO: AÙpllÀlŒ TTpi�LCX CXJCEÀEU8Épcx Aùp11À10:ç ywly' 'rly' prym' brt f11y 'wrly' 'qm' brl 232
GAWUKOWSK!, 1975, 'AK�llÎÇ 'Anhôxou îOÛ KO:Î. ÜÀCXl<jJEl 'n[tyks blypy]
p. 129)
CIS 4031 'Iou(À10ç) Aùp(17À10ç) 'Avtircmpoç 6 KO:Î. AÀo:<jlcovcxç ywl \vr b]pwn' br ''ylmy zbyd' 'qwp' 233
ACXlÀO:�LEl îOÛ Z11vopiou îOÛ AKOJCO:OU
4 - Il y a une forte probabilité que ce nom (prmwn <Plp�LCOV) ne soit soit pas d'origine latine: voir au tableau suivant, et à celui des noms iraniens.
256 Les notables de Palmyre
2. LISTE GÉNÉRALE *
Le classement suit r ordre théorique de la transcription en français. On !"esclave de Livie représente le même nom sémitique que le nom de la
trouvera après la liste des attestations non datées. entre parenthèses les même forme à Palmyre. en particulier si. comme on le fait généralement.
textes datés (avec la date pour permettre de les retrouver plus facilement on donne une étymologie arabe à l · anthroponyme connu à Palmyre.
clans le tableau précédent). Dans la dernière colonne. on trouvera l'équivalent R. Degen (compte rendu de J. K. STARK. 1971. clans Bi Or 29. l 972, p. 213),
grec ou latin le plus probable. Le point d'interrogation clans la 3' colonne en fait apparemment une forme de 3' personne masculin singulier de
indique que l'un des cieux noms (soit le grec. soit l'araméen) est restitué. qcî111a IV (en arabe) : M. Macdonald me signale que le« · » final est presque
l - Lecture ' gtps(au lieu de 'gt pl de H. lngholt) cl'après J. K. STARK. 1971. certainement l'abréviation du nom divin. Le nom signifierait clone« Il [nom
p. 120. divin! a élevé». Le même verbe est à l'origine cl' un nom très courant à
2 - On peut clouter de !"origine grecque de ce nom (voir R. Degen. Palmyre comme Moqîmù. mais surtout clu nom féminin 'qmt(AKO'.�La817
compte rendu de .1. K. STARK. 1971. dans Bi Or 29. l 972. p. 213). Dans le en grec. H. lNGHOLT. 1936. p. 99. n" 7) dont l'étymologie reste obscure à
cas contraire. ce serait le 110111 grec le plus courant à Palmyre. J. K. Stark J. K. Stark (1971. p. 72). On peut supposer que. quelle que soit r origine du
( 1971. p. 72) fait référence à W. PAPE. 1870. p. 46 où le nom est cité d'après nom. il n'a connu cette vogue que parce qu'on pouvait le rapprocher d'un
plusieurs textes de Flavius Josèphe (BJ I. 632 sq). à propos d'une esclave nom grec (je remercie F. Briquel-Chatonnet et M. MacDonald de leur aide
juive de Livie. originaire de .Judée (P!R' A92). Le nom n'apparaît pas clans pour cette recherche). D'autre part. H. Ingholt propose d'y voir une forme
les trois volumes parus du Lexicon of" Greek Pffsonaf Names. ni même assimilée de 'nnqâma, infinitif absolu aphel de la racine nqm. signifiant
dans les inscriptions du reste de la Syrie (je remercie M. Sartre. pour m'avoir «vengeance» (H. INGHOLT. 1974. p. 52). Tl rapproche d'autre part le nom
laissé consulter ses fichiers). À Rome, H. Solin (1982, p. 1193-1194) en A KO'.�La817/' qml. cité plus haut. qui aurait la même signification. Même si
cite 29 exemples. dont r esclave cle Livie ( sous les formes A one ou Acume) cette hypothèse était avérée. ce qui est peut-être douteux. on peut penser
l 7 sont esclaves et affranchis (donc d'origine sémitique possible). 2 sans que le rapprochement avec un mot grec a pu jouer de la même façon clans
cloute affranchis et l Cl incerti. On se rapproche de ce qui se passe pour les ce cas.
noms grecs les plus courants à Palmyre et à Rome, Hermes ou Ale.ffmda 3 - Au lieu de lm' de SFP n" 74 et N. SALIBY. 1992. n" 31. La lecture de PAT
Le sens sémitique du nom n·est pas très clair. D'autre part. comme me ra semble confirmée par la fig. 144 de SFP.
fait remarquer M. Macdonald. il n · est pas du tout assuré que le nom cle 4 - Cf. H. lNGHOLT. 1962, p. l 08-109.
258 Les notables de Palmyre
5 - J. T. Milik, DFD, p. 237 lit plutôt 'dmtws (Ad111et11s). clans Bi Or 29, 1972, p. 212, avec la n. 5) y voit plutôt la forme araméenne
6 - Voir A. Caquot clans RTP, p. 167. (et non arabe) du mot« chaldéen». avec un u/cJprosthétique inexpliqué.
7 - = SFP n'" 80 et 84 et N. SALIBY, 1992, n'" 37 et 41 (nom lu brny111). 9 - Ces textes de RSP établissent l'équivalence entre dynys et L',.1ovûcrwç.
L'interprétation correcte du nom est celle de D. Hillers et E. Cussini (PAT A. Caquot clans RTP (p. 171) proposait L';.ElVK, t,.dvtoç ou lnvicxç, « ou
1047, p. 166:« Berenice»).On retrouve la même lecture dans P. PIERSIMONI. même peut-être L',.wvûmoç».
1994a, p. 309 et 311 (n'" 34 et 42), mais sans cette interprétation. 10 - J. K. Stark (1971, p. 83) explique ce nom par l' accadien daycînO
8 - Lorigine de cc nom a été discuté: voir les discussions sur la tribu «juge». Il est sans doute préférable d'en faire une transcription du nom
Clcwdias dans le chapitre 11 (p. 68). Voir aussi les références dans PAT, grec t,.imv, qui de plus existe à Palmyre. Le nom ddy11•11 (H. lNGIIOLT. 1935,
p. 372 (Glossary. s.l'. Ide/y). R. Degen (compte rendu de J. K. STARK, 1971, p. 102, n" XI) est peut-être lié.
Annexes 259
12 - Ou bien M17v68wpoç (RTP. p. 167). 15 - Et sans doute aussi 'J11dwn (RTP 682): voir R. Degen (compte rendu
13 - Pour ce nom, voir la discussion au chapitre IV. deJ. K. STARK, 1971.dansBi0r29.1972.p. 213).A. Caquot(RTP.p. 165)
14 - Voir l'annexe suivante : le nom est peut-être cl' origine iranienne. C'est se contente d'un simple«?».
O. Puchstein(dans M. SoBERNHEIM. 1905.p. 10) qui en fait une transcription I 6 - Voir RTP, p. 167.
d'un nom latin Firmo (de «fïrmus»): voirJ. K. STARK, 1971, p. 109. Cette 17 - Sur la popularité de ce nom en milieu sémitique. voir M. SARTRE, 1985,
opinion est combattue par H. Ingholt (1936, p. 91) qui propose une p. 234.
étymologie sémitique (racine prm avec le suffixe -ôn). Pour J. K. STARK. 18 - Comme le note J. Starcky (ud !oc.), il peut aussi s'agir d'un nom
1971. p. 109 « u Persian origin is more !ike!y». sémitique.
Annexes 261
Ce tableau, comme le précédent, n'inclut pas les noms À titre de comparaison, on peut donner la liste des noms
inhérents à la condition de citoyens romains (voir cette liste les plus courants dans les inscriptions grecques de Syrie ;
dans D. ScHLUMBERGER, l 942-l 943b, complétée ici au ces huit noms représentent environ 10 % des Syriens qtü
chapitre rn, n. 211). Les Palmyréniens citoyens romains écrivent le grec : Alexandros, Philippos, Antiochos,
n'apparaissent donc qu'autant que leur nom soit grec ou latin. Séleukos, Bassos, Eutychès, Dionysos, Diogénès (voir
D'autre part, la liste n'inclut que les Palmyréniens sûrs ou M. SARTRE, 1998, p. 559). À part Philippos, tous ces noms
probables ; les étrangers à l'oasis (soldats, fonctionnaires sont présents dans la liste qui précède, mais sont parfois peu
romains) sont regroupés dans un des tableaux suivants. fréquents (Diogénès). De plus, des noms comme Hermès
Le classement alphabétique essaie de suivre l'ordre des (ou les noms latins) sont aussi ou plus fréquents que certains
noms en transcription française, seule manière d'uniformiser d'entre eux.
les données de textes écrits dans trois alphabets différents.
19 - CIS 4408 (p. 404) en suivant Ch. Clermont-Ganneau, propose aussi 20 - Sur ce nom et sa proximité avec des noms sémitiques qui ont favorisé
TapÎ.aç ou Tîptoç. sa popularité en Syrie, voir M. SARTRE, 1985, p. 225-227.
262 Les notClbles de PCllmyre
Noms 1
Références 2
omrt (p. 2 et 64) CIS 3991
'.s/DJ (p. 6 et 70) CJS 4068
'.spys/Aa�11 ? BOUNNI,1986. n'is 31 et 48 (même personne sans cloute)
'p111/ (p.6 et 72) CIS 4239; lNGHOLT,1935,p.98,VII et 1962,p. l 04 et 106 (dont trois fois le même)
i-bz (p.7 et 72) CANTINEAU. 1931. n" 18 (le personnage n'est pas palmyrénien)
r' /bn (p.7 et 73) CJS 3968 + SFP nns 24-25. 27-28. 30. 41 ( cieux ou trois personnages de la même famille). Grec S FP
n'is 24 et 28 : 'Apnx�o:voç
bgy (p. 8 et 74)? lnv IV,7b (bilingue: Bo:yyO'.loç )
bgdn 3 (p. 8 et 74)? CJS 4076, 4340. 4402. 4454: CANTINEAU,1931. p.127. n ° 8 -+: PS n'is 141,210 et 395:
AKAYASU et TAKURA (éd.),1994. n" 8 (bilingue : 'Arro)c)c68mpoç en CIS 4402)
bgs et bgi;w (p. 8 et 74)? CIS 4395. 3968,4455 : 1111• VII,14,IX,33-34,XII,15: MILIK et STARCKY, 1970, p. ]61-162;
RTP 32: au moins cieux sont de la même famille 5. Grec: Bo:yrnoç en lm· III,2 (cf. lm· XII,19 et
WILL 1983. p. 69 = SEC 35. 1499) et VIII. 87
hrmz et hrmzd (p.15 et 84) C/S 4074 et CANTINEAU,1930b. n" 18
wrdn (p.16 et 85) lNGHOLT. 1938. p. 106. I et 110. III: INGHOLT. 1974. p.50. n" 2: PNO n"' 55A et C
wrwcl 6
(p.16 et 85) /111· VIII. 99: /Ill' IX. 28 (= GAWLIKOWSKI. 1971,p. 413-421): CANTINEAU,1938. p. 158.
n" 3 6f
B RIQUEL-Cl-IATONNET,1991. p.84: GAWLIKOWSKI et As'AD. 1 997. n" 9: tous les autres textes (sauf
peut-être CJS 4217 = 1111' IV. 21 : 11T1t'/ cf/) concernent Septirnius Worocl: SEYRIG. 1963. p.166:
C!S 3937-3943: 4105ter: 4217: /111• III. 3 (voir WILL. 1996 et chapitre I): bilingue: Oùopcô811c;
mhw_y (p.30 et 93) '? CJS 4130-4132 (cieux personnes de la même famille)
mhrclcl et mhrdt 7 (p.30 et 93) /111• IX. 28: PNO n" 55A et 59: RTP 36 el 567: STARCK Y. 19-1-9-1950. p. 46. n" 1 RSP n" 185
PAT 1610
mbrbzn (p.30 et 94) CANTINEAU. 1938. n" 35
mytq' (p. 30 et 94)? C!S 4597
ssn x (p.41 et 102)? Le même apparaît clans cinq textes de lNGHOLT. 1935. p. 76-84 + PAT 1019,1021-1023. 1025-1032.
1034,1040,1042. 1051-1055 (3 ou 4 de la même famille)[= SALIBY. 1992. n'" 6. 9-1 l . 13-19. 21.
23. 30. 32,41-45 et SFP n'is 49. 52-54. 56-62. 64,66. 73. 75. 84-88 ]
prd{v (p.47 et 109) C!S 4458bis BS n ° 1 0
prmwn (p.47 et 109) l)? CANTINEAU. 1938,n" 28c: nom d'ancêtre d'une famille (bilingue: C!)1p�twv. CJS 3914: CANTINEAU,
1930b. n 10 et lNGI-IOLT. 1936,p. 109. n" ] ] ) Ill
prn(k) (p. 47 et 109) CJS 3996
tyrclt (p.56 et 117) C!S 4598-4599: P S n" 371 STARCKY et DELAVAULT. 1974. p. 70. n" 3
1 - Le point de départ du tableau est la liste de J.K.STARK. 1971. p.132.Le roi cl"Élymaïde. clone pas un Palmyrénien. La restitution du texte grec
nom est ici suivi de la référence aux pages de J. K.Stark. où !"on trouvera ( · Opcô811v ). qui est celle cles auteurs grecs anciens,ne s'applique peut-être
les autres références et l'étymologie la plus probable.On a donné tous les pas clans le cas de Palmyre. puisque !"équivalence 11·n1·d/Oùopw811ç y est
noms dont l'origine est probablement iranienne. même quand le cloute paraît attestée par de nombreux exemples.Ce texte est cité cieux fois clans la liste
s'imposer. de J.K. STARK. 1971. p.16. une fois sous fm, X. 114. r autre fois avec la
2 - D'après J. K. STARK. 1971. Pour simplifier. on a tenté cle donner le référence ü « La Susiane». titre d'un article de J.Cantineau dans les
nombre total de personnes différentes qui ont porté ce nom. On a ajouté !Vlé!ungl's sffims r�fferts à M. R. D11ssu11cl. I (BAH XXX. Paris. 1939.
ensuite les références parues après le livre de .J. K. Stark. p.277-279) où il donnait un fragment de la partie palmyrénienne du même
3 Écarté par J. K. ST.\IŒ. 197 l. p. 74 parce que« Persiu11 Numl's ui Pu/11nn1 texte.
url' rure », voir pourtant DFD. p.245 qui aL'cepte l'interprétation iranienne 7 - Le nom est aussi attesté en grec (/m· X. 38): il ne s'agit pas c1·u11
avec de bons arguments.J. K.Stark écarte avec la même phrase le nom suivant. Palmyrénien, mais du roi de Characène ( MEEpcxôœcou �cxcnÀ.Érnç
bg.sw.On trouve aussi le nom hgd (PATn" 2721) qui est peut-être bien le même. LTCCXCTl VOU Xcxpct.KOÇ ).
4 - Il faut peut-être corriger ainsi le bg m de la transcription de J. Cantineau. 8 - Sur ce nom. voir P.PIERSIMONI. 1994a. p.302.On a aussi la variante ssn
Le seul autre exemple de bg m cité par J. K. STARK. 1971,p.8. est le texte (SFP n" 87 = N.S ALIBY,1992. n" 44).
/111· Vlll,78 où le nom est restitué cl' après le texte grec où l'on a Boypcxv11ç. 9 - L'origine occidentale de ce nom étant au moins possible. on retrouve
5 - L'origine iranienne du nom est établi par A.Caquot,clans RTP. p.169 les mêmes références clans le tableau des noms gréco-latins (voir le tableau
(en particulier à propos de C/S 4455 qui n'est alors pas bg [dn/). Peut-être précédent: CIS 3914 de 175 et H. lNGHOLT. 1936. p. 109. n" 11 de 182).
faut-il ajouter à la liste le 110111 lu bgw.sy (SFP n" 125).P. Piersimoni (1995. Néanmoins. on peut conclure avec J. K.Stark (1971. p.109) et P. Piersimoni
p. 258) 1· accepte comme perse,malgré les cloutes de J. K.S1'.!\RK. 1971,ad (1995. p.258) à 1· origine iranienne du nom.
!oc.(voir note précédente). 10 - Voir aussi le composé btprnmn (H. INGHOLT, 1936. p. 88 ;
6 - Dans le texte bilingue 1111' X. 114 (de 138),le \\'l'll'd qui apparaît est le cf. J. K.STARK,1971. p.81 et DFD,p.35).
Anne...:es 263
Ce tablea u a surtout pour but cl' être un point de et 29 (mêmes textes) où est proposée une explication par le
comparaison en donnant une idée générale de la fréquence latin Pr;stina, malgré la présence de -s (RSP, p. 15). Voir
des noms iraniens, malgré le nombre des cas douteux. Il aussi 'lksndr' (PAT 1654) pour 'AÀÉçcxv8poç.
faut écarter prstn' (J. K. STARK, 1971, p. 109) : cf. RSP n° 24
1 - La partie grecque d"fm, IX, 11 n'a pas de rapport avec le commerce '.?. - = 0. SCHLUMBERGER, 196 J. p. '.256 (BE 1963, '.290).
caravanier. Il s' agit sans cloute d'un autre texte.
264 les notables de Palmyre
0m�tcxpacxç J\wcxpaou rnû McxÀ1xou CIS 3963 = Jnv X. Caravane ( bny ,Çyr() qui est Leur a été agréable Entre 89
mû Acx�n tymn,w br J.(ms br 47 remontée avec lui et 188
mikw '·by
0mpcxpacxç 0mp17 rnù MoK:t�lOu CIS 3948 Caravane ( bny i:yr() montée Synodiarque (et rb ,Çyr() ; a fait 193
tymr,'.,W br tym· br mqymw grb' avec lui de Charax des dépenses pour eux
Oy17Àoç Mct.KKcxtou mû Oy17Àou rnû Inv X. 44 Quatre tribus sur décret du Stratège contre les nomades. 199
Ayqou rnû Irnuipcx ·gylw br mtJY Conseil et du Peuple synodiarque
"giw ;;wyr
Icx88cxtoc: 00'.lpu.[pau. rnù 0mp17 rnûl CJS 3949 Marchands? A aidé des marchands ü 21 l
MoKl�lOU îOÛ ru.[ppu.l Vologésias?
'I. Aùp. ZEPn8u. MoKtpou toû CIS 3933 Marchands ( i\mopm et tgr' bny TEl�tiic:xcip1v : parce qu'il leur a été 247
ZE�n8ou Aa8copou Bm8cx syr() descendus avec lui à agréable
ywiys \vrlys zbdyd· br mqymw br Vologésias
zbyd' ·stwr byd'
'I. Aùp. I:cxÀ.cxpu.ÀÀ.o:80ç McxÀ.17 CIS 3936 Conseil et Peuple /-\rd1cmporos rb .syr(: a 257
ywlys ,vrlys .slmlt br mr "bc!y accompagné ( àvCJ.KopiÇ(I)) une
caravane ( .syr()
'I. A Ùp. [ Nle[ Plowtmoç 00'.l[�llCTCY.]aoru lnv IX. 30 Conseil et Peuple Synocliarque qui a accompagné une ?
t)oû Brnvvrn[u]ç [Ilcx�n caravane (cxvcxKo�tiau.vw. t17v
auvo8icxv)
I:rntt�llüç Oùopco81ic; (Worocl) CJS 3942 Conseil et Peuple A accompagné des caravanes Après
( à.vuxopiau.vw. tèt_ç auvoôio:c:) et 260
reçu des témoignages des
nrchemporoi
3 - = R. MouTERDE et A. PoIDEBARD. 1931, p. l 01-115 (SEC 7. 135).Le texte palmyrénien a été publié par J. T. Milik. DFD, p. 13.
Annexes 265
Creticus Silanus ::
Gouverneur de Syrie (11-17) : établit les SCHLUMBERGER, 1939 a. p. 61
bornes de la Palmyrène ( IGLS 2550, AE 1939, 179)
Minucius T. f. Hor. Rufus :i Légat de la légion X Fretensis : dédie des Inv IX. 2 (AE 1933, :204) Avant 19
statues de Tibère. Drusus et Germanicus
Germanicus Envoyé en Orient de Tibère (17-19 ) Inv IX. 2: ers 3913. 1. 182 Entre 17 et 19
(grec) et 103 (araméen) :
CANTlNEAU, 1931, p. 139, n" 18
Statilius Procurateur( '?) .i C!S 3913, l. 182 (grec) et 104 Avant 19
(araméen) : CANTINEAU, 193 L
p. 139, n° 18 (cf. GAWLIKOWSKL
1998 , p. 146, n. 6 )
10'.lOÇ OùiptOÇ 'A)cKl�LOÇ gys wyrs Affranchi, publicain: fondateur de son I!VIP n" l13: CIS 3913 . 1. 78 57-58
'Jqms C. V irius Alcimus tombeau 5 (araméen)
Ti1oç IW.îlÀlOÇ 'Ep�uiç tyts :,/!lys Affranchi de Statilius: publicain: fondateur IMP n" l13: CIS 3913, l. 104 57/58
hrms T. Statilius Hermes de son tombeau (araméen)
J\OUKlOÇ IrcÉfüoç Xpuaczv8oç Jwqyws Publicain; fondateur de son tombeau CIS 4235 (Inv V III, 57) Septembre 58
:,pclys kryslws Lucius Spedius
Chrysanthus
KtÀlS qlqs Affranchi impérial ( br Jny qysr Kcziaczpoç CIS 3913 . 1. 93 (grec) et 62 Vers 50-60 6
''' Le tableau est à compléter avec ceux des soldats palrnyréniens d'origine (lecture d'après la photo). Le style ressemble bien à celui des bustes
(à Palmyre et ailleurs). Dans certains cas,le cloute est permis quant à l'origine funéraires palrnyréniens. mais ni l'inscription,ni le monument ne sont d'un
locale des personnes en question. De plus sont aussi compris dans la liste type courant sur le site. Les sujets représentés sont bien sür étrangers à
les gouverneurs et fonctionnaires attestés en Palmyrène, en particulier sur l'oasis. D'autre part, il semble curieux que ce relief , daté par
les milliaires, même si leur présence effective sur place n'est pas assurée. M. A. R. Colledge du début ou du milieu du u" siècle, se rapporte à un
personnage qui est affranchi d'un procurateur de l' époque de Germanicus,
et qui a fondé son tombeau au milieu du siècle précédent. Il peut évidemment
1 - C'est- à-dire date du texte de Palmyre qui nomme le personnage en s'agir d'un de ses enfants, mais l'onomastique des cieux personnages
question. Il peut arriver que cette date soit postérieure à son passage réel à prouvent qu'on reste pour le moins clans un milieu pas tout à fait intégré à
Palmyre. la société palrnyrénienne, malgré le style de leur monument funéraire. Je
2 - P1R 2. C 64. Comme pour tous les gouverneurs de Syrie jusqu' �L Septime ne sais d'ailleurs pas si l' origine palmyrénienne de la pièce est assurée.
Sévère, voir maintenant E. DABROWA, 1998 (p. 30-32 pour Q. Caecilius Récemment est parue une étude de M. Gawlikowski (1998, p. 145-151)
Q. f. M. n. Metellus Creticus Silanus). Pour la période postérieure, pendant sur ce personnage et les inscriptions le concernant. Il l'identifie au publicain
laquelle Palmyre appartient à la Syrie-Phénicie. voir B. E. THOMASSON LP L de Palmyre.
1984, col. 318-320 (col. 303-320 pour la liste complète des gouverneurs 6 - Vers fin de l'époque clauclienne, d'après A. PIGANIOL, 1945, p. 17 .
de Syrie). 7 - E. DABROWA, 1998, p. 53-56.
3 - Voir PJR2 , M 625. 8 - Le nom est restitué par H. SEYRIG, 1941a, p. 166-167 à la ligne 74 de
4 - Cf. J.F. MATTHEWS,1984, p. 179, n. 35 qui pense qu'il s'agit peut-être l'araméen. Voir E. DABROWA, 1998, p. 58-60.
autrement du fonctionnaire romain chargé dePalmyre : il envisage les deux 9 - Un autre personnage est nommé à la ligne 65 du palmyrénien, m1yns
mêmes solutions pour Barbarus, à l'époque de Corbulon. (Marinus). Comme aucun gouverneur de ce nom n'est connu, on suppose
5 - Le même personnage apparaît peut- être sur un relief funéraire qu'il s'agit du légat remplaçant un gouverneur absent pour une raison ou
aujourd'hui au British Museum (BM 125036) dont une photo a été publiée une autre (« the acting depuly CJf an absent govemor », J. F. MATTH EWS,
par M. A. R. Colledge(l976a,pl. 76: voir aussi K. PARLASCA, 1988,p. 218). 1984, p. 178, n. 23 avec le détail de la discussion). Voir maintenant
Le texte grec inscrit sous les bustes d'un homme et d'une femme les désigne E. DABROWA, 1998, p. 213-214.
respectivement comme rak (sic) Oùî.pwç 'AÀKÎ.�Loç et Oùî.prn <Doi�17 10 - E. DABROWA, 1998,p. 64-68.
266 Les notables de Palmyre
Iulius Quadratus 12
Gouverneur de Syrie ( 100 ?-104); fait des !OLS 2549 (AE 1939, 178) 102
bornes entre Palmyrène et Émésène (?)
P. Postumius Acilianus 13 Procurator Syriae; fait des bornes entre SCHLUMBERGER, 1939a, p. 53 102
Palmyrène et Émésène (?) (IGLS 2549, AE 1939, 178)
L. Fabius Iustus 1 + Gouverneur de Syrie (108-112 ?); fait des SCHLUMBERGER, l939b, p. 549- 108-109
milliaires en Palmyrène 550, n° 2 (AE 1940, 210)
gys ywlys mksyms r . 'IouÀwç Centurion Inv X. 81 (AE 1947. 175); Inv 115 et 135
Mcxl;t�toç XII, 33
Hadrien Empereur (visite Palmyre et adresse des CJS 3959 ; MOUTERDE et 131 et 145
félicitations à un notable) POIDEBARD, 1931
floPÀtKlOÇ Mo:pKÉÀÀ.Oç pwblwqyws Gouverneur de Syrie de 130-131 à 134-135 BSn° 45 (AE 1958, 506) et 132 et 144-
mrqlws 15 MOUTERDE et POIDEBARD. 1931, 145
p. 101
Bruttius Praesens 16 Consulaire en mission extraordinaire 17 Inv X, 114 (AE 1938. 137) 138
Sex. Iulius Major IR Gouverneur de Syrie cle 136 à 140 Inv X, 114 (AE 1938, 137) 138
Anonyme ... de la légion IV Scythica SEYRIG, 1939, p. 320, n° 24a (AE 140-141
1940, 173)
Antonin le Pieux Empereur (adresse des félicitations à un MOUTERDE et POIDEBARD. 1931 145
notable)
tfys plwys prsqs = ? Titus Flavius Procurateur XX herec!itarium prouinciae BS n° 20 (cf. PJR2 F 344 et 149
Priscus (Gallonius Fronto Q. Syrine Palestinae ; cléclicataire d'une colonne PFLAUM, 1960. I, n° 157bis)
Marcius Turbo, de la tribu Palatine) clans le sanctuaire de Baalshamîn
Pontius Laeli:1nus 19 Gouvcrnem cle Syrie ( i 50-154) ; rétablit les SCHLUMBERGER, 1939a. p. 61 153
bornes de la Palmyrène de Creticus Silanus (IGLS 2550, AE 1939. 179)
[TlpÉplOç KÀO:UÔlOÇ CP1 ...l fb!ys Préfet cle l'aile I Augusta Thracum equitata, InvX, 128 (AE 1947. 171 ; Mi-Il e s.
qlwc!ys py--- tribun cle la légion XV I Flauia Firma et préfet cf. PME C 165)
de l'aile I Ulpia Dromec!ariorurn); citoyen
palmyrénien
r. ouEipwç KÉÀ2p (C. V ibius Celer synèc!re; préfet d'aile à Palmyre (ala I Ulpia lnv IX, 23 (AE 1933, 207) V ers 150
Papirius Ru fus) 20 singularium); citoyen palmyrénien ; honoré
par le Conseil et le Peuple
MixpKOÇ Ai�ll/\.lOÇ Mo:pKtO:VOÇ Bouleute d'Antioche, fonctionnaire clu quart �t lnv X, 29 (AE I 947. 179) 161
'ACTKÀllTClO'.ÔllC. mrc1s 'mlyws mrqynvvs Palmyre
'.sqlpyc!·
11 -On trouvera clans l' article de M. A. SrEIDEL,1998. p. 185, n" 31. une 14 -E. DABROWA, 1998. p. 83-85.
étude de la carrière du personnage. L' auteur pense qu' il est d' origine 15 - Son nom complet est C. Quinctius C. f. Vel. Certus Poblicius Marcellus
syrienne, et même locale. Il place de plus le texte à la fin du li' siècle, mais (voir J.-P. REY-COQUAIS, 1978, p. 64 et E. DABROWA. 1998, p. 92-94).
avant Septime Sévère. alors que H. Seyrig penchait plutôt pour la fin clu 16 - C. Bruttius Praesens L. Fuluius Rusticus (PIR2 , B 161 + B 164).
I"' siècle, date qui s'accorde assez bien avec la biographie supposée clu 17 - Voir J.-P. REY-COQUAIS, 1978, p. 65 et E. DABROWA, 1998. p. 214.
c!éc!icant Saturnin us qui et E!abelus Malichif ( CIS 3962; H. SEYRIG, 1941b, 18 - Voir E. DABROWA, 1998, p. 97-100.
p. 238-240) ; voir chapitre v1. 19 - M. Pontius M. f. Pup. Laelianus Larcius Sabinus. Cf. E. DABROWA,
12 - C. Antius Aulus Julius A. f. Vol. Quac!ratus. Cf. E. DABROWA, 1998. 1998, p. 104-106.
p. 79-81. 20 - H.-G. PFLAUM, 1960, I, n" 1 SS.
13 - PIR2 , P 883.
Annexes 267
21 - Identifié avec L. Vehilius Gratus lulianus. PlR2 I 615; H.-G. PFLAUM, 24 - PlR2 M 137.
1960, I. n" 180 (voir p. 458 : « les commandants des troupes romaines 25 - J.-P. REY-COQUA[S, 1978, p. 66 et B. E. THOl'vlASSON, LP I. n" 98.
cl' occupation étaient d'ordinaire non seulement gratifiés du droit de cité du 26 - B. E. TI-IOMASSON, LP I, n" 99 (et PIR V 254).
municipe qu'ils protégaient, mais y remplissaient le plus souvent des honneurs 27 - PlR 2 A 435, à compléter par RE Suppl. XIV. 13 et surtout,
municipaux». La remarque est valable aussi pour C. Vibius Celer, vers 150). B. E. THül'vlASSON, LP I, n" 100.
22 - J.-P. REY-COQUAIS. 1978. p. 65 (avec référence à PlR2 D 144) et 28 - PlR2 L 146 et B. E. TI-IOMASSON, LP I, n" 101.
E. ÜABROWA, 1998. p. 112-117. 29 - B. E. THOMASSON, LP I, n" 106.
23 - E. ÜABROWA, 1998. p. 122-123. 30 - H.-G. PFLAUM, 1960, II, n" 324a.
268 Les notables de Palmyre
À ces textes, on peut ajouter quelques textes provenant de Palmyrène (pour les milliaires, voir le tableau ùifi·o).
1 - Pour ce texte. comme le précédent. D. Schlumberger. ad /oc.. propose 2 - Les cieux noms sont apparemment d'origine thrace (D. Schlumberger.
de restituer pour le nom de l'unité (C)oh(ors) li E(111esenoru111). od /oc.).
Anne.tes 269
3.
Parmi les étrangers à Palmyre, il faut ajouter Obaidû, tenitoire parthe. Il s' agit en tout cas d'un étranger à Palmyre,
fils de Animû ('bydw br 'nmw br s'dlt), Nabatéen (nb.ty'), même s'il n'appartient sans doute pas à l'armée romaine
ancien cavalier dans la forteresse de Ana (sur !'Euphrate). (voir pourtant CIS 3944, Aurelius Philinos, soldat de la
La dédicace (C/S 3973) date de 132 et on voit mal quel est Légion III Cyrenaïca est cn:pmlffiî17ç en grec, mais pl/1' en
le statut exact de ce cavalier (prs) d'une garnison située en araméen).
1 - La partie palmyrénienne de ce texte porte les mots : dky1yn zbd' wzbwd 2 - On peut supposer que cette Shegel, qui porte un nom relativement courant
ws'dlt w[..b]nypybd/2·(« Qu'on se souvienne de Zabdâ, Zabûd et Shadallat, à Palmyre, faisait partie d'une famille qui entretenait des relations avec
fils de pybd/2- » ). Il semble, d'après Z. T.Fiema, qu'il ne s'agisse pas des ! 'Égypte, où sont attestés des commerçants et des militaires palmyréniens
gens mentionnés dans le grec et le latin. On notera néanmoins le possible (voir tableau coITespondant).
rapprochement phonétique entre Zabûd et le mystérieux Zcx�ou du grec.
270 Les notables de Palmyre
* Sont exclus de cette liste. les personnages des textes palmyréniens de ne sont pas nécessairement originaires de la ville: ainsi ceux mentionnés
Doura-Europos, ainsi que ceux de la Palmyrène (en particulier du nord en IDR III!!. 153 ou 142 + 149 et 136.
ouest). De n1ên1e. les textes du \\'adi I-Iauran (P. SAFAR, I 9G4, p. 9-27 el l - Le texte R1WD n" 28 concerne un autre ancien de cette unité. mais son
BES 1967, 78) et ceux des environs (dépression de Qa'ara: J. TErxmoR, nom est malheureusement illisible.
1963, p. 33-34; entre!'Euphrate et Je Wadi Hauran: J. STARCKY, l963, p. 47) 2 - Ce texte est le même que celui donné par G. DArcovrcr(u). Dacia 1.
appartiennent visiblement à une zone sous contrôle palmyrénien. Il n'en 1924. p. 251 (cité clans J. STARCKY et M. GAWLIKOWSKI, 1985, p. 47) avec
est pas de même pour des textes trouvés plus au sud et à l'ouest, en Jordanie une lecture totalement différente: [A]elius d[omo Pal}myr[a] ori[11nd11s]
et en Arabie séoudite actuelle (voir annexe XIII. 4 « Divers » ). pme.fïectus) coh(ortis) A11g(11s1ae) l(111raeoru111). Il est cité d'après cette
** Voir L. BIANCHI, 1987, p. 87-95. qui donne les références antérieures lecture (corrigée par H. Devijver, dans PME I, p. 59, n" 30) clans AE l 979.
ainsi qu'un certain nombre de textes. Les soldats des unités palmyréniennes 486. Une photo est publiée clans /DR IlI/2, paru en 1980.
Annexes '.271
2. NUMIDIE*
* Voir principalement Y. LE Bor-1Ec, 1989 (p. 120-140 sur le 1111111erus 2 - Voir les remarques de E. WILL, 1992. p. 50.
Pa!myrenorum sagittariorw11. avec discussion cle l'onomastique) et 3 - D'après Y. Le Bohec ( 1989). il s'agit peut-être du centurion de la cellturia
E. EQUINI-SCHNEIDER, 1988, p. 383-395. Ma.rimi (Cil VIII. 2505, supra).
l - Voir Y. LE Bor-IEc. 1989.
272 Les notables de Palmyre
3. ROME*
4. DIVERS*
!0817p 11 KÈ 'A�tcpo:( 00'. Beth Shearirn PAT0138 (C!J IL 1009 avec le grec en plus=
ScI-!WABE et LlFTSHITZ. 1974. p. 64, n ° 88)
tjm Beth Shearirn PAT 0140-0141 (CIJ II. 1114-1115) 1
Arnv1ioc; floÀ�tup11voç (sic!) Beth Shearirn SCI-IWABE et LIFTSHITZ, 1974. p. 72. 11° 92 (CIJ 11.
1po:rrEÇ( mu 11pÊiç 1010: cf BE 1939, 499)
n::p�tavoç ·10aKiou fla11.�rnp17voç Beth Shearim SCHWABE et LIFTSHITZ. 1974. p. 80. n° 100 (C!J
1011 : cf. BE 1939. 499) 2
brll bt bkrw bt bbl bl 7_1th Pannonie/Mésie C!S 3907
d"rt ·u inslm br ·wb 'byh Inférieure. Constantia
dbyrn (=Tomi)
M. Acilius Alexander Praefectus coh( ortis) I Mésie Inférieure. CIL XVI. 78 (PME A7)
Palrnyr(a) ClaudiaeSugambr( arum) Gurgiu (en 134)
zbdb,vl wïnwr wmlkw w"Inrw Cinq frères. Palmyréniens de Nazala(Qaryatein) ers 3911 3
wydfbl bny br.sms br zbdbwl Nazala (td1111y· [dy] bnzly)
lym · br biyky Harbata ( 30 km au STARCKY, 1955. p. 41, n ° 10 (PAT 0154)
nord de Baalbek)
!_1/pw br qdm -+ Originaire de Palmyre (11111 Hawran DUSSAUD. 1935. p. 324 (mais voir STARCKY, 1978,
tdmr) selon Dussaud n ° 41)
Anonyme 'A8ptavoç flet.À�tup17voç Ahiré (Syrie du Sud) WADDINGTON 2440
bg.sw br qmf' br s·cJ ( et son El-Qarqar, Wadi es- MILIK et STARCKY, 1970. p. 161 (PAT 0016)
fils) psl Sirhan (Arabie séoud.)
lymr:;;w br "gylw et mlkw mr Wacli Miqat (Jordanie) PAT 2811 (CAQUOT, Syria. XLVII. 1970, p. 413 5)
'byhn br /11y cly Hatra PAT 1604 (AL-SALIHI. 1987. p. 57)
Barates Palmyrenus: brï' Angleterre. South CIS 3901 (COLLINGWOOD - WRIGHT. Roman
Shields Inscriptions of Britoin, I. 1065)
l'Iou(Àtov)] Aùp(1iÀ.tovJ z... Marchand accompagnant une Denclerah C!S 3910 (BERNAND. 1984. n° 39: cf. SEG 34. 1620)
Met.KKm[ou ; [......]mqy caravane (= Tentyris)
nb[t.. ....... ]
M(àp1rnç) A ÙplÎÀtoç Où11s1Ucip1oç 'A8p1avéôv Égypte, Coptos BERNAND. 1984 n° 85 (OG/S 639: !GRR I, 1169:
81711.aKo:poç lEpO'.�Àou TIO'.À�t[u]p17véôv 'Av1:wv10:vci'1v Somme!buch V. 3 (1950) n ° 8810: cf. SEG 34. 1585)
îOSOîù-)\1
zo:p8o:ÀO'. I:aÀ.�LO'.VOU KCl.l A \/Elva Appartient aux 'A8pwvéôv Égypte, Coptos BINGEN, 1984. p. 355 (cf. AE 1912, 171: cf.
riaÀ�tup11véôv V0'.1JK11.1ipwv BERNAND, 1984. n° 103 d'où SEG 34. 1593: AE
'Epu0pmKcôv 1984, 925 : BERNAND. 1985, p. 81-84)
BëptXEl biyky 1qvEi11w glyp· ( sculpteur) Égypte. Berenike D IRYEN, 1999, p. 182, 11. 90
Papp17À Atpavou : [r]bï br Dédicace à Bel, Iarhibôl, Grèce. Cos LE V I DELLA V IDA. 1939. p. 883-886 r, (BE 1940. 90:
/lym Aglibôl PAT 1616: DU MESNIL DU BUISSON, 1942-1943,
p. 133-134)
* Sur la présence palrnyrénienne en J. Sc:11WARTZ, 1953. p. 63-81, (Z17vo�ia = SEG 16, 829). Beaucoup d'entre eux sont probablement
H. SEYRIG. 1972. p. 120-125 et 1
. . BINGEN, 1984, p. 355-358 (avec références d'origine palmyrénienne. mais c'est sans cloute aussi vrai pour quelques
et bibliographie). uns parmi les très nombreux Isaac ou Sara connus clans cette nécropole
1 - L'expression utilisée clans le premier de ces textes ( whnps whnp,s cl (voir l'index onomastique cle la publication de M. Sc:1-1wABE et B. LIFTSHITZ,
l '{Jm) montre qu'il est peu vraisemblable qu'il s'agisse d'un texte 1974. p. 227-228 pour les textes grecs).
palrnyrénien (présence de l'article lz- et d au lieu de dy plus normal en 3 - C'est le seul texte trouvé à Qaryatein dont l'origine locale soit assurée.
palmyrénien). Comme pour les quatre personnages qui précèdent, c'est la Voir J. STARC:KY et B. DELAVAULT. 1974. p. 69-70, 11. 4.
graphie des textes qui permettrait d'en faire des Palmyréniens, or le fac 4 - Inscription nabatéenne. La lecture de .1. Starcky supprime toute référence
similé montre que l'écriture est fort différente cle celle de Palmyre à Palmyre (1978, n" 41).
(B. MAZAR. [ 973. p. 207, fig. 19 : ici fig. 78). 5 - Dans le compte rendu de W. G. OxTOBY, S0111e Inscriptions of" the Sqfàitic
2 - On peut ajouter à cette liste de Palmyréniens de Beth Shearim les Bedouin (American Oriental Series, vol. 50), New Haven, 1968 (on trouvera à
personnages suivants dont l'onomastique révèle peut-être aussi une origine la planche XIX de cet ouvrage un fac-similé clu texte. mais pas de transcription).
palmyrénienne: M. Sc:HWABE et B. L1FTSHITZ, 1974. p. 15. n'" 18-19 6 - Le texte est repris clans M. SEGRE, Iscri-::)oni di Cos I, Testo, p. 243,
(E10Ô:Kl0ç MoKl�LOU=CU IL 995-996): p. 18. n" 24 ([Zh7vo�ia 8uyô:117P Ev 260 et IL Tcl\•o!e, pl. 131 (Monografie della Scuola archeologica di
[02]011.�LCY.ç= CU IL 1035): p. 43, n" 67 (MüKl�Loç MoK[l�LOU]= CU IL Atene VI. Rome. 1993). mais la traduction du palmyrénien s'appuie sur
1084): p. 51. n" 80 (ïCTàK Oya BEVlO'.�ll.V=CIJ IL 1099): p. 157. n" 183 une transcription fautive.
274 Les notables de Palmyre
Aùp11Àlioç c])1ÀÉivo]ç Aùp11Àiou 'lürn8côpou mû PŒpmou: Soldat de la légion III Cyrénaïque CJS 3944 = Inv IIL 16
'wrlys plynws br m1y plyn ry (octobre 25 l)
LEIT'Tl�llOÇ 'AÀÉçcxv8poç 'Hp(t)ÔO'\.J àrràmpmiwv (264 ou 267) CIS 3940 = Jnv III, 9 ( cf. PME
S29)
On ne sait où placer Septimius Zabdas et Septimius à Antioche avant la défaite contre Aurélien (ZosIME, I, 44, 1
Zabbaios, généraux d'Odainat et de Zénobie (C/S 3946 et et 51, l : Zci08cxç 6 Z11vo01.cxç cnpm1iyoç) et donc sans
3947). Zabdas est appelé 6 �tÉyaç cnpœn1Àcxi:11ç et rb J1yl' cloute le Saba de !'Histoire Auguste ( Vita Clau., XI, 1),
rb' ( «le grand chef cl' armée ») et Zabbai os, 6 Èv0ci8E présent en Égypte. Le second est sans cloute le Zaba, allié
cr1:pm11Àcx1:11ç et rb byl' dy tdmwr («chef de l'armée de de Zénobie (Zenobimn et Zobom eius socium) et vaincu près
Palmyre»), mais ils ont peut-être été aussi au service de d'Émèse par Aurélien (Histoire Auguste, Vitez Aurel., XXV,
l'armée romaine, avant la sécession palmyrénienne. Ils sont 2-3). Néanmoins la proximité phonétique entre les noms
mentionnés aussi par les sources classiques : le premier est Zaba et Saba est remarquable et il est possible qu'ils
sûrement le Zabclas envoyé en Égypte par Zénobie et présent désignent le même personnage.
l - Voir les 11'" l l - l 2 de A. Mus1L et E. KALINKA, 1900 (= OG!S 650-65 l) à restituer de la même manière que ce texte grec selon Ch. CLERMONT-G.!\NNEAU,
1920, p. 414 : cL aussi WADD!NGTON 2629.
(Funéraire : relief funéraire ; Autel : dédicace à une divinité sur un autel ; Fondation : inscription de fondation d'une tombe ;
Concession : inscription de concession d'une tombe).
* Pour les affranchis attestés clans le Tarif ( C/S 3913), voir la liste des 1 - Voir aussi RSP n" 104 où l'on trouve la formule Ibny J11yh[wnJ ( « pour
fonctionnaires romains. leurs affranchis »). sans que le nom de ceux-ci ne soit connu.
Annexes 277
XVII. ARBRES
FAMILLE DE BôNNÊ ; FAMILLE DE NASHÛM: FAMILLE DE SHORAÎKÔ ET ALAÎNÈ: BENÈ AABEÎ: B ENÉ B AÂ
( FA.MILLE DE FAMILLE D'ELAHBEL: FAMILLE DE Iuuus AuREuus MALÈ; FAMILLE DE ATETAN ET CoRBULON.
Taîrnî
Shamshigeram
Atenatan 1
Nashûm
1
Bônnê
1 Malikû ( l)
,�
Rabbel
1
1
Synèdre (2) Zabdâ Nashûm (3) Shamshigeram
<- (2)
Bônnê (1) ""' Baaltegâ
1 1
1
I. Bassus Nashûm (4) Tammâ (5)
Haîran (3)
1
Malikû
1
Bônnê (4) Shabâ
1 1 Malikû Malôkâ
1 1
Bônnê (5) Haîran
1 Zenobios-Zabdilah (6) I. Aur. Sept. Malikû (7)
Ahophalî (6)
Seferâ Shimôn
1 1
Wahballât
Alaînê
1 1
Haîran Alexanclre-Iadê
1
Alaînê (1) Shoraîkô (2) Martî (3)
1 1
Haîran Hérôclès ( 4) Iadê (5) (1) CIS 3951 et M. GAWLIKOWSKI. 1970a. p.74. n" 6.
1
Alexandre
(2) CIS 3950. 3952-3954.
(3) CIS 3954.
1
I. Aur. Sept. Iadê ( 6)
(4) CIS 3953: fm, X, 27.
(5) CIS 3950.
(6) CIS 3940.
278 Les notables de Palmyre
BENÉ AABEÎ
Haîran. en 33.
Belshûrî Baâ (2) lm· IV. 26a, tour n" 21 en 8-9 de notre
1
ère.
(3) lm• IV. 26b. tour n" 21 en 24-25.
Hagegû Haîran bar Baâ ( 1) (4) M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 82, tour
n" 67.
Moqîmû (2) Belshûrî (3) Belshûrî (4) (5) CIS 4126 (fnl' VIII. 161a) et
1 1
1
1 M. GAWLIKOWSKI, 1970a, p. 82, tour n" 67.
1 Alîîshâ 1 (6) CIS 4124 (hn 1 l'v', ]), touï n1) 68. fondée
1 en 83 par les quatre frères Shabî,
Haîran(5) Shabî (6) Nebûzabad Tài aî A ài (7) Nebülah Nebûzabad,Taîmaî et Nebûlah. Voir aussi
, r le texte du sanctuaire de N abû. lu
j
1 1 1 1
Nebülâ (8) Fils Fille Belshûrî Bônnê Belshûrî
1 Alaîshâ Belshûrî (7)
rapidement clans DFD. p. 86 avec
seulement trois frères. auxquels il faut
ajouterTaîmaî (cf. A. BouNNI, 1986, n" l ).
HaJan Sh!bî Shabî sLbî (9)A!Lhâ Baaltegâ (10) (7) M. GAWLIKOWSKI 197], p. 422.
(8) CIS 4128? J. T. Milik, DFD, p. 88 en
1
M. Gawlikowski hésite pour l'origine du relief inscrit des quatre frères Nebûlah(lecture nbwlh d'après A. BouNNI,
CIS 4126-4127 (lm, Vlll, 161) entre les tours n'" 67 et 68 1986, n" 1), car l' alernance nbwlh/nbwl' n'est pas très
(M. GAWLIKOWSKI, 197Oa, p. 83 et note 56). gênante, et on peut supposer que l'on a sauté une génération
Il faut ajouter à cette généalogie le prêtre Belshûrî, fils entre Haîran et Nebûlah (celle de Belshûrî, père des quatre
de Haîran, fils de Nebûlà, fils de Hairan, fils de Belshûri, fondateurs de la tombe). La première solution semble
mort en 139 (J. TE1xmoR, 1997, p. 66: bl.s:wq br byrn br pourtant plus satisfaisante.
nbwl' br byrn br bl.s:w1y). Il descend sans cloute du Haîran, J. T. Milik (DFD, p. 88) ajoute à l'arbre généalogique
mort avant la fondation de la tour n" 68 en 83, par ses quatre de la famille Julius Aurelius Nebûmaî (lnv IX, 30, [ywlys]
frères plus jeunes. Cela exp liquerait le déca lage 'wrlys [nbwmy br tymsm].s bwn' [sby} 'IoÛÀ.1oç Aùp11À1oç
chronologique avec Alaîshâ et Baaltegâ, morts enfants en [N]E[�]ouw:noç 0m[p10cx.lcrn[u T]où Bcovvrn[u]ç [L]cx.�a) qu'il
114, alors que le prêtre Belshûrî semble assez àgé. pense être un descendant du survivant des trois frères
Alternativement, on peut penser qu'il descend du dernier nommés Shabî.
FAMILLE o'ELAHBEL
Manü
Pulmwe II. n ° 1
Manaî Haîran
Il, n ° 1
Pu/111yre
1 es
Attaî "" Mê-ilikü M. Ulpius Elahbel "" Amathê Arnatê "" Shokayaî c1s 4134. Manaî "" Beltîhan Aqmat
1
(Il
CIS41-16 C/S3921 el4134 C/S-113-lctDFDp.1631 CIS-1151 (mortle30-I0-!21J C/S4152cl4!58 CIS4150 C. lui. Haîran Elahbel Saturninus Haîran
C!S 4145
l RTP 376 el825 lm· X. 129 CIS 3962 Jm·Ylll. 106
C/S 4134 et 4158 cl DFD p. 10
1 1 1
Shegel Wahballât "" Shegel Hadîrat Manaî Wahballât Belaqab "" Shegel Wahballât Elahbel Amatê Wahballât Etpenî Haclîrat Apolloc\ôros Bagdan Malikü
C/S-1156 C/S-1142 CJS-1155 CIS 415-1 C/S 4138 C/S-11-11 CIS 41-13 C/S-1148 CIS 4136 C/S-1137 CJS-1153 C!S 41-14 CJS 4135 CIS-1147 CIS 4402 /111·Ylll. 129
cl DFD p. 163 1
Elahbel Malikü Manaî le jeune
C/S-1140 C!S 4139 el DFD p. 46
1
Aqarnat
lNGHOLT, 1936. p. 98
t0
-.....J
\.0
280 Les notables de Palmyre
Sasan
1
?
1
Haîran
1
(Iulius Aurelius) Malê (])
1
(Iulius) Aurelius Haîran
1
( l l H. lNGIIOLT. 1935. p. 76-78. n"' II-IV.
Julius Aurelius Malê (2) (2) H. lNCiHOLT. 1935. p. 82-85. n"· V-VII.
r possibilité : Atetan (1) fils de Corbulon ( I) meurt 2' possibilité: Corbulon ( 1) et (2) ne sont qu'un seul et
vers I50 à 25 ans (RSP 11 ° 55). Son fils Corbulon (2), né vers même personnage ; le premier fils Atetan ( l ) du nom de son
150 est père de Atetan (2) (RSP n° 58) vers 175. Celui-ci a grand-père était né vers 130. Il meurt vers 150, son frère né
30-3 5 ans vers 200-210 et peut donc être représenté barbu après cette date (Atetan [2]) reprend le nom de son aîné
et adulte à cette date sur le buste retrouvé dans la tombe disparu. Il est représenté déjà assez âgé au début du troisième
(vûir SFP, fig. 112). Celle lhéorie correspond au schéma siècie, en même temps que son frère Haîran et que ses deux
suivant: sœurs Abinâ et Martâ (c'est la solution proposée clans l'arbre
généalogique de SFP, p. 123 ).
Corbulon ( 1)
1
Atetan
Atetan (1) 1
Corbulon
1
Corbulon (2) l l 1 1 1
1
Atetan (1) Atetan (2) Abinâ Haîran Martâ
Atetan (2)
La différence d'âge entre les deux Atetan peut faire pencher vers la l'" solution, mais la ressemblance d'âge et de style
des portraits de Haîran et de Atetan (2) pousse plutôt vers la seconde. En tout état de cause, le problème est sans doute
insoluble mais n'est qu'un exemple de plus de l'incertitude des généalogies palmyréniennes la plupart du temps. Le fait
qu'on ne connaisse pas l'âge moyen au mariage, ainsi que la possibilité de remariages ajoutent encore à l'obscurité de la
question.
1. DES DANS CETTE ÉTUDE
On a essayé d'uniformiser les transcriptions, même s'il est difficile d'y arriver pour des textes parfois incohérents entre
eux : le squelette consonantique est celui de l'araméen, avec l'aide de la vocalisation fournie par les textes grecs et la
signalisation systématique des matres lectionis. En cas de noms doubles (par exemple MalêAgrippa ou Zabdilah Zénobios),
il faut chercher le personnage sous son nom sémitique.
Seules quelques exceptions ont été faites à ces règles, en particulier pour les noms passés dans l'usage courant (la reine
Zénobie) ou pour le grand caravanier Soados (Shoadû s'dw en araméen) dans le but de le distinguer des autres Shoadû.
Pour faciliter les recherches qui peuvent concerner aussi bien des noms sémitiques qu'indo-européens, les noms sont
dans l'ordre de l'alphabet latin.
Voir l'annexe XVII pour quelques arbres généalogiques.
Aaîlamî AmÀa.�tEK Atpa.vou MoKwou wu Atpa.vou wu Ma.00a. Abisaî(IuliusAurelius) ywlys 'wrlys 'bsy bJ)myn' br bnyn' br 'g'
"ylmy br J1yrn br mqymw br J1yrn mt' (CIS 4168; C/S 3930); yrq(lNGHOLT, 1935, p. 78, n" IV); prise d'une concession clans
(fils de Haîran Atpa.v17ç J1yrn [CIS 3930]; ancêtre de Zebîdâ le tombeau de IuliusAurelius Malê(223) ....................... p. 202
zbyd' br mqymw [CIS 4243]; frère de Zénobios Zebîdâ Z17vô�1oç
Abnergal 'bnrgl (STARCKY, 1949-1950, n" 1) [frère de mhrdt
zbyd' [CIS 4168]); famille deAaîlamî et Zebîdâ; fondateur du
Méherdate] affranchi de mqy br ytm' ; stèle funéraire érigée par
tombeau de famille; honoré avec son père par le Conseil et le
son frère(160) ................................................. p. 187,189,276
Peuple(139 et 149) .............................................. p. 20,38,214
Abnergal 'bnrgl br J11y tym' br '1111(CIS 4000); affranchi; fait un
Abbâywlys 'wrlys 'b' br ywlys 'wrlys mqy br y11Jy(INGHOLT, 1935,
autel au dieu anonyme ............................................. p. 193, 276
p. 77,n" III) [frère de Haîran ywlys 'wrlys l)yrn br ywlys 'wrlys
mqy br y1J]y(n" III); parent de Malê ywlys 'wrlys ml' br l)yrn Abnergal 'bnrgl br 'my(SFP n" 140) [fils deAmî 'my brt )11y zbd'
br ssn(n" III) ?]; prise de concession dans le tombeau de Iulius (SFP n" 141)]; relief funéraire clans l'hypogée de Barîkaî ........
Aurelius Malê(215) ......................................................... p. 202 ......................................................................................... p. 195
Abdsîarâ 'bd.5yr' br J11y 't'qb br 1pbwl (CIS 4172); affranchi; Agrippa (Iulius Aurelius) ywlys 'wrlys 'g1p' br 'gtpws br Jny
prend une concession dans le tombeau des Trois frères(] 60) ... hlydwrs yrbbwl'(= ywlys 'wrlys 'g1p' br 'gtps br J11y hlydwrs
......................................................................... p. 187,192,276 y1f]bwl' br byrn bwn' ?) [INGHOLT, 1935, p. 99, VIII et 1962,
p. 106]; prend une concession du tombeau de famille(tombeau
Abelaalî 'bl'ly mqymw tybwl (RTP n"' 638 et 93 ?) [neveu de
de Malikû)(213 et 214) ................................................... p. 187
Lishamsh Jsm.s br tybwl br skybl(lnv IX,1),frère de Hannâ Um'
brt mqymw br {tyb]wl, CIS 4493) et de x et x bny mqymw br Ahophalî Aocpa.Àstç Atpa.vou wù La.�a. wu Atpa.vou 1ou Bmvvrnuç
tybwl (lnv XI, 85)] ; clan Shokaîbel; symposiarque (DFD, 'bply br byrn sb' br bym bwn' s't (CIS 3927) [descendant de
p. 222) [après 31] ............................................... p. 47,182,240 Haîran Bônnê]; famille de Bônnê; honoré par le Conseil; dédie
des objets àAtargatis,Malakbel et Gad Taîmaî(140) ...............
Abgal 'bgl br s'rw(PNO n'\S 2ter et 3); possède du pouvoir sur une
............................................................................... p. 44,46-47
localité de Palmyrène (Khirbet Semrine ?); a fait un sanctuaire
àAbgal(199) ........................................................... p. 189, 191 Aîtîbel 'ytybl br tym' br 'ytybl br 'gylw(Jnv VIII,4) [même famille
que[.. br by1]11 br 'gylw 'ytybl (BS 11° 23) et Malê ml' br 'g' br
Abgar A�yapoç TTmpÔKÀou 1ou Ka.\ Amoupya. wu J\s1csrnou
[ml]' br 'gylw '[ytyb]I(CIS 4197)]; stèle funéraire .................
'bgr br ptrqls dy mtqrh 'stwrg' brlqysw(CANTINEAU,1938,p. 76
......................................................................................... p. 220
n" 29); Bené Mîtâ; honoré par le Conseil(84) ................. p. 36
Alaînê AÀ.mv17ç Atpa.vou wu A1cmv17 LE<p<pspa. 'lyn' br J1yrn br
Abgar (Marcus Ulpius) MâpKoç OÜÀmok A�ya.]poç 'bgr br
'lyn' $pr' (C/S 3951; RSP 11° 167) [frère de Shoraikô fopmxoç
tymrfr;wJ(lnv X,99); centurion d'archers palrnyréniens ; honoré
Atpa.vou]; Bené Zabclibôl(?); famille deAlaînê; fondateur de
par ses fils( l41) .............................................................. p. 114
la tombe familiale; honoré par Bené Zabclibôl pour avoir offert
Abgar (Marcus Ulpius) MâpKoç OÜÀmoç A�ya.poç Atpa.vou mrqs au temple du Soleil des portes ou des corbeilles (138 et 179) ...
'Ipys 'bgr(lnv X,81) [fils de Haîran Atpa.v17ç A�ya.pou(lnv X, ................................................ p. 50,73-76,184,213,231-232
73); oncle de Abgar A�ya.poç (lnv X, 107); frère de Iarhaî
MapKoç OÜÀmoç Ia.pmoç]; (Famille de) Marcus Ulpius Iarhaî; Alaîshâ et Belshûrî 'lys' wblsw1y (GAWLIKOWSKI, 1971, p. 422)
caravanier; honore un centurion(135) ...................................... [fils de Taîmaî tymy br bLsw1y (CIS 4124)]; Bené Baâ; relief
................................................. p. 101-102,114,124,142,205 funéraire ........................................................................... p. 210
(Marcus Ulpius) MapKoç OÜÀ.moç A�ya.poç Ia.pmou mrqs Alaîshâ AÀmcra Aysyou 1ou Awa.�Lcrou wu OuÇa.pÇtpa.0ou 'lys'
'Ipys 'bgr br yr�1y(Inv X,107) [fils de Iarhaî MéipKoç OÜ1cmoç brJ1ggw Isms 'zrzyrt(brtym' 'zrzyrten CIS 4213) [lnv X,24 et
Iapmoç mrqs 'Ipys yrby; neveu de Abgar MâpKoç OÜÀmoç CIS 4213] (père de Haclclûclan bdwdn et frère de Haclclûclan
A�yapoç]; famille de Marcus Ulpius Tarhaî; synodiarque(159) bdwdn) ; honore son frère; fondateur du tombeau de famille
......................................................... p. 101,111,114,184,274 (164 et 153) ...................................................................... p. 181
284 les notables de Palmyre
Alexandros ... .. dy mtqrh 'Iksndnvs (CANTINEAU, 1931, p. 139, Anonyme [. .. br by1]11 br 'gylw 'ytybl (BS n'" 23 et 34) [même
n" 18); envoyé comme ambassadeur en Mésène et à Émèse par famille que Malê ml' br ·g' br [ml}' br 'gylw '[ytybjl ( CIS
Germanicus; Palmyrénien; honoré (l'' moitié I'' siècle) .......... 4197)]; clan des Bené Ieclibel,Bené Mazîn : dédie colonnes et
......................................................................................... p. 105 portiques dans le sanctuaire de Baalsharnîn; choisi comme
archonte? (62) ......................................................... p. 194,220
Alexander (M. Acilius) [CIL XVI,clip!. 78]: soldat en Dacie .....
................................................................................. p. 119-120 Anonyme .. )1yrn br mlkw (CIS 4197): Bené Mazîn; fondation
Alexandros 'AÀ.Éi;avopoç 'AÀ.2i;civopou wu cI)lÀ.oncimpoç 'lksdrs
du tombeau de famille (81) .............................................. p. 220
br 'Iksdrs br plptr (CJS 3913); secrétaire du Conseil ( 137) ...... Anonyme 't[....J brt 111/kw br whblt br 'rgn ( CIS 3988) [femme de
............................................................................. p. 10,59, 241 Malikû mlkw br 'g' '· by] ; Bené Aabeî ; dédie un autel à
Baalsharnîn (89) ............................................................... p. 171
Alexandros 'Jksdrys br 'JksdJYS br 'plnys nbwzbd br tym·' br 'gdm
'AÀ.Éi;avopoç 'AÀ.2/;cxvopou wu' AnoÀÀ.coviou mû N2�ouÇcx�aoou br 111/kw n.swm Un\' X, 106): famille de Nashüm;
n.-.nu,,n° ...
1oû 0m�tcx17 mû Ayyooopou (lm· IV, 7b) [descendant de Iedîbel synèdre ou proèclre ; honoré par le Conseil (peut-être le même
I2oa�17Jcoç 0mpm7 mû Ayyooo�LOu ydy'bl br tymf1' br ydy'bl que Nashüm de RTP n" 773) [l 19] ......................... p. 37, 47-48
br 'bd'th 'gdm (lm• IV, 7a)] ; famille de Aggodornos: Bené
Anonyn1e (Gaius Iuiius) rarnç 'louÀioç McxÀlXOD u\.oç ... (SEYRIG,
Komarê; vente d'une concession du tombeau de famille ( 191)
1939,p. 321,n" 25; lm• VIII, l 06 pour DFD, p. JO qui restitue
..................................................................................... p. 10, 63
le nom Haîran dans le premier texte) [frère d'Elahbel Saturninus
Amatdatheh 'mtd'th brt bwlbrk 'tt bwlbrk (/171' XII,6) [femme de (Elabelus qui et Saturninus Malichi f.,CJS 3962)?]: dresse une
Bôlbarak b11·!brk] ; relief dans 1'hypogée de Bôlbarak .... p. 176 statue de l'empereur Hadrien (125) ......................... p. 123. 279
Amatê 'mt' brt 'fhbl br whblt (CIS 4145) [fille de Marcus Ulpius Anonyme ... br tymr.:;w br mlkw 0m�tapuou 10-û Mcx.ÀlXOD
Elahbel. un des quatre fondateurs de la tombe ( C/S 4134): femme (]111• X, 57) : Bené Aabeî: synèclre ; honoré par le Conseil
de Shokayaî .skyy br whblt ( CIS 4134)]: famille cr Elahbel: relief ( l '' moitié 11' siècle) .... :............................................... p. 51,241
funéraire ........................................................................... p. 178 f
6 8. îOÛ O. îüÛ 'AÀ2/;6.vopou (lm· X,112): en rapport
nf nu,,-n.n
A1natê 'mt' brt skky br whblt 'tt whblt br m'ny (CIS 4153) [fille avec Phorath : honoré par caravaniers ( 140) ........... p. 105, 263
de Shokayaî,un des quatre fondateurs de la tombe (CIS 4134);
Anonyme [. ..] 111/kw br füns brJmbl "by ( C/S 4458) [peut-être
femme de Wahballat whblt br m'ny br whblt(CIS 4144)]; famille
identique à Shalman Uf/11111 y111bwl') de RTP n"' 31 et 34 ou à
cl'Elahbel ; relief funéraire ............................................... p. 178
Iarhibôlâ de lm• XII, 48 (voir à ces noms)J : Bené Aabeî: buste
Anrntê (Iulia Aurelia) "IouÀ{cx Aup17À(cx Apcx817 BrnÀcx.Çmou funéraire (146-147) ............................................................ p. 51
1où Mo1np ou ywlys 'wrlys 'mt' br bwf/1zy mqymw
Anonyme 'JouÀ.wç Aùp17À.wç .... (/111· XIL 29): agoranome, fait
(INGHOLT, 1935, p. 110 et 112, II-III) [famille de Belhazaî] ;
construire des ateliers (pour la patrie?) [après 212] ..................
prend cieux concessions clans l'hypogée de Nasrallât (263 et 265)
........................................................................... p. 39, 124. 155
................................................................................. p. 174-175
Anonyme, fille de Nebôzâ ...[b1Jt nbwz' br tym' br nbwmr
Amathê 'mt/1· brl bwn' (CIS 4193) [mère de Ogâ 'g'; femme de
(CIS 4206) [de la maison de l'oncle maternel de Julius Aurelius
Ogeîlû 'gylw br 'g' br mqymw br bdwdn] ; clan Shewîrâ (cf.
Bôlmâ: cousine de Iulii Aurelii Ogâ et Shalmê] ; prend en
DFD): fondateur du tombeau de famille: Palmyrénienne (73)
concession une partie de tombeau à Bôlmâ (229) ........... p. 174
........................................................................................... p. 52
Anonyme 'IoûÀwç [Aùp17Àwç ...J 0mpapuou 10-û Avavcxc (As'Ao
Amathê 'mtb' brt bl'qb brn.s'(CIS 4151) [femme de Marcus Ulpius
et TEIXIDOR, 1985a, n" 5); cède une concession dans un tombeau
Elahbel, un des quatre fondateurs de la tombe (CIS 4134)]:
(238-239) ................................................................. p. 124, 270
famille cl' Elahbel: relief funéraire .................................. p. 178
Anonyme (SEYRIC,, 1937, p. 372) [père de Iarhibôlâ et ShalmallâtJ :
Ambaî 'mby brt bgdn br 111/kw (CANTINEALI, 1931, p. 127, n" 8)
dons aux prêtres, aux empereurs ( '?). en son nom et au nom de
[mère de Tammê lm' brt nbwzbd br zbdbwl ifm' wn et femme de
Nebûzabad nbwzbd br zbdbwl .sm' wn] : honore sa fille (après
ses fils ...................................................................... p. 161-162
168) .................................................................................. p. 167 Antonia 'tny' (RSP n" 67); buste clans l'hypogée de Zabdateh et
Moqîn1û ........................................................................... p. 203
Amdabô 'mdbw brt bry lwqys 'wrlys brsmy' (INGHOLT, 1938,
p. 124-125, II); mère et protectrice de son fils Bônnê (mprnsyt' Aphrahat 'prht br 'gylw (INGHOLT, 1962, p. l 04) [fils de Ogeîlü
dy bwn' br rb'I brh); affranchie ; cède une concession clans ywlys 'wrlys 'gylw br 'pJi1t (INGHOLT, 1935. p. 98, n" Vll )]:
l'hypogée d'Abdastôr .............................................. p. 174. 276 tombe de Malikü (214) ................................................ p. 59-60
Amî 'my brtJ11yzbd'(SFP11" 141) fmère cle Abnergal 'bnrg/(SFP Apsaios (Septimius) I:rn1ip1oç A\jlmoç (Inv IIL 18): honoré par
n" l 40)] : nourrice de la famille de Barîkaî (hypogée de Barîkaî), la cité : citoyen et prostatès (272) ............. p. 143-144. 149-150
affranchie ................................................................. p. 195, 276
Aqmat 'qml brt bwrq' br tym§' (SFP n" 76) [femme de Belshürî
Am.tallât 'mtlt brt br" br 'tntn (BS n" 11) [femme de Taîmê tym' bli'1w1y br ssn (SFP n" 73)]: relief clans l'hypogée de Sasan .....
br blbzy br zbdbl dy 11111 pf1d bny m'zyn] : famille de Belhazaî?; ......................................................................................... p. 176
Bené Mîtâ; dédie une colonne clans le sanctuaire de Baalshamîn
Aqmê 'qm' brt syg' brt blsw1y (PAT 1041, mieux que SFP n" 74)
pour le salut de ses fils et de son frère (52) .............. p.170,180
[fille de Belshürî blsw1y d'après SFP, p. 59, ou plutôt petite-
Annâ 'n' (PS n" 210); nourrice: fait un relief funéraire pour fille]; relief dans l'hypogée de Sasan ...................... p. 175-176
Mezabbanâ mzbn' br yrf1bwl' 1pbwl bgdn ...................... p. 194
Aqmê (Iulia Aurelia) ywfy' 'wrly' 'qm' brt 1pbwl brt wrdn br 1pbwl
Annia Annia Nice (Heinen, dans P ARL ASCA, 1982, (lNGHOLT,1974,p. 50 = PAT2729); famille de Refabôl, fils de
p. 35-37) : nourrice : reçoit une stèle funéraire de Baebia Ateaqab; associée à Bat-Ateaqab bt't'qb pour la cession d'un
Baebiana .................................................................. p. 194,269 hypogée (243) .................................................................. p. 177
Index des Pa!myréniens 285
Asphis A0�17 'spys (BouNNI. 1986, n'" 31 et 48 ?) ; affranchi de Baaltegâ b'ltg' brt mqymw (TEIXIDOR, 1966, p. 178-179); relief
Honaînû (Ovmvoç A88ou8cxvou wu M[cxÀlXOD '?]), évergète de funéraire; prêtresse d'après SFP, p. 27-28 ...................... p. 169
Nabû ......................................................... p. 188, 192-l 93, 276
Baebia Baebia Baebiana (Heinen, clans PARLASCA, 1982, p. 35-37) :
Ateaqab 'loui\.ioç A ùp11i\.rnç A817cx1mpoç Oy17i\.ou ZcxP8lPm[i\.ou ... J fait une stèle funéraire pour la nourrice Annia Nice p. I 94. 269
îOD Kat Kmpcx 't'qb br ·gylw br zbdbwl br mqymw dmqr' qr'
(GAWLIKOWSKI, 1985, n" 13); honore Oclainat (252) .................. Bagdan Apollodôros 'AnoUô8wpoç bgdn (C!S 4402) [fils
......................................................................... p. 124, 146, 192 d'Elahbel 'Jf1bl br mlkw(C!S 3962)]; famille cl'Elahbel (malgré
C!S. ad foc.) [ l'" moitié du 11" siècle] .................. p. 83, 133, 225
Ath.aia A00mcx Mcxi\.xou (RONZEVALLE, 1910, p. 179, n" 33) [sœur
de Moqîmû MoKl�toç Mcxi\.xou et Nasrallàt Ncxapcxi\.i\.cx0oç Bageshû bg.sw br bb' br bgi}w br zbdbwl Bcxywoç APPrnuç îOD
Mcxi\.xou]; famille de Malchos (hypogée de Nasrallât) ... p. 226 Bcxyrnou zcxp8lpcoi\.rnu (lm· IX, 34: /111· III, 2 et lm· XII. I 9;
RTP n" 32 cl'après DFD) [fils de Habbê /lb' br bgsw br zbdbwl] ;
Athènodôros (M.Acilius) M. 'AKEii\.wç 'AKai\.iou MoKl�tou u\.oç famille de Bageshû; Bené Hashash,Bené Komarê ; honoré par
LEpyiq. 'A817vô8copoç (lm· X, 108 et 109) ; Palrnyrénien ; honoré les Benê Hashash; symposiarque; construction clans la Grande
par le Conseil et le Peuple et par M. Ulpius Malikû; tribun de la Colonnade ( vers 130) ......................................... p. 60, 156, 241
Cohors la Petraeorum et de la légion Fretensis (après Hadrien)
...........................................................................p. 35, 120, 274 Barnâ br'' br mqynnv br tw1y br br'' (As'AD et TEIXIDOR, 1985b,
p. 286) [grand-père de Baraâ br'' et Bôrefâ bwrp' bny rb'J br
Attâ 't' brt prd.� (BS n" 10) ; dédie deux colonnes clans le sanctuaire br'' (ClS4163); Bené Mathabôl; dédie un autel àArsû,Qismaia
de Baalshamîn (avec deux autres femmes) [23] ........ p. 89, 170 et les bnt 'J (63) .................................................................. p. 70
Attaî 'ty brt sbr' (BS n" 10) [sœur de Shabhaî sbby]; dédie deux Barateh br' th br mrqs (RSP n" 5 l ) ; prend concession clans
colonnes clans le sanctuaire de Baalshamîn (23) ............. p. 170 l'hypogée de Zabdateh et Moqîmû .......................... p. 202-203
Attaî 'ty brt rb'I bgsw (C!S 4455 cl'aprè� lecture RTP p. 169) [fille Bartê brt' brt yd1y br' (SFP n" 41) [femme de Ogâ 'g' br 'rfbn br
de rb'J br byrn bgsw (C!S 3968)]; famille de Bageshû; Bené ' g ']; relief clans l'hypogée cl'Artaban ............................. p. 175
Hashash; Bené Komarê ..................................................... p. 60
Bat-Ateaqab (luliaAurelia) ywly' 'wrly' bt't'qb brt wrdn bnpbwl
Attéemm 't'm brt.. ..... 'wsy (C!S 3969 (lm• XI, 84 ; meilleur texte (INGHOLT,1974, p. 50 = PAT2729); famille de Refabôl,fils de
clans DFD, p. 62)) [femme de Bôlhâ bwlb']; famille de Kohaîlû Ateaqab; associée à Aqmê 'qm' pour la cession d'un hypogée
selon Milik; Bené Komarê; honorée par Aglibôl et Malakbel et (243) ................................................................................. p. l 77
les Bené Komarê (- 17 mais cent ans plus tard pour C/S) .. p. 170
Bat-Eilîad bt 'ylyd (INGHOLT,1974, p. 38 = PAT2727); associée à
Awîdâ Aoua8oç A88ou8cxvou lcxp1Pmi\.rnuç TOD A88ou8cxvou TOD Bat-Mitraî bt mt1y pour la possession d'un hypogée (95) .........
Zu.P81Pmi\.ou A88ou8cxvou <Dlpµmvoç 'wyd' br bdwdn br y1)1bwl' ......................................................................................... p. 175
br bdwdn br zbdbwl br bdwdn pnnwn (CIS 3914) [petit-fils
de Iarhibôlâ y1)1bwl' prmn (RTP n" 35); frère de Thomallachis Bat-Malikû Julia Aurelia (ywly' 'wrfy') btmlkw b(r)t zbdbwl br
0WlCXÀÀCXXlç et de Hadcl û cl a n bdwdn br f1dwdn prmwn et zbdbwl br $'dy (C!S 4175,4176, 4184); cède une concession
cousin de Iarhibôlâ Iu.p1pwi\,17ç Ey17] ; famille de Firmôn ; clans le tombeau des Trois frères; héritière de la maison et de
honoré par le Conseil pour des constructions clans le temple de l'hypogée (241) ................................................................ p. 168
Bel (175) .................................................................. p. 151,168 Bat-Mitrai bt mtJy(INGHOLT,1974,p. 38 = PAT2727); associée à bt
Aûz 'zyz br tybwl dy mtqr' 'bd' (CIS 4288) [parent de Taîbbôl 'ylyd (Bat-Eîlîacl) pour la possession d'un hypogée (95) ... p. 175
tybwl br 'bd' br tybwl (INGHOLT,1935, p. 76); parent de Taîbbôl
Belaqab bl'qb br 'lhbf br whblt br m'ny (lnv IV, 27b = C!S 4157)
tybwl br lsms tybwl rb' (C!S 4288); descendant de Lishamsh
[fils de Marcus Ulpius Elahbel] ; famille cl'Elahbel; épimélète
lsms br lybwl br skybl (lnv IX,1)]; clan Shokaîbel ; (deuxième
de la tombe (103) ............................................................. p. 205
moitié du ri" siècle) ............................................................. p. 41
Azîzû AÇElÇoç IE8ap17Àou îOÛ Bcxpxmou 'zyzw br ydy'bl brky Belhazaî blbzy br 'g' br whby bwlbzy (BS 11" 43) [frère de Malikû
(C/S 3925) [père de Ieclîbel IE8E1p17Àoç AÇ1Çou ydy'bl br 'zyzw mlkw br 'g' (BS n" 7) et de Wahbaî whby br 'g' (BS n" 6) et neveu
br ydy'bl (C!S 3924)]; clan Barîkaî ; Benê Mathabôl;
des frères de lnv VIII, 59 (?); cousin de Zebâ zb' br tymn'
(BS n" 38)]; famille de Belhazaî; Bené Mazîn; dédie un portique
caravanier; Palmyrénien; honoré par son fils (17) ........... p. 52
clans le sanctuaire de Baalshamîn; honoré par les Bené Mazîn
Baâ b" brt 't'qb bt/1wml (RSP n" 42 = SFPn" 213) [tante de Bôlhâ (103) ................................................................................. p. 141
bwlb' br byrn br 't'qb bwml (RSP n" 127)] ; clan Haumal
(cf. DFD, p. 258-259 et 261) ; enterrée clans l'hypogée de Belshûr B17À0oupoç Icxpmou 1:où 013H blswr br y1)1y bJ: ..
Shalmallat .................................................................. p. 69, l 68 (lnv X,78); honore M. Ulpius Iarhaî (157) .................... p. 147
Baalaî b'ly ml'' /hw(SAFAR,1964,p. 13,11° l ); police des nomades Belshûrî blsw1y bJ)1ggw (lnv IV, 26b); Bené Baâ; graffita clans
(?) [98] ............................................................................... p. 69 tombe n" 21 (peut-être le même que le suivant) [24] ....... p. 210
Baalaî b'ly br dywn mlkw (INGHOLT,1935,p. 93-95,n'" III et IV); Belshûrî blsw1y br bggw br blsw1y b'' (C!S 3929 et lnv IV,26b ?)
décurion; achat et vente de concession du tombeau de famille [neveu de f1ym br blsw1y br gdn;w dy mtqrh br b" (CIS 4114)];
(tombeau de Malikû) [186 et 188] ........................... p. 121,274 Bené Baâ; honoré par Shaclrafa et ses prêtres ......... p. 210-211
Baaltegâ BcxcxÀ817ycx b'ltg' brt blswJY (RornNSON, 1950, p. 137) Belshûrî blsw1y br ssn (SFP 11° 73) [mari deAqmat 'qmt brt bwrq'
[mère de Haîran byrn br bwn' Alpcxv11ç Bwvvmou; femme de br lyms' 'tt blsw1y (SFP n° 76)]; relief clans l'hypogée de Sasan
Bônnê Bmvvmoç TOD Pcxpp17Àou bwn' (dy mtqr' rb'I) br rb'l]; ......................................................................................... p. 176
famille de Bônnê; Benê Gaclclibôl (52) ..................... p. 45,180 Beltîhan bltybn brt 'tpny br mlkw 'trsw1y (CIS 4152 et 4158)
Baaltegâ b'ltg' brt bg' br n�r' (SFP n" 22); relief clans la tombe [femme de Manaî, un des quatre fondateurs de la tombe
cl'Artaban; prêtresse d'après SFP, p. 27-28 .................... p. 169 (C!S 4134)]; famille cl'Elahbel; relief funéraire (121) ...p. 178
286 Les notables de Palmyre
Betheî fü:00Etv Mouictavoü Ma1ctxou 1:oü Avavt8ou (As'Ao et 'Arcon68wpoç(C/S 4402); frère de l'anonyme nhoç 'IouÀwç
GAWLIKOWSKI,1986-1987,n" 2) [arrière-petite-fille de AVO'.VlÔÜÇ Ma1ctxou uioç [.....l (SEYRIG, 1939, p. 321, n" 25 d'après DFD,
Ma1cxou 'nny br mlkw 'nny(CIS 3994); mère de Malikù Ma1cxoç p. 10)] ; famille d'Elahbel; honore le centurion Celesticus ......
foa8ou(As'Ao et GAWLIKOWSKI,1986-1987,n'" 1 et 4); femme ..................................................................... p. 25,84,205,266
de Shoadû foa8oç E/ca�111cou s'dw br 'Jhbl (ibid., n"' 2 et 3);
Elahbel 'Jhbl br mlkw br zbdbwl brt'(lnvIV,12) [père de Iarhibôl
sœur (?) de Malikû Ma.1cxoç Mouicmvoü 1:oü Avavt8ou (ibid.,
yrbbwl br 'lhbl(As'AD et GAWLIKOWSKI,1986-1987 11° 5) et de
n" Sa)] ; famille de Bartê; famille Ananis; Benê Mathabôl;
Shoadû foa8oç E1ca�111cou s'dw br'lhbl(ibid., n'" 2 et 3)]; famille
honoré par les Benê Mathabôl(208) ................... p. 76-77,167
de Bartê; fondateur du tombeau de famille(164) ....... p. 58,76
Bôlaî Bôlanos BcoÀavoç Z11vo�iou wü Atpavou wü MoKl�LOu
Elahbel E1ca�11Aoç Atpavou wù E1ca�111cou wù Mcxvvou
wü Ma08a bwly br zbyd' br byrn br mqymw mt' (lnv IV,9c;
(Palmyre II,n" 1); stèle funéraire .................................... p. 225
CANTINEAU, 1930b, n" 14; RSP n" 125(WADDINGTON 2571c) et
126) [fils de Zénobios Z11v6�wç Atpavou MoKl�tou zbyd' br Elahshâ 'Jhs' br tyms' br 'lhs' (C/S 4187,4191 et RTP n'" 725 et
byrn br mqymw(CIS 4168); mari de Kallistè Kanicrn1 8uych11P 695 lu parDUNANT,1959,n" 24)[neveu de Zebîdâ zbyd' br ' lhs'
'Hpcp8ou MOUlQO'.VO'll(CANTlNEAU,1930b,n" 14); frère de Aaîlamî ZE�a8a E1ca00a (RTP n" 775 et C/S 4187 = Inv IV, 2)]; Benê
''ylmy br zbyd' J1y111 (lnv IV,9d)]; famille de Aaîlamî et Zebîdâ; Mathabôl; symposiarque (vers 166 ou trente ans avant pour
symposiarque; curateur(épimélète) de la source Efqa choisi par DFD, p. 27) .............................................................. p. 182,242
le dieu Iarhibôl; dédie autel au dieu anonyme (162) ................
Erôs (Iulius) 'Iou1cwç "Epwç (AAES III n" 353 = WADDINGTON
........................................................................... p. 38, 133,241
2572) ; affranchi de C. lulius Bassus (à.rri:Àrn0Époç ra.i.ou(ç)
Bolhâ bJJ1' bi�s (C/S 4560); Benê Hashash ..................... p. 64-65 'IouÀÎ.ou B6.cmou) ; dédie un autel au dieu très-haut (178) .......
......................................................................... p. 187,193,276
Bolhâ blb' br ns' bss (CIS 4559); Benê Hashash ................. p. 64
Etpenî 'tpny br zbd'' E0tavEl (Pre!. Rep. V II/V III, n" 845 = Du
Bôlmâ (Iulius Aurelius) ywlys 'w1lys bwlm' br zbdbwl br bwlm'
MESNIL DU BUISSON, 1939, n" 19 et p. 41-42); stratège à Doura
nyny' (CIS 4206); cède une moitié de tombeau à Iulii Aurelii
(168) ......................................................................... p. 108,242
Ogâ 'g' et Shalmê ,�lm' (cousins maternels) et à une fille de
Nebôzâ (... [br]t nbwz' br lym' brnbwmr) [229] .... p. 182, 211 Eutychès (Iulius Aurelius) 'IouÀÎ.oç Aùp1i1ctoç Eù1ux11ç Ayymou
ywlys 'wllys 'wtk' bgy(CIS 4211)[frère de[...] 'IouÀwç 'Ep�lEÎ.aç
Bôlnâ bwln' br 'zyzw br 'zyzw br s'y]' (CJS 3976) [frère(?) de
et Mai:va] ; fondateur du tombeau de famille et cède une
Ogâ Séleukos 'IouÀtoç Aùp1i1ctoç Oyya 6 ica1. LÉÀrnicoç ywlys
concession (237) ........................................................ p. 62,188
'wrlys 'g' dy mtqr' slwqws (CIS 3934-3935)] ; deux fois
épimélète de la source .......................................... p. 62,69,243 Gaddarsû gdrsw br yrby br gdn5w br · ty (RSP n" 143 =
GAWLIKOWSKI, 1990b, p. 103-104) [descendant de Matnaî mtny
Bônnê bwn' br byrn (RTP n" 463) [fils de Haîran byrn br bwn';
br qynw br 'ty rb' (père du père de son père ou bien père de ses
père de Bônnê Bcovvrnuç Bcovvrnuç wü Atpavou bwn' br bwn'
pères), cf. ES n" 60]; Benê ledîbel ; Benê Mazîn ?; dédie un
br bym]; famille de Bônnê; symposiarque (vers 100) .............
autel ù la Dame du Temple (Allât) [115] ........................... p. 65
............................................................................. p. 10,45,240
Goraîmî grymy br nbw::.bd (!nv XI, 100; cf DFD p. 31); Benê
Bônnê Bwvvrnuç Bwvvrnuç wü Atpavou bwn' br bwn' br byrn
Kohennabû; honoré par les prêtres de Bel(44 av. J.-C.) ..........
(CTS '.1913) [fils de Bônnê bwn' br byrn; petit-fils de Haîran
..................................................................................... p. 14,38
byrn br bwn '] ; famille de Bônnê; proèdre(137) .....................
....................................................................... p. 10,36,45,241 Habbê J1b' br bg.sw br zbdbwl(lnv IX,33)[père deBageshû bg.sw
br bb' br bgsw(lnvIX,34)] ; famillecleBageshû;BenêHashash;
Bôrrâ (Aelius) 'lys bwr' br tyts 'lys 'gylw (DFD, p. 36-37 +
Benê Komarê ?; honoré par les Benê Hashash (128) ....... p. 60
INGHOLT, 1932 p. 278) [fils de T. AlÀtoç ('?) (lm• X, 79 d'après
Starcky ad. !oc.)] ; stratège; honoré par la patrie et les tribus; Habîbî bbyby br yrby br J1yrn br 'nwbt (ln1' X, 87-88 = CJS 3960)
félicité par gouverneurs et par le dieu Iarhibôl; citoyen romain [cousin de Haîran byrn br yrJ1y br tym' br 'nwbt et de Habîbî
(198) ......................................... p. 14,21,27,35,114-116,242 J1byby br mlkw 'nwbt (CIS 3905 ù Rome)]; famille Annûbat;
conduit une caravane depuis Choumana (157) ................ p. 146
Casperianus Ka01CE,piavoç Z11vo�i.ou qsp1yns ( br zbyd') ( SEYRIG,
1939,p. 320,n" 24; RTP n" 785); grand prêtre et symposiarque Haddûdan bdwdn br bdwdn prmwn(CANTINEAU, 1936, n" 28c)
de Bel; dédie une statue à un militaire romain de la légion IV [frère de Thomallachis 0o�taUcxxtç(INGHOLT,1936,p. 109) et
Scythique(140-141) .................................................. p. 42,241 de Awîdâ AouEt8oç A88ou8avou (C/S 3914; voirDuKSTRA,1995,
p. 128)]; famille de Firmôn; dédie une statue à M. Ulpius larhaî
Celer (C. Vibius) r. Oùd�toç KÉÀEp (/nv IX, 23); Romain;
(159) ......................................................................... p. 106,111
synèdre ; préfet d'aile ù Palmyre ; citoyen palmyrénien; honoré
par le Conseil et le Peuple (vers 175) ........................................ Haddùdan J1dwdn br Juy blpnnwn (INc;1 IOLT,1936, p. 88) [affranchi
........................................................... p. 35,124,241,244,266 de la famille Firmôn (peut-être de 0o�taHCY.Xtc;)] ..................... .
......................................................................... p. 168,193,276
Elahbel (Marcus Ulpius) Mcipico ç OÜÀmoç E 1ca�111coç
Oua�anaeou wù Mavvmou 1:où E1ca.�111cou mrqs 'Jpys 'Jhbl Haddûdan A88ou8av11ç Ayi:you mû A10a�t0ou wù OuÇapÇtpa0ou
br whblt br m 'ny 'lhbl (C/S 4134; BouNNI, 1986, n"' 3 et 18; J1dwdn br J1ggw Jsm� 'zrzyrt (br tym' 'zrzyrt en C/S 4213)
DFD p. 163)[père de Marcus Ulpius Mannaios; de Hadîrat bdyrt [lnvX, 24; C/S 4213] (frère de Alaîshâ 'lys' et oncle de
A8Etpa811v ; frère de Manaî, Shokayaî et Malikû Mavvmoç Haddûdan hdwdn); honoré par son frère pour avoir consacré au
foxamç Ma1ctxoç (C/S 4134)]; famille d'Elahbel; fondateur dieu le fils de son frère (neveu); fondateur du tombeau de famille
du tombeau de famille; citoyen romain(103; 119 à 128) ........ (153 et 164) .............................................................. p. 181,184
··················· p. 81-82,84-85,124,133,166,178-179,204-206
Haddûdan A88ou8av11ç bdwdn br 'ly.i';'(Jnv X,24) [fils de Alaîshâ
Elahbel Elabelus qui et Saturninus Malichi f. (C/S 3962) [fils de 'lys'; neveu de Haddûdan bdwdn] ; consacré au dieu par son
mlk'vv (lnv XII, 21) ; père de Bagdan Apollodôros bgdn oncle(164) ....................................................................... p. 181
Index des Pa!myré11ie11s 2 87
Haddûdan (Septimius) sptmyws bdwdn br spfymyws 'gylw mqy Haîran A1pav17ç MoKt�tou 1où Atpavou wù Ma88o: /Jyrn br
(lm 1 IX, 28; GAWLIKOWSKI, 1971, p. 420; RTP n"' 4 86, 490-492, mqymw br /1yrn mt' ( CIS 3930) [père de Aaîlamî et Zebîclâ
4 95) [fils de Ogeîlü 'gylw br mqy /1dwdn bd' (CANTINEAU, 1931 , AmÀa�LEK Kat Z17v6�1oç zbyd' et "ylmy ( CIS 4168)] : famille
p. 138, n" 17); descendant de Ogeîlü honoré par les quatre tribus de Aaîlamî et Zebîclâ ; honoré avec son fils (Aaîlamî) par le
en 199 ([nv X, 44)]; famille d'Ogeîlü Maqqaî; clan Shewîrâ ?; Conseil et le Peuple ( 139) .................................................. p. 20
symposiarque (272 et 273) ...................... p. 119, 144, 158, 244
Haîran byrn br yrby br tym' br 'nwbt (lm' X, 87-88 [ CIS 3960])
Hadîrat bdyrt A8npa817v (BouNNI, 1986, n" 18; CJS 4154) [fille [cousin de Habîbî J1byby br yrby br byrn br 'nwbt et de Habîbî
de Marcus Ulpius Elahbel]; famille d'Elahbel ; honorée par son bbyby br mlkw 'nwbt ( CIS 3905 à Rome)]; familleAnnubath;
père (morte vers 1 25) ................................................. p. 82, 166 conduit une caravane depuis Choumana; honore M. Ulpius Iarhaî
(157) ................................................................................. p. 146
hgr brt mqy 'mby (INGHOLT, 1936, p. 96, n" 5 = lm• VIII,
200) [sœur de Manaî m'ny et d'une sœur anonyme]; honorée Haîran bym br mlkw br 11$Wr A1pav17ç Ma11.1xou (Du MESNIL ou
par son frère d'une colonne ............................................. p. 166 BurssoN, 1939, n'" 28, 30 et 31; Pre!. Rep VII/VIII, n'" 902 et 903) :
famille de Odainat; fait deux reliefs à Doura (159) .......... p. 108
bgt brt bw]b' 'tntn 'bytwr(C!S4287) [mère deAqmê, ' qm'
brt dynys .<;i'dy et mère deAteaqab, 't'qb br sdy]; relief funéraire Haîran (Iulius Aurelius) ywlys 'wrlys bym br ywlys 'wrlys mqy
......................................................................................... p. 177 br yrby (lNGHOLT, 1935, p. 78, n" III; p. 86, 11° VIII et p. 88, n" IX)
[frère de Abbâ ywlys 'wrlys 'b' br ywlys 'wrlys mqy br y111y
bggw br tym' swyr' (SAFAR, 1964, n" 8) [descendant de
(p. 78, n" III); parent ou proche de Malê ywlys 'wrlys ml' br
swyr' br tym' (lm' XII, 55); ancêtre de Ogeîlü Oy17Àoç MaKKmou
byrn br ssn (n" III) ?]; prise et cession de concession dans le
'gylw br mqy (lm· X, 44); frère de Taîmarsü lymr$W br tym'
tombeau de Iulius Aurelius Malê (215 et 237) ........ p. 201-202
.s"wyr'] ; clan Shewira; police des nomades ? (98) ....................
··········································································· p. 94, 116, 240 Haîran Hérôdès A1pav17ç 6 Kat 'Hpcù817ç fopmxou 1où Atpavou
îüÙ AÀmv17 LE<jl<j}Epa /Jyrn br "�1ykw br /1yrn br 'Jyn' ,';ipr'
Ayqoç Iapmou 1où Oya /1ggw br yr/Jy br 'g' ydy'bl
(simplement 'Hpm817ç fopmxou clans lnl' X, 27) [ CJS 3953 ; lnv
(lnv X, 69) [fils de y111y br 'g' (C!S 4537); frère de Belîâ bfy'
X, 27] (fils de Shoraîkô fopmxoç Atpavou s1ykw br /1yrn et de
brt yrby br 'g' ( CIS 4537) et de Haggaî J1gy br y111y br 'g' ydy'bl
Martheî Mo:p8aç 'AÀEç,cxv8pou 1où Kat Ia817 mrty brt yd';
(lnv VIII, 1 08) et neveu de Hagegü bggw br 'g' br ydy'bl
grand-père de Iaclê ywlys' wrlys sptmyws yd' 'IouÀwç Aùp17Àt0ç
(CIS 4468)]; famille de Hagegü; synèclre; honoré par le Conseil
Lrn11�noç Ia817; frère de Iaclê Ia817 fopmxou yd' br siykw) ;
(112) ........................................................................... p. 54, 240
famille de Alaînê; Bené Zabclibôl ; honoré par Bené Zabdibôl;
Hagegû /Jggw br yhyb' br y111y dk' (CIS 4030 et 4050); dédie honore Manilius Fuscus, fils du légat de Syrie, Manilius Fuscus
deux autels au dieu anonyme (232 et 261) ................ p. 59, 140 (179 et vers 198) ........................................ p. 50, 6 1, 63, 74-75
Hagegû bggw br ml' whblt ( C!S 4232 , mieux que Inv IV, 17) [père HaîranLE1niµ1oç A1po:v17ç uioç 08mva8ou spfmyws byrn br 'dynt
de Pasaîel p$y'J;mari de Pasâ p$' brt ns' bggw] ; relief funéraire (CIS 3944; SEYRIG, 196 3, p. 1 61, n"' 1 et 2 = ÜAWLIKOWSKI, 1985,
......................................................................................... p. 1 78 n"' 5 et 6; Inv III, 3 ?) [fils cl'Oclainat et de sa première épouse];
sénateur, exarque; peut-être le même que Hérodien cl'Im• III, 3
Haggê bg' brt tym' br /]]pt' br'th 'Jty '[ouÀta Aùp17Àia Ayy17 (251 et 2 57) .. p. 33, 41-42, 56 , 61, 102 , 119, 1 44-145, 147-149
(lnv X, 119) [fille de Taîmê lym' br blpt' br'th 'Jty et sœur de
Halaft:â /1/pt'] ; honore son père et son frère (214 en palmyrénien Halaftâ blpt' br lym' br blpt' ( CJS 4267) [pas de la même famille
et 21 6 en grec) ................................................................. p. 1 67 que personnages de Inv X, 119 (lnv X, p. 76)]; relief funéraire
(vers 150) ......................................................................... p. 167
Haîran byrn br blsw1y br gdr,';iw dy mtqrh br b" (CIS 4 114)
[grand-père de Shabî, Nebüzabacl, Taîmaî et Nebülah 2:a�nç Halaftâ blpt' br lym' br blpt' br' th 'lty (lnv X, 119) [fils de Taîmê
NE�ouÇa�a8oç 0m�tatoç NE�ouÀaç oi B17Àcroupou Atpavou tym' br /1/pt' et frère de Haggê bg ']; honoré avec son père par sa
1où B17Àcroupou 1oû ïa88apcrou 1où ÈmKaÀouµÉvou Baa sby sœur (214 en palmyrénien et 216 en grec) ....................... p. 1 67
wnbwzbd wlymy wnbwlh bny blsw1y br/nyn br blsw1y br gdr$W
Halaftâ (Iulius Aurelius) ywlys 'wrlys b]pt' br mqymw zbd'
dy mtqrn bny b" (CJS 4124) et de Haîran /nyn (GAWLIKOWSKI,
(INGHOLT, 1935, p. 84-86 , n'" VI-VIII); achat de concessions clans
1970, p. 82 et CJS 4126); frère de Belshürî bl.sw1y br bggw br
tombeau de Iulius Aurelius Malê (235, 237) ................... p. 202
blsw1y b" (CJS 3929)]; Bené Baâ; Bené Kennabat; fondation
d'un tombeau (33) ................................................... p. 210-211 Hannâ bn' brt mqymw br tybwl 'tt Jsms skybl ( CIS 4493) [femme
et nièce de Lishamsh /sms br tybwl br skybl (Inv IX, 1); sœur
Haîran Haeranes Bonne Rabbeli f. (qui et Rabbilum) byrn br bwn'
(dy mtqr' rb'J) br rb'f br bwn' br 'tntn br tymy dy mtqr' brs'l
cleAbelaalî 'bl'ly mqymw(RTP n" 6 38)]; clan Shokaîbel; relief
A1pav17ç (Kat Pa��17Àoç) Bcovvmou wù Pa��17Àou 1où Bcovvrnuç funéraire ........................................................................... p. 1 82
îOÛ A817vo:8avou îOÙ ÈmKaÀOWLÉVOD Bapcraaeou (ROD!NSON, Hashash bss br n.s' br bw]b' bss (CIS 3915) [frère de Malikü
1950, p. 137;Jnv IX, 20; CANTINEAU, 1933, p. 175 n" 2b et p. 183- mlkw br ns' br bwlb · dy mtqr' /]§§ MaÀtXOç Nrna 1où BcoÀaa
184 [?]; fnl' XII, 42 [?]) [fils de Bônnê Bcovvmoç bwn'; père de (lm IX, 11-12)]; famille de Bené Hashash; Bené Komarê;
Bônnê bwn' br byrn; grand-père de Bônnê Bcovvrnuç Bcovvrnuç pacificateur entre Bené Mathabôl et Bené Komarê (21) ...........
1où Atpo:vou bwn' br bwn' br J1yrn; ancêtre de Ahophalî ................................................................. p. 26, 64, 79-80, 180
Ao<jlaÀav Atpavou 'bply br byrn] ; famille de Bônnê; Bené Mîtâ;
honoré par les prêtres de Bel; par le Conseil et le Peuple; par les Héliodôros 'HA1ô8copoç 0w8mpou MoKt�tou 1où AwtaÀou
archontes (CANTINEAU 1933, p. 183-184 ?); décore les édifices (lnv X, 1 et 2 [et 117 ?]) [fils de Théoclôros 0Eo8mpoç MoKt�wu;
des dieux; Palmyrénien (52, 56 et 74) ....................................... frère de Malikü et Mucianus MaÀxoç et MouKtavôç]; clan
............ p. l 0, 27, 29, 34, 44-4 7, 52, 54, 80, 140, 179-180, 250 Haumal ; honore un centurion de la légion X Gallica; honore
son père (vers 100) ............................................................ p. 69
Haîran (Gaius Iulius) rchoç 'IouÀ1oç EÀa�17Àou uioç <Da�iq,
Atpav17ç g'ys ywlys byrn br 'lhbl([nv X, 129); famille cl'Elahbel Hennibel Evv1�17Àoç LwLcÔvou 1où BaÇEK17 bnbl sm'wn bzq'
(108) ........................................................................... p. 82, 205 (DRI.JVERS, 1995a); synocliarque (1 44) .............................. p. 59
288 Les notobles de Palmyre
Hennibel f111bl br simit br mlkw (RSP n" 24) [fils de Pristina prstn' Meeraclate : Palmyrénien : honoré par les marchands de Spasinou
brt tymr.5w br 'tzbd (RSP n'" 24 et 29) et de Shalmallât Charax ( 131) ...................................................... p. 34, 105. 263
LCY.ÀWXÀÀCY.0oç McxÀtXOD ,5Jmlt br mlkw br dynys (RSP n" 24)];
Iarhaî yrf1y br zbd'th br f111bl Icxpmoç Zcx�8a.0ouç mû Avt�11Àou
famille de Shalmallât ; concède une partie de 1'hypogée de
(RSP n" 33) [fils de Zabdateh zbd'th br bnbl Zcx�8a.cx817ç
Shalrnallât à Zabdateh zbd'th br bnbl br dynys (147) ..... p. 174
Evv1�11Àou (RSP n"' 24 et 31); frère de Hennibel fmbl br zbd'th
Hermeias (? Iulius) [ ... ] 'IouÀtoç 'Ep�tdcxç [...] ywlys hrmys br fmbl (RSP n" 32) et Dionysios L'i10vu0ioç Zcx.(38a.0ouç dynys
(C/S4211) [frère de Eutychès 'IouÀioç Aùp1iÀtoç E.'nux11ç br zbd'th f111bl (RSP n" 34 J]; famille de Shalmallfü ......... p. 225
Ayymou]; affranchi (?) ; prend une concession du tombeau de Iarhaî (Marcus Ulpius) MÔ'.pKoç OÜÀ.moç Icxpmoç Atpcxvou mu
famille (237) ............................................................ p. 188,276
A�ycxpou mrqs 'Jpys y1J1y brbyrn br· bgr(CIS 3928 : CANTINEAU,
Herm.ès (luliusAurelius) 'Im'.iÀtoç Aùp11À10ç 'Ep�tiiç CY.rrEÀEu0Epoç 1936, n" 28c; lnl' X. 77. 78, 87-88 (= CIS 3960). 89. 90. 96,
Aùp17Àiouywlys 'wrlyshrms bd11y 'wrl[ys ...J(lndV, 13) [mari 107,111,128) [fils de Haîran Atpcxv11ç A0ycxpou (1111• X,73 ?);
de Prima ' louÀlO'. AÙpllÀlO'. npi�LO'. O'.ITEÀED0Épcx A Ùp1711.1cxç 'AKpi1ç père de Abgar A�ycxpoç (1111• X. 107) : frère de Abgar MÔ'.pKoç
ywly' 'rly' p1ym' brl)11y 'wrly' 'qm']; affranchi: fondateur du OÜÀmoç A�ycxpoç (lm• X,81)]: famille de Marcus Ulpius Iarhaî;
tombeau de famille (232) ......................................... p. 192,276 caravanier. honoré par marchands, évergète (lm• X, 77), ami
(lm• X,78); dirige des caravanes (/111• X, l I 1) : honore un soldat
Hérodien I:rnn�Lioç 'Hpco8tcxv6ç (lm· III, 3) [fils d'Odainat et sa romain. son ami (lm• X. 128) [155,157 et 159] ........................
première femme]: roi des rois : peut-être le même que Septimius ... p. 34,55,95,97.99-102. 106,109. 111-114, 120.132, 142,
Haîran (CJS 3944) .............................................. p. 61,148, 150 145-147. 160, 192,205-206.232,264
Hertâ f1rt' brt byd' .�gl bt bb' ( CIS 4548) : relief funéraire ........... Iarhaî,,..::.••IJ'I-"' yrby 'g1p' yrf1y ydy'bl ·g' y'/ (INGHOLT, 1926.
................................................................................. p. 168,176 p. 129) [même famille que les personnages des textes CIS 4322
Honaînû Ovmvoç A88ou8cxvou mû Ma.11.txou? (lm· X. 96 et (yrby br yrf1y br yrby ydy' bl y' t) 4323. 4324 et 4325] :
BouNNI,1986,n" 31); capitaine de navire.évergète de Nabû ... symposiarque de Bel (chef du thiase). chef de la divination:
··················································································· p. 85.192 honoré par le thiase (243) ...................... p. 54. 5 9,61, 128.243
Iaddaî Icx88moç Zcx�blÀ.cx 10ù Icx88mou ydy br zbdlh ydy(/111• X.90): Iarhaî y111y (STARCKY,1963,p. 48),stratège au sud-est de Palmyre
caravanier: honore Marcus Ulpius Iarhaî ( 157) . p. 100, 111-112 ................................................................................. p. 115.241
Iaddaî ydy br kyly (CANTINEAU, 1930a,p. 548. n" 14): témoin lors Iarhibôl yrf1bwl br 'Jhbl mlkw brt' (As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-
rL:,, 1'7 l"PL'l:'Ïnn rl'11nP. r-v1r1-1P r1'11n h1rnhr-i..:111 rlr-::i, f,:in,-ilL:::..
\...&.'- lL\. '-'-•Jl.J.1.\..,./J..l \,...l Ll.l..l"-' JJl-L.I. l...1'-' \,...l Ll.l.l t..'-.JJJ_lLJ''-,;LLLl ..__._.,_ J. LJ..lJ..l.l l .l'-
{\ 171 \
.l / .l / •••••••••
1987 n" 5) [fils d'Elahbel 'Jhbl br mlkw U111· IV. 12): frère de
................................................................................. p. 174,219 Shoadû LOCY.ôoç EÀcx�17Àou .5' dw br 'Jhbl (As' AD et GAWLIKOWSKI,
1986-1987 n'" 2 et 3)]: famille de Bartê: Benê Mathabôl: honoré
Iaddaî Ia.88moç 00'.l�LCY.pacx 1où 0mpq mu MoKt�Lou 10D ra.p�cx par les Benê Mathabôl (197) .............................................. p. 76
( CJS 3948 et 3949) [fils de Taîmarsû tymr.5w br tym' 00'.l�Lcxpaa.
0m�u7: frère de Zabclibôl ::.bdbll'I; neveu de Zebîdâ (1111• III.26)]: Iarhibôlâ yrf1bwf' br mlkw br fün.i; br fmbl · · by la.pt (3rnÀ1W Mcx11.1xou
caravanier : honoré par les marchands de caravane ( 193 et 211) AtCTCY.�LCTOD îOD Acx�El (/111• XIL 48 et 49 : CANTINEAU.1930b,n" 36:
........................................................................... p. 15,102,264 RTP n" 763; /111• X,59) [fils de Malikû Ma.ÀtXoç Awcx�LCTOD mlkw
br lsms (lnv X,131); père de Shalrnan ,5/mn yrbbwl'(RTP n'" 31
Iaddaî ydy br fl[... J ( CIS 4056) [demi-frère de Lishamsh Jsm.5 br et 34); oncle de Taîmarsû 0m�LCY.p0cxç J\10cx�wou îüll McxÀtXOD
s[. .. J] ; dédie un autel au dieu anonyme .......................... p. 177 tymr.<;w füns br mlkw ( CJS 3963)]; Benê Aabeî; Benê Agrûd? :
Iadê Ia.817 fopmxou 10D Atpcxvou 10D AÀmvq LEcj)<pEpcx yd' br dédie le temple de Belhammôn et celui de Manawat : synèdre ou
s1ykw br byrn br 'Jyn' :;;pr' ( CJS 3950) [fils de Shoraîkô fopmxoç proèdre; honoré par le Conseil et le Peuple (89) .......................
Atpcxvou frykw br byrn et de Martheî Mcxp0Etç 'AÀEs,âv8pou mD ··········································································· p. 51,151. 241
KCY.l Ia.817 mrty brt yd' ; frère de Haîran Hérôdès Atpcxv17ç 6 KCY.l Iarhibôlâ yrf1bwl' pnnn (RTP n" 35 cl'après lecture DFD) [grancl
'Hpco817ç byrn br .11ykw] ; famille de Alaînê et Shoraîkô ; Benê père de Icxpt�coÀ.17ç Ey17 y111bwl' br 'g' ( CIS 3914 ) : famille de
Zabclibôl?; honoré par Benê Zabdibôl (179) ........... p. 75,150 Firmôn?; symposiarque (vers 100) .......................... p. 59,240
ladê (Iulius Aurelius Septimius) ywlys' wrlys spfmyws yd' br Iarhibôlâ la.p1�coÀ11ç J\t0cx�10ou Acx�El yrbbwf' br lsms
'lksndrws f1yrn sqkw 'IouÀtoç Aùp1iÀtoç LEITît�Ltoç Ia.817 (Inv X, 114) ; Benê Aabeî ; caravanier ; ambassadeur en
LEITîl�Liou 'AÀEs,âv8pou 10D 'Hpco8ou (CIS 3940 ) [petit-fils de Élymaïcle; honoré par la Cité et le Conseil; décret envoyé aux
Haîran Hérôclès Atpav17ç 6 KO'.l 'Hpco817ç byrn br sqkw] ; famille gouverneurs (138) .................. p. 32,50-51,103,105,241,263
de Alaînê; chevalier romain (tres militiae) : honore Septimius
Worocl (262) ........................................................... p. 49-50,61 Iarhibôlâ Icxpl�COÀ17ç Ey11 Icxpl�COÀEODÇ îO'lJ A88ou8cxvou îO'lJ
Zcx�8t�coÀou A88ou8cxvou <Ptp�tcovoç y111bwl' br 'g' br y11Jbwf'
Iamlikû ymlkw br whblt br gwrny (1111· X. 53); honore Iarhibôlâ br bdwdn br zbdbwl br f1dwdn prmwn ( CIS 3914) r petit-fils de
yr{1bwf' br mqymw br s1ykw d'une statue à l'agora (211) .. p. 184 Iarhibôlâ yrbbwf' prmn (RTP n" 35); cousin de Thomallachis
Iamlikû ........................................................... (voir à Jamblique) 0o�LCY.ÀÀ.O.XK et de Awîdâ AouEt8oç A88ou8cxvou]; famille de
Firmôn; honoré par le Conseil pour des constructions cl a ns le
Iarhaî y111y br Jsms br r'y (Jnv I,5 = BS n" 1 ; RTP n" 575 [?]) [père temple de Bel (175) ................................................... p. 20,168
de Malê Agrippa Ma.À17 6 Kcx't 'Aypirrrccx ml' br y111y Mms r'y ] ;
Benê Mazîn ; dédicataire cl' un portique du sanctuaire de Iarhibôlâ y111bwl' br mqymw br s1ykw (lnv X, 53); honoré par
Baalshamîn (67) ................................................................. p. 79 Iamlikû ymlkw br whblt br gwrnycl'une statue à l'agora (211)
......................................................................................... p. 184
Iarhaî Icxpmoç Zcx�81Àcx y111y br zbdl' (Jnv X, 127); caravanier
(86) ............................................................................. p. 21,263 Iarhibôlâ y111bwl' br sbyn' br tym' (INGHOLT,1938, p. 104) [oncle
maternel de Séleukos slqws br typyls br slqws] ; fils de vétéran
Iarhaî Icxpmoç Ne�ouÇcx�cx8ou 1oû LCY.Àcxpa.Ucx0ou 10D Axxa.80'.vou ( wtrn') ; cède une concession clans un tombeau (hypogée de
y111y nbwzbd br... (Jnv X, 38); satrape de Thilouos pour le roi Séleukos) [251] ................................................................ p. 183
Index des Palnzyréniens 289
Iarhibôlâ IcxptPrnA11ç (SEYRIG. 1937. p. 372) [fils du bienfaiteur br l.<Jm.1 (BS n" 1) ; honoré par le Conseil: reçoit Hadrien ;
anonyme] : poursuit les bienfaits de son père .................. p. 162 évergète (huile): deux fois secrétaire: dédicataire de la
construction du temple de Baalshamîn (131) ............................
Iarhibôlâyr/1bw/' brtm'(C/S4535):relief funéraire ....... p. 176
p. 32, 38, 55, 59, 78-79, 81-82, 95. 141, 150-152. 160-161, 164,
Iedîlbel ls8a�qÀoç AÇtÇou ydy'bl br 'zyzw br ydy'bl (CJS 3924 et 187-188, 241
3925 [/m' lX, 6 a et b]) [fils de Azîzû AÇstÇov l282tB11Àou (CJS Malê m/' br 'g' br ml' br 'gylw 'ytybl (CJS 4197 = lm· VIL 15)
3925)]:clan Barîkaî: Bené Mathabôl : caravanier: honoré par [cousin de Ogâ 'g' br .i:;Jm · fo1.i:;grm br br ..s ·g· br 'ytybl: même
les Grecs et les Palmyréniens de Séleucie: Palmyrénien : famille que ... br byrn br 'gylw 'ytybl (BS 11° 23 J]: Bené Mazîn:
contribue à une construction du temple de Bel (17 et 19) ......... restauration de la porte du tombeau de famille (après 188) .......
................................................................... p. 95, 105, 184, 263 ......................................................................................... p. 220
Iedîbel I28aP11Àoç 0m�LCX1l 10u Ayyo8o�Lou ydy'bl br tymb' br Malê (IuliusAurelius) ywlys 'wrlys 111/' br /1ym br ssn (INGHOLT,
ydy'bf br 'bd'th 'gdm (lm· IV. 7a) [fils de Taîmhê 0CY.l�LCXll tymb' 1935, p. 76-78, n"' II-IV ) [grand-père de Malê ywlys 'wrlys 111/'
et de Maîshâ mys· brt tyms' Mmcm 0m�ncrn : ancêtre de br byrn ml' (p. 84-85, n'" VI-VII)]: cession de concessions de
Alexandros 'lksdrys br 'lksdrys br 'plnys · AÀÉ./;cxv8poç tombeau (tombeau de Iulius Aurelius Malê) [193. 215 et 223] .
'AÀsl;civ8pou 1ou 'AnoÀÀcovi.ou (/n1' IV. 7b): demi-frère de ......................................................................................... p. 201
Ogeîlû, Taîmhê et Attaî 'gylw wlymb' w·ty bny byrn br 'bd'th
'gdm (Oy11Àoç 0m�LCXll A88mcx) avec la même mère]: famille Malê (IuliusAurelius) ywlys 'wrlys ml' br 'wrlys f1ym br mf' /lym
deAggodomos: Bené Komarê: fondation du tombeau de famille ssn (INGHOLT. 1935. p. 82-85, n'" V-VII) [petit-fils de Malê ywlys
(67) ..................................................................... p. 63. 176-178 'wrlys ml' br byrn br ssn (p. 76-78. n'" II-V)]: cession de
concessions dans le tombeau de IuliusAurelius Malê (234-235)
Iedîbel ydy'bl br hlydrws lsmi; br ydy'bf l28aB11Àoç 'HAw8cbpou ................................................................................. p. 201-202
1ou Kcx't Awcxw:rnu 10u Isfü:1�11Àou (CANTINEAU, 1930a, n" 13b)
[fils de Lishamsh füns ydy' bl (RTP n" 19) : petit-fils de ledîbel Malikû mlkw br rmw (Du MESNIL ou Bu1ssoN, 1939, n" 1): Bené
ydy'bl br whblt (C\NTINEAU. 1930, n" 13a)]; clan Barîkaî: Komarê: fondateur du temple de Bel et Iarhibôl à Doura (32 av.)
concession d'un tombeau (192) ......................................... p. 63 ......................................................................................... p. 107
Jamblique (Tamlikû) lcx�tÀlXOç MoK1�Lou 10u Kcxt AKKcxÀswou Malikû mlkw br ns' br bw/1) · dy mtqr' Ms McxA1xoç Nrncx 1ou
1ou MCY.À1xou ymlkw br mqymw dy mtqrh 'qfys br mlkw 'bnyl BrnÀCY.cx 1ou Èm KCXÀOWLÉvou Acmc:rnu (lm· IX. 11 et 12) [frère de
br bl 'qb br myk' br mt' (CJS 4123 et 4123bis: RTP 11° 761) Hashash '7,i;,s br ni;' br bwlb · '7s.s']; famille de Bené Hashash ;
[petit-fils de Malikû mlkw br bl 'qb (lm, X, 145)]: famille de Bené Komarê: honoré par les trésoriers et le peuple: bienfaiteur
Jamblique: bny zmr' '? (comme son grand-père de Jm, X. 145, de Bel (24 et 25) ................. p. 14, 26, 63-64. 79. 104-106, 263
mais voir les réserves de DuKSTRA, 1995. p. 92): fondateur d'un Malikû Mcxhxoç MoKEl�Lou 1ou BrnÀ�CY.CY.pCY.xou mlkw br mqymw
tombeau:symposiarque de Bel (83) ......... p. 52, 221-222, 240 br blbrk bwml (CJS 4122): clan Haumal (c\iuA11ç KÀcxufücx8oç):
Kafatût kptwt br slwm (C,\NTINEAU, 1933, p. 178-180, n" 4); fondateur du tombeau de famille (79) ............................... p. 68
lieutenant du stratège deAna et Gamla (225) .......... p. 176, 243 Malikû McxÀ1xoç AHmw:mu wu EACY.B11Àou 10-u Aa.�a mlkw br
Kîltôt kytwt br lymr;;w br kytwt br tym' rb' ( CJS 4115) [père de Jsms br{111bl br br'th '· by(Jnv X, 13 l) [père de Iarhibôlâ yri)bwl'
Shalman et Lishamsh slmn et J.<J1ni; '?; mari d'une Maîshâ mys' br mlkw : grand-père de Shalman .slmn yri}bwf' ; grand-oncle
brt ...; famille de Shegel iigl brt .<Jkyy, mère d'Elahbel et de ses de Taîmarsû 0m�mp0cxç A10CY.�t0ou 1ou McxÀ1xou]; BenéAabeî;
trois frères (CIS 4149)]; famille de Kîtôt; Bené Mathabôl ; honoré par les Bené Agrûd (81) ......................................... p. 51
fondation du tombeau de famille (41) ............................. p. 179 Malikû mlkw br 'g' "by (CIS 3988 = lm• VI, 3 = RSP n" 128)
Kohaîlû (PubliusAelius) pplys '[lys] kh{yly] 111 'ny br khyly (RSP [mari de 't[. ...] brt mlkw br whblt br '1g11]; Bené Aabeî (89) ...
......................................................................................... p. 171
n" 136); dédie un autel au dieu anonyme; citoyen romain .......
......................................................................................... p. 270 Malikû mlkw br ' g ' br whby br blbzy (BS n'" 7 et 40) [frère de
Wahbaî whby br ' g ' br whby (BS n" 6) et de Belhazaî blf1zy br
Lishamsh Jsms br s{. ..] (CJS 4056) [demi-frère de Iaddaî ydy br
'g' br vvhby bwlbzy (BS n" 43) et neveu des frères de !ni> V III,
'1[... ]] ; dédie un autel au dieu anonyme .......................... p. 177
59 (?); cousin de Zebâ zb' br tymn' br whby br blbzy(BS n" 38)];
Lishmnsh Hms br tybwl br .{kybl (fnv IX, l ) [mari et oncle de famille de Belhazaî; Bené Mazîn , dédie un portique clans le
Hannâ bn' brt mqymw br tybwl 'tt fün.i; ,i;kybl (CJS 4493): oncle sanctuaire de Baalshamîn et DurahlCrn : honoré par ces deux
deAbelaalî 'bl'Jy mqymw tybwl (RTP n" 638) et des deux frères divinités et par les Bené Mazîn (90) .................. p. 86, 141, 170
x et x bny mqymw br tybwl (Jnv XI, 85)]: clan Shokaîbel; Bené Malikû McxÀxoç 0so8cùpou MoKl�Lou 1ou AwcxÀou (lm, X, l et 2
Kornarê ; dédie le temple de Bel ; honoré par ses fils :
[et 117 '?]) [fils de 0sô8mpoç MoKl�tou; frère de MouKmvoç et
symposiarque (selon DFD, p. 222) [45] .................................... de 'HAtô8copoç]; clan Haumal; honore un centurion de la légion
....................................................... p. 47, 48, 51, 151, 182, 240 X Gallica ; honore son père (vers l 00) ............................. p. 69
Maîshâ mys' brt 1yms' br ydy'bl lymwn' Mmcm 0m�Lwcx wu Malikû McxÀ1xoç Ncx00owLOu 1ou LCY.�l\\nyspcx�LOu (GAWLIKOWSKI,
Ta�Lrnvoç (lm• IV, 7a) [mère de ledîbel, fils de Taîmhê (0m�LCXll 1976, p. 200) [ancêtre de tous les membres connus de la famille];
lymb ') ls821�11Aoç 0m�LCXll ydy'bl br lym/1' et de 'gylw wlymb' famille de N ashûm; honoré parAthéna et les ? (fin du 1" siècle)
w'ty Oy11Àoç 0m�LCXll A88mcx (enfants de Haîran bny byrn br ........................................................................................... p. 47
'bd'th 'gdm)]: famille deAggoclomos (67) ............ p. 177-178
Malikù McxÀ1xoç Oua.�cxÀÀcx8ou 10-u Mcxvvmou 10-u EÀcx�11Àou
Makkaî mky brt 'g' (CJS 4014) [femme de Malê m/' br mlkw] ; mlkw br whblt br m 'ny 'lhbl (CIS 3921 et 4134) [frère d'Elahbel,
dédie autel à celui dont le nom est béni à jamais (au dieu Manaî et Shokayaî EÀCY.�11Aoç KCY.t Mcxvvmoç KCXl Loxmaç;
anonyme) [207] ................................................................ p. 171 mari cleAmatê, fille d'Elahbel (CIS 4145)]; famille cl'Elahbel;
Malê Agrippa MCY.Àll Kcx't 'Aypi.nncx lcxpmou 1ou Pcxmou ml· br fondateur du tombeau de famille; honoré par le Conseil (103)
y!J1y lsm§ r'y (CJS 3959 = Inv I, 2 = BS 11° 44) [fils de larhaî y1J1y ..................................................................... p. 11, 82, 178, 205
290 Les notables de Palmyre
Malikû (G. Licinius Flavianus) rchoç A1Kiv10ç cJ)Àa.�rnvoç Buppou Manaî m'ny br mqy 'mby (INGHOLT,1936,p. 96, n° 5 = Jnv V III,
u\.oç Ma.À1xoç g' ys lqnys plwy nws br bw1p' mlkw (/nv X,130; 200) [frère de Hagar hgr et d'une sœur anonyme]; honore sa
RTP n"' 700,776,835); honoré par trois frères comme évergète; sœur cl'une colonne .................................................. p. 166-167
symposiarque (DFD, p. 231); citoyen romain (après 130) .........
Mareas Aurelius AùptjÀ1oç Ma.prnç (/nv IX, 22) ; honore un
......................................................................... p. 144-145,241
militaire romain (l 67) ................................................ p. 20,205
Malikû Ma.À1xoç OÀa.10uç mlkw br 'ly y brmqymw(CIS 3913); Marôna (Iulius Aurelius) 'IoÛÀ1oç Aùp17Àwç Mcxprova. Ma.À11 toù
archonte éponyme (137) .............................................. p. 9,241 ica.'t MEÇcxPBcxvcx toù 'A8p1a.voù ywlys 'wrlys mrwn' br ml' dy
Malikû (Marcus Ulpius) M. OÜÀmoç Ma.Àxoç (Jnv IX,24 et Inv X, mtqr' mzbn' br 'd1ynws (C/S 4209); fondateur d'un tombeau
108) [père de OÜÀmo1 OÙÀrriou Ma.Àxou ZEpyiq. MouK1a.voç (236) ......................................................................... p. 213-2]4
0E6�ouÀoç Kat 'ArroÀ1vap10ç Kat Ma.pirov]; Palmyrénien; honore Martheî Mcxp0aç 'AÀE/;av8pou toù Kat Ia.811 toù OucxBa.Ucx0ou
M. Acilius Athènoclôros,fils de Moqîmû, tribun de la Cohors la wu I:wrovoumrty brt y d' br whblt br sm'wn (CJS 3954) [petite
Petraeorurn et de la légion Fretensis ; honoré par ses fils ; a fille de Wahballat whblt br sm'wn (RTP n"' 696 et 724); mère
accompli les trois milices équestres (après Hadrien) ................... de Iadê Icx811 fopmxou y d' br .s1ykw et de Haîran Hérodès
......................................................................... p. 120,184,274 A1pa.v11ç KCY.t 'Hpcô817ç Zopmxou bym br s1ykw; femme de
MalikûMa.À1xoç 6 KO'.t MEÇcx��cxv11ç B.... mû Ma.Àtxou toù ZE�a8cx Shoraîkô fopmxoç A1pcxvou s1ykw br 1Jym]; famille de Shoraîkô
mlkw dy mtqr' mzbn' br b... br mlkw br zby d' (Jnv IX, 26 et et Alaînê; honorée par son mari (179) .. p. 63, 75, 83,167,180
RTP n" 754?); grand prêtre et symposiarque; dédicace à un Matnaîmt ny br nwrbl brmlkw br tymb' brmtny br bwn' br mtny
empereur (Pescennius Niger) [193] ................... p. 42,123,242 dy mtqrh mhwy (CJS 4130) [fils de Nûrbel nwrbl et de Nabî
MalikûMa.Àxoç MouKtcxvoù toù Avcxv18ou (As'Aoet GAWLJKOWSKI, nby] ; fondateur du tombeau de famille (95) ..................... p. 58
1986-1987,n" 5a) [frère de Betheî BE00a MouKrnvoù Ma.À1xou Méherdate mhrdt (STARCK.Y, 1949-1950, n" 1) [frère de Abnergal
mû Avcxv18ou (n" 2)]; famille Ananis; Benê Mathabôl? Dédie · bnrgl]; fait une stèle funéraire à son frère (160) ............ p. 187
un autel au dieu très haut ............................................. p. 76-77
Mezabbanâ mzbn' br mlkw tymr;;w "by (CJS 4456) [frère de
Malikû Ma.Àxoç focx8ou EÀcx�11Àou toù Bcxp811 mlkw br /fdw br Taîmarsû tymr.<;,w brmlkw(CIS 4457); descendant de Taîmarsû
' Jhbl brt' (As'AD et GAWLIKOWSKI,1986-1987,n"' 1 et 4) [fils de 0m�mpcrcxç Awcxpcrou tymr:;,·w Jsm.s]; Benê Aabeî ; buste dans
Shoaclû foa.8oç EÀa.B11Àou s'dw br 'Jhbl] ; famille de Bartê; le tombeau de famille ......................................................... p. 51
honoré par les Benê Mathabôl (203) ......................... p. 76, 167
Mezabbanâ mzbn' br y 1j]bwl' 1pbwl bgdn (PS 11° 210); relief
Malikûmlkw br hrms 'byhn (INGHOLT,1935,p. 102,n" X) [petit funéraire fait par sa nourrice Annâ 'n' ... ............................ p. 59
fils de Obaîan ' by n br lnmy (PNO n" 77)]; prise de concession
dans un tombeau (tombe de Malikû) [249]...................... p. 128 Moqîmûmqymw br bgg,v(Jnv IV,26a); Benê Baâ; graffita dans
la tombe n" 21 (8) ............................................................. p. 2 10
Malikû (Iulius Aurelius) 'JoûÀ10ç Aùp17À10ç Ma.À1xoç Oua.arnu
Ma.À1xou toù Oua.arnu NEBouÀa. y wlys 'wllys mlkw br ws/nv Moqîmûmqymw br khy lw br zbdbl dymtqrh br zbydy(CANTINEAU,
br mlkw br wsbw nbwl' (/111 1 X, 115) [fils de Wasehû 'JoûÀ10ç 1938, p. 78, n" 31); Bené Gacldîbôl; dédie autel à El-Qônerâ/
Aùp17À10ç Oua.crEoç y wlys 'wrlys wsbw]; stratège,agoranome; Poséidon (39) ..................................................................... p. 27
honoré par le Conseil et le Peuple ; félicité par le dieu des pères, MoqùnûMoicEt�toç OyEtÀou toù Ka.'t oxxcxwou mqymw br 'gy lw
par le Conseil et le gouverneur (milieu du m" siècle) ................ br p;;y'I br tymy dy mtq1J1 bky sw (CJS 3923 et Jnv XII, 35):
.......................................................... p. 39-40, 55-56, 185,2,ü Benê Zabdibôl ?; honoré par la Cité pour avoir embel1i le temple
Malikû (Iulius Aurelius Septimius) y wlys' wrlys sp(myws mlkw de Bel ; honoré par les Benê Taîmaî ( 5 1) .......................... p. 80
brmlwk' nswm 'IoÛÀ10ç Aùp17À10ç Zrn1i�t1oç Ma.Àxoç McxÀroxa. Moqîmûmqymw br zby d' bry1j]y (CIS 4164 = lm• IV,19); Benê
Na.crcroupou (C!S 3941) [descendant de Nashûm nswm mlkw Hatraî; fondateur de la dernière tour datée (128) ............ p. 200
n.swm (RTP n" 773)]; famille de Nashûm; chevalier? (265) ...
............................................................................. p. 49-50,244 Moqîmûmqymw br nbwzbd br bJyky · bsy (DFD p. 162 = BouNNI,
1986, n" 10) [petit-fils de Aqmat 'qmt brt bym br bnr 'mh dy
Malikû mlkw mqymw 'nnw ('?) (As'AD et ÜAWLIKOWSKI, 1986- nhwzbd bry ky (RSP n" 37); frère de Barîkaî bryky br nbw::.bd br
1987,n'" 7 et 8) [père de Mucianus MouK1a.voç Ma.Àxou (n" 7)); b ryky (RSP n" 38); oncle ( ou grand-oncle) de Hannâ )111' brt b1yky
famille Ananis; honoré par les Benê Mathabôl (?). Offre le toit nbwzbd (br 11b1d}{l) (RSP n" 39)] ; honoré par ses fils; dédie une
de la basilique du sanctuaire cl'Arsu (279-280) ............... p. l 54 colonne et un toit clans le temple de Nabû (]46) ......... p. 86,141
Malikûmlkw br bym br 'gy lw 'y tybl (RSP n" 161); « maître » ; MoqîmûMoK1poç McxÀxou mqymwmlkw brn<;,r' (PAT0142) [frère
reçoit une statue clans le sanctuaire de Baalshamîn ................... de Ncxcrpa.Ua.0oç McxÀxou et de A00ma. McxÀxou] ; famille de
................................................................................. p. 194. 220 Malchos (hypogée de Nasrallfü) ...................................... p. 226
Malikûmlkw brsy·wn br whblt(RSPn"69=SFPn" 179); buste !Vh)Q11inu 111lfJ1111W br tm' ( CIS -1--1-86) ; relief funéraire ........ p. 176
dans J'hypogée de Zabdateh et Moqîmû .................. p. 202-204
Mucianus et Théoboulos et Apollinarios et Mariôn OuÀmo1
lVfaiikûmlkw br 'g' br 'rfbn (SFP n" 27) .............................. p. 59 Oùhiou McxÀxou Î:Epyiq. MüDKlO'.VOÇ KO'.l 0EoBouÀoç KCXl
'ArroÀ1vâ.pwç Kcx't Mcxpirov (/111' IX, 24) [fils de M. OÜÀmoç
Manaî Ma.vvmoç Oua.Ba.Ucx0ou toù Ma.vvmou toù EÀcxB11Àou
Ma.Àxoç]; honorent leur père (après Hadrien) ................ p. 184
m'ny br whblt brm'ny 'lhbl(CIS 4134 et 4158) [frère cl'Elahbel,
Shokayaî et Malikû EÀcx�11Àoç LOXO'.lEK Ma.À1xoç ; mari de lVIucianus Mouic1cxvoç 0rn8c6pou MoKipou wù AWLCXÀOD (lm• X,
Beltîhan bltybn brt 't pny brmlkw (CJS 4158 et 4152); famille l et 2 [et 117?]) [fils de 0E68ropoç MoKt�tou; frère de Ma.Àxoç
cl'Elahbel ; fondateur du tombeau de famille (103; meurt le 30 et de 'HÀ168mpoç 0rn8côpou]; clan Haumal; honore un centurion
octobre 121) ............................................................. p. 178,205 de la légion X Gallica ; honore son père ............................ p. 69
Index des Folmyréniens 291
Mucianus MOUKlŒVQÇ MŒÀXOU îOÙ MOKl�lOU Avav18ou(As'AD foa8ou 1où Atpa ywlys' wrlys nbwzbd br s'dw byr'( CJS 3939) ;
et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,n" 7) [fils de Malikû mlkw mqymw stratège(262) ............................................................. p. 33,244
'nnw (?)(n'" 7 et 8)]; famille Ananis(et de Bartê); honoré par
Nes(h)â ns' (ou ns') br/11' br ns' br/11' bnp'J br 'bsyNrn11 AÀa
les Benê Mathabôl ; offre le toit de la basilique du sanctuaire
-coù Nrn17 1où AÀ.a 1où PE<jJO'.EÀou -coù APw0wu( C/S 3916;
d'Arsû ........................................................................ p. 77, 154
lm• X, 124) [neveu de Nebûzabad NE0ouÇapa8oç 1où Nrna];
Narcisse nrqys br J11y 'gylw br mlkw(= nrqys 'gylw) (CJS 4173- famille de Neshâ bar Halâ ; caravanier, synodiarque depuis
4174 et 4185); prend et cède des concessions dans le tombeau Yologésias(142 et 150) ........................... p. 102, 113,142,263
des Trois frères(191) ......................................... p. 59,188,276
Neshâ ni f br blyd'Nrn17 BmÀ1a8ouç(/nv X, 29) [frère de Soados
Narcisse nrqys (lm, IX,28); affranchi(?) ; desservant du sanctuaire foa8oç BmÀrn8ouç(Soaclos); neveu de Zebîdâ zbyd' br s'dw
de Bel(272) ..................................................... p. 188-189,276 br tymsms]; famille de Soados; conduit une caravane; honore
M. Ai�LlÀlOÇ MapKlŒVQÇ 'A01cÀ17mâ811ç(161) ........................ .
Nashûm nswm mlkw nswmNa0cmuµoç MaÀ1xou 1oùNa00owLou
......................................................................... p. 103,125,142
mû l:a�n1nyEpa�LOu (RTP n"' 773-774; GAWLIKOWSKI, 1976,
p. 200) [ancêtre deMalikûywlys 'wiiys sptmyws mlkw br mlwk' Obaîan 'byn br himy (FNO n" 77) [grand-père de Malikû mlkw br
nswm (CIS 3941); oncle de 'IouÀwç Bcfo0oç nswm br zbd' hrms 'byhn]; dédie un autel ............................................ p. 128
(RTF n"' 778 et 837) et de tm' brt .smsgrm (CIS 4508)] ; famille
de Nashûm; symposiarque; peut-être le même que l'anonyme Obaîhan(Publius Aelius) TiémÀrnç AÏÀ1oç opmav17ç l:WLCÔvou
de Inv X,106 ............................................ p. 37-38,47-48,240 1où opmavou wù NoupP11Jcou 'byhn br sm · wn br 'byhn br
nwrbl (CIS 4162) [ancêtre de Obaîhan et Malikû 'byhn et
Nashûm 'IouÀwç Bâ00oç nswm br zbd' br mlkw br nswm (RTF mlkw]; famille de Publius Aelius Obaîhan; citoyen romain ;
n'" 778, 837, 847 et 872 et WADDINGTON 2572(?)) [ancêtre de fondation de la tour n" 164(118) ............................. p. 206-607
Zabclilah Zénobios ywlys 'wrlys zbdlh br mlkw br mlkw nswm
Obaîhan et Malikû(Iulii Aurelii) ywly' 'wrly' 'byhn et mlkw
( CIS 3932); neveu de Nashûm nswm mlkw nswm (RTF n" 773)];
(lm' VII,1b) [descendants de Obaîhan TIÔrrÀ1oç A'Lhoç opmcx,v11ç
famille de Nashûm; symposiarque(178) .......................... p. 48
'byhn br sm · wn]; famille de Publius Aelius Obaîhan ; vente de
NasrallâtNa0paÀÀa8oç MaÀxou 1oùNa0paÀÀa8ou 11$Ilt br mlkw concession du tombeau de famille ........................... p. 206-207
br 11$rlt(et 11$r' br mlkw br n5r') (CJS 4403; lNGHOLT, 1935,
Odainat l:rn1{µ1oç 08mva8oç Atpavou Ouapcx,ÀÀa8ou -coù
p. 109, n" I) [frère de MoKt�Loç MaÀxou et A88ma Mcx.Àxou];
Na0mpou sptmyws 'dynt br byrn whblt n�wr( C/S 3945-3946,
famille de Malchos; fondateur de la tombe de famille(hypogée
4202; GAWLIKOWSKI,1985,n" 13; BS n" 52; lm• XII,37); prince
de Nasrallât) [142] ........................................................... p. 226
de Palmyre, roi des rois,exarque,sénateur(meurt vers 268) ....
NebûlahNEPouÀaç B11Jc0oupou Atpavou 1où B11Jc0oupou 1où .. p. 1-2,5,16,20,28,31,33,39,41-43,49-50,61,86-88,91,
ïa88ap0ou 1où bn KaÀouµÉvou Baa nbwlh br blsw1y br J11yn 102-103, 108, 119, 132, 136, 143-150, 157-158, 169, 181,
br blsw1y br gdr$W dy mtqrn bny b''( CIS 4124; BouNNI,1986, 185-186,191-192,194-196,211,232,235
n" 1 mieux que DFD, p. 86) [frère de Shabî, Nebûzabad et
Ogâ 'g' br 'rtbn br 'g' (SFF n" 41) [père de Shamshigeram smsgrm
Taîmaî; frère de Haîran byrn(GAWLIKOWSKI,1970,p. 82)]; Benê
br 'g' br 'rtbn (SFF n" 20 ?); mari de Bartê brt' brt y1J1y br'(et
Baâ; fondateur du tombeau de famille; attesté dans le sanctuaire
de Shalmat slmt brt smsgnn br bl'qb 'byb (SFF n" 32) d'après
de Nabû(83) ...................................................................... p. 83 SFF, p. 23-24)]; relief dans l'hypogée cl'Artaban ........... p. 175
Nebûmaî (Iulius Aurelius) 'IouÀ1oç Aùp17À1oç NEPowLmoç
Ogâ 'g' br slm' smsgnn br br.. s 'g' br 'ytybl (CIS 4197) [cousin
0m�u0a�L0ou 1où Bmvvwuç l:apa ywlys 'wrlys nbwmy br
deMalê ml' br 'g' br ml']; BenêMazîn; restauration de la porte
tymsms bwn' sby(1111 1 IX,30) [descendant de Shabî sby]; Bené
du tombeau de famille(après 188) .................................. p. 220
Baâ(d'après DFD, p. 88); synodiarque; honoré par la Cité et le
Conseil(+/-250 ) ........................................................ p. 84,264 Ogâ(Julius Aurelius) ywlys 'wrlys 'g' br slm' br lym' br nbwmr
(CJS 4206) [frère de Shalmê slm' br slm' br tym' br nbwmr;
Nebûzâ nbwz' br kptwt (TEIX!DOR, 1997, p. 68-71); serviteur cousin de l'anonyme, fille de Nebôzâ . . . [bI]t nbwz' br tym' br
cl'Odainat (tly' dy 'dynt hptyq' nhyr') ; dédie à Abga] une salle nbwmr]; prend en concession une moitié de tombeau à Bôlmâ
de réunion(263) ............................................................... p. 191 (229) ......................................................................... p. 182-183
NebûzabadNEPouÇapa8oç B11Jc0oupou Atpavou 1où B11Jc0oupou
Ogâ Séleukos(Iulius Aurelius) 'IouÀ1oç Aùp11Jc10ç Oyya 6 Kat
1où ïa88ap0ou 1où Èm KŒÀOWLÉvou Baa nbwzbd br blsw1y br l:ÉÀEUKoç 8k 1où AÇ1Çou 1où l:EttÀa ywlys 'wrlys 'g' dy mtqr'
J11y11 br blswq br gdr$W dy mtqrn bny b'' ( CIS 4124; BouNNI, slwqws br 'zyzw 'zyzw s'y]' (CJS 3934 et 3935) [frère de(?)
1986, n" 1 - mieux que DFD, p. 86) [frère de Shabî, Nebûlah Bôlnâ bwln' br 'zyzw br 'zyzw br s'y]']; stratège; honoré par
et Taîmaî; frère de Haîran J1yrn (GAWLIKOWSKI, 1970, p. 82)]; le Conseil et le Peuple; chevalier romain(254 et 259) .............
Benê Baâ; fondateur du tombeau de famille; attesté dans le ................................................. p. 58,61-62,69,153,178,243
sanctuaire de Nabû(83) ..................................................... p. 83
Ogeîlû 'gylw br mqymw br 'gylw (RSF n" 161); fait une statue
NebûzabadNEPouÇapa8oç 1où Nrna 1où AÀa PE<)lm1Àou 1où dans le sanctuaire de Baalshamîn .................................... p. 194
APt00a10u nbwzbd br ns' br /11' bnp'J 'bsy(GAWLIKOWSKI,1975,
p. 131) [oncle de Nesâ ns' br /11' br ns'Nrn17 AÀ.a 1oùNrn17]; Ogeîlû 'gylw br tymy br zbdbwl (CIS 3922); honoré par ses fils
famille de Neshâ bar Halâ; fondateur du tombeau de famille dans le sanctuaire de Bel; Benê Kornarê(28) ................... p. 80
(120) ................................................................................. p. l 02
Ogeîlû 'gylw br 'wsy br khylw (CIS 4119); famille de Kohaîlû;
Nebûzabad nbwzbd br zbdbwl sm'wn(CANTINEAU,1931,p. 127, Benê Mîtâ; Palmyrénien,fondateur d'un tombeau(57) ... p. 52
n" 8) [père de Tammê lm' brt nbwzbdet mari de Ambaî 'mby brt
Ogeîlû 'gylw br 'g' br mqymw br J1dwdn( C/S 4193) [père de Ogâ
bgdn br mlkw]; honore sa fille(après 168) .................... p. 167 'g'; mari de Amathê 'mt/1' brt bwn']; clan Shewîrâ; fait des
Nebûzabad(Iulius Aurelius) 'IouÀrnç AùpfÎÀwç NEPouÇapa8oç statues dans le tombeau de famille; Palmyrénien(73) ..... p. 52
292 Les notables de Palmyre
Ogeîlû 'gylw br bw17J' (CANTINEAU,1930a,p. 548,n" 14) [mari de Sammaî 'w1ly' .�my brt J.sms (INGHOLT, 1935, p. 88, IX); prend
Shalmê slm' brt bwlb' brt bw1p'];absent lors de la cession d'une une concession dans le tombeau de IuliusAurelius Malê (237)
partie du tombeau de famille par sa femme (171) ........... p. 174 ................................................................................. p. 174,202
Ogeîlû Oy1111.oç M<XKK<Xlûu 1oû Oy1711.ou wû AyEyou 1oû LEouî.pa Samsigeramos LqtmyEpa�Loç (lnv VIII, 202) ; stèle funéraire ....
'gylw br mqy 'glw swyr' (lnv X, 44) [descendant de Hagegû ......................................................................................... p. 225
bggw br tym' swyr' et de Sewîrâ swyr' br lym';ancêtre de Ogeîlû
'gylw br mqyMwdnJ1d'(CANTINEAU, 1931,p. 138,n" 17)] ;clan Seiba (Iulius Aurelius) 'Iou11.1oç Aùp1111.1oç LEt�a A8170'.Ka�ou
Shewîrâ ; famille de Ogeîlû Maqqaî ; stratège des nomades ; (lnv III,5); stratège éponyme (224) .......................... p. 10,243
synocliarque; honoré par le Conseil et le Peuple et les tribus Séleukos slqws br typyls br slqws (INGHOLT,1938, p. 104) [neveu
(199) ............................... p. 21,40,55,104,114-117,242,264 (côté maternel) de Iarhibôlâ yrl.1bwl' br sbyn' br tym']; cède
Ogeîlû (IuliusAurelius) ywlys 'wrlys 'gylw br 'prht bd11y zbdbwl une concession dans un tombeau (hypogée de Séleukos) [251]
br mlkw 'swyt (= ywlys br 'wrlys 'gylw) (INGHOLT,1935,p. 98, ......................................................................................... p. 183
n., VII et 1962,p. 106) [père deAphrahate 'p1N br 'gylw];prise Shabî L<X�aç B1711.croupou Atpavou 1oû B1711.croupou wû ïaooapcrou
et cession de concession clans un tombeau de famille (tombeau 1oû ÈmKaÀ.oupÉ.vou Bmx .sby br bl.swiy br J.11yn br bl.sw1y br
de Malikû) [214] ........................................................ p. 59,193 gdr:;;w dy mtqrnbny b''(C/S4124;BouNNI,1986,n" 1- mieux
Parnak pmk br J11y Jsms br smsgnn (CIS 3996); dédie un autel à que DFD, p. 86-) [frère de Nebûzabacl, Nebûlah et Taîmaî;
celui dont le nom est béni à jamais (au dieu anonyme);affranchi grand-père des Shabî sby ( CIS 4125) et ancêtre de Nebûmaî ywlys
(125) ........................................................................... p. 60,276 'wrlys nbwmy br tymsms (lnv IX, 30); frère d e Haîran byrn
(GAWLJKOWSKI,1970,p. 82)] ; Benê Baft;fondateur du tombeau
Pasâ p:;;' brt ns' bggw ( CJS 4232,mieux que lm• IV,17) [mère de de famille; attesté clans le sanctuaire de Nabû (83) .......... p. 83
Pasaîel (p:;;y'1) ; femme de Hagegû bggw br ml' whbll] ; relief
funéraire ........................................................................... p. 178 Shalamallat LO'.À.�LaÀ.À.a8oç (SEYRIG, 1937, p. 372) [fils du
bienfaiteur anonyme] ;poursuit les bienfaits de son père p. 162
Pasaîel p:;;y'J (CIS 4232, mieux que lnv IV, 17) [fils de Hagegû
J1ggw br 1111' whblt et de Pasâ JJ$' brt ns' bggw]; relief funéraire Shalamallat LO'.À.apaUa8oç [Iap1�co11.rnuç wûl Noup�1711.ou wû
......................................................................................... p. 178 ÈmKaÀ.oupÉvou... slmlt br [y1J1bwl]' br nwrbl dy 111tql11 [. ..] br
ydy' bl ( CJS 3966 = lnv II, l = RSP, n" 156); Benê Mazîn ;
Phi... (Tiberius Claudius) Tt�Ép1oç K11.aû8toç $tl...l tb1ys qlwdys Palmyrénien; honoré par Allât,sa tribu et le Peuple(?) [64] .....
py- (/nv X, 128); Romain; militaire romain, préfet d'aile, ..................................................................................... p. 17,52
tribun de légion; citoyen palmyrénien (milieu n" siècle) ..........
................................................................. p. 114,120,124,266 Shalamallat L<XÀ.�taUa8oç Ma11.1xou wû ôt0vucriou slmlt br mlkw
br dynys(RSP n'" 24,25 et 28) [fils de Malikû mlkw (RSP n" 25);
Phileinos (?) Aùp1711.î.[oç $111.Etvod Aùp1111.î.ou 'H11.1oocôpou 1oû père de Hennibel bnbl (RSP n" 24) ; mari de Pristina pr.stn' brt
Pamou 'wrlys plynws br miy' plyn' r'y (C/S 3944); militaire tymr:;;w br 'tzbd (RSP n'" 24 et 29) et cousin de Zabclateh zbd'th
de la légion Cyrénaïque; honore Haîran,fils de Odainat (251) br l_mbl br dynys Za�oaa817ç Evv1�1711.ou wû ôtovucriou (RSP
......................................................... p. 144-145,267,269,274 n" 24)] ; famille de Shalamallat;fonde l'hypogée de Shalamallat
Prima (Iulia Aurelia) 'IouÀ.rn Aùp1711.1a ITpÎ�L<X à1i:EÀ.Eu8Épa (147) .................................................................................. p. 175
Aùp17À.Î.aç 'AK�lllÇ 'AVîlÔXOU îOÛ KO'.l ÜÀ.<Xl<pEl ywly' '1ly' p1ym' Shalamallat (Iulius Aurelius) 'Ioû11.1oç Aùptj11.10ç I:aÀ.apaUa8oç
brt bïY' 'Vv'ï])l' 'qïn' brt 'nJy'k,s blyJJY' (lnv I\1, 13 ; GAVVLiKOVv'SKI, MaA17 1oû A138mouywlys 'w1Jysslmlt br ml' 'bdy(C!S 3936);
1975, p. 129) [femme de Hermès 'Ioû11.10ç Aùp1111.10ç 'Eppiîç archemporos; caravanier (257) ............... p. 104,118,152,264
à1ŒÀ.Eu8Epoç Aùp1711.îou ywlys 'wrlys ]11111s br J11y 'wrlys];
affranchie ; fondatrice du tombeau de famille, en vend une Shalman slmn br tymr:;;w br skky ( CJS 4113 = lnv VIII,56) [grand
concessi011 (232 et 242) ........................................... p. 188,276 père de Shegel sgl brt skyy, femme de Wahballat whblt, mère
d'Elahbel et de ses trois frères (/nv IV,27q = C/S 4149)] ;famille
Pristina prstn' brt lymr:;;w br 'tzbd (RSP n'" 24 et 29) [mère de de Kîtôt ( CJS 4113 et 4115);Benê Mathabôl;fonde le tombeau
Hennibel bnbl br slmlt br mlkw (RSP n ° 24) ; femme de de famille (9) ................................................................... p. 179
Shalamallat LO'.À.paÀ.À.a8oç Ma11.1xou slmlt br mlkw br dynys
(RSP n° 24)] ; famille de Shalamallat; concède une partie de Shalman slmn br kytwt br tymr:;;w br kytwt br tym' rb'(CIS 4115b)
l'hypogée de Shalamallat à Zabdateh zbd'th br bnbl br dynys [fils de Kîtôt kytwt br tymr:;;w br kytwt br tym' rb' et de mys'
(147) ................................................................................. p. 174 brt .....w ; frère de Lishamsh Jsms '? ; parent de Shegel sgl brt
skyy, mère d'Elahbel et de ses trois frères] ; famille de Kîtôt;
Qûpâ qwp' br s1ykw y1J1y (SAFAR,1964,p. 13,n'" 3 et 6); police Benê Mathabôl (41) ......................................................... p. 179
des nomades ? (98) ............................................................ p. 93
Shalman "s/11111 y111bwl' mlkw "by (RTP n'" 3 l et 34 et peut-être
Rabbel rb'l br bym bgsw (CJS 3968 = lnv VI, 6 = RSP n., 157) l'anonyme de C/S 4458) [fils de Iarhibôlâ yrbbwl' br mlkw
[père cleAttaî 'ly brt rb'J bgsw(CIS 4455 d'après RTP p. 169)] ; (/nv XII, 48 et 49) et petit-fils de Malikû Ma11.1xoç Arnaµcrou
famille de Bageshû ; Benê Hashash; Benê Komarê; épimélète mlkw br lsms(/nv X,131)] ; BenêAabeî; symposiarque (après
du sanctuaire de Malakbel et Aglibôl; dédie statue de ... clius 120) ...................................................................... p. 51,59,240
gouverneur (134 ) .............................................................. p. 60
Shalman slmn tly' dy 'gylw kylywn(PNO n° 14);serviteur;dédie
Rauhibel rwbbl brJ11y 'mtslmn btJ11y sgl brt zbyd' (INGHOLT,1935, un autel aux Génies (gny') et y associe ses frères (270) ... p. 191
p. 91,II) [père de Ogâ ywlys 'w1lys 'g' br rwbbl (V,IX et X)] ;
affranchi (d'une affranchie !); prend une concession clans un Shalmat (Iulia Aurelia) ywly' 'wrly' slmt brt 'bd'stwr br y1J1bwl'
tombeau de famille (tombeau de Malikû) [186] ...... p. 192,276 (INGHOLT, 1938, p. 124-125, II); cède une concession dans
l'hypogée d'Abdastôr (239) ............................................. p. 174
Refabôl 1pbwl br 't' qb (INGHOLT,1974,p. 50 = PAT 2728);famille
de Refabôl,fils deAteaqab; fonde la tombe de famille (123) .. Shalmat slmt brt bw1p' 'tt bwlbJlc(/nv XII,5) [femme de Bôlbarak
......................................................................................... p. 177 bwlbrk]; relief dans l'hypogée de Bôlbarak .................... p. 176
Index des Palmyré11ie11s 293
Shalmat ?Umt brt smsgrm br bl'qb 'byb (SFP n" 32) [mère de avoir offert sept colonnes de la basilique et un kcmôn cle bronze
Shamshigeram sm.c;grm br 'g' br 'rtbn (SFP n" 20); femme de (179) ............................... p. 20,33,50. 72-75,77,83,167,180
Ogâ 'g' br 'rtbn br 'g'(SFPn"41,cl'aprèsSFP,p.23-24)];relief
Soados Locxooç BcoÀmoouç s'dw br blyd' br s'dw br
dans l'hypogée cl'Artaban ................................................ p. 175
(ES n" 45; GAWLIKOWSKI, 1970a, 11° l ; /111• X, 56; DRUVERS,
Shalmêslm' brt bwfb' brt bw1p'(CANTINEAU, 1930a,p. 548,n ° 14) 1995a; PAT 1062)[neveu de Zebîdâ zbyd' br s'dw br tymsms;
[femme de Ogeîlû 'gylw br bw1p ']; cède une partie de tombeau frère de Neshâ n'i' br blyd']; famille de Soaclos; bienfaiteur à
de famille au nom de son mari ( J 71) ............................... p. 174 Vologésias; caravanier; félicité par les gouverneurs ; honoré
par des caravanes, les tribus,le Conseil et le Peuple (132,144,
Shalmê LcxÀ�Lllç McxÀ1xou wû BcoÀmoouç slm' br mlkw br blyd'
145/146,147) .............................................................................
( CIS 3970; RTP n" 821); grand-prêtre et symposiarque de Bel;
dédie six statues de Septime Sévère et sa famille (203) ............ p. 32-33,40,43,47,59,70-72,88,97,101-106, 109-114. 117,
........................................................................... p. 42,123,242 120,122-123,125,142,145. 160,206,215,232,234, 263-264
Shalm.ê (Iulius Aurelius) ywlys 'vvrlys slm' br slm' br tym' br Taîbbôl tybwl br ? br ? = tybwl br 1/Ims tybwl rb · (fnv X, 13 et
CIS 4288 : même personnage selon DFD. p. 112-113,ce qui est
nbwmr (CIS 4206) [frère de Ogâ 'g' br slm · br tym' br nbwmr;
cousin de l'anonyme, fille de Nebôzâ ...[bJ]t nbwz' br tym' br douteux) [ancêtre de Halafû f1lpw brt f1Jp' br Jsm.s tybwl rb'
nbwm1] ; prend en concession à Bôlrnâ une moitié de tombeau
( C/S 4289) ; parent de Azîz 'zyz br lybwl dy mtqr' · bd';
(229) ......................................................................... p. 182-183 descendant de Lishamsh Jsm.s br tybwl br .skybl (lm· IX, 1);
clan Shokaîbel; secrétaire du Conseil : honoré par le Conseil et
Shalmêslm' bryrbybt/'(TAKAYAsuet TAKURA[éd.],1994,p. 139); le Peuple; donne 500 deniers (comme swnma honoraria '?);
relief dans l'hypogée C de la nécropole sud-est .............. p. 200 prêtre d'après DFD, p. 112-113 (prêtre coiffé du modius en C/S
4288) [213] .................................... p. 35,40-41,151,153,243
�11an1s1112t'�ram smsgrm br 'g' br 'rtbn(SFP n" 20)[fils de Shalmat
slmt brtsmsgrm(SFP n" 32) et de Ogâ 'g' br 'rtbn(SFP 11° 41?)]; Taîbbôl tybwl br 'bd' br tybwl (INGHOLT,1935,p. 76,n" II); prend
relief dans l'hypogée d'Artaban ...................................... p. 175 une concession clans le tombeau de Iulius Aurelius Malê ( 193)
......................................................................................... p. 202
Shebhaî .sbby brt sf1r' (BS n" 10) [sœur de Attaî 'ty]; dédie deux
colonnes clans le sanctuaire de Baalshamîn (23) ............. p. 170 Taîmaî 8m�m1oç B11À0oupou A1pcxvou wu B11À0oupou i-oû
ïcxoocxpuou îOÛ ÈmKa.ÀouµÉvou Ba.ex tymy br bl.sw1y br Z11yn br
.sgl brt skyy br iilmn br tynm;w rb' (fol' IV, 27q
blsw1y br gdn;w dy mtqm bny b" (C/S 4124; BouNNI, 1986,
= CIS 4149) [petite fille de Shalman .slmn br tyn11�1,w br skyy
(CIS 4113); mère d'Elahbel et de ses trois frères (C/S 4134);
n" 1 - mieux que DFD, p. 86) [frère de Shabî, Nebûlah et
Nebûzabad; frère de Haîran byrn (GAWLIKOWSKI,1970a,p. 82);
femme de Wahballat ( whblt br m'ny)]; famille d'Elahbel et
père deAlaîshâ et Belshûrî (GAwLIKOWsKr,1971,p. 422)]; Bené
famille de Kîtôt; Bené Mathabôl; buste funéraire . p. 178-179
Baâ; fondateur du tombeau de famille; attesté clans le sanctuaire
.sgl brt 'lhbl br whblt (CIS 4155) [fille de Marcus Ulpius de Nabû (83) .............................................................. p. 83,210
Elahbel (CIS 4134);femme de Wahballat whblt br mlkw br whblt
Taîmarsû tymr,';w br lym' swyr' (SAFAR,1964,p. 18, n" 8) [frère
(CIS 4142)]; famille d'Elahbel; relief funéraire .... p. 178,183
de Hagegû bggw br tym' ifwyr']; clan Shewîrâ; police des
sgl brt bw1p' (C!S 4547); origine égyptienne . p. 120,269 nomades? (98) ................................................... p. 94,116,240
Shoadû Locx8oç Gmw:ouç i-oû Awcx�wcxwu wû Oy117'.ou wû Taîmarsû 0mµcxpuaç Awa�Luou wû MaÀ1xou mû Acxpa tym1�1,w
r28nP11Àou s'dw tym' br lsmsy br 'g' ydy'bl(CIS 3904; 3920) füns br mlkw '' by (CIS 3963)[ancêtre de Mezabbanâ mzbn' br
[fils de Taîmê 8m�u1 Arncx�L0cx10u tym' br lifmsy; frère de mlkw et Taîmarsû tymr0 w br mlkw (C/S 4456 et 4457); neveu
Lishamshaî lsmsy br tym' br lsmsy (lm XI, 2)]; famille de de Iarhibôlâ yrbbwf' br mlkw (fnv XII, 48); petit-neveu de
Hagegû; dédie un objet aux dieux ancestraux à Rome; dédie Malikû Ma7i.1xoç Awcx�Loou mlkw br lsms (lnv X,131 )] ; Bené
une statue posthume de son père à Palmyre (127) ..... p. 54,120 Aabeî; honoré par les caravaniers (début Il" siècle) .. p. 50,264
Shoadû Locx8oç ncxp177i.ou McxÀtXOD mû Bcxp817 .f dw br 'Jhbl Taîmarsû tymr0w br tym' br mqymw grb' 0mµapua 8mµ11 wu
mlkw brt' (As'AD et ÜAWLIKOWSKI, 1986-1987 n'" 2 et 3) [fils MoKt�Lou i-où ïa.ppa. (C/S 3948) [père de I cxoomoç et
cl'Elahbel 'lhbl br mlkw (fnv IV, 12); père de Malikû McxÀxoç Za"p01pco;\oç; frère de z.cpaocx]; chef caravanier;synodiarque?;
Locx8ou mlkw br s'dw (n'" 1 et 4); frère de Iarhibôlâ y1)1bwl br fait don de 300 deniers poids ancien (193) p. 15, l 02,152,264
'fhbl (n" 5); mari de Betheî fü:00w;; MouKtcxvoû (n" 2)];famille
de Bartê; Bené Mathabôl?; honoré par les Bené Mathabôl (201 Taîmarsû (Iulius Aurelius) ywlys 'wrlys tym1�1,w .... br 'wyd' br
mlkw (fnv VII, 1 b); prend une concession clans la tour n" 164 .
et 208) ............................................................ p. 58,76-77,167
......................................................................................... p. 206
"'-hnk,'11,,,�. LOXCüElÇ Oucxpcxncxeou îOÛ Mcxvvmou i-où EÀcxP11Àou
Tahné (Publius Aelius),Publius Aelius Theimes (!DR III/2, 18),
skyy br whblt br m'ny 'Jhbl (CIS 4134; BouNNI, 1986,n" 2 et
duumuiralis de la colonie de Sarmizegetusa sous Hadrien .......
RTP 11'" 376 et 825) [frère de ncxp17Àoç Kcx't Mcxvvmoç Kcx't
................................................................................. p. 119,270
Mcx7i.1xoç; mari (et oncle?) de Amatê 'mt' brt 'Jhbl br whblt
(C/S 4145)]; famille d'Elahbel; fondateur du tombeau de Taîmê 0cxw11 Awcx�L0cx10u wû Oy17Àou wû I2821p17Àou tym' br
famille; honoré par le Conseil; symposiarque de Bel (l 03 et Jsmsy br 'g' ydy'bl (CIS 3920) [père de Lishamshaî lsmsy br
113-114) ............................................... p. 81-82,178,205,240 tym' (lm• XI,2) et de Shoadû Loa.8oç 8mµ11 Awaµumou if'dw
tym' br Jsmsy (CIS 3920)]; famille de Hagegû; honoré par son
Shoraîkô Lopmxoç Atpavou wù AÀmv11 L2<j)<j)2pcx .s1ykw br bym
fils Shoaclü après sa mort en 127 ............................... p. 54,147
br 'Jyn' 0 pr' (CIS 3952 et 3954) [père de Iaclê fcx811 Lopmxou
yd' br ,{1ykw et de Haîran Hérôdès Atpcxv11ç 6 Kcx't 'Hpw81w Taîmê tym · br Z1Jpt' br' th 'Jçy 8m�u7 AÀcx<j)cx0cx Bcxpcx0ouç
Lopmxou bym br s1ykw;mari de Martheî Mcxpea 'AÀ2çcxv8pou AUmmou (lm• X,119) [père de Halaftâ b/pt' et Haggê bg'];
mrly brt yd'; frère de Alaînê AÀcxtv11 A1pcxvou 'fyn' br bym]; honoré avec son fils par sa fille (214 en palmyrénien et 216 en
famille de Alaînê;Bené Zabclibôl?; honoré par le Conseil pour grec) ................................................................................. p. 167
294 Les notables de Palmyre
Taîmhê tymb' br tymf (SAFAR, 1964, p. 13, n"3); police des prend et cède concession dans l'hypogée de Lishamsh (186 et
nomades ? (98) ................................................................... p. 93 228) .......................................................... p. 177,186,192,276
Tammê 1111' bltnbwzbd brzbdbwlsrn'wn(CANTINEAU,1931,p. 127, Wasehû (IuliusAurelius) 'IouÀ.wç Mip1iÀ.wç Ouacrrnç MaÀ.1xou
n"8) [fille de Nebûzabad nbwzbd et deAmbaî 'mby lm bgdn br wù Ouacrrnu Ns�ouÀ.cx (?) ywlys 'wrlys wsbw br mlkw br wsbw
mlkw] ; honorée après sa mort par ses parents (après 168) ....... nbwl' (?) (/nv X, 115) [père de Malikü 'IoÛÀ.tüç Aùp1iÀ.t0ç
......................................................................................... p. 167 MaÀ.1xoç Ouacrrnu ywlys 'wrlys mlkw br wsbw] ; a accompli
toutes les liturgies (milieu dn 111° siècle ?) ................ p. 185,243
Tammê tm' brt smsgrm br mlkw br nswm (C/S 4508) [cousine de
Nashûm 'loÛÀ.toç Bcxcrcroç nswm br zbd' br mlkw et nièce de Worod Imi:i�L1oç Oùopm811ç sptmys wrwd (C/S 3937,3938,3939,
Nashûm nswm mlkw nswm] ; famille de Nashûm ............ p. 48 3940,3941,3942,3943; Jnv III,3; CIS 4105ter; SEYRIG,1963,
p. 161); ducénaire; agoranome, symposiarque, stratège de la
T héodôros (Iulius) 'IoÛÀ.1oç 0rn8mpoç 'Aypinou -coù MapKÉÀ.À.ou
colonie; sénateur; bouleute; honoré par le Conseil et le Peuple;
ywlys 'wrlys tydrws br 'g1p' br mrql' (CIS 4209); acheteur du
patron (258,262,264 et 267) ......... p. 33-34,38-43,49-50,53,
tombeau n"150 (après 236) ............................................. p. 214
55-56, 59-60, 70, 101-104, 106, 118, 122-124, 132, 136, 140,
T hmnallachis 0oµCY.À.À.cxx1ç A88ou8avou toù lapt�mÀ.rnuç 1:où 143-150,152,157-158,160-161,192-193,211-212,244,264
A88ou8avou -coù <Dtpµmvoç (lNGHOLT, 1936 p. 109 et peut-être
Zabbai (Septimius) Irn1:i�Ltoç Za��moc;, sptmyws zby (Zaba
p. 88) [sœur de Awîdâ AouEt8oç A88ou8avou et de Haddüdan
(C/S 3946 et 3947; Histoire Auguste, Vito Aurel., XXV, 2-3);
bdwdn br bdwdn prmwn; cousine de Iarhibôlâ lapt�mÀ.l)ç Ey11];
général de Zénobie et Odainat (6 Èv0cx8s 01:pm11À.cx1:11ç ; rb byl'
famille de Firmôn; Benê Komarê ?; évergète-constructrice d'un
dy tdmwrqrtstw) [271] ............................ p. 149-150,169, 196
bain ; honorée par les Benê Komarê (182) ................................
.................................. p. 152,159-161,164,168-170,173,196 Zabdas (Septimius) sptmyws zbd' IEmi�uoç Za�fo.ç Saba (CJS
Ti tianus (Iulius Aurelius) 'l ou À.toç A ù p1i À.toç Tn{ avoç 3946 et 3947; ZosIME I, 44, 1 et 51, 1; Histoire Auguste, Vito
'A811vo8mpou (Inv III,5); stratège éponyme (224-225) ........... Clau., XI, 1); général de Zénobie et Odainat (o �LÉyCY.ç
................................................................................... p. 10,243 01:pm11M1:11ç rb byf' rb' qr_tstw) [271] ......................................
......................................................... p. 149-150,157,169,196
Valens wls br mrqws (RSP n" 63); buste dans l'hypogée de
Zabdateh et Moqîmû (vêtu à la romaine) ........................ p. 203 Zabdibôl zbdbwl br b'ybw (Du MESNIL ou Bu1ssoN, 1939, n"1);
Benê Gaddibôl; fondateur du temple de Bel et Iarhibôl à Doura
Wahbâ whb' br mlkw ml' ( CJS 4008) [frère de Malê ml' br mlkw (32 av.) ............................................................................. p. 107
(C/S 4014)]; dédie autel à celui dont le nom est béni à jamais
(191) ........................................................................... p. 86,171 Zabdibôl Zcx�8t�coÀ.oç Oy11À.ou rnù A�L�La0ou rnû AaxEt zbdbwl
br 'gylw br 'mt br... (/nv X, 40); Benê Mazîn; Palmyrénien,
Wahbaî whby br 'g' br whby (BS n"6) [frère de Malikû mlkw br honoré d'une statue par les marchands remontés de Spasinou
'g' br whby br blbzy (BS n"7) et de Bolhazaî blbzy br 'g' br Charax (81) ................................................................ p. 52,263
whby bwlbzy (BS n"43) et neveu des frères de lm• VIII, 59 (?);
cousin de Zebâ zb' br tymn' br whby br blf1zy (BS n"38)]; famille Zabdibôl Za�8t�wÀ.oç Zcx�8t�mÀ.ou 1:0ù ZCY.�8aCY.0ouç 1où
de Belhazaî; Benê Mazîn; dédie un portique dans le sanctuaire AKKCX�EÀ.ou (Inv X, 125); honore un préfet cl' aile (Claudius
de Baalshamîn .................................................................. p. 141 Celsus) ............................................................................. p. 205
WahbaHai whblî bï mtny br gdr$\V br mtny br qynw br 'rlty hr Zabdibôl Za�81�mÀ.oç zbdbwl(C/S 3948) [fils de Taîmarsû lymr�w
ydy'bl (BS n"60) [lié à Gacldarsû gdr$W br y1j1y br gdr$W br · ty br tym' 0awcxpcra 0mµ11; frère de Iaddaî Iaoomoc_, Gm�tu.pcro:;
(RSP n"143) descendant lui aussi de Matnaî mtny brqynw br'ty neveu de Zebîdâ Zs�Et8a] ; honoré par les marchands d'une
rb' (père du père de son père ou bien père de ses pères)]; Benê caravane (193) ........................................................... p. 15,102
Iedîbel; Benê Mazîn ?; ouvre une tombe clans le sanctuaire de Zabdibôl (luliusAurelius) ywlys 'wrlys zbdbwl br zbdbwl khylw
Baalshamîn (11) ................................................................. p. 65 (lNGHOLT, 1935, p. 85, n"VII); prise de concession dans le
Wahballat whblt br mlkw br whblt (CIS 4142) [fils de Malikû,un tombeau de IuliusAurelius Malê (235) ........................... p. 202
des quatre fondateurs de la tombe (C/S 4134); mari de Shegel Zabdilah zbdlh br b1yky br nwrbl qynw (BS n"37) [même famille
sgl brt 'lhbl br whblt, sa cousine (CIS 4155)]; famille d'Elahbel; que Gaddarsû gdr$W br y1J1y br gdr$W br 'ly (RSP n" 143) et
relief funéraire ......................................................... p. 178,183 Wahballat whblt br mtny br gdr�w br mtny br qynw y1J1y br 'dty
Wahballat whblt br m'ny br whblt (C/S 4144) [fils de Manaî,un br ydy'bl (BS n"60)]; Benê Iedibel; Benê Mazîn ?; honoré par
des quatre fondateurs de la tombe (CIS 4134); mari deAmatê les Bené Mazîn (32) ........................................................... p. 65
'mt' brt skky br whblt 'tt whblt br m'ny (CIS 4153)]; famille
Zabdilah Zcx�8tÀ.CY.ç Icx�Lcrtyspa�wu loucra zbdlh br sm.sgrm 'ys'
d'Elahbel; relief funéraire ............................................... p. 178
(lm• X, 39); secrétaire ; honoré par le Conseil (75) ..................
Wahballat whblt br.i;m'wn (RTP n'"696 et 724) [grand-père de ....................................................................... p. 10,18,37,240
Martheî Map0Etç 'AÀ.sl;cxv8pou toù ica't Ia811 mrty brt yd'] ;
Zabdilah Zénobios (luliusAurelius) 'IoÛÀ.toç AùptjÀ1oç Z11vô�1oç
famille deAlaînê; symposiarque ? (vers 120) ........ p. 180,240
6 Ka't Za�8tÀ.aç 8k MCY.À.XOD toÙ Nacrcrouµou ywlys 'wrlys
Wahballat Athènodôros Oua�aHa0oç 'A811vo8olpoç spfymyws zbdlh br mlkw br mlkw n.swm (C!S 3932); famille de Nashûm ;
whblt 'tndrws L. Iulius Aurelius Septimius Vaballathus stratège de la colonie,agoranome,citoyen; honoré par le Conseil
Athenodorus (C/S 3971; BAuzou, 1986, p. 2-6; OGJS 647; et le Peuple ; félicité par le préfet du prétoire ; accueil de
CIL III,209a (= 6728); P Oxy 1264, BGU 946) [fils d'Odainat l'empereur Sévère Alexandre (242-243) .................................. .
et Zénobie]; roi des rois (271) .................................................. ......... p. 13, 19,39,49-50,55,61,69,100,119,152,188,243
.................. p. 28,42,88,91,119,138-140,148-149, 169, 181
Zebâ zb' br lymn' br whby br blbzy (BS 11 ° 38) [cousin de Wahbaî
Wardan wrdn b1)11y 'ntykys 1pbwl br 't'qb(INGHOLT,1938,p. 106 whby br 'g' br whby (BS n"6) et de Malikû mlkw br 'g' br whby
et 110); affranchi de la famille de Refabôl, fils de Ateaqab; br bl{Jzy (BS n"7) et de Belhazaî blfv-:y br 'g' br whby bwl/1zy
Index des Polmyréniens 295
(BS n" 43)]; famille de Belhazaî; Bené Mazîn; honoré par les Zebidâ Zénobios Z11vcî�1oç Atpavou Moict�Lou 1où Atpcxvou 1où
prêtres de Baalshamîn (49) .............................................. p. 141 Ma.eea zbyd' bI)1yrn brmqymw brbyrn mt' (CJS 4168 = bn· IV,
9a; lnv IV, 9c) [fils de Haîran A1pav11ç l1yrn (CIS 3930); père
Zebîdâ zbyd' brbwml (SAFAR,1964,p. 13, n °' let 3 et p. 16,n" 5) de BCDÀcxvoç Z11vo�10u 1où Atpcxvou; frère deAaîlamî AmÀcx�LEK
[grand-père de 0ECÎOCDpoç MOK1�LOU îOÛ ZE�ElôOU AWLŒÀOU Atpavou Moict�Lou · 'ylmy brbyrn brmqymw; mari de A�La0m1ç
(lnv X, 2) - ou bien le même d'après Milik:]; clan Haumal; MouKmvoù (lm· IV, 9c)]; famille deAaîlarnî et Zebîdâ; fondateur
stratège? (98) .................... p. 37, 65,69,93,96, 115-116, 240 du tombeau n" 85c (149) ............................................ p. 38,214
Zebidâ Zs�nooç 0m�Locx�LE8ou zbyd' br tym'md mskw (SAFAR, Zebidâ Zénobios (IuliusAurelius) 'lo'ÛÀ1oç Aùp11À1oç Z11v6�10ç
1964,p. 18,n" 8 et p. 19,n" 9; CJS 3994); trésorier; police du Aa0CDpou 1où ZE�t18ou ywlys 'wrlys {zbdyd'J br 's,twr zbyd'
désert (98 et 114) ....................................................... p. 37,240 (CIS 4209) [descendant de Zebîdâ zbyd' 's,twr (RTP n" 997);
neveu de Zebîdâ 'lo'ÛÀ10ç Aùp11À10ç ZE�t18cx MoK:t�Lou 1où
Zebîdâ zbyd' br ,{:'dw br tymsin{: (CIS 3919) [oncle de Soados et ZE�t18ou Aa0mpou Bmocx ywlys 'wrlys zbyd' br mqymw br
de Neshâ ns' br blyd' (lnv X,29)]; famille de Soados; prêtre de zbyd' br 's,twr byd' (CIS 3933)]; famille de Zebîdâ Asthôr;
Bel; symposiarque; félicité par Iarhibôl ; honoré par le Conseil vendeur d'un tombeau (après 236) .................................. p. 214
(117) ................................................................... p. 88,110,240
Zebîdâ Zénobios et Samuel Z11v6�10ç Ka\ La�tou11Àoç A110u\ 1où
Zebidâ ZE�aocx Nrncx zbyd' brns' (C/S 3913); archonte éponyme 'la,rnu�ou zbyd' wsmw'J bny lwy br y'qwb br smw'l
(137) ............................................................................. p. 9,240 (CIS 4201); fondateurs du tombeau de famille (212) ...............
................................................................................... p. 61,216
Zebidâ ZE�ElOCX 0m�lll 1où Moict�Lou 1où ïcxp�cx (lnv III, 26)
[frère de Taîmarsù 0m�Lcxpcm (CIS 3948) et oncle de Iaddaî et Zénobie Batzabbai Lrnn�Licx Z11vo�î.a euy[ch1wl 1où 'Avnoxou
Zabdibôl Icx88moç et Zcx�81�CDÀoç (CIS 3949)]; honoré par le sp.lymy' btzby bt 'n_tywkws (CIS 3947; CLERMONT-GANNEAU,
Conseil et le Peuple; fondateur (158) ............... p. 35,102,156 1920, p. 391-399 et p. 410-414 [d'après WADDINGTON 2629];
OGJS 647; CJS 3971) [mère de Oucx�aÀÀa0oç 'A011vô8mpoç
Zebîdâ zbyd' br' lhs br l { dy br 'Jhs ZE�ElôCX EÀCXCTCTCX îOÙ LcxEOEl sp,tymyws whblt 'tndrws; ancêtre de L. Septimia Patabiniane
1où EÀcx00cx (RTP n" 775 et CIS 4187 = lm• IV, 2) [oncle de Balbille Tyria Nepotilla Odaenathianae (CIL VI,1516); femme
Elahshâ 'lhs' br tyms br 'Jhs' (CIS 4187,4191 et RTP n'" 725 et d'Odainat]; famille d'Odainat (271) ..... p. 1-2,5,7,17-18,21,
695)]; Bené Mathabôl; symposiarque (vers 166 ou trente ans 34,49-50,61,70,87-88,91,119-121,126,135-140, 143-144,
avant pour DFD, p. 27) ............................................ p. 182,242 148-149,157-158,165,168-169,173,181,195-196
Zebîdâ (luliusAurelius) 'Io'ÛÀ1oç Aùp11À10ç ZE�t18a Moict�Lou 1où Zénobios Z11vcî�10ç 6 1m't Etan�cxç lcxp1pcoÀrnuç (Pre!. Rep.
ZE�Et8ou Aa0CDpou Bmocx ywlys 'wrlys zbyd' br mqymw br VII/VIII, n" 846 = DFD, p. 336-337); stratège des archers à
zbyd' 's,twrbyd' (CJS 3933) [descendant de Zebîdâ zbyd' 's,twr Dourn (170-171) ...................................................... p. 109,242
(RTP 11° 997); oncle de Zebîdâ Zénobios 'Io'ÛÀ10ç Aùp11À10ç Zeqâ zq' et zq,trly (même personne ?) [GAWLIKOWSKI,1971,p. 422
Z11vcî�10ç Aa0CDpou (CIS 4209)]; famille de Zebîdâ Asthôr; et lnv IV,4b]; nourrice,esclave de la famille de Belshùrî ........
caravanier (247) ....................................................... p. 214,264 ......................................................................... p. I 94-195,210
296 Les notables de Palmyre
Aggodomos Elahbel
Alexandros Amatê (2)
Iedîbel Amathê
Bagdan Apollodôros
Alaînê et Shoraîkô Belaqab
Alaînê Beltîhan
Haîran Hérôdès Elahbel (2)
Iadê (2) Hadîrat
Martheî Haîran
Shoraîkô Malikû
Wahballat Manaî
Shegel
Bageshû Shokayaî
Attaî Wahballat (2)
Bageshû
Habbê Firmôn
Rabbel Awîdâ
Hadclûclan (2)
Bartê Iarhibôlâ (2)
Betheî Thomallachis
Elahbel
Iarhibôl Iarhaî (Marcus Ulpius)
Malikû Abgar (2)
Mucianus Iarhaî
Shoaclû
N�shûm
BenêAabeî anonyme br 111/kw 11si1•m
Anonyme ... brt mlkw Malikû
Anonyme ... br tymr.5w Nashûm (2)
Anonyme[ ...] mlkw br /.<!ms Tarnrnê
Iarhibôlâ Zénobios Zabdilah
Malikû (2)
Mezabbanâ Odainat
Shalman Haîran (2)
Taîmarsû Hérodien
Oclainat
Benê Baâ Wahballat Athènodôros
Alaîshâ et Belshûrî Zénobie Bat-Zabbaî
Belshûrî (2)
Haîran
Moqîmû
Nebülah
Nebûmaî
Nebûzabad
Shabî
Taîmaî
Index des tribus et clans 297
On trouvera ailleurs (index 1) les noms des Palmyréniens eux-mêmes, ainsi que des militaires romains citoyens de
Palmyre. De même, les termes désignant la topographie de la ville de Palmyre sont regroupés dans l'index 4.
Chou111ana ............................................................................ p. 111 Gaddé (sanctuaire) [ voir aussi Tychè] ................................. p. 108
Leptis Magna ................................................... p. 30-31,224,231 Palrnyrène . p. 91-96,117, 126-130, 134,149, 158, 189, 191-192,
265-266,268
Libyque .......................................................................... p. 31,231
Pamphylie ...................................................................... p. 14, 172
Langin ................................................................. p. 137-139. 158
Pannonie .............................................................................. p. 172
Lucius Verus .......................................................... p. 42. 123,275
Parapotan1ie ......................................................................... p. l 07
Lycie ..................................................... p. 122 (koinon), I 60,231
Parthes . p. 1, 5,104,107-109,113-117,122-123,133,136,146,161
Macédoine ........................................................................... p. 153
Pergan1e ......................................................................... p. 11, 154
Magnésie-du-Méandre ........................................... p. 10,134,161
Pergé .................................................................................... p. 172
Malakbel .................................................... p. 25,33,46, 108,272
Perses (voir aussiParthes, Sassanides) . p. 1-2,132, 136-137, 148
Malakbel et Aglibôl (voir à Bois sacré,index 4) ...........................
................................................................... p. 59,152,159,168 Pescennius Niger ................................................... p. 42, 123, 185
Malalas .................................................................................. p. 96 Pétra ............................................................................... p. 30, 163
Index des noms propres 301
DE
Agora ............ p. 12,21,25,33,37,44,52,67-69,75,79-81,110 Malakbel et Aglibôl (sanctuaire ; voir aussi à Bois sacré) ............
(= tétrodéion), 147,152,155,157,163,167-168,184, 218-219, ........................... p. 59-60,70-71,152,154.158-159,164,168
222,250
Mosaïques d'Achille et de Cassiopée .................. p. 138,158-159
Allât (sanctuaire) ...........................................................................
Nabû (sanctuaire) ..... p. 81-86,129,133,141,151,155-157,159,
.... p. 54,65,71-74,89,101,103,113,117-118,156,213,250
161,166,179,183.188.192,204-205,222,231
Arsu (sanctuaire) ................... p. 70-71,76-77,141,154-158,253
Nécropole nord ............... p. 24,206,212-213,215-220,223,229
Atargatis (sanctuaire) ............................................... p. 70-71,253
Nécropole sud-est ................. p. 199-201,203,215-216.219,225
Baalshamîn (sanctuaire) ................................................................
Nécropole sud-ouest ...... p. 200-201,215-216,219-220,222,226
p. 26, 32, 38, 44, 51, 54-55, 59, 65, 70-72, 74, 78,81-86,103,
110,122,141,145,151-152,156,158,160-161,168,170, 180, Nyn1phée ....................................................................... p. 60,129
194,198,213,220-221,241,250,253,266
Palais d'Odainat et Zénobie ......................................... p. 157-158
Bains d'Aglibôl et Malakbel ......... p. 59,152,159-160,164,168
Shamash-Soleil (sanctuaire près de la Colonnade transversale) ...
Bel (sanctuaire) .. p. 2,10,20-21,24,26,33-35,38,40,44-45,47, .................................................... p. 73-75,77,81-82,153,158
52, 54,59-60,67, 69, 72, 76, 79-82,84-85,104-105,110, 120,
Théâtre ................................................. p. 135,152-153,157,164
122-123, 133, 136,151, 153-156,158,167-168,172,182-184,
189,205,212,218-219,232,25�263 Thermes de Dioclétien ......................................... p. 153,157,164
Belhammôn (sanctuaire) ........................................ p. 51,151-152 Tombe C ...................................................... p. 199-200,203,209
Bois sacré .................. p. 33,70-71,123,154,158,162,164,253 Tombe de Iulius Aurelius Malê ........... p. 174,201-202,230,232
Bôl,Isis et Aphrodite (sanctuaire) ................................. p. 16,156 Tombe de Malikû ................................................. p. 192,207,230
Caesareum (temple du culte impérial) .................. p. 43,122,158 Tombe des« Trois frères» .......................... p. 199, 228-229,230
Colonnade transversale ........ p. 20,33,50,72-77,82-83,85,130, Tombe du sanctuaire de Baalshamîn ..................... p. 65,198,209
153-157,163,167,180,184,212-214,222
Tombeau-temple 11° 36 ..................... p. 42,55,135,161,211-213
Efqa (source) .................................................................................
p. 1,37-38,40,103,127,129,153,159,182,214-215,241,243 Tombeau-temple 11° 85b ................................................. p. 38. 214
84-85, 102, 122, 129, 131, 141, 143-145, 148, 150, 153-157, Tombeau-temple n"150 ....................................... p. 212-214,228
159,164,167,184,195-196,212-214,241,253
Tombeau-temple n"173d ............................... p. 74,102,212-213
Hypogée d'Artaban ............................................................. p. 175
Tourd'Elahbel (n"13) ...... p. 11,76,81-83,133,161,166,190,
Hypogée de Barîkaî ............................................................. p. 195 197,204-207,209,215,218,226,231
Hypogée de Bôlbarak .......................................................... p. 176 Tours des Bené Baâ (n'" 21,67 et 68) ............................................
Hypogée de Iarhaî ................................................................ p. 200 ................................. p. 64,83-84,199,210-211,218,221-222
Hypogée de Iarhaî,Atenûrî et Zabdibôl .............................. p. 200 Tour de Kîtôt (11° 44) ............................................ p. 203,207,209
Hypogée de Lishamsh ................................. p. 177, 192,220,230 Tourde Jamblique (11° 51) ............................ p. 209,221-222,226
Tour de Moqîmû (n" 34) ...................................................... p. 206
Hypogée de Nasrallât .......................................... p. 174-175,226
Hypogée de Sasan ................................................. p. 60,175,201 Tourn"164 ........................................................... p. 206-207. 214
Umm Belqis (colline) .................................. p. 215,218,221-222
Hypogée de Shalmallât ................................ p. 141,174,226,228
Hypogée de Zabdateh (et Moqîmû) ............................. p. 200,202 Vallée des Tombeaux ......... p. 76,81-83,161, 198-200, 206,211,
213-216,218-219,221,226
Maisons ..... p. 131-132,138-139 (plans),158-159 (localisation),
159 (décor),159 (tradition orientale)
304 Les notables de Palmyre
On trouvera ici tous les textes épigraphiques cités dans aram.= araméen
le texte et les annexes.Pour faciliter la recherche,on a donné bil. = bilingue grec + araméen palmyrénien
systématiquement la concordance entre le CJS (le plus sou gr. grec
vent cité au cours du texte) et l' Inv. On a ajouté les référen hatr.= hatréen
ces aux OGIS, JGRR, SEG et AE, qui ne donnent pourtant lat.= latin
pas les textes araméens des bilingues ou trilingues. On a nab.= nabatéen
aussi donné parfois la référence à PAT pour certains textes palm. araméen palmyrénien
araméens plus difficiles à trouver. Ce dernier recueil permet phén. = phénicien
de façon aisée l'accès à la plupart des textes araméens cités saf. = safaïtique
ici (à l'exception principale des inscriptions publiés par syr.= syriaque
A. BouNNI, 1986,et par Kh. As' AD et M. ÜAWLIKOWSKI, 1986- tril. = araméen palmyrénien + grec + latin
1987). On trouvera dans le volume correspondant des IGLS tri 1. perse = grec + perse + parthe
(en préparation) des concordances systématiques.
PALMYREETPALMYRÈNE
AAES III,353 (voir WADDINGTON 2572) As'AD et TE1x100R, 1985a,n" 4 (SEG35,1504) [bil.] .. p. 223,227
AE 1939,178 et 179 (lat.) [voir IGLS V,2549 et 2550] As'AD et TE1x100R, 1985a,11° 5 (SEG 35,1505) [bil.] ...................
......................................................................... p. 124,223,228
AE 1940,210 (lat.) ...................................................... p. 266,274
As'AD et TEIXIDOR, 1985a,11° 7 (palm.) ........................ p. 154,223
AE 1974, 653 (lat.) ...................................................... p. 265,274
As' AD et TE1x100R, 1985a,n" 8 (SEG 35,1506) [bil.] .. p. 154,223
As'AD, 1993 (SEG43,1037) [bil.] ...................................... p. 225
As' AD et TEIXIDOR, 1985a,11
°
9 (AE 1986,695 ; SEG 35,1507) [tril.]
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,n" 1 (SEG 38,1573) [gr.] ..... .. ................................................................... p. 25,27,251,267
..................................................................... p. 70,76,167,252
As'AD et TmxmoR, 1985b,p. 286 (palm.) .....................................
As'.@ et GAWUKoWsKr, 1986-1987, n" 2 (SEG 38, 1574) fgr.l ..... ........................................................... p. 70-71, 76-77,252-253
....................................................... p. 58,70,76,167,252-253
As'AD et TE1x100R, 1985c,p. 39,11° 6 (IMP 11° 8) [palm.] .............
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,n" 3 (SEG 38,1575) [bil.] ....
......................................................................... p. 171,256,259
....................................................... p. 58,70,76,167,252-253
BEN-HAYYIM, 1947,p. 142 (PAT 0142) [bil.] ............... p. 225-226
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987, 11° 4 (palm.) ..........................
............................................................... p. 58,70,76,252-253 BouNNI, 1960,p. 159-164 (lat.) ........................................... p. 274
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,11° 5 (palm.) .......................... BouNNI, 1986,11° 1 (= DFD, p. 86) [palm.] .............. p. 81,83,278
..................................................................... p. 70,76,252-253
BoUNNI, 1986,11° 2 (bil.) ........................ p. 82,205,240,246,279
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,11° 5a (SEG 38,1576) [gr.] ...
............................................................. p. 76-77,187,255,260 BouNNI, 1986,11° 3 (bil.) .................... p. 68,82-83,128,183,279
As'AD et GAWLIKOWSKl, 1986-1987, n" 6 (SEG 38,1577) [bil.] .... BouNNI, 1986,11° 4 (bil.) .............................................. p. 254,258
............................................................................. p. 70,76,252 BoUNNI, 1986,11° 9 (palm.) ................................................... p. 258
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,11° 7 (SEG38,1578) [bil.] .... BouNNI, 1986,11° 10 (= DFD, p. 162) [palm.] ...............................
............................................................... p. 70,76-77,245,252 ............................................................... p. 81,83,86,141,279
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,11° 8 (SEG 38,1579) [bil.] .... BoUNNI, 1986,11° 12 (palm.) ................................................... p. 83
........................................................ p. 70,76-77,245,252-253
BouNNI, 1986,11° 13 (palm.) ................................................... p. 82
As'AD et GAWLIKOWSKI, 1986-1987,11° 9 (palm.) ......... p. 254,260
BoUNNI, 1986,11 ° 14 (palm.) ............................................. p. 83-84
As'AD et TEIXIDOR, 1985a,11° l (palm.) ................................ p. 223
BouNNI, 1986,n" 16 (palm.) ............................................. p. 83,86
As'AD et TErXIDOR, 1985a,11° 2 (SEG35,1503) [bil.] .. p. 223,227
BouNNI, 1986,n" 18 (= DFD, p. 163) [bil.] ..................................
As'AD et TEIXIDOR, 1985a,11° 3 (palm.) ................................ p. 252 ....................................................... p. 68,81-82,124,166,279
Inde.Y épigraphique 305
BouNNI, 1986, n"20(= DFD, p. 162) [palrn.].......... p. 81,83,279 BS n"91(gr.) ........................................................................ p. 194
BouNNI,1986,n"31 (bil.) ...................... p. 85,188,192, 262,276 CANTINEAU,1930a,n'" 4ab(voir lm· 7ab)
BouNNL 1986,n"33(palrn.) ................................................... p. 82 Cê\NTINEAU,1930a,n" 6(palm.) ........................................... p. 208
BouNNI,1986,n"37 (SOBERNHEIM,1905, p. 24,n"19) [gr.] .......... CANTINEAU,1930a,n" 8 (palm.) ........................................... p. 231
..................................................................................... p. 81,83
CANTINEAU,1930a,n" 12(= IMP, n"108) [bil.]............ p. 219,223
BoUNNI,1986,n"42(palrn.) ................................................... p. 85
CANTINEAU, l 930a,n'" 13ab(bil.) ..................................................
BouNNI,1986,n"43(palm.) ................................................... p. 83 ........................ p. 61,63,76,144,218-220,230,252-254, 259
BouNNI,1986,n"48(gr.) ...................................................... p. 262 CANTINEAU,1930a,n" 14 (palm.) ......................... p. 128,219,230
BowERSOCK,1976,p. 349-355 (AE 1976,687; SEG 26,1641) [gr.] CANTlNEAU,1930b,n" 10 (SEG 7,147) [bil.] ....... p. 187,260,262
.................. p. 13,15,42-43,122-123,133,220,242,247,275
CANTINEAU,1930b,n" 14 (SEG 7,168) [gr.] .................................
BRIQUEL-CHATONNET,1991, p. 84(palm.) ............................. p. 262 ............................. p. 38,61,133,173,24L 247,255,259-261
BRIQUEL-CHATONNET,1995a, p. 155(palm.) ........................... p. 25 CANTINEAU,1930b,n" 18 (palm.) ......................................... p. 262
ES n" l (voir /111 1 I,5) CANTINEAU,1930b,n" 33(palm.) ......................................... p. 279
°
ES 11 2(palm.) ....................................................... p. 32,145,161 CANTINEAU,1930b,n'' 34(palm.) ................. p. 104,252-253,263
ES n"6(palm.) ............................................................... p. 83, 141 CANTINEAU,1930b,n" 36 (palm.) ............. p. 50-51,151,241,278
ES n"7(palm.) ................................. p. 83,86,141,170,252-253 CANTINEAU,1930b,n" 49(voir SEYRIG,1931,p. 321-323)
ES n"10(palm.) ....................................... p. 26,89,168,170,262 CANTINEAU,1930b,n" 56 (SEG 7,167) [gr.] ........................ p. 223
ESn" li (palm.) ................................... p. 168,170,180,252-253 CANTINEAU,1930b,n" 79(palm.) ......................................... p. 147
ES n"12(palrn.) ................................................................... p. 252 CANTINEAU,1931,n" 8 (SEG 7,182) [bil.]........... p. 166-167,262
BS 11° 13(palm.) [ voir CIS 3983 = lm L 4] CANTINEAU,1931, 11° 9(palm.) ............................................. p. 252
BS n"14 (palrn.) ........................................................... p. 252-253 CANTINEAU,1931, n'' l l (palm.) ........................... p. 151, 252-253
°
ES 11 20(palm.) ................................................................... p. 266 CANTINEAU,1931,11° 17(= GAWLIKOWSKI,1985,p. 253,n" l) [palm.]
......................................................................... p. 148-149,257
ES n"23 (palm.) ........................ p. 54,74,194,220-221,252-253
CANTINEAU,1931,n" 18 ( palm.) ................... p. 105,254,262, 265
ES n"24 (palm.) ........................................................... p. 252-253
CANTINEAU, 1933, p. 175,n" 2b (SEG 7,133) [tril.]......................
ES n'" 27 et 30(palrn. et gr.) .................................................. p. 86
p. 10,18-19,27,32-33,44,54,80,124,179,245,247-250,277
ES 11° 31(gr.) .................................................................. p. 86,268
CANT!NEAU,1933, p. 176-177,11° 3(palm.) ...................................
°
ES 11 34(palrn.) ............................... p. 54,65,194,220-221,246 ............................................. p. 22,55,122,151,153,240,247
BS n"37 (palm.) .......................................... p. 26,65-66,252-253 CANTINEAU,1933,p. 179,n"4(palm.) ......... p. 114,176,243,247
ES 11° 38(palm.) ............................................. p. 83,141,252-253 CANT!NEAU,1933, p. 183,n"7a(palm.) ........... p. 10,44,229,277
ES n"39(palm.) ........................................................... p. 252-253 CANTINEAU,1933, p. 184,n"7b(palm.) ....................... p. 160,229
ES n"40(palm.) ....................... p. 83,86,122,141,170,252-253 CANTINEAU,1933, p. 186,11° 9(palm.) ................................. p. 252
BS n"41(bil.) ............................................... p. 122,250,252-253 CANT!NEAU,1933,p. 187-188,11° 10(SEG7,156; voirDFD,p. 32)
BS n"43(palm.) ................................. p. 74,78,83,141,252-253 [bil.] ................................................................... p. 22,194,245
BS n"44(voir C/S 3959) CANTINEAU,1933, p. 188,n"11 (SEG 7,146) [bil.] ............. p. 187
ES n"45 (SEG 15,849; AE 1958,506) [bil.]............................... CANTINEAU,1936, p. 268,11° 17(palrn.) ......... p. 14,151,251,253
p. 11,13-14,22,32,40,52,70-72,82,101,103-l 04,106,110, CANTINEAU,1936, p. 274,n"19 (palm.) ............................... p. 151
112,123,143,245-248,263,266
CANTINEAU,1936, p. 279,n"20 (BS 11° 48) [bil.]. p. 11,13,22,36,
BS n"47(bil.) ................................................................. p. 48,259 43,52,70,82,86,110,122-123,245,247,249,267
ES n"48(voir .CANTINEAU,1936,n"20) CANTINEAU,1936, p. 346,n"21 (BS 11° 25) [bil.].................. p. 187
BS n"49(voir CIS 3958 = lnv L 3) CANTINEAU,1936, p. 349,11° 24(palm.) ......................... p. 80,252
BS n"51(palm.) ...................................................... p. 86,114-115 CANTINEAU,1936, p. 350-352,n"25 (palm.) .................. p. 53,229
BS n"52 (gr.) ............................. p. 86,99,143,148-150,246-247 CANTINEAU,1936, p. 353,11° 26(palm.) ................................. p. 53
ES n"60(palm.) ................................... p. 44,54,65-66,198,209 CANTINEAU,1936, p. 355,n"27 (palm.) ............................... p. 230
ES n"63(palm.) ................................................................... p. 194
CANTINEAU,1938, p. 75-76, 11° 28c (palm.) ...................................
BS n"78(gr.) ........................................................................ p. 260 ......................................................... p. 106,109,111,262,264
306 Les notables de Palmyre
CANTINEAU, 1938,p. 76, 11° 29 (bil.) .............................................. C/S 3937 (lnvIII,12; OG/S644,JGRR III,1036) [bil.] .............
................... p. 32,36,47,51, 245-247, 249-250, 252-254, 260 .... p. 34,38,42,53,55,145-146,148,211,244, 246-247,262
CANTINEAU, 1938,p. 78, 11 ° 31 (bil.) ................. p. 26-27,251,253 C/S3938 (lnvIII, 11 ;JGRR III,1041) [bil.] ...............................
................ p. 38,42,55,143-144,211,244, 246-247,249,262
CANTINEAU, 1938,p. 82, 11 35 (palm.) ................................. p. 262
°
CANTINEAU, 1938 p. 160, n" 39 (bil.) [complète C/S 4163] ........... CJS 3941 (lnv III,8; IGRR III,1042) [bil.] .. p. 38-39,42,49-50,
................................................................................. p. 226-228 55,143,145,147,211,244,246-247,262,277
Cil Il,n'" 821-823 (hébreu) ................................................. p. 216 CJS 3942 (lnv III,7; OG/S646,IGRR III,1045) [bil.] ...............
p. 13,22,33,38-42,55-56,101-102,104,118,123,133,148,
C/S 3913 (OG/S629,IGRR III, 1056) [bil.] ................................ 152,158,211,244-247,249,262,264
p. 9-11,23,29,38,45,54,56,59,124-127,130,144,186,203,
207-208,241,246-247,254,257,260,265,276-277 C/S 3943 (lnv III,6; OG/S645,IGRR III,1043) [bil.] .. p. 38-39,
42,49,55,143-145,147,211,244,246-247,256,258,262
C/S 3914 (lnv IX,25) [bil.] ... p. 11,13,15,17-20,32-33,59,79,
CIS 3944 (lnv III,16 ; OG/S643,IGRR III,1035) [bil.] .............
110, 151,154,168,182,245,247-249,255,260,262 p. 14,19,33,56,61,115,119,143-145,147,149,246-247,256,
C/S 3915 (lm· JX, 13) [palm.] ...................................................... 259-260,269,274
............................. p. 26,64,75, 79-80,115-116,180, 251-252
CIS 3945 (lnv III,17; JGRR III,1031) [bil.] ...............................
C/S 3916 (/111' IX,14a; OG/S632,IGRR TT1 1052) [bil.] ............ ........................................ p. 16,19,99,143-144,148-149,245
.......................................... p. 102-103,112-113,142,183,263
CIS 3946 (/nv III,19) [palm.] .......................................................
C/S 3917 (lm IX,15) [bil.] ......... p. 104, 151,180,250-251,253 ............... p. 16,28,50,122,143,148-149,169,195,246,274
CJS 3919 (/11\ 0 IX,19) [palm.] ...................................................... C/S 3947 (/l11' III,20; OG/S 648, IGRR III,1030) [bil.] .............
............................. p. 35,88,110,122,142,240,246-247, 249 p. 18,21,49,122,143,149,169,195,245-246,248,256,274
CIS 3920 (/11\' IX,32) [bil.] .......................................................... CJS 3948 (/l11' Ill,28; IGRR III,1050) [bil.] ...............................
.............................. p. 54,75,120-121,147,183-184,247,272 ........................ p. 11,15-16,102-104,118,152,160,245,264
CJS 3921 (lnv IX,31) [bil.] ........... p. 11-12,24,36,82,205,249 CJS 3949 (lnv III,29; IGRR III,1051,OG/S638) [bil.] .............
CIS 3922 (lnv IX, 9) [palm.] ............. p. 26,66,80,184,251,253 ......................................................................... p. 102-104,264
C/S 3923 (lm IX,8) [bil.] .......... p. 13,17,22,33,53-54,67,72, CIS 3950 (lm, V,1) [bil.] ..............................................................
................... p. 50,66-67,72-73,75,82-83,219,251,253,277
80-81,151,160,245,247,250-251,253
C/S 3951 (/l11' V,2) [bil.] ..............................................................
CIS 3924 (lnv IX,6a) [bil.] ........ p. 11,15,21,23,25-26,34,52, .................... p. 50,66-67,72-75,153,184,219,251,253,277
75,80,103-105, 151,184,243,245,250,252-253,263 CIS 3952 (/m' V,3) [bil.] ..............................................................
CJS 3925 (lnv IX,6b) [bil.] .......................................................... ..... p. 18,20-21,33,50,72-75,77,82,154,245,248-249,277
....... p. 15,24,26,34,52,75. 80,103, 184,243, 250,252-253 CJS 3953 (1111 1 V,4; OG/S635) fbil.] ........... p. 50, 61,63,66-67,
C/S 3927 (bil.) ... p. 14,33,40,44,46-47,75,153,162,249,277 72-73,75,82-83,219,251,253,255,259,277
C/S 3928 (OG/S633,IGRR III, 1053) [bil.] ................................ CIS 3954 (lm, V,5; OG/S636) [bil.] ...........................................
..................................... p. 15, 67,100-101,103, 109,245,264 ........................... p. 50,63,73,75,83,167,180, 255,257,277
CIS 3929 (palm.) ............................................. p. 18,81,122,210 CIS 3955 (/nvV,8) [palm.] ................. p. 73-75,77,82,153,155
CJS 3930 (/11\' II,2) [bil.] .............................................................. C/S 3958 (/l11' I,3 et BS 11 ° 49) [palm.] .................. p. 71,252-253
............................... p. 17-18,20,22,32-33,110,214,245-249
CIS 3959 (lnv I,2 et BS n" 44; IGRR III,1054) [bil.] .................
CIS 3931 (lnv Il,3) [bil.] .................... p. 24,32-33,245,247-249 ...... p. 13,22,32,38,51, 54-55,59,65-66,70,78-79,82,141,
CIS 3932 (lm· Ill,22: OG/S640,IGRR III, 1033) [bil.] ............. 150-152,164. 187-188. 241,245,247,249,254,257,266
.... p. 10,13,19-20. 22,36. 39-40. 48-50,55,61. 69, l 00, 119. CIS 3960 (lm• X,87-88; IGRR III. 1538) lbil.] ...........................
122-123,152,173,188,243,245-249,256,261,267,277 ............................................ p. 11,103, 109,111,146-147,264
CIS 3933 (lm• III,21; OG/S641) [bil.] .......................................
C/S 3961 (lnv X,89) [pal m.] ............................... p. 101,109,264
.................................. p. 11,16-17,49,103-104,214,245,264
CIS 3962 (lm• X,17; AE 1947,172) [bil. palm.-lat.] ..................
C/S 3934 (lnv III,14; JGRR III,1047) [bil.] ...............................
............................. p. 25,83,205,224,250,254, 260,266,279
................. p. 32,58,61,69,123,153,160,245-249,256,260
CIS 3963 (lnv X,47) [bil.] .................... p. 50,245, 248,264,278
CIS 3935 (/17\' III,15; IGRR III, l 038) [bil.] ...............................
....................................... p. 61-62,69,178,247,249,256,260 CIS 3966 (lnv li,1 et RSP 11 ° 156; cf. SEC 26,1642) [bil.] .........
p. 17,19,22,33,52,54,65,122,245,247-248, 250,252-253
CIS 3936 (/17\' III, 13) [bil.] ..........................................................
........................... p. 24, 101-104,118,152,245,247,249,264 CJS 3968 (/m' V I,6 et RSP 11 ° 157) [bil.] ....... p. 60,205,245,262
Index épigraphique 307
CJS 3969 (!Ill' XI,84; voir DFD, p. 6'.?.) [palm.] .......................... CIS 4049 (palm.) ......................................................... p. 260-'.?.6 l
·························································p. 122,166, 170,251,'.?.53
C/S4050 (palm.) ................................................... p. 59. 140. 182
CJS 3970 (!GRR III, 1533) [bil.] ..................................................
... p. 11, 15,18, n 4'.?.. 113,138,143, 242,'.?.45, 247-248, n5
CIS 405'.?. (palm.) ................................................................. p. 182
CIS 4054 ) ................................................................. p. 261
C/S3971 ( OG/S 649; CLERMONT-GANNEAU, 19'.?.0, p. 391-399) [tril.]
p. '.?.8,50, 61. 136, 139, 148-149, 168-169,196,246,257,261, CIS 4056 (palm.) ................................................................. p. 177
275
CJS 4059 (palrn.) ................................................................. p. 102
CIS 3973 (palm.) .................................... p. 12. 114-115,124, '.?.69
C/S4066 (bil.) ............................................................... p. 73. 187
CJS 3975 (palm.) ........................................................... p. 70, 252 CIS 4067 (palm.) ................................................................. p. 171
CIS 3976 (palm.) ............................................. p. 6'.?., 69, 205. 243 CIS 4068. 4074 et 4076 (palm.) .......................................... p. 26'.?.
CIS 3978 (palrn.) .............................................. p. 73-74,'.?.5'.?.-253 CJS 4080 et 4081 (pal m.) ............................................ p. 171. 259
CIS 3979 (bil.) ....................................................................... p. 7 4 C/S4083 (palrn.) ................................................................. p. 171
CIS 3983 (!Ill' L 4; BS n" 13) [palm.] .................... p. 71. 252-'.?.53 C/S4084 (palm.) ................................................................. p. 258
CJS 3984 (!Ill' V,9) [palm.] ................................................. p. 1 56 CIS 4085 (palm.) ......................................................... p. 173,260
CIS 3986 (palm.) ................................................................. p. 143 CIS 4086 (palm.) ................................................................. p. '.?.60
C/S 3988 (!Ill' V I, 3 et RSP 11° 128) [palrn.] ........... p. 5 L 171, 278 CIS 4087 (palm.) ................................................................. p. 171
CIS 3990 (palm.) ........................................................... p. 51. 278 CIS 4094 (palrn.) ................................................. p. 256,260-261
CIS 3991 (palrn.) ................................................................. p. 262 CIS 4096 (palm.) ................................................................. p. 186
CIS 3992 (palrn.) ................................................................. p. 254 CIS 4103 (palm.) ......................................................... p. 186-189
CIS 3994 (bil.) ........................................... p. 16,37, 76. 139,240 CIS 4105 (palm.) ................................................................. p. 189
CIS 3996 (palrn.) ........................... p. 60,193,254,260,262. 276 CIS 4105ter (palm.) ........................... p. 38-39, 42,244, 246,262
CIS 3998 (RSP n" 130) [bil.] .................................. p. 16,143. 187 CIS 4109 (lnv IV, 28) [palm.] ....................... p. 218-219,252-253
CJS 4000 (palm.) ......................................................... p. 193,276 CJS 4112 (palm.) .......................................... p. 218-219,251,253
CJS 4001 (palrn.) ......................................... p. 193,254,259,276 CIS 4113 (Jnv V III,56) [palm.] ...... p. 76,179,'.?.18-219, 252-253
CIS 4003 (bil.) ............................... p. 16, 187. '.?.54,258,260-261 CIS 4114 (/m' IV,4a) [palm.] .......................................................
CIS 4006 (palrn.) ................................................................. p. 171 ····························· p. 64,81, 210,218-219,221,251, 253,278
CIS 4007 (pal m.) ................................................................. p. 182 C/S4115ab (/m' IV,18ab) [palrn.] ................................................
······························ p. 56,76,179,186,207,218-219,252- 253
CIS 4008 (palrn.) ........................................................... p. 86,171
CIS 4116 (palm.) ........................................... p. 21 8-219,252-253
CJS 4010 (lnv XI,23) [palm.] ............................................. p. 171
CJS 4119 (palrn.) ..................................... p. 52,21 8-219,252-253
CJS 4011 (palrn.) .................................................................. p. 193
CIS 4120 (Jnv V III,75) [bil.] .. p. 73,218-219,223,228,252-253
CIS 4013 (palm.) ......................................... p. 193,255,259,276
CIS 4121 (Jnv IV,5) [palm.] .......................................... p. 68,222
C/S4014 (palm.) ................................................................. p. 171
CIS 4122 (Jnv V IL 6a) [bil.] .........................................................
C/S4015 (palm.) ................................................................. p. 102 ........................................ p. 54,68-69, 208,21 8,227, 252-253
CIS 4016 (palm.) ................................................. p. 255,259-260 CIS 4123 (/111' IV,6b) [bil.] .................... p. 52,221,226-227, 240
CJS 4017 (palm.) ................................................................. p. 182 C/S4123bis (Jn1'1V, 6a) [bil.] ..................... p. 221,226-227,240
CIS 4020 (palm.) ......................................... p. 171,173, 255,258 CIS 4124 (/111' IV,3) [bil.] .... p. 64,81, 83-84,210,2 21, 227,278
CIS 4021 (palm.) ................................................................. p. 260 C/S4125 (JnvVIII, 160) [palrn.] ................................... p. 81,278
CIS4022 (bil.) ..................................................... p. 128-129,187 CIS 4126 (palrn.) ................................................................. p. 278
CIS 4024 (palm.) ......................................................... p. 255,259 CIS 4129 (palm.) ........................................................... p. 81, 278
CIS 4027 (palm.) ................................................................. p. 171
CJS 4130 (palm.) ........................................... p. 58,219-220,262
CIS 4028 (palm.) ................................................................... p. 73
CJS 4131-4132 (palm.) ................................................ p. 219,262
CIS 4030 (palm.) ................................................... p. 59,140,182
C/S4133 (palm.) ................................................................. p. 219
C/S4031 (!GRR III,1027) [bil.] ........... p. 16,187,255,258,261
CIS 4134-4158 (Jnl'lV,27) [bil. et palm.] .... p. 81,177,204,279
CIS 4042 (palm.) ................................................................. p. 171
CIS 4134 (/111' IV,27a; OGIS 630) [bil.] ......................................
C/S4048 (palm.) ......................................................... p. 256,260 ··························································· p. 11, 204,226-227,240
308 Les notC1b!es de PC1!myre
C/S 4138 (lnvIV,27k) [palm.] .............................................. p. 83 C/S 4202 (lnvV III,55 ; OCIS 642; JCRR III,1034 ) [bil.] .........
························· p. 108,11 9,150,196,227-228, 232,245,246
C/S 4139 (lnvIV,271) [palm.] ....................................... p. 84,190
C/S 4203 (bil.) ............................................................. p. 228,245
C/S 4140 (/nvIV,27c) [palm.] .............................................. p. 84
CJS 4206 (lnvIV,l) [palm.] .......... p. 174,182-183,210-211,21 4
C/S 4142 (lnvIV,27e) [palm.] ............................................ p. 178
C/S 4144 (lnvIV,27g) [palm.] ............................................ p. 178 CJS 4209 (bil.) ........ p. 15,212-214,228,245,256-257,259,261
C/S 4145 (lnvIV,27m) [palm.] ........................................... p. 178 C/S 4210 (palm.) ................................................................. p. 102
C/S 4149 (lnvIV,27q) [palm.] .................................... p. 178-179 C/S 4211(bil.) ................................. p. 62-63,188, 245,256,259
C/S 4151(lnvIV,27s) [palm.] ............................................ p. 178 C/S 4212 (lnvV II,13 ; SEC 7,170) [bil.] ...................................
···································· p. 76,174,214,228,25 6-257,259-260
C/S 4152 (/nvIV,27t) [palm.] ............................................. p. 178
C/S 4213 (lnvV II,11) [bil.] ................................ p. 182,212, 23 2
C/S 4153 (/111 1 IV,27u) [palm.] ............................................ p. 178
C/S 4214 (lnvV II,2) [bil.] .................................. p. 175,212-213
C/S 4154 (lnvIV,27v) [palm.] .............................................. p. 82
C/S 4215 (bil.) ............................. p. 160,190,21 2,228-229,245
C/S 4155 (lnvIV,27w) [palm.] ........................................... p. 178
C/S 4217(lnvIV,21 ; SEC 35,1508) [bil.] .................................
C/S 4157(/nvIV,27b) [palm.] ............................................ p. 205 ························································· p. 175,211 -212,229,262
C/S 4158(lnvIV,27y) [palm.] .................................... p. 178, 209 C/S 4218(palm.) ................................................................. p. 229
C/S 4 159(palrn.) ......................................... p. 175,202, 204,231 CIS 4231 (= /111' V III,194) [palm.] ................................ p. 81, 178
C/S 4160(bil.) ............................................................... p. 15,227 C/S 4232 (mieux que /111 1 IV,17) [palm.] ............................ p. 178
C/S 4162 (lnvV II, l a; SEC 7, 163) [bil.] ........... p. 206-207,227 CIS 4235 (lnvV III,57 ; JCRR III, 1539) [t ril.] ............................
C/S 4163 (lm• V III,61 ; voir CANTINEAU, 1938,p. 1 60,11° 39) [bil.] ................................... p. 27,113,125,130,203, 208,250,265
......................................................................................... p. 226 CIS 4236 (lm' V II,6b ?) [palm.] ..................................... p. 68-69
C/S 4164(lnvIV,19) [palm.] .............................. p. 218,251,253 CIS 4237(palm.) ................................................................. p. 257
C/S 4167 (bil.) ............................................... p. 15,212, 215,227 C/S 4238(palm.) ................................................................... p. 76
C/S 4168 (/l11' IV,9a; SEC 7,164) [bil.] ..................................... C/S 4239 (palm.) ................................................................. p. 26 2
..................................... p. 38,62,212,214, 223,227, 254,261
CIS 4265-4268 (palm.) ........................................................ p. 16 7
C/S 41 70 (lnvIV, 23) [palm.] ...................................... p. 212,226
CIS 4287 (palm.) ................................................. p. 177,257- 258
C/S 41 71 (palm.) ................................................................. p. 230
CIS 4288 (palm.) ................................................... p. 41, 182,243
C/S 4172 (palm.) ................................................. p. 187,192,230
CJS 4292(palm.) ......................................................... p. 121,274
C/S 4173 (palm.) ......................... p. 188,192,230,255,260,276
CJS 4296-4299 (palm.) ........................................................ p. 260
C/S 4174 (palm.) ........................... p. 59,188,230,255,260,276
CIS 4301 (palm.) ......................................................... p. 255,259
C/S 4175 (palm.) ......................................................... p. 168,230
CIS 4322-4326 (palm.) ........................................................ p. 128
C/S 4176 (palm.) ......................................... p. 168,199,211,230
C/S 4336 (palm.) ........................................................... p. 54,257
C/S 4184(palm.) ......................................... p. 168,199,211,230
CIS 4338 (palm.) ................................................................. p. 257
C/S 4185 (palm.) ........................... p. 59,188,199,230,255,260
C/S 4339 (palm.) ......................................... p. 168, 257,259,276
C/S 4187 (lnvIV,2) [bil.] ........ p. 48,76,182 ,218,242,252-253
CJS 4340 (palm.) ................................................. p. 168,262,276
C/S 4188 (palm.) ................................................................. p. 182
C/S 4357 (palm.) ................................................................. p. 259
C/S 4191 (palm.) ................................................................. p. 242
C/S 4358 (palm.) ................................................................. p. 220
C/S 4192 (lnvIV,22) [bil.] ............................ p. 15,212,227-228
C/S 4357-4359 (palm.) .................................................. p. 68,258
C/S 4193 (palm.) ............................................................. p. 52,68
C/S 4363 (palm.) ................................................................. p. 176
C/S 4194(palm.) ......................................................... p. 220,230
C/S 4368 (palm.) ................................................................. p. 176
C/S 4195 (palm.) ................................................................. p. 230
C/S 4369 (palm.) ................................................................. p. 260
C/S 4196 (SEC 7, 183 ; GAWLIKOWSKI et As' AD, 1997, p. 34-36,
11° 22 pour le texte complet) [bil.] ............................ p. 175,212 CIS 4379 (palm.) ................................................................. p. 260
C/S 4197 (lnvV II,15) [palm.] ..... p. 198,212,218-220,252-253 CJS 4383-4384 (palm.) .......................................................... p. 76
C/S 4198 (palm.) ................................................................... p. 93 CIS 4385 (palm.) ......................................................... p. 259,276
C/S 4199 (palm.) ................................................................. p. 219 C/S 4395 (palm.) ........................................................... p. 60,262
C/S 4201 (lnvV II,4 et Cil II,820) [bil.] ..................................... C/S 4401 (DENTZER-FEYDY et TErxrnoR, 1 993, 11 ° 166 ; OCJS
··································· p. 61,137,212,216,228,245,255,261 588 ; JCRR III,1055) [bil.] ...................................... p. 224,247
Inde.Y épigraphique 309
eIS 4402 (bil.) ......... p. 83-84,133,220,225,254,258,262,279 DFD, p. 243 (voir lm· XII,21)
eIS 4403 (bil.) ..................................................... p. 220,225-226 DFD, p. 318 (tessère biL) ...................................................... p. 50
eJS 4408-4410 (palrn.)........................................................ p. 261 DRIJVERS, 1978,p. 340 (palm.) ·············································· p. 27
eIS 4454 (palm.) ................................................................. p. 262 DRIJVERS,1995a, p. 34-37 (bil.).. p. 11,13,22,24, 32,34,39-40,
eIS 4455 (palm.) ........................................................... p. 60,262 59,71-72,91,103,106,110,112-113,117,245,248,263
eIS 4456-4457 (palm.).................................................. p. 51,278 DUNANT,1959, 11° 24 (nouvelle lecture de RTF 695) [palm.]. p. 242
e/S4458 (palrn.) ................................................... p. 51,133,278 DUNANT,1976,p. 161 (palm.).............................................. p. 223
eJS 4458bis (palm.) ............................................................. p. 262 EuTING,1887,p. 418,n" 119 (!GRR III,1026 ; CLERMONT-GANNEAU,
RAO VII. p. 164-167) [gr.].............................. .p. 124,154, 275
eJS 4466 (palm.) ................................................................. p. 257
GAWLIKOWSKI,1970a,p. 66,11° l (bil.).... p. 11,110,145-146,246
eJS 4468 (palm.) ................................................................... p. 54
GAWLIKOWSKI,1970a,p. 68-69, 11° 3 (gr.) ............. p. 143,245,269
eJS 4472 (palm.)................................................................. p. 257
GAWLIKOWSKI,1970a,p. 70, 11° 4 (bil.)..........................................
eJS 4478 (palm.)................................................................. p. 194 ................................................. p. 212,223,227,255,259, 261
eJS 4479 (palrn.) ................................................................. p. 426 GA.WLIKOWSKI,1970a,p. 71, 11° 5 (bil.)................. p. 124,223,228
CIS 4482 (palrn.) ................................................. p. 187,257,276 GAWLIKOWSKI,1970a,p. 74,11° 6 (palm.) [voir RSP 11 ° 167]
eIS 4486 (palm.) ......................................................... p. 176,198
GAWLIKOWSKI,1970a,p. 76 (palm.) ....................................... p. 73
CIS 4487 (palm.) ................................................................. p. 198
GAWLIKOWSKI,1970a,p. 82 (palrn.) ....................... p. 81,210,278
eIS 4493 (palm.) ................................................................. p. 182
GAWLIKOWSKI,1971,p. 420 (palm.)p. 136,144,158,244,247,267
eIS 4508 (palm.) ........................................................... p. 48,277
GAWLIKOWSKI,1971,p. 422 (palm.)............................. p. 194,278
eJS 4514 (palm.) ......................................................... p. 259-260
GAWLIKOWSKI,1973a,p. 56,n"' 1 et 2 (voir SEYRIG, 1939,p. 321-322,
eJS 4515 (palm.) ................................................................. p. 257 n'" 27-28)
eIS 4518 (palm.) ................................................. p. 194,257-258 GAWLIKOWSKI,1973a,p. 100 (Palmyre I, 11° 2) [gr.] ......................
eJS 4532 (palrn.) ................................................................. p. 259 ............................... p. 14,43,74,122,149,158,245,247,249
CIS 4535 (CussINI,1992) [palm.] ........................................ p. 176 GAWLIKOWSKI,1975,p. 129 (palm.)............................. p. 223,276
eIS 4537 (palm.) ................................................................... p. 54 GAWLIKOWSKI,1975,p. 130-131 (biJ.)............ p. 15,102,223,227
ers 4543 (palm.) ................................................................. p. 260 GAWLIKOWSKI,1976,p. 200 (SEG 26,1643) [gr.] .......... p. 47,277
ers 4546 (palm.) ................................................................. p. 269 GAWLIKOWSKI,1984,11° 22 (palm.)., ..................................... p. 276
ers 4547 (palm.) ......................................................... p. 120,269 GAWLIKOWSKI,1984,11° 33 (lat.)··········································· p. 251
eIS 4548 (palm.) ......................................................... p. 168,176 GAWLIKOWSKI,1984,11 ° 34 (GAWLIKOWSKI,1970b,p. 203,11 ° 72)[gr.]
......................................................................................... p. 224
eIS 4559-4560 (palrn.).................................................... p. 64-65
GAWLIKOWSKI,1984,11° 36 (bil. gr.-lat.)................................ p. 187
eJS 4565-4567 (palm.)........................................................ p. 259
eJS 4566 (palm.) ................................................................. p. 260
GAWLIKOWSKI,1984,n "' 40-41 (AE 1969-1970,610-611)[lat.] ....
........................................................... p. 15,138,250,267,275
ers 4570 et 4573 (palm.) .................................................... p. 257
GAWLIKOWSKI,1985,p. 257,n'" 6 et 5 (voir SEYRIG,1963,p. 161)
eJS 4594 (palm.) ................................................................. p. 176
GAWLIKOWSKI,1985,p. 257,11° 13 (SEG 35,1497; 38,1580)[bil.]
eIS 4597-4599 (palm.)........................................................ p. 262 ................................... p. 14,108,124,146,148, 150,192,246
ers 4604 (palm.) ................................................................. p. 176 GAWLIKOWSKI,1986,p. 87-99 (palm.).......................... p. 118,160
ers 4606 (palm.) ................................................................. p. 257 GAWLIKOWSKI,1987,p. 306,11° 28 (palm.)........................... p. 223
eIS 4621 (palm.) ................................................................... p. 68 GAWLIKOWSKI,1998,p. 145-151 (gr.)................................... p. 265
DFD, p. 12-14 (voir MouTERDE et PoIDEBARD,1931) GAWLIKOWSKI etAs'AD,1997,p. 164 (palm.)................................
DFD, p. 32 (lnv X,91 et 95 + CANTINEAU,1933, 11° l 0) [bil.] ...... ........................................................ p. 33-34,80,125,252-253
.................................................... p. 22,104,109,111-112,264 GAWLIKOWSKI etAs'AD,1997,11° 4 (palrn.)[voirAs'AD et TEIXfDOR,
DFD, p. 36 (voir INGHOLT,1932,p. 278) 1985c, 11° 6]
DFD, p. 54-55 (gr.)................................................ p. 16,156,245 GAWLIKOWSKI etAs'AD,1997, 11° 7 (palm.)........................... p. 259
DFD, p. 162 (voir BouNNI,1986,n "' 10 et 20) GAWLIKOWSKI etAs'AD,1997,11 ° 9 (palrn.)................... p. 262,276
DFD, p. 163 (voir BouNNI,1986,11° 18) GAWLIKOWSKI etAs'AD,1997, !1° 16 (palm.)................. p. 259,276
310 Les notables de Palmyre
GAWLIKOWSKI et As'AD, 1997, n"' 18 et 19 (palrn.) ............... p. 276 lNGHOLT,1938,p. 104 (palm.) .............. p. 121,183, 256,260.274
Heinen,dans PARLASCA,1982,p. 35-37 (lat.) ............................... INGHOLT,1938,p. 106,I (palm.) .. p. 177,192,230,255,257,262
......................................................... p. 194,215,224,251,269
lNGHOLT,1938,p. 109,II(même texte que ClS 4195) [palm.] .....
HERZIG et SCHMIDT-COLINET,1991,n" 1 (AE 1991,1573) [lat.] ..... ......................................................................................... p. 230
................................................................. p. 138,215,250,275
INGHOLT,1938,p. 110 ,III(palm.) .................................................
HERZIG et Sc1-IMIDT-CouNET,1991, n" 2 (AE 1991,1574) [lat.] ..... ................................................. p. 177,192,255, 257,262,276
........................................................... p. 15,215,250,267,275
lNGHOLT,1938,p. 116-117(palm.) ....................................... p. 198
lGLS V,2549-2552(lat.) ..................................................... p. 274
lNGHOLT,1938,p. 124-125 II(palm.) ........................... p. 174,276
lGLS V,2549 (AE 1939,178) [lat.] ............................. p. 266,274
lINGHOLT,1938,p. 133(palm.) ............................................ p. 229
lGLS V,2550 (AE 1939,179) [lat.] ..................... p. 265-266,274
INGHOLT,1938,p. 135(palrn.) .............................................. p. 176
lMP n" 8(voir As' AD et TEIXIDOR,1985c,n" 6) [palm.]
lNGHOLT,1962,p. 104(palm.) ........................................ p. 59,262
!MP 11" 113(tri!.) ...... p. 24, 27,125,203,208,223,227,250.265
lNGHOLT,1962,p. 106(palm.) .......................................................
lMP n" 115(bil.) .................... p. 15,223,227-228,254,257,259 ............. p. 59-60,124,174,187,193,230,255, 257,262,276
INGHOLT,1926,p. 128-141(palrn.) ............................................... lNGHOLT,1974,p. 38 (PAT 2727) [palm.] ............. p. 175,200,223
................ p. 54,59,61,128,162-163,243,247,256-257,260
INGHOLT,1974. p. 50 (PAT 2728) [palm.] ..................... p. 177,223
lNGHOLT,1930,p. 192 (PAT 0001) [palrn.] ..................... p. 51,278
INGHOLT,1974,p. 50 (PAT 2729) [palrn.] ......................................
lNGHOLT, 1932 , p. 278 (AE 1933, 206; SEG 7, 138; avec le ......................................... p. 177,192,216,223, 256-257,262
palmyrénien DFD, p. 36; PAT 1063) [bil.] ..............................
p. 11, 13-14, 19, 21-22, 35, 52, 55, 67, 70,115-116,120,123, 1111' I,1(gr.) .......................................................................... p. 259
242,245-247,251, 253,267 lm., I,5 (BS n" 1) [palm.] .................... p. 32,59,71,161,252-253
INGHOLT,1934,p. 38-40, n" 4 (palm.) ............................ p. 68,258 1111 1 III,2 (bil.) [voir WILL,1983,p. 69]
lNGHOLT,1935,p. 59(bil.) ............................................ p. 226-227 lm' III,3 (IGRR III,1032; avec ScHLUMBERGER,1942-1943a,p. 38)
INGHOLT,1935,p. 60,II (palrn.) ................................... p. 175,226 [gr.] .......... p. 15,38,42,61,143,148,244,246-247,259,262
INGHOLT,1935,p. 76-88, (II à IX) [palrn.] ... p. 201-202,262,280 lm., III,5 (WADDINGTON 2597; lGRR III,1046) [gr.] ....................
......... p. 9-10,35,157,243,245,247,249,255, 258,261,267
lNGHOLT.1935,p. 82,V [palm.] ........................... p. 256,259-260
lnv III,18 (WADDINGTON 2582; !GRR III, 1049) [gr.] ..................
INGHOLT, 1935,p. 88, IX(palm.) .......................... p. 174,201-202 ........................................................... p. 34, 143, 149-150,247
lNGHOLT,1935,p. 90 (voir ln\! V III,60) lnl' III,23(WADDINGTON 2584; lGRR III,1039) [gr.] .. p. 245,269
INGI-IOLT,1935,p. 91-107,II-XIII (palm.) ............................ p. 230 lm 1 III,24 (SEG 7,140) [gr.] ................................. p. 75,252,269
lNCiHOLT,1935,p. 91, II(palm.) ................................... p. 192,207 Jm, III, 26 (gr.) .................... ........... p. 35, 102, 156, 245-249
lNGHOLT,1935,p. 93,III(palrn.) .......... p. 121,247,255,258,274 lnv III,27 (gr.) ............................................................. p. 154,267
lNGHOLT,1935,p. 98,V II(palm.) .... p. 59-60, 193,207,262,276 lm' IV,4b(palrn.) ................................................................. p. 210
lNGHOLT,1935,p. 99,V III (palm.) ................................................ lnv IV,7ab (SEG 7,160 et 158) [bil.] ....... p. 10,63,66,176-178,
........................................... p. 47,187,207,255,257,259,276 208,218-219,227-228,245,251, 253-255,257- 258,261-262
lNGHOLT,1935,p. 102,X (palm.) ......................... p. 128,256,259 ln\! IV,9b(SEG 7,177) [bil.] .............................................. p. 223
lNGHOLT,1935,p. 102,XI et p. 104,XII(palm.) ......... p. 256-261 lnv IV,9c (SEG 7,169) [gr.] ........................................ p. 203,241
lNGHOLT,1935,p. 108(gr.) ................................................... p. 230 lnv IV,11 (SEC 7,176) [gr.] ................................................ p. 245
INGHOLT, 1935,p. 109,I (bil.) ...................................... p. 175,227 lm' IV,1 2 (SEC 7,181) [bil.] .................................. p. 58,76,228
INGHOLT, 1935,p. 110,II (bil.) ............................. p. 174-175,228 lm 1 IV,13 (SEC 7,175) [bil.] .......................................................
INCîHOIT. 1935. p. 112. III (palm.) ........................ p. 17-1--175. 212 .................. p. 173,186-187. 192. 245. 255,257. 259-260. 276
lNGHOLT,1935,p. 115 (biJ.) .......................................... p. 227-228 lm' IV,1-1- (SEC 7. 166) lbil.] ....... p. 218-219,227, 245. 252-253
lNGHOLT,1936,p. 88, n" 2 (palrn.) ........ p. 168,175,190,193,276 lnvIV, 16(bil.) .................................................................... p. 223
INGHOLT,1936,p. 96, n" 5 (lnv V III,200) [palm.] ............... p. 166 lnv IV,19(palm.) ................................................................. p. 200
lNGHOLT,1936,p. 99, n" 7(biJ.) .................................... p. 171,279 lm' IV. 26 (palm.) ................................................... p. 81,210,278
INGHOLT,1936,p. 104-105,n"' 8-9 (gr.) ............................... p. 258 lm' V I,2(lat.) .............................................................. p. 251,267
lNGHOLT,1936,p. 106,n" 10 (gr.) ......................... p. 169,175,225 1111 1 V I,8 (gr.) ....................................................................... p. 187
lNGHOLT,] 936,p. l 09-J] 2, n" ] [ (gr.) ........................................... ln1' V I, 13 (complété par SEYRIG, 1933c, p. 2 77- 2 79, et
...... p. 59,73,152,159-160,168,246,251, 253-255,260,262 GAWLIKOWSKI, 1973a. p. 96-97) [gr.] .......................... p. 46, 162
Index épigraphique 311
ln1' X,32 (gr.) ...................................................................... p. 258 lnv X, 91 (palm.) [voir DFD, p. 32]
lnv X,34 (AE 194 7, 176) [gr.] ...................................................... Inv X,95 (gr.) [voir DFD, p. 32]
......................... p. 12,32,35,61,125,245-247,249,258,266
lnv X,96 (bil.) ........ p. 85,104,109,111-112,192,246,248,264
l11v X,36 .(gr.) ...................................................................... p. 246
l11v X,97 (gr.) ...................................................................... p. 100
l11v X,37 (gr.) ...................................................................... p. 246
Inv X,98 (palm.) ................................................... p. 18,246,249
lnv X,38 (bil.) ................................... p. 23,34,53, 105,262-263
lnv X,99 (AE 1947, 169) [bil.] ...................... p. 25, 114, 184,274
lnv X,39 (SEG 7, 141) [bil.] ........................................................
Inv X, 100 (lat.) ................................................................... p. 251
··························· p. 10, 12, 18-19,32-33,37-38,240,245-250
Inv X,102 (palm.) ................. p. 29, 123, 153, 164,241, 246-247
lnv X,40 (SEG 7, 142) [bil.] ........................................................
········································ p. 52,67-68, 118,250,252-253,263 lnv X, 103 (gr.) ...................................................... p. 15, 124,275
lnv X,44 (SEG 7,139) [bil.] ........................................................ lnv X, 105 (bil.) ................................................... p. 245,248-249
p. 13, 21-22, 32, 36, 40, 52, 55, 70, 79, 88, 91, 101, 103-104,
Inv X, 106 (palm.) .............. p. 37,47-48,240,246-247,249,277
108, 110, 112-114, 116,242,245,247-249,264
lnvX, 107 (bil.) ....................p. 101,109,111,184,245-246,264
lnv X,45 (gr.) ...................................................... p. 242,247,26 1
lnv X, 108 (AE 194 7, 168) [gr.] ..................... p. 25,120,145,274
lnv X,46 (gr.) ...................................................................... p. 246
]171, X,51 et 52 (lat.) ............................................................ p. 251 /171, X, 109 (gr.) ...................... p. 35, 120,145,245,247-249,274
Inv X, 111(palm.) ................................................ p. 101,109,264
lnv X,53 (palm.) ................................................................. p. 184
Inv X, 112 (bil.) ........................... p. 104-105,246,254,257,263
Jm, X,54 (bil.) ..................................................... p. 162,246,248
Inv X,113 (AE 1947,180) [tril.] ..................................................
lnv X,55 (AE 1947, 177) [gr.] ......................................................
..................................... p. 22,35, 123,242,245-247,249,267 ....................................... p. 15,25,27, 125,203,246,250,267
Inv X,80(gr.) ...................................................................... p. 247 Inv XI,13(palm.) ................................. p. 143, 190-191, 193-194
Jm, XI,78 (palm.) ........................................................ p. 242,244 PAT0001 (palm.) [voir INGHOLT,1930,p. 192]
Inv XI,80, (palm.) ....................................................... p. 122,251 PAT986 (palm.) ................................................................... p. 259
lnv XL 83 (palm.) ................................................ p. 122,251,253 PAT1015-1061 (palrn.) .......................................... p. 60,201,262
Jm, XI,84 (voir CIS 3969) PAT1040 (SFP 11 ° 73) [palm.] .............................................. p. 176
Inv XI,85, (palm.) ....................................................... p. 122,251 PAT1041 (SFP n" 74) [palm.J .............................. p. 175-176, 257
Inv XI,86 (pal m.) ................................................................ p. 178 PAT 1043 (SFP n" 76) [palm.] .............................................. p. 176
Jm, XI,87 (J. CANTINEAU, 1933,p. 182,n" 6) [palm.] ............ p. 25 PAT1047 et 1051 (palm.) ............................................ p. 173, 258
Inv XI,88 et 92 (palm.) ................................................. p. 80,252 PAT1062 (voir MouTERDE et PornEBARD,1931)
Inv XL 94 (palm.) ................................................................ p. 260 PAT1128 (pal m.) ................................................................. p. 243
fm, XI,97 (palm.) .................................................................. p. 53 PAT1610 (palm.) ................................................................. p. 262
Inv XI,100 (palrn.) .................. p. 14-15, 25,34,38,80,251,253 PAT1635 (palm.) ................................................................. p. 257
Inv XII,1 (palm.) ................................................................. p. 223 PAT1654 (palm.) ......................................................... p. 257,260
fm, XII,6 et 5 (SFP n'" 195 [3] et [4]) [palm.] .................... p. 176 PAT1657 (palm.) ......................................................... p. 255,258
°
Inv XII,14 (RSP 11 51) [palm.] .................................................... PAT2721 (palm.) ................................................................. p. 262
........................................... p. 62,200,202,204,223,254,260
PAT2727, 2728 et 2729 (voir INGHOLT,1974,p. 38,50 et 50)
Inv XII,15 (palm.) ............................................................... p. 262
PNO p. 56 (gr.) .................................................................... p. 128
Inv XII,19 (bil.) [voir WILL,1983,p. 69]
PNO, p. 86-87,n',s 1-3 (2 gr. et 1 lat.) .......................... p. 128, 268
Inv XII,20 (gr.) .................................................... p. 111,124,246
PNO 11° 2 ter (palm.) ........................................ p. 18, 92,189,191
Jm, XII,21 (palrn.) ....................................................... p. 157,279
PNO n" 3 (palm.) ......................................................... p. 189,191
Inv XII,22 (palm.) ....................................................... p. 251,253
PNO n" 5 (palm.) ................................................................. p. 189
Inv XII,23 (palm.) [voir WILL,1983,p. 71]
PNO 11 ° 14 (palm.) ............................................................... p. 191
Inv XII,29 (gr.) ...................................... p. 39,124,155-156,243
PNO 11° 16 (palrn.) ................................................................. p. 88
Inv XII,30 (palm.) ............................................................... p. 258
PNO 11 ° 24 (palm.) ............................................................... p. 189
Inv XII,33 (bil.) .......................................................... p. 124,266
PNO 11° 33 (palm.) ............................................................... p. 189
Inv XII,35 (palm.) ............................................................... p. 157
PNO 11° 38 (palm.) ....................................................... p. 189,259
Inv XII,37 (gr.) ...................................... p. 99,143,148,246-247
PNO 11° 39 (palm.) ................................................................. p. 92
Inv XII,39 (palm.) ......................................................... p. 25,246
PNO 11° 42 (palm.) ................................................. p. 92,186,189
Inv XII,42 (lat.) ............................................... p. 10,44,251,277
PNO11° 48 (palrn.) ............................................... p. 186,189,259
Inv XII,44 (palm.) ....................................................... p. 103,243 PNO 11 ° 50 (palm.) ....................................................... p. 189,259
Inv XII,46 (bil.) .................................................................. p. 187 PNO 11° 51 (palm.) ......................................................... p. 92,189
Inv XII,48-49 (palm.) ............................. p. 50-51,151,241,278 PNO 11° 55 (palm.) ....................................................... p. 189,262
Inv XII,55 (palm.) ............................................................... p. 116 PNO 11° 57 (palm.) ...............................................................p. 189
Inv XII,56 (palm.) ............................................................... p. 276 PNO 11° 59 (palm.) ....................................................... p. 259,262
MouTERDE et PomEBARD, 1931, p. 106-107 (SEG 7, 135; DFD PNO 11 ° 72 (palm.) ............................................................... p. 259
p. 12-14 pour le palmyré11ien,PAT1062) [bil.] ........................
... p. 13,32,40,43,52,103,106,110,110,112,122-123,126, PNO 11° 73 (palm.) ............................................................... p. 128
215,245-249,264,266 PNO 11° 77 (palm.) ....................................................... p. 128,259
MusrL et KALINKA,1900, 11'" 11-12 (voir OG/S 650-651) PNO 11° 78 (palm.) ................................................................. p. 92
OGIS 650-651 (gr.) ...................................................... p. 140,275 PNO 11°s 60,63bis,63quater,80-82 (saf.) .............................. p. 92
°
Palmyre I,11 2 (gr.) [voir ÜAWLIKOWSKI,1973a,p. 100] PS 11°s 141,210 et 395 (palm.) ............................................. p. 262
°
Palmyre II,11" 1 (GAWLIKOWSKI,1987,p. 306 11 27) [gr.] ............. PS 11° 210 (palm.) ........................................................... p. 59,194
········································································· p. 205,225,279
PS 11° 371 (palm.) ................................................................. p. 262
Palmyre V,11° 1 (gr.) ..................................................... p. 225,260
PS 11° 394 (palm.) ................................................................. p. 257
Palmyre V,11° 2 (= DFD, p. 268) [palm.] ............................. p. 219
RüDINSON,1950,p. 137 (tril.) ....... p. 10,27,44-45,52,124,173,
Palmyre V,n'is 3 et 14 (voir RSP n')S 159 et 160) 179-180,218-219,227,250-252,277
314 Les notables de Palrnyre
RoNZEVALLE, 1910,p. 179,n" 33 (SEG 7,184) [gr.] .... p. 225-226 RSP n" 159 (Palmyre V,11° 3) [palm.] ............ p. 89,122,252-253
RSP n'" 2 et 6 (palm.) ................................................... p. 198-199 RSP11" 160 (Palmyre V,11° 14) [bil.] ............ p. 122,245,251,253
RSP 11° 15 (palm.) ................................................................. p. 176 RSP 11° 161 (palm.) ....................................................... p. 194,220
RSP 11° 24 (bil.) ............................ p. 173-174,226,227,254,258 RSP 11° 162 (palm.) ............................................... p. 164,241,251
RSP n" 25 (bil.) ............................................ p. 226-228,245,258 RSP n" 163 (palm.) ....................................................... p. 256,259
RSP 11° 26 (bil.) .................................................................... p. 173 RSP 11° 167 (GAWLIKOWSKI,1970a,p. 74) [palm.] .........................
RSP n'lS 27-28,30-31,36,38,46 (palm.) ............................. p. 258
....................................................... p. 50,73-74,223,231,277
RSP 11° 29 (palm.) ......................................................... p. 173,260 RSP 11° 172 (palm.) ............................................................... p. 194
RSP 11° 33 (bil.) .................................................................... p. 225 RSPnos 173,179,184,187,191,195 et 196 (palm.) ........... p. 198
RSP 11° 34 (palm.) ................................................................. p. 258 RSP n" 185 (palm.) ............................................................... p. 262
RSP 11° 37 (SFP, 11° 207) [palm.] ................................... p. 141,176 RTP 14 (palm.) .................................................................... p. 240
RSP n 38 et 39 (SFP, 11',s 208 et 209) [palm.] ..................... p. 141
os RTP 15 et 22 (palm.) ............................................................ p. 241
RSP 11 40 (palm.) ................................................................. p. 259
° RTP 19 (palm.) .................................................................... p. 242
RSP 11° 42 (palm.) ..................................................... p. 68-69,168 RTP 27 (palm.) .................................................................... p. 247
RSP 11 47 (palm.) ................................................................. p. 257
° RTP 30-35 (palm.) ............................................................... p. 247
RSP 11 51 (palm.) [voir Inv XII,14]
° RTP 31 (palm.) .......................................... p. 50-51,59,240,278
RSP 11 55 (palm.) ................................................. p. 203,258,280
° RTP 32 (palm.) ...................................................... p. 60,241,262
RSP 11 56 (palm.) ................................................................. p. 203
° RTP 33 (palm.) .................................................................... p. 243
RSP 11 58 (palm.) ................................................................. p. 280
° RTP 34 (palm.) .................................. p. 50-51,59, 103,240,278
RSP 11'" 58-62 (palm.) ................................................... p. 203-258 RTP 35 (palm.) .............................................................. p. 59,240
RSP 11" 60 (palm.) ................................................................. p. 203 RTP 36 (palm.) .................................................................... p. 262
RSP 11')S 63 et 72 (palm.) ................................ p. 202-203,260-261 RTP 93 (palm.) .............................................................. p. 47,240
RSP 11 67 (palm.) ................................................. p. 173,203,258
°
RTP l 05 (palm.) .................................................................... p. 73
RSP 11 69 (SFP 11 179) [palm.] ................................... p. 202,204
° °
RTP 135 (palm.) .................................................................... p. 46
RSP 11° 75 (palm.) ................................................................. p. 223 RTP 138-142 (palm.) ............................................................. p. 74
RSP 11'' 93 (palm.) ................................................................. p. 176 RTP 160 (palm.) .......................................................... p. 163-164
RSP 11')S 95-96,99-101 (palm.) ............................................. p. 258 RTP 165 (palm.) .................................................................... p. 89
RSP 11 102 (palm.) ....................................................... p. 259,276
°
RTP 251 (palm.) .................................................................. p. 259
RSP 11° 103 (palm.) ............................................................... p. 257 RTP 273-277,279 (palm.) ..................................................... p. 46
RSP 11 104 (palm.) ............................................................... p. 276
°
RTP 301,304,306-308 (palm.) ............................................. p. 85
RSP 11" 105 (palm.) ............................................................... p. 229 RTP 375 (palm.) .................................................................. p. 242
RSP n" 106 (palm.) ....................................................... p. 255,259 RTP 376 (palm.) ............................................ p. 82, 205,240,279
RSP n" 108 (palm.) ....................................................... p. 255,258 RTP 381 (palm.) .................................................................. p. 259
RSP 11 111 (palm.) ............................................................... p. 187
°
RTP 421 (palm.) .................................................................. p. 241
RSP n" 117 (palm.) ............................................................... p. 182 RTP 425 (palm.) .................................................................. p. 259
RSP n" 123 (palm.) ............................................................... p. 171 RTP 427 (gr.) ....................................................................... p. 260
RSP n" 125 (OG/S 634) [bil.] ......... p. 38,187,241,245,254,261 RTP 463 (palm.) ........................................ p. 10,45,54,240,277
RSP n" 126 (palm.) ......................................... p. 38,187,241,245 RTP 485 (palm.) ........................................................ p. 41-42,61
RSP 11 127 (palm.) ..................................... p. 40,68-69,153,243
°
RTP 486,490-492,495 (palm.) ........................................... p. 244
RSP 11 136 (palm.) ............................................................... p. 124
°
RTP 567 (palm.) .................................................................. p. 262
RSP 11° 140 (palm.) ................................................ , .............. p. 259 RTP 580 (palm.) .................................................................. p. 242
RSP 11° 142 (Palmyre V,11° 6) [palm.] .................................. p. 183 RTP 582 (gr.) ....................................................................... p. 257
RSP n" 143 (palm.) ........................................................... p. 65-66 RTP 595 (palm.) .................................................................. p. 260
Index épigraphique 315
RTP599(gr.) ....................................................................... p. 261 ScHLUMBERGER, 1939a,p. 43-73 (IGLS 2549-2552) [lat.] .............
................................................................. p. 113,265-266,274
RTF 638 (palrn.) .................................................... p. 47,182,240
ScHLUMBERGER, 1939b,n'JS 1 et 4 (]at.) ......................... p. 149,266
RTF 669 (bil.) ................................................................ p. 48,261
ScHLUMBERGER, 1939b, n"' 1-4 (lat.)..................................... p. 274
RTF 682 (palm.) .................................................................. p. 260
ScHLUMBERGER, 1961,p. 256-260 (SEG 20,385) [gr.] ..................
RTF 695 (voir DUNANT, 1959,n" 24) [palm.] ................. p. 48,242 ................................................................... p. 50,245,263,278
RTF 696 (palm.) .......................................................... p. 180,240 SEYRIG, 1931,p. 321-323 (SEG 7,152) [gr.] ............... p. 157,267
RTP 694-701,703-704,706-708 (palrn.) ............................ p. 163 SEYRIG, 1932,p. 276 (AE 1933,205) [lat.] .......... p. 113,265,274
RTF 700 (palm.) .................................................. p. 241,258-259 SEYRIG, 1933a,p. 161,n" 3 (AE 1933,209) [lat.] .. p. 224,251,268
RTF 704 (palm.) .................................................................. p. 257 SEYRIG, 1933a,p. 162,n" 7 (AE 1933,213) [lat.] ........ p. 251,268
RTF 709 (palm.) .................................................................. p. 164 SEYRIG, 1933a,p. 164,n" 8 (AE 1984,900) [lat.] .........................
RTP 724 (palrn.) .......................................................... p. 180,240 ................................................................... p. 24, 121,251,267
RTF 725 (palm.) ............................................................ p. 48,182 SEYRIG, 1933a,p. 166,n" 10 (AE 1933,216) [lat.] .......................
................................................................... p. 15,215, 250,275
RTF 736 (palm.) ................................................ p. 41-42, 61,278
SEYRIG, 1933c,p. 263-264,n')S 3ab (gr.)······················· p. 187,259
RTF 746 (palm.) .............................................................. p. 41-42
SEYRIG, 1933c,p. 269 (gr.)................................................... p. 242
RTF 754 (palm.) .................................................................. p. 242
SEYRIG, 1933c,p. 275-276,11° 6 (gr.) ........................... p. 187,245
RTP 761 (palm.) .................................................................. p. 240
SEYRIG, 1933c, p. 279-280,11° 7 (bil.) .................................. p. 187
RTF 763 (palm.) .............................................................. p. 50-51
SEYRIG, 1937,p. 372 (gr.) .............................................................
RTF 764 (palm.) .................................................................. p. 241 ............... p. 13,46,122-123,153-154,160-162, 245-246,248
RTF 770 (palm.) ...................................................... p. 50-51,278 SEYRIG, 1939,p. 319,11° 22 (lat.).......................................... p. 251
RTF 773 (palm.) ........................................ p. 37,47-48,240,277 SEYRIG, 1939,p. 319-320,n" 23 (gr.) ............................................
RTF 775 (palm.) .................................................... p. 48,182,242 ··························································· p. 46,153, 162,246,248
RTP 776 (palm.) .................................................. p. 241,258-259 SEYRIG, 1939,p. 320,n" 24a (AE 1940,173) [gr.] ........................
........................................... p. 42,241,247,254,258,261,266
RTF 778 (gr.) ................................................. p. 48,242,258,277
SEYRIG, 1939,p. 321,11° 24b (gr.) ................................ p. 242,247
RTF 785 (palm.) .......................................................... p. 241,258
SEYRIG, 1939,p. 321,n" 25 (gr.) .... p. 15,123-124,154,245,275
RTF 787 (palm.) .............................................................. p. 41-42
SEYRIG, 1939,p. 321,11° 26 (gr.) .................................. p. 124,275
RTF 789 (palm.) .................................................................. p. 241
SEYRIG, 1939, p. 321-322, n'" 27-28 (GAWLIKOWSKI, 1973a, p. 56,
RTF 806 (palm.) .................................................................. p. 260 n'" 1-2) [gr.] .......................................................... p. 25,34,258
RTF 821 (palm.) .................................................................. p. 242
SEYRIG, 1941a,p. 175 (AE 1947,167) [gr.] ................. p. 250,275
RTF 825 (palm.) .................................................... p. 82,205,279
SEYRIG, 1941b,p. 260 (gr.) .......................................... p. 246,248
RTF 835 (palm.) .................................................. p. 241,258-259
SEYRIG, 1950,p. 242,11° 6 (gr.) ............................ p. 124,245,269
RTP 837 (palm.) ............................................................ p. 48,242
SEYRIG, 1959a,p. 58 (SEG 18,618) [gr.] ............... p. 26,124,269
RTF 847 et 872 (gr.) .............................................. p. 48,242,258
SEYRIG, 1963,p. 161 (GAWLIKOWSKI, 1985,p. 254,11° 5) [gr.] .......
RTF 858 (palm.) .................................................................. p. 260 .............................................. p. 61,99,102, 148-149, 246-247
RTF 913 (palm.) .................................................................. p. 259 SEYRIG, 1963,p. 161 (GAWLIKOWSKI, 1985,p. 254,11° 6) [gr.] .......
RTF 954 (palm.) .................................................................. p. 260 ........................ p. 38,42,61, 143,148-149,244,246-247,262
RTF 989 (gr.) ....................................................................... p. 259 SFP n" 20 (palm.) ................................................................. p. 175
SABEH, 1953,p. 24-26 (PAT 0007) [palm.] .................... p. 68,258 SFP 11
°
22 (palm.)................................................................. p. 169
SAFAR, 1964,n" l (palm.) ............ p. 68-69,94,115-116,240,247 SFP n'JS 24-25,27-28 (palm.) ............................................... p. 262
SAFAR, 1964,n" 3 (bil. palm.-saf.) ......................... p. 68-69,93-94 SFP n" 27 (palm.)................................................................... p. 59
SAFAR, 1964,n" 5 (palm.) ........................ p. 65,68-69,92-94,240 SFP n'" 32 et 41 (palm.)....................................................... p. 175
SAFAR, 1964,n" 6 (bil. palm.-saf.).................................... p. 93-94 SFP n" 42 (palm.)................................................................. p. 258
SAFAR, 1964,n" 8 (palm.) ........................... p. 37,69,94,116,240 SFP n"' 45-94 (voir PAT 1015-1061)
SAFAR, 1964, 11° 9 (palm.)···················································· p. 240 SFP n" 73 (palm.) [voir PAT 1040]
SAFAR, 1964,n" 10 (palm.) ............................................... p. 90,94 SFP n" 76 (voir PAT 1043)
316 Les notables de Palmyre
SFP 11° 125 (palm.) ............................................................... p. 262 TEIXIDOR,1966,p. 178-179 (palm.) ..................................... p. 169
°
SFP 11 140 (palm.) ............................................................... p. 195 TEIXIDOR,1997,p. 66 (palm.) ......................................... p. 81,278
°
SFP 11 141 (palm.) ....................................................... p. 195,276 TEIXIDOR,1997,p. 68-71 (palm.) ......................... p. 158,191,246
SFP 11° 142 (palm.) ............................................................... p. 260 WADDINGTON 2572 (AAES III,353, DFD, p. 236-237) [gr.] .........
··········································· p. 48,187,193,242,255,258,276
SFP n')S 147-149 (palm.) ....................................................... p. 195
WADDINGTON 2573 (gr.) ................................................ p. 187,269
SFPn')S 152-153 et 157 (palm.) ............................................ p. 257
WADDINGTON 2574 (SEYRIG,1939,p. 318,n" 21) [gr.] .. p. 187,260
SFP 11° 207 (voir RSP 11° 37)
WADDINGTON 2577 (SEYRIG,1939,p. 317,11° 20) [gr.] .. p. 187,193
Starcky in MACKAY,1949,p. 185 (palm.) .................... p. 173,260
WADDINGTON 2629 (gr.) ................................................ p. 149,275
STARCKY,1949-1950,11° 1 (palm.) ................ p. 187,189,262,276
WILL, 1983, p. 69 (SEG 35, 1499; Inv III, 2 et Inv XII,19; voir
STARCKY,1963,p. 48 (palm.) .................. p. 94,115-116,241,247
DFD, p. 240 et GAWLIKOWSKI,1973a,p. 80-81) [bil.] ...............
STARCKY et DELAVAULT,1974, p. 70,11° 3 (palm.) ......... p. 201,262 ........................................................... p. 60,156,241,245,262
TAKAYASU et TAKURA (éd.),1994 (palm.) p. 200,201,223,225,262 WILL,1983,p. 71 (lnv III,1 et Inv XII,18 et 23; SEG 35,1500)
[bil.] ················································································· p. 156
Tarif (voir CIS 3913)
WILL,1983,p. 74-75,11. 10 (gr.) .......................................... p. 157
TEIXIDOR,1962, p. 63,11° 1 (voir TEIXIDOR,1963,p. 34) [palm.] ...
............................................................................. p. 91, 94,128
Index épigraphique 317
HORS DE PALMYRE CIL VI,51 (IG XIV,970 (]GR I,44; IGUR I, l 18) [bil. gr.-lat.] .
................................................................................. p. 120,272
AE 1900, 197 ........................................................ (voir ILS 9 l 73) CIL VI,710(bil. palm.-lat.) [voir CIS 3903]
AE 1901, l 14(lat.)............................................................... p. 271 CIL VI,3174 (DFD, p. 229) [lat.] ......................... p. 53, 124,272
AE 1904,60 (GERMER-DURAND, 1904, p. 8,11 ° 6) [lat.] .. p. 61,275 CIL VI, 19134 (voir CIS 3905)
AE 1933,36(lat.) ................................................ p. 119-120,271 CIL VI,31036(lat.) ............................................................. p. 272
AE 1933,37-41, 43(lat.) ..................................................... p. 271 CIL VIII,2505(18005) [lat.] ......................................... p. 53,271
AE 1933,44(lat.) .................................................. p. 53,120,271 CIL VIII,2509-2513(lat.) ................................................... p. 271
AE 1933,104(CHABOT,1932,p. 266) [bil. palm.-lat.] .. p. 53,271
CIL VIII,2515(voir CIS 3908)
AE 1936,33 (lat.) .......................................................... p. 53,272
CIL VIII,3917(18202) [voir CIS 3909]
AE 1965,274; 1977,661; 1979,495; 1987,836(lat.) ..... p. 271
CIL VIII,8795(lat.) ............................................................ p. 272
AE 1967,572; 1989,902(lat.) ........................................... p. 272
CIL XIV,4759sq(lat.)......................................................... p. 208
AE 1974,653(lat.) ...................................................... p. 265,274
CIL XVI,dipl. 68(lat.)........................................................ p. 271
BALLAND,1981, n'" 66-67(gr.) ............................................. p. 160
CIL XVI,dipl. 78 (lat.) ........................................ p. 119-120,273
BAUZOU, 1986, p. 2-3(lat.)........................................... p. 149,275
CISI, l,n'" 10-11,13-14,16,41,57-58,60-62 (phén.) ........ p. 13
BAUZOU, 1986, p. 611° l (T HOMSEN, 1917, p. 44,11° 96b) [lat.] ......
......................................................................................... p. 275 CIS I,24(phén.) .................................................................. p. 228
°
BEAN, 1965,11 194b(gr.)....................................................... p. 17 CIS II,198(nab.)................................................................. p. 175
"'
BEAN etMITFORD,1970,11 9-10,97, 171-172(gr.)............... p. 14 CIS II,202(nab.) ................................................................. p. 208
BERNAND, 1984,11 ° 67 (OGIS 674; IGRR I, 1183) [gr.] ....... p. 117 CIS II,197-224(nab.).......................................................... p. 229
°
BERNAND, 1984,11 85(SEG 34, 1585) [gr.] ........... p. 23, 120,273 CIS 3901 (RIB 1065) [bil. lat.-palm.] ............ p. 53, 120,168,273
°
BERNAND, 1984,11 103 (AE 1984,925; BrNGEN 1984, p. 355) [gr.] CIS 3902 (IGUR I, 119) [bil.] ............................ p. 23,53,85,272
................................................................................... p. 23,273 CIS 3903(bil. lat.-palm.)....................................... p. 53, 119,272
BERTOUNO, 1996, p. 143-146(hatr.)....................................... p. 94 CIS 3904(bil.) ............................................... p. 54, 120-121,272
Bor dreuil, Desreumaux, Robin et Teixidor dans CALVET et ROBIN, CIS 3905(bil. lat.-palm.)............................................... p. 53,272
1997,p. 265-269,n" 205(inscription de an-Namarâ) [nab. arabe]
................................................................................... p. 87,115 CIS 3906(bil. lat.-palm.) [voir !DR III/1, 154 = CIL III,7999]
BowERSOCK, 1975, p. 512-522 (inscription de Ruwwafa) [bil. CIS 3907(palm.) ................................................................. p. 273
gr.-nab.] ............................................................................ p. 115 CIS 3908 (CIL VIII,2515) [bil. lat.-palm.] ................... p. 53,271
BucKLER-ROB[NSON, 1932,11° 153(gr.) ......................... p. 227,231 CIS 3908bis(palm.)............................................................. p. 271
CHABOT,1932,p. 266(voir AE 1933,104) CIS 3909 (CIL VIII,3917) [bil. lat.-palm.] ........... p. 53,102,272
CHABOT, 1932, p. 269(lat.) .................................................. p. 272
CIS 3910(bil.) ............................................................. p. 120,273
CIG 3151(gr.) ..................................................................... p. 115
CIS 3911(palm.)............................................ p. 53, 126,220,273
CIG 4503b(voir OGIS 647)
CIS 3912(bil. gr.-lat.).......................................................... p. 143
Cil II, 994-996, 1010-1011, 1035, 1084, 1099 (voir ScHWABE et
LIFTSHITZ, 1974) CIS V,663,1649,1664-1665(saf.) ....................................... p. 92
CIJ II, 1009, 1024, 1027-1028, 1074, 1077, 1083, 1114-1115 CONTENAU, 1921,n'" 5,7,9-11, 15, 17(gr.) ......................... p. 225
(palm.) [voir PAT0132-0l4l] CUMONT,1926,n'" 1, 12 et 24 .............................................. p. 108
CIJ 1418 (aram.).................................................................. p. 228 DFD p. 436(lat.)[voir AE 1927,56; !DR III/2,20]
CIL F, 1221(lat.) ................................................................. p. 227 DrRVEN,1999,p. 182,11. 90(bil.)......................................... p. 273
CIL III,209a(6728) [lat.] ............................................ p. 149,275 DRIJVERS,1980,p. 24,11. 18(gr.) ......................................... p. 135
CIL III,837(lat.) ................................................................. p. 271 DRIJVERS et HEALEY,1999,11° Asl ,p. 45-48(syr.) ............... p. 136
CIL III,907(7693) [lat.] ................................................ p. 53,270
Du MESNIL DU BurssoN, 1939, 11° 1 (Pre!. Rep. VII/VIII, 11° 916)
CIL III,1108(lat.) ....................................................... p. 119,271 [palm.] ........................................................ p. 91,107,251,253
CIL III,6719(lat.) ............................................................... p. 275 DuMESNIL DU BUISSON,1939,11° 12(bil. gr.-palm.)............. p. 109
CIL III, 14177(lat.) ............................................................. p. 275 DuMESNIL DU BUISSON,1939,11 °s 28-32,34,38-46(palm.). p. 108
CIL VI, 50 (IGUR11° 117; ILS 4334 ; IG XIV, 969; IGRR I, 43) Du MESNIL DU BurssoN, 1939, 11° 33 (Pre!. Rep. VII/VIII, p. 279,
[bil. gr.-lat.] ........................................................ p. 53,120,272 11° 909) [palm.] ............................................. p. 47,91,108,252
318 Les notables de Palmyre
I. Stratonikeia II,651 et 701 (gr.) ........................................ p. 161 ScI-IWABE et LIFTSHITZ, 1974, p. 8, n"' 18 et 19 ( Cil IL 994 et 995)
MAMA VIII,534 (gr.) .......................................................... p. 208 [gr.] .......................................................................... p. 216,273
MARCADÉ,Recueil des signatures de sculpteurs grecs, I,9(gr.) .. ScHWABE et LIFTSI--IITZ, 1974,p. 33,11° 92( Cil II,1010) [gr.] ........
........................................................................................... p. 16 ................................................................................. p. 216,273
MD AI (A) 27,1902,p. 93,11 ° 83(gr.) .................................. p. 154 ScHWABE et LIFTSHITZ,1974, p. 37, 11° 100 (CllII, 1011) [gr.] ......
................................................................................. p. 216,273
MIGEOTTE,1984, p. 322-323, 11 ° 103(gr.) ............................. p. 154
SEG 16,829(gr.) [voir SCHWABE etLIFTSHITZ,1974,p. 157,11 ° 183]
MILIK et STARCKY,1970,p. 161-162(palrn.) ................ p. 262,273
SEG 26,1668(bil. gr.-aram.) .............................................. p. 149
OGIS 129 (CIL III suppl. 6583; ILS 574; Cil 1449) [bil. gr.-lat.]
......................................................................................... p. 137 SEG 35,1416(gr.) ................................................................. p. 17
OGIS 415(gr.) ....................................................................... p. 16 SEG 37,1403(gr.) ............................................................... p. 122
OGIS 485(gr.) ..................................................................... p. 161 SEG 39,1590(gr.) ....................................................... p. 134,224
OGIS 639(voir IGRR I,1169) SEG40, 1420-1421(gr.) ...................................... p. 134,224-225
OGIS 647(gr.) ....................................... p. 61,149,257,261,275 SEG 42,1143(gr.) ................................................................. p. 16
OGIS 657(gr.) ....................................................................... p. 15 SEG 43,1037(gr.) ............................................................... p. 224
PAES III A,785 1 (gr.) [voir IGLS XV,267] STARCKY, 1955,p. 41,11° 10(PAT0154) [palm.] .................. p. 273
PAES IV A,41(bil. gr.-nab.) ................................................. p. 87 STARCKY,1978, n" 41 (nab.) [voir DusSAUD,1935]
PAT 0132-0141 (CllII, 1009,1024,1027-1028,1074,1077,1083, STIEHL,1970,p. 87(nab.) .................................................... p. 149
1114-1115) [palm.] ................................................... p. 216,273
TAM II,15,18-19,145-146,289-290(gr.) ............................ p. 16
PAT0994(bil. lat.-palm.) [voir !DR III/1, 167]
TAM II,46(gr.) .................................................................... p. 230
PAT 1604(palm.) ................................................. p. 189,273,276
TAM II,55(gr.) .............................................................. p. 17,227
PAT 1616(palm.) ................................................................. p. 273
TAM II,52-57(gr.) ............................................................... p. 227
PAT 2811(palm.) ................................................................. p. 273
TAMII, 905(gr.) .......................................................... p. 122,160
PFLAUM, 1952,p. 307-330(gr.) ............................................ p. 145
Pre!. Rep. II,p. 92,H4(gr.) ................................................. p. 139 TAM II,910(gr.) .................................................................. p. 161
Prel. Rep. V,p. 113-114,11° 418(gr.) ................................... p. 139 TAMII, 938-939,941,949-950,951-953(gr.) .................... p. 208
°
Pre!. Rep. V, p. 227, 11 561 (AE 1934, 280),VII/VIII, 11 847 (AE ° TAM IV,117(gr.) ................................................................. p. 227
1940,220) et IX,3,p. 107,11° 970 (AE 1954,264) [lat.] .. p. 139 TAMV, 1056,1113(gr.) ....................................................... p. 227
Pre!. Rep. VII/VIII, 11° 845 (Du MESNIL DU BUISSON, 1939, 11° 19) TEIXIDOR,1980b,p. 453-454(voir GrnsoN,1982, 11° 41)
[gr.] .......................................................... p. 108-109,242,247
THOMSEN,1917,p. 16,11° 3(voir CIL III,209a)
Prel. Rep. VII/VIII,11 ° 846 (DFD, p. 336-337) [gr.] .... p. 109,242
TI--IOMSEN,1917,p. 27,11 ° 45 (voir CIL III,14177)
Prel. Rep VII/VIII,11° 876(gr.) .............................................. p. 15
THOMSEN,1917,p. 28,11° 52(voir CIL III,6719)
Pre!. Rep. VII/VIII, n'" 901-903,907-908(gr.) ................... p. 108
TI--IOMSEN,1917,p. 38, 11 ° 73b(voir AE 1904,60)
Prel. Rep. VII/VIII,11 ° 909 .(voir Du MESNIL DU BuissoN,1939,11° 33)
THOMSEN,1917,p. 44, 11° 96b (voir GERMER-DURAND, 1904,p. 22,
Pre!. Rep. VII/VIII,11° 916 .(voir Du MESNIL DU BUISSON,1939,11° 1)
11° 33)
Prel. Rep. VII/VIII,n" 917(gr.) ........................................... p. 107
WADDINGTON 1850a,1851,1853(gr.) .................................. p. 225
RB 7,1898,p. 104, n° 2(gr.) [voir IGLS XVI/2,607]
WADDINGTON 2188(gr.) .......................................................... p. 77
Res Gestae Diui Saporis(tril. perse) ............................. p. 42,212
WADDINGTON 2196(gr.) ........................................................ p. 113
REY-COQUAIS,1973,p. 41-46, 11 ° 2(gr.) ................................. p. 55
WADDINGTON 2240(gr.) ............................................ p. 23,53,273
RIB 1065(voir CIS 3901)
WADDINGTON 2465(voir IGLS XV,268) [gr.]
RMD 11° 17(lat.) ................................................................... p. 271
WAGNER,1976,n'" 22b,34,38,143,163(gr.) ..................... p. 225
RMD 11° 27-28(lat.) ............................................................. p. 270
WAGNER,1976,p. 189,11° 27(gr.) ........................................ p. 230
RoBERTletL.,1954,p. 192-198,n'" 101,103,107,llO,112,114-
115,119(gr.) .................................................................... p. 229 WELLES,1938,11° 60(OGIS 625; IGRR III,1353) [gr.] ...... p. 155
Salamine de Chypre XIII,p. 49-55,n'" 106-122(gr.) ............ p. 43 WELLES,1938,11° 163(gr.) ..................................................... p. 14
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11° 67; p. 30,11° 88; p. 76,11° 183(gr.) ............................. p. 273
320 Les notables de Palmyre
TABLE DE CONCORDANCE
avec M. GAWLIKOWSKI, 1970b
CANTINEAU, 1930a, 11° 6= 11 ° 19,p. 189 CIS 4209=11° 65,p. 201 et 11° 49,p. 218
° °
CANTINEAU, 1930a, 11 8=11 45,p.195 C/S4213=11° 66,p. 201
°
CANTINEAU, 1930a, 11 13=n" 26,p. 211 C/S4214=11° 67,p. 202
° °
CANTINEAU, 1930a, 11 14= 11 6,p.206 C/S4215=11 ° 77,p. 203
°
CANTINEAU, 1930a, n"13=11 27,p.191 C/S4218=n" 3,p. 219
° ° °
CANTINEAU, 1933,p. 184, 11 7b=11 76,p. 203 INGHOLT, 1935,p.59=11 25,p. 190
° °
CANTINEAU, 1936,p. 355, 11 27=n" 47, p.195 INGHOLT, 1935,p. 60=11 62,p.200
° ° °
CANTINEAU, 1938,p. 155-156, 11 36c=11 42,p. 215-216 INGHOLT, 1935, p. 76 11 28,p.212
°
C/S4109=n"1,p. 184 INGHOLT, 1935, p. 77=11 29,p. 212
C/S4112=11 ° 2,p. 184 INGHOLT, 1935,p.78 :-:: n"30,p. 212
C/S4113=n"3,p.185 INGHOLT, 1935, p. 82=n" 31,p. 212
°
C/S4114=n"5,p. 185 INGHOLT, 1935,p.84=11 32,p. 213
C/S4115=11 ° 6,p. 185 °
INGHOLT, 1935, p.85 = 11 33,p. 213
°
C/S4116=n" 8,p. 186 INGI-IOLT, 1935,p. 86=11 34,p. 213
°
C/S4119=n"9,p.186 lNGHOLT, 1935,p. 88 = 11 35,p. 213
C/S4211=11° 40,p. 215 °
INGHOLT, 1935,p. 91=11 12,p. 207-208
C/S4235=11° 10,p. 186 °
lNGHOLT, 1935,p.93 = 11 13,p. 208
°
C/S4120=n"11,p. 187 lNGI-IOLT, 1935,p. 98 = 11 17,p. 208-209
C/S4121 11° 14,p.188 lNGHOLT, 1935,p. 99 11° 19,p.209
C/S4122=11° 15,p. 188 lNGHOLT, 1935,p. 102, X=n"21,p.210
C/S4123=11° 17,p. 188 °
INGHOLT, 1935,p. 110=11 46,p.217
C/S4124 11° 18,p.189 °
INGI-IOLT, 1935, p. 112 = 11 47,p. 217
°
C/S4130=n" 24, p.190 lNGI-IOLT, 1935,p. 115 = 11 58,p. 199
C/S4134=11° 28,p. 191 INGHOLT, 1938,p. 104=n"44,p.216
C/S4159=11° 33,p. 192 lNGI-IOLT, 1938,p. 106=n"9,p.207
° °
CIS 4160=n" 35,p.193 lNGHOLT, 1938,p. 109=11 48,p. 195-196 et 11 10, p.207
C/S4162=n" 36,p. 193 INGHOLT, 1938,p. 110 = n"11,p. 207
°
C/S 4163=n" 38,p. 193 INGHOLT, 1938,p. 124-125 = 11 41,p. 215
°
C/S4164=n" 42,p. 195 INGHOLT, 1962,p. 106=11 18,p. 209
C/S4167=11° 49,p. 196 Inv IV, 7=n"12,p.187 et 11° 25,p. 211
C/S4168=n(l 51,p. 197 Inv IV, 12 = 11 ° 54,p.198
C/S4170=n" 52,p.197 Inv IV, 13=11° 63,p. 100
C/S4171 11° 2,p. 205 Inv IV, 14 = 11 ° 55,p. 198
C/S4172=n"1,p. 204-205 /nvVII, lb 11° 50,p.218
C/S4173=11° 4,p.205 Inv VII, 3 11° 20,p.189
C/S4174 11° 3,p. 205 Inv VII, 5 = 11° 53,p. 197
C/S4175=n" 5,p. 206 Inv VII, 13=11° 74,p. 203 et 11° 45,p. 217
C/S4192=11° 56,p. 198 Inv VIII, 58 = 11 ° 69,p. 202
C/S4193=11° 13,p. 187 Inv VIII, 59=11° 29,p. 191
C/S 4194=11° 8,p.207 Inv VIII, 60 (INGHOLT, 1935,p. 90)=11° 40,p. 194
C/S4195=11° 10,p. 207 Inv VIII, 67 = 11 ° 71,p. 203
C/S4196=nu 57,p. 199 Inv VIII, 71=n ° 81,p.204
CIS 4197 = 11° 16,p. 188 Inv VIII, 86 = 11 ° 2,p.219
CIS 4199 11° 59,p. 199 Palmyre II, n° 1=11° 21,p. 190
C/S 4201=nu 60,p. 199 Palmyre V, 11° 2 = 11 ° 4,p. 185
CIS 4202=11° 68,p. 202 °
RoDINSON, 1950,p. 137=11 7,p. 185-186
CIS 4203 11° 61,p. 200 °
RSP n')S 24-25=11 50,p. 196
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322 Les notables de Palmyre
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CHAPITRE PREMIER - L'IDENTITÉ CIVIQUE DE PALMYRE
Le Tarif et son formulaire (p. 9), les magistrats (p. 9-10), le (p. 62-63), bilinguisme onomastique (p. 63), les surnoms
laconisme des décrets (p. 10-12), honneurs à Hatra et au (p. 63-64), clan et tribus, le clan Hashash (p. 64-65), les Bené
Proche-Orient ancien (p. 12-13 ), les textes détaillés Mazîn et les Bené Iedîbel, Baalshamîn et Allât (p. 65-66),
(p. 13-14), les motifs et l'honneur (p. 14-15), l'utilisation tribus civiques et traditionnelles (p. 66-67), les trois tribus
du datif (p. 15-16), le mot «statue» (p. 16), l'expression d'Jnv 61 (p. 67-68), la cpuÀll KÀcxufock et le clan Haumal
EÙCTE�17ç Kci't qnÀÔrcmpK Kat cp1ÀÔTH�Loç et ses traductions (p. 68-69), le nom des quatre tribus et le témoignage d'Arsû
(p. 17-21), le «courage» et les formules rares (p. 21), (p. 69-71), les sanctuaires tribaux et la question d' Allât et
particules et adverbes (p. 22), isolement de Palmyre Baalshamîn (p. 71-72), les Bené Zabdibôl et la famille de
(p. 22-23), bilinguisme, les théories (p. 23-24), le latin, Shoraîkô dans la Colonnade transversale (p. 72-73), la
langue des étrangers ? (p. 24-25), le début du grec à Palmyre Colonnade et les sanctuaires (p.74), les honneurs pour la
et les regravures (p. 25-27), le trilinguisme et Haîran, fils de famille de Shoraîkô (p. 74-75), la place de la famille (p. 75),
Bônné (p. 27-28), traduction et translittération du vocabulaire les Bené Mathabôl et la famille de Bartê (p.75-77), leurs
officiel (p. 28-29), le cas des Phéniciens de Grèce et de Pétra offrandes à Arsû (p. 77), solidarités tribales et localisation
(p. 29-30), Leptis Magna et Palmyre (p. 30-31), Conseil et (p. 77-78), Malé Agrippa et les Bené Mazîn (p. 78-79), le
Peuple, l'ordre des mots dans leurs décrets (p. 31-32), sanctuaire de Bel, centre pour les tribus (p. 79-81 ), le
localisation des textes (p. 32-33), le Conseil, le Peuple, le sanctuaire de Nabû et ses bienfaiteurs (p. 81-83), l'opposition
gbl et l'ethnique«Palmyréniens» (p. 33-34), le Conseil et entre la famille d'Elahbel et celle de Belshûrî (p. 83-84), le
le Peuple (p. 34-35), usage des langues (p. 35-36), mention sanctuaire de Nabû et l'installation de la Grande Colonnade
des fonctions (p. 36), le petit nombre de magistrats (p. 84-85), le sanctuaire de Nabû et les nouveaux rapports
(p. 36-37), la rareté des cursus honorwn (p. 37-38), le cas sociaux (p. 85-86), les dédicaces et les honneurs dans les
de Worod (p. 38-39), agoranomes et stratèges (p. 39-40), les sanctuaires (p. 86-87), Palmyre et Tanukh (p. 87-88),
rapports entre magistratures civiles et religieuses, Taîbbôl, l'influence arabe et araméenne à Palmyre (p. 88-89), Hatra
Worod et Odainat (p. 40-42), la personnalité de Worod entre nomades et sédentaires (p. 89-90), «Arabes» à Hatra
(p. 42), symposiarchie et culte impérial (p. 42-43), famille (p. 90-91), «Arabes» et«nomades» à Palmyre (p. 91), le
de Bônné (p. 44), la place de Haîran (p. 44-45), le destin de peuplement sédentarisé de la Palmyrène (p. 91-92), les
ses descendants (p. 45), de ses ascendants (p. 45), Ahophalî inscriptions safaïtiques de Palmyrène (p. 92-93), le
(p. 46-47), généalogie de la famille (p. 47), famille de bilinguisme safaïtico-araméen du Wadi Hauran (p. 93-94),
Nashûm (p. 47-48), Iulii Bassi à Palmyre (p. 48), retour de tribus à Hatra et Palmyre (p. 94-95), Araméens et Arabes à
la famille au rn" siècle (p. 49), Nashûm et Zénobie (p.49-50), Palmyre (p. 95), la société de Palmyre, les nomades, les
famille de Shoraîkô (p. 50), Benê Aabeî, diversité des Bédouins (p. 95-96), l'occupation de la Palmyrène
occupations (p. 50-51 ), tribus et fonctions civiques (p. 96-97).
(p. 51-52), l'ethnique«palmyrénien» et les tribus (p. 52-53),
l'ethnique hors de Palmyre... (p. 53 ), ... et à Palmyre
CHAPITRE III - LES ACTIVITÉS DES NOTABLES
(p. 53-54), l'instauration de la rcÔÀK (p. 54), la vie civique
et les notables (p. 54-56), l'assemblée du Peuple (p. 56). Les métiers et les activités des Palmyréniens, la faiblesse
des sources (p. 99-100), les grands caravaniers (p. 100-101),
les synodiarques (p. 101), différences sociales et carrières
CHAPITRE II - L'IDENTITÉ ETHNIQUE DE PALMYRE
(p. 101-102), spécialisation familiale (p. 102), Odainat et le
L'originalité de la cité de Palmyre (p. 57), les règles des commerce (p. 102), àvcxKo�tiÇro et àvcx�cxivro (p. 102-103),
généalogies (p. 57-58), la longueur des généalogies (p. 58), synodiarques, caravanes et marchands (p. 103-104 ),
le mot bar et son omission (p. 59), les noms perses (p. 59-60), archemporoi (p. 104), géographie du commerce (p. 104), les
famille Bageshû (p. 60), les noms grecs, procédés marchands de Séleucie et Babylone (p. 104-105),
d'équivalence (p. 60-61), le cas de Ogâ Séleukos (p. 61-62), Palmyréniens au service de Rome et des souverains du Golfe
rareté des noms grecs (p. 62), caractéristiques sociales (p. 105), Soados et les grands notables (p. 105-106), les
336 Les notables de Palmyre
Palmyréniens à Doura ( 106-107), le sanctuaire de la divinités (p. l 54-155), le culte cl' Arsû dans la Grande
nécropole (p. 107-108), le sanctuaire des Gaddé et la famille Colonnade (p. 155-156), la transformation de Palmyre à
cl'Odainat (p. l 08), les archers palmyréniens (p. 108), la l'époque romaine (p. 156), la construction des colonnades
Cohors XX Palmyrenorum (p. 109), une province de Palmyre (p. 156-157), de nouvelles formes cl'évergétisme (p. 157),
(p. 109), Soados et la Mésopotamie (p. 110), les honneurs la présence des princes de Palmyre et le palais de Zénobie
de Soados (p. 110-111), M. Ulpius Iarhaî et sa famille (p. l 57-158), les grandes maisons (p. 158-159), les maisons
(p. 111-112), les dangers du désert(p. 112-113), la présence « orientales » (p. 159), les constructions par fragments
militaire et le commerce (p. 113-114), les stratèges et la (p. 159-160), les dépenses des notables (p. 160-162), les
milice de Palmyre (p. l 14-1l 5), la surveillance des nomades traditions familiales, les fondations (p. 162), les banquets
(p. 115-116), stratèges et caravanes (p. l l 6), la défense des publics (p. 162-163), les caractères de l'évergétisme et de
caravanes (p. 116-117), les notables et le contrôle du désert l'urbanisme de Palmyre (p. 163-164 ), les caractères
(p. 117-1 l 8), les carrières dans 1'Empire romain (p. 118-119), particuliers de la culture de Palmyre (p. 164).
Dacie, Afrique, É gypte, Rome (p. 1 l 9-120), officiers
palmyréniens (p. l 20), le retour des expatriés (p. 121), la CHAPITRE V - FEMMES, AFFRANCHIS ET ESCLAVES DE NOTABLES
place de Palmyre dans l'Empire (p. 121), Soados et le culte
impérial à Vologésias et Palmyre (p. 122), les félicitations La place des femmes en Asie Mineure (p. 166), les femmes
officielles (p. 122-123 ), les dédicaces impériales dans la vie publique de Palmyre (p. 166-168), le cas de
(p. 123-124), les citoyens romains (p. 124), les fonctionnaires Thomallachis (p. 168), l'expression«Bat+ nom masculin»
et officiers romains à Palmyre (p. 124-125), l'origine de la (p. 168), Zénobie et sa famille (p. 168-169), l'absence des
fortune de Palmyre (p. 125-126), l'exploitation ancienne de prêtresses (p. 169), les femmes et la vie religieuse à Hatra et
la Palmyrène (p. 127-128), les notables de Palmyre en Palmyre (p. 169-170), le rôle des veuves(?) [p. 170], le culte
Palmyrène du nord-ouest (p. l 28-129), les travaux au dieu anonyme et les femmes (p. 171), les sculptures
d'irrigations (p. 129-130), l'exploitation du sel (p. 130). funéraires (p. 171-172), le costume des femmes et le
problème du voile (p. 172), la résistance à l'acculturation et
les valeurs familiales (p. 172-173), l'onomastique des
CHAPITRE IV - L'INFLUENCE SOCIALE DES NOTABLES femmes (p. 173-174), les femmes et les concessions de
Le costume des Palmyréniens (p. 132), celui des prêtres tombes (p. 174-175), la priorité aux héritiers mâles (p. 175),
(p. 132-133), la place des prêtres clans la société (p. 133-134), la monogamie et la matronymie à Palmyre (p. 175-176), les
Palmyre et Zeugma-Hiérapolis (p. l 34-135), la spécificité femmes remariées (p. 176-177), les filles de Wardan, fils de
de l'art de Palmyre (p. 135), la culture en Syrie Refabôl (p. 177), les mariages entre proches (p. 177-178),
Mésopotamie, grec et araméen (p. 135-136), l'influence le cas de la famille d'Elahbel (p. 178-179), les alliances entre
perse (p. 136-137), les Manichéens et les influences tribus (p. 179-1 80), les femmes des grands notables
«orientales» (p. 137), Palmyre et les Juifs (p. l 37), le cercle (p. 180-181), Zénobie et Mavia (p. 181), oncles et neveux
de Zénobie (p. 138), les Sévères, Émèse (p. 138), Longin et paterneis (p. 181-182), ia famille maternelle (p. 182-183 ),
les mosaïques (p. 138-139), les dédicaces «pour le salut honneurs en famille (p. 183-184), honneurs publics et privés
de... » à Doura (p. 139), pour Zénobie (p. 139-140), le poids (p. 184), la place des familles (p. 184), lignées familiales
des notables (p. 140-141), les textes honorifiques et les (p. 185), les ancêtres d'Odainat (p. 185-186), esclaves et
dédicaces«pour la vie de...» (p. 141-142), la concurrence affranchis à Palmyre (p. 186), les noms gréco-latins des
des notables (p. 142-143), la famille d'Odainat,«maîtres» affranchis (p. 186-187), les noms sémitiques (p. 187), le mot
et «patrons» (p. 143), Worod, Apsaios, les «patrons» «affranchi» en grec (p. 187-188), les noms des affranchis,
(p. 143-144), patronage et corporation (p. 144-145), la l'omission du mot « affranchi » (p. 188), les noms sans
montée et la prééminence de la famille cl'Odainat (p. 145), patronymes... (p. 188-189), ... en Palmyrène (p. 189), ... à
les notables et «l'amitié» (p. 145-146), l'ambiguïté du Zeugma (p. 189-190), le mot « tly' » (p. 190-191), les
bilinguisme (p. 146-14 7), l'amitié dissymétrique serviteurs en Palmyrène (p. 191), Odainat et la Palmyrène
(p. 147-148), Worod et Haîran (p. 148), les titres de Haîran (p. 191-192), un cas d'affranchi évergète (p. 192), les
et Odainat (p. 148-149), le nom de Worod et celui des grands affranchis hors de la tombe de leur maître (p. 192-193),
notables (p. 149-150), les nouveaux maîtres de Palmyre l'analphabétisme (p. 193),«pour leur vie» ou « pour la vie»
(p. 150), la construction des sanctuaires de Bel et de Nabû, des maîtres (p. 193-194), relations maîtres-serviteurs
les magistrats et les bienfaiteurs (p. 151), Malê Agrippa et (p. 194), les nourrices à Palmyre (p. 194-195).
Baalshamîn (p. 152), l'évergétisme classique et les
CHAPITRE VI - DES MONUMENTS POUR L'ÉTERNITÉ
constructions (p. 152), Taîbbôl et la sununa honoraria
(p. 153), les constructions religieuses de la Colonnade La documentation épigraphique et figurée (p. 197-198), le
transversale et de la Grande Colonnade (p. 153-154 ), plus ancien tombeau connu (p. 198), les stèles funéraires
construction pour les empereurs (p. 154), dédicaces à des (p. 198-199), les plaques de fermeture de loculi (p. 199), le
Sommaire détaillé 337
nombre de personnes enterrées (p. 199), 1' évolution des artistiques et sociaux du milieu du 11" siècle (p. 215), les
hypogées (p. 199-200), l'exemple de la tombe C de la nécropoles de Palmyre (p. 215), la nécropole nord (p. 215),
nécropole sud-est (p. 200-20 l ), les subdivisions dans la Juifs de Palmyre (p. 216), les pratiques funéraires des gens
tombe de Iulius Aurelius Malê (p. 201-202), les noms latins modestes (p. 216-217), les nécropoles cl'Elaioussa-Sebasté
dans l'hypogée de Zabdateh et Moqîmû (p. 202-203), les (p. 217), la prospérité et la montée des classes moyennes
tombes des fonctionnaires romains (p. 203-204), la (p. 217), les reflets de la rivalité des notables (p. 217-218),
reconstitution des familles cl'après les textes funéraires tribus et nécropoles (p. 218-219), l'origine des textes de
(p. 204), la prééminence d'Elahbel (p. 204-205), les citoyens Palmyrène (p. 219-220), la disparition des tribus (p. 220-
romains de la famille (p. 205), les frères cl'Elahbel (p. 205- 221 ), les stèles funéraires des classes moyennes (p. 221),
206), la disparition de la famille (p. 206), la tour (11° 164) les rivalités de localisation sur Umm Belqis et le prestige
cl'Obaîhan, citoyen romain (p. 206), la famille d'Obaîhan et familial (p. 221-222), les textes de fondation et de concession
la fierté généalogique (p. 206-207), esclaves et affranchis (p. 222-223 ), les langues utilisées (p. 223-224), la
clans les textes funéraires à Palmyre et Ostie (p. 207-208), prédominance de l'araméen (p. 224), les textes grecs et
les tombes pour les descendants de la famille étroite (p. 208- bilingues (p. 224-225), la formule cxÀUTCE xcxîpE (p. 225),
209), hiérarchie familiale dans les tombes (p. 209), l'abandon les traditions familiales (p. 225-226), les textes de fondation
des tombes et le déplacement des tombeaux de familles comme textes publics (p. 226), le vocabulaire des tombeaux
(p. 209-210), les tours des Bené Baâ (p. 210-211 ), le temple (p. 226-227), l e caractère laconique de ces textes
funéraire 11 ° 36 (p. 211-212), les langues des textes de (p. 227-228), la notion d'éternité (p. 228-229), interdictions
fondation (p. 212), le temple funéraire 11 ° 86 et l'urbanisme et malédictions (p. 229), différences linguistiques, sociales
de Palmyre (p. 212-213), le quartier du sanctuaire d'Allât et et type de textes (p. 229-230), le coût des tombeaux et des
les tombeaux n'" 86 et 173 (p. 213), une concession de temple amendes (p. 230-231), influence occidentale et permanence
funéraire (p. 213-214), le tombeau cl'Aaîlamî et Zebîdâ des coutumes locales, les notables et leurs tombeaux
(p. 214-215), l'influence romaine et les changements (p. 231-232).
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DES ILLUSTRATIONS
PLANS ET CARTES
Pl. 1 : Le Proche-Orient (J.-B. Yon, d'après fond de carte IFAPO: H. David-S. Vatteoni).
Pl. 2: Plan de la région de Palmyre (J.-B. Yon, d'après J. F. MATTHEWS, 1984).
PI. 3: Plan de Palmyre (T. Fournet, d'après plans A. Ostraz et R. Saupin).
PI. 4: Centre ville de Palmyre (T. Fournet, d'après plans A. Ostraz et R. Saupin).
Pl. 5: Plan de SulJné (J.-B. Yon, d'après A. DE BouCHEMAN, 1939).
PI. 6: Palmyre: les tombes de la périphérie urbaine (C. et J.-B. Yon).
PI. 7: Palmyre: les zones d'influences des groupes tribaux (C. et J.-B. Yon).
PI. 8: Palmyre: les monuments du centre ville et la ville« hellénistique» (C. et J.-B. Yon).
Pl. 9: Les nécropoles de Palmyre (T. Fournet, d'après plans A. Ostraz et R. Saupin).
Pl. 10: Maisons de Palmyre (d'après E. FRÉZOULS, 1976 et M. GAWLIKOWSKI, 1997a).
*
* *
FIGURES
Fig. 1 : Tour d'Elahbel dans la vallée des Tombeaux.
Fig. 2: Inscription CJS 3932 (Iulius Aurelius Zabdilah Zénobios).
Fig. 3: Inscription lnv XI, 100 (d'après lnv XI, photo fonds Starck.y, !ES-Collège de France).
Fig. 4: Inscription H. INGHOLT, 1932, p. 279 (à propos d' Aelius Bôrrâ).
Fig. 5: Inscription H. SEYRIG, 1959a, p. 58 (d'après Sculptures of Folmyra, fig. 121).
Fig. 6: Le temple de Baalshamîn vu de face avec les consoles de colonnes (à gauche de 1'entrée, C/S 3959 = BS n" 44 de Malê Agrippa).
Fig. 7: L'agora de Palmyre et les colonnes à console de l'angle nord-est.
Fig. 8: Vue de la Grande Colonnade (section B).
Fig. 9: Angle nord-ouest du sanctuaire de Bel.
Fig. 10: Inscription C/S 3942 (Septimius Worod).
Fig. 11: Inscription J. CANTINEAU, 1938, p. 76, n" 29.
Fig. 12: Buste du prêtre Taîbbôl ( CIS 4288) d'après CIS pl. 36.
Fig. 13: Inscription FAES III, 353 (= WADDINGTON 2572).
Fig. 14: Poutre du temple de Bel (quatre prêtres sacrifiant).
Fig. 15: Tessère RTF n" 35 (d'après RTF, frontispice).
Fig. 16: Inscription CIS 3935.
Fig. 17: Inscription CIS 4124.
Fig. 18: Inscription Jnv X, 61 (d'après lm' X, photo fonds Starcky, !ES-Collège de France).
Fig. 19: Inscription CJS 4122 (avec mention de la tribu Claudias).
Fig. 20: Console avec l'inscription H. J. W. DRIJVERS, 1995a (côté).
Fig. 21: Console avec l'inscription H. J. W. DRIJVERS, 1995a (face).
Fig. 22: Inscription C/S 3923.
Fig. 23: Sanctuaire de Bel (cour sud-ouest).
Fig. 24: Sanctuaire de Nabû (plan J. Seigne dans E. WrLL, 1992, p. 141).
Fig. 25: Relief de dieux arabes en costume guerrier (photo archives IFAPO).
Fig. 26: Relief du sarcophage d'un caravanier (d'après Sculptures of Folmyra).
Fig. 27: Inscription lm III, 26.
342 Les notables de Palmyre
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Pl. 8 - Palmyre: les 111011ume11ts du centre ville et la l'i/le« hellénistique» (C. et 1.-B. Ycm).
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352 Les notables de Palmyre
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1 Plan de la maison 11" 35 ( d'après A. GABRIEL, Syria, VJJ, 2 Plan des moisons à /'est du sanctuaire de Bel
1926, pl. XV). ( P Coupel et R. Duru).
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Pl. JO - Maisons de Palmyre (d'après E. FRÉZOULS, 1976 pour les 11"' 1 et 2 et M. GAWLIKOWSKJ, 1997a pour le 11° 3).
Figures 353
Fig. 1 - Tour d'Elahbel dans la i·allée des Tombeaux. Fig. 2 - I11scriptio11 CIS 3932 (Julius Aurelius Zabdilah Zé11obios).
Fig. 3 - Inscription Inv XI, 100 (d'après Inv XI, photofèmds Starcky, Fig. 4 - J11scriptio11 H. INGHOLT, 1932, p. 279 (à
!ES-Collège de France). propos d'Aelius Bôrrâ).
354 Les notClb!es de PCl!myre
Fig. 5 - Inscription H. SEYRIG, 1959Cl, p. 58 (d'après Fig. 6 - Le temple de Boalslrnmîn 1'll de foce ovec les
Sculptures of Palmyra, .fïg. 121). consoles de colonnes (à gauche de 1 'entrée, CIS 3959 =
BS n" 44 de MCllê Agrippo).
Fig. JO - Inscription CIS 3942 (Septimius Worod). Fig. ll - Inscription J. C\NTINEr\U, 1938, p. 76, 11" 29.
Fig. 12 - Buste du prêtre Taîbbôl (CIS 4288) d'après CIS pl. 36. Fig. 13 - Inscription PAES 111, 353 (= WADDINGTON 2572).
Figures 357
Fig. 19 - Inscription CIS 4122 (a1 1 ec mention de la tribu Claudias). Fig. 20- Console m'ec l'inscription H. J. W DRJ.J\IERS, 1995a (côté).
Fii. 21 - Cu11sule u1 1ec l'inscription H. J. vv'. Dm.1v1�1<s, 1995a (face). Fig. 22 - Inscription CIS 3923.
Fig. 24 - Sanctuaire de Nabû (plan J. Seigne dans E. WtLL, 1992, Fig. 25 - Relief de dieux arabes en costume guerrier
p. 141 ). (photo archives IFAPO).
Fig. 31 - Costume iranien (photo archives IFAPO). Fig. 32. - Palmyrénien en toge
· (photo archives IFAPO).
Fig. 35 - Sorcophoge du musée (d'après A. SCHMIDT-COLINET et Kh. As'AD, 1995, p. 36). Fig. 36 - Tessère RTP 11" 21 (d'après
RTP, _ji-ontispice).
Fig. 38 - Inscription CIS 4402 (photo Ch. Lorrieu, musée du Fig. 39 - Stèle de la région de Zeugma (d'oprès
Loul're, déportement des Antiquités orientales). J. WIGNER, 1976, pl. 34).
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Fig. 40 - Plan du tombeau-temple 11 ° 36 (d'après Fig. 41 - U1fa, citodel!e, inscription syriaque de lu reine
A. SrnM!DT-CouNET et Kh. As'AD, 1995, p. 40). Shalmot.
Figures
365
Fig. 49 - Inscri ption CIS 3959 (= ES n" 44; Fig. 50 - Inscription de Thomallachis (d'après H. INGHOLT,
inscription de Malê Agrippa). 1936, pl. XXII).
368 Les notobles de Palmyre
Fig. 57 - Foçade du tombeau 11'' 36 (reconstruction, d'après A. SCHMIDT-COLINET, 1992, pl. 13b).
Fig. 66 - Stèle.fzméraire individuelle (photo Fig. 67 - Pl oques de fermeture de loculi (hypogée de Iarlwî d' après
archives IFAPO). R. AMY et H. SEYRJG, 1936).
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Fig. 69 - Hypogée de Zabdateh et Moqîmû (d'après SFP, plan X). F ig. 70 - Plan de la tour d'Elahbel (d'après R. PFISTER, 1937, p. 8,
fig.]).
Fig. 76 - Buste de M. Julius Aristeides (photo Ch. Larrieu, musée Fig. 77 - Décor de la tombe des Trois frères (photo archil'es
du Louvre, département des Antiquités orientales). IFAPO).
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ISBN 2-912738-19-9