Ken Wilber - La Physique, Le Mysticisme Et Le Nouveau Paradigme Holographique 1984

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La physique, le mysticisme et le nouveau paradigme holographique : Une valuation

critique par Ken Wilber


(Extrait de Ken Wilber Le paradigme Holographique. dition Le Jour 1984)

Nous assistons prsentement un virage


paradigmatique en science peut-tre le plus
grand virage du genre jusqu'ici. C'est la premire
fois que nous tombons sur un modle englobant les
expriences mystiques, et qui a l'avantage
supplmentaire d'tre issu de la fine pointe de la
physique contemporaine.
Lawrence Beynam (1978)

Afin de comprendre comment le nouveau paradigme scientifique s'insre dans le plan


gnral des choses, il est ncessaire en premier lieu d'avoir un plan gnral des choses. La
philosophie prenne a toujours offert un tel plan, et, pour des raisons pratiques, c'est
celui-l que j'utiliserai ici.

Dans ce qui suit, je vais rsumer la philosophia perennis laissant, toutefois, beaucoup
de dtails de ct , puis j'appliquerai cette philosophie une lucidation et une
critique du "paradigme holographique" et de la "nouvelle physique", touchant brivement
chacun des points cls en question.

Le trait le plus frappant de la philosophie / psychologie prenne est qu'elle prsente l'tre
et la conscience comme une hirarchie de niveaux dimensionnels, allant des domaines les
plus bas, les plus denses et les plus fragmentaires ceux qui sont les plus levs, les plus
subtils et les plus unitaires. Dans l'hindouisme, par exemple, le niveau le plus bas est
appel annamayakosa, ce qui signifie le niveau fait d'aliments c'est--dire le corps
physique et le cosmos matriel. Le niveau suivant est prnamayakosa l'enveloppe faite
de fonctions biologiques, de souffle vital, d'motions, de bionergie et ainsi de suite. Ces
deux niveaux, dans le bouddhisme Mahayana, sont appels les cinq vijnnas le
domaine des cinq sens et de leurs objets physiques.

Le niveau suivant, selon l'hindouisme, est le manomayakosa, l'enveloppe faite d'esprit.


Dans le bouddhisme, on l'appelle le manovijnana l'esprit qui reste (par myopie) prs
des cinq sens. C'est approximativement le niveau que nous, en Occident, appellerions
intellect, esprit, ego mental, processus secondaire, pense oprationnelle, etc.

Au-del de l'esprit, selon l'hindouisme, il y a le vijnanamayakosa (ce que les bouddhistes


appellent manas). C'est une forme trs leve de l'esprit, si leve, en fait, qu'il vaut
mieux la dsigner par un nom diffrent le plus commun tant "le domaine subtil". On
dit que le subtil inclut les processus archtypaux, les insights et les visions suprieures,
l'intuition extatique, une extraordinaire clart de conscience, une conscience ouverte qui
va loin au-del de l'ego, de l'esprit et du corps ordinaires.

Par-del le subtil, il y a le domaine causal (hindouisme: anandamayakosa; bouddhisme:


alayavijnana vici). C'est un domaine de transcendance parfaite, si parfaite qu'on dit qu'il
dpasse la conception, l'exprience et l'imagination de tout individu ordinaire. C'est un
domaine de radiance sans forme, ou d'insight radical dans toute la manifestation, de
libration extatique dans l'infini, d'clatement de toutes les frontires, leves ou
infrieures, et de sagesse et de conscience absolument panoramiques ou parfaitement
semblables un miroir.

Passant par le domaine causal, la conscience se rveille son royaume absolu. C'est la
conscience-comme-telle, et non seulement c'est la limite infinie du spectre de l'tre, mais
c'est la nature, la source et l'en-soi de chaque niveau du spectre. Elle englobe
radicalement tout, elle est sans gale. A ce point mais pas avant tous les niveaux
sont vus comme tant des manifestations parfaites et gales de ce Mystre ultime. Il n'y a
alors ni niveaux, ni dimensions, ni suprieur, ni infrieur, ni sacr, ni profane, de faon si
prosaque que le zen le dcrit ainsi:
Quand le vent fait onduler les saules
Des billes de velours volent dans l'air.
Quand la pluie tombe sur les fleurs de poiriers
Des papillons blancs dansent dans le ciel.

Le rsum ci-dessus nous donnerait approximativement Six niveaux principaux


physique, biologique, mental, subtil, causal et ultime (numrs ci-dessous dans le
tableau l). Nombre de traditions subdivisent et tendent largement ce modle (on dit par
exemple que le subtil consiste en sept niveaux). Mais part cela, il est important de
comprendre que toutes les principales traditions prennes acceptent cette hirarchie
gnrale, et la plupart d'entre elles s'entendent mme sur les dtails. De plus, cette
hirarchie n'est pas une subtilit de questions philosophiques secondaires; pour ces
traditions, il s'agit du noyau fondamental de la sagesse ternelle dans la mesure o il peut
tre verbalis. Il est juste de dire, alors, que tout compte rendu de la "vision du monde"
du mystique qui ne tient pas compte de ce type de hirarchie est srieusement inadquat.

Tableau 1
1. Physique matire / nergie non vivante
2. Biologique matire / nergie vivante, prnique, sensible
3. Mental ego, logique, pense
4. Subtil archtypal, transindividuel, intuitif
5. Causal radiance sans forme, transcendance parfaite
6. Ultime conscience-en-tant-que-telle, la source et la nature de tous les autres
niveaux.

Selon les traditions prennes, chacun de ces divers niveaux a un champ d'tude appropri.
L'tude du niveau 1 est fondamentalement celui de la physique et de la chimie, l'tude des
choses non vivantes. Le niveau 2 est le domaine de la biologie, l'tude des processus
vitaux. Le niveau 3 est le niveau de la psychologie (quand la conscience est tourne "vers
l'intrieur") et de la philosophie (lorsque elle est tourne "vers l'extrieur"). Le niveau 4,
le subtil, est le domaine de la religion des saints, c'est--dire la religion qui vise l'insight
visionnaire, les halos de lumire et d'extase, l'intuition anglique ou archtypale et ainsi
de suite. Le niveau 5, le causal, est le royaume de la religion des sages, qui ne vise pas
tant les expriences suprieures que la dissolution et la transcendance du sujet et de
l'exprience. Cette voie sage implique la transcendance de toute dualit sujet-objet dans
la conscience sans forme. Le niveau 6, l'ultime, attend quiconque franchit les barrires
finales des niveaux 4 et 5 de faon s'veiller radicalement en tant que conscience
ultime.

Remarquez que ces diffrentes disciplines, comme les niveaux qu'elles abordent, sont
hirarchiques. C'est--dire, tout comme chaque niveau du spectre transcende mais inclut
son prdcesseur, ainsi chaque tude suprieure enveloppe ses disciplines cadettes
mais pas l'inverse. Ainsi, par exemple, l'tude de la biologie utilise la physique, mais
l'tude de la physique n'utilise pas la biologie.

C'est une autre faon de dire que les niveaux infrieurs n'embrassent pas, et ne peuvent
embrasser les niveaux suprieurs. Le principe premier de la philosophie prenne est que
le suprieur ne peut tre expliqu par l'infrieur ni dcouler de l'infrieur. (En fait, comme
nous le verrons, l'infrieur est cr partir du suprieur, un processus appel
"involution".)

Bien que les divers niveaux dimensionnels soient hirarchiques, ceci ne veut pas dire
qu'ils sont radicalement spars, discrets et isols les uns des autres. Ce sont en fait des
niveaux diffrents, mais des niveaux diffrents de conscience. Par consquent, on dit que
les divers niveaux s'interpntrent mutuellement. En voici une excellente description:

Ces "mondes" [ou niveaux dimensionnels] ne sont pas des rgions distinctes,
spatialement divises les unes des autres, de manire ce qu'il faille se dplacer dans
l'espace pour passer de l'une l'autre. Les mondes suprieurs sont en interpntration
complte avec les mondes infrieurs, qui sont faonns et soutenus par leurs activits.
Ce qui les divise, c'est que chaque monde a un niveau de conscience plus restreint et plus
contrl que le monde au-dessus de lui. La conscience infrieure est incapable de faire
l'exprience de la vie des mondes suprieurs et est mme inconsciente de leur existence,
bien qu'elle soit interpntre par eux.
Mais si les tres d'un monde infrieur peuvent lever leur conscience jusqu' un niveau
suprieur, alors ce monde suprieur leur devient manifeste, et on peut dire qu'ils sont
passs un monde suprieur, bien qu'ils ne se soient pas dplacs dans l'espace.
(Shepherd, 1977)

Les divers niveaux, alors, sont en interpntration et en interconnexion mutuelles. Mais


pas de faon quivalente. Le suprieur transcende mais inclut l'infrieur et non
l'inverse. C'est--dire que tout l'infrieur est "dans" le suprieur, mais tout le suprieur
n'est pas dans l'infrieur. Pour donner un exemple simple, tout le reptile est dans
l'homme, mais tout l'homme n'est pas dans le reptile; tout le monde minral est dans une
plante, mais non l'inverse, et ainsi de suite. "Le plus volu, explique Wachsmuth,
contient toujours en lui-mme les attributs du prcdent, et pourtant se dveloppe
toujours en tant que nouvelle entit, en tant qu'activit clairement diffrenciable de celle
de l'autre." (1977)

Ainsi, quand le sage-mystique parle de ce type d'interpntration mutuelle, il ou elle veut


dire une interpntration multidimensionnelle avec non-quivalence.
L'explication, par les sages-mystiques, de cette interpntration multidimensionnelle
constitue une partie de la littrature la plus profonde et la plus belle du monde [ 1].
L'essence de cette littrature, bien qu'il semble presque blasphmatoire d'essayer de la
rduire quelques paragraphes, est qu'au commencement "il n'y a que la conscience-en-
tant-que-telle, intemporelle, aspatiale, infinie et ternelle. Pour nulle raison qui puisse
tre nonce avec des mots, une subtile vaguelette est gnre dans cet ocan infini. Cette
vaguelette ne pourrait pas en elle-mme se soustraire l'infini, car l'infini peut embrasser
toutes les entits. Mais cette subtile vaguelette, s'veillant elle-mme, la mer infinie
dont elle n'est qu'un geste. La vaguelette se croit par consquent spare de l'infini, isole,
distincte.

Cette vaguelette, trs rarfie, est la rgion causale (niveau 5), le tout dbut, bien que
faible, de la vague du moi. ce point, toutefois, elle est encore trs subtile, encore
"proche" de l'infini, encore extatique.

Mais en quelque sorte, pas vraiment satisfaite, pas profondment paisible. Car afin de
trouver cette paix ultime, la vaguelette devrait retourner l'ocan, se dissoudre nouveau
dans l'infini radieux, s'oublier et se rappeler l'absolu. Mais pour cela, il lui faudrait mourir
il lui faudrait accepter la mort de son sens du moi distinct. Et elle en est terrifie.

L'infini est tout ce qu'elle veut, mais puisqu'elle est terrifie d'accepter la mort ncessaire,
elle se met chercher l'infini par des faons qui l'en empchent. Puisque la vaguelette
veut la libration et en a peur en mme temps, elle arrange un compromis et un substitut.
Au lieu de trouver la vraie divinit, la vaguelette prtend tre Dieu, cosmocentrique,
hroque, suffisante et immortelle. C'est non seulement le commencement du narcissisme
et la bataille de la vie contre la mort, c'est une version rduite ou restreinte de la
conscience, parce que la vaguelette ne fait plus un avec l'ocan, elle essaie d'tre elle-
mme l'ocan.

Pousse par ce projet Atman la tentative d'atteindre l'infini par des moyens qui l'en
empchent et la forcent des gratifications substitutives , la vaguelette cre des modes
de conscience toujours plus troits et plus restreints. Trouvant le causal moins que parfait,
elle rduit la conscience pour crer le subtil (niveau 4). Finissant par trouver le Subtil
moins qu'idal, elle rduit la conscience une fois de lus pour crer le mental (3). chouant
l, elle la rduit au plan prnique, puis au plan matriel, o, finalement, puisant son
dsir d'tre Dieu, elle tombe dans un sommeil inconscient.

Et pourtant, derrire ce projet Atman, le drame ignorant du moi distinct se trouve


nanmoins l'Atman. Tout le drame tragique du dsir et de la mortalit du moi n'tait que
le jeu du divin, un sport cosmique, un geste d'oubli du Soi afin que le choc de la
ralisation du Soi soit plus dlicieux. La vaguelette a vraiment oubli le Soi, c'est sr
mais elle tait une vaguelette du moi, et l'est reste tout au long de la pice.

1Ce qui suit est, approximativement, une combinaison du Lankavatara Sotra, du Livre
des morts du Tibet et de l'existentialisme occidental. Pour un compte rendu plus dtaill,
voir The Atman Project (Wheaton, Quest, 1980).
Ainsi, ce mouvement du suprieur l'infrieur qui est l'involution est en mme temps
un acte de pure cration et de radiance fulgurante (de la part de l'Atman) et une tragique
histoire de souffrance et de malheur pique (de la part du moi-vaguelette entreprenant le
projet Atman). Le but ultime de l'volution le mouvement de l'infrieur au suprieur
est de s'veiller en tant qu'Atman, et par consquent de retenir la gloire de la cration
sans tre forc de jouer dans le drame de la souffrance du moi.

Au cours de l'histoire de notre univers (et la science nous aide ici), nous avons volu du
niveau 1 (qui commena il y a approximativement 15 milliards d'annes avec le Big
Bang) au niveau 2 (qui se produisit plusieurs milliards d'annes plus tard lorsque la
matire s'veilla une certaine comprhension de la vie) au niveau 3 (qui jusqu'ici n'a t
pleinement atteint que par les humains). L'volution est, pourrait-on dire, demi
complte. "L'humanit, disait Plotin, est en quilibre mi-chemin entre les dieux et les
btes."

Mais dans le pass de l'histoire humaine, certains hommes et femmes, travers la


discipline volutionnaire de la religion suprieure, russirent pousser leur propre
dveloppement et leur propre volution jusqu'au niveau 4: celui de la religion sainte et de
la premire intuition d'une ralit transcendantale, une en essence, au-dessus et au-del de
l'esprit, du moi, du corps et du monde ordinaires. Cet "au-del" fut potiquement appel
le ciel; cette unit fut appele le seul Dieu. Cette intuition ne se produisit pas pleinement
avant environ 3000 av. J.-C., avec la monte des premires grandes religions
monothistes. (Avant cette poque, il n'y avait que des ralisations polythistes un
dieu du feu, un dieu de l'eau, etc. Il s'agit en fait de magie shamaniste, issue d'une simple
manipulation du niveau 2, les nergies et les rites motifs-sexuels). Ds 500 av. J.-C.,
toutefois, certaines mes volutionnaires poussrent leur dveloppement jusque dans le
causal le Christ, Bouddha, Krishna, les grands sages axiaux. Leurs insights furent
prolongs et largis pour produire ce que les Tibtains ont appel la voie Svabhavikakaya
la voie du niveau 6, ou la Vrit dj accomplie, la voie du zen, Vajrayana, Vedanta.
Le monde n'a plus qu' suivre l'exemple et en faire autant par processus volutionnaire
ou mditation, jusqu'aux domaines suprieurs, culminant dans l'infini.

Selon la philosophie prenne, non seulement tout ce processus d'involution et d'volution


se droule-t-il pendant des sicles, mais il se rpte d'instant en instant, sans cesse et
instantanment. cet instant et cet instant et celui-ci, un individu repart vers l'infini.
Mais en cet instant, cet instant et celui-ci, il se contracte et s'loigne de l'infini et finit par
tre rduit au niveau de sa prsente adaptation. Il involue jusqu'au plus haut point auquel
il a jusqu'ici volu et tous les domaines suprieurs sont tout simplement oublis,
refouls, rendus inconscients. C'est pourquoi toute mditation est appele rappel ou
souvenir (en sanskrit smriti, en pali sati, comme dans satipatthana, l'anamnse de Platon,
le zikr soufi tous ces termes se traduisent exactement par "souvenir" ou "rappel").

Toute cette panoplie de niveaux suprieurs engendrant l'infrieur d'instant en instant, et


de l'incroyable interpntration de chaque niveau avec les autres, et de l'extraordinaire
dynamique entre les niveaux, tous se produisant dans un champ de radiance fulgurante
c'est tout ce qu'entend le sage-mystique quand il parle de l'interpntration
multidimensionnelle avec non-quivalence.
Le fait que le sage-mystique parle si souvent de la diffrence entre les niveaux, et mette
l'accent sur ces diffrences, ne signifie pas qu'il nglige les relations entre les lments
un niveau donn. En fait, le mystique est prcis dans sa comprhension de la
communaut d'lments constituant chaque niveau. Puisque tous les lments sont "faits
de" la mme densit de conscience puisqu'ils sont tous du mme niveau ils sont
tous en parfaite interpntration et en interdpendance mutuelle, d'une faon quivalente.
C'est--dire: nul lment d'un niveau donn n'est plus haut, ou plus rel, ou plus
fondamental que les autres, tout simplement parce qu'ils sont tous faits de la "mme
toffe" (c'est--dire la mme densit de conscience).

En fait, il y a certaines hirarchies l'intrieur de chaque niveau, mais ce ne sont pas des
hirarchies de statut, comme celle de grandeur. Par exemple, une plante est plus grosse
qu'une pierre, un systme solaire est plus gros qu'une plante, une galaxie plus grosse
qu'un systme solaire. C'est une hirarchie de grandeur, et non un statut ontologique,
parce qu'ils sont tous galement du plan matriel. De mme, toutes les hirarchies
l'intrieur de chaque dimension sont d'lments quivalents.

Ainsi, sur le plan physique, aucune particule lmentaire n'est "la plus fondamentale"
(elles semblent toutes en bootstrap). Sur le plan nutritif, aucune vitamine n'est finalement
plus essentielle (retirez-en une et vous tes galement mort). Dans la sphre morale,
aucune vertu n'est plus grande qu'une autre elles semblent toutes se recouper
rciproquement (comme Socrate le savait et comme Maslow le dcouvrit pour les valeurs
B). Au niveau du subtil, tous les archtypes sont des reflets quivalents de Dieu, tout
comme tous les Sambhogakaya sont des aspects quivalents du Dharmakaya.

L'essentiel est que tous les lments d'un niveau donn Sont approximativement
quivalents en statut et s'interpntrent mutuellement en fait. Tous en un et un dans tous
holographiquement, pourrait-on dire. Mais, cause de la hirarchie, tout lment d'un
niveau suprieur est plus lev en statut ontologique que tout lment d'une dimension
infrieure (par ex.: la vertu de compassion n'est pas l'quivalent de la vitamine B-12).
L'interconnectivit mutuelle des lments de tout niveau particulier est une
interpntration unidimensionnelle avec quivalence. C'est un genre d'holoarchie existant
l'intrieur de chaque niveau de hirarchie. Ainsi, la faon la plus simple de rsumer la
perspective mystique du monde:

1) Holoarchie l'intrieur de chaque niveau;


2) Hirarchie entre les niveaux.

Avec cette information de base, nous en venons au nouveau paradigme.

PHYSIQUE ET MYSTICISME

L'une des doctrines mystiques les plus frquemment mentionnes est celle de
l"interpntration mutuelle" telle que prsente, par exemple, dans l'cole Kegon du
bouddhisme, les Discours de Meher Baba, les cinq rangs du zen Soto, etc. Par
"interpntration mutuelle", le mystique veut dire les deux formes d'interpntration
exposes ci-dessus: unidimensionnelle et multidimensionnelle, holoarchique et
hirarchique, horizontale et verticale.
Imaginez les six niveaux de la conscience comme un difice six tages: le mystique
veut dire que tous les lments de chaque tage interagissent harmonieusement, et, ce qui
est plus important, que chacun des tages est en interaction avec chaque autre. Pour ce
qui est de l'interaction entre plusieurs niveaux, le mystique veut dire que les lments
physiques interagissent avec les lments biologiques qui interagissent avec le mental qui
interagit avec le subtil qui interagit avec le causal qui passe l'infini, chaque niveau
succdant son prdcesseur mais en interpntration mutuelle avec lui. Et ainsi, parlant
de tous ces niveaux, le mystique dit, pour employer les termes de Meher Baba: "Ils
s'interpntrent tous les uns les autres et existent ensemble."

Or, il advient que le physicien moderne, travaillant au domaine le plus bas celui des
processus matriels, inconscients et non vivants a dcouvert l'interpntration
unidimensionnelle du plan matriel: il a dcouvert que tous les hadrons, les leptons, etc.,
sont en interpntration et en interdpendance mutuelles. Comme l'explique Capra:

La thorie des quanta nous oblige voir l'univers non pas comme une collection d'objets
physiques, mais plutt comme un tissu compliqu de relations entre les diverses parties
d'un ensemble unifi ... Toutes les particules [physiques] sont dynamiquement composes
les unes des autres de faon cohrente en soi, et en ce sens, on peut dire qu'elles se
"contiennent" les unes les autres. Dans [cette thorie], l'accent est mis sur l'interaction,
ou l'"interpntration" de toutes les particules (1977).

En rsum, parlant de ces particules, ondes et champs subatomiques, le physicien dit: "Ils
sont en interpntration mutuelle et existent ensemble." Or, une personne peu prudente,
voyant que le mystique et le physicien ont utilis prcisment les mmes mots pour parler
de leurs ralits, en concluraient que les ralits doivent aussi tre les mmes. Et ce n'est
pas le cas.

Le physicien, avec son interpntration unidimensionnelle, nous dit que toutes sortes
d'vnements atomiques sont tisss les uns avec les autres ce qui en soi est une
dcouverte significative. Mais il ne nous dit rien, et ne peut rien nous dire de l'interaction
de la matire non vivante avec le niveau biologique, et de l'interaction de ce niveau avec
le champ mental quelle relation le plasma ionique a-t-il avec, disons, les buts et les
pulsions de l'ego? Et au-del de cela, que dire de l'interaction du champ mental avec le
subtil, et du subtil avec le causal, et de l'interaction et de l'interpntration inverses
revenant en descendant travers les niveaux infrieurs? Que peut nous dire la nouvelle
physique ce sujet?

Je suis d'avis que la nouvelle physique a tout simplement dcouvert l'interpntration


unidimensionnelle de son propre niveau (la masse / nergie inconsciente). Bien que ce
soit une dcouverte importante, elle ne peut tre mise sur le mme pied que
l'extraordinaire phnomne de l'interpntration multidimensionnelle dcrite par les
mystiques. Nous avons vu que l'hindouisme, pour ne citer qu'un exemple, a une thorie
incroyablement complexe et profonde sur la faon dont le domaine ultime engendre
l'ordinaire, qui son tour engendre le subtil, qui cre l'esprit, dont vient le monde charnel
et, tout en bas, le plan physique. La physique nous a dit toutes sortes de choses
significatives sur ce dernier niveau. De ses prdcesseurs, elle ne peut rien dire (sans se
changer en biologie, en psychologie ou en religion). En gros, l'tude de la physique est au
premier tage, dcrivant les interactions de ses lments; les mystiques sont au sixime
tage, dcrivant l'interaction de tous les six tages.

Ainsi, titre de conclusion globale, mme titre d'approximation, l'affirmation selon


laquelle " les visions du monde de la physique et du mysticisme sont similaires" est une
grossire surgnralisation et est fonde, comme l'a dit rcemment un physicien, "sur
l'utilisation de similarits accidentelles de langage comme si celles-ci taient d'une
certaine faon la preuve de rapports profondment enracins" (Bernstein, 1978).

De plus, la physique et le mysticisme ne sont pas deux approches diffrentes de la mme


ralit. Ce sont des approches diffrentes de deux niveaux de ralit tout fait diffrents,
dont le second transcende mais inclut le premier. C'est--dire que la physique et le
mysticisme ne suivent pas le principe de complmentarit de Bohr. Il n'est gnralement
pas compris que la complmentarit, telle qu'elle est utilise en physique, veut dire deux
aspects ou deux approches d'une interaction de la ralit qui s'excluent mutuellement. La
physique et le mysticisme ne sont pas complmentaires parce qu'un individu peut tre, en
mme temps et dans le mme geste, un physicien et un mystique. Comme nous l'avons
dit, le second transcende mais inclut le premier, il ne l'exclut pas. La physique et le
mysticisme ne sont pas deux approches d'une mme ralit qui s'excluent mutuellement,
pas plus que, disons, la botanique et les mathmatiques.

Toute cette notion de la complmentarit de la physique et du mysticisme vient du fait


d'ignorer les niveaux 2 5. Il semble alors que la physique (niveau 1) et le mysticisme
(niveau 6) soient les deux seules approches majeures de la ralit. De cette perspective
tronque de la ralit provient la suppose "complmentarit" de la physique et du
mysticisme. On ne revendique pas cela de la sociologie et du mysticisme, de la nutrition
et du mysticisme, ni de la botanique et du mysticisme; pas plus, donc, de la physique et
du mysticisme.

Ce qui est nouveau de la nouvelle physique, ce n'est pas qu'elle ait quelque chose voir
avec les niveaux suprieurs de la ralit. A part quelques exceptions mineures (dont nous
parlerons bientt), elle ne tente mme pas d'expliquer le niveau 2 ou d'en rendre compte
(sans parler des niveaux 3 6). Plutt, en poussant aux extrmes des dimensions
matrielles, elle a apparemment dcouvert l'holoarchie fondamentale du niveau 1, et cela,
en fait, est nouveau. L-dessus, du moins, la physique et le mysticisme s'entendent.

Pourtant, mme ici, nous devons tre prudents. Dans la hte de marier physique et
mysticisme, par la force de la gnralisation, nous tendons oublier que la ralit
quantique n'a presque aucune porte dans le monde rel des processus macroscopiques.
Comme le dit le physicien Walker, dans le monde ordinaire des "automobiles et du
basket-ball, les quanta sont sans consquence". Cela a depuis longtemps t clairement
reconnu par les physiciens. Le niveau des quanta est tellement sous-microscopique que
ses interactions peuvent toutes fins pratiques tre ignores dans le macro-monde. Les
intenses interactions entre msons subatomiques, qui semblent tellement mystiques, ne
sont pas du tout observes entre macro-objets, entre pierres, gens et arbres. Comme
l'explique soigneusement Capra: "L'unit fondamentale de l'univers ... devient apparente
au niveau atomique et se manifeste de plus en plus mesure qu'on pntre plus
profondment ... dans le domaine des particules subatomiques" [les italiques sont de moi]
(1977).

Mais c'est prcisment dans le domaine ordinaire des pierres et des arbres que le
mystique voit son interpntration mutuelle de toute matire. Son unit fondamentale de
l'univers ne "commence" pas "au niveau atomique". Lorsque le mystique regarde un
oiseau volant au-dessus d'un ruisseau en cascades et dit "Ils ne font qu'un, parfaitement",
il ne veut pas dire que si nous apportions un supermicroscope et examinions la situation,
nous verrions l'oiseau et le ruisseau changer des msons d'une faon unitaire. Sa vision
unitaire est un impact immdiat exprimant sa comprhension personnelle que "En vrit,
tout ce monde est Brahman".

C'est--dire que mme l'accord entre mystique et physicien au niveau 1 doit tre
considr soit comme quelque peu tnu ou comme une heureuse concidence. Demandez
presque n'importe quel physicien si les rapports entre, disons, un arbre et une rivire
macroscopiques sont aussi intenses et aussi unitaires que ceux entre des particules
subatomiques, et il dira non. Le mystique, lui, dira oui.

C'est une question fondamentale et cela dmontre, en fait, que le physicien et le mystique
ne parlent mme pas du mme monde. Le physicien dit: "Le monde newtonien ordinaire
est, toutes fins pratiques, spar et discret, mais le monde subatomique est un pattern
unifi." Le mystique dit: "Le monde newtonien ordinaire est, comme je le perois
directement, un ensemble indivisible; quant au domaine subatomique, je ne l'ai jamais
vu."

La question ici est cruciale, parce que, comme l'explique (1978) Jeremy Bernstein,
professeur de physique au Stevens Institute: "Si j'tais un mystique oriental, la dernire
chose au monde que je voudrais, ce serait une rconciliation avec la science moderne."
Son argument est qu'il est dans la nature mme des dcouvertes scientifiques de changer
et de s'altrer sans cesse, que la preuve scientifique de la dernire dcennie est la fausset
de cette dcennie, et qu'on ne peut empcher aucun fait scientifique majeur d'tre
profondment modifi par le temps et l'exprimentation ultrieure. Et si nous disions que
l'illumination de Bouddha vient d'tre corrobore par la physique'? Qu'arrivera-t-il alors
lorsque, dans une dcennie, de nouveaux faits scientifiques remplaceront (comme il se
doit) les faits actuels? Bouddha perdra-t-il alors son illumination? Nous ne pouvons pas
jouer sur deux tableaux. Si nous attelons le mysticisme la physique maintenant, ne
devrons-nous pas le laisser tomber plus tard? Qu'est-ce que cela signifie que de confondre
des faits scientifiques temporels avec des domaines contemplatifs intemporels? "Atteler
une philosophie religieuse [transpersonnelle] une science contemporaine", dit le Dr
Bernstein, "est un moyen sr de les rendre obsolescentes."

L'ORDRE IMPLICITE

Le mme genre de difficults entoure l'usage populaire du concept, introduit par David
Bohm, d'un "ordre implicite" de la matire. Le public en gnral, et bien des
psychologues en particulier, considrent le domaine implicite comme s'il transcendait les
particules physiques et atteignait d'une certaine faon un tat suprieur d'unit et de
totalit. En fait, le domaine implicite ne transcende pas la matire il lui est immanent
et exprime une cohrence, une unit et une totalit de tout le plan physique, ou niveau 1.
Il va, en fait, au-del de la matire explicite, mais d'une faon immanente ou sous-jacente,
mais qui n'est pas transcendante. D'ailleurs, le concept exclut explicitement tous
domaines suprieurs tels que l'esprit et la conscience.

Et Bohm lui-mme l'a dit trs clairement. D'abord, Bohm est nettement oppos au fait
d'essayer d'introduire l'esprit ou la conscience dans le formalisme de la mcanique
quantique (MQ), comme certains physiciens aimeraient le faire. Comme Hiley et lui
l'expriment dans un article rcent: "Nous dmontrons que l'introduction de l'esprit
conscient dans la physique... est motive par certaines considrations tout fait gnrales
qui ont peu de choses voir avec la mcanique quantique elle-mme. Cette approche fait
contraste avec nos propres recherches utilisant le potentiel quantique... Notre but est, en
fait, de dcrire cet ordre sans y introduire l'observateur dans quelque rle fondamental"
[les italiques sont de moi] (1975). La conclusion du travail de Bohm est qu'il semble y
avoir certains phnomnes quantiques qui "nous mettent en prsence d'un nouvel ordre
ou d'un nouveau processus de structure, qui ne s'insre pas dans l'ancien plan newtonien."
(1975)

Ce nouvel ordre, en termes gnraux, est le domaine implicite (holographique ou de


l'holomouvement). Mais Bohm se donne de la peine pour insister sur le fait qu'il n'y a
rien de mystique ou de transcendantal dans l'ordre implicite. Sa thorie, et elle est trs
lgante, est que la matire explicite repose sur une mer d'nergie physique implicite
d'une tendue et d'un potentiel extraordinaires, et que les quations de la mcanique
quantique "dcrivent cela [l'ordre implicite]" (1978). En un sens, donc, le domaine
implicite va bien plus loin que la matire explicite: "La matire est comme une petite
vague sur ce gigantesque ocan d'nergie ... Cet ordre implicite implique une ralit qui
dpasse immensment ce que nous appelons la matire. La matire elle-mme n'est
qu'une vaguelette sur cet arrire-plan." (1978)

Mais en dernire analyse, cette mer implicite, bien que "plus fine" que la matire
explicite, fait encore partie du domaine de la physis ou de la masse / nergie non vivante
en gnral. C'est vident parce que 1) Bohm a dj exclu les domaines suprieurs, tels
que la conscience mentale, de la mcanique quantique, et 2) on dit que les quations de la
MQ "dcrivent l'ordre implicite". Le fait de se dplier partir du domaine implicite est,
dit-il, "une ide directe de ce qu'on entend par les mathmatiques (de la mcanique
quantique). Ce qu'on appelle la transformation unitaire ou la description mathmatique de
base du mouvement en mcanique quantique est exactement ce dont nous parlons."
(1978) Or, les quations de la MQ ne dfinissent pas la vie biologique, ou niveau 2; elles
ne dcrivent pas la vie mentale, ou niveau 3; elles ne dcrivent pas, non plus, les
domaines subtil, causal ou absolu. Elles dcrivent quelque chose qui se passe dans le
domaine de la physis et nulle part ailleurs. Par ailleurs, Bohm affirme clairement que
"l'ordre implicite est toujours de la matire".

Il faut reconnatre que Bohm, dans ses crits thoriques, affirme trs clairement qu'il ne
tente pas d'introduire la conscience ou l'esprit dans le formalisme de la MQ, ou qu'il
n'essaie pas ainsi de "prouver" l'existence des tats suprieurs d'tre par des quations qui
dcrivent clairement non pas la vie animale (niveau 2) mais plutt les processus
inconscients. Car il est certain que si le domaine implicite repose sur une interprtation
lgante des faits engendrs par la MQ, il est alors tout aussi certain qu'il n'a pas
d'identit fondamentale avec aucun des niveaux de 2 6. Bref, l'ordre implicite, comme
je l'noncerais, est la structure unitaire profonde (holoarchie) du niveau 1, qui est
immanente aux structures explicites de surface des particules lmentaires et des ondes,
ou qui les sous-tend.

En mme temps, Bohm lui-mme est parfaitement conscient du fait que la notion d'un
ordre implicite non local de la physis est encore loin de la seule interprtation possible de
la MQ, et loin, en fait, d'en tre le cas absolu de toute faon: "A l'heure actuelle, dit-il, il
est ncessaire de rsister la tentation de conclure que tout [dans le domaine physique]
est reli tout le reste sans gard aux sparations d'espace et de temps. Les preuves ce
jour indiquent que les effets non locaux [que le public en est en gnral arriv appeler
les vnements holographiques ou d'ordre implicite] surviennent dans des conditions trs
particulires et que toutes les corrlations qui ont t tablies tendent tre morceles
plutt rapidement, de telle faon que notre approche traditionnelle d'analyser les systmes
en sous-systmes autonomes est, en gnral, tout fait valable." (1975)

L'essentiel est que l'insight du mystique ne repose pas sur ce que ces physiciens finissent
par dcider [2].

L'ORDRE IMPLICITE APPLIQUE A LA PSYCHOLOGIE

Ce n'est pas parce que l'ordre implicite n'a t valid qu'au seul niveau de la physis qu'il
ne peut tre appliqu, en tant que mtaphore (et non modle), des niveaux Suprieurs
il peut l'tre (et Bohm lui-mme a de plus en plus spcul en ce sens). Mais il faudrait
observer certaines prcautions.

D'abord, la mtaphore implicite / explicite, parce qu'elle ne fournit que deux dimensions
majeures (trois au plus, si on ajoute un domaine "au-del des deux"), n'offre qu'une trs
vague reprsentation de la Grande Chane de l'tre, qui, comme l'a dmontr Huston
Smith, doit possder au moins quatre et de prfrence cinq niveaux si elle veut se
rclamer un tant soit peu de la compltude (nous avons dj rsum la version
hindoue/bouddhiste six niveaux de cette Grande Chane). Il est acceptable de parler
grossirement des "gradations du domaine implicite", afin d'tirer la mtaphore pour
rendre compte de toute la Chane; mais moins de pouvoir spcifier la nature prcise de
ces "gradations", rien n'a t gagn. Et naturellement, nous ne pouvons pas imaginer que
nous avons l'autorisation de la physique pour le faire.

2 Dans cet article, j'exclus la diffrence la plus radicale et la plus rpandue entre
mysticisme et tout genre de paradigme physique ou holographique, parce que c'est aussi
la plus vidente. savoir: 1) La comprhension des principes holographiques est un acte
de l'esprit, alors que la comprhension de la vrit mystique est un acte de contemplation
transmentale; et 2) Si on dit en fait que les thories holographiques dcrivent des vrits
transcendantes, ou qu'elles sont la mme chose que le fait de vritablement transcender, il
se produit un violent sophisme appel erreur de catgorie [au sujet de celle-ci, voir
Wilber (1979)]. Certains ont mme suggr qu'un simple apprentissage du paradigme
holographique serait la mme chose que la vritable transcendance, et, en l'occurrence,
ces thories hypothtiques sont non seulement errones, mais elles sont prjudiciables.
Par ailleurs, si nous comprimons la Grande Chane de l'tre afin de la faire concider avec
la mtaphore implicite / explicite, nous perdons la grande prcision et la globalit de la
hirarchie traditionnelle de la conscience. John Welwood, par exemple, a prsent une
belle version de la Chane de l'tre consistant en six niveaux: l'esprit pensant (niveau 1),
l'assise situationnelle du corps (niveau 2), l'assise personnelle de l'esprit (niveau 3),
l'assise transpersonnelle (niveaux 4 et 5), et l'assise ouverte (niveau 6). Mais afin de la
mettre en corrlation de quelque faon avec la mtaphore implicite / explicite, il a d
comprimer son modle seulement trois niveaux avec une perte consquente et
substantielle de prcision, et aucun gain vident de clart. Encore l, ceci est parfaitement
acceptable et utile dans une certaine mesure. (En ce cas, Welwood crivait dans un style
lmentaire simple, et a joliment russi en cela [1979].) Mais si nous poussons la
mtaphore au-del des gnralisations grossires et de l'hyperbole introductoire, rien n'est
gagn; au contraire, il en rsulte certaines erreurs spcifiables.

Deuximement, certains auteurs se servent de l'ordre implicite comme d'une mtaphore


non pas de l'immanence mais de la transcendance. C'est--dire que le domaine implicite
est utilis en tant que mtaphore d'une totalit ou d'une unit d'ordre suprieur, faisant
rfrence, prsumons-le, des niveaux tels que le subtil ou le causal. Ceci, aussi, est une
gnralisation utile jusqu' un certain point. La difficult est que, comme l'a d'abord
expliqu Bohm pour le domaine de la physis, les "entits" explicite et implicite s'excluent
mutuellement. La particule "goutte d'encre" est soit dplie et manifeste (explicite), soit
replie et non manifeste (implicite). Elle ne peut tre les deux en mme temps (pas, de
toute faon, sans dmolir la dmonstration originale).

Tout cela est trs bien pour la dimension de la physis. Mais les niveaux vritablement
suprieurs ne sont pas en relation mutuellement exclusive avec les niveaux infrieurs
le suprieur, comme nous l'avons dit, transcende mais inclut l'infrieur. Considrez mme
un exemple simple: lorsque le niveau 2 (la bio-vie) est d'abord apparu et a transcend la
matire, il n'a pas dispers l'ordre explicite de la matire il ne l'a ni annihil ni dispers
en potentialit replie. Il l'a transcend mais l'a inclus d'une faon parfaitement explicite
comme un aspect ou une partie de lui-mme. C'est l'volution, ou enveloppement
explicite, et non l'involution, ou dispersion implicite. L'une des plus belles illustrations de
ceci est le cerveau humain: le cerveau reptilien est envelopp par le cerveau limbique qui
est envelopp par le nocortex, tous tant parfaitement explicites mais subsums,
reprsentant et retenant l'volution ou le dpliement de reptile mammifre humain.

L'essentiel est que, moins que ce ne soit fait avec un soin et une prcision extrmes (et
cela peut se faire en utilisant cette mtaphore) [ 3], l'usage de la mtaphore de l'ordre

3 J'ai, dans Atman Project (Wilber, 1980), tent de le faire selon les lignes directrices
suivantes. L'aspect souvent nglig est que s'il y a des gradations de l'ordre implicite, il y
a tout autant des gradations de l'ordre explicite, et, en fait, elles sont rciproquement
parallles travers l'volution. "Implicite", lorsqu'utilis en tant que mtaphore, a presque
la connotation d'tre plus rel, plus fondamental, et plus lmentaire que le monde
explicite des entits manifestes. En fait, cependant, ils alternent. Ce qui est implicite un
niveau de la conscience devient explicite au niveau suivant. C'est--dire que chaque
niveau est implicite pour son prdcesseur mais explicite pour son successeur. Le prna,
par exemple, est implicite de la matire et explicite de l'esprit, tout comme l'esprit est
implicite a tendance engendrer une description de l'involution, qui est un mouvement
rgressif. La mtaphore implicite qui en rsulte est un "modle rduit": l'absolu, au lieu
de transcender parfaitement et de subsumer les distinctions, ne fait que les oblitrer et les
disperser. Mais la grce, comme le savait saint Thomas, parfait la nature, elle ne
l'embrouille pas.

L'ESPRIT ET LA MCANIQUE QUANTIQUE

Contrairement David Bohm, et la majorit des physiciens, il y a une poigne de


physiciens d'avant-garde qui non seulement veulent injecter "l'esprit" dans les quations
de la MQ, mais qui insistent galement l-dessus. Wigner, Walker, Muses et Sarfatti
fournissent des explications mathmatiques labores qui prtendent dmontrer le rle
crucial de la conscience dans les formulations de la MQ. Ce sont ces types de
formulations, par-dessus tout le reste, qui ont amen le physicien errer dans l'arrire-
cour du mystique ou du moins du parapsychologue.

Ce qui donne leur lan ces formulations rside dans ce qu'on appelle le "problme de la
mesure", et le problme de la mesure est une abrviation de certaines quations
mathmatiques trs sophistiques et trs labores, et de certains paradoxes qu'elles
engendrent.

Le problme en soi concerne ce genre de dilemme: les mathmatiques de la MQ peuvent


dterminer, avec grande prcision, la probabilit qu'un certain vnement quantique se
produise dans un certain environnement ( un certain endroit ou un certain moment),
mais elles ne pourront jamais prcisment prdire l'environnement lui-mme. Elles
peuvent dire, par exemple, que les chances de trouver une particule quantique dans la
rgion A sont de 50 pour 100, dans la rgion B de 30 pour 100, et dans la rgion C de 20
pour 100. Mais elles ne peuvent, en aucune circonstance, dire qu'un vnement particulier
implicite du prna et explicite du subtil. L'volution est une srie d'explicitations de ce
qui tait auparavant implicite. mesure que chaque structure suprieure se dplie, ou
s'explicite, elle subsume, ou implique, celle qui lui est infrieure. Tout ce processus est
soigneusement dcrit dans The Atman Project. Mais lorsque les termes "implicite /
explicite" sont utiliss de cette faon, on ne dit prcisment rien de neuf leur propos;
c'est le cur mme de la philosophie prenne, de Hegel Aurobindo. Ce n'est pas,
cependant, la faon dont ces termes sont prsentement utiliss. Alors, pour ce qui est des
termes "implicite" et "explicite", j'essaie en gnral d'viter leur usage pour dcrire ce
processus gnral et son contexte hirarchique de multidimensions, parce que la
philosophie prenne dpasse de loin tout ce qui est contenu dans l'usage actuel de ces
notions d'implicite / explicite. Et quand ces notions sont mises en rapport avec la
philosophie prenne, comme dans le rsum ci-dessus, elles finissent par ne prsenter
qu'une ressemblance minime avec la signification qui leur a originellement t donne
par les physiciens.
Finalement, il y a une vaste diffrence entre l'immanence et la transcendance, et
lorsqu'on sous-entend que 1"ordre implicite" signifie les deux, il en rsulte certaines
erreurs frappantes. Le moyen le plus facile d'viter cela est d'utiliser la notion d'"ordre
implicite" prcisment de la faon dont elle fut propose: comme une unit immanente du
plan du niveau 1 de la physis.
se produira dans la rgion A (tant donne la distribution de probabilit qui prcde).
Ainsi, l'vnement particulier n'est pas considr comme une seule entit ou un seul
vnement, mais plutt comme une "tendance exister", qui, dans cet exemple, serait
dfinie par une quation (ou une amplitude de probabilit) qui dit, en effet: 50 pour 100 A
/ 30 pour 100 B / 20 pour 100 C.

Or, ce qui est trange, c'est que l'vnement, lorsqu'il se produit, se produit dans une seule
rgion. C'est presque (mais pas tout fait) comme si un statisticien essayait de prdire par
laquelle de trois portes vous tes susceptible d'entrer et, pour diverses raisons, il en
arrivera aux rsultats: 50 pour 100 des chances pour la porte A, 30 pour 100 pour la porte
B, 20 pour 100 pour la porte C. Il ne peut pas prdire exactement laquelle des portes ce
sera, seulement les pourcentages. Mais lorsque vous finissez par entrer, vous ne passez
que par une seule porte vous n'allez pas 50 pour 100 par la porte A, 30 pour 100
par B et 20 pour 100 par C.

Mais au-del de cela, l'analogie s'croule. Le statisticien avait des raisons de croire que
vous existiez avant d'entrer par n'importe laquelle des portes il peut aller vous voir,
premirement. Mais le physicien n'a pas ce genre d'assurance au sujet de ses particules
quantiques, parce qu'il n'y a pas moyen qu'il aille voir la particule (pour notre propos
moins que prcis, contentons-nous de dire qu'elle est trop petite pour qu'on la voie
parfaitement). Sa seule faon de regarder la particule, c'est d'utiliser certains instruments
c'est--dire en la mesurant en un sens. Mais pour mesurer la particule, il doit, en fait,
la faire passer par les portes de ses instruments. Et voil le problme: pour trouver ce qui
est derrire la porte, le physicien doit utiliser une porte. Dans tous les cas, ses
phnomnes ne peuvent tre dtects que lorsqu'ils passent travers diverses portes, et
que les quations qui dcrivent ces "passages" sont purement probabilistes: 50 / 30 / 20,
disons.

Le physicien fait donc face un problme conceptuel: avant le mesurage, tout ce qu'il
peut dire au sujet d'un vnement quantique est qu'il est (et non a) une certaine tendance
exister (par ex., 50 / 30 / 20). L'vnement lui-mme, si on le laisse tel quel (sans le
mesurer) se "propagera travers l'espace-temps" selon la fonction ondulatoire de
Schrdinger, qui, au carr, donne la probabilit de trouver l'vnement dans un certain
environnement (50/30/20). Mais avant le mesurage vritable, il n'y a absolument aucun
moyen de savoir prcisment dans quelle rgion la particule se manifestera. Et pourtant,
lorsqu'elle est finalement dtecte, elle se produit de fait dans une seule rgion (disons B)
et ne s'tend pas travers les trois portes. Ceci est appel l'effondrement du vecteur d'tat
ou paquet d'ondes, parce que lorsque le mesurage dtermine que la particule est en B, la
probabilit qu'elle soit en A ou en C s'effondre zro. L'effondrement du vecteur d'tat
signifie que l'vnement a fait un saut depuis tre une "tendance exister"
(50A/30B/20C) jusqu' tre un "vnement rel" (B).

D'o les problmes. Le mesurage lui-mme "cause"-t-il l'effondrement du paquet


d'ondes? La particule relle existe-t-elle mme vraiment avant le mesurage? Si nous
disons qu'elle existe (ce que semble dicter le bon sens), comment pouvons-nous en tre
srs, puisqu'il n'y a aucun moyen de le dire, et puisque nos quations mathmatiques, qui
autrement dcrivent parfaitement ce domaine, ne nous disent que 50 /30 / 20? Si nous
nions les quations, comment pouvons-nous nier le fait qu'autrement elles fonctionnent si
bien?

part un grand nombre de philosophes qui soutiennent (non sans certaines justifications)
que ce qui fait s'effondrer le paquet d'ondes, ce n'est ni l'esprit ni la matire mais de la
mauvaise mtaphysique, il y a diverses coles de penses quant ce "problme de
mesurage", offertes par les physiciens eux-mmes:

1. L'interprtation de Copenhague. La grande majorit des physiciens suivent cette


cole, qui soutient que l'effondrement du paquet d'ondes est au fond purement fortuit.
Aucune explication n'est ncessaire. Puisqu'il n'y a aucun moyen d'aller derrire la porte,
il n'y a pas de derrire la porte [ 4]. La MQ est une explication complte en elle-mme, et
il n'y a aucun besoin ou possibilit de "regarder derrire le dcor", et d'essayer de savoir
si l'vnement est l ou non avant de le mesurer. En toute justice, on devrait dire qu'il y a
de nombreuses raisons qui sont bonnes, sinon absolues, d'adopter ce point de vue. On
devrait galement dire, comme on le souligne souvent, qu'Einstein lui-mme, a carrment
rejet ce point de vue (avec l'exclamation "Dieu ne joue Pas aux ds avec l'univers! "),
mme si chaque objection qu'il a pose cette interprtation fut brillamment pare par
Bohr et d'autres en utilisant les propres thories d'Einstein. En mme temps, je rpte que
ceci (et ce qui suit) est une espce d'explication extrmement vulgarise. Mais
l'intrieur de cette dngation, l'interprtation de Copenhague dit que la probabilit de
50/30/20 est tout ce que nous savons et tout ce qu'il y a savoir; quelle porte franchit la
particule est purement fortuit.

2. Les thories des variables caches. Ces thories soutiennent qu'il y a de fait des
facteurs spcifiables "derrire le dcor" de l'effondrement du paquet d'ondes. Ces
processus subquantiques sont dcrits par des variables prsentement caches, mais il est
possible qu'ils finissent par devenir techniquement accessibles. Dans les termes les plus
grossiers, cette thorie dit que les vnements quantiques ne sont pas purement fortuits, et
que la particule franchit une porte spcifique pour une raison "cache", une raison que la
particule "connat" et que nous devrions tre capables de dcouvrir. Bohm et ses
collgues, travaillant avec le potentiel quantique (et l'ordre implicite), sont de cette cole,
comme, prsumment, Einstein. Le thorme de Bell, qui a beaucoup attir l'attention
populaire, est souvent utilis par certains tenants de cette cole pour souligner l'apparent
transfert non local (non confin une rgion locale de causalit spatiale) d'information
entre rgions de l'espace largement isoles. On considre gnralement que le thorme
de Bell signifie que si la MQ est par ailleurs correcte, et s'il y a un genre de variables
caches, alors ces variables caches sont donc non locales un genre de causalit
"instantane" non spare par le temps ou l'espace. Bohm et ses collges considrent cela
comme un exemple d'ordre implicite possible ; Sarfatti le considre comme un exemple
de "communication" plus rapide que la lumire; d'autres (comme Einstein) le considrent
comme un non-sens.

3. L'hypothse des mondes nombreux. Celle-ci est propose par Everett, Wheeler et
Graham (EWG). Selon l'interprtation de Copenhague (thorie numro 1), lorsque la

4C'est grossirement nonc, mais c'est aussi ce sur quoi est fonde l'accusation de
mauvaise mtaphysique.
particule 50A /30B / 20C est mesure et qu'on dcouvre quelle se produit dans la rgion
B, alors les deux autres possibilits (A et C) s'effondrent elles ne se produisent tout
simplement pas (tout comme, par exemple, si vous lancez une pice de monnaie en l'air et
qu'elle tombe pile, la possibilit qu'elle tombe face s'effondre zro). Or, selon EWG,
toutes les possibilits rciproquement exclusives contenues dans la fonction ondulatoire
se produisent, mais dans diffrentes branches de l'univers. Au moment o la particule
touche B dans cet univers, deux autres univers se ramifient, dont l'un contient la particule
touchant A, et l'autre contient la particule touchant C. Ou, ds que j'attrape "pile" dans cet
univers, j'attrape aussi "face", mais dans un univers entirement diffrent. Aucun des
deux "je" ne connat l'autre. Ceci a t labor d'une faon mathmatique trs
sophistique.

Il est facile, en entendant ce genre de thorie, de sympathiser avec Franois Mauriac: "Ce
que dit ce professeur est beaucoup plus incroyable que ce que nous pauvres chrtiens
croyons." Mais ce qui est vritablement essentiel, c'est qu'il est dj vident que ce qu'on
appelle la "nouvelle physique" est loin de faire le consensus sur la nature de la ralit
subatomique, un fait qui nous mnera ventuellement certaines conclusions suggestives.
Entretemps, nous passons la quatrime grande thorie engendre par le "problme du
mesurage".

4. La connexion matire/esprit. Cette thorie a diverses formes, mais, dans le cadre de


notre prsentation vulgarise, nous pouvons dire que la thorie en gnral suggre ce qui
suit. Si le mesurage mme fait s'effondrer la poche d'ondes, alors le mesurage n'est-il pas
d'une certaine faon essentiel la manifestation de cet vnement matriel? Et qui fait le
mesurage? De toute vidence, un tre conscient. L'esprit n'est-il pas, alors, une influence
sur ou mme un crateur de la matire?

Cette vue gnrale, sous une forme ou une autre, est soutenue par Wigner, Sarfatti,
Walker et Muses. "Selon moi, dit Sarfatti, le principe quantique implique l'esprit d'une
manire essentielle... l'esprit cre la matire."(1974) Walker identifie les variables
caches, supposant qu'elles sont l, la conscience; Muses fait intervenir la conscience
dans le potentiel de vide quantique. Mais Beinam rsume tout cela par: "C'est la
conscience elle-mme qui fait s'effondrer le vecteur d'tat." C'est cette thorie que nous
allons maintenant examiner, parce qu'on dit que c'est la connexion entre physique et
parapsychologie/mysticisme.

Pour commencer, y a-t-il quelque chose dans la philosophie prenne qui s'accorderait
avec l'affirmation gnrale: "L'esprit cre la matire"? La rponse de premire
approximation est certainement affirmative. On considre la matire, dans toutes les
traditions philosophiques, comme tant un prcipit dans le champ mental. Mais elles
l'expriment plus prcisment. Ce n'est pas directement l'esprit (niveau 3) qui cre la
matire (niveau 1), mais le prna (niveau 2). L'esprit cre le prna; le prna cre la
matire.

Ainsi, les physiciens seraient plus prcis, selon la tradition, s'ils ne disaient pas que c'est
l'"esprit" mais plutt le "prna", la "bionergie" ou la "conscience biologique" qui est
directement suprieur la matire. Von Weizsacker l'a dj fait de faon explicite (utiliser
le mot prna), ainsi que plusieurs autres. Cela ne serait pas un problme pour ces
physiciens, parce que les caractristiques qu'ils attribuent dj l'"esprit" comme tant
ncessaires l'effondrement du paquet d'ondes sont en ralit des caractristiques du
prna. C'est--dire que ces physiciens ne disent habituellement pas que des "concepts",
des "ides" ou de la "logique" font s'effondrer le vecteur d'tat. Plutt, ils utilisent des
termes comme "systmes biologiques"(Sarfatti), "tre conscient" (Walker), "sensation"
(Wigner), qui possdent des caractristiques distales par rapport l'esprit mais
proximales par rapport au prna (ou tout systme vivant). L'esprit pourrait aussi faire
s'effondrer le vecteur, mais via le prna. Cela conciderait aussi avec les suggestions de
Sarfatti, parce que tous les systmes biologiques contribueraient au mouvement brownien
quantique alatoire, mais un esprit disciplin (qui n'est pas prsent chez les animaux)
pourrait le contrler [5].

Tout cela semble vouloir dire que cette version de la MQ est bien en accord avec la
vision mystique, du moins en ce qui concerne les niveaux 1 et 2 (c'est--dire que le
niveau 2 cre le niveau 1). Et pourtant, nous devons encore une fois tre trs prcis ici,
parce qu'il est beaucoup trop facile de tirer des conclusions htives.

Tout d'abord, lorsque le mystique dit que la matire est cre par le prna, il ne veut pas
dire que le prna lui-mme doit tre prsent d'une faon manifeste (et, partir d'ici, pour
plus de commodit, j'utiliserai "esprit" au lieu de prna, en rappelant les importantes
prcisions donnes ci-dessus). C'est--dire: l'esprit ne cre pas la matire en la percevant,
ou en la sentant, ou en la "mesurant" ce qui est, comme nous l'avons vu, la forme de la
thorie soutenue par les physiciens de la MQ dont nous discutons. Plutt, la matire se
prcipite tout simplement hors de l'esprit, que l'esprit y prte attention ou non. En fait,
durant l'involution, l'esprit engendre la matire, puis "quitte" tout fait la scne. Il ne
reste pas l pour surveiller la matire et ainsi l'engendrer.

Ainsi, la philosophie traditionnelle vite entirement le dilemme autrement ridicule: si


l'esprit cre la matire par la perception ou par contact rel (en tant que participant-
observateur), alors que s'est-il pass, disons, il y a dix milliards d'annes lorsqu'il n'y
avait que de la matire et pas d'esprits? La science est peu prs certaine que la vie
biologique n'est apparue que des milliards d'annes aprs la matire. Avant cela, il n'y
avait pas de vie, pas d'esprit. Si l'esprit doit mesurer ou observer la matire afin que cette
dernire existe (ou faire s'effondrer son paquet d'ondes), nous arrivons l'absurdit. Nous
ne travaillons mme pas avec un fantme dans la machine, mais avec une ombre
inexistante d'un fantme inexistant dans une machine trop relle.

Cette perspective que l'esprit engendre la matire par l'effet du "participant-


observateur" , c'est comme dire que la poule (l'esprit) voit l'uf (la matire) et ainsi le
cre. Pas de poule pour voir l'uf, pas d'uf. La vision traditionnelle dit que la poule
(l'esprit) pond ou donne naissance l'uf (la matire) et ainsi le cre; ce que fait la poule

5 Ilfaudrait dire, bien que je finirai par tre en dsaccord avec cette cole de MQ quant
la nature de la gnration de la matire par l'esprit, que je n'exclus pas qu'ils puissent
avoir des choses importantes et brillantes dire au sujet de l'influence de l'esprit sur la
matire, aprs le fait de la gnration de la matire par l'esprit. C'est un accord trs tnu,
mais un accord nanmoins, et certaines branches trs prcises de la parapsychologie (et
non du mysticisme en gnral) trouveront peut-tre une rsonance avec ces thoriciens.
aprs cela, c'est son affaire l'uf continue d'exister, qu'il soit peru ou non. En fait,
durant l'involution, la poule est, eh bien, enterre. Ce qu'elle laisse derrire elle, c'est une
version rduite de la poulit, une version rduite de l'esprit appele la matire (l'uf).
Mais l'uf-matire a, repli en lui, le potentiel de raliser ("couver") une nouvelle poule,
ou l'esprit mme, et c'est exactement ce qui se produit dans l'volution. Mais en aucun cas
la poule ne cre l'uf en l'observant.

C'est pour des raisons semblables que la plupart des physiciens rejettent eux-mmes cette
version de l'interprtation de la MQ. Comme l'explique David Bohm lui-mme:
"L'introduction par Wigner de l'esprit conscient en physique est motive par certaines
considrations tout fait gnrales qui n'ont pas grand-chose voir avec la mcanique
quantique elle-mme." Et, parlant de cette tendance conclure htivement que
l'observation par l'esprit est requise pour produire la matire (mesurage), Bohm rpond
succinctement: "En fait, ceci est souvent pouss un tel extrme qu'on croirait que rien
n'arrive jamais sans l'observateur. Cependant, nous connaissons de nombreux processus
physiques, mme au niveau des phnomnes quantiques, qui se produisent de fait sans
aucune intervention directe de la part de l'observateur. Prenez par exemple les processus
qui se produisent dans une toile loigne. Ils semblent obir des lois connues de la
physique et les processus se produisent, et se sont produits, sans aucune intervention
significative de notre part." (l975)

Bref, la philosophie prenne admettrait que la matire est cre partir de l'esprit (prna),
mais par un acte de prcipitation et de cristallisation, et non de perception et de mesurage.
Mais la MQ ne peut expliquer, tout au plus, que cette dernire thorie seulement, et par
consquent l'accord de la MQ et du mysticisme l-dessus est pure concidence [ 6]. S'il
s'avrait, par consquent, que l'on dmontre que cette interprtation particulire de la MQ
est incorrecte (et je suis d'accord avec Bohm et d'autres que cela arrivera), cela
n'affecterait aucunement la vision du monde du sage-mystique.

Mais je ne me soucie aucunement de la justesse ou de la fausset d'aucune de ces quatre


interprtations de la MQ. Et il y en a mme d'autres dont nous n'avons pas du tout parl
les connexions superluminales, les interprtations statistiques simples, les interprtations
de logique quantique. Ces questions sont extrmement complexes et difficiles, et il faudra
des dcennies pour examiner leurs implications. Cependant, ce que nous pouvons faire
prsent, c'est d'en venir certaines conclusions immdiates:

1. La "nouvelle physique" est loin de faire le grand consensus en ce qui a trait la nature
mme de la ralit subatomique. Raccorder mysticisme / psychologie transpersonnelle au

6 Lorsque l'vque Berkeley (mme s'il n'tait pas un puriste vis--vis de la philosophie
prenne) disait qu'tre c'est tre peru, il voulait dire ultimement peru par Dieu, ou la
conscience absolue. Mais, comme il le savait, l'tre et la perception ne font qu'un dans la
conscience absolue; c'est--dire: ce n'est pas que les entits existent parce qu'elles sont
perues par la conscience, mais que leur existence est conscience. Elles ne sont pas cres
en tant vues par Dieu, elles sont tout simplement Dieu de cur. Autrement dit, Berkeley
ne voulait pas dire tre par la perception (ou la conscience), mais qu'tre est la
conscience. La conscience ne cre par une chose en la regardant; elle est tout simplement
cette chose, et les "perceptions" spcifiques ne sont pas pertinentes.
consensus de la nouvelle physique quantique n'est pas possible, parce qu'il n'y a pas de
consensus. Ces rapports qui ont t tablis entre physique et mysticisme sont du genre
slectif. Les dtails rels des diverses interprtations de la MQ sont, comme nous l'avons
vu, largement en exclusion mutuelle. Ne prendre qu'un dtail d'une interprtation, puis un
autre, un peu de bootstrap ici, un peu d'ordre implicite l, est, selon le physicien
Bernstein, "travestir et desservir" les thories en question.

2. Mme si nous pouvions tablir plusieurs parallles rigoureux, raccorder la psychologie


transpersonnelle la physique est encore "la voie la plus sre de tomber dans l'oubli".
Pour paraphraser Eckhart, si votre dieu est le dieu de la physique d'aujourd'hui, alors
quand cette physique s'en ira (demain), ce dieu s'en ira avec elle.

3. Le point le plus important est que quelle que soit la version de la thorie de la MQ qui
sera finalement accepte, cela n'affectera pas profondment la perspective ou vision du
monde du mystique. En premier lieu, en aucun cas elle ne pourrait invalider la vision du
monde du mystique. Lorsque la "vision du monde fracture" de Newton tait "la vrit",
elle n'a pas invalid la vision mystique. Si l'interprtation de Copenhague est "la vrit",
elle n'invalidera pas la vision mystique. Si n'importe laquelle des interprtations de la MQ
est vraie, elle n'invalidera pas la vision mystique. Et, par consquent, comme nous le dira
tout pistmologiste, en aucun cas une interprtation ne pourrait valider la vision du
monde mystique. S'il n'y a aucune preuve physique concevable qui puisse dmentir la
vision mystique, et il n'y en a pas, alors il n'y en a aucune concevable qui la corroborerait
non plus.

4. On dit parfois qu'au moins la nouvelle physique s'accorde avec la vision du monde
mystique. Je crois que nous pouvons aisment convenir que certains aspects de certaines
interprtations de formalismes quantiques mathmatiques, lorsqu'on les traduit en
langage courant, sembleraient similaires des aspects de la vision du mystique, non du
monde (niveaux 1 6), mais du niveau 1. L'insight du mystique, cependant, ne trouve pas
sa validation ni son explication dans ce possible accord. Mais si cet accord permet de
"lgitimer" le mysticisme aux yeux du public, si du moins il ne fait en sorte que ses
adhrents nient radicalement les tats mystiques comme tant hallucinatoires, s'il ouvre la
voie une plus grande acceptation de l'exprience mystique alors, nous devrons
vraiment remercier la nouvelle physique.

Au-del de ce point, cependant, n'oubliez pas l'avertissement de Bernstein: remerciez la


nouvelle physique d'tre d'accord avec vous, mais rsistez la tentation de construire vos
modles transpersonnels sur les sables mouvants des thories changeantes du niveau 1.

LE CERVEAU HOLOGRAPHIQUE

Alors que les thories holographique/ implicite de la physique concernent sans quivoque
le niveau 1, les thories des processus du cerveau holographique concernent,
apparemment, le niveau 3, ou l'esprit et la mmoire. En tandem, alors, ces thories
couvriraient, plus ou moins, les niveaux 1 3.

Mais au-del de cela, certains suggrent que si l'esprit tait holographique, alors cela
pourrait aussi expliquer des expriences transpersonnelles suprieures, par l'intermdiaire
de l'esprit se fondant dans le flou holographique au-del des distinctions explicites. Ce
flou holographique est appel un "domaine de frquence" o, supposment, les objets
dans l'espace et le temps "n'existent pas". Le flou holographique ou domaine de frquence
est dcrit ainsi: "Pas d'espace, pas de temps que des vnements (ou des frquences)."

vitons les difficults d'avoir des vnements existant sans aucune sorte d'espace ou de
temps; ignorons aussi le fait que des objets physiques (des choses de l'espace-temps)
soient ncessaires au dpart pour produire des hologrammes. A part cela, comment cet
esprit holographique conciderait-il avec la philosophie prenne?

En premier lieu, c'est fondamentalement l'enregistrement de la mmoire-information


qu'on dit se produire selon les principes de l'holographie optique. Les mcanismes de
l'holographie sont expliqus par les transforms mathmatiques. L'une de ces curieuses
proprits est que en termes mathmatiques du moins l'espace et le temps semblent,
un certain stade, tre exclus et que les rsultats temporels dsirs sont retrouvs par une
fonction de lecture de l'information de frquence. Ceci a men la notion d'un domaine
de frquences la notion selon laquelle les objets de l'espace/temps viennent de
"frquences sans espace ni temps".

Je ne doute aucunement que ceci soit fondamentalement vrai que la mmoire est
enregistre holographiquement, exactement comme on le dit. Je crois aussi que la
recherche qui dmontre cela est brillante. Mais au-del de cela, comment ceci est reli de
quelque faon aux tats transcendants est loin d'tre clair. Bien sr, il y a des similitudes
de langage le flou holographique ("sans espace ni temps") donne l'impression d'tre un
tat mystique. Il ressemble aussi au fait de s'vanouir. Il y a un monde de diffrence entre
la conscience prtemporelle, qui n'a ni espace ni temps, et la conscience transtemporelle,
qui dpasse l'espace et le temps tout en les embrassant toujours. "L'ternit", aprs tout,
"est amoureuse des productions du temps". Cela ne prouve aucunement que le flou
holographique n'est pas un tat transcendantal; cela dmontre qu'on ne peut en dcider
ainsi en se fondant sur des corrlations de langage.

Nanmoins, on dit qu'un virage vers une "perception du flou holographique" produirait
des tats transcendants. Puisque c'est la mmoire qui est holographiquement enregistre
[7], qu'est-ce que cela signifierait en fait que de changer pour une perception du contenu
d'enregistrement de la mmoire personnelle? Cela serait-il le nirvna, une conscience
directe qui a transcend mais qui a inclus toute manifestation?

Selon la thorie elle-mme, je ne crois pas que cela rsulterait ou pourrait rsulter en
quoi que ce soit d'autre qu'une exprience du contenu d'enregistrement de sa propre
mmoire, embrouill comme il se doit et sans l'avantage de la lecture linaire. Comment
quelqu'un pourrait sauter d'un flou de sa propre mmoire une conscience claire comme
du cristal qui transcende l'esprit, le corps, le moi et le monde, Cela n'est pas du tout
clarifi. C'est un saut thorique farfelu que d'aller de "la mmoire personnelle et
holographiquement enregistre" "par consquent, tous les esprits font partie d'un
hologramme transpersonnel".

7 La "perception" du domaine de la frquence physique est expose plus tard en


conjonction avec la critique de William Tiller du paradigme holographique.
Je crois plutt que nous permettons certaines similitudes superficielles de langage de
rgner sur la raison. L'exemple prcdent est suffisant, peut-tre, mais au-del de cela, il
existe toute la notion d'un "domaine de frquence transcendant au-del de l'espace et du
temps" qu'on dit tre le flou holographique implicite. Cette notion, il me semble, ne
gagne crdibilit que grce aux bizarreries des mathmatiques impliques, qui traduisent
"choses" en "frquences" et permettent ainsi un lapsus de passer pour des vrits
transcendantes. On prsuppose que les transforms du "domaine de la frquence" font
rfrence aux ralits issues de l'exprience d'une faon qui n'est pas seulement
incroyable, mais franchement contradictoire.

Le transform de "choses" en "frquences" n'est pas un transform de l'espace/temps en


"ni espace ni temps", mais un transform des objets de l'espace/temps en frquences de
l'espace/temps. Frquence ne signifie pas "ni espace ni temps"; cela veut dire cycles /
seconde ou espace par temps. Lire les mathmatiques autrement est plus qu'un saut
quantique; c'est un acte de foi.

Cette "thorie a gagn un soutien croissant et n'a pas t srieusement mise en question.
Un corps impressionnant de recherche dans de nombreux laboratoires a dmontr que les
structures du cerveau voient, entendent, gotent, sentent et touchent grce l'analyse
mathmatique sophistique de frquences temporelles et / ou spatiales [d'o la primaut
du domaine des frquences)" (ReVision, 1978). Je ne conteste pas cette thorie; je rpte,
et dis sincrement, que je suis tout fait impressionn. Je ne suis pas impressionn,
toutefois, par des spculations qui donnent des "frquences temporelles et / ou
spatiales" le nom de "sans espace ni temps". Et c'est justement dans ce lapsus smantique
que cette thorie donne l'impression d'tre vivante.

Il va sans dire, ce tour de passe-passe smantique, qui remplace le flou personnel par
l'unit transpersonnelle, ne sert ni le brillant travail de ces chercheurs du cerveau
Pribram, par exemple ni la difficile tche des transpersonnalistes qui tentent
d'expliquer la transcendance.

Outre ce qui prcde, il nous reste un autre fil de l'argument qui a t propos. Pour ce fil,
supposons priori que l'esprit en gnral est holographique dans son fonctionnement.
Cela s'insrerait-il dans la philosophie prenne et, au-del de cela, cela nexpliquerait-il
pas les niveaux de conscience suprieurs?

J'ai bien peur que, mme pourvus de cette gnreuse avance, nous n'allions pas plus loin.
D'abord, le fait que la structure profonde du champ mental soit holographique
n'expliquerait pas en soi les niveaux transpersonnels, ou les niveaux 4 6. Les raisons,
selon les traditions prennes sont que: 1) chaque niveau est une holoarchie, et non
seulement l'esprit; et 2) de faire l'exprience de l'holoarchie de chaque niveau n'amne
personne au-del de ce niveau, mais ne fait que permettre des insights plus profonds dans
ce niveau. Tout comme l'holoarchie du niveau 1 n'implique ni n'exige les niveaux 2, 3, 4,
5 ou 6, l'holoarchie du niveau 3 n'explique automatiquement aucun des niveaux au-dessus
de lui (niveaux 4, 5 ou 6).

De mme, l'exprience vritable de l'holoarchie du niveau 3 n'impliquerait pas


ncessairement ni mme vraisemblablement les niveaux 4, 5 ou 6. L'esprit
superficiel ordinaire (niveau 3) s'prouve en tant que distinct en quelque sorte et isol des
autres esprits. Faire lexprience de l'holoarchie du niveau 3 serait, tout au plus, ressentir
une forte rsonance, et mme un chevauchement avec d'autres esprits. Cela produirait une
exprience directe de l'empathie interpersonnelle vritable.

Mais empathie interpersonnelle n'est pas identit transpersonnelle. Dans des tats de
conscience transpersonnels (au-del de certaines pratiques introductoires), que l'esprit soit
ou non prsent, explicite ou implicite, net ou holographiquement embrouill tout cela
n'est pas pertinent. Les domaines suprieurs transcendent mais peuvent aisment inclure
l'esprit, et que lesprit lui-mme surgisse, cela na pas d'importance. Lexistence des tats
levs ne peut tre explique en termes de quelque chose qui peut arriver ou non un tat
infrieur, que cet tat soit dpli et projet ou repli et flou. Autant dire qu'on peut
expliquer le niveau 2 en embrouillant suffisamment le niveau 1. Ce rductionnisme
dguis a amen Willis Harman faire ce commentaire: "Ces thories holographiques
interprteraient encore la donne primaire, la conscience, en termes d'une autre chose
ultimement quantifiable [c'est--dire en termes de mesurages de niveau physique
infrieur]. Ces thories ne sont pas encore de la nouvelle science, mais plutt de
l'ancienne, o l'on tente de se dbarrasser de la conscience en l'expliquant, plutt que de
la comprendre."

Finalement, on pourrait suivre les suggestions de William Tiller: "La [thorie de la


perception crbrale] holographique s'est surtout concentre sur l'apprhension
sensorielle de cette reprsentation au niveau physique de la conscience [niveau 1]. [Nous
serions mieux] d'opter pour une reprsentation [hirarchique] multidimensionnelle de la
conscience et des structures possibles de l'univers pour sa manifestation. Sans une telle
extension au-del du cadre de perception purement physique, la porte de tout "nouveau
paradigme" sera srieusement limite."

Tiller suggre deux arguments. D'abord, ce "domaine de frquences" qu'on dit si


transcendant est en ralit "prcendant" : c'est seulement le "bourdonnement florissant"
de frquences du niveau physique 1 avant que le cerveau ne puisse les distribuer en une
organisation d'ordre suprieur. Une exprience relle de cette "ralit primaire" serait, en
fait, pure rgression, et non transcendance. Deuximement, l'holoarchie ne peut expliquer
la hirarchie, et ainsi toute la thorie, en tant que paradigme, tombe plat dans la zone
d'explication la plus importante [8].

8 Je ne conteste pas le fait que la perception et la mmoire se produisent tel qu'on le


suggre dans cette hypothse. Je ne remets pas du tout en question l'hypothse sur cette
base. Je remets en question le fait que, au-del de cela, l'hypothse puisse avoir quelque
chose voir avec des ralits transcendantes. Ma conclusion personnelle provisoire est
qu'elle semble seulement avoir quelque chose voir avec la vritable transcendance
cause des bizarreries des mathmatiques impliques et cause d'une moins que prcise
manipulation du langage. Particulirement discutable est le saut de "chaque souvenir
personnel est galement distribu dans chaque cellule du cerveau individuel" "par
consquent, chaque esprit individuel fait partie d'un hologramme transpersonnel". Le
paradigme holographique est dcrit comme tant "une en toutes et toutes en une" o
"une" signifie la "mmoire /cellule individuelle" et "toutes" signifie "toutes les cellules
crbrales individuelles". A cet nonc correct, on fait une substitution rapide: "une" en
CONCLUSIONS ET VALUATIONS

Plusieurs rpercussions bnfiques proviennent de la "nouvelle physique" et du


"paradigme holographique", mme si nous concluons, comme nous devons, je crois, le
faire, que ce dernier ne constitue en rien un paradigme globalisant ou mme adquat.
Mais on retrouve, parmi les avantages:

1. L'intrt de physiciens influents pour la mtaphysique. Ceci a pris deux formes.


D'abord, le fait de bien vouloir postuler des ordres incommensurables et indtectables de
physis cachs derrire ou immanents l'nergie/masse explicite. C'est l'ordre potentiel /
implicite quantique de Bohm. Ensuite, le fait que les physiciens aient voulu reconnatre la
ncessit d'inclure ultimement des rfrences des niveaux suprieurs la physis dans
leurs explications de physis. Comme l'nonce Wheeler: "Aucune thorie de la physique
qui ne s'occupe que de physique n'expliquera jamais la physique." (cit par Sarfatti, 1974)
Et Sarfatti: "Par consquent, les affirmations mtaphysiques sont absolument vitales
l'volution de la physique" (1974), la suite de quoi Sarfatti introduit la notion d'"esprit
crant la matire". Mais mme si c'tait vrai de la faon dont le propose Sarfatti, la
philosophie prenne lui rappellerait dajouter: "Et vous avez alors le besoin du mta-
mental pour expliquer l'esprit, ce qui vous amne au subtil; et vous avez alors besoin du
mta-subtil pour expliquer cela, et ainsi de suite jusqu' ce que, comme une courbe
asymptotique qui approche d'un axe mais ne l'atteint jamais jusqu' l'infini, vous arriviez
la conscience-en-tant-que-telle."

2. La rage rductionniste de la science mcaniste semble finalement se calmer, et la


physique souvre et par l'impact de l'autorit, beaucoup d'autres champs tout autant
des systmes ouverts d'une nouveaut et d'une crativit sans fin. C'est particulirement
vident dans le travail de I. Prigogine, dont la thorie des structures dissipatrices est aussi
belle que profonde. Les structures dissipatrices sont simplement une faon mathmatique
de permettre l'volution d'tats suprieurs, plus organiss, partir de structures moins
complexes. Les structures dissipatrices ne sont pas vraiment des explications de la vie ou
de 1esprit, comme on le dit parfois, mais plutt des descriptions de ce qui doit arriver
la matire afin que des domaines levs se dplient. Le fait d'identifier vraiment l'essence
d'un niveau lev comme tant simplement une structure dissipatrice est comme de dire
que la Mona Lisa n'est qu'une concentration de peinture. L'importance des mathmatiques
dissipatrices rside en ce qu'elles dmontrent nettement et permettent pleinement
l'avnement des patterns d'mergence d'un ordre suprieur.

3. Tout le mouvement de la nouvelle physique et du nouveau paradigme dmontre au


moins qu'il y a un intrt profond, srieux et en croissance rapide pour les proccupations
ternelles et les ralits transcendantes, mme chez des spcialistes et dans des champs
qui, il y a une dcennie, ne s'en seraient gure souci. Peu importe qu'une partie de , qui
est dit soit prmatur, le fait qu'on le dise est extraordinaire.

vient dire "un individu" ou "une personne" et "toutes" en vient dire, non pas toutes les
autres cellules crbrales personnelles, mais toutes les autres personnes, point la ligne.
4. Des livres comme Le Tao de la physique et The Dancing Wu-Li Masters (La danse des
lments) et des publications telles que le Brain/Mind Bulletin de Marilyn Ferguson
prsentent de vastes quantits de gens non seulement l'intrigue de la science et de la
physique occidentales, mais aussi des aspects de la sagesse et de la pense orientales, et
de faons qui n'auraient tout simplement pas t possibles auparavant.

Par consquent, mon intention, en critiquant certains aspects du nouveau paradigme, n'est
certainement pas de freiner l'intrt envers des tentatives futures. C'est plutt un appel
la prcision et la clart dans la prsentation de questions qui sont, aprs tout
extraordinairement complexes et qui rsistent la gnralisation rapide. Et je dis ceci
avec une certaine urgence, parce que dans notre zle comprhensible promulguer un
nouveau paradigme, qui en quelque sorte touche des bases ayant la physique une
extrmit et le mysticisme l'autre, nous sommes susceptibles de nous aliner les deux
parties et tout le monde les deux.

Dj, un bout du spectre, certains chercheurs orients vers la mystique ou l'approche


transpersonnelle Tiller, Harman, W.I. Thompson, Eisenbud ont exprim leur
dception ou leur rejet total l'gard du nouveau paradigme.

l'autre bout: dj certains physiciens sont furieux cause du traitement "mystique"


auquel on soumet la physique des particules. Le physicien des particules Jeremy
Bernstein a lanc rcemment une salve sur de telles tentatives, les qualifiant de
"superficielles et de profondment trompeuses" (1978). Et une autorit comme John
Wheeler, rien de moins dont le nom est toujours mentionn dans le "nouveau
paradigme" et d'une faon qu'il trouve agaante a rcemment publi deux lettres
cinglantes dans lesquelles, entre autres choses, il taxe les tentatives de
physique/mysticisme d'"effort alambiqu", de "science pathologique" et de
"charlatanisme". "Qui plus est, dclare-t-il, dans la thorie quantique de l'observation,
mon prsent champ de recherches, je trouve le travail honnte presque submerg par le
bourdonnement d'ides absolument farfelues avances dans le but d'tablir un lien entre
la mcanique quantique et la parapsychologie" (1979) et la psychologie
transpersonnelle, au demeurant. Il a demand, et l'amiral Hyman G. Rickover s'est joint
lui, de faire cesser toutes les approbations de l'American Association for the
Advancement of Science toute recherche tendant au transpersonnalisme, une sanction
que Margaret Mead, il y a dix ans, s'est battue si fort pour obtenir.

Le travail de ces scientifiques Bohm, Pribram, Wheeler et les autres est trop
important pour tre alourdi de folles spculations sur le mysticisme. Et le mysticisme lui-
mme est trop profond pour tre raccord des phases de la thorisation scientifique.
Qu'ils s'apprcient l'un l'autre, et que leur dialogue et leur change mutuel d'ides ne
cesse jamais. Mais des mariages injustifis et prmaturs finissent habituellement par le
divorce et, trop souvent, un divorce qui blesse terriblement les deux parties.

RFRENCES

Beynam, L. "The Emergent Paradigm in Science". In ReVision, 1, 2, 1978.


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