Introduction À La Macroéconomie

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Anne Epaulard

Aude Pommeret

Introduction
, la
macroeconomie
.
NOUVEllE DITION

(( Un petit livre clair et accessible. ))


ALTERNATIVES k:ONO"IQUES

ColleLion
R E p R E s
ECONOM IE

SOCIOI.OGIE

SOENS POUTtQUES DROIT

t. D&ouw"te
HISTOIRE

GESTION

CULTURE COMMUNICATION
Anne Epaulard
Aude Pommeret

Introduction
la macroconomie
NOU V ELLE DITION

~a Dcouverte
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sente pour l'avenir du livre, tout particuli.rement dans le domaine
des sciences humaines et sociales, le dveloppement massif du
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sation du Centre franais d'exploitation du droit de copie (CFC, 20, rue des Grands-
Augustins, 75006 Paris). Toute autre forme de reproduction, intgrale ou partielle, est
gaJement interdite sans autorisation de l'diteur.

ditions La Dcouverte, Paris, 2002, 2017.


Introduction

D epuis le mois de septembre 2008 et la chute de la banque


Lehman Brothers qui a dclench une crise financire mondiale,
les politiques macroconomiques se sont retrouves sur le devant
de la scne. Loin d'tre cantonns aux tats et aux banques
centrales, les dbats sur les politiques budgtaires et montaires
se multiplient sur les plateaux tlviss et les rseaux sociaux,
et sont aliments par des blogs tenus par des macroconomistes
reconnus, comme Paul Krugrnan, prix Nobel d'conomie, et Ben
Bernanke, ancien prsident de la Rserve fdrale amricaine.
Compte tenu de la situation dgrade des conomies, les pays
occidentaux ont-ils raison, ou non, d'adopter des politiques
d'austrit ? Les politiques montaires expansionnistes (faibles
taux d'intrt et<< assouplissement quantitatif) font-elles courir
le risque de voir resurgir l'inflation? L'objectif de cette Introduc-
tion la macroconomie est de fournir celles et ceux qui s'int-
ressent ces dbats les lments thoriques de base utiles la
comprhension des mcanismes qui rgissent les conomies et
du rle des mesures de politique conomique.

Qu'est-ce que la macroconomie?

La macroconomie est la branche de l'conomie dont le but


est de comprendre le fonctionnement des conomies natio-
nales (ou de groupes de pays), ainsi que les effets des politiques
conomiques et des rglementations mises en uvre par les
gouvernements. Pour cela, les macroconomistes s'intressent
aux relations thoriques et empiriques entre les grands agrgats,
4 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

tels le produit intrieur brut (PIB), le niveau des prix, la consom-


mation, l'emploi. ..
Parmi les questions auxquelles la macroconomie tente de
rpondre, on trouve aussi bien des questions relatives la crois-
sance conomique long terme, c'est--dire l'horizon de quinze
ou vingt ans, voire davantage, (comme celle, par exemple, des
dterminants de la croissance), que des questions relatives aux
volutions conomiques de court et moyen terme (comme celle,
par exemple, de la correction des fluctuations conomiques qui
implique de comprendre leur origine). Ce livre est entirement
consacr l'analyse des phnomnes de court et moyen terme;
pour une prsentation des phnomnes de long terme, le lecteur
peut consulter le livre de Dominique Guellec et Pierre Ralle [2003].
Le premier objectif des macroconomistes qui s'intressent
aux phnomnes de court terme consiste identifier les raisons
pour lesquelles les conomies connaissent des fluctuations. Leur
second objectif est d'tablir les mesures de politiques cono-
miques pour rduire ces fluctuations.

La croissance
Le produit intrieur brut (PIB) en volume (hors effet de varia-
tion des prix) fournit une mesure de la richesse produite chaque
anne dans un pays. Le graphique 1 reprsente l'volution des
taux de croissance annuels du PIB en volume des conomies fran-
aise, japonaise et amricaine de 1980 2014. Dans ces trois
pays, on observe des variations brutales du taux de croissance.
D'o proviennent-elles? Peut-on les anticiper? Comment expli-
quer que, de 1992 2000, l'conomie amricaine ait connu des
taux de croissance annuels suprieurs 3 o/o alors qu'une crois-
sance soutenue pendant une si longue priode ne s'tait jamais
vue dans ce pays? Pourquoi l'conomie franaise a-t-elle connu
un taux de croissance ngatif en 1993 et en 2009 ?
Le graphique 1 suscite d'autres interrogations : la politique
conomique peut-elle viter ou limiter les priodes de taux de
croissance faibles ou ngatifs pour viter la destruction des
emplois? Convient-il au contraire, comme le pensent certains,
de laisser se produire cette succession juge naturelle de booms et
de ralentissements sans tenter de l'entraver, sans quoi la crois-
sance serait en moyenne encore plus faible et le chmage encore
plus lev?
I NTRODUCTI ON 5

Graphique 1. le taux de croissance du PIB rel en France,


aux tats-Unis et au Japon de 1980 2015
Sr-------------------------------------------------
\ '
6+-----~.:~t~--~~~~~--------------------------------------
/~ 1
4+-~-+:~t~~,~~~~----~--L---~----~--------;r-------

-4+-----------------------------------~~-------
- France - - japon ---tats-Unis
-6~------------------------------------------------
1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015

Source: FMI.

Graphique 2. l 'inflation en France, aux tats-Unis et au Japon


de 1980 2015

4
1 "
'
0

-2
1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015

Source: FMI.
6 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

L'inflation et le chmage

La matrise de l'inflation partir du milieu des annes 1980,


bien visible sur le graphique 2, est en partie due aux efforts des
conomistes pour en comprendre les mcanismes et proposer des
moyens pour la combattre.
Depuis que les taux sont repasss sous la barre des 3 o/o, la ques-
tion de l'inflation proccupe moins les conomistes et les gouver-
nements. De fait, depuis 2012, les banques centrales europennes
et amricaine sont davantage proccupes par la possibilit de
taux d'inflation trop faibles ou ngatifs, comme c'est le cas au
Japon depuis le dbut des annes 2000. Certains conomistes
voient, dans les moyens mis en uvre pour stabiliser l'infla-
tion, la raison du maintien du chmage un niveau lev en
Europe. Pour d'autres, ce sont l'internationalisation et la concur-
rence des pays mergents qui sont les causes du chmage dans les
pays dvelopps. Mais comment expliquer alors que le taux de
chmage aux tats-Unis, qui subissent aussi la concurrence des
pays mergents et qui ont aussi lutt contre l'inflation, soit bien
plus faible qu'en France? Rarement en de de 7 o/o depuis 1980,
autour de 8,5 o/o en moyenne, le taux de chmage est lev en
France, en comparaison de celui observ aux tats-Unis et au
Japon (cf graphique 3). Aux tats-Unis, le taux de chmage
connat de trs fortes fluctuations, montant brutalement
pendant les priodes de rcession, comme entre 2007 et 2010
o il passe de 5 o/o 9,5 o/o, puis chutant assez rapidement en
priode de reprise, pour redescendre 6 o/o ds 2014. Au Japon,
le chmage est trs bas, rarement au-dessus de 5 o/o, mais les fluc-
tuations sont de faible ampleur et beaucoup moins rapides
qu'aux tats-Unis ou mme qu'en France.
C'est la comprhension du fonctionnement des conomies de
march qui permettra de comprendre l'origine des fluctuations
et de proposer des politiques conomiques mme de sortir des
rcessions et de rsorber le chmage. De ce point de vue, si les
mthodes et les rponses apportes par les conomistes ont beau-
coup volu depuis la naissance de la macroconomie, le but
ultime de la macroconomie n'a quant lui gure chang depuis
la parution en 1936 de la Thorie gnrale de l'emploi, de l'intrt
et de la monnaie. L'objectif ambitieux de John Maynard Keynes
tait en effet de fournir une analyse du fonctionnement des
conomies de march pour proposer des voies de sortie de la crise
I N TR ODUC TI ON 7

Graphique 3. le taux de chmage en France, aux tats-Unis


et au japon de 2000 2015
12 r---------------------------------------------- -

6~------~~,~_-
__-_f---~------------~- __
,~-~------~~~----~~\
.,...,:~,' .... ::._ ... _/
4+---------------------~~~----~~~--~~,~--
....
......... ' ,'-'
,...----- ..... _____ ........
,...--/
2~~------~~~---------------------------
- France - - Japon --- tats-Unis
0+-----~----~------~----------~----~------~
1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015

Source : FMI.

qui touchait rudement les pays europens et les tats-Unis dans


les annes 1930. La crise conomique de 2009, qui a fait plonger
simultanment les conomies avances (cf graphique 1), a
galement fait renatre les interrogations sur les politiques cono-
miques mener au cours de priodes exceptionnelles. Pour les
macroconomistes, cela a t l'occasion de vrifier si les outils
d'analyse dont ils disposaient permettaient, ou non, de
comprendre les phnomnes l'uvre et de proposer des poli-
tiques conomiques mme de remettre les conomies sur de
bons rails.

La mthode et les dbats des macroconomlstes

La principale difficult du raisonnement conomique rside


dans la prise en compte des interdpendances, car la moindre
mesure de politique conomique (comme une baisse des taux
d'intrt, ou une augmentation du taux de TVA) ou le moindre
choc extrieur (par exemple une hausse du prix du ptrole) se
traduisent par des effets en chane sur l'ensemble des variables
macroconomiques : sont affects la consommation, le chmage,
8 I NTRODUCTION lA MACROCONOMIE

l'investissement, l'inflation, le taux de change ... qui leur tour


s'influencent les uns les autres.
Pour prendre en compte les interdpendances sans se noyer
dans l'accumulation de dtails, les conomistes acceptent de faire
des simplifications et donc des choix. Le macroconomiste
choisit tout d'abord les phnomnes qui lui semblent les plus
importants expliquer (la croissance, le chmage, l'inflation, la
distribution des revenus et celle des richesses, le stock de
capital...). Il dcrit ensuite les actions conomiques des individus
et des firmes en les considrant soit individuellement, soit collec-
tivement. Pour cela, il formule des hypothses sur le fonction-
nement de l'conomie et les comportements des individus et des
firmes ou les buts qu'ils poursuivent. Juxtaposes, ces hypothses
constituent ce que l'on appelle un modle qui prend en compte
les interdpendances et avec lequel le macroconomiste tente de
reproduire au mieux l'volution des grandeurs macrocono-
miques qu'il souhaite expliquer. Ces hypothses fondamentales
peuvent tre testes pour slectionner le modle le plus perti-
nent. Il faut garder l'esprit que, pour une conomie donne,
le meilleur , modle n'est pas ncessairement toujours le
mme : un modle peut perdre de sa pertinence dans des situa-
tions conjoncturelles spcifiques (une crise conomique impor-
tante, par exemple), mais aussi du fait de changements
institutionnels ou technologiques qui modifient radicalement le
fonctionnement des marchs. Comme l'explique Dani Rodrik
dans Economie Ru/es [2015], le travail du macroconomiste n'est
pas seulement de concevoir des modles, mais aussi de navi-
guer entre diffrents modles pour identifier celui qui semble le
plus pertinent pour dcrire le fonctionnement d'une conomie
donne un moment donn.
Parvenir crire un bon modle n'est pas facile. n faut sans
cesse faire des allers et retours entre le modle thorique et les
faits. Pratiquement, la recherche du bon modle est une entre-
prise collective laquelle participe toute la communaut scienti-
fique. Le modle IS-LM qui sera expos ds le deuxime chapitre
a t propos par John Hicks (1937] comme une faon pratique
(rductrice, dirons certains) de rsumer la Thorie gnrale de
Keynes [1936). Dans les annes 1960, Robert Mundell et Marcus
Fleming l'tendent pour tenir compte de l'ouverture croissante
des conomies. Mais ce modle, qui n'accorde qu'une maigre
place aux comportements des entreprises et l'offre de biens
I N TR ODUC TI ON 9

n'est pas un outil d'analyse suffisant pour expliquer, par


exemple, ce qui s'est pass au moment de la brutale hausse des
prix du ptrole en 1973. li peut cependant tre complt pour
intgrer les phnomnes lis l'offre. Le rsultat est alors le
modle offre globale-demande globale.
Tout au long de ce livre d'introduction la macroconomie,
nous ferons tat d'oppositions entre les macroconomistes. Pour
simplifier l'extrme, l'opposition la plus prononce se situe
entre, d'une part, les conomistes keynsiens, pour qui le fonc-
tionnement spontan des marchs ne suffit pas assurer une
volution rgulire de l'conomie, ce qui justifie une interven-
tion de l'tat, et, d'autre part, les conomistes noclassiques
convaincus que le libre jeu des forces du march permet la meil-
leure allocation possible des ressources et qui en dduisent, sauf
cas particulier, que les interventions de l'tat ne sont pas souhai-
tables. Nous verrons dans la suite que ces conclusions, qui parais-
sent diamtralement opposes, peuvent tre obtenues partir de
modles en tous points semblables l'exception d'une ou deux
hypothses fondamentales.

Le contenu de ce livre

Chaque chapitre propose un expos thorique simple du


modle considr ainsi que des tudes de cas illustrant la faon
dont le modle propos peut tre utilis pour comprendre des
phnomnes macroconomiques de la fin du xx sicle et du
dbut du XXI' sicle. Chaque chapitre est en outre accompagn
d'un ou deux encadrs plus techniques prsentant tape par
tape la construction d'un modle macroconomique simple.
Le chapitre 1 propose un premier aperu de la faon dont on
peut schmatiser le fonctionnement de court terme d'une
conomie l'aide d'un modle assez simple appel offre globale-
demande globale. Ce modle est utilis pour analyser les effets des
chocs sur l'inflation et la croissance, notamment les chocs sur le
prix du ptrole.
Le clbre modle IS-LM est prsent dans le chapitre 11. Il
permet la construction de la demande globale. Nous illus-
trerons ce chapitre : 1) par la hausse des taux d'intrt nomi-
naux la suite de la runification allemande, et 2) par les stimuli
budgtaires de 2008-2009 puis l'austrit ds 2011 dans les pays
10 INT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

avancs. On dispose alors de suffisamment d'lments pour


entrer dans le dtail de certaines oppositions entre les diffrents
courants de la macroconomie depuis Keynes.
Le chapitre 111 revient en dtail sur le ct offre de l'conomie.
C'est l'occasion de prsenter la faon dont le fonctionnement
du march du travail influence l'efficacit des politiques cono-
miques. Cela est illustr par les politiques de rduction des
impts aux tats-Unis au dbut des annes 2000.
Le chapitre IV introduit dans le modle offre globale-demande
globale les anticipations et la dynamique. Nous disposons alors
d'outils pour analyser la relation entre inflation et chmage et
nous tudions les problmes concrets 1) de la persistance du
chmage en France depuis les annes 1970, et 2) des dcisions
de politique montaire. Les lments introduits dans ce chapitre
permettent de comprendre les dbats contemporains sur le rle
et l'efficacit des politiques conomiques.
Le chapitre v prsente le clbre modle Mundeli-Fleming qui
est la version en conomie ouverte du modle IS-LM. On tudie
alors dans ce cadre : 1) le policy mix dans l'Union conomique et
montaire; 2) la crise dans la zone euro; 3) la dcision d'arrimer
le franc suisse l'euro de 2011 2015.
1 1 Le modle offre globale-demande globale :
un premier aperu

P ourquoi la croissance a-t-elle t ngative juste aprs la crise


financire dans la plupart des conomies occidentales ? Pourquoi
cette croissance ngative s'est-elle accompagne d'une inflation
trs faible? Pourquoi une relance de la demande comporte-t-elle
des risques d'inflation dans certains cas, mais pas dans d'autres?
Le modle offre globale-demande globale va nous permettre de
comprendre les mcanismes de base par lesquels un choc ou une
politique conomique donns engendrent de la croissance ou
une rcession, de l'inflation, du chmage. Ce modle est l'outil
de base pour tudier les fluctuations court terme de l'activit
macroconomique, des prix et du chmage. Il rsume les interac-
tions de tous les marchs (le march du travail, celui des biens et
services et celui de la monnaie). Ce trs court chapitre donne un
premier aperu de la faon dont ce modle peut tre utilis pour
synthtiser le fonctionnement d'une conomie.
Le graphique 1 donne une reprsentation du modle offre
globale-demande globale dans le plan (PIB, niveau gnral des
prix). La courbe d'offre globale (Ys) dcrit, pour chaque niveau
de prix, la quantit de biens et services que l'ensemble des entre-
prises est prt mettre sur le march une fois pris en compte le
fonctionnement du march du travail. Cette courbe d'offre
globale est une fonction croissante : les entreprises sont d'autant
plus disposes produire que le niveau des prix est lev. La
courbe de demande globale (Yd) reprsente l'ensemble des
couples prix-niveau d'activit pour lesquels le march des biens
et services et le march de la monnaie sont l'quilibre. La
courbe de demande globale est dcroissante avec les prix ce qui
exprime que, toutes choses gales par ailleurs, la demande de
12 INT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

Graphique 1. Modle offre g lobale-demande globale

PIB

biens et services sera d'autant plus faible que le niveau des prix
est lev.
Si les prix sont flexibles, il existe un quilibre entre l'offre
globale et la demande globale. En effet, tout excs de demande
(respectivement, d'offre) tire les prix vers le haut (respective-
ment, vers Je bas) jusqu' ce que la demande et l'offre s'gali-
sent. L'intersection des deux courbes donne le niveau d'activit
de l'conomie (Je PIB) et le niveau des prix. Cette reprsentation
ne doit pas tre confondue avec un schma microconomique
reprsentant la confrontation de l'offre et de la demande sur un
march donn : dans le schma microconomique, le prix est Je
prix d'un bien donn, dans Je modle offre globale-demande globale
du graphique 1, Je prix reprsente le niveau gnral des prix dans
l'conomie, mais surtout, les courbes d'offre et de demande sont
ici construites conditionnellement ce qui se passe sur d'autres
marchs (march du travail, march de la monnaie).
Un dplacement de l'une ou l'autre des courbes se traduit par
une modification du niveau des prix et du niveau de J'activit.
Nous aurons l'occasion dans ce livre de proposer beaucoup
d'exemples de dplacements des courbes d'offre globale et de
demande globale : ceux-ci proviennent soit des chocs exognes
que subit l'conomie (la hausse des prix du ptrole, un choc clima-
tique comme une tempte), soit des politiques conomiques. Bien
qu'il y ait des dbats ce sujet (cf. Je chapitre rv), la plupart des
macroconomistes admettent que le prindpal objectif de la poli-
tique macroconomique conjoncturelle est d'viter de trop
grandes fluctuations de court terme de l'activit conomique et
des prix. Pratiquement, cela signifie que les autorits en charge de
L E MODtLE OFFRE GLOBALE-DEMANDE GLOBALE : UN PREMIER APERU 13

la politique conomique doivent agir sur les variables qu'elles


peuvent contrler plus ou moins efficacement (les taux d'intrt,
les dpenses de l'tat, les impts) en raction aux chocs subis par
l'conomie. Par exemple, si un choc ngatif rduit la demande
(dplacement vers la gauche de la courbe de demande), Je gouver-
nement peut souhaiter prendre des m esures pour stimuler la
demande (dplacer la fonction de demande vers la droite) et viter
une rcession. Pour pouvoir comprendre ce type de mcanisme, il
est ncessaire de savoir ce que recouvrent exactement les fonctions
d'offre globale et de demande globale du graphique 1.

La fonction d 'offre globale

Nous prsentons ici les trois types d'offre globale. Nous revien-
drons plus en dtail dans le chapitre m sur les dterminants de
l'offre des entreprises et sur la faon dont Je fonctionnement du
march du travail l'influence.

La fonction d'offre classique

La fonction d'offre globale classique n'a pas exactement la forme


prsente dans le graphique 1. Elle n'est pas oblique mais verti-
cale (cf graphique 2a) indiquant que la mme quantit de biens et
services sera offerte par les entreprises quel que soit le niveau des prix.
La courbe d'offre classique repose sur l'hypothse que le march
du travail est l'quilibre de plein emploi; tous les facteurs de
production (le travail et les quipements) sont utiliss. Une
augmentation des prix est alors sans effet sur l'offre des entreprises
parce que l'conomie fonctionne dj plein rgime.
On appelle Pm potentiel (ou encore P de plein emploz) ce niveau
de production, indpendant du niveau des prix, qui correspond au
cas o tous les facteurs de production sont pleinement utiliss.
Comme tous les facteurs de production, y compris le travail,
sont utiliss, il n'y a pas de chmage dans l'conomie ou, plus
exactement, le taux de chmage est trs faible et ne reflte que
le chmage frictionnel, celui qui rsulte seulement des ralloca-
tions invitables dans le fonctionnement d'une conomie :
certaines personnes cherchent u n premier travail aprs leurs
tudes, certaines entreprises licencient pendant que d'autres
embauchent. Parce qu'il faut un peu de temps pour trouver un
14 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Graphique 2. la fonction d'offre classique


a. b.

p Ys p Ys

P18 potentiel PIB


-
Pl8 potentiel PIB

travail, il y a toujours du chmage frictionnel, mme dans une


conomie dite de plein emploi.
Il est important de noter que le PIB potentiel n'est pas
constant au cours du temps, il a tendance crotre chaque anne
sous l'effet de l'augmentation de la population active (lorsqu'elle
augmente), de l'accumulation du capital (l'investissement) et du
progrs technique ; mais cette volution au cours du temps ne
dpend pas du niveau des prix. Dans le plan (PIB, niveau gnral
de prix), l'augmentation du PIB potentiel se traduit par un dpla-
cement vers la droite de la courbe d'offre, celle-ci tant toujours
verticale (cf graphique 2b).

La fonction d'offre keynsienne extrme

La fonction d'offre globale keynsienne extrme est horizontale


(cf. graphique 3). Cela signifie que, au prix qui prvaut, les entre-
prises sont prtes produire n'importe quelle quantit de biens
et services qui leur serait demande. Derrire cette courbe d'offre,
se trouve d'une part l'ide qu'il y a du chmage et donc que les
entreprises trouveront embaucher autant qu'elles le souhai-
tent au salaire en vigueur et, d'autre part, que chaque nouveau
travailleur produit autant que chaque travailleur dj en place
(les entreprises peuvent donc produire davantage sans augmenter
leurs prix). ll est important de noter que, dans cette reprsenta-
tion, le niveau des prix est indpendant du niveau du PIB.
l E MODhE OFFRE GLOBALE- DEMANDE GLOBALE : UN PR EMIER APERU 15

Graphique 3. la fonction d'offre keynsienne extrme


p

Ys

PIB

La fonction d'offre keynsienne

La fonction d'offre keynsienne est mi-chemin entre les deux


reprsentations de l'offre dj tudies. C'est celle qui est repr-
sente dans le graphique 1, et qui exprime le fait que l'offre des
entreprises est une fonction croissante du niveau des prix. Cette
reprsentation de la fonction d'offre est compatible avec l'exis-
tence de chmage (en plus du chmage frictionnel) de telle sorte
que les entreprises peuvent embaucher au salaire qui prvaut
dans l'conomie. Cependant, chaque nouveau travailleur produit
moins que chaque travailleur en place, et seule une hausse des
prix incite les entreprises embaucher pour produire davantage.

Forme de la fonction d 'offre court terme et politique conomique

Quelle est la forme de la fonction d'offre la plus mme de


reprsenter le fonctionnement d'une conomie dveloppe ? La
rponse cette question est fondamentale, parce que la forme de
la fonction d'offre conditionne largement l'efficadt d'une mesure
de politique conomique donne. Imaginons par exemple une
politique conomique qui augmente la demande (dplacement
vers la droite de la courbe de demande, comme sur chaque schma
du graphique 4). L'effet final de cette politique sur le niveau d'acti-
vit et les prix dpend de la forme de la fonction d'offre. Si celle-ci
est horizontale (cas keynsien extrme), l'augmentation de la
demande se traduit par une augmentation du PIB sans augmenta-
tion des prix, comme sur le graphique 4b. Au contraire, si la courbe
d'offre est verticale (cas classique), l'activit conomique n'est pas
du tout stimule par l'augmentation de la demande qui engendre
16 I NTRODUCTI ON lA MACROCONOMIE

Graphique 4. Fonction d'offre et politiques de relance par la demande


a. Cas classique b. Cas keynsien extrme c. Cas keynsien

uniquement une hausse des prix (cf. graphique 4a). Enfin, dans
le cas keynsien, reprsent par le graphique 4c, la stimulation de
la demande a un effet positif sur l'activit (moindre toutefois que
dans le cas keynsien extrme) qui s'accompagne d'une hausse
des prix (moindre que celle obtenue dans le cas classique).

La fonction d'offre : une question d'horizon et de conjoncture

trs court terme, quelques semaines ou quelques mois, la


courbe d'offre keynsienne extrme fournit sans doute une
bonne reprsentation de la ralit. Au-del d'un trimestre, l'offre
des entreprises ragit aux prix et c'est plutt la fonction d'offre
keynsienne qui donne une reprsentation pertinente de la
ralit. moyen terme, au-del d'un an et demi ou deux ans,
c'est sans doute la courbe d 'offre classique qui reprsente le
mieux le fonctionnement de l'conomie.
Cela signifie qu'un choc favorable sur la demande (ou une
politique de soutien de la demande) aura vraisemblablement
pour effet d'augmenter l'activit court terme, mais qu' plus
long terme les effets positifs sur l'activit disparaissent pour
laisser place de l'inflation uniquement.
Comment expliquer que la reprsentation de l'offre de biens et
services change en fonction de l'horizon temporel considr ? Cette
succession de reprsentations provient prindpalement des ajuste-
ments des prix et des salaires qui ne sont pas immdiats. trs
court terme (quelques semaines), les prix et les salaires peuvent tre
considrs comme fixs; court terme (quelques trimestres), les
prix s'ajustent alors que les salaires nominaux s'ajustent plus
l E MODhE OFFRE GLOBALE- DEMANDE GLOBALE : UN PREMIER APERU 17

Graphique 5. la courbe d'offre, fonction de la conjoncture

PIB potentiel

lentement et c'est essentiellement cette diffrence entre la vitesse


d'ajustement des salaires et celle des prix qui en~endre une courbe
d'offre croissante avec les prix (cf. chapitre m). A plus long terme,
c'est--dire lorsque les prix et les salaires se sont parfaitement
ajusts l'environnement (et cela peut prendre plusieurs annes),
l'offre globale est indpendante des prix.
Tous les macroconornistes ne partagent pas cette vision. Selon
certains (notamment les conomistes dits noclassiques), la fonc-
tion d'offre verticale fournit une bonne reprsen tation du fonc-
tionnement du ct de l'offre mme court terme; pour d'autres
(plutt keynsiens), l'hypothse d'une offre globale verticale (et
l'absence de chmage qui l'accompagne) n 'est q u'une fiction
inutile la comprhension du fonctionnement rel des conomies
mme pour le long terme.
La forme de la fonction d'offre peut aussi tre influence par la
conjoncture conomique. Elle a alors l'allure non pas d'une droite
comme sur les graphiques prcdents mais plutt d'une courbe
convexe (cf graphique 5). Pourquoi une telle forme? Pour prendre
en compte le fait que, pour de faibles niveaux d'activit par rapport
au PIB potentiel, une stimulation de la demande aura des effets
positifs sur l'activit et peu d'effets inflationnistes (la courbe d'offre
est presque horizontale). En revanche, pour des niveaux de produc-
tion proches du niveau du PIB potentiel, toute augmentation de la
demande se traduit par une hausse des prix sans effet majeur sur
l'activit : puisque tous les facteurs de production sont utiliss, il
n'y a pas de marges de manuvre court terme pour augmenter la
production (la courbe d'offre est alors verticale). Entre ces deux cas
extrmes, on retrouve une courbe d'offre qui dpend positive-
ment des prix; une stimulation de la demande (dplacement de la
18 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

courbe de demande vers la droite) a alors des effets positifs sur


l'activit tout en tant un peu inflationniste.

La fonction de demande globale

La courbe de demande globale reprsente l'ensemble des


couples (activit, niveau gnral des prix) pour lesquels il y a
quilibre simultan sur le march de la monnaie et sur le march
des biens. Le chapitre n est entirement consacr l'tude des
dterminants de la demande lorsque l'conomie est ferme (c'est
le clbre modle IS-LM). Le chapitre v envisage le cas o
l'conomie est ouverte (c'est le modle IS-LM en conomie ouverte
aussi appel modle de Mundel-Fleming) .
Il n'y a gure de dbats entre conomistes autour de la forme
de la fonction de demande globale. En revanche, les cono-
mistes ne s'accordent pas sur la faon dont une mesure de poli-
tique conomique donne (par exemple, une augmentation des
dpenses publiques finance par un emprunt) affecte la demande :
y a-t-il ou non dplacement de la courbe de demande globale?
Dans le cas le plus simple, o l'conomie est ferme, on consi-
dre le plus souvent qu'une augmentation des dpenses publiques
ou de l'offre de monnaie dplace vers la droite la courbe de
demande globale (cf. chapitre n). Ainsi, pour un niveau de prix
donn, la demande agrge est d'autant plus forte que l'offre de
monnaie est leve et que les dpenses publiques sont impor-
tantes. Tous les conomistes ne s'accordent cependant pas sur ce
point (cf. chapitres n et IV). Par ailleurs, dans le cas o l'conomie
est ouverte, le rgime de taux de change (taux de change fixe ou
taux de change flexible) joue un rle important dans la faon dont
une augmentation de l'offre de monnaie ou des dpenses publiques
affecte la demande agrge. Cela sera tudi en dtail au chapitre v.

Une analyse simple des chocs dans le modle


offre globale-demande globale

Nous pouvons dj utiliser le modle offre globale-demande globale


dont nous avons expos les rudiments dans ce chapitre pour nous
faire une ide de la nature des chocs qui perturbent l'conomie un
moment donn. Les conomies sont en permanence soumises
L E MODtLE OFFRE GLOBALE- DEMANDE GLOBALE : UN PREMIER APERU 19

Graphique 6. Chocs d 'offre et chocs de demande


dans le modle offre globale-demande globale

a. Effet d 'un choc de demande positif b. Effet d 'un choc d'offre positif

p ?' ' p
''
'' Offre
''
p2 ..... '
p1 ------- -- 1'''
',
/' ' ',

des chocs auxquels elles ragissent. Un t plus chaud ou plus


froid que la moyenne, un tremblement de terre, la faillite inat-
tendue d'une grande entreprise, une hausse du prix du ptrole,
un regain d'optimisme dans un pays sont des exemples de chocs
qui modifient l'offre et la demande de l'conomie. En temps
normal, des chocs positifs sur l'offre et la demande annulent en
moyenne les chocs ngatifs, et la rsultante de l'ensemble de ces
chocs sur l'conomie est minime. Toutefois, il existe des situa-
tions o un choc domine clairement les autres ou encore des
situations dans lesquelles tous les ch ocs sont de mme nature
(positifs, par exemple) et touchent principalement un pan de
l'conomie (l'offre ou la demande) . Dans ces situations, la crois-
sance conomique acclre si les chocs sont majoritairement
positifs et dclre s'ils sont majoritairement ngatifs. Les effets
sur les prix nous aident savoir si les chocs un moment donn
affectent surtout le ct offre de l'conomie ou le ct demande.
Le graphique 6 illustre cela : dans la partie a du graphique, on
reprsente schmatiquement ce qui se passe sur l'activit et les prix
en cas de choc positif sur la demande. La situation initiale est celle
o l'offre et la demande se rencontrent pour un niveau de prix P,
et un niveau d'activit Y,. En cas de choc positif sur la demande,
pour un niveau donn des prix, il y a plus de demande : la courbe
de demande se dplace vers la droite. la nouvelle intersection
de l'offre et de la demande, l'activit Y2 est suprieure au niveau
initial Y, et les prix un niveau P2 suprieur au niveau initial P,.
20 INT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

La partie b du graphique reprsente ce qu'il advient en cas de


choc positif sur l'offre. Dans ce cas, c'est la courbe d'offre qui
se dplace. Elle se dplace vers la droite pour signifier que, un
niveau de prix donn, les entreprises sont prtes produire
davantage. Dans ce cas-l, aprs le choc, l'conomie se posi-
tionne un niveau d'activit suprieur au niveau initial, mais
avec un niveau de prix infrieur.
Ainsi, dans la ralit, une conomie o l'activit acclre sans
regain d'inflation est probablement une conomie qui subit un
choc d'offre positif, alors que, lorsque l'activit acclre et que
l'inflation augmente, l'conomie est probablement soumise un
choc de demande positif.

tudes de cas

La crise financire de 2008-2009

Que se passe-t-il si les chocs sont majoritairement ngatifs? Si


c'est surtout l'offre qui est touche par un choc ngatif, l'activit se
contracte (ou la croissance ralentit) et l'inflation augmente. Si c'est
surtout la demande qui est touche par un choc d'offre ngatif,
la croissance devient faible, voire ngative, et l'inflation diminue.
C'est d'ailleurs ce que l'on a observ dans les conomies des pays
avancs lors de la crise financire de 2009, dans lesquelles la crois-
sance, dj faible en 2008, devient ngative en 2009 alors mme
que l'inflation ralentit fortement entre 2008 et 2009 (cf. tableau 1).
Ces symptmes observs sur les conomies avances nous mettent
sur la piste d'un choc ngatif de demande.
Rciproquement, une conomie o l'activit ralentit et o
l'inflation augmente est probablement victime d'un choc d'offre
ngatif, comme ce fut le cas lors du premier choc ptrolier.

Le premier choc ptrolier

Utilisons le modle offre globale-demande globale pour repr-


senter l'effet du premier choc ptrolier sur l'activit conomique et
les prix. Entre 1973 et 1974, le prix en dollars du baril de ptrole
a t multipli par quatre (cf. tableau 2). En France, cela s'est traduit
par une augmentation en francs du prix de l'nergie importe.
Qu'observe-t-on au niveau de l'conomie franaise? La hausse du
L E MODtLE OFFRE GLOBALE- DEMANDE GLOBALE : UN PREMIER APERU 21

Tableau 1. La croissance et l' inflation dans les pays avancs


entre 2007 et 2009

2007 2008 2009 2010

Taux de croissance (en %) 1,9 0,2 -3,4 3,1


Taux d'inflation (en %) 2,7 3,4 0,1 1,5

Source: FMI, WEO database.

prix du ptrole rduit la rentabilit des entreprises : c'est un choc


d'offre ngatif (dplacement vers la gauche de la courbe d'offre).
Les entreprises licencient ou limitent les nouveaux recrutements,
le chmage augmente. Cela se traduit en 1974 par un ralentis-
sement de la croissance, par une baisse du PIB en 1975 et par une
forte inflation. Fin 1975, des mesures de politique conomique
(visant stimuler la demande et qui se traduisent par un dpla-
cement vers la droite de la courbe de demande) sont mises en
uvre pour tenter d'enrayer la contraction de l'activit cono-
mique. Nous verrons leur effet au chapitre suivant.
Ces symptmes ne sont pas propres l'conomie franaise.
L'conomie amricaine ragit peu prs de la m me faon.
Toutefois, la raction de l'conomie amricaine est plus rapide, le
chmage augmente plus vite, la contraction de l'activit a lieu
ds 1974 et se poursuit en 1975.
La raction de l'conomie suisse est diffrente, du moins en ce
qui concerne l'volution du chmage. Le ralentissement de l'acti-
vit de 1974 se transforme en forte rcession en 1975 (le PIB baisse
de 6,7 %) du fait de la concomitance du choc ptrolier et d'une
crise propre l'industrie horlogre. Toutefois, le chmage augmente
peine. Cela vient des politiques visant rduire la population
active : les contrats de travail des travailleurs trangers ne sont pas
renouvels et les femmes sont indtes ne pas travailler.

Les variations du prix du ptrole depuis 2007

Le prix du ptrole a connu d'autres variations importantes


depuis le choc ptrolier de 1973. En juin 2014, le prix du baril de
ptrole de Brent tait de 112 dollars, en aot 2015 il n'tait plus que
de 47 dollars. l'inverse de ce qui s'est pass en 1974, cette baisse
du prix du ptrole constitue un choc d'offre favorable. De fait, les
dirigeants des pays importateurs de ptrole se sont rjouis
22 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Tableau 2. L'activit conomique en France, aux tats-Unis


et en Suisse autour du premier choc ptrolier

1973 1974 1975

Prix du baril de ptrole en dollars 2,7 11 ,0 10,4


(moyenne annuelle)
France
Taux d'inflation (%) 7,3 14,8 11 ,8
Taux de croissance (en % du PIB rel) 5,4 3,1 -0,3
Taux de chmage (%) 2,7 2,9 4,0
Solde des comptes publics (en %du PIB) 0,0 0,1 -2,8
tats-Unis
Taux d'inflation (%) 5,4 10,3 8,2
Taux de croissance (en % du PIB rel) 5,2 -0,6 -0,8
Taux de chmage (%) 4,9 5,6 8,5
Solde du budget fdral (en % du PIB) -1,0 -0,4 -3,2
Suisse
Taux d'inflation (%) 8,9 9,9 6,4
Taux de croissance (en % du PIB rel) 3,2 1,2 -6,7
Taux de chmage (%) 0,0 0,0 0,3
Solde du budget fdral (en % du PIB) -0,6 -0,7 -0,8

Source : Base de donnes OCDE.

du surcrot de croissance que cela pourrait apporter des conomies


trs peu dynamiques depuis la crise de 2009. n'en pas douter, la
croissance conomique a t meilleure en 2015 qu'en 2014, en
partie du fait de la baisse du prix du ptrole. Mais ce contre-
choc >> ptrolier ne peut pas tre interprt exactement comme tant
l'inverse du choc de 1974, notamment parce que les conomies
avances sont, en ce dbut du XXI' sicle, moins exposes aux fluc-
tuations du prix du ptrole car elles ont rduit leur dpendance au
ptrole en diminuant la consommation d'nergie par rapport au
PIB ainsi qu'en dveloppant d'autres sources d'nergie. Pratique-
ment, cela signifie que la courbe d'offre globale se dplace dsormais
moins lorsque le prix du ptrole varie. Mais les conomies avances
ne sont pas totalement immunes aux chocs ptroliers, comme le
soulignent les chiffres du tableau 1 : en 2008, avant la crise finan-
dre de l'automne, la croissance ralentit (par rapport 2007) dans
les pays dvelopps alors que l'inflation augmente. Ce sont les
consquences du choc d'offre ngatif que constitue le renchrisse-
ment du ptrole et de matires premires en 2008.
Il 1 La demande de biens en conomie ferme
le modle /S-LM

L austrit budgtaire rduit-elle la croissance? Quels sont les


effets attendre d'une baisse des taux d'intrt? Une rduction
d'impt peut-elle relancer l'conomie?
Pour rpondre ces questions, on doit s'intresser en dtail
au ct demande du modle offre globale-demande globale prsent
dans le chapitre prcdent. Pour tudier les dterminants de la
demande globale, on utilise le clbre modle IS-LM, propos en
1937 par sir John Hicks (prix Nobel d'conomie en 1972) sur la
base de fondements thoriques dvelopps par Keynes dans la
Thorie gnrale de l'emploi, de l'intrt et de la monnaie [1936].
On s'intresse d'abord aux composantes de la demande
agrge qui peuvent tre l'origine de fluctuations du PIB et,
parmi celles-ci, celles susceptibles d'tre influences par la poli-
tique conomique. En combinant la fonction de demande
agrge avec les fonctions d'offre voques au chapitre 1, on
dispose d'lments pour tudier l'effet des politiques cono-
miques sur l'activit d'un pays.
Pour bien isoler les diffrents mcanismes conomiques, nous
ignorons dans ce chapitre l'ensemble des interactions de
l'conomie d'un pays avec celles des pays du reste du monde et
nous nous restreignons ainsi l'tude d'une conomie ferme.
Cette analyse en << conomie ferme >> s'applique videmment
l'conomie mondiale prise dans son ensemble, laquelle n'a en
effet aucun change conomique avec le reste de l'univers. Nous
complterons l'analyse en considrant l'ouverture de l'conomie
dans le chapitre v de ce livre.
24 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Le modle IS-LM

Le modle IS-LM s'intresse deux marchs : le march des


biens et services, et celui de la monnaie. La demande agrge
rsulte de l'quilibre simultan sur ces deux marchs.

L'quilibre sur le march des biens et services prix donns


L'quilibre sur le march des biens et services stipule qu'en
valeur aussi bien qu'en volume la somme des ressources en
marchandises et en services d'une conomie doit tre gale
celle de ses emplois en biens et en services. Si l'conomie est
ferme, cet quilibre ressources/emplois s'crit : Y = C + I + G
avec G = Ge + G1 Ainsi, les biens et services produits (Y) sont
soit consomms (et on note C la consommation des mnages,
et Ge celle de l'tat), soit investis (on note I l'investissement des
mnages et des entreprises, et G 1 l'investissement de l'tat). Les
variations de stocks (diffrence entre biens produits et biens
vendus), trs faibles, sont intgres l'investissement priv. On
parle d'identit comptable car cet quilibre est toujours vrifi
quelle que soit la conjoncture conomique, qu'il y ait une rces-
sion ou un boom conomique, qu'il y ait ou non du chmage.
En conomie ouverte, l'quilibre ressources/emplois sur le
march des biens et services devient : Y = C + I + G + X - M, o
X et M indiquent respectivement les exportations et les importa-
tions (cf chapitre v).
La comparaison des composantes de la demande agrge en
France en 1980, 1990, 2000 et 2010 (cf tableau 1) montre la rela-
tive stabilit dans le temps de la part de chaque composante.
La consommation des mnages reprsente plus de la moiti de
la demande agrge, tandis que les dpenses publiques et l'inves-
tissement priv reprsentent environ un quart de la demande
agrge. Malgr la stabilit des parts de chaque composante dans
le PIB, leur contribution la croissance du PIB varie selon les
deux priodes (cf tableau 2). Depuis 2010, la contribution de la
consommation prive et celle des dpenses de l'tat ont diminu,
alors que celle de l'investissement priv a augment.
Toutes les composantes de la demande n'ont pas la mme
variabilit, comme l'illustre le graphique 1, o sont reprsents,
pour chaque composante, les carts du taux de croissance annuel
son taux de croissance annuel moyen sur la priode 1990-2015.
l A DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 25

Tableau 1. Les composantes de la demande de biens agrge


en France en 1980, 1990, 2000 et 2010
(en%)

c G X-M

1980 55 22 25 -2
1990 56 20 26 - 1
2000 54 18 26
2010 56 18 28 -2

Source : Insee, Comptes nationaux, base 201 O.

Tableau 2. Contributions la croissance annuelle moyenne du PIB


en France
(en%)

PIB c G X-M

1980-1989 2,4 1,3 0,4 0,7 - 0,1


1990-1999 2,0 1,0 0,3 0,4 0,3
2000-2009 1,4 1,1 0,2 0,5 - 0,3
2010-2015 1,1 0,4 0,5 0,2 - 0,1

Lecture : entre 1980 et 1989, le PIB de la France a crO en moyenne de 2,4 % par an, dont
1,3 point est attribuable la croissance de la consommation et 0,4 point celle de l'inves-
tissement priv.
Source : Insee, Comptes nationaux.

La consommation, principale composante de la demande, varie


peu, de mme que les dpenses de l'tat, alors que l'investisse-
ment connat des fluctuations de plus grande ampleur. Finale-
ment, mme si l'investissement ne reprsente qu'une plus petite
partie de la demande, du fait de sa forte variabilit, il contribue
autant que la consommation aux fluctuations de la demande.
En conomie ferme, l'quation qui traduit l'quilibre
ressources/emplois peut tre rcrite sous la forme Y- C- Ge =
I + G,. Comme Y est aussi le revenu global d'un pays, cela signifie
que l'pargne (le revenu moins la consommation) est gal
l'investissement. C'est de l que provient l'appellation IS (avec I
pour Investment et S pour Saving, l'pargne) de la courbe qui rend
compte de l'quilibre ressources/emplois dans le modle IS-LM.
26 I N T RO DUCT IO N LA MAC RO ~ CONOMIE

Graphique 1. Variabilit des composantes de la demande


en France entre 1990 et 2015

- 17 %~---------------------------------v-----------
---c --1 ---c - - x --- M
- 20 %L-------------------------------~-----------
1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014

Source : Insee.

Les composantes de la demande de biens et services. - Les


dpenses publiques G regroupent la consommation de biens et
services de l'tat (traitements des fonctionnaires, achats de four-
nitures ... ) et ses investissements (achats de btiments, construc-
tion de routes ... ). Elles sont en gnral considres comme
exognes, c'est--dire qu'elles ne sont dtermines par aucune
autre variable du modle ; leur niveau est simplement fix par
l'tat et les collectivits locales, elles sont un instrument de la
politique conomique conjoncturelle et chaque anne le budget
de l'tat fait l'objet d'une discussion l'Assemble nationale.
Notons toutefois que la taille du budget de l'tat change peu au
cours du temps : la plus grande part des dpenses publiques (les
dpenses d'ducation, de sant, de justice ...), comme la plus
grande part des recettes de l'tat, dcoulent de choix qui ne sont
pas remis en question chaque discussion budgtaire. Cepen-
dant, les changements la marge dan s les dpenses ou les
recettes de l'tat (une augmentation de 1 % de dpenses
p ubliques, une baisse de quelques pour-cent d'un impt ... )
peuvent avoir des effets importants sur l'activit conomique.
lA DEMANDE DE BIENS EN fCONOMIE FERMfE : LE MODhE /5-LM 27

La consommation prive et l'investissement priv sont endo-


gnes. Ces variables dpendent du niveau du revenu national et
de celui du taux d'intrt, eux-mmes dtermins par le modle.
Dans la Thorie gnrale, Keynes considre que la consomma-
tion des mnages peut tre approxime par une relation linaire
trs simple : C = c (Y - 1) + C0 . La consommation des mnages
crot avec leur revenu disponible (Y- 1), c'est--dire avec le
revenu leur disposition aprs transferts (prestations sociales .. .)
et prlvements obligatoires (impts et cotisations sociales). Les
taux d'imposition sont dcids par le gouvernement; on peut
considrer que l'tat prlve une part du PIB note t sous forme
d'impt. Le volume des impts est alors T = t Y.
Une propension marginale consommer le revenu disponible
(c dans l'quation ci-dessus) gale 0,8 signifie que pour chaque
euro de revenu disponible supplmentaire les mnages consa-
crent 80 centimes la consommation et 20 l'pargne (c < 1,
car une augmentation du revenu national se traduit par une
augmentation d'ampleur infrieure de la consommation). Les
macroconomistes prfrent souvent utiliser la notion d'lasti-
cit de la consommation au revenu disponible plutt que celle de
propension marginale consommer. Cette lasticit est habituel-
lement value 0,4 l'horizon d'un an, ce qui signifie qu'une
augmentation de 1 o/o du revenu disponible conduit, la mme
anne, une augmentation de 0,4 o/o de la consommation.
L'lasticit de la consommation au revenu disponible n'est pas
constante dans le temps, et l'volution de la consommation des
mnages dpend aussi d'autres facteurs, comme le niveau du
taux de chmage et, de faon plus large, de l'optimisme ou du
pessimisme des consommateurs concernant le futur. Une tude
rcente de la Banque de France [Faubert et Olivella Moppett,
2015] montre par exemple que Je ralentissement du pouvoir
d'achat et la hausse du taux de chmage ne suffisent pas expli-
quer la faiblesse de la consommation des mnages depuis la crise.
La consommation dpend aussi de la structure des revenus (la
propension consommer les revenus du capital est plus faible
que celle consommer les salaires et les transferts sociaux), de la
structure par ge de la population (les jeunes et les retraits par-
gnent peu ou pas alors que les adultes en milieu de carrire par-
gnent davantage), de la dispersion des revenus (le taux d'pargne
sur les bas revenus est plus faible que celui sur les hauts revenus)
28 I NTRODUCTION lA MACROCONOMIE

et de l'inflation (l'effet de l'inflation sur la consommation


dpend du patrimoine net de chaque agent).
L'investissement priv est compos de l'acquisition de biens
d'investissement par les entreprises, des variations de stock et des
investissements immobiliers des mnages. Quels sont les dter-
minants de ces investissements ? La plupart des conomistes
considrent que les plus importants sont : les anticipations de
l'volution future de la demande (les perspectives de march) ou,
plus gnralement, les anticipations des conditions cono-
miques futures, et le taux d'intrt rel (i - n*) calcul comme la
diffrence entre le taux d'intrt nominal (i) et le taux d'inflation
anticip (n*). Le taux d'intrt rel est en effet le cot d'opportu-
nit de l'immobilisation des fonds qui permettent de financer les
investissements (le cot de ne pas pouvoir placer ces fonds ou
le cot de l'emprunt de ces fonds) . Lorsque le taux d'intrt rel
augmente, le nombre de projets d'investissement rentables (ceux
dont le rendement rel est suprieur au taux d'intrt rel)
diminue. Notons que c'est bien en fonction du taux d'intrt rel
(et non nominal) que les entrepreneurs prennent leurs dd-
sions d'investissement car l'inflation affecte de la mme faon
le rendement nominal des projets d'investissement et celui des
placements financiers. Les autres dterminants de l'investisse-
ment (mode de financement, incertitude) sont prsents dans le
livre de Patrick Villieu [2007].

La courbe /S. - En prenant en compte les principaux dtermi-


nants de la consommation et de l'investissement (cf rcapitu-
latif dans le tableau 3), l'quilibre ressources/emplois peut tre
rcrit :
Y= C(Y, t, ac*) + I(i- n*, at) + G (1)
Pour des niveaux donns du taux d'imposition et des antici-
pations, le respect de cet quilibre dfinit une relation unique
entre Y et i qui donne l'ensemble des couples (Y, i) pour lesquels
le march des biens et services est l'quilibre. La courbe IS repr-
sente ces couples dans le plan (Y, i).
Pour des anticipations d'inflation donnes, plus le taux
d'intrt nominal est lev, plus le taux d'intrt rel l'est aussi
et plus l'investissement est faible. Cela rduit mcaniquement la
demande et donc le revenu (du fait de l'quilibre ressources/
emplois). Il existe ainsi une relation ngative entre Y et i, et la
lA DEMANDE DE BIENS EN fCONOMIE FERMfE : LE MODhE /5-LM 29

Tableau 3. les principaux dterminants des composantes


de la demande

c G = G, + Ge

Y, t, De"' Exogne
+, -, +

n est le taux d'inflation anticip, a, est un indicateur des anticipations que forment les
consommateurs sur leur environnement futur et a/t de celles que forment les entrepre-
neurs. Plus a, ou ai" sont levs, plus les agents sont optimistes quant l'avenir et plus
ils consomment ou investissent.

courbe IS est dcroissante dans le plan (Y, i). Un taux d'intrt


nominal plus faible se traduira donc par un dplacement le long
de la courbe IS dans le sen s d'une hausse de la demande
(cf graphique 2a). Prcisons que l'analyse mene ici est une
analyse de statique comparative : on compare l'tat de l'conomie
dans le cas o le taux d'intrt est faible avec celui o il est plus
lev mais on ne s'intresse pas la faon dont l'conomie passe
d'un tat l'autre.
Comment le march des biens et services ragit-il une poli-
tique conomique ou un choc qui affecte les anticipations des
consommateurs ou des entrepreneurs ? Dans la reprsenta-
tion IS et pour un taux d 'intrt nominal donn, davantage
d'optimisme chez les agents privs accrot la consommation
et/ou l'investissement, et donc la demande agrge : dans le plan
(Y, i), la courbe ISse dplace vers la droite (cf graphique 2b).
De mme, si l'tat met en place une politique budgtaire
expansionniste ou rduit les impts, la courbe IS se dplace vers
la droite. En effet, un accroissement des dpenses publiques (un
relvement des minima sociaux par exemple) accrot la demande
de biens et services. C'est aussi le cas d'une rduction du taux
d'imposition qui, en augmentant le revenu disponible, permet
aux mnages de consommer plus.
Une hausse de l'inflation anticipe se traduit (pour un niveau
donn des taux d'intrt nominaux) par une baisse du taux
d'intrt rel, et donc par une hausse de l'in vestissemen t, ce qui
engendre aussi un dplacement de IS vers la droite.
Dans tous les cas, l'effet initial sur la consommation des
mnages, l'investissement ou les dpenses publiques s'ajoutent des
effets induits via la consommation des mnages : l'accroissement
30 INT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

Graphique 2. la courbe IS

a. Dplacement b. Dplacement
le long de la courbe IS de la courbe IS

/S'

de la demande induit une augmentation du revenu national qui


stimule la consommation des mnages ce qui, nouveau, accrot la
demande de biens et services et le revenu, ce qui favorise la consom-
mation... et ainsi de suite. Le rsultat de cette succession d'effets est
connu sous le nom d'effet multiplicateur (cf. encadr p. 38).

L'quilibre sur le march de la monnaie

L'offre de monnaie dans une conomie est le plus souvent assi-


mile l'agrgat M 2 , compos de l'ensemble des billets et pices
en circulation, des dpts vue dans les banques (les comptes
courants), des comptes d'pargne et des comptes courants ou
d'pargne en devises trangres. En termes nominaux, la masse
montaire rsulte de l'quilibre entre l'offre de monnaie et la
demande de monnaie. En termes rels, cet quilibre s'crit :
M!P = L, o M est la masse montaire, P est le niveau gnral
des prix et L la demande relle de monnaie. Dans le modle
IS-LM, cet quilibre est reprsent par la courbe LM (avec L pour
Liquidity et M pour Money). Le niveau gnral des prix est pour
l'instant considr comme fixe et donn.
L'offre de monnaie est exogne. C'est un outil de politique
conomique car elle est en grande partie ddde par les auto-
rits montaires, c'est--dire les banques centrales, mais elle est
aussi affecte par le fonctionnement du systme bancaire et les
marchs financiers. Le livre de Dominique Plihon [2013)
prsente les mcanismes qui sous-tendent l'offre de monnaie et
le rle jou par les banques.
l A DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERME : lE MDD~lE 15-LM 31

Les composantes de la demande de monnaie. - Les mnages


souhaitent dtenir de la monnaie car c'est un actif trs liquide
puisqu'il peut tre mobilis, immdiatement et sans cot, pour
effectuer des paiements. Mais la dtention de monnaie a un cot
d'opportunit: en dtenant une partie de leurs avoirs sous forme
de monnaie, les mnages renoncent aux intrts qu'ils auraient
pu toucher s'ils les avaient placs un taux d'intrt nominal
sans risque (en achetant des bons du Trsor par exemple). Il en
rsulte que, lorsque le taux d'intrt nominal augmente, les
agents prfrent dtenir moins de monnaie. Par ailleurs, en
immobilisant des fonds lorsque le taux d'intrt est faible, les
mnages s'interdisent de profiter d'une hausse future des taux
d'intrt, ainsi un taux d'intrt faible incite les agents dtenir
leurs actifs sous forme trs liquide. Ce motif pour la dtention de
monnaie est connu sous le nom de motif de spculation.
La demande de monnaie dpend aussi du niveau d'activit :
plus le PIB est lev, plus les dpenses envisages sont impor-
tantes, et plus les mnages souhaitent dtenir de monnaie. Ce
motif pour la dtention de monnaie est connu sous le nom de
motif de transaction.

La courbe LM. - Compte tenu des principaux dterminants de la


demande de monnaie (cf rcapitulatif dans le tableau 4), l'qui-
libre sur le march de la monnaie s'crit :
M/P = L(Y, i) (2)
Cet quilibre dfinit une relation unique entre Y et i qui donne
l'ensemble des couples (Y, i) pour lesquels le march de la
monnaie est l'quilibre. La courbe LM reprsente ces couples
dans le plan (Y, 1}

Tableau 4. les principaux dterminants de l'offre


et de la demande de monnaie

M/P

Exogne i Y
- +

Plus le revenu national est lev, plus les mnages souhaitent


dtenir de monnaie afin de pouvoir raliser leurs transactions. La
demande de monnaie s'accrot donc pour un niveau donn
32 INTRODUCTION LA MACRO~CONOMIE

Graphique 3. la courbe LM
a. Dplacement b. Dplacement
le long de la courbe LM de la courbe LM

d'offre de monnaie, ce qui engendre un excs de demande par


rapport l'offre. L'quilibre du march de la monnaie se rta-
blit alors par une augmentation du << prix , de la monnaie : le
taux d'intrt nominal s'accrot. Tout accroissement du revenu
national engendre un dplacement le long de la courbe LM dans le
sens d'une augmentation du taux d'intrt : dans le plan (Y, i), la
courbe LM est croissante (cf graphique 3a).
Que se passe-t-il sur le march de la monnaie si les autorits
montaires dcident de mettre en uvre une politique de
rigueur ? Pour un niveau donn du revenu national et des prix,
lorsque la Banque centrale rduit la masse montaire, l'offre
relle de monnaie (M/P) diminue elle aussi. Cela cre une situa-
tion d'excs de demande par rapport l'offre de monnaie. L'qui-
libre se rtablit un niveau de taux d'intrt plus lev. Dans le
plan (Y, i), la courbe LM se dplace vers le haut (cf graphique 3b).
Si nous envisageons au contraire une politique montaire expan-
sionniste, le sens des effets est invers et la courbe LM se dplace
vers le bas.

L'quilibre IS-LM : la dtermination de la demande agrge


La demande agrge prix donns. - La demande agrge est
dtermine par l'quilibre simultan sur le march des biens et
services et sur celui de la monnaie pour un niveau de prix donn.
L'quilibre de chacun des deux marchs implique une relation
(positive pour LM et ngative pour IS) entre la demande agrge
et le taux d'intrt, et finalement un unique couple (Y, i) permet
leur quilibre simultan. Sur le graphique 4, cet quilibre se situe
lA DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 33

Graphique 4. quilibre simultan sur le march de la monnaie

;ls
et sur le march des biens et services

l'intersection entre IS et LM. On rappelle que les deux quations


correspondantes s'crivent :
IS Y= C(Y, t, ac*) + J(i- n, at) + G (1)
LM M!P = L(Y, i) (2)
o t, G, M, ac, at, et n sont exognes et Pest donn.

la fonction de demande globale. - L'ensemble des niveaux de


la demande satisfaisant l'quilibre IS-LM pour diffrentes valeurs
du niveau gnral des prix P donnent la fonction de demande
globale Yd dans le graphique Sb. Dans le plan (Y, P), la pente de
la demande globale est ngative, ce qui signifie qu'une hausse des
prix, toutes choses gales par aiiieurs, rduit la demande agrge.
Cette proprit dcoule directement du modle IS-LM :
Considrons une conomie dont le niveau gnral des prix est
P1, et initialement l'quilibre de IS-LM (Y1, i1) (cf. graphique Sa).
Si le niveau gnral des prix augmente de P 1 P2 alors que
l'offre nominale de monnaie reste constante, l'offre relle de
monnaie (M! P) diminue et LM se dplace vers le haut. Une
contraction de (M/P) dsquilibre donc le march de la monnaie
(le couple (Y1, i 1) ne se trouve pas sur LM') : il existe un excs de
demande de monnaie par rapport l'offre, ce qui engendre une
augmentation des taux d'intrt. Mais l'augmentation du taux
d'intrt affecte le march des biens et services : l'investissement
ragit ngativement la hausse du taux d'intrt ce qui rduit
la demande de biens et services. Ces effets simultans dplacent
l'quilibre IS-LM de l'conomie vers le point (Y21 i 2).
Un niveau de prix plus lev, toutes choses gales par ailleurs,
aboutit donc une demande plus faible. La courbe de demande
globale est donc bien dcroissante dans le plan (Y, P).
34 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Graphique 5. De l'quilibre 15-LM la courbe de demande agrge

a. Effet d'une augmentation b. Effet d'une augmentation


de prix sur l'quilibre ISLM de prix sur la demande agrge

~r~
t P,--r-~~
-
.
Y2 Y, Y

Chocs de demande et politiques conomiques

Intressons-nous maintenant aux effets sur l'activit cono-


mique de diffrents chocs et politiques conomiques affectant
directement la demande. Nous commenons par l'tude des
chocs puis envisageons les politiques budgtaires et montaires
susceptibles d'en attnuer les effets.
S'il existe des dbats autour de l'ampleur exacte des impacts sur
la demande agrge de ces chocs et politiques (cf conclusion de ce
chapitre), on peut considrer que les conomistes s'accordent sur
les effets qualitatifs tels que les retrace le modle IS-LM. Cepen-
dant, l'effet final sur l'activit conomique d'un choc ou d'une
politique conomique donns dpend de la confrontation entre
la <<nouvelle >> demande agrge et l'offre agrge. Pour chaque
choc et chaque politique conomique tudis, nous envisagerons
donc successivement trois hypothses concernant l'offre agrge :
le cas keynsien extrme; le cas keynsien ; le cas classique.

Austrit budgtaire ou choc de demande dfavorable

Un brusque accs de pessimisme de la part des agents rduit la


consommation et/ou l'investissement et dplace la courbe IS vers
la gauche. L'austrit budgtaire (baisse des dpenses de l'tat
et/ou hausse des impts) a le mme effet. Sur le march de la
monnaie (courbe LM), cette rduction de la demande de biens et
services rduit la demande de monnaie et aboutit une baisse du
taux d'intrt. Sur le march des biens et services (courbe IS), des
l A DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 35

Graphique 6. Choc de demande dfavorable


ou austrit budgtaire /S-LM et demande globale

a. Effet d'un choc b. Effet d'un choc


de demande dfavorable de demande dfavorable
sur l'quilibre 15-LM sur la demande globale

taux d'intrt plus bas favorisent l'investissement ... Finalement,


l'quilibre IS-LM de l'conomie se situe un taux d'intrt et un
niveau de demande plus faibles (cf. graphique 6a). Dans le plan
(Y, P), la courbe de demande globale se dplace vers la gauche
(cf. graphique 6b). Notons que la prise en compte du march
de la monnaie rduit, sans J'annuler, l'ampleur de l'effet multipli-
cateur obtenu en ne considrant que le march des biens et
services (cf encadr p. 38).
Dans Je cas keynsien extrme (l'offre s'ajuste la demande),
l'offre globale peut tre reprsente par une droite horizontale
dans le plan (Y, P). L'effet d'un choc ngatif sur la demande
agrge se transmet alors intgralement l'activit cono-
mique, sans variation de prix. Le choc dfavorable se traduit
donc par une contraction de l'activit et davantage de chmage
(cf. graphique 7b).
Avec une fonction d'offre keynsienne (l'offre est une fonc-
tion croissante des prix), l'austrit budgtaire, tout comme un
choc de demande dfavorable, qui engendre un excs d'offre
agrge par rapport la demande se traduit par une diminu-
tion du niveau gnral des prix et de la production ; le chmage
augmente (cf graphique 7c).
Dans le cas d'une offre classique (inlastique aux prix), l'excs
d'offre agrge par rapport la demande engendre un ajustement
la baisse du niveau gnral des prix jusqu' ce que l'emploi et Je
niveau de production retrouvent leurs niveaux initiaux. Dans Je
cas classique, un choc dfavorable rduit donc le niveau gnral
36 I N TRODUCTION lA MACRO CONOMIE

Graphique 7. Effet de l'austrit budgtaire ou d'un choc


de demande dfavorable pour diffrentes courbes d'offre globale

a. Cas classique b. Cas keynsien extrme c. Cas keynsien

des prix sans affecter les variables relles de l'conomie


(cf. graphique 7a).
Dans de nombreux pays dvelopps, aprs la crise finandre
de 2008-2009, les agents privs (entreprises, mnages) qui
se trouvaient avec des niveaux d'endettement difficiles
rembourser ou parce qu'ils taient devenus tout simplement
pessimistes sur les volutions venir ont rduit leur consomma-
tion et leur investissement. Par exemple, en France, le taux
d'pargne des mnages a augment aprs la crise. Dans le mme
temps, les tats de ces pays ont mis en place des plans d'aust-
rit pour essayer de stabiliser la dette publique. Au total, ces
conomies ont donc vu une contraction importante de la
demande qui s'est traduite par une baisse de la croissance et
une inflation trs faible, voire ngative. Les tenants de l'aust-
rit budgtaire avanaient cependant qu'elle n'aurait pas d'effet
trop ngatif sur l'activit. Certains suggraient que la courbe
d'offre de l'conomie tait de type << classique , de telle sorte
que le niveau d'activit ne serait pas affect par la demande
(cf. graphique ?a). D'autres prdisaient que l'austrit budgtaire,
en amliorant la soutenabilit des finances publiques, crerait de
l'optimisme chez les particuliers, les amenant consommer et
investir davantage ; la baisse de la demande publique serait ainsi
compense par la hausse de la demande prive et ne se traduirait
pas par une perte d'activit (indpendamment de la forme de la
courbe d'offre). L'tude de cas la fin de ce chapitre revient sur
cet pisode.
lA DEMANDE DE BIENS EN fCONOMIE FERMfE : LE MODhE 15-LM 37

Graphique 8. Effet d 'une augmentation des dpenses publiques,


d'une rduction d'impts ou d 'un choc de demande favorable
sur l'quilibre /S-LM et sur la demande globale

a. quilibre 15-LM b. Demande globale

t;2
1'
-~.---,..~
> !..' .. . . . . .
-

1 i
LM

--~~-
IS'

:.r*~~.
-
Y, Y2 Y
-
Y, y2 y

Politique budgtaire expansionniste, rduction des impts


ou choc de demande favorable
Un accroissement des dpenses publiques et une rduction du
taux d'imposition net accroissent la demande agrge : dans les
deux cas, la courbe ISse dplace vers la droite (cf. graphique Sa).
S'ensuivent des ajustements simultans sur le march des biens
et services et sur le march de la monnaie de mme nature (mais
en sens inverse) que ceux dj mis en vidence dans le cas des
chocs de demande dfavorables, jusqu' ce que l'conomie se
trouve l'intersection de IS' et de LM. Finalement, le taux
d'intrt augmente et la demande agrge s'accrot. Dans le plan
(Y, P), la courbe de demande globale se dplace vers la droite
(cf graphique Sb). La hausse du taux d'intrt limite l'effet
expansionniste, ce qui est connu sous le nom d'effet d'viction par
le taux d'intrt.
Les effets sur l'activit conomique et le niveau gnral des
prix d'une politique budgtaire expansionniste ou d'une rduc-
tion des impts sont symtriques ceux qui apparaissent lors
d'un choc de demande dfavorable. Ils dpendent de la reprsen-
tation de l'offre globale retenue. Sauf dans le cas classique, ces
politiques de relance favorisent l'activit et l'emploi. Mis part
le cas keynsien extrme, ces politiques crent de l'inflation
(cf. graphique 4 du chapitre 1).
38 I N TRODUCTION lA MACROCONOMIE

11 et 11 sont des constantes positives.


Calcul du multiplicateur L'quilibre LM sur le march de la
des dpenses publiques : monnaie s'crit donc :
le cas d'un modle linaire M/ P=I,.Y-11 i"" Y=
(l,i + M/P)/ 1, (2)
le multiplicateur simple En combinant l'quation de la
(la courbe IS seule) courbe IS (1) et celle de la courbe
LM (2), on obtient l'q ua tio n de
La consommation : C = c(Y- tY) demande agrge :
+ c, Y = [/1 (C0 + 10 + G + b1r*)
L'investissement : 1 = 10 - b(i - 1r*) + b M/P] I [1,(1- c(1- t))
L'quilibre ressources-emplois : Y = + b 1,] (3)
C + 1+ G Dont on dduit qu'une augmenta-
En combinant ces trois quations tion des dpenses publiques d'un
on obtient l'quation de la courbe IS. montant LIG conduit, toutes choses
Y = [C, + 10 + G - b(i- ,..*)]/ gales par ailleurs, une augmentation
[1 - c(1 - t)] (1) de la demande de 7/ [7 - (c(l - t)) + b
En utilisant cette quation, on obtient 1,/1,] L!G. Le multiplicateur des dpenses
immdiatement qu'une augmentation publiques est afars gal 11[ 1 -
des dpenses publiques d 'un montant (c( l - t)) + b 1,!11]. On montre aisment
LIG conduit, toutes c hoses gales par que le multiplicateur issu de IS-LM est
ailleurs, une augmentation de Y de p lus petit que celui issu d e la seule
[1/(1 - c( 1 - t)] LIG. On dit alors que le courbe IS. Cela provient de l'viction par
multiplicateur des dpenses publiques est les taux d'intrt. Par exemple si
gal [7/(7 - c(l - t)]. Comme cet t b 11/ 11 = 0,1, le multiplicate ur issu de
sont infrieurs 1, ce multiplicateur est IS-LM est gal 2 ( comparer avec 2,5
suprieur 1 . Par exemple pour c = 0,8 dans le cas de la seule courbe IS).
et t = 0,25, le multiplicateur est gal
2,5. Ce qui signifie qu'une augmenta-
tion des dpenses publiques de 1 million le multiplicateur dans le modle
d'euros aurait pour effet une augmenta- global (IS-LM + offre globale)
tion de la production de 2,5 millions
d'euros. Toutefois, comme ce calcul est Dans le cas keynsien extrme, les
ralis en ne considrant que la courbe prix sont fixes et les entreprises adap-
IS, l'quilibre sur le march de la tent l'offre la demande. Le multipli-
monnaie est ignor, de mme que l'qui- cateur est alors identique celui
libre offre globale-demande globale. obtenu avec le seul m odle IS-LM.
Dans le cas classique, l'offre est ind-
pendante des prix (et de la demande), le
Le multiplicateur dans le modle IS-LM multiplicateur est gal zro.
Dans le cas keynsien, l'offre est
Sur le march de la monnaie, l'offre une fonction croissante des prix ; le
nominale de monnaie, M, est constante multiplicateur des dpenses publiques
et la demande re lle de monnaie, L, est alors strictement positif mais inf-
s'crit: rieur celui obtenu dans le cas keyn-
sie n extrme.
lA DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 39

La politique budgtaire en pratique

Revenons sur la politique budgtaire conjoncturelle, c'est--


dire sur la dcision de mettre en place une politique budgtaire
expansionniste dans le but d'viter une rcession ou, au
contraire, une politique de rigueur dans le but d'viter la
surchauffe de l'conomie (c'est--dire l'inflation). Quand et
comment prendre une dcision plutt qu'une autre ?
En temps rel, il n'est pas toujours facile d'identifier la situa-
tion dans laquelle se trouve l'conomie. Pourtant, une bonne
apprciation de la nature des chocs subis par l'conomie et de
leurs effets potentiels sur l'activit conomique est le pralable
indispensable toute politique conomique conjoncturelle.
Alors que la mise en uvre de la politique montaire ne requiert
que la modification du taux d'intrt, la politique budgtaire
subit des dlais qui proviennent du grand nombre de mesures qui
doivent tre pralablement adoptes par les instances lgisla-
tives. ces dlais lgislatifs s'ajoutent les dlais de raction de
l'conomie une mesure donne. L'existence de ces dlais de
raction moyens des conomies europennes des mesures de
politique conjoncturelle (budgtaire ou montaire) exacerbent le
besoin d'outils statistiques permettant d'identifier au plus vite
la situation conjoncturelle. Les organismes qui suivent la
conjoncture conomique ont mis au point des outils statis-
tiques leur permettant de suivre en temps rel l'activit cono-
mique. Par exemple, l'Insee publie chaque mois un indicateur
du climat des affaires en France sur la base d'enqutes auprs
d'un grand nombre d'entreprises. Le graphique 9 reprsente
l'volution de cet indicateur de janvier 1990 juillet 2016. On
remarque sa chute vertigineuse la fin de l'anne 2008 et au
dbut de l'anne 2009. Le principal intrt de cet indicateur
rside dans sa disponibilit immdiate.
En priode de boom conomique, l'tat engrange des recettes
fiscales (TVA, impt sur les bnfices des socits ... ) impor-
tantes, alors mme que certaines de ses dpenses (les alloca-
tions chmage par exemple) diminuent. En priode de rcession,
les mmes effets jouent en sens inverse : les recettes fiscales
diminuent, les dpenses augmentent. On appelle stabilisateurs
automatiques l'ensemble des mcanismes qui assurent automati-
quement une partie de la rgulation conjoncturelle de l'activit
via le systme fiscalo-social.
40 I N T RO DUCT IO N LA MAC RO ~ CONOMIE

Graphique 9. Indicateur du climat des affaires en France


de 1990 2016
120
115
110 Il """) tl\
\ 1\ 1\ 1 ,,
utn.l' 1 {1
105
100 1 1 1 v \ A J { /&Il

r l/'11 J ( 1
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rv~ \~} v1 t ~ rv
90
85
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75
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0
N
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N N
0
N
0
N
0
N
0
N
0 N

Source : Insee.

Tableau 5. Taille des stabilisateurs automatiques


dans quelques pays europens et aux tats-Unis

Choc sur le revenu Choc sur le chmage

Allemagne 0,48 0,62


France 0,37 0,57
Zone e uro 0,39 0,49
Royaume-Uni 0,35 0,42
tats-Unis 0,32 0, 34

Lecture : en France, un choc qui diminue le revenu de l'ensemble des mnages est
absorb 37 % par les stabilisateurs automatiques et 57 % si le choc ngatif passe par
une augmentation du taux de chmage.
Source : Dolls et al. [201 2].

Ces stabilisateurs automatiques sont plus levs dans les pays


europens qu'aux tats-Unis, comme le montre le tableau S,
notamment pour les chocs qui touchent l'emploi.
l A DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERME : lE MDD~lE 15-LM 41

Graphique 1 O. Effet d'une expansion montaire sur l'quilibre /S-LM


et la demande globale

a. quilibre 15-LM b. Demande globale

~
''
M-' ''
;, , ''
~ ;2
P! ....

Yd
~-- "!

'
...... ~

l'
j ' , , Yd'
1 1 /5 '

- Y, y2 y Y,
- y2 y

Effet d'une expansion montaire

Lorsque la Banque centrale entreprend une politique mon-


taire expansionniste, la courbe LM se dplace vers le bas
(cf. graphique lOa), ce qui signifie que, niveau donn d'acti-
vit, le taux d'intrt est plus bas. Cela favorise l'investissement
des entreprises et la consommation des mnages : la demande
agrge s'accrot. Aprs des ajustements sur le march des biens
et services et sur celui de la monnaie, l'conomie se trouve fina-
lement l'intersection de IS et de LM' et la courbe de demande
globale se dplace vers la droite (cf graphique lOb).

Tableau 6. Un aperu des effets macroconomiques des chocs


et des politiques qui affectent la demande

Cas keynsien Cas keynsien Cas classique


extrme

y p u y p u y p u

Choc de demande
dfavorable ++ +

Relance budgtaire ++ + -- + + + ++ +

Expansion montaire ++ - -- + + ++
42 INTRODUCTION LA MACRO~CONOMIE

Construction d'un petit modle.


tape 1 : la demande globale

Nous avons obtenu (d. corps du texte) que la demande de biens est une fonc-
tion croissante de l'offre de monnaie relle, des dpenses publiques et d'un choc
de demande. Nous pouvons reprsenter cela par une quation loglinaire trs
simple:
Y!= a, (m,- pJ + a,g, +v,
dans laquelle les lettres minuscules reprsentent le logarithme des variables en
niveau. Dans le cas des dpenses pub li ques cependant on pose
g, = -/n(l - G, 1 Y,) o g peut s'interprter comme la part des dpenses publiques
dans le Pl B. Les coefficients a1 et a, sont positifs; ils dpendent des diffrents
compo rtements des agents (consommation, investissement) et nous les
su pposons constants dans le temps. a, s'interprte comme l'lasticit de la
demande agrge une hausse de l'offre de monnaie relle, ce qui signifie que,
si l'offre de monnaie relle augmente de 1 %, la demande agrge de biens et
services augmente de a, % . De mme, a, est l' lasticit de la demande agrge
la part des dpenses publiques dans le Pl B.

tudes de cas

La hausse des taux d'intrt nominaux la suite


de la runification allemande

En 1990, l'Allemagne de l'Est et l'Allemagne de l'Ouest sont


runifies. Des mesures de politique conomique accompagnent
cette runification : accroissement des dpenses publiques (via
notamment le Fonds de l 'unit allemande d'un montant de
115 milliards de Deutschemark, soit 5 o/o du PIB de l'Allemagne de
l'Ouest) pour moderniser les entreprises d'Allemagne de l'Est qui ne
sont pas comptitives mais peuvent survivre et pour indemniser les
chmeurs issus des entreprises qui ont d fermer. Cet accroisse-
ment des dpenses publiques augmente la demande (IS se dplace
vers la droite) et conscutivement la demande de monnaie, d'o il
rsulte une lgre augmentation des taux d'intrt. Mais, surtout,
la Bundesbank, craignant une surchauffe de l'conomie susceptible
d'engendrer de l'inflation (cf. chapitre 1v), met en place une poli-
tique montaire restrictive (LM se dplace vers le haut) et main-
tient un Deutschemark fort pour lutter contre l'inflation importe
(cf chapitre v). La rduction de l'offre de monnaie accentue
lA DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 43

Tableau 7. L'conomie d'Allemagne d e l'Ouest au moment


d e la runification

o/o 1988 1989 1990 1991

Taux de croissance du PIB en volume 3,6 5,7 13,2 2,2


Taux d'intrt nominal (court terme) 4,3 7,1 8,5 9,2
Inflation 1,3 2,8 2,7 3,5

Source : Base de donnes OCDE.

l'augmentation des taux d'intrt et freine la croissance de l'acti-


vit. Le tableau 7 illustre les consquences de cet enchanement
de politiques.

Le stimulus budgtaire en 2009-2010 dans les pays avancs

En septembre 2008, la faillite de la banque Lehman Brothers,


qui fait suite des problmes observs ds 2007 dans d'autres
banques (comme la Royal Bank of Scotland qui a d tre nationa-
lise pour viter l'effondrement), fait douter l'ensemble des acteurs
conomiques, y compris les banques elles-mmes, de la stabilit
des systmes bancaires des pays dvelopps. Les banques ne se font
plus confiance entre elles et sont rticentes prter aux mnages et
aux entreprises. La baisse gnralise des marchs boursiers rduit
la richesse des agents qui avaient investi en Bourse dans des instru-
ments financiers qui ont perdu une grande partie de leur valeur.
Les agents privs rduisent leur consommation et leurs investisse-
ments. Privs des financements bancaires de court terme, les
changes mondiaux s'effondrent. Rapidement, les indicateurs de
climat des affaires se dtriorent dans tous les pays occidentaux :
en France, notamment (cf graphique 9). Face ce choc sans prc-
dent, les gouvernements des pays dvelopps dddent de mettre
en uvre de larges plans de relance budgtaire en baissant les
impts et en augmentant les dpenses publiques. La ddsion (rare)
de faire appel un stimulus budgtaire plutt qu' un stimulus
montaire s'explique par la paralysie des banques qui, habituelle-
ment, sont la courroie de transmission de la politique montaire.
Les pays dvelopps mettent donc en place des plans de relance
trs importants : dans le cas de la France, le plan de relance est
d'environ 45 milliards d'euros (soit 2,25 o/o du PIB), que l'tat anti-
cipe de dpenser (en plus de ses dpenses habituelles) sur les
44 INTRODUCTION LA MACRO~CONOMIE

Tableau 8. Les soldes budgtaires de quelques pays dvelopps


entre 2007 et 2013
(en% du PIB)

2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013

France -2,5 -3,2 -7,2 -6,8 - 5,1 -4,B -4,1


Allemagne 0,3 0,0 -3,0 - 4, 1 -0,9 0,1 0,1
Espagne 2,0 -4,4 -11,0 -9,4 -9,5 - 10,4 -6,9
Royaume-Uni -3,0 -5,0 -10,7 -9,6 - 7,7 -7,7 -5,6
tats-Unis -2,9 -6,7 -13,2 - 10,9 -9,6 -7,9 - 4,4

Source : base de donnes WEO, FMI.

annes 2009-2010. Ces dpenses supplmentaires s'ajoutent


videmment l'effet des stabilisateurs automatiques et aux
dpenses des tats pour renflouer les banques. Dans tous les pays,
les soldes budgtaires se dgradent de faon trs importante
(cf. tableau 8). En France, le dficit budgtaire, qui tait de 2,5 %
du PIB en 2007, passe 7,2% en 2009. La mme anne, il atteint
13,2 % du PIB aux tats-Unis.
n est difficile de mesurer l'effet qu'ont eu les plans de relance
de 2009-2010 sur les conomies, mais, n 'en pas douter, les
conomies de ces pays auraient plong plus qu'elles ne l'ont fait
si ces plans n'avaient pas eu lieu. Les calculs du FMI [2012)
montrent que, dans la situation dans laquelle taient les
conomies avances au dbut de l'anne 2009 (caractrise par
un effondrement de la demande sans possibilit de mener une
politique montaire), les effets multiplicateurs des dpenses
publiques sont d'environ 1,2 (ce qui signifie que 1 euro de
dpenses publiques supplmentaire se traduit par 1,20 euro de
PIB en plus) et ceux des rductions d'impts de l'ordre de 0,7.
court terme, des augmentations de dpenses publiques stimu-
lent donc davantage l'activit que les baisses d'impts.

Les politiques d'austrit budgtaire partir de 20 77

Les plans de stimuli budgtaires de 2009-2010, ajouts aux


effets des stabilisateurs automatiques et aux cots budgtaires des
renflouements des banques, ont sensiblement accru les dettes
publiques des pays dvelopps. Ds l'anne 2010, la crainte d'une
perte de contrle de leur endettement pousse la plupart des pays
lA DEMANDE DE BIENS EN fCONOMIE FERMfE : LE MODhE /S-LM 45

dvelopps annoncer des plans de rduction des dpenses


publiques afin de retrouver rapidement des niveaux de dficit
public faibles, assurant la stabilisation du ratio d'endettement
(dette publique/P). En dpit de cette austrit budgtaire, les
tats ne parviennent que difficilement rduire leurs dficits :
seule l'Allemagne y parvient (f. tableau 8). Pour les autres pays,
la dcrue est lente et difficile. Ds 2013, une tude empirique
d'Olivier Blanchard, conomiste en chef du FMI, a soulign que
l'austrit budgtaire avait abouti rduire davantage l'activit
que ce qui avait t anticip. Le faible niveau de la demande au
niveau mondial se conjugue avec l'impossibilit de rduire les
taux d'intrt en dessous de leurs niveaux dj trs bas : les multi-
plicateurs sont trs levs : la baisse des dpenses publiques
rduit fortement la croissance, ce qui rend difficile l'amlioration
du solde budgtaire rapport au PIB.

Retour sur les dbats entre courants de la macroconomie


de 1945 1975

La macroconomie keynsienne : de l'ge d'or la remise en question


Dans le schma propos par John Maynard Keynes dans la
Thorie gnrale de L'emploi, de l'intrt et de la monnaie [1936), les
politiques montaires et les politiques budgtaires peuvent, en
cas de rcession, permettre une reprise (ou un maintien) de l'acti-
vit conomique en se substituant la demande prive. Keynes
s'opposait alors la vision classique selon laquelle de telles inter-
ventions ne servent rien et pour laquelle la seule faon de rta-
blir le plein emploi et la croissance consiste laisser les forces du
march fonctionner.
Les prescriptions keynsiennes rencontrrent un grand succs
auprs des hommes politiques qui s'empressrent de les appli-
quer avec un apparent succs pendant les trente glorieuses.
L'absence durable d'inflation et de chmage pendant cette
longue priode de croissance laissa croire que le cycle cono-
mique avait disparu, notamment grce l'application des poli-
tiques keynsiennes.
Cela concidait avec le dveloppement du courant de la
synthse noclassique qui proposait un schma thorique permet-
tant d'organiser les ides initialement dveloppes par Keynes.
46 I NTRODUCTION lA MACROCONOMIE

Les conomistes de ce courant proposrent notamment une


tude systmatique des comportements des agents privs (les
entreprises et les mnages) la base du schma IS-LM propos
par John Hicks. Le dbat s'organisa notamment autour de la
pente des courbes IS et LM, de la stabilit de ces courbes et des
dterminants des comportements d'pargne, de consommation
et d'investissement, dont dpend la valeur du multiplicateur des
dpenses publiques. Les modles conomtriques (cf encadr
p. 68) fournirent en outre un complment empirique
aux modles thoriques. Paul Samuelson, James Tobin, Robert
Solow, Franco Modigliani, tous prix Nobel d'conomie (respecti-
vement 1970, 1981, 1987, 1972), sont parmi les figures les plus
marquantes de ce courant.
Aprs le premier choc ptrolier, les politiques keynsiennes de
relance ne rencontrrent cependant pas les succs escompts. Les
pays europens connurent une longue priode d'augmentation
rgulire du chmage, de croissance du PIB des taux bien inf-
rieurs ceux des annes 1960, et de taux d'inflation deux
chiffres. La Thorie gnrale de Keynes et la description du fonc-
tionnement de l'conomie propos par la synthse noclassique
n'avaient aucun remde contre une maladie jusqu'alors
inconnue dont les symptmes taient la fois le chmage et
l'inflation.

La remise en cause par les conomistes montaristes de l'efficacit


des politiques budgtaires et de l'utilit des politiques montaires
L'conomiste amricain Milton Friedman (Nobel 1976), chef
de file de l'cole connue sous le nom de montarisme, n'avait pas
attendu les dboires des conomies amricaines et europennes
pour attaquer une une les propositions thoriques de Keynes et
de ses successeurs.
En remettant en cause l'analyse de Keynes sur les dtermi-
nants de la consommation des mnages, Milton Friedman nie
tout d'abord la possibilit de relancer l'activit conomique par
des politiques budgtaires. Ds les annes 1950, il dveloppe la
thorie du revenu permanent, selon laquelle la consommation
courante ne dpendrait pas du revenu courant mais plutt du
revenu permanent, c'est--dire du revenu moyen que le mnage
anticipe sur sa dure de vie. L'intuition est que les mnages
lissent leur consommation dans le temps : ils pargnent lorsque
lA DEMANDE DE BIENS EN CONOMIE FERM E : lE M D D~lE 15-LM 47

leur revenu est plus lev que ce qu'ils considrent tre leur
revenu permanent et dspargnent (ou empruntent) lorsque leur
revenu courant est infrieur leur revenu permanent. Prendre
en compte le revenu permanent plutt que le revenu courant
dans la fonction de consommation introduit une modification
de taille dans l'tude de l'effet des variations de revenu sur la
consommation : les mnages n'ajustent compltement leur
consommation qu'en rponse des variations permanentes de
leur revenu. Ainsi, une rduction temporaire des impts ou une
augmentation temporaire des dpenses publiques qui n'affecte
que trs peu Je niveau du revenu permanent n'aurait qu'un effet
limit sur Je niveau de consommation courante, ne dplacerait
donc que trs peu la courbe IS, et n'aurait finalement que peu
d'effet sur la demande agrge.
Cette thorie intertemporelle de la consommation repose
toutefois sur l'hypothse que les mnages peuvent tout
moment emprunter autant qu'ils le souhaitent. Si ce n'est pas le
cas, certains mnages font alors face une contrainte de liquidit,
et la relation entre consommation courante et revenu courant
retrouve de sa force et justifie des politiques conomiques de
relance de la consommation lorsque la demande est faible.
Quelle est finalement la bonne reprsentation du comporte-
ment de consommation des mnages? l'vidence, les arguments
thoriques ne suffisent pas dpartager les diffrentes thories.
Seuls des travaux empiriques peuvent dterminer si, un moment
donn, certains mnages sont soumis des contraintes de liqui-
dit. La plupart des tudes empiriques montrent qu'en Europe
comme aux tats-Unis l'volution de la consommation des
mnages est lie celle de leur revenu courant. Au total, une
augmentation temporaire du revenu se traduit bien par une
augmentation temporaire de la consommation, mais une partie
du revenu supplmentaire est pargne. Ainsi, les politiques de
soutien de la demande fonctionnent d'autant mieux que le
surcrot de revenu temporaire est dirig vers ceux qui sont le plus
mme de le consommer immdiatement.
propos de la politique montaire, Milton Friedman ne niait
pas que les variations de l'offre de monnaie dcides par la
Banque centrale aient court terme des effets sur l'activit relle.
Mais il affirmait que les conomistes savent trop peu de choses
sur l'amplitude de ces effets et les dlais avec lesquels ils appa-
raissent pour que l'offre de monnaie soit un instrument efficace
48 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

de rgulation conjoncturelle de l'activit. Il mettait aussi en


doute la stabilit dans le temps de la fonction de demande de
monnaie. Cette ignorance aboutirait selon lui mener des poli-
tiques montaires qui, plutt que de limiter les fluctuations
cycliques, les amplifieraient. Par ailleurs, Milton Friedman fut
l'un des premiers soutenir l'ide, aujourd'hui partage par beau-
coup d'conomistes, que les effets ventuellement bnfiques des
politiques montaires disparaissent long terme pour ne laisser
place qu' de l'inflation. Sa position tait donc qu'il valait mieux
s'abstenir de mener des politiques montaires actives et se
contenter d'inscrire dans la Constitution une rgle d'volution
de l'offre de monnaie (cf chapitre Iv) afin de supprimer dfiniti-
vement toute tentation pour les dirigeants politiques d'utiliser
l'instrument montaire.
Ill 1 L'offre agrge

Quel est l'effet attendu sur l'conomie d'une baisse de l'impt


sur les bnfices des socits, d'un crdit d'impt sur les bas
salaires ou d'une innovation technique majeure qui augmente
brutalement la productivit du travail? En d'autres termes, que
se passe-t-il dans une conomie lorsque les conditions de produc-
tion changent sous l'effet d'un choc exogne ou d'une mesure de
politique conomique ? Pour rpondre cette question, on doit
se tourner vers le ct offre de l'conomie.
L'offre agrge est la production de la totalit des entreprises
et des entrepreneurs pendant une priode donne. Parce que le
travail est avec les quipements (les machines) le principal
facteur de production, le fonctionnement du march du travail
doit tre pris en compte dans l'tude des dterminants de l'offre
des entreprises.

Offre de travail et demande de travail

L'offre agrge est la production que l'ensemble des entre-


prises et des entrepreneurs individuels mettent sur le march
pendant une priode donne. Parmi la multitude de variables
prises en compte par les entreprises, celles qui sont les plus
importantes au niveau macroconomique sont les prix auxquels
les entreprises coulent leur production, ceux auxquels elles
achtent leurs matires premires et leurs fournitures, les salaires,
les quipements qu'elles peuvent utiliser et les techniques de
production disponibles.
50 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

Pour prendre leurs dcisions de production concernant les


mois venir, les entreprises considrent Je stock de capital (la
quantit de machines) dont elles disposent comme donn. Elles
peuvent videmment dcider d'investir pour augmenter leur
stock de capital. Toutefois, les dlais entre le moment o la dci-
sion d'investissement est prise et celui o les nouvelles machines
sont disponibles pour la production sont tels que considrer le
stock de capital comme une donne exogne pour l'entreprise
qui doit dcider de son niveau de production pour le trimestre
ou J'anne en cours est une hypothse acceptable. Les modles
DSGE (cf encadr p. 68), utiliss pour la zone euro afin d'analyser
les effets des chocs et des politiques conomiques, estiment des
dlais d'ajustement du stock de capital entre un an et demi et
deux ans et demi [Moyen et Sahuc, 2005]. Si l'entreprise ne peut
rapidement augmenter son stock de capital, elle peut toujours
faire varier le taux d'utilisation des capacits de production. Mais la
principale variable d'ajustement pour l'entreprise est la quan-
tit de travail qu'elle utilise. Heures supplmentaires, recours
l'intrim et aux contrats dure dtermine, embauches en
contrats dure indtermine et licenciements, les moyens dont
disposent les entreprises pour faire varier assez rapidement la
quantit de travail utilise sont nombreux.

Maximisation du profit et demande de travail des entreprises

Comment les entreprises dterminent-elles Je montant


qu'elles souhaitent produire et la quantit de travail ncessaire
cette production? L'hypothse centrale est que les entreprises
cherchent maximiser leur profit, c'est--dire leur chiffre
d'affaires net des cots occasionns par la production. l'hypo-
thse de maximisation du profit s'ajoutent des hypothses sur les
prix de vente et sur la productivit du travail.
Les entreprises considrent que c'est Je march (ou l'tat, cela
n'a pas d'importance pour ce qui suit immdiatement), et non
pas elles, qui fixe le prix auquel elles peuvent couler leur
production ainsi que Je niveau des salaires nominaux qu'elles
doivent payer aux salaris. On dit alors que les entreprises sont
preneuses de prix (priee takers).
Pour un stock de capital donn, la production de chaque
nouveau travailleur dcrot avec le nombre de travailleurs dj en
place. C'est l'hypothse de rendement marginal dcroissant du
L 'OFFRE AG RtGtE 51

des facteurs de production (plus de


Fonction de production travail et moins de capital ou plus de
et productivits marginales capital et moins de travail).
La troisime proprit est connue
Pour reprsenter le lien entre les quan- sous le nom de productivits margi-
tits de facteurs de production utiliss nales dcroissantes des facteurs de
et la production, on utilise une fonc- production, qui signifie simplement que
tion de production (souvent note F) et pour un niveau donn d'un des deux
on crit une relation du type Y = F(A, facteurs de production (par exemple le
K, L) dans laquelle Y est la production capital), l'augmentation de production
(en volume), K est le stock de capital que permet une unit additionnelle de
de l'entreprise (par exemple, la valeur l'autre facteur (le travail) est d'autant
en euros constants des qu ipements), plus faible que la quantit dj utilise
L est la quantit de travail utilise par est grande (ce qui se traduit par des
l'entreprise (par exemple un nombre drives secondes ngatives : Fa < 0,
d'heures annuelles de travail) et A est Fu <0).
une variable qui reprsente le niveau Les deux facteurs de production
des connaissances techniques. A a sont ncessaires : on ne peut se passer
tendance crotre au cours du temps, compltement ni du travail ni du
au taux de progrs technique. On capital.
suppose par ailleurs que la fonction de Pour fixer les ides, il peut tre utile
production a les quatre proprits de donner une forme fonctionnelle la
suivantes : fonction de production ; on retient
Pour un niveau donn de capital, habituellement une fonction de
la quantit produite sera d'autant plus production Cobb-Douglas : F(A, K,
importante que l'on utilise beaucoup L) = AK'i!, o a et Psont des paramtres
de travail; symtriquement, pour un compris entre 0 et 1 (il est courant
nombre donn d'heures de travail, la d'imposer par ailleurs a + P= 1, ce qui
quantit produite sera d'autant plus revient imposer des rendements
grande que beaucoup de capital est d'chelle constants - c'est--dire que,
utilis. On dit alors que la productivit si la quantit de travail et la quantit de
marginale des facteurs de production capital sont doubles, la production
est positive (ce qui se traduit par des double aussi). L'conomtrie permet
drives partielles de la fonction de d'avoir une ide plus prcise de la
production positives F, > 0, F, > 0). valeur de ces paramtres et l'on
Les facteurs de production sont s'accorde habituellement sur le fait que
substituables, c'est--dire que, pour la somme des deux paramtres est
produire une certaine quantit, on proche de l'unit avec a proche de 0,3
peut utiliser diffrentes combinaisons et p proche de 0,7.

travail. Cette dcroissance ne vient pas d'une insuffisance


quelconque du ct du travail mais plutt du fait que, pour un
stock de capital donn, accrotre le nombre de travailleurs revient
attribuer chaque unit de travail une plus petite quantit de
capital, ce qui pse sur l'efficacit du travail. L'encadr ci-dessus
52 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

sur la fonction de production dtaille cette hypothse de rende-


ment marginal (ou productivit marginale) dcroissant.
Les entreprises connaissent donc le prix auquel elles peuvent
couler leur production, le niveau des salaires, et la quantit de
production supplmentaire qu'elles obtiennent pour chaque
nouvelle unit de travail (cette dernire, rappelons-le, dcrot
avec le nombre d'units de travail). Tant que la valeur de la
production d'un nouveau travailleur est suprieure au salaire que
l'entreprise doit lui verser, l'entreprise fait un profit et a un
intrt l'embaucher. L'hypothse de maximisation du profit l'y
incite. Mais comme chaque nouvelle embauche la production
du nouveau travailleur est un peu plus faible, il arrive un
moment o l'entreprise n'a plus intrt embaucher parce que
la valeur de la production d'un travailleur supplmentaire serait
alors infrieure au salaire que l'entreprise devrait lui verser. Il est
donc optimal pour l'entreprise de choisir des effectifs tels que la
productivit marginale du travail soit gale au salaire rel. C'est
ainsi qu'elle dtermine simultanment la quantit de production
et l'emploi qu'elle souhaite.
On voit bien alors que plus le salaire rel est lev, moins
l'entreprise a intrt embaucher de travailleurs; sa production
est alors elle aussi plus faible : la quantit de travail demande
par l'entreprise et la quantit de production offerte sont des fonc-
tions dcroissantes du salaire rel, ainsi que reprsent dans le
graphique 1. Lorsque le salaire rel est lev (W/P)z, les entre-
prises souhaitent utiliser moins de travail Ld2 que lorsque le
salaire est faible. partir de la maximisation du profit, on obtient
(dans le cas d'une fonction de production Cobb-Douglas), dans
l'encadr p. 54, les expressions de la demande de travail et de la
production en fonction du salaire rel.
Le graphique 2 reprsente la faon dont les entreprises modi-
fient leur choix lorsque leur environnement est affect par des
politiques conomiques, des chocs exognes (c'est--dire ind-
pendants des actions prises par les entreprises) ou par des dd-
sions de plus long t erme des entreprises elles-mmes (les
dcisions d'investissement par exemple).
Dans le modle trs simple que nous tudions ici, une
augmentation du stock de capital des entreprises et une augmen-
tation de l'efficacit des techniques de production utilises
(le progrs technique) ont qualitativement les mmes cons-
quences : la productivit du travail est augmente et, pour un
L'OFFRE AGRtctE 53

Graphique 1. Demande de travail et offre de biens et services


des entreprises
W/P Ys

(W/P)2

(W/P)l .

Ld

Graphique 2. Effets d'une augmentation du stock de capital


ou du progrs technique sur les choix des entreprises

a. Salaire rel et demande b. Demande de travail


de travail et niveau de production
Ys
W/P Ys 1'
;,, ________ _
Ys 1 -

(W/P)l
-r 'r--.

salaire rel donn, les entreprises souhaitent utiliser davantage


de travail. C'est ce que reprsente, sur le graphique 2a, le dpla-
cement vers la droite de la relation dcroissante entre l'emploi
dsir par les entreprises et le salaire rel.

L'offre de travail des mnages

Les mnages consomment, pargnent et travaillent. videm-


ment, ces trois activits sont lies. On travaille gnralement
pour toucher un salaire et pouvoir consommer ; de mme
S4 I N TRODU CTION lA MACRO CONOMIE

considrant que le capital est donn


la demande de travail (mathmatiquement, on cherche L tel
que le profit soit maximum : n, = 0,
le profit de l'entreprise est la diff- o l' indice L indique la drive
rence entre la valeur de sa produc- premire par rapport au travail). Prati-
tion : PF(A, K, L) et le cot d'utilisation quement, cela conduit galiser la
des facteurs de production (le capital productivit marginale du t ravail au
et le travail). le cot du travail est la salaire rel : PF, = W. Dans le cas parti-
masse sa laria le (le sala ire horaire culier de la fonction de production
que multiplie le nombre d'heures Cobb-Douglas, la productivit margi-
travailles) : WL. le cot unitaire du nale du travail se calcule aisment :
capital, not c, est le cot d'opportu- F, = {JAK"e- 1 et l'galisation de la
nit qu'il y a immobiliser une unit productivit marginale du travail au
de capital pendant une priode de salaire rel permet de connatre la
temps donne : c'est la somme du demande de travail de l'entreprise :
taux d'intrt rel et du taux annuel
d'amortissement pour usure et obso- Ld = [A/3) 1~ [~]- 1~ K 1~
lescence des quipements multiplie
par l'indice de prix des quipements. En remplaant L par cette expres-
la rmunration totale du capital est sion dans la fonction de production,
donc cK. le profit s'crit : on obtient l'offre des entreprises en
n =
PF(A, K, L) - cK - WL fonction du salaire rel.
Pour maximiser ce profit, l'entre-
prise peut modifier la quantit de Ys = A 1~ /31~ [~]" 1
: K 1~
capital et la quantit de travail qu'elle
uti lise. court terme cependant, le Comme cela est expliqu dans le
capital est donn puisque modifier le texte, lorsque les salaires nominaux
capital prend du temps. l 'entreprise so nt rigides, cette quation est la
va donc maximise r son profit e n fo nction d'offre globale.

l'pargne d'aujourd'hui est souvent lie un dsir de consommer


plus tard une partie de son revenu. Qu'est-ce qui incite les indi-
vidus travailler ou chercher du travail ? Cette question peut
paratre triviale parce que la rponse semble vidente : les indi-
vidus souhaitent travailler pour gagner leur vie. Cependant,
l'offre de travail n'est pas constante, elle varie au cours du temps
et pas seulement parce que la population en ge de travailler
augmente ou diminue. L'offre de travail dpend de l'environne-
ment social et culturel : par exemple, les femmes seront d'autant
plus susceptibles de travailler qu'elles trouveront des moyens de
faire garder leurs enfants. Et il n'est qu' comparer les taux d'acti-
vit des femmes dans diffrents pays de l'Union europenne pour
se convaincre de la dpendance de l'offre de travail des
L'OFFRE AGRtctE 55

caractristiques culturelles et la volont des pouvoirs publics de


favoriser l'activit des ferrunes. Mais, pour l'analyse des phno-
mnes de court terme qui nous intresse, nous pouvons consi-
drer que ces caractristiques sont donnes et nous intresser au
lien qui unit l'offre de travail et le salaire.
L'hypothse de base que nous allons poser est qu'au niveau
d'un pays l'offre de travail des mnages est d'autant plus leve
que le salaire rel (le pouvoir d'achat du salaire) est lev. Cette
hypothse mrite quelques commentaires. Est-il vrai que, lorsque
le salaire rel augmente, de plus en plus de personnes souhaitent
travailler ou que chaque personne souhaite travailler davan-
tage ? Imaginez un instant que votre salaire nominal double
(passant de 1 000 2 000 euros par mois) alors que tous les autres
prix restent identiques. Quelle sera votre raction ? Travailler
davantage pour gagner encore plus ou au contraire travailler
moins pour conserver un pouvoir d'achat identique celui que
vous aviez prcdemment et profiter de davantage de temps
libre ? La thorie microconornique a depuis longtemps iden-
tifi deux effets qui, dans un tel cas, jouent en sens contraire :
celui qui vous incite travailler davantage est connu sous le nom
d'effet de substitution, celui qui vous incite travailler moins est
connu sous le nom d'effet de revenu, et l'effet global dpend de
la conjonction de ces deux effets contraires ; pour certains indi-
vidus, l'offre de travail se rduira si le salaire rel augmente, pour
d'autres elle augmentera. Au niveau macroconomique, on
considre gnralement que l'offre de travail est d'autant plus
leve que le salaire rel est lev (c'est donc l'effet de substitu-
tion qui l'emporte sur l'effet de revenu); cela est illustr par le
graphique 3a : l'offre de travail Ls, correspond un niveau de
salaire rel faible (W/P),; elle est infrieure l'offre de travail
Ls2 qui correspond au salaire rel lev (W/P)z. Cependant,
les dveloppements qui suivent dans ce chapitre restent valides
avec une offre de travail fonction dcroissante du salaire rel,
pour peu qu'elle soit moins fortement dcroissante que la
demande de travail, ce qui n'est finalement pas une hypothse
trs forte. Notons que la mesure exacte du lien entre salaire
rel et offre de travail au niveau macroconomique est au centre
des dbats de la macroconomie contemporaine [Cahuc et
Zylberberg, 2004).
Revenons un instant sur les autres dterminants de l'offre de
travail des mnages. Imaginons par exemple que l'tat prenne en
56 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

Graphique 3. L'offre de travail des mnages

a. Salaire rel b. Effet d'une mesure


et offre de travail favorisant l'offre de travail

7,/'
W/ P W/P

(W/Ph

-....,;' ,
/
(W!P), (W!P) 1
1 ;',' 1

r' 1

charge les frais de garde des enfants ou abaisse l'ge d'entre


l'cole. La consquence sera probablement que, pour un niveau
de salaire donn, davantage de personnes souhaiteront travailler.
Sur le graphique 3b, cela correspond un dplacement vers la
droite de la fonction d'offre de travail. Quels autres change-
ments auraient qualitativement les mmes effets sur l'offre de
travail ? Connolly [2008] montre que, aux tats-Unis, les
hommes augmentent leur temps de travail de trente minutes les
jours de pluie. Il n'est en effet pas surprenant que les personnes
souhaitent moins de loisirs, donc davantage de travail pour un
salaire donn, lorsque le temps est mauvais.

Fonctionnement du march du t ravail, emploi et offre


de biens

Nous avons vu que, pour un stock de capital donn et pour


un niveau donn de la technologie, la demande de travail des
entreprises est une fonction dcroissante du salaire rel. L'offre
de travail est une fonction croissante du salaire rel. Pour iden-
tifier le niveau d'emploi dans l'conomie, il faut tudier ce qui
se passe sur le march du travail. C'est sur ce point que les
approches keynsienne et classique divergent le plus.
Nous allons considrer successivement trois fonctionnements
diffrents du march du travail :
l'OFFRE AGRt GtE 57

- dans le premier cas, le salaire nominal est parfaitement


flexible, le march du travail est alors toujours quilibr : il n'y a
pas de chmage ;
- dans le deuxime cas, le salaire nominal est rigide. Ce fonc-
tionnement du march du travail aboutit du chmage;
- dans le troisime cas, c'est le salaire rel qui est rigide; l
encore, du chmage peut apparatre.

La flexibilit parfaite des salaires

Comment se traduit la flexibilit parfaite des salaires ? Lorsque


l'offre de travail est suprieure la demande, le salaire nominal
diminue de faon faire baisser le salaire rel et rtablir l'galit
entre offre et demande de travail. Dans le cas contraire, o initia-
lement la demande de travail est suprieure l'offre, le salaire
nominal augmente de sorte que le salaire rel s'lve et rta-
blisse l'galit entre l'offre et la demande de travail. Dans le cas
d'une flexibilit parfaite du salaire, il y a donc tou jours galit
entre l'offre et la demande de travail, et il n'y a jamais de
chmage puisque tous ceux qui souhaitent travailler au salaire
en vigueur trouvent du travail. Sur le graphique 4a, le salaire
nominal se fixe au niveau W* tel que l'offre et la demande de
travail soient juste gales. Au niveau d'emploi d'quilibre qui
s'tablit sur le march du travail (L*) correspond une offre de
biens et services (Ys*) sur le graphique 4b.
L'tape suivante consiste tudier la faon dont l'offre des
entreprises (qui, rappelons-le, dpend du fonctionnement du
march du travail) varie lorsque le niveau des prix auquel les
entreprises peuvent couler leur production varie. Cela peut se
faire aisment avec le raisonnement suivant. Commenons par
tudier ce qui se passe si les prix augmentent, passant de P0 P,
sur le graphique Sa, alors que le salaire rel initial (W\/ P0 )
permettait l'quilibre sur le march du travail. Si le salaire
nominal reste inchang et que les prix augmentent, le salaire rel
(W*r/P1) diminue, les entreprises souhaitent augmenter l'emploi
(au niveau Ld) et l'offre de biens. Cependant, les salaris, face la
hausse des prix qui rduit le pouvoir d'achat des salaires, dimi-
nuent leur offre de travail (au niveau Ls). Il y a donc une
augmentation de la demande de travail des entreprises et, du ct
des mnages, une baisse de l'offre de travail. La hausse des prix
se traduit par une pnurie de travail. La flexibilit des salaires
58 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

Graphique 4. Dtermination de l'offre de biens et services


avec flexibilit parfaite d u salaire nominal

a. March du travail b. Emploi et production

ls

cw;PJ ____ -------

norrnaux est le mcanisme qui permet au march de retrouver


un quilibre. Dans le cas prsent, c'est la hausse des salaires
nominaux qui, en augmentant l'offre de travail des mnages et
en rduisant la demande de travail des entreprises, permet l'ajus-
tement. Le salaire nominal augmente donc jusqu'au niveau o,
de nouveau, l'offre et la demande de travail sont gales. La crois-
sance des salaires nominaux est exactement identique celle des
prix initialement considre de telle sorte qu'aprs l'ajustement
des salaires rels (W*,/P,) l'emploi (L*) et la production (Y*)
sont exactement aux mmes niveaux que ceux qui prvalaient
avant la hausse des prix. Un raisonnement symtrique s'applique
en cas de baisse du niveau gnral des prix.
Finalement, lorsque les salaires nominaux sont parfaitement
flexibles, une hausse des prix est sans effet sur le niveau du salaire
rel, sans effet sur le niveau d'emploi et sans effet sur l'offre des
entreprises. On dit alors que l'offre globale est inlastique au
prix, ce que reprsente le graphique Sc. Pour dire les choses autre-
ment, si les salaires sont parfaitement flexibles, toute variation de
prix se transmet immdiatement aux salaires nominaux, laissant
finalement inchangs les niveaux d'offre des entreprises.
Des variables autres que les prix influencent le niveau de
production. Une politique en faveur de l'offre de travail (une
subvention la garde d'enfants} augmentera le niveau d'offre de
biens et services de la part des entreprises. Une augmentation du
stock de capital ou le progrs technique ont les mmes effets :
l'OFFRE AGRt GtE 59

Graphique 5. Effets d'une hausse des prix sur le march du travail


et l'offre des entreprises lorsque les salaires sont flexibles

a. March du travail b. Fonction de production c. Offre globale

(W'ofPo)

(W'tfP 1) Ys

(7)~ t(2)
(W'ofP 1)

Ls L' Ld L' PIB potentiel= Ys'

pour un niveau donn de prix, les entreprises souhaitent


produire davantage.
Une telle reprsentation du march du travail qui aboutit
ncessairement l'absence de chmage peut paratre surpre-
nante et totalement dnue d'intrt qui veut comprendre les
forts taux de chmage que connaissent rgulirement les
conomies. L'argument des conomistes noclassiques qui consi-
drent que cette reprsentation est pertinente est le suivant : le
chmage rsulte de l'existence de barrires institutionnelles (les
plus souvent cites tant l'existence d'un salaire minimum ou
l'indexation automatique des salaires sur les prix) qui loignent
le fonctionnement du march du travail de l'idal du modle
salaire flexible. Dans cette optique, la meilleure faon de lutter
contre le chmage serait de supprimer les entraves la flexibilit
du salaire.

La rigidit des salaires


Que se passe-t-il si les salaires ne varient pas toujours de faon
assurer l'quilibre sur le march du travail? Quel est le niveau
d'emploi dans l'conomie en l'absence d'quilibre sur le march
du travail ? Pour rpondre ces questions, il est ncessaire
d'expliquer pourquoi les salaires ne sont pas parfaitement
flexibles et de distinguer deux types de rigidits des salaires, la
rigidit nominale et la rigidit relle (cf encadr ci-aprs), qui
ont des consquences trs diffrentes pour le fonctionnement du
march du travail.
60 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

Rigidit nominale et rigidit relle des salaires

On parle de rigidit nominale lorsque le salaire nominal ne varie pas pour quili-
brer le march du travail. On parle de rigidit relle lorsque c'est le salaire rel qui
ne varie pas pour quilibrer le march du travail. Prenons comme exemple une
conomie dans laquelle le salaire moyen (nominal) est de 1 500 euros par mois; il
y a du chmage et 5 % d'inflation par an (avec un niveau initial de prix gal
100). Dans le cas o ce sont les salaires nominaux qui sont rigides, aprs un an,
du fait de la hausse des prix, les salaires rels ont diminu (troisime colonne du
tableau ci-dessous). Au contraire, dans le cas o ce sont les salaires rels qui sont
rigides, aprs un an, les salaires nominaux augmentent comme les prix pour laisser
les salaires rels inchangs (dernire colonne du tableau ci-dessous). Dans la ralit,
rigidits relle et nominale coexistent probablement.

Rigidits nominale et relle des salaires

Anne t Anne t + 1 Anne t + 1


Salaire nominal rigide Salaire rel rigide

p 100 105 105


w 1 500 1 500 1 575
W/P 15 14,3 15

March du travail et offre globale salaire nominal rigide. -


Le simple fait que les contrats de travail prcisent la rmunra-
tion nominale annuelle et ne font pas l'objet de rengociations
chaque fois que l'environnement change suffit introduire une
rigidit nominale dans les salaires. Que se passe-t-il alors sur le
march du travail ? Pour un niveau de prix donn, le salaire
nominal peut tre au-dessus ou au-dessous de celui qui quilibre-
rait le march du travail. C'est alors le ct court du march qui
dtermine le niveau d'emploi dans l'conomie, c'est--dire que
l'emploi dans l'conomie est gal au minimum de l'offre et de
la demande de travail. Comme en gnral, l'offre de travail est
suprieure la demande, il y a du chmage.
Lorsque les salaires nominaux sont rigides, une hausse des prix
a pour effet de diminuer le salaire rel ; les entreprises souhai-
tent embaucher davantage et produire plus, le ch mage est
rduit et l'offre de biens et services des entreprises augmente.
C'est ce qu'illustrent les graphiques 6a et 6b. Retenons donc que,
lorsque les salaires nominaux sont rigides, cette analyse partielle
nous amne conclure que le niveau d'emploi est une fonction
l 'OFFRE AGRtGtE 61

Graphique 6. Effet d' une hausse des prix sur l'emploi et l'offre
de biens et services des entreprises lorsque les salaires nominaux
sont rigides

a. March du travail b. Fonction de production c. Offre globale

Lo = Ldo Lr = Ld1 Ls1 Lso Lo Lr Yo Y,


---+

croissante du niveau des prix, et le niveau de chmage est une


fonction dcroissante du niveau des prix.
L'offre globale est donc une fonction croissante du niveau
gnral des prix lorsque les salaires nominaux sont rigides et qu'il
y a du chmage (graphique 6c). Comme c'tait dj le cas en
l'absence de rigidit salariale, le progrs technique a pour effet
d'augmenter l'offre de biens et services des entreprises. En
revanche, une augmentation de l'offre de travail des mnages
n'aura pas pour effet d'augmenter le niveau de l'offre des entre-
prises. Elle augmentera seulement le chmage.

La rigidit du salaire rel. - Les entreprises ont parfois intrt


verser leurs employs des salaires rels suprieurs ceux qui
quilibreraient le march du travail, c'est la thorie du salaire
d'efficience. Verser des salaires levs peut prsenter plusieurs
avantages pour les entreprises : cela vite une rotation trop leve
de la main-d'uvre et limite les cots d'embauche et de forma-
tion de nouveaux salaris; ventuellement, cela augmente la
productivit des salaris. Le rsultat de ces calculs des entre-
prises est que le salaire rel est rigide : si les prix augmentent,
les entreprises peuvent avoir intrt augmenter les salaires
nominaux dans les mmes proportions [Perrot, 1992].
Qu'advient-il de l'offre des entreprises dans ce cas-l? Dans le
schma que nous avons dvelopp jusqu'ici, les entreprises consi-
d rent que les prix et les salaires sont donns par le
62 I N TRODUCTION lA MACRO CONOMIE

chmage. Il savait en effet que, si les


John Maynard Keynes, salaires nominaux taient flexibles et
Winston Churchill et les rigidits suivaient la baisse des prix engendre
du salaire nominal par la rvaluation de la livre ster-
ling, la baisse des prix n'tait pas en
En 1925, Winston Chu rchill, alors elle-mme bien grave : les prix bais-
chancelier de l'chiquier en Grande- sent, les salaires baissent d'autant de
Bretagne (l'quivalent d'un ministre telle so rte que le salaire re l est
des Finances), dcide de rvaluer la inchang et il n'y a pas ncessaire-
livre sterling sa parit d'avant la ment d'augmentation du chmage.
guerre e n menant dans le mme Mais Keynes doutait que les salaires
temps une politique montaire trs nominaux suivraient la baisse des prix
restrictive. Cette politique a caus une car individuel lement les sa laris
grande contraction de la demande avaient intrt s'opposer aux rduc-
(cf. chapitre v), de l'activit et une tions du salaire nominal alors mme
augmentation du chmage. que les prix baissaient. La dcision de
Dans une srie d'articles publis rvaluer la livre sterling engendra
dans l' Evening Standard et intitule d'ailleurs une grve des mineurs suivie
Les consquences conomiques de d'une grve gnrale. Ce n'est
monsieur Churchill , Keynes [1925] que l'augmentation dramatique du
dveloppa des arguments contre chmage qui contraignit finalement
cette politique. Celle-ci risqua it, selon les salaris accepter des baisses du
lui, de rdui re la demande, d'amener salaire nominal.
de la dflation et d'engendrer du

march et qu'individuellement elles n'ont aucun pouvoir


d'influencer ces prix. Pour tudier le comportement de l'offre
globale dans le cas o les entreprises sont actives dans la forma-
tion des salaires, il faut laborer un modle un peu diffrent de
celui dvelopp ici (le lecteur intress peut consulter le
chapitre 5 du livre de Blanchard et Cohen [2007]).

Un bref rsum des dterminants de l'offre globale, de l'emploi


et du chmage

Nous disposons maintenant de suffisamment d'lments pour


isoler les dterminants des variables conomiques qui intervien-
nent du ct de l'offre de biens et services. L'offre de biens et
services des entreprises dpend de l'ensemble des facteurs qui
affectent le rendement, pour l'entreprise, des facteurs de produc-
tion (progrs technique, systm e fiscal, systme lgislatif) et de
ceux qui affectent l'offre de travail des mnages. On retiendra
surtout que :
L'OFF RE AGRtctE 63

- lorsque les salaires sont flexibles, l'offre globale, le niveau


de l'emploi et le salaire rel ne dpendent pas du niveau des prix
et du salaire nominal mais uniquement de l'environnement rel
de l'entreprise (par exemple du stock de capital); le chmage est
nul;
- dans le cas o les salaires nominaux sont rigides, l'offre des
entreprises, l'emploi, le salaire rel et le taux de chmage dpen-
dent aussi du niveau des salaires nominaux et des prix. Ces
derniers sont dtermins par le fonctionnement du reste de
l'conomie.

Effet d 'un choc d'offre sur l'quilibre macroconomique

Nous avons vu que l'offre des entreprises dpend de leur stock


de capital et de l'tat des connaissances techniques qui, court
terme, sont considrs comme exognes. Ces variables exognes
peuvent tre affectes par des chocs ou des politiques cono-
miques. Par exemple, suite un brusque accroissement du
progrs technique, la productivit du travail augmente ce qui
incite les entreprises augmenter leur demande de travail. Que
les salaires nominaux soient ou non flexibles, cela se traduit par
une augmentation conjointe de l'offre des entreprises et de
l'emploi dans l'conomie : sur le graphique 7, la fonction d'offre
globale se dplace vers la droite. Lorsque les salaires sont
flexibles, la hausse de l'offre se transforme en hausse de l'activit
conomique et en baisse de prix. Lorsque les salaires nominaux
sont fixes, les prix baissent aussi et il y a donc une augmentation
des salaires rels.
Si les entreprises subissent au contraire une baisse de leur
rentabilit la suite d'un choc ngatif, des effets inverses se
produisent : contraction de l'activit, augmentation des prix et
baisse de l'emploi dans l'conomie, ainsi que davantage de
chmage si les salaires ne sont pas flexibles. C'est ce type de choc
qu'ont subi les conomies occidentales lors des chocs ptroliers.
La hausse du prix du ptrole a rduit la rentabilit des entre-
prises, oprant comme un ch oc d'offre ngatif (cf tude de cas du
chapitre 1).
Le tableau 1 ci-dessous rsume les effets des chocs et des poli-
tiques sur l'activit conomique, le chmage et les prix.
64 I NTRODUCTI ON lA MACROCONOMIE

Graphique 7. Effet d'une augmentation de la productivit


des facteurs de production sur l'activit et les prix
p p
Ys

Po
P,

Yo Y1 y

Salaires flexibles Salaires nominaux rigides

Tableau 1. Effets de chocs d'offre sur les variables macroconomiques

Salaires nominaux rigides Salaires flexibles


PIB Prix Chmage PIB Prix
Choc d'offre dfavorable
(augmentation du prix du
ptrole) - + + - +
Choc d'offre favorable
(progrs techn ique) + - - + -
Politique en faveur de
l'offre de travail (crdit
d'impt) ; ;
+ + -
Po litique en faveur de la
demande de travail (baisse
des cotisations sociales) + - - + -
Politique en faveur de
l'offre de biens et services
des entreprises (baisse de
l'impt sur les bnfices
des entreprises) + - - + -

tude de cas: les baisses d'Impts de George W. Bush

Le gouvernement Bush ddda deux rformes fiscales succes-


sives : en 2001, avec le Economie Growth and Tax ReliefReconciliation
l'OFFRE AGRt GtE 65

Act, et en 2003, dans le cadre du Jobs and Growth Tax ReliefRecond-


liation Act. Ces rformes ont significativement rduit le taux
marginal d'imposition, c'est--dire le taux d'imposition de tout
revenu supplmentaire qu'un individu touche pendant une
priode donne. Ce taux marginal varie d'un individu l'autre en
fonction du montant de ses revenus, de l'origine de ces derniers
(les revenus salariaux et les revenus du capital ne sont pas toujours
imposs aux mmes taux marginaux, et certains revenus ne sont
pas du tout imposables) et de la composition de sa famille. Les
barmes de l'impt sur le revenu sont normalement tablis de sorte
que le taux marginal d'imposition soit croissant en fonction du
revenu.
Quels taient les effets attendus de cette baisse trs impor-
tante? D'aprs les conomistes de l'offre (supply-side economists) qui
soutinrent ces rformes, la baisse des taux marginaux allait
inciter les individus travailler davantage, ce qui augmenterait
l'offre de biens et services (dplacement vers la droite de la
courbe d'offre globale), et donc l'activit. Selon ces mmes
conomistes, ce surcrot d'activit devait par ailleurs apporter
l'tat des recettes fiscales suprieures la rduction initiale des
impts (selon une ide popularise par l'conomiste amricain
Laffer).
Le Congressional Budget Office (CBO) a publi en 2006 une
tude des effets attendre si ces baisses d'impts devenaient
permanentes. Dans le meilleur scnario envisageable, rendre ces
baisses d'impts permanentes permettrait une croissance
annuelle du PIB de 0,04 %, ce qui ne serait pas suffisant pour
financer la rduction d'impts dont le cot est estim (en termes
de recettes fiscales non perues) par le CBO 1,27 % du PIB.
Les conclusions du rapport du CBO peuvent donc s'interprter
comme suit : les effets attendre d'une telle politique d'offre sont
ngligeables.
S'en est suivi un dbat entre conomistes, les supply-side econo-
mists remettant en question les conclusions du CBO. Gregory
Mankiw, notamment, a contest la valeur utilise pour l'lasti-
cit de l'offre de travail au salaire aprs impt. Le CBO utilise
en effet une lasticit de 0,14, tandis que Mankiw et Weinzierl
[2006] prconisent une valeur de 0,5. La littrature empirique
n'est en fait pas trs conclusive sur cette valeur, mais on
comprend bien que plus cette lasticit est forte, plus la baisse
d'impts aura des effets bnfiques sur la croissance.
66 I NTRO DUCTIO N LA MACRO~CONOMJE

Construction d'un petit modle.


tape 2 : l'offre globale salaires nominaux rigides

Reprenons la fonction d'offre globale salaires nominaux rigides obtenue partir


d'une fonction de production Cobb-Douglas :

Ys=A~ p~ [~tt; ~
En utilisant les lettres minuscules pour reprsenter le logarithme des variables, la
fonction d'offre globale s'crit alors :
Y.s.1 :=- c1 (wl- pJ + c2 +vi
avec- c, =- P/(1-{J), l'lasticit de l'offre globale au salaire rel. pest approximati-
vement la part des salaires dans la valeur ajoute, soit environ 0,65 (on a alors c,
environ gal 1,86), ce qui signifie que si les salaires rels augmentent de 1 %,
alors que la productivit marginale du travail ne change pas, l'offre des entreprises
diminue d'environ 1,86 %. c2 dpend du stock de capital dans l'conomie et de la
productivit totale des facteurs de production. Enfin u est un choc de producti-
vit, pouvant prendre des valeurs positives ou ngatives mais qui en moyenne est
nul. De faon cohrente avec cette fonction d'offre, le logarithme de l'emploi dans
l'conomie est donn par :

Ainsi, l'lasticit de l'emploi au salaire rel est gale - c1/P = - 1/(1 - {J), qui
vaut- 2,86 lorsque p vaut 0,65 ce qui s'interprte comme le fait que, productivit
du travail donne, une augmentation de 1 % du salaire rel se traduit par une baisse
de 2,86 % de la demande de travail des entreprises. Ces chiffres peuvent paratre
un peu surprenants : les salaires rels augmentent rgulirement sans qu'il y ait pour
autant des baisses du niveau de l'emploi. Rappelons que dans la ralit la produc-
tivit du travail n'est pas constante mais qu'elle augmente dans le temps du fait du
progrs technique, de la meilleure formation des salaris et de l'investissement

Conclusion

Le modle IS-LM et le modle offre globale-demande globale qui


le complte constituent des reprsentations extrmement
stylises du fonctionnem ent des conomies. Leur succs vient du
fait qu'ils facilitent le raisonnement conomique. Robert Solow
(Nobel 1987) a coutume de dire que, si l'on rveille n'importe
quel conomiste en pleine nuit en lui annonant que la banque
centrale a augment les taux d'intrt ou que le prix du ptrole
vient d'tre multipli par deux, pour lui demander quels sont les
effet s attendre sur l'conomie de ce changement de prix, le
L'OFFRE AGRt GtE 67

des entreprises. Si les salaires rels augmentent comme la productivit du travail,


la demande de travail des entreprises ne diminue pas et si les salaires augmen-
tent moins vite que la productivit du travail, la demande de travail des entre-
prises augmente.
Le taux de chmage est la diffrence entre le logarithme de l'offre de travail
et celui de l'emploi dans l'conomie :
ut = ll,,-ld,t

tape 3 : L' quilibre offre globale-demande globale

L'quation d'offre dans le cas o les salaires sont rigides et l'quation de


demande composent un systme de deux quations deux inconnues (le niveau
d'activit y, et le niveau gnral des prix p,) dont la rsolution donne :
1
Pt= - - [a,m, + 029, + c1 W 1 - c2 + v1 - uJ
a,+ c1

y, = _ c_,- [a, rn, + a1 g, - a 1w, +v,]+ _a_,- [c


2 + uJ
~+G ~+~

Que nous apprend cette rsolut ion mathmatique? Qualitativement, les


effets sont identiques ce que l'on a obtenu graphiquement : toutes choses
gales par ailleurs, une augmentation de l'offre de monnaie, une augmentation
des dpenses publiques et un choc positif sur la demande augmentent le niveau
d'activit de l'conomie et le niveau gnral des prix. Une augmentation des
salaires nominaux rduit l'activit et augmente les prix, un choc positif sur la
productivit des entreprises augmente l'activit et diminue le niveau gnral
des prix. Si l'on connat la valeur des paramtres a,, a 2, c1 on peut aussi
ca lculer numriquement l'intensit des diffrents effets. Par exemple, la rsolu-
tion mathmatique nous dit qu'une augmentation de 1 %de l'offre de monnaie
se traduit ici par une augmentation du PIB de c, a, (a, + c,) %. C'est exactement
sur ce principe que fonctionnent les modles macroconomtriques (cf. encadr
p. 68).

raisonnement que cet conomiste ensommeill mnera adopte


prcisment la dmarche que l'on peut suivre avec ces reprsen-
tations simplifies de l'conomie. En fait, cet conomiste utilise
ces reprsenttions simplifies.
Ces modles sont toutefois bien trop simples pour permettre
d'aller au-del de prdictions qualitatives. Pour mesurer prci-
sment les effets attendre d'une politique ou d'un choc donns,
on doit utiliser des modles chiffrs et incorporant des compor-
tements conomiques plus labors que ceux qui sont explici-
tement pris en compte dans les petits modles thoriques. Les
modles macroconomtriques (cf. encadr p. 68), dont
68 INTRODUCTION LA MACRO~CONOM JE

En particulier, ces modles laissent


Les modles peu de place aux rationalits des
macroconomtriques acteurs conomiques et aux interd-
pendances des marchs, ce qui peut
Les modles macroconomtriques ont conduire surestimer l'efficacit des
t construits pour essayer de mesurer politiques conomiques. Le renouveau
les effets des chocs et des politiques de la modlisation macroconomique
conomiques sur l'activit. Chaque applique commena par les modles
comportement conomique (l'investisse- des cycles rels, connus sous le nom de
ment des entreprises, l'offre de travail modles RBC (pour Real Business
des mnages, la consommation des Cycles). Il s'agissait de modles d'qui-
mnages) est reprsent par une qua- libre gnral, avec des comportements
tion qui dcrit les effets des autres dynamiques cohrents et des prvi-
grandeurs conomiques sur ce compor- sions rationnelles des agents, sans fric-
tement Les techniques conomtriques tions ni imperfections de march.
permettent, d'une part, de slectionner Les conomistes enrichirent cette
parmi la trs longue liste des variables dmarche, en ajoutant au cadre initial,
susceptibles d'influencer un comporte- seulement perturb par des chocs de
ment donn celles qui, dans le pass, productivit, les nombreuses imperfec-
semblent avoir effectivement influenc tions des marchs, les rigidits cono-
ce comportement, et, d'autre part, de miques et les perturbations varies que
mesurer l'intensit des effets du change- connat toute conomie afin de mieux
ment d'une variable donne (par rendre compte du cycle conomique et
exemple le taux de chmage) sur une des politiques de stabilisation. Ces
autre variable (la consommation). modles, aujourd'hui connus sous le
Les quations reprsentant les diff- nom de modles DSGE (Dynamic
rents comportements sont alors rassem- Stochastic General Equilibrium ou, en
bles (certains modles comptent plus franais, modles d'quilibre gnral
de 1 000 quations), exactement dynamique stochastique), sont au cur
comme le modle IS-LM rassemble une de la recherche en macroconomie, et
quation de consommation, une qua- certains chercheurs regrettent leur
tion d'investissement, une quation de suprmatie [Blanchard, 2016].
demande de monnaie et les quilibres En France, les principaux modles
ressources/emplois. Le systme d'qua- sont dvelopps et utiliss dans l'admi-
tions est alors rsolu numriquement nistration ( l' INSEE, au ministre des
pour autant de mesures de politique Finances) et dans des instituts d'tudes
conomique que l'on souhaite. Il est conjoncturelles (I'OFCE, le CEPII); les
alors possible de donner des ordres o rganisations internationales (OCDE,
de grandeur pour les effets des mesures FMI) utilisent et dveloppent aussi leurs
de politique conomique. Qualitative- propres modles macroconomtriques
ment cependant, les effets sont de et DSGE.
mme nature que ceux prdits par les
petits modles IS-LM et offre globale-
demande globale. Le livre d'Anne Epau-
lard [1997] fournit une prsentation de
ces modles et de leurs limites.
l 'OFFRE AGRtGtE 69

la tradition remonte jan Tinbergen (Nobel 1969) et Robert


Klein (Nobel 1980), sont l'un des outils dont disposent les
conomistes pour chiffrer les effets des politiques et des chocs
conomiques.
IV 1 La dynamique de court terme
des conomies : inflation et chmage

l es reprsentations de l'conomie que nous avons utilises


jusqu' prsent, tel le modle offre globale-demande globale, sont
statiques. Ces reprsentations nous ont permis de comprendre
l'effet de certains chocs et de certaines politiques conomiques sur
les principaux agrgats macroconomiques. Cependant, le fait que
la dynamique de l'conomie ne soit pas prise en compte limite
la porte des analyses. Par exemple, la monte simultane de
l'inflation et du chmage dans les pays occidentaux au milieu des
annes 1970 ne peut tre correctement tudie dans un cadre
statique. L'objet de ce chapitre est d'introduire la dynamique dans
le modle de l'conomie que nous avons tudi jusqu' prsent.
Nous pourrons alors nous intresser l'inflation, mesurer le rle
des anticipations et comprendre les dbats sur la possibilit pour
un gouvernement d'arbitrer entre inflation et chmage.

La modlisation de la dynamique de court terme

L'investissement des entreprises accrot leur stock de capital,


le dficit public alimente le stock de dette de l'tat, l'pargne
des mnages augmente leur patrimoine ... , l'articulation entre les
flux (l'investissement, l'pargne, J'emprunt, l'ducation) et les
stocks (le stock de capital, le patrimoine, l'endettement, Je stock
de capital humain) empche l'conomie de se reproduire l'iden-
tique d'une priode l'autre. Ces accumulations d'actifs, de
dettes, de biens et de connaissances sont mme la principale
source de la dynamique moyen terme des conomies. Par
exemple, les dpenses d'ducation augmentent la productivit
72 INTRODUCTIO N LA MACROtCONOMJE

du travail mais cet effet bnfique participe la croissance


moyen terme de l'conomie. En premire approximation,
l'analyse de la dynamique de court terme peut donc ngliger cet
aspect de la dynamique pour se concentrer sur les anticipations
des agents et la formation des salaires.

Les anticipations et les erreurs d'anticipation

On retient gnralement deux schmas alternatifs pour repr-


senter la formation des anticipations d'inflation. Les anticipa-
tions adaptatives et les anticipations rationnelles.
Les anticipations adaptatives supposent que les agents rvi-
sent leurs anticipations en fonction de l'erreur d'anticipation
commise la priode prcdente. Pratiquement, les anticipations
d'inflation n~ pour la priode t sont gales aux antidpations qui
avaient t ralises pour la priode t-1, corriges d'une fraction
(note A., avec 0 <A. :5 1) de l'erreur d'anticipation commise la
date t - 1 (et qui vaut n,_, - n:_1), ce qui s'crit :
nt = n't-t + . (nt-t - n't-t)
Dans le cas particulier o A. = 1, le schma d'anticipations se
rduit prvoir pour la priode t l'inflation observe la priode
t - 1 ; on parle alors d'anticipations naves (nt = n,_,).
L'hypothse d'anticipations rationnelles implique que les agents
utilisent toute la connaissance qu'ils ont du fonctionnement de
l'conomie ainsi que toute l'information disponible au moment
de la formation des anticipations. Ils ne commettent donc
aucune erreur systmatique d'anticipation. Pratiquement, poser
l'hypothse d'anticipation rationnelle dans un modle revient
supposer que les agents connaissent ce modle de l'conomie et
l'utilisent pour faire des prvisions en supposant qu'en moyenne
les chocs seront nuls.
Une composante importante des modles dynamiques est que les
antidpations formes par les agents, mme lorsqu'elles sont ration-
nelles, ne sont pas ncessairement vrifies, soit parce que des chocs
qu'on ne peut prvoir rendent l'volution de l'conomie en partie
imprvisible, soit parce que l'tat met dlibrment en uvre une
politique conomique diffrente de celle anticipe par les agents.
Le tableau 1 reprend les prvisions de croissance et d'inflation pour
l'conomie franaise publies pour chaque anne par le FMI. Entre
2010 et 2014, les erreurs de prvision sont en moyenne trs faibles :
LA DYNAMIQUE DE C O URT TERME DES tCONOMIES : INFLATION ET CH0 MAGE 73

Tableau 1. Prvisions (octobre de l'anne prcdente) et ralisations


de croissance et d'inflation pour l'conomie franaise

2010 2011 2012 2013 2014 Moyenne

Taux de croissance anticip 1,5 1,7 0,5 -0,1 0,4


Taux de croissance ralis 1,4 1,7 0 0,3 0,4
Erreur (ralis-anticip) -0,1 0 -0,5 0,4 0 -0,04
Taux d'inflation anticip 1,2 2,1 2 1,6 0,7
Taux d'inflation ralis 1,7 2,3 2 1 0,6
Erreur ( ralis-anticip) 0,5 0,2 0 -0,6 -0,1 0

Source : IMF/World Economie Outlook, diffrentes annes.

elles conduisent sur-estimer lgrement la croissance. Mais ces


moyennes cachent en fait des erreurs annuelles de prvision plus
importantes qui, nous le verrons plus loin, jouent elles aussi un
rle important dans le fonctionnement des conomies.

L'volution des salaires : la courbe de Phillips

l'origine, la courbe de Phillips (du nom de l'conomiste qui la


proposa la fin des annes 1960) tait une relation empirique non
linaire dcroissante liant la variation des salaires nominaux et le
taux de chmage. Cette relation, mesure sur donnes britanniques
sur la priode 1861-1957, a vite t conteste par Milton Friedman
(Nobel 1976) et Edmund Phelps (Nobel 2006) qui lui substituent
une relation entre salaires nominaux, antidpations d'inflation et
chmage, qualifie de courbe de Phillips augmente. L'intuition est la
suivante : les salaires nominaux suivent en moyenne l'volution
antidpe des prix la consommation; toutefois, un chmage lev
limite la croissance des salaires. Ces deux caractristiques des volu-
tions salariales sont retraces par l'quation suivante :
W-W
1 1 1
- = W, - b (u 1 - un) (1)
wl_,
un est le taux de chmage naturel (cf. encadr p. 75).
Dans le plan (chmage, taux de croissance des salaires nomi-
naux), chaque niveau d'inflation anticipe correspond une
courbe de Phillips (cf graphique 1).
Les estimations conomtriques ralises par Heyer et al. [2007]
concluent que, sur la priode 1970-2003, l'indexation des salaires
sur les prix en France a t d'environ 75 o/o, infrieure donc une
74 INTRODUCTION LA MACROtCONOMJE

Graphique 1. la courbe de Phillips augmente


pour diffrentes anticipations d'inflation

Courbe de Phillips de long terme

Courbes de Phillips de court terme pour


diffrents niveaux d'inflation anticipe

ut

indexation complte. Par ailleurs, l'tude conomtrique ralise


par L'Horty et Rault [2003] permet d'valuer le coefficient b
environ 0,2 sur donnes trimestrielles : un taux de chmage
d' 1 point suprieur son niveau naturel rduirait la croissance
du salaire nominal d'environ 0,2 point par trimestre. Une tude
d' Aaronson [2014], ralise sur la priode 1979-2014, montre
qu'aux tats-Unis l'effet serait un peu plus fort : un taux de
chmage d'1 point suprieur son niveau naturel rduirait la
croissance du salaire nominal de 0,4 point par trimestre.

Les enchanements dynamiques

Pour crire un modle dynamique avec anticipations, il


faut prdser l'ordre dans lequel les agents privs et publics prennent
leurs ddsions. Nous allons supposer l'enchanement suivant :
- la fin d' une anne donne (note t - 1), on connat le
niveau de l'ensemble des stocks disponibles (stock de capital,
niveau d es connaissances, dette et patrimoine). Les agents
forment alors des antidpations d'inflation pour l'anne suivante
(notons-les nt') et ngocient des augmentations de salaires nomi-
naux pour l'anne suivante;
- une fois que les salaires sont ddds, l'conomie fonctionne
ensuite comme cela a t dcrit dans les chapitres prcdents : du
ct de la demande, le schma IS-LM permet de raliser l'quilibre
simultan sur le march des biens et sur celui de la monnaie; du
ct de l'offre, le salaire nominal tant fix au niveau ngoci en
L A DYNAMIQUE DE COURT TERME DES ~CONOMIES : INFLATION ET CHMAGE 75

dans la suite de ce chapitre) selon


Taux de chmage naturel, laquelle, quelles que soient les poli-
NAWRU, NAIRU tiques conomiques conjoncturelles
menes, le taux de chmage d' une
le taux de chmage d'une conomie conomie finira toujours par retourner
n'est jamais nul mme lorsque ce niveau naturel. Pour ce taux de
l'conomie est en plein emploi : tout chmage, les salaires nominaux
moment, des salaris quittent sponta- voluent donc au taux de l'inflation
nment leur travail pour en chercher anticipe; il est parfois appel NAWRU,
un autre; des entreprises licencient des des initiales de Non-Accelerating Wage
salaris qui deviennent chmeurs le Rate of Unemployment (le taux de
temps de retrouver du travail; les chmage qui n'acclre pas les
nouveaux venus sur le march du salaires), ou encore NAIRU, des initiales
travail sont eux aussi momentan- de Non-Accelerating Inflation Rate of
ment chmeurs. Seul le chmage Unemployment (le taux de chmage
au-del de ce chmage frictionnel ou qui n'acclre pas l'inflation). Cette
de ra/location affecte l'volution des dernire appellation trouve sa justifica-
salaires. Dans ses travaux, Friedman tion dans le fait que la relation entre
choisit d'appeler ce taux de chmage chmage et croissance des salaires
frictionnel ou de rallocation le taux de (quation 1) fournit, sous certaines
chmage naturel, une faon pour lui de hypothses, une relation entre inflation
rsumer sa thse (qui sera dveloppe et chmage.

dbut de priode, les entreprises dterminent une demande de


travail et un niveau d'offre. Le niveau gnral des prix est dter-
min par la confrontation de l'offre et de la demande de biens
et services. Dans le mme temps, des chocs (favorables ou dfa-
vorables) ont lieu et des politiques montaires et budgtaires sont
mises en uvre. On obtient alors le niveau de l'ensemble des
variables macroconomiques et il se peut que l'inflation observe
(n,) soit finalement diffrente de celle qui avait t anticipe (nn ;
- ... et le cycle reprend avec formation des anticipations pour la
priode suivante, ngociation des salaires ...
Prenant en compte le modle statique dvelopp aux chapi-
tres u et 111, l'volution des salaires nomirlaux et la formation des
anticipations d'inflation, le systme de trois quations prsent
dans l'encadr p. 76 permet de rsumer les dynamiques de l'infla-
tion (premire quation), du chmage (deuxime quation) et de
l'activit (troisime quation), proche de la loi d'Okun (sur laquelle
revient l'encadr p. 77). partir de ce modle, on peut tudier les
effets court et moyen terme d'une politique conomique ou d'un
choc exogne. Ils dpendent largement de la faon dont les agents
forment leurs anticipations d'inflation.
76 I NTRODU CTION lA MACROCONOMIE

Construction d'un petit modle conomique


tape 4 : le modle dynamique

le modle dynamique est compos de deux blocs. Dans le premier bloc, on


dtermine les anticipations d'inflation et les salaires nominaux ngocis entre les
salaris et les entreprises. Ces grandeurs sont alors injectes dans le modle offre
globale-demande globale dont nous avons vu la rsolution en statique dans les
chapitres 11 et 111 et qui donne le niveau d'activit et le niveau des prix. la dyna-
mique vient du fait que les salaires sont ngocis pour la priode suivante sur la
base du chmage courant et des anticipations d' inflation.
L'volution des salaires est celle discute dans le texte (avec w, = lnW,) :
w, - w,_1 = n: - b(u,_ 1 - u,) + ete
De l'encadr du chapitre 111, nous reprenons la rsolution en statique du
modle offre globale/demande globale lorsque les salaires nominaux sont rigides
(ce qui est bien le cas ici puisque les salaires nominaux sont ngocis une
priode l'avance).

p, ==-- [a1m, + OJ!J1 + c1w,- c2 +v,- uJ


ol +cl
y, == _c_,- [o1m, + Ol!J1 - 0 1W1 + vJ +_a_,_ [c2 + u,]
~+G ~+G
1
u,=F-{iy,
l a rsolution dynamique consiste simplement crire ce modle en diff-
rences : p, - p,_,, y,- y,_, ... (qui s'interprtent directement comme des taux de
cro issance puisque les grandeurs sont en logarithmes), et utiliser l'quation
d'volution des salaires nominaux. Aprs des calculs assez fastidieux mais techni-
quement la porte d'un lve de seconde, on peut crire :
1
"=-c_,-"~ __c_,- bu,_, + -- [a,(dmJ + a,(dgJ + dv, - du, + c,bu, c,.cte]
a +1 C1o +c 1 o +c
1 1 1

U1 ==~ ~+(1-~b)ur-1
/J(a1 + c1) !J(a, + c,)

--- a, - a,.cteJ
c, - [-a, bu, + a,(dm,) + a,(dg,)- dv, +-du,
/J(a1 + c1) c1
dy, = -P(u, - u,_,)

Inflation et chmage avec anticipations adaptatives

Les effets de court terme (c'est--dire lorsque les anticipa-


tions sont donnes) d'une augmentation de l'offre de monnaie
rsultent directement des quations du systme prsent dans
l'encadr ci-dessus.
L A DYNAMIQUE DE COURT TERME DES ~CONOMIES : INFLATION ET CHMAGE 77

stable entre la croissance cono-


la loi d'Okun mique et l'volution du chmage. l e
graphique ci-dessous la retrace pour
la loi d'Okun, du nom d'Arthur la France. On y voit que, en dessous
Okun, l'conomiste amrica in qui d'une croissance de 2 % par an, il est
tudia le lien entre c roissance et rare que le chmage diminue. C'est
chmage aux tats-Unis au dbut des plutt partir de 2,5 % ou 3 % de
an nes 1 960, est une relation qui croissance par an que le chmage est
stipule qu'il existe une relation assez en gnral rduit.

Variation du taux de chmage et croissance en France de 1980 1999

"'
0\ 2,00

<0
-5 1,50
"'x
"C
1,00
~"
"
"C
.91
0,50
Ql
0,00
"iijc:
5,00
- 0,50
:~
~ -1,00
Taux de croissance annuel du PIB

Source : OCDE.

Quelle interprtation conomique de grandeu r ces effets; sur les


donner cette loi ? Notons tout donn es fran aises ann ue lles du
d'abord que le sens de la causalit graphique c i-dess us, o n obtient :
n'est pas c lairement tabli. Comme u, - u,_,= - 0,44(dyJ + 1, 12. l'inter-
nous l'avons vu dans le chapitre m, les prtation est la suivante : en l'absence
entreprises dcident simultanment de croissance (dy, = 0), le taux de
de leur offre et de l'emploi qu'elles chmage augmente de 1,1 2 point de
souhaitent utiliser. Ce n'est donc ni pourcentage par an (par exemple
seulement la croissance qui rduit le augmente de 10 % 11,12 %), et
chmage ni seulement la rduction chaque point de croissance rduit ce
du chmage qui engendre la crois- chmage de 0,44 point. Ainsi, une
sance. les deux phnomnes sont croissance de 3 % correspond en
insparables. moyenne une baisse d u taux de
Une rgression cono mtrique chmage de 0,2 point (- 0,443 +
simple permet de donner des o rd res 1,12 =- 0,2).

L'inflation dpend : 1) des anticipations d'inflation (plus


l'inflation antidpe est leve, plus l'inflation effective sera leve) ;
2) de l'cart du taux de chmage son niveau naturel lors de la
78 INTRODUCTIO N LA MACROtCONOMJE

priode prcdente (lorsque le taux de chmage est suprieur son


niveau naturel, les salaires nominaux baissent, ce qui se rpercute
sur l'inflation); 3) des chocs sur l'offre et la demande; 4) du taux
de croissance de la part des dpenses publiques dans le PIB ; et 5) du
taux de croissance de l'offre de monnaie.
Le taux de chmage dpend des mmes variables. Plus l'infla-
tion anticipe est leve, plus le taux de chmage est lev
(lorsque l'inflation anticipe s'accrot, les salaires nominaux
augmentent, ce qui accrot le chmage). Par ailleurs, un accrois-
sement de la part des dpenses publiques ou du taux de crois-
sance de l'offre de monnaie rduit le taux de chmage.
Il existe dans ce modle un arbitrage entre inflation et
chmage : l'effet bnfique d'une expansion montaire sur le
chmage vient du fait que les agents anticipent une inflation
plus faible que celle ralise finalement ; cela les amne court
terme ngocier des salaires nominaux faibles, ce qui incite les
entreprises produire et embaucher davantage.
A plus long terme, comme les anticipations des agents s'ajus-
tent, il n'y a plus d'erreur d'anticipation, et l'activit comme le
chmage retrouvent leur niveau initial. Considrons par exemple
le cas le plus raliste o long terme la part des dpenses publiques
dans le PIB est constante (dg= 0) et o l'offre de monnaie crot un
taux constant (dm= 8). On montre alors aisment que, en l'absence
de choc, l'quilibre de long terme, dfini par une inflation et un
taux de chmage constants (~r, = n,_,, et u, = u,_,), est obtenu lorsque
l'inflation est gale au taux de croissance de la masse montaire
(n, = 8) et le taux de chmage gal au taux de chmage naturel
(u, =un), cela signifie que les effets bnfiques d'une augmentation
du taux de croissance de l'offre de monnaie sur le chmage dispa-
raissent long terme. La vitesse laquelle on retrouve le taux de
chmage naturel dpend de la valeur du paramtre ; plus il est
proche de 1, plus le retour est rapide.
Le graphique 2 retrace l'volution dans le temps du taux de
chmage (schma de gauche) et des taux d'inflation raliss et
anticips (schma de droite) lorsque les autorits montaires
dcident d'augmenter durablement le taux de croissan ce de
l'offre de monnaie partir d'une date t. L'effet immdiat est une
rduction du chmage et une augmentation de l'inflation. Les
anticipations d'inflation s'ajustent progressivement. Lorsque
l'quilibre stationnaire est atteint, l'inflation effective est gale
la fois aux anticipations d'inflation et au nouveau taux de
LA DYNAMI Q UE DE C O URT TERME DES tCONOM I ES : INFLATION ET CH0 MAGE 79

Grap hique 2. Effet d ' une hausse durable du taux de croissance


de l'offre de monnaie sur le chmage et l'inflation
Chmage
0,05,---- - -- -- - -- - - - - -- - - - ,

un

0,02 +---.----.----.----.----.--- -.----.----.------j


t+2 t+4 t +6 t+8 t+ lO t + 12 t+ 14 t+ 16

Inflation
0,07 , -- - - - - - - - - - - -- -- -----,

1t

0,04 + - - - , - - - , - - - , - - - , - - - , --- , - -- , - --,-----i


t +2 t+4 t +6 t+ 8 t + lO t + 1 2 t+ l4 t+ 16

croissan ce de l'offre de monnaie, tandis que le t aux de chmage


a retrouv son niveau naturel. Pendant une courte priode tran-
sitoire, l'inflation ralise est mme suprieure au taux de crois-
san ce de l'offre de monnaie. Cela vient du fait que le taux de
chmage tant infrieur au taux de chmage naturel, les salaires
nominaux augmentent plus vite que les prix.
Le graphique 3 reprsente ces volutio n s da n s le plan
chmage/inflation ; la verticale reprsente la courbe de Phillips
de long terme. la suite de l'augmentation du taux de croissan ce
de l'offre de monnaie, le chmage et l'inflation se dplacent le
long d'une courbe de Phillips de court terme, et, mesure que les
anticipations d'inflation s'ajustent, on retrouve la courbe de long
80 I NT RO DUCTION LA MAC RO t CONOMJE

Graphique 3. Effets d'une augmentation permanente du taux


de croissance de l'offre de monnaie sur le chmage et l'inflation
0,065

0,0 ......
0,05
t +l
.,
. t
-"'
:
0,0
t-1

0,04

0,0
0,02 0,04 0,06
Taux de chmage

terme avec un niveau d'inflation entirement dtermin par Je


taux de croissance de J'offre de monnaie.
Le graphique 4 retrace les volutions de l'inflation (schma de
droite) et du chmage (schma de gauche) lorsque la variation
du taux de croissance de l'offre de monnaie est temporaire : la
date t, le taux de croissance de l'offre de monnaie passe de 5 %
6 % et est ramen 5 % pour l'anne t + 1. L'impact initial
sur l'inflation et Je chmage est Je mme que dans Je cas d'une
augmentation permanente du taux de croissance de l'offre de
monnaie, mais long terme o n retrouve un taux d'inflation
identique celui qui prvalait avant le choc temporaire.
Finalement, cette analyse montre que, si les salaires nomi-
naux sont rigides court terme et si les antidpations d'inflation
s'adaptent suffisamment lentement, la politique conomique
(accroissement des dpenses publiques, rduction des impts,
augmentation de l'offre de monnaie) peut court terme doper
l'activit conomique et rduire le chmage. moyen terme
cependant, on retrouve les niveaux d'activit et de chmage
initiaux, et ce, que la politique mene soit poursuivie ou non.
Ce qu'enseigne ce modle est donc qu'en cas de choc temporaire
ngatif (un hiver difficile, une sch eresse, une attaque terro-
riste ... ) la manipulation adquate de l'offre de monnaie ou des
LA DYNAMIQUE DE C O URT TERME DES tCONOM I ES : INFLATION ET CH0 MAGE 81

Graphique 4. Effet d' une hausse temporaire du taux de croissance


de l'offre de monnaie sur le chmage et l'inflation
Chmage
0,05 , - - - - - - - - - - -- - - - ----,

0,03-f-- - - - - - - - - - - - - - - --1

0,02 +---.----.----.----.----.--- -.----.--- -.------1


t+2 t+4 t+6 t+B t+ l O t+12 t+14 t+ 16

Inflation
0,06 ,--- - - - - - - - - - - -- - -- - ,

0,02 -!----r--r-~.----,----.---r---r---,...--1
t+2 t+ 4 t+6 t+B t+lO t+12 t+14 t+ 16

dpen ses publiques peut viter l'conomie de tomber en rces-


sion. Que les effets de ces politiques sur l'activit relle et le
chmage disparaissent moyen terme ne pose pas de problme
puisqu'il s'agit de traiter un choc lui aussi temporaire. En
revanche, en cas de choc ngatif permanent, mieux vaut mener
des politiques conomiques dont les effets se maintiennent dans
le temps.
82 I NTRODUCTION LA MACROtCONOMJE

Inflation et chmage lorsque les anticipations


sont rationnelles

L'inefficacit des politiques anticipes

L'tude des effets de court terme des politiques montaires qui a


t mene prcdemment montre que l'arbitrage temporaire entre
inflation et chmage provient intgralement d'anticipations
d'inflation qui ne sont pas vrifies. Que se passe-t-il si les agents
ne commettent pas d'erreurs d'anticipation systmatiques?
Reprenons l'exemple prcdent d'une hausse permanente du
taux de croissance de l'offre de monnaie. Imaginons qu' la fin
de la priode t - 1 (au moment o les anticipations d'inflation
pour la priode suivante sont formes et les salaires nominaux
ngocis) l'tat annonce qu' partir de la date t le taux de crois-
sance de l'offre de monnaie sera durablement augment. Si les
agents croient l'annonce de politique conomique et connais-
sent le fonctionnement du modle de l'conomie, ils anticipe-
ront que ce changement de politique conomique va se traduire
par davantage d'inflation et il est rationnel pour eux d'intgrer
cette information dans leurs anticipations d'inflation. Leur erreur
d'anticipation est donc plus faible que celle que l'on obtiendrait
avec des anticipations adaptatives. En poussant le raisonne-
ment jusqu'au bout, il n'y a aucune raison pour que les agents
n'anticipent pas correctement l'inflation qui suivra la modifica-
tion de la politique montaire; l'effet de la politique montaire
sur le chmage est alors n ul et l'inflation est immdiatement
gale au nouveau taux de croissance de la masse montaire.
Dans ces conditions, la seule possibilit qui reste aux autorits
en charge de la politique montaire pour rduire le taux de
chmage en dessous du taux de chmage naturel consiste
surprendre les agents en mettant en uvre une politique mon-
taire n'ayant t ni annonce ni anticipe. Mais, l encore, la
surprise ne peut pas tre permanente, puisque les agents rationnels
finissent par intgrer dans leurs anticipations rationnelles la possi-
bilit d'une politique montaire surprise. Finalement, l'arbitrage
entre inflation et chmage n'existe alors ni long terme ni court
terme. C'est la thse initialement propose par Robert Lucas,
laurat du prix Nobel d'conomie en 1995.
LA DYNAMIQUE DE C O URT TERME DES tCONOMIES : INFLATION ET CH0 MAGE 83

La Banque centrale doit-elle tre indpendante ?

De par ses statuts, la Banque centrale europenne est indpen-


dante ; elle a la charge de la politique montaire commune et
les dcisions en la matire prises par le conseil de la politique
montaire ne sont pas soumises une approbation des instances
politiques europennes. La plupart des banques centrales,
commencer par la Banque fdrale amricaine, jouissent de cette
mme indpendance. Cela n'a pas toujours t le cas. Le large
mouvement d'indpendance des banques centrales date des
annes 1980 et 1990 et fait suite une littrature thorique qui
voyait dans l'indpendance des banques centrales une condi-
tion ncessaire la matrise de l'inflation. L'argumentation est la
suivante:
Sous l'hypothse d'anticipations rationnelles, l'engagement
d'un gouvernement mettre en place une politique montaire
non inflationniste n'est pas crdible. L'intrt du gouvernement
consiste en effet annoncer une cible d'inflation faible puis
mener une politique montaire moins restrictive de faon
surprendre les agents privs et bnficier ainsi de l'effet de
surprise qui joue favorablement sur l'activit. Des agents
rationnels, connaissant la tentation de tricher des gouverne-
ments, n'anticipent donc jamais de faibles niveaux d'inflation.
De ce jeu entre les gouvernements non crdibles et les agents
privs rationnels rsultent finalement des niveaux d'inflation
levs sans que les effets positifs sur l'activit apparaissent
puisqu'il n'y a pas d'effet de surprise.
Comment rompre ce jeu ? Milton Friedman avait propos
d'inscrire dans la constitution le taux de croissance annuel de
la masse montaire afin d'ter aux gouvernements la possibilit
de manipuler l'offre de monnaie. La littrature sur la crdibilit
propose la cration d'une banque centrale indpendante dont le
principal objectif est de maintenir l'inflation dans une fourchette
raisonnable, la banque centrale tant juge sur le respect de cet
objectif. Qu'entend-on exactement par indpendance? L'objectif
de la banque centrale ne relve pas de son propre choix. Il est soit
dcid par les autorits politiques, soit inscrit dans les statuts de
la banque centrale. L'indpendance ne porte que sur les mesures
mettre en uvre (essentiellement la dcision d'augmenter ou
de baisser les taux d'intrt) pour atteindre l'objectif d'inflation.
Les achats de grandes quantits de titres de la dette publique par
84 I NTRODUCTION lA MACROCONOMIE

les banques centrales depuis la crise ont fait craindre certains


un affaiblissement de l'indpendance des banques centrales.
Cependant, la trs faible inflation et la difficult pratiquer des
taux d'intrt ngatifs peuvent justifier ces achats [Blinder,
2012]. Les discussions actuelles sur la possibilit (et le dsir) pour
les banques centrales de conserver leur indpendance portent
davantage sur leur nouveau rle dans la stabilit financire que
sur leur dtention de titres publics [Cecchetti, 2013].

tudes de cas

L'aplatissement de la courbe de Phillips

Un aplatissement de la courbe de Phillips a t observ dans


les pays industriels, comme le reflte le graphique S : l'inflation
est de moins en moins lie l'cart entre le taux de chmage et
le taux de chmage naturel. La mondialisation serait en partie
l'origine de cet aplatissement (voir par exemple Borio et Filardo
[2007]) : les flux de commerce et d'investissement ont rendu les
prix des biens moins sensibles la pression de la demande. Par
ailleurs, les bonnes pratiques de politiques montaires ont ancr
les anticipations d'inflation.
Quelles sont les consquences de cet aplatissement ? D'un
ct, les banques centrales ont moins se soucier des dsqui-
libres temporaires entre offre et demande parce que le chmage
ne joue plus beaucoup sur l'inflation. D'un autre ct, rpondre
aux chocs leur devient plus difficile car l'ampleur des modifica-
tions des taux d'intrt doit tre plus grande pour ramener
l'inflation sa cible. Ceci est parfaitement illustr par la situation
des pays dvelopps en 2015. Malgr les politiques montaires
trs expansionnistes menes par les banques centrales (faibles
taux d'intrt, achats massifs de titres sur les marchs), l'inflation
reste trs faible, bien en dessous de la cible de 2 o/o.

Persistance du chmage en France depuis les annes 7970

La courbe de Phillips, ainsi que le modle que nous avons


analys dans ce chapitre, prvoient que, plus ou moins longue
chance, le taux de chmage d'une conomie retrouve son
niveau naturel. Comment peut-on expliquer alors qu'en France le
L A DYNAMIQU E D E CO U RT TER M E DES ~CO N OMIE S : IN FLATION ET C H M AGE 85

Graphique 5. l 'aplatissement de la courbe de Phillips


20 .---------------------------------------~

l
..,
~
'0
15
"'
'0
-~
Q.
:0 10
'0

"'
.!.!
'0
:
~
c:
0

~
E 2000s ~

0
-1 ,0 0,0 1,0 2,0 3,0 4,0
cart du taux de chmage de NAIRU (%)

Source : lakova [2007].

chmage soit durablement si lev (suprieur 8 % depuis le


milieu des annes 1980, cf graphique 6)?
Une premire explication consiste avancer que c'est le taux
de chmage naturel qui est lev. La difficult avec cette explica-
tion est que dans les annes 1960, le taux de chmage tait inf-
rieur 3 % sans que l'inflation soit forte pour autant, ce qui
contredit la thse d'un taux de chmage naturel lev.
Une seconde explication con siste dire que le taux de
chmage naturel a augment. L'OCDE calcule ainsi, partir d'esti-
mations conomtriques de courbes de Phillips, le niveau de
chmage qui n'acclre pas les salaires (le NAWRU, cf encadr
p. 75). Le graphique 6 retrace pour la France l'volution du taux
de chmage et du NAWRU, celui-ci n'ayant cess d'augmenter
depuis le milieu des annes 1970.
Les conomistes ne s'accordent pas sur les raisons de (et donc
sur les remdes ) cette augm entation du taux de chmage
naturel et donc sur les remdes pour la contrer. Aux tats-Unis
o, au contraire, le taux de chmage naturel semble avoir baiss.
Pour certains, c'est l'insuffisante flexibilit du march du travail
86 I N TRODUCTION lA MACROCONOMIE

Graphique 6. Taux de chmage et NAWRU en France


14,00

12,00
Taux de chmage

i
:::;)

10,00 ,,'
----- ....

~ 8,00
g' NAWRU
. 6,00
-5
.,
~ 4,00
~
2,00

Source : OCDE.

conjugue une plus forte concurrence mondiale qui explique-


rait la monte du taux de chmage naturel en Europe. Pour
d'autres, un progrs technique biais en faveur des travailleurs
qualifis aboutirait l'exclusion du march du travail des travail-
leurs les moins qualifis en Europe (et donc une monte du
taux de chmage naturel) et un creusement des ingalits sala-
riales aux tats-Unis (o le salaire minimum est plus faible qu'en
Europe continentale). D'autres encore avancent la thse d'hyst-
rse du taux de chmage naturel : un taux de chmage lev hier
augmenterait durablement le taux de chmage naturel. En effet,
un individu durablement au chmage perd ses comptences, ce
qui limite ses chances de trouver un nouveau travail; tout se
passe alors comme si les chmeurs de longue dure ne pesaient
plus sur l'volution des salaires ... , ce qui se traduit par une
augmentation du taux de chmage naturel. Ainsi, en France,
comme dans le reste de l'Europe continentale, les chocs subis
par les conomies (l'augmentation du prix du ptrole dans les
annes 1970, les politiques montaires restrictives de lutte contre
l'inflation des ann es 1980) ont eu pour consquence des taux
de chmage levs qui, leur tour, contribueraient augmenter
le taux de chmage naturel. Sur ce dbat, on peut consulter les
LA DYNAMIQUE DE C O URT TERME DES tCONOMIES : INFLATION ET CH0 MAGE 87

articles d'Olivier Blanchard et Lawrence Katz [1997], de Gregory


Mankiw [2001].

La rgle de Taylor, ou comment les banques centrales


dcident la politique montaire

Sur quelles bases les banques centrales indpendantes pren-


nent-elles leurs dcisions ? Dans un petit article devenu trs
clbre, John Taylor [1993] se proposait d'identifier les raisons
pour lesquelles la Banque fdrale amricaine augmentait ou
baissait ses taux. Il y montre que la politique montaire mene
par la Fed (par l'intermdiaire des modifications de son taux
d'intervention nominal sur le march montaire) peut tre repr-
sente par l'quation suivante :
i, = n, + 0,5 ((y,- yn) + nJ + 2
o i, est le taux d'intrt nominal (y, - yn) reprsente l'output gap
(c'est--dire l'cart entre le niveau d'activit et le niveau d'acti-
vit potentiel), trs li la diffrence entre le taux de chmage
observ et le taux de chmage naturel, et n, l'inflation.
Selon cette rgle simple, un cart du PIB de 1 o/o par rapport
la production potentielle devrait se traduire par une augmenta-
tion de 0,5 point du taux d'intrt nominal (et rel) et une hausse
de l'inflation de 1 point devrait se traduire par une augmentation
de 1,5 point du taux d'intrt nominal (soit une hausse du taux
d'intrt rel de 0,5 point).
Comment interprter cette rgle? Mme si beaucoup d'autres
facteurs (par exemple une crise de change) peuvent tre pris en
compte, Taylor identifie cette rgle comme un moyen de se repr-
senter la politique montaire : 1), la banque centrale dfinit (ou
se voit imposer) une dble pour l'inflation 2), pour dterminer le
taux d'intrt nominal, elle prend en compte l'existence d'un arbi-
trage entre inflation et chmage. Plus l'aversion de la banque
centrale vis--vis de l'inflation est forte, plus elle augmente le taux
d'intrt (pour un cart la cible d'inflation donn), plus
l'conomie ralentit, ce qui cre du chmage, et plus l'inflation est
rapidement rduite. Au contraire, plus son aversion relative
l'inflation est faible, plus elle consent dvier de la cible d'inflation
pour rduire le chmage et le rapprocher de son niveau naturel.
Mme si elles s'en sont dfendues, la plupart des banques
centrales europennes ainsi que la Fed pratiquent depuis la fin
88 INTRODUCTION LA MACROtCONOMJE

des annes 1980 des politiques montaires tout fait conformes


la rgle de Taylor (cf par exemple Clarida et al. [1998]).
Janet Yellen a d'ailleurs reconnu en 2012 que l'approche de la
Fed pour rpondre l'inflation et au chmage correspondait
une rgle de Taylor avec un coefficient de 1 pour l'output gap
plutt que 0,5 comme dans la version initiale.

Conclusion : les dbats entre nouveaux classiques


et nouveaux keynsiens

Les propositions d'inefficacit de la politique conomique


des conomistes nouveaux classiques
l 'inefficacit de la politique montaire. - Les annes 1970 ont
connu une radicalisation des arguments l'encontre des poli-
tiques montaires conjoncturelles. Les conomistes nouveaux
classiques, souvent assimils leur chef de file Robert Lucas et
leur hypothse d'anticipations rationnelles, avancrent l'argu-
ment selon lequel l'hypothse d'anticipations rationnelles a pour
corollaire que la politique montaire n'a d'effet sur l'activit
relle que si elle n'a pas t anticipe par les agents privs (les
consommateurs, les salaris, les entreprises). Dans le cas o la
politique montaire a t anticipe par les agents, seuls les prix
sont affects et, mme court terme, les relances montaires
n'ont donc que des effets inflationnistes. Les conomistes keyn-
siens et nouveaux keynsiens ont toutefois montr que les poli-
tiques montaires anticipes ont des effets rels sur l'activit ds
lors que les salaires ou les prix n e sont pas parfaitement flexibles
et ce, mme si les anticipations sont parfaitement rationnelles.

le financement et l'efficacit des politiques budgtaires. -Un


argument thorique remis au got du jour au milieu des
annes 1970 par Robert Barro, un conomiste du courant
des nouveaux classiques, veut que le mode de financement de la
politique budgtaire soit neutre pour l'activit conomique et
met de ce fait en doute l'efficacit de la politique budgtaire.
Parce qu'il a t initialement dvelopp par David Ricardo, qui
s'interrogeait sur la meilleure faon pour l'Angleterre de financer
la guerre contre les armes de Napolon, cet argument porte le
nom d'quivalence ricardienne.
LA DYNAMIQUE DE C O URT TERME DES tCONOMIES : INFLATION ET CH0 MAGE 89

Imaginons tout d'abord que, pour financer sa politique budg-


taire, l'tat prlve des impts : pour chaque euro dpens, l'tat
prlve un euro sous forme d'impt (le dficit budgtaire reste
inchang). L'effet de relance de l'augmentation des dpenses
publiques sera alors fortement tempr par l'augmentation des
impts (mme s'il existe un effet redistributif - on prend
certains agents pour donner d'autres - qui contribue aussi
relancer l'conomie si les agents qui en bnficient ont une
propension consommer suprieure celle de ceux qui paient
des impts).
Imaginons maintenant que, au lieu de prlever des impts,
l'tat accroisse le dficit budgtaire (s'endette). L'argument de
Robert Barro est qu'il n'y a pas davantage attendre de ce
stimulus budgtaire que de celui entirement financ par
J'impt : des consommateurs parfaitement rationnels, antici-
pant que l'tat devra, dans le futur, prlever de nouveaux impts
pour rembourser cette dette, prfrent pargner plutt que
consommer le surcrot de revenu courant .. ., limitant de ce fait le
jeu des mcanismes sur lesquels repose la stimulation de l'activit
conomique.
Il serait donc vain d'esprer des dficits budgtaires qu'ils
permettent de relancer une conomie. Les recherches empi-
riques n'ont toutefois pas apport de preuves incontestables
cette logique valable uniquement sous certaines hypothses
(notamment que les agents privs peuvent prter et emprunter
comme ils le souhaitent auprs des banques et sur les marchs
financiers).

Faut-illutter contre les fluctuations conjoncturelles?- Il a long-


temps t admis que les fluctuations conomiques n'taient pas
une bonne chose. Au milieu des annes 1980, deux arguments
ont t avancs l'encontre de cette ide.
Le premier argument est avanc par les thoriciens des cycles
rels pour qui les fluctuations cycliques constituent la rponse
optimale des conomies de march aux perturbations exognes
qu'elles subissent (les alas climatiques, les dcouvertes techno-
logiques ... ) ; dans cette optique, combattre le cycle est
contre-productif.
Le second argument est avanc par Robert Lucas pour qui le
gain en bien-tre qu'il y aurait supprimer les fluctuations
cycliques est trs faible, et les ressources alloues la mise en
90 INTRODUCTIO N LA MACROtCONOMJE

uvre des politiques conjoncturelles seraient mieux utilises


soutenir la croissance de long terme.
Ces doutes sur la pertinence des politiques de stabilisation
conjoncturelle ne se sont pas traduits par une volont moindre
de lissage conjoncturel : les interventions de la Banque fdrale
amricaine, qui augmente le taux d'intrt quand elle juge le
rythme de croissance de l'conomie amricaine trop lev et qui
le rduit lorsque l'conomie amricaine est juge en phase de
rcession, illustrent bien que les gouvernements ou les banques
centrales n 'ont pas totalement abandonn l'obj ectif d'viter si
possible emballements conjoncturels et rcessions.

Les conomistes nouveaux keynsiens


On dsigne par conomistes nouveaux keynsiens les cono-
mistes qui, tout en acceptant l'hypothse d'anticipations ration-
n elles, mettent l'accent sur les imperfection s des diffrents
marchs et s'intressent leurs origines et aux con squences
pour l'efficacit des politiques conomiques conjoncturelles. Ils
tudient alors aussi bien le fonctionnement du march du travail
et les raisons pour lesquelles les salaires sont rigides, celui du
march du crdit et les raisons pour lesquelles certains agents ne
peuvent emprunter, que celui du march des biens et services
et les raisons pour lesquelles les prix ne s'ajustent pas en perma-
nence pour assurer l'quilibre entre l'offre et la demande. Les
imperfections dans le fonctionnement des marchs peuvent
provenir de l'imperfection de l'information qui empche les
agents individuels de procder des changes qui seraient pour-
tant souhaits par les parties prenantes si l'information tait
parfaite. Par exemple, dans le cas du march du crdit, le fait que
les banques qui accordent des crdits ne puissent observer parfai-
tement la qualit des emprunteurs les incite limiter leur offre
de crdit ; des agents parfaitement solvables peuvent ainsi se voir
refuser des crdits par des prteurs pourtant parfaitement
rationnels du seul fait de l'imperfection de l'information. George
Akerlof et Robert Stiglitz (tous deux prix Nobel en 2001) sont
parmi les initiateurs de ces recherches sur les consquences des
imperfectio ns de l'informatio n sur le fonctionnement d es
marchs et sur l'efficacit de la politique conomique dan s un tel
contexte.
LA DYNAMI QUE DE COURT TERME DES tCONOMIES : INFLATION ET CH0MAGE 91

La rsurgence keynsienne
La crise financire de 2008 a ren ouvel l' int rt pour
l'conomie keynsienne. Cette crise partageant des caractris-
tiques avec la Grande Dpression, les politiques budgtaires et
montaires expansionnistes des annes 1930 ont retrouv de la
pertinence. L'ampleur de la rcession de 2008-2009 a conduit
rvaluer le potentiel des politiques de relance keynsiennes.
Ainsi, Blanchard et al. [2010] prconisent de veiller crer des
conditions permettant l'utilisation de la politique budgtaire
expansionniste, notamment des niveaux d'endettement bas hors
des priodes de crise, et de concevoir des mcanismes de stabili-
sateurs automatiques plus performants. Ils mettent aussi en garde
contre une cible d'inflation trop basse qui peut faire craindre la
dflation en cas de choc ngatif de demande.
V 1 L'quilibre macroconomique
en conomie ouverte

Dans un rapport datant du mois d'avril 2015, le Dpartement du


Trsor amricain accusait le yuan d'tre sous-valu. Pourquoi les
autorits chinoises avaient-elles intrt ce que le yuan soit faible
et pourquoi cela posait-il un problme aux autorits amricaines?
Nous avons suppos jusqu' prsent que l'conomie tait
ferme : toutes les interactions avec les autres pays taient
ignores. Pourtant, que les mnages puissent consommer des
biens trangers (acheter des voitures allemandes ou japonaises) et
acheter des titres trangers (des bons du Trsor amricain ou des
actions Nokia) affecte l'vidence le march des biens et services,
le march de la monnaie et donc la demande agrge d'un pays.
L'offre des entreprises est, elle aussi, affecte par l'ouverture de
l'conomie; cependant, court terme au moins, c'est principa-
lement via la demande agrge que l'ouverture de l'conomie
modifie l'analyse.
L'objectif de ce chapitre est d'tudier l'effet des chocs et des
politiques conomiques sur les agrgats macroconomiques
d'une conomie qui change avec l'extrieur. On s'intressera
particulirement aux effets des chocs qui proviennent de l'ext-
rieur et aux consquences de l'ouverture de l'conomie sur
l'efficacit des politiques conomiques. Nous verrons que les
effets d'une politique conomique donne dpendent de faon
cruciale du rgime de change (fixe ou flexible) en vigueur dans
l'conomie. Dans ce cadre, nou s reviendrons sur l'analyse des
consquences de la monnaie unique en Europe pour la mise en
uvre de la politique conomique ainsi que sur celle des causes
du cours plancher >> en vigueur en Suisse entre le 6 septembre
2011 et le 15 janvier 2015.
94 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Taux de change nominal et taux de change rel

Les changes avec l'extrieur (les quantits de biens et services


exportes et importes) dpendent des prix relatifs des biens int-
rieurs et trangers, ces prix tant exprims dans la mme
monnaie. Pour transformer des prix exprims dans une monnaie
extrieure (par exemple le dollar) en prix exprims en units
montaires intrieures (par exemple l'euro), on utilise le taux de
change nominal entre ces deux monnaies.
Il existe deux dfinitions possibles du taux de change nominal
selon qu'il exprime combien d'units de monnaie intrieure
permettent d'obtenir une unit de monnaie trangre (cotation
l'incertain), ou combien d'units de monnaie trangres sont
ncessaires pour obtenir une unit de monnaie intrieure (cota-
tion au certain). Par exemple, si 1 dollar peut s'changer contre
1,07 euro, 1,07 est le taux de change au certain du dollar vis--vis
de l'euro et aussi le taux de change l'incertain de l'euro vis--
vis du dollar tandis que 0,93 est le taux de change au certain de
l'euro vis--vis du dollar, etc. On retiendra ici la cotation au
certain : une apprciation de la monnaie intrieure correspond
une augmentation du taux de change, et une dprciation
revient une diminution du taux de change (lorsque les taux
de change sont flexibles, on parle d'apprciation et de dprciation
tandis que les termes de rvaluation et dvaluation s'appliquent
pour des rgimes de changes fixes). Le tableau 1 donne quelques
valeurs du taux de change entre euro et dollar pour trois dates,
selon la cotation retenue :

Tableau 1. Taux de change nominaux

30 dcembre 31 dcembre 31 dcembre


2013 2014 2015

Cotation de l'euro au certain


1 euro = X dollar 1,3783 1,2141 1,0887
Cotation de l'euro l'incertain
1 dollar = X euro 0,7255 0,8236 0,9185

Source : Statistiques financires internationales, FMI.

Si on s'intresse maintenant ce qui se passe non pas seule-


ment entre deux monnaies (l'euro et le dollar) mais entre une
l' (QUI LIBRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 95

monnaie donne (l'euro) et l'ensemble des autres monnaies,


on construit un indice de taux de change nominal, not eN qui
combine le cours de l'euro vis--vis de l'ensemble des autres
monnaies. Gnralement, le poids des diffrentes monnaies dans
cet indice est fonction de l'intensit des changes commerciaux
avec les diffrents pays. Les variations de cet indice au cours du
temps s'interprtent comme des apprciations ou des dprcia-
tions de la monnaie intrieure vis--vis du panier de monnaies
des partenaires commerciaux.
Le taux de change rel (en adoptant toujours la cotation au
certain) donne le prix des biens intrieurs en termes de biens
trangers. Il est une gnralisation l'ensemble des biens et
services de l'conomie de la question : combien faut-il de
tablettes de chocolat belge pour avoir une tablette de chocolat
suisse? Le taux de change rel s'obtient donc partir du taux de
change nominal corrig du niveau gnral des prix l'tranger et
du niveau gnral des prix intrieur. Pour un niveau donn du
taux de change nominal, plus le niveau gnral des prix int-
rieur est lev, plus le taux de change rel est fort. De mme que
pour le taux de change nominal, on peut construire un indice
de taux d e change rel avec des poids attribus aux autres
monnaies. On a finalement: e =eN P 1P., o eN est l'indice de taux
de change nominal, P est le niveau gnrai des prix intrieur,
pE est le niveau gnral des prix trangers (qui intgre le niveau
gnral des prix des pays trangers avec des poids dpendant de
la taille des changes avec ces pays) et e est l'indice de taux de
change rel. Le livre de Dominique Plihon (2012] est une bonne
introduction l'analyse des taux de change. On ne pose pas ici
l'hypothse que la parit des pouvoirs d'achat absolue ou rela-
tive tient (cf encadr p. 95). Plus e est faible, plus les produits
d'un pays sont bon march par rapport ceux proposs dans les
pays avec lesquels il entretient des relations commerciales ; plus
la comptitivit du pays est forte.
Comme le montre le tableau 2, les indices de taux de change
nominal et rel pour la France diminuent entre 2010 et 2015 :
il y a une dprciation nominale et relle (donc une hausse de
la comptitivit) de l'euro vis--vis du panier de monnaies des
partenaires commerciaux de la France. Au contraire, entre 2000
et 2005, le taux de change rel s'tait apprci, indiquant une
perte de comptitivit de la France.
96 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Tableau 2. Indices de taux de change nominal et rel pour la France


(2010 =100)
2000 2005 2010 2015

fi' 90,8 99,8 100 96,9


e =fi' P/ P' 97,3 104,1 100 92,9

Source : Banque des rglements internationaux.

Demande globale en conomie ouverte

L'quilibre simultan sur les marchs des biens et services et de


la monnaie permet, comme en conomie ferme, d'obtenir une
fonction de demande globale qui dtermine la quantit de biens
et services intrieurs demande pour chaque niveau de prix.

L'quilibre sur le march des biens et services (lS) en conomie ouverte

En conomie ouverte, la production intrieure ne sert plus


seulement satisfaire la consommation et l'investissement int-
rieurs mais aussi ceux du reste du monde : une partie de la
production intrieure est exporte. Par ailleurs, les biens et
services consomms et investis l'intrieur du pays peuvent tre
soit imports, soit produits domestiquement. L'quilibre
ressources/emplois en conomie ouverte prend donc en compte
les exportations et les importations :
Y=C+I+G+X-M
o M et X indiquent respectivement les importations et les
exportations en termes de biens intrieurs.
L'tude des composantes de la demande de biens intrieurs
propose dans le tableau 1 du chapitre 11 montre qu'entre 2000 et
2010 la part de la composante extrieure (X-M) de la demande
de biens intrieurs en France a diminu pour atteindre - 2 %.
Sa contribution la croissance du PIB s'est cependant renforce
(cf tableau 2 du chapitre u), passant de- 0,3% en 1980 - 0,1%
en 2000. Par ailleurs, sa variabilit est plus importante que celle
de la consommation mais moins forte que celle de l'investisse-
ment. Comme les exportations nettes des importations ne repr-
sentent qu'une faible part de la demande, elles ne contribuent
finalement que faiblement la variabilit du PIB.
l'tQUILIBRE MACROCONOMIQUE EN CONOMIE OUVERTE 97

pas toujours arbitrer effectivement de


Parits des pouvoirs d'achat faon instantane et sans cot entre le
absolue et relative march intrieur et les marchs
trangers : il existe des cots de trans-
Sous l'hypothse de parit des pouvoirs port. des droits de douane, certains biens
d'achat (PPA) absolue, le taux de change ne sont pas changeables ou stricte-
nominal est gal au rapport entre les prix ment semblables d'un pays l'autre, etc.
trangers et intrieurs : e" = P'!P; le taux Par ailleurs, il n'est pas sOr que les indices
de change rel est alors gal l' unit. des prix des diffrents pays contiennent
C'est la gnralisation, l'indice des prix, les m mes biens avec les mmes
de la loi du prix unique quel que soit le pondrations.
pays, pour un bien identique. Cette loi Depuis 1986, l'hebdomadaire anglais
est justifie par l'existence d'arbitrage The Economist propose chaque anne en
entre les biens de diffrents pays. Elle ne avril une valuation de l'hypothse de
se vrifie pratiquement jamais, notam- PPA partir du prix du Big Mac de
ment parce que les agents ne peuvent McDonald's dans diffrents pays.

Tableau 3. Indice Big Mac (janvier 2016)

Pays Monnaie Prix du Big Mac e respectant la PPA e observ


France Euro 4 0,82 0,9
Russie Rouble 11 7,26 23,78 76,64
japon Yen 369,78 75 118,52
Suisse CHF 6,49 1,32 0,98
tats-Unis Dolla r amricain 4,93 1 1

Il faudrait qu'un dollar amricain s'change contre 1,32 (6,49/4,93) franc suisse pour que le Big
Mac cote la mme chose aux tats-Unis et en Suisse.
Sour<:e : The Economist, janvier 2016.

En janvie r 2016, un Big Mac tait de change rel doit reste r constant
plus cher en Suisse qu'aux tats-Unis: long terme. Or il suit de sa dfinition, par
il faudrait qu'un dollar US s'change diffrenciation totale :
contre 1,32 (= 6,49 1 4,93) francs suisses de/e = d e"!e" + dP/P- dl"li"
pour que le Big Mac cote la mme La constance long terme du taux
c hose aux tats-Unis et e n Suisse. En de change rel implique que le taux de
janvier 2016, un dollar s'changeait change nominal se dprcie un taux
contre seulement 0,98 franc suisse. Selon gal la diffrence entre le taux d'infla-
cet indicateur, le dollar serait sous-valu tion intrieur et le taux d'inflation
(ou le fra nc suisse survalu) par rapport tranger. C'est la parit relative des
l'hypothse de PPA absolue. pouvoirs d'achat. Mme si elle est moins
Si on carte l'hypothse d'un taux de restrictive que la PPA absolue, il reste que
change rel unitaire, ce dernier, long beaucoup de b iens n e sont pas
terme est dtermin par les gots des changs, et que les indices de prix des
agents, leur productivit relative, les pays diffrent dans leur construction. Il
droits de douane, etc. Si ces dtermi- n'est donc pas sr que l' hypothse de
nants sont stables dans le temps, le taux PPA relative tienne.
98 I NTRODUCTI ON lA MACROCONOMIE

Dtermination des volumes imports. -Plus le revenu intrieur


est important, plus la demande pour tous les biens, c'est--dire
la fois pour les biens intrieurs et pour les biens produits
l'tranger, est importante.
Les importation s augmentent aussi avec le taux de change
rel : si une voiture produite en France est plus ch re qu'une
voiture de mme type produite l'tranger, cette dernire sera
alors importe en France.
Enfin, la qualit relative des produits intrieurs et trangers
entre aussi certainement en compte : si une voiture produite en
Allemagne est de meilleure qualit qu'une voiture produite en
Italie alors qu'elles ont le mme prix, cela favorise les importa-
tions en Italie de voitures allemandes. Nous supposerons qu'
court terme cette comptitivit qualit est exogne. long terme,
elle dpendrait videmment des dpenses d'investissement et de
recherche et dveloppement des entreprises.

Dtermination des volumes exports. - Les exportations du


pays sont les importations ralises par l'tranger. De faon
symtrique ce que nous avons vu pour les importations :
- plus le revenu tranger est lev, plus la demande trangre
est forte et plus le pays va exporter vers l'tranger ;
- par ailleurs, plus l'indice du taux de change au certain est
lev, plus la comptitivit du pays est faible et moins les expor-
tations sont importantes ;
- enfin, comme on l'a vu dans le cas des importations, la
qualit relative des biens doit aussi tre considre : plus la
comptitivit qualit d'un pays est leve, plus ses exportations
sont importantes.
En prenant en compte les dterminants des variables en jeu,
l'quilibre en volume entre ressources et emplois en biens et
services s'crit :
JS: Y= C(Y, t, a~) + J(i, n*, at)
+ G + X(}'f, e, q) - Q(Y, e, q) 1 e
o t, G, a, ar, n*, q, }If sont considrs comme exognes et o
q est un indice de la qualit de biens intrieurs. i et e, on le verra
par la suite, sont dtermins par les marchs intrieur et
trangers de la monnaie. Q(Y, e, q) 1 e = Q(Y, e, q). pE 1 (f!'.P) = M
donne les importations en termes de biens intrieurs (P" trans-
forme Q les importations initialement exprimes en termes de
l ' tQUILIBRE MACROCONOMIQUE EN CONOMIE OUVERTE 99

Tableau 4. les principaux dterminants des composantes


de la demande en conomie ouverte

c G; G, +Ge x Q

Y, t, a~ i,:c"', at Exogne Y', e, q Y, e, q


+, -, + -, +, + +,-,+ +, +,-

Tt" est le taux d 'inflation anticip. al est un indicateur des anticipations que forment les
consommateurs sur leur l'environnement futur et ar de celles que forment les entrepre-
neurs (cf. chapitre u). Par ailleurs, X est la quantit exporte, 1 est le revenu tranger, e est
l'indice du taux de change rel au certain, et q est un indice de la comptitivit qualit,
suppose exogne; Q est la quantit importe.
Lecture : toutes choses gales par ailleurs, une augmentation du taux d'intrt nominal
accrot l'investissement, une augmentation du taux d'imposition rduit la
consommation ..

biens trangers en importations en termes d'unit montaire


trangre ; 1/" les transforme en importations en termes d'unit
montaire intrieure et 1/P les transforme en importations en
termes de biens intrieurs). X(YE, e, q) - Q(Y, e, q)/e fournit les
exportations nettes des importations ou encore le solde de la
balance commerciale. Comme en conomie ferme et pour les
m mes raisons, IS est dcroissante dans le plan (Y, i)
(cf. graphique 2a du chapitre n).
Un choc favorable sur les anticipations des consommateurs ou
des entrepreneurs a des effets de mme nature que ceux tudis
dans le cas d'une conomie ferme (cf. graphique 2b du
chapitre 11). En conomie ouverte cependant, les effets en chaine
ne jouent pas plein car l'augmentation du revenu intrieur
favorise la consommation qui se rpartit entre l'achat de biens et
services intrieurs et imports. Par ailleurs, un choc sur la comp-
titivit qualit ou une augmentation des dpenses publiques qui
accrotraient la demande de biens et services auraient le mme
type d'effet.

La courbe en J. -Une dprciation, c'est--dire une diminution


du taux de change nominal e" et ici aussi du taux de change
rel e, car nous raisonnons prix fixes, modifie l'quilibre sur
le march des biens. Ce dernier est affect trois niveaux par la
dprciation :
1) Une dprciation rduit le prix, pour l'tranger, des expor-
tations du pays dont la monnaie se dprcie, qui se trouvent
100 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

donc stimules. 2) De faon symtrique (le prix des importa-


tions du pays qui dvalue augmente), les importations sont
dcourages. Cette rduction du volume des importations, jointe
l'augmentation de celui des exportations, contribue accrotre
le solde de la balance commerciale et augmenter la demande
pour les biens et services intrieurs. Ces deux effets sont de
nature relle. Cependant, il existe un troisime effet, de nature
nominale, qui se produit par l'intermdiaire de la valeur des
importations : 3) Dans IS, les importations sont exprimes en
units de biens et services intrieurs. Or le prix unitaire des
importations en termes de biens et services intrieurs (qui est
donn par l'inverse de l'indice du taux de change rel au certain)
augmente lors d'une dprciation. Ainsi, mme si le volume
d'importations est infrieur, leur valuation en termes de biens et
services intrieurs peut augmenter.
Finalement, le solde de la balance commerciale et la demande
pour les biens et services intrieurs ne s'accroissent que si les
deux premiers effets l'emportent sur le dernier. C'est la condition
dite de Marshall-Lerner ou thorme des lasticits critiques.
D'un point de vue dynamique, une dprciation affecte
d'abord les prix puis les quantits : on assiste tout d'abord une
dtrioration de la balance commerciale puis une amliora-
tion. Ce phnomne est connu sous le nom de courbe en J (de la
forme en J de la courbe reprsentant l'volution dans le temps
du solde de la balance commerciale suite une dprciation).
La condition de Marshall-Lerner ne serait donc vrifie qu'aprs
un certain dlai. Aux tats-Unis, la forte dprciation de 1985
ne s'est traduite par une amlioration du solde de la balance
commerciale qu'en 1988!
Dans la suite de ce chapitre, on considre que la condition
de Marshall-Lerner est satisfaite. Pour un mme niveau du taux
d'intrt nominal, l'quilibre sur le march des biens et services
implique donc un niveau plus lev du PIB suite une dprcia-
tion de la monnaie intrieure : la courbe IS se dplace vers la
droite.

quilibre sur le march de la monnaie (LM)

En conomie ouverte, les agents domestiques n'ont pas de


raisons de dtenir de la monnaie trangre (sauf dans les situa-
tions extrmes de fuite devant la monnaie intrieure ou de
l' (QUI LIBRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 101

dollarisation rampante de l'conomie). La courbe LM n'est donc


pas directement affecte par l'ouverture de l'conomie. On a
toujours LM : M/P = L(Y, i) avec Lr > 0 et Li < 0, et la courbe LM
peut toujours tre reprsente dans le plan (Y, t), par une courbe
croissante (cf graphique 3a du chapitre u).

La condition de parit des taux d'intrt


S'il est peu probable que la monnaie trangre intresse les
agents domestiques, ces derniers peuvent souhaiter placer leur
argent l'tranger afin de profiter des rendements qui prvalent
hors du pays.
Si un mnage de la zone euro achte pour 1 euro de bons du
Trsor franais, ce placement lui rapportera (1 + i) euros au bout
d'une anne.
S'il place la mme somme l'tranger, il lui faut 1) convertir
aujourd'hui, c'est--dire la date t, son euro en monnaie tran-
gre ; il obtient alors une somme 1!,' en monnaie trangre ;
2) placer ensuite cette somme l'tranger au taux (1 + ie); il rcu-
pre en (t + 1), la somme ((1 + iE) ei') en monnaie trangre ... qu'il
lui faut 3) convertir en monnaie intrieure, au taux du moment,
c'est--dire e;':1
Le rsultat final de l'opration << placement l'tranger d'un
euro >> est donc : [(1 + iE) 1!,' 1 ei':-1]. Comme les agents prennent
leur dcision de placement aujourd'hui sur la base de leur antici-
pation 1!',!1 du taux de change futur, le rendement anticip du
placement l'tranger est donc : [(1 + iE) 1!,' 1 1!',: 1].
Sous !'hypothse de parfaite mobilit des capitaux, les agents dci-
dent sans contrainte de placer dans le pays ou l'tranger. l'qui-
libre, si les deux possibilits de placement coexistent, c'est qu'il n'y
a d'opportunit de gain ni passer du march intrieur au march
international ni l'inverse : (1+iE) tf1 1!',!1 = (1 + t), ce qui peut tre
approxim par l'galit : i = iE- (~!',*. 1 - r!')ltf= iE- aa, o l'antid-
pation d'apprdation est note aa. Si l'investissement financier est
plus risqu l'tranger, l'absence d'opportunit de gains changer
de march devient alors : i = iE+ pr-aa, o pr est la prime de risque.
Cette galit est connue sous le nom de parit non couverte des
taux d'intrt (la condition de parit couverte intgre un march
terme, et l'anticipation du taux de change futur est alors
remplace par le taux de change terme [Bnassy-Qur et al.,
2015], pour laquelle le taux d'intrt nominal dans un pays doit
102 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

tre gal au taux d'intrt nominal mondial ajust pour tenir


compte du << risque de change ,,, c'est--dire des anticipations
concernant l'volution du taux de change. C'est une cons-
quence de l'intgration des marchs financiers internationaux.
Si les agents anticipent que l'indice du taux de change va rester
constant entre tet (t + 1), le taux d'intrt nominal intrieur est
gal au taux d'intrt nominal tranger.

Contrainte de parit des taux d'intrt et quilibre simultan


sur les marchs des biens et services et de la monnaie
On fait l'hypothse dite de petite conomie ouverte, c'est--dire
que le niveau des prix trangers, le taux d'intrt tranger et la
production trangre sont supposs ne pas tre affects par
l'conomie domestique : ils sont considrs comme donns. On
suppose par ailleurs que les capitaux sont parfaitement mobiles ;
le taux d'intrt intrieur est donc dtermin par la condition de
parit (note CP) des taux d'intrt.
IS : Y= C(Y, t, a) + I(ip, n*, at) + G +X (YE, e, q)
- Q (Y, e, q)/e
LM: M/P = L(Y, i)
CP : i = iE- aa + pr
Le graphique 1 reprsente les courbes IS, LM et CP dans le plan
(Y, i). La prime de risque pr et l'anticipation d'apprciation aa
sont considres comme donnes. L'quilibre simultan sur les
marchs des biens et services et de la monnaie implique un
niveau de revenu intrieur d'quilibre ( l'intersection entre IS,
LM et CP), ainsi qu'implicitement un taux de change d'quilibre,
le taux d'intrt tant dict par la CP.

Politique conomique en rgime de changes flexibles

Lorsque les changes sont flexibles, le taux de change peut


s'ajuster librement aux modifications de l'environnement
conomique. Dans ce cadre, nous dfinissons la fonction de
demande globale Yd qui regroupe l'ensemble des niveaux de la
demande qui satisfont l'quilibre IS-LM-CP pour diffrentes
valeurs du niveau gnral des prix. Nous tudierons ensuite
les effets de chocs de demande et de diffrentes politiques
l' (QUI LIBRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 103

Graphique 1. l 'quilibre IS-LM-CP en conomie ouverte

15

E-aa f----------o~--
+ pr

conomiques susceptibles de contrer ces effets en envisageant les


trois types d'offre globale dj distingus dans les chapitres prc-
dents. Lorsque l'offre intrieure est suppose s'ajuster parfaite-
ment la demande (cas keynsien extrme dans le chapitre 1), les
trois quations IS, LM et CP dfinissent alors le fameux modle de
Mundell-Fleming dvelopp dans les annes 1960 et qui donne
une version en conomie ouverte du modle IS-LM. Nous adop-
terons ensuite l'hypothse de salaires nominaux rigides (cas
keynsien) puis celle de salaires nominaux flexibles (cas classique).

La fonction de demande globale

En conomie ouverte et en rgime de change flexible, les prix


n'interviennent pas seulement par l'intermdiaire de l'quilibre
sur le march de la monnaie (comme c'est le cas en conomie
ferme) mais aussi par celui du march des biens via le taux de
change rel.
Sur le march des biens et services, une augmentation du niveau
gnral des prix accrot l'indice de taux de change rel pour un
taux de change nominal donn (car e = 'PJPf), ce qui - on
rappelle qu'il est suppos que la condition de Marshall-Lerner est
vrifie- rduit la demande (IS se dplace vers la gauche).
Sur le march de la monnaie, une augmentation du niveau
gnral des prix (cf chapitre n) rduit l'offre relle de monnaie
(LM se dplace vers le haut).
Selon le niveau de taux d'intrt qui rsulte de ces deux effets,
le cours de la monnaie intrieure s'ajuste (et ISse dplace vers la
104 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

Graphique 2. De l'quilibre 15-LM-CP la courbe de demande agrge

a. Effet d' une augmentation de prix b. Effet d' une augmentation de prix
sur l'quilibre ISLMCP sur la demande agrge

p
IS LM'

t:: :~
-
Y2 YI

-
'
Y2
'
YI

gauche ou vers la droite) de sorte que la condition de parit des


taux d'intrt soit finalement respecte (cf graphique 2a).
On a donc toujours une relation dcroissante entre demande
agrge et prix (cf graphique 2b) qui ne provient pas, comme
c'est le cas en conomie ferme, d'ajustements du taux d'intrt
mais d'ajustements du taux de change.

Optimisme des agents et activit conomique

Un brusque accs d'optimisme de la part des mnages


(augmentation de a~) ou des entreprises (augmentation de at)
accrot la demande de biens et services (IS se dplace vers la
droite). Pour le taux d'intrt dict par l'intgration financire,
le march de la monnaie n'est alors plus l'quilibre : il existe
un excs de demande de monnaie qui tire le taux d'intrt vers
le haut. Cette tension sur le taux d'intrt attire les capitaux
trangers, ce qui contribue apprcier la monnaie intrieure.
L'augmentation du taux de change rduit la demande de biens et
services (JS se dplace vers la gauche). En fait, la monnaie int-
rieure s'apprde jusqu' ce que IS ait retrouv sa position initiale.
Finalement, l'indice de taux de change rel a augment mais le
revenu intrieur retrouve son niveau initial (cf graphique 3a).
Dans le plan (Y, P), la courbe de demande globale reste donc
inchange (cf graphique 3b).
Quelle que soit l'hypothse retenue pour l'offre globale, ces
chocs n'ont aucun effet sur le niveau de l'activit conomique ou
l' (QUI LIBRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 105

Graphique 3. Optimisme des agents, 15-LM-CP et demande globale

a. Effet d'un choc de demande b. Effet d'un choc de demande


favorab le sur l'quilibre /S-LM-CP favorable sur la demande g lobale

iE-00 f---*---4<,....-
+pr

YI y

sur celui des prix. Ils apprcient cependant la monnaie intrieure,


ce qui dtriore le solde de la balance commerciale.

Des politiques budgtaire inefficaces

Les consquences d'une augmentation des dpenses publiques


ou d'une rduction des impts sont de mme nature que celles
tudies dans le cas d'un choc de demande favorable (cf graphi-
ques 3a et 3b) : de telles politiques sont inefficaces. En effet,
une augmentation des dpenses publiques accrot la demande
de biens et services ; l'excs de demande de monnaie qui
en rsulte tire le taux d'intrt vers le haut, ce qui contribue
apprcier la monnaie intrieure jusqu' ce que IS ait retrouv sa
position initiale, et, finalement, le revenu intrieur reste
inchang. Une rduction des impts conduit la mme conclu-
sion d'inefficacit.
Quel que soit le type d'offre considr, l'activit conomique
comme les prix restent inchangs ; en revanche, le solde de la
balance commerciale est dtrior.

Une politique montaire efficace

Une expansion montaire accrot l'offre de monnaie pour un


niveau donn du revenu intrieur et du taux de change (la droite
LM se dplace vers le bas). Il existe alors un excs d'offre de
106 I N TRODU CTI ON lA MACROCONOMIE

Graphique 4. Effet d'une expansion montaire sur l'quilibre IS-LM-CP


et la demande globale

a. quilibre 15-LM-CP b. Demande globa le


p

LM'

-~----, -~
---~~Yd'----'
i : Yd
Y1 Y2 y
--+

monnaie par rapport la demande, ce qui tire le taux d'intrt


vers le bas, fait fuir les capitaux vers l'tranger et se dprcier la
monnaie. Du ct du march des biens et services, pour un
mme niveau du taux d'intrt, la dprciation amliore le solde
de la balance commerciale et accrot la demande de biens et
services (ISse dplace vers la droite). La demande de monnaie de
transaction augmente alors, jusqu' galiser l'offre de monnaie et
stabiliser le taux d'intrt son niveau initial.
Finalement, par l'intermdiaire de la dprciation qu'elle
e nge ndre, une expansion montaire accrot la demande
(cf graphique 4a). La demande globale s'est dplace vers la
droite dans le plan (Y, P) (cf graphique 4b).
Si, comme en conomie ferme, la politique montaire est effi-
cace, il faut remarquer que les mcanismes en jeu sont trs diff-
rents puisque en conomie ouverte les effets passent par une
dprdation alors que le taux d'intrt retrouve finalement son
niveau initial.
Si l'offre s'ajuste parfaitement aux quantits demandes pour
un niveau de prix donn (cas keynsien extrme), on se trouve
dans le cadre du modle Mundell-Flerning. L'expansion mon-
t aire relance l'activit conomique et rduit le chmage
(cf graphique 4b du chapitre 1). Cette relance passe par la dpr-
ciation relle de la monnaie intrieure qui amliore le solde de la
balance commerciale.
l ' tQUILIBRE MACROtCONOMIQUE EN tCONOMIE OUVERTE 107

Si les salaires nominaux sont rigides (cas keynsien), la


demande se trouve en excs par rapport l'offre, et le niveau
gnral des prix s'accrot pour rsorber cet excs. Comme les
salaires nominaux ne suivent pas les prix, l'activit conomique
est relance (cf graphique 4c du chapitre 1). Par ailleurs, mme si
les prix ont augment, le taux de change rel diminue globale-
ment, ce qui amliore le solde de la balance commerciale.
Dans le cas classique, seuls les salaires nominaux augmentent
et dans les mmes proportions que les prix, tandis que l'activit
reste inchange (cf graphique 4a du chapitre 1). Par ailleurs, suite
cette augmentation des prix (plus importante que dans le cas
keynsien), le taux de change rel retrouve son niveau initial, ce
qui laisse le solde de la balance commerciale inchang.

Politique conomique en rgime de changes fixes

Aprs la Seconde Guerre mondiale, les conomies les plus


importantes opraient sous un systme de change fixe dfini par
les accords de Bretton Woods (1944). Aujourd'hui, les princi-
pales monnaies mondiales, le dollar, Je yen et l'euro, sont en
change flexible les unes par rapport aux autres. Cependant, un
grand nombre de pays choisissent d'adopter des rgimes de
changes fixes, c'est--dire que leurs autorits montaires s'enga-
gent intervenir sur les marchs des changes pour maintenir
entre leur monnaie et une monnaie extrieure (ou un panier de
monnaies extrieures) une parit fixe l'avance. On discutera
plus loin des avantages et des inconvnients d'un rgime de
change fixe. Retenons pour l'instant que, en rgime de change
fixe, Je taux de change ne varie pas en fonction des mouvements
de capitaux. Nous allons voir que les effets des politiques cono-
miques ou des chocs exognes en rgime de change fixe diffrent
largement de ceux obtenus lorsque le taux de change est flexible.

La fonction de demande globale

En changes fixes, la condition de parit des taux d'intrt peut


tre rcrite : CP : i = i, + pr +AD, o pr et AD reprsentent respec-
tivement la prime de risque et les anticipations de dvaluation.
Comme en rgime de changes flexibles, les prix affectent le
march des biens et services via le taux de change rel. Le
108 INTRODUCTION lA MACROCONOMIE

mcanisme l'uvre est cependant diffrent en raison de la


fixit du taux de change nominal.
Sur le march des biens et services, un accroissement du
niveau gnral des prix accrot le taux de change rel, ce qui dt-
riore le solde de la balance commerciale et rduit la demande (IS
se dplace vers la gauche).
Sur le march de la monnaie, l'accroissement des prix rduit
l'offre de monnaie (LM se dplace vers le haut), et la rduction de
la demande de biens et services rduit la demande de monnaie.
Il n'y a aucune raison pour que la nouvelle intersection entre
IS' et LM' corresponde un taux d'intrt qui respecte la
contrainte d'intgration financire CP (cf. graphique Sa).
Supposons que le taux d'intrt soit infrieur celui dict par
CP (dans la situation inverse, le raisonnement est symtrique), ce
qui fait fuir les capitaux. La monnaie tend se dprcier mais,
en rgime de taux de change fixe, une dprciation ne peut
cependant se produire : les autorits montaires doivent inter-
venir pour soutenir le cours de la monnaie et acqurir de la
monnaie intrieure contre des rserves de change, ce qui rduit
la masse montaire (LM se dplace vers le haut) jusqu' ce que
le taux d'intrt intrieur respecte la condition d'intgration
financire.
Finalement, la demande agrge est bien toujours une fonc-
tion dcroissante des prix (cf. graphique Sb) mais le mcanisme
l'origine de cette relation diffre de ceux qui prvalent en
conomie ferme ou en conomie ouverte avec changes flexibles.

Optimisme des agents et activit conomique


Si les agents deviennent plus pessimistes, (diminution de at ou
at), la demande agrge est rduite (ISse dplace vers la gauche).
Le march de la monnaie n'est alors plus l'quilibre : au taux
d'intrt nominal dict par l'intgration financire, il existe un
excs d'offre de monnaie par rapport la demande de monnaie,
ce qui tire le taux d'intrt vers le bas et fait fuir les capitaux
vers l'tranger. Pour soutenir le cours de la monnaie intrieure,
les autorits montaires doivent intervenir, et l'offre de monnaie
se trouve rduite (LM se dplace vers la gauche). Tout choc de
demande dfavorable dclenche une raction des autorits
montaires, de sorte que la monnaie intrieure conserve son
cours.
l' (QUI LI BRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 109

Graphique 5. De l'quilibre 15-LM-CP la courbe de demande agrge

a. Effet d'une augmentation de prix b. Effet d' une augmentation de prix


sur l'quilibre IS-LM-CP sur la demande agrge
p
IS LM" LM'
Yd

if- AD i-----,;;.16,c-~:._

+pr ______ ..''' _____ _


'
'''
.....__Y1
Y2

Graphique 6. Pessimisme des agents, 15-LM-CP et demande globale

a. quilibre /S-LM-CP b. Demande globale

p
/S LM'

"~, : : Yd'
.....__
Y2 Y7

Les effets joints du choc dfavorable et de l'intervention aboutis-


sent finalement un revenu intrieur plus faible (cf graphique 6a).
Dans le plan (Y, P), la demande globale se dplace donc vers la
gauche (cf graphique 6b).
Dans le cadre du modle Mundell-Fleming (l'offre s'ajuste parfai-
tement la demande), un choc de demande dfavorable rduit
l'activit conomique et accrot le chmage (cf graphique 7b du
chapitre u). Comme le taux de change rel n'a pas vari, mais que
l'activit est rduite, ce qui dcourage les importations, le solde de
la balance commerciale s'amliore.
Si les salaires nominaux sont rigides (cas keynsien), l'excs
d'offre agrge engendre une diminution du niveau gnral des
prix qui n'est pas rpercute sur les salaires nominaux. L'activit
110 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

conomique est alors freine et le c hmage augmente


(cf. graphique 7c du chapitre II). Suite la baisse des prix (le taux
de change rel diminue alors) et au ralentissement de l'activit
conomique, le solde de la balance commerciale s'amliore.
En revanche, si les salaires nominaux sont flexibles (cas clas-
sique), ils suivent la baisse des prix, et l'activit conomique
retrouve son niveau initial (cf graphique ?a du chapitre II) . La
baisse des prix permet une amlioration du solde de la balance
commerciale.

Des politiques budgtaires efficaces

Comme en conomie ferme, une augmentation des dpenses


publiques accrot la demande de biens et services (IS se dplace
vers la droite). Sur le march de la monnaie, la demande est alors
en excs, le taux d'intrt est tir vers le haut, ce qui dclenche
une entre de capitaux. La monnaie tend s'apprcier et les auto-
rits montaires doivent vendre de la monnaie intrieure contre
des rserves de change. L'offre de monnaie s'accrot alors (LM se
dplace vers le bas).
Les deux interventions, politique budgtaire et soutien de la
monnaie par la banque centrale, aboutissent un revenu int-
rieur plus lev (cf graphique ?a) et pourraient donc permettre de
ragir des chocs de demande dfavorables. Dans le plan (Y, P), la
demande globale s'est dplace vers la droite (cf. graphique 7b).
Les effets d'une expansion budgtaire sur le chmage, l'acti-
vit conomique, les prix et le solde de la balance commerciale
sont symtriques ceux dcrits dans le cas d'un choc dfavo-
rable affectant IS : dans le modle Mundeli-Fleming, l'activit
conomique est relance (cf graphique 4b du chapitre 1) ; si les
salaires nominaux sont rigides, les prix augmentent, ce qui
m odre la relance d e l'con omie, le ch mage est rduit
(cf graphique 4c du chapitre 1) ; si les salaires nominaux sont
flexibles, tout l'effet passe dans les prix, l'activit conomique
reste inchange (cf. graphique 4a du chapitre 1). Dans tous les cas,
la balance commerciale est dtriore.

Une politique montaire inefficace

En conomie ouverte, si les autorits montaires choisissent


d'accrotre l'offre de monnaie, par exemple en achetant des actifs
l' (QUI LI BRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUV ERTE 111

Graphique 7. Effet d' une augmentation des dpenses publiques


ou d'une rduction d'impts sur l'quilibre 15-LM-CP
et sur la demande globale

a. quilibre /S-LM-CP b. Demande globale

p
IS' LM

.. ~.. : : Yd
Y! Y2
----+

financiers aux agents, la courbe LM se dplace vers le bas, ce qui


tire les taux d'intrt vers le bas et fait fuir les capitaux. Les auto-
rits doivent alors acheter de la monnaie intrieure, ce qui rduit
l'offre de monnaie jusqu' ce que LM retrouve sa position
initiale. En fait, lorsque les changes sont fixes, la masse mon-
taire chappe au contrle des autorits montaires, et la politique
montaire est inefficace (cf graphique Sa). Dans le plan (Y, P), la
demande globale reste inchange (cf. graphique Sb).
Quel que soit le type d'offre considr, l'activit conomique
comme les prix et le solde de la balance commerciale restent
inchangs.

Quel policy mix ?

Les autorits peuvent aussi choisir de pratiquer un policy mix


(combinaison de politiques montaire et budgtaire) particulier
qui consiste accrotre conjointement les dpenses publiques et
la masse montaire (cf. graphiques 7a et 7b).
La seule diffrence avec l'expansion budgtaire prsente plus
haut est que l'origine de l'augmentation de la masse montaire
diffre. Dans le cas d'une politique budgtaire pratique seule,
le taux de change tend s'apprcier mais, comme les autorits
montaires s'engagent pratiquer un taux de change fixe, elles
doivent vendre de la monnaie intrieure et acqurir des rserves
de change, ce qui accrot bien l'offre de monn aie et stabilise le
112 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOM I E

Graphique 8. Effet d' une expansion montaire sur l'quilibre 15-LM-CP


et la demande globale

a. quilibre IS-LM-CP b. Demande glo bale

LM

iE- AD l---*--7f"--
+pr

chan ge. Dans le cas du policy mix, l'accroissement de l'offre de


monnaie provient de l'achat par les autorits montaires d'actifs
finan ciers auprs des banques. Une telle politique n'est bien sr
envisageable que si les politiques montaires et budgtaires sont
conduites par le gouvernement ou si- dans le cas o la banque
centrale est indp endante - les d iffren tes auto rits se
coordonnent.

La dvaluation, un instrument de politique conomique


en rgime de changes fixes

Si les autorits montaires dddent de rduire le niveau auquel


est fix le taux de change nominal, la monnaie est alors dva-
lue (on tudie le cas d'une dvaluation non an ticipe par les
agents). Pour engendrer une d valuation , la ba nque centrale
s'engage acheter des devises trangres un prix suprieur
celui du march en chan ge de m onnaie intrieure, ce qui accrot
l'offre d e monn aie (dplacem ent de LM vers le bas). Sur le
march des biens et services, suite la diminution du taux de
change, le solde d e la balan ce commerciale s'amliore et la
demande s'accrot (IS se dplace vers la droite). La demande de
m onnaie augmente alors (mais l'quilibre IS-LM-CP n 'est pas
forcment assur et les autorits montaires interviendront si
ncessaire pour maintenir le cours de la monnaie). Finalement,
une dvaluation, qui s'accompagn e d'un accroissement de la
l' (QUI LI BRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 113

Tableau 5. Effets des chocs et des politiques conomiques


sur l'quilibre macroconomique en fonction du rgime
de taux de change

Modle de Salaires Salaires


Mundeii-Fieming nominaux nominaux
rigides flexibles

Change flexible

y p 5BC u y p 5BC u y p 5BC u

Choc
favorable
sur 15

Relance
budgtaire

Expansion
montaire ++ ++ + + + ++

Change fixe

Choc
dfavorable
sur 15 + ++ ++ + ++

Relance
budgtaire* ++ + + ++

Expansion
montaire

Policy mix ++ + + ++

Dvaluation ++ ++ + + + ++

On rappelle que, en rgime de change fixe, une relance budgtaire implique une inter-
vention des autorits montaires pour maintenir le cours de la monnaie intrieure.

masse montaire, permet de relancer l'conomie (cf. graphique ?a).


La demande globale s'est dplace vers la droite (cf. graphique 7b)
dans le plan (Y, P).
Dans le cadre du modle Mundell-Fleming (les quantits
produites s'adaptent parfaitement aux quantits demandes pour
un niveau gnral des prix donn), l'activit conomique est
relance (cf graphique 4b du chapitre 1) et le solde de la balance
commerciale est am lior. C'est pour cette raison que les
114 INTRODUCTIO N LA MACRO~CONOMIE

autorits chinoises favorisent un yuan faible, tandis que les auto-


rits amricaines auraient prfr un dollar faible face au yuan
(c'est--dire un yuan plus fort).
L'effet de la dvaluation du taux de change nominal est ruin
par l'augmentation des prix, partiellement si les salaires nomi-
naux sont rigides (cas keynsien, cf graphique 4c du chapitre 1) et
totalement s'ils sont flexibles (cas classique, cf graphique 4a du
ch apitre 1). Le solde de la balance commerciale est donc amlior
dans le cas keynsien et inchang dans le cas classique.

La monnaie unique en Europe

En adoptant une monnaie unique, les pays europens ont


choisi un systme de change un peu original : les taux de change
entre les monnaies des diffrents pays qui composent l'Union
sont fixs des taux irrmdiablement fixes (un rgime plus
extrme que le rgime de change fixe puisqu'il carte toute possi-
bilit d e dvaluation) ; dans le mme temps, la monnaie
commune est en taux de change flexible vis--vis de l'ensemble
des monnaies extrieures la zone euro.
Quel est l'intrt d'un tel systme de change? Il limine les
transactions de change et permet au fonctionnement de
l'conomie de gagner en efficacit. En effet, les entreprises n'ont
plus besoin, lors de leurs changes avec les pays de la zone euro,
de prendre en compte les fluctuations potentielles du taux de
change et, surtout, les prix deviennent plus facilement compa-
rables entre les pays de la zone, ce qui intensifie la concurrence et
devrait permettre aux consommateurs de bnficier de prix plus
bas. Cependant, un tel systme implique un partage particulier
des attributions concernant les politiques montaires et budg-
taires entre les diffrents niveaux (europen ou des pays) de dci-
sion et, comme nous l'avons vu dans ce chapitre, affecte
l'efficacit des politiques budgtaires et montaires.

Le triangle de Munde/1

Mundell (Nobel 1999) a propos le principe du triangle


d'incompatibilit (ou triangle de Mundell), selon lequel une
conomie nationale ne peut pas simultanment avoir : 1) un
rgime de change fixe ; 2) une politique montaire autonome ;
l 'tQUILIBRE MACROtCONOMIQUE EN tCONOMIE OUVERTE 115

Graphique 9. le triangle d'incompatibilit


Stabilit du taux
de change

Chine Hong Kong


Suisseentre20 11 et2015

Parfaite mobilit
Politique montaire des capitaux
autonome
ltats-Unis
Zone euro
japon
Suisse en temps nanna/

3) une parfaite libert de circulation des capitaux. Seuls deux de


ces trois objectifs sont atteignables simultanment. Nous avons
montr (cf tableau 4) que, avec un rgime de change fixe et des
capitaux parfaitement mobiles, la politique montaire est ineffi-
cace. Son efficacit est cependant restaure si les capitaux ne sont
pas mobiles et que la variation du taux d'intrt n'occasionne
alors aucun mouvement de capitaux. Enfin, nous avons aussi
montr (cf tableau 4) que la politique montaire est efficace en
cas de parfaite mobilit des capitaux et de rgime de change
flexible.
Le graphique 9 situe les pays d ans ce triangle. La Chine exerce
un contrle sur le yuan. Les capitaux ne sont pas parfaitement
mobiles, ce qui lui permet d'avoir une politique montaire ind-
pendante. Les pays de la zone euro on t, quant eux, renonc
men er des politiques montaires indpendantes les unes des
autres. Toutefois, la zone euro dans son ensemble est en change
flexible vis--vis du reste du monde et peut mener une politique
montaire indpendante tout en tant ouverte aux capitaux
trangers. Comme la zone euro, le Canada ou le Royaume-Uni,
les tats-Unis et le Japon ont un rgime de change flexible. La
Suisse a, pendant plus de trois ans, maintenu un contrle sur le
116 INTRODUCTION lA MACROCONOMIE

franc suisse, tout en autorisant la libert des capitaux, ce qui limi-


tait de fait les marges de manuvre de la politique montaire. Ce
cas particulier sera tudi au cours du chapitre.

Le policy mix dans la zone euro

Comme l'euro est en change flexible vis--vis des autres


monnaies, la politique montaire est efficace et les interventions
de la Banque centrale europenne, qui a la charge de la poli-
tique montaire, sont donc susceptibles d'affecter le niveau
d'activit des conomies. Cependant, puisqu'il n'y a qu'une seule
monnaie, la politique montaire est ncessairement la mme
pour tous les pays de l'Union. Si tous les pays subissent un choc
identique, tous souhaiteront la mme politique montaire et la
monnaie unique ne prsente pas d'inconvnient majeur. Que se
passe-t-il cependant si certains pays subissent des chocs ngatifs
(qui requirent une politique montaire expansionniste) alors
que d'autres subissent des chocs positifs (qui requirent plutt
une politique montaire prudente) ?
Dans le cas de figure o les chocs sont asymtriques, ce n'est
pas la politique montaire qui doit tre employe mais plutt
la politique budgtaire, charge pour chaque pays d'adopter la
politique budgtaire qui correspond sa situation. Le fait que
chaque pays soit en taux de change fixe par rapport aux autres
membres de l'Union rtablit une certaine efficacit de la poli-
tique budgtaire. La difficult vient du fait que les pays membres
de l'Union ont aussi adopt le pacte de stabilit et de croissance qui
limite la possibilit d'avoir des dficits budgtaires trop impor-
tants (cela afin d'viter que des dcisions politiques d'un pays de
la zone n'affectent toute la zone via le taux de change de l'euro).
Un dernier mcanisme d'ajustement peut cependant
permettre de compenser les chocs asymtriques : si les pays sont
suffisamment intgrs conomiquement, la mobilit des facteurs
de production, c'est--dire la mobilit du capital et celle du travail
l'intrieur de la zone, devrait permettre d'absorber les chocs
asymtriques. Les capitaux et la main-d'uvre se dplaceraient
alors des rgions subissant des chocs ngatifs vers celles subissant
des chocs positifs.
L'ouvrage de Bnassy-Qur et Cur [2014] expose le rle et
la stratgie de la Banque centrale europenne en matire de
l' (QUI LIBRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 117

politique montaire, les politiques budgtaires et les instruments


de coordination de ces politiques au sein de la zone euro.

Les dsquilibres en zone euro et la crise de 201 0

Pourquoi certains pays de la zone euro ont-ils tant souffert


d'une crise financire dont le dclencheur se trouvait sur les
marchs amricains ?
L'adoption de l'euro a favoris les mouvements de capitaux
entre les pays de la zone et, de 1999 2008, les capitaux du cur
de la zone euro (l'Allemagne, la France et les Pays-Bas notam-
ment) ont investi massivement dans les pays de la priphrie (en
Irlande, au Portugal, en Espagn e et en Grce) [Baldwin et al.,
2015]. Ces flux de capitaux taient la contrepartie des dficits des
balances courantes dans les pays rcipiendaires. Au moment de la
crise, ces flux de capitaux se sont taris, rendant plus difficile et
plus cher l'accs au crdit pour les tats et pour les particuliers
des pays concerns. L'activit conomique s'est contracte et le
risque de contagion dans les autres pays de la zone a renchri le
cot de l'emprunt, transformant la crise de la dette prive en
une crise de la dette publique (pour la Grce et le Portugal, la
dette publique tait le problme initial). Le fait d'appartenir la
zone euro a accentu le problme : d'une part parce que, avant
la crise, ces pays auraient eu du mal soutenir des dficits de
balance courante d'une telle ampleur, d'autre part parce que, une
fois la crise ouverte, il ne leur tait pas possible de dvaluer leur
monnaie pour redonner rapidement de la comptitivit leur
conomie. Enfin, l'incertitude quant l'attitude de la BCE vis--
vis des dettes publiques a aussi contribu renchrir le cot de
l'emprunt. D'autres caractristiques (le rle central du finance-
ment bancaire, les rigidits sur les marchs) ont contribu la
gravit de la crise dans les pays europens, mais ces caractris-
tiques ne sont pas propres l'appartenance la zone euro.

tude de cas : le taux plancher en Suisse entre 2011 et 2015

Entre le 6 septembre 2011 et le 15 janvier 2015, la banque


centrale suisse (BNS pour Banque nationale suisse) a instaur un
taux plancher entre le franc suisse et l'euro. Ainsi, 1 euro ne
pouvait valoir moins que 1,20 franc suisse. Quelles sont les raisons
118 INT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

qui ont pouss la BNS imposer un taux de change fixe ?


Comment cela a-t-il pu fonctionner dans des conditions correspon-
dant au triangle d'incompatibilit de Mundell ? Enfin, pourquoi et
comment le taux plancher a-t-il finalement t abandonn?
l't 2011, pendant la crise de la zone euro, le franc suisse,
considr par les investisseurs comme une valeur refuge, avait
plusieurs reprises atteint la parit avec l'euro. Cela pesait sur les
exportations suisses et mettait la croissance en pril. l'approche
de l'automne, les entreprises devaient dcider de leurs investis-
sements pour 2012 compte tenu de leur anticipation du taux de
change. Cette anticipation allait tre ralise sur la base de
l'observation d'un franc suisse fort et trs fluctuant. Aussi la BNS
a-t-elle dcid d'liminer les variations la hausse du franc suisse
et de l'empcher de devenir trop fort. Elle s'est donc engage
intervenir en ach etant des euros contre des francs ds que le taux
de change l'incertain du franc suisse descendrait en dessous
de 1,20. Comment ce niveau a-t-il t dcid? Un plancher
1,10 n'aurait sans doute pas beaucoup aid l'conomie suisse,
car le franc serait alors rest relativement fort, et un plancher
1,30 aurait peut-tre t trop difficile dfendre. Comme il
s'agissait d'un taux plancher, la BNS laissait toute latitude une
remonte de l'euro 1,30 franc ou plus.
La BNS s'est donc engage acheter des euros en quantit
potentiellement illimite. Cela a fait changer la Suisse de ct
du triangle de Mundell (cf graphique 9). Cette politique a t
conteste, certains y voyant un risque inflationniste (du fait de la
cration de francs suisses pour acheter des euros), d'autres crai-
gnant que les achats de titres libells en euros ne soient pas des
investissements trs srs.
En janvier 2015, la BNS a estim que l'euro n'tait plus sous
pression et que le franc suisse n 'tait plus survalu sur le march
des changes. Elle a donc retir le cours plancher " S'en est
suivie une envole du cours qui s'est finalement stabilis aux
alentours de 1,10 l't 2015, ce dont les exportations suisses
ont souffert. Le graphique 10 reprsente l'volution du taux de
change effectif nominal et du taux de change effectif rel de la
Suisse. L'instauration en 2011 du taux plancher a permis de faire
redescendre le taux de change rel un niveau proche de celui
qu'il avait avant l'envole du franc suisse. L'abandon du plan-
cher en janvier 2015 s'est traduit par une perte de comptitivit
l' (QUI LI BRE MACROCONOMIQUE EN ~CONOMIE OUVERTE 119

Graphique 1 O. Indice de taux de change effectif nominal et rel


en Suisse autour de la priode d'instauration d'un cours plancher
pour le franc suisse vis--vis de l'euro
135
130 1,05
~"ri'\
125
1
.,
l"' ''=:..v'.;':;..."~
1,10
120 1,15
115
pj i 1,20
, " - - ... _.J
110
!J / ---.._ .....
,_... - 'V
,-, ..,._ ,..,. 1,25
jj \-
A ~y~
105 1,30
100 :~ "'""--- ~ 1,35
j"{ ---Taux de change effectif nominal (2010 = 100)
95 1,40

90
'! - Taux de change effectif rel (2010 = 1 00)
1,45
1 - - Taux de change nominal FS/euro (chelle inverse)
"

Source : Banque des rglements internationaux.

(hausse du taux de ch ange rel), mais d'ampleur sans commune


mesure avec l'pisode du dbut 2011.

Conclusion

Tout au long de ce chapitre, nous avons fait l'hypothse d'une


petite conomie ouverte. L'analyse est-elle fondamentalement
diffrente si l'conomie est suffisamment grande pour que les
taux d'intrt mondiaux et l'activit mondiale soient influencs
par les politiques conomiques intrieures ? Cette situation est
celle des tats-Unis et de la zone euro. L'efficacit des poli-
tiques montaires et budgtaires est alors modifie. Mme en
taux de change flexible, comme c'est le cas pour le dollar et
l'euro, les politiques budgtaires peuvent permettre de relancer
l'activit conomique du fait du poids de ces conomies dans le
monde. Cela fournit un argument en faveur de la coordination
des politiques budgtaires dans la zone euro, voire de la mise en
place d'un budget au niveau europen.
Rfrences bibliographiques

Cette liste d e r frences bibliographiques repre nd l'ensemble des


ouvrages et articles cits dans ce livre. Y sont ajouts les livres de macro-
conomie e n franais a u xqu els le lect e ur intress par la macroconomie
peut se rf re r; ces r frences sont prcdes d'un astrisque.

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Table des matires

Introduction 3
Qu'est-ce que la macroconomie? 3
La croissance, 4
L'inflation et le chmage, 6
La mthode et les dbats des macroconomistes 7
Le contenu de ce livre 9

Le modle offre globale-demande globale :


un premier aperu
La fonction d'offre globale 13
La fonction d'offre classique, 1 3
La fonction d'offre keynsienne extrme, 14
La fonction d'offre keynsienne, 15
Forme de la fonction d'offre court terme
et politique conomique, 15
La fonction d'offre : une question d'horizon
et de conjoncture, 16
La fonction de demande globale 18
Une analyse simple des chocs dans le modle
offre globale-demande globale 18
tudes de cas 20
La crise financire de 2008-2009, 20
Le premier choc ptrolier, 20
Les variations du prix du ptrole depuis 2007, 21
126 I NT RO DUCTIO N LA MAC RO ~ CONOMIE

Il La demande de biens en conomie ferme :


le modle IS-LM
Le modle IS-LM 24
l'quilibre sur le march des biens et services
prix donns, 24
l'quilibre sur le march de la monnaie, 30
l'quilibre /S-LM : la dtermination de la demande
agrge, 32
Chocs de demande et politiques conomiques 34
Austrit budgtaire ou choc de demande dfavorable, 34
Politique budgtaire expansionniste, rduction des impts
ou choc de demande favorable, 37
0 Encadr : Calcul du multiplicateur des dpenses publiques :
le cas d'un modle linaire, 38
la politique budgtaire en pratique, 39
Effet d'une expansion montaire, 41
0 Encadr : Coi!Stmction d'rm petit m odle.
tape 1 : la demande globale, 42
tudes de cas 42
la hausse des taux d'intrt nominaux la suite
de la runification allemande, 42
le stimulus budgtaire en 2009-201 0
dans les pays avancs, 43
les politiques d'austrit budgtaire partir de 2011, 44
Retour sur les dbats entre courants
de la macroconomie de 1945 1975 45
la macroconomie keynsienne : de l'ge d'or
la remise en question, 45
la remise en cause par les conomistes montaristes
de l'efficacit des politiques budgtaires et de l'utilit
des politiques montaires, 46

Ill L'offre agrge


Offre de travail et demande de travail 49
Maximisation du profit et demande de travail
des entreprises, 50
o Encadr : Fonction de production et productivits marginales, 51
l'offre de travail des mnages, 53
0 Encadr : La demande de travail, 54
Fonctionnement du march du travail, emploi
et offre de biens 56
la flexibilit parfaite des salaires, 57
la rigidit des salaires, 59
TABLE DES MATitRES 127

o Encadr : Rigidit nominale et rigidit relle des salaires, 60


o Encadr : folln Maynard Keynes, Winston Cllurclli/1
et les rigidits du salaire nominal, 62
Un bref rsum des dterminants de l'offre globale,
de l'emploi et du chmage, 62
Effet d'un choc d'offre sur l'quilibre
macroconomique 63
tude de cas : les baisses d'impts
de George W. Bush 64
0 Encadr : Constmction d'un petit modle.
tape 2 : l'offre globale salaires nomirwux rigides.
tape 3 : L'quilibre offre globale-demande globale, 66
Conclusion 66
0 Encadr : Les modles macroconomtriques, 68

IV La dynamique de court terme des conomies :


Inflation et chmage
La modlisation de la dynamique de court terme 71
Les anticipations et les erreurs d'anticipation, 72
L'volution des salaires : la cou rbe de Ph illips, 73
Les enchanements dynamiques, 74
0 Encadr : Taux de chmage naturel, NA WRU, NAJRU, 75
o Encadr : ConstnJCtion d'un petit modle conomique.
tape 4 : le modle dynamique, 76
Inflation et chmage avec anticipations adaptatives 76
0 Encadr : La loi d'Okun, 7 7
Inflation et chmage lorsque les anticipations
sont rationnelles 82
L'inefficacit des politiques anticipes, 82
La Banque centrale doit-el le tre indpendante ? 83
tudes de cas 84
L'aplatissement de la courbe de Phillips, 84
Persistance du chmage en France
depuis les annes 1970, 84
La rgle de Taylor, ou comment les banques centrales
dcident la politique montai re, 87
Conclusion : les dbats entre nouveaux classiques
et nouveaux keynsiens 88
Les propositions d'inefficacit d e la politique conomique
des conomistes nouveaux classiques, 88
Les conomistes nouveaux keynsiens, 90
La rsurgence keynsienne, 91
128 I NTRODUCTIO N LA MACRO~CONOM I E

V L'quilibre macroconomique
en conomie ouverte
Taux de change nominal et taux de change rel 94
Demande globale en conomie ouverte 96
L'quilibre sur le march des biens et services (/5)
en conomie ouverte, 96
0 Encadr : Parits des pouvoirs d'acl1at absolue et relative, 97
quilibre sur le march de la monnaie (LM), 100
La condition de parit des taux d'intrt, 101
Contrainte de parit des taux d' intrt et quilibre
simultan sur les marchs des biens et services
et de la monnaie, 102
Politique conomique en rgime de changes flexibles 102
La fonction de demande globale, 103
Optimisme des agents et activit conomique, 104
Des politiques budgtaires inefficaces, 1 05
Une politique montaire efficace, 105
Politique conomique en rgime de changes fixes 107
La fonction de demande globale, 107
Optimisme des agents et activ it conomique, 108
Des politiques budgtaires efficaces, 110
Une politique montaire inefficace, 11 0
Quel policy mix ? 111
La dvaluation, un instrument de politique conomique
en rgime de changes fixes, 112
La monnaie unique en Europe 114
Le triangle de Mundell, 114
Le policy mix dans la zone euro, 11 6
Les dsquilibres en zone euro et la crise de 2010, 11 7
tude de cas : le taux plancher en Suisse
entre 2011 et 2015 117
Conclusion 119

Rfrences bibliographiques 121

Composition Facompo, lisieux (Calvados).


Achev d'imprimer e n janvier 2017 sur les presses de
La Nouvelle Imprimerie Laballery Clamecy (Nivre).
Dpt lgal : janvier 201 7
N de dossier : 00/00
Imprim en Fronce
Anne Epaulard et Aude Pommeret

Introduction la macroconomie (nouvelle dition)

Cette introduction l'analyse du fonctionne-


Anne Epaulard est
ment des conomies et des politiques macro-
professeure d'conomie
conomiques couvre le programme des deux
l'universit Paris-
premires annes de macroconomie ensei-
Dauphine et conseillre
gnes l'universit, dans les lEP et dans les
scientifique France
classes prparatoires.
Stratgie. Sa recherche
Elle accompagne le lecteur dans l'explora-
en conomie porte
tion des principaux rouages des conomies
principalement sur les
dveloppes, expose les modles thoriques
effets macroconomiques
les plus utiliss( 15-LM "" Mundeii-Fieming "
des politiques conomiques.
courbe de Phillips, modle offre-demande)
et les illustre par des exemples rcents (quel Aude Pommeret est
est l'impact sur l'activit et le chmage des professeure d'conomie
plans d'austrit budgtaire? la politique l'universit de Savoie
montaire a-t-elle perdu de son efficacit?) et actuellement en poste
ou plus anciens (le choc ptrolier de 1973, la City University of Hong
la rvaluation de la livre sterling en 1914). Kong. Sa recherche porte
L'accent est mis sur la possibilit pour les sur la macroconomie
politiques conomiques (politiques budg- et l'conomie de
taires, politiques montaires, choix du rgime l'environnement.
de change, dvaluation de la monnaie) de
maintenir l'conomie loin des dsquilibres
majeurs et d 'viter la fois le chmage et
DANS LA 11I1E
l'inflation. L'ouvrage s'intresse enfin aux
COLLECTION - - - -
limites de ces modles macroconomiques La comptabilit nationale
et aux voies explores pour les dpasser. conomie de l'euro
L'conomie europenne 2017
L'conomie franaise 2017
L'conomie mondiale 2017
La monnaie et ses mcanismes.

ColleeLion
R E P R E S
Plus de 600 synthses jour, rdiges par des
spcialistes reconnus en conomie, sociologie, ISBN 978-2 7071-9396 4
histoire, gestion, etc.

Pour en savoir pl us : 11 1111111111111111111111


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