Phrase Modalisee Cours2014

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1. Phrase modalise. Notions fondamentales.

1.1.

Phrase/ nonc.

Phrase : l'unit linguistique maximale (COMPTENCE).

Constitue de morphmes 1 (lexicaux et grammaticaux), associs de manire incrmentielle les uns


aux autres, selon des rgles de bonne formation syntaxique.
Niveaux danalyse pertinents: la syntaxe (rgles de formation de la phrase) et la smantique (contenu
de la phrase).
Contenu de la phrase : la signification, produit de la signification des morphmes (lexicaux et
grammaticaux) qui la composent (signification dite, de ce fait, compositionnelle).

Enonc : l'unit pragmatique minimale (PERFORMANCE).

Constitu par une phrase (unit linguistique maximale) utilise dans un contexte prcis, dans une
certaine situation dnonciation.
Niveau danalyse pertinent: la pragmatique.
Contenu de lnonc : le sens, obtenu sur la base de la signification de la phrase et des
informations constituant son contexte.

Noter que cette dcoupe <phrase/ nonc>, largement accepte en linguistique contemporaine, nallait pas de
soi chez Saussure (dbut du XXme sicle), pour qui la phrase procdait, en tant que combinatoire libre de
signes linguistiques, de la parole .
COMPTENCE/ PERFORMANCE (Noam
Chomsky 2)

LANGUE/ PAROLE (Ferdinand de Saussure 3)

Comptence :
connaissance que le
locuteur-auditeur (idal) a
de sa langue (lexique,
syntaxe, phonologie,
smantique).

Langue : ct
social (conventionnel) du
langage : trsor collectif.

Parole : ct
individuel du langage.

Langue : entit
abstraite (systme de
potentialits : PURES
VALEURS) ; code (=
systme de signes :
SIGNES & RELATIONS
entre signes).

Parole : entit
concrte : utilisation
individuelle (actualisation)
du code de la langue, dans
la communication.

Langue : produit
[de lusage collectif, des
conventions] que
lindividu enregistre
passivement

Parole : acte
individuel de volont et
dintelligence

Langue :
dictionnaire
relations
associatives (in
absentia :
paradigmatiques) entre
signes linguistiques
combinatoire
fige 4

Parole :
relations combinatoires (in
prsentia :
syntagmatiques) entre
signes linguistiques :
combinatoire libre.

Phrase comptence

Performance :
emploi effectif de la
langue, par un sujet
parlant donn, dans
des situations
concrtes.

!!!Phrase PAROLE.
!!!Phrase unit
linguistique (opposition
linguistique/ langagier)

1
Units significatives minimales (son/ sens). Il y a des mots qui ne consistent quen un seul morphme (rose, et, ), et dautres qui
consistent en plusieurs morphmes (radical + affixes drivationnels (prfixes, suffixes) ou flexionnels et/ou dsinences : inPREF-galRADitSUFF-s DS. PL, pluieRAD-s DS.PL, marchRAD-aiIMP-ent DS.3PL, ) voire de plusieurs mots (mots composs : moulin caf, machine-outil, portemonnaie, portefeuille,). Niveau danalyse pertinent (et discipline linguistique correspondante) : morphologie (flexionnelle,
drivationnelle).
2
Chomsky N. (1965) Aspects of the Theory of Syntax, Cambridge Massachussets : MIT Press, 1965 (trad. fr., Aspects de la thorie
syntaxique, Paris : Seuil 1971). Dans cette section, les renvois la page concerneront la traduction en franais de louvrage cit
(Chomsky 1965/1971).
3
De Saussure, Ferdinand (1995/ 1916) - Cours de linguistique gnrale, Paris : Payot.
Publi en 1916, le Cours de linguistique gnrale a t rdig par les lves de Ferdinand de Saussure (1857-1913) partir de leurs
notes (Charles Bally, Albert Sechehaye, avec la collaboration de Albert Riedlinger). Ldition 1995 reproduit l'dition originale. Elle est
accompagne de l'important appareil critique tabli par Tullio de Mauro.

Dans les termes mmes du Cours de linguistique gnrale : combinaisons rgulires .

Les deux dfinitions corrles de la phrase et respectivement de lnonc reposent crucialement sur lhypothse
de rapports doccurrence (ou: dactualisation) entre ces deux types d'units :

une phrase telle que Je suis arrive en retard est susceptible de nombreuses actualisations, qui
influeront sur sa rfrence; prononce par Marie Dupont, le 23 mai 2008, devant le secrtariat de
sa facult, elle signifiera: Marie Dupont est arrive en retard ( la fac), le jeudi 23 mai au matin,
et prononce par Jeanne Dubois, le 4 novembre 2008, dans le hall de la Banque o elle travaille:
Jeanne Dubois est arrive en retard (au bureau) le vendredi 4 novembre 2008, au matin;
par voie de consquence, cest lnonc dune phrase assertive et non cette phrase mme (
rfrence incompltement spcifie) qui sera le lieu de lassignation dune valeur de vrit (vrai/
faux).

Lhypothse de rapports doccurrence (ou: dactualisation) entre phrase et nonc se laisse prciser par
lidentification de deux types de mcanismes interprtatifs lenrichissement contextuel, dune part, et le
filtrage contextuel, de lautre :

la signification (compositionnelle) de la phrase doit tre enrichie


contextuellement pour produire le sens de l'nonc (voir problmatique de la
rfrence actuelle voque tout lheure) ;
corrlativement, tant donn un nonc (entendu ou lu), il nest pas toujours
vident didentifier la phrase dont il est lactualisation : en cas dambigut
(syntaxique : [SN Le vieux singe] [SV [SN le] [v masque]] ( le vieux primate (m)
empche de voir quelque chose/ [SN le vieux] [SV singe [SN le masque]] (= le
vieillard imite un masque ); lexicale : le loup (= masque de carnaval ?
ou bien : animal carnassier ?) est gris), cest le contexte qui filtrera les
interprtations inconsistantes, permettant dassocier, lnonc entendu (ou lu)
la phrase correspondant lintention communicative du locuteur 5.

Ces deux dfinitions gomment en revanche les divergences structurales censes pouvoir subsister entre
nonc et phrase. Il est en effet souvent suggr, dans la littrature, que si la phrase est le rsultat de
principes de composition syntaxique et smantique, l'nonc n'aurait pas tre interprt en termes des seuls
principes compositionnels, ntant pas toujours construit en fonction de critres syntaxiques : Moi, tu sais, la
linguistique, ouais, bf ! Il y aurait donc des noncs qui ne sont pas pour autant des phrases:
En franais, la phrase minimale comporte ncessairement au moins un sujet et un verbe conjugu.
En revanche, l'nonc minimal peut tre constitu d'un seul lment, de nature quelconque : des
squences comme Bonjour ! , All ? ou Zut ! constituent des noncs, mais pas des
phrases 6. Des noncs comme Moi, partir ? , Quel dsastre ! , Voir Venise et mourir , ou
encore L, il va, je ne sais pas, moi, mais srement, enfin comment dire ? srement ragir, oui, c'est
a, ragir , ne sont pas descriptibles en termes de construction syntaxique canonique de phrases.
L'nonc peut apparatre, tantt comme une phrase incomplte ou tronque ( Moi ? jamais ! ),
tantt comme une phrase en quelque sorte surcharge et bgayante ( Ma sur, elle, son
concours, c'est pour bientt ). Si la structure de l'nonc se diffrencie souvent de celle de la phrase,
c'est parce qu'il s'agit de ralits linguistiques relevant de niveaux diffrents du point de vue
thorique (Encyclopaedia Universalis, art. nonc).
Nous nous en tiendrons, ici, la dfinition fonctionnelle (vs structurale) du couple phrase/ nonc (dfinition en
termes dactualisation). Les noncs syntaxiquement dviants mais parfaitement interprtables du (des)
type(s) voqu(s) prcdemment se laissent galement analyser en tant quoccurrences de phrases, force
dassumer, ne serait-ce quen termes oprationnels (vs thoriques), la distinction entre phrases
grammaticales, phrases interprtables et phrases acceptables.

Le couple notionnel grammaticalit/ acceptabilit (notions graduelles) est dvelopp, en


grammaire gnrative, en lisr de la distinction comptence/ performance:
Grammaticalit : conformit aux rgles de la grammaire. Concept appartenant ltude de
la comptence.
Acceptabilit : conformit lusage ( les phrases plus acceptables sont celles qui ont plus
de chances dtre produites, sont plus aisment comprises, moins maladroites et, en un
5

Cf. Moeschler, Jacques et Anne Reboul (1994) Dictionnaire encyclopdique de pragmatique, Paris : Seuil, 131-132.
Cela dit, le dpart phrase/ nonc nest pas toujours aussi tranch en termes de leur structuration respective. Charles-Albert
Sechehaye analyse les noncs monormes en tant que phrases un seul terme , nonc monorme et phrase
monorme apparaissant en variation libre, dans le texte (Sechehaye, Charles-Albert (1926) Essai sur la structure logique de
la phrase, Tome 1/1, Paris : Champion, chap. I. Accessible en ligne sur : http://roman.ens-lsh.fr ).
6

certain sens, plus naturelles op. cit., p. 22). Concept appartenant ltude de la
performance 7.
Dfinitions oprationnelles.

1.2.

phrase grammaticale : conforme aux rgles de la grammaire (Dincolores ides


vertes dorment furieusement 8) ;
phrase interprtable : laquelle ont peut assigner un sens (mme si elle nest pas
bien forme selon les rgles de la grammaire : moi, Tarzan, toi, Jane ; moi, la
linguistique, tu sais, bf !) ;
phrase acceptable : la fois grammaticale et interprtable (De jolis agneaux blancs
dorment paisiblement ; moi, la linguistique, je peux trs bien men passer).

Enonc/ nonciation.

nonciation : acte individuel dutilisation de la langue, activit exerce par celui qui parle au moment o il
parle.
nonc : produit de cet acte, qui en garde les traces (marques nonciatives = marques du locuteur; dans les
termes dmile Benveniste 9, initiateur de la linguistique de lnonciation , en France : lhomme dans la
langue , la subjectivit dans le langage ).
Principaux reprsentants de cette mouvance en linguistique franaise : Catherine Kerbrat-Orecchioni 10,
Oswald Ducrot 11, Antoine Culioli 12.
1.3.

Phrase/ syntagme.

Nous avons dit que la phrase tait constitue de morphmes (lexicaux et grammaticaux), associs les uns aux
autres de manire incrmentielle (1.1. supra). De manire incrmentielle, cest--dire : par augmentation(s)
ou ajouts successifs, par ordre croissant de complexit.
Les morphmes se combinent pour former des mots, les mots se combinent pour former la phrase : Ils
parlent franais couramment.

La distinction comptence vs performance et labstraction du locuteur-auditeur idal sont autant dhypothses de travail
participant du cadre gnral des recherches gnrativistes ds la version standard du modle.

Lobjet premier de la thorie linguistique est un locuteur-auditeur idal, appartenant une communaut linguistique
compltement homogne, qui connat parfaitement sa langue et qui, lorsquil applique en une performance effective sa
connaissance de la langue, nest pas affect par des conditions grammaticalement non pertinentes, telles que
limitations de mmoire, distractions, dplacements dintrt ou dattention, erreurs (fortuites ou caractristiques)
(Chomsky 1965/1971 : 12).
Une distinction fondamentale est ainsi tablie entre la comptence (la connaissance que le locuteur-auditeur a de sa
langue) et la performance (lemploi effectif de la langue dans des situations concrtes) .
Est galement soulign le fait que la performance ne peut tre dite reflter directement la comptence qu
lintrieur de la premire hypothse de travail avance, savoir lhypothse du locuteur-auditeur idal (op. cit., p. 13),
et non dans les faits , puisquun enregistrement de la parole naturelle comportera de faux dparts, des infractions
aux rgles, des changements dintention en cours de phrase, etc. (op. cit., p.13).
Le rapport entre comptence et performance est un rapport dinclusion (de la comptence, la performance) : ltude
de la performance linguistique effective , oblige considrer linteraction de facteurs varis, dont la comptence
sous-jacente du locuteur-auditeur ne constitue quun lment parmi dautres (idem, pp. 12-13). Mais,
corrlativement, linvestigation de la performance navancera quautant que le permettra la comprhension de la
comptence sous-jacente (ibid., p. 20).
Les donnes de la performance, en tant quobservables, se retrouvent en amont de la modlisation de la comptence
(ou : grammaire ), cense dterminer, partir des donnes de la performance, le systme sous-jacent de rgles
qui a t matris par le locuteur-auditeur et quil met en usage dans sa performance effective. (ibid., p.13, nous
soulignons).
8
Remarquer la violation systmatique des restrictions de slection smantique (dormir slectionne un sujet anim, les adjectifs
de couleur tel vert(es), des nominaux concrets, notamment objets physiques, et les modificateurs de verbe tel furieusement,
un verbe [+intentionnel]), ainsi que les contradictions (ides ou bien incolores ou bien vertes).
9
Benveniste, Emile (1958) De la subjectivit dans le langage , Journal de Psychologie, 55, repris in : Benveniste, Emile
(1966), Problmes de linguistique gnrale, tome I, ch. XXI.
Benveniste, Emile (1970), LAppareil formel de lnonciation , Langages, 17, repris in : Benveniste, Emile (1974), Problmes
de linguistique gnrale, tome II, ch. V.
10
Kerbrat-Orecchioni, Catherine (1980) Lnonciation. De la subjectivit dans le langage, Paris : Armand Colin. KerbratOrecchioni, Catherine (1990-1994) Les Interactions verbales, tomes 1-3, Paris : Armand Colin.
11
Qui articule traitement de la phrase et traitement de lnonc en termes du contexte situationnel (composant linguistique :
signification de la phrase, composant rhtorique : sens de lnonc tant donn un certain contexte situationnel), et
opre, dans le cadre dune extension originale de la thorie nonciative de Benveniste, inspire des analyses de texte chez
Bakhtine (linguiste russe), la thorie de la polyphonie, une distinction de principe entre locuteur-allocutaire, dune part, et
nonciateur-destinataire de lautre. Cf. Ducrot, Oswald, (1980) Les Mots du discours, Paris : Minuit.
12
Thorie des oprations nonciatives. Cf. Culioli, Antoine (1990) Pour une linguistique de lnonciation. Oprations et
reprsentations, Tome 1, Paris : Ophrys.

Parmi les morphmes qui se combinent pour former des mots, on distingue, selon leur contribution
smantique et/ou fonctionnelle : radical, affixes et dsinences. Les morphmes libres sont des mots
part entire (franais, dans lexemple prcdent). Voir note 1 supra.
La distinction traditionnelle entre parties du discours (nom, verbe, adjectif, prposition, adverbe,
conjonction) et fonctions syntaxiques (sujet, complment dobjet direct, complment dobjet
indirect, complment circonstanciel, attribut du sujet, attribut de lobjet, pithte, complment du nom
(adnominal)) postule dj des regroupements fonctionnels (=pertinents pour linterprtation) des
morphmes libres constituant la phrase (= mots).
De fait, except le prdicat verbal , qui concide systmatiquement, sous cet clairage, avec le
verbe seul (Ltudiant va la fac, prdicat : va, sujet : ltudiant, complment de lieu : la fac), les
autres (vraies) fonctions sont le plus souvent ralises par des groupes de mots.
En grammaire traditionnelle dj, la phrase est donc (de manire plus ou moins explicite) envisage
comme constitue non pas directement de morphmes ou de mots, mais de groupes de mots.
Mais partir de l, lanalyse traditionnelle assignera la phrase une structure plate, comme si tous
les groupes de mots fonctionnellement dfinis en quoi elle consiste y taient linairement
additionns les uns aux autres, lun aprs lautre : groupe sujet + verbe (=prdicat) + groupe
complment.
En linguistique moderne, les grammaires de dpendance, tel le modle valences de Lucien Tesnires
vont dans le mme sens : le verbe y est pos come terme principal autour duquel gravitent sujet et
complments slectionns par le verbe (les actants syntaxiques), mais ces derniers sont placs au
mme niveau lun par rapport lautre, et tous par rapport au verbe.
Lanalyse en constituants immdiats propose par le structuralisme amricain 13 viendra suppler ce
manque. Elle comporte trois concepts opratoires : syntagme, constituant, constituant immdiat.
tant donn le morphme, unit significative (et syntaxique) minimale, et la phrase, unit syntaxique
maximale, un groupe de morphmes qui, un niveau danalyse quelconque, forme une unit
syntaxique en se combinant entre eux sera appel syntagme. Dans la phrase Ltudiant va la fac,
larticle dfini le et le nom tudiant constituent un syntagme (nominal) fonction de sujet, la+fac en
constituent un autre (toujours nominal), fonction dobjet de la prposition , +la+fac constituent un
syntagme prpositionnel complment (de lieu) du verbe, et va la fac, un syntagme verbal.
Tout morphme ou syntagme faisant partie dun syntagme plus grand sera appel constituant.
Ainsi les constituants du syntagme va la fac sont-ils : va, , la, fac, la fac, la fac. Les constituants
de nous parlons franais (la phrase mme est dsormais envisage comme un syntagme) sont : parl(radical), -ons (dsinence personnelle), nous, franais, parlons (morphmes libres), parlons franais
(syntagme).
Les deux (ou plus de deux) constituants qui forment directement un syntagme seront appels
constituants immdiats. Les constituants immdiats de la phrase Ltudiant va la fac sont ainsi les
plus grands des constituants qui forment cette phrase rien quen se combinant entre eux : le syntagme
nominal sujet ltudiant, et le syntagme verbal va la fac. Les constituants immdiats du syntagme
verbal va la fac sont le verbe va et le syntagme prpositionnel la fac, les constituants immdiats du
syntagme prpositionnel la fac sont la prposition et le syntagme nominal la fac, les constituants
immdiats du syntagme nominal la fac sont larticle la et le nom fac, les constituants immdiats du
syntagme nominal sujet ltudiant sont larticle le et le nom tudiant, les constituants immdiats du
nom tudiant sont le radical (de souche verbale) tud- et le suffixe -ant
Si, initialement, on avait suppos quun syntagme pouvait avoir deux ou plus de deux constituants
immdiats, la grammaire gnrative en est arrive, partir notamment de sa version standard tendue,
limiter le nombre de constituants immdiats de tout syntagme deux. Au sens de la thorie
syntagmatique de cette nouvelle syntaxe appele thorie X-barre tout syntagme est suppos
instancier les relations structurales suivantes :
-

13

14

tte X (catgorie terminale qui projette) ;


complment de la tte (premire catgorie avec laquelle la tte fusionne formant ainsi un
constituant complexe): Compl, X ; une fois compose structuralement son complment, la
catgorie introduite en syntaxe comme tte projettera : le constituant complexe engendr par
lunion de X un autre syntagme YP 14 (son complment) sera vue par la computation
syntaxique (et linterface smantico-logique) comme catgorie du type de X (non comme
catgorie du type Y - type instanci par son complment) ;
spcifieur de la tte (seconde catgorie (ZP) introduite dans lobjet syntaxique en train
dtre gnr, auprs de X dj compos son complment YP (en fait : auprs de la
premire projection de la tte X, projection note X, qui reprsente tout ce quelle domine,
en loccurrence lobjet complexe X + YP dans son entier) ; une fois lobjet syntaxique form

Expression propose par Bloomfield.

P du terme anglais de phrase, pour : syntagme .

par X et par YP (son complment) fusionn ZP, ce sera la premire projection de X (X) qui
projettera, de sorte que le nouveau constituant complexe sera toujours visible comme
catgorie du type de X (=XP) ; notation : Spec, X.
Cette analyse des syntagmes, qui ne comporte que des di-branchements, permet de rendre compte de
manire immdiate de lordre dintroduction des constituants dans lobjet syntaxique, assurant une
transparence maximale de la chronologie des procdures de fusion, dans la reprsentation syntaxique
gnre.
Projection maximale de la tte X (Xmax donc, not aussi
X), interprte comme syntagme de catgorie X (XP)

XP

Spcifieur

ZP

Tte X qui projettera

Projection intermdiaire
qui projette son tour (X et Xmax la fois) : chaque
niveau de projection est not par une barre ou un prime

YP

Complment

Fig. 2. Structure du syntagme (thorie X-barre).

1.4.

Phrase/ proposition.

Distinction structurale
manifeste (distinction
syntaxique):

Distinction en termes de niveaux danalyse syntaxique


(distinction structurale pas forcment apparente)

proposition = constituant
syntaxique de la phrase.

proposition = niveau danalyse syntaxique infrieur celui


de la phrase 15.

phrase simple (= lmentaire)


1 proposition
phrase complexe plusieurs
propositions 16

Phrase : unit syntaxique et smantique pourvue de


spcifications temporo-aspectuelles et modales (ancrage
temporel au sens large : Sylvie est alle la fac).

proposition indpendante :
Sylvie est alle la fac.

Proposition : unit syntaxico-smantique non pourvue


dancrage temporel, simple structure de prdication
(structure argumentale [aller (Sylvie, la fac)], [marcher
(Sylvie)] augmente ventuellement de complments
optionnels [ pied [aller (Sylvie, la fac)]] 23, [vite [marcher
(Sylvie)]] 24).

proposition principale : Jean


croit que Sylvie est alle la fac.
proposition subordonne :
Jean croit que Sylvie est alle la
fac.
La notion de proposition
indpendante est dfinie par la
ngative : ni principale, ni
subordonne (cest--dire : en
dehors de toute relation de
dpendance). Il sensuivra que les
coordonnes (=chacun des
conjoints (souligns dans
lexemple ci-contre) dune phrase
complexe du type de : Sylvie est
alle la fac 17 et Marie est reste
chez soi 18) et les juxtaposes
(=chacun des conjoints (souligns
dans lexemple ci-contre 19) dune
phrase complexe du type de :
Sylvie est alle la fac, Marie est
reste chez soi) seront aussi
envisages comme
indpendantes 20.
Ddoublement terminologique
phrase/ proposition :

proposition
indpendante =

Il sagit l, sans autre, dune dfinition de la


proposition comme niveau danalyse syntaxique
infrieur la phrase (donc : comme constituant
syntaxique de la phrase) y compris dans le cas des
phrases simples.
Rappel : une structure argumentale est constitue dun
Prdicat (smantique 25) et des arguments slectionns par
ce prdicat.
La notion dargument est emprunte la logique des
prdicats (ou : logique des propositions analyses), plus
exactement, la notation logique des relations de
prdication (x est f not f(x) - argument dune fonction,
donc), la notion de prdicat tant assimile la notion
(mathmatique, logique) de fonction (MORTEL (Socrate) :
Socrate est mortel).
En linguistique structurale franaise (Tesnire, Lucien (1959)
Elments de syntaxe structurale, Paris : Klincksieck), on
dirait plutt structure actancielle (de: actant (slectionn
et donc non optionnel dans lconomie de la phrase), notion
syntaxique et smantique correspondant la notion
dargument (davantage utilise dans lespace anglophone),
et oppose la notion de circonstant (non slectionn et
donc optionnel, dans lconomie de la phrase).
Sujet et complments sont, chez Tesnire, des actants qui
compltent (ou : satisfont) les valences du verbe (centre de
la phrase). Le sujet est le premier actant, les complments
slectionns, des actants second ou tiers, les complments

15

Ce qui reformule en fait lide que la proposition est un constituant syntaxique de la phrase.
On distingue, traditionnellement, aussi : phrase minimale (qui ne comporte que des lments essentiels, ineffaables : le
minimum requis pour sa grammaticalit parfois appele toujours : phrase simple), et phrase tendue (qui comporte, outre
les lments essentiels, des largissements (ou : expansions ) : pithtes conjointes venant largir les groupes
nominaux sujet ou objet, adverbiaux venant largir le groupe verbal, complments de phrase venant largir la phrase tout
entire) cf. Dubois, Jean et Ren Lagane (1993) La nouvelle grammaire du franais, Paris : Larousse-Bordas : 151-152).
Nous prserverons ici au terme de phrase simple lacception courante en grammaire gnrative (phrase uni-propositionnelle
(minimale ou tendue pourvu que (tant dans le cas de la phrase minimale que dans celui de la phrase tendue) les
arguments slectionns (pour la phrase minimale : Je le crois vs Je crois que vous avez compris) et/ou les expansions (pour la
phrase tendue : Je le pensais encore ce moment-l [arguments et expansions non propositionnels] vs Je pensais encore
ce moment-l [expansions non propositionnelles] que vous aviez compris le sens de cette opposition [argument slectionn
propositionnel] ; Avant davoir corrig les copies [expansion propositionnelle], je croyais encore [expansion non
propositionnelle] que vous aviez compris le sens de cette opposition [argument slectionn propositionnel] ; Les tudiants
sont arrivs avant la prof [expansion non propositionnelle] vs Les tudiants sont partis avant que la prof narrive [expansion
propositionnelle]) ne soient pas eux-mmes des propositions), oppose la notion de phrase complexe (=multipropositionnelle)), et opposerons la phrase tendue (= phrase qui comporte des lments non slectionns, optionnels
mais pas toujours propositionnels eux-mmes quel quen soit le niveau dincidence), la phrase minimale .
17
Premier conjoint : une proposition indpendante.
18
Second conjoint : une autre proposition indpendante.
19
Veuillez noter que la phrase complexe nest pas, elle, souligne comme un tout (virgule comprise) !
20
Cf. Riegel, Pellat & Rioul (2008/ 1994) : 472.
16

phrase simple
proposition
principale = phrase
matrice (= phrase
racine) 21

Spcialisation structurale (en


grammaire gnrative
notamment) : phrase racine
(=matrice)/ proposition
enchsse.
N.B. Que lon prenne le
ddoublement terminologique
proposition indpendante/
phrase simple pour une relation
dquivalence substantive (et
donc transitive : toute
proposition indpendante serait
une phrase simple et toute phrase
simple, une proposition
indpendante) ou que lon veuille
distinguer minimalement
propositions indpendantes et
phrases simples (toute phrase
simple se rduit une proposition
indpendante, mais toute
proposition indpendante nest
pas du coup une phrase
simple 22), sous cet clairage, il
ny a pas moyen de distinguer
entre (dans cet ordre-ci :) phrase
simple et proposition
indpendante. Il y aurait donc
concidence (triviale) entre phrase
(simple) et proposition
(indpendante) en tant que
niveaux danalyse syntaxique. Un
rsultat pas trs heureux.

non slectionns, des circonstants.


Il existe des actants syntaxiques auxquels il ne correspond
aucun actant smantique (les sujets expltifs : il est arriv
trois tudiants), et des actants smantiques auxquels il ne
correspond aucun actant syntaxique (lobjet zro de
phrases elliptiques telle Cela dpend [ de quoi ? ]).
Les notions dargument et dactant ne sont cela dit pas
strictement parallles : le nom modifi par un adjectif en
emploi dpithte conjointe (la belle Vnitienne) est bien
largument de cet adjectif (analys, lui, comme prdicat
smantique), sans pour autant en tre lactant.
Une fois la proposition apprhende comme simple
structure de prdication (structure argumentale,
ventuellement tendue), non soumise ancrage
temporel, toute phrase simple devrait tre
constitue dun syntagme (=groupe de mots)
instanciant la relation de prdication
smantique essentielle, enchss (en labsence
de complments non slectionns (=prdications
optionnelles)) sous une catgorie fonctionnelle
portant les traits de temps-aspect-mode pertinents
pour lancrage temporel (au sens large) : voir Fig.
1 ci-aprs.
Cette catgorie fonctionnelle, note T (T de Temps)
runit les traits de temps-aspect-mode du verbe
(les flexions verbales pertinentes du point de vue
interprtatif pour la rfrence temporelle de la
phrase), ainsi que ses traits daccord (traits de
personne et de nombre), redondants, eux, de traits
de mmes valeurs dun argument nominal du verbe
(en franais, il sagira ( de rares exceptions prs 26)
du sujet).
Si les traits de temps-aspect-mode dun verbe
smantiquement plein (=verbe substantif vs
auxiliaire ou verbe postiche 27) seront composs,
lors de linterprtation smantique de la
reprsentation gnre en syntaxe, la matrice de
traits smantiques purs de celui-ci, les traits

23

Phrases simples correspondantes : Sylvie va la fac pied./ Sylvie ira la fac pied./ Sylvie est alle la fac pied./
Phrases simples correspondantes : Sylvie marche vite./ Sylvie marchera vite./ Sylvie marchait vite./
Prdicat smantique vs prdicat syntaxique (au sens de la grammaire traditionnelle) : dans le cadre du prdicat nominal
(=copule+ attribut du sujet), seul lattribut du sujet est un prdicat smantique (un prdicatif, en termes de grammaire structurale).
Prdicat smantique vs groupe prdicatif (grammaire structurale) : lanalyse structurale des phrases tendues distingue, outre
le sujet (GN1), deux niveaux, incrmentiels : le groupe verbal GV (=verbe+ complments slectionns), et le groupe prdicatif GPrd
(=GV + complments de verbe non slectionns), la structure de la phrase tant Ph = GN1 + GPrd. lintrieur dune telle approche, la
notion de groupe prdicatif recoupe plus ou moins la notion logique de prdicat (vs sujet) dun jugement (exprim par une proposition
susceptible de se voir assigner une valeur de vrit (ou bien vrai ou bien faux)), mais le verbe ( valences satisfaites par le sujet et (le
cas chant) par son ou ses complments obligatoires) ny est pas le seul prdicat smantique.
Les complments non slectionns par le verbe (analyss comme des Groupes Adverbiaux (nots GAdv), mme lorsquils sont
exprims par des groupes prpositionnels (Sylvie va la fac pied), voire par des groupes nominaux (complments directs
qui ne sont pas des complments dobjet, tels les complments de prix ou de mesure : jai pay/ achet ce meuble 1000
euros/ trois fois rien, jai nag 1000 mtres), se laissent galement envisager en tant que prdicats smantiques : ce seraient
des prdicats optionnels, dans lconomie de la phrase, qui slectionnent, eux, un certain (type de) verbe/ groupe verbal (ce
qui expliquerait lexistence de relations de slection smantique fine entre ces lments : *Sylvie va la fac laiguille
(OKCette nappe est brode aiguille), Sylvie va la fac pied (*Cette nappe est brode pied).
24
25

21
22

.Cf. Riegel, Pellat & Rioul (2008/ 1994) : 472.

Une phrase simple est constitue dune (seule) proposition indpendante, et certaines phrases complexes sont construites de plusieurs
propositions indpendantes celles qui ninstancient pas de relation de dpendance smantico-syntaxique, savoir les phrases
complexes composes par juxtaposition et par coordination.
Le jeu des formes verbales suggre dj que cest l notre option.
26
Accord avec le thme discursif qui nest pas le syntagme Cas Nominatif, mais un adnominal Cas Oblique. Ainsi, dans une phrase
telle La majorit des candidatsM 3PL ont3PL t admisM PL y aura-t-il accord avec les-OBL candidats, non avec la-NOM majorit. La Forme
Logique de cette phrase encode, dune manire qui reste prciser, que la prdication doit tre entendue comme portant sur les
candidats concerns plutt que sur leur nombre.
27
Tel do-support en anglais (I dont eat meat (je (=moi)-nominatif do-prs. indic. 1sg +NEG mang(er) viande je ne mange pas de
viande), Does he eat meat? (do-prs.indic. 3sg il (=lui) mang(er) viande ? mange-t-il de la viande ? ). Les auxiliaires de temps dans
les langues qui nexhibent pas dalternance qui se laisse motiver smantiquement, tel le roumain (vs le franais : am venit de la
facultate/ je suis venu(e) de la fac ; am mers pe jos/ jai march, am citit o carte/ jai lu un livre) peuvent tre entendus jouer (plus ou
moins) le mme rle. Plus ou moins seulement parce que lauxiliaire de temps requiert une interprtation compositionnelle des traits de
temps-mode-aspect distribus entre lui-mme et le verbe plein au participe pass (dans les exemples envisags), alors que le verbe
postiche cumule lensemble des traits TAM pertinents (le verbe plein ntant alors quune sorte de racine verbale codant pour une certaine
ventualit (vnement, procs ou tat)).

daccord, qui nont aucune pertinence interprtative


sur le verbe, ne le seront pas ; ce sont leurs
corrlats sur largument nominal sujet qui seront
interprts.

SylvieN

=Tmax

Ancrage temporel (phrase)

=TP

=T

all(er)+

Structure de prdication
(proposition)

=VP

{prs. ind., 3 sg}


1

SylvieN

=T
1

all(er)

=PP

la

=DP

facN

=NP

Fig. 1. Sylvie va la fac

On peut aussi dfinir la proposition en tant que niveau danalyse linguistique distinct de celui de la phrase :
Phrase : unit syntaxicosmantique.
Exemple : Sylvie est alle
la fac

Proposition : unit logico-smantique :


a) association dun sujet et dun prdicat (logiques) : aller (Sylvie, la
fac) ;
b) association dun sujet et dun prdicat, qui se voit assigner une valeur
de vrit (vrai/ faux) ; dans cette acception-ci, certaines phrases
vhiculent une proposition (les phrases assertives), dautres pas (les
phrases interrogatives ou impratives par exemple) : Sylvie est alle
la fac [aujourdhui] sera la proposition vhicule par (une certaine
occurrence de) la phrase assertive Sylvie est alle la fac (dans un
certain contexte dnonciation, par exemple, en rponse la question O
est Sylvie ?).
On parlera alors plutt de forme propositionnelle. Les interrogatives par
exemple auraient une forme moins que propositionnelle (puisque
foncirement incomplte, contenant des variables, ouvrant des
alternatives pistmiques) 28.
Cette analyse (sous ses deux volets) rcupre lacception du terme de
proposition en grammaires logiques :
Proposition = construction minimale porteuse dun jugement.
Jugement = association dun sujet et dun prdicat
Sujet = ce dont on dit quelque chose
Prdicat = ce que lon dit de ce sujet 29

28
Cest dans cette acception-ci du terme de proposition que les mondes possibles sont envisags comme constitus de propositions
(vraies ou fausses) cf. Martin 1987 (ici mme, 2.3.1.3.1.).
29
Cf. Riegel, Pellat & Rioul (2008/ 1994) : 472.

Sous cet clairage-ci, la proposition aurait une ralit en Forme


Logique, sans vraiment en avoir une en syntaxe.

1.4. Phrase noyau/ phrase modalise.


1.4.1. Syntaxe de la phrase modalise (version gnrative-transformationnelle standard Chomsky
1965/ trad. fr.1971 (Aspects de la thorie syntaxique), dans la lecture de Dubois & Dubois-Charlier
1970 30).
Toute phrase (lire : sigma le terme anglais correspondant ayant linitiale S(entence)) est forme, en
structure profonde (niveau de reprsentation syntaxique dont est justiciable linterprtation smantique), dun
constituant de phrase (abrviation : Const), qui en dtermine la modalit, et dun noyau (abrviation : P, de
phrase 31) :
Const + P
(lire : se rcrit comme Const + P ).
Le constituant est, lui, form dun lment obligatoire (soit Affir(mation), soit Inter(rogation), soit Imp(ratif)),
et de constituants facultatifs (ngation, emphase et passif nots entre parenthses dans la formule cicontre) :
Const

Affir 32
Interr
Imp
;

+ (Ng)

+ (Emph)

+ (Passif)

Marqueur sous-jacent de la modalit, ce Constituant engendrera les types de phrase essentiels ou :


obligatoires (= types de phrase 33), et (le cas chant) des types de phrase facultatifs (= formes de
phrase).
Les types essentiels sont:
des constituants de phrase fondamentaux (toute phrase est assigne lun de
ces types),
mutuellement exclusifs (toute phrase est assigne lun et seulement un de
ces types),
import smantique fonctionnel-actionnel ( acte de langage ),
structure syntaxique, morphologie et intonation spcifiques.
Les types de phrase facultatifs (= formes de phrase) sont :
des constituants de phrase optionnels 34,
par hypothse non exclusifs des types obligatoires, ni entre eux (se combinent entre
eux et/ou avec les types obligatoires) ;
import smantique surtout fonctionnel-communicatif (rpartition de linformation en
thme-propos : passif, emphase, impersonnel), ou descriptif (=reprsentationnel :
ngation 35)
structure syntaxique et morphologie spcifiques, mais dpourvus dintonation propre
encore que non dpourvus deffet sur lintonation spcifique du type obligatoire avec
lequel ils se combinent (phnomnes daccentuation).
(cf. Riegel et al. 2004 (1994) : 386-387).

Lintroduction de Const ds la structure profonde permet de rendre justice au postulat selon lequel
les transformations ne peuvent introduire des lments porteurs de sens (Chomsky 1971 (1965) :
180-181).
Rappelons quau sens de cette modlisation de la grammaire, en syntaxe seraient gnres non pas
une, mais deux reprsentations : une structure profonde, issue de linsertion lexicale des catgories,
par lintermdiaire de rgles de rcritures (inscrites dans le composant de base de la grammaire),
et une structure de surface, rsultat des transformations portant sur cette structure profonde. Des

30

Dubois, Jean et Franoise Dubois-Charlier (1970) lments de linguistique franaise : syntaxe, Paris : Larousse (collection
Langue et langage ).
En anglais : S, de sentence. Cette transposition en franais nharmonise donc pas les rapports entre les deux notations, en
alphabet grec et latin (dans la logique de / S, il aurait fallu sans doute avoir ici : (lire : pi )/P).
32
Nous prenons nos distances par rapport la nomenclature en place dans Dubois & Dubois-Charlier 1970, sur ce point prcis,
et dirons plutt assertion (type assertif) , employant affirmation pour lune des deux formes logiques possibles
( affirmation (type affirmatif, forme affirmative)/ ngation (type ngatif, forme ngative) ), parce que parler d affirmation
ngative nous semble participer de la contradiction dans les termes. Bien que lon puisse affirmer que non-p en langue
naturelle (Jaffirme quil nest pas l, et je peux le prouver), laffirmation en tant que telle ne saurait tre dite ngative sans
contradiction.
33
Souvent, dans la littrature, il y a hsitation sur la marque du pluriel, vu la variante phrase(s)-type(s) : types/ formes de
phrase ou : phrases ?
34
Dfinis, en termes (implicitement) transformationnels, comme ragencements particuliers des types obligatoires (Riegel
et al. 2004 (1994): 386).
35
Ngation descriptive : assertion dun contenu propositionnel ngatif (ex. Paul nest pas l pour linstant, ce que je vois).
Linterprtation des types facultatifs ne peut tre actionnelle que de manire marginale, lencontre de celle des types
obligatoires : le type facultatif qui illustre ce cas de figure marginal est encore la ngation (quand elle ralise, dans
lnonciation, un acte de dngation (ou de refus) plutt que la simple assertion dun contenu ngatif ex. Tu viens ?/ -Je ne
peux pas. Toujours dans un contexte doffre/ invitation : Un peu de rti?/ -Je ne mange pas de viande).
31

10

deux reprsentations gnres en syntaxe, seule la structure profonde fera lobjet de linterprtation
smantique :

Catgories /Rgles de rcriture/ Structure profonde : interprtation smantique.

Structure profonde /Transformations/ Structure superficielle : forme (ordre des mots


observ).

Lanalyse des phrases-types en grammaire transformationnelle (non gnrative : Z. S. Harris) et dans la


premire version de la grammaire gnrative (Chomsky 1957/trad. fr. 1969 36 ) privilgiait le type assertif
neutre (phrase assertive active affirmative non emphatise) en tant que type de base, dont on drivait
tous les autres types (et toutes les formes de phrase aussi).
La notion de phrase noyau concidait cet observable linguistique, et les phrases modalises en taient
drives par transformations.
Cette analyse-l tait consistante avec le statut privilgi de la phrase assertive, en logique seule phrase en
langue naturelle donnant lieu une proposition logique (lieu du vrai ou du faux).
Introduisant le marqueur abstrait de modalit ds la structure profonde, la nouvelle analyse de la phrase ne
privilgie plus le type assertif neutre (phrase assertive active affirmative non emphatise) : la notion mme de
type de base perd tout contenu propre.
La phrase noyau est de fait dsormais plutt apprhende comme noyau de la phrase toute phrase
susceptible dtre nonce tant, par hypothse, modalise. Ce noyau est maintenant postul en tant que
niveau danalyse pertinent (analyse en constituants immdiats), mais nest plus susceptible dinstanciations per
se au gr des nonciations et nest jamais, donc, directement observable.
Sous lanalyse purement transformationnelle des types de phrases/ formes de phrases, les transformations
taient entendues procder de manire ordonne : passivation avant emphase, emphase avant transformation
ngative, et transformation imprative/ interrogative par la suite. Comparer :
1. Une vipre a mordu la brebis. [dclarative affirmative active non emphatise]
2. La brebis a t mordue (par une vipre). [dclarative affirmative passive non emphatise]
3. Cest par une vipre que la brebis a t mordue. [dclarative affirmative passive complment
dagent mis en vedette : phrase clive]
4.
Ce nest pas par une vipre que la brebis a t mordue. [clive ngative dune phrase dclarative
passive]
5. Nest-ce pas par une vipre que la brebis a t mordue ? [clive ngative interrogative de la mme
phrase passive].
Sous lanalyse non-transformationnelle, qui introduit la modalit (Const) ds la base de la grammaire (en
structure profonde), on svertue rendre compte des mmes observables en termes du rapprochement des
constituants optionnels et respectivement obligatoire 37, de la phrase, par rapport au Noyau : le constituant le
plus droite dans la formule sera le premier introduit dans la base en loccurrence, le passif, puis, lemphase,
puis, la ngation 38.
En bon franais, certaines combinatoires de types sont de fait barres :

mise en vedette de lattribut (du sujet) par le prsentatif cest que : *cest que X est 39 ;

phrase clive & impratif (mise en vedette du complment par le prsentatif cest que) et
impratif : *cest que+ verbe limpratif 40 ;
dautres sont marques, restant confines des genres discursifs particuliers :

passif & impratif (Soyez remercis pour votre cadeau. Bni soit-il !).
Remarque :
La reformulation, par Dubois & Dubois-Charlier 1970, de la thse chomskyenne des marqueurs sousjacents (seuls) responsables du sens interrogatif , impratif , ngatif (cf. Chomsky 1971
(1965) : 180-181, et, pour commentaire, Ruwet, Nicolas (1967) Introduction la grammaire
gnrative, Paris : Plon, p. 343) ignore un certain nombre de dtails, ayant trait notamment au passif
et lemphase : nous y reviendrons plus tard.
Retenons pour le moment quau sens de Chomsky 1965, aussi bien lemphase que le passif (et,
principalement, pour les mmes raisons), continuaient de fait tre analyss comme phnomnes
syntaxiques sans retombes interprtatives smantico-logiques : linterprtation smantique (des

36

Chomsky, N. (1957) Syntactic Structures, Mouton, The Hague (trad. fr. Structures syntaxiques, Paris : Seuil, 1969).
Singulier puisque les constituants obligatoires sont par hypothse mutuellement exclusifs.
La question se pose de savoir si les observables eux-mmes imposaient un tel biais ou si ce ntait l que linfluence de la
modlisation prcdente.
Phnomnes de porte de la ngation (Cest Paul qui nest pas venu (emphase dpart ngatif)/ Ce nest pas Paul qui est venu
(ngation dune phrase dj emphatise), restrictions smantico-distributionnelles lies la subordination/ lenchssement
(*Cest Paul qui est-il venu ?), ranalyse du passif comme donne morphologique/ lexicale (radical verbal passif non
trivialement distinct du radical actif, structure argumentale distincte) sont autant dlments susceptibles de fournir cette
analyse des motivations indpendantes.
39
*Cest froid que le caf est. OKLe caf est froid.
40
*Cest le dca que prenez. OKPrenez le dca (dcafin)..
37
38

11

structures gnres en syntaxe) tait envisage comme restreinte au reprsentationnel et lactionnel


(force illocutionnaire).
Aussi les effets de sens lis lemphase, ainsi que les effets de sens communment imputs aux
divergences daccentuation entre une phrase active et sa contrepartie passive, taient-ils analyss
comme relevant (au mieux) des effets de surface sur linterprtation (smantique cf. Chomsky
1971 (1965) : 186, note 9 ; 163, note 32).
1.4.2. R-analyse du marqueur abstrait de modalit : la catgorie complment(is)eur (C).
Les versions plus rcentes de la GGT reformulent le marqueur sous-jacent de la modalit (Const) une
catgorie fonctionnelle qui prendrait TP (le syntagme Temps ) pour complment : le complment(is)eur C.
Appel ainsi en rfrence notamment aux propositions subordonnes enchsses, le
complment(is)eur est dabord envisag en tant que catgorie capable de convertir une phrase en
complment du verbe (position typiquement voue un syntagme nominal), correspondant alors la
conjonction introductive dune compltive.
Toute subordonne enchsse sera donc analyse comme un CP (un syntagme complment(is)eur) :
Jean dit [CP queC [TP Marie est jolie]]/ Jean ignore [CP siC [TP elle est la fac]]/ Dis-lui [CP deC PRO 41
partir].
Les complment(is)eurs que (+indicatif) et si (dubitatif) expriment, outre la slection dune
proposition subordonne verbe fini (+Temps), respectivement la valeur assertive de la
compltive enchsse, et la valeur interrogative de celle-ci (question rponse oui/non) ; le
complment(is)eur de slectionne, lui, une subordonne non tense (-fini).
Lanalyse sera ensuite tendue aux phrases racines (propositions indpendantes comprises), moment
o de fait C se substituera pour de bon au marqueur de modalit de la version standard du modle
(not Const in Dubois & Dubois-Charlier 1970). En franais, le complment(is)eur des phrases racines
est typiquement non pel (=dpourvu de matrice phonologique).
Catgorie syntaxique fonctionnelle (vs substantive), linstar de D (D de : dterminant ; dterminant du nom :
rfrence nominale) et de T (T de Temps ; catgorie qui runit rappelons-le les traits de temps-aspectmode du verbe (flexions verbales pertinentes du point de vue interprtatif pour la rfrence temporelle ce
qui en fait une sorte de dterminant du verbe), ainsi que les traits daccord (traits de personne et de nombre),
interprts non sur le verbe, mais sur largument nominal (sujet)), le complment(is)eur C est cens exprimer
des composants non rfrentiels de lintention informative du locuteur, ayant respectivement trait la
dimension actionnelle ( force ) et la hirarchie informationnelle de la phrase nonce (bref, C contribuerait
crucialement au codage grammatical de ce que lon pourrait appeler sans autre lancrage discursif de la
phrase), tout en rappelant le caractre fini (+Temps) ou non fini (-Temps) de celle-ci voir Fig. 3 plus bas dans
le texte.
Dans une proposition relative (restrictive), le syntagme relatif (oprateur de relativisation) spcifiera un
complment(is)eur non pel, lui (lhomme [CP dont [C C [TP tu as pous la fille]]]), ou bien sera analys
comme phontiquement nul, le complment(is)eur tant, alors, pel (lhomme [CP LEQUEL [C queC [TP
jaime]]]).
Selon une analyse dj classique par Richard Kayne, qui dans les relatives antcdent du type de lhomme
qui est arriv est en fait le complment(is)eur, accord au Nominatif avec loprateur de relativisation non
pel (sans forme phontique) dans son Spec.

41

Pronom abstrait (sans forme phontique), sujet dune infinitive ; son interprtation (rfrentielle) est en gnral
contrle par un argument du verbe recteur (ici, par le complment dobjet indirect lui).

12

{+assertif, +fini}

SylvieN

=Tmax

Ancrage discursif

=CP

Ancrage temporel

=TP

=T

all(er)+

Structure de prdication
(proposition)

=VP

{prs. ind., 3 sg}


1

SylvieN

=T
1

all(er)

=PP

la

=DP

facN

=NP

Fig. 3. Sylvie va la fac

1.5. Mode/ modalit/ modalisation.


1.5.1. Mode/ modalit, temps/ temporalit, aspect grammatical / aspect lexical.
Temps, aspect (grammatical), mode : formes de langue (morphologie verbale : tiroirs verbaux )
Temporalit, mode daction (aspect lexical), modalit : notions smantiques.
Temporalit : notion construite autour du moment de la parole (le maintenant du locuteur, not par
convention t0). Avant t0, il ya le pass, aprs, lavenir. Noter ds prsent que t0 est un moment fictif, variable
en extension (une seconde, une journe, une anne, une priode quelconque). Temps extrieur au procs 42
(Gustave Guillaume).
Mode daction (aspect lexical) : temps intrieur au procs (Gustave Guillaume) ; caractristiques du
droulement du procs ; classes (aspectuelles) de verbes 43 dfinies en termes des traits dynamique/ non
dynamique (=statique), tlique/ atlique 44, ponctuel/ non ponctuel (=duratif) (Zeno Vendler cf. Vendler
1967):

verbes dtat ([-dynamique, -tlique, -ponctuel] situations statiques, homognes et continues, sans
structure interne et sans limite temporelle inhrente) : tre malade, connatre qqch, aimer qqch, croire
qqch, avoir qqch, / tests distributionnels : *X est en train daimer la musique (-dynamique); OKX a
cess daimer la musique (+duratif (=-ponctuel)).

verbes dactivit ([+dynamique, -tlique, -ponctuel] actions qui peuvent avoir une certaine dure et
qui ont un point de terminaison arbitraire) : marcher, nager, danser (sans complment dsignant la

42

Il sagit bien videmment du procs dsign par le verbe. Cf. GUILLAUME, Gustave (1984) Temps et verbe. Thorie des
aspects, des modes et des temps. Paris : Champion.
Ou plutt : classes aspectuelles de situations (mtaterme entendu non comme synonyme dtat, mais comme une sorte
dhyperonyme pour : tats, actions, procs, vnements ; certains auteurs parlent de : ventualits (Vikner, Carl (1985)
Laspect come modificateur du mode daction : propos de la construction tre + participe pass , Langue Franaise 67,
Paris : Larousse, 95-113)ou de prdications (au sens de la Role and Reference Grammar cf. Van Valin, R. D. (1993) A
Synopsis of Role and Reference Grammar , in Advances in Role and Reference Grammar, R. D. Van Valin (ed.), Amsterdam :
John Benjamins Publishing Company, 1-164), puisque ce nest pas le verbe seul que lon classifie, mais le verbe avec ses
arguments (sujet, objets) , voire avec ses adverbes.
44
Telos : but, limite finale.
43

13

limite finale ou cible du mouvement 45) ; pleurer, rire, ; penser, crire, boire, (sans objet direct
explicite 46) / tests distributionnels : OKX est en train de marcher (+dynamique); *X nage en une heure
(-tlique) ; *X met une heure nager (-tlique); OKX nage pendant une heure (+duratif), OKX a cess
de nager (+duratif).

verbes daccomplissement ([+dynamique, +tlique, -ponctuel] actions/ situations qui ont une
certaine dure et qui comportent un point de terminaison prcis, au-del duquel laction ne peut plus
continuer) : fondre (intr. 47), scher (intr.), apprendre la posie par coeur, peindre un tableau/ tests
distributionnels : OKX est en train de peindre un/ le tableau (+dynamique) ; OKX peint un/ le tableau
en une heure (+tlique) ; OKX met une heure peindre un/ le tableau (+tlique)

verbes dachvement ([+dynamique, +tlique, +ponctuel] verbes dcrivant le seul point culminant
(ou : dnouement) de la situation envisage, mais pas ce qui prcde, au contraire des
accomplissements) : (se) casser, exploser, clater, trouver une solution, apprendre la nouvelle/ tests
distributionnels : *X a cess de trouver la solution (-duratif), *X est en train de trouver la
solution (!!+ponctuel); OKX a trouv la solution en deux secondes/ OKX met deux secondes trouver la
solution (+tlique).

Terminologie relativement floue, dans la littrature : tlique/ atlique, perfectif (terminatif)/ imperfectif (non
terminatif), accompli/ inaccompli.
Modalit : expression de lattitude du locuteur par rapport au contenu propositionnel de son nonc. Paul court
(nonc sans marque dattitude du locuteur par rapport au contenu propositionnel autre que le type de phrase :
type assertif neutre; analys, dans la littrature non-gnrativiste, comme nonc non modalis par
excellence)/ Il se peut que Paul coure, Paul court peut-tre, Paul peut courir (noncs modaliss).
Une fois la modalit intgre dans la base de la grammaire (rgle de rcriture de toute phrase comme Const
+ noyau), le type assertif neutre se laissera envisager comme modalisateur linstar des types de
phrases marqus (phrases interrogative, imprative, etc.), et linstar des phrases ; dautre part, la
diffrence, du point de vue de la modalit, entre Il court/ Je crois quil court, Il est vrai quil court pourra tre
formule non plus en termes de +modalit/ -modalit, mais en tant que diffrence de ralisation linguistique
dune seule et mme valeur modale (attitude propositionnelle de croyance du locuteur la vrit de ltat de
chose dcrit par son nonc).
Il ny a pas de correspondance terme--terme entre tiroirs verbaux et notions smantiques (temps/
temporalit, aspect/ mode daction, mode/ modalit).

Vous fermerez cette porte sans la claquer (tiroir : futur, sens : modalit injonctive).
Un pas de plus, et vous tombez dans labme (tiroir : prsent, sens : modalit implicative si
vous faites un pas de plus, vous tomberez ).
Il mavait dit quil viendrait ce soir (tiroir modal : conditionnel, sens temporel : futur du
pass) 48.

45

Distinguer nager (pendant 30 minutes) : activit/ nager cent mtres (en trois minutes), nager jusqu lle des rats (en dix
minutes) : accomplissements.
46
Distinguer : crire (pendant des heures) : activit/ crire lexercice (en cinq minutes) : accomplissement.
47
La neige fond.
48
Cf.. Le Querler, Nicole (1996). Typologie des modalits, Caen : Presses Universitaires de Caen.

14

1.5.2. Modalit/ modalisation.


Modalisation : opration nonciative ; prise en charge de lnonc par son nonciateur (rapports entre :
nonc/ fait assert ; nonciateur/ fait assert ; nonciateur/ son nonc ; nonciateur/ sa faon de raliser
lnonciation ; nonciateur/ destinataire (locuteur/ allocutaire, auditeur 49)).
Modalit(s) : catgories conceptuelles logico-smantiques ; produit de la modalisation.
1.6. Modalit/ modalisateur. Dmarche onomasiologique/ dmarche smasiologique.
Modalit : zone modale, prdicats modaux (abstraits).
Modalisateur : marqueur (perspective dinterprtation)/ ralisateur (perspective de production).
Dmarche onomasiologique (du sens vers les mots) : de la zone modale (valeur modale, prdicat modal
abstrait) ses incarnations linguistiques.
Dmarche smasiologique (des mots, aux sens) : du marqueur modal aux valeurs modales quil exprime.
Polysmie des marqueurs modaux.
Les modalisateurs sont des signes linguistiques signification modale. La relation modalit/ modalisateur se
laisse alors envisager comme cas particulier de la relation signifi/ signifiant.
Ferdinand de Saussure dfinit le signe linguistique en tant que catgorie relationnelle 50, deux
facettes solidaires : le signifiant (suite de phonmes ou de graphmes) et le signifi (signification
(description) lexicalement associe cette chane sonore ou graphique), le rfrent (objet du monde
auquel renvoie la chane sonore ou graphique pourvue de cette signification : entit extralinguistique qui
satisfait la description) restant extrieur au signe proprement parler.
Dautres auteurs 51 proposeront une dfinition ternaire du signe linguistique, qui inclura le
rfrent 52 : signifiant (symbol (symbole)) + signifi (thought (pense)) + rfrent (referent)).
Le signe linguistique nest pas identique au mot : dune part, une lexie complexe ou un syntagme
(groupe de mots) non lexicalis, une phrase (un nonc), un paragraphe, voire tout un texte peuvent
tre envisags comme signes (signifiant-signifi(-rfrent)) ; de lautre, des parties constitutives dun
mot sont des signes linguistiques (non autonomes) : les prfixes ou suffixes drivationnels (impossible,
improbable ( qui nest pas [possible, probable] ), mangeable, buvable ( (qui) peut tre [mang/
bu] ), mais galement les affixes flexionnels (viendra ( lavenir )).
1.7. Modus/ dictum.
Structure de la phrase modalise : modus + dictum.
Charles Bally (Linguistique gnrale et linguistique franaise (1932)) rcupre la distinction, formule dabord
par la Scolastique mdivale : dictum propositionis dsigne, chez Ablard (XIIe sicle), la signification de la
proposition, son contenu (contenu propositionnel, en logique moderne).
Dictum : contenu propositionnel de lnonc (prdication, reprsentation virtuelle dun tat de chose)
Modus : modalit de lnonc (assertion qui actualise une telle reprsentation virtuelle).
Je crois (MODUS) que les tudiants sont partis (DICTUM).
Toute phrase a un dictum et un modus, selon Bally, mais la structure syntaxique ne soutient pas toujours
aussi directement cette structuration smantique.

49

Pour les besoins des analyses syntaxiques et syntaxico-smantiques faisant lobjet de ce cours sur la phrase modalise, la
distinction allocutaire (vis par le locuteur)/ auditeur (qui se trouve entendre ce qui est dit sans tre nullement vis par le
locuteur) telle que pose en linguistique de lnonciation nest en gnral pas pertinente.
En linguistique de lnonciation (notamment dans le cadre des thories polyphoniques cf. Ducrot, O. (1980) Les Mots du
discours, Paris : Minuit), distinction est galement faite entre locuteur-allocutaire, dune part, et nonciateur-destinatire (parfois
appel : nonciataire), de lautre. Ces distinctions feront lobjet de vos cours dinitiation en pragmatique.
50
Ce qui vaut de tout symbole, et mme des indices ou des icnes pour nous rfrer au classement des signes selon leur
relation au rfrent, au sens de Ch. S. Peirce ( noter que, selon cette tripartition, la plupart des signes linguistiques sont des
symboles (interjections (qui sont des indices dtats dme, sentiments etc.) et onomatopes (qui, imitant leur rfrent, sont
des icnes) mises part).
51
Ogden, C. K. et I. A. Richards (1989/1923) The Meaning of Meaning, San Diego-New York: Harcourt Brace Jovanovitch
Publishers.
52
Plus exactement : une reprsentation mentale de celui-ci.

15

1.8. Modalit de re/ modalit de dicto.


Porte de la modalit (du modalisateur) : interne/ externe (au dictum).
Modalit de dicto : porte extra-prdicative (externe au dictum). Je crois (MODUS) que les tudiants sont
partis (DICTUM).
Modalit de re : porte intra-prdicative (interne au dictum). Les tudiants sont sans doute partis.
Termes remontant Thomas dAquin (De modalibus) : propositions modales de re (quand le modus est
insr dans le dictum : Socrate peut courir) / propositions modales de dicto (modus prdiqu du dictum
sujet : Que Socrate coure est possible/ il est possible que Socrate coure).
1.9. Classement des modalits.

Modalits dnonciation (contribution interprtative attitude du locuteur dans son rapport avec le
destinataire de lnonciation : actes de langage 53 ; syntaxiquement parlant = types de
phrase obligatoires) :

assertion (phrase assertive ou : dclarative : Paul est l),

interrogation (phrase interrogative : Paul est-il l ?/ O est-il ?),

injonction (phrase imprative : Fermez la fentre !),

exclamation (phrase exclamative : Paul, parti !/ Que cette fentre est sale !).

Modalits de message (contribution interprtative hirarchie informationnelle; syntaxiquement parlant


54types de phrase facultatifs) :

emphase (Paul, il est dj parti pour Paris/ Cest PAUL 55 qui est arriv le premier. Cest
PAUL que je voudrais parler. Voil TROIS JOURS quil est parti).

passif (La porte fut ouverte par un tudiant) ;

impersonnel (Il est arriv trois nouveaux tudiants/ Il a t dans toute la nuit).

Modalits dnonc (contribution interprtative attitude du locuteur face au contenu propositionnel de


son nonc ; syntaxiquement parlant phrases double prdication:

althiques ;

pistmiques ;

dontiques

dsidratives (volitives)

apprciatives (valuatives, axiologiques)

implicatives (relation causales au sens large : condition, cause, consquence, but,


concession )

temporelles (logique du temps linaire (vs logique du temps arborescent: mondes


possibles) ; sporadicit (Kleiber 1983 56)).

Modalits (dnonciation, de message) et types de phrase : problmes de classement.


Types de phrase obligatoires (= types de phrase 57):
constituants de phrase fondamentaux (toute phrase est assigne lun de ces
types),
mutuellement exclusifs (toute phrase est assigne lun et seulement un de
ces types),
import smantique fonctionnel-actionnel ( acte de langage ),
structure syntaxique, morphologie et intonation spcifiques.
Types de phrase facultatifs (= formes de phrase) :
constituants de phrase optionnels 58,
par hypothse non exclusifs des types obligatoires, ni entre eux (se combinent entre
eux et/ou avec les types obligatoires) ;
import smantique surtout fonctionnel-communicatif (rpartition de linformation en
thme-propos : passif, emphase, impersonnel), ou descriptif (=reprsentationnel :
ngation 59)

53

Ou plutt : actes illocutionnaires. Voir chapitre ddi (encadr ).


Symbole notant ici linclusion un ensemble donn.
Les majuscules notent ici laccent de phrase : laccent le plus fort dans la phrase, qui frappe un constituant du syntagme
apportant linformation nouvelle (que le locuteur prsente/ signale ainsi comme tant) la plus importante pour linterlocuteur.
56
Lemploi sporadique du verbe pouvoir , in : David, J. et G. Kleiber (ds), La notion smantico-logique de modalit,
Paris : Klincksieck, 183-203.
57
Souvent, dans la littrature, il y a hsitation sur la marque du pluriel, vu la variante phrase(s)-type(s) : types/ formes de
phrase ou : phrases ?
58
Dfinis, en termes (implicitement) transformationnels, comme ragencements particuliers des types obligatoires (Riegel
et al. 2004 (1994): 386).
59
Ngation descriptive : assertion dun contenu propositionnel ngatif (ex. Paul nest pas l pour linstant, ce que je vois).
54
55

16

structure syntaxique et morphologie spcifiques, mais dpourvus dintonation propre


encore que non dpourvus deffet sur lintonation spcifique du type obligatoire avec
lequel ils se combinent (phnomnes daccentuation).
(cf. Riegel et al. 2004 (1994) : 386-387).

Problmes :
1. Lexclamatif, dou dintonation particulire, mais non exclusif dautres types obligatoires (cf. interroexclamatif : moi, partir pour Londres ?!), et spcificit syntaxique douteuse (car partageant les
structures des phrases dclaratives (Vous ne songez point elle !) et interrogatives (Quest-ce quelle
tait belle ! Est-il bte !)) peut-il tre envisag comme type obligatoire, dautant que, du moins selon
certains auteurs, il nexprimerait pas d acte de langage spcifique , fond sur des rapports entre le
locuteur et son destinataire ?
2. Le ngatif, qui, seul, parmi les types optionnels, na pas dapport smantique essentiellement
fonctionnel, non descriptif (hirarchie informationnelle, structuration du message), mais
reprsentationnel, descriptif (contribution smantico-logique propositionnelle), et qui semble au moins
susceptible de raliser un acte de langage spcifique (dngation, rfutation) peut-il tre envisag
comme type optionnel ?
La solution serait de re-classer les types de phrases obligatoires/ facultatifs en quatre catgories, quitte ce
que lexclamatif soit envisag comme seul reprsentant de sa catgorie (Riegel et al. 2004 (1994) : 388390) :
types nonciatifs (assertif, interrogatif, impratif) ;
types logiques (ngatif/ positif) ;
types de ragencement communicatif (passif, emphase, impersonnel) ;
type exclamatif (manifestant seulement la subjectivit du locuteur et ralisant la fonction expressive du
langage).
Cette solution ne fait que reformuler les problmes soulevs, sans y apporter de relle explication.
Lanalyse de la ngation fait limpasse sur ce qui est appel, dans la littrature, ngation descriptive, pour tirer
argument des seuls emplois illocutionnaires de la ngation : nier un contenu propositionnel constitue un
acte de langage, ce qui rapproche le type ngatif des types obligatoires (op.cit., p. 388) .
Et la distinction allgue entre types nonciatifs et exclamatif, selon le critre pragmatique de lacte de
langage spcifique , est elle-mme sujette caution, dans la mesure o :
(1) les types nonciatifs restants eux-mmes ne font pas lobjet danalyses uniformes, dans le paradigme
thorique dont procde la notion distinctive invoque (Thorie des actes de langage) : les types assertif et
impratif correspondent aux forces primitives assertive et directive, tandis que le type interrogatif procde
des forces drives (instanciant un sous-type directif : demander de rpondre) 60 ;
(2) le lien entre types de phrases et acte de langage spcifique nest pas aussi direct, ni aussi naturel, que
cette analyse le suppose 61, ne laissant pas dtre tributaire dun certain horizon thorique. En pragmatique
infrentielle 62, par exemple, les trois types de phrases en question sont censs correspondre non pas des
actes spcifiques , mais des actes gnriques dire que/ dire de/ demander (si /qu-) entendus par
Sperber et Wilson comme des schmas dhypothse (ou schmas descriptifs ) dans lesquels sont
incorpores les formes propositionnelles pleines des noncs concerns, mais qui restent typiquement sousdtermins quant ce quil est convenu dappeler intention (ou : but) illocutoire 63.

Linterprtation des types facultatifs ne peut tre actionnelle que de manire marginale, lencontre de celle des types
obligatoires : le type facultatif qui illustre ce cas de figure marginal est encore la ngation (quand elle ralise, dans
lnonciation, un acte de dngation (ou de refus) plutt que la simple assertion dun contenu ngatif ex. Tu viens ?/ -Je ne
peux pas. Toujours dans un contexte doffre/ invitation : Un peu de rti?/ -Je ne mange pas de viande).
60
Cf. Ghiglione & Trognon 1993.
61
Dans cette mme logique, on voit dans les types de phrases obligatoires des indicateurs de force illocutionnaire .
62
Cf. Sperber Dan et Deirdre Wilson, La pertinence. Communication et cognition, Paris : Minuit, 1989 (original en anglais
1986).
63
Par contre, les forces primitives assertive et directive (cela vaut dailleurs de toutes les cinq forces primitives
distingues dans la thorie logique de lillocutoire), tout en tant sous-dtermines quant aux autres composants , ce
qui en fait justement les forces illocutoires les plus simples possibles , sont bien dtermines, elles, quant au but. Le but
assertif (primitif) est de reprsenter quelque chose qui est le cas, et le but directif (primitif), de faire une tentative
linguistique pour que le destinataire ralise une action future (cf. Ghiglione & Trognon 1993). Par contre, dire que P et dire de P
(o P est la forme propositionnelle de lnonc p), en tant quactes gnriques, ne rendent manifeste quune proprit assez
abstraite de lintention du locuteur : la direction dans laquelle la pertinence de lnonc est rechercher (Sperber et Wilson
1989 : 381). Dire que rendrait manifeste lexistence dune relation descriptive (vs interprtative) entre la pense du locuteur et
un tat de choses rel ; dire de, lexistence dune relation descriptive entre la pense du locuteur et un tat de choses (non pas
rel, mais :) dsirable.

17

1.10. En guise de conclusions : retour sur les critres de classement des modalits.
a. Critres syntaxiques.
a.1. Critre du rapport fonction modale/ structure phrastique (modalit/ type de phrase) :

modalits dnonc (phrase double prdication)/

modalits dnonciation (phrases contour non assertif : interrogatives, injonctives,


exclamatives) 64/

modalits de message (phrases clives, topicalisations, ) 65.


a.2. Critre de lincidence (construction de la phrase modalise 66):

modalit de re (incidence syntaxique intra-prdicative) ;

modalit de dicto (incidence syntaxique extra-prdicative).


Distinction terminologique : incidence syntaxique/ porte smantique (cf. Le Querler 2001)
b. Critres smantiques 67.
b.1. Critre de lnonciateur 68 :

modalits subjectives 69 ( locutives 70 ; rapport sujet nonciateur/ contenu propositionnel :


modalits pistmiques, apprciatives (ou : valuatives, ou : axiologiques), dsidratives
(ou 71 : volitives) rflexives 72) ;

modalits intersubjectives ( allocutives ; rapport entre nonciateur et destinataire


propos du contenu propositionnel : modalits dontiques, modalits illocutionnaires
directives : ordre, requte, conseil, suggestion, modalits dsidratives (ou : volitives)
translatives 73) ;

modalits objectives ( dlocutives : rapport entre deux contenus propositionnels, contre


effacement de lnonciateur : ontiques (ou : althiques), implicatives).
b.2. Critre du contenu 74 :

modalits althiques (ontiques), dontiques, pistmiques, dsidratives, apprciatives, implicatives,


temporelles

64
Au sens dAndr Meunier. Cf. Meunier, Andr (1974) Modalits et communication , Langue Franaise n 21, pp. 8-25.
Citations pertinentes : [La modalit dnonciation] se rapporte au sujet parlant (ou crivant). Elle intervient obligatoirement
et donne une fois pour toutes une phrase sa forme dclarative, interrogative ou imprative [].
[La modalit dnonc] se rapporte au sujet de lnonc, ventuellement confondu avec le sujet de lnonciation. Ses
ralisations linguistiques sont trs diverses de mme que les contenus smantiques et logiques quon peut lui reconnatre.
[Elle] caractrise la manire dont le sujet de lnonc situe la proposition de base par rapport la vrit, ncessit (vrai,
possible, certain, ncessaire et leurs contraires etc.), par rapport aussi des jugements dordre apprciatif (utile, agrable,
idiot, regrettable, ) (art. cit., pp. 13-14).
Une phrase ne peut recevoir quune seule modalit dnonciation, alors quelle peut prsenter plusieurs modalits dnonc
combines (art. cit., p. 13).
65
Cristea, Teodora (1981) Pour une approche contrastive de la modalit , in Cristea et al., Les modalits. Etudes
contrastives, Bucuresti : TUB, 8-46.
66
Ce classement concerne surtout les modalits dites dnonc (selon le critre prcdent).
67
Nous prfrons cette tiquette celle de critres fonctionnels susceptible de suggrer, tort, que lesdits critres aient
voir avec la dcoupe focus/ topique de la grammaire fonctionnelle.
68
Ce sont l des tentatives de classement (Le Querler 1996 et Charaudeau 1992) qui regroupent modalits dnonciation et
modalits dnonc. Cf. Le Querler, N. (1996). Typologie des modalits, Caen : Presses Universitaires de Caen. Cf. Charaudeau,
Patrick (1992) Grammaire du sens et de lexpression, Paris : Hachette.
69
Le Querler (1996).
70
Terme emprunt Charaudeau 1992. Noter que le contenu de cette classe nest pas identique chez les deux auteurs, malgr
des points de concidence.
71
Au gr des auteurs, la distinction <dsidratif>/ <volitif> est maintenue ou au contraire dlite. Si nous navions pas
souscrit au dlitement de cette nuance au niveau conceptuel mme, il aurait fallu noter ici ou (sans : ).
72
Vouloir, dsirer + infinitif : Je veux partir.
73
Vouloir que, dsirer que + subjonctif : Je veux que vous fassiez attention lemploi des modes dans la relative. Je ne veux
pas que tu viennes (ngation portant sur la compltive : dfendre, interdire - cf. Nouv. P. Rob.)
74
Ce classement, qui rcupre les catgories modales de la tradition logique, tout en en augmentant linventaire, concerne,
nouveau, surtout les modalits dites dnonc.

18

2. Modalits dnonciation.
Smantiquement parlant, les modalits dnonciation indiquent lattitude du locuteur dans son rapport avec le
destinataire de lnonciation : actes de langage 75 ; syntaxiquement parlant, ce sont l des types de
phrase obligatoires modulo lhsitation au sujet de lexclamation :

assertion (phrase assertive ou : dclarative),


interrogation (phrase interrogative),
injonction (phrase imprative),
exclamation (phrase exclamative).

Hors cours.
La notion dacte de langage est dfinie lintrieur dun cadre thorique spcifique : la thorie des actes de
langage (entendue comme cas particulier de la thorie de laction). Il sagit, pour lessentiel, de ce que lon
fait (accomplit) en disant quelque chose quelquun.
Performatif vs constatif
Dans un premier temps (Austin J.L., Quand dire cest faire, Paris, Seuil, 1970 (tr. fr.)/ 1962 (original)) sont
seulement dissocis les performatifs ou : dclarations (angl. statements) dont lnonciation revient excuter
(angl. to perform) une action (exemple donn : baptiser un bateau, cest dire, dans les circonstances
appropries, les mots je baptise).
Dpourvus de conditions de vrit, lencontre des noncs qui dcrivent un tat de chose ou rapportent (=
constatent) un fait (noncs appels, dsormais : constatifs), mais sujets des conditions de russite, les
noncs performatifs remettent en cause le postulat du caractre essentiellement descriptif du langage
( lillusion descriptive , dans les termes dAustin).
Locutoire vs illocutoire vs perlocutoire
La difficult doprer des distinctions tranches entre noncs constatifs et noncs performatifs laide de
critres proprement parler linguistiques tels le critre, syntaxique, du verbe performatif la premire
personne du singulier, ou le critre, lexical, des mots performatifs (verbes ou autres) a eu pour
consquence llaboration de lappareil thorique. La question de savoir ce que veut dire, au juste, dire, cest
faire sera envisage sous un angle plus large.
Seront maintenant dfinis comme actes de langage :
1. lacte de dire quelque chose (= acte locutoire), lui-mme dcompos en plusieurs actes
gnralement coextensifs lun lautre :
produire (prononcer) des sons (= acte phontique) ;
produire des vocables (ou : mots) qui entrent dans des constructions conformes la
grammaire (=acte phatique),
et pourvus, dans lemploi, dun sens et dune rfrence dtermins (= acte rhtique) ;
2. laction ralise du fait mme de dire (en accomplissant un acte locutoire donc = acte illocutoire
de in ( dans ) acte ralis dans la locution) : promettre, poser une question, donner un
renseignement, annoncer un verdict, donner un ordre, ;
3. lacte ou leffet provoqu par la locution (vs dans la locution), sur les sentiments, penses,
agissements de lauditoire, du locuteur ou de tiers (= acte perlocutoire, de per ( par )) :
convaincre, effrayer, faire faire, (Austin 1970/ 1962).
Le noyau dur de la thorie dfendue par Austin est sans conteste la notion dillocutoire, ne, elle, en droite
ligne, dune gnralisation du concept de performatif. La spcificit de lillocutoire repose sur lexploitation
conjointe de deux axes doppositions : fonction dnotative, et respectivement conventionnel :
la distinction entre valeur (force) de lnonciation et signification de lnonc (assimile, elle, la
dnotation (=sens + rfrence)) oppose lillocution la locution ;
la distinction entre conventionnel (produit de rgles) et non conventionnel (produit des circonstances)
oppose lillocutoire au perlocutoire, comme linvariant au variable.
Austin distingue cinq types fondamentaux dillocutions :

75

Actes verdictifs [verdictives] : nonciations qui reviennent exprimer ce que lon a constat
(officiellement ou pas), partir de lvidence ou partir des raisons concernant ou bien les
faits eux-mmes, ou bien leur caractre axiologique (actes judiciaires, plutt que lgislatifs ou
excutifs : prononcer un diagnostic (par un expert : mdecin ou autre), acquitter, condamner,
dcrter, classer, valuer, etc.).
Actes exercitifs [exercitives] : nonciations consistant donner une dcision pour ou contre
une certaine faon dagir, inciter les autres se comporter de telle ou telle faon. A
lencontre des verdictifs, les exercitifs comportent un jugement (une dcision) sur ce qui devra

Ou plutt : actes illocutionnaires. Voir encadr

19

ou devrait tre, plutt que sur ce qui est : dgrader, commander, ordonner, lguer,
pardonner, etc.).
Actes promissifs [commissives] : nonciations qui visent obliger le locuteur adopter une
certaine faon dagir, sengager des degrs divers (ce terme ne sapplique pas aux seules
promesses au sens strict : promettre, sengager formellement, faire voeu de, prter serment
(jurer de), parier, etc.).
Actes comportatifs [behabitives] : nonciations qui expriment une raction la conduite ou
au sort des autres, des attitudes lgard du comportement antrieur ou simplement prvu,
dautrui (sexcuser, remercier, injurier, dplorer, critiquer, braver, etc.).
Actes expositifs [expositives] : nonciations qui visent exposer une manire de voir les
choses, dvelopper un argument, tirer au clair lusage dun mot, ou le rfrent de celui-ci
(affirmer, nier, postuler, remarquer, dcrire, tmoigner, rapporter, etc.).

Dsormais, quand nous emploierons le terme dacte de langage (ou : acte de parole), nous nous rfrerons
aux seuls actes illocutoires (ou : illocutionnaires).
Contenu propositionnel vs force illocuoire
La postrit dAustin laborera davantage encore la thorie des actes de langage (= actes illocutionnaires).
Searle (1972 (1969)) sattache oprer la distinction entre proposition exprime par lnonc et acte accompli
dans lnonciation non seulement en termes dactes (acte locutoire (notamment : rhtique) vs acte illocutoire),
mais galement en termes de la structure syntaxique de la phrase nonce (relativement aux actes
illocutionnaires mmes); ainsi discriminera-t-il deux types de marqueurs : le marqueur de contenu
propositionnel et le marqueur de force illocutoire.
Cest l une distinction qui ne se laisse apprhender directement que dans le cas des performatifs explicites, o
la principale correspond au marqueur de force illocutoire, et la subordonne enchsse, au marqueur de
contenu propositionnel :
[F je te promets [p que je fermerai la fentre]]
soit, dans la notation de lauteur, pour lacte de force F accompli propos du contenu propositionnel p : F(p).
En vertu cependant du principe dexprimabilit 76, tous les noncs se laisseraient rduire des performatifs
explicites : Searle considre en effet quun marqueur de force illocutoire (prfixe performatif Je verbe
illocutoire) sous-tend, en structure profonde, tout nonc (analyse qui correspond en tout point l
hypothse performative des gnrativistes chomskyens (cf. Ross 1970)).
Conditions de succs des actes illocutionnaires
la distinction actes/ marqueurs des actes il correspond, dans la thorie searlienne, la distinction rgles
constitutives (des actes)/ rgles smantiques (drives des premires, et gouvernant lemploi des
marqueurs dactes). Cette distinction se laisse enchsser dans une autre, dordre plus gnral : rgles
constitutives (qui crent des activits dpourvues dexistence indpendante : les rgles qui gouvernent les
jeux (football ou checs au mme titre), y compris les jeux de langage au sens de L. Wittgenstein) vs
rgles normatives (qui ont pour objet des comportements/ actions qui existent indpendamment des normes
les rgissant : linstar des rgles de politesse, la signification des phrases est justiciable de conventions). Si
les conventions smantiques dpendent des langues particulires, les rgles constitutives des actes de langage
seraient universelles.
Elles dfinissent autant de conditions de succs des actes illocutoires :

Condition de contenu propositionnel (proprits du contenu propositionnel de lacte : action


future de linterlocuteur pour lordre, du locuteur, pour la promesse) ;

Condition(s) prliminaire(s) (qui doivent tre satisfaites pralablement, pour que lacte puisse
tre accompli : capacit de linterlocuteur, pour lordre) ;

Condition de sincrit (qui dfinit ltat psychologique du locuteur : dsir pour lordre, intention
pour la promesse, croyance, pour lassertion) ;

Condition essentielle (qui dfinit le but illocutoire : amener linterlocuteur raliser laction pour
lordre, sengager la raliser soi-mme, pour la promesse, sengager sur la vrit de la proposition
exprime, pour lassertion).
Ds quune rgle constitutive est enfreinte, lacte choue, mais cet chec est diffrent suivant la rgle
spcifique qui aura t viole.

Classement des actes illocutionnaires


Partant de la distinction explicite entre verbes illocutoires (qui ressortissent aux langues particulires) et actes
illocutoires (universaux de langage), lauteur rvalue la taxinomie dAustin, davantage un classement de
verbes que dactes, et, qui pis est, ne reposant pas sur des principes/ critres de classement clairement dfinis
dentre de jeu, do force chevauchements inter-catgoriels. Aussi, la contribution de Searle consistera-t-elle
notamment une recherche des critres de classement pertinents et surtout mutuellement consistants. Il en
isole douze, mais cinq seulement sont dcisifs dans la classification proprement parler :
76

Qui asserte que tout ce que lon veut dire peut tre dit littralement (cf. Searle 1969/ 1972).

20

Le but illocutoire (condition essentielle) ;

Mais pas : la force avec laquelle est prsent le but (qui varie selon le degr dexplicitation de lacte, et, si
lacte est explicite, selon le verbe employ : demander de/ exiger de/ ordonner de), ni le style de
laccomplissement de lacte (annonce vs confession).

La direction dajustement entre les mots et le monde (concerne le contenu propositionnel de


lacte, et reprsente une sous-composante (sinon une consquence) du but illocutoire : ajustement
des mots, au monde, pour une assertion, ajustement du monde, aux mots, pour une promesse ou un
ordre) ;

Ltat psychologique exprim (lattitude du locuteur par rapport au contenu propositionnel de


lacte : condition de sincrit) ;

Les statuts respectifs du locuteur et de linterlocuteur (condition prparatoire) ;

Mais pas : les relations de lnonc aux intrts du locuteur et de linterlocuteur, ni les relations de
lacte au reste du discours (rponse (question), conclusion (argument(s))).

Le contenu propositionnel (les diffrences dans le contenu propositionnel qui sont dtermines
par des mcanismes lis la force illocutionnaire : tats de choses passs, pour le rapport, tats de
choses futurs, pour la prdiction).
Mais pas : les diffrences entre actes essentiellement et non essentiellement linguistiques (qui ne
peuvent pas ou respectivement qui peuvent tre accomplis y compris sans le dire : poser un diagnostic vs
prter serment), ni entre actes institutionnels (excommunication, dclaration de guerre), et non
institutionnels, ni entre actes dont le marqueur (le verbe) est susceptible demploi performatif, et
actes dont le verbe nest pas susceptible dun tel usage (cf. se vanter, menacer).
Type dactes

But illocutoire

Direction
dajustement

REPRSENTATIFS:
Suggestion, assertion,
prdiction, rapport,

Engagement du

Des mots, au

locuteur sur la vrit

monde.

Etat
psychologique
exprim
Croyance.

Statuts du
locuteur et de l
interlocuteur

Contenu
propositionnel

Dsir.

Position de force
du locuteur.

Action future de
linterlocuteur.

de la proposition
exprime

DIRECTIFS :
Requte, consigne,
ordre, question

Obligation de

Du monde, aux

linterlocuteur

mots.

accomplir certain(s)
acte(s).

PROMISSIFS :
Promesse, legs,
serment

Obligation du locuteur
accomplir certain(s)
acte(s)

EXPRESSIFS :
excuse, critique,
flicitation,
condolances,
remerciements

Exprimer ltat psycho-

Du monde, aux
mots.
____

logique (par rapport

Intention.

Action future du
locuteur.

(croyance+
77 )

(vrit
prsuppose)

ltat de chose spcifi


dans le contenu
propositionnel).

DCLARATIFS 78 :
Bndiction,
excomunication,
baptme, arbitrage
dun hors-jeu de
lavant-centre, pari sur
un trois sans atout
(annonce au bridge),
verdict de culpabilit,
dclaration de guerre

Provoquer la vrit de
leur contenu
propositionnel

Direction
dajustement
double.

(+institution extralinguistique :
statuts respectifs
bien spcifiques)

Actes de langage indirects : procdure de drivation (Searle 1975)

77

O llment ajout lattitude fondamentale, qui est de lordre de la croyance, est de lordre du sentiment : insatisfaction
(PLAINTE), tristesse (LAMENTATION), y compris lorsque cette attitude est fonction de (voire redondante du) statut du
locuteur : culpabilit (EXCUSE), assurance/ sentiment de supriorit (CRITIQUE)
78
Ce sont les performatifs dAustin.

21

Dans un acte de langage indirect, le locuteur ralise un acte illocutoire primaire, par lintermdiaire dun
acte secondaire, tout en ayant lintention que ce soit son intention de raliser lacte primaire qui soit
reconnue par linterlocuteur.
La demande linterlocuteur, de passer le sel (au locuteur) peut ainsi tre ralise par plusieurs types de
phrases:
1. Par une phrase (surtout interrogative) concernant la capacit de linterlocuteur passer le sel :
Pouvez-vous me passer le sel ?
2.

Par une phrase concernant le dsir/ la volont du locuteur que linterlocuteur lui passe le sel :
Jaimerais que vous me passsiez le sel, Je voudrais que vous me passiez le sel

3.

Par une phrase (ventuellement interrogative) concernant lexcution de laction par linterlocuteur :
Allez-vous (bientt) me passer le sel ?, Vous me passerez le sel ,

4.

Par des phrases concernant le dsir/ le consentement de linterlocueur dexcuter laction : Voulezvous me passer le sel ? Cela vous drangerait-il de me passer le sel ?

5.

Par des phrases concernant les raisons de linterlocuteur dexcuter cette action : Vous devriez me
passer le sel, pourquoi ne pas me passer ce sel ? Ne vaudrait-il pas mieux que vous me passiez ce
sel ? 79

6. Par des phrases enchssant lun de ces lments dans un autre, voire par des phrases enchssant un
verbe directif explicite dans

lun de ces contextes : Jespre que (2) vous mobligerez en me

passant le sel (3), Pourrais-je vous demander (condition prparatoire du locuteur : varit de (1)
donc, o est enchss le verbe illocutoire explicite) de (bien vouloir (4)) me passer le sel ?
Comment linterlocuteur recouvrira-t-il lintention illocutionnaire du locuteur, dans tous ces cas-l ? la faveur
d informations darrire-plan mutuelllement partages , tant linguistiques que non linguistiques, ainsi que
grce ses propres capacits gnrales de rationalit et dinfrence (Searle 1975 : 60-61). La thorie des
actes de langage (notamment les conditions de satisfaction des actes), dune part, et le principe de la
Coopration de Grice (et les maximes de rgulation conversationnelle qui en drivent), de lautre interviennent,
conjointement aux informations darrire-plan, dans la modlisation searlienne de drivation de lacte primaire
partir dun acte secondaire.
La procdure de drivation de la demande de passer le sel, partir dune phrase interrogeant la capacit
de lauditeur accomplir cette action, comporterait ainsi dix tapes : (1) lidentification de lacte littral
(acte secondaire : en loccurrence, la question de savoir si lauditeur a la capacit de passer le sel au
locuteur) ; (2) lactualisation de lhypothse dobservation trs gnrale, dune conversation cooprative
(lnonc du locuteur doit donc avoir un objet, un but) ; lactualisation dinformations darrire-plan
conversationnel qui invalident linterprtation littrale : (3) labsence dindices dun intrt thorique (du
locuteur) portant sur la capacit de linterlocuteur (le sujet interprtant) performer laction , et (4) la
probabilit (trs haute) de lhypothse selon laquelle le locuteur connat dj la rponse la question
littrale (rponse affirmative) ; (5) linfrence du caractre vraisemblablement non littral de
lillocution ; (6) lactualisation, titre de prmisse de raisonnement, dune proposition ressortissant au
bagage cognitif des participants au dialogue, en loccurrence, lune des conditions prparatoires des
actes directifs (la capacit de linterlocuteur performer laction dsire par le locuteur), et (7)
lidentification de lacte littral comme question portant sur la satisfaction de cette condition ; partir de
(7), et de (8) (actualisation dinformations darrire-plan lies au scnario <DEJEUNER>), infrence de
(9) (la question sur la satisfaction de la condition prparatoire de lacte directif reprsente une allusion
la satisfaction des conditions dobissance de cet acte) ; (10) infrence du but illocutionnaire actuel (en
labsence dautres buts plausibles), partir des tapes (5) et (9).
Dans le mme article, Searle formule quatre gnralisations censes rendre compte des relations
systmatiques entre forme des phrases et type illocutoire directif de celles-ci.
Le locuteur peut faire une demande indirecte en :
En demandant si/ en affirmant quune condition prparatoire (la condition concernant la capacit de
linterlocuteur daccomplir laction dsire par le locuteur) est satisfaite ;
En demandant si/ en affirmant que la condition de contenu propositionnel (action future performe par
linterlocuteur) est satisfaite.
En affirmant que la condition de sincrit est satisfaite.
En affirmant que/ en demandant si linterlocuteur a de bonnes raisons (ou des raisons dterminantes)
dexcuter laction dsire par, soit objectives, soit subjectives (son dsir/ consentement/ bon
vouloir mme).

79

Formulations tout fait naturelles avec larme ou cette arme , la place du sempiternel sel, et qui exigent simplement
la construction dun contexte interprtatif spcifique, pour sembler naturelles telles quelles : si linterlocuteur est par exemple,
un malade en rgime hyposodique...

22

Thorie logique de lillocutoire


La thorie des actes de langage devient une thorie de lengagement illocutoire (Searle et Vanderveken
1985), qui intgre dsormais une thorie de lnonciation et de ses effets (Vanderveken 1988). La
formalisation logique de la thorie non seulement continue oprer la distinction entre proprits tant
reprsentationnelles quactionnelles des illocutions : limmense majorit des actes 80 sont en effet constitus
dune force prdique dun contenu propositionnel, la premire correspondant la fonction proprement parler
actionnelle de lnonc, et le second, la fonction reprsentationnelle de celui-ci mais met en vedette les
relations entre les deux types de proprits/ fonctions.
Le contenu propositionnel dun acte est envisag comme une proposition qui reprsente (au
sens fort du terme) les conditions de satisfaction de celui-ci : en effet, le contenu propositionnel
dune demande de faire quelque chose est la proposition qui reprsente lauditeur faisant cette chose
( cause justement de la demande). Or, toute demande est satisfaite si laction saccomplit.
Quant la notion de force illocutoire, elle est explicitement pose comme notion drive, donc
comme combinaison de plusieurs lments : (a) le but illocutoire, qui dtermine galement la
direction dajustement de lnonciation (cinq types de buts illocutoires sont retenus, comme
prcdemment (cf. taxinomie des actes in Searle 1979/ 1982) : assertif, commissif, directif,
dclaratif et expressif), (b) le degr de puissance (lintensit de la force mise au service du but,
qui est fonction de lengagement du locuteur, et qui est gnralement identique lintensit de
lattitude exprime (degr de puissance du but = degr de puissance de la condition de sincrit voir
infra (7)): une requte et un ordre diffrent, entre autres, quant leurs degrs de puissance ; (c) le
mode daccomplissement
(prire : expression humble/ requte : option de refus ouverte
linterlocuteur/ commandement : option de refus prsente comme ferme, position dautorit du
locuteur invoque lors de lnonciation) ; (d) les conditions de contenu propositionnel (exprimes
en franais par des contraintes syntaxiques sur les formes grammaticales) ; (e) les conditions
prparatoires (prsuppositions du locuteur, distinguer des prsuppositions au sens strict, lies au
contenu propositionnel de lnonciation, et indpendantes de sa force) ; (f) les conditions de
sincrit (ltat psychologique conventionnellement associ laccomplissement dun acte (vs
rellement possd par le locuteur)) ; (g) le degr de puissance des conditions de sincrit
(marqu loral par lintonation, et lcrit, par des adverbes comme sincrement, franchement, etc. ;
les actes de demander et dimplorer, partagent le but directif, ainsi que la condition de sincrit (tat
psychologique de dsir), mais diffrent quant au degr de puissance de cette dernire (moindre pour la
demande)).
Une force illocutoire nest cela dit pas la simple addition de ses sept composantes (six selon
Vanderveken 1988), car celles-ci ne sont pas indpendantes les unes des autres : le but dclaratif
dtermine en effet la condition prparatoire du locuteur (autoris raliser ltat de chose reprsent
par le contenu propositionnel par sa seule nonciation), etc.
Force primitive/ forces drives
Les forces assertive, commissive, directive, dclarative et expressive correspondant aux cinq types de
buts reprsentent les cinq forces primitives, les plus simples possibles , pourvues uniquement de
but, dun degr de puissance neutre, et des conditions prparatoires, sur le contenu propositionnel et
de sincrit que ce but dtermine ; toutes les autres forces illocutoires en sont drives, par des
oprations dajout de conditions (sur le contenu propositionnel, prparatoires et/ou (selon le cas) de
sincrit), daugmentation ou baisse de degr de puissance du but, ou encore de restriction du
mode daccomplissement du but (Searle et Vanderveken 1985 : 51 ; 60-70). Voir le graphe cidessous, qui relie des forces illocutoires de mme but (directif) :

Force directive primitive

+mode daccomplissement
spcifique (consistant donner
option de refus linterlocuteur)
demande

+baisse du degr de puissance du


but
suggestion

+ condition sur le contenu


propositionnel (acte de discours
futur de linterlocuteur, dirig vers
le locuteur original)
question

+condition prparatoire (action

80

Seraient dpourvus de contenu propositionnel certains actes expressifs raliss au moyen dinterjections (Zut! Ae !),
tandis que dautres auraient un contenu qui nest pas une proposition complte, mais plutt un objet de rfrence
(Vanderveken 1988 : 30) : Vive la France !

23

future bonne (ON-dsirable))


recommandation

Rfrences minimales (en attendant le cours de pragmatique) :

Austin, John Langshaw (1970) Quand dire, cest faire, Paris, Seuil.

Searle John R. (1972 /1969) Les actes de langage, Paris, Hermann,.


Searle, John R. (1982) Sens et expression, Paris, Minuit.

Searle John R. et Daniel VANDERVEKEN (1985) Foundations of Illocutionary Logic, Cambridge,


Cambridge U.P., 1985.
Vanderveken, Daniel (1988) Les Actes de discours, Bruxelles, Mardaga.

Ghiglione Rodolphe & Alain Trognon (1993) O va la pragmatique? De la pragmatique la


psychologie sociale, Grenoble, Presses Universitaires.

2.1. Lassertion. La phrase dclarative.


2.1.1. Syntaxe de la phrase dclarative : phrase dclarative ou phrase affirmative ?
La ngation tant regroupe, en grammaire gnrative-transformationnelle standard, comme type de
phrase optionnel (forme de phrase), avec le passif, limpersonnel, lemphase, le type dclaratif sera
directement envisag en tant que type obligatoire affirmatif (affirmation, oppose linterrogation et
limpratif : Le serpent 81 mordit Jacques Frron). Dans cette acception donc, aussi contre-intuitif que
cela puisse paratre, laffirmation nest pas oppose la ngation : les phrases ngatives peuvent fort
bien pouser le contour prosodique affirmatif (Le serpent ne tua pas Jacques Frron).
Nous avons fait tat prcdemment de nos rserves sur cette option mtalinguistique (1.4. supra),
aussi nous bornerons-nous ici un rapport neutre de la thorie prsente.
Le constituant affirmatif se rcrit obligatoirement par le constituant Intonation affirmative (abrviation
Intonaffir), distincte, par hypothse, des intonations interrogative et imprative.

Const
Const

Intonaffir

Intonaffir

+P
Affir

Affir

Intonaffir

SN +SV

+P

+SN +SV

(structure
profonde)

81

Dont il est question dans lpigramme de voltaire. Dans le texte voqu, le sujet est indfini, et la phrase, ouverte par deux
complments donnant le cadre spatio-temporel : Lautre jour, au fond dun vallon, un serpent mordit Jean Frron. Ce type de
construction, sujet non-topical, est une phrase thtique. Nous y reviendrons sous 3 (voir infra).
Lpigramme (pour que les litttraires ne restent pas sur leur faim) :
Lautre jour, au fond dun vallon
Un serpent mordit Jean Frron
Que pensez-vous quil arriva ?
Ce fut le serpent qui creva !

24

Le changement structurel, au passage de la structure profonde la structure de surface, dans le cas de la


phrase affirmative (active non emphatique) se rduira au dplacement du constituant Intonaffir en fin de
squence :

Intonaffir +SN +SV (structure profonde)

Taff

SN +SV + Intonaffir (structure de surface).

La transformation affirmative ainsi formule est postule pour rendre compte de lhypothse
fondamentale du modle, la distinction entre structure profonde et structure de surface, mme en
labsence de diffrences directement observables en termes de contour prosodique marqu et/ou en
termes de lordre des lments terminaux (mots 82) : il ny a donc plus de rcriture directe de la
phrase de base (affirmative active non emphatique).
Dautre part, le dplacement droite du constituant affirmatif (Intonaffir) rendrait compte du
traitement prosodique caractris en fin de syntagme prosodique maximal, donc concernant
au premier degr la fin de la squence linaire (linarise). Cette corrlation reste cependant
sujette caution, dans la mesure o, bien que le contour assertif soit, en franais du moins,
descendant, les donnes prosodiques concernent lensemble de la phrase, et non seulement
sa fin.
2.1.2. Smantique de la phrase dclarative.
Le constituant affirmatif est interprt comme une assertion dont P est le noyau (comme une assertion dont P
est le contenu propositionnel, en termes de la thorie des actes de langage).
Lassertion exprime lattitude de croyance du locuteur la vrit de ltat de chose dcrit par son
nonc (Thorie des actes de langage).
En termes de pragmatique infrentielle (Thorie de la Pertinence), lassertion exprime une relation
descriptive entre la pense du locuteur et un tat de chose du monde ou, en termes plus toffs : la
forme propositionnelle de lnonc dune phrase dclarative interprte (littralement) une pense du
locuteur qui est la description dun tat de chose rel.
Du point de vue de la hirarchie informationnelle, le constituant affirmatif permet linterprtation du sujet de
lassertion (de) P comme topique (de cette assertion), et du syntagme verbal comme commentaire, ainsi que
linterprtation des autres syntagmes nominaux (complments) comme non-topiques.
Ces faits permettent de dfinir la relation entre phrase active et phrase passive : la transformation concernant
le marqueur sous-jacent de modalit Affir (en bref : la transformation affirmative) a lieu aprs la
transformation concernant le marqueur sous-jacent de Passif (ou : transformation passive), aussi le sujet de la
phrase passive (complment de la phrase active correspondante) sera-t-il interprt comme topique de
lassertion que fonde le constituant Affir (cest--dire : de lassertion qui est linterprtation smantique du
Constituant Affir) :
Le serpent mordit Jacques Frron [Topique : serpent, Jacques Frron commentaire] Jacques
Frron fut mordu dun serpent [Topique : Jacques Frron, serpent commentaire].
Cf. Dubois et Dubois-Charlier 1970, chap. XV.
Des notions corrlatives proches mais (minimalement) distinctes.
Bien que souvent, dans la littrature, les notions de topique et de thme, et respectivement, de
commentaire et de propos (ou : rhme), soient entendues comme synonymes, et comme instanciant en
quelque sorte ou bien la relation sujet/ prdicat, ou bien la relation information donne/ information nouvelle,
une mise au point cet gard simpose. Les critres oprationnels pour la discrimination de ces couples
notionnels restent minimalement distincts.

Topique (ce qui est mis en position frontale, ce qui est annonc en premier lieu par le locuteur)/
commentaire (ce qui est introduit aprs introduction du topique): distinction syntaxique
(positionnelle).
Thme (objet du discours)/ propos (ce quen dit le locuteur 83) : distinction fonctionnelle (structure
fonctionnelle (= interprtative) des noncs vs structure formelle des phrases).

82

De toute manire, au niveau du noyau, en franais, lordre des mots et affixes directement observable en surface, ne recoupe
pas directement lordre dinsertion lexicale des constituants terminaux sous les constituants syntagmatiques concerns (en
structure profonde issue de lapplication incrmentielle, ventuellement rcursive, des rgles de rcriture) : () Aux (affixe)
+ V (racine) + SN, en structure profonde, contre racine+ affixe en structure de surface.
83
Ou : rhme. Expression contenant linformation que le locuteur dsire communiquer (au sens de lcole fonctionnaliste
praguoise (Firbas).

25

Sujet/ prdicat : distinction grammaticale (fonctions grammaticales) et logique (sujet : terme


particulier, prdicat : terme gnral (au sens de Peter Frederik Strawson 84)).
Les fonctions grammaticales ne recoupent pas systmatiquement les catgories logiques
correspondantes: il existe des sujets grammaticaux qui nont pas la smantique des termes
particuliers (tels les noms en emploi gnrique Les castors sont des mammifres, Lhomme
est mortel) 85, et il existe des phrases dont les prdicats logiques ne sont pas analyss (du
moins pas en grammaire normative scolaire) comme des prdicats grammaticaux, ntant pas
raliss par des squences qui comportent des verbes, mais par des adjectifs (Lhomme est
mortel : prdicat grammatical est mortel, o ladjectif mortel est analys come attribut du
sujet ; prdicat logique MORTEL), par des noms Anne est linguiste : prdicat grammatical est
linguiste, o le nom linguiste (en usage non rfrentiel labsence darticle en tmoignant)
est analys come attribut du sujet ; prdicat logique LINGUISTE) ou des prpositions (Le
piano est dans le bureau : prdicat grammatical est (sous analyse existentielle forte des
situatifs), ou est dans le bureau (sous lanalyse copulative); prdicat logique DANS, deux
arguments internes slectionns : le piano et respectivement le bureau.

Information donne (ancienne)/ information nouvelle : distinction cognitive.


Cf. Moeschler & Reboul (1994) : 456-458.

Typiquement, en franais, les sujets sont des Thmes, les Thmes sont des Topiques, et Topiques et Thmes
participent de linformation donne (rfrents dj introduits dans le discours), ce pourquoi ce sont (ou, pour
les Topiques, ils comportent), le plus souvent, des syntagmes nominaux dfinis.
Un nonc tel Un serpent mordit Jacques Frron sera donc (toutes choses gales par ailleurs 86) moins
acceptable que sa contrepartie sujet dfini Le serpent mordit Jacques Frron.

2.2. Linterrogation. La phrase interrogative.


Typologie syntaxique des phrases interrogatives :

Interrogation totale (=questions oui-non)/ interrogation partielle (= questions QU-)/ interrogation

84
Strawson, Peter Frederik (1974) Subject and Predicate in Logic and Grammar, Londres : Methuen. Peter Frederick
Strawson (1919 2006), l'un des auteurs dominants de la philosophie dite du langage ordinaire, explique que le prdicat
identifie un terme universel, comme le sujet identifie un terme particulier. Il sagit en fait de sujets ressortissant une
certaine classe d'expressions, utilises pour se rfrer une personne individuelle, un objet, un vnement ou un lieu
particuliers : noms propres (Peter Strawson), pronoms dmonstratifs singuliers (celui-ci), pronoms personnels (il), descriptions
dfinies (lauteur de Sur la rfrence ( On Referring )). Comparer :
a) Peter Strawson estime que les descriptions dfinies prsupposent lexistence de leur rfrent plutt que de lasserter.
b) Celui-ci estime que les descriptions dfinies prsupposent lexistence de leur rfrent plutt que de lasserter.
c)
Il estime que les descriptions dfinies prsupposent lexistence de leur rfrent plutt que de lasserter.
d) Lauteur de On Referring estime que les descriptions dfinies prsupposent lexistence de leur rfrent plutt que
de lasserter.
85
Les exemples donns dans la rfrence cite pour illustrer labsence de correspondance terme--terme entre catgories
logico-smantiques et catgories de lanalyse grammaticale sont en fait :

(i) Sujet logique sujet grammatical (Paul a t tu par Jean vs Jean a tu Paul, les deux phrases (active et passive) tant
censes se ramener, de lavis des auteurs, une mme forme logique TUER (Jean, Paul)).
Puisque cette analyse ne correspond pas la perspective adopte ici sur les types de phrases, nous avons chang
dillustrations sur ce point prcis.
(ii) Prdicat (logique) verbe (Lhomme est mortel : MORTEL (lhomme) ; Le piano est dans le bureau : DANS (le piano, le
bureau)).
Notons ds prsent que la notion de sujet logique voque par la tradition grammaticale reste assez vague.
Sil est assez ais de dfinir (en termes gnrativistes) le sujet grammatical comme syntagme nominal porteur du Cas
Nominatif, la question de savoir ce quest un sujet logique na pas de rponse aussi directe, en grammaire gnrative.
En termes de la logique des prdicats, il sagira du sujet dun prdicat logique (prdicat qui nest, lui, pas forcment exprim
par un verbe en langue naturelle).
En termes gnrativistes, se qualifiera tre appel sujet logique un sujet de Forme Logique et donc : le sujet de la structure
profonde.
Les relations de prdication (prdicat logique-sujet logique) ressortissant, dans la phrase, la structure profonde (positions
dinsertion lexicale= positions argumentales), les deux dfinitions en arrivent, dans la pratique, dire la mme chose.
Maintenant, ce que la tradition grammaticale appelle sujet logique des phrases passives telle Paul a t tu par Jean
correspond en fait lAgent (un rle smantique ralis, dans les phrases actives correspondantes, par le sujet grammatical
(syntagme nominal porteur du Cas Nominatif)) : lAgent tant le sujet grammatical (et le Topique) des phrases actives, cest
seulement dans la mesure o les phrases passives taient analyses comme drives de phrases sous-jacentes actives, que
lon pouvait dire que le sujet logique (=sujet de la structure profonde, sujet de Forme Logique) des phrases passives soit
ralis, en surface, par le complment dagent.
La notion mme de sujet logique = Agent restera sans contenu propre, ds que la phrase passive nest plus analyse comme
drive dune phrase active sous-jacente. Mais cest l lobjet dun prochain chapitre.
86
Le vers de La Fontaine se prte justement une analyse diffrente, du fait des adverbiaux de cadre qui ouvrent la phrase :
Un beau jour, au fond dun vallon, un serpent mordit Jacques Frron.

26

alternative (cas particulier : interrogation alternative polaire) = questions disjonctives 87 nommes


ainsi en raison de la prsence de la conjonction de coordination disjonctive ou).
Ces classes dfinies la fois en fonction des rponses attendues et selon leurs particularits
formelles restent cela dit affaire dinterprtation (au gr des analyses linguistiques) et de
degr (dans la pratique textuelle/ discursive) :

analyse de linterrogation totale comme cas particulier (rduction


dune) question alternative polaire

analyse des questions disjonctives (polaires ou non polaires)


comme coordination de questions totales (combinatoire libre vs
sous-type interrogatif),

Questions totales fonction/ interprtation de question partielle :


Penses-tu quelquun de particulier ?/ qui penses-tu ? (une
rponse oui ce type de question de forme oui/non est ressentie
comme insuffisante),

etc.

Nous les tiendrons cela dit pour acquises, aux fins de la slection des exemples de phrases
interrogatives et lors des analyses menes le long de ce mmoire.
Interrogation directe (phrase racine)/ interrogation indirecte (discours rapport au style indirect :
phrase enchssement). Indirection syntaxique.
Cumul de types de phrases : interro-exclamatif, interro-ngatif, interrogation emphatique (interroemphatique dans Dubois et Dubois-Charlier 1970 : 209).

Typologie smantico-pragmatique des questions :

Question appel dinformation

Questions factuelles (concernent ce qui est le cas ; rponse vise : phrase assertive)
vs questions dlibratives (concernent ce qui doit/ peut tre fait, non ce qui est le
cas ; rponse vise : phrase imprative)

Question appel de confirmation

Question-requte

[actes de langage directs]


Question-cho

Question rhtorique

Question-offre

Questions commissives (question-promesse, question-menace)

Question-reproche

N.B. La notion de question dclarative est entendre dans une logique de formants : ce sont les questions
oui/non marques par la seule intonation (ponctuation lcrit), et, de ce fait, formellement les plus proches
des phrases dclaratives correspondantes.
[actes de langage indirects : indirection pragmatique]
87

La distinction terminologique entre


question disjonctive (en tant que question alternative : Prfres-tu le th ou le caf ? rponse : Je
prfre le th. Ni lun ni lautre ou bien Les deux ne sont alors pas des rponses smantiquement licites)

et

question contenu propositionnel disjonctif (qui reste une question totale canonique : Tu aimes [SN le
th ou le caf] ? rponses licites y compris : Ni lun ni lautre./ Les deux.) tant trs fragile,

mieux vaut rserver le terme de QA (question alternative) la vraie question qui vhicule un prsuppos
dalternative (obligation pour linterlocuteur de choisir lune des alternatives explicites dans la question) et le
terme de question disjonctive la question totale contenu propositionnel disjonctif.

27

2.2.1.

Interprtation de la phrase interrogative:

question appel dinformation (valeur prototypique) : le locuteur ignore la rponse.


Exemples : tes-vous son pre ? Qui tes-vous ?
question-cho (valeur marginale, non prototypique) : on naura pas bien entendu, on veut se faire
rpter/ prciser une partie de lnonc de linterlocuteur.
Exemple :
A : Je vais fermer la fentre.
B : Tu vas faire quoi ? (intonation montante sur quoi)

2.2.2.

Syntaxe de la phrase interrogative. Sous-types.

A.

Interrogation totale/ interrogation partielle

Interrogation totale (sans mot interrogatif ; questions fermes : alternatives pistmiques en


nombre fini : rponse vise oui/ non) : Est-il encore l ? (Oui, il est l/ Non, il nest plus l).
Interrogation alternative ( coordination disjonctive dlments : Prfrez-vous la mer ou
la montagne ? (alternatives pistmiques en nombre fini dcrites (encodage conceptuel
rponses vises oui/ non (choix de lune des alternatives dcrites dans la question), analyse
syntaxique : question multiple (coordination de CP interrogatifs) : Je prfre la mer/ Je
prfre la montagne) ; Me prenez-vous pour un imbcile ou le faites-vous exprs ? (rponses
vises (toutes choses gales par ailleurs): Je vous prends pour un imbcile/ Je le fais exprs ;
aucune de ces deux rponses ntant socialement admissible, cette question alternative
fonctionnera pragmatiquement comme un acte, particulirement agressif, de remise en cause
des faits et/ ou dires de linterlocuteur) ; interrogation alternative polaire (alternatives
pistmiques en nombre fini rponses vises : si 88/ non) : Aimez-vous la mer ou ne
laimez-vous pas/ ou non ? / ou pas ? Rponses : Si, je laime/ Non, je ne laime pas) ;
analyse syntaxique : question multiple (coordination de CP interrogatifs), non = adverbe prophrase (substitut dune phrase).

Analyse des questions alternatives par dcrochage nonciatif.


= analyse srielle dissymtrique et drivationnelle (p. 167)
Analyse srielle : suite (= srie) de questions, relies par un connecteur disjonctif (ou)
Argument pour cette analyse (p.132) :
1. Possibilit de rpter le marqueur de linterrogation dans chacun des
conjoints :
-inversion du sujet clitique : Est-ce un garon ou est-ce une fille ?
-EST-CE QUE : Est-ce que cest un garon ou est-ce que cest une fille ?
Distinction que toute analyse srielle permet :
QA de la forme [Est-ce que] P ou [est-ce que] Q ? (Oui = rponse exclue (non
pertinente)) vs QT contenu disjonctif du type Est-ce que (P ou Q) ? (Oui = rponse
pertinente)
Contra : analyse non srielle (qui confond [Est-ce que] P ou [est-ce que] Q ?/ Estce que (P ou Q) ?)
QA de forme P ou Q ? serait le rsultat de la transformation interrogative
applique la proposition disjonctive P ou Q. Exemple (p.133) : analyse de
Ren Thom (1970 : 97). Autrement dit, P ou Q serait une question avec
du ou dedans (p.134).
Contre-argument lanalyse non srielle : les variantes de QA du type de
Tes fch ou quoi ?, qui ne correspondent aucune phrase assertive
contenu propositionnel disjonctif (Tu es fch ou ______ est une forme
propositionnelle incomplte) p.134.
Analyse dissymtrique : les questions de la srie nont pas toutes le mme statut au regard
du choix marqu par ou.
Argument pour cette ide :
1. Impossibilit de placer un ou dans la premire question : *Ou P ou Q ? (*Ou est-ce
un garon ou est-ce une fille ?/ OK Est-ce un garon ou est-ce une fille ?)

88

Roum. ba da. Rponse affirmative une question oui/non de forme ngative.

28

2.

P ou Q ? nest pas identique Q ou P ? En permutant les membres dune QA on


peut altrer le sens et mme crer des absurdits : Tu charries ou quoi ? *Quoi ou
tu charries ? (p. 139)

Contra : analyse srielle symtrique, qui place tous les membres dune QA
fondamentalement sur le mme plan, et donne ainsi P ou Q ? la mme valeur littrale qu
Q ou P ?
Exemple : Borillo 1978
Contre-arguments lanalyse srielle symtrique :
1. Caractre non pertinent de la rponse non-P (ou non-Q, ou non-Z) une QA plus
de 2 membres : Est-ce un garon, une fille ou du vent ?/ ?Ce nest pas un garon
[rponse incomplte] vs OKCest une fille. Pourquoi cela ? parce que le questionneur
veut quon lui signale la bonne hypothse, et non quon en limine une fausse (p.
136
2.

Impossibilit daccomplir disjonctivement deux actes de parole, au niveau littral, en


gnral, (pas seulement sagissant de questions) :

*Pleut-il ou allez voir le temps quil fait (pour proposer linterlocuteur de


rpondre directement la question de savoir sil pleut, ou, son choix,
daller voir le temps quil fait).

*Jai lhonneur de vous demander sil pleut ou de vous demander daller voir
le temps quil fait.

en prsence dune phrase ambigu plusieurs sens possibles (A, B ou C), le


locuteur nest pas cens numrer ces trois sens, mais employer cette
phrase en un sens dtermin (p. 137). Sauf intention spcifique (jeux de
mots, nonciation mtalinguistique, en contexte par exemple pdagogique).

Analyse drivationnelle : Est-ce que P ou est-ce que Q ? Est-ce que P ? Sinon, est-ce
que Q ? (p. 164).
je propose de considrer les QA comme des suites de questions dont chacune conditionne
ngativement la suivante, et dinterprter par exemple Est-ce que cest un garon ou est-ce
que cest une fille ? comme une espce de condensation de la suite : Est-ce que cest un
garon ? Sinon, est-ce que cest une fille ?.
Analyse par dcrochage nonciatif :
Ceci revient simplement considrer ou Q ? dans la QA P ou Q ? () comme un dcrochage
nonciatif conscutif la question P ?, elle-mme interprtable dune manire autonome
avant (au moins logiquement) dtre intgre ce qui la suit (p. 164, nous soulignons).
Pour rendre compte des possibles diffrences non-triviales entre segments
textuels/ discursifs P, Q, R (des questions, donc des actes de parole) et
respectivement les lments constituant lalternative, qui sont, typiquement,
eux, de lordre des contenus propositionnels, lauteur propose le
formalisme : P ? Si non-X, (Q ?)
Cette analyse peut stendre aux QA de plus de 2 membres : P, Q ou R ? P ? Si non-X,
(Q ?) Si non Y, (R ?) ; chaque question est conditionne par une rponse ngative la
question prcdente, mais puisque cette prcdente, si elle nest pas la premire, est ellemme conditionne par une rponse ngative la question qui la prcde, finalement chaque
question sera conditionne par la conjonction des rponses ngatives toutes les questions
prcdentes.
Dans cette analyse, chaque question est un peu plus conditionne que les
prcdentes (p. 165).
La premire nest pas lexception, mais plutt un cas particulier o le
nombre de questions prcdentes (et donc le nombre des conditions) est
nul.
Cette analyse drivationnelle doit tre complte par une prsupposition
dalternative : une et une seule des propositions mises en question est
vraie (p. 165).
Cest grce cette prsupposition que rpondre la QA P, Q ou R ?
interprte en P ? Sinon, Q ? Sinon, R ?, en confirmant une seule des trois
propositions P, Q ou R est une rponse exhaustive : la prsupposition
dalternative impliquera alors la ngation des deux autres (p. 166).
Distinction entre faits de discours et faits de langue : continuum (dans la pratique
discursive)
QA bloque/ QA lche/ succession de QT sans marque dalternative aucune, mais
prsupposition dalternative vhicule par le contexte (168-169). Exemples dans le texte aux

29

pages indiques. Voir aussi notes aux pages 167-168, en particulier n.27.
De Cornulier, Benot (1982) Sur le sens des questions totales et alternatives,
Langages n67, pp. 55-109.
De Cornulier, Benot (1985) Effets de sens, Paris : Minuit, chap. 3.

Interrogation partielle 89 ( mot interrogatif (qu-) ; questions ouvertes 90 : alternatives


pistmiques en nombre in(d)fini) : Qui est l ? (Cest Paul/ Sylvie/ ).

Syntagme qu- : focalis (=foyer dinformation nouvelle), liant une variable (souligne dans les exemples ciaprs) dont la rponse fixera la valeur, au cas par cas. Le reste des lments de la phrase interrogative
ressortissent aux informations prsupposes (=dj acquises).
Qui est l ?/ prsuppos : quelquun est l.
O est-elle ?/ prsuppos : elle est quelque part.
Des notions corrlatives proches mais (minimalement) distinctes.

89
90
91
92

93

Information donne (ancienne)/ information nouvelle : distinction cognitive.


Focus (foyer dinformation nouvelle)/ prsuppos (information partage par le locuteur et
linterlocuteur 91): distinction cognitive et nonciative.

B.

Interrogation directe/ interrogation indirecte :

Interrogation directe : phrase indpendante, courbe intonatoire spcifique, et se terminant,


lcrit, par un point dinterrogation. Pourvue de valeur et de fonction interrogative. Est-il encore l ?/
Qui est l ?

Interrogation indirecte (discours rapport en style indirect) : subordonne compltive, enchsse


sous un verbe principal qui marque conceptuellement (= descriptivement) la valeur interrogative (mais
pas la fonction : suspendue, elle, la faveur de la subordination) : Je me demande si Paul arrivera ce
soir. Je ne sais pas qui arrivera le premier. Noter que la valeur interrogative est galement indique 92
par llment introducteur (si : questions totales/ qu- : questions partielles).

C.

Interrogation comme acte de langage indirect (stratgie communicative): Je ne trouve pas ce


livre (comparer cette assertion la question appel dinformation : O est ce livre ?).

questions ralises par le truchement de phrases dpourvues de toute marque linguistique


indicative de la force ou de la valeur interrogative (indirection pragmatique vs indirection
syntaxique).

Quen est-il des assertives incompltes intonation suspensive (on en trouve dexcellentes
illustrations dans le dialogue entre le directeur de lhtel et le personnage camp par Julia Roberts
dans Pretty Woman) 93. Faut-il y voir un cas dindirection pragmatique (acte de question ralis par le
truchement dune assertion), comme le suggre la GALR (II, p. 44), ou bien plutt un patron moins
typique (=marginal) de phrase interrogative ? Le cas chant, faudrait-il y voir une interrogative totale
ou bien une interrogative partielle ? Puisque largument vide ouvre un espace dalternatives
pistmiques autres que oui/non (dans lexemple ci-avant, largument vide voque un paradigme
relationnel (relations de parent ou socio-amicales : sa petite amie, sa femme, sa fille, sa fiance, sa
nice, etc. )).

Lintonation suspensive et le caractre incomplet de la forme propositionnelle de ces


noncs (non rductible en termes dellipse) sont-ils suffisants pour les exclure du
domaine des assertions (comme type de phrase) ? Le cas chant, on peut choisir
soit (1) dy voir des faits de performance sans incidences pertinentes sur lanalyse
des faits de langue (facteur dcisif sous cette analyse : lincompltude entendue
comme tant lorigine de lintonation suspensive qui vaut demande de dire ),
soit (2) (alternativement) de les analyser comme instances dune varit de phrases
interrogatives marques par la seule intonation (des interrogatives dclaratives
incompltes : incompltude greffe sur une phrase dpart interrogatif.

Distinction dfinie en terme de porte.


Distinction purement interprtative : rponses vises.
Information commune une question et sa rponse.
Marqueurs indicatifs vs descriptifs.

Directeur : Vous tes donc sa ?


Jeune femme : Nice... ?
Directeur : Cest cela. Nice.

30

2.2.3. Syntaxe de la phrase interrogative. Ralisateurs (marqueurs).


2.2.3.1. Interrogation totale.
2.2.3.1.1. Interrogation totale directe.

Intonation ascendante suspensive (sans modification aucune dans lordre des mots) : Il est
toujours l, votre mari ? (comparer : Il est toujours l, votre mari. intonation dclarative
descendante).

Et inversion du sujet :
Inversion simple du sujet clitique: <verbe-clitique 94 sujet> (trait dunion oblig : Es-tu
encore l ?; insertion dun -t- euphonique aprs un verbe finissant en voyelle : A-t-il compris ?
Parle-t-elle toujours aussi fort ?) ; inversion de je : systmatique au futur et au conditionnel
(dirai-je, pourrais-je, ) ; rare aprs le prsent de lindicatif (liste ferme : ai-je, suis-je, sais-je,
fais-je, dis-je, dois-je, puis-je, vais-je, veux-je, vois-je ; viter aprs dautres monosyllabes :
*cours-je, *mens-je, *pars-je, *sors-je, ).
Inversion complexe : <sujet non clitique (nom propre, syntagme nominal qui comporte
un nom substantif ou bien pronom (tonique) autre que personnel) + verbe-clitique
sujet> (trait dunion oblig entre verbe et clitique sujet, comme il en va de linversion simple ;
pas de pause-virgule aprs le sujet non clitique en tte de la phrase 95 : Paul est-il encore l ?
[sujet : syntagme nominal qui consiste en un nom propre], Le plombier est-il encore l ? [sujet :
syntagme nominal dfini (DP dont la tte est larticle dfini leD) nom substantif (plombierN (= NP)),
introduit en syntaxe comme complment (=sur) de larticle dfini tte du syntagme DP)], Celuil tait-il dj parti ? [sujet : pronom dmonstratif non clitique] ; Quelquun a-t-il une question
poser ? [sujet : pronom indfini] 96 ; noter que cette dernire question est lquivalent fonctionnel
dune question partielle sur le sujet : Qui a une question poser ? 97).

Et Est-ce que (version interrogative du prsentatif cest que+ structure phrastique 98) : Est-ce que
Paul est l ?

2.2.3.1.2. Interrogation totale indirecte.


Aprs si : Je ne sais si le docteur viendra

Inversion du sujet clitique bloque (inversion simple ou complexe) : *Je ne sais si


viendra-t-il, *Je ne sais si le docteur viendra-t-il
Inversion (simple) du sujet non clitique bloque : *Je ne sais si viendra le docteur.

Les questions caches (savoir si...) sont un argument de choix lanalyse selon laquelle le complmentiseur
peut exprimer (indiquer) lui seul la valeur interrogative de la subordonne (marqueur indicatif vs descriptif) :
Je sais sil est venu (mais je ne veux pas vous le dire)
2.2.3.1.3. Interrogation totale : contrastes franais-roumain
2.2.3.1.3.1. Structures franaises sans correspondant direct roumain
dans les QT

Sujet nul (sous-entendu pour la 3me personne, inclus pour les 1re et 2me personnes, au sens de
la grammaire normative scolaire roumain)

le roumain na pas dinversion du sujet clitique (le

sujet clitique roumain est phonologiquement nul donc inobservable en surface), ni dinversion
complexe donc

quivalence interlinguale RO de ces constructions franaises systmatiquement

indirecte:

94
Pour la mmoire : sont appels clitiques les pronoms atones (=non accentus) qui prsentent une contrainte dadjacence
au verbe. Seuls peuvent intervenir entre un clitique et le verbe dautres clitiques. Clitiques sujets : je, tu, il, elle, nous, vous,
ils, elles (pronoms personnels sujets) et ce (dmonstratif sujet). Ainsi, entre je (clitique sujet) et ai (auxiliaire de temps)
peuvent licitement intervenir les clitiques objets (le lui) et ne (ngation clitique) : Je ne le lui ai pas rendu.
95
Ce qui distingue la construction interrogative dite inversion complexe de la construction emphatique topicalisation du
sujet (phrase dtachement) : Paul est-il encore l ? (inversion complexe) vs Paul, est-il encore l ? (emphase).
La construction emphatique peut concerner les interrogatives comme elle concerne les dclaratives correspondantes : Paul, il
est encore l. Ce qui ne va pas de linversion complexe, rserve, elle, linterrogation.
Si lemphase sur le sujet nest pas exclusive, dans le cas des interrogatives non plus, du pronom personnel tonique (comparer :
Lui, il est encore l./ Lui, est-il encore l ?), linversion dite complexe lest : *Lui tait-il dj parti ?/ OKCelui-l tait-il dj
parti ?).
96
Exemple emprunt Riegel, Pellat et Rioul 1994/2008 : 393. Commentaire de notre main.
97
linstar de Qui a une question poser, la question totale sujet indfini quelquun est susceptible dune lecture dpart
dfini (contre restriction explicite du paradigme dalternatives pistmiques ouvert par lindfini : Quelquun dentre vous a-t-il
une question poser ?) ou contre restriction contextuelle de ce paradigme (Quelquun [ dentre vous ici prsents ] a-t-il une
question poser ?). Cest mme l linterprtation la plus courante.
98
Construite par inversion simple du sujet clitique ce.

31

Pour linversion du sujet clitique en franais: ou bien (version la plus directe) on


rend le tour franais par une question dclarative en roumain (paraphrase littrale?
paraphrase par rorganisation du schma actanciel (+sujet/ -sujet)? implicitation
systmatique?), ou bien (version plus indirecte et pas toujours disponible) par une
question inversion du sujet non clitique (contre recouvrement, facilit par le
contexte, dun SN non pronominal: ce qui revient traduire en roumain une
interrogative totale franaise inversion du sujet clitique par une mme phrase que
la construction inversion complexe correspondante neutralisation de la distinction
inversion simple du sujet clitique/ inversion complexe 99); une tierce option serait
recourir un pronom personnel nominatif tonique, en roumain; noter cependant
que ce tour vhicule des valeurs de sens (nuances) trangres linversion du sujet
clitique en franais (interrogation apuye (Vine el mine? Asta vreau sa stiu),
incertitude du locuteur marque par la particule oare (Vine el oare mine? encore
mieux avec un indicateur dincertitude au niveau de la forme verbale (mode
prsomptif: O fi venit el oare?), voire menace (Mai pupi tu invitatie la film?)) etc.
ce pourquoi il faut y voir un cas de modulation nonciative).

Pour linversion complexe franaise: inversion stylistique, en roumain. Le procd


de traduction lorigine de cette modification dabord squentielle doit tre entendu
comme paraphrase directe par permutation (sujet non clitique prverbal linitiale
de linterrogative franaise rendu par un sujet non clitique postverbal (aprs le verbe
plein), en roumain: Quelquun peut-il maider fermer cette sacre porte? Ma
poate ajuta cineva sa ncui blestemata asta de usa?), compte tenu de linexistence
de relations de paraphrase intralinguale en franais, entre inversion stylistique dune
part, et inversion complexe, de lautre, pour ce qui est des interrogatives totales
(contrainte squentielle barrant linversion stylistique dans linterrogative totale).
Noter labsence de nuances de sens distinguant les phrases FR et RO, qui conforte
lanalyse en termes de changement squentiel sans autre.

Dpourvu de tours prsentatifs en partie figs, tel cest du franais, et de vraies clives (seule loption
pseudo-clive en est une, en roumain cf. GARL II : 37 pour exemples concernant linterrogative), le
roumain na pas dinterrogatives priphrastiques non plus. Est-ce que (marqueur grammatical
sujet figement lexical) est typiquement rendu en roumain par oare (particule interrogative non
rserve linterrogation totale, linstar de est-ce que, mais incompltement dsmantise, puisque
non exclusive deffets de sens sur linterrogative quelle modalise ; en soulignant lattitude pistmique
du locuteur, de lordre de lincertitude, de lhsitation entre alternatives binaires ouvertes par la
question oui/non, oare oriente une question affirmative vers la rponse ngative ; dans les questions
QU-, oare marque ou bien limpatience ou bien lhsitation du locuteur). Du fait de ses effets de sens,
oare reprsente non seulement une condensation (1 mot pour 3 mots), mais encore une modulation
par rapport est-ce que. Dans le systme des stratgies syntaxiques-grammaticales de
Chestermann 2000, lquivalence interlinguale est-ce-que/ oare participerait galement dun level
shift , du fait du changement de niveau de marquage (marqueur grammatical/ marqueur lexical).

Est-ce que (interrogative totale)/ cumva : lquivalence est-ce que/ cumva est encore plus indirecte
que lquivalence est-ce que/ oare puisque cumva est, lui, rserv aux interrogatives totales (ce que le
marqueur franais nest pas).
2.2.3.1.3.2. Structures roumaines sans correspondant direct franais dans les QT

Inversion verbe plein (participe ou infinitif selon le cas)-auxiliaire, dans les interrogatives totales
temps compos, tour cens tre dialectal, archaque, potique (GARL II : 33) : Vazutu-l-ai ?
(potique, archaque)/ comparer : L-ai vazut ? (standard).

Particules agonistiques intgres (non disjointes) pour les interrogatives totales interprtation de
questions requtes, de forme casuelle oblique, parallles la particule interro-exclamative non
obliques dracu/ naiba dans les questions partielles (correspondants assez directs de la particule diable
en franais dans les mmes environnements) : Vii naibii (+dracului) odata ? / Cine dracu (+naiba) va mai spus-o ?

Construction spcifique des interrogatives totales lecture de question-menace : <Mai + verbe au prsent de

Viendra-t-il demain ? Vine miine ? Vine Paul mine ?


Paul viendra-t-il demain ? Vine Paul mine ?
99

32

lindicatif + pronom personnel sujet +SN sujet (apposition) + complment ou circonstant> (Mai vezi tu
vreodata bani mprumut de la mine ?! Mai vine el Mircea pe la voi ?!) selon la GARL II : 41, en rgime interroexclamatif ( ?!). Noter que le fonctionnement de question rhtorique lorigine de cette interprtation (avec
inversement de polarit canonique : nu mai vezi bani , Mircea nu ma vine ), noblige pas, lui,
intonation interro-exclamative. Cest la menace qui semble y obliger (marquage paralinguistique qui lui assure
le statut dacte de langage indirect plutt que simple effet perlocutoire dune question rhtorique)

Peut-tre : la focalisation de contraste sous interrogation totale est une option reconnue pour les
phrases racines, en roumain (Vrei sa mergi CU MASINA ? ( Ai renuntat la ideea de a merge cu
trenul ? ) cf. GARL II : 892), alors quelle semble exclue en franais : Veux-tu y aller EN VOITURE ?

*Le docteur viendra-t-il ou son assistante ? (conflit entre statut de Topique du sujet nominal dans
linversion complexe et statut de Focus exig par le tour alternatif). En revanche OK Le docteur
viendra-t-il DEMAIN ? (ou APRES-DEMAIN ?)
2.2.3.2. Interrogation partielle.
2.2.3.2. 1. Interrogation partielle directe.

Intonation ascendante suspensive optionnelle. Le plus souvent : intonation descendante (


linstar des phrases dclaratives correspondantes), aprs une monte sur le mot interrogatif
(porteur de laccent focal). Dans ce second cas de figure, selon lanalyse gnrativetransformationnelle standard, lintonation ne serait plus gure un marqueur actuel de linterrogation.
Mot interrogatif & inversion du sujet :
Inversion simple du sujet clitique (trait dunion oblig : Que disait-il ? Qui cherchezvous ? Qui est-ce ? 100),
Inversion simple du sujet non clitique (pronominal ou nominal) 101 sans trait
dunion: Que disait celui-l ? Que disait cet homme ? Quand est parti Jean (pour Londres) ?).
Inversion complexe : Quand Paul repartira-t-il ?
Mot interrogatif & est-ce que : Quand est-ce que Paul repartira ?

+humain
Qui (est-ce)

-humain
Qu(est-ce)

+sujet
qui

-sujet
que

Qui [+humain] est-ce que [-sujet] tu as rencontr ? Qu [-humain] est-ce que [-sujet] tu racontes ?
Qui [+humain] est-ce qui [+sujet] veut encore partir ? Qu[-humain] est-ce qui [+sujet] arrive ?
Inversion (simple) du sujet clitique/ inversion (simple) du sujet non clitique : distributions distinctes
(structures syntaxiques bien diffrentes !)
Inversion simple du sujet clitique
() Verbe +TEMPS - clitique sujet ()
Formes complexes : auxiliaire

Inversion simple du sujet non clitique


verbe +TRAITS SMANTIQUES PURS sujet non clitique ()
Formes complexes : participe pass, infinitif

2.2.3.2.1.1. Cas particuliers.


2.2.3.2.1.1.1. Inversion exclue : mot qu- sujet (qui : Qui la dit ?).
{Pas dinversion : variante prfre/ inversion complexe : variante permise} : mot qu-
sujet (combien de, quel, lequel de(s)).
Combien de gens lont vu ?
Quel tmoin a vu laccus ? Quelle folie avait pris Clmence ?
Lequel de ces enfants a vu laccus ? Lequel de ses romans vous parat le meilleur ?
[variantes prfres exemples (et sanction normative) emprunts Hanse 1991 : 526]
-

Combien dentre vous lont fait (+ lont-ils fait),


Quelle rage de vivre et de dominer lavait-elle soutenue ? (Druon),
Laquelle de ces deux Mathilde () emporte-t-elle la sympathie dAlinor ? (Pernoud)
[variantes permises exemples (et sanction normative) emprunts Hanse 1991 102 : 526527]

2.2.3.2.1.1.2. Inversion simple oblige :

Mot qu- attribut (Qui tes-vous ?, Qui est cet homme ? Quelle sera votre dcision ?) ou attribut
(Quelles gens tes-vous ? Quelles gens sont les Dupont ?)

100
Inversion de je courante pour les verbes de la liste dj mentionne (ai-je, suis-je, sais-je, fais-je, dis-je, dois-je, puis-je,
vais-je, veux-je, vois-je : Pourquoi ai-je ferm ce tiroir cl ?) ; rarissime (tour trs marqu, en particulier loral), avec les
verbes en -e - ( ?Pourquoi hsit-je ? /OKPourquoi est-ce que jhsite ?).
101
Souvent appele, dans la littrature : inversion stylistique. Les oprations stylistiques tant par hypothse supposes tre
optionnelles, seuls les cas o cette inversion est optionnelle devraient tre nomms ainsi.
102
Hanse, Joseph (1991) Nouveau dictionnaire des difficults du franais moderne, Paris-Louvain-la-Neuve : Duculot,
deuxime dition mise jour et enrichie.

33

Sujet= SN [+humain]

Attributs du sujet en
variation libre :
Qui / Quel

Qui est cette femme ?

Quelle est cette femme ?

Sujet= pronom personnel


[+personne, locuteur]

Attribut du sujet choix


contraint :
Qui/ *Quel(le,s) :

Qui
Qui
Qui
Qui

*Quel suis-je ?
*Quels sommes-nous ?
*Quel es-tu ?
*Quels tes-vous ?

Sujet= SN [-humain]

Attribut du sujet choix


contraint :
*Qui/ Quel

*Qui est cette voiture ?

Attribut du sujet +qu

suis-je ?
sommes-nous ?
es-tu ?
tes-vous ?

Interroger sur la qualit


Interroger sur lidentit

Quelle est cette voiture ?

Que suis-je ?
Que devient-elle ? 103
Qui suis-je ?
Qui est-elle ? Qui est cette
femme ?

QueCOD (Que disent-ils ? Que veulent ces gens ? Que vont dire ces gens ?)
O est + SN (O est votre guitare ? O avait t votre guitare ?)

2.2.3.2.1.1.3. Inversion complexe oblige :

Ngation excluant linversion simple du sujet non clitique: Depuis quand votre ami ne dort-il
plus ?/ *Depuis quand ne dort plus votre ami ? Comparer : Depuis quand votre ami dort-il?
OKDepuis quand dort votre ami? Depuis quand sest endormi votre ami ?
Ngation & mot qu- sujet (ngation excluant labsence dinversion): Combien de ne pas
(Combien dentre vous ne lont-ils pas fait ?), Quel ne pas (Quels tudiants nont-ils pas compris
lexplication ?).
Pourquoi, En quel sens excluant linversion simple du sujet non clitique : *Pourquoi rient les
enfants ?/ OKPourquoi les enfants rient-ils ? *En quel sens parlent les fleurs ? / En quel sens les fleurs
parlent-elles ?
Pour viter lquivoque :

viter la squence <Verbe + SNi+ SNj> : *O a trouv Pierre ce livre ? OKO Pierre at-il trouv ce livre ? * qui a donn Pierre ce livre ? OK qui Pierre a-t-il donn ce
livre ?

viter les phrases deux arguments nominaux directs (=sans prposition)


[+humain]: ???Quel ami [sujet ? COD ?] souponne votre fils [sujet ? COD ?]?/ OKQuel
ami votre fils souponne-t-il ?
Ce nest pas vident que linterdiction des squences <V + sujet+attribut (du sujet, de lobjet)>
tombe sous le mme principe (viter lquivoque au niveau notamment de linterprtation des
fonctions grammaticales). En effet, si, dans le cas de lattribut de lobjet on peut allguer ( la limite),
comme facteurs de risque smantique (interprtatif), ladjacence du sujet nominal invers et de lobjet
non clitique 104, ou, si lobjet est, lui, un pronom clitique, ladjacence du sujet et de lattribut accord
avec lobjet :
*Quand laissera celui-l [sujet invers] les enfants [objet]
tranquilles [attribut de lobjet]?/ OKQuand celui-l laissera-t-il les enfants
tranquilles ?
*Quand nous [objet clitique] laissera celui-l [sujet invers]
tranquilles [attribut de lobjet]?/ OKQuand celui-l nous laissera-t-il
tranquilles ?
tel nest manifestement plus le cas avec lattribut du sujet :
*Comment serait votre frre [sujet] si ingrat [attribut du sujet]?/
OKComment votre frre serait-il si ingrat ?

2.2.3.2. 2. Interrogation partielle indirecte.


Pas dinversion :
Sujet pronom clitique (personnel, ce, on) : Je ne sais o il est/ pour quand cest.
Inversion simple du sujet non-clitique possible :
Sujet SN (non clitique) : Je me demande ce que mon frre a dit/ ce qua dit mon frre.
103

Avec, en sus de la lecture littrale compositionnelle (rponse attendue (par exemple): prof danglais), une lecture
idiomatique (disant peu prs la mme chose que : Comment va-t-elle ?). Traduction en roumain : Ce mai face ?.
Mme cas de figure donc que <Verbe + SNi+ SNj>.

104

34

Inversion simple du sujet non-clitique prfre :


Verbe plus court que le SN sujet : Jignore o est cet employ (comparer : Jignore o se trouve cet
employ/ Jignore o cet employ se trouve actuellement).
Inversion simple du sujet non-clitique oblige :
Mot qu- atribut, sujet SN (non clitique) : Je ne sais quel est votre avantage. Je me demande qui
est cet individu. 105
Inversion simple du sujet non-clitique bloque :
En cas dquivoque (deux arguments nominaux directs (sans prposition) +humain): Jignore qui
[sujet ? COD ?] a rencontr Jean [sujet ? COD ?]/ OKJignore qui [objet] Jean [sujet] a rencontr.
Ngation ; Pourquoi excluant linversion simple du sujet non clitique 106 : *Dites-moi depuis
quand ne dort plus votre ami / *Jignore pourquoi rient les enfants.
2.2.3.3. Interrogation linfinitif.
Questions partielles portant sur un argument non sujet ou sur un circonstant :
Que faire ? 107 O aller ? Comment retirer le poignard ?
Interprtation : sujet non exprim = locuteur/ indfini gnrique quivalent on.
2.2.3.4. Tours familiers : prserver lordre des mots de la phrase dclarative, viter linversion.
Terme interrogatif en position de base : Tu vas o ? Vous attendez qui ? Tu pars quand ? Tu regardes
quoi ? 108

Terme interrogatif en tte de phrase, renforc par cest qui/ que (viter linversion de est-ce (que/
qui)) : Quand cest que tu pars ? Qui cest que tu attends ? Qui cest qui a cass le vase ?
!!!*Que cest que

Terme interrogatif (qu-) + que (abrviation de Qu- +est-ce que) : O [est-ce] que tu vas ? Quand
[est-ce] que tu reviens ? Qui [est-ce] que tu attends ?

Terme interrogatif extrait par le prsentatif cest __ qui/que


Cest quand que tu pars ? Cest qui que tu attends ? Cest o que tu vas ?
??
Cest quoi, que tu veux ? [comparer : quoi que (tu veuilles), quoique(tu veuilles
bien y aller)]
??
Cest qui qui arrive ?

2.2.4. Pragmatique de linterrogation pour dtails, voir cours de linguistique vou la pragmatique
(Licence, semestre 6).
2.2.4.1. Valeur fondamentale (cf. interprtation de la phrase interrogative) : question-appel dinformation.

Interprtation directive (question comme demande de dire, sous-type


directif donc) : thorie des actes de langage (Searle & Vanderveken 1985).
Interprtation non directive (question comme interprtation d'une pense
qu'il serait dsirable d'entretenir d'une certaine manire : en tant que
connaissance) : thorie de la pertinence (Sperber & Wilson 1989).

Tout nonc implique aux moins deux relations : une relation entre la forme propositionnelle de lnonc
et une pense du locuteur (son intention informative ostensive), et l'une des quatre relations possibles entre
une pense et ce que cette pense reprsente.
Une pense, comme toute reprsentation mentale doue d'une forme propositionnelle, peut tre utilise
descriptivement, ou interprtativement.
Quand elle est utilise descriptivement, une pense peut tre la description d'un tat de choses rel, ou
celle d'un tat de choses dsirable.
Utilise interprtativement, une pense peut tre l'interprtation d'une pense attribue (ou d'un
nonc attribu) quelqu'un, ou bien l'interprtation d'une pense qu'il serait dsirable d'entretenir d'une
certaine manire : en tant que connaissance, par exemple. D'o les cas de figure ci-contre :
METAPHORE :

relation interprtative entre la forme propositionnelle de l'nonc et la

105

Mais : Je me demande qui vous tes (sujet clitique pas dinversion).


Dans lacception pertinente (circonstant de phrase), En quel sens exige, au style indirect, lexicalisation du verbe de pense
ou de parole sous-jacent dans la question au style direct ( porte sur le dire ):
?Jignore en quel sens les fleurs parlent. / OK Jignore en quel sens tu penses que/ tu dis que/ on dit que les fleurs parlent.
107
Cette question porte sur le procs mme. Rponses : toujours des phrases infinitives (fuir, lutter, ).
108
Interprtes comme vraies questions-appels dinformation, ou comme des question-cho (demande de prcision : on naura
pas bien entendu/ compris).
106

35

IRONIE :
ASSERTION :
DEMANDE,
CONSEIL :
QUESTIONS,
EXCLAMATION :

pense qu'il reprsente ;


relation interprtative entre la pense du locuteur et des penses ou des
noncs attribus ;
relation descriptive entre la pense du locuteur et un tat de choses du
monde ;
relation descriptive entre la pense du locuteur et un tat de choses
dsirable;
relation interprtative entre la pense du locuteur et des penses
dsirables
cf. Sperber et Wilson 1989: 347-348.

Noter que lanalyse gnrative-transformationnelle standard du Constituant interrogatif comme type


obligatoire de phrase repose crucialement sur lhypothse de linterprtation distincte des questions (pour
le type interrogatif) et des ordres (pour le type impratif).
2.2.4.2. Valeur argumentative : orientation vers le ngatif (Il fait beau maintenant [sortir], mais fera-t-il
beau ce soir [ne pas sortir]?).
2.2.4.3. Valeurs drives :
question-requte : Avez-vous lheure ? [Quelle heure est-il sil vous plat ?, Dites-moi lheure
quil est, sil vous plat ] ; Taurais-pas cent balles ? [ Prtez-moi 100 francs, sil vous plat ] ;
Pouvez-vous me passer le sel ? [ Passez-moi le sel, sil vous plat ].
question rhtorique (implique le contraire de ce quexprime sa forme grammaticale) : Es-tu
parti pour Londres ? ( Tu nes pas parti pour Londres ) ; Nes-tu pas l ? ( Tu es l ). Cas
particulier : les questions appel de confirmation (Nest-ce pas que Jacques est gentil ?/ Jacques
est gentil, nest-ce pas ?/ Jacques est gentil, non ?).
Dans tous ces cas de figure, la rponse vise par linterro-ngatif (rponse prfre) sera : Si/
rponse non prfre : Non/ rponse exclue : *Oui.

36

2.3. Lexclamation. La phrase exclamative.


Smantique (non vriconditionnelle) : fonction expressive (affectivit) vs fonction rfrentielle vs fonction
dappel (ou : directive) 109.
Lexclamation exprime un sentiment vif devant un vnement - Dubois & Lagane 1997 (1973) : 161), une
attitude affective du sujet parlant lgard de ltat de chose voqu par son nonc (Riegel, Pellat & Rioul
2008 (1994): 387), bref, une raction affective du locuteur, de lordre de ladmiration 110 ou du dgot 111, de
lapprobation 112 ou de lindignation 113, de la joie 114 ou de la peur 115, du souhait 116 ou du regret 117, mais aussi de
lordre de lincrdulit, de ltonnement 118 etc.
Cette approche, en termes des fonctions du langage dans la communication (approche traditionnelle que
nous appellerons de ce fait : fonctionnelle) refuse lexclamation la fois la dimension actionnelle (acte de
langage), et la porte cognitive (selon lopposition cognitif/ affectif), et, le plus souvent, intgre exclamation et
interjection une mme catgorie :
-

soit en dfinissant demble les interjections comme espces dexclamations : exclamations brves,
parfois faites dun simple cri, destines mettre en relief un sentiment ou un geste , envisages
pourtant non pas en tant que types de phrase, mais en tant que classe grammaticale (Mauger 1968 :
382) 119,
soit en assimilant, en second, les interjections aux phrases exclamatives ( les interjections, dont la
fonction est dexprimer un sentiment plus ou moins vif, peuvent tre assimiles des phrases
exclamatives Dubois & Lagane 1997 (1973) : 162).

Syntaxe de la phrase exclamative:


type obligatoire ? ( contour prosodique propre) ;
type optionnel ? ( type non exclusif de lassertion, ni de linterrogation modalits avec
lesquelles lexclamation partage, de manire assez systmatique, le plus clair de ses
marqueurs morphosyntaxiques (sinon prosodiques); cumul de valeurs modales explicitement
consign lcrit, pour linterro-exclamatif, par la ponctuation [?!] : Elle est dj partie ?!
(exclamation surajoute une vraie question appel dinformation 120) Elle est alle o ?!
(exclamation surajoute une question-cho) Que ne le disiez-vous plus tt ?! (exclamation
surajoute une question rhtorique).
2.3.1. Approches alternatives de lexclamation.
2.3.1.1. Approche actionnelle : thorie des actes de langage.
Exclamation = Assertion emphatique (croyance + sentiment).
109

Fonctions du langage, au sens de Karl Bhler.


Quil est beau, le lavabo ! (Ah ! [interjection+] Quil est beau ! [exclamation])
Quil est laid, le bidet ! (Pouah ! [interjection+] Quil est laid ! [exclamation])
112
Cest parfait ! [exclamation]
Tant mieux ! Cest cela (+a) ! a va ! [exclamations brves, fortement lexicalises, souvent analyses comme interjections]
Bravo ! [interjection]
113
a, par exemple ! a alors ! [interjections]
a alors ! [interjection +] Vous lavez assomme, imbcile ! [interjection +exclamation]
114
Ah [interjection+], elle est l, ma bien-aime ! [exclamation]
115
Oh [interjection+], elle est l, la mgre ! [exclamation]
116
Ah [interjection+]! Si elle tait encore l ! [exclamation]
117
Hlas [interjection+], elle est dj partie, votre Dulcine ! [exclamation]
118
Tiens [interjection+]! Il pleut ! [exclamation]
a alors [interjection+] ! elle nest plus l ! [exclamation]
Lui, voler un parapluie!
119
Lexclamation tant entendue, elle, dans cette grammaire vocation notionnelle, qui neutralise les distinctions entre modalits
dnonc/ modalits dnonciation, comme modalit de lnonc (noter le gnitif), ct non seulement de laffirmation ou de la
ngation, de linterrogation, de lordre ou de la dfense (communment analyss, en linguistique franaise en terme de modalits
dnonciation si ce nest en tant que types de phrases), mais galement ct du souhait ou du regret, du doute, de la possibilit et de
lventualit (le plus souvent apprhends en tant que modalits dnonc).
120
Linterro-exclamatif y exprime alors, la fois, ltat de non savoir pralable du locuteur (alternatives pistmiques ouvertes : Elle est
dj partie (OUI)/ Elle nest pas encore partie (NON)), et son attitude subjective, de lordre de lincrdulit face aux indices situationnels
pointant vers la premire de ces alternatives (OUI), de lordre du regret que tel puisse tre le cas, de lordre du souhait que ce soit plutt
lautre alternative qui se ralise, :
A : La voiture de Marie nest plus dans le parking.
B : Elle est dj partie ?!
A : Oui, elle est partie plus tt que prvu.[rponse non prfre]/ Non, elle est en runion. Sa voiture est chez le
garagiste. [rponse attendue/ espre]
110
111

Remarquer que, si linterrogation totale inversion du sujet (clitique) semble exclusive de ce cumul de valeurs modales, tel nest pas le
cas des questions QU- : Mais quand/ o a-t-elle bien pu partir ?!.
La question se pose de savoir comment linterrogation (alternatives pistmiques polaires (OUI/NON) actives la fois) survit alors
lexclamation (qui nen active par hypothse quune seule, sur le mode de lvidence).
si lajout de lexclamation achve de convertir une question a priori non oriente en question oriente, et, le cas chant, sil sagira dune
sorte de question appel de confirmation (comparable Elle nest pas encore partie, nest-ce pas ?, mais en loccurrence plutt empreinte
du regret (pour son dpart prcoce)/ souhait quelle ait t encore l (pourvu quelle ne soit pas partie !) ou bien dune question
rhtorique au sens usuel .

37

Dans le classement des actes de langage propos dans Searle (1972 (1969)), lexclamation nest pas
mentionne en tant que telle, mais la description des actes EXPRESSIFS se laisse extrapoler
lexclamation : ce sont des actes typiquement raliss par des phrases exclamatives (excuse, critique,
flicitation, condolances, remerciements), et qui expriment une attitude psychologique de lordre de
la croyance ( linstar des actes reprsentatifs, dont lassertion), augmente dun lment de lordre
du sentiment (insatisfaction (plainte), tristesse (lamentation), y compris lorsque cette attitude est
fonction de (voire redondante du) statut du locuteur : culpabilit (excuse), assurance/ sentiment de
supriorit (critique)) soit, en notation : croyance + y .
Ce qui est remarquable dans cette analyse, cest que cognitif et affectif y sont runis plutt quopposs
lun lautre ( lencontre de lanalyse traditionnelle en termes des fonctions du langage (fonction expressive)).
Les thories de lnonciation, dans lespace francophone, se rallient la mme perspective :
Exclamation = Assertion + quelque chose en plus (Antoine Culioli thorie des oprations
nonciatives 121)
Exclamation = Assertion du haut degr/ du degr extrme.
2.3.1.2. Approche cognitive : pragmatique infrentielle (Thorie de la pertinence).
Rapprochement (et opposition) dire QU-/ demander QULa forme propositionnelle de lnonc dune phrase exclamative (graduelle), linstar de la forme
propositionnelle de lnonc dune question (en particulier : dune question partielle), interprte une pense qui
est elle-mme linterprtation dune pense dsirable : si assigner une valeur la variable lie par le mot
interrogatif tait pertinent pour le locuteur (ignorant, au moment de linterrogation, la rponse la question
quil est en train de poser), assigner une valeur la variable lie par le mot exclamatif serait pertinent pour
linterlocuteur.
Sous cette analyse, lexclamation graduelle (ou plutt : la forme moins que propositionnelle car
incomplte de lnonc exclamatif respectif) fournirait une interprtation de lassertion du haut degr/
du degr extrme correspondante de mme que la (forme moins que propositionnelle car incomplte
de la) question QU- fournit une interprtation de la rponse attendue.
2.3.1.3. Approche vriconditionnelle de lexclamation (thorie des univers de croyance Martin
1987 122).
En termes de valeur de vrit relativise aux univers de croyance et aux mondes possibles.
2.3.1.3.1. Notions oprationnelles.
Mondes possibles :
(1) totalit inconditionne de faits non contradictoires (le monde actuel = un monde possible parmi une infinit
dautres : extension infinie du POSSIBLE, POSSIBLE intemporel) ;
(2) lensemble des mondes alternatifs du monde m0 de ce qui est ; ces mondes alternatifs ne diffrent
de m0 que par une proposition ou par un ensemble de propositions qui sy trouvent non vrifies (conception
temporelle du POSSIBLE).
Mondes potentiels (m): ne contiennent aucune proposition contradictoire avec celles de m0 (mondes
qui prsentent comme vrai ou comme faux ce qui apparat dans m0 comme possiblement vrai ou
comme possiblement faux 123).
Le monde des attentes : chane privilgie ayant toutes les chances de se raliser (parmi le champ
infini des possibles ouverts en t0). Lun seulement des mondes possibles deviendra le monde de ce
qui est , quand lavenir sera lui aussi devenu du pass.
Mondes contrefactuels (m 124): contiennent au moins une proposition contradictoire avec celles de m0
(et donnent donc pour vraie une proposition admise dans m0 comme fausse 125).
Univers de croyance : lensemble indfini des propositions que le locuteur, au moment o il sexprime, tient
pour vraies ou quil veut accrditer comme telles 126.

121

CULIOLI, Antoine (1974) A propos des noncs exclamatifs , Langue Franaise n22, Paris : Larousse.
MARTIN, Robert (1987) Langage et croyance. Les univers de croyance dans la thorie smantique, Bruxelles : Mardaga.
Il est possible que Pierre soit revenu voque un monde o Pierre est revenu est une proposition vraie.
124
Not, dans le texte comme m barr.
125
Si Pierre avait russi laisse entendre que Pierre na pas russi, sa russite tant voque dans un monde contrefactuel (m je
narrive pas dessiner la barre sur la lettre !!!).
126
Mais il est vident, le long de louvrage, que lauteur emploie le terme, loccasion, dans son acception la plus large (la plus naturelle
aussi) de terme complexe sappliquant tout sujet de conscience : ainsi, Uil est-il cens noter lunivers de croyance de il (table des
abrviations et des symboles).
122
123

38

Indfini : parce que toutes ces propositions ne sont pas explicites (propositions latentes tenues pour
respectivement vraies ou fausses).
Variable selon les informations que le locuteur possde (connaissances acquises, faits mmoriss : la
mme phrase, nonce par des locuteurs diffrents, aura des contenus plus ou moins prcis).
Distinct de la notion dunivers de discours (=ensemble des circonstances dans lesquelles une
proposition peut tre dite vraie (circonstances dcrites par des adverbiaux de phrase (sous lAncien
Rgime, p) ou fournies par le co(n)texte interprtatif)).
Notion oprationnelle pour lanalyse de :
des contextes opaques (Oedipe voulait pouser (vs pousa 127) Jocaste/ *sa mre 128) ;
du discours direct et indirect,
de lusage de certains adverbes,
de lemploi des temps et des modes.
Univers de croyance vs image dunivers : au lieu de confrer lui-mme une proposition une valeur de vrit,
le locuteur peut situer cette proposition dans quelque univers quil voque. La reprsentation, dans le discours
(du locuteur), dun univers de croyance qui nest pas le sien ici-et-maintenant, est appele image dunivers.
Images dunivers : notion qui couvre toutes les modalits pistmiques (p. 20)

Htro-univers (U, U) : lensemble de propositions que tient pour vraies celui dont le locuteur
rapporte les dires, la pense ou la croyance ( lnonciateur ) ; ou bien lunivers du locuteur en un
temps autre que t0 (le temps de lnonciation).

Gnrent des htro-univers :


une personne autre que je, les verbes dattitude propositionnelle (croire, penser) et les
verbes de parole (dire que, demander si) ;
la premire personne du singulier (je), les verbes dattitude propositionnelle (ou de parole)
un temps autre que le prsent (de lindicatif) : je pensais alors que p, je mimaginais que p,
je vous avais dit que p
le conditionnel dit de linformation incertaine (de distanciation n.n.).

Anti-univers (U) : lensemble des propositions qui, quoique fausses en t0, auraient pu tre vraies
(=que lon imagine tre vraies), donc lensemble des propositions vraies dans des mondes
accidentellement contrefactuels. Ex. : Si Pierre avait russi (Pierre na pas russi Uje, Pierre a
russi U).
distinguer des propositions fausses qui ne sauraient tre vraies en t0 (car tant le fruit de la
seule imagination du locuteur : Si Napolon tait au pouvoir (prononce en 2011)), et qui
dfinissent des mondes esentiellement contrefactuels.

Image de lunivers de croyance 129 (description de lunivers actuel du locuteur : Je crois que p, Je sais
que p).
Image (en ligne) dun univers anonyme (modalisateur pistmique renvoyant anonymement au
certain, au vraisemblable, : Il est certain que p noncs pronom sujet impersonnel (expltif il);
do sans doute lide que la prise en charge par un nonciateur spcifique (locuteur actuel 130, ou
autre 131) serait compltement dpourvue de marquage linguistique).
Commentaire :
Cette analyse ignore lapport smantique de la forme verbale (traits de temps-aspect-mode
(TAM)), au codage linguistique (grammatical) de la prise en charge par le locuteur actuel (ici:
prsent de lindicatif).
En labsence de tout renvoi quelque autre nonciateur ( la faveur de la construction
impersonnelle), les traits TAM exprimeront (par dfaut : seul sujet de conscience daccessible
dans le contexte nonciatif/ interprtatif) le degr dadhsion du locuteur actuel, la vrit de
la proposition pose comme certaine.
Comment dailleurs exprimer la distinction entre il est certain que p et on est certain que p
(forme personnelle smantique vague qui prserve elle aussi le caractre (rfrentiellement)
anonyme du sujet modal, mais projette un htro-univers de la voix publique 132, moins

127
Avec le pass simple (sans verbe modal dsidratif), le contexte est transparent : dire qudipe pousa Jocaste, cest dire quil
pousa sa mre (mme si dipe ignorait lidentit rfrentielle /Jocaste = sa mre/).
128
Ne sachant pas que la femme appele Jocaste tait galement sa mre.
129
Sorte dimage dunivers en ligne, toutes les autres tant hors ligne.
130
Comparer Je crois que p
131
Comparer Paul croit que p.
132
Rappel : on est un pronom de troisime personne qui dsigne toujours des humains (= nimporte qui, tout le monde, les gens), ne
semploie quen tant que sujet, et commande un accord du verbe au singulier : Quand on veut, on peut.
Emplois particuliers (avec diverses valeurs de style) :
on = je (On fait ce quon peut),

39

daccepter que la construction impersonnelle vhicule, elle, toutes choses gales par
ailleurs 133, une description de lunivers actuel du locuteur ( linstar dnoncs pistmiques
sujet modal je du type de je trouve certain que p, je crois que p, je sais que p) ?
Javoue ne pas saisir la porte pragmatique exacte de cette distinction, puisquen disant il est
certain que p (vs on est certain que p : htro-univers de la voix publique si ce nest dun
nonciateur identifiable dans lenvironnement cognitif du locuteur et/ou en situation de
discours), le locuteur assume cette certitude autant sinon plus que lorsquil dit je crois que
p, je sais que p).
Notation en usage :
Ui (univers dun locuteur donn linstant i)/ Ui+k (univers dun locuteur donn linstant i+k)/ Uje
(univers du locuteur (actuel)), U (image dunivers) ; Uje (univers du locuteur en un temps autre que
t0), Uil (univers de de il), Uon (univers anonyme [ ?] sagirait-il de la voix publique [comme dans les
dictons et autres proverbes] ?).
2.3.1.3.2. Classement des phrases exclamatives (Martin 1987 : chap.7) & ralisateurs.
non graduelle

Forme assertive, interrogative


rhtorique (question oui/non
rponse oriente) ou interrogative
indirecte en si
+ INTONATION

graduelle

Forme interrogative (inversion du


sujet clitique, si, quel, combien,
combien de ; quest-ce que),
mcanismes de pseudosubordination que/ ce que), de
comparaison (comme), de
conscution (si/ tellement + adj/ adv
& ellipse de la subordonne
conscutive), dindfinition, diverses
(autres) procdures deffacement
+INTONATION

Exclamation

- p asserte avec force dans le


monde de ce qui est mo (univers
de croyance U)/ fausset de p
dans quelque monde
contrefactuel (relevant dune
image dunivers U:
contradictoire avec lunivers
actuel du locuteur)
vidence dans lunivers
de croyance (du
locuteur) U
- p vrifi jusque dans les cas
extrmes (parcours des
possibles : mondes potentiels m
(relevant de lunivers de
croyance U)) / fausset de p
dans au moins un monde
contrefactuel (relevant dune
image dunivers U)

Lexpos des principales constructions exclamatives en franais que nous vous proposons sous 2.3.2. 2.3.4.
suivra de prs leur prsentation par Robert Martin (Martin 1987).
2.3.2. Exclamation non graduelle 134
2.3.2.1. Formants qui se rattachent directement au composant p asserte avec force dans le monde de ce
qui est mo (formes qui assertent p ou voquent p) (mme quand elles interrogent non-p).
2.3.2.1.1. [structure de phrase assertive] Mais elle est l ! (en rponse et sopposant une assertion de
linterlocuteur : Marie ne viendra pas.)
Comparer lassertion (enchanement en discours homogne): {Nous ne lattendions pas,/ Elle na pas
t invite,} mais elle est l.

on = tu, vous (Alors, on fait lintressant ?),


on = nous (moi +dautres) accord de lattribut du sujet ou du participe pass avec le sujet rellement vis : On est arrivs en retard).
Cf. Dubois & Lagane 1997 (1973) : 90-91).
Remarque : Dans toutes ces interprtations marques, la langue familire accepte laccord rfrentiel avec le sujet vis pour
ladjectif attribut, le participe pass du verbe, jamais toutefois pour le verbe porteur de linformation de temps et de personne.
Cest l un indice proprement parler linguistique de la smantique dviante du pronom.
Si selon interprtations marques de on la rfrence du pronom personnel [+humain] smantique rfrentielle vague se laisse
dvoiler discursivement (en prsence, ventuellement, dindices linguistiques (tel laccord), ou textuels (co-texte intra-phrastique:
apostrophe) : on est certaine/ certains [accord] de ce que lon avance, mon petit/ ma petite fleur/ mes petits [apostrophe]) il sagira de
lhtro-univers dun nonciateur identifiable dans lenvironnement cognitif du locuteur et/ou en situation de discours (linterlocuteur, ou
linterlocuteur et/ou un (des) tiers), moins que on ne dsigne le locuteur lui-mme ou le locuteur lui-mme et un (des) tiers : auquel
cas nous serons prsents avec une image (en ligne) de lunivers de croyance (du locuteur). Jamais pourtant avec ce que Martin 1987
appelle image dun univers anonyme .
133
Comparer : En rsum, pour vous, il est bien certain que p.
134
Exemples de lop.cit. (sauf stipulation).

40

2.3.2.1.2. [structure de question rhtorique (quivalent fonctionnel dune assertion, du fait du caractre
fortement orient de la rponse 135) formes finissant en nest-ce pas ?, non ?, pas vrai ? exclues !]
Mais enfin, ntait-il pas prsent quand la dcision a t prise ! Comparer la question inversive
correspondante (une question rponse oriente): Ntait-il pas prsent quand la dcision a t prise ? (= il
tait prsent quand la dcision a t prise, nest-ce pas ?)
Qui ne laccepterait ! Comparer la question rhtorique correspondante : Qui ne laccepterait ? (= nimporte
qui laccepterait, tout le monde laccepterait )
Comment est-ce possible ! Comparer la question rhtorique correspondante : Comment est-ce possible ? (=
ce nest pas possible ) exclamation contradictoire : le rel contredit les attentes du locuteur.
Si elle tait l ! Si elle est l ! 136 Noter la troncation, leffacement de la proposition racine : linterrogation est
attribue quelquun dautre, la mise en doute interrogative est prsente comme injustifie, car se heurtant
lvidence des faits. Comparer la question indirecte oui/non correspondante : Vous vous demandez
[maintenant] si elle est l [maintenant], Vous vous demandez [maintenant] si elle tait l [alors].
Tours non tronqus : Vous pensez si elle est/ tait l ! Pensez si elle est/ tait l ! ( bien sr quelle
est/ tait l )
Malgr la forme dinterrogation indirecte, vous pensez si ( la diffrence de vous savez si 137) est
rserv lexclamation.
2.3.2.1.3. Autres constructions :
[exclamation non graduelle & emphase par extraction du constituant focalis (phrase clive) : Cest
maintenant que tu le dis ! Cest Ren qui a t surpris ! (GM : 405).
Et [sujet] qui ne [Verbe] pas ! ajout dun argument ngatif : Et Tristan qui nest pas l ! (GM :
406)
[exclamation non graduelle & emphase par dislocation du Topique] : La grammaire, je ne men lasse
jamais ! (GM : 406)
[exclamation non graduelle renforce par apostrophe et/ou interjections] : Quoi ! 138 cette nuit ne finira
donc pas ! (Bernanos, apud GM : 407). Octave ! 139 () tu as un pied de rouge sur les joues ! (Musset,
apud GM : 406).
2.3.2.2. Formants qui se rattachent au composant fausset de p dans quelque monde contrefactuel (relevant
dune image dunivers U) .
2.3.2.2.1. [Formes smantiquement lies au contrefactuel formes qui voquent non-p] :
Mme Pierre est venu ! ( Pierre nest pas venu est vrai dans plusieurs mondes contrefactuels : sa
venue est tonnante en t0)
Il est dj l ! (on sattendait ce quil ne ft pas encore l)
Sil avait russi ! (SI conditionnel en emploi contrefactuel : Pierre na pas russi est vrai pour le
locuteur)
Dommage que tu ne sois pas avec nous ! ( Tu es avec nous (=non-p, o p est dj ngatif) vrai
dans un monde contrefactuel)
[Subjonctif de protestation]: Moi, hron, que je fasse une si pauvre chre ! ( je ne ferai pas )
[Infinitif dexclamation]: Moi, renoncer mon projet ! ( je ne vais pas renoncer ).
Voir Naples et mourir ! ( Si je voyais Naples je pourrais bien mourir, cela ne me ferait rien
(infinitif de souhait)).
2.3.3. Exclamation graduelle
Pr-requis : prdicats dsignant des proprits sujettes gradation.
Comparer :
Est-elle charmante ! / ???Est-elle ingnieur !
Est-elle grande ! /*Est-elle grande de 1m85 !
*Que ce triangle est isocle !
2.3.3.1. [Formants qui se rattachent au composant fausset de p dans au moins un monde contrefactuel
(relevant dune image dunivers U) ]

135
Selon linversion de polarits : rponse affirmative une question ngative (Nest-elle pas charmante ?), et ngative une question
affirmative (Le vois-tu l ?).
136
Lajout dexemples au prsent de lindicatif est cens prvenir toute contamination avec la lecture dsidrative (vs pistmique) de Si
elle tait l ! (SI conditionnel vs dubitatif : souhait RO dac ar fi acolo ! ).
137
Qui exprime lignorance du locuteur, quant la valeur de vrit de la proposition elle tait l.
138
Interjection.
139
Apostrophe.

41

2.3.3.1.1. [formes interrogatives : questions oui/non directes (inversion simple du sujet clitique), indirectes (si
dubitatif)]
Ces formes suggrent (je dirais plutt, ici : connotent) la fausset de p dans au moins un monde possible
(comme il en va en gnral des questions fermes (interrogations totales : le locuteur ignore si p si et
seulement si, ses yeux, p est faux dans au moins un monde possible (de son univers de croyance op. cit.,
p. 24) 140) ; lintonation exclamative indiquera, elle, que p est de fait vrai dans tous les cas, mme dans le
cas o on pourrait le supposer tre faux (cas extrme).
Est-elle charmante !
Si elle est charmante !
2.3.3.2. [Formants qui se rattachent au composant parcours des possibles ]
2.3.3.2.1. [Formes interrogatives : questions qu- directes (porte sur le syntagme nominal dans son entier
exclue ; il ny a pas dexclamation qui corresponde une QAI ouverte (interrogation partielle) telle : Qui a t
dsign comme juge ? #Qui a t dsign comme juge !); signification des exclamatives morphosyntaxiquement semblables aux interrogatives partielles : cart en intensit de la proprit ou cart
quantitatif en nombre)]
2.3.3.2.1.1. [cart en intensit de la proprit]
Quel juge a t dsign ! [bien mauvais, en tant que juge : cart en intensit de la proprit : noter
les donnes prosodiques distinctes de la phrase interrogative correspondante 141]
[phrases attributives mot qu- & ellipse de la copule : construction de fait exclusive de linterrogation]
Quelle fille charmante ! (*Quelle fille charmante ?)
Condition ncessaire : proprit attache de manire durable au sujet (dfinition dune
classe de rfrence ) 142. Comparer :
Quelle fille fatigante ! /*__________fatigue !
Quelle fille maladive ! /*_________ malade !
Qu1est-ce qu2elle est charmante !
Selon Martin 1987, il sagirait non pas dun tour rapprocher des formes interrogatives, mais dune
pseudo-subordination, linstar des tours Ce quelle est charmante ! Quelle est charmante !. Le
tour exclamatif quest-ce que p ! serait glos : Que [que1 suspensif 143, provoquant le parcours des
possibles] cela est, savoir que [que2 appositif] p (= (qu) elle est charmante) .
Glose bien plus difficile (moins naturelle) pour : Quest-ce quil a crit comme bouquins !
[quantification dobjets vs intensit de proprit] :
?? que cela est, savoir ce quil a crit comme bouquins
qui se ramne pour lessentiel : que cela est, savoir ce(la) ).
Sous lanalyse conjointe de qu1est-ce que2 p ! et de ce que p !, que2 ne serait plus appositif,
mais relatif, comme il en va de Ce quil crit comme bouquins ! voir 2.3.3.2.1.2. infra.
Lauteur met en garde cependant que, malgr lapparente relation de parent formelle entre qu1est-ce
que P !/ ce que P !/ que P !, quest-ce que p ! nest pas lorigine de ce que p, ni de que p (par
troncations successives) cf. note 22, chap.7, op.cit. (les donnes diachroniques sy opposeraient :
quest-ce que p ! tant attest le plus tard).
Contre-argument lanalyse en termes de subordination : linversion du sujet clitique !!!
Quelle est belle !
*quest-elle belle ! (pas dinversion du sujet clitique subordination)
Quest-ce quelle est belle ! (inversion du sujet clitique phrase racine)

140

Ce qui revient reformuler en termes de mondes possibles la smantique des questions fermes OUI/NON.
Quel juge a t dsign ? (accent focal sur quel, monte de la courbe intonatoire sur le mme mot, descente sur juge)/ Quel juge a
t dsign ! : dpart bas sur quel, monte de la courbe mlodique sur juge (le prdicat quantifi quant lintensit de la proprit : ici,
de la qualit de juge).
142
Op. cit., p. 107.
143
Cest--dire : qui suspend la valeur de vrit. Dans une subordonne enchsse (Paul dit que Marie est charmante, Paul sait que
Marie est charmante, Paul simagine que Marie est charmante), le que initial (en termes gnratifs : complment(is)eur) suspend la
valeur de vrit de la proposition p quil introduit : la valeur de p se dtermine entirement par le smantisme [du verbe]
introducteur (Martin, Robert, (1983) Pour une logique du sens, Paris : PUF, pp. 97-98). Cest donc au terme dun calcul interprtatif
impliquant la phrase complexe dans son entier que la subordonne pourra se voir assigner une valeur de vrit. Noter que renvoi est fait,
dans le texte de Martin 1987 :103, cette interprtation de que valeur suspensive.
Une autre manire denvisager ces choses (en termes de thorie des actes de langage): distinguer entre valeur et force
assertives (lassertion tant lacte de langage qui exprime la croyance (du locuteur) que ltat de chose dcrit par la
proposition p est le cas (p=est vrai)) : les subordonnes en que seront dites avoir seulement une valeur assertive, seule la
principale pouvant, par hypothse, avoir une force (par exemple) assertive.
141

42

Nous adopterons donc ici lanalyse plus directe selon laquelle que1 est un adverbe dintensit
QU- (= quel point, combien) (vs conjSub), analyse plus conforme lavis des dictionnaires
de langue. Cet adverbe se retrouve, en structure de surface, la position Spec,C, mais aura
t introduit en syntaxe en tant que modifieur de ladjectif (quantificateur sur la proprit
dnote par ladjectif) belle, dans la proposition enchsse. Il atteint donc la position Spec,C
suite un dplacement en priphrie gauche.
La position de complment(is)eur C est suppose rester vide, pour accueillir le verbe flchi
(pralablement incorpor la tte Flexion (=Temps)) do inversion du sujet clitique ce,
rest, lui, Spec, T, sous C).
Vous avez l une mme analyse structurale que celle propose pour les questions
partielles (parent structurale de lexclamative et de linterrogative).
Pourtant, nous avons opt pour lide que cette parent structurale na pas dexpression
directe en synchronie, tant le rsultat dune volution de la langue.
Le rapport linterrogation nest plus directement pertinent pour lanalyse en synchronie de
lexclamative (celle-ci nest pas envisage comme une espce de transforme de
linterrogative correspondante), puisque la phrase exclamative est cense comporter un
ouvreur dalternatives pistmiques proprement parler exclamatif (spcialis pour
lexclamation).
Argument pour : il ny a pas de question telle *Quest-ce quelle est belle ? (avec
linterprtation vise ici pour que : quel point vs pourquoi, en quel sens 144).
Comparer quel point est-elle belle ? insolite smantiquement si ce nest
pragmatiquement ( quel point est-elle intelligente ?, cest bien mieux comme
acceptabilit), mais tout fait grammatical.
Cest l une analyse smantique de type what you see is what you get qui nexige plus
dimplicite laborieux (rasoir dOccam 145).
En gnral, postuler des oprations nonciatives trop toffes en amont de ce qui se laisse
effectivement observer (le lien entre oprations sous-jacentes et formes observes tant
rtabli coup de troncations) participe dune politique assez douteuse : comment en effet
traiter les troncations requises en ligne, il faudrait y voir des ellipses (avec tout ce que cela
comporte de restrictions en syntaxe et smantique grammaticale) ; hors ligne, ce ne sont ni
plus ni moins que des volutions dun tat de langue un autre tat de langue.
Cela vaut (plus ou moins) de lensemble des analyses de la phrase exclamative par
Antoine Culioli (Culioli 1974, 1992) et par Robert Martin (Martin 1987).
Pour mettre en vedette des liens de parent entre exclamatives dune part, et acceptions/
constructions attestes ailleurs en langue/ discours, de lautre, les analyses en termes
(explicites ou implicites) doprations nonciatives, me semblent (au mieux) pertinentes
gntiquement parlant (gense/ mergence dune construction et/ou dune nouvelle
acception dun lexme, un tat prexistant de la langue fait de diachronie donc), sans
pour autant se laisser transposer telles quelles en termes gnratifs (gense dune
occurrence de cette construction dans la langue interne du locuteur actuel fait de
synchronie).
A lair dy survivre, de manire sournoise, le fameux principe de rcapitulation dErnst
Haeckel (1866), selon lequel lontognie rcapitulerait systmatiquement la
phylognie, principe cens exprimer le lien entre volution de lespce et
dveloppement dun individu, et dment remis en cause par la biologie moderne.
2.3.3.2.1.2. [cart quantitatif en nombre]
Combien de films ont t censurs !
Combien de courage a-t-il fallu !
Que de trsors clos en mon absence! (Colette, apud GM 146 : 404).
Que de (+Combien de) gens il y a dans la rue !

144

145
146

Olivier et Roland, que ntes-vous ici ? (Hugo, apud Nouv. P. Rob. 2007).
Diachronie (tymologie de que adverbe exclamatif intensificateur, signifiant comme , combien ) : driv du
que interrogatif pourquoi , et reproduisant ainsi, en franais, une volution smantique dj ralise en latin
pour quid (tymon de que interrogatif pourquoi ).
Principe dpistmologie qui privilgie, en matire de recherche scientifique, la solution la plus simple.
Grammaire mthodique

43

Noter la spcialisation de que de (ouvreur dalternatives pistmiques statut de quantifieur


(dterminant quantitatif : beaucoup de, assez de, peu de) pareil combien de) pour lexclamatif
preuve, linexistence de #Que de gens y a-t-il dans la rue ?/ OKCombien de gens y a-t-il dans la rue ?
Qu1est-ce qu2il a crit comme bouquins !.
Rappelons que les phrases exclamatives en Quest-ce que smantique dcart quantitatif en nombre
(quantification dobjets) sont analyses dans Martin 1987 en termes de pseudo-subordination (plutt quen
termes de la parent de leurs formants ceux de linterrogation partielle), linstar des exclamatives en
Quest-ce que smantique dcart en intensit de la proprit.
Si nous nous tions situe ( linstar de Martin 1987) dans la logique des oprations nonciatives ( la
Culioli 1974) 147, nous rapprocherions plutt la forme de ces exclamatives, des questions appel dinformation
complment de relation telle Quest-ce quil a crit(,) comme bouquins ? rponses vises non du type de : Il
a crit des romans (spcification de lespce de bouquins (prdication sortale)) mais du type de : Il a crit les
romans suivants : , (numration des bouquins crits (titres) : rfrence des particuliers). La
construction exclamative serait alors obtenue par glissement dune lecture qualitative (didentification :
numration de particuliers), une lecture quantitative de la question (nombre de(s) particuliers
(numrs)) 148, lecture selon laquelle Qu1est-ce qu2il a crit comme bouquins ? en arriverait pouvoir se
substituer, dans le discours, : Combien est-ce quil a crit de bouquins ?
Notons dabord que pouvoir se substituer dans le discours ne veut nullement dire signifier la mme
chose que , puisque manifestement les deux structures syntaxiques resteraient distinctes (la drivation de la
lecture quantitative tant du domaine de la pragmatique, la smantique de la construction Qu1est-ce qu2il a
crit comme bouquins ? (si cette question tait atteste) serait du type de Combien de [textes] est-ce quil a
crit comme bouquins (vs comme articles) ? . Or il se trouve que ce type de des questions du type de cette
glose questions sont, elles, attestes en franais : des questions appel dinformation portant sur la quantit,
complment de relation en comme et syntagme nominal partitif quantifi par combien instanciant le mme type
notionnel que ce complment de relation.
Comparer :
Il vous faudra payer combien dargent comme pension ? (www.nupge.ca).
Il faut donner combien comme pourboire ? (www.dictionnaire.reverso.net) analyse comme Il faut
donner combien [dargent] comme pourboire ?
Combien donner comme pourboires au Botswana ? (www.voyageforum.com) analyse comme
Combien [dargent] donner comme pourboires au Botswana ? (pluriel oblige, toute rduction directe de
__comme pourboires __de pourboire y est barre).
Nanmoins, le rapprochement entre questions telle que Qu1est-ce qu2il a crit comme bouquins ?/ Combien
est-ce quil a crit [de textes] comme bouquins ? et exclamatives correspondantes ne sera lui-mme pas
entendu ici comme pertinent en synchronie, du moins pas au sens fort (qui consisterait voir dans
lexclamative une transforme de linterrogative correspondante).
Que1 sera analys, en synchronie, en termes douvreur dalternatives pistmiques portant sur le nombre/
la quantit, directement ( combien ) compatible, lui, la fois avec linterrogation et avec
lexclamation.
Cette analyse ne prjuge en rien de son statut catgoriel : on pourrait toujours maintenir que
llment pel (=prononc) directement apprhend en surface soit le complment(is)eur (Conj
Sub de lanalyse traditionnelle), comme dans lassertion Je sais que Paul a crit beaucoup de
bouquins, mais ajouter quil serait spcifi par un oprateur QU- abstrait (sans matrice
phontique), qui quantifierait, lui, sur la proprit dnot par le prdicat de la phrase.
Ce qui sy oppose, et nous fait dire que dans ces contextes, Que1 doit tre un cas de pro-forme
adverbiale substitut de combien, cest linversion du sujet clitique ce (comme nous lavons relev
dans le cas des exclamatives en quest-ce que smantique dcart dans lintension de la
proprit (Que1 = quel point ) - sous 2.3.3.2.1.1).

2.3.3.2.2. [pseudo-subordination : que suspend la valeur de vrit et dclenche le parcours des possibles]
Quelle est charmante !
Ce quelle est charmante ! [quantification sur lintensit dune proprit : que = conjonction de
subordination 149, introduisant une proposition compltive en apposition ce (selon lauteur, rsidu dun cela)]
Ce quil a crit comme bouquins !
147

Qui est trs certainement lorigine des analyses de Martin 1987 pour lexclamation (en particulier graduelle).
Le rapport linterrogation est invoqu dans Martin 1987 (pour dautres constructions exclamatives) en termes assez ambigus : tantt
on allgue une sorte de source dordre interrogatif (approche informellement transformationnelle), tantt (et cest l je crois loption
correcte) on pose ce rapport, en synchronie, en termes de simple proximit formelle superficielle (rapport homonymique des
constructions).
148

149149

Vous voyez quelle est charmante.

44

(*Quil a crit comme bouquins !: preuve (selon R. Martin) du fait que, dans ces contextes (=quantification
dobjets), la proposition en que est une relative, dont ce est lantcdent.
Noter labsence dinversion du sujet clitique avec ces tours :
*Quest-elle charmante !/ OKQuelle est charmante !
*Quest-ce bte !/ OKQue cest bte !.
Le complment(is)eur que serait, dans ces constructions, non pas un vrai marqueur de subordination
(puisque les exclamatives en que sont exclusives de la subordination (denchssement) linstar des
questions partielles en que), mais un marqueur de modalit.
En tant que tel, que fait ce quil fait aussi dans ses occurrences de vrai subordonnant, quand il
suspend la force assertive de la proposition enchsse : il marque une modalit en suspension de
lassertion cf. Hirschbhler & Labelle 1992 (1994) 150 : 222. Ce pourquoi Martin 1987 parle de
pseudo-subordination , de fausse subordination.
TOURS TRONQUES (INCOMPLETS)
Distinguer ellipse : forme logique complte, forme phonologique incomplte (effacements
dans la reprsentation de surface traite par le composant phonologique), et
respectivement incompltude (=vague) : forme logique incomplte aussi !
2.3.3.2.3. [comparaison sans comparant spcifi]
Comme elle est charmante !
Comme elle sexprime bien !
Analys dans Martin 1987 en termes dauto-reprage 151 : [elle est charmante] comme elle est
charmante + ellipse de la phrase racine.
Interprtation : si on lavait compare x (laide comme un pou, belle comme Vnus, etc. : comparant
spcifi distinct du compar), du point de vue de la proprit P (quelle que soit cette proprit), on
aurait prsuppos que x est exemplairement P ; dans cette logique, comparer une jeune femme ellemme pour ce qui est du charme conduit la conclusion quelle est exemplairement charmante
(proprit quantifie dans lexemple donn).
Ce tour est analys ailleurs comme comportant un mot qu-, lorigine interrogatif, mais qui nest plus gure
attest que dans les questions enchsses (questions caches du type de : Tu sais comme (+ comment) il est
Nouv. P. Rob. 2007/ comparer la question directe (phrase racine) Comment (#Comme) est-il ?), et spcialis
dans lexclamation 152.
Un argument assez direct ou bien en faveur de ou alternativement lencontre de lanalyse en synchronie
de ces phrases exclamatives comme comparaisons tronques le mme raisonnement valant dailleurs de
lanalyse des exclamatives en que/ ce que en terme de (pseudo-)subordination relverait de lexamen des
donnes prosodiques.
Les conjonctions de subordination introduisant la compltive (que) ou la comparative (comme) ne portent pas
laccent focal dans les phrases complexes assertives phrase racine non efface, correspondant aux
exclamatives concernes, except les emplois rectificatifs mtalinguistiques (somme toute assez marqus et
rares) :
Je sais que Marie est CHARMANTE (mais je ne vais pas lpouser)
Cest l laccentuation la plus naturelle (non ncessairement oppositive : enchanement concessif plutt
que rectificatif).
Je SAIS quelle est charmante (je nen doute pas).
Je crois quelle EST charmante (non quelle le ft seulement par le pass).
??Je sais QUE Marie est charmante (non SI elle est charmante) 153.
Cela vaut mme des comparatives non triviales, a fortiori dans les structures comparative rendue triviale par
la redondance :
Elle est charmante comme sa MRE (non comme son PRE).
Elle est charmante COMME sa mre (non LINSTAR DE sa mre).
Cela tant, dans la mesure o, dans les exclamatives graduelles en que ou en comme, linstar des syntagmes
QU- dans les interrogatives partielles, et pareillement leur quivalent quel point ( QUEL POINT elle est
seule!), que et respectivement comme porteraient, eux, laccent focal (ce qui correspondrait une
150

Hirschbhler, Paul & Marie Labelle 1992 (1994) Syntaxe du franais. LUniversel et le particulier dans la langue, Montral :
Universit du Qubec Montral.
151
Mcanisme postul par Culioli 1974 (schmas circulaire de reprage).
152
Ouvrages lexicographiques et GM : 404.
153
OK sous scnario rectificatif mtalinguistique (le prof corrige ltudiant qui aura dit, fautivement, je sais si Marie est
charmante dans un contexte requrant : je sais que Marie est charmante).

45

interprtation selon laquelle llment le plus important de l(nonc) de cette phrase est le degr de la
proprit), on en dduirait que lanalyse en termes de complmentation phrase racine absente doive cder le
pas une analyse explicitement quantificationnelle (quantification pose plutt quimplique).
Largument converse ne vaut cependant pas : du fait que ?/#QUelle est charmante ! et ?/#COMME elle
est charmante ! reste(raie)nt peu frquents (voire non attests) en bon franais, alors que Comme elle
est CHARMANTE ! Quelle est CHARMANTE ! reprsente(raie)nt la rgle on ne pourra pas infrer ce
que seules des analyses pseudo-subordination ou comparaison tronque soient justes. Tout ce quon
pourra en dduire : que/ comme sont des formes atones.
Or, le caractre atone de que (qui concerne aussi bien le pronom interrogatif que (vs quoi) que la
ConjSub et le relatif) est compatible avec des analyses directement quantificationnelles du type de
[CP COMMENT/ COMBIENQU- [C queC [TP ]]]
(voques la fin de la section prcdente).
Si le trait de focalisation est associ en syntaxe loprateur abstrait QU-, du fait de labsence de
matrice phontique, cette instruction ne pourra pas jouer en forme phonologique que si elle percole
sur le premier constituant terminal dpel (que). Celui-ci tant porteur dune instruction contraire
lisible ce point de la computation par exemple [+atone], linstruction syntaxique de focalisation ne
pourra pas avoir deffets prosodiques du tout 154.
Posons, dans la mme veine, que commeQU- en vient spcifier un complmenteur non pel QUE
[CP CommeQU- [C QUEC [TP ]]]
et se voit associer linstruction de focalisation en syntaxe, tout en tant marqu (dans sa matrice
dinstructions phonologiques) du trait [+atone], linstar de queC.
Linstruction syntaxique [+Focus] aura alors des effets de FL, mais restera sans contrepartie
prosodique, du fait que le complmenteur QUE (premier candidat toutes choses gales par
ailleurs hriter du trait, dans la computation priphrique) est, lui, non pel.
Dans le meilleur des mondes possibles, le trait syntaxique de focalisation devra donc tre
effac sur comme avant traitement de sa matrice phonologique, porteuse de linstruction
incompatible [+atone], savoir en syntaxe noyau, une fois gnre la configuration de
focalisation pertinente (=interprte=lue) en FL.
En clair : [CP CommeQU- [C QUC [TP elle est [AP tcomme charmante]]]] ! instancierait un cas de
complment(is)eur rempli par une tte QUE non pele spcifie par comme (adverbial) qui
quantifierait, lui, sur la proprit dnote par ladjectif, aussi bien dans lexclamation directe que dans
lexclamation indirecte (Voyez comme elle est charmante !).
Cela revient analyser les comparatives en comme sur un mme patron (morphosyntaxique) que les
comparatives en ainsi que, de mme que (adverbial+que), mais aussi et cest l le plus intressant
de manire consistante lanalyse des interrogatives correspondantes en combien (Combien
(#Comme) laimes-tu ? [interrogation directe]/ Si tu savais combien (+comme) je laime !
[interrogation/ exclamation indirecte]/ Combien (+Comme) je laime ! [exclamation directe]).
Postuler une tte QUE non pele est ncessaire pour rendre compte de lagrammaticalit de *Comme
est-elle charmante !, ainsi que de la spcialisation de comme (vs comment, combien) pour les
structures subordination (dans les interrogatives correspondantes).
Cette analyse vaudrait aussi bien de comme comparatif (Elle est jolie comme sa sur [est jolie]) que
de comme interro-exclamatif. 155
2.3.3.2.4. [conscution sans consquence spcifie : quelle que soit la consquence, le prdicat est vrifi]
Elle est si charmante ! Comparer lassertion correspondante non tronque : Elle est si charmante que vous
allez lpouser.
2.3.3.2.5. [indfinition complments/ qualificatifs possibles seulement suggrs : tous ces complments
(parcours des possibles) vrifient ce qui est dit]

154

Plutt que de permettre, dans ce cas-ci, leffacement tardif du trait [+Focus] introduit en syntaxe noyau (et effets certains de Forme
Logique (FL)) et clon dans la reprsentation traite, post-pellation, dans la computation priphrique vers la Forme Phonologique (FP),
contre insertion de laccent focal dans la computation priphrique selon la variante par dfaut ( la fin du syntagme phonologique
maximal trait), il faut plutt penser que la computation prviendra dune manire ou dune autre la copie du trait incrimin, de lautre
ct de lpellation, dans la reprsentation sur laquelle oprera la computation priphrique : y introduire une instruction qui aura pour
toute finalit dy tre efface ne rime pas grand-chose.
155
Pour une analyse du mme type, des structures comparatives en que et en comment, voir Muller, Claude (1996) propos de que
comparatif , LINX N 34-35, Lexique, syntaxe et analyse automatique des textes. Hommage Jean Dubois, 241-254.

46

Cest dun pnible !


Elle a un (de ces) charme(s) ! Elle portait un (de ces) chapeau(x) !
Elle a un de ces charmes ! Elle portait un de ces chapeaux !: le tour partitif pose lensemble de
rfrence (sur lequel seffectuera le parcours des possibles), mais cet ensemble reste sous-dtermin
du point de vue informatif ( complments/ qualificatifs spcifiques voqus en bloc (et non : noncs,
numrs)).
2.3.3.2.6. [phrases nominales rfrence dfinie, (ventuellement) tronques/ incompltes : contre-exemple
apparent ; parcours des possibles dclench partir du prsuppos (indfini), selon le mcanisme postul cidessus pour les tours exclamatifs indfinis]
Ce sont des constructions contextuellement dpendantes, sous-dtermines du point de vue informatif pour ce
qui est de lvaluation, ntait-ce lintonation et le mimo-gestuel ( lcrit, on ne sait pas sil sagit dadmiration
ou au contraire dhorreur, sauf recours ce qui entoure la phrase exclamative tronque (co-texte)).
tours elliptiques dfinis
Phrases nominales rfrence dfinie : Le chapeau quelle a !
Tours dfinis tronqus :
Le charme ! Le chapeau !
Ce charme ! Ce chapeau !
Drivation postule (en termes doprations nonciatives): Elle a un chapeau (indfinition dclenchant
le parcours de possibles dterminations (=complments, pithtes : un chapeau de femme
dautrefois, un chapeau magnifique, )) Le chapeau quelle a ! Le/ Ce chapeau !

2.3.3.2.7. [phrases nominales relativisation de lattribut du sujet tour exclamatif non recens dans
lapproche en termes dunivers de croyance]
Octave ! [apostrophe] [interjection] fou que tu es ! (Musset, apud GM : 406)
Comparer : FouFOC que tu es ! [interprtation littrale en de de la gradation : tu es fou
plutt quimprudent, sur un prdicat par ailleurs gradable]/ COMBIENFOC que tu es fou !
[+gradation : tu es trs fou].
Linterprtation graduelle reste, dans ces cas-ci, possible, et mme probable, mais cest l un effet dindirection
pragmatique (interprtation infre la faveur de maximes de la conversation, notamment de la maxime de
pertinence). Mme comportement syntaxico-smantique (modulo les diffrences de ralisation morphologique
au niveau des propositions relatives, dans les deux langues) et mme type dindirection dans le cas du roumain
Nebunule ce esti !
Ce sont des structures exploites, en dehors de lexclamation, en contexte circonstanciel (circonstancielles
valeur causale, dtaches en tte de phrase) : Press que jtais de vous voir, je suis venu aussitt (GM : 481,
analys comme relativisation dun adjectif attribut du sujet, dans le cas du procd stylistique de
renforcement dun adjectif en position dtache ). Insens que je suis (exemple, hors co-texte, de que
pronom relatif, in Hanse 1991 : 793). Tour quivalent roumain : <adj + cum + sunt/ esti/ este> (Grbit cum
eram s v vd, ).
Par contre, lexclamative construite sur le mme patron, en franais, sera traduite en roumain par <adj. (forme
casuellement non marque) + ce + sunt/ esti/ este>, alternatif : <nom (<adj.)+art. df. enclitique au
vocatif+ ce + esti/ sunteti> (pour lexclamative de forme interlocutive susceptible dtre renforce par
lapostrophe en franais) : Nebunule ce esti ! Adjectifs non substantivables exclus (*Tristule ce esti !).
Lagrammaticalit de *Triste que tu es ! *Bte que tu es ! vs OKIdiot que tu es ! OKDprim que tu es !
(comparer : *Tu es un bte/ OKTu es un idiot, *Tu es un triste/ Tu es un dprim 156), pas amliore aux formes
non interlocutives (*Bte que je suis ! vs OK Idiot que je suis !) encourage une analyse syntaxique
nominalisation en franais aussi, ce qui ne va pas sans majorer les diffrences syntaxiques et smantiques
entre structure relative de dpart (qui semble favoriser les adjectifs dorigine verbale plutt que laptitude
nominalisation) et exclamative exploitant la mme ( ?) construction.
*Triste (OKAttrist) que jtais (par son dpart), je ne vous avais pas accompagns la fte
(=Comme jtais triste cause de son dpart)

156

Emploi subst. Un dprim grave, psychique. Oh! le mauvais vin de l'motion forte, celui dont la griserie atrophie la volont et prpare
les dprims et les maniaques (LORRAIN, mes automne, 1898, p. 77). TLFi.

47

2.3.4. Exclamatives indirectes.


2.3.4.1. Exclamatives non graduelles
Exemple de Robert Martin (Martin 1987 :108, note 27)
Je trouve que cela te va bien !
Comparer lexclamative directe Cela te va bien !
Noter le choix du verbe trouver, un prdicat smantique caractris (au sens de Ducrot et al. 1980 : 66-84) par
les traits :
[+jugement de valeur] (vs jugement de ralit) : Je trouve que sa voiture est confortable/ *Je trouve
que sa voiture est une Citron.
[+valuation pose] (vs valuation prsuppose) : *Je trouve quil a un peu mang (accent sur a :
pose seulement la ralit du fait que Pierre a mang une certaine quantit de nourriture, prsente
comme faible, mais ne porte pas vraiment sur lvaluation de la quantit ingre, lvaluation nest pas
au premier plan du discours, elle est simplement voque/ OKJe trouve quil a peu mang (accent sur
peu : cest lvaluation qui est lobjet principal du discours ; la ralit du fait est, elle, simplement
prsuppose) ;
[+jugement personnel bas sur une exprience] (vs jugement rapport) : je ne peux pas rpondre,
lorsquon me demande mon avis sur un film que je nai pas vu mais dont jai lu les critiques
(favorables) par *Je trouve quil est intressant. Je peux en revanche trs bien y rpondre par : Je
crois quil est intressant. De mme, *Je trouve quil fera trs beau demain (cest la vision futurale qui
pose ici problme, tant exclusive de toute exprience personnelle de la chose value)/ OK Je trouve
quil fait trs beau aujourdhui (exprience personnelle de la chose value)/ OKJe crois (+Jai
limpression) quil fera beau demain ;
[+prdication originelle] (vs prdication seconde) : je ne peux pas dire Je trouve que cette voiture
est chre si le vendeur ne men a pas dit le prix (ou si le prix nen est pas affich), lorsque, par
exemple, je dduis, sur simple examen de la voiture en question, quelle est au-dessus de mes
moyens.
Noter galement la forme de ce prdicat (1sg, prsent de lindicatif) qui en fait une sorte de performatif
primaire cest ainsi du moins quOswald Ducrot lanalyse (op.cit.).
Remarquons ainsi que :
que la lecture exclamative de la subordonne enchsse (vs de la phrase matrice) savre trs
improbable avec dautres verbes dopinion, ou avec des verbes de connaissance ou de
perception :
?

Je crois que cela te va bien !


?Je comprends que cela te va bien !
?Je vois que cela te va bien !
-

quelle se dgrade si lon change de forme verbale (pass au lieu de prsent, et/ou autre
personne que 1sg), ne pouvant alors tre prserve quau mieux sous interprtation de
discours indirect mimtique :

?Je trouvais que cela tallait bien !


?Elle trouve que cela te va bien !
-

quelle samliore sous modification de degr sur ladverbe :

Je trouve que cela te va vachement (=diablement) bien !


-

quelle est assez problmatique contre registre factuel vs valuatif (en changeant,
naturellement, de verbe introducteur) : ?Mais je vois quil nest pas l !

Notons dabord que lexclamation non graduelle est parfaitement compatible avec le registre factuel
(tonnement face un tat de chose inattendu, mais vident) : Mais il nest pas l !
Ainsi linterprtation exclamative est-elle problmatique pour la subordonne, non pour lensemble de
la phrase, cest--dire en fait : non pour la principale. Interprte comme OKMais je le vois ! o le
fonctionne comme substitut clausal (pronom neutre), la phrase exclamative Mais je vois quil nest pas
l ! est parfaitement grammaticale. Cest lindirection de lexclamation qui est bloque, avec un
contenu propositionnel purement factuel, en prsence dun verbe recteur (oprateur dindirection) de
perception ( ?Je vois quil nest pas l !) ou de connaissance ( ?Je sais quil nest pas l !), oprateurs
dindirection compatibles avec le registre factuel dans le cas des phrases dclaratives (Je vois quil
nest pas l. Je sais quil nest pas l : Il nest pas l ) voire interrogatives (vraies questions : Je ne
vois pas sil est l, Je ne sais pas (+ Jignore) sil est l : Est-il l ? ) ou questions caches : Je vois
sil est l, Je sais sil est l : Est-il l ? )
Nous en retiendrons que lindirection syntaxique est une option bien plus lime en fait
dexclamation non graduelle quelle ne lest en fait dinterrogation totale : argument pour

48

lide que la bonne dcoupe, en fait dexclamations, nest pas : total/ partiel, mais : graduel/ non
graduel. Je trouve que __ (performatif de prdication originelle) est un environnement qui laisse
passer la valeur exclamative de la subordonne.
2.3.4.2. Exclamatives graduelles
Voyez combien de films ont t censurs !
Voyez comme elle est charmante !
Regarde ce quelle est belle ! (mais non : *Regarde quelle est belle !, la construction quelle est belle (pseudosubordination) tant rserv lexclamation directe 157).
Noter, dans ces exemples, le type smantique (verbe de perception) et la forme du verbe introducteur
(limpratif).
Mais la valeur (vs force) exclamative de la subordonne subsiste aussi bien avec un verbe de connaissance
(savoir) voire, la forme ngative (notamment en prsence dune surmodalisation selon le <possible>), avec
un verbe dopinion (ne pas arriver croire__, ne pas pouvoir croire__), lindicatif prsent (premire ou
deuxime personne notamment, ou troisime personne en tours neutres )
Je sais comme elle est charmante ! Nous savons comme elle est charmante !
Tu sais comme elle est charmante ! Vous savez comme elle est charmante !
Comme elle est charmante !
Je ne peux pas croire ce quelle est belle !
Tu ne peux pas croire ce quelle est belle !
Cest incroyable, ce quelle est belle !
Je sais comme elle est charmante fonctionne toujours en tant quexclamative indirecte, mais Je sais
comme elle est participe des questions caches (tour direct correspondant : Comment est-elle ?).
Je reconnais bien comme elle se tient mal, comme elle sourit peu (DURAS, apud Nouv.P. Rob.
2007 : exclamative indirecte)/ Je sais comme elle se tient. (question cache).
2.3.5. Lavis des dictionnaires.
2.3.5.1. TLF
QUE
I. (Emplois conjonctionnels)
A. Conjonction de subordination.
B. Conjonction de comparaison (tel que, aussi/ moins/ plus que, etc).
C. Conjonction ou adverbe exclamatif.
II. Empl. pronom. Pronom non prdicatif, marque le genre de l'inanim et assume toutes les
fonctions rgimes du substantif.
A. Interrogatif.
B. Relatif.
I.C. [Plac en tte de phrase, que indique un haut degr]
a) Que + phrase attributive. Oh! que la suite des temps est lente. Quels longs efforts pour dplacer! Comme
l'on se repose entre luttes! (GIDE, Journal, Feuillets, 1896, p. 104). Qu'il est beau! (GIRAUDOUX, Intermezzo,
1933, II, 7, p. 143). Qu'il est fidle! (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 202).
Que + autre phrase. Que je voudrais l'avoir connu! (GIDE, Si le grain, 1924, p. 415). Ah! qu'il avait peur
d'arriver trop tard! (MAURIAC, Nud vip., 1932, p. 156).
Familier
Ce qu'il est beau! Ce qu'avec trois mots je le ferais taire! (COLETTE, Bl en herbe, 1923, p. 315).
Qu'est-ce qu'il est beau! Alors, qu'est-ce qu'ils se payent notre gueule, les Fritz, depuis deux ans! (MALRAUX,
Espoir, 1937, p. 523).
b) Que + interr. ou exclam. ng. Pourquoi. Pour resserrer les nuds de cette chaste famille, que ne donne-t-on
en mariage le frre la sur et la sur au frre? (CHATEAUBR., Fragm. Gnie, 1800, p. 165). Que ne suis-je
dj au lieu de mon repos! (CHATEAUBR., Natchez, 1826, p. 389). Ah, pensait le plus jeune, que n'ai-je
auprs de moi mon chien aux dents fraches, pour lui faire un licol de mes bras!... (MONTHERL., Bestiaires,
1926, p. 576). Qu'allons-nous visiter sa cellule! Elle est vide (SAINT-EXUP., Terre hommes, 1939, p. 187).
Que + de + subst. Que de problmes soulve ce destin trange! (MAURIAC, Journal 2, 1937, p. 109).
c) Pop. Comment que...! Il y a vingt ans, un type qui se serait conduit comme a, et comment qu'elle l'aurait
laiss tomber! (M. BERNARD, La nouvelle Nouvelle Revue franaise, 1956, p. 219 ds A. HENRY, t. de synt.
expressive, Univ. de Bruxelles, 2e d., 1977, p. 148).
2.3.5.2. Le Nouv. P. Rob. 2007
157

Exemples, analyse en tant quexclamations graduelles indirectes et commentaire emprunt Martin 1987 :108, note 27

49

1QUE conj. <quia, employ en bas latin au sens de quod le fait que, que (milieu IXe s).
2QUE adv. 1080 <bas latin quid.
1. Interrogatif : Pourquoi ?, En quoi ? Que mimporte un bonheur difi sur lignorance ? (GIDE)
2. Exclamatif : Comme !, Combien ! Que peu de temps suffit pour changer toutes choses ! (HUGO)
Que cest donc bte de vous tourmenter comme a ! (ZOLA)
FAM. (dans le mme sens) Ce quil est bte ! Quest-ce quelle a d pleurer (PROUST)
QUE DE loc. exclam. Combien : Que de difficults je prvois ! (RENAN).
3QUE pronom <lat. quem, accusatif de qui (842).
1. Pronom relatif (dsignant une personne ou un objet ; COD, COInd ou circ., Attribut ;
vx. : ce que, ce qui : Cote que cote, Advienne que pourra 158).
2. Pronom interrogatif (dsignant une chose).
EXCLAM. Quest-ce quon va dguster ! (DORGELES) Quest-ce quil y a
comme poussire !
2.3.5.3. Analyse des donnes lexicographiques :
Que (conjonction de subordination, conjonction de comparaison, conjonction ou adverbe exclamatif ou bien
pronom interrogatif ou relatif) bnficie, dans le TLF, dun traitement polysmique poly-catgoriel (une entre
lexicale plusieurs sens correspondant deux grandes catgorisations syntaxiques ( conjonction et
pronom )) et, dans le Robert, dun traitement homonymique (entres lexicales distinctes, selon
catgorisations syntaxiques et tymologies distinctes).
Que exclamatif maintenant a un traitement unitaire aussi bien dans le TLF, que dans le Robert, lentre
polysmique 2QUE [adv. 1080 <bas latin quid] du Robert correspondant la famille de sens regroupe sous I.
C. dans le TLF [conjonction ou adverbe exclamatif].
Au niveau de la structuration de la famille dacceptions regroupe sous I.C. dans le TLF, il faut noter que la
spcification [Plac en tte de phrase, que indique un haut degr] , situe, dans le texte, avant les trois
acceptions a), b) et c) de I.C., ne se rfre de fait qu I.C. a).
Que de (loc. exclam. Combien (de)) est affilie dans le TLF QUE-pourquoi (interrog. et exclam. : C.I. b)), et
dans le Robert, directement QUE-comme, combien (exclam.) 159, lui-mme driv de QUE-pourquoi, en quel
sens.
Si, pour le sens, le tour quest-ce que + intensit de la proprit (Qu'est-ce qu'il est beau! Quest-ce quil est
bte !)/ quantit (Quest-ce quelle a d pleurer) est rapproch, dans les deux dictionnaires, de QUE-comme,
combien, du point de vue syntaxique, le mme tour est explicitement align sur QUE-pronom interrogatif (dans
le seul Robert), du moins quand il a linterprtation quantitative (cart quantitatif en nombre Quest-ce
quon va dguster ! (DORGELES), Quest-ce quil y a comme poussire !). Ce qui va dcidment lencontre
de lanalyse de Martin 1987, et corrobore notre hypothse (voir supra 2.3.3.2.1.2.).
Le Robert emphatise dailleurs aussi le lien entre exclamatives en que (QUE-comme, combien) et interrogatives
en QUE-pourquoi (dans le respect des donnes tymologiques : quid aura subi la mme volution smantique
en latin). Encourageant ( premire vue) une analyse de QUE-comme, combien directement compatible avec
les traductions en roumain (ct (de) : marqueur de quantification/intensit, mot QU- donc)).
Par contre, le regroupement des emplois exclamatifs parmi les emplois conjonctionnels dans le TLF encourage
une analyse unifie en termes de Complment(is)eur.
Les emplois du type de comment qu'elle l'aurait laiss tomber! (M. BERNARD, La nouvelle Nouvelle Revue
franaise, 1956, p. 219 ds A. HENRY, t. de synt. expressive, Univ. de Bruxelles, 2e d., 1977, p. 148) relevs
dans le TLF, encouragent une analyse de que ! en tant que complment(is)eur pel, tay par un
oprateur de quantification non pel (variante de COMMENT) dans son Spec dabord pour la distribution Que
+ phrase non attributive (Que je voudrais l'avoir connu! (GIDE, Si le grain, 1924, p. 415) = [CP COMMENT [C
queC [TP je voudrais l'avoir connu!]]]) extrapoler, ventuellement, la distribution Que+phrase attributive
(Qu'il est beau! = [CP COMMENT [C quC [TPil est beau !]]]).
Pareille analyse reviendrait reformuler, en termes gnrativistes, lhypothse de que-adverbe
dintensit, en prenant au srieux lanalyse du TLF (sous lecture inclusive du connecteur ou :
conjonction ou adverbe conjonction et adverbe).
(ce e cu verde este optional)

158
Advienne ce qui pourra arriver. Que ici a donc partie li avec la fonction sujet, lencontre de son comportement habituel en franais
contemporain.
159
Correspondant, au sens du TLF, QUE en tte de phrase marquant le haut degr, (soit C.I.a)).

50

3. Les modalits du message


Linterprtation des modalits dites de message concerne de manire cruciale la hirarchie informationnelle
thme-rhme (ou : topique-commentaire).
Au sens des Aspects la hirarchie informationnelle dune phrase nonce participe dune fonction
demphase au sens large dpourvue de contribution smantico-logique (=contribution
propositionnelle, descriptive, ou indication de force illocutionnaire), car naffectant pas le contenu
informationnel du message.
Cela en lgitimera le traitement transformationnel (vs basique): le topique et le commentaire sont
envisags, dans cette version du modle, comme des fonctions dfinies (exclusivement) au niveau des
structures superficielles, par opposition au couple sujet/ prdicat, dfini en termes fonctionnels relatifs
la base de a grammaire (constituant syntagmatique responsable de la gnration de la structure
profonde) Chomsky 1965 : 221, note 32.
Syntaxiquement parlant, les modalits de message ressortissent, comme nous lavons dj voqu dans le
chapitre introductif, aux types de phrase facultatifs :

emphase (phrase disloque & topicalisation ; focalisation & clivage) ;

passif (d-topicalisation du participant agissant au procs & topicalisation (non emphatique)


du participant non agissant) ;

impersonnel (disparition du thme (ou : topique), donc : d-topicalisation du sujet


grammatical, mais non redouble de la topicalisation (non emphatique) dun autre constituant
phrases thtiques ).
3.1. Grammaire fonctionnelle : catgories Focus et Topique.
3.1.1. Focus : linformation relativement la plus importante ou saillante dans la situation de
communication donne, information considre par le locuteur comme devant tre intgre par lauditeur
parmi ses informations pragmatiques en toute priorit (Dik 1997:326).
Le marquage grammatical du focus est ralis, en franais, par des procds diffrents, en rgle gnrale
par un ensemble de moyens phonologiques (comme laccent, le ton, le syntagme phonologique), lexicaux
(comme les particules sensibles au focus (=oprateurs de focalisation) : seulement) et syntaxiques (comme la
position du terme focalis).
-

position canonique (in-situ) : le terme focalis garde sa place de base (position lgitimation
smantique propositionnelle vs fonctionnelle) ;

position non canonique (ex-situ) : le terme focalis se trouve, en surface, linitiale de la phrase
(en franais 160, dans des questions partielles : QUI voulez-vous parler ?) ou bien il est isol du reste
de la phrase dans des constructions appeles clives (sparation du constituant mis en vedette, par
rapport au reste de la phrase : Cest PAUL que je voudrais parler). Lentit en focus et la partie
non-focalise, c.--d. la prdication sont spares par des caractristiques prosodiques (intonation :
accentuation, mlodie), mais il ny a pas vraiment de rupture (pas de pause-virgule) entre les deux
squences. Cest l une premire diffrence par rapport aux constructions de topique.
La position de largument focalis dans la partie prsuppose (non-focalise) de la construction nest
pas comble, si bien quil y reste une lacune (analyse en grammaire gnrative (version standard
tendue : thorie du gouvernement et du liage ) comme trace de llment dplac en tte de
phrase). Cest l une diffrence essentielle par rapport aux constructions de topique, en franais 161.

Les constructions in-situ et ex-situ exhibent des traits smantico-pragmatiques diffrents (interprtation des
termes focaliss, interprtation de la construction entire).
-

constructions ex-situ : focus didentification (ou : de contraste).


Un lment est choisi dans lensemble des alternatives contextuelles possibles. Llment en
question est marqu comme celui lexclusion de toutes les autres alternatives pour
lequel la prdication vaut (parcours exhaustif des possibles). En mme temps, cet lment se

160
En roumain, en revanche, le focus ex-situ est attest (galement) la faveur du dplacement en tte de phrase dun
syntagme interprtation fonctionnelle de <focus (= foyer dinformation nouvelle>), dans les phrases dclaratives : ACOLO
vreau sa merg (nu n alt parte), PAUL mi-a spus-o (nu altcineva) o les capitales marquent laccentuation focale. Cette
construction est atteste en particulier dans les langues dpourvues la fois de tours prsentatifs figs (phrases du type de
Cest une craie, Cest mon mari nonces en montrant lobjet ou la personne en question), et de construction clive, tel le
roumain.
161
Pas en roumain, o le focus ex-situ peut requrir, linstar des constructions de topique, la reprise du constituant extrapos par un pronom clitique : Pe PAUL l caut (nu pe Mircea). La pause-virgule (exclue, avec le Focus ex-situ, mais requise,
pour les constructions de topique correspondantes : Pe Paul, l CAUT nc (pe Mircea l-am i gsit) et la prosodie ( loral)
restent alors les seules marques distinctives des deux constructions.

51

trouve en contraste avec les autres options (ce qui est exclu, cest la possibilit de
substitution dune autre option loption actuellement en focus).
Typiquement, en franais, si le focus en position non-canonique (ex-situ) concerne aussi bien,
et systmatiquement, les questions partielles (directes), ce sont des phrases clives (cest
qui/que, voil que, ) que lon interprte en termes de focus de contraste 162 :
Cest PARIS que jai achet mon chapeau.
Voil TROIS JOURS quil est parti.
Comparer aux questions correspondantes :
O avez-vous achet votre chapeau ?
DEPUIS QUAND est-il parti ? 163
constructions in-situ : focus dinformation.

Il sagit de la partie de lnonc qui reprsente une information nouvelle (nouvelle pour
lauditeur) non-prsuppose. En franais comme en roumain, la rponse une question QUest un cas de focus in-situ et est interprte en termes de focus dinformation : nombre
illimit dalternatives pistmiques ouvertes, parcours non exhaustif. Comparer :
O avez-vous achet votre chapeau ?
-Jai achet mon chapeau Paris.
Position daccent de phrase dtermine par la syntaxe (rgle daccent noyau Chomsky
1971). Typiquement, en franais (comme en anglais), dans les phrases dclaratives :
membres de phrase les plus droite (derniers tre prononcs) :
Jai achet mon chapeau Paris. Comment tu le trouves ?
Un accent noyau dans une position autre que celle prdite par la rgle indiquerait un focus
expressif ou contrastif :
Jai achet mon chapeau Paris (non ma jupe) !
Constructions in-situ et focus de contraste (constructions corrlatives, focus symtriques
mme fonction grammaticale, mme rle smantique):
Je nai pas achet mon chapeau Londres, mais [je lai achet] Paris.
Jai achet mon chapeau non pas Londres, mais Paris.
Jai achet mon chapeau Paris, et non Londres.
Constructions in-situ oprateur de focalisation restrictif (par exclusion daddition vs
exclusion de substitution) :
Jachte mes chapeaux seulement Paris 164.
Ngation restrictive: Je nachte mes chapeaux qu Paris
Jai achet seulement mon chapeau Paris.
Ngation restrictive: Je nai achet que mon chapeau Paris.
3.1.2. Topique : ce dont on parle ( aboutness , -propos ) le topique chez Lambrecht (1994)
et chez Dik (1997).
Parmi les dfinitions (concurrentes) les plus frquentes dans la littrature, nous mentionnerons les
suivantes (perspective informationnelle et/ ou cognitive):

le point de dpart psychologique et/ou positionnel : le thme chez Halliday (1994) ;

162

Pour la caractrisation focale des questions QU- appel dinformation et des constructions focus de contraste, voir Lambrecht 1994 :
282-291.
Bien que sous une interprtation du type de Cest o vous lavez achet, et non quand, qui mintresse , cest depuis quand il est
absent, et non jusqu quand il sabsentera, qui mintresse , le focus interrogatif dplac en tte de phrase dans les questions ouvertes
directes (questions appel dinformation) se laisse galement envisager en tant que focus didentification ou de contraste, la chose est
moins vidente que dans le cas des clives dclaratives correspondantes. Focus informatif (vs contrastif), bien que le syntagme
interrogatif porteur de laccent de phrase ne soit pas in situ. Dans les questions indirectes (enchsses), par contre, le focus de contraste
sur le syntagme interrog reprsente une option : Je veux savoir qui vous tes, non ce que vous tes. Comme il peut porter sur un autre
syntagme : Je veux savoir qui est parti POUR LONDRES (non POUR PARIS). Option clairement barre dans les questions QU- racines :
*Qui est parti POUR LONDRES (non POUR PARIS) ?.
164
Variante restrictive : Je nachte mes chapeaux qu Paris.
163

52

llment peu informatif : le thme dans les travaux dvelopps par lcole de Prague, puis par Firbas
(1992), le caractre plus ou moins informatif tant formul en termes de degr de dynamisme
communicatif ;

llment connu : amalgame entre statut informatif et accessibilit cognitive ;

le cadre : Chafe (1976).

Topiques:

Fonction de reprage:
Cadres (de discours Charolles 1997):

reprage sappliquant aux participants


la prdication principale (arguments) ;

reprage sappliquant ltat de choses


(fait exprim par lnonc ou
lnonciation) auquel rfre la phrase
(adverbiaux) ;

signalent ce sur quoi porte le segment en


tte duquel ils sont dtachs.

indexe(raie)nt non seulement la proposition


linitiale de laquelle ils se trouvent, mais
aussi, possiblement, un certain nombre de
propositions subsquentes.

Topique intgr : Tu as des nouvelles de Paul ?/ Oui, il 165 ma tlphon hier.


Topique dtach (=non intgr), li 166: Paul, il ma tlphon hier.
Topique dtach (=non intgr), non li: Paul, je nai toujours pas de nouvelles 167.
Cadre spatial: Sur le pont dAvignon on danse (vs Le pont dAvignon, on y danse: topique
dtach li 168)
Cadre temporel: La nuit, tous les chats sont gris. Au 17e sicle, la condition paysanne tait rude.
Tout dpend de la suite du texte. Si le locuteur poursuit son discours sur les chats, ou sur la
condition paysanne, ceux-ci constitueront le topique principal de lnonc. En revanche sil se
lance dans une numration des vnements caractristiques de la nuit (agressions, vols de
voitures, rencontres tranges), ou du XVIIe sicle (vie des autres catgories sociales) on
peut considrer que ce sont la nuit ou le XVIIe sicle qui ont un statut de topique. Ce
qui ne les empche pas dassurer en mme temps une fonction de cadrage () par rapport
aux vnements qui les caractrisent.
Cadre thmatique: Quant Paul, je nai toujours pas de (ses) nouvelles.
Topicalisation/ Focalisation: stratgies discursives de construction du Topique et respectivement du Focus
( contreparties syntaxique et phonologique (ralisateurs), ainsi que fonctionnelle (interprtation)).
Topicalisation2: opration (syntaxique) de dplacement en tte de phrase (frontalisation) ou bien: lune des
frontires de la phrase (extraposition gauche/ droite, avec ou sans dtachement 169). Dans cette
165
Ou : celui-ci, ou : ton frre (si, dans la situation dnonciation donn, le frre de linterlocuteur est (ledit) Paul) bref, toute anaphore
nominale (ft-elle ad hoc), y compris la rptition du syntagme nominal dorigine (en loccurrence : Oui, Paul ma tlphon hier) ferait
laffaire.
Noter que selon certains auteurs, les pronoms personnels clitiques ne seraient jamais des Topiques, la diffrence de descriptions
nominales plus fournies ou de pronoms dmonstratifs, du fait que, dans les constructions topique dtach, les clitiques redoublent, la
position casuelle (fonction sujet), le topique, ncessairement tonique, lui, qui se trouve en position priphrique (dtache).
166
Au sens de Sophie Prvost (Prvost 2003). Noter que lemploi du terme li est ici informel, descriptif ( ne pas confondre avec la
notion technique gnrativiste de liage, conditionn la c-commande du li par le lieur ).
167
Dans le mme logique, Paul, je nai toujours pas de ses nouvelles illustrera, par contre, un cas de topique dtach li.
168
Que faire alors du refrain de la vieille chanson Sur le pont dAvignon, on y dans, on y danse ? Cadre li ?!
169
Pause-virgule. Dans la littrature on parle aussi bien de position dtache (que ce soit par clivage ou par des moyens prosodiques
(pause-virgule)) et de syntagmes dtachs (qui en arrivent occuper de telles positions, en surface)).

53

acception, neutralise discursivement quant la distinction fonctionelle (=interprtative) Topique/ Focus,


seront appeles topicalisations aussi bien le dplacement en tte de phrase, ou plutt: lune des
frontires de la phrase du constituant vou interprtation fonctionnelle de topique que celui du constituant
vou interprtation fonctionnelle de focus opration transformationnelle dite dextraposition (extra- de:
extraire; verbe transitif direct extraposer) 170:

Topicalisation-Topique (+extraposition, +dtachement)


Topicalisation-Focus (+extraposition, -dtachement).

Topicalisation (= dplacement en tte de phrase)-topique (= interprtation fonctionnelle de


<topique>) : Paul, il est dj parti pour Paris.
distinguer de la topicalisation-focus (=dplacement en tte de phrase interprtation fonctionnelle
de <focus = foyer dinformation nouvelle>), actualise en particulier dans les langues dpourvues de
structures phrastiques clivage, ou clivage rarement employ, tel le roumain (Pe PAUL l caut (nu pe
MIRCEA) o les capitales marquent laccentuation focale 171).
Cette acception du terme de topicalisation est non neutre quant lanalyse syntaxique des
structures de focus ex situ et respectivement des topiques non intgrs lis, puisquelle
postule une transformation de dplacement dans les deux cas de figure, ce qui nest pas
forcment vrai.
En labsence de qualification, le terme de topicalisation sera entendu dans ce qui suit au sens de
topicalisation-Topique , elle-mme redfinie de manire volontiers neutre quant son appartenance
au composant transformationnel 172 ou au contraire au composant syntagmatique 173 de la syntaxe, en
tant quopration de gnration dune phrase disloque. Nous distinguerons deux patrons
structuraux, selon que le syntagme dtach (pause virgule) est situ gauche (en tte de phrase) ou
droite (en fin de phrase) :

Topicalisation progressive: le syntagme dtach gauche (en relation de quasi-chane


avec le clitique argumental in-situ) est dpourvu de marques casuelles 174. Suite linaire
respectueuse du principe diconicit (ce qui est connu/ donn est nonc dabord). Cette
structure rend compte de manire assez directe de ce que le syntagme dtach remplit
seulement une fonction de lordre de la hirarchie informationnelle de lnonc (Topique vs
Focus), le clitique de redoublement remplissant, lui, une fonction grammaticale (sujet,
complment) et un rle argumental (agent, patient, cible, source).
Paul, il ma tlphon hier.
Paris, jy vais tous les ans.
Les vacances, lcolier en rve. (GM: 427)
Paul, jelui ai lgu ma montre en or.

Topicalisation rgressive: le syntagme dtach droite (annonc par le clitique


argumental) est cette fois-ci pourvu de marques casuelles. Suite linaire non respectueuse
du principe diconicit, puisque linformation connue/ donne sera nonce aprs linformation
nouvelle.

170
Le terme dextraposition peut tre entendu renvoyer aussi un concept rsultatif : position engendre suite une opration de
dplacement par extraction du noyau ; cette position drive, du constituant extrait viendra en sus des positions argumentales et/ou
casuelles canoniques dont sont respectivement justiciables le rle smantique et la fonction syntaxique de celui-ci. Sont des
extrapositions les positions de priphrie gauche, voues interprtation fonctionnelle discursive actionnelle et/ou informationnelle
(positions qui interviennent dans la ralisation syntaxique des modalits dnonciation et de message). Par ranalyse smantique du
terme dextraposition, on peut y voir une position extra (= en sus des positions porte descriptive). Cette acception additive plutt que
rsultative se dessine souvent en lisr des arguments, dans la littrature gnrativiste plus rcente, justement parce quelle nest pas
engage sur lexistence ou non dun dplacement. Si dplacement il y a (eu), la position priphrique constituera une vraie chane avec
une position du noyau, en labsence de dplacement, on parlera de quasi-chane.
171
En cas dexplicitation de lalternative rejete (phrase complexe construite par juxtaposition), laccent focal frappe, souvent, dans le
second conjoint, non pas le membre de phrase statut syntaxico-smantique symtrique, mais la ngation (Pe PAUL l caut, NU pe
Mircea).
172
Pour la mmoire : dplacement de constituants depuis leur position dite de base (premire position dintgration la structure
syntaxique en train dtre cre) une position dite drive (ou, en cas de dplacements multiples dun mme constituant, dune
position drive une autre position drive).
173
Pour la mmoire : introduction de constituants leur position de base dans la structure syntaxique en train dtre cre, par fusion
dautres constituants dj intgrs cette structure.
174
En particulier: pas de marques de Cas oblique sur le syntagme nominal dtach en tte de phrase, mme lorsquil est redoubl dun
clitique oblique lui/ leur, y, en!

54

Jy vais tous les ans, Paris.


Je lui ai lgu ma montre en or, Paul.
Lcolier en rve, des vacances.

Bibliographie minimale :
Chafe Wallace L. (1976) Givenness, contrastiveness, definiteness, subjects, topics and point of view , in C. N. Li (d.)
Subject and Topic, New York, Academic Press, 25-55.
Charolles Michel (1997) Lencadrement du discours : univers, champs, domaines et espaces, Cahiers de Recherche
Linguistique 6, Universit de Nancy-2, 1-73.
Charolles Michel (2002) Les adverbiaux cadratifs : fonction et classification ,
http://www.lattice.ens.fr/siteACFT/Documents/CharollesAdverbFoncClass4111.pdf.
Dik Simon Cornelis (1997) The theory of functionnal Grammar, Berlin, de Gruyter.
Firbas Jan (1992) Functionnal Sentence Perspective in written and spoken communication, Cambridge, Cambridge University
Press.
Halliday Michael Alexander Kirkwood (1985, 2e d. 1994) An introduction to Functionnal Grammar, London, Arnold.
Lambrecht Knud (1994) Information structure and sentence form: Topic, Focus, and the mental representations of discourse
referents, Cambridge: Cambridge University Press.

3.2. Grammaire gnrative : analyse fine de la priphrie gauche. [sectiunea 3.2. este optionala]
Initialement (thorie standard tendue) apprhende comme catgorie fonctionnelle complmenteur (ou :
complmentiseur ), note C , tte dont les positions de spcification (Spec, C) interviennent crucialement
tant dans le codage grammatical des modalits dnonciation que dans celui des modalits de message, la
priphrie gauche bnficiera, partir des annes 1995, dune analyse fine , dans le cadre de lapproche
cartographique (cole gnrativiste italienne), en principal la faveur des contributions de Luigi Rizzi :
Nous nous rfrerons dans ce chapitre la premire version de cette analyse (Rizzi 1995 (1997 175)), qui
distingue non pas une, mais quatre catgories (positions) fonctionnelles distinctes, dans ce qui sera dsormais
appel le domaine Complment(is)eur :
-

Une position C interne, qui rappelle le caractre fini (tens) ou non fini (non tens) de la phrase,
slectionnant un TP ou un IP : cest l une dernire position de redondance morphologique ; en
franais, que+ indicatif, que+subjonctif, / de/ e 176+ infinitif, dans les subordonnes compltives (ou
relatives) ; catgorie sans ralisation phonologique dans les phrases racines (tte phonologiquement
vide) ;

Une position de Focus, la tte Focus prenant le syntagme Complmenteur interne pour complment, et
un autre syntagme XP, en gnral 177 dplac depuis la rgion rfrentielle de la phrase, pour
spcifieur ;

Des positions de Topique optionnelles et itrables (entre C interne et Focus, et suprieure(s) au


Focus) ;

Une position C externe indicateur de Force (assertive, interrogative etc.), la tte Force prenant un
Topique-P 178 pour complment : toute phrase sera donc un cas de Force-P.

Comme nous venons de le dire, ces catgories/ positions permettront galement une analyse syntaxique plus
nuance des types de phrases obligatoires (par exemple, des phrases interrogatives inversion complexe telle
CommentQP les tudiants arriveront-ils la fac ?) :

175
Rizzi, Luigi (1997) The Fine Structure of Left Periphery , in L Haegeman (ed.), Elements of Grammar, Dordrecht: Kluwer, pp.
281-337.
176
Morphme ralisation phonologique zro (la notation e venant de langlais empty (= vide)).
177
Si dit dubitatif serait insr en syntaxe directement la position Focus (adjoint incorpor la tte focus).
178
Syntagme form de la tte Topique, du complment de cette tte (Focus-P), et dun spcifieur (ventuellement dplac depuis la
rgion rfrentielle de la phrase).

55

Force+Inter
r

QU-P

Force+Inter
r

Foc

Force+Inter
r

Foc

tQU-P

Top

Foc

DPi

Top

Top

O [+fini] = [+Temps]

+fini

[+fini [T Futur 3pl ARRIV(ER)V+Futur 3pl] +fini]

O : [TP ils [T t{ARRIV(ER)

+Futur 3pl}

TP

[FP tcomment [FF [VP tils [V tARRIV(ER) la facDP-OBL]]]]]

O F = catgorie fonctionnelle de prdication optionnelle smantique vague (ici : [+Manire]),


spcifie par un PP/ AdvP complment non slectionn par le verbe, et qui prend le VP pour
complment.
La smantique toffe du syntagme prpositionnel ou adverbial Spec,F est en relation
hyponymique la smantique catgorielle de F ; en tant que prdicat smantique, cet Adverbial
(un PP ou un AdvP) slectionne, lui, par lintermdiaire de F, le VP comme sujet de prdication.

Comment les tudiants arriveront-ils la fac ?

Lanalyse syntaxique de linversion dite complexe, dans les phrases interrogatives directes doit rendre compte
de :
a)

de lexistence de la construction aussi bien dans les questions OUI/NON que dans les questions QU- :

Comment les tudiants arriveront-ils la fac ?


Les tudiants arriveront-ils la fac pied ?
b)

de labsence de pause-virgule (distinction entre inversion complexe et emphase (=sujet comme


Topique ex situ)) :

Comment les tudiants arriveront-ils la fac ?


Les tudiants arriveront-ils la fac pied ?

56

vs
Les tudiants, comment arriveront-ils la fac ?
Les tudiants, arriveront-ils la fac pied ?
c)

de linexistence de la construction dans les interrogatives enchsses (distinction entre inversion


complexe et emphase (=sujet comme Topique ex situ)) :

*La question se pose de savoir si les tudiants arriveront-ils la fac pied.


La question se pose de savoir si les tudiants, ils arriveront la fac pied.
d)

de linexistence de postposition du sujet repris par le clitique dans le cas de linversion complexe
(option licite dans le cas de lemphase sur le sujet comme Topique ex situ : topicalisation rgressive) :

*Comment arriveront-ils la fac les tudiants ?


*Arriveront-ils la fac pied les tudiants ?
vs
Comment arriveront-ils la fac, les tudiants ?
Arriveront-ils la fac pied, les tudiants ?
e)

de ce que linversion dite complexe (mais pas lemphase) met en jeu le seul sujet ( lexclusion
dautres arguments slectionns par le verbe) :

Moi, jai lu ce livre.


[emphase sur le sujet]
Ce livre, je lai lu.
[emphase sur lobjet direct]
Genve, jy suis alle en mars dernier.
[emphase sur largument locatif]
Retombes de (a) : sujet non clitique une position de priphrie gauche plus basse que le Focus
( supposer que le syntagme QU-) occupe, sauf spcification contraire, la position de Focus des questions
partielles directes.
Retombes de (b) et de (e) : les analyses sujet non clitique la position casuelle sous TP, et clitique
pelant la trace de celui-ci sous le VP/vP. Lanalyse informelle de la grammaire traditionnelle, en
termes de reprise du sujet qui reste sa place (cest--dire, en termes gnrativistes, sa place
sous TP, la position casuelle, sans dplacement en priphrie gauche), par un pronom personnel postverbal, accord avec lui, telle quvoque par exemple dans la GM (p. 393), participe de la mme logique.
Outre le fait quelles nexpliquent pas trs bien comment il se fait que la trace dun syntagme nominal
souvent trs lourd soit un pronom personnel clitique plutt que dtre phonologiquement identique au
syntagme dplac 179, ces analyses ne rendent pas compte de lagrammaticalit de : *Les tudiants
partiront donc/ alors/ enfin ils pour Londres ? (ni dailleurs de : *Les tudiants sont donc/
alors/ enfin ils partis ?), si ladverbe dit de Flexion occupe, comme on le suppose le plus
souvent dans la littrature, une position entre T et le syntagme verbal, tant de ce fait un tmoin
privilgi de la monte du verbe T. Sauf postuler une enclise du pronom atone qui pelle la trace
du sujet, sur le verbe porteur des marques de Temps, de personne et de nombre, enclise postrieure
et la monte du sujet Spec,T (position casuelle) et la monte du verbe T (ventuellement
comme opration de Forme Phonolgique).
Retombes de (b) absence de pause-virgule : analyse monte du sujet non clitique en priphrie
gauche, plutt qu quasi-chane gnre par fusion du sujet non clitique directement la position non
casuelle de priphrie gauche, contre chane casuelle non triviale concernant, sous TP, le seul clitique
(clitique argumental), comme il en irait des constructions emphatiques dtachement.
Sous une telle analyse, le clitique serait un pronom expltif impur, fusionn la position Spec,T
(position casuelle et daccord) et le sujet non clitique, le sujet argumental, introduit en syntaxe une
position sous le VP/ vP (selon le type de verbe).
Clitique expltif impur/ T, clitique expltif impur/ sujet argumental, Sujet argumental /T
179
Cela se laisse expliquer la limite, si de fait le syntagme dplac est littralement entendu comme emport depuis sa
place dorigine, o sa trace serait reconstruite de toutes pices par la suite (thorie des traces comme copies (ex post facto)),
et non comme copi la position cible du dplacement (thorie du dplacement comme copie interne), en stipulant (par
exemple) une reconstruction minimale de la seule tte porteuse du faisceau de traits daccord directement impliqus dans la
procdure syntaxique aboutissant au dplacement.
Noter que mme sous lhypothse de linsertion tardive uniforme des matrices phonologiques, en PF (association sens-son
uniformment ralise, et pour les traits intrinsques et pour les traits valeurs optionnelles, de lautre ct de Spell Out
(lopration dpel), lissue des traitements de morphologie flexionnelle), il faudra expliquer pourquoi une trace de DP
structure interne non triviale (les tudiants) serait pele comme un DP trivial (DP=D) de mme nombre et personne (ils).

57

3.3. Lemphase.
La GGT standard analyse en termes demphase les constructions topique dtach (non-intgr), appeles
phrases disloques, et les constructions Focus ex-situ. La focalisation in-situ nest pas analyse comme un
cas demphase.
En franais, le focus ex-situ est typiquement instanci dans des phrases clives.
Lanalyse syntaxique de ces constructions concerne de manire cruciale la priphrie gauche de la phrase.
Phrases disloques : interprtation de Topique (Topique dtach li par un clitique dans le noyau).
Pause-virgule entre le syntagme priphrique et le reste de la phrase (dtachement).
Topicalisation progressive (sans marques casuelles sur le syntagme dtach gauche) : v. ex. plus
haut sous 3.1.2.
Topicailsation rgressive ( marques casuelles sur le syntagme dtach droite) : v. ex. plus haut
sous 3.1.2.
Phrases clives : interprtation fonctionnelle du syntagme (qui apparat comme) spar du noyau (position
dite ex situ) = foyer dinformation nouvelle (Focus didentification ou : de contraste). Pas de pause-virgule
aprs le syntagme (qui apparat comme) spar du noyau (pas de dtachement, donc).
(1) Cest/ ce sont 180 SNi 3sg/3pl qui verbe 1813sg/3pl : mise en vedette du sujet de troisime personne (cest
mon frre qui me la dit/ ce sont nos parents qui me lont dit) 182
(2) Cest/ ce sont 183 SNi 3sg/3pl que SNj 1841sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl verbe 1851sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl : mise en vedette de
lobjet (direct) de troisime personne (cest mon frre que jai rencontr ; ce sont nos parents que vous
avez rencontrs [accord du participe pass avec le COD antpos])
(3) Cest 186 SNi 1sg/2sg/1pl/ 2pl qui verbe 1871sg/2sg /1pl/ 2pl : mise en vedette du sujet de premire ou de deuxime
personne (tonique (moi/ toi/ nous/ vous) : cest moi qui vous le dirai/ cest nous qui vous le dirons
( !*ce sont nous qui vous le dirons))
(4) Cest 188 SNi 1sg/2sg/1pl/ 2pl que SNj 1891sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl verbe 1901sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl : mise en vedette du COD
de premire ou de deuxime personne (tonique (moi/ toi/ nous/ vous) : cest moi que vous aviez vu/
cest nous que vous aviez vus [accord du participe pass avec le COD antpos])
(5) Cest 191 SP/ SAdv 192 que SNj 1931sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl verbe 1941sg/2sg /3sg/ 1pl/ 2pl/ 3pl : mise en vedette du
complment indirect/ prpositionnel (quelle que soit la personne : Cest moi/ toi/ lui/ elle/
nous/ vous/ eux/ elles que vous pensiez, cest l-bas que vous allez, cest demain que vous
partez, cest en forgeant que lon devient forgeron, cest parce quil pleut que je ne sortirai pas le chien,
cest de ton frre que Marie est amoureuse)
Syntagmes exclus au clivage :
1.

2.

ladjectif attribut du sujet (*Cest belle que Marie tait), bien que se laissant focaliser par des
moyens prosodiques et/ou morphosyntaxiques (oprateurs de focalisation, structures
paralllisme syntaxique : Marie tait seulement jolie, mais sa sur tait non seulement
belle, mais encore trs intelligente),
des adverbes et adverbiaux entirement rbarbatifs la focalisation : *Cest puisque vous
naimez pas la pluie que vous ne sortirez pas le chien par un temps pareil. (Comparer :
*Vous ne sortirez pas le chien non seulement puisque vous naimez pas la pluie, mais
encore puisque votre petit copain vient darriver) ; *Cest toujours (+encore) quil travaille.

180

Accord en nombre avec le syntagme focalis SNi.


Accord en nombre et en personne avec le syntagme focalis.
Une proposition infinitive sujet se laisse aussi extraire (focaliser) ; accord 3sg comme laccoutume avec un argument clausal : Cest
travailler qui est agrable (GM : 431).
183
Accord en nombre avec le syntagme focalis.
184
Sujet.
185
Accord en nombre et personne avec son sujet SNj.
186
Ne varie pas en nombre avec le syntagme focalis.
187
Accord en nombre et en personne avec le syntagme focalis.
188
Ne varie pas en nombre avec le syntagme focalis.
189
Sujet.
190
Accord en nombre et personne avec son sujet SNj.
191
Invari.
192
Syntagme prpositionnel (prposition + syntagme nominal)/ syntagme adverbial.
193
Sujet.
194
Accord en nombre et personne avec son sujet SNj.
181
182

58

Phrase clive interrogative : Est-ce ton frre qui te la dit ?/ Sont-ce vos parents qui vous lont
dit ? [style soutenu] Est-ce que ce sont vos parents qui vous lont dit ? [franais standard]
Phrase clive ngative : Ce nest pas mon frre qui me la dit. Ce ne sont pas nos parents qui
nous lont dit.
Phrase pseudo-clive: structure qui combine lextraction et le dtachement en tte de phrase.
1. La partie dtache = relative priphrastique (= information prsuppose)
2.

Cest/ ce sont + syntagme extrait = construction quative (didentification 195) :


C/Ce = pronom anaphorique (renvoie du dj dit, en loccurrence, la relative
priphrastique en position dtache)
est/ sont = copule
le syntagme extrait (syntagme nominal rfrentiel (+article), proposition subordonne
finie ou proposition infinitive) = attribut du sujet (=foyer dinformation nouvelle)

Celui qui me la dit, cest mon frre.


Ceux qui me lont dit, ce sont nos parents.
Celui que jai rencontr, cest mon frre.
Ceux que jai rencontrs, ce sont nos parents.
Celui qui vous le dira [ *dirai 196], cest moi.
Ceux qui vous le diront [ *dirons], cest nous.
Construction non trivialement distincte de la clive correspondante pour ce qui est de laccord.
Celui que vous avez vu, cest moi.
Ceux que vous aviez vus, cest nous.
Celui qui vous pensez, cest moi/ lui/ Paul.
Celle qui vous pensez, cest moi / elle/ Marie.
Ceux qui vous pensez, cest nous/ vous-mmes.
Ceux qui vous pensez, ce sont eux/ vos amis.
Celles qui vous pensez, cest nous/ vous-mmes.
Celles qui vous pensez, ce sont elles/ vos surs.
Construction non trivialement distincte de la clive correspondante pour ce qui est du site de
la prposition marqueur du cas oblique :
pseudo-clive : marque de cas oblique sur le pronom relatif, proximit du verbe qui
assigne le Cas (et le rle thmatique : Celui qui vous pensez) ;
clive (standard, franais contemporain) : marque de Cas oblique sur le syntagme
nominal extrait, proximit de la copule. En effet, en franais contemporain standard
le tour ???Cest moi qui vous pensez est rput agrammatical (vs OKCest moi
que vous pensez).
Analyse syntaxique des phrases clives :

(a) proposition relative antcdent dmonstratif en partie non pel (sans matrice phontique), intgre
une construction quative o le syntagme focalis occupe la position dattribut du sujet: (1), (2)
phrases qui exhibent lalternance cest/ ce sont.

Ce N qui/que. est/sont + SNrf o N est un nom abstrait, sans matrice phontique (non prononc),
qui ne consiste quen un faisceau extrmement rduit de traits smantiques, ventuellement un seul,
appartenant linventaire des traits smantiques trs gnraux susceptibles de grammaticalisation
(HUMAIN/ NON ANIME,). Ce y aurait le statut de dterminant dmonstratif du nominal non pel
smantique vague ( adjectif vs pronom).
En termes plus humains, des phrases telles (1) plus haut se laisseraient gloser par : cette
personne qui me la dit est mon frre ( celui qui me la dit est mon frre ), ces
personnes qui me lont dit sont mes parents ( ceux qui me lont dit sont mes parents ).

195

Syntagme nominal rfrentiel (nom propre, nom commun article dfini, dterminant possessif ou dmonstratif, ou, plus
rarement, article indfini) +copule + syntagme nominal rfrentiel (nom commun article dfini/ indfini, dterminant possessif
ou dmonstratif ; nom propre), la prdication dgalit (quative, dite encore : didentification) posant justement leur identit
rfrentielle :
Marie Dubois est ma sur.
La jeune femme qui te regardait de travers tait Marie Dubois.
Mon dpart fut le facteur dcisif de son chec.
Ce projet est votre meilleur argument. Cest votre meilleur argument.
196
Inacceptable en franais standard.

59

Ce dont cette analyse est suppose rendre compte : laccord de la copule avec lattribut du sujet plutt
quavec ce en position de sujet de la phrase quative (en apparence une forme de singulier, sous cette
analyse, ce est entendu comme tte D pele dun syntagme nominal nombre variant au cas par cas,
mais invisible en surface du fait de labsence de corps phontique sur le nom (N) complment de ce).
Ce dont cette analyse ne rend pas compte : la relation entre structure profonde et structure de
surface, en particulier lordre des mots observ (proposition relative incidente au sujet (interprtation)
mais place aprs lattribut du sujet (ordre des mots observ)).

(b) construction quative intgrant, la position dattribut du sujet, une proposition compltive dont un

constituant aura subi une extraction la position de Focus (position de Focus de la compltive
enchsse sous la copule): (3) (5) phrases qui nexhibent pas lalternance cest/ ce sont.
CeDP estV [CP 197[FocusP XP [Focus Focus [ +finiP [+fini que [TP () tXP ()]]]]]]
Ce y fonctionne comme pronom cataphorique substitut clausal (annonce un constituant propositionnel
(CP)), comme il en va de ceci dans ceci est vrai : vous nous aviez vus.
Une phrase du type de cest nous que vous aviez vus se gloserait par : ce que je veux dire
est que vous nous aviez vus nous (et non quelquun dautre) .
Une phrase du type de cest l-bas que vous allez sous (5) se gloserait par ce que je veux
dire est que vous voulez aller l-bas (et non ailleurs) .
Lanalyse extraction du SN (syntagme dterminant DP) sujet, dans les phrases du type de (3) doit en
outre rendre compte de la forme qui du complmenteur interne de la compltive enchsse sous la
copule : cest l le rsultat de laccord en Cas Nominatif entre syntagme nominal sujet et conjonction
de subordination (complment(is)eur interne, la faveur dun dplacement intermdiaire la position
de Spec, +fini (Complmenteur interne = +fini). Ce dplacement intermdiaire, que nous avons
dj rencontr dans les questions QU- et dans les relatives, est (pour des raisons dont lexplicitation
margerait les vises de ce cours) un pralable ncessaire lextraction du sujet depuis sa position
casuelle (Spec, T), dans la rgion rfrentielle du noyau (rfrence temporelle), vers une position
fonctionnelle en priphrie gauche (rgion o sont ultimement dfinies les modalits dnonciation
et/ou de message) - telle la position de focalisation (Spec, Focus).
Laccord en personne et en nombre du verbe dans le noyau, avec le syntagme post-copule
porteur de laccent focal est, dans les phrases clives du type de (3), un argument de taille
pour lanalyse extraction au sens fort du syntagme focalis, depuis la position de sujet
grammatical (position dans le noyau o sont justement raliss laccord des traits de nombre
et de personne du verbe avec les traits correspondants du sujet, et lassignation du Cas
Nominatif au sujet).
Dans tous les cas ((1) (5)), la compltive attribut dans la construction quative sera son tour
marque pour interprtation focale in situ dans la phrase racine (cest--dire dans la phrase quative),
comme il en va des attributs des phrases copulatives en gnral, et alors, de manire
compositionnelle, son propre Focus deviendra le foyer dinformation nouvelle absolu de la phrase
complexe.
Le propre de cette construction (sous lanalyse prsente) : cest le complmenteur interne de la
compltive enchsse sous la copule qui est pel, et non le complmenteur externe, lencontre des
autres compltives emphatiques attestes en franais standard ( dislocation dun constituant vou
interprtation de Topique). Comparer : Je crois que cette femme, je lai dj rencontre. Lextraction,
une position de priphrie gauche, dun argument ou dun circonstant vou interprtation de Focus
est par contre une option virtuellement non actualise en bon franais, pour les compltives
enchsses, en dehors des constructions clives : *Je crois que ce roman Paul a lu tce roman. *Elle dit
que l-bas tu partiras tl-bas. *Elle dit que demain vous partirez pour Londres tdemain. Seules sont
acceptes les compltives clives : Je crois que cest ce roman que Paul a lu, Elle dit que cest l-bas
que tu partiras, Elle dit que cest demain que vous partirez pour Londres. Ou alors les compltives
membre de phrase focalis in situ (marqueur prosodique seul) : Je crois que Paul a lu ce roman (et
non cette nouvelle).
Il faut noter, en guise de conclusion, que la structure extraction de sous une compltive (vs
relativisation) du syntagme focalis semble en voie de simposer, en franais parl notamment : Cest
nos parents que vous avez rencontrs (analyse (c)), Cest nos parents qui nous lont dit (analyse (d)).

(c) CeDP estV [CP [FocusP XP [Focus Focus [+finiP que [TP () tXP ()]]]]]]
(d) CeDP estV [CP [FocusP XP3sg/pl [Focus Focus [ +finiP tXP [+fini qui [TP tXP V3sg/pl]]]]]]
197
Les pointills signalent de possibles autres positions fonctionnelles (par exemple, des positions de Topique liant des constituants in
situ dans le noyau de la compltive), C (CP) notant informellement la (projection maximale de la) tte qui code pour la valeur (vs Force)
illocutionnaire de la proposition enchsse.

60

Rappel : analyse des propositions relatives.


Typologie des relatives (Riegel & al. 2008 (1994) : chap. XIII)
Relatives adjectives : antcdent qui donne le contenu rfrentiel du pronom relatif ; selon leur
propre apport lidentification rfrentielle de cet antcdent:
dterminatives (ou : restrictives) : Les Alsaciens qui boivent de la bire sont obses.
(seulement ceux des Alsaciens qui boivent de la bire sont obses : une partie ; la
proposition relative restreint lextension du groupe nominal fonctionnant comme
antcdent du pronom relatif, tant ncessaire lidentification rfrentielle de celui-ci) ;
explicatives (ou : appositives) : Les Alsaciens, qui boivent de la bire, sont obses.
(tous les Alsaciens sont obses : la relative ne restreint pas lextension du groupe nominal,
ntant pas ncessaire lidentification rfrentielle de lantcdent).
Relatives substantives : sans antcdent ; le pronom relatif nest pas anaphorique ; cest la
relative elle-mme qui donne un contenu rfrentiel au pronom relatif (op.cit., p. 486) :
substantives proprement dites (qui quivalent un GN ; toujours indfinies : Qui dort
dne ; Voil de quoi il est capable)
priphrastiques (expansions dun dmonstratif ce/ celui, celle, ceux, celles + QU- formant
avec ce dmonstratif lquivalent dun GN ; indfinies (variantes des relatives substantives
proprement dites correspondantes : Celui qui dort dne) ou non indfinies : Celui qui
maime, le voil. Cest celui dont on vous a parl). Sont censes avoir un statut
intermdiaire entre relatives adjectives ( antcdent) et relatives substantives proprement
dites (sans antcdent). Elles nont pas de vritable antcdent , puisque le terme qui
les introduit na quun sens trs gnral (+humain (celui, celle etc.)/ non-anim (ce), la
rfrence du pronom relatif tant de fait entirement spcifie par le contenu de la relative
elle-mme : Celui qui casse les verres les paie est interprt comme les casseurs sont les
payeurs (op.cit., 487, nous soulignons).
Les relatives concernes par lanalyse (1) des clives qui exhibent lalternance cest/ ce sont
participent typiquement des relatives priphrastiques.
Voir supra 1.4.2. pour analyse du CP relatif :
Dans une proposition relative (restrictive), le syntagme relatif (oprateur de relativisation) spcifiera un
complment(is)eur non pel, lui (lhomme [CP dont [C C [TP tu as pous la fille]]]), ou bien sera analys
comme phontiquement nul, le complment(is)eur tant, alors, pel (lhomme [CP LEQUEL [C queC [TP
jaime]]]).
Selon une analyse dj classique par Richard Kayne, qui dans les relatives antcdent du type de lhomme
qui est arriv est en fait le complment(is)eur, accord au Nominatif avec loprateur de relativisation non
pel (sans forme phontique) dans son Spec.

Analyses minimalistes de la proposition relative conjointe (interprtation restrictive ou :


dterminative)
Analyse 1 : consistante avec lanalyse des adjectifs pithtes conjointes dans lapproche
cartographique.
[FP CP-REL [F F [nP n N(=NP)] o :
N note (informellement) un thme nomina 198l (ventuellement, une
racine nominale) dpourvu(e) de toute information formelle (traits
syntaxiques) : association son-sens (sens lexical vs
grammatical ) ; du point de vue de la computation syntaxique,
cest l un simple relais daccs /vers la matrice de traits
smantiques purs et la matrice dinstructions phonologiques
(accs vers mais pas accs lintrieur de, cest--dire sans accs
trait pour trait lintrieur de ces matrices, rserv
respectivement au calcul interprtatif compositionnel en Forme
Logique, et aux tapes post-morphologiques de la computation
priphrique vers la Forme Phontique).
198

Enseignant, tudiant, rviseur, rtracteur seraient alors analyss comme pourvus dune structure interne
non traite en syntaxe.

61

n (minuscule !) note (informellement) le faisceau de traits


syntaxiques minimalement associs ce thme lexical ou cette
racine, ds lentre lexicale, traits qui justement la rendent visible
comme un nominal le long de la computation et linterface
smantique sous lhypothse (trs) minimaliste selon laquelle les
traits CAT (N, V, A, P) ne seraient que dutiles abrviations de
grammairien/ linguiste, sans vrai statut pistmologique et coup
sr (dans le modle des phases du programme minimaliste de la
grammaire gnrative) sans statut thorique.

Le concept de redoublement des catgories substantives n-N, v-V, a-A, tel quintroduit par les
tenants de la morphologie distribue (Marantz 1997 notamment) revenait diviser les items
lexicaux concerns en un composant catgoriel (sorte daffixe nominalisant, verbalisateur ou
adjectivant) et un radical porteur de linformation smantique pure et de linformation
phonologique (envisags comme proprits intrinsques de litem sous lanalyse non divise de
Chomsky 1993, 1995) ; laffixe qui cre (par exemple) un nom partir dun radical
catgoriellement sous-dtermin sera en mme temps/ par l mme porteur des traits syntaxiques
de genre et de nombre normalement associs aux noms.
Dans le modle des phases maintenant (dernire orientation du programme minimaliste de la GG),
le trait de genre est analys comme intrinsque (valoris ds le lexique), le trait de nombre, come
sous-dtermin dans lentre lexicale correspondante : cest un trait approximer par la glose
quel que soit le nombre ( ou bien Pl, ou bien Sg , en franais ou en roumain), not u Nr,
dans les textes gnrativistes rcents (modle des phases, u de unspecified).
Il est vident que sous lanalyse clate la Marantz 1997, dune part, et sous lanalyse clate
suggre par Chomsky 2001, de lautre, le point de clivage nest pas exactement le mme : la
morphologie distribue emphatise la distinction intrinsque/ non intrinsque (donc : partie invarie
de litem lexical, association son-sens ne requrant pas de processus syntaxiques ou de
morphologie flexionnelle/ partie variable au gr des occurrences, association son-sens
dtermine par des processus syntaxiques et des opration morphologie flexionnelle), alors que
Chomsky 2001 a lair de jouer plutt sur la distinction formel/ non formel, grammatical/ lexical,
et de scinder en quelque sorte information syntaxique et information smantique pure de litem (la
dernire tant associe aussi, lexicalement, aux instructions phonologiques (correspondant au
radical vs affixes) :
Chomsky 1995 : LI(N) = {FF(N), TSP, MP} (litem lexical de catgorie N consiste dans la
runion de trois faisceaux/ matrices de traits : traits formels (FF de langlais : formal
features), traits smantiques purs et matrice phontique (ou plutt : jeu dinstructions
phonologiques).
Chomsky 2001 : N = {{TSP}, {TPhon}} ; n = FF(N).
-

F note une catgorie fonctionnelle dans la veine des analyses


menes, lintrieur de lapproche cartographique, par Guglielmo
Cinque (Cinque 1994 (Pollock 1997 pour commentaire en franais),
Cinque1999), envisage ici explicitement comme intermdiaire de
prdication, donc comme catgorie qui introduit un prdicat
optionnel dans lconomie de la phrase, tels les adjectifs pithtes
(pour le nom) ou les adverbiaux (pour le syntagme verbal ou la
phrase elle-mme).
CP-REL note le syntagme complment(is)eur en quoi consiste une
proposition relative.

Sous cette analyse, la relative conjointe, associe N en-de de la composition de celui-ci


larticle dfini (=trait formel de personne), sinon aux traits formels de genre et de nombre (n),
augmenterait lintension du nom substantif, par lintermdiaire de la catgorie de prdication
optionnelle F. Ordre de base postul : article+relative +nom/ ordre de surface observ :
article+nom+relative.
Alternative2 : CP-REL fusionn la position de Spec,D de larticle dfini ; nP fusionn en tant que
Compl,D. Relative dterminative restreignant lextension du nom en amont, puisquassocie
larticle au-del de la composition {art+nom}. La relative spcifierait la smantique de larticle
(marqueur dextensit ou : dactualisation). Ordre de base postul: relative + article + nom/ ordre
de surface observ : article+nom+relative.
Alternative3 : CP-REL fusionn la position de Compl,N. Composition smantique directe de
lintension du nom et de la relative : analyse qui ne rend pas justice au caractre optionnel de cette

62

prdication ( linstar dune pithte conjointe, la relative nest pas un constituant oblig du groupe
nominal), mais qui rend compte sans autre de lordre observ (art +N+relative).
La catgorie note n pourrait elle-mme clater en trois ttes fonctionnelles distinctes
regroupant respectivement des traits de genre, de nombre et de personne, la dernire
correspondant au trait de dfinitude (rfrence spcifique, unicit) normalement attribu
larticle dfini : si, dans le modle dAbney 1987, ctait plutt larticle (notamment dfini)
qui tait le prototype de la catgorie D, dans cette modlisation, ce sont parat-il les
pronoms personnels qui fourniraient lessence de la catgorie, savoir la smantique des
personnes grammaticales.
Larticle indfini (un(e) /des) serait alors une ralisation de la catgorie de nombre (trait de
nombre intrinsque, trait de genre non valoris en lexique (?)).
Encore faudrait-il expliquer laccord en personne du verbe avec le sujet indfini (un enfant
jouait dans la cour/ des enfants jouaient dans la cour) ?
3.4. Le passif.
3.4.1. Introduction.
3.4. 1.1. Morphologie passive.
En franais, comme en roumain, le passif est une forme analytique du verbe 199, appele par les grammairiens
franais ( partir du XVIIIme sicle) voix 200 et ralise laide de lauxiliaire tre + verbe au participe pass
(accord avec le sujet grammatical) :
La traite est (a t, vient dtre, tait, avait t, fut, a eu t, eut (vite) t, sera, va tre, aura t,
serait, aurait t) avalise par un banquier suisse.
Il faut bien que cette traite soit avalise par un banquier suisse pour que notre banque engage aussi sa
signature.
Il faut bien que cette traite soit avalise par un banquier avant que notre banque nengage aussi sa
signature.
Je doutais que cette traite ft avalise par un banquier suisse.
Je doutais que cette traite et t avalise par mon banquier suisse, sil avait eu vent de la situation
obre de son tireur.
Sois (Soyez) flicit(e, s) !
Soyons bien entendu(e)s l-dessus !
La traite tant (ayant t) avalise,
La traite doit tre (avoir t) dment avalise.
En franais, peuvent tre mis au passif (conjugaison passive vs conjugaison active) des verbes transitifs
directs (+COD : ouvrir qq. ch., lire qq. ch., crire qq. ch., )) et des verbes di-transitifs (+COD, +COInd :
donner qqc. qqn), donc des verbes qui ont un complment dobjet direct.
de rares exceptions prs, les verbes transitifs indirects (parler de qq.ch, parler qqn, penser qqn/
qq. ch., contribuer qq.ch., ) nont pas de conjugaison passive, linstar des intransitifs
(inergatifs : danser, nager, ; inaccusatifs : aller qq. part, partir qq. part, venir de qq. part, ).
Cette corrlation nest cela dit pas parfaite : il existe des verbes sans COD qui peuvent tre mis au passif (les
transitifs indirects (ds)obir , pardonner : Vos ordres ont t obis, Vous serez pardonns), et des verbes
COD qui ne sont jamais mis au passif :
-

Avoir, possder (dans leur acception premire 201) : Marie a un livre./ *Ce livre est eu par Marie.
Verbes modaux + infinitif 202 : Marie peut marcher/ *Marcher est pu par Marie.

199

Tel ntait pas le cas en latin, o le passif tait une forme synthtique : on distinguait entre ama-nt (=ils aiment)/ ama-ntur (=ils sont
aims), ama-ba-nt (=ils aimaient)/ ama-ba-ntur (=ils taient aims). Seules les formes perfectives de passif taient analytiques (parfait
passif = esse (au prsent de lindicatif) + participe parfait passif accord en genre et en nombre avec le sujet (amati sunt (= ils ont t
aims))).
200
Les grammaires anciennes parlaient de : genre ou de signification du verbe pour dsigner lopposition entre action et
passion (Muller, Claude (2005) Diathses et voix en franais , dans : Interaction entre smantique et pragmatique, Actes du XIe
sminaire de Didactique Universitaire (Constanta 2004, Universit Ovidius, ACLIF), Bucarest : Ed. ASE, 73-95).
201
Jai t eue = jai t trompe (fig.)
Il est possd du Dmon
Il est possd par la jalousie (fig. : il est domin par ).
202
Les constructions V+ CODinf. sont assez rgulirement rbarbatives au passif, nanmoins on dit bien: Manger du porc est interdit aux
Musulmans (= Le Coran interdit aux Musulmans de manger du porc), Boire du caf ma t vivement dconseill par mon mdecin (=
Mon mdecin ma vivement dconseill de boire du caf). Notons galement que, dans les constructions actives correspondantes, de+inf.
nest pas un COInd mais un COD du verbe recteur, ainsi que latteste la pronominalisation en le. Comparer : Le Coran interdit aux
Musulmans de manger du porc/ Le Coran linterdit aux Musulmans, et respectivement Je me flatte de bien parler lallemand/ Je men
flatte.

63

Verbes COD interne (pleurer des larmes de joie, dormir le sommeil du juste, vivre sa vie, ) : *Sa
vie est vcue (par Jean), *Le sommeil du juste est dormi
Expressions figes : casser sa pipe (= mourir ), casser la crote (= manger ), faire autorit (=
tre reconnu comme une autorit (dans un certain domaine) ), tenir tte (= rsister ),
Des tours tels donner ordre (aux soldats, dattaquer laube), donner confirmation ( qqn, de
qqch), faire allusion (qq ch), etc., bien quils correspondent des verbes (ordonner,
confirmer, suggrer), et en dpit de labsence darticle, peuvent tre mis au passif :
Ordre formel a t donn aux soldats dattaquer laube.
Confirmation expresse nous en a t donne par courrier du 15 courant.
Allusion a t faite cet pisode malheureux dans lallocution du Prsident.

Verbes faux COD :

Complment de mesure : valoir (une fortune), coter (la peau des fesse), peser
(une tonne), mesurer (trois mtres), faire (= mesurer ) deux mtres de long,
courir (deux kilomtres), marcher (deux kilomtres), : *Une fortune est value
(par ce tableau)

Complment de temps : dormir la nuit, travailler le jour (= pendant )

Courir (le cerf, le sanglier ; les jupons (= courir aprs , chaser en


leurcourant aprs ).

3.4. 1.2. Construction passive vs construction active 203.


Classe
syntaxique
du verbe

Voix

Entit qui agit


(Agent)

Transitif
direct,
ditransitif

active

Sujet

passive

Complment
prpositionnel
(PAR, DE)

Phrase active
COD
Verbe
Temps/Mode
Sujet

Evnement
dnot

Ancrage
temporel
Verbe

Verbe au
participe
pass ( t)

Reformulation

ETRE
auxiliaire de
voix

Entit qui
subit
(Patient)

Rles et
valeurs
smantiques

Complment
dobjet direct
Sujet

Ralisateurs
syntaxiques

Phrase passive
Sujet
Participe pass (t)
TRE (conjugu)
Complment dagent

Votre socit a dpos le meilleur projet. (Pourtant elle na obtenu quun tiers du financement sollicit).
Le meilleur projet a t propos par votre socit. (Pourtant il a t rejet par le Ministre).
Tous les tudiants aimaient ce professeur.
Ce professeur tait aim de tous les tudiants.
Phrase active
COD
Verbe
Temps/Mode
Sujet ON (+humain, -dfini)

Reformulation

Ces livres ont t vendus en trois semaines.


On a vendu ces livres en trois semaines.

Phrase passive sans agent


Sujet
Participe pass (t)
TRE (conjugu)
________
Pas de complment dagent

3.4. 1.2.1. Limites de la corrlation construction active/ construction passive.


Il existe des phrases actives sans correspondant passif exhaustif (complment dagent exclu) : les phrases
actives sujet pronom personnel clitique. Comparer : Jai vendu cette bagnole un ami. Cette bagnole a t
vendue un ami (*par moi).
Il existe des noncs qui ne sont attests quau passif :
Nul nest cens 204 ignorer la loi.
A limpossible nul nest tenu. (Wilmet 2003 : 581, apud Muller 2005 : 76).

203

Voix au sens de Muller 2005.


Contre-exemple apparent, puisque cens est analys comme vrai adjectif, en franais contemporain, par les lexicographes (Nouv. P.
Rob. 2007).

204

64

3.4.1.2.2. Expression du complment dagent.


Le complment dagent est largement optionnel, dans les phrases passives, sans que le sens verbal (passif
daction ou du procs ne sen trouve affect) :
Tous ces exemplaires ont-ils vraiment t couls par un seul reprsentant ?
Tous ces exemplaires ont-ils vraiment t couls en un mois ?
Complment dagent obligatoire (exceptions) :
(1) verbes daccompagnement (tre prcd de, tre suivi de) :
La runion fut prcde dune allocution du prsident/ *La runion fut prcde.
Le chasseur est suivi de ses chiens./ *Le chasseur est suivi.
(2) verbes exprimant la cause (tre caus par, tre dtermin par, tre entran par) :
Cette hausse des prix a t cause par une fiscalit oppressive/ *Cette hausse des prix a t cause.
Ces licenciements ont t entrans par la perte de plusieurs contrats importants, pour cause de livraisons
dfectueuses/ *Ces licenciements ont t entrans.
En fin de compte, tous ces licenciements auront t dtermins par larrt ministriel qui nous oblige
taler les amortissement sur 25 ans : nos quipements battent de laile et nos technologies sont
dpasses./ *En fin de compte, tous ces licenciements auront t dtermins.
Choix de la prposition.
DE + SN

Par + SN
(1) verbes daction (et y assimils) :
Il fut appel par le prof.
Ce projet a t mis
dpartement.

en

place

par

votre

Elle a t touche par une balle (sens propre :


verbe daction).

(1) verbes de sentiment et de connaissance : tre


aim de, tre ador de, tre ha de, tre mpris de,
tre respect de, tre estim de, tre apprci de, ;
tre compris de
Il est aim de tous.
Il nest pas compris de tous.
Elle est touche de votre sympathie (emploi figur :
verbe de sentiment)

MAIS :
Je suis impressionne par la beaut de ces sites.
Le public tait trop mu par la scne pour
applaudir.
Le diamant a malheureusement t tonn (=
fl) par le jeune apprenti. (sens tymologique :
verbe daction).
Les touristes ont t tonns par la beaut de ces
sites historiques (sens driv, verbe psy assimil
un verbe daction : le passage la figure nest
pas toujours accompagn dun changement de la
prposition : DE).
Ce mcanisme ingnieux a t conu (+ imagin)
par un simple contrematre (verbe psy assimil
un verbe daction : noter le rapprochement
smantique du verbe crer (tre cr par)).
Ces dtails sont souvent ignors par nos
dirigeants (verbe de connaissance assimil un
verbe daction).
(2) Verbes daction agent concret (rfrence
dfinie)
Le voleur fut saisi par la Police.
Cet arbre a t frapp par la foudre.
Jai t accable dinjures [complment de moyen !]

(2) Verbes daction agent abstrait (sans article ou


article indfini) : tre frapp dtonnement, (+ de
stupeur), tre saisi de peur, tre accabl de soucis (+
de remords, de honte), tre submerg de
pressentiments (+ de travail)

65

par la foule dchane.


Le pays a t submerg par lennemi.

Lenfant fut saisi de peur.


Il fut saisi dune peur panique 205.
Le prof a t frapp dtonnement.
Jtais submerg dtranges pressentiments ;
Nos employs taient submergs de travail

(3) Verbes daccompagnement dnotant une action


intentionnelle, non habituelle, envisage dans son
unicit :

(3) Verbes daccompagnement dnotant une situation


habituelle :

La petite fille est suivie par un clbard lair froce.


Le criminel sera accompagn par nos gendarmes
jusqu la frontire.
Elle tait accompagne par un jeune homme hirsute
(4) verbes dtat dont le participe pass garde entire
sa valeur verbale : rsultat dune action antrieure
(passif du rsultat); pourtant, le passif ntant pas
processuel (et donc pas agentif), nous avons l des
complments instrumentaux plutt que de vrais
complments dagent. Exemples :
La villa du P-DG est entoure par des jardins
langlaise.
Les cimes taient couvertes par le manteau tincelant
des neiges ternelles.
Question : PAR QUOI EST [part. pass] [sujet] ?

Le chasseur est suivi de ses chiens.


Elle tait accompagne de son mari.
La runion fut prcde dune allocution du prsident.

(4) verbes dtat dont le participe pass a (ou :


acquiert)
une
valeur
adjective
(constructions
attributives): complment instrumentaux plutt que
vrais complments dagent. Exemples :
Mon jardin est entour de haies.
La terre est couverte de neige.
La rue est borde darbres.
Le rideau est orn de fanfreluches.

Question : COMMENT EST [sujet] ?

Complment dagent en (passif du rsultat): tre rong aux mites/ aux rats, tre mang aux vers,
Ce tapis tait mang aux mites.
Le plancher tait rong aux rats.
3.4.1.2.3. Passif daction (passif du procs) vs passif dtat (passif du rsultat).
Critres smantico-syntaxiques
(tests distributionnels)
1a. + EN heures 207 (dure : limites atteintes)
1b. + PENDANT heures (dure : intervalle ouvert)
2. + PUIS/ ENSUITE/ AUSSITT APRS (succession
dvnements)
3. + LENTEMENT, PEU PEU, PROGRESSIVEMENT,
VITE (manire : droulement dans le temps)

Action (procs) 206

tat (rsultat)

+ (Ces tablissements
ont
t
ferms
en
quelques heures)
__

__

+ (Puis le phare est


teint.
Aussitt aprs les rideaux
sont tirs)
+ (La porte est ferme
lentement.
La salle est peu peu
vide.
Le
texte
est
lu
rapidement.
La
maison
est
progressivement

+ (Ces tablissements
ont t ferms pendant
quelques heures) 208
__

__

205
Mais, dans ce cas-ci galement, on peut dans certains contextes envisager lagent abstrait comme une sorte dagent concret, et
employer par : saisi par une motion irrsistible, par une curiosit violente, par un souvenir tout-puissant (Gobineau, apud Nouv. P. Rob.
2007).
206
Verbes qui nexpriment jamais en franais, au passif, le rsultat (ltat) :
1.
tre caress, tre clin, tre cajol, tre secou (au sens propre)
2.
abattre, assassiner, dcapiter, excuter, fusiller, guillotiner, pendre, tuer
Exemple : Napolon faisait le bilan de la bataille : deux mille soldats franais* taient tus (ETAT ! OK morts : copule+adj)/ OK
avaient t tus : ACTION !)
207
Tout autre intervalle de temps ferait laffaire (en trois jours, en trois minutes etc.).
208
Ce test discrimine les procs (+pendant) des vnements (+en) - au sens de Vikner 1985 ; les verbes dactivit (+pendant), des
verbes daccomplissement ou des verbes dachvement (+en), au sens de Vendler 1967. Aussi ny-a-t-il rien dtonnant ce quun tas
de verbes qui acceptent pendant ne se comportent-ils pas, au passif, comme des verbes dtat, mais comme des verbes dactivit ou de
procs : tre caress, tre clin, tre cajol, tre secou ; tre vu, tre entendu, tre regard, tre cout, tre ressenti
Exemples : Lenfant malade est caress pendant quelques minutes afin quil sendorme. Ltrange phnomne a t vu pendant quelques
minutes.

66

4. +ATTENTIVEMENT, CONTRE-CUR (manire :


caractre intentionnel de laction)
5a. + complment dagent exclusif de lauxiliaire tre
une forme perfective compose ou au pass simple

repeinte).
+ (Le texte est lu
attentivement.
Lordre est obi contrecur.)
__

__

+(Le contrat dachat est


(tait) paraph par Julien
Vasco
Nous
nous
sommes
aperus du premier coup
dil que lacceptation
tait biffe par quelquun
dautre que le tireur.
Vous constaterez que le
bordereau de livraison est
en effet marg par votre
reprsentant.
Cette
ptition
tait
manifestement crite par
un illettr.
Ce
paysage
tait
manifestement peint par
un matre flamand du
XVIIme sicle.
Nous avons constat que
ces demandes taient
effectivement approuves
par lANPE.
Cet arrangement floral
est visiblement ralis
par
un
matre
de
likebana.
Le bordereau est marg
par
notre
reprsentant) 209.

5b. + complment dagent sans restrictions quant la


forme de lauxiliaire (en particulier si aux formes
interdites pour la lecture rsultative)

+(Le
contrat
dachat
a(vait) t paraph par
Julien Vasco

__

Nous
savons
que
lacceptation avait t
biffe
par
quelquun
dautre que le tireur.
Nous avons constat que
le bordereau de livraison
navait
en
effet
t
marg
par
votre
reprsentant.
Ce paysage a t peint
par un matre flamand du
XVIIme sicle.
209

Les verbes susceptibles demplois au passif dtat ou du rsultat vrai complment dagent sont des verbes dnotant des actions
telles que le fait que ltat rsulte de laction de X plutt que de celle de Y ou de Z est pertinent (dans la pratique), et directement visible
partir du (dans le) rsultat de cette action : il sensuit que lentit qui subit laction (ou qui en rsulte) est ncessairement une chose
concrte, un objet sur lequel lagent aura laiss son empreinte :
tre sign par, tre paraph par, tre marg par, tre avalis par, tre biff par, tre approuv par, tre avis
favorablement/ dfavorablement par, tre accept par [en parlant dun effet de commerce ou dun papier administratif], tre
crit par, tre fait par, tre peint par, tre ralis par
Ces verbes expriment, mme en prsence dun complment dagent, le rsultat (ltat) si tre est une forme non perfective simple,
seulement autres paramtres gaux. Comparer : Les actes sont ensuite signs par les deux parties (action). / Les actes sont dment
signs par les deux parties (rsultat).

67

Nous avons constat que


ces demandes avaient t
effectivement approuves
par lANPE.
Cet arrangement floral a
t ralis par un matre
de likebana.

6a. + dj (verbe tre une forme simple non


perfective)
6b. + dj (verbe tre une forme compose
perfective)
7. + VENIR DE + inf.

Le bordereau fut marg


par votre reprsentant).
__
+ (La traite a (+ avait)
dj t avalise).
+ (La traite vient dtre
avalise).

+ (La traite est (tait)


dj avalise)
__
__

3.4. 1.3. Le passif comme modalit de message 210.


Rappelons que, du point de vue interprtatif (=smantique au sens large), les modalits dites de message
concernent toutes la hirarchie informationnelle thme-rhme (ou : topique-commentaire).
cet gard, le passif se caractrise par la topicalisation-thmatisation de largument subissant (ralis, dans
les phrases actives correspondantes, toutes choses gales par ailleurs, en position postverbale, comme objet
grammatical 211, et relevant du propos (rhme)) ainsi que par la d-topicalisation-rhmatisation de largument
agissant (ralis, dans les phrases actives correspondantes, toutes choses gales par ailleurs, en position
initiale, comme sujet grammatical 212 interprt comme thme).
Lanalyse du passif est explicitement aligne, dans Aspects , sur celle de la ngation (type optionnel
ou : forme de phrase, comme le passif), ainsi que sur celle des phrases interrogatives et impratives
(types obligatoires), seulement du point de vue syntaxique (vs smantique) : le passif serait, lui aussi,
introduit par un marqueur ds la structure profonde, qui commandera ainsi une transformation
obligatoire, linstar des marqueurs de force illocutionnaire. Vise thorique : liminer les
transformations facultatives autres que linversion stylistique.
Mais le passif continuera tre envisag comme phnomne syntaxique sans retombes
interprtatives smantico-logiques, linstar de lemphase : lintroduction prcoce du marqueur de
passif ny est donc pas envisage comme rgie par le mme principe que lintroduction dans la base de
la grammaire des marqueurs de force illocutionnaires ou de ngation (pour la mmoire : pas
dinterprtation smantique des structures superficielles, donc pas dimport smantique des
transformations) cf. Chomsky 1971 (1965) : 181 [chap.3], note 3.
Structure profonde dune phrase passive (Dubois & Dubois-Charlier 1970 : chap. XVI) :
Const + P
Const Affir + Passif
Passif Aux tre 213 + SP passif 214
Aux tre tre [+V] + part pass [+aff]
SP passif Prp + SN passif
Affir + Aux tre + Prp + SN passif + P
Affir + tre [+V] + part pass [+aff] + Prp + SN

passif

+P

210

Diathse au sens de Muller 2005.


SN complment direct (=sans prposition) du verbe, Cas Accusatif assign par celui-ci.
212
Sujet : SN Cas Nominatif assign par linflexion [+Temps], et commandant laccord en nombre et en personne du verbe
porteur de traits de temps (Ltudiant3sg ouvre3sg la porte/ Les tudiants3pl ouvrent3pl la porte), et laccord en nombre et en
gendre du participe pass des verbes conjugus aux temps perfectifs composs avec lauxiliaire tre (PaulMsg est entrMsg en
classe/ MarieFsg est entreFsg en classe) ainsi que de ladjectif attribut du sujet (MarieFsg est intelligente Fsg).
213
Cette catgorie Auxiliaire qui procde du Constituant spcifiant la Modalit de la phrase (type de phrase/ forme de phrase)
fdre lensemble des formants de la voix passive en terme de morphologie verbale, ne se rduisant pas au seul auxiliaire
de diathse (voir rgle de rcriture suivante), et ne concide pas avec la catgorie Auxiliaire du noyau P (qui fdre, elle, les
catgories formelles de Temps (au sens large : temps et mode de la grammaire traditionnelle, auxquels sajoutent les affixes
daccord en personne et nombre), dAspect accompli (catgorie Parfait, rcrite comme auxiliaire de temps avoir ou tre +
affixe de participe pass) et de Modalit (modaux pouvoir ou devoir + infinitif ou (selon le cas) aspectuels venir de, aller, tre
en train de + infinitif).
214
Le complment dagent des grammaires notionnelles (dont la grammaire normative traditionnelle).
211

68

Maintenant : dans le texte mme des Aspects (Chomsky 1965 : 104-105), lintroduction du
marqueur de passif en structure profonde nest pas ralise la faveur dune rgle de rcriture
qui place dabord la modalit en marge du noyau.
Lintroduction du morphme de passif est pose comme ralise, dans la base (=structure profonde)
la faveur dune rgle de rcriture dun adverbial de manire, constituant du groupe verbal :
Manire par passif.
Tout en tant optionnel, ce constituant adverbial nest pas compltement tranger la souscatgorisation par le verbe, puisque certains verbes y sont rbarbatifs ceux-l prcisment qui
savrent rbarbatifs la passivation (les verbes dits moyens ).
Comparer :
1a. La voiture pesait deux tonnes/ b. Jean pesa la lettre.
2a. *La voiture pesait deux tonnes lentement/ b. Jean pesa (lentement, attentivement, ) la lettre
(lentement, attentivement, ).
3a. *Deux tonnes sont peses par la voiture/ b. La lettre fut pese par Jean. 215
Cette analyse rend compte du fait que la passivation peut aussi concerner des verbes sans
complment dobjet direct ( lactif), pourvu quils sous-catgorisent un complment de manire le
sujet de surface de la phrase passive ntant pas alors, en structure profonde, un Objet direct du verbe
en franais, ces cas-l sont assez rares : Mes ordres seront obis (comparer : On obira mes
ordres).
Transformations postules dans la version standard du modle GGT (Dubois & Dubois-Charlier 1970 : chap.
XVI) :
3 dplacements droite (= descente dans larbre) :
(1) Aux tre sera dplac de sous Const, sous le noyau, droite de Aux (cette transformation rendant
compte de ce que le verbe tre va porter les marques de temps de la phrase, le verbe conjugu V
tant, lui, mis au participe pass).
(2) SP passif sera dplac aprs lobjet direct du verbe (SN2) en tant que constituant du GV.
( cette tape, le groupe verbal est constitu du verbe, du syntagme nominal
objet direct et du SP passif ).
(3) SN sujet se substitue SN passif, sous le SP passif.
1 dplacement gauche (monte) :
(4) SN objet profond se substituera la position, dsormais vide, du SN sujet profond (pralablement
dplac sous SP passif (3).
Les versions plus rcentes du modle limiteront de manire trs stricte les transformations entendues comme
lgitimes en syntaxe noyau (dplacements de droite gauche et du bas vers le haut, dans le sens de
gnration des structures arborescentes). Lanalyse du passif sera remanie en consquence.
3.4. 2. Pralables thoriques. Cas syntaxiques et rles smantiques.
Les versions ultrieures du modle GG formuleront la distinction de principe entre Cas syntaxique, dune part,
et rle smantique (thmatique), de lautre.
Le Cas syntaxique doit tre interprt (lu) en morphologie flexionnelle, dans la computation priphrique
vers la Forme Phonologique, o il sera traduit un cas [initiale minuscule !] morphologique son ralisateur
superficiel:
flexion nominale (affixe flexionnel, comme en latin ou en roumain, langues flexion nominale riche
(dclinaison) ; il en va de mme en franais pour les pronoms personnels (clitiques), qui ont des
formes de nominatif (je/ tu/ il, elle/ nous/ vous/ ils, elles) distinctes de leurs formes obliques (me/te
(accusatif, datif), le, la/ lui, les/leur (accusatif/ datif), y (locatif), en (ablatif))) ;
ou bien prfixe casuel (prposition) :
4a. Je penserai ce que vous venez de me dire (prposition = simple prfixe casuel)/ b. Jy penserai (flexion))
Le rle thmatique est lexicalement associ, lui, au verbe en tant que prdicat smantique 216 : cest un rle
smantique ayant la particularit saillante de devoir tre ralis en syntaxe par un argument du verbe
215

Exemples de base emprunts Chomsky 1971 : 146 [chap. 2], dveloppement des tests de notre main.
De fait, tout prdicat smantique ayant des arguments obligatoires en syntaxe est cens se voir associer de tels rles ds
lentre lexicale.
Un adjectif comme conforme (Ce clause contractuelle nest pas conforme la lgislation en vigueur) aura ainsi un
argument <Thme> (le syntagme nominal dont il sera prdiqu : cette clause contractuelle), et un argument
<Repre> ( la lgislation en vigueur).

216

69

(syntagme nominal, prpositionnel ou adverbial introduits en syntaxe en tant que complments ou spcifieurs
du verbe).
Du fait quil est assign par une tte lexicale substantive (=doue de traits smantiques purs), le rle
thmatique est encore appel rle- (lisez : tta).
Les rles thmatiques assigns par la tte verbale seraient ainsi spcifis explicitement dans lentre lexicale du
verbe, en sus de ses traits smantiques purs (en marge de la matrice conceptuelle du verbe), sous forme de
liste : grille thmatique (appele aussi -grille).
Linventaire des rles thmatiques varie au gr des linguistes, mais, en gnral, on reprend, dans le cadre
gnrativiste chomskyen, linventaire des Cas smantiques des grammaires casuelles (smantique
gnrative) :
-

<Thme> (argument qui ne peut manquer : tout verbe en a un) : participant non agissant au procs.

Plutt que de distinguer


<Agent> : participant agissant au procs, ncessairement [+anim]
<Force> : causateur non anim,
on parlera de
<Causateur> (neutralisation de la distinction anim/ non anim, relgue aux distinctions/
slections smantiques fines, toffes, non argumentales (rles smantiques sans contrepartie
structurale et morphologique distincte).
-

<Instrument>

Arguments locatifs : <Lieu>, <Source>, <But> (<Cible>)

La question se pose de savoir si oui ou non il y a lieu de distinguer matrice conceptuelle du verbe et grille de
rles thmatiques.
Hale & Keiser 1993 : approche configurationnelle aux rles thmatiques (vs liste de rles).
-

La smantique lexicale du verbe serait par hypothse (ds le lexique) configurationnelle


(iconicit des reprsentations syntaxiques relativement aux reprsentations smantiques
pures).

Lapproche configurationnelle lencodage lexical (vs lassignation) des rles thmatiques, que
dfendent Hale et Keyser 1993, explore les implications et tire les dernires consquences de loption thorique
selon laquelle la grille du prdicat est projete en syntaxe.
partir du constat qu la fois les rles thmatiques possibles, les catgories substantives (N, V, A, P) et les
relations syntaxiques une tte (Spec1 H /Compl1 H) dfinissent des inventaires ferms, Hale et Keyser 1993
formulent lhypothse que les rles thmatiques sont en fait des drivs de relations syntaxiques (lexicales)
le caractre limit de linventaire des rles- sexpliquant par linventaire ferm des catgories substantives et
des relations structurales possibles, et lexpression configurationnelle des rles- tant rgie par les principes
de Projection non ambigu, de Pleine Interprtation et de Prdication.
Les catgories substantives (N, V, A, P) sont associes des types notionnels (ou : contenus notionnels)
lmentaires 217 : CAT : V / vnement (ou peut-tre vnement dynamique) 218 (notation : e), CAT : A /
tat (notation : s (state angl.)), CAT : P / (inter)relation , CAT : N / n (notation du type notionnel
associ la catgorie N quel quil soit, de fait cf. Hale et Keyser 1993 : 69).
Mmes les verbes superficiellement mono-morphmiques sont lexicalement syntagmatiques (phrasal angl.),
en ce sens quils possdent une structure qui est syntaxique, satisfaisant les conditions de Projection non
ambigu et de Pleine Interprtation (cf. Hale et Keyser 1993 : 96).
Cette structure, la structure relationnelle lexicale du verbe (sa LRS), exprime univoquement la -grille de
celui-ci. Lentre lexicale du verbe est en fait sa LRS, et sera introduite dans la drivation s-syntaxique en tant
que catgorie syntagmatique complexe (visibilit de la LRS en syntaxe-s et linterface LF) cf. idem, p. 95.
Du coup, le glissement est fait dune approche de la -thorie en tant que module indpendant ((partiellement)
autonome) de la grammaire, une approche interprtative des rles thmatiques : la notion dassignation de
rle- se substitue celle dexpression des rles et donc dinterprtation argumentale ( linterface de FL) 219.

De mme, largument interne dune tte substantive P (prposition) se voit assigner la fois un Cas syntaxique et un
rle smantique par cette prposition (ce pourquoi les PP peuvent ne pas tre slectionns par le verbe, et
fonctionner comme complments de phrase : Paris jai appris jouer du pipeau).
217
Cette notion est trs proche de la CSR (Canonical Structural Realization) quintroduit, dans une perspective dacquisition du
langage (par lenfant), Grimshaw 1981 : la ralisation structurale canonique dun objet physique est N, celle dune action est V,
etc.
218
Nous avons cit ici Hale et Keyser 1993. En regard du classement smantique des verbes de Vendler (1967), par exemple,
la notion d vnement dynamique est redondante (les vnements (vs situations) tant entendus, dans ce classement,
comme dynamiques par dfinition).
219
Il ny a pas de mcanismes linguistiques spcifiques la structure argumentale. Par exemple, il ny a aucun processus d
assignation de rle thmatique distinct de la prdication; et il ny a pas de rles thmatiques si ce nest en tant que
relations lexicales exprimes par des projections non ambigus et pleinement interprtes de catgories lexicales
lmentaires . (Hale et Keyser, art. cit. pp. 93-94 n. trad.)

70

verbe.

Linterprtation argumentale est linterprtation des relations structurales lexicales du


La LRS dun verbe transitif V qui na quun seul argument interne sera :

[vP v [VP V e]]

o e est une position vide laquelle, en vertu des principes de Pleine Interprtation et de
Prdication, seul un syntagme nominal pourra tre fusionn (puisque V na pas de Spec).
Notons que nous nous loignons ici de la lettre de Hale et Keyser 1993, qui suggrent que cette
position vide soit tiquete dentre de jeu (comme il en allait, dans lapproche TSE en
gnral, des positions de substitution mais cette hypothse a largement t abandonne in
Chomsky 1995: chap.4). En matire de LRS, ltiquetage de la position vide est redondant en
regard des principes de Pleine Interprtation, et reviendrait en fait rcuprer lhypothse des
sous-catgorisations (des relations de slection-c) expression lexicale directe.

La LRS du verbe est interprte en termes des configurations instancies et des contenus
notionnels lmentaires associs aux traits catgoriels (ni les TSPs (traits smantiques purs)
des items, ni les autres traits formels FF(CAT) ne sont directement pertinents) : une configuration
V-VP (v-VP, dans la notation Chomsky 1995 : chap. 4), interprte comme (e1e2) exprime le
rle argumental externe (n>(e1e2)) de CAUSATEUR 220 (Agent ou Force) 221 ; une configuration V
- NP (ou DP), interprte (en) (un vnement cre ou modifie une entit) exprime le rle-
interne <THME>, une configuration [VPNP[VV PP]], interprte n>(er), exprime le rle-
<THME> (= sujet de linterrelation que [CAT : P] exprime, sujet dun prdicat de
changement ), et un rle interrelationnel <BUT>, <SOURCE> ou <LIEU>.
Les verbes inergatifs sont des verbes transitifs cachs qui incorporent leur argument
interne, des dnominaux 222 (donne lexicale cf. Hale et Keyser, art. cit., p.73).
Chomsky 1995 (chap.4) reprend explicitement son compte lide dapproche configurationnelle lexpression/
interprtation des rles thmatiques, mais il nest pas clair sil tend cette hypothse la smantique du verbe
en gnral, ou sil veut plutt dire que :
-

la matrice conceptuelle du verbe consisterait dans un faisceau (liste) de traits, dont certains,
exprimant la slection darguments thmatiques, auraient une contrepartie configurationnelle
oblige, en syntaxe.

Quoi quil en soit, les rles thmatiques et la structure argumentale qui les porte/ exprime constituent le noyau
dur de la structure profonde de la phrase (structure-D) : la proposition minimale (entit smantico-logique) ende de lancrage temporel (=relations de prdication essentielle).
Parmi les Cas syntaxiques, certains ont surtout un effet sur la structure de surface (ordre des mots) : ces Cas
sont appels structuraux. Ils sont assigns dans des configurations syntaxiques drives ( la faveur de
transformations : structure-S (structure de surface)).
Dautres seront directement traduits en Forme Logique un rle thmatique : ces Cas, assigns par une tte
lexicale son rgime (argument slectionn morphologiquement) ds la structure-D (structure profonde), sont
appels inhrents.
Cas inhrents : cas Obliques (assigns par les verbes, les prpositions ou par certains adjectifs).
Cas structuraux : Nominatif (assign par T) et Accusatif (assign par un verbe transitif).
3.4.3. Rvision de lanalyse syntaxique du passif.
Premire question : est-ce le passif qui perd un argument, ou lactif qui en gagne un (pour les verbes transitifs
directs en particulier) ?
Lanalyse traditionnelle drive le passif, comme cas marqu, de lactif, cas de figure neutre, non marqu. Telle
a t aussi lanalyse GGT standard.
Selon cette analyse, le passif perd un argument (largument le plus saillant de lactif) :
absorption de largument externe du verbe transitif, par la morphologie passive (largument
nest pas vraiment ray de la grille thmatique du verbe, mais il perd de sa saillance, ne
pouvant plus tre lexicalis comme sujet, mais pouvant, et, dans certains cas mme devant
tre lexicalis en tant que Complment prpositionnel ; corrlativement, le verbe perd
220

La philosophie du verbe lger est loin dtre la mme, dans la dernire version de la GGT chomskyenne (programme
minimaliste toujours drivation par phases), mais cela marge les vises de ce cours.
221
Dans lhypothse configurationnelle, la distinction smantique Agent /Force ne peut tre faite en tant que distinction
argumentale.
222
Le patron de lexicalisation de tels verbes drivs est appel conflation .

71

laptitude assigner le Cas structural Accusatif son argument interne). Donnes empiriques
en faveur de cette analyse : mme en labsence dun AGENT lexicalis, ce rle reste
accessible ( rfrence certes indfinie, arbitraire : Son portefeuille a t vol implicite un
(quelconque) voleur cf. Hirschbhler & Labelle 1992 (1994) : 209-211). Sous cette analyse,
comme le complment interne du verbe passif ne reoit plus de Cas Structural du verbe
(priv, au passif, de son aptitude assigner lAccusatif), il devra en acqurir un auprs de T,
ce qui en motivera le dplacement la position dassignation casuelle Spec,T (position de
sujet).
A intgrer maintenant les suggestions de la rfrence cite (analyse qui rsout en syntaxe la drivation du
passif partir dune mme tte verbale que celle qui projette la LRS active (causative)), la modlisation de
Hale & Keyser 1993, la position de Spec,v serait vide (ce qui, sous la lecture forte, voudrait dire quil ny aurait
pas de Spec,v, bien que la smantique de causation et donc la configuration v-VP subsisterait ce qui ne laisse
pas davoir lair contradictoire).
Sous la lecture littrale, cela reviendrait postuler une catgorie vide cette position thmatique (et non pas
une simple position de substitution, mais une sorte de PRO rfrence arbitraire).
Le passif dit agentif (passif daction ou passif du procs) tant cens prserver la reprsentation de laction, y
compris la reprsentation dactions en cours, le syntagme verbal devrait tre configurationnellement identique
loccurrence active, limpossibilit dinsrer un argument externe pel prs.
Ce qui est peu clair (pour moi) dans cette analyse, cest comment le verbe pourrait avoir la mme smantique
causative, en dpit des modifications de saillance relative des arguments qui correspondent aux participants
respectivement agissant et subissant du procs. Question corrlative : quel est le patron exact de cette perte
de saillance de lagent ?
Si ranalyse smantique il y a, au niveau de la tte V, il faudrait bien postuler une nouvelle entre lexicale.
Si la ranalyse ne concerne que les structures syntaxiques, comment le principe de projection (des proprits
lexicales du verbe, en syntaxe) sera-t-il satisfait ?
Une solution consistante avec la modlisation de la GG reviendra alors envisager le verbe V comme au
demeurant sous-dtermin (les TSP du verbe coderaient pour le rsultat de laction), et obtenir
compositionnellement, dans certaines phrases, une configuration transitive(-causative), argument externe
introduit auprs dune tte lgre de causation, et dans dautres, une configuration passive simple VP,
ventuellement intgre dans une structure de prdication optionnelle agentive ( FP = CAUSE (DE), qui
introduit le complment dagent (=Causateur) en tant que prdicat optionnel, auprs du VP - dans la veine des
analyses cartographiques de G. Cinque).
Les verbes causatifs (et, par extension, tous les transitifs) se laissent en effet analyser comme un cas de Y fait
en sorte que X devient V- o V note informellement la racine verbale, et V- le participe pass du verbe
substantif.
Dans les termes de Muller 2005 : Pour une phrase active comme Pierre mange le gteau, il y a en quelque
sorte deux propositions enchsses lune dans lautre Pierre fait en sorte que le gteau devient mang , et si
on veut tre complet, on doit y ajouter la simple relation de laction en cours : il y a action de manger
(art. cit., 79-80).
Cest dans ce sens quil faut entendre la smantique de la configuration v-VP selon lapproche configurationnelle
au codage des rles thmatiques (Hale & Keyser 1993).
Cela tant, lhypothse peut tre formule selon laquelle cest plutt lactif qui est construit, de faon
incrmentielle, ventuellement en syntaxe, partir du passif, et dune structure de causation, reprsente par
le verbe lger (dans lesprit de Pylkknen 2008 223 : 6-7, qui reprend cet gard largument de Kratzer 1996 224,
chez qui le verbe lger est explicitement envisag comme catgorie fonctionnelle de voix).
[ce e cu rosu : optional]
3.5. Les phrases impersonnelles.
3.5.1. Mcanisme fonctionnel allgu : d-topicalisation du sujet, caractre focal (rhmatique) de toutes les
expressions argumentales de la phrase.
Consquence logico-smantique (interprtative) : phrase thtique .
Phrase thtique :

Sert : rapporter un vnement (il est arriv plusieurs accidents), prsenter un nouvel
tat de chose (il court de drles de bruits, il rgne un silence de mort), ou introduire un
nouveau rfrent (il en sort du ptrole).

Le rfrent du terme sujet (si le sujet est un argument nominal : il est arriv trois
tudiants) est trait comme tant une partie intgrante de la situation dsigne par la
proposition dans son entier ; le sujet nominal ne rfre pas de faon indpendante, ntant
pas li au contexte (vs Lamphi tait pour le moment vide. Les tudiants [sujet rfrentiel,

223

Pylkknen, Liina (2008) Introducing Arguments, Cambidge Masachussetts, London, England : MIT Press.
Kratzer, Angelika (1996) Severing the external argument from its verb. In Johan Rooryck and Laurie Zaring, eds.,
Phrase structure and the lexicon, 109-137. Dordrecht: Kluwer.

224

72

dfini contextuellement : les tudiants de la fac lamphi prcdemment introduit dans le


discours] allaient arriver dun moment lautre) ni anaphorique (vs Il est arriv trois
tudiants ; ils [sujet rfrentiel, anaphorique] avaient lair dsempars).

Est dpourvue de prsuppositions : la proposition dans son ensemble, y compris


largument sujet, se retrouve dans le champ de lassertion.
partir des mmes relations prototypiques [dfinies pour lapprhension des phrases
catgoriques verbe actif transitif : agent-action verbale, patient-action verbale, existence de
laction verbale mme], limpersonnel met au premier plan laction verbale sans autre
modification, vitant ainsi la topicalisation du sujet (Muller 2005 : 80).

Toutes les phrases impersonnelles sont thtiques, toutes les phrases thtiques ne sont
pas impersonnelles : Des enfants taient en train de jouer dans la cour, Un enfant tait en
train de jouer dans la cour, De leau dgoulinait sur le plancher sont galement des
phrases existentielles (thtiques) caractrises ; noter :

le sujet indfini (Les enfants taient en train de jouer dans


la cour est une phrase catgorique, sujet thmatique qui
rfre de faon indpendante),
les prdicats qui ne se prtent pas linterprtation
[+proprit] (comparer : *Des enfants taient intelligents
dans la cour, *Un enfant tait intelligent dans la cour),
les formes verbales qui barrent linterprtation gnrique
sur le sujet (imparfait et forme progressive vs prsent) :
Un enfant joue dans la cour est toujours susceptible de
lecture gnrique du type de un enfant, a doit jouer
dans la cour, pas lintrieur , et la lecture gnrique est
un cas dinterprtation catgorique ( sujet thmatique) vs
thtique,
la prsence dun localisateur spatial (en gras dans les
exemples donns), en labsence duquel les phrases sont
peu acceptables, sauf lecture partitive (elle-mme
conditionne un contexte contrastif, dhabitude) : Des (=
certains des ) enfants taient en train de jouer,
dautres dormaient.

Cf. Dobrovie-Sorin, C. (1997) Classes de prdicats,


distribution des indfinis et la distinction thtiquecatgorique , Le Gr des Langues, Paris : LHarmattan.
Types de verbes :

a.
b.
c.
d.

Construction :

transitifs directs : Il mange chaque jour une centaine de personnes dans cette
cantine/ Voix active : Une centaine de personnes mange chaque jour dans cette
cantine. Construction assez rare en franais.
di-transitifs : #__
transitifs indirects : # __.
intransitifs :
1. inergatifs : #__
2. inaccusatifs : Il est arriv trois nouveaux tudiants.

IL impersonnel fonction sujet (Cas Nominatif, accord du verbe), dpourvu de valeur rfrentielle (pronom
expltif) + verbe (accord avec il) + SN argumental ( associ de lexpltif : sujet logique)
Sujet (argumental rle thmatique non agentif, si verbe intransitif, agentif, si verbe transitif) en position
postverbale, rhmatique.
Position de complment direct, mais comportement morpho-syntaxique modifi, puisque, de toute vidence
non accusatif (pronominalisation par le/ la/ les exclue):
Il test arriv un malheur.
*Il te lest arriv. (Muller 2005 : 80)
Ce syntagme nominal ne commandant pas laccord des formes verbales non plus, lhypothse du Cas Nominatif
(assign par T) est elle aussi problmatique.
Associ de lexpltif nominal : le plus souvent indfini ou ngatif (Il y a des livres sur la table, Il nest
entr aucun tudiant dans lamphi jusqu prsent).
Associ de lexpltif clausal : proposition subordonne (finie : il vaut mieux que tu finisses tes devoirs
avant lexamen, ou non finie : il vaudrait mieux finir ses devoirs avant lexamen)

73

Il y a, il faut, il manque, il reste + Nom propre ou SN dfini, partitif (et non seulement : indfini ou ngatif):
Il y avait l Marie Dupont/ le pavillon de chasse/ du verglas/ (quelques arbres).
Pour rsoudre cette difficult, il faudrait Paul Dupont/ le professeur/ du temps/ (un
dictionnaire).
Il manque lessentiel/ la cl 225.
Corrlations systmatiques forme personnelle/ forme impersonnelle : conditionnes certains facteurs
smantico-pragmatiques.
Il court de drles de bruits (en ville).
De drles de bruits courent en ville. ( ? De drles de bruits courent).
Il est arriv un malheur/ trois tudiants.
Un malheur est arriv chez les Dupont. Trois nouveaux tudiants sont arrivs chez les Dupont.
3.5.2. Passif impersonnel
I. Construction : Il impersonnel (expltif impur : Nominatif, accord 3sg masc.) + tre (auxiliaire de voix :
traits TAM qui donnent lancrage temporel de la proposition) + verbe au participe pass (accord avec il en
genre et en nombre : m. sg.) : vnement dnot) + GN (gnralement indfini 226) valeur rfrentielle
(associ de lexpltif : interprtation argumentale : entit qui subit (patient), statut fonctionnel
informationnel/ discursif : rhmatique). Complment dagent rarissime : Il a t dcid des choses trs
importantes par le Conseil de lUniversit (Muller 2005 : 80).
II. Types de verbes :
b. transitifs directs : Il a t promulgu deux nouvelles lois/ Comparer : On a promulgu
deux nouvelles lois.
c. di-transitifs : Il nous a t dit beaucoup de choses dsagrables./ Comparer : On nous a
dit beaucoup de choses dsagrables
d. transitifs indirects : Il sera obi mes ordres/ Comparer : On obira mes ordres. Il sera
remdi cet incident dans les meilleurs dlais [circonstanciel ncessaire la compltude
pragmatique de lnonc 227]/ Comparer : On remdiera cet incident dans les meilleurs
dlais. Construction sans associ de lexpltif.
e.

intransitifs :
1.
2.

inergatifs : Il a t dans toute la nuit./ On a dans toute la nuit.


Construction sans associ de lexpltif.
inaccusatifs 228 : ___.

Du fait de la construction impersonnelle du passif (qui oblige un statut rhmatique du participant non agissant
au procs), et de la smantique particulirement vague (toutes choses gales par ailleurs) du pronom indfini
clitique on ([+humain]), phrase active sujet on et phrase impersonnelle passive correspondante sont en
relation pratique de paraphrase, ce qui ne peut pas tre maintenu des phrases actives et passives par ailleurs
(qui, par hypothse, ne thmatisent ni ne rhmatisent les mmes arguments) : en effet, le participant non
agissant au procs a statut rhmatique aussi bien dans la phrase active en on que dans la phrase au passif
impersonnel, et il semble difficile de voir dans le sujet on (dpourvu de variante tonique susceptible de
topicalisation) un vrai thme de discours ( moins dune lecture pragmatiquement marque on = nous ,
tu , je , selon le contexte nonciatif).

225
226

Hanse 1991 : 501.

Quand le sujet rel du passif impersonnel est un objet unique en son genre (dans une situation donne), un GN dfini reste possible :
Personne ne sort ! Il a t vol le portefeuille de Marie (Marie nayant eu quun seul portefeuille sur elle). Rassurez-vous : il ne leur a pas
t dvoil le montant exact de votre dette (il ny a quun seul montant qui soit exact).
227
Exemple et commentaire emprunt Muller 2005 peut-tre pour des raisons pragmatiques de localisation de laction verbale
(Muller 2005 : 80).
228
. Verbes qui expriment le changement de place (Je suis alle la fac, Elle est venue de Londres, etc ) ou dtat (Je suis devenue prof
de franais).

74

4. La ngation : modalit dnonciation ou constituant du noyau ?


4.1. Ngation interne/ ngation externe : une distinction logique (il est vrai que non-p/ il nest pas vrai que
p)
4.2. Ngation descriptive/ ngation polmique/ ngation mtalinguistique 229 : distinction
interprtative (interprtation smantique voire pragmatique dnoncs en langue naturelle) qui ne recoupe
quimparfaitement la distinction logique ngation interne/ ngation externe.
Ngation descriptive : assertion dun contenu ngatif (constituant du noyau 230)
-Quest-ce qui se passe ?
-Je ne trouve pas mes lunettes.
-O est votre frre ?
-Il nest pas l pour le moment.
Ngation polmique : acte de rejet dune affirmation (dngation) relle ou virtuelle (modalit dnonciation).
Marie naime que les hommes grands, parat-il. Pourtant son mari nest pas grand, mais petit.
[rectification]
Marie a eu son bac avec mention, mais elle nest pas trs intelligente. [concession : rejet de
laffirmation implique (virtuelle) Marie est trs intelligente ]
-Marie est trs intelligente.
-Mais elle na pas eu son bac. [rfutation : rejet impliqu de laffirmation de linterlocuteur Marie est
trs intelligente : elle na pas eu son bac, donc elle nest pas trs intelligente ]
-Je voudrais parler Monsieur le Directeur.
-Mais il nest pas l pour le moment. [rfutation : rejet de laffirmation virtuelle Monsieur le Directeur
est l , pense attribue linterlocuteur]
Ngation mtalinguistique : pas de valeur vriconditionnelle ; porte sur le dire plutt que sur le dit (modalit
dnonciation).
Pierre nest pas grand, mais immense [emploi majorant] 231
Anne na pas trois enfants, elle en a quatre [rejet dune implicature scalaire 232 : avoir quatre enfants
implique la vrit de avoir trois enfants ; autrement dit, dans un monde o Anne a quatre enfants, il
nest pas faux de dire quelle a trois enfants, cest seulement incomplet]
Jean ne regrette pas davoir chou, puisquil a russi. [rejet dune prsupposition 233 lexicale :
regretter que p prsuppose que p est vrai]
-Est-ce que tu as rsolu cette problme ?
-Je nai pas rsolu cette problme, mais ce problme.
4.3. Ngation de phrase/ ngation de constituant : distinction en terme dincidence syntaxique de
loprateur de ngation (tranche selon le statut morphologique, la fonction syntaxique et la position des
marqueurs ngatifs, dans la phrase).
Ngation de phrase = ngation incidente au verbe flchi,
Ngation de constituant = ngation incidente un argument du verbe ou un circonstant.
Marqueur de la ngation en franais = discret (discontinu) : ne (clitique ngatif) + membre tonique (appel
forclusif puisquil clt la squence ngative). Le membre tonique peut tre un adverbe, un pronom ou un
dterminant (=adjectif indfini) ngatif. Dans le cas de la ngation de phrase, le forclusif est ncessairement un
adverbe :
() ne pas
() ne point
() ne nullement/ aucunement ( pas du tout , daucune manire )
229

Cf. Moeschler, Jean (1992) Lexique et pragmatique. Les donnes du problme , CLF 14, 7-36, 3.4.
Lanalyse de la ngation comme type logique (GM) va dans le mme sens (+contribution la valeur de vrit de
lnonc).
231
Moeschler 1992 : 29.
230

232
233

Moeschler 1992 : 29.


Moeschler 1992 : 29.

75

Les marqueurs de la ngation de phrase sont par hypothse non cumulatifs : ils ne se combinent pas
entre eux, ni avec des marqueurs de ngation de constituant. Aussi les forclusifs adverbiaux gure et
plus se verront-ils classer comme marqueurs de ngation de constituant :
() ne gure ( pas beaucoup )
() ne plus (indique la cessation dune action, dun tat ; selon lantonymie ne plus/ encore,
les grammaires normatives y voient parfois une ngation de constituant : ngation de encore plutt
que de toute la phrase dcrivant ltat de chose dont ne plus indique la cessation, et encore, la
continuation ; argument distributionnel : possibilit de cumul ne plus gure, ne plus jamais/ nulle part/
personne
Dans le cas de la ngation de constituant, le forclusif peut tre un pronom indfini ngatif, un dterminant
ngatif (adjectif indfini ngatif), un adverbe :
(1) Pronom ngatif :
ne personne/ Personne ne Je nai vu personne./ Personne nest arriv temps.
ne rien/ Rien ne : Je nai rien achet./ Rien ne lembte autant que le manque de politesse des voisins.
Nul ne : limpossible nul nest tenu.
Pas un ne/ (ny avoir) pas un + de + adj./ pas un + relative au subjonctif: Pas un ne recula/ De ses
partisans, il ny en a pas un de sr (Hanse 1991 : 710)/ Pas un de vos amis qui se soit souvenu de votre
anniversaire cette anne-ci.
(2) Dterminant ngatif :
Aucun(e)/ Nul(le)/ pas un(e) +N ne Aucun tudiant nest entr aprs la prof./ Nulle force au monde
n'et empch les spectateurs de se tourner vers la victime, pour voir si le coup avait port (BERNANOS,
Imposture, 1927, p.408, apud TLFi)../ Pas de rose sans pines.
() ne aucun(e)/ nul(le/ pas un(e) +N Je nai rencontr aucun tudiant dans le couloir./ Elles nont nul
argument pertinent vous opposer.
(3) Adverbe ngatif :
Ne jamais
Ne nulle part
Les marqueurs de la ngation de constituant se laissent combiner dans une mme phrase : Personne na
jamais rien compris ce cours de linguistique. Ils ne peuvent toutefois pas tre co-occurrents une ngation
de phrase, en particulier pas : *Personne na pas compris.
4.4. Ngation totale/ ngation partielle : distinction en terme de porte smantique de loprateur de
ngation (ultimement tranche par laccent focal).
a)

Forclusif porteur de laccent focal : ngation totale.

Je ne partirai PAS pour Londres demain.


Je nai PAS mang dcrevisses au petit djeuner. (analys comme quantification distance du type de : Jai
beaucoup mang dcrevisses au dner/vs/ Jai mang beaucoup dcrevisses au dner, en dpit de labsence
dune structure canonique pas de en tant que dterminant quantifiant sur le nom, except peut-tre pour le
sujet ou pour lassoci du sujet expltif: (Il ny a) PAS de roses sans pines).
b)

Autre mot porteur de laccent focal (y compris dans une clive ngative, ou dans une coordination
rectificative ngation non incidente au verbe flchi (structures paralllisme syntaxique) non pas
mais/ et non ) : ngation partielle (=ngation portant sur le seul constituant focalis).

Quand il parlait avec ses enfants, ce n'tait pas de la vie QUOTIDIENNE, mais de ses TRAVAUX, de ses
RECHERCHES (MAUROIS, Disrali, 1927, p.16, apud TLFi) 234.
En cas denchanement rectificatif, il sagira de coordination de phrases et non de coordination de
membres de phrase, dans tous les cas. En tant que membres de la phrase complexe construite par
coordination, les phrases coordonnes seront analyser comme propositions conjointes.
Lellipse de membres communs, contre interprtation parallle est toujours une option ((1), (2), (3)), et,
avec les constructions corrlatif, elle est mme obligatoire (2) :
(1) Il ne parlait pas de la vie QUOTIDIENNE avec ses enfants, mais [il parlait avec ses enfants] de
ses TRAVAUX.
(2) Il parlait avec ses enfants non pas de la vie QUOTIDIENNE, mais de ses TRAVAUX [il parlait avec
ses enfants].

234

Squence souligne = syntagme foyer dinformation nouvelle, mot en majuscules = item porteur de laccent focal.

76

Cas particulier : Clive ngative (emphase + ngation = ngation partielle) :


(3) Ce nest pas de la vie QUOTIDIENNE quil parlait avec ses enfants, mais [cest] de ses TRAVAUX
[quil parlait avec ses enfants].
Interprtation parallle (paralllisme syntaxique) : les lments effacs dans le second conjoint
ont les mmes fonctions syntaxiques, le mme type dinterprtation smantique, le mme statut
dinformation prsuppose et (dans le cas particulier des coordinations rectificatives ngation
partielle ou bien dans le premier ( __ne __ pas XP, mais YP ; _______non pas XP, mais YP), ou bien
dans le second conjoint (______YP, et non (pas) XP) sont sujets la mme interprtation
rfrentielle que les lments formellement identiques dans le premier conjoint.
Dans dautres cas de figure cependant, linterprtation rfrentielle est elle aussi simplement
parallle (mme types de rfrents, et non rfrent identique). Il en va ainsi des
constructions lecture concessive vs rectificative :
Il ne parlait PAS avec ses enfants [ : lui], mais sa sur PARLAIT avec ses enfants [ :
elle].
Il ne parlait PAS avec ses enfants [ : lui], mais sa sur, SI [=elle parlait avec ses enfants
[ : elle]]

Dans les exemples du type de (1) et de (3), les lments sujets interprtation parallle, dans le second
conjoint, sont articuls avec intonation plate, ou bien (alternativement) ils sont effacs (ellipse de membres
communs). Variante prfre : ellipse.
Dans les exemples du type de (2), lellipse est la seule option, ce qui est en soi problmatique (lellipse tant
cense tre une opration facultative).
Les phrases du type de (2), analyses comme constructions o mais, dans le second conjoint, est le corrlatif
de la ngation (partielle) dans le premier conjoint exhibent une autre caractristique saillante : le second
conjoint (la rectification) ne saurait manquer, tandis que cest l une option, en (1) ou en (3). Comparer :
*Il parlait avec ses enfants non pas de la vie QUOTIDIENNE.
OK
Il ne parlait pas de la vie QUOTIDIENNE avec ses enfants.
OK
Ce nest pas de la vie QUOTIDIENNE quil parlait avec ses enfants.
Ces phrases sont en relation de paraphrase avec les coordinations en ______et non (pas) + syntagme foyer
dinformation nouvelle :
Il parlait avec ses enfants de ses TRAVAUX, et non de la vie QUOTIDIENNE.
Dans les phrases ngation partielle (ngation qui porte sur le seul syntagme focalis), larticle partitif nest
pas remplac par de, mme lorsque le constituant foyer dinformation nouvelle nest pas le syntagme nominal
partitif lui-mme. Comparer :
Je nai PAS mang dcrevisses au petit djeuner. [ngation totale]
Je nai pas mang des CREVISSES au petit djeuner. (Jai mang des CROISSANTS). [ngation partielle]
Je nai pas mang des crevisses au PETIT DJEUNER. (Jen ai mang au DNER). [ngation partielle]
4.5. Ngation et quantification
Tous les tudiants ne sont pas l est (contre mmes donnes prosodiques : accent focal sur PAS) inter-ambigu
entre une lecture Aucun tudiant nest l (contenu ngatif (ngation descriptive) prdiqu de tous les
tudiants sans exception (le quantifieur universel nest alors pas dans le champ de la ngation) roum. Toti
studentii nu sunt aici), et une lecture certains tudiants le sont, dautres pas (tous dans le champ de la
ngation roum. Nu toti studentii sunt aici).
4.6. Ngation et porte : quelques cas particuliers.

TOUJOURS PAS = continuit (=pas encore) / PAS TOUJOURS = discontinuit (= pas tous les coups,
parfois, quelquefois).

PAS MME = limite suprieure non atteinte (roum. Nici chiar)/ MME PAS = liite infrieure non atteinte
(roum. Nici macar)
() pas mme () la vaine science humaine ne peut faire que vous lvitiez (Camus, apud
Cristea 1971 : 74)
Mme pas sa mre ne le reconnatrait (Barthes, apud Cristea 1971 : 74)

77

GURE PLUS (DE)= quantitatif (plus de y est non pas mot ngatif (forclusif), mais quantifieur indfini
comparatif de supriorit de beaucoup/ PLUS GURE = temporel (plus y est mot ngatif).
Ce village ne compte gure plus de 700 habitants. (Acest sat nu (cred c) are mai mult de
700 de locuitori)
Je ne vais plus gure Mamaia. (Nu prea mai merg la Mamaia).

4.7. Remarques concernant lemploi de NE dit expltif.


Ce ne est dit expltif de mme que le pronom impersonnel il est dit expltif : parce quil ne remplit pas son
rle smantique habituel. Il, dans il vaut mieux, il est ncessaire de, etc. ne rfre pas une personne ou
une chose de particulire (par exemple, : Jean, mon cousin germain ; ou : au volume de posie russe
contemporaine que Jean vient de moffrir). De mme, ne dans Jean est plus fort quil ne le pense, ne marque
pas la ngation du contenu pos 235. La preuve, on peut sen passer : Jean est plus fort quil le pense.
Quand est-il de fait employ ?
A. + SUBJONCTIF
Aprs un verbe ou une expression de <crainte> ou y assimile (cf. <vitement>) : Je crains quil ne
vienne. De peur quil ne vienne Prends garde quil ne sen aperoive ! Le renard vitera ainsi que
nous ne lattrapions.
o
= Je souhaite quil ne vienne pas , Il est souhaitable pour toi quil ne sen aperoive
pas , Le renard souhaite que nous ne lattrapions pas .
Aprs avant que (antriorit de la situation dcrite dans la principale = postriorit de la situation
dcrite dans la subordonne temporelle) : Je cueillerai quelques fleurs avant quil ne fasse nuit.
o
= Je cueillerai quelques fleurs tant quil ne fait pas encore nuit .
Aprs moins que (qui marque une condition la falsification de lantcdent) : Laccord prendra fin
dans un an, moins quil ne soit renouvel un mois avant son expiration.
o
= Laccord prendra fin dans un an, sil nest pas renouvel ( Laccord ne prendra
pas fin , sil est renouvel) .

Aprs sans que, en prsence ou bien dun indfini susceptible (par ailleurs) demploi ngatif
(personne, rien 236, ), ou bien dune principale ngative. Emplois par influence du cotexte,
dconseills par lAcadmie : Il la battue plate couture sans que personne ne pt sy opposer 237.
Onde () o lon ne jette rien sans que tout ne remue (Hugo, apud NOUV.P.ROB.).

Noter que le premier cas de figure (, mot potentiellement ngatif ne/ , ne mot potentiellement
ngatif) a une smantique du type de (p &non-q), et le second cas de figure ( principale ngative), une
smantique du type de [non (p & non-q)] (p&q) 238.
Mais dans aucun de ces cas, la ngation de q (non-q) nest le fait de ne : elle est le fait de la prposition sans.
Ne lui-mme continue dy jouer vide.
B. + INDICATIF
Cest plus difficile que je ne pensais. Ce nest pas plus difficile que je ne lenvisageais. Il est autre que
je ne croyais (Hanse 1991 : 622).
o
= Je ne pensais pas que ce soit aussi difficile , Je nenvisageais pas que ce ft aussi
difficile , Je ne croyais pas quil ft ainsi .
Ils se compltent plutt quils ne sopposent (Hanse 1991 : 623). Je subissais son amiti plutt que je
ne la choisissais (Sagan, apud Hanse 1991 : 746). Glos ce que je faisais, ctait subir son amiti,
non la choisir , afin de mettre en vedette lide que le second terme de la comparaison, lindicatif,
soit ni en quelque sorte (Hanse 1991 : 746).
o
= Ils ne sopposent pas, ils se compltent , je ne choisissais pas son amiti, je la
subissais .
Une possible explication unitaire des emplois de ne sans valeur ngative propre, en perspective
onomasiologique (gnration de la phrase nonce) :

235
Soit la ngation de Jean pense tre fort ce qui revient dire que linterprtation de cet nonc serait du type de:
Jean est plus fort que Jean pense tre fort .
236
Mais qui fonctionnent comme indfinis non ngatifs dans des contextes affirmatifs : Il la battue sans que personne
nintervienne. Avez-vous rencontr personne ? (= cinevaR, pe cinevaR). A-t-il rien dit ? (=a spus ceva R ?)
237
Comparer : il la battue plate couture sans que quelquun (n) intervienne. O il ny a pas dinfluence directe dun indfini
vocation ngative, et, partant, ne expltif peut manquer. Exemples attests toutefois assez peu fiables (voir sources):
(1) Sur un site islamique (sans que quelquun sans ne expltif): alors, le savant dit : O, toi le mcrant, sil nest pas
valable selon la raison quune barque existe sans que quelquun la fabrique et sans menuisier, .
(2) Et, dans un article en ligne de Rima Elkouri, sur un crivain noir vivant Montral, et qui, aprs avoir crit un roman
intitul Comment faire lamour avec un Noir, a crit un roman intitul Je suis un crivain japonais, paru chez Grasset
cf. www.cyberpresse.ca sans que quelquun avec ne expltif : Il ne se passe pas une journe (..) sans que
quelquun ne vienne lui dire : Ah ! cest vous qui avez crit Comment faire lamour .
238
Glos : ncessaire que p et q , jamais p sans q .

78

Contamination/ attraction par une proposition ngative infre (proposition correspondant un


(nonc) synonyme in absentia) : occurrences de ne sans valeur ngative propre communment
analyses comme dues une pense parallle ngative 239 (Hanse 1991 : 622)) 240,
Contamination/ attraction par une proposition ngative donne (antcdent de lnonc contenant
ne): ne pas (rien/ personne, etc. : ngation) sans que ne.

239

Sans que ne
Loccurrence de ne dpourvu de valeur ngative propre en prsence de sans (que) smantique ngative et dun indfini
susceptible, par ailleurs, de fonctionnement ngatif est une illustration de ce mme cas de figure : la proposition ngative
correspondante (quivalente) est infre, quand elle est active la faveur de la confusion des indfinis prsents dans le
cotexte de sans que, avec de vrais forclusifs (=mots ngatifs accompagnant ne, et susceptibles de porter laccent focal : pas,
rien, personne etc.). Ainsi, sous lnonc Il la battue sans que personne ne sy oppost (=sans que quelquun sy oppost)
pourra-t-on lire il la battue et personne ne sy est oppos.
240

79

5. Les modalits dnonc.


5.1. Modalits. Notions fondamentales. Le carr des oppositions (Aristote 241).
5.1.1. Classement des nonciations (ici, nonciation (= jugement prdicatif (= proposition), lieu du vrai et du
faux dans la mesure o Aristote ntudie que les nonciations dclaratives, dcrivant un tat de fait, par
opposition aux noncs interrogatifs ou impratifs, qui ne sont ni vrais ni faux) :

nonciation catgorique (=nonciation simplement une : Lhomme est un animal)

nonciation hypothtique (=nonciation par conjonction : Si lhomme est, il est animal)


5.1.2. Structure des propositions catgoriques : (Quantificateur) Sujet-(Copule)-Prdicat 242 (Quelque
homme est juste (=Certains hommes sont justes)).

Le sujet (S) est ce quoi l'on attribue le prdicat.


Le prdicat (P) est ce qui est attribu au sujet.
Le quantificateur exprime la quantit de la proposition : s'agit-il de tous les hommes (proposition
universelle) ou seulement de certains d'entre eux (proposition particulire)?
La copule exprime la qualit de la proposition (affirmative ou ngative : est ou n'est pas).

En ce qui concerne la quantit, Aristote adopte le point de vue extensionnel qui sera en grande partie celui de
la logique contemporaine : chaque terme possde une extension (l'ensemble des objets qu'il dsigne) et une
comprhension (les caractres qu'on nonce quant on dfinit le terme).
Le terme homme a pour extension la classe des objets auquel il peut tre appliqu : Socrate, Platon,
Pierre, Jacques... et comme comprhension la classe de ses caractres : tre vivant, bipde,
omnivore...
Les propositions universelles considrent toute l'extension du sujet, les particulires seulement une partie.
5.1.3. Types de propositions catgoriques selon la qualit et la quantit :

(proposition catgorique) universelle affirmative (A) : Tout S est P (cf. De linterprtation) ou


P appartient tout S (cf. Premiers analytiques). Tout homme est juste (=Tous les hommes
sont justes).
(proposition catgorique) universelle ngative (E) : Aucun S nest P (cf. De linterprtation) ou
P nappartient aucun S (cf. Premiers analytiques). Aucun homme n'est juste.
(proposition catgorique) particulire affirmative (I) : Quelque S est P (cf. De linterprtation),
ou P appartient quelque S (cf. Premiers analytiques) Quelque homme est juste (=Certains
hommes sont justes).
(proposition catgorique) particulire ngative (O) : Quelque S nest pas P (cf. De
linterprtation) ou P nappartient pas quelque S (cf. Premiers analytiques). Quelque homme
n'est pas juste (=Certains hommes ne sont pas justes) 243.

Les quatre premires voyelles de l'alphabet latin A, E, I, O qui dsignent traditionnellement ces propositions
sont respectivement la premire et seconde voyelle du mot latin affirmo ( j'affirme ), et la premire et
seconde voyelle du mot latin nego ( je nie ) 244.
5.1.4. Thorie de l'infrence immdiate : analyse des relations ncessaires entre propositions.

raisonner = infrer.
infrer = tirer d'une ou de plusieurs propositions donnes et connues comme vraies ou comme fausses
(qu'on appelle prmisses) une ou plusieurs propositions nouvelles (qu'on appelle conclusions) juges
vraies ou fausses en fonction de la relation logique que l'on a tablie entre elles et les prmisses.

241

Philosophe grec du IVe sicle avant Jsus Christ (av. J.-C.). La mis en forme traditionnelle des crits dAristote relatifs
la logique, dits sous le nom dOrganon (gr. outil, instrument ) vers 60 av. J.-C. par Andronicus de Rhodes ayant t le
fait de Boce (cinq sicles plus tard, soit au Ve sicle aprs Jsus Christ (apr. J.- C.)), le carr logique (ou : carr des
oppositions) est encore connu, dans la littrature, sous le nom de carr de Boce . Sont particulirement concerns, pour
ce qui est de la dfinition des diffrentes espces de propositions (appeles, dans le texte : nonciations), et des oppositions
entre celles-ci, deux traits : De linterprtation, dune part, et les Premiers analytiques, de lautre.
242
Tous les noncs du langage ordinaire ne prsentent pas spontanment la structure< Sujet-(Copule-)Prdicat>. Il faudrait
donc les transformer pour les rendre conformes cette structure logique. Parmi les procds utiliss, le plus simple est celui
de la transformation du verbe en copule+participe prsent : Quelque Grec vit (Certains Grecs vivent) devient ainsi Quelque
Grec est vivant (Certains Grecs sont vivants).
243
omnis homo iustus est [universelle affirmative] ;
nullus homo iustus est (= omnis homo iustus non est) [universelle ngative] ;
aliquis homo iustus est (= non omnis homo iustus non est) [particulire affirmative] ;
aliquis homo iustus non est (= non omnis homo iustus est) [particulire ngative].
244

Autre notation frquente, dans la littrature, qui intgre la lettre identificatrice du type de proposition
catgorique entre les symboles S et P (sujet, prdicat) : SaP, SiP, SeP, SoP.

80

infrences immdiates = infrences qui partent d'une seule proposition, juge vraie ou fausse;
infrences dites mdiates (cas particulier : syllogisme) = infrences qui partent de deux propositions
au moins (deux exactement dans le cas du syllogisme).

Structure de linfrence immdiate = raisonnement compos de deux propositions : une prmisse et


une conclusion, unies par un lien de consquence logique.

infrences immdiates valides = infrences qui, partant d'une prmisse suppose vraie, conduisent
ncessairement une conclusion vraie.

validit formelle d'un raisonnement vs vrit factuelle des propositions qui le constituent : un
raisonnement peut tre valide mme si certaines propositions qui le composent sont fausses. <Tout
homme est un automate donc Quelque homme est un automate> est, pour Aristote, une infrence
valide.

Une srie d'infrences immdiates sont rassembles sous la forme traditionnelle du carr logique. Ce
carr donne un nom aux relations infrentielles qui existent entre des propositions A, E, I et O.

Carr logique (ou : carr de Boce)

5.1.5. Thorie de l'infrence immdiate : dfinition des relations infrentielles.

La relation de contradiction oppose deux propositions de quantit et de qualit diffrentes. Les


contradictoires ne peuvent tre ni vraies en mme temps, ni fausses en mme temps (prenant toujours
des valeurs de vrit diffrentes).

Tout homme est juste


[universelle affirmative]

contradictoires

Quelque homme n'est pas


juste [particulire ngative]

Aucun homme n'est juste


[universelle ngative]

contradictoires

Quelque homme est juste


[particulire affirmative]

La relation de contrarit oppose deux propositions de mme quantit (universelle) mais de qualit
diffrente. Les propositions contraires ne peuvent tre vraies en mme temps, mais peuvent tre fausses
en mme temps.

Tout homme est juste


[universelle affirmative]

Aucun homme nest juste


[universelle ngative]

La relation de subcontrarit oppose galement deux propositions de mme quantit (particulire) mais de
qualit diffrente. Les propositions subcontraires ne peuvent tre fausses en mme temps, mais peuvent
tre vraies en mme temps.

Quelque homme est juste


[particulire affirmative

contraires

subcontraires

Quelque homme n'est pas


juste [particulire ngative]

La relation de subalternation oppose (de prime abord) deux propositions de mme qualit (ou bien
affirmative, ou bien ngative) mais de quantit diffrente. La vrit de la subalterne infrieure
(particulire) suit de la vrit de la suprieure (universelle).

Tout homme est juste


[universelle affirmative]

subalternes
( suprieure affirmative)

Quelque homme est juste


[particulire affirmative]

81

Aucun homme nest juste


[universelle ngative]

subalternes
( suprieure ngative)

Quelque homme n'est pas


juste [particulire ngative]

Pour rendre justice aux distinctions logiquement pertinentes (QUANTITE : quantification universelle/
quantification existentielle ; QUALITE : ngation/ affirmation), plutt quaux limitations des langues naturelles
employes comme mtalangue (do deux formes de quantificateur universel, selon lenvironnement affirmatif
(tout) ou ngatif (aucun)), nous proposons de reformuler explicitement le quantificateur universel des
propositions ngatives aucun en termes du quantificateur universel tout, soit : aucun 245 N nest A 246 = tout N
est non-A.
Voir quipollence nullus homo iustus est = omnis homo iustus non est [universelle ngative] au niveau
des exemples latins dorigine.
Nous avons opt pour la formule (mtalinguistique) tout N est non-A plutt que pour tout N nest pas A,
puisque la dernire reste sujette ambigut, en franais langue naturelle du moins ( certains N sont A /
Aucun N nest A ), avec prpondrance de linterprtation particularisante.
Au sens de la thorie de lassertion quesquisse Aristote notamment dans De linterprtation, si la quantification
(universel/ particulier) porte sur le sujet, la qualification (affirmatif/ ngatif) porte sur la prdication, donc sur
le lien entre sujet et prdicat, plutt que sur le prdicat tout seul tant donne par la copule (est/ nest pas),
en de du prdicat proprement parler. Cest l une nuance prcieuse pour ltude de la syntaxe des langues
naturelles.
Opter pour la formule (mtalinguistique) tout N est non-A ignore cette nuance, allant dans le sens dune
articulation des formules mtalinguistiques en termes de ngation interne (NEG+prdicat) ou/et externe (NEG
+ proposition (=Quant+sujet+copule+(NEG+)prdicat)), si lon procde la gnralisation dune seule
expression de quantification, dans le carr logique, comme il est suggr dans les exemples latins
dorigine (reformulation de nullus et daliquis en terme du quantificateur universel omnis voir plus haut
troisime note de ce chapitre). Pour la mmoire:

omnis homo iustus est [universelle affirmative] ;


nullus homo iustus est (= omnis homo iustus non est) [universelle ngative] ;
aliquis homo iustus est (= non omnis homo iustus non est) [particulire affirmative] ;
aliquis homo iustus non est (= non omnis homo iustus est) [particulire ngative].

TOUT HOMME EST JUSTE


[universelle affirmative]

TOUT HOMME EST NON JUSTE


[universelle ngative]

c o n t r a i r e s

s
u
b
a
l
t
e
r
n
e
s
QUELQUE HOMME EST JUSTE
[particulire affirmative]
=NON (TOUT HOMME EST NON JUSTE)

245
246

contradictoires

s u b c o n t r a i r e

s
u
b
a
l
t
e
r
n
e
s

QUELQUE HOMME EST NON JUSTE


[particulire ngative]
=NON (TOUT HOMME EST JUSTE)

N de : nom.
A de : adjectif.

82

Notons, avant de clore cette section, quil est crucial, la dfinition de la subalternation comme <opposition
en quantit>, que lopposition opre selon deux paramtres distincts <Quantit (quantificateur universel /
quantificateur existentiel )/ Qualit (affirmation/ ngation)>, plutt quen termes doprateurs daffirmation/de
ngation ayant dans leur champ non seulement un seul et mme prdicat, mais encore un seul quantificateur
(le quantificateur universel ). Ce nest que dans cette perspective que le lien naturel entre universelle
affirmative et particulire affirmative (=subalternes suprieure affirmative) et respectivement entre
universelle ngative et particulire ngative (=subalternes suprieure ngative) reste directement saisissable,
au plan mtalinguistique :

Tout homme est juste

subalternes suprieures

TOUT HOMME EST JUSTE


[universelle affirmative]

TOUT HOMME EST NON JUSTE


[universelle ngative]

subalternes suprieure
affirmative

Quelque homme est juste

Aucun homme nest juste

subalternes suprieure
ngative

subalternes infrieures

QUELQUE HOMME EST JUSTE


[particulire affirmative]

Quelque homme n'est pas juste


QUELQUE HOMME EST NON JUSTE
[particulire ngative]

Le cot thorique de la gnralisation du quantificateur universel, dans les formules


mtalinguistiques du carr (cot thorique des quipollences proposes) concerne alors
principalement la dfinition des relations de subalternation : les subalternes infrieures seront
dsormais apprhender directement en tant que contradictoires de la contraire de leur
suprieure respective. La parent de qualit entre subalterne infrieure et subalterne
suprieure ne se laissera apprhender quau terme dun calcul assez complexe (faisant
intervenir lincidence de la ngation, sur la quantification).
Comparer cet effet le premier tableau de subalternation au tableau suivant, qui intgre les
formulations synonymes des particulires affirmative et ngative, en termes de quantification
universelle et de ngation :

Tout homme est juste


[universelle affirmative]

Tout homme est non-juste


[universelle ngative]

subalternes
( suprieure affirmative)

Non (tout homme est non-juste)


[contradictoire de (la contraire de
la suprieure affirmative) 247 =
particulire affirmative]

subalternes
( suprieure ngative)

Non (tout homme est juste)


[contradictoire de (la contraire de
la suprieure ngative) 248 =
particulire ngative]

5.1.6. Types de propositions catgoriques selon linhrence du prdicat (P) au sujet (S) :

Propositions catgoriques de inesse ( tre dans ) appeles aussi assertoriques: inhrence de P S non
modifie 249.
Propositions catgoriques modales : inhrence de P S modifie 250.

La reformulation des propositions catgoriques assertoriques du carr de Boce en termes du seul


quantificateur universel et de la ngation, pour obscurcir le lien naturel entre universelle affirmative et
particulire affirmative et respectivement entre universelle ngative et particulire ngative [subalternation =
opposition seulement en quantit], comporte lavantage dtre formellement analogue lanalyse des

247
248
249
250

Contraire de la suprieure affirmative = universelle ngative.


Contraire de la suprieure ngative = universelle affirmative.
Dictum seul : tout ce qui prcde illustre ce cas de figure.
Modus + dictum.

83

propositions catgoriques modales, o la ngation, si ngation il y a, porte tantt sur le modus, tantt sur le
dictum, tantt sur les deux.
Analogie (purement formelle 251) propose ici : quantificateur modus, prdicat dictum. Cette analogie serait
susceptible de fonder lextrapolation du carr logique des propositions assertoriques aux infrences sur les
propositions catgoriques modales.

5.1.7. Carrs modaux.


Carr althique :

Ncessaire

Impossible

(=NECESSAIRE QUE P)
(=IMPOSSIBLE QUE NON-P)

(=NON POSSIBLE QUE P)


(=NECESSAIRE QUE NON-P)

Possible

Contingent

(=POSSIBLE QUE P)
(=NON NECESSAIRE QUE NON-P)

(= NON NECESSAIRE QUE P)


(= POSSIBLE QUE NON-P)

Carr pistmique :

Certain

Exclu

(=CERTAIN QUE P)
(=EXCLU QUE NON-P)

(=EXCLU QUE P)
(=CERTAIN QUE NON-P)

Probable

Incertain

(=PROBABLE QUE P)
(=NON CERTAIN QUE NON-P)
(=NON EXCLU QUE P)

(= NON CERTAIN QUE P)


(=NON EXCLU QUE NON-P)

Carr dontique :

Obligatoire

Interdit

251

Puisque, du point de vue smantique, et compte tenu de la syntaxe des langues naturelles, ce serait plus juste dassocier
modus et prdicat et dictum et sujet (voir noncs modalit de dicto).

84

(=OBLIGATOIRE QUE P)
(=NON PERMIS QUE NON-P)

(=NON PERMIS QUE P)


(=OBLIGATOIRE QUE NON-P)

Permis

Facultatif

(=PERMIS QUE P)
(=NON OBLIGATOIRE QUE NON-P)

(= NON OBLIGATOIRE QUE P)


(= PERMIS QUE NON-P)

85

Pour ce qui est de lanalogie <quantificateur modus, prdicat dictum>, comparer les dfinitions modales
en termes des primitifs ncessaire, certain et respectivement obligatoire, lexpression alternative des AIEO de
inesse en termes du seul quantificateur universel:

TOUT HOMME EST JUSTE


[universelle affirmative]

TOUT HOMME EST NON-JUSTE


[universelle ngative]

NON TOUT HOMME EST NON-JUSTE


[particulire affirmative]

NON TOUT HOMME EST JUSTE


[particulire ngative]

Soit :
NECESSAIRE QUE P
CERTAIN QUE P
OBLIGATOIRE QUE P
TOUT HOMME EST JUSTE

NON NECESSAIRE QUE NON-P


NON CERTAIN QUE NON-P
NON OBLIGATOIRE QUE NON-P
NON TOUT HOMME EST NONJUSTE

NECESSAIRE QUE NON-P


CERTAIN QUE NON-P
OBLIGATOIRE QUE NON-P
TOUT HOMME EST NONJUSTE

NON NECESSAIRE QUE P


NON CERTAIN QUE P
NON OBLIGATOIRE QUE P
NON TOUT HOMME EST
JUSTE

86

5.2. Ralisation des modalits dnonc en franais


5.2.1. La zone des modalits althiques et ses ralisateurs en franais

Carr althique :
Ncessaire
(=ncessaire que p)
(=non possible que non p)

Impossible
(=non possible que p)
(=ncessaire que non p)
c o n t r a i r e s

s
u
b
a
l
t
e
r
n
e
s

Possible
(=possible que p)
(=non ncessaire que non p)

contradictoires

s u b c o n t r a i r e

s
u
b
a
l
t
e
r
n
e
s

Contingent
(=non ncessaire que p)
(=possible que non p)

Contingent vs possible : une distinction maintenir ?


[Contingent : non ncessaire que P= non impossible que non-P. Il arrive que Socrate coure (Socrate tant de
fait courant au moment de lassertion de la phrase modalise: course en acte). Possible en acte .
Possible : non ncessaire que non-P= non impossible que P. Il est possible que Socrate coure (Socrate tant
assis au moment de lassertion de la phrase modalise). Possible en puissance .]
Malgr la distribution (possiblement) complmentaire des exemples, entre les deux valeurs de non-ncessaire
discrimines dans le texte dAristote ( De linterprtation ) respectivement le contingent et le possible,
et lusage de mots distincts (possible (< lat. possibilis, pour le grec dynaton)/ contingent (< lat. contingens,
correspondant propos au Moyen Age, par les Scolastiques, pour le grec endekomenon), dans le texte, et, dans
la table des conversions/ implications 252, en formules verbales : il se peut que/ il arrive que), nous

252

Dans sa forme initiale, o les colonnes correspondent la relation contradictoire (ngation du modalisateur), la table des
conversions/ implications comporte des solutions de continuit des implications, pour les contradictoires de il nest pas
ncessaire que p et respectivement de il nest pas ncessaire que non-p , marques ici par des gras et des signes
dexclamation ; les conversions (ou : quivalences) des propositions modales oprateurs abstraits de lordre du <possible>
et du <ncessaire>, mises en vedette ici par les italiques, seront dfinies plus loin dans le texte (commentaire de la table) :
Il se peut que p soit le cas

Il ne se peut pas que p soit le cas


Il arrive que p soit le cas
Il narrive pas que p soit le cas

Il nest pas impossible que p soit le cas


Il est impossible que p soit le cas

Il nest pas ncessaire que p soit le cas

!!! Il est ncessaire que p soit le cas


Il se peut que p ne soit pas le cas
Il arrive que p ne soit pas le cas
Il nest pas impossible que p ne soit pas le cas
Il nest pas ncessaire que p ne soit pas le cas
[Commentaire dans le texte :]
Il se peut que p soit le cas

() Il nest pas ncessaire que p ne soit pas le cas

Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas


Il narrive pas que p ne soit pas le cas
Il est impossible que p ne soit pas le cas
!!!Il est ncessaire que p ne soit pas le cas
[Commentaire dans le texte :]
Il ne se peut pas que p soit le cas

() Il est ncessaire que p ne soit pas le cas

87

remarquerons que la conversion, en termes de il arrive que, des valeurs modales althiques formules en
termes de il se peut que, savre tre un cas de substitution synonymique triviale (sans jeu aucun des
ngations), lencontre de ce qui se passe lors de la conversion de il est ncessaire que en il se peut que ou
respectivement en il est impossible que.
Comparer les conversions non triviales du <ncessaire> en <possible> et <impossible>, sous (1a) aux
conversions triviales (par substitution synonymique sans jeu des ngations) du <possible> (en formulation
mtalinguistique verbale : il se peut que) en <contingent> (en formulation mtalinguistique verbale : il arrive
que) sous (1b):
1a.

NECESSAIRE : Il est ncessaire que p = il ne se peut pas que non-p (il nest pas possible que non-p) =
il est impossible que non-p ;
POSSIBLE : Il nest pas ncessaire que non-p = il se peut que p (il est possible que p) = il nest pas
impossible que p ;
CONTINGENT : Il nest pas ncessaire que p = il se peut que non-p (il est possible que non-p) = il
nest pas impossible que non-p ;
IMPOSSIBLE : Il est ncessaire que non-p = il ne se peut pas que p (il nest pas possible que p) = il
est impossible que p.

1b.

NECESSAIRE : il ne se peut pas que non-p (il nest pas possible que non-p) = il narrive pas que nonp;
POSSIBLE : il se peut que p (il est possible que p) = il arrive que p ;
CONTINGENT : il se peut que non-p (il est possible que non-p) = il arrive que non-p ;
IMPOSSIBLE : il ne se peut pas que p (il nest pas possible que p) = il narrive pas que p.

Ce qui nous conduit lide (qui remonte Ablard 253) que le possible et le contingent tant quivalents (ainsi
que, selon Ablard, Aristote lui-mme laurait suggr), il ny a que trois modalits logiques de base le
ncessaire, le possible et limpossible le carr modal althique pouvant tre envisag alors comme un triangle
(cf. Le Querler 1996 : 48).
Que se passe-t-il ds que lon se tourne vers les langues naturelles ? Par exemple, en franais et en roumain ?
Les adjectifs possible et contingent sont certes parasynonymes 254. Encore que leur comportement syntaxique
ne soit pas identique, seul possible instanciant un emploi doprateur de phrase :
2a. Il est possible que Socrate coure.
2b. *Il est contingent que Socrate coure.

Il nest pas ncessaire que p soit le cas


Il est ncessaire que p soit le cas

()
() Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas
Il se peut que p ne soit pas le cas
force de rtablir les implications du ct droit, nous perdrions la corrlation horizontale entre les colonnes (en termes de la
relation contradictoire) ; mais nous retrouverions une certaine version (incomplte relationnellement) du carr de Boce
(contradictoires, contraires et subcontraires en clair, encore que dans dautres positions relatives, mais subalternes
compltement occultes):
Il se peut que p soit le cas

Il ne se peut pas que p soit le cas


Il arrive que p soit le cas
Il narrive pas que p soit le cas

Il nest pas impossible que p soit le cas


Il est impossible que p soit le cas

Il nest pas ncessaire que p soit le cas


Il est ncessaire que p ne soit pas le cas
!!!
POSSIBLE-CONTINGENT
IMPOSSIBLE
Il se peut que p ne soit pas le cas

Il ne se peut pas que p ne soit pas le cas


Il arrive que p ne soit pas le cas
Il narrive pas que p ne soit pas le cas

Il nest pas impossible que p ne soit pas le cas


Il est impossible que p ne soit pas le cas

Il nest pas ncessaire que p ne soit pas le cas


Il est ncessaire que p soit le cas
!!!
CONTINGENT-POSSIBLE
NCESSAIRE

253

Dans son ouvrage intitul Dialectica, o il commente (entre autres) le carr de Boce.
Ainsi, ladjectif contingent tant dfini, dans le Petit Robert (2007) comme : Qui peut se produire ou non , avec des
renvois : accidentel, 1casuel, conditionnel, ventuel, fortuit, 1incertain, occasionnel, et des exemples illustratifs du
type de : Evnement contingent, chose contingente (soumis(e) au hasard), lune des acceptions de ladjectif possible (3
possible) sera (selon le mme dictionnaire) qui peut se raliser, tre vrai ; qui peut tre ou ne pas tre , avec des renvois
: contingent, ventuel. Et des illustrations du type de : Averses possibles en fin de journe. De possibles chutes de neige.
Une aggravation possible de la maladie. Une rechute est toujours possible. Il ny a plus aucun doute possible. Il est possible
quil fasse froid cette nuit (il se peut que).
254

88

Do la ncessit de comparer le comportement de ladjectif oprateur possible avec celui du verbe oprateur il
arrive que 255 :
3a. Il est possible que Socrate coure.
3b. Il arrive que Socrate coure.
Ainsi que lattestent maintenant les exemples sous (4), les deux oprateurs de phrase nont pas le mme
comportement en regard dun dictum descriptivement marqu pour le virtuel :
4a. Il est possible que Socrate coure un jour.
4b. *Il arrive que Socrate coure un jour.
4c. OKIl arrivera un jour que Socrate coure 256.
Dautres verbes oprateurs de smantique [-ncessaire] se rangent, cet gard, soit du ct de il est possible
que (le verbe modal il se peut que+SUBJONCTIF), soit du ct de il arrive que (les verbes factuels il se fait que,
il se trouve que+ INDICATIF) :
5a. Il se peut que Socrate coure un jour.
5b. *Il se fait que (+Il se trouve que) que Socrate court un jour.
Il arrive que se range en revanche avec il est possible que (+ il se peut que) quant la possibilit
denchanement sur mais () pas maintenant, se dissociant cet gard des verbes factuels il se fait que, il se
trouve que :
6a. Il est possible que (+ Il se peut que, +Il arrive que) Socrate coure, mais (il ne court) pas
maintenant (+ il nest pas en train de courir maintenant).
6b. ???Il se fait que (+ Il se trouve que) Socrate court, mais (il ne court) pas maintenant 257.
En 6a, lenchanement par ___mais (il ne court) pas maintenant (+ il nest pas en train de courir
maintenant) oblige une lecture du dictum ou bien habituelle ( Il se peut que Socrate coure dhabitude
(+quil soit un coureur (professionnel)) ), ou bien temporellement discontinue (itration : il se peut que
Socrate coure de temps autre ), interdisant la lecture soit en train de courir choix privilgi en
labsence de lenchanement.
Toutes choses gales par ailleurs, cest--dire en labsence dlments co(n)textuels favorisant les
lectures habituelle ou frquentative, Il est possible que (+ il se peut que) Socrate coure sera en effet
entendu au sens de il est possible que Socrate soit en train de courir [au moment t0 o jnonce la
phrase].
Ce qui barre, en 6a, la lecture dactualit ( tre en train de courir en t0 ) obligeant lune des interprtations
marques (directement ou indirectement) pour la discontinuit, courir de temps autre , ou bien courir
dhabitude/ tre un coureur (professionnel) cest la conjonction de la perspective modale pistmique initiale
sur p (<NON CERTAIN (p)>), au constat que p nest pas le cas (constat consistant avec la subalterne
suprieure de cette prdication pistmique valeur modale pistmique contradictoire, savoir : <CERTAIN
(non-p>). Soit, en notation abrge :
<* NON CERTAIN (p) & constat (non-p), donc : CERTAIN (non-p)>.
Ce qui barre, en 6a, la lecture dactualit ( tre en train de courir en t0 ) obligeant lune des
interprtations marques (directement ou indirectement) pour la discontinuit, courir de temps
autre , ou bien courir dhabitude/ tre un coureur (professionnel) cest la conjonction de la
perspective modale initiale dincertitude sur p (<NON CERTAIN (p)>), au constat que p nest pas le
cas (constat consistant avec la modalisation <CERTAIN (non-p>). Soit, en notation abrge, o ??
symbolise le caractre problmatique de la conjonction, et * son impossibilit :
< ??NON CERTAIN (p) & constat (non-p)>, donc : <*NON CERTAIN (p) & CERTAIN (non-p)>.
Nous remarquerons que CERTAIN (non-p) est, techniquement parlant, force dextrapoler le carr
logique aux modalits (pistmiques), la subalterne suprieure (ngative) de NON CERTAIN (p). Et
nous savons dj que la vrit de la subalterne infrieure est cense suivre de la vrit de la subalterne
suprieure. Faut-il en dduire que ce qui est exclu soit aussi, et en mme temps, incertain
(=douteux) ?!
La relation logique entre subalternes suprieure et infrieure, dfinie sur le carr des propositions
assertoriques (propositions quantifies : universelle affirmative, particulire affirmative ; universelle
ngative, particulire ngative), en termes dimplicature quantitative 258 ne se laissera extrapoler telle
255

Un verbe factuel.
O le marqueur descriptif de [+virtuel] (un jour) porte sur le modus, marqu, dailleurs aussi grammaticalement, pour le
virtuel (affixe de futur).
257
Acceptable, la limite, sous lecture habituelle (ou dispositionnelle) : si donc Socrate tait entendu avoir lhabitude de courir
tous les soirs (a fortiori si Socrate tait un athlte (coureur professionnel) plutt quun philosophe).
256

258

Ce qui vaut de lensemble tout entier vaut galement de lun (quelconque) de ses membres : si la proposition tout
homme est non-violent est vraie, alors la proposition quelque homme est non-violent lest aussi.

89

quelle au carr modal quau prix dune reformulation des modalits en termes directement
quantifis (extensionnels): force, par exemple, de dfinir ce qui est contingent, incertain, facultatif
comme ce qui est faux dans au moins un monde possible (ce qui est impossible, exclu, interdit tant
faux dans tous les mondes possibles ) on pourra dire que limpossible implique le contingent, lexclu
implique lincertain, lobligatoire, le facultatif. Car tre faux dans tous les mondes possibles implique tre
faux dans un monde possible, tout comme la vrit de tout homme est non-violent implique la
vrit de quelque homme est non-violent .
En labsence dune telle reformulation extensionnelle des modalits (au plan mtalinguistique), tout ce
que lon pourra avancer, ce sera que la subalterne infrieure est oriente vers la subalterne suprieure
correspondante : ce qui est incertain (=douteux) a davantage de chances de ne pas tre que dtre (ce
qui est exclu nayant aucune chance dtre).
Les marqueurs des modalits {[-ncessaire], [-impossible]} semblent donc se ranger, en franais, le long dun
continuum, en termes de [virtuel], [discontinu] :
[-discontinu]
Il se fait que

[-virtuel]

Socrate court.

[+virtuel]

[+discontinu] 259

Il arrive que Socrate coure, mais il


ne court pas maintenant.

Il se trouve que

Il est possible
que
Il se peut que
Il peut se faire
que 260
Il peut arriver
que 261
Sil arrivait
que 262

<contingent ponctuel>

<contingent discontinu>
prdication valide

Socrate coure
un jour/ Socrate
coure
[ dhabitude :
soit un
coureur ], mais
il ne court pas
maintenant.
Socrate coure
un jour,

<possible>
prdication validable 263

La distinction entre <contingent> et <possible> est donc maintenir en langue naturelle, mme si elle se
laisse rduire en logique (par le jeu des mta-termes).
NCESSAIRE

verbes modaux : devoir (+infinitif), il faut que+subjonctif, il faut +infinitif

ncessit analytique (=de dfinition): Tout ce quoi on rfre doit exister. Appelons cela
laxiome de lexistence (Searle 1969 :121, apud Kronning 2001 : 68).
ncessit analytique mathmatique : Un nombre premier doit tre impair (Kronning
2001 : 77).
ncessit analytique argumentative (pseudo-analyticit des fins argumentatives) : Un
regret, a doit tre inutile, ou ce nest plus un vrai regret (Beauvoir, apud Kronning 2001 : 77).

ncessit synthtique (= dinfrence, de dduction): Tous les hommes doivent mourir


(Kronning 2001 : 78).
Si tu lances une pierre dans lair, elle doit retomber (Kronning 2001 :68).
Sous la pression atmosphrique normale, leau doit bouillir 100 degrs.

259

Cest l la modalit sporadique isole dans Kleiber 1983.


Verbe factuel ponctuel + auxiliaire modal de possibilit ([+virtuel]).
Verbe factuel discontinul + auxiliaire modal de possibilit ([+virtuel]).
262
Charge dirrel du tour syntaxique (Si-ait) aidant, le verbe factuel en arrive tre compatible avec le caractre virtuel du
dictum.
263
Cf. Cristea 1981 :37- 44, pour une analyse que nous reprenons ici notre compte, modulo la distinction entre alatoire
virtuel et possible proprement parler. Lalatoire virtuel (appel aussi, dans cette rfrence, contingent par
rapport l alatoire actuel , qui regroupe les ralisateurs que nous avons rangs sous <contingent ponctuel>/ <contingent
discontinu>) nest cela dit distinguer du vrai possible quen termes de leurs marqueurs respectifs, rputs (para)synonymes ;
aucun test distributionnel ne permet de discriminer par ailleurs les deux classes smantiques allgues. Les cas de
surmodalisation comportant un verbe factuel (pouvoir+ verbe factuel : il peut se faire que, il peut arriver que), tour
syntaxique virtualisant + verbe factuel : sil arrivait que,) sont analyss comme alatoire virtuel (saisie compositionnelle),
et les cas de modalisation simple (il se peut que.), comme du (vrai) possible .
La seule distinction quasi-distributionnelle davance nous semble bien tnue : +alternative quiprobable [explicite], +
contingent/ -alternative quiprobable [explicite], +possible. Il se peut que a tourne bien serait un cas de possible tout
court, tandis que il se peut que a tourne bien, comme il se peut que a tourne mal serait un cas de contingent ( alatoire
virtuel ).
260
261

90

Comparer : ?Leau doit bouillir 100 degrs/ OK Leau bout 100 degrs 264 (Kronning 1996 :
37).
Si tu lances une pierre dans lair, il faut quelle retombe.
Une fois n, il faut aussi mourir. 265

futur althique : Est-ce de Galile que le Christ doit (+OKva 266) venir ? (Jean 7 : 41, Bible 1975,
apud Kronning 2001 : 78).
futur althique du pass : Cependant, pour Lisbeth, la date du dpart approchait : elle
devait (OKallait) quitter Paris le dimanche suivant (Martin du Gard, apud Kronning 2001 : 78).

condition ncessaire : Les candidats doivent avoir moins de 52 ans au moment de la


nomination (Kronning 2001 : 79). Que doivent tre lhomme et le monde pour que le rapport soit
possible entre eux ? (Sartre 1943 :38, apud Kronning 2001 : 73).

Adjectifs oprateurs de phrase : il est ncessaire que (+subjonctif)/ de (+infinitif), il est invitable que
(+subjonctif)

Il est ncessaire dtre expos ce type de stimuli avant un ge critique, pour apprendre parler.
Il est ncessaire que lon soit expos ce type de stimuli avant un ge critique pour que lon apprenne
parler.

Il est invitable quil en soit ainsi (P. Rob.).

Invitable a de nombreux synonymes lecture premire 267 althique: [consquence] immanquable, [coup]
imparable, [rformes] incontournable [s] ,[destin] inluctable, [consquence] fatal[e] [du capitalisme].
Pourtant aucun de ces synonymes nest susceptible de vrai emploi doprateur de phrase et ne joue donc le rle
dun modalisateur althique.
Quand ils fonctionnent comme attributs de ce, dans le tour (familier), cest +Adj, employ en incise, leur
interprtation semble tre sensible au contexte. Cest en particulier le cas de ladjectif fatal.
Dans un

Dans un

cotexte dj althique, ladjectif aura une lecture de <ncessit> althique :


Et il faut que a arrive, cest fatal (P. Rob. : fam.),
contexte pistmique (prdiction), la lecture pistmique (de <certitude>) semble simposer :
Paul arrivera bien lui mettre la main dessus, cest fatal. ( cest sr ).

Adverbes modaux : fatalement, forcment, immanquablement, inluctablement, invitablement,


ncessairement

Le gnie est fatalement condamn ntre quimparfaitement compris de la foule (R. Rolland, in P.
Rob.) ;
Laventure devait fatalement tourner mal. (P. Rob.)
La cause et leffet sont lis ncessairement. (P. Rob. : adverbe de manire)/ La cause et leffet sont
ncessairement lis (modalisateur de re).
Le srieux que donne ncessairement la pense continuellement fixe sur tout ce qui est grand
(Stendhal, in P. Rob.).

POSSIBLE

verbes modaux : pouvoir +infinitif (possibilit interne (capacit)/ externe (possibilit matrielle)), il se
peut que + subjonctif, savoir au conditionnel prsent ngatif+infinitif

Elle peut venir pied, sa jambe est dpltre. (capacit)


Elle peut venir pied, puisquil ny a plus de verglas. (possibilit matrielle)
Il se peut que votre fille tourne mal aussi, vous savez. (dit par le pre, zonard, dune jeune drogue,
lagent de police. Cest--dire : cela peut vous arriver aussi, vous ntes pas labri de ce type de
dboires, malgr votre uniforme ) 268.
Je ne saurais assez vous remercier. (capacit).

264

La rgularit ou loi exprime par la phrase modalise doit se laisser envisager comme produit dune infrence, pour que le
verbe devoir soit licite (Kronning 1996).
265
Exemples de notre main, sur le modle des exemples devoir althique emprunts aux crits de Hans Kronning.
266
Argument linguistique pour linterprtation althique vs pistmique de ces noncs lecture futurale : relation
paraphrastique : V-FUT probablement/ certainement/ sans doute barre (Kronning 2001 : 74).
267
Ainsi que dautres, dont lacception ncessaire (ncessit althique) est drive, en franais familier, dun sens premier
obligatoire (ncessit dontique) : forc, oblig, obligatoire. la faveur dun co(n)texte orient vers lalthique, ces
adjectifs fonctionneront comme modalisateurs althiques, dans la mme structure syntaxique. Une fois lance dans lair, la
pierre retombera, cest oblig (+cest forc, + cest obligatoire). Cest forc connat mme un emploi douvreur de phrase : une
fois lance dans lair, cest forc quelle retombe. Et, dans le P. Rob. : Cest forc quil perde/ Il perdra, cest forc.
268
Comparer : il se peut que votre fille ait tourn mal (lecture pistmique : ventualit).

91

Locutions verbales comportant le nom chance ( possibilit de se produire par hasard ) 269: il y a peu
de chances, il y a des chances, il y de fortes chances, il y a une bonne chance (pour) que + subjonctif

Il y a des chances que votre fille gurisse, si vous suivez la lettre ces quelques conseils.

Adjectif oprateur de phrase : il est possible que + subjonctif

Il est possible que votre fille tourne mal aussi, vous savez.

Adverbes modaux : ventuellement, possiblement (Qubec)

Vous ntes manifestement pas des personnes possiblement (+ventuellement) intresses par cette
offre (= susceptibles dtre intresses par . Cf. Les personnes possiblement (+ventuellement)
intresses par cette offre (P.Rob.)).

CONTINGENT

Verbes factuels : il arrive que+ subjonctif/ il arrive qqn de +infinitif, il se fait que, il se trouve que+
indicatif 270

II arrive que le mois daot soit pluvieux (Cristea 1981 :40).


Il lui arrive de se tromper (Cristea 1981 :41).
Il se trouve que, malgr la justesse du raisonnement, la solution est fausse (Lexis, apud Cristea
1981 :39).
Comment se fait-il quil parte dj (+ quil soit dj parti) ? (P. Rob.)

adverbiaux modalisateurs de smantique essentiellement [+contingent] : par hasard, incidemment 271

Est-ce que par hasard vous ne seriez pas complice ? (P. Rob.)
Si par hasard tu le vois, prviens-le ( au cas o ) (P. Rob.).
Dinde : Gros oiseau dont la chair, quand on la mange l'occasion de certains anniversaires religieux, a
mets
des
vertus
de
ferveur
et
de
grces.
Incidemment,
c'est
un
excellent
[Le Dictionnaire du Diable (1911)].

Marqueurs non spcifiques :


Adjectifs oprateurs qui ralisent, la forme affirmative, le <ncessaire>, la forme ngative 272 : il
nest pas ncessaire de +infinitif/ que+subjonctif

Il nest pourtant pas ncessaire que tous les vnements finissent mal. (Cristea 1981 : 42).
Adverbes de modalisation qui ralisent, la forme affirmative, le <ncessaire>, employs dans des
phrases ngatives : pas forcment, pas ncessairement

Tu nauras pas forcment raison 273 (P. Rob.).


Tous les vnements ne finissent pas ncessairement mal.

IMPOSSIBLE
Pas de ralisateurs spcifiques, hormis ladjectif impossible lui-mme (oprateur de phrase il est impossible de
+ infinitif/ que+ subjonctif) : formes ngatives de certains ralisateurs du POSSIBLE.

Il mest impossible sur ce point dtre de leur avis (Renan, in P. Rob.)


Impossible de le joindre (P. Rob.)).
Il est impossible que tous les tudiants aient fait la mme erreur.

Il nest pas possible que tous aient fait la mme erreur.


Elle ne peut pas venir pied, sa jambe est dans le pltre.
Elle ne peut pas venir pied, cause du verglas.

269

Expriment, selon T. Cristea, l alatoire virtuel quantifi (Cristea 1981).


Except : comment se fait-il que+ subjonctif.
Noter que ladverbe accidentellement, synonyme des deux modalisateurs invoqus, ne fonctionne, lui, quen tant quadverbe
de manire (modificateur du verbe, susceptible de porter laccent focal, et donc de faire lobjet dune restriction sachant que
les marqueurs restrictifs du type de seulement, ne que sont des oprateurs de focalisation) : je lai avale accidentellement.
Je ne suis quaccidentellement implique dans cette affaire.
272
Le contingent tant le contradictoire du ncessaire, rien dtonnant que les formes ngatives des ralisateurs du ncessaire
ralisent le contingent.
273
Il peut arriver que tu te trompes .
270
271

92

Remarques.
(1) NecessaireALTHIQUE : Cest+adj / ctait + adj (fatal, forc, oblig, obligatoire).
Noter qu limparfait (ctait fatal), la faveur de la rupture davec linstance dnonciation actuelle (<moi-icimaintenant>), ladjectif marquera la ncessit althique, mme si la proposition donnant son antcdent ce
na pas dorientation althique particulire :
Paul y est arriv, ctait fatal.
Linterprtation pistmique peut tre retrouve alors dans les contextes choques (discours rapport de
paroles ou de penses) :
Paul devait y arriver, ctait fatal. (= Paul doit (+va) y arriver, cest fatal pensait Jean (dont le
locuteur rapporte donc les penses)). Style indirect libre.
(2) propos de la notion de cotexte (dj) althique .
Remarquer que, dans lexemple donn (Et il faut que a arrive, cest fatal), le modalisateur il faut que nest pas
dcisif lui seul: le contenu propositionnel modalis y joue aussi (arriver verbe factuel smantique de type
<CONTINGENT>). Comparer :
Il faut que Paul russisse lui mettre la main dessus, cest fatal. (lectures possibles : althique et
pistmique).
Il faut bien que Paul russisse lui mettre la main dessus, cest fatal. (lecture pistmique seule, en
raison de ladverbe bien).
(3) Possibilit althique et porte extra-prdicative.

Il se peut que (+il se peut faire que, +il peut se faire que 274) votre fille tourne mal aussi, vous savez.

Contexte (scnario) : dit par le pre, zonard, dune jeune drogue, lagent de police.
En dautres mots : cela peut vous arriver aussi, vous ntes pas labri de ce type de dboires, malgr votre
uniforme ) 275.
Pour moi, il ne sagirait pas l de <probabilit> (modalit syntaxiquement extra-prdicative, donc
smantiquement extra-prdicative aussi, donc pistmique), mais de <possibilit (matrielle)> (modalit
althique). Contra : Le Querler 2001. Cela revient dire donc que le <possible althique> nest pas exclusif de
porte extra-prdicative. En particulier, dans lapodose (= assertion) dune macrostructure
conditionnelle, et avec une protase (= supposition) et un prdicat (dictal) consistants avec la
lecture de <possibilit matrielle>, il se peut que, il peut arriver que, il peut se faire que etc. ne laissent
pas de marquer le <possible althique> plutt que l<ventualit pistmique>. Comparer :
Si le ciel se couvre, il se peut quil pleuve. (prmisses non actuelles possibilit matrielle 276)
Le ciel se couvre : il se peut quil pleuve. (prmisses in prsentia 277 probabilit)
A : Quel temps fait-il Londres aujourdhui ?
B : Il se peut quil pleuve, je nen sais rien. (prmisses de raisonnement au mieux implicites (topos 278
du temps pluvieux Londres) absence de certitude (valeur pistmique explicite, renforce par lincise je
nen sais rien): peut-tre bien quil pleuvra, peut-tre quil ne pleuvra pas )

(4) Verbes factuels et modalisation althique : le contingent actuel.

Comment se fait-il quil parte dj (+ quil soit dj parti) ? (P. Rob.)

Le subjonctif aprs comment se fait-il que sexplique par la remise en cause du contingent actuel : je nen
crois pas mes yeux/ mes oreilles . Le contingent (althique) y est intgr une stratgie discursive
pistmique (doute).

274
275
276
277
278

Surmodalisation, virtualisante, du verbe factuel se faire que (il se fait que).


Comparer : il se peut que votre fille ait tourn mal (lecture pistmique : ventualit).
Lecture conditionne galement certains faits dintonation (acent focal sur le verbe modal plutt que sur le verbe dictal.
Le locuteur constate de visu (i.e. de ses propres yeux) que le ciel se couvre.
Lieu commun.

93

5.2.2. La zone des modalits pistmiques et ses ralisateurs en franais.


CERTAIN

Verbe modal ddi : savoir (vs croire, penser)

Je sais que Paul est malade. (= je crois que Paul est malade et Paul est de fait malade : savoir =
croyance vraie)

(a) Savoir est un verbe factif (vrit du dictum prsuppose), croire et penser, non :

Je savais que Paul tait malade. 279 Paul tait malade.


Je ne savais pas que Paul tait malade. Paul tait malade 280.
Vous savez que Paul est parti. Paul est parti.
Vous ne savez pas que Paul est parti. Paul est parti.

Ni Je crois que Paul est malade ni Je pense que Paul est malade nimpliquent la vrit de
Paul est malade .

La croyance est donc (au mieux) un savoir faible, un savoir par dfaut. Do la possibilit de dire :
Je crois (+pense) que Paul est malade, mais je nen suis pas sr. (o il est vident que les verbes
modaux croire et penser nexpriment plus la certitude, ft-ce faiblement, mais la simple probabilit).

Jean croit que Paul est malade oriente plutt vers le faux, du point de vue du locuteur ( je ne le
crois pas , je sais que tel nest pas le cas ).

Jean pense que Paul est malade ne prjuge en rien de lopinion du locuteur.

(b1) <X sait que p> <Je sais que p>


(b2) <Je savais que p> <Je sais que p>
Hirarchie des univers de croyance (Martin 1987) :
Lunivers de croyance du locuteur actuel (je) > lunivers de croyance dautrui ( htro-univers ) :
interlocuteur, tiers ou locuteur lui-mme par le pass.

Jean sait que Paul est malade . Je sais que Paul est malade .
Jean ne sait pas que Paul est malade . Je sais que Paul est malade .

Je savais que Paul tait malade Je sais que Paul tait malade .
Je ne savais pas que Paul tait malade Je sais que Paul tait malade .

La logique pistmique, inaugure par les travaux de Hintikka 281, se prsente comme une logique de
lpistmologie tudiant lensemble des consquences logiques relatives aux affirmations de connaissance.
Quelle consquence puis-je tirer par exemple du fait de savoir quil pleut dehors ? Si je sais que telle chose est
vraie, alors : je ne sais pas quelle nest pas vraie, je crois quelle est vraie, je sais que je sais quelle est vraie,
je connais toutes les consquences logiques de sa vrit, etc.

Adjectifs oprateurs de phrase (il est que + indicatif) : sr, certain, incontestable, vrai, vident+
indicatif 282

Il est sr que les cours seront suspendus jusqu nouvel ordre.


Il est vrai que le mont Everest est le plus haut sommet du globe (Bordas).
Son mari layant gifle, il est vident que votre fille le quittera.
Il est incontestable que ce trajet est plus pittoresque.

279

La flche se lira ici : prsuppose .


Rappel : la prsupposition est une relation dimplication non affecte par la ngation de lantcdent.
P implique Q ( si P vrai, alors Q vrai ). La vrit de la proposition Pierre est tudiant (P) implique la vrit de la
proposition Pierre est un homme (Q). Note P Q ou P Q.
P prsuppose Q : P implique Q et non-P implique toujours Q (la vrit de Q est une condition ncessaire de la vrit ou de la
fausset de P). Note P Q. Cf. Tuescu 1978 : 224-225.
281
Jaakko Hintikka, Knowledge and Belief (An Introduction into the Logic of the two Notions) , Ithaca Press, New York,
1962, 179 pages.
282
Noter cependant que il est exact que peut tre suivi du subjonctif, en raison sans doute de son glissement vers lvaluation
subjective (modalits axiologiques, thymiques) comme marqueur dune constatation vigoureuse cf. Mauger
280

1968 : 303, citant ce sujet G. Gougenheim, Structure et conomie en linguistique.

94

Adverbes modaux : certes, certainement, assurment, srement, absolument, coup sr,


videmment, manifestement

Les cours seront assurment suspendus jusqu nouvel ordre.


Cela tant, votre fille va videmment quitter son mari.
Manifestement, votre fille a eu raison de quitter son ivrogne de mari.
Ce trajet est incontestablement plus pittoresque, mme sil est un peu plus long.
Incontestablement, le mont Everest est le plus haut sommet du globe.

Ngativisation de ralisateurs de lincertitude 283 : ne pas douter (+indicatif 284), sans doute

Je ne doute pas quil est sincre (P.Rob). Je ne doute pas quil le fera (Hanse 1991 : 351).
Il est sans doute (+sans nul doute, +sans aucun doute) sincre.

Mode indicatif ralisateur grammatical typique de la certitude (modalit dnonciation assertive) :


fait rel (Paul est parti, Il est encore l, Elle riait gorge dploye), fait ralisable (Il va partir sous
peu), voire non ralis (mais qui a t sur le point de ltre imminence contrecarre : Encore un pas
et tu tombais dans labme).

PROBABLE

Verbes modaux dopinion et dapparence : croire que, penser que; se douter que/ de ce que ; paratre
que, sembler que + indicatif (ou conditionnel)

Je crois que cet enfant sait dj lire.


Je pense que les tudiants ont compris votre explication.
Je me doute quil sest tromp.
Il me parat ( jai limpression, je crois ) que Paul a tort.
Il me paraissait que le dpart tait proche.
Il parat que cet enfant sait dj lire ( daprs ce quon en dit 285).
Il me 286 semble que vos bons amis vous laisseraient tomber volontiers, ntait-ce votre beau-pre.
(Comparer la phrase racine 287 correspondante, toujours au conditionnel: Vos bons amis vous
laisseraient tomber volontiers).
Il semble bien 288 que Paul sest rendu compte de votre trahison.
Il semblait 289 que personne navait rien leur reprocher.

Verbes modaux smantique initiale non pistmique (polysmie de marqueurs) : pouvoir, devoir
+inf.

Sylvie peut (bien) tre rentre pied.


Les lumires sont teintes : ils doivent tre dj partis.

Adjectifs oprateurs de phrase (il est que) : vraisemblable, probable + indicatif

Vu le nombre dabsents, il est probable que la runion sera ajourne.


Il est vraisemblable que vos bons amis vous laisseront tomber sans crier gare, maintenant que votre
divorce vient dtre prononc.

283

Rappel du carr smiotique : CERTAIN a INCERTAIN (DOUTEUX) pour contradictoire, PROBABLE a


IMPROBABLE (EXCLU) pour contradictoire (diagonales).
284
Pour insister sur la ralit de ltat de chose dcrit dans la subordonne. Car en principe, le subjonctif reste de
mise aprs douter, y compris la forme ngative ou interrogative: Je ne doute pas quil (ne) le fasse, Doutezvous quil (ne) vienne ? (ne dit expltif optionnel, aux formes ngative et interrogative du verbe modal) cf.
Hanse 1991 : 351-352). Mais ces noncs-ci exprimeront une valeur modale de <probabilit> (voire de
<probabilit faible> cf. P. Rob. 2007, douter, 1, ne pas douter que : avec subj., si la chose est trs peu
probable ) plutt que de <certitude>.
285
Probabilit allgue. Forme de discours rapport, avec effet de distanciation : refus du locuteur dassumer la
responsabilit du dire rapport.
286
Lopinion prend plus de crdit quand elle est rattache une personne dtermine : il semble que + subj.
(<incertain>), il me (te, lui) semble que + indicatif (<probable>).
287
Non enchsse.
288
Ladverbe pistmique (confirmatif) bien inflchit linterprtation dans le sens de la certitude (plus
exactement : vers la probabilit).
289
Noter le tiroir verbal (limparfait) : le subjonctif domine nettement (toutes choses gales par ailleurs) aprs il
semble que et lindicatif, dans la mesure o il convient aussi, est plus frquent (sans toutefois simposer) en
particulier aprs il semblait que cf. Hanse 1991 : 869.

95

Adverbes modaux : probablement, vraisemblablement, apparemment, peut-tre ; peut-tre que 290 +


indicatif

Vos bons amis vous laisseront vraisemblablement tomber, maintenant que votre divorce vient dtre
prononc.
La runion sera probablement reporte la semaine prochaine.
Peut-tre que les tudiants ont compris votre explication.

Noter la fuite vers le probable de marqueurs sens premier de certitude :


les ralisateurs dincertitude ngativiss :
Sans doute est-il sincre.
Sans doute arrivera-t-elle demain. (apparemment, vraisemblablement, probablement)
Je ne doute pas quil (ne) soit sincre. (P. Rob.)
tout autre adverbial de la srie :
Il est srement parti (en labsence dvidence du contraire, mais aussi sans preuve de ltat de chose
dcrit dans le dictum).
(INCERTAIN=) DOUTEUX
Verbe modal ddi : douter 291 + subjonctif

Paul doute que vous puissiez me remettre le mmoire temps.


Verbe dapparence (rserve subjective) + subjonctif ( hsitation affirmer ):

Il semble que nous nous soyons tromps.

Formes ngative et interrogative de croire, penser 292 ; sembler, paratre + subjonctif

Je ne crois pas quil sache jouer du piano.


Je ne pense pas que les tudiants aient compris votre explication.
Crois-tu que Marie revienne parmi nous avant Pques ? (Comparer : Tu crois donc que Marie
reviendra parmi nous avant Pques).
Pensez-vous que la runion doive tre ajourne ? 293 (Comparer : Vous pensez donc que la runion
doit tre ajourne).
Le visage si froid, si parfaitement impassible quil ne semblait pas que le moindre sentiment pt
lhabiter (Vercors, Le silence de la mer, p. 67, apud Hanse 1991 : 869).
Semble-t-il seulement quon sen soit aperu ? (Hanse 1991 : 869)
Il ne me paraissait pas que le dpart ft proche.
Il ne parat pas que ce soit bien.
Verbe modal smantique initiale althique (<possible>, <contingent> polysmie de marqueurs) : il
se peut que, (y compris dans des structures de sur-modalisation : il se peut faire que, il peut se faire
que ) + subjonctif

Le ciel est gris : il se peut quil pleuve cet aprs-midi.

Adjectifs oprateurs (Il est/ parat que +subjonctif) : possible, douteux ; marqueurs de certitude
ngativiss : il nest pas certain que, il ne parat pas certain que+subjonctif ; marqueur de
probabilit ngativis : il est improbable que 294

290

Peut-tre + inversion du sujet (Peut-tre est-il parti plus tt).


Dfinition lexicographique : tre dans lincertitude de la ralit dun fait, de la vrit dune assertion (P.
Rob., douter, v. tr. ind., 1).
292
Mais pas de se douter :
Elle ne stait pas doute quon lobservait.
Te doutais-tu quon tobservait ?
dont les formes ngative ou interrogative ne seraient suivies du subjonctif que rarement (Hanse 1991 :352) : Il ne
se doutait pas quon et des preuves contre lui.
293
Interprt : je ne pense pas que la runion doive tre ajourne (question rhtorique), ou comme vraie
question portant sur les opinions de linterlocuteur.
294
Qui ne fonctionne pas comme ralisateur de l<EXCLU>, mais comme ralisateur de l<INCERTAIN>
(<DOUTEUX>). Cest plus quimprobable, cest impossible (P. Rob). Le carr pistmique recle une
inexactitude en regard des langues naturelles: si lincertain peut tre entendu en langue naturelle come synonyme
de douteux, improbable ne peut pas tre entendu comme synonyme de exclu ; les valeurs pistmiques sont donc
291

96

Il
Il
Il
Il

est possible quil vienne demain soir.


parat douteux quil vienne.
ne me parat pas certain quil vienne.
est improbable quil vienne.

En rsum (verbes dapparence) :


Il parat que + indicatif/ Il ne parat pas que + subjonctif (impression produite par lobjet (tat de chose), sur le
sujet) : TESTIMONIAL (mise distance)
Il semble que + subjonctif (impression ressentie par le sujet)/ RSERVE SUBJECTIVE
Il me (te, lui) semble que ( avoir limpression : affirme la ralit de notre pense), Il me (te, lui)
parat que ( donner limpression : affirme la ralit de lapparence) + indicatif/ Il ne me semble pas que, Il
ne me parat pas que + subjonctif
Il semble bien que + indicatif
Il semblait que + indicatif 295 (frquent)/ subjonctif imparfait (plus rare)
(IMPROBABLE) EXCLU

Adjectifs oprateurs (ou locutions): (il est que +subjonctif) : exclu, hors de question ; impossible
(attraction de lalthique vers lpistmique)

Il est exclu que vous soyez licencie dans ces conditions.


Il est impossible quil revienne avant midi.

5.2.3. Modalits althiques/ modalits pistmiques. Critres distributionnels distinctifs.


(IM)POSSIBLE althique/ POSSIBLE pistmique (INCERTAIN ; PROBABLE)
Marqueurs favorisant la lecture pistmique :
il se peut que + subjonctif,
peut-tre (que/ +inversion du sujet), peut-tre
Contextes favorisant la lecture pistmique de pouvoir non pronominal:
infinitif pass dictal : Sylvie peut tre rentre pied 296.
circonstancielle causale/ finale +infinitif pass dictal : Pour faire de lexercice/ Comme elle aime faire
de lexercice, elle peut tre rentre pied (=il se peut quelle soit rentre pied).
adverbe pistmique bien : Elle peut bien tre malade/ Elle peut bien venir pied/ Elle peut bien tre
venue pied/ Que peut-elle bien vouloir dire par l ?/ Qui peut bien tre venu pied par un temps
pareil ?!
infrence partir dune protase (=premire prmisse du syllogisme ; proposition conditionnelle) de
type vridictoire : Si ce que vous dites est vrai, elle peut tre en train de prparer sa candidature
un poste de matre de confrences.
Contextes barrant la lecture pistmique de pouvoir non pronominal:
ngation 297 : Comme elle a la jambe droite dans le pltre, Sylvie ne peut pas tre rentre pied 298
(impossibilit althique : incapacit).

plutt ordonner sur un axe graduel (<certain-probable-incertain (=douteux)-improbable (= trs douteux)exclu>).


295

Peut-tre est-ce suite lloignement du <moi-ici-maintenant> propre limparfait, que lexpression connat un
affaiblissement de son caractre fortement subjectif lorigine de la slection du subjonctif par ailleurs (sorte de glissement
vers lobjectif).
296
La forme perfective de linfinitif dictal nest quun indice faible en faveur dune lecture pistmique, puisque cette
interprtation ne survit pas aux contextes normalement suspendant cette interprtation, telles linterrogation (interrogation
totale, vraie question appel dinformation) ou la ngation.
Noter que Peut-elle tre rentre pied ? nest susceptible de lecture pistmique que sous interprtation dlibrative de la
question mme (question dlibrative = question adresse soi-mme, en cas dhsitation : serait-elle rentre pied ? ).
Alors, la question dlibrative pourra tre entendue porter sur la manire dont Sylvie est rentre ( pied, en voiture, en mtro,
par le tram) et non sur sa capacit dtre rentre de cette manire : je me demande si elle est rentre pied et non je
me demande si elle peut (= est capable de) lavoir fait .
De mme, la question Peut-elle avoir fini sa thse avant Nol? entendue comme question dlibrative recevra une lecture
pistmique, si elle est prononce au mois de fvrier suivant Nol ( aurait-elle fini sa thse avant Nol ? ), mais une
lecture althique si elle est prononce au mois de novembre prcdent ( sera-t-elle capable de finir sa thse avant Nol ? ).
Dans ce second cas de figure, cette question peut mme apparatre dans un contexte interrogatif standard, en tant que
question appel dinformation (adresse autrui).

97

interrogation (totale : vrai appel dinformation) : Peut-elle rentrer pied, Docteur ? (appel
dinformation concernant ltat de sant de la patiente, sa capacit de faire telle ou telle chose 299)

(Autres) contextes favorisant la lecture althique intra-prdicative de pouvoir non pronominal:


question-QU (appel dinformation) portant sur la manire 300/ phrase assertive complment de
manire possibilit althique (possibilit matrielle ou bien capacit): Comment peut-elle rentrer ?
Elle peut rentrer en voiture ou par le train. Comment peut-elle rsoudre tous ces exercices ? Elle peut
les rsoudre en tudiant la bibliographie/ laide dun dictionnaire spcialis,
dans une subordonne finale ou hypothtique : Enlevons ce pltre, afin quelle puisse se dgourdir les
jambes. (capacit) Vous mobligeriez si vous pouviez y aller de ce pas. (capacit requte)
infinitif (non perfectif), sous interrogation et/ ou exclamation : Moi, pouvoir grimper cette
pente ?/ !/ ?! Moi, pouvoir rater le bus ? / !/ ?!
pronominalisation en le du complment de pouvoir :
-Peut-elle venir pied ?
-Elle le peut, sa jambe est dpltre.
Contextes favorisant mme la lecture althique ((im)possibilit matrielle) de pouvoir pronominal:

aprs puisque ou si conditionnel (sous interprtation diaphonique 301 de la squence


modus+dictum): PUISQUil se peut que le chien ne me laisse de toute manire pas entrer dans la
salle de sjour sans vous, ce nest plus la peine de me presser./ Sil se peut que mme votre fille
tourne mal, que dire de la mienne, Monsieur lAgent ?
ngation 302 : Il ne se peut pas quelle soit rentre pied par un temps pareil.

NECESSAIRE althique/ PROBABLE pistmique


Contextes barrant la lecture pistmique de devoir, mais compatibles avec la lecture althique :

interrogation partielle (question-QU) : Quand est-ce que Paul ne doit pas travailler, en tant que
catholique pratiquant ? avec, pour rponse attendue : En tant que catholique pratiquant, Paul ne doit
pas travailler le dimanche). 303 Dans le cas de la question, la lecture pistmique est barre, seule
restant disponible, au vu de la restriction en tant que catholique pratiquant (= si Paul est un
catholique pratiquant ), la lecture althique de condition ncessaire ( ne pas travailler le
dimanche est alors prsent comme condition ncessaire pour tre un catholique pratiquant ),
telle que dfinie dans Kronning 2001 : 79; comparer leffet de sens toujours althique nomm
par Hans Kronning ncessit analytique argumentative : Paul doit ne pas travailler le dimanche, ou
ce nest pas un vrai catholique. Noter que, sortie du contexte immdiat de lchange question-rponse,
lassertion En tant que catholique pratiquant, Paul ne doit pas travailler le dimanche ne barre pas au
mme titre la lecture pistmique (ainsi que latteste la possibilit de substitution de devoir par sans
doute : En tant que catholique pratiquant, Paul ne travaille sans doute pas le dimanche).
Comparer galement la question (ou le couple question-rponse) un nonc tel: Pierre doit travailler
mme le dimanche, maintenant lecture pistmique parfaitement licite.
Que doivent tre lhomme et le monde pour que le rapport soit possible entre eux ? (Sartre, apud
Kronning 2001 : 73 ; lecture althique : condition ncessaire).

subordonne en puisque : Pierre ne peut pas venir aujourdhui, puisquil doit partir pour Londres ce
soir (lecture pistmique barre (probabilit), lecture althique permise ncessit althique (futur
althique : va partir )).

297

Noter que la ngation a le mme effet sur se pouvoir (impersonnel pronominal), prservant ainsi lacceptabilit dnoncs
problmatiques sous lecture pistmique (de il se peut) : Il ne se peut pas quelle soit rentre pied par un temps pareil
(impossibilit althique : impossibilit matrielle). Comparer : ???Il se peut quelle soit rentre pied par un temps pareil
(nonc acceptabilit problmatique pour des raisons smantico-pragmatiques : par un temps pareil (mauvais temps)
oriente vers NE PAS RENTRER A PIED, voire NE PAS SORTIR, contrairement au modal il se peut que, qui exprime (par
dfaut) la <probabilit> (valeur de possible pistmique)).
298
Noter lapport de a ngation contre un contexte normalement vou interprtation pistmique.
299
Plutt que demande de permission.
300
Comparer une question-QU portant sur le temps : Quand peut-elle rentrer ?, davantage oriente vers la lecture
demande de permission que vers linterprtation de vrai appel dinformation, qui favorise la lecture althique (capacit,
possibilit matrielle).
301
Reprise lallocutaire ou un tiers. En clair, lallocutaire (ou bien un tiers) aura dit pralablement p (qui renferme le
modus et le dictum de la squence puisque p, ou respectivement si p), ou au moins celui qui nonce puisque p/ si p lui
attribue cette pense.
302
Voir note 2 supra.
303
Dans le cas de : Quand est-ce que les Chrtiens ne doivent pas travailler ? Les Chrtiens ne doivent pas travailler le
dimanche, la lecture par dfaut de devoir sera dontique (modalit du faire). Voir infra 6.5.

98

Enchanement sur des prmisses convoques in absentia : Daprs les prvisions mto, le
temps doit samliorer demain. (Kronnig 2001 : 76 : lecture pistmique barre (probabilit), lecture
althique permise futur althique va samliorer ).

Contextes favorisant la lecture pistmique de devoir :

enchanement sur des prmisses convoques in praesentia : Le ciel se dcouvre. Le temps doit
tre en train de samliorer.
adverbe pistmique bien : Paul doit bien travailler demain.

Rfrences de la section:
Kleiber, G. (1983). Lemploi sporadique du verbe pouvoir en franais , in J. David ; G. Kleiber, (ds), La
notion smantico-logique de modalit. Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8,
183-201.
Kronning H. (1996). Modalit, cognition et polysmie : smantique du verbe modal devoir , Uppsala ;
Stockholm : Acta Universitatis Upsaliensis : Almqvist & Wiksell International.
Kronning, H. (2001). Pour une tripartition des emplois du modal devoir , Cahiers Chronos 8 : 67-84.
Le Querler, N. (1996). Typologie des modalits, Caen : Presses Universitaires de Caen.
Le Querler, N. (2001). La place du verbe modal pouvoir dans une typologie des modalits , Cahiers Chronos
8, Amsterdam-Atlanta : Rodopi, 17-32.
Sueur, J.-P. (1979). Une analyse smantique des verbes devoir et pouvoir , Le franais moderne 47.2 :
97-120.
Sueur, J.-P. (1983). Les verbes modaux sont-ils ambigus ?, in : J. David ; G. Kleiber, (ds), La notion
smantico-logique de modalit, Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 165182.
Tutescu, Mariana (2005) LAuxiliation de modalit. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura Universitatii
din Bucuresti
Van der Auwera, J. ; Plungian, V. (1998). Modalitys semantic map, Linguistic Typology 2 : 79-124.
5.2.4. Modalits pistmiques et modalits vridictoires.
5.2.4.1. Les modalits vridictoires.
La notion de modalits vridictoires a t formellement dfinie dans le cadre de lapproche smiotique aux
modalits que propose Algirdas-Julien Greimas. Cette thorie des modalits se veut adquate lanalyse de
textes/ discours, et se laisse apprhender dans ses relations aux autres composantes de la smiotique
greimassienne ( programme narratif , structure actantielle , carr smiotique ). Prsenter ici de
manire tant soit peu consistante ce modle marge certes nos vises. Aussi allons-nous simplement introduire
les repres ncessaires une saisie de la porte de la catgorie modale qui nous concerne en particulier.
Dans le cadre de lapproche smiotique, ce sont la dfinition opratoire de la modalit en amont de la thorie
( modification du prdicat par le sujet , dans et par lacte de langage mme) et la dfinition de tout acte
(acte de langage y compris) en termes de ce qui fait tre qui fournissent les concepts lmentaires dont la
combinatoire donnera la typologie des modalits retenues : ltre vs le faire. Ces concepts lmentaires seront
redfinis de manire plus formelle comme jonction du sujet et de lobjet (catgorie smantique qui rend
compte de ltat du sujet par rapport un objet de valeur quelconque, projete sur le carr smiotique sous les
catgories de la conjonction (sujet possdant lobjet) et de la disjonction (sujet ne possdant pas lobjet)),
et respectivement comme transformation (catgorie smantique qui rend compte de ce qui arrive lors du
passage dun tat lautre, projete sur le carr smiotique sous les catgories de lassertion et de la
ngation).
La modalisation se laisse maintenant dfinir en tant que production d'un nonc dit modal, d'tat ou de faire,
surdterminant un nonc descriptif, d'tat (ou : de jonction du sujet et de l'objet) ou de faire (ou : de
transformation). Do un premier classement des modalits :

la comptence (l'tat ou l'acte en puissance) : l'tre modalisant le faire (dans la dfinition de lacte
comme ce qui fait tre , cest l le ce qui );
la performance (l'acte ou l'action) : le faire modalisant l'tre (dans la dfinition de lacte comme ce
qui fait tre , cest l le faire tre );
la vridiction : l'tre modalisant l'tre;
la factitivit : le faire modalisant le faire.

99

En bref :

dtat

nonc modal

de faire

Modalisation :

d'tat
(jonction du sujet et de l'objet)

nonc descriptif

de faire
(transformation de lobjet, par le
sujet)

modalits de ltre/ modalits du faire


ltre modalisant le faire
le faire modalisant ltre
ltre modalisant ltre
le faire modalisant le faire

comptence
performance
vridiction
factitivit

Dans une situation dnonciation donne (un nonciateur disant quelque chose un nonciataire son
destinataire, son interlocuteur), les modalits vridictoires sont dfinies comme modalits de ltre: est
vridictoire un nonc modal dtat (endoss par lnonciataire) modifiant un nonc descriptif toujours dtat
(mais dont la responsabilit revient lnonciateur).
Le prdicat modal peut tre trait comme catgorie smiotique et dcompos en:
tre // non-tre / paratre // non-paratre,
soit, en carr smiotique :
vrit
/tre/

/Paratre/
m
e
n
s
o
n
g
e

s
e
c
r
e
t
/Non-paratre/

/Non-tre/
fausset

Comme toute catgorie smiotique, le prdicat modal vridictoire sarticule en deux schmas (dfinis par la
relation contradictoire), deux axes (laxe des contraires et laxe des subcontraires 304), et deux deixis (positive et
ngative, correspondant, positionnellement, aux relations de subalternation du carr logique classique). Les
deux schmas vridictoires sont la manifestation et limmanence, soit: /paratre/ /non-paratre/ =
manifestation ; /tre/ /non-tre/ = immanence. Les deux axes vridictoires : [/tre/ & /paratre/] = vrit,
pour laxe des contraires, et respectivement, [/non-paratre/ & /non-tre/] = fausset, pour laxe des
subcontraires. Les deux deixis, positive et ngative (selon leur point de dpart) dfiniront respectivement le
secret ([/tre/ & /non-paratre/]) et le mensonge ([/non-tre/ & /paratre/]).
Rfrences de la section:
GREIMAS, A.J. (1976) Pour une thorie des modalits , Langages 43, Paris: Didier-Larousse, 90106.
GREIMAS, A.J. et COURTS, J. (1979) Smiotique. Dictionnaire raisonn de la thorie du langage,
Paris: Hachette.
304

Dfinis positionnellement, mais pas intensionnellement, comme dans le carr logique classique, puisque constitu de
(mta-)prdications par hypothse susceptibles dtre vraies en mme temps ou fausses en mme temps

100

COURTS, J. (1991), Analyse smiotique du discours. De l'nonc l'nonciation, Paris: Hachette, 302
p.
HBERT, L. (2003), Lanalyse des modalits vridictoires et thymiques : vrai/faux,
euphorie/dysphorie , Semiotica, Bloomington, Association internationale de smiotique, 144, 1/4, p.
261-302.

6.4.2. pistmique et vridictoire.


Dans le cadre thorique prcdemment envisag, la relation entre vridiction dune part et modalits
pistmiques, de lautre semble tre :
a) une relation de ralisation : la vridiction est une opration cognitive qui sexerce comme un
savoir sur les objets du monde (Greimas 1976 : 95, nous soulignons) ;
b) une relation de prsupposition (pragmatique) : si la modalisation vridictoire se laisse
interprter comme comptence cognitive dun sujet (comptence lgitimant le savoir-vrai ) qui
statue sur la performance pragmatique dun autre sujet (en loccurrence, sur le produit de
lnonciation de ce dernier) cf. idem, p. 96, o statuer sur serait la performance cognitive
associe cette comptence la modalisation pistmique (selon le /savoir/, toujours), se laisserait
dfinir (dans un inventaire ouvert, comportant aussi les modalisations selon le /pouvoir/, le /devoir/ ou
le /vouloir/) comme sur-modalisation de la comptence 305 .
Nous restons rserve quant la dfinition des modalits vridictoires comme modalits pistmiques
dtat , attribue Greimas 1976 (dans Drghicescu 1981 306 : 140), et surtout quant la lgitimation de cette
dfinition : modalits pistmiques, puisquelles relvent de la comptence de lnonciateur qui prend son
compte les positions cognitives dun nonciateur antrieur (). Modalits dtat, puisque lnonc sur lequel
lnonciateur porte son jugement pistmique est un nonc dtat .
En effet, lnonc modalis par il est vrai que (par exemple) peut tre aussi bien (selon le classement de
Greimas 1976 mme) un nonc de faire. Il est vrai que Paul [a tu Sylvie/ a commis une grosse bvue] est
tout aussi vridictoire que : Il est vrai que Paul [est un tueur/est dans lerreur]. Dautre part, voir dans le
vridictoire une catgorie pistmique sans autre nous semble marger (mme) la thorie greimassienne des
modalits (telle que prsente dans Greimas 1976).
Nous proposerons ici de reformuler la distinction vridictoire/ pistmique en termes de la porte des deux
types de prdications modales, ainsi que le suggre Robert Martin (Martin 2001) : la modalisation vridictoire
concernerait alors les noncs, et la modalisation pistmique, les tats de chose (sur lesquels ces noncs
portent). Ce qui nous cotera un dtour par la dfinition des concepts modalit de re/ modalit de dicto
chez Robert Martin.
Rappel (cours introductifs) :
Modus/ dictum.
Structure de la phrase modalise : modus + dictum.
Je crois (MODUS) que les tudiants sont partis (DICTUM).
Toute phrase a un dictum et un modus, mais la structure syntaxique ne soutient pas toujours aussi
directement cette structuration smantique.
Modalit de re/ modalit de dicto.
Porte de la modalit (du modalisateur) : interne/ externe (au dictum).
Modalit de dicto : porte extra-prdicative (externe au dictum). Je crois (MODUS) que les tudiants sont
partis (DICTUM).
Modalit de re : porte intra-prdicative (interne au dictum). Les tudiants sont sans doute partis.
Termes remontant Thomas dAquin (De modalibus) : propositions modales de re (quand le modus
est insr dans le dictum : Socrate peut courir) / propositions modales de dicto (modus prdiqu
dun dictum sujet : Que Socrate coure est possible/ il est possible que Socrate coure).

305

Comptence pragmatique (orient vers/ conditionnant le faire somatique305) ou cognitive (oriente vers/ conditionnant le
faire cognitif305) ? Nous prsumons que la surmodalisation pistmique (selon le /savoir/) concerne (selon Greimas 1976) la
seule comptence cognitive. Autrement dit : lpistmique sur-modalise(rait) le vridictoire (ce que capte la formule
mtalinguistique de /savoir-vrai/).
306
Drghicescu, Janeta 1981 La valeur modale avr> en franais et en roumain type de modalit vridictoire , in :
CRISTEA, Teodora et al. (1981), Les Modalits. Etudes contrastives, Bucuresti : TUB, 140-172.

101

La distinction de dicto/ de re chez Robert Martin (Martin 2001 307) :


De dicto : propos des propositions (noncs) propos donc de ce qui est dit .
De re : propos des tats de choses (dcrits dans ces propositions (noncs)) propos donc de ce qui
est 308.
La modalit de dicto attribue une valeur de vrit la proposition (cf. possibilit de dire : La proposition Marie
est revenue est vraie/ fausse, mais non : *La proposition Marie est revenue est possible).
La modalit de re value la probabilit doccurrence dtats de chose (cf. possibilit de dire : Le retour de Marie
est certain/ probable/ possible, douteux/ exclu, mais non : * Le retour de Marie est vrai).
Dans cette logique, les modalits pistmiques seraient de re , linstar des modalits althiques (cf. Le
retour de Marie est ncessaire /impossible) ou dontiques (cf. Le retour de Marie est obligatoire/ interdit).
Il va sans dire quici le terme de re nest pas entendu comme quivalent de : intra-prdicatif , ni de dicto,
comme quivalent de extra-prdicatif .
Nous en retiendrons la distinction tats de choses/ noncs sur ces tats de choses, et reformulerons
explicitement la distinction entre modalits pistmiques et modalits vridictoires, en termes de cette
distinction : modalits pistmiques tats de choses, modalits vridictoires propositions (noncs).

6.4.3. Modalits explicitant, dans le discours, la sous-catgorie <VRAI> : <vrifi>, <vident>,


<avr> 309.
<vident>

<VRAI> - <vrifi>
<avr>

qui simpose lesprit


qui est saisi par la perception/
constatation directe
connu comme tel par laffirmation
(faible, forte)
connu comme tel par la
confirmation
connu comme tel par la
dmonstration

5.2.4.4. Emploi des formes verbales dans lnonc modalis vridictoirement (indicatif ?
subjonctif ?)

Il est vrai que entrine 310 lassertion (on est en droit dire il est vrai que p condition que lon
sache que p soit le cas, autrement dit si lon avait le droit de dire aussi je sais que p 311), ce qui
explique lusage de lindicatif (+ indicatif) ; et cela vaut des emplois o la prise en charge par le
locuteur est maximale (1), comme dans ceux o le locuteur ne fait que concder la vrit de p ( son
interlocuteur (2)) :

(1) Il est vrai quil fait froid [le locuteur sort sur la terrasse, en bras de chemise, et constate par lui-mme la
temprature extrieure 312, ou bien : le locuteur est bien au chaud le soir, dans son sjour, devant la tl, et
commente la Mto, qui vient dannoncer -20C Bucarest pour le soir en question 313).
307

MARTIN, Robert (2001) Sur la smantique du possible , Revue de Linguistique Romane, Janvier-Juin 2001, Nos
257-258, Tome 65, 5-23.
308
Autrement dit : propos des tats de chose (le nom res (ABLATIF re) signifiant, en latin, prcisment cela : chose ).
309
Cf. Drghicescu 1981.
310
Au cas o vous lavez oubli, cela veut dire : valide , confirme .
311
Il sagit donc dune condition pralable de lacte de langage ralis en disant il est vrai que p (= prsuppos
pragmatique). La distinction est importante, pour comprendre que la ngation de il est vrai que p ne continue pas impliquer
je sais que p , pour signifier je sais que non-p (contrairement la prsupposition smantique ou lexicale, non affecte
par la ngation du pos,: les noncs Jean continue de fumer et Jean ne continue pas de fumer impliquent tous les deux que
Jean a fum par le pass).
312
Dire alors il est vrai quil fait froid plutt que : il fait vraiment froid met en scne un dialogue (ne serait-ce que virtuel) ; le
locuteur peut en effet dire il est vrai quil fait froid, en ayant dcouvert cet tat de chose :
si quelquun a de fait soutenu quil faisait froid, auquel cas lnonc il est vrai quil fait froid sera interprt
comme confirmation de cet nonc antrieur rel ;
en labsence de dialogue rel, pour confirmer verbalement une hypothse telle il doit faire froid aujourdhui ,
quil aura lui-mme entretenue avant de sortir (et de la vrifier par les sens).

102

(2) Il est vrai quil fait froid, mais je sortirai quand mme.
Bien que rput marquer un jugement de vrit actualis par affirmation (seulement) faible ( lencontre de : il
est incontestable, indubitable, indniable que qui marquent un jugement vridictoire actualis par affirmation
forte) 314, il est vrai que savre tre rbarbatif au subjonctif mme dans des circonstances amenant
normalement lemploi de ce mode avec les verbes dopinion, de dclaration ou de perception savoir la
forme ngative, la forme interrogative, sous un si conditionnel.
Deux explications de possibles ( premire vue) :
1) Lexpression vridictoire volue (aura volu) prfrentiellement vers une smantique du type de
SAVOIR QUE p (elle ne sait pas que p, vous ne savez pas que p, savez-vous que p 315 o p est
lindicatif) plutt que vers une smantique du type de CROIRE/ PENSER QUE p (je ne crois/ pense pas
que p/ croyez-vous que p o p est (de prfrence) au subjonctif). On peut y voir le reflet
linguistique (syntaxique) du statut pragmatique (illocutoire) de lacte de vridiction, qui a le savoir
pour condition prparatoire. Contre-argument : tant lnonciation de (a) Il est vrai que les tudiants
ne sont pas partis que celle de (b) Il nest pas vrai que les tudiants sont partis, mengagent,
moyennant le jeu des ngations, lassertion de la mme condition prparatoire 316 : Je sais que les
tudiants ne sont pas partis, ou lassertion de Les tudiants ne sont pas partis (tout court). cet
gard, il est vrai que p se comporte donc plutt comme croire que p et non comme savoir que p. En
effet, Je crois que non-p et je ne crois pas que p engagent lassertion de non-p, alors que je savais
que non-p engage je sais que non-p, et non-p, tandis que je ne savais pas que p, lassertion de
je sais que p ou de p (tout court).
2)

Lexpression vridictoire prdique justement de la proposition asserte, et non de ltat de chose dcrit
par celle-ci (voir distinction de Martin 2001), aussi lemploi typique serait-il celui de citation directe
aprs il est vrai que (soit la notation logique il est vrai que p ). Or cet emploi (le style direct
li de la grammaire normative roumaine 317) a pour vertu dfinitoire de suspendre les effets
syntaxico-smantiques de lenchssement, qui devient trivial (enchssement, oui, subordination non).

Il nest pas vrai que + indicatif en citation directe :

Il nest gnralement pas vrai que trop dimpts tue limpt .


(Dominique Taddi, Transformer les finances publiques , deuxime partie,
in Forum de la Gauche Citoyenne du lundi 21 novembre 2005,
sur : www.forumgc.org)
Il nest pas vrai que plus on pense, moins on sent [enfin, un INDICATIF indubitable, non homonyme du
subjonctif !], mais il est vrai que plus on juge, moins on aime.
(Chamfort, sur : www.evene.fr/citations)

En contexte doublement marqu pour le doute (si oppositif et ngation du marqueur vridictoire), sous
la plume dun conomiste amricain, nous retrouverons il nest pas vrai que + subjonctif (par
assimilation je ne crois pas que) :

Effectivement, sil nest pas vrai que le march mondial soit vraiment plus ouvert aujourdhui
quhistoriquement, il est encore moins vrai quil nexiste [toujours SUBJONCTIF ( ?)] pas dalternatives.
(WALLERSTEIN, Immanuel (2002) La Mondialisation nest pas nouvelle ,
Le Capitalisme historique, Postface la seconde dition,
sur : www.binghamton.edu/fbc/wpost-12.htm)

la forme interrogative aussi, lindicatif cde le pas au le subjonctif, en contexte oppositif (si p, est-il
vrai pour autant que q ?):

Si donc la mondialisation nest pas la bonne faon de caractriser la situation actuelle, est-il vrai pour autant
que rien ne soit nouveau ?

313
Mme remarque que dans le cas du scnario de constat (vrification par les sens) : il est vrai que p continue exprimer la
confirmation ou bien dune nonciation antrieure relle de p (les dires du prsentateur de lmission peuvent fonctionner
comme antcdent discursif), ou bien dune nonciation seulement virtuelle.
314
Cf. Drghicescu 1981 : 149-150.
315
Comparez Savez-vous que la prof est arrive lheure ? : Croyez-vous quelle soit arrive lheure ?
316
Comme nous lavons dj signal, lnonciation de Il est vrai que les tudiants sont partis et lnonciation de Il nest pas
vrai que les tudiants sont partis mengagent respectivement vers je sais quils sont partis et je sais quils ne sont pas
partis (conditions prparatoires (ou : prsupposs pragmatiques) contraires).
317
Exemple : Zice c vii sau nu vii, mai Ioane ? Comparer aux questions indirectes correspondantes (vraie subordination). Si
la question indirecte a pour allocutaire Ion : Vrea s tie dac vii sau nu (vii). Si la question indirecte a pour allocutaire un
tiers : Vrea s tie dac Ion vine sau nu (vine).

103

(Wallerstein 2002)

partout ailleurs, lindicatif lemporte aprs la forme interrogative du modalisateur vridictoire :

Est-il vrai que Tom Cruise, Alain Souchon, Depardieu sont timides ?
Est-il vrai quil nest pas bon pour les chats de manger souvent du thon ?
Est-il vrai que cela peut abaisser mon taux de cholestrol ?

(http://fr.answers.yahoo)

(Cano Sant)
Sil est vrai que + indicatif (alors que le bon usage requiert un subjonctif, en suspension de
lassertion (et de la croyance) aprs les verbes dopinion, de dclaration ou de perception enchsss
sous si conditionnel/ hypothtique 318 cf. Hanse 1991 : 902) 319 :

Sil est vrai que cest travers les expriences diverses que se dveloppe le savoir-faire, cette anne en sera
encore une fois le reflet 320. (www.iet-notre-dame.be).

Le subjonctif dit dattraction semble galement bloqu (il est vrai que tant lui-mme au subjonctif
continue entriner lassertion):

Bien quil soit vrai que, toutes choses gales par ailleurs, une amlioration du chiffrage du refroidissement
associ aux arosols devrait [CONDITIONNEL 321] conclure une amlioration de lestimation de la sensibilit
climatique, les barrires derreur sont trop grandes ()
(www.reclimate.org)
Dans le cas des noncs interro-ngatifs, orients par hypothse 322 vers laffirmation, lindicatif est de
toute manire attendu, vu la prise en charge par le locuteur lui-mme (question appel dadhsion vs
vraie question appel dinformation):
Vous navez pas vu ma main. Nest-il pas vrai quelle est belle ? (Marivaux, apud Good, Kathleen F. (1986)
Truth and signification in Marivauxs Monde Vrai, Eighteenth-Century Studies, Vol. 19, N3 (Spring 1986), The
John Hopkins University Press, 355-372).

Il est faux que + subjonctif

Il est faux que vous mayez vu l, je ny tais pas.

(Nouv. P. Rob. 2007)

Il est faux que lacte extrieur ne soit pas proprement bon en lui-mme.
Il est faux que nous ne devions recevoir que passivement et ngativement le choc des passions (Jacques Rmi
A. Texier et al., 1860, Encyclopdie tologique, p. 1038, sur : http://boks.google.ro )
Il semble donc que le raisonnement valant de il est vrai que ne vaut plus de son contradictoire 323 il est faux
que, dont le comportement syntaxique lapparente aux expressions pistmiques. Notons toutefois qu la
faveur de lexplicitation de lopration cognitive et/ou nonciative en quoi le jugement vridictoire
consiste, il est faux que recouvrira laptitude de il est vrai que prdiquer de la proposition asserte, plutt
que de ltat de chose dcrit par celle-ci (au sens de la de Martin 2001). Nous aurons, en effet :

Il est faux de dire, de prtendre, de croire que + indicatif,

318

Comparer donc sil est vrai que [cela est/ ?*soit utile] plutt : Sil sait que [cela est (*soit) utile], qu : sil croit que
[cela soit (+ est) utile], qui privilgie le subjonctif, tout en tolrant aussi lindicatif aprs si conditionnel/ hypothtique.
319
Le subjonctif doit tre employ aprs la forme ngative ou interrogative des verbes dopinion, de dclaration ou de
perception (). De mme sils sont introduits par un si conditionnel . Mais lauteur ne manque pas de nuancer : Lusage
actuel est beaucoup moins rigoureux que celui du XIXe sicle (Hanse, 1991 :902).
320
Le co-texte suivant le passage directement pertinent labore le thme de ces expriences diverses : Ds septembre, nos
lves de 7me Gestion dInstitut de Beaut ont dcouvert un mode particulier o strass et paillettes sont de mise : maquiller
les jeunes prtendantes au titre de Miss Hainaut 2008 fut une approche nouvelle du maquillage et participer au dfil du
groupe de Je suis moi et a se voit .
321
Comparer lnonc sans enchssement, pour vous convaincre de ce que lemploi du conditionnel, ici, va dans la mme
direction que lemploi de lindicatif : non vers la suspension de lassertion, la faveur de la subordination une ide de
doute, mais vers lassertion (ft-elle affaiblie). Une amlioration du chiffrage du refroidissement associ aux arosols devrait
conclure une amlioration de lestimation de la sensibilit climatique.
322
Au cas o vous lavez oubli, cela veut dire : par dfinition .
323
Contraire, dans une logique plurivalente qui accepte le ni vrai ni faux comme tierce valeur de vrit (parfois nomme
indcidable).

104

alors mme que ne pas dire que, ne pas prtendre que (dans leurs acceptions respectives dclaratives/
dopinion et non quand ils signifient exiger ), linstar de ne pas croire que sont typiquement suivis du
subjonctif (expression de lincertain, du doute 324). Comparez :
Il est faux de dire, en gnral, que nous agissons [INDICATIF !] toujours prudemment lorsque nous choisissons
le parti le moins probable, pourvu quil garde encore quelque probabilit de preuve intrinsque ou extrinsque.
(Jacques Rmi A. Texier et al., 1860, Encyclopdie tologique, p. 1038, sur : http://boks.google.ro )
Il est faux de dire que les crdits de la ville ont [INDICATIF !] baiss de 30% La Courneuve (prcisions
concernant la mise en uvre du Plan de cohsion Sociale dans cette localit).
sur : www.travail-solidarite.gouv.fr/ ).
5.2.4.5. Modalits pistmiques, sources du savoir et degrs dadhsion. Le mdiatif (ou :
testimonial, ou encore : videntiel).

Dans lespace anglophone, ltude des sources du savoir redouble, en lisr, ltude des modalits
pistmiques, sans pour autant sy confondre. Savoir une chose et se donner les moyens de justifier cette
attitude pistmique restent choses distinctes.
Cest dans ce paradigme thorique que nous devons situer lvidentiel (correspondant franais de langlais
evidential). Ne pas ramener ce terme la notion (au demeurant vridictoire) d<vident>, qui ne correspond
(au mieux) qu un cas particulier dvidentiel : qui est saisi par la perception/ constatation directe ).
quivalents franais : testimonial (si le tmoin invoqu est la source allgue plutt que le locuteur lui-mme
au moment de la parole), mdiatif (terme qui focalise sur lentit intermdiaire du savoir)
Perception :

Je me suis laiss dire que (+jai entendu dire


que) Paul tait parti pour Londres.

Selon Nathalie, tout le monde est emball par les


Fruits dOr.
Il parat que tout le monde est emball par les
Fruits dOr.
Sources du savoir

Emprunt :

Tout le monde est emball par les Fruits dOr,


ce quil parat (Sarraute 1963 :133 325, apud
Cristea 1983 : 88).
Le Pape aurait quitt Bucarest vers quatre heures
de laprs-midi.

Infrence :

La secrtaire ne rpond pas au tlphone


[=prmisse de raisonnement]. Elle peut avoir t
appele chez le directeur [=conclusion] 326.

La notion de mode mdiatif.


La notion de mode mdiatif plonge ses racines dans une tradition troitement lie la description particulire
des langues ( linstar de notions telles les notions daspect et de mode de procs (Aktionsart)). Certains
auteurs suggrent dintgrer le mdiatif, aux modalits pistmiques, ne serait-ce que par extension :

324

Je ne dis pas quil lait fait : jhsite laffirmer (P. Rob. 1990)
Je ne prtends pas quil lait dit ou quil la dit. Prtendez-vous quil la dit ? ou quil lait dit ? (comme croire, le verbe
serait sujet hsitation entre subjonctif et indicatif, sans que cela ne soit ncessairement/ rgulirement doubl dune
quelconque contrainte interprtative (orientation prfrentielle vers la certitude ou vers le doute). Mais : je ne prtends pas
(=je naffirme pas) quil le fera (le subjonctif (fasse) donnerait prtendre le sens dexiger (Hanse 1991 : 773).
325

Nathalie Sarraute (1963) Les Fruits dOr, Paris : Gallimard.


Exemple emprunt : Tutescu, Mariana (2005) LAuxiliation de modalit. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura
Universitatii din Bucuresti, p. 57.
326

105

On peut tendre la notion de modalit pistmique aux cas o il s'agit de l'attitude du locuteur par rapport
ce dont il parle, non pas au moment o il en parle, mais au moment o il en a pris connaissance. Un exemple
spectaculaire en est fourni par les systmes verbaux comme celui du bulgare, o des formes diffrentes
marquent que le locuteur a ou n'a pas t lui-mme tmoin des faits qu'il prsente. Dans le premier cas, les
grammairiens parlent de mode non mdiatif, dans le second, de mode mdiatif, ou, en anglais, d'
evidentiality [sic]. l'intrieur de ce dernier, il peut y avoir encore des formes diffrentes selon que la
connaissance a t obtenue par ou-dire, ou par dduction partir d'indices (NB: on utilise souvent en franais
les termes testimonial et non testimonial , mais le mot testimonial , construit l'origine pour traduire
l'anglais evidential , dsigne aussi quelquefois le mode non mdiatif: l'ambigut tient ce qu'on ne prcise pas
qui est le tmoin: le locuteur lui-mme, ou la source laquelle il se rfre?)
Ces distinctions ne sont pas aussi nettement marques dans la morphologie du verbe franais. Mais elles
existent dans la langue. Ainsi une phrase comme Il parat que Jean est Paris indique que la prsence de
Jean a t signale au locuteur par quelqu'un d'autre. L'intressant, dans cette structure, est qu'elle ne relve
pas du simple discours rapport: Il parat que... ne sert pas rapporter l'existence d'une opinion que l'on
pourrait ensuite, ventuellement, dclarer fausse. Au contraire le locuteur de Il parat que... prend son
compte cette opinion qui ne vient pas de lui: il fait comme si elle tait juste, et il en tire des conclusions. (Il
parat que Jean est Paris, va le voir) Ducrot, Schaeffer, et al., 1995: 585 (apud Laureandeau 2004) 327.

Les exemples strictement morphologiques de mdiatf existent d'ailleurs bel et bien en franais aussi: le
conditionnel dit de distance (ou encore : journalistique, selon lemploi prototypique de cette forme verbale)
comporte bien la mdiation implicite d'une source : Le premier ministre partirait pour Isral 328. la diffrence
du ralisateur lexical il parat que (+ indicatif), avec le conditionnel de distance, le locuteur ne reprend pas
son compte la croyance ou les dires de la source implicite.
Dautres auteurs, au contraire, prennent le parti de distinguer mdiation et modalits pistmiques :
Dans la conception large, lvidentialit englobe la notion de modalit comme expression de lattitude
pistmique du locuteur. Dans la conception troite, lvidentialit est le pendant et le complment pistmique
de la modalit. Il nous semble quon ne peut que gagner en clart si lon oppose, plutt quon nintgre, les
concepts de modalit et dvidentialit et quon rserve donc le terme de modalit lexpression de lattitude
du locuteur et celui dvidentialit lexpression du mode de cration et/ ou de rcolte de linformation, quitte
utiliser ventuellement un autre terme par exemple celui de marquage pistmique comme hyperonyme
mtalinguistique, pour souligner le lien naturel qui existe entre les deux phnomnes linguistiques.
Dendale & Tasmowski 1994 329, apud Tuescu 2005 330 : 56.
La question des sources du savoir est galement au cur de la problmatique, plus large, de ladhsion du
locuteur aux informations quil prsente. Notion graduelle sil en est : adhsion totale < adhsion partielle <
rserve subjective < mise distance < refus dadhsion (non adhsion).
Lvidentiel (testimonial, mdiatif) grammaticaliserait alors la mise distance (Cristea 1983 331 : 82-84).

327

Laurendeau, Paul (2004) Modalit, opration de modalisation et mode mdiatif , Delamotte-Legrand. R. dir. Les
mdiations langagires, Volume l, Des faits de langue aux discours, Dyalang CNRS, Publications de l'Universit de Rouen,
Rouen, pp 83-95.
328
Exemple et commentaire emprunts Laurendeau 2004.
329
Dendale, Patrick et Liliane Tasmowski (1994) Prsentation , Langue Franaise 102, mai1994. Numro ddi
justement ltude des marques linguistiques des sources du savoir.
330
Tutescu, Mariana (2005) LAuxiliation de modalit. Dix auxi-verbes modaux, Bucuresti : Editura Universitatii din
Bucuresti.
331
Cristea, Teodora (1983) Ladhsion et ses ralisations linguistiques en franais et en roumain , in : Cristea, Teodora
et Alexandra Cunita (1983) nonciation et contrastivit. Etudes contrastives, Bucuresti : TUB, 24-98.

106

5.2.5. La zone des modalits dontiques et ses ralisateurs en franais.


Pour la mmoire, le carr dontique :

Obligatoire

Interdit

(=OBLIGATOIRE QUE P)
(=NON PERMIS QUE NON-P)

(=NON PERMIS QUE P)


(=OBLIGATOIRE QUE NON-P)

Permis

Facultatif

(=PERMIS QUE P)
(=NON OBLIGATOIRE QUE NON-P)

(= NON OBLIGATOIRE QUE P)


(= PERMIS QUE NON-P)

OBLIGATOIRE (DEVOIR FAIRE, NE PAS POUVOIR NE PAS FAIRE)

Verbes modaux

Obligation interne (morale) : se devoir de + inf., avoir + inf., force m(t, lui, nous, vous, leur) est de +
inf., il me (te, lui, nous, vous, leur) faut (fallait, faudra, faudrait, ) + inf. ;
falloir + subj., devoir + inf.

Je me dois de le prvenir.
Force lui fut de reconnatre quil avait tort.
Jai lui parler/ Je nai rien faire/ Avoir des lettres crire

(Nouv. P. Rob.2007)

Obligation externe : devoir, falloir + inf., falloir + subj. ; tre tenu (+SN, +inf.)/de (+inf.), tre forc de,
tre oblig de, tre dans lobligation de + inf. 332; valoir mieux (il vaut mieux (+mieux vaut)) + inf., subj., il
convient de + inf. ( tre conforme aux usages, aux ncessits, aux besoins ), il convient que, il est
souhaitable que + subj. ; navoir qu + inf.

Le mdecin est tenu au secret professionnel. ( doit garder )


A limpossible nul nest tenu.
Le prince tait tenu ne pas quitter le sol de lInde (Lotti). 333
Ce devoir de refus et de rbellion est le dernier dont ils se croient tenus de sacquitter (Caillois).
Il sest cru oblig dintervenir.
Vous ntes pas obligs de me croire.
Il convient de respecter une minute de silence.
Il convient que vous y alliez.
Vous navez qu tourner le bouton/ Tu nas qu ten aller, si a ne te plat pas/ Il na qu bien se tenir.
(Nouv. P. Rob.2007)

dontique thorique :

Nous devons nous opposer linjustice autant que les lois le permettent (Montherlant, apud Kronning
2001 : 67).

332

En revanche, obliger qqn faire qqch (en particulier avec un sujet anim) a un fonctionnement descriptif vs
modal : Ses parents lont oblig travailler (Nouv. P. Rob. 2007). La chose est moins assure avec un sujet
gnrique (inanim, abstrait) : Tout nous oblige admettre son existence (Paulhan, apud Nouv. P. Rob. 2007).
333
Dans le tour, juridique (droit commercial), Le preneur est tenu des dgradations, tre tenu de + SN signifie
[ rfrent du SN] est/sont la charge du [rfrent du sujet] ( les dgradations sont la charge du preneur ).

107

dontique pratique (obligation pratique):

Pour atteindre le boulevard Montparnasse, jai d me frayer un chemin travers les couples dansants
(Mauriac, apud Kronning 2001 : 67).

Il faut manger pour vivre, non vivre pour manger (lecture gnrique vs spcifique dontique thorique).
Il faut partir ds que possible.
=Il faut que lon parte ds que possible (rfrence spcifique vague obligation pratique ou obligation interne).

Adjectif oprateur de phrase ddi : obligatoire (il est obligatoire de+ inf., que + subj.).

Il est obligatoire de passer une visite mdicale. (Nouv. P. Rob. 2007)

Adverbe modalisateurs : obligatoirement.

Vous devez obligatoirement prsenter votre passeport la frontire. (Nouv. P. Rob. 2007).

PERMIS (POUVOIR FAIRE, NE PAS DEVOIR NE PAS FAIRE)

Mtalangue vs ralisateurs en langue naturelle : pouvoir faire (MAIS AUSSI : pouvoir ne pas faire 334) ; ne
pas devoir faire (plutt que : ne pas devoir ne pas faire, par trop analytique) ;
lexmes ddis : permettre ( qqn, de faire qqch), autoriser qqn faire qqch. ; tolrer, admettre, souffrir
supporter que + subj.

Je vous autorise ne pas y aller (Nouv. P. Rob. 2007)


Vous pouvez y aller (si vous en avez envie)/ Vous pouvez ne pas y aller, si vous nen avez pas envie.
Tu ne dois pas y aller, si tu ne veux pas.
Son patron lui a permis de ne pas venir travailler ce matin (Nouv. P. Rob. 2007)
Elle me permit plusieurs fois de lui donner un baiser (Rousseau, apud Nouv. P. Rob. 2007)

Ils nauraient pas tolr quon fermt ce cercle [de jeu] (Morand, apud Nouv. P. Rob. 2007)
Il ne supporterait pas plus longtemps quon se ficht de lui (Gide, apud Nouv. P. Rob. 2007)
Sil marrivait de me convertir, je ne souffrirais pas que cette conversion ft publque (Gide, apud Nouv. P.
Rob. 2007)

INTERDIT (DEVOIR NE PAS FAIRE, NE PAS POUVOIR FAIRE)

Mtalangue vs ralisateurs en langue naturelle : ??devoir ne pas faire/ OK ne pas devoir faire ; ne pas
pouvoir faire ;
Verbes ddis : interdire, dfendre ( qqn, de faire qqch) ; expression performative : dfense de + infinitif.

FACULTATIF (NE PAS DEVOIR FAIRE, POUVOIR NE PAS FAIRE)

Mtalangue vs ralisateurs en langue naturelle : ne pas devoir faire (accent focal sur le modal plutt que
sur la ngation) ; pouvoir ne pas faire (MAIS AUSSI : pouvoir faire 335), surtout en prsence de ladverbial
toujours

Modaux ddis (verbes + adv. toujours) : avoir (toujours) la facult de + inf., pouvoir (toujours) + inf.

Vous avez toujours la facult de refuser (Nouv. P. Rob. 2007)/ Vous pourrez toujours refuser/ Vous pourrez
toujours ne pas y aller.

Tu ne dois PAS y aller, quoi quil arrive (INTERDIT)


Tu ne dois PAS y aller si tu ne veux pas (PERMIS)
Tu ne DOIS pas y aller (FACULTATIF) 336

Devoir dontique/ devoir pistmique : critres distinctifs


Classes de prdications (mode daction et modalit) :
Elle est fatigue. Elle doit manger/ partir/ rentrer (tat activit/ vnement dynamique : OBLIGATION
EXTERNE).
Elle est fatigue. Elle doit dormir/ se reposer (tat, tat : OBLIGATION INTERNE)
Temporalit et modalit : tat1 (pass : prmisse de raisonnement), tat2 (infrence) :
Elle tait fatigue. Elle doit dormir/ se reposer dormir (maintenant). : INFERENCE, PROBABILITE.
334

Mtalinguistiquement dfinitoire du FACULTATIF.


Mtalinguistiquement dfinitoire du PERMIS.
336
Suite attendue : ____mais tu PEUX le faire.
335

108

5.2.6. Polysmie des verbes modaux pouvoir et devoir.


5.2.6.1. Notions opratoires.

Valeur radicale/ valeur pistmique 337 : une saisie lexico-smantique.

La valeur radicale correspond la valeur d'origine du verbe modal (sens lexical premier), la valeur pistmique,
une acception drive ; le verbe modal en vient ainsi indiquer un degr (quelconque) de probabilit
d'actualisation du procs, allant du moins probable (ventualit) au trs probable (vraie probabilit
d'actualisation, quasi-certitude) : les modaux vocation smantique premire althique et/ou dontique
peuvent tous dvelopper des valeurs pistmiques (selon le cas : ventuel, probable).
Valeurs radicales des verbes pouvoir et devoir
Nature du causatif
Causatif externe (au sujet)
[-anim]
Causatif externe (au sujet)
[+humain]/ [+anim]
Causatif interne (au
sujet : proprit stable du sujet)

POUVOIR
possibilit 338

DEVOIR
ncessit

permission 339

obligation

capacit 340

___

(cf. Sueur 1979)


Noter labsence de corrlat pour la lecture radicale de capacit du verbe pouvoir, dans le cas du modal
devoir. Il manque ce verbe modal, selon lanalyse cite, lexpression dune ncessit dont le causatif serait de
lordre des qualits inhrentes du sujet emploi ralise, dans les langues germaniques, par des verbes
distincts de ceux qui expriment typiquement la ncessit externe : voir lopposition sollen (ncessit externe)/
mssen (ncessit interne), en allemand.
Vetters 2004 341 identifie ce type demploi du verbe franais devoir (quil appellera auto-obligation ) dans un
roman de srie noire clbre, port lcran, en 1983, avec Lino Ventura dans le rle dAldo : [Aldo] pouvait
avaler une boisson brlante, tandis quAnselme devait attendre quelle tidisse (Le Ruffian, p. 32). Nous ne
manquerons pas de noter que le paralllisme pouvoir (capacit)/ devoir (___ ?) favorise sans doute
linterprtation de ncessit causatif interne pour devoir. Nempche que les exemples allemands
mssen et valeur caractrise de ncessit interne se laissent certes traduire en franais par devoir, mais le
sont, le plus souvent, par avoir besoin de voire par double ngation de pouvoir radical interprtation de
capacit (ne pas pouvoir ne pas) 342. Pour argument en faveur de la valeur dauto-obligation, voir aussi Barbet
2008 343.
Il faut en outre noter que, dans les exemples se prtant interprtation en termes de proprit inhrente
stable du sujet (appele, dans la littrature, souvent : disposition do : interprtation dispositionnelle vs
pisodique), cette proprit sera typiquement inattendue, insolite, avec pouvoir (interprtation de capacit),
mais notoire, attendue, avec devoir (cas particulier de ncessit pratique ? auto-obligation ?) :
Le mercure peut svaporer./ ???Leau peut svaporer.(OKLeau svapore)
Les colibris peuvent voler reculons. / ?? Les colibris peuvent voler. (OKLes colibris volent)
Lhomme doit mourir.
Tt ou tard, notre soleil doit exploser.

Modalit du faire/ modalit de ltre 344 : proprits smantiques du dictum.

337

Tradition anglo-saxone.
Source de la possibilit = conditions matrielles possibilit matrielle (Le Querler 2001 : 22).
339
Source de la possibilit = anim humain permission (idem).
340
Source de la possibilit = qualit du sujet capacit (ibid.)
341
Vetters, C. (2004) Les verbes modaux pouvoir et devoir en franais, Revue belge de philologie et dhistoire LXXXIII, p.
657-671.
342
Ich musste enorm viel schlafen : Moi-mme javais besoin dnormes quantits de sommeil. http://www.linguee.de/deutschfranzoesisch/uebersetzung/ich+muss+schlafen.html; et, dans le dictionnaire allemand-franais de Pierre Grappin (Larousse
1963), on retrouve la mme tendance ne pas rendre par devoir les occurrences lecture d auto-obligation de mssen :
Man musste die Klarheit seiner analyse bewundern : on ne pouvait pas ne pas admirer la clart de son analyse. Da muss ich
lachen : laissez-moi rire !
343
Ccile Barbet note, dans son projet de thse : Van der Auwera & Plungian (1998: 80) parlent quant eux, dans leurs
cartes smantiques diachroniques de la modalit, de participant internal necessity (need) ; ils proposent lexemple (2), que
lon peut aisment traduire en franais avec devoir, cf. (3) :
(2) Boris needs to sleep ten hours every night for him to function properly.
(3) Boris doit dormir dix heures par nuit pour tre en forme, tre efficace (Barbet 2008 : 2).
Dautre part, elle propose de rinterprter lauto-obligation comme cas particulier de ncessit pratique.
344
Krnning 1996, 2001. Les valeurs modales du verbe devoir, dans Krnning 1996 : 4.1. sont en effet dfinies en termes de la
distinction (mtalinguistique) TRE/ FAIRE TRE: NCESSIT DE FAIRE TRE vridicible (ncessit dontique : obligation/
NCESSIT DTRE vridicible (ncessit logique : ncessit althique)/ NCESSIT DTRE non vridicible mais montrable
(ncessit pistmique : haute probabilit) cf. op. cit., p. 29 ; 72. Nous avons explicit, ici, lopposition <faire (tre)/ tre>
en termes du contenu smantique de la proposition modalise, dans une perspective explicite dinterprtation de lnonc
(discrimination de la valeur modale).
338

109

Les valeurs radicales du verbe modal ne sont compatibles quavec un prdicat modalis de lordre des activits
(Elle peut[capacit]/ doit [obligation] nager pendant trois heures), des accomplissements (Elle peut [capacit]/
doit [obligation] peindre le tableau en une heure) ou des achvements (Si quelquun peut [capacit] trouver
votre chien en moins de 24 heures, cest bien elle/ Elle doit [obligation] trouver votre chien en 24 heures/ Les
lves internes peuvent [permission] sortir jusqu telle heure/ doivent [obligation] rentrer avant telle heure)
tous ces dictums tant de lordre du faire, donc.
La valeur pistmique, par contre, est surtout compatible avec un prdicat modalis de lordre des tats : Elle
peut/doit tre fatigue, Elle peut/doit aimer la linguistique 345 ou avec les formes perfectives de prdicats du
faire, qui envisagent la situation concerne (activit, accomplissement ou achvement) en question comme
ayant atteint sa limite finale : Elle peut [ventualit : probabilit faible]/ doit [probabilit forte] avoir nag
pendant trois heures.

Modalit rfre au sujet/ modalit rfre lnonciateur 346 : relation du modal au sujet
grammatical.

Les valeurs modales radicales seraient rfres, au premier degr, au sujet grammatical du modal, et
seulement au second degr, lnonciateur (Guimier 1989).
Cest ce que signale par ailleurs aussi la qualification de modalits orientes vers lagent
(Bybee & al. 1994).
Par contre, les valeurs modales pistmiques seraient directement rfres lnonciateur.

Porte smantique 347 intra-prdicative/ extra-prdicative : relation de lauxiliaire modal au


verbe plein (oprations de vise phrastique diffrentes) 348.

Les valeurs radicales seraient conditionnes selon cette analyse, une coalescence du modal avec le verbe
modalis. Le modal (entendu alors comme auxiliaire) porterait sur le verbe plein (et son ou ses
complments slectionns, obligatoires ou optionnels 349 donc en fait : sur le prdicat), en-de de la relation
de celui-ci avec le sujet. Le sujet serait incident (au sens guillaumien du terme) lensemble
{modal+verbe+}, et non pas au prdicat modalis tout seul, ni au modal pris de manire autonome.
La distinction entre valeurs modales radicales et valeurs modales pistmiques dun mme marqueur
modal supposment polysmique serait ramener des oprations de vise phrastique diffrentes,
dans la gense mentale de lnonc (introduction dudit modalisateur respectivement prcoce (avant
introduction du sujet) et tardive (aprs introduction du sujet)) 350.

Porte interne/ externe (du modal, par rapport la proposition) opposition syntaxique
corrlative lopposition valeurs radicales / valeurs pistmiques (Sueur 1979, 107113 ; 1983, 167-168, apud Fuchs 1989 : 83) ; terminologie Le Querler 1994, 2001 :
incidence (syntaxique) intra-prdicative/ incidence (syntaxique) extra-prdicative.

modalit de re (modus insr dans le dictum)/ modalit de dicto (modus extrieur au


dictum, dictum = sujet du modus) : relation du modus au dictum, dfinie en termes de lordre
des mots observ opposition donc pour lessentiel quivalente : porte interne/ porte
externe, incidence intra-prdicative/ incidence extra-prdicative.

5.2.6.2. Constructions syntaxiques (analyse GB 351).


la diffrence de lanalyse standard des modalits dnonc parfaitement compatible avec lide dune
coalescence du modal (= auxiliaire de mode) avec le verbe modalis (=verbe lexical plein), et avec lide dune
composition entre modal et verbe modalis qui prcde la mise en place de la relation de prdication (groupe

345

Noter que la construction aspectuelle tre en train de+infinitif, tout en filtrant (test distributionnel) des activits et des
accomplissements (aspect lexical [+dynamique]), est elle-mme de lordre des tats : aussi des noncs du type de Elle peut/
doit tre en train de courir auront-ils des lectures pistmiques (respectivement : ventualit/ probabilit forte).

346

Guimier 1989.
Entendue comme distincte de lincidence syntaxique (Le Querler 2001).
348
Guimier 1989.
349
Certains complments de verbe non obligatoires (optionnels) ne laissent pas de faire lobjet dune certaine forme de
slection smantique il en va ainsi des complments de manire, qui ne peuvent se combiner librement avec nimporte quel
verbe : les verbes moyens, par exemple, ainsi que nous lavons appris ds le chapitre introductif, sont la fois rbarbatifs la
complmentation (modification) de manire, et au passif.
350
Guimier 1989.
351
Thorie du gouvernement et du liage. Dnomination la fois dune version de la grammaire gnrative chomskyenne
postrieure la Thorie standard tendue, et dun (couple de) module(s) de la grammaire, lintrieur de la variante
paracheve de cette thorie, connue sous le nom de thorie des principes et des paramtres ( ct dautres modules, telles la
thorie X-barre ou la thorie des traces (dj formules en termes TSE), la thorie des rles thmatiques, la thorie du Cas, la
thorie des Barrires, la thorie du gouvernement propre et la thorie du contrle dont il sagira prcisment dans cette
section).
347

110

verbal-sujet) 352, la thorie du gouvernement et du liage propose une approche diffrente de la distinction entre
emplois radicaux et emplois pistmiques, qui rend au modal son statut de verbe plein, rgissant une
proposition compltive. Selon que le verbe modal assigne ou non un rle thmatique au groupe nominal qui en
surface occupe la position de sujet modal, distinction sera faite entre constructions contrle et constructions
monte.
Pouvoir/ devoir radicaux : verbes contrle 353.
Verbes pleins, qui slectionnent thmatiquement deux arguments internes, dont leur sujet superficiel :

un argument propositionnel (une proposition infinitive), qui remplit le rle- 354 typiquement appel
<Thme> : en loccurrence, il sagira de lobjet de la capacit, de la permission (pouvoir), ou de
lobligation (devoir)) argument introduit en syntaxe comme complment (= sur) du verbe modal
(un CP 355 : [CP C [IP ]]) ; cet argument reprsente, en termes danalyse des modalits dnonc, le
dictum ;

et un argument nominal qui remplit le rle- de <sige> de la capacit (pouvoir) ou de <cible> de la


permission (pouvoir), de lobligation (devoir) ou de linterdiction (devoir ne pas, ne pas pouvoir))
argument ralis syntaxiquement comme sujet du verbe modal (syntagme nominal porteur du Cas
Nominatif 356).
La proposition infinitive aura, elle, pour sujet 357 un pronom non pel (tiquet PRO):

qui reoit un rle smantique de la tte lexicale prdicat dans cette proposition (un verbe plein
linfinitif (cas le plus frquent : Paul peut nager 100m en deux minutes), mais galement, sous rserve
de compatibilits smantiques 358, un adjectif ou une prposition ttes du syntagme attribut du sujet 359
(Ces jours-ci, les pargnants doivent tre attentifsA (= doivent prter attention/ faire attention/ faire
gaffe) au moindre changement du taux dintrt / Tous les associs devront tre prsentsA (= se
prsenter, venir) cette runion du Conseil dadministration/ Le jour de lAssemble gnrale des
actionnaires vous devrez tre tous devantP le sige de la socit avant 8h15) ;

qui se voit assigner un Cas abstrait par la tte fonctionnelle I (correspondant syntaxique de laffixe
dinfinitif) un Cas structural, non interprtable linterface smantico-logique ( linstar du Cas
Nominatif assign par T 360), appel Cas nul , puisque la fois postul pour un constituant nominal

352

Pouvoir et devoir sont censs tre introduits en syntaxe sous le nud M(odal) de lAux(iliaire), et le verbe plein linfinitif,
sous V, tte du groupe verbal.
Rappelons que sous cette analyse du verbe et de ses inflexions, la catgorie (abstraite) Auxiliaire regroupe plusieurs ttes
fonctionnelles, la tte (obligatoire) regroupant les traits de temps-mode-aspect (non perfectif), ainsi que les traits de nombre
et de personne (traits daccord), tte note Tps (= Temps) ; une tte qui introduit laspect accompli (avoir ou tre et laffixe de
participe pass), note Parf (ait) ; une tte qui regroupe les modalits dnonc et les modaux aspectuels, note M (=Modal),
qui peut tre ou bien un marqueur de modalits (abrg Mod) ou bien un aspectuel (not Asp), ncessairement suivis de
linfinitif. Mod introduit les modalits dnonc telles les modalits ralises par pouvoir ou devoir. Laspectuel introduit en
syntaxe des priphrases aspectuelles comme aller+inf., venir de+inf., tre en train de + inf., tre sur le point de+inf. La tte
Parf est itrable, sous le nud Auxiliaire, pour que la modlisation rende compte de la possibilit de formes composes
perfectives aussi bien pour V que pour le modal ou laspectuel, ainsi que des formes aspectuelles dites surcomposes (cf.
Dubois et Dubois-Charlier 1970 : 105-111).
Le groupe verbal est analys comme complment de lAuxiliaire, avec qui il formerait un constituant SV (syntagme verbal), qui
sera, lui, compos, par la suite, avec le sujet grammatical, sous le nud maximal P (phrase) cf. Dubois et Dubois-Charlier
1970 : 93-104.
Il est ais de voir que cette analyse corrobore directement lide dune composition du verbe modal avec le verbe plein
linfinitif, avant composition de lensemble [modal+ verbe plein], avec le sujet de la phrase.
353
Cf. Hirschbhler, Paul et Marie Labelle (1994) Syntaxe du franais. Luniversel et le particulier dans la langue, Universit
du Qubec Montral, polycopi (317p). Pour analyse des constructions monte et contrle franaises, en termes de la
Thorie des principes et des paramtres : 283-293 ; 302-314 ; pour la suggestion danalyser les verbes modaux devoir et
pouvoir comme susceptibles dinstancier les deux constructions : 313, (61a). Application effective de lanalyse des deux
constructions ces verbes, de notre main.
354
Rle smantique assign par une tte (do le symbole de : ) lexicale, statut de prdicat smantique (un verbe, un
adjectif, une prposition) son argument slectionn.
355
Rappel : syntagme complment(is)eur, tte C pele (que + TP (T de [+Temps]), de/ + IP (propositions [-Temps],
telles les infinitives) ou non pele ( + IP), qui a la vertu de protger son domaine phrastique (son complment) TP ou IP
de toute influence / ingrence syntaxique externe (assignation casuelle, processus daccord). Avec les modaux :
complmentiseur phontiquement nul, suivi dune proposition infinitive (le dictum : IP).
356
Si le modal est lui-mme un verbe fini (verbe un mode personnel), et que donc la proposition soit [+ Temps].
357
Sujet dictal (= sujet du dictum) donc.
358
Voir cet gard les paraphrases entre parenthses, qui attestent de la smantique de type faire (ou du moins
[+intentionnelle]) des prdicats concerns (malgr la construction copulative par dfaut voue interprtation tat ).
359
Dans le cas de locutions adjectives telle surP le qui-vive (Ces jours-ci, les pargnants doivent tre sur le qui-vive (= doivent
ouvrir lil)), le rle smantique <Thme> sera assign au pronom non pel PRO par la locution comme un tout (fonctionnant
comme un adjectif), et non par la tte P de smantique (compositionnelle) situative.
360
Distinction est faite, en grammaire gnrative, entre Cas structural (marqu typiquement par la position du syntagme
nominal qui en est porteur, en particulier dans les langues morphologie nominale pauvre, tel le franais) le Nominatif
(assign par T) et lAccusatif (assign par le verbe transitif (verbe de smantique causative), en gnral son argument interne
rle- de <Thme>), dune part, et Cas inhrent (ou : Oblique), de lautre marqu, en franais, par une prposition (en
roumain, par une prposition et/ ou par la flexion (dsinences casuelles)). Si le Cas structural nest pas interprt linterface
logico-smantique, le Cas inhrent le sera (trait syntaxique pleinement interprtable, donc). Si le Cas structural est assign
une position syntaxique drive (appele de ce fait position casuelle except le Cas Nominatif des expltifs impurs tel Il en
franais (Il ny a que trois tudiants dans lamphi, il est arriv trois tudiants, il tait une fois), assign la position dinsertion
lexicale de lexpltif (position de base)), le Cas inhrent est assign largument nominal dans sa position de base (position
argumentale).

111

non pel, et assign par une tte I, exclusive de traits syntaxiques daccord susceptibles de signaler,
en surface (grce leur ralisation morphologique), la prsence et la composition de traits du nominal
non pel (postul par lanalyse) 361;
et dont linterprtation rfrentielle est contrle par le sujet du verbe modal (mme rfrent) 362.

Pouvoir/ devoir pistmiques : verbes monte.


Verbes pleins, qui ne slectionnent thmatiquement quun argument propositionnel IP (leur dictum), et qui
nassignent donc pas de rle smantique leur sujet syntaxique (au syntagme nominal porteur du Cas
Nominatif).
Le nominal sujet du verbe modal sera donc argument smantique du verbe dictal (ou de la tte lexicale A ou P
tte dun syntagme attribut du sujet): il aura t introduit en syntaxe auprs de cette tte lexicale, dans la
proposition infinitive, et montera auprs de la catgorie fonctionnelle T qui spcifie les traits de temps(-aspectmode) du verbe modal, la recherche dun Cas structural.
la diffrence de la tte I dans les constructions infinitives dites contrle , linfinitif des
constructions monte nassigne pas de Cas nul (=varit de Cas structural).
Pour que le nominal puisse monter auprs de la catgorie fonctionnelle qui lui assignera le Cas, dans la phrase
racine, encore faut-il que le constituant IP dont il procde ne soit pas protg , lui, contre toute influence de
cette catgorie, par un domaine CP.
5.2.6.3. Polysmie du verbe modal POUVOIR
Schma de rfrence (Sueur 1979)
Selon le contexte dans lequel ils sont employs (voir passages souligns dans les exemples ci-contre), des
noncs comme elle peut venir pied ou elle peut faire les calculs peuvent avoir au moins quatre effets de
sens :
I.
a.

Emplois radicaux 363 (modalit du faire 364) porte smantique 365 intra-prdicative
(modalit rfre au sujet syntaxique 366) :

Possible, pour le sujet, par ses qualits inhrentes (=capacit 367 physique ou intellectuelle due au
sujet lui-mme) :
Elle peut venir pied, sa jambe est dpltre (capacit physique) 368.
Elle peut faire ces calculs plus vite que vous (capacit intellectuelle).

b.

Possible, pour le sujet, par les circonstances en gnral (=possibilit matrielle 369, pour le sujet,
de faire quelque chose = capacit due une situation dans laquelle se trouve le sujet, ne dpendant
pas de lui-mme) :
Elle peut venir pied, puisquil ny a plus de verglas 370.
Elle peut faire ces calculs maintenant : elle vient de recevoir les derniers chiffres de vente.

Linventaire des Cas inhrents nest cela dit pas trs bien spcifi, dans ce cadre thorique : Partitif (sujet postverbal (indfini)
associ dun expltif : Il est arriv des tudiants), Locatif, Ablatif, Allatif, autant de termes emprunts aux grammaires de
langues morphologie casuelle riche (tel le finnois), et/ou la grammaire casuelle localiste (o les notions correspondantes
taient directement dfinies en tant que rles smantiques susceptibles de ralisations superficielles par divers marqueurs :
Position, Pr-/Postposition, Flexion).
Noter la re-conversion syntaxique des concepts respectifs, au sens de la Thorie du Cas abstrait, en GB : on y opposera, en
effet, rle smantique et Cas abstrait (Cas syntaxique), dune part, mais galement Cas abstrait (Cas syntaxique) et cas
morphologique (ralisation en surface du cas abstrait syntaxique), de lautre.
361
la diffrence du sujet nul des langues romanes tel litalien ou le roumain, dans les phrases verbe fini, dont on peut
infrer la composition de traits daccord (personne et nombre notamment) partir des dsinences personnelles du verbe : am
(1sg) citit scrisoarea, a (3sg) citit scrisoarea , et qui est cens porter le Cas Nominatif, comme ses correspondants pels en
franais : jai lu la lettre, il a lu la lettre. Ce sujet nul-ci tait tiquet pro, en termes de la Thorie du Gouvernement et du
Liage.
362

PRO expltif et verbes modaux : rare (emplois radicaux de dicto ou externes). Exemple emprunt Krnning
1996 : 79. Ds le premier jour, il ne doit plus y avoir de levain dans vos maisons (JEAN 19 :7, Bible 1982)
363
364
365
366
367
368
369
370

Cf. Sueur 1979, 1983.


Krnning 1996, 2001.
Pour la distinction porte smantique/ incidence syntaxique, voir Le Querler 2001.
Guimier 1989.
Cf. Sueur 1979, 1983.
Elle peut nager 100 mtres en 2 minutes
Cf. Sueur 1979, 1983).
Elle peut passer, on a dgag la route

112

c.

Possible, pour le sujet, par le truchement dun individu ou dune institution investis dautorit
(=permission 371) :
Elle peut venir pied, son mdecin ly autorise.
Elle peut faire ces calculs, son client ly a autorise.
Valeur primaire (primitive) : <Possible, pour le sujet ()> = non impossible (possible
unilatral 372).

II.

Emploi pistmique 373 (modalit de ltre 374) porte smantique extra-prdicative


(modalit rfre lnonciateur 375) ventualit ( ni ncessaire, ni impossible possible bilatral 376):
Pour faire de lexercice, elle peut bien venir pied, malgr la pluie.

Emplois qui sintgrent mal ce schma :


III.

sporadicit (rfrentielle, temporelle 377) :


Les Alsaciens peuvent tre obses (= certains Alsaciens sont obses, dautres pas :
sporadicit rfrentielle, quantification sur le sujet)
Georges peut manger du lard (= Georges mange parfois du lard : sporadicit temporelle,
quantification sur le prdicat, lecture habituelle)

IV.

valeurs illocutoires (emplois postmodaux 378) :


a.
b.
c.
d.
e.
f.
g.
h.
i.
j.

Concession : Elle peut prendre le mtro, en tout cas, nous ne lattendrons pas.
Dlibration : Je me demande comment je pourrais encore y arriver temps.
Intensification : Quest-ce quelle peut tre agaante !
Suggestion de faire 379 : Vous pouvez venir pied, si a vous dit
Injonction : Tu peux te taire, oui ! 380
Question-requte : Pouvez-vous me passer le sel, sil vous plat ? 381
Question-offre : Puis-je vous offrir un digestif ?
Question-demande de permission : Puis-je masseoir ? 382
Question-excuse : Puis-je mexcuser de vous avoir importune ?
Question-aveu : Puis-je vous dire que je vous aime plus que bien ?

Ces emplois, qui ont tous un rapport avec la force illocutoire de lnonc, semblent tre du
type que Van der Auwera & Plungian (1998) appellent emplois postmodaux. Lapproche
typologique de Van der Auwera & Plungian (1998) suggre que de faon universelle lvolution
diachronique que subissent les expressions modales est :
Modalit du faire modalit de ltre Valeurs postmodales (ou : illocutoires)

371

Cf. Sueur 1979, 1983.


Terme de Gardies 1979, qui interprte le texte de lOrganon, quand la bivalence du terme de possible : () possible
nest pas un terme absolu : tantt il exprime la ralit en tant quelle est en acte, quand on dit, par exemple, quun homme
peut se promener parce quil se promne en fait, et, dune faon gnrale, [qu]une chose est possible parce que se trouve dj
ralis en acte ce qui est affirm tre possible, tantt possible exprime que la chose pourrait [seulement] se raliser, quand on
dit par exemple [sans autre] quun homme peut se promener (Aristote, Organon, p. 135).
En dautres termes (telle semble avoir t linterprtation de Guillaume dOckham (XIVime sicle), qui est lorigine de
lapproche moderne aux modalits althiques sous forme de carr modal, distinguant de manire non univoque <possible> et
<contingent>):

il y aurait un <possible> qui suit du <ncessaire> (relation logique de subalternation), sopposant


l<impossible> (relation logique de contradiction): <possible que p> (le possible) ;

et un <possible> qui soppose au <ncessaire> (relation logique de contradiction), suivant de l<impossible>


(relation logique de subalternation) : <possible que non-p> (le contingent).
Gardies 1979 interprte ce mme passage dune manire quelque peut diffrente, distinguant un possible oppos
(seulement) l<impossible> (possible appel, de ce fait, unilatral), et un possible oppos la fois au <ncessaire> et
l<impossible> : le <potentiel> (possible bilatral).
373
Cf. Sueur 1979, 1983.
374
Krnning 1996, 2001.
375
Guimier 1989.
376
Au sens de Gardies 1979.
377
Kleiber 1983.
378
Van der Auwera & Plungian 1998, Vetters
379
Le Querler 2001.
380
Charaudeau 1992.
381
Impratif poli in Vetters & Barbet 2006.
382
Comparer lnonc doctroi de permission (valeur radicale de permission ) : Vous pouvez vous asseoir.
372

113

Dans une tude prsente au 7e Colloque Chronos, Carl Vetters et Claude Barbet se sont
attachs tester cette hypothse sur des corpus diachroniques franais. Les donnes
analyses confirment, pour le franais au moins, le bien-fond des hypothses de Van der
Auwera & Plungian : en ancien et en moyen franais, les emplois radicaux sont prdominants,
alors que la valeur pistmique est plutt rare. Quant aux valeurs postmodales, elles
apparaissent mis part quelques occurrences isoles plus anciennes au XVIIe sicle et
deviennent vraiment courantes au XVIIIe sicle.
Porte smantique vs incidence syntaxique
Il ny a pas de corrlation systmatique entre, dune part, incidence syntaxique intra-prdicative et, de lautre,
emplois radicaux du modal pouvoir (porte smantique intra-prdicative), ni entre incidence syntaxique extraprdicative, et porte smantique extra-prdicative (qui caractriserait aussi bien lemploi pistmique que les
emplois sporadique et concessif) puisque, si les effets de sens radicaux (porte smantique intra-prdicative)
sont systmatiquement raliss par des constructions syntaxiques incidence intra-prdicative du modal, la
lecture pistmique peut tre aussi bien le fait de constructions incidence syntaxique extra-prdicative, que
de constructions incidence syntaxique intra-prdicative.
Incidence syntaxique intra-prdicative : pouvoir porterait sur le prdicat en-de de la relation prdicative
pouvoir-sujet du modal. Prdicat complexe qui assignerait un rle smantique (unique) au sujet grammatical.
Sige de la capacit, cible de lautorisation.
Comparer :
Il se peut quelle vienne pied.
Pouvoirpistmique + infinitif monte :
__ peut bien [IP ti tre venue pied] Ellei peut bien [IP ti tre venue pied]
Pouvoirradical + infinitif contrle :
Ellei peut [IP PROi lire 100 pages par jour]

Porte smantique vs incidence syntaxique 383 :


Peut-tre quelle viendra
pied

incidence syntaxique
extra-prdicative

Il se peut quelle vienne


pied
porte smantique
extra-prdicative 384 :
la modalit pistmique porte, de
lextrieur, sur lensemble du
contenu propositionnel
<POSSIBILIT[sujet-verbe]>

Elle viendra peut-tre pied


(= il se peut quelle vienne ,
peut-tre quelle viendra )

Pour faire de lexercice, elle


peut bien venir pied

incidence syntaxique
intra-prdicative

(= il se peut quelle vienne ,


peut-tre quelle viendra )

Elle peut venir pied, son


mdecin ly autorise.
383
384

porte smantique
intra-prdicative 385 :

Cf. Le Querler 2001.


Modalit de dicto.

114

(= elle est autorise )

Elle peut venir pied, sa


jambe est dpltre.
(= elle est capable de , elle est
mme de)

les modalits radicales portent sur


la relation entre le sujet et le
prdicat
<sujet-POSSIBILIT-verbe>

Elle peut venir pied,


puisquil ny a plus de verglas
(= elle a les moyens de, elle a la
possibilit de )

Critres de discrimination de la porte smantique : glose (paraphrase) par un marqueur


syntaxiquement intra- ou respectivement extra-prdicatif.

385

Modalit de re.

115

Critres de discrimination distributionnels :


Emplois radicaux (Modalit du faire) porte
smantique intra-prdicative

Emploi pistmique (Modalit de ltre) porte


smantique extra-prdicative

OKNgation :
elle ne peut pas venir pied,
son mdecin linterdit/ elle a une jambe dans le pltre/ il y a
du verglas.

*Ngation :
*Pour faire de lexercice, elle ne peut pas bien venir pied.

OKInterrogation

:
Peut-elle venir pied ?

*Interrogation
*Pour faire de lexercice, peut-elle bien venir pied ?

OKquestion-QU

:
Qui peut venir pied ?
Quand peut-elle venir pied ?
Comment peut-elle grimper la pente ?
+circonstant temporel, +circonstant de manire :
Aujourdhui elle peut grimper la pente.
Elle peut grimper la pente en sappuyant sur une canne.
(capacit)

____

dans une subordonne finale :


Enlevons ce pltre, afin quelle puisse se dgourdir les
jambes.(capacit)

Avec ladverbe pistmique bien :


Elle peut bien tre malade.
Elle peut bien venir pied.
Elle peut bien tre venue pied 386.

dans une macro-structure conditionnelle (protase,


apodose) :
Si vous pouviez venir pied, je vous en saurais gr.
(capacit)
Si vous arrivez avant nous, vous pouvez entrer sans sonner.
(permission)

dans lapodose dune conditionnelle [=infrence partir


dune protase de type vridictoire]
(si = admettons que , supposer que , au cas
o ) :
Si ce que vous dites est vrai, elle peut tre en train de
prparer sa candidature un poste de matre de
confrences.

Aprs une circonstancielle causale ou finale, et avec un


infinitif dit pass (= infinitif perfectif) :
Pour faire de lexercice, elle peut tre rentre pied.

linfinitif (+infinitif non perfectif), dans une phrase


simple (emploi non subordonn 387), sous interrogation/
exclamation :
Moi, pouvoir grimper cette pente ?/ !/ ?! (capacit)
Moi, pouvoir rater le bus ?/!/ ?! (possibilit 388)
linfinitif (non perfectif) complment dun verbe, dans
une phrase complexe, sous rserve de prdication non
exclusive du contrle dun agent :
Il se rjouit de pouvoir grimper cette pente.
Il dplore de pouvoir manger autant.
(capacit)
OKPronominalisation

en le du complment de pouvoir :
-Peut-elle venir pied ?
-Elle le peut, sa jambe est dpltre.

linfinitif (+infinitif non perfectif), dans une phrase


complexe, avec une prdication exclusive du contrle de
lagent:

Il dplore de pouvoir rater son bus.


(= il dplore cette ventualit )
*Pronominalisation en le du complment de pouvoir :
-Peut-elle venir pied ?
- *Pour faire de lexercice, elle le peut bien.

386

Noter, ici, galement linfinitif perfectif du verbe modalis.


Noter que les exemples du type de : Moi, pouvoir grimper cette pente, exclu ! sont en fait une abrviation de
Moi, pouvoir grimper cette pente ? Cest exclu ! o linfinitive verbe modal nest pas syntaxiquement
subordonne au participe pass exclu, lencontre de : il est exclu de pouvoir grimper cette pente.
388
Linterprtation dlibrative (et donc pistmique) me semble toujours possible, vu la nature non agentive du
prdicat modalis.
387

116

Rfrences
Charaudeau, P. (1992). Grammaire du sens et de lexpression, Paris : Hachette (Education).
Kleiber, G. (1983). Lemploi sporadique du verbe pouvoir en franais , in J. David ; G. Kleiber, (ds), La notion smanticologique de modalit. Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 183-201.
Kronning H. (1996). Modalit, cognition et polysmie : smantique du verbe modal devoir , Uppsala ; Stockholm : Acta
Universitatis Upsaliensis : Almqvist & Wiksell International.
Kronning, H. (2001). Pour une tripartition des emplois du modal devoir , Cahiers Chronos 8 : 67-84.
Le Querler, N. (1996). Typologie des modalits, Caen : Presses Universitaires de Caen.
Le Querler, N. (2001). La place du verbe modal pouvoir dans une typologie des modalits , Cahiers Chronos 8, AmsterdamAtlanta : Rodopi, 17-32.
Sueur, J.-P. (1979). Une analyse smantique des verbes devoir et pouvoir , Le franais moderne 47.2 : 97-120.
Sueur, J.-P. (1983). Les verbes modaux sont-ils ambigus ?, in : J. David ; G. Kleiber, (ds), La notion smantico-logique de
modalit, Paris : Klincksieck, Collection Recherches Linguistiques, vol. 8, 165-182.
Van der Auwera, J. ; Plungian, V. (1998). Modalitys semantic map, Linguistic Typology 2 : 79-124.
Barbet, Ccile & Carl Vetters (2013). Pour une tude diachronique du verbe modal pouvoir en franais : les emplois
postmodaux' ,Cahiers Chronos 26 : 315336

7. Adverbe 389 de manire/ adverbe modalisateur. Porte smantique et incidence syntaxique 390.
Adverbe de manire : prdiqu secondairement du syntagme verbal.
Contribue au contenu propositionnel.
Reste dans le champ de la ngation.
Est focalisable.
Adverbe modalisateur de re : incidence syntaxique dite intra-prdicative . MAIS :
Ne contribue pas au contenu propositionnel (exprime lattitude de lnonciateur par rapport son
propre discours).
Nest pas dans le champ de la ngation.
Nest pas focalisable.
Porte smantique : commente plus lnonciation que lnonc.
Quelle structure syntaxique ?
Adverbe de manire :

ne V pas Adv (Obj)/ ne V pas Obj Adv


ne Aux pas V Adv (Obj)/ ne Aux pas V Obj Adv/ RARE :
ne Aux pas Adv V Obj

Elle ne prononce PAS correctement votre nom./ Elle ne prononce PAS votre nom correctement./
Elle ne prononce pas votre nom CORRECTEMENT, elle distord les voyelles nasales.
Elle ne fera PAS ce voyage dune seule traite.
Il na PAS fait ce voyage dune seule traite./ Il na pas fait ce voyage DUNE SEULE TRAITE, il a
pass la nuit Lille.
Il na PAS lu attentivement cette revue ( de manire attentive , avec attention ).
Il na pas lu ATTENTIVEMENT cette revue, il la seulement feuillete. / Il na PAS lu cette revue
attentivement.
Ce fichier na pas t ACCIDENTELLEMENT effac ( dune manire fortuite, imprvue , par
hasard ). 391 Le fichier est effac.
Il nest PAS mort accidentellement ( par suite dun accident ). Il est mort.

Remarque. La distribution ne Aux pas Adv V Obj (frquente avec des adverbiaux aspectuels : Ils ne sont pas
encore arrivs la fac, Elle na pas encore lu le mode demploi du nouvel engin) reste relativement rare avec
des adverbes de manire:

Elle na PAS bien lu (*lu bien) le mode demploi du fer repasser 392.

389

Ou : adverbial pour y inclure aussi les groupes prpositionnels (PP) de smantique apparente
(accidentellement, mais aussi par hasard, certainement, mais aussi sans nul doute).
390
Pour la distinction porte smantique/ incidence syntaxique, cf. Le Querler 1996. Terme usuel en grammaire
gnrative : porte (angl. scope).
391
Lire ce symbole : implique .
392
Noter la difficult de focaliser bien mme dans lemploi de manire.

117

Adverbe modalisateur :

ne V Adv pas (Obj)/ Adv, ne V pas (Obj)


ne Aux Adv pas V (Obj)/ Adv, ne Aux pas V (Obj)

Il ne lira certainement PAS cette revue.


Ce fichier na accidentellement PAS t effac. Le fichier na pas t effac.
Tu nas fatalement PAS la mme qualit doptique et de pixels

Certainement, il ne lira pas cette revue.


Accidentellement, ce fichier na pas t effac.

118

TABLEAUX DE GRAMMAIRE
Modalits dnonc. Phrases double prdication.

119

1. Lemploi du subjonctif (vs infinitif, vs indicatif)


dans les propositions compltives
[modalits althiques : <ncessaire>, modalits
dontiques : <obligatoire>]
IL FAUT (faudrait) QUE ...
IL EST NCESSAIRE QUE ...
(obligatoire)

Il faut /Il (me, te, lui ... ) faut ...


Il est ncessaire de ...
(obligatoire)
On doit / Je (tu ... ) dois ...
+ SUBJONCTIF
+ INFINITIF
[modalits dontiques : <permis>, <interdit>]
Paul PERMET QUE 393
(je/tu/Marc ... ) ...
Paul me/ te/ lui permet de
+ INFINITIF
( sujet PRO 401 contrl par le complment
dobjet indirect du verbe principal)

ACCEPTE QUE 394


ADMET QUE 395
CONSENT QUE/ CE QUE 396
VEUT BIEN QUE 397
[marqueurs de la valeur <permis>, la forme ngative :
<interdit>]
ne SUPPORTE(RAIT) pas QUE 398
ne SOUFFRE (SOUFFRIRAIT) pas QUE 399
ne TOLRE (TOLRERAIT) pas QUE 400
+ SUBJONCTIF (sujets diffrents)
[modalits dsidratives 402 : <+dsirable> 403,
<-dsirable> 404]
Paul accepte de 406
consent 407
veut bien 408
ne supporte pas de 409
393

Maman, dordinaire intraitable sur les questions dheure (), permettait que je prolongeasse la veille
(Gide, Nouv. P. Rob.).
394
Ceux qui nacceptent pas que la vie soit une partie quil faut toujours perdre (Mauriac, Nouv. P. Rob.).
395
Mais, avec le sens de considrer comme vrai, rel , reconnatre , lindicatif est de mise : jadmets que
jai eu tort (Nouv. P. Rob.). Avec le sens de supposer (admettre seulement titre provisoire comme vrai),
subjonctif, nouveau : en admettant que cela soit vrai, admettons que ce soit vrai.
396
Je consens ce quil y aille (Nouv. P. Rob.).
397
Le prof veut bien que vous remettiez le mmoire la semaine prochaine.
398
Il ne supporterait pas plus longtemps quon se ficht de lui (Gide, Nouv. P. Rob.). Dans cette acception,
supporter veut dire subir de la part dautrui sans ragir, sans se rebeller, sans interdire . Par voie de
consquence, la forme ngative, le verbe pourra signifier linterdiction.
399
Je ne souffrirais pas que cette conversion ft publique (Gide, Nouv. P. Rob.).
400
Ils nauraient pas tolr quon fermt ce cercle [de jeu] (Morand, Nouv. P. Rob.).
401
Pronom non pel (=non prononc, sans forme phontique) sujet (argumental) dun infinitif.
402
Ou : volitives, ou : boulestiques. Certains auteurs distinguent volitif et dsidratif.
403
Si dictum [+favorable].
404
Si dictum [favorable].

120

+ INFINITIF (mme sujet 410)


Paul VEUT (voudrait) QUE (je / tu / Marc ... ) ...
DSIRE
SOUHAITE

Paul

veut ...
dsire ...
souhaite ...

Paul PREND GARDE QUE (je/tu/Marc/cela ... ) ...


[= veut que ... et fait en sorte que tel soit
le cas : rsultat atteindre]

Paul PREND GARDE QUE (je/tu/Marc/cela ... ) NE 405

Paul prend garde (Prenez garde)


... [rsultat atteindre]

[ ne veut pas que ... et fait en sorte que


cela narrive pas : rsultat viter]

Paul

de ... [rsultat viter]

TIENT CE QUE (je/tu/Marc ... ) ...


[= veut que ... ]

VEILLE CE QUE
[= veut que ... et fait en sorte que tel soit
le cas : rsultat atteindre]

Paul

tient ...
veille ...
soppose ...

SOPPOSE CE QUE
[= ne veut pas que ... ]

+ INFINITIF (mme sujet)


+ SUBJONCTIF (sujets diffrents)
[modalits directives 411 : <ordre>, <requte>,
<suggestion>]
ELLE EXIGE QUE (tu/vous/Marc ...) ...
Elle lui (leur ) intime (lordre)
ELLE DEMANDE [= ordonne, exige] QUE ...
de ...
Elle te (vous ... ) demande de ...
ELLE ORDONNE QUE ...
ordonne de ...
ELLE PRTEND [= ordonne, exige] QUE ...
ELLE DIT [= ordonne, exige] QUE ...
dit de ...
Elle te (vous, ) suggre de
ELLE SUGGRE QUE

+ SUBJONCTIF
(sujets diffrents)

+ INFINITIF
( sujet PRO 412 contrl par le complment
dobjet indirect du verbe principal)

[modalits apprciatives (=valuatives, axiologiques) ;


affectives (=thymiques) : <prospectif favorable>, <prospectif
dfavorable>, <rtrospectif favorable>, <rtrospectif
406

Il a accept de venir, de nous aider (Nouv. P. Rob.).


Il consent cooprer (Nouv. P. Rob.).
408
Il veut bien cooprer.
409
Elle ne supporte pas de rester inactive (Nouv. P. Rob.).
405
NE dit expletif (= s` nu . . . ).
410
Dans la construction compltive infinitive et sujets rfrentiellement identiques, ces verbes ne participent
plus des modalits dontiques (permission/ interdiction), mais des modalits dsidratives.
411
Actes de langage, en discours indirect (rapport). la premire personne du singulier, au prsent de
lindicatif, actes de langage directs (verbes performatifs, qui ralisent ( performent ) lacte quils dcrivent), et
donc : modalits dnonc difficiles de distinguer de la modalit dnonciation correspondante (<injonctif>).
Modalits intersubjectives dans Le Querler 1996.
412
Pronom non pel (=non prononc, sans forme phontique) sujet (argumental) dun infinitif.
407

121

dfavorable>]
< favorable> (neutralis du point de vue de la distinction
<prospectif>/ <rtrospectif>, rsolue au niveau du dictum)
IL VAUT MIEUX QUE ...

Il vaut (vaudrait) mieux (il aurait


mieux valu) ...
+ SUBJONCTIF 413
+ INFINITIF
IL VAUDRAIT MIEUX QUE <prospectif>
IL AURAIT MIEUX VALU QUE <rtrospectif>
+ SUBJONCTIF 414
<favorable/ dfavorable rtrospectif 415>
IL EST BON/ MAUVAIS QUE ...
Il est bon / mauvais de...
IL EST HEUREUX/ MALHEUREUX QUE ...
Il est trange de 418
+ INFINITIF
DOMMAGE
TRANGE 416
+ SUBJONCTIF Cest normal de 419
Il est normal de 420
JE TROUVE NORMAL/ TRANGE QUE (tu/Marc... ) Il parat normal de 421
DRLE
+ SUBJONCTIF (sujets
diffrents 417) Il fait beau 422
Cest beau de/ Cest laid de 423
Ce nest pas beau de 424, 425
+ INFINITIF
<favorable prospectif>
JESPRE QUE

Jespre 436

413

Il vaut mieux que (+ Il est bon que) vous layez lu avant-hier [subjonctif pass & repres temporels
dantriorit dans la compltive : rtrospectif]/ que vous le lisiez demain [subjonctif prsent et repres temporels
de postriorit : prospectif]. Noter que mieux vaut nest disponible que pour les emplois prospectifs : mieux vaut
que vous le lisiez demain/ ???mieux vaut que vous layez lu hier.
414
Contre compltive non marque pour lantriorit (laspect perfectif), lorientation prospective ou
rtrospective de lapprciation se jouera dans le verbe principal. Il aurait mieux valu que vous arriviez lheure
[conditionnel pass (irrel) du verbe principal (prdicat apprciatif) : rtrospectif]/ Il vaudrait (+vaut) mieux que
vous arriviez lheure [prsent de lindicatif ou conditionnel prsent du verbe principal (prdicat apprciatif) :
prospectif].
415
Mais le jeu des formes verbales et (dans la compltive) des repres temporels peut induire une orientation
prospective : il serait bon de relire ce rapport demain, juste avant la runion.
416
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
417
En principe, lautre cas de figure (trouver normal/ trange de + infinitif, contre identit rfrentielle des
sujets) devrait tre attest aussi. Le fait est que les dictionnaires consults ne citent point de tels exemples. Soit :
Tu trouves normal de boire trois bires de suite ? (si le destinataire lui-mme a bu les trois bires).
418
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
419
Cest normal de vouloir se reposer aprs un tel effort. (Nouv. P. Rob.).
420
Cf. Nouv. P. Rob., sans exemple toutefois.
421
Mme remarque que prcdemment.
422
Il fait beau croire aux prodiges lorsque les prodiges nous arrangent (Cocteau, Nouv. P. Rob. : il est
commode de ).
423
Cest laid de fourrer les doigts dans son nez. (Nouv. P. Rob.).
424
Ce nest pas beau de mentir. (Nouv. P. Rob.).
425
Formules familires, hypocoristiques (utilises quand on sadresse des enfants) dpourvues de corrlat
impersonnel suivi du subjonctif. Toute prdication apprciative ne donne pas lieu aux mmes effets syntaxiques
(ne se prte pas aux mmes constructions).

122

JESCOMPTE QUE
+INDICATIF 426 (FUTUR 427)

Jescompte
+INFINITIF (mme sujet)

<favorable rtrospectif>
JE ME RJOUIS 428 QUE ...
JE SUIS RAVI(E) (ENCHANT(E) etc.) QUE ...
JAIME (MIEUX429) QUE 430

Je me rjouis de ...
Je suis ravi(e) (enchant(e)) de ...
Je me flicite de (= je , et je
men flicite) 437
Jaime 438
Jaime mieux que
+ SUBJONCTIF (sujets diffrents) Jaime 439
+ INFINITIF (mme sujet)

<dfavorable rtrospectif>
JE REGRETTE QUE (tu/Marc ... ) ...
JE SUIS DSOL(E) QUE ...
JE REDOUTE QUE (tu/Marc/cela ... ) ...
JAI PEUR QUE

NE1 ...

Je regrette de ...
Je suis dsol(e) de ...
Je redoute de 440 ...

436

Jespre pouvoir revenir.


Qui espre, dsire, mais tandis que le dsir se fait sentir sans que la pense ait accs au sentiment de
probabilit, lesprance, au contraire, ne nat que de laccs ce sentiment, le dsir tant maintenu. Sans une
probabilit minima, il nexiste aucune raison desprer, on peut dsirer seulement (Gustave Guillaume, Temps
et verbe, p. 39, nous soulignons). Lanalyse psychomcanique du verbe esprer (vs dsirer) explique le choix
des modes (indicatif avec esprer, subjonctif, avec dsirer) en termes de relations lactualit : les deux verbes
comportent un quantum dsidratif , mais celui de dsirer lempche datteindre lactualit, tandis que celui
desprer, du fait de son ouverture vers la probabilit, ly porte . Ce quantum dsidratif non-interceptif
(qui nempche pas lide exprime par le verbe datteindre la ligne dactualit ) est reprsent comme
parallle la ligne dactualit, que la vise (reprsente comme perpendiculaire sur cette ligne) peut ainsi
atteindre sans obstacle, tandis que le quantum interceptif de dsirer est reprsent comme perpendiculaire sur
la ligne dactualit, linstar de la vise, quil retient en de de cette ligne. Si les reprsentations graphiques de
Guillaume vous semblent par trop rbarbatives, vous retiendrez quand mme lide que cest la composante
pistmique desprer (+probabilit) qui le rend compatible avec lindicatif, annulant en quelque sorte les effets
syntaxiques de la composante valuative de son signifi. Les cas (somme toute, relativement rares) o esprer
est suivi du subjonctif procdent justement de la stratgie inverse : cest alors la composante valuative (et
virtualisante) qui lemporte, le probable, cest--dire la confiance dans la ralisation du fait espr tant
revu(e) la baisse. Emploi du subjonctif dconseill en principe, par les grammaires normatives, sauf aprs
esprons que ou aprs on pourrait esprer que (cf. Hanse 1991 : 392-393), qui virtualisent lespoir au point de
le convertir en simple souhait.
427
Jespre quil arrivera temps.
Jescompte quil russira (Nouv. P. Rob.). Cela dit, le verbe esprer peut tre suivi dun temps pass, auquel cas
il signifiera aimer croire, penser : jespre avoir fait ce quil fallait, il espre avoir russi (Nouv. P. Rob.),
jespre que les enfants sont arrivs sains et saufs ; suivi du prsent ou du pass compos, il fonctionne comme
formule de souhait (Jespre que tu vas bien, Esprons quil na rien entendu Nouv. P. Rob.).
428
Je me rjouis de ce que + indicatif [fait rel] : Je me rjouis de ce que la famille est runie (Cristea 2000) /
subjonctif [fait suppos] : Je me rjouis de ce que ce projet de coopration soit mis en place le mois prochain.
La perspective futurale est essentielle cet effet de sens (fait suppos vs rel), en labsence de mdiation. Si la
chose vient dtre allgue par autrui, le subjonctif orientera linterprtation vers la distanciation (mdiation).
Comparer : -Le projet va dmarrer le mois prochain au plus tard./ - Je me rjouis de ce que ce projet de
coopration doive tre mis en place le mois prochain. Si le verbe de sentiment est au conditionnel, seul le
subjonctif est de mise (expression du dsir): Je me rjouirais de ce que ce projet de coopration soit mis en
place le mois prochain . Suite possible : Mais hlas, jen doute.
429
Comme, en franais contemporain du moins, en prsence des deux termes de la comparaison le subjonctif sur
le second conjoint est exclu, on aura : Jaime mieux que vous partiez que si vous restez. Jaime mieux que vous
partiez (plutt) que de rester o le sujet de linfinitif rester (dans le comparant) est corfrentiel au sujet du
premier conjoint (du compar). Mais jamais : *Jaime mieux que vous partiez queCOMP queSUBJ vous restiez.
430
Jaime que les choses soient leur place (Zola, Nouv. P. Rob.). Mais prospectif dans : Jaimerais bien que
vous me jouiez quelque chose (Nouv. P. Rob.). De mme dans : Jaimerais mieux que vous le rsolviez vousmme. Comparer : Jaime mieux que vous soyez parti avant son arrive.
426

123

JE CRAINS QUE
NE1 ...
(= je ne veux pas que (tu/Marc/cela ... ) ...,
mais je crois que tel est le cas)
JE MINDIGNE QUE431
ELLE SE PLAINT QUE 432
+ SUBJONCTIF (sujets diffrents)

Jai peur de ...


Je crains de ...
+ INFINITIF (mme sujet)

<rtrospectif favorable>, <rtrospectif dfavorable> [variantes


syntaxiques]
JE ME RJOUIS DE CE QUE
JE MINDIGNE DE CE QUE
JE MINQUITE DE CE QUE
ELLE SE PLAINT ( quelquun : son patron) DE CE
QUE 433
ELLE SOUFFRE DE CE QUE
JE LE HAIS DE CE QUE434

Je me rjouis de
Je mindigne de
Je minquite de
Elle se plaint de
Elle souffre de
+ INFINITIF (mme sujet)
Je lei hais de

+ INFINITIF
+INDICATIF (sujets identiques ou diffrents,
( sujet PROi contrl par
fait rel (ralis)) le complment dobjet direct de har)
Je me rjouis de ce que
Je mindigne de ce que
Je minquite de ce que
Elle se plaint ( quelquun : son patron) de ce que 435
Elle souffre de ce que
+ SUBJONCTIF (sujets diffrents,
fait suppos ou irrel (=pas encore ralis))

437

Je suis svre, et je men flicite (Nouv. P. Rob.). Je me flicite dtre svre.


Jaime danser.
439
Jaime croire/ penser que (+ indicatif) : Jaime croire que vous viendrez (Nouv. P. Rob.).
440
Comparer la rection des verbes concerns : je redoute, je crains + SN (le froid) // jai peur de + SN (du froid).
431
Je mindigne quil soit si lche (Nouv. P. Rob.).
432
On ne sait pas si la plainte est ou non justifie (cest--dire : si ltat de chose dcrit dans la subordonne est
ou non rel) : Elle se plaint quon lait calomnie (Nouv. P. Rob.). Dans le cas contraire, pour souligner la ralit
de la plainte (le caractre rel de ltat de chose au sujet duquel on se plaint), lindicatif sera de mise : Mes
matres se plaignaient que joubliais mon latin (Stendhal, Nouv. P. Rob.).
433
Elle se plaint de ce que les enfants sont par trop impolis.
434
Elle le hassait de ce quelle lavait aim (R. Rolland, Nouv. P. Rob.). Pas de corrlat avec le subjonctif,
semble-t-il.
435
La femme de mnage se plaint doucement de ce quelle ait nettoyer cette ordure. (Nouv. P. Rob.) [fait pas
encore ralis]. Comparer : de ce quelle a nettoy toute cette ordure [fait ralis].
438

124

[modalits pistmiques : <douteux> 441]


JE DOUTE QUE ...
JE NE CROIS PAS QUE ...
PENSE
TROUVE
N ESTIME
CROIS-TU QUE ...
PENSES-TU QUE ...
TROUVES-TU QUE ...
ESTIMES-TU QUE ...

[modalits pistmiques :
<probable>, <certain>]
Je me doute que ...
Je crois que 442 ...
pense
trouve
estime

IL SEMBLE QUE

Il semble bien que

IL NE (ME, TE, LUI) PARAT PAS QUE

Il parat que
Il me (te, lui) parat que
Il me (te, lui) semble que
+INDICATIF

IL NE ME (TE, LUI) SEMBLE PAS QUE


+ SUBJONCTIF

[modalits althiques : <possible>, <contingent>,


<impossible> modalits pistmiques : <incertain> 443,
<exclu>]
IL EST POSSIBLE QUE ...
IL SE PEUT QUE 444...
IL PEUT ARRIVER QUE ...
IL ARRIVE QUE ...
IL EST (parfaitement) IMPOSSIBLE QUE ...
EXCLU QUE ...
HORS DE QUESTION QUE ...

Il est PROBABLE que ...


Il est CERTAIN que ...
Il est SR (et certain) que ...

+ SUBJONCTIF

+ INDICATIF

441

= <incertain>.
JE MATTENDS CE QUE . . . + SUBJONCTIF! (= je crois que + INDICATIF)
443
Ou : possible pistmique .
444
Mais: Peut-tre que + INDICATIF!
442

125

2. Lemploi

du subjonctif dans les PROPOSITIONS RELATIVES

Antcdent (Comparaison explicite/implicite)


LE/LA/LES PLUS/MOINS ...
...
MEILLEUR(e)(s)
...
PIRE(s)
...
MOINDRE(s)
...
(Adjectif au superlatif relatif)
(Nom)
LE/LA/LES PREMIER,-ire,-s
...
DERNIER,-ire,-s
...
SEUL(e)(s)
...
L
UNIQUE
...
(Adjectif)
(Nom)

Je souhaite(rais) bnficier dun placement


boursier

Relative (qualit superlative, rare)

QUI ...
QUE ...
DONT ...
SUBJONCTIF

O ...
AUQUEL ...
laquelle, auxquel(le)s
DUQUEL ...
de laquelle, desquel(le)s

qui soit la fois hautement performant et


exempt de risques.
[antcdent indfini qualit requise +
SUBJONCTIF]

- Eh bien, la BNP vous propose NATIO


PERFORMANCE - un placement

qui rpond justement vos exigences.

Avez-vous trouv un placement

qui vous convienne mieux?

- Non, il ny a pas de placement

qui rponde au mme titre que celui-ci


mes souhaits.

Si je connaissais une banque

qui vous convienne mieux, je ne


manquerais pas de vous le dire!

[antcdent indfini & qualit prsente comme relle


+ INDICATIF]

[antcdent (indfini) en co-texte ngatif,


interrogatif 445 ou hypothtique qualit incertaine +
SUBJONCTIF]

Quel que soit le placement

que vous souhaitiez, la BNP fera


parfaitement votre affaire!
[antcdent en co-texte virtualisant ( subjonctif)
qualit incertaine + SUBJONCTIF : subjonctif dit
dattraction 446]

445

Interrogation furtive y compris : je cherche quelquun qui fasse ce travail ( je le cherche, mais le trouveraije ? ). Comparer : je trouverai bien quelquun qui fera ce travail (lindicatif y marque la confiance du
locuteur).
446
Aprs un autre subjonctif. Dans les noncs du type de : Je regrette que ce soit lui qui ait t nomm il
sagirait moins dattraction modale que de relation smantique avec le verbe principal qui requiert lui-mme le
subjonctif (comme si lon disait : je regrette quil ait t nomm). Noter toutefois que le subjonctif reste
optionnel, dans la relative (Je regrette que ce soit lui qui a t nomm est toujours possible, pour souligner la
ralit du fait), alors quil est obligatoire dans la compltive (on ne peut pas dire : *je regrette quil a t
nomm). Cf. Hanse 1991 : 903.

126

3. Modalits implicatives.

SI

vous voulez
(votre femme veut)
vous avez achet
vous vouliez
vous aviez voulu

3.1. Exprimer la CONDITION et lHYPOTHSE


3.1.1. Le SI conditionnel 447
acheter une voiture neuve, VOUS CHOISIREZ
VOUS CHOISISSEZ
CHOISISSEZ!/ (quelle choisisse)
une Renault,
vous AVEZ FAIT
vous CHOISIRIEZ
vous AURIEZ CHOISI/

(subordonne : protase)

SI

PRSENT / pass compos de lindicatif

IMPARFAIT de lindicatif
PLUS-QUE-PARFAIT de lindicatif
CONDITION (HYPOTHSE)

en franais:
* SI + FUTUR / CONDITIONNEL
- R 450-

une Renault.

une bonne affaire.

(principale : apodose) 448

FUTUR <ventuel>, forte probabilit de ralisation


prsent / pass compos
impratif/subjonctif prsent (! 3e personne)
CONDITIONNEL prsent : <potentiel> 449, ralisation
possible (mais plus douteuse)
CONDITIONNEL pass : <irrel>, ralisation exclue
SITUATION

en roumain:
OK
DAC + VIITOR / CONDITIONAL

447

Qui fonctionne plus souvent, en langue naturelle, comme si hypothtique. Do lemploi des guillemets. Voir
plus bas (dans le texte) Condition vs hypothse.
448
Dans le cas des conditionnelles standard, la corrlation ou en logique : limplication est bel et bien
figure comme se droulant (de la protase lapodose), i.e. comme un enchanement temporellement ordonn
(Si P alors Q), et qui sinscrit ainsi dans squentialit du texte : [] + siP + alorsQ + [] . (Achard-Bayle, Guy
(2006) Connexit(s), Cadrages co(n)textuels, Porte(s) , sur : http://edel.univpoitiers.fr/corela/document.php?id=1278). Le terme de conditionnelles est employ dans ce texte au sens des grammaires normatives
(traditionnelles), sans gard pour la distinction smantique condition/ hypothse. Cela dit, lordre progressif protase + apodose caractrise ou bien les noncs
(mtalinguistiques) de la logique formelle (si p, alors q), ou bien, en langue naturelle, les corrlations de type hypothtique (supposition vs condition au sens strict).

449

La distinction modale entre potentiel (avec une suite possible de type espoir que tel sera le cas : sil venait,
je serais contente et jespre quil viendra) et irrel du prsent (avec une suite possible du type regret
que tel ne sera pas le cas : sil venait, je serais contente mais hlas, il ne viendra pas) cf. Le Querler 1996 :
108 est (pour cette construction) pragmatique plus que smantique, cest--dire marge la smantique de la
construction grammaticale <si+ imparf., cond. prs.>, mme compte tenu de lapport compositionnel des
lexmes qui la ralisent au cas par cas. La distinction est rsolue en termes de lenchanement (inter- voire
transphrastique). Lattitude pistmique du locuteur, de <croyance forte que p> ou de <savoir que non-p>, qui
tranche linterprtation, nest accessible que co-textuellement (par la suite donne au discours du locuteur) ou en
termes du contexte situationnel (dans lexemple donn : sil est mutuellement vident, pour le locuteur et son
interlocuteur-interprtant, que la personne en question ne saurait venir).
Nous distinguerons <potentiel (fait ralisable)> et <irrel du prsent> en termes syntaxico-smantiques. Une
construction d-balance (asymtrique), conditionnel prsent dans la principale, et plus-que-parfait de
lindicatif aprs si signifiera l<irrel du prsent> : Je partirais volontiers [maintenant] sil tait venu me
remplacer ; la construction balance (symtrique) conditionnel prsent dans la principale, et imparfait de
lindicatif aprs si codera pour le <potentiel (fait encore ralisable)> : Je partirais volontiers sil venait me
remplacer (avec, pour suite possible, qui confirme, le cas chant, linterprtation smantico-syntaxique obtenue
au niveau phrastique : ___et jespre quil viendra) ; et la construction balance conditionnel pass dans la
principale, et plus-que-parfait de lindicatif aprs si codera pour l<irrel du pass> : Je serais volontiers partie
[ce matin, hier] sil tait venu me remplacer. Le caractre irralisable du fait suppos est alors marqu dans la
subordonne hypothtique (par le plus-que-parfait de lindicatif), tant dans le cas de lirrel du prsent que dans
celui de lirrel du pass.
450
formes en -r- (radical du futur et du conditionnel)

127

Condition vs hypothse :
Lordre des conjoints : [si p, (alors) q] favorise linterprtation hypothtique (supposition : ventuel,
potentiel, irrel). [q, si p] favorise par contre la lecture conditionnelle. Comparer : Sil vient me
remplacer, je partirai./ Je partirai sil vient me remplacer.
Les restrictifs bloquent la lecture hypothtique au profit de la lecture (bi)conditionnelle ( si et
seulement si ): q, seulement si p, [q ne] que si p. Comparer : Je partirai sil vient me remplacer/ Je
partirai seulement sil vient me remplacer, Je ne partirai que sil vient me remplacer.
Coordination : q, si p1 et que [+subjonctif =p2] : Si vous voulez acheter une voiture neuve et que vous ayez
besoin dun financement complmentaire, vous souscrirez cette carte de crdit.
3.1.2. Autres tours conditionnels/ hypothtiques
En cas de vol de votre carte bancaire, Protecarte couvre votre prjudice.
(Si votre carte bancaire a t vole . . . )
dfaut dune assurance Protecarte, vous ne toucherez pas dindemnit.
(Si vous navez pas dassurance . . . )
condition davoir souscrit Protecarte, vos prjudices seront couverts.
(Si vous avez souscrit Protecarte, ...)
(Faute davoir souscrit Protecarte, vos prjudices ne seront pas couverts.)
(Si vous navez pas souscrit Protecarte, ...)

condition
... condition que ...
... pourvu que ...

CONDITION
+ rserve
... si tant est que ...
... sous rserve que ...

+ subjonctif
(sujet 1 = sujet 2)
... condition de
+ infinitif (prsent, pass)

+ subjonctif

SUPPOSITION (hypothse)
+ restriction 451
... moins que... ne 452 ... supposer que ..., ...
Suppos que ..., ...
En supposant que/ En
admettant que ..., ...
+ subjonctif
+ subjonctif
(sujet 1 = sujet 2)
Au cas o ..., ...
... moins de ...
+ infinitif
+ conditionnel
... sauf si ...
en cas de + SN/ cas
+ indicatif (prsent,
auquel (auquel cas)
imparfait, plus-queparfait) 453

451

Le fait exprim par la proposition principale cesse dtre vrai si la condition est remplie (autrement dit ce fait
EST LE CAS, sous restriction que le fait exprim par la subordonne ne soit pas le cas)
452
NE dit expltif (sans valeur ngative - cf., en roumain: M` tem s` nu vin` (= M` tem [de faptul] c` ar putea
veni) Nu vreau s` vin`).
453
Mme rgle de concordance que SI conditionnel.

128

3.2. Exprimer lOPPOSITION


La Banque de France a
t cre en 1800 ,
SI
(ALORS QUE)
(TANDIS QUE)
La Haute Banque a
perptu ses traditions.

... ,

, dans la plupart des autres grands pays, linstitution


quivalente ne date que de la seconde moiti du
XIXe sicle.
la Banque de France a t cre dans la plupart des autres grands pays, linstitution
quivalente ne date que de la seconde moiti du
en 1800 ,
XIXe sicle.
les grands tablissements daujourdhui se veulent
PAR CONTRE,
banques tout faire.
(AU CONTRAIRE,)
(EN CONTREPARTIE,)
(EN CHANGE,)
(EN REVANCHE,)
MAIS
ALORS QUE
(TANDIS QUE)

3.3. Exprimer la CONCESSION


MALGR + SN
EN DPIT DE + SN
BIEN QUE / QUOIQUE + subjonctif
( . . . ) QUEL(LE) QUE soit le montant (la somme) engag(e) ( . . . )
( . . . ) QUEL(LE)S QUE soient les risques (les circonstances) ( . . . )
( . . . ) QUI QUE vous soyez ( . . . )
( . . . ) QUOI QU il arrive ( . . . )
( . . . ) O QUE vous alliez ( . . . )
QUELQUE percutants QUE soient ces placements, . . .
FRANAIS
quel(le)(s)) que
qui que
quoi que
o que
quelque (+ Adj. / Adv.) que
+ SUBJONCTIF

La BNP vous

fait / fera
ferait
aurait fait

ROUMAIN
oricare
oricine
orice
oriunde
oric@t de + Adj. / Adv.
+ CONDI|IONAL-OPTATIV
PREZUMTIV
INDICATIV

bnficier de 50% de ces progressions


baisse
MME SI lindice boursier

baissait

ultrieurement
avait baiss.

129

3.4. Exprimer la CAUSE

3.4.1. Expliquer
Pour rpondre une question portant sur la (les)
Parce que (P)
cause(s)
cause de (SN)
(POURQUOI?)

CEST parce que (P)


cause de
en raison de (SN)
Pour rectifier la cause (cause nie)
CE NEST PAS QUE
(CE NEST PAS QUE, NON QUE + subjonctif !!!)
(P : subjonctif) mais (Q :
indicatif) 454
NON QUE
[P et Q = phrases simples, propositions (P = la cause // Q = leffet)]

Pour mettre en vedette la cause


(CEST ... QUE ...)

(Q) parce que (P)


car
(Q) cause de (SN)
en raison de
que (Q)

... cause de
laugmentation de la masse
en raison de
montaire allemande =
suite
... faute dune baisse des taux dintrts allemands
=
... force dinterventions sur les marchs =
Le SME est en danger
CAUSE DE la nouvelle crise montaire
(effet (situation) dfavorable)

... parce que la masse montaire allemande a


augment
... parce que les taux dintrts allemands nont
pas t abaisss
... parce que (la Banque de France) est intervenue
maintes reprises sur les marchs
Le calme a t ramen
GRCE la Banque de France.
(effet (situation) favorable)

Si vous ntes pas mme de fournir une rponse une question Pourquoi?,
vous direz (comme pour nimporte quelle question):
Je ne sais pas / Aucune ide.
Si vous ne voulez pas y rpondre,
Si vous voulez
narguer votre interlocuteur,
couper court la conversation,
vous direz :
De-aia/ Uite-a]a

Squence
Acte
Conscuter

Parce que =

3.4.2. Conscuter
(Le point de vue de lInterlocuteur)

CAUSE
Fait (prmisse): connu(e)
COMME
je ne peux (pas)
TANT DONN QUE
pargner,
VU QUE
PUISQUE
PARCE QUE
FAUTE DE
pouvoir pargner
Ne pouvANT pas pargner
GRCE votre contrat Prsence,
FORCE Dtudes personnalises,
CAUSE DE

tous ces avantages,

EFFET
Consquence: inconnue
je rentabilise.

vous bnficiez de lengagement de la BNP, sur


la qualit de ses services.
nos conseillers vous aident grer votre
budget au mieux de vos intrts.
la plupart de nos clients adhrent Prsence.

votre refus dadhrer


Prsence,
SUITE votre demande,

nous sommes dans limpossibilit de vous


consentir ce prt un tarif prfrentiel.
nous vous envoyons ci-joint une formule
dadhsion Prsence.
Rappeler le fait (= la prmisse)
En indiquer la consquence
(Le point de vue du Locuteur)

454

Elle accepta avec joie, non quil y et entre nous beaucoup dintimit, mais elle aimait nos enfants. (Mauriac,
Nouv. P. Rob.).

130

3.5. Exprimer la CONSQUENCE


. . . , DE SORTE QUE ( + Indicatif) . . .
. . . , DONC . . .
. . . . PAR CONSQUENT, . . .
EN CONSQUENCE, . . .
PAR VOIE DE CONSQUENCE, . . .
. . . . AUSSI
( + inversion du sujet) . . . .
AINSI
...

TROP (PEU) + Adj. / Adv. + POUR QUE ( + subjonctif) . . .

3.6. Exprimer le BUT


...

POUR
EN VUE DE

+ SN

...

CONTRE

(but)
dans votre intrt
dans le but de . . .
dans un but dsintress
des fins lucratives

+ SN
(but viter)

...

POUR
AFIN DE
+ infinitif
EN VUE DE
histoire de
question de
+ infinitif
Verbe de mouvement
+ infinitif 455
aller
venir
etc.
. . . POUR QUE
. . . AFIN QUE
+ Subjonctif (prsent)
(but)
. . . DE SORTE QUE
(consquence voulue)
CAUSE // BUT
CONSQUENCE // BUT
... TROP ... POUR
... POUR QUE
POUR
POUR
+ infinitif pass
+ infinitif prsent
QUE + Subjonctif
+ Subjonctif
Pour avoir souscrit une
Vous avez souscrit une
... DE SORTE QUE
... DE SORTE QUE +
assurance-vie, vous
assurance-vie pour payer
+ Indicatif
Subjonctif
payez moins dimpt.
moins dimpts.

455

Je vais (chez le boulanger) acheter du pain ( je vais chez le boulanger pour acheter du pain ). Construction
lorigine du futur proche (jachte du lait, puis je vais acheter du pain = jachterai du pain tout de suite ).

131

4. Les REPRES TEMPORELS 456


4.0. Indiquer le MOMENT
QUAND?
Prposition
le 1er octobre, le 10 novembre, le vendredi 10
novembre, le 15 du mois;
les annes 70;
le soir, laprs-midi, le matin, la nuit, le jour, le
samedi;
le jour, le samedi, la semaine, le mois, lt,
lanne, le moment,
la priode o...
un (beau) jour/matin;
lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi,
dimanche (Il passera te voir samedi);

+ Prposition
, AU: au printemps, au mois de janvier (fvrier, mars,
avril, mai, juin, juillet, aot, septembre, octobre, novembre,
dcembre); au XIXe sicle, lpoque (= cette poque-l),
lpoque de Louis XV, une poque domine par ... ;
- le 10 mars au matin/soir;
- midi/minuit (sans article!)

fin/dbut novembre, 2004;


fin courant (= la fin du mois courant).

DE/DU: (le/au) mois daot, 11 heures du soir, la runion


de mercredi, laprs-midi du 15 mai, les difficults
conomiques des annes 30, les rformes de 1966 - 1967;
EN: en dcembre, en t (automne, hiver), en 1995;
DANS: dans la matine (la journe, la soire, laprs-midi),
dans les annes 90;
VERS: vers onze heures, vers midi;
APRS: aprs le repas / la guerre; laprs-guerre, laprsmidi; aprs-demain;
SOUS: sous la Ve Rpublique, sous Louis XV;

la fin (de);
lissue de la runion / la guerre;
en fin de semaine (danne) (sans article!);
au milieu de (... du sicle dernier / du XIXe sicle / des
annes 80);
la mi-janvier (fvrier, ...);
au dbut (de) (au dbut du chapitre), au
commencement (de) (au commencement du printemps);
en dbut daprs-midi (danne) (sans article!);
dans le courant du mois de mai (Il repassera dans le
courant du mois de mai).

456

Chapitre non compris dans la matire prparer pour lexamen, except les sections marques dun
astrisque.

132

4.1. LOCALISER une action dans le temps, par rapport au MOMENT DE LA PAROLE*
avant
aprs
AUJOURDHUI
JE DIS AUJOURDHUI:
Il a fait beau
Il fait beau
Il fera beau
(hier)
(en ce moment)
(demain)
autrefois (jadis)
maintenant
plus tard
dans le pass
en ce moment
dans/ lavenir
par le pass
pour le moment
ultrieurement
nagure
prsent
de nos jours
ces temps-ci
ces derniers temps
avant
ce jour-l
aprs
AUJOURDHUI
JE DIS AUJOURDHUI:
Il a fait beau
Il a fait beau
Il a fait beau
(la veille)
(ce jour-l)
(le lendemain)
(un peu/
ce moment-l
(un peu / bien ) plus tard
beaucoup) plus lpoque
(peu / longtemps) aprs
tt
alors
(peu/ bien)
avant
auparavant
IL Y A 3, 4, 5 ... jours/semaines/mois/ans
AVANT-HIER
(matin)
(aprs-midi)
(soir)
HIER
AUJOURDHUI
DEMAIN
APRS-DEMAIN
DANS/DICI 3, 4, 5 jours/semaines/mois /ans

la semaine (lanne) dernire (passe)


le mois (lan) dernier (pass)

ce soir
cette semaine
ce mois(-ci)
cette anne(-ci)
la semaine (lanne) prochaine,
le mois (lan) prochain (qui vient / venir)

4.2. LOCALISER une action dans le temps, par rapport un MOMENT distinct du MOMENTDE LA
PAROLE*
la semaine (lanne) prcdente
3, 4, 5 ... jours (semaines, ans) AUPARAVANT /
le mois (lan) prcdent / davant
PLUS TT
LAVANT-VEILLE
(au matin)
(dans laprs-midi)
(au soir)
LA VEILLE
ce soir-l / ce jour-l / ce mois-l
CE JOUR-L
cette semaine-l / cette anne-l
(LE JOUR MME)
la semaine (lanne) suivante/ daprs
LE LENDEMAIN
le mois (lan) suivant/ daprs
(matin)
(aprs-midi)
(soir)
LE SURLENDEMAIN
3,4,5, jours (semaines, mois, ans)
APRS / PLUS TARD
4.3. Indiquer les LIMITES du procs, dans le temps

133

I. Limite initiale (point de dpart


dans le temps)
ds 1971, la crise des changes
attnue la porte des mesures
librales
partir de (daujourdhui, de
maintenant / du 15 avril;
ds (aujourdhui / maintenant / le
15 mai / lundi);
dores et dj (= ds
maintenant);
dsormais, dornavant (=
partir de maintenant).

II. Limite finale (point darrive dans le


temps)
au terme de deux sicles dactivit

au bout de, au terme de (3 jours / une


journe);
jusqu prsent / maintenant / une
poque rcente / aujourdhui / demain /
au matin etc.;
jusquau jour o
jusque l, jusquau bout
dici-l (dici demain, dici Nol).

III. Limites: initiale et finale


De 1800 1914 (... ) la Banque
dispose dune relle
indpendance
de ... ...
du 1er mai au 15 juin;
entre ... et ...
entre le 2 et le 7 juin (entre
les 2 et 7 juin).

4.4. Indiquer la DURE


au cours des annes 70
Limite initiale et dure: DEPUIS
(Je tattends) depuis trois heures.
(Il est triste) depuis ton dpart.
Dure: PENDANT (trois jours / la guerre)
DURANT (trois jours / la Deuxime Guerre)
(trois jours durant)
EN (trois heures) (Il a fini en trois heures.)
POUR (trois jours) (Je serai partie pour trois jours.)
AU COURS DE (des annes 90, du premier semestre)
SUR (Le remboursement du prt peut tre tal sur 7 ou 15 ans.)
Dure Moment: journe, matine, soire, anne jour, matin, soir, an
Verbes : durer...; mettre... pour
La privatisation des grandes banques rseau a dur quelques annes.
Ils ont mis annes pour privatiser les grandes banques rseau.
4.5. La SIMULTANIT
(Action 1)
(Action 2)

EN MME TEMPS

... quand ...


... lorsque ... / ... lors de + SN
... au moment o ...
... ce moment-l, ...
... alors que ...
... Alors, ...
... comme ...
... pendant que ... / ... pendant + SN / ... durant + SN
... Pendant ce temps, ...
... tandis que ...
... (tout) en +V2 - ant (...)
... et ... en mme temps / ... en mme temps que + SN 457
... et ... au mme moment

457

Paul est sorti en mme temps que toi, analys comme simultanit de la sortie de deux individus, donc
comme simultanit de deux vnements distincts.

134

Action 1
Action 2
Il est sorti

PENDANT QUE
TANDIS QUE
ALORS QUE

(pass compos)
(prsent)
(prsent)
Action 1
Action 2
Il est sorti
COMME
jarrivais.
(pass compos)
Il sort
AU MOMENT O
jarrive.
(prsent)
(prsent)
Il sort (toujours) QUAND
(prsent)
(prsent)
Verbe 1
Verbe 2
plus-que-parfait
plus-que-parfait
pass compos
pass compos
imparfait
imparfait
prsent
prsent
futur
futur
...
...
(INDICATIF)
Verbe 1
Verbe 2
pass compos
imparfait
imparfait
pass compos

4.6. La POSTRIORIT 458


POSTRIORIT
***Action 1
APRS

je mangeais.

(imparfait)

SIMULTANIT
(imparfait)
SIMULTANIT

jarrive.

Il tait sorti
Il est sorti
Il sortait (toujours)
Il sort
Il sortira
(il va sortir)

SIMULTANIT
& RPTITION

quand jtais arriv.


quand je suis arriv.
quand jarrivais.
quand jarrive.
quand jarriverai.
(je vais arriver.)

Il est sorti au moment o (quand)


jarrivais.
Il dormait quand (lorsque, au moment o) je suis arriv.

Action 2
[fait ralis 459]
***
... quand ...

... lorsque ...

... aprs que ... [+ INDICATIF !]


(temps simple)
(temps compos)
Nous en reparlerons quand vous aurez rgularis
votre situation.
(Dhabitude,) Quand il avait lu le courrier, il faisait
entrer le premier client.
... APRS + infinitif pass
(sujet 1 = sujet 2)
Je viendrai aprs avoir lu ce rapport.
... aprs + SN
... plus tard

SIMULTANIT
&
DURE

POSTRIORIT IMMDIATE
TOUT DE SUITE
Action 2
APRS
... ds que ...
... aussitt que ...
... une fois que ...
(temps simple)
(temps compos)
Je suis vous ds que jai fini.
Je viendrai aussitt que jaurai fini ce rapport.
Il faisait (toujours) taper le rapport aussitt quil lavait
rdig.
Ds
(...)
Aussitt + SN 1 + participe pass (...)
Une fois
(...)
Aussitt le rapport rdig, il est mont me voir.
SITT dit, SITT fait.
Action 1

458

Seules les cases marques par *** feront lobjet de linterrogation (emploi de lindicatif pour marquer la
ralit (le caractre ralis) du fait dcrit dans la subordonne temporelle (introduite notamment par aprs que),
en tant quoppos au caractre virtuel (inactuel, pas rel) du fait dcrit dans la subordonne introduite par avant
que (cf. section LANTERIORITE).
459
Ou envisag sous cet clairage (pour les situations postrieures t0).

135

Revenez aprs les Ftes.


Nous verrons a plus tard.
... ds + SN
Les problmes ont commenc ds votre arrive
... Aprs (quoi), ...
(et aprs)
... Ensuite, ...
(et ensuite)
... Puis, ...
(et puis)
... L-dessus, ...
(et l-dessus)
... Sur ce, ...
(temps simple)
(temps simple)
Nous tudierons votre dossier. Puis, nous
aviserons.
(temps compos)
(temps compos)
Il a rdig son rapport. Aprs quoi, il a fait venir la
secrtaire.

Postriorit immdiate
. . . ds que . . .
. . . aussitt que . . .
(temps simple)
(temps compos)
Je suis vous ds que jai fini ce rapport.

... Aussitt, ...


... Tout de suite (aprs), ...
... Immdiatement, ...
(et (...) aussitt / et (...) tout de suite / et (...)
immdiatement)
(temps simple)
(temps simple)
Il rdigera le rapport. Madame Duranton le tapera
aussitt.
(temps compos)
(temps compos)
Il a rdig son rapport. Tout de suite aprs, il a fait
venir la secrtaire.
peine (+ inversion du sujet) . . . que . . .
(temps compos)
(temps simple)
peine ai-je raccroch que le tlphone se met
sonner.
Quasi - simultanit
. . . ds que . . .
. . . aussitt que . . .
(temps simple)
(temps simple)
Ds que le tlphone sonne, elle se prcipite pour
rpondre.

LA CONCORDANCE DES TEMPS


Action antrieure
SAVOIR DIRE
pass compos
futur antrieur
plus-que-parfait

COMPRENDRE

Action postrieure
prsent
(postriorit (postriorit immdiate))
futur
imparfait
(postriorit (postriorit immdiate) & rptition)
toutes les fois que
toujours
dhabitude

Aprs quil a eu rdig son rapport,


(pass surcompos)

il la fait taper.
(pass compos)

Quand il eut rdig son rapport,


(pass antrieur)

il le fit taper.
(pass simple)

LE PASS SIMPLE
V1 er
- ai
- as
-a
-mes
- tes
- rent

V2 ir
- is
- is
- it
- mes
- tes
- irent

V3
- is
- is
- it
- mes
- tes
- irent

- us
- us
- ut
- mes
- tes
- urent

- ins
- ins
- int
- nmes
- ntes
- inrent

136

il paracheva
ils parachevrent
il bnficia
ils bnficirent
il acheta
ils achetrent
il jeta
ils jetrent
il gela
ils gelrent
il souleva
ils soulevrent
-a- / --

ils accomplirent
ils choisirent
ils finirent
ils fournirent
ils russirent
ils blanchirent

il fit ... ils firent


FAIRE
ils vit ... ils virent
VOIR
il naquit ... ils naquirent
NATRE

-i-

-i-

PASS SIMPLE
il bnficia
ils bnficirent
ils finirent
ils sortirent
- AI
- AS
-A
- RENT

FUTUR
il bnficiera
ils bnficieront
ils finiront
ils sortiront
- RAI
- RAS
- RA
- RONT

PASS SIMPLE
il sortit ...
il perdit ...
il fit ...

il fut ... ils furent


TRE
il vcut ... .ils vcurent
VIVRE
il connut ... ils connurent
CONNATRE

il vint ... ils vinrent


VENIR
il tint ... ils tinrent
TENIR
(et leurs drivs)

-uPASS SIMPLE
il eut
il sut
il put
il voulut
il fallut
il valut
je mis
je pris
il dit ...
(ils dirent)

-inPARTICIPE PASS
(il a) EU
(il a) SU
(il a) PU
(il a) VOULU
(il a) FALLU
(il a) VALU
(jai) MIS
(jai) PRIS
(jai) DIT

PRSENT DE LINDICATIF
il SORT...
il PERD ...
il FAIT ...

! MAIS: il accomplit ...


(ils accomplirent)
(ALORS)

il ACCOMPLIT
(ils ACCOMPLISSENT)
(MAINTENANT)

!! Paul vit ALORS tous ses espoirs svanouir. (VOIR: pass simple)
Paul vit ACTUELLEMENT Paris. (VIVRE: prsent de lindicatif)
4.7. LANTRIORIT*
(Action 1)
AVANT
(Action 2)
Avant que (ne*) + subjonctif (prsent), . . .
Avant de + infinitif (prsent), . . .
Avant + SN, . . .
Jusqu ce que + subjonctif (prsent), . . .
En attendant de + infinitif (prsent / pass **), . . .
Jusqu + SN / alors, . . .
En attendant ( + SN) , . . .
Dici + SN / l, . . .
* ne expltif (voir supra)
** action acheve, accomplie
Mettre en vedette le repre temporel:
trois jours
A FAIT
longtemps
IL Y A
VOIL

ANTRIORIT

ANTRIORIT &
DURE

QUE

je cherche le joindre
je ne lai pas vu
je lattends

137

5. Le DISCOURS RAPPORT
DISCOURS
DIRECT
(dialogue)

JE travaille pour Sims, Dawson and Dick, dit/a dit Paul lemploy.
JE suis arriv HIER des Etats-Unis dclare/a dclar Paul lemploy.
JOUEREZ-VOUS la Bourse pour VOTRE propre compte? lui demande/a demand
lemploy.
Comment pourrait-on briser ce monopole? demande/a demand Paul lemploy.
DISCOURS Paul dit/a dit lemploy
QUIL travaille/travaillait pour Sims, Dawson
INDIRECT
and Dick.
Paul dclare/a dclar lemploy
QUIL est arriv HIER / tait arriv LA
VEILLE.
Lemploy LUI demande/a demand
SIL jouera/jouerait (+allait jouer) la Bourse
pour SON propre compte.
Paul demande/a demand lemploy
COMMENT on pourrait/pouvait briser le
monopole des firmes dj en place.
1.1. Mode demploi
Verbes introducteurs:
- dire, affirmer, dclarer, maintenir, soutenir, annoncer, faire savoir, rtorquer, rpliquer ...+QUE
- demander, vouloir savoir, senqurir ... + SI 460 / O / QUAND / COMMENT / QUI / CE QUE...
Personnes
X sadresse TOI (VOUS):
Je
IL (ELLE)
Nous ILS (ELLES): nous = X + quelquun dautre
NOUS: nous = X + TOI (VOUS).
Tu JE
Vous NOUS
JE (vous = pronom de politesse)
[indices syntaxiques : accord du verbe flchi
formel (2pl), mais accord smantique du participe
pass et de ladjectif attribut du sujet, au sg.,
spcification du genre selon le genre naturel de
lindividu auquel on sadresse]

X sadresse un TIERS:

Je, Tu, Il, Elle,


IL, ELLE, ILS, ELLES
Nous, Vous, Ils, Elles

Concordance des temps (de lindicatif)


Verbe introducteur
nonc (de X)
au prsent
pass compos / imparfait: ANTRIORIT
(X dit que ...)
prsent: SIMULTANIT
futur (futur proche): POSTRIORIT
un temps pass
plus-que-parfait: ANTRIORIT
(X a dit / disait . . . que . . . )
imparfait: SIMULTANIT
conditionnel prsent: POSTRIORIT 461
Discours direct
conditionnel prsent 462
Relateur
Forme verbale
FUTUR

au prsent
conditionnel prsent

Discours indirect
verbe introducteur
un temps pass
IMPARFAIT (indicatif)

Si conditionnel

Si dubitatif

460

SI dubitatif (vs. SI conditionnel)


valeur temporelle (et non pas modale) de futur du pass; forme concurrente: ALLER ( limparfait) +
infinitif (Il ma fait savoir que tu viendrais (+ allais venir) le surlendemain)
462
valeur MODALE!
461

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Futur proche
Futur du pass priph.
CONDITIONNEL

MME SI + prsent / imparfait / plus-que-parfait (de lindicatif)


Concordance des temps: cf. Si conditionnel
Le SI dubitatif
DOUTE Je ne sais/savais pas
(question Paul ne sait/savait pas
cache)
Je me demande/me suis demand
question Paul me demande/ma demand
indirecte Paul veut (voudrait)/voulait savoir (=
(discours Paul ne sait/savait pas)
rapport)

SI

les firmes a) se sont empares/staient


dj en
empares du march.
place
b. ont/avaient le monopole du march.
c. garderont/garderaient, allaient
garder leurs privilges.
lon

d. pourrait/pouvait briser ce
monopole.
(a. = antriorit; b. = simultanit; c. = postriorit; d. = conditionnel valeur modale)
N.B. Mme rgle de concordance que celle qui est de mise aprs que, o, quand, comment etc. (discours
rapport (style indirect)).
La concordance des temps est une forme de distanciation, en rfrence aux dires rapports (en style indirect). Les
vrits ternelles, indiscutables (scientifiques, analytiques) sy soustraient (Il maintenait que la terre tourne
autour du soleil).
Sy soustraient galement les propositions dcrivant des situations qui restent futures, du point de vue du
locuteur actuel (non seulement du point de vue du premier locuteur, dont les dires seront rapports) : Il ma dit
que la runion commencera [plutt que : commencerait, allait commencer] dans un petit quart dheure. Quand
je suis arrive la fac, ce matin, il vous disait que Marie arrivera [plutt que : arriverait, allait arriver] par le
train de 16h.

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