Titus Burckhardt, Cle Spirituelle de L'astrologie Musulmane D'apres Mohyiddin Ibn Arabi

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~

Titus Burckhardt

Cl spirituelle

de

L'Astrologie Musulmane

d'aprs
Mohyiddn Ibn Arab

HON
OA\HII:N'5

""'TV"
ARCH

MILANO
1974

L'uvre crite du plus grand Matre (ash-shaikh al


akbar) souH, Mohyiddn ibn Arabi, comporte certaines con
sidrations sur l'astrologie qui permettent d'entrevoir com
ment cette science, qui n'est parvenue l'Occident moderne
que sous une forme fragmentaire et rduite quelques-unes de
ses applications les plus contingentes, pouvait se rattacher
des principes mtaphysiques, donc, relevant d'une connaissan
ce qui se 'Suffit elle-mme. L'astrologie, telle qu'elle fut r
pandue au moyen ge dans les civilisations chrtienne et isla
mique et qu'elle subsiste encore en certains pays arabes, doit
sa forme l'hermtisme alexandrin; elle n'est donc ni isla
mique ni chrtienne dans son essence, et elle ne saurait d'ail
leurs trouver une place dans la perspective religieuse des tra
ditions monothistes, tant donn que cette perspective in
siste sur la responsabilit de l'individu devant son Crateur
et qu'elle vite de ce fait tout ce qui pourrait voiler cette re
lation par la considration de causes intermdiaires. Si f'astro
logie a nanmoins pu tre intgre dans les sotrismes chr
tien et musulman, c'est qu'elle perptuait, vehicule par l'her
mtisme, certains aspect d'un symbolisme trs primordial; la
pntration contemplative de l'ambiance cosmique, et l'identi
9

fication spontane des apparences - constantes et rythmiques


du monde sensible avec leurs prototypes ternels corres
pondent en effet une mentalit encore primitive, au sens
propre et positif de ce terme. Cette primordialit implicite du
symbolisme astrologique se rallume au contact de la spiritua
lit, directe et universelle, d'un sotrisme vivant, comme le
scintillement d'une pierre prcieuse s'allume lorsqu'elle est
expose aux rayons d'une lumire.
Mohyiddn ibn Arabi enchsse les donnes de l'astrologie
hermtique dans l'difice de sa cosmologie, qu'il rsume mo
un schma de sphres concentriques, en prenant com
me point de dpart et comme terme de comparaison le sys
tme gocentrique du monde plantaire tel que le concevait
l'as'trologie mdivale. La polarisation subjective de ce sys
tme
nous voulons dire le fait que la position terrestre de
l'tre humain sert de point fixe auquel seront rapports tous les
mouvements des astres - symbolise ici le rle central de
l'homme dans l'ensemble cosmique, dont l'homme est comme
l'aboutissement et le centre de gravit. Cette perspective sym
bolique ne dpend naturellement pas de la ralit purement
physique ou spatiale, la seule qu'envisage l'astronomie mo
derne, du monde des astres; le systme gocentrique tant
conforme la ralit telle qu'elle se prsente immdiatement
aux yeux humains, il possde en lui-mme toute la cohrence
logique qu'un ensemble de connaissances doit avoir pour pou
voir constituer une science exacte. La dcouverte du systme
hliocentrique, qui correspond un dveloppement possible
et homogne, mais trs particulier de la connaissance empiri
que du monde sensible, ne saurait videmment jamais rien
prouver contre la position centrale de l'tre humain dans le
cosmos; seulement, la possibilit de concevoir le monde pla
ntaire comme si on le contemplait d'une position non hu
10

L.

maine, et mme comme si on pouvait faire abstraction de


l'existence de l'tre humain - dont la conscience reste pour
avait pro
tant le contenant de toutes ces conceptions
duit un dsquilibre intellectuel qui montre bien qu'une exten
sion artificielle de la connaissance empirique a quelque
chose d'anormal, et qu'elle est, intellectuellement, non seule
ment indiffrente, mais mme nuisible (1). La dcouverte de
l'hliocentrisme a eu des effets semblables ceux de certaines
vulgarisations d'sotrisme; nous pensons ici surtout ces
inversions de point de vue qui sont propres la spculation
sotrique (2); la confrontation des symbolismes respectifs

1. ... Les li erreurs sciemifiques" dues une subjectivit collective


par exemple celle du genre humain et des tres terrestres en gnral voyant
le soleil voluer autour de la terre
traduisent un symbolisme vrai, et par
consquent des ((vrits", qui sont videmment indpendantes des simples
faits qui les vhiculent d'une manire toute provisoire; l'exprience subiec
telle que ceIIe que nous venons de mentionner titre d'exemple, n'a
de toute vidence rien de fortuit. Il est "lgitime" pour l'homme d'admettre
que la terre est plate, puisqu'elle l'est empiriquement; par contre, il est par
faitement inutile de savoir qu'eIIe est ronde, puisque ce savoir n'aioute rien
au symbolisme des apparences, mais le dtruit inutilement et le
par un autre qui, lui ne saurait exprimer
les mmes vrits. tout en
prsentant l'inconvnient d'tre contraire
l'exprience humaine imm
diate et gnrale. La connaissance des faits pour eux-mmes n'a, en dehors
des applications scientifiques intresses, aucune valeur; autrement dit ou
bien l'on se situe dans le vrit absolue, et alors les faits ne sont plus
rien, ou bien l'on se situe sur le terrain des faits, et alors on est de toutes fa
ons dans l'ignorance. A part cela, il faut dire encore que la destruction du
symbolisme naturel et immdiat des faits - tels que la forme plane de la
terre ou le mouvement circulaire du soleil
entrane de graves inconv
nients pour la civilisation o elle se produit, comme le montre satit
l'exemple de la civilisation occidentale . (Frithjof Schuon: Fatalit et pro
grs, dans Etudes traditionnelles).
2. II est des indices qui permettent de supposer que les Pythagoriciens
connaissaient dj le systme hliocentrique. II n'est pas exclu que cette

11

des systmes gocentriques et hliocentriques montre fort


bien cc qu'est une telle inversion: en effet, le fait que le
soleil, source de la lumire des plantes, est galement le
ple qui rgit leurs mouvements, comporte comme toute
chose: existante un symbolisme vident et reprsente en rali
t. toujours au point de vue symbolique et spirituel, un point
dt' Vllt' complmentaire de celui de l'astronomie gocen
( 1).

rarchie des sphres clestes, et cela en comptant un mme


nombre de cieux suprieurs et de cieux infrieurs au ciet du
soleil; il amplifie toutefois le systme de Ptolme en souli.
gnant encore cette symtrie des sphres par rapport celle
du soleil: selon son systme cosmologique, qu'il tient pro
bablement du Soufi andalou Ibn Masarrah, le soleil ne se
trouve pas seulement au milieu des six plantes connues,
Mars (al-Mirikh), ,Jupiter (al-Mushtar) et Saturne (Zuhul)
tant plus loigns de la terre (al-Ardh) que le soleil (ash.

Mohyiddn ibn Arab englobe d'une certaine faon la


vt<l'l essentielle de l'hliocentrisme dans son difice cosmo
IOHiqllt': comme Ptolme et comme tout le moyen ge, il
ill'il'iiHIlC IlU soleil, qu'il compare au ple (qutb) et au cur
dn monde (qalb al-lam) , une position centrale dans la bi-

IIIUllllluutll'C' sc

soit toujours maintenue, et que la dcouverte de Copernic

Ilfl .,,11 rll ralit qu'une simple vulgarisation, comme beaucoup d'autres
".I~lullvrllrN" dc la Renaissance.

l :ul'rt'tli\' sc refre d'ailleurs lui-mme, dans la prface - adresse au Pape


de son livre fondamental Sur les orbites des corps clestes",
Ilh ~ltl. ,Ir Syr'lIt'lIse et certaines citations de Plutarque, Hictas tait pytha
N"II. h'lI; CIl Aristote, dans son livre "Du ciel", dit que "les philosophes itali
'I""., '1 11 '011 IIppclle pythagoriciens, sont d'un avis contraire celui de la
I,hll"lll tir" physiciens, car ils affirment que le centre du monde est occup
11111' 1.. 11'11, IUlldis que la terre, qui est une des toiles, se meut cercle au
111111 ,h "l' rllll'l'. causant ainsi le jour et la nuit". Aristarque de Samos
1t.'11111111111' 1\ Alexandrie vers 250 av. ].-c., enseigna galement le systme
h..IIIII'I'I1III.I"r; dl~ mme AI-Birn, le clbre compilateur musulman des
nltlll,I"". hlll(/OIlCS, rapporte que certains sages de l'Inde ont soutenu que
1. "". 111111'111' lI11tnllf du soleil.
1 1:.. qlll "l'lld inconciliables les deux systmes n'est videmment pas leur
t'ftjjl Il "Pl Iit ur " , IIwis la thorie sur la gravitation rattache au systme hlio
... "Hh~II".

J'lIul III

1.1

li

Shams), et Vnus (az-Zuhrah), Mercure (al-Utarid) et la LlIIw


H

(al-Qamar) plus rapprochs, - mais au del du ciel de Sa


turne se situent encore la vote du ciel des toiles fixes
(falak al-kawkib), celle du ciel non toil (al-falak al-atlas), et
les deux sphres suprmes du Pidestal divin (al-Kurs) et du
Trne divin (al-'Arsh), sphres concentriques auxquelles
correspondent symtriquement les quatre sphres sublunaires
de l'ther (al-thr), de l'air (al-haw), de l'eau (al-m) et de
la terre (al-ardh). Ainsi se rpartissent sept degrs de chaque
ct de la sphre du soleil, le Trne divin symbolisant la
synthse de tout le cosmos, et le milieu de la terre en tant
la fois l'aboutissement infrieur et le centre di fixation.
Il va sans dire que, entre toutes les sphres de cette hi
rarchie, seules les sphres plantaires et celles des toiles
fixes correspondent telles quelles l'exprience sensible,
encore qu'il ne faille pas les envisager sous ce seul rapport;
quant aux sphres sublunaires de l'ther - qui ne signifie
pas ici la quintessence, mais le milieu cosmique dans lequel
se rsorbe le feu, --de l'air et de l'eau, il faut y voir plutt
une hirarchie thorique suivant les degrs de densit, que
des sphres spatiales. Pour ce qui est des sphres suprmes
le premier conte
du Pidestal et du Trne divins,
nant les cieux et la terre et le second englobant toute
chose (1), -leur forme de sphres est purement symbolique,
et elles marquent en somme le passage de l'astronomie la
cosmologie intgrale et mtaphysique (2): le Ciel sans toiles
(al-falak al-atlas), qui est un vide , et qui de ce fait n'est

mme plus spatial, mais marque plutt la fin de l'espace,


marque aussi par l mme la discontinuit entre le formel
et l'informel; celui-ci apparat en effet comme un nant
au point de vue du formel, de mme que le principiel apparat
comme un nant au point de vue du manifest. On aura
compris que ce passage du point de vue astronomique au
point de vue cosmologique ou mtaphysique n'a rien d'arbi
traire: la distinction entre un ciel visible et un ciel chappant
notre vue est relle, mme si son application n'est que sym
bolique, et l' invisible devient ici spontanment le trans
cendant , conformment au symbolisme oriental; les sphres
de la manifestation informelle - le Trne et le Pides
tal - sont appeles expressment le monde invisible
( ,lam al-ghab ) le mot ghab signifiant tout ce qui est hors de
porte de notre vue, ce qui montre bien cette correspondance
symbolique entre 1' invisible et le transcendant .
Le Pidestal sur lequel sont poss les Pieds de Celui
qui est assis sur le Trne , reprsente la premire polari
sation , ou dtermination distinctive, en vue de la manifes
tation formelle, dtermination qui comporte une affirma
tion et une ngation auxquelles correspondent, dans le
Livre rvl, le commandement (al-amr) et la prohibition
(an-nah).
Le ciel sans toiles (al-falak al-atlas) est aussi le ciel des
douze tours (burj) ou signes du zodiaque; ceux-ci ne

1. C'est ce qu'enseigne le Qoran. Selon une expression du Prophte, le


monde est contenu dans le "Pidestal" divin et celui-ci dans le "Trne"
comme un anneau dans un moule de terre.
2. Dans certains schmas symboliques du Sheikh al-akbar, on trouve
d'autres sphres plus vastes que celle du "Trne", ce symbolisme tant
naturellement susceptible d'une extension plus ou moins grande; cependant,

la hirarchie que nous venons d'numrer reprsente en elle mme un en


semble complet, puisque le "Trne" divin englobe toute la manifestation.
C'est ce qu'enseigne Mohyiddin ibn Arabi, conformment au Qoran, dans les
"Rvlations mecquoises" (Al-Futht al-makkiyah); dans d'autres crits
il parlera de toute une hirarchie de diffrents "Trnes" qui constituent les
principaux degrs de l'Existence informelle.

14

15

sont donc pas identiques aux douze constellations zodiacales


contenues dans le ciel des toiles fixes (falak al-kawkib ou
falak al-manzil) , mais reprsentent des determinations vir
tuelles (maqdir) de l'espace cleste et ne se diffrencient que
par rapport aux stations ou mansions (manzil) plan
taires projetes sur le ciel des toiles fixes. Il y a l un Foint
trs important pour la comprhension de l'astrologie arabe et
occidentale; nous y reviendrons plus loin.
La cosmologie traditionnelle ne fait pas de diffrence expli
cite entre les cieux plantaires dans leur ralit corporel~e et
visible et ce qui leur correspond dans l'ordre subtil, car le
symbole s'identifie essentiellement la chose symbolise, et il
n'y a lieu de faire une distinction entre l'un et l'autre que l
o cette distinction peut pratiquement se faire et que par suite
l'aspect driv peut tre pris sparment pour le tout, comme
il arrive lorsque la forme corporelle d'un tre vivant est prise
pour l'tre entier; or dans le cas des rythmes plantaires - car
ce sont eux qui constituent les diffrents cieux , - cette
distinction ne peut tre faite que par l'application thorique de
conceptions mcaniques trangres la mentalit contemplative
des civilisations traditionnelles (1).
Les sphres plantaires sont donc la fois des parties du
monde corporel et des degrs du monde subtil; le Ciel sans
toiles, qui est l'extrme limite du monde sensible, enveloppe
symboliquement tout l'tat humain y compris tous les pro
longements suprieurs de cet tat; le Sheikh al-akbar sitl}e
1. Ainsi, les Indiens de l'Amrique du Nord, qui ne font pas de thories
sur l'lectricit, peuvent voir dans l'clair la puissance mme de l'''Oiseau
Tonnerre", qui est l'Esprit divin dans la manifestation macrocosmique: il y a
mme des cas o la percussion de l'clair confre des puissances spirituelles,
ce qui ne serait pas possible chez des Europens qui ont l'habitude de spa
rer mentalement ls formes sensibles de leurs archtypes "surnaturels".

16

en e:Efet les tats paradisiaques entre le ciel des toiles fixes et


le ciel sans toiles - ou ciel des Tours zodiacales, - les
paradis suprieurs touchant pour ainsi dire l'existence infor
melle, tout en restant circonscrits par la forme subtile de l'tre
humain (1). Le ciel des tours zodiacales est donc, par rap
port l'tat humain intgral, le lieu des archtypes.

Ce qui se situe au del du ciel des toiles fixes, entre ce


lui-ci et le ciel sans toiles se maintient dans la dure pure,
tandis que ce qui est en dessous du ciel des toiles fixes est
soumis la gnration et la corruption. Il peut sembler
trange que la sphre du ciel suprme, qui est le primum
mobile) soit identifi au monde incorruptible, alors que le
mouvement volue ncessairement dans le temps. Mais ce
dont il faut tenir compte ici, c'est que la rvolution du ciel le
plus vaste, tant elle-mme la mesure fondamentale du temps
suivant laquelle tout autre mouvement est mesur, ne saurait
tre elle-mme susceptible de mesure temporelle, ce qui cor
respond l'indiffrenciation de la dure pur~. De mme que
les mouvements concentriques des astres se difrfrencient dans
l'ordre de leur dpendance successive, de mme la condition
temporelle se prcise et se contracte en quelque sorte dans la
mesure o elle interfre avec la condition spatiale; et par ana
logie, les diffrentes sphres du monde plantaire - ou plus
1. Il s'agit de la dfinition cosmologique des tats paradisiaques, et non
de leur symbolisme implicite, qui fait que leurs descriptions peuvent tre
transposes aux degrs les plus hauts de l'existence et mme dans l'Etre pur,
puisqu'on parle en langage soufique d'un" paradis de l'Essence" (djannat adh
dht).

17

exactement les rythmes de leurs rvolutions


s'chelonnant
partir des limites indfinissables de l'espace jusqu'au milieu
terrestre, peuvent tre considrs comme autant de degrs suc
cessifs de la contraction temporelle (2),
II

Le symbolisme astrologique rside dans les points de


jonction des conditions fondamentales du monde sensible, et
notamment dans les jonctions du temps, de l'espace et du nom
bre. On sait que la dfinition des rgions ou parties de la grande
sphre du ciel sans toiles au moyen des points de repre
qu'offrent les toiles fixes concide, en astronomie, avec la
dfinition des divisions du temps. Or la sphre-limite du ciel
n'est mesurable qu'en raison des directions de l'espace; lor
squ'on parle des parties du ciel, on ne fait que dfinir des
dircctions; d'autre part, celles-ci sont l'expression de la nature
qualitative de l'espace, de faon ce que les limites de l'ind
fini spatial se rintgrent en quelque sorte dans l'aspect quali
tatif cn question, l'ensemble des directions qui rayonnent d'un
centre contenant virtuellement toutes les dterminations spa
tiales possibles (1), L'panouissement extrme et indfini de
ces directions est la vote du ciel non-toil et leur centre est
chaquc tre vivant qui se trouve sur terre, sans que la perspec
tive >.> des directions diffre d'un individu l'autre, puisque nos
2. Pour cette raison, la hirarchie astrologique des deux plantaires situe
Mercure entre Vnus et la Terre, pL'sque Mercure se meut plus rapide
ment que Vnus, et ceci bien que Vnus soit plus prs de la Terre et Mercure
plus prs du SoleiL

18

1. Cf. le chapitre sur l'espace qualif dans Le rgne de la quantit et 1er


\'111/11'\' dt'.\' temps
Ren Gunon,

oc

19

axes visuels concident sans se confondre lorsque nous fixons


un mme point de la vote cleste, - en quoi s'exprime vi
demment une concidence du point de vue microcosmique avec
le point de vue macrocosmique (2). Il faut distinguer ces
directions objectives , c'est--dire gales pour tous les tres
terrestres considrant le ciel au mme instant temporel, et les
directions qu'on peut appeler subjectives , parce qu'elles
sont dtermines par le znith et le nadir individuel; nous fe
rons remarquer en passant que c'est prcisment la comparai
son entre ces deux ordres de directions de l'espace cleste qui
est la base de l'horoscope. L'indfinit des directions de l'es
pace est en elle-mme indiffrencie, nous voulons dire qu'elle
contient virtuellement toutes les relations spatiales possibles
sans qu'on puisse les dfinir. Mais les qualits de ces directions
de l'espace cleste sont interdpendantes; nous entendons par
2. Cette concidence des perspectives n'a pas seulement lieu lorsqu'on
envisage un point du ciel-limite, )Tlais dj qual1d on fixe une plante.
Elle s'ecprime dans l'exprience courante selon laquelle chaque spectateur
qui regarde le soleil se lever ou se coucher au del d'une surface d'eau
voit la "voie" des rayons reflts dans l'eau venir directement vers lui;
lorsque le spectateur se dplace, cette voie lumineuse le suit. - Signalons
en passant lue les Indiens de l'Amrique du Nord considrent ce chemin
lumineux projet sur l'eau par les rayons du soleil couchant comme le
sentier des mes vers le monde des anctres; en effet, on peut y voir
comme une projection "horizontale" du "rayon solaire", qui, selon le sym
bolisme hindou, reprsente le lien par lequel chaque tre particulier se rat
tache directement son principe. On sait que les textes sacrs de l'Hin
douisme dcrivent ce rayon comme allant de la" couronne" de la tte au
soleil. Le mme symbolisme - impliquant la fois l'ide d'un lien direct
et celle de la "Voie Divine" - se retrouve dans ce passage de la Sourate
Hd: "Il n'existe pas d'tre vivant qu'Il (Allah) ne tient pas par son toupet;
en vrit mon Seigneur est sur une voie droite". - Comme la "Voie
Divine", la direction qui va d'un tre terrestre quelconque un point d
termin de la vote cleste est la fois unique pour chacun et une pour
tous.

20

l que ds qu'une direction de l'espace cleste - ou le point de


la sphre-limite qui lui correspond - est dfini, tout l'ensemble
des autres directions se diffrencie et se polarise par rapport
celle-l. C'est dans ce sens que le Matre dit que les divisions
du ciel non-toil ou ciel des tours zodiacales sont des
dterminations virtuelles qui ne se diffrencient que par
rapport au ciel des stations des astres. Or les points fixes
du ciel des stations sont avant tout les ples respectifs de la
rvolution diurne du ciel (ou de la terre) et du cycle annuel du
soleil, et par consquent les points que la divergence de ces
ples dtermine sur l'cliptique, c'est--dire les deux quinoxes,
points d'intersection de l'orbite solaire avec l'quateur, d'une
part, et les deux solstices, points extrmes des deux phases,
ascendante et descendante, du cycle solaire d'autre part. Ds
que ces quatre points de l'cliptique sont fixs, les huit autres
divisions zodiacales leur rpondent en raison des partitions ter
naires et snaires qui sont naturellement inhrentes au cercle,
ainsi que l'exprime le rapport entre le rayon et les proportions
de l'hexagone inscrit dans le cercle. Il se produit alors comme
une cristallisation spontane des relations spatiales, chaque
point du quaternaire voquant deux autres points d'un trigo
ne, qui leur tour rptent la relation en carr , de faon
ce que la division du cercle par quatre se trouve intgre et
compense par une synthse congnitale la nature uni
verselle du cycle, suivant la formule 3 X 4 = 4 X 3 = 12.
Si les deux -grands cercles, celui de l'quateur cleste et
celui du cycle solaire, concidaient, les saisons ne se manifes
teraient pas. La divergence des deux grands cycles clestes
exprime donc de toute vidence la rupture d'quilibre qui d
clenche un certain ordre de manifestation, c'est--dire de con
trastes et de complmentaires, et les quatre points cardinaux,
d(..<tcrmins par cette divergence, sont bien les marques de ces
21

contrastes. Ibn Arabi identifie le quaternaire zodiacal avec


celui des qualits ou tendances fondamentales de la Nature
totale ou universelle (at-tab 'ah), qui est la racine de toutes les
diffrenciations. Ajoutons, afin de prvenir tout malentendu,
que la Nature totale, telle que l'envisage le Matre, n'est pas
la Substance universelle comme telle, premier principe passif
que la doctrine hindoue appelle Prakriti et que Mohyiddn ibn
Arabi dsigne soit par le terme de al-hab (<< Substance), soit
par celui de al-' unur al-a' zam (<< Elment suprme), mais
elle en est une dtermination directe envisage plus particu
lirement sous son aspect de maternit l'gard des cra-

Gnration du duodnaire zodiacal


par Je carr et le trigone

tures. La Nature universelle, non manifeste en elle-mme, se


manifeste par quatre qualits ou tendances fondamentales qui
apparaissent dans l'ordre sensible comme chaleur et froid,

22

scheresse et humidit. La chaleur et le froid sont des qualits


actives, opposes l'une l'autre; elles se manifestent aussi
comme force expansive et force contractive; elles dterminent
le couple des qualits passives, la scheresse et l'humidit (1).
Rapports aux quatre points crdinaux du zodiaque, le froid
correspond aux deux solstices, qui refltent en quelque sorte
la contraction polaire, tandis que la chaleur correspond aux 1
deux quinoxes, qui se situent sur l'quateur, diapason de 1
l'expansion des mouvements clestes. De ce fait, les signes
cardinaux se succdent par contrastes; mais les qualits pas
sives de la scheresse et de l'humidit en relient deux couples.
Les quatre tendances ou qualits de la Nature se joignent deux
deux dans la nature des quatre lments ou fondements du
monde sensible, produits partir de la substance terrestre: la
terre est froide et sche, l'eau est froide et humide, l'air est
humide et chaud, le feu est chaud et sec. Si l'on attribue ces
qualits lmentaires aux signes du zodiaque, disant que le
Blier est de nature igne, le Cancer aqueux, la Balance arien
ne et le Capricorne terrien, il faut tenir compte du fait que
le zodiaque ne comporte que les modles clestes des quatre
lments et que ces modles restent composs des quatre ten
dances de la Nature totale, ainsi que le fait remarquer Mer
hyiddn ibn Arabi.
Le quaternaire des tendances fondamentales de la Nature
totale doit tre multipli, selon Mohyiddn ibn Arabi, par le
ternaire dont le pardre cosmique sont les trois mouvements
ou orientations principielles de l'Intellect premier ou Esprit
universel ( al-'Aql), ou encore, sous un altre rapport, les trois
mondes, c'est--dire le monde prsent, le monde futur et

....
1. La mdecine traditionnelle du monde musulman rduit toutes les ma
ladies autant de manifestations dsquilibres de ces quatre tendances.

23

l'tat intermdiaire du barzakh (1). Les vrois mouvements


ou orientations de l'Esprit sont: le mouvement descendant,
qui s'loigne apparemment du Principe et qui mesure la pro
fondeur (al-'umq) du possible; le mouvement expansif, qui
en mesure l'ampleur ou la largeur (al-'urd); le mouvement
du retour vers l'origine, qui se dirige dans le sens de l'exalta
tion ou de la hauteur (at-tt). Ce ternaire de l'Esprit est sup
rieur au quaternaire de la Nature; s'il apparat ici en deuxime.
lieu, c'est que la diffrenciation du ciel des archtypes zodia
caux procde des contrastes manifests pour aboutir leur
rintgration dans la synthse parfaite. Par suite de cette
rintgration ou multiplication, tous les points di zodiaque qui
se trouvent en relation de trigone ont la mme nature lmen
taire mais se distinguent par les qualits relevant du ternaire
de l'Esprit; et tous les points qui se trouvent en relation de
. carr ont la mme qualit spirituelle mais se diffrencient par
1. les contrastes lmentaires. De l on peut dj dduire les dif
frents caractres des aspects ou positions rciproques des
plantes sur l'cliptique: la relation en angle droit signifie
ncessairement contraste, de mme que l'opposition signifie
opposition; le trigone est l'expression d'une synthse parfaite,
et le sextile, c'est--dire la position en angle de 60 degrs,
exprim une affinit. Appliqus la nature du cycle, les trois
mouvements principie1s de l'Esprit ne peuvent plus tre com
pars aux trois dimensions de la profondeur, de l'ampleur et
de la hauteur, mais ils apparaissent suivant une rflexion on
forme cette nature: la seule tendance qui se manifeste di
rectement dans l'ordre cyclique est celle de l'expansion dans
l'ampleur, car le cycle est avant tout l'image du dveloppe
1. Sur les diffrentes significations de ce terme voir, notre article "Du
Barzakh", dans Etudes Traditionnelles, dcembre 1937.

24

..

ment de toutes les possibilits impliques dans l'ampleur


d'un degr de manifestation. En conformit avec ceci, les
signes cardinaux, rgions critiques du cycle solaire, sont appe
ls mobiles (munqalib), c'est--dire dynamiques ou expan
sifs. Quant au mouvement descendant de l'Esprit, il se traduit
dans l'ordre cyclique par la fixation (sukn), car c'est en raison
de ce mouvement que le monde subsiste comme tel. Enfin,
le mouvement spirituel du retour vers l'origine se reflte dans
le plan du cycle zodiacal par la synthse des deux autres orien
tations, et les signes qui lui sont coordonns sont appels
doubles ou synthtiques (dh ishtirh). Nous devons
faire remarquer en passant qui ces dterminations ternaires
du Zodiaque relvent d'une toute autre perspective que le
symbolisme des deux phases, ascendante et descendante, du
cycle solaire, symbolisme qui peut videmment tre rattach
aux deux mouvements ou orientations opposes de l'Esprit;
mais il s'agit ici d'un dualisme qui se rapporte au mouvement
cyclique, tandis que le ternaire que nous venons de dcrire se
rapporte la dtermination existentielle du cycle, l'expres
sion de mouvement , pour indiquer les orientations de
l'Esprit universel, devant tre pris dans un sens purement
symbolique.
Quant aux correspondances avec les trois mondes ou de
grs de l'existence humaine, telles qu'elles apparaissent dans
le symbolisme des fonctions angliques auxquelles se rappor
tent les douze signes zodiacaux, symbolisme que nous avons
extrait du livre Le lien qui retient le partant ('Uqlat al-mus
tawfiz) de Mohyidd ibn Arab, quant ces correspondances,
disons-nous, elles doivent tre comprises partir des reflets
du terrain intellectuel dans la nature du cycle et suivant la
perspective de la production de ces trois mondes. Ceci explique
pourquoi ce ne sont pas les signes synthtiques , attribus

25

l'orientation ascendante de l'Esprit, qui rgissent le monde


relativement suprieur, c'est--dire les degrs intemporels de
l'tat humain, mais les signes fixes ; par contre, il est vi
dent que ce sont les signes mobiles qui se rapporten~ au
dveloppement des tats de ce monde-cL Quant aux signes
synthtiques ou doubles , ils correspondent au monde inter
mdiaire (le barzakh de la la thologie islamique, le purgatoire
chrtien et le bardo des thibtains), ou encore, suivant une
perspective quelque peu diffrente, la synthse de l'immu
tabilit spirituelle et de l'expansivit psychique dans le com
pos corporel, - l'instar de la production du sel alchimique
par'l'union du soufre et du mercure.

1. -

Signes mobiles.

Le Blier est de nature chaude et sche (igne). Son ange


dtient la clef de la cration des qualits et des accidents.
Le Cancer est de nature froide et humide (aqueuse). Son
ange dtient la clef de la cration de ce bas monde.
La Balance est de nature chaude et humide (arienne).
Son ange dtient la clef de la cration des tats (phmres)
et des changements.
Le Capricorne est de nature froide et sche (terrienne).
Son ange dtient la clef du jour et de la nuit.

II. - Signes fixes


Le Taureau est de nature froide et sche (terrienne). Son
ange dtient la clef de la cration du paradis et de l'enfer, et
il est sous la terreur de la Majest (haybah).
Le Lion est de nature chaude et sche (igne). Son ange

26

est gnreux (Karm); il dtient la clef de la cration du mon


de' futur.
Le Scorpion est de nature froide et humide (aqueuse).
Son ange dtient la clef de la cration du feu (infernal).
La Verseau est de nature chaude et humide (arienne).
Son ange est gnreux, et sous la terreur de la Majest; il
dtient la clef des esprits.

III.

Signes synthtiques.

Les Gmeaux sont de nature chaude et humide (arienne).


Leur ange rgit les corps, en communion avec les recteurs des
autres signes doubles; il dtient en particulier la clef de la
cration des mtaux.
La Vierge est de nature froide et sche (terrestre). Son ange
rgit, en communion avec les altres signes doubles, les corps,
et en particulier les corps humains.
Le Sagittaire est de nature chaude et sche (igne). Son
ange est gnreux; il rgit les corps lumineux et les corps
tnbreux, et il dtient en particulier la clef de la cration
des plantes.
Les Poissons sont de nature t'roide et humide (aqueuse).
Leur ange rgit, en communion avec les autres anges des
corps, les corps lumineux et les corps tnbreux, et il dtient
en particulier la clef de la cration des animaux.
Nous avons maintenant expos, dans ses gnralits, la
diffrenciation des douze rgions zodiacales du ciel-limite
partir des points fixes du cycle solaire. Nous ferons encore
remarquer que cette faon de concevoir la division du zodia
que justifie la manire employe couramment dans l'astrologie
arabe et occidentale pour situer les douze signes; cette ma
nire consiste compter douze parties gales partir de l'equi
27

noxe de printemps, abstraction faite de la situation des cons


tellations portant les mmes noms que les signes; car, en raison
de la prcession des quinoxes, dont chacune fait le tour du
ciel entier en 26.000 ans environ, il s'est produit un dca
lage de presque un signe entier entre la situation des
constellations et des parties du zodiaque ayant le mme nom;
la constellation du Blier, par exemple, se trouve aujourd'hui
dans le signe du Taureau. On peut donc soulever la ques
tion de savoir si les formes de ces groupements d'toiles fixes,
qui ont t l'origine des points de repre pour la dtermi
nation des douze parties du cycle solaire, sont indiffrentes
par rapport la signification de celles-ci; or il y a srement
analogie entre la dnomination des signes zodiacaux et ces
groupements d'toiles sur l'cliptique: la constellation des G
meaux se caractrise effectivement par un couple d'toiles ju
melles; celle du Taureau comporte un triangle semblable
la tte de l'animal, et les formes du Scorpion ou du Lion
peuvent tre reconnues dans les constellations du mme nom,
bien que d'autres interprtations de ces groupements soient
galement concevables. Il est d'ailleurs fort bien possible que
lors de la premire fixation des symboles astrologiques les
ressemblances furent plus frappantes, car certaines toiles
fixes ont d se dplacer depuis cette poque fort lointai
ne (1), ainsi que le fait remarquer Mohyiddn ibn Arab en se
rfrant certaines reprsentations stellaires sur des monuments
de l'Egypte ancienne. A leur origine, les images symboliques
attribues aux douze parties du cycle solaire devaient prsen-

ter une synthse entre, d'une part, les significations spm


tuelles de ces dterminations de l'espace cleste et, d'autre
part, les interprtations possibles des groupes d'toiles des
douze constellations, les premiers jouant un rle essentiel,
et les combinaisons latentes des groupes d'toiles - y com
pris leurs couleurs et leurs intensits
un rle potentiel;
une fois la fixation opre, elle s'imprimait dans la mmoire
collective en raison de son originalit la fois spirituelle et
imaginative; et c'est l du reste une image particulirement
adquate d'un certain ordre d'inspirations.
D'un autre ct, la prcession des quinoxes, qui consti
tue le cycle astronomique majeur, doit ncessairement jouer
un rle dans le symbolisme astrologique, et le dplacement
des constellations zodiacales doit faire partie de sa signifi
cation, sur laquelle nous aurons revenir par la suite.

L La dernire concidence des signes zodiacaux avec les constellations


de mme nom et lieu dans les premiers sicles de l're chrtienne; mais
il est probable que la dnomination des douze constellations date d'une
concidence prcdente. Nous allons revenir sur cette question.

28

29

III

Le ciel des toiles


qui est contenu dans la sphre
des tours du zodiaque, est appel le ciel des stations
(manzil), parce que les mouvements des plantes se projettent
sur lui. Les sept plantes, qui reprsentent les intermdiaires
cosmiques entre le monde immuable des archtypes et le mi
lieu terrestre, actualisent par leurs rythmes combins et par
les positions rciproques qui en rsultent, les relations spa
tiales virtuellement contenues dans la sphre indfinie du ciel
limite, sphre qui n'est rien d'autre que la totalit des di
rections de l'espace et par l l'image de l'univers (1). Les
astrologues modernes veulent que les plantes agissent sur
la terre par un rayonnement de forces, et ils entendent cela
dans un sens matriel ou quasi-matriel, car il est invitable
qu'il introduisent dans l'astrologie quelque chose des con
ceptions modernes de la causalit; c'est alors que les rsidus
de cette science prennent l'allure d'une vritable superstition.
Le besoin de causalit dpend des proccupations gnrales
d'une poque; il est vrai qu'il est toujours d'essence logique,

1. D'o la drivation tymologique du terme "univers" de orbis unversum.

31

car ce qU1 confre un enchanement causal son caractre con


vaincant rside autant dans l'unit de l'esprit que dans la na
ture des choses; mais en mme temps le besoin de
dpend substantiellement du niveau mental: il est mcaniste
ou imaginatif, raisonnant ou intuitif. Comme l'horizon mental
n'englobe la fois qu'un certain ordre de ralits, l'argument
causal d'une poque mentalement diffrente apparat insuffisant
ou mme dfectueux,
qu'on n'en voit que les limites du
dveloppement dans le sens d'une investigation ultrieure; on
oublie trop facilement que tout enchanement causal
rieur de la manifestation est essentiellement symbolique (1),
et que la conception la plus vaste et la plus adquate de
causalit est prcisment celle qui est consciente de ce symboli
sme et qui considre toute chose sous le rapport de l'Unit de
l'Existence (wahdat-al-wudjd). D'autre part, il faut bien se
dire que la verit essentielle d'une perspective intellectuelle
n'empche pas que son expression mentale reste sujette la re
lativit des moyens extrieurs de connaissance; ainsi par exemMohyiddn ibn Arabi affirme du soleil
le cur
monde
qu'il communique la lumire tous les autres
astres, y compris les toiles fixes, et qu'il est lui-mme illumin
par l'irradiation directe et incessante d'une rvlation divine
(2). Cette conception est essentiellement vrai, en ce sens que
toute lumire sensible a sa source dans la lumire intelligible,
dont le soleil est le symbole le plus vident;
est vraie
en ce sens que les lumires de tous les astres sont de mme
substance, comme le reconnaissent d'ailleurs les astro~omes

1.
les "causes secondes" ne sont que des reflets de la "cause
premire" et n'ont aucune ralit propre.
2. C'est un fait significatif que l'il ne peut pas
le soleil - qui
illumine le monde entier
sans en tre bloui.

32

modernes; enfin, il est vrai que le soleil communique sa lu toutes les plantes. Quant aux toiles fixes, on est au
jourd'hui convaincu qu'elles reprsentent des sources de lu
mire indpendantes du soleil, et sur ce point la conception de
Mohyiddn Ibn Arab peut paratre errone; cependant la
fonction d'un Matre en mtaphysique n'implique pas nces
sairement la connaissance distinctive de tous les domaines de
nature, et Ibn Arab ne pouvait qu'envisager le symbolisme
des connaissances astronomiques telles qu'elles se prsentaient
lui. Cela ne veut certes pas dire que sa thorie ne soit plus
valable ds qu'on accepte que les toiles fixes sont des lumires
autonomes dans l'ordre sensible; car la distinction entre l'en
semble des astres rgis par le soleil et la multitude des toiles
apparat seulement comme une diffrenciation du mme
symbolisme, en ce sens que le soleil reprsente le centre du
rayonnement de la lumire divine pour un monde dtermin,
tandis que les toiles fixes symbolisent les interfrences de la
lumire d'un monde suprieur; mai~; mme dans ce cas on pour
ra dire que la lumire qui rayonne du soleil est la mme que
celle qui illumine tous les corps clestes.
Cette
sur les diffrentes perspectives selon les
quelles on peut envisager la causalit cosmique tait nces
saire pour situer le rle des plantes dans l'astrologie et pour
faire comprendre ce qu'on doit entendre par l'influence de
leur rayonnement. Quel que puisse tre
matriel ou sub
til de leurs rayons, la pntration contemplative de la physio
gnomie du cosmos les considre plus directement comme
des modes de l'Intellect dans sa manifestation macrocosmique,
modes qui ralisent ou mesurent les possibilits contenues dans
la sphre indfinie. L'espace cleste, dans lequel les plantes
dcrivent leurs rvolutions reprsente en quelque sorte les li
mites extrmes du monde sensible, et ces limites sont inverse

33

("

'in"""!i';!" "bn,'",';" ,d,li::

:i,;lil:ilH~Hj iUill HHHi!"jHHm!;!H~!,j~m@lllij~\!umli

ment analogues au centre qui est l'homme lui-mme, comme


nous l'avons dj fait remarquer en considrant le caractre
objectif des directions spatiales rayonnant de chaque tre
humain vers les mme points du ciel-limite (1); en raison de
cette analogie inverse, les modes de l'Intellect cosmique que
reprsentent les astres sont existentiels au lieu d'tre in
telligents , ce dernier mot pris dans le sens de l'intelligence
active manifeste dans l'homme; nous nous rapportons ici la
polarit de 1' existence et de 1' intelligence dans l'Etre
(2). Cette nature intellectuelle des plantes s'exprime, - tou
jours en raison de la mme analogie inverse par rapport
telIigence active -dans la rgularit et continuit rythmique
de leurs mouvements. Leur nature lumineuse relve du mme
symbolisme; d'autre part, la propagation de la lumire est pour
ainsi dire gomtrique et correspond l'actualisation des
directions et des relations spatiales. Il faut d'ailleurs bien com
prendre que ce symbolisme n'envisage pas la situation des pla
ntes dans l'espace quantitativement mesurable; leurs as
pects se dterminent par leur projection sur le zodiaque,
c'est--dire, en raison des directions de l'espace dont le centre
est l'tre humain terrestre; quant aux directions de l'espace,
leur dfinition n'est videmment pas quantitative mais toujours
relative l'unit indivisible de la sphre indfinie du ciel
extrme.

De tous les astres mobiles , il n'y a que le soleil et


lune dont les mouvements puissent tre reprsents par des
cercles rguliers sur le ciel des toiles fixes, car les orbites ap
parentes des autres plantes sont la fois rgies par le centre
solaire et le centre terrestre, de faon qu'elles voluent en des
mouvements combins. Il y a donc un rapport simple entre le
rythme solaire et celui de la lune; celle-ci parcourt le zodiaque
en 28 jours, et on lui assigne 28 stations ou mansions qui se
rpartissent d'une faon ingale mais rythmique sur les douze
parties du zodiaque et que l'on compte partir de l'quinoxe du
printemps. Le vritable commencement du cycle lunaire, qui
s'exprime dans la succession des lunaisons, ne concide pas
toujours avec le point de l'quinoxe, car les deux points
tersection de l'orbite lunaire avec le cycle solaire, que l'on ap
pelle la tte et la queue du dragon, dcrivent en 18
ans le tour de tout le ciel des stations . La fixation des man
sions de la lune consiste donc en une sorte d'abrg symbolique
des rythmes vritables (1).
Dans les rapports des mansions lunaires avec le zodiaque se
manifeste un symbolisme numrique vident: nous avons mon
tr comment le duodnaire zodiacal se prsente comme le pro
duit de la multiplication du quaternaire par le ternaire; or la
multiplication symbolise le mode de distinction propre au
monde des archtypes, car ceux-ci ne se diffrencient pas par
exclusion mutuelle, mais l'instar de miroirs oui se refltent les

1. On nous objectera peut-tre que les directions que nous appelons4lt ob

1. L'astrologie hindoue ne compte que 27 mansions lunaires, le parcours


de la lune autour du ciel ne s'effectuant pas en un nombre
de jours, de
faon que l'abrg symbolique de son cycle peut-tre ou bien port 28 ou
rduit a 27 jours. D'autre part, les astrologues hindous ne situent pas le d
but du cycle lunaire au point vernal actuel, mais au point du ciel des toiles
fixes qui concidait, l'poque de la dernire concidence entre les signes
zodiacaux et les constellations synonymes, avec l'quinoxe du printemps. Nous
allons revenir sur cette diffrence des ooints de vue.

jectives" ne relvent que de la "subjectivit collective"; mais dans l'ordre de


la perception sensible directe et spontane, sur laquene se fonde le symbolisme
en question, cette "subjectivit collective" est quivalente d'''objectivt''. Voit
ce propos ce que dit Frithjof Schuon dans son article Fatalit et Progrs, pas
sage que nous avons reprenduit en note au dbut de cette tude.
2. Cf. l'article de Frithjof Schuon: Transcendance et universalit de l'so
trisme, dans Etudes Traditionnelles, oct-nov. 1945.

35

34
,

./

unes les autres et ne se distinguent que par leurs positions rci


proques. Les mmes nombres 3 et 4 composent aussi le nombre
des sept plantes de l'astrologie; comme
plantes sont les in
termdiaires entre le ciel des archtypes et la terre, leur distinc
tion est celle d'une hirarchie et comporte les principes du ter
naire et du quaternaire selon un ordre graduel. Quant au nom
bre 28 des mansions de la lune, il s'obtient par la somme pytha
goricienne des nombres de 1 7, ce qui signifie que le rythme
lunaire dveloppe ou expose en un mode successif toutes les
possibilits contenues dans les archtypes et transmises, par
hirarchie des intermdiaires, la sphre qui entoure immdia
tement le milieu terrestre.
La relation entre le soleil et la lune est analogue celle
va de l'Intellect pur son reflet dans la forme humaine. Ceci
trouve d'ailleurs son expression la plus
dans le fait
que la lune reflte le rayonnement du soleil la faon d'un
cycle de ses lunaisons est comme un dve
de ce rayonnement. Mais le mme sym
aussi sous le rapport des mouvements des
astres: nous avons dj expos plus haut que c'est le soleil
qui par son mouvement actualise ou mesure les dterminations
virtuelles du ciel des archtypes zodiacaux; car sans les points
du cycle solaire les directions du ciel sans toiles seraient
indfinissables. Le soleil mesure donc l'espace cleste d'une
faon active, de mme que l'acte essentiel de l'Intellect repr
sente le fiat lux qui extrait le monde des tnbres de l'itadiff
renciation potentielle; par contre, la lune mesure le ciel passi
vement en parcourant le zodiaque solaire: elle subit la fois
et celles
les dterminations des directions de l'espace
des directions des rayons solaires, double dpendance qui se
traduit dans ses phases lumineuses et dans le rythme rgulier de
18 ans, selon lequel leur cycle se dplace par rapport celui du

36

zodiaque. Nous verrons par la suite que les directions de l'espa


ce, dont la lune subit tour tour l'influence, correspondent
autant de qualits de l'Etre.
Le fait que la lune est le rceptacle de toutes les
se trouve aussi
qu'elle recueille pour les transmettre la
indiqu par le degr qui correspond la lune dans la hirarchie
des fonctions prophtiques; l'sotrisme islamique, on le sait,
ces fonctions dans les differents
plantaires. Selon cet ordre de correspondances, qui d'ail
leurs ne peut se comprendre que dans la perspective spirituelle
et en quelque sorte cyclique de l'Islam (1), Abraham (Seyid-
n Ibrhm) rside dans le ciel de Saturne, Mose (Seyid
n Ms) dans celui de Jupiter, Aaron (Seyidna Harn) dans ce
lui de Mars, Hnoch (Seyidn Idrs) dans celui du soleil, Joseph
(Seyidn y suf) dans celui de Vnus, Jesus (Seyidn 'Is)
dans celui de Mercure et Adam (Seyidn Adam) dans celui de la
lune. Il y a, dans cette hirarchie, le mme rapport entre Hnoch
et Adam qu'entre 1' homme transcendant (shn jen) et
l' homme vritable (chen jen) dans la doctrine taoste: H
noch rside dans le soleil en tant qu'il reprsente 1' homme
divin par excellence, ou le premier grand spirituel des
fils d'Adam et par consquent le prototype historique de
tous les hommes ayant ralis Dieu; quant
1' homme primordial ou, selon l'expression d'Ibn Arab,
1' homme unique (al-insn al-mufrad, par opposition al
insn al-kmil, 1' homme universel ), c'est--dire, il sera le
1. De ceci on peut conclure que l'interprtation spirituelle de l'astrologie
ne saurat tre sans autre transfre d'une tradition une autre; non seu
lement cette interprtation tient la perspective intellectuelle propre telle
tradition, mais mm la validit de ses applications divinatoires dpend dans
une certaine mesure de l'homognit de l'ambiance subtile
par l'influence
spirituelle de la tradition envisage.

37

reprsentant par excellence de la qualit cosmique qui revient


l'homme seulement, et qui s'exprime dans le rle de mdia
teur entre la terre et le Ciel . Ibn Arab compare la lune
au cur de l' homme unique , qui reoit la rvla tion
de l'Essence divine (Dht); ce cur change
essentielles (haqq) qui
forme selon les diffrentes
y laissent successivement leur empreinte. Le fait que le Matre
cur indique qu'il s'agit, ici, non pas du mental, fa
cult purement discursive, mais au contraire de l'organe central
de l'me; continuel changement de forme que subit ce cur
ne doit donc pas tre confondu avec la traduction en mode di
scursif, opre par le mental, d'une connaissance spirituelle,
bien que le rle central et mdiateur de la raison relve videm
ment de cette mme qualit cosmique qui caractrise l'tre
humain. D'un autre ct, la description de ce renouvellement
continu du cur, ou plutt de sa forme, montre qu'il n'est pas
sous tout rapport identique au ple transcendant de l'tre,
et qu'il est comme circonscrit par les limites de
la substance individuelle qui, elle, ne saurait recevoir simulta
nment tous les aspects impliqus dans l'inpuisable actualit
de la Rvlation essentielle (tajall dht); de ce fait, la for
me subtile du cur change sans arrt, rpondant successivement
toutes les directions ou polarisations spirituelles, et ce chan
gement est la fois comparable une pulsation et aux phases
de la lune. L'incessante volution dans les formes est comme
l'image extrieure et inverse de l'immuable orientation ,.int
rieure du cur chez 1' homme unique , car, tant toujours
ouvert la seule Unit transcendante, et toujours conscient de
ce qu'Elle seule se rvle dans toutes les qualits de la Lumire
intellectuelle, le cur ne peut jamais rester enferm ou immobi
lis dans une seule forme; et c'est prcisment en cela que con
siste le double aspect du rle mdiateur propre au cur humain.

38

Or, c'est cette facult de mdiation que se rapporte la


transformation du son primordial, vhicule de la rvlation spi
rituelle, en langage articul. C'est pour cette raison que l'sot
risme islamique tablit une correspondance entre les 28 man
sions de la lune et les 28 lettres ou sons de la langue sacre.
Ce ne sont pas, comme le pensent les gens, -dit Mohyiddn
ibn Arabi, - les mansions de la lune qui reprsentent le mo
dle des lettres; ce sont les 28 sons qui dterminent
man
sions lunaires . Ces sons reprsentent en effet l'expression
crocosmique et humaine des dterminations essentielles de
l'Expir divin, qui lui-mme est le moteur premier des cycles
cosmiques. Le Matre compte les 28 sons de l'alphabet arabe
partir de la premire mansion lunaire, qui suit l'quinoxe de
printemps, dans l'ordre de leur extriorisation phontique suc
cessive, en commenant par le hiatus (al-hamzah), et allant des
gutturales aux labiales en passant par les palatales et les denta
les. Si l'on tient compte du fait que le hiatus initial n'est pas
proprement parler un son, mais seulement l'instant transitoire
entre le silence et l'locution, la srie des sons attribus aux
mansions lunaires commence avec le h et finit avec
waw
ces
lettres composant le Nom divin huwa, Lui , symbo
le de l'Essence une et identique Elle-mme.

39

IV

'.

signification la plus profonde des cycles astronomiques


consiste en ce qu'ils offrent une image logiquement analogue
tout dveloppement successif de possibilits rgies par le ple
d'un mme principe, de faon ce qu'ils symbolisent n'importe
quel ordre de manHestation, que cet ordre soit conditionn par
le temps ou que la succession qu'il implique soit de nature pu
rement logique. Il est donc possible de concevoir toute une
hirarchie de cycles cosmiques analogues entre eux, mais
se situant des niveaux diffrents de l'existence et se refltant
tous, simultanment et sous des rapports divers, dans un cycle
astronomique tel que le parcours du
ou celui de la lune
sur le ciel des toiles fixes. Dans son livre <<! Les Rvlations
mecquoises (al-futht al-makkiyah), Mohyiddn ibn Arabi
une srie de correspondances cosmologiques qui permettent
de tracer le schma symbolique qu'on trouvera en hors-texte. Ce
schma est bti sur la juxtaposition du zodiaque et du cycle des
mansions lunaires partir de l'quinoxe du printemps, et les
differents ordres d'analogies sont indiqus par des cercles con
centriques.
La raison premire de tout cycle de manifestation est le d
ploiement des possibilits principielles de manifestation sym

41

bolises par la srie des Noms divins. D'autre part, la science


des Noms ou des qualits divines - les premiers n'tant que
les dterminations logiques des deuximes - constitue l'abou
tissement suprme de toute science sacre, car les qualits
universelles sont en quelque sorte le contenu distinctif de
l'Essence divine, alors que l'Essence divine en Elle-mme ne
saurait jamais tre objet de science, c'est--dire objet d'une
connaissance qui implique encore une distinction quelconque.
qualits ou les Noms divins sont ncessairement innombra
bles; mais en raison de la simplicit de l'Etre, qui est un des
aspects de son Unit, ils peuvent tre symboliquement rsums
en un groupe dtermin, qui sera d'ailleurs numriquement
ou moins tendu, selon le principe de diffrenciation logique
qu'on voudra appliquer. Comme il n'y a pas de distinction sans
hirarchie implicite, la srie des Noms aura toujours le carac
tre d'une chane logique, et c'est en cela qu'elle est le modle
de tout ordre cyclique.
Dans le cas prsent, le Matre fait correspondre les 28 man
sions de la lune autant de Nomes divins. D'autre part, ceux
ci, qui ont tous un caractre actif ou crateur, ont pour com
plment ou comme objets directs un mme nombre de degrs
cosmiques, dont l'enchanement forme un deuxime cycle ana
logue. La srie de ces degrs cosmiques produits par la sri_e
des Noms divins va de la manifestation de l'Intellect premier
jusqu' la cration de l'homme. Dans sa hirarchie elle com
prend aussi
degrs cosmiques qui correspondent aux-diff
rents cieux, c'est--dire au ciel du zodiaque, au ciel des toiles
fixes et aux sept cieux plantaires. Or ces degrs, qui sont ici
rapports certaines rgions du zodiaque, mesures par des
mansions lunaires, doivent en ralit tre conus en une suc
cession verticale par rapport au cycle zodiacal, et il faut
bien comprendre qu'il y a, dans cette attribution d'une srie de

42

degrs cosmiques aux stations lunaires, et par l aux rgions


zodiacales, comme une projection d'une hirarchie verticale >;
sur un plan horizontal .
Les noms divins reprsentent les essences dterminantes
des domaines cosmiques correspondants. Quant la production
de ces domaines partir de leurs dterminations principielles,
elle est l'effet de l'Expir divin (an-naias al-ilh), qui dploie
toutes les possibilits de manifestation impliques dans les
terminations principielles des Noms. Suivant un symbolisme
fois verbal et figur, les Noms divins se trovent, avant la
cration du monde, dans un tat de resserrement divin (al-karb
al-ilh), et ils demandent alors leurs complments crs,
jusqu' ce que l'Esprit divin les soulage (tanaffasa), en d
ployant toute l'ampleur de leurs consquences.
d'autres ter
mes, ds que l'Etre conoit, dans sa premire auto-dtermination
(t'ayyn), les distinctions prindpielles, qui sont ses Noms ou
ses qualits, ceux-ci exigent leurs complments logiques, dont
l'ensemble constituera le monde. C'est l'Expir divin qui
tend cet enchanement logique en mode existentiel, et il
s'identifie sous ce rapport la Substance premire et la Na
ture universelle. C'est ainsi que nous pouvons rsumer en quel
ques mots la thorie de l'Expir divin, thorie qui rend compte
de la correspondance symbolique qui relie entre eux le cycle
des Noms divins, celui des degrs cosmiques et celui des 28
sons de l'alphabet arabe, les degrs cosmiques tant les dter
minations de l'Expir universel et macrocosmique et les 28 sons
ceux de l'expir humain et microcosmique; les sons du langage
sont ports par l'expir physique comme les degrs cosmiques
sont ports par 1' expansion divine. Nous avons expliqu
plus haut la raison de l'analogie qui rattache ces 28 sons la
sphre lunaire.
Le Matre fait remarquer que la hirarchie des degrs co

43

qu'il numre suivant l'ordre des mansions lunaires,


ne doit pas tre comprise comme une srie de productions suc
cessives, mais comme une chelle dfinitive de degrs d'existen
ce; car l'ordre de production ne correspond pas la hirarchie
dfinitive; il est inverse suivant qu'il s'agit des
~c
stence universelle et informelle, ou des degrs infrieurs au ciel
des toiles fixes, c'est--dire, des degrs du monde individuel,
et cela se comprend aisment, vu que la production des tats
ne peut tre conue que d'une faon purement lo
gique, dans le sens d'une diffrenciation essentielle partir de
l'unit de l'Etre; la production des mondes formels et indivi
duels par contre sera ncessairement envisag sous le rapport
de leur ralit substantielle, voire matrielle donc comme
une closion de formes et d'tats d'existence partir de la
potentialit d'une materia indiffrencie, qui se situe, en raison
de sa passivit tnbreuse, au degr infrieur d'tme chelle
ascendant d'tats d'existence. Il rsulte d'ailleurs de ceci que
ontologique de la matire premire, ou de la substance
plastique d'un ensemble de manifestations, peut tre conu et
reprsent de diffrentes faons, soit qu'on la considre comme
le premier terme d'une srie de productions successives et qu'on
la situe au commencement de cette srie parce que toutes
entits suivantes prennent d'elle leur substance
qu'on lui assigne le dernier
o
jouera le rle de
ou de l'ancre
dans
r1"',CY ....

'.

double situation hirarchique de la matire premire


ou de la substance passive s'exprime dans le rang qu'occupe
dans le schma cosmologique que nous tudierons, le principe
que Mohyiddn ibn Arabi nomme al-jawhar al-hab
ce qui
correspond la matire premire - ou encore al-hayl) terme
arabe pour hyl . Le Matre crit que cette

44

'J
1

tient ici le quatrime rang parce qu'elle est la prmisse nces


saire du degr suivant, assign au corps universel , substance
secondaire, qui remplit l'espace intelligible comme l'ther
- ou l'aksha de la doctrine hindoue
remplit l'espace sen
sible. C'est sous ce rapport, c'est--dire comme origine imm
diate du corps universel , que la cosmologie conoit gnra
lement la ralit de la matire premire. Cependant, selon son
sens le plus profond, celui qu'expose Mohyiddn ibn Arab, la
matire premire, conue comme la substance universelle qui
est le support de toutes les dterminations principielles, devrait
tre reprsente en dehors de cette succession hirarchique, car
est soit suprieure, soit infrieure tous les autres degrs;
l'intrieur de la hirarchie est nanmoins justifi
qu'elle reprsente le dernier terme du premier qua
ternaire qui rsume lui seul toute l'Existence universelle:
l'Ame universelle (an-Nais al-Kulliyah), qui occupe le deuxime
rang, est en quelque sorte une rsultante de l'action de l'Intel
lect premier (al-Aql) sur la Substance premire (al-Hab); et la
Nature universelle (at-Tab'ah), qui se situe au troisime
apparat comme une modification de cette substance. D'autre
part, la Matire premire (al-jawhar
est attribue au
Le Dernier (al-Akhir), qui
la facult
divine d'tre le dernier sans ultriorit temporelle, ou
d'tre 1' autre sans altrit essentielle, ce sens correspond
de toute vidence la fonction de la substance passive qui est
la racine indfinissable de toute manifestation.
Cette explication du rang hirarchique de la Matire pre
mire a t ncessaire pour indiquer comment on doit envi
sager la succession des degrs cosmiques. Pour ce qui est des
autres termes de cette mme hirarchie, leur explication nous
au del du cadre de la prsente tude; nous nous
bornerons donc indiquer quelques distinctions gnrales. On
45

remarquera que le cycle des Noms, des degrs cosmiques et des


mansions lunaires peut tre divis en quartiers, dont chacun
comprend sept mansions et correspond un ensemble dfini de
degrs d'existence: le premier quartier symbolise le monde des
principes ou l'ensemble des degrs divins; ce quartier se ter
mine symboliquement au solstice d't et par le degr du tr
ne divin, qui est le complment du Nom divin Al-Muht, Ce
lui qui englobe , et le modle de la lettre qaf, signe du ple et
nom de la montagne polaire que les Hindous appellent Mer;
et, ajouterons-nous, il y a l comme une image verbale du fait
que le trne divin est la fois la sphre qui englobe tout, et
le ple autour duquel evolue la circumambulation des anges.
Les deux quartiers suivants symbolisent tout le monde formel,
mais sous le seul rapport de l'existence lmentaire et direc
te de chacun de ses degrs, car c'est le dernier quartier du cycle
qui reprsente la hirarchie des tres composs, c'est--dire des
tres dont la forme relve d'une synthse de plusieurs degrs
d'existence. Les deux quartiers moyens constituent donc un
seul monde ; mais ils peuvent tre diviss par rapport au
centre de ce monde, ce centre tant le sphre du soleil, qui est
le cur du monde , et qui se trouve ici en rapport d'analo
gie avec l'quinoxe d'automne.
Le monde intermdiaire comprend les sept cieux pla
ntaires, et leur attribution un mme nombre de Noms di
vins indique avec prcision les principes cosmiques dont les
rythmes plantaires sont l'expression. Le ciel de Satur.ne est
attribu au Nom divin Ar-Rabb, Le Seigneur , dont la signi
fication implique une relation rciproque, car un tre n'a qua
lit de seigneur que par rapport un serviteur, et le serviteur
n'est tel que par rapport un seigneur; pour l'tre cr, cette
relation a un caractre ncessaire etinchangeable, alors que
les autres qualits divines peuvent en quelque sorte varier de

46

,Il
l'

'1
1\

Il
1

couleur par rapport l'individu. Le ciel de Jupiter est le


complment du Nom divin Al-Alm, Le Savant }) ou
Con
naissant }>. Mars correspond au nom divin Al-Qhir, Le Vain
queur}) ou
Dompteur ; Jupiter rgit donc la facult
intellectuelle et Mars la facult volitive. Le Soleil est analogue
au Nom divin An-Nr, La Lumire }}, alors que la lune cor
respond au nom Al-Mubn, L'Apparent ou L'Evident ;
le Soleil symbolise le principe mme de l'Intellect, tandis que
la Lune reprsentera la manifestation; il y a entre ces deux
Noms le mme rapport qu'entre vrit et preuve , ou
entre rvlation }> et commentaire . Vnus est attribue
au Nom divin Al-Muawwir, Celui qui forme }>, mot qui
dsigne galement le peintre et le sculpteur, et dont le fem
minin dsigne la facult imaginative. Quant Mercure, il est
l'analogue du Nom divin Al-Muh, Celui qui compte }>,
dont la signification se rapporte au nombre et la cannaissan
ce distinctive (1).
Les deux quartiers moyens du cycle, symboliss par l'h
micycle zodiacal compris entre le solstice d't et le solstice
d'hiver, englobent toute la hirarchie des sphres clestes
partir du trne}} divin dans un ordre descendant; et cet
hmicycle correspond effectivement la phase descendante
du parcours solaire. La dernire mansion avant le solstice
d'hiver est attribue l'lment terre; le point mme du
solstice symbolise donc le centre de gravit, le point le plus
bas qui serait le rang de la matire passive du monde
main, - non de la matire premire de tout l'univers, car
ce centre de gravit n'est le point le plus bas que par rapport
sens de
au monde des hommes. A partir de ce point,
1. Il !;'agit d'une perspective autre que celle qui envisage les fonctions pro
~h"\+;~"M

en leurs correspondances avec les sept plantes.

47

'.

Les directions de l'espace sont un symbole particulirement


adquat pour la nature des Qualits divines. Comme ces Qua
lits, qui sont les premires dterminations de l'Etre, les
di!fections de l'espace sont en une multitude inpuisable; on
ne peut d'ailleurs les concevoir comme une multitude que
parce que chaque direction est en elle-mme parfaitement
dtermine, sa raison d'tre tant prcisment la singularit
de sa dtermination. De mme que pour les Qualits Divines,
l'ensemble des directions de l'espace ne peut pas tre dfini,
et la sphre illimite, forme logique de leur rayonnement extr
me, n'est qu'un symbole qui s'impose l'esprit sans qu'on sa
che la prouver. Qu'il s'agisse des Qualits divines ou des di
rections de l'espace, ds que l'une d'entre-elles est nomme ,
les autres peuvent tre dfinies par leurs rapports celle-ci, ce
qui est un aspect de l'unicit de l'Existence.
Lorsqu'on prte une image aux Qualits divines, le centre
de leur rayonnement doit tre identifi au Principe incondi
tionn. Quant aux directions de l'espace cleste, leur centre
est l'tre humain, - ou chaque tre humain se trouvant sur
terre, - sans que cela implique une pluralit de centres, com
me mous l'avons dj expliqu. Il y a donc une analogie inverse

51

\ "

l"

entre l'image logique des Qualits divines et les directions de


l'espace cleste. En principe, c'est l'Esprit prsent dans l'hom
me qui est la fois le centre divin d'o rayonnent les qualits
de l'espace, et la sphre-limite qui les synthtise; mais en fait,
l'esprit humain subit les rayons convergents de la vOllte cleste;
car l'homme, n'tant pas actuellement identifi son centre
incr, subit la totalit de l'Esprit comme une ralit ou comme
un destin extrieur lui. C'est ainsi que le ciel ragit sur l'ex
centricit relative de la nature individuelle, excentricit qui
s'e~prime symholiquement par la situation des directions sub
jectives de l'espace au moment de la naissance.
Un faisceau de directions ou de qualits peut toujours tre
remplac par une seule qui en est en quelque sorte la rsultante;
cepend~,nt, cette rsultante ne se prsente pas comme une som
me ou comme un mlange des directions ou des qualits qu'elle
rsume, car, tout en tant une synthse de celles-ci, elle est
aussi quelque chose d'unique, puisque la singularit de dter
mination constitue le caractre essentiel de chaque direction;
elle implique donc une qualit nouvelle, que la somme des
qualits prcdentes ne saurait exprimer.
Cette loi, qui est pleine de consquences cosmologiques,
doit aussi tre applique la combinaison des natures de plu
sieurs mansions lunaires dans un seul signe zodiacal. Chaque
mansion lunaire reprsente un faisceau de directions de l'espace
cleste dont la synthse correspond symboliquement une
Qualit divine. Ces faisceaux tombent d'une manire ingale
sur les douze rgions du zodiaque, de telle faon que chaque
signe zodiacal comprend, soit deux. mansions entires et un
tiers de mansion, soit une seule mansion entire et de chaque
cte de celle-ci deux tiers. On appelle les signes de la premire
catgorie des signes purs et ceux de la deuxime des m
langs . Or, selon Mohyiddn ibn Arab, les qualits des man

sions fractionnes se combinent d'une part avec celles de frac


tions complmentaires d'autres mansions contenues dans le
mme signe, constituant avec celles-ci des rsultantes nouvelles,
et elles concourent, grce leurs qualits originales en mme'
temps qu' leurs rsultantes nouvelles, la constitution de la
synthse qui exprime la nature qualitative du signe zodiacal en
question.
Cette synthse, dit Mohyiddn ibn Arab, est le modle
cosmique de 'toute dduction logique, celle-ci ayant toujours la
forme de deux prmisses fondes sur deux couples de termes:
a=b et b=c) dont le terme moyen b constitue la liaison par
la quelle s'opre la synthse: a=c.
Les qualits des mansions lunaires, explique-t-il, confrent
chaque signe zodiacal sept aspects, auxquels s'ajoutent trois
aspects inhrents ce signe - et dploys par ailleurs dans
son trigone - , ce qui fait dix aspects qui sont multiplier par
leur 1Jriple rapport avec les trois principaux degrs d'existen
ce (1).
Le monde, dit le matre, consiste dans l'unit de l'unifi
(ahadiyat-al-majm) , tandis que l'Indpendance divine rside
dans l'unit de l'Unique (ahadiyat-al-Whid). Mais l'unicit se
reflte l'intrieur du multiple unifi dans la singularit de
chaque rsultante, comme nous venons de la voir propos de
la synthse des directiOins de l'espace; ainsi un enfant repr
sente la synthse des natures du pre et de la mre, mais il est
en mme temps un tre unique et nouveau, et c'est son unicit
qui est sa vritable raison d'tre. D'une faon gnrale, toute
paNie singulire du cosmos comporte la fois un aspect relatif
1. Il rsulte de cette multiplication 30 aspects pour chaque signe, ce qui
fait 360 pour tout le zodiaque, nombre de la division courante du cercle en
degrs.

52

53

,-~.I""~

selon lequel elle se prsente comme une combinaison de plu


sieurs lments prexistants, et un aspect unique qui est en
quelque sorte sa face tourne vers son Principe ternel et qui
correspond, selon son sens le plus rel, ce que cette chose
ou cet tre est dans la Science divine (2).
Chaque lment d'un ensemble cosmique est autre par ce
qu'il reprsente en lui-mme, et autre par ce qu'il apporte
une synthse. En outre, chaque rsultante d'une synthse n'est
pas seulement dtermine par ses composantes, mais elle d
termine son tour cel1es~i, en raison de ce qu'elle comporte
d'unique. De ce fait, chaque domaine cosmique est comparable
un tissu de relations o chaque croisement de lignes est en
mme temps un centre et une partie de l'ensemble (1).
Il rsulte de ceci pour l'astrologie en tant qu'art, que ses
procds ont d'une part le caractre d'une dduction exacte ou
d'un calcul, et qu'ils supposent d'aunre part une intuition d'en
haut qui dcle la qualit unique de chaque nouvelle forme
naissante des combinaisons. Tandis que la dduction ou la
combinaison est sustantielle ou horizontale , la reconnais
sance de l'unicit de chaque rsultante est essentielle ou ver
_ ticale . Dans toute opration d'un art traditionnel comme
l'astrologie il intervient donc une inspiration plus ou moins
directe et qui dpend gnralement d'une participation une
influence spirituelle. Il n'y a d'ailleurs pas de science vraiment
exacte sans une telle intervention verticale , et ceci en
raison du double aspect de chaque forme existante, ,omme
nous venons de l'expliquer. D'autre part, les combinaisons d

'
l

2. Sur le diffrence de l'aspect essentiel et de l'aspect substantiel d'un


tre, voir aussi J'article de Ren Gunon: L'tre et le milieu dans Le Voile
d'Isis, dc. 1935.
1. Les rseaux gometriques de l'ornementation de l'art arabe peuvent
tous tre considrs comme des symboles de cette "unicit" du cosmos.

54

ductives d'une science cosmologique telle que l'astrologie pro


duisent une foule de potentialits symboliques qui sont su
sceptibles d'attirer des inspirations d'ordres trs diffrents;
ceci est notamment le cas pour tout ce qui relve de l'art di
vinatoire, qui peut toujours, dans la mesure o il est intress,
attirer des interfrences insidieuses. En d'autres termes, l'hom- (
me ne peut retirer le voile de son ignorance que par quelque
chose qui transcende sa volont individuelle; pour la curiosit
individuelle tout oracle reste quivoque et peut mme ren
forcer l'erreur qui constitue le pige fatal de telle destine.
Traitant de la superposition des parties du zodiaque aux
mansions lunaires, Mohyiddn ibn Arab remarque qu'une
tour zodiacale doit ncessairement runir en elle la fois
un nomble entier et un nombre fractionnaire de mansions,
sans quoi la croissance et la diminution n'apparatraient pas
dans le monde du devenir . Cette remarque contient une allu
sion une loi qui s'affirme dans les rapports mutuels de tous
les cycles cosmiques, et notamment dans les rapports entre les
cycles du soleil et de la lune; car, non seulement les mansions
lunaires ne sont pas entirement contenues dans les parties du
zodiaque, mais encore le parcours annuel du soleil ne concide-t
il pas avec un nombre entier de cycles lunaires; ainsi qu'il est
dit dans le Qoran (srat Ya Sn): Il n'est pas permis au soleil
d'atteindre la lune, ni la nuit de dpasser le jour, mais chacun
Si le soleil atteignait la
plane dans une propre sphre .
lune, c'est--dire, si un rythme complet de rvolutions lunaires
pouvait tre contenu dans un cycle solaire, de faon ce que
l'volution de leurs rapports ,rciproques revienne au point de
dpart, leur cycle commun serait achev; leur manifestation se
rsorberait dans la non-manifestation: La nuit dpasserait le
jour .
Il faut aussi qu'il y ait, dans une certaine mesure, rpti
5.5

tion; dans des intervalles de 18 ans, les positions rciproques


du soleil et de la lune parcourent en effet les mmes cycles;
mais ceux-ci sont tisss dans l'ensemble du monde plantaire,
et se situent selon des proportions nouvelles par rapport aux
autres astres.
Ce qui s'exprime dans cette superposition de rythmes, c'est,
d'une part, que tout cycle de manifestation comporte une re
lative rptition, puisqu'il est fait d'images d'un mme arch
type polaire , images qui sont ncessairment analogues en
tre elles; mais d'autre part, il ne comporte aucune rptition
effective, puisque l'essence crative de l'archtype ne saurait
jamais tre puis par ses images ou symboles.
L'analogie
est la trace de l'Unit, et le caractre inpuisable est le reflet
de l'infinit du Principe.
Cette
loi de non-rptition, qui veut qu'aucun cycle
cosmique ne se referme sur lui-mme, s'exprime aussi, en quel
que sorte aux extrmes limites du monde sensible, dans la pr
cession des quinoxes qui fait que
points-d'intersection du
cycle solaire avec l'quateur cleste effectuent, par rapport au
ciel des toiles fixes, une rvolution entire en une priode d'en
viron 26.000 ans; d'o rsulte le dcalage actuel entre les si
gnes ou divisions du zodiaque et les douze constellations qui
portent les mmes noms. - Nous avons dj montr que la
diffrenciation qualitative des rgions ou directions clestes qui
s'exprime dans la division du zodiaque procde des quanre
termes constants du cycle solaire, les quinoxes et les so13tices,
et qu'il est donc impropre de dire - comme le font certains
astrologues modernes - que l'quinoxe de printemps se d
place du signe du Blier au signe du Verseau, puisque les signes
se comptent invariablement partir du point vernal. Par COTI.
tre, on peut dire que la constellation du Blier s'est dplace
vers le signe du Taureau ou que le point vernal, c'est--dire

56

l'quinoxe de printemps, s'est dplac de la constellation


Blier celle des Poissons; et l'on doit supposer que le change
ment des rapports entre ces deux deux suprmes, celui des
tours zodiacales et celui des toiles
a modifi d'une
certaine faon ce qu'on peut appeler l'influence du ciel . Ce
pendant, nous manquons de toute mesure spatiale pour dter
les contenus de ce grand cycle extrme qui se traduit
dans la prcession des quinoxes, car nous n'en connaissons ni
le commencement ni la fin, et si nous faisons abstraction des
termes constants du cycle solaire, les qualits des rgions c
lestes deviennent compltement indfinissables (1). En effet,
le principe de distinction qui mesure l'espace cleste est essen
tiellement solaire; c'est par la rvolution du soleil que s'opre
la diffrenciation qualitative des directions qui rayonnent inva
1. Il nous faut rpondre :1 l'objecton qu'on pourrait tirer du fait que
'astrologie hindoue,
semble remOl1te!" aux mmes
pas, pour hl dtermnation des positions plantaires,
ne se
la division actuelle du zodiaque partir de l'quinoxe de printemps (le
vernal), mais aux douze constellations de la sphre des toiles fixes. Il serait
erron de conclure de ceci que selon tel point de vue traditionnel, la division
du Zodiaque serait indpendante des points cardinaux du cycle solaire; les
trologues hindous se rfrent simplement, dans leur divi sion des rgions
une certaine date cyclique qui se marque par la concidence des
douze constellations avec les douze
zodiacaux synonymes, et ils oprent
en cela d'une faon analogue celIe qui rapporte tous les mouvements
ntaires s'effectuant au cours d'une vie individuelle la position initiale
ciel lors du moment de la naissance. D'un autre ct le point de vue de
l'astrologie hindoue correspond bien la tendance "mythologique" de la
civilisation hindoue, alors que l'astrologie arabe se caractrise par son esprit
nous voulons dire que les hindous ont spontanment la tendance
pour les dissoudre dans l'assentiment de l'Infini,
de diviser" les
tandis que l'esprit d'Islam, qui dtermine l'astrologie
dduit tout de
Quant la date de concidence des deux zodia
l'ide de l'Unit divine.
se situe aux environs de l'an 400
l-C., elle doit nces
ques, date
sairement correspondre une "renaissance" du symbolisme astrologique
mme.
ft

57

signes }) majeurs des dures successivemetnt dcroissantes: Le


Blier rgne pendant 12.000 ans, le Taureau pendant Il
les Gmeaux pendant 10.000; et les dures dcroissent ainsi
jusqu'au signe des Poissons, dont le rgne ne compte que
1.000 ans. Cette dcroissance prouve encore qu'il ne peut pas
s'agir de dterminations spatiales comme celles qui divisent le
zodiaque, mais que les divisions zodiacales sont ici transposes,
en raison d'une analogie spirituelle, en des dterminations
rement temporelles d'un cycle dont la subdivision se soustrait
la mesure spatiale; en effet, tout cycle spatial se divise par
symtrie, tandis qu'un cycle purement temporel se divise en
raison de la contraction progressive du temps (1). Quant la
dure effective des diffrents rgnes de ces signes ma
jeurs, il ne faut peut-tre voir dans les nombres d'annes
ques par Ibn Arabi que des chiffres tout symboliques. Toute
fois, la somme de tous ces 'rgnes quivaut la dure de
trois prcessions entires des quinoxes; - il faut toujours te
nir compte du fait que nous pouvons mesurer la dure entire
d'une prcession (tant donn que nous en pouvons dterminer
vitesse), sans que nous puissions en fixer les termes dans
l'espace.
Si l'on se rapporte la thorie hindoue des cycles
cosmiques et que l'on compte pour le premier yuga de l'actuel
manvantra la dure d'une prcession entire, le manvantra,
tant compos de quatre yugas dcroissant selon la proportion
4: 3: 2: 1, devra comporter 65.000 ans, ce qui diffre d'une
demi-prcession de la somme de 78.000 ans, qui se dduit du
symbolisme indiqu par Ibn Arabt Ajoutons que le Skeikh al
akbar Iremarque incidemment que le premier signe qui rgna
sur le monde fut la Balance, et que celle-ci dominait du nouveau

riablement du centre terrestre et humain et qui dfinissent les


rgions de la vote du ciel-limite.
cycle solaire est donc l'ex
pression directe de l'Acte divin qui ordonne le chaos. Par con
tre, la sphre des toiles
dont l'innombrable multitude
est comme une image d'autant de germes lumineux isols dans
les tnbres et susceptibles d'entrer en relations mutuelles non
encore manifestes - symbolise, par ,rapport la sphre zo
diacale, la potentialit cosmique qui ne saurait jamais s'puiser
et qui se soustrait toute dfinition intelligible. - Ainsi nous
ne pouvons pas distinguer les qualits propres de la sphre des
toiles fixes, dont nous voyons pourtant les traces, alors que
nous connaissons les qualits de la sphre sans toiles, que nous
ne voyons pas. Il y en ceci une signification profonde: nous
pouvons en effet connatre le droulement du monde en prin
cipe, mais nous ne connaissons pas toutes les potentialits
matrielles que ce drouloment puisera.

Le cycle extrme qui se manifeste par la prcession des


quinoxes, mais dont nous ne pouvons pas dterminer les
phases, doit influencer l'ensemble du ciel par une successive
prdominance de certaines qualits cosmiques ou divines. Et
puisque ce cycle majeur est comme le modle de tous les autres
cycles qui lui sont subordonns, on peut lui attribuer, par une
transposition symbolique, des contenus ou partitions analogues
celles d'un cycle infrieur. Ainsi le Skeikh al-akbar attribue au
cycle cosmique majeu1;' des dterminations qu'il dsigne par les
noms
signes zodiacaux et qui se suivent dans l'ordre du
mouvement annuel du soleil; ce qui montre bien qu'il ne s'agit
nullement du dplacement du point vernal dans les constella
tions, dplacement qui se meut en sens inverse du mouvement
solaire. D'autre part, le Maitre assigne aux rgnes de ces

1. Cf. le

Le temps
temps de

en espace dans: Le rgne de la quan


Gu\1on.

59

58

";,,;,,,b;i,,;;jj 'i,y;:,j";):::Hiil iijjiiHl ii,; ;itli'!'

l'poque du prophte Mohamed (1). - Nous laisserons vo


lontiers d'autres la tche de concilier ces diffrentes donnes.
Par la considration de la prcession des quinoxes nous tou
chons ncessairement aux limites de l'ensemble cosmique qui
se caractrise par la concidence des dterminations temporelles
et spatiales dans le mouvement des astres. Cet ensemble ne peut
pas
un systme clos, et ds que nous considrons ses limites,
nous manquons de mesures; car le temps se mesure par le
mouvement dans l'espace. Le monde visible est comme une
figure parfaitement cohrente, tisse sur un fond glissant
chappe notre prise.
Pour terminer, nous rappellerons une formule de Mohyid
drn ibn .A>rab que nous avons dj cite incidemment au cours
de notre expos, et dont l'importance cosmologique et mta
physique est tout fait fondamentale: Le monde consiste
dans l'unit de l'unifi, tandis que l'Indpendance divine rside
dans l'unit de l'Unique .

<.

1. Remarquons que le
de la Balance n'existe pas dans les
anciennes reprsentations du zodiaque. Par contre, les anciens Chinois
naient le nom de Balance l'Ourse polaire.

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Titus Burcl?Jmrilt:

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Cl spirituelle
de

L'Astrologie Musulman
d'aprs
Mohyiddn Ibn Arabi

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ARCH
MILANO

1974

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