Bulletin Archéologique Sousse

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SOCIT ARCHOLOGIQUE DE SOUSSE

STATUTS

ARTICLE 1er Il est institu Sousse, sous le nom de Socit


Archologique de Sousse, une association dont le but est de grouper
toutes les personnes qui s'intressent l'histoire du pays, ses
ruines et au dveloppement de la rgion du Sahel. Cette Socit
aura pour objectif de faire mieux connatre la rgion et d'y attirer
des visiteurs en amnageant et en protgeant les ruines qui con-
tribuent si puissamment son pittoresque.
Dans ce but la Socit agira par les moyens suivants :
1- Fonder une Bibliothque;
2- S'intresser au dveloppement du Muse municipal par le
concours matriel et moral de ses membres, favoriser de toutes
ses ressources l'entretien et la conservation des monuments histo-
riques, antiques ou arabes, de la Rgion de Sousse et signaler
l'administration comptente tous les actes de vandalisme qui pour-
raient tre ports sa connaissance, grce la surveillance vigilante
de ses membres ;
3- Publier un Bulletin o il sera brivement rendu compte des
sances, de toutes les dcouvertes faites dans la rgion et des vne-
ments l'intressant au point de vue archologique ;
4- Affecter tous les fonds non employs au Bulletin ou la
correspondance, l'acquisition d'objets pour le Muse, ou autant
que possible l'excution d'une fouille poursuivie d'une manire
continue dans un des grands monuments de l'antique Hadrumte
ou de ses environs ;
5- Organiser :
4

(a) Des runions au Muse ;


(b) Des confrences relatives un sujet archologique;
(c) Des promenades Sousse et dans les environs immdiats de
la ville chaque fois qu'une tude ou une trouvaille intressante y
sera faite;
(d) Des visites aux fouilles effectues dans la rgion;
(e) Des excursions aux ruines si nombreuses et si intressantes
de toute la contre;
6- Echanger le Bulletin avec celui des autres Socits africaines
ou archologiques.
ART. 2. La Socit comprend :
1- Des membres d'honneur;
2- Des membres actifs. Ceux des membres actifs qui auront
particip la formation de la Socit prendront le titre de membres
fondateurs et mention en sera faite sur la liste des socitaires.
3- Des membres correspondants.
Tous ces membres peuvent assister aux assembles gnrales.
En outre, dans certaines runions ou excursions, les membres
d'honneur ou actifs seront autoriss se faire accompagner d'une
ou plusieurs personnes de leur famille.
ART. 3. Seront admis comme membres actifs les personnes
habitant Sousse ou qui dsireraient jouir de tous les avantages
confrs la Socit, prsentes par deux membres et agres par
le Comit.
Tout membre correspondant qui vient habiter Sousse devient
membre actif pour l'anne suivante.
Les membres actifs paient un droit d'entre de 5 francs et une
cotisation semestrielle de 6 francs, exigible d'avance.
Les membres actifs pourront user de la bibliothque dans des
conditions qui seront fixes par un rglement spcial et seront
autoriss, chaque fois qu'ils le demanderont Monsieur le Conser-
vateur, visiter le Muse, en dehors des heures o il est ouvert au
public; ils auront l'entre libre des fouilles ou chantiers d'explora-
tion que la Socit pourrait ouvrir.
Pourront tre membres correspondants les personnes n'habitant
pas Sousse qui dsireront recevoir le Bulletin et tre en communi-
cation avec la Socit.
Elles devront tre agres par le Comit et auront payer une
cotisation de 6 francs. Tout membre actif qui vient quitter Sousse
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reste actif ou devient correspondant son choix. Tout membre


dmissionnaire est tenu au paiement de l'anne courante.
Tout refus de paiement de la cotisation pendant un an entranera
la radiation du socitaire.
Les membres actifs assistent, avec voix dlibrative, toutes les
assembles gnrales de la Socit.
ART. 4. L'assemble gnrale des membres actifs choisit dans
son sein et nomme, la majorit des suffrages exprims, un bureau
compos comme suit :
1. un Prsident,
2. deux Vice-prsidents,
3. un Secrtaire Gnral,
4 . un Trsorier,
5. un Bibliothcaire.
Le Prsident a la Direction des Travaux de la Socit: il se met en
relation avec les Socits savantes, reoit les ouvrages imprims ou
manuscrits adresss la Socit et les demandes d'admission.
Il runit le Bureau et le Comit chaque fois qu'il le juge utile.
Il maintient l'ordre dans les assembles; il a voix prpond-
rante en cas de partage dans les dlibrations.
Il signe la correspondance et autorise les dpenses dans le ca
d'urgence, sauf en rendre compte au bureau dans la plus prochaine
sance.
Il est membre de toutes les Commissions. Il porte la parole en
toute occasion au nom de la Socit.
Les Vice-prsidents remplacent le Prsident absent, par anciennet
d'ge.
Le Secrtaire Gnral rdige les procs-verbaux des sances et
les signe avec le Prsident. Il peut signer la correspondance par
dlgation du Prsident. Il soumet au visa du Prsident les pices
des dpenses. Il tient les registres relatifs aux travaux de la Socit en
la forme arrte par le bureau et prsente chaque anne, en
assemble publique, le compte-rendu des Travaux de la Socit. Il
prsente chaque anne la Socit un tat des ouvrages, objets
mobiliers, remis la Socit. Il peut s'adjoindre un ou plusieurs
secrtaires pris dans le Comit et agrs par ce dernier.
Le Bibliothcaire est dtenteur des livres qui lui sont remis par le
Secrtaire Gnral. Il gre la bibliothque, conformment un
rglement adopt et sign par le Bureau.
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Le Trsorier est charg du recouvrement des cotisations et du


paiement des dpenses de la Socit; il ne peut effectuer aucune
dpense sans le visa du Prsident.
Il tient un registre des recettes et des dpenses et rend des
comptes tous les ans, et plus souvent, si le cas l'exige, au bureau
qui les vrifie et les arrte.
Les membres du bureau seront lus chaque anne, mais peuvent
tre rlus. En cas de dmission ou de dpart de l'un d'eux, ses
collgues pourvoiront son remplacement jusqu' la prochaine
lection.
Le Bureau a la gestion de toutes les affaires intrieures de la
Socit. Il ordonne les dpenses, rgle les dpenses et les recettes,
reoit et arrte le compte du Trsorier.
Il a la haute surveillance des archives, de la bibliothque et des
collections. Il nomme les membres du Comit d'tudes.
Le Bureau ne peut dlibrer si quatre membres au moins n'as-
sistent la sance.
ART. 5. Il est form un Comit d'Etudes compos des mem-
bres du bureau et d'autres socitaires choisis par ces derniers.
Le Comit d'Etudes rgle tout ce qui a trait aux publications,
collections, runions, excursions, confrences, fouilles, acquisi-
tions, recherches scientifiques, etc.
Toutes ses dcisions sont prises la majorit absolue des suf-
frages. En cas de partage, la voix du Prsident compte pour deux.
ART. 6. Tous les votes devront toujours, sur la demande
mme d'un seul des membres appels voter, avoir lieu au scrutin
secret.
La Socit se runit en assemble gnrale, pour l'lection du
bureau et la reddition des comptes, dans la premire quinzaine de
Janvier de chaque anne.
Elle tient annuellement une sance publique, dont elle dtermine
l'poque, et qui est destine au rsum des travaux excuts pendant
l'anne, la ncrologie des membres dcds, une lecture dsigne
par le Comit d'Etudes.
ART. 7. Sont Prsidents d'honneur de droit :
Monsieur le Rsident Gnral de France, Tunis,
Monsieur le Gnral, Commandant la Division d'occupation,
Monsieur le Directeur du Service des Antiquits Tunisiennes.
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Le Comit peut confrer, aprs dlibration, le titre de membre


d'honneur aux personnes qui, par leur situation minente, leur
grande notorit, leur influence, ou les services rendus, lui paraissent
mriter cette distinction.
Les membres d'honneur ne paient aucune cotisation, moins
qu'ils ne se fassent inscrire comme membres actifs ou correspon-
dants ; ils ont les mmes droits que les membres du Comit.
ART. 8. Toute personne qui versera une premire somme de
cent francs sera membre bienfaiteur.
Toute personne qui, en outre, versera cent autres francs sera
galement inscrite sur la liste des Bienfaiteurs de la Socit et dis-
pense de la cotisation habituelle.
Il en sera de mme de toute personne qui aura rendu des services
minents la Socit, en favorisant des recherches.
ART. 9. La Socit peut, au scrutin secret et la majorit des
voix, la moiti au moins des membres actifs prenant part au vote,
prononcer l'exclusion d'un membre pour indignit.
ART.10. En cas de dissolution de la Socit, sa bibliothque
et ses archives seront dposes la Municipalit de Sousse; les
fonds disponibles seront dposs au Crdit foncier et agricole
d'Algrie ou un autre tablissement de Crdits.
Si dans le dlai de cinq ans de la dissolution, une autre Socit
scientifique ou littraire se fonde Sousse, elle pourra se faire
remettre ces dpts dans le courant de la deuxime anne de son
existence et devra, dans ce cas, inscrire la Socit Archologique de
Sousse en tte de la liste de ses membres, comme bienfaiteur.
A dfaut de reconstitution, Sousse, d'une nouvelle Socit
scientifique ou littraire, la bibliothque, les collections, les archi-
ves et les fonds dposs seront acquis la commune de Sousse qui
devra les affecter ou les dposer au Muse Municipal, sous une
forme perptuant publiquement le nom de la Socit lgataire.
Sousse, le 17 Avril 1903.

Le Secrtaire Gnral, Le Prsident,


GOUVET Dr CARTON
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MRITE AGRICOLE
Chevaliers
M. GALLINI, avocat-dfenseur Sousse,
M. NESTLER, Secrtaire de la Chambre Mixte du Centre, Sousse.

NICHAN-IFTIKAR
Grand-Officier
M. ROBERT, vice-prsident, de la Municipalit de Sousse.
Commandeurs
M. BALZAN, conseiller municipal de Sousse,
M. PARIENTE, conseiller municipal de Sousse,
Officiers
M. DAUPHIN, Chef de Service la Cie du Port Sousse,
M. CHEVY, chef de section la Cie des Chemins de fer B.-G. Sousse.

DRAGON DE L'ANNAM
Officier
M. DE B RAY , capitaine adjudant-major au 4 e Rgiment de Tirailleurs
Algriens, Sousse.
Chevalier
M. VIOLLET, Lieutenant au 4e Rgiment de Tirailleurs Algriens, Sousse.
Mdaille d'Honneur en Bronze
M. C YTAUX, Rgisseur du Domaine de l'Enfida, pour acte de dvouement.

Le Secrtaire gnral,
Ct GIORGI.

Le 10 dcembre 1902, sur l'initiative de M. le Docteur Carton,


Mdecin-Major de 1re classe au 4me Rgiment de Tirailleurs,
Sousse, arriv tout rcemment de France, et de M. Gouvet, depuis
plusieurs annes conservateur du Muse Municipal, dix-neuf per-
sonnes se runirent, 5 heures du soir, dans une des salles de la
Municipalit, pour tenter la cration d'une Socit Archologique.
Ces personnes taient :
MM. ARGAUT, BALZAN, CHEYY, CARTON, DAUPHIN, DE DIANOUS, DEVALLOIS,
DUBOS, GHEZ, GOUVET, GRELLET, GRESSE, HABIB, LAMBERT, LEYNAUD,
NESTLER, PERRUT, PETIT, RECURT.
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Elles rsolurent de former une Socit dont le but tait, dit le


procs-verbal de cette runion, de grouper tous ceux qui, plus ou
moins directement, s'intressent l'histoire du pays, ses ruines
et au dveloppement de la rgion du Sahel.
M. le Docteur Carton qui, en sa qualit de militaire n'assistait
cette runion qu' titre consultatif, dveloppe le programme que
la future Socit aurait remplir. Puis, il est donn lecture des
statuts et dcid que les autorisations ncessaires seront
demandes. M. Gouvet, comme prsident, et M. Ghez, comme
secrtaire, forment un bureau provisoire.
C'est le 26 Dcembre 1902, que fut reu l'arrt ministriel, en
date du 19 dcembre 1902, autorisant la formation de la Socit.
Par une dpche en date du 7 fvrier 1903, le Ministre de la
Guerre autorise les militaires de tous grades faire partie de la
dite Socit.
Le 27 fvrier 1902, les 17 membres qui s'taient runis, une
premire fois, et auxquels d'autres adhrents s'taient joints, se
constiturent en assemble gnrale.

Assemble gnrale du 29 Fvrier 1903.


Etaient prsents :
MM. ARGAUT , B ALZAN , B ERTRAND , B ERRA, B ERTIN , DE B RAY , D r C ARTON ,
CHEVY, D EVALOIS, D EMEURE, DUBOS, DUHAR , GALTIER , GOUVET, GRELLET,
GIORGI, GAUDIOZ, Dr LAMBERT, ABB LEYNAUD, M ARINO, EL M ESTIRI,
M OREL, M ATTEI, M ICHAUD, ORDIONI, P ETIT, P IHAN, P ILLOT, RECURT,
ROLLET, RIETMANN, SIGNORETTY, SUSINI, TERRAS, VALLE, VlOLLET
ET ZURETTI.

Le Bureau provisoire fait immdiatement procder la nomi-


nation du Bureau dfinitif pour l'anne 1903, puis M. Gouvet cde
le fauteuil de la prsidence M. le Docteur Carton, qui, au nom
des membres prsents, adresse des remerciements au Bureau pro-
visoire, remercie la Municipalit de vouloir bien lui prter un local,
et prononce une allocution dans laquelle il expose le but et le
programme de la Socit.
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Extraits des procs-verbaux des runions.


27 Fvrier 1903. Il est donn lecture d'une lettre de M. S. Reinach,
rpondant une-demande de M. le Prsident de la Socit relativement aux
papiers de Daux, et en particulier ceux d'entre eux ayant trait aux relevs et
aux fouilles que le clbre ingnieur a faits Sousse.
Tissot avait, crit M. Reinach, de son vivant, remis les papiers de Daux
Hrisson, qui est mort depuis au Dahomey, je crois. Dans la Gographie
compare de Tissot (T. II, p. 795), il est dit, en outre, que les plans de Carthage,
Utique, Hadrumte, ont t vendus Londres le 1er Juin 1886.
A ce propos, M. le Prsident ajoute que les recherches qu'il a faites depuis
six mois qu'il est Sousse, ne lui ont pas permis de relever quelque trace des
deux enceintes phniciennes et romaines que cet auteur avait retrouves. Il
fait remarquer d'ailleurs que tous ceux qui ont tudi Sousse aprs Daux, et en
particulier M. le Capitaine Hannezo, dans l'tude trs intressante qu'il a publie
de la question, ont fait, au sujet des assertions de Daux, les plus grandes rserves.
Le seul difice dont l'identification faite par ce dernier ait t reconnue
exacte est le cirque.
Le monument appel Hadjar Maklouba ne semble pas avoir t un thtre,
malgr l'existence d'un mur demi circulaire qui a pu induire en erreur. Des
fouilles importantes d'ailleurs devraient tre faites en ce point.

5 Mars, M. le Commandant Giorgi expose qu'il a vu, il y a plusieurs


annes, au Nord-Est de Hammam-Soussa, prs de Sidi Kantaoui, une vaste
construction antique qu'il serait peut-tre intressant d'tudier et il attire sur
cette construction l'attention des Membres de la Socit. Aucun des assistants ne
connaissant cette ruine, plusieurs des Socitaires dcident d'aller la visiter.
Revenant sur les monuments de l'antique Hadrumte dont il a t question
prcdemment, M. le Prsident expose le rsultat des fouilles qu'il a faites, de
concert avec M. Gouvet, au lieu dit Hadjar Maklouba et au cirque. Il se propose
de commencer le dgagement de ces monuments et met, ce propos, le dsir
que la Municipalit de Sousse puisse acqurir le terrain o s'lvent ces
monuments, de manire doter la ville de quelques ruines intressantes. A
vrai dire, celles dont il est question paraissent assez dtruites et ne donneront
pas un ensemble remarquable par son architecture. Mais on pourra certaine-
ment y voir un plan de monument s'levant plus de 2 mtres au-dessus du
sol. La symtrie des lignes et l'intrt que prendront les visiteurs en saisir le
sens justifieraient certainement quelques travaux de dblaiement.
Les masses normes et si pittoresques de l'Hadjar Maklouba (actuellement
tour Eiffel), s'levant au-dessus des normes soubassements que les fouilles ont
mis jour, offriraient certainement un aspect imposant.
Au cirque, le podium pourrait tre dgag sur une grande longueur, et on
verrait trs nettement, au-dessus de lui, la longue enfilade de gradins qui le
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surmontaient. Les fouilles pratiques rcemment en ce point ont montr qu'un


portique colonnes de marbre blanc devait couronner le monument, sur une
longueur de plus de 600 mtres.
M, le Prsident attire encore l'attention sur ce fait que la spina du cirque a
servi, au moment de l'invasion arabe, de dlimitation du partage du sol, et
qu'elle forme encore actuellement la limite d'une proprit, caractrise par
une longue leve de terre surmonte d'une haie de cactus.
A l'extrmit septentrionale de la spina on voit encore un norme puits qui
devait recevoir toutes les eaux tombes l'intrieur du cirque.
Et non loin de celte extrmit la ligne orientale des gradins ne devait
plus, comme cela a lieu dans tout le reste de l'difice, tre adosse au versant du
vallon et au rocher. Le vallon dcrivant cet endroit (c'est dire au-dessous
de l'infirmerie vtrinaire) une courbe vers l'est, on avait d le barrer par un
mur puissant dont on devrait retrouver les traces. Ce mur portait le pro-
longement des gradins.
Il serait trs peu coteux d'acqurir l'extrmit mridionale du cirque,
ou mieux le terrain situ entre cette extrmit et la route. Les gradins tant en
gnral recouverts soit par une piste, soit par une haie de cactus, il serait
galement peu onreux d'acheter cette bande et, ces deux emplacements dga-
gs, on pourrait dj mettre au jour celles des parties les plus intressantes
de l'difice.
M. le Dr Lambert insiste vivement sur l'intrt que prsenterait ce dgage-
ment.
Il est dcid que la Socit signalera l'attention de la Municipalit l'utilit
qu'auraient ces travaux pour la ville, o on ne voit actuellement aucun reste
important de l'antiquit, en dehors des citernes.
M. Gouvet veut bien se charger de faire et de diriger les dmarches nces-
saires.

13 Mars. M. le Prsident fait connatre qu'il a visit les ruines de Sidi


Kantaoui qui lui ont paru fort curieuses. Il en fait passer un plan sommaire et
attire l'attention sur la bizarrerie de la forme des murs, les nombreuses
demi-coupoles recouvertes de ciment de tuileaux. Ces ruines lui paraissent
romaines, mais avoir t ultrieurement remanies en partie.
La Socit dcide qu'elle chargera plusieurs de ses Membres d'tudier ces
ruines, et elle prie M. Gouvet de les signaler M. le Directeur du Service des
Antiquits.
Il est donn lecture d'une lettre de M. le Capitaine Esprandieu dans
laquelle, aprs quelques mots trs aimables pour la Socit, il annonce que le
service de la Revue pigraphique, dont il est Directeur, sera assur la Socit.
On dcide de crer un album de vues et un album historique de Sousse
renfermant des vues de la ville toutes les poques, en particulier celles des
anciens monuments appels disparatre : premires gares, premiers bureaux
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de poste, glise, etc. Il est fait appel toutes les personnes qui possderaient
des gravures, photographies, etc., de ce genre. M. Nestler est charg de ces
albums.
Messieurs les Membres qui dsireront avoir des photographies semblables
celles qui seront recueillies dans cet album, pourront les obtenir en s'inscrivant
auprs de M. le Secrtaire gnral qui transmettra leur demande aux posses-
seurs des clichs.
Une collection d'empreintes, d'intailles, qu'on trouve en si grand nombre
dans la rgion sera forme par les soins de la Socit. La cration en est confie
M. Riettmann qui nos confrres sont pris de vouloir bien soumettre les
pierres qu'ils possderaient.
M. Chevy signale l'existence, 2 kilomtres environ du S. O. de El Kenis-
sia, d'une ncropole de famille possdant encore son enceinte carre, forme
par un mur en blocage. On y voit encore trois grandes lombes demi-cylindri-
ques. M. Chevy donnera ultrieurement la Socit une description de ces
monuments qu'il a explors.

26 Mars. M. le Lieutenant Grange offre la Socit un agrandissement de


la carte de Sousse et des environs publie dans lAtlas archologique. Toutes les
ruines romaines y ont t reportes. Grce ce prcieux instrument de travail,
il sera possible aux Membres de la Socit, chargs de complter cette carte, d'y
porter toutes les indications qui viendront leur connaissance. Toutes les
personnes qui rencontreront des vestiges antiques, mme minimes et de quelque
nature qu'ils soient, aux environs de Sousse, sont pries de les signaler M. le
Prsident.
Lecture est donne d'une lettre de M. le Dr Deyrolles annonant la dcouverte
de trs curieuses spultures, en forme d'haounet avec peintures murales et
bas-reliefs, dans le Djebel Bazina.
Il est aussi donn quelques dtails sur les fouilles excutes par M. Robin dans
la ncropole mgalithique de Dar bel Ouar. M. Robin annonce l'envoi d'une tude
sur ces spultures.
M. le Prsident signale l'existence d'une ncropole qui semble avoir pass
inaperue jusqu'ici. Elle est situe auprs du cimetire musulman du Sud et se
compose de caissons demis cylindriques revtus en ciment de tuileaux. Il se
propose d'y conduire les Membres de la Socit au cours d'une excursion qui
sera faite prochainement de ce ct.
M. de Bray signale l'existence, Sousse, d'une fabrique de fausses monnaies
antiques, fabriques par un horloger juif. Elles sont produites trs habilement,
par le moulage de monnaies authentiques. C'est surtout l'examen des tranches,
o l'on voit des traces de rognures et de polissage, que la fausset peut se
reconnatre.
M. le Prsident fait connatre le rsultat des fouilles qui viennent d'tre
pratiques par ses soins au lieu dit : la Tour Eiffel. Il a t mis jour un
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aqueduc de grandes dimensions, maonn et vot en berceau, se dirigeant du


centre du plateau o s'lvent les ruines vers la route de Kala-Srira. On a
constat que, pour installer ce point un monument, les anciens avaient ras
une petite colline, de manire y former une vaste plateforme de 50 mtres de
ct environ, dont une partie a t dcouverte lors des fouilles. Les deux Hadjar
Maklouba qui restent formaient les angles de l'difice bti en ce point.
Une discussion s'engage au sujet de la prsence d nombreux blocs de lave et
de pierre-ponce engags dans la maonnerie de l'difice. Certains blocs sont
si lgers que, malgr leurs grandes dimensions, un homme peut les soulever.
D'o viennent ces pierres, volcaniques? Ont-elles t prises en Sicile et amenes
ici, ou bien ont-elles t jetes sur les ctes par quelque phnomne
mtorologique lors de l'ruption d'un volcan voisin ?
Des remerciements sont adresss M. Balzan qui, avec le plus grand
empressement, a autoris M. le Dr Carton faire des fouilles dans un champ
ensemenc.
Au cirque, MM. Carton et Ordioni ont dcouvert un large mur de 3 mtres
d'paisseur, en forme de fer cheval qui formait l'une des extrmits du
monument. Au centre de la courbe il semble y avoir eu une terrasse maonne
faisant saillie l'intrieur du champ de courses.
Le podium a t dgag ou suivi sur une longueur de 40 mtres et on a
trouv de grands fragments de vote en blocage qui devraient recouvrir au
moins certaines parties des gradins.
En raison de l'intrt que prsentent ces recherches, et comme le propritaire
s'oppose ce qu'on les continue, on dcide de demander ce qu'on loue la
partie dcouverte jusqu' ce qu'on ait fait les dmarches ncessaires pour l'achat
ou l'expropriation de cette petite surface. M. Gouvet veut bien se charger des
ngociations ncessaires.
Tous les Membres prsents expriment le v u que la ville puisse donner la
Socit les moyens de dgager cette partie du cirque.
Vue de la route, la courbe de ce mur, se prolongeant avec la silhouette du
podium, produirait certainement un trs heureux effet.
Il est ensuite donn lecture d'une lettre de M. le Directeur de l'Agence du
Crdit Foncier et Agricole d'Algrie, en date du 1er avril, faisant connatre que
cette Compagnie accorde la Socit un subside de 50 francs. De vifs remerci-
ments lui seront adresss pour son don gnreux.

2 Avril. M. le Prsident fait remarquer qu'en examinant une mosaque


assez dtruite de la ncropole que l'on explore en ce moment au camp Sabatier, et
qui, en raison de son mauvais tat n'avait jamais t examine de prs, il a
reconnu qu'elle portait l'emblme de la croix gamme ou svastika. Cette mo-
saque tant trs difficile protger, M. le Capitaine Ordioni et M. Gouvet
dcident de l'enlever et de la mettre dans le Muse.
M. le Capitaine Ordioni rend compte des fouilles qu'il excute dans la
21

ncropole du camp Sabatier et annonce l'envoi, sur ces fouilles, d'un travail qui
sera publi ici.
M. le Capitaine Morel, rentrant d'une tourne dans le Sud, fait connatre
qu'il a vu une ruine des environs de Mtameur, renfermant autrefois de beaux
monuments, actuellement renverse. Sur la demande du Prsident, M. Morel
promet de s'enqurir de la situation exacte et du nom de ces ruines, afin que le
fait soit signal M. le Directeur du Service des Antiquits.

8 avril. M. le prsident donne lecture d'une lettre en date du 9 Juin 1903, de


M. le Ministre de la Guerre permettant aux Officiers membres de la Socit
archologique de Sousse de publier leurs travaux archologiques dans le Bulletin
de cette Socit sans autorisation pralable.
M. le prsident donne galement lecture d'une lettre de M. l'Ingnieur en
chef de la Cie de chemins de fer Bne-Guelma, faisant connatre que cette Cie
accorde la Socit une subvention de cinquante francs. De vifs remerciements
sont adresss cette Compagnie.

14 mai. MM. Vall et Bertin annoncent qu'ils ont dcouvert dans les
environs de Sousse, prs des bords de l'oued Hallouf, un buste de femme en
calcaire.

M. Dubos, dans une lettre adresse au Prsident, attire l'attention sur un


gisement de curieuses poteries, en forme de couronne, qu'il a trouv aux environs
de Mokenine. Ces poteries sont intressantes et par leurs formes et par les
emblmes o les inscriptions qu'elles portent, et M. Dubos promet d'tudier
plus en dtail ce gisement et les poteries afin de pouvoir en dterminer l'ge et
la nature.
M. Dubos signale galement des cavits situes aux environs de Sousse et
qui lui paraissent tre des hypoges du genre de ceux du Camp Sabatier.

Pour copie conforme :

Le Secrtaire Gnral
Ct GIORGI.
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Liste des objets entrs au Muse municipal de Sousse,


par suite de dons ou d'indications des membres de la
Socit.
Dons de M. le colonel Calley de St-Paul, du 4e Rgiment de Tirailleurs
Algriens. Fouilles excutes Sidi-El-Hani par M. le capitaine
Ordioni :
un bec........................ 150
Lampes trois becs 1
quatre becs................ 1
Statuettes...................................... 20
Miroirs avec manche.................... 18
Vases.. .............................. 2
Objets en bronze .......................... 50
Plais en terre ............................... 18

Fouilles excutes Ksiba par M. le docteur Carton et M. le capitaine


Ordioni :
Lampes puniques......................... 7
Petites poteries fusiformes .......... 6

Lieutenant Henry. Ncropole du Camp Sabatier :


Statuettes ..................................... 7
Plusieurs lampes et poteries diverses.
M. Chevy :
Reliefs en stuc reprsentant divers personnages ayant fait partie d'une
scne idyllique.
Cippe funraire avec partie d'inscription retaill en forme d'auge double.
Torse de guerrier en marbre blanc.
Dr C ARTON :
Base de Hydatius venant de Zaouiet.
Corniche en marbre blanc trouve Sousse.
Frise architrave avec bas-relief reprsentant deux gnies tenant une
guirlande.
M. Coeytaux :
Plusieurs petits bronzes provenant de lhenchir Sidi Khalifat.
M. Robin :
Plusieurs poteries berbres provenant de la ncropole de Dar-Bel-Ouar.
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EXCURSIONS ET PROMENADES

Henchir Zembra (Ulizippira ?)

Le 8 mars 1903, nous sommes alls explorer les ruines identifies d'une
faon incertaine l'ancienne Ulizippira et situes Henchir Zembra, prs
Sidi-bou-Ali.
Plus d'une vingtaine de membres avaient rpondu l'appel de notre rudit
Prsident, M. le Docteur Carton, qui, se trouvant empch pour raison de service,
ne put se joindre eux; et c'est sous l'habile direction de MM. Gresse,
vice-prsident, et Gouvet, secrtaire gnral, que nous primes le train qui
devait nous conduire sur les lieux mmes de l'excursion.
Les ruines que nous avons visites appartenaient une ville de plus de 60
hectares de superficie, qui s'levait sur un petit plateau dominant d'une
vingtaine de mtres l'Oued-Sed. Cet oued y coule au sud et ses pieds dans la
direction est-ouest.
Ce plateau a subi vers son centre une dpression en forme de cuvette, laissant
deux collines bien dessines, l'une au nord et l'autre au sud.
Cette dernire, la plus puissante, affecte la forme d'un bastion avec rdans
dont les habitants de la ville semblent avoir tir parti pour la dfense.
Sur la premire de ces collines les Romains avaient construit l'amphi-
thtre dont l'arne mesure sur le grand axe (sensiblement E. 0.) 45 mtres et
sur le petit 35 mtres et ce la hauteur du premier gradin encore visible par
places.
Nous n'avons pu relever les traces du podium. Il serait ncessaire d'ex-
cuter des fouilles pour le retrouver et dterminer ainsi les dimensions exactes
de la cavea.
Les deux entres principales aux extrmits du grand axe sont indiques
par une dpression plus forte que les deux entres secondaires qui sont
l'extrmit de l'axe perpendiculaire.
Extrieurement, on ne trouve pas de traces d'un ordre architectural
quelconque. Cet difice a t creus dans la colline et les terres provenant du
dblai ont t rejetes sur le pourtour de faon le surlever et lui donner
ainsi une hauteur approximative de douze mtres du fond de l'arne au sommet.
Quelques murs destins supporter les gradins de l'amphithtre sont
encore en place sur divers points au pourtour, mais on n'y voit nulle trace des
paliers (praecinetiones) qui sparaient les maeniana, ni des murs verticaux
baltei qui sparaient les diffrentes classes de la population.
24

La courbe elliptique que revtent habituellement les lignes concentriques


du monument, pouse ici une forme anguleuse qui ne doit tre
qu'apparente et provoque par les glissements successifs des terres.
Prs de la porte ouest existe une vote en plein cintre de 4m 90 de dia-
mtre, la longueur en est encore de 4 m 40, le fond en est ferm par un mur
en blocage de 0m 75 d'paisseur ; sa direction vers l'arne est sensiblement
S.-O N.-E. Par suite d'un mouvement de bascule provenant de la dislocation
des maonneries, elle est incline d'environ 10 sur le plan horizontal.
Au dessus du dbouch actuel existe 0m40 de l'ouverture et dans
l'intrados de la vote un trou carr de 0m45 X 0m45 et dont la hauteur de
0m 70 de vide correspondant l'paisseur de la vote. Cette ouverture est
couverte par 3 pierres formant dalles; au dessus se trouvaient les gradins.
L'orientation de l'amphithtre tait telle que les spectateurs placs sur
les gradins suprieurs, dans la partie comprise entre les deux portes
secondaires et la porte principale ouest, apercevaient en face d'eux la mer.
Au sud-est de l'amphithtre et prs de lui, existait un monument qui
devait tre assez important en juger par l'paisseur de ses murs; une partie
affecte la forme dune abside et le sol est recouvert de mosaque. C'est
peut-tre, ainsi que l'ont pens certains de nos collgues, le chevet d'une
glise. Mais il nous semble difficile de donner l'affectation relle de cet
difice, tant que des fouilles srieuses n'auront pas t pratiques.
En continuant notre excursion nous remarquons un monument demi-
circulaire qui doit tre celui signal par Pelissier que M. Cagnat n'avait pu
voir et que j'avais examin en 1896. M. Gresse met l'avis que ce devait tre
le thtre. Des fouilles que nous avons excutes depuis sur ce point nous
ont fait connatre que le monument tait enferm dans un rectangle ferm
par des murs qui ont respectivement pour longueur 24m30 au S., 31 m
l'Est, 33m40 au N. et 10m encore visible l'ouest.
Le mur courbe qui limitait extrieurement les gradins mesure 48m38 de
dveloppement et 1m30 d'paisseur.
Un autre mur excentrique limitant l'hmicycle avait intrieurement un
dveloppement de 29m85 ; son paisseur tait de 1m10.
L'orchestre mesure 9 m50 de rayon. La profondeur de la scne est de
m
6 10. A une des extrmits (N. E) se trouvait deux chambres mesurant
respectivement 3m70 et 4m40 de longueur et dont la largeur tait celle de la
scne. Je n'ai pu relever aucune trace de porte, nanmoins une tude et
des fouilles plus compltes que nous nous proposons de faire nous fourniront
peut-tre des renseignements intressants sur cet difice.
Continuant notre route et en nous dirigeant toujours vers le Sud, dans la
dpression comprise entre les deux collines, nous rencontrons les vestiges
d'importants btiments aux murs trs pais qui, comme le reste
des ruines, sont rass au niveau du sol. Pourtant de nombreux fragments
25

de marbres aux multiples couleurs, des stucs recouvert de peintures, indiquent la


richesse de ces monuments. C'est dans l'un d'eux qu'au cours des fouilles
pratiques par nous en 1896, nous avons trouv une plaque de bronze ajoure
portant les restes d'une inscription l'Empereur Commode, un mdaillon en
bronze surmont d'une croix latine et une petite clef de coffret galement en
bronze. Ces diffrents objets ont t offerts par nous au muse de Sousse, o ils se
trouvent actuellement.
Escaladant la colline sud, nous trouvons la partie suprieure de trs nom-
breuses citernes, dont les unes en ruines sont la surface du sol, les autres trs
bien conserves s'y enfonant.
Cet ensemble dnote, par la multiplicit de ses rservoirs et la grande surface
qu'ils occupent, l'importance des habitations qui couvraient cette partie de la
ville.
C'est dans l'une d'elles que nous avons trouv et exhum, en prsence des
membres de la Socit, reposant sur la mosaque d'une des chambres une srie de
sujets en stuc trs finement excuts ayant trait quelque scne idyllique et
reprsentant des ttes de profil de femmes d'une excellente excution, ainsi que
celle d'un faune tirant la langue et coiff de bandelettes, etc. ( 1 ).
Tous ces diffrents fragments, rellement intressants, ont t enchsss
dans du pltre, maintenus par des encadrements et exposs au muse.
La chambre o reposaient ces dbris mesure 5 m65 du Sud au Nord et 5 m25 de
l'Est l'Ouest. Elle tait encadre d'une mosaque blanche de 0 m 15 de largeur,
suivie d'un filet bleutre de 0 m 0l, puis d'une torsade en 3 couleurs bleu, rouge,
blanc, entremle enveloppant un cadre en forme de T dans lequel se trouvaient
des cercles entrelacs.
Le reste de la mosaque couvrant la chambre reprsentait des pavs de
forme rectangulaire mesurant 0 m31 sur 0 m15, spars l'un de l'autre par un cube
part formant joint de 0 m01 de largeur.
A part les stucs dsigns sommairement ci-dessus, il na pas t dcouvert
autre chose d'intressant en ce point.
La chambre voisine, fouille, a donn une mosaque reprsentant des
demi-cercles tangents. Dans le tiers de la hauteur de chaque demi-cercle
taient placs quatre cubes en verre bleu.
Quittant ces lieux, nous nous dirigeons, dans la direction de l'Est, vers les
gourbis habits par des Arabes de la rgion et nous trouvons chez ces indignes
une partie de statue allant des hanches la hauteur des genoux et mesurant
0 m50 environ de hauteur. Les bandelettes qui bordent le bas de la cuirasse portent
chacune un petit bas-relief diffrent, parmi lesquels on peut seulement
reconnatre une tte casque et une tte de Gorgone ( 2 ).

(1) J'espre pouvoir publier dans le prochain numro du Bulletin une tude, avec
planches, des plus remarquables de ces sujets.
(2) Actuellement dans le square Pichon, en face du Muse.
26

Plus loin, un cippe mutil de la bonne poque. Malheureusement cette pierre a


t abme et on en a fait une date indtermine deux auges spares par un
intervalle de 0m12. Cette pierre dont les deux extrmits ont t brises, mesure
actuellement longueur 0m50, largeur 0m 50, paisseur 0m 25.
Dans le cloisonnement, on lit l'inscription suivante :
M. CAECILIVS
m
en lettres de 0 07 de hauteur.
De chaque ct et au-dessus de l'inscription on voit l'extrmit infrieure de
deux colonnes (1).
Continuant notre reconnaissance des ruines vers le S.-E. nous admirons au
passage un difice assez vaste contenant un grand nombre de piscines dont l'une
peu prs dblaye laisse voir en place la marche sur laquelle s'asseyait le baigneur
et au-dessous, sans aucune dformation, le tuyau de plomb qui amenait les eaux
dans lalveus.
Les enduits recouvrant les maonneries intrieures sont trs soignes et
comportent 3 paisseurs diffrentes dont la dernire trs fine et particulirement
bien lisse rappelle par sa duret le vritable stuc.
Un fragment de moulure reprsentant des gorges, large de 0m 080, profondes de
0 020, spares par un triangle de 0m 030 de largeur, rappelle par la rptition en
m

dessin un fragment d'astragale. Pourtant la double courbure qu'il possde semble


indiquer qu'il appartenait l'ornementation d'une coupole.
Des fouilles devraient tre entreprises au plus tt en ce point. Elles pourraient
donner des rsultats fort intressants.
C'est sur cet espoir que nous dirigeons nos pas vers la gare pour prendre
le train de 10 heures 50, qui nous ramne Sousse midi, heureux de nos
trouvailles.
P. CHEVY.
Membre du Comit

Henchir Sidi Khalifat (Aphrodisium ?)


Cette excursion, qui a eu lieu le 5 Avril, a t organise et dirige par M. le
D r Carton avec le concours empress de M. C ytaux, directeur de la Socit de
l'Enfida. M. l'abb Winkelmann, professeur d'archologie l'Universit de Louvain,
y assistait.
Avant d'arriver aux ruines de Sidi Khalifat, les excursionnistes tudient le bassin
de l'An Hallouf, dcrit par Gurin ( 2 ). Le double bassin, runi par un canal qu'il a
vu, a t rpar depuis, lors des travaux entrepris pour l'adduction
des eaux la halte de la voie ferre d'An Hallouf. Le plus grand de ces deux

(1) Ce cippe est actuellement dpos dans le square Pichon, en face du Muse.
(2) Voyage en Tunisie, t. II, p. 311.
27

rservoirs, qui est en pierres de taille, a gard sa forme et ses dimensions


antrieures. Il a 8 mtres de ct et 0m80 de profondeur. Le bassin suprieur
aurait compltement disparu et t remplac par le bassin rectangulaire actuel.
Le canal qui les runit porte encore par place un enduit en ciment antique. La
petite colonne leve au centre du bassin principal existe toujours, mais les
ouvriers qui ont fait les rparations l'ont surmonte d'une mauvaise base de
colonnes qui n'ajoute rien que de disgracieux l'effet qu'elle produit.
L'eau qui remplit ces rservoirs y est amene par un aqueduc antique, issu
de deux chambres de captation, qui ont t galement rpares. L'une d'elles a
environ 5 mtres de ct. D'aprs les renseignements fournis par
M. C ytaux, il n'y a pas une source isole, mais bien plusieurs canaux
drainant le sol du voisinage et convergeant vers ces rservoirs.
Remontant la valle trs fertile et couverte de beaux vergers, qui porte le
nom de Kheley, nous arrivons une autre source, Ain Djedid, qui jaillit auprs
d'un barrage en maonnerie antique la partie infrieure et en blocage rcent
plus haut : il a videmment t rpar par les Arabes. M. C ytaux nous dit que
les barrages, si nombreux dans le domaine de lEnfida, qu'il a vus, sont trs
gnralement en maonnerie la partie infrieure, et plus haut en pierres
sches. D'un point culminant, nous pouvons compter, dans le lit de l'oued
Kastleia 12 barrages-chelonns les uns au dessus des autres, des distances
variables, mais qui sont en moyenne de 30 mtres; ce sont quelques-uns de ces
ouvrages hydrauliques, si nombreux dans l'Enfida, qui ont t tudis par de
la Blanchre. A 40 mtres environ au dessus du point o jaillit la source, nous
remarquons une chambre de captation en blocage, dont la vote est croule,
mais la partie infrieure de laquelle il doit y avoir un canal ou une cavit au
dessous de la surface du sol. Accoles cette chambre sont plusieurs pices en
blocage, angles en pierres de taille, restes de quelque nymphe ou d'un poste
protgeant la source. J'admettrais volontiers cette dernire destination, car
ainsi qu'on le verra plus loin, une voie antique, assez importante, venant de
Henchir Sidi Khalifat, passait auprs de ces ruines. Au voisinage de celles-ci, on
voit encore, ras du sol, un mur circulaire d'environ 3 mtres de diamtre que
les uns prennent pour la section d'un four, les autres pour une tour. Mais comme
elle est en haut d'une dpression qui semble se continuer avec celle de la
chambre de captation, je croirais volontiers qu'il s'agit d'un regard ou puits
auquel aboutissaient plusieurs canaux de drainage.
Parmi ces ruines, nous relevons encore une pierre en forme de tronc de
cne dont l'extrmit la plus large est vide en une cavit sphrique prsentant
une saillie en son centre. Elle prsente intrieurement des rainures obliques et
parallles entre elles. Nous admettons tous que ce fut la partie infrieure d'un
moulin craser les olives(1).

e
(1) M. Berger a bien voulu promettre d'adresser la Socit, pour le Bulletin du
2 semestre, une note sur ces inscriptions.
28

La hauteur de cette pierre est de 50 centimtres, son plus grand diamtre


de 1 mtre, le plus petit de 0m 90.
Au cours de mes excursions dans les rgions voisines, j'ai rencontr un
nombre considrable de pierres semblables. Ce sont, en somme, des cuves avec
une saillie arrondie en leur milieu. J'ai vu de ces bases de meules
Bou-Ficha et auprs d'un autre puits voisin, Bir Faouera prs Djeradou,
au puits voisin du Ksar Menara, Bir bou Rekba, etc.
Nous prenons ensuite un col qui se dirige vers le Nord, et constatons que
nous suivons une voie antique. Sa bordure, son empierrement sont des plus
nets. La largeur en est de 4 mtres. Ctait videmment un chemin assez im-
portant et reliant le centre qui fut Sidi Khalifat d'autres centres situs au sud
du Kheley. Arrivs au sommet du col, nous apercevons brusquement la valle
o s'tendent les ruines de Sidi Khalifat et, au sommet d'une haute colline, la
masse imposante du monument que Gurin considrait comme le temple de
Vnus Aphrodite. Le point o nous sommes est coup sr celui d'o ce
monument se prsente avec le plus de majest, et c'est par ici qu'il est le plus
intressant d'aborder les restes de la ville antique.
L'exploration des ruines a donn lieu quelques dcouvertes intressantes.
A l'extrmit occidentale de la ville, au pied des collines qui l'enserrent de ce
ct, ont t trouves trois stles no-puniques ayant la mme forme. En
dehors de la base qui servait les fixer dans le sol, ce sont des demi-cylindres.
L'une d'elle, brise sa partie suprieure, offre sur sa face plane l'extrmit de
deux colonnes, et au dessous d'elles deux lettres ( 1 ) .

V S
v (otum) s (olvit)

Les lettres sont, d'ailleurs, grossirement faites et uses.


Une autre stle, trouve par M. Villaret, brise en deux, est entire. Son
extrmit pointue porte le croissant, au dessous duquel un triangle semble
figurer l'emblme de Tanit et jouer en mme temps le rle d'un fronton de
temple, port par deux colonnes. Sur la frise qui spare ces deux parties de
fronton, court, grave finement la pointe, une ligne de caractres no-puniques.
Entre les deux colonnes se trouve un vase deux anses, en forme de canthare. La
troisime stle prsente, entre les deux colonnes, des caractres no-puniques
assez frustes,
Enfin, M. C ytaux m'a montr Enfidaville dans le Muse qu'il a com-
menc constituer, une autre stle tout fait semblable, renfermant des

(1) Nous n'avons pas rencontr la seconde des deux sources avec bassins et colonnes
au centre que Gurin a vues entre l'Henchir Sidi Khalifat et l'An Hallouf. Peut-tre
les bassins ont-ils t dtruits, moins que ce ne soient les vestiges que nous avons
vus ici.
29

Caractres no-puniques. Elle mesure 40 centimtres de hauteur, 20 centimtres


de largeur sa partie suprieure, qui est brise et 10 centimtres d'paisseur.
L'inscription se trouve comprise entre deux colonnes, dont l'extrmit-est
galement brise.
Celle stle, qui a t apporte d'Henchir Sidi Khalifat par des Arabes, est
galement demi-cylindrique sa partie postrieure.
Les trois petits monuments que nous avons
trouvs taient environ 40 mtres au
sud-ouest de l'amphithtre. Il y avait
certainement, au point o ils ont t trouvs, un
sanctuaire ddi quelque divinit orientale
ou une ncropole renfermant des monuments du
mme genre et il est probable que des fouilles
mthodiques en mettraient d'autres au jour.
Tout prs de l, et ayant peut-tre fait partie
du mme sanctuaire, est un difice de grandes
dimensions ; on y remarque un mur qui a prs
de 50 mtres de longueur, construit en un petit
appareil d'un aspect trs agrable : ce sont des
pierres tailles en forme de grosses briques et
disposes en assises horizontales trs rgulires.
Il y a lieu de remarquer, d'ailleurs, que la
plupart des difices de lHenchir Sidi Khalifat
sont construits de la mme faon. Un autre fait
caractrise galement ces ruines. C'est l'extrme abondance des fragments de
poterie rouge couverte vernisse, en pte fine, qu'on y rencontre. Je n'en ai
jamais vu autant dans aucune ruine de l'Afrique du Nord. En certains
endroits, le sol, vu un peu obliquement, y semble color en rouge.
Non loin des stles, ce qui donne penser que c'est de la ncropole qu'il
s'agit ici, M. C ytaux met jour deux tombes jumelles ; ce sont deux sarco-
phages forms par trois dalles parallles, dont celle qui est au milieu leur est
commune.
Cette dernire est en mme temps plus paisse que les deux autres. La
cavit qu'elles limitent est ferme, leur extrmit, par des dalles plus petites,
mais aussi trs rgulires. L'un des tombeaux mesure environ 1m90 de lon-
gueur, et l'autre lm80. Le premier renfermait une lampe orne de globules,
l'autre un vase une anse et une lampe queue fore, portant une marque
assez fruste.
A V G endi ?
Quelques observations ont aussi pu tre fuites dans certains difices de
l'antique cit.
30

Nous sommes tous frapps de l'asymtrie que prsente la face Sud de l'arc-
de-triomphe : la distance qui spare le bord interne du pied droit oriental de la
colonne adjacente est de 1m70 ; elle n'est que de 1m20 entre le pied droit
occidental et la colonne oppose.
En outre, on voit bien l'Est l'amorce d'une arcade qui prenait son point
d'appui sur le pied droit; il n'y a rien de semblable de l'autre ct. Les arches
trs enfonces et en bel appareil que l'on voit au Sud de l'arc de triomphe, qui
ont t fouilles par M. Cagnat (1) portaient, d'aprs cet auteur, des chapiteaux
corinthiens semblables ceux de l'arc de triomphe. Ces dtails ne sont pas
visibles, la terre les ayant recouverts de nouveau.
Il est probable que des fouilles pratiques en ce point dune manire
mthodique et en mnageant un coulement aux eaux, permettraient de
mettre jour un difice trs joli et de voir comment il se relie l'arc de
triomphe.
Les deux niches qui ornent la face septentrionale de ce dernier sont, con-
trairement aux colonnes de l'autre face, places symtriquement ; mais c'est
tort que Gurin a crit qu'elles prsentaient toutes deux des ornements. En
dehors de la large coquille de St Jacques qui en orne le fond de part et d'autre, la
niche orientale ne prsente aucun relief dcoratif. L'autre est au contraire
richement ornemente : au dessus de son cintre, on remarque de l'Est l'Ouest,
une espce d'arbre ou de roseau, une couronne 5 pointes, deux petits disques,
des rinceaux et une hampe surmonte d'un croissant rappelant par sa forme le
caduce si commun sur certaines stles votives.
Plus bas que l'arc-de-triomphe, un ravin offre les substructions de nom-
breux difices et une quantit considrable de pierres croules, parmi les-
quelles je remarque plusieurs bases de colonnes et une console orne d'une
moulure d'un profil assez lourd.
M. Villaret y dcouvre un fragment d'inscription grave sur la tranche
d'une dalle. A gauche, sur toute la hauteur de la tranche, a t reprsente
une croix dont toutes les extrmits se terminent par deux volutes tournes
l'une vers l'autre, ce qui indique que le monument est chrtien.
Longueur, 0 m 50; largeur, 0 m 30; paisseur, 0 m 17; hauteur des lettres,
m
0 07.

De chaque ct de ce ravin, mais surtout vers l'Ouest s'tendent des difices


considrables en blocage renfermant de nombreuses colonnes, deux chapiteaux
corinthiens aux feuilles simplement panneles et un trs grand nombre de
rservoirs ciments, de toutes dimensions et de toutes formes.

(1) Cagnat, Explorations pigraphiques et arc hologiques en Tunisie. II, p. 15.


31

Un peu plus bas se trouve le vaste monument que Gurin croyait tre le
palais du roi Vandale que Procope avait vu. Cet difice a d souffrir beaucoup
depuis la visite de l'explorateur, car les murs en sont si dtruits qu'il n'est pas
possible, sans fouille, d'y tudier l'agencement des matriaux. Mais un coup
d' il, mme superficiel, permet de se rendre compte que ce n'est pas un difice de
l'poque romaine.
Il serait intressant de pouvoir dterminer exactement l'poque laquelle a
t leve cette construction, car on pourrait par l, et dfaut d'inscription,
arriver identifier ces ruines. On sait, en effet, que la dtermination de ce
centre antique n'est pas encore faite ; on hsite entre Aphrodisium et Grasse.
Si, comme le pensait Gurin, on avait ici un monument vandale, il faudrait
pencher vers la dernire de ces deux appellations.
Nous avons en vain recherch l'emplacement de la basilique qui a t vue par
MM. Gurin et Cagnat. C'est videmment l'un des monuments en blocage qui
sont l'Est de l'arc de triomphe. Mais les entrepreneurs ont pass par ici et une
recherche plus approfondie que celle que nous avons faite serait sans doute
ncessaire pour permettre de le retrouver.
Au Nord-Est de la porte triomphale, on voit les restes d'un aqueduc dont
le specus est revtu de ciment de tuileaux. Il s'appuie sur un mur qui repose
sur le rocher en en suivant les contours, pour aboutir une srie de grands
rservoirs ciments.
Les restes du grand difice qui domine les ruines, au sommet de la colline
situe l'Est de celle-ci, ont t, on le sait, l'objet d'hypothses trs diverses.
Plissier en faisait une forteresse, Gurin un temple. M. Cagnat, la suite de
fouilles qu'il avait pratiques en ce monument, pousa d'abord la premire de
ces deux opinions pour se ranger ensuite la seconde d'entre elles.
C'est le soubassement seul qui subsiste, de l'avis de ceux qui l'ont tudi et
M. Cagnat a constat que l'intrieur tait divis en trois tages. Rien ne
prouve d'ailleurs que cette subdivision soit de la mme poque que les murs en
bel appareil qui en constituent les parois extrieures.
L'irrgularit de la direction du couloir central constate par M. Cagnat
le donne dj penser. Enfin il a sembl tous les excursionnistes que les cintres
qui surmontent les portes ne devaient pas tre romains.
Pour ma part, je penserais que la courbe en appartient plutt l'art
arabe. L'assemblage des pierres des murs, trs apparent maintenant que les
pluies ont lav les parties dcouvertes par les fouilles, ne parait pas non plus
digne du beau monument que semble extrieurement avoir t celui-ci.
Il est donc probable que les subdivisions de ce sous-sol sont de l'poque
arabe ou vandale et il est possible qu'il n'y ait eu que deux ou mme un seul
tage. Un autre fait viendrait l'appui de cette manire de voir, c'est qu'ex-
trieurement, on ne voit ni bandeau ni corniche qui correspondent aux divisions
horizontales intrieures de la pice, comme cela a eu lieu souvent.
Quand la destination du monument, la beaut de son appareil, la pr-
32

sence de corniches et mme l'existence de ces baies fermes par des clathri
me poussent me ranger l'opinion de M. Cagnat et Gauckler (1) qui en ont
donn la description et la reproduction dans leur livre sur les temples paens.
Quant la divinit qui tait honore dans ce temple, si l'identification des
ruines avec Aphrodisium tait certaine, j'aurais peine renoncer l'ide de
Gurin et ne pas croire que le temple de la desse, qui avait donn son nom
la ville, tait dans cette superbe position au dessus de la vaste tendue de
plaines et de montagnes que l'on aperoit de l, depuis Neapolis jusqu'au mons
Siquensis.
Mais, dfaut de cette identification, il y a un rapprochement faire et je
m'tonne de ne l'avoir pas vu prsent par MM.Cagnat et Gauckler. L'minent
pigraphiste a, en effet, trouv (2) dans les fouilles qu'il a pratiques, un autel
dont le texte a t lu de manires diffrentes.
Mais une dcouverte faite dans les fouilles de Gighiti doit permettre, mon
sens de fixer quelle tait la divinit dont il est question ici. Il s'agit videmment
de la Concorde et probablement de la Concorde Panthe.
Alors que les matriaux provenant de la partie suprieure du monument
devaient non seulement y abonder mais en encombrer l'intrieur, on peut tre
certain que cet autel n'a pas t transport grands renforts de bras des difices
situs au dessous et, par consquent, que si le monument n'tait pas ddi la
seule Concorde, cette divinit y avait du moins sa statue.
Nous avons en vain cherch le bas-relief portant la reprsentation d'un
lion signal par MM. Gurin et Cagnat, et qui a d disparatre depuis quelques
annes. M. C ytaux pre m'a dit dernirement, ce propos, qu'il a vu pendant
longtemps au dessus de ce lion, une autre pierre o tait figur une espce de
plican se grattant la poitrine avec le bec, et ombrag par un palmier.
Un chemin en pente devait permettre de monter assez facilement vers le
monument. On en voit encore nettement le trac.
Quant au nom de Phradize donn aux ruines et dont, il y a peu d'annes,
quelques indignes se souvenaient encore, nous n'avons pu rencontrer d'habi-
tant qui le connaisse. Dr CARTON.

Sousse (Hadrumetum)
Le dimanche 24 mai, au cirque d'Hadrumte, M. le Dr. Carton montre
qu'un large mur, dont une fouille permettrait sans doute de retrouver les
restes, doit prolonger vers le Nord le long ct oriental du monument, un
endroit o l'absence d'un relief naturel form par la roche n'avait pas permis

(1) Ces auteurs disent que les fentres garnies de clathri sont intactes du ct qui
regarde la mer. Il n'existe plus actuellement que l'amorce des barreaux en pierre qui
fermaient ces ouvertures, et l'aspect de la cassure semble indiquer qu'il y a longtemps
qu'ils ont t briss.
(2) C A G N A T , E x p l o r a t i o n s , e t c . , I I , p . 1 6 .
33

d'appuyer les gradins sur celle-ci. Il indique un puits extrmement large et


vot, qui, plac l'extrmit de la Spina, recevait les eaux tombes l'intrieur
du monument, puis conduit les promeneurs aux fouilles qu'il a suspendues
depuis quelques semaines et au courts desquelles il a dgag un des longs cts du
monument sur une longueur de 40 mtres. On voit ce point que le tuf a t
taill de manire former le podium et recevoir des gradins en pierres de
taille. Plusieurs pierres des gradins ont t retrouves.
Par conomie, dans un pays o la pierre de taille est trs rare, on leur a
donn la forme d'un prisme non rectangulaire mais triangulaire, dont le grand
ct reposait obliquement sur le tuf. M. Gresse remarque que les blocs ont t
dbits la scie. Des loges dont il reste quelques murs ayant form cloison, un
couloir taill dans le tuf, descendant vers l'arne et recouvert de puissantes votes
en blocage, ont laiss des traces bien visibles. D'normes blocs de ces votes
subsistent encore, gardant l'empreinte des planches qui ont servi les construire.
Enfin de nombreux dbris de moulures en marbre blanc, des fleurons de
chapiteaux trouvs dans les talus qui dominent les gradins, montrent qu'un
portique entablement en marbre couronnait le monument.
Au camp Sabatier, on visite en passant les fouilles si curieuses de M. le
Capitaine Ordioni dont il ne sera pas question ici puisqu'elles doivent tre
dcrites dans un mmoire spcial.
M. Berra montre ensuite les vestiges de plusieurs villas dont l'une situe
800 mtres au S. E. du cimetire arabe du Sud est particulirement remar-
quable, avec un puissant massif en blocage, une piscine circulaire revtue de
mosaque blanche et une vaste citerne vote en berceau.
M. Carton indique ensuite dans un chemin creux situ immdiatement au
Nord du cimetire arabe du Sud, un cimetire romain tombes en forme de
caissons revtus de ciment sarcophages en jarres et en tuiles, dont quinze
affleurent dans le talus.
Enfin M. Rietmann signale un lion en relief sur une pierre d'angle du mur
sud des fortifications de la ville. Il semble plusieurs socitaires qu'il y a,
auprs de cette pierre, d'autres sculptures qu'on se propose d'tudier ultrieu-
rement.
Dr CARTON, Mdecin Militaire.
PRSIDENT.
L ETTRE A M. LE D OCTEUR C ARTON
SUR UNE INSCRIPTION DE THYSDRUS
CONSERVE AU MUSE DU LOUVRE

MON CHER DOCTEUR,


Vous m'avez trs aimablement demand un article. Je suis telle-
ment pris et occup que je n'ai gure le temps de rdiger un m-
moire. Pour vous montrer toute ma bonne volont et mon dsir de
vous tre agrable, voulez-vous me permettre de vous envoyer quel-
ques notes qui dormaient au fond d'un de mes carnets ; elles sont
relatives une inscription latine conserve au Louvre. Cette ins-
cription, mon avis, n'a pas encore t l'objet d'une attention suf-
fisante. Elle provient de Thysdrus et, ce titre, elle mrite d'tre
connue de tous ceux qui s'intressent aux antiquits romaines de
la Tunisie.
Mieux que personne, vous savez l'importance que la colonia
Thysdritana prit rapidement sous l'Empire. Six voies romaines y
aboutissaient ; un amphithtre qui est encore aujourd'hui, aprs
tant de nouvelles et curieuses dcouvertes, un des monuments ro-
mains les plus remarquables de l'Afrique du Nord, s'y dresse plein
de majest devant les yeux tonns du voyageur. Et cependant les
inscriptions y sont rares (1) ; il faut esprer que l'avenir nous y
rserve des surprises pigraphiques.
Au mois d'avril 1874, en compagnie de mon ami trs regrett
Jules de Laurire, je fis un petit sjour El-Djem. Le lendemain
de mon arrive, les Arabes ayant su par mon guide que je cherchais
des pierres crites, me firent voir tout ce qu'ils jugrent digne de
mon attention. L'un d'eux m'apporta mme une petite plaque de
cuivre portant le nom d'un Biskri, commissionnaire Alger, et me
jura sur la tte de ses enfants qu'il l'avait trouve dans un tombeau

(1) Corp. inscr. lat.,VIII, n 49-56; 10499-10502; 11097-11104.


36

romain. Il paraissait trs courrouc de ce que je ne consentais pas


lui acheter cette plaque qu'il avait eu soin de frotter ferme et de
rendre trs brillante. Sur ces entrefaites un autre habitant de l'en-
droit, un grand gaillard, survint ; il cachait quelque chose sous son
burnous. Arriv devant moi, il dcouvrit avec prcaution un mor-
ceau de marbre blanc allong et d'une faible paisseur sur lequel
taient gravs quelques caractres romains du second sicle de notre
re. C'tait un fragment d'une belle inscription ; je lui demandai
s'il ne possdait pas d'autres morceaux trouvs avec le premier. Il
hsita quelques instants, mais comme je lui avais fait dire par mon
guide que je ne lui achterais rien s'il ne me montrait pas tout ce
qui avait t dcouvert avec le premier morceau, il retourna chez lui,
et revnt bientt en m'apportant successivement douze morceaux de
la mme inscription. Ayant fait prix avec lui je me rendis possesseur
du tout. J'avais achet les dbris d'une grande plaque de marbre
inscrite ; il manquait peu de chose au texte. Mon guide, un ancien
tirailleur algrien assez dbrouillard, loua un chameau et transporta
les morceaux de l'inscription jusqu' Sfax o M. Matte, alors notre
agent consulaire, voulut bien se charger de les faire passer en
France bord d'un bateau charg d'ponges. Ils arrivrent au Louvre
sans accident ; les morceaux furent rapprochs par nos marbriers, et
le texte, presque complet, est maintenant expos dans la salle des
Antiquits africaines sur le mur du fond. Il a t publi dans le
Corpus latin, t. VIII, sous le n 10, 500 (l).
J'en donne cependant ici une nouvelle copie.
L. EGNATVLEIO . P . F . GAL . SABINO . PONTIFIC
PALATVALI . PROC . AVG . XXXX . GALLIARVM
PROC . AVG . AD . EPISTRATEGIAN . THEBAIDOS
PROC . AVG . AD . CENSVS . ACCIPIENDOS
5 MACEDONIAE . PRAEF . GENTIS . CINITHIORVM
TRIB . LEG . IIII . SCYTHICAE . TRib . leg . vii
GEMINAE . FLAM . AVG . Coloniae
EGNATVLEIA . P . F . SABINA . Fratri..
L . EGNATVLEIVS . SABINVS . Tutori..
10. CALIDIVS PROCVLVS AVONCV lo

(1) Cagnat, Les impts indirects chez les Romains, p.96, a reproduit la copie du Corpus
37

A la ligne 2, une barre au milieu du dernier X, indique par le Corpus, est


une erreur ; il y a dans le marbre une veine friable qui a produit un creux au
milieu du X, mais ce n'est pas un trait grav.
A la ligne 5, sont lis : TI, TH ; le dernier T est plus haut que les autres
lettres.
A la ligne 6, avant la cassure finale il y a un T visible et le bas d'un R.
A la ligne 10, il ne reste que l'extrmit suprieure des lettres ; mais je
suis certain de ma lecture qui diffre de celle du Corpus ainsi nonce :
CNIDIVS PROCIII / IVSRICV.
Mes complments diffrent galement aux lignes 6 10.

Cette inscription se rapporte un chevalier romain, originaire de


Thysdrus, et par consquent dans la tribu Galeria. Le cursus appar-
tient donc la carrire questre ; il est conu dans l'ordre indirect et
dbute par la mention de la dernire fonction exerce. Les titres
sacerdotaux restent en dehors de cette numration.
On remarquera cependant qu'il y a des titres sacerdotaux en tte
et la fin de l'pitaphe. Pourquoi cette anomalie ? Pourquoi ces
titres ne sont-ils pas tous runis ? C'est que les uns, ceux de la fin, se
rapportent des sacerdoces municipaux, exercs dans la ville mme
de Thysdrus o Sabinus a t flam(en) et aug(ur) coloni tandis que
l'autre, celui de pontifex Palatualis, nonc se rapporte un
sacerdoce exerc Rome.
Examinons en tte, en dtail ce que nous savons de la vie de L.
Egnatuleius Sabinus.
1. 2. Trib(unus) leg(ionis) IIII Scythic, tr[ib(unus) leg(ionis)
vII] gemin.
Pendant la premire partie de sa carrire publique, c'est--dire
pendant la priode militaire il a exerc successivement deux tribunats
lgionnaires (1) : le premier dans la IVe lgion Scythique, lgion
connue surtout par son sjour et par ses oprations en Syrie; le
second dans une lgion dont le chiffre manque mais qui portait le
surnom Gemina. On peut donc hsiter entre la VIIe, la Xe et la
XIIIe qui toutes trois ont reu ce surnom. Il est certain que la
VIIe, la lgion d'Espagne, a sjourn en Afrique (2); on avait fait

(1) A propos du double tribunat lgionnaire exerc par un officier de rang questre,
cf. Corp. inscr. lat., VI; 3518.
(2) Cagnat, L'Arme romaine d'Afrique, p. 102,
38

appel elle, plus dune fois probablement, la suite d'insurrections


intrieures. Je dirai plus loin pourquoi je fais cette remarque et
pourquoi j'ai adopt le chiffre de cette lgion dans mes
complments.
3. Prf(ectus) gentis Cinithiorum.
Les Cinithii faisaient partie des habitants primitifs de l'Afrique :
ils formaient une de ces tribus indignes plus ou moins sdentaires
vivant en dehors des cits, soumises l'empire mais toujours prtes
en secouer le joug, que Pline appelle nationes ou gentes (l). Ils
habitaient les bords de la petite Syrte, d'aprs Ptolme qui les d-
signe sous le nom de Kinithioi (2). Au moment du soulvement de
Tacfarinas, sous Tibre, ils firent cause commune contre les Ro-
mains avec les Musulamii; Tacite, en parlant d'eux, dit qu'ils cons-
tituaient une importante tribu avec laquelle il fallait compter, haud
spernenda natio (3). Dans les anciennes ditions de Pline, leur nom a
t mal transcrit; dans l'numration des tribus africaines donne
par cet auteur on est d'accord pour croire que le nom des Cinithii
se cache sous celui des Ethini.
L'inscription de Thysdrus nous montre que les Cinithii taient
placs sous la surveillance et mme sous l'autorit d'un officier
portant le titre de prfectus gentis (4) ; le territoire tait donc,
pour employer le langage moderne, un territoire militaire. Il en
tait de mme de leurs anciens compagnons de rvolte, les Musu-
lamii comme nous l'apprend l'inscription de Guelma mentionnant un
prfectus gentis Musulamiorum (5).
Ces prfets militaires chargs de maintenir l'ordre dans les tribus
les plus turbulentes taient-ils dtachs de leur commandement et
chargs d'une mission particulire sur le territoire de la tribu ? Ou
bien dsignait-on pour remplir ces fonctions spciales des officiers

(1) H. N., V, 4 et 7. Les Mauri gentiles qui, en l'anne 158, faisaient partie de
la Dacie Suprieure avec un dtachement venu d'Afrique et de Maurtanie, taient-ils
recruts dans ces tribus ? Cf. le diplme militaire de Pesth, Corp. inscr. lat., III, n
LXVII, p. 1989.
(2) Ptolme, IV, 3,22, 27.
(3) Tacite, Ann. II, 52.
(4) Cf. le passage de Servius ad Virg. Aeneid. IV, 242 : Prfecti gentium Maura-
rum cum fiunt, virgam accipiunt et gestant
(5) Corp. inscr. lat., VIII, 5351 ; voir le mmoire de M. J. Toutain, Le territoire
des Musulamii, dans les Mmoires de la Soc. des Antiq. De France, LVII, 1895, p.
271-294.
39

pourvus d'un commandement dans le voisinage de la tribu et pour


lesquels la surveillance en question venait s'ajouter aux occupations
dpendant de leur poste? C'est ce qu'il serait intressant de dter-
miner.
Il rsulte d'une inscription de Cme, relative au grand pre de la
troisime femme de Pline le Jeune, L. Calpurnius Fabatus, que ce
personnage tait prfectus cohortis VII Lusitanorum et nationum
G tulicarum sex qu sunt in Numidia (1). Or on a trouv au nord de
l'Aurs, Zoui, Khenchela et Lambse, des inscriptions prouvant
que la VIIe cohorte des Lusitaniens a tenu garnison en Numidie (2).
Fabatus n'aurait donc pas t dtach du commandement de la
cohorte pour gouverner les Gtules mais, au contraire, son
commandement de la cohorte des Lusitaniens, on aurait joint la
surveillance des six tribus Gtules qui se trouvaient en Numidie. Il
n'est pas impossible que Tib. Claudius Pollion, qualifi en mme
temps prfectus gentium in Africa et praefectus alae Flaviae
miliariae (3) ait exerc ces doubles fonctions dans des conditions
analogues (4). Le prfet d'une cohorte qui tenait probablement
garnison en Palestine sous le rgne d'Agrippa Il est en mme temps
qualifi, dans une inscription d'Eitha, stratge des nomades (5).
Ces exemples permettraient peut-tre de penser que
L. Egnatuleius Sabinus aurait pu exercer les fonctions de prfectus
gentis Cinithiorum en mme temps que celles de tribunus legionis
VII Geminae pendant un des sjours de la lgion d'Espagne en
Afrique ?
Si les pr fecti gentium peuvent tre compars nos officiers des
affaires indignes, nos chefs de bureaux arabes, leur suprieur
dans chaque province, celui qui centralisait cette administration
spciale, devait tre le fonctionnaire qu'une inscription de Cherchel
appelle procurator Augusti ad curam gentium (6). On pourrait
l'assimiler au chef des affaires indignes.
4. Procurator Augusti ad census accipiendes Macedoni.
L. Egnatuleius Sabinus fut ensuite charg des oprations du cens

(1) Corp. inscr. lat., V. 5267.


(2) Cagnat, L'arme romaine d'Afrique, p. 250.
(3) Ephem. pigr. , IN, p. 269, n 759.
( 4 ) L'inscription d'Arles, XII, 675, ne peut pas servir appuyer cette supposition car
lala miliaria qui y figure appartenait l'arme de Mauritanie.
(5) Waddington. Inscriptions grecques et latines de Syrie, n 2 1 1 2 ,
(6) Corp. inscr. lat., VIII, 9327.
40

dans la province snatoriale de Macdoine, ce qui tend prouver


que l'inscription ne peut-tre antrieure au second sicle. Au pre-
mier sicle, le censeur provincial, au moins pour les grandes pro-
vinces, tait de rang snatorial.
5. Procurator Augusti ad epistrategian Thebaidos.
Notre personnage passa ensuite en Egypte o il fut mis la tte
d'un des grands districts de la province.
A l'poque romaine l'Egypte, au point de vue administratif, pr-
sente plusieurs particularits qui s'expliquent par la conservation du
systme en vigueur l'poque des Ptolmes. Sous la haute direction
du praefectus Aegypti, vritable vice-roi, le pays tait divis en trois
grands districts appels pistratgies, dont le gouvernement tait
confi des chevaliers romains appels pistratges ou procurateurs
impriaux l'pistratgie du district. Ces trois districts taient : 1
la Haute Egypte ou Thbade, Thebais, avec Ptolemas aujourd'hui
Menchiye, pour capitale ; 2e l'Egypte moyenne, Heptanomis ; 3e la
Basse Egypte, c'est--dire le Delta.
L'pistratge de la Thbade est connu par un certain nombre
d'inscriptions ; son district comprenait tout le pays qui s'tendait
entre le Nil et le sinus arabicus ; la dfense de la route de Brnice
Coptos lui tait confie.
6. Procurator Augusti quadragesimae Galliarum.
Toutes les provinces de la Gaule taient runies dans une seule
rgion douanire dans l'intrieur de laquelle l'impt de douane pre-
nait le nom spcial de quadragesima Galliarum. Cet impt, comme
son nom l'indique tait du quarantime de la valeur des objets = 21/2
pour 100. Il tait lou un fermier ou une compagnie de fermiers.
Pour surveiller ces publicains, pour rgler les contestations qui s'le-
vaient entre leurs agents et le public, les empereurs avaient institu
un procurateur spcial dont la rsidence tait Lyon, C'est aussi
dans cette ville que se trouvait le centre administratif de la
quadragsime. C'est donc en Gaule que L. Egnatuleius Sabinus
remplit ses dernires fonctions.
Entre temps, comme on l'a vu plus haut, il avait t honor du
flaminat et de l'augurat Thysdrus. A Rome il avait t honor d'un
sacerdoce spcial, sous le titre de pontifex Palatualis. On connat
les attributions de ce prtre par un passage de Festus : Pala-
tualis flamen ad sacrificandum ei deae constitutus erat in cujus tu-
41

tela esse Palatium putabant (1). C'est la premire fois qu'il est
mentionn dans un document pigraphique.
Le pontifex Palatualis faisait partie des prtres dsigns sous le
nom gnrique de pontifices minores. Dans les inscriptions, relati-
ves aux personnages de l'ordre questre qui ont t honors d'un
sacerdoce rserv aux pontifices minores, ce sacerdoce est presque
toujours mentionn au dbut du texte en ces termes : pontifex minor,
pontifex minor Romae ou pontifex Romae sacrorum publicorum,
ou exornatus sacerdotio sptendidissimo pontificatus minoris.... etc.
Il est rare que le sacerdoce soit indiqu, comme sur notre inscrip-
tion, par son nom particulier.
Le monument funraire sur lequel tait place cette inscription
avait t lev par Egnatuleia Sabina, s ur de L. Egnatuleius
Sabinus, par L. Egnatuleius Sabinus son pupille, par Calidius
Proculus son neveu. Le marbre tant bris au dessous de ce dernier
nom et la fin des trois dernires lignes, il est impossible de dire si
d'autres parents avaient pris part l'rection du monument.

A. HRON DE VILLEFOSSE.

Membre de l'Institut.

(1) Festus, De verborum significatione, d. O. Mller, p, 245,5.


NOTE SUR LE PRIX DES FUNRAILLES
FUNRAILLES
CHEZ LES ROMAINS

Parmi les documents recueillis par M. le Gnral


Gnral G tschy dans
les ncropoles romaines de Sousse, figure une plaquette
plaque de marbre
portant une courte pitaphe
pi :

D(iis) M(anibus) s(acrum). L. Calpurnius Furnariuss vixit


annis LX et bene vixitvixi ; et ad funus ejus erogati denarii centum.
Cette inscription dont M. le Gnral
Gnral G tschy a bien voulu me
communiquer l'estampage, sort de la banalit ordinaire de ces sortes
de monuments. Non seulement on nous dit que le dfunt a vcu
soixante ans, mais on ajoute qu'il a bien employ sa vie et aussi
qu'on a dpens pour son enterrement cent deniers, soit un peu
plus de cent francs de notre monnaie. Comme on insiste sur ce
dtail,
ail, c'est que la somme tait relativement importante et que la
crmonie avait t honorable, tant donne la condition sociale de
L. Calpurnius Furnarius. Autrement dit, Hadrumte au IIe ou au
e
III sicle car on ne saurait dater la tombe d'une faon plus
rigoureuse un enterrement de petit bourgeois cotait une cen cen-
taine de francs.
C'est un renseignement de plus qui vient s'ajouter ceux que l'on
possde dj sur la question. Les textes qui mentionnent
mentionnent les frais
des funrailles ailleurs qu' Rome ne sont pas nombreux, je les
runis ici :
C. I. L., X, 680 (Sorrente) Tombe d'un enfant d'un an et trois
43

mois, fils de quelque personnage de la ville : huic decuriones locum


sepulturae et in funere sestertium V milia dec(reverunt).
Ibid., 688 Tombe d'un duumvir quinquennal : huic decurion(es)
publice locum [sepulturae et in] funer(e) sestertium V milia et statuam
[decreverunt].
Ibid., 1019 (Pompi) Tombe d'un dile : huic publice locus
datus et sestertium duo milia.
Ibid., 1024 - Tombe d'un duumvir: huic decuriones locum
monum(enti) et sestertium duo milia in funere et statuam equestr(em) [
in f]oro ponendam censuerunt.
C. I. L., VIII, 3079 (Lambse) Tombe d'un vtran de la lgion
e
III Auguste : Cum sibi in funus et monimentum sestertium duo
milia erogari cavisset .. filius et .. lib(rta) adjectis de suo sestertiis D
n(ummis) .. f(ecerunt).
Ibid., 2557 Rglement du collge des cornicines : Si qui obitum
naturae red(diderit) acc(ipiet) her(es) ips(ius) sive proc(urator)
denarios D.
C.I. L., 1501 (Sarmizegethusa, en Dacie) Collge d'ouvriers :
ad funus autem Zosimi et titulu(m) contulerunt colleg(ae)
fabr(i) denarios CCCC.
Ibid., 3583 ( Aquincum) Collge d'artisans: is ad quem (=
cujus) sepultura(m) coll(egium) cent(onariorum) denarios CCC
contulit.
C. I. L., XIV, ( Lanuvium) Rglement du collge funraire de
Diane et d'Antinos : Quisquis ex hoc corpore nostro pariatu(s)
decesserit, eum sequentur ex arca sestertii CCC n(ummi) ex qua
summa decedent exequiari nomine sestertii L n(ummi), qui ad rogus
dividentur.
C. I. L, II, 3114 ( Cabeza del Griego) Collge funraire :
sod(ales) Claudiani cont(ulerunt) ad funus sestertios CC.
Ainsi nous arrivons aux rsultats suivants :
Sorrente. Pour un magistrat, enterrement public, donc de
premire classe, 5.000 sesterces, ou en rduisant en deniers ( 1), 1250
deniers.
Pompi. Pour un enterrement, de premire classe aussi, 2.000
sesterces, soit 500 deniers.

( 1 ) Conformment aux donnes gnralement admises, je compte le denier comme


quivalent 1 f. 07, le sesterce 0,26 ; le sesterce est donc peu prs le quart du denier.
44

Lambse. Pour un cornicen, 500 deniers ; mais l'achat du ter-


rain, ou tout au moins les frais d'rection de la tombe, sont sans
doute compris dans cette somme.
Pour un vtran, 2500 sesterces, d'o il faut dduire les frais du
monument, soit entre 1500 et 2000 sesterces (1) ; peu prs 500
deniers.
Dans les rgions danubiennes. Pour un artisan, 400 deniers
moins le prix de l'inscription, d'une part (2) ; 300 deniers, de l'autre,
qui peuvent trs bien comprendre les frais du monument.
Lanuvium. 250 sesterces pour de trs petits gens ou 62 de-
niers 1/2.
Enfin en Espagne et pour la mme catgorie de personnes 200
sesterces ou 50 deniers.
De tout cela il ressort que suivant les villes les frais de pompes
funbres variaient d'une faon sensible (3), que de plus il y avait
plusieurs classes, suivant le rang des dfunts. Mais il n'y a pas
moyen d'arriver un rsultat prcis, d'autant plus que le prix devait
tre diffrent suivant le mode de spulture adopt. L'incinration
ncessitait sans doute des frais plus levs que la simple inhuma-
tion. Or, dans bien des cas, nous ignorons le procd employ pour la
spulture.
Le chiffre de cent deniers, qui se lit sur l'pitaphe de Sousse,
parat bien convenir pour un homme, qui n'appartenait ni aux di-
gnitaires de la cit, ni la classe la plus humble de la population,
mais la petite bourgeoisie.
R. CAGNAT.

(1) La pierre o est grave cette inscription de Lambse est un autel de 0m96 sans
ornement. Or, nous connaissons le prix de quelques autels de cette taille, provenant
pareillement de Lambse: Autel haut de 1 mtre (C.I. L., VIII, 3572) 500 sesterces ; autel
de l m06 (3668) 500 sesterces ; autel de 1 mtre (3254) 800 sesterces ; cippe de 1
mtre (2896) 1000 sesterces ; autel avec un portrait de centurion (3001), 1000 sesterces ;
autel de 1 mtre pour un vtran (3016) 1200 sesterces etc. Il faut donc compter en
moyenne entre 500 et 1000 sesterces pour une tombe de cette sorte Lambse ; mais le
prix n'est pas constant et les donnes qui rglent les variationsenous chappent. Cf. pour les
prix des tombes en gnral, Friedlaender, Sittengeschichte, 6 dition, p. 130.
(2) On ignore absolument ce que cotait une inscription dans le monde romain. Voir
cet gard Huebner, Exempla scripturae epigraphicae, p. XXIX.
(3) A Rome, comme il est naturel, les prix semblent avoir t un peu plus levs.
Exemples : C. I. L., VI, 9625 (corporation des mensores machinarii) 425 deniers. Cf.
Traugott Schiess, Die roem. Collegia funeraticia p. 101; Waltzing, Corporations proe
fessionnelles, IV, p. 526 Ibid., 6220 (Monument des Statilii) 490 deniers (in funeret
in ossibus et in novemdi(alibus) ) Ibid., 6221 : 225 deniers.
A L'AMPHITHATRE DE GARTHAGE (MARS 1903)

Le 7 mars dernier tait le XVIIe centenaire du martyre de


sainte Perptue et de sainte Flicit qui furent condamnes aux
btes dans l'amphithtre de Carthage, en 203.
A l'occasion de la fte qui devait avoir lieu pour clbrer digne-
ment ce centenaire, la petite chapelle souterraine, inaugure le 7
mars 1895, fut agrandie. La grille d'entre fut reporte sous le
second arc correspondant exactement celui sous lequel
elle tait place auparavant. Ces arcs portaient jadis le plancher de
l'arne.
Les murs anciens furent laisss dans leur tat. Il fallut cepen-
dant les exhausser quelque peu pour tablir la terrasse et pour
avoir des baies donnant de la lumire. Chaque baie reut une
grille de fer reproduisant le monogramme du Christ sous sa forme
constantinienne (X et P) accost de lalpha et de lomga.
Je fis entrer dans la maonnerie nouvelle plusieurs inscriptions
trouves prcdemment au mme lieu et conserves au Muse
Lavigerie.
En avant de la chapelle, d'autres textes furent aussi encastrs.
Ces inscriptions proviennent, pour la plupart, des siges rservs
et de la balustrade du podium. Quelques fragments appartiennent
une ddicace monumentale qui se lisait l'entre de l'amphithtre.
Une plaque de marbre ainsi fixe dans la muraille offre en
creux la forme de deux pieds. Nous avons trouv plusieurs de ces
dalles avec incrustation de semelles de bronze. Ces pieds portaient
une inscription telle que T. MODIVS FELIX sur une semelle, et
VOTVM . SOLVIT sur l'autre.
Dans la chapelle mme, une sorte de pierre d'autel (1) dalle dont
la face est marque d'une croix et d'une cavit demi-sphrique, a
t place sur la colonne au mot EVASI (2) grav peut-tre par un
bestiaire ou un condamn heureux d'avoir chapp la mort. La
cavit en forme de godet sert de bnitier.
Au sommet de l'escalier rustique qui descend vers la chapelle,

(1) Fouilles dans l'Amphithtre de Carthage (1896-1897) p. 55, n 161. (Extrait


du T. LVII des Antiquaires de France.)
(2) Id, p. 36, n 91.
46

j'ai fait dresser deux grande dalles ornes


ornes chacune d'un dauphin
sur chaque face. Elles proviennent de l'entre ou, si l'on prfre,
de la sortie d'un vomitorium. Ces dauphins qui se regardent, en
avant de la chapelle, produisent un certain effet. Ils rappellent par
leur origine ce passage d'une inscription trouve dans les ruines
du thtre de Rusicade, aujourd'hui Philippe, delphinis binis per
vias theatri adjunctis. (1)
J'ai t heureux de profiter des travaux d'agrandissement de la
chapelle des saintes Perptue et Flicit pour faire reporter ainsi
l'amphithtre bon nombre de pierres que j'y avais trouves. Elles
seront plus remarques l que dans le jardin de Saint-Louis. Louis. Les
archologues pourront les tudier sur place. Ils trouveront d'ailleurs
exposes dans les vitrines du Muse Lavigerie
L vigerie les plus importantes
pices, inscriptions, statuettes, lampes, dcouvertes au cours des
fouilles de l'Amphithtre
l'Amphithtre et qui complteront ce qu'ils auront vu
autour de la chapelle des saintes Perptue et Flicit.
Les prparatifs
paratifs de la crmonie, qui devait tre imposante,
ncessitrent aussi quelques travaux de terrassement. Ceux Ceux-ci
furent dirigs de faon dblayer tout le pourtour de l'arne et
permirent de constater que ses dimensions (2), en longueur et en
largeur, taient, moins d'un mtre prs, identiques celles du
Colise
ise de Rome.
Ces terrassements, malgr
malgr leur peu d'importance, amenrent la
dcouverte de plusieurs objets et textes.
Je signalerai une anse d'amphore rhodienne telle que l'on doit
en trouver dans les ruines de l'antique Hadrumte
Hadrum o le commerce
avec les les de la Mditerrane et l'archipel tait si intense aux IVe et
e
III sicles avant J. J C. Cette anse d'amphore, bien antrieure la
construction de l'amphithtre, porte l'estampille suivante :

Les autres pices dcouvertes appartiennent surement lpoque


Romaine : base de petite colonne de marbre blanc, chapiteau de

(1) Wilmanns, Exempla inscriptionum, n716.


(2) Le grand axe mesurait 86m 60 et le petit 53m 60
47

pilastre, petite console orne d'une palmette, dalles du podium


et de siges, lampe romaine du type de transition queue non
perfore et disque sans sujet dans une double ligne concentrique
de globules, lampe chrtienne, etc...
Mais la dcouverte la plus intressante a t celle d'une inscrip-
tion se rapportant aux combats qui se livraient contre les btes.
En voici la description et la copie.
Sur une petite tablette de marbre blanc, revers brut, paisse
de 0m025, large de 0m 13 et haute de 0m 18 :
.
CN LV R IV S
.
ABASCANTI
ANVS VOTO ..
2
POSVIT . LIBES .
VENATOR.
T AELEGENIO
RVM
Hauteur des lettres, 0m 015. Les A ne sont pas barrs.
Ce texte a t communiqu le 13 mars l'Acadmie des
Inscriptionset Belles-Lettres. M. Hron de Villefosse a fait remarquer
qu'il devait tre rapproch d'un vase en terre cuite trouv, il y a bien
des annes, dans les ruines de l'antique Thapsus et publi par
Temple et Falbe dans leurs Recherches sur l'emplacement de
Carthage.
On lit, en effet, sur ce curieux vase :
T E LE G E
NI NIK A
Cette lgende, m'crit M. de Villefosse, prouve bien qu'il s'agit
d'un vase donn en prix dans les jeux. Ce qui prouve qu'il a t
donn un venator, ou plutt au patron des venatores, ce sont les
reliefs dont il est entour.
Les rdacteurs du Corpus (VIII, 10479, 51) les dcrivent ainsi :
Puer cum urso Puer cum equo
Puer cum tauro Puer cum apro
Evidemment l'inscription de l'Amphithtre nous apprend qu'au
lieu de puer il faudrait dire venator.
L'acclamation s'adresse un membre de l'association des
Telegenii qui taient les entrepreneurs des venationes du cirque de
Carthage, les patrons des venatores qui y figuraient.
48

Notre inscription permet donc d'expliquer le texte de l'intres-


sant vase de Thapsus.
Voici d'autres inscriptions trouves l'Amphithtre dans les
travaux excuts l'occasion du XVIIe centenaire du martyre des
saintes Perptue et Flicit.
Dalle de podium paisse de 0m10. Les deux extrmits du boudin
portent une entaille et sur le boudin lui-mme on a grav les trois
lettres :
3
ROG
La largeur de cette dalle est de 0m 78. Les lettres sont sans doute
les initiales du nom Rogatus.
Sur une autre dalle du podium, de mme paisseur, haute de
0m 52 et large de 0m 69, deux grandes lettres trs bien graves :
4
CA .
Hauteur des lettres, 0m 24.
Sur la face d'un cube de pierre, haute de 0m 36 et large de 0m 50 :

EEFEIVL
5
LIX

Hauteur des lettres, 0m 09. Les deux premires ne s'expliquent


pas. Il est facile cependant de reconnatre le nom de Flix.
Sur la face rectangulaire, haute de 0m 36 et large de 0m 43, d'une
pierre longue de 0m 80, mais taille en pointe :

6
N
Hauteur de cette lettre, 0m 21.
Voici encore quelques autres inscriptions provenant de l'Amphi-
thtre et demeures indites jusqu' ce jour, quoique trouves en
mars 1898.
Sur la partie suprieure d'une corniche de marbre blanc :
7
//////MAN . NICV
Lettres grles en partie effaces, hautes de 0m 045.
Entre les deux N, il y avait peut-tre un I.
C V qui termine cette inscription doit se lire clarissimi viri.
49

Sur la tranche d'une dalle de marbre gris-noirtre, paisse de


m
0 105 :
/////////// TIICV
8
////// ITIANICV

Hauteur des lettres, la 1re ligne, 0m 025 : la 2me, 0m 04.


Mme observation pour C V que dans le texte prcdent.
Sur la tranche d'une dalle de mme marbre paisse de 0m 10 :

/////////////UNI
//////ONIIPK
9

Hauteur des lettres, 0m 03. Avant U, amorce d'une lettre, I.


Sur la tranche d'un fragment de dalle paisse d'au moins 0m 11,
dans un cartouche peine indiqu, large de 0m 065 :

10
MC. V

Hauteur des lettres, 0m 05. Pour le C, un appendice infrieur se


prolongeant en dehors du cartouche en fait peut-tre un G. A
gauche du cartouche, amorce d'une lettre.
Nous avons encore trouv une lampe de terre grise portant une
marque au revers :
. . .
. .
.
11
CORNELI
.
..
...
Le nom de ce potier a t trac la pointe sche avant la
cuisson. Ce devait tre un africain, car on ne le trouve pas parmi
les marques cramiques de Rome.
Saint-Louis de Carthage, 31 mars 1903.
A. L. DELATTRE,
DES PRES BLANCS

Correspondant de l'Institut.
APERU DE LA NCROPOLE DE SIAGU
(BIR BOU REKBA)

La ncropole de l'antique Siagu s'tend sur une longueur de 1


kilom. et est situe sur un peron terminant une ligne de crtes
orientes N. S. (approximativement). Le versant E. de cette ligne
de crtes est bord par une voie antique.
La ncropole comprend des tombeaux en forme de demi-cylin-
dres, reposant sur un soubassement formant marche, revtu ext-
rieurement d'un enduit de mortier. Intrieurement, les uns sont
creux, les autres pleins ; les premiers ont dj t fouills, les
seconds possdent au dessous d'eux un sarcophage.
Au milieu de ces tombeaux on en rencontre plusieurs de forme
cubique ou prismatique, ayant environ 2 mtres de cts.
Voici la description d'un tombeau demi-cylindrique qui a t
fouill.
La partie cylindrique tait en partie totalement dtruite.
Orientation N. E. S. O.
Dimensions : longueur, 2m10; largeur, lm10; hauteur du soubas-
sement, 0m85.
Le demi-cylindre tant dtruit, il n'a pas t possible d'en avoir
les dimensions.
A l'intrieur se trouvait un sarcophage ciment parfaitement
conserv; il mesure 35 centimtres de haut sur 35 de large. L'ou-
verture a t pratique sur le cte N-E, o il a t trouv une tte de
jeune homme dont le crne avait t respect par le temps, ainsi que
les mchoires suprieure et infrieure prsentant encore presque
toutes les dents.
Du ct des pieds, se trouvait une amphore laquelle il man-
quait les 2 anses : sa hauteur mesure 25 centimtres.
Aprs cette amphore, 2 briques rouges superposes et places
de champ, formaient cloison. Au del de cette cloison et terminant
le sarcophage, un petit compartiment de 20 centimtres de ct
51

renfermait un vase une seule anse et de 20 centimtres de hauteur.


Cet objet n'est marqu d'aucune estampille.
Ni l'amphore, ni ce vase ne renfermaient d'objets.
L'extrmit du sarcophage tait ferme l'aide de tuiles cimentes.
Deux autres tombes places ct offraient les mmes dimen-
sions et taient construites de la mme faon.
En rsum, cette ncropole, si on en juge par ce coup d' il
rapide, ne renfermait que les restes de gens d'une situation modeste, si
l'on tient compte de cette habitude qu'avaient, tant les Romains que
les Etrusques, de faire des caveaux, images plus ou moins fidles des
chambres qu'habitaient autrefois les dfunts.
Enfin, cette ncropole se rapproche sensiblement de celles
d'Hadrumte, avec ses tombeaux demi-cylindriques.
Bir bou-Rekba, 23 Avril 1903.

NOGU
Lieutenant au 4 me Tirailleurs.
MEMBRE ACTIF
UNE TROUVAILLE DE MONNAIES ROMAINES
DU IIIe SICLE

faite sur le Domaine de l'Enfida.

Les monnaies antiques des priodes carthaginoises, romaines,


vandales et byzantines se trouvent en abondance l'tat isol en
Tunisie, soit qu'on les rencontre parses la surface du sol ou
enfouies dans les dcombres, soit qu'on les exhume des tombeaux
o elles sont gnralement places sur la lampe funraire. Trouves
dans ces conditions, elles sont presque toujours frustes, uses par
le frottement des eaux, oxydes par le contact de l'air ou par
l'effet du feu dans les spultures incinration, revtues enfin
d'une gangue terreuse et compacte d'o l'on extrait rarement et
avec beaucoup de peine une mdaille digne de faire bonne figure
dans une collection.
La plupart des monnaies de bonne conservation proviennent
de trouvailles comprenant un grand nombre de pices runies
dans une cachette, gnralement dans un vase de terre qui les a
mises l'abri des diverses dgradations, tout en leur laissant la
belle patine antique qui augmente leur valeur aux yeux des
numismates.
Malheureusement, ce genre de cachette se rencontre rarement
en Tunisie, du moins jusqu' prsent. Il est probable que ces trou-
vailles deviendront plus frquentes, grce au progrs des dfriche-
ments, aux labours plus profonds faits par la charrue europenne et
enfin aux fouilles mthodiques entreprises sur l'emplacement des
anciennes cits. A Carthage, le Pre Delattre ne compte que trois
ou quatre dcouvertes, au cours de ses fouilles, de ces petites
cachettes, dont deux, il est vrai, taient composes de monnaies
d'or de l'poque byzantine. Pour ma part, depuis une quinzaine
d'annes que je m'occupe de la recherche des monnaies antiques, il
ne m'est arriv qu'une fois d'avoir la joie trs grande, pour un
apprenti numismate, de pouvoir tudier une de ces trouvailles et
53

cette satisfaction je la dois l'aimable obligeance de M. Coeytaux,


le sympathique directeur de la Socit Franco-Africaine de l'Enfida,
qui voulut bien me faire parvenir en 1890 une grande partie du petit
trsor dcouvert par un de ses khamms dans un champ du domaine
de la Socit.
Une femme arabe qui passait dans ce champ situ au nord de
Dar-bel-Ouar, prs de l'Oued Sidi Abd el Goui, aperut quelques
petites pices de monnaie sur le bord d'un trou creus par les
rats. Elle en fit part son mari qui dfona le sol l'aide d'une
pioche et trouva, environ 30 centimtres de profondeur, un vase
de terre grossire, en forme de gargoulette, de la contenance
approximative d'un litre et demi, que la pioche avait bris et d'o
s'chappa un ruissellement de petites pices de bronze qui le rem-
plissaient.
Le vase m'ayant t peu aprs envoy Sousse, je constatai
que toutes ces pices taient des petits bronzes romains variant,
comme dimension entre le n 1 et le n 6 de l'chelle de Mionnet
c'est--dire entre 9 et 23 millimtres environ de diamtre. Ces
monnaies taient, en gnral, dans un bon tat de conservation,
peu oxydes et revtues d'une jolie patine verte. J'en oprai un
triage minutieux et en fis deux parts, l'une comprenant les mon-
naies faciles classer, l'autre les pices de petite dimension et de
frappe trs barbare mais se rattachant, cependant, certainement aux
types des prcdentes.
La premire part tait compose de pices appartenant sept
empereurs diffrents, savoir : Gallien, Postume, Victorin pre,
Ttricus pre, Ttricus fils, Claude II le Gothique, Quintille. Les
Postume, les Victorin et les Quintille n'y figuraient que par un
petit nombre d'exemplaires; les Ttricus pre et fils, par contre,
taient en abondance.
Si on se reporte aux dates de l'histoire romaine, on remarque
que ces monnaies, bien que frappes sous sept empereurs diffrents,
ont d tontes tre mises dans une priode de temps relativement
restreinte, de vingt annes au plus.
En effet, nous voyons :
Gallien, empereur de 253 268 ;
Postume, de 259 267 ;
Victorin pre, de 265 267 ;
Ttricus pre, de 268 273 ;
54

Ttricus fils, Csar en 268 ;


Claude II le Gothique, empereur de 268 270 ;
Quintille, en 270.
Ces monnaies appartiennent donc l'poque comprise entre les
dates extrmes de 253 et 273, c'est--dire aux vingt annes renfer-
mant la priode dite des trente tyrans, qui s'tend aux huit dernires
annes du rgne de Gallien, (260-268), priode pendant laquelle on
ne compte pas moins de 17 usurpateurs et de 30 mme si on y fait
figurer les fils associs leurs pres comme Csars ou comme
Augustes. Ce sont des empereurs provinciaux surtout qui surgissent
ainsi, ou bien des gnraux que leurs armes acclament et qui
meurent bientt, les uns et les autres victimes des passions de
rvoltes qui les avaient ports au pouvoir.
Presque tous ces usurpateurs ont frapp monnaie pendant leur
rgne souvent phmre. Il en rsulte que ces monnaies taient,
pour la plupart, provinciales et ne se rpandaient que lentement et
par infiltration dans les autres parties de l'Empire.
Au sujet de la trouvaille qui nous occupe, faite au centre de la
Province d'Afrique, aux confins de l'ancienne Zeugitane et de l'an-
cienne Byzacne, il est curieux de constater que la plus grande
partie des monnaies comprenant ce petit trsor, frappes l'effigie
des deux Ttricus, de Postume et de Victorin, sont, en ralit, des
monnaies gauloises, provenant de cet phmre empire Gaulois
fond en 259 par Postume, avec Trves pour capitale, l'instigation
de la clbre Victorine dite la mre des camps , et qui se termine en
273 par la victoire d'Aurelien sur Ttricus Chlons-sur-Marne.
Ces monnaies se rencontrent assez rarement en Tunisie l'tat
isol. En tout cas, je n'ai jamais entendu parler d'autres trouvailles
collectives de pices ces effigies.
Il ne serait donc pas tmraire de supposer, en prsence de la
runion d'un millier de ces pices, qu'elles aient t importes des
Gaules et qu'elles aient fait partie du pcule d'un de nos anctres
gaulois, soldat, colon ou marchand, qui les aurait enfouies, il y a 16
sicles et demi, dans le sol de notre Tunisie actuelle.
Quant aux monnaies de Claude II le Gothique, premier empereur
illyrien, elles se rencontrent trs frquemment sur le sol tunisien,
principalement sous le type CONSECRATIO, l'aigle ou l'autel,
frappes, d'ailleurs, aprs sa mort.
J'ai pu classer la plupart de ces monnaies au moyen de l'ou-
55

vrage d'Henry Cohen et Feuardent. Il en est cependant quelques-unes,


des Ttricus surtout, dont je n'ai pu retrouver la description du
revers dans cet ouvrage. Il est juste de dire que ces pices taient de
fabrication barbare et devaient appartenir cette nombreuse
catgorie dont parle M. Feuardent, pices indchiffrables, mais
offrant cependant toutes des imitations plus ou moins rapproches,
souvent caricaturales, des types qui sont connus. Il faudrait se
reporter, pour leur description, aux belles planches graves jointes
au magnifique ouvrage de M. le baron de Witte sur les
Empereurs des Gaules .
Je me bornerai donc citer les quelques revers les plus rares
que j'ai pu relever au cours de cette tude, sans parler des
empreintes de la face qui, toutes, comportaient les ttes ou les
bustes radis particuliers aux petits bronzes de cette poque.
Gallien
R). DIANA FELIX. Diane dbout droite, tenant une javeline et un arc
tendu. Un lvrier court devant elle.
R). LIBERO. P. CONS. AVG. Panthre marchant gauche. A l'exergue, B.
R). NEPTVNO CONS. AVG. Hippocampe (cheval marin) droite. A l'exer-
gue, N.
R). SOLI CONS. AVG. Pgase s'levant en l'air.

Postume
(Trs petit nombre d'exemplaires)
R). PROVIDENTIA AVG. La Providence debout gauche tenant un globe et
un sceptre transversal.
Victorin pre
R). INVICTVS. Le Soleil, demi-nu, marchant gauche, levant la main
droite et tenant un fouet.
R). PAX AVG. La Paix, debout gauche, tenant une branche d'olivier et un
sceptre. Dans le champ, V et une toile.

Ttricus pre
R), COMES AVG. Victoire debout gauche, tenant une couronne et une
palme.
R). HILARITAS AVG. L'Allgresse debout gauche, tenant une palme et
une corne d'abondance.
R). LAETITIA AVGG. La Joie debout, rpandant le contenu d'une corne
d'abondance dans un vase plac auprs d'elle.
56

R). ORIENS AVG. Le Soleil passant gauche, levant la main droite et


tenant un fouet.
R). PAX AVG. L'Allgresse debout tenant une longue palme et un sceptre.
Ttricus fils
R). SPES AVGG. L'Esprance marchant gauche, tenant une fleur et
relevant sa robe.
R). SALVS AVGG. Femme debout gauche tenant un rameau et une
ancre.
Ttricus pre et Ttricus fils
F). TETRICVS P. F. AVG. Buste radi et cuirass droite de Ttricus pre.
R). v. ESV. TETRICUS CAES. Buste de Ttricus fils radi droite. Cette
pice, d'une assez grande raret dont j'avais heureusement not
la description a t gare ou enleve de mon mdaillier.
Claude II le Gothique
R). CONSECRATIO. Autel allum orn de guirlandes.
R). GENIVS AVG. Gnie coiff du modius, debout gauche, tenant un
patre et une corne d'abondance.
R). PAX AETERNA. La Paix debout gauche tenant une branche d'olivier
et un sceptre transversal.
R). LIBERSTAS AVG. La Libert, debout gauche, tenant un bonnet et
une corne d'abondance.
Quintille
R). CONCO EXERC. La Concorde, debout gauche tenant une enseigne
militaire et une corne d'abondance.
R) PROVIDENT, AVG. La Providence debout gauche indiquant avec une
baguette un globe qui est ses pieds et tenant un sceptre.
En ce qui concerne les monnaies trs nombreuses de frappe
barbare, je me contenterai de relever les quelques particularits
suivantes :
Une mdaille l'effigie de Victorin et au revers d'une Victoire
portant une palme a, dans le champ, une croix trs nettement
trace. Cette particularit, qui a t remarque par M. Feuardent
sur diverses monnaies de Ttricus pre, a t explique par ce savant
numismate par le fait que des monnaies de Ttricus ont continu
tre frappes longtemps aprs sa mort et mme l'poque du chris-
tianisme, Cette explication ne pourrait convenir la trouvaille de
Dar bel Ouar qui ne comporte aucune pice de date postrieure
l'anne 270.
57

Un petit bronze quinaire, qui semble appartenir Ttricus pre


porte dans le champ du revers (vase sacrifice) la mention S. C.
rserve aux grands et moyens bronzes.
Un buste de Ttricus pre porte un collier de cuirasse prsentant
un relief inusit et trs remarquable. Un petit bronze de Ttricus
fils n'a pas de revers. A la place de ce revers, est trace en creux la
reproduction exacte de la face.
Une monnaie de Quintille, au revers de FORTUNA REDVX
porte, du ct face, deux profils juxtaposs et bien nets de Quintille.
On ne peut voir l, comme dans le cas prsent, qu'une bizarrerie de
frappe.
CAPITAINE DE BRAY,
4e Tirailleurs Algriens
Ncropole de lOued Keceb
HAOUANETS DU DJEBEL-BEHELIL

Description de quatre nouveaux groupes

Les haouanets, pluriel de hanout, boutique, sert dsigner des


cryptes funraires ou chambres tailles dans le roc qui se rencon-
trent assez frquemment en Tunisie (1).
On en connat neuf El-Harouri, 6 kilomtres de l'est de Kelibia.
Monsieur le docteur Carton a fort bien dcrit celles de Chouach,
prs de Medjez-el-Bab, au nombre de 46 (2). Il en existe encore
Henchir-ech-Chett (3) et Kouch-Batia.
Je viens d'avoir l'occasion d'en rencontrer 56 nouvelles situes en
4 groupes diffrents dans les contreforts du Djebel-Behehil au
sud-est de Grombalia. Ces haounets ne sont pas signales sur l'atlas
d'archologie.
Le premier groupe A, situ l'est de la Koubah de Si
Mohamed-el-Atrach, comprend 13 grottes situes sur 2 tages dont
10 l'tage suprieur et 3 l'tage infrieur; elles sont toutes
cubiques, simples, de dimensions habituelles, 1m 80 environ dans
tous les sens; l'entre mesure en gnral 0m80 de haut sur 0m 40 de
large, mais cette entre est tantt une simple porte, tantt un long
couloir atteignant 1m50. En effet, les blocs de grs o elles sont
creuses sont fort beaux dans la plupart des cas.
Examinons-les dans l'ordre du Nord au Sud :
A 1. Elle prsente une entre s'ouvrant dans une surface plane, la
partie mnage au-dessus forme un auvent et la partie au-dessous
forme un fort relief. Au-dessous de la niche se voit un relief

( 1 ) TISSOT.
(2) CARTON. Les ncropoles primitives de Chaouach. L'anthropologie.
(3) CARTON. Dcouvertes pigraphiques et archologiques.
60

figurant une colonne surmonte d'un chapiteau rectangulaire


(figure 1).

A 2. Crypte assez insignifiante, petite, sans niche, mais prsen-


tant une trace de bande rouge trs nette courant sur le haut des
parois latrales.
A 3. Crypte prsentant sur le ct droit de la porte d'entre des
rainures ressemblant celles qu'aurait produit un frottement pro-
long (4).Dans lintrieur, sur la face du fond se trouvent deux petites
niches de 10cm de haut sur 15 au-dessus de celles de droite se
voient des traces de dessins en rouge comprenant une ligne
mdiane vers le milieu de laquelle viennent aboutir une srie
d'angles emboits en chevrons.
Les deux niches sont runies par des bandes rouges, au-dessous
d'elles on distingue deux personnages.
Le plus visible est gauche, il a une
attitude hiratique qui rappelle celle
des dieux gyptiens, il est vtu d'une
robe s'arrtant au mollet, la tte est
celle d'un ruminant, surmonte des
cornes ramifies d'un cerf, le bras
gauche est en flexion la faon du bras
gauche d'un escrimeur, le bras droit
tient une bande rouge qui soutient
galement la main droite du deuxime
l'autre extrmit (figure 5 et 6).
Le premier personnage mesure
0m 23, l'autre est plus petit.
A 4. La chambre suivante a une entre oblique par suite de la

(4) Fort semblables aux polissoirs nolithiques, mais la forme des coups de ciseaux
aux murs indique que les tailleurs de haouanets employaient les mtaux.
61

conformation du rocher, elle prsente une niche la paroi post-


rieure et les angles de cette paroi sont en partie masqus par deux
colonnettes pris-
matiques sarr-
tant 0m50 du
sol, la figure 4
en indique la
forme La paroi
infrieure est
0m40 plus bas
que le couloir.

A 5. L'entre est 1 m 50 au-dessus du niveau actuel du sol, elle


contient une niche dans la paroi du fond avec deux moulur es en creux
qui l'encadrent et des traces de peinture rouge entourant les parois. Du
ct gauche de la niche on remarque
un carr divis par deux diagonales,
les triangles latraux ainsi dlimits
sont colors l'ocre (figure 7).
A 6. Cette crypte est plus
profonde et mesure de lm80
2 mtres de hauteur par suite de
l'usur e du plancher r duit en sable; le couloir est excentr ique
cause de la forme convexe du bloc. Elle est mme corne un angle,
ct de la niche du fond on relve des traces de peinture consistant en
traits parallles et en carrs triangles rouges ( fig. 8 et 9.)

A7. Ne prsente rien de remarquable.


A 8. Elle porte des traces de bandes rouges, elle est demi-
comble par des apports de sable venu d'une fissure de la paroi
62

postrieure, elle est un peu en arrire des autres, la niche est dans la
paroi de gauche.
A 9. Elle est trs intressante par suite de traces de peinture,
une bande de 0 m5 de large courant 10 c / m de profond. Un peu
au dessus on remarque une gazelle fort bien dessine et d'un beau
style, les oreilles en arrire et les cornes en lyre (Fig. 9). Un dessin
d'oiseau (oie ou autruche) est moins reconnaissable. Elle possde
une niche de 30 c/m de ct sur la paroi postrieure nord.
De plus, la paroi suprieure est perce d'une ouverture circulaire
de 0m50 de diamtre; elle s'ouvre au milieu d'une sorte d'auge
creuse dans le toit, entoure d'un rebord de 0m 10 environ, perce
d'un trou au dessus de la porte comme pour permettre l'coulement
des eaux (Fig. 10).

Fig. 10

A 10. Elle est situe 15 mtres environ au Sud de A 9; elle


prsente une niche divise en deux par une colonnette brise. La
porte d'entre est dgrade. Cette crypte mesure lm80 en tous sens
Les chambres A 11, A 12 et A 13 sont situes sur un plan antrieur
et infrieur au Nord de A1.
Les environs sont jonchs de poteries grossires, noirtres grains
de quartz.
Le groupe B se trouve dans les flancs du Djebel-Bazina ; il pr-
sente une porte en forme de T, face au Sud donnant entre dans
une chambre assez vaste avec deux niches irrgulires dans la paroi
63

Est ; la paroi Ouest parat avoir t dfonce et donne dans une


seconde chambre dont le sol est 0m 50 plus haut que celui de la
premire, elle mesure 1m20 en tous sens et communique par une
ouverture arrondie dans une troisime chambre d'un niveau plus
lev encore. Une fissure a enlev une partie de la paroi Ouest de
cette dernire pice mesurant 1m20 en tous sens.
Dans ce qui reste de la paroi antrieure, on remarque une niche
demi-circulaire descendant jusqu' 0m20 du sol et de 0m30 d'ou-
verture environ ; dans la paroi infrieure on remarque des cavits
hmisphriques de 0m 10 de rayon.
Cette grotte a t trs dtriore et a pu servir de poste d'obser-
vation; on remarque, en effet, que de la porte on aperoit toute la
valle de Djedidi Hamamet et un poste d'observation romain form
d'une grotte dans le Dj. Hamamet.
Le groupe C comprend 4 cryptes assez loignes les unes des
autres (50 mtres environ) dans le flanc Sud d'un contrefort du
Djebel-Bazina, adoss l'Oued-Keceb. Trois d'entre elles C 1, C2 et C3
sont ouvertes au Sud, C 4 s'ouvre dans le ct Est d'un bloc de grs
s'avanant en peron vers le Sud. L'entre de C1 s'ouvre dans
une surface plane amnage dans le rocher, disposition dont la

figure 11 donne une ide nette, l'angle S.-E. est effac cause du
voisinage de la surface extrieure ; encore cette prcaution a-t-elle
t insuffisante et n'a pas empch cette crypte d'tre corne. Elle
mesure 2m50 en tous sens.
C2 prsente une disposition peu prs semblable, l'entre du
couloir est 0m 50 du sol, le rocher faisant banquette devant cette
entre, la surface plane dans laquelle elle s'ouvre est entoure d'une
saillie circulaire, elle possde une marche ronde sous l'extrmit
interne du couloir. C1 et C2 ont une niche carre.
64

C3 s'ouvre lm50 du sol, elle mesure L 1m 80, P 2m 10, H 1m70, elle


n'est pas symtrique par rapport l'entre.
C4 s'ouvre 1m du sol et son entre est situe dans une face
verticale entoure d'un relief rectangulaire. On ne rencontre pas
de dbris de poteries autour de ces chambres, ce qui tient sans
doute la nature du sol marneux trs ravin chaque pluie.
Le groupe D, dont la planche hors texte montre 27 entres et qui
se trouve 300 mtres au sud du groupe C, est de beaucoup le plus
important ; il comprend trois plans se dveloppant en arc de cercle
convexit NW autour d'un plateau, bord par un oued encaiss et
innom. Il est noter qu'au nord-est, en bas, le dfil tombant dans
l'Oued Keceb est barr par un mur cyclopen large de 2 mtres
environ, s'appuyant de chaque ct, aux rochers verticaux, formant
les parois de la gorge. C'est bien l, un mur de dfense form de
blocs de pierres sches assez irrguliers, sans ciment, ne ressem-
blant en rien aux murs de retenue de terre qui se voient dans le
centre de la Tunisie ou au Matmata, ni un barrage pour les eaux ;
d'ailleurs la premire valle cultivable se trouve 3 kilomtres au
dessous. Les chambres sont numrotes par plans, le 1er tant le plus
lev et dans chacun de l'W l'E.
L'ensemble D1 et D2 comprend deux chambres runies par
l'boulement de leur cloison commune dont il ne subsiste plus qu'un
pilier. D1 mesure 2m 36 de large sur 2m de profondeur, le sol dgrad ne
permet pas la mesure de la hauteur, elle possde une niche de 0m24
de large sur 0m30 de haut au milieu de sa paroi postrieure et autour
de la face suprieure rgne une corniche de 0m 14 de haut sur 0m 10 de
large. D 2 plus petite avait un couloir de 70 c/m de large et mesurant elle
mme 95 de large sur 1m50 de profondeur environ. D 3 trs dgrade
ne possde pas de niche, elle mesure 1m 10 X 1m20 X 1m.
D 4 s'ouvre une hauteur de 3 mtres dans le mme bloc que D 3
elle mesure 1m80 en tous sens et possde une petite niche carre et
une grande niche agrandie ou faite probablement postrieurement.
D 5 s'ouvre 2 mtres de hauteur et ne possde pas de niche.
D 6 a un couloir d'environ 1 m80 qui prsente dans sa paroi de
droite, une niche de 6m50 de large sur 0m60 de haut. Cette crypte,
cause du voisinage des parois du rocher, prsente la forme
gomtrique dite du tas de pierre.
65

D 7 en grande partie dtruite prsente une petite niche et mesure


m
1 80 en tous sens.
D 8 dont le couloir s'ouvre 1m 80 du sol et mesure 1m50 en tous
sens et n'a pas de niche. D 9 cubique mesure 1m80.
D 10 possde des peintures, 3 personnages de face, de 0m50 de
haut ; l'un d'eux parait tenir un drapeau, les cuisses sont trs grosses
comme recouvertes d'une culotte bouffante, les yeux sont figurs par
un simple point. D'autres traits reprsentent un bateau peron
avec un mt muni d'une grande antenne latine, des traits parallles
figurent des rames. Le couloir de cette chambre s'ouvre au niveau
du plancher, elle possde une niche carre.
D 11 assez dgrade; on y voit galement une niche. D 12 s'ouvre
1m 20 du sol, mesure L lm 50 x P lm10 x H lm 70; peut tre range
dans les plus petites. D13 est presque compltement dtruite. D14
a une entre surleve et une petite niche. D15 bien que trs
dgrade au niveau du sol prsente une corniche en relief peinte en
rouge. D 16 est presque dtruite. D 17, D 18 ne prsentent aucun
intrt. D 19 assez grande mesure 2m en tous sens. D 20 oriente
l'Est est corne par suite de l'effondrement d'une paroi trop mince.
D 21 prsente une petite niche latrale entoure d'une corniche en
relief. D22 a une entre surmonte d'une sorte d'auvent, ct de
cette entre se voit une niche extrieure. D23 prsente une entre
1m50 du sol surmonte d'un auvent montrant une moulure, dans le
couloir est aussi une moulure; elle possde une niche ronde, une
corniche et mesure 2m50 de ct sur 1m 80. D 24 est sans intrt.
D 25 possde un couloir court avec moulure encadrant son orifice
interne, une corniche qui court le long de son plafond est remar-
quablement polie.
D 26 prsente une petite niche, dont le poli trs fin, contraste avec
l'effritement de la base des parois, ses peintures demandent une
description spciale. La niche est entoure d'une bande forme
d'une suite de carrs diviss par des diagonales dlimitant, quatre
triangles isocles dont 2 base carre, les triangles opposs par les
sommets sont peints en rouges, et dans la srie des carrs ce sont
alternativement les triangles bases verticales puis horizontales qui
sont peints. J'ai retrouv ce motif ornemental dans les chambres du
groupe A, et aussi dans celle de la ncropole d'El Harouri, prs de
Kelibia. Au niveau du bas de la niche, une bande rouge de 0m 10 de
large, dans laquelle des cercles blancs sont rservs (6 de chaque
66

ct de la niche) court le long des parois ; 3 de ces cercles prsentent


leur centre un trou de 5 7 c/m de profondeur sur 2 de diamtre
ayant pu servir ficher quelque objet. Dans le rectangle form au
dessus de cette bande, on voit, affronts la niche deux poissons avec
un il rserv en blanc, 3 nageoires suprieures et 2 infrieures,
mais sans qu'il soit possible d'en dterminer l'espce; prs des parois
latrales on trouve dans le rectangle de droite, une srie de traits
assez confus pouvant reprsenter la proue d'un bateau, dans celui
de gauche une toile 5 branches forme de traits, assez irrgulire
dans son ensemble; sous la niche une large bande verticale remplace
la colonne qui existe parfois (D29). Deux spirales rouges 5 spires
figurent une volute de chapiteau supportant la niche (Fig. 12).

D 27 consiste en une crypte commence qui est arrte 0m20 de


profondeur et qui se trouve dans le mme bloc que D 27.
D 28 prsente des traces de peintures; sur la paroi de droite, coupant
une corniche qui rgne autour du plafond, se trouve une petite
niche encadre par deux colonnettes en partie brises ; cette niche est
soutenue par une colonne qui prsente un relief de 8 c/m surmonte
d'un chapiteau ; sous celui-ci rgne une srie de 5 petites oves. Le
ft de la colonne est cannel, la faon d'une colonne ionique
(Fig. 4). Sur la paroi de gauche se trouve une colonne d'un tout
autre style plus barbare et moins lgante, supportant un chapiteau
arrondi surmont d'un cube, le tout soutenant la corniche ; le ft est
conique, il s'vase largement et se dtache au trois quarts de la
muraille (Fig. 3).
67

D 29 deux entres par suite de l'effondrement d'un des angles,


elle est trs vaste mesurant 2m 10 de ct sur 1m60 de hauteur. Elle
possde une grande niche arrondie, trs dgrade et des traces
de peintures.
D 30 est sans intrt.
D 31 approfondie possde une niche et une marche arrondie qui permet
d'y descendre, elle mesure 2m72 de large sur 1m98 de profondeur. Elle
est remarquable par ses peintures, qui
reprsentent sur la paroi du fond droite de
la niche un bateau et gauche un ruminant,
un b uf probablement, mais plus lanc, d'un
dessin assez pur (Fig. 13). Sur la paroi de
gauche, se trouve un bas relief montrant un
homme de profil gauche, les bras en l'air,
la prominence des fesses est bien accentue;
il parait combattre un ruminant aussi lev que
lui, muni de fortes cornes recourbes rappelant le mouflon,
s'lanant sur lui, le mouvement des membres antrieurs replis

sous le poitrail est bien naturel (Fig. 14). Sur la paroi de droite, un
autre bas relief parat reprsenter un cheval, mais la crinire n'est
pas indique, (Fig. 15) ; a et l se voient d'autres traits en rouge:
un trait vertical surmont d'une tache pyriforme allonge la faon
dont les arbres sont reprsents dans les hiroglyphes gyptiens.
Les bas reliefs rappellent nettement les rupestres dcrits en plu-
sieurs points de l'Algrie, de la Tunisie et de la presqu'le du Sina.
D 32 est trs dgrade. D 33 prsente une niche et des traces
de peinture; elle mesure 2m10 de ct sur 1m80 de haut. D34 est
68

protge par un norme Callitris qui empche d'y pntrer. D 35


prsente deux chambres successives, mais elles sont combles jus-
qu' 0m10 du plafond, et lon ne peut y pntrer. D 36 possde une
entre dgrade et une petite niche. D37 est trs dgrade.
Pour conclure notons que j'ai rarement trouv, la porte d'entre,
les encastrements trs nets rencontrs dans d'autres ncropoles du
mme genre(1). Un dispositif analogue existe dans deux chambres,
mais l'extrmit interne du couloir. C'est mon avis, dans ce cas,
une disposition purement ornementale, ne jouant aucun rle dans
la fermeture.
Notons galement que toutes les grottes n'ont pas de niches et
que ces niches ont toujours une forme rectangulaire.
J'admets aussi que les diverses modifications dans la forme des
haouanets, (forme en tas en pierres, etc.), pour les groupes dcrits
sont adaptes la forme du rocher et que le type gnral est celui
des spultures puniques cubiques de Carthage.
Enfin, sans vouloir mettre une hypothse sur l'origine de ces
spultures avant de pouvoir la dmontrer, je ferai remarquer les
influences probables qui ont agi sur leurs constructeurs :
1 Influence des sculpteurs des rupestres ;
2 Influences des Egyptiens, soit directes, soit indirectes par les
Phniciens, (mais directe mon avis; dmontres par la facture de
certains des dessins (Dieu tte de cerf, b uf, gazelle) ;
3 Influence des Phniciens, (forme des tombeaux, des niches
rappelant celles des tombeaux de Carthage) ;
4 Influence des Grecs (colonne ionienne) ;
D'ores et dj, il me semble difficile d'admettre que les hommes
qui ont lev les dolmens, aient t les mmes que ceux qui ont
creus les haouanets. A Chaouach, o ils sont juxtaposs, il n'y aurait
eu qu'une concidence.
Dr DEYROLLE, Mdecin aide-major
LICENCI ES-SCIENCES

(1) Cf. CARTON.


INSCRIPTIONS DE LA COLONIA THUBURNICA

Les jolies ruines de Colonia Thuburnica sont situes 11 kilo-


mtres au nord de Ghardimaou, prs du Hammam des Oulad Ali,
l'antique Ad Aquas. Je ne les visite jamais sans y faire quelque
trouvaille, plus ou moins importante. Cette anne, j'ai dcouvert
dans ces ruines, et dans celles qui les entourent, un certain nombre
de funraires, dont un seul sort, par son texte, du type banal.
1. A El Guela, stle en grs, termine en pointe sa partie
suprieure, brise en bas. Hauteur, 0m50; largeur, 0m35; paisseur,
0m15; hauteur des lettres, 0m035.

D. M. S
MAMILIA RVFIL
IA. SAMBVC. PIA
VIXIT . ANNIS
LXXX .

Lisez la 2e ligne Ru(fi) filia. Notez le cognomen Sambuc, qui est


indigne, et l'ge avanc de la personne dfunte dont le nom est
grav ici.
2. Fragment trouv dans l'oued Enja, au pied mme de la forte-
resse de Thuburnica. Stle en grs, inscription dans un cartouche.
Hauteur, 0m26; largeur, 0m36 ; paisseur, 0m30; hauteur des lettres,
m
0 05.
VS QI
VIR PIVS VIXIT
ANN. LXIX . HS .
::PRAEDIS. SVIS

Le personnage dont le nom tait grav sur cette stle parait avoir
t un duumvir. Il avait t inhum dans sa proprit. La topographie
de la rgion, la proximit de la ville et du point o a t trouve la
stle, les petites dimensions du monument indiquent ce domaine
70

ne devait pas tre tendu. J'imagine que c'tait quelque villa avec un
champ ou un verger. L'examen des lieux ne permet pas d'admettre
qu'il y ait eu autre chose.
3. Dans une ruine tendue, situe 5 kilomtres l'O.-S.-O.
de Colonia Thuburnica, et appele Henchir Achem, on remarque
plusieurs monticules couverts de pierres de taille et renfermant
les tables infrieures de plusieurs pressoirs, reconnaissables leur
rigole circulaire. Ce fait, joint d'autres constatations du mme
genre, montre que toute cette partie de la Rekba tait couverte
d'oliviers. D'ailleurs on voit actuellement un trs grand nombre
de ces arbres, l'tat sauvage, et entirement vigoureux, non seu-
lement dans la montagne, mais dans les champs fertiles, auxquels
ils donnent l'aspect d'olivettes.
On sait que cette rgion de Colonia Thuburnica renferme un
type de stles qui ne lui est pas particulier, mais que l'on y ren-
contre avec une frquence exceptionnelle, ce qui tient en partie
la nature des rochers qui peuvent s'y dbiter en blocs trs longs. Ce
sont de vritables menhirs, des stles presque coniques, termines en
gnral par une pointe leur partie suprieure, et le plus souvent
d'une hauteur suprieure deux mtres. Elles offrent en outre
presque toujours une ornementation abondante, la reprsentation
d'emblmes ou de personnages en un fort relief, traites avec cette
navet ou plutt cette barbarie que l'on considre comme
caractristique de l'art indigne.
Il est certain que c'est en partie la nature de la pierre que sont
dues les grandes dimensions de ces stles, et la grossiret des
sculptures; le grs du pays renferme des bancs trs rsistants,
mais qu'il est impossible de tailler finement. Aussi toutes les mou-
lures un peu dlicates qui ornaient les difices taient-elles en stuc
ou en mortier appliqu sur la pierre, simplement dgrossie.
Nanmoins, il est impossible de ne pas voir dans les dimensions,
la forme de ces stles, et la manire dont sont sculpts leurs orne-
ments, la survivance de rites funraires, de traditions architectu-
rales, et l'expression d'ides religieuses ayant appartenu aux anti-
ques Lybiens.
C'est sur une stle de ce genre que se trouve l'inscription sui-
vante :
Hauteur, 2m ; longueur, 0m40; paisseur indtermine (un des
71

cts du monument est enfoui), hauteur des lettres, qui sont uses,
0m06.
LIA . C . F
QVINTA PIA
VIXIT ANNIS
LX . HSE

Cette pierre a servi une basse poque former la base d'un


pressoir; on y voit encore une partie de rigole circulaire, moins,
ce qui est moins probable, qu'elle ait t taille aux dpens du
pressoir.
4. Au mme endroit, grande stle cintre la partie sup-
rieure, et brise l'extrmit infrieure. Les ornements et les
caractres en sont extrmement uss.
Hauteur, 1m60 ; largeur, 0m61 ; paisseur indtermine ; hauteur
des lettres, 0m 025.
Tout en haut de la face sculpte, on remarque un petit trou de
scellement dans lequel devait tre fix un crochet ou une tige mtal-
lique pour y suspendre quelque objet.
De haut en bas, sont disposs trois cartouches. Le suprieur con-
tient trois personnages, sculpts en relief, dont un homme et une
femme seuls reconnaissables, et qui font des libations sur un autel.
Au-dessous, le cartouche est divis en trois colonnes, renfermant
chacune une inscription funraire.

DM S DMS DMS
.
Q. ETI I BIEIA M APIA
I..VS .. M.. A MIMA
E. A . . M NA
VIXIT .. I . PIAVIXI
/////// V I X I T ANIS
//////// ANIS.... LXX
////// ... H S HSE
//////// .. S . .

Le cartouche sous-jacent renferme deux personnages en relief,


se donnant la main. Plus bas, dans le dernier cartouche, divis en
72

deux sont des caractres trs uss, et que je n'ai pas eu le temps
d'tudier suffisamment, J'ai pu reconnatre seulement quelques
lettres droite.
P ..
Q
XX
. I

DOCTEUR CARTON
Mdecin militaire.
PRSIDENT.
NOTES SUR QUELQUES STATUETTES & LAMPES
CHOISIES DANS LES COLLECTIONS NOUVELLES

e
DE LA SALLE D'HONNEUR DU 4 RGIMENT DE TIRAILLEURS

Les recherches faites, cette anne, dans les ncropoles


d'Hadrumte (Sousse) et de Vico Augusti (Sidi-el-Hani) ont permis
d'ajouter de nombreuses pices aux collections de la Salle
d'Honneur du 4e Rgiment de Tirailleurs :
20 statuettes ;
100 lampes puniques, paennes et romaines :
1 flambeau en bronze ?
50 verres iriss, dont quelques uns mritant une mention
spciale ;
5 tabell dvotionis ;
2panoplies (objets de bronze, miroirs, bagues.);
des fuseaux pour tisser la laine ?
des poteries de toutes sortes.
ont t runis dans une vitrine nouvelle ;
4 petites mosaques donneront, aprs restauration, 4 mdaillons
intressants.
Beaucoup de ces pices sont indites. Elles font ncessaire un
supplment au catalogue tabli par Monsieur le capitaine Hannezo.
Le bulletin de la Socit Archologique de Sousse publiera, pro-
chainement, ce travail de classification mthodique.
Aujourd'hui, nous ne profiterons de cette publication que pour
dcrire celles des statuettes qui nous ont paru offrir un intrt par-
ticulier.
Les planches ci-jointes en donnent un aperu d'ensemble.
STATUETTES
I. Debout, sur un socle circulaire, un jeune esclave soutient
de la main droite un plat garni qui repose demi sur son paule
droite ; le bras gauche reste coll au corps.
74

Son manteau, retenu seulement la partie suprieure, est rejet


en arrire laissant la poitrine et les jambes compltement nues. Les
membres sont trapus.

La face est joufflue et imberbe ; la tte massive est dcouverte ; les


cheveux sont taills court.
Traces de peinture : rouge pour le visage avec traits noirs aux
sourcils ; jaune pour les cheveux ; bleu avec rayures noires pour le
manteau. Deux traits bistre soulignent les pectoraux; deux points
de mme couleur la pointe des seins. Trou d'aration en arrire.
Terre rouge. Hauteur: 0m165m/m. Provenance Sousse.
II. Joueuse de flte, debout sur un socle circulaire.
Elle laisse retomber derrire elle une draperie que soutiennent
ses deux bras replis. Dans chaque main elle tient une flte ; la
main droite s'appuie au ventre, la main gauche sur la cuisse gauche
porte lgrement en avant.
La tte, un peu penche, est encadre d'une abondante chevelure
ondule, runie en arrire en chignon allong et bas.
A droite, une petite fille nue se serre contre la Joueuse. Elle
porte les cheveux flottants. Les deux bras sont replis et ses mains
se croisent sur son ventre.
Toute entire en argile noire cette statuette ne porte pas trace de
75

peinture. Le buste de la Joueuse est assez lgant, mais le mouve-


ment de la jambe gauche est disgracieux.
Trou d'aration en arrire.
Hauteur : 0m16c/m. Provenance : Sidi-el-Hani.
III. Homme, debout, sur un socle ovale.
Il s'appuie, gauche, contre une colonnade ; la hanche droite est
rejete droite ; le genou gauche est lgrement avanc.
Une toge jete sur l'paule gauche recouvre le bras gauche et
retombe en larges plis verticaux.
Le reste du corps est nu.
La figure, finement modele, semble pensive ; des cheveux
boucls, relevs haut et maintenus par un ruban forment comme un
diadme.
Les jambes sont ornes de gros bracelets au dessus des chevilles,
A droite, un chien, la queue en panache, est assis aux pieds de
son matre. Il porte au cou un collier.
Le bras droit du personnage
manque, il retombait le long
du corps.
Trace de peinture: rouge
la chevelure.
Trou d'aration au dos.
Terre grise.
Hauteur, 0m213.Provenance :
Sidi-el-Hani.
IV. Sur un socle
pyramidal, cercl de rouge,
une femme nue en stuc ros.
En quilibre sur la jambe
gauche tendue, elle se penche
pour saisir avec la main
droite son talon droit,
la jambe droite en flexion.
La main gauche s'appuie sur une colonne ionique.
La tte est lgrement penche en avant et droite.
Des rayures rouge carmin figurent un collier qui forme boucle
sur la gorge et des anneaux aux chevilles.
Des bracelets forment des bourrelets dors sertis de rouge aux
bras et aux poignets.
76

Tout le buste est tatou de points rouges rgulirement disposs.


Un triangle dor couvre le bas ventre.
Traces de peinture encore: noire aux yeux, rouge aux lvres et
aux narines.
En avant de la colonne se tient, debout, un jeune enfant aux che-
veux noirs flottants.
Cette statuette est d'un joli modle. Le corps est svelte, les jambes
sont lgantes. La poitrine est, peut-tre, un peu troite. Les
extrmits seules, mains et pieds, sont vraiment disproportionnes.
Hauteur 0194m/m, Provenance; Sidi-el-Hani.
V. Sur un socle ovale un Amour est assis, de ct, en ama-
zone, sur un Dauphin; son bras droit entoure la queue releve de la
ble, sa main gauche, leve au dessus de sa tte, soutient une
draperie.
L'Amour est coiff d'un bonnet qui, laissant le front dcouvert,
cache les oreilles et descend en arrire jusqu'au cou.
Traces de peinture : ros et bleu sur l'Amour et sur le Dauphin ;
bistre sur le bonnet.
Trou d'aration au verso.
Terre rouge.
Hauteur: 0m14c/m. Provenance : Sousse.

CAPITAINE ORDIONI.
du 4e Tirailleurs.
INSTRUCTIONS
POUR LA CONSTITUTION D'UNE COLLECTION D'EMPREINTES

D'INTAILLES, DE CAMES ET DE CACHETS ANTIQUES

La " Socit Archologique de Sousse " se propose de constituer


une collection d'empreintes d'intailles, de cames et de cachets
antiques de toutes sortes ; dans ce but elle fait appel toutes les
bonnes volonts et, en particulier, aux amateurs et collectionneurs
de ces petits objets antiques, si intressants tant de points de vue.
Cette Socit a bien voulu me confier le soin de runir et, si
possible, de classer ces empreintes et elle m'engage donner les
indications ncessaires pour que cette collection ait un coup d' il
d'ensemble agrable et qu'elle puisse tre intressante, utile mme,
ceux qui consultent tous les documents de l'histoire ancienne, si
faibles soient-ils, pour arriver la mieux connatre.
La " Socit Archologique de Sousse" a dcid que les em-
preintes en question seraient mises sur des feuilles de carton enca-
dres de bois. Les cadres feront saillie de quelques millimtres en
dessus et en dessous de leur feuille de carton (environ 6m/m en
dessus, 3m/m en dessous), de manire protger les empreintes,
car ils devront tre placs les uns sur les autres dans des
cartonniers faits leurs mesures.
Chaque cadre portera en avant un anneau pour le tirer hors du
cartonnier, puis un numro et, au besoin, quelques indications trs
sommaires, qui seront visibles en ouvrant le cartonnier. Un rper-
toire plac ct du meuble contenant l'ensemble de ces cartonniers
permettra de prendre la planche d'empreintes dsire.
Tout cadre enlev d'un cartonnier pourra sans inconvnient y
tre remis par dessus les autres, chaque cartonnier ne devant con-
tenir qu'un petit nombre de feuilles, une dizaine environ. L'ordre
des numros n'est donc pas ncessaire, vu le nombre rduit de
feuilles. Les cadres, faits de bois dur, glisseront facilement les uns
sur les autres, leur poids tant faible.
78

La question principale est celle des empreintes elles-mmes. Il


serait dsirable de les avoir en pltre fin, mais bien peu de per-
sonnes seront disposes manier du pltre, si fin soit-il, et la
" Socit Archologique de Sousse " acceptera avec reconnaissance
de ses membres et de ses amis des empreintes tout, simplement de
cire cacheter, de prfrence de couleur rouge, ou bien de couleur
claire.
Le meilleur moyen, pour avoir de jolies empreintes de cette cire,
me parat tre le suivant : prendre une vulgaire cuillre soupe de
fer tam ; y mettre un petit fragment de bton de cire cacheter,
l'y faire fondre doucement au dessus de la flamme d'une bougie ou
d'une petite lampe, en vitant qu'il y ait bullition car, alors,
l'empreinte aurait des bulles d'air et verser la quantit ncessaire
sur du papier ou du carton ; puis, aprs quelques secondes
de refroidissement, imprimer lintaille, le came ou le cachet.
On peut ainsi obtenir des empreintes trs nettes, quoiqu'ayant
beaucoup plus d'paisseur que les cachets de cire habituels, qui,
tant faits sur de la cire trs chaude, sont gnralement trs minces
et se cassent facilement.
De cette faon, galement, on vite le noircissement par la
fume, qui abime la plupart des empreintes. La couleur est uni-
forme et le dessin ressort bien. Les cachets de couleur noire font
moins bien ressortir les dtails.
Aprs un ou deux essais, on arrive facilement ne verser que la
quantit de cire pteuse voulue pour chaque empreinte et on
obtient alors de vritables pastilles de cire, paisses de deux ou
trois millimtres, bien rondes, donnant du coup d' il aux em-
preintes qu'elles portent.
Mais une empreinte n'a tout son intrt, toute sa valeur archo-
logique, que si on connait l'origine et la nature de la pierre ou du
cachet qu'elle reprsente. Ds lors, la Socit prie les personnes
dsireuses de lui tre utiles dans la constitution de cette collection
de bien vouloir ne pas omettre de lui indiquer les particularits
suivantes des pierres ou cachets de mtal, de verre, ou autres dont
elles voudront bien lui envoyer les empreintes.
1 Le lieu d'origine (ville, village; dfaut, la rgion.)
2 Si possible, le monument dans lequel ou prs duquel a t
trouv l'objet et la date approximative ;
79

3 Le genre de pierre (sardoine, cornaline blonde ou brune, agate,


etc.) o le mtal (cuivre, bronze, fer, mtal prcieux, etc.) ;
4 Le sujet de la gravure ; dfaut, tine opinion ;
5 Le nom du possesseur;
6 Le nom et l'adresse, bien lisibles, du membre ou de l'ami de la
Socit qui fait l'envoi.
La " Socit Archologique de Sousse" s'adresse tous pour
cette collection et sera heureuse d'inscrire le nom de ceux qui
voudront bien lui faire des envois d'empreintes au dessous de ces
empreintes elles-mmes.
Elle s'adresse particulirement aux collectionneurs de Tunisie,
puisque le sol de ce pays s'est rvl, en certains endroits, vraiment
riche en intailles romaines, et elle les remercie d'avance de leur
concours obligeant.

Edouard RIETMANN,
Secrtaire gnral adjoint.
NOTES HISTORIQUES SUR SOUSSE

PREMIRE PARTIE

Priode prpunique et punique


jusqu' 146 avant J.-C.

La Tunisie, et la rgion de Sousse en particulier, a


t habite depuis les temps les plus reculs. Laissant
de ct les lgendes antiques et les mythes relatifs
ce pays, abordons en de suite l'histoire. Les peuplades
originaires furent les Chamites, les Gtules et les
Ngres, rparties en trois zones, des ctes l'intrieur
de l'Afrique septentrionale : ces peuplades vinrent,
XV OU XIV si- au XVe ou XIVe sicle avant notre re, se mlanger de
cle J.-C
envahisseurs : Perses, Mdes, Armniens, Lybiens,
ces derniers devant former l'lment prpondrant de
la population des contres comprises dans la Tunisie
actuelle; un sicle plus tard, des peuplades
Chananennes (Phniciens) vinrent galement
s'implanter dans le pays et y formrent, avec leurs
prdcesseurs, la race Liby-Phnicienne ; les faits
historiques rapports par Hrodote el Salluste
confirment la fable et sont eux-mmes confirms par
l'anthropologie.
Les Phniciens avaient abord sur les ctes d'Afri-
que pour y crer des tablissements commerciaux
(emporia) assez semblables aux comptoirs que les Eu-
ropens crrent plus tard dans leurs expditions
coloniales aux Indes et en Afrique. Les premiers
tablissements Phniciens en Afrique furent au nom-
bre de trois dans la rgion appele actuellement Tripo-
81

XIVe OU XIIIe litaine : Leptis, O a, Sabrata ; puis plus au Nord furent


sicle avant
J.-C.
fondes Thapsus (Ras Dimas), Leptis minor(1) (Lemta)
Hadrumetum (1) (Sousse), Tuns (Tunis), Bou-Chateur
(Utique) et Hippo-Diarytos (Bizerte).
VII sicle av. Longtemps aprs la Reine de Tyr, oblige de quitter
J.-C.
son pays, vint s'tablir au Nord-Est de Tunis et y fonda
une ville Carthago. Cette ville se dveloppa rapide-
ment et sa rputation se rpandit au loin, grce aux
marins Carthaginois qui fondrent des comptoirs
jusqu' l'Ocan ; elle sut aussi s'attirer l'amiti de toutes
les colonies phniciennes dj tablies sur la cte
d'Afrique et utiliser, le cas chant, leurs ressources
de tout genre.
A ce moment Hadrumte tait dj une ville deve-
nue riche, trs commerante et une des plus popu-
leuses de la cte; l'emporium des premiers jours et le
village Lybien avaient fait place une cit.
Carthage aurait voulu s'emparer de la Sicile qui
tait alors aux mains des Grecs; des luttes s'engag-
rent de part et d'autre et, aprs des alternatives de
succs et de revers, les Carthaginois durent signer avec
340 avant J.-C Timolon un trait qui assurait la libert des cits
grecques.
La paix fut de courte dure : un aventurier
Agathocle russit lever une arme et dbarquer
dans la presqu'ile du Cap Bon dans le but d'attaquer les
tablissements Carthaginois; il fait brler ses vais-
seaux pour ter tous la possibilit d'une fuite, et
commence sa marche sur Soliman, Nebeul, Tunis et
autres villes du Nord qui se rendent, puis va mettre le
sige devant Hadrumte, de concert avec Elymas, roi
des Lybiens, devenu momentanment son alli.
On l'apprend Carthage; les Carthaginois veulent pro-
fiter de ce que l'ennemi est loin d'eux pour attaquer
Tunis occup par un faible dtachement d'Agathocle;
mais celui-ci est prvenu. Laissant alors la plus grande

(1) POSTEA PHNICES (Jug. XIX). Hipponem, Hadrumetum


Leptim aliasque urbes in ora marituma, condidere (Salluste).
82

partie de ses forces devant Hadrumte et, ne prenant avec


l u i que sa garde et un simple peloton d'escorte, il gravit
en silence la montagne de Zaghouan et y allume des
feux qui sont vus de Tunis et d'Hadrumte;
les Carthaginois croyant l'arrive d'Agathocle
307 avant J.-C. abandonnent le sige de Tunis et les dfenseurs
d'Hadrumte, croyant l'arrive des renforts ennemis,
se rendent discrtion (Diodore de Sicile).
306 avant J.-C. Agathocle ne devait pas profiler longtemps de ses
succs : l'anne suivante, il tait battu son tour et
oblig de regagner la Sicile.
289 avant J.-C. Aprs la mort d'Agathocle les Syracusains vcurent
au milieu des luttes intestines et furent de nouveau
279 avant J.-C. menacs par les Carthaginois. Pyrrhus, roi d'Epire,
mari une fille d'Agathocle, vint leur secours, mais,
275 avant J.-C. aprs quelques succs, regagna son pays.
Les Carthaginois taient alors matres des principales
routes maritimes et taient installs en Sicile, en Corse,
en Sardaigne et autres villes de la Mditerrane ; Rome, de
son ct, voulait aussi dominer dans la Mditerrane et
occuper elle seule la Sicile; des questions de parti dans
264 avant J.-C. cette le amenrent la rupture des relations entre Rome et
Carthage et la guerre fut dclare ; la lutte qui va durer plus
d'un sicle et demi, de 264 146 avant J.-C, peut se diviser
en trois priodes et se terminera par l'crasement de la
Carthage punique.
264 241 Pendant la premire guerre punique, les Carthagi-
avant J.-C.
nois sont d'abord battus en Sicile, puis sur mer ; les
Romains dbarquent en Afrique, mais dfaits ils doivent
regagner la Sicile suivis par les Carthaginois qui
acceptent la paix, abandonnent la Sicile et s'engagent
payer Rome une contribution de guerre.
Entre la premire et la deuxime guerre punique a lieu
la rvolte des Mercenaires qui, leur retour de Sicile, ne
sont pas pays de la solde qui leur est due par Carthage ;
les Mercenaires prennent les armes, soutenus par les
indignes et mme par certaines villes phniciennes de
la cte, t e l l e s que Hadrumte; des combats sont livrs,
83

des actes de cruaut inouis sont commis ; Carthage ne


russit rprimer cette rvolte qu'aprs avoir chang le
commandant de ses troupes, Hannon, qui fut remplac
par Amilcar. Ce gnral Carthaginois gagna sa cause la
cavalerie indigne et spara les diffrents corps
insurgs; l'un de ces corps, command par Spendius,
fut enferm dans le dfil de La Hche
(au Khanguet, prs Tunis) et prit entirement de faim
et massacr.
Amilcar, vainqueur, fut envoy par Carthage en
Espagne pour en faire la conqute; durant neuf annes,
il marcha de succs en succs; mais, tu, il est remplac
par son gendre Adsrubal qui, par trait sign avec
Rome, arrte ses troupes sur la rive droite de l'Ebre;
il meurt, son tour, assassin par un esclave gaulois
soudoy par Rome. L'arme dsigne alors pour la
commander le jeune fils d'Amilcar, Annibal, qui n'a-
vait que 29 ans, mais qui tait connu pour ses qualits
militaires et surtout pour sa haine contre les
Romains.
Annibal attend et saisit la premire occasion pour
tirer vengeance de toutes les calamits que Rome a
fait fondre sur Carthage ; rompant le trait de 227, il
assige Sagonte, ville allie des Romains, et s'en em-
pare.
Des ambassadeurs romains, envoys Carthage pour
rclamer contre les agissements d'Annibal dont ils
exigent le dsaveu et mme la remise entre leurs
218 201 mains, sont mal accueillis, d'o la deuxime guerre
avant J.-C.
punique.
Annibal, prenant l'offensive, marche sur l'Italie par
218 217 la Gaule et les Alpes qu'il passe au Grand
avant J.-C.
Saint-Bernard, crase les Romains au Tessin, la
216 avant J.-C. Trbie, Trasimne, Cannes; mais ne recevant aucun
secours srieux, le Gnral carthaginois, affaibli par ses
victoires mmes, vit bientt la fortune se retourner
contre lui.
Les Romains reprenant courage remportrent quel-
ques succs locaux et, dcids frapper un grand
84

coup, envoyrent Scipion en Afrique pour faire diver-


sion.
Annibal est rappel d'Italie pour revenir au secours
de Carthage ; il dbarque Lemta, gagne de suite
Hadrumte, o il tablit son quartier gnral. Ds son
arrive il fait reposer ses troupes, rassemble ce qu'il peut
trouver de soldats, vivres, chevaux ; un chef numide
Mztule lui amne mille cavaliers ; un autre chef
des nomades Aracides, nomm Tychus, lui en amne
2.000 ; Vermina, fils de Syphax, vient avec les derniers
soldats de son pre ; 4.000 hommes lui sont envoys
par Philippe, roi de Macdoine; Asdrubal, lui-mme,
lui remet les dbris de son arme. Les Carthaginois,
l'annonce de l'arrive de Scipion devant leurs murs,
donnent l'ordre Annibal de quitter Hadrumte pour
marcher l'ennemi ; Annibal continua ses prparatifs
et ne partit que lorsqu'il eut 50.000 combattants. Il
marche alors sur Zama; sa cavalerie fut mise en
droute. Il essuya plusieurs autres checs et, aprs
avoir essay de trouver la mort dans la lutte Cilla
(Zouarin), il regagna Hadrumte aprs une course de
557 (1) kilomtres en 48 heures, suivi tout d'abord d'une
faible escorte, puis d'un seul homme de confiance.
A peine arriv dans Hadrumte, il se mit refaire
une arme ; il rassembla la garnison, la renfora
d'hommes achets et des fuyards de Cilla. Il avait dj
runi Marthama, prs d'Hadrumte, 6.000 fantassins
et 500 cavaliers quand il fut appel Carthage pour
traiter de la paix avec les dlgus Romains.
La paix fut conclue, terminant cette deuxime guerre
punique et ruinant effectivement Carthage dont la fin
est proche.
Quelques annes plus tard, Annibal, cherchant
rveiller le patriotisme de ses concitoyens pour
reprendre la revanche contre Rome, est oblig de quit-
ter Carthage pour se rfugier d'abord Hadrumte ;

(1) D'aprs les relations, ce chiffre est exagr, Zouarin tant situ
peu prs mi-distance du Kef Maktar, 257 kilomtres conviendraient
mieux.
85

de l, dcid fuir la haine des Romains et l'ingrati-


tude des Carthaginois, il gagne un port prs d'Alipota
(Mehdia) et s'embarque pour l'exil dans lequel il devait
vivre jusqu' sa mort. (Il succombe l'ge de 64 ans,
en absorbant un poison).
A la suite de frquentes incursions des Berbres,
commands par Massinissa, sur le territoire de
Carthage, une nouvelle lutte s'engage entre les
Carthaginois et les Berbres ; ceux-ci, soutenus par
Rome, acceptent le combat et sont victorieux. Rome,
effraye du relvement rapide de Carthage, n'attendait
qu'une occasion pour mettre excution la destruction
de sa rivale ; la paix venant d'tre rompue, les
Romains refusent tout arrangement et viennent
assiger Carthage qui, malgr une dfense des plus
opinitres, fut emporte d'assaut aprs avoir t
dsole par la famine. La voix du vieux Caton fut
entendue: Delenda est Carthago . Carthage fut rase
de fond en comble et le territoire Carthaginois, ainsi
que les villes phniciennes, furent organises en
province romaine sous le nom d'Africa. Ainsi se
terminait la troisime et dernire guerre punique.

Priode Romaine
de 146 avant J.-C. 439 de J.-C.
Pendant les guerres puniques et surtout, pendant la
deuxime guerre, Hadrumte avait port des secours
l'arme romaine ; aussi, aprs la destruction de,
146 avant J.-C. Carthage, fut-elle rcompense des avances qu'elle avait
faites Rome; elle acquit du terrain et la libert, de
plus elle conserva son autonomie dans l'organisation
de la province Romaine ; le titre de " Civitas libera et
immunis " lui fut accord, et ses habitants furent con-
nus sous la dnomination de " Populus liber
Hadrumetinorum ".
Les rgions de la Tunisie centrale et orientale
86

actuelle furent encore troubles par les luttes des


princes berbres entre eux, Hiempsal et Adherbal,
contre Jugurtha, qui, malgr son audace et sa fourbe-
rie, finit par lasser les Romains. Ceux-ci envoyrent
Marius, pour pacifier le pays ; les Berbres furent
106 avant J.-C. battus, Jugurtha fait prisonnier, et la Byzacne dfini-
tivement soumise l'influence romaine.
L'histoire montaire d'Hadrumte commence peu
prs cette poque. L'on a retrouv des monnaies por-
tant, ct du nom de la ville, ceux de fonctionnaires
romains dont le premier fut celui de Sextilius, propr-
teur de la province; ce Sextilius tait de plus Septemvir
des Epulons, c'est--dire membre du Sacerdoce ou
Collge compos de 7 personnes dont les fonctions
consistaient ordonner les crmonies, ftes
publiques, banquets auxquels ils prsidaient ;
C. Fabius-Catulus figure aussi comme suprme
magistrat de la ville, prpos surveiller le
monnayage.
L'Afrique va servir de nouveau de champ clos pour
vider les querelles des partisans de Marius et de Sylla,
puis de Pompe et de Csar.
Les Pompiens, chasss d'Italie, viennent se rfugier
en Afrique et mettent la main sur ce pays avec le con-
cours du chef berbre Juba I; Csar, ne pouvant ce
moment poursuivie lui-mme ses adversaires, envoie
Curion pour lutter contre Varus et Juba.
119 avant J.-C. Varus lve alors une lgion de citoyens romains
pour occuper Hadrumte, en raison de son commerce
important et du chiffre de sa population; un de ses
lieutenants Lucius Csar, apercevant prs de Clup a
(Kelibia), la flotte imposante de Refus, lieutenant de
Csar, va s'chouer avec sa trirme sur la cte et s'enfuit
par terre jusqu' Hadrumte o ses vaisseaux eurent
le temps de se rfugier. Varus apprenant de son ct
l'arrive d'une flotte Csarienne envoie un courrier
Considius Longus, chef de la Lgion d'Hadrumte,
avec ordre ce dernier de le rejoindre de suite;
la lgion, prvenue le 8 Juillet, tait le 13 Utique.
Curion avait pu dbarquer et s'tait avanc vers
87

Tunis et Utique. Aprs quelques succs suivis de


revers, il se fait tuer bravement pour ne pas survivre
au dsastre; les dbris de son arme furent massacrs,
ou se rendirent, ou prirent dans les flots en cherchant
un refuge sur les navires qu'ils trouvrent ancrs sur la
cte.
Csar ne peut aller immdiatement venger son lieu-
tenant et ses soldats; il prpare une expdition et
rassemble en Sicile ses troupes au fur et mesure de
47 avant 8 leur formation.
octobre J.-C.
Enfin, il quitte Lilybe (Marsala) destination de
l'Afrique pour combattre la coalition soutenue alors
par Seipion, Caton, les deux fils de Pompe, Labienus
et Juba Tout d'abord sa flotte est disperse par la
tempte; quelques navires purent nanmoins se ralli er
au vaisseau de Csar; on se dirige vers le port
d'Hadrumte. Cette vi l l e tait alors occupe par deux
lgions sous les ordres de Considius, en prvision de
l'arrive de Csar et parce qu'elle tait suspecte d'tre
quelque peu attache aux intrts de Csar et, de plus,
parce qu'elle occupait, avec Utique, le premier rang
3 novembre 47 parmi les villes du pays. Csar s'arrte l'entre du
Avant J.-C. port, attend ses navires disperss, puis fait dbarquer
ses troupes disponibles, soit 3.000 hommes d'infanterie
(presque tous de nouvelle leve) et 150 chevaux. Ds
son dbarquement, il fut rejoint par un nomm Sittius,
ancien complice de Catilina, qui, aprs s'tre mis la
solde des princes africains, disposait de quelques
soldats aventuriers de tous pays organiss la romaine
et, ce qui valait mieux pour Csar, avaient une
grande connaissance des lieux avec des intelligences
dans les deux royaumes Numide et Maure.
I l parat que Csar, descendant terre, fit un faux
pas et tomba la face contre le sol; sa chute tait dj
considre comme un mauvais augure, lorsqu'il eut la
prsence d'esprit de s'crier en prenant une poigne
de sable " Teneo te Africa ". De funeste, le prsage
devint favorable. Csar tablit un camp prs de la ville
et s'y retrancha la hte pour rsister la cavalerie
88

numide qui pouvait arriver tous moments. Considius


qui commandait la place, stupfait de l'arrive
imprvue de Csar, n'essaya mme pas d'attaquer
cette poigne d'hommes dbarqus, il ne songea qu' la
conservation de la vi l l e ; il ferma les portes, distribua
ses troupes sur les remparts et redoubla les gardes;
de plus, il fit tout pour qu'Hadrumte put rsister en
tous points. Il est vident que Considius ne fut pas
assez bien inform des forces de l'ennemi et que Csar
dbarqua ses troupes dans un endroit o elles taient
hors de la vue de la vi l l e ; la peur du commandant de la
place ne pouvait avoir d'autres raisons. Csar fit
cheval le tour de la place pour la reconnatre et s'assurer
de l'impossibilit de l'enlever par un coup de main ;
en effet, Hadrumte avait une triple enceinte d'un
dveloppement d'au moins 5 kilomtres avec un vallum
extrieur et de hautes murailles. Il rentra son camp et
dfendit ses soldats de piller les environs.
L. Plancius, son lieutenant, essaya de parlementer avec
Considius; celui-ci reut le messager, le fit gorger en sa
prsence et envoya, sans la dcacheter, la missive
Seipion. Csar passa une nuit dans la plus grande
inquitude attendant une rponse et en mme temps ses
navires; sa petite arme tant beaucoup trop inf-
rieure, quant au nombre, aux troupes de la garnison et
aux troupes qui pouvaient fondre sur elle d'un
moment l'autre. Aucune rponse de Considius
n'arrivant, aucun navire csarien n'tant en vue, Csar
prit la dcision, par prudence, de quitter Hadrumte et
de chercher plus au sud une ville maritime, moins bien
garde, mieux dispose en sa faveur et pouvant servir
de point d'appui sa flotte.
5 novembre 47 De grand matin, il leva le camp et se dirigea , sur
Avant J.-C. Ruspina (Monastir) en mme temps que sa flotte
quittait le port et gagnait Leptis (Lemta).
Les Hadrumtins sortent alors en foule de la place et
Considius va chercher rparer la faute qu'il a
commise, avec l'aide et les renforts que vont lui prter
les cavaliers numides arrivs propos Hadrumte
pour y toucher leur solde.
89

Le camp romain est envahi et l'arrire-garde de


Csar est poursuivie. La petite arme s'arrte alors;
la cavalerie, quoique infrieure en nombre, prend
hardiment l'offensive, tel point que 30 cavaliers
gaulois, lancs en avant, rejetrent dans la place les
2 000 cavaliers numides ; ce succs remarquable est d
tant la bravoure de cette petite troupe de cavalerie
qu'aux bonnes dispositions prises par Csar pendant
sa marche, en utilisant le terrain, en suivant le bord
de la mer et en rendant impossible tout mouvement
tournant ou de flanc de la part de l'ennemi. La cava-
lerie numide persistant harceler l'arrire-garde,
aussitt aprs la rentre dans le rang des cavaliers
gaulois, Csar plaa alors en arrire quelques vieilles
cohortes qui tinrent en respect l'ennemi et permirent
5 novembre 47 l'arme de gagner lentement mais srement Ruspina o
Avant J.-C.
l'on arriva le soir mme.
Le mme jour Seipion apprenait par Considius que
Csar avait dbarqu ; il met en route toutes ses trou-
pes, lanant en avant sa cavalerie numide commande
par Labienus, Ptrius et Placidius. Ruspina avait fait sa
soumission Csar : d'autres villes suivent alors son
exemple et apportent aux troupes csariennes des
6 novembre vivres en change des bons procds de leur chef qui
avait interdit tout pillage. Csar marche sur Leptis
7 novembre Lemta) qu'il occupe, puis revient le lendemain
Ruspina.
8 novembre Au moment mme o la cavalerie de Seipion arri-
vait Hadrumte et poursuivait sa marche sur Rus-
pina, Csar tablissait son camp retranch Ruspina
et partait dans la direction de l'Ouest (vers Sahaline)
pour se procurer des vivres et du fourrage, mais, arrt
par les premires troupes pompiennes, il dut accepter
le combat ; Labienus, tout d'abord victorieux, fut la
fin de la journe, oblig de se replier sur Hadrumte
o il attendit les lgions amenes d'Utique par Seipion ;
ses blesss dans la bataille avaient t en si grand
nombre qu'il dut employer des charriots pour
les transporter jusqu' Hadrumte.
90

du 9 au 11 Csar se fortifie dans son camp de Ruspina (plateau


novembre d e S k a n s ) . Seipion tait arriv Hadrumte avec 8
lgions et 3.000 chevaux ; aprs s'tre concert avec
Labienus et Btrius, il rassemble toutes ses troupes et
arrive devant le camp de Csar qu'il va bloquer.
Malgr les attaques journalires des Pompiens et les
privations que durent subir ses soldats et ses chevaux,
Csar se maintint en position attendant toujours des
renforts demands en Sicile. Son prestige, loin de
s'affaiblir, augmentait. Acholla (El Alia) lui demandait
une garnison qui lui fut accorde; Csar prit possession
de cette vi l l e malgr Considius qui, ayant appris cette
nouvelle Hadrumte, t a i t parti en toute hte,
mais arriv trop tard Acholla, avait d rtrograder
sur Hadrumte. Csar ayant reu des renforts quitte
momentanment son camp de Ruspina et, marchant
vers le Sud, va entreprendre le sige d'Uzita, ville
situe dans la grande plaine qui s'tend de la mer aux
collines de Djemmal.
Entre temps et pendant les oprations devant Uzita,
Csar avait envoy quelques vaisseaux sous les ordres
d'Aquila, pour a l l e r au devant de transports attendus
de Sicile; Varus, l'ayant su, quitte Utique et gagne
Hadrumte pour attaquer ces vaisseaux; il arrive
mme jusqu' Leptis, o il brle tous les navires
l'ancre. Csar inform de cette attaque imprvue,
q u i t t e en toute hte Uzita, poursuit Varus, l'oblige
se rfugier dans le port d'Hadrumte, reprend en
route une de ses galres avec 130 soldats pompiens,
s'empare d'une trirme ennemie et brle son tour
tous les vaisseaux de charge en rade d'Hadrumte,
puis il regagne Leptis et Uzita.
Mais les oprations devant Uzita n'allaient pas au
gr de Csar; Seipion ne voulait pas livrer de combat et
les ressources en vivres commenaient manquer.
Csar quitte alors ses positions devant cette ville,
renforce les garnisons de Ruspina, Leptis et Acholla
et met sa flotte en tat de croiser devant Hadrumte
pour assurer le passage des convois venant de Sicile et
la sret des ports.
91

Csar gagne alors Agar (Beni-Hassen), Sarsura (Bou


Merds, Thysdrus (El Djem) et enfin Thapsus (Ras
22 dcembre Dimas) prs Bkalta; la prise de Thapsus mit fin
47 avant J.-C. cette campagne heureuse pour lui.
Csar, de retour Thapsus, reut la soumission
d'Hadrumte; il se fit donner l'tat de l'argent, des
vivres, des armes qui s'y trouvaient, pardonna aux
chefs qui y gouvernaient et y laissa une lgion avec
Livinius Rgulus. La ville fut condamne payer
comme contribution de guerre, les habitants 3.000.000
de sesterces (615.000 trancs) et le conseil 5.000.000 de
sesterces (1.025.000 francs); elle recouvra son titre
de ville libre " Civitas Libera ". Sa prosprit et sa
14 av. J.C. population ne firent que s'accroitre ; l'on dut faire
construire de nombreuses citernes, en agrandir et
amnager d'autres dj creuses l'poque phni-
cienne ; le bassin de la Sofia a d tre transform
cette poque.
Cette mme anne, aprs la mort de Csar, l'Afrique
fut le thtre de luttes entre Titus Sextius et
Cornificius, tous deux comptiteurs et soutenus, l'un
par les Csariens, l'autre par le Snat; Octave, qui avait
succd Csar, remet Sextius le commandement
des 2 provinces d'Afrique: Numidie (province
de Constantine) et Afrique (Tunisie) ; Cornificius,
qui occupait la Tunisie, refuse d'obir. Sextius, pour
arrter l'arme nombreuse de Cornificius qui avait
envahi la Numidie, fait une diversion et marche
hardiment sur Hadrumte dont il s'empare, ainsi que
d'autres ports ; Cornificius dut alors partager son arme
en deux masses qui furent battues successivement.
43 av. J.-C. L'anne suivante, Sextius fut abandonn par les
42 av. J.-C. Csariens; nouveau partage de l'Afrique. La nouvelle
province reste Octave, l'ancienne Antoine. La
guerre dclare nouveau entraine la chute du rival
de Sextius ; celui-ci reprend la direction des deux pro-
41 av. J.-C. vinces jusqu' l'arrive de Lepidus.
36 av. J.-C.
L'Afrique est ensuite gouverne par Statilius Taurus
et par des proconsuls nomms par Octave, devenu
26 av. J.-C. l'Empereur Auguste ; les noms de quelques-uns de ces
92

proconsuls d'Afrique figurent, pour cause d'honneur,


7 av. J.-C. sur des monnaies d'Hadrumte; on y lit : P. Quintilius
6 av. J.-C. Varus, 7 avant J.-C; L. Volusius Saturninus, 6 avant
5 av. J.-C. J.-C. ; Q. Fabius Maximus Africanus, 5 avant J.-C.
L'Afrique romaine s'tendait alors de l'Amsaga
(Oued-el-Kbir, dans la province de Constantine) aux
Autels de Philnes (frontire de la Cyrnaque) ; la IIIe
lgion Augusta fut dsigne comme corps permanent
d'occupation et eut son quartier gnral Theveste
(Tebessa). La Carthage romaine redevint une grande
ville, la capitale de l'Afrique, et fut renomme par sa
magnificence; de nombreuses voies de communica-
tion sillonnrent le pays en tous sens et, pour ne parler
que des principales routes partant d'Hadrumte, il y a
lieu de citer les suivantes : d'Hadrumte Tunis, par la
cte et passant l'une par Hergla, Bou-Ficha, Grombalia,
Hammam-Lif; l'autre par Sidi-bou-Ali, Enfidaville et
rejoignant la premire Bou-Ficha : d'Hadrumte
Tunis par Kala-Kebira, Menzel, Ain-Garci,
Ain-Mdeker, Zaghouan et Oudna ; d'Hadrumte
Thveste, par Vicus Augusti (Sidi-el-Hani) Sbeitla
et Kasrin ; d'Hadrumte Thysdrus (El-Djem) par
Ouardanine, Zramedine et Bou-Merds ; d'Hadrumte
Sellectum (Salacta) par Ruspina, Lemta, Thapsus
et Mahdia. Des voies secondaires en grand nombre,
runissaient entr'elles toutes les cits plus ou moins
importantes.
Les Travaux publics, l'Agriculture, le Commerce et
mme le mouvement littraire, furent l'objet des proc-
cupations de Rome; Hadrumte fut un des principaux
ports o vinrent s'entasser les crales destines
l'Italie, crales provenant du centre tunisien et
des environs immdiats de la ville, o la culture tait
trs tendue; des coles furent fondes qui eurent
pour lves, diverses poques, les Saint Cyprien,
Saint Augustin, Tertullien, Victor de Vite, Trence,
Apule et Salvius Julianus ; ce dernier, enfant
d'Hadrumte, devint un jurisconsulte clbre.
14 aprs. J.-C. Mais Auguste meurt et, aprs lui, la puissance
93

romaine, qui venait d'atteindre son apog e, va dcrotre


insensiblement.
Sous Tibre, qui succde Auguste, a l i e u la rvolte
16 24 aprs du Numide Tacfarinas qui inquite Rome pendant
J.-C. 8 ans.
Aprs Tibre, Caligula (37 -41), Claude (41 -54),
Nron (54-68), Galba (68-69), Othon (69),Vitellius(69),
puis Vespasien qui avait dj t proconsul en Afrique
et qui s'y tait fait remarquer par une in tgrit parfaite,
mais aussi par une avarice tellement sordide qu'un jour,
Hadrumte, dans une sdition, la populace l'accueillit
par une pluie de raves, lui reprochant sa parcimonie
dans les ftes; Vespasien , succdrent Titus (79 -81),
98-117 Domitie n (81 -96), Ne rva (96 -98) dont le rgne fut
pacifique, Trajan (98-117) qui leva Hadrumte
la dignit de colonie romaine .Colonia
Concorda -Ulpia-Traana-Augusta -Hadrumetina et lui
accorda les privilges accords aux villes qui portaient
ce titre. Hadrumte, grce cette situation et la
fertilit de son sol " frugifera" ne tarda pas prendre
le rang de deuxime ville de la province d'Afrique et plus
tard devint la mtropole de la Byzacne ; elle fut choisie
comme lieu de rsidence d'un des lgats du proconsul
d'Afrique; les diverses administrations y avaient leurs
bureaux et les navires de toutes les nations s'y
donnaient rendez -vous dans son port. Le territoire
dpendant d'Hadrumte s'tendait trs loin et
Aggenus-Urbicus dit ce sujet que les habitants de
Thysdrus (El -Djem) et d'Hadrum te furent, pendant
l'poque imp ria le, e n proc s dura nt de longue s
annes ; ils voulaient dcider qui appartenait le
territoire sur lequel tait construit un temple de Minerve
qui limitait les deux territoires.
117-138 L'Empereur Hadrien fit trois voyages en Tunisie, en
122,125129, tant pour apaiser une r volte que pour
combler le pays de ses bienfaits.
138-193 Sous Antonin -le-Pieux (138 161), Marc -Aurle (161-
180), Commode (180 -192), nouvelle rvolte des Berbres
rprime par Pertinax (192 -193) ; Septime -Svre,
lui succde aprs avoir battu trois comptiteurs
94

l'Empire (Salvius-Didus-Julianus, Percennius-Niger et


Albin).
Septime-Svre tait n Leptis Magna, ville l'est
de Tripoli ; il repoussa les tribus pillardes, fit excuter
des travaux considrables dans son pays, mais son rgne
fut malheureusement marqu par le martyre des
premiers chrtiens, dont deux, Perptue et Flicit,
moururent Carthage ; Tertullien, dans les sublimes et
immortelles pages de son apologtique, rapporte le
martyre de ces premires victimes de la foi catholique.
193 Sous le rgne de Septime-Svre, la communaut
chrtienne avait son vque, ses diacres, ses trso-
riers, ses magistrats, un budget largement aliment
par des dons volontaires et des cotisations mensuelles,
des lieux de runion plus ou moins fixs et des lieux de
spulture.
202 Ds l'anne 202, des meutes populaires clatrent
contre les chrtiens; leurs cimetires furent viols et
la communaut dut se cacher. La perscution com-
mena bientt par ordre de l'empereur Svre et le
proconsul Scapula fut impitoyable ; les prisons se rem-
plirent et les condamns furent mis la question,
livrs aux btes ou brls vifs. La population
d'Hadrumte fut tellement dcime qu'on donna la
ville le nom de " Terre des Saints ".
Les annales de l'Afrique chrtienne citent, outre
Perptue et Flicit, Sainte Verule et Saint Victorien
comme ayant t victimes de cette perscution ; elles
donnent les dtails suivants sur le martyre de Saint
Mavillus.
Tertullus-Scapula, nomm par le Snat proconsul
d'Afrique, venait de dbarquer Hadrumte lorsqu'il
rencontra le 11 mai 211, dans la rue, Mavillus que
211 l'on avait arrt comme chrtien; il le condamna,
sance tenante, au supplice des btes ; conduit sur le
champ l'amphithtre, Mavillus y fut dchir par
une panthre. Le sang de toutes ces victimes criait
vengeance ; Tertullien, dans sa lettre Ad Scapulam,
voulut effrayer Scapula pour l'empcher de renouveler
95

les exactions l'gard des chrtiens : Tibi quoque


optamus admonitionem solam fuisse, quod cum Adru-
meticum Mavilum ad bestias damnasses.
Aprs Caracalla (211-217), Macrin ,(217-218),Elagabal
(218 222), Alexandre Svre (232 -235) ; son adminis-
tration fut sage, claire et ferme. Sous son rgne ,
225 Hadrumte faisait toujours partie de la province
proconsulaire ; Saint Cyprien vint en visiter la colonie;
235 un concile eut lieu Cart hage. Massacr, Alexandre
Svre est remplac par le despote Maximin dont les
exactions rvoltent tellement les populations que Gor -
dien d'Afrique, g de 80 ans, gouverneur de Thys drus
(El-Djem), est nomm empereur; son rgne fut de
courte dure; son arme battue sous Cart hage par les
partisans de Maximin, le vieil Empereur se donne la
mort.
Les e mpe re urs se suc c de nt a vec une ra pidit qui
dit assez l'tat d' ana rc hie profonde da ns le quel est
tomb l'Empire. Maxime, Balbin, Gordien III, Philippe,
237 253 Trajan (dce), Trbonien, Galle, Emilien passent
successivement au pouvoir, de 237 253.
Au printemps, Saint Cyprien se rendit Hadrumte
et, en l'absence de l'v que de cette ville, son
251 Polycarpus, il donna des conseils aux clercs qui firent
directement une communication l'Eglise de Rome,
ce qui mcontenta fort le Pape Cornelius qui demanda
des explications Cyprien.
Sous Valrien se renouvellent les rigueurs contre
253-260
les chrtiens ; la plus illustre victime de ce regain de
perscution fut l'vque Cyprien. La mme anne eut
258 lieu, nanmoins, un concile auquel assista l'vque
d'Hadrumte.
Avec la chute de Valrien, commence la priode
dite des 30 tyrans; suivent les rgnes phmres de
260-293 Gallien, Claude II, Quintillus, Aurtien, Tacile, Probus,
Florien,Carus, Numrien,Carin,Diocltien,Maximien,
Hercule, Constance-Chlore et Galre-Maximien.
Vers cette poque, les hordes du Nord, Goths,
Wisigoths, Huns, harcelaient les troupes aux frontires
du monde romain et des rvoltes incessantes troublaient
96

la plus grande partie de l'Afrique, Maximien Hercule


mit la raison les tribus insurges et, de concert avec
Constance Chlore, remania les divisions administrativ es
de l'Afrique romaine, sauf le Maroc (Tingitane) ;
297 les autres possessions imp riales furent constitues
en un vaste dioc se partag en 6 provinces, chacune
administre, au point de vue civil, par un proconsul
relevant d'un chef appel " Vicaire d'Afrique " et, au
point de vue militaire, par un commandant soumis
l'autorit d'un comte d'Afrique.
298 Les perscutions continuent : Boniface et Thcle,
natifs d'Hadrumte, subissent le martyre ; ils laissaient
douze fils.
Ces douze frres chrtiens nomms ; Donatus, Flix,
Ariontas, Honoratus, Fortunatus, Sabinianus,
Septimianus, Januarius, Flix Jeune, Vitalis, Satyrus et
Sparatus, renoncrent la fortune de leurs parents, qui
tait considrable, pour se consacrer la conversion de
leurs concitoyens. Par la puissance de leur parole, ils
ruinrent le c u l t e de Jupiter et d'Hercule dont les autels
taient clbres Hadrum te. Appels par l'vque de
Carthage, ils se rendirent auprs de ce prlat qui
ordonna prtre Donatus, sous -diacre Flix le plus g
aprs lui ; i l s vanglisrent alors et on leur attribua
toutes sortes de prodiges et de gurisons merveilleuses,
entr'autres celle du jeune fils de Restitue, noble dame
allie la famille impriale. Lorsque l'empereur fit
commencer la perscution, le proconsul d'Afrique
Valrius ordonna au tribun Victor de prendre avec lui un
certain nombre de soldats d'lite, de pa rtir
imm diate me nt pour Hadrum te , d'a rrte r e t de lui
amener les frres de Boniface ; Victor et ses soldats
touchs de la pit de ces chrtiens se convertirent et
refusrent d'accomplir leur mission. Un second
dtachement d'hommes arms le s ramena tous
Carthage o Valrius, aprs les avoir fait dpouiller de
leurs vtements et frapper coups de btons et de verges
plombes, avec tant de violence que leurs os taient en
partie briss, les fit transporter dans des cachots et
les co ndamna mort. Pendant la nuit, les portes des
97

prisons s'ouvrirent; l'on trouva, le lendemain matin, les


douze frres prchant dans les rues de la gr and e cit. La
p o p ulatio n pr enant fait et cause pour eux s'opposa
leur supplice; Valrius s'embarqua alors secrtement la
nuit suivante avec ses prisonniers et mit la voile pour
l'Italie. Pendant la traverse une tempte violente faillit
engloutir l'embarcation ; Valrius jura de se faire
chrtien, le vent s'apaisa et, quelques heures aprs, tous
abordaient heureusement au port; mais, une fois en
sret, Valrius ne se souvint plus de sa promesse et
trana dans toute l'Italie ses victimes aprs lui.
Les douze fires furent martyriss sparment dans
diverses villes; plus tard, le roi lombard Arrichio
recueillit ces corps avec vnration, les runit tous les
douze Bnvent dans un tombeau magnifique, sous
les votes du temple de Sainte-Sophie o ils reposent
enco re aujo urd 'hui.
303 L'dit de Nicomdie par Diocltien parait ; la pers-
cution contre les chrtiens va redoubler de frocit :
destruction des difices, livres ou objets de culte, mise
ho r s la lo i d e to us les chr tiens; une seule p nalit,
la mort avec tout son cortge de supplices atroces ; le
proconsul Anulinus excuta en T unisie cet dit avec
une extrme rigueur. Un nomm Innocent est dnonc
au proconsul comme chrtien pratiquant ; il va subir le
martyre, mais, ayant russi s'enfuir, il arrive
Hadrumte o, plus tard, il fut nomm diacre, puis
vque.
Des luttes intestines vont encore troubler lItalie et
l 'Af r iq ue p ar s ui te d e l a r i va li t e ntr e Ma x e nc e et
312 Constantin I; le pays en souffre ; Carthage, Cirta, sont
assiges et prises d 'assaut; mais enfin Co nstantin
dfait son rival q ui prit no y dans le T ibre.
Avec Constantin, renat la tranquillit et la paix
religieuse; Cirta reconstruite prend le nom de
Constantine ; le monde romain fut divis en quatre
grandes prfectures ; l'Afrique fut rattache la
prfecture d'Italie.
321 Une inscription concernant Hadrumte fuit mention
98

d'un certain : Quintus-Aradius, Valrius-Proculus,


comme patron de la Colonie de Sousse.

POPVLOE II
D. D. N. N. CRISPO ET CONSTANTINO . IVN . NOBB .
CAESS ITERVM III . IDVS. MART CONSS
COLONI COLONIAE CONCORDIAE VLPIAE TRAIANAE
AUGUSTAE FRVGIFEDRAE HADRUMETINAE
Q ARADIUM VALERIVM PROCVLVM VC PRESIDEM
PROVINCE BYZACENE LIBEROS POSTEROSQVE EIVS-
SIBI LIBERIS POSTERISQVE SVIS PATRONVM COOPTA
VERVNT.Q.ARADVS VALERIUS PROCULVS VC PRAESES
PROVINC. VAL BYZACENAE COLONOS COLONIAE CON
CORDIAE VLPIAE TRAIANAE AVGVSTAE PRVGIFERAE
HADRVMETINAE LIBEROS POSTEROSQVE EORV MIN FI
DEM CLIENTELAMQVE SVAMQVE SVAM LIBEROR VM
POSTERVMQVE SVORVM RECEPIT ( C . I. L . VI. 1687)

337 A la mort de Consta nt in I, sur no mm le Grand,


ses trois fils, Constantin II, Constance et Constant se
partagrent ses Etats; l'vque d'Hadrumte, Abon
dance, assiste un concile assembl par Gratus ; il y
fut dcid, entr'autres choses, qu'il ne serait pas per-
350 mis de prter usure. L'anne suivante, une garnison
de moines-soldats occupa Hadrumte.
350 Ap r s l'assassinat d e Constantin I I et de Co nstant,
Constance reste seul au pouvoir, usurp ensuite par
Julien dit l'Apostat qui succdent (363) Jovien, Va-
360-379 lentinien et Valens (364) Gratien et Valentinien II (375)
Thodose I (379).
391-393 So us le r gne d e l'emp er eur T ho d o se le Gr and,
Hadrumte fut la rsidence du vicaire d'Afrique
Magnillus (ainsi q u'il rsulte de la co nstitutio n imp-
riale 3 de fule et jure bast . C. T h. X. 17, reproduite
au Code de Justinien.)
391-393 Les vnements q ui vo nt se p rod uire et q ui co ntr i-
bueront l'invasion de l'Afrique par les Vandales
p euvent se rsumer par d es d issensio ns entr e les
Chrtiens d 'Afriq ue qui, jusq u'alors unis dans
une- mme croyance, vont former plusieurs sectes,
99

entr'autres celles des Donatistes, des Circoncellions,


des Orthodoxes, et par des rvoltes qui clatent en
Afrique et auxquelles se trouveront mls les partisans
de ces diffrentes doctrines.
P e n d a n t c e t t e p r i o d e t r o u b l e , Ha d r u m t e n 'e s t
me n tio n n e d a ns le s d o c u me n t s a n cie n s q u e p o ur la
393 p ar ticip atio n d e ses Evq ues aux co nciles : d e 3 9 3
assemb l Cab ar sussi, faubo ur g d e So usse ( ce
concile Primien, que les Donatistes avaient
397 donn pour successeur Parmnien, est condamn),
411 de 397 assembl Carthage o figure comme
signataire Philologus vque du peuple d'Hadrumte,
de 411 o figure le mme vque sous le nom
de Filolocius.
Enfin, au moment mme o Saint Augustin cher -
chait co mb attre, avec l'app ui d u Go uver nement
imprial, les hrtiq ues et les envahisseur s de l'Afri
q ue , i l y a v ai t So us s e u n mo na st r e d o n t l a b b
427 Valentin tait le principal ; il tait clbre par ses
relations avec le Saint-Docteur ; vivaient avec lui les
moines Cresconius, Florus, deux Flix et d'autres
moines.
Les Vandales, matres d es Gaules et d e l'E spagne ,
vont profiter des discordes civiles qui dsolent l'Afri-
q u e p o u r p a s s e r la me r , e n v a h i r le s M a u r t a n i e s
e t s 'a v a n c e r v e r s l a N u m i d i e . Le C o m t e B o n i f a c e , u n
i n s t a n t l e u r p ar t i s a n , l e s co mb a t , ma i s b a t t u d e va n t
430-431 Calama (Guelma) (430) et Hippone (Bne) (431), il dut
432 se retir er en I talie, aprs avo ir sign avec Gisr ic la
paix, qui donnait au roi Vandale les trois Maurtanies;
c e t te p ai x f u t d e co u r t e d u r e : l e s V an d a l e s r ec o m -
435 mencrent leurs courses et, par trait de 435, se firent
r emettr e en p lus u ne p ar tie d e la Nu mid ie.
Gisr ic s'o ccup a alo r s d 'ad mini str er ses no u vel les
p r o vi nce s, p ui s ap r s s ' tr e acq u is tr a tr e u se me nt la
confiance des Ro mains el le co ncour s des Berbres il
franchit les frontires de la Proconsulaire et vint
439 s'emparer de Carthage.
C AP ITAINE HANNEZO,
du 4e Tirailleurs.
(A suivre)
SOUSSE. IMPRIMERIE FRANAISE
NOTES HISTORIQUES SUR SOUSSE

(SUITE)

Priode Vandale

de 439 533 de J. -C.

La conqute de toute la Tunisie actuelle suivit rapidement


la prise de possession de Carthage et n'offrit aucune
difficult.
Gisric essaya en vain une premire fois de s' emparer de la
Sicile et de l'Italie; repouss, il va user de stratagmes pour
empcher les Romains de lui crer des embarras dans le
pays conquis ; il signe mme des traits avantageux. Il
448 de J.C. organise ensuite ses conqutes; il dmantle Hadrumte
pour empcher les h abitants, qui auraient pu tre soulevs
par les Romains, de se dfendre derrire ses fortifications.
La ville demeura alors expose aux courses des Berbres ;
les habitants pour leur propre scurit avaient reli
entr'elles et fortifi leurs maisons contre les agressions du
dehors ; dans cette situation leur salut ne tenait qu' un fil;
car les Berbres les harcelaient et les Vandales ne prenaient
aucun souci de les dfendre (Procope). Malgr cela la ville
n'en resta pas moins p opuleuse et fut le chef-lieu de la
Byzacne et le sige d'un vch sous le titre de Ecclesia
Adrumet ina (Morcelli).
Pendant une priode de paix, un concile fut assembl
451
auquel assista l'vque d'Hadrumte. Gisric attendait
une occasion pour renouveler ses tentatives sur l'Italie ;
455 elle se prsenta lors de l'avnement au trne de l'Empereur
Maximus. Les arm es vandales, dbarques en Italie, entrent,
dans Rome dont elles font le pillage pendant 14 jours, puis
retournent en Afrique, charges de butin.
102

A partir de ce moment, Gisric russit, soit par


la ruse, soit par la force, dans toutes les expdi-
tions et ngociations qu'il eut entamer avec ses
adversaires ; la lin de son rgne il fit preuve de
magnanimit en rendant sans ranon tous les Romains
en esclavage dans ses Etats, et de tolrance en faisant
477 rouvrir les glises et en rappelant les vques exils.
Peu de temps aprs, Gisric mourait, dans tout l'clat
d e sa gloire, laissant po ur successeur Hunr ic. Ce
p r i nce a mb i ti e u x se mi t tr a me r la d isp ar i tio n d e
tous ceux de la famille de Gisric qui pouvaient bar-
rer son fils le chemin du trne ; sanguinaire avant
tout, arien convaincu, il ordonna de nouvelles pers-
483 cutions contre les chrtiens.4970 vques, prtres ou
fidles furent dports.
L 'E mp e r e u r Z n o n tan t i n t e r v e n u e n f a v e u r d e s
484 catholiques, un concile fut assembl, mais les Ariens,
s'y trouvant en grande majorit il fut dcid qu'il y
avait lieu de poursuivre les perscutio ns co ntre les
chefs d e l'E glise ; les uns fur ent e xils tels q ue
Servitius, vque d'Unuricopolis (Hadrumte), dau-
tres furent martyriss, tels que Victorin (immaniis-
simis suppliciis cruciatus egregieque coronatus),
Verulus et ses compagnons du mme vch.
Heureusement la mort d'Hunric, survenue la fin de
l'anne, mit fin ce rgime de terreur.
Aprs Hunric, Gundamund et Trasamund eurent
lutter contre les Berbres qui, malgr les efforts des
rois Vandales, triomphrent partout.
523 Hildric qui succda Trasamund n'avait ni l'au-
torit, ni l'nergie voulues pour pacifier un pays si
troubl et rprimer les rvoltes incessantes des Ber-
bres; aussi ceux-ci continuent-ils leurs courses dvas-
tatr ices et po ur suivent-ils les Vand ales j usq ue d ans
les villes fortifies ;Hadrumte les vit dans son enceinte.
Tout fut mis feu et sang, on gorgea mme dans les
glises.
Dans cette extrmit, on recourut Glimer, popu-
laire et investi du commandement en chef des troupes
vandales; ce chef de parti eut vite fait de vaincre les
103

Berbres. Ce succs obtenu, les soldats de Glimer


proclament sa royaut et prononcent la dchance
d'Hildric.

Priode Byzantine
de 533 698 de J.-C.

Aprs avoir arrach Hildric le trne qu'il occupait,


Glimer notifia son avnement Constantinople;
Justinien, la nouvelle de la dchance de son alli,
envoya de suite auprs de Glimer une ambassade
pour lui faire des reprsentations ; celui-ci loin de
satisfaire au dsir de Justinien rendit plus dure la
dtention de ses prisonniers; l'Empereur l'apprit et
fit partir une nouvelle ambassade qui rapporta Cons-
tantinople une lettre de refus formel de se soumettre
l'injonction de l'Empereur d'Orient. La guerre tait
imminente ; Justinien russit, malgr certaines oppo-
sitions de son Conseil des Ministres, organiser une
arme dont il donna le commandement en chef
Blisaire.
Le corps expditionnaire fort d'environ 15.000
hommes, dont un tiers de cavaliers, s'embarque,
22 Juin 523
s'loigne de Constantinople et dbarque au Ras
22 Sep. 523 Kapoudiah, prs du bordj Khadidja, situ peu de
distance du village de Chebba, au sud de Mahdia ; ds
son arrive sur le sol africain, Blisaire dtache des
petits dtachements de cavaliers pour faire connatre
aux populations ses intentions, puis marche sur
Salakta, Mahdia, Lemta et Sousse, (Hadrumetum)
dont il s'empare; il est reu en librateur et fait
respecter personnes et proprits ; tout maraudeur est
jug, condamn et pass par les armes.
De Sousse, Blisaire continue sa marche vers le
Nord, prcd d'un escadron de 300 cavaliers d'lite
commands par Jean l'Armnien et flanqu vers l'est
104

par la flotte qui longeait la c te et sa hauteur; aprs


un combat prs de Hammam -Lif, l'arme de B lisaire
arrive Tunis, puis s'empare de Car thage o elle se
prpare pour l'attaque du camp de Glimer tabli 5
lieues de l en un point appel Tricamarum ; l'arme
14 Dc. 533 impriale marche l'ennemi.
15 Dc. 533 La bataille s'engage avec acharnement de part et
d'autre et Glimer, voyant son arme anantie, aban -
donne femmes, trsors, etc., et s'enfuit en Numidie ;
Mars 534 cern et priv de tout, il dut se rendre et se livra
Blisaire qui le re ut avec dfrence Carthage.
Avril 534 Aussitt aprs, l'organisation civile et militaire du
pays fut rgle par deux rescrits impriaux, et toutes
les villes furent de nouveau fortifies. Hadrumte vit
ses murailles compltement releves ; une garnison
suffisante lui fut donne pour rassurer les habitants
contre toute espce d'ennemis ; elle recouvra son
antique prosprit ; aussi les gens de la ville
voulurent -ils appeler leur cit Justinienne en
tmoignage de leur gratitude pour les bienfaits de
l'Empereur, seul tmoignage qu'ils puissent lui donner
et qu'il voult accepter.
Malheureusement, la tranquillit ne fut pas de lon -
gue dure ; si les Vandales n'existaient plus, les Ber-
bres subsistaient toujours. Il eut fallu agir avec sa -
gesse avec eux ; au contraire, la population berbre
eut supporte r d'incessantes vexations, tant de la
part de l'Administration civile que du ct de la reli -
gion catholique qui dpouilla de leurs biens les Ariens ,
les Donatistes, les dissidents chrtiens et les Juifs.
Les insurrections surgirent et ne furent rprimes
q u ' a v e c b e a uc o u p d e d i f f i c u l t s p a r le s g n r a u x
539 Salomon, Germain et B lisaire, lui mme, qui eurent
lutter jusqu'en 539 contre Stozas et Antalas, les chefs
principaux des berbres.
de 539 543 Une priode de paix succda ces troubles.
543 A la su ite d ' un ma s sa c re de Be r b re s a ya nt p r is
part un festin offert par Sergius, gnral romain
Tripoli, une nouvelle rvolte clata. En cette mme
anne, 543, la peste svit en Afrique, et augmente la
105

misre dans la Byzacne qui est dvaste par les bandes


berbres.
545 Hadrumte tant menace, Himrius, commandant
militaire de la Byzacne et commandant d'armes de la
ville, demande l'appui de Jean, fils de Sissinniolus,
pour repousser les Berbres ;les deux troupes runies
devaient surprendre les troupes combines de Stozas
et d'Antalas campes dans les environs. Un messager
s'tant gar, Himrius tomba seul sur l'arme ber-
bre ; ses troupes furent battues et lui-mme fait pri-
sonnier; le combat eut lieu Mnphse (1), localit
situe 18 kilomtres environ au N.N.O. dHadru-
mte entre le lac Kelbia et Hergla. Himrius ne dut
la vie qu'en se prtant une ruse de ses ennemis
qui purent occuper la place d'Hadrumte qui lui
avait t confie; la ville prise fut dvaste, et
les vainqueurs exercrent de telles cruauts que la
plupart des habitants, pouvants, durent prendre
la fuite en Sicile, Malte, aux Balares et
jusqu' Constantinople ; les campagnes si prospres
devinrent un vritable dsert. En se retirant, les
Berbres laissrent dans Hadrumte une petite
garnison. Ici se place, dans l'histoire de la ville,
une anecdote raconte par Procope : Un prtre du
nom de Paulus dsirant dlivrer sa patrie du joug
des Berbres s'entendit avec les principaux
citoyens. Je vais partir Carthage, leur dit-il,
pour y chercher des secours que j'espre vous
ramener bientt ; faites en sorte que l'arme de l'Em-
pereur puisse s'introduire dans nos murs.
Ils le lirent avec des cordes et le descendirent du
haut des remparts pendant la nuit : sorti de la cit le
prtre s'avana vers la mer ; il trouva une barque et
se fit conduire Carthage. L, il est introduit devant
Sergius, matre de la milice,lui raconte les vnements
d'Hadrumte et le prie de venir au secours de ses
concitoyens ; Sergius donne 80 soldats Paulus qui,
pour dissimuler l'insuffisance de cette troupe, ras-

(1) Mnphse doit se trouver dans la plaine appele El Menfez


aux ruines de Djemmiah.
106

semble un grand nombre de barques et de petits na -


vires, fait monter des matelots et africains habill s e n
s o l da t s ro ma in s ; p ui s se di r ig e s u r H a d r u m te .
En vue de la ville il envoie des missaires prvenir
les citoyens les plus importants qu'un parent de l'Em -
pereur, Germanus, amne une puissante arme dont
l'avant -garde va dbarquer; il leur recommande de
laisser une porte ouverte la nuit suivante afin de per-
me ttre a ux solda ts lib ra te urs d'e nt re r sa ns c oup
frir. Cette nouvelle donne de l'a udace aux plus
timides; on suit les instructions de Paulus qui entre
aisment dans la ville avec la poigne d'h ommes qu'il
conduit, massacre la garnison et fait retomber Hadru -
mte au pouvoir de Justinien. L'Empereur, ayant appris
le mouvement insurrectionnel des Berbres, d
e n gra nde pa rtie l'inc urie de Se rgius, se dc ide le
releve r de ses fonctions, et envoya Jean Troglita
548 pour remettre l'ordre dans la province d'Afrique. Les
Berbres vaincus font leur soumission. Les travaux
ordonns par Justinien, commencs par Blisaire, sont
achevs durant une priode de paix.
Pendant plus d'un si cle, l'histoire de Sousse n'offre
a uc un fa it re ma rqua ble; note r se ule me nt la dsi -
551 gnation d'un vque, nomm "Primase" ( 1) dans la
cit d'Hadrumte appele aussi l'poque
"Justinianopolis" et la participation d'un autre
646 vque, nom m "Boniface", au concile de la
Byzacne.
Le sicle qui vient de s'couler fut tmoin de troubles
de dsorganisation administrative et d'excs d'ind -
pendance de la part des Gouverneurs ; les Byzantins
voient leur domination en pleine dcadence.
647-648 Les Arabes envahissent l'Ifrikia (Tunisie) et, laissant
de ct les places fortifies du littoral, vont atteindre
leur ennemi au c ur de sa puissance ; le patrice
" Grgoire" est battu et tu Su ffetula (Sbetla) ; les
Chrtiens n'obtiennent le dpart des Arabes que
moyennant le paiement d'une forte contribution de
guerre value environ 3 millions de francs.

( 1 ) Pri masius, auteur d'un ouvrage Commentaire de l'Apocalypse.


107

665-666 L es Ar ab e s r ep a r ai s se n t en n o mb r e so u s l e co m -
mandement de Maoua ben Khodeidj-el-Kendi, tra
versent la Tunisie et vont camper prs de Djaloula
sur le Baten-el-Korn.
L'E mpereur Constant II, voulant s'opposer aux
entrepr ises des Arab es et en mme temp s r epr endre
possession d'un pays qui s'tait soustrait son autorit,
envo ya une ar me co mmande par le patrice " Nic-
phore " ; cette arme, forte de 30.000 combattants d-
b ar q ua So usse. Cette no uvelle f ut v ite co nn u e d e
Maouia ben Khodeidj qui fit partir de suite Abdallah
ben ez Zobeir pour secouru les habitants de Sousse ;
ce gnral tablit son camp sur un monticule 12
milles de la ville.
Les Byzantins, prvenus, craignant, malgr leur
supriorit numrique, un insuccs, firent approcher
leurs vaisseaux pour se rembarquer. Le lendemain
Abdallah s'avana avec son corps d'arme jusqu'au-
p r s d es r emp ar ts ; il mit p ied ter re et fit d evant ses
troupes quelques prires appropries la circonstance.
Les Byzantins, tonns de ce spectacle et de l'in-
diffrence que ce chef arabe leur tmoignait, firent
alors une sortie ; cavalier s et fantassins prirent part a u
c o mb a t ; Ab d a l l a h , d s l e c o m me n c e me n t d e
l'attaque, ter minait sa prire prostern terre; ds
qu'il l'eut termine, il monta cheval et fondit im-
ptueusement sur l'ennemi qui fut dfait et mis en
droute.
Les Byzantins rentrrent dans la ville puis gagnrent
leurs vaisseaux ; les vainqueurs ne les poursuivirent
pas, ne pntrrent pas dans la ville et repartirent de
suite vers le Baten-el-Korn.
Cette deuxime expdition des Arabes dans la pro-
vince romaine d'Afrique se termina par la prise de la
petite v i l l e d 'Usulitanum et l'occupatio n de Meninx
667-668 (Ile de Djerba).
669-670 Les Arabes envahissent pour la troisime fois
l'Afr iq ue, mais cette fo is avec l'i ntentio n fer me d 'y
imposer leur domination ; l'mir Okba-ibn-Nafi com-
108

mande l'arme d'invasion ; aprs avoir travers la


Tripolitaine, Gabs et Sfax.il vint mettre le sige de vant
Sousse qui t a i t appele la " v i l l e de fer" cause de ses
fortifications et de sa position ; au bout de deux mois de
sige, la v i l l e fut prise d'assaut; les habitants qui
n'embrassrent pas la religion musulmane fure nt
extermins, les glises furent dtruites et remplaces
par des mosques.
Les troupes de l'Emir d molirent la grande tour
de la ville dans laquelle il y avait un moine qui priait
Dieu et avertissait les habitants de l'approche de l'en -
nemi. On raconte que dans la lutte les habitants furent
presque tous massacrs malgr les ordres de l' mir
Okba et, lorsque ce dernier vit qu'i l ne pouvait arrter
le massacre, il leva les yeux au ciel et dit: "Oh mon
Dieu, je vous implore, au nom de notre prophte
Mohamed, de chtier ceux qui ne veulent pas couter
l'mir et qui rpandent le sang innocent. Lorsque les
Arabes entendirent cette prire, i l s cessrent de suite le
massacre et vinrent demander le pardon l'mir.
Okba laissa alors une forte garnison et se dirigea vers
l'Ouest ; aprs avoir fait 13 milles, il trouva un e citadelle
occupe par les Berbres, qui ne voulaient pas le laisser
passer; aprs un sige de trois jours il s'empara
de la citadelle et gagna l'emplacement o il fonda
Kairouan, dont la construction commence en 670 fut
acheve en 675.
680 Okba, dpossd en 675, reprend le gouvernement
de l'Afrique en 680 et continue la lutte contre les Roums
et les Berbres ds 683 ; son arme est battue devant
Hadrumte par le Berbre Kouciba ; il est enfin tu
la mme anne prs de Biskra.
Quatrime expdition arabe et, jusqu'en 697, alter -
688 natives de succs et de revers de part et d'autre. Enfin,
au printemps de 698,1e Patrice Jean qui avait su pour
la dernire fois, en automne 697, reprendre les cits
tombes au pouvoir des Arabes est lui -mme chass
avec les siens de C arthage et oblig de quitter tout
jamais ces rives ensoleilles, muets tmoins de tant
de gloires.
109

A cette poque, c'est--dire aprs la conqute arabe,


une lgende arabe donnait le nom de Djohra la vieille
Hadrumte et ce nom fut transform en celui de Soussa ;
suivant cette lgende, une pierre prcieuse (Djohra) fut
suspendue un jour par le gouverneur au dessus de
Bab-el-Bahr ; le fil qui retenait cette pierre prcieuse fut
coup pendant la nuit; ds l'aube on s'en aperut et chacun
de s'crier que le fil avait t coup par un ver (soussa) ; de
ce jour le sobriquet de Soussa resta l'antique Hadrumte.

Priode Arabe
de 698 972 de J.-C.

Les Arabes, apr s avoir chass les Grecs, repris


Carthage et donn du repos leurs troupes, vont
attaquer les Berbres qui, seuls, pourront encore nuire
le ur domina ti on; ma is il sont t out d'a bo rd ba tt us
698
par la reine Berb re, la Kahinah, et repousss jusqu'au
del de Gabs ; ayant reu des renforts, i l s regagnrent la
Berbrie et russissent, aprs avoir subi des pertes
702-704 normes, rompre l'lan de leurs ennemis que la
mort de leur reine dcourage sur le moment, et qui,
voyant leur libert dtruite, se convertissent en grand
nombre l'islamisme. L'appt du butin que les Arabes
710 font dans leur conqu te de l'Espagne, ds l'anne 710,
entraine aussi un assez grand nombre de Berb res
s'enrler parmi les Arabes. Mais, au fond, la Tunisie
restait be rbre et n'tait ara bise qu'en a ppa re nce;
les nombreuses rvoltes qui suivirent le prouvrent
suffisamment, rvoltes toujours rprimes et sans cesse
renaissantes.
750 Pendant le cours de ces guerres intestines, Hadru -
mte fut prise en 750 par Bou -Zid-ben-Ridad, chef
des Schismatiques K houaredj, qui s'y tablit aprs
110

l'avoir livre au pillage et avoir fait massacrer la plus


grande partie des habitants ; il en fut lui-mme chass
par Ali Mansour ben Smal, deux ans aprs.
Aprs la dynastie des Omaades, viennent celle des
800 Abassides, puis celle des Aghlabites fonde avec Ibra-
him-ibn-el-Aghlab comme premier prince ; sa mort,
812 son fils, Abou l'Abbas, se h ta de conclur e la paix
ave c les B er b r es et mo ur ut en tr ansm ett ant l e pou -
817 voir son frre Ziadet-Allah; celui-ci chercha de suite
mettre profit l ' i n s t i n c t guerrier des Berbres ses
administrs, en les lanant la conqute de la Sicile.
A l'appel de Ziadet- Allah, un gr and nombr e de
Berbr es et par ticulir ement de la tribu des Houarak
se runirent Sousse aux miliciens, aux rfugis Es-
pagnols et aux musulmans rassembls pour
l'expdition : la flotte arme sous le commandement de
Assed ben Ferath, cadi de Kairouan, second par un
Juin 827 certain E u p h e m i u s , c h a s s d e S i c i l e , p a r t i t d e
S o u s s e a v e c un effectif de 1.000 cavaliers et 500
fantassins. Aprs plusieurs annes de lutte, la victoire se
pronona pour les musulmans.
829-829 Ziadet-Allah fait amliorer les fortifications de
S o us s e e t, q u e lq u es a nn e s a pr s , i l f a i t l e v er le
835 chteau des mar abouts, le K sar - er- Rbat actuel.
851 Sous le gouvernement d'A bbou - l Abbas, Mohamed
ben El Agleb ben Ibrahim, on construisit Sousse une
belle mosque dans laquelle on disait la prire de la
Khoteba ; la ville, bien dchue de son antique splendeur,
n'tait alors, d'aprs les historiens arabes, qu'une simple
bourgade.
de 855 863 Abou-Ibrahim-Ahmed fait continuer les murailles
de Sousse qu'il visita peu de temps avant sa mort ; il
863 avait galement agrandi la v i l l e et fait graver dans la
cour de la mosque, sur une plaque de marbre, l'ins-
cription suivante : " Le Koran est la parole de Dieu et n'a
point t cr " ; cette mme inscription fut grave sur
les colonnes de la mosque pour servir d'avertissement
aux orthodoxes.
A A b o u I br a h i m - A h m e d, m o r t e n d c e m b r e 8 6 3 ,
succ d a A bou Moham ed Ziade t A ll ah qui lui- m me
111

864 mo ur ut en d cemb r e 8 6 4 . Ab o u Ab d allah Mo ha -


med, surnomm Abou l'Grarania (l'homme aux grues)
cause de son got pour la chasse aux grues, prit les
r nes d u go uver nement. I l se d istingua p ar sa bont
et sa gnrosit ; malheureusement il avait ses dfauts ;
esclave d e ses passio ns, il tait do min p ar le go t des
plaisirs et surtout de la dbauche et du vin.
Ibn-Kaldoum cite son sujet l'pisode suivant : Un
jour qu'il ( Abou-Abdallah-Mohomed) tait Soua, il
fit une pr o menad e en mer tant ivr e; so n emb arcation
tait dj arrive l'le de Cossura (Pantallaria) avant
qu'il eut repris sa raison ; saisi de frayeur, il se hta
de revenir So ua, mais, malgr le danger qu'il
avait couru, il continua vivre dans la dbauche.
Le travail des fortifications ayant t l'objet de l'at-
tention des divers Gouverneurs de la ville, celle-ci fut
entir e ment e nto ur e ( 8 74 ) .
883 Lon-le-Sage fait mention de Sousse comme vch.
Les gouver neurs ar abes plus ou moins d bauchs
se succdent r apidement; l'un d'eux, Abou
Ishak-I br ahim ibn A hmed, par ses excutions
sanglantes, ses massacres injustifis, se fait dtester
tel point qu'un soulvement gnral clate et que les
habitants de Tunis adressent au Khalife une supplique
exposant leurs griefs.
902 Ibrahim est dpossd et gagne Sousse d'o il devait
s e r e n d r e B a g d a d p a r o r dr e d u K h a l i f e ; m a i s
S o u s s e i l f i t u n n o u v e l a p p e l p u b l i c p o u r l a g u er r e
sainte et r ecueillit des volontair es qui il distr ibua
de fortes sommes ; le 30 mars il a l l a s'tablira Nouba,
mi-chemin de Sousse et de Kelibia, remit des armes
et des chevaux ceux qui l'accompagnaient et, de plus,
accorda une gratification de 20 dinars chaque cava-
903 lier et de 10 chaque fantassin ; il resta Nouba
jusqu' son dpar t pour la Sicile en juin. Il est r em -
pl a c p ar A bo u l' A b b as qu i es t a ss a ss in p ar tr oi s
sicair es soudoys par son fils Ziadet-Allah. Avec ce
prince finit la dynastie des Aghlabites ; battu par
Abdallah, prcurseur du Mahdi qui avait l'appui de la
tribu berbre des Kitamah, Ziadet-Allah s'enfuit lche-
112

ment aprs avoir commis, avant son dpart de Kai-


rouan, d'inutiles cruauts, et se faisant suivre par ses
femmes favorites et des mulets porteurs de ses trsors.
La dynastie des Fatimites tait fonde.
Le lieutenant d'Obed Allah, le premier des Fati-
mites, arrive Kairouan, organise le pays conquis et
nomme partout des gouverneurs ; il envoie de suite
Sousse Gharaoua ibn Youcef pour donner l'aman aux
habitants. A cette poque, le Ksar-er-Ribat contenait
la plus gr and e p ar tie des richesses d e Ziad et-Allah
qui, envoyes par convois la suite de ce prince fugitif,
avaient t apportes par erreur Sousse ; le
Gouverneur de la v i l l e , Ibn el Hamadani, avait fait
mettre en sret ce trsor qu'il destinait au vainqueur
pour obtenir l'aman. Gharaoua, sa mission termine,
revint Kairouan avec 28 charges de richesses.
910 Obed-Allah arrive Raccadah, prs Kairouan,
augmente son empire qui s'tend jusqu'aux extrmits
du Maroc et fait choix, pour construire sa capitale, de la
presqu'le o est actuellement Mahdia. Il inaugura
916 la v i l l e et le port en mai; puis il se rendit Sousse
o il se trouva en j u i l l e t et aot. A cette poque, les
Siciliens, rvolts contre leur gouverneur Ibn-Khorhob,
s'emparent de ses vaisseaux au mo ment o il vo ulait
fuir en E spagne, p uis le saisirent lui mme ainsi q ue
so n cad i, les char gr ent d e chanes et les envoyrent
916 au Mahdi qu'ils savaient Sousse ; celui-ci interrogea
Ibn-Khorhob qui il reprocha sa dfection et fit
conduire ses prisonniers Raccadah o ils furent
supplicis. Obed-Allah sut maintenir la tranq u i l l i t
en Tunisie jusqu' sa mort; il est remplac par Abou
934
lKacem Mohamed, plus connu sous le nom de El Kaem
Biamr Allah ( l e soutien de l'ordre de Dieu).
Les insurrections se renouvellent de tous cts ;
la dynastie fatimite f a i l l i t tre renverse la suite de
la guerre sainte que prchait depuis longtemps un
Berbre du nom de Maklad-ibn-Kedad, surnomm
Abou-Yezid, connu aussi du sobriquet de l'Homme
l'ne, cause de sa monture; cet Abou-Yezid, obtint
d es hab itants le ser me nt d 'exter mi ner les Fati mites
113

et de rempl acer en B erb rie l eur gouvern em ent


desp o t i q u e p a r u n g o u v e r n e m e n t r p u b l i c a i n c o m p o s
d ' u n co n s ei l d e ch ei ck s .
943 La guerre est d clare ; Abou -Yezid enlve un grand
nombre de villes dont : T bessa, Tozeur, Sbiba, Bja,
enfin Tunis ; les troupes berbres mar chen t de su ccs
en succs, les troupes fatimi tes cdent partout ; battues
943 ell es se retirent sur Sous se, se reforment sou s le co m -
mandement de Bochra et, avec l'aide de renforts, se
d ci d en t r epr endr e l 'o ff en s iv e.
Les Fa timites marchent la rencontre d'Abou -Yezid
venant de Tunis et livrent le combat d'A riklia
(probablement H e r g l a ) ; les Berbres sont vaincus et
perdent 4 000 hom mes tu s et 500 prisonniers; ceux - ci
sont emmens Mahdia o i l s sont massacrs par
la populat ion coups de bton et de pi erres. A l 'occas ion
du fait d'armes qui donna la victoire aux troupes fa timites
contre les Berbres proximit de la v i l l e de Sousse deux
vrificateurs arab es Sehl i b n Ibrahim el Ouer rac
et A h m ed i b n B el ed j ex al t e n t l a r en o m m e d e S o u a et
f o n t l ' l o g e d es h ab i t an t s q u i o n t u n e f o r ce d e co r p s et
u n e v i g u eu r ex t r ao r d i n ai res .

Vers compos s par Sehl ibn Ibrahim el Ouerrac :


Les Schismatiques ont t repousss de devant Soua par
nos lances et notre bravoure ;
Et par coups de sabre qui firent voler dans la poussire
les ttes des guerriers qui combattaient sous les yeux de leurs
femmes.

Vers composs par Ahmed ibn Beledj, n a t i f de Soua :

Il s'approcha de Soua et l'insulta avec audace, mais la


ville avait Dieu pour protecteur.
Soua est le boulevard du Maghreb, les autres villes et
forteresses l u i rendent hommage.
La maldiction divine est tombe sur ceux qui insultrent
Soua, ainsi qu'elle tomba sur Coreidha et Madhir (peuplades
juives des environs de Mdine.
Le crateur de toute chobe exalta sa religion par le moyen
de Soua au moment mme o les affaires taient au plus
114

mal. Dans la ville de Soua, il serait survenu des malheurs


faire blanchir la tte des enfants.
La renomme de Sousa retentira dans toute la terre, et
l'loge de ses habitants sera rpandu par une multitude de
peuples .
(Extrait de l'ouvrage d'Fl Bekri, 1068 de J. - C.)

Les Berb res rtrogradent sur Tunis, attendent des


renforts, puis gagnent Kairouan et Raccadah qui, aprs
944 plus i eurs c o mb ats , son t p rise s du 15 au 21 O ct ob re ;
d e s u it e a pr s , A bo u Y e z i d m ar c h e s ur S o u s s e e t
Mahdia, seules villes qui ne lui sont pas encore s ou -
mises; Sousse, les habitants voulurent rsister, mais
l e s B er b r e s pr e n n e n t l a v i ll e d ' a s s a u t ; l e s h o m m e s
sont torturs ( on leur coupe les pieds, on leur brise
les os, les femmes sont ventres depuis les parties
sexuelles jusqu' la poitrine), une partie des habitants
est amen e co mme esclav es Kairouan ; ce qui reste
es t m a int en u en r esp e ct d ans l a v ill e p ar u n G ouv e r -
neur dsign par Abou -Yezid et quelques troupes.
La population fut indigne de pareils actes de
cruaut, aussi n'attendit -elle qu'une occasion pour se
rvolter.
Apr s l a pri se de S ous se, Abo u - Y ez id v a at ta qu e r
945 Mahdia ; le si ge dura du 7 janvier au 15 aot ; aprs
a v oi r l i vr p l u si e u rs c o m b a t s e t t e nt l ' a ss a u t d e l a
ville, le chef berbre abandonn d'une partie des siens
est oblig de lever le sige et se replie sur Kairouan.
Profitant de cet insucc s et de la faiblesse de la
945 garnison de Sousse, les habitants se soulvent contre
le Gouverneur, l'arr tent et l'envoient prisonnier avec
la garnison Mahdia ; Abou l'Kassem el Kam, titre
de remerciement, expdie Sousse sept navires
c h ar g s d ' a p pr o vi s i on n e m e n t s et de tr o u p e.
Ab o u - Yezid reforme une arme avec des renforts reus
de diverses rgions, puis prend la dtermination de s'em -
parer de nouveau de Sousse. Il arrive devant la place
l e 1 3 j a n v i er , l a t t e d e 8 0. 0 00 c a v a l i e rs , d it E l
Bekri, et avec 100.000 khoss (huttes -tentes), chaque
khoss abritant deux ou quatre guerriers, dit El Tid -
115

jani (ce dernier chiffre para t exagr); catapultes,


machines de guerre diverses furent mises en uvre
pour saper les murailles ; chaque jou r, l'attaque de la
ville est renouvele; tantt le succs rpond aux armes
d'Abou-Yezid, et tantt l'avantage passe aux dfenseurs
de Sousse. Aprs trois mois de lutte outrance,
la ville avait dj perdu un grand nombre de ses
dfenseurs lorsqu'en Ramadan, El Kam, fatigu dans
son chteau de Mahdia, abdiqua en faveur de son fils
Abou Tahir Ismal, et mourut quelque temps aprs,
18 mai 946.
Isma l envoya alors Sousse des navires chargs
de vivres, munitions et troupes, sous la conduite de
Raschik et de Yacoub ibn I s h a k ; il voulu m me
aller en personne au secours de Sou sse, mais en route
il changea d'avis, revint Mahdia et chargea ses deux
gnraux d'agir suivant les circonstances ; les troupes
furent dbarques.
Abou -Yezid venait de faire amasser de grands tas
de bois au pied des murailles (ou ne sait pourquoi,
vu que la ville tait entoure, non ne palissades, mais
de murailles forte ment construite s en pierres) ; il
avait aussi fait fabriquer une norme machine destine
recevoir de nombreux combattants pouvant arriver
hauteur des mu railles. Renforce la garnison fit une
sortie ; la lutte fut terrible. Les assigs furent d'abord
culbuts et refouls dans la v i l l e ; mais Rashid fit
mettre le feu aux amas de bois et la machine (dabbaba);
des tourbillons de fume obscurcissent l'air, de
manire empcher Abou -Yezid de voir ce qui se
passait de ce ct ; il ne dou te pas que les combattants de
la machine eussent pri ; une panique survi n t ,
l a ga r ni s o n se r ua s u r le c a m p d u re be l le e t mit en
droute son arme; Abou -Yezid lui -mme fuit en toute
hte et arrive le mme jour Kairouan dont les portes
restent fermes.
Ds l'arrive Mahdia de la nouvelle de la dlivran -
946 ce de Sousse, Ismal part, arrive dans la place le 27
mai et repart le lendemain pour Kairouan.
946 Abou-Yezid dfinitivement vaincu, le 15 aot 946,
116

au Sud-Ouest de Kairouan, quitte la Tunisie et est


947 pris, bless, demi-mort, entre Aumale et Bordj-bou-
Arreridj.
Ismal, qui avait t si brave et si entreprenant, reste,
partir de ce moment, plong dans l'inaction. Il fait
lever une ville de plaisance Sabr a et, la suite
953 d'une partie de plaisir Djaloula, il rentre transi de
froid dans son palais o il meurt, 18 mars.
L'an de ses dix enfants lui succde, Abou-Temim
Mad surnomm El Moz Lidin Allah (qui exalte la
religion de Dieu) ; sous le rgne de ce prince, la paix
intrieure de la Tunisie ne fut trouble que par une
expdition des Maures d'Espagne dont une partie, sous
955-957 le com mand em ent de R' alib, vint par mer dva ster
Sousse.
Pour venger cette insulte, El Moz envoya 20.000
cavaliers dans le Magreb, vassal de son ennemi, et le
conquit.
968 Puis il entreprit la conqute de l'Egypte avec 100.000
hommes. Les Berbres profitant de l'loignement des
troupes se soulevrent de nouveau ; i l s furent battus
par un des lieutenants de El Moz, Ziri ben Menad,
qui fut tu dans la lutte ; son fils Bolokhin le remplaa
et infligea aux insurgs dfaites sur dfaites. Toutefois
l e K h a l i f e v o y a n t s e s e n n e m i s t o u j o u r s i nd o m p t s
972 malgr leurs insuccs, prit le parti de confier le
gouvernement de l'Afrique au vainqueur Bolokhin et
de gagner l'Egypte, pour prendre possession de son
nouvel empire.
C'en tait fait de la domination arabe dans l'Afrique
du Nord.
117

Priode Berbre

de 972 1535 de J.-C.

Bolokkin, investi du Gouvernement d'Afrique, ta-


977 blit la dynastie des Zirides et meurt.
980-981 Sous son successeur, les chrtiens de Sicile arrivent
devant Sousse et veulent s'en emparer. Les habitants
demandent du secours au khalifat de Kairouan,
Abbou l'Abbas ; celui-ci fit rpondre qu'elle pouvait
se dfendre elle-mme. Les dfenseurs se conduisirent
si bien que les chrtiens durent lever le sige.
Mais l'anne suivante lorsque les gens d'Abbou l'Abbas
vinrent Sousse pour lever les impts, ils furent mal-
traits et les gens de Sousse se dclarrent indpen -
dants.
Les successeurs de Bolokkin, El Mancour et Badis
eurent encore lutter contre les Berbres toujours en
rvolte contre l'autorit fatimite.
997 Badis , dan s un mom ent d e r pi t, vin t Souss e en
voyage d'agrment; le port tait assez vaste; les bti-
ments qui s'y trouvaient purent man uvrer en sa
prsence.
El Moz, qui succda Badis, dut partager les Etats
qui lui taient conf is en deux royaumes; il abandonna
la par tie occidentale et ne conserva que la Tunisie.
Avant de quitter le x e sicle et d'entamer le XI e sicle
qui devait voir la terrible invasion hilalienne, il y a
lieu.de noter que la Tunisie tait en pleine prosprit ;
Sousse, tout particulirement, renfermait des mosques,
des bains et des caravansrails en grand nombre ;
les bazar s tmoignaient de la r ichesse de ses
habitants; les campagnes environnantes taient
superbes ; les marchandises et les fr uits abondaient:
la viande et les denres de toutes sortes taient trs
bas prix ; Sousse tait aussi renomme par ses manu-
118

factures de toile fine et de laine; on y fabriquait un


fil dont le poids d'un mithcal (l) se vendait deux
mithcals d'or (2); les toffes fines de Kairouan taient
envoyes l'apprt Sousse; enfin le premier vque
de la Byzacne sigeait dans cette ville.
Telle tait la situation de la Tunisie, et notamment
de Sousse, quand El Moz Ibn Badis secoua le joug
des Fatimites d'Egypte, repoussa les reproches
1048 d'El Mostancer, son suzerain, et se dclara vassal des
Abassides de Bagdad.
Le khalife El Mostancer rsolut de se venger de
l'insolent vassal qui se rvoltait contre lui. Sur son ordre
son vizir alla trouver le chef des Beni Hillal et des
Beni-Solim qui, la suite des dvastations dans la
rgion du Nil et de rvoltes contre les souverains fati-
mites, avaient t dports dans la Haute-Egypte; pour
se dbarrasser de ces voisins gnants El Mostancer
leur offrit le Magreb et le royaume d'El Moz Ibn
Badis. Les Hilaliens acceptrent de suite les proposi-
tions et se mirent en route vers la Tunisie au nombre
de 250.000 environ.
1048-1049 A la nouvelle de cette dfection d'EI Moz les habi-
tants de Sousse se soulevrent contre lui et se dcla-
rrent indpendants.
Les tribus pillardes lances par El Mostancer se
ruent sur la proie qui leur est abandonne; semblables
une nue de sauterelles, dit Ibn Khaldoum; ils
dtruisirent tout sur leur passage.
Vainement El Moz voulut les arrter; battu
Haiderane, prs de Gabs. il est oblig de reculer
devant le torrent qui dborde, inondant tout.
El Moz se retire sur Kairouan qu'il devra bientt
abandonner.
1053-1054 El Moz envoie nouveau Sousse les collecteurs
d'impts; les habitants refusent de payer dclarant
qu'ils avaient besoin eux-mmes d'argent pour se

(1) Ancienne mesure arabe.


(2) Comme valeur montaire, le mithcal d'or peut tre valu
dix francs.
119

mettre en tat de repousser leurs propres ennemis ;


sur ces entrefaites la s ur d'El Moz mourut Sousse
et les autorits de la ville recueillirent tout ce qu'elle
avait laiss, refusant d'envoyer El Moz l'hritage de
sa s ur. Celui-ci, dans le but de rclamer cette suc-
cession, dpche vers les habitants de Sousse un de ses
officiers auxquels ils rpondirent: Comment
serions-nous assez insenss pour envoyer El Moz ces
richesses qui lui fourniraient des armes contre nous;
nous les gardons, afin d'augmenter nos propres forces
pour le repousser et le combattre . El Moz envoya
alors contre eux de nombreux vaisseaux qu'il fit partir
de Mahdia ; ds le lendemain, au point du jour, ils
taient dans le port de Sousse qu'ils incendirent avec
tous les vaisseaux qui s'y trouvaient ancrs. Il y en
avait, ce moment l, plus de soixante dont la majeure
partie appartenait aux habitants de la ville. Aussitt la
population se rue sur les gens de Kairouan qui taient
domicilis Sousse et qui taient rests fidles El
Moz, pille leurs demeures et leur fait subir toutes
sortes de mauvais traitements.

En mme temps, El Moz envoya contre Sousse une


petite colonne de 100 cavaliers laquelle fut ordonn
de s'entendre et d'agir d'un commun accord avec la
division navale; on devait assiger la ville par mer et
par terre. Mais il arriva que, le jour mme o ces
troupes se mettaient en marche, les vaisseaux du roi
de Sicile vinssent passer devant Sousse ; ceux d'El
Moz en prirent alarme et rentrrent prcipitamment
Mahdia sans que l'mir en fut inform. Sur ces
entrefaites la colonne arriva devant Sousse, elle
demanda des nouvelles de la division navale, et ayant
appris qu'elle tait partie, les soldats d'El Moz se
repentirent de s'tre ainsi aventurs. Mais, ce mo-
ment, les habitants de Sousse et les arabes des environs
vinrent eux et les engagrent entrer dans la ville;
peine y taient-ils entrs qu'ils y furent massacrs
et leurs ttes exposes sur les remparts. L'historien
Ibn Sharaf dit : Il m'a t rapport par un tmoin
120

oculaire, que le nombre de ces ttes tait de plus de


cinquante.
Aprs leur victoire prs de Gabs, les Hilaliens
pour suivent leur dvastation dans les riches plaines
de la Tunisie; seules les populations des montagnes
et des villes fortifies du littoral sont pargnes.
1056 Ils se pr sentent devant K air ouan, qu'ils assigent
et que El Moz russit quitter pour se rfugier
Mahdia. Kairouan occupe par les Hilaliens il ne reste
plus El Moez que Mahdia et quelques villes fermes;
le reste du pays est soumis au vainqueur ou se dclare
indpendant.
1062 El Moz meurt Mahdia (aot); son fils, Temim, lui
succde ; il s'attache favoriser les discordes intestines
parmi les tribus envahissantes et ramener lui
les villes qui s'taient mancipes. Sousse obtient son
1065 par don et Temim r epr end la ville dont il par gne les
habitants.
1068 Abou Obid El Bekri, clbre polygraphe espagnol,
laisse un manuscrit arabe d'une haute importance ( 1 ),
il est intressant de relever ce qu'il dit de Sousse.
Sou a est entour e p ar la mer de tr ois cts, au
nord, au sud et l'orient. La muraille de pierres qui
l'environne est trs forte et solidement btie; la mer
vient s'y briser, et, du ct de l'orient, elle pntre
ju sq u' a ux m a is on s p ar de s c o nd uit e s s ou t er r a i ne s
(gots probablement). Dans l'angle de la ville qui
r egar de le sud- ouest, on voit un phar e qui por te le
nom de K hal ef el F t a et qui s'lv e un e gr a nde
hauteur ( 2 ). Soua a huit portes dont celle qui s'lve
l'est du btiment nomm Dar-es-Sena , l'arse-
nal maritime, est d'une grandeur norme; c'est
par l que les vaisseaux entrent et sortent (du port).
Deux autres portes sont du ct de l'occident et
regardent le " Melab " (amphithtre, hippodrome) .
Ce vaste, difice de construction antique, est pos

(1) Traduit par MM. Quatremre et le baron de Slane.


(2) Ce phare venait d'tre construit, en mme temps que la Cas-
bah sur l'emplacement de l'acropole phnicienne.
121

sur des votes trs larges et trs hautes dont les


cintres sont en pierre ponce, substance assez lgre
pour f lotter sur l'eau et que l'on tir e du volcan de
la Sicile.
Autour de Melab se trouvent un grand nombre de
votes communiquant les unes avec les autres. Dans
les environs de la ville, on voit des ruines d'une
grandeur norme et d'une haute antiquit. Soua
est entirement btie en pierre de taille. La viande
qu e l 'o n c on so m me S o us s e es t l a m e il l e ur e du
monde ; tou t y est b a s pr ix, ju squ' aux f r uits ; les
denres de toute espce s'y trouvent foison .

Reprenons la srie des faits qui suivirent la prise de


Souss e par T emim en 10 65. Ce pr inc e Zir id e tr a ns -
1087 f or ma Mahdia en un r epair e d'audacieux pir ates qui
devinr ent la terr eur de la M diterr ane; aussi les
Pisans et les Gnois parurent-ils devant le port de
Mahdia, saccagrent la ville qu'ils ne quittrent qu'aprs
paiement d'une forte indemnit.
1090 L'anne est marque par la peste et la famine en
Tunisie.
1108 Temim meurt et est remplac par son fils Yahia.
1116 Ali lui succde et disparait laissant les rnes du Gou-
1121 vernement Hassen ; sous son rgne, les Normands de
1122 Sicile firent une premire tentative sans succs contre
1135 Mahdia, s'emparrent de l'le de Djerba et se prsen-
trent de nouveau devant Mahdia qu'ils prirent sans
1148 coup frir, en fin juin.
Sousse subit le m me sort ( 2 juillet) et le gouver-
neur D jebar a-ben K amelben Serhan ibn Abi-el Onen
el Fadr i el Baid es Sti dut livr er la ville aux chr -
tiens du roi Roger II, de Sicile, commands par l'ami-
ral George.
Les gouverneurs des villes furent d signs par les
1154 Normands; tout alla bien jusqu' la mort de Roger II.
Le successeur de ce roi s'alina les populations du
littoral par ses tyranniques exigences; les arabes de
leur ct dvastaient l'intrieur ; El Hassan, le souverain
dtrn de Mahdia, s'tait rfugi auprs d'Abd-El-
122

Moumem, chef de la secte nouvelle des Almohades


en Espagne, au Maroc et en Algrie,
Les opprims de la Tunisie allrent supplier
Abd-el-Moumen de leur porter secours ; le chef
almohade cout a leur s p l aint es, pr omi t son se cou r s,
r unit 100.000 hommes dont 70.000 fantassins et 30.000
1159 chevaux, arma 60 navires et quitta le Maroc, arriva
devant Tunis en Juillet et poursuivit sa conqu te dans
toute la Tunisie. Les populations des villes se
soulevrent en sa faveur contre les chrtiens qui se
trouvaient parmi e u x . S o u s s e , d a n s l a p e r s o n n e d e
s o n g o u v e r n e u r Djebara ben Kamel, offrit sa
soumission ; un gouverneur pris parmi les Mouahedin
(sectaires d'El Mahdi et par tis ans d'A bd - el- Moume n)
f ut donn aux h abi tants de Sousse, il se nommait
Abd-el- Mohamed ben Altasse el Kourni.
1160 La f or ter esse de Mahdia r sista aux attaques des
musulm ans ; m ais el le d ut se r endr e apr s un a n de
comba t et d e pr ivat ions ; le vainqu eur ac cor da la
gar nison une capitulation honor able ; les N or mands
r e g ag n r en t l a S i c i l e sur d e s b t i m en ts a lm oh a de s .
Abd el Moumen reprit le chemin du Maroc, aprs
avoir organis le pays qu'il venait de conqurir.
1163 Abd el Moumed meurt, laissant la succession son
fils, Youssef ; sous son rgne il avait port la puissance
berbre son apoge ; toute la rgion de l'Atlantique tait
soumise sa domination.
Avec Youssef, la Tunisie jouit d'une tranquillit
presque relative ; les chrtiens revinrent inopinment
attaquer Sousse une deuxime fois, s'emparrent de la
ville, la pillrent et massacrrent une partie de la popu-
lation, firent le reste prisonnier, et ne v oulant pas
s'tablir dans la ville, la dtruisirent presque compl-
tement.
Le Gouverneur fut fait prisonnier avec sa femme et
ses enf ants, fut emmen en Sicile et ne put r entr er dans
son pays qu'aprs avoir pay une assez forte ranon.
Pendant plus d'un si cle la Tunisie f ut le thtre
des luttes intestines entre les diverses tribus, et les
123

Almoravides cherch rent plusieurs fois supplanter


les Almohades.
Ibn Ghania, chef rebelle, poursuivi et battu une pre -
1187
mire fois Gabs par Yacoub el Mansour, saisit tou-
tes les occasions pour imposer son autorit en Tunisie.
1202-1203 I l f u t m m e m a t r e d e l a T u n i s i e e n t i r e , e t n e du t
la quitter qu' la suite de nombreux checs que lui fit
subir l'arme puissante d'El N acer. A cette poque
(1205) fut restaur le Ksar de Sousse, ainsi que l'indique
l'inscription coufique, grave sur marbre et fixe
au- dessus d e la gr ande t our. A u no m d e D i eu, cl -
ment et misricordieux, l'mir Ziad Allah ben Bra-
h i m , q u e D i e u pr o t g e s e s j o u r s e t l u i d o n n e u n e
l o n g u e v i e , a a u t o r i s , p ar l 'i n t e r m d i a i r e d e s o n
serviteur Mesrour el Melek, la restauration du Ksar
et ce la date de 602 .
En Nacer, fils d'El Mansour, regagna le Maroc lais -
sant le gouvernement de la Tunisie A bou Mohamed
el H af s qui sut maint enir la tr anquillit dans le p ays
1221 jusqu' sa mor t.
1221-1236 Durant cette priode, les khalifes ou princes Almo-
hades, ainsi que les gouverneurs de la Tunisie, se
succdrent rapidement; la dynastie des Almohades
t o u c h e s a f i n. L e G o u v er n e u r A bo u Z a k a r i a s e
dclare indpendant et avec lui est fonde une nou-
velle dynastie des Hafsides dont il devient le chef.
1236 La puissance dAbou Zakaria s'tendit bientt jus -
qu'au Maroc; l'Espagne lui offre la souverainet ;
l'Empereur d'Allemagne mme, Frdric II, entretient
avec lui d'excellentes relations.
1249 A sa mort, il laissait la Tunisie pacifie et enrichie;
il avait runi Tunis une superbe bibliothque de
36.000 volumes ; son fils Abdallah lui succde et
prend le surnom d'El Mostancer B'Illah (celui qui
cherche le secours de Dieu) ; nergique, il sut main-
tenir son autorit ; il embellit Tunis, reut de nom-
breuses missions trangres et personnages importants.
1259 Sousse, qui tait au pouvoir des Hafsides, rsiste
aux attaques du Sultan Abou Inan qui cherchait
jeter le trouble en Tunisie.
124

1269 Enfin la chute dfinitive de la dynastie des Almoha-


des assur e E l Mostan cer l a pr pondr anc e
dans l'Afrique du N ord.
A cette poque, les tribus arabes des Hilaliens et des
Solimites qui, deux sicles auparavant, avaient envahi
la Tunisie et l'avait dvaste, sont dissmines
de la province de Barka (Cyrnaque) au Maroc; elles
ne sont donc plus aussi r edoutables; de plus, elles
sont actuellement mlanges l'lment berbre ; ces
deux tribus principales sont elles-mmes divises en
sous-tribus dont une, celle des Hakim, avait son can-
tonnement entre Sousse et El-Djem.
1269 C'est sous le rgne d'El Mostancer qu'eut lieu l'ex
pdition de Saint Louis, roi de France contre Tunis.
Les c aus es en son t bi en connue s : Char les d'A n jou,
f r r e du roi et souver ain des D eux- Siciles, voulait
imposer son autor it en Tunisie; Saint Louis
ne voyait p as d 'un m auva is il l 'o ccup at ion de la c te
situe sur la route de la Palestine ; un incident entre le
gouvernement tunisien et des ngociants provenaux
qui rclamaient le paiement des sommes dues par un
cer tain Abbou L'Abbas, un indigne des environs de
Mahdi a, a men a l a r uptur e des r e lat ions entr e le r oi
de France et El Mostancer.
La flotte de Saint Louis dbarque, Carthage, 6.000
cavaliers et 30.000 fantassins. C'en et t fait de
Tunis, si le chef de l'expdition n'eut apport des
lenteurs dans ses opr ations militair es et si la peste
ne se fut dclare dans le camp franais.
1270 Saint Louis succomba un des premiers ; Tunis n'en
fut pas moins serr e de prs et la guerre ne prit fin
que lor squ e Ph il ipp e III, suc c es se ur d e S ai nt Lou is ,
eut obtenu du khalife El Mostancer un tribu de 210
mille onces d'or, soit 10 millions 500 mille francs ; la
flotte franais e regagna alors le large pour entre r en
Fr ance.
1277 Q u el q ue s an n es pl us t ar d, El M os t an c er m our u t
laissant son royaume en pleine prosp rit.
Les successeur s I aia et A bou I shak voient leur
pouvoir branl par les rvoltes; un aventurier de
125

basse extr action se f ait passer pour El Fahdl un des


f i l s d 'I a i a , e t r u s s i t s e f a i r e p r o c l a m e r k h a l if e
1283 Tunis en janvier.
Les habitants de Sousse vont Kairouan faire leur
so u mi ssi o n c e t us ur p a te ur do nt l e vr ai no m t ai t
Ibn Abou O mara.
Heureusement pour les Hafsides, l'usurpateur victo-
rieux ne tarda pas s'aliner par ses cruauts les
populations qui l'avaient accueilli sans df iance; un
1284 no uv el m ir A b ou H af s f ut a c cl a m so us l e s ur n o m
d'El Mostancer II et Ibn Abou Omara, dcouvert dans
une maison o il s'tait cach, fut justement puni du
cr ime d'impostur e.
S ou s l e r gn e d 'El Mo s ta n c er I I , M a hd i a eu t
1290 subir trois assauts des chrtiens, et des rvoltes durent
tre rprimes.
El Mostancer II mourut en laissant comme succes-
seur A bou A cid a qui joui t d'un r gn e long et pr osp re
jusqu'en 1309; durant cette priode de tranquillit,
Sousse vit un de ses concitoyens Abou Zeyd Abd
Er r a h m an, j ur i st e, l e v l a di gn it d e k a di K ai -
1302-1306 rouan en 1302 et reut la visite en 1306, d'un clbre
historien El Tadjani ; ce voyageur de marque fait de
Sousse la description suivante.
Sousse est une trs grande ville, btie sur le revers
d'une colline, entoure d'un rempart solidement cons-
truit et baigne par la mer; on y trouve d'anciennes
ruines, on y fabrique de fins vtements appels Sous sia.
Cette ville voit arriver de nombreux voyageurs.
Sousse a toujour s t r enomme par les obstacles
qu'elle oppose ses assaillants; ses habitants sont connus
par la fiert de leur car actre et leur courage
guer r ier.
1309-1318 Deux rivaux, les gouverneurs de Tunis et de Cons -
tantine se disputent l'empire H afside; la suite de
luttes dfavorables au gouverneur de Tunis, El Mos-
tancer IV, un trait fut conclu qui rduisit considra-
blement les possessions de ce prince et donna au con-
traire au sultan de Constantine, Abou Yaya Bekr, outre
sa province, toute la Tunisie sauf Mahdia.
126

Sous le rgne d'Abou Bekr, le commerce de Sousse


fut trs florissant et de cette date, 1318 1375, le port
fut ouvert aux navires europens pour les transactions;
ct des douars arabes, il y avait des centres d'ta -
blissements chrtiens, fondouks, chapelles, etc ; des
agents chrtiens prparaient les approvisionnements
et les comptes avec la douane, afin que les navires
e usse nt sjourne r le moins possible da ns le port.
Abou Bekr ne put emp cher les luttes intestines
causes par les arabes; il rprima les rvoltes de 1323
1327 et organisa le pays pour eu assurer la scurit ;
il nomma gouverneur de Sousse et du littoral envi -
ronnant, avec rsidence S ousse, ses deux fils Abou
Fars Azouz et Abou l'Baka Kalid, avec Mohamed
ben Tahir, puis Ibn Farhoum comme chambellans ;
quelque temps aprs, Abou Fars resta gouve rneur
de Sousse.
1346 Abou Be kr mourut subiteme nt Tunis, a pr s un
rgne extrmement troubl. A sa mort, un de ses fils
Abou Ha fs Oma r s'e mpare du pouvoir a u dtrime nt
de son frre ain Abou l'Abbas ; celui -ci appelle aux
armes les populations qui lui sont fidles, marche sur
Kairouan, puis sur Tunis o il entre sans coup frir,
suivi de son frre Abou Fars, gouverneur de Sousse ;
mais Abou Hafs, rentr secrtement dans Tunis, assas -
sine Abou l'Abbas et aprs avoir pris ses deux frres
Abou Fars et Abou l'Baka, les mutile horriblement
et les laisse mourir en cet tat.
Le Sultan du Maghreb, chez qui se trouvait alors un
des derniers fils d'Abou Bekr, indign de ces cruauts
marche sur Tunis pour venger le sang des malheu -
reuses victimes ; Abou Hafs fuit, mais arrt prs de
Gabs, il a la tte coupe.
1347 El Hace n e ntre Tunis en triomphate ur, puis va
re c e voir Sous se le s homma ge s de se s n ouve a ux
sujets.
1348 Son triomphe fut de courte dur e ; battu sous Kai -
rouan par les arabes pillards, il dut gagner en toute
hte le port de Sousse, s'y embarquer pour Tunis qu'il
va dlivrer des Berbres et qu'il quitte poursuivi par
127

l e s m a l d i c t i o n s du p e u p l e . A pr s E l F a d h l , A b o u
1370 I shak et A bou l' Ba ka K haled, A bou l'A bb as I I f ut
appel par les v ux de toutes les populatio ns ; il
arrive Tunis dont il s'empare, fait rentrer la plus
1375 grande partie des villes, dont Sousse, sous son auto-
1378 rite ; il fait cesser tous les abus et va lui-mme lever
des recrues et percevoir les contributions Sousse et
autres localits.
La fin du rgne d'Abbou l'Abbas II est marque par
1390 un e e xp dit io n d e c hr t i en s c ontr e M a h di a; l a v i ll e
est dlivr e ; par trait, la piraterie est en principe
1394 suppr im e. A bou l'A bbas I I m eur t laissant les r n es
du gouvernement Abou Fars qui, durant 40 annes,
entretint de bonnes relations avec les puissances euro-
1432 penn es et mour ut apr s avoir tendu son inf luen ce
du Maroc en Egypte. Avec Abou Fars, dernier grand
prince Hafside, sont termines les brillantes priodes
de cette dynastie; ses successeurs voient leur pays
troubls et les populations victimes du terrible flau
1469 et 1493 de la peste qui svit avec intensit.
1497 Sousse est prise par l es T urcs.
Au commencement du xv I e sicle, l'Afrique, encore
sous la domination des derniers princes Hafsides qui
ne savent la gouverner, est l'objet des convoitises des
Espagnols et des Turcs ; les premiers, aprs avoir con -
quis la plus grande partie de l'Algrie actuelle, vont
mar cher sur Tunis lorsque les Cor sair es tur cs, sous
les ordres de Barberousse et de Kheireddine, obtien-
nent des f aveur s du prince H afside sous pr texte de
l u i v e n ir e n a i d e ; l a l u t t e e n tr e l e s C o r s a i r e s e t l e s
1514 Espagnols est alors engage.
Barberousse refoule les Espagnols en Afrique, mais
1518 battu son tour, il pr it dans la pour suite.
K h eir e dd in e ay a nt r e u de s r enf or ts s e m a in ti e n t
en position, mais fut un moment embarrass par des
lev es des K abyl es ex cit s par le nouveau kalif e de
1525 T u n i s, M o u l a H a s s e n , q u i venait de s'emparer du
pouvoir la mort de son pre.
Pour se venger de ce prince H af side, K heir eddin e
va Con stantinopl e expl iquer au Sulta n que la po s -
128

session de Tunis tait indispensable pour chasser les


Espagnols; le sultan Soliman lui accorde une flotte et
des troupes. Pendant ce temps Moula Hassen, dont
le gouvernement tait faible, voit plusieurs villes
mconnatre son autorit. Sousse fut du nombre ; elle
se soumit El Kolel, parent d'El Hassen.
1534 Kheireddine arrive Bizerte o il est bien accueilli,
puis Tun is qui es t pr i s e f a ci l e men t . L a d ch a nc e
des Hafsides est proclame. Moulai Hassen russit
fuir, grce un chec subi Bja par les troupes tur -
ques lances sa poursuite, et va se rfugier auprs
de Charles-Quint : il sollicite son appui et l'obtient.

Priode Espagnole

de 1535 1573 de J. -C,

Char les - Q ui nt pr par a une gr ande ex pdition con -


tr e T un is, qu i t ai t o c c up e p ar K h e ir e dd in e ; l a
f lotte de l'Emper eur comptant 400 vaisseaux monts
1535 par 25.000 hommes, jeta l'ancre devant Carthage le 16
juin ; du 4 au 14 juillet, sige de la Goulette qui est
enleve; le 17 juillet, marche sur Tunis et dfaite des
troupes turques; le 18 juillet, Tunis ayant ouvert ses
portes est mise sac; 70 000 habitants sont massacrs;
le 21 juillet, Charles-Quint et Moula Hassen font leur
entre dans cette malheureuse capitale, le 6 aot, un
trait fut sign entre Charles-Quint et Moulai Hassen
qui fut replac sur son trne au prix de certaines
conditions
Peu de temps aprs, l'Empereur quittait la Tunisie;
Moulai H assen ne peut f aire r econnatre son autorit
Sousse et dans d'autres villes ; l'anarchie commence
rgner. Don Bernardino, qui reprsentait comme chef
militaire en Tunisie Charles-Quint, conseilla alors
son matre de dmanteler les places fortifies du litto-
129

ral pour rduire les corsaires turcs ; la situation s'em-


pira tel point que le vice-roi de Sicile reut l'ordre
d'envoyer Sousse des vaisseaux et des troupes pour
porter secours son vassal tunisien. Marmol, historien
espagnol qui suivit toutes les expditions des
Espagnols en Tunisie, dcrit ainsi cette expdition :

On en donna donc la commission au marquis de


Terre-Neuve, gentilhomme sicilien, et l'on assembla
14 galres (10 de Sicile et 4 de Malte) avec 4 grands
navires sur lesquels on embarqua 2.000 Espagnols et
quelques Siciliens et l'on prit la route de Suse; outre
ces troupes, le r o i de Tunis envoya par terre 7.000
chevaux maures ou arabes sous le commandement
de son fils.
L'arme navale arrive devant Suse, les galres
dbarqurent l'infanterie un peu loin de la ville, en
une petite rade du ct du couchant o elles ne
pouvaient tre offenses de l'artillerie des ennemis;
mais les gros navires demeurrent fort loigns
cause des bancs de sable qui sont le long de cette
cte. L'arme s'tant mis en bataille tout son aise,
sans tre trouble de la ville, se vint camper en une
plaine du ct du chteau, les forces allies tenant
la campagne.
Aprs avoir fait une batterie avec des gabions, on
planta dessus quatre pices d'artillerie; donc on
commena battre le pan de mur attach la tour
du donjon, ce qui fut sans effet. On pouvait atta-
quer la ville plus facilement et la prendre d'emble,
puis battre de l le chteau o s'taient retirs quel-
ques Turcs et rengats ; mais il ne voulut pas, parce
que les soldats se seraient amuss au pillage et que
les Turcs et les Maures sortant l-dessus du chteau
les auraient gorgs par les maisons.
Nanmoins avant que la brche fut raisonnable, il
fit donner l'assaut, tous les allis tant rpandus
autour de la place et ayant sur leurs ttes des
rameaux d'oliviers pour tre reconnus des chrtiens.
L'assaut dura fort longtemps; les Turcs et les
130

re n ga ts d fe n dire nt v ive me nt la br c he a ve c de s
cailloux et des quartiers de pierre qu'ils jetaient du
haut du donjon, et, ayant tu Don Di go de Castille,
mestre de ca mp et Lope de Mlo, c a pita ine d'une
des galeries de Malte avec plusieurs gentilshommes
et plusieurs soldats, on fut contraint de se retirer et
d'abandonner la victoire aux ennemis, car les muni -
tions taie nt c onsomm es et n'a ya nt pa s a ssez de
vivres pour en attendre de nouvelles, on se rembar -
qua et on retourna en Sicile.
A cette description du si ge de Sousse, Marmol y
ajoute celle de la v i l l e : C'est une ville de 1500 mai -
sons sur la cte, en un beau lieu, un peu relev du
c t de la te r re, de sorte que de la me r toute s le s
ma isons se voie nt; e ll e e st fe rm e de bonne mu -
raille et, au plus haut de la ville, il y a un fort ch -
teau avec un foss et une esplanade tout autour.
Parlant des habitants, il dit que : Tourments par les
a ra be s q ui le u r re nd e n t d i f fic ile la c u lt u re de la
terre, la plupart des gens de Sousse s'adonnent la
ma rine, vont tra fique r Ale xa ndrie et a ille urs et
que, suivant l'exemple des corsaires turcs venus en
Afrique, beaucoup font le mtier de pirate et vont
jusqu'aux cts d'Italie avec des galiotes.

1539 Une nouvelle attaque de Sousse est ordonn e; elle


est dirige par Andr Doria, amiral Gnois, qui joint
ses galres celles de Naples, de Malte et de Sicile for -
mant en tout le nombre de quarante -trois ; il embarqua
dessus l'infan terie espagnole et abordant sur la cte
de Tunis, vint rduire l'obissance Sousse en mme
temps que Kelibia, Monastir et Sfax, mais quelques
mois aprs la prise de Sousse et la suite d'un chec
du khalife Moulai Hassen devant Kairouan, Sousse se
1540 soul ve de nouve a u, se plac e sous la prote ction du
corsaire Dragut -Pacha, rengat grec, et offre un refuge
assur aux vaisseaux corsaires. Dragut y installe un
gouverneur et met une garnison dans le chteau ; sur
les murs il arbore firement sa bannire rouge et
blanche avec demi -lune bleue au centre pour rappeler
131

tous que ses compagnons s ont les Serviteurs du


Croissant.
Moulai Hassen est remplac par son fils Ahmed qui
pend an t un voy ag e d e so n p re en Europ e, pro c l a me
sa dchance ; son retour, Hassen voulant reprendre
les rnes du gouvernement est pris dans un combat
et a les yeux crevs.
Sous Ahmed, Dragut -Pacha continue ses exploits de
piraterie ; Andr Doria, cherche de nouveau s'empa -
1549 rer de Dragut, qui est insaisiss able. A la suite d'une
expdition faite en t, Monastir et Sousse sont rduites
l'obissance pour un temps trs court et remises
entre les mains du roy Muley B ubear.
1550 Dans le courant de l'hiver, les Turcs reprennent
Mona st ir et l' ayan t pr is e , Su s e envoy a d e s d pu t s
Andr Doria, chassa de nouveau la garnison tu rque et
reprit le parti du roy de Tunis jusqu'au moment o
1551 la f lotte chr tienne fut partie ; e l l e retourna alors au
pouvoir des Turcs. En septembre Don Juan de V ga,
vice-roi de Sicile, voulant mettre un terme aux sinistres
exploits de Dragut -Pacha, enleva Mahdia, son
r e p a i r e , q u ' i l g a rd a d eux a n s av e c un e g ar n i so n d e
1500 hommes.
Aprs la prise de Mahdia, les villes rvoltes durent
pay er u n tr ibu t au v a inq ueur ; l a sou m is sion fu t d e
trs courte dure, car, ds le dpart de la flotte chr -
tienne, Sousse, comme les autres villes maritimes, se
proclama de nouveau indpendante. Les Espagnols
1560 battus en rade de Djerba, voient leur influence dimi -
nuer de jour en jour; relev e un instant aprs la
bataille de Lpante o les Turcs furent crass, la
reprise de Tunis par Don Juan et la retraite des Turcs
sur Kairouan et l'intrieur, ce tte influence devait
dfinitivement dispara tre ds la rentre en Espa gne
du gnral victorieux et l'envoi d'une nouvelle flotte
turque ;La Goulette, Tunis furent prises malgr la dfense
acharne des Espagnols qui furent tous pris ou tus.
1574 Le vainqueur instal la Tunis un gouvernement
rgulier relevant directement du Sultan de
Constantinopl e , r epr s en t sur pl a c e p ar un pa ch a .
132

Priode Turque
de 1573 1705 de J. -C.

L'autorit turque se trouve ds lors implante dans


l'Afrique septentrionale et le pays va gmir sous la
tyrannie de ses nouveaux oppresseurs qui devaient
achever l'abaissement politique et moral de la Berb rie.
Heider-Pacha est ma tre absolu de la Tunisie qu'il
rgit au nom du Sultan ; c'est sous sa rgence qu'est
1574-1590 cr le consulat France Tunis; Louis Danis fut
le premier consul dsign ; une situation privilgie
lui fut accorde en raison des excellentes relations qui
1577
existaient entre les Turcs et la France.
A partir de 1590, l'autorit du Pacha est presque
mconnue, et les Deys prennent la direction des affai -
res du pa ys ; les de ux pre mie rs Deys, Ibrahim et
Moussa ne firent que passer : Kara -Othman s'imposa
Dey et gouverna avec fermet jusqu' sa mort (1610).
1590-1593 Monsieur de Brves, alors ambassadeur de F rance
Constantinople, vint Tunis rclamer l'largissement
1593 des esclaves fran ais ; fort mal accueilli tout d'abord,
1605 il obtient, par son attitude nergique, la libert des
esclaves, la restitution d es biens pris par les corsaires
et des avantages commerciaux pour notre pays. Notre
Saint-Vincent de Paul vit Tunis en captivit, esclave
d'un pcheur, puis d'un mdecin " tireur de
quintes sences ", i l russit s'chapper, et regagner
1605-1607
la Provence.
Un gran d no mbre de M aur es son t expu ls s d'E s pa -
gne e t v ienn en t fond er o u r el ev er c er t ain s c en tr es de
la Tunisi e, Z aghou an , Testour, Soliman, M edjez - el-
1610 Bab et Tebourba, o ils tablissent leur industrie (les
villages de Slouguia et Testour ont leurs maisons ou
au moins leurs toitures construites l'europenne, la
plupart des habitants tant d'anciens Andalous).
CAPITAINE HANNEZO,
(A suivre) du 4 e Tirailleurs,
NOTE SUR DES INSCRIPTIONS NO-PUNIQUES
DE HENCHIR SIDI KHALIFAT

M. le Dr Carton m'a adress, la date du 19 avril, la photographie


et les estampages de deux stles avec inscriptions no-puniques,
dcouvertes Henchir Sidi Khalifat, au cours d'une excursion de
la Socit Archologique de Sousse.
La jeune Socit inaugure ainsi son activit, non seulement en
publiant, mais en dcouvrant des monuments qui intressent l'his-
toire de Sousse et de la rgion avoisinante. Je suis heureux de
pouvoir lui en envoyer la traduction, pour autant que j'ai russi
les dchiffrer, comme souhait de bienvenue.
Ces deux stles ont ceci de particulier, ce que m'crit M. le
Docteur Carton, qu'elles sont arrondies en arrire, en forme de
demi-cylindres verticaux.
La premire est haute de 0m, 70, large de 0m, 32; elle se termine
la partie suprieure par un fronton triangulaire. Sa face antrieure
reprsente un petit dicule form de deux colonnes tailles en creux
dans l'paisseur de la pierre supportant une architrave qui porte
l'inscription. Au dessus, un petit fronton form d'un double triangle.
Dans la petite niche mnage entre les colonnes, on a sculpt un
grand vase pied deux anses. Au-dessus du fronton, tout au
haut de la stle, le croissant.
L'inscription est crite en caractres no-puniques, soigneusement
tracs. Elle porte :

Himilcon, fils d'Ana, fils d'Himilcon, le [charpentier].


Le dernier mot seul est douteux ; il peut se lire
les deux racines d'ailleurs ont peu prs le mme sens ; elles
signifient " tailler" et plus particulirement " tailler le bois". C'est
le sens que j'adopte sans le donner pour certain.
134

La seconde inscription mesure 0m40 de haut sur 0m20 de large.


Je n'ai pas la photographie de la stle.
st
L'inscription, beaucoup plus ngligemment
ngligemment trace, se compose
de quatre lignes trs courtes et mal calibres. Voici ce que je
crois y lire :

M. le Dr Carton ajoute : Nous avons trouv au meme endroit


quatre autres stles, dont deux brises. Il devait y avoir l un
sanctuaire . Daprs le contexte des conscriptions, on serait plutt
port y voir des inscriptions funraires. (1)

La dcouverte en tous cas est intressante et mrite detre suivie.


Heureux pays ou lon trouve en se promenant des inscriptions no
no-
puniques.

BERGER

(1) La dcouverte
couverte de deux tombes romaines trouves auprs de ces monuments
vient confirmer la lecture donne par M. Berger. N. D. L. R.
LE METALLUM SIGUENSE

Une des lettres les plus clbres de Saint Cyprien est celle qu'il
adressa, pendant son exil Curubis (257-258 aprs J.-C), un certain
nombre de chrtiens, condamns aux durs travaux desmetalla(l).
En tte de cette lettre, on l i t : Cyprianus Nemesiano, Felici, Lucio,
alteri Felici, Litteo, Poliano, Victori, Iaderi, Dativo coepiscopis,
item compresbyteris et diaconibus et ceteris fratribus in metallo
constitutis, etc. Elle fut remise aux dentinaires, avec des secours
en argent, par quatre clercs auxquels Cyprien avait confi ce soin.
Nous avons conserv trois rponses que les condamns firent
tenir l'vque de Carthage(2). La premire mane de Nemesianus,
Dativus, Flix et Victor. La seconde porte cette suscription :
Cypriano fratri et collegae Lucius et qui cum eo sunt fratres omnes
in Deo s(alutem). L'en-tte de la troisime est ainsi rdig : Cypriano
carissimo et dilectissimo Flix, Iader, Polianus, una cum
presbyteris et omnibus nobiscum commorantibus apud metallum
Siguensem aeternam in Deo s(alutem).
Le nom de Litteus ne figure dans aucune des trois rponses.
Plusieurs hypothses sont admissibles cet gard (3) :
1 Ce nom a pu tre omis par erreur ;
2 Litteus avait succomb quand ses collgues crivirent
Cyprien (4) ;
3 Il tait dtenu part des autres vques, et sa rponse Cyprien
ne nous est pas parvenue.
Quoi qu'il en soit, les trois lettres des condamns que nous poss-
dons prouvent que ceux-ci taient rpartis dans trois exploitations,
et il est croire que ces exploitations taient assez voisines, puisque

(1) Lettre 76, dition H ARTEL .


(2) Lettres 77-79.
(3) Conf. LENAIN DE T ILLEMONT , Mmoires pour servir l'histoire ecclsiastique, IV,
p, 173-174 ; F OURNEL , Richesse minrale de l'Algrie, I, p. 271, n. 1.
(4) On voit, par la lettre de Cyprien (76, 1 ) , que la mort claircissait les rangs de ces
chrtiens, condamns une vie des plus pnibles.
136

Cyprien n'crivit qu'une seule lettre aux divers confesseurs et char-


gea les mmes personnes de la leur porter (1).
L'un de ces metalla est appel metallum Siguense (2) ; les autres
ne sont pas nomms.
On sait que, chez les Latins, le mot metallum signifiait la fois
mine et carrire. Quelques auteurs ont cru devoir donner ce dernier
sens aux metalla o travaillaient las forats chrtiens dont, il est
question dans ces lettres (3). Le Blant (4) a mme propos d'identifier
le metallum Siguense avec les carrires d'onyx d'An Smara,
voisines de Constantine (5). Mais, comme l'a fait remarquer
Fournel (6 ), il est certain qu'un de ces metalla, tout au moins celui o
sjournaient les auteurs de la premire rponse, tait vritablement
une mine. La phrase suivante, en effet, dsigne d'une manire trs
nette une exploitation minire souterraine : Agunt ergo tibi nobiscum
damnati maximas apud Deum gratias, Cypriane carissime, quod...
tenebras carceris inluminasli, montes metalli in plana deduxisti,
naribus etiam fragrantes flores inposuisti et tetrum odorem
fumi discussisti (7).
Un passage de la lettre de Saint Cyprien a mme pu faire
supposer (8) qu'on extrayait de ces mines de l'or et de l'argent : Quid
mirum si vasa aurea et argentea in metallum, id est auri et argenti
domicilium, dati estis, nisi quod nunc metallorum natura conversa
est, locaque, quae aurum et argentum dare ante consueverant,
accipere coeperunt(9)? Mais ce serait videmment attacher trop
dimportance cette comparaison, quelque peu alambique, d'un

(1) Conf. TILLEMONT , l. c, p. 173; F OURNEL, l. c, p. 270; S CHWARZE , Untersu-


chungen ber die aussere Entwicklung der afrikanischen Kirche, p. 113-114. Flix,
lader, Polianus et leurs compagnons ne reurent la visite que de trois de ces clercs.
(2) Le texte porte, on l'a vu, metallum Siguensem.
(3) MORCELLI, Africa christaina, II, p. 146. Corpus inscriptionum latinarum, VIII,
p. 552 ( lapidicinae eae... ) .
(4) Comptes-rendus de l'Acadmie des Inscriptions, 1894, p. 345-346.
(5) Elles sont situes 18 kilomtres au S.-O. de cette ville. Remarquons du
reste que les carrires d'Ain Smara sont assez loignes de Sigus et qu'elles ne se
trouvaient sans doute pas sur le territoire de cette cit. Elles ne pourraient donc pas
tre le metallum Siguense, supposer, ce que nous allons contester , que
Siguense soit un adjectif form, de Sigus.
(6) L . c , I , p . 3 7 .
(7) Lettre 77, 3.
(8) Voir, par exemple, DE ROSSI, Bullettino di archeologia cristiana, VI, 1868, p.19;
ALLARD, Les dernires perscutions du troisime sicle, p. 62.
(9) Lettre 76, 2.
137

ex-rhteur que d'y voir une dsignation exacte des mtaux que les
condamns tiraient des galeries o ils taient employs (1).
O tait le metallum Siguense, nomm dans l'en-tte de la
lettre 79 ?
La plupart des auteurs (2) l'ont plac prs de Sigus, lieu situ
prs de quarante kilomtres au Sud-Sud-Est de Constantine. Ce
n'est pas cependant l'avis de M. Fabre (3), qui, reprenant une opinion
de Baronius, le cherche prs de Siga, ville maurtanienne voisine
de la mer et de l'embouchure de la Tafna (dans le dpartement
d'Oran) (4).
Il existe, en effet, dans le voisinage de Siga, des mines de fer trs
importantes, et, quoiqu'on n'en ait pas la preuve, plusieurs d'entre
elles ont pu tre exploites par les Romains (5). Du ct de Sigus,
on signale bien certains gisements minraux (6), en particulier celui
du djebel Sidi Rgheiss (mine de cuivre), qui a t certainement
l'objet d'une exploitation antique (7). Mais ces gisements sont assez
loigns de Sigus (8) et il est fort peu vraisemblable qu'ils aient t
situs sur son territoire (9).
Pour ma part, je suis trs dispos penser que le metallum Siguense
n'tait ni prs de Sigus, ni prs de Siga. La forme Siguense, qu'il
n'y a aucune raison de croire corrompue, me parat tre cet
gard un argument premptoire (10). L'adjectif tir du nom propre
(1) Conf. FOURNEL, l. c., p. 271 ; TISSOT, Gographie de la province romaine d'A-
frique, I, p. 258.
(2) M ORCELLI , l. c, I, p. 279, et II, p. 146. F OURNEL, l. c, I, p. 269 et suiv. D E
Rossi, Bullettino di archeologia cristiana, VI, 1868, p. 19. CHERBONNEAU, Recueil de
la Socit archologique de Constantine, XII, 1868, p. 430, et Bulletin de l'Acadmie
d'Hippone,XII, p. 135. F RA U D , Rec. de Constantine, X I I I , 1869, p. 17. C.I.L.., VIII,
p. 552. A L L A R D , l. c., p. 61, n. 4. S C H W A R Z E , l. c, p. 112. Etc.
(3) FABRE, Une controverse historique rsolue l'aide de la gographie ; les exils
de Siga. Ce mmoire a paru dans le volume intitul : Socit de gographie et d'ar-
cheologie d'Oran. Congrs national des Socits franaises de gographie (1902): Comp-
tes-rendus des travaux du congrs, Oran, 1903 (p. 127-143).
( 4 ) Voir Allas archologique de lAlgrie, feuille 31 (Tlemcen), n 1.
(5) F ABRE, l. c, p. 141-142. Conf. Atlas archologique de l'Algrie, l. c., n 6.
(6) Voir FOURNEL, l. c, p. 260 ; FRAUD, Revue africaine, XVI, 1872, p. 404.
(7) FOURNEL, l. c., p.-263, 269, 271. CHERBONNEAU, Bulletin de lAcadmie dHip-
pone, XII, p. 135. FRAUD, Revue africaine, l. c.
(8) Celui du djebel Sidi Rgheiss est environ 40 kilomtres de ce lieu.
( 9 ) Aussi l'ingnieur des mines Fournel, qui joignait des connaissances techniques
une vaste rudition historique, dclarait-il que le metallum Siguense, situ, d'aprs son
opinion, prs de Sigus, n'avait pas encore t identifi ( l . c, p. 271). Conf, TISSOT,
l.c., p. 258.
(10) C'est ce que M. Fabre (l. c, p. 137) a fait observer pour Sigus, mais non pour
Siga.
138

Sigus tait Siguitanus (1) ; on rencontre aussi une fois la forme


Siguitensis (2); l'adjectif tir de Siga tait Sigensis (3). Pourquoi
admettre, soit pour Sigus, soit pour Siga, la forme insolite Siguen-
sis ?
Mais ce mot Siguense se rencontre dans un autre document antique,
la Table de Peutinger. C'tait le nom d'un lieu situ sur la route
de Carthage Sicca Veneria (Le Kef), entre cette dernire ville et
Thacia (prs de Bordj Messaoudi) : ... Thacia VII Drusiliana
VII Siguese XXX Sicca Ve(ne)ria. L'lision de ln (Siguese,
au lieu de Siguense) ne fait naturellement aucune difficult (4).Cette
forme Sigue(n)se est au neutre : c'est un adjectif, se rapportant
un nom assez usuel pour tre sous-entendu. Rien n'empche de
supposer que ce nom ait t metallum. Mgr Toulotte, qui n'invoque
pas le tmoignage de la Table, parait cependant avoir pens au
rapprochement que je fais ici, quand il crit (5) :
Iader rpondit avec Felix, Polianus et ses autres compagnons
des mines de Sigua, c'est--dire des environs de Sicca, probable-
ment.
L'emplacement prcis de Siguese n'est pas encore connu (6). La
Table marque trente milles entre ce point et Sicca Veneria, et elle
indique, un peu au del de Siguese (dans la direction de Sicca), une
autre voie, se dtachant, gauche de la route de Carthage, voie qui
devait sans doute se diriger d'abord vers le Sud-Sud-Ouest, puis
vers l'Ouest ; les lieux marqus sont Flacciana, Sibus, Ad Arvalla,
Vico Valeriani, Vatari, etc. (7).
Mais le chiffre de trente milles est srement altr (8), puisqu'en-

(1) Voir C. I. L., VIII, 5693, 5694, 19121, 19131, etc. C'est la seule forme qu'on
trouve sur les inscriptions.
(2) Confrence de Carthage de l'anne 4 11, I, 197, apud Migne, Patrologie latine,
XI, p. 1333. Je ne suis nullement persuad que l'episcopus Suggitanus, mentionn
la fin du cinquime sicle (Notice des vques de 484, Numidie, n 18), ait t un
vque de Sigus (conf. Toulotte, Gographie de l'Afrique chrtienne, Numidie, p. 267).
(3) Le portus Sigensis, port de Siga, est mentionn par l'Itinraire d'Antonin et la
Gographe de Ravenne (Atlas archologique de l'Algrie, l. c, n 2). Etienne de By-
zance indique en grec l'ethnique Siggaios (voir ibid., n 1).
(4) Conf., entre beaucoup d'autres exemples, C. I. L., VIII, 8701, ligne 5.
(5) Gographie de l'Afrique chrtienne, Proconsulaire, p. 202.
(6) Dans l'inscription C. I. L., VIII, 15669, trouve Henchir Gaousst, il faut lire
(lignes 14-15) decur(iones) Sic(censes), et non Sig(uenses), comme l'a fait Poinssot (Revue
de l'Afrique franaise, IV, 1886, p. 250).
(7) Sur cette route, voir T ISSOT , Gographie, II, p. 414 et suiv.
(8) TISSOT ( l . c, p. 374) corrige XXX en XII.
139

tre Thacia et Sicca, deux points fixs avec certitude, la distance


n'est gure que de vingt-sept milles (1), au lieu de quarante-quatre
milles, chiffre qui rsulte des distances partielles donnes par la
Table (2).
En tout cas, Siguese tait dans le voisinage de Sicca, l'Est, ou
plutt au Nord-Est. La rgion du Kef attire depuis quelques annes
l'attention des chercheurs de mines. Peut-tre y retrouveront-ils
un jour le metallum Siguense.
Les vques dont ces lettres nous ont gard les noms apparte-
naient la Numidie : cela n'est gure douteux pour Nemesianus,
Polianus et Iader (3), et on peut fort bien l'admettre pour les autres (4).
Ils avaient t condamns par un praeses qui n'tait pas le proconsul
de Carthage(5) et qui devait tre, par consquent, le gouverneur de
la province impriale de Numidie. D'autre part, Siguese, ou si l'on
adopte notre hypothse, le metallum Siguense, situ l'E. de Sicca,
tait sans doute, comme cette ville, en Proconsulaire. Mais rien
n'empchait de transfrer des condamns d'une province dans des
metalla exploits dans une autre province (6) ; d'ailleurs, ces mines,
o l'on faisait travailler des forats, devaient appartenir l'empe-
reur, tre places sous une administration impriale et ne pas
dpendre du proconsul d'Afrique.
STPHANE GSELL.

(1) Quarante kilomtres par la route moderne.


(2) Il existe bien une ruine antique importante (Henchir Gaouss t), une distance de
Bordj Messaoudi qui concorde peu prs avec la distance marque sur la Table entre
Thacia et Siguese. Mais elle s'appelait Ucubi (C. I. L., VIII, p. 1509).
(3) Vu la raret relative de ces trois noms propres, il y a lieu de croire que ce sont
les trois vques, portant les mmes noms, qui assistrent au concile de 256, tenuos
Carthage (voir dans les uvres de Saint Cyprien, dit. H ARTEL , p. 435 et suiv., n 5,
13 et 45 : Nemesianus a Thubunas ; Polianus a Mileo; Iader a Midili. Thubu -
nae (Tobna) et Mileu (Mila) taient certainement dans la province impriale de Numidie.
Quand Midili, dont l'emplacement exact est inconnu, cette ville est indique en 484
comme se trouvant dans la province ecclsiastique de Numidie (qui, il faut le dire, ne
concordait pas exactement avec l'ancienne province impriale) : Notice de 484,Numidie,
no 41 (je ne pense pas qu'il y ait lieu de corriger dans ce document le mot Midilensis).
(4) Voir, ce sujet, Morcelli, l. c, II, p. 146 ; Schwarze, l. c, p. 112-113.
(5) Lettre 77, 2 : Quasi bonus et verus doctor quid nos discipuli secuti apud praesi dem
dicere deberemus prior apud acta proconsulis pronuntiasti.
(6) Conf. Digeste, XLVIII, 19, 8, 4 (au sujet des peines in metallum et in opus metalli)
: metalla autem multa num ro sunt ; et quaedam quidem provinciae hubent,
quaedam non habent ; sed quae non h abent, in eas provincias mitt unt quae metalla
habent. Voir aussi D E R OSSI , Bull, di archeol. cristiana, VI, 1868, p. 20 et 21.
NOTES SUR UN CIMETIRE PAIEN
DCOUVERT AUX ENVIRONS DE SOUK-AHRAS

Le hasard, ce gnie tout puissant qui dj fit faire tant de dcou-


vertes, nous a galement servi souhait en nous faisant trouver
rcemment une ncropole paenne en un point de la commune
mixte de Souk-Ahras, o jusqu'ici n'avaient t signales que des
ruines sans importance.
Un indigne venait, il y a quelque temps, nous prsenter un
morceau de Gargoulette comme il le dnommait et sur lequel
taient graves en creux, les lettres F. E. d'une facture des plus
irrgulires. Ce fragment, nous dit-il, provenait d'un pot assez
volumineux qu'il avait mis en morceaux en creusant dans sa ferme
un trou de plantation d'arbre et l'intrieur duquel se trouvaient
des ossements, qui s'en allaient en poussire : sur le pot il y avait
quelques lettres, ajoutait-il. Les renseignements prcdents, ainsi
que l'examen de ce fragment de poterie grossire, d'une paisseur
de douze millimtres, nous permirent de constater qu'il devait ap-
partenir une urne funraire ; il y avait donc lieu de souponner
l'endroit dsign quelques vestiges de spulture ancienne et une
visite s'imposait pour entraner une certitude absolue.
A 28 kilomtres de Souk-Ahras, sur l'ancienne route de
Sidi-Youssef et un peu sur sa gauche, se trouve une ferme indigne
au lieu dit : An-el-Haoud. Aux alentours de la maison d'habitation on
trouve quelques preuves de l'occupation romaine : bases de colonne
et chapiteaux corinthiens de facture grossire. Plus loin, le propri-
taire a utilis comme silos pour sa rcolte de crales deux cham-
bres aux murs en maonnerie romaine, trs pais et dont le sol
dall se trouve aujourd'hui deux mtres en contre-bas du niveau
du sol actuel. Ces deux chambres de dimensions restreintes faisaient
partie sans doute aucun d'une maison de ferme romaine. Mais ce
n'est point l qu'a t trouv le fragment dcrit plus haut et nous
Continuons notre investigation.
Chemin faisant, sur le sentier qui est flanc de coteau, nous
141

trouvons des vestiges de mosaque de pavage, cubes moyens, blancs


et noirs. Rien ne dcle l pourtant trace quelconque d'habitation:
ni pierres affleurant le sol, ni pans de mur ou de blocage apparents :
l'orge et le bl poussent tout ct de cette bande de mosaque,
sans paratre nullement gns par quelque substruction que ce soit.
Et cependant cette mosaque implique l'habitation de quelque riche
colon romain.
Nous voici l'endroit o a t trouve la gargoulette
funraire. C'est un petit plateau orient vers le Nord-Est d'o l'on
domine plus de 10 kilomtres la campagne environnante. L'arte
de ce plateau est forme par une ligne de rochers affleurant le sol
et les pentes, surtout sur le versant Nord-Est, en sont trs accuses.
C'est sur cette pente et en contre bas d'un de ces rochers qu'a t
trouv le vase funraire.
Enfoui 40 centimtres environ de profondeur dans de la terre
trs lgre, il reposait sur une couche assez paisse de charbon en
poudre et contenait, nous l'avons dj dit, des ossements excessi-
vement friables; la surface rien ne rvlait la moindre spulture.

Constitution des tombes.


Nous ne constatons nous-mmes aucun indice de tombe, ni l,
ni tout autour; point de stle, point de cippe, pas la moindre trace
de tombes en terre. Cependant, pour nous rendre compte, nous
faisons placer sur une mme ligne une dizaine d'arabes munis de
pioches et distants les uns des autres de 3 mtres. De nombreux
trous sont ainsi rapidement pratiqus et mettent jour une terre
trs lgre, une sorte de tuf excessivement fin, presque du sable des
bords de la mer : au-dessous, 25 centimtres peine de profondeur,
dans certains trous, on trouve une couche de charbon finement
pulvris et qu'on ne saurait mieux comparer qu' de la poudre de
charbon de peuplier ; dans d'autres trous pratiqus tout ct,
point de-traces de charbon, quelque profondeur que l'on continue.
Au milieu del couche de charbon sont pars ple-mle des osse-
ments qu'on reconnait facilement tre des ossements humains et
qui prsentent la caractristique d'tre comme blanchis la chaux.
Ces ossements je le rpte, sont pais dans le charbon et non pas
mis en tas, sous quelque tuile creuse ou quelque moiti de vase
funraire.
142

Il n'y a plus de doute possible : il se trouve l une ncropole


ancienne o les corps taient soumis l'incinration : le l i t de
charbon et la couleur des ossements en sont des preuves irrfutables.
Nous conseillons aux travailleurs de n'avancer qu'avec les plus
grandes prcautions, puisque ces tombes sont pour ainsi dire
dcouvert et que nulle trace de sarcophage ou de maonnerie quel-
conque n'est mise jour. Ces conseils devaient presque aussitt
porter leurs fruits; car un des indignes venait bientt nous apporter
une lampe trouve au milieu de la couche de charbon et prs
des ossements qu'elle recouvrait.
Cette lampe, entirement intacte, nous frappa d'abord par cette
caractristique : l'absence d'anneau et en outre par son bec trian-
gulaire et volutes: malgr la couche terreuse adhrente son
disque suprieur, on pouvait distinguer assez nettement une tte de
coq crte dentele. Cette lampe prsentait donc tous les signes
d'une antiquit assez recule.
Peu aprs, un autre ouvrier apportait aussi une lampe, galement
sans anse, puis un troisime venait prsenter un Unguentarium
en terre absolument intact et rempli de terre noire durcie. Tous
ces objets provenaient des tombes seules o l'on rencontrait du
charbon : les ouvriers qui ne rencontraient pas cette couche, ne
trouvaient ni ossements ni mobilier funraire quelque profondeur
que ce ft.
Les recherches furent continues dans une deuxime sance et
avec le mme succs. Voici la liste des divers objets dcouverts au
cours de ces deux journes de fouilles que nous avions pu seulement
diriger jusqu' ce jour.

Lampes sans anneau.


1 Lampe d'argile rougetre, ronde, bec triangulaire avec volutes ; poterie
fine et l i s lgre un trou seul sur le disque suprieur.
SUJET : Tte de coq, gauche, avec crte dentele bien marque.
Sans marque.
2 Lampe d'argile jaune, ronde, bec triangulaire avec volutes: poterie trs
fine et excessivement lgre, un seul trou.
SUJET : Muse jouant du luth (Terpsichore).
Sans marque.
143

3. Lampe d'argile jaune ronde bec arrondi, poterie fine mais moins lgre que
les prcdentes.
SUJET : Quadrige de chevaux au galop tranant un char, dans lequel se
trouve debout le conducteur tenant une palme de la main droite et une
couronne de la main gauche Deux trous Dans le trou central est
encore place l'aiguille de bronze servant faire avancer la mche
au fur et mesure de sa combustion.
Marque en creux, sous la lampe :
M. R E S
4 . Lampe d'argile jaune, ronde bec triangulaire et deux volutes ; poterie
fine et lgre.
SUJET : Cupidon ail, genoux, tirant de l'arc sur un serpent enroul sur
lui-mme et redressant la tte.
Pas de marque.
5. Disque suprieur d'une lampe sans anneau, en argile jauntre, fine et lgre.
Sujet reprsent :
Divinit ou princesse assise prsentant une branche ou un rameau d'oli-
vier (?) un cerf dont les bois sont trs nettement indiqus.

Lampes avec anneau.


1. Lampe d'argile jaune, ronde, avec anneau perfor et bec volutes deux
trous.
SUJET : Amour ail portant un carquois garni de flches.
Sans marque.
2. Lampe d'argile rouge, ronde, avec bec arrondi 2 volutes anneau perfor
deux trous.
SUJET : Petite barque avec un rameur et un passager assis l'arrire (la
barque Caron, trs certainement.
Marque en creux L. MADI.
L'obole n'existait plus sur la lampe !
3. Lampe d'argile grise avec bec arrondi sans volutes, anneau perfor deux
trous.
SUJET : Une poule et ses quatre poussins.
Marque: L. M. PHIL.
4. Lampe d'argile rouge avec bec arrondi sans volutes ; anneau perfor deux
trous Pas de sujet : cercles concentriques sur le disque suprieur.
Marque L. MADIEC.
144

5. Lampe d'argile rouge avec bec arrondi, sans volutes ; anneau perfor. Pas
de sujet : cercles concentriques.
Marque: PIVVESAMV.
6. Lampe d'argile rouge avec bec arrondi sans volutes anneau perfor. Pas de
sujet : cercles concentriques.
Marque G. OPPI. RES.
7. Lampe semblable la prcdente.
SUJET: trois rosaces stries concentriques, entoures d'un cercle de festons.
Marque : LFEVA.
8. Lampe ronde anse pleine : bec sans volutes et arrondi.
SUJET : Rosace stries rayonnantes, entoure d'un cercle de festons.
Marque en creux : Z.
9. Lampe de forme allonge anneau perfor bec demi-long et volutes.
SUJET : Rosace de ptales entoure d'un cercle de festons.
Pas de marque.
10. Lampe ronde, anneau plein : bec rond sans volutes.
SUJET : Rosace en ptales de marguerites entoure d'un cercle concentrique
et d'une couronne de feuilles de chne et d'olivier Traces de vernis
noir sur le disque suprieur.
Sans marque, mais avec trois cercles concentriques gravs en creux par
dessous.
11. Lampe ronde, anneau plein ; bec arrondi sans volutes, pas de sujet ; un
simple filet concentrique.
Pas de marque.

Toutes ces lampes sont dans un tat de conservation parfaite, bien


qu'elles n'aient t protges que par une faible couche de terre et
de charbon.
En outre de ces quinze lampes ont t trouvs galement dans
les mmes conditions :
Quatre petits vases renfls col court dont deux avec anse, deux
sans anse et quatre plats funraires, en terre grossire et sans
marque ni dessin.
Nous devons signaler galement six Unguentaria ou lacrymatoires
en verre, tous intacts, d'une hauteur de 11 centimtres et dont deux
prsentent les reflets iriss du plus vif arc-en-ciel. Un septime lacry-
matoire plus petit, en verre galement, et dont le goulot est cass,
145

prsente tous les signes de la dformation par la chaleur. Sans


doute, tandis que le cadavre brlait, il avait d tre jet sur le bcher
o il avait subi un commencement de fusion, les autres au con-
traire retrouvs intacts n'avaient d tre placs auprs des cendres
du cadavre qu'aprs son incinration.
Pour terminer l'numration de nos trouvailles, nous signalerons
enfin la dcouverte des objets de bronze suivants :
1 . Fragments informes de bronze ayant subi l'action du feu.
2. Fragments de miroirs carrs, en bronze.
3 . Fragments de miroirs ronds, en bronze.
4 . Un miroir rond, en bronze de 8 centimtres 1/2 de diamtres, avec cercle
concentrique ajour : le manche seul est cass au ras du disque.
5 . Une fibule de bronze en parfait tat de conservation avec son aiguille
broche en place et fonctionnant encore merveille.

Monnaies.
C'est peine si, dans toutes les tombes fouilles jusqu' ce jour
(une trentaine environ), nous avons pu recueillir deux monnaies.
L'une est un moyen bronze des monnaies de Numidie avec tte
barbue l'avers et cheval au galop sur le revers, sans lettres puni-
ques, monnaie fruste.
L'autre est un grand bronze de l'empereur Commode.
Toutes les deux se trouvaient dans la couche de charbon, mais
non point places sur le disque central des lampes qui les accompa-
gnaient el qui taient pour la pice numide, la lampe au coq et pour
la pice de Commode, la lampe au quadrige au galop.
Malgr cette pnurie de documents numismatiques, l'tude de la
constitution mme des tombes dcouvertes jusqu' ce jour, ainsi
que les indications tires du mobilier funraire font ressortir net-
tement qu'il y avait, en ce point d'An-el-Haoud, une ncropole
paenne et que son origine remonte certainement au Ier sicle de
l're chrtienne ou mme au Ier sicle avant notre re. Quant
la priode d'utilisation de cette ncropole, d'aprs les quelques
lampes trouves, elle devrait comprendre les deux premiers sicles
de l're chrtienne.
En nous inspirant, en effet, des savantes recherches du R. P.
Delattre et de notre camarade et ami, M. le Capitaine Hannezo, sur
l'tude des lampes antiques de Carthage et de la Tunisie en gnral,
146

il nous a t possible de dterminer ainsi approximativement,


d'aprs les sujets reprsents sur les lampes trouves et d'aprs leur
forme, l'poque de cration de cette ncropole d'An-el-Haoud et sa
priode d'utilisation.
Peut-tre la suite des fouilles, que nous nous proposons de con-
tinuer aux prochains beaux jours, nous fera-t-elle dcouvrir quel-
ques autres documents, lampe ou monnaie, qui compltera ces pre-
mires indications.
Quoiqu'il en soit, la dcouverte par le seul fait du hasard de cette
ncropole, dont nous ignorons encore les limites exactes, est un fait
curieux noter, parce qu'elle se trouve en un point assez loign
de tout centre romain connu.
Nous conclurons donc qu'elle devait constituer, comme le dit
le R. P. Delattre, dans son Etude sur les lampes antiques de
Carthage , le lieu de spulture de quelques colons romains venus des
premiers dans la rgion de Thogaste. Ces colons n'taient autres
sans doute, que les possesseurs de la ferme dont nous avons dcrit
les vestiges retrouvs au dbut de cet article et, dans ce cas, il est
craindre que nos prochaines recherches ne soient pas aussi fruc-
tueuses que celles-ci, puisque nous n'aurions explorer ainsi qu'une
spulture de famille.

Dr ROUQUETTE,
Mdecin - Major
LES STUCS A RELIEFS DHENCHIR-ZEMBRA
(ULIZIPPIRA ?)

Monsieur le Docteur Carton, le dvou prsident de notre Socit,


ayant bien voulu nous demander pour le n 2 du bulletin ( 1) la des-
cription des stucs d'Henchir-Zembra dont la dcouverte a t
annonce dans le n 1 de ce priodique, nous nous empressons de
dfrer son dsir en regrettant que de trs lourdes occupations
ne nous aient pas permis de donner notre description tout le
dveloppement que comportent ces documents.
Les deux planches reprsentes ci-contre reproduisent les pan-
neaux dans lesquels ces objets sont dposs au Muse de Sousse
Ce sont les plus importants de ceux qui ont t trouvs. Un assez
grand nombre existe encore, non class, dans cet tablissement.
Nous sommes heureux d'adresser tous nos remerciements M.
Causse qui a bien voulu mettre la disposition de la Socit son
remarquable talent de dessinateur pour reproduire ces panneaux.

Planche n 1
.
N 1. Lance entoure d'un ruban et au-dessous d'elle paule gauche, drape,
d'un personnage.
N. 2. Calotte d'un relief ayant reprsent une tte de femme, cheveux relevs
en arrire en torsade et serrs par un troit bandeau.
Nos 3, 4, 5, 6. Fragments de mains, chevelures, faces et torse.
Nos 7 et 29. Fragment d'un mme morceau de pedum.
N. 8. Dbris d'une tte de femme avec cheveux relevs en torsade et sans bandeau
pour les fixer.
N. 9. Petite tte d'enfant ou d'amour avec cheveux hrisss.
N. 10. Tte de femme ou d'adolescent tourne droite, vue de profil la position
rserve au visage semble indiquer que la personne est dans la douleur et
implore une divinit. La bouche et le menton ont disparu. Les cheveux
forment de larges boucles qui encadrent le visage et une mche d'entre eux
retombe au-dessous de l'oreille sur la joue.

(1) V. Bulletin n. 1, p. 25.


148

N. 11. Fragment de tte de femme. Chevelure en torsade retenue par une cou-
ronne de feuillage et de fleurs, (peu nette dans la planche).
os
N 12 et 23. Epaules gauches du sommet desquelles tombe une draperie. De-
vaient appartenir des amours.

PlancheN1
.
N 13-39? ?
Nos 14, 15, 16, 20. Personnages tte renverse en arrire et regardant en
haut. Mme attitude que pour le n. 10, mme coiffure qu'au 2 et bouche
de trois quarts, reprsentation assez rare dans l'antiquit. Le n. 16 a la che-
149

velure fortement releve.sur le ct en arrire de l'oreille, de mme au


dessus du front (le dessin du n. 16 est un peu obscur).
.
N 17. Fragment de chevelure de femme. Il se pourrait cependant que ce
morceau fit partie de la chevelure du faune.
.
N 18. Tte de faune d'une excution des plus intressantes.
Le profil Caprin de la face est frappant. Des bandelettes semblent
tomber des cornes et encadrer la face.
La dpression de la base du nez, la forme des narines, la langue sortant un
peu de la bouche ont t traites de la manire la plus artistique faisant
participer cette figure la fois de l'expression humaine et du facies du bouc
sans cependant nuire son expression. La longue barbe ondule poils
gros et rudes offre aussi le mme caractre.
Nos 19, 25, 26, 27. Fragments de mains faisant partie de diffrents sujets et
dans diffrentes positions.
N. 21. Figure humaine profil tout particulier; le nez relev et droit extrmit
trs mince, le front trs droit, la chevelure courte et saillant en avant
du front lui donnent une expression des plus bizarres.
N. 22. Fragment de plateforme ou de corniche sur lequel reposent les serres
d'un oiseau de proie, probablement un aigle.
N. 24. Un des pieds du faune.
N. 28. Main gauche trs finement reproduite d'une femme tenant la partie Inf-
rieure d'une conque, trs probablement une corne d'abondance.
N. 30. La peau d'un chevreau, le museau et les cornes sont trs caractristiques sur
l'original. Devait faire partie du manteau de la Bacchante porte au n. 6
de la planche n. 2 (Le dessin, excut d'aprs une photographie qui a
tromp le dessinateur n'est pas bien rendu).
N. 31. Pied droit d'un personnage chauss de brodequins, l'empeigne est retenue
sur la partie dorsale droite du pied par trois boutons, le travail en est des
plus artistiques. Le dessin ne donne pas ide de l'original, (mme
.
observation qu'au n 30).
Ce moulage semble devoir tre attribu au n. 4 de la planche n. 2.
N. 32. Pied gauche d'un personnage dont la main porte au n. 19 semble lui
appartenir.
Nos 33-34. Pieds droit et gauche semblant devoir appartenir au mme person-
nage.
Nos 36-37-38. Objets divers, sans doute destins aux sacrifices, tels que fruits,
gteaux.
N. 39. Pointe d'un pied recouvert d'un chausson tricot trs caractristique,
les mailles en sont encore visibles sur le stuc, devait appartenir en raison
de ses dimensions restreintes un personnage de trs petite taille.
150

Planche n 2
.
N 1. Corbeille enveloppe d'toffe et limite la partie suprieure par une
bande d'toffe lignes parallles. Contenant, sans aucun doute des fruits.
Une grappe de raisin pend le long de la corbeille.

Planche N. 2

N. 2. Morceau sans forme apprciable avec les deux bandes d'toffe qui se juxta-
posent, il semble appartenir un costume de femme.
N. 3. Pomme de pin.
151

N. 4. Partie infrieure d'un personnage depuis la ceinture. La jambe droite


adhre au tronc mais est brise au milieu de la cuisse, la partie qui suit
n'est pas sa place, il manque un morceau pour que le raccord soit bien.
La courbe de la partie suprieure de la jambe incline vers l'arrire semble,
avec les plis flottants de la tunique, indiquer une marche rapide, peut-tre
mme la course. Cette attitude et la brivet de la jupe nous fait songer
la Diane Chasseresse.
N. 5. Bras droit d'un personnage qui semble arm d'un instrument tranchant
plac prs d'un jeune animal, un chevreau sans doute destin au sacrifice.
N. 6. Torse d'une femme dont les plis du vtement trs rguliers sont seulement
sous le sein par un cingulum. A l'extrmit de la manche droite
dpassant peine l'paule existe une bande d'toffe formant ornement et
diffrente du reste du costume.
Ce doit tre une Bacchante et la pomme du pin porte au n. 3 appar-
tiendrait son thyrse.
.
N 7. Torse et buste d'un personnage du sexe fminin, il en est de mme des
fragments ports aux nos 8, 9, 15 et 16 tandis que le n. 11 appartiendrait
une femme.
N. 10. Jambe replie sous la cuisse gauche d'un personnage dont l'attitude est
difficile dterminer puisqu'il tient son genou gauche avec sa main droite.
N. 12. Personnage debout dont il ne reste qu'une partie du torse, le sige et
la cuisse droite.
N. 13. Un cne sans attribution bien certaine.
N. 14. La forme de ce fragment semble indiquer un vase.
N. 17. Partie infrieure d'une amphore.

De l'ensemble de ces deux planches, il semble se dgager que les


divers personnages taient placs sur trois plans diffrents pour la
reprsentation du sujet.
Il est difficile de prciser ce que devait tre ce dernier. Il semble
que la scne se soit passe en plein air et qu'il y ait eu quelque
sacrifice champtre.
Sousse, le 19 fvrier 1904.
P. CHEVY,
Membre du Comit d'Etudes.
LES ORIGINES DE LA VILLE DORAN

Sur la foi des chroniqueurs arabes qui fixent 902 la fondation


d'Oran par les Maures expulss d'Espagne (1) la ville a clbr en
grande pompe, l'an dernier, le millnaire de cette fondation. Nous
allons prouver que, quoiqu'en disent les historiens maures, Oran
tait, depuis un temps immmorial, un centre de peuplement et que
sa fondation remonte beaucoup plus avant dans la srie des sicles.
Les preuves de cette assertion sont de deux natures : il y a
d'abord les prsomptions morales, comme on dit au Palais, puis les
preuves matrielles qui formeront certainement le ct le plus
positif de cette tude.
La plupart des archologues ont le grand tort de n'tre pas
gographes, ce qui simplifierait considrablement leur besogne et
les empcherait bien souvent d'mettre des opinions par trop lgres.
C'est ainsi qu'avec un touchant accord tous les archologues ont
soutenu que le port de Portus Magnus devait se trouver devant la
ville de ce nom, c'est--dire dans une position tout fait contraire
aux exigences de la marine, et il a fallu que ce soit un ingnieur qui
dmontrt, par des prsomptions thoriques d'abord, puis par des
preuves matrielles (2) que le port de la grande cit romaine se
trouvait, non pas Saint-Leu, mais un peu plus l'est,
Port-aux-Poules.
Pour prouver l'antiquit d'Oran, nous commencerons donc par
les prsomptions morales :
Le vent dominant sur la cte ouest de l'Algrie est celui du N-0
qui souffle en moyenne 200 jours par an. Or, dans le golfe d'Oran
deux endroits, et ces deux endroits seulement, permettent d'abriter
les navires contre ce vent : ce sont Mers-el-Kbir et Oran. Tout le
reste de la cte est bord de falaises pic, constamment battues
par la lame et peu prs inabordables.

(1) Cfr. REN BASSET. Fastes Chronologiques de la Ville d'Oran, p. 11.


(2) AD. KOCH. Bull. Soc. Gogr. et Arch., Oran 1903, p. 141-146.
153

La rade de Mers-el Kbir est bien mieux abrite que celle d'Oran,
mais elle offre un inconvnient capital en l'espce, c'est qu'elle est
absolument dpourvue d'eau potable. Ce point ne pouvait donc
servir que d'abri temporaire. Ajoutons, pour aggraver la situation,
le manque absolu de terrains de culture dans cette localit.
A Oran, au contraire, les conditions sont tout autres : le port
est moins abrit, il est vrai, que celui de Mers-el-Kebir, mais il ne
faut pas voir le port d'Oran tel qu'il est actuellement, il faudrait le
voir avec les yeux de nos prdcesseurs, avant que l'on ait excut
le moindre ouvrage rendu ncessaire par la supriorit de notre
marine. Or, l'ancienne crique qui s'tendait devant les btiments
de la manutention militaire jusqu'au tunnel tait fort bien protge
par le Santa-Cruz des grosses mers du N-O. De plus, les sources
ne sont (ou plutt n'taient) pas rares sur l'ancien littoral et,
ressource inestimable, il y a un ruisseau coulant toute l'anne :
lOued Rehhi (Ras el An) fournissant une eau excellente qui a
suffi jusqu' ces derniers temps aux besoins d'une ville de 50.000 habi-
tants. Enfin, au-dessus d'Oran s'tend une vaste plaine qui met
en relation ce port avec le reste de la province : la plaine pouvant
tre cultive peut, non seulement suffire l'alimentation de la ville,
mais l'excdent peut encore tre export par mer. Ainsi donc,
seule, la rade d'Oran pouvait convenir pour la cration d'un centre
de peuplement parce qu'elle seule remplit les nombreuses conditions
ncessaires pour un tablissement permanent : abri assur,
eau potable demeure, terres cultivables proximit pouvant
amener un trafic dans les deux sens (1).
Maintenant que nous avons tabli par des raisons thoriques la
preuve qu'Oran devait tre forcment choisie, de prfrence aux
localits voisines, pour l'tablissement d'une colonie humaine, nous
allons passer aux preuves matrielles de cet tablissement et prouver
que cet tablissement fut permanent depuis les temps les plus
anciens jusqu'aux temps dont font mention les chroniques, notre
tude s'arrtant forcment la priode historique.
Nous ne voudrions pas, comme l'Intim, remonter jusqu' la
naissance du monde et nous attirer la spirituelle rplique
de Dandin :
Avocat ! ah ! passons au dluge !

(1) CF. avec le passage de Ibn Haouquel, in BASSET, loc. cit., p. 13.
154

mais, puisque nous traitons une question d'origine, il nous est bien
permis cependant de prendre la chose d'un peu loin...
En compagnie de chercheurs patients et rudits, tels que MM.
Tommasini, Carrire et Doumergue, nous avons pu constater que
l'emplacement d'Oran et ses environs avaient t habits pendant
presque toute la dure des temps prhistoriques. Nous n'avons pas
rencontr, jusqu' prsent, de traces pouvant tre rapportes la
plus ancienne priode de la pierre taille : l'poque chellenne,
mais j'ai pu positivement tablir que l'on trouvait dans la couche
infrieure des grottes d'Oran des outils de facture moustirienne
associs une faune plistocne bien caractrise. C'est l une
constatation qui, on l'avouera, vieillit singulirement les parche-
mins de la mtropole de l'Oranie !
Depuis ce moment qui marque la limite la plus recule de l'oc-
cupation du territoire d'Oran, l'homme n'a cess de se maintenir
sur ce point ; il a simplement suivi l'volution ascendante de la
civilisation, qui, de rudimentaire qu'elle tait, est arrive progres-
sivement l'tat actuel.
A partir de l'poque moustirienne les grottes des environs imm-
diats d'Oran (et sans doute aussi celles qui ont t enfouies sous les
remblais des ravins sur lesquels s'lve aujourd'hui la ville) ont
t habites d'une faon interrompue jusqu' la fin du nolithique,
comme je l'ai tabli ailleurs.
Ceux qui succdrent aux premiers troglodytes avaient un outil-
lage dj assez perfectionn, qui correspond, industriellement par-
lant, celui des troglodytes de la Madeleine sans tre pourtant aussi
artistique; mais l'homme d'Oran avait les mmes gots que celui
de la Vzre : comme lui il aimait la parure et il devait se barioler le
corps comme le prouvent les coquilles et ossements trous disposs
pour les colliers et la grande quantit de matires colorantes :
ocres, hmatite, argiles et oligiste, qui ont t exhumes des couches
de cette poque. Comme lui aussi, il enterrait ses morts dans la
mme abri qui lui servait de demeure.
Cette industrie dj bien varie alla en se perfectionnant : la
pierre clate et retouche et l'os poli s'ajoutrent la poterie et la
pierre polie. Cette dernire priode qui correspond au nolithique
des palethnologues semble avoir eu la plus longue dure, sans doute
parce que c'est celle que nous observons le plus frquemment. Les
troglodytes qui habitaient les grottes cette poque avaient la
155

coutume de les vider chaque fois que les dtritus amoncels sous
leurs pieds taient trop considrables, ce qui est une preuve de la
longue dure de celte priode.
Les troglodytes de l'ge de la pierre taient d'infatigables chas-
seurs et pcheurs : c'taient au demeurant des hommes de petite
taille, mais des marcheurs de premier ordre comme le prouvent
leurs tibias plactynmiques. Ils chassaient le grand b uf cornes
recourbes en avant (peut-tre le mme dont parle Hrodote), des
antilopes aux jambes agiles et l'autruche dont nous trouvons les
ossements et les ufs dans les foyers de cette poque. Ctaient
aussi de grands consommateurs d'escargots, de coquilles marines
et de poissons.
D'aprs la dcouverte d'un fragment d'un trs joli vase de facture
grecque que j'ai faite dans la grotte du Polygone, je crois pouvoir
avancer que les derniers troglodytes ont t en relations avec les
hardis navigateurs phniciens qui ont laiss tant de leurs souvenirs
sur la cte oppose de l'Espagne !
L'industrie que nous avons trouve dans les grottes de Noiseux,
du Polygone, des Troglodytes, marque l'apoge du travail de la
pierre et de l'os, car les armes en pierre que nous trouvons dans les
stations en plein air d'Eckmuhl, de Gambetta et de Canastel
dnotent une priode de dcadence correspondant, il faut bien le
remarquer, l'abandon des cavernes comme lieu d'habitation et
de spulture. Cependant le passage de l'industrie raffine des grottes
aux grossiers outils en silex des ateliers en plein air n'a pas d se
faire d'une faon subite, et ce sont sans aucun doute les stations
de pche que l'on observe en si grand nombre sur toute la cte
(Canastel, Batterie espagnole, Roseville) qui ont d marquer cette
transition, car les lames en silex ont la mme facture que celles des
grottes. Mais si l'industrie est peu prs semblable, les conditions
d'habitation ne sont plus les mmes puisque ces stations sont places
sur des falaises, au bord de la mer, dans des endroits o les
excavations manquent. Forcment donc, l'homme de cette poque
devait se construire des huttes pour s'abriter, non contre le froid,
mais plutt contre la chaleur.
On peut supposer que l'abandon des grottes peut avoir t provo-
qu par un changement de climat, mais on peut admettre aussi que
l'homme ait cherch se rapprocher de la mer tant pour la pche que
pour se trouver en rapport plus direct avec les marins trangers ?
156

Nous avons la preuve que les Oranais de cette poque ne crai-


gnaient pas non plus de s'aventurer en mer, car toutes les les de la
cte : Habibas, Rachsgoun et les Zaffarines, ont t habites par
eux, ainsi que le tmoignent les nombreux outils en silex que l'on
trouve dans ces les.
Aux temps nolithiques succde en Algrie la priode numide ou
berbre, et c'est sans doute le contact des trangers qui introduisant
dans notre pays les mtaux a d amener cette dcadence de
la pierre que nous avons constate dans les ateliers en plein air.
Mais l'introduction des mtaux ne dut se faire que lentement et
difficilement, car l'emploi des armes en silex et des grosses hches
polies en forme de boudin se maintint jusque et pendant la domi-
nation romaine.
Quoiqu'on ne trouve sur notre littoral, ni ruines, ni spultures
de l'poque, on ne peut cependant se refuser admettre que les
Phniciens et les Carthaginois ne soient venus commercer dans
notre port.
Les Romains taient trop bons juges en matire de port pour
ngliger Oran : Oran et Mers-el-Kbir taient leurs Portus divinis.
Mais il ne reste presque plus rien de leur tablissement : trois
inscriptions et quelques monnaies seulement.
Mais s'il ne subsiste plus rien des monuments romains, c'est que
ceux-ci ont disparu dans la ville arabe, puis dans les formidables
enceintes de pierre dont les Espagnols entourrent la ville et enfin
sous l'avalanche des dblais qui ont t faits depuis, de sorte qu'il
y a peu d'espoir de ne jamais plus rien retrouver ni des Romains,
ni des Carthaginois et des Phniciens. C'est l'opinion qu'ont gale-
ment mises Fey (1) et Demaeght (2), les deux historiens qui Oran
doit le plus.
Mais s'il ne reste presque plus rien de l'poque de la domination
romaine, il n'en est pas de mme pour la priode berbre.
Nous avons appel priode berbre la priode qui s'tendait entre
le nolithique et l'occupation romaine. Il est bien certain toutefois
que les berbres ont coexist avec leurs envahisseurs et sont
rests dans le pays aprs la retraite de ces derniers, mais il n'est
non moins vident aussi qu'au contact d'une civilisation plus affine
les berbres ont modifi leurs m urs et coutumes et que, par suite,
(1) L. F EY. Histoire d'Oran, pp. 30-32.
(2) L. DEMAEGHT. Gogr. comp. de la Mauret. Csar, pp. 169-170.
157

leur industrie a subi une volution nouvelle qui la distingue des


poques antrieures. Nous avons pu saisir trs nettement cette infil-
tration de l'influence romaine Benia Djouhala, dans le Dahra, o
les potiers berbres ont essay de copier la poterie ornemente de
leurs dominateurs. Voil pourquoi le berbre contemporain de
l'poque romaine n'est plus le berbre archaque des temps ant-
rieurs : si le peuple est rest le mme, son mobilier, son outillage
et son armement se sont transforms.
Les berbres se sont largement installs dans la banlieue d'Oran,
car depuis les premiers mamelons d'Eckmuhl jusqu'au grand ravin
de Misserghin (et bien certainement au del) toutes les crtes sont
couvertes de ruines ayant un caractre absolument uniforme et
rpondant bien la description qu'en a fait M. Ren de la
Blanchre (1).
Tout prs d'Oran, au confluent du Chabet el Hurmann avec les
Chabet el Hemmann (Chabet Dartaous), dans le lit mme du ravin
sont des ruines indtermines, mais qui ne sont srement pas
romaines.
Si l'on suit le sentier qui va de Pont-Albin la ferme Maurer, on
observera des ruines entre le sentier et le Chabet Ouard notamment
prs du point 262. Dans ces ruines j'ai ramass un fragment de
meule de moulin en basalte, quelques dbris de poterie et un
poudingue artificiel.
La ferme Maurer est sur le bord O. d'un plateau que les nom-
breuses ruines qui le couvrent ont fait nommer El Kelia par les
indignes (2). On observe en plus de nombreux amas de pierres
sches, boules, une double range de grandes dalles fiches en
terre suivant le bord S. et O. du plateau : c'est bien l le double
mur berbre avec blocage intrieur.
Au fond du ravin il y a un puits qui alimente la ferme connu dans
toute la rgion sous le nom de puits romain. Les indignes le con-
naissent sous celui de Bir Sidi Daho.
Les tumulus ne sont pas rares dans les environs, quelques-uns
sont encore bien conservs : il y en a un notamment sur un coteau
entre le coude du chemin de ben Assi et le confluent du ravin bord
sa base par des pierres plates fiches longitudinalement.
(1) REN DE LA BLANCHRE . Voy. d'tudes dans une partie de la Mauret. Csar ,
pp. 27-28.
(2) Quand on interroge les indignes sur ces ruines, ils rpondent que ce sont les
restes d'un groupement de Beni Makhias, une tribu disparue depuis des sicles !
158

Nous pourrions encore numrer beaucoup d'autres ruines dans


cette rgion, mais cela nous carterait un peu trop d'Oran. Il suffit
de constater que leur densit annonait un territoire beaucoup plus
peupl qu'il ne lest d e nos jours !
Si l'on consulte la feuille 153 de la carte au 50/000e on sera frapp
de l'abondance des ruines indiques sous le nom de dchera : ce
sont ces ruines que nous rapportons, au moins en trs grande partie,
la priode berbre.
Est-ce l'invasion vandale qui a amen la destruction de tous ces
villages dont nous observons les ruines aujourd'hui? Celte dispa-
rition concide-t-elle au contraire avec l'invasion arabe, ou est-elle
conscutive de la chute de celte v i l l e aprs son sige par les
Fatimites ? Autant de questions que nous ne sommes pas en tat de
rsoudre.
Les chroniqueurs arabes et les historiens espagnols ne signalent
gure que le petit village de Yeffri au dessus de la source Noiseux,
mais ne parlent pas des agglomrations qui les auraient certainement
frapps si elles avaient exist alors.
Il est souhaiter que l'tude de ces ruines soit entreprise d'une
faon rationnelle ; c'est tout un programme remplir, mais qui
claircira bien des points de l'histoire ancienne d'Oran. D'autres
le feront, je l'espre. Pour moi j'ai voulu seulement montrer
qu'Oran avait de plus vieilles archives que ne l'indiquent les chro-
niques musulmanes. Aussi dsormais, lorsque un crivain voudra
entreprendre une nouvelle version de l'histoire d'Oran, il devra
commencer son rcit par la formule traditionnelle : L'origine d'Oran
se perd dans la nuit des temps ......
C'est l tout ce que nous avons voulu prouver pour cette fois.

P AUL PALLARY,
Membre Correspondant.
A PROPOS D'INTAILLES ANTIQUES TROUVES
EN TUNISIE ( 1 )

Dans la Tunisie, les gemmes antiques, nous voulons dire les


pierres fines et les intailles, sont assez communes ; ainsi, (et nous
ne mentionnerons dans cet article que des pierres, vues, recueillies,
ou offertes au Muse du Bardo, par nous-mmes), Gabs, dans
les ruines de Tacape, ont t trouvs un saphir et une amthyste,
celle-ci perfore (pendeloque); Sfax, une meraude, perfore gale-
ment (grain de collier) (2) ; etc., etc. Il s'agit ici, bien entendu, et
trs peu d'exceptions prs(3), de gemmes occidentales, les seules,
ou peu prs, qu'aient connues les Romains, et qui n'avaient rien de
commun, comme clat, avec les pierres que fournit actuellement
l'Orient; le travail de polissage tait, du reste, imparfait.
Mais, laissons de ct les gemmes, et aussi les cames, qui eux
sont trs rares. Nous voudrions dire quelques mots des pierres
graves, ou intailles, de l'poque romaine.
Si l'on explore la surface du sol tunisien, soit au milieu de ruines,
soit aux environs des villes, surtout dans les points jadis occups
par les ncropoles, il arrive assez frquemment que l'on dcouvre
de ces intailles, entires ou fragmentes. C'est, du reste, du culti-
vateur arabe, et surtout du berger, qui a tout loisir pour chercher,
que viennent la plupart des pierres que les marchands vendent aux
collectionneurs, et l'on sait que, dj bien avant l'occupation fran-
aise, chaque ville de la Rgence avait au moins un collectionneur
de pierres graves.

(1) M. Rietmann, secrtaire-gnral-adjoint, se proposant de publier dans le Bulletin


la liste des empreintes qu'il recueille pour la Socit, nous ne pouvons mieux faire que
de donner, comme introduction son tude, le mmoire plein d'excellentes choses
inspires par l'exprience que m'a adress M. le Docteur Vercoutre. Dr CARTON.
m
(2) Trouve sur le bord de la mer, 1500 environ au Nord de la ville; l, la plage
s'tant affaisse, des tombes antiques sont laves par l'eau de mer et leur mobilier
devient trs visible.
(3) Nous avons une gemme (grain de collier) d'un bleu remarquable provenant
d'El-Kantara de Djerba (anc. Meninx).
160

On a prtendu que nombre de ces pierres ainsi acquises sont


fausses, c'est--dire modernes : c'est exagrer; nous avons vu des
simili-intailles en verre coul, mais antiques, et, d'autre part, (et
nous parlons ici de ce que nous avons observ dans les dbuts de
l'occupation), celles de ces pierres qui ne prsentaient pas le carac-
tre antique, c'est--dire qui n'avaient pas reu le poli sur les sur-
faces graves, taient fort rares. On a prtendu encore que la plupart
de ces pierres taient importes d'Italie : c'est bien douteux,
d'autant que les intailles antiques sont moins communes en Italie
que dans la Tunisie. Mais, ce qui est malheureusement certain, c'est
que l'on n'a pas souvent la bonne fortune de rencontrer des pierres
graves offrant un rel intrt, et non moins certain que beaucoup
sont en mauvais tat ; la raison en est que les antiques violateurs
de spultures, rencontrant un anneau d'or ou d'argent orn d'une
pierre (car ces pierres taient montes sur anneaux parfois normes),
glissaient une pointe de couteau sous cette pierre sans valeur pour
eux, et, n'ayant cure que du mtal prcieux, la faisaient brutalement
sauter : de l ces brches, ces fentes, qui, trop souvent, dparent
et dprcient les intailles. On conoit que nombre de pierres graves
aient t ainsi brises : de tels dbris se trouvent assez frquemment,
par exemple aux environs de Sousse.
Nous avons une preuve de l'abondance de ces intailles en cer-
taines localits, (ruines de Tacape, territoire de Sousse, etc.), dans
ce fait que, au dbut de l'occupation militaire, quelques soldats
aviss utilisaient leurs loisirs des camps la recherche, sur la surface
du sol, de ces pierres ; le petit lot trouv tait soigneusement log
dans un coin du porte-monnaie, puis vendu vil prix Marseille ;
tel de ces lots, achet au marchand marseillais par un
amateur que le hasard avait conduit aux alentours de la Joliette,
contenait des pierres intressantes : nous connaissons, provenant
d'un de ces lots, une intaille avec portrait trs fin de l'empereur
Claude.
Parmi les pierres graves recueillies ou examines par nous, un
bon nombre reprsentent des sujets qui tmoignent de l'enthou-
siasme du possesseur pour la vie rurale, desse tenant une charrue,
une corne d'abondance, etc., et la pense se reporte ces vtrans
qui, aprs avoir combattu, venaient coloniser : gaudet tellus
vomere laureato, disaient-ils avec Cicron ; ces pierres graves, de
travail sommaire et de sujet banal, qui figurent des Victoires, des
161

guerriers arms, etc., ornaient aussi les anneaux de ces vieux


braves; l'une d'elles reprsente " Mars au repos" ; l' uvre est
dtestable, pourtant intressante ; nous ne serions pas surpris
qu'elle rappelt quelque monument remarquable de la statuaire (1).
Nous ne parlons pas des pierres gnostiques : le sujet est trop
spcial ; une pierre (souvent un jaspe jaune) devait tre utilise
contre la piqre des scorpions : un de ces animaux y est reprsent.
Rares sont les portraits ; Sfax, nous avons vu sur une meraude
un portrait trs fidle de l'empereur Claude ; malheureusement,
un entourage de couronnes dparait ce beau travail de glyptique.
A Houmt-Souk (le de Djerba) nous avons vu, sur cornaline rouge,
un bon portrait de Caracalla. Une cornaline provenant de Sfax
montre une tte imberbe, assez fine, que nous esprons identifier.
Quelques ttes fminines sont intressantes pour la coiffure.
Pour les divinits, nous les avons vues assez nombreuses : Mer-
cure est frquemment reproduit ; nous possdons, sur un jaspe
rouge minuscule, une tte trs fine de Jupiter Serapis, provenant
de Sousse.
Certes, de tels sujets taient depuis longtemps connus sous une
forme infiniment plus parfaite; mais, qu'on veuille bien le remar
quer : si les intailles tunisiennes ne se recommandent pas, en gnral,
par l'art, il s'en trouve qui mritent l'attention par le motif
reprsent.
Voici, sur une cornaline, un pauvre hre qui s'avance appuy sur
un bton; vtu d'une peau, il est coiff du pileus pointu du
matelot ; un chien bondit son ct ; quelques pas est un arbre sans
feuilles l'un des rameaux duquel est suspendu, non un de ces
" oscilla " dont parle Virgile, mais une dpouille d'animal. Dans
cette scne, trs grossirement figure, que convient-il de voir? une
reprsentation nave d'Ulysse, de retour dans sa patrie et reconnu
par son chien, le fidle Argos? Et pourquoi non ? En 84 avant
J.-C, ce mme sujet tait trait par les graveurs en monnaies,
comme en tmoigne un denier bien connu de la famille Mamilia ;
mais cela ne rend pas compte de tout : comment expliquer l'arbre?
Rappelons-nous nos classiques: Virgile et Lucam disent que, reve-
nus d'une navigation dangereuse, les marins suspendent leurs ex-
(1) Mars (sur l'empreinte) est debout, gauche, la jambe gauche demi-flchie ; la
lance, qui s'appuie sur le sol, repose obliquement sur l'paule gauche. Le dieu s'est
dcasqu : de sa main gauche il tient devant lui son casque ; il laisse pendre son bras
droit fatigu. A ses pieds est son bouclier (cornaline jauntre, Sfax).
162

voto l'olivier de Faunus, et ils parlent du vieux chne qui tend


dans le ciel ses rameaux desschs, mais qui porte toujours les
dpouilles des victimes offertes par le peuple et les dons des chefs;
autour de lui la fort est robuste et verdoyante ; seul, il est honor :
Exuvias populi .... sacrata que gestans
Dona ducum .............
Sola tamen colitur.
Cette intaille ne serait-elle pas l'illustration de ces textes, et
n'est-il pas vraisemblable qu'elle a orn le doigt de quelque marin,
enfin revenu, comme Ulysse, au port, et heureux de retrouver ses
pnates?
Sur une gemme incolore, translucide, recueillie Gabs, voici
un acteur ; en dpit de l'imperfection de la gravure, on le reconnat
son masque, ses hautes chaussures ; il tient une lanterne ; alors
la pense se reporte l'Amphitryon de Plaute (1) : nous sommes
au thtre, Mercure est en scne et il interpelle Sosie : " O vas-tu,
toi qui portes le dieu du feu dans de la corne? " Sans doute, le
rpertoire de Plaute, l'auteur si cher la populace, devait tre
connu en Afrique (2), et est-il tmraire d'admettre que le possesseur
de la pierre tait quelque affranchi ayant nom Sosia, ou Sosianus?
Que de petits problmes soulvent d'autres intailles que nous
connaissons ! Voici une meraude, lgrement bombe, trouve
Sousse : on y voit, gravs par une main habile, deux lions affronts,
furieux, se menaant du regard ; l'un d'eux tient sous sa patte une
tte de loup ; l'exergue, en lgende, MAGNVS(3).
Le sujet est intressant, mais, quid ? Dire que le style est oriental
n'apprend rien ; l' uvre d'ailleurs est bien romaine. Certes, on est
tout dispos voir dans la scne reprsente une allusion aux luttes
entre Pompe (dont le surnom tait MAGNVS) et Csar, pour la
souverainet sur l'empire romain, d'autant qu'un denier de mon-
taire de la gens Egnatia, contemporain de Pompe, montre la desse
Rome affirmant sa souverainet prcisment en posant le pied sur
une tte de loup ; pourtant il convient d'observer que l'A de la
lgende est archaque, barre non transversale, mais descendante,

(1) Act. I, sc. I, v. 185.


(2) Cf. cependant G. Boissier, Ac. des Insc. juin 1901.
(3) Litter quadrat .
163

et est-il certain que cette lettre, ainsi figure, tait encore en usage
au premier sicle avant J.-C ? La question est examiner, mais,
par ces quelques exemples, nous avons voulu montrer que, sur
certaines pierres, le sujet, trait mme sans art, veille l'intrt, et
que, par suite, l'tude de ces intailles, dissmines dans les muses
ou les collections prives en Tunisie, mriterait d'tre tente. Cata-
loguer, c'est bien; mais tcher de dcouvrir la pense du graveur,
s'efforcer de comprendre son uvre, c'est mieux ; il est vrai que
c'est plus difficile.
Sachons nous borner ; cependant, avant de finir, aux heureux
chercheurs qui habitent l'Afrique du Nord, cette terre bnie des
archologues et que nous avons beaucoup aime, offrons quelques
conseils.
Pour tre fructueuse, la recherche des intailles la surface du
sol doit tre faite immdiatement aprs une pluie; celle-ci, en effet,
enlve aux dbris qui jonchent le sol la poussire qui les ternit
et qui les cache, et elle rend ainsi momentanment, aux objets,
intailles, mdailles, poteries, etc., l'clat qui attire l'attention ; les
bergers arabes connaissent merveille cette particularit et ils en
profitent. Du reste, l' il acquiert assez vite, et noire propre exp-
rience en fait foi, l'acuit ncessaire pour apercevoir de trs menus
objets.
D'un autre ct, pour tre utile la science, toute dcouverte
d'intaille doit tre signale, et l'empreinte de la pierre, sinon la
pierre elle-mme, doit tre dpose dans un muse de la rgion (1).
Combien d'intailles antiques, d'un rel intrt, ornent des anneaux
modernes, mais ont perdu de leur valeur, simplement parce que
leur origine est tombe fcheusement dans l'oubli !

Dr A. T. VERCOUTRE.

( 1 ) On sait que la Socit Archologique a commenc une collection d'empreintes


d'intailles, dont la formation a t confie M. Rietmann. D r CARTON.
FOUILLES DE LA NCROPOLE ROMAINE
DE DAR-BEL-OUAR

J'ai l'honneur de vous adresser quelques renseignements sur des


fouilles que j'ai pratiques dans une ncropole romaine voisine du
bordj de Dar-bel-Ouar.
Les tombeaux ne sont nullement apparents la surface du sol, qui
est partout recouvert de pierres roulantes. Mais, aprs un examen
du terrain, tant donne l'orientation des tombes (de l'Ouest
l'Est, la tte tant l'Ouest) et en dgageant la pioche les pierres
taillantes les plus leves, en arrive dterminer l'emplacement
d'un tombeau.
J'ai t amen fouiller dans ces conditions deux monuments
funraires, qui, malgr leur proximit (10m de distance), prsentent
des caractres absolument diffrents.
Le premier tait recouvert de moellons poss la main sur une
paisseur de 0m40 environ. Le corps se trouvait dispos sous des
dalles places en forme de toit et non assembles au mortier ; il
reposait sur le terrain naturel.
Le mobilier funraire tait plac droite du corps et hauteur
de l'paule.
Il comprenait les objets suivants :
1. Une gargoulette dont le corps massif est rachete par l'vasement du goulot
et le dveloppement d'anses fines, ce qui rend l'ensemble assez lgant. (La
poterie est lgre, mais blanche aprs cuisson).
2. Un plat avec couvercle en poterie rouge trs fine.
Ce plat contenait des os d'animaux.
3. Une lampe anse perfore, ornements formant rayons et sans estampilles.
Ce tombeau ne contenait pas de cendres ni de charbon.
Le deuxime tombeau a donn des rsultats plus intressants. Il
tait recouvert, comme le premier, par des pierres poses la main,
mais non assembles au mortier. Le sarcophage n'tait pas form de
dalles en forme de toit, mais de dalles horizontales de 0m60 largeur.
Au dessous de ces dernires ont t rencontrs les ossements au
165

milieu d'un mlange de cendres, charbon et terre. Ils taient, du


reste, intacts et le corps n'a pas t incinr.
Le mobilier funraire tait dispos, comme dans le prcdent,
la hauteur de l'paule droite, et les objets trouvs sont :
1. Une vase en poterie rouge trs fine recouvert d'une assiette, et contenant
des os d'animaux.
2. Un plat creux deux oreilles avec couvercle, contenant des os d'animaux.
3. Un vase une anse.
4. Un vase bris en verre.
5. Des noyaux d'amandes brles.
6. Deux clous en fer tte plate de 15m/m de diamtre, ce qui reste de la tige
ayant un centimtre 1/2 de longueur.
7. Une pice en bronze de 0.02 de diamtre, compltement use. Pas de
lampe.

Il parat rsulter de cette dernire fouille, tant donne la pr-


sence de clous et la disposition des dalles, que le corps n'avait pas
t simplement enfoui comme dans le tombeau, mais avait t plac
dans un cercueil en bois.
La richesse du mobilier funraire semble montrer que le sujet
de la tombe appartenait une famille plus aise que celui de la
tombe prcdente. Il doit, du reste, y avoir une diffrence de date
entre la confection de deux tombeaux.

L. ROBIN.
Conducteur des Ponts et Chausses Enfidaville,
Correspondant,
LES HAOUANET D'EL-HAROURI (KLIBIA)

Il existe 6 kilomtres l'ouest de Klibia, dans un ravin, une


srie d'houanet dsigne sous la mention Grottes , sur la carte
de la Tunisie au 1/50.000mes
Il en existe dix prsentant les caractres gnraux des haouanet,
chambres cubiques prcdes par un couloir s'ouvrant dans une
face taille pic, mais avec des dispositions qui n'ont t releves
nulle part dans les autres groupes d'haouanet tunisiens. Pour la
commodit de la description, je les ai numrots de 4 10 en
partant du Nord ; tous font face l'ouest, tant placs sur la rive
droite d'un ravin creus dans les bancs de grs qui forment un
plateau uni.
H1 s'ouvre au niveau du sol ; son entre mesure 0m 80 sur 0m 70
de large, elle forme un arc surbaiss en haut, forme due l'usure.
On pntre par le couloir de 0m 30 dans une premire chambre de
plein pied avec le couloir dont les caractristiques sont : profon-
deur, 0m 90; largeur, 1m 29; hauteur 0m 95, petite par consquent.
La face du fond est perce d'un couloir de 0m 90 de haut sur
0 68 de large et long de 0m46; il conduit dans une deuxime
m

chambre plus grande que la premire : P = lm95 x L = 2 mX 1;


la face suprieure est en chevron dans le sens de l'axe comme
dans l'haouanet que j'ai dcrit Sidi-Bou-Rouigat, (feuille de
Menzel-Bou-Zelfa) mais l'arte ici est moins nette. La hauteur de
cette chambre est de 1m60 au milieu et 1m40 aux bas-cts.
Le fond de cette deuxime chambre prsente une niche rectan-
gulaire mesurant : profondeur 10 cm, largeur 31cm, hauteur 34cm.
Cette face prsente un relief de 2cm partir de 1m 20 de haut, coupant
la niche son tiers infrieur. Elle est bien conserve et prsente
des traces de peinture l'ocre comme celles que j'ai dcrit
aux houanet de Sidi Mohamed el Atrach et de l'oued Kob.
En face de l'ouverture, le rocher est creus d'une cavit en cuelle
comme celle que j'ai signale en face de l'haouanet de
Sidi-Bou-Rougat, mesurant comme elle 0m 25 de diamtre environ.
167

H2 est accole HI; elle est de plein pied avec l'esplanade creuse
dans le roc.
Son entre prsente un encastrement de 0m10 de profondeur
creus dans la face du rocher taill pic ; le couloir d'entre
us en haut de manire le rendre cintr mesure H = 79cm x L
87cm L = 54cm on pntre dans une chambre un peu en contrebas,
assez petite, P = 1m 15 x L = 1m 40 x H = 87.
Elle est suivie d'un couloir et d'une deuxime chambre en
contrebas o il y a un pied d'eau croupissante empchant les
mensurations verticales; le couloir est large de 60cm sur 41cm de long.
La chambre est cubique et mesure 1m85 de ct. La partie suprieure
des parois verticales est orne d'une corniche haute de 0m 12 et
paisse de 2cm. La paroi du fond est perce d'une niche de 10cm
de profondeur et de 22cm de ct, entoure d'une moulure en creux
angle droit de 2cm environ ; au dessous de cette niche s'ouvre un
couloir semblable au second permettant l'accs dans une troisime
chambre semblable la seconde et la niche semblable celle de la
deuxime chambre.
H3 est situe droite en avant des deux premires et a un plan un
peu infrieur, son entre entoure d'un encastrement trs net,
est brise et mesure 50 cm de long. On pntre dans une premire
chambre dont les dimensions sont :
P = 2m00 x L = 2m00 x H 1m75 x Hc 1m42
Elle possde une corniche sur la paroi du fond avec un faible
relief. Elle est prolonge par un couloir long de 50cm dans une deu-
xime chambre semblable, la premire :
P = l m90 x L = 2m00 x H 1m 72 x Hc = 1 m 42
et elle possde une niche qui se voit sur la paroi du fond ; cette
niche empite dans ses 4/5mes suprieurs sur une corniche qui garnit
le haut de la paroi ; ses caractristiques sont :
P = 10cm x L = 29 x H = 32
profonde de 14cm, large de 21, haute de 25cm au milieu et de 15cm
sur les bas-cts. Elle possde des traces de peinture, dont les plus
nettes sont :
A sur la face du fond ; partant de la partie suprieure des bas-cts
se voit une bande large de 16cm, divise en carrs, alternativement
orns ou non. Les ornements sont forms par les deux diagonales
dont les triangles suprieurs et infrieurs sont peints l'ocre ;
168

B au-dessous de la niche un dessin rappelant vaguement la main


de Fathma schmatique des arabes. Une barre horizontale surmonte
de cinq barres verticales dont celle de gauche plus courtes est sur-
monte d'un U ; du milieu, un coude se dirige en bas et droite.
Ce dessin l'ocre est contemporain du creusement de la grotte
et n'est pas arabe, cause de la nature de sa facture ; si le doute
peut avoir lieu premire vue, il n'est plus possible lorsqu'en a vu
les peintures des haouanet, des groupes A et D du Djebel Behelil.
D'autre part l'ornementation gomtrique est identique celle de
ces groupes.
H 4 sur le mme plan que les cinq suivants, possde une
entre au milieu d'une surface taille verticalement en retrait du
bord du banc de grs. Le couloir mesure 63cm de large sur 15 de
long avec une hauteur de 66cm sur les cts et de 72 au milieu. La
paroi suprieure est cintre et au niveau de la paroi suprieure du
couloir. Le sol est en contre-bas, aussi comme dans beaucoup
d'autres haouanet, il existe une marche au-dessous de la porte, large
de 57cm situe 73cm de la paroi de gauche et 70cm de la paroi de droite.
La profondeur de la chambre est de 1m 92 droite, 1m 86 gauche,
c'est--dire quelle nest pas trapzodale; sa hauteur est de 1m 40
aux bas-cts et 1m 66 au milieu. Le fond possde une niche cintre
dont le haut touche la vote.
H5 prsente une ouverture encastrement rectangulaire bien
marqu, taille dans une surface rendue verticale, et s'ouvre un peu
plus haut que l'esplanade amnage devant elle. Le couloir mesure
H = 80cm X L = 70cm X L 8 = 50cm;
il s'ouvre dans une chambre situe au niveau du sol, avec un plafond
en chevron trs net, ses caractristiques sont :
P = 2 m 20 x L = 2 m 10 x H = 2 m 10
au milieu et 1m 80 aux bas cts. La paroi du fond prsente une
niche rectangulaire plus profonde sa partie infrieure
P c = 8 P m = 13 x L = 36 x H = 46
son plancher prsente sept cavits en cuelles
dont une mdiane et les autres latrales, sym-
triques et gales, deux deux, ainsi que l'indi-
que la figure ci-contre.
H6 prsente un encastrement trs net, profond de 10cm environ;
169

son entre est cintre par l'usure ; le couloir peu profond s'ouvre
de plein pied dans la chambre en chevron mesurant
P = 1 m 92 x L = 2 m et H = 1 m 73 au milieu 1 m 37 aux bas cts.
La face du fond prsente une niche de 37cm s'ouvrant 27cm du
fate. En haut des parois latrales court une corniche de 16 cm de
haut avec un relief de 2cm environ. La face infrieure droite prsente
un trou en cuelle de 15cm de diamtre avec une rigole destine
canaliser des liquides, semblable encore celui de l'intrieur
de l'Hanout de Sidi Bou Rouigat.

H7 a un plan un peu infrieur et antrieur, elle prsente un


encastrement trs marqu avec un relief de 12cm environ comme H5.
Le niveau du couloir et de la chambre sont ceux de l'esplanade.
L'entre est large de 63cm, rectangulaire; la chambre est en chevron,
mais trs basse H = 90 aux bas-cts, 1m20 au milieu avec une pro-
fondeur de 2m et une largeur de 1m92, mais elle prsente une parti-
cularit unique. Le sol est creus en son milieu d'une cavit large
de 60cm et profonde de 30cm environ, c'est--dire pouvant admettre
un corps humain. Les rebords de cette cavit sont entours d'une
gorge rectangulaire de 6 cm ayant pu servir de point d'appui un
objet couvrant cette cavit. On peut penser qu'il y a eu l une co-
nomie de travail et qu'on a amnag une excavation suffisant epour
recevoir un cadavre tendu, vitant ainsi l'enlvement de 80 dci-
mtres cubes de pierre.

H8 a une entre surleve, use et entoure d'un encastrement;


ses dimensions sont 1m 92 de large sur 1m 92 de profondeur, le toit
est en chevron, sa hauteur est de 1 m 70 au milieu et 1m 35 au bas-ct.
Elle possde une niche carre l m 20 de hauteur dont les
caractristiques sont :
P = 10 cm x L= 25 cm x H = 34 cm
Elle possde des traces nettes de peintures parmi lesquelles on
distingue encore une sorte de main de Fatma. Il faut se figurer un
trident dont les 2 branches latrales courtes sont termines par
un U et la branche interne de U est surmonte elle-mme d'un U
plus petit.

H9 est accole H8 sur une esplanade mnage dans le roc, large


de 1 m 50. Son entre est trs abime. La chambre en forme che-
vron, mesure 1 m 70 au milieu et 1 m 30 au bas-ct, sur 2 m de large
170

Elle possde une niche dans la face du fond, en chevron, mesurant


24cm de large, 36 de haut et 25 de ct. L'angle est donc un angle
droit. On y relve des traces de peintures rouges et noires.
H10 prsente une
disposition d'entre
anormale. Elle est
trs en arrire des
autres. Dans un
bloc de grs
affleurant le sol, on a
creus un plan incli-
n, laissant les parois
latrales verticales, et
conduisant une au-
tre face verticale o
s'ouvre la chambre.
L'entre possde un encastrement trs net, mais il est impossible
de pntrer dans la chambre encombre par des apports de terre
venus de l'extrieur. Il serait utile de dblayer cette chambre, ce
que je n'ai pu faire, press par les ncessits de mon service.
Les particularits de ces haouanet sont, en rsum :
1 la forme en chevron des haouanet et des niches ;
2 la rgularit des encastrements ;
3 les peintures en carrs orns, que j'ai dj dcrites au Djebel
Bhelil et qui prouvent les mmes traditions artistiques;
4 les deux ornements en " main de Fathma ";
5 les houanet en chambres successives dont je n'ai vu qu'un
exemple l'Oued Keceb, encore la premire chambre s'ouvrait
directement sans couloir.
Il y a une remarque faire, c'est que le mode de travail n'est pas
le mme, tandis que dans les quatre groupes du Djebel Behelil, sur
les surfaces qui n'ont pas t polies intentionnellement, on voit la
trace du travail au ciseau prsentant une srie d'entailles
scalariformes, le travail a eu lieu au pic man uvr directement.
Dr DEYROLLE, Mdecin aide-major,
Licenci es-sciences.
NOTE SUR LES NCROPOLES ANCIENNES
DE BIZERTE

Les ncropoles anciennes de Bizerte n'ont pas encore pu tre


dtermines d'une faon absolue quant leurs emplacements.
Les notes que nous donnerons ne seront donc que de simples
indications, qui pourront peut-tre guider des archologues dsireux
de reconstituer l'histoire de la tombe dans l'antique Hippozarite.
De l'poque punique, nous avons reconnu l'emplacement de trois
ncropoles :
1 A l'Ouest de Bizerte, sur la route de Bja, quelques centaines
de mtres du camp Ouest, ont t dcouverts une quinzaine de
caveaux creuss, flanc de colline, dans un grs assez compact

fournissant, lorsqu'il est concass, un sable recherch pour certaines


constructions ; c'est en taillant cette colline que des ouvriers
carriers ont trouv des chambres funraires, les unes obstrues par
de la terre, les autres fermes par des dalles en pierre de en grs
172

assez dur. Elles taient toutes pourvues d'un puits vertical les reliant
la surface et combl par de la terre. Les ouvertures sont rgulires,
rectangulaires ainsi que les chambres parois, le plafond plat. Les

dimensions de la plupart sont : largeur 1m48, profondeur 1m81, hau-


teur 1m30. On y a trouv, mlang une terre argileuse, un mobilier

funraire assez commun et compos de lampes, fioles parfums


(unguentaria), rcipients boisson (capis et nochoe), plats (pater ),
173

urnes et vases creux, le tout du type connu et dj signal tant


Carthage qu' Sousse et Mahedia ; noter aussi quatre petits sar-
cophages en pierre de diverses dimensions, avec couvercles double
pente et pleins d'ossements calcins. Une gargoulette ainsi que
ces petits sarcophages renfermaient des cendres.
Au mme endroit auraient aussi t trouvs, d'aprs le propri-
taire du terrain, M. Don, jardinier, une lampe en bronze (?), une
statuette en marbre trs grossire, et une tte de statuette en marbre
reprsentant une femme.
Les dessins suivants (fig. 1 et 2), donnent une ide gnrale de
la forme, des dimensions des caveaux ainsi que de leurs emplace-
ments dans la colline qui n'a pas t entirement explore.
La figure 3 indique la forme d'un monolithe surgissant du sol,
non loin de la ncropole dont il vient d'tre mention et proximit
du terrain de man uvre de la garnison ; dans les temps
reculs, il est probable qu'il n'tait pas en vidence comme actuel-
lement; l'intrieur de la chambre correspond comme forme et
dimensions ce qu'on remarque dans presque toutes les chambres
funraires de cette poque. Il existe encore un certain nombre de
tombeaux qui n'ont pas t explors.
2 A l'Est de Bizerte, Zarzouna, lors de l'agrandissement du
canal, l'on enleva, sur une large et longue bande de terrain, une
couche assez paisse de terres et pierres
dans le but de faciliter le fonctionnement
de la dra gue au fur et mesure de
l'avancement des travaux. L'on trouva
alors, dans les dblaiements, quelques
tombes renfermant des lampes et poteries,
des petits sarcophages en pierres et une
stle anpigraphe ; cette stle (fig. 4)
affecte forme d'une longue dalle fronton
triangulaire et bas-relief figurant, dans
une niche rectangulaire, le dfunt debout,
dressant la main droite, la paume en
dehors et le bras gauche pli, l'avant-bras
horizontal.
3 Dans l'ouvrage militaire du Chrek
ben Chabane, 5 kilomtres environ l'Est de la ville,
a t dcouvert, en novembre 1898, un tombeau
que nous pensons tre punique d'aprs la description qui
nous en a t faite et surtout d'aprs l'examen des objets qu'il ren-
174

fermait. C'est en faisant une rampe d'accs vers une plateforme et


en talutant le roc d'une partie du parados que les ouvriers mirent
jour ce tombeau qui consistait en un simple trou dans le roc,
0m 60 environ de profondeur ; le tombeau tait recouvert d'une
dalle en pierre de mme nature que le roc, dans l'intrieur l'on
trouva un cercueil en plomb renfermant les os calcins d'un indi-
vidu; parmi les os, quelques menus objets briss (en os ou ivoire)
dont les fragments d'une petite figurine sculpte (1) et d'autres
peu reconnaissables ; le fragment d'un crochet eu bronze; deux
grands rcipients en terre (oll) ; un certain nombre de fioles
parfums (unguentaria) en terre cuite ; une lampe en terre noire
avec petits dessins d'ornementation ; deux plats (patell ) en terre
noire ; deux soucoupes, l'une filet, l'autre unie, galement en
terre noire. Aucune trace de lettres sur les objets recueillis.
Monsieur le capitaine du Gnie Levi-Alvarez, de qui nous tenons
ces renseignements, ajoute qu'on peut tablir un certain rapport
entre ce tombeau et l'existence d'une habitation, d'un gout ou
puits perdu et d'un four poteries, proximit de la spulture
qui pourrait bien tre celle du propritaire ou d'un habitant de la
maison, vu que dans toute la zone embrassant l'ouvrage du Chrek
aucune autre tombe n'a t dcouverte.
Des poques romaine et chrtienne nous ne savons rien ou presque
rien quant l'emplacement des ncropoles. Nous avons appris
nanmoins que des traces de tombes romaines avaient t releves
au Nord-Ouest de la ville, entre le Cap de Bizerte et le fortin de
Sidi-Salem, dans des jardins ou terrains de culture, et qu'
Bijou-ville, dans Bizerte mme, avaient aussi t dcouvertes
quelques tombes romaines lors de fondations de maisons.
Ces dernires donnes, trs vraisemblables mais aussi trs
vagues, mriteraient d'tre vrifies.

G. HANNEZO,
Commandant au 4e Tirailleurs Algriens.
Correspondant.

(1) Peut-tre une pingle cheveux semblable celles qui ont t trouves Lemta
dans la ncropole punico-romaine. Bult. Arch. 1897.
ANNOTATIONS A L'ATLAS ARCHOLOGIQUE
DE TUNISIE

I. Feuille de Grombalia

Khalloua de Sidi Bou Zekhi


Il existe, sur la carte archologique de Grombalia, au lieu appel
Sidi-bou-Zekhi, quatre kilomtres au S. S. O. de Grombalia, un
point not Tombeau Phnicien . Cette annotation est fortement
aventure.
C'est une roche blanchie la chaux situe derrire la Zaoua
de Sidi-bou-Zekhi et qui prsente en effet un aspect bizarre. Elle

Khalloua de Sidi-bou-Zekhi (face Est)

est creuse et la face suprieure s'ouvre une ouverture circulaire


qui peut rappeler celle des Dolmens perfors, ou encore, celle j'ai
dcrite dans les Haouanets de Sidi-Mohamed-El-Atrach
176

ouverture se trouve au milieu d'une plate-forme o l'on accde


par trois marches creuses dans le roc (face nord).
La face Est prsente, au niveau du sol, une ouverture en arc,
large de 0 m 60 et d'une hauteur gale, rappelant assez l'ouverture
de certaines haouanet et qui permet l'accs dans une cavit situe
au-dessous de l'ouverture en trou d'homme . Cette chambre
mesure 1m 20 de ct et 1 m de hauteur, c'est--dire des dimensions
sensiblement gales celles d'un petit hanout. Il n'y a pas de
traces de niches carres; mais on trouve des excavations qui sont
peut-tre des niches trs dtriores par l'usure.
A droite de cette ouverture, existe une excavation semi-circulaire
en plan, profonde de 0m 20, haute de 0m 40 et large de 1m 75, rappelant
certaines haouanet bauches.
Les arabes appellent cette pierre la R'aloua ou Khalouia
de Sidi-bou-Zekhi . Des interprtes autoriss, que j'ai interrogs,
ne connaissent pas ce mot et n'envoient pas l'origine. Les indignes
paraissent avoir ce monument en vnration et la faon dont il
est blanchi en fait foi. Il est probable qu'ils ne le laisseraient pas
dchausser pour en tudier la base.
Quoi qu'il en soit, rien ne me parat permettre de le classer
comme Tombeau Phnicien .

II. Feuille de Grombalia

Hanout de Sidi-Messaoud

Il existe sur la proprit Alvarez et derrire la Koubah ruine


de Sidi-Messaoud, une falaise de grs, au milieu de laquelle on voit
un hanout typique. (Le fait n'est pas signal sur la carte archologi-
que.)
L'entre qui est 2 m au-dessus du sol, mesure 0 m 60 de large
sur 0m 80 de haut. Elle s'ouvre entre deux avances de la roche,
avances surmontes elles-mmes d'un auvent qui mesure 0 m 20
de saillie et 1 m 40 entre ses encorbellements. Le couloir mesure
environ 0m 20 de profondeur au plancher et 0 m63 au plafond. Dans
la paroi de droite un trou qui peut paratre destin recevoir un
dans la ttte disposition ne permet pas d'admettre l'obturation de
177

louverture par une pierre : elle devait donc rester libre et


lauvent devait empcher la pluie dentrer. Le couloir souvre au
milieu de la face antrieure (E),
1 m 05 du plafond et 1 m de la
paroi suprieure ; au dessous
delle, existe, comme dans
plusieurs haouanet du Djebel
Bazina et de lOued Keceb que
jai dcrites, une sorte de marche
rendue conique par lusure ; elle
fait une saillie de 0 m 30 et mesure
0 m 40 de hauteur.
La chambre est presque cubi-
que et mesure 2 m 70 de haut,
2m 60 de large 2m 30 de profon-
deur.
Au milieu de la paroi postrieure, 1 m 50 du sol, existe une
petite niche carre de 0 m 23 de ct sur 0 m 12 de profondeur.
Les arabes ont recouvert d'paisses couches de chaux les parois
de la grotte qu'ils paraissent avoir en vnration, ainsi que l'indiquent
des lampes arabes que j'y ai trouves. On peut apercevoir des
traces de peinture l'ocre, surtout dans les angles ; mais il est
impossible d'en voir le dessin.
La disposition des auvents qui devaient assurer une grande sche-
resse ces chambres, me permet d'tayer l'hypothse suivante :
Les haouanet, ainsi que les grottes spulcrales artificielles de la
Marne, sches comme elles et avec lesquelles elles ont une foule
d'analogies (la niche, par exemple) devaient servir, non de spultures,
mais de chambres de momification. Le cadavre momifi recevait,
plus tard, une destination dfinitive. On sait qu'une coutume
semblable existe encore Madagascar ( l ) .
Le cadavre d'une chvre, absolument momifi, ne prsentant
plus que les os et la peau recouverte de ses poils et parfaitement
parchemine, que j'ai trouv dans une des cryptes de l'Oued Keceb,
rend indubitable la possibilit du fait matriel. Cette hypothse
explique bien des particularits des Haouanet.

(1) C. f. Dr VERNEAU, Collecteur Brehm Les Races humaines.


178

III. Feuille de Kelibia

Il existe un certain nombre de polissoirs signals sur la carte


archologique de Tunisie (Ex. Feuille de Menzel-bou-Zelfa) ; celui
d'El Harouri n'a pas t signal. On
voit, en ce point, quatre kilomtres
au S.-O. de Klibia, dans un ravin
qui contient une srie de grottes arti-
ficielles, une fontaine romaine en pier-
res de grand appareil. A quelques pas
existent un sarcophage romain trs
ornement(1) sur un de ses cts par
des volutes en forme d'S et un moulin
romain, qui servent d'abreuvoirs
aux animaux (fig. 1). Entre ces objets
et la fontaine, git un polissoir
nolithique. Ce polissoir, dont la forme est assez paralllpipdique,
prsente, sa face suprieure, deux sries d'excavations, des cupules
arrondies en cuelles et des rainures scaphodes (fig. 2).
Les cupules, au nombre
de cinq, larges respective-
ment de six, douze et vingt
centimtres, n'atteignent
pas huit centimtres de
profondeur.
Les rainures scaphodes,
au nombre de cinq, mesu-
rent, l'une vingt-cinq cen-
timtres de long, sur une largeur et une profondeur maxima de
cinq centimtres; deux autres, quinze centimtres de long sur
quatre de large, deux autres sont toutes petites. Il y a, en outre,
une entaille bauche.
Il existe, en outre, des traces de polissage en deux points des
grands cts.
C'est une pice remarquable qui figurerait dignement dans un
muse archologique.

(1) Signal par Tissot.


179

IV. Feuille de Menzel-bou-Zelfa

Menhirs et gisements de silex taills de Fortuna


Il existe, dans la rgion de Fortuna, deux menhirs : le premier,
huit cents mtres au N. W. de Fortuna, est signal sur la carte
au 1/50.000 sous la mention R. M. (ruine mgalithique). Le second,
deux kilomtres au sud, la cte 128, trs nettement visible de la
valle, n'est signal ni sur la carte topographique, ni sur la carte
archologique. Ce dernier attenant au banc de grs ferrugineux
sous-jacent, n'est d'ailleurs srement pas dress par la main de
l'homme, il mesure 2m70 de haut sur 2m dans sa plus grande largeur.

Menhir de Fortunata

Le menhir du nord-ouest a la form d'un bloc de grs ferrugineux


rougetre, haut de cinq mtres environ, sur un mtre soixante
d'paisseur et trois mtres de large. La carte archologique signale,
en cet endroit, un gisement de pointes de flches. J'ai ramass, en
effet, une dizaine d'chantillons de silex taill, minral qui ne se
trouve pas sur place. Le plus important est une pointe prsentant
nettement le type moustrien, c'est--dire une pointe de silex taille
en clats assez petits sur la face convexe et dtach brusquement
du nuctus. La face plane, en effet, prsente un conchode de per-
cussion net. Toutefois, la surface qui faisait partie du plan de frappe
180

a disparu : deux brisures rcentes se trouvent la base de cet instru-


ment, sur l'une et l'autre face montrant
la nature de l'chantillon de silex. C'est
un silex fonc, translucide dont la partie
externe a perdu, sur une paisseur d'un
demi millimtre, son aspect vitreux,
pour devenir cette substance opaque,
blanche, nomme cacholong, qui atteste
la haute antiquit de l'instrument consi-
dr. Il est noter, en outre, que cet
instrument a servi, ainsi que l'indique lu-
sure irrgulire des artes et de sa pointe.
Le deuxime fragment est une petite lame trs fine de trois cen-
timtres de long environ, sur huit millimtres de large et deux
millimtres et demi d'paisseur, prsentant un conchode de per-
cussion sur une face, un plan de frappe et une autre face taille
par longs clats, rappelant, en petit, certains couteaux moustriens.
Il est entirement transform en cacholong.
Un troisime chantillon parait avoir fait partie d'une pointe
moustrienne assez volumineuse, brise. Il porte des traces de
l'action du feu, comme on en remarque sur les silex Thenaysiens
(mais sans assimilation possible, bien entendu, avec ces instru-
ments.), Il n'y a eu l qu'un accident. Les autres clats de frag-
ments de pointes sont en silex blond. Je n'ai pas trouv de nucleus,
ce qui eut t tonnant, la matire premire devant tre assez rare
et utilise jusqu' la limite extrme. Je n'ai relev, malgr mes
recherches, aucune trace de polissoir aux environs.
Ce menhir a t assurement rig de main d'homme. Il est en-
tour de gros blocs provenant d'un banc de grs voisin, visible
quelques mtres de l. Toutefois, ces blocs dtachs, situs au
Nord et l'Ouest du menhir, ne forment pas cromlech et paraissent
avoir servi de points d'appui dans l'rection de ce mgalithique.
Dr DEYROLLE, Mdecin aide-major
Correspondant.
181

V. Notes sur les ruines marques " Mgalithiques " sur


la Carte des environs de Bizerte au 1/50000e (1).

Cote 193 (2). Nord-Ouest d'An-Tella. Tertre lev d'environs


cinq mtres au dessus du terrain environnant, parat tre de
formation naturelle ; terrains rocheux, des pentes assez raides la
runissent au terrain. Au bas de ces pentes quelques roches dont
les plus grandes n'ont pas plus de 1m3 ; rien n'indique que ces
roches reprsentent des vestiges de monuments mgalithiques ; elles
paraissent au contraire dtaches tout naturellement. Aucune forme
particulire, aucun ordre dans leur disposition ; pas mme une
pierre l'une sur l'autre; sur le tertre se trouve une surface bien
aplanie de quinze mtres sur laquelle sont parsems quelques
pierres de taille et un pan de mur : fleur de sol, vestiges incontes-
tables d'une habitation romaine.
Entre les cotes 193 et 218. Il existe trois morceaux de roc
pleins, l'un ct de l'autre et d'environ 1/2 mc chaque, marqus
sur la carte.
Cote 218 (3). Sur le plateau, nombreux vestiges d'habitations
romaines, deux citernes, des pierres de taille, quelques roches plus
grosses que celle de la cote 193 places galement au bas des pentes qui
runissent la cote 218 au terrain environnant, terrain rocheux ; les
blocs ont d se dtacher naturellement ; d'ailleurs on voit partout
dans la rgion des blocs dtachs de la montagne.
Cote 196, Djebel Soumeur (4). Rien vu, peut-tre ces ruines
ont-elles disparu lors de la construction de la redoute, cela prouve
en tout cas qu'elles n'avaient aucune importance. (Personnelle-
ment j'ai vu construire la redoute il y a deux ans, et il n'y avait
aucune ruine ; j'ai pourtant bien cherch ce jour-l.
Sidi Chagroun (5). Cavernes perces dans le roc, probablement
anciennes carrires de pierre pour les habitations romaines dont
(1) D'aprs M. le capitaine Rouchette, de l'tat-major particulier d'Artillerie, com-
munique par M. le capitaine Hannezo.
(2) Ce point et les suivants portent les numros 44 et 45 de l'Atlas Archologique
avec la mention : ruines qui semblent mgalithiques (Dr CARTON.)
(3) Au Nord du numro 45. (Dr C.)
(4) Numros 13. 16 et 17 de l'Atlas; Ce point et tous les suivants sont aussi nots
Ruines qui semblent mgalithiques . Dr C.
(5) Numro 15 de l'Atlas. (Dr C.)
182

les ruines pullulent ou pour la construction du phare du Raz Enge-


lah. Dans le lit de l'oued quelques roches boules.
Henchir Rirari (1). Prs de la mer. Petit tertre lev peine
de 1 mtre au dessus du sol naturel ; sur ce tertre, une fondation
de maison romaine ; pas autre chose ou plutt quelques pierres et
poteries casses ranges par les petits Arabes.
Prs de Gliet Mellaha (2). Ruines romaines assez importantes,
pans de murs en pierres de taille encore debout, quelques belles pierres
de taille; a et l, quelques petits roches pleines, les unes ct
des autres.
En remontant la valle, on passe dans un vritable champ de
pierres provenant, de ruines romaines et aussi dtaches du Bir
Ed-damous et cette particularit se rencontre d'ailleurs sur tout
l'Henchir Monnous (Ouest du Djebel Soumieur) qui est un immense
champ de cailloux.
Sud du Djebel Frofel (3). Au sud du marabout de Sidi
Chagroun, aucune ruine mgalithique ; au milieu des pierres de
taille, il convient de citer une pierre debout d'environ un mtre de
hauteur plante dans le sol; une roche toujours en bas d'une
pente et c'est tout.
Aucune ruine mgalithique (4). COMMANDANT HANNEZO.

VI. De Sousse Oudena, par Battaria.

Les notes qui suivent ont t prises pendant les man uvres d'au-
tomne 1904. Je souhaite que le lecteur trouve quelque intrt les
lire et que cet exemple pousse les personnes que leurs gots ou leur
profession font voyager en Afrique relever ainsi tous les dtails
qu'ils rencontreront. La juxtaposition de ces documents d'autres
du mme genre peut, en effet, prsenter souvent un intrt tout
fait imprvu.
(1) Numro 12 de l'Atlas, (Dr CARTON). r
(2) Numro de l'Atlas Archologique. (D C.)
(3) Numro 18 de l'Atlas. (Dr C.)
(4) Le capitaine Rouchette croit que le topographe de cette rgion avait une faon
lui de comprendre les monuments mgalithiques ; car, dans les autres parties des envi-
rons de Bizerte leves par d'autres topographes, l'on trouve bon nombre de blocs de
pierres semblables ceux appels Ruines mgalithiques aux points indiqus ci-
dessus. Le capitaine Rouchette enverra quelques croquis des soi-disant ruines mga-
lithiques.
183

Feuille de Sousse. A 3.500 mtres au Nord du numro 3 de


l'Atlas, sur la rive droite de l'oued Fradj Gaa sont des ruines assez
tendues (1).
Dans la berge mme du ravin affouill, apparat prominent en
corniche, le rez-de-chausse d'une habitation : pices au sol ciment,
bassins, mosaque, puits circulaire descendant jusqu' la rivire.
Sur prs de 200 mtres de longueur, le sol est jonch de dbris
de marbres prcieux. En plusieurs points apparaissent des cubes
de mosaques en couleur. On peut encore reconnatre des bassins
ciments, des citernes votes en berceau. Mais l'difice le plus
reconnaissable est constitu par un soubassement octogonal ou hexa-
gonal qui parait avoir appartenu quelque lgant mausole.
L'emplacement d'une petite ncropole est sans doute indiqu par
des dbris de lampes et de grandes tuiles rebord qui jonchent un
champ.
Aucun numro n'est donn dans l'Atlas cette ruine qui aurait
d cependant depuis longtemps attirer l'attention. Je l'ai aperue
moi-mme pour la premire fois du plus oriental de ces deux pitons
auxquels on donne le nom des Sorelles , d'o il se signala
mon attention par de grandes masses gristres de blocage qui
s'aperoivent de loin.
Feuille de Sidi-bou-Ali. Des numros 72 76 se trouvent les
trois collines de Henchir el Hassel, tudies par le savant directeur
de Museum, M. le Docteur Hamy. Depuis l'exploration qu'il y a
faite, les dolmens en ont t dtruits ras du sol, part quelques
exceptions et c'est en vain que j'ai cherch le monument qu'il a
dcrit comme un prototype caractristique du Medracen; on voit
d'ailleurs en ce point quelques ruines romaines. En 76 est une
citerne-barrage qui semble avoir t construite intentionnelle-
ment au travers d'un thalweg pour en arrter la fois et en recueillir
les eaux. Elle est forme par une seule vote en berceau, d'une lon-
gueur insolite atteignant prs de 30 mtres.
Les Arabes ont construit rcemment, sur le plus occidental des
mamelons, une srie de petites enceintes circulaires ou carres

(1) Cette ruine, d'aprs les renseignements assez vagues que j'ai recueillis, serait
lHenchir Biniana, o auraient t trouves les statuettes dites de la collection
Gandolphe, maintenant disperses en raison de la ressemblance de celles-ci avec
celles que jai trouves El-Kenissia ; il y aurait lieu de chercher , laide de
fouilles, sil nexiste pas, en ce point, de sanctuaires de ce genre.
184

formes, soit de pierres grosses comme la tte et poses en une seule


paisseur les unes sur les autres jusqu' une hauteur de 50 centi-
mtres, soit de pierres fiches de mme hauteur. Ces enceintes au
nombre d'une trentaine sont attenantes et alignes sur une soixan-
taine de mtres de longueur. Leur diamtre est de 2 3 mtres et
elles sont ouvertes vers le Sud, c'est--dire vers la dclivit de la
colline. Du ct oppos l'ouverture, on voit accol au mur un tas
de grosses pierres ou des petites niches dans lesquelles les indignes
dposent les ex-votos.
Cette survivance qui est peut-tre mme une rsurrection
d'un rite si couramment employ dans les bazinas de la ncropole
toute voisine de Dar-bel-Ouar, est des plus frappantes. Elle constitue
un indice trs probant que les fellahs actuels de la rgion
descendent des constructeurs de mgalithes.
J'ai travers le point si curieux dont l'Atlas Archologique a
publi le plan sous le numro 88 de la feuille de Sidi-bou-Ali.
A l'est du chemin de fer, la cte 19, est un dolmen typique
bazina, dont la table a disparu, mais dont les piliers existent encore.
A la cote 29 (Kherbet el Menzel) je remarque un beau cercle
pierres en forme de voussoirs, base de bazinas, et, ct, une
enceinte elliptique constitue par un mur deux rangs de pierres
fiches soutenant de la pierraille. Son plus grand axe a 35 mtres de
longueur. Elle renferme deux silos ouverture norme.
Les enceintes situes en ce point, qu'elles soient rondes ou bien
elliptiques, carres ou rectangulaires, ressemblent tout fait aux
alignements de Dar-bel-Ouar. Chacune d'elles, forme de deux lignes
de pierres fiches, renferme presque toujours deux silos, ou deux
dpressions qui sont certainement les restes de silos, et cette cons-
tatation me semble tre une indication capitale. Les indignes
dposaient l leurs grains et, dans l'enceinte, ils mettaient leur
paille, ils dressaient mme sans aucun doute leurs tentes comme
ont coutume de faire les modernes africains. On construisait les
murs d'enceintes avec des pierres provenant du creusement des
silos quand celles de la surface manquaient. C'tait une ingnieuse
faon de nettoyer le sol tout en s'enfermant.
L'espace couvert de ces restes est bien plus considrable que ne
l'indique l'Atlas Archologique. Il s'tend du numro 70 l'ouest
de la mechta Ouled Drid jusque Sidi Soua, c'est--dire sur 5 kilo-
mtres de longueur et sur 2 3 kilomtres de largeur.
185

Comme si cette rgion devait nous offrir un exemple de toutes les


manires dont le gnie de la race aux mgalithes s'est perptu
jusqu' nous, une autre constatation peut tre faite Sidi Soua.
Auprs du marabout de ce nom est un cimetire musulman. Depuis
de longues annes les indignes se contentaient d'lever, au-dessus
des restes des leurs, de petits tumuli allongs en terre...
parce qu'ils n'avaient plus de pierres, ni l'nergie suffisante pour
l'extraire. Il s'est trouv que des entrepreneurs ont dispos, le long
de la voie, des pierres pour les travaux y faire. Immdiatement
le gnie de la race a repris le dessus et les indignes ont "emprunt"
les matriaux ncessaires pour lever sur leurs tombes de vritables
tumuli en pierres.
Pour en revenir aux enceintes, le fait important retenir est
qu'il y a eu ici autrefois une vaste surface habite, une espce de
grande ville berbre (1), toute en gourbis ou en tentes. Cette con-
clusion jette, me semble-t-il, un jour tout nouveau et trs net sur la
conception que l'on doit avoir de ce que fut autrefois cette curieuse
contre. Tout le pays, du Bordj el Bey aux Sobkhet Halk el Menzel,
avait t occup par une mme race ou une tribu. Au centre, dans
une vaste dpression au sol humide et fertile, de tous temps cultive
(les Romains y ont laiss un aqueduc, et les Franais de l'Enfida
y ont lev un barrage long de plusieurs centaines de mtres,
se trouvaient les terrains de culture de ces populations. Une srie de
collines rocheuses formaient autour des champs un vaste
demi-cercle, inutilisable pour la culture. La moiti de cette courbe,
la plus occidentale, tait recouverte de grosses pierres plates,
vritables dalles provenant de l'effritement des roches de la surface.
Ces populations qui n'avaient besoin de grosses pierres que pour
leurs tombes, comme prsent les gens de Sidi Soua, installrent
leurs ncropoles de Dar bel Ouar Kherbet el Menzel. Sur l'autre
moiti de la courbe, elles tablirent leurs greniers et leurs habita-
tions.
Ces considrations n'infirment d'ailleurs en rien l'opinion de M.
le Dr Hamy, d'aprs laquelle les Zenati descendants des construc-
teurs de ces mgalithes habiteraient la dechra de Takrouna. Seule-

(1) Cet article et en particulier ce mot taient crits quand j'ai reu de M. Pallary
l'article insr dans ce Bulletin et dans lequel il insiste sur les ruines berbres de la
rgion d'Oran. C'est un fait tout fait frappant et premptoire que la manire dont,
aux deux extrmits de la Berbrie, les enceintes ont t constitues l'aide de deux
ranges de pierres plantes dans le sol.
186

ment une partie de ces descendants seraient aussi demeurs dans la


plaine. Les indignes actuels qui construisent encore des cercles
de pierres et qui, aprs plusieurs sicles d'oubli du mode tumulus
faute de matriaux y sont instinctivement revenus ds qu'ils
l'ont pu, sont certainement les descendants des populations qui
avaient leur ville Kherbet el Menzel, leur ncropole au
Dar-bel-Ouar, leurs champs dans la dpression intermdiaire.
Telles sont les rflexions qui m'ont t suggres par une excur-
sion de quelques instants en ce point si curieux. Il est vivement
souhaiter qu'il soit tudi en dtail et que le plan de tout cet
ensemble soit dress trs exactement et avec prcision.
Feuille de lEnfida. N 168, An-Garci (Aggersel ?). Entre
Enfidaville et An-Garci, je constate trs nettement l'existence de
la voie antique indique dans l'Atlas au point 2.
L'aspect des travaux de captation m'a paru avoir chang consi-
drablement depuis la courte description qu'en a donn M. Gresse (1).
Les deux sources Pasteur et Rgence jaillissent au fond d'une
chambre antique, la premire dans un rservoir qui semble lev
son point d'mergence, la seconde l'extrmit d'une galerie
qui n'a pas encore t dblaye. Je n'ai plus vu l'aboutissant de la
troisime source indique par M. Gresse et qui a d sans doute tre
jointe la source Pasteur. Malgr les amnagements modernes la
disposition des antiques travaux est bien visible. La galerie a t
remplace par une tranche ciel ouvert. En se dirigeant vers le
bassin arabe, la conduite formait un angle obtus, presque droit. On
remarque, au milieu des abondants dpts qui soulignent le trac
du canal primitif, plusieurs restes de rigoles sinueuses, sensiblement
parallles et se dirigeant vers le bassin.
Autour de ces travaux s'tendent les ruines en trs mauvais tat,
mais nettement apparentes, d'un gros bourg et en particulier plu-
sieurs bassins ciments dont l'un, form d'une espce de baignoire
surleve, offre une disposition trs curieuse. Je n'ai pas tudi
cette dernire, me figurant tort ainsi que je l'ai su plus tard
que ce travail avait t fait, ce qui prouve l'intrt qu'il y a,
lorsquon en a le temps, prendre note de tous les vestiges du
pass que l'on rencontre, moins qu'il ne soit notoire qu'ils ont t
tudis.

(1) Enqute sur les travaux hydrauliques, par M. GAUCKLER, t. 1., p. 319.
187

Auprs de l'tablissement je trouve, sur une pierre calcaire en


forme de caisson, l'inscription suivante :
Longueur de la pierre 1m 60, hauteur 30 centimtres, paisseur 40
centimtres. Hauteur des lettres, l. 1 = 35 millimtres, l. 2 et sui-
vantes = 45 millimtres.
D MS
VICTO
R IA V I X I T
ANNIS
X
Les sigles initiales sont au-dessus d'un cartouche renfermant
le reste du texte ; les trois lettres V, I, X, formant une ligature consti-
tue tout simplement par un V dont la branche montante est croise
par une barre oblique.
La ruine qui porte le numro 177, place entre Takrouna
et An-Garci, renferme des restes de pressoirs. Or il n'y a plus, au
moins 2 ou 3 kilomtres la ronde, un seul olivier cultiv. Mais on
voit en revanche un grand nombre de ces arbres sauvages et
rabougris, particulirement serrs aux environs immdiats de la
ruine. Ce sont certainement les restes de plantations disparues.
Au pied du piton pittoresque de Takrouna (134) environ 200
mtres au nord-est du puits plac aux bords de la route, je remarque
un monticule coup par cette dernire et qui est couvert de testons
romains. Il y a eu certainement l un centre antique. D'ailleurs
toutes les croupes qui forment le pidestal de la dechra de
Takrouna, et que j'ai explores, au Nord, l'Est et au Sud,
offrent de nombreuses traces de ruines romaines, assez effaces par
suite de la recherche des pierres faites par les gens du village
voisin. Il est donc vident qu' l'poque romaine la Takrouna
berbre est descendue de son nid d'aigle et s'est tale vers les
cultures de la plaine pour se rtracter en quelque sorte ensuite et
remonter sur son rocher aux poques de trouble et de misre qui ont
suivi. C'est un phnomne que j'ai constat dj pour beaucoup de
centres antiques, notamment pour Chaouach, Djebba, Dougga, etc.
Auprs du monticule que j'ai signal plus haut, dans un ravin
50 mtres au Nord de la route, je relve un barrage form en
bas de pierres de taille, en haut de pierres sches, comme au
188

barrage du Kheley prs de Henchir Sidi Khalifat, que j'ai signal


dans le prcdent numro du Bulletin.
M. C ytaux m'a montr une petite statuette en terre noire, pro-
venant des environs de Takrouna, o elle a t trouve par un
Italien. Elle reprsente une femme coiffe du modius, complte-
ment enveloppe dans un ample manteau, tenant une lyre d'une
main, une baguette de l'autre.
N 60. A An M'deker, je note une grande quantit de pierres
de taille, enleves videmment aux ruines et qui ont t disposes
le long de la route pour y tre employes. Souhaitons qu'il ne s'y
soit pas trouv quelque texte intressant ou quelque sculpture.
N 12. A Battaria (civitas Bijensis) le bordj renferme tou-
jours, encastrs dans les murs d'une pice, des carreaux reliefs
bien conservs, mais qui sont malheureusement revtus d'une
couche de peinture. Une jolie pierre, un peu brche rcemment,
et place devant le bordj, porte le chrisme.
Dans la ncropole antique, je visite de grandes tombes
demi-cylindriques. Quelques-unes d'entre elles ont plus de deux
mtres de longueur. Une spulture place en pleine broussaille est
creuse dans un tumulus conique qui devait servir de base au
monument actuellement dtruit, qui la recouvrait. C'est une
chambre dont les parois sont formes par des murs en pierres plates
disposes en assises rgulires sans mortier. Cela me rappelle tout
fait les dolmens supports en pierres sches de Dar-bel-Ouar.
La cavit a 2 mtres de longueur sur 1m30 de largeur. On y descend
par un escalier de trois ou quatre marches dont l'axe est
perpendiculaire la paroi dans laquelle il est mnag; sa largeur
est de 1 mtre. Il n'y a pas traces de votes et il me semble certain
que cette spulture tait recouverte d'une ou plusieurs grandes
dalles, rapprochement de plus avec les mgalithes.
Je remarque, entre la ncropole et la ville, de ces alignements
comme ceux que j'ai vus Sidi Kantaoui, au Sud de
Hammam-Sousse, Dar-bel-Ouar, Kherbet-el-Menzel. Ce sont
deux lignes de pierres, de 50 60 centimtres de hauteur, et dont
l'intervalle large d'environ 60 centimtres, est rempli de pierrailles et
de terre. Ces lignes, qui sont videmment des limites, sont peu prs
droites et perpendiculaires une antique chausse, qui traverse la
ncropole en se dirigeant vers le Sud-Ouest.
Sur le piton qui domine les ruines et o il dut y avoir autrefois
189

une citadelle dont les murs sont compltement arass, au milieu


de tombes musulmans modernes, je trouve une vritable petite
alle couverte, de 1m20 de long sur 60 centimtres de large et
autant de hauteur. Elle est recouverte de trois dalles, et ferme en son
fond par une autre dalle. Son ouverture regarde vers l'Est. A
l'intrieur sont de ces poteries grossires, comme en font les
bdouines. Une hampe de drapeau y est galement plante. En
outre, ce monument est entour par une enceinte en pierres de
taille brutes, irrgulires, de 3 mtres de diamtre.
Voici encore une construction toute rcente et qui, comme les
alignements voisins, fait penser aux mgalithes. Dtail curieux, on
ne trouve dans cette spulture indigne moderne aucune pierre de
taille romaine.
Feuille de Bou-Ficha. N 188. Henchir el Hammimi. La
route de l'Enfida Zaghouan, aprs l'embranchement de Battaria,
suit pendant plusieurs kilomtres une voie antique dont les traces
sont trs apparentes, en ce pays de broussaille. C'est la mme
chausse qui est indique sur la feuille de Sidi-bou-Ali, l'Ouest
d'Henchir El Assel, qui sur celle de l'Enfida franchit l'Oued Boul,
l'aide d'un barrage (n 176) que j'ai retrouve entre Takrouna et
Ain-Grci et que la route moderne suit en passant Ain-M'deker.
Les ruines d'Henchir el Hammimi, qui ne sont ni trs importantes
ni trs belles, mritent qu'on s'y arrte un instant Leur examen
peut faire comprendre dans quelles conditions purement artificiel-
les certains centres ont pu s'lever le long des voies romaines.
La rgion trs pittoresque o elles s'lvent, avec sa piste, sablon-
neuse comme l'alle d'un parc, qui chemine entre de jolis taillis de
thuyas, est extrmement pauvre en eau. A quelques kilomtres
plus au Nord, le vaste centre de Segermes n'avait jadis que des
citernes; aucune source n'en alimentait les habitants. Le seul
point o ma connaissance coule une source prenne et d'une cer-
taine abondance est Battaria. Mais la voie de Carthage Hadrumte
et fait un dtour trop considrable en y passant; cette petite cit
lui tait relie par un embranchement qui s'en spare au voisinage
de Henchir el Hammimi. Ce centre fut donc, suivant toute appa-
rence cr pour les besoins des gens qui sjournaient ou qui
passaient ce carrefour, poste militaire, htelleries, rservoirs d'eau,
etc. Des restes de toutes ces constructions, ce qu'on reconnat le
190

mieux ce sont les ouvrages pour l'eau. Non loin d'un grand bti-
ment dont le mur extrieur a laiss des angles en pierres de taille
debout, on voit un puits compltement obstru et ras, et, dans le
voisinage de celui-ci un grand rservoir ciment, contreforts
intrieurs. Tout ct et comme accoles ce dernier sont deux
petites salles couvertes de demi-coupoles qui semblent avoir t
quelque fontaine, ou avoir fait partie de bains.
De l'autre ct de la piste, on voit galement deux citernes avec
demi-coupoles.
Ces ruines, dont la broussaille permet difficilement d'apprcier
l'tendue qui parait assez considrable, couvrent un petit mamelon
rocheux. Le grand nombre et l'importance des rservoirs qui
viennent d'tre signals montrent prcisment avec quel soin on y
recueillait l'eau, et combien celle-ci tait rare.
Le nom mme de ce point rappelle bien aussi que les Arabes
ou les Berbres ont t frapps de l'amnagement hydraulique de
ce gros bourg.
L'origine artificielle de ce dernier est encore dmontre par un
autre fait. Ds que le puits fut bouch et le rservoir vid, il fut
compltement abandonn. Actuellement pas de douar, pas de cul-
ture dans les environs. C'est la broussaille basse et inextricable qui
revt tout de sa teinte d'un vert sombre. En ce carrefour, les voya-
geurs devaient se reposer ou peut-tre passer la nuit. C'tait une
halte.
Et ceci est encore une indication dont nous pourrions profiter.
Les troupes qui vont de l'Enfida Zaghouan doivent, pour passer
la nuit mi-chemin, faire un crochet considrable qui les conduit
dans le site, d'ailleurs ravissant, de Battaria. Si nous avions eu,
comme je le prconise depuis 1889, la sagesse de consulter les rui-
nes, parfois si loquentes, et si nous avions t ainsi amens rtablir
l'hydraulique de Henchir el Hammimi, nos troupes, ou du moins
l'infanterie, eussent trouv ici l'eau ncessaire.
La voie romaine est trs apparente dans le voisinage avec son
empierrement form d'un simple cailloutis, et sa bordure constitue
par des pierres trs grosses.
Les numros 87 91 indiquent quelques ruines peu importantes.
Tout fait au bord de la route se dresse une tombe demi-cylindri-
que, et la piste elle-mme est traverse par un mur que l'on prendrait
pour le vestige de quelque aqueduc.
191

Au dessus et sur la rive droite de l'Oued el Hammam, une tran-


che couverte de broussailles entame l'arte du talus. C'est proba-
blement en ce point que passait la voie antique. La route descend
galement en tranche, quelques mtres en amont.
Feuille de Zaghouan. Au Sud-Est du numro 184, 50 mtres
au Sud-Ouest de la piste de Zaghouan-Enfida et hauteur
d'Ain-M'zikr, M. le lieutenant Nogu me signale des ruines qui ne
sont pas mentionnes dans l'Atlas archologique. Un mamelon est
couvert de vestiges sur 150 mtres d'tendue environ. Le point cul-
minant porte les restes d'une forte construction plan rectangulaire.
Un puits antique, quelques colonnes brises, une corniche d'un bon
profil indiquent que ce poste, situ sans doute le long de la voie
romaine, avait une certaine importance.
N. 23. Ruines tendues, vaste difice au sommet d'un mamelon,
vestiges d'enceinte , dit l'Atlas archologique. Ces ruines
reprsentent certainement un centre antique.
Elles ont t malheureusement dtruites et aussi presque enti-
rement rases pour la recherche de la pierre de taille. On peut
voir cependant qu'elles couvraient toute la colline sur une lon-
gueur de plus d'un kilomtre et descendaient ensuite jusque dans
le col o passe la route pour s'allonger sur la gauche de cette der-
nire pendant un trajet de 500 mtres. J'y compte 15 citernes plus
ou moins dtruites, dont un groupe considrable. Les murs de
l'enceinte dont parle l'Atlas archologique sont en plusieurs points
tablis sur des citernes. De belles dalles carres, qui ont d recou-
vrir la cour d'un difice public, gisent dans un champ, auprs de
colonnes en calcaire bleu vein presque marmoren de Zaghouan.
Il est possible qu'il y ait eu un difice considrable auprs de l'en-
ceinte sur le point culminant. La nuit tombait quand j'ai pu par-
courir rapidement ces restes, qui mritent d'tre plus attentive-
ment explors. Ce centre dfendait videmment l'entre du dfil
du Djebel-Oust vers le Sud. Le passage tait flanqu, en outre, par
des postes dont j'ai retrouv deux, l'est de la chausse au milieu
de la broussaille; ce sont de petites constructions rectangulaires sur
des pitons, avec une citerne.
L'autre extrmit du dfil prsentait aussi des ruines impor-
tantes.
Elles portent le numro 136 de la feuille d'Oudena, o elles sont
appeles Henchir Bab Khaled et sont ainsi dcrites dans l'Atlas :
192

Ruines tendues autour d'une carrire de marbre exploite


l'poque romaine. Porte monumentale (aujourd'hui dtruite).
Barrage, bassin de dcantation, citernes, petit temple avec
inscriptions.
Le petit temple avec inscriptions signal par M. Toutain doit avoir
subi le sort de l'arc de triomphe, car, dans le rapide examen que j'ai
fait de ces ruines, je ne l'ai pas aperu.
J'ai t frapp par la prsence d'assez nombreuses conduites
places dans les murs mmes des constructions et par le grand
rservoir, que soutiennent des contreforts, qui barre un ravin
dont il recevait et arrtait les eaux. (1)
N 48. Oudena. J'ai peu de choses dire sur une ruine aussi
connue et explore.
Le plan publi dans l'Atlas archologique par M. le Commandant
Driant porte l'indication de : "Dolmens?" auprs de l'amphi-
thtre. J'ai explor en dtail l'endroit indiqu et n'y ai vu que de
gros blocs de rochers. Comme on venait d'en extraire rcemment
plusieurs, j'ai pu avec certitude me faire une opinion ferme en
examinant des fouilles rcentes et si, comme c'est probable, dans
quelque temps ces blocs n'existent plus, il est heureux que le doute
qui aurait pu toujours planer sur l'existence de ces dolmens ne sub-
siste plus. La prsence de mgalithes en un point aussi
septentrional, loin d'autres groupes de monuments semblables et
prs de Tunis, et, en effet, t trs intressante.
En visitant ces jolies ruines si proches de Tunis, nos compagnons
et moi avons souvent regrett qu'on n'en fasse pas une Pompi.
C'est une uvre coteuse et de longue haleine, mais qui serait
certainement seconde par le propritaire d'Oudena, M. Ducroquet,
correspondant de notre Socit, ancien Directeur des finances tuni-
siennes, dont l'esprit clair et l'intrt qu'il porte aux recherches
archologiques sont bien connus.
Au moment o je me prparais pntrer dans les profondeurs
de la gigantesque crypte de la basilique (s'agit-il bien ici d'une
basilique et non de thermes, comme je le croirais volontiers ?) je
trouve une jolie et grande lampe chrtienne portant comme sujet
un lion passant droite, encadr dans une ligne de pastilles
en
forme de carrs.
Pendant une man uvre, mon poste de secours est install au
(1) Ces travaux hydrauliques ont t, je crois, tudis par M. le Lieutenant
Godin, (Enqutes sur les travaux hydrauliques etc., p. 78.)
193

pied mme du plateau qui porte la demeure de M. Ducroquet, et


en attendant le moment d'agir j'ai tout le temps d'en examiner les abords.
On considre gnralement comme une forteresse ou une citadelle les
votes considrables situes sur ce point culminant et qui portent de
modernes constructions. J'avoue n'avoir pas eu du tout,
ni cette fois-ci, ni quand j'ai visit les ruines d'Oudena pour la premire
fois, l'impression d'tre en prsence d'un ouvrage fortifi :
point de tours, de meurtrires, de bastions, de rduits. Bien au
contraire, il m'a sembl que ces salles votes s'ouvraient largement
sur le plateau qui leur sert de pidestal.
Une partie d'entre elles a t utilise comme magasins et dgage. Nous
avons la satisfaction d'y pntrer et d'admirer les nefs, rellement
surprenantes par leur tendue et leur hauteur qu'elles constituent.
Une norme corniche, en excellent tat de conservation,
en orne les parois. C'est cette saillie qui, dans le dessin de la salle
avant son dgagement qu'a donn M. Sadoux dans l'Atlas, parat
toute proche du sol. Elle en est actuellement 5 mtres environ.
Au dessous de ces vastes locaux qui, sans exagration, peuvent
tre compars la nef d'une cathdrale, on descend par un escalier
dans un vritable ddale de souterrains qui sont encore en grande
partie obstrus.
Remontant au jour, je photographie en passant un joli chapitean
corinthien en marbre blanc, et une corniche dans la cour de la
ferme, et je vais ensuite m'installer sur le point culminant, en avant
de l'habitation.
Tout en suivant des yeux la man uvre, je remarque mes pieds,
sur l'extrados de la grande salle vote que je viens de visiter, plusieurs
inscriptions en caractres bizarres.
Les pierres de taille qui les portent sont dispose en un demi cercle
et encastres dans le blocage. Elles correspondent sans doute un
mur courbe de mme forme situ au dessous ou qui s'levait au
dessus d'elles. Le croquis ci-contre montre la disposition des
caractres. En a sont deux lettres trs frustes, en b je l i s t r s di s -
tinctement une suite de caractres qui se rptent en c dans le
mme ordre et sur de lgres diffrences de forme. Les lettres ont de
6 8 centimtres de hauteur (voir fig. a-c, page suivante).
J'ai soumis le fac-simile de ces caractres, qui me semblent no-
puniques, M. Berger.
194

A la partie postrieure de la plate-forme, en I du plan, la lgende


de l'Atlas indique un monument trois absides.
Ces dernires me semblent
tre tout simplement des vo-
tes en cul-de-four destines
soutenir la masse de maon-
neri qui s'lve de l'autre
ct.
On se rend facilement com-
pte que les anciens ont con-
sidrablement modifi la for-
me de ce plateau. La plate-for-
me qui porte l'habitation et la
ferme semble compltement
artificielle. L'dification des votes puissantes dont il a t question
plus haut a exhauss le relief du sol en ce point d'au moins 10
mtres. Toute cette plate-forme, si imposante par sa masse, dispa-
ratrait si les votes taient supprimes. Il ne resterait que le petit
plateau qu'elles dominent, et sur lequel j'ai relev les dbris de
cinq normes colonnes canneles, rudentes, en un trs beau marbre
rose, jaune et violac.
Au-dessus du pont une arche situ en amont du ravin qui
contourne la ville, je note en passant et pour mmoire une petite
pice orne d'une mosaque ornementale dans laquelle on descend
par un escalier plac sur un de ces cts. Adoss une des parois
de cette salle est un rservoir circulaire, revtu de mosaques o
sont figurs des oiseaux, des serpents, des poissons.
Dans l'amphithtre, dont les cintres en grandes pierres de taille
font un si bel effet, je relve les caractres suivants gravs la
pointe, sur l'enduit d'un vomitorium (voir figure c ci-dessus).
La hauteur de ces signes est de 13 centimtres.

Dr. CARTON,
Prsident.
LA BIBLIOTHQUE DE LA S. A. S.

Ds la constitution de notre Socit, il fallait songer la cration


d'une Bibliothque, cet instrument de travail indispensable. Grce
la gnrosit de plusieurs membres, honoraires, actifs ou corres-
pondants, qui vint accrotre le produit de nos acquisitions, nous
emes bientt les lments srieux d'une Bibliothque qui ne
demande qu' s'enrichir.
Nous avons pens que c'tait bien la place, dans ce Bulletin mme, de
remercier les auteurs aussi gnreux que savants qui avaient bien
voulu nous faire don de leurs ouvrages. Puissions-nous nous
assimiler leur science !
C'est dans ce but de reconnaissance que nous publions le Cata-
logue de notre Bibliothque (1).
Cette publication doit avoir, en outre, son u t i l i t pour les membres
de la Socit qui trouveront dans notre Bulletin la liste des ouvrages
mis leur disposition, utilit bien plus grande pour les membres
correspondants qui ne peuvent pas venir sur place consulter le
Catalogue.
Il est admis, en effet, que les membres correspondants peuvent,
sous leur responsabilit et en se conformant notre rglement,
s'adresser M. le Bibliothcaire pour emprunter les ouvrages qu'ils
dsireraient compulser, sauf les rpertoires alphabtiques et les
publications priodiques qui doivent rester au sige de la Socit.
Nous publierons chaque anne, dans le Bulletin du second
semestre, un supplment ce catalogue. Les auteurs voudront bien
nous excuser de rompre ainsi avec l'habituelle Bibliographie des
Revues; mais qu'ils soient persuads que, sous cette forme modeste,
nos remerciements et notre reconnaissance ne perdront rien de leur
vivacit !
MARCEL CORDIER.

( 1 ) L'indication du don est faite, soit par la lettre D place en vue du nom de
l'auteur, soit par le nom du donateur inscrit en renvoi.
EXTRAITS DES PROCS-VERBAUX DES RUNIONS

9 juin 1903. M. le Prsident donne lecture de la lettre suivante de


M. Dubos, relative une dcouverte de dbris de
poteries en forme de couronne dans les environs de
Ouardanine.
Sousse, le 28 mai 1903.
MONSIEUR ET CHER PRSIDENT,
J'ai l'honneur de vous faire connatre que je
pos-
sde dans ma petite collection d'objets anciens neuf
morceaux de couronnes en terre cuite, dont huit
proviennent des enviions de Ouardanine, d'un mame-
lon situ au sud-est et environ 2 kilomtres de cette
ville.
L, dans les oliviers, gisent innombrables des frag-
ments de poterie, gnralement grossire. Mon atten-
tion a t attire par ces sortes d'anneaux, parce que,
nulle a u t r e part je n'en avais trouv. De plus, certains
de ces morceaux sont remarquables par des dessins ou
par des inscriptions simples tracs la main, alors
que la matire tait l'tat de pte. Les caractres
composant, ces inscriptions ne sont pas, je crois,
romains. (Ci-contre les reproductions).Dessins et ins-
criptions indiquaient peut-tre diffrentes fabriques(1).
A l'endroit o j'ai ramass ces intressants
dbris,
il y a tant de fragments de vases, de briques et
de
tuiles que j'ai pens qu'il s'y tenait soit un march,
soit quelque fabrique importante de terres cuites;
puis, il m'est venu l'ide que les couronnes dont je
trouvais des morceaux servaient de support de
grands vases sans pied, soit pour les faire scher avant
la cuisson, soit pour les placer isolment et mieux en
vue des acheteurs. On n'aperoit en ces lieux aucune
trace de four ; certaines places cependant le sol
est compos de matires noircies par le feu. Non loin
et plus bas, existe de l'argile potier, du moins la
surface du sol, sur une tendue approximative de
100 mtres carrs. J. DUBOS.
( 1 ) Deux de ces fragments semblent porter desr caractres puniques ou no-puniques,
sur l'un deux ou distingue nettement un sne. (D CARTON).
204

M. Dubos signale encore des cavits situes aux environs de Sousse et qui
lui paraissent tre des hypoges du genre de ceux du camp Sabattier.
Le capitaine Ordioni prsente la description de cinq statuettes, les plus
curieuses qu'il ait trouves dans ses fouilles si fructueuses du camp Sabattier
et de Sidi-el-Hani. L'une d'entre elles, d'une facture toute diffrente des
autres, a fait mme natre une discussion entre quelques assistants, au sujet de
son authenticit qui semble douteuse beaucoup d'entre eux.
13 aot. M. le Prsident fait connatre que la Socit est autorise
faire des fouilles aux ruines de Sidi Kantaoui. Il fait galement savoir que les
statuts de la socit ont t approuvs par l'autorit comptente la date du 12
Juillet.
M. le commandant Giorgi, secrtaire gnral de la Socit, fait part de la
dcouverte faite par un membre de la Socit, entre Sbetla et Thala, d'un
souterrain comprenant plusieurs chambres communiquant entre elles par des
corridors plan inclin.
17 septembre. M. le Prsident fait savoir que la Municipalit de Sousse a
accord une subvention de 500 francs la socit. De vifs remerciements sont
adresss M. le Prsident de la Municipalit.
Il est dcid que des fonds seront accords, suivant les ressources de la caisse,
diffrents membres de la Socit.
Le rglement sur les fouilles, prsent par M. le prsident, est approuv et
son insertion dans le registre des procs-verbaux dcide.
M. le Prsident signale deux dcouvertes qui ont t faites par deux
membres de la Socit.
M. Chevy vient de mettre jour, dans une villa romaine situe une petite
distance de la gare de Ksiba, deux magnifiques mosaques compltement in-
tactes. L'une d'elles, longue de 4 mtres, large de 2 mtres, aux couleurs vives et
cependant d'une grande harmonie, offre une srie de vases disposs en
quinconce, la faon des ornements de certaines de nos tapisseries. C'est un
motif assez rare et qui apporte un rel appoint l'tude des mosaques orne-
mentales.
L'autre porte en son milieu, un mdaillon circulaire de 0m 85 de diamtre dans
lequel est figure une tte de Mduse d'un excellent dessin. La large figure est
encadre d'abondants cheveux d'o s'lancent des serpents onduleux. La pice o
se trouve ce motif mesure 6m 80 de longueur sur 6m 80 de largeur et
l'intervalle qui s'tend entre le mdaillon et le mur est rempli par une srie
d'cailles alignes de manire former de larges rayons allant du centre la
paroi. C'est un motif original et qui fera un bel effet quand la mosaque, ap-
plique sur un mur, sera visible de loin.
M. Rietmann, secrtaire gnral adjoint, vient de son ct de faire une
dcouverte du mme genre, moins importante, mais qui mrite d'tre signale
en raison de l'intrt de l'objet trouv et du point o il a t rencontr.
205

Il s'agit d'une petite mosaque situe dans le territoire mme de Sousse, en


petits cubes de couleurs trs-vives, formant plusieurs cartouches situs
l'intrieur d'un rectangle et disposs eux-mmes en hexagone autour d'un
mdaillon central offrant des gerbes de feuillage de teintes varies. L'tat de
conservation de ce petit monument laisse malheureusement fort dsirer en
certaines de ses parties.
Le Prsident, aprs avoir prsent les cinquante-cinq ouvrages d'archologie
offerts la Socit par MM. Hron de Villefosse, Gauckler, Carton, et avoir
annonc l'acquisition du Cours d'pigraphie latine de M. Cagnat et du Dic-
tionnaire des Antiquits de Daremberg-Saglio, instruments prcieux de travail
qui seront trs utiles tous les membres, donne la parole M. Berra.
M. Berra prsente :
1 Une jolie statuette en terre cuite provenant d'El-Djem et
reprsentant le buste d'une femme coiffe d'un diadme ; deux
cercles rouges autour du cou figurant deux tours de collier (fig. l).
2 Une bague en bronze avec chaton
reprsentant en gravure un combat de coqs.
3 Une autre bague galement en bronze avec chaton repr-
sentant un guerrier tenant un-bouclier de la main gauche et
une lance de la main droite.
4 Une petite lampe romaine offrant ceci de particulier que l'anse a la
forme d'une main tenant la lampe, le pouce plac sur le ct, la
paume de la main au dessous du rcipient (fig. 2).
Dans un mouvement de gnrosit tout spontan, M. Berra
offre la Socit la plus jolie pice de sa collection, la statuette.
Le prsident le remercie en regrettant que la Socit ne puisse
accepter ce don pour l'offrir au Muse de Sousse, la demande
de dclaration d'utilit publique qu'elle a faite n'ayant pas
encore abouti. Il saisit cette occasion pour montrer de quelle
utilit cette dclaration serait pour la ville de Sousse.
Cette petite exposition a eu le plus vif succs et a provoqu
de nombreux changes d'ides. Aussi le prsident demande-t-il
aux membres de suivre l'exemple de M. Berra, et M. Argaut veut bien pro-
mettre de prsenter, la prochaine runion gnrale, un certain nombre
d'objets lui appartenant.
M. le Prsident dpose sur le bureau, de la part de M. Gresse, l'tude d'une
voie antique allant Hergla, dont le trac et les ponts ont t utiliss par la
route moderne qu'il a fait construire.
M. l'Abb de Smet, correspondant de la Socit, a galement offert la
Socit, la reproduction d'une vue de Mahadia en 1550 et a promis l'envoi de
toutes les vues de monuments antiques qu'il prendrait.
M. le Prsident remercie les gnreux donateurs de ces documents et fait
206

remarquer que, grce leur empressement, les archives de la Socit ne tarde-


ront pas devenir trs riches.
M. le docteur Carton signale la disparition des dolmens d'Henchir-El-Assel,
dans lEnfida, tudis jadis par M. le docteur Hamy et dont il a eu grand peine
retrouver quelques traces.
M. le Prsident donne lecture d'un mmoire de M. Ph. Berger, de l'Institut,
destin au Bulletin de la Socit et relatif deux inscriptions puniques qui ont
t trouves Henchir Sidi-Khalifat lors d'une excursion de la Socit. M.
Berger exprime le dsir de voir faire des recherches au point o ces stles ont t
trouves et M. le prsident dit qu'il ne doute pas que MM. C ytaux et Villaret ne
dfrent au dsir du savant orientaliste.
M. le Prsident invite ensuite les membres de la Socit aller voir oprer
dans la Halle aux Grains le mosaste du Muse du Bardo, venu Sousse pour
monter les trois belles mosaques trouves rcemment prs de Ksiba.
17 novembre M. le Prsident donne lecture de lettres ou de passages de
lettres relatifs la publication du Bulletin, lettres les plus flatteuses pour les
organisateurs. L'une mane de M. Gauckler, Directeur des Antiquits en
Tunisie, qui ne veut pas tarder fliciter le prsident d'avoir su "mener
bien, dans d'excellentes conditions, cette uvre intressante qui rendra de
prcieux services". M. Gauckler veut bien, en mme temps, annoncer l'envoi
de deux articles pour le numro 2 du Bulletin de la Socit.
D'autres loges ont t adresss la Socit par MM. Hron de Villefosse,
Mercier, Ducroquet, etc.,
Sur la proposition du prsident et la demande de M. Ang, on dcide de
publier le catalogue de la bibliothque. Tous les ans, la suite de ce catalogue
paratra dans le second numro du Bulletin.
Il est ensuite donn lecture d'une lettre signalant l'tat dans lequel se
trouvent les ruines dites : Hadjra Maklouba (Tour Eiffel). On y jette des im-
mondices qui les comblent et finiront par cacher les parties de l'difice qui ont
t mises jour.
Des dmarches seront faites auprs du propritaire du terrain pour mettre
un terme ces dprdations.
M. le Prsident cite, propos de ces ruines, l'opinion du savant allemand
Schulten, d'aprs laquelle Hadrumte aurait t le Derby, le Longchamp de
lAfrique ancienne. Toutes les mosaques reprsentant les chevaux de course le
prouvent. Il y aurait un intrt capital, aprs avoir sauv ces mosaques, mettre
jour les vestiges du monument o ces courses ont eu lieu, le cirque, seul
monument public d'Hadrumte dont on connaisse l'emplacement.
Il est souhaiter que les dmarches faites jusqu' ce jour et qui n'ont pas
abouti, pour obtenir l'achat du terrain par la Municipalit, russissent enfin.
Ds que les terrains seront mis sa disposition, la Socit procdera leur
dgagement.
M. le Prsident lit une lettre de M. Prvost, ingnieur en chef de la Cie de
207

chemin de fer Bne-Guelma, accompagnant l'envoi du plan de tous les murs et


constructions antiques trouvs lors de la construction de la nouvelle gare de
Sousse. On remarque surtout dans ces plans, qui sont mis sous les yeux des
membres, l'existence, sous la nouvelle gare mme des voyageurs, d'un vaste
bassin circulaire revtu de mosaques et entour de gradins.
A ce sujet, le prsident prsente les plans des travaux excuts rcemment
pour la continuation du buffet de la gare. M. le Prsident donne quelques ren-
seignements sur ces travaux qu'il a suivis au jour le jour.
La Socit exprime le dsir que tous les vestiges antiques trouvs au cours de
travaux excuter en ville, soient relevs et ports sa connaissance et elle
compte surtout sur ceux d'entre ses membres que leur profession met mme
d'tre le mieux renseigns sur ces dtails.
M. le Prsident fait ensuite circuler dans l'assemble une srie d'admi-
rables photographies reprsentant des monuments et des antiquits de Sousse.
Toute la Socit est unanime adresser de vifs remercments M. Robert,
officier d'administration gestionnaire de l'hpital militaire de Sousse, au talent
de qui sont dues ces belles vues destines l'Album historique de Sousse.
Il est donn ensuite lecture d'une lettre des plus intressantes de M. le
docteur Deyrolle annonant un grand nombre de dcouvertes de monuments,
inscriptions, etc., dues son activit et dont il promet la communication la
Socit.
La Socit est ensuite prvenue que des fouilles ont t entreprises pour son
compte par M. le Dr Carton et l'abb Leynaud dans les catacombes chrtiennes de
la ncropole d'Hadrumte. M. le colonel Galley de Saint-Paul a bien voulu,
une fois de plus, tmoigner sa bienveillance la Socit, en lui donnant les
moyens de poursuivre ces fouilles trs conomiquement et tous les membres
prsents sont unanimes lui en exprimer leur reconnaissance.
Revenant, sur ce qui a t dit de l'article de M. Schulten, un membre de la
Socit exprime le regret de voir qu'un savant aussi autoris se soit, au dbut
de son article, livr des allusions dsobligeantes l'gard de l'occupation de la
Tunisie par la France.
M. Dauphin prsente ensuite un joli dessin d'une tte de Gorgone reproduite
dans un mdaillon en haut-relief, au muse du Vatican et il attire l'attention sur
les points de ressemblance que cette tte a avec celle de la mosaque trouve
rcemment par M. Chevy, notamment le peu de hauteur de la moiti droite du
front recouvert par des cheveux et l'ingalit des deux ailes de la coiffure, celle
de gauche tant beaucoup plus courte que celle de droite.
M. le Prsident prsente ensuite un joli dessin d'une lampe fausse six
becs envoye par M. le capitaine Hannezo. Le sujet en est un taureau men au
sacrifice par deux hommes. Il mentionne une lettre de M. le capitaine Hannezo
annonant qu'il vient de dcouvrir des tombes puniques et romaines
Zaghouan. Reprenant l'ordre du jour, M. le Prsident donne la parole M.
Argaut pour prsenter quelques objets de sa collection.
208

M. Argaut prsente :
1 . Un buste en terre grise, haut de 0.16 c, de femme jeune d'une expression
charmante. Le vtement est noter en raison de deux banderoles qui passent,
l'une sur l'paule gauche lui formant un baudrier, l'autre tombant verticalement
(fig. 1 et 2 hors texte). La coiffure est trs intressante : cheveux onduls en avant
; en arrire tresss formant un chignon volumineux aplati verticalement.
2 . Un buste d'adolescent ou de jeune fille, en terre d'un rouge gris, haut de
0 14c ; cheveux courts et boucls, visage souriant, faisant un peu penser un
m

faune (fig. 3 et 4 hors texte).


3. Une lampe romaine de la premire poque sans anse, large bec orn de
deux volutes. Au revers : VICTOR.
4. Une autre lampe, d'un art remarquable reprsente Vnus ou une femme
romaine la toilette. Elle carte
son vtement de la main gauche
et relve son abondante cheve-
lure de la main droite. A sa
droite est un dieu terme barbu;
sa gauche un amour l'aide
carter son vtement ; droite
deux petits amours voltigent,
l'un tenant un miroir ou un
vanfail, l'autre lui prsentant
un stylet ou une flche, un
oiseau droite, probablement
une colombe. L'excution de ce
sujet est des plus remarquables.
Le model des formes et la
finesse des dtails sont admira-
blement traits et ne perdent
mme pas la loupe (figure
ci-contre.
5. Un coq en terre grise haut
de 0m 11c de facture grossire
avec un trou d'vent sur le dos.
6. Une lampe queue perfo-
re encadrement de pampres.
Sujet : Berger trainant une chvre l'ombre d'un arbre. Remarquable par
ton excution.
7. Un petit vase dcanter de 0m21c en terre grise d'un type assez commun dans
le pays. La rainure du bec n'y est indique que par une ligne creuse.
Traces de peinture rose. Du ct oppos au bec sont, sur le rebord, deux trous
Buste d'adolescent ou de jeune fille
(Fig. 4 de renvoi au texte page 208)
209

de suspension. Une discussion s'engage au sujet de ces trous que M. Chevy


dit exister sur les trois plats de ce genre qu'il possde ; on ne voit pas quelle a
pu tre leur destination.
8 . Deux petites poteries, l'une en terre brune, l'autre en terre rouge
hautes de 0m05c, d'un modle rare et probablement punique.
9. Un vase une anse, en poterie trs fine et trs dure; remarquable par
l'enduit trs brillant qui n'en revt que la moiti suprieure. M. le docteur
Carton dit en avoir trouv un de mme forme, mais bien plus grand, dans le
sanctuaire punique d'El Knissia, remarquable aussi par la prsence d'un vernis
circulaire dans sa seule moiti suprieure. A El Knissia le vase renfermait
des ossements d'animaux sacrifis.
10. Un joli petit enguentarium trs curieux par la courbure de sa tige qui le
fait ressembler un porte-fleurs.
11. Une statuette de Vnus pudique tenant un coin de son voile sur le bras
droit ploy et le ramenant de la main gauche sur le corps pour se couvrir
accoste aussi gauche d'un amour cheval sur un dauphin. Type assez
rpandu. M. Carton remarque la coiffure caractrise par une crte situe vers le
sommet de la tte, mode qu'il a rencontre sur une des statuettes trs parti-
culires par leur facies dans le souterrain d'El Knissia.
Sur la proposition du Prsident, il est dcid qu'une mdaille bisannuelle
sera dcerne, lors de la sance solennelle, l'auteur du meilleur travail paru
dans le Bulletin ou de la fouille la plus importante faite pour le compte de la
Socit.
26 novembre. M. l'abb Leynaud donne des renseignements sur les fouilles
qu'il dirige avec M. le docteur Carton dans les catacombes d'Hadrumte. Il
semble qu'on soit en prsence d'une vritable catacombe. De chaque cot d'un
couloir, il y a de trois cinq ranges de corps dposs dans des loculi ferms
par des tuiles. Celles-ci portent le nom du dfunt avec la formule : In pace ou
Cum pace. Cela rappelle tout fait les catacombes de Rome et il semble qu'il y
ait l un ensemble trs remarquable qu'il sera des plus intressants de visiter.
La Socit va prendre ds maintenant des mesures ncessaires pour protger
ces restes et laisser les corps en place.
On dcide de placer quelques vitres devant les caveaux pour en laisser voir les
squelettes. Pour protger ces restes, en somme assez fragiles, l'entre des
catacombes sera rigoureusement interdite toute personne non munie d'une
autorisation.
M. Rietmann signale l'existence d'un stock de monnaies romaines en
argent qui a t vendu cette semaine Sousse plusieurs personnes et qui
proviendrait d'Hammam-Lif o on en aurait trouv un trs grand nombre.
Ces indications sont soumises M. le capitaine de Bray qui veut bien se charger
de faire connatre les rsultats de son enqute, s'il y a lieu.
M. de Bray prsente ensuite une jolie monnaie en or d'Honorius qui lui a
t communique par M. Rietmann.
210

3 Dcembre. M. le docteur Carton fait savoir que les ouvriers qui tra-
vaillent, la route longeant le ct Sud du camp et de l'Hpital militaire pour
aboutir peu prs en face de l'avenue Boucher ont trouv, dans un monticule
form de dbris et renfermant encore les restes d'une citerne, plusieurs pierres
de taille, dont l'une, en calcaire bleu, mesurait : longueur 0.90, hauteur 0.40,
paisseur 0.24 et portant l'inscription suivante :

A E M

La hauteur des deux premires lettres est de 0.10 et celle de la troisime


lettre de 0.19.
Cette dcouverte confirme ce qu'a fait remarquer M. le Prsident au cours
de la dernire promenade archologique sur les restes de toutes les construc-
tions des environs d'Hadrumte qui ne sont plus reprsentes que par des
monticules renfermant des particules calcaires, de la caillasse et des tessons.
Au mme endroit a t trouve une lampe romaine brise, des fragments
de mortier peint dont l'un portait la reprsentation d'une rose, semblable tout
fait celle de la ncropole du camp Sabattier. Ces dtails joints la disposition
des lettres font croire au docteur Carton qu'on est en prsence des restes d'un
mausole et que la ncropole romaine s'tendait jusque-l. Le monticule
prsente, ras du sol, la coupe d'un mur de blocage de cinq mtres de ct
formant un carr, restes probables du mausole ou de l'enceinte d'une petite
ncropole prive.
17 Dcembre. M. le prsident prsente deux jolies
lampes puniques aileron latral unique, non
delphini-formes, portant la base du bec une estampille
figurant le triangle dit de Tanit que M. le capitaine
Hannezo vient de trouver dans la ncropole punique de
Zaghouan. Ces deux objets sont remis M. le
capitaine de Bray pour tre placs la Salle d'Honneur
du 4e tirailleurs.
Il prsente ensuite de magnifiques dessins faits la
plume par M. le capitaine Thvenin et M. Causse qui
toute l'assistance a vot de chaleureuses flicitations.
M. Carton met sous les yeux des membres prsents une
reproduction de la grande plaquette en argent grave par Mercier et frappe la
Monnaie de Paris qu'il offre la Socit pour rcompenser le membre qui par
ses travaux aura t le plus utile l'archologie.
M. le commandant .Giorgi, secrtaire gnral, en l'absence des vice-prsi-
dents, adresse M. le docteur Carton ses plus vifs remerciements au nom de la
Socit pour son offre gnreuse et spontane. M. le capitaine Montalier,
membre actif, prsente quelques spcimens de lampes qui proviennent de
Sbetla, et lit la note suivante :
211

FOUILLES DE SBEITLA

Les quelques lampes prsentes la Socit archologique de Sousse pro-


viennent des recherches faites Sbetla en septembre 1903. Celles qui ont paru
tre les plus intressantes sont dcrites ci-dessous :
1. Lampe romaine de la premire poque, sans queue, bec volutes, poterie
assez fine, couverte brune, sujet : Sanglier courant droite. Au revers :

A vR
2. Mme lampe que la prcdente, terre fine, sujet : Guerrier tenant dans sa
main gauche une lance et un bouclier ; dans sa main droite : un casque ?
3. Epoque de transition : lampe queue perfore. Bec large volutes, terre
fine, couverte brune, sujet : Diane tendant son arc. Au revers:

C. OPPI .
RES

4. Lampe typique. Queue perfore, bec ordinaire, pas de trace de couverte,


terre rouge, assez fine, sujet : Personnage tenant une grande amphore ; peut-
tre un potier ou un esclave portant du vin. Au revers :

M TMARI

5. Lampe grand modle, queue perfore, deux petites saillies sur les bords
et la face suprieure, lgre couverte rouge, sujet : quatre chevaux tranant
un char funbre. Au revers :

M NOV GERM

6. Jolie lampe, queue perfore, bec gracieux et orn de volutes, sujet :


Diogne et sa lanterne? Personnage portant une cage ? un brle-parfums ?
7. Lampe queue perfore, couverte ocre, orne de lobules sur son pour-
tour. Au revers :
L DOMITIA

8 . Lampe queue non perfore, en terre brune, couverte jauntre, bordure


forme de rayons, sujet : chasseur combattant un sanglier l'pieu. Au revers :
sur les cts ornements en forme d'U tourns en haut.
9. Grande lampe queue non perfore, couverte rouge, terre grise, mme
sujet que la prcdente. Au revers : une toile forme par des t r a i t s placs
comme les rayons d'une roue.
10. Lampe chrtienne, queue pointue orne de six feuilles disposes en
cercle autour de l'unique trou. La feuille la plus rapproche du bec porte une
palmette suivant son axe ; traces trs nettes de noir de fume autour du bec.
212

Au revers : Gracieux rameau avec feuilles appliques symtriquement sur le


bec. Palmettes sur le front et sur les cts.
11. Lampe chrtienne, l'anse promine en arrire formant une espce de
talon-encadrement de palmettes, deux trous, sujet : Personnage coiff d'un
bonnet et regardant gauche. Au revers : Palmettes au centre, rinceau la
base du bec, gouttire sur la base de la queue.
24 dcembre. M. le Prsident donne lecture de deux lettres de M. le
lieutenant Jouanne, correspondant de la Socit, dont la premire est relative
une monnaie et la seconde un moule en argile :
Bizerte, le 10 dcembre 1903.
Ne m'occupant gure que de pices, c'est sur une monnaie que je vais
essayer d'intresser les lecteurs du Bulletin de la Socit.
La monnaie dont voici le dessin, a t trouve
en 1902 par un tirailleur de ma compagnie dans
le jardin potager du 4 e tirailleurs Sousse. Elle
est en bronze, une belle patine verte lui donne
l'aspect si apprci par les numismates.
L'avers reprsente une tte de face, barbue, se rapprochant de celles qui
figurent sur les pices mal frappes des derniers empereurs byzantins. Cette
tte peut galement tre prise pour celle de Baal.
Le revers prsente des caractres coufiques ou arabes.
D'o vient cette pice ? A qui l'attribuer ? La religion judaque et la religion
musulmane dfendant de reprsenter des figures humaines sur des monnaies, ces
races doivent tre cartes M. Gauckler, directeur des Antiquits en Tunisie,
consult, donne l'avis suivant : Cette pice doit remonter aux premiers temps
de la domination arabe, au moment o les nouveaux conqurants, torts habiles
politiques, se voyaient obligs de mnager les transitions ncessaires pour faire
accepter plus aisment leur joug par les anciennes populations africaines.
M. de Villenoisy, sous-directeur du Cabinet des mdailles la Bibliothque
nationale de Paris, charg par M, Babelon, directeur de ce service, d'une
enqute relative cette pice, donne l'avis suivant :
Elle pourrait tre ortokide, les princes de ces diverses dynasties ayant
imit de nombreuses monnaies anciennes ou trangres. Leurs pices ont une
face entirement arabe, l'autre est une copie forte exacte d'une pice
d'Alexandre-le-Grand, des rois de Syrie, des Ptolmes ou d'empereurs
byzantins. Elle pourrait aussi appartenir la numismatique si complique du
nord ou de l'ouest de l'Inde . Cette dernire hypothse, mon avis, semble
devoir tre carte.
La ressemblance de la figure avec celles reprsentes sur quelques pices du
bas empire byzantin et les caractres coufiques ou arabes du revers, m'ont
fait classer cette monnaie dans la srie ortokide.
213

Si quelque socitaire pouvait m'clairer plus compltement, je serais heureux


de sa communication.

Recevez, etc.

Je me permets de vous adresser une deuxime note. Elle est relative un


moule en argile trouv Bizerte.
La pice tant rare, je vous soumets dessin avec avis de M. Gauckler.
Ce petit moule a t trouv dans une carrire aux portes de Bizerte. Des
Italiens extraient du tuf et le pulvrisent pour leurs constructions. Ils avaient
mis jour quelques tombes, vastes trous cubiques munis d'un puits pour y
descendre, en moyenne 3 ou 4 mtres du sol actuel.
Quelques poteries et quelques monnaies de Tibre leur avaient t achetes
par moi.
Un dimanche je mis rendis avec un tirailleur
qui au premier coup de sa baonnette dans un
coin de la carrire sentit son arme pntrer dans
une cavit. C'tait une tombe aussi pauvre que
celle dj mise jour. Cependant nous y,
trouvmes ce moule, quelques monnaies du
premier sicle compltement ronges et des
dbris de pierres transparentes blanches rayant
le verre. Trois de ces pierres n'ont pas t tra-
vailles ; deux l'ont t.
Je crus que ce moule, qui devait servir un gaucher, tait un moule tte
de statuette. Je fis part de ma trouvaille M. Gauckler en le lui offrant. Voici
l'avis qu'il a mis :
D'aprs ma dernire description, il attribuait ce moule la fabrication de
mdaillons. Mais dans la lettre o il m'accuse rception de l'objet, il m'annonce
que la pice est d'une certaine raret, qu'elle servait relier les anses d'une
amphore l'amphore elle-mme et qu'elle reprsente la tte d'Ammon.
Ce moule a t dpos au muse du Bardo dans la salle Delcass.
Voil, M. le Prsident, le compte-rendu de ma trouvaille. Si j'avais la
chance de trouver quelque chose dans ce genre, je me ferais un plaisir de vous
l'envoyer pour le muse de Sousse ou pour tout autre usage que vous jugeriez
utile.
Recevez, etc. Lt JOUANNE, Correspondant.

COMMANDANT GIORGI,

Secrtaire gnral.
EXCURSIONS ET PROMENADES

Sidi Kantaoui

Les ruines de Sidi-Kantaoui, situes 8 kilomtres au Nord de Sousse,


avaient t signales par M. le Secrtaire gnral Giorgi la runion gnrale
du 5 mars. Elles furent ensuite, de la part de M. le D r Carton, lobjet d'une
tude sommaire, lue en runion gnrale, qui dcida la Socit s'y rendre en
excursion. Le 7 juin, 4 heures, les membres de la Socit taient runis sur le
vaste plateau, situ au Nord de l'oued Hammam-Sousse, d'o l'on a une vue
remarquable sur toute la rgion, de Monastir la presqu'le du Cap Bon. Aux
pieds mme du plateau vers la mer, s'tend une vaste plaine fertile, pays de
cultures et de jardins.
Le Prsident, qui dirige l'excursion, appelle l'attention sur un monticule
peu loign, o a d tre quelque poste antique, commandant peut-tre la
voie de Carthage Hadrumte. Il dit aux Membres qui n'ont pas le temps de
visiter ces ruines qu'il y a l une construction carre dont les murs d'enceinte
sont adosss des citernes, ce qui semble indiquer quelque tablissement
fortifi.
Des restes de construction semblent, parait-il, l'attester et la situation
comporte cette hypothse. Le marabout de Sidi-Kantaoui est non loin de ces
ruines.
Aux bords du plateau, environ 300 mtres au Nord-Ouest du marabout,
on visite une ruine en partie ensevelie dans des cactus. Il y a l des murs, des
enduits. Un trs grand plat rond, sorte de patera de 1 mtre 20 environ de
circonfrence, est mis au jour par le Prsident ; malheureusement ce plat,
quoique entier, n'est retir qu'en un trop respectable nombre de morceaux.
Mais la Socit arrive au monument qui est le clou de la promenade.
Il n'a fallu pour cela que descendre de quelques cinquante mtres sur le
flanc du plateau, entrer dans les oliviers, pour se trouver en prsence de la
ruine principale, remarquable par ses votes, ses demi-coupoles plein cintre.
Voici des pices bizarrement agences, des pans de murs levs dont les sur-
faces sont angles trs aigus les unes par rapport aux autres et surtout une
vritable dbauche de demi-coupoles revtues de ciment de tuileaux, des citer-
nes, etc., etc.,
On note des dbris de fresques et quelques cubes de mosaques.
Extrieurement, de ci de l, un enduit trs rsistant, o sont simuls des
215

joints ; en ces endroits la couleur de l'appareil est d'une belle teinte


jaune-roux ; c'est le hle du temps, des sicles...
Le Commandant Giorgi trouve prs d'un mur une petite monnaie antique
en bronze, qui sera nettoye pour tre lue.
En somme, trs curieux, trs trange difice ; disons mme, jusqu' prsent
incomprhensible. Il faudra que la pioche aide dvoiler le mystre. (1)
A moins de cent mtres est un autre difice, moins important, mais plus
lev ; le mur principal a sept mtres de haut et comprend une vote en berceau
dont la circonfrence est grand rayon et sur le ct de laquelle se trouve une
ouverture intacte seulement par le haut, qui a pu tre une sorte d' il-de-b uf.
Du mme ct est une citerne et du ct oppos... un four chaux arabe. Une
grande partie de cette ruine a d passer dans ce four et elle y passera tout
entire, si on n'y met ordre. Un tas de pierres provenant de la dmolition d'un
mur est l, toutes frachement brises.
La petite troupe revient au plateau d'o elle tait partie ; tout, prs d'un
puits arabe, est un tombeau antique form d'un norme caisson demi-cylin-
drique semblable ceux de quelques-uns des tombes du camp Sabattier. Il a
plus de trois mtres de longueur et prsente cette particularit d'avoir deux
gradins. En revenant, le directeur de l'excursion fait remarquer que le plateau a
d porter de nombreuses ruines. Mais depuis des annes on y extrait d'in-
nombrables pierres ; aussi, les ruines elles-mmes ont-elles disparu et je l'en-
tends, se remmorant les mots nergiques de Lucain racontant la visite de
Csar aux ruines de Troie : " Etiam periere ruinae ", les ruines mme ont
pri !...
En passant, nous remarquons un barrage rectiligne en grosses pierres
sches, plates, plantes dans le sol, qui coupe un vallon " meska " dont l'eau, par
temps de pluie, arrose des oliviers plants plus bas. La rectitude de ce barrage
ne permet pas de le rapprocher de ceux que font les Arabes ; il doit tre trs
ancien et aboutit, en outre, un petit monticule conique lev sur

(1) Lensemble du plan semble constitu par une espce de grande salle ou de cour
sur laquelle souvriraient plusieurs de ces absides ou demi-coupoles et laquelle sont
accoles dautres salles. Il y a lieu de noter lpaisseur du ciment tuileaux
qui,
extrieurement, recouvre celles-ci et la grosseur des fragments rouges qui entrent
dans sa composition.
A l'angle Sud-Ouest on voit demi enfouie l'ouverture d'une porte ou d'une fentre,
d'une conservation remarquable. La pice attenante cette ouverture prsente des traces
de remaniements et de reconstruction. Elle est couverte par une vote d'arte que
constituent deux votes en berceau se pntrant, mode de construction trs ancien.
Toutes les votes disposes en hmicycle autour du nymphaeum de Zaghouan ont cette
disposition. Et les Arabes l'emploient encore trs frquemment de nos jours. J'en ai vu de
trs remarquables exemples Nabeul o beaucoup de maisons sont couvertes de cette
manire. En somme il me semble qu'il s'agit ici de quelque glise ou de thermes remanis
peut-tre ultrieurement l'poque arabe.
(Dr CARTON).
216

un des flancs du vallon, qui doit tre le vestige de quelque monument difi
l'extrmit de ce barrage.
Un peu plus loin, toujours sur le plateau, nous remarquons de nombreuses
traces d'anciens murs d'enceintes, divisions de proprits, prouvant que ce
sol, nu, dsol, maintenant, avait autrefois de la valeur et portait des rcoltes.
ED. RIETMANN Secrtaire
gnral adjoint.

Sousse
Octobre 1903. Aprs un long repos impos par les chaleurs estivales, la
S. A. S. reprend ses excursions et ses promenades habituelles.
C'est au pied de la vieille Casbah d'Hadrumte qu'une quinzaine de membres
se sont, donn rendez-vous, sur le Monte Testaccio, nom donn cette colline
par M. le Dr Vercoutre en raison de l'amoncellement de tessons antiques qui
constitue ce mont et par analogie avec un amas de ce genre connu Rome sous
cette dnomination.
Les promeneurs constatent avec une vive satisfaction tous ces intressants
dbris de tessons orns de dessins, de reliefs, en terre fine, en os, en verre, etc. M.
le Docteur Carton a rcolt, diffrentes reprises, plus de quatre-vingt marques de
poteries sur le fond de vases trs lgants, des aiguilles en os, deux ttes de
statuettes, etc. De petites dcouvertes qui viennent d'tre faites ne tardent pas
montrer combien est productif ce champ d'antiquits. Voici une poterie o l'on
voit une jolie tte aux cheveux crpus ; un dbris de lampe trouv par M. le
capitaine Grillet porte un cerf; M. Mattei dcouvre un fragment d'estampille de
potier et une de ces curieuses charnires en os qui ont si longtemps intrigu les
archologues, tout cela en quelques minutes.
La plupart des membres admettent que l'origine de ces amas de tessons
provient de l'habitude qu'avaient les habitants d'Hadrumte de jeter leurs
immondices aux pieds du mur de la ville, comme le faisaient encore, il y a peu de
temps, leurs successeurs de Sousse.
Aprs un coup d' il de curieux rservoirs d'origine punique qui
transmettent la Sofra les eaux de pluie et dont M. le Vice-prsident Gresse
explique le fonctionnement, nous nous dirigeons sur la tour Sud-Est de
l'enceinte pour examiner quelques curieux bas-reliefs. L'un d'eux, le plus lev,
grav sur une pierre, semble offrir un lion attach par une chane un palmier.
L'autre reprsente aussi un lion, mais grav la faon des animaux figurs
dans les tableaux arabes.
Remontant ensuite vers la porte du Sud, les promeneurs se dirigent vers la
place du Djebenet-El-Rourba, petit coin pittoresque avec ses nombreuses
koubbas renfermant les tombeaux et les restes de vnrables marabouts.
217

A quelques pas de l, par une porte entre-baille, nous pntrons dans un


tablissement qui est la fois une fabrique de poteries et un moulin huile. De
hautes salles votes, trs sombres, renferment des cuves, des auges, des
rouleaux en pierre. Dans une longue salle, un gigantesque levier en bois qui ne
mesure pas moins de vingt mtres de long, mu par un norme pas de vis. C'est
l'ancien torcular. Ce pas de vis repose sur un norme chapiteau composite ou
romain, admirablement fouill qui n'a pas moins de 0m 80 de hauteur sur 0m 60
de diamtre.
Un autre chapiteau, mutil, offre un intressant exemple de la manire
dont les Arabes ont adapt leurs gots les ruines qu'ils ont exploites. D'ordre
corinthien, il a toute sa partie suprieure ravale et retaille. Les feuilles
d'acanthe, les vases, les caulicoles, sont remplacs par de maigres volutes
comme celles qui ornent certains chapiteaux arabes. De plus, au lieu d'tre
prismatique, cette partie suprieure est arrondie et les arabesques n'ont plus
d'angles, ce qui indique le remaniement d'une faon certaine. Il serait int-
ressant de prendre un croquis de ce curieux exemple de transformation. Les
nombreuses poteries prpares pour la cuisson qui remplissent la cour attirent
aussi l'attention des visiteurs par l'analogie de forme qu'elles prsentent avec
les produits de la cramique romaine et punique.
La petite caravane, aprs cette intressante visite, s'arrte un instant au
Kaouat-el-Koubba, install dans une antique mosque ou dans une basilique
chrtienne, on ne sait au juste. La coupole de ce monument, dcoupe en
ctes profondes avec alternance de grandes et de petites niches, nous laisse
bien perplexes.
Aprs avoir dgust un kaoua, nous dirigeons nos pas vers le Ksar-Er-Ribat
dont l'aspect extrieur n'a rien de bien particulier. L'entre est saisissante. A
peine le seuil est-il franchi que se prsente nous un escalier raide, mais les
marches sont larges. Il semble que l'on entre dans un souterrain. De belles
colonnes canneles portant de ravissantes consoles arabes ou byzantines l'en-
cadrent. C'est frique. Un peu plus loin, dans la cour toute blanche, un
grand portique aux longues enfilades de cintres prcde les portes d'une mul-
titude de chambrettes ; o sont les moines qui ont, peut-tre, marmott de
longues prires dans les ouvertures immenses des arcades ? Nous gravissons une
grande tour cylindrique du haut de laquelle nous jouissons d'une merveilleuse
vue sur toute la ville.
D'ici le plan du monument apparat bien nettement. Il est carr ou presque
cantonn de tours aux angles et au centre de chaque face, disposition qui
parat bien tre byzantine et il semble bien que le monument remonte cette
date quoique, ainsi que le fait remarquer M. le D r Carton, les tours rondes
soient plutt l'exception dans les constructions byzantines d'Afrique.
218

La campagne d'Hadrumte
Novembre 1903. Favoriss par un temps couvert propice ce genre de
promenade, un groupe de Socitaires de la S. A. S. se runissent prs du cimetire
franais et isralite. On examine d'abord un point qui, d'aprs les fragments de
jolies poteries romaines trouves par plusieurs membres, parat devoir donner des
fouilles productives, et o il semble y avoir eu jadis la fois une ncropole et un
four potier. Puis les promeneurs se dirigent vers le champ de courses actuel o
l'on relve, ras du sol, deux massifs de maonnerie qui sont les restes de
rservoirs ou de tombeaux. Une grande citerne en berceau avec deux
compartiments, trs profonde, est indique par M. le docteur Carton. M. R.
Terras signale au fond de cette citerne les restes d'une mosaque en couleurs
tombe l'intrieur, mais qui devait autrefois revtir l'extrados de la vote;
cette construction est au Nord du champ de courses.
Toujours dans ce dernier, mais au Sud, les promeneurs aperoivent encore
plusieurs monticules blanchtres qui sont videmment les restes de villes ou
de fermes.
M. le docteur Carton nous fait remarquer que, dans celte partie des environs
de Sousse, la plupart des ruines ne sont plus reprsentes que par un monticule
plus blanc que le sol voisin, blancheur due certainement aux particules de
chaux provenant de la dmolition, comme le lui ont montr plusieurs re-
cherches,
Un peu au del du point o s'est arrte la Socit, un monticule dominant un
vallon prsente une ruine tendue de 50 80 mtres de ct, avec une enceinte
paraissant cantonne de tours. Une chambre elliptique revtue d'une mosaque
murale dont le bandeau est form de deux torsades aux couleurs trs vives, une
autre chambre avec une niche o tait une statue ou quelque missorium, divers
autres puits, un bassin revtu de mosaques, deux autres bassins ciments,
diffrentes pices, des portes et des fentres font de ces ruines un ensemble des
plus intressants sur la destination desquelles s'vertuent discuter les
socitaires : basilique chrtienne, temple, bain, etc.,
A 30 mtres au sud s'lve une construction norme, massive, de 6 8
mtres de ct en blocage, dont la partie suprieure formait terrasse. Est-ce
une tour ou bien les restes d'un mausole ou d'une p o r t e ttrastyle ?
Il serait trs intressant de faire des fouilles au pied de cet difice, qui
malgr l'tat avanc de destruction qu'il prsente, est certainement un de
ceux de la rgion qui sont les plus apparents.
Il y avait ici un centre trs important, quelque riche villa sans doute, quelque
castellum pensent plusieurs touristes, et l'tude de ce point semblerait devoir
tre des plus fructueuses. Souhaitons qu'un des membres de la S. A. S.
l'entreprenne.
COMMANDANT GIORGI.
Secrtaire gnral.
TABLE DES MATIRES

PAGES
Statuts ...................................................................................................... 3
Liste des Membres de la Socit .............................................................. 9
Rcompenses honorifiques........................................................................ 14
Extraits des procs-verbaux des runions (1 er semestre) .......................... 19
(2"'e semestre) ................... 203
Excursions et Promenades :
Henchir Zembra (P. CHEVY). ........................................................... 23
Henchir Sidi-Khalifat (Docteur CARTON) ........................................ 26
Sousse (Docteur CARTON).................................................................. 32
Sidi-Kantaoui (E. RIETMANN) .......................................................... 214
Sousse (Commandant GIORGI)........................................................... 216
La Campagne d'Hadrumte (Commandant GIORGI) .......................... 218
Note sur une inscription de Thysdrus (HERON DE VILLEFOSSE) .............. 35
Note sur le prix des funrailles chez les Romains (CAGNAT).................... 42
A l'Amphithtre de Carthage (R. P. DELATTRE) .................................... 45
Aperu de la ncropole de Siagu (Lieutenant NOGU) .................... ...... 51
Une trouvaille de mdailles romaines du IIIe sicle (Capitaine De BRAY). 52
Les haouanet du Djebel-Behelil (Docteur DEYROLLE) .............................. 59
Inscriptions de la Colonia Tuburnica (Docteur CARTON) ........................ 69
Notes sur les collections du 4e Tirailleurs (Capitaine ORDIONI) .............. 73
Empreintes d'intailles, de cames (Instructions) (RIETMANN) ................. 77
Notes historiques sur Sousse (Commandant HANNEZO).......................... . 80
Note sur des Inscriptions no-puniques de Henchir Sidi Khalifa
(BERGER).......................................................................................... 133
Le Metallum Siguense (Stphane GSELL) ................................................. 135
Notes sur un cimetire paien dcouvert aux environs de Souk-Ahras
(Docteur ROUQUETTE) ....................................................................... 140
Les stucs reliefs d'Henchir Zembra (CHEVY)........................................ 147
Les origines de la ville d'Oran (Paul PALLARY) ...................................... 152
A propos d'intailles antiques trouves en Tunisie (Docteur VERCOUTRE) 159
Fouilles de la ncropole romaine de Dar-bel-Ouar (L. ROBIN) .............. 164
Les haouanet d'El Harouri (Docteur DEYROLLE) ..................................... 166
Note sur les ncropoles anciennes de Bizerte (Commandant HANNEZO). 171
220

Annotations l'Atlas Archologique de Tunisie : PAGES

(Docteur DEYROLLE). I. Feuille de Grombalia............................ 175


II. Feuille de Grombalia .......................... 176
III. Feuille de Kelibia .............................. 178
IV. Feuille de Menzel-bou-Zelfa............... 179
(Commandant HANNEZO). V. Notes sur les ruines marques
Mgalithiques sur la Carte des environs de Bizerte au 50000m. 181
(Docteur CARTON). VI. De Sousse Oudena par Battaria .......... 182
Catalogue de la Bibliothque de la S. A. S. (Marcel CORDIER) .............. 195

TABLE DES GRAVURES

PAGES
Ncropole de l'Oued Keceb ..................................................................... 58
Haouanet du Djebel-Behelil ........................................... 60-61-62-63 66-67
Statuettes et lampes (collection du 4e Tirailleurs) ................................ 74-75
Stucs reliefs de Henchir Zembra ................................................... 148-150
Haouanet d'El-Harouri .......................................... .......................... 158-170
Ncropoles anciennes de Bizerte................................................ 171-172-173
Khalloua de Sidi-bou-Zekhi.................................................................... 175
Hanout de Sidi-Messaoud ....................................................................... 177
Polissoirs de Kelibia ................................................................................ 178
Menhir de Fortuna .................................................................................. 179
Fragments de silex de Fortuna................................................................ 180
Inscriptions d'Oudena ............................................................................. 194
Dbris de poteries en forme de couronnes ............................................... 203
Statuette en terre cuite d'El-Djem .......................................................... 205
Lampes romaines ........................................................................ 205-208-210
Bustes divers (hors-texte) ........................................................................ 209
Monnaies et moules monnaie........................................................... 212-213

IMPRIMERIE FRANAISE, PLACE PICHON. - SOUSSE


SOCIT ARCHOLOGIQUE DE SOUSSE
(1) M.F= membre fondateur ; H. = membre honoraire.- En cas dinexactitude
ou domission dans cette liste, on est pri den aviser M. le secrtaire gnral.
10

9. Acadmie d'Hippone, Bne.


10. Socit Archologique de Constantine.
11. Socit d'Archologie de Bruxelles.
12. Socit Archologique de Montauban.
13. Socit Archologique du Finistre, Quimper.
14. Socit des Etudes du Midi, Toulouse.
15. Socit Archologique de Provence, Marseille.
16. Socit des Etudes Provenales, Aix-en-Provence.
17. Smithsonian Institution, Washington (Etats-Unis).
18. Socit des Antiquaires de la Morinie, Saint-Omer.
19. Socit de Gographie d'Alger et de l'Afrique du Nord, Alger.
20. Socit Littraire, Historique et Archologique, Lyon.
21. Revue Tunisienne (organe de l'Institut de Carthage), Tunis.
22. Socit Nationale des Antiquaires de France, au Louvre, Paris.
23. Comit des Travaux Historiques et Scientifiques au Ministre de l'Ins-
truction publique, Paris.

DISTINCTIONS ACCORDES AUX MEMBRES DE LA SOCIT

Lgion d'Honneur
Officier
M. le Commandant TARDIEU, du 4e Tirailleurs.
Chevalier
M. le Sous-intendant militaire BERTRAND, Gabs.
Officiers de l'Instruction Publique
M. GOUVET, Architecte municipal, Conservateur du Muse Sousse.
M. HANNEZO, Chef de Bataillon au 144e de Ligne Bordeaux.
M. NOVAK, Propritaire Mahdia.
M. ORDIONI, Capitaine au 4e Tirailleurs.
Officiers d'Acadmie
M. MAILLET, Lieutenant au 4e Tirailleurs.
M. MONTALIER, Capitaine au 4e Tirailleurs.
M. ROUQUETTE, Mdecin militaire Souk-Ahras.
M. SUREAU Huissier Tunis.
Mrite Agricole
Officier
M. LEFRONT, Capitaine en retraite Sousse.
11

Chevaliers
M. CHEVY, Chef de Section la Compagnie Bne-Guelma.
M. COMBAZ, Inspecteur de l'Enseignement primaire Sousse.
M. EPINAT, Mahdia.
M. FALCONETTI, Capitaine au 4e Tirailleurs.
M. LEB UF, Capitaine aux Affaires indignes.
M. MONTALIER, Capitaine au 4e Tirailleurs.
Nichan Iftikhar
Commandeurs
M. D OLLANS , Chef de Bataillon au 4 e Tirailleurs.
M. le Docteur C ARTON , Mdecin-Major de 1 r e Classe au 4 e Tirailleurs.
Officiers
M. BERTIN, Propritaire Sousse.
M. COUVE, Juge d'Instruction Sousse.
M. DELBREL, Capitaine Commandant le Train Sousse.
M. JACQUES, Lieutenant au 4e Tirailleurs.
M. JOUANNE, Lieutenant au 4e Tirailleurs.
M. KYNDT (DE), Lieutenant au 4e Tirailleurs.
M. MANIGOLD, Officier d'Administration de l'Artillerie Sousse.
M. MONNIER, Lieutenant au 4e Tirailleurs.
M. MOUSSARD, Substitut du Procureur de la Rpublique Sousse.
Chevalier
M. BOUBY, Socit Franco-Africaine des Ptes d'Alfa.

MDAILLE D'ARGENT BISANNUELLE DE LA S. A. S.


M. le Docteur DEYROLLE, Mdecin Aide-Major de 1re Classe, au 48e d'In-
fanterie.

Mdaille d'Argent de la Socit des Antiquaires de France


M. le Docteur CARTON. Mdecin-Major de 1 r e Classe au 4e Tirailleurs.
So cit Go lo giq ue d e Fr ance
M. Ph. THOMAS, Vtrinaire Principal de l'Arme en retraite, pour l'en-
semble de ses travaux gologiques en Algrie et en Tunisie. (1)
Mdaille de Vermeil de l'Acadmie de Mdecine
M. le Docteur T ROUILLET , Kairouan.

(1) La Compagnie des Chemins de Fer et des Phosphates de Gafsa a galement


allou une somme de 15.000 fr. M. Ph. Thomas comme tmoignage de reconnaissance
envers l'auteur de la dcouverte des phosphates du Nord de l'Afrique.
12

Prix Barotte, de la Socit Nationale d'Agriculture


de France
M. Ph. THOMAS, Vtrinaire Principal de l'Arme, en retraite.

Mdaille de Vermeil de la Socit de Gographie d'Alger


M. le Docteur ROUQUETTE, Mdecin-Major, Chef de l'Hpital militaire
Souk-Ahras.
Mdaille d'Argent de l'Exposition de Nabeul
M. le Docteur DEYROLLE, Mdecin Aide-Major de l'Arme.
Mdaille d'Honneur en Bronze
M. JOUANNE, Lieutenant au 4e Tirailleurs, pour sauvetage.

Citation l'Ordre de la Division


M. FALCONETTI, Capitaine au 4e Tirailleurs, pour son ouvrage sur les Oasis
sahariennes.
Diplme d'Honneur de la Socit Nationale d'Horticulture
M. LEFRONT, Capitaine en retraite Sousse.

Le 1er juin 1904.

MARCEL CORDIER,

Secrtaire gnral.
SANCE SOLENNELLE
du 29 Fvrier 1904

Nombreuse tait l'assistance qui avait rpondu l'invitation lance par le


Comit de la Socit Archologique l'occasion de la Sance solennelle qui
s'est tenue le 29 fvrier 1904, salle de l'Umanit.
Au milieu de fraches et lgantes toilettes de dames, on remarquait la
prsence de M. le Contrleur civil, de M. le Prsident du Tribunal, de M.
Calley de Saint-Paul, colonel commandant le 4e Tirailleurs, et de nombreux
Officiers, fonctionnaires, commerants et industriels.
Sur la scne avaient pris place M. le Docteur Carton, prsident, MM. Giorgi
et Gresse, vice-prsidents; MM. Cordier, secrtaire gnral, et Rietmann,
secrtaire gnral adjoint; M. Moussard, bibliothcaire. M. le docteur
Deyrolle, le laurat du prix bisannuel dcern par la Socit, tait assis la
droite du Prsident.
M. le Prsident ouvre la sance par l'allocution suivante :

C'est avec une profonde satisfaction que je dclare ouverte cette


premire sance solennelle de notre Socit.
Le nombre et le choix des personnes qui ont tenu indiquer, par
leur prsence, l'intrt qu'elles portent notre uvre sont une cla-
tante attestation de son utilit.
Mais qu'il me soit tout d'abord permis de remercier au nom de la
Socit Archologique de Sousse toutes les autorits civiles et mili-
taires qui ont voulu rehausser, en venant ici, l'clat de cette runion.
Il est impossible de parler de ses travaux sans citer ceux qui nous
ont aids les accomplir et je me vois forc d'empiter un peu sur le
rapport de notre dvou secrtaire gnral, en exprimant la recon-
naissance de notre Socit : M. le Contrleur civil, pour l'appui
moral, M. le Vice-prsident de la Municipalit, pour le concours
moral et l'aide pcuniaire qu'ils nous ont prts; M. le Directeur
des Antiquits tunisiennes, pour l'assentiment qu'il a donn notre
fondation et les encouragements qu'il nous a prodigus sous la forme
de flicitations l'occasion de notre premier Bulletin, et de promesse
d'y collaborer activement en nous envoyant des articles.
Mais il est un devoir qu'il m'est particulirement agrable de
remplir, et comme Prsident et comme militaire. Vous connaissez les
14

importants travaux que la Socit excute aux catacombes de l'an-


tique Hadrumte. Les ressources de la S. A. S. ne lui eussent jamais
permis de les effectuer sans l'aide qu'a bien voulu lui prter le chef
respect du 4e Tirailleurs. La Socit Archologique et toute la popu-
lation soussienne lui seront reconnaissantes d'avoir, en continuant la
noble et ancienne tradition du rgiment, contribu une uvre utile
la science, utile la ville.
Je dois encore remercier tous nos collaborateurs de la premire
heure, notamment les membres du Bureau et du Comit d'tudes.
Leur zle, leur dvouement m'ont soutenu dans une tche parfois
trs ardue, et si j'ai fait quelque chose d'utile en aidant la cration de
cette Socit, je trouverai ma meilleure rcompense dans les sym-
pathies et les amitis que m'aura suscites le travail fait en commun.
Mesdames, Messieurs, tous ces remerciements ne sont que des
paroles. Voici des actes : notre dvou Secrtaire gnral, qui je
donne la parole, en vous exposant les travaux de la Socit, va vous
dire quelle est la rsultante et du labeur de nos socitaires et de la
bienveillance de ses bienfaiteurs. Montrer ce que nous leur devons
sera encore la meilleure manire de les remercier.

COMPTE-RENDU DES TRAVAUX DE L'ANNE

M. Cordier, Secrtaire gnral, donne lecture de son compte-rendu sur les


travaux de l'anne :

Mesdames, Messieurs,
Au moment o notre Socit entre dans la deuxime anne de son
existence, il nous est agrable de considrer le chemin parcouru et de
puiser dans la constatation de l' uvre accomplie un encouragement
pour l' uvre venir. Je n'abuserai de votre bienveillante attention que
quelques instants pour : vous rappeler la fondation de notre Socit,
vous faire connatre rapidement ses travaux de l'anne et vous
exposer ses dsirs.
Le 10 dcembre 1902, sur l'initiative de M. le docteur Carton et de
M. Gouvet, architecte municipal, 19 personnes se runissaient pour
tenter la cration d'une Socit archologique. Un bureau provisoire
tait form avec M. Gouvet comme prsident et M. Ghez comme
secrtaire.
15

Le 27 fvrier 1903, 37 personnes se runissaient dans le mme but, et


le provisoire devenait dfinitif : la Socit Archologique de Sousse
tait fonde.
Depuis, le nombre de ses adhrents n'a fait que progresser, de
faon si satisfaisante qu' ce jour anniversaire nous comptons 16
membres honoraires, 87 membres actifs et 82 membres correspon-
dants, soit un total de 185 adhrents.
Les promoteurs de l'ide peuvent donc, bon droit, se montrer
satisfaits de leur initiative ; qu'ils reoivent ici l'expression de nos vifs
sentiments de reconnaissance ! C'est grce leur dvouement, leur
activit et leur esprit de suite j'allais dire leur tnacit que le
succs a couronn leurs efforts et que nous recueillons aujourd'hui la
moisson. A leur tte, payant de toute sa personne, mettant tout son
c ur atteindre le but propos, M. le docteur Carton donnait une
preuve de ce que peut une volont nergique unie une prodigieuse
activit. Je suis mal l'aise pour faire son loge en sa prsence, je
risque fort d'tre malhabile et de froisser sa modestie. Il me permettra,
cependant, de dire qu'il a mieux fait que de donner toute son me
notre uvre, ainsi qu'il nous l'avait promis, il en est devenu l'me
mme.

La Socit Archologique, ainsi constitue, avait un programme


rsum dans l'article premier de ses statuts :
1 Fonder une bibliothque ;
2 S'intresser au dveloppement du Muse municipal par le
concours matriel et moral de ses membres, favoriser de toutes ses
ressources l'entretien et la conservation des monuments historiques,
antiques ou arabes, de la rgion de Sousse, et signaler l'admi-
nistration comptente tous les actes de vandalisme qui pourraient
tre ports sa connaissance, grce la surveillance vigilante de
ses membres ;
3 Publier un Bulletin o il sera brivement rendu compte des
sances, de toutes les dcouvertes faites dans la rgion et des vne-
ments l'intressant au point de vue archologique ;
4Affecter tous les fonds non employs au Bulletin ou la cor-
respondance l'acquisition d'objets pour le Muse ou, autant que
possible, l'excution d'une fouille poursuivie d'une manire con-
tinue dans un des grands monuments de l'antique Hadrumte ou
de ses environs ;
Organiser :
(a) Des runions au Muse ;
16

(b) Des confrences relatives un sujet archologique ;


(c) Des promenades Sousse et dans les environs immdiats de
la ville chaque fois qu'une tude ou une trouvaille intressante sera
faite ;
(d) Des visites aux fouilles effectues dans la rgion ;
(e) Des excursions aux ruines si nombreuses et si intressantes
de toute la contre ;
6 Echanger le Bulletin avec celui des autres Socits africaines
ou archologiques.
uvre multiple, ainsi que cette numration vous permet d'en
juger, uvre qui paraissait ne pouvoir tre mise en mouvement que
dans un temps assez long.
Nous allons passer brivement en revue tout ce qui a t fait dans le
court espace d'un an, et vous verrez que, si les lments offerts son
activit taient nombreux, la Socit n'a pas failli ses engagements.

Une bibliothque a t fonde et, grce de nombreux dons qui


sont venus augmenter le produit de nos acquisitions, nous possdons
aujourd'hui sur l'Archologie gnrale et sur l'Archologie africaine
220 ouvrages. De nombreux membres, correspondants comme actifs,
ont fait appel ces ressources ; et nous sommes heureux d'avoir ainsi
pu contribuer l'activit scientifique dans notre rgion.
Le catalogue de notre Bibliothque va tre publi dans notre Bul-
letin n. 2 en cours d'impression (1).

L'intrt que la Socit a port au Muse municipal s'est traduit


par des dons que lui ont faits plusieurs de nos confrres ; je ne les
numrerai pas en dtail, notre Bulletin n . 1 s'tant charg de ce soin.
Je vous rappellerai cependant les dons de M. le colonel Calley de
Saint-Paul, comprenant : 152 lampes de formes diverses, 20 statuettes,
18 miroirs, 50 objets en bronze, 18 plats en terre, tous objets provenant
des fouilles opres Sidi-el-Hani par M. le capitaine Ordioni ; 7
statuettes dcouvertes par M. le lieutenant Henry dans la ncropole
du camp Sabattier; des lampes puniques et des petites poteries
fusiformes dcouvertes Ksiba par MM. le docteur Carton et le
capitaine Ordioni ; les dons de M. le docteur Carton, de M. C ytaux,
de M. Robin, comprenant : corniche, frise, bronzes, poteries

(1) Voir Bulletin n. 2, p. 195.


17

berbres ; et enfin les dons de M. Chevy, comprenant des reliefs en


stuc d'une finesse d'excution remarquable. M. Chevy nous a prsent
sa dcouverte dans un article paru au Bulletin n . 1 qui nous fait
vivement dsirer celui qu'il nous a promis pour notre Bulletin n . 2, et
qui doit tre une tude, avec planches, des plus remarquables des sujets
dcouverts par lui.
M. Chevy a galement fait don d'une grande mosaque tte de.
Mduse dcouverte par lui Ksiba.
L'numration que je viens de faire n'est certes pas limitative ; j'ai
cru devoir vous rappeler les dons les plus importants. S'ils n'manent
pas tous de la Socit elle-mme, ils proviennent de la gnrosit de
ses membres, et il nous semble que c'est l l'heureux effet d'un groupe-
ment qui stimule l'initiative prive.
Notre Socit a suffisamment montr son dsir bien vif de faire
une uvre dsintresse dont le public de la ville de Sousse doit large-
ment bnficier ; elle n'abandonnera pas la voie qu'elle s'est trace et
son v u le plus ardent sera de voir les richesses archologiques s'en-
tasser dans le Muse municipal une crainte en passant : Ne sera-il
pas bientt trop petit ?

Chaque fois que l'occasion s'est prsente, nous nous sommes fait
un devoir de signaler M. le Directeur des Antiquits les actes de
vandalisme commis sur les monuments antiques.

Nous devions publier un Bulletin, et cette partie de notre pro-


gramme, tente ds la premire anne, paraissait beaucoup imprudente,
tous trs laborieuse. Le rsultat, qui a t un succs, a vite rendu ces
apprhensions vaines. Notre Bulletin n . 1 a paru ds le premier
semestre, et notre Bulletin n. 2, actuellement sous presse, paratra
incessamment. Voil qui est d'un bon augure pour la rgularit de nos
publications futures !
Je ne voudrais pas abuser de l'attention que vous me prtez avec
tant de bienveillante, et je me garderai bien de faire ici une analyse de
tous les articles parus dans notre premier Bulletin. Je vous rappellerai
cependant que d'minents archologues, tels que MM. Cagnat Hron de
Villefosse, Delattre, ont collabor notre uvre avec une grce et une
amabilit qui n'ont d'gal que leur grand talent.
M. Cagnat nous a donn une Note sur le prix des Funrailles
chez les Romains inspire par une inscription dcouverte dans les
ncropoles romaines de Sousse.
18

Cette inscription, dit M. Cagnat, dont M. le Gnral G tschy a


bien voulu me communiquer l'estampage, sort de la banalit ordi-
naire de ces sortes de monuments. Non seulement on nous dit que
le dfunt a vcu 60 ans, mais on ajoute qu'il a bien employ sa vie
et aussi qu'on a dpens pour son enterrement 100 deniers, soit un
peu plus de cent francs de notre monnaie . Et le savant auteur
nous fait une numration de tous les textes qui mentionnent
les frais de funrailles ailleurs qu' Rome.
Voil un usage perdu travers les civilisations qui se sont suc-
cd .... mais hlas ! la vanit humaine n'aurait-elle pas seulement
chang de forme ?
M. Hron de Villefosse, dans une lettre trs spirituelle M. le Dr
Carton, nous a donn la copie d'une inscription latine provenant de
Thysdrus et conserve au Louvre. Cette inscription, relative un
chevalier romain, Egnatuleius Sabinus, avait t dcouverte par M.
Hron de Villefosse au cours d'un voyage El-Djem en avril 1874 ; il
avait pu, grand peine, runir les nombreux morceaux de marbre
blanc qui la composaient et qu'un indigne lui avait donns jalouse-
ment l'un aprs l'autre.
Ecoutez plutt M. Hron de Villefosse lui mme : Le lendemain
de mon arrive, les arabes, ayant su par mon guide que je cher-
chais des pierres crites, me firent voir tout ce qu'ils jugrent digne
de mon attention. L'un d'eux m'apporta mme une petite plaque
de cuivre portant le nom d'un Biskri, commissionnaire Alger, et
me jura sur la tte de ses enfants qu'il l'avait trouve dans un tom-
beau romain. Il paraissait trs courrouc de ce que je ne consentais
pas lui acheter cette plaque qu'il avait eu soin de frotter ferme
et de rendre trs brillante. Sur ces entrefaites un autre habitant de
l'endroit, un grand gaillard, survint : il cachait quelque chose sous
son burnous. Arriv devant moi, il dcouvrit avec prcaution un
morceau de marbre allong et d'une faible paisseur sur lequel
taient gravs quelques caractres romains du second sicle de
notre re. C'tait un fragment d'une belle inscription ; je lui de-
mandai s'il ne possdait pas d'autres morceaux trouvs avec le
premier. Il hsita quelques instants, mais comme je lui avais fait
dire par mon guide que je ne lui achterais rien s'il ne me montrait
pas tout ce qui avait t dcouvert avec le premier morceau, il
retourna chez lui et revint bientt en m'apportant successivement
douze morceaux de la mme inscription. Ayant fait prix avec lui, je
me rendis possesseur du tout.
M. le R. P. Delattre nous a donn un article sur les nouvelles d-
couvertes faites par lui, en mars 1903, dans l'amphithtre de car-
thage. Ce sont une anse d'amphore rhodienne, et autres objets
19

tels que : base de petite colonne de marbre blanc, chapiteau de


pilastre, petite console orne d'une palmette, dalles du podium et
de siges, lampes romaines, lampe chrtienne ; et enfin, dcouverte la
plus intressante, une tablette de marbre blanc revers brut avec
inscription qui, suivant l'opinion de M. Hron de Villefosse, devait
appartenir un vase donn en prix dans les jeux. M. le R. P. Delattre
donne ensuite copie de plusieurs inscriptions trouves l'Amphithtre
au cours des mmes travaux.
Notre Bulletin a publi galement des articles de MM. le Docteur
Carton, Chevy, Nogu, de Bray, Deyrolle, Ordioni, Rietmann,
Hannezo. Vous avez certainement tous lu ces articles dont la forme
ne le cde qu'au fond, mais je devais les rappeler pour vous signaler
encore une fois l'activit de notre jeune Socit.
Notre Bulletin a rendu compte des travaux et des excursions de la
Socit ; il en est le tmoin indispensable pour nos nombreux membres
correspondants qui ne peuvent assister nos runions ; grce lui ils
peuvent suivre la marche d'un uvre qui les intresse puis quils y
collaborent.
Notre organe a, en outre, l'avantage indniable de contribuer
cette uvre que tous les groupements poursuivent en Tunisie,
c'est--dire de faire connatre et aimer notre pays. Tandis que les uns
en font connatre le pittoresque, les autres le charme oriental ou le
climat bienfaisant, nous en dcrivons les beauts archologiques qui
passionnent le visiteur par les souvenirs qu'elles voquent en lui.
Enfin, notre Bulletin est actuellement chang avec celui de qua-
torze Socits savantes de France ou d'Algrie, et cet change doit
avoir pour le commerce intellectuel les plus heureux rsultats. ( 1)
Vous estimerez avec moi, Messieurs, que nous n'avons pas trop
nous proccuper des rsultats matriels de l' uvre entreprise. Nous
pouvons, certes, dsirer trs vivement que la Socit, par l'activit de
ses membres et des sacrifices pcuniaires, parvienne arracher au sol,
o elles sont enfouies, de nouvelles richesses archologiques ; mais
tous nos efforts ne doivent pas tendre ce but unique, et il nous est
permis de chercher dans l'tude purement spculative de la science
une saine distraction nos occupations professionnelles.

Je suis amen tout naturellement vous parier des fouilles faites


par les membres de la Socit.
Des fouilles ont t faites par M. le Docteur Carton au lieu dit la

(1) Le nombre des Socits correspondantes est actuellement de 21. (Voir le pr-
sent Bulletin, p. 9.)
20

Tour Eiffel dnomm par la Socit : les Gros Blocs. Il a t


mis jour un aqueduc de grande dimension, maonn et vot en
berceau ; on a dcouvert en partie une vaste plate-forme, mais si l'on a
pu penser que c'tait l l'emplacement d'un thtre, rien n'a permis
de l'affirmer.
MM. Carton et Ordioni ont fait des fouilles un peu l'est des pre-
mires et ont dgag un monument qui, n'en pas douter, tait un
cirque. Le podium a pu tre dgag ou suivi sur une longueur de 40
mtres.
Au camp Sabatier, M. le capitaine Ordioni a mis jour une n-
cropole romaine, sur une longueur de 100 mtres et une largeur de
15 mtres environ. Des mesures ont t prises pour que les monuments
dcouverts ne soient pas dgrads. C'est, en effet, un coin curieux
de Sousse que peu de personnes de la ville n'ont pas visit, et que
tous les touristes demandent voir.
Des fouilles trs importantes, pour le compte de l'Acadmie des
Inscriptions et Belles-Lettres, ont t faites Ksiba par M. le docteur
Carton. Je m'interdis d'en parler, car leur achvement, qui doit tre
fait sous les auspices de notre Socit, permettra seul d'en avoir une
vue d'ensemble. Qu'il me soit permis cependant d'esprer en Ksiba
la Pomp du Centre tunisien !
J'en arrive enfin aux fouilles, en cours d'excution, opres au
camp Sabatier par les soins de MM. Carton et Leynaud pour le
compte de notre Socit. Il a t dgag un hypoge immense,
comprenant un parcours total de 150 mtres environ. Une septime
galerie vient d'tre dcouverte ces jours derniers. Ce sont, n'en pas
douter, les catacombes des premiers chrtiens de la terre d'Afrique.
Dans chaque paroi des galeries, et disposs par tages, se trouvent
les loculi ou tombes, contenant encore des ossements. Chaque
loculus est ferm par des briques plates, enduites d'un mortier
sur lequel sont traces des inscriptions telles que : IN PACE, CUM
PACE, BRUMASA CUM PACE. Ces inscriptions, qui sont assur-
ment chrtiennes, sont aussi de la premire poque ; ce qui permet
de le supposer, c'est l'absence du mot FIDELIS (FIDELIS IN PACE),
que l'on retrouve dans les inscriptions de l'poque plus rcente.
Ces dcouvertes sont de la plus grande importance en Afrique, o
des catacombes chrtiennes n'taient pas encore connues. Elles ajou-
tent une page de plus l'histoire archologique de l'Afrique. Mais
notre Socit aura encore de nombreux sacrifices faire pour para-
chever l' uvre entreprise et donner la ville de Sousse un monument
antique de plus. Puissent les visiteurs qui viendront l'admirer ne pas,
en plein XXe sicle, nous ramener l'poque Vandale ! Cette boutade
vous paratrait dplace, Messieurs, si vous ne vous rappeliez les
21

actes de vandalisme commis tout rcemment dans nos catacombes.


Les nouvelles dcouvertes faites depuis ont heureusement compens
leur mauvais effet.
La Socit Archologique n'a pas oubli que son but principal
tait de pratiquer des fouilles, et une autorisation vient d'tre de-
mande pour permettre M. le commandant Giorgi de dgager les
monuments dcouverts l'oued Blibane, prs de Sousse. J'apprends
aujourd'hui mme que notre dvou vice-prsident vient d'y dcouvrir
une superbe mosaque reprsentant une scne tragique.
Nos flicitations et nos plus vifs souhaits pour l'heureuse conti-
nuation de ses recherches ! ( 1 )

Pour nous guider dans nos recherches archologiques, nous avons


pens qu'il tait utile de faire une collection d'tude .M. Manigold,
charg de ce soin, s'en est acquitt avec le plus grand dvouement.
Il a recueilli une srie de lampes phniciennes et romaines, des ciments
et mortiers des diffrentes poques. L'origine de ces objets a t
soigneusement tablie de faon nous permettre de les prendre
comme pices de comparaison avec la plus grande certitude.

A l'utile a t joint l'agrable. M. le capitaine Lefront, avec un


zle dont nous lui sommes trs reconnaissants, a commenc l' Album
Historique de Sousse . Il est dj parvenu recueillir 120 vues diff-
rentes de Sousse, prises diverses poques allant de 1881 ce jour. Il
a galement recueilli les quatre plans qui ont t faits de Sousse en
1881 1890 1899 1904. L'amabilit de M. Gouvet, architecte
municipal, a grandement facilit sa tche. Cette collection est d'un
rel intrt pour un pays qui se modifie tous les jours ; elle permet
d'en suivre les phases diverses et d'en constater les transformations
successives.

M. Rietmann s'est charg de faire une collection d'intailles et, avec


un got artistique parfait, il a russi prendre les empreintes des plus
jolis types de la rgion.

Enfin, dans le cours de l'anne, nous avons fait des excursions


charmantes Henchir-Zembra, Henchir-Sidi-Khalifat, et de nom-

(1) Depuis, M. le Commandant Giorgi a dcouvert, au mme endroit, une mosaque


de toute beaut reprsentant Neptune debout sur un char tran par des chevaux
marins. Elle a t enleve et mise, par les soins de M. le Directeur des Antiquits,
au Muse municipal de Sousse. M. CORDIER.
22

breuses promenades Sousse et dans les environs immdiats de la


ville. Elles ont t pour nous le plus utile et le plus agrable des pas-
se-temps ; de nombreux membres ont saisi avec empressement ces
occasions de se trouver runis pour changer leurs ides et leurs
impressions. C'est un honneur pour notre Socit d'avoir ainsi con-
tribu, mme dans cette faible mesure, au mouvement intellectuel
dans ce pays.

Tel est, Messieurs, le bilan moral de notre Socit pour l'anne


1903. Je viens de remplir un rle bien ingrat auprs de vous ; malgr
mon dsir de me rsumer le plus possible, je crains fort d'avoir
dpass les bornes de votre patience. Je vous suis d'autant plus recon-
naissant de votre bienveillante attention que votre impatience est
grande d'entendre le distingu confrencier dont l'loge n'est plus
faire.
Je terminerai donc en formulant un v u : voir notre Socit orga-
niser l'avenir de nombreuses confrences !
Pour cette anne, le stade parcouru me semble suffisant ; et, sans
vous demander de nous tresser des couronnes, nous serions heureux
d'avoir votre approbation qui sera un stimulant pour l'avenir.

M. le docteur Carton, prsident de la Socit, se lve et prononce l'allo-


cution suivante :
Je n'ai pas vous apprendre pourquoi la Socit Archologique
de Sousse a dcern sa mdaille unique M. le Docteur Deyrolle.
Vous connaissez tous, par notre Bulletin, quelles belles dcouvertes il
a faites et avec quel talent de savant et d'artiste il les a exposes.
Nos prochains numros vous diront d'autres dcouvertes qu'il
vient de faire, et qui jettent un jour nouveau sur ces monuments si
curieux qu'on appelle des haouanet .
Mais je tiens surtout vous dire ici dans quelles conditions a tra-
vaill M. Deyrolle ; comment il s'en va souvent seul, travers les
montagnes du Cap Bon, se contentant pour lui et sa monture de la
maigre hospitalit que les douars ne refusent pas aux mdecins.
Je suis d'autant plus heureux d'tre appel lui remettre notre
mdaille, que son activit me rappelle mes premires ardeurs archo-
logiques et une vie que j'ai longtemps mene, mais certainement
avec moins de privations.
M. Deyrolle n'est pas seulement docteur en mdecine ; il est en-
core licenci s sciences naturelles, et nous savons tous quelles belles
tudes d'archologie il vient de faire. Il est donc admirablement pr-
par, par sa science et son endurance, faire de grandes explorations,
23

et je lui souhaite vivement de trouver un jour un champ qui lui per-


mette de dployer toutes ces qualits pour le grand bien de la science
et du pays.

M. le Prsident remet ensuite M. Deyrolle une plaquette


d'argent reprsentant la mdaille qui lui a t offerte par la
Socit Archologique de Sousse.

La sance est clture par une confrence sur Dougga, de M. le docteur


Carton, accompagne de projections faites par MM. Bertin et Manigold.
Le distingu confrencier, pendant plus d'une heure, tient l'auditoire sous
le charme de sa parole chaude et image, et la sance est leve sur cette excel-
lente impression.

MARCEL CORDIER,

Secrtaire gnral.
EXTRAITS DES PROCS-VERBAUX DES R UNIONS

Sance du Comit du 14 Janvier 1904

Attribution de la mdaille en argent. Il est procd, par voie de scru


tin secret, l'attribution de la mdaille unique que la Socit doit dcerner
dans sa sance solennelle.
C'est M. le docteur Deyrolle qui est dsign.
Description de la plaquette eu argent mat :
Dimensions : 0m 07 X 0m 05 sujet : jeune femme sortant d'une fosse autour
de l'orifice de laquelle gisent des objets qu'elle en a retirs : barque, vases,
mdailles, groupe d'objets dans un de ces paniers servant habituellement aux
fouilles. Elle lve de la main droite et examine une lampe antique et s'appuie
de la main gauche sur une pioche. En h a u t , dans un angle, on l i t : Archologie.
Au revers : la Socit Archologique de Sousse M. ...et, au-dessous,
tte de sphinx.

Sance du 21 Janvier 1904

M. Giorgi prsente, de la part de M. Barral, des bijoux forms d'intailles,


de cames, ou de monnaies romaines dont quelques-uns sont trs remarquables.
M. le Prsident montre un t u i en plomb renfermant une Tubella devotionis,
deux stylets en bronze ayant servi y graver des caractres. Il met aussi
sous les yeux des assistants des lampes, brle-parfums orns de peintures, che-
valets d'instruments de musique, verres iriss provenant de Carthage.
M. le Prsident donne lecture de la note suivante, du commandant Bordier,
sur une tte en marbre de Didia Clara, existant la salle d'honneur du 4e
Tirailleurs :
La tte en marbre dont il va tre question a t dcouverte, en 1897,
dans les ruines de Naheul-Khedim, l'antique Neapolis, par M. Barlerin, con-
ducteur des Travaux publics Nabeul, adjoint du Gnie de l'arme territoriale.
M. Barlerin a bien voulu me la donner et j'ai t heureux de pouvoir l'offrir
mon tour mon ancien rgiment.
Ce morceau de sculpture semble appartenir une statue que les habitants
de Neapolis auraient leve Didia Clara Augusta, fille de Didius Julien, qui
fut Empereur pendant deux m o i s peine (d'Avril J u i n 193), et femme du
snateur Commode Repentinus qui fut un protecteur de Neapolis.
25

Par reconnaissance pour ses bons offices, il est probable que les habitants
de Napolis lui rigrent une statue. Dans tous les cas, ils en dressrent une
en l'honneur de sa femme Didia Clara.
Il est remarquer, en effet, que la tte en marbre qui orne la salle d'honneur
du 4e Tirailleurs a une ressemblance frappante avec celle figure sur une
mdaille de Didia Clara reproduite, sous le n 152, dans les Instructions
adresses par le Comit des Travaux Historiques et Scientifiques aux Corres-
pondants du Ministre de l'Instruction publique. Mme fin profil, mme
coiffure.
Cette mdaille montre, l'avers, Didia Clara tourne droite. En exergue,
Didia Clara Aug. ; au revers, desse (l'Allgresse sans doute) marchant gauche,
tenant la main droite une longue palme dont le pied repose sur le sol et,
dans le bras gauche, une corne d'abondance. En exergue : Hilar Tempor
(Joyeux temps).
Cette mention indique, si elle n'est pas menteuse, qu'on vivait dans l'all-
gresse au temps de Didia Clara. C'est d'ailleurs tout ce qu'on sait sur son
compte, car elle mourut une date qui n'a pas t exactement dtermine,
aprs avoir vcu obscurment comme sa mre Manlia Scantilla Augusta, dont
on a aussi des mdailles.
Son pre M. Didius Severus Julianus, fut un des quatre prtendants
l'empire aprs l'assassinat de Pertinax (Publius Helvius), par les prtoriens, le
28 mars 193. Il tait n Milan le 29 janvier 133, de Ptronius Didius et
d'milia Clara. Malgr ses dfauts, il fut aim de Marc-Aurle. Plus tard, il
fut exil par Commode; puis, rappel par lui, il rentra en faveur, et la mort
de Pertinax, le trne imprial fut marchand entre l u i et Sulpicien, beau-pre
de Pertinax.
Les prtoriens lui donnrent la prfrence parce qu'il tait plus riche, ou
fut plus gnreux, que son comptiteur. Le premier, et peut-tre le seul acte
de son court rgne, consista altrer le titre de la monnaie d'argent, mais son
cursus honorum est long depuis le moment o, de mutations en mutations, il
arriva, de quaestor consulum, au grade de Proconsul Africae 189-190), en
passant par le Consulat (175).
J'espre faire connatre cette honorable carrire mes descendants du 4e
Tirailleurs et mes amis de la S. A. S. quand je pourrai leur offrir pro-
chainement sans doute une mdaille de Marcus Didius Severus Julianus,
une de sa femme Manlia Scantilla, et, surtout, un nouveau portrait (1), sur
bronze, argent, lectrum ou or, de la gracieuse Didia Clara.
Le Snat le fit tuer le 2 juin 193. Il n'avait donc t empereur que deux
mois tout au plus.
Le mari de Didia Clara, le snateur Commode Repentinus, est presque

M. GAUCKLER qualifie ainsi la tte en marbre dont je parle. Ce n'est pas moi qui
le contredirai.... ni Didia Clara non plus !
26

inconnu. Tout ce qu'on sait de lui, c'est qu'il avait Neapolis (Nabeul) des
clients qu'il favorisa.
Hammamet, Villa des Palmiers, 7 juin 1901.

Commandant BORDIER,
du Service Territorial des Affaires indignes,
ancien capitaine au 4e Tirailleurs,

Sance Gnrale du 7 Mars 1904


M. le Prsident donne lecture de la note suivante de M. Dubos :
Sousse, 3 fvrier 1904.
MONSIEUR ET CHER PRSIDENT,
J'ai rapport de Kairouan, le 29 courant, et pour vous les remettre, divers
objets et dbris numrs ci-aprs, que j'ai trouvs dans une tranche
du chemin de fer. Cette tranche, pratique dans un bois de cactus, est
son origine haute de 2 m. 50 3 mtres environ ; sa longueur est d'environ
200 mtres ; elle se trouve prs du chemin qui conduit la ferme Minot,
800 mtres de la gare, et par suite 1 k. 500 environ de la ville arabe de
Kairouan.
Cette petite collection, que je mets votre disposition, se compose de :
1 4 lampes en terre grossire sans marque long bec, prsentant sur
leur face suprieure une large ouverture circulaire;
2 un demi-vase en terre maille avec dessins. (Ce genre n'existe plus,
je crois, chez les Arabes) ;
3 Morceaux de flacons en verre dont un grand fond de vase que je trouve
remarquable par la multitude de petits creux en gouttes de pluie dont le
dessous est garni, ce qui me fait croire que l'on se servait, pour fabriquer de
grands vases de verre, d'un plateau recouvert d'asprits dans le but d'empcher
le glissement de l'objet pendant l'opration du soufflage (?) ;
4 d'ossements;
5 d'un petit cylindre en terre cuite trs bien fait et poli, perc d'un trou.
(Je pense que par le trou passait un axe fix au plateau du potier afin de faciliter,
vu la petitesse et la lgret de l'objet, sa fabrication) ;
6 un morceau de parquet en mortier coul sur un lit de briques. (A remar-
quer le chanfrein sur le bord extrieur) ;
7 un morceau de conduite d'eau en poterie qui tait rempli de sable et
recouvert d'une mme couche de mortier (chaux et cendre);
8 fragments de sculptures (fleurs) sur pltre trouvs terre, et sur les-
quels apparaissent des traces de peinture rouge;
27

9e un petit vase de terre cuite, cass;


10 un morceau de fer qui pourrait tre un clou;
11 3 pices de monnaie, dont une grande qui me parat tre tout fait
moderne et peut tre tombe dans la tranche du haut du talus;
12 un morceau de marbre blanc (statuaire) ou d'albtre ;
13 un fragment de meule moudre le grain. Cette dernire pice pro-
vient du mme endroit, et je l'ai rapporte il y a prs de deux ans.
Quelques jours avant mon arrive sur le chantier, les ouvriers ont dcouvert
un vase clos ferm hermtiquement par du pltre. Sa position tait penche
et environ 0m 75 de profondeur dans une couche de terre grise comme
de la cendre. La poterie fut brise (toujours l'espoir d'y trouver un trsor !)
et je n'ai pu en retrouver les morceaux. Sous la couche de terre grise il y avait
une range de briques, puis une autre couche de terre et encore une range
de briques.
Dans cette tranche l'on rencontre, en fouillant la pioche, normment
de briques comme les briques actuelles dont est bti tout Kairouan. Certaines
formaient des murs, relies entre elles par un mlange de chaux et de cendre,
d'autres par du mortier de chaux et sable et aussi par de l'argile dlaye.
En maints endroits, il semble qu'il n'y avait pas de murs, mais une simple
couche de mortier de 0m 01 environ tapissait les cts en terre, comme si
une habitation avait t creuse dans le sol.
Kairouan est entour de vritables montagnes d'ordures : terres, cendres,
poteries s'levant bien 10 m. de hauteur en certains points. Il a fallu des
sicles pour crer de pareilles masses, et il se pourrait qu'une coupe partant
d'en haut pour arriver au terrain naturel montre d'une faon irrfutable les
diffrentes poques qui se sont coules depuis la fondation de la cit. Il y a
aussi des silos qui semblent avoir t vids un d'entre eux m'a fait l'effet
d'une habitation souterraine.
Plusieurs arabes m'ont d i t que le lieu travers par le chemin de fer, l o
j'ai trouv ce que je vous apporte, est un ancien cimetire. Je n'y ai remarqu
aucune trace de tombe.
Quelques rares pierres au-dessus du sol, sur ce terrain accident, ou une
lgende ont pu le faire croire ; peut-tre existait-il l une bourgade de cultiva-
teurs ou des villas de riches citadins ; ces habitations loin de la ville furent
saccages et les habitants y trouvrent la mort ? Enfin, je ne puis faire de com-
mentaires. J. DUBOS

Objets prsents par M. Chevy. M. le Prsident prsente les objets


suivants, remis par M. Chevy : un plat, une lampe, un fourneau de pipe. Ils
auraient t envoys M. Chevy par une personne digne de foi qui affirme
les avoir trouvs ensemble dans une tombe, Gabs.
1 Le plat est creux, de 15 centimtres de diamtre, en terre rouge, fort
cuite, mais assez grossire ;
28

2 la lampe est petite, ctes, anse perfore, en terre blanche, avec traces
de couverte brune. A vrai dire, l'anse n'est pas perfore compltement,
mais c'est le rsultat de la ngligence du potier qui n'a pas enfonc son
emporte-pice assez profondment et a laiss un peu de pte au fond du trou.
Le fourneau de pipe a absolument la forme du fourneau de pipe turque,
en terre d'un blanc jauntre. Trs bas, il a un orifice de 3 centimtres de
diamtre. Il est orn de palmettes formant un dessin en creux, obtenues par
une matrice imprime neuf fois sur le pourtour. Au-dessous du fourneau, on
voit encore une ligne de palmettes renverses et, plus bas encore, une srie de
figures elliptiques entoures de rayons. L'une d'elles affecte, n'en pas douter,
la forme d'un petit poisson.
Toute cette ornementation a t obtenue par le procd de l'estampage.
M. Carton d i t ne prsenter ces objets qu'avec les plus grandes rserves, et
seulement afin de soulever une question qui, depuis longtemps, se pose aux
archologues de Sousse.
M. Carton a lui-mme trouv au Monte Testaccio toute une srie de dbris
de pipes dans une couche renfermant d'innombrables fragments de belle poterie
romaine, laquelle ils ont pu tre mlangs ultrieurement.
Ces fragments, en terre jaune et peu cuite, n'ont pas d'ailleurs les caractres
de la cramique romaine; et il a d y avoir en ces points de nombreux rema-
niements. M. Carton a entendu dire que plusieurs personnes prtendent avoir
trouv, Sousse et dans les environs, des pipes semblables dans des tombes
romaines. C'est uniquement pour susciter des observations sur une question
qui l u i a t soumise plusieurs reprises, et sans exprimer lui-mme aucune
opinion ce sujet, qu'il a expos ce qui prcde.
Pour en revenir la pipe de Gabs, sa forme, la nature de sa terre, le
caractre de son ornementation peuvent trs bien la faire prendre pour un
instrument moderne. Pour que la dcouverte signale par M. Chevy ait
quelque valeur, elle aurait d tre faite en prsence de plusieurs personnes
capables de comprendre l'intrt de la question, et il aurait d tre dress un
inventaire de la fouille avec plan et coupe de la tombe.
Objets remis par M . le Sergent Icard. M. le Prsident prsente ensuite
des objets appartenant M. le sergent Icard. Ce sont :
1 une lampe romaine en terre grise queue perfore, couverte brune,
offrant le sujet bien connu de la colombe sur un rameau. Au revers, on voit
une estampille peu commune :

QMISE

2 Une lampe en bronze de 12 centimtres de longueur, trs lourde,


d'excution grossire. Le bec est trs long. La face suprieure du vaisseau est
largement ouverte par un orifice circulaire.
29

L'anse est arrondie et surmonte d'un anneau de suspension demi-bris.


Il y a galement un petit anneau de suspension sur le col du bec. Enfin, entre
l'anse et l'orifice, il y a une charnire indiquant que ce dernier tait muni d'un
opercule, actuellement disparu. Aucun dessin, aucune ornementation.
M. Carton estime qu'il est difficile de se prononcer sur l'poque de cette
lampe, mais il constate que, par son bec allong et surtout par l'orifice de sa
face suprieure, elle se rapproche tout fait des lampes arabes qui viennent
d'tre prsentes par M. Dubos. Les objets en bronze antiques sont, en outre, et
d'une manire gnrale, plus lgers et plus ou moins ornements ; mais il est
possible cependant que cet objet soit antique.
Dcouverte d'une villa romaine Bulla-Regia. M. le Prsident prsente
ensuite, de la part de M. Argaut, les photographies d'un palais romain
que fouille en ce moment, Bulla-Regia, M. Lafont, sous la direction de M.
Gauckler, Directeur des Antiquits, avec un subside de l'Association franaise
pour l'avancement des sciences.
Cet difice, avec son portique orn de colonnes corinthiennes encore intactes,
avec sa porte flanque de magnifiques pilastres cannels, avec les mosaques
ornes de personnages et d'animaux qui en revtent le sol, est des plus remar-
quables. Il offre en outre ce fait assez rare, et de bon augure pour les fouilles
ultrieures, qu'il a conserv une partie de son tage suprieur. M. Carton
ajoute, ce sujet, que Bulla-Regia lui a toujours paru tre un des points o
l'on trouvera un jour, quand des fouilles mthodiques y seront faites, les difices
les plus riches et les mieux conservs.
Il rappelle que le seul monument de Bulla-Regia dans lequel, en dehors de
la ncropole, il a fait quelques fouilles, avait son sol enfoui 8 mtres de pro-
fondeur, et qu'il a trouv ce niveau une mosaque extrmement riche, semblant
offrir des sujets, mais qu'il n'a pu dgager et qui est encore en place. Il
pense que le dgagement du Bulla-Regia donnerait presque partout ce que M.
Lafont vient de trouver : une ville dont le rez-de-chausse et une partie des
tages seraient conservs.

Sance Gnr ale d u 1 7 Mar s 1 90 4 .

Correspondance. Lecture est donne d'une lettre de M. Renault, officier


d'administration, flicitant la S. A. S. du n 1 de son Bulletin, et formulant
tous ses v ux pour la russite de votre courageux essai de dcentralisation.
Le champ si vaste dj fouill, mais encore tant prometteur de la rgion de
Sousse, parait devoir assurer votre uvre une longue et fructueuse existence.
Je n'en doute plus, et c'est mon v u le plus sincre.
Voulez-vous me permettre une petite rectification ? Dans le n 1 du Bul-
letin, la page 92, M. le capitaine Hannezo, dans ses notes historiques si
30

rudites et si documentes sur Sousse, donne une liste des proconsuls de la


Province d'Afrique, entre les annes 7 5 avant notre re. Il me parat avoir
suivi les indications donnes par Tissot. Or, j'ai fait paratre dans le Bulletin
Archologique 1897 (page 250 259) une note sur une monnaie indite
d'Hippo-Diarrhytus qui rectifie sur ce point la chronologie adopte par Tissot
et M. Clment Pallu de Lessert. Cette note fixe le proconsulat de Q. Fabius
Maximus Africanus l'anne 748 de Rome, soit 6 ans avant J.-C.

Sance du Comit du 14 Avril

Le Comit a dcid que le titre de Membre associ pourra tre accord,


dans certaines circonstances que le Comit apprciera, des personnes ayant
excut des travaux pour la Socit. Ce titre sera confr pour deux ans, et
renouvelable ; il donne droit au service gratuit du Bulletin pendant deux ans.

Sa n ce G nr al e d u 1 4 Av r i l

M. le docteur Deyrolle fait part d'une inscription trouve dans une cons-
truction byzantine (?) de Bir-bou-Rekba.
Longueur de la pierre : 0m45 ; largeur : 0m25. Hauteur des lettres : 4 cen-
timtres.
Pro saLVTE IMPP CAESS
ET M AVRELI ANTO nini
DO M I N AVG

M. le commandant Giorgi rend compte de la dcouverte d'une seconde


mosaque sujet reprsentant Neptune dans un char tran par des chevaux
marins. Les cubes sont d'une grande finesse, les couleurs trs vives et l'ensemble
rellement artistique.
M. Manigold prsente ensuite les objets qu'il a classs dans la collection
d'tudes dont la nomenclature sera publie ultrieurement dans le Bulletin.
L'utilit de cette collection apparat ds cette prsentation par les discussions
intressantes et trop courtes en raison du peu de dure de la sance.
La collection de mortiers et d'enduits arrte particulirement l'attention.
Un mode probablement employ par les Phniciens, qui le fut ensuite par les
Romains et qui l'est encore par les Arabes, est l'enduit avec cendres de char-
bon dont la collection offre de remarquables exemples. M. Combaz dit que les
indignes donnent le nom de chhaba ce produit.
31

Les unguentaria fusiformes de Ksiba attirent aussi l'attention de M. Combaz


qui remarque, ce propos, que les indignes emploient encore, comme fioles
parfums, de petits rcipients en mtal ayant cette forme.
Il est donn ensuite lecture d'une note de M. Renault sur un vase en
bronze ornementations, qui sera publie dans le Bulletin, ainsi que de la note
suivante sur un porte-feu trouv Lampta (ancienne Leptis Minor) en 1901 :
Petit instrument en cramique trs grossire et paraissant rfractaire,
affectant la forme antrieure et le volume d'un sabot ordinaire dont le talon
aurait t coup en suivant la ligne verticale de la vote.
Les deux petits trous pratiqus dans l'un des cts servaient ventiler la
braise contenue dans le sabot.
Sur la vote apparaissent quatre petites asprits laisses par la cassure de
l'anse double griffes dont devait tre pourvu cet objet qui, trs probablement,
servait aux mnagres transporter d'une maison dans une autre le feu qu'elles
s'empruntaient.
Fait don au Muse de Sousse. G. MENAGE,

M. Mnage pense fort justement que ce n'tait pas un brle-parfums; mais


un vase destin porter le feu et la braise.
M. Gouvet rappelle qu'il existe au Muse de Sousse un objet peu prs
semblable.
M. le docteur Carton dit qu'il en a trouv galement un, en la mme terre,
dans le sanctuaire d'El-Kenissia. Ce dernier est seulement de plus petites di-
mensions et il est possible qu'il ait servi aux rites sacrs.
M. le capitaine de Bray donne ensuite des renseignements qui seront
reproduits dans un article du Bulletin sur le trsor de monnaies byzantines
trouv El-Djem sous la mosaque qui a depuis t transporte au Bardo. Il
prsente une de ces monnaies, qu'il a pu acqurir.
M. le Prsident lit ensuite une lettr e de M. Novak annonant la dcouverte
qu'il a faite, dans la ncropole romaine de Thina, d'une mosaque figurations
datant de la bonne poque, constitue en grande partie par des cubes en verres
colors et paraissant reprsenter une scne funbre. La mme lettre du corres-
pondant de la Socit renferme d'intressants dtails sur la ncropole romaine
de Thapsus, que la Socit a visite dernirement. Des remerciements sont
vots par l'assemble M. Novak pour les renseignements qu'il a bien voulu
fournir.
Il est ensuite donn lecture d'une lettre de M. le Secrtaire gnral Cordier
adresse M. le Prsident donnant les rsultats d'une excursion qu'il vient
de faire aux environs d'Hammamet.
M. Cordier crit entre autres : J'ai vu des ruines romaines en quantit,
notamment la zaoua Djedidi o se trouvent les vestiges d'une ville qui a
d tre trs importante et qui ne semble pas avoir t fouille.
32

J'ai remarqu, renvers dans le lit d'un torrent, un pidestal avec une
inscription o j'ai pu dchiffrer les lettres suivantes :

IMP CAES DIVI M. ANtoNINI


M A G N I . . . . DIVI S.VERI PII
NEPOT ..................................

J'ai visit galement le Hammam-Djedidi, 9 kilomtres de l. Il y a


une source d'eau chaude et sulfureuse 60 environ. Aux environs, j'ai vu
les vestiges de trois villes romaines ; je ne compte plus les dbris de poterie
que j ' y ai remarqus. Sur un parcours de 24 kilomtres, ce ne sont que
ruines de villas, de fermes, et, un endroit de la piste que j'ai parcourue, nous
avons pitin une mosaque mise jour, avec motifs d'ornements gomtri-
ques.
Enfin, il y aurait ample moisson faire dans ce pays, mais l' uvre serait
immense. Je serais heureux d'y retourner avec vous ; vous prouveriez cer-
tainement la vive jouissance de l'archologue qui ne peut faire un pas sans
rencontrer des vestiges de monuments antiques. Il reste encore d'assez
nombreux pans de murs ; nous serions donc l dans la priode qui prcde
celle de l'ensevelissement.
M. Maillet, surveillant des Ponts et Chausses El-Djem, envoie ensuite
quelques dtails que lui a demands M. le Prsident sur quelques monuments
d'El-Djem. Ces renseignements, trs prcis et donns avec la plus grande
clart, seront compris dans le compte-rendu de l'excursion que la Socit a
faite en ce point. Des remerciements sont adresss M. Maillet pour son obli-
geance.
M. Chevy a adress M. le Prsident des renseignements sur des fouilles
qu'il vient d'excuter Sidi-el-Hani, l'ancien Vicus Augusti, dans un monu-
ment travers par la voie ferre et o, depuis plusieurs annes, on pouvait
voir de jolies mosaques ornementales. M. Chevy a mis jour plusieurs pices
ornes galement de mosaque et des chambres dont le sol en opus musivum
est form de grandes tuiles portes par des piliers en maonnerie. La prsence
de ces suspensur et l'tendue du monument indiquent, n'en pas douter,
qu'il s'agit ici des Thermes publics de la ville antique.
Il est souhaiter que cet difice, assez bien conserv, soit dgag pour que
les touristes, si nombreux, qui vont de Sousse Kairouan puissent y jeter un
coup d' il.
M. Carton dit qu'en fouillant dans une des pices de cette construction il
y a trouv, en 1903, les fragments d'une grande tablette en marbre portant
des lettres.
33

Longueur du fragment : 0m33 ; hauteur : 0m18 ; paisseur : 0m01. Hau-


teur des lettres : 0m09.

M. Chevy, qui M. Carton avait signal celte trouvaille, a fait des fouilles
en ce point et y a trouv un fragment de la mme tablette, le n 4 ci-dessus,
et d'autres fragments d'inscriptions sur marbre blanc dont un seul offre
plusieurs lettres.
Hauteur : 0m19 ; largeur : 0m10 ; paisseur : 0m015. Hauteur des lettres :
8 centimtres.

Les lettres sont extrmement lgantes et les queues, de formes courbes,


se prolongent en pointes effiles au-dessus et au-dessous des deux ou trois
lettres voisines.

Sance du 5 Mai 1904

Lecture est donne de plusieurs notes de M. J. Renault sur des objets


appartenant sa collection. Des doutes assez srieux tant soulevs au sujet
de l'un d'eux, un superbe glaive qui pourrait tre une contrefaon, la Socit
dcide de les publier nanmoins, cette pice prsentant de toutes manires un
rel intrt artistique et documentaire, et sa non authenticit ne paraissant pouvoir
tre dmontre avec certitude.
M. Nogu donne ensuite lecture de la note suivante :

Couvercles inscription et figuration.


Dans une promenade archologique, des membres de la Socit ont pu
constater de visu la grande quantit de fragments de poterie rpandus au ras
du sol, sur le versant du Monte-Testaccio faisant face la mer. Je me suis
aperu qu'aprs les fortes pluies, le terrain, en raison de sa dclivit, tait
ravin en plusieurs endroits, mettant ainsi jour pas mal de dbris de toute
sorte. C'est ainsi que j'ai trouv ces deux couvercles. Le couvercle figuration a
prs de 9cm de diamtre et prsente en relief, sur la face externe, deux ancres
trs nettes et trs apparentes (fig. 1, page suivante).
Le couvercle inscription a le mme diamtre et porte, sur la face externe
galement, l'inscription en relief, crite en caractres romains : ALEXSANDER
(fig. 2, page suivante).
34

A mon grand regret, je n'ai pas trouv proximit les vases auxquels ils
appartenaient. Je dis regret, car ils auraient peut-tre prsent aussi soit des
figurations, soit des inscriptions, et permis de connatre leur usage.
1er mai 1904. Lieutenant NOGU.

M. le docteur Deyrolle a adress au Prsident les deux notes suivantes


relatives des inscriptions romaines :
1 Dans le Djebel Gattouna, au-dessus de Fondouk-Djedid, au lieu dit
Petite-Sicile , un Italien vient de trouver une stle qui est actuellement en-
castre dans sa maison. Elle prsente un sommet en chevron ; les lettres, assez
mal graves, prsentent un caractre archaque. Voici l'inscription :

Lettres dans un cartouche apparent seulement la partie suprieure.


Hauteur de la pierre : 26 centimtres; longueur: 14 centimtres. Hauteur des
lettres : 1 centimtre.

Cette inscription forme une borne limite de champ entre Soliman et


Fondouk-Djedid, 300 mtres au nord de la ligne et mi-distance entre ces
35

deux localits. Les caractres sont fort bien gravs. Hauteur des
caractres : 1re ligne, 98mm ; 2e ligne, 88mm; 3e ligne, 94mm.
M. Carton fait ensuite passer sous les yeux des assistants une
tabella devotionis d'une excellente conservation semblant porter
des caractres romains et berbres qui lui a t remise par un
officier et qu'il se propose d'tudier.
Une discussion s'engage ensuite entre M. le Dr Carton et M.
Chevy sur la destination de tubes en terre cuite, coniques, que ce
dernier a trouvs en grand nombre dans l'hypocauste des thermes
de Sidi-el-Hani et qu'il considre comme des porte-flambeaux.
M. le Dr Carton, qui vient d'en rencontrer galement dans un hy-
pocauste, croit que ces tubes taient destins laisser passer l'air
chaud ou la vapeur d'eau. Ces tubes ont 20 centimtres de hau-
teur (Fig. 1).

Sance du 1 e r Juin 1904

Correspondance. M. Gresse donne lecture d'une lettre qu'il a reue de


M. Gauckler, dont extrait suivant :
.......
Je viens de recevoir votre deuxime fascicule du Bulletin de la S. A. S.
que j'ai lu avec grand intrt, et o j'ai t heureux de trouver quantit de
dessins et croquis, qui seront aussi utiles aux travailleurs que les articles qui
les accompagnent et clairent. Permettez-moi toutefois de protester contre
une coquille qui m'attribue une bourde trop vidente.
Il s'agit de l'opinion que j'aurais exprime M. le lieutenant Jouanne
sur son moule de terre cuite, page 212. J'ai crit amour et non amon :
en ralit, aprs avoir tir une preuve du moule en question, j'ai reconnu
qu'il figure un joli masque, non d'enfant, mais de jeune fille.
Auriez-vous la bont de communiquer cette petite rectification qui de
droit ? Merci d'avance.
Album historique. Le capitaine Lefront prsente l'Album historique
de Sousse qu'il a compos avec un soin et un art remarquables. Tous ses confrres
prennent le plus vif plaisir admirer les vues de Sousse et de ses environs,
datant d'poques diffrentes, qu'il a su runir et grouper avec un got
et un ordre parfaits. C'est l'histoire de Sousse entire qui dfile sous les yeux.
De vives flicitations et des remerciements nombreux sont adresss au capi-
taine Lefront.
Empreintes d'intailles. M. Bietmann reoit les mmes loges pour la
collection d'empreintes d'intailles compose avec un esprit de mthode parfait.
Pierre volcanique (polissoir ?). M. Giorgi prsente une pierre volcani-
que trouve Ksiba prs d'une mosaque par le Docteur Deyrolle. Elle est de
36

forme semi-elliptique, et ses dimensions sont de 22 X 15 X 5. M. Deyrolle


pense que c'tait un polissoir de mosaste; sa forme qui permet de l'avoir
bien en main et l'endroit o elle a t trouve donnent crance celte opinion.
Inscription arabe. M. Yuns prsente ensuite une pierre trouve dans
sa proprit, portant l'inscription suivante en criture barbaresque :

Transcription de l'inscription lapidaire

Traduction

Nous ne reconnaissons ( l'article de la mort), aucun d'entre les envoys


de Dieu (que le Prophte).
37

Nanmoins, nous devons dire :


Nous coutons et nous nous soumettons ;
O notre Dieu, nous implorons votre indulgence;
Puisque c'est vous qu'appartient l'avenir, faites que le jour du juge-
ment dernier ne soit pas un long jour pour nous.
Djoumadi premier de l'anne trois cent trente-un (913 de l're chr-
tienne).
NOTA. La pierre, dont l'inscription est reproduite plus haut, est en
marbre et a 33 centimtres de long sur 18 centimtres de large. Elle a t
trouve par M. Clment Yuns dans son jardin situ Oued-Bliban (circons-
cription de Sousse).
L'inscription grave sur cette pierre tant un passage des plus saillants du
Coran, les musulmans ne s'en servent gnralement pas pour les pierres tom-
bales, craignant de l'exposer ainsi au pitinement des animaux et le profa-
nation des infidles.
Cette pierre devait trs certainement tre place l'entre d'un monument
religieux.
M. le Prsident donne lecture de la note suivante de M. le Docteur
Deyrolle :
Note sur des chapiteaux avec croix Monastir et Kairouan. Le
monastre qui a donn son nom El Monastir parait n'avoir gure laiss de
traces que dans le nom de la ville. Toutefois, il existe l'extrieur de la porte
Nord, voisine de la Kasbah et qui donne sur le cimetire,
une colonne surmonte d'un chapiteau, l'un et l'autre en
marbre blanc. Le chapiteau prsente une tablette suprieure
(abaque) carre; la corbeille carie sa jonction
avec l'abaque est cylindrique sa partie infrieure.
Les quatre artes sont ornes d'une moulure, la face,
antrieure porte un encadrement form d'une baguette
et une croix latine, patte, dont le haut et le bas se confondent
avec la baguette prcite. La figure ci-contre
en donne nettement une ide.
Je pensai devoir attribuer ce chapiteau une origine antrieure l'invasion
musulmane, parce que les Espagnols et les Gnois qui ont occup Monastir
n'ont gure eu le temps de construire. Une observation inattendue
vient de me confirmer dans cette hypothse.
J'ai retrouv quatre chapiteaux identiques dans la mosque de Sidi Okb
Kairouan, dans le pristyle Nord Mais ici les quatre faces sont visibles dans
trois cas, un autre est perdu dans la maonnerie. Dans deux de ces chapiteaux
la croix a t dtruite certainement avec intention, mais reconnaissable cause
des palmettes identiques sur les quatre chapiteaux qui occupent les faces lat-
rales et qui sont bien conserves ; enfin, la quatrime face offre un disque en
38

relief qui parait tre la reprsentation de l'hostie eucharistique. Je donne ci-


dessous une figure du dveloppement de ces chapiteaux.

Chapiteaux de la Mosque de Sidi-Okba (Dveloppement)

Le fait de l'inclusion de ces chapiteaux, sans aucun doute transports de


Monastir la Grande Mosque, implique une date antrieure l'hgire, que
l'on pourrait, en le cas prsent, puisqu'ils ne se rattachent aucun ordre,
attribuer pour plusieurs raisons, en France, l'poque mrovingienne. Les
raisons seraient :
1. la forme de la croix ;
2. le disque (globe du monde ou eucharistie ?) signe se retrouvant sur les
monnaies mrovingiennes ;
3. l'aspect gnral du chapiteau. Dr DEYROLLE

MARCEL CORDIER,

Secrtaire gnral,
EXCURSIONS ET PROMENADES

Monastir (Ruspina)

Le 13 dcembre 1903, les excursionnistes qu'un vent assez violent et


froid n'avait pas effrays suivaient en voiture la grand route de Monastir, et
jetaient, en passant, un coup d' il sur le vieux pont bti par Si Osman, main-
tenant abandonn. Un peu plus loin, sur la gauche, un massif de blocage s'lve
sur un banc de sable spar de la chausse par une large nappe d'eau qui remplit
ce point de la sebkha. Il est impossible d'accder, d'ici, ces ruines qui seraient,
d'aprs M. Saladin, les restes d'un ancien pont; il devait s'lever
sans doute au point du passage de la route suivie jadis par les troupes de Csar.
A la porte de la ville de Monastir, je signale une auge allonge, troite, en
marbre blanc, orne de jolis rinceaux dus l'art arabe. Tout le monde
exprime le regret de voir cette pice ainsi expose aux dprdations.
Prs du nouvel htel de ville on vient d'amener, je ne sais d'o, une jolie
vasque en marbre blanc section horizontale octogonale. Chaque face est
dcore par une large feuille d'acanthe et les artes voisines semblent former
la lige d'un feuillage qui s'incurve gracieusement au-dessus de la feuille(1).
Le long du rivage nous visitons ce qui fut autrefois le plus occidental des
lots de Monastir, actuellement reli par un isthme la terre ferme. Dans la
roche, si riche en magnifiques fossiles, de la petite le, ont t creuses deux
chambres, deux ou trois mtres au-dessus de la mer. L'une prcde l'autre.
Celle qui tait situe en avant a actuellement sa paroi antrieure dtruite. Elle
a 2m 60 latralement et prsente, dans sa paroi mridionale, 60 centimtres
au-dessus du sol, une niche de 1 mtre de hauteur sur 80 centimtres de largeur
et 30 centimtres de profondeur. La seconde chambre donnait sur celle-
ci par une baie qui offre des traces de trous de gonds indiquant qu'il y avait
autrefois une porte entre les deux. Elle a 2m60 de longueur sur 1m 45 de largeur
et le plafond presque plat est trs lgrement cintr.
Dans l'le de la Tonnara, nous visitons le Hammam bent Sultane et la des-
cription qu'en donne Tissot ne nous parat pas tout fait exacte. C'tait
videmment un endroit amnag pour la balnation. On verra plus loin qu'il
rappelle certaines parties du souterrain d'El-Kahlia. Une salle, qui n'est pas
demi-circulaire, mais sensiblement carre, a t creuse dans le roc et s'ouvre

(1) Depuis notre excursion, cette vasque a t place dans un jardin situ en avant
de l'cole.
40

vers la mer. Elle a environ 3 mtres de ct et un peu plus de 2 mtres de


hauteur. Tout autour, sur les trois parois, rgne une banquette de 50 centimtres
de largeur.
Il y avait autrefois en avant de cette pice une autre salle parois maonnes
et dont le fond tait rgulirement taill, de manire former une piscine
entoure d'une marche qui a paru n'tre d'ailleurs autre chose qu'un rebord
mnag pour l'tablissement des murs. Cette salle a 8 mtres de ct; vers
l'angle sud-ouest il y avait une porte taille dans le rocher. Deux canaux,
larges de 1 mtre, situs prs des angles intrieurs de la piscine et qui la font
communiquer avec la mer, taient ferms par des vannes dont les mortaises
existent encore en partie. Plusieurs des excursionnistes soutiennent que le
long de la cte, et en avant de ces deux pices, on aperoit dans l'eau les restes
d'un long couloir en partie maonn. Si cela avait exist, la ressemblance
entre le Hammam bent Sultane et le bain devait tre bien grande.
J'estime qu'il serait intressant de dgager le bassin des pierres qu'il
renferme. Mais on voit dj, par sa disposition, quelle tait la destination de cet
ensemble. C'tait donc en somme une piscine alimente par la mer, avec
laquelle elle communiquait par deux vannes et donnant du ct oppos sur
une salle de repos creuse dans le roc.
Nous cherchons en vain la porte sculpte dans le rocher que M. Saladin a
dessine dans son rapport, p. 7, fig. 8. Les employs de la " Tonnara " nous
disent que les rochers o elle se trouvait ont t taills et que toute la partie de
l'le o ils taient a compltement chang d'aspect. Presss par le temps, nous nous
contentons de ces explications. D'ailleurs, l'extraction facile avec laquelle se fait
cette pierre tendre permet d'en enlever de grandes quantits et la surface de
l'le diminue certainement peu peu. Nous voyons un des silos en forme de
bouteille signals par M. Saladin. C'est une forme qui a t d'ailleurs trs
frquente en ce pays l'poque romaine. J'en ai vu dans la ncropole
d'Hadrumte. Auprs de la ncropole de Siagu, il y a un silo maonn en forme
de bouteille. De mme dans la ruine que j'ai visite prs de Hergla. J'en ai
relev plus de vingt dans le plateau qui s'tend entre Akouda et Sousse. On
sait enfin que les Africains modernes en creusent encore, eux aussi.
De l'le de la Tonnara, la Socit se fait conduire, en barque, devant les
nombreuses chambres qui sont creuses dans l'le d'Oustania et qui lui donnent,
distance, un si curieux aspect. C'est un vritable village de Troglodytes
que l'on croit avoir sous les yeux. On s'explique qu'on ait pu aussi facilement
creuser des abris rguliers dans la roche qui, mouille, se taille trs ais-
ment.
Les excursionnistes n'ont pas, leur grand regret, le temps de visiter toutes
ces chambres, et nous n'avons pu que nous faire arrter devant quelques-
unes d'entre elles pour les photographier. Voici nanmoins quels sont leurs
caractres les plus frappants : au nombre d'une trentaine, ces pices, par-
fois isoles, sont souvent apparies, l'une prcdant l'autre, et toutes deux
41

communiquant par une porte. Le sol de la plupart d'entre elles est 2, 3, 6


mtres et plus au-dessus de la mer. Il y a, en effet, en un endroit, deux tages
superposs. Le plafond est lgrement cintr, presque plat, et les parois inclines
l'une vers l'autre. Le profil des votes m'a tout fait, rappel celui des haouanet,
et c'est ce qui me fait penser que ces deux genres de cryptes sont l' uvre
de mmes populations, c'est--dire puniques. Mais leurs plus grandes dimen-
sions, celles des portes, qui sont autrement leves que les communications des
haouanet, tablissent entre ces deux genres de monuments des diffrences qui
sont plus apparentes que relles, car il est possible qu'aprs avoir t des
spultures ces caveaux aient t agrandis et amnags par des pcheurs.
D'ailleurs, personne n'a jusqu'ici tudi en dtail ces chambres et il est
souhaiter qu'un des Membres de la S. A. S. en lve soigneusement les plans et
coupes, et surtout recherche s'il n'y a pas traces de dcorations en peinture ou
en sculpture et des spultures creuses dans le sol ou des banquettes.
Le rivage qui fait face l'le d'Oustania est domin par la pittoresque falaise
qui porte la Kasbah. On sait, par la description qu'El Bekri a donne du Ribat
de Monastir, que cette forteresse avait, au Ixe sicle de notre re, le caractre
de forteresse et de monastre. On ne voit plus, l'intrieur de la vieille forteresse,
que murs crouls ; le ddale des escaliers ne mne plus qu' des salles ouvertes
tous les vents. Le jour o l'on entreprendra la dmolition de ces
murs on dcouvrira certainement, sous les pltres, des dbris intressants.
Souhaitons qu'un de nos confrres ait alors l'occasion de suivre les travaux. Il
semble y avoir, l'intrieur du monument, une grande muraille plus ancienne
et qui, de l'avis de M. le commandant Giorgi, .serait byzantine, ce qu'il est
difficile de savoir actuellement cause de l'enduit qui en recouvre les pierres.
Il serait intressant de conserver cette partie de la Kasbah et de sauver aussi
les colonnes et les deux jolis chapiteaux romains de l'entre.
Dans une tour de ce mur suppos byzantin, j'aperois deux belles consoles
romaines ou plutt byzantines ornes leur partie antrieure de fleurons et,
sur les cts, d'un beau feuillage formant des espces de rinceaux. La chaux
recouvrait en partie ces sculptures, que je gratte pour mieux admirer l'art
avec lequel elles ont t sculptes.
Les plus audacieux d'entre nous gravissent les marches uses de la tour de
la Kasbah. C'est aussi de l'archologie, ou plutt de l'histoire qu'on peut faire
en une telle ascension. Tout en admirant le vaste panorama qui s'tend du cap
Bon au ras Dimas, et en numrant les taches blanches, que forment dans la
sombre verdure des oliviers ou sur le fond jaune ple des sebkha, Nabeul,
Hammamet, Hergla, Hammam-Sousse, Akouda, Sousse, toute resplendissante,
Lemta, etc., nous voquons les principaux pisodes de la clbre campagne
de Csar, que les habitants de Ruspina ont trs bien pu suivre des tours de leur ville.
L'aprs-midi, c'est la partie sud des environs de Monastir que nous visitons.
En nous dirigeant vers El-Kahlia, nous passons auprs d'un puits o M.
Terras nous indique une jolie inscription arabe.
42

Avant d'arriver au souterrain nous apercevons, la base de la presqu'le,


entre les dernires maisons et la mer, deux bases attiques en marbre blanc qu'a
vues galement. M. Saladin. Leur diamtre suprieur est de 85 centimtres.
Sont-elles en place, ont-elles t amenes l pour servir aux constructions du
fameux Si Osman ? Il a sembl plusieurs des membres de l'excursion que le
paralllisme des bords des plinthes devait faire admettre la premire ide, mais
une fouille de quelques centimtres de profondeur serait ncessaire pour
trancher la question. Toutes deux prsentent, leur partie suprieure, une cavit
et une rainure allant de celle-ci la priphrie. L'une d'elles offre en outre
quatre lettres assez nettes. C'est une marque de pose :

ILES

L'L n'est pas certain. La hauteur des caractres est de cinq centimtres.
Non loin de l se trouve une autre base, sur un d de 65 centimtres de
hauteur, qu'a dessine M. Saladin (1).
Un escalier d'une dizaine de marches nous conduit dans le souterrain
d'El-Kahlia. Devant nous un long couloir va jusqu' la mer, o la lumire en est
demi-ferme par un mur moderne. Il a 2 m 20 de largeur, 1m10 de hauteur
sur les cts et 2 mtres au sommet, le plafond tant trs lgrement
cintr. A peine a-t-on avanc de quelques pas que l'on a, gauche, une
petite salle carre entoure par un banc taill dans le rocher et, droite, en
face de cette salle, un couloir perpendiculaire au premier. Mais en continuant
suivre celui-ci on voit, 16 mtres plus loin, un enfoncement non pas
demi-circulaire comme on l'a dessin, mais carr, mesurant 1 mtre de pro-
fondeur et 1 mtre de largeur. Le couloir qui fait face la salle aux bancs
laisse droite une petite salle longue, vote en berceau, puis un bassin, et
aboutit une chambre qui s'tend sur la gauche et dont la paroi antrieure a
t ronge par les flots. La petite salle est vote en berceau, contrairement
aux antres pices voisines. Elle prsente deux ouvertures longues qui, peu rgu-
lires, semblent avoir t pratiques une poque relativement rcente. Au
point o elle est en communication avec le couloir, les parois et la vote
offrent une large rainure qui a d videmment loger jadis les extrmits d'un
mur fermant cette ouverture. Enfin, la vote, en grande partie dtruite,
semble offrir les traces de deux regards. Tous ces dtails m'incitent penser
qu'il y eut jadis ici une citerne. Le bassin qui se trouve aprs la citerne,
droite du petit couloir, renferme une eau limpide et claire. C'tait videmment
une piscine.
J'ai indiqu plus haut les ressemblances que cet amnagement a avec le
Hammam ben Sultane. C'tait videmment un endroit o l'on devait venir
s'asseoir au frais, tout en ayant sous les yeux la surface bleue de la petite cri-

(1) Loc, cit., p. 8, fig. 10.


43

que, trs anime sans doute jadis. Il est assez naturel qu'il y ait eu l, ct
de la grande cavit pleine d'une eau calme et abrite du soleil o l'on se bai-
gnait, un rservoir d'eau douce.
On ne voit pas quelle utilit aurait eue le plus long; couloir. Conduisait-il
quelque autre pice actuellement disparue? Servait-il tout simplement assurer
laration ? Ne serait-ce pas un plan inclin par lequel on aurait descendu
jusqu' la mer ou bien par o l'on aurait pu hisser une banque?
Le promontoire dans lequel sont creuses ces galeries offre une berge ver-
ticale, avec des angles trs nets. A une dizaine de mtres eu avant d'elle, M.
Manigold nous indique six compartiments carrs d'environ 2 mtres de cts,
limits par des cloisons qui doivent avoir une quarantaine de centimtres
d'paisseur. Il nous parat difficile de croire, avec M. Saladin, que ces cavits
aient t pratiques pour extraire de la pierre. On ne voit pas pourquoi, dans
ce cas, on aurait laiss des cloisons. Cela a tout fait l'air d'tre la base de
constructions, et peut-tre de bassins.
Tout ceci, bassins et galeries, semble avoir appartenu un vaste ensemble,
quelque riche palais ou quelque tablissement de bains construit l'extrmit
de la presqu'le et dans le soubassement duquel il se trouvait.
Quittant regret tous ces dtails que, faute de temps, nous ne pouvons
qu'effleurer, nous nous dirigeons vers le port, qui est deux kilomtres de la
ville. En suivant le bord do la mer, sur toute notre route, nous remarquons
des affleurements de murs, d'innombrables tessons. Je ne tarde pas attirer
l'attention des excursionnistes sur la grande quantit de cubes de mosaques
que l'on rencontre. On en trouve chaque pas sur une longueur de prs d'un
kilomtre, et on remarque mme parfois de grandes plaques dtaches et dont
quelques-unes portent des cubes trs fins et de couleurs varies.
Tous ces vestiges montrent donc que si, comme on l'a crit, Ruspina s'levait
primitivement l'extrmit de la pointe o est actuellement Monastir, si,
le port a pu un moment donn en tre spar par un espace de deux kilomtres,
il n'en a pas t ainsi l'poque de la prosprit romaine (1). Du promontoire
l'emplacement actuel du port, il y avait une suite ininterrompue
d'habitations. On saisit l'tendue considrable que semble avoir eue alors
l'antique cit.
On voit que Monastir offre des restes dignes d'tre tudis et qu'avec un
peu d'observation on pourrait y faire d'intressantes dcouvertes.
DOCTEUR CARTON,
Mdecin Major de 1re Classe au 4e Tirailleurs,
Membre non rsidant du Comit des Travaux Historiques et Scientifiques
prs le Ministre de l'Instruction publique.

(1) Il semble d'ailleurs bien extraordinaire que Ruspina ait t aussi loigne de son
port. C'est contraire cette grande loi qui fait que les habitations se pressent toujours
proximit des points de communication avec l'extrieur, ports, quais, marchs et, de
nos jours, gares, etc.
44

Haouanet de l'lot de la Quarantaine (Monastir) (l)


L'lot de la Quarantaine (Djezeret-el-Oustania) montre du rivage de Mo-
nastir les ouvertures de 23 grottes tranchant sur la belle teinte dore des
couches de grs et de sables grseux plongeant rgulirement vers le nord.
Les grs de la partie N.-O. sont plus durs, ceux de la partie S. plus friables.
Aussi les chambres du nord sont-elles mieux conserves.
Du rivage ou d'une barque rasant l'lot, on ne peut en apercevoir
la complication, la rgularit et les dtails. En effet, ces chambres ont des
arrire-chambres. Elles sont ornes de niches rgulires creuses dans la paroi
que l'on peut ranger en quatre catgories :
1 Niches en quartiers ou cul-de-four de 0,20 0,50 centimtres de large
(niches rondes = nr) ;
2 Niches votes elliptiques, beaucoup plus larges que longues, atteignant
parfois presque un mtre, mais n'admettant pas un cadavre allong (niches
longues = nl) ;
3 Petites niches admettant le poing parfois irrgulires, parfois rectang-
laires ou semi-hmi-phrides (petites niches = np) ;
4 Niches rectangulaires = nc.
Enfin dans ces grottes ou devant elles, on remarque dans le sol des cavits
larges de 0m 60/1m 80, avec ou sans moulures, destines l'encastrement d'une
dalle et dans un cas ayant la forme anthropode d'un cercueil gyptien (spulcre).

Voici la description de ces chambres que j'ai appeles groupe O, numrotes


en partant du N. Toutes atteignent 2 mtres de haut.
O1 rectangulaire, c'est le plus grand hanout que j'ai rencontr; il loge

(1) M. le Docteur Deyrolle a bien voulu, ma demande, crire cette tude des
chambres de l'lot de Monastir destine tre mise la suite du compte-rendu de l'ex-
cursion ci-dessus. Dr CARTON.
45

actuellement deux canots de pche, ct de la rectangulaire qui occupe le


coin S la paroi S E, une petite fentre sans doute accidentelle ( n r = 1, nl =
2, nc == 2, np = 5) un spulcre.
O2 a sa paroi antrieure (et sa porte dtruite) (nr = 4, nc = 1,np = 2)
4 spulcres e l l e communique avec O 3 par une porte bien conserve.
O3 prend jour par deux ouvertures irrgulires accidentelles, l'entre se
fa i s a n t p a r O 2 ( n r = 1 , n l = 2 , n c = 2 , n p = 1 ) .
O 4 on y pntre par une ouverture occidentale par un escalier de quelques
marches; elle est en forme du cul de four (nl = 2, np = 4); elle communique
avec O5.
O 5 rectangulaire, spacieuse (nc = 2, np = 1) prsente une porte sur
l'extrieur, deux spulcres, communique avec O 4 et O6 et prsente une grande
niche.
O 6 rectangulaire, 2 ouvertures artificielles, communique au N avec O 5 ou
S avec O8 l'E avec O7 .
O 7 en cul de four, ne prend jour que par sa porte sur O 6 (nr = 1).
O 8 a sa paroi extrieure dtruite, rectangulaire (nl = 1, np = 4) communique
avec O 6 , O 9 , O 10 , O 9 prend jour par O 8 rectangulaire.
O 10 rectangulaire, a une porte et une petite ouverture sur la mer, communique
avec O 8 et O 11 la cloison entre O 10 et O 11 qui est de dimension moindre
est dtruite (n c = 1) O 1 1 (nr = 2, nl = 1. nc = 1. np = 2).
O12 et O 13 prsentent les mmes rapports que O 10 et O 11 O 12 , communi-
q u e avec O 1 4 (n r = 2 , n l = 3, np = 2) 2 spulcres.
O13 (nr = 2, nl = 1, np = 4) ses deux niches rondes sont ornes d'un
cercle concentrique, une niche de la paroi du fond descend jusqu'au sol, elle
prsente hauteur d'appui des rainures profondes pouvant admettre l'extrmit
de planches formant tables.
O 14 plus petite ( n r = 4) paroi antrieure dtruite.
O 15 paroi antrieure dtruite dans l'angle N un couloir donne accs
dans O 16 (nr = 4, nl = 1, nc = 2) deux dessins, une croix et une flche.
O 16 est orient diffremment, le couloir a la partie O de la paroi S (nr =
1, nl = 2, nc = 2) sur sa paroi O une partie pentagonale, cerne d'une ligne
en creux, reprsente un fronton de temple grec au-dessus d'une niche, c'est
un travail peut-tre rcent.
A partir de ce moment le grs tant plus friable les avant-chambres et les
portes sont presque toutes dtruites.
O 17 prsente une disposition toute nouvelle ; c'est une sorte d'abside avec
quatre grandes niches rayonnantes comportant de petites niches secondaires
mobilier funraire (nr = 6, nl= 1) on peut compter 9 spulcres dans le sol.
O 18 rectangulaire ( n r = 3, nl = 2, np = 1) 5 spulcres dont deux trs
nets.
O 19 trs dtruite, rectangulaire, communique avec O 18 et O 20 (np = r).
O 2 0 rectangulaire (nr = 1, nl = 1, np = 4) 2 spulcres.
46

O21 r e c t a n g u l a i r e (n r = 1 , n l = 2 , n p = 3 .
O22 rectangulaire (nl = 1, nc = 1, np = 1) communique avec O 2 1 et O 2 3 .
O23 rectan gulaire (n l = 2, nc = 1).
O24 rectangulaire rduite sa moiti postrieure.
O 25 (bis) c'est l'emplacement d'une chambre dtruite, place en contre-
bas de O 24 se prsente sous forme d'un creux de 1 mtre de profondeur au
milieu de la plateforme environnante.
O 25 circulaire, en coupole, perce d'une ouverture circulaire au sommet
de la vote, ct une niche.
O26 r e ct an gu l ai r e, (nr = 2 , nl = 1. np = 2 ).
O27 r e c t a n g u l a i r e (n r = 1, nc = 1 , np = 4 ) .
O28 trapzodale, dans son plan l'angle N E est rectangulaire, l'angle SE
aigu (nr = 2, nc = 2).
Devant O 27 et O 28, on remarque 5 spulcres dont deux avec encastrements
trs nets, le 4 e prsentant sa tte une cavit en cuelle.
O30 trs dtruite en avant un spulcre elle parait avoir t l'arrire
chambre antrieure dtruite.
O30 arrondie, 2 spulcres se faisaient suite (nl = 1, nc = 2).
O 31 arrondie, 1 spulcre anthropode (nr = 3, np = 3) prsente une banquette
semi-circulaire.
O32 arrondie parait avoir prsente une banquette amnage tout l'entour
et o sont creuses des cuelles.
O33 rectangulaire s'ouvre par une porte dans O 32 qui est en contre-bas.
En rsum, ce sont bien l les haouanet les plus vastes de tous ceux que j ai
visits jusqu'ici ; leurs particularits sont :
1 La hauteur inaccoutume des portes, ce que permet l'paisseur du banc
de grs ;
2 Leurs niches longues.
Les spulcres encastrements sont analogues ceux que j'ai dcrits dans les
groupes d'haouanet d'El Harouri et de Beni-Aech.
La forme en cul-de-four rappelle fort celles des tombeaux phniciens que
le docteur Carton m'a montrs aux environs de Sousse et des haouanet de
Chaouach qu'il a dcrits.
Le spulcre anthropode parait rappeler une influence gyptienne.

D r DEYROLLE, Mdecin Aide-Major,

LICENCI S-SCIENCES.
47

Thapsus

Excursion du 14 mars 1904. Les ruines de Thapsus, actuellement


ras Dimas, situes entre Monastir et Mahdia, sont beaucoup trop dtruites
pour qu'une visite trs rapide ait pu y permettre des constatations importantes.
Je me bornerai signaler quelques points qui ont retenu particulirement
l'attention des membres de la Socit.
D'autre part, comme il est toujours u t i l e de recueillir des renseignements
qui pourraient sans cela tre compltement perdus, je commencerai par fixer
ici mme ceux qui nous ont t fournis par deux membres, quoiqu'ils soient
entirement trangers au sujet de cet article.
M. Dauphin, qui est en Tunisie depuis si longtemps et dont la mmoire
est meuble de souvenirs antrieurs l'occupation, nous a d i t avoir vu l'arc-
de-triomphe de Bulla-Regia, compltement dtruit depuis, dont je n'ai pu
retrouver l'emplacement, et qui a t reproduit dans leur rcit de voyage en
Tunisie par MM. Gagnat et Saladin. Il se rappelle parfaitement y avoir vu,
dans les deux niches, une statue prive de la tte.
On a souvent accus la Compagnie des chemins de fer de Bne Guelma
d'avoir dtruit cet difice. Il parat que c'est tort, puisque la gare de
Souk-el-Arba et les ponts sur la Medjerdah taient construits lors de la visite
que leur fit M. Dauphin, immdiatement aprs rtablissement de la voie
ferre.
M. Quinet, Directeur de l'Ecole de Moknine, qui la Socit doit
l'organisation de cette excursion, nous a signal l'existence, dans cette localit,
d'une villa romaine dans laquelle existe une mosaque offrant des figurations
de poissons. C'est peut-tre une autre mosaque, existant aussi Moknine, qui
m'a t signale par M. Dubos et dont le motif central serait une tte de
Neptune, un peu abime d'un excellent travail. L'existence de ces mosaques
a d'ailleurs t signale depuis plusieurs annes au Service des Antiquits.
Ce qui nous a le plus longuement arrts, Thapsus, ce sont les citernes
publiques et leur aqueduc. Il nous a t impossible d'apprendre, tant de M.
Epinat, qui prenait part cette excursion, que des indignes, o il prenait
naissance. Notre confrre nous a seulement expos qu' environ 200 mtres
vers le S.-O. la conduite devient souterraine et prsente sur son parcours un
certain nombre de regards.
Elle aboutit au milieu du long ct correspondant des rservoirs. Aucune
des votes des compartiments ne subsiste intacte, ce qui est d la manire
dont elles ont t construites. Il semble qu'on s'y soit pris en trois fois. Tout
dabord les pieds droits ont t difis; ensuite, sur le bord suprieur de ceux-
ci, on a coul une couche horizontale de ciment. C'est presque partout la face
plane constitue pour cet enduit qui forme la partie la plus leve de ce qui
subsiste des murs.
Puis, sur la charpente en forme de cintre destine permettre l'tablisse-
48

ment des votes, on a coul du bton ou du blocage ou, si l'on veut, et pour
ne pas infirmer ce qu'a crit Daux, pos les voussoirs et coul le bton ou le
blocage dans leur intervalle formant tympan jusqu' une
certaine hauteur, mais en s'arrtant avant de fermer
compltement le cintre, la vote en berceau de
chaque compartiment prsentant ce moment une
longue fente longitudinale l'endroit de la clef de
vote.
Aussitt aprs on aurait coul la plate-forme en bton
sur la sur face sensiblement plane constitue par le dos
du cintre en charpente et la face suprieure du tympan,
c'est--dire que chacune des trois parties aurait t tablie
successivement de la mme manire que, dans une colon
nade, le sont le fut, le chapiteau et l'entablement (voir
fig.1).
L'enduit qui revt intrieurement ces rservoirs offre une premire couche,
applique sur le blocage, d'une paisseur moyenne de 4 centimtres et forme de
petites pierres concasses et de cendre de charbon de bois(1). Elle est recouverte
par une couche de ciment de tuileaux d'un centimtre. M. Dauphin a fait
remarquer que le mortier runissant les pierres du blocage des pieds droits
ne renferme aucun lment de ce genre. Un enduit brun, qui n'a pas un mil-
limtre d'paisseur, recouvre le prcdent. Il semble constitu par une couche
de calcaire laiss par les eaux.
L'appareil formant les cloisons, et que Daux considre comme du romain trs
ancien, ne m'a pas paru trs diffrent de celui de beaucoup de citernes publiques
de villes africaines. Les moellons en sont peut-tre tout au plus un peu
plus rgulirement disposs. Les parpaings dont Daux a galement parl sont
sans doute des pierres plates disposes en assises horizontales. Il m'a t
impossible de vrifier si elles traversent rellement la muraille. Cet appareil
est de tous points semblable celui qui forme les murs du grand difice que
j'ai fouill El-Kenissia pour le compte de l'Association Historique.
La prsence de nombreuses poteries cylindriques pourrait faire penser
que les votes en blocage avaient t tablies sur des cintres forms par elles.
Je n'ai pu trouver de votes assez bien conserves pour me permettre de m'as-
surer de ce fait.
De la face N.-E de la citerne, l'aqueduc se dirige vers la ville. On le suit
sur une certaine longueur et l'on peut mme en reconnatre un embranche-
ment. Le specus en mesure 50 centimtres de largeur et les parois en ont
45 centimtres d'paisseur. Un solin les spare du radier.
En ce qui concerne la ville en elle-mme, sa triple enceinte, les monuments
et tout ce que Daux a figur dans le plan qu'a publi Tissot, il nous a t

(1) Un chantillon de cet enduit a t recueilli par M. Manigold et plac par lui
dans la collection d'tudes dont il est charg.
EXCURSION A THAPSUS

A. Vue du mle antique. B. et C. Vues des citernes puniques


Coupe trouve Thapsus (page 50)
49

impossible de rien distinguer, l'exception de l'amphithtre et de la cita-


delle.
De nombreuses citernes de toutes formes et de toutes dimensions, des
dbris d'inscriptions, de tablettes en marbres, de colonnes, rvlent seuls la
grande richesse de l'antique cit. Beaucoup de membres de la Socit ont t
frapps par les nombreux fragments de lampes chrtiennes qui jonchent le sol.
En ce qui concerne le mle, dont une grande partie encore battue par les
flots est si bien conserve, il m'a sembl que la cause principale de sa des-
truction est l'existence du canal central, perpendiculaire aux trois ranges de
souffleurs , qui rgne dans toute sa longueur. Ce canal, faisant face la
pleine mer, offre un point d'attaque aux vagues qui agrandissent cette ouverture
et la transforment en une cavit qui s'effondre ensuite. La disposition des
blocs crouls confirme cette observation, que l'on peut d'ailleurs saisir actuel-
lement sur le vif.
Un des points les plus intressants de Thapsus est assurment la ncropole
punique, qui a t fouille par MM. Epinat et Novak. Il faut esprer vivement
que quelques-uns des hypoges, trs curieux plusieurs points de vue,
pourront tre dgags compltement et protgs. Sur la bande de collines o
ils se trouvent, ils sont si rapprochs que pour passer de l'un l'autre les vio-
lateurs n'ont eu le plus souvent qu' percer la mince cloison qui les sparait.
Ils ont pu visiter ainsi d'enfilade jusqu' vingt caveaux.
A chaque instant, sous nos pas, dans la piste que nous suivons, nous
voyons la section carre formant presque damier, par leur rapprochement, des
ouvertures remplies de terre des spultures.
Je ne veux point, anticiper sur la description de ces tombeaux que doivent
donner ceux qui les ont dcouverts. Mais je dois noter l'aspect tout particulier
qu'ils offrent, avec leur puits trs large, sur les parois duquel est accot un
petit escalier trs troit et le plus souvent d'une parfaite conservation. Un
certain nombre des ouvertures de ces tombes- offrent un encastrement destin
recevoir la dalle de fermeture et, dans ce cas, leur aspect rappelle tout fait
celui des haouanet.
Cet encastrement, les dimensions des chambres funraires, la surface lg-
rement cintre qui forme le plafond, la prsence de niches et la technique
mme du procd employ pour creuser ces pices, me confirment dans cette
opinion que les haouanet du Djebel Behelil tudies par M. le Docteur Deyrolle,
celles que j'ai vues Chaouach, au Gorra, prs de Dougga, et qu'on rencontre
en diffrents autres points de l'Afrique du Nord sont toutes des tombes
puniques.
En outre, l'existence de spultures de ce type constamment le mme sur
tout ce littoral, de Mahdia Monastir, me pousse admettre que les chambres
qui se trouvent dans les iles de cette dernire localit ont eu la mme destina-
tion. La forme et la technique en sont d'ailleurs tout fait analogues.
En ce qui concerne cette ncropole de Thapsus, il rsulte des renseigne-
50

ments qui m'ont t fort obligeamment fournis par M. Novak qu'elle a t viole
une poque trs ancienne, mais que les rares caveaux qui ont t trouvs
intacts renfermaient un trs riche mobilier funraire : lampes, vases, coupes,
assiettes d'importation italo-grecque et de fabrication locale; quelques-uns de
ces objets portaient des figurations en relief. M. Novak y a trouv des statuettes
en terre cuite ornes de couleurs et mme dores, ainsi qu'un certain nombre
d'amulettes, scarabes, perles de colliers, etc.
Il est souhaiter qu'une dcouverte aussi intressante et aussi riche soit
publie le plus tt possible par ses auteurs avec la description des objets les
plus remarquables.
Je dois l'obligeance de M. l'abb de Smet communication de la photographie
d'une jolie coupe trouve dans une de ces chambres par MM. Ch. Epinat
et J. Violante. Ce vase, sans les anses, mesure 145 millimtres de diamtre
suivant l'axe passant par celles-ci et 140 millimtres suivant l'axe perpendi-
culaire. Il a 46 millimtres de hauteur. C'est la proprit de M. Lebihan qui,
en le dbarrassant de la gangue calcaire qui l'enveloppait, dcouvrit la couverte
d'un rouge vif alternant avec une teinte bronze fonc et dans le fond de la
coupe la reprsentation d'une tte de femme profil grec reposant dans la
concavit d'un croissant (voir figures page prcdente, feuilles intercalaire).
Je n'ai pu retrouver les grandes carrires dont M. Saladin parle dans son
rapport. D'aprs les renseignements que M. Epinat a eu l'obligeance de prendre
ce sujet, il n'y en aurait pas ici mme. Mais on signale l'existence de
trs grandes carrires de pierre excellente 6 kilomtres de Thapsus, vers
Teboulba.

DOCTEUR CARTON,

Prsident.
LISTE DES OBJETS ENTRS AU MUSE DE SOUSSE

depuis la publication du Bulletin n 1

Sergent ICARD Lampe en bronze.


M. MNAGE Un porte-feu en terre.
Capitaine MONTALIER Stle en calcaire de 0 m77 x 0 m60, personnage dans
une niche ;
Stle brise en calcaire ;
Stle en calcaire d e 0 m29 x 0 m28, personnage dans
une niche tenant une pomme de pin dans ses mains ;
Un chapiteau en calcaire ;
Une pierre tombale avec inscription Domitia ;
8 lampes queue pleine, terre rouge;
8 lampes queue perce, avec sujet ;
7 marmites, 22 cuelles, 2 plats, 1 brle-parfums,
1 petit vase en terre rouge, 14 pots une anse,
2 boucles d'oreilles verre, clous.
Dr CARTON Tuiles estampilles de Sousse ;
Amphore punique estampille ;
Tuiles de tombes romaines ;
Moulage en pltre de la lampe en bronze trouve Souk-
Ahras par le Dr Rouquette.
r
D CARTON 175 stles votives (fouilles de MM. Carton et Ordioni
El-Knissia) ;
25 lampes votives d'El-Knissia (mme provenance);
10 unguentaria et vases d'El-Knissia (mme prove-
nance) ;
Tuiles avec fils de plomb ayant servi les attacher,
plaques de plomb et stucs du sanctuaire d'El-Knissia
(mme provenance).
DUBOS Pltres, verre, lampes arabes.
S. A. S. Les deux mosaques de l'oued Blibane (fouilles de M. le
Commandant Giorgi).
CATALOGUEDELACOLLECTIOND TUDES
dela S.A.S.

La Bibliothque de notre Socit tant en bonne voie de prosprit, il importait


d'tablir ct d'elle une nouvelle source de renseignements laquelle
pourraient puiser les Membres dsireux non seulement de lire, mais encore de
comparer.
C'est dans ce but que la collection d'tudes a t cre, et la S. A. S. a bien
voulu me charger de son organisation.
Constitue d'lments authentiques provenant des ruines si nombreuses et
si intressantes dont est jonch le sol de la Tunisie, cette collection a, pour la
facilit des recherches, t divise en sries dont le nombre pourra par la suite
tre augment.
Actuellement trois sries sont ouvertes au catalogue.
Srie A. Ciments, Enduits, Mortiers.
B. Lampes.
C. Poteries, Vases.
Incessamment la srie D, MONNAIES, sera ouverte.
De mme que pour la Bibliothque, il sera publi chaque anne, un suppl-
ment au catalogue.
P.MANIGOLD,
Officier dAdministration dArtillerie
Membre du comit dtudes.

(1) Sera class ultrieurement dans une Srie faire, renfermant les principales
estampilles et marques de poteries sur amphores et sur lampes.
TRAVAUX HYDRAULIQUES

I. Aqueduc de Sidi-er-Res
(Feuille de La Goulette)
Il existe une conduite d'eau trs visible, bien conserve en certains points,
se rendant du point marqu Abreuvoir, 700 mtres au S.-O. de la koubah
de Sidi-er-Res, jusqu'auprs de l'ancien port romain situ au sud de Korbeus,
un point peu lev (2 mtres peine au-dessus du niveau de la mer). Elle
partait d'une source situe une altitude de 25 mtres environ. Pour un trajet
de 1k200, sa pente est donc de 2/1000 environ.
La conduite d'eau tant ciel ouvert, elle merge en certain point 1m50
au-dessus des sables.
Cette conduite d'eau n'est pas signale sur la Carte Archologique.
Dr DEYROLLE.

II. Aqueduc de Hammam-Korbeus


(Feuille de La Goulette)

Il existe des traces d'une conduite d'eau ciel ouvert sur le flanc ouest du
djebel Bou-Korbeus, allant paralllement la mer depuis le ravin qui va de la
cote 378 An-el-Okteur. Celte conduite part d'une petite source situe
80 mtres au-dessus du niveau de la mer, source en partie aveugle actuelle-
ment, se rendant des citernes trs visibles Hammam-Korbeus, sur le flanc
sud du ravin o se trouve la petite agglomration sur les ruines des antiques.
Cet aqueduc, trs nettement visible sur des espaces de plusieurs mtres,
n'est pas signal dans l'Atlas Archologique. Sa longueur est d'environ deux
kilomtres ; les citernes sont une altitude de 20 mtres environ ; la pente
pouvait donc tre de 60/2000 ou de 30/1000.
L'existence de cet aqueduc indiquerait elle seule l'importance de la station
thermale du Korbeus de l'poque romaine. Dr DEYROLLE.

III. Note sur l'aqueduc romain de l'Oued Blibane


C'est un fait tabli qu'Hadrumte fut dans l'antiquit une ville considrable,
un chef-lieu administratif important, le Derby, le Longchamp de l'Afrique,
un emporium considrable, etc., et que sa prosprit a t trs grande. Aussi
ne reviendrai-je pas sur tout ce qui a t dit ce sujet, me contentant, pour les
56

besoins de ce qui va suivre, de noter que l'tendue de la ville de Sousse moderne


ne reprsente pas plus du tiers de la surface qu'elle occupait autrefois.
Il est certain qu'une quantit d'eau considrable devait tre ncessaire sa
nombreuse population. Et, malgr l'excellent principe qu'ont toujours suivi les
architectes africains en dotant chaque habitation d'une citerne plus ou moins
considrable(1), il dut y avoir d'autres moyens d'alimentation en eau potable.
Ceux que nous connaissons jusqu'ici, quoique dj importants, semblent
bien cependant n'avoir pas t suffisants. Ce sont, d'une part, la Sofra, ces
grands et pittoresques rservoirs qui remontent peut-tre l'poque punique
et qui reoivent toutes les eaux tombes la surface du camp, les grandes
citernes votes qui servent de magasins l'artillerie et, d'autre part, l'aqueduc
de l'oued Karrouba, qui a t l'objet d'une intressante tude de la part, de M.
le vice-prsident Gresse, dans son Enqute sur les Travaux Hydrauliques.
J'ajouterai avoir dcouvert, au cours des fouilles que j'ai pratiques dans les
Blocs Gants (anciennement Tour Eiffel), un grand canal vot que les membres
de la Socit Archologique ont pu voir au cours d'une de nos premires pro-
menades, et qui est peut-tre un antique aqueduc, quoique j'incline plutt voir
en lui un gout.
Mes recherches sur la topographie de la campagne d'Hadrumte m'ont fait
dcouvrir un travail hydraulique qui semble avoir une relle importance et qui,
suivant toute apparence, devait contribuer l'approvisionnement en eau de la
ville.
Si on suit la route de Sousse Tunis en descendant dans la valle de l'oued
Blibane, on remarque, une trentaine de mtres l'est et fleur de sol, ou
plutt au fond d'un petit ravinement produit par les pluies, des traces de maon-
nerie et, une dizaine de mtres plus bas, un mur en blocage haut de lm80,
visible sur une longueur d'environ 13 mtres.
C'est un aqueduc, et il n'y a aucun doute sur cette destination, comme tous les
membres de la Socit l'ont reconnu au cours de la promenade archologique du
24 janvier.
On ne voyait, auparavant, que ce mur assez pais, portant un autre mur plus
troit et une surface couverte de ciment avec solin, c'est--dire une des parois
de l'aqueduc et son radier.
Quoique l'aspect de ce dbris me part dj trs concluant, j'avais remarqu

(1) Principe que nous avons eu le plus grand tort d'abandonner.


L'adduction d'eau de source dans nos villes n'est pas une raison pour qu'on ne
recueille pas dans des citernes l'eau tombe sur place et qui pourrait si utilement tre
employe divers usages : lessive, cuisson des aliments, etc. On n'a pas le droit, dans ce
pays, de ngliger un moyen, quel qu'il soit, de recueillir le liquide prcieux. C'est un
rel gaspillage que de ne pas employer celui-ci. Et nous avons une fois de plus ici.
le tort de ne pas suivre l'exemple des anciens qui, en dehors de leurs aqueducs ali-
mentant les citernes publiques, mnageaient sous chaque habitation une citerne destine
recueillir les eaux pluviales tombes sur les terrasses. Nous ne les imitons pas
malheureusement Sousse., ni ailleurs.
57

qu'une partie de ce mur, encore en partie enfouie, devait encore possder les,
deux parois de son specus. C'est la cavit de celui-ci que je pus faire dblayer
devant les socitaires, qui ont pu ainsi se rendre compte de son existence.
Visibles donc sur 13 mtres de longueur, les restes de ce mur ont ensuite
disparu sur un intervalle de 30 mtres, aprs quoi ils reparaissent sous la forme
de deux petits massifs aplatis de blocage placs dans le prolongement exact
des premires constructions. On voit trs nettement, d'aprs leur forme, qu'ils
ont fait partie de deux cintres. C'est donc ici que la conduite, au lieu de
reposer sur un mur, commenait s'lever au-dessus de la rivire l'aide
d'une srie d'arcades.
Ici, comme de l'autre ct de l'oued Blibane, ce long mur sert de limite des
plantations d'oliviers. C'est un fait absolument analogue celui qui a fait
lever une tabia couverte de cactus l'endroit mme o se dressait la spina,
dans le cirque d'Hadrumte.
Au del de ces deux massifs de blocage, l'aqueduc disparat sur une assez
grande longueur, pour reparatre de l'autre ct de l'oued. Sur la rive gauche on
aperoit une grosse masse de blocage, reste d'une cule du pont-aqueduc
qui se trouve dans la berge mme, puis, en montant sur celle-ci, on trouve pres-
que aussitt, et dans le prolongement exact des vestiges de l'autre rive, un long
mur en blocage, vestige de l'aqueduc, sur lequel, ou tout ct duquel, a t
construit un mur en pis dont il forme le soubassement. C'est d'ailleurs ce qui
l'a sauv, car en y touchant on et certainement provoqu la chute du pis,
qui constituait l'enceinte d'une proprit arabe.
Les traces de la conduite sont donc visibles, ici, sur une longueur de plus de
350 mtres.
Il est facile de voir que sa pente est en sens inverse de l'ordre dans lequel
nous l'avons suivi ; ses eaux coulaient vers Sousse.
En rsum, l'aqueduc tait superficiel et plac sur un simple mur, au nord de
l'oued Blibane. Il franchissait la rivire l'aide d'une srie d'arcades, pour
cheminer de nouveau sur un mur, puis devenait probablement souterrain.
Au point o il a pu tre examin, l'aqueduc forme un mur pais de 1m45
prsentant, du ct o la surface n'en est pas cache par la terre, deux retraits.
La hauteur du radier au-dessus du sol est actuellement de 1m25. Elle devait
tre antrieurement moindre de 60 centimtres, c'est--dire de toute la hauteur
de la partie situe sous le retrait le plus infrieur.
Le bord suprieur du mur du specus est trs rgulirement plat et il ne
prsente pas, contrairement ce que j'ai vu bien souvent ailleurs, J'amorce
dchiquete d'une vote en blocage. Le canal tait donc ciel ouvert, ou bien
recouvert de dalles.
D'o venait l'eau qui cheminait dans la conduite ? O allait-elle ?
Si on suit l'aqueduc en remontant sur la rive gauche de l'oued Blibane, on
remarque, comme je l'ai dit, qu'il est constamment surmont d'un mur en pis
qui en indique la direction. Quand la conduite cesse d'tre visible, ce mur conti-
58

nue se diriger vers le nord en changeant lgrement de direction. Il serait


intressant de voir, par quelques sondages, si la conduite n'est pas ici souter-
raine. En continuant marcher vers le nord, dans le prolongement du mur,
on remarque qu'on longe une limite de jardins rectiligne le long de laquelle sont
rpartis plusieurs puits.
Ces derniers ont-ils quelque rapport avec l'aqueduc ? Auraient-ils servi y
dverser l'eau qu'on y puisait ? Cela me parat d'autant moins probable que cette
eau serait saumtre. En outre, je n'ai jusqu'ici trouv rien de semblable dans
l'antiquit. Cependant, je dois noter que, de nos jours, il existe un systme
peu prs analogue en Tunisie. J'en ai vu un exemple prs de Gafsa : ce sont
des canaux souterrains aboutissant aux oasis et le long desquels sont espacs
les puits qui les alimentent.
On pourrait aussi admettre que le canal ait drain une nappe aquifre, mais
il est trop prs de la surface pour cela.
Reste donc une hypothse que j'hsite admettre en raison de sa hardiesse.
Cet aqueduc aurait amen Sousse les eaux de l'oued Hammam.
Quelques faits, qui sont loin d'tre premptoires d'ailleurs, corroboreraient
cette opinion.
Il n'y a, entre cet oued et l'oued Blibane, aucun ravin, aucune dpression
qui eussent pu rendre l'adduction difficile ou impossible. On connat, en outre,
l'tendue et l'importance du barrage que les indignes entretiennent non loin de
l'embouchure de l'oued Hammam. Or, c'est un fait trs gnral, sinon constant,
que les gens du pays n'ont fait qu'entretenir et conserver les anciennes instal-
lations hydrauliques, qu'ils ne les ont pas cres. Il est donc probable qu'un
barrage du mme genre devait, jadis, exister au mme endroit.
Enfin, on suit nettement, de l'oued Blibane l'oued Hammam, une ligne
de tabias borde de constructions et de puits qui ne sont peut-tre pas sans
rapports avec l'aqueduc, et j'ai vu, aux environs de la villa des Pins, entre
cette habitation et le barrage, un long mur longeant la piste qui pourrait bien
tre un reste de la conduite. D'ailleurs, la question pourrait de ce ct tre
rapidement tranche par la comparaison hypsomtrique des deux points.
Quant au point o aboutissait l'aqueduc, il est difficile de le prciser. La di-
rection gnrale du canal est videmment celle de Sousse. o les eaux taient
conduites soit directement, soit par l'aqueduc de l'oued Karrouba, dont elles
auraient t tributaires.
J'ai pens qu'il tait intressant de faire connatre les restes de cet aqueduc,
qui ne tarderont pas disparatre, en raison de la rapidit avec laquelle les
moindres dbris sont dtruits aux environs de Sousse.
L'tude de cet ouvrage peut, en outre, avoir un intrt pratique au point de
vue de l'alimentation en eau de la Sousse moderne.
DOCTEUR CARTON
Mdecin-Major de 1re Classe,
Membre non rsidant du Comit des Travaux Historiques.
DESCRIPTION DE

QUELQUES OBJETS DE HAUTE CURIOSIT


faisant partie de la Collection de M. Jules Renault,

J'ai eu l'honneur de transmettre la Socit Archologique de


Sousse, dans sa sance du 17 Dcembre 1903, une liste de diffrents
objets puniques, grco-puniques ou romains appartenant
ma collection.
M. le Docteur Carton, notre si dvou prsident, a bien voulu
me demander quelques croquis accompagns de notes sur les
principaux d'entre-deux, c'est--dire sur ceux offrant un vritable
intrt, archologique ; je tcherai de faire tout pour satisfaire
ses desiderata.
noch et anse en bronze (4e sicle av. J.-C. ?). L' noch
trouve dans les fouilles de Sainte-Monique est en fort mauvais
tat (pl. 1, fig. 1) ; le mtal trs oxyd ne tient plus que grce
la terre argileuse dont le vase tait rempli ; la partie infrieure a
t dmolie par la pioche des ouvriers; l'anse manque.
Le goulot dont l'ouverture est trifolie est de forme caractristi-
que ; l'anse y tait soude au moyen d'une tte, probablement une
tte de femme, d'aprs la forme de la partie qui subsiste encore.
La panse, lgrement dforme par l'oxydation, en devait tre
assez gracieuse.
L'anse en bronze provient du mme endroit, et comme elle
s'applique exactement sur le col et sur la panse de l' noch dont
je viens de parler, je ne serais pas tonn qu'elle ait appartenu
sa semblable.
Lorsque je me suis procur cette anse, elle tait recouverte
d'une telle quantit de vert de gris qu'on n'en percevait qu'une
masse informe et recourbe (pl. 1, fig. 2).
L'ayant passe la flamme avec prcaution, j'en ai pu faire
ressortir deux ttes aux extrmits ; l'une, de femme au sommet
60

Planche 1

de l'anse, l'autre de Baal-Ammon, servant de soudure avec


la panse du vase (pl. 1, fig. 3 et 4).
La tte du dieu possde une grande barbe avec des moustaches
61

relativement fines et tombantes aux extrmits; ses oreilles pr-


sentent l'aspect de celles d'un chien auquel on les aurait coupes;
enfin, une paire de cornes ornemente le chef de la divinit car-
thaginoise ; malheureusement, l'une d'elle tait tellement ronge
que la chaleur de la flamme l'a a peu prs volatilise.
Des stries saillantes partaient des deux ttes, ornant l'anse et
s'effaant au milieu. J'ai pu, depuis, me procurer d'autres anses
de formes plus ou moins similaires et qui, si elles n'ont pas de
tte de femme, ont nanmoins celle de Baal-Ammon.
Glaive romain. La forme de ce glaive est superbe, il suffit de
jeter un regard sur la planche le reproduisant, vu dessus et vu dessus
pour se rendre compte qu'on a devant soi une arme redoutable.
Sa longueur totale est de 28 centimtres; la lame en mesure
17 elle seule et a jusqu' 27 millimtres de largeur.
Ce glaive est bien la main, et mani par un bras exerc, il
ferait des blessures terribles. Il est en bronze et, la patine en a
une fort jolie couleur.
Je l'ai achet un ngociant de Tunis, qui le tenait lui-mme
d'un Sicilien, lequel n'a pu lui en indiquer positivement la prove-
nance.
Si nous considrons la face de la poigne (pl. 2, fig. 1) nous
verrons qu'elle est orne d'un bas-relief reprsentant un guerrier
tourn droite pour le lecteur, la main gauche sur un bouclier, et
la droite tenant l'extrmit d'une lance. La pose est gracieuse.
Sur la garde on lit LEG en lettres en relief. Une tte fruste, sur-
monte d'un bonnet punique, et dont les traits en creux ont t
frapps avec une sorte de ciseau d'une faon brutale, surmonte
l'ensemble, et lui donne un aspect bizarre. Il est fort probable
qu'il y avait l une espce de pomme de pin qu'un soldat loustic
a transform en souvenir de ses exploits.
Les extrmits de la garde, qui a une forme recourbe sont
ornes de fausses pommes de pin. La lame du glaive est lgrement
incurve du haut en bas, produisant une convexit sur la face
et une trs lgre concavit sur le revers. Elle a, sa partie
centrale, neuf millimtres d'paisseur.
Sur les cts plats de la poigne, il y a de petits ronds frapps
en creux et les ornementant. Ces ronds sont au nombre de huit
droite et de dix gauche du petit motif de guerrier.
Le revers, (fig.2, pl. 2) laisse voir les cheveux de la tte marqus
62

Planche 2
en creux et sur la poigne S. P. Q. R. en relief, tandis que sur la
garde il y a galement le nombre XXII, en relief. Nous serions
donc l en prsence d'un glaive de la 22e lgion dnomme
PRIMIGENIA qui a fait campagne en Afrique.
63

Malheureusement pour lui, ce glaive, par sa provenance dou-


teuse, devient sujet caution. J'ai cru nanmoins devoir le repro-
duire titre de curiosit, la forme en tant trs belle, et l'allure
gnrale de la pice tant intressante. Si seulement le Sicilien,
qui il a t achet de premire main, avait pu en indiquer tant soit
peu la provenance, on pourrait faire des recherches ; il a prtendu
qu'il tenait cette arme de sa famille.

Bagues sigillaires
Bague en or chaton enchassant une intaille reprsentant une
tte d'Apollon archaque. Cette bague, qui parait dater du Ive
sicle avant J.-C, en or massif, provient de Carthage. L'anneau en
est fort petit, et montre que cette bague n'a pu tre mise qu' un
doigt de femme ou d'enfant, J'ai fourni la Socit Archologique
de Sousse une reproduction en cire de l'intaille, que je prsente
ici (pl. 2, fig. 3). (Cette pice d'un grand intrt archologique est
maintenant au Muse du Bardo, auquel j'en ai fait don, en change
d'ailleurs d'objets manquant ma collection et que M. le Direc-
teur des Antiquits et Arts a bien voulu mettre ma disposition).
Bague sigillaire en bronze. J'ai pu me procurer Carthage
une bague sigillaire en bronze, ayant certainement t double
d'or, d'aprs les fragments d'or qui s'aperoivent encore la nais-
sance de l'anneau. La gravure trs use me parat reprsenter
un Amour agenouill, j'en donne la reproduction (pl. 2, fig. 4).
Clochette, pince en bronze et cure-oreilles La clochette mesure
en hauteur 67 millimtres, elle a un diamtre de 42 millimtres.
Bien que trs oxyde, et brise d'un ct du fait de cette oxydation,
elle n'en est pas moins trs intressante. Une sorte d'anneau
servait la prendre ; deux trous indiquent la faon dont tait fix
le battant; je la reproduis (pl. 2, fig. 5). Elle provient des fouilles
du P. Delattre, de mme qu'une pince en bronze (pl. 2, fig. 6) qui
mesure 77 millimtres de long sur 8 de large la tte et 16 au bas.
Cette pince n'avait pas de charnire, mais tait forme d'une
lame de mtal flexible, recourb sur lui-mme.
Puisque j'en suis des articles de mnage et peut-tre de toi-
lette, je dois signaler deux cure-oreilles, l'un en bronze, l'autre
en ivoire provenant des mmes fouilles. J'y joins des pingles en
os et en ivoire de mme origine (fig. 7, pl. 2).
64

Planche 3
Miroirs en bronze, colonnette en os, fragment de flte, diffrence
avec une charnire, chevalets d'instruments cordes, stles
puniques.
Miroirs en bronze, Je possde des miroirs en bronze de l'po-
65

que punique de deux formes. (Voir pl. 3, fig. 1 et 2) La premire


forme a un fragment de queue, la seconde se termine en pointe.
Ces miroirs ont t monts sur un manche quelconque, auquel
chacun d'eux tait retenu par une vis ou une clavette passant dans
un trou qui existe chaque exemplaire. Les dimensions sont aux
extrmits, pour le n 1, 188 millimtres de long sur 156 milli-
mtres de large et 2 millimtres d'paisseur ; pour le n 2, 176
millimtres de long sur 156 millimtres de large et 2 millimtres
d'paisseur. La colonnette en os, dont la description suit, me para-
trait faire un manche trs bien adapt, surtout au n 2.
Colonnette en os (pl. 3, fig. 3). Cette colonnette qui mesure
0,108 de longueur sur un diamtre moyen de 0,025 est agrmente
son sommet et sa base de fines moulures, entre lesquelles se
profilent verticalement 38 cannelures. Le haut et le bas de la colon-
nette laissent deviner et mme voir, du moins la base, des trous
ayant servi fixer quelque chose chacune des extrmits. Il est
fort probable qu'une sorte de petit chapiteau, encastrant le bas du
miroir et enchssant le haut de la colonne, s'y fixait au moyen
d'une seule vis ou clavette, maintenant le tout, et que la partie
infrieure avait comme terminaison, soit une gaine en mtal poli,
soit une petite sculpture reprsentant Tanit ou une autre divinit,
ou mme quelque emblme de la divinit. Je donne un semblant
de reconstitution du miroir avec cette colonnette comme manche
(pl. 3, fig. 4).
Flte, charnire, chevalets. Une quantit d'objets plus ou
moins cylindriques, (gnralement tout briss), a t trouve dans
les diffrentes fouilles opres Carthage. Il y en a mon sens
de deux espces trs diffrentes. On a donn le nom de charnires
certains de ces objets; ce mot ne s'entend certainement pas
dans le sens que nous attribuons au mot charnire aujourd'hui,
les anciens ne s'tant servi, en gnral que de pivots sur lesquels
pouvaient man uvrer leurs portes. Ces charnires en os me sem-
blent plutt avoir servi relier les livres antiques, qui taient
en somme des rouleaux. Les trous dont sont percs ces ossements
sont petits, et peuvent seulement laisser passer du fil ou de la
ficelle. Il est probable qu'il y en avait deux par livre, un au com-
mencement et un la fin permettant de rouler et de drouler le
livre son aise. (pl. 3, fig. 5).
Quant la seconde forme d'ossements cylindriques, nul doute
66

qu'elle n'appartienne la flte, instrument connu ds la plus haute


antiquit (pl. 3, fig. 6). En effet, les trous des extrmits sont per-
cs face face comme dans nos fltes modernes, les trous ont une tout
autre envergure que ceux des charnires, et leur travail est galement
beaucoup plus soign. Enfin, dans cette seconde srie, les fragments
sont en ivoire, lequel a t vid, tandis que les
charnires en gnral, sont en os, et n'ont pas donn lieu ce
travail spcial et dlicat.
Et puisque la flte nous amne la musique, examinons ensemble
ces chevalets trouvs dans les tombeaux puniques de Carthage,
et qui montrent que nos aeux ne devaient pas s'ennuyer
plus que nous (pl. 3, fig. 7).
Chevalets en ivoire. Le R. Pre Delattre, dans ses fouilles des
tombeaux puniques de Carthage, a trouv un nombre relativement
considrable de tablettes d'os ou d'ivoire, dcoupes toutes d'une
faon identique et toutes perces de petits trous. Je donne la
reproduction de deux de ces chevalets, et nous allons tablir la
distinction faire entre ces deux exemplaires. Quiconque a jou,
ou mme tenu en main un instrument cordes, obtenant sa vibra-
tion par pincement comme la guitare moderne, la mandoline
ou le banjo a pu voir que les cordes sont places sur le chevalet
d'une faon, je dirais horizontale (si le mot peut tre employ) ou
du moins ces instruments tant plats dessus, sont places parall-
lement la table dharmonie.
L'exemplaire deux trous devait tre un chevalet d'instrument
d'accompagnement, les trous beaucoup plus grands que ceux de
l'autre exemplaire nous indiquent des cordes plus grosses, et
donnant par consquent des notes plus graves. L'instrument sur
lequel s'adaptait ce chevalet devait tre une sorte de grosse gui-
tare deux cordes. Ces chevalets ont 39 et 35 millimtres de large.
Le chevalet 4 trous est, au contraire, le chevalet d'un instrument
tenant sa vibration du frottement d'un archet.
Le violon auquel pourrait tre assimil l'instrument qui a t
plac sur ce chevalet, est oblig d'avoir ses cordes places d'une
faon sinon circulaire, du moins courbe au dessus de la table
d'harmonie, pour que l'archet ne touche deux cordes la fois que,
d'une faon absolument voulue. Les cordes taient donc introduites
par ces quatre trous correspondant aux quatre cordes du violon ou
de l'alto actuels, sauf la question du diapason de l'instrument.
67

Les anciens Carthaginois pouvaient donc, comme nous, s'offrir des


concerts avec des instruments cordes et archet.
Je donne enfin sur cette planche, ce qui est moins r cratif,
deux fragments de stles puniques provenant de Carthage, et
donnant les expressions ordinaires des attributs de Tanit (fig. 8-9).
Je ne m'tendrai pas sur ce chapitre trop connu de tous. La stle
8 a 13 cent de large, la stle 9 en a 11 en moyenne.
Je possde une quantit d'pitaphes latines ; mais il a t fait
sur les diffrentes rdactions des dites, (qui sont d'ailleurs du
domaine de l'pigraphie plutt que de l'archologie proprement
dite) tant de dissertations savantes que je ne crois pas utile de
devoir les reproduire.

JULES RENAULT,

Membre Correspondant.
INSCRIPTIONS DE CARTHAGE

Saint-Louis-de-Carthage, 31 dcembre 1903.

MONSIEUR LE PRSIDENT,

Je conserve dans mes cartons un certain nombre d'inscrip -


tions latines que j'ai copies au fur et mesure que l'occasion
s'est prsente.
Cette srie ne renferme pas celles que j'ai trouves dans la
terre et dans les dcombres qui ont recouvert l'orifice des puits
funraires puniques de la colline voisine de Sainte -Monique. De
celles-l, je compte faire une liste part que je publierai plus
tard.
Il pourrait se faire que deux ou trois des inscriptions que je
vous envoie aient dj t donnes ailleurs. Dans le doute, j'ai
pens qu'il valait mieux risquer de les publier une seconde fois.
Permettez-moi de vous signaler l'pitaphe de M. Julius Dativus,
du Muse Lavigerie, dans laquelle est mentionn le prix de la
tombe, soit 315 deniers (DEN. CCCXV), somme quivalant 337 francs
environ. Je l'ai publie dans la Revue Tunisienne.
Veuillez agrer, etc.
A.-L. DELATTRE,
des Pres Blancs,
Correspondant de l'Institut.

I. Sur la face d'un gros morceau de marbre pais de 0 m18 prove-


nant d'un pidestal bris, trouv dans le jardin de Saint -
Louis, prs de la ligne de colonnes du portique du temple
d'Esculape :
/////////// C E P T O I N V I C T I S S I M ///////////
.
ET. THI //////////////////////////////
///////////////////////////// ORI
.
////////////////P I O AN ///////////////////
m
Hauteur des lettres : 0 06. A la troisime ligne, la lettre P ne se re-
connat que par sa boucle. Ce pourrait tre un R.
69

2. Sur la colline de l'Institution Lavigerie, dite colline de Junon;


fragment de marbre blanc, revers brut, pais de 0 m06 ;

///////C T O R ///////
Hauteur des lettres : 0m04. Amorces d'une seconde ligne.
3. Au pied de la colline de l'Institution Lavigerie ; fragment de
plaque de marbre blanc, revers lisse, pais de 0m03 :
//////////////// O B V S ////////////////
Hauteur des lettres : 0m075.
4. Cube de marbre jaune numidique, retaill la partie suprieure
et sur le ct droit. La face, dans l'tat actuel du cube, mesure
0m55 de hauteur sur 0m38 de largeur. La troisime dimension du
marbre est de 0m32. La retaille a enlev les deux dernires
lettres de la troisime ligne.
L - O FI L L I V S . F E L I X
PR OC . AVG .
AR AM CONSECR AV it
ET. VOTV M
REDDIDIT
Hauteur des lettres : 0m05. Ce texte a t martel depuis la pre-
mire ligne jusqu' la dernire, mais il peut encore tre lu. Le dbut
de l'inscription manque peut-tre. On peut croire qu'il donnait le
nom de la divinit laquelle l'autel avait t ddi et le v u rendu.
5. Marbre blanc revers lisse, pais de 0m03, trouv dans le quar-
tier de Dermche :
/////// L //////////////// S . C ////////////////////////////
////////////// V S E R A S I N V ///////

//////////////V S P P///// T O/////////////////////////

Hauteur des lettres : 0m025. La premire ligne a t martele. Les


lettres de la troisime ne se reconnaissent que par leur moiti sup-
rieure.
6. Sur une plaque de marbre trouve dans les terrains voisins du
lac appels Stiha, plaque revers lisse paisse de 0 m021 :

L. GRANIO ///////

Hauteur des lettres : 0m09. Elles conservent des traces de couleur,


rouge. Aprs O, amorce d'une lettre, portion de haste droite dpas-
sant lgrement la hauteur des caractres qui prcdent.
70

7. Epitaphe trouve dans les environs de Douar-ech-Chot. Elle est


grave sur une plaque de marbre blanc peu prs carre
0 m205 X 0 m215) :

D.M.S.
CANNEIA
SECVNDA
PIA.VIXIT
ANNIS.XXXIX
Hauteur des lettres : 0m025.
8. Fragment de dalle de marbre revers lisse, paisse de 0 m03,
provenant des terrains appels Stiha :
//////////////I . BIS . SA //////////////
////////////// O ///////////////////////////////////////

Hauteur des lettres : 0m075. La partie occupe par les lettres a t


piquete avant que les caractres y soient gravs. Avant I, amorce
d'un jambage ; aprs A, amorce d'un C et, aprs O, partie suprieure
d'une haste boucle, P, B ou D.
9. Sur un fragment de plaque de marbre blanc, revers lisse, pais
de 0m033, trouv vers le lac, dans les terrains appels Stiha :
M V K E R E /////////////////
////////////////

////// G . ET . INCONC . //////


Hauteur des lettres : 0m048. A la premire ligne, avant M, amorce
d'une lettre qui parat tre un N ; il y avait sans doute IN MVNERE. A
la seconde ligne, G, T et le premier C sont plus hauts que les autres
lettres.
10. Grande dalle en saoun longue de 1m14, large de 0m62 et paisse
de 0m07, trouve par M. Garcia, entrepreneur, dans les dmo-
litions d'une masure arabe, La Malga, prs du caf maure
situ sur la route de La Marsa. Cette dalle porte au centre les
lettres suivantes :
TIVLA
Hauteur des lettres : 0m05. Le T a presque la forme d'un r. Les
lettres L et A forment ensemble presque M. (1)
11. Plaque de saoun, trouve sur le bord de la mer, prs de Bordj-
Djedid.
F I L I C ////////////
E T.S I B////////////

(1) Cette inscription a peut-tre t publie par la Direction des Antiquits. Je la


donne ici tout hasard.
71

Hauteur des lettres : 0m043. A la deuxime ligne, B est incomplet et


pourrait tre un R. A la premire ligne, il faut sans doute lire FILIO.
12. Dbris d'une tablette opisthographe, de marbre gris, trouve prs
de Douar-ech-Chot ; d'un ct on lit :

Hauteur des lettres : 0m05.


De l'autre ct :

Hauteur des lettres : 0m02.


13. Angle suprieur de droite d'une pierre noire paisse de 0 m055 :

Hauteur des lettres : la premire ligne, 0m022 ; la seconde, 0m015.


Ce fragment peut tre class parmi les plus anciennes inscriptions
latines de Carthage. Il doit provenir de Bir-el-Djebbana, o nous
avons trouv plusieurs pitaphes graves dans le mme style sur des
pierres semblables.
14. Fragment d'une troite plaque de marbre blanc, haute seule-
ment de 0m09, revers lisse, paisse de 0m020 0m022 ; trouv
par le chasseur d'Afrique Aries, en aot 1897 :

Hauteur des lettres : 0 m018. A la premire ligne, la lettre incom-


plte droite est peut-tre un M.
14a. Sur un fragment de marbre recueilli par le lieutenant Bernard :
////////////////////// R V F I N A //////////////////////

15. Tablette de marbre blanc trouve entre Damous-el-Karita et


Bab-el-Rieh. Longueur : 0m27 ; largeur : 0m22 :
72
. . .
D M S
L.OVINIVS.VICTOR
T I T I A N V S .P I V S . V I X
ANN.XVIII.M.II.D.VIII
H. S. E.
Hauteur des lettres : 0m025.
16. Morceau de tablette de marbre blanc, revers lisse, pais de
0m03 ; trouv Damous-el-Karita.

//////////////////A I N/////////////////
////// V I C X I T Annis///////
////// M E S I B V S////////////////
////////// D I E B V S . X //////////
H . S .e
Hauteur des lettres : 0m015.

17. Fragment de tablette de marbre blanc, revers brut, pais de


0m02, trouv prs de Sainte-Monique :
/////////////////////// V RSOR
/////////////////////////////////////// S

Hauteur des lettres : 0 m 022. Nous avons dj trouv Carthage


plusieurs pitaphes de Cursores.
18. Epitaphe sur une tablette de marbre blanc, provenant du pre-
mier cimetire des Officiales de Bir-el-Djebbana :
D.M.S
CONCORDIA
VIX.ANNIS
XVIII.PRIMI
GENIA MATER
PIA FECIT. H. S. E
19. Marbre blanc, revers lisse, pais d'environ 0 m 04, trouv
Saniet-Khodja :

E
/////////////////// F AVSTVS
pius vixit A N N L X V
h s e
m
Hauteur des lettres : 0 03. Plusieurs signes et lettres ont t gravs
postrieurement autour de l'inscription. De ce nombre est la
lettre E qui se lit au-dessus du cognomen.
73

20. Fragment d'inscription trouv prs du palais de Sidi-1'Amin,


marbre gris pais de 0m034 :

Hauteur des lettres : 0m025.


21. Fragment d'pitaphe, trouv par un scolastique entre
BouKhris et Damous-el-Karita ; marbre blanc revers brut,
pais de 0m03 :

Hauteur des lettres : 0 m02. Les A ne sont pas barrs et les C sont
plus hauts que les autres lettres.
22. Fragment de dalle de grs, pais de 0m035, revers brut, trouv
Gamart par les scolastiques du Grand Sminaire :

Hauteur des lettres : 0m03. Elles sont mal graves. Celles de la pre-
mire ligne, en partie brises, ne sont pas certaines.
23. Fragment de saoun gris tendre, trouv Gamart :

Hauteur des lettres : 0 m03. Celles de la deuxime ligne ne se re-


connaissent que par le sommet.

Les inscriptions qui suivent ont t trouves sur certains points


indtermins de Carthage.
24. Sur une plaque de marbre, revers lisse, paisse de 0 m035,
large de 0m27.
74

Hauteur des lettres : 0 m012.


24. Fragment de plaque de marbre gris, revers lisse, pais de
0m025. Il a t employ dans une maonnerie. Au-dessus de
l'inscription, deux traits parallles doivent appartenir l'en-
cadrement.

Hauteur des lettres : 0 m02. A la quatrime ligne, elles ne se recon-


naissent que par leur sommet avec amorces d'autres avant et aprs.
25. a) Fragment d'une plaque de marbre gris, mesurant 0 m15 d'-
paisseur. Il conserve quelques lettres des trois dernires lignes
d'une inscription. (13 octobre 1900).

Hauteur des lettres : 0 m035. Avant la premire lettre, amorce d'un I.


A la seconde ligne, il devait y avoir Afficiuntur. A la troisime ligne,
avant le premier M, amorce d'un O.
Ce fragment appartient un texte dont j'ai dj recueilli d'autres
morceaux (1).
b) Voici un autre fragment qui semble bien appartenir au mme texte :

Hauteur des lettres : 0 m035. Au-dessus du second A amorces de


deux lettres appartenant une ligne suprieure. Le T, comme dans
le fragment prcdent, se rapproche par sa forme de la lettre Y.

(1) Inscriptions de Carthage (Epigraphie paenne) 1889-1890. Rome, 1890, p. 16


n.38. (Extr. des Mlanges de l'Ecole franaise, T. X.)
75

c) Voici encore un fragment du mme marbre ; paisseur : 0m065 :

Hauteur des lettres : 0m03 0m035. Les lettres sont de mme facture
que dans les fragments qui prcdent. A la seconde ligne, le second
I se prolonge obliquement droite. C'est un signe de comptabilit,
et non une lettre.
d) II en est de mme du fragment suivant :

Hauteur des lettres : 0 m03. A gauche, large marge. Le fragment,


dans sa plus grande largeur, mesure 0m09. (1)
Ces divers fragments semblent bien appartenir un mme texte.
26. Fragment de marbre blanc, revers lisse, pais de 0 m022 :

Lettres grles, mal graves, hautes de 0m065. La dernire de chaque


ligne n'est pas complte.
Au revers, ce marbre porte un treillis assez grossirement trac.
27. Fragment de plaque de marbre, revers lisse, pais de 0 m 04 :

Hauteur des lettres : 0m05. Celles de la seconde ligne ne se recon-


naissent que par leur moiti suprieure.
28. Marbre blanc, pais de 0m03 :

Hauteur des lettres : 0m016. Avant la premire de la dernire ligne,


O ou Q. Sous la dernire ligne, amorces d'autres lettres.

(1) Les Y remplacent dans l'impression des signes forms d'une haste oblique avec
appendice gauche vers le sommet. Mme observation que pour le fragment c.
76

29. Sur une portion de belle dalle de marbre, paisse de 0 m055 :

Hauteur des lettres : 0m06. Les T sont plus hauts que les autres
lettres.
30. Sur un fragment de plaque de marbre blanc, revers lisse
pais de 0m023 :

Hauteur des lettres : 0m05. Au-dessus et au-dessous, amorces d'au-


tres lettres.
31. Disque de marbre rose, pais de 0m011 ; diamtre, 0m029; por-
tant sur la face une inscription :

Hauteur des lettres : 0 m003. Un clat a fait disparatre une partie


des lettres. Dans son tat actuel, ce marbre, qui doit avoir servi de
poids, pse 17 gr. 5.

32. Sur un marbre blanc bris gauche, haut de 0m 12 et pais de


plus de 0m08 :

Hauteur des lettres : 0 m023. A la troisime ligne, L, A et D sont


lis. Ce monogramme renferme peut-tre un V.
Ce marbre porte au revers, la partie suprieure, une mortaise.
La face est entoure d'un simple filet trac en creux.
33. Sur un fragment de dalle de marbre blanc, revers lisse, pais
de 0m 03 :

Hauteur des lettres : environ 0 m07. Au-dessous, amorces d'une


autre ligne. Ce mot semble se rapporter un temple hypthre ou
sans toiture.
34. Sur un fragment trouv par M. Schelble :

Hauteur des lettres : 0m03.


77

35. Portion d'une dalle de marbre, paisse de 0m025, conservant la


fin de plusieurs lignes d'une inscription, sans doute d'une
ddicace :

Lettres bien graves, hautes de 0m06. L'extrmit suprieure des C


et des G remonte au-dessus des autres lettres.
36. Fragment de marbre pais de 0 m045 :

Hauteur des lettres : 0m02. Les A ne sont pas barrs.


37. Fragment de grosse dalle de marbre blanc, revers lisse, pais
de 0m08. A droite, portion de l'encadrement large de 0 m077 :

Hauteur des lettres, la deuxime ligne, 0m022. Celles de la ligne


suprieure taient plus grandes.
38. Marbre blanc, pais de 0m04 :

Lettres bien graves, hautes de 0m058. Il faut sans doute complter


Reip[ublic......La premire lettre incomplte doit tre un D ou un O.
39. Sur une troite tablette de marbre blanc, haute seulement de
0m09, revers lisse, paisse de 0m022 :

Hauteur des lettres : 0m017.


40. Tablette de marbre blanc, paisse de 0m03, haute de 0m155 :
78

A la premire ligne, I est plus haut que les autres lettres et compte
pour deux I, Diis.
41. Sur une portion de plaque de marbre blanc numidique, pais
de 0m05 :

Hauteur des lettres : 0m025.


42. Sur un dbris de tablette, revers brut, pais de 0 m025 :

Hauteur des lettres : 8m015.


43. Sur un fragment de marbre, pais de 0 m 03, revers brut :

Hauteur des lettres : 0m03.

44. Gros galet noir, double face plane, mais fortement arrondi
sur les bords, long de 0m40 et haut de 0m20. Son paisseur est
de 0m 15. Un des cts a t dress pour qu'il puisse tenir de
champ. On y lit le nombre 99 :

Les caractres mesurent 0 m06 de hauteur, l'exception du signe


qui suit le C. Ce signe, dont la valeur est six, atteint 0m11 il de hauteur.
Le nombre grav sur cette pierre est donc 99.

45. Montant de chancel en marbre blanc, sommet ellipsodal haut


de 0m16. La partie rectangulaire est large de 0 m 17. Les cts,
pais de 0 m 14, ont t creuss pour recevoir des panneaux.
La face de ce montant porte :

Hauteur des caractres : 0m04.


79

46. A Porto-Farina, portion d'pitaphe copie, il y a plusieurs an-


nes, par le R. P. Reynaud, missionnaire d'Afrique :

Hauteur des lettres : 0 m 03. On remarquera la seconde ligne


P. M. pour plus minus, plus ou moins. Les Romains indiquaient sou-
vent approximativement l'ge de leurs morts en employant un chiffre
rond, tel que 20, 35, 30 ou 35, etc.

A. DELATTRE,
Membre d'honneur.
NOTES SUR QUELQUES HAOUANET TUNISIENS

Haouanet triple de Sidi -Ali-Djebali


(Groupe L1 L2 L3)

A 800 mtres environ au nord de la Zaoua de Sidi-Ali-Djebali


et de l'hanout figures, on rencontre un haouanet triple. Ce
monument, par sa disposition singulire, est un des plus curieux
de ceux qu'il m'a t donn de visiter. Il n'est pas signal dans
l'Atlas Archologique (feuille de Tozegrane). Il a t creus au
milieu d'un bloc de grs isol qui a gliss d'un banc suprieur
au milieu d'une pente douce de marne (figure 1).

Fig. 1. Triple haouanet de Sidi-Ali-Djebali (vue de l'ouest)

Il comprend trois chambres dont deux sont effondres : la


premire, intacte (L 1 ), s'ouvre au nord par une porte de 0 m80 de
haut sur 0m 60 de large (creuse au milieu d'un gros bloc taill
verticalement).
Le couloir d'entre est peu profond ; il mesure 0 m 50 environ.
Il prsente une gorge ou une sorte d'encastrement interne qui
donne la porte un ressaut de 0 m06 environ, plus marqu en haut
et en bas que sur les cts.
81

Sur la paroi de gauche, quatre trous sont taill s comme pour


admettre des gonds ou des verrous. Les deux plus profonds se
trouvent sur une ligne verticale 0 m 30 environ l'un de l'autre; les
deux autres un peu en arrire, 0 m 15 de distance.
La chambre est vaste (fig. 2) mesure 2 m 10, de ct environ ;
elle prsente considrer, l'angle inf -
rieure N-E, une ouverture circulaire en
pente vers l'extrieur et qui a d servir
videmment l'coulement de l'eau ;
elle mesure environ 0 m 08 de diamtre.
Elle parait probablement creuse par
les architectes des haouanet.
Les dispositions analogues, se
rencontrant d'ailleurs dans d'autres
haouanet, en particulier sous forme de canaux et d'cuelles,
permettraient l'hypothse que ces cryptes seraient des schoirs
momies. A une hauteur de 0 m 80 s'ouvre, dans la paroi
de gauche, une porte de 0m 80/0 m 80 environ
travers une cloison de 0 15 d'paisseur dans la 2 chambre L 2 ;
m e

cette ouverture a t considrablement agrandie par le bris de


la partie N. de la paroi.
La particularit la plus intressante de cette chambre, dpour -
vue de niche, consiste en la disposition du plafond.
Ce plafond, en effet, a la forme dite en chevron (fig. 3), mais
prsente en relief :
1 un ressaut mdian de 0 m05
de large occupant le didre, la
faon d'une poutre matresse;
2 une double corniche de 12
centimtres ornant le haut des
parois antrieures et postrieu -
res la faon des vrais chevrons
et paraissant supporter la poutre
mdiane; on peut supposer que
les constructeurs du hanout ont
voulu imiter l'architecture de
leurs habitations habituelles.
La disposition de l'emmanc hement de la pseudo poutre avec
les chevrons et d'ailleurs curieuse et assez naturelle. Elle recourbe
82

vers le bas tout en s' largissant la partie antrieure, o elle est


creuse d'une fente triangulaire. Il existe un lger relief de la paroi
postrieure et latrale 0 m 20 du sol.
Chambre L2. La vote est totalement effondre et il ne reste plus
de trace de la paroi E. La paroi N. est en grande partie dtruite,
la paroi W. est perce de l'ouverture qui la fait communiquer avec
le sol et atteint le bas de cette ouverture.
La paroi S. est perce d'une niche qui communique avec la
chambre L 3 . Le sol est au niveau du bas de l'ouverture de la
paroi W.
L3 tait beaucoup plus vaste comme dimension (2 m50 de large);
la vote est absolument dtruite. Cette chambre est de plein pied
avec le sol environnant, comble en partie de la terre rapporte,
et suprieure de 0 m80 environ avec le sol de L 1 .
La paroi N. est perce de la niche qui communique avec L 2 et
dtruit en grande partie.
Dans l'angle N.-W, se trouve une petite niche suprieure la
niche prcite.
La paroi M. contient 3 niches de 0 m40 de large environ, vote
arrondie, situes : la plus grande au milieu, les deux autres un
niveau infrieur, droite et gauche de la premire.
Ces niches prsentent une particularit trs inattendue : les
niches infrieures, contournant droite
et gauche des excavations polies,
ressemblent absolument celles des
polissoirs robenhausiens, bien qu' ma
connaissance il n'y ait pas de polissoirs
dans des parois verticales.
La niche du milieu contient 6 de
ces excavations : lune gauche, en
bas, est amygdalode. deux autres
un niveau suprieur, l'antrieure
circulaire, la postrieure ellipsodale;
en haut une quatrime plus petite,
peu profonde, circulaire; celles de
droite sont : l'antrieure ovale et la
postrieure scaphode, avec un
angle didre courbe, trs profond
et trs marqu, analogue aux encoches
de polissoirs (fig. 4 et 5).
La prsence de telles cavits, produites indubitablement par le
83

polissage ou l'aiguisage d'instruments, est noter et rapprocher


des faits suivants :
1 L'existence d'une cavit que j'ai signale sur la porte du
hanout A3 de Si Mohamed, mais que je n'ai pas os dcrire comme
telle par scrupule scientifique.
2 Le polissoir robenhausien que j'ai dcrit et qui se trouve
prs du groupe des haouanet d'El-Harouri.
L'angle lgrement arrondi S.-W. contient une niche symtrique
de l'angle N.-W. rectangulaire.
La paroi S. effronte dans sa partie E. contient une niche infrieure
la niche prcdente; l'angle est au mme niveau que celle
qui fait communiquer L 2 et L 3 .
Le dessus du rocher prsente des cavits circulaires commu-
niquant plus ou moins; ces cavits contiennent quelques grains
de silice, de quartzs dtachs du grs ; la formation de ces cavits
est due l'usure de la pierre par ces mmes fragments
tourbillonnant sous l'influence des vents, action facilite par l'action
dissolvante des eaux sjournant dans l'excavation. C'est donc un
phnomne gologique qui donne lieu des excavations qui
pourraient de prime-abord tre confondues avec des cavits
creuses de main d'homme, comme dans les pierres cuelles.
La preuve de l'authenticit de ce processus se trouve prcisment
dans le ravin de Demmet-el-Karoui, o l'on peut observer
dans une couche de grs le phnomne connu en gologie sous le
nom de marmite des Gants.

Hanout de Demmet-el-Karroui (K1), s'ouvrant au fond


d'un puits et accompagn de menhirs jumeaux

A 1.400 mtres au N.-N.-W. de Fortuna 400 mtres au N., en


outre du menhir signal M R par la carte archologique, existent
deux menhirs taills dans le roc mesurant environ 2m 50 de haut. Ils
laissent entre eux un espace large de l m70 environ. Ils sont forms
par des blocs de grs sur une pente oriente vers l'est; ce banc
affleure, suivant une direction N.-S.; par rapport entre eux, ces
menhirs sont placs l'un au nord de l'autre (fig. 1).
A trois pas l'ouest, existe une sorte de puits rectangulaire
large de 1 mtre environ et long de l m 50, profond de l m 50,
84

obstru en partie par des palmiers nains poussant dans la terre


rapporte qui occupe le fond de cette cavit.

Fig. 1. Hanout de Demmet-el-Karrou avec menhirs.

Les parois latrales sont lisses et ne prsentent aucune ouverture.


La petite paroi du sud est entaille et forme une sorte de
niche irrgulire profonde de
0 m 50 et de grande dimension
(0m80).
La paroi nord est perce dune
ouverture rectangulaire dont la
partie infrieure est masque
par les boulis et une dalle de
grs aussi large que le puits qui,
a sans aucun doute servi
boucher l'entre de la cavit la
faon d'une porte. La niche de la
paroi S. parat l'bauche d'une
ouverture analogue.
On se trouve en prsence d'un hanout trs bien caractris, la
porte mesurant environ 0 m80 de large et le couloir 0 m 20 de pro-
fondeur.
La chambre, en partie comble, est assez vaste, carre, pla-
fond plat, et mesure 2 mtres de ct.
85

Elle prsente 2 niches rectangulaires sur les parois W. et N.,


celle-ci occupant le fond de la chambre.
L'angle N.-W. est perc d'une ouverture irrgulire par o
passe une forte racine qui a produit une fissure oblique dans ces
parois et par o a pntr une partie de la terre et des cailloux
qui remplissent le fond de la chambre. On n'y relve aucune
trace de peinture ou de sculpture.
Cet hanout que je dsignerai sous le nom de hanout de
Demmet-el-Karroui (K 1 ), est fort intressant par suite :
1 De l'existence des deux menhirs qui le signalent, et qui ont
t videmment retaills par les mmes individus qui ont creus
le hanout en profitant d'une disposition naturelle des blocs de grs
pour tablir ces monuments qui indiquent gnralement une civili-
sation prhistorique, et qui paraissent jeter une nouvelle confusion
ou un nouveau jour sur le mlange des civilisations prhistoriques,
berbres et puniques autour de ces curieux haouanet, surtout si
l'on remarque la proximit du menhir de Fortuna, au pied duquel
j'ai retrouv pour la deuxime fois, pendant mon dernier voyage
Fortuna, de nouveaux silex taills analogues ceux que j'ai dj
signales la S. A. S. ;
2 Par la disposition de l'entre creuse au fond d'un puits et
qui identifie la forme de ce hanout avec celle des tombeaux ph-
niciens de Carthage et ceux que le D r Carton m'a montrs aux
environs de Sousse ;
3 De l'existence dans le puits d'une dalle mince peu prs
carre de 0 m90 environ de ct qui fermait la porte du hanout;
c'est la premire fois, ma connaissance, que la dalle fermant le
hanout a t retrouve.

Hanout de Sidi-Ali-Djebali (J 1 )

A 300 mtres au N.-E. de la Zaoua de Sidi-Ali-Djebali (carte


de Tozegrane) existe un hanout dcrit dans l'Atlas Archologique.
La figure 1 accompagnant ce texte montre une entre largie par
l'usure vers le bas, surmonte d'un lger relief; une ouverture
gauche creuse postrieurement ; une niche externe approfondie
jusqu' la chambre, sans doute postrieurement, et surmonte
86

d'un lger relief 0 m50; au-dessus de cette niche, droite et


gauche, deux niches extrieures semi-circulaires en haut et trs
nettes.

Fig. 1. Hanout de Sidi-Ali-Djebali

La c ha m b r e m e s u re 2 m t re s d e c t et a ut a nt d e ha ut e u r.
L a p a r o i d u f o n d m o n t r e u n e n i c h e r ec t a n g ulaire profonde,
entoure d'une gorge galement
rectangulaire et les figures de deux autels
(dj signals par l'Atlas Archologique).
La figure 3 montre la disposition de ces
autels tracs en traits creux, parfaitement
rguliers et rectilignes.

La figure de prtre signale entre les


autels est pl us douteuse, tant donn la
grande ressemblance des traits
scalariformes qui la composent avec les
coups de ciseau qui ont servi creuser
la chambre. Cette figure est trs
barbare ; en tout cas le nez serait
trs volumineux, ainsi que la
narine, les oreilles; les yeux manquent,
le fond de la coiffure e n f or me de t ro nc
de c ne largi en haut n'a pas de fond
indiqu ; le bas du corps est peu visible.
Fig.3. Face postrieure du Le caractre de la face rappelle celui
Hanout de Sidi-Ali-Djebali de certaines figures mexicaines.
Il existe une niche sur la face E.,
plus petite, galement rectangulaire.
87

Les deux autels sont placs droite et gauche de la niche


du fond; celui de droite est plus petit et parat sur mont d'une
table avec une moulure simple et reposer sur un socle d'une
marche.
Le second autel, celui de gauche, est plus grand, surlev sur un
socle de deux marches ; il est surmont par un grand pentagone
irrgulier, mais symtrique par rapport une ligne verticale,
qui le divise et se prolonge au del du sommet une certaine
hauteur; c e t t e ligne est termine par une figure amygdalode
la faon de certains fers de lance. Le pentagone reprsente
videmment le feu, mais la figure qui le surmonte est moins
explicable.
Dans la centaine de haouanet que j'ai visit et en particulier dans
les 17 du Cap Bon, je n'ai jamais vu de traits aussi rgulirement
tracs que ceux des figures de ces deux autels; ils sont fort
diffrents de ceux des rupertus de Djebel-Behellil, qui sont
proprement parler des bas-reliefs.
Toutefois je ne pense pas qu'il y ait lieu d'admettre que ces
figures ne soient pas contemporaines du creusage du hanout.
Si la figure du prtre n'est pas une simple apparence due au
hasard, la question ne se pose pas, car les traits du contour de
cette figure sont bien faits par le mme instrument qui a creus le
hanout.
A 0 m50 du sol il existe, sur les faces du fond et au-dessus des
autels, deux trous qui auraient pu servir admettre un bton de
0 m08 centimtres de diamtre environ; il en existe de semblables
sur les autres faces ; trois trous plus petits se trouvent sur les
faces E. et O., 0 m20 du plafond.
Il existe sous une paisse couche de suie des traces de peinture,
non pas d'un brun rouge ocrac, comme dans les autres
haouanet, mais d'un beau rouge de minium.

Dr DEYROLLE,
Correspondant.
TUDE
SUR UNE NCROPOLE PRSUME DE L' POQUE ROMAINE

ET A TOMBES SANS MOBILIER

Sur un chemin partant de M'Saken et passant par


Rhas-El-Kadada (carte au 50mes) pour rejoindre la piste semi empierre
qui relie ce village Ksiba, et au lieu dit Souassi-El-Ksiba, existe une
srie de tombes gradins surmonts de vestiges de caisson, ce qui
indique d'une faon certaine qu'elles sont de l'poque romaine.
Ces tombeaux de dimensions peu ordinaires se trouvent au nom-
bre de onze et placs sur trois rangs, dont sept sur le premier,
trois au second et un seul au troisime. Il est possible qu'il en
existe d'autres dans les intervalles, mais nous n'avons pas eu le
loisir de prolonger nos fouilles.
L'alignement de ces tombeaux est parfait et parallle au chemin,
ce qui semble indiquer qu'une voie romaine de petite communica-
tion passait l( 1 ), se dirigeant vers les ruines importantes et non
identifies d'El-Knisia et peut-tre en suivant une des rives de
l'oued Hamdoun, rejoignait la grande voie du littoral, allant
d'Hadrumte (Sousse), Ruspin (Monastir). Cette route possible
par l'une ou l'autre rive, est toute jalonne de ruines.
Ces tombeaux qui sont orients S. N. ont des dimensions peu
prs uniformes de 2 mtres sur 3, la plus grande longueur tant
perpendiculaire au chemin. Ce sont, notre avis, partag du
reste par notre infatigable Prsident, M. le Docteur Carton qui
avait bien voulu venir examiner nos fouilles, les spultures d'ha-
bitants d'un centre agricole situ non loin de cette petite ncropole.
A 300 mtres au plus existent, en effet, les ruines d'une
ferme aux murs en blocage revtus d'un enduit de mortier de
cendre sous-jacent un autre renfermant des tuileaux.
D'une faon gnrale on attribue aux Phniciens cet emploi de
mes
(1) Ces ruines sont indiques sur la carte au 50/ comme tant au Sud du
chemin tandis qu'en ralit, elles sont au Nord .
89

la cendre dans la fabrication de leur mortier ; jusqu' ce jour la


chose n'a pas, je crois, t bien dmontre, tmoin ce fait qui s'est
pass Carthage au sujet des citernes situes au bord de la mer.
Le R. P. Delattre s'exprime ainsi dans son ouvrage intitul
Ncropole punique de la Colline S t Louis, 1896, page 12 :
Nous savons aujourd'hui que ces citernes, que l'on croyait
appartenir la Carthage primitive, sont de construction romaine.
La nature des matriaux, leur mode d'emploi, surtout une inscrip-
tion du rgne d'Antonin le Pieux et une brique estampille au nom
de Flavius Apriles trouve dans le mortier partout homogne du
radier et datant de l'an 142 environ de notre re, ne laissent point
de doute cet gard.
Quoiqu'il en soit, si le mrite de l'invention leur revient, ils ont
eu des continuateurs dans les Romains au moins pour leurs cons-
tructions ordinaires et leurs citernes.
Or, le fait est ici pris sur le vif, puisque nous avons bien affaire
une construction romaine, que cet enduit de cendre se trouve en
contact avec la maonnerie de blocage et qu'il est recouvert par
un enduit compos de chaux et de tuileau. On constate donc la per-
sistance travers les sicles de l'emploi de cette matire, puisque
les indignes de la rgion emploient encore actuellement la cendre
et la chaux grasse comme mortier pour leurs constructions.
Toutes ces tombes ont t fouilles par nous, toutes taient
invioles. Aussi notre surprise a t grande en ne trouvant pas le
mobilier funraire habituel. Sans aucune exception, ces tombeaux
taient remplis d'un sable jaune trs fin, dont nous ne connaissons
pas le similaire dans la rgion voisine ; la couverture au-dessus
de la fosse se composait de fortes tuiles plates places en che-
vrons, mais dans le plus grand nombre les tuiles taient rem-
places par des dalles de 0 m 08 d'paisseur en calcaire coquillier
dont on trouve le similaire tout le long de la cte depuis Monastir
jusqu' Mahdia.
En examinant le sable extrait des tombes, nous n'y avons trouv
que quelques petits dbris d'ossements calcins et de minuscules
dbris de charbon.
Dans l'une d'elles, un fragment de pomme de pin et un noyau
d'olive demi consums mlangs de quelques fragments de char-
bon.
Ce noyau d'olive, cette caille de cne de pin, nous font songer
90

que peut-tre lors de l'dification de ces monuments funraires le


pays tait complant de pins sur les hauteurs et d'oliviers dans les
fonds.
A l'extrmit d'une de ces tombes et du ct oppos au chemin,
nous avons trouv un tronc de statue en marbre, grandeur nature,
reprsentant un homme dont la main droite est passe dans les
plis de la toge la hauteur de la poitrine, le bras gauche tombant
naturellement. Malheureusement la main gauche est brise et la
tte n'a pu tre retrouve.
La sculpture est d'une assez bonne facture, les plis de la toge
sont bien fouills, la partie postrieure est brute.
Cette statue devait faire partie du tombeau situ tout ct du
lieu o elle tait enterre et o un monument, de forme carre ou
plutt rectangulaire, devait tre lev, car nous y avons trouv des
fragments de moulures de bandeau et d'angles en mortier de chaux,
reprsentant des oves et picettes, et d'autres fragments avec
feuilles d'acanthe mesurant 0m 10 de hauteur.
Au dessous de ces dbris indiquant que le monument tait d'une
certaine importance, nous avons trouv, toujours sur le mme ali-
gnement, un bloc de maonnerie de 3m 60 de longueur, 3m de lar-
geur et mesurant encore 1m60 de profondeur dans le sol. Sur le
devant de ce massif de maonnerie, cot du chemin et la partie
suprieure, taient places jointivement trois grosses pierres d'ap-
pareil mesurant chacune 1 m X 0m 50 X 0m50.
Au milieu de ce massif de maonnerie, existait une fosse de
1 80x0m70x0m70 servant de spulture. Les mrs en taient)
m

bruts et le fond form par le terrain naturel.


Cette excavation tait recouverte par des dalles de calcaire de
0m08 d'paisseur places en chevron. Ces dalles reposaient par
leurs bases sur d'autres places plat et dont l'un des cts faisait
saillie sur la fosse de 0m05.
L'intrieur tait, comme pour les autres tombes, rempli de sable.
De mobilier funraire aucun. Quelques dbris de gros clous en fer,
auxquels adhraient encore quelque fragment de bois, ont t les
seuls objets trouvs. Mais ils suffisent, croyons-nous, indiquer
que ce tombeau, au contraire de ses voisins dont les cadavres
avaient t incinrs, avait reu la dpouille de l'individu aprs
ensevelissement.
Je le rpte, cette tombe tait inviole; les efforts et la persv-
rance dont nous avons d faire preuve pour connatre ce que con-
91

tenait ce bloc de maonnerie se comprendront quand on saura que


pics et coins tant impuissants, nous avons d avoir recours la
mine.
Nous n'avons pas constat d'enceinte comme dans une autre
ncropole situe non loin de l et dont nous parlerons. Peut tre
a-t-elle t dtruite superficiellement et pourrait-on en retrouver
des traces en faisant des fouilles.
Cette absence de mobilier funraire ne nous permet pas de fixer
une date ces tombes, moins toutefois que deux pices assez
frustes l'effigie d'Adrien (117-138 de J.-C.) trouves au cours
des fouilles ne la fixent dans le cours du II e sicle ; quoiqu'il en
soit, si l'on en juge par la fabrication parfaite des mortiers, qui ont
fait de chaque tombeau un vritable monolithe, il est permis de
croire que leur construction remonte la bonne poque.

P. CHEVY,
Membre du Comit d'Etudes.
NOTES
SUR LE TOMBEAU D'UN GUERRIER ROMAIN DCOUVERT
A TBOURSOUK

Dans le tuf de la tranche creuse en face de Tboursouk pour


le passage de la route de Tunis, environ 600 mtres du camp
des Tirailleurs, un indigne civil me fit remarquer une plaque
de fer travaill. Ayant donn plusieurs coups de pioche dessus il
la dtruisit compltement.
Le sol sur lequel reposait cette plaque avait t tass et portait,
des traces d'un foyer ancien. Probablement le corps a t inci -
nr dans cette espce de petite cavit forme par le tombeau.
Cette petite cavit qui constituait une espce de niche a t en
partie dtruite pour la construction de la tranche, ce qui explique
que la plaque de fer paraissant avoir la forme d'un bouclier
tait en partie dtruite. Hauteur de la niche, 1 m 10 environ du
sol la vote ; profondeur restante, l m 50 ; largeur,
environ 0m 80. Elle ne portait aucune trace de construction.
Quelques grosses pierres ont d en fermer l'entre.
Une trs jolie urne, en forme de gargoulette deux anses, en
terre trs fine et bien travaille, fut le premier objet dcouvert.
Cette urne trs mince, n'a pu rsister la pression des terres.
Elle a t retire en morceaux.
J'ai eu l'agrable sur-
prise, en la dblayant,
de trouver derrire elle,
tout un mobilier se com-
posant de poteries, d'ob-
jets en bronze et quel -
ques dbris qui me sem-
blent, n'en pas douter,
tre ceux d'une armure
et deux lances en
fer(fig.1)

Tout d'abord deux jolies lampes en terre grise sans anse, per -
fores et bec trs large, accompagnaient la gargoulette.
Elles taient d'un remarquable travail et doivent appartenir aux
premires poques de notre re.
93

La premire portait comme figurine la tte de Mercure de pro -


fil, son caduce sur l'paule. La deuxime un cheval marin conduit
par un enfant. Plus tard j'ai retrouv les dbris d'une trois ime
lampe en partie calcine et du mme genre que les deux
premires. Elle portait comme ornement un cheval marin mont
par un enfant lequel joue dans un instrument en forme de flte.
Deux lances en fer gisaient ct des lampes. L'une d'elles a
perdu sa pointe, longueur, 0 m 25 ; Plus grande largeur, 0 m 05 ;
paisseur moyenne du mtal, 0 m 07.
Les plus curieux objets taient en bronze. Le premier a la forme
d'un demi- uf d'autruche, de
forme elliptique (fig. 2) ; il tait
si mince que c'est un miracle
d'avoir pu le sorti entier et sur-
tout le transporter en France.
Sa plus grande largeur avait
0m 11 et sa profondeur 0m 04. Il
tait muni de deux anses pla-
ces au-dessus de deux ouver-
tures en forme de trfle et de -
vait tre suspendu, car j'ai
retrouv les deux chainettes dont un morceau adhrait l'une des
anses. C'tait probablement un brle-parfum, ( 1 ) puisque j'ai
retrouv ct une petite cuelle en bronze
de 0 m 03 de diamtre, munie d'une minuscule
cuillre ayant servi la trituration des pro-
duits odorifrants.
Le deuxime objet, galement en bronze
ou cuivre, affecte la forme, sa base, d'un
chandelier rustique. Au centre on remarque
un double O comme s'il avait t destin
recevoir un cylindre.
Deux cercles de mme mtal
devaient maintenir une paroi verticale
en bois ou en mtal trs mince, faisant
ressembler cet objet une lanterne
(fig. 3).
Le cercle suprieur tait rainures pour recevoir les lames ou

(1) L'opinion de M. le sergent Icard est exacte. J'ai trouv dernirement un objet
semblablesurmontd'unlongtube de ventilation,galement enbronze, Dr CARTON,
94

de bois o de mtal ? Le cercle central devait maintenir la char -


pente de cet objet. Dans le pourtour de la base on remarque des
petits clous en bronze et recourbs qui maintenaient la base des
parois verticales.
Pour revenir aux dbris de fer trouvs dans ce tombeau et
qui paraissent avoir appartenu soit un bouclier, un casque, etc.,
il a t impossible de reconstituer le moindre morceau pouvant
mme permettre d'tablir une simple supposition.
Je n'ai pu trouver l'urne contenant les ossements du guerrier
romain qui parat avoir t incinr seul dans cette partie de la
montagne. Car il n'existe aux alentours aucune trace de tom -
beaux de ce genre.

IGARD.

Sergent au 4e Tirailleurs,
Membre correspondant.
ANNOTATIONS A L'ATLAS ARCHOLOGIQUE
DE TUNISIE

I. Feuille d'Hammamet

Il existe sur la rive gauche de l'Oued Faouara, au niveau de l'a


de Krabet (Kef Krabet Kelila), un rocher escarp de 140 mtres
d'altitude environ.
Ce rocher est perc d'une grotte avec entre spacieuse l'E,
et d'une fentre donnant sur la falaise verticale qui est videmment
un poste d'observation romain. De cette faon on dcou-
vrait d'une part la voie romaine allant Hadrumte, jusqu'au
del de Ksar Menara, et d'autre part la valle de Djedidi, les
contreforts du Djebel Behelil, en mme temps qu'on surveillait
les aqueducs de Siagu et de Puput, dcrits si savamment par
MM. Bordier et du Paty de Clam (Enqute sur les travaux hydrau-
liques des Romains).
L'entre de la grotte l'E. (fig. 1) donne sur une esplanade
rebords abrupts entoure d'une leve de
terre qui est, n'en pas douter, un retran-
chement de 200 pas de circonfrence. Dans
ce talus, qui atteint encore un mtre de
haut, comme sur le terre-plein, comme au
bas des glacis, on rencontre une norme
quantit de tessons, de poterie, tantt
rouge et grossire, tantt noirtre et
charge de grains siliceux, tantt enfin
de terre rouge, fine, avec un trs joli
vernis, vide mment r omaine.
Fig.1.Plan du retranchement
De lOued Faoura Nous y avons rencontr une estampille
F. Fentre sur la falaise de potier reprsentant une amphore dun
G. Entre de la grotte trs jo li g a lb e. L es f o u ill es n o n t
C. Retranchement n o n t p as d o n n d a u tr e r su lt at.
96

Cet ensemble curieux n'est pas signal dans l'Atlas Archolo-


gique ( 1).
Dr DEYROLLE,
t
L MARCHAL Mdecin-Major,
du 4e Batailon d'Infie lgre d'Afrique Correspondant.
Correspondant.

II. Carte de Menzel-bou-Zelfa


Il existe, auprs de la petite Zaoua de Sidi-Ali-bou-Rouigat,
un hanout typique dont l'extrieur est plus ornement que ceux
des quatre groupes d'haouanet que j'ai dcrits au Djebel Behelil
et que ceux que j'ai visits dans le Cap Bon.
On a d'abord creus, dans un banc de grs situ au versant est
de la croupe de
Sidi-Ali-bou-Rouigat, une
esplanade de 1m 15 de large sur
0m 80 de profondeur et lm 20 de
hauteur. La paroi du fond,
rendue verticale par ce travail
pralable, a t de nouveau
creuse, pour mnager une
sorte d'auvent en chevron.
C'est dans cette surface que
s'ouvre le couloir de la crypte,
qui mesure 0m 67 de haut sur
0m 57 de large et 0 m37 de
profondeur. Celui-ci, qui tait poli primitivement, prsente une sorte
de rigole qui donne l'ouverture la forme d'un cu hraldique.
Comme la face suprieure du rocher tait trop voisine, la
crypte, trs vaste, a t creuse en contre -bas. Elle prsente un
toit en chevron, ce qui lui donne des petits cts de 1 m 22 et une

(1 ) M. Carton dit connatre auprs de Ghardimaou, aux bords d'un ancien lit de la
Medjerdah, une chambre creuse mme le rocher, avec une fentre, et qui devait,
tre fort apparemment, comme celle dont il est question ici, un poste d'observation
situ au dbouch de la Medjerdah dans la plaine.
D'autre part, j'ai signal au Djebel Hozma un vaste hanout fort dtrior qui domine
la valle de Mohamed-el-Abrach, Djeddi, etc... et d'o l'on voit la grotte du Krabet -
Kelila
97

hauteur de 1m 45. Dans l'axe, la profondeur est de 2m 41 et la


largeur de 2m 44.
Cette crypte possde, en contre-bas, comme beaucoup d'haoua-
net, une marche
mesurant 0 m 36 de
hauteur sur 0m 24
d'paisseur et 0m26 de
largeur. Elle prsente
trois niches en chevron :
une grande sur la face du
fond, mesurant 0m 38 de
haut sur 0m 28 de large et
0m 20 de profondeur avec
un petit ct de 0m 24;
les deux autres, au milieu
des faces latrales, mesurent 0m 28 de haut sur 0m 16 de large et
0m 12 de profondeur, avec un petit ct de 0m 16.
Il existe, sur le sol, une cavit en cuelle de 0m 10 de profondeur,
droite et au fond.
Cette grotte a servi de grenier aux arabes. Les murs sont
recouverts en grande partie de fume, qui ne permet pas de dis-
tinguer le dessin des peintures l'ocre dont on aperoit les traces
avec peine.
Le travail de ce hanout n'est pas le mme que dans ceux du
Djebel Behelil. En effet, les traces d'instruments, qui se montrent
sous l'aspect de coups de ciseau successifs, donnent une bande
continue scalariforme de 0m 01 de large avec des ressauts de
0m 001, paraissent avoir t produits par un pic.
Sur le rocher en face de l'ouverture, 2m, il existe un trou en
cuelle de 0m 20 de profondeur, sur autant de diamtre, qui a pu
servir des libations ou a recueillir le sang des animaux sacrifis
et dont j'ai trouv le semblable en d'autres endroits.
L'ensemble est expos au sud.
Dr DEYROLLE.

III. Carte de Menzel-bou-Zelfa


Il existe Kourchine, dans une ruelle de cette petite agglom-
ration, une pierre de marbre avec inscription en lettres d'un galbe
98

allong, brise en haut, lgrement droite, mais surtout


gauche.
//////////IN//////////
/ / / / / / // ENN IR ED
////VCCHIPATAV
HSEPTIMIAEODG
ET FILIORVM////
A parties deux dernires lignes : SEPTIMLE ET FILIORUM ?
cette inscription est peu lisible. (J'ignore si elle est indite. Le
temps ne m'a pas permis de la photographier et je n'ai pas pu
l'estamper faute de matriaux).
Dr DEYROLLE.

IV. Carte de Menzel-bou-Zella


Le Djebel Abd-El-Rhaman est spar du Djebel Hofra par un
col lev (291m), le Foum Khanguet-El-Hadj, o la carte au 1/20.000
indique une voie romaine. Il n'en existe plus aucune trace sur le
versant S.-E. Sur le versant N.-W, partir du point indiqu R. R.,
o se trouve un monument quadrangulaire en pierre d'appareil
mesurant sept mtres de long sur cinq de large et deux de hau-
teur, il existe une voie romaine, chemin creus dans le roc,
dominant le thalweg sur une longueur de un kilomtre environ.
Plus bas, au passage de l'Oued El-Gora, il existe des pierres de
taille qui ont d former une sorte de cassis en pierres trs
larges pour le passage des eaux. Le long de cet oued, en quatre
points trs prcis sur la carte et une distance de mille cinq cents
mtres, il existe huit petits ronds rouges accols deux deux et
annots R.M. (Ruines mgalithiques). Je n'ai rien trouv qui puisse
rappeler un monument mgalithique connu ou qui indique en ces
points le travail de l'homme. Les blocs de grs sont, certains
endroits, dcoups naturellement en grandes dalles qui, acciden-
tellement, peuvent figurer un demi-dolmen, mais assez peu typi-
ques pour donner une apparence de dolmen sur une preuve photo-
graphique.
En suivant la crte qui court au N.-W. du Djebel Abd-El-Rha-
man, une distance moyenne de 5 kilomtres, sous le nom de
Argoub-El-Mangoub nous trouvons sur la carte au 1/20.000, prs
de l'a de Argoub, un point signal R. M. Il existe en ce point un
99

vritable monument mgalithique. C'est un dolmen support par


trois pierres, signales sur la carte archologique et mesurant un
mtre quatre-vingt sur quarante centimtres et un mtre vingt.
Il est entour d'un crombech de petites pierres. C'est donc une
vritable Bazina. Ce monument parat avoir t fouill.
La carte archologique signale encore vers le b de Argoub, vers
le g de Mangoub (cote 170) An-El-Kreckha, quatre cents mtres
de ce point, sous les n os 60, 61, 62, des tombeaux no-puniques. Je
n'ai rien vu de tel, sauf au premier point o, ct d'une cons-
truction romaine en blocage et pierre d'appareil, il existe un amas de
blocs de grs superposs paralllpipdiques mesurant un mtre
vingt environ et qui peuvent simuler une construction de main
d'homme. Dans le fond de la valle de l'Oued Er-Rissane, qui borde
ces hauteurs l'E., trois cents mtres de An-El-Krarouba, il
existe sur la carte au 1/20.000 un poste not R. P. (Ruine prhis-
torique). Je n'ai rien trouv qui puisse se rapporter cela, si ce
n'est de lgres anfractuosits naturelles trs communes dans le
lit de cet oued aux bords abrupts.
A la Kouba de Sidi-Hamouda, je n'ai pas trouv les polissoirs
robenhausiens qui sont indiqus sur l'atlas archologique.
Dr DEYROLLE.

II. De Sidi-bou-Ali Hergla


Feuille de Sidi-Bou-Ali
C'est au cours d'une excursion Hergla avec MM. Gresse et
Riettmann que j'ai vu, Sidi-bou-Ali mme, prs de la maison
du Service des Travaux Publics, une pierre place l'entre d'un
fondouk, haute de 55, large de 50, paisse de 26 centimtres.
Elle est en calcaire et porte un buste encadr entre deux colonnes
corinthiennes, le tout trs us ; c'est videmment le haut
d'une stle funraire.
Prs de l, de l'autre ct de la route, git
une base attique en marbre blanc haute de
25 centimtres; la plinthe a 70 centimtres
de ct; la face suprieure 50 centimtres de
diamtre. Cette dernire porte quelques
caractres gravs la pointe et dont l'un a
la forme d'un epsilon.
100

Ces deux pierres doivent provenir de l'henchir Zembra (1).


A 3 kilomtres environ de Sidi-bou-Ali, l'ouest de la route
de Tunis, sont des ruines que ne signale pas l'Atlas. Elles sont
constitues par un rservoir carr d'environ 4 mtres de ct
dont les murs ont 60 centimtres d'paisseur. Un enduit de 2
centimtres en tapisse l'intrieur, dont les angles sont arrondis.
On y remarque des particules de charbon, caractre que l'on a
voulu souvent attribuer aux constructions phniciennes mais qui
existe aussi dans l'architecture romaine, et que l'on retrouve, de
nos jours, dans la maonnerie indigne.
A 5 kilomtres et demi de Sidi-bou-Ali nous prenons la route
qui vient d'tre tablie sur une ancienne piste suivant peu prs le
trac d'une chausse romaine dont quelques traces sont d'ailleurs
indiques sur l'Atlas, prs du n. 118.
C'est avec satisfaction que j'ai vu raliser, sous l'habile direction
d'un des vice-prsidents de la Socit, M. Gresse, un v u que
j'ai formul il y a bien des annes (2). On a, non seulement
tabli l'empierrement moderne en bien des points sur l'antique
chausse, mais on y a encore repris et rutilis trois ouvrages
d'art.
D'aprs les renseignements que M. Gresse a bien voulu me
fournir, la largeur de la voie tait de 2m 75 et son paisseur seu-
lement de 23 25 centimtres. Elle tait forme par de la grosse
pierraille, maintenue sur chaque bord par une ligne de grosses
pierres. C'est tout fait la structure des voies de petite commu-
nication que j'ai releve un peu partout en Tunisie, et surtout
dans le massif, si remarquable ce point de vue, du Djebel Golea,
prs de Teboursouk. On est bien loin, on le voit, de la stratification
attribue classiquement aux voies de l'Italie et que l'on n'a,
ma connaissance, nullement retrouve en Afrique. La grande
voie de Carthage Thveste elle-mme n'est, dans son ensemble,
qu'un conglomrat de pierrailles et de mortier.
Au n 118 de l'Atlas, on voit dans la sebkhet Hack-el-Menzel une
le entoure de deux canaux sur lesquels les anciens avaient
tabli des passages maonns dont les vestiges ont t utiliss de
la manire la plus intressante. Une autre dpression, situe plus

(1) Voir sur cette ruine, Bulletin de la S. A. S. 1er semestre 1903, page 23.
(2) Dr CARTON. De lUtilit des recherches archologiques au point de vue de la
colonisation.
101

l'ouest, tait aussi traverse par un ponceau qui, en 1900, pr-


sentait encore trois arcades en plein cintre sur l'extra-dos des-
quelles tait rest l'empierrement. L'une d'elles tait dtruite, les
deux autres encore debout.
La centrale avait 1m 30 de flche, les deux autres 1m. Les piliers
mesuraient 50 centimtres d'paisseur et l'lvation la plus
grande du monument au-dessus de la dpression tait de 40 cen-
timtres seulement.
Le plan occidental des deux canaux tait franchi par un vritable
pont de trois ouvertures, portant galement encore la chausse.
L'arche centrale avait 3m 20 et les latrales 4m de flche, les
piliers 5m 50 et la cule orientale 6m d'paisseur.

Les cules taient encore trs rsistantes; on a pu y asseoir les


piliers qui supportent actuellement un tablier en bois. Construites
avec fruit l'intrieur des terres, elles taient spares par un
remplissage en terre. Il en tait de mme des piliers, qui
avaient une cavit de 5m 50 de ct remplie de terre leur intrieur.
M. Gresse croit, d'aprs ce qu'il a vu, que l'empierrement de
la chausse se continuait directement sur les votes de ce pont
comme d'ailleurs sur celles des ponceaux, n'en tant spar que
par un matelas de terre de 10 15 centimtres.
La chausse ayant 2m 80 de largeur et la maonnerie antique du
pont 3m 60 de largeur, il est possible que cette diffrence corres-
ponde l'existence d'un parapet.
102

Il est curieux de voir comme tous ces ouvrages des Romains


ont rsist, et je crains bien que beaucoup de ceux que nous di-
fions ne puissent, ce point de vue, leur tre compars.
Je puis, ce propos, dire combien j'ai t frapp, en voyant aux
Knatir, au nord de Bou-Ficha, deux ponts d'poque diffrente (fig.
1 et 2 page hors texte).
Les Romains avaient construit l, sur un point extrmement large,
une srie d'arcades : il y en a bien une vingtaine. Nous avons, sur
un rtrcissement et une trentaine de mtres en aval, difi un
tout petit pont. Je suis bien certain que dans quinze sicles il
n'en restera plus traces. Quand on a vu l'norme quantit d'eau
que toutes les dpressions de cette rgion vomissent, lors des
pluies, vers les sebkhas ou la mer, on ne peut s'empcher d'admirer
la prvoyance... ou l'exprience dont ont fait preuve les
anciens, exprience dont nous devrions toujours profiter, comme
nous avons fait ici.
La longueur du pont de la voie menant l'antique Horrea Cae-
lia est de 20 mtres. La hauteur de l'intrados au-dessus de la
partie la plus dclive de la dpression tait seulement de 40 centi-
mtres environ et ici, comme dans les deux autres ouvrages, les
votes taient noyes dans la vase de la sebkha. Un sondage
pouss plusieurs mtres de profondeur a montr que les piliers
s'enfonaient profondment et que les apports des eaux ont
exhauss de 1 m 22, depuis l'tablissement du pont romain, le fond
du canal qu'il franchissait. Il serait intressant de voir si l'examen
des ruines situes au bord de la sebkha corroborerait cette cons-
tatation en montrant que des constructions situes sur ses bords
en sont maintenant plus ou moins loignes.
A l'poque des rcents travaux, presque toutes les arcades
taient en partie dtruites, mais les cules, les piliers et une partie
du cintre subsistaient encore, comme le montre la figure ci-
jointe, page 101 ( l).
Le ponceau ou aqueduc passant au-dessus du canal oriental
tait form de quatre arches, dont deux seulement existaient
encore lors des travaux. L'intervalle entre les piliers, qui ont
30 centimtres, est de 1 mtre.
Aprs une halte auprs de ces vestiges, nous montons en voi-
(1) L'Administration des Travaux Publics a remplac les arches cintres par des
tabliers poss sur les piliers antiques prolongs, en sorte que l'lvation actuelle de
la chausse est suprieure de 50 centimtres celle de l'ancienne.
103

ture pour nous arrter bientt et visiter les ruines situes au sud
de la route. Nous n'avons pu trouver la tombe en mosaque
signale au n . 121 par M. le capitaine Moreau. Il me semble, en
outre, certain que les coupes donnes dans le texte de l'Atlas ont
t renverses, car, telles qu'elles ont t publies, elles sont
incomprhensibles.
Nous voyons seulement en cet endroit un rservoir carr trois
compartiments enduits de ciment de tuileaux et, tout auprs, les
restes de votes en berceau ayant sans doute recouvert des citernes.
Le monticule est assez tendu et il devait y avoir l quelque
exploitation importante.
Au nord de la route se dresse, vers les n os 120 et 119, un mur
en blocage, visible de loin en raison de sa hauteur qui dpasse
2 mtres et de ses 8 mtres de longueur. Tout ct de lui, et
sur un axe parallle, s'tend un mur courbe ayant certainement
form une abside.
Mais ce qui attire surtout l'attention, c'est qu'extrieurement et
concentriquement celui-ci, existe un autre mur courbe qui se
continue, sa partie antrieure, avec une construction de forme
carre ou rectangulaire : cette disposition indique fort probable-
ment qu'il y a en ce point une basilique chrtienne de quelque
importance.
On sait et on verra plus loin que Hergla offre de nombreux ves-
tiges de l'poque chrtienne.
Au mme endroit nous voyons un tambour de colonne engage
en calcaire, un puits antique ouverture carre, trois ouvertures
de silos maonns et offrant cette particularit que la partie sup-
rieure le goulot de la bouteille de ces rcipients est en
maonnerie. Ces ruines ont prs de 200 mtres de ct.

N. 126. Hergla (Horrea C lia). Malgr le peu de temps que nous


avons pass ici, j'ai pu y faire des constatations intressantes.
Au centre de la ville s'lve un monticule qui doit tre l'anti-
que acropole. Il y a quelques annes s'levait encore en ce point
un fort peut-tre byzantin en blocage, revtu de pierres de taille.
Ces dernires ont t descelles et transportes pour la construc-
tion du pont qui a t bti, il y a quelques annes, sur la piste
reliant directement Sousse Hergla.
Autant que nous avons pu en juger, cette citadelle tait carre
104

ou rectangulaire, mesurant, si mes souvenirs sont exacts, une cin-


quantaine de mtres de ct. Elle tait cantonne chacun de ses
angles par de grosses tours rondes, dont une seule est signale
dans l'Atlas archologique. En ralit, il en reste encore deux trs
apparentes; celle de l'angle sud-est a encore conserv quelques
pierres de taille. Il est donc probable que le revtement en grand
appareil n'a t enlev que jusqu'au sol moderne. En descendant
au-dessous de celui-ci une tranche laisserait voir sans doute la
disposition des assises et, si la forteresse est rellement byzantine,
ferait sans doute dcouvrir des inscriptions romaines.
Les habitants d'Hergla disent que cette construction est espa-
gnole.
Tout prs de la tour du sud-est, le montant de la porte d'une
maison arabe est form par une pierre de taille en marbre bleu
portant un bas-relief us qui reprsente deux cornes d'abondance
ou deux dauphins tourns l'un vers l'autre et spars par un objet
ovale. Cette pierre mesure 50 centimtres de longueur.
En passant devant la porte entrebaille d'une maison, j'aper-
ois, l'intrieur de celle-ci, un bloc orn de moulures qui sert
de banc. J'entre et, par une lumire douteuse, je relve l'inscription
suivante sur une pierre en marbre blanc
Longueur de la pierre, 0 m 75; hauteur, 0 m 40.

Comptant revenir bientt pour revoir ce texte plac dans l'ombre,


et qui me semble pouvoir tre mieux dchiffr dans un jour plus
favorable, je ne l'ai pas mesur compltement. Mais je n'ai pas
encore pu y retourner.
Les lettres ont 10 12 centimtres de hauteur. Elles taient
graves sur la frise d'un entablement, car on voit, la partie
infrieure de la pierre, des moulures d'architrave. Il portait une
ddicace quelque divinit paenne. Peut-tre provient-il du
temple du Capitole, qui et t bien sa place sur ce point culminant.
Mais la dernire lettre du nom de la divinit ne semble pas corroborer
cette opinion. Cette pierre a, en outre, t retaille une basse
poque. En effet, la face du soffite a t ravale, et on y a
sculpt un bas-relief reprsentant deux oiseaux, sans doute
105

deux paons affronts et penchs vers un vase deux anses d'o


sort une plante. Cette pierre est brise.
Mais nous avons la chance d'en voir une tout fait pareille, et
beaucoup mieux conserve, dans le mur d'une maison auprs de
la tour du nord-ouest. Elle est orne en haut d'un cordon de petits
croissants, au-dessous duquel deux paons se font face et becqutent
un fruit ovale sortant d'un vase en forme de canthare d'o s'lvent,
de chaque ct de la tige qui porte ce fruit, deux rameaux
retombant de suite et sur la naissance desquels sont perchs
les deux oiseaux. A gauche, au-dessous du paon, une colombe
becqute un fruit port par ces rameaux, et au del on voit la
moiti d'une espce de croix dont l'autre partie a disparu avec la
cassure de la pierre.
Ces deux sculptures sont de la mme pierre et traites exacte-
ment de la mme manire, et il est bien possible qu'ayant t faites
aux dpens du mme entablement elles portent des parties d'une
mme inscription sur l'une de leurs faces. Nous n'avons pu nous
rendre compte de ce fait, la seconde tant prise dans une muraille.
L'existence de ces deux pierres en un point voisin indique
qu'elles ne sont pas loin de l'emplacement de l'difice qu'elles
ont orn. Le motif en est certainement chrtien et il est probable
qu'au temple qui dominait Horrea Caelia a d succder une basi-
lique chrtienne.
Dans une construction ruine, en face du cimetire qui borde la
mer, j'aperois un cippe funraire, haut de 1 mtre, large de 45
centimtres, pais de 20 centimtres. La hauteur des lettres est
de 9 centimtres la premire ligne et de 5 centimtres aux sui-
vantes.
.F E L I X
L X V H S E
H S E
/////////X X X
A la partie suprieure est un fut de colonne trs abim, reste
de l'image d'un fronton qui devait orner la pierre.
Aprs quelques heures de repos l'ombre de beaux rochers
qui forment la grve de Hergla, nous suivons le rivage en nous
dirigeant vers le nord.
A une trentaine de mtres des dernires maisons de la petite
ville, nous remarquons des tombes en ciment, enfouies dans le
106

sable. Nous essayons en vain de dterminer l'endroit exact o


devait se trouver le port. Mais les dunes entames par les flots
nous laissent voir les restes de la ville ventrs et bants. Ici, sont
des chambres dont les murs et le sol demi crouls dpassent
le sable 2 mtres au-dessus de nous; l, sont des rservoirs
carrs ou rectangulaires dont l'un est recouvert d'une espce de
dme. Un peu plus loin, voici la section trs nette d'un canal
maonn parfaitement conserv, d'environ 1 m 20 de hauteur sur
60 centimtres de largeur. Ailleurs, c'est un tambour de pilastre
engag, en calcaire jaune. Et ces observations se continuent sur
plus de 1500 mtres de longueur. Combien plus tendue et floris-
sante que la bourgade actuelle fut la cit antique et quel
ratatinement vers leur centre l'invasion musulmane a provoqu
dans tous ces centres si prospres autrefois ?
En suivant ainsi la cte, on arrive en un point o une large et
pittoresque route venant de Hergla descend, en s'largissant, vers
la mer.
Nous sommes la limite septentrionale des ruines. Le chemin,
qui est encaiss depuis la petite ville arabe jusqu'ici, s'ouvre large-
ment sur l'arne blouissante et sablonneuse, entoure du ct de
la terre par un croissant de hautes thabias blanches comme la
neige et couronnes de vigoureux cactus. Ce large et lumineux
espace descend en s'largissant vers la frange d'cume qui forme
une onduleuse trane jusque Hammamet, tache blanche pique
aux flancs du cap Bon entre l'azur sombre des flots et le bleu plus
gristre des gracieuses montagnes. La voie antique devait, comme
la piste, s'accoler ici la mer jusque prs de la ville de Puppu,
dont les ruines s'lvent au bord de la mer entre Bir-bou-Rekba
et Hammamet.
Au centre de l'aire clatante, trois tches plus sombres formes
par le sol humide, entourent chacune la margelle d'un puits anti-
que (fig. 3, page hors texte).
Ce chemin est frquent. A chaque instant quelque caravane
de chameaux s'arrte auprs d'un des orifices et leur conducteur,
muni d'une longue corde, retire le liquide qu'il verse dans une
auge antique. Des vieillards ou des enfants monts sur de petits
nes, de longues thories de femmes porteuses d'amphore, en
leur tunique bleue d'o sort le bronze des poignets cercls d'ar-
gent viennent s'y approvisionner d'eau. Cette description serait
un hors d' uvre dplac ici, si elle ne permettait de reconstituer
107

ainsi des scnes qui se sont, immuables, succd depuis des sicles
en ce point. Supprimez le chameau, ce nouveau venu en Berbrie,
remplacez les cactus, nouveaux venus aussi, par les murs des
maisons ou l'enceinte de la ville, et cette partie variable du cadre
s'ajoutant au fond immuable de la mer, il n'y aurait qu'une chose
importante de change : de grandes barques devaient, choues
sur le flanc, s'aligner le long de la plage et les marins ont d bien
souvent, en faisant leur provision d'eau aux puits, fraterniser ici
avec les terriens . Ce point d'eau, pour les voyageurs, pour la
ville peut-tre, tait en mme temps une aiguade, et cela vous
explique qu'il soit si vaste et qu'il touche la mer. Je ne serais
pas tonn que ce soit de ce ct qu'il faille chercher le petit port
de Horrea Clia, quelque peu abrit qu'il paraisse au premier
abord avoir t ici.
Des trois puits, l'un, le plus loign de la mer, est rectangulaire
et mesure environ 5 mtres sur 2 mtres de ct. L'eau s'y
trouve 4 mtres et on voit dans une de ses parois l'ouverture
actuellement mure d'un grand aqueduc qui devait amener ici
l'eau de la nappe souterraine. Cette dernire a sans doute descendu
depuis l'poque romaine, car elle passe au-dessous du mur du
puits.
20 mtres plus bas sont deux puits rectangulaires distants aussi
d'une vingtaine de mtres. Les parois de l'un d'eux sont formes
de 4 arceaux peut-tre antiques, peut-tre arabes. C'est un mode
qu'on emploie assez souvent dans les puits modernes. La moiti
de l'orifice est recouverte par de la maonnerie.
Le troisime est flanqu d'une petite citerne en blocage, dont
la vote en berceau demi dtruite est perpendiculaire sa paroi
la plus rapproche de la mer.
Les margelles de ces puits sont en grande partie formes par
un grand nombre d'auges funraires de toutes dimensions, depuis
la cassette en pierre jusqu'au sarcophage. Il y avait incontestable-
ment une ncropole dans le voisinage de chaque ct de la voie
qui passait ici, et au sortir de l'antique cit.
A une quarantaine de mtres d'ici, vers Hergla, et au bord de
la route, on voit une autre citerne antique qui passe sous le che-
min et qui a t singulirement utilise par les arabes. Ceux-ci
ont simplement perc le fond du rservoir, de manire le trans-
former en puits.
108

En suivant le chemin o se trouve ce travail hydraulique, nous


revenons vers Hergla. Des restes de murs, de citernes, de puits
percent, et l, le manteau de sable formant de fertiles jardins
qui recouvrent les restes de la vieille cit. A l'entre du village
mme nous trouvons une grande jarre couche, demi -brise et
rcemment dcouverte. C'est le vestige de quelque tombe.
Quittant Hergla pour prendre la piste arabe vers Sousse en lon -
geant la mer, nous relevons en plusieurs endroits des traces de
l'antique chausse dont elle suit la direction et que jalonnent
d'ailleurs de nombreuses ruines. A 1 kilomtre au sud de la petite
ville, c'est une trs vaste enceinte rectangulaire couronnant un
mamelon, reste de quelque retranchement. A droite et gauch e,
des vestiges de villas servent de carrires. Puis nous laissons la
ruine situe aux bords de l'oued Fradj-Gaa et, plus prs encore de
Sousse, celle de Sidi-Kantaoui. Une enceinte carre rservoirs
ciments est situe 1 kilomtre au nord des ruines demi-coupoles,
que la Socit se propose de fouiller, sur le sommet d'un mame -
lon. On dcouvre admirablement de l une plaine basse, couverte
d'une magnifique vgtation et qui s'tend jusque la mer. C'tait
videmment un poste plac sur la voie de Horrea Clia Hadru -
metum.

D r CARTON, Prsident.
Membre non rsidant du Comit des Travaux
Historiques et Scientifiques.
NOTES HISTORIQUES DE SOUSSE

(SUITE )

Youssof succde Othman, pacifie le pays, tmoi -


1616 gne la France des sentiments amicaux et signe un
trait d'change d'esclaves ; sous son gouvernement,
1619 le duc de Savoie fit une exp dition malheureuse contre
Sousse.
1637 Youssof, mort, est remplac par Mourad qui autorise
l'tablissement des Capucins, les fondateurs en Tuni-
1640 sie de la communaut catholique actuelle. Hamouda-
Bey lui succde ; sous son gouvernement plusieurs
flottes europennes durent se prsenter devant Alger
et Tunis pour mettre la raison les corsaires ; les con-
suls Lange, Martin et Le Vacher rendirent d'minents
services la cause franaise ; les habitants de Sousse
n'eurent qu' se louer des bonnes dispositions
d'Hamouda-Bey leur gard, ce prince ayan t une
prdilection pour cette ville. H amouda- Bey, nomm
1663 pacha depuis quatre ans, laisse ses fonctions son fils
Mourad et remet son second fils Abou-Abdallah le
gouvernement de Sousse.
Pendant ce temps, la flotte fran aise, commande
par le duc de Beaufort, terminait son expdition cont r e
les cor sair es algr ien s et ar r ivait dev ant La
1665 Goulette. Ayant appris que quatre btiments corsaires
char geaient du bl Sousse pour un ngociant de
Tunis, il partit le 10 octobre avec cinq vaisseaux, donna
le 11 la chasse deux btiments turcs, mais vainement ;
le 12 il s'empara d'un transport charg de bois ; mais
empch les jours suivants par une violente tempte
il ne put gagner Sousse et revint devant Tunis. Le Dey
Musta pha- K ar a- K ou z, al or s m atr e du r oyau me de
2 5no v.1 665 Tunis, s'empressa de conclure un trait trs avantageux
pour la France en ce qui concerne Sousse ; il
tait stipul dans l'art. 8 que : tous les vaisseaux
110

marchands ou autres, franais, qui se rendent


Sousse pour y vendre leurs marchandises le pour-
ront faire en toute libert et sret en payant seu-,
lement les droits ordinaires, et l'gard de celles
qu'ils ne vendront pas, ils pourront les remporter
dans leurs bords, sans que pour ce ils puissent tre
obligs de payer aucun droit pour icelle ; un autre
article du mme trait portait que : le consul de
France, rsidant dans la ville Tunis, sera honor et
respect et aura la prdominance sur tous les autres
1666 consuls, etc. Le Dey Kara-Kouz est assassin.
Ds lors, l'autorit des Deys fut de plus en plus
mconnue, tandis que les Beys cherchent par tous les
moyens tendre leur pouvoir.
Les corsaires, renouvelant leurs exploits contre nos
1670 nationaux, l'amiral marquis de Martel vient avec une
5 fv. 1671 flotte dans les eaux de Tunis ; un de ses capitaines
demande des reprsailles pour la prise d'un vaisseau
franais et propose de bloquer Sousse et mme d'en
ruiner les murailles et les maisons coups de canon
24 fv. 1671 Le roi, en rponse des ordres demands,
prescrit le blocus de certains ports (Porto-Farina, La
Goulette et Bizerte), et la chasse sur Sousse pour
empcher la retraite des corsaires.
1672 Un nouveau trait est sign qui complte les avan-
tages concds par celui de 1665 et qui porte entr'au-
trs stipulations que : toutes les nations reconnatront
le consul des Franais, mme les Grecs de la
domination ottomane, etc..
Les discussions continuent rgner entre les Deys
et les Beys, et chaque postulant la place de Bey se
dispute le pouvoir.
Aprs la mort de Mourad-Bey, ses deux fils Mo-
hamed et Ali, luttrent entre eux pour la succession
que laissait leur pre. A tour de rle vainqueurs
1675 et vaincus, ces deux comptiteurs se rconcilirent
un moment pour tenir t te aux Algriens qui prpa -
raient une expdition contre les Tunisiens; c'est
vers cette poque quAli-Bey donna une rude leon la
111

tribu des Ouled-Sad qui tait dissmine dans la


rgion comprise entre Kairouan, Sousse, Zaghouan et
Hergla ; cette tribu de la confdration des Riah, de
mauvaise rputation, dteste, fut razzie et disperse.
Un nouveau conflit surgit entre les deux frres ; enfin
1679-1680 Ali-Bey, aprs avoir dbloqu Monastir, va Sousse,
d'o il envoie des messagers pour traiter de la paix avec
son frre Mohamed-Bey.
Les Algriens avaient profit de ces troubles pour
envahir la Tunisie et la piller. Ils rentrrent ensuite
Alger chargs de butin.
Les intrts franais avaient souffert de ces troubles ;
une flotte sous le commandement du marchal
d'Estres avait d tre envoye pour obtenir
rparation du prjudice caus notre commerce ; par
30 aot 1685 Dey de Tunis accordait tout ce qui tait demand,
mais n'ayant pas d'argent, il dut concder le cap
Ngre une maison de Marseille qui remit l'indemnit
exige ; mais ce trait n'tait valable qu'aprs appro-
bation des beys. Le marchal d'Estres gagna alors
par mer Sousse, dont Ali-Bey tait commandant sup-
rieur, et Monastir que gouvernait Mohamed-Bey; ces
deux beys avaient quitt leur rsidence.
Le marchal d'Estres crivit alors en ces termes
aux commandants provisoires de ces deux places :
3 sept. 1685 Le marchal d'Estres, bord de lArdent, en rade
de Sousse, fait savoir Sidi-Hassan, commandant
dans la ville et le chteau de Sousse, et Sidi Hussen
Agha et Sidi Soliman Agha,commandants Monastir,
qu'aprs avoir attendu jusqu' samedi soir la rponse
des trs illustres Mohamed-Bey et Ali-Bey frres,
touchant le projet de trait qui leur a t envoy de
sa part, il n'est pas possible qu'il diffre davantage
recevoir les justes satisfactions qu'il demande au
nom du roi, les prendre lui-mme en cas de refus
de la proposition qu'il fait prsentement ; il propose
aux dits commandants d'excuter par provision les
restitutions nonces dans le projet de trait, sans un
plus long dlai que dimanche et lundi prochains,
112

tant pour la restitution des esclaves que pour les


sommes en argent et en marchandises, et de signer
ensuite le trait ; en faute de quoi il fera toutes sor-
tes d'actes, d'hostilit et de la manire qu'il estimera
propos.
9 sept. 1685 Cette dmonstration navale et cet ultimatum produi-
sirent leur effet ; le trait fut sign entre le marchal
d'Estres et Hassan Kiaya, commandant la ville et le
chteau de Sousse et lieutenant d'Ali-Bey, aprs que
le marchal eut fait avancer les galiotes pour bombar-
der la ville en cas de refus ou de retard prolong.
Treize coups de canon de part et d'autre salurent la
conclusion de cette ngociation. Le mme jour, le
marchal recevait deux esclaves retenus Sousse, les
esclaves retenus Tunis, une forte somme d'argent
(20.000 cus), un fort beau cheval donn par Ali-Bey
et une jument envoye par Mohamed-Bey.
12 sept. 1685 Le trait est sign entre le marchal d'Estres et
Issouf, Kiaya de Mohamed-Bey Monastir.
28 aot 1686 Le Consulat de France est reprsent Sousse.
9 juin 1687 Sidi Hassan- Kiaya se plaint qu'un ngociant de
Toulon, Laurent Blancart, tait venu drober deux
esclaves son matre aprs avoir charg des marchan-
dises Sousse. Le Bey rclame une indemnit de 500
piastres par tte. Le consul de France rgle le diffrend.
1689 L'anne fut marque par deux terribles flaux : la
peste et la guerre. Les Algriens et les Tripolitains se
1692 coalisrent contre la Rgence de Tunis ; le Bey demande
deux vaisseaux de guerre franais pour s'opposer aux
Tripolitains moyennant des avantages au Cap Ngre.
juillet 1694 Pendant la campagne entreprise par les Algriens
contre les Tunisiens, deux vaisseaux de guerre :
Le Modr et lArc-en-Ciel, partis de Toulon, vont
dgager les vaisseaux marchands enferms dans le
3 aout 1694 port de Sousse et les mettent en tat de suivre leur
route vers Marseille. Le Modr tait arriv de Malte,
sous les ordres du commandant de Pallas.
Les Algriens, presque toujours victorieux dans les
113

nov. 1694 c o m b a t s , e n tr e n t d a n s T u n i s d o n t l e s p or t e s s o n t
ouvertes par les habitants, destituent le nouveau Dey
Ibrahim et l'exilent Sousse.
janvier 1695 Aprs. paiement de l'indemnit de guerre, 500 000
piastres (1.500.000 francs), les Algriens rentrent dans
leur pays. Sousse et d'autres villes se rvoltent contre
Ben Tcheker qui avait fait cause commune avec les
Algriens et, de plus, avait mcontent tout le monde
par ses abus.
mai 1695 Les frres Bourguet, gnois, ex-esclaves d'Ali-Bey,
veulent entreprendre des travaux en vue de dcouvrir
un trsor aux environs de Sousse; le Consul de France
les en empche, vu que le Consul d'Angleterre devait
tirer tout profit de cette entreprise et que des difficul-
ts auraient pu survenir avec les autorits du pays.
1696 A la mort de Mohamed-Bey, son frre Rhamdam
lui succda ; il s'alina les populations au point qu'il
fut question de son neveu Mourad pour le remplacer ;
alor s quelques- uns de ses partisans l'engagr ent
exiler ce neveu qui, disaient- ils, conspir ait pour le
1698 renverser. Mourad fut enferm, gard au Bardo
e t conda mn avoir les y eux cr ev s pour av oir ten t
une vasion, mais les partisans de Mourad gagnrent
le chirurgien franais Carlier, rengat, qui ne lui ta
pas la vue. Mourad fut toutefois exil Sousse et
enf er m d an s l e c h t e au so us l a g ar d e d e l' A g h a,
moine rengat, nomm Papafola, cause de son
apostasie; ce dernier s'aperut que la vue de Mourad
avait peu souffert; Mourad, convaincu qu'il fallait
prvenir les desseins de son oncle, fit tuer l'Agha
26 nov. 1698 pendant qu'ils taient table et par vint s'chapper
de sa pr ison, se rfugia dans le Djebel Ousselet o il
runit un parti puissant.
Vers la mme poque, un Provenal nomm Dedous
vint Sousse et fit, pendant une nuit, des recherches
pour dcouvrir le trsor dj envi des frres Bourguet,
mais c e f ut en vain. D edo us f aillit pa yer de sa vie
cette tentative que le Bey n'avait pas autorise.
1699 Au commencement de l'anne on apprit la nouvelle
114

que Mourad n'tait pas aveugle. Rhamdam, pour s'as-


surer, en cas de besoin, un lieu de retraite fortifi,
achte, contre du bl du Cap Ngre, au Consul d'An-
gleterre 4 mortiers, 1000 bombes, 2 couleuvrines, 2
gros canons qu'il envoie Sousse dont il fait armer
les bastions et remparts.
mars 1699 Mourad est lu Bey Kairouan. Rhamdam n'eut
alors d'autre ressource que de s'enfuir Tunis avec 5
ou 6 esclaves et des rengats, ses favoris, et de gagner
Sousse; mais, recherch et reconnu par les spahis de
Mourad, qui le dcouvrent dans le marabout d'Hadji-
Bourraoui o il s'tait cach, il eut d'abord la vue
brle, puis la tte coupe. Mourad fit parvenir cette
tte au Dey en le priant de l'exposer et de la faire
promener dans Tunis.
mai 1699 Mourad poussa plus loin sa vengeance; tant venu
Sousse, il fit dterrer le cadavre de son oncle Rham-
dam, le fit brler et jeter les cendres la mer; les os
q u e l e f e u a v a it p a r gn s f u r en t br oy s d an s un
mortier et les poudres conserves dans des botes.
1700 Mourad eut encore lutter contre les Algriens qui
russir ent le battr e; il pr parait une nouvelle exp -
1702 d i t io n lo r s qu ' il f ut a ss a ss i n p ar I br a hi m q ui s e f i t
1705 nommer Bey, puis Dey et ensuite Pacha ; ce dernier
fut lui-mme pris la suite d'une dfaite que lui firent
subir les Algriens; l'Ag ha des janissa ires, Husse in
ben Ali, rallia les fuyards tunisiens, se fit proclamer
Bey, et put, non seulement repousser les assauts des
Algriens contre Tunis, mais les obliger rentrer dans
leur pays. Hussein ben Ali restait seul matre de la
Tunisie, en qualit de Bey, toute aut re fonction sup -
prime.

Priode Husseiniste ou Moderne


de 1705 nos jours.

1705 Hussein ben Ali, Bey de Tunis et ma tre absolu


du pou voir en Tu ni si e , r organ is a l e pa ys e t ch er c ha
entretenir les meilleures relations avec les puissances
tr an gr es . D an s l es pr e m ier s t e mp s d e s on r g ne , l e
115

Bey, priv d'enfants mles, avait dsign comme Bey


1709 du camp son neveu Ali; mais plus tard, une jeune
f ill e d e G n e s, a m en e da ns l e h ar e m du B e y, lui
donna successivement cinq enfants, dont trois garons
Mohamed, Ali et Mahmoud; Hussein dcida alors que
le pouvoir se transmettrait de mle en mle et, pour
calmer les regrets de son neveu Ali, il le nomma Pacha.
Parmi ses proccupations multiples concernant la
rorganisation des villes de la Rgence et l'extension
du commerce, il y a lieu de faire mention pour Sousse :
1 Du remaniement des plans de la Zaouia, qu'il
attribua Sidi Abd-el-Kader-el-Ghilani, de la consti-
tution d'immeubles comme habous et de l'affectation
du quart des revenus de ces immeubles aux profess eurs
et aux gardiens de la Zaouia, dont il assurait la
construction ;
9 mai 1712 2 D'un trait qu'il passa avec le sieur Vince nt
Denoux, franais, pour l'tablissement d'une fabrique
d'huile et de savon Sousse.
De plus, pour maintenir les bonnes relations avec la
29 nov.1718 Fr anc e, le B ey f ait des excuses pr opos de deux
patrons franais qui, justiciables du Consulat, avaient
t illicitement emprisonns par les autorits musul-
manes pour avoir embarqu des huiles en contrebande
Sousse.
Malgr la direction nergique donne aux affaires,
Hussein ne put empcher le renouvellement de quel-
ques actes de piraterie qui obligrent l'envoi dans les
eaux tunisiennes de navires franais en 1710, 1720,
1724 et 1727.
1727 Cette anne, en septembre, il fut tabli, par le chef
de l'escadre fran aise, un rapport sur la situation de
la ville de Sousse en vue d'un projet de descente et de
bombardement pour punir les marchands d'esclaves.
Les termes de ce rapport sont les suivants : Sousse,
ville trs riche, la deuxime aprs Tunis, gros trafic
d'huile s'y embarquant tous les ans pour Alexandrie
( 3 4. 0 0 0 q u in t a u x ) s ur d e s b t i m e n t s f r a n a i s ;
b e au c ou p d e m ti er s de to il er i e ( l e s t oi le s s ont
116

distribues en Tunisie et en Barbarie); laines portes


Marseille; la vi l l e , sur le rivage de la mer, forme
une espce d'amphithtre; elle est ferme partout
par des murailles assez bonnes, tant sur mer que du
ct de la terre, mais sans fosss en dehors ni rem-
parts en dedans, qui ne sont pas l'preuve des
canons de 18 24 livres de balles qui les dtruiraient
bientt; les vaisseaux peuvent surveiller un coup
de mousquet de la ville; il est facile de la bombar-
der et canonner.
Au bout de la ville et dans son enceinte, il y a un
espce de chteau, avec 20 pices de canon, 30 40
Turcs et un Agha de garnison ; les murailles de la
marine sont aussi montes d'une vingtaine de canons
de 6 8 livres de balles, presque tous de fer ; il y
en a un de fonte de 24 livres de balles qui fut pris
par la galre de Jannon Khodja, autrefois capitaine
corsaire ; ces canons n'ont pas d'artilleurs expri-
ments; les munitions font presque dfaut.
Ce court aperu dmontre que Sousse n'aurait pu
rsister l'attaque d'une escadre franaise ; le Bey
1728 Hussein arrangea tout et conclut un nouveau trait
avantageux la France. Ali Pacha, mcontent de n'tre
plus l'hritier prsomptif, rompit subitement avec son
oncle et, s'tant rendu chez les Ousseleta, chercha
s'attirer un certain nombre de tribus; mais le Bey
Hussein marcha de suite contre ce neveu rvolt et
l'obligea bientt fuir, avec son fils Youns, dans la
direction du Sahara, d'o il gagna Alger. Ali esprait
avoir l'appui du Dey, vain espoir; il fut emprisonn
jusqu'en 1735, poque jusqu' laquelle Hussein Bey
paya rgulirement au Dey d'Alger une indemnit
pour la garde de son neveu.
La somme convenue n'ayant pas t paye, le Dey
d'Alger profita de cette occasion pour dclarer
nouveau la guerre la Rgence de Tunis ; les deux
4 sept. 1735 armes se rencontrrent Smindja, sur l'Oued Miliane;
les Tunisiens furent battus et obligs de se retirer
sur Zaghouan, puis sur Kairouan.
117

7 sept. 1735 L'arme victorieuse gagna de suite Tunis et Ali


Pacha, se faisant proclamer Bey dans la capitale, se
reconnaissait vassal du Dey d'Alger et s'engageait
lui payer une redevance annuelle de 50.000 piastres.
Cinq annes durant Hussein-Bey, ses fils et certaines
tribus vont rsister aux attaques de l'usurpateur. Les
faits principaux de cette priode, concernant Sousse,
avril 1736 mritent d'tre nots. Youns, le fils du nouveau Bey,
va faire le sige de Sousse qui ne s'tait pas encore
soumise ; la ville utilisait tous les moyens pour se
ravitailler, mme par mer; un capitaine d'un vaisseau
nov. 1736 marchand de Martigues, nomm Joseph Patet, fut
dnonc au Bey Ali comme ayant ravitaill Sousse ;
ce malheureux fut mis la chane. Le Bey Ali
continua user de reprsailles contre la ville de
Sousse, qui ne voulait pas se soumettre.
mars 1737 Mohamed-Bey, fils d'Hussein, qui tait gouverneur
de la ville depuis 1735, chercha exciter le roi de
France Louis XV contre le Bey usurpateur ; il lui
2 dc. 1737 crivit pour lui faire connatre que le Bey de Tunis
prenait et pillait les btiments franais chargs
de marchandises et de passagers provenant de
Sousse et de Monastir ; il lui signala, en outre, les
mauvais traitements subis par les chrtiens parce
que Sousse ne s'est pas soumise. Le Bey de Tunis
fait mettre la chane le capitaine et l'quipage
d'une polacre franaise capture Sousse avec son
chargement et refuse de restituer quoi que ce soit.
Le Consul, sur une rclamation nergique, obtient
satisfaction d'autant plus facilement qu' la suite
de nombreux compte-rendu faits au roi de
France, celui-ci envoie de Toulon un certain
1738 nombre de vaisseaux de guerre. Le sige de la ville ne
fut pas continu ; aussi Mohamed-Bey put-il recevoir
la Casbah la visite de son pre qui demeura quelques
jours avec lui et retourna ensuite Kairouan.
Mohamed-Bey disposait alors d'une cavalerie et d'une
infanterie assez fortes pour lui permettre de maintenir
son autorit dans la plus grande partie du Sahel
qui tait reste fidle sa cause et celle de
118

son pre (seule Kala-Srira, prs de Sousse, s'tait mise


du ct d'Ali-Pacha).
Mohamed-Bey ngocia un trait avec le grand -matre de
Malte qui envoya des navires de commerce porter et
rapporter des marchandises de Sousse, il eut mme un
navire affrt pour son usage personnel. Avec les facilits
de ravitaillement qu'elle avait, Sousse put fournir des
vivres Kairouan lorsque le besoin s'en f ai sa i t se ntir
dan s c et t e v il l e e t dur ant l es mo m en ts o le sige tait
partiellement interrompu.
mai 1739 Sousse, alors assige, reoit des vivres de btiments
franais ; le Consul et nos nationaux de Tunis sont
prvenus par le Bey Ali qu'ils seront renvoys si leurs
navires continuent porter des vivres Sousse.
Peu de temps apr s, Mohamed-Bey cde le comman -
dement de la ville son frre Mahmoud -Bey et va
rejoindre son pre Kairouan, puis gagne Alger.
1740 L'arm e d'Ali - Pacha, s'tant considrable m ent
augment e, put investir compltement Kairouan et
entreprendre la soumission des autres villes et des
tribus encore fidles Hussein -Bey. Le 13 mai, Kairo u a n
f u t p r i s e e t H u s s e i n p r i t d e l a p r o p r e m a i n de son
petit-neveu Youns, mais en brave et face l'ennemi.
Sousse tait en mme temps investie trs troitem ent;
elle dut supporter de terribles preuves et les h a b i t a n t s
e n a r r i v r e n t s o u h a i t e r l a m o r t c o m m e une
dlivrance.
Apr s la prise de Kairouan, Youns se porta lui - mme
devant Sousse et hta la reddition de Monastir. A la
nouvelle de la perte de ces deux villes, Mahmoud -B ey,
gouverneur de Sousse, rs olut de fuir, ma is l'insu des
habitants; il s'entendit avec le capitaine du navire affrt
qui tait sa disposition, convint de simuler une dispute
avec lui en prsence de notables, apr s q uoi l e c ap it a in e
s'e mb arqu er a it fur i eux en faisant connatre son
intention irrvocable de partir.
L' apr s- m idi l e c ap it a in e de sc en di t t erre , mo nt a
la Casbah feignant d'tre de mauvaise humeur; il
119

fut mal reu par Mahmoud, qui lui fit une avanie, et
il quitta brusquement la salle d'audience en jurant qu'il
ne resterait pas un jour de plus dans le port.
Cette dispute fut connue en ville. Mahmoud envoya
prier des notables de monter dans une barque et
daller trouver le capitaine pour une rconciliation, ce
qui fut fait; le capitaine feignit de cder leurs prires
et promit de redescendre le lendemain pour aller voir
Mahmoud-Bey ; les notables rendirent compte de leur
mission, furent remercis et gards la Casbah
jusqu' la nuit. Pendant la nuit, Mahmoud alluma un
feu, signal convenu entre lui et le capitaine ; celui-ci fit
mettre la mer une barque et l'envoya se poster dans un
endroit fix d'avance; Mahmoud quitta secrtement la
Casbah et la ville et s'embarqua en emportant ses biens
les plus prcieux, emmenant ses serviteurs les plus
fidles et laissant dans sa chambre une feuille de papier
sur laquelle il avait crit : Aux habitants de Sousse
! je quitte votre ville maudite; si vous voulez m'en
croire, faites comme moi. Il gagne ensuite Alger o il
retrouva son frre Mohamed-Bey.
Le matin, les gens de Sousse s'aperurent du
dpart du navire, montrent la Casbah pour prvenir
le gouverneur, se firent ouvrir les portes et les
chambres, ne trouvrent que des lits vides et consta-
trent la disparition de Mahmoud-Bey et de ses intimes;
l'on comprit alors que le prince avait fui ; une grande
anxit rgnait dans la ville qui craignait la vengeance
de Youns. Les notables se concertrent et dcidrent
que la ville ayant suffisamment souffert des privations,
des maladies et ne pouvant plus esprer aucun secours,
devait se rendre.
Le Pacha Ali-Bey apprit vite la nouvelle du dpart
de Mahmoud-Bey et des intentions de la population
de Sousse; il fut heureux de savoir que de ce ct la
1740 tranquillit allait renatre. La ville de Sousse, prive
de chef, tait soumise.
1741 Les habitants, redoutant toujours la vengeance de
Youns, attendaient une occasion pour lui tmoigner
120

leur soumission absolue. Dans le courant de l'ann e,


Youns quitta Tunis avec une arme pour aller perce voir
l'impt dans le Sud ; il passa par Sousse ; tous les
habitants, riches et pauvres, sortirent sa rencont r e e t
v in r en t l u i b a i s e r l a m a i n e n a pp e l a n t su r l u i les
bndictions du ciel. Youns pntra dans la ville et
licencia tous les koulouglis, qu'il condamna ainsi la
misre; ceux - ci se rsignrent plutt que de se rvolter.
La situation politique entre Ali -Pacha et les puis -
sances europ ennes tait alors trs tendue; la France
dut, pour faire cesser les vexations multiples dont elle
t a i t l 'o b j e t , f a i r e e nv o i d' un e e s c a d r e ; l a p a i x fu t
1742 aussitt signe ; les autres puissances durent faire de
1746 m m e l e s a n n e s s u i v an t e s . A l i - P a c h a m c o n t e n t a i t
tout le monde, y compris le Dey d'Alger, qui tenta une
expdition contre Tunis; les Algriens durent bientt
cesser les hostilits.
1752 Youns, fils du B ey de Tunis, se rvolte contre son
pre, est proclam Bey, mais pour peu de temps, car
Ali-Pacha rprima nergiquement la rvolte; il autorisa
le pillage dans Tunis qui avait reconnu Bey le rebelle.
Sur ces entrefaites, un nouveau Dey d'Alger arriva
au pouvoir; il tait ennemi personnel d'Ali - Pacha,
voulut de suite soutenir les droits des deux fils
1756 d'Hussein et d clara la guerre aux Tunisiens. L'arme,
command e par les deux fils d'Hussein, n'eut pas de
pe in s' e mp ar er d e Tun i s ; Al i - P a ch a e t un d e s e s fils
furent dcapit s. Youns ne put leur succder.
1756 Mohamed-Bey fut appel prendre les rnes du
Gouvernement ; prince bienveillant et nergique la
fois, il fut ad mirable ment second par son frre Ali q u i
d e v a i t l u i s u c c d e r . D a n s s a p r e m i r e t o u r n e pour la
perception des impts, Ali -B ey arriva devant
1756 S ou s s e ; l e s h a b i t a n t s , i gn or a n t l e s d e r n i er s v n e -
ments, ferment leurs portes, tirent le canon, puis
parlementent du haut des remparts, disant tout
d'abord qu'ils ne se rendraient pas tant qu'Ali -Pacha
ser a it vi va nt ; l es pre m i r es diff i cu lt s v ai nc ue s, l es
121

portes furent ouvertes, Ali passa la nuit Sousse avec


son goum; le Cad Mansour Sas se prsenta Ali-Bey,
qui l'accueillit avec bienveillance, le rassura et lui
promit de lui conserver son Cadat ; le Cad invita
alors les habitants verser une somme d'argent ;
Ali-Bey reut avec remerciement l'impt convenu et
partit pour Sfax. Pendant ce temps, les Algriens qui
avaient ramen Mohamed-Bey Tunis devenaient de
plus en plus exigeants; ils allrent jusqu' provoquer
un conflit et livrer la capitale au pillage.
Mohamed-Bey appela alors son frre Ali son secours
et demanda des troupes franaises pour l'aider mettre
la raison ses anciens allis qui taient devenus ses
ennemis. Sousse fut dsigne par le Bey pour recevoir
ces troupes. Mohamed-Bey mourut subitement,
regrett de son peuple et laissant la succession son
frre Ali. Ali-Bey, prince trs populaire, s'occupa de
suite de dvelopper l'agriculture, l'industrie et le
commerce de son pays ; il s'attacha entretenir
d'excellentes relations avec les nations europennes,
surtout avec la France ; des ftes eurent lieu au Bardo,
des avantages furent accords nos nationaux.
Malheureusement un incident vint, pour quelque
15 aot 1768 temps, changer la tournure des choses. La Corse avait t
incorpore la France ; or, les Corses et les Gnois
taient cette poque en guerre avec Tunis ; il arriva
que des btiments de commerce corses, naviguant
sous pavillon franais, furent capturs par des vaisseaux
tunisiens; notre Consul, sur ordre du roi, adressa ses
rclamations au Bey, qui ne voulut pas tenir compte
de la situation nouvelle de la Corse ; la guerre du
tre dclare. Le Consul de France et ses nationaux
1770 quittrent Tunis le 31 mai 1770 et l'escadre franaise,
sous les ordres de Monsieur de Broves, mouilla prs
21 juin de la Goulette le 21 juin. L'ultimatum ayant t
28 juin envoy, le bombardement de Porto-Farina et de
Bizerte se fit en juillet et aot; il fut dcid aussi que
Sousse, laquelle le Bey tait fort attach, serait
attaque.
122

25 juillet La flotte fran aise appareille 6 heures du matin


devant Sousse, vena nt de Hammamet; le soir, par
suite d'un grain tr s fort, elle est oblige de jeter
l'ancre deux lieues et demie de la ville.
26 juillet Chaque navire prend sa place de combat; prendront
part l'action : La Salamandre, Le Sagittaire, L'Etna, La
Provence. Les premires bombes sont lances dans la
ville; l'ennemi ne rpond que par un feu trop court ou
trop long; deux galiotes seulement ont tir et cessent
le feu aprs avoir tir 34 bombes durant 2 heures 1/4 , la
mer tant trs forte, la flotte se retire un peu. Ds le
commencement du sige ( 1 ), la population de Sousse se
hta de fuir et se runit hors de l'enceinte, laissant la
ville dserte, seule expose aux coups.
Le cheik Ahmed ibn Tahar el Mazongli, gouv erneur
du Sahel, e nvoy pour pre ndre le commandeme nt,
prit conseil des chefs de la ville et arrta que l' artillerie
des forts de la ville serait tablie sur la plage pour
faire obliquer la direction du tir des bombes et attirer
l'attention de l'e nne mi (ce qui eut lieu e n partie).
28 juillet Fort c oup de ve nt de Nord -Est, l'e sc adre ne pe ut
pas tiret ; l'ennemi, fort heureusement, ne profite pas
de notre d savantage (mauvais temps, impossible de
29-30 juillet bombarder).
4 aot La Salamandre et L'Etna reprennent le bombarde -
ment de 12 h. 3/4 7 heures du soir ; 203 bombes sont
lances, l'ennemi riposte vivement; M.de Mis -
siessy, enseigne de vaisseau, bord de la Salamandre,
est tu par un boulet perdu, le seul qui eut atteint la
galiote; un pilotin a la main fracasse.
5 aot Bombardement de 9 heures 11 heures du matin;
52 bombe s sont lanc e s, la Salamandre re oit de ux
coups de canon. Bombardement du soir au lendemain
matin 3 heures ; 171 projectiles lancs ; l'ennemi envoie
des bombes qui n'arrivent pas moiti chemin.
6 et 9 aot Mauvais temps ; la ville a dj bien souffert ; les

(1) D'aprs El Hadj Hamouda ben Abdel-Aziz, historien arabe, dans


son Ktab-el-Bacha.
123

pertes subies sont values alors huit millions de


francs.
11 aot, soir
Reprise du bombardement jusqu'au 12 aot, 4
heures du matin. 166 bombes sont lances; l'ennemi
tire peu.
12 aot, soir Feu trs vif jusqu'au 13 aot matin 3 heures; 252
bombes sont lances; M de Broves fait cesser le bom-
bardement, jugeant les dommages causs la place
assez considrables, vu que les deux tiers des bombes
sont tombes dans la ville ; les vaisseaux sont rpars et
l'on se tient prt gagner le large de Sousse ; la flotte
franaise se dirigea sur Monastir qu'elle bombarda,
25 aot 1770
puis revint bloquer La Goulette. A la suite de ces
expditions sur mer le Bey dut signer un trait recon-
naissant nos droits.
A partir de ce jour, Ali-Bey renoua ses relations
janvier 1773 amicales avec la France, s'occupa de son royaume, fit
rprimer la contrebande et punit de disgrce, pour
un fait de ce genre, le gouverneur de Sousse, qui avait
favoris l'exportation illicite de denres du royaume;
il s'associa de plus en plus son fils Hamouda au dtri-
1781 ment de ses deux neveux, vrais hritiers prsomptifs.
Sentant sa fin prochaine, Ali-Bey confia Hamouda le
soin de rendre la justice sa place.
1782 Mort d'Ali-Bey et avnement au trne
d'Hamouda-Bey. Ds le dbut de son rgne,
1784 le nouveau Bey se brouilla avec la Rpublique de
Venise et la guerre entre les deux pays clata la suite
de l'acte de violence d'Hamouda-Bey qui renvoya dans
les 24 heures le reprsentant de la Rpublique de
Venise.
Une flotte vnitienne, sous les ordres de l'amiral
Angelo Emo, aprs avoir bloqu La Goulette, gagna
Sousse o elle arrive; elle est compose de 3 vaisseaux
2octobre1784 de ligne, 2 bombardes, 1 frgate, 2 chebeiks et 1
demi-galre, qui viennent s'embosser porte du
5octobre canon. Au lever du soleil, les bombardes envoyrent
4 projectiles qui tombrent demi-porte de la ville et
en mme temps les vaisseaux ouvrirent le feu auquel
rpondit la forteresse avec avantage ; cette premire
124

attaque dura 1 h. 1/2 sans rsultat de part et d'autre. Le


6 octobre
feu fut trs vif des deux cts puis cessa, l'escadre
vnitienne ayant gagn un peu le large. Le bombarde-
ment continua les nuits suivantes et 250 bombes et
300 boulets furent lances contre la ville qui, selon
les uns, fut en partie incendie, et, selon les autres,
n'eut qu'une maison dtruite et deux autres endomma-
ges.
La flotte vnitienne causa, sans nul doute, des dgts
la place de Sousse, mais n'obtint pas les rsultats
qu'elle esprait, car le feu des batteries tunisiennes
fut plus srieux qu'on ne l'aurait pens.
12 octobre
L'escadre appareilla sans que les habitants connus-
sent sa destination.
29 juillet 1785
La flotte vnitienne reparait devant Sousse; elle est
compose de 11 btiments sous les ordres de l'amiral
Emo; elle jette l'ancre deux tiers de porte de canon
de la ville.
21 juillet
La flotte se met en bataille ; elle fait des man uvres
insignifiantes ; une galiote essaie d'incendier les vais-
seaux tunisiens ancrs au sud de la ville; minuit la
batterie du port repousse deux vaisseaux qui s'taient
approchs de la terre.
23au 25juil.
La flotte ne peut man uvrer ni tirer contre la ville
cause du feu des forts et du mauvais tat de la mer.
26 au 27 juil.
Le bombardement s'opre; 135 bombes sont tires
dans ces deux jours.
28 au 31 juil.
Par suite du mauvais temps la flotte vnitienne est
oblige de se tenir au large.
1er, 2, et 3 aot
Le bombardement est repris ; ou tire pendant la
5 aot
nuit; 350 bombes sont lances.
Le feu cesse ; 20 maisons ont t dtruites ; un
6 aot
pareil nombre a t endommag, seul un enfant a t
tu d'un clat de bombe. La flotte fait route vers Sfax.
Pendant plusieurs jours la mer rejeta sur la cte
des cadavres de matelots vnitiens et des dbris de
navires; cette expdition ne produisit aucun effet sur
l'esprit du Bey qui parut moins dispos que jamais
un accommodement.
125

nov. 1785 Aprs les bombardements de Sousse, La Goulette


et Sfax, le Bey r clama la Rpublique de Venise une
indemnit de guerre de 60.000 sequins. La guerre, au lieu
de se terminer, allait entrer dans une nouvelle phase.
L'anne 1786 allait revoir la flotte vnitienne devant
Sfax, puis devant Bizerte et enfin devant Sousse o
19 sept. 1786 elle se prsenta; le bombardement fut repris. Le Bey,
loin de se laisser intimider, demanda 100.000 sequins au
lieu de 60.000; les hostilits auraient pu durer encore
longtemps, mais la mort de l'amiral Emo apaisa un
peu le caractre d'Hamouda -Bey qui signa les prli -
minaires de la paix qui ne devait tre complte ment
1792 rtablie qu'en 1792 entre Tunis et la Rpublique de
Venise ; le Bey re ut 40.000 sequins comme indemn it
de guerre.
1792 A Tunis, comme sur toute la c te d' Afrique, on
suivit attentivement la marche de la R volution fran -
aise.
Notre Consul g n ral Tunis, M. De voize, tr s
respect , se procc upe trs consciencie useme nt des
int rts de nos nationaux; il facilite le s rec herc hes,
1794 aux environs de Sousse, d'une riche mine de salp tre
signale par le citoyen Venture, drogman chancelier
Tunis, e t, gr c e son ne rgie , obtint d u Be y q ue
les Fran ais molests Tripoli et Alger pendant la
1798-1799 campagne d'Egypte ne le fussent point Tunis.
Hamouda -Bey entretint d'excellentes relations avec
Bonaparte qui il envoya une ambassade pour le fli -
citer de son lection comme Consul vie.
1811 La fin de son rgne fut occupe dans des expditions
contre les Alg riens en 1807, 1808, 1811, poque
laquelle une escadrille tunisienne fut battue dans les
eaux de Souss e par la flotte algrienne ; l'escadrille
tunisienne, sous les ordres du Ras Mohamed el
Mourali, tait forte de 12 btiments de guerre et eut
lutter contre la flotte algrienne sous le commandement
de Hamidou ; la lutte fut acharne de midi 6
heures du soir et n'eut lieu qu'entre les deux navires
126

portant les chefs des deux divisions ; la fr gate tuni-


sienne dut amener ses couleurs et se r endr e ; le reste
de l'escadrille s'tait rfugi dans le port de Monas -
tir; la f r g at e al g r i en n e p er di t 4 1 ho m m e s et l a
tunisienne 230.
1813 Nouvelle expdition des Algriens en Tunisie.
1814 Mort d'Hamouda-Bey ; son frre Othman lui succde
mais prit trois mois aprs, victime d'un complot tram
par son cousin Mahmoud qui monta sur le trne.
Sous le rgne de Mahmoud, les nations europennes.
1815 dcidrent, dans les congrs de Vienne (1815) et d'Aix-
1818 la-Chapelle (1818) la suppression absolue de lesclavage
et des corsaires dans tas Etats barbaresques; le Bey
dut, bon gr m al gr , s'incliner dev ant ces d cisi ons.
1821 Les rgences d'Alger et de Tunis signent entr'elles
un trait de paix.
1824 A la mort d'Hamouda, son fils Hussein lui succde ;
ce nouveau Bey favorise le commerce franais; nos
ngociants proposent la Chambre de Commerce de
Marseille une somme en dpense de 1.200 francs pour
les agents de Sousse, Sfax et Bizerte, dpenses recon-
nues ncessaires dans l'intrt de la France.
1826 Installation Sousse, le 1er juin, d'une agence du
C o n s u l a t d e F r a n c e ; M . J r m e S a c c o m a n , n o m m le
15 mai 1822, par M. Malivoire, Consul gnral de France
Tunis, entre en fonctions.
La dfaite de Navarin (1827), la prise d'Alger (1830) ne
m od if i r en t p as , gr c e a u b on es pr i t d 'H us s ein - Bey et
l'influence de notre Consul, M. Mathieu de Lesseps, nos
relations avec la Tunisie.
1830 S u p p r e s si o n d e l a c o u r s e d e s p ir a t e s ; u n n o m m El
Hadj Mohamed Dehbi, de Sousse, est cit comme ayant
t, de 1810 1820, un des principaux chefs de piraterie
de la cte ; les quipages et passagers des bateaux
capturs taient rduits en esclavage et parta- gs entre
les habitants les plus riches de la ville qui les traitaient
avec douceur et les employaient comme domestiques ;
ceux qui avaient un mtier pouvaient
l'exercer; ils payaient une redevance et gardaient
127

pour eux le surplus de leur salaire ; il leur tait permis de


se racheter moyennant une somme qui variait de 500
1000 francs ; l'on prtend que les Europens les mieux
tablis actuellement Sousse sont les descendants de ces
anciens esclaves.
Le pirate Dehbi fut pris son tour et emmen en
Sardaigne. A signaler aussi un nomm Ahmed Douk,
capitaine de corsaires.
1835 Mustapha-Bey remplace son fr re sa mort ; son
rgne fut de courte dure ; il laisse le trne son fils
Ahmed.
Ce prince intelligent, ami de la France, ne voulut pas
reconnatre l'autorit du Sultan de Constantinople qui,
depuis 1830, cherchait rtablir sa suzerainet sur la
Tunisie ; il fit rorganiser son arme par le capitaine
franais Campenon et dresser une carte rgulire du
pays de 1841 1848; il encour agea les tudes et fit
mme un voyage en France pour rendre visite au roi
Louis-Philippe et se rendre compte de l' installation
d'industries, fabriques, coles, etc...
1842 Abolition de l'esclavage en Tunisie.
Tolrant en matire de religion, le Bey Ahmed
man cip a l es ju if s et au tor isa l a f onda tion d ' col es
1843 tenues par des religieuses ; la premire cole de Sousse
est fonde par les s urs de Saint-Joseph de l'Appari-
tion, dont la s ur Josphine Dfis fut la directrice.
1843-1848 M. P lis si er es t char g du Consul at de Sous s e
jusqu'en 1848, poque laquelle le consulat fut sup-
pr im mom ent an men t.
1850 La f in du r gn e d 'A hmed - Bey e st m ar qu e par l a
rpression d'une rvolte de dissidents qui s'taient
renferms dans l'amphithtre d'El-Djem ; les troupes
beylicales dur ent employer le canon et mme fair e
une coupur e dans le m onument pour r du ir e l es
r ebelles. Enf in, apr s avoir envoy des tr oupes en
1855 Crime, Ahmed-Bey meurt.
C'est aussi la fin de son rgne (1854) que Sousse fut
pour la premire fois relie Tunis pour la corres-
pondanc e, p ar une entr ep r ise pr iv e, moy ennan t le
128

tarif de 4 caroubes (15 centimes) ; le piton circulait


deux fois par semaine, faisant la route d 'une traite
(130 kilomtres en 24 heures); son service tait sr et
1 85 5 -1 85 9 ponctuel. Mo hamed go uverna trop peu de temps, car
part quelques erreurs commises par suite des mauvais
conseils q ue lui do nna so n ministre Khaznadar, il sut
donner so n rgne un clat exceptionnel ; o n lui doit
particulirement la restauration des aqueducs de
Carthage et leur amnagement au moyen du systme
des siphons, la cration de la premire Municipalit de
T unisie et la constitution, promulgue en 1857, sous le
nom de Pacte fondamental, proclamant l'galit de tous
les habitants de la Rgence devant la loi.
Mo h a med -B e y e ut u ne af f ec tio n p r o fo nd e p o ur
notre Consul Lon Roche, dont la rputation s'tendait
de T anger la Mecque, et, avant de mo urir, le Bey
voulut encore faire plaisir la France en accordant
l'Ad ministration franaise le droit d 'installer un
service tlgraphique dans la Rgence et en s'engageant
fair e co nstr uir e un h tel co nsulair e po ur nos
reprsentants.
1859 Mohamed Es-Sadok monte sur le trne ; prince
bienveillant, mais trop faible, il verra son pays en
proie aux rvoltes des tribus ruines et affames par
suite de l'augmentation toujours croissante des impts,
et son gouvernement fait banqueroute par suite des
emp r unts et d e la no n garantie d es dro its des po rteurs
de titres tunisiens.
Mohamed-Bey avait autoris l'installation de lignes
tlgr ap hiq ues en T uni sie : So usse est r elie
14 avril 1861 avec Tunis en 1861 et avec Sfax en 1862 (9 septembre).
1863 Les tr ib us, et p ar ticulir e ment celle d es So uassi,
aux environs de Sousse, se soulvent contre l'autorit
beylicale ; la rvolte clate partout ; la ligne tlgra-
juin 1863 phique Sousse-Sfax est dtruite presque en totalit
prs de Sfax.
COMMANDANT HANNEZO.
(A suivre)
BULLETIN
DE LA

SOCIT ARCHOLOGIQUE DE SOUSSE

DEUXIME SEMESTRE 1904


NOTES HISTORIQUES DE SOUSSE

( SUITE ET FIN DE LA PREMIRE PARTIE )

1863 Les tribus, et particuli rement celle des Souassi,


aux environs de Sousse, se soulvent contre l'autorit
beylicale ; la rvolte clate partout ; la ligne tlgra -
juin 1863 phique Sousse-Sfax est d truite presque en totalit
prs de Sfax.
aot 1863 La mort d'Hamouda, bey du camp, arrte un instant
le dveloppement des ferments de rvolte, mais, en
d c em bre d e l a m m e ann e, l' aug m en ta ti on d e la
medjba fait clater dfinitivement l'insurrection.
1864 La ligne t lgraphique Sousse -Sfax, qui avait t
rtablie, est de nouveau coupe ainsi que celle de
Sousse-T uni s ; p ar tou s l es m oy ens on ch er ch e
plus i eurs r epri se s l es r t ab lir, m ais l es v n e me nts
saggravent ; Sousse n'a plus de communications
tlgraphiques avec Sfax le 30 mai avec Tunis
31 mai
le 31 mai.
Les agents du t lgraphe se rfugient avec les Euro -
pens sur les bateaux ancrs dans le port et vacuent
la v i l l e en raison de l'hostilit de la population. L'au-
torit d u b ey S i Sa do ck e st m co nnu e.
Le Cad Si-Ferraht, de la Djebira, est massacr ; les
no m a d e s d u C e n tr e e t d u S u d pr e n n e n t l e s a r m e s .
Si Ahmed Zerouck re ut le commandement d'une
colonne forme Sousse pour rprimer l'insurrection.
Les habitants de Sousse restrent relativement calmes;
toutefois, un jour, la population irrite envahit le
consulat d'Italie sous le prtexte qu'on y avait dbarqu
des soldats qui devaient s'emparer d u pays; la frgate
Garibaldi recueille tous les Europens ainsi que les
consuls ; seul le vice -consul anglais reste son poste
ayant, sans nul doute, de bonnes raisons pour s'y
croire en sret. Ce n'est qu' la fin de l'anne que
l'autorit du Bey est r tablie Sousse, la suite d'une
130

7 octobre victoire remporte non loin de la ville par le gnral


Zarnet sur les dissidents.
Ahmed Zerouck, aprs avoir rtabli le calme dans le
Sahel, fit excuter les trois principaux coupables, Ben
El Menchetta, Bel El Hafsa et Dahmani El Bouji,
originaires de M'Saken. Les deux premiers tant soldats
lis au service, furent passs par les armes; quant au
troisime, on le pendit l'un des canons de la porte
Bab-el-Bhar de Sousse.
1865 La ligne tlgraphique Sousse-Tunis est reconstruite
au commencement de l'anne et le 29 avril le bureau
est rouvert.
Peu de temps aprs la ligne est encore en partie
dtruite, prs de Hergla, par des zaouas de l'arme
beylicale congdis ayant avec eux un officier du Bey;
le surveillant de la ligne faillit tre tu par un soldat.
1866 La ligne tlgr aphique de Sousse-Sf ax est r tablie
et la communication est assur e le 11 juillet entre
Sousse et Monastir et le 26 novembre entre Sousse et
1867
Sfax. Le 29 mars, Mahdia est relie tlgraphiquement
avec Sousse.
La Tunisie, depuis 1863, venait de passer par de ter-
ribles preuves par suite de ces rvoltes qui ne prirent fin
que grce l'intervention de la France, de l'Angleterre et
de la Turquie; le pays n'avait pas seulement souffert de
ces luttes intestines; le typhus, le cholra et la famine
avaient aussi dvast cette malheureuse Tunisie ; l'anne
1867,surtout, fut une anne terrible; la rcolte ayant t
trs mauvaise, la famine fut gnrale et le cholra,
apport Sousse par des plerins de la Mecque et propag
dans toute la Tunisie, fit de nombreuses victimes.
Pour remdier la fcheuse situation pcuniaire de la
Rgence, Mohamed es Sadock se dcide accepter la
constitution d'une commission f inancir e, tout
d'abord franaise, puis internationale.
1868 Malgr toutes les difficults qu'elle rencontrait cha-
que pas, l'administration franaise des Postes et Tl-
gr aphes en Tunis ie pour s uivai t son bu t pa tr iotiqu e ;
131

cette anne le service postal de Tunis Sousse est


prolong jusqu' Sfax.
1870 Les fcheux vnements qui ont fait appeler
cette anne d e 1870 l'Anne terrible nous obligent
momentanment de dtourner nos regards de ce
pays o l'influence franaise continue nanmoins
subsister assez profondment pour ne pas
permettre nos rivaux, Anglais et Italiens, de se
poser en matres de la Tunisie.
1873 Enfin Mustapha Khaznadar, qui avait t cause de
tant de mis res, est destitu et remplac par Mustapha
ben Ismal et le gnral Kheirreddine ; sur ces entre -
faites, M. Roustan fut nomm Consul de France
Tunis ; grce son habi let i l sut djouer les intr i -
gues des agents anglais et italiens, appuyer Kheirred -
dine, qui tait trs bien dispos pour la France, con -
trairement Mustapha ben Ismal qui, favori du Bey,
poussait son matre dans une voie nfaste ; il obtint
1875 la concession du chem in de fer de Tunis Alger et ,
1878 la s u i t e d u c o n gr s d e B e r l i n r u n i p ou r l a
qu e s t i o n d' O r i e n t , s u t r e nd r e l a Fr a n c e s a p l a c e
d an s l e s affaires de la Rgence et reconqurir, comme
au temps des traits de Louis XIV, la prminence sur
tous les autres consuls (d'Estournelles).
L'influence n faste de Mustapha ben Ismal sur le
Bey Mohamed es Sadock continue porter ses fruits;
l e g ou v er n e m e n t b e y l i c a l n e p eu t p l u s f a i r e h o nn e ur
s es eng ag e m en ts , ni m ai nt en ir s es su je ts da ns le
devoir et les empcher d'insulter notre frontire
algrienne.
31 mars 1881 Un dtachement de soldats franais est attaqu par plus
de 1.500 kroumirs; immdiatement une entre en
campagne est dcide.
7 avril Rappelons grands traits les principaux vnements de
cette expdition en insistant sur les actions militaires
qui se sont droules autour de Sousse.
Deux colonnes, commandes par les gnraux Dele-
24 avril becque et Logerot, franchissent la frontire tuni-
sienne.
132

25 avril Prise de Tabarca par deux bataillons (88 e et 143 e ) ;


marche des deux colonnes sparment pour cerner la
1er mai Kr o u mir ie ; r ed d it io n d e B i zer t e ; le g nr al
B r ar t, peine arriv, reoit l'ordre de marcher sur
Djededa, tant dsign co mme p lnipo tentiair e po ur
11 mai pr opo ser au Bey la conclusion d'un trait ; il est la
12 mai Manouba ; il fait signer, en prsence de M. Roustan, le
trait de Kassar-Sad.
Le Bey n'informe pas les tribus de son pays de cette
convention; la Kroumirie, seule, tait soumise; malgr
cela, la p lus gr and e par tie d u corp s expd i tio nnaire
fut rembarque pour France; l'effet de ce renvoi trop
prcipit ne se lit pas longtemps attendre. Le nord de la
T unisie, seul, avait vu nos so ldats; le sud et le centre,
pousss parle fanatisme religieux et les menes des
Senoussi, taient loin d'tre soumis notre cause;
l'autorit du Bey mme tait mconnue; il fallut donc
juillet s o n g e r n o u v e a u r ep r e n d r e l e s o p r a ti o n s
mi l i t a i r es. Le mois de juillet vit le bombardement par
notre flotte de la ville de Sfax, qui fut enleve
(16 juillet), et de Gab s (24 juillet).
fin juillet De suite aprs l'amiral Garnault, en remontant vers
le nord, reut en passant la soumission des gouverneurs
et des notables des villes de la cte,
Mahdia, Monastir et Sousse; toute fois cette
dmonstration navale ne pacifiait pas le pays; dans
l'intrieur les insurgs attaquaient nos colonnes lgres
(lieutenant-colonel Corrard), causaient des dgts
partout et dvastaient la ligne tlgraphique
29 juillet Sousse-Tunis ; il tait temps d'en finir avec ces tribus
turbulentes.
Les grandes chaleurs tant passes et les troupes
ayant t concentres, on va se dcider prendre l'offensive.
aot Du ct de Sousse la situation avait t la suivante, depuis le
commencement des oprations en T u n i si e j u s q u' a u m o i s
d 'a o t :
L'entr e des troupes franaises sur le territoire tunisien,
en mars, et les oprations dans le nord, en
avril et mai, avaient laiss peu prs indiffrente la
population du Sahel, sauf toutefois celle de Djemmal,
133

gros bourg de 4.000 mes et march important; le 23


mai, une socit secrte s'tait forme la zaoua Kountche,
prs Djemmal, dans le but de recueillir des dons de
diverses natures et d'organiser une insurrection gnrale
contre les autorits tunisiennes; nanmoins le
pays ne fut troubl qu'aprs les vnements de Sfax;
la surprise fut si grande qu'une panique gnrale s'empara
de Sousse (administrateurs et administrs) et que tous les
pillards et assassins du Sahel en profitrent pour se runir en
bandes, celle du Bennan, sous les ordres de Saad ben El
Ghem, celle de Djemmal, avec Hadj Ali El Khedidja,
et celle de Ksour-Saf, avec Ali Ouled El Bahar;
ces bandes, que vinrent grossir plus tard les
soldats rfractaires et dserteurs tunisiens, jetrent la
teneur dans le pays, enlevant les troupeaux,
tuant les voyageurs isols, etc.
Dans les premiers jours de juillet arriva Sousse,
sur un aviso franais, La Corse, le gnral Baccouch, nomm
gouverneur du Sahel et envoy avec mission de rtablir
l'ordre et d'envoyer Tunis tous les hommes valides
appartenant l'arme tunisienne.
L'ordre ne fut pas rtabli, bien au contraire; les villages
demandrent des armes pour se dfendre contre les
pillards soutenus par Ali ben Khelifa, qui leur promettait
l'arrive de l'arme turque par Tripoli, ainsi que de l'argent,
des armes, des munitions et la victoire.
Les tribus des Ouled Souassi (1) et des Ouled Sad
faisaient alors cause commune avec les insurgs. Une
tentative fut faite, le 25 aot, du ct de Bir-Loubit,
pour rtablir la ligne tlgraphique Tunis-Sousse; on
dut y renoncer. Les soldats que le gnral Baccouch
avait dirigs ; par bateau de la Cie Transatlantique, sur
Tunis pour y tre arms, taient revenus et s'taient
unis aux villages rvolts; les bandes d'insurgs
taient rassembles la Kadra, prs de Mnara (21 kil.
S.-E. de Sousse), l'embranchement des routes de
Sousse, Djemmal, Monastir et Mahdia.
(1) Caid Ahmed ben Sliman.
134

Bref, la guerre sainte retentissait un peu partout,


isolment il est vrai, mais l ' ta t des esprits tait gn-
ralement surexcit, et le commandant du Monarch,
navire de guerre anglais, avait reu l'ordre de faire
descendre, si besoin t a i t , 300 hommes pour favoriser
l'embarquement des chrtiens. A Sousse mme l'ordre
existait, un peu grce au khalifa Si Mohamed Righi ( 1)
et au cheikh Ali ben Khalifa El Trabelsi, qui calmaient
les esprits, mais dans le district et mme prs des
portes de la ville rgnait le dsordre; aussi les
Israli t e s des villages se rfugirent-ils Sousse ainsi
qu' Monastir; la ligne tlgraphique de Sousse
Mahdia est dtruite.
Enfin, avant de dbarquer Sousse, disons que si
nous devions nous attendre recevoir quelques coups de
fusil dans nos sorties autour de la vi l l e et aux
avant-postes, nous n'avions pas redouter l'artillerie
tunisienne qui, alors, ne se composait que de vieux
canons rouills que leurs affts moisis ne pouvaient
plus porter, tant sur les remparts que dans les bastions.
2 septembre La bande de Sassi Souilem (des Ouled Sad), revenue
du combat d'El-Arban et rentre Kala-Kebira,
nomme pour chef Ali ben Mabrouk et, pour venger
ses pertes, va porter la terreur jusqu'aux portes de
Sousse.
10 septembre Enfin Sousse voit arriver nos troupes transportes
par mer; les cuirasss, ainsi que les bateaux de trans-
port, jettent l'ancre assez loin de la rade. Un coup de
canon part des remparts et le drapeau blanc se met
flotter sur la tour de la Casbah; on dbarque avec les
embarcations de l'escadre; l'opration se fait rapide-
ment et sans aucune rsistance, bien que de nombreuses
bandes d'Arabes tinssent encore la campagne; trois
bataillons (48e, 66e et 116e de Ligne) et une batterie
d'artillerie de montagne, aussitt dbarqus, entrent
dans la ville par Bab-Djedid et gagnent la Casbah; le
lieutenant-colonel Moulin, commandant ces forces,
d'un effectif de 1.600 hommes environ, est reu par le
(1) En fonctions avant les premiers vnements de mars 1881.
135

gnral Baccouch et les notables; le gnral, qui connait


notre langue ayant voyag en France sous l'empire, lui
souhaite la bienvenue.
La population de Sousse se tranquillise.
Des mesures sont prises pour purger le plus t t pos-
sible les environs des maraudeurs.
15 septembre Les gens de Kal a-Kebira et de Sidi -bou-Ali, ainsi
que les insurgs commands par Ali ben Mabrouk,
signals comme che rchant inqui ter nos
avant -postes, sont poursuivis par quatre compagnies du
48 e , deux compagnies du 66 e , deux compagnies du 116 e ,
auxquelles sont adjointes quatre pices de 80 de mon -
tagne du 33 e d'Artillerie. De Sousse Kala, ce fut une
marche en tirailleurs, nos soldats tirant par moment sur
les Arabes (500 environ) qui fuyaient, s'arr taient,
tiraient quelques coups de fusil et repartaient; au bout de
deux heures, le village fut atteint, l'ennemi tait
bousc ul, que lque s ma isons fure nt brle s e t une
razzia de marchandises diverses et surtout de volailles
fut faite au grand profit de nos troupiers, qui rentr rent
Sousse le soir mme; nous eme s 4 blesss dans
cette affaire; les insurgs eurent 9 tus et 7 blesss.
19 septembre Les insurgs, sachant que le lieutenant -colonel Moulin
doit marcher sur Djemmal, quittent la Kadra, vont se
poster dans les bois d'oliviers au sud -est de Sahaline; ils
sont 3.000 : Zlass, Metelli t, Ouled Sad, bandes de
Djemmal et autres villages du Sahel. Dans la nuit du 19
au 20 septembre, quelques -uns viennent jusque prs
des remparts de Sousse et tirent quelques coups de fusil
sur nos sentinelles.
20 septembre La colonne fran aise, compose de deux bataillons
d'infanterie (48 e et 116 e ) et d'une batterie de montagne,
quitte Sousse et arrive Sahaline; pendant un repos de
la troupe dans le village, o elle prend son repas, une
compagnie qui en dfendait l'accs rpond la fusillade
de fantassins arabes; cette compagnie, immdiatement
renforce, n'a pas de peine faire fuir les
tirailleurs ennemis ; leurs cavaliers essayent alors,
136

mais en vain, de rsister ; ils sont disperss au del


de Sahaline.
L'engagement, commenc au point du jour, cessa
midi; le 48 e avait eu 2 blesss, l'ennemi 26 tus et
une cinquantaine de blesss; pendant, le combat le
khalifa de Djemmal, Youns ben Ahmed, se fit remar-
quer, la tte des insurgs, par la beaut de sa monture,
la richesse de ses vtements et de son armement. A la
fin de la journe, les dissidents se dsunirent sans
toutefois se dissoudre compltement. La situation
s'amliora au point de vue de la scurit.
21 septembre La colonne rentre Sousse.
25 septembre La ligne tlgraphique Sousse-Monastir est rtablie.
du 25 au 28 1 500 dserteurs tunisiens qui se soumettent sont
septembre
envoys Tunis.
1er octobre Le gnral Etienne, la tte d'une brigade, vient
Sousse complter les premiers lments d'une colonne
expditionnaire et y reoit tout le matriel d'un che-
min de fer Decauville que le Gnie doit poser au fur et
mesure de la marche en avant sur Kairouan.
Arrivent, avec le gnral, trois bataillons (19e, 62e, 138e),
le 23e bataillon de Chasseurs pied, quatre batteries d'ar-
tillerie (une de 95, une de 90, une de 80 monte, une de
80 de montagne), et de la cavalerie (trois escadrons du
6e Hussards) ; ces troupes vont former, avec celles du
colonel Moulin, la 7e brigade dsigne pour marcher
de Sousse sur Kairouan.
1er au 6 Repos et installation.
7 octobre La brigade marche sur M'Saken o elle campe,
s'tablissant 600 mtres au N.-E. du village. Une
compagnie du bataillon du 133e de Ligne (capitaine de
Mritens, 2 officiers et 100 hommes de troupe) est
dsigne pour accompagner jusqu' Mourredine et
protger une reconnaissance de cavalerie (1 escadron
du 6e Hussards, capitaine Brl); cette reconnaissance
part 3 h. 20 du soir; l'infanterie est quipe la
lgre; 4 h. 30 cette petite troupe, aprs avoir t
bien accueillie Mourredine, reprend le chemin de
M'Saken escorte jusqu'un peu au del du village par
137

le cheikh; la cavalerie flanque la droite; un certain


moment, le cheikh signale au capitaine de Mritens
des cavaliers et fantassins ennemis dans la direction de
l'ouest et embusqus dans un ravin; les dissidents, au
nombre de 200 300 cavaliers et autant de fantassins,
ont l'intention, en barrant la route, de couper la retraite
vers M'Saken. L'infanterie fait face l'attaque; la
cavalerie ne pouvant charger, en raison des difficults
du terrain, se replie derrire la compagnie; le feu est
ouvert calme el bien ajust, les Arabes y rpondent et
accompagnent leurs coups de fusil de cris et de
menaces; ils ne cdent le terrain qu' la suite d'un
mouvement ordonn par le capitaine d'Etat-major
Canton, d'une brusque mise en ligne d'une section de
rserve et d'une vigoureuse charge la baonnette
excute par la section du lieutenant Gorgeot; cette
charge la baonnette est soutenue par le feu de
cavaliers pied qui avaient renforc une section
d'infanterie. L'ennemi repouss, les cavaliers pied
rejoignent leurs chevaux et la compagnie se reforme
en bon ordre pour regagner le camp de
MSaken ; deux soldats, Dulac et Dussand, avaient t
tus, et un autre, Tarayre, bless par le feu ennemi; les
deux cadavres ne purent tre rapports; le soldat
Tarayre, quoique grivement bless, avait continu
tirer. La reconnaissance ne tarda pas arriver au camp;
quelques coups de fusil tirs de loin et sans effet par les
dissidents furent les derniers incidents de la journe.
L'engagement avait dur de 4 h. 55 6 h. 10 du soir;
une trentaine d'Arabes furent mis hors de combat.
Les corps des deux malheureux soldats du 138 e de
Ligne furent enterrs le lendemain par les soins du
cheikh de Mourredine.
8 octobre La colonne rentre Sousse; le lieutenant-colonel
est assailli l'arrire-garde par 6 ou 700 dissidents
qui ne nous font subir aucune perte; de leur ct ils
ont une dizaine de tus et autant de blesss.
Ces reconnaissances autour de Sousse ne ralentis-
saient pas l'ardeur des insurgs; bien au contraire,
138

persuads que nous avions battu timidement en retraite


de M'Saken sur Sousse, il s s'enhardissaient et presque
chaque jour, ou plutt chaque nuit, nos avant-postes et
patrouilles taient bravs jusque sous les murs de la
ville par les nomades tablis surtout vers la route de
Kairouan; un jour mme, vers midi, le troupeau de la
garnison fut enlev par les dissidents.
16 octobre Le gnral reoit l'ordre d'tablir un dtachement
assez fort non loin de Sousse pour protger la cons-
truction de chemin de fer Decauville, surveiller et
inquiter l'ennemi.
17 octobre Chaque jour une reconnaissance quittait le camp
pour explorer les environs de Sousse et chasser les
maraudeurs ; ce jour-l, le bataillon du 138 e, qui avait
t attaqu 5 kilomtres de la v i l l e et qui avait eu
deux blesss, rentrait au camp, suivi de trs prs des
Arabes; une grand garde du 48 e, tablie au lieu dit
aujourd'hui " Caroubier vert", prs du camp Sabattier,
reut l'ordre de dtacher deux groupes pour tendre
des embuscades entre la redoute des chasseurs et les
ruines romaines de l'amphithtre. Les Arabes tomb-
rent dans le pige et eurent deux tus dont les corps,
n'ayant pu tre facilement enlevs, furent rapports
au camp et exposs Bab-el-Gharbi.
19 octobre Une reconnaissance de t r o i s bataillons, deux esca-
drons, deux sections de 80 de montagne, sous les
o r d r e s du lieutenant colonel Moulin, est dirige vers
Kala-Srira pour choisir et protger l'installation d'un
camp 7 kilomtres de Sousse; le camp est i ns t a l l le
soir mme prs d'un ravin o coulent quelquefois les
eaux de l'oued Laya; le camp est command par le
lieutenant-colonel Lanes, qui a avec lui dix compa-
gnies, un escadron, une batterie de 90, une section
de 80 de montagne, de l'ambulance et 400 chameaux.
du 19 au 22
Le lieutenant-colonel supporte les attaques des
octobre dissidents (l 800 cavaliers.2.000 fantassins) concentrs
vers l'Oued-Laya; les insurges obissent Ali ben
Amara, des Ouled Iddir, et combattent en dsesprs,
voulant arrter notre marche sur Kairouan.
139

Le colonel Lanes a 6 blesss dans ses engagements; le


capitaine du gnie Travers, bless le 21 dans sa tente
d'une balle, meurt le 26 des suites de sa blessure.
22 octobre La colonne du gnral Etienne quitte Sousse pour
Kairouan; elle est compose de quatre bataillons,
trois batteries, deux escadrons, le convoi; Sousse est
garde par un bataillon de chasseurs; la colonne arrive le
mme jour l'Oued-Laya et campe prs du jardin de
M.Saccoman; le mme jour a l ie u un engagement contre
les Zlass d'Ali ben Amara, qui est tu presqu'en mme
temps qu'Ahmed ben Rehouma, personnage influent
des Souassi. Les insurgs se dmoralisent et fuient
vers Kairouan, emportant le corps d'Ali ben Amara,
qui fut enterr le 24 octobre Kairouan au lieu dit :
"El Manoubia".
24 octobre La colonne Etienne sjourne l'Oued-Laya, tandis
que, Kala-Srira, un dernier engagement avait l i e u
entre les Zlass et des troupes de la colonne du lieu-
tenant-colonel Lanes (compagnie Castaing, du 138e, et
escadron du capitaine de Brienne, du 6 e Hussards).
L'ennemi perdit dans ces divers engagements une
centaine d'hommes.
2 4 octobre La colonne Lanes rejoint bientt la brigade campe
l'Oued-Laya.
25 octobre La colonne du gnral Etienne quitte l'Oued-Laya
y laissant deux bataillons (62 e et 138 e bataillon Jgu) et
la batterie de 80 de montagne, et va camper
Sidi-el-Hani.
26 octobre Kairouan se rend au commandant de la colonne de
Sousse, qui devanait de deux jours les colonnes du
gnral Forgemol venant de Tbessa et du gnral
Logerot venant de Tunis.
Le gnral en chef Saussier laisse le commandement
de Sousse, de Kairouan et du Centre de la Rgence
au gnral Etienne et lance ses deux autres colonnes
volantes, l'une vers le sud, Gabs et la frontire
tripolitaine, l'autre vers Gafsa: les oprations militaires
de ces deux colonnes termines, la plus grande
140

partie des troupes remontera vers le nord en dcembre de


la mme anne.
2 novembre Aprs la prise de Kairouan, le bataillon du 138e de
Ligne fut laiss l'Oued-Laya avec un demi-escadron
du 6e Hussards pour garder le dpt de vivres et protger
toujours la construction du chemin de fer Decau-
7 novembre ville, qui fut termin jusqu' l'Oued-Laya le 7 novembre.
A Sousse furent laisss deux compagnies du 19e
de Ligne, tous les indisponibles et le parc d'artillerie
n 2 Les dissidents se rfugirent dans le sud et aucun trouble
ne fut plus signal dans la rgion de Sousse.
15 dcembre La ligne tlgraphique Tunis-Sousse est rtablie et
le bureau rouvert.
Pendant le mme mois le colonel Moulin dirigea une
colonne au sud de la sebkra de Sidi-el-Hani pour s'assurer
de la pacification du territoire (dans une charge du
train d'artillerie contre les Arabes de la rgion, nous emes
un tu).
Le 20 dcembre, alors que cette colonne tait campe
El-Djem, le khalifa de Mokenine, Si Ahssen, amena
au colonel Saad El Ghem, qu'il tait parvenu, non sans
danger, arrter dans le village de Laouesse;
cette arrestation eut un grand retentissement dans le pays
qu'elle dlivrait d'un malfaiteur des plus dangereux,
auteur d'un grand nombre de crimes de droit
commun ; Saad El Ghem fut fusill Kairouan le 18
janvier 1882.
17 janv. 1882 La colonne du gnral Logerot, venant du sud,
arrive Sousse, et le gnral y fixe son quartier-gn-
25 janv. 1882 ral et le chef-lieu de son commandement.
Les oprations militaires importantes taient termi-
nes; on s'occupa activement complter les moyens
de communications rapides; Sousse fut relie Kai-
rouan par des fils tlgraphiques poss par l'autorit
militaire et un cble sous-marin de Tunis Sousse et
Sfax fut immerg.
La pacification du pays se fit, partir de ce moment,
sans difficult; les tribus tunisiennes qui avaient cher-
ch un refuge en Tripolitaine revinrent bientt dans
141

leur pays natal, aprs avoir obtenu l'aman qui leur


fut accord largement.
Cet aperu historique des vnements principaux
qui se sont passs Sousse et dans ses environs imm-
diats jusqu'au moment de l'occupation effective de la
Tunisie par nos troupes prend fin en 1882 ; depuis
cette poque Sousse a prospr avec l'appui bienveil-
lant de Si Ali-Bey et du Bey actuel et sous l'habile
direction de nos rsidents gnraux qui ont succd
M. Roustan depuis 1882, MM. Cambon, Rouvier,
Massicault, R. Millet et Pichon.
Sousse, comme les autres villes de la Rgence, s'est
transforme ; elle a t choisie en 1884 comme
chef-lieu d'un contrle civil, a t rige en
municipalit et a vu commencer les travaux de son port
celte mme anne 1884; les travaux publics ont
conquis sur la mer un grand espace sur lequel sont btis
une partie de la ville europenne et bon nombre de
magasins; l'ancien mle romain, dont certaines parties
mergeaient encore il y a quelques annes, entre la
Quarantaine et l'ancien bastion turc, et dont les
dbris taient la terreur des pcheurs les jours de gros
temps, a disparu; de nouveaux quartiers sont en voie de
cration au nord et au sud de la ville arabe; Sousse est
tte de trois voies ferres vers Tunis, Kairouan et
Mokenine, ces deux dernires lignes tant des amorces
pour l'Algrie et vers le sud; enfin, si notre ville ne
possde pas encore de beaux monuments ayant un
grand renom, elle peut tre fire des richesses
archologiques tires de son sol et qui s'talent
majestueusement au Muse municipal et dans notre
splendide Salle d'honneur.
Pour terminer, il me semble bon de donner l'appr-
ciation d'un des explorateurs de notre Afrique qui,
dans leurs relations de voyage, font connatre de plus
en plus notre empire colonial : Sousse est une ville
de progrs, ville de travail; chez tous une inspira-
tion de vaillante intelligence guide toutes les activi-
ts , et la description si simple mais si juste que fait
de Sousse M. le colonel Montlezun la fin de son int-
142

ressante tude sur la topographie d'Hadrumte :


La vue d'ensemble du large, ou simplement du bout
de la jete, de cette masse blanche un peu confuse,
couronne de crneaux se dentelant nettement sur
le ciel bleu, est destine longtemps encore forcer
ladmiration de tous ceux qui ont au c ur la notion
vraie du beau.

COMMANDANT HANNEZO.
INSCRIPTIONS FUNRAIRES
DE LA COLONIA THUBURNICA

Je suis heureux de pouvoir offrir aux lecteurs de notre Bulletin


deux nouveaux textes que je viens de relever au cours d'une r cente
excursion Thuburnic. ( 1)

1. A 30 mtres au nord du pont romain et sur la rive droite de


l'oued Enja. Cippe en grs orn sa face suprieure d'acro tres
l'extrmit de deux faisceaux de lauriers. Largeur du d sur les
cts : 0 m 60 ; sur la face de l'inscription : 0 m 50. Hauteur des
lettres : 0 m 045. Les points ont la forme de feuilles pointues.
Sur les cts, gauche du spectateur, est figure en relief une
patre, droite un vase anse large col et bec.
D. M. S
.
Q OCTAYIYS. Q
FIL. C O R N E L I A
PRIMUS . OPTIME
INDOLIS . ADULES
CENS . AEDILIS
D E S I G N ATVS
PIVS VIXIT AN
NIS.XXIII . M .VI
DIEBVS XVII
H. S .
E
Le personnage dont je viens de retrouver le monument fun raire
avait sa statue sur une des places publiques ou dans un des
monuments de la colonia. Les noms, Q. Octavius Q. F., Corn.
Primus, sont en effet gravs sur une base honorifique ddie

(1) Les ruines de la Colonia Thuburnica sont situes 11 kilomtres au nord de


Ghardimaou. '
153

une divinit locale : Arnasi, publie dans le Corpus insc. lat., t.


v III , n 14 et Ephem. pigr., t. vu, n 235. Il peut nanmoins s'agir
d'un personnage diffrent parent du prcdent, mais ayant les
mmes noms, prnoms et surnoms, car celui dont je viens de
publier l'pitaphe est mort l'ge de 23 ans seulement, ce qui
n'est gure compatible avec l'pithte omnibus honoribus in colonia
sua functus qui lui est attribue sur la base honorifique.

2. Au pied du grand mausole figurations. Stle en grs.


Longueur, 1m35 ; largeur, 0m30 ; paisseur, 0m20. Dans son extrmit
suprieure triangulaire, ce petit monument porte le croissant. J'ai
perdu la hauteur des lettres. L'inscription est dans un cartouche.
C.IVLIVSS
A T V R N I NV
S . P I V S VIX .
AN . LXX
. .
H S E

D r CART ON, Prsident,


Membre non rsidant du Comit des Travaux
Historiques et Scientifiques.
HAOUANET A LITS ET A FACES HUMAINES

Description d'un groupe d'haouanet d'un type nouveau


dans le djebel Zid

Par suite de la disposition des couches gologiques identiques du


djebel Behellil et du djebel Zid, j'ai pens que, dans ce massif
montagneux, devaient exister des haouanet; mes recherches sur le
versant est, et en particulier dans l'oued Rorfa, ont t infructueuses.
L'oued Rorfa, cause de son nom (Rorfa, vote), m'avait surtout
donn de l'espoir.
J'avais, d'autre part, entendu parler de la dcouverte par M.
Chavant, colon Henchir-Soudane, d'une vaste chambre vote,
entoure de bancs, mais la description en tait si vague que je ne
pensais pas un hanout.
Pendant mon dernier sjour en Tunisie, du 2 au 8 juillet 1904, je
me suis de nouveau rendu au djebel Zid, o j'ai t plus heureux.
Avec le P. Fulchiron, de S te -Marie-du-Zid, qui avait vu ces grottes,
nous avons explor une dizaine d'haouanet d'un type tout fait
nouveau, situs dans un ravin l'est de l'oued Zid et au nord-est de
la Koubah de Sidi-Zid.
J'ai dsign tous les groupes par la lettre Z.
Z1 oriente au sud-est, demi-effon-
dre dans sa paroi ouest.
La porte prsente un encastrement
net et un auvent ; elle est situe
1 m50 au-dessus du sol, trs dclive.
Elle prsente sa paroi E. une sorte
de lit lev de 1m et large de 1m ga-
lement, avec un ressaut simulant un
oreiller large de 20 c/m. et haut de
8 c/m. Ce dispositif parat absolu-
ment appropri pour y dposer un
cadavre allong. Le long et au bas de la paroi N. court une sorte de
ressaut analogue, large de 20 centimtres sur 10 de haut,
155

qui a pu servir d'oreiller des cadavres couchs sur le fond de


lhanout. Elle prsente de plus une niche carre situe 1 m 50.
Elle mesure 2 m10 de long et de large, 1 m 90 de haut.
A ct et au nord, on remarque les traces d'un hanout boul Z1 bis.
Z2 galement orient au sud. La
porte est taille 3 m environ dans
un bloc de 8 mtres de haut qui
se dresse comme une tour dans le
milieu du ravin.
La porte d'entre est prcde
dune sorte desplanade, large de
1m20 sur une gale profondeur.
Elle est munie d'un encastrement trs net de 0 m 70, et de plus d'une
feuillure large et paisse de 5 centimtres, la partie interne du
couloir, long de 0 m40 environ ; la dimension de l'entre est celle du
hanout, soit 0 m65 de large et 0 m80 de haut. Le sol est en contre-bas,
0 m70 de profondeur environ.
Le fond de la chambre a la forme d'un trapze dont les parois E. et
O. sont parallles 1 m30 de distance. Dans
l'angle N.-O., la hauteur de 0 m80
environ, se creusent deux lits : le premier
lit prsente une largeur de 1 mtre et une
longueur de 1m80 jusqu' l'oreiller, qui
prsente un ressaut de 8 centimtres et qui
a 1 m 70 de largeur jusqu' l'oreiller situ
sa partie S., oreiller de 8 centim. de
ressaut et de 20 centim. de large.
Au pied du lit, l'angle aigu form par
la paroi O. et la paroi E. du lit, l m50 de
hauteur, il existe une petite niche demi-sphrique.
Sous les deux lits existe un videment en forme de vote qui se
continue, comme les lits eux-mmes, sans interruption dans l'angle
N. O.
Une niche carre, de 0 m20 de ct, existe dans la paroi E., profonde
de 0 m10. Au milieu de la paroi N. existe un disque en relief que
j'identifie, par hypothse, ceux signals par M. Letourneux dans
une grotte artificielle de Kala-es-Senam et, par comparaison, avec
les figures humaines du hanout Z 3 .
Les grottes suivantes, partir de Z 3 , sont situes dans un mme
156

banc de grs, rendu presque vertical par suite de l'inclinaison des


couches gologiques; aussi sont-elles superposes dans la tranche
de cette couche de grs. La plupart sont tellement
dtruites qu'on ne peut les dcrire ; beaucoup sont
aussi obstrues par les boulements.
Z3 est le plus typique des haouanet lits
(fig. VI et VII). Elle s'ouvre par un couloir de 1
mtre de profondeur environ, de dimension
ordinaire 60/75 0m80 du sol ; sous la porte,
0m40, on trouve une marche ; mais, au lieu d'tre
demi-cylindrique, elle forme un tronc de cne dont la base la plus
large est en haut, disposition unique jusqu'ici.
Dans les parois, 1 mtre de haut, se creusent des cavits
longues respectivement de 1 m70 au nord, 1 m 80 l'ouest, 1 m 50 au
sud, prsentant un oreiller large de 0 m20
avec un ressaut de 8 centimtres au nord,
pour le lit L" l'ouest, et pour les lits L et
L' au sud et au nord. Sous les lits L et L'
se creusent deux videments E et E' qui
achvent de dessiner la forme du lit. La paroi
du fond de L' est dgrade par suite
de l'effritement du grs.
Il existe, au-dessus de la porte, et un peu droite, au nord,
une niche longue de 60 centimtres, large et haute de 10 centi-
mtres environ, la seule de l'hanout. Au milieu du lit de la
paroi O. et auprs du plafond existe un relief ovode,
petite pointe en bas tangent en haut au plafond, et large de
0 m16, o l'on reconnat vaguement une figure humaine,
peut-tre le portrait du dfunt. Une seconde figure
humaine existe au pied du lit L, en haut de la paroi E . ,
un peu droite de la porte et d'une partie
effondre de la paroi E.
Cette figure, quoique dtriore par le temps
et sans grand caractre, n'en est pas
moins trs intressante.
Le visage est ovalaire, le relief est de 3centi-
mtres environ; chacun des yeux est
ovale, symtrique son axe horizontal,
entour dun bourrelet en relief
son axe vertical, cern par un
trait. Le nez parat avoir t dtruit ou, peut -tre, fait-en
157

creux ; en tous cas, son relief n'existe pas. La bouche est entr'ouverte
et ento ure d 'un bo ur relet en relief; l'or eille dro ite est rniforme et
parait figure vue de profil; un creux en indique la conque.
Z 4 est fort abime; le ciment du grs est trs peu rsistant; le sab le
q ui le for me est p resq ue blanc avec des marbr ures ro uges. Elle
co mp o r te d e u x l it s, e t p e ut - tr e tr o i s co m me d a ns Z 3 . Le fond des
lits prsente un effet mer veilleux par suite des zb rures d u gr s q ue
l'o n p eut co mp arer d e l'o nyx o u des placages d e bois prcieux.
Le p lancher est en p ar tie effo ndr et un tro u fait co mmuniq uer la
chambre avec Z 5 (fig. IX) qui prsente une
ouverture avec encastr ement. Elle est
co mpltement ob str ue p ar un nor me
Ca llitris quadrivalvis (faux thuya) qui a
pouss dans les fissures de la roche et les
boulis provenant d e Z 4 . On ne p eut y
p ntr er.
En rsum, ce groupe d'haouanet
prsente d es p ar ticular its to utes
no uvelle s p o ur la science :
1 L e s t t e s s c u lp t e s q u i s o n t a n a lo g u e s
aux deux disques, signales par Leto urneux dans la grotte taille de
Kala-es-Senam et qui, places une par lit, sont sans doute le portrait
du dfunt ;
2 Les lits oreillers et videment dont rien ne peut se rap-
procher jusqu'ici dans le nord de l'Afrique, si ce n'est la disposition
des deux haouanet de Ben-Aech (S.A.S.). Ces dispositions apportent
une confirmation inattendue dans l'hypothse mise par moi que ces
cr yptes sont des chambres mo mificatio ns ou des charniers, et l'on
se figure trs bien les cadavres, couchs sur chacun de ces lits, se
momifiant avec ou sans prparation pralable ou se dcomposant la
longue, permettant de recueillir les os suivant un rite cher aux
populations nolithiques de France et certains sa u va g e s d e
l 'A mr iq u e d u No r d e t d e l 'Oc a ni e.
Quelle que soit l'hypothse adopte, on parat se trouver en pr-
sence d 'un mo d e d e sp ultur e avec exp o sitio n d u cad avr e.
Il est intressant de rapprocher ces haouanet lits d'un monument,
q ui affecte aussi le caractr e funb re de l i t , ainsi q u'o n
158

le voit dans celui trouv en Macdoine par M. Heuze et qui est au


muse du Louvre.
Ce rapprochement n'a rien que de naturel si l'on se rappelle
les colonnes type ionique du hanout du djebel Behelil, d'une
part, et, d'un autre ct, les chambres spulcrales des contres
avoisinant la Grce :
1 Les chambres spulcrales signales en Phrygie, proximit
des frontispices en chevron (comme les hanout de
Sidi-bou-Rouhat) et sculptes dans les roches, paraissent
appartenir la dynastie des Midas. Dans ces frontispices, l'on
remarque la niche extrieure et les ornements en losange ;
2 Les tombeaux creuss dans le roc sont trs nombreux en
Lycie. Entre autre celui de Myra, conu comme s'il tait construit
en bois, ce qui lui a donn une certaine analogie avec la chambre I1
du triple haouanet de Sidi-Ali-Djebali.
Les deux hypoges inaccessibles de Telmiros ont une faade
ordonnance ionique, avec deux colonnes accostes de deux antes
supportant un fronton.
Le portique donne accs dans une chambre o sont disposes,
comme d'habitude, des banquettes pour recevoir les corps, les
Lyciens n'ayant pas de cercueils de bois ou de pierre.
Je rappellerai, propos de spultures creuses dans le rocher
ou ordonnance architecturale, les grottes de Beni -Hassan, en
Egypte, o l'on trouve la colonne encastre comme au djebel
Behelil.
En Cyrnaque il existe une vritable range de grottes qui
doivent tre de vritables haouanet.
Je rappellerai surtout les Etrusques, qui ont creus leurs pre-
miers tombeaux dans le rocher, spulcre s o ils plaaient les
urnes et les sarcophages, et qui nous ont laiss galement des
cryptes avec un lit funraire et un oreiller taills dans la pierre.

Dr DEYROLLE,
Mdecin-Major,
CORRESPONDANT.
LES MOSAQUES DE LA VILLA ROMAINE
DE L'OUED BLIBANE

Au cours d'une promenade organis e au printemps de 1904, la


Socit Archologique de Sousse visita, sous la direction de M. le D r
Carton, un point qui lui avait t signal par M. le D r Lambert sur la
croupe d'un plateau qui domine la rive droite de l'oued B l i b a n e ,
p r s d e S o u s s e , o i l a v ai t r e m a r q u d e p u i s p e u d e jours des
traces videntes de mosaques.
En examinant attentivement le terrain environnant, mes regards
furent attirs par des alignements de murs ras de sol, trs peu
apparents. M. le D r Carton, le distingu prsident de la Socit, me
conseilla de pratiquer des sondages dans ces ruines qui, son avi s,
ne pou vaient t re que l es restes d'une villa ro maine.
Les premiers coups de pioche mirent dcouvert une petite
mosaque trois personnages ( 1 ) , puis une splendide mosaque
reprsentant Neptune dont il sera parl plus loin.
Les fouilles, poursuivies avec les subsides et pour le compte de la
Socit Archologique de Sousse, avec l'autorisation et les
encouragements de M. Gauckler, lminent directeur des Antiqui t s
en T u ni sie, o nt mi s dco uvert une c o nst ructi o n ro mai ne dont le
plan, d au talent de M. Gouvet, architecte, conservateur du Muse
de Sousse, est joint cette tude (fi g. 1).
L'aspect gnral de ces ruines et la disposition bizarre de cer -
tains murs laissent supp o ser que cet ensem bl e de const ructi ons ne
fait pas partie d'un tout et se rapporte des difices construits
diffrentes poques.
La superposition de deux mosa ques, spares par une couche de
terre de t rent e cent i mt res, se rap p ort ant deu x cha m bres bien
distinctes et de dimensions ingales (chambres 30 ou 31), donne
une grande crance cet te supposition.
Le t errai n argil o-cal cai re, sur l eq uel se t rou ve nt di fi es ces

(1) Offerte au Muse de Sousse


160

constructions, a d subir, avec le temps, des modifications impor-


tantes : une partie des locaux renfermant les plus belles mosaques a
t dtruite par les glissements du sol dans la direction de la
valle de l'oued Blibane. Des fragments de mur en blocage, des
morceaux de stuc peint et quelquefois moulur, ainsi qu'une
grande quantit des cubes en marbre provenant de mosaques, ne
laissent aucun doute cet gard.
Les murs, construits en un blocage assez r sistant, taient
maintenus, de distance en distance, par un chanage en pierres
de taille dont il ne reste plus que les empreintes et quelques
rares spcimens chapps au pillage. Il n'y a pas de sous-sol ni de
cave. Voici quelle tait la disposition des locaux :
Les chambres 19, 20, 21 et 22 pr sentent une diffrence de
niveau avec les autres de plus d'un mtre en hauteur.
Le dblaiement de la partie nord -est n'a pas t effectu en
entier par suite de l'opposition obstine du propritaire du terrain.
Cette partie des ruines reprsente, peut -tre, un tout indpendant
des autres constructions.
Les chambres n os 1 11 paraissent avoir t destines, l'origine,
des thermes privs. La chambre prsente sur une partie des
parois des murs quelques adhrences de ciment qui indiquent
vraisemblablement l'emplacement de l'hypocauste. Nulle trace,
nanmoins, de tuyautage ni de bouches de chaleur.

1. Chambre carre, pavement en ciment, traces d'adhrences


de ciment aux murs la hauteur de 0 m 45. Nombreuses tuiles
avec rebord et une quantit considrable de poteries en terre en
forme de seringue employes pour la formation des votes.
J'ai trouv dans cette chambre un bronze moyen de Commode (180-
192 aprs J.-C), un plomb de forme cylindrique (diamtre 0 m05,
long 0m07, poids 1 k380) avec traces bien apparentes d'une boucle
en fer sur la tranche.
2. Chambrette btonne un peu en contre-bas de la prcdente.
3. Chambrette btonne en grande partie dtruite.
4. Chambre rectangulaire avec un dicule en forme de niche,
au mur ciment et pav d'une mosaque blanche.
Mosaque rectangulaire (1,10x0, 70) reprsentant trois person-
nages de petite dimension (fig. 1).
Le personnage de droite pourvu d'un masque barbu, dans l'atti-
Socit Archologique de Sousse . Fouilles du Ct Giorgi.

NEPTUNE, Mosaque de loued Blibne


16 1

tude de la surprise ou de la moquerie, fl chit sur les jambes en se


tenant sur la pointe des pieds, faisant face au personnage du
milieu, tendant vers lui la main droite ouverte, les doigts carts.
Habill d'une dalmatique d'un jaune ple, il fixe de la main gauche,
la hanche, un bout de l'charpe passe sur les paules et noue sur
la poitrine. L'autre bout repose sur l'avant -bras tendu hori-
zontalement. Il est chauss de crpides noires (fig. 3).
Le personnage du milieu, d'une taille un peu plus leve que
les deux autres, porte une costume ample bleu clair manches
flottantes et par-dessus une chlamide d'une nuance plus accentue
avec bordure bleu fonc. De face, portant un demi -masque, il a la
main droite retenue par le personnage de gauche. Il est galement
chauss de crpides noires. La partie du vtement de la ceinture
aux genoux est trs dtriore.
Le personnage de gauche, portant un masque rouge, dans l'atti -
tude d'un solliciteur, retient de ses deux mains la main droite de
son voisin. Il est affubl d'un vtement fond bleu clair et liser
bleu fonc, manches flottantes, chlamide d'un jaune clair et
chauss de crpides noires.
5. Chambre peu prs carre, mosaque fond blanc, encadre -
ment en grecques (1.80 X 1.50).
Au centre un splendide tableau reprsentant Neptune entire-
ment nu, debout sur son char tran par deux hippocampes, escort
d'un dauphin. Le dieu de la mer, d'une expression de figure
douce et mlancolique quoique portant les cheveux et la barbe
incultes, tient les rnes de la main gauche et le trident de la
main droite, paraissant aiguillonner ses coursiers.
Une charpe bandes bleues, vertes et blanches flotte au vent
au-dessus des paules et dont les extrmits reposent sur les
avant-bras.
L'aspect de ce tableau est des plus saisissants. Le coloris et le
model ne laissant rien dsirer. Demi-grandeur naturelle. Cubes
en marbre de nuances, du rouge ncessairement pour reprsenter
Neptune et son char. Le vert dans toutes ses nuances a t ut ilis
pour reprsenter une mer calme, et les chevaux marins, dans les
parties trs claires, sont reprsents par des cubes en marbre
blanc.
Les cubes utiliss pour Neptune sont d'un beau marbre et de
petite dimension. Dans les autres parties du tableau, on a utilis
162

des cubes moyens. Des cubes en pte de verre ont t employs


pour reprsenter les bandes en vert tendre de l'charpe.
Le dessin qui a servi la reproduction en couleur de la mosaque
est d au talent et au pinceau de M.Bertin, membre de la Socit,
qui je suis heureux d'adresser les remerciements de notre
Compagnie.
Un ft de colonne en calcaire rougetre a t trouv dans cette
chambre.
Des quantits de morceaux de carreaux en verre, dont
quelques-uns atteignent la dimension de la main, ont t galement
trouvs dans cette mme chambre.
L'emploi du verre pour les portes et fentres, cette poque
recule, est un signe certain du luxe qui rgnait da ns cette maison
dont le propritaire devait tre vraisemblablement une notabilit
d'Hadrumte ou un colon romain enrichi parla culture de l'olivier.
6. Citerne ou piscine cimente avec enduits en tuileaux.
7. Corridor. Mosaque use et en grande partie dtruite, en -
cadrement torsade.
8. Chambre. Mosaque fond blanc et sujet gomtrique :
Lignes transversales formes de petits carrs en marbre noir et
se coupant perpendiculairement de manire former de grands
carrs. Bordure en torsade.
9. Chambre. Mosaque reprsentant des ds en perspective,
forme de cubes blancs et noirs. Bordure en torsade.
De 10 22. Locaux avec pavement en ciment, l'exception
du 12 qui ne prsente aucune trace de pavement.
23. Chambre carre. Mosaque motif reprsentant un paon
vu de face dans un mdaillon formant toile huit branches. Il ne
reste de visible de l'oiseau que les pattes, le bout des ailes et de
la queue. Huit carrs forment cercle autour du motif central. Les
vides sont remplis par une combinaison harmonieuse de carrs,
de rectangles et de losanges. Cubes de moyenne dimension. En -
cadrement eu torsade.
24. Chambre rectangulaire. Mosaque blanche forme d'-
cailles. Bordure en torsade.
25. Chambrette carre. Pavement en ciment.
26. Chambre en partie dtruite par un glissement du sol.
Mosaque en damier, marbre blanc et noir. Bordure en torsade,
Plan densemble de la villa romaine de lOued-Blibane
Mosaque de la chambre n4.
163

27. Chambre partiellement dtruite. Mosaque formant un


genre de damier et des carrs semblables ceux de la chambre
8. Bordure en tresse.
28. Chambre en partie dtruite. Mosaque blanche forme de
lignes transversales d'olives se coupant perpendiculairement de
manire former des toiles quatre branches. Bordure en tor -
sade.
29. Chambre. Mosaque forme de cercles entrelacs ayant
au centre une petite rosace. Bordure en torsade.
30. Chambre. Mosaque forme d'un ensemble harmonieux
d'toiles quatre branches et de cercles remplissant les vides.
Bordure en torsade.
31. Mosaque trouve trente centimtres au -dessous de
celle de la chambre 30.
Cette mosaque, en partie dtruite, tait motif gomtrique.
Des peltes sont inscrites dans quelques carrs encore assez bien
conservs,
Cette mosaque, ainsi qu'il a t dit plus haut, ne faisait certaine-
ment pas partie de la construction laquelle appartenaien t les
autres mosaques.
Les chambres de 27 30 devaient donner accs un large cor -
ridor en mosaque blanche encadrement en torsade presque
compltement dtruit par des boulements. Sur l'axe du corridor
se trouvaient des mdaillons circulaires espacs contenant des
Svastika (croix gamme).

M. le docteur Carton avait dj signal, une runion de la


Socit, la dcouverte de ces croix gammes au camp Sabattier,
ce qui donne penser que c'tait un emblme ou une Ornemen-
tation en usage dans le pays.
Il y avait ici une riche villa avec thermes priv s le long de la
voie de Carthage. L'emplacement tait admirablement choisi :
une vue magnifique dans la belle et large valle de l'oued Bli bane
et le vaste plateau qui s'tend jusqu'aux villes de Kala-Kebira,
Akouda et Hammam-Soussa, avec une chappe vers la mer dans la
direction du golfe d'Hammamet.
On a dj trouv de trs riches villas aux environs de Sousse.
Celle de l'oued Blibane vient s'ajouter la liste de celles o l'on
164

a trouv les mosaques qui ornent le Muse de Sousse et la Salle


d'honneur du 4 e Rgiment de Tirailleurs Algriens.
Au cours d'une promenade faite par les membres de la Soci t,
M. le docteur Carton, son minent prsident, a indiqu une srie
de riches villas le long de la voie d'Hadrumte Carthage et la
villa de l'oued Blibane est une des premires de la srie.
Ds que les ressources financires le lui permettront, la Socit
Archologique de Sousse entreprendra de nouvelles fouilles, et
nul doute que ses efforts ne soient couronns de succs.
Grce la gnrosit de cette Socit, le Muse de Sousse a t
dot de deux mosaques d'un grand intrt, l'une par le sujet qu'elle
prsente, l'autre par son excution.

COMMANDANT GIORGI,
Vice-Prsident.
NOTE SUR UNE NCROPOLE ROMAINE
DE SOUSSE

Cette ncropole est situe l'ouest de la ligne de chemin de fer


de Kairouan, au point exact o cette ligne passe sur le premier
ponceau en sortant de la gare.
Je fus tout d'abord surpris de trouver dans le terrain, et quel-
ques centimtres peine de profondeur, une forte couche de
terre noirtre paisse quelquefois de 1 m 50. Dans cette terre
gisaient, pars, un grand nombre de dbris, tels que tuiles rouges,
fragments de mosaque, restes d'un grand plat en forme de bai-
gnoire, buste d'une statuette en terre cuite et fragments de lampes.
Dans cette couche de terre noire j'ai trouv une tabella
devotionis, enfonce dans le sol 0 m 15 et mle aux matriaux
dnomms plus haut. Elle tait enferme dans un tui ayant la
forme d'un obus forte panse ou d'une bouteille sans goulot. Cet
tui est en plomb et se divise en deux parties.
La partie suprieure a 0 m 065 de hauteur, 0 m 04 de diamtre. La
partie infrieure a pour hauteur 0 m 04 et 0 m 05 de diamtre sa
base. L'tui a pour hauteur totale 0 m 105. L'paisseur moyenne
de l'enveloppe de plomb
est de 0m 004. Au moment
de la mise jour, il tait
hermtiquement ferm et
contenait une plaque
de plomb enroule autour
d'un morceau de bois.
Deux poinons, dont un
bris, taient dissimuls
entre le mtal et
le bois (fig. 1 et 2).

La plaque droule porte sur toute sa surface


une inscription malheureusement un peu dgrade par des dpts
calcaires. Nanmoins il reste assez d'lments pour la
reconstituer entirement.
166

Comment cette tabella a-t-elle t dpose l, dans ce terrain,


peut-tre rapport une poque postrieure la ncropole ? J'ai
bien retrouv 0 m50 plus bas une spulture inhumation dont le
sarcophage tait en partie dtruit. Il a t possible d'en dblayer la
partie infrieure qui tait intacte. Des tuiles, plate s recouvraient
un squelette assez bien conserv ayant une direction
Nord-Sud. C'est la seule tombe inhumation dcouverte dans
cette ncropole.
Ce terrain a donc subi, mais sur une faible surface, quelques
mtres carrs peine, un remaniement quelconque, moins que
ces dbris ne proviennent d'une autre partie de ce terrain. Sur le
sommet de la colline on remarque des traces de construction et
les dbris d'une grande mosaque.
Mon opinion ne peut tre bien arrte sur la prsence du tub e
contenant la tabella. Il est possible qu'il provienne du tombeau
inhumation trouv plus bas. A une poque rapproche de nous, on
a pu creuser l un trou pour planter des oliviers ou construire une
tranche pour l'coulement des eaux.
Comme je le dis plus haut, c'est sur une faible surface que le
terrain a t boulevers, puisque j'ai trouv, droite, des tom -
beaux trs bien conservs dont je vais donner ici une description
dtaille.
Tout d'abord, une lgre construction carre, haute de 0 m20,
compose de quelques pierres seulement,
portait sa partie suprieure, et dbordant
lgrement, un plat de 0 m 35 de diamtre.
Il tait recouvert par les dbris d'un autre
plat semblable et contenait des ossements
calcins. Le fond en tait trou. Pas un seul
objet de mobilier funraire !
Mls ces petites constructions, des
tuyaux en terre cuite mergeaient de ci de
l du sol ancien. Ils communiquaient avec
une urne funraire trs forte panse, que
l'on retrouve souvent dans les ncropoles
de la rgion de Sousse. Ces urnes sont
dnommes Keuskeus cause de la
grande quantit de trous percs au fond, les faisant ressembler
167

aux ustensiles dont se servent actuellement les Arabes pour


faire cuire leur couscous (fig. 3).
Trs peu profondment enfouies dans le sol elles taient prot -
ges par des pierres de moyenne grosseur, mles la terre
argileuse, et contenaient des ossements calcins. Le plus souvent
la lampe tait droite de l'urne. Quelquefois elle tait remplace
par un vase piriforme en terre rouge trs fine et une anse.
A gauche d'une de ces urnes j'ai trouv un buste entier, haut
de 25 centimtres, en terre cuite rouge, d'un jeune homme im -
berbe.
C'est en dblayant ces urnes, enfouies ngligemment dans le
sol, que j'ai mis jour un tombeau, en forme d'autel, intact et
situ dans un terrain trs meuble, ce qui lui a conser v son fin
crpissage (fig. 4). C'est certainement le mieux conserv de ceux
que j'ai mis jour dans ce
terrain. Sa partie suprieure,
dont trois angles se
terminaient en pointe, tait
recouverte par des tuiles
carres et rouges. Il tait
construit en moellons et dans
sa partie centrale tait
enclave une urne funraire
absolument semblable aux Keuskeus trouvs ct dans le
sol. Le tuyau mergeait l'un des angles, la partie suprieure,
supprimant un des quatre coins.
L'urne reposait dans le fond du monument sur une lgre et
trs fine couche de cendres blanches, laquelle recouvrait une
autre couche de terre rouge.
A droite de l'urne, dans les cendres, un vase piriforme semblab le
celui dj dcouvert contenait un produit noir et rsineux ayant
t brl. A gauche une lampe de moyenne grandeur, en terre
rouge queue perfore, portait comme estampille une rosace.
Dimensions exactes du monument : hauteur, 1 m40; largeur, lm10;
longueur, lm 10.
La deuxime dcouverte intressante se composait de
deux tombeaux accoupls (fig. 5). Ils ont d avoir t construits
une poque diffrente. En effet, aprs en avoir dmoli
compltement un, le mur du deuxime avait conserv son
crpissage intact du ct de l'autre tombeau.
168

Le monument de droite, d'une construction bien diffrente de


celui de gauche, contenait une urne funraire absolument semblable
celles dj dcrites et reposant sur un lit de cendres fines et

de terre rouge. Mls aux cendres, les dbris d'un


objet en plomb et en argent fondu.
Le tuyau sortait lgrement par la partie suprieure et int-
rieure du mausole.
Dans le monument de gauche le tuyau communiquait avec une
cavit laisse dans l'intrieur de la construction. Au fond, mme
couche de cendres et de terre rouge ; une lampe commune
queue perfore tait mle aux cendres.
Ces deux tombeaux, de forme bien diffrente, devaient avoir,
leur partie suprieure, soit un cippe, soit un monument quelconque
reposant sur une assise plusieurs rebords. Hauteur du
monument, 1 m 30; longueur totale, 2 m50; largeur, l m 10.
Un peu plus loin, un autre genre de tombeau a pu faire croire
qu'il y avait l une spulture inhumation. Il se composait de
quatre normes tuiles plates, ayant
un trs petit rebord, longues de
0 m 70 et larges de 0m60 (fig. 6),
places en forme de toit avec deux
autres tuiles plates de mme
dimension aux deux extrmits qui
fermaient le tombeau.
La tuile de devant, soutenue par
une grosse pierre, tait lgrement chancre pour permettre le
passage du tube. Vu sa forme allonge, il paraissait devoir
contenir un squelette.
Ce qu'il y a de plus curieux remarquer dans ce tombeau,
c'est l'absence complte de toute construction extrieure, au-
169

dessous du sol ancien. Ds le dbut des travaux de dblaiement, le


faite seul des quatre tuiles apparaissait au-dessus du sol.
De grosses pierres brutes poses et mles la terre argileuse
recouvraient ces tuiles, qui n'abritaient que des cendres et des
ossements calcins en grande quantit. Le tube ayant une direction
fort incline vers l'intrieur de cette sorte de t o i t , donnait passage
aux parfums que Ton rpandait sur les cendres. Il a servi galement
introduire, dans ce tombeau, les cendres d'un certa i n nombre de
personnes.
Le Service des Antiquits de Sousse, ayant eu connaissance de la
dcouverte de cette ncropole, a fait, son tour, pratiquer des
fouilles. Il a t dcouvert des tombeaux incinration en forme
d'autels et de cippes, peu prs semblables ceux dj dcrits.
Ceux qui contenaient les plus curieux objets n'taient pas de la
construction la plus riche. Quelques inscriptions ont t transportes
au Muse de Sousse.
Je n'ai trouv aucune pice ou mdaille antique, seuls quelques
dbris de bijoux moiti fondus. Les poteries taient remarquables,
surtout les vases piriformes.
Cette ncropole peut donner encore de beaux spcimens de
l'art antique ; la partie fouille jusqu' ce jour semble tre la par-

tie gauche (fig. 7). Dans le jardin attenant ce terrain il y aurait


peut-tre fouiller.
J'ai conserv un dessin des derniers tombeaux dcouverts qui
ont t dmolis par ceux qui les ont ouverts. Je joins ce dessin ma
description.
St ICARD,
Membre correspondant.
TOMBEAU PRSUM PHNICIEN
A BOUGIE (ALGRIE)

En 1904, nous avons signal la Socit Archologique de


Constantine le dgagement, par nos soins, d'un mgalithe situe
Bougie, lieu dit Roumane, dont le tout constitue un colossal
monument comportant: rochers taills, creuss, perfor s, pour
divers usages sur lesquels on ne peut gure fonder que des con -
jectures.
Depuis, il nous a t donn de relever d'autres monuments, de
moindre importance il est vrai, mais toujours travaills dans des
conditions telles qu'il est permis d'entrevoir une poque de
constructions particulire utilisant le roc mme, dans la plus
large mesure, laquelle pourrait bien tre antrieure, si elle ne
lui est contemporaine, l'poque phnicienne.
Nous allons bien que sortant de nos sujets d'tude habituels
donner aujourd'hui la description d'un curieux tombeau, sans
doute de cette dernire priode, mais viol depuis fort longtemps
et consquemment priv de son contenu.
Dans le massif de rochers sur lequel on a difi le fort Clauzel,
dans sa partie longitudinale par rapport la mer, en contre -bas
et au sud-est, face aux dernires habitations de la ville basse ou
Camp-Infrieur, on remarque de trs loin une cavit sombre et
paraissant former un cusson rgulier.
En s'approchant de la paroi presque verticale d'un bloc mons -
trueux ne mesurant pas moins de 20 m tres de base et 10 mtres de
hauteur, il est facile de se rendre un compte exact de ce qu'est cette
nigmatique ouverture, dont la photographie d'autre part donne
une vague reproduction. Nous nous trouvons tout simple - ment en
prsence de l'entre d'un tombeau, d'un accs extrme -
ment difficile, entirement creus dans le roc et offrant un re l
intrt. On a, vraisemblablement, d profiter d'une cavit natu relle
dans le massif, l'amnager et l'approprier pour la circons tance,
car pareille perforation semble un travail fort pnible. Nous nous
171

trouvons l dans un conglomrat calcaire d'une excessive


duret, o le fer entre pour une bonne part, parfois sous forme de
concrtions, phnomne commun dans le djebel Gourraya et le
crtac suprieur de l'Atlas.
Si on escalade le rocher de faade
en s'aidant de quelques rares asprits,
ascension assez dangereuse, on
pntre, 3 m 50 environ au-dessus du
niveau du sol, par l'ouverture rgulire
taille en cusson qui sert en mme
temps de porte et de fentre. On se
trouve, 0 m 50 en dessous, dans une
salle bien claire, oriente
directement au sud, de forme rectan-
gulaire, entirement taille dans le
roc et mesurant 2 m 80 de longueur,
2 m 05 de largeur, avec une hauteur
moyenne de 1m 47 l'entre et au
fond ; le milieu, plus lev, forme un
peu dme et permet de s'y tenir
facilement debout. La paroi de droite est nue ; on y remarque
quelques suintements stalagmitiques en nappes (fig. 1).
Face l'ouverture, 0 m90 au-dessus du sol du caveau, paroi de
fond, se trouve mnage une niche de toute la largeur de la salle,
soit 2 m05, avec une hauteur de 0 m 57 et une profondeur de 0 m20 ; les
angles sont rguliers.
A la tte et aux pieds, on a laiss subsister dans la pierre deux
lgers tasseaux de 0 m05 de saillie, de telle sorte que le cercueil plac
dans cet endroit ne reposait pas directement sur le fond (fig. 2).
La paroi de gauche forme sur toute la longueur une saillie d-
bordante sous laquelle il tait galement facile
d'aligner une srie de sarcophages sur toute
l'horizontalit du caveau.
Au-dessus, mme particularit que prcdem-
ment : fort belle niche angles arrondis, plus
spacieuse encore si on considre qu'elle a prs de
m
0 50 de profondeur, avec en moins les deux tasseaux l'effet de
supports (coupe fig. 3.)
172

Vers le sommet de c e t t e n i c h e , et au fond par rapport l'entre


du tombeau, on remarque une cavit sans doute naturelle, mais
certainement entaille dessein, presque ovale, de 0 m 10 de large
et 0 m03 de haut, laquelle parait communiquer avec
l'intrieur du massif. Quand vient la saison des
pluies, les infiltrations, qui doivent tre trs consi-
drables, s'coulent l et permettent de relever
tout le long de la paroi, jusqu'au sol du caveau, une
large trane de dpts calcaires qui s'est couverte de
mousses. Ce sol tant peu rgulier, lgrement en pente mme
vers le fond, il s'ensuit q u ' i l y a pour ainsi dire toujours de leau
dans le tombeau. C e t t e particularit s'est produite galement
autrefois, et, nous dirons mme, on a d en tirer un parti immdiat,
car, ct de l'entre, qu'il tait toujours facile d'obstruer
avec un simple tampon, il nous faut signaler la sortie.
A la base de l'ouverture en cusson et au niveau du sol du
caveau, on a perc un trou d'coulement, un peu en orifice de
four, de 0 m15 de largeur et 0 m05 de hauteur. Il semble que la
quantit de liquide rejete au dehors par cet orifice ait d tre
importante : tout le long de la paroi du rocher, extrieurement,
on relve un large sillon, quoiquirrgulier, fortement accus.
L'entre de la crypte qui, du dehors, forme cusson rgulier,
e s t , a u contraire, l'intrieur, nettement trapzodale et fortement
entaille, de telle sorte qu'une fermeture de 1 m35 de largeur, 1 m15
de hauteur droite et l m l0 gauche pouvait facilement y tre
adapte. A la base, et de chaque ct, subsistent deux encoches
en rigoles, lesquelles ne permettent aucun doute cet gard.
Bien que ltanchit du caveau paraisse parfaite, la longue
quelques suintements persistants ont laiss, surtout vers la droite
en entrant, des dpts en nappes. Ceci nous permettra de faire
une remarque pouvant avoir son utilit. Toute la surface du tombeau,
l'exception du sol, a t autrefois enduite d'un badigeon
grossier, jauntre, base de chaux, et il est facile de constater
que les dpts calcaires sont postrieurs au badigeonnage.
On relve une assez grande quantit d'inscriptions, en franais
et en arabe, les unes au crayon, les autres la pointe, mais toutes
dactualit ; en gnral, ce sont des noms de militaires, parfois
avec le matricule, lesquels ont voulu laisser un souvenir de leurs
visites au monument.
173

A part deux endroits, o les bordures des niches ont t mutiles


tout rcemment, la conservation de l'ensemble est parfaite.
Du haut de cet observatoire, on jouit d'une vue merveilleuse
sur le golfe de Bougie et les hauts sommets de la rgion stifienne.
Bien que ce tombeau ait beaucoup d'analogie avec d'autres
dj signals en Algrie et en Tunisie, il nous a paru intressant de
le faire connatre, car son ouverture surtout, en l'absence de tout
autre indice intrieur ou extrieur, dnoterait une poque
franchement phnicienne.

A. DEBRUGE.
Membre de l'Association Franaise pour lAvancement des Sciences
el de la Socit Archologique de Constantine.
ANNOTATIONS A L'ATLAS ARCHOLOGIQUE
DE LA TUNISIE

Feuille de Grombalia

Description de nouveaux haouanet jumeaux Hir Ben-Hassen

Il existe un groupe de 2 haouanet situ au col entre la valle de


Ben-Aech et celle de Ben-Hassen. entre le djebel Makki et le
djebel Madjadib, 800 mtres au N.-N.-E. de Bordj-Sidi-Ahmar. Ils
sont creuss dans un bloc de grs faisant face l'ouest. J'ai dsign
ce groupe par la lettre M.
M 1 a une entre large de 61 c/m. sur 45 de long; elle s'ouvre au
niveau du sol, mais la route est surleve et le fond est en

Haouanet de Kelibia (El Harouri)

contre-bas. La chambre, peu prs carre, large de l m 93, est


peine haute de 1 m 15. Le sol prsente une particularit intressante
qui se retrouve dans un hanout d'El-Harouri ; c'est une excavation
rectangulaire, large de 68 cm., mdiane, occupant toute la longueur
du hanout; ses dimensions indiquent qu'elle est faite pour recevoir
un corps humain; l'angle N.-E., malheureusement effondr, laisse
voir la couche de sable sous-jacente au grs; le hanout prsente
encore considrer une petite niche carre mesurant 20 c/m. de
haut sur 14 de large.
175

M2 Le deuxime hanout s'ouvre au S. du premier par une entre


large de 68 cm. dans les mmes conditions que le prcdent; il est
profond de 2 mtres et prsente une disposition fort irrgulire :
tandis que la paroi N. est 10 c/m. de l'entre, la paroi S. est
52; cette paroi prsente, partir du fond, une sorte de grande
niche ne s'arrtant qu' 50 c/m. de la paroi antrieure; sa profon -
deur est de 41 c/m; le plan fait bien saisir cette dispos ition; elle
atteint en haut le plafond et s'arrte en bas environ 35 c/m. du sol
; les angles sont fort arrondis. Elle prsente une petite niche trs
dgrade sur sa paroi postrieure, large de 20 c/m. sur 9 de
profondeur. Cette disposition parait avoir t prise pour mnager
la cloison entre M 1 et M2. (1)
M. Peney, contrleur adjoint, avait vu l'entre de ces haouanet,
mais n'y avait pas pntr. La carte archologique n'en fait
aucune mention.

Dr DEYROLLE.
Mdecin - Major
CORRESPONDANT,

( 1 ) Le plan qui accompagne dans le bulletin prcdent la fig. 1, hanout de


Si Ali Djebali, est celui de ces haouanet.
LA CAMPAGNE DHADRUMTE

TUDE DE TOPOGRAPHIE ANTIQUE ET SUBURBAINE

I
Dans toutes les rgions de la Tunisie o j ' a i sjourn un certain
temps, j'ai t amen en faire l'tude topographique par
des recherches, entreprises d'abord comme de simples promenades,
puis poursuivies de plus en plus mthodiquement mesure
que les vestiges tudis prsentaient plus d'intrt.
Un tel travail m'a fourni, chaque fois que je l'ai fait, des rsultats
si satisfaisants que je m'tonne de voir si peu d'archologues
l'entreprendre.
A vrai dire, il n'a pas le charme d'une exploration rapide et grandes
journes, ni celui d'une fouille de grande envergure. Il exige
beaucoup de temps, de marches pnibles et monotones et surtout
une grande patience. Ce qui en loigne surtout c'est, je
crois, qu'on ne voit pas les succs, tout t'ait certains cependant,
qu'il doit procurer.
C'est l'exploration archologique des environs de Sousse, ce
pays o les ruines sont si dvastes et qui a t fouill par tant
d'officiers, que je dois la dcouverte de Curza. C'est la mme
mthode que je dois d'avoir dcouvert, dans le pays de Dougga, 500
inscriptions dont plusieurs sont capitales, comme cette loi de
l'empereur Hadrien, dsormais clbre, et relative des concessions
de terrains, l'exonration d'impts accorde l'oliculture.
C'est grce des recherches de ce genre que, prs de Bulla Regia,
j'ai trouv des inscriptions puniques et libyques et toute une cit,
l'henchir Douamis, o l'on vient de mettre jour des textes importants.
J'insiste dessein sur ces rsultats, dans l'espoir qu'ils pousseront
peut-tre quelques lecteurs les rechercher. Mais ils
devront, je le rpte, s'armer de tnacit et surtout revenir
souvent sur les points douteux, jusqu' ce que la comparaison avec
Fig. 1. Tronon de statue formant le seuil d'une habitation
Hammam-Sousse.

Fig. 2. La ligne de pierres moyennes dans le prolongement de laquelle est l'homme


est la bordure de la voie. A droite, une autre ligne de pierres plus grosses est le
reste du chanage du mur de clture parallle la voie.
177

d'autres ruines, places dans les mmes conditions, les ait suffi-
samment clairs.
C'est aprs six mois d'investigations que j'ai dcouvert, dans
un buisson, la premire stle de la ncropole de Bulla Regia.
A Teboursouk, j'avais je l'avoue pass pendant plusieurs
mois cheval, au milieu des spultures mgalithiques, dtruites
ras du sol et bouleverses. Quand un jour, mettant pied terre
pour voir de plus prs trois grosses pierres qui m'avaient depuis
longtemps frapp par leur disposition, je m'aperus que j'tais sur
une spulture.
J'ai voulu, par ce qui prcde, non pas m'offrir le vain plaisir
d'numrer quelques-unes des dcouvertes que j'ai faites, mais
montrer que je n'ai pas me justifier d'avoir inutilement pass
mon temps l'tude d'infimes dtails. J'irai mme plus loin en
avouant que ce genre de recherches m'a procur au moins autant
de satisfaction que des tudes plus transcendantes de gographie
ou d'histoire antiques. Rien de plus attrayant que cette lente ini-
tiation la vie intime d'un pays. La vie de chaque jour, la lutte de
ses habitants contre le sol et le climat, dont ils ont si merveilleu-
sement utilis la fcondit, les moyens qu'ils ont employs pour
recueillir et conserver l'eau, liquide particulirement prcieux en
Afrique, ceux par lesquels grands et petits propritaires cher-
chaient se procurer tout le confort possible par l'amnagement
de leurs demeures, le luxe des pices, le charme des jardins,
l'tude des variations que le voisinage des villes, la fertilit du
sol, la quantit d'eau disponible ont produit dans le groupement
et l'installation des habitations, tout cela, souvent nglig par les
archologues et les chercheurs, offre pourtant un intrt philoso-
phique et conomique considrable.
Je venais d'crire ces lignes quand, au Congrs de la Fdration
des Socits archologiques de Mons de 1904, j'entendis un conf-
rencier exprimer, propos de modestes archives communales
souvent ddaignes, l'opinion que, bien plus que d'autres docu-
ments importants, elles peuvent nous fournir des renseignements
sur la manire dont ont vcu nos anctres. Et, ce propos, on
citait cette assertion de Karl Max, que les conditions conomiques
d'un peuple dominaient l'histoire. Eh bien, si, en Afrique, nous n'a-
vons pas de bibliothques et de mairies dans les poussires des-
quelles les chercheurs puissent exercer leur activit, tous ces
restes, souvent trs effacs, dont l'architecture ou tout au moins le
178

style sont mconnaissables, nous offrent encore nombre de ren -


seignements utilisables. Si les monuments grandioses et admira-
blement conservs, comme le colyse d'El-Djem ou le thtre de
Dougga, peuvent tre compars aux archives nationales, les petites
ruines sont, pour l'archologue africain, des archives communales
inexplores presque toutes jusqu'ici, o il aura beaucoup glaner.
Je viens de trouver une nouvelle confirmation de l'int rt qu'of-
frent ces tudes, modestes en apparence, dans le discours pro -
nonc par M. Bayet, au congrs des Socits savantes de 1904.
L'minent directeur de l'Enseignement suprieur s'exprimait, en
effet, en ces termes : Nous estimons, avec raison, qu'il est plus
important pour la connaissance du pass de savoir comment vivait
un paysan ou un artisan que de fixer la date prcise de l'avnem ent
ou de la mort d'un roi.
Enfin, en se plaant un point de vue plus pratique, ce sont des
tudes toutes sporadiques, qui permettront de connatre, pour
chaque contre, les mthodes par lesquelles les anciens ont su
l'amnager et par lesquelles nous pourrons la restaure r.
Pour en revenir l'objet de ce mmoire, je ne pense pas que
la majeure partie en puisse intresser ceux qui ne connaissent
pas ou qui n'tudieront pas, ces lignes en main, le plateau que je
vais dcrire. J'ai essay de dgager, en quelques pages, les con-
clusions d'une porte plus gnrale, qui pourront intresser le
lecteur tranger Sousse. Mais il a bien fallu, l'appui de celle -ci,
faire, au pralable, l'expos des documents qui m'ont servi les
tayer; de l, la liste un peu fastidieuse qui va suivre.
A mon grand regret, et surpris par un brusque changement de
garnison, je n'ai pas pu faire, comme je me l' tais propos, un
inventaire complet de toutes les richesses archologiques de la
rgion. J'ai d me borner, dans les quelq ues semaines qui me
restaient, complter l'tude du secteur compris entre la route
de Tunis, l'oued Blibane (ou en amont oued Karrouba) l'oued
Hammam (en amont oued Laya) et une ligne passant immdiatement
l'ouest de la butte de tir.
La plupart des ruines que je vais signaler sont mconnaissables.
Il en reste mme parfois si peu de traces que, si l'on ne passe
explorer le plateau autant de temps que j'en ai mis moi -mme,
on risquera de ne pas les retrouver. Aussi dois -je au pralable
exposer quels indices m'ont bien souvent permis d'affirmer
179

l'existence de vestiges presque entirement disparus, quelle


mthode j'ai employe dans l'exploration de cette surface.
Depuis longtemps, dans les runions de la Socit archologique
de Sousse, familirement et pour la facilit des discussions,
on distingue trois classes de ruines : 1 celles dont les murs
s'lvent au-dessus du sol; 2 celles dont les murs sont rass;
3 celles o toute construction a dis paru et o il y a, la place
des murs, une tranche remplie de leurs dbris. Presque toutes
les ruines du plateau appartiennent aux deux dernires catgories.
On sait, en effet, combien le Sahel est peupl et combien nom -
breux sont les villages qui s'lvent sur son sol. La chasse aux
matriaux de construction y a t particulirement active et lon
s'est attaqu non seulement aux pierres de taille mais aussi aux
marbres, si nombreux et si riches, qui dcoraient les villas ro -
maines. On fait, en effet, d'excellente chaux avec le marbre et
c'est cet usage qu'ont t employs les statues et les revtements
qu'on trouvait. J'ai plusieurs reprises fait recueillir aux membres
de la Socit Archologique de Sousse, dans le voisinage des fours
chaux, des fragments de statues ou de bas-reliefs. Trs souvent
donc ce qui reste des antiques constructions consiste simplement
en un monticule, mlang de pltres et de tessons.
On conoit donc que sur ce plateau, o les ruines se touchent
presque, elles soient signales par des fours plus ou moins nom-
breux, suivant leur importance.
D'autre part, si les Arabes ont enlev les pierres des murs, ils
n'ont pas dtruit les citernes ou les silos, qui le plus souvent
n'taient pas maonns. De grandes dpressions ont ainsi succd
aux minences formes d'abord par les murs crouls. Elles se
sont remplies d'un humus excellent et humide. Le vent, les
oiseaux ou la main de l'homme y ont dpos quelques grains ou
quelques boutures. Un arbuste y est pouss, protg contre la
dent des troupeaux par l'escarpement des bords ou par la distance
qui les en sparait. C'est ainsi que les antiques citernes sont
indiques par un superbe figuier, parfois par un olivier, rarement
par un caroubier.
Ainsi : monticule blanc couvert de tes sons, fours, arbre isol
dans une dpression, tels sont les trois lments qui peuvent
dceler l'emplacement d'une construction antique, lorsque les
murs eux-mmes en ont disparu. Isols, chacun d'eux constitue
dj une forte prsomption ; runis, ils donn ent une certitude.
180

Ces exemples feront comprendre quelle mthode j'ai suivie.


Il a fallu un travail rellement colossal pour que les monuments
innombrables qui couvraient le plateau aient t ainsi dtruits.
Pendant plus de dix sicles, les gnrations musulmanes qui ont
habit Sousse et les quatre villages voisins ont exploit ces restes
comme carrire. Et ils l'ont fait avec d'autant plus d'ardeur qu'en
dehors de la pierre de mdiocre qualit qu'on trouve sur place
les Romains avaient apport de loin, pour les employer dans leurs
constructions, d'excellents matriaux qu'on retrouve maintenant
dans les seuils et les montants des portes de maisons. (Fig. 1.)
La ruine dtruite, on s'attaque maintenant la roche sous-jacente.
On peut voir, sur toute la surface du plateau, de nombreux
charretiers, arms de pics et de barres de fer, dtachant.
toutes les plaques de travertin affleurant, en sorte que peu peu
le niveau du sol s'abaisse ( 1 ) . C'est un fait que l'tude des ruines
m'a montr constamment d'ailleurs.
Mais comme la pierre de la surface elle-mme se rarfie de plus
en plus, les arabatiers se rejettent maintenant sur de plus petits
matriaux, qu'ils avaient ddaigns jusque-l. Ils s'attaquent la
bordure des voies antiques, et ces grandes leves qui me semblent
tre des limites de proprits. Si bien qu'en plusieurs
endroits j'tais guid trs srement, pour retrouver la direction
de la grande voie de Carthage, par une tranche longitudinale
d'extraction place dans le prolongement de la bordure.
Il m'a fallu un temps assez long avant d'arriver reconnatre
l'existence de ce grand chemin de communication. J'avais en effet
t frapp tout d'abord par la vue de grosses pierres quarries,
alignes sur la crte de leves de terre en dos d'ne, et, bien
longtemps, malgr ltonnement que j'avais de les voir sur le bord
places distance les unes des autres et de dimensions insolites,
je les avais prises pour la bordure de la voie romaine. C'est seu-
lement le jour o, ct de ces leves, je vis trs nettement la
bordure avec ses caractres que je compris que les leves taient
les restes de murs en bordure du chemin. Cette disposition offrait
une consquence assez dconcertante et qui m'a longtemps trou-
(1) A ce point de vue, l' uvre accomplie par les chercheurs de pierres est plutt
utile, car comme ils laissent la terre, l'endroit d'o le bloc a t extrait forme une
cuvette sans issue o l'eau s'accumule ; do ce double rsultat que la roche se dbite
plus activement en raison de l'humidit et que le ruissellement est compltement
supprim. L'aspect du sol couvert ainsi de dpressions qui se touchent est des plus
caractristiques.
181

bl. L'emplacement de la chausse, au lieu, comme cela a lieu


habituellement, d'tre en dos d'ne, constituait un mplat ou un
creux limit par la saillie que faisaient les murs qui la bordaient.
(Fig.2.)
Mais cette constatation ne m'expliquait pas tous les cas, ceux
par exemple o des alignements de pierres beaucoup moins longs
que les prcdents taient disposs suivant des lignes brises.
On verra plus loin comment, d'observation en observation , j'ai pu
distinguer la destination de tous ces vestiges.
Si j'ai insist aussi longuement sur la mthode suivie dans ces
recherches, c'est, je le rpte encore, afin de permettre d'en
contrler les rsultats et surtout de faire bnficier de l'exp -
rience acquise ceux qui voudront les poursuivre. C'est aussi pour
montrer qu'on peut encore partout, sans fouilles et quelque
explor qu'ait t le pays, y faire des tudes fructueuses et qu'on
en sera presque coup sr rcompens par une dcouverte im -
portante, comme je l'ai t ici par celle de Gurza.
Mais ce mode ne doit d'ailleurs tre appliqu qu'aux contres
dvastes comme les environs de Sousse o il n'existe plus de
monuments, dterminables premire vue, de pices ornemen -
tes, d'pigraphes la surface du sol.
J'ai eu, quelques jours avant de quitter Sousse, la satisfaction
de parcourir le plateau avec nos confrres de la Socit Archo-
logique et de leur voir accepter toutes mes conclusions.
Je n'ai malheureusement pas pu pousser cette tude autant que
je l'aurais voulu, ayant d l'interrompre au moment o j'allais
pouvoir, par quelques fouilles, dterminer les monuments dcou -
verts et sans doute y faire d'heureuses trouvailles. Puisse cette
satisfaction choir celui qui reprendra mes recherches l'aide
de ce simple guide, crit pour encadrer et faciliter les travaux
ultrieurs.
J'ai cru devoir reproduire dans cette tude un grand nombre
de vues de monuments et de constructions qui n'ont peut -tre
pas un trs grand intrt scientifique gnral, mais qu'il est int-
ressant de donner ici parce qu'il s'agit de restes trs voisins de
Sousse appels disparatre rapidement et dont on sera trs
heureux un jour de retrouver la reproduction.
Je dois adresser tous mes remerciement s MM. Blondel et
Deyrolle qui ont bien voulu me prter le concours de leur joli
talent pour illustrer ce travail.
182

II. Voie de Carthage

La disposition des ruines, sur le plateau, est des plus confuses.


L'absence de tout point de repre saillant, la raret des vestiges
qui mergent au-dessus du sol, la succession ininterrompue et
monotone de vallons remplis d'olivettes font qu'il est trs difficile
de s'y orienter. Aussi, pour mettre un peu de clart dans cet
expos, suivrai-je d'abord la voie de Carthage Hadrumte, qui
le traverse, en dcrivant les ruines qui se trouvent en bordure
ou peu de distance d'elle.
Il y avait deux grands chemins reliant la capitale de l'Afrique
Hadrumte. L'un d'eux longeait la mer en passant par Puppu et
Siagu. L'autre appuyait vers l'ouest, en passant par Medicera et
Uthina. C'est du second d'entre eux qu'il va tre question ( 1 ).
Il passait quelques mtres au nord-est du cirque et traversait
ensuite une ncropole situe l'extrmit orientale de la pro-
prit de M. le D 1 ' Lambert. On a trouv en ce point des tombes
incinration, recouvertes de tuiles, et un assez grand nombre
de fragments de statuettes. Il rsulte des renseignements fournis
par M. Lambert qu'il y avait, le long de la voie, des constructions
trs pauvres et dont les murs taient en terre.
A partir d'ici la voie antique se confond peu prs avec la
grande piste d'Akouda. On en reconnat trs nettement l'empier-
rement, pais de 30 centimtres, dans la coupe de la tabia qui
borde le chemin, vers son bord sud-ouest.
On peut remarquer, dans la route mme, ras du sol, l'affleu-
rement de deux grosses pierres alignes dans l'axe de la voie et
places quelques mtres l'une de l'autre. Ce sont les restes
d'un mur d'enceinte qui courait paralllement la voie.
A lest de la piste, auprs d'un olivier mort, s'ouvre une citerne
en forme de silo, seul reste de la demeure antique laquelle elle
a appartenu. Il est possible d'ailleurs que l'on trouve des mosa-
ques au-dessus d'elle, et cette rflexion s'applique toutes les
ruines dont il va tre question.
Quelques mtres plus loin, dans la route mme et au pied de
la tabia qui la longe l'ouest, gisent plusieurs masses de blocage
domines par un monticule de dbris de pierres et de mortier

(l) J'indiquerai dans une autre tude quel est le trac du premier.
183

qui renferme aussi plusieurs blocs. De l'autre c t du monticule


est l'ouverture, parfaitement conserve, d'une citerne en forme de
silo revtu d'un ciment de tuileau trs rsistant, avec rigole
d'adduction.
Un peu au del, quelques mtres avant d'arriver sur le vers ant
de l'oued Blibane, une soixantaine de mtres v ers l'est,
au milieu de jardins et prs de maisons arabes, sont des citernes
en forme de silo et des ruines confuses recouvertes de fumier.
La Socit Archologique de Sousse a, au cours d'une de ses
excursions, visit prs de l plusieurs hy poges, dont l'un en
forme de croix, taills dans le tuf. C'est non loin de ce point, et
sur les bords de l'oued Blibane, que se trouvait la luxueuse
demeure dans laquelle M. le commandant Giorgi a dcouvert de
magnifiques mosaques.
Revenant la piste d'Akouda, on remarque, dans la boucle
qu'elle dcrit immdiatement avant de descendre dans l'oued
Blibane, une srie de cavits section rectangulaire, carre ou
cylindrique, trs rgulires, pratiques dans le travertin et
s'ouvrant ras du sol. On en rencontre beaucoup de semblables aux
environs de Sousse. Je viens d'en relever une grande quantit
autour des hypoges de la ncropole juive de Kamart, prs
Carthage, et je me propose de les tudier en une note spciale. Je
me contenterai de dire pour le moment que, contrairement mon
attente, je n'y ai trouv aucuns dbris pouvant les faire considrer
comme tant des spultures.
Sur le versant sud de l'oued, au del de la voie ferre, on
laisse droite un four chaux et on remarque peu prs sa
hauteur, dans la piste et ras du sol, un mur sur lequel j'ai attir
l'attention des membres de la Socit Archologique de Sousse.
Il est exactement dans le prolongement dun talus sparant
deux cuvettes superposes o sont des oliviers. Or, dans t oute
la rgion et la base des talus et des tabias qui sparent des
cuvettes semblables, il y avait des murs, les uns en pierres
sches, les autres maonns, dont on trouve souvent les traces.
On saisit de suite combien si, d'une part, la dispositio n des olivettes
a peu vari depuis longtemps, l'aspect en a t du moins
notablement modifi.
Auprs du four chaux sont les restes d'un empierrement
form de cailloux calcins et dont la situation ne me semble pas
correspondre celle de la voie antique. Je croirais plutt qu' un
184

moment donn, et assez rcemment, on a consolid de cette


manire certains passages de la piste.
Un peu plus bas et l'est, dans le talus de la route, auprs d'un
puits, sont encore les restes d'un mur antique.
Dans le lit de l'oued mme, une dizaine de mtres en amont
du ponceau demi ruin sur lequel passe la piste, on voit trs
nettement dans chaque berge, et se faisant face, les restes de deux
maonneries, caractriss par une poche blanchtre forme de
pierres brises et de chaux, haute de 2 3 mtres et large d'environ
5 mtres. On se trouve srement ici en prsence des restes
des cules d'un pont. Suivant la loi que j'ai indique plus
haut, il n'en reste plus qu'une fosse pleine de dbris. Une des-
truction aussi complte et en profondeur indique nettement en
outre que cette construction devait tre en pierres de taille. Sur
la rive nord, le profil en dos d'ne de la coupe du sol correspond
bien la forme de la chausse.
Je signale, incidemment, l'existence, une centaine de mtres
en aval de ce pont, et dans l'oued, d'un grand barrage assez
grossirement construit, au seuil form de grandes pierres de
taille poses plat, et qui doivent tre romaines.
Cette construction, qui est moderne, doit dater de la priode
de prosprit de l'occupation arabe dont on retrouve tant de
vestiges et dont j'aurai encore l'occasion de signaler quelques
restes. On sait qu'environ 1 kilomtre en aval un aqueduc romain
que j'ai tudi ici mme ( 1 ) franchissait l'oued sur une srie d'ar-
cades.
Sur la rive septentrionale de l'oued Blibane, la voie montait en
pente assez douce. In peu avant d'arriver sur le plateau elle est
longe, l'est, par un ravin creus sur l'emplacement d'une
ancienne piste et dont le sol offre par places un empierrement
fait de cailloux calcins semblable celui qui vient d'tre signal.
Il ne me semble pas non plus tre celui de la voie antique. Cette
dernire tait plus l'ouest et formait une rampe en pente douce
pour l'tablissement de laquelle les anciens avaient entaill le
roc, en sorte que le chemin passait entre deux murailles de tra-
vertin. Cette rampe est actuellement dans une olivette spare de
la piste par une zeriba (1 du plan).

(1) CARTON. Bulletin de la S. A. S. 1904, p. 56. Note sur l'aqueduc romain


de l'oued Blibane.
185

A peine sur le plateau, la voie antique mettait vers l'ouest un


embranchement que nous suivrons ultrieurement pour tudier
une partie de la rgion (voie n 3). Elle longeait ensuite une
habitation antique (2 du plan) dont l'tendue tait grande, en
juger par les tessons qui en jonchent l'e mplacement. On conoit
que cette ruine, la premire que les chercheurs de pierres
trouvent en arrivant sur le plateau, ait compltement disparu
et qu'il n'en reste qu'un monticule blanc, auprs duquel s'ouvre
une citerne en forme de bouteille. L'enduit, en ciment de tuileaux,
trs rsistant, qui la revt, est
parfaitement conserv, notamment sur le
pourtour de l'orifice. A ct de ce dernier
on en remarque un autre sur lequel
donne un couloir horizontal s'ouvrant
dans la citerne par une baie cintre de 1 m40
de hauteur. Les parois de ce passage ont
t rgularises par de la maonnerie
recouverte d'un enduit et on y trouve les traces, assez effaces, de
marches descendant vers le rservoir. Il est possible que l'on soit
en prsence d'un amnagement peu r cent.
La chausse antique forme, partir d'ici, un dos d'ne trs
apparent. Mais toutes les pierres de bordure en ont t enleves
et on ne voit plus, leur place, que les trous d'extraction. Une
olivette que longe la leve de terre doit avoir conserv d'anciennes
limites car elle est comprise entre trois voies antiques. Imm -
diatement au-dessus d'elle se trouve en effet un embranchement
se dirigeant vers l'ouest, puis la voie de Carthage arrive aux
bords d'une large et fertile valle, l'un des points les plus int-
ressants du plateau.
Les oliviers y sont encore vigoureux et serrs, dans un sol riche
et humide. Il y avait en outre ici un carrefour et, dans l'oued,
devait s'lever un barrage. Tout l'entour de nombreuses cons -
tructions formaient au moins quatre groupes, c'est --dire un
vritable bourg, ou mieux un faubourg d'Hadrumte qui
n'est distant que de 1.800 mtres.
Le premier groupe (3) tait situ dans l'angle S.E. du croisement
de la route et de l'oued, en partie sur le plateau, en partie sur le
versant. On y reconnat nettement les vestiges d'un mur d'enceinte
s'tendant des bords du plateau la route n 3, sur une longueur de
130 mtres et une largeur de 100 mtres environ. A l'intrieur se
186

dessinent plusieurs autres murs circonscrivant des dpressions,


restes de pices ou de cours.
La partie centrale forme un monticule lev et trs blanc, en
dbris de maonnerie. Des sondages m'y ont montr qu'en
certains points le sol antique
y est deux mtres de
profondeur. A la surface j'ai
trouv de trs beaux
morceaux de marbre, et
notamment un fragment
moulur ayant appartenu un
chambranle.
Un nombre prodigieux de
tessons en terre rouge fine
couverte, y couvre aussi le sol.
A 7 mtres du mur d'en-
ceinte, est l'ouverture elliptique
d'une citerne parois cimentes. Si l'on s'en rapportait l'examen
de l'orifice seulement, et du goulot situ la partie infrieure,
on se croirait en prsence d'un rservoir en forme de bouteille.
Mais cette forme est ici bien autrement complique. C'est le
premier exemple d'un type que nous rencontrerons trs frquem-
ment, combinaison de la citerne en silo et de celle en berceau.
On sait le rle important que joue la couche de travertin qui
s'tend dans tout le sous-sol de la contre. C'est elle qu'on cherchait
pour y asseoir la fondation des difices. C'est sa surface
qu'on creusait les tombes paennes qui n'taient pas des hypoges.
C'tait au-dessous d'elle qu'on tablissait les caveaux funraires,
qu'on vidait les catacombes et les citernes. Si cette couche est
trs voisine de la surface ou si elle affleure, le plafond de ces
cavits et leur ouverture ne sont, comme dans la ncropole de
Gurza, qu' quelques centimtres de profondeur. Ailleurs, au
contraire, on a d pratiquer de vritables chemines de 2 et 3
mtres de profondeur pour traverser la couche de travertin.
Le plus souvent, au-dessous de ce plafond trs solide, on a pu,
aprs avoir creus le rservoir dans le tuf, appliquer directement
sur celui-ci l'enduit, sans interposition de maonnerie.
La citerne dont l'tude a caus cette digression offre donc un
orifice sur lequel aboutit une rigole d'adduction bien conserve.
Au-dessous s'allonge le goulot, en forme de col de bouteille, puis
187

le corps de celle-ci, sur lequel donnent trois chambres de forme


ingale, en grande partie combles et dont je n'ai pu lever qu'un
plan peu prcis, quoique suffisant pour donner une ide de leur
distribution (fig. 4).
Une observation m'a t ici trs utile pour la dtermination de
ces leves de terre, derniers vestiges de ruines, que l'on ren -
contre en si grand nombre sur le plateau. En grattant simplement
avec la pioche en ce point une leve de ce genre, j'ai dcouvert ,
de distance en distance, la section d'un mur en place qui en
formait en quelque sorte l'arte. C'est le mur d'enceinte indiqu
sur le plan.
C'est sur cette constatation que je me suis appuy , en bien des
points, pour conclure l'existence de murs.
Sur cet emplacement j'ai trouv aussi beaucoup de dbris de
ce calcaire gris que les membres de la S. A. S. connaissent bien,
qui a t transport de loin et qui a t employ la construction
des gradins du cirque de Sousse et du thtre d'El -Kenissia. On
a d l'employer ici dans les marches ou les seuils des cons -
tructions.
Au S.-E. s'ouvre une seconde citerne ou silo demi-effondr.
Sur le versant de la valle certains vestiges sont trop confus pour
tre dtermins sans recherches ; d'autres sont, au contraire, par -
faitement reconnaissables.
Parmi ces derniers il y a d'abord un bassin situ actuellement
comme il devait l'tre jadis au milieu de plantations.
Il mesure 5m X 7m50. Les murs, en blocage dispos par assises
horizontales, ont 65 centimtres d'paisseur. On y voit l'orifice
d'une rigole qui amenait les eaux d'un puits situ dans le voisi -
nage. L'intrieur en est revtu d'un bel enduit en ciment.
A 30 mtres vers l'est, le long de la voie romaine, s'levait un
ensemble de constructions dont les murs atteignent encore, par
endroits, prs de 2 mtres de hauteur et qui, dtail trs rare dans
toute la rgion, sont assez bien conserves pour que la disposit ion
gnrale en soit reconnaissable. C'est dans ces ruines que
j'ai commenc la srie des fouilles, malheureusement interrom -
pues ds le dbut, par lesquelles je voulais complter l'tude
archologique du plateau (fig. 5, page 197).
Il s'agit ici de thermes privs. L'entre A A, (fig. 6) forme par
deux portes larges de 1 mtre n'tait tourne ni vers la voie toute
proche, ni vers la valle mais vers les autres constructions ce qui
188

indique bien que l'difice tait un tablissement de bains l'usage


du propritaire de la villa adjacente.
Un sondage pratiqu en B a montr, 1 m80 de profondeur, un
hypocauste avec ses piliers en briques portant de larges tuiles
constituant le roc de la pice.
En C tait le foyer. Les pices en taient votes, car j'y ai
retrouv un trs grand nombre de poteries en forme de seringue.
Il y avait en outre sur le
sol une paisse couche
de charbon. On remar-
quera la disposition de
cette pice contre l'-
difice et en dehors de
lui, tout fait comme
chez nous dans nombre
de fermes, le four est
accol l'habitation sur
l'intrieur de laquelle il
s'ouvre. On pouvait ainsi
allumer et entretenir le
feu de l'extrieur sans,
passer par les autres
pices. Il serait int-
ressant de faire un dgagement complet de ces locaux o je n'ai
excut que quelques sondages. C'est en ce mme point que j'ai
trouv un certain nombre de poteries d'une forme toute particu -
lire et sur la nature desquelles on n'tait pas fix jusqu' la
dcouverte de M. le capitaine Touchard ( 1) montrant que ces
tubes avaient t placs dans les cloisons mmes des pices.
En B C D E F G, des pices de petites dimensions constit uent
la srie des locaux qu'on retrouve dans les bains antiques.
Mes fouilles n'ont pas t assez pousses pour les dterminer tous,
et je le regrette d'autant plus qu'en raison de leur exigi t et de la
rduction une grande simplicit d'un ensemble qui est en
gnral assez compliqu, le dgagement de ce monument et
offert un exemple trs clair et trs instructif d'difices de ce
genre. Quoiqu'il en soit, des sondages m'ont montr que le so l

(1) Recueil des notices et mmoires de la Socit Archologique de Constantine


(1902, p. 151). Note sur les fouilles faites Tehouda.
189

de chacune de ces pices y tait revtu de mosaques aux cou -


leurs trs vives offrant, ici une srie d'cailles, l des rinceaux,
des cercles, des figures plus compliques que je n'ai pas eu le
temps de relever.
En H est une piscine dont le sol et les parois sont rev tus de
mosaque blanche.
En I tait un bassin reposant sur un pais massif de maonn erie.
Le fond, revtu de ciment de tuileaux, est un niveau bien
suprieur celui des autres pices. Il y avait donc ici un rserv oir
surlev d'o le liquide tait distribu dans tout l'tablissem ent.
Il tait aliment par le puits voisin. C'est videmment de
cette faon qu'on devait se procurer et garder l'eau dans tout le
pays.
En J une vaste salle, peut-tre un couloir, a un sol revtu de
grands cubes rectangulaires dont le long ct a plus de 2 cen-
timtres de longueur. Une couleur y frappe par la frquence de
son emploi. C'est le rose tendre.
La conservation des murs, l'excellent tat des mosaques, la
clart de la disposition de ce monument, enfin la trs petite sur -
face qu'il occupe, permettraient d'y faire, je le rpte, un dga-
gement instructif, d'un aspect agrable, et trs peu coteux.
Je ne quitterai pas ce point sans attirer l'attention sur un fait
assez curieux. C'est que la seule partie reconnaissable de toutes
les ruines de ce plateau est constitue par les anciens bains des
villas qui s'y levaient et que quand tout y a presque compltem ent
disparu, la partie qui en subsiste toujours consiste dans un bassin
ou une piscine. On peut expliquer ce fait en pensant que
les Arabes, grands amateurs de hammams, ont pu les entret enir
pendant quelque temps, ou ce que les bassins en ont t utiliss
par les ptres, ou enfin ce que les murs de ces tabliss ements
particulirement rsistants ont dcourag les dmoliss eurs.
On voit que ce premier groupe offre un type tr s complet de
grande villa. Sur le plateau, au point de croisement de deux
chemins d'o la vue s'tendait sur le large vallon verdoyant,
s'levait la demeure du matre, avec les btiments d'exploitation
et les communs. Une pente douce conduisait d'ici dans le jardin
et aux bosquets ou aux plantations de la valle, Dans cette der -
nire, une srie d'tages soutenus par des murs bas y retenait
190

l'eau ruisselante. A la partie la plus leve du jardin un puits


alimentait tantt un bassin d'irrigation, tantt le rservoir des
bains de la villa. Comme on le verra plus loin, la surface sur
laquelle s'tendait chacune de ces proprits tait de peu d'tend ue.
On n'y pouvait faire de grande culture. C'tait plutt des
habitations de plaisance, des maisons de campagne plus ou moins
vastes o comme font de nos jours les riches indignes on
s'installait lt, ou bien o les habitants de Sousse, prfrant la
campagne la ville, demeuraient proximit de celle -ci. Ils
avaient bien l une basse-cour, un verger, quelques animaux
domestiques, quelques plantations d'arbres d'agrment ou de
rapport. Mais il ne s'agissait pas d'une vritable exploitation
agricole. C'tait de lamnagement suburbain.
On saisit, d'autre part, quels rapports ont moins le luxe
et les thermes avec ces villas les installations modernes :
cuvettes remplies de beaux oliviers, puits et bassin d'irrigation,
demeure cache dans la verdure et entou re d'un potager, tout
cela se retrouve de nos jours, et j'imagine qu'avec un peu moins
d'art dans les constructions ce qu'on a sous les yeux dans la cam -
pagne moderne Sousse est tout fait semblable ce qu'on
voyait ici autrefois. Seulement villas ou jardins y taient dix fois
plus nombreux.
J'estime cependant qu'en dehors des olivettes il devait y avoir
des travaux hydrauliques importants, de grands barrages, des
aqueducs. L'indolence de l'Arabe n'a pas su les entretenir ou les
reconstruire tous. On voit encore ici un travail moderne trs
intressant ; il s'agit d'une digue courbe, forme de gradins
concentriques, qui rejette vers un radier situ dans le fond de la
valle les eaux de ruissellement. Il est en bordure de la piste ( 1).
A l'est des bains, la voie de Gurza descend, par une tranch e
creuse de main d'homme, jusque dans la valle. On voit trs
nettement, dans ses talus, d'un ct l'invitable four chaux et
de l'autre la coupe de murs, de votes. A l'est de la tranche,
c'est--dire de l'autre ct de la voie, est le second groupe de
constructions situes au bord de l'oued (4). Des pierres de taille
alignes y rvlent la direction de quelques murs dont elles for -
maient les chanes. Le sol est jonch de tessons et de dbris de

(1) Et il ne tardera pas disparatre; les chasseurs de pierres commenaient l'en-


tamer quand j'ai quitt Sousse.
191

tuiles. Il y avait ici des constructions et peut-tre la ncropole du


groupe.
Sur le versant sud de la valle l'empierrement de la voie forme,
l'est de la piste, un dos d'ne trs net, coup franchement
son extrmit infrieure par les eaux de l'oued. Si on se place
dans l'axe de la chausse on distingue parfaitement, dans la
berge oppose, une grosse pierre, quarrie, sortant moiti de
la terre. C'est l'amorce du mur qui bordait le chemin. Et l'on
voit, en effet, au del d'elle, tout un alignement de pierres sem-
blables ( 1 ) distantes de 10 20 mtres (fig. 7, page 197). Cette
ligne monte trs nettement sur le versant oppos jusqu' une
rampe mnage entre deux murailles rocheuses et tailles pic
par la main de l'homme (2). On arrive ainsi sur le plateau, et l'on
aperoit alors dans la mme direction et plusieurs centaines de
mtres au del, des ruines, les plus hautes de toute la rgion,
dont il sera question plus loin. Une leve de terre longeant la
piste entre ces deux points est le reste de l'antique empierrement
qui, on le voit, relie exactement, suivant une ligne droite, les
deux ruines 4 et 9 voisines.
Mais revenons au croisement de l'oued et de la voie, o nous
avons encore deux groupes tudier.
A environ 30 mtres l'est et en amont de la chausse le vallon
est domin, sur la rive gauche, par une minence au sommet de
laquelle s'ouvre une citerne demi-effondre d'o sort un beau
figuier (5). A lentour la terre couverte de tessons laisse affleurer
le sol ciment d'une pice, situe une dizaine de mtres au sud.
Plusieurs pierres de taille ayant form les chanes de murs en
blocage mergent tout autour, montrant l'importance des tablis-
sements qui s'levaient ici autrefois.
Le quatrime groupe est situ dans l'angle nord-ouest du croi-
sement de la voie et de l'oued (6). On y accde par une piste
creuse profondment dans le tuf, et sinueuse. Il est probable
qu' l'poque romaine une voie secondaire s'y engageait. Si rien
ne reste la surface, on y voit en revanche une belle citerne.

(1) Bien souvent, ici et ailleurs, lorsque les pierres de l'alignement, caches dans
le sol, ne sont plus visibles, la prsence en est dcele par une ligne de vgtation
plus pauvre, et quelquefois absente, tranchant sur les plantes voisines. Ce fait est d
ce que la terre qui recouvre les pierres y est plus mince, plus sche ou plus tasse.
(2) Ce travail est surtout visible dans la muraille occidentale, La hauteur de ces
berges est d'environ 50 60 centimtres.
192

C'est une vote en berceau, un peu irrgulire, qui a t mnag e


dans le tuf, sans interposition de maonnerie entre lui et l'enduit.
Seule la vote, qui prsente trois regards, est en blocage.
Elle est d'ailleurs assez irrgulire. Le cintre s'en abaisse vers
les extrmits et les parois n'en sont pas absolument planes. Ces
dfauts, et la situation de ces ruines prs d'une piste et de restes
arabes me les avaient fait, au dbut, considrer comme assez
rcents. La constatation, Gurza, de dtails identiques m'a permis
ultrieurement d'attribuer cette citerne l'poque romaine. Sa
longueur en est de 12 mtres sur 2 mtres de largeur environ.
Deux petits figuiers en sortent par une brche situe son extr -
mit mridionale. L'enduit, jauntre la surface, est en ciment
de charbon.
Un bordj arabe maintenant disparu a t lev sur l'empla -
cement de la villa dont nous venons d'tudier les restes. On en
reconnat trs bien encore les murs en pis, le pu its, le bassin
d'irrigation et des restes de jardins. Dtail intressant, l'enduit
du bassin est en ciment de charbon, comme celui de la citerne,
malgr la diffrence de leurs poques. On remarque enfin que
des murs berbres, c'est--dire forms de deux ranges de pierres
sches spares par de la caillasse coupent les prcdents.
Il y a longtemps que, dans les environs imm diats de Sousse,
on ne btit plus en pis. Mais on y trouve encore bien des restes
de ce mode architectural. L'exemple le plus frappant se voit au
nord de l'oued Blibane, non loin d'une tour arabe, situe en bord ure
de la route, qui s'est rcemment croule, et auprs de
laquelle on voit une citerne et un hypoge antiques. Il semble
qu'on ait employ ici le pis assez longtemps et durant une
priode de prosprit. Quant aux murs berbres, on en trouve
dans toute l'Afrique du Nord et M. Pallary, sans connatre mon
opinion ce sujet, vient encore d'en dcouvrir en Oranie. Mais
je ne connais pas de rgion o ils soient plus abondants qu'ici.
Le plateau en est couvert et il y en a de grandes quantits en
bien d'autres endroits, notamment tout l'entour du rservoir de
l'oued Laya. Prs de Dar-bel-Ouar, Kherbet-el-Menzel et dans
la ncropole mgalithique elle-mme, on en trouve chaque pas.
On peut voir ici que les murs berb res, recoups par les murs
en pis, sont bien plus anciens qu'eux, ce qui permet de les
faire remonter une poque antrieure l'poque arabe. Car ce
193

n'est certainement pas au moment ou la civilisation romaine s'est


rpandue dans ce pays qu'on a pu y faire des constructions de
ce genre.
On trouve donc ici la superposition de trois civilisations : ber -
bre ou libyenne, romaine et arabe.
Si, de la citerne qui vient d'tre tudie, on se dirige vers le
nord-ouest, en suivant le bord d'une large olivette, on remarque,
dominant le vallon o elle se trouve et sur le plateau, une srie
de monticules coniques en pierrailles blanches qui semblent
placs intervalles peu prs gaux (7). Je n'ai pas eu le temps
de les fouiller, mais ils me semblent tre artificiels. Sont -ce des
tombes, des restes de tours comme celles qui dfendaient souvent
les castella ? Il est possible que ce soient tout simplement les
restes de gourbis ou de huttes de gardiens, quoiqu'ils n'aient
pas de dpression centrale.
Au point o le vallon s'incurve vers l'ouest, une large leve
blanche se dirige du nord au sud, passant prs de 21. C'est
peut-tre un des vestiges de la division en centuries dont je
parlerai plus loin.
On voit aussi l, prs du point o deux pistes convergent,
un rocher cylindrique perc d'un trou de mme forme et de
40 centimtres environ. J'en figurerai bientt un autre tou t pareil.
A un kilomtre en aval du point de croisement de la piste
d'Akouda et de l'oued o nous venons d'tudier ces quatre group es
de ruines on voit, dominant
la valle, une construction
assez, leve pour qu'on
puisse l'apercevoir de la
ruine n 1 (8).
La partie la plus
importante en est
constitue par deux
grandes et belles votes
en cul- de-four dont
l'extrados est revtu
extrieurement de ciment
formant un enduit de 4
centimtres d'paisseur. Les fragments de briques qu'il renferme
194

en sont extrmement grossiers.Elles ont 20 mtres de largeur en


dedans et les murs en ont 40 centimtres d'paisseur (fig. 8 et 9).
Accule l'une de ces absides est une petite vote en berceau,
beaucoup plus troite
ou plus basse, qui de-
vait recouvrir une
piscine, un couloir ou
un escalier. Au -
dessus d'une des
absides est suspendu
en quelque sorte un
mlange de mauvaise
maonnerie et de terre
qui doit provenir
de quelque addition
arabe.

Fait curieux, les angles adjacents des pieds droits des deux
votes sont spars par un intervalle, correspondant peut -tre
un angle commun en pierres de taille qui aurait disparu. En
outre les cintres, plus minces que les murs qui
les supportent, sont extrieurement en retrait sur
eux (fig. 10).
L'appareil et le mortier ne sont pas trs bons et
je me suis demand tout d'abord si ces restes n'a-
vaient pas appartenu des constructions arabes.
On pourrait, priori, se croire en prsence d'un
trifolium ayant appartenu quelque glise. Mais
l'examen des ruines de la rgion m'a montr que
ce mode tait d'un emploi habituel dans les bains.
C'est cette dernire destination que je rapportais
ces votes quand des sondages ont confirm cette opinion en me
faisant dcouvrir une grande et belle conduite en pierres de taille
1 mtre de profondeur dans l'espace qui les spare.
Entre ces absides et le versant de l'oued, vers le sud-ouest,
s'tendent plusieurs sols ciments et, du ct oppos, s'lve un
monticule blanc avec traces de murs, ce qui permet de penser
que l'tablissement bti en ce point avait au moins 120 m x60 m
de surface.
195

Revenons la voie de Carthage, au point o elle sort de l'oued


et se dirige vers le nord, en une leve bien reconnaissable, pour
atteindre les ruines, visibles de loin, dont
il a dj t question (9). C'est un fait
extraordinaire que de voir, dans les envi-
rons de Sousse, une ruine dont les murs
ont plus de deux mtres de hauteur. Elle
forme un monticule de 40 mtres de dia-
mtre et, comme c'est la rgle, ce qu'elle
offre de mieux conserv fait partie de
bains. Vers son extrmit sud les murs
d'une piscine s'lvent encore deux
mtres au-dessus du sol formant un rec-
tangle de 1m50 X lm75 de ct (fig. 11). Ils
sont revtus de trois couches d'enduit. La
plus profonde, de cinq centimtres d'pais-
seur, est en ciment de tuileaux trs gros-
sier. On y voit mme, mls en grand
nombre aux fragments de brique, de pe-
tites pierres bleues. Au-dessus, une autre couche, de couleur
rouge, renferme les mmes lments, mais beaucoup plus fins ;

Fig. 12. Piscine. Les marches sont au fond, droite; sur le mur ruin,
on distingue la mosaque.

ils n'ont que un deux millimtres, alors que prcdemment ils


avaient un centimtre. Enfin, la couche la plus superficielle est
196

forme par une mosaque cubes blancs revtant le fond et les


parois, bien visible dans le dessin ci-contre, et reposant sur
une couche de mortier trs blanc et trs fin de cinq
millimtres d'paisseur, qui relie galement les cubes entre eux
(fig. 12).
Les murs ont 60 centimtres d'paisseur. Ils portaient une
petite vote en ber-
ceau dont tous les
lments gisent
prs de l (fig. 13).
La paroi regardant
vers le centre du
monticule n'tait
pas ferme par un
mur. Elle prsen-
tait une entre
par laquelle on
descendait dans la
piscine l'aide
d'une ou deux
marches dont
une seule est
actuellement visi-
ble.
De l'autre ct du monticule les murs d'une pice font face
celle-ci (fig. 14). Ils sont cantonns extrieurement de deux piliers
qui en renforcent
les angles et for-
maient aussi une
ouverture regar-
dant l'intrieur.
Dans l'un d'eux on
voit une petite fe-
ntre. L'intrieur
est revtu de ci-
ment de tuileaux
trs peu pais, non
comparable celui
de la piscine. Cette
pice tait gale-
ment vote en berceau. Les pieds droits, qui ont actuellement
deux mtres de hauteur, portent l'amorce du cintre.
197

Fig. 5. Thermes privs de la ruine 3. A droite, la piste suit la voie: antique. La


pice en s a i ll i e gauche est la chambre de chauffe G. Le massif du fond, prs de
l'olivier en forme de fourche, est le bassin de distribution I. Vue avant les fouilles.

Fig. 7. Restes d'un mur d'enclos, caractriss par quelques grosses pierres de
chanage alignes. A l'horizon, dans le dveloppement de cette ligne, une dpression
blanche est le point o la voie romaine suivie par la piste monte en tranche sur le
plateau.

Fig.15. Voie entre les nos 9 et 11. On sent que le sol est en dos d'ne. Au milieu,
ligne de pierres moyennes. C'est le bord de la chausse. A gauche, ligne de plus
grosses pierres. C'est le mur de clture qui longe la voie.
198

Fig. 16. Voie romaine au S.-E. de 11. Bordure coupe par la piste
de Sousse Akouda.

Fig. 17. Bordure de la voie romaine.

Fig. 18. La voie romaine en dblai avec les deux murs rocheux la bordant.
199

Entre les deux constructions l' minence conique est forme


par de grosses masses de blocage croules et en grande partie
enterres. Mais on distingue trs nettement qu'elles ont appar -
tenu une vote en cul-de-four, comme celles dont il a t pr-
cdemment question, fait confirmant ce que j'ai dit de l'emploi de
ces demi-coupoles dans les bains antiques ( 1). Plusieurs sondages
m'ont permis de dcouvrir l'hypocauste et les suspensurae. Des
mosaques existent partout 1m30 de profondeur environ. L'une
d'elles est tablie sur les tuiles de l'hypocauste ( 2). Une autre est
remarquable par une large bande entoure de rinceaux. Je ne
serais pas tonn qu'on dcouvrt quelque mosaque sujet dans
l'une des pices que je n'ai pu dgager, faute de temps.
Vers l'est un large trou conique, trs profond, indique l'empla-
cement du puits, maintenant effondr, qui alimentait ces thermes.
Sur les bords du cne, plusieurs murs rectilignes portent un
enduit de chaux de huit millimtres d'paisseur. J'y ai trouv une
pierre de lave en forme de brique. Enfin, en plusieurs points on
voit encore des pierres de taille. Les chercheurs de matriaux ne
semblent pas avoir puis ces restes. On pourrait peut -tre y faire
des recherches assez fructueuses.
La voie antique change un peu de direction partir d'ici et
s'inflchit vers un point qui semble situ 40 mtres l'ouest
du marabout de Sidi-Sahloul.
La chausse, d'abord compltement bouleverse par les che r-
cheurs de pierres, est ensuite coupe par un jardin. Mais, au del
de celui-ci, elle est remarquablement conserve (10). Le relief en
est parfaitement visible jusqu' hauteur du marabout. C'est le
point o l'existence des deux murs qui la bordent appara t le
plus nettement, comme j'ai pu le faire constater aux membres de la
S. A. S. qui ont visit ces restes avec moi.
J'ai vu ici que ces grosses pierres align es et places de dis-
tance en distance n'taient pas la bordure de l'empierrement,
mais bien les restes de murs d'enceinte de proprits (fig. 15,
page 197).
Je ne serais pas tonn qu'il y ait eu Sidi-Sahloul un carrefour

(1) Je pense maintenant que les ruines de Sidi -Kantaoui, dont les votes abside
m'avaient tant frapp, doivent tre celles de bains antiques.
(2) Elle s'est dforme sous le poids des terres. Les membres da la S. A. S. qui
ont assist au sondage que j'ai fait excuter devant eux en ce point se rappellent cette
mosaque gondole et sonnant le creux.
200

et un tablissement antique de quelque importance. Mais les


restes y sont peu visibles de loin et rendus d'un accs difficile
par la prsence de familles arabes habitant autour du marabout.
La chausse antique est ensuite interrompue par les planta-
tions sur une longueur d'une centaine de mtres et il est pro -
bable que d'ici peu de temps elle disparatra en ce point o l'on
commence crer de nombreux jardins et o les chercheurs de
pierres s'attaquent aux matriaux de la route.
Nous reviendrons d'ici la piste d'Akouda, l'endroit o elle
passe auprs d'une fesguia qui la signale de loin par le dme
pointu, en forme de koubba, de sa vote. Ce rservoir, dans
lequel on descend par quelques marches, est une citerne romaine,
vote en berceau, que les musulmans ont rpare.
La piste longe ensuite un jardin tout rcemment cr. C'est le
premier effort que, depuis longtemps, les indignes aient tent
sur ce plateau pour lui rendre son antique fcondit, et ce titre
il mrite qu'on l'observe. Il et t trop audacieux de crer une
telle plantation en plein milieu de la surface dsole et il s'agit
tout simplement ici d'un propritaire agrandissant l'olivette qu'il
possde la limite des jardins bordant le plateau. Il a t out
d'abord fait appel aux chercheurs de pierres qui ont enlev tous
les gros blocs de la surface, en sorte qu'actuellement son embryon
de jardin n'offre plus qu'une terre rougetre et meuble. Il a
entour cette surface d'un foss dont la terre, rejete l'intrieur,
forme une tabia dans laquelle il plantera des cactus. Enfin, il a
fait creuser un puits et construire un bassin avec lesquels il arro-
sera les jeunes plants d'oliviers puis, quand ceux-ci n'auront plus
besoin d'irrigation, pour ses lgumes.
Voici donc un coin de ce plateau transform et qui, dans quelques
annes, aura repris peu prs l'aspect qu'il offrait lors de la
paix romaine . Nul doute qu'on ne puisse agir de mme partout
et que les indignes ne reprennent les traditions de leurs
anctres.
Au del des plantations de Sidi Sahloul, la chausse se prsente
avec les mmes caractres que prcdemment : empierrement et
murs qui la longent sont trs reconnaissables. Puis elle coupe
obliquement la piste d'Akouda. Les deux lignes de gros cailloux
qui la bordent ont t laves ici par l'eau qui ruisselle dans les
pistes arabes (11). Pas une herbe, pas une motte de terre ne les
recouvre. Et la voie est si remarquable, si apparente, que je me suis
201

toujours tonn qu'archologues ou topographes ne l'aient pas


signale. Elle est appele d'ailleurs disparatre avant peu de
temps, les chercheurs de pierres s'en approchant de plus en plus.
Il est bien craindre que la photographie ci-jointe (fig. 16) soit le
seul vestige qui tmoigne de l'tat de conservation dans lequel je
l'ai trouve. J'ai pu en prendre la largeur, qui est de 6 m 75 ( 1). Vers
l'est, on remarque quelques murs effacs, restes de constructions
romaines, et une dpression conique, peu marque galement, qui
est le dernier vestige d'un puits ou d'une citerne antique (12).
Dans ce point plusieurs pierres semblant au moins quarries
forment plusieurs alignements. Bien longtemps j'ai hsit leur
donner une attribution. C'est seulement aprs de nombreuses
observations que j'ai pu les considrer comme les pierres de
chanes de murs d'habitations. On se trouve ici la bifurcation de
la piste, qui envoie un embranchement vers Hammam-Sousse,
dont la proximit exprime la disparition de ces ruines.
La voie de Carthage se dirige, trs reconnaissable, vers le N.-O.,
flanc de coteau, jusqu' une olivette qui la coupe sur une assez
grande longueur. Aussi n'y est-elle plus souligne par une piste
de quelque importance, et disparait-elle elle-mme sur un par-
cours d'environ 200 mtres.
An milieu de l'olivette on voit deux massifs de maonnerie
aligns dans la direction de la voie (13). Ce sont les restes de
deux tombes ou de deux bassins; je n'ai pas eu le temps d'y
donner les quelques coups de pioche ncessaires pour les dtermi-
ner. Il y avait donc ici un tablissement antique important. Mais
il m'a fallu de minutieuses recherches pour y retrouver deux
pierres de chanes alignes dans la direction du mur auquel
elles appartenaient. Il n'en reste rien de plus.
Au del de l'olivette, la voie rapparat trs nettement avec
les murs qui la bordaient (fig. 17, page 198). Mais sur une longueur
d'environ 40 mtres, les chercheurs de pierres en ont
enlev la bordure, dont la place est indique par une ligne de
trous d'extraction.
A quelques mtres vers l'est, sur le versant oriental du vallon
o passe la piste d'Akouda, on voit un monticule blanchtre de

(1) C'est exactement la largeur de la voie de Carthage Thveste, que j'ai tudie
galement. V. CARTON. Dcouvertes pigraphiques et archologiques faites en
Tunisie, p. 36.
202

prs de 50 mtres de longueur (14). J'y note 4 ou 5 bassins


enduit en ciment de tuileaux, et dont le fond est des niveaux
diffrents. Ils devaient videmment appartenir des bains. L'un
d'eux a la forme d'une vritable baignoire, parfaitement conser -
ve, de 2 m 50 de longueur sur 50 centimtres de largeur. A ct
d'elle un autre rservoir, avec solin, avait plus de 2 mt res de
ct. Comme partout, d'ailleurs, il ne reste de la plupart de ces
constructions que le sol ciment. Un peu plus loin, on voit l'orif ice
d'une citerne, enduit de ciment de tuileaux. Enfin, fait trs
extraordinaire, sur le plateau plusieu rs belles pierres de taille
retires du sol ont t jusqu'ici respectes par les chercheurs de
pierres. L'une d'elles a une forme particulire. C'est une espce
de bouchon constitu par deux cnes se touchant leur base. Ce
devait tre la clef de vote d'un dme ou d'une abside.
A 20 mtres au nord de cette importante villa, deux
petits massifs de maonnerie aligns sont les restes de tombes en
forme de caissons, qui semblent invioles. On voit que
chacune des villas de ce plateau devait avoir, en dehors de son
bassin d'irrigation, de ses jardins et de ses bains, une
petite ncropole.
De nombreuses tranches ont t faites le long de ces btiments
pour en extraire les pierres. Dans l'une d'elles, j'observe un mur
de blocage, bti la romaine, avec chanes verticales. La tranc he
s'arrte une de ces pierres de chane en sorte que celle -ci,
tout fait dgage d'un ct, merge peine du sol de l'autre.
Elle offre ici un aspect tout fait semblable celles qui, en cer -
tains points du plateau, forment des alignements et dont la nature
m'avait, jusqu'ici, chapp.
J'ai donc pu dsormais, partir de cette petite dcouverte,
diviser trs nettement en deux catgories ces lignes pierres.
Quand elles sont plus ou moins plates et disposes suivant une
ligne parallle leur plus large bord vertical, ce sont les restes
de murs berbres. Quant, au contraire, elles sont section horizontale
carre et places perpendiculairement la ligne qu'elles
forment, ce sont les chanes d'un mur romain qui a pu appartenir
une habitation ou un simple mur de clture.
Au sud de cette ruine, on voit encore, ras de sol, plusieurs
murs de blocage et, un peu plus loin, auprs d'une olivette, une
dpression circulaire dont les bords nettement taills pic
entourent un olivier. C'est le vestige d'un silo ou d'un e citerne.
Au nord, et sur le mme versant, au voisinage d'un monticule
203

blanchtre et couvert de tessons, s'ouvre un puits antique, carr,


de 2 mtres de ct, que les Arabes viennent de curer. L'aspect
de la maonnerie ne permet pas de douter que l'on se trouve en
prsence de murs romains et cependant on ne voit, aux alentours,
aucun reste de ruines. Seulement, le sol y est couvert de tessons
et il y a tout prs d'ici deux fours chaux. Aprs d'assez longues
recherches, j'ai pu voir, dans un ravin et aprs une pluie, entre
les deux fours, affleurer un bout de mur romain (15). On voit
combien il est difficile de retrouver, dans certains cas, les restes
de grands tablissements et que nombre de ceux-ci ont trs bien
pu disparatre sans laisser de traces. Cet ensemble de vestiges
antiques devait avoir au moins 150 mtres de longueur.
Revenons au point o nous avons laiss la voie antique. On
aperoit trs nettement, d'ici, le plateau o s'levait autrefois
Gurza, ou du moins un centre antique trs important auquel,
mon avis, doit tre attribu ce nom. Toujours bien visible, la
chausse se rapproche insensiblement du versant oriental d'un
large vallon plant d'oliviers dans lequel elle descend ensuite,
tantt pose sur le talus et tantt resserre entre les deux bords
d'une tranche creuse dans la roche par l'homme pour en rgu-
lariser la pente (fig. 18, page 198). En deux points, elle passe ainsi
au milieu de petites murailles rocheuses. La largeur de cette
tranche, qui est de 8 mtres, correspond bien celle de l'em-
pierrement que j'ai indique plus haut.
La voie laisse droite, sur le bord du plateau, une cavit
section rectangulaire de 40 centimtres de longueur sur 25 centi-
mtres de largeur semblable celles que j'ai releves sur les
bords de l'oued Blibane ; puis elle atteint, en mme temps que
le fond du vallon, l'une des ncropoles romaines de Gurza.
Nous cesserons de la suivre partir d'ici. Mais avant de l'aban-
donner, je dois signaler, sur la pointe du plateau qui domine la
ncropole, l'est, des restes de murs et des hypoges appartenant
galement la ville antique.

Dr CARTON, Prsident,
Membre non rsidant du Comit des Travaux
Historiques et Scientifiques.
(A suivre.)
EXTRAITS DES PROC S-VERBAUX DES RUNIONS

Sance gnrale du 17 Novembre 1904


M. le Prsident donne lecture d'un extrait de la lettre de M. l'Abb Ley-
naud relative aux fouilles des catacombes d'Hadrumte.
Sousse, le 17 novembre 1904.
MONSIEUR LE PRSIDENT,
Par une heureuse concidence, le 17 novembre que vous avez fix pour
la runion gnrale est le premier anniversaire du commencement de nos
fouilles aux catacombes d'Hadrumte.
C'est donc pour moi un vrai bonheur de pouvoir vous dire, en quelques
mots, ce que nous avons fait avec le prcieux concours de notre chre Socit
Archologique.
Comme nul ne l'ignore, c'est grce aux subsides de cette Socit, et la
main-d' uvre militaire, si aimablement accorde par M. le colonel Calley de
St-Paul, commandant le 4e rgiment de Tirailleurs, que nous avons pu entre-
prendre et poursuivre sans relche une uvre aussi considrable et aussi
importante.
Aussi bien, laissez-moi vous renouveler aujourd'hui, en mon nom et en
celui de mon savant collaborateur, notre distingu Prsident, laissez-moi vous
prier aussi de transmettre tous nos chers collgues la plus sincre expression
de notre vive et profonde reconnaissance.
Ce que nous avons fait est l'honneur de la S. A. S. tout entire; je
tiens l'affirmer ici.

Jusqu' ce jour nous avons dcouvert 41 galeries, nous en avons dblay


compltement 22; je devrais dire : presque compltement, puisqu'il ne nous
a pas t possible encore de fouiller le sol qui est rempli de tombeaux. Nous
avons dcouvert plus de trente inscriptions de diverses poques peut-tre.
Par mesure de prudence, nous avons tay les votes aux endroits les
plus dangereux. De plus, plusieurs loculi ont t trs soigneusement ouverts
par l'actif surveillant des fouilles, le sergent Moreau, du 4e Tirailleurs, et gar-
nis d'une vitrine pour permettre aux trs nombreux visiteurs de voir les cada-
vres endormis dans leur couche de pltre. Nous nous sommes empresss aussi
de consolider srieusement la vote de la crypte d'entre et de rparer le mur
principal de la chambre funraire, si curieuse, et si remarquable par sa rosace
et les motifs d'architecture qui ornent son plafond.
208

Toutes ces dpenses, ainsi que les gratifications donnes chaque semaine
aux militaires, ont t payes, avec les frais d'achat de couffins et de cordes,
par la S. A. S.
Il y a eu d'autres dpenses, celles de l'clairage pour les fouilles, de la
pose de la premire porte; j'ai tenu m'en charger au nom de la communaut
chrtienne de cette ville.
Mais nous pouvons ajouter que c'est peu de frais que nous avons donn
la ville de Sousse et l'archologie les plus grandes et les plus belles
catacombes africaines.
Elles ont dj attir l'attention des savants et des touristes, comme celle
des pouvoirs publics. Des ministres et anciens ministres, des gnraux, M.
le Rsident Gnral Pichon, M. Gauckler, Mgr Tournier, le R. P. Delattre,
cent autres personnages les ont visites avec intrt.

..

Voil un an que je consacre ces catacombes, de concert avec notre cher


Prsident, une grande partie de mes journes. Bientt, M. Gauckler va me
renouveler l'autorisation de fouiller encore une anne.
Je me permets de solliciter, cet effet, de nouveaux crdits de la S. A. S.
et en retour, je la prie d'agrer l'assurance de mon absolu dvouement. Je
ne travaille que pour le bien de ce pays, et pour l'honneur de notre chre
Socit.
Dans ces sentiments, je vous demande, cher Monsieur le Prsident, de
vouloir bien agrer la nouvelle expression de ma considration la plus distin-
gue.
Sign : A. - F. LEYNAUD.

M. le Prsident donne lecture de l'extrait d'une lettre adresse M. le


Dr Carton par M. Saladin, membre correspondant de la S. A. S., au sujet d'une
note de M. le docteur Deyrolle sur les chapiteaux avec croix Monastir et
Kairouan (page 37, 1 e bulletin 1903). Le chapiteau de Sidi-Okba (grande
mosque de Kairouan) est un chapiteau byzantin dont Saint-Vital de Ravenne
Saint-Marc de Venise, etc. contiennent des types .
209

Sa n ce g n r a le d u 2 2 D ce mb r e 1 9 0 4

Correspondance. M. le Prsident donne lecture de la note suivante :


M. le docteur Carton fait savoir que M. Roy, Secrtaire gnral du Gouver-
nement Tunisien ayant examin la monnaie publie par M. le lieutenant
Jouanne dans le Bulletin de la S. A. S. n 2 de 1903 (page 212), dit avoir
trs bien lu au revers le nom de Tlemcen, lieu o elle a t frappe.
La Socit adresse tous ses remerciements l'minent orientaliste qu'est
M. Roy pour avoir bien voulu lui tmoigner, en fournissant ce renseignement,
l'intrt qu'il porte ses travaux (1).
M. l'abb Leynaud fait une communication trs intressante au sujet
des Catacombes.
En quelques mots, il fait l'historique des fouilles qu'il dirige avec M. le
docteur Carton depuis plus d'une anne et, l'aide d'un plan, initie l'auditoire
aux belles dcouvertes faites au cours de ces fouilles qui ont permis de dgager
environ 650 m. de galeries et de mettre jour plus de 2.300 loculi prsentant
de nombreuses inscriptions dont l'une revt un caractre particulier de raret.
Cette inscription indique que le loculus sur les tuiles duquel elle est grave
contient les cendre d'un habitant d'Ancusa (2).
Le but principal de la communication de l'abb Leynaud tait de faire part
la S. A. S. de la belle dcouverte faite il y a quelques jours aux catacombes
et consistant en un tombeau situ au fond d'un silo et recouvert d'une magnifique
plaque de marbre de grande dimension sur laquelle est grave une inscription
de toute beaut.
Un membre de la S. A. S. signale qu'entre Sbeitla et Djilma, au cours
de travaux excuts par des arabes, il a t dcouvert de nombreux tombeaux
et quelques dbris de statues.
Le Prsident donne lecture de la lettre de M. Chevy demandant :
1 Que le bureau veuille faire allouer M. Bouby un premier crdit de
25 francs et faire les dmarches ncessaires auprs des autorits du pays
pour procder des fouilles dans les ruines romaines situes dans un terrain
habous prs de l'usine Bouby ;
2 De l u i allouer un premier crdit de 50 francs et de faire les dmar-
ches comme ci -dessus pour excuter des fouilles dans le cimetire musulman
dsaffect, en un point o il croit se trouver le thtre de l'antique Hadru-
mte.

(1) M. le lieutenant Jouanne a adress dernirement la Socit, sur cette mon-


naie, une lettre complmentaire dont il sera donn connaissance l'une des sances
gnrales.
(2) Ville ancienne situe entre Thysdrus et Hadrumte et non identifie.
210

Aprs dlibration, le bureau accorde M. Chevy 50 francs et M. Bouby


25 francs pour faire des sondages aux endroits indiqus et dcide que les
dmarches ncessaires seront faites auprs des autorits pour procder ces
sondages.
M. l'abb Leynaud fait part de la dcouverte d'une inscription sur
marbre, trouve Sousse derrire la proprit de M. le Dr Lambert.
Dimensions de la plaque de marbre : longueur, 0m30 ; largeur, 0m25;
paisseur, 0m02. Hauteur des lettres : 0m005.
.
M ANIBv s
.
DIIs
. .
P POMPON IVS FOR TV
. . . .
NATVS H S E
. .
VIX ANN X X X III
CORNELIA MAXIMA
CON I VGI PII SSIMO
F E C I T
Diis. Munibus. P. Pomponius. Fortunatus H (ic) s (itus) e (st). Vix (it)
ann (is) XXXIII. Cornelia Maxima conjugi piissimo fecit (1).

NOTA. Nous tenons informer nos confrres que le prochain numro du


Bulletin comprendra tout ou partie d'un rapport sur les fouilles si intres-
santes que M. Robin, correspondant de notre Socit, excute l'Enfida.
C'est, en effet, sur les conseils et les indications du Prsident de la Socit
et sur les promesses d'un lger subside pour les recherches prliminaires que
notre confrre a commenc les touilles de la basilique d'Upenna o MM Cagnat
et Sadoux avaient antrieurement tudi et dblay une piscine.
La S. A. S., dont tous les fonds disponibles sont actuellement employs
au dgagement des catacombes, n'a, son grand regret, pas pu faire davantage.
Elle sera heureuse de pouvoir, grce aux brillantes dcouvertes de M. Robin
et la savante tude qu'il donnera ici mme, montrer une fois de plus les
rsultats intressants que donne non-seulement sa propre activit, mais l'action
morale qu'elle exerce dans la rgion.

Erratum au Bulletin n . 2 de 1903, page 217 :


Le dernier alina du compte rendu de l'excursion Sousse a trait, non
la ville entire, mais la mosque dont on voit l'intrieur du haut de la tour
du Ksar.
P. MANIGOLD,
Secrtaire gnral.

(1) Cette inscription est actuellement dpose au Muse de Sousse.


EXCURSIONS ET PROMENADES

El-Djem (Thysdrus)

Le dimanche 27 mars au soir, en arrivant auprs du clbre amphithtre,


les excursionnistes ont la bonne fortune d'assister l'embrasement du mur
extrieur du monument, produit par un immense feu qu'allument les indignes.
C'est jour de fte chez les musulmans et, fait intressant noter, les
membres de la Socit ont constat, au cours des rjouissances auxquelles ils
ont assist que, sans doute par une curieuse survivance de coutumes, les indi-
gnes se dguisent ce jour-l.
Les auteurs qui ont crit sur les ruines d'El-Djem, en ces derniers temps,
y ont signal un certain nombre d'difices : le grand amphithtre, un petit
amphithtre, un cirque, des citernes publiques, une citadelle, une double
enceinte, et le clbre chapiteau colossal. Je dirai de suite, en ce qui concerne
l'enceinte et la citadelle, que je n'ai pu en relever aucune trace, ce qui ne m'a
surpris d'ailleurs. Car on sait combien d'difices l'imagination de Daux, qui
est le seul les citer, a vus dans les emporia d'Hadrumte, Thapsus et plusieurs
autres centres antiques. Tout dernirement les auteurs de latlas archologique
ont signal ici, non plus deux, mais un seul amphithtre, et le thtre.
J'avoue encore n'avoir rien rencontr qui ressemblt ce dernier. Enfin, le
service des Travaux Publics a, dans ces dernires annes, dgag des thermes
dcouvert un gout, et il vient de mettre au jour de magnifiques mosaques
dans un quartier travers par la nouvelle route des Souassi.
Nous nous dirigeons tout d'abord vers le petit amphithtre; il n'en reste
plus de murs apparents, en dehors de ceux que des sondages ont mis jour.
Le grand axe a environ 155 mtres de longueur, le petit 120 mtres et l'arne
40 X 75 (1). Il semble trs tonnant qu'il y a i t eu en mme temps deux amphi-
thtres El-Djem, surtout en raison des grandes dimensions de l'un d'eux,
qui devait tre largement suffisant. On ne peut pas admettre non plus qu'ils
aient t construits pour que l 'u n remplat l ' a u t r e : si le petit amphithtre
avait t difi le premier, on l'et dtruit pour en utiliser les matriaux lorsque
le grand fut lev, et les sondages montrent qu'il n'a pas t l'objet d'une
destruction systmatique. On s'explique encore moins qu'on l'ait bti aprs
le grand, car il eut t tout fait inutile. Il parait donc certain que ces deux
monuments ont du coexister, mais avec des destinations diffrentes. C'est

(1) Ces mesures sont dues M. Maillet, qui a bien voulu me les adresser.
212

probablement une considration de ce genre qui a pouss certains auteurs


voir ici un thtre. Mais il n'y a pas de doute ce sujet. Un simple coup d' il
montre qu'on est en prsence d'un amphithtre. On ne peut donc, mon
sens, trouver qu'une explication cette coexistence. C'est que le plus petit des
deux monuments servait aux naumachies. Il aurait fallu, pour faire ces
dernires dans le Colyse, une bien trop grande quantit d'eau, et nous savons par
des inscriptions que le prcieux liquide tait, Thysdrus, assez abondant
pour pouvoir alimenter une arne de petites dimensions. Les fouilles que l'ont
pratiquera ici confirmeront peut-tre, un jour, ce qui n'est qu'une simple
hypothse.
Du petit amphithtre, nous nous dirigeons vers les thermes et, un peu
avant d'arriver ceux-ci, nous admirons le superbe dallage d'une voie antique.
Les pierres, bords peu rguliers, larges de 50 centimtres en moyenne, carres
ou rectangulaires, sont disposes obliquement par rapport l'axe du chemin,
fait que j'ai dj observ Dougga, en avant du Dar-El-Acheb. De distance
en distance, on peut par des regards, voir la section d'un gout plac
sous la voie et qui, comme elle, reliait le thtre aux thermes.
Ce dernier monument a t dgag par le service des Travaux Publics. Nous
y admirons de jolies mosaques ornementales, les piscines carres en cubes
blancs, avec un bandeau multicolore courant autour du point atteint par la
surface de l'eau mode de dcoration original que nous avons dj relev
dans une promenade archologique, aux abords du champ de courses de Sousse.
Une base qui a peut-tre port une statue de la Victoire, trouve ici, est atroce-
ment mutile. D'ailleurs tout le monument a souffert normment depuis son
exhumation. Je ne dcrirai pas ces thermes, dont le plan a t remis depuis
longtemps au Service des Antiquits, qui doit les publier.
Nous nous dirigeons ensuite vers la route des Souassi, nouvellement difie
par les Travaux Publics. A chaque pas, dans les talus et sur le sol, apparaissent
d'autres mosaques multicolores. Nous remarquons l'ouverture de plusieurs
citernes en forme de carafe, que l'on est en train de vider. De presque toutes
on retire de la terre une espce de tuf renfermant d'innombrables fragments
de charbon. Il serait intressant de savoir exactement quel niveau, dans
les remblais qui remplissent la cavit, ils ont t trouvs. Mais cette constatation,
plusieurs fois rpte par nous, permet de penser que les anciens Africains
usaient dj d'un mode employ de nos jours, en dsinfectant l'eau de leurs
citernes l'aide de charbon de bois.
Parmi les pierres disposes le long de la route, nous remarquons une
tablette en calcaire bleu, haute de 62 centimtres, large de 50 centimtres d'un
ct et de 47 centimtres de l'autre, orne de moulures sur un de ses bords. Le
profil de celle-ci rappelant celui du dos d'un dauphin, la ressemblance a t
complte par l'addition de quelques traits indiquant un il, une oue et la
queue. Cela m'a beaucoup rappel les appuis des latrines de Timgad.
Mais nous voici en un point o les dbris exhums sont de dimensions
213

imposantes et d'une relle richesse : corniches normes, ornes de belles


sculptures, colonnes mergeant des talus, etc. En explorant les alentours,
nous trouvons un double alignement de magnifiques colonnes en marbre, couches
sur le sol auprs de leurs bases. Elles constituent videmment les restes
d'un portique, et nous sommes tous d'avis qu'il y aurait une fouille importante
faire en ce point. Suivant toujours cette route, nous arrivons la hauteur du
cirque, au del duquel se trouve la ncropole. La plupart des tombes y sont des
caissons demi-cylindriques, surmontant un sarcophage en tuiles chevrons.
L'une d'elles, ouverte noire intention, a donn trois beaux unguentaria en
verre, un miroir circulaire en bronze de 10 centimtres de diamtre, orn sur
une de ses faces de traits concentriques et bord d'une ligne de trous, et deux
lampes, dont l'une, queue perfore, offre le buste de Jupiter enlev par l'aigle
aux ailes ployes. Sur le fond de l'autre, dont le reste est introuvable, ou lit
l'estampille;

1
M NOVI IVSTI

Le cirque, ou plutt l'hippodrome, est un difice des plus remarquables et


de trs grandes dimensions. Les cloisons qui portaient les gradins en sont
encore visibles en plusieurs points, et il reste aussi des parties intressantes de
la spina, qui formait un massif en blocage pais d'environ deux mtres. On
sait que dans l'hippodrome de Thugga je n'ai rien retrouv de la spina, en
dehors de ses deux extrmits.
Nous sommes ici 1.500 mtres du grand amphithtre et, sur tout le
trajet que nous venons de faire, nous avons relev les restes de rues, d'difices,
d'habitations. Le centre antique de Thysdrus, s'il fut un moment donn
une localit pauvre, humilis locus, dut prendre ultrieurement une relle impor-
tance.
En revenant vers l'amphithtre, nous voyons, dans un champ, 1 mtre
de profondeur, un magnifique dallage dont les lments ont la forme de rec-
tangles trs rguliers. Cette voie sert actuellement de carrire. Avant de visiter
le clbre monument nous nous rendons auprs du grand et galement fameux
chapiteau en marbre blanc, haut de 2 mtres, qu'ont admir tous ceux qui
connaissent El-Djem. A quelles injures cette superbe sculpture n'a-t-elle pas
t soumise depuis qu'on l'a dcouverte ! On m'assure qu'il y a quelques annes
encore, elle possdait ses angles, ses feuilles d'acanthe intactes, et je ramasse
moi-mme, son pied, un fragment d'ove tout rcemment dtach de son
abaque. Encore un monument qu'il et t prfrable d'enfouir ou de ne pas
dcouvrir !
Le temps nous presse et nous n'avons pas le temps de rechercher ou de
visiter les citernes publiques d'El-Djem. D'ailleurs, aucune des personnes
capables de nous renseigner, qui habitent Sousse, ne se souvient qu'il y ait des
214

citernes importantes ici. Celles que me signale M. Maillet sont situes 80


mtres environ vers le N.-O. et dans le prolongement de la double range de
colonnes dont il a t question. Il y en a trois, actuellement pleines d'eau, qui
ont 6 mtres de profondeur, et un diamtre moyen de 3 mtres. A ct d'elles
est un bassin rectangulaire de 6 mtres de longueur, 3 mtres de largeur et
2 mtres de profondeur. Ce ne sont videmment pas des citernes publiques.
Mais j'apprends un dtail intressant : leur propritaire actuel retire de la
vente de l'eau qu'il y recueille prs de 1.200 francs par an. En t, l'eau vaut
El-Djem deux sous la gargoulette ! Voil un curieux exemple de l'utilisation
des anciens monuments que j'ai depuis 18 ans prn tant de reprises (1).
Combien nous sommes loin de l'poque o l'eau coulait flots dans la cit romaine !
En revenant vers l'amphithtre, nous achetons un grand nombre de
lampes romaines aux indignes qui exploitent depuis des annes la ncropole,
et quelques autres objets. Il n'y en a d'ailleurs aucune de fausse, quoiqu'on ait
dit que ces contrefaons soient frquentes ici. Beaucoup sont raccommodes ou
peintes rcemment, mais antiques cependant. D'ailleurs, pourquoi les indignes
iraient-ils acheter ces objets qu'ils peuvent si facilement retirer du sol ?
Deux seuls mritent dtre signals :
L'un a t acquis par M. le Dr Rouquette qui a bien voulu m'en envoyer
la description suivante : Monnaie punico-romaine, en bronze, de Cossura, reprsentant
une tte de femme voile, image du gnie de l'le, couronne par une victoire. Au
revers, on lit le mot : Cossura au-dessous de l'emblme triangulaire de Tanit, dans
une couronne de lauriers.
L'autre est un joli plat de 17 centimtres de diamtre, couvercle rouge
verniss, trs fin, fond plat et bord vertical de 2 centimtres de hauteur,
pied circulaire galement haut de deux centimtres. Le bord est orn extrieurement
de mascarons alternant avec une rosace et une guirlande. Le fond offre,
l'intrieur, des lignes concentriques et, dans un pied de 22 centimtres
de longueur, une estampille :

2
CAPRIM
Deux fragments d'inscriptions sur marbre bleu prsents par les indignes,
et dont l'un est offert la collection d'tudes par M. Rietmann, portent quelques
lettres. On lit sur le premier :
3

INOV
....... R T E

(1) Dr CARTON. De lUtilit des Etudes archologiques au point de vue de la colonisation


dans lAfrique du Nord, Paris 1889.
215

Hauteur du fragment, 17 centimtres ; largeur en haut, 11 centimtres ;


paisseur, 0m03. Hauteur des lettres, 3 centimtres.
Sur la seconde ligne, entre deux moulures :

4
BONIVS.N

Longueur, 8 centimtres; hauteur, 4 centimtres; paisseur, 2 centimtres.


Hauteur des lettres, 3 centimtres.

Je dirai peu de choses sur l'amphithtre, dont beaucoup ont parl, mais
que personne n'a cependant tudi compltement jusqu'ici. Le seul travail
important qui ait t fait sur lui est d Trmeaux (1). Il y aurait, d'ailleurs,
d'aprs plusieurs personnes comptentes qui assistaient l'excursion, quelques
inexactitudes dans ce travail. L'ellipse de l'amphithtre ne serait pas aussi
rgulire qu'il l'a indiqu. En outre, les arcades qui ornent si gracieusement
le mur extrieur sont loin d'avoir toutes des dimensions gales, ou
symtriquement diffrentes.
Les chapiteaux composites qui ornent les colonnes de ce mur sont traits
sommairement leur partie infrieure, les feuilles d'acanthe ne prsentant
aucune trace de nervures, tandis qu' ct le caulicole est fouill. Peut-on en
conclure qu'ils sont rests inachevs?
Mais, ainsi que la remarque M. le vice-prsident Gresse, ce qui est aussi
trs surprenant, c'est de voir cette montagne de pierres de taille dans un pays
o le sol ne peut en procurer aucune.
C'est avec un profond sentiment de tristesse que les excursionnistes ont
constat l'tat de dlabrement et d'abandon dans lequel se trouve le monument.
Les indignes en souillent tellement le sol qu'il est impossible de circuler sous
les galeries en bien des points. A dfaut d'autres travaux, il semble qu'une
barrire devrait au moins empcher d'y pntrer librement.
Il a aussi sembl la plupart d'entre nous que si la restauration en serait un
travail norme, ce n'est pas une raison pour empcher d'y faire des travaux
de consolidation tout fait urgents et peu coteux, en somme. C'est ainsi,
pour n'en citer qu'un, que les piliers qui forment les arcades du mur extrieur
ont t, leur partie infrieure, dpouills de leurs pierres et que cet norme
mur semble port par des colonnes surplombant, dont la partie infrieure et la
base ont disparu.
Ce serait un travail assez facile que de combler ces vides et de rendre
tout le revtement extrieur de l'difice l'appui qui lui manque maintenant.
Il est rellement prodigieux de voir ces pierres suspendues ainsi grce

(1) Et ce travail n'est prcisment pas cit dans l'Atlas archologique, ni par les
archologues africains, M. Saladin seul lui rend hommage dans une de ses missions.
216

l'appui qu'elles se prtent mutuellement. Mais le jour ou l'une d'elles partira, soit
qu'elle se dtache, s'effrite ou s'miette sous l'norme poids qu'elle supporte, ce
n'est pas un dlabrement partiel qui se produira probablement, mais un
effondrement en masse.
Voil certainement un exemple de la ncessit qu'il y aurait appliquer la
conservation des monuments une partie des fonds qu'on emploie exhumer du sol
des difices que l'on est contraint d'abandonner ensuite aux dprdations.
Jadresse, en terminant, tous les remerciements de la Socit M. Maillet, qui
a bien voulu mettre la disposition des excursionnistes sa parfaite connaissance
des ruines et les guider avec la plus grande amabilit.
C'est M. Manigold que la S. A. S. doit l'organisation d'une excursion qui aura
t l'une des plus fructueuses et des plus agrables de l'anne.

DOCTEUR CARTON,
Prsident.
TABLE DES MATIRES

PAGES
Listes des membres de la socit.. 3
Distinction honorifiques accordes aux Membres de la Socit. 10
Sance solennelle du 29 fvrier 1904.. 13
Extraits des procs verbaux des runions (1er semestre). 24
- - - (2em semestre) 207
Excursions et promenades :
Monastir (Docteur Carton).. 39
Haouanet de llot de la Quarantaine (Docteur Deyrolle)... 44
Thapsus (Docteur Carton)... 47
El-Djem (Docteur Carton)... 211
Liste des objets entrs au Muse de Sousse. 51
Catalogue de la collection dEtudes 52
Travaux hydrauliques :
Aqueduc de Sidi-er-Reis (Docteur Deyrolle).. 55
Aqueduc de Hammam-Corbeus (Docteur Deyrolle)... 55
Aqueduc romain de lOued-Blibane (Docteur Carton) 55
Description de quelques objets du haute curiosit faisant partie de la
Collection de M.Jules Renault (J. Renault). 59
Inscription de Carthage (R. P. DELATTRE) 68
Notes sur quelques haouanet tunisiens (Docteur Deyrolle) 80
Etude sur une ncropole prsume de lpoque romaine et tombes
sans mobilier (P. Chevy). 88
note sur le tombeau dun guerrier romain dcouvert Teboursouk
(Sergent Icard). 92
Annotations lAtlas archologique de Tunisie :
Docteur Deyrolle et L. Marchal. Feuille dHammamet.. 95
Docteur Deyrolle. Carte de Menzel-bou-Zelfa, II-III-IV.. 96
Docteur Carton. de Sidi-bou-Ali Hergla... 99
Docteur Deyrolle. Feuille de Grombalia. 174
Notes historiques sur Sousse (Commandant HANNEZO) 109
Inscriptions funraires de la Colonia Thuburnica (Docteur Carton) 152
Haouanet lits et faces humaines (Docteur Deyrolle).. 154
Les mosaiques de la villa romaine de lOued-Blibane (Ct Giorgi).. 159
218

PAGES
Note sur une ncropole romaine de Sousse (Sergent Icard) 165
Tombeau prsum phnicien Bougie (A. DEBRUGE). 170
La Campagne dHadrumte (Docteur Carton) 176
Supplment au catalogue de la Bibliothque de la S.-A.-S. 204

TABLE DES GRAVURES

PAGES
Extrait des procs-verbaux des runions 34-35-37-38
Excursions et Promenades : Monastir 44
Thapsus (hors texte). 48-49
Description de quelques objets de haute curiosit.. 60-62-64
Note sur quelques haouanet tunisiens... 80-81-82-84-86
Tombeau dun guerrier romain Teboursouk 92-93
Annotations lAtlas archologique... 95-96-97-99-101
(hors texte) 104-105
Notes historiques sur Sousse 151
Haouanet lits et faces humaines. 154-155-156-157
Mosaiques de la villa romaine (reproduction en couleurs) 160-161
De lOued-Blibane (hors texte)... 162-163
Note sur une ncropole romaine.. 165-166-167-168-169
Tombeau prsum punique 171-172
Annotations lAtlas archologique.. 178
La Campagne dHadrumte (hors texte). 176-177-197-198
(en texte)... 185-186-188-193-194-195-196

IMPRIMERIE FRANAISE, PLACE PICHON - SOUSSE

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