Laisse Moi Te Posseder Beth Kery PDF
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Beth KERY
Etudiante en art et en architecture, Francesca Arno a t slectionne pour raliser une
peinture murale d'exception dans le nouveau building de Noble Enterprises.
A la tte de cette socit florissante : Ian Noble. Puissant, insaisissable, il contrle tout ce
qui l'entoure d'une main de matre.
C'est l'occasion d'un cocktail que Francesca fait sa connaissance. Une rencontre qui se
rvle dcisive, fatale. Elle est jeune, innocente. Il ne peut rsister.
Il l'attire, la possde. Et elle aime a. C'est un jeu passionnel et exclusif. Un jeu de pouvoir
sans aucune limite.
Traduit de l'anglais (tats-Unis) par Clia Chazel
Titre original BECAUSE YOU ARE MINE
diteur original
The Berkley Publishing Group, published by the Penguin Group (USA) Inc., New York
BethKery, 2013
Pour la traduction franaise ditions J'ai lu, 2013
J'adresse ma profonde gratitude Leis Pederson, Laura Bradford, Mahlet, Amelia, ainsi
qu' mon mari, n'aurais pas pu mener bien ce roman sans vous.
Merci galement tous les lecteurs qui m'encouragent depuis des annes. C'est d'abord
vous que je dois ma carrire.
Quand Ian Noble pntra dans la salle du luxueux bar-restaurant, Francesca tourna
aussitt les yeux vers lui, comme la plupart des convives prsents. Les battements de son
cur s'acclrrent. A travers la foule, elle distingua un homme de grande taille, vtu d'un
impeccable costume sur mesure. Il tait en train de retirer son pardessus, rvlant un corps
mince et svelte.
Elle le reconnut instantanment, et son regard s'attarda sur l'lgant manteau noir drap
autour de son bras. Elle songea soudain que si le manteau tait parfait, le costume ne lui
correspondait pas du tout. Un jean aurait bien mieux convenu ! Francesca dut reconnatre
que cette rflexion n'avait aucun sens. Pour commencer, le costume lui allait merveille et,
en plus, elle avait lu dans un rcent article du magazine GQ que Noble tait connu pour faire
fructifier presque lui tout seul les tailleurs de luxe de l'avenue Savile Row, Londres. C'tait
sans doute le moins qu'on puisse attendre d'un homme d'affaires issu d'une branche mineure
de la famille royale britannique. Un des messieurs qui l'accompagnaient tendit la main pour
prendre son manteau, mais il dclina la proposition d'un mouvement de tte.
Apparemment, l'nigmatique M. Noble ne prvoyait pas de s'attarder plus que le strict
minimum au cocktail organis en l'honneur de Francesca.
C'est M. Noble... Il va tre ravi de te rencontrer, il adore ton travail ! fit Lin Soong.
Francesca perut une subtile nuance d'orgueil dans la voix de la jeune femme, comme si
Ian Noble n'tait pas son employeur mais son amant.
Il a l'air d'avoir bien plus important faire que de me rencontrer, rtorqua Francesca en
souriant.
Elle sirota une gorge d'eau gazeuse tout en regardant Noble mener une conversation
tlphonique laconique au tlphone. Deux hommes restaient posts prs de lui, et il tenait
toujours son pardessus pli au creux de son bras, prt dcamper aussi vite que possible. Au
pli subtil de ses lvres, Francesca devina qu'il tait irrit. trangement, en voyant cette
expression trs humaine sur son visage, elle se dtendit un peu. Elle n'en avait pas touch un
mot ses colocataires qui la connaissaient plutt pour son caractre tmraire et bien
tremp mais la perspective de rencontrer Ian Noble gnrait en elle une drle d'angoisse.
Le cours des conversations reprit, mais l'nergie qui emplissait la pice s'tait d'une
certaine faon amplifie depuis l'arrive de Noble. De manire surprenante, cet homme qui se
dmarquait par son lgance et sa distinction semblait fasciner une gnration de porteurs de
tee-shirts accros la technologie. Il faisait tellement annes 1930 !
Elle avait lu quelque part que Noble avait gagn son premier milliard en crant quelques
annes plus tt une socit d'information en ligne, qu'il avait ensuite revendue en bourse,
rcuprant ainsi treize milliards supplmentaires, investis leur tour dans une gigantesque
et florissante socit de vente par Internet.
Apparemment, tout ce qu'il touchait se transformait en or. Pourquoi ? Parce qu'il tait Ian
Noble. Il pouvait faire absolument tout ce qui lui plaisait. cette pense, les lvres de
Francesca esquissrent un sourire amus. C'tait d'une certaine faon plus facile de songer
lui comme un tre arrogant et dplaisant. D'accord, il tait son mcne.
Mais comme beaucoup d'artistes au fil des poques, Francesca nourrissait une certaine
dfiance l'gard de son pourvoyeur de fonds. Malheureusement, tous les artistes affams
avaient besoin d'un Ian Noble.
Je vais juste le prvenir que tu es l. Comme je te l'ai dit, il est fascin par ta peinture. Il
t'a choisie sans hsiter parmi les trois finalistes, reprit Lin.
Celle-ci faisait rfrence au concours artistique que Francesca avait remport, dont le
laurat se voyait confier la mission prestigieuse de peindre la pice matresse du hall d'accueil
du nouveau gratte-ciel construit par Noble Chicago. O ils se trouvaient en ce moment
mme. Le cocktail en l'honneur de Francesca se tenait dans un restaurant baptis Fusion, un
tablissement branch et hors de prix situ l'intrieur de la tour dtenue par Noble. Plus
important encore, du point de vue de Francesca, la commande tait accompagne d'une
dotation de cent mille dollars, dont elle aurait grandement besoin en tant qu'tudiante en
master des Beaux-arts.
Lin fit apparatre comme par magie une jeune femme afro-amricaine du nom de Zoe
Charon pour converser avec Francesca durant son absence.
Je suis ravie de vous rencontrer, fit Zoe qui afficha un sourire de rve tout en serrant la
main de Francesca. Toutes mes flicitations pour votre prix. Rendez-vous compte : je passerai
devant votre tableau chaque fois que j'irai travailler !
En comparant ses vtements avec ceux de Zoe, Francesca fut prise d'un malaise diffus qui
lui tait de plus en plus familier. Lin, Zoe et quasiment tous les convives prsents dans la
salle arboraient des tenues d'un raffinement extrme, la pointe de la mode. Comment avait-
elle pu croire que son look bohme chic conviendrait pour une rception de Ian Noble ?
Comment avait-elle pu croire, d'ailleurs, que sa conception du bohme chic avait quoi que ce
soit de chic ?
Elle apprit que Zoe tait assistante de direction pour Noble Enterprises, dans un
dpartement du nom d'Imagetronics. Qu'est-ce que c'est que ce truc ? se demanda
distraitement Francesca tout en faisant montre d'un intrt poli, le regard de nouveau attir
par l'entre du restaurant.
Le visage de Noble s'adoucit lgrement quand Lin s'approcha pour lui parler. Quelques
secondes plus tard, une expression d'indiffrence ennuye apparut sur ses traits. Il secoua la
tte et jeta un coup d'il sa montre. Il n'avait visiblement aucune envie de se prter au
rituel de l'entrevue avec l'un des nombreux bnficiaires de ses uvres philanthropiques. Pas
plus que Francesca n'avait envie de le rencontrer. Cette rception en son honneur ne
reprsentait pour elle qu'une des obligations rbarbatives dont elle devait s'acquitter en tant
que laurate du prix.
Elle se tourna vers Zoe et lui adressa un large sourire, dtermine profiter de la fte
maintenant que son angoisse idiote de rencontrer son bienfaiteur n'avait plus lieu d'tre.
Alors, qu'est-ce qu'il a de si spcial, Ian Noble ?
Zoe sourcilla devant cette question tmraire et jeta un bref regard en direction du bar o
se tenait Noble.
De si spcial ? Pour rsumer, c'est un dieu.
Francesca eut un sourire narquois.
Au moins, vous ne risquez pas de le sous-estimer.
Zoe clata de rire et Francesca l'imita. Durant un bref moment, elles furent simplement
deux jeunes femmes en train de pouffer devant l'homme le plus sduisant de la soire. Ce
que Noble tait sans conteste, Francesca devait bien se l'avouer. Pas seulement de la soire,
en fait. C'tait l'homme le plus attirant qu'elle ait jamais crois de sa vie.
Elle cessa brusquement de rire en voyant une expression inquite apparatre sur le visage
de Zoe. Elle se retourna et surprit le regard de Noble fix sur elle. Une chaleur lourde et
diffuse se rpandit au creux de son ventre. Elle n'eut pas mme le temps de reprendre ses
esprits qu'il s'avanait dj vers elle en traversant la salle, abandonnant une Lin tonne dans
son sillage.
Francesca fut prise d'une envie ridicule de s'enfuir en courant.
Oh... Il vient vers nous... Lin a d lui dire qui vous tiez, lcha Zoe qui semblait aussi
abasourdie et surprise que Francesca.
Malgr tout, Zoe tait bien plus habitue qu'elle aux codes du savoir-vivre en socit. Avant
que Noble n'ait eu le temps de les rejoindre, toute trace de babillage juvnile avait dj
disparu de son visage, remplac par l'expression d'une belle jeune femme rserve.
Bonsoir, monsieur Noble.
Il avait des yeux d'un bleu cobalt. Ils se dtachrent de Francesca durant une fraction de
seconde et elle dut lutter pour accorder un peu d'air ses poumons pendant ce bref rpit.
Zoe, c'est bien a ? demanda-t-il.
Zoe ne parvint pas dissimuler sa fiert en voyant que Noble connaissait son prnom.
Oui, monsieur. Je travaille chez Imagetronics. Puis-je vous prsenter Francesca Arno,
l'artiste que vous avez dsigne comme laurate du concours Far Sight ?
Il lui tendit la main.
Enchant de vous rencontrer, mademoiselle Arno.
Francesca hocha simplement la tte en guise de rponse. Elle tait incapable de parler. Son
cerveau tait temporairement submerg par la vision de cet homme, la chaleur rassurante de
sa main, l'accent britannique qui transparaissait dans sa voix grave. Sa peau semblait ple par
contraste avec ses cheveux courts et sombres coiffs avec style et son costume gris. Un ange
tnbreux. L'image s'imposa malgr elle son esprit.
Les mots me manquent pour vous exprimer quel point votre travail m'impressionne.
Pas de sourire. Pas de douceur sans sa voix, bien qu'on puisse y dceler une petite pointe
de curiosit. Francesca avala pniblement sa salive.
Merci.
Il relcha lentement sa main et sa peau glissa contre la sienne. Il n'ajouta rien et se
contenta durant quelques atroces secondes de la jauger. Elle essaya de reprendre ses esprits
et redressa les paules.
Je suis trs heureuse d'avoir l'occasion de vous remercier en personne. Cela signifie bien
plus pour moi que je ne saurais le dire, dit-elle d'un ton guind en dtachant excessivement
les syllabes.
Noble eut un haussement d'paules imperceptible et sa main esquissa un geste ngligent.
Vous l'avez mrit. (Il soutint son regard.) Ou du moins, vous allez le mriter.
Elle sentit son pouls s'emballer la lisire de sa gorge et pria pour qu'il n'ait rien remarqu.
Je l'ai mrit, oui. Mais vous m'en avez donn l'opportunit. C'est pour cela que j'essaie
de vous remercier. Je n'aurais sans doute pas eu les moyens financiers de me payer ma
deuxime anne de master si vous ne m'aviez pas donn cette chance.
Il plissa les paupires. Dans un angle de son champ de vision, Francesca vit Zoe se raidir.
Elle lui lana un coup d'il inquiet. S'tait-elle montre trop franche ?
Ma grand-mre me reprochait souvent de ne pas savoir accueillir la gratitude, dit-il d'une
voix plus calme... plus chaleureuse. Vous avez raison de me le rappeler. Et je suis trs
heureux de vous avoir donn cette opportunit, mademoiselle Arno. (Il appuya ses propos
d'un bref hochement de tte.) Zoe, auriez-vous l'amabilit de transmettre un message Lin
de ma part ? J'ai dcid d'annuler le dner avec Xander LaGrange, en fin de compte.
Demandez-lui, je vous prie, de trouver une autre date.
Bien entendu, monsieur Noble, rpondit Zoe en s'loignant.
Voudriez-vous que nous nous installions plus confortablement ? demanda-t-il
Francesca en dsignant du menton un divan en cuir circulaire inoccup.
Avec plaisir.
Il la laissa se faufiler la premire dans l'alcve. Elle aurait prfr qu'il s'en abstienne : elle
se sentait gauche et pataude devant lui. Quand elle fut installe, il se glissa ct d'elle d'un
mouvement fluide et lgant. Francesca lissa d'une main la tunique vaporeuse de la robe
vintage baby doll qu'elle avait achete d'occasion dans une boutique de Wicker Park.
Ce dbut de mois de septembre s'tait rvl plus froid que prvu quand elle avait planifi
le cocktail, et elle n'avait eu d'autre choix que de revtir une veste en jean ordinaire par-
dessus les fines bretelles de sa robe.
Elle comprit tout coup combien elle devait paratre ridicule, assise ct de cet homme
la mise impeccable, majestueusement viril.
Elle froissa nerveusement le col de sa robe, et sentit qu'il l'observait. Leurs regards se
croisrent, et elle ne put s'empcher de relever le menton d'un air de dfi. Un lger sourire
s'esquissa sur les lvres de Noble, et Francesca sentit quelque chose se serrer dans son bas-
ventre.
Ainsi, vous tes en deuxime anne de master ?
Oui. l'Institut des arts.
Une excellente cole, murmura-t-il.
Il posa les mains sur la table et se laissa aller un peu en arrire sur le divan, qui avait l'air
redoutablement confortable. Son corps tait svelte, la fois relax et nerveux, et Francesca se
dit qu'il ressemblait un prdateur sur le point de bondir malgr son calme apparent. Ses
hanches taient minces et ses paules larges, suggrant une imposante musculature
dissimule sous la chemise blanche amidonne.
Si je me souviens bien de votre dossier, vous tudiez la fois les beaux-arts et
l'architecture l'universit de Northwestern ?
Oui, souffla Francesca.
Son regard se posa sur les mains de Noble. C'taient des mains lgantes, mais galement
larges, calleuses et d'apparence habile. Cette vision la troubla sans qu'elle comprenne
pourquoi. Elle ne pouvait s'empcher d'imaginer la sensation qu'elle prouverait au contact
de ces mains sur sa peau... enserre autour de sa taille...
Pourquoi ?
Elle s'arracha ses penses totalement inappropries et releva les yeux vers lui.
Pourquoi j'ai choisi d'tudier la fois l'architecture et les beaux arts ?
Il hocha la tte.
L'architecture, pour faire plaisir mes parents, et les beaux-arts, pour me faire plaisir
moi, rpondit-elle, surprise elle-mme par l'honntet de sa rponse.
Elle avait pour habitude de faire preuve d'un ddain ml de froideur quand on lui posait
cette question. Pourquoi aurait-elle d choisir entre ses talents ?
Mes parents sont tous les deux architectes, poursuivit-elle, et me voir continuer dans
cette voie tait le rve de leur vie.
Alors, vous leur avez accord la moiti d'un rve. Vous avez travaill pour obtenir la
qualification d'architecte, mais vous ne prvoyez pas d'en faire votre mtier.
Je peux toujours tre architecte.
Et je m'en rjouis pour vous.
Il releva la tte tandis qu'un homme sduisant coiff de dreadlocks, dont les yeux gris clair
contrastaient avec la peau sombre, s'approchait de leur table. Noble lui serra la main.
Lucien, comment vont les affaires ?
a marche du tonnerre, rpondit ce dernier en dvisageant Francesca avec intrt.
Mademoiselle Arno, je vous prsente Lucien Lenault. Il est le manager de Fusion et le
chef le plus illustre d'Europe. Je l'ai chip au restaurant le plus couru de Paris.
Lucien leva les yeux au ciel d'un air amus Ian venait de dresser un portrait trs logieux
de sa personne, et adressa un large sourire Francesca.
J'espre qu'on pourra bientt en dire autant de Fusion Chicago. Mademoiselle Arno, je
suis ravi de faire votre connaissance. Que puis-je vous offrir ? Ajouta-t-il avec une voix
teinte d'un dlicieux accent franais.
Noble la regarda, attendant sa rponse. Le dessin de ses lvres, inhabituellement pleines
pour un homme aussi robuste et viril, frappait Francesca par la sensualit mle de fermet
qu'il voquait.
Une forme de sauvagerie.
D'o cette pense compltement incongrue pouvait bien lui venir ?
Rien de spcial, rpondit-elle enfin en essayant de dominer les battements
assourdissants de son cur.
Et plus spcifiquement ? Senquit Lucien en lorgnant ostensiblement son verre moiti
vide.
Juste ce que je bois d'habitude : de l'eau gazeuse avec du citron.
Vous devriez tre en train de clbrer votre succs, mademoiselle Arno, intervint Noble.
tait-ce son accent qui dclenchait une vague de frissons sur la nuque de Francesca quand
il prononait son nom ? Il avait quelque chose de trs singulier, se dit-elle. Un accent
indniablement anglais mais teint d'un petit quelque chose qui mergeait de temps en
temps entre les syllabes ; quelque chose qu'elle tait incapable d'identifier.
Apporte-nous une bouteille de Roederer brut, fit Noble Lucien qui sourit en retour,
esquissa un lger salut et s'clipsa.
Francesca se sentit de plus en plus confuse. Pourquoi prenait-il la peine de passer autant
de temps avec elle ? Il ne commandait srement pas du Champagne pour tous les
bnficiaires de sa gnrosit. Noble reprit :
Comme je vous le disais avant l'arrive de Lucien, je suis heureux que vous ayez
galement une formation d'architecte. Vos talents et vos connaissances dans ce domaine sont
sans aucun doute ce qui donne votre art autant de prcision, de profondeur et de style. Le
tableau que vous avez soumis pour le concours tait spectaculaire. Vous avez saisi
exactement l'esprit que je dsirais pour l'atmosphre de mon hall d'accueil.
Le regard de Francesca erra sur son costume immacul. D'une certaine faon, l'amour qu'il
professait pour les lignes pures ne la surprenait pas. Effectivement, son travail artistique tait
souvent inspir par la passion qu'elle nourrissait pour la forme et la structure et pourtant,
cette prcision ne constituait pas le centre de son art. Loin de l.
Je suis contente que a vous plaise, dit-elle d'un ton qu'elle esprait aussi neutre que
possible.
L'ombre d'un sourire apparut sur les lvres de Noble.
Vous ne me dites pas tout. N'tes-vous pas heureuse d'avoir su me plaire ?
Ces paroles la laissrent bouche be. Elle touffa les mots qui menaaient de jaillir de sa
bouche. Je ne peins pour le plaisir de personne, sauf de moi-mme. Elle s'tait contrle juste
temps. Qu'est-ce qui clochait donc, chez elle ? Cet homme allait lui permettre de changer sa
vie.
Je vous l'ai dj dit, je suis enchante d'avoir remport le concours. C'est trs excitant.
Ah, murmura-t-il tandis que Lucien revenait avec une bouteille de Champagne dans un
seau glace.
Noble ne jeta pas mme un regard ce dernier pendant qu'il ouvrait la bouteille, mais
continua scruter Francesca comme s'il avait devant lui un sujet d'tude particulirement
intressant.
Mais vous rjouir d'avoir gagn ce prix n'est pas la mme chose que de vous rjouir de
m'avoir plu moi.
Non, ce n'est pas ce que je voulais dire..., balbutia-t-elle en regardant Lucien ter le
bouchon avec un pop touff.
Elle lana Noble un regard perplexe. De quoi parlait-il, bon sang ? Et pourquoi, bien
qu'elle n'et rien rpondre cela, sa question la troublait-elle autant ?
Je suis ravie que vous ayez apprci ma peinture. Vraiment ravie.
Noble ne rpondit rien et se contenta de la contempler d'un air dtach tandis que Lucien
versait le liquide ptillant dans des fltes Champagne. L'homme d'affaires hocha la tte et
remercia Lucien voix basse avant que ce dernier ne s'loigne. Francesca souleva son verre
pendant que Noble s'emparait du sien.
Toutes mes flicitations.
Elle parvint se composer un sourire tandis que leurs fltes s'entrechoquaient avec un son
cristallin. Elle n'avait jamais got quelque chose de ce genre ; le Champagne tait sec et
glac, et distillait une sensation dlicieuse sur sa langue et travers sa gorge. Elle jeta Noble
un regard en biais. Comment pouvait-il se montrer si insensible la tension qui emplissait
l'air, alors qu'elle-mme en suffoquait presque ?
Je suppose qu'en tant que membre de la famille royale, vous ne pouvez pas vraiment
vous faire servir par une barmaid, fit-elle en priant pour que sa voix n'ait pas trembl.
Je vous demande pardon ?
Oh, je voulais juste dire... (Elle se maudit intrieurement.) Je suis aussi serveuse a
aide payer les factures pendant que je termine mes tudes, ajouta-t-elle, saisie d'un dbut
d'affolement.
Il paraissait soudain si froid et si intimidant ! Elle porta sa flte ses lvres et aspira une
trop grande gorge de liquide glac. Elle apprhendait dj de devoir expliquer Davie
comment elle s'tait auto-saborde. Cela ne ferait sans doute qu'exasprer une fois encore
son meilleur ami, mme si ses deux autres colocataires, Caden et Justin, seraient surtout
plies de rire quand elle leur raconterait sa piteuse dbcle dans la bonne socit.
Si seulement Ian Noble n'tait pas si sduisant. Sduisant un point que c'en tait
drangeant.
Veuillez m'excuser, marmonna-t-elle. Je n'aurais pas d dire a. C'est juste que... j'ai lu
que vos grands-parents appartenaient une branche mineure de la famille royale britannique
un comte et une comtesse, rien de moins.
Et vous vous demandiez si je me vexerais de voir mon verre rempli par une simple
serveuse, c'est bien cela ?
L'amusement n'adoucissait pas rellement ses traits, il les rendait juste plus fascinants
encore. Francesca soupira et se dtendit un peu. Elle n'avait pas russi l'offenser
totalement.
J'ai fait une grande partie de mes tudes aux tats-Unis, reprit-il. Je me considre
d'abord et avant tout comme un Amricain. Et je vous assure que la seule raison pour
laquelle Lucien est venu nous servir en personne, c'est qu'il le voulait. Nous sommes
partenaires d'escrime en plus d'tre amis. La tradition aristocrate anglaise de se faire servir
par des hommes n'existe plus que dans les romans, mademoiselle Arno. Et mme si elle tait
encore pratique, je doute qu'elle s'applique un rejeton btard. Je suis dsol de vous
dcevoir sur ce point.
Les joues de Francesca taient en feu. Apprendrait-elle un jour tenir sa langue ? Pourquoi
lui disait-il qu'il tait un enfant illgitime ? Elle n'avait jamais lu cela nulle part.
O travaillez-vous en tant que serveuse ? demanda-t-il sans paratre s'apercevoir de la
couleur carlate de ses joues.
Au High Jinks, Bucktown.
Je n'en ai jamais entendu parler.
a ne me surprend pas vraiment, marmonna-t-elle mi-voix avant d'avaler une autre
gorge de Champagne.
Elle plissa les paupires, surprise par son rire grave et rocailleux, puis rouvrit grands les
yeux, surprenant l'expression de son visage. Il avait l'air enchant. Le cur de Francesca se
mit battre plus vite. Ian Noble tait en permanence extraordinaire contempler, mais
quand il souriait, il devenait difficile pour une femme de garder son sang-froid.
Accepteriez-vous de m'accompagner... le temps d'une petite balade dans le quartier ?
J'aimerais vous montrer quelque chose de trs important.
Elle tait en train de porter la flte ses lvres mais se figea sur place. Que pouvait-il bien
avoir en tte ?
C'est en relation directe avec ma commande, fit-il d'une voix soudain crispe, autoritaire.
J'aimerais vous montrer le sujet que je voudrais vous voir peindre.
Une bouffe de colre pera sous la surprise de Francesca, et elle redressa le menton.
Je suis cense peindre ce que vous voulez que je peigne ?
Oui, rpondit-il sans hsiter.
Elle reposa la flte qui toucha la table avec un petit tintement, faisant trembler le liquide
ambr l'intrieur. Noble avait parl d'une voix inflexible. Finalement, il tait aussi arrogant
qu'elle se l'tait imagin. Comme elle s'y tait attendue, ce prix allait se transformer en un
vritable cauchemar. Il la fixa droit dans les yeux sans ciller, les narines frmissantes, et elle
soutint son regard.
Je vous suggre de venir voir la vue en question avant de prendre ombrage de cette
demande, mademoiselle Arno.
Francesca.
Un clair traversa les yeux bleus de Noble. Durant une fraction de seconde, la jeune femme
regretta la scheresse de son ton. Mais il finit par hocher la tte.
D'accord pour Francesca, fit-il doucement. condition que vous m'appeliez Ian.
Elle lutta intrieurement pour faire abstraction des papillonnements dans son ventre. Ne te
laisse pas avoir, se morigna-t-elle. Il reprsentait l'archtype mme du patron autoritaire
qui essaierait de lui dicter ses volonts et toufferait du mme coup ses intuitions cratrices.
C'tait encore pire que ce qu'elle avait imagin.
Sans ajouter un mot, elle se glissa hors de l'alcve et se dirigea vers la sortie du restaurant.
Consciente, travers toutes les fibres de son tre, que Ian Noble lui avait embot le pas.
Il pronona peine quelques mots quand ils quittrent Fusion et la mena jusqu' une alle
qui bordait le fleuve Chicago et le bas du boulevard Wacker Drive.
O allons-nous ? Finit-elle par demander aprs une minute ou deux.
ma rsidence prive.
Les sandales hauts talons de Francesca tanguaient dangereusement sur la chausse, et
elle s'arrta un instant.
On va chez vous ?
Il se tut et lui rendit son regard. Son manteau noir flottait autour de ses cuisses
visiblement muscles, soulev par le vent du lac Michigan.
Oui, on va chez moi, fit-il d'une voix moqueuse et faussement solennelle.
Elle frona les sourcils. Il se payait clairement sa tte. a me fait tellement plaisir de vous
servir de divertissement, monsieur Noble. Il inspira profondment et fixa la direction du lac
Michigan, de toute vidence exaspr par ses jrmiades.
Je comprends que a vous mette mal l'aise mais je vous donne ma parole que c'est
purement professionnel. Il s'agit du tableau. La vue que je veux que vous peigniez vient de
l'immeuble o je vis. Vous n'allez quand mme pas vous imaginer que je pourrais vous faire
du mal d'une quelconque faon ? Tous les clients nous ont vus sortir ensemble de ce
restaurant.
a, il n'avait pas besoin de le lui rappeler. Elle avait eu l'impression qu'une cinquantaine
d'yeux taient fixs sur eux lorsqu'ils taient sortis de la salle.
Elle lui jeta un discret regard en biais quand ils reprirent leur marche. Les cheveux noirs de
Noble, bouriffs par le vent, lui semblrent soudain trangement familiers. Elle cligna les
yeux, et la sensation de dj-vu s'vanouit.
Vous tes en train de me dire que je suis cense travailler dans votre appartement ?
Il est trs grand, rtorqua-t-il schement. Si vous n'avez pas envie de me voir, vous n'y
serez nullement oblige.
Francesca fixa les ongles vernis de ses pieds, essayant de lui dissimuler son visage.
Elle ne voulait pas qu'il devine que des images totalement inconvenantes venaient
d'apparatre dans son esprit. Des images de Ian sortant de la douche, de son corps nu et
humide, portant une simple serviette drape autour des hanches, comme seule barrire la
vision de sa nudit.
Ce n'est pas trs orthodoxe.
Je ne suis pas trs port sur l'orthodoxie, rpliqua-t-il avec brusquerie. Vous le
comprendrez quand vous verrez la vue.
Il habitait au 340 East Archer, un immeuble ancien construit durant les annes 1920 dans
le style Renaissance italienne, dont elle connaissait dj la faade pour l'avoir tudie avec
admiration durant ses cours d'architecture. a lui allait bien, d'une certaine faon, Cette tour
en brique sombre, austre. Elle ne fut pas spcialement surprise d'apprendre que sa rsidence
occupait la totalit des deux tages suprieurs.
La porte de l'ascenseur priv s'ouvrit sans un bruit, et, lui tendant la main, il l'invita
entrer la premire.
Elle pntra alors dans un endroit magique.
Le luxe des tissus et du mobilier tait vident, mais malgr cette somptuosit, le vestibule
parvenait exprimer une atmosphre accueillante un accueil austre, certes, mais un
accueil tout de mme. Elle jeta un bref coup d'il son reflet dans le miroir ancien. Sa longue
chevelure aux reflets roux tait compltement dcoiffe par le vent, et ses joues cl aient
teintes de rose. Elle aurait aim croire que celte couleur tait due la froideur du vent, mais
craignait qu'elle soit bien davantage lie la prsence de Ian Noble.
Puis elle vit les uvres d'art et oublia tout le reste, Elle traversa une large antichambre en
forme de galerie, en contemplant bouche be les tableaux qui se succdaient. Certains d'entre
eux lui taient familiers, des chefs-d'uvre qu'elle avait l'occasion de voir de prs pour la
premire fois.
Elle s'arrta devant une statuette reposant sur un pidestal, une superbe rplique inspire
de l'art grec antique.
J'ai toujours aim l'Aphrodite d'Argos, murmura-t-elle en dtaillant mticuleusement la
finesse exquise des traits du visage et la courbe gracieuse du buste dnud, sculpt dans
l'albtre le plus pur.
C'est vrai ? demanda-t-il d'un ton sincre.
Elle hocha la tte, submerge par l'merveillement, et poursuivit sa marche.
J'en ai fait l'acquisition il y a quelques mois. Les enchres ont t rudes.
Elle s'arracha grand-peine de son tat de ravissement extatique.
J'adore Sorenburg, fit-elle.
Elle faisait rfrence l'artiste qui avait ralis le tableau devant lequel elle se tenait. Elle
se tourna vers Noble et fut frappe par un fait : cela faisait maintenant plusieurs minutes
qu'elle avanait comme une somnambule dans son appartement sans y avoir t invite, et il
avait permis cette intrusion sans faire aucun commentaire. Elle se trouvait maintenant dans
une sorte de petit salon dcor avec des toffes outrageusement riches de jaune, de bleu ple
et de brun fonc.
Je sais. Vous l'avez mentionn dans votre lettre de motivation pour le concours.
Je n'arrive pas croire que vous apprciiez l'expressionnisme.
Qu'est-ce qui vous surprend tant ?
Au son grave de sa voix, Francesca fut parcoure par une vague de frissons dans la nuque.
Elle releva les yeux vers lui. Le tableau dont elle parlait tait accroch au-dessus d'un pais
tapis de velours. Noble se tenait plus prs d'elle qu'elle ne l'avait cru, perdue qu'elle tait dans
sa contemplation.
C'est que... vous avez choisi mon tableau, murmura-t-elle faiblement, le regard attir par
son corps.
Elle avala pniblement sa salive. Il avait dboutonn sa redingote. Une odeur piquante et
musque de savon s'infiltra travers ses narines. Une sensation de chaleur lourde
l'envahissait tout entire.
Vous semblez tellement aimer... commander, tenta-t-elle d'expliquer d'une voix peine
plus forte qu'un murmure.
Vous avez raison. (Elle crut voir une ombre traverser son visage.) J'ai la ngligence et le
dsordre en horreur. Mais Sorenburg, ce n'est pas seulement a, dit-il en jetant un regard au
tableau. Il s'agit de fabriquer du sens partir du chaos. Vous n'tes pas d'accord ?
Francesca demeura interdite tandis qu'il contemplait son profil. Elle n'avait jamais entendu
une description aussi juste et succincte du travail de Sorenburg.
Si, bien sr, rpondit-elle lentement.
Il lui adressa un petit sourire. Ses lvres pleines reprsentaient sans doute le trait physique
le plus fascinant chez lui, si l'on faisait abstraction de ses yeux, et de sa mchoire pleine
d'assurance. Et de son corps splendide...
Dois-je en croire mes oreilles ? Murmura-t-il doucement. Est-ce bien une nuance de
respect que je perois dans votre voix, Francesca ?
Elle se retourna vers le tableau de Sorenburg, le regard perdu dans le vague, la poitrine
oppresse.
Vous mritez du respect dans ce domaine. Vos gots en matire d'art sont
irrprochables.
Merci. Il se trouve que je suis d'accord avec vous.
Elle risqua un coup d'il de ct. Il la contemplait de ses yeux d'ange tnbreux.
Laissez-moi prendre votre veste, fit-il en lui tendant la main.
Non.
Les joues de Francesca devinrent brlantes quand elle se rendit compte du ton brusque
qu'elle avait employ. Un lan de lucidit vint briser le charme qui s'tait jusqu'alors opr.
La main de Ian Noble tait toujours tendue.
Je vais vous la prendre.
Elle ouvrit la bouche pour protester mais se ravisa devant son regard ombrageux et ses
sourcils lgrement froncs. Il reprit :
Une femme doit faire oublier ses vtements, Francesca. Pas l'inverse. C'est la premire
leon que je vous enseignerai.
Elle lui lana un bref regard exaspr avant de s'extraire de sa veste en jean. L'air lui
sembla frais sur ses paules nues, mais le regard de Ian la brlait. Elle se redressa.
Vous parlez comme si vous aviez l'intention de me donner d'autres leons, marmonna-t-
elle en lui tendant sa veste.
Je le ferai peut-tre. Suivez-moi.
Il suspendit le vtement avant de la mener travers la galerie jusqu' un couloir plus troit
qui bifurquait angle droit, clair seulement par des appliques en forme de chandeliers. Il
ouvrit l'une des nombreuses portes qui se dressaient devant eux et invita Francesca entrer.
Elle s'attendait ce que Ian lui montre une autre pice emplie de merveilles, mais fut
tonne de dcouvrir un espace troit en enfilade, bord sur l'un des cts par un alignement
de hautes fentres qui couvraient intgralement la surface du sol au plafond. Noble n'alluma
pas la lumire. Ce n'tait pas ncessaire. La pice tait claire par la lueur des buildings et
les reflets qu'ils projetaient sur le fleuve noir.
Francesca s'avana vers les fentres sans rien dire. Noble vint se poster son ct.
Ils sont vivants... les gratte-ciel... certains plus que d'autres, lcha-t-elle d'une voix
rauque au bout d'un moment. (Elle lana Ian un regard contrit et lui rcompense par un
sourire. Une vague d'embarras la submergea.) Je veux dire, ils ont l'air vivants, c'est ce que je
me suis toujours dit. Ils ont chacun une me. La nuit, en particulier... Je peux le sentir.
Je sais que vous en tes capable. C'est pour a que je vous ai choisie.
Pas cause des lignes parfaitement droites de ma composition et de la prcision de mes
reproductions? demanda-t-elle d'un ton hsitant.
Non. cause de cela.
Il l'observa sourire avec une expression indchiffrable sur le visage. Un plaisir inattendu
envahit Francesca. Il comprenait rellement son art, au bout du compte. Et... elle lui avait
donn ce qu'il dsirait voir.
Elle contempla l'incroyable panorama.
Je crois que je vois ce que vous voulez dire, reprit-elle d'une voix plus assure. a fait
plus d'un an et demi que je n'ai pas suivi de cours d'architecture, et j'ai t si occupe par mes
tudes d'art que je n'ai pas pris le temps de lire la presse, sinon j'aurais compris... Et
pourtant... J'ai honte de ne pas avoir saisi plus tt, fit-elle en regardant les deux tours les plus
imposantes qui bordaient le fleuve sombre paillet d'or.
Elle secoua la tte, merveille, et reprit :
Vous avez conu le sige de Noble Enterprises comme une image moderne et pure de
l'architecture classique de Chicago. C'est comme une version contemporaine du Sandusky.
Une vision brillante.
Elle faisait rfrence l'cho que les gratte-ciel de Noble Enterprises renvoyaient du
Building Sandusky, un chef-d'uvre d'architecture gothique. D'une certaine faon, les
btiments lancs taient semblables Ian une rminiscence audacieuse, fire, lgante et
moderne de quelque anctre gothique. Cette pense la fit sourire.
La plupart des gens ne s'en rendent pas compte avant que je les emmne ici.
C'est un coup de gnie, Ian, dit-elle d'une voix vibrante. (Elle se tourna vers lui d'un air
interrogateur et aperut le scintillement reflt par les lumires des gratte-ciel dans ses
prunelles. Elle poursuivit :) Pourquoi ne l'avez-vous pas revendiqu devant la presse ?
Parce que je n'ai pas fait a pour les journalistes. Je l'ai fait pour mon propre plaisir,
comme j'en ai l'habitude pour la plupart des choses.
Elle se sentit pige par son regard et ne trouva rien rpondre. Cette faon de voir n'tait-
elle pas particulirement goste ? Mais pourquoi, alors, ces mots faisaient-ils natre une telle
chaleur au creux de ses cuisses ?
Je suis cependant ravi que a vous plaise, poursuivit-il. J'ai quelque chose d'autre vous
montrer.
Vraiment ? Souffla-t-elle.
Il hocha trs lgrement la tte. Elle le suivit, soulage qu'il ne puisse distinguer ses joues
empourpres. Il la conduisit jusqu' une pice aux murs presque entirement recouverts de
bibliothques en bois sombre. Ian s'arrta sur le seuil, attendant sa raction tandis qu'elle
dcouvrait l'endroit. Francesca s'immobilisa finalement, aimante par le tableau qui
surplombait la chemine. Puis elle s'avana vers le cadre comme en tat de transe, avec
l'attitude qu'elle adoptait parfois quand elle se concentrait sur ses propres crations.
Vous l'avez achet chez Feinstein ? Murmura-t-elle, en faisant rfrence l'un de ses
colocataires Davie Feinstein, qui tait propritaire d'une galerie d'art Wicker Park.
La toile que Francesca contemplait avait t l'une de ses premires uvres, que son ami
avait vendue. Elle avait insist pour en faire don la galerie en la ni que participation sa
part du loyer durant un an et demi, du temps o elle tait compltement fauche.
Oui, rpondit Ian.
Elle devina aux vibrations de sa voix qu'il se tenait juste derrire son paule gauche.
Davie ne m'avait jamais dit...
J'ai demand Lin de l'acheter pour moi. La galerie n'a probablement pas eu
connaissance du nom du vritable acqureur.
Elle avala sa salive pour chasser le nud qui s'tait form dans sa gorge. Le tableau
reprsentait un homme solitaire qui descendait une alle du Lincoln Park dans la pnombre
des premires lueurs de l'aube, le dos tourn. Les gratte-ciel qui l'entouraient semblaient le
regarder de haut avec une rserve distante, aussi indiffrents la souffrance humaine que le
personnage semblait l'tre la sienne propre. Son manteau ouvert flottait derrire lui, et il
votait les paules face au vent, les mains profondment enfonces dans ses poches. Toutes
les lignes de son corps irradiaient la puissance, la grce et la solitude endurcie par la force et
la rsolution.
Elle adorait ce tableau. Le donner la galerie lui avait fendu le cur mais il fallait bien
qu'elle paie son loyer.
Le Chat qui marche tout seul, rcita Ian d'une voix grave dans son dos.
Elle rit doucement en l'entendant prononcer le titre qu'elle avait donn la peinture.
Je suis le Chat qui marche tout seul, et pour moi tous les endroits se valent... Je l'ai
peint pendant ma deuxime anne aux Beaux-Arts. Je suivais paralllement des cours de
littrature, et on tait en train d'tudier Kipling. Cette phrase me semblait adapte, d'une
certaine manire...
Elle laissa traner sa voix en fixant la silhouette solitaire du tableau, mais son attention
tait entirement concentre sur la prsence de Ian derrire elle. Elle lui jeta un regard par-
dessus son paule et sourit. Elle s'aperut alors avec embarras que des larmes brlantes
avaient envahi ses yeux. Ses narines frmirent lgrement, et elle se dtourna brusquement
pour s'essuyer les joues. Voir ce tableau mis l'honneur dans un tel lieu touchait quelque
chose de trs profond en elle.
Je crois que je ferais mieux d'y aller.
Son cur se mit tambouriner ses tympans. Un lourd silence s'abattit sur eux.
C'est peut-tre mieux, admit-il enfin.
Elle se tourna vers lui et laissa chapper un soupir de soulagement - ou peut-tre de regret
- en voyant sa haute silhouette quitter la pice. Elle lui embota le pas et bredouilla des
remerciements quand il lui rendit sa veste dans l'entre. Elle voulut la prendre, mais il
protesta.
Avalant sa salive, elle lui tourna le dos et le laissa la lui remettre. Les doigts de Noble
frlrent sa peau au niveau des paules, et un frisson la parcourut quand il passa la main
sous ses longs cheveux, effleurant sa nuque. Il tira doucement sa chevelure hors du vtement
pour la lisser. Elle ne put s'empcher de tressaillir et souponna qu'il l'ait senti.
Une couleur tellement rare..., murmura-t-il en lui caressant les cheveux.
Le corps entier de Francesca frmit.
Je peux demander mon chauffeur Jacob de vous ramener chez vous, reprit-il enfin.
Non.
Elle se sentait stupide de ne pas s'tre retourne pour lui parler. Elle tait incapable de
bouger, comme paralyse, tout son corps en alerte.
Un ami doit passer me prendre dans un petit moment, ajouta-t-elle.
Accepterez-vous de venir peindre ici ?
Sa voix grave rsonna quelques centimtres peine de son oreille droite. Elle regardait
devant elle, les yeux perdus dans le vague.
Oui.
J'aimerais que vous commenciez lundi. Je demanderai Lin de vous fournir un passe
d'entre et le code de l'ascenseur. Tout le matriel sera prt quand vous arriverez.
Je ne pourrai pas venir tous les jours. J'ai des cours - surtout le matin et je travaille
comme serveuse de dix-neuf heures la fermeture du bar plusieurs jours par semaine.
Passez quand vous pouvez. Tout ce qui importe, c'est que vous veniez.
Oui, trs bien, articula-t-elle pniblement en forant le nud dans sa gorge.
Il n'avait pas retir ses mains de son dos. Pouvait-il sentir les battements affols de son
cur?
Il fallait qu'elle sorte d'ici. Tout de suite. Elle n'avait plus le moindre contrle sur la
situation.
Elle avana en vacillant jusqu' l'ascenseur et appuya prcipitamment sur le bouton du
panneau de contrle. Si elle avait cru qu'il essaierait de la toucher nouveau, elle s'tait
trompe. La porte de l'ascenseur ultramoderne s'ouvrit enfin.
Francesca ? fit-il alors qu'elle se ruait l'intrieur.
Oui ?
Elle se tourna vers lui.
Il avait crois les mains derrire lui et cette position faisait biller la veste de son costume,
rvlant les contours de son torse mince moul par la chemise, de ses hanches troites
entoures par une ceinture boucle d'argent et... de tout ce qui se trouvait au-dessous.
Maintenant que vous disposez d'une certaine scurit financire, je prfrerais que vous
ne partiez plus en expdition dans les rues de Chicago aux premires heures du jour pour
trouver des sujets d'inspiration. On ne sait jamais qui on peut rencontrer. C'est dangereux.
Francesca en resta sans voix. Ian avana de quelques pas, appuya sur un des boutons du
panneau, et les portes de l'ascenseur se refermrent. La dernire chose qu'elle vit de Noble
fut l'clat scintillant de son regard bleu au milieu de son visage impassible.
C'tait lui qu'elle avait peint quatre ans plus tt. C'tait ce qu'il avait essay de lui faire
comprendre : il savait qu'elle l'avait observ en train d'arpenter les rues sombres et dsertes
aux dernires heures de la nuit pendant que les habitants de la ville sommeillaient dans la
chaleur de leurs lits douillets. Elle ne connaissait pas l'identit de son sujet, pas plus sans
doute qu'il n'avait pris conscience qu'on l'observait jusqu' voir le tableau. Mais cela ne faisait
plus aucun doute dsormais.
Ian Noble tait le Chat qui marche tout seul.
Et il avait tenu ce qu'elle le sache.
Ian russit chasser Francesca de son esprit pendant dix jours complets. Il partit en voyage
New York pour un sjour de deux nuits et finalisa l'acquisition d'un logiciel qui lui
permettrait de dvelopper un nouveau rseau en ligne combinant des fonctionnalits sociales
et un concept de jeu entirement nouveau. Il se rendit comme tous les mois sa rsidence
londonienne. Quand il se trouvait Chicago, les runions et le travail l'occupaient au bureau
jusqu' minuit pass. Lorsqu'il regagnait son appartement, l'intrieur tait sombre et
silencieux.
Il n'tait pas tout fait juste de dire qu'il avait russi oublier Francesca, cependant. Ni
tout fait honnte, s'avoua-t-il rudement, le mercredi aprs-midi suivant, dans la cabine
d'ascenseur qui remontait vers son appartement. La conscience qu'elle tait prsente dans la
rsidence s'emparait parfois de lui sans prvenir, en de brefs et puissants clairs, et
imprgnait sa perception de tous les dtails de la vie quotidienne. Mme Hanson, sa
gouvernante, le tenait innocemment au courant, lors de ses vantardises habituelles, sur la
bonne marche de la maison. Il s'tait rjoui d'apprendre que la vieille dame anglaise s'tait
prise d'amiti pour Francesca, l'invitant parfois partager un th dans la cuisine, et que la
jeune femme semblait de plus en plus son aise. Avant de se demander en quoi a avait la
moindre espce d'importance. Tout ce qu'il voulait, c'tait un tableau, et elle n'avait
certainement pas se plaindre de ses conditions de travail.
Un jour, il se dit qu'il se montrait impoli en ignorant la jeune femme. L'viter tait aussi
une faon de lui donner de l'importance et de faire bien trop grand cas d'une situation
anodine.
Le soir du deuxime jeudi, il se rendit finalement l'atelier de Francesca pour lui
demander si elle dsirait prendre un rafrachissement avec lui la cuisine. La porte tait
entrebille, et il entra sans frapper. Pendant quelques secondes, il resta sur le seuil
l'observer son insu.
Elle se tenait sur une petite estrade, en train de travailler sur le coin suprieur droit de la
toile, totalement absorbe par ce qu'elle faisait.
Bien qu'il ft certain de n'avoir fait aucun bruit, elle se retourna brusquement vers lui et se
figea, le contemplant de ses yeux bruns carquills, son pinceau toujours pos sur la toile.
Une paisse mche brillante s'tait chappe de sa pince cheveux et lui retombait sur la
nuque. Des taches de fusain maculaient ses joues lisses, et ses lvres d'un rose sombre
taient lgrement entrouvertes sous l'effet de la surprise.
Il s'enquit poliment de la progression du tableau en essayant de ne pas laisser son regard
s'attarder sur la pulsation du pouls de la jeune femme visible sa gorge, ou sur la douce
courbe de ses seins. Elle avait enlev son survtement de travail et portait seulement un lger
dbardeur. Sa poitrine tait plus gnreuse qu'il ne l'avait cru au dbut, formant un contraste
rotique avec sa taille, ses hanches troites cl ses longues jambes juvniles.
Aprs plusieurs secondes de conversation guinde, il prit la fuite comme le couard qu'il
tait.
La conscience exacerbe qu'il avait de sa beaut n'avait rien, selon lui, de trs naturel.
C'tait une femme magnifique, aprs tout. Elle semblait compltement aveugle sa propre
sensualit, et a le fascinait. Avait-elle grandi dans un trou perdu ? Elle tait forcment
habitue voir les hommes s'animer quand elle entrait quelque part, saliver la vision de ses
cheveux soyeux couleur d'or rose, de ses yeux de velours brun, de sa silhouette fine et
lance. Comment pouvait-elle ignorer, l'ge de vingt-trois ans, le pouvoir que lui confrait
sa peau ple et sans dfaut, ses lvres d'un rose sombre, son corps souple et agile ?
Il ignorait la rponse cette question, mais maintenant qu'il l'avait observe de plus prs, il
tait certain que son attitude n'avait rien d'une posture. Elle se mouvait avec la dmarche
dgingande d'une adolescente et s'exprimait parfois avec une gaucherie surprenante.
C'tait seulement quand elle contemplait sa toile d'un regard hypnotique ou qu'elle fixait
l'horizon la fentre, ou encore lorsqu'il l'piait secrtement alors qu'elle tait totalement
absorbe par son art, que sa beaut se rvlait entirement.
Une vision fascinante, obsdante, qu'il n'arrivait pas se sortir de la tte.
Il s'immobilisa en pntrant dans le vestibule. Elle tait l. Aucun son n'manait des
profondeurs de la rsidence, mais d'une manire ou d'une autre il savait que Francesca se
trouvait dans l'atelier. tait-elle toujours en train de peindre sur l'immense toile ?
Il se l'imagina soudain avec une prcision parfaite, son superbe visage tendu par la
concentration, ses yeux sombres faisant des allers-retours entre son pinceau habile et le
panorama. Elle prenait une expression sombre et austre quand elle travaillait, tout entire
absorbe par son extraordinaire talent et la grce singulire dont elle ne semblait pas
consciente.
Elle ignorait le magntisme sexuel qu'elle dgageait. Lui, au contraire, tait parfaitement
lucide sur son pouvoir de sduction. Mais il savait galement quel point elle tait nave. Il
pouvait presque en sentir l'odeur sur sa peau ; son innocence se mlait une sensualit
inexplore, gnrant un parfum capiteux qui lui faisait perdre toute raison.
De la sueur s'accumulait sur sa lvre suprieure. Il sentit aussitt son sexe se durcir.
Fronant les sourcils, il jeta un coup d'il sa montre et tira son tlphone portable de sa
poche. Il tapota sur quelques boutons et traversa la galerie d'entre avant de bifurquer vers sa
chambre.
Heureusement, ses quartiers privs se trouvaient l'oppos de la pice o travaillait
Francesca. Il fallait qu'il la chasse de son esprit. Une bonne fois pour toutes.
Une voix grsilla au bout du tlphone.
Ian ? fit Lucien. C'est la folie au restaurant, je n'ai pas eu une minute moi. On peut se
retrouver dix-sept heures trente dans ta salle d'entranement ?
Impeccable. Je t'attends dans quarante minutes. J'espre que tu es prt encaisser une
drouille parce que je suis de mchante humeur.
Ian referma la porte de sa chambre derrire lui et la verrouilla, un sourire aux lvres.
Je crois bien que mon pe a soif de sang elle aussi, mon ami, fit Lucien. On verra bien
qui de nous deux prendra cette drouille.
Ce dernier riait toujours quand Ian raccrocha. Il rangea son porte-documents et sortit du
dressing sa tenue d'escrime : un plastron, des jambires et une veste matelasse. Il se dvtit
ensuite et tira une cl de son attach-case. Ses quartiers privs disposaient de deux grands
dressings o personne pas mme Mme Hanson n'avait le droit d'entrer.
C'tait son territoire priv.
Il dverrouilla la porte en bois d'acajou et s'avana, nu, dans une pice au plafond haut et
aux murs recouverts d'tagres et de placards, tous impeccablement rangs. Il ouvrit un tiroir
sur sa droite et en sortit les accessoires qu'il cherchait avant de revenir dans la chambre et de
les taler sur le lit.
Il aurait d se rendre compte plus tt que son dsir inassouvi tait sur le point d'atteindre
un niveau dangereux. Il pourrait peut-tre s'arranger pour faire monter une femme la
rsidence le week-end prochain mais, en attendant, il devait absolument mousser le
tranchant de ses apptits sexuels.
Il dposa une noisette de lubrifiant dans sa paume. Son rection n'avait pas diminu. Des
frissons de plaisir le parcoururent quand il tala le gel froid sur son sexe.
Il envisagea de s'allonger sur le lit mais non... c'tait mieux debout. Il saisit ensuite la gaine
en silicone et l'enfila. Il l'avait fait fabriquer sur mesure, en spcifiant bien que la silicone
devait tre transparente. Il aimait se voir jaculer. Ses instructions avaient t suivies la
lettre, except un seul ajout : un anneau rose sombre autour de l'orifice principal de
l'instrument.
Ian avait jug la modification mineure et n'y avait rien trouv redire. Le sex-toy ne
reprsentait pas un substitut sexuel. Ian pouvait avoir autant de jeunes femmes talentueuses
et consentantes qu'il le voulait, n'importe quel moment. Mais au fil des annes, il avait
appris les vertus de la discrtion. Il avait donc rduit drastiquement sa liste de partenaires
pour ne plus garder que deux femmes qui connaissaient parfaitement ses besoins et
comprenaient ses exigences.
Le masturbateur avait l'avantage de n'tre qu'un objet. Ian ne lui devait rien aprs qu'il eut
assouvi son dsir.
Pourtant, cette fois-ci, un frisson d'excitation le parcourut la vue du gland pais de son
sexe en train de pntrer l'troit anneau rose. Il flchit le bras et poussa la gaine autour de
son membre durci et enfl jusqu' trois centimtres environ de sa base. Il imprima son
poignet un mouvement de piston, apprciant quel point la chaleur de sa chair se
communiquait vite au doux fourreau de silicone.
Oh oui... C'tait a dont il avait besoin - un bon orgasme pour se vider compltement. Les
muscles de son abdomen, de ses fesses et de ses cuisses se contractrent pendant que sa
main s'activait. Les alvoles l'intrieur de la silicone s'ouvraient et se refermaient au rythme
de son geste, reproduisant la sensation de succion d'une fellation. Il retirait presque la gaine
transparente jusqu'au gland avant de plonger nouveau son sexe dans les profondeurs
chaudes et glissantes du sex-toy, encore et encore.
D'habitude, il fermait les yeux et laborait un scnario sexuel pendant qu'il se masturbait.
Cette fois, cependant, son regard demeura fix sur son sexe en rection pntrant l'anneau
rose, qu'il imagina tre des lvres roses et pulpeuses. Il vit de grands yeux bruns levs vers
lui.
Les lvres de Francesca. Les yeux de Francesca.
Tu ne peux pas te permettre de sduire une fille innocente. N'as-tu pas retenu la leon la
premire fois ?
Ses gots le portaient vers la domination sexuelle. Un dominant rticent, peut-tre, mais
un vrai dominant tout de mme.
Il avait accept depuis longtemps sa nature, conscient qu'elle correspondait au destin
solitaire qu'il s'tait choisi. Non qu'il l'et dsir, mais il tait assez sage pour comprendre
que c'tait invitable.
Son travail le consumait tout entier. Maniaque du contrle, c'tait ce que tout le monde
disait de lui : la presse, les gens du monde des affaires... et son ex-femme. Il s'tait rsign
leur donner raison et, au fil du temps, la solitude tait devenue comme une vieille amie.
Tu n'as pas le droit de soumettre une femme comme Francesca tes fantaisies sexuelles.
La voix svre dans sa tte fut noye par les pulsations sourdes de son cur et ses propres
grognements de plaisir tandis qu'il poursuivait les va-et-vient avec sa main.
Je ferai d'elle un objet de plaisir, je pervertirai ses lvres douces. Comment ragira-t-elle
l'ide d'tre ainsi possde ? Sera-t-elle effraye ? Excite ?
Les deux la fois ?
Il gmit cette pense et tendit davantage le bras, acclrant le mouvement, chaque
muscle de son corps band au maximum.
Son membre paraissait norme quand il enfona jusqu' la garde l'pais fourreau. Il ne
voulait pas jouir ainsi... mais ce qu'il voulait, il ne pouvait l'obtenir, et il devrait donc se
contenter de cet expdient.
Mme si ce qu'il voulait vraiment, c'tait lier les mains d'une belle jeune femme aux
cheveux d'or cuivr et aux jambes fuseles, lui ordonner de s'agenouiller devant lui et
introduire son sexe dans sa bouche troite et humide... mme si ce qu'il voulait vraiment,
c'tait entrevoir la lueur d'excitation dans ses yeux quand il s'abandonnerait enfin et se
perdrait en elle.
L'orgasme explosa, ravageur et dlicieux. Il hoqueta en se voyant jaculer l'extrmit de
l'tau transparent, la semence blanche giclant contre les parois de la cavit. Au bout d'un
moment, il ferma les yeux et lcha un long rle, continuant jouir.
Bon sang, il avait t stupide de ne pas faire a plus tt.
L'orgasme ne le lchait pas. Il n'en pouvait plus. Il n'avait pas pour habitude d'ignorer son
apptit sexuel, et il ne savait pas ce qui lui avait pris de s'abstenir cette semaine. Une
absurdit.
a aurait pu l'amener perdre le contrle de lui-mme, un risque qu'il ne pouvait en aucun
cas se permettre de prendre. Les gens qui ne sont pas attentifs leurs besoins finissent
toujours par faire des erreurs, et par se laisser aller la paresse et au dsordre.
Ses muscles devinrent flasques tandis que les dernires vagues de l'orgasme le
parcouraient. Le souffle rauque, il retira le sex-toy et enveloppa d'une main son membre nu
et hypersensible.
Ce n'tait qu'une femme comme les autres.
En tait-il si sr ? Elle l'avait troubl, avec sa peinture. a le mettait mal l'aise, comme
une vague dmangeaison. a lui donnait envie de lui rendre la monnaie de sa pice... de lui
faire payer pour avoir lu dans son esprit, pour avoir vu des choses qu'elle n'aurait pas d voir
grce l'incroyable acuit de son talent.
Il allait matriser ce dsir puissant et dangereux. Il se retourna et se dirigea vers la salle de
bains pour prendre une douche et se prparer sa sance d'escrime.
Plus tard, une fois rhabill, il s'aperut que son sexe demeurait excessivement sensible et
que son rection n'avait pas entirement disparu. Bon sang...
Il allait faire savoir Francesca et Mme Hanson qu'il avait besoin d'intimit ce week-end.
Et il allait passer un coup de fil. Pour vaincre cette trange lubie : il avait clairement besoin
d'une femme exprimente qui savait exactement comment le satisfaire.
Lucien n'avait pas menti. Il tait effectivement d'humeur bagarreuse. Ian recula sous les
assauts agressifs de son ami, contrant ses coups rapides, attendant calmement le moment o
il baisserait sa garde. Lucien tait son partenaire d'escrime depuis deux ans, et Ian
connaissait prsent bien son style et la faon dont il cdait parfois ses motions.
C'tait un combattant extrmement talentueux et malin, mais il n'avait pas encore
pleinement saisi la stratgie de Ian.
Peut-tre parce que ce dernier mettait un point d'honneur matriser ses motions et
ragir par pure logique.
Ce soir-l, Lucien bouillonnait d'nergie, et ses coups taient plus puissants que
d'habitude, mais galement plus imprudents. Ian attendit jusqu' discerner une lueur de
triomphe dans le regard de son adversaire. Il devina ce que son partenaire avait en tte et
para d'un geste prcis le coup destin l'achever. Lucien grogna de frustration quand Ian
riposta et toucha au but.
Bordel, on dirait que tu lis dans mes penses, marmonna Lucien en tant son masque,
faisant cascader ses longs dreadlocks sur ses paules.
Ian retira galement le sien.
Tu te sers toujours de a comme excuse. En fait, c'est purement logique, et tu le sais trs
bien.
On remet a, le dfia Lucien en levant son pe, une lueur froce dans ses yeux gris.
Ian sourit.
Qui est-elle ? demanda-t-il soudain son ami.
Qui est qui ?
Ian lui adressa un regard perant en tant un de ses gants.
La femme qui fait bouillir ton sang comme celui d'un bouc en rut.
a l'intriguait, cette impression de frustration chez Lucien, qui tait d'ordinaire si
populaire avec les femmes.
L'expression du Franais se tendit, et il dtourna le regard. Ian, qui tait son autre gant,
suspendit son geste et frona les sourcils.
Qu'est-ce qui ne va pas ?
J'ai quelque chose te demander, fit Lucien d'une voix pose.
Je t'coute, alors.
Son ami lui lana un regard soucieux.
Les employs de Noble sont-ils autoriss avoir des liaisons avec d'autres employs ?
a dpend de leur position. C'est crit noir sur blanc dans leurs contrats. Les managers
et les cadres n'ont pas le droit de sortir avec leurs subordonns, et s'exposent un
licenciement immdiat s'ils sont pris sur le fait. Les relations entre managers sont hautement
dcourages, mme si elles ne sont pas interdites. Les contrats stipulent trs clairement que
n'importe quel conflit d'intrts caus par l'existence d'une relation extraprofessionnelle
constitue un motif valable de licenciement. Je pense que tu sais que c'est une mauvaise ide,
Lucien. Elle travaille chez Fusion ?
Non.
la direction de Noble Enterprises, alors ? demanda Ian tout en retirant son plastron et
sa veste, gardant seulement ses jambires et son maillot de corps.
Pas exactement. Et si le contrat avec Noble tait... moins conventionnel ?
Ian lui lana un regard acr avant de dposer son pe et d'attraper une serviette.
Moins conventionnel... comme dans une relation libre un manager de restaurant et un
cadre du dpartement commercial ? fit-il d'un ton quelque peu ironique.
La bouche de Lucien se fendit d'un sourire amer.
Il vaudrait peut-tre mieux que je te rachte Fusion aussi vite que possible. Comme a,
a ne serait plus un problme pour aucun de nous.
Ils se figrent de conserve en entendant quelqu'un happer la porte de la salle.
Oui ? Lana Ian en fronant les sourcils avec perplexit.
Mme Hanson n'avait pas pour habitude de le dranger durant ses sances d'entranement.
Il avait besoin de savoir qu'il ne serait pas interrompu pour trouver la concentration
intrieure ncessaire ses passes d'escrime et sa gymnastique de routine.
Ils carquillrent les yeux tous les deux en voyant Francesca entrer dans la pice. Ses longs
cheveux taient retenus par un nud lche l'arrire de sa nuque, et quelques mches
retombaient sur sa gorge et ses joues.
Son visage ne portait pas la moindre trace de maquillage, et elle tait simplement vtue
d'un jean moulant, d'un haut de survtement informe a capuche, et de baskets gris et blanc.
Les chaussures n'taient pas de la plus haute qualit, mais Ian valua rapidement que c'tait
sans doute la pice de son habillement la plus coteuse. Sous l'encolure de son sweat, il
entrevit la mince lanire d'un autre dbardeur. L'image de son corps souple, surlign par le
fin vtement, le submergea.
Francesca. Qu'est-ce que vous faites ici ? demanda-t-il d'un ton involontairement sec en
raction la vision incontrlable qui envahissait son esprit.
Elle s'arrta quelques dizaines de centimtres du tapis d'entranement. Ses lvres taient
pulpeuses, ses froncements de sourcils diaboliquement sexy.
Lin voudrait vous parler de quelque chose d'urgent. Comme vous ne rpondiez pas sur
votre tlphone portable, elle a appel sur le fixe. Mme Hanson tait sur le point de partir
faire quelques courses pour votre dner, alors je lui ai dit que j'allais vous transmettre le
message.
Ian hocha la tte et utilisa la serviette enroule autour de sa nuque pour essuyer la sueur
qui ruisselait sur son visage.
Je la rappellerai ds que j'aurai pris ma douche.
Je vais le lui dire tout de suite, rpondit Francesca avant de se diriger vers la sortie.
Comment a ? Elle est encore en ligne ?
Francesca opina.
Il y a un tlphone dans le hall d'entre, juste devant la salle d'entranement. Dites-lui
que je la rappelle trs vite.
Trs bien, fit Francesca.
Elle jeta un bref coup d'il Lucien et lui adressa un petit sourire avant de se dtourner.
Une vague d'irritation submergea Ian. Reconnais au moins que ce salaud ne lui a pas
aboy dessus comme tu viens de le faire.
Francesca ?
Elle fit volte-face.
Voudriez-vous bien revenir me voir une fois que vous aurez transmis le message Lin ?
Nous n'avons pas eu l'occasion de discuter beaucoup cette semaine, et j'aimerais me tenir au
courant de vos progrs.
Elle sembla hsiter pendant une fraction de seconde. Son regard se posa sur sa poitrine.
Bien sr. Je reviens tout de suite, rpondit-elle avant de quitter la pice.
Les portes de la salle d'escrime se refermrent derrire elle avec un claquement.
Lucien souriait de toutes ses dents quand Ian se retourna vers lui.
Quand j'ai voyag dans les tats du Sud, ils avaient une expression. Une longue, trs
longue gorge d'eau frache...
Ian perdit un instant sa contenance.
Laisse tomber, fit-il schement.
Lucien semblait perplexe. Ian plissa les paupires, aux prises avec un mlange d'hostilit et
de remords. Une ide lui vint soudain l'esprit, et ses yeux s trcirent.
Attends une seconde... la femme dont tu me parlais, qui travaille pour Noble...
Ce n'est pas Francesca, rtorqua Lucien, une lueur dans les yeux, avant de se dtourner
et d'ouvrir le rfrigrateur pour attraper une bouteille d'eau. Mais j'ai l'impression que tu
ferais mieux de suivre tes propres conseils sur le danger des liaisons au boulot.
C'est compltement ridicule.
a veut dire que cette splendide crature ne t'intresse pas ?
Ian tira d'un coup sec la serviette sur sa nuque.
a veut dire que je ne suis pas tenu par un contrat d'embauch, rpliqua-t-il d'un ton sec
qui signifiait clairement que la conversation tait close.
Je crois que je ferais mieux de dcamper, fit Lucien d'une voix acerbe. On se voit lundi
prochain.
Lucien...
Le Franais se retourna vers lui.
... Je suis dsol.
Lucien haussa les paules.
Je sais ce que c'est de se sentir sur la corde raide. a a tendance rendre un homme un
peu... grincheux.
Ian ne rpondit pas et regarda simplement son ami s'en aller. Il songea l'expression que
ce dernier avait utilise pour parler de Francesca. Une longue, trs longue gorge d'eau
frache. Il avait raison.
Et Ian tait comme un homme mourant de soif en plein dsert.
Il jeta un regard mfiant vers la porte et aperut Francesca rapparatre sur le seuil.
Francesca vit Lucien lui adresser un signe amical de la main et sortir de la pice au
moment o elle entrait. L'atmosphre de la grande salle ultra-quipe s'paissit d'un coup ;
elle regretta aussitt le dpart du Franais quand la porte se referma derrire elle et qu'elle se
retrouva seule avec Ian. Elle s'arrta la limite du tapis de sol.
Rapprochez-vous. Vous pouvez marcher sur la piste avec vos baskets.
Elle s'approcha prudemment de lui. Elle n'osait pas le regarder. Son beau visage tait
impassible, comme d'habitude. Il ressemblait un dieu du sexe paen avec ses jambires
ajustes sur son pantalon blanc et son maillot de corps tout simple. Elle se dit que son tee-
shirt tait sans doute aussi moulant parce qu'il devait enfiler ses autres pices d'quipement
par-dessus. Le tissu ne laissait que peu de marge l'imagination, pousant toutes les lignes
de son torse mince et musculeux.
De toute vidence, il accordait beaucoup d'importance ses sances d'entranement. Son
corps tait sculpt comme une lame superbe et redoutable.
La piste ? Rpta-t-elle sans comprendre en s'avanant sur le revtement caoutchouteux.
Le tapis d'escrime.
Oh...
Elle jeta un regard curieux l'pe qui reposait sur une table, essayant d'ignorer les
effluves subtils qui manaient du corps de Ian une odeur piquante et pice de savon
mle de la sueur.
Comment allez-vous ? demanda-t-il d'un ton poli et froid qui ne correspondait pas avec
la lueur qui brillait dans ses yeux bleus.
Il n'arrtait pas de la dstabiliser. Comme la fois prcdente, le jeudi soir o elle l'avait
surpris en train de l'tudier en silence pendant qu'elle peignait. Ses manires taient presque
crmonieuses mais la faon dont son regard s'attardait sur ses seins coupa le souffle de
Francesca. Elle sentit ses ttons se durcir. Elle ne pouvait s'empcher de repenser la faon
dont ils s'taient spars la premire fois qu'elle tait venue chez lui, au contact des doigts de
Ian sur sa nuque quand il lui avait remis sa veste... la faon dont il voquait sa peinture.
tait-il flatt ou mcontent qu'elle l'ait choisi comme sujet ? Et avait-il vraiment essay de
lui dire, comme elle en avait eu l'impression, que le titre qu'elle avait choisi pour ce tableau
n'tait pas aussi anodin qu'elle l'avait cru au dbut ; qu'il tait vritablement un homme qui
avanait seul dans sa vie ?
C'est compltement absurde, se morigna-t-elle en se forant soutenir le regard perant
de Ian. Il ne pensait certainement pas elle autrement qu' une artiste qui ralisait pour lui
une commande.
J'ai beaucoup de travail mais a va, merci, lui rpondit-elle.
Elle lui fit un rapide rcapitulatif de son avance.
La toile est prte. J'ai fait mes esquisses. Je pense que je pourrai commencer le vritable
travail de peinture la semaine prochaine.
Vous avez bien tout ce qu'il vous faut ? fit-il en passant devant elle pour ouvrir le
rfrigrateur.
Il se dplaait avec une lgance trs masculine. Elle aurait ador le voir pratiquer
l'escrime de l'agressivit canalise travers une technique pleine de grce.
Oui. Lin a vraiment fait du bon boulot en achetant mes fournitures. J'ai eu besoin d'un
ou deux lments en plus, mais elle me les a fait parvenir immdiatement lundi dernier. Elle
est vraiment trs efficace.
Je suis on ne peut plus d'accord. N'hsitez pas vous manifester si vous avez besoin de
quelque chose.
Il dcapsula la bouteille d'eau d'une brusque torsion du poignet. Ses biceps saillaient sous
les manches de son tee-shirt et semblaient durs comme la pierre. Quelques veines
ressortaient sur ses avant-bras puissants.
Votre emploi du temps vous convient-il ? L'cole, votre travail de serveuse, la peinture...
votre vie sociale ?
Le pouls de Francesca se mit marteler sa gorge. Elle baissa la tte pour qu'il ne le voie pas
et fit semblant d'tudier l'une des pes ranges sur le rtelier.
Je n'ai pas vraiment de vie sociale.
Pas de petit ami ?
Elle secoua la tte en faisant courir ses doigts sur le pommeau d'une arme.
Mais vous avez srement des amis avec qui vous aimez passer du temps ?
Oui, fit-elle en levant brivement les yeux vers lui. Je suis trs proche de mes trois
colocataires.
Et que faites-vous toutes les quatre de votre temps libre ?
Elle haussa les paules et tendit la main vers une autre pe.
Le temps libre est plutt un luxe, ces derniers temps, mais j'ai quelques loisirs, rien
d'extraordinaire jouer aux jeux vido, sortir dans les bars, traner en ville, jouer au poker...
C'est ce genre d'activits que s'adonnent quatre jeunes filles durant leur temps libre ?
Mes colocataires sont tous des hommes.
Elle releva les yeux juste temps pour voir une ombre de contrarit passer sur son visage
stoque. Elle sentit les battements de son cur s'affoler. Les cheveux courts et presque noirs
de Ian taient luisants de sueur, comme son cou. Elle battit des paupires et dtourna le
regard.
Vous vivez avec trois hommes ?
Elle acquiesa.
Et qu'est-ce que vos parents en disent ? fit-il en lui jetant un coup d'il par-dessus son
paule.
Ils dtestent a. Grand bien leur fasse, ce ne sont pas leurs oignons. Caden, Justin et
Davie sont super.
Il ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais sembla se raviser.
Ce n'est pas trs conventionnel, lcha-t-il au bout de quelques secondes, d'une voix
emprunte qui rvlait qu'il avait d'abord eu l'intention de dire autre chose.
Ce n'est sans doute pas trs orthodoxe, je vous l'accorde. Mais a devrait vous rappeler
quelque chose, non ? Vous ne m'avez pas dit quelque chose de semblable l'autre nuit ?
Francesca fixa nouveau les pes. Cette fois, elle enserra les doigts autour de la garde de
l'une d'elles apprciant le contact du mtal dur et froid contre sa paume. Puis elle fit aller sa
main de bas en haut sur la lame.
Arrtez a.
Elle releva brusquement la tte et relcha l'arme comme si le mtal tait soudain devenu
brlant. Elle le considra, interloque. Les narines de Ian tremblaient lgrement, et ses yeux
bleus flamboyaient. Il rejeta la tte en arrire et but une rapide gorge d'eau.
Vous pratiquez l'escrime ? demanda-t-il d'un ton brusque en reposant la bouteille sur
une table.
Non. Enfin... pas vraiment.
Qu'est-ce que vous voulez dire ? fit-il en fronant les sourcils.
J'ai bien fait un peu d'escrime avec Justin et Caden mais... je n'ai jamais touch une pe
de ma vie, dit-elle d'une voix penaude.
L'expression perplexe qu'avait Ian se volatilisa. Il sourit. Francesca songea que c'tait
comme d'assister un lever de soleil sur un paysage sombre et majestueux.
Vous tes en train de me parler d'un jeu sur Game Station ?
Oui, admit-elle, un peu sur la dfensive.
Il dsigna le rtelier d'un hochement du menton.
Prenez celle du bout.
Je vous demande pardon ?
Prenez la dernire pe. C'est Noble Enterprises qui a conu le logiciel dont vous parlez.
Nous l'avons revendu Shinatz il y a quelques annes. quel niveau jouiez-vous ?
Difficile.
Alors vous devriez comprendre les bases.
Il la regarda droit dans les yeux.
Prenez cette pe, Francesca.
Il y avait une nuance de dfi sans sa voix, et un sourire s'attardait toujours sur ses lvres
pleines. nouveau, il se moquait d'elle. Francesca souleva l'arme et lui lana un regard noir.
Le sourire de Ian s'largit. Il s'empara d'une autre pe et lui tendit un masque, puis hocha la
tte en direction du tapis. Quand ils furent l'un en face de l'autre, son souffle devint rapide et
saccad. Ian fit tinter leurs deux lames l'une contre l'autre.
En garde, dit-il doucement.
Les yeux de Francesca s'agrandirent de panique.
Attendez... vous voulez dire qu'on va... maintenant ?
Pourquoi pas ? fit-il en prenant position.
Elle lana un regard nerveux l'pe qu'elle tenait dans la main, puis au torse non protg
de Ian.
Elle est destine l'entranement, ajouta-t-il. Vous ne pourriez pas me blesser avec,
mme si vous le vouliez.
Il se jeta en avant. Elle para d'un geste instinctif. Il avana, et elle recula gauchement,
bloquant toujours sa lame. Mme travers le voile de stupeur et de panique qui recouvrait
ses yeux, elle ne pouvait s'empcher d'admirer le jeu de ses muscles, la puissance de son
grand corps mince.
N'ayez pas peur, l'entendit-elle dire alors qu'elle parait dsesprment.
Il n'avait pas l'air de produire plus d'effort que s'il lisait le journal.
Si vous matrisez bien les mcanismes du jeu vido, votre cerveau connat d'instinct les
mouvements adquats.
Qu'est-ce que vous en savez ? Laissa-t-elle chapper d'une voix perante en se jetant de
ct pour viter sa lame.
Je le sais parce que c'est moi qui ai conu ce programme. Dfendez-vous, Francesca, lui
lana-t-il au moment mme o il plongeait sur elle.
Elle cria et bloqua sa lame quelques centimtres de son paule. Il continua la
tourmenter sans piti, l'acculant l'extrmit du tapis. Les heurts de leurs pes rsonnaient
dans toute la pice.
Il se dplaait plus vite prsent, et imprimait de plus en plus de force sa lame. Mais son
expression demeurait d'un calme olympien.
Vous avez dcouvert votre garde basse, murmura-t-il.
Elle hoqueta quand il la frappa la hanche droite d'un coup prcis. Il l'avait peine
touche, mais sa chair la cuisait.
Deuxime assaut.
Elle le suivit jusqu'au centre de la piste. La manire dont il l'avait vaincue froidement et
sans effort faisait bouillir son sang dans ses veines. Ils entrechoqurent leurs pes et elle
attaqua, se fendant en avant.
Ne laissez pas la colre vous faire perdre votre sang-froid.
Je ne suis pas en colre, mentit-elle travers sa mchoire serre.
Vous pourriez tre une bonne escrimeuse. Vous avez de la tonicit. Vous faites de
l'exercice rgulirement ?
Il parlait sur le ton de la conversation tout en continuant frapper et parer.
De la course de fond.
Elle poussa un cri d'effroi aigu quand il lui allongea un coup particulirement puissant.
Concentrez-vous.
J'y arriverais si vous vous taisiez !
Il eut un petit rire, et elle grimaa. Une goutte de sueur coula le long de sa nuque ; elle tait
oblige de dployer toute son nergie pour bloquer ses attaques. Il feinta, et elle tomba dans
le panneau. De nouveau, il frappa sa hanche droite.
Si vous ne protgez pas cette octave
1
, vous allez finir avec les fesses vif.
Les joues de Francesca taient brlantes. Elle rsista l'envie de passer une main sur son
postrieur encore chauff par le dernier coup de Ian. Elle se redressa et se fora respirer
plus lentement. Le regard de Ian tait fix sur son paule. Elle se rendit compte qu'une
bretelle de son soutien-gorge avait gliss pendant l'assaut, et elle la remit en place.
On recommence, fit-elle aussi calmement que possible.
Il hocha la tte poliment.
Elle rassembla ses esprits et lui fit face au centre de la piste. Elle savait qu'elle se montrait
stupide ; elle le savait pertinemment. Noble tait non seulement un escrimeur d'exception
mais aussi un homme en excellente condition physique. Elle ne pouvait pas le vaincre. Et
pourtant, elle ne parvenait pas dominer son esprit de comptition. Elle essaya de se
souvenir des mouvements du jeu.
En garde, annona-t-elle.
Leurs lames s'entrechoqurent.
Cette fois, elle le laissa avancer, en protgeant soigneusement tous ses quadrants. Mais
c'tait peine perdue : il tait trop fort et trop rapide. Plus il s'approchait et plus il empchait
Francesca d'attaquer. Elle para avec fougue, luttant pour le contenir.
Son excitation s'accrut alors qu'il se rapprochait plus prs encore. Elle se dfendit de toutes
ses forces mais ils savaient tous deux qu'il allait vaincre.
Stop ! Cria-t-elle frustre quand il l'accula la limite de la piste.
Vous dclarez forfait.
La lame de Ian frappa celle de la jeune femme si durement qu'elle en perdit presque
l'quilibre. Elle parvint de justesse bloquer son coup suivant.
Non.
Alors rflchissez, fit-il d'un ton cassant.
Elle tenta dsesprment de suivre ses instructions. Elle n'avait pas la place de se fendre,
elle allongea donc le bras pour le forcer reculer.
Trs bien vu, murmura-t-il.
La lame de Noble transpera l'air si rapidement que Francesca n'entrevit qu'un mouvement
flou. Elle ne sentit mme pas le contact du mtal sur sa peau. Elle cessa de se dfendre et
baissa la tte, sonne. Il avait tranch net la bretelle de son dbardeur.
Vous aviez dit que les pes taient inoffensives ! s'exclama-t-elle d'une voix tremblante.
J'ai dit que la vtre l'tait.
D'une petite torsion du poignet, il envoya valser son pe travers les airs. Elle atterrit
avec un son mat sur le tapis. Il retira son masque.
Elle le fixa, estomaque. cet instant, il avait l'air tellement effrayant qu'elle dut se retenir
de partir en courant.
Ne baissez jamais votre garde, Francesca. Jamais. La prochaine fois que vous le ferez, je
vous punirai.
Il repoussa son arme de ct et s'avana brusquement vers elle. D'un geste, il ta le
masque de Francesca et le jeta sur le tapis. Il empoigna d'une main l'arrire de sa nuque, lui
saisit le menton de l'autre, et s'empara de ses lvres.
Au dbut, Francesca se raidit de surprise. Puis l'odeur de Ian la submergea. Il inclina sa
tte vers l'arrire et fora ses lvres avec avidit. Il plongea la langue en avant, explorant la
bouche de Francesca, la possdant.
Une chaleur humide apparut au creux de son ventre. Elle n'avait jamais rien connu d'aussi
intense, son corps ragissait pleinement cette exprience. Ian la serra plus fort, accentuant
la pression de son corps contre le sien.
Il tait si brlant. Si dur. Oh, mon Dieu, ayez piti de moi... Comment avait-elle pu penser
qu'elle le laissait indiffrent ? Elle sentait une bosse saillante travers le tissu de son
pantalon... c'tait comme d'tre brutalement entrane dans une fournaise de dsir sans
espoir d'en sortir.
Elle gmit sous son baiser. Les lvres de Ian pousaient les siennes et les caressaient
divinement, les maintenant entrouvertes pour laisser le champ libre a sa langue conqurante.
Elle colla sa langue contre la sienne et lui rendit son baiser comme elle lui avait tendu ses
coups. Il grogna, la serra l'en touffer, et les yeux de Francesca s'affolrent quand elle
perut la plnitude de son rection. Son sexe tait norme et dur. Celui de Francesca se
resserra comme un fourreau troit, et ses penses volrent en clats. Il l'obligea reculer, et
elle se plia sa volont, peine consciente de ce qu'elle faisait. Il ne cessa pas une seconde de
l'embrasser durant les quelques mtres qu'il lui fit parcourir.
L'air s'chappa de ses poumons, se communiquant la bouche inquisitrice de Ian quand il
la cloua contre le mur. Il s'appuya contre elle, comprimant son corps entre deux surfaces
aussi dures que la pierre.
Elle arqua instinctivement son buste contre le sien, sentant les courbes de ses muscles
bien dessins, collant son bassin contre sa monumentale rection.
Dans un souffle rauque, il arracha sa bouche la sienne et, sans mme lui laisser le temps
de deviner ses intentions, il fit glisser son dbardeur du ct de la bretelle coupe. Ses longs
doigts parcoururent la poitrine de Francesca et s'infiltrrent sous le bonnet de son soutien-
gorge, repoussant le tissu et dvoilant l'un de ses mamelons. Sa main puissante enserrait
maintenant son sein dans son entier, le soulevant, le ptrissant... l'exhibant. Une ardente
lueur de dsir brillait dans ses prunelles, fixes sur sa chair nue. Il frotta son membre dur
contre son bas-ventre, et elle gmit, les narines frmissantes, la tte baisse.
Elle laissa chapper un hoquet de surprise quand la bouche de Ian s'empara de son tton. Il
le mordilla sans mnagement, lui faisant presque mal, et elle sentit une certaine moiteur
entre ses cuisses. Elle cria. Oh, Seigneur, que lui arrivait-il ? Son vagin lui semblait
incroyablement troit, puisant, implorant d'tre empli. Peut-tre Ian entendit-il son cri, car il
cessa de tourmenter son sein pour l'agacer gentiment de sa langue chaude et experte. Avant
de recommencer lui mordiller le tton.
Son dsir conqurant lectrisait le corps de Francesca. Il lui causait un peu de douleur et
beaucoup de plaisir, mais ce qui l'excitait le plus tait cette avidit implacable. Elle mourait
d'envie de l'attiser... de la satisfaire. Elle se cambra contre lui et gmit encore. Jamais un
homme n'avait os l'embrasser si rudement ou la toucher avec autant d'habilet et de
brutalit mles.
Comment aurait-elle pu deviner quel point elle aimerait a ?
Il ptrit nouveau son sein entre ses doigts et le fit rouler dans sa paume tout en
continuant mordiller la pointe durcie. Un gmissement rauque jaillit de la gorge de
Francesca. Il lui souleva la tte, et elle hoqueta en sentant sa bouche abandonner
brusquement sa poitrine. Il la dvisagea de ses yeux de braise avec une expression
impassible. Elle le sentit aux prises avec une incroyable tension intrieure, une guerre contre
lui-mme. Est-ce qu'il va me repousser ? Songea-t-elle soudain. Est-ce qu'il veut rellement
de moi ?
Il bougea brusquement sa main libre et plongea les doigts vers l'entrejambe de Francesca,
englobant son sexe travers le tissu de son jean. Il pressa. Elle gmit faiblement.
Non..., murmura-t-il dans un rle, comme s'il se rpondait lui-mme.
Sa tte sombre s'approcha de nouveau de la poitrine de la jeune femme.
... Je prendrai ce qui est moi.
Ds le dpart, Francesca avait eu l'intuition que frquenter Ian Noble n'tait pas une bonne
ide. Elle Avait compris que la situation lui chappait compltement chaque fois qu'il la
regardait avec cette lueur nigmatique dans ses yeux bleu cobalt. Ne l'avait-il pas lui-mme
avertie, subtilement d'ailleurs, qu'il tait un homme dangereux ?
A prsent, elle en avait la preuve : prs de quatre-vingt-dix kilos de muscles en train de la
plaquer contre un mur. Il la dvorait comme si elle reprsentait son dernier repas.
Il tendit la paume sous la courbe de son sein, offrant la chair de Francesca sa bouche
conqurante, et joua de nouveau avec son tton en une douce morsure. Francesca hoqueta, et
l'arrire de sa tte cogna contre le mur ; une nouvelle vague d'excitation assaillit son
entrejambe. Les doigts de Ian pressaient le creux de son ventre, soulageant et accroissant non
dsir.
Ian..., murmura-t-elle faiblement.
Il releva la tte de quelques centimtres pour contempler sa poitrine. Le tton, humide de
salive, avait rougi et pointait effrontment, raidi par les mordillements et les suotements de
sa langue experte. Elle sentit le corps de Ian se crisper, son sexe en rection appuy contre
son bas-ventre. Il laissa chapper un grognement de satisfaction.
Il faudrait tre un putain de robot pour ne pas dsirer a, fit-il d'une voix rauque et
farouche.
Elle geignit d'affolement et de ravissement. L'expression lgrement perdue qui flottait sur
le visage de Ian et son regard perant la troublaient profondment.
Qui tait rellement cet homme ? Elle dtestait le combat intrieur qu'il semblait mener
contre lui-mme. Elle passa la main l'arrire de sa nuque et fourragea dans ses cheveux. Ils
taient aussi soyeux et pais qu'elle se l'tait imagin. Un instant, les yeux de Ian trouvrent
les siens, et elle guida sa tte vers ses seins.
Tout va bien, Ian.
Ses narines frmirent.
Non, tout ne va pas bien. Vous ne savez pas ce que vous dites.
Je sais ce que je ressens, chuchota-t-elle. a ne suffit pas ?
Il ferma brivement les yeux, et elle sentit soudain la tension l'abandonner tandis qu'il
s'emparait nouveau de ses lvres, lui flchissant les hanches, collant son rection contre sa
peau douce et accueillante. Elle se cramponna son cou et s'abandonna totalement lui.
travers un pais brouillard de dsir, elle entendit des bruits de pas se rapprocher.
Oh... Toutes mes excuses.
Les bruits de pas s'interrompirent.
Ian releva la tte et son regard transpera Francesca. Il dplaa lgrement son corps,
s'assurant que les seins nus de la jeune femme soient dissimuls, et remit en place son
dbardeur.
Qu'est-ce que c'est
[1]
? Rugit-il d'une voix rauque.
Francesca essaya de regarder par-dessus son paule, droute par cette question prononce
en franais, langue qu'elle ne parlait pas.
Je suis dsol. Ton tlphone portable n'arrtait pus de sonner dans le vestiaire. Je ne sais
pas ce que Lin veut te dire, mais a a l'air vraiment urgent.
Elle reconnut l'accent franais de Lucien. Sa voix sonnait de manire touffe, comme s'il
parlait en leur tournant le dos. Ian baissa de nouveau les yeux vers elle, et elle comprit
aussitt qu'une distance s'tait installe entre eux. Son corps tait toujours presse contre le
sien, dur et excit, mais elle eut l'impression que quelque chose venait de se fermer en lui.
J'aurais d la rappeler plus tt. Je me suis montr ngligent, fit Ian sans cesser de
scruter Francesca.
Les bruits de pas reprirent, et elle entendit un claquement de porte. Il s'arracha elle.
Ian ? demanda-t-elle faiblement.
Elle se sentait bizarre, comme si ses muscles avaient oubli leur fonction premire, comme
si le poids et la force du corps de Ian avaient t les seules choses qui la maintenaient debout.
Elle plaqua brutalement sa paume contre le mur pour se ressaisir. Ian tendit le bras vers elle
et lui agrippa fermement le coude. Il la dvisagea.
Francesca ? Vous allez bien ? fit-il d'une voix rugueuse.
Elle cligna les yeux et hocha la tte. Il avait l'air presque en colre.
Je suis dsol, reprit-il. a n'aurait pas d arriver. Je me suis laiss aller.
Oh..., rpondit-elle d'un ton stupide, l'esprit vide. a veut dire que a n'arrivera plus ?
L'expression de Ian s'adoucit. Qu'est-ce qu'il lui prend, bon sang ? Sinterrogea-t-elle
dsesprment.
Vous ne m'avez pas dit. Les hommes avec qui vous vivez... Vous couchez avec l'un
d'entre eux ? Avec tous ?
Le visage de Francesca se dcomposa.
Hein ? Qu'est-ce qui vous prend de me demander a ? Bien sr que non, je ne couche pas
avec eux. Ce sont mes colocataires. Des amis !
Le regard trci de Ian descendit vers sa poitrine,
Et vous pensez que je vais avaler a ? Trois hommes vivant sous le mme toit que vous
sans qu'il y ait rien d'autre qu'une relation amicale ?
Malgr l'hbtude qui l'enveloppait, Francesca fut prise d'une bouffe de colre. Puis la
fureur la submergea totalement. Essayait-il dlibrment de l'insulter ?
Si c'tait le cas, il avait russi. Quel salaud imbu de lui-mme... Comment osait-il lui dire
une telle chose aprs ce qu'il venait de faire ?
(Aprs ce qu'elle lui avait permis de faire.)
Elle s'carta du mur et s'arrta quelques centimtres de lui.
Vous m'avez pos la question, et je vous ai dit la vrit. Je me fiche de ce que vous
croyez. Ma vie sexuelle ne vous regarde pas.
Elle se dtourna et commena s'loigner.
Francesca.
Elle s'immobilisa mais ne se retourna pas. Un sentiment d'humiliation commenait se
mler son irritation. Si cet instant mme elle regardait son superbe visage plein de
suffisance, elle risquait d'exploser.
Je vous ai juste demand a parce que j'essaie de comprendre quel... quel degr
d'exprience vous avez.
Elle fit volte-face et le fixa, estomaque.
C'est a qui compte pour vous ? L'exprience ?
Elle pria pour que la douleur qu'elle ressentait ne transparaisse pas dans sa voix.
Oui.
Pas de douceur. Pas de compromis. Seulement oui. Vous ne jouez pas dans la mme
division que moi, Francesca. Vous n'tes qu'une stupide gamine maladroite tout juste bonne
me distraire.
L'expression de Ian se durcit, et il dtourna le regard.
Je ne suis pas ce que vous croyez. Je ne suis pas un homme bien, ajouta-t-il comme si a
expliquait tout.
Non, fit-elle avec plus de calme qu'elle n'en prouvait. Vous n'tes pas un homme bien. Et
mme si les lche-bottes qui vous entourent ne vous l'ont jamais dit, vous n'avez aucune
raison d'en tre fier, Ian.
Cette fois, il ne tenta pas de la retenir quand elle se rua hors de la salle.
Francesca s'assit la table de la cuisine et contempla pensivement le toast beurr de Davie.
Qu'est-ce qui te met d'aussi mauvaise humeur ? Remarque, ce n'est pas comme si tu
rayonnais de joie de vivre depuis hier. Tu es toujours patraque ? Linterrogea son ami.
Il faisant rfrence au fait qu'elle tait rentre directement la maison la veille aprs ses
cours, au lieu d'aller peindre chez Noble.
Non. a va, fit Francesca avec un sourire rassurant que Davie n'eut pas l'air de trouver
trs crdible.
Au dbut, elle n'avait prouv qu'bahissement et colre aprs ce que Ian avait dit et fait
deux jours plus tt, mais son ressentiment s'tait mu en inquitude au fil des heures.
Ce qui s'tait produit mettait-il en pril sa prcieuse dotation ? tait-ce son manque d'
exprience qui la rendait moins intressante ses yeux et faisait qu'il se permettait de la
traiter ainsi ? Et s'il mettait fin leur accord et qu'elle se retrouvait sans aucun moyen de
payer ses frais de scolarit ? Elle n'tait pas strictement parler une employe de Noble
Enterprises, aprs tout. Elle n'avait aucun contrat, seulement son accord de mcnat. Et Ian
n'tait-il pas rput pour se comporter en tyran ?
Elle tait si anxieuse et perdue au sujet des consquences que ce baiser pourrait avoir
qu'elle ne s'tait pas sentie capable de retourner peindre l'appartement la veille.
Davie dposa un toast dans l'assiette de Francesca et fit glisser un pot de confiture sur la
surface de la table.
Merci, marmonna-t-elle en levant mollement son couteau.
Mange, lui intima Davie. Tu te sentiras mieux.
Davie tait une sorte d'hybride entre un grand frre, un ami et une mre poule pour les
trois autres colocataires.
Il avait au minimum cinq ans d'cart avec chacun d'entre eux, et les avait rencontrs
l'universit de Northwestern alors qu'il passait son diplme de gestion. Il y avait d'abord fait
la connaissance de Justin et Caden, qui suivaient le mme cursus, puis intgr leur cercle
d'amis auquel Francesca appartenait dj.
Davie tait galement historien de l'art. De retour sur les bancs de la fac, il tudiait les
rudiments ncessaires au dveloppement de sa galerie en plusieurs tablissements, ce qui
l'avait immdiatement rapproch de Francesca. Quand Justin, Caden et Davie avaient obtenu
leur master, et Francesca, sa licence, Davie leur avait propos de les accueillir chez lui, dans le
centre-ville de Chicago une maison de cinq chambres et quatre salles de bains dans le
quartier de Wicker Park, hrite de ses parents et prsent bien trop grande pour lui. De
plus, Francesca savait que Davie avait besoin de leur compagnie. Son ami tait sujet de
frquentes priodes de blues, et vivre entour de ses trois colocataires l'aidait surmonter ses
tendances mlancoliques.
Les parents de Davie l'avaient rejet lorsque, adolescent, il leur avait avou son
homosexualit. Alors qu'il tait sur le point de se rconcilier avec eux, un terrible accident de
hors-bord les avait emports trois ans plus tt, sur les ctes mexicaines. Un drame qui
semblait emplir Davie de dtresse et de soulagement.
Le jeune homme cherchait dsesprment l'amour, mais sa vie sentimentale s'tait rvle
jusque-l peu prs aussi dcevante que celle de Francesca. Ils se confiaient mutuellement
leurs malheurs et profitaient du baume de l'amiti chaque fois qu'une de leurs histoires sans
passion s'achevait dans l'amertume et la tristesse.
Les quatre colocataires taient tous bons amis, mais Francesca et Davie taient les plus
proches par leurs gots et leur temprament, tandis que Justin et Caden partageaient les
obsessions communes d'un grand nombre de jeunes mles htrosexuels au milieu de la
vingtaine une carrire lucrative, du bon temps et du sexe rgulier avec des filles sexy.
C'tait Noble au tlphone ? Linterrogea Davie en jetant un regard entendu au portable
de Francesca pos sur la table.
Bon sang... Il avait remarqu que le dernier appel qu'elle avait reu l'avait mise dans tous
ses tats.
Non.
Davie lui adressa un regard moqueur, et elle soupira.
Elle n'avait pas rvl ce qui s'tait pass dans la salle d'entranement de Noble Caden et
Justin qui, en dignes jeunes diplms d'coles de commerce qu'ils taient, travaillant dans
la banque et la finance, ne cessaient de la harceler de questions sur le clbre homme
d'affaires. Elle ne pouvait pas dcemment leur raconter que leur idole, si inaccessible qu'il
ft, l'avait plaqu contre un mur, embrasse et caresse l'en faire dfaillir. Elle n'en avait
pas non plus parl Davie, ce qui prouvait quel point elle nageait dans la plus grande
confusion.
C'tait Lin Soong. La bonne tout faire de Noble.
Elle mordit dans sa tartine.
Et ?
Elle mcha et dglutit.
Elle appelait pour me dire qu'il avait dcid de me faire signer un contrat pour le tableau.
Il me paie la totalit de la somme d'avance. Elle m'assure que les termes du contrat sont trs
gnreux et stipulent que Noble ne peut en aucune circonstance revenir sur cette dotation.
Mme si je ne l'achevais pas, la somme me serait verse.
La mchoire de Davie se dcrocha, et son toast lui glissa des doigts. Avec ses cheveux brun
fonc qui lui retombaient sur le front et sa mine chiffonne du matin, il paraissait plus
proche des dix-huit ans que des vingt-huit.
Pourquoi tu ragis comme si tu venais d'apprendre la mort de quelqu'un, alors ? C'est
une bonne nouvelle, non, que Noble te garantisse ta rmunration quoi qu'il arrive ?
Francesca reposa sa tartine. Son apptit s'tait vanoui quand elle avait compris les
implications de ce que Lin lui avait expos de sa voix professionnelle et chaleureuse.
Il faut toujours qu'il mette tout le monde sa botte, fit-elle amrement.
Bon sang, de quoi est-ce que tu parles, Cesca ? Si ce contrat correspond bien ce que tas
dit son assistante, a reprsente une carte blanche de la part de Noble. Tu peux mme ne
jamais y retourner et toucher ton argent.
Elle reposa son assiette dans l'vier.
Tout fait, marmonna-t-elle le dos tourn. Et Ian Noble sait parfaitement que me
proposer a est la seule chose qui lui garantira que je reviendrai et que je terminerai ce projet.
Davie repoussa sa chaise en arrire pour la regarder bien en face.
Je n'y comprends rien. Tu es en train de me dire que tu songeais vraiment ne pas finir
ce tableau ?
Alors qu'elle rflchissait sa rponse, Justin Maker entra d'un pas tranant dans la
cuisine, vtu en tout et pour tout d'un jogging, son torse nu luisant dans la lumire du matin,
ses yeux verts bouffis par le manque de sommeil.
Caf, grogna-t-il d'une voix rocailleuse en attrapant une tasse dans le placard.
Francesca lana Davie un regard implorant et dsol, esprant qu'il comprendrait qu'elle
ne poursuive pas la discussion.
Tu as fait la fermeture du McGill's avec Caden hier soir ? fit-elle d'une voix sarcastique
en se rfrant leur bar de quartier favori.
Elle tendit le pot de crme son ami.
Non. On est rentrs une heure. Mais devine qui vient jouer au McGill's samedi soir ?
Lana-t-il en prenant la crme. Les Run Around On ne peut pas rater a ! Et on enchanera
sur une nuit de poker !
Je ne crois pas. J'ai un expos important prsenter lundi, et je ne sais pas comment
vous faites pour vous lever aussi tt en vous couchant aussi tard, Caden et toi.
Elle se dirigea vers le seuil.
Allez, Cesca ! Ce sera marrant. a fait un bout de temps qu'on n'est pas sortis tous les
quatre, intervint Davie.
Cela la surprit. Comme Francesca, Davie ne faisait pratiquement plus de nuits blanches
depuis qu'ils avaient quitt Northwestern.
Les sourcils arqus, il semblait vouloir lui dire qu'une incursion dans le monde extrieur
lui changerait les ides.
Je vais y rflchir, rpondit-elle avant de quitter la cuisine.
Elle n'en fit absolument rien. Son esprit tait dj consum par la pense de ce qu'elle
dirait Ian Noble quand elle le reverrait.
Malheureusement, il n'tait pas l quand elle se prsenta la rsidence cet aprs-midi-l
non qu'elle se ft rellement attendue le voir ; il ne se montrait quasiment jamais avant
le soir. Incapable de dcider quelle attitude elle devrait adopter devant lui et quelle rponse
lui donner au sujet du contrat sans mme parler de son avenir en gnral elle se rendit
dans son atelier.
Cinq minutes plus tard, elle tait en train de peindre fivreusement. Ian n'avait pas
dcider pour elle. Mme elle n'avait rien dcid. C'tait le tableau qui avait dcid tout seul.
Elle l'avait dans le sang, et il fallait qu'elle le termine.
Elle se perdit dans son travail pendant plusieurs heures et mergea enfin de sa transe
quand le soleil commena sombrer derrire les gratte-ciel.
Mme Hanson tait occupe verser quelque chose dans un saladier quand Francesca
pntra dans la cuisine d'un pas hsitant, en qute d'un verre d'eau. Cette pice correspondait
en tout point l'image qu'elle se faisait d'une cuisine dans un manoir anglais immense,
renfermant tous les ingrdients possibles et imaginables, mais accueillante sa faon. Elle
aimait s'asseoir ici et bavarder avec Mme Hanson.
Vous tiez tellement silencieuse que je ne me suis mme pas aperue de votre prsence !
s'exclama la vieille dame avec chaleur.
J'tais concentre sur mon travail.
Elle tendit la main vers la poigne de l'norme rfrigrateur en inox. Mme Hanson avait
insist ds le premier jour pour que Francesca fasse comme chez elle. La premire fois qu'elle
avait ouvert le frigo, elle avait pouss une exclamation de surprise en voyant un tage entier
occup par des bouteilles d'eau gazeuse bien fraches et une assiette en porcelaine garnie de
rondelles de citron protges par une couche de cellophane.
Ian m'a dit que l'eau gazeuse au citron tait votre boisson favorite. J'espre que a vous
conviendra, avait ajout la gouvernante d'une voix anxieuse.
Depuis, chaque fois qu'elle ouvrait le frigo, Francesca ressentait une sensation de chaleur.
La mme que la premire fois, lorsqu'elle avait compris que Ian avait mmoris ses gots et
s'tait assur qu'elle disposerait le tout le confort possible pendant qu'elle peignait.
Pathtique, se morigna-t-elle en ouvrant une bouteille.
Souhaitez-vous rester pour dner ? Linterrogea Mme Hanson. Ian ne viendra pas
rclamer le sien avant un moment, mais je peux vous prparer quelque chose sur le pouce.
Non, je n'ai pas vraiment faim. Merci beaucoup.
Elle hsita un instant, mais finit par poser la question qui lui brlait les lvres :
Alors Ian est en ville ? Il rentrera ce soir ?
Oui, c'est ce qu'il m'a dit ce matin. D'habitude, il dne huit heures et demie pile, que ce
soit l'appartement ou au bureau. C'est un homme qui apprcie la routine. Il a toujours t
comme a, depuis tout petit dj.
La gouvernante l'observa.
Pourquoi ne pas vous asseoir et me tenir compagnie un petit moment ? Vous tes toute
ple. Vous travaillez trop dur. J'ai mis de l'eau bouillir, je vais nous faire du th.
D'accord, opina Francesca en s'affaissant sur l'un des tabourets qui jouxtaient le bar.
Elle se sentait soudain morte de fatigue, prsent que l'adrnaline de son lan cratif
l'avait quitte. Qui plus est, elle n'avait pas trs bien dormi les deux nuits prcdentes.
Comment tait Ian, quand il tait enfant ? Ne put-elle s'empcher de demander.
Oh... une vieille me comme je n'en ai jamais vu dans d'aussi jeunes yeux, fit la
gouvernante avec un sourire triste. Srieux. Extraordinairement intelligent. Un peu timide.
Mais une fois que vous le connaissiez, c'tait le plus gentil et le plus loyal des enfants.
Francesca essaya de se reprsenter un jeune Ian timide aux cheveux sombres, et son cur
se serra l'image qui naquit dans son esprit.
Vous n'avez pas l'air dans votre assiette, fit Mme Hanson tout en continuant s'affairer.
Cette dernire versa l'eau bouillante dans deux lasses avant de garnir une assiette d'argent
de diffrents lments : deux petits pains au lait, une cuillre d'argent finement ouvrage et
un couteau assorti, deux serviettes de table blanches, un pot de crme du Devonshire et de la
confiture prsente dans d'exquis petits bols de porcelaine. On ne faisait jamais les choses
autrement qu'en grand chez Ian Noble, mme pour une conversation informelle la table de
la cuisine.
Vous n'tes pas satisfaite de votre tableau ?
J'en suis trs contente, en fait. Merci, murmura Francesca tandis que la vieille dame
dposait une tasse et une soucoupe devant elle. Le travail avance bien. Vous devriez venir
voir, un de ces jours.
Ce serait avec grand plaisir. Voulez-vous un pain au lait ? Ils sont particulirement bons,
aujourd'hui. Rien ne vaut un petit pain au lait avec de la crme et de la confiture pour vous
gurir de la mauvaise humeur.
Francesca rit et secoua la tte.
Ma mre ferait une crise cardiaque si elle vous entendait dire a.
Pourquoi donc ? demanda la gouvernante en carquillant ses yeux bleu clair et en
cessant de recouvrir les viennoiseries de crme.
Parce que vous m'encouragez apaiser mes motions avec de la nourriture, voil
pourquoi. Mes parents, assists d'un bataillon de psys, ont tout fait depuis que j'ai sept ans
pour m'extirper le dmon de la boulimie du cerveau.
Devant l'expression interloque de la vieille dame, elle ajouta :
J'tais plutt grosse, quand j'tais petite.
Je ne l'aurais jamais imagin ! Vous tes fine comme une brindille !
Francesca haussa les paules.
Quand j'ai quitt la maison, mon problme de poids a t rsolu en un ou deux ans. C'est
cette poque que j'ai commenc faire de l'endurance ; je suppose que a a aid. Mais j'ai
tendance penser que me retrouver loin du regard critique de mes parents a t le vritable
lment dclencheur.
La gouvernante eut un murmure d'approbation.
Une fois que votre surpoids n'a plus reprsent une sorte de pouvoir sur vos parents,
toute cette graisse est devenue inutile ?
La jeune femme sourit de toutes ses dents.
Madame Hanson, vous avez rat une belle carrire de psychologue.
La vieille dame clata de rire.
De quelle utilit aurais-je t alors pour Ian ou lord Stratham ?
Francesca cessa un instant de siroter son th.
Lord Stratham ?
Le grand-pre de Ian ; James Noble, le comte de Stratham. J'ai travaill pour lord et lady
Stratham pendant trente-trois ans avant de venir ici, en Amrique, pour me mettre au service
de Ian. C'tait il y a huit ans.
Le grand-pre de Ian..., murmura la jeune femme d'un air pensif. Qui doit hriter de son
titre ?
Oh, un parent du nom de Grard Sinoit, le neveu de lord Stratham.
Ce n'est pas Ian ?
Mme Hanson soupira et reposa son pain au lait.
Ian est l'hritier de la fortune de lord Stratham, mais non de son titre.
Francesca tait perplexe. Les coutumes anglaises taient si tranges...
Ian descend-il de lord Stratham par son pre ou par sa mre ?
Une ombre traversa le visage de la vieille femme.
Par sa mre. Helen tait l'unique enfant du comte et de la comtesse.
Est-ce qu'elle est...
Par politesse, Francesca laissa sa phrase en suspens, et Mme Hanson hocha tristement la
tte.
Oui, elle est morte. C'est arriv quand elle tait trs jeune. Une vie tragique.
Et le pre de Ian ?
La gouvernante ne rpondit pas immdiatement, comme si elle tait en proie un conflit
intrieur.
Je ne suis pas sre de pouvoir vous parler de ce genre de choses.
La jeune femme rougit.
Oh... bien sr. Je suis dsole. Je ne voulais pas tre indiscrte, c'est juste qu...
Ce n'tait pas une question indiscrte, la rassura Mme Hanson en tapotant la table de
ses doigts. Mais Je crains juste de devoir vous dpeindre un triste tableau. Malgr toute sa
fortune, Ian a un passif douloureux. Sa mre tait une jeune femme plutt rebelle... presque
sauvage. Lord et lady Stratham n'ont jamais russi la contenir. Elle a fui le domaine avant
ses dix-huit ans et personne n'a eu de ses nouvelles pendant dix ans. Les Noble craignaient
qu'elle ait trouv la mort mais n'en ont jamais eu la preuve. Ils ont continu chercher. Ce
fut une priode noire pour la maison Stratham. (La vieille dame fit une pause, visiblement
affecte par ce souvenir. Puis elle reprit :) Le lord et la lady ont essay dsesprment de la
retrouver.
Je ne peux mme pas imaginer une chose aussi horrible.
Mme Hanson hocha la tte.
Ce fut une terrible poque. Et les choses ne se sont pas vraiment arranges quand ils ont
finalement dcouvert Helen dans une sorte de taudis au nord de la France, presque onze ans
aprs sa disparition. Elle tait quasiment folle. Malade. Dlirante. Personne n'a jamais
dcouvert ce qui lui tait arriv, et on n'en sait pas vraiment plus aujourd'hui. Avec elle, il y
avait Ian un enfant de dix ans qui en paraissait beaucoup plus.
Mme Hanson se racla la gorge, le regard humide, et Francesca descendit de son tabouret.
Je suis vraiment dsole. Je ne voulais pas vous bouleverser.
Elle se sentait la fois dvore par la curiosit et pleine de sollicitude l'gard de la
gouvernante. Elle trouva une bote de mouchoirs et la lui tendit.
Ne vous en faites pas. Je ne suis qu'une vieille dame trop sensible, marmonna Mme
Hanson en prenant le mouchoir. Aux yeux de la plupart des gens, les Noble sont seulement
mes employeurs, mais pour moi, ils reprsentent ma seule famille.
Elle renifla et se pina les joues.
Que se passe-t-il, madame Hanson ?
Francesca sursauta au son de la voix masculine et se retourna brusquement. Ian se tenait
sur le seuil de la cuisine.
La gouvernante releva la tte d'un air coupable.
Ian, vous tes rentr tt !
Vous allez bien ?
Une expression de sincre inquitude marquait les traits de son visage. Francesca se rendit
compte d'une chose : si la vieille dame considrait les Noble comme tant sa seule famille, la
rciprocit tait tout fait valable.
Tout va bien. Je vous en prie, ne vous inquitez pas, ajouta-t-elle avec un petit rire
dsinvolte. Vous savez que les vieilles femmes ont tendance pleurer pour un rien.
Je ne vous ai jamais vue pleurer pour un rien, Ian reporta son attention sur Francesca.
Puis-je vous dire deux mots dans la bibliothque ?
Bien sr, rpondit cette dernire en redressant la tte.
Elle croisa le regard perant de Noble.
Une minute plus tard, elle se retournait avec inquitude vers Ian qui refermait la lourde
porte en noyer derrire eux. Il s'avana vers elle avec la dmarche fluide et gracieuse d'un
fauve. Pourquoi avait-elle toujours envie de comparer un homme aux manires si contenues
et sophistiques un animal sauvage ?
Qu'avez-vous dit Mme Hanson ?
Francesca s'y attendait un peu mais le ton accusateur qui perait dans sa voix lui donna
quand mme la chair de poule.
Je n'ai rien dit de spcial ! Nous ne faisions que... discuter.
Il la foudroya du regard.
Discuter au sujet de ma famille.
Elle se retint de pousser un soupir de soulagement. Apparemment, il n'avait entendu que
les derniers mots de la gouvernante, non la partie qui concernait sa mre. Et lui. D'une
manire ou d'une autre, Francesca tait certaine qu'il aurait ragi de faon bien plus brutale
s'il avait su que la gouvernante s'tait laisse aller lui rvler ces dtails.
Oui, admit-elle.
Elle raidit les paules et se fora soutenir son regard, quoi qu'il lui en cote cet
instant, les yeux de Ian ressemblaient ceux d'un ange vengeur. Elle croisa les bras devant sa
poitrine.
Je l'ai questionne au sujet de vos grands-parents.
Et a l'a fait pleurer ? demanda-t-il d'une voix sarcastique.
Je ne sais pas exactement ce qui l'a fait pleurer, rtorqua-t-elle schement. Je ne
fouinais pas, Ian. Nous discutions normalement. Vous devriez essayer, des fois.
Si vous voulez des renseignements sur ma famille, je prfrerais que vous m'interrogiez
directement.
Oh, et vous me raconterez tout, bien sr, siffla-t-elle, aussi sarcastique que lui.
Elle vit un muscle de sa joue tressaillir. Brusquement, il s'avana vers le grand bureau en
bois massif et saisit un petit cheval en bronze qu'il tripota distraitement.
Francesca se demanda avec un mlange d'irritation et d'inquitude s'il avait besoin de
s'occuper les mains pour s'empcher de lui sauter la gorge. Comme il lui tournait le dos, elle
put l'observer loisir pour la premire fois. Il portait un pantalon sur mesure
impeccablement coup, une chemise blanche et une cravate bleue assortie la couleur de ses
yeux. Comme il se rendait toujours en costume trois-pices au bureau, elle supposa qu'il avait
retir la veste. La chemise amidonne mettait merveilleusement en valeur ses larges paules
; le pantalon faisait ressortir ses hanches troites et ses longues jambes : un style la fois
lgant et d'une virilit brute.
C'est rellement un fauve magnifique, songea-t-elle avec amertume.
Lin m'a dit qu'elle vous avait appele ce matin.
Ce brusque changement de sujet obligea Francesca baisser la garde.
Effectivement. J'aimerais m'entretenir directement avec vous au sujet de ce qu'elle m'a
dit, rpondit-elle en sentant l'angoisse prendre de nouveau le dessus sur la colre.
Vous tes venue peindre aujourd'hui.
Elle plissa les yeux, surprise.
Vous... Comment le savez-vous ?
Elle avait cru qu'il s'tait rendu directement la cuisine une fois rentr.
Il y a de la peinture sur votre majeur droit.
Elle regarda sa main droite. Elle ne l'avait mme pas vu jeter un coup d'il dans cette
direction. Avait-il des yeux derrire le dos ?
Oui, je suis venue peindre.
J'ai pens que vous prfreriez peut-tre ne pas revenir, aprs ce qui s'est pass
mercredi.
Eh bien, je suis revenue. Et pas parce que vous avez demand Lin de m'acheter. Ce
n'tait pas ncessaire.
Il se retourna vers elle.
J'ai pens que c'tait ncessaire. Je ne voulais pas que vous vous demandiez si vous
alliez ou non toucher la somme ncessaire pour achever vos tudes.
Et vous l'avez fait parce que vous saviez que je reviendrais terminer le tableau si j'avais
la certitude que, quoi qu'il arrive, vous me verseriez ma commission, fit-elle d'un ton irrit en
s'avanant vers lui.
Il trcit les yeux et eut la dcence de paratre lgrement gn.
Je n'aime pas qu'on me manipule, reprit-elle.
Je n'essayais pas de vous manipuler. Je voulais juste vous viter de perdre quelque
chose que vous avez mrit cause de mon manque de sang-froid. Vous n'avez rien vous
reprocher.
On s'est pelots, murmura-t-elle en rougissant. Ce n'est pas non plus une affaire d'tat.
J'avais envie de faire bien davantage que vous peloter, Francesca.
Ian, vous m'apprciez ? demanda-t-elle sur une impulsion subite.
Elle carquilla grands les yeux. Elle ne pouvait croire qu'elle venait de laisser chapper la
question qui la tourmentait depuis des jours.
Si je vous apprcie ? J'ai envie de vous baiser. J'en crve d'envie. a rpond votre
question ?
Le silence qui s'abattit sur eux tait si lourd que Francesca en eut le souffle coup. La
puissance de son dsir semblait se rpercuter travers toute la pice.
Pourquoi vous avez si peur de perdre le contrle ? Je ne suis plus une gamine de douze
ans, articula-t-elle au bout d'un moment.
Il la scruta, et elle sentit une chaleur brlante envahir ses joues.
Non. Mais a revient au mme, lcha-t-il d'un ton soudain ddaigneux.
Une vague d'humiliation la submergea. Comment peut-il souffler ainsi le chaud et le froid
sans la moindre transition ? Songea-t-elle, excde. Il fit le tour de son bureau et s'installa
dans le sige de cuir.
Vous pouvez partir moins que vous n'ayez autre chose rgler avec moi ?
Je prfrerais tre paye quand le tableau sera fini. Pas avant.
La voix de Francesca tremblait d'une colre contenue. Il hocha pensivement la tte, comme
s'il mditait sa requte.
Vous n'tes pas oblige de dpenser la somme ds maintenant. Mais le paiement a dj
t intgralement transfr sur votre compte bancaire.
Elle tait abasourdie.
Comment connaissez-vous les coordonnes de mon compte ?
Il ne rpondit pas et se contenta de hausser lgrement les sourcils, une expression
indchiffrable sur le visage.
Francesca parvint tout juste touffer le juron qui menaait de franchir ses lvres.
Comme elle ne pouvait pas se permettre de maudire ouvertement son bienfaiteur pour son
arrogance ou sa gnrosit, elle ne voyait rien d'autre ajouter. La fureur avait court-
circuit ses neurones. Elle se dtourna et se dirigea vers le seuil de la pice.
Au fait, Francesca ? Ajouta-t-il d'une voix calme.
Oui ?
Elle fit volte-face.
Ne prvoyez pas de venir travailler ici samedi soir. Je compte me dtendre, et j'ai besoin
d'intimit.
Elle eut l'impression de recevoir un coup de poing dans l'estomac. Il tait en train de lui
dire qu'il recevait une femme ici ce week-end. Sans qu'elle sache comment, elle en tait
certaine.
Pas de problme. J'avais prvu de sortir samedi soir avec mes amis pour dcompresser
un peu. On ne peut pas dire que l'ambiance soit franchement dtendue ici.
Une lueur brilla dans les yeux de Ian avant qu'elle se dtourne, mais son expression
demeura impassible.
Comme toujours.
Davie conduisait prudemment la voiture de Justin travers la circulation encombre du
samedi soir Wicker Park. Justin tait un peu trop mch aprs les deux heures passes au
concert de Run Around Mand au McGill's comme Caden et Francesca d'ailleurs.
Ce qui expliquait leurs comportements quelque peu erratiques.
Allez, Cesca ! La taquina Caden depuis le sige arrire. On va tous s'en faire un.
Mme toi, Davie ? Senquit Francesca qui occupait le sige passager avant.
Ce dernier haussa les paules.
J'ai toujours eu envie de me faire faire un tatouage sur le biceps un dessin l'ancienne
mode, comme une ancre ou un truc de ce genre, fit-il avec un petit sourire tout en bifurquant
sur North Avenue.
Il pense qu'avec a il pourra sduire un pirate, blagua Justin.
Eh bien, je ne franchirai pas le pas avant d'avoir le temps de dessiner moi-mme le mien,
fit Francesca d'un ton rsolu.
Petite joueuse, la tana Justin. Y a quoi de marrant prvoir de se faire tatouer ? T'es
cense te rveiller avec un abominable truc super-cochon sur la peau le matin sans avoir le
moindre souvenir de ce que t'as fait la veille.
Tu parles du tatouage, l, ou de la fille que tu comptes ramener ? demanda Caden.
Francesca clata de rire et, cause des chamailleries d'ivrognes de ses amis, elle entendit
peine son tlphone portable sonner au fond de son sac. Elle jeta un coup d'il l'cran
lumineux mais ne reconnut pas le numro.
All ? fit-elle en s'efforant de masquer son fou rire.
Francesca ?
Toute hilarit l'abandonna d'un seul coup.
Ian ? rpondit-elle d'une voix incrdule.
Oui.
Justin pronona quelque chose voix basse l'arrire, et Caden s'esclaffa bruyamment.
Je vous drange, peut-tre ?
L'accent britannique un peu guind de Ian contrastait avec les intonations graveleuses des
plus jeunes colocataires de Francesca.
Non. Je suis juste dehors avec des amis. Pourquoi m'appelez-vous ? demanda-t-elle
d'une voix blanche.
Caden clata de rire, et Davie l'imita.
Les garons, s'il vous plat, mettez-la un peu en sourdine.
Cette demande fut superbement ignore.
Je pensais quelque chose..., commena Ian.
Non ! Tourne gauche ! s'exclama bruyamment Justin. La boutique Dragon Signs est
sur North Paulina.
Davie crasa la pdale de frein, et Francesca se retrouva projete vers l'avant, retenue par la
ceinture de scurit.
Qu'est-ce que vous disiez ? reprit-elle au tlphone.
Elle tait plus dsoriente par le fait d'avoir Ian au tlphone que par la secousse brutale
qu'elle venait le subir, suite au brusque changement de direction de Davie. Il y eut un long
silence l'autre bout de la ligne.
Francesca, vous tes ivre ?
Non, rpondit-elle froidement.
Qui tait-il pour se permettre de lui parler sur un ton aussi suprieur ?
Vous n'tes pas au volant, si ?
Non, je ne conduis pas. C'est Davie qui s'en charge. Et il n'est pas ivre, lui non plus.
qui tu parles, Cesca ? Lana Justin depuis le sige arrire. C'est ton pre ?
Une vague de fou rire monta dans sa gorge. C'tait plus fort qu'elle. La question de Justin
avait touch en plein dans le mille.
Ne lui dis pas que tu es en route pour aller faire tatouer ton superbe petit cul ! Beugla
Caden.
Elle pouffa, et sa colre l'abandonna. la place, un sentiment d'embarras l'envahit l'ide
que Ian entendait les plaisanteries de ses amis. Elle tait en train de lui prouver qu'elle tait
aussi immature et purile qu'il le pensait.
Vous n'allez pas vous faire tatouer, fit Ian.
Le sourire de Francesca s'vanouit. a sonnait davantage comme un ordre que comme une
question.
Si, c'est exactement ce que je vais faire, rtorqua-t-elle, furieuse. Et d'ailleurs, j'ignorais
que vous aviez le droit de rgenter ma vie. J'ai accept de peindre un tableau pour vous, pas
de devenir votre esclave.
Caden, Davie et Justin se turent brusquement.
Vous avez bu. C'est une dcision impulsive que vous regretterez ds demain matin.
Une nuance de colre teintait la voix calme de Ian.
Comment le savez-vous ?
Je le sais.
Cette rponse prononce d'un ton ferme la dgrisa un peu. Durant une fraction de seconde,
elle fut convaincue qu'il avait raison. Puis une vague d'irritation l'aiguillonna.
Elle avait pass toute la soire s'efforcer de ne pas penser Ian Noble - tente d'oublier
qu'il lui avait dit avoir envie de la baiser -et il avait fallu qu'il se manifeste et qu'il ruine tous
ses efforts en l'appelant et en se comportant de faon si arrogante ?
Vous m'appelez pour une raison prcise ? Parce que si ce n'est pas le cas, je vais de ce pas
me faire tatouer un pirate sur le cul, fit-elle en reprenant au hasard un lment de la
conversation de ses amis un peu plus tt.
Francesca, ne faites p...
Elle raccrocha.
Cesca, tu ne viens pas de...
Putain, elle l'a fait, coupa Caden d'un air ahuri, un peu impressionn. Elle vient de dire
Ian Noble qu'il pouvait aller se faire foutre et lui a raccroch au nez.
Tu es sre que tu veux le faire, Cesca ? demanda Davie aprs qu'elle eut choisi un motif
sur le catalogue illustr.
Je... je crois bien, marmonna-t-elle.
Sa dtermination faiblissait peu peu.
videmment qu'elle veut le faire. Tiens, bois un autre coup pour te donner du courage,
suggra judicieusement Justin en lui tendant une petite flasque urgente.
Cesca..., reprit Davie d'une voix inquite.
Francesca s'empara de la flasque.
La sensation du whisky dans sa gorge la fit grimacer. Elle avait horreur des alcools forts.
Je n'aime pas beaucoup que mes clients boivent de l'alcool avant de passer aux aiguilles,
grogna le tatoueur barbu aux cheveux hirsutes en entrant dans la salle d'attente o se
tenaient les quatre amis.
Oh, eh bien, dans ce cas..., tenta Francesca, entrevoyant une possible voie de sortie.
Ne fais pas ta mauviette, insista Justin. Bart ne va quand mme pas te renvoyer juste
cause d'une ou deux gorges de gnle, n'est-ce pas, Bart ? Ce mec a une vraie thique, mais il
a tendance l'oublier trs vite quand y a du fric se faire.
Le tatoueur jeta un regard noir Justin, mais le jeune homme ne se dmonta pas.
Baissez votre pantalon et allongez-vous sur table, alors, marmonna Bart.
Francesca commena dboutonner son jean. Davie, Justin, Caden et Bart la regardrent
s'allonger sur le ventre.
Eh, laisse-moi t'aider ! s'exclama Caden avec enthousiasme quand elle commena faire
descendre son jean et sa culotte le long de sa fesse droite.
Davie lui empoigna le bras et l'arrta avec un froncement de sourcils autoritaire. Caden se
contenta de hausser les paules avec un sourire bovin.
Juste cet endroit-l ? demanda Bart d'un ton bourru quelques secondes plus tard.
Au contact des doigts de l'homme sur sa peau, Francesca ressentit un profond dgot.
Eh ! Vous pourriez mme vous servir d'une des superbes fossettes qu'elle a sur le cul
comme une sorte de pot peinture !
Francesca se figea au son touff de la voix de Justin et lana un regard de ct. Justin
contemplait ses fesses partiellement dnudes avec un intrt non dissimul.
On devrait peut-tre jeter un coup d'il sur l'autre fesse, histoire d'avoir une bonne vue
d'ensemble, suggra Caden.
Vos gueules, tous les deux, grina-t-elle entre ses dents serres.
a la mettait vraiment mal l'aise que Justin et Caden la regardent de cette faon. C'tait
peut-tre bien une ide stupide, aprs tout. Ses penses se fracassrent en mille morceaux
quand Bart s'approcha d'elle avec, la main, une seringue visse sur un tube d'encre. Elle vit
que ses ongles taient sales. Les aiguilles lui faisaient peur. Le whisky semblait bouillir
l'intrieur de son estomac.
Attendez, tous, je ne suis pas tout fait sre de..., souffla-t-elle, les paupires
obstinment fermes comme pour tenter de se concentrer.
Allez, Cesca... Eh ! C'est quoi ce putain de bordel ?
Elle releva aussitt la tte, et ses cheveux glissrent devant son visage, l'aveuglant. Elle
sentit la main de Bart se crisper brusquement, comme si quelqu'un lui avait agripp le bras.
Laissez-la partir tout de suite, ou je vous jure que je ferai en sorte que vous fermiez
boutique dfinitivement.
Bart retira la main de sur son jean.
Relevez-vous, Francesca.
Elle s'excuta sans y rflchir deux fois. Elle se remit debout en chancelant et se rhabilla,
considrant avec incrdulit un Ian au visage bouillonnant de Colre.
Qu'est-ce que vous faites l ?
Il ne rpondit pas, se contentant de clouer Bart sur place de son regard furieux. Une fois
qu'elle eut reboutonn son jean, il l'attrapa par le poignet. Elle trbucha derrire lui quand il
commena l'entraner hors de la salle d'attente. Il s'arrta devant le trio berlu form par
Davie, Caden et Justin. Face eux, Il ressemblait une sombre statue menaante et austre.
Vous trois, vous tes ses amis ?
Davie hocha la tte, le visage livide.
Vous devriez avoir honte de vous.
Justin semblait commencer reprendre ses esprits. Il ouvrit la bouche pour protester mais
Davie l'interrompit.
Non, Justin. Il a raison.
Le visage du jeune homme vira au rouge brique et il parut sur le point de rpondre, mais,
cette fois, ce fut Francesca qui l'arrta :
a suffit, les garons. Tout va bien. Vraiment, insista-t-elle l'intention de Justin avant
de suivre Ian hors de la boutique, la main fermement cramponne la sienne.
Elle eut du mal suivre son pas rapide sur la chausse, une fois qu'ils se furent loigns le
long la sombre avenue borde d'arbres. Elle n'avait pas l'impression d'tre si saoule que a.
Mais alors, pour quoi le monde avait-il sombr sous un ocan flou jusqu' ce que la voix
autoritaire de Ian intimant Bart de la laisser partir l'ait ramene la ralit ?
Vous avez l'intention de me dire ce qui vous a pris ? Senquit-elle d'une voix essouffle
tout en trottinant son ct.
Vous avez de nouveau baiss votre garde, Francesca, fit-il avec une rage contenue.
Hein ? Qu'est-ce que vous voulez dire ?
Il s'arrta brusquement sur le trottoir, la prit dans ses bras et l'embrassa rudement.
Tendrement.
Pourquoi tait-elle incapable de distinguer les deux quand il s'agissait de ses baisers ?
Elle gmit sous ses lvres et son corps s'arc bouta avant de fondre nouveau au contact de
son torse. Le got de ce baiser l'emplissait d'un tourbillon de dsir. Ses ttons se durcirent,
comme si sa peau avait appris associer la saveur de sa langue au plaisir. Il arracha sa bouche
la sienne plus tt qu'elle ne s'y attendait ou qu'elle ne le voulait. Son corps tait brlant
contre le sien.
Dieu du ciel, comme elle le dsirait ! Cette vidence flamboyante ne s'tait pas encore tout
fait impose son esprit. Elle n'avait jamais imagin qu'un homme comme Ian pt la
convoiter sexuellement, et encore moins qu'elle dsirt elle-mme une telle chose.
La lumire des lampadaires quelques mtres de l faisait briller les yeux de Ian, dont le
visage tait plong dans la pnombre. Il la regardait, pench sur elle, et elle sentait un
mlange de colre et de convoitise vibrer travers toutes les fibres de son corps.
Comment avez-vous os laisser ce misrable dchet qui n'a mme pas de licence poser
une aiguille sur votre peau ? Et quel genre de fille stupide tes-vous pour vous dnuder les
fesses dans une pice remplie d'hommes concupiscents ?
Des hommes concupiscents ? Ce sont mes amis...
Francesca ferma un instant les yeux, le temps de retrouver un peu son souffle et
d'assimiler le reste de ses propos.
Bart n'avait pas de licence ? Attendez... Comment avez-vous su o j'tais ?
Votre ami a braill le nom de la boutique de tatouage pendant que vous tiez au
tlphone, rpondit Ian d'un ton cinglant.
Il s'carta d'elle, abandonnant son corps pantelant et frustr.
Oh..., souffla-t-elle.
Il traversa les plates-bandes de la contre-alle pour ouvrir d'un geste sec la porte d'une
superbe berline noire et luisante.
Elle le fixa avec mfiance.
O allons-nous ?
Si vous choisissez de me suivre dans cette voiture, la rsidence.
Le pouls de Francesca se mit tambouriner ses oreilles.
Pour quoi faire ?
Comme je vous l'ai dit, vous avez baiss votre garde, Francesca. Je vous avais prvenue
de ce que je ferais si a se reproduisait. Vous vous en souvenez ?
L'univers autour d'elle cessa d'exister. Seuls les yeux brillants de Ian, son visage sombre et
les battements effrns de son propre cur subsistaient
Ne baissez jamais votre garde, Francesca. Jamais. La prochaine fois que vous le ferez, je
vous punirai."
La jeune femme sentit son entrecuisse devenir tout moite. Non... il ne pouvait pas tre
srieux. Elle eu envie, l'espace d'un instant, de partir en courant rejoindre la joyeuse beuverie
de ses amis.
Rien ne vous oblige entrer dans cette voiture, reprit-il plus doucement. Je veux juste
que vous sachiez ce qui arrivera si vous le faites.
Vous me punirez ? fit-elle d'une voix tremblante Vous allez... quoi... me donner la fesse
?
Elle ne pouvait pas croire que sa bouche venait d'articuler ces mots. Et elle n'en crut pas
ses yeux quand elle le vit hocher la tte.
Exactement. Et votre comportement vous vaudra aussi quelques coups de tapette. Vous
auriez mrit davantage, mais je vais tenir compte de votre inexprience en la matire. Et a
fera mal. Enfin, je ne vous imposerai rien qui dpasse vos limites. Et jamais, jamais, je ne
vous blesserai ou laisserai des marques, Francesca. Vous tes bien trop prcieuse. Je vous en
donne ma parole.
Francesca jeta un regard aux lumires lointaines de la boutique de tatouage avant de se
tourner nouveau vers Ian.
C'tait pure folie, et elle tait incapable d'y rsister.
Ian n'ajouta rien. Il referma juste la portire derrire elle une fois qu'elle fut installe du
ct passager.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent en silence, et Francesca pntra dans le vestibule avec
un mlange d'excitation et d'apprhension.
Suivez-moi dans ma chambre coucher, fit Ian.
Ma chambre coucher. Ces mots rsonnrent dans le crne de la jeune femme. Elle
n'tait jamais entre dans cette aile de l'immense appartement, songea-t-elle distraitement.
Elle lui embota le pas avec l'impression d'tre une colire prise en flagrant dlit, le
sentiment d'attente fivreuse qu'elle prouvait rpondait quelque chose de profondment
ancr en elle, quelque chose qu'elle ne parvenait pas saisir totalement.
Elle savait que, d'une certaine faon, si elle franchissait le seuil des quartiers privs de Ian,
sa vie ne serait plus jamais la mme. Comme s'il le comprenait, il s'arrta juste devant la
porte de bois sculpt.
Vous n'avez jamais rien fait de ce genre, n'est-ce pas ?
Non, admit-elle, les joues en feu. a ne vous pose pas de problme ?
Ils parlaient tous les deux voix basse.
a m'en posait un, au dbut. Mais je vous dsire tellement que j'ai fini par accepter
votre innocence.
Elle baissa les yeux. Il reprit :
Vous tes certaine de vouloir faire cela, Francesca ?
Dites-moi juste une chose.
Tout ce que vous voulez.
Quand vous m'avez tlphon tout l'heure, quand j'tais dans la voiture... Vous ne
m'avez jamais dit pourquoi vous appeliez.
Et vous aimeriez le savoir ?
Elle hocha la tte.
J'tais seul dans la rsidence. Je n'arrivais pas travailler ou me concentrer.
Vous ne m'aviez pas dit que vous aviez l'intention de vous dtendre ?
C'est bien ce que j'ai dit. Mais le moment venu, je n'arrivais pas cesser de penser
vous. Je n'aurais pu voir personne d'autre.
Elle prit une inspiration tremblante, touche qu'il lui parle avec autant de franchise.
Alors je suis all dans l'atelier voir ce que vous aviez peint hier. C'est prodigieux,
Francesca. J'ai aussitt su que je devais vous voir.
Elle baissa encore davantage la tte pour dissimuler le plaisir que lui causaient ces mots.
Trs bien. Je suis sre de vouloir faire a.
Cette fois, ce fut lui qui hsita avant de tourner finalement la poigne. La porte s'ouvrit, il
l'invita entrer d'un geste de la main, et elle avana avec prudence dans la pice. Ian appuya
sur un bouton d'un panneau de contrle, et plusieurs lampes s'allumrent d'un seul coup,
diffusant une lumire chaude et dore.
C'tait une chambre magnifique - paisible, meuble avec got, luxueuse. Un divan et
plusieurs siges taient disposs autour d'une chemine, juste en face de Francesca. Un grand
vase Ming abritant une superbe composition florale d'arums rouges et d'orchides tait pos
sur la table derrire le divan.
Un tableau impressionniste reprsentant un champ de coquelicots surplombait la
chemine ; Francesca tait presque sre qu'il s'agissait d'un original de Monet.
Je n'arrive pas y croire. Son regard se posa enfin sur l'immense lit colonnes sculptes
qui occupait la partie droite de la pice. Comme le reste du mobilier, il tait tapiss dans de
riches tons de brun, d'Ivoire et de rouge sombre.
Les quartiers privs du seigneur du manoir, murmura-t-elle.
Ian esquissa un sourire gn, avant de se diriger vers une porte plus petite. Francesca le
suivit dans une salle de bains qui s'avra en ralit plus grande que la chambre. Il fouilla dans
un placard et en sortit une housse en plastique transparent qu'il dposa prs du lavabo.
Allez prendre une douche et mettez cette robe. Seulement la robe. Laissez toutes vos
autres affaires. Vous trouverez tout ce dont vous avez besoin dans ces deux compartiments.
Vous sentez le whisky et le tabac froid.
Je suis dsole.
J'accepte vos excuses.
Elle sentit ses joues s'enflammer nouveau. Un lger sourire apparut sur les lvres de Ian
quand il vit l'embarras que sa raction provoquait en elle. C'tait de toute vidence l'effet qu'il
recherchait.
Vous me plaisez, Francesca. Au-del de toute mesure.
Elle en resta bouche be. Apprendrait-elle un jour dchiffrer ses ractions ?
Or vous devez apprendre me plaire galement sur le plan sexuel.
Je le veux vraiment, fit-elle d'un ton calme, surprise par sa propre candeur.
Trs bien. Pour commencer, je veux que vous preniez une douche et que vous mettiez
cette robe. Quand vous aurez fini, revenez dans la chambre pour y recevoir votre punition.
Il s'apprtait sortir de la salle de bains quand il s'arrta.
Oh, et lavez aussi vos cheveux, je vous prie. C'est criminel de laisser cette splendeur
empester la cigarette, murmura-t-il avant de sortir pour de bon.
La porte se referma derrire lui avec un petit cliqutement.
Francesca demeura un moment immobile, campe sur le sol de marbre immacul. Il
trouvait ses cheveux splendides ? Elle lui plaisait ? Comment pouvait-il penser ce genre de
chose d'elle ?
Comment faisait-il pour l'embrasser jusqu' ce qu'elle ait l'impression de frler la
combustion spontane, et pour la regarder l'instant suivant sans paratre lui accorder plus
d'attention qu'au papier peint ?
Elle prit une longue douche qu'elle savoura plus qu'elle ne s'y tait attendue. La cabine aux
parois de verre se remplit trs vite de vapeur, et les volutes blanches envelopprent sa peau
nue d'une caresse moelleuse. C'tait agrable d'utiliser son savon de fabrication artisanale, de
s'imprgner de sa senteur frache et pice. Heureusement, elle s'tait pile avant de se
rendre au McGill's ; ses jambes taient donc impeccables.
Allait-il la mettre nue avant de la fesser ?
Bien sr que oui, il va le faire, se rpondit-elle elle-mme en faisant coulisser le panneau
de verre avant de sortir de la cabine de douche. Il lui avait clairement fait comprendre qu'il la
voulait nue sous la robe. Elle sortit le vtement de la housse de plastique. La robe tait-elle
neuve ? Est-ce qu'il en avait en rserve pour toutes les femmes qui le distrayaient ? Cette
ide la mit mal l'aise, et elle la repoussa vite, se concentrant plutt sur la recherche de ce
dont elle avait besoin : un peigne, du dodorant, me brosse dents neuve, un flacon de bain
de bouche. Tout tait si impeccablement rang dans les compartiments qu'elle prit soin
ensuite de replacer chaque objet sa place initiale.
Elle plia ses vtements et les posa sur un tabouret rembourr avant de s'immobiliser
devant le miroir, fascine par l'image que la glace lui renvoyait. Ses yeux semblaient
immenses au milieu de son visage ple, et ses cheveux humides lui retombaient sur les
paules.
Elle avait l'air un peu effraye.
Peut-tre que je suis vraiment effraye, songea-t-elle fivreusement. Il avait dit qu'il allait
lui donner la fesse et que a ferait mal. Elle avait consenti ces pratiques sexuelles
dviantes parce qu'elle le dsirait tellement...
La question tait : qu'est-ce qui l'emporterait, la peur qu'elle prouvait, ou son dsir de
sduire Ian ?
Elle s'avana vers la porte de la salle de bains et l'ouvrit. Ian tait assis sur le divan, une
tablette lectronique sur les genoux. Il reposa l'appareil sur la table quand Francesca pntra
dans la chambre.
J'ai allum la chemine pour vous, fit-il en la scrutant de la tte aux pieds.
Il portait toujours les mmes vtements qu'au moment o il avait fait irruption dans le
salon de tatouage un pantalon gris sombre et une chemise rayures bleues et blanches
dboutonne sur le haut.
Ses longues jambes taient ngligemment croises, et il semblait extraordinairement
dtendu. La lumire du feu se refltait dans ses yeux.
Il ne fait pas chaud, ce soir. Je ne voulais pas que vous attrapiez froid.
Merci, souffla-t-elle d'une voix gauche et hsitante.
Otez la robe, Francesca, fit-il calmement.
Le cur de la jeune femme manqua un battement Elle dfit la ceinture en tremblant et fit
glisser le vtement sur ses paules.
Asseyez-vous l, dit-il en dsignant une chaise devant elle, sans la quitter un instant du
regard.
Elle dposa la robe sur le dos de la chaise et s'assit en priant pour que le sol s'ouvre sous
ses pieds et l'engloutisse, gardant les yeux obstinment baisss sur les motifs compliqus du
tapis persan, comme s'ils renfermaient le secret ultime de l'univers.
Regardez-moi.
Elle releva la tte. Dans ses iris, elle discerna quelque chose qu'elle n'avait encore jamais
vu.
Vous tes exquise. tourdissante. Pourquoi baissez-vous la tte comme si vous aviez
honte ?
Elle avala pniblement sa salive. L'embarrassante vrit fusa sans prvenir entre ses lvres
:
Je... avant, j'tais grosse. Jusqu' mes dix-neuf ans, environ. Je crois que j'ai toujours
l'impression d'habiter mon ancien corps, murmura-t-elle d'une voix peine audible.
Une expression de comprhension soudaine apparut sur les traits vigoureux de Ian.
Ah... je vois. Et pourtant, vous semblez parfois trs sre de vous.
Ce n'est pas de l'assurance. C'est un rflexe de dfense.
Oui, souffla-t-il. Je comprends, maintenant. Mieux que vous ne pourriez le croire. C'est
votre faon de dire au monde d'aller se faire foutre quand quelqu'un a l'outrecuidance de
poser le regard sur vous.
Il sourit et reprit :
Vous avez du caractre, Francesca. Mais il est temps que vous appreniez aussi quel
point vous tes belle. Vous devez toujours contrler la force qui est en vous sans jamais la
laisser s'altrer ou, pire, permettre aux autres de la contrler votre place. Venez devant moi,
je vous prie.
Elle s'avana vers lui, les genoux tremblants, et ses yeux s'agrandirent de confusion quand
il se saisit d'un petit pot pos sur le divan ct de lui. Le rcipient tait de taille si modeste,
et Francesca tait tellement hypnotise par Ian, qu'elle ne l'avait pas remarqu auparavant. Il
dvissa le couvercle et dposa une noisette d'paisse crme blanche sur son majeur.
Relevant les yeux, il remarqua l'expression abasourdie de Francesca.
C'est un stimulant clitoridien. a augmente la sensibilit des terminaisons nerveuses.
Oh... d'accord, rpondit-elle sans mme s'en rendre compte.
Le regard de Ian descendit vers le creux de ses cuisses. Elle brlait d'excitation, comme si
ce regard tait dj un stimulant suffisant.
J'ai l'habitude d'tre trs goste quand mon plaisir est en jeu.
Que voulez-vous dire ?
Je donne toujours du plaisir une soumise si elle me satisfait. Mais je ne me soucie pas
de savoir si elle en ressent ou non pendant sa punition. Elle doit d'abord l'endurer pour
recevoir sa rcompense. Cependant, avec vous, je vais... changer un peu mes habitudes.
Une soumise ? demanda-t-elle faiblement, incapable de penser autre chose qu' ce
mot.
Oui. Je suis un dominant sexuel, bien que je n'aie pas besoin de pratiquer le bondage ou
la domination pour parvenir la jouissance. C'est une prfrence, pas une ncessit.
Il s'avana sur le canap de manire ce que sa tte sombre se retrouve quelques
centimtres du ventre de Francesca, son nez proche de son sexe. Elle le vit respirer lentement
et fermer quelques instants les yeux.
Si douce, murmura-t-il d'une voix un peu gare.
Elle n'eut pas le temps de se prparer ce qui arriva ensuite. Il plongea hardiment son
majeur en elle et appliqua rudement la crme sur son clitoris, provoquant une raction...
lectrique. Elle se mordit la lvre infrieure pour s'empcher de crier sous l'effet de l'intense
plaisir qui la traversait.
Ce soir, je vous punirai, et je ne ferai pas semblant. Je vais y prendre du plaisir.
Beaucoup de plaisir. Seulement, je veux que vous en prouviez aussi. C'est votre nature qui
en dcidera en majeure partie, mais cette crme aidera orienter les choses dans le bon sens,
dit-il en continuant masser son clitoris.
Il la scruta de nouveau.
Je ne veux pas que cela reprsente vos yeux une exprience traumatisante. Je ne veux
pas que vous redoutiez mes chtiments. En d'autres termes, je ne veux pas que vous ayez
peur de moi, Francesca.
Sa main interrompit son geste, et il contempla de nouveau son entrecuisse. Ses narines
frmirent, et son expression se durcit tandis qu'il se relevait brusquement.
Venez par l.
Elle le suivit prs du feu, et ses jambes faillirent se drober sous elle quand elle vit ce qu'il
venait de prendre sur la tablette de la chemine : une longue tapette noire.
Approchez-vous davantage. Je veux que vous la voyiez bien.
Il leva la tapette pour la montrer Francesca.
Je les commande directement au fabricant. J'ai reu celle-ci la semaine dernire. Et
mme si j'tais alors rsolu ne jamais l'utiliser sur votre corps, je l'ai fait fabriquer en
pensant vous, Francesca.
Les yeux de la jeune femme s'agrandirent.
Je vais vous mettre la peau en feu avec ce ct-la, dit-il calmement en lui montrant la
face en cuir de la tapette.
Un liquide moite afflua entre les cuisses de la jeune femme. Ian tordit le poignet, projeta la
tapette de quelques dizaines de centimtres dans l'air, et la rattrapa par le manche. Francesca
l'observait, fascine. L'autre face tait recouverte de fourrure brun sombre.
Et j'apaiserai le feu avec ce ct-ci.
La bouche de Francesca devint sche, et son esprit s'embua.
Nous allons commencer tout de suite. Penchez-vous et placez vos mains sur vos genoux.
Elle fit ce qu'il lui demandait, le souffle haletant.
Il se rapprocha et se posta debout, ct d'elle.
Elle lui lana un coup d'il anxieux. Le feu qui brlait dans l'tre faisait luire ses prunelles
tandis qu'il laissait errer son regard sur son corps.
Seigneur... vous tes magnifique. a me frustre que vous ne le voyiez pas, Francesca. Ni
dans les miroirs, ni dans les yeux des autres hommes, ni mme au fond de vous-mme.
La jeune femme battit des paupires quand il tendit la main pour lui caresser d'abord le
dos, puis la hanche et la fesse gauche. Une onde de plaisir la traversa.
Vous mritez vraiment d'tre punie pour avoir os seulement imaginer abmer cette
peau. Si lisse. Si blanche. Si douce.
Il fit courir ses longs doigts dans le sillon de ses fesses, et Francesca ferma les paupires de
toutes ses forces. Une motion troublante monta du fond de sa gorge, l'emplissant de
confusion. Ian avait l'air sincrement merveill.
Elle ne desserra pas les cils avant qu'il cesse de la caresser.
cartez les jambes et cambrez le dos. J'aurai ainsi le plaisir de pouvoir contempler vos
jolis seins pendant que je vous corrigerai.
Elle ajusta sa position, arquant le dos. Ian tendit la main pour soupeser l'un de ses seins,
lui arrachant un bref hoquet. Il pina lgrement le tton, et elle frissonna de plaisir.
Maintenant, flchissez trs lgrement les genoux. a vous aidera supporter les coups.
Voil. C'est parfait. C'est cette position que j'exigerai de vous chaque fois que je vous
administrerai des tapes.
Elle regretta le contact de ses doigts agiles et de sa paume chaude sur sa poitrine quand il
remonta la main jusqu' son paule.
Vous avez une peau extrmement dlicate. Je vous donnerai quinze coups.
La face en cuir de la tapette s'abattit sur ses fesses. Elle carquilla grands les yeux et laissa
chapper un cri. Le bref clair de douleur se transforma rapidement en sensation de brlure.
a va ?
Oui, rpondit-elle avec sincrit en se mordant la lvre infrieure.
Il frappa de nouveau, visant cette fois la douce courbe du bas de ses fesses. Le coup la fit
lgrement vaciller en avant, et il la rattrapa par l'paule.
Vous avez une croupe splendide, murmura-t-il d'une voix rauque et grave. (Il lui donna
un nouveau coup.) Vous avez raison de pratiquer la course de fond. Vos fesses sont la fois
fermes et pulpeuses. L'idal pour la fesse.
Le coup de tapette suivant arracha Francesca un souffle heurt. Comment tait-il
possible que la sensation de brlure sur son postrieur commence se communiquer son
clitoris ? Un fourmillement brlant envahissait lentement le fragile bouton de chair. Ian
frappa encore, et elle ne put retenir un cri.
Vous avez mal ? demanda-t-il en suspendant son geste.
Elle hocha la tte.
Si c'est trop, vous pouvez me le dire. J'adoucirai mes coups.
Non... a va aller, rpondit-elle en tremblant.
Il se rapprocha d'elle sans prvenir et lui saisit les hanches avant de coller son bas-ventre
contre son flanc. Elle hoqueta au contact du membre imposant qui pulsait contre sa chair
travers le tissu.
Voil, chuchota-t-il. Voil quel point vous me plaisez.
Les joues de Francesca s'enflammrent, et la chaleur au creux de son entrejambe
s'intensifia.
Ian recula et abattit la tapette encore et encore, avec des claquements secs. Au moment o
il s'apprtait lui infliger le dernier coup, elle avait dj l'impression que ses fesses taient en
feu. Il remarqua peut-tre le tremblement de ses cuisses car il affermit sa prise sur son
paule et murmura :
Gardez la position.
Il colla ensuite la surface de cuir contre sa chair chauffe au rouge, comme s'il calculait
calmement la trajectoire de son coup final. Il leva la tapette et frappa.
Un cri aigu jaillit de la gorge de Francesca. Il la rattrapa alors qu'elle tombait presque en
avant.
Chhh, la consola-t-il. Cette partie-l est finie.
Elle clata en sanglots quand il retourna la palette et commena caresser son postrieur
endolori avec la fourrure. C'tait si bon... La sensation de fourmillement dans son clitoris
s'tait transforme en brlure exquise et suppliante. Elle mourait d'envie de se toucher, de se
caresser. Cette excitation tait-elle due aux coups de tapette de Ian, ou la crme
sensibilisante qu'il avait applique ? Le simple souvenir de son doigt long et pais
frictionnant son clitoris avec la crme la fit gmir. Elle se sentait fbrile. Il cessa soudain de
caresser ses fesses avec la fourrure et l'incita se redresser en faisant pression sur son
paule.
Il la fit se tourner vers lui. Elle se sentait dans un tat trange... hbte... excite. Il avait
lch la tapette. Elle resta debout devant lui, bouleverse, tandis qu'il cartait doucement les
cheveux de son visage.
Vous vous tes extrmement bien comporte, Francesca. Mieux que je n'osais
l'imaginer, chuchota-t-il en lui caressant la joue de son pouce. C'est la douleur qui vous fait
pleurer ?
Elle secoua la tte.
Pourquoi, alors, ma beaut ?
La gorge de Francesca tait trop noue pour lui permettre de rpondre. Qui plus est, elle
n'aurait su quoi dire, mme si elle l'avait pu.
Il entoura son visage de ses paumes. Avec son pass d'adolescente en surpoids et sa taille
inhabituellement grande pour une femme, elle se sentait d'habitude gauche et disgracieuse.
Mais Ian tait nettement plus massif qu'elle. ct de lui, elle se sentait frle, dlicate...
fminine. Elle se rendit soudain compte qu'il tremblait lgrement.
Ian... Vos mains tremblent, dit-elle dans un souffle.
Je sais. Je pense que c'est parce que je me Contiens depuis trop longtemps. Francesca, je
fais tout ce que je peux pour ne pas vous prendre dans la seconde et vous baiser
sauvagement.
Elle cligna les yeux, abasourdie. Il parut se rendre compte de sa raction et ferma un
instant les paupires, comme s'il regrettait ce qu'il venait de dire.
Maintenant, j'aimerais vous fesser sur mes genoux. a me procurerait un plaisir
immense de vous avoir ainsi sur mes cuisses, ma merci. Or vous tes trs dlicate. Si la
tapette vous a trop durement prouve, je n'insisterai pas pour que nous poursuivions.
Non. Je veux continuer, murmura-t-elle d'une voix rauque.
Elle le regarda fixement. Je veux vous faire plaisir, Ian.
Il battit des paupires et continua lui caresser les joues, la dvisageant impitoyablement.
Trs bien, dit-il finalement d'un ton rsign. Approchez-vous d'abord de la chemine.
Elle le suivit mais il bifurqua vers la salle de bains.
Je reviens tout de suite, fit-il.
Elle l'attendit prs du feu. La chaleur du foyer se mlait l'embrasement sexuel de son
corps, produisant en elle un trange mlange de lassitude et d'effervescence. Ian revint au
bout d'un moment avec un peigne dans la main.
Laissez-moi vous brosser les cheveux pour qu'ils schent au coin du feu.
Elle lui jeta un regard perplexe. Il rpondit par un petit sourire penaud.
J'ai besoin de faire quelque chose qui me dtende.
Elle lui rendit son sourire en tremblant et lui tourna le dos quand il lui en fit signe. Le
mlange paradoxal d'apaisement et de fbrilit qu'elle ressentait s'accentua quand Ian
ordonna doucement sa chevelure, cartant les mches entre ses doigts avant de passer
lentement et sensuellement le peigne travers ses cheveux. La tte de Francesca s'affaissa
sur ses paules.
Vous avez sommeil ? Souffla-t-il derrire elle.
Le simple son de sa voix semblait suffire faire durcir ses ttons. La sensation de chaleur
cuisante dans son clitoris s'intensifiait. Maudite crme.
Non, pas vraiment. C'est juste trs agrable.
Il fit glisser le peigne depuis ses racines jusqu'aux pointes humides qui retombaient sur sa
poitrine.
Je n'ai jamais vu des cheveux comme les vtres. De l'or rose, fit-il d'une voix grave et un
peu rauque.
Il caressa ses fesses rougies, la faisant frmir, et soupira comme pour s'avouer vaincu.
Ce n'tait pas exactement la bonne mthode pour me calmer, en fin de compte. Autant
continuer. Suivez-moi.
Il s'avana jusqu'au divan et s'assit sur le coussin central, les cuisses lgrement cartes.
D'un simple regard, il dsigna ses genoux Francesca. Cette dernire recouvra brutalement
ses esprits. Elle tait nue, il tait habill, et elle n'avait aucune ide de ce qu'elle tait cense
faire. Elle avala nerveusement sa salive en remarquant l'rection vidente sous le tissu du
pantalon de Ian. Le contour de son sexe durci formait une bosse sur le flanc intrieur de sa
cuisse droite. Comme hypnotise par cette vision, elle grimpa sur le divan quatre pattes et
se laissa tomber sur les cuisses de Ian.
Il l'aida doucement en guidant ses hanches de sa main pour qu'elle prenne la position qu'il
dsirait.
Quand ce fut fait, les seins de Francesca taient presss contre l'extrieur de la cuisse
gauche de Ian, son ventre pos sur ses genoux, ses fesses recourbes un dessus de sa cuisse
droite. Il fit courir sa main sur son dos, ses hanches, ses fesses, et elle sentit son sexe se
dresser sous ses ctes.
C'est l'exacte position que je veux que vous preniez pour une fesse sur les genoux. Vous
avez compris ? demanda-t-il tout en la caressant.
Une sensation de chaleur et de fourmillement, qui n'tait pas dsagrable, irradiait
toujours sur sa peau.
Oui, fit-elle en hochant la tte.
Des mches lui retombrent sur le visage.
Autre chose..., commena-t-il.
Il lui releva doucement les cheveux et les runit d'un ct, puis appuya lgrement sur sa
nuque de manire ce que le front de la jeune femme soit coll contre la douce toffe du
divan.
Je vous mettrai souvent un bandeau avant de vous fesser je veux que vous soyez
totalement concentre sur ma main, sur les sensations lies votre punition... sur ma propre
excitation. Or, pour l'instant, je vous demande juste de garder le visage baiss et de fermer les
yeux.
Elle serra les paupires et laissa chapper un petit gmissement. Il se figea.
Qu'y a-t-il ? a vous excite ?
Je... je crois que oui, rpondit-elle, trouble.
Elle supposa qu'il avait raison. Une bouffe de dsir s'tait empare d'elle quand il avait
prononc ces mots. Comment cela tait-il possible ?
Ce doit tre la crme, murmura-t-il. (Elle sentit qu'il souriait, et il reprit :) Maintenant,
ne bougez plus, ou je vous frapperai plus durement.
Il leva la main et tapa sa fesse droite, puis la gauche, puis encore la droite en une
succession de coups rapides. Le bruit des claquements sur sa chair rsonnait dans les oreilles
de Francesca mme quand il s'interrompait.
Il avait de toute vidence beaucoup d'exprience en la matire : ses coups taient prcis,
nets, rapides, mais pas prcipits. Francesca sentit une sensation de chaleur embraser sa
chair, diffrente de celle qu'elle avait ressentie quand il avait utilis la tapette.
La main de Ian engendrait une lente et frmissante brlure qui se diffusait ensuite le long
de sa peau. Chaque fois qu'il abattait la main, elle sentait son membre durci se dresser contre
son ventre, et les muscles de ses cuisses se tendre. La paume de Ian devint progressivement
aussi chaude que la chair de Francesca. Son sexe en rection dgageait une autre sorte de
chaleur qui se communiquait la peau de la jeune femme travers l'toffe du pantalon.
Il gifla la courbe infrieure de sa croupe, puis empoigna soudain brutalement ses deux
fesses tout en arquant le bassin, plaquant le bas-ventre de Francesca contre sa hampe rigide.
Le gmissement tremblant de la jeune femme se mla au rugissement rauque de l'homme
d'affaires. Son clitoris s'embrasa sous la pression et la conscience aigu du sexe dress de Ian,
tout prs. Elle se sentait confuse, fbrile comme si un feu intrieur la dvorait, consume
par le dsir de prolonger ce contact entre leurs deux intimits et l'envie de se redresser pour
enfourcher ce membre telle une dprave. Il rabaissa les hanches et recommena la fesser.
Quand il s'interrompit aprs une rapide srie de coups pour la ptrir une nouvelle fois,
Francesca perdit tout contrle d'elle-mme.
Oh ! Ian... non. Je suis dsole, je n'en peux plus, geignit-elle en se tordant sur ses
genoux.
Il se figea, une main toujours enfonce dans la chair de ses fesses.
C'est trop douloureux ? Senquit-il d'une voix crispe.
Non. C'est juste que je ne peux plus rester immobile. Je brle !
Durant quelques secondes prouvantes, il ne bougea pas. Puis, il relcha sa pression et
glissa une main entre ses cuisses. Elle laissa chapper un rle d'agonie quand ses doigts
frlrent sa fente. Sa puissante rection se dressa contre son ventre.
Dieu du ciel... vous tes trempe, l'entendit-elle murmurer.
Il avait l'air estomaqu. Elle tait trop excite pour ressentir de la gne... les choses taient
alles trop loin. Elle hoqueta quand il passa une main sous l'une de ses paules pour l'aider
se redresser.
Venez l, lui ordonna-t-il d'une voix dure.
Oh non. L'avait-elle de nouveau irrit ? Elle se remit genoux sans son aide.
Enfourchez mes cuisses.
Les cheveux prsent presque secs de Francesca s'parpillrent autour de ses paules
quand elle excuta son ordre. Il lui saisit les hanches et replaa sa croupe brlante au-dessus
de ses cuisses. Puis il lui lissa la chevelure en arrire, exposant sa poitrine. Le regard vrill
sur ses seins, il esquissa un petit sourire tordu.
Regardez-moi a..., souffla-t-il. Vos ttons sont presque aussi rouges que vos fesses. (Il
releva les yeux vers son visage.) Comme le sont aussi vos joues, Francesca... et vos lvres.
Vous aimez tre punie, ma beaut. Et a me plat au plus haut point. a va tre si bon de
baiser votre petite chatte humide...
Le sexe de la jeune femme se contracta douloureusement. Ian posa ses larges mains sur
ses hanches et baissa la tte, attirant la poitrine de Francesca vers lui. Elle se crispa,
s'attendant retrouver les sensations de l'exquise morsure qu'il avait inflige ses seins dans
la salle d'escrime. Mais au lieu de cela, il saisit doucement son tton entre ses lvres, suotant
sa pointe durcie, avant de rpter l'opration avec l'autre.
Si parfaite..., chuchota-t-il.
Ses mains s'activrent rapidement, et l'excitation de Francesca s'intensifia encore quand
elle comprit qu'il tait en train de dboutonner son pantalon. Il continuait embrasser le
creux de sa poitrine, lchant et embrasant sa chair avec sa langue chaude et humide de salive.
Elle sentit son clitoris saillir, envahi d'un dlicieux tourment. Elle n'arrivait plus se
contrler. Elle se pendit dsesprment son cou et laissa chapper un gmissement fivreux
et sauvage. Il releva la tte et contempla son visage.
Tout va bien..., fit-il d'une voix douce, les yeux flamboyants de dsir.
Elle gmit encore quand il glissa un doigt entre les petites lvres de son sexe moite. Il
effleura son clitoris. Ce fut tout. Un seul contact.
Elle explosa littralement.
Elle tait peine consciente de ce qui lui arrivait. Durant quelques instants, le dferlement
de plaisir oblitra la totalit de son tre.
Pendant une seconde ou deux, il continua caresser son clitoris tandis que les ondes de
jouissance se rpercutaient travers tout son corps. Perdue dans un ocan de jouissance, elle
l'entendit pousser un juron et sentit qu'il la serrait plus fort, comme s'il voulait absorber les
vagues de son orgasme. Elle se convulsa contre lui, vaincue par le tourbillon de plaisir.
Il bougea la main. Elle cria quand il introduisit doigt pais dans son vagin.
Quelques secondes plus tard, elle se retrouva tendue sur le divan ct de Ian, qui la
toisait svrement pendant qu'elle essayait de reprendre son souffle.
Vous n'avez jamais connu d'homme. N'est-ce pas ?
Elle se figea. a ne ressemblait pas vraiment une question. Plutt une accusation.
Non, fit-elle en recommenant haleter pourquoi la regardait-il ainsi ? Je vous l'ai dit.
La colre se mit crpiter dans ses yeux.
quel moment, prcisment, m'avez-vous dit que vous tiez vierge, Francesca ? Parce
que je doute sincrement qu'une information aussi essentielle ait simplement gliss hors de
mon esprit.
Devant la... juste avant que nous entrions dans la chambre, rpondit-elle en dsignant
stupidement la porte de la pice. Vous m'avez demand si j'avais dj fait ce genre de choses,
et je vous ai dit que...
Je vous demandais si vous aviez dj laiss un homme vous punir. Vous dominer. Pas...
pas vous baiser, bon sang !
Il se releva brusquement et commena faire les cent pas devant la chemine, les doigts
crisps dans ses cheveux. Il semblait compltement perdu.
Ian, qu'est-ce qui...
Je savais que c'tait une erreur, marmonna-t-il d'un ton amer. Qui croyais-je tromper
avec a ?
Francesca en resta bouche be. Il considrait que tout cela avait t une erreur ? Il la
rejetait ? Maintenant ? Un flot d'images et de sensations submergea son cerveau, des
souvenirs de l'excitation dbride qu'elle avait ressentie, de son abandon total au dsir de son
partenaire.
Elle se souvint alors d'une exprience cuisante de son adolescence, parmi celles qu'elle
aurait prfr oublier ce soir-l. Rien ne peut causer plus de honte que d'exprimer un besoin,
d'accepter de se montrer vulnrable et de voir ensuite cette motion pure et sincre
brutalement repousse comme un mprisable dchet.
Des larmes lui brouillrent la vue, et elle tendit dsesprment la main vers la couverture
en cachemire jete sur le rebord du divan. Elle en enveloppa son corps nu avant de se relever.
Ian se figea.
Qu'est-ce que vous faites ?
Je m'en vais, rpondit-elle en s'avanant vers la salle de bains.
Francesca, arrtez-vous tout de suite, ordonna-t-il d'un ton calme, svre.
Elle s'immobilisa et soutint son regard. Une bouffe de colre et de douleur monta dans sa
poitrine, lui nouant la gorge.
Vous venez juste de perdre le droit de me donner des ordres.
Il plit.
Elle se dtourna temps pour qu'il ne puisse pas voir les larmes jaillir de ses yeux. Elle
avait dj dvoil bien assez de sa vulnrabilit Ian Noble.
Plus qu'assez pour le reste de sa vie.
Deux jours plus tard, Ian regardait par la fentre de sa limousine tandis que son chauffeur
Jacob Suarez bifurquait le long d'une rue borde de maisons cossues en brique. D'aprs l'un
de ses associs, David Feinstein avait hrit cette rsidence de ses parents, Julia et Sylvester,
mais il aurait tout aussi bien pu se permettre d'acheter lui-mme cette maison situe dans le
quartier ais de Wicker Park. La galerie d'art Feinstein marchait trs bien. Apparemment, le
colocataire de Francesca pouvait se targuer de possder la fois un got artistique trs sr et
un solide sens des affaires, ainsi que des manires tranquilles, raffines et mesures, qui
plaisaient beaucoup aux riches amateurs d'art.
Ian devait admettre qu'il avait t soulag d'apprendre que David - ou Davie , comme
l'appelait Francesca tait gay. Non que les prfrences sexuelles de ses colocataires aient
une grande importance, se dit-il pendant que Jacob ralentissait. Il avait eu la preuve
clatante, deux nuits plus tt, que les colocataires de la jeune femme ne franchissaient
aucune limite condamnable.
Il avait eu aussi la preuve clatante d'avoir franchi, lui, une limite condamnable, songea-t-il
amrement en fronant les sourcils au moment o Jacob lui ouvrait la portire.
L'image d'une Francesca effondre quittant sa chambre n'avait cess de le tourmenter
depuis ce moment. Il l'avait regarde s'enfuir de l'appartement en fulminant contre lui-
mme, brlant d'envie de l'arrter mais conscient, en voyant l'expression obstine qui
dformait son beau visage, qu'elle refuserait de l'couter. Il lui en voulait de les avoir mis
dans une telle situation, et il s'en voulait de n'avoir vu que ce qu'il dsirait voir.
Oui, il savait pertinemment avant de commencer qu'elle tait innocente, mais pas
innocente ce point-l. Il savait qu'il ferait mieux de la laisser tranquille. Pour le bien de tout
le monde.
Et pourtant, il tait l.
Il frappa la porte d'entre vert sombre avec un mlange de rsignation et de
dtermination. D'o lui venait cette trange obsession ? tait-ce parce que Francesca avait
captur son reflet son insu dans un de ses tableaux, des annes plus tt ? La vision qu'elle
avait eue de lui, bien que fugitive, tait drangeante.
Il avait envie la fois de la punir et de la possder pour lui faire payer son erreur.
Il avait su par Mme Hanson que Francesca n'tait pas revenue peindre chez lui. Le fait
qu'elle vite sa prsence l'avait rendu furieux une colre irrationnelle, or la logique
semblait impuissante face au tumulte de ses motions. l'instant o il frappait la porte, Ian
n'avait toujours pas dcid s'il venait pour s'excuser et assurer Francesca qu'il ne
l'importunerait plus jamais, ou pour la convaincre par tous les moyens de le laisser la toucher
nouveau.
Ce conflit intrieur permanent l'avait mis dans un tel tat d'irritabilit que mme Lin, qui
savait d'ordinaire mieux que personne temprer ses humeurs, le fuyait prsent comme la
peste.
La porte d'entre s'ouvrit, et un homme brun de taille moyenne, qui paraissait plus jeune
que ses vingt-huit ans, le toisa sombrement. Il devait tre rentr rcemment de la galerie, car
il tait vtu d'un costume trois-pices gris anthracite.
Je viens voir Francesca, annona Ian.
Davie jeta un regard inquiet l'intrieur de la maison, puis finit par hocher la tte et
reculer, invitant Ian entrer. Il le conduisit jusqu' un petit salon dcor avec got.
Asseyez-vous. Je vais la chercher.
Ian opina et dboutonna sa redingote avant de s'asseoir. Il ramassa distraitement un
catalogue pos sur le fauteuil ct de lui, l'afft toutefois du moindre son perceptible dans
la vaste maison. Pas de bruit de pas dans les escaliers. Certaines pages du catalogue taient
cornes, comme si quelqu'un en avait rcemment tudi le contenu. C'tait un listing de
tableaux qui seraient prochainement vendus aux enchres dans une salle des ventes locales.
Davie rapparut dans le salon une minute plus tard. Ian releva la tte et abandonna sa
lecture.
Elle est occupe, fit Davie, l'air vaguement mal l'aise.
Ian hocha lentement la tte. Il n'tait pas surpris.
Pourriez-vous, je vous prie, l'informer que j'attendrai jusqu' ce qu'elle soit libre ?
La pomme d'Adam de Davie saillit ostensiblement sur sa gorge tandis qu'il avalait sa salive.
Il quitta le salon sans rien dire et revint une minute plus tard, toujours sans Francesca. Il
adressa Ian une grimace d'excuse. Ce dernier se leva et sourit.
Vous n'y tes pour rien, le rassura-t-il. (Il lui tendit la main.) Au fait, je suis Ian Noble.
Nous n'avons jamais t prsents dans les rgles.
David Feinstein, rpondit Davie en lui serrant la main.
Accepteriez-vous de me tenir un peu compagnie pendant que je patiente ?
Davie semblait quelque peu dstabilis en voyant que Ian s'apprtait vritablement
rester, mais il tait trop poli pour protester. Il s'installa sur une chaise de l'autre ct de la
table basse.
Je peux comprendre qu'elle soit bouleverse cause de moi, reprit Ian en croisant les
genoux et en saisissant nouveau le catalogue.
Elle n'est pas bouleverse.
Ian releva les yeux d'un air surpris.
Elle est furieuse, poursuivit Davie. Et blesse. Je ne l'ai jamais vue aussi blesse.
Un silence lourd s'abattit sur eux. Pendant plusieurs secondes, aucun des deux hommes ne
reprit la parole.
Je me suis mal comport envers elle, admit finalement Ian.
Dans ce cas, vous devriez avoir honte de vous, rpliqua Davie d'une voix calme o perait
malgr tout une nuance de colre.
Ian se souvint d'avoir dit quelque chose de semblable Davie et aux deux autres
colocataires de Francesca dans le salon de tatouage.
J'ai honte de moi.
Il ferma un instant les yeux. La fracheur de la peau de Francesca lui revint en mmoire, sa
douceur aussi. Le souvenir de son sexe s'tait log dans son cerveau comme un virus tenace
qui ne faisait que prolifrer quand il essayait de le repousser. Les poils pubiens d'or rose,
soyeux, entre ses cuisses blanches, les petites lvres crmeuses, pulpeuses, et la fente la plus
lisse et la plus troite qu'il ait jamais touche. Il se revit en train de la fesser, se rappelant le
plaisir qu'il y avait pris... qu'elle y avait pris, elle.
Malheureusement, continua-t-il, ma honte n'est pas suffisante pour me retenir loin
d'elle. Je commence penser que rien n'y suffirait.
Davie semblait estomaqu. Il se racla la gorge et se releva.
Je vais peut-tre monter voir o elle en est du... travail qui l'occupe.
Ne vous drangez pas. Elle est partie, murmura Ian.
Davie frona les sourcils et s'arrta au milieu du salon.
Qu'est-ce que vous voulez dire ?
Elle a fil par la porte de derrire il y a peu prs trente secondes, si je ne me trompe
pas, rpondit Ian en feuilletant distraitement les pages du catalogue.
Il profita de l'hsitation de Davie pour lui montrer l'objet.
C'est vous ?
Davie hocha la tte.
Je crois que je devine ce qui vous intresse dedans. Quand Francesca a-t-elle peint ce
tableau ?
Le jeune homme trcit les yeux et sembla retrouver ses esprits.
Il y a environ deux ans. Je l'ai vendu chez Feinstein l'anne dernire. Je suis content
qu'il soit nouveau sur le march des enchres. Je voudrais le racheter, le revendre ensuite
sa vritable valeur et verser la diffrence Francesca. (Il prit un air soucieux.) Elle a t
oblige de cder beaucoup de ses toiles pour presque rien, ces dernires annes. Et je
n'imagine mme pas quel genre de somme drisoire elle obtenait de son travail avant qu'elle
me rencontre. Francesca galrait depuis des annes quand nous nous sommes connus. Je n'ai
peut-tre pas t capable de vendre ses uvres au prix qu'elles mritent, car elle est encore
relativement peu connue mais, au moins, je lui en obtiens plus que la valeur d'un sac de
courses. (Il dsigna le catalogue d'un hochement du menton.) Si j'arrive rcuprer ce
tableau-l, je suis convaincu de pouvoir le revendre un excellent prix. Francesca commence
se faire un nom dans le milieu. Je suis sr que votre concours et la publicit qui l'a
accompagn y ont contribu.
Ian se redressa et reboutonna son manteau.
Je pense que votre soutien indfectible y est aussi pour quelque chose. Vous tes un
vritable ami pour elle. Pourriez-vous me laisser votre carte de visite ? Il y a quelque chose
dont j'aimerais vous parler, mais je suis en train de me mettre en retard pour une runion.
Davie sembla hsiter quelques instants, puis fouilla dans sa poche avec l'air d'un homme
qui se retient d'avouer quelque chose.
Merci, dit Ian en prenant la carte.
Francesca est une personne merveilleuse. Je crois... je crois qu'il vaudrait mieux que
vous n'essayiez pas de la revoir.
Ian scruta l'expression inquite, toutefois dtermine, de Davie pendant quelques
secondes. Le jeune homme dtourna le regard, gn.
Avec ses yeux emplis de douceur, l'ami de Francesca devinait sans doute bien davantage
qu'il ne le montrait ses clients fortuns. Une bouffe d'amertume monta dans la poitrine de
Ian quand il songea la muflerie dont il faisait preuve par contraste.
Vous avez parfaitement raison, lcha Ian en se dirigeant vers la porte, incapable de
dissimuler la pointe de rsignation qui perait dans sa voix. Et si j'tais un homme meilleur,
je suivrais votre conseil.
Voil quoi elle en tait rduite : venir travailler la nuit comme une voleuse. Le tableau
l'avait irrsistiblement rappele lui, malgr les circonstances pnibles de la situation.
Francesca mlangeait ses couleurs avec dextrit sous la lueur d'une petite lampe qu'elle
avait pose sur un bureau, cherchant capturer la nuance exacte du ciel de minuit avant que
la lumire n'volue. Le reste de la pice tait plong dans la pnombre afin qu'elle distingue
le mieux possible les gratte-ciel ombreux et scintillants qui se dessinaient sur le firmament
velout de l'obscurit.
Elle s'arrta brusquement et jeta un coup d'il anxieux la porte ferme de l'atelier, le
cur battant au milieu du silence absolu. Les ombres parurent s'paissir et se dformer au
fond de la pice, trompant sa vue. Mme Hanson lui avait assur qu'elle serait seule dans la
rsidence, cette nuit. Ian tait Berlin, et la vieille gouvernante, partie rendre visite une
amie en banlieue.
Pourtant, aucun moment Francesca ne s'tait sentie seule depuis qu'elle tait sortie de
l'ascenseur pour pntrer sur le territoire de Ian.
Un endroit pouvait-il tre hant par une personne pourtant bel et bien vivante ? C'tait
comme si la prsence de Ian flottait dans le luxueux appartement, frlant l'esprit de
Francesca, caressant sa peau, la faisant frissonner sous sa caresse immatrielle.
Compltement dbile, se morigna-t-elle en imprgnant son pinceau de peinture avant de
jeter sur la toile de longs traits amples et nergiques. Cela faisait maintenant quatre nuits
qu'elle s'tait tenue nue et vulnrable dans la chambre coucher de Ian. Il avait essay de la
recontacter. Il l'avait appele plusieurs fois sur son portable, et il y avait eu cet pisode
embarrassant la colocation, quand elle avait t oblige de s'enfuir par la porte de derrire,
comme une adolescente prise en faute. L'ide de le revoir la plongeait dans un tat de
panique absolue... et de frayeur.
Tu as peur de ce qui va arriver si tu le revois, si t u l'coutes. Tu as peur de finir par le
supplier pitoyablement de terminer ce qu'il a commenc l'autre nuit.
Elle serra plus fort la palette de pigments. Jamais. Jamais plus elle ne s'abaisserait devant
ce salaud arrogant.
La chair de poule fit se dresser le duvet sur sel bras, et elle jeta un nouveau coup d'il par-
dessus son paule. Elle n'entendit ni ne vit rien d'anormal, et se concentra nouveau sur la
toile. Elle n'aurait jamais d revenir ici, mais il fallait qu'elle la termine. Elle ne trouverait
jamais le repos si elle ne le faisait pas, et a n'avait rien voir avec le fait que Noble l'avait
dj paye. Une fois qu'elle avait une uvre dans le sang, elle ne trouvait pas la paix avant de
l'avoir acheve.
Elle essaya de se concentrer nouveau. Le fantme de Ian et son propre fantme lui
rendaient la tche trs difficile.
Tu es reste l, debout, pendant qu'il te battait avec une tapette ; tu t'es allonge sur ses
genoux, entirement nue, et tu l'as laiss te donner la fesse comme une enfant.
Un sentiment de honte l'envahit. tait-elle si dsespre, aprs avoir pass la plus grande
partie de sa vie en surpoids, pour que le dsir d'un homme tel que Ian la pousse renoncer
sa dignit ? Comment aurait-elle pu, sinon, se plier ses exigences, ce soir-l ? Jusqu'o
serait-elle alle s'il le lui avait demand ?
Ces penses l'humiliaient, et elle essaya de se focaliser sur la toile, trouvant finalement le
sanctuaire de concentration dont elle avait dsesprment besoin.
Une heure plus tard, elle reposa la palette de pigments, nettoya son pinceau et se massa les
paules pour soulager la tension musculaire gnre par les coups de pinceau incessants. Ses
amis taient toujours surpris quand elle leur disait quel point la peinture tait une activit
physiquement puisante.
Elle fut parcourue d'un frisson et suspendit son geste, avant de se retourner brusquement.
Il portait une chemise blanche qui, au milieu des ombres, ressortait davantage que le reste
de ses vtements. Il n'avait pas mis de veste, et ses manches taient roules sur ses avant-
bras. Sa montre en or luisait dans la pnombre. Francesca se figea, ttanise, avec
l'impression d'tre au milieu d'un rve.
Vous peignez comme si vous tiez possde par un dmon.
Vous avez l'air de savoir quoi a ressemble, rpondit-elle d'une voix pince.
Vous savez que je le sais.
L'image de Ian marchant seul dans les rues dsertes s'imposa l'esprit de la jeune femme.
Elle touffa la bouffe de compassion et les sentiments profonds que ce souvenir lui voquait
chaque fois.
Elle cessa de masser son paule douloureuse et se tourna vers Ian.
Mme Hanson m'avait dit que vous tiez Berlin.
Je suis revenu pour une affaire urgente.
Elle le dvisagea pendant un moment, sans rien dire. Les lumires des gratte-ciel se
refltaient dans ses yeux.
Je vois, dit-elle enfin en se dtournant. Je vais y aller, alors.
Vous comptez m'viter encore combien de temps ?
Aussi longtemps que vous serez en vie ? rpliqua-t-elle du tac au tac.
La nuance de colre qu'elle percevait dans la voix de Ian agissait comme un catalyseur sur
sa propre irritation. Elle voulut passer devant lui en baissant la tte mais il lui saisit le
poignet au vol et l'arrta.
Lchez-moi.
Elle avait parl d'un ton furieux, mais elle fut horrifie de sentir les larmes lui monter aux
yeux. C'tait dj assez pnible de le revoir ; fallait-il en plus qu'il la surprenne ainsi, aussi
vulnrable et fragile ?
Pourquoi vous ne me laissez pas simplement tranquille ?
Je le ferais si je le pouvais. Croyez-moi.
Sa voix tait aussi rude qu'un vent d'hiver glacial. Elle tordit le bras pour essayer de lui
chapper mais il affermit sa prise et l'attira lui. Elle se retrouva le visage press contre son
torse solide et sa chemise froisse, entoure de ses bras.
Je suis dsol, Francesca. Je le suis vraiment.
Durant quelques instants, elle perdit toute volont et se laissa aller contre lui, acceptant sa
force et sa chaleur, tremblant d'motion tandis qu'il lui caressait les cheveux.
Plus tard, en se remmorant ce moment d'garement, elle comprit que c'tait le timbre de
sa voix qui l'avait provoqu. L'espace de quelques secondes, il avait sembl aussi dmuni et
dsespr qu'elle l'tait elle-mme. Ce n'tait pas le pire des hommes, admit-elle. Il n'avait
pas essay de la rabaisser en lui rappelant ce qui s'tait pass l'autre nuit.
Elle tait juste furieuse contre lui parce qu'il n'avait pas voulu d'elle. Parce qu'il ne la
dsirait pas assez pour la prendre malgr son inexprience, en tout cas.
L'motion lui coupait le souffle. Elle le repoussa, incapable de supporter le dsir qui la
submergeait.
Il relcha lentement son treinte, sans toutefois dnouer ses bras.
Elle baissa la tte et s'essuya les joues, refusant de te regarder dans les yeux.
Francesca...
Ne dites rien, je vous en supplie.
Je ne suis pas un homme pour vous. Je tiens ce que cela soit trs clair.
C'est clair comme de l'eau de roche. Merci.
Je ne suis pas intress par le genre de relation qu'une fille de votre ge, de votre
exprience, de votre intelligence et de votre talent mrite. Je suis dsol.
Le cur de Francesca se serra au son de ces paroles, mais elle savait qu'il avait raison.
C'tait ridicule de penser le contraire. Il n'tait pas pour elle. N'tait-ce pas vident ? Davie ne
le lui avait-il pas dit et rpt durant ces derniers jours ? Elle fixait d'un regard vide la poche
de sa chemise. Elle brlait d'envie de se librer de son treinte et, la fois, de rester l, au
milieu des ombres, dans ses bras. Il lui saisit le menton et la fora doucement relever la
tte. Elle s'excuta avec rticence et vit un rictus douloureux se dessiner sur les lvres de Ian.
Elle se dgagea brusquement de ses bras, refusant de cder un lan de compassion. Il
l'attrapa par le poignet et elle se figea.
Je suis abominable avec les femmes, lcha-t-il. J'oublie les rendez-vous et les dates
importantes. Je suis discourtois. La seule chose qui m'intresse vraiment, c'est le sexe... et
obtenir ce que je veux.
Elle le regarda en tremblant, presque en tat de choc. Il reprit :
Mon travail reprsente tout pour moi. Je ne peux pas me permettre de lcher les rnes
de ma socit Je ne le ferai pas. Voil ce que je suis.
Pourquoi vous prenez la peine de me dire tout a ? Pourquoi tes-vous venu me voir, ce
soir ?
La mchoire de Ian se crispa, comme s'il essayait d'touffer les mots qui lui venaient la
gorge.
Parce que j'tais incapable de rester loin de vous.
Elle vacilla presque, sonne. Puis le souvenir de l'humiliation qu'elle avait vcue lui revint
en mmoire et elle retrouva ses esprits.
Si vous tes incapable de rester loin de moi, il va falloir que vous trouviez un autre
artiste, ou que vous dmnagiez mon atelier.
Francesca, ne vous avisez pas de me fuir une nouvelle fois, dit-il d'une voix tranchante.
Une fois de plus, la jeune femme chancela. Elle russit regagner tout juste assez de
dignit pour tourner la poigne de la porte et quitter la pice.
Quelques nuits plus tard, Francesca prouvait toujours une sorte de douleur sourde,
permanente, mais elle tait parvenue organiser ses penses... accorder Ian une place
plus restreinte dans son esprit, C'tait particulirement dur quand son tlphone portable
sonnait et qu'elle le voyait chercher dsesprment la contacter. Ignorer ses appels lui
demandait un effort considrable.
Faire abstraction de son chagrin tait plus facile le samedi soir, pendant ses heures de
service au High jinks. Elle tait si occupe qu'elle n'avait le temps de penser ni Ian, ni son
tableau, ni ses regrets, alors qu'elle s'affairait entre les tables du bar qui restait bond
jusqu' deux heures du matin. Parmi tous les bars que comptait Wicker Park et Bucktown, le
High Jinks tait du lieu populaire, attirant de jeunes actifs urbains et des tudiants en fin de
cursus.
Alors que beaucoup d'tablissements fermaient leurs portes deux, trois ou quatre heures
du matin, le High Jinks restait ouvert jusqu' cinq heures les week-ends, accueillant les plus
acharns des ftards et des soiffards. Les soires du samedi puisaient Francesca et mettaient
ses nerfs rude preuve, mais elle essayait de ne jamais manquer son travail ce jour-l
les pourboires taient souvent trois fois plus levs que le reste de la semaine.
Elle dposa son plateau sur la desserte de service et annona ses commandes au
propritaire du bar, Sheldon Hays, un ours irascible mais attendrissant, qui manageait les
serveurs ce soir-l.
Tu vas devoir dire Anthony de filtrer les entres, hurla-t-elle pour se faire entendre au
milieu de la musique et du tintamarre des conversations. On est dbords.
Sheldon lui fit signe de s'approcher comme s'il avait quelque chose d'important lui dire.
Elle but une gorge d'eau gazeuse et s'accouda contre le comptoir.
J'ai besoin que tu files l'picerie du coin pour acheter tout le jus de citron qu'ils ont en
stock, s'poumona-t-il. Cet incapable de Mardock a oubli d'en recommander, et j'ai une
tourne de side-cars
[2]
sur le feu.
Elle soupira. Elle ne sentait dj plus ses pieds, l'ide de cavaler dans le quartier ne
l'enchanta gure.
Malgr tout... a lui ferait un bien fou de respirer l'air frais automnal pendant quelques
minutes et d'accorder un peu de rpit ses oreilles durement prouves par la musique
assourdissante.
Elle adressa un hochement de tte son patron ta son tablier.
Tu peux dire Cara de s'occuper de mes tables ? Cria-t-elle.
Sheldon lui fit signe de ne pas s'inquiter et lui tendit deux billets de vingt dollars attraps
dans la caisse.
Elle joua des coudes pour arriver jusqu' la porte sortie.
Il ne restait que quatre bouteilles de jus de citron disponibles en rayon, et le caissier
somnolent de l'picerie dut se lever pour aller en chercher une autre dans la rserve. Alors
qu'elle revenait vers le bar quelques minutes plus tard, leste de ses achats, elle remarqua
que le trottoir tait encombr de gens marchant en direction de leurs voitures ou de la station
taxis. D'o est-ce qu'ils sortent tous ? Sinterrogea Francesca, perplexe, en arrivant quelques
dizaines de mtres du High Jinks.
Elle s'arrta au coin de la rue lorsqu'elle vit une vingtaine de personnes en train de quitter
le bar, qui laissrent la lourde porte de bois se refermer en claquant derrire eux.
Qu'est-ce qui se passe au High Jinks ? demanda-t-elle un trio de trois hommes.
Y a le feu dans la rserve, rpondit l'un d'en eux d'un ton acide, laissant entendre qu'il
n'apprcia pas de voir sa beuverie nocturne interrompue pour des raisons de scurit.
Quoi ? s'cria Francesca.
Mais les trois hommes avaient dj pass leur chemin. Elle se rua vers le bar, alarme,
mais ne senti aucune odeur de fume. Pas de sirnes non plus l'horizon. Le videur,
Anthony, n'tait visible nulle part quand elle ouvrit la porte pour jeter un coup d'il
l'intrieur. Personne.
Elle s'avana jusqu'au comptoir, interdite et aux aguets. La salle, noire de monde vingt
minutes plus tt, tait prsent totalement vide et silencieuse.
Venait-elle de pntrer dans une quatrime dimension ?
Elle perut un mouvement derrire le comptoir. bahie, elle distingua Sheldon en train
d'essuyer calmement la vaisselle.
C'est quoi ce bordel, Sheldon ? Lui lana-t-elle en s'approchant.
Il ne resterait quand mme pas tranquillement plant l si un incendie tait en train de
dvaster la rserve, si ?
Son patron se tourna vers elle et reposa un verre a bire.
J'attendais d'tre sr que tu reviennes, fit-il en s'essuyant les mains avec un torchon. Je
vais monter mon bureau. Vous laisser un peu d'intimit.
Mais qu'est-ce q...
En guise d'explication, Sheldon dsigna du doigt un point situ derrire Francesca. La
jeune femme se retourna et se figea quand elle vit Ian assis l'une des tables, ses longues
jambes replies sous lui. Un grand paravent avait empch Francesca de le voir quand elle
tait entre. Les battements de son cur s'acclrrent, comme chaque fois qu'elle le voyait.
Malgr sa stupeur, elle remarqua qu'il portait un jean, et qu'une barbe de quelques jours
ombrait ses joues. Il avait l'air trs peu... Ian. Un peu dbraill, trs dangereux... cependant
toujours aussi sexy qu'un dmon. Est-ce qu'il avait pass la nuit arpenter les rues ?
Il la transpera du regard sans bouger de son sige.
Il veut te parler en priv, dit calmement Sheldon dans le dos de Francesca. Et il a l'air
de beaucoup y tenir. J'suis dsol si a te botte pas, mais c'est pas vraiment le genre d'homme
qui un gars comme moi peut se permettre de dire non.
C'est son argent que tu ne peux pas dire non, siffla la jeune femme d'une voix rendue
aigu par l'inquitude et l'irritation.
Qu'est-ce que Ian fichait l ? Pourquoi ne la laissait-il pas en paix, afin qu'elle russisse
l'oublier ? Est-ce qu'il avait vraiment fait fermer le bar juste parce qu'il voulait lui parler ?
Tu n'arriveras jamais l'oublier. Qui essaies-tu de tromper ? Songea-t-elle amrement en
se tournant vers le comptoir pour dposer les bouteilles de jus de citron.
Sheldon rpondit son froncement de sourcils par un regard penaud signifiant Qu'est-ce
que j'y peux, moi ? avant d'aller rejoindre son bureau. Elle n'osait mme pas imaginer la
somme que lui avait propose Ian pour le convaincre de chasser ses clients le soir le plus
lucratif de la semaine.
Elle prit son temps pour sortir les bouteilles du sac et les ranger une par une sous le
comptoir. Elle sentait des picotements parcourir sa nuque l'ide qu'il se trouvait derrire
elle. Qu'il attende quelques secondes de plus, se dit-elle. Il ne pouvait pas tout obtenir
l'instant mme o il l'exigeait.
Il a fait fermer le bar juste pour pouvoir me parler ?
Elle fit taire la voix surexcite qui rsonnait dans sa tte. Quand elle ne vit plus rien quoi
s'occuper pour faire attendre Ian, elle se retourna et marcha lentement vers lui.
On vient s'encanailler avec le bas peuple, ce que je vois ? C'est pousser les choses un
peu loin juste pour me convaincre que vous daignez accepter de vous faire servir par une
femme, non ? Lui lana-t-elle d'un ton sarcastique.
Je ne suis pas venu ici pour que vous me serviez. Pas ce soir.
La jeune femme saisit l'insinuation et le foudroya du regard, s'attendant le voir rpondre
avec son sempiternel ton amus. Or elle ne distingua dans ses yeux que de la lassitude et... de
la rsignation ? Chez Ian Noble ?
Asseyez-vous.
Elle soutint son regard pendant quelques secondes avant de s'asseoir. Un millier de
questions vrillaient son crne, mais elle les rduisit au silence. Il avait l'ait montre de son
arrogance habituelle en chassant des centaines de personnes du bar pour la rencontrer seul
seule au moment prcis o il le dsirait. Il allait devoir parler en premier, aprs tout. Elle
refusait de lui faciliter les choses.
a ne marchera pas, lcha-t-il. Je sais que je vais vous blesser. Je sais qu'il y a de fortes
chances pour que vous finissiez par me mpriser... par me craindre, mme. Mais je n'arrive
toujours pas vous oublier. Il faut que je vous possde. Totalement. Continuellement... et
n'importe quel prix.
Elle couta les battements de son cur marteler ses tempes pendant plusieurs secondes,
essayant de rassembler ses esprits. Comment pouvait-elle prouver autant de colre envers
cet homme et, en mme temps, le dsirer au point d'en ressentir un besoin physique, comme
s'il lui tait aussi ncessaire que l'air qu'elle respirait ?
Je ne suis pas vendre, rpondit-elle enfin.
Je sais cela. Le prix auquel je me rfre n'a rien voir avec l'argent.
De quoi parlez-vous, bon sang ?
Il se pencha en avant et laissa reposer un de ses avant-bras sur la table. Il tait vtu d'un
tee-shirt en coton bleu sombre manches courtes et ne portait pas sa Rolex.
Le souvenir de l'excitation qu'elle avait ressentie la premire fois qu'elle avait vu ses larges
mains et ses bras musculeux lui revint en mmoire.
Il lui faisait toujours le mme effet. Encore plus prsent qu'elle savait ce qu'il tait capable
de faire avec ces mains-l.
Je vais sans doute perdre un peu de mon me dans cette relation avec vous. C'est dj le
cas, en ralit, du simple fait que je suis venu vous voir ce soir. (Il parlait d'une voix fbrile,
son regard scell celui de Francesca.) Et je sais que je prendrai un peu de la vtre.
Vous n'en savez rien, rpliqua-t-elle tout en redoutant qu'il ait raison. Qu'est-ce qui
vous rend si sr que vous allez me blesser ?
Beaucoup de choses, rpondit-il d'un ton si assur que le cur de Francesca se serra
davantage encore. Je vous ai dj parl de l'une d'entre elles : je suis un maniaque du
contrle. Saviez-vous que, quand j'ai revendu Noble Worldwide Technology aprs une offre
publique de vente, on m'a propos de rester directeur gnral ?
Il faisait rfrence l'norme compagnie de mdias sociaux qu'il avait fonde et
dveloppe avant de la cder.
C'tait une position trs confortable, reprit-il, pourtant j'ai dclin l'offre. Vous savez
pourquoi ?
Parce que vous ne pouviez pas supporter l'ide de devoir rendre des comptes un
conseil d'administration ? Senquit-elle d'un ton irrit. Vous voulez garder le contrle en
toutes circonstances, n'est-ce pas ?
C'est a. Vous commencez me comprendre mieux que je ne l'imaginais.
Pourquoi son sourire semblait-il la fois amer et heureux ?
Je vais vous dire autre chose que vous devez savoir, poursuivit-il. J'ai eu une relation
avec une vierge, dans le pass. Elle est tombe enceinte, et j'ai fini par l'pouser. Ce mariage a
t une catastrophe. Elle ne pouvait pas supporter ma manie du contrle et je ne parle pas
seulement de ce qui se passait dans notre chambre coucher, bien que ce domaine ait dj
t calamiteux. Elle a fini par me considrer comme le pire des pervers.
Francesca en resta bouche be. L'expression tendue et presque furieuse qui s'tait dessine
sur le visage de Ian ne laissait aucun doute ; il lui disait la vrit.
Qu'est-ce que le bb est devenu ? demanda-t-elle.
Cette information n'avait pas sa place dans ce qu'elle savait de l'histoire de Ian.
Elizabeth l'a perdu. D'aprs elle, c'tait ma faute.
Elle le dvisagea et perut une nuance de ddain dans son regard, une lueur d'angoisse,
aussi. Il tait presque certain que son ex-femme se trompait en disant cela. Et pourtant, le
doute demeurait.
la fin de notre mariage, ma femme avait peur de moi. Je crois qu'elle me voyait comme
le Diable incarn. Elle n'avait peut-tre pas tout fait tort. Mais la vrit, c'est que je me suis
conduit comme un imbcile. Un imbcile de vingt-deux ans.
Et moi, je suis une idiote de vingt-trois ans.
Ian frona les sourcils. Elle ne savait pas s'il avait vraiment compris ce qu'elle sous-
entendait par l, mais une soudaine intuition la mit en garde contre ce qu'il s'apprtait dire.
D'une certaine faon, elle savait pertinemment ce qu'elle allait lui rpondre.
La bouche de Ian se durcit.
Je tiens ce que les choses soient bien claires. Je veux vous possder sexuellement.
Totalement. Selon mes propres termes. Je vous offre le plaisir et l'exprience. Rien d'autre. Je
n'ai rien d'autre offrir.
Francesca avala pniblement sa salive en entendant les mots qu'elle avait la fois esprs
et redouts.
Vous parlez comme si vous essayiez de me dcourager.
Il y a peut-tre de a.
Ce n'est pas trs flatteur, Ian.
Elle avait parl d'un ton irrit mais, au fond d'elle-mme, elle se sentait blesse.
Je ne suis pas venu ici pour vous flatter. Je ferai en sorte que l'exprience soit aussi
riche et gratifiante que possible pour vous, toutefois je ne vous bercerai pas de fausses
promesses. Je vous respecte au moins assez pour a, ajouta-t-il dans un souffle.
Et cette exprience se terminera quand vous en aurez assez ?
Oui. Ou quand vous en aurez assez, bien sr.
Et a arrivera quand ? Aprs une nuit ? Deux nuits ?
Il sourit sombrement.
Je pense qu'il me faudra plus de temps que a pour vous chasser de mes penses.
Nettement plus de temps. Mais encore une fois, je ne peux pas vous le promettre. Vous
m'avez compris ?
Francesca avait l'impression que son cur allait exploser, dchir par le conflit intrieur
qui faisait rage en elle. Tout ceci tait une vaste erreur, elle le savait. Et pourtant...
Oui, dit-elle.
Sa tension ne faisait qu'augmenter chaque battement de son cur.
Et vous tes d'accord avec a ?
Oui.
Qu'tait-elle en train de faire, bordel ?
Regardez-moi, Francesca.
Elle releva les yeux, le menton fuyant. Il la scruta d'un air inquisiteur.
Je vous ai dit une fois de ne pas laisser votre colre vous faire agir stupidement, fit-il
d'une voix douce.
Plus que tout le reste, ces paroles la mirent en colre.
Si vous me prenez pour une gamine irrflchie, alors vous n'auriez pas d me poser la
question, grina-t-elle. Je vous ai donn ma rponse. C'est vous de voir si vous l'acceptez ou
pas. Oui, rpta-t-elle.
Il ferma un instant les yeux.
Trs bien, reprit-il d'une voix calme au bout d'un moment, comme si toute trace de lutte
intrieure avait dj disparu en lui. C'est rgl, alors. J'ai une runion importante Paris
lundi dans la matine, que je ne peux pas reporter. J'aimerais partir trs tt demain.
D'accord, rpondit-elle d'un ton perplexe, dconcerte par ce brusque changement de
sujet. Donc... je vous verrai votre retour.
Non, dit-il en se relevant. Maintenant que nous nous sommes mis d'accord, je ne peux
pas attendre plus longtemps. Je veux que vous veniez avec moi. Pouvez-vous vous absenter
de Chicago quelques jours ?
Est-ce qu'il est srieux ?
Je... je pense. Je n'ai pas cours le lundi, mais j'en ai un le mardi. Enfin je suppose que je
peux me permettre de manquer une sance.
Bien. Je passerai vous prendre chez vous sept heures demain matin.
Que dois-je emporter ?
Votre passeport. Vous en avez un, n'est-ce pas ?
Elle acquiesa.
J'ai tudi quelques mois Paris pendant mon anne de licence. C'est frquent dans ce
genre de cursus.
Juste votre passeport et vous-mme, alors. Je vous fournirai tout le reste.
ces mots, Francesca sentit le souffle lui manquer, mais elle rpondit d'un ton
pragmatique :
On ne peut pas partir plus tard ? Il est dj trois heures du matin.
Non. Sept heures. J'ai un planning respecter, Vous pourrez dormir dans l'avion, et
j'aurai du travail durant le vol, de toute faon. (Il la dvisagea quelques instants et son
expression s'adoucit lgrement.) Vous allez dormir dans l'avion. Vous semblez puise.
Elle faillit rpondre qu'il paraissait lui aussi puis, mais elle se rendit compte que ce
n'tait plus le cas, Toute la fatigue qu'elle avait perue en lui au dbut de leur conversation
semblait s'tre envole...
Maintenant qu'il avait obtenu ce qu'il voulait.
Approchez, s'il vous plat.
Quelque chose, dans le ton calme et autoritaire qu'il avait employ, coupa la respiration de
Francesca. Elle venait de consentir arrter de le fuir, et il le savait. Essayait-il de dmontrer
le pouvoir qu'il avait sur elle ? Elle se releva et s'approcha lentement de lui. Il passa une main
derrire sa nuque, dans ses cheveux relevs en chignon. Il la dvisagea de ses yeux d'ange
tnbreux avec une motion qu'elle ne comprenait pas.
Il pencha la tte et posa ses lvres contre les siennes, mordilla doucement sa lvre
infrieure pour qu'elle ouvre la bouche, haletante, et plongea sa langue entre ses dents. Une
chaleur brlante envahit le sexe de Francesca. Oh, Seigneur... a, elle pouvait le comprendre.
La passion submergea sa raison. Elle gmit sous l'emprise d'un dsir violent, immdiat, et
tous les muscles de son corps se tendirent.
Quand il releva la tte quelques instants plus tard, une tideur moite tait apparue entre
les cuisses de la jeune femme.
Je veux que vous sachiez, souffla-t-il quelques centimtres peine de ses lvres
tremblantes, que j'aurais empch a si je l'avais pu. Je vous revois dans quelques heures.
Elle resta plante l, ttanise, incapable de reprendre son souffle avant d'avoir vu la porte
du bar se refermer derrire lui.
Francesca alla se coucher, sans toutefois parvenir trouver le sommeil. Son excitation
croissante l'en empchait. Elle se leva sans laisser le temps au rveil de sonner, se fit du caf,
mangea un bol de crales et prit une douche. En ouvrant son placard, elle fut prise d'un
vertige. Quels vtements choisir pour un voyage avec Ian Noble ?
Comme absolument aucune pice de sa garde-robe n'tait approprie, elle opta finalement
pour son jean favori, des bottines, un dbardeur et une tunique vert sombre qui mettait en
valeur son teint. Si elle ne pouvait pas tre lgante, autant voyager confortablement. Elle prit
le temps de brosser et d'arranger ses longs cheveux chose qu'elle faisait rarement , mit
du mascara et du gloss. Quand ce fut fait, elle se regarda dans le miroir, haussa les paules et
quitta la salle de bains.
Il faudrait bien que a fasse l'affaire.
Certes, Ian lui avait dit de ne rien emporter, mais elle fourra tout de mme quelques sous-
vtements dans un sac marin, plus des vtements de rechange, sa tenue de jogging, une
trousse de toilette et son passeport. Elle posa son sac et son portefeuille devant la porte et se
dirigea vers la cuisine, o Davie et Caden taient dj assis autour de la table. Davie avait
toujours t lve-tt, mme le dimanche, or c'tait plus surprenant pour Caden. Francesca se
souvint qu'il devait passer ce week-end travailler jour et nuit pour boucler un dossier dans
les temps.
Je suis contente que vous soyez levs, fit-elle en se servant une nouvelle tasse de caf,
sachant pertinemment qu'elle ne la boirait pas l'ide que quelques minutes seulement la
sparaient de l'arrive de Ian lui nouait l'estomac. Je vais partir pour plusieurs jours,
annona-t-elle en se tournant vers ses amis.
Tu vas Ann Arbor ? demanda Caden en arrosant son toast de sirop d'rable.
Ann Arbor tait la ville du Michigan o rsidaient les parents de Francesca.
Non, rpondit-elle en vitant le regard curieux de Davie.
O, alors ? Linterrogea ce dernier.
Euh... Paris.
Caden cessa de mcher et carquilla les yeux. Elle sursauta en entendant quelques coups
brefs sur la porte d'entre et reposa sa tasse sur le comptoir de la cuisine d'un geste trop vif,
projetant une claboussure de caf sur son poignet.
Je vous expliquerai quand je rentrerai, assura la jeune femme en s'essuyant l'avant-bras
avec une serviette.
Elle se dirigea vers la cuisine ; Davie se leva.
Tu pars avec Noble ?
Oui, rpondit Francesca en se demandant pourquoi elle se sentait coupable de
l'admettre.
Alors appelle-moi ds que tu peux.
D'accord. Je le fais demain.
La dernire vision qu'elle eut en quittant la cuisine fut l'expression contrarie sur le visage
de Davie. Merde. Quand Davie s'inquitait, c'tait gnralement pour de bonnes raisons.
Est-ce que je viens de prendre la dcision la plus stupide de ma vie ?
Elle ouvrit grande la porte d'entre et ses vellits de sagesse s'envolrent aussitt. Ian se
tenait sur le perron, vtu d'un pantalon bleu sombre, d'une chemise blanche au col
dboutonn et d'une veste ordinaire capuchon.
Mme s'il tait toujours beau comme un dieu, elle se rjouit qu'il n'arbore pas un de ses
costumes immaculs, vu la faon dont elle s'tait habille.
Vous tes prte ? Senquit-il en la toisant de haut en bas.
Elle hocha la tte, ramassa son sac et son portefeuille.
Je... je ne savais pas quoi prendre, dit-elle en refermant la porte derrire elle.
Ne vous inquitez pas pour a, rpondit-il en lui prenant son sac. (Il lui jeta un regard
par-dessus son paule en descendant les marches du perron. Le cur de Francesca bondit
dans sa poitrine quand il lui adressa un de ses si rares sourires.) Vous tes parfaite.
La jeune femme sentit le rouge lui monter aux joues, et elle fut soulage qu'il lui tourne le
dos. Il la prsenta son chauffeur, Jacob Suarez, un Hispanique entre deux ges qui la salua
avec un franc sourire. Jacob s'empara immdiatement du sac de Francesca qu'il rangea dans
le coffre pendant que Ian lui ouvrait la portire.
Elle se glissa le long d'un des divans de cuir, impressionne par le luxe de la limousine. La
douceur moelleuse des siges et l'odeur qu'ils dgageaient une senteur de cuir mle
l'odeur masculine et pice de Ian la frapprent tout particulirement.
L'cran de tlvision tait teint, mais l'ordinateur portable de Ian tait pos ouvert sur la
table basse qui sparait les deux banquettes. Un air de musique classique paisible rsonnait
travers les enceintes. Du Bach - les concertos brandebourgeois, qu'elle reconnut au bout de
quelques secondes. Un choix qui semblait correspondre parfaitement Ian : l'homme et la
musique taient caractriss tous les deux la fois par leur prcision mathmatique et par
une intense expressivit. Une bouteille glace de la marque d'eau gazeuse prfre de
Francesca, frachement ouverte, reposait sur la table, ct de l'ordinateur.
Ian ta sa veste et s'assit sur le sige qui lui faisait face.
Vous avez dormi ? Linterrogea-t-il une fois qu'ils furent installs et que la limousine eut
dmarr.
Un peu, mentit-elle.
Il hocha la tte et la dvisagea.
Vous tes trs jolie. J'aime beaucoup vos cheveux arrangs de cette faon. Vous n'avez
pas l'habitude de les lisser ainsi, n'est-ce pas ?
Elle sentit nouveau ses joues s'empourprer ; cette fois, d'embarras.
a prend beaucoup de temps.
Vous avez les cheveux longs, rpondit-il avec un lger sourire, comme s'il avait peru sa
gne. Ne vous inquitez pas, je ne m'en plains pas. J'adore chacune de vos mches. a vous
drange si je travaille ? Plus j'avancerai ici et dans l'avion, mieux je pourrai me consacrer
vous quand nous serons sur place.
Bien sr que non, l'assura-t-elle, un peu dcontenance par ce brusque changement de
sujet.
a ne la drangeait vraiment pas. Elle aimait pouvoir le regarder pendant qu'il se
concentrait sur autre chose que sur elle. Il porte des lunettes ? Elle le vit ajuster sur son nez
une paire de lunettes discrte et style. Ses doigts se dplaaient sur le clavier avec une
vitesse qui aurait rendu jalouse la plus productive des secrtaires. C'tait trange... de voir
que ces mains larges et masculines pouvaient faire montre d'une prcision si arienne.
Et il allait bientt les employer pour lui faire l'amour. Elle n'arrivait pas y croire. Son
premier amant allait tre Ian Noble.
Une certaine tideur s'installa dans la zone de son bas-ventre. Elle avala une gorge d'eau
gazeuse et se fora regarder par la fentre. Un essaim de questions bourdonnait dans sa
tte. Quand ils eurent dpass l'aroport Skyway et se furent enfoncs encore de plusieurs
miles supplmentaires dans l'Indiana, elle ne put retenir la question qui lui brlait les lvres :
Ian, o allons-nous ?
Il cligna les yeux et releva la tte, elle eut alors l'impression qu'il mergeait d'une transe
profonde. Il jeta un coup d'il par la fentre.
Au petit aroport priv que j'utilise pour mon avion. Nous sommes presque arrivs.
Il tapota quelques touches sur son clavier et rabaissa l'cran de l'ordinateur.
Vous possdez votre propre avion ? demanda-t-elle.
Oui. Je voyage trs rgulirement, parfois pour des dplacements de dernire minute.
J'ai absolument besoin d'un avion.
videmment, songea-t-elle. Il tait incapable de patienter pour quoi que ce soit.
Il y a quelque chose que je veux vous montrer ce soir, Paris.
Quoi ?
C'est une surprise, rpondit-il en esquissant un lger sourire avec ses lvres fermes et
bien dessines.
Je n'aime pas vraiment les surprises, fit-elle, incapable de dtacher les yeux de sa
bouche.
Vous allez aimer celle-l.
Elle le regarda fixement et distingua une lueur d'amusement dans ses prunelles, et aussi
quelque chose d'autre... comme une flamme chauffe blanc. Elle eut l'impression qu'il
s'apprtait encore une fois n'en faire qu' sa tte.
Comme d'habitude.
Quelques minutes plus tard, elle observait toujours par la fentre quand elle fut soudain
gagne par la stupeur.
Ian, qu'est-ce qu'on fait ? s'exclama-t-elle tandis que Jacob engageait la limousine sur
une rampe d'accs.
On monte dans l'avion.
La voiture s'engouffra dans le jet fin et lanc qui tait pos sur le tarmac de l'aroport.
Francesca se sentait comme Jonas dans le ventre de la baleine.
Je ne savais pas qu'on pouvait faire a.
Il lcha un petit rire dont le son grave et rocailleux gnra une vague de frissons sur la
peau de Francesca. Elle le regardait d'un air bahi quand il tendit la main pour prendre la
sienne et l'attirer lui. Il lui souleva le menton et inclina la tte pour recouvrir sa bouche de
la sienne, pressant sa lvre infrieure entre les siennes, mordillant la chair pulpeuse.
Puis il plongea sa langue profondment dans sa bouche, et elle gmit ; son baiser joueur se
fit alors plus vorace.
Il releva la tte en entendant Jacob claquer la portire de la limousine. La voiture tait
prsent l'arrt. Francesca leva les yeux, moiti hypnotise par ce baiser inattendu.
Ian s'tira et attrapa son attach-case au moment o Jacob frappait la portire avant de
l'ouvrir en grand. Francesca suivit l'homme d'affaires hors du vhicule. Elle se sentait
dsoriente, fbrile et extrmement excite.
Le jet ne ressemblait rien de ce qu'elle avait vu. Ils prirent un ascenseur jusqu'au
deuxime niveau et pntrrent dans un luxueux habitacle quip d'un bar, d'un coin loisirs,
d'une bibliothque, d'un divan en cuir intgr et de quatre luxueux siges inclinables. Des
teintures coteuses masquaient les hublots. Francesca n'aurait jamais pu deviner qu'elle se
trouvait dans un avion.
Ian lui prit la main et l'entrana dans le salon.
Voulez-vous boire quelque chose ? Lui demanda-t-il poliment.
Non, merci.
Il se dirigea vers deux siges inclinables installs l'un en face de l'autre autour d'une table
basse.
Asseyez-vous l, dit-il en dsignant d'un hochement du menton le sige de gauche. Il y a
une chambre coucher, mais je prfrerais que vous vous reposiez ici. Le sige s'incline
totalement l'horizontale, et il y a des couvertures, des oreillers et des draps dans ce placard.
Il lui montra le superbe meuble multifonctions en acajou.
Il y a une chambre coucher ? fit-elle en se sentant ridicule l'instant o elle
prononait ces mots.
Ian prit place dans son propre sige et sortit immdiatement son ordinateur ainsi que
quelques dossiers de sa mallette.
Oui, murmura-t-il en lui jetant un bref coup d'il. Mais je voudrais pouvoir vous
regarder dormir. Vous tes cependant libre d'utiliser la chambre, si vous prfrez. C'est par l.
(Il dsigna une porte d'acajou.) La salle de bains aussi, en cas de besoin.
Il se dtourna sans remarquer l'expression ahurie de Francesca. Elle se leva et revint
quelques minutes plus tard avec une couverture en polaire et un oreiller trouvs dans le
placard. Ian ne dit rien, elle aperut toutefois un lger sourire flotter sur ses lvres tandis
qu'il allumait son ordinateur.
Elle s'assit sur le sige et tudia le panneau de contrle lectronique encastr sur
l'accoudoir avant de trouver le bouton qu'elle cherchait, puis commena incliner le dossier
en position horizontale.
Oh, et... Francesca ? demanda Ian sans lever les yeux de son cran.
Oui ? rpondit-elle en levant le doigt du bouton de contrle.
Retirez vos vtements, je vous prie.
Elle le dvisagea sans rien dire pendant plusieurs secondes. Les pulsations de son cur
martelaient ses tempes. Il remarqua peut-tre sa raction, car il releva les yeux et la scruta
calmement.
Vous pourrez dormir sous la couverture.
Pourquoi voulez-vous que j'enlve mes vtements si, de toute faon, je reste couverte ?
Bafouilla-t-elle.
J'aime savoir que vous tes disponible pour moi.
Un liquide chaud afflua au creux de son entrejambe. Oh, Seigneur. Elle tait sans doute
aussi perverse que Ian, pour ragir ainsi ces quelques mots.
Elle se releva lentement en tremblant et commena se dvtir.
Ian appuya sur la touche entre de son ordinateur, refermant un mmo dtaill destin
son conseil d'administration. Pour la cinquantime fois en cinq minutes, il parcourut du
regard les courbes de la jeune femme qui se dessinaient sous la couverture. Le soulvement
discret et rgulier du tissu sur sa poitrine lui indiquait qu'elle dormait toujours
profondment.
Il aurait pu deviner la seconde prs le moment o Francesca avait fini par cder au
sommeil, environ cinq heures plus tt. C'est dire s'il tait conscient de sa prsence. Et s'il
avait rencontr quelques difficults se concentrer, il ne pouvait s'en prendre qu' lui-mme.
C'tait lui qui avait insist pour qu'elle se dshabille.
C'tait lui qui s'tait assis en face d'elle et l'avait admire, hypnotis, alors qu'elle enlevait
ses vtements un par un, en sentant sa bouche devenir sche comme du pltre et les
battements frntiques de son cur commencer pulser le long de son sexe.
Chaque fois qu'il repensait au visage baiss de la jeune femme, ses joues roses, sa
longue et splendide chevelure balayant sa poitrine nue, ses seins insolents et somptueux
aux larges mamelons, ses jambes faire pleurer un homme tellement elles taient longues
et souples... et, pire que tout, la douce toison couleur d'or rose la jonction de ses cuisses,
suffisamment clairseme pour qu'il puisse distinguer la fente des lvres ds qu'il repensait
tout cela, le sang affluait violemment travers son membre. Et comme il y pensait
constamment, a faisait maintenant cinq heures qu'il dominait une imposante rection.
a allait tre un calvaire de ne pas la toucher avant ce soir, mais il s'tait promis de rendre
cette exprience aussi insolite que possible. Une torture pire encore serait de la toucher sans
la prendre. Il ta ses lunettes et se releva.
Une dlicieuse torture. Et il avait l'habitude de souffrir.
Il s'installa confortablement dans son sige et considra la jeune femme. Elle reposait sur
le ct, face lui, le visage paisible. Sa bouche tait d'une nuance lgrement plus sombre
que son habituel rose brillant. Ian sentit son sexe se dresser contre le tissu lastique de son
boxer. Y avait-il une chance qu'elle soit excite pendant son sommeil ?
Il souleva la couverture au niveau de l'paule de Francesca et la fit dlicatement glisser le
long de son corps, jusqu'aux genoux, prenant le temps de contempler la splendeur de ses
formes tentatrices rvles centimtre par centimtre.
Il sourit en voyant que ses ttons taient foncs et durcis. Quel genre de rves rotiques
pouvait bien hanter le sommeil d'une crature aussi innocente ? Le regard de Ian s'attarda
sur la douce toison de bl cuivr entre les cuisses blanches. Sa fente luisait-elle vraiment de
moiteur ? C'tait srement un effet de son imagination aprs des heures de dsir inassouvi.
Il tendit la main sur la chair douce du ventre plat de Francesca. Elle lui avait confi avoir
t en surpoids jusqu' la fin de son adolescence ; il n'en restait aucune trace. Perdre tous ses
kilos si jeune avait d lui pargner les marques de vergetures. La surface de son piderme
tait lisse et parfaite. Elle bougea lgrement dans son sommeil, et son visage se crispa
l'espace d'un instant, puis retomba dans un repos tranquille. Ian aplatit sa paume contre la
peau tide et satine, et infiltra les doigts dans la toison soyeuse, avant de les enfouir entre
ces lvres humides dont le souvenir le hantait chaque nuit.
Il mit un grognement de satisfaction. Il ne s'tait pas fait des ides ; ses doigts taient
bien recouverts par les fluides sexuels de la jeune femme. Il bougea un peu la main, trouva le
clitoris et le caressa de la pointe des doigts, tirant doucement Francesca du sommeil. Puis il
tendit quelques instants la main autour de son pubis - il sentait dj son propre sexe pulser
de dsir. La vulve de la jeune femme tait chaude, humide et divinement douce.
Quand Francesca ouvrit les yeux, elle rencontra directement son regard. Ils s'observrent
durant quelques secondes tandis qu'il continuait stimuler son clitoris. Il vit ses joues et sa
bouche se colorer de rouge.
C'est pour a que vous vouliez que je sois disponible ? Murmura-t-elle d'une voix encore
engourdie par le sommeil.
Peut-tre. Je n'arrte pas de penser votre sexe. Et je prvois de passer autant de temps
que possible enfoui l'intrieur.
Il accentua la pression sur sa perle de chair. Elle hoqueta, se mordit la lvre infrieure, et il
la contempla avec fascination. Seigneur Dieu. Il n'tait pas certain de survivre tant de
beaut... cette femme splendide et fascinante qui reprsentait une source de dlices infinis.
Mettez-vous sur le dos, ordonna-t-il sans cesser de la caresser, le doigt plong entre ses
petites lvres crmeuses.
Il garda les yeux fixs sur son visage, tudiant les subtiles ractions de la jeune femme
ses caresses, apprenant la connatre. Quand elle se mit sur le dos en suivant ses
instructions, il ne la lcha pas.
Maintenant, cartez les jambes. Je veux vous regarder, dit-il d'un ton bourru.
Elle carta ses longues cuisses. Le regard vrill entre les jambes de la jeune femme, Ian
tendit la main vers le panneau de contrle du sige pour abaisser le repose-pieds et le dossier.
Il s'agenouilla devant elle, le torse entre ses jambes ouvertes. Puis il retira enfin sa main et
contempla sa fente, comme ensorcel.
Je demande d'habitude aux femmes que je frquente de se raser intgralement, fit-il. a
augmente la sensibilit. a rend une femme totalement disponible pour moi.
Vous voulez que je le fasse aussi ? demanda-t-elle.
Il releva la tte vers son visage. Ses yeux sombres et velouts brillaient de dsir.
Je ne veux pas que vous changiez la moindre chose. Vous avez la plus jolie chatte que
j'aie jamais vue. Je me montre souvent exigeant, mais j'aurais tort de gcher cette perfection.
Il vit sa gorge se contracter tandis qu'elle avalait sa salive. Il tendit la main et utilisa ses
doigts pour carter les grandes lvres de son sexe, exposant les petites lvres rose sombre et
la minuscule fente de son vagin. Il sentit son membre se dresser, comme si son sexe savait
pertinemment l'endroit o il aurait voulu se trouver ce moment prcis. Ian mourait d'envie
d'y plonger sa langue, de goter ses fluides. Il en crevait de dsir.
Or s'il la gotait, il faudrait qu'il la prenne, ici et maintenant. C'tait une certitude.
Il se releva avec difficult et s'assit ct d'elle sur une chaise basse. Il se pencha en avant
et embrassa dlicatement la bouche entrouverte de la jeune femme tout en continuant
caresser son clitoris.
Est-ce que c'est agrable ? demanda-t-il en scrutant son visage empourpr.
Oui, murmura-t-elle avec une ferveur qui convainquit Ian tout autant que la rougeur de
ses lvres et de ses joues, ainsi que son souffle heurt.
Il accrut la pression de son doigt, dcrivant un doux mouvement de va-et-vient sur la petite
pointe de chair. Elle hoqueta, et il sourit. Elle tait si humide qu'il pouvait entendre le lger
bruit de succion produit par son geste.
Vous tes si rceptive, Francesca... Je ne peux pas attendre, il faut que je vous fasse
jouir.
Il accentua encore sa caresse, frottant nergiquement le clitoris.
Oh... Ian, gmit-elle en grimaant, arquant le bassin vers le haut pour accentuer la
pression de son doigt.
Tout va bien, ma belle, chuchota-t-il quelques centimtres de sa bouche avant d'y
dposer un long baiser. Je vais te donner ce que je me refuse encore.
Enferm dans une prison brlante de dsir, il la vit pousser un cri avant d'tre saisie de
tremblements, le corps ravag par les vagues de la jouissance. Le parfum sublime de sa sueur
envahit les narines de Ian tandis qu'elle succombait l'orgasme. Incapable de se matriser, il
s'empara une nouvelle fois de sa bouche, touffant presque avec colre les gmissements de
Francesca, tanchant la soif qu'il avait d'elle.
Quand les tremblements du plaisir abandonnrent enfin le corps de la jeune femme, il
arracha ses lvres aux siennes et enfouit la tte dans le creux de son paule, presque aussi
haletant qu'elle. Au bout d'un moment, il comprit qu'il ne parviendrait pas apaiser son
rection triomphante simplement en se repaissant de son parfum enivrant.
Il se redressa et se releva avec rticence avant de retourner son sige.
Nous allons bientt atterrir Paris, murmura-t-il en tapotant sur son clavier.
Le doigt qu'il avait utilis pour faire jouir Francesca luisait encore. Il ferma un instant les
yeux pour repousser cette vision excitante mais elle refusa de disparatre, pareille un voile
brlant sous ses paupires closes.
Vous avez tout juste le temps de prendre une douche et de vous changer, reprit-il.
Me changer ?
Il hocha la tte en jetant un regard furtif au corps nu de la jeune femme encore enflamm
par l'orgasme. Seigneur... Elle tait magnifique : les yeux sombres d'une nymphe, la peau
blanche et douce d'une fe celtique, les courbes voluptueuses d'une desse romaine. Il rsista
l'envie presque imprieuse de se jeter sur son corps et d'empaler son sexe en elle comme un
animal sauvage.
Oui. Je vous emmne dner, lcha-t-il enfin.
Vous m'avez achet des vtements ? demanda-t-elle, ses yeux de nymphe carquills de
surprise.
Il sourit sombrement et russit concentrer de nouveau son attention sur l'cran, ce qui
lui cota un effort monumental.
Je vous ai dit que je vous fournirais tout ce dont vous auriez besoin, Francesca.
Peut-tre commenait-elle devenir blase, car elle ne s'tonna mme pas en dcouvrant
la grande et luxueuse chambre coucher. Peut-tre parce qu'elle avait appris mieux
connatre Ian et savait prsent qu'il ne pouvait se satisfaire que de la perfection. Elle ouvrit
la porte de la penderie qu'il lui avait indique et aperut une robe du soir noire accroche sur
un cintre.
Lin m'a dit que tout ce qui pourrait vous tre utile se trouvait soit dans le tiroir
suprieur de la commode, soit dans le compartiment du haut, lui avait affirm Ian. Elle a dit
aussi que la temprature prvue Paris ce soir tait de dix-huit degrs environ et que les bas
taient donc optionnels, avait-il ajout en jetant un coup d'oeil sur l'cran de son tlphone,
lisant visiblement un message de son efficace assistante.
l'intrieur du meuble en bois d'acajou, Francesca trouva un ensemble exquis de lingerie
noire en dentelle. Elle souleva un autre accessoire qui semblait appartenir l'ensemble entre
ses doigts, perplexe avant de se rendre compte qu'il s'agissait d'un porte-jarretelles.
Elle se sentit gne l'ide que Lin s'tait occupe de tout cela. Peut-tre s'acquittait-elle
rgulirement de ce genre de tche pour Ian ?
Sa main se posa sur le dernier objet prvu par Lin des bas de soie. Elle jeta un regard
nerveux la porte de la chambre et remit les porte-jarretelles dans le tiroir.
Ian avait certainement envie qu'elle les port mais elle n'avait aucune ide de la faon dont
il fallait les fixer. Aprs tout, Lin avait bien spcifi que le bas taient optionnels, non ?
Deux botes taient poses sur la commode l'une en carton, et l'autre en cuir. Elle ouvrit
d'abord la bote chaussures et sa bouche forma un oooh de ravissement lorsqu'elle
dcouvrit une paire d'escarpins en daim noir rehauss de tissu. Francesca tait loin d'tre une
fanatique de chaussures ses baskets de jogging reprsentaient l'accessoire le plus onreux
de sa garde-robe , mais c'tait bien un cur de femme qui battait dans sa poitrine : elle ne
put s'empcher d'essayer aussitt les ravissants talons. Elle carquilla les yeux en lisant le
nom de la marque. Ces chaussures cotaient probablement plus cher que ce qu'elle aurait
vers pour trois mois de loyer.
Avec un mlange d'excitation et d'apprhension, elle ouvrit la deuxime bote. Des perles
virginales luisaient sur un crin de velours noir un collier exquis double rang de perles
avec des boucles d'oreilles assorties. eux seuls, ces bijoux incarnaient l'lgance la plus
pure.
Tout cela tait-il cens reprsenter une sorte de rtribution pour ses services sexuels ?
Cette ide la mit soudain mal l'aise.
Elle posa la bote en cuir sur le ct, se rendit dans la salle de bains, et laissa tomber la
couverture qu'elle avait enroule autour de son corps. Une douche chaude lui ferait du bien et
l'aiderait chasser ce sentiment d'irralit qui hantait son esprit. Elle fixa une serviette en
turban sur sa tte pour garder ses cheveux propres et ouvrit le robinet.
Elle regagna la chambre quelques minutes plus tard, la peau encore humide de la crme
hydratante qu'elle avait trouve prs du lavabo.
Elle n'avait pas encore dcid ce qu'elle allait faire des vtements et des bijoux luxueux que
Ian avait mis sa disposition.
Nous atterrirons dans moins d'une heure. Les conditions de vol sont parfaites, grsilla
une voix.
Francesca sursauta lgrement avant de comprendre qu'il s'agissait du pilote qui
s'adressait eux via un haut-parleur. Elle imagina Ian dans le compartiment adjacent,
relevant un instant les yeux au son de la voix du pilote avant de se replonger dans son travail.
Il attendait d'elle qu'elle porte les vtements qu'il lui avait achets. Il serait irrit si elle
refusait. Elle n'avait pas envie de s'opposer lui. Pas ce soir. Et aprs tout, n'avait-elle pas
accept de se lancer dans cette folle aventure ?
N'avait-elle pas vendu son me au Diable rien que pour satisfaire le dsir draisonnable
qu'elle avait de lui ?
Elle chassa ces penses mlodramatiques et revint vers la penderie pour taler la lingerie.
Vingt minutes plus tard, elle sortit de la chambre d'un air gauche, presque certaine qu'elle
ne tiendrait pas plus de deux minutes sur ses magnifiques escarpins avant de se casser la
figure. Ian lui jeta un bref coup d'il en biais quand elle s'approcha, puis un deuxime regard
plus prolong. L'expression de son visage demeura impassible tandis qu'il la dtaillait de pied
en cap.
Je... je ne savais pas quoi faire avec mes cheveux, fit-elle stupidement. J'avais des pinces
dans ma trousse de toilette, mais il m'a sembl que...
Non, dit-il en se relevant.
Malgr les talons qu'elle portait, il faisait toujours une bonne douzaine de centimtres de
plus qu'elle. Il tendit la main vers elle et passa la main dans ses cheveux laisss libres. Elle
avait au moins pris soin de les lisser le matin avant de partir pour qu'ils ne partent pas dans
tous les sens. Ils retombaient en cascade brillante autour de ses paules, mais mme
Francesca dont le sens de la mode tait proche du degr zro savait qu'elle aurait d les
porter relevs avec cette robe.
On vous trouvera demain matin quelque chose d'adapt. Mais pour ce soir, vous pouvez
les laisser ainsi. Une aussi glorieuse couronne ne saurait dparer votre beaut.
Elle lui adressa un sourire hsitant. En retour, il parcourut de son regard bleu ses seins, ses
hanches et son ventre, la faisant rougir d'embarras.
La jeune femme avait ressenti un mlange de frayeur et d'excitation en voyant quel point
la robe de mailles drape moulait de prs sa silhouette. L'ensemble dgageait une lgance
sexy du moins, c'aurait t le cas sur une autre femme, se dit-elle en scrutant avec anxit
le visage de Ian.
Lui plaisait-elle ? Elle tait incapable de le savoir devant son expression ferme.
Je ne vais pas garder tout a, dit-elle calmement. C'est beaucoup trop pour moi.
Je vous ai dit que je pouvais vous offrir deux choses.
Oui... le plaisir et l'exprience.
J'ai beaucoup de plaisir voir votre beaut rvle. Et en ce qui vous concerne, ces
vtements font partie de l'exprience, Francesca. (Il la scruta une nouvelle fois de la tte aux
pieds avant de dtacher la main de ses cheveux.) Pourquoi n'en profitez-vous pas simplement
? Dieu sait que c'est mon intention, ajouta-t-il d'une voix bourrue avant de se dtourner d'elle
pour se diriger vers la chambre.
La porte se referma derrire lui dans un cliqutement.
Une heure et demie plus tard, Francesca tait au Palais-Royal, assise une table prive du
restaurant historique Le Grand Vfour.
Elle tait si bouleverse par le cadre luxueux, par la nourriture raffine, par l'apprhension
de ce qui se passerait plus tard dans la nuit... et par le regard calme et implacable que Ian
posait sur elle, qu'elle avait le plus grand mal avaler ce qu'on lui servait - sans mme parler
de savourer les mets exquis comme elle l'aurait d.
Tout se rduisait un jeu de sduction peine voil.
Vous n'avez presque rien mang, fit Ian quand le serveur vint dbarrasser les entres.
Je suis dsole, rpondit-elle sincrement.
Elle se maudit intrieurement en pensant tout le travail et l'argent gaspills pour le
sublime buf bourguignon, accompagn de pommes de terre sautes aux truffes noires, qui
allait finir la poubelle. Le serveur posa une question Ian en franais, et ce dernier rpondit
dans la mme langue. Une chose tait certaine : Francesca avait peine pu dtacher le regard
de l'homme d'affaires depuis qu'il tait apparu quelques heures plus tt sur le seuil de la
chambre de l'avion, vtu d'un smoking assorti d'un nud papillon noir et d'une chemise
blanche immacule. Quand il l'avait escorte jusqu' leur table dans la salle prive du
restaurant, tous les regards s'taient tourns vers eux.
Vous tes tendue ? demanda-t-il posment aprs le dpart du serveur.
Elle hocha la tte et rprima un frisson en contemplant les longs doigts calleux de Ian
caresser ngligemment la base de sa coupe de Champagne.
a vous soulagerait de savoir que je le suis aussi ?
Elle carquilla grands les yeux et le dvisagea. Ses iris bleus brillaient comme des braises
incandescentes sous ses paupires demi closes.
Oui, lcha-t-elle abruptement. Vous l'tes vraiment ?
Il hocha pensivement la tte.
J'ai sans doute de bonnes raisons de l'tre.
Pourquoi dites-vous a ?
Parce que je suis si excit l'ide de vous prendre qu'il y a un risque que je perde le
contrle de moi-mme. Je ne perds jamais le contrle, Francesca. Mais ce soir, cela pourrait
arriver.
Un frisson d'angoisse et d'excitation parcourut la jeune femme quand elle comprit le
sombre avertissement qui perait dans sa voix. Pourquoi l'ide qu'il pourrait cder sans
retenue la passion la troublait-elle jusqu'au plus profond de son cur ? Elle releva la tte
avec surprise quand le serveur revint pour dposer un magnifique dessert devant elle, et une
lasse de caf en argent devant Ian.
Est-ce qu'il y aura autre chose, monsieur ?
Non, merci.
Trs bien. Je vous souhaite bon apptit
[3]
.
Je n'ai pas command a, dit Francesca en scrutant son dessert d'un il dubitatif.
Je sais. C'est moi qui l'ai fait pour vous. Mangez-en un peu. Vous allez avoir besoin
d'nergie, ma beaut. (Elle lui jeta un timide regard travers ses cils baisss et vit qu'il avait
un petit sourire aux lvres.) C'est la spcialit de la maison, le palet aux noisettes. Mme si
vous tiez dj gave comme une oie, vous en redemanderiez. Faites-moi confiance, ajouta-t-
il doucement.
Elle saisit sa fourchette. Un soupir d'extase s'chappa de ses lvres quelques instants plus
tard lorsque le mlange de pte brise, de mousse au chocolat, de noisettes et de crme glace
au caramel explosa sur ses papilles. Il lui sourit, et elle lui rendit avec espiglerie la pareille
en donnant un autre coup de fourchette enthousiaste.
Vous parlez trs bien le franais, fit-elle avant d'enfourner une nouvelle bouche.
Je n'ai aucun mrite. J'ai la nationalit franaise, en plus de la britannique. C'est presque
autant ma langue maternelle que l'anglais. Ma mre tait anglaise, mais les gens parlaient
franais l o j'ai grandi.
Elle cessa un instant de mcher en se souvenant de ce que Mme Hanson lui avait dit au
sujet d grands-parents de Ian, qui avaient retrouv leur fille dans le nord de la France, et
dcouvert du mme coup leur petit-fils. Elle brlait d'envie de l'interroger sur son pass.
Vous ne parlez jamais de vos parents, dit-elle prudemment en prenant une autre
bouche.
Vous ne parlez pas non plus des vtres. Vous n'tes pas proche d'eux ?
Pas vraiment, rpondit-elle en fronant intrieurement les sourcils devant ce brusque
changement de sujet. J'ai pass presque toute ma vie me dire qu'ils m'en voulaient parce
que j'tais trop grosse. Mais maintenant que je ne suis plus en surpoids, j'en suis venue la
conclusion qu'ils ne m'apprcient tout simplement pas. Un point c'est tout.
Je suis dsol.
Elle haussa les paules, jouant avec sa fourchette.
a ne se passe pas si mal. On ne se dispute pas, il n'y a rien de mlodramatique. C'est
juste... douloureux d'tre avec eux.
Douloureux ? fit-il en levant la tasse de caf ses lvres.
Pas vraiment douloureux, je suppose. Juste... bizarre.
Ils ne sont pas fiers d'avoir une fille aussi talentueuse que vous ?
Elle ferma un instant les yeux, savourant les parfums exquis qui se mlaient sur sa langue.
Mes tableaux les ennuient. Mon pre encore plus que ma mre, ajouta-t-elle aprs avoir
profit de la moindre note de saveur sur son palais.
Elle se lcha le pouce, capturant une goutte gare de mousse au chocolat sur l'extrmit
de sa langue. Seigneur. C'tait se damner.
Elle releva la tte quand Ian froissa sa serviette sur la table.
C'est bon. Il est temps d'y aller, fit-il en repoussant sa chaise en arrire.
Hein ? Lana-t-elle, dstabilise par son ton abrupt.
Il s'approcha d'elle pour l'aider tirer sa chaise.
Excusez-moi, reprit-il sombrement en lui prenant la main. Faites-moi juste penser, la
prochaine fois que j'essaie de me dominer, de ne pas vous faire servir de chocolat fondu.
ces mots, une onde d'excitation parcourut la jeune femme, promesse d'un plaisir bien
plus grand que mme le plus dlectable des palets aux noisettes.
O logeons-nous ? Senquit Francesca quelques minutes plus tard tandis que la
limousine descendait la rue obscure et presque dserte du Faubourg Saint-Honor.
Alors qu'il s'tait assis ct d'elle et lui avait tenu la main durant le trajet de l'aroport au
restaurant, Ian s'tait cette fois-l install sur la banquette d'en face. Ses manires taient
distantes, et il regardait par la fentre d'un air sombre.
l'htel George V. Mais nous n'y allons pas tout de suite.
Alors o...
La voiture ralentit, et Ian dsigna un btiment d'un signe de tte. Les yeux de la jeune
femme s'agrandirent quand elle reconnut l'architecture caractristique d'un norme
immeuble Second Empire.
Le muse Saint-Germain
[4]
? fit-elle sur le ton de la plaisanterie.
Elle connaissait bien ce muse d'antiquits grecques et romaines depuis son bref sjour
tudiant Paris.
Il occupait l'un des derniers palaces privs de la ville.
Oui.
Le rire de la jeune femme se figea sur ses lvres.
Vous tes srieux ?
Bien sr.
Ian, il est minuit pass. Le muse est ferm.
Jacob arrta la limousine. Quelques instants plus tard, il frappa poliment la portire et
leur ouvrit. Ian quitta le vhicule et prit la main de Francesca, qui sortit dans la rue borde
d'arbres. Elle le dvisagea d'un il perplexe, et il sourit.
Ne vous en faites pas. Nous n'allons pas rester longtemps. J'ai tout aussi hte que vous
de rentrer l'htel. Encore plus, sans doute.
Il la mena jusqu' une porte surmonte d'une grande arche de pierre. la surprise de
Francesca, un homme lgant aux cheveux poivre et sel se prsenta immdiatement quand
Ian frappa sur l'pais battant de bois.
Monsieur Noble, l'accueillit-il avec un mlange de chaleur et de respect.
Ils entrrent, et l'homme referma la porte derrire eux avant de tapoter sur un digicode. La
jeune femme entendit une serrure se dverrouiller quelque part.
Une lumire verte se mit clignoter, sans doute mise par le systme d'alarme
lectronique.
Alain, je ne sais comment vous remercier pour cette faveur, fit Ian chaleureusement
quand leur hte se retourna vers eux.
Les deux hommes se serrrent la main dans le vestibule faiblement clair, pav de marbre
blanc, Francesca balaya la pice d'un regard perplexe. Ce n'tait pas l'entre de la visite
publique.
Vous plaisantez. C'est un plaisir pour moi, rpondit l'homme voix basse, comme s'il
participait quelque mission nocturne clandestine.
Comment se porte votre famille ? M. Garrond va bien, je prsume ?
Trs bien, mme si nous nous sentons en ce moment comme des chats bousculs dans
leurs habitudes. Notre appartement est en rnovation et, notre ge, il nous est difficile de
nous passer de routine. Comment va lord Stratham ?
Grand-mre dit qu'il est insupportable depuis son opration du genou, mais je pense que
son obstination est un atout, dans ce cas de figure. Il se remet trs vite.
Alain rpondit avec un petit rire :
Transmettez-leur mes amitis la prochaine fois que vous les verrez.
Je n'y manquerai pas, mais vous risquez de les revoir avant moi. Grand-mre a prvu
d'assister l'inauguration de l'exposition Polygnotus la semaine prochaine.
Heureuse nouvelle, en ce cas, rpondit Alain d'un ton qui parut sincre Francesca.
Il regarda la jeune femme avec un intrt poli, et elle perut l'intelligence et la curiosit qui
brillaient dans ses yeux.
Francesca Arno, fit Ian, je suis heureux de vous prsenter Alain Laurent. C'est le
directeur du muse Saint-Germain.
Enchant et bienvenue, mademoiselle Arno, rpondit Alain en lui tendant la main. M.
Noble m'a dit que vous tiez une artiste de talent.
l'ide que Ian avait fait son loge en son absence, la jeune femme sentit le rouge lui
monter aux joues.
Merci. Mon travail est insignifiant par rapport aux uvres que vous ctoyez chaque jour
en travaillant ici. J'adorais venir au muse Saint-Germain quand j'tais tudiante Paris.
Un lieu d'inspiration, tout autant que d'art et d'histoire, non ? rpondit son interlocuteur
en souriant. J'espre que l'uvre que s'apprte vous montrer Ian sera pour vous porteuse
d'une inspiration toute particulire. Nous sommes assez fiers de l'exposer ici, au Saint-
Germain, ajouta-t-il d'un ton mystrieux. Mais je vais vous laisser en juger par vous-mme.
J'ai pris toutes les dispositions ncessaires ; soyez srs que vous ne serez pas drangs. J'ai
dsactiv le systme de surveillance lectronique de la salle Fontainebleau pour vous
permettre d'avoir un peu d'intimit. Je serai dans mon bureau, dans l'aile ouest, si vous avez
besoin de moi.
Ce ne sera pas le cas, fit Ian. Permettez-moi de vous remercier une fois encore d'avoir
accd cette requte que je sais trs inhabituelle.
Je suis certain que vous ne m'auriez pas fait cette demande sans une excellente raison,
rtorqua Alain Laurent d'une voix douce.
Je vous prviendrai ds la fin de notre visite. Ce ne sera pas long.
Laurent esquissa un lger salut plein de naturel et d'lgance, avant de prendre cong.
Ian, que faisons-nous ici ? Murmura Francesca alors que l'homme d'affaires l'entranait
travers un corridor ombreux et vot dans la direction inverse de celle que Laurent avait
prise.
Il ne rpondit pas immdiatement. Perche sur ses talons hauts, la jeune femme avait du
mal suivre ses longues enjambes. Ils s'enfoncrent dans les entrailles de l'norme et
vnrable btiment, traversant parfois des salles que Francesca connaissait. Il s'agissait plus
d'une enfilade de pices que d'une galerie l'intrieur de l'htel particulier avait t
totalement prserv, et on avait l'impression de remonter clans le temps et de visiter un
palais du dix-septime sicle magnifiquement meubl, abritant des trsors de l'Antiquit
grecque et romaine.
Vous voulez que je peigne quelque chose d'autre pour vous en m'inspirant de ce qui se
trouve ici ? Tenta-t-elle.
Non, rpondit-il abruptement sans la regarder.
Il marchait toujours d'un pas aussi press, et le claquement sec des talons de Francesca se
rpercutait contre le haut plafond et les arches de marbre lisse.
Pourquoi allons-nous si vite ?
Parce que je me suis promis de vous offrir cette exprience, mais que je meurs
galement d'envie de vous ramener avec moi l'htel.
Il avait parl d'un ton si factuel que la jeune femme resta bouche be durant un moment,
traversant sans rien dire les salles sombres et silencieuses. Les statues spectrales devant
lesquelles ils passaient gnraient en elle un sentiment croissant d'irralit. Elle avait eu
cette impression presque toute la journe, or cette absurde promenade le long des salles
dsertes du muse achevait prsent de la dsorienter. Ian avana travers une pice troite
qui semblait familire Francesca, avant de s'arrter brusquement.
Si brusquement que la jeune femme faillit basculer en avant, et que ses cheveux lui
retombrent sur le visage. Elle suivit le regard de Ian et carquilla les veux, abasourdie. Elle
resta stupfie durant quelques instants.
L'Aphrodite d'Argos, souffla-t-elle.
Oui. Le gouvernement italien nous la prte pour six mois.
Nous ? Murmura-t-elle en contemplant l'inestimable statue d'Aphrodite.
La lumire de la lune filtrait travers les lucarnes du plafond, baignant la pice et la statue
de leur douce luminescence. La vision de la poitrine aux courbes gracieuses et du visage
sublime sculpts dans le marbre blanc tait littralement couper le souffle.
Le palais Saint-Germain appartient la famille de ma grand-mre. James Noble en est le
protecteur. Cette collection reprsente une de ses nombreuses contributions publiques une
offrande ceux qui partagent son amour des antiquits. Je sige au conseil d'administration
du muse, comme ma grand-mre.
Francesca le dvisagea, et la lueur d'admiration et de respect qui brillait dans ses yeux alors
qu'il contemplait la statue la surprit. Une surprise agrable il se montrait d'habitude si
stoque ! Il y avait davantage en Ian Noble qu'elle ne l'avait cru au premier abord.
Vous vnrez cette uvre..., chuchota-t-elle en se remmorant la rplique de taille
rduite qui se trouvait dans sa rsidence Chicago.
Je l'achterais si je le pouvais, admit-il avec un sourire que Francesca trouva un peu
triste. Mais nul ne peut possder Aphrodite, n'est-ce pas ? C'est du moins ce qu'on m'a dit.
Francesca avala sa salive. Un trange tourdissement l'envahit devant cet homme si
nigmatique.
Pourquoi tes-vous si attach cette uvre prcise ?
Il baissa les yeux sur elle. La lumire de la lune Taisait ressortir ses traits virils, aussi
fascinants que ceux de la desse grecque.
En dehors de sa beaut intrinsque ? Peut-tre a cause de ce qu'elle reprsente.
Francesca frona les sourcils et contempla nouveau la statue.
Elle fait ses ablutions, n'est-ce pas ?
Ian hocha la tte, et son regard s'attarda sur le visage de la jeune femme.
Elle accomplit le rituel de purification. Chaque jour, Aphrodite se baigne et renat des
eaux. Un beau mythe, vous ne trouvez pas ?
Que voulez-vous dire ? demanda-t-elle en le scrutant, ensorcele par son visage sombre
et ses pupilles o se refltait la lumire de la lune.
Il leva la main pour lui caresser la joue. Ses doigts taient chauds, mais Francesca ne put
s'empcher de frissonner.
Que nous pouvons toujours nous laver de nos pchs. Je ne cesse de transiger avec les
miens, Francesca, dit-il calmement.
Ian..., commena-t-elle d'une voix emplie de compassion.
Pourquoi tait-il si convaincu d'tre damn ?
Peu importe, l'interrompit-il.
Il se tourna vers elle, entoura sa taille de ses mains, et l'attira lui. Les yeux de la jeune
femme s'agrandirent.
cause des talons, son bassin tait presque la mme hauteur que celui de Ian ; elle
pouvait sentir ses testicules fermes presss contre son pubis et son membre durci coll
contre sa cuisse gauche. Comment pouvait-il avoir dj une telle rection alors qu'il l'avait
peine touche ? tait-ce l'uvre d'Aphrodite ? Se demanda-t-elle dans un lan fantasmatique.
Ian lui souleva le menton, exposant son visage aux rayons lunaires. Le cur de la jeune
femme commena battre un rythme effrn. Il colla son bassin contre le sien, et l'ampleur
de son rection coupa le souffle de Francesca. Elle sentit ses doigts descendre le long de ses
hanches. Pench au-dessus d'elle, il effleura ses lvres des siennes, comme s'il voulait aspirer
son souffle.
Seigneur, je vous veux..., murmura-t-il d'un ton presque furieux, avant de capturer sa
bouche et d'y plonger la langue.
Subjugue par le contact soudain du corps de Ian contre le sien, Francesca eut l'impression
de prendre feu. Sa force brute, le got de ses lvres la submergrent totalement. Elle vacilla
sur ses talons, et il la serra plus fort contre lui. Les douces courbes du corps de la jeune
femme pousaient les contours de ses muscles durs et de son impressionnante rection. Elle
n'avait jamais t confronte tant de dsir masculin. Ce brasier couvait-il en lui depuis des
heures ? Des jours ?
Elle gmit contre sa bouche, sans dfense contre son ardeur. Les mains de Ian se
dplacrent jusqu' la ceinture de sa robe. Quand il rompit leur baiser avec rudesse quelques
instants plus tard, Francesca tait presque ivre de dsir. Il recula. Les pans de la robe drape
de la jeune femme baient, exposant sa chair blanche aux rayons de la lune. Il repoussa le
tissu en arrire, dvoilant son corps presque nu, et la contempla avec passion. Francesca
sentit ses poumons se vider de leur air quand elle perut la lueur d'adoration et de convoitise
mles qui brillait dans ses yeux. Ses narines frmissaient.
Je veux que vous vous souveniez de ce moment durant tout le reste de votre vie, dit-il
abruptement.
Je m'en souviendrai, rpondit-elle docilement.
Qui pourrait oubl ier une exprience aussi intense ? Songea-t-elle. Et pourtant, la
signification implicite de ces mots la ttanisait.
Asseyez-vous l, fit-il en lui prenant les hanches.
Elle ouvrit la bouche pour exprimer son incomprhension, mais il la guida jusqu'au
pidestal qui soutenait la statue d'Aphrodite. Elle s'assit sur le rebord de marbre et ressentit
la froideur de la pierre travers le mince tissu de sa robe. Ian posa les mains sur ses genoux
et lui carta les jambes. Il s'agenouilla devant elle.
Ian ? Souffla-t-elle d'une voix effraye.
Elle crut sentir ses mains trembler quand il fit descendre sa culotte le long de ses cuisses,
et les muscles de son vagin se contractrent dans l'attente de ce qui allait arriver.
J'ai cru que je pouvais attendre. Je me suis tromp, lcha-t-il d'une voix rauque,
empreinte d'une nuance de regret. (Il la regarda droit dans les yeux en caressant ses cuisses
et ses hanches, et elle perut la chaleur de sa propre chair se communiquer au marbre froid.)
Si je ne gote pas votre sexe, je crois que je n'y survivrai pas. Et si je vous gote, je ne
pourrai plus m'arrter. Je vais devoir vous prendre, ici et maintenant.
Seigneur..., murmura-t-elle d'une voix tremblante.
Un liquide tide et familier afflua au creux de ses jambes. La tte sombre de Ian se pencha
entre ses cuisses, et ses doigts explorrent sa fente avec ravissement. Francesca carquilla les
yeux en sentant la pointe chaude de sa langue s'infiltrer entre ses petites lvres, en qute de
son clitoris.
Elle agrippa les cheveux noirs et pais de Ian et laissa chapper un long gmissement,
rejetant la tte en arrire. travers les brumes hbtes de la volupt, elle aperut Aphrodite
qui veillait sur son initiation avec une tranquille et suprme satisfaction.
Francesca eut l'impression de fondre sur le pidestal de marbre, perdant toute conscience
d'elle-mme, abandonne totalement cette sensation quasi lectrique, le glissement sensuel
de la langue de Ian au creux de son sexe. Elle crispa les doigts dans ses cheveux, savourant
leur texture. Comment les autres tres humains faisaient-ils pour vivre, manger, travailler et
dormir alors que ce plaisir divin tait leur porte ?
C'tait peut-tre lui la rponse cette question. Tout le monde n'avait pas la chance d'avoir
un amant aussi talentueux et charismatique sa disposition. La bouche et la langue de Ian
taient sans aucun doute les plus habiles du monde...
Il la fit se plier entre ses bras, et elle bascula le dos plus loin sur le pidestal, appuye sur
les coudes, inclinant le bassin pour trouver une position plus confortable. Elle fut
rcompense par un grognement sourd de son amant satisfait, qui la fit vibrer de plaisir. Il lui
carta davantage les jambes et enfouit totalement son visage entre ses cuisses. L'cho du cri
de Francesca se rpercuta contre la vote de pierre quand il plongea profondment sa langue
dans son vagin.
Ian !
Il lui fit l'amour avec sa langue, d'abord lentement et langoureusement, puis de plus en
plus passionnment, au rythme des mouvements instinctifs de la jeune femme. Avec un
gmissement, il tendit ses larges mains autour de ses hanches, enfona les doigts dans la
chair de ses fesses et l'immobilisa sa merci. Elle hoqueta quand il l'aima avec encore plus de
passion, enfouissant sa langue en elle et utilisant sa lvre suprieure pour faire doucement
pression sur son clitoris. Il oscilla la tte entre ses cuisses, la stimulant avec une prcision
diabolique. Les yeux de Francesca s'carquillrent.
Elle releva la tte vers la desse du sexe et de l'amour, cloue sur place, tandis qu'un
orgasme la secouait violemment.
Ian lui souleva le bassin et continua explorer son sexe de sa bouche conqurante,
arrachant jusqu' la dernire parcelle de plaisir au corps tremblant de la jeune femme. Quand
elle s'apaisa, il continua un moment lcher le miel qu'il avait rcolt. Il avait toujours su
qu'elle serait dlicieuse, rien qu'au parfum de sa bouche et de sa peau, mais il n'avait pas t
prpar goter un tel nectar.
Il tait ivre d'elle, et il en voulait plus.
Son membre rigide n'avait que faire de ces rflexions. Il attira Francesca lui, dposant un
baiser humide sur le havre sensuel de son ventre, puis se redressa en grimaant de plaisir. Le
got sublime de sa peau avait temporairement apais son dsir, mais ce rpit fut de courte
dure. contempler le corps de la jeune vierge demi nue tal sur le pidestal, clair par
les rayons lunaires qui faisaient scintiller ses yeux sombres et luire la fente moite de son
sexe, il se dchana de plus belle.
Il la souleva, apprciant la faon dont elle se lovait contre lui. Elle pouvait se montrer
parfois si rtive et soudain si docile... En la voyant reposer la tte sur son paule avec tant de
confiance, une bouffe de tendresse l'envahit. Qui ne fit qu'attiser son envie de la possder.
Il la porta jusqu' un fauteuil rembourr de velours qui trnait quelques pas du pidestal
d'Aphrodite une sorte de mridienne fabrique pour un roi, si sa mmoire tait juste. Or,
au lieu d'y tendre la jeune femme, il la reposa au sol, sur ses pieds, et lui retira
compltement sa robe qu'il dposa sur le dossier d'une autre chaise. Ensuite, il ta sa propre
veste. Francesca le regarda avec perplexit quand il l'allongea prcautionneusement sur les
coussins du fauteuil.
Louis XIV s'est jadis tendu sur ce sige. Grand-mre m'tranglerait si nous venions ...
dborder dessus.
Le petit sourire de Ian s'largit en entendant le rire cristallin de Francesca. Il lui prit le
menton et souleva son visage pour lui arracher un baiser vorace, avide de son rire. Son
rection se durcit davantage encore quand elle lui lcha timidement les lvres, dcouvrant la
saveur de ses propres fluides sexuels.
Oui... Pourquoi ne goteriez-vous pas un tel dlice ? Souffla-t-il d'une voix rauque en
se dtachant d'elle avec regret pour chercher un prservatif.
La tempte qui rugissait en lui menaait de lui faire perdre tout contrle. Il ne pouvait plus
se fier lui-mme, et ne pourrait bientt plus se fier rien s'il ne la pntrait pas dans la
seconde.
tendez-vous sur le sige, ordonna-t-il d'une voix qui parut excessivement rauque ses
propres oreilles,
Elle s'allongea sur la veste de Ian. Ses jambes et son ventre taient d'une blancheur
d'albtre sous la lumire de la lune, par contraste avec le tissu noir du vtement. Le fauteuil,
sans accoudoirs, tait long et profond, avec un dossier recourb. Le corps de la jeune femme
reposait sur la partie plate, sa nuque tait renverse contre le dossier, ses pieds dpassaient
lgrement au-del du rebord.
Elle tait si belle que la regarder tait presque douloureux. Les dents serres, Ian
dboutonna rapidement son pantalon, le fit descendre jusqu' ses chevilles, puis fit glisser
son boxer, rvlant son membre triomphant. Il prit ensuite son temps pour enfiler le
prservatif et suspendit son geste lorsqu'il remarqua les yeux carquills de la jeune femme,
fixs sur son sexe.
Elle avait peur de lui.
Tout va bien se passer. Je vais aller lentement, la rassura-t-il en droulant le mince
fourreau de latex le long de son membre.
Laissez-moi vous toucher, chuchota-t-elle.
Il se figea, le poing serr autour de la base de son pnis, qui pulsait dans sa paume. La
douceur inattendue de sa requte le dstabilisa. Il imagina Francesca en train de faire ce
qu'elle lui avait demand, l'exquise volupt que lui procurerait le contact de ses doigts, de ses
lvres, de sa langue...
Non, rpondit-il avec une rudesse involontaire. (Il fut envahi par un sentiment de regret
devant son expression due.) Je dois vous pntrer, maintenant. Je n'en peux plus. J'ai
attendu si longtemps... Trop longtemps, ajouta-t-il d'une voix plus douce.
Elle se contenta de hocher la tte, ses grands yeux sombres vrills sur son visage. Il se
dbarrassa de ses chaussures, enleva ses chaussettes et repoussa son pantalon du pied. Sa
chemise lui semblait un fardeau. Il la dboutonna, incapable de dtacher son regard des
cuisses cartes de Francesca et de sa fente luisante.
Il tait trop excit pour retirer compltement ses vtements. Il se pencha au-dessus d'elle,
les genoux appuys contre le rebord du fauteuil, les mains juste au-dessus des paules de la
jeune femme. Il savait qu'il aurait d placer ses genoux entre ses cuisses ouvertes, mais
quelque chose le poussa finalement les placer de part et d'autre des jambes de Francesca,
serrant ses cuisses entre les siennes.
Si belle... et totalement sa merci.
Reculez-vous et accrochez vos mains au dossier, lui intima-t-il.
Une expression de confusion se peignit sur le visage le Francesca, mais elle s'excuta sans
protester, avec une docilit telle qu'il sentit son rection pulser violemment entre ses cuisses,
la fois lourde et brlante. Lorsque la jeune femme eut les bras tendus au-dessus de la tte,
agrippe au rebord du dossier de la mridienne, il lcha un grognement de satisfaction.
J'aurais aim vous attacher, mais comme je ne peux pas le faire ici, vous devrez garder
vos bras dans cette position. Vous m'avez compris ?
Je prfrerais pouvoir vous toucher, fit-elle.
Sa bouche rose sombre en mouvement fit s'emballer le cur de Ian.
Je prfrerais moi aussi que vous puissiez le faire, rpondit-il sombrement en soulevant
son sexe entre ses doigts. Et c'est prcisment pour cette raison que vous les garderez au-
dessus de la tte quoi qu'il vous en cote.
Elle avait de plus en plus de mal respirer, allonge ainsi, cramponne dsesprment au
rebord de bois du dossier, les yeux emplis par l'incarnation mme de la beaut virile et brute
qui lui faisait face. Elle mourait d'envie de poser les mains sur son corps, or elle ne pouvait
que le regarder avec fascination tandis qu'il se touchait. Tenant son membre rigide, il
s'apprta la pntrer. Francesca sentit les muscles de son vagin se contracter, en proie
l'excitation et la crainte. Il avait l'air si pais, si puissant, si gonfl de dsir...
la dernire seconde, il sembla se raviser et relcha son pnis, qui resta suspendu
l'oblique entre leurs deux corps. Il tendit la main vers le soutien-gorge de dentelle noire de la
jeune femme et dgrafa l'attache frontale. Un nouvel afflux de liquide inonda le sexe de
Francesca quand il repoussa les deux bonnets, dnudant ses seins. L'rection de Ian oscilla.
Vnus..., souffla-t-il d'une voix rauque, un lger sourire aux lvres.
Elle patienta, le souffle coup, consume par l'envie qu'il pose les mains sur sa poitrine
frmissante et ses ttons durcis, mais il n'en fit rien. Au lieu de a, il souleva nouveau son
pnis entre ses doigts, releva l'un des genoux de la jeune femme pour l'ouvrir encore
davantage lui, et pressa le sommet de sa verge contre l'entre de son vagin. Elle se mordit
les lvres pour touffer un cri. Il laissa chapper un grognement d'excitation ou de
frustration, impossible dire et flchit les hanches pour commencer faire glisser son
membre au creux du ventre de la jeune femme.
Ah ! Bon sang, Francesca, vous allez me mettre au supplice...
Elle entrevit son visage crisp, plong dans l'ombre, au milieu duquel luisaient ses dents
blanches pendant qu'il grimaait. Dsirant plus que tout le satisfaire, lui donner du plaisir,
elle avana les hanches vers l'avant pour lui faciliter la tche. Elle laissa chapper un
gmissement aigu, traverse par un lancement de douleur, et entendit peine le
rugissement de Ian, lui claqua une main sur sa hanche en guise d'avertissement.
Ne bougez pas, Francesca. Qu'est-ce que vous voulez ? Nous achever tous les deux ?
Non, je voulais j...
Peu importe (Elle se rendit compte que la respiration de son partenaire s'tait faite
haletante.) a va mieux, maintenant ? demanda-t-il au bout d'un moment entre deux souffles
rauques.
Elle comprit qu'il parlait de la douleur qu'elle avait ressentie. Comment savait-il qu'elle
avait eu si mal ? Elle prit alors conscience que son sexe tait toujours demi enfonc en elle.
Ses muscles internes se contractaient et pulsaient autour de la chair vibrante. C'tait encore
un peu inconfortable, mais le plus fort de la douleur tait pass.
Ian en elle. Fusionn elle.
a ne me fait pas mal, chuchota-t-elle avec un respect ml de crainte.
Elle vit la pomme d'Adam de son amant saillir alors qu'il dglutissait. Il ta la main de son
genou et tendit les doigts entre ses cuisses.
Oooh, gmit-elle quand il commena masser son clitoris avec son pouce.
Il semblait connatre exactement la pression ncessaire pour la faire se tordre de plaisir. La
sensation omniprsente de son membre pais en elle ajoutait une dimension supplmentaire
l'excitation qu'il lui procurait.
Arrtez de gigoter, lcha-t-il d'une voix o perait un mlange d'exaspration, de
tendresse et de dsir exacerb.
Ses caresses la mettaient dans un tat d'incandescence presque insupportable. Il poussa le
bassin en avant avec un grognement qui sembla lui dchirer la gorge et s'enfona presque
compltement en elle. Il restait tout juste assez d'espace sa main glisse entre eux. La
douleur diffuse que ressentait toujours Francesca se dilua dans une sensation de plaisir
intense tandis qu'il continuait la caresser.
Ian ! Gmit-elle.
Il avana encore les hanches, pressa les doigts plus fermement encore contre son clitoris,
puis donna un coup de reins... une fois... deux fois. Elle gmit sous l'extase, et un nouvel
orgasme vint secouer son corps, les muscles de son vagin serrs autour de lui. Cette fois,
mme au travers des vagues de jouissance qui la submergeaient, elle savait que les
grognements de Ian exprimaient eux aussi le plaisir. Elle jouissait encore quand il ta la main
de son sexe pour enserrer sa taille. Il se retira lgrement avec un son rauque, avant de
replonger profondment en elle.
Aaah, Dieu du ciel, votre chatte... c'est meilleur encore que je ne l'imaginais, rugit-il tout
en donnant un nouveau coup de reins. La seule chose capable de surpasser a, ce sera de vous
baiser sans capote.
Elle frmissait encore sous les derniers assauts de l'orgasme qui ravageait son corps. Ian la
fit trembler davantage encore quand il la pilonna, se faisant de plus en plus conqurant,
heurtant intervalles rguliers son bas-ventre contre le sien.
Il s'interrompit quelques instants plus tard, enfonc totalement en elle, et colla ses
testicules contre l'entre de sa vulve. Elle laissa chapper un cri d'excitation.
Je ne veux pas vous faire mal, mais vous me rendez fou, Francesca, souffla-t-il.
Vous ne me faites pas mal.
Vraiment ?
Elle secoua la tte.
La jeune femme sentit alors le corps de son amant se dtendre. Il recommena lui faire
l'amour, imprimant un mouvement de piston, fluide et rythm, avec ses hanches. Elle touffa
un cri, qui demeura coinc dans sa gorge. Elle savait que Ian se retenait depuis les jours,
prsent, cependant, il la prenait tout entire et sans retenue... et pas seulement, mais avec
une habilet qui l'merveillait. Ses gestes taient la fois subtils et spontans, contrls et
sauvages. C'tait comme s'il injectait patiemment du plaisir en elle, pressant sa chair contre la
sienne jusqu' ce qu'elle ait l'impression d'tre sur le point d'exploser. Elle se mit bouger les
hanches pour accompagner ses mouvements, laissant chapper de petits glapissements
chaque fois que leurs deux corps s'entrechoquaient dans un claquement moite.
Dieu..., grogna-t-il d'une voix la fois misrable et extatique.
Il bougea contre le sige et l'empala avec une telle force que la tte de Francesca heurta le
coussin de velours noir. travers les brumes du plaisir, elle se rendit compte qu'il lui avait
cart les jambes des deux cts du sige, et que ses pieds reposaient maintenant sur le sol. Il
la souleva en mme temps que le fauteuil et donna un nouveau coup de reins, la mchoire
serre.
Ian, laissez-moi, lchez le sige ! Limplora-t-elle alors qu'il plongeait en elle encore et
encore.
Elle sentit les prmices d'un nouvel orgasme sur le point de dferler en elle, et
probablement en lui aussi, Elle avait tellement envie de le toucher...
Non, rtorqua-t-il d'une voix crispe.
Il dcolla les pieds du sol et retomba sur elle, lchant un gmissement au moment o leurs
corps entraient en collision. Le fauteuil eut un craquement bizarre mais, heureusement,
l'inestimable pice de mobilier ne s'effondra pas sous leur poids en un tas de planches. La
tte de la jeune femme heurta la surface matelasse du sige ; ses seins rebondissaient
chaque puissant coup de boutoir de Ian, et cette sensation ne faisait qu'attiser son ardeur. Il
tendit la main vers sa fente pour l'ouvrir plus largement encore, puis inclina les hanches de
manire faire ballotter ses testicules contre la chair rose, faisant tourner son membre en un
mouvement subtil l'intrieur de son vagin.
Pas avant que tu aies joui nouveau, ma beaut.
Ce n'tait pas vraiment comme si elle avait le choix.
La pression qu'il avait fait monter en elle tait insupportable. La jeune femme lcha un cri
en sentant le septime ciel s'approcher nouveau. Ian grogna frocement sous l'emprise du
plaisir et acclra encore le rythme de ses mouvements, laissant la sauvagerie qu'il avait
maintenue si longtemps sous contrle s'exprimer entirement.
Francesca geignit de protestation quand il se retira brusquement d'elle et carta les genoux
pour l'enjamber califourchon. Il avait le souffle de plus en plus heurt. Elle leva les yeux
vers lui, sentant avec dsespoir l'orgasme s'loigner, incapable de comprendre ce qu'il faisait.
travers la pnombre, elle le vit prendre son rection en main et commencer se masturber.
Ian ?
Il gmit comme s'il tait l'agonie et commena jaculer. Francesca eut l'impression
qu'une intense frustration assaillait sa poitrine en le voyant se rpandre hors d'elle. Elle
baissa lentement les bras, envahie par une sensation de vide, de vulnrabilit... et pourtant
excite par le spectacle auquel elle venait d'assister.
Quelques instants plus tard, il baissa la tte et s'effondra au-dessus d'elle, les muscles
bands, aspirant l'air par grandes goules. Elle le trouvait dj magnifique quand il rugissait
au-dessus d'elle, possdant son corps et son esprit, mais il l'tait davantage encore agenouill
ainsi, tremblant et puis par la passion.
Elle tendit les bras vers lui et entoura doucement son cou de ses bras, caressant les
muscles puissants de ses paules. Au contact de sa chair, un frisson la traversa.
Pourquoi...
Je suis dsol, haleta-t-il. Je n'ai pas pu m'empcher de repenser ce qui tait arriv
avec mon ex-femme... la grossesse...
Tout va bien, Ian, murmura-t-elle.
Une vague de compassion envahit Francesca lorsqu'elle comprit quelle angoisse terrible il
devait prouver, pour redouter ainsi le risque infime de la mettre enceinte malgr le
prservatif. Elle saisit dlicatement les pans de sa chemise ouverte et les rabattit d'une main
sur son torse, posant l'autre main sur son dos pour l'attirer doucement elle.
Viens, insista-t-elle en percevant sa rsistance.
Il hsita un moment mais finit par cder. La masse solide et puissante de son corps press
contre le sien sembla relever, pour Francesca, d'un petit miracle.
Je dsirais tellement ce moment. Je n'ai pas eu... il n'y a eu personne d'autre depuis
plusieurs semaines. a ne me ressemble pas. Je sentais que a montait en moi, et j'avais
peur... Le prservatif n'tait pas suffisant. C'est idiot, marmonna-t-il, haletant.
Elle lui embrassa l'paule et caressa son large dos ruisselant de sueur. Une inexplicable
sensation de gratitude emplit sa poitrine l'ide que, depuis plusieurs semaines, il avait mis
de ct ses pratiques sexuelles habituelles.
Avait-elle quelque chose voir avec cette abstinence ?
Non. Srement pas.
Tout cela l'effrayait un peu. La personnalit de Ian tait pleine de mystre, comme son
choix dlibr de solitude.
Elle continua le caresser tandis qu'il revenait lui, sans dtacher les yeux du visage
nigmatique de leur gardienne, et se demanda confusment si la desse tait l pour les bnir
ou pour les maudire.
Il demeura perdu dans ses penses durant le trajet en voiture vers l'htel. Assise ct de
lui sur le sige arrire de la limousine, elle gardait la tte pose sur son paule et lui caressait
les cheveux. Au dbut, elle se demanda avec angoisse s'il regrettait son moment de
vulnrabilit au muse son aveu, mais elle finit par se dtendre, berce par son silence.
Elle contempla travers ses paupires mi-closes les lumires de Paris qui dfilaient derrire
les fentres, se remmorant chaque dtail de ce qui tait arriv dans la salle du muse Saint-
Germain.
Elle n'allait quand mme pas regretter une exprience aussi incroyable, n'est-ce pas ?
L'htel George V se situait non loin des Champs-lyses. Le terme luxueux est encore
bien en de de la vrit, songea Francesca en suivant Ian dans l'ascenseur dor.
Lorsqu'il ouvrit la porte devant elle, elle eut le souffle coup en dcouvrant le salon rempli
de mobilier ancien et de splendides draperies, avec une chemine en marbre et des tableaux
originaux des dix-septime et dix-huitime sicles.
C'est par l, fit-il en l'invitant entrer dans une chambre coucher digne d'un roi.
Oh, c'est magnifique..., murmura-t-elle alors qu'elle effleurait la soie damasse du
couvre-lit et qu'elle contemplait la pice dcore avec un got exquis.
Tout en la dvorant du regard, il l'aida ter sa veste, qu'il accrocha un portemanteau.
L'htel est proche de l'endroit o se tiendra ma runion demain matin. Je vais devoir
me lever tt, et je serai probablement parti quand tu te rveilleras. Je te conseille d'aller
admirer la vue de la terrasse quand le jour sera lev ; a te plaira srement. Je te ferai
monter un petit djeuner, et tu pourras t'y installer pour manger, si tu veux. Tu as l'air trs
fatigue.
Elle frona les sourcils devant ce soudain changement de sujet.
Oui, sans doute. La journe a t longue. Je ne peux pas croire que ce matin encore,
j'tais au High links. Tout a me semble un peu... irrel.
En vrit, elle avait l'impression de ne plus tre la mme personne que celle qui avait
ouvert la porte Ian quand il avait sonn la colocation... ou mme que celle qui tait entre
au muse Saint-Germain quelques heures plus tt. Comme si son initiation amoureuse
l'avait, d'une manire ou d'une autre, transforme.
Elle lui jeta un regard nerveux, sans trop savoir ce qu'il attendait d'elle.
Tu pourrais peut-tre te prparer te mettre au lit ? fit-il d'un ton bourru en lui
indiquant la porte de la salle de bains. Jacob nous a livr nos affaires pendant que nous tions
au restaurant. Ton sac est l.
Tu ne veux pas y aller en premier ?
Il secoua la tte et commena dfaire ses boutons de manchette.
Je vais utiliser celle de l'autre suite.
Il y a une autre suite ?
Il hocha la tte.
Jacob y dort la plupart du temps.
Mais pas cette fois ?
Il releva les yeux vers elle.
Non. Pas cette fois. Je te voulais toute moi.
Francesca sentit les battements de son cur marteler ses tempes en pntrant dans la salle
de bains. Elle ta prcautionneusement la robe, le soutien-gorge et le collier, sans cesser de
penser aux derniers mots qu'il avait prononcs.
Dans le miroir, elle vit pourquoi Ian lui avait trouv l'air fatigu. Son visage tait ple
contrairement ses lvres rougies et enfles par la passion, et ses yeux semblaient
inhabituellement grands, souligns de cernes sombres. Elle avait prvu de prendre une
douche mais elle se sentit soudain trop puise.
Elle se nettoya le visage, se brossa les dents et contempla avec perplexit son sac de nylon
pos sur un tabouret recouvert d'un coussinet brod. Il n'avait pas sa place dans un tel
endroit.
Comme elle, sans aucun doute.
Aprs une soire comme celle qu'elle venait de vivre, elle se sentit compltement ridicule
en enfilant le pantalon de yoga et le tee-shirt large qu'elle avait emports en guise de pyjama.
Elle se passa de la crme hydratante sur le visage et se peigna les cheveux avant de quitter la
pice. Quand elle retourna dans la chambre, Ian tait tranquillement assis sur le luxueux
sofa, en train de tapoter sur son tlphone portable. Elle se figea et l'observa avec un mlange
l'admiration et de dsir. Il ne portait qu'un simple pantalon de pyjama noir qui lui retombait
assez bas sur les hanches. Les courbes de son torse, sa taille droite et ses larges paules
taient sublimes. Il n'avait pas un gramme de graisse, et il accordait tant d'importance sa
discipline personnelle qu'elle n'imaginait mme pas quels exercices quotidiens il pouvait
s'astreindre. Ses courts cheveux noirs, sa nuque et ses tempes semblaient lgrement
humides.
Elle n'avait jamais vu un aussi bel homme de sa vie. Et elle tait certaine de ne jamais lui
trouver d'gal.
Il releva les yeux et vit qu'elle tait plante l, sur le seuil de la chambre, ttanise par son
regard impitoyable. Il dtourna la tte et reprit ce qu'il tait en train de faire.
Pourquoi ne te mets-tu pas au lit ? fit-il en continuant taper son message.
Elle commena ter les coussins dcoratifs et releva les draps scandaleusement luxueux.
Enlve tes vtements, lui lana-t-il depuis l'autre extrmit de la pice quand elle fit
mine de se glisser dessous.
Elle s'immobilisa et se tourna vers lui. Il n'avait pas lev les yeux de son tlphone. Elle
commena ter son pyjama, et sa respiration s'acclra.
Pourquoi ne la regardait-il pas comme il l'avait fait dans l'avion quand elle s'tait
dshabille devant lui, en suivant chacun de ses mouvements avec des yeux brillants de dsir
?
Elle se mit au lit et tira les draps et la couverture elle. Ian resta l'autre bout de la
chambre, toujours occup sur son tlphone. Les paupires de Francesca devinrent de plus en
plus lourdes ; le lit tait doux et chaud. Elle sombra dans le sommeil.
Il y eut un petit cliqutement, et elle rouvrit brusquement les yeux. Ian avait teint les
lumires. Elle sentit le matelas s'enfoncer prs d'elle tandis qu'il se glissait son tour sous les
draps. Il l'attira lui, entoura sa taille de ses bras et colla le ventre contre son dos. Elle
pouvait sentir qu'il portait toujours son pantalon de pyjama, et aussi... qu'il n'y avait rien
d'autre sous le mince tissu.
Elle se rveilla alors tout fait.
Pourquoi portes-tu un pyjama alors que je suis nue ? Senquit-elle dans l'obscurit.
Il lui carta les cheveux des paules et lui caressa doucement le dos, projetant des ondes de
plaisir travers son corps.
Je serai souvent habill quand tu seras nue.
a n'est pas trs logique, fit-elle en retenant son souffle lorsqu'il effleura d'une main la
courbe de ses seins.
Elle sentit le membre de Ian se dresser contre ses fesses. En rponse, son clitoris
commena pulser.
Il me plat de pouvoir te toucher de la faon que je veux, au moment que je veux.
Pendant que tu restes habill et que tu gardes le contrle absolu de toi-mme ?
demanda-t-elle avec une pointe de colre dans la voix.
Pendant que je reste habill et que je garde le contrle absolu de moi-mme, rpta-t-il
en guise de confirmation.
Mais...
Il n'y a pas de mais , rtorqua-t-il en lui caressant les fesses, un sourire dans la voix.
(Elle sentit son sexe se dresser contre ses fesses, et il soupira, retirant sa main.) Tu ne devrais
pas te plaindre, fillette, la gronda-t-il en la serrant davantage contre lui. Je suis dj
dangereusement proche de la ligne rouge quand je suis avec toi. Tu viens d'ailleurs d'en avoir
une parfaite dmonstration.
C'tait extraordinaire, chuchota-t-elle d'une voix merveille.
Il resta immobile pendant un moment, puis tendit la main vers ses cuisses. Elle hoqueta de
surprise quand il introduisit doucement les doigts entre ses jambes pour englober sa fente de
sa paume, d'un geste la fois tendre et ouvertement possessif.
Je t'ai possde comme j'aurais pu le faire avec la plus exprimente des femmes et tu
tais... vierge, murmura-t-il avec une nuance de rage dans la voix.
Ces mots si crus firent monter le rouge aux joues de la jeune femme. Possde tait bien le
terme. Elle avait t compltement sa merci, tendue sur la mridienne, et elle avait aim
chaque instant de cette prise de possession magistrale.
Je ne suis plus une vierge, dit-elle en tremblant. On pourra le refaire, et tu n'auras pas
t'inquiter autant, cette fois.
Le membre durci de Ian vint une nouvelle fois buter contre les fesses de la jeune femme.
Pendant quelques secondes, elle perut sa tension intrieure... son indcision.
Il retira lentement la main de son entrejambe.
Non. Demain viendra bien assez tt. Il y a beaucoup de choses que je veux t'apprendre.
Tu mrites au moins une bonne nuit de rcupration.
Quelles choses ?
Tu le sauras en temps voulu. Maintenant, dors, La journe de demain sera charge.
Ce n'tait pas exactement le genre de chose qu'il aurait fallu lui dire pour l'aider trouver
le sommeil. Et pourtant, au bout d'une minute, elle finit par se dtendre contre le corps de
Ian, rconforte par sa chaude et dure prsence.
Quand il se rveilla, mergeant de rves sombres et sensuels, Ian sentit le corps nu de
Francesca coll contre lui. Une rection monstrueuse dformait son pyjama, quelques
centimtres des fesses de la jeune femme, et sa main droite enserrait l'un de ses seins
plantureux.
Dieu du ciel.
Il se redressa en grimaant pour regarder l'heure, gardant une main sur la hanche de
Francesca et maintenant son postrieur splendide en contact avec son membre dress. Elle
perut son mouvement et se cambra dans son sommeil, stimulant tant son rection qu'il dut
serrer les dents.
Il ramassa son tlphone et dsactiva le rveil automatique qui menaait de sonner la
seconde suivante. Il aurait d se lever pour se prparer son rendez-vous, mais il reposa le
tlphone sur la table de chevet et abaissa son pantalon de pyjama, librant son membre
rigide du carcan de tissu. Il attira encore davantage lui le corps de Francesca, flchissant les
genoux pour pouvoir enfouir son sexe plus profondment au creux du doux sillon entre ses
fesses. Dieu, que c'est bon ! Songea-t-il en enfonant encore davantage son sexe pais, pris
entre les deux globes de chair. L'excitation qui avait mont en lui toute la nuit au contact du
corps nu de la jeune femme - qui montait en lui, en ralit, depuis l'instant mme o il avait
joui au muse Saint-Germain - rendait son sexe dur comme la pierre. Il maintint fermement
les hanches de Francesca, arqua le bassin, et lcha un grognement de plaisir quand il
s'enfona une fois encore entre ses fesses fermes et satines.
Il se rendit compte qu'elle frmissait contre lui. Il l'entendit hoqueter et prononcer
doucement son nom, mais il tait si captiv par les dlicieuses sensations de ce rveil sensuel
inattendu qu'il tait incapable de faire autre chose que continuer donner des coups de reins,
grogner et prendre son plaisir. Son membre tait norme et raide, merveilleusement sensible
tandis qu'il effectuait des allers-retours dans le sillon chaud et douillet. La jeune femme
voulut tendre le bras en arrire pour le toucher, or Ian lui attrapa le poignet et le replaa prs
de son ventre, l'immobilisant pendant qu'il continuait la pntrer.
Depuis quand le simple contact avec le postrieur d'une femme pouvait-il le mettre dans
un tel tat de frnsie sexuelle ?
Laisse-moi faire, articula-t-il d'une voix rauque en poursuivant son mouvement de va-et-
vient. a ne prendra plus beaucoup de temps.
Effectivement, l'orgasme arriva quelques coups de reins plus tard. Il serra les dents et se
regarda jaculer sur le bas du dos et la courbe suprieure des fesses de Francesca. Dieu du
ciel, cette fille me fait un effet fou, songea-t-il en se rpandant par saccades et en se
demandant si ce plaisir dvastateur finirait jamais. Puis il s'croula sur elle, le souffle court.
Elle geignit quand il s'carta d'elle pour attraper un mouchoir.
Francesca tourna la tte vers lui, et il la dvisagea avec surprise. Elle avait les joues d'un
rose intense, ses lvres rouges et gonfles. Il jeta le mouchoir au pied du lit et s'allongea
contre elle.
a t'a excite ? fit-il en l'embrassant doucement. De me laisser utiliser ainsi ton corps
pour mon plaisir ?
Oui, chuchota-t-elle.
Alors il faut que tu jouisses aussi, ma beaut.
Il glissa les doigts entre les cuisses serres de la jeune femme et dcouvrit son sexe
dlicieusement humide. Elle hoqueta et dtourna la tte, pressant sa joue contre l'oreiller. Il
sourit en introduisant un doigt dans sa fente pour caresser son clitoris.
Je veux pouvoir jouir en toi, Francesca. Partout en toi, murmura-t-il allong contre elle,
la bouche quelques centimtres de son oreille. Tu aimerais a, aussi ?
Oh... oui.
Il va falloir songer un moyen de contraception, alors.
Oui, souffla-t-elle tandis qu'il la massait doucement, fermement.
Irrsistiblement.
Il la scrutait tout en la caressant, fascin par le dlicat battement de ses paupires et le rose
qui assombrissait ses joues. Ses lvres entrouvertes l'ensorcelaient.
Plus tard, je t'attacherai..., chuchota-t-il. Et je t'apprendrai me donner du plaisir par
d'autres moyens encore. Tu aimeras a ?
Oui, rpondit-elle.
La vision de ses lvres tremblantes mettait Ian au supplice, et il commena masser le
clitoris avec plus de force. Elle se cambra contre lui, et il lui donna ce dont elle avait besoin, la
caressant en un mouvement frntique du poignet.
Je veux te donner du plaisir, Ian, reprit la jeune femme dans un souffle.
Tu m'en donnes, grogna-t-il en l'embrassant avec rudesse, malmenant sa bouche
exquise. Et tu m'en donneras.
Elle cria et fut prise de violents tremblements. Il la bera pendant que l'orgasme la
ravageait et pensa avec excitation ce qu'il lui ferait plus tard quand il la retrouverait dans la
suite, docile, prte se soumettre ses moindres dsirs... sa volont.
Elle commena s'apaiser, et il lui embrassa la nuque, gotant la saveur sucre de sa peau.
Un doux gmissement s'chappa des lvres de Francesca.
La lgislation sur la pilule est un peu plus permissive ici. Je connais un pharmacien qui
peut nous en fournir pour plusieurs mois. Tu pourras commencer tout de suite, murmura-t-
il.
Il la sentit se raidir contre lui et contempla le mouvement de sa nuque avec ravissement.
Je n'aurai pas voir un mdecin ?
Quand tu seras retourne Chicago, oui. Mais plus tt tu commenceras, mieux a sera.
Je peux envoyer Jacob faire la course pour que tu commences ce soir mme. J'ai dj parl au
pharmacien. Tu n'as pas de risques de sant particuliers, n'est-ce pas ? Une pression artrielle
leve, des antcdents d'accidents vasculaires ?
Non, je suis en pleine forme. J'ai vu mon mdecin le mois dernier. (Elle s'tendit contre
lui, sur le dos, et le contempla de ses yeux doux et sombres.) Je commencerai ce soir, bien
sr. Je sais quel point c'est important pour toi, Ian.
Merci, fit-il en dposant un baiser sur sa joue, tout en se disant qu'elle tait bien loin
d'imaginer quel point cela avait de l'importance pour lui.
Tandis que Ian se prparait pour sa runion, Francesca se prlassa au lit, comble par ses
baisers et la plnitude de l'orgasme qu'il lui avait procur. Quand elle rouvrit paresseusement
les yeux aprs avoir somnol un moment, elle dcouvrit Ian debout ct du lit, les yeux
poss sur elle. Il tait superbe dans son costume noir assorti d'une chemise amidonne et
d'une cravate bleu clair ; l'odeur piquante de son aprs-rasage envahit les narines de la jeune
femme.
Veux-tu que je te commande un petit djeuner ? demanda-t-il d'une voix basse qui
sembla Francesca comme une caresse au milieu du silence ouat de la chambre. Tu veux
manger sur la terrasse ? Le temps est magnifique.
Je vais le commander. Ce n'est pas la peine de t'en occuper, rpondit-elle d'une voix
ensommeille.
Il hocha la tte et s'carta comme s'il s'apprtait partir. Il eut pourtant une hsitation et
se pencha brusquement sur elle pour l'embrasser pleine bouche.
C'tait indniable ; les baisers de Ian taient les plus... sexuels qu'elle ait jamais connus.
Non qu'elle ait beaucoup d'exprience en la matire, mais tout de mme... Comment un
simple baiser la sauvette pouvait-il lui rappeler ce que c'tait que d'tre la merci de ses
lvres habiles et exigeantes ?
Elle le regarda s'loigner quelques instants plus tard, si grand et si imposant dans son
costume sombre, et elle ressentit un trange mlange de joie et de regret. Une fois qu'il eut
disparu, elle prit une douche, se lava les cheveux et sortit sur la terrasse ensoleille pour les
laisser scher l'air libre, contemplant le merveilleux panorama sur Paris et la clbre
fontaine Art dco des Trois Grces.
Elle appela le room-service et dgusta son petit djeuner l'extrieur, comme Ian le lui
avait suggr. Au milieu de tout ce luxe, l'impression de vivre quelque chose d'extraordinaire
la frappa une fois encore.
Puis elle contacta Davie. Elle essaya surtout de le convaincre qu'elle tait en scurit et
heureuse d'tre Paris avec Ian. Or son ami semblait tout sauf emball par sa petite
aventure. En fait, ses inquitudes soulignaient certaines choses, qu'il tait facile pour elle de
mettre de ct quand Ian tait auprs d'elle, quand il lui faisait l'amour et qu'elle oubliait tout
sauf le dsir qu'elle avait de lui.
Elle se souvint que Ian l'avait paye intgralement pour son tableau, sachant
pertinemment qu'elle ne refuserait jamais de le finir. Elle se remmora en dtail la faon
dont il avait fait fermer le bar pour lui dire qu'il voulait la possder sexuellement, de manire
lui faire perdre ses repres habituels. Elle repensa aussi la faon dont il l'avait convaincue
un peu plus tt de commencer prendre la pilule le plus tt possible.
Quand on y songeait... comment avait-elle pu prendre aussi vite une dcision si lourde de
consquences pour son corps ? Pourtant, c'tait bien ce qui tait arriv, juste aprs que Ian
l'eut embrasse, caresse et fait hurler de plaisir.
Une sensation d'oppression envahit sa poitrine.
Non. a ne s'tait pas pass comme a.
N'est-ce pas ?
Heureusement, elle avait l'excuse du prix de la communication longue distance pour
courter sa discussion avec Davie. Vers la fin de leur conversation, elle commenait
craindre qu'il peroive l'anxit qui couvait dans sa voix.
Dans un tat fbrile, elle enfila ensuite ses vtements de jogging et se rendit compte que
Ian ne lui avait pas donn la cl de la suite. Elle appela la rception, soulage de trouver une
employe qui parlait l'anglais. La femme l'informa que son nom tait enregistr en tant
qu'invite, et qu'elle pouvait passer prendre une cl magntique l'accueil si elle prsentait
ses papiers.
Francesca sortit courir dans les rues de Paris, parcourant d'abord celles parallles, peu
frquentes, avant de revenir le long des grandes avenues touristiques et commerantes,
traversant les Champs-lyses et dpassant l'Arc de Triomphe.
Quand elle fit demi-tour vers l'htel, elle avait russi vacuer une bonne partie de son
anxit et de ses inquitudes. Courir la calmait toujours.
Ian ne l'avait certainement pas manipule au sujet de la contraception. Elle avait intrt
tout autant que lui viter un risque de grossesse. Comment avait-elle pu penser le contraire
?
Sa bonne humeur ne la quitta pas jusqu' ce qu'elle ouvre la porte de la suite pour
dcouvrir Ian en train de tourner en rond comme un lion en cage devant la chemine de
marbre, son tlphone viss l'oreille. Il s'interrompit et la dvisagea.
a ne fait rien, fit-il, les lvres serres, tout en la dtaillant de pied en cap. Elle vient de
rentrer.
Il coupa la conversation et reposa le tlphone sur la chemine.
O tais-tu passe ? demanda-t-il.
Francesca se raidit devant son ton accusateur. Il s'avana vers elle, les yeux brillants
comme des braises.
Je suis alle faire un jogging, rpondit-elle en baissant ostensiblement les yeux sur son
short, son tee-shirt et ses chaussures de course comme pour dire : Eh ! a se voit, non ?
Je me suis inquit. Tu n'as mme pas laiss de mot.
Elle en resta bouche be.
Je ne pensais pas que tu rentrerais avant moi, s'exclama-t-elle, bahie par sa colre
subite. Qu'est-ce qui te prend de t'emporter comme a ?
Les muscles du visage de Ian se crisprent.
C'est moi qui t'ai amene Paris. Je suis responsable de toi. Je prfrerais que tu ne
disparaisses pas comme a, fit-il schement en se dtournant d'elle.
Je suis adulte et responsable. Et je m'en suis trs bien sortie sans toi depuis vingt-trois
ans, merci.
Tu es ici avec moi, reprit-il en faisant brusquement volte-face.
Ian, c'est ridicule !
Elle n'arrivait pas croire qu'il soit si irrationnel. Qu'est-ce qui se cachait derrire sa colre
? Etait-il ce point maniaque, ce point obsd par ses projets qu'il ne pouvait admettre le
moindre cart, comme son jogging matinal ?
Tu ne peux quand mme pas m'en vouloir d'tre alle courir, reprit-elle.
Elle vit un muscle de sa joue tressaillir. Derrire la lueur de colre qui perait dans ses
yeux, elle distingua un puits sombre d'inquitude et d'impuissance. Bon sang... Il s'tait
vraiment inquit pour elle.
Pourquoi ? Malgr l'irritation qu'elle ressentait, elle ne pouvait pas s'empcher d'prouver
de la compassion pour lui. Il s'approcha d'elle, et elle rsista l'en de reculer tant il tait
impressionnant.
Je suis en colre parce que tu es sortie sans laisser un mot pour me dire o tu allais. Si
tu tais rentre plus tt, les choses se seraient passes diffremment, mais a ne change rien
au fait que je prfre que tu n'ailles pas courir les rues d'une ville trangre toute seule. Nous
ne sommes pas Chicago. Tu parles peine le franais !
J'ai vcu Paris plusieurs mois !
Je n'aime pas quand une personne dont je suis responsable disparat sans explication,
rpliqua-t-il sans desserrer les dents.
Il la dtailla des pieds la tte, et elle se rappela soudain qu'elle portait un soutien-gorge
de sport, un tee-shirt moulant et un short. Ses ttons se durcirent lorsque le regard de Ian
s'attarda sur ses seins.
Va prendre une douche, fit-il en se dtournant vers la chemine.
Pourquoi ?
Il posa un bras sur le manteau de la chemine et la toisa.
Parce que tu as encore beaucoup apprendre, Francesca, rpondit-il d'une voix plus
douce.
Elle avala pniblement sa salive.
Tu vas me... punir?
Je me suis fait un sang d'encre quand j'ai dcouvert la chambre vide. Je m'attendais ce
que tu sois l m'attendre. La rponse ta question est oui. Je vais te punir, et je te baiserai
ensuite pour mon plaisir goste. Et si, aprs a, tu n'as pas retenu la leon, je te punirai
nouveau. Autant de fois qu'il sera ncessaire pour que tu comprennes que je n'apprcie pas ta
conduite impulsive.
Les ttons de Francesca se dressrent encore plus contre le fin tissu du soutien-gorge, alors
mme que la colre montait en elle. Une vague de chaleur inonda son entrejambe.
Trs bien, tu peux me punir, mais pas parce que j'ai t faire du jogging. C'est
compltement idiot.
Pense ce que tu veux. Mais tu vas entrer dans la salle de bains, prendre une douche et
enfiler une robe. Tu m'attendras dans la chambre, ajouta-t-il en se dtournant nouveau
pour reprendre son tlphone.
Il composa un numro et pronona quelques phrases courtoises en franais avant de
formuler plusieurs demandes. Il venait de la congdier.
Elle resta plante l un instant, brlant d'envie de dire Ian d'aller se faire foutre, lui et sa
maudite douche, sa maudite robe et sa putain de voix irrsistible.
Une autre part d'elle-mme se sentait coupable d'avoir fait natre sans le vouloir cette
angoisse dans ses yeux.
Une autre encore tait excite par ce qu'il venait de dire. Elle n'avait jamais cess de
repenser la nuit o il avait utilis sur elle la tapette avant de lui administrer la fesse, en
regrettant que les choses aient t interrompues aussi brutalement.
Elle avait envie de voir jusqu'o Ian tait capable d'aller. Elle avait envie de lui donner du
plaisir.
Mais quel prix ? Sinterrogea-t-elle avec anxit en pntrant dans la chambre coucher,
rsigne se plier sa volont. Pourquoi tait-il si indchiffrable ?
Pourquoi la rendait-il si indchiffrable... mme ses propres yeux ?
Aprs avoir pris sa douche, Francesca s'assit nerveusement sur le sofa moelleux dans le
coin salon de la chambre, de nouveau en colre. Comment osait-il la faire poireauter ainsi ?
Prenait-il un plaisir pervers la manipuler comme une marionnette ?
Il tirait les ficelles de bien des faons. Elle mourait la fois d'envie de retourner la salle
de bains pour s'y enfermer double tour et de se caresser pour apaiser les pulsations de son
sexe. L'attente tait insupportable mais, pour une raison mystrieuse, elle renforait
galement son excitation. L'impatience, le dsir... et la crainte mls de ce que Ian avait
l'intention de lui faire.
Elle sursauta quand la porte de la chambre s'ouvrit brusquement, laissant apparatre Ian,
qui pntra dans la pice. Il lui jeta un bref regard avant de se diriger vers le portemanteau
pour accrocher sa veste. Il ouvrit une armoire ancienne en bois de cerisier et se pencha pour
chercher quelque chose l'intrieur. Francesca se raidit, essayant de voir ce qu'il faisait, mais
le battant de l'armoire lui bloquait la vue. Quand il se redressa, elle dtourna la tte ; elle ne
voulait pas lui montrer quel point elle suivait chacun de ses mouvements.
Elle eut un choc quand il revint vers le canap quelques instants plus tard et dposa une
cravache noire sur la table basse. Elle contempla avec des yeux carquills la claquette de cuir
souple l'extrmit de la longue et mince canne, et son cur se mit battre trs fort.
N'aie pas peur, la rassura-t-il doucement.
Elle le regarda.
a a l'air de faire mal.
Je t'ai dj punie. Est-ce que a faisait mal ?
Un peu, admit-elle en baissant les yeux sur la main de Ian, qui tenait ce qu'elle identifia
comme une paire de menottes en cuir noir.
Oh non.
Eh bien, ce ne serait pas vraiment une punition si a ne faisait pas un peu mal, non ?
(Elle contempla son sduisant visage, fascine, hypnotise par le son de sa voix.) Mets-toi
debout et enlve ta robe.
Elle soutint son regard tout en se relevant, puisant force et courage dans le message muet
que lui adressaient les yeux de son amant. Elle laissa tomber la robe sur le sofa. Ian posa son
regard sur son corps; ses narines frmissaient lgrement. Elle fut parcourue d'un frisson.
Veux-tu que j'allume la chemine ?
Non, rpondit-elle, bouleverse par son comportement : il tait la fois
particulirement poli et avait l'intention de la punir.
Elle s'avana vers la chemine.
Reste dos moi, ordonna-t-il quand elle fit mine de se retourner vers lui.
Elle brlait d'envie de jeter un coup d'il par-dessus son paule pour voir ce qu'il faisait
mais, malgr l'excitation et la peur qui la submergeaient, elle parvint se retenir. Parce
qu'elle ne voulait pas qu'il voie quel point elle tait curieuse ? Ou parce qu'elle savait qu'il le
prendrait mal ? Elle l'ignorait elle-mme Elle sursauta quand il lui saisit les poignets.
Du calme, ma douce, murmura-t-il. Tu sais bien que je ne t'ai jamais fait vraiment
souffrir. Tu dois me faire confiance.
Elle ne rpondit rien, submerge par une foule d'motions quand il referma doucement
une des menottes autour de son poignet.
Maintenant, tu peux te retourner, dit-il.
Elle fit volte-face et sentit ses ttons se durcit quand elle se rendit compte qu'il se tenait
tout proche d'elle. Elle n'avait aucun moyen de lui dissimuler son tat d'excitation. Puis il
referma la deuxime menotte autour de son autre poignet. En baissant la tte, il avait les
yeux seulement quelques centimtres de ses seins, que la position en mains jointes de
Francesca mettait particulirement en vidence. Quand il eut fini, elle avait les mains lies
juste devant son pubis.
Ian recula.
Maintenant, lve les bras et place-les derrire ta tte. (Il la regarda excuter ses
instructions.) tire les coudes en arrire et cambre lgrement le dos. Je veux que tes
muscles soient tendus.
Elle fit ce qu'il lui demandait et tira les coudes en arrire, ce qui fit saillir sa poitrine
encore plus en avant. Elle remarqua un lger sourire sur les lvres de Ian. Dans cette
position, elle se sentait extrmement vulnrable et expose.
a va amplifier la sensation, expliqua-t-il en lui tournant le dos pour se diriger vers la
table basse.
La sensation de douleur ? demanda-t-elle d'une voix qui tremblait la fois d'angoisse et
de dsir.
Allait-il prendre cette effrayante cravache ?
Il revint vers elle, mais elle ne vit pas la cravache. Les battements de son cur
s'acclrrent quand elle aperut le petit pot de crme qui lui tait dj familier. Il dvissa le
couvercle et plongea l'index l'Intrieur.
Je t'ai dj dit que je ne voulais pas que tu me craignes.
Elle retint son souffle et frmit quand il introduisit les doigts entre les lvres de son sexe.
Il commena lui masser le clitoris avec le stimulant qui la ferait trs vite trembler
d'ivresse... et de dsir.
Elle se mordit la lvre infrieure pour s'empcher de crier et vit qu'il la scrutait
intensment.
Je tiens souligner qu'il s'agit quand mme d'une punition, nona-t-il d'une voix ferme.
Et je tiens souligner, souffla-t-elle en essayant de ne pas tressaillir, que mme si je t'ai
donn l'autorisation de me punir, j'ai bien l'intention de continuer faire ce qui me plat sans
te demander ta putain de permission.
La main de Ian dlaissa sa fente, et il se dtourna, Francesca touffa un cri de frustration.
Quand il revint vers elle, il tenait la cravache. Elle n'arrivait pas dtacher les yeux du terrible
instrument enserr par la main large et virile de son amant. a avait l'air de faire bien plus
mal que la tapette ou les claques...
carte les cuisses... Si tu veux bien, ajouta-t-il doucement d'une voix teinte d'ironie.
Elle battit des paupires et releva vers lui un regard incrdule. Une vague de chaleur afflua
dans son entrejambe quand elle perut la lueur d'amusement et d'excitation qui brillait au
fond de ses yeux... et la nuance de dfi dans sa voix.
Si Francesca acceptait de faire ce qu'il lui demandait, ce serait parce qu'elle le voulait. La
phrase qu'elle lui avait rtorque tait destine lui en donner la preuve. Elle ragea soudain
en se rendant compte qu'il avait habilement fait en sorte d'obtenir son consentement tout en
lui rvlant elle-mme son propre dsir.
Elle accentua sa position, sans quitter Ian des yeux.
Ta colre fait saillir tes courbes autant que ta posture. Bizarrement, a ne me dplat pas,
murmura-t-il avec un sourire en coin comme s'il se moquait silencieusement, pas seulement
d'elle mais de lui-mme, aussi.
Il leva la cravache, et l'irritation de Francesca fut balaye par un sentiment de peur et
d'agitation. Allait-il viser les fesses, comme il l'avait fait avec la tapette ? Elle contracta les
muscles abdominaux lorsqu'il lui tapota doucement le ventre avec la claquette de cuir. Une
chaleur rotique envahit son sexe tandis qu'il faisait courir doucement le cuir contre sa
hanche.
Il leva la main.
Snap. Snap. Snap.
Elle hoqueta en sentant l'aiguillon du cuir claquer contre sa peau. La sensation se
transforma rapidement en impression de brlure.
C'est trop fort ? Senquit-il en scrutant son visage, puis ses seins. (Il fit passer la
claquette le long de ses ctes puis sous la courbe infrieure de son sein droit. Elle lcha un
gmissement quand il appuya le cuir contre son tton.) Non. Tes jolis seins me disent que
tout va bien.
Il carta de nouveau la cravache et tapota sa poitrine, puis leur courbe infrieure, et enfin
ses ttons dresss. Ses gestes taient rapides, fermes, prcis.
Francesca sentit quelque chose brler en elle. Un liquide moite afflua entre ses cuisses ;
l'intensit de sa propre raction la choqua presque autant que ce que Ian venait de lui faire
subir. Elle ferma obstinment les yeux, submerge par la honte. Quelle sorte de perverse
tait-elle, pour prendre du plaisir une telle chose ?
Francesca ?
Elle rouvrit les yeux au son de sa voix.
a va ?
Oui, rpondit-elle en tremblant.
Le stimulant clitoridien semblait accomplir son office avec encore plus d'efficacit que la
fois prcdente, faisant saillir la petite pointe de chair.
Tu aimes a ? demanda-t-il d'une voix rude.
Je... dteste, murmura-t-elle sous l'emprise la fois de la honte et de l'excitation. Et...
j'aime. C'est si bon...
Grand Dieu...
Les yeux de Ian flamboyaient, mais Francesca avait la nette impression que ce n'tait pas
de colre. Il frappa de nouveau, touchant la courbe infrieure de son autre sein qu'il fit
ballotter lgrement. Elle se mordit la lvre, mais son gmissement vibra dans sa gorge.
Pour ce que tu viens de dire, je vais te mettre les fesses vif, espce de petite...
Elle ne sut jamais quelle sorte de petite elle tait, parce qu'il frappa ses seins encore et
encore, toujours dlicatement, mais assez fort quand mme pour causer une brlure qui
obligea la jeune femme serrer les dents et fermer les yeux. Sans y penser, elle arqua la
poitrine en avant.
C'est bien. Offre-toi moi, l'entendit-elle marmonner tandis qu'il continuait tapoter sa
chair. Maintenant... dis-moi ce que tu aimerais que je fasse ? fit-il en caressant sensuellement
ses deux mamelons avec la cravache.
La jeune femme fermait toujours obstinment les yeux, or la sensation tait exquise. Entre
ses jambes son clitoris pulsait.
Francesca ? Insista-t-il schement.
Oh non. Il n'allait quand mme pas l'obliger le dire. Il fit glisser la claquette de cuir
contre un tton en imprimant un mouvement de torsion qui la fit frmir de plaisir. Elle
hoqueta.
a me plairait que tu...
Il tordit de nouveau la claquette contre son sein et elle trembla.
Dis-le simplement. Il n'y a aucune honte avoir dit-il d'une voix la fois ferme et douce.
Francesca serra la mchoire, partage entre l'envie de dire la vrit et de la cacher. Il massa
dlicatement son mamelon avec le cuir.
a me plairait que tu me frappes... entre les cuisses.
Elle ouvrit timidement les yeux quand il carta la cravache de ses seins sans prononcer un
mot.
Qu'y a-t-il ? demanda-t-elle au bout d'un moment, incapable de dchiffrer son
expression.
Il secoua lentement la tte, et elle comprit qu'il tait abasourdi. Ses narines frmirent, et il
eut soudain l'air froce. Elle crut que son cur allait s'arrter quand elle se rendit compte
qu'il ne s'attendait pas cette rponse.
Je... Oh, Ian, je suis dsole. Vraiment dsole. Ian... ?
Elle tait effraye par sa raction et n'avait aucune ide de ce qu'elle devait dire.
Ne t'excuse jamais d'tre aussi belle.
Il s'avana vers elle, lui saisit le menton et s'empara de sa bouche, la ravageant, la fouillant
de ses lvres et de sa langue. Le got de ce baiser forc commenait tout juste monter la
tte de la jeune femme quand il s'arracha brusquement elle.
Tu me tentes au-del de toute raison...
Francesca demeura haletante. Il avait prononc ces mots comme une accusation, mais elle
commenait comprendre que, dans ces circonstances, cela signifiait clairement qu'elle le
satisfaisait.
cette pense, une chaleur nouvelle envahit son ventre.
Mais tu ne russiras pas me faire flchir, reprit-il d'un ton rauque.
Je n'essayais pas de te faire...
Je vais mener cette punition son terme, souffla-t-il comme s'il se parlait lui-mme.
(Il dposa un tendre baiser sur sa bouche.) Maintenant, penche-toi en avant et prsente-moi
tes fesses. Tu n'es pas oblige d'carter les cuisses puisque tes mains sont attaches. Je vais te
mettre les fesses vif pour avoir os me causer autant d'inquitude.
Quelque chose dans le ton de sa voix fit comprendre Francesca qu'il allait la punir plus
durement que la premire fois. Elle baissa les bras, se pencha en avant et plaa ses mains
lies entre ses genoux. Il commena immdiatement frotter l'extrmit de la cravache
contre son postrieur en une caresse glissante. Ian lui avait dj demand auparavant de
cambrer lgrement le dos. Les muscles de son vagin se contractrent et ses ttons
hypersensibles la picotrent tandis qu'elle arquait la poitrine en avant.
Ian cessa un moment de la caresser. Elle lui jeta un regard anxieux.
Il marmonna un juron inaudible, et elle le regarda avec une excitation croissante
dboutonner son pantalon. Au lieu de le faire descendre sur ses cuisses, il le garda autour de
ses hanches, ouvrant simplement sa braguette pour librer sa puissante rection, laissa son
membre durci l'extrieur, soutenu par son boxer lastique et le tissu du pantalon qui le
maintenaient un angle horizontal.
Francesca contempla son sexe avec stupfaction. Elle ne l'avait encore jamais vu d'aussi
prs ; il ne l'avait jamais vraiment laisse l'approcher. Elle le trouvait magnifique. Comment
pouvait-il marcher tous les jours avec quelque chose d'aussi gros, d'aussi pais entre les
jambes ? Bon, elle devait admettre qu'il n'tait pas tout le temps aussi dur...
Mais tout de mme. La splendeur clatante de ce pnis tait quelque chose de presque
incomprhensible pour elle. Fascine, elle contempla l'pais mat de chair la surface duquel
saillaient quelques veines. Le gland fusel et apptissant lui donnait l'eau la bouche, tout
comme les testicules massifs et rass.
J'aurais d te bander les yeux, dit-il d'un ton sec. Regarde vers le sol, ma belle. (Elle fit
ce qu'il lui demandait, peinant reprendre son souffle. Il frotta la cravache contre ses fesses.)
Tu es prte ?
Oui, geignit-elle.
L'tait-elle vraiment ?
Il tapota son postrieur avec la claquette, et elle gmit. Peut-tre commenait-il
diffrencier ses petits cris d'excitation de ses gmissements de douleur, car il continua sans
ralentir, faisant atterrir chaque fois l'extrmit de la cravache sur un endroit diffrent de sa
peau. Une fois qu'il eut fini de frapper les deux globes de chair, il recommena zro. Les
coups ports sur des endroits dj touchs taient nettement plus cuisants. Elle serra les
dents ; la dmangeaison intolrable de son clitoris l'aidait supporter la douleur lgre sur sa
chair. Comment la cravache pouvait-elle aussi stimuler ses ttons sans les toucher ? Et
pourquoi, au nom du Ciel, avait-elle l'impression que mme la plante de ses pieds la brlait
alors qu'il continuait frapper ses fesses ?
Oooh..., gmit-elle aprs un coup particulirement douloureux.
Penche-toi compltement et place tes mains sur les pieds.
Il avait parl d'un ton si implacable qu'elle ne put s'empcher de se retourner vers lui. Elle
lcha un gmissement tremblant en voyant qu'il avait empoign son membre rigide d'une
main et qu'il tait en train de se caresser tout en continuant la punir. Mme alors, il
remarqua qu'elle l'observait.
Baisse la tte, souffla-t-il d'une voix rauque.
Elle se pencha plus avant, tira les bras et fixa obstinment ses mains poses sur le
sommet de ses pieds. Le grognement sourd que venait d'mettre Ian tait-il signe de plaisir ?
Ses penses volrent soudainement en clats quand il employa ses larges mains pour lui
carter les fesses, exposant sa vulve humide l'air frais de la pice.
Elle lcha un cri quand il abattit la cravache sur sa chair dlicate et gonfle. Il accentua la
pression de ses mains, cartant davantage les grandes lvres.
Pop.
Les genoux de la jeune femme partirent en avant sous l'impact du cuir sur son clitoris
enfl. Elle comprit soudain l'intrt de la cravache en tant que jouet sexuel : c'tait un
instrument prcis, rapide et redoutable en tout cas entre les mains de son amant.
Il lui attrapa aussitt l'paule pour l'empcher de tomber en avant tandis que l'orgasme la
balayait comme un tsunami. Elle gmit encore, perdant toute conscience d'elle-mme
pendant quelques secondes, engloutie dans l'abme de la jouissance. Comme distance, elle
sentit que Ian la tenait contre lui et la maintenait par les hanches alors que des tremblements
la secouaient. Ses doigts n'avaient pas cess de s'agiter entre ses cuisses, la faisant hurler de
plaisir dans une extase interminable.
La guidant de ses mains, Ian la fit avancer sur un ou deux mtres. Les spasmes de la jeune
femme s'attnurent.
Allonge-toi sur le ventre et pose tes avant-bras sur le dossier du sige, fit-il d'une voix
svre.
Dans un tat de semi-hbtude, elle s'allongea comme il le lui avait indiqu sur le large et
moelleux sofa Louis XV. Elle sentit Ian se dplacer derrire elle, le tissu de son pantalon
effleurer ses chevilles, puis l'extrmit de son rection contre ses fesses. Une nouvelle onde
d'excitation naquit travers son corps dj combl.
Il savait dj qu'elle allait le mettre rude preuve, mais il ne s'tait quand mme pas
attendu ce qu'elle le fasse avec tant de prcision... et de cruaut. Il chercha fbrilement un
prservatif et le droula sur son sexe.
a me plairait que tu me frappes... entre les cuisses. Il avait presque fait un arrt
cardiaque quand elle avait dit a. Il essayait de la forcer le supplier de punir ses seins
splendides, ce qu'elle apprciait clairement autant que lui. Et puis elle avait ouvert ses lvres
roses et elle avait dit a. Alors mme qu'il la punissait pour son caractre impulsif. De qui
croyait-elle se moquer ?
Il plaa une main sur le flanc de la jeune femme pour l'immobiliser et empoigna son
membre dress d'une main.
Je vais te baiser. Brutalement, fit-il en contemplant le contraste rotique entre les fesses
rougies de la jeune femme et la peau ple de ses cuisses. Je n'attendrai pas que tu jouisses,
ma beaut. Tu m'as provoqu, et tu dois en accepter les consquences.
D'une main, il lui carta les fesses et exposa sa vulve, avant d'introduire l'extrmit de son
sexe travers la mince fente. Il sentit la douce muqueuse de son vagin s'carter sous la
pression. La chaleur de son sexe traversait la paroi de latex du prservatif. Il agrippa les
hanches de Francesca pour la maintenir en place pendant qu'il s'enfonait en elle jusqu' la
garde, mais elle eut quand mme un sursaut. Les mains de la jeune femme s'agitaient dans le
vide la recherche d'un support auquel s'accrocher. La bouche dforme par une grimace de
frustration, il attendit jusqu' ce qu'elle et empoign le rebord en bois du sige.
Il commena la besogner, se retirant partiellement avant de plonger nouveau en elle,
jusqu' ce que leurs deux chairs entrent en collision avec un claquement moite et qu'elle
pousse un petit cri. L'univers se rduisit la vision du corps nu et soumis de Francesca, la
sensation de friction presque insupportable de son fourreau troit autour de son membre
dur, l'engloutissant, l'puisant... le torturant.
travers les brumes du dsir, il se rendit compte que ses puissants coups de reins
l'intrieur du corps doux et chaud de la jeune femme faisaient glisser peu peu le sige sur le
tapis persan. Ce n'tait pas la faute de Francesca - il ne pouvait s'en prendre qu' lui -, mais il
poussa quand mme un grognement animal.
Ne bouge pas, fit-il schement en resserrant encore davantage l'tau de ses paumes
autour du corps de la jeune femme pour l'asservir son membre furieux.
Son bas-ventre et son pubis heurtaient en rythme les fesses brlantes de Francesca, et il
tait bien trop excit pour se soucier de savoir s'il lui faisait mal ou pas. Bon sang, c'tait si
bon... Il la pilonna encore une fois vigoureusement, et son sexe s'enfona plus profondment
en elle. Un rugissement de plaisir dchira la gorge de Ian tandis que l'orgasme le ravageait de
part en part.
Francesca demeura immobile, la joue presse contre le velours du sige, bouche be,
merveille devant les sensations qu'elle venait de dcouvrir. Toute cette nergie explosant,
se rpercutant en elle... Elle avait l'impression qu'elle allait se souvenir jusqu' la fin de sa vie
du moment o Ian avait succomb au plaisir, profondment enfoui en elle. Le grognement
qu'il avait pouss ce moment avait sembl le dvaster... C'tait comme s'il lui avait arrach
quelque chose de vital l'instant o il s'tait rpandu en elle.
Francesca..., murmura-t-il en l'aidant se redresser.
Le ventre coll contre son dos, il la guida vers le divan. Ils trbuchrent plus qu'ils ne
marchrent, sans briser le contact de leurs deux corps sur la courte distance qui les sparait
du sofa. Ian s'effondra sur les coussins, emportant la jeune femme avec lui. Il s'tendit sur le
flanc gauche, le torse coll contre son dos ; elle sentit les boutons de sa chemise, sa cravate
toujours en place et son sexe raide, encore norme, press le long de son dos.
Ils demeurrent tous deux haletants et pantelants pondant une bonne minute. Elle tait
bouleverse par la caresse de son souffle chaud contre sa nuque et son paule.
Ian ? Linterrogea-t-elle une fois qu'elle eut repris sa respiration, pendant qu'il lui
caressait langoureusement la taille et les hanches.
Oui, rpondit-il d'une voix sourde.
Tu es vraiment fch contre moi ?
Non. Plus du tout.
Mais tu l'tais, avant ? Insista-t-elle.
Oui.
Elle tordit le cou pour l'observer. Une expression panouie se dessina sur le visage de son
amant. Sa main faisait des allers et retours le long de son flanc nu.
Je ne comprends pas. Pourquoi ?
La main de Ian s'immobilisa et sa bouche se fit dure.
Je t'en prie, dis-le-moi..., murmura-t-elle.
Ma mre disparaissait parfois sans donner d'explications quand j'tais enfant.
Disparaissait ? Rpta-t-elle lentement. Pourquoi ? O est-ce qu'elle allait ?
Il haussa les paules.
Dieu seul le sait. Je la retrouvais diffrents endroits... Trbuchant sur une route de
campagne, essayant de nourrir avec des feuilles un chiot apeur, se baignant nue dans une
rivire glace...
Francesca scruta le visage impassible de Ian, et un frisson d'horreur la parcourut.
Elle souffrait d'une maladie mentale ? demanda-t-elle en se rappelant ce que Mme Hanson
lui avait dit.
Elle tait schizophrne, acquiesa-t-il en tant la main de sa hanche pour se recoiffer
sommairement. Sous forme aigu. Mais elle pouvait parfois aussi se montrer paranoaque.
Et elle tait... Est-ce qu'elle tait comme a tout le temps ? Interrogea la jeune femme en
forant le nud qui lui bloquait la gorge.
Le regard bleu de Ian erra sur son visage. Elle essaya de dissimuler son inquitude,
devinant qu'il prendrait a pour de la piti.
Non. Pas tout le temps. Parfois, c'tait la plus douce, la plus gentille, la plus aimante des
mres au monde.
Ian..., fit-elle d'une voix douce alors qu'il commenait se redresser.
Elle sentit qu'il s'loignait d'elle et se maudit d'avoir provoqu cette raction chez lui.
Ne t'inquite pas, dit-il en ramenant ses longues jambes au sol sans la regarder. a
t'aidera peut-tre comprendre pourquoi je n'ai vraiment pas envie que tu disparaisses dans
la nature comme a.
La prochaine fois, je te laisserai un mot ou un message, mais je continuerai faire ce
que j'ai envie, rpondit-elle en l'observant avec nervosit.
Elle ne pouvait pas lui promettre de passer son temps l'attendre juste pour l'aider
calmer son anxit.
Il tourna brusquement la tte vers elle, et elle perut son irritation. Allait-il lui dire qu'elle
ferait mieux de lui obir si elle ne voulait pas que leur arrangement prenne fin ?
Je prfrerais que tu te contentes de m'attendre si une situation semblable se reproduit.
Je sais. Je t'ai bien entendu, fit-elle doucement. (Elle se rassit et posa la bouche sur la
mchoire serre de Ian.) Et je m'en souviendrai avant de prendre mes propres dcisions.
Il ferma quelques instants les yeux, comme pour rassembler ses esprits. Cesserait-elle un
jour de l'agacer ?
Pourquoi n'irais-tu pas prendre une douche avant qu'on sorte faire un tour ? reprit-il
d'un ton brusque en se relevant et en se dirigeant vers la sortie, sans doute pour aller se laver
lui-mme dans l'autre suite.
Une vague de soulagement envahit Francesca lorsqu'elle se rendit compte qu'il n'allait pas
la remettre sance tenante dans un avion pour Chicago parce qu'elle refusait d'excuter ses
quatre volonts. Ce n'tait pas loin d'tre une petite victoire.
Tu ne vas pas encore essayer de me convaincre que... que c'est prendre ou laisser ?
Elle ne parvint pas dissimuler un petit sourire en coin. Il lui jeta un regard par-dessus
son paule, et elle vit un clair traverser ses yeux bleus, voquant l'approche d'un orage dans
le lointain. Son sourire s'vanouit.
Apprendrait-elle un jour tenir sa langue ?
La journe n'est pas encore finie, Francesca.
Sa voix ressemblait une caresse sourde et menaante. Il se dtourna et sortit de la pice.
Quand elle regagna le salon de la suite aprs avoir pris une douche et s'tre habille,
Francesca trouva Ian assis son bureau, son portable ouvert, son tlphone viss l'oreille.
J'ai tudi attentivement son CV. Il a surtout de l'exprience dans la spculation
boursire et les investissements Internet risques. Il n'a pas la fibre de la gestion, l'entendit-
elle dire. (Il leva les yeux vers elle et la regarda entrer dans la pice. Il reprit sans la quitter du
regard :) Ce que je suis en train de vous dire, c'est que vous pouvez embaucher le directeur
financier que vous voulez parmi un groupe de candidats acceptables, Declan. Tant que vous
ne m'aurez pas communiqu cette slection de postulants, ne commencez pas les entretiens.
En particulier avec un franc-tireur comme celui-ci. (Il fit une autre pause.) Il pourrait peut-
tre convenir pour n'importe quelle autre socit, mais pas pour la mienne, ajouta-t-il d'un
ton glacial avant de mettre schement un terme la conversation.
Je suis dsol, dit-il Francesca en se relevant et en tant ses lunettes. J'ai toutes les
peines du monde finaliser le recrutement pour une de mes start-up.
Quelle sorte de start-up ? demanda la jeune femme, intresse.
Il ne lui avait jamais vraiment parl de son travail,
Un concept de jeu social en ligne que je fais tester en Europe.
Et tu as du mal trouver des dirigeants ?
Il se rassit et soupira. Il avait l'air particulirement dtendu - une expression choisie par
Francesca pour dcrire Ian quand il portait autre chose que son costume habituel. Cette fois,
il tait vtu d'un lger pull bleu cobalt col en V sur une chemise blanche et d'un pantalon
noir qui rendait ses hanches et ses longues jambes divinement sexy.
Oui, entre autres, admit-il en tapotant sur le clavier de son ordinateur portable. Mais a
se passe souvent comme a, en fait. Malheureusement, le march orient vers les ados sur
lequel je me positionne semble foisonner de jeunes loups opportunistes qui aiment dpenser
mon argent simplement parce qu'il est l.
Et alors que tu te montres trs novateur en matire de concepts et de marketing, tu
envisages la gestion comme un vieux conservateur austre ?
Il la dvisagea, rabaissa l'cran de son portable et s'avana vers elle.
Tu t'y connais en commerce ?
Pas le moins du monde. Je suis un dsastre financier ambulant. Demande Davie.
J'arrive peine grer mon loyer. Je dduisais juste ton style en affaires de ce que je sais de
ta personnalit.
Il s'arrta quelques pas d'elle et frona les sourcils d'un air amus.
Ma personnalit ?
Tu sais bien, bredouilla-t-elle, les joues en feu. Ce que tu m'as dit sur ton obsession du
contrle.
Il sourit et leva une main pour lui caresser la joue.
Je n'ai pas peur de dpenser de l'argent en grande quantit. Je veux juste tre sr que
c'est pour d'excellentes raisons. Tu es vraiment trs belle, dit-il ni changeant brusquement de
sujet.
Merci, souffla-t-elle en baissant les yeux avec embarras sur sa tunique de coton
manches longues toute simple qu'elle portait enfonce dans un jean taille basse avec sa
ceinture prfre - elle avait simplement attach ses cheveux en queue de cheval pour qu'ils
ne lui tombent pas sur le visage. Je... je n'ai pas apport beaucoup de vtements, reprit-elle.
Je ne savais pas ce que tu voulais faire cet aprs-midi.
Ah ! En parlant de a...
Ian dtacha la main de sa joue et vrifia sa montre. Comme s'il lui avait suffi de se
concentrer sur l'heure, Francesca entendit qu'on frappait l'entre de la suite. Ian se dirigea
vers le seuil et ouvrit la porte. Une femme sduisante d'environ quarante ans, vtue d'une
robe brun chocolat et juche sur des talons d'une hauteur impressionnante pntra dans la
suite. Francesca resta plante l btement tandis que Ian changeait des formules de
politesse en franais avec l'inconnue. D'un geste de la main, il invita la jeune femme se
joindre la conversation.
Francesca, je te prsente Marguerite. C'est mon assistante en shopping. Elle parle le
franais et l'italien, mais pas l'anglais.
Francesca changea les prsentations dans son franais rudimentaire. Elle lana Ian un
regard interrogateur en voyant la femme sortir un mtre mesurer et un instrument en bois
mystrieux de son grand sac main. Marguerite s'approcha de Francesca en souriant.
Ian ? Qu'est-ce qui se passe ? Senquit Francesca en voyant la femme dposer son sac et
l'instrument en bois puis drouler le mtre.
Francesca, abasourdie, carquilla des yeux incrdules quand Marguerite enroula d'un geste
preste le mtre autour de ses hanches.
Lin Soong a un talent incroyable pour deviner la taille des gens pour le prt--porter, et
mme leur pointure. C'est elle qui t'a command la robe que tu portais hier soir, et je dois
dire qu'elle a fait du bon travail. Cependant, je pense qu'il serait mieux de noter tes
mensurations prcises pour des vtements plus haute couture, dit Ian d'un ton dsinvolte
depuis l'autre ct de la pice.
La jeune femme releva les yeux, estomaque, quand la femme enroula d'un geste habituel
le mtre autour de sa poitrine. Ian tait en train de ranger des dossiers dans sa mallette, or il
s'interrompit en voyant son expression.
Ian, dis-lui d'arrter a, marmonna Francesca entre ses dents, comme si elle risquait
moins d'offenser Marguerite en parlant voix basse oubliant que cette dernire ne parlait
pas l'anglais.
Pourquoi ? Questionna-t-il. Je veux juste rassurer que ta nouvelle garde-robe t'ira
parfaitement.
Marguerite reprit le mystrieux instrument en bois, que la jeune femme identifia enfin
comme un mesureur de pointure. Francesca passa devant elle, les traits crisps, et s'approcha
de Ian.
Arrte a. Je ne veux pas de nouveaux vtements, siffla-t-elle en jetant un regard en biais
Marguerite qui affichait un air perplexe.
Il se pourrait que je t'invite m'accompagner dans des endroits qui requirent un code
vestimentaire plus strict, dit-il en refermant sa mallette d'un geste sec.
Je regrette, mais je crains de ne pouvoir t'accompagner si tu ne juges pas mon apparence
convenable.
Il la toisa, les narines frmissantes, percevant clairement sa colre. Marguerite posa une
question en franais depuis le ct oppos de la pice. Les yeux de Ian flamboyaient, mais
Francesca soutint son regard avec dtermination. Il passa devant elle et adressa quelques
phrases en franais Marguerite.
La femme hocha la tte, sourit chaleureusement Ian, ramassa son sac et prit cong.
a t'ennuierait de me dire quelle mouche t'a pique ? demanda-t-il une fois que la porte
se fut referme derrire son assistante.
Son ton tait froid, ses yeux luisaient de colre.
Je suis dsole. C'tait trs gnreux de ta part, mais je devine quelle sorte de vtements
Marguerite achterait ou ferait confectionner pour moi. Je suis tudiante, Ian. Je ne peux pas
m'offrir ce genre de choses.
Je le sais. C'est pour a que je te les achte.
Je t'ai dj dit que je n'tais pas vendre.
Et je t'ai dj dit que cela faisait partie des choses que je pouvais t'offrir, rpliqua-t-il
schement.
Eh bien, cela ne m'intresse pas.
J'avais t clair sur les conditions de notre arrangement. Et tu les as acceptes. Je peux
tolrer ton enttement petites doses, mais l, tu es alle trop loin, fit-il en s'avanant vers
elle, visiblement exaspr par son enttement.
Non. C'est toi qui es all trop loin. J'ai pass presque toute ma vie entendre des figures
autoritaires me dire que mon apparence n'tait pas convenable et que je devais la corriger. Tu
me crois vraiment assez stupide pour te donner la permission de faire comme eux ? Je suis ce
que je suis, Ian. Et si tu ne veux pas me frquenter dans ces conditions, j'en suis dsole, dit-
elle d'une voix tremblante.
Il se figea. Elle aurait tant voulu qu'il ne la regarde pas avec ces yeux si perants et si
perspicaces ! Des larmes jaillirent sous ses paupires. Pour une raison mystrieuse, penser
qu'il aurait prfr qu'elle soit diffrente lui dchirait le cur. Elle savait que c'tait un
sentiment irrationnel il n'avait pas voulu la changer elle, juste ses vtements mais elle
ne pouvait pas s'empcher d'tre bouleverse. Ils restrent ainsi sans rien dire pendant
qu'elle tentait de contenir ses larmes.
Tant pis, fit-il au bout d'un moment. (Elle fixait obstinment la fentre de la terrasse
ensoleille, les bras croiss sur la poitrine.) Nous pourrons peut-tre en rediscuter plus tard.
Je n'ai pas envie de dbattre de a avec toi maintenant. C'est une belle journe. Je veux en
profiter avec toi.
Elle lui lana un regard plein d'espoir. Allait-il vraiment lui pardonner d'avoir refus sa
gnrosit ? Elle baissa les bras.
Qu'est-ce que... qu'est-ce que tu prvoyais de faire ?
Il se rapprocha d'elle.
Eh bien, j'avais prvu un peu de shopping avant de djeuner, mais maintenant que je
connais ton opinion sur le sujet, je vais rviser mes projets.
Elle grimaa. Elle savait qu'il dtestait l'imprvu.
Que dirais-tu d'un petit tour au muse d'Art moderne avant le djeuner ?
Elle scruta son visage impassible, mais fut incapable de deviner son humeur.
Oui. Ce serait formidable.
Il hocha la tte et lui ouvrit la porte donnant sur le couloir. Elle passa devant lui et s'arrta
quand il pronona soudain son nom, comme s'il avait hsit lui dire quelque chose et qu'il se
dcidait enfin. Elle tourna les yeux vers lui. -
Je veux que tu saches que je suis loin de rprouver ton apparence. Que tu portes des
perles ou tes tee-shirts informes, je te trouve toujours extrmement sduisante. Tu n'avais
pas remarqu ?
Elle en resta bouche be.
Je... Si. Vraiment. Je voulais juste dire...
Je sais ce que tu voulais dire. Mais tu es une femme magnifique. Je veux que tu en aies
la certitude, Francesca.
J'ai surtout l'impression que tu veux en avoir la certitude. Pour... pour aussi longtemps
que a te conviendra.
Les mots taient sortis tout seuls de sa bouche.
Non, rtorqua-t-il schement. (Il respira lentement, comme s'il regrettait son accs
d'humeur.) Je reconnais que tu as probablement de bonnes raisons de penser a, compte tenu
de ce que tu sais de moi... de ce que j e sais de moi, mme. Mais je me suis aperu que je
dsirais vraiment que tu te voies telle que tu es... que tu connaisses ton pouvoir.
Elle le dvisagea, le souffle court, trouble par ce qu'elle lisait dans ses yeux.
Elle n'en revenait toujours pas quand il lui prit la main et l'entrana hors de la suite.
Francesca devait se rpter constamment qu'il ne s'agissait que d'un arrangement
purement sexuel avec Ian. Car en ralit, elle n'avait jamais rien vcu d'aussi romantique de
sa vie. sa demande, il donna cong Jacob, et ils marchrent tous les deux dans les rues de
Paris. La jeune femme prouvait une euphorie dmesure et ridicule sentir la main de Ian
enserre autour de la sienne, et jetait rgulirement de petits regards de ct pour s'assurer
qu'elle tait vraiment au ct de l'homme le plus sduisant et fascinant qu'elle ait jamais
rencontr.
Je meurs de faim, dit-elle franchement aprs leur brve et agrable visite du muse d'Art
moderne, durant laquelle Ian n'avait cess de l'merveiller par la profondeur de ses gots
artistiques.
Il s'tait montr un compagnon idal soucieux des salles qu'elle dsirait voir, intress
par ses commentaires, rvlant plus que jamais son esprit aiguis et son sens de l'humour.
On pourrait peut-tre manger l ? demanda-t-elle en dsignant du doigt un petit bistrot
avec terrasse dans la Rue Goethe.
Lin nous a rserv une table prive au Cinq, fit Ian en parlant du restaurant luxueux de
l'htel George V.
Lin Soon..., rpta Francesca d'un ton rveur en observant un couple install en terrasse
la femme attrapait dans une assiette des amuse-gueules en riant une plaisanterie de son
compagnon. Elle est trs efficace pour l'organisation, n'est-ce pas ?
C'est la meilleure. C'est pour a que je l'ai embauche, rpondit-il d'une voix crispe en
lui jetant un regard en biais.
Elle fut surprise de le voir s'arrter quelques instants plus tard devant l'entre du bistrot
avant de lui faire signe d'entrer, l'air amus.
Vraiment ? demanda-t-elle, tout excite.
Bien sr. Mme moi, je suis parfois capable de spontanit. En trs faible quantit, cela
va de soi, ajouta-t-il sur le ton de l'humour.
C'est la journe des miracles, dcidment, le taquina-t-elle.
Il cligna les yeux d'un air lgrement surpris quand elle s'leva sur la pointe des pieds pour
l'embrasser sur la bouche avant qu'ils prennent place une table en terrasse.
Tu veux boire quelque chose en plus de ton eau gazeuse ? Senquit-il poliment quand le
serveur s'approcha de leur table.
Elle secoua la tte.
Non, juste de l'eau, merci.
Ian commanda les boissons, et le serveur s'loigna. Elle lui adressa un sourire, heureuse,
admirant comme le bleu de ses yeux paraissait lectrique mme l'ombre des arbres qui les
surplombaient.
Tu m'as dit une fois que tu ne t'tais jamais vraiment panouie avant d'entrer
l'universit. Mais comment se fait-il que tu n'aies jamais eu une relation durable avec un
homme depuis ces annes-l ?
Elle vita son regard. Son exprience des hommes ou son manque d'exprience n'tait pas
vraiment le genre de sujet qu'elle avait envie d'aborder avec un homme aussi sophistiqu que
Ian.
C'est juste que a n'a jamais vraiment coll avec personne, j'imagine. (Elle leva
prudemment les yeux et vit qu'il continuait la dvisager. Elle lcha un soupir ; il n'allait pas
renoncer si facilement.) La plupart des garons la fac ne m'intressaient pas,
sentimentalement parlant, en tout cas. Je les aime bien comme amis, en gnral. Je les
comprends mieux que les femmes. Les femmes sont tout le temps du genre : Comment tu
me trouves... ? O as-tu trouv ce jean... ? Qu'est-ce que tu vas mettre la prochaine
soire ? imita-t-elle en levant les yeux au ciel. Mais quand il s'agit de parler vraiment des
hommes... de leur...
Elle laissa sa phrase en suspens, cherchant ses mots.
Des dtails salaces ?
Oui, c'est a, admit-elle avant de rester silencieuse un moment pendant que le serveur
dposait leurs boissons.
Ils passrent commande. Une fois que le serveur fut parti, Ian la regarda nouveau comme
s'il attendait qu'elle parle.
Je ne sais pas ce que tu veux que je te dise..., fit-elle en rougissant. Je m'entends bien
avec les hommes pour faire la fte, pour traner, pour m'amuser, mais je n'ai jamais vraiment
t... sduite. (Elle parlait peine plus fort qu'un murmure.) Par aucun d'entre eux. Ils
taient trop jeunes. Trop ennuyeux. J'en avais assez qu'ils me demandent sans cesse ce que je
voulais faire pour les rendez-vous, ajouta-t-elle dans un lan de franchise. Je veux dire...
pourquoi ce serait toujours moi de dcider ? (Elle hsita en remarquant le petit sourire qui
flottait sur les lvres de Ian.) Qu'est-ce qu'il y a ?
Tu es une soumise sexuelle naturelle, Francesca. Une des plus naturelles que j'aie jamais
vues. Tu es aussi extraordinairement brillante, talentueuse, indpendante... pleine de vie.
C'est une combinaison unique. Tes frustrations amoureuses sont probablement dues au fait
que les hommes ne faisaient pas vibrer la bonne corde en toi, si je puis dire. Il n'existe
probablement qu'une poigne d'hommes sur la plante qui tu peux accepter de te
soumettre. (Il souleva son verre et la toisa tout en buvant une gorge d'eau.) Apparemment,
je suis l'un d'entre eux. Ce qui fait de moi un homme extrmement chanceux.
Elle eut un petit toussotement et le dvisagea. Il tait vraiment srieux ? Elle se souvint de
la premire fois qu'il avait employ le mot soumise , la premire nuit o il l'avait punie
la rsidence. Elle n'avait pas aim ce que sous-entendait ce mot, et avait vit de trop y
repenser depuis.
Je ne sais pas de quoi tu parles, fit-elle pour couper court la conversation.
Cette fois, cependant, elle ne put s'empcher de penser ce qu'il avait dit, se souvenir du
dgot qu'elle prouvait quand un homme se forait boire pour trouver le courage de lui
faire des avances sexuelles, quand il se comportait avec indcision ou immaturit... l'oppos
exact de Ian.
Ce dernier frona lgrement les sourcils, et elle eut l'impression de voir les pices du
puzzle s'assembler dans son cerveau.
On peut parler d'autre chose ? demanda-t-elle en fixant obstinment les passants sur le
trottoir oppos.
Bien sr, accepta-t-il.
Francesca le souponna d'avoir cd si vite parce qu'il avait dj obtenu les rponses qu'il
dsirait.
Regarde ! s'exclama-t-elle en dsignant d'un hochement de tte trois jeunes qui
passaient dans la rue scooter. J'ai toujours voulu en louer un quand j'tudiais Paris. a a
l'air vraiment chouette.
Pourquoi ne l'as-tu pas fait ?
Le rouge lui monta aux joues. Elle dtourna les veux, priant pour que le serveur arrive avec
leurs entres.
Francesca ? Insista-t-il en se penchant un peu en avant.
Je... euh... Je n... (Elle ferma un instant les yeux.) Je n'ai pas mon permis de conduire.
Pourquoi ? demanda-t-il, perplexe.
Elle essaya de dissimuler sa honte, sans comprendre vraiment pourquoi a la gnait tant
d'aborder ce sujet avec Ian. Un grand nombre de ses amis ne conduisaient pas. Beaucoup de
gens Chicago n'avaient pas leur permis. Caden, par exemple, ne possdait pas de voiture.
Quand j'tais au lyce, je n'en avais pas vraiment l'utilit, et mes parents ne m'y
encourageaient pas. Je n'ai pas pris de cours de conduite, ajouta-t-elle rapidement en
esprant qu'il ne percerait pas jour les efforts qu'elle faisait pour lui masquer la vrit.
La vrit, c'tait qu'elle tait au maximum de son surpoids seize ans. Elle remerciait Dieu
tous les jours que son corps ait t assez jeune pour supporter la perte massive de poids,
qu'elle avait connu deux annes plus tard. sa grande surprise, elle n'avait gard aucune
squelle de ses annes d'obsit. Les kilos avaient fondu comme s'ils avaient reprsent
davantage un symptme psychologique que physique.
Mais les sweet sixteen comme l'affirmait le dicton amricain, avaient t d'abominables
seize ans pour Francesca. Elle s'tait retrouve suivre les cours de conduite avec trois autres
filles de sa classe, trois filles qui par une horrible malchance la harcelaient
rgulirement. Les cours de gym reprsentaient dj une torture quotidienne pour elle, et elle
n'avait pas support l'ide de passer encore plus d'heures dans un lieu confin avec trois filles
hilares qui ricanaient en douce chacune de ses maladresses ainsi qu'un jeune professeur de
gym qui partageait vaguement leur mpris.
Ses parents avaient devin en partie la vrit, et n'avaient pas insist pour qu'elle se rende
aux cours.
L'ide les humiliait presque autant qu'elle.
Quand je suis venue minstaller Chicago, je n'avais absolument aucune raison de
passer mon permis. Je n'avais pas l'argent pour me payer une voiture, ni le parking,
l'assurance et l'essence. C'est rest au point mort, expliqua-t-elle Ian.
Comment faisais-tu pour te dplacer ?
Le mtro, le vlo... pied, fit-elle en souriant.
Il secoua la tte, l'air contrari.
Ce n'est pas acceptable.
Le sourire de Francesca s'vanouit.
Qu'est-ce que tu veux dire ? demanda-t-elle, vexe.
Il lui jeta un regard exaspr en constatant qu'elle tait en train de prendre la mouche.
Juste qu'une jeune femme comme toi devrait possder les bases ncessaires pour
contrler sa vie.
Et tu penses que conduire est une de ces bases ?
Oui, rpondit-il d'un ton si factuel que la jeune lemme ne put s'empcher de rire. Avoir
son permis de conduire est une tape du dveloppement personnel, comme faire son premier
pas... ou apprendre dominer ses impulsions, ajouta-t-il tandis qu'elle ouvrait la bouche pour
protester.
L'arrive du serveur apportant leurs entres interrompit provisoirement leur discussion
pour le moins tendue.
Les formules des dictons ne sont pas le fait du hasard, tu sais, dit-il pensivement au bout
d'un moment en fixant la salade de Francesca. Quand on parle d'tre aux commandes de sa
vie, de piloter son existence, d'avoir le volant bien en main...
Elle le contempla en se souvenant de tout ce qu'il lui avait dit sur son obsession du
contrle. Il lui adressa un sourire de connivence.
Pourquoi ne me laisserais-tu pas t'apprendre conduire ? fit-il.
Ian..., protesta-t-elle.
Elle prouvait la fois un sentiment de frustration et de vulnrabilit.
Je ne te propose pas a pour te diriger. En fait, j'aimerais que tu aies davantage de
contrle sur ta vie, l'interrompit-il en dcoupant son filet de poulet d'un geste prcis.
Comme elle ne rpondait rien, il releva les yeux vers elle.
Allez, Francesca..., l'encouragea-t-il. Un peu de spontanit !
Haha, fit-elle d'un ton sarcastique, sans pouvoir retenir un sourire. (Elle eut l'impression
de fondre quand il lui rendit son sourire avec une lueur sexy et diabolique dans les yeux.) On
croirait presque que tu veux m'apprendre conduire ici, Paris, ds qu'on aura fini de
djeuner.
C'est parce que c'est prcisment mon intention, dit-il en saisissant son tlphone.
Ils s'attardrent un moment au bistrot, bavardant, sirotant leur caf, et attendant que
Jacob arrive avec la voiture que Ian avait demande.
Le voil, fit-il en dsignant du regard une berline BMW noire et rutilante, avec des vitres
teintes.
Francesca l'avait entendu demander Jacob au tlphone d'amener une voiture bote
automatique l'adresse du caf. Moins d'une demi-heure plus tard, il tait l. C'tait trange
de songer aux choses qu'on pouvait obtenir instantanment quand l'argent n'tait pas un
problme.
Elle n'arrivait pas croire qu'elle lui avait parl de cette histoire de permis. Elle sourit
Jacob, qui tendait les cls Ian.
On ne peut pas vous dposer ? demanda-t-elle au chauffeur qui s'cartait sur le trottoir.
Je vais rentrer pied l'htel. Ce n'est pas loin, la rassura Jacob d'un ton chaleureux
avant de les saluer et de tourner les talons.
Ian ouvrit la porte du ct passager la jeune femme. Elle se sentit soulage qu'il ne tente
pas de lui apprendre conduire dans la circulation intense des avenues parisiennes. Pourtant,
elle restait convaincue qu'un dsastre allait se produire.
C'est une trs belle voiture, dit-elle en prenant place l'intrieur et en regardant Ian
reculer le sige du conducteur pour l'adapter ses longues jambes, tu n'aurais pas pu louer
une vieille guimbarde ? Et si je cassais celle-l ?
Tu ne vas pas la casser, rpondit-il en commenant conduire dans les rues troites.
(Les nuages avaient envahi le ciel, masquant le soleil superbe dont ils avaient eu la chance de
bnficier en cette matine d'automne.) Tu as d'excellents rflexes et de bons yeux. J'ai
remarqu a lors de notre petite sance d'escrime.
Il lui jeta un coup d'il en biais et la surprit en train de le contempler. Elle battit des
paupires et dtourna les yeux. C'tait seulement la deuxime fois qu'elle le voyait conduire
aprs cette nuit mmorable o il l'avait entrane hors du salon de tatouage. Elle tait
incapable de dtacher le regard de ses larges mains poses sur le volant de cuir avec lgret
et assurance, comme celles d'un amant. Bizarrement, Cela lui fit penser la faon dont il
avait tenu la cravache ; un frisson la parcourut.
L'air conditionn ne te gne pas ? demanda-t-il avec sollicitude.
Non, a va. O allons-nous ?
On retourne au muse Saint-Germain, murmura-t-il. C'est ferm le lundi. Il y a un
grand parking l'arrire, o tu pourras t'entraner.
Francesca s'imagina aussitt en train de foncer dans le mur du magnifique palace, sans trop
savoir si le fait qu'il appartienne au grand-pre de Ian reprsentait une circonstance
attnuante ou aggravante. En tout cas, ce serait bien la pire faon de rvler son existence au
vieux comte.
Vingt minutes plus tard, elle tait assise au volant de la berline, et Ian avait pris le sige
passager. C'tait trs trange d'tre la place du conducteur, et d'avoir Ian son ct.
Je crois que je t'ai expliqu toutes les bases, fit-il aprs lui avoir dcrit toutes les pdales
et les mcanismes de contrle. Garde le pied sur le frein et dmarre.
Dj ? Gmit-elle nerveusement.
L'objectif est de faire bouger la voiture, Francesca. Tu ne peux pas faire a en restant
gare.
Elle fit ce qu'il lui demandait, le pied viss sur la pdale de frein.
Maintenant, relve le pied. C'est a. (La voiture avana de quelques centimtres sur le
parking vide.) A prsent, tu vas commencer appuyer sur l'acclrateur... doucement,
Francesca, ajouta-t-il tandis que la voiture se ruait en avant.
Elle appuya brusquement sur la pdale de frein, et ils furent tous les deux projets en
avant, retenus par leurs ceintures de scurit. Bon sang...
Elle jeta un regard nerveux Ian.
Comme tu peux le constater, fit-il d'une voix ironique, les pdales sont trs sensibles.
Continue exprimenter. C'est la seule faon d'apprendre.
Elle serra les dents et, cette fois, effleura trs doucement l'acclrateur. Comme la voiture
commenait rpondre sa pression subtile, un frisson d'excitation la parcourut.
Trs bien. Maintenant, tourne vers la gauche et dcris un cercle.
Elle donna de nouveau trop de gaz.
Freine.
Une fois de plus, ils furent projets en avant.
Quand je dis freine , a veut dire appuie lgrement sur le frein pour dclrer . Si
je veux que tu stoppes, je te dirai stop. Tu dois apprendre ralentir, ou tu perdras le contrle.
Essaie encore une fois, dit-il gentiment.
Il se montra si patient avec elle durant la demi-heure qui suivit qu'elle en fut tonne. Elle
avait l'impression d'tre une vraie calamit au volant. Ses arrts brusques et ses acclrations
soudaines finirent quand mme par s'amliorer sous la tutelle bienveillante de Ian. mesure
qu'elle avait l'impression de gagner du contrle sur le vhicule, un sentiment d'euphorie
l'envahissait.
Maintenant, va te garer sur l'emplacement l-bas, fit-il en dsignant un point du
parking. (La pluie commena tomber, et de grosses gouttes s'crasrent sur le pare-brise
tandis qu'elle effectuait un tour propre et net sur le macadam, laissant chapper un cri de
triomphe.) Trs bien, la complimenta-t-il en se tournant vers elle. On continuera une fois de
retour Chicago. Je vais demander Lin de m'envoyer un manuel de code par mail pour que
tu puisses rviser dans l'avion demain. D'ici quelques semaines, tu seras prte passer
l'examen.
Francesca tait si excite qu'elle ne releva pas les plans mticuleux qu'il faisait pour
rgenter sa vie. Elle lcha le volant et regarda devant elle, un grand sourire aux lvres.
Apprendre conduire tait l'exprience la plus libratrice qu'elle ait jamais connue. A moins
que son enthousiasme ne soit li au fait que Ian tait son instructeur ?
Tu vois, ce n tait pas si dur, reprit-il tandis que la pluie s'intensifiait. teins tes phares
et arrte les essuie-glaces. Il commence pleuvoir srieusement. Voil, ajouta-t-il en
dsignant les boutons de contrle. Bien. On va juste essayer une dernire chose avant que la
tempte nous tombe dessus. Je veux que tu fasses reculer la voiture tout en la dirigeant vers
la gauche. Oui, comme a, fit-il tandis qu'elle enclenchait la marche arrire. Pense regarder
dans les rtroviseurs. Non... non, dans l'autre sens, Francesca !
Elle paniqua, incapable de dcider dans quel sens tourner le volant pour virer vers la
gauche en marche arrire. Voulant freiner, elle donna en fait un grand coup d'acclrateur
tout en dirigeant le volant dans la mauvaise direction. Comme le vhicule faisait une brusque
embarde, elle appuya fond sur la pdale de frein, avec pour rsultat de faire dcrire la
berline un tte--queue complet sur le macadam tremp du parking.
Une onde d'adrnaline afflua dans les veines de la jeune femme devant cette acclration
inattendue... cette perte de contrle.
Elle poussa un cri de joie.
La voiture s'immobilisa en grondant, et la chevelure de Francesca fut projete au-dessus du
volant quand la ceinture de scurit se bloqua. Elle ressentit une trange sensation de
complicit avec la berline comme s'il s'agissait d'une crature vivante qui venait de se
rebeller. Elle clata de rire.
Francesca, l'interrompit Ian d'un ton sec.
Elle cessa de rire et le regarda avec des yeux carquills. Il avait l'air sonn, et un peu
contrari.
Je suis vraiment dsole, Ian.
Gare la voiture.
tait-il en colre contre elle ? Il avait horreur du dsordre et il dtestait quand elle perdait
le contrle...
Elle suivit prestement ses instructions avec une lgre sensation d'ivresse, sans savoir si
cette raction tait due l'embarde du vhicule ou la lueur qui tait apparue dans les
prunelles de Ian.
Je t'avais dit que c'tait une mauvaise ide, marmonna-t-elle en coupant le contact pour
viter de causer une nouvelle catastrophe.
Ce n'tait pas une mauvaise ide.
Ses lvres serres formaient une mince ligne. Francesca eut le souffle coup quand il
s'approcha d'elle. Il enfouit les doigts dans ses cheveux et tourna le visage de la jeune femme
vers lui. La seule chose dont elle se souvint ensuite, c'est qu'il se pencha et s'empara de sa
bouche. Le flot d'adrnaline qui avait envahi ses veines quand elle avait perdu le contrle de
la voiture n'tait rien ct de l'excitation que faisait natre en elle ce baiser inattendu. Elle
se fondit dans sa chaleur, dans le got de ses lvres, dans la sensation de sa langue
conqurante enveloppant la sienne et submergeant ses sens. Il joua avec sa bouche de
manire si habile qu'elle sentit son entrecuisse s'humidifier. Il releva la tte un moment plus
tard, la laissant haletante.
Tu es si belle, fit-il d'une voix rauque.
Je... je... Quoi ? demanda-t-elle encore tout tourdie par son baiser.
Il sourit et lui caressa doucement la joue.
Va sur la banquette arrire, et enlve ton jean et ta culotte. Il faut que je te gote.
Maintenant.
Elle le fixa, bouche be, avant de jeter un coup d'il nerveux par la fentre de la voiture.
Le parking est dsert. Et mme si un des employs du muse passait, les vitres sont
teintes. Maintenant, fais ce que je t'ai demand, ajouta-t-il doucement. Je te rejoins dans
une minute.
Elle dboucla sa ceinture de scurit, le souffle court, et ouvrit la portire ct conducteur.
Une pluie drue tombait prsent, et elle referma vivement la porte avant de monter en
vitesse l'arrire. Elle se sentait la fois trouble et extrmement excite en se glissant sur
les confortables siges de l'habitacle, Ian tait toujours assis l'avant, la tte baisse. Elle se
demanda s'il tait en train de taper quelque chose sur son tlphone portable, et en fut
bientt convaincue. Lentement, elle commena dfaire sa ceinture et dboutonner son
jean.
Quand elle l'eut t, ainsi que sa culotte, elle se rassit avec l'impression d'tre
compltement folle. Ian ne bougea pas. Le sexe de Francesca frlait le sige, et elle se tortilla
nerveusement, perturbe par la sensation agrable de sa vulve gonfle contre le cuir frais et
lisse. Que faisait donc Ian ? Elle ouvrit la bouche pour lui dire qu'elle avait retir son jean,
lorsqu'il dfit brusquement sa ceinture de scurit.
Elle cessa pratiquement de respirer jusqu' ce qu'il la rejoigne dans l'habitacle sombre,
quelques instants plus tard. Il claqua la portire derrire lui. Maintenant qu'il tait son ct,
l'intrieur de la voiture semblait soudain plus petit, plus intime. Un coup de tonnerre retentit
dans le lointain. La pluie martelait toujours le toit de la berline.
Il la regarda et passa la main dans ses cheveux constells de gouttes de pluie.
Tu sais ce que je veux, dit-il calmement. Allonge-toi sur le dos et prsente-moi ta chatte.
Sa voix grave rsonna dans le silence pesant. Le sexe de la jeune femme se contracta et
pulsa d'excitation. Elle ne put s'empcher de repenser au plaisir divin et subtil qu'il lui avait
prodigu avec sa bouche la nuit prcdente. Elle fit de son mieux pour trouver la position la
plus pratique pour lui. Cette fois-ci, il ne lui dit pas comment faire. Il se contenta de la
regarder caler son dos contre la portire et carter les cuisses aussi largement qu'elle le
pouvait, compte tenu de l'espace confin qui les environnait. Le cur de Francesca battait
une cadence frntique. Ian resta immobile, le regard scell sur sa fminit.
Soudain, il se pencha en avant et repoussa l'un des genoux de Francesca en arrire, lui
faisant lever la jambe jusqu' ce que son pied cogne le plafond. La vision de sa tte sombre
plonge entre ses cuisses tait si exaltante qu'elle laissa chapper un gmissement avant
mme qu'il la touche.
Elle frmit quand il colla sa bouche ouverte contre sa vulve. C'tait chaud, humide et
insupportablement enivrant. Il appliqua une subtile pression sur son clitoris, avant d'carter
les grandes lvres avec sa langue.
Puis il se dplaa un peu, enfouissant encore davantage son visage dans l'entrejambe de
Francesca, stimulant son clitoris avec plus de force que la fois prcdente, le massant,
l'aguichant, le pressant si rudement qu'elle lcha un cri et se cambra brusquement.
Il la maintint immobile dans l'tau de ses mains, la forant subir le dferlement de plaisir
qui la submergeait. Elle s'agrippa son cou avec l'impression de brler et de fondre contre
lui. Il la dvora avidement, presque avec colre, comme si le sexe de Francesca l'avait offens
d'une manire ou d'une autre... Comme s'il voulait montrer qui tait le matre.
C'est lui, songea la jeune femme travers les brumes de l'ivresse. Sa tte heurta la vitre de
la voiture avec un bruit sourd, mais elle ne sentit rien. Comment la douleur aurait-elle pu
exister au milieu de l'extase ?
C'tait pure folie de l'avoir pris comme amant. Quand il se serait lass d'elle, aucun autre
homme ne pourrait plus jamais la satisfaire. Sa vie sentimentale serait fichue.
Il utilisa ses doigts pour carter encore davantage les grandes lvres, puis leva la tte et se
mit caresser son clitoris un rythme de plus en plus frntique jusqu' ce qu'elle hurle son
nom. La vision de sa langue avide contre son sexe tait totalement indcente...
insupportablement excitante. Elle crispa les doigts dans les cheveux de Ian et poussa un
gmissement aigu.
L'orgasme dferla enfin en elle, et elle resta accroche son cou telle une noye agrippe
son sauveteur. Il continua la dguster comme s'il rclamait quelque chose qui lui tait d,
tandis qu'une vague de tremblements la secouait, la maintenant au paroxysme de la
jouissance durant ce qui sembla Francesca durer une ternit. Chaque fois qu'elle
s'effondrait, inerte, persuade qu'il avait tir d'elle la moindre tincelle de plaisir, il bougeait
encore la tte ou la langue et la faisait frmir nouveau.
Aprs lui avoir arrach un dernier frisson, il releva enfin la tte. Les muscles du vagin de la
jeune femme se contractrent quand elle vit le visage de son amant luisant de ses fluides
sexuels. Elle essaya de reprendre son souffle pendant qu'il la contemplait calmement.
Je veux pouvoir aussi te faire a, murmura-t-elle.
Elle tait profondment sincre. C'tait un cadeau extraordinaire qu'il avait le pouvoir
d'offrir. Elle voulait pouvoir lui rendre la pareille.
Tu as dj fait a ? Utilis ta bouche pour donner du plaisir un homme ?
Elle secoua la tte. Il lcha une sorte de grognement, sans qu'elle sache si c'tait une
manifestation de contentement ou d'irritation. Peut-tre les deux.
C'est ce que je pensais. Tu apprendras, mais ce n'est pas le genre de leon qu'on doit
recevoir l'arrire d'une voiture, dit-il en se redressant.
Il ferma les yeux pendant quelques secondes et posa la main sur sa bouche. Puis il l'abaissa
et contempla la jeune femme. Ses yeux, d'abord perdus dans le vague, s'trcirent quand ils se
posrent sur la fente expose de Francesca. Il ferma de nouveau les paupires.
Rhabille-toi, fit-il d'un ton svre en tendant les doigts vers la poigne de la portire. Je
te ramne l'htel, et tu tiendras ta promesse.
ces mots, un sentiment de fbrilit s'empara une nouvelle fois de Francesca. Elle
rassembla ses vtements ttons.
Ian resta silencieux durant le trajet de retour sous la pluie, et Francesca tait trop anxieuse
pour chercher un sujet de conversation. C'tait comme si quelque chose d'important venait de
se produire l'arrire de la voiture, quelque chose qu'elle n'arrivait pas dfinir. Une sorte de
tension paisse s'tait installe entre eux. Elle aurait pu croire qu'il s'agissait simplement
d'un effet de l'orage, mais elle savait pertinemment que a n'avait rien voir avec la mto.
C'tait Ian la source du phnomne.
Quand ils arrivrent l'htel et s'engouffrrent sous le porche d'entre, un jeune groom
salua Ian par son nom. Ce dernier lui donna les instructions ncessaires en anglais pour qu'il
ramne la voiture l'agence de location et lui tendit les cls avec une liasse de billets.
Merci, monsieur Noble, rpondit le jeune homme avec un fort accent franais. Vous ne
pas inquiter. La voiture sera rapporte trs rapidement. Je m'en occuper.
Ne vous inquitez pas. La voiture sera trs vite rendue , le corrigea Ian d'un air
distrait en prenant la main de Francesca.
Oui, comme vous dites. Ne vous inquitez pas. La voiture sera trs vite rendue, rpta le
jeune garon voix haute, puis plusieurs fois voix basse.
Je n'en doute pas une seconde, Gene, fit Ian avec un petit sourire. (La conversation avec
le groom semblait avoir clair un peu son humeur. Il remarqua les sourcils froncs et
l'expression perplexe de Francesca pendant qu'ils prenaient l'ascenseur.) J'ai dit Gene que je
l'embaucherais comme commis l'essai s'il apprenait l'anglais. Il a une tante et un oncle
Chicago, et l'Amrique est un rve pour lui.
Elle sourit en sortant de l'ascenseur.
Fais attention, Ian, lcha-t-elle d'un ton badin.
Il lui jeta un regard surpris en activant la cl magntique de la chambre.
Tu dvoiles ton ct sensible, expliqua-t-elle.
Tu crois ? rpondit-il en lui ouvrant la porte. Je pense que c'est juste du pragmatisme.
J'ai simplement pu constater que Gene est un travailleur acharn. Il essaie toujours d'en faire
plus quand les autres se reposent.
Et bien sr, tu veux ton service ceux qui essaient le plus de te plaire.
Oui, dit-il en ignorant la pointe de sarcasme dans sa voix. (Il l'entrana dans la chambre
coucher et se posta face elle.) Tu as un problme avec a, Francesca ?
Avec quoi ? fit-elle d'un air perplexe.
Avec le fait de participer un arrangement conu essentiellement pour mon plaisir.
Je le fais pour mon plaisir moi, rtorqua-t-elle en relevant le menton.
Il la regarda d'un air amus.
Oui, murmura-t-il en lui caressant la joue de ses doigts calleux, la faisant frissonner. Et
c'est a qui te rend si spciale. Tu prends du plaisir me plaire.
Elle frona les sourcils. Quelque chose dans ce qu'il venait de dire la ramenait au sujet
tabou de la domination et de la soumission.
Il lui lcha la main en souriant.
Je prfrerais que tu ne te poses pas autant de questions, ma douce. Il n'y a aucune
honte tre ce que tu es. En fait, je trouve cela exquis. Tu n'as pas vraiment compris
pourquoi je voulais t'avoir n'importe quel prix, n'est-ce pas ? Tu possdes une qualit que
seul un homme comme moi peut voir... (Il hsita en voyant l'incrdulit se peindre sur son
visage et lcha un profond soupir.) Peut-tre que tu as juste besoin de temps pour accepter,
en ralit. De temps, et de pratique.
Elle battit des paupires en voyant la lueur qui brillait dans ses iris.
S'il te plat, va te changer et mettre une robe. Brosse-toi les cheveux, et attache-les en
arrire. Ensuite, tu iras t'asseoir sur le rebord du lit. Je reviens dans un petit moment. Nous
aurons besoin de quelques accessoires pour cette leon trs importante.
Tu n'as pas vraiment compris pourquoi je voulais t'avoir n'importe quel prix, n'est-ce
pas ?
Les mots de Ian continurent rsonner dans la tte de la jeune femme tandis qu'elle
suivait ses instructions, se brossant les dents en plus. Assise au coin du lit, dans l'attente, elle
sentit l'anxit la gagner.
Elle n'tait pas trs l'aise avec l'ide qu'elle dsirait plus que tout satisfaire Ian
sexuellement, lui donner le mme genre de plaisir qu'il lui donnait elle, mais elle devait
admettre que c'tait la ralit. Elle n'avait pas le droit de le blmer pour ses prfrences
sexuelles alors qu'elle les partageait au plus profond d'elle-mme.
Le fil de ses penses s'interrompit quand Ian pntra dans la chambre, vtu seulement
d'un pantalon noir, le torse et les pieds nus, un petit sac plastique la main. Elle l'observa, le
souffle coup, fascine par la vision de sa semi-nudit. Lui permettrait-il un jour de toucher
et de caresser tous ces muscles fins et saillants, toute cette peau lisse ? Il avait de petits
mamelons pointus presque toujours durcis, pour autant qu'elle eut pu le constater.
Il dposa le sac sur une des chaises au pied du lit et en sortit un objet dot de lanires
noires, qu'elle fut incapable d'identifier, en mme temps qu'autre chose qu'elle connaissait
dj : les menottes en cuir. Il s'avana vers elle, un objet dans chaque main.
Pourquoi faut-il que je porte des menottes pour a ? demanda-t-elle avec une pointe de
dception dans la voix.
Elle s'tait dit qu'elle aurait enfin l'occasion de le toucher.
Parce que je te le dis, fit-il doucement. Maintenant, relve-toi et enlve ta robe.
Elle se mit debout et dlaa son vtement. L'air sur sa peau nue lui parut un peu frais. Ses
ttons se durcirent tandis qu'elle jetait la robe sur le lit.
Il fait un peu froid, mais je pense que ce que j'ai prvu de faire va trs vite te rchauffer.
Tourne-toi. (Une fois encore, elle dut rsister l'envie de jeter un coup d'il par-dessus son
paule pour voir ce qu'il faisait.) Joins les poignets derrire le dos. (Elle sentit son clitoris
pulser quand il fixa les menottes autour.) Maintenant, retourne-toi vers moi.
Un lger hoquet chappa la jeune femme quand elle aperut le petit pot de crme
blanche. Un liquide moite afflua entre ses cuisses. Elle commenait s'habituer ce produit,
au point que sa seule vision faisait immdiatement ragir son corps. Ian fit une pause et
sembla remarquer sa raction en la voyant contempler le pot.
Je connais un docteur en mdecine chinoise Chicago. C'est lui qui m'a recommand ce
stimulant, mais je ne l'avais jamais utilis sur personne avant toi. J'ai la nette impression que
tu l'approuves, dit-il en souriant lgrement.
Il s'approcha d'elle, et elle retint sa respiration, sachant ce qui allait arriver. Il plongea les
doigts entre les grandes lvres de son sexe et massa son clitoris avec la crme. Elle dut se
mordre les lvres pour s'empcher de crier. C'tait peut-tre juste d'imaginer ce qui allait se
passer ensuite, mais elle avait l'impression d'tre dj en feu.
Il abaissa la main, et elle le vit, inquite, ramasser l'objet avec les lanires noires qu'elle
avait remarqu un peu plus tt. Un cble noir y tait attach, reli une petite
tlcommande.
Qu'est-ce que c'est que a ? demanda-t-elle d'une voix un peu effraye.
a, c'est un instrument conu pour ton pur bonheur, ma belle. N'aie pas peur, ajouta-t-il
en s'avanant vers elle. C'est un vibromasseur tlcommand. (Il commena ajuster les
lanires autour de ses hanches, et elle le contempla avec un mlange de fascination et
d'excitation coller une sorte de manche transparent et rigide contre sa vulve et son clitoris. Il
dposa la tlcommande sur le bord du lit.) Je n'aime pas te mettre dans une situation
d'inconfort, mais comme tu n'as aucune exprience, ta premire leon risque d'tre... un peu
prouvante. Je veux que tu ressentes du plaisir pendant que tu apprends m'en donner. Le
vibromasseur te rendra peut-tre les choses plus faciles.
Je ne comprends pas, dit-elle tandis qu'il resserrait les lanires du sex-toy.
Il recula, examinant son uvre. C'tait comme si elle portait une sorte de culotte bizarre
avec un petit vibrateur log entre ses grandes lvres. Son sexe se contractait dj sous l'effet
de la crme et de la pression lgre alors que Ian n'avait mme pas encore actionn la
tlcommande.
Il la contempla sans rien dire pendant un moment. Elle sentit ses ttons se dresser quand
le regard de Ian s'attarda dessus.
Il se trouve que je suis trs exigeant en matire de fellation.
Oh..., souffla-t-elle, incapable de trouver autre chose dire.
Il avait prononc cette phrase presque sur un ton d'excuse.
Je n'ai jamais appris une femme faire a. Je suppose que a ne va pas vraiment te
rassurer, mais j'attends normment de toi.
Qu'est-ce que tu veux dire ?
Un sentiment de confusion l'envahissait de plus en plus. Parlaient-ils bien de la mme
chose ? Il avait parl de fellation, comme elle s'y attendait, mais malgr tout...
C'est un vrai casse-tte. Je ne peux pas changer ma nature exigeante ; je doute mme
que j'y parviendrais si j'essayais de toutes mes forces, quel que soit le dsir que j'prouve
pour toi.
Elle sentit le rouge lui monter aux joues. Parfois, Ian pouvait dire les choses les plus
gentilles du monde sans mme s'apercevoir de l'effet que ses paroles avaient sur elle.
D'un autre ct, je sais que la faon dont une femme dcouvre le sexe oral a un impact
majeur sur le plaisir qu'elle y ressentira sur le long terme ; je dois donc me montrer trs
prudent.
Je vois, murmura-t-elle.
Elle n'arrivait pas croire qu'elle tait en train d'avoir cette conversation. Elle n'avait pas
vraiment rflchi aux aspects techniques auparavant, mais le membre de Ian tait... norme.
Elle croisa son regard et vit qu'il la dvisageait.
Je suis en train de t'effrayer, soupira-t-il. Comme je te l'ai dit, je ne veux pas que tu aies
peur de moi. Je fantasme en t'imaginant me prendre dans ta bouche depuis l'instant o j'ai
pos les yeux sur toi. J'aurai souvent envie de a, Francesca, et je prfrerais que nous y
trouvions un plaisir mutuel.
Elle ne put s'empcher de rougir nouveau. La crme commenait faire effet.
D'accord.
Il lui caressa la joue.
Agenouille-toi, dit-il simplement.
Il l'aida se mettre genoux en la tenant par les paules, car ses poignets taient lis
derrire son dos. Elle releva les yeux et avala sa salive. Son visage tait directement en face de
l'entrejambe de Ian. Elle le regarda, ensorcele, dboutonner son pantalon et descendre la
fermeture clair, dvoilant un boxer blanc immacul. Il le fit glisser et libra l'extrmit de
son rection. Puis, il abaissa son pantalon mais ne l'enleva pas, le maintenant au-dessous de
ses testicules rass.
La jeune femme se retrouva tout d'un coup face son membre nu. Il tait dj dur pas
d'une rigidit comme elle avait dj eu l'occasion de le voir, mais clairement dress. Elle le
trouvait magnifique. Elle s'humecta nerveusement la lvre infrieure en fixant le gland
fusel. L'endroit le plus large avait le diamtre d'une petite prune. Ce pnis avait-il dj
vraiment t l'intrieur de son corps ? Comment tait-il possible qu'elle le prenne dans sa
bouche ?
Tu dois mme rester habill pour a ? demanda-t-elle en le regardant, interdite.
Un frisson la parcourut le voir se tenir ainsi devant elle, si grand et si autoritaire, le sexe
dress hors du boxer. C'tait une vision intimidante... et extrmement rotique.
Oui. Tu es prte commencer ?
Il souleva d'une main l'paisse hampe et se caressa devant elle.
Oui.
Il libra compltement son membre hors du boxer, qui se retrouva dress l'horizontale.
Les lvres de Francesca brlaient de dsir.
Oh ! Sursauta-t-elle.
Il venait de dclencher le vibromasseur, qui frmissait dsormais nergiquement contre sa
vulve et son clitoris. Elle leva les yeux vers Ian, abasourdie par l'intense plaisir qu'elle
ressentait. Il la dvisagea attentivement. Elle sentit un flot de chaleur remonter dans sa
poitrine, ses lvres, ses joues. C'tait diaboliquement bon. Il gronda de satisfaction et se
redressa devant elle, prenant son sexe en main.
Je t'apprendrai un autre jour utiliser la fois les mains et tes lvres. Aujourd'hui, tu
dois t'habituer me recevoir dans ta bouche.
Elle se figea quand il fit un pas en avant et effleura ses lvres avec la pointe de son
rection. Elle entrouvrit la bouche.
Ne bouge pas, ordonna-t-il fermement.
Elle resta immobile tandis qu'il suivait la courbe de ses lvres. Le bout de chair tait lisse et
doux contre sa lvre frmissante.
Son parfum pntra ses narines... un parfum viril et pic. Elle sentit les muscles de son
vagin se contracter et lcha un doux gmissement. Le membre de Ian se durcit davantage, et
la pression du gland se fit plus insistante contre sa bouche. Incapable de s'en empcher, elle
effleura du bout de sa langue la succulente chair.
Francesca, l'avertit-il en interrompant son mouvement circulaire.
Elle le regarda anxieusement. Il frona les sourcils.
J'ai encore oubli ce fichu bandeau, marmonna-t-il dans sa barbe. carte grandes les
lvres.
Elle ouvrit la bouche du mieux qu'elle put. Il y insra le bout de son sexe.
Utilise-les pour recouvrir tes dents, l'entendit-elle dire travers le battement sourd de
son pouls qui martelait ses tempes. Fais-en un tau rigide. Plus tu pourras serrer, plus j'aurai
de plaisir. (Elle l'entoura aussi fermement qu'elle put en entendant cela. Il grogna de plaisir.)
Bien. Maintenant, enroule ta langue autour du gland.
Elle fit ce qu'il lui dit, de plus en plus excite en voyant sa main faire des allers-retours le
long du membre dur. Existait-il vision plus sensuelle que celle de Ian se caressant lui-mme ?
C'est a. Apprends connatre ma forme. Serre plus fort. (Elle suivit ses instructions la
lettre.) Oui. Voil, fit-il d'une voix un peu plus rauque lorsqu'elle passa la langue au-dessous
du gland pais et caressa la petite fente.
Elle fut rcompense par quelques gouttes de liquide sal. Son got se rpandit sur sa
langue, singulier, addictif. Elle pressa avec plus de force. Il gronda doucement et s'enfona de
deux ou trois centimtres supplmentaires dans sa bouche. Il passa la main l'arrire de la
nuque de Francesca, la maintenant fermement, puis recula lgrement et flchit les hanches
de manire imprimer un trs lger mouvement de va-et-vient.
Maintenant, suce, dit-il d'une voix tendue.
Elle l'enserra entre ses lvres gonfles et appliqua une ferme succion.
Oh oui... a, c'est une bonne petite lve, fit-il in haletant au-dessus d'elle, tout en
continuant de l'enfoncer dans sa bouche.
Le vibromasseur tait un supplice. Elle ne pouvait pas chapper aux vibrations constantes
contre son clitoris frmissant. Comme la veille, elle sentit la brlure se communiquer ses
ttons et la plante de ses pieds. Ses lvres, elles aussi, lui paraissaient hypersensibles,
tires autour du membre pais de Ian. Elles commenaient lui faire un peu mal force
d'appliquer une pression perverse autour de son pnis triomphant. Pourtant, elle en voulait
plus. Elle avait besoin de plus.
Elle plongea la tte vers l'avant, sentant son sexe glisser contre sa langue, emplir sa
bouche. Il grogna et lui agrippa les cheveux, l'immobilisant.
Si tu recommences te comporter de manire impulsive, on arrtera.
Elle rouvrit grands les yeux, et la voix dure de Ian l'atteignit malgr son intense excitation.
Son membre viril pulsait l'intrieur de sa bouche. Le vibromasseur menaait de la faire
succomber - c'tait une petite chose sans piti... Elle ne rpondait plus de rien.
Elle scruta Ian avec dsespoir, incapable de parler avec son sexe norme et conqurant
emplissant sa bouche. Le visage de son amant s'assombrit quand il vit son expression.
Francesca ?
Elle commena trembler sous l'orgasme, le souffle s'chappant de ses poumons par petits
hoquets, moiti touffs par le membre gonfl. Elle vit les yeux de Ian s'agrandir de
surprise et elle ferma obstinment les siens, submerge par la honte l'ide qu'elle s'tait
montre incapable de contrler son insatiable apptit.
Ian baissa les yeux sur elle sans comprendre son expression dsespre avant qu'elle
commence trembler sous le choc d'un orgasme vident. Il n'avait jamais vu une femme
jouir avant lui en le prenant dans sa bouche. Il ne s'tait jamais souci de donner du plaisir
une femme avant d'obtenir le sien.
Imbcile qu'il tait.
Il lcha un grognement en sentant ses lvres douces et chaudes frmir autour de son
rection. Incapable de s'arrter, il enfouit les doigts dans la chevelure lisse de la jeune femme
et s'enfona plus profondment en elle. Elle mit un petit jappement venu de l'intrieur de la
gorge, qui se rpercuta travers son sexe, en mme temps que les tressaillements dlicat de
l'extase. Il se retira de quelques centimtres pour la soulager un peu. Elle faillit dclencher
son orgasme en continuant le sucer tandis qu'elle le regarda si fixement et qu'elle faisait
dcrire sa langue de petits cercles autour de son gland.
Il voulut la rprimander mais se ravisa au dernier moment et s'enfona nouveau dans sa
bouche. Quel idiot aurait protest contre quelque chose d'aussi bon ? Il la laissa contrler ses
mouvements pendant un moment, dans un tat d'excitation extrme ; elle plongeait et
relevait alternativement la tte en un mouvement de va-et-vient nergique autour de son
pnis.
C'est bien..., murmura-t-il. Prends-moi du mieux que tu peux.
Un frisson le parcourut. L'enthousiasme vident de la jeune femme suffisait plus que
largement compenser son inexprience. Et elle tait doue. Elle s'accrochait lui comme
une sangsue. Sa succion tait dj exquise, mais il la poussa malgr tout dans
retranchements.
Suce-moi plus fort, dit-il en se mettant bouger les hanches au mme rythme qu'elle.
Il lcha un grondement rauque et froce quand elle surpassa ses attentes, et vit les joues
carmin de la jeune femme se creuser tandis qu'elle resserrait autant qu'elle le pouvait la
bouche autour de son membre gonfl.
C'en tait trop. Il la tira doucement en arrire par les cheveux. Francesca entrouvrit
langoureusement les paupires ; la vision de ses lvres entrouvertes et de ses yeux brillants
de dsir mit Ian au comble de l'excitation.
Tu dois me prendre plus profondment, fit-il d'une voix douce. Respire par le nez. Si a
te parat inconfortable au bout d'un moment, dis-toi que je ne laisserai pas a durer trop
longtemps. Tu as compris ?
Elle hocha la tte, et il serra les dents en voyant la confiance qui se lisait dans ses yeux de
velours. Il soutint son regard en s'enfonant davantage en elle, et sentit l'anneau troit de la
gorge envelopper l'extrmit de son sexe. Un frmissement de plaisir le traversa.
Elle plissa les paupires et hoqueta mais russit se contrler pour ne pas le repousser. Il
grogna et se retira.
C'est a. Respire par le nez, rpta-t-il tout en s'enfonant nouveau en elle.
Cette fois, il grimaa quand son membre raide se logea au fond de sa gorge.
Je suis dsol, dit-il en se retirant.
II se maudit intrieurement en voyant deux larmes couler sur les joues de la jeune femme.
Est-ce que a va ? demanda-t-il.
Elle agrandit les yeux pour le rassurer et hocha la tte, faisant rebondir son sexe rig. Il
grimaa de nouveau ; une vague de plaisir dferlait travers lui en contemplant l'ardeur de
Francesca, sa gnrosit. Dieu soit lou, elle tait la bont personnifie. Il savait qu'il ne
s'arrterait pas. Il savait qu'il en tait incapable.
Il souleva la tte de la jeune femme entre ses mains et la regarda fixement tout en
besognant en cadence ses lvres serres, essuyant d'un revers du pouce les traces de larmes
sur ses joues. La lueur d'excitation n'avait fait que s'intensifier dans les deux orbes sombres
de ses yeux, mais il y vit quelque chose d'autre. Quelque chose qui semblait l'absoudre de ses
pchs.
Tu n'imagines mme pas le plaisir que tu me donnes, confia-t-il.
Il la maintint immobile et s'enfona de nouveau dans sa gorge. Il perdit conscience de lui-
mme pendant un moment ; tout l'univers se rduisit au plaisir que lui offrait la douce
bouche de Francesca, qui comblait ses dsirs les plus dpravs et les plus honteux. Il
carquilla les yeux en la voyant trembler au moment o il plongeait le plus profondment en
elle, et commena se retirer pour la soulager. Mais il se rendit soudain compte qu'elle ne le
rejetait pas.
Douce Francesca..., souffla-t-il, submerg par l'motion et merveill de voir qu'elle
jouissait nouveau.
Il se rpandit dans sa gorge avec un rugissement de plaisir brutal qui le dchira en deux, et
eut quand mme le rflexe de se retirer, finissant finalement contre son palais. Il la
contempla, le visage crisp, sans pouvoir dtacher le regard de ses joues enflammes. Une
expression de vulnrabilit totale brillait dans les iris sombres de la jeune femme tandis
qu'elle succombait son tour l'extase.
Sa gorge douce se contracta pendant qu'elle avalait.
Il continua jouir et jaculer, incapable de retenir les vagues impitoyables de plaisir qui
dferlaient sur lui alors mme que Francesca semblait avoir des difficults le contenir. Ce
soupon fut confirm quand elle gmit et desserra momentanment la mchoire autour de
son membre. Un peu de semence se rpandit la commissure de ses lvres.
Il lcha un hoquet rauque et plissa les paupires, secou par une nouvelle onde de
jouissance, l'image de Francesca grave au fer rouge dans son cerveau. Comment une fille
aussi innocente pouvait-elle le rendre si vulnrable, le faire vibrer de tout son corps, le
chambouler de l'intrieur jusqu' ce qu'il se sente aussi nu, aussi fragile, aussi expos qu'il
avait voulu qu'elle le soit ? Cette pense soudaine lui fit entrouvrir les paupires. En
agrippant les cheveux de la jeune femme, il en avait libr une partie. Ses mches folles et
soyeuses retombaient librement le long de ses paules blanches et balayaient ses joues ; ses
yeux taient pareils des phares obscurs. Il contempla sa beaut ardente et voluptueuse
comme s'il tait n aveugle et qu'il voyait pour la premire fois.
Il se retira lentement de sa bouche, produisant un bruit humide de succion quand son
membre se dtacha de ses lvres. La cruelle et brusque sparation d'avec sa chaleur lui fit
fermer les paupires.
Aucun d'eux ne parla quand il l'aida se relever et lui ta les menottes. Elle gmit
doucement lorsqu'il teignit le vibromasseur.
Je l'ai sans doute rgl un peu trop fort, fit-il d'une voix qui sonna faux ses propres
oreilles.
Peut-tre parce qu'il mentait. Le sex-toy n'tait pas ce point efficace. Elle avait joui deux
reprises parce qu'il l'avait conquise, parce qu'il avait utilis bouche pour prendre son plaisir,
parce qu'elle tait si douce, si ractive... mille fois plus que ce qu'il avait jamais os l'esprer.
Ian ?
Il ne put retenir un rictus en entendant le son rauque de sa voix.
Oui ? rpondit-il en vitant son regard et en commenant ranger mthodiquement les
accessoires dans le sac qu'il avait apport.
Est-ce que... est-ce que a allait ?
C'tait fantastique. Tu as de nouveau dpass mes attentes.
Oh... C'est juste que... Tu as l'air, un peu... malheureux.
Ne sois pas ridicule, rtorqua-t-il doucement en rajustant la ceinture de son pantalon. (Il
la regarda en ignorant dlibrment son extraordinaire beaut et l'expression trouble dans
ses yeux noirs.) Que dirais-tu d'aller prendre une douche, pendant que j'utilise l'autre salle de
bains ? Aprs, je nous commanderai dner.
D'accord.
L'inquitude qui perait dans la voix de la jeune femme l'attrista profondment. Malgr
tout, il s'loigna rsolument vers la porte - avant de se raviser brusquement et de se retourner
vers elle. Elle n'avait pas boug. Il carta les bras.
Viens par ici, dit-il doucement.
Elle se prcipita vers lui. Il l'treignit avec ferveur, respirant le parfum de sa chevelure. Le
contact de ses seins fermes presss contre ses ctes tait dlicieusement rotique. Il avait
envie de lui dire combien a avait t merveilleux - combien elle tait merveilleuse - mais
sans qu'il sache pourquoi, son cur se mit battre trop vite. Il n'aimait pas la sensation de
vulnrabilit qu'il avait prouve la fin... Fragilis par le besoin qu'il avait d'elle.
Il ne pouvait toutefois s'empcher de convoiter ses lvres. Il l'embrassa avec une retenue
calcule, Conscient qu'il lui causait sans doute de la peine. Le soupir qu'elle laissa chapper
lui donna envie de la prendre sur le lit et de passer la nuit entire, le visage enfoui dans sa
chair soyeuse et parfume... La simple vocation de cette vision le mit la torture.
Au lieu d'y cder, il baisa une dernire fois ses lvres et rompit leur treinte. Il devait se
prouver lui mme qu'il tait toujours capable de se dtacher delle.
Le lendemain matin, Francesca plaa la pilule sous sa langue et but un peu d'eau pour la
faire passer. Elle jeta un coup d'il dans le miroir de la salle de bains et dtourna les yeux
devant son reflet. Se voir elle-mme en train de prendre une pilule contraceptive lui remettait
aussitt en mmoire les vnements de la veille au soir : le dner avec Ian et le panorama
incroyablement romantique, l'attitude distante de son amant et sa sollicitude feinte, la
confusion, puis l'irritation qu'elle avait fini par prouver...
... leur dernire discussion et le dpart de Ian.
Pourquoi se souciait-elle de prendre cette pilule aprs la faon dont il s'tait comport ?
Elle avait t folle d'accepter cette aventure avec lui. Quand Ian s'tait dtourn d'elle
froidement aprs l'exprience particulirement rotique qu'ils avaient connue la veille, elle
avait compris quel point elle s'tait montre nave.
Particulirement rotique pour Francesca, en tout cas. Pour Ian, c'tait visiblement de la
routine.
Ou simplement un exemple des services de qualit qu'il juge mriter.
A cette pense, la colre l'envahit de nouveau.
D'accord, il avait pass du temps avec elle aprs... ce qu'ils avaient fait. Elle aurait appel a
faire l'amour , mais Ian aurait clairement t en dsaccord. Une leon sur l'art de la
fellation ? Un puisement mutuel ?
Une humiliation telle qu'elle avait prsent du mal se regarder dans une glace ?
Si elle considrait la situation objectivement, elle devait admettre qu'il avait non seulement
pass du temps avec elle, mais qu'il l'avait mme traite avec des gards dignes d'une reine.
Ils avaient d'abord pris une douche sparment dans les deux salles de bains, et il tait
rapparu vtu d'un pantalon gris - qui soulignait ses longues jambes et ses hanches troites -,
d'une lgre chemise bleu clair et d'une veste de sport.
Tu es prte ? Nous allons dner au Cinq, avait-il dit en se tenant sur le seuil de la
chambre coucher.
Elle avait lev vers lui des yeux angoisss.
Je croyais que tu allais nous commander un repas dans la suite. Je ne peux pas aller au
Cinq habille comme a ! Stait-elle exclame en se souvenant de tout ce qu'elle avait lu et
entendu au sujet du restaurant trs slect de l'htel George V.
Pourquoi Ian avait-il modifi ses plans ? L'atmosphre de la suite tait-elle soudain
devenue trop intime son got ?
a ne pose aucun problme, avait-il rpondu avec brusquerie, la main tendue. J'ai
demand ce qu'on soit servis sur une terrasse prive.
Ian, je ne peux pas ! Pas comme a ! Avait-elle protest en se drobant.
Tu viens avec moi, lui avait-il ordonn avec un regard amus. Les autres clients ne nous
verront pas. Et si un seul employ ose froncer les sourcils devant ton tee-shirt trop grand, il
aura affaire moi.
Cette phrase n'avait rien de rassurant, ni mme de tendre, mais Francesca percevait
toujours chez Ian une anxit diffuse - qui ne l'avait pas quitt depuis la fin de leur sensuel
corps corps.
Dubitative, elle avait enfil ses sandales et pris la main de Ian.
Elle l'avait ensuite suivi avec rticence dans l'ascenseur et dans les couloirs de l'htel, sans
Cesser de protester tout bas. N'allait-on pas la jeter dehors sance tenante quand elle se
prsenterait vtue d'un Jean et d'un tee-shirt informe ? Ian ne lui avait pas rpondu une
seule fois, se contentant de la traner dans son sillage.
Le matre d'htel du restaurant avait accueilli Ian comme un vieil ami. Francesca tait
reste plante, stupide, derrire son amant, priant pour que le sol l'engloutisse, pendant que
les deux hommes conversaient en franais. Pourtant, le matre d'htel l'avait accueillie
chaleureusement quand Ian l'avait prsente ; elle avait rougi quand il s'tait pench pour lui
faire un baisemain - comme si elle tait la reine de la soire, et non Francesca Arno, gauche et
mal fagote.
Elle tait reste bouche be quand le matre d'htel les avait conduits sur une terrasse
prive claire aux chandelles, avec une vue poustouflante sur la tour Eiffel illumine. Deux
braseros rchauffaient l'air agrable et frais de ce dbut d'automne. La table tait un rgal
pour les yeux, charge de bougies, de cristal, de vaisselle dore l'or fin et orne d'un bouquet
enivrant d'hortensias blancs.
Elle avait regard Ian, stupfaite, et s'tait rendu compte que le matre d'htel tait parti.
Ils taient seuls sur la terrasse. Ian l'avait invite s'asseoir.
C'est toi qui as organis tout a ? Lui avait-elle demand les yeux dans les yeux.
Oui, avait-il rpondu en l'aidant s'installer.
Tu aurais d me laisser m'habiller pour dner.
Je t'ai dj dit qu'une femme devait faire oublier ses vtements, Francesca, avait-il dit en
prenant place en face d'elle. (Ses iris avaient la mme couleur que le ciel nocturne.) Quand
une femme connat son pouvoir, elle peut bien se prsenter en loques, les gens la verront
comme une reine.
Elle s'tait racle la gorge avec embarras.
C'est le genre de chose qu'on enseigne au petit-fils d'un comte. Je ne vis pas dans le
mme monde que toi, Ian.
Ils avaient dgust un repas somptueux, discut de choses et d'autres, bu du vin rouge et
savour les plats de fine gastronomie. Deux serveurs taient entirement leur disposition,
et aucun n'avait eu l'air surpris devant l'accoutrement de Francesca. Apparemment, tre
l'invite de Ian vous confrait un statut particulier. Quand elle s'tait mise frissonner sous
la brise, il s'tait lev et avait t sa veste, insistant pour qu'elle la pose sur ses paules.
Si une personne extrieure avait assist la scne, elle aurait probablement cru un dner
romantique idyllique. Mais plus le repas avanait, plus les incertitudes et l'angoisse de
Francesca allaient croissant. Ian tait courtois et plein de sollicitude... un compagnon parfait.
Au dbut, elle avait cru que son malaise tait d l'atmosphre guinde et l'omniprsence
des deux serveurs - mais avec le temps qui passait, elle comprenait que ce n'tait pas li
cela.
Il s'tait clairement referm comme une hutre aprs la fin de leurs bats sexuels.
Pourquoi ? Est-ce qu'elle avait tout fait de travers, et tait-il trop poli pour le lui avouer ?
moins qu'il ne commence dj se lasser d'elle ?
Les soupons de Francesca s'taient confirms leur retour dans la suite. Il lui avait
demand si a la drangeait qu'il travaille un peu. Elle avait rpondu par un Bien sr que
non , mais son inquitude commenait dj se transformer en colre. Elle tait retourne
dans la chambre et avait vrifi ses e-mails sur son tlphone.
Au bout d'un moment, il avait pntr dans la pice, la faisant sursauter. Sans rien dire, il
lui avait tendu un sachet en papier. Il contenait une bote de trois plaquettes de pilules
contraceptives.
On vient de me les livrer. Aaron, le pharmacien, dit que tu peux commencer les
prendre tout de suite. J'ai fait rajouter la notice en anglais.
Comme c'est gentil de ta part.
Le sarcasme tranquille de Francesca l'avait fait ciller.
a t'ennuie que je te propose de prendre la pilule ds maintenant ? J'ai avec moi les
rsultats d'un check-up mdical rcent. Je te les montrerai. Je ne veux pas que tu aies le
moindre doute sur mon tat de sant. Et sache que tant que nous continuerons tous les deux,
je ne verrai personne d'autre.
Ce n'est pas a que je pensais.
Ces mots l'avaient quand mme quelque peu soulage- elle aurait d aborder le sujet plus
tt. Il l'avait dvisage.
Tu as remarqu que j'tais un peu proccup ce soir ? Je suis dsol. J'avais du travail en
retard. Je dois m'occuper d'une acquisition trs importante, prvue de longue date, qui
devrait se concrtiser la semaine prochaine.
Elle lui avait lanc un regard maussade. Elle savait que le problme n'avait rien voir avec
son travail, et il en tait certainement conscient lui aussi. Le problme, c'tait le contraste
entre l'exprience sexuelle extraordinairement intime qu'ils avaient vcue, et l'attitude
soudain distante de Ian.
Il l'avait contemple en silence pendant un moment. Un sentiment d'apprhension avait
envahi Francesca. Elle ne se sentait plus du tout d'humeur sarcastique. Elle prouvait une
envie brlante de lui prendre la main pour le rassurer.
Tu veux que je t'apporte un verre d'eau ?
Elle avait ferm les yeux un instant pour masquer sa dception.
Je t'avais prvenue que j'tais un vrai goujat avec les femmes, avait-il rajout d'une voix
crispe.
Tu m'as aussi dit que tu n'tais pas un homme bien. Mais je ne peux pas m'empcher de
remarquer que tu n'as jamais exprim le moindre remords...
La colre tait deux doigts de la faire fondre en larmes.
Et je suppose que tu as pens pouvoir faire de moi un homme meilleur. (Ses lvres
pleines avaient esquiss un rictus, comme s'il buvait une potion amre.) Tiens-le-toi pour dit,
Francesca, et pargne-toi ces efforts. Je suis ce que je suis, et je n'ai jamais prtendu autre
chose devant toi.
Elle l'avait regard sortir de la pice, muette de stupfaction, de colre et de souffrance.
C'tait ce qu'il pensait ? Qu'elle voulait le changer, juste parce qu'elle ne comprenait pas
son attitude distante depuis qu'ils avaient fait l'amour ?
moins qu'il n'et raison de lui faire ainsi la leon ? Il lui avait offert cet incroyable dner
romantique devant le plus beau panorama de Paris - et il s'tait montr irrprochable pendant
le repas, la traitant avec tous les gards possibles.
Il ne lui avait jamais offert son cur. Il lui avait promis des expriences et du plaisir, et il
avait plus que largement tenu parole.
Toutes ces penses n'avaient fait qu'accentuer la confusion de la jeune femme, et l'angoisse
commentait lui nouer le ventre. Elle avait essay de lire un e-book sur son tlphone mais
avait fini par renoncer, incapable de se concentrer, avant de sombrer dans un sommeil
tourment.
Le lendemain, son rveil, Ian n'tait visible nulle part. Elle se souvenait vaguement
d'avoir senti son corps dur et chaud press contre le sien un moment de la nuit - ses bras
autour d'elle, sa bouche embrassant le creux de son paule. Mais elle n'arrivait plus savoir
s'il s'agissait d'un rve ou de la ralit.
Il y avait un message pos sur la table de chevet.
Francesca,
Je suis sorti pour un rendez-vous au restaurant La Galerie. N'hsite pas commander un
petit djeuner la rception. Nous devons dcoller pour Chicago 11 h 30. S'il te plat,
prpare tes affaires. Je passerai te prendre la suite 9 h.
Ian
Elle frona les sourcils en lisant le mot. Il lui donnait l'impression d'tre une vulgaire
valise.
9 h 10, elle se tenait prte dans le salon, son sac de voyage sur l'paule. Elle ressentait
une pointe de regret l'ide de quitter la magnifique suite parisienne - o Ian lui avait tant
appris sur ses propres dsirs -, mais elle avait galement hte de retrouver la banalit de sa
vie quotidienne.
Elle regarda sa montre en fronant les sourcils. Toujours pas de Ian.
Bon sang.
Compltement dsempare, elle rdigea un court message lui indiquant qu'elle quittait la
suite et qu'elle l'attendrait dans le hall de l'htel. Mieux valait patienter dans le luxueux
vestibule, en regardant passer les clientes sophistiques perches sur leurs talons hauts.
Arrive en bas, elle s'effondra dans un des fauteuils moelleux de l'htel et fouilla dans son
sac la recherche de son tlphone portable pour consulter ses SMS. Quelque chose attira
son attention dans un angle de son champ de vision. Quand elle se rendit compte que c'tait
la haute silhouette de Ian, qui rentrait l'instant, elle se rencogna immdiatement dans son
sige, se cachant derrire les larges accoudoirs rembourrs. Il sortait juste de La Galerie - un
des restaurants de l'htel -, un bras pass autour de la taille d'une lgante femme aux
cheveux noirs qui semblait avoir environ la trentaine. Francesca ne pouvait pas entendre ce
qu'ils se disaient, mais elle fut frappe par l'apparence... intime de leur conversation. tait-ce
pour cela qu'elle avait eu le rflexe de se cacher derrire les accoudoirs du fauteuil ?
Ian fouilla dans la poche intrieure de sa veste de sport et en sortit une enveloppe, qu'il
tendit la femme. Elle l'accepta avec un sourire et se dressa sur la pointe des pieds pour
embrasser Ian sur la joue. Le cur de Francesca se mit battre tout rompre quand elle vit
son amant poser les mains sur les paules de la sduisante inconnue et l'embrasser sur les
deux joues.
Ils changrent un sourire que Francesca trouva poignant, terriblement triste.
La femme hocha la tte, comme pour dire Ian que tout se passerait bien, avant de se
dtourner et de traverser le hall pav de marbre blanc jusqu' la sortie de l'htel. Elle rangea
dans sa mallette en cuir l'enveloppe qu'il lui avait donne. Ian resta immobile pendant un
moment, suivant la femme des yeux. Son visage aux traits rudes et virils affichait une
expression que Francesca ne lui avait encore jamais vue. Il avait l'air un peu perdu.
Francesca se redressa sur son sige et fixa d'un il vide le bouquet de fleurs extravagant
qui ornait la table devant elle. Elle avait l'impression que son cur allait se briser. C'tait
comme si elle avait surpris Ian dans un moment trs personnel... Elle ne comprenait pas
vraiment ce qu'elle avait vu, toutefois elle tait certaine qu'il s'agissait d'une chose
importante pour lui, une chose qui le bouleversait.
Une chose qu'il n'aurait pas voulu qu'elle voie.
Elle continua l'pier. Quand elle comprit qu'il tait sur le point de pntrer dans la
bijouterie de l'htel, elle se releva d'un bond et fona vers les ascenseurs.
Lorsqu'il ressortit de la boutique quelques minutes plus tard, elle se comporta comme si
elle venait juste d'arriver dans le hall.
Salut. Je me suis dit que j'allais descendre t'attendre ici, lui lana-t-elle avec un
engouement feint.
Il carquilla lgrement les yeux en la voyant.
Je pensais t'avoir demand de rester dans la suite, fit-il avec une expression perplexe.
Mme ainsi, il tait toujours aussi sduisant. Cesserait-elle un jour d'tre captive par sa
sombre et mle beaut, comme si elle recevait chaque fois une flche en plein cur ?
Oui. J'ai bien vu ton message. Je t'ai aussi laiss un mot pour te dire que je venais ici.
Les lvres pleines de Ian esquissrent une grimace, mais Francesca n'tait pas sre de
savoir si c'tait une marque d'irritation ou d'amusement.
Je te dois des excuses pour mon retard. J'avais un rendez-vous important avec une
personne trs proche de ma famille, qui se trouvait en ville pour assister une confrence. Je
monte juste rcuprer mes affaires et je te rejoins ici.
Elle hocha la tte, sans cesser de s'interroger sur l'identit de cette mystrieuse amie qui
avait le pouvoir de percer la barrire motionnelle qu'il s'tait construit. Le bijou qu'il venait
d'acheter lui tait-il destin ?
Comme elle ne pouvait pas lui poser la question, elle se dtourna pour retourner s'asseoir
dans le hall. Il l'arrta en posant une main sur son bras.
Je suis dsol pour hier soir.
Elle le regarda sans rien dire, interdite face au regret sincre qui perait dans sa voix.
Pour quel moment, prcisment ?
Je crois que tu le sais, rpondit-il d'un ton calme. J'tais mille lieues d'ici, hier. J'ai
peur que tu te sois sentie abandonne.
Et ce n'tait pas le cas ?
Non. Je suis toujours avec toi, Francesca - quoi que vaille cette promesse, ajouta-t-il
sombrement.
Il se pencha au-dessus d'elle et l'embrassa d'une manire la fois tendre et passionne. La
jeune femme se faisait-elle des illusions, ou ce baiser contenait-il quelque chose que Ian tait
incapable d'exprimer autrement ?
Quelques instants plus tard, le cur battant, elle le regarda s'loigner - encore merveille
par ce baiser, et pleine d'une ardeur qui faisait se contracter malgr elle les muscles de son
sexe.
En dpit de ses rcentes excuses, elle sentit que Ian tait toujours tendu pendant le trajet
du retour jusqu' l'aroport.
Elle tait dchire entre la compassion qu'elle ne pouvait s'empcher de ressentir pour lui -
en repensant son air perdu dans le hall de l'htel -, et un sentiment d'irritation devant sa
capacit l'ignorer comme s'il suffisait d'appuyer sur un interrupteur.
Aprs qu'ils eurent embarqu, elle s'installa en face de lui dans le salon du jet priv.
Quelle tait l'acquisition importante dont tu me parlais, qui doit se conclure la semaine
prochaine ? Lui demanda-t-elle alors qu'il se penchait pour sortir son ordinateur portable de
sa mallette.
a fait plus d'un an que je courtise le propritaire particulirement fuyant - et pour tout
dire, ennuyeux mourir - d'une certaine socit. Nous avons enfin russi trouver un accord,
dit-il en allumant l'ordinateur. Ce n'est pas tant son entreprise en tant que telle qui
m'intresse, que le brevet sur un de leurs logiciels. J'en ai absolument besoin pour le
nouveau jeu en ligne que je dveloppe en ce moment. (Il adressa la jeune femme un regard
gn par-dessus l'cran du portable.) a t'ennuie si je travaille ?
Non, bien sr que non, fit Francesca avec sincrit.
Il avait beau tre vexant et irritant, elle n'tait pas du genre rclamer constamment son
attention. Il se mit au travail ds que l'avion eut dcoll - parcourant des dossiers, prenant
des notes et passant de temps en temps de brefs coups de fil. Francesca consulta son propre
Smartphone et vit que Lin lui avait envoy par e-mail un manuel du Code de la route en
Illinois . Quand Ian avait-il trouv le temps d'en faire la demande son assistante ? La veille
au soir, lorsqu'il l'avait royalement ignore aprs leur dner romantique ?
Est-ce que a ne voulait pas dire qu'il avait pens elle... au moins un petit peu ? Et est-ce
que ce n tait pas prcisment le genre de rverie qu'une suppose soumise tait cense avoir
- se demandant en permanence si son matre pensait ou non elle, si elle avait russi lui
plaire ou pas ?
Rvulse par cette ide, Francesca dtourna rsolument son attention de l'homme
charismatique qui tait assis en face d'elle. Elle envoya un chaleureux message de
remerciement Lin et interrogea Ian pour savoir si elle pouvait lui emprunter sa tablette
lectronique.
Pourquoi ?
Pour lire quelque chose.
Le code de la route que j'ai demand Lin de t'envoyer ?
Non, rpondit-elle sans sourciller. Un roman de gare.
Elle rpondit son regard froid par un petit sourire. Il lui tendit la tablette sans autre
commentaire.
Heureusement, Francesca tait capable de se concentrer presque autant que Ian sur une
tche quand elle le dcidait. Durant le vol, elle mmorisa avec prcision toutes les rgles du
manuel - trangement dtermine obtenir son permis de conduire, maintenant que Ian
avait remis le sujet sur le tapis. Son exprience derrire le volant l'avait survolte. Au bout
d'un moment, elle en oublia quel point il l'irritait. Sa prsence silencieuse lui parut mme
agrable tandis qu'ils s'occupaient tous les deux de leurs propres affaires.
Elle fit une courte sieste dans la chambre coucher. Quand elle revint dans le salon, Ian
avait fait apporter des rafrachissements. Elle sirota tranquillement son eau gazeuse tout en
le regardant travailler. C'tait vritablement une force de la nature. S'il avait pu vendre sa
puissance de concentration, il serait devenu l'homme le plus riche du monde.
Il fait dj partie des hommes les plus riches du monde, songea-t-elle avec ironie avant de
se replonger dans son code.
Quand le pilote annona qu'ils amoraient la descente vers l'Indiana, Ian releva la tte et
cligna les yeux, comme s'il mergeait d'un long sommeil. Il referma l'ordinateur et passa la
main dans ses cheveux courts, un peu bouriffs. Francesca songea qu'elle aurait aim le
faire sa place.
Tu avances bien dans le manuel ? demanda-t-il d'une voix rendue un peu rauque par
cette longue priode de silence.
Trs bien.
Elle n'tait pas surprise qu'il ait perc jour son petit mensonge. Peu de choses lui
chappaient.
Tu as l'air trs sre de toi, reprit-il en portant la main son verre d'eau frache.
Je ne vois pas pourquoi je ne le serais pas.
Il tendit la main vers elle sans rien dire. Elle soutint son regard et lui rendit la tablette.
Il commena lui poser des questions sur le code. Francesca donna chaque fois les bonnes
rponses sans hsiter. Quand le pilote les informa qu'ils s'apprtaient atterrir, Ian teignit
la tablette et la rangea dans son tui. Son superbe visage tait toujours indchiffrable, mais
Francesca avait l'impression qu'il tait satisfait.
J'ai des runions cet aprs-midi, et je dois passer toute la journe de demain au bureau,
mais je vais demander Jacob de te donner des leons de conduite. Encore quelques heures
au volant, et tu seras prte passer le permis.
La jeune femme rprima son exaspration - Ian avait parl comme s'il venait d'ajouter
permis de Francesca sa liste mentale des tches en attente.
Cet aprs-midi ? Quelle heure est-il Chicago ?
Il jeta un coup d'il sa Rolex.
peu prs la mme heure que celle o nous avons quitt Paris : onze heures quarante.
Waouh ! C'est comme si on s'tait tl transports !
Il rpondit par un sourire inattendu. L'avion commena descendre en piqu, accentuant
le nud dans l'estomac de la jeune femme. Quand Ian souriait, il semblait toujours plus
accessible. Elle mourait d'envie de lui poser des questions sur la femme qu'il avait rencontre
avant leur dpart, de lui demander pourquoi cette entrevue semblait tant l'affecter... de lui
rclamer une cl pour rsoudre enfin l'nigme de sa personnalit.
Or Ian avait dj tout autre chose en tte.
Tu m'as dit une fois que tu te considrais comme un dsastre financier ambulant.
Qu'est-ce que tu prvois de faire avec l'argent du tableau ?
La jeune femme resserra les doigts sur l'accoudoir et sursauta quand le train d'atterrissage
heurta la piste. Ian ne cilla mme pas.
Qu'est-ce que tu veux dire par faire avec cet argent ? Je prvois de l'utiliser pour mes
tudes, pour mon avenir.
Bien entendu, mais je doute que tu aies besoin de cent mille dollars dans l'immdiat, non
?
Elle secoua la tte.
Pourquoi ne me laisserais-tu pas en investir la majeure partie ?
Non, rpondit-elle abruptement.
Devant le ton inflexible qu'elle avait employ, une expression incrdule apparut sur le
visage de son amant. N'importe qui aurait saut de joie la perspective de voir Ian Noble - le
magnat de la finance - s'occuper de son patrimoine.
Tu ne peux pas laisser une telle somme sur un simple compte bancaire, reprit-il comme
s'il nonait la chose la plus vidente au monde. a n'aurait absolument aucun sens.
a a du sens pour moi ! Les personnes dans mon genre n'aiment pas investir leur argent,
Ian.
Les personnes dans ton genre ? Tu veux dire les idiots ? Parce que c'est ce que tu seras, si
tu laisses un montant aussi exorbitant dormir sur un compte-chques.
Ses yeux bleu cobalt flamboyaient. Elle se pencha en avant, prte lui renvoyer une
rplique cinglante, mais se ravisa au dernier moment. Elle se rencogna dans son sige et
regarda Ian droit dans les yeux.
Qu'y a-t-il ? demanda-t-il d'un ton suspicieux.
Je l'investirai moi-mme si tu m'apprends comment faire.
La lueur de mfiance dans le regard de Ian se transforma en amusement.
Je n'ai pas le temps de te donner des leons. (Elle haussa les sourcils.) Pas en matire
de finance, en tout cas, ajouta-t-il avec un sourire enjleur.
Le pouls de Francesca s'affola. Seigneur, qu'il tait beau ! L'avion s'immobilisa sur la piste,
et il dfit sa ceinture de scurit.
Tu as vraiment envie d'apprendre la finance ?
Bien sr. J'ai besoin de toute l'aide possible.
Sans rpondre, il referma sa mallette, se releva, passa sa veste de sport et tendit la main
vers la jeune femme. Elle dfit son tour sa ceinture, et il l'attira tendrement lui.
Je verrai si je peux trouver un peu de temps malgr tes autres leons, murmura-t-il
avant de poser les lvres sur celles de Francesca.
Le contraste entre sa froideur passe et son ardeur prsente fit natre en elle une vague de
dsir qui se rpercuta travers tout son corps.
Une heure et demie plus tard, elle tait de nouveau entoure par les gratte-ciel de Chicago,
qui se dessinaient avec nettet sur le ciel bleu ple. La jeune femme ressentait une
impression trange. La ville tait semblable ce qu'elle avait toujours t, rien n'avait chang,
et elle se sentait pourtant diffrente. Quand Jacob quitta l'autoroute pour s'engager sur North
Avenue, elle se prpara psychologiquement retrouver son ancienne vie. C'tait difficile de
faire correspondre la nouvelle Francesca avec son pass. Paris l'avait change.
Ian l'avait change.
Mme s'il la quittait le lendemain, regretterait-elle d'avoir connu cette initiation sensuelle,
cette ouverture un monde nouveau ?
Est-ce que tu viendras peindre demain aprs tes cours ? Lui demanda Ian, assis en face
d'elle sur la banquette en cuir de la limousine.
Oui, fit-elle en rassemblant ses affaires.
Jacob venait de s'arrter devant la maison qu'elle partageait avec Davie et les autres
Wicker Park. Elle jeta un coup d'il en biais Ian ; elle prenait conscience qu'ils allaient tous
les deux retourner leurs vies respectives, et cette pense l'emplissait de mlancolie. Jacob
frappa poliment la portire, et l'homme d'affaires se pencha en avant pour rpondre par
quelques coups rapides. La porte demeura ferme.
Si tu veux, nous pouvons dner ensemble jeudi soir.
Trs bien, rpondit-elle, la fois enchante et trouble par cette proposition.
Et vendredi et samedi, j'aimerais simplement te voir.
Francesca sentit le rouge lui monter aux joues et prouva un profond soulagement. Vu le
ton qu'il venait d'employer, il tait vident qu'il n'allait pas la laisser tomber dans les jours
venir.
Samedi soir, je travaille au bar.
Dimanche, alors.
Elle hocha la tte.
J'ai demand Jacob de t'emmener conduire cet aprs-midi, et aussi demain. Tu pourras
convenir avec lui d'un rendez-vous pour demain. Aujourd'hui, il passera te prendre seize
heures. Tu as peut-tre envie de te reposer avant.
Je ne pense pas, rtorqua-t-elle avec ironie. Je vais aller courir un peu, et j'ai du travail
rendre.
Il la contempla en silence, le visage plong dans les ombres de l'habitacle. Elle avala sa
salive et serra son sac contre elle.
Merci. Pour Paris, souffla-t-elle.
Merci toi, rpondit-il simplement.
Elle s'loigna d'une dmarche gauche.
Francesca...
Il plongea la main dans la poche intrieure de sa veste et lui tendit une petite bote en cuir.
Elle reconnut la marque du bijoutier de l'htel George V.
Il tait entr dans la bijouterie ce matin pour lui acheter un cadeau elle - pas la
mystrieuse femme.
Je t'avais dit lors de notre arrive Paris que je trouverais quelque chose pour tes
cheveux, mais tu ne m'as pas laiss t'emmener faire les boutiques. J'espre que a te plaira.
Je ne suis pas habitu choisir ce genre d'accessoire sans les conseils de Lin.
Elle ouvrit la bote, le cur battant, et resta bouche be. Dans un crin de velours noir
brillaient huit grandes pingles cheveux, chacune orne d'un croissant de lune en pierres
prcieuses. Piqus dans un chignon, ils transformeraient sa chevelure en tourbillon de
diamants. Ce n'tait pas seulement somptueux, c'tait aussi un cadeau raffin et trs
personnel.
Elle fixa Ian avec des yeux grands comme des soucoupes.
J'ai parl au bijoutier de tes cheveux incroyables, et il m'a certifi qu'avec ce nombre
d'pingles, mme ta crinire ne s'chapperait pas. (Comme elle ne rpondait rien, il plissa les
paupires.) Francesca ? a te plat, n'est-ce pas ?
Elle faillit refuser ce prsent qu'elle souponnait avoir cot une fortune, mais elle perut
une nuance de doute dans la voix de Ian, d'habitude assure. Cette fois...
Tu plaisantes ? Ian, elles sont magnifiques, dit-elle d'une voix tremblante en
contemplant les pingles. Ce ne sont pas de vrais diamants, hein ?
Si c'est de la verroterie, je me suis fait rouler, rpondit-il d'un ton bourru. Tu les porteras
? Jeudi soir au dner ?
Elle contempla son visage ombrageux. Pourquoi n'arrivait-elle jamais lui dire non ? Ce
n'tait pas par dsir de lui plaire. C'tait autre chose... une envie de lui dire quel point elle
aimait son cadeau, combien elle le trouvait beau...
Combien il l'merveillait.
Oui, rpondit-elle en se demandant si des cheveux piquets de diamants iraient bien
avec un jean.
Le sourire franc qu'il lui adressa aurait suffi lui seul pour qu'elle accepte. Elle se fora
dtourner les yeux de son visage et posa la main sur la poigne de la porte d'entre.
Et... Francesca ?
Elle se retourna vers lui, le souffle court.
Juste pour que tu saches, dit-il avec un sourire semblait se moquer de lui-mme. Si je
n'tais pas oblig de m'occuper de cette maudite acquisition, je t'aurais dj emmene dans
ma chambre coucher, et nous serions en train de poursuivre tes leons.
Les jours qui suivirent filrent toute vitesse. Entre ses cours, ses devoirs la maison, la
peinture chez Ian et ses leons de conduite avec Jacob, Francesca n'eut pas une minute elle.
Les cours avec Jacob s'avrrent plus amusants que prvu. Le chauffeur tait d'une
compagnie trs agrable. De plus, il possdait deux qualits essentielles pour rester assis sur
le sige passager pendant que Francesca conduisait une des luxueuses voitures de Ian : des
nerfs toute preuve et le sens de l'humour. Le mercredi matin, elle se lana pour la
premire fois dans les rues de la ville. Aprs s'tre arrte devant le High Jinks et avoir coup
le moteur, elle lana Jacob un regard plein d'espoir, auquel ce dernier rpondit avec un
grand sourire.
Je pense que vous tes prte passer l'examen ds que vous le dciderez.
Vous en tes vraiment sr ?
Parfaitement. Nous trouverons un centre en banlieue. Ce sera nettement plus facile
qu'ici, en pleine ville.
Je me sens coupable de vous avoir autant accapar cette semaine, fit-elle en rassemblant
ses affaires.
Elle travaillait ce soir-l au High Jinks, et Jacob avait propos qu'elle s'y rende elle-mme
en voiture.
Mon travail consiste faire ce que Ian me demande, rpondit-il avec une lueur amuse
dans les yeux. Et il m'a charg de faire en sorte que vous obteniez votre permis... et aussi de
veiller cote que cote votre scurit durant les leons.
Elle baissa la tte pour dissimuler son plaisir devant le sous-entendu de cette phrase.
Ce n'tait pas une mince affaire, hein ? Senquit-elle en songeant au nombre de fois o
elle avait failli les crabouiller tous les deux contre un obstacle.
Jacob eut un petit rire.
C'tait un changement agrable dans ma routine quotidienne. En plus, Ian a quasiment
lu domicile dans son bureau depuis notre retour de Paris, pour rgler les derniers dtails
d'une opration financire. Il n'a pas eu besoin de moi.
Francesca fut heureuse de recueillir ces maigres informations. Elle n'avait pas eu la
moindre nouvelle de Ian depuis qu'il l'avait dpose devant chez elle leur retour Chicago.
Son absence ne faisait qu'exacerber l'excitation et l'apprhension qu'elle prouvait l'ide de
dner avec lui - ou, tout simplement, de le voir- le lendemain soir.
Elle passa la journe du jeudi attendre dsesprment un appel de sa part pour lui
indiquer le lieu et l'heure du rendez-vous. Malgr tout, elle fit de son mieux pour se
concentrer sur le tableau tout au long de l'aprs-midi. Elle comptait sur Mme Hanson pour
informer Ian qu'elle se trouvait l'atelier. Lentement, mesure qu'elle s'immergeait dans sa
toile, toute son anxit reflua peu peu - jusqu' ce qu'elle trouve finalement la
concentration dont elle avait besoin.
Quand une crampe musculaire commena se manifester dans son paule, il tait dj
presque dix-neuf heures. Elle baissa le bras et contempla le rsultat de son travail.
C'est incroyable.
Elle fut parcourue d'un frisson au son de cette voix tranquille et familire, et se retourna
brusquement. Il se tenait juste devant la porte ferme de l'atelier, vtu d'un costume sombre
assorti d'une cravate bleu ple.
Ses cheveux taient un peu bouriffs, comme s'il venait de rentrer pied du bureau sous
la brise du lac Michigan. Francesca se dirigea vers une table pour nettoyer ses pinceaux - elle
avait besoin d'un peu de temps pour rassembler ses esprits aprs la surprise que Ian venait de
lui faire.
a commence prendre forme. J'ai du mal saisir exactement la lumire que je veux
sur l'immeuble de Noble Enterprises. Et il faudra aussi que j'aille voir le hall d'accueil pour
me rendre compte de la luminosit ambiante... voir quoi le tableau ressemblera une fois
qu'il sera accroch.
Du coin de l'il, elle le vit s'approcher d'elle comme un fauve lanc et puissant. Aprs
avoir plong ses pinceaux dans le dissolvant, elle se retourna vers lui. Ses iris bleus
l'hypnotisrent instantanment.
Comme chaque fois.
Le tableau est extraordinaire. Mais c'est de toi que je parlais. C'est incroyable de te
regarder travailler. C'est presque surprendre une desse pendant qu'elle cre une petite partie
du monde, fit-il avec un sourire penaud - comme pour s'excuser d'avoir une pense aussi
saugrenue.
Tu l'aimes vraiment ? Le tableau ?
Ian tait maintenant tout proche ; elle pouvait sentir son parfum de savon anglais, la
fragrance subtile de son aprs-rasage, et une trace infime de la brise du soir. Une vague de
dsir monta en elle.
Oui. Mais ce n'est pas une surprise pour moi. J'tais certain que tu ne pouvais peindre
que quelque chose de brillant.
Je me demande comment tu peux bien le savoir, fit-elle en dtournant les yeux avec
embarras.
Je le sais parce que tu es talentueuse, rpondit-il en la prenant par le menton.
Il se pencha au-dessus d'elle et l'embrassa. Cette fois, pas de caresse sur ses lvres, pas de
jeu. Il plongea presque immdiatement la langue dans sa bouche comme s'il tait assoiff
d'elle.
Une vague de chaleur et de plaisir afflua entre les cuisses de la jeune femme mesure
qu'elle s'imprgnait de sa chaleur et de son odeur, mesure qu'elle se laissait conqurir par
lui.
Lorsqu'il releva la tte un peu plus tard, Francesca souleva lentement les paupires, encore
ivre de son baiser.
Quand il commena dboutonner un par un les boutons de sa blouse de travail, elle
carquilla grands les yeux.
Mme Hanson...
J'ai verrouill la porte derrire moi.
Une dlicieuse moiteur envahit son sexe quand les doigts de Ian plongrent dans la douce
valle qui sparait ses seins. Il tordit lgrement le poignet, et l'attache frontale du soutien-
gorge de Francesca se dtacha d'un coup. D'un geste impatient, il repoussa les bonnets avant
de plonger les yeux dans ceux de la jeune femme.
Pourquoi est-ce que je ne peux pas m'empcher de te dsirer autant ?
Ian..., commena-t-elle, bouleverse par son propre dsir, avant qu'il l'interrompe en
penchant la tte pour capturer un tton entre ses lvres.
Elle lcha un hoquet en sentant une vague de plaisir envahir le creux de ses cuisses et leva
les mains pour s'agripper ses cheveux. Il joua un peu avec son tton, l'agaant avec sa
langue, la faisant gmir. Puis il passa l'autre sein, le massa tendrement, pina doucement le
mamelon entre ses doigts. Francesca rejeta la tte en arrire, s'abandonna au dsir
conqurant de son amant.
Il se redressa au bout d'un moment pour scruter ses seins lgrement rosis par le plaisir.
Ils sont si beaux..., murmura-t-il en stimulant les deux pointes la fois. Je pourrais
passer un jour entier vnrer chaque parcelle de ton corps et, mme alors, a ne suffirait
pas. En plus..., poursuivit-il d'une voix soudain plus dure, je perds chaque fois le contrle
quand je suis avec toi.
Ce n'est pas grave de perdre parfois le contrle, Ian..., murmura-t-elle.
Il la transpera du regard tout en continuant jouer d'une main avec l'un de ses seins.
Il commena dboutonner le jean de Francesca, sans dtacher les yeux de ceux de la
jeune femme.
Je veux te voir toi perdre le contrle. Tout de suite.
Il ne fit pas descendre son jean, se contenta de dfaire la boutonnire pour glisser ses
doigts sous sa culotte.
Oh..., gmit-elle lorsqu'il enfouit la main au creux de ses cuisses et commena titiller
son clitoris.
Il lcha un grognement de satisfaction.
Tu es dj trempe... Tu as aim ce que je viens de faire ? Chuchota-t-il en piant ses
ractions ses caresses.
Oui..., murmura-t-elle.
Pose les mains sur tes seins. Presse-les. a me donnera du plaisir, ajouta-t-il quand il
perut son hsitation.
Il n'avait pas besoin d'en dire plus. Elle rassembla ses seins entre ses paumes et les ptrit -
dcouvrant le contact de sa propre chair d'une faon entirement nouvelle sous le regard
brlant que Ian posait sur elle. Il continuait masser son clitoris avec une habilet
diabolique.
De son autre main, il entoura le menton de Francesca et caressa sa joue avec son pouce. Le
contraste entre la douceur de ce geste et les manuvres de ses doigts experts au creux de son
sexe dcupla inexplicablement l'excitation de la jeune femme.
Ian baissa les yeux et la regarda jouer avec son propre corps, se caresser pour lui donner du
plaisir... et, de plus en plus, en prendre.
Oui, voil... Pince les ttons, fit-il d'une voix de plus en plus rauque, accentuant la
pression de ses doigts entre les cuisses de la jeune femme. Maintenant, soulve-les -
prsente-moi tes jolis seins roses.
Francesca battit des paupires, submerge par une dferlante de dsir. Elle prit sa poitrine
en coupe et la souleva, sans trop savoir ce qu'il attendait. Il plongea brusquement la tte et
prit dans sa bouche un tton, puis l'autre, leur prodiguant une douce succion. C'tait plus que
Francesca n'en pouvait supporter. Quand elle sentit la morsure des dents de Ian sur l'un de
ses mamelons gonfl par le plaisir, elle succomba l'orgasme. Un flot brutal et intense de
jouissance la traversa de part en part.
Quand elle revint elle, les doigts de Ian remuaient toujours entre ses cuisses ; il la
dvorait des yeux. Lentement, il dtacha la main de sa fente.
Pardonne-moi. Je pensais que je pourrais attendre que nous ayons dn, mais te regarder
peindre est le plus puissant aphrodisiaque au monde.
Elle baissa brivement la tte et vit qu'il commenait dfaire son pantalon.
Quand il libra son sexe l'air libre, elle comprit pourquoi il avait d carter autant sa
ceinture. Son rection tait norme et rigide. Elle sentit son clitoris puiser d'excitation.
l'instant o elle dchiffra l'expression du visage ombrageux de son amant, elle tomba
immdiatement genoux. Pas de menottes, cette fois. Pas de vibromasseur.
Seulement le dsir rig de Ian... et le sien.
Il enfouit les doigts dans sa chevelure quand elle saisit son pnis d'une main. Elle tait
merveille par son poids, par sa chaleur, par sa vitalit sauvage. Elle utilisa l'autre main pour
lui caresser la cuisse - qui semblait elle aussi dure comme l'acier, recouverte de poils bruns
boucls. Elle s'enivra de la sensation de virilit brute et musque qu'il dgageait. Il gronda de
plaisir quand elle effleura la couronne carlate de son membre avec sa joue, puis avec ses
lvres. Ses testicules semblaient ronds et massifs sous les doigts de la jeune femme.
Elle soupira de plaisir et le prit enfin dans sa bouche, cartant au maximum les lvres pour
s'adapter la circonfrence de son rection. Alors, l'univers entier s'vanouit. Seules
existaient dsormais les sensations qu'engendraient en elle la chair dure et vibrante qui
s'enfonait entre ses lvres, le membre pais qui glissait dans son poing serr, le got sal de
sa chair sur sa langue... jusqu' ce qu'elle brle d'envie de le goter encore une fois.
Elle le prit profondment, pas parce qu'il le lui demandait mais parce qu'elle le voulait. Elle
en ressentait l'envie imprieuse.
A travers les brumes du dsir, elle se rendit compte qu'il murmurait son nom d'un ton
dsespr, presque gar.
Ses lvres et sa mchoire commenaient lui faire mal, et sa gorge tait ravage par ses
coups de reins, mais elle le sua encore plus fort, comme pour le soulager de sa souffrance...
mme si ce n'tait que pour un bref et explosif instant.
L'tat de quasi-transe dans lequel elle se trouvait se dissipa quand il enfona son norme
rection encore plus profondment dans sa bouche. Lorsqu'il se rpandit enfin au fond de sa
gorge, Francesca, les yeux carquills, se sentit la fois sa merci et en scurit - parce
qu'elle lui faisait confiance. Il se retira lgrement en poussant un rle guttural et continua
jouir sur sa langue, les doigts crisps dans sa chevelure, faisant aller et venir les lvres de
Francesca en une lente caresse sur son pnis. Elle avala jusqu' la dernire goutte le liquide
suave et musqu, el sentit l'tau des doigts de Ian dans ses cheveux se dtendre.
Relve-toi, fit-il d'une voix rauque.
Elle laissa glisser avec rticence son membre hors de sa bouche - elle aurait voulu
continuer le sucer, le lcher, jouer avec la chair moins dure mais toujours aussi paisse,
se familiariser avec sa forme. Il l'aida se relever et se pencha au-dessus d'elle pour
l'embrasser avec une extraordinaire passion, mle de tendresse.
Tu es si douce..., dit-il un peu plus tard en reprenant son souffle. Merci.
De rien, rpondit-elle avec un petit sourire espigle.
Elle tait sincrement heureuse d'avoir russi combler ses besoins. Il se pencha sur son
visage et lui caressa la bouche.
Tu m'as encore fait perdre le contrle de moi-mme, Francesca.
Le sourire de la jeune femme s'attnua un peu quand elle vit l'ombre qui obscurcissait son
regard.
Je ne vois pas o est le mal. C'est un problme pour toi ?
Il battit des paupires, et l'ombre se dissipa.
Je ne pense pas. Mais nous avons un programme respecter, murmura-t-il en penchant
la tte pour couvrir de baisers sa joue et son oreille.
Elle tressaillit et sentit le creux de ses cuisses se rchauffer nouveau.
Dieu que tu sens bon..., reprit-il dans un souffle, ses lvres brlantes colles contre le
cou de la jeune femme.
Ian ? Quel programme ? Articula-t-elle avec difficult.
Il releva la tte, et elle regretta aussitt d'avoir pos la question.
Nous avons une rservation pour dner vingt heures trente.
On peut se permettre d'arriver un peu en retard, non ? Chuchota-t-elle en enfouissant les
doigts dans les cheveux pais de Ian.
Il la laissait si rarement le toucher... Elle dtestait l'ide de devoir arrter juste cause d'un
programme respecter.
Malheureusement, non, fit-il avec regret tout en s'cartant d'elle pour reboutonner son
pantalon.
Elle fit de mme avec le sien. Il la prit par la main et l'entrana hors de l'atelier.
Nous dnons avec le propritaire de la socit que je veux acheter. J'ai de bonnes raisons
de penser que ce soir, Xander LaGrange va cesser de jouer ce stupide jeu du chat et de la
souris avec moi, et signer enfin ce maudit contrat de vente. J'ai suffisamment assoupli mes
conditions pour que mme ce vieux rapiat ne puisse plus refuser, marmonna-t-il alors qu'ils
traversaient la galerie principale de la rsidence.
Oh..., s'tonna Francesca tout en trottinant pour suivre les rapides enjambes de son
amant.
Elle tait surprise qu'il la convie un repas d'affaires aussi important, et elle se demanda
avec angoisse si c'tait sage de sa part. Ses parents auraient srement jug ce choix
inconsquent.
O est-ce que tu as rserv pour le dner ?
Au Sixteen, rpondit-il en l'entranant dans la chambre coucher avant de refermer la
porte derrire eux.
Elle cligna les yeux avec incrdulit.
Ian... C'est un des restaurants les plus cots de la ville ! s'exclama-t-elle au bord de la
panique. Je n'ai rien me mettre pour un endroit de ce genre... et c'est dans une heure ! Tu as
rserv une salle prive comme la dernire fois ?
Non.
Sans rien ajouter, il l'invita le suivre dans une pice qu'elle ne connaissait pas. Il alluma
la lumire, et elle dcouvrit, merveille, une range d'tagres impeccables. Il s'agissait en
fait d'un vritable dressing, plus grand que la chambre de Francesca, et tout en longueur. Le
parfum de l'aprs-rasage de Ian flottait dans l'air, mlang une autre odeur agrable et
pice. La jeune femme remarqua les cintres en bois de cdre impeccablement aligns dans
leur penderie, et une range de casiers chaussures longue n'en plus finir. Elle prit
conscience que la seconde senteur qu'elle avait hume venait du bois des cintres.
Ian dsigna d'un geste l'une des penderies, et Francesca regarda l'endroit qu'il lui montrait
sans comprendre ce qu'elle voyait.
Pourquoi y avait-il des robes dans cette range ? Et des chaussures et accessoires fminins
?
Elle sentit un nud se former dans sa gorge et se retourna vers Ian, estomaque.
Il est hors de question que je porte les vtements d'une autre femme ! s'cria-t-elle,
touche au cur qu'il ait mme os lui suggrer de mettre des vtements ayant appartenu
l'une de ses anciennes matresses.
Il sembla un peu dcontenanc par sa raction.
Ce ne sont pas les affaires d'une autre femme. Ce sont les tiennes.
Qu'est-ce que tu racontes ?
Marguerite les a fait livrer hier. C'est du prt--porter, dit-il sur un ton d'excuse, mais elle
les a fait retoucher d'aprs tes mensurations.
Marguerite..., rpta lentement Francesca comme si elle prononait un mot d'une langue
trangre pour la premire fois. Pourquoi Marguerite aurait-elle fait a ?
Parce que je le lui ai demand, videmment. Ils se dvisagrent en silence pendant
plusieurs secondes.
Ian, je t'ai dit trs clairement que je ne voulais pas que tu m'offres de vtements,
annona-t-elle d'un ton indign.
Et je t'ai dit qu'en certaines occasions, je t'inviterais m'accompagner dans des endroits
o l'on ne peut pas tre en jean, Francesca. Ce soir, il s'agit d'une de ces occasions. Je t'avais
aussi demand de porter tes nouvelles pingles cheveux, ajouta-t-il si schement qu'elle en
resta bouche be. O sont-elles ?
Que... dans mon sac, rpondit-elle d'un ton rageur. l'atelier.
Il hocha la tte.
Je vais aller te les chercher. Pendant ce temps, tu vas prendre une douche et te prparer.
Tu trouveras de la lingerie fine l-dedans, fit-il en indiquant d'un mouvement du menton une
petite commode en bois prcieux.
Il tait dj sur le seuil.
Ian...
Il se retourna et la transpera du regard.
Je n'ai pas envie de me disputer avec toi ce sujet. Est-ce que tu veux m'accompagner ce
soir ? demanda-t-il calmement.
Je... oui, tu sais bien que je veux.
Alors prpare-toi et choisis l'une de ces robes. Tu ne peux pas assister un dner
d'affaires en jean.
Il la laissa plante l, bouillonnant de colre. Elle rflchit un moyen de contourner sa
demande mais ne trouva rien. Ce qu'il disait tait vrai. Elle ne pouvait pas accompagner Ian
Noble dans l'un des plus prestigieux restaurants de Chicago habille comme a. Avec ses
misrables frusques.
C'tait surtout la maladresse de son amant qui la mettait hors d'elle, en ralit.
Bizarrement, son attitude avait fait resurgir des souvenirs de son pre de l'impatience et du
vague dgot dont il faisait preuve autrefois envers elle quand elle devait se montrer en
socit. Elle se sentait mortifie, blesse et cela ne fit qu'accrotre son ressentiment envers
Ian.
Pour l'amour de Dieu, Francesca, si tu es incapable de dire une chose intelligente,
pourquoi est-ce que tu ne fermes pas la bouche ? Et pas en te gavant de nourriture comme tu
le fais depuis le dbut de la soire.
Elle avait douze ans quand son pre l'avait prise part dans la cuisine et avait prononc ces
mots. Elle se souvint du sentiment de honte et de rvolte qui l'avait submerge alors - un
cocktail d'motions familier. Francesca ne s'tait jamais gave en public. C'tait son pre qui,
obsd par son poids, semblait la foudroyer du regard chaque fois qu'elle avalait la moindre
bouche. a avait toujours t ainsi.
Son pre la voyait comme une tache honteuse la surface du monde, et elle s'tait assure
de coller parfaitement cette image. Ian avait sciemment ignor ses prfrences en matire
de vtements et s'tait entt suivre son propre programme. Francesca avait cru qu'il la
comprenait, qu'il ressentait menu de l'empathie pour elle.
Elle ouvrit d'un geste brusque l'un des tiroirs de la commode et caressa rveusement les
exquises culottes en soie, les bas et les corsets.
Il avait dit vouloir qu'elle s'approprie sa sexualit, qu'elle la considre comme un pouvoir.
Tout cela n'tait-il qu'une manipulation de plus pour parvenir ses fins ?
Elle sortit du tiroir une paire de bas en soie noire.
Eh bien, si Ian voulait l'exposer comme une bte de foire, il n'allait pas tre du du
rsultat.
Il tait en train de nouer sa cravate quand elle sortit de la salle de bains cinquante minutes
plus tard. Leurs regards se croisrent dans le reflet du miroir devant lequel il se tenait. Il
baissa lentement les yeux sur elle et sentit tous les muscles de son corps se crisper sous
l'effet du dsir.
Elle tait si provocante qu'elle semblait la limite de l'illgalit - vtue d'une robe noire au
profond dcollet en V, qui soulignait sa taille de gupe, les courbes lascives de ses hanches et
celles de ses cuisses longues et minces.
Il se rendit compte, avec un mlange de regret et de possessivit, que ses lvres pulpeuses
taient encore gonfles cause du traitement qu'il leur avait fait subir un peu plus tt. Un
homme expriment saurait prcisment quoi s'en tenir en voyant cela, et l'ide de placer
ainsi Francesca dans une situation embarrassante face Xander LaGrange le mit subitement
mal l'aise. Ses cheveux de cuivre rose taient rassembls en chignon, fixs avec ce que Ian
souponnait tre les pingles de diamants qu'il lui avait offertes. Elle portait des pendants
d'oreilles tout simples. Il tait incapable de dtacher les yeux de sa peau ivoirine au-dessus du
profond dcollet - qui laissait dcouvertes la majeure partie de sa poitrine et ses paules
d'albtre. Ian n'arrivait pas croire qu'il s'agissait d'une robe de prt--porter. On aurait cru
qu'elle avait t cre pour elle seule.
Un pur concentr d'lgance sensuelle.
Choisis une autre robe, s'il te plat, fit-il en se forant dtourner les yeux pour finir de
nouer sa cravate.
Nous sommes dj en retard, rpondit Francesca.
Il la contempla et se demanda si c'tait grce ses longs cils de nymphe qu'elle parvenait
viter ainsi son regard. Elle tait en train de vrifier le contenu d'une minaudire en cuir
qu'elle tenait la main. Une vague de suspicion envahit Ian, malgr le dsir que le spectacle
qu'il avait sous les yeux faisait natre en lui. Elle n'avait quand mme pas choisi cette robe
ridiculement sexy pour lui faire payer le fait qu'il lui ait achet des vtements, n'est-ce pas ?
Les talons de douze centimtres et les bas en rsille lui inspiraient des visions de ses jambes
en train de l'enserrer pendant qu'il la chevauchait sauvagement pour obtenir sa soumission...
jusqu' l'extase ultime.
Il frona les sourcils et retourna dans le dressing. Xander LaGrange tait un coureur de
jupons. En vrit, cet homme lui tait insupportable, et Ian ne pouvait imaginer pire torture
que de satisfaire ses caprices uniquement pour pouvoir conclure la vente selon les termes
qu'il souhaitait.
Il avait demand Francesca de l'accompagner cette soire crmonieuse, destine
sceller leur accord, parce qu'il craignait de laisser chapper des paroles dures ou grossires
face au doucereux LaGrange - et de ruiner ainsi toutes ses chances de parvenir ses fins.
Avec Francesca son ct, il serait moins focalis sur le comportement suffisant de
LaGrange, qui tait persuad d'avoir men les ngociations son avantage. Il lui serait plus
facile de se contrler si elle tait l. La fracheur de la jeune femme temprait son caractre.
Sauf qu'il n'avait jamais prvu d'emmener une desse du sexe un dner o Xander
LaGrange tait prsent.
Ian revint dans la chambre avec un gilet en mailles noires lgres orn d'un fermoir cisel
de pierres prcieuses.
Si tu tiens absolument garder cette robe, alors mets ce gilet. a couvrira toute cette...
Il s'interrompit, les yeux fixs sur le large dcollet. Les seins de la jeune femme restaient
dcemment couverts, mme si le tissu laissait apparatre une quantit impressionnante de
chair. La faon dont la robe moulait et soulignait sa poitrine, cependant, reprsentait
l'quivalent visuel d'une confiserie sexuelle. Par contraste, le tissu noir rendait sa peau
extraordinairement blanche et lisse, extraordinairement nue.
... peau, acheva-t-il en ignorant de toutes ses forces la raideur soudaine de son sexe. Je
vais avoir une petite discussion avec Marguerite. Je lui avais parl d' lgance sexy , pas de
provocation sexuelle vous en dcrocher la mchoire .
Je ne vois pas ta mchoire se dcrocher, rpondit-elle d'un ton badin en se tournant pour
qu'il l'aide enfiler le gilet.
Comme il hsitait un instant, elle jeta un coup d'il par-dessus son paule et surprit Ian en
train de contempler ses fesses pulpeuses.
Elle se dcroche intrieurement, marmonna-t-il ajustant le vtement. (Il la prit par les
paules et la tourna face lui, la dtaillant de la tte aux pieds.) Tu n'aurais pas, par hasard,
choisi cette robe pour me faire passer un message, n'est-ce pas ?
Quel genre de message a pourrait tre ? rpondit-elle avec un petit hochement de
menton.
Un message de dfiance.
Tu m'as demand de choisir l'une des robes, et c'est ce que j'ai fait.
Attention, Francesca, fit-il d'une voix calme et inquitante en caressant du pouce le
menton de la jeune femme.
Il vit qu'elle frissonnait et sentit une vague de chaleur envahir son entrejambe. Elle allait
vraiment finir par le rendre fou.
Attention quoi ?
Tu sais ce que je pense de l'impulsivit. Et tu connais les consquences de ce genre de
chose, ajouta-t-il calmement avant de la prendre par la main el de l'entraner hors de la suite.
Le Sixteen tait situ dans la tour de l'Htel International Trump. La salle du restaurant
tait dcore dans un style moderne o dominaient les teintes boises, surplombe par un
norme chandelier en cristal Swarovski. Ils s'installrent ct de l'immense baie vitre qui
offrait un magnifique panorama sur la ville - certains gratte-ciel semblaient si proches qu'on
avait l'impression qu'il suffisait de tendre la main pour les toucher.
Francesca se dit d'abord que le meilleur qualificatif pour dcrire Xander LaGrange tait
raffin , mais elle changea rapidement d'avis pour mielleux . Elle apprit que Ian et lui se
connaissaient depuis les bancs de la fac et taient de vieux rivaux - c'tait du moins le point
de vue de Xander.
Vous tiez l'universit ensemble ? demanda-t-elle lorsque Xander fit allusion au temps
immmorial depuis lequel Ian et lui se connaissaient.
J'tais dj en fin d'tudes quand Ian est arriv, expliqua Xander. Et pourtant, tous les
tudiants en sciences informatiques avaient du mal sortir de son ombre. Ian et moi avons
eu le mme mentor. Le professeur Sharakoff me demandait de trier ses papiers, quand il
proposait Ian de cocrire un livre avec lui,
Tu exagres, Xander, intervint calmement Ian,
Je pensais tre au-dessous de la vrit, rpondit LaGrange avec un petit sourire de
faade.
LaGrange tait un homme au milieu de la trentaine, avec de courts cheveux blond sable qui
grisonnaient vers les tempes. Au premier abord, c'tait un compagnon de table charmant.
Cependant, Francesca perut immdiatement la tension latente qui crpitait entre Ian et lui.
Au bout de quelques minutes de conversation, elle comprit que mme si Ian faisait assaut de
courtoisie, il mprisait LaGrange. Elle le devinait son attitude, sa posture rigide et crispe.
LaGrange, quant lui, transpirait la jalousie l'gard de Ian, une jalousie la limite de
l'hostilit. Ses sourires clatants faisaient presque penser des rictus, et elle se demanda si
cette jalousie n'tait pas le vritable motif de ses rticences accepter les conditions du
contrat que Ian lui proposait.
Tu veux de l'eau gazeuse ? Lui demanda Ian quand le serveur arriva pour prendre leurs
commandes.
Non. Je vais prendre du Champagne, je pense, fit-elle en rendant Xander son faux
sourire de connivence.
Elle tait d'humeur audacieuse ce soir... presque euphorique. C'tait peut-tre la robe noire
sexy, ou le panorama tourdissant, ou la lueur apprciatrice dans les yeux de Xander lorsqu'il
la regardait - ou la tranquille menace de Ian quand ils avaient quitt la chambre coucher -,
mais, quoi qu'il en soit, elle se sentait mutine et... excite.
tait-ce le pouvoir dont Ian lui avait parl ?
O as-tu trouv cette superbe rose, Ian ? Saventura LaGrange, les yeux rivs sur
Francesca, aprs que Ian eut command une bouteille de Champagne.
Ce dernier expliqua que Francesca avait remport le concours de peinture destin
slectionner l'artiste qui raliserait le grand tableau de son hall d'accueil.
Non seulement belle, mais talentueuse, la complimenta Xander. (Il adressa Ian un
regard que Francesca trouva prdateur.) Je crois que je comprends pourquoi tu l'as invite
se joindre nous.
Francesca dtourna immdiatement les yeux vers Ian. LaGrange tait-il en train d'insinuer
que Ian la considrait comme une plante dcorative destine faciliter leurs ngociations ?
Elle s'interrogea sur les raisons qui avaient pouss son amant la convier ce dner. Une
ombre passa furtivement sur le visage de Ian.
J'ai amen Francesca parce que les prparatifs de notre contrat m'ont tenu si occup que
je n'ai pas eu l'occasion de la voir beaucoup ces derniers temps.
Et je ne t'en fais en rien le reproche, assura LaGrange en gardant les yeux rivs sur le
visage et la poitrine de la jeune femme. (Le serveur dboucha le Champagne, et Francesca
revint son humeur lgre.) La prsence d'une aussi jolie femme ne peut qu'tre bnfique
notre accord.
Francesca rougit d'embarras.
Avait-elle vraiment senti Ian se raidir ct d'elle ? Elle se dit qu'elle s'tait trompe quand
il commena discuter d'un ton aimable avec LaGrange au sujet des derniers dtails du
contrat. Elle comprit qu'un des obstacles majeurs la conclusion de l'affaire tait la volont
de LaGrange d'tre pay partiellement en parts dans la socit de Ian, alors que ce dernier
insistait pour un simple versement financier. Elle imaginait trs bien pourquoi Ian refusait
de cder une tierce personne une forme de contrle - mme relativement faible - sur
l'entreprise qu'il avait fonde. Apparemment, il avait finalement propos LaGrange une
somme tellement importante que ce dernier ne pouvait refuser.
Aucun homme sain d'esprit ne pourrait dcliner une telle offre, Ian, concda finalement
Xander en levant sa coupe pour porter un toast. Te voici donc l'heureux propritaire d'une
nouvelle socit.
Le sourire de Ian quand il se joignit au toast parut Francesca un peu forc.
Lin Soong a fait livrer ce matin mon domicile tous les papiers ncessaires. Nous
pourrons nous y rendre aprs le dner pour prendre un dernier verre et nous occuper de cette
paperasse.
La conversation reprit un tour plus mondain. LaGrange interrogea Francesca sur sa
peinture et ses cours, et elle rpondit avec bien plus de ferveur qu' son habitude -
probablement sous l'effet du Champagne. Ian lui jeta un regard en coin quand le serveur vint
remplir sa coupe pour la troisime fois, mais elle ignora dlibrment ce discret
avertissement. Tout au contraire, elle approuva chaleureusement LaGrange quand il proposa
de commander une autre bouteille.
Alors qu'elle dgustait sa dlicieuse entre de loup de mer, elle fut prise d'une envie
pressante et s'excusa pour se rendre aux toilettes. Ian se leva et tira sa chaise.
Merci, murmura-t-elle en croisant son regard. (Il frona les sourcils quand elle
commena ter le gilet.) J'ai un peu chaud, expliqua-t-elle en respirant trop fort.
Il n'avait pas d'autre choix que de l'aider enlever le gilet, mais elle remarqua la tension
qui l'habitait. Elle ramassa sa minaudire et se dirigea vers les toilettes, la fois excite et
embarrasse par le nombre de regards qui se tournaient vers elle tandis qu'elle traversait la
salle. Elle pria pour que Ian l'ait remarqu. L'intrt que lui portaient les hommes tait
encore plus enivrant que le Champagne.
Est-ce que c'tait le genre de chose qu'une belle femme exprimentait tous les jours ? C'est
incroyable, se dit-elle tout en souriant un homme d'une quarantaine d'annes qui la
dvorait des yeux. Ce dernier trbucha et dut se raccrocher au bras de sa compagne pour
regagner son quilibre.
LaGrange eut l'air de trouver tout cela trs amusant quand elle retourna la table.
Je suppose que vous provoquez souvent ce type d'accident, Francesca ? Murmura-t-il en
la scrutant travers sa coupe de Champagne.
Jamais, rpondit-elle ingnument. Sauf une fois - j'ai trbuch au milieu de l'avenue
Michigan pendant un semi-marathon et je me suis foul la cheville.
LaGrange clata de rire comme si elle venait de dire la chose la plus spirituelle du monde.
Il n'tait pas si antipathique, en fin de compte. Ian se montrait trop intransigeant. Elle sourit
Xander tout en jetant un regard en coin Ian. Son sourire s'vanouit quand elle remarqua
la lueur inquitante dans ses prunelles - cet clat sombre qui lui faisait toujours penser
l'approche d'un orage.
Le reste du dner fila dans un tourbillon sensuel o se mlaient la nourriture exquise, le
scintillement des chandeliers, les regards apprciateurs et suggestifs de LaGrange, la
sensualit sombre et intense de Ian ct d'elle... un tourbillon de plus en plus puissant. Elle
rit davantage qu'elle ne l'aurait d, but plus que de raison, prit un plaisir draisonnable voir
le regard apprciateur que Xander et les autres hommes prsents dans le restaurant posaient
sur elle. Elle prouvait une joie dlicieuse sentir Ian prsent son ct pendant qu'ils
bavardaient, et savoir qu'il tait tout aussi conscient de sa prsence elle. C'tait
extraordinairement excitant de se dire qu'elle avait sduit un homme tel que lui - et qu'elle
disposait d'une sorte de pouvoir sur lui, rien que par la magie de sa sexualit.
Quand elle se pelotonna sur sa chaise la fin du dner pour siroter une tasse de caf, elle se
rendit compte que sa robe troite tait remonte sur ses cuisses - rvlant le laage dentel
d'un des porte-jarretelles. Elle vit Ian suspendre son geste alors qu'il tendait la main vers sa
propre tasse, et river les yeux sur son entrejambe.
Abasourdie par sa propre audace, elle glissa un doigt sous la bande de tissu du porte-
jarretelles et caressa sa peau d'un geste lent, sensuel, voquant irrsistiblement les va-et-
vient de l'acte sexuel. Elle risqua un coup d'il innocent sur le visage de Ian, et vit un brasier
peine contenu flamboyer dans ses yeux.
Elle avala sa salive et fit redescendre la robe. C'tait comme si ce simple regard avait suffi
l'embraser tout entire.
Ian demeura silencieux durant le trajet du retour dans la limousine. Elle fit de son mieux
pour entretenir la conversation avec Xander, esprant que ce dernier ne prendrait pas
ombrage du silence de son hte. Ian ne lui avait-il pas demand de venir ce dner pour
charmer LaGrange, afin de faciliter un peu leurs ngociations ? Eh bien, c'est ce qu'elle avait
fait, n'est-ce pas ? Xander semblait absolument ravi du dner, et empress de signer.
Un peu trop empress, mme, lorsqu'il bouscula Jacob devant la portire de la limousine
pour aider Francesca s'extraire du vhicule. Sa main descendit jusqu'aux hanches de la
jeune femme avant de se retrouver sur ses reins par un mystrieux hasard. Francesca
sursauta et s'carta immdiatement, rvulse par ce contact. Elle jeta un coup d'il par-
dessus son paule et vit une lueur glaciale briller dans les yeux de Ian.
Merde. Il l'a remarqu.
Elle resta muette dans l'ascenseur qui montait l'appartement. L'ivresse due au
Champagne tait en train de se dissiper, et elle prit brutalement conscience du comportement
inconsquent qu'elle avait eu durant la soire.
Ian se montrait d'une politesse de marbre. Il tait peut-tre furieux contre elle - c'tait
toujours difficile dire, avec son expression perptuellement stoque. LaGrange, quant lui,
continuait son bavardage inepte, et ne semblait pas remarquer l'humeur massacrante de Ian,
ni les regrets tardifs et honteux de la jeune femme.
Je vais vous laisser parler affaires, annona Francesca quand ils arrivrent devant la
porte d'entre. Xander, j'ai t enchante de vous rencontrer.
LaGrange lui prit la main et la serra entre les siennes.
Non, je vous en prie ! Restez avec nous pour la fin de soire. J'insiste.
Je ne peux vraiment pas, rpliqua-t-elle d'un ton poli mais ferme. J'ai une journe
charge la fac demain. Bonne nuit.
Elle se dtourna et prit la direction de la chambre coucher. Elle avait soudain hte
d'enlever cette robe.
Mais non, enfin, vous ne pouvez p...
Attends-moi dans la chambre, je te prie, fit Ian avec son accent britannique sec et
autoritaire, coupant court aux protestations de LaGrange.
Une vague de rbellion gonfla dans la poitrine de la jeune femme quand elle croisa le
regard de son amant. Comment osait-il lui parler ainsi en prsence d'un tiers ? Elle redressa
le menton d'un air de dfi, mais se souvint alors quel point elle s tait comporte de
manire stupide. Stupide et totalement inconsciente. Elle jeta un coup d'il LaGrange qui
affichait une expression offense. tait-ce cause de Francesca, ou simplement parce que Ian
lui avait coup la parole ? Elle adressa un hochement de tte Ian et tourna les talons. Elle se
sentait soudain fbrile.
Elle avait voulu lui faire payer sa maladresse. Mais peut-tre tait-elle alle trop loin ?
Il lui reprocherait probablement son comportement provocant et frivole durant la soire.
Mais au fond, ne l'avait-il pas cherch ? Songea-t-elle une fois arrive dans la suite de Ian.
Elle ne pouvait pas le laisser rgenter sa vie comme a.
Une fois dans la salle de bains, elle commena ter les pingles de son chignon, essayant
de se convaincre qu'elle avait eu raison de dfier son amant d'une si subtile faon. Il n'avait
pas respect son refus de se faire offrir des vtements. Il l'avait de toute vidence invite au
dner pour qu'elle charme Xander et le mette dans de bonnes dispositions pour signer leur
contrat. Comment osait-il lui en faire ensuite le reproche ?
Eh bien, il saurait maintenant qu'il avait intrt ne pas retenter l'exprience, se dit-elle
avec un mlange de rage et d'anxit en finissant de dfaire le chignon. Ses cheveux
retombrent en cascade sur ses paules, et elle passa la main derrire son dos pour descendre
la fermeture clair de sa robe.
Elle se figea en entendant un bruit de pas l'extrieur de la suite. Elle hsita sortir de la
salle de bains pour voir s'il s'agissait de Ian.
Son cur se mit battre plus vite quand elle entendu la porte de la chambre claquer, puis
le son d'une serrure qu'on verrouillait.
Elle jeta un regard de ct et aperut son amant qui l'observait, plant sur le seuil de la
pice.
Garde la robe, fit-il d'une voix dure. (Elle avait suspendu son geste, la main toujours
dans son dos, prs de la fermeture.) Viens par l.
Sa chemise tait dboutonne, ses muscles crisps, son expression rigide. Le regard de
Francesca fut attir par la boucle brillante de la ceinture de Ian, et la bosse loquente au
niveau de son entrejambe lui sauta aux yeux. Elle sentit son cur battre la chamade.
Xander est dj parti ? demanda-t-elle en sortant de la salle de bains, d'une voix plus
timide qu'elle ne l'aurait voulu.
Oui. Et pour de bon.
Elle s'arrta quelques pas de lui.
Qu'est-ce que tu veux dire par pour de bon ? a signifie que maintenant qu'il t'a
vendu sa socit, tu n'auras plus le voir ?
Non. a signifie que je lui ai dit de reprendre son foutu contrat et d'aller se torcher le cul
avec.
Francesca cligna les paupires et crut pendant quelques secondes ne pas avoir bien
entendu. Avait-il vraiment pu prononcer une phrase aussi vulgaire avec son impeccable
accent britannique ? Elle resta interdite en remarquant la lueur froce qui brillait dans ses
prunelles.
Ian... Tu n'as quand mme pas... Tu voulais absolument obtenir ce logiciel pour ta
compagnie, tu avais tellement travaill pour signer ce contrat... (Un nud atroce se forma
dans son estomac.) Oh non... Tu n'as quand mme pas dit a Xander LaGrange cause de la
faon dont je me suis comporte ce soir, n'est-ce pas ?
J'ai dit Xander LaGrange d'aller se faire foutre et je lui ai coll le visage contre
l'ascenseur simplement parce que je ne peux plus supporter cet immonde salopard, siffla Ian
entre ses dents tout en s'approchant d'elle.
Elle releva la tte et vit la fureur qui couvait dans ses yeux. Elle faillit reculer, mais il
l'arrta en l'attrapant par le poignet.
Et aussi parce qu'il a eu l'outrecuidance de demander un ajout dans le contrat.
Quel ajout ?
Toi. (Il ignora le hoquet de surprise de Francesca.) Il n'tait pas totalement goste. Il a
dit que je pouvais le regarder pendant qu'il scellerait notre contrat dans ta chatte.
Une expression horrifie se dessina sur le visage de la jeune femme.
Ce sont ses mots, Francesca. Pas les miens.
Elle le regarda avec angoisse et incrdulit. Elle n'arrivait pas croire que Xander
LaGrange soit une telle ordure... et pourtant. Si elle n'avait pas flirt avec lui aussi
ouvertement, si elle n'avait pas essay de dfier Ian, Xander n'aurait jamais os faire une telle
proposition. Ian aurait obtenu son contrat. Elle sentit les larmes lui monter aux yeux.
Oh non. Elle avait ruin tous ses plans. Il avait peut-tre mrit une petite vengeance pour
sa maladresse envers elle, mais elle n'avait jamais voulu que les choses dgnrent ainsi.
Ian... je suis dsole. Je ne voulais pas... Tu ne penses quand mme pas que je l'ai fait
expr...
Il passa une main derrire sa nuque, la maintint immobile et lui imposa le silence d'un
regard autoritaire.
Je sais que tu ne voulais pas saborder le contrat. Tu n'es pas ce point rancunire. Qui
plus est, tu es mme trop nave pour avoir eu conscience de ce que tu faisais. La proposition
que Xander a os me faire tait juste l'tincelle qui a mis le feu aux poudres. la seconde o
ce trou-du-cul t'a touche, notre accord tait caduc. Je l'ai juste fait monter la rsidence
pour l'en informer. Avant que j'en aie eu le temps, il a eu l'audace de me faire cette demande
abjecte et y a gagn un dpart plus... abrupt que je ne l'avais prvu.
Je n'arrive pas y croire, murmura-t-elle d'une voix horrifie.
C'est parce que tu n'as aucune ide de ce qui peut se passer dans la tte d'un homme
comme LaGrange. Tu as jou avec le feu. Tu as le corps et le visage d'une desse, et l'ge
mental d'une gamine de six ans qui on vient d'offrir un nouveau jouet.
De la colre affleura sous la honte de Francesca.
Je ne suis pas une gamine. J'essayais juste de te prouver que je refuse que tu me traites
en tant que telle, Ian !
Tu as raison, fit-il en resserrant la prise sur son poignet. (Il commena entraner la
jeune femme vers l'autre extrmit de la suite. Elle avait de la peine le suivre, perche sur
ses talons hauts.) Tu veux jouer des jeux de femme, tu veux griller des allumettes devant
moi pour voir si je brle ? Eh bien, j'espre que tu es prte en assumer les consquences,
Francesca.
Il tendit la main vers un tiroir et en sortit un jeu de cls d'un geste brusque.
Elle sentit un mlange d'anxit, de regret et d'excitation envahir sa poitrine, lui coupant le
souffle. quoi servaient ces cls ? Il la trana par le poignet et la fit pntrer dans une petite
pice sans fentre qui devait faire environ six mtres sur quatre. L'un des murs tait
recouvert de tiroirs encastrs en bois de cerisier. Ian claqua la porte derrire eux, et elle
regarda autour d'elle. Le mur du fond tait recouvert d'un miroir, et une sorte de mobile
bizarre constitu de cordes, de sangles, et de lanires en nylon noir, tait fix au plafond. Elle
contempla l'installation, stupfaite, et sentit son pouls marteler ses tempes.
Va te placer devant le canap et enlve ta robe.
Elle dtacha les yeux de l'effrayant mobile et se rendit compte qu'un divan pelucheux
faisait face au miroir. Un lgant chandelier pendait au plafond -bizarrement, il ne semblait
pas inconvenant dans une telle pice. C'est tellement typique de Ian d'associer le cristal et les
jeux coquins. Il y avait aussi d'autres choses, comme deux crochets fixs au mur, un tabouret
haut la courbure bizarre, une barre horizontale contre l'une des parois et une banquette
matelasse.
Ian, qu'est-ce que c'est que cet endroit ?
C'est ici que tu recevras tes chtiments les plus svres, rpondit-il avant de s'avancer
vers l'un des tiroirs.
La jeune femme ouvrit grands les yeux quand elle remarqua plusieurs tapettes et
accessoires avec des lanires de cuir. Sa bouche devint sche lorsque Ian saisit le manche de
la tapette de cuir noir qu'elle connaissait si bien.
Oh non.
Je n'avais vraiment pas l'intention de saborder ton contrat..., souffla-t-elle.
Je t'ai dj dit que je le savais. Je ne te punis pas parce que Xander LaGrange est un
salopard vicieux. Je te punis parce que tu m'as tourment toute la soire. Ne t'ai-je pas
demand de retirer ta robe ?
Il se tourna vers elle avec une lueur d'amusement dans les yeux, la tapette la main.
Comme Francesca ne cillait pas, la lueur disparut.
La porte n'est pas ferme cl, Francesca. Tu peux t'en aller si tu le veux. Mais si tu
choisis de rester, tu feras ce que je te dirai.
Elle traversa la pice et s'arrta devant le divan, haletante. Alors qu'elle tait sa robe, elle
remarqua que son reflet dans le miroir tait excessivement ple. Elle vit Ian ouvrir un autre
tiroir pendant qu'elle se dbarrassait du tissu qui lui collait la peau.
Ce n'tait pas pour rien qu'on appelait a une robe fourreau.
Elle hsita aprs avoir retir le vtement.
J'enlve tout a aussi ? demanda-t-elle d'une voix tremblante en dsignant le soutien-
gorge, la culotte, les porte-jarretelles et les vertigineux escarpins.
Juste le soutien-gorge et la culotte, rpondit-il en sortant d'autres objets du tiroir et en
s'approchant derrire elle.
Son corps faisait cran, de sorte qu'elle ne pouvait distinguer ce qu'il tait en train de
dposer sur la banquette en plus de la tapette.
Elle enleva ce qu'il lui avait demand et aperut juste une chose avant qu'il ne lui bloque
totalement la vue en revenant vers elle : un objet qui ressemblait un tube conique en
caoutchouc noir, termin par un anneau, du ct le plus large.
Elle jeta un coup d'il la main de son amant, et son clitoris pulsa d'excitation quand elle
aperut le petit pot de crme blanche. Il remarqua sans doute son expression - ou peut-tre le
durcissement de ses ttons - car un sourire se dessina sur sa bouche dure.
Oui. Je suis d'une faiblesse coupable quand il s'agit de toi, Francesca. Je ne peux pas
supporter l'ide que tu prouves seulement de la douleur, fit-il en dvissant le couvercle du
pot. (Il plongea un doigt dedans et regarda la jeune femme dans les yeux.) Mme maintenant
- alors que tu mrites pourtant une svre punition.
Elle avala pniblement sa salive.
Je suis vraiment dsole, Ian, fit-elle sincrement - pas cause de la tapette noire pose
sur la table, ni de l'trange plug noir qu'elle avait aperu.
Il frona les sourcils et recula un peu. Elle gmit quand il insra un doigt entre les lvres de
son sexe et commena taler la crme sur son clitoris avec une prcision experte qui la fit
frmir.
Je te gte trop, dit-il en retirant sa main.
J'aurai du mal croire a dans quelques minutes, quand mes fesses seront en feu,
marmonna-t-elle.
Il releva les yeux vers son visage et lui adressa un sourire diabolique. Une onde de chaleur
envahit l'entrecuisse de la jeune femme.
Il retira sa veste et se tourna vers la table. Elle admira le jeu souple de ses muscles tandis
qu'il retroussait les manches de sa chemise, dcouvrant ses avant-bras puissants et sa montre
en or. Un nud commena se former dans son estomac.
Il tait srieux.
Quand il se retourna vers elle, elle essaya tout de suite de voir ce qu'il avait dans la main.
Curieuse ? Murmura-t-il.
Elle hocha la tte.
Comme j'ai l'intention de te mettre un bandeau dans un petit moment, je vais t'expliquer
ce qui va se passer, reprit-il calmement en lui montrant la paire de menottes qui lui tait dj
familire. Je vais t'attacher les poignets et te mettre sur mes genoux avant de te punir avec la
tapette. Une fois que tes fesses seront joliment rouges et brlantes... (Il leva le plug en
caoutchouc noir qui ressemblait un peu une matraque et un flacon de gel transparent) je
lubrifierai ce plug anal et je te prparerai me recevoir.
Le cur de Francesca s'arrta de battre pendant quelques secondes.
Tu vas faire quoi ?
Tu m'as bien entendu, dit-il en reposant le lubrifiant et le plug anal sur le divan. (Il
dsigna du regard les poignets de la jeune femme.) Place-les devant toi,
Elle suivit ses instructions comme si elle tait sur pilote automatique et joignit les poignets
devant son bas-ventre.
Tu sais certainement que les hommes adorent a, ajouta-t-il devant son expression
estomaque.
Mme si ce n'est pas le cas des femmes ?
Certaines d'entre elles aiment a. Et mme beaucoup.
Elle songea l'norme pnis de Ian, et son opinion fut faite. Ce serait une vritable
punition d'avoir ce membre dans son anus, malgr le stimulant clitoridien qui commenait
dj la faire frmir de plaisir. Ian se rapprocha de la table et revint avec un long foulard de
soie - le bandeau. Elle lui jeta un dernier regard quand il leva les mains pour l'ajuster sur ses
yeux.
Une fois qu'il eut bien fix le foulard et qu'elle fut compltement aveugle, il la mena
jusqu'au divan. Elle crut entendre son puissant corps tomber sur les coussins. Il la guida sur
ses genoux. Entrave par ses poignets lis, elle s'effondra misrablement sur ses cuisses.
Je suis dsole, souffla-t-elle.
Il n'y a pas de problme. Tu te souviens de la position que je t'ai apprise ? Murmura-t-il
au-dessus d'elle.
Elle hocha la tte et fit glisser sa poitrine l'extrieur de sa cuisse jusqu' ce que la courbe
infrieure de ses seins repose sur ses muscles durs, tirant ses mains entraves au-dessus de
sa tte, ses fesses nues rebondissant sur l'autre cuisse. Son sexe se contracta quand elle sentit
son membre dress contre ses ctes et son ventre, et perut sa chaleur travers le tissu du
pantalon de Ian.
Ian, tu ne pourras pas faire rentrer a l'intrieur de mon...
Il fit claquer sa main sur ses reins, et elle sursauta sur ses genoux.
C'est ce que je vais faire, ma douce, l'entendit-elle dire. Et je vais apprcier chaque
seconde. Maintenant, tiens-toi tranquille.
Elle se mordit la lvre pour s'empcher de crier quand il commena frapper son
postrieur et, occasionnellement, ses cuisses, en de rapides coups cuisants. Son clitoris pulsa
d'excitation. Elle dcida qu'elle prfrait la fesse la tapette. Elle aimait le contact de la peau
de Ian, la faon dont sa main se rchauffait en mme temps que ses fesses, dont son membre
se dressait contre ses flancs chaque tape terme sur la courbe infrieure de ses fesses. Elle
ne vivait plus que dans l'attente du prochain coup.
Elle adorait les moments o il faisait une pause pour caresser sa croupe enflamme de sa
large main, apaisant la brlure. Elle gmit lorsqu'il s'empara brusquement d'une de ses fesses
pour la ptrir sans mnagement en arquant le bassin - collant son rection contre les ctes de
la jeune femme.
Pourquoi est-ce que tu me tourmentes autant, ma beaut ? Murmura-t-il d'un ton rude.
Je me pose la mme question pour toi, marmonna-t-elle d'une voix demi touffe, le
visage press contre les coussins du divan.
Il la relcha avec un grognement.
Tu es comme une pine perptuelle dans ma chair, fit-il sombrement.
Je suis dsole, souffla-t-elle en regrettant le contact de sa main.
Qu'est-ce qu'il trafiquait ? Elle tordit le cou pour essayer de percevoir la moindre chose qui
rpondrait sa question. Un cri trangl jaillit de sa gorge quand il posa sa large main entre
ses fesses pour les maintenir cartes. Elle sentit une pression froide et dure contre son anus.
Je ne pense pas que tu sois rellement dsole, dit Ian derrire elle. (La pression
s'accrut, et l'extrmit du plug s'introduisit dans son orifice troit.) Je crois que tu aimes me
tourmenter autant que j'aime te punir.
Ian..., geignit-elle quand il enfona davantage le plug en elle, puis commena imprimer
des mouvements de va-et-vient au cylindre de caoutchouc en le maintenant fermement. Le
lubrifiant permettait au sex-toy de glisser librement malgr l'troitesse du passage.
a va ? demanda-t-il d'une voix rauque.
Francesca ouvrit la bouche pour rpondre, le visage toujours enfoui dans les coussins du
canap.
C'est trs... trange, articula-t-elle d'une voix tremblante.
Elle n'arrivait pas trouver les mots adquats pour dcrire ce qu'elle ressentait -
l'apprhension de se trouver sa merci, la honte de lui laisser accs une partie aussi intime
de son corps, l'excitation de sentir ses terminaisons nerveuses s'affoler, un plaisir
inimaginable qui vibrait dans son clitoris...
Il la fit crier de surprise en enfonant soudain le plug en elle.
a fait mal ? demanda-t-il en maintenant l'objet en place.
Elle secoua la tte contre le sofa, trop bouleverse pour parler. La crme clitoridienne
faisait maintenant pleinement effet. Comme si Ian avait senti cela, il glissa une main entre
ses cuisses et carta ses grandes lvres, puis caressa la petite pointe de chair. Elle frmit sur
ses genoux.
Tu commences comprendre pourquoi une femme peut aimer a ? fit-il en
recommenant faire aller et venir le plug dans son anus. Au moins autant qu'un homme.
Un gmissement jaillit de la gorge de Francesca. Elle tait incapable de rpondre. Ian
accentua son geste tout en caressant son clitoris. S'il continuait comme a, elle succomberait
bientt l'orgasme.
Malheureusement, ce n'tait pas dans ses plans. Il retira sa main, et le sex-toy glissa hors
des fesses de la jeune femme. Elle laissa chapper un gmissement d'insatisfaction et sentit
les doigts de son amant s'agiter autour de ses poignets. Il dfit les menottes et lui ta le
bandeau. Elle cligna les yeux, blouie par la lumire du chandelier de cristal qui lui paraissait
clatante aprs les tnbres du bandeau. Ian la prit par la main.
Relve-toi. Je vais t'aider.
Elle apprcia son aide, encore dsoriente par la lumire et l'interruption brutale du plaisir.
Elle se tint devant lui, frustre, excite et vacillante sur ses hauts talons. Il leva vers elle des
yeux anims par une lueur de dsir et d'excitation. Ses longues jambes lgrement cartes
dvoilaient de faon flagrante l'intensit de son rection.
Tu as aim a, n'est-ce pas ? Senquit-il en la dvisageant.
Non, murmura-t-elle, sachant trs bien que ses joues roses et ses ttons durcis la
trahissaient.
Il se contenta de sourire et se releva. Elle le regarda, incapable de dissimuler son dsir
languissant, tandis qu'il cartait doucement les cheveux de son visage. Elle soupira en sentant
sa main caresser son dos.
Encore rebelle mme face la dfaite ? Tu ne cesseras jamais de m'tonner, ma belle.
Suis-moi, murmura-t-il en lui prenant la main.
Elle s'excuta et s'arrta brusquement quand elle aperut son reflet dans le miroir.
Par contraste avec le porte-jarretelles noir, sa peau semblait extrmement ple - faisant
ressortir la toison cuivre entre ses cuisses. Ses cheveux retombaient en dsordre sur ses
paules, et ses ttons arboraient une couleur rose sombre. Les globes blancs de sa poitrine se
soulevaient rgulirement au rythme de son souffle.
Elle se figea devant son image transfigure par le dsir.
Tu vois ? Lui chuchota Ian l'oreille en se collant derrire elle. (Elle frmit en sentant
son souffle chaud contre ses tempes.) Tu le vois, n'est-ce pas ? quel point tu es belle...
Il passa la main sur son ventre en un geste possessif. Les lvres de Francesca s'ouvrirent,
mais elle ne parvint articuler aucun mot.
Dis-le, murmura-t-il, le souffle rauque. Que tu vois toi aussi ce que je vois quand je te
regarde.
Je le vois, rpondit-elle d'une voix blanche, presque merveille, comme si Ian possdait
un miroir magique.
Bien. Ce n'est pas le genre de pouvoir avec lequel on joue, n'est-ce pas ?
Francesca mit du temps comprendre que le petit sourire de Ian n'tait pas une marque de
moquerie ou de suffisance. Non... Il triomphait cause de ce qu'elle percevait dans le miroir,
parce qu'elle l'avait admis. Pourquoi se souciait-il du fait qu'elle se trouve belle ou non ?
Il la mena jusqu' l'trange installation qui pendait au plafond, mlange de sangles et de
lanires intriques. Le cur de la jeune femme se mit battre follement. Ian appuya sur la
barre noire horizontale et fit bouger le mobile de faon faire descendre une sorte de cercle
de cuir rembourr un peu plus d'un mtre du sol. Une seconde... Ces bandes de cuir
pouvaient trs bien servir suspendre un corps dans l'air. Si celle circulaire servait de support
la tte, la sangle plus large au torse et la plus basse aux cuisses... les boucles plus troites
pouvaient tre utilises pour emprisonner les poignets et les chevilles.
Cette personne serait totalement immobilise, sans dfense. Francesca releva les yeux vers
Ian, qui tenait toujours le harnais. La lueur du chandelier se refltait dans ses prunelles
bleues. L'expression d'incrdulit de la jeune femme disparut mesure que l'angoisse lui
nouait la poitrine.
Oh non.
Elle tait dj totalement sans dfense avec Ian Noble... et a n'avait rien voir avec les
liens physiques.
Il tendit la main vers elle et lui fit signe d'approcher.
Francesca sentit son anus se contracter ; une chaleur moite envahit le creux de ses cuisses.
Il lui prit la main, l'attirant vers lui.
Il est temps que tu apprennes que, chaque fois que tu joueras avec le feu, tu finiras ma
merci.
Il la souleva doucement et fermement du sol, et fit glisser son corps, tourn vers le bas,
travers les boucles du harnais. Il ajusta les sangles rembourres sous ses hanches, son torse
et son front. Elle laissa chapper un cri aigu en sentant l'installation flchir sous son poids
lorsqu'il la lcha.
Chhh, souffla-t-il en lui caressant le dos. Le mobile est fix une poutre d'acier
l'intrieur du plafond. Il n'y a absolument aucun risque. Dtends-toi.
Elle finit par expirer lentement et se rendit compte, une fois installe, qu'elle se sentait
effectivement en scurit. Trouble, excite et un peu effraye, mais certaine que Ian veillait
ce qu'il ne puisse rien lui arriver de grave. Il lui caressa les mollets, puis les chevilles. Elle
jeta un coup d'il en biais, mais elle ne pouvait rien voir travers l'pais rideau de sa
chevelure. Elle sentit son amant glisser d'abord l'un de ses pieds travers une boucle de
nylon, puis l'autre, et resserrer les lanires autour de ses chevilles. Il lui avait attach les
pieds un peu plus bas que le corps de sorte que ses jambes soient sous le niveau de ses
hanches - un peu comme si elle se trouvait genoux, mais suspendue dans l'air. Aprs avoir
fix ses chevilles, il passa devant elle et lui attacha les poignets de manire similaire, laissant
ses bras retomber dans une position de prire au-dessous de sa poitrine.
Devant ses gestes experts et prcis, Francesca comprit qu'il avait une grande exprience
avec l'trange installation.
Je vais chercher quelque chose pour tes cheveux.
Pendant plusieurs minutes particulirement angoissantes, il disparut. Puis, ses mains
habiles balayrent ses cheveux de son visage, soulevant leur impressionnante masse. Elle vit
dans le miroir qu'il tordait ses cheveux sur eux-mmes pour les rassembler avec une grande
pince.
Elle n'arrivait pas dtacher les yeux du reflet de la puissante silhouette de son amant, ni
de sa propre image, nue et suspendue dans l'air, vulnrable tout ce que Ian dciderait de lui
faire.
Il remarqua peut-tre son expression anxieuse, car il passa ses longs doigts sur sa nuque et
croisa son regard dans la glace.
N'aie pas peur, dit-il.
Elle battit des paupires et discerna dans les yeux de son amant quelque chose qui lui
donna du courage. De la passion. De la tendresse. Un dsir visible de la possder, mais pas
d'une faon qu'elle devait craindre ou dtester. Elle hocha la tte, le souffle coup.
Il s'avana vers la table. Quand il se retourna, il tenait la tapette. la vue de l'instrument
de punition, elle ressentit un pincement d'excitation dans son entrejambe. Elle se rendit
compte quel point son postrieur tait vulnrable, suspendu ainsi un mtre du sol. Elle
retint sa respiration quand Ian s'arrta derrire elle et leva la tapette. Elle sentit la caresse
exquise de la fourrure sur sa chair encore brlante.
Il agrippa les sangles qui retenaient ses hanches et les maintint en place. Les yeux
carquills, elle vit dans le miroir qu'il cartait la tapette quelques centimtres de ses fesses
et la faisait tournoyer dans l'air. Quand elle s'immobilisa dans sa main, la face de cuir tait
dirige vers les reins de Francesca.
Je vais te donner dix coups, dit-il d'un ton bourru en posant le plat de la tapette contre
ses fesses.
La peau de la jeune femme s'chauffait dj cette sensation, au contact du cuir noir
press contre la surface blanche de son postrieur.
Il leva la tapette et frappa. Elle hoqueta sous l'impact, et son corps s'arqua lgrement en
avant malgr l'tau des mains de Ian autour d'elle. Un cri de surprise jaillit de sa gorge quand
le deuxime coup atterrit, embrasant ses nerfs. Ian garda la surface de cuir presse contre sa
chair.
Je t'ai dit que tu tais en scurit, et ce sera toujours le cas. Mais a ne veut pas dire que
tu n'auras pas mal du tout. Il s'agit tout de mme d'une punition.
Elle gmit quand le troisime coup toucha la courbe infrieure de ses fesses. Ian mit un
grognement rauque et sourd, et il utilisa de nouveau le cuir pour la masser.
J'adore faire rougir ton petit cul, marmonna-t-il en lchant un autre coup.
Celui-l fut assez fort pour faire sursauter Francesca d'une dizaine de centimtres, bien
que Ian la retienne.
Tu vas tenir le compte, Francesca. Je perds ma concentration.
Elle fixa ses traits durs au moment o il disait cela, le cur battant cent l'heure. Entre
ses cuisses, la crme tourmentait son clitoris. Ian, perdre sa concentration ? Il leva le bras, et
la jeune femme carquilla les yeux dans l'attente du coup.
Smack.
Cinq, couina-t-elle.
Elle n'arrivait pas dtacher le regard du miroir : la faon dont la chemise de Ian moulait
son torse quand il levait le bras, ses yeux focaliss sur elle tandis qu'il faisait pleuvoir les
coups, la force brute de ses bras qui la maintenaient en place durant sa punition.
Il frappa encore plusieurs fois, avant de lcher un juron mi-voix. Il relcha alors sa prise
sur le harnais qui entourait les hanches de la jeune femme. Libr de son treinte, le corps de
Francesca se balana d'avant en arrire. Elle le remarqua peine tant elle tait occupe
contempler son amant dans le miroir, Il enroula d'un geste preste la dragonne de la tapette
autour de son poignet et commena dfaire son pantalon. Il l'abaissa juste assez pour
librer son sexe sous l'lastique du boxer blanc et le caressa.
Ian...
la vue de sa puissante rection, un afflux de chaleur envahit l'entrecuisse de la jeune
femme. Ian ta la dragonne de son poignet et serra nouveau le manche.
Oui ? rpondit-il d'une voix rauque d'excitation.
Je n'en peux plus..., lcha-t-elle sans trop savoir ce qu'elle voulait dire.
C'tait plus de tension qu'elle ne pouvait en supporter ; elle avait l'impression qu'elle allait
prendre feu.
Pourquoi cette position suspendue, de totale vulnrabilit, l'excitait-elle autant ?
Je ne fais que te rendre la monnaie de ta pice, dit-il sombrement en assurant de
nouveau sa prise mit ses hanches.
Il leva une nouvelle fois la tapette.
Huit ! Cria Francesca.
Ses reins la brlaient, et elle ne pouvait dtacher les yeux du membre dress de Ian, qui se
balanait l'horizontale quand le coup atterrissait, et venait heurter doucement la hanche de
la jeune femme.
Quand le dix jaillit enfin de ses lvres, le creux de ses cuisses tait tremp, elle haletait
dsesprment, et ses fesses taient comme deux braises. Ian caressa sa chair avec la surface
de fourrure pour apaiser la douleur, et relcha le harnais. Elle touffa un gmissement quand
il saisit l'une de ses fesses pour la ptrir avidement entre ses doigts.
a va tre si bon de baiser ton petit cul, ma beaut... Si chaud. Tu vas finir par me faire
fondre.
Elle crut discerner un sourire sur ses lvres dures.
Est-ce que a fera mal ? demanda-t-elle en tremblant.
Il interrompit sa caresse lascive et croisa les yeux de Francesca dans le miroir.
Un peu au dbut, peut-tre. Mais mon intention est de te punir pour ton comportement,
pas de te torturer.
Et... mettre ton sexe dans... c'est une partie de ma punition ?
Il la lcha et se dtourna d'elle pour s'approchait de la table. Elle essaya de distinguer ce
qu'il faisait dans le miroir - mais le dos de Ian et son propre corps lui bloquaient la vue.
Quand il se retourna, Il tenait un plug noir luisant. Elle tait sous le choc. Celui-ci tait plus
grand que le prcdent. Entre ce sex-toy intimidant et l'rection triomphante de Ian,
Francesca ne savait pas o poser le regard.
Je ne considre pas la sodomie comme autre chose qu'un plaisir, dit-il en se rapprochant
d'elle. Savoir si toi, tu la verras comme une punition ou comme un change mutuel de plaisir,
est encore dterminer.
Il crocheta l'avant-bras droit dans les sangles du harnais, les maintenant fermement, puis il
utilisa la tranche de sa main pour carter les fesses de la jeune femme et effleura son anus
avec l'extrmit pointue du plug.
Tends les mains et caresse ton clitoris, ordonna-t-il d'une voix crispe.
Elle plongea ses mains lies vers son pubis. Sa fente tait niche juste au-dessous de la
bande de cuir rembourre. Elle introduisit un doigt sous le harnais et l'enfouit entre ses deux
grandes lvres. Elle tait trempe. la seconde o elle toucha la petite pointe de chair, une
vague de plaisir la traversa.
Ensuite... il y eut un bref lancement de douleur, qui disparut presque aussitt.
Elle hoqueta et se rendit compte que Ian avait enfonc le plug l'intrieur de son anus.
Elle frotta son clitoris avec plus de vigueur. Son corps entier tait en feu. Oh... elle allait
bientt jouir.
Ian lui attrapa les poignets et tira ses mains en arrire. Elle laissa chapper un
gmissement de protestation.
Ian avait une expression amuse.
Je pense que nous avons la rponse notre question, non ?
Elle se mordit la lvre et jeta un coup d'il nerveux son reflet. Il avait entirement insr
le plug de caoutchouc l'instant o elle s'tait abandonne au plaisir. La base plate du sex-toy
tait colle contre son postrieur.
Suspendue, sans dfense dans l'air telle une boule de nerfs et de chair tremblante,
Francesca se figea en voyant ce qui se passait dans la glace. Ian tait en train de se
dshabiller. Il ta ses chaussures et ses chaussettes, puis retira sa chemise. Elle eut le souffle
coup la vision de sa taille mince, de ses abdominaux muscls et de son large torse. Son
apprhension et son dsir taient si grands qu'elle avait l'impression que ses poumons taient
en feu.
Oui.
Il fit descendre son pantalon et son boxer le long le ses longues jambes. Elle le vit enfin
intgralement nu.
Elle ferma les paupires un moment. Splendide, il tait la virilit incarne. Elle avait
presque mal rien qu' le regarder, dans l'tat d'excitation intense o elle se trouvait. Un cri
jaillit de ses lvres quand son corps se mit soudain tourbillonner dans l'air. Elle carquilla
grands les yeux en voyant les murs dfiler autour d'elle. Quand le tournoiement s'arrta
enfin, elle releva le front au-dessus du harnais. Ian se tenait quelques centimtres devant
son visage, la main crispe sur la corde qui retenait sa poitrine. Elle leva les yeux vers lui.
C'est tout l'intrt de la suspension, fit-il devant son expression ahurie. Je peux te
mettre dans la position que je veux, en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire.
Il saisit son membre et le dirigea vers la bouche de la jeune femme. Son intention tait
claire. Le sommet de son sexe glissa d'un coup dans sa bouche. Elle enserra son gland, puis
son pnis entier contre sa langue, en observant le visage de son amant par en dessous. Il
poussa un grognement sourd, la contemplant tout son sol.
Comment tait-il possible qu'elle se sente la fois vulnrable et totalement matresse
d'elle-mme ?
Il fit dcrire au corps de la jeune femme un mouvement de va-et-vient. Il continua pendant
un moment, possdant sa bouche, la contrlant totalement, mais n'abusant jamais de son
pouvoir, glissant seulement de quelques centimtres contre sa langue, d'avant en arrire,
jusqu' ce que son membre cartle totalement les lvres serres de Francesca.
C'est si bon..., murmura-t-il en reculant un peu, retirant son sexe de la bouche de la
jeune femme. Trop bon, en fait, ajouta-t-il d'une voix crispe. Prpare-toi, ma belle.
Brusquement, il la retourna dans la direction inverse. Il fit ensuite glisser vers le bas la
bande de cuir qui soutenait ses hanches, de sorte qu'elle supporte prsent les cuisses de la
jeune femme.
Oh ! Geignit-elle quand il la souleva sans effort par la taille.
D'une main, il maintint doucement le plug enfonc.
Fais passer tes pieds de l'autre ct travers la sangle du bas, de manire te retrouver
en position assise.
Elle fit de son mieux pour excuter ses instructions, guide par les mains expertes de Ian,
et russit finalement adopter la position qu'il dsirait. Une fois qu'elle fut stabilise et qu'il
eut ajust les sangles, celle frontale retomba, faute de tension. Le harnais mdian soutenait
prsent ses ctes, et elle tait assise dans celui infrieur, les genoux plies, les mains lies
devant son ventre. Aprs avoir vrifi toutes les attaches, Ian fit glisser le harnais infrieur
plus loin, a mi-chemin de ses cuisses.
Son excitation et sa parfaite matrise tourdissaient Francesca. Elle avait l'impression de
participer une sorte de version estampille triple X d'un numro du Cirque du Soleil.
Il fit glisser le plug noir lubrifi hors de son anus, arrachant la jeune femme un hoquet de
surprise. Il dposa le sex-toy sur le sol. Pantelante, presque hypnotise, elle le regarda
lubrifier son membre turgescent jusqu' ce qu'il luise sous la lumire. Il passa derrire elle et
attrapa les diffrentes lanires du dispositif, attirant le corps de la jeune femme lui.
Elle se retrouva dans une sorte de position assise suspendue, le dos tourn Ian, la
poitrine en oblique... les fesses totalement exposes, enserres dans les sangles du harnais
comme une offrande.
Elle n'arrivait plus respirer. Elle sentit le sommet pais et glissant du pnis dress
caresser ses fesses brlantes, puis appuyer contre l'orifice de son anus.
Ian..., lcha-t-elle entre ses dents serres.
C'est maintenant que tu vas t'embraser, ma belle, dit-il en un rugissement sourd.
Il relcha sa prise sur les sangles et attrapa le rebord de la bande de cuir rembourre qui
soutenait les cuisses de Francesca. Elle ne pouvait rien faire, condamne aller la rencontre
de son rection. Il arqua le bassin et s'introduisit en elle d'une seule pousse. Elle cria quand
son membre s'enfona de plusieurs centimtres entre ses fesses ; une douleur vive la traversa
de part en part. Il s'immobilisa quelques secondes, tendu comme un arc.
Elle observa avec fascination le reflet de son amant dans le miroir. On aurait dit qu'il venait
juste d'achever une tche reintante. Tous les muscles de son corps taient bands
l'extrme, leurs contours clairement dessins, et la sueur faisait luire son abdomen et son
torse haletant. Les muscles puissants de ses fesses et de ses cuisses taient eux aussi tendus,
comme s'il effectuait un numro d'quilibriste. cet instant, il offrait une vision
extraordinaire : un ouragan sexuel sur le point de se dchaner. La partie de son sexe qui
n'tait pas encore plonge en elle tait d'une largeur intimidante. Elle le sentait pulser dans
son troit orifice. Elle n'avait jamais prouv la sensation de leurs deux chairs si proches, si
fondues l'une l'autre.
Est-ce que a va ? fit-il d'une voix haletante.
Oui.
Elle se rendit compte que sa rponse tait sincre. La douleur initiale avait disparu,
remplace par un plaisir fascinant et interdit. Ses joues et ses lvres taient empourpres.
Son clitoris pulsait.
Tant mieux, parce que ton petit cul est un vritable brasier, souffla-t-il en s'enfonant
davantage en elle. (Un cri rauque jaillit de la gorge de Francesca. Il commena imprimer un
mouvement de va-et-vient avec son bassin.) Oh, seigneur, c'est bon de te prendre sans
prservatif...
Francesca gmissait de plaisir sous cette nouvelle sensation rotique, et la vision de Ian
qui s'abandonnait enfin l'ivresse. Il n'y avait plus de douleur, mais une jouissance intense et
insupportable qui ne faisait que crotre. Les terminaisons nerveuses de l'troit canal de chair
taient si sensibles qu'elle pouvait percevoir chaque nuance de son membre. Le plaisir se
communiquait peu peu son clitoris - l'orgasme approchait. Bouche be, elle contemplait
son reflet dans le miroir tandis que le pnis de Ian s'enfonait encore et encore, de plus en
plus profondment dans son corps chaque pousse. Enfin, le sexe de son amant vint cogner
contre ses fesses.
Il la maintint contre lui et lcha un grondement sauvage. Francesca tait au bord de la
folie. Elle se mit a trembler alors que l'orgasme la submergeait, d'autant plus intense qu'il
avait t retenu si longtemps.
travers les brumes de la volupt, elle entendit Ian pousser un juron touff. Il continua
la prendre pendant qu'elle jouissait, asservissant ses reins avec une froce avidit. Ses
hanches cognaient en rythme contre la chair brlante de Francesca tandis qu'il manuvrait la
suspension - et le corps de la jeune femme -, se dlectant sans retenue.
Francesca n'aurait pas pu endurer ce supplice exquis beaucoup plus longtemps. Elle tait
totalement sa merci, secoue par l'orgasme, les muscles de son anus crisps autour du
membre conqurant de Ian.
Il plongea en elle une dernire fois. Le grognement qu'il poussa alors avait quelque chose
de dsespr, alors mme qu'il avait le contrle total de la situation. Il passa un bras autour
de la taille de Francesca, l'attirant lui en une treinte ultime. Elle laissa chapper un cri en
sentant le large pnis contre les parois de son orifice. Il poussa un rugissement, pencha la
tte, grimaant, et pressa les lvres contre le dos de la jeune femme. Elle se mordit les lvres
et serra les paupires en le sentant exploser en elle, dans un dernier mouvement de va-et-
vient. Francesca sentit son souffle brlant sur son dos, et des larmes lui montrent aux yeux -
des larmes qui n'taient pas de douleur, mais engendres par un sentiment nouveau.
tait-elle tombe amoureuse de cet homme ?
Comment pouvait-elle expliquer autrement la confiance totale et absolue qu'elle avait en
lui, son dsir de se soumettre entirement sa volont ?
quoi d'autre pouvait tre due l'euphorie qu'elle prouvait en le contemplant dans le
miroir, totalement abandonn au plaisir ? Soit elle tait amoureuse, soit elle devenait folle.
Quelle que ft la rponse cette question, Ian avait eu raison tout l'heure. Elle tait
compltement sa merci.
Ian la dtacha, puis l'aida doucement s'extraire du harnais. Il tremblait encore sous l'effet
d'un mlange d'motions qu'il n'arrivait pas tout fait identifier. Quand les pieds de la
jeune femme touchrent le sol, il la prit immdiatement dans ses bras, soupirant de plaisir au
contact de sa peau nue et soyeuse presse contre la sienne.
Il lui souleva dlicatement le menton et l'embrassa passionnment, en se demandant
comment il pouvait ressentir la fois un dsir si puissant - presque douloureux - et une
tendresse aussi profonde. S'tait-il montr trop dur avec elle ? Elle tait tellement douce,
fminine, dlicate, songea-t-il en caressant distraitement ses courbes gnreuses. Il avait
adapt son comportement celui de Francesca. Au moment o elle enserrait son sexe entre
ses fesses tout en tremblant sous les secousses de l'orgasme, quelques minutes plus tt, il ne
la voyait plus comme dlicate.
Elle reprsentait un mystre pour lui - un mystre fascinant, inquitant et doux auquel il
tait incapable de rsister.
Il s'arracha ses lvres un peu plus tard et la prit par la main pour l'entraner hors de la
pice.
Il referma la porte derrire eux et mena la jeune femme dans la salle de bains. Sans dire un
mot, il fit coulisser la porte de la cabine de douche et ouvrit le robinet. Quand la temprature
fut assez chaude, il s'carta un peu et fit signe Francesca de rentrer. Elle le suivit et referma
la paroi derrire eux.
Elle semblait elle aussi d'humeur maussade, comme s'il lui avait transmis son propre
trouble, car elle resta silencieuse dans les minutes qui suivirent, pendant qu'il lavait
mticuleusement son corps splendide. Il sentait son regard pos sur lui, tandis que ses mains
glissaient sur sa peau satine. Des volutes de vapeur s'enroulaient autour d'elle pendant qu'il
la lavait, qu'il la vnrait. Une petite partie de lui avait encore envie de fuir, comme il l'avait
fait Paris, lorsque la douceur et la gnrosit de Francesca l'avaient boulevers.
L'exprience qu'il venait de vivre avec elle avait entam ses dfenses, cependant. Il avait
l'impression qu'il risquait de devenir fou s'il essayait de lui rsister.
Il se lava lui-mme avec plus de hte, quoique autant de mticulosit, et coupa le robinet.
Aprs les avoir schs tous deux avec une grande serviette, il prit de nouveau la jeune femme
par la main et la conduisit jusqu'au lit. Il carta les draps et se tourna vers elle pour ter la
pince qui maintenait toujours sa chevelure. Ses lourdes mches retombrent en cascade sur
ses paules et sur son dos. Ian plongea immdiatement les doigts dans leur masse soyeuse,
savourant leur contact.
Les grands yeux sombres de Francesca lui nouaient les tripes.
Viens dans le lit, murmura-t-il.
Elle s'allongea sur le ct, face lui. Il s'tendit, son ventre effleurant le sien, et rabattit le
drap et la couverture sur eux. Il caressa la douce courbe de sa hanche dans le silence de plus
en plus lourd qui s'tait abattu sur eux. Ni l'un ni l'autre ne semblait se dcider parler, alors
mme qu'il sentait l'attention de la jeune femme fixe sur lui.
Au bout d'un moment, elle tendit la main pour lui effleurer les lvres. Il ferma les yeux,
cherchant dsesprment un refuge intrieur contre la mare de sentiments nouveaux qui
l'assaillait.
Il permettait rarement une femme de le toucher de manire si intime, or il laissa faire
Francesca. Ses doigts avides et irrsistibles le tourmentrent pendant plusieurs minutes
tandis qu'elle explorait son visage, son cou, ses paules, son torse et son ventre. Lorsqu'elle
griffa doucement l'un de ses mamelons avec ses ongles, il laissa chapper un soupir de plaisir.
Il soutint son regard quand elle entoura son sexe de sa main, un peu plus tard.
Ses doigts taient si dlicats. Pourquoi eut-il l'impression qu'elle pansait une blessure
profonde au fond de lui quand elle commena bouger le bras pour caresser son pnis ?
Incapable de supporter plus longtemps cette douce torture, il tendit un bras en arrire pour
trouver un prservatif dans le tiroir de la table de chevet - priant pour que le jour o
Francesca aurait pris la pilule assez longtemps afin d'viter tout risque de grossesse arrive
vite, et qu'il puisse la prendre peau contre peau.
Quelques instants plus tard, il tait allong sur elle ; leurs ventres se soulevaient en
rythme, comme en tandem, et le membre dress de Ian tait profondment enfonc dans son
vagin troit et chaud. Quand il rouvrit ses paupires crispes, il la dcouvrit en train de le
contempler.
Est-ce que je me suis mal comport envers toi, Francesca ? demanda-t-il d'une voix rude.
Elle ne rpondit pas pendant un long moment, mais l'expression sombre qui luisait dans
ses prunelles, Ian sut qu'elle comprenait qu'il ne parlait pas seulement de la soire, mais de
tout le reste - son incapacit rsister au charme d'une femme aussi belle, talentueuse et
sensible qu'elle, en sachant pertinemment qu'il risquait de ternir sa lumire avec ses
tnbres... peut-tre mme de la blesser de manire dfinitive.
L'ide qu'elle puisse un jour le rejeter tait comme un coup de poignard.
Est-ce que a change quelque chose ?
Les muscles du visage de Ian tressautrent au son de cette douce rponse. Il recommena
bouger, lui faire l'amour en de longs et profonds coups de reins, frmissant sous les ondes
de l'orgasme.
Non. a ne changeait rien.
Il ne pouvait pas rester loin d'elle, quelles que fussent les consquences pour elle... ou pour
lui.
Aprs avoir fait l'amour, il la serra contre lui et ils parlrent comme des amants - du moins,
la faon dont Francesca imaginait que des amants parlaient, vu qu'elle n'en avait elle-mme
aucune exprience. C'tait quelque chose d'enivrant, de l'entendre voquer son enfance au
Belford Hall, le domaine de son grand-pre dans le Sussex. Elle avait envie de lui poser des
questions sur la priode o il avait vcu avec sa mre dans le nord de la France - qui devait
certainement tre l'oppos du luxe et des privilges dont il avait bnfici en tant que petit-
fils d'un comte - mais elle n'arriva pas trouver le courage.
Avec anxit, elle amena le sujet Xander LaGrange.
Ian se montra malgr tout catgorique : le comportement de Francesca n'tait pas la cause
premire de l'issue malheureuse de leurs ngociations.
C'tait juste le bouquet final, dit-il. J'ai dtest devoir courtiser cet homme pour obtenir
les droits sur ce logiciel. Je l'ai toujours mpris, mme quand je n'tais qu'un tudiant de
dix-sept ans. a me rvulsait d'tre oblig de le flatter. J'ai tout fait pour viter de le
rencontrer en personne pendant des semaines. (Il ferma les yeux, comme pour mieux se
souvenir.) En fait, j'tais cens dner pour la premire fois avec lui le soir o je t'ai
rencontre, au cocktail chez Fusion. J'ai appel Lin pour annuler.
Le cur de Francesca bondit dans sa poitrine.
J'avais cru que a t'ennuyait quand Lin s'est approche de toi chez Fusion, que tu n'avais
pas envie de gaspiller ton temps me parler.
Il passa doucement sa main sur sa nuque alors qu'elle relevait les yeux vers lui.
Qu'est-ce qui t'a fait penser a ?
Je ne sais pas. J'imaginais juste que tu avais plus intressant faire que de me
rencontrer.
Il eut un petit rire qui rconforta Francesca. Il lui pressa doucement la tte, et elle se laissa
aller avec soulagement contre lui.
Je ne dis pas de choses que je ne pense pas, Francesca. J'ai eu envie de te rencontrer
l'instant o j'ai vu ton book lors de ta candidature et o j'ai compris que c'tait toi qui avais
peint Le Chat, fit-il en raccourcissant le nom du tableau accroch dans sa bibliothque... le
tableau o elle l'avait reprsent sans le savoir.
Elle colla sa bouche contre sa peau et l'embrassa, touche au cur par la petite parcelle de
vrit qu'il venait de lui rvler. Elle le sentit crisper les doigts dans ses cheveux.
Mais comment vas-tu faire pour le logiciel dont tu as besoin pour ta start-up ? demanda-
t-elle au bout d'un moment.
Je ferai ce par quoi j'aurais d commencer, rpondit-il d'un ton bourru en lui massant le
cuir chevelu, faisant natre en elle des frissons de plaisir. Je crerai mon propre logiciel. a
reprsente un certain effort, et a prendra plus de temps que prvu, mais j'aurais d y penser
tout de suite au lieu de me coltiner ce salaud. Une affaire avec un homme comme LaGrange
ne peut pas tre bonne. Je me suis menti moi-mme.
Plus tard, elle lui parla de l'poque o elle avait commenc comprendre qu'elle tait une
artiste, alors qu'elle participait un camp pour enfant en surpoids, l'ge de huit ans.
Je n'ai pas perdu un seul kilo dans ce camp, au grand dsespoir de mes parents. Mais j'ai
appris que j'excellais au dessin et la peinture, murmura-t-elle, toujours allonge contre le
torse de Ian tandis qu'il lui caressait les cheveux.
Tes parents avaient l'air obsds par ton poids, commenta Ian.
Sa voix douce et grave faisait vibrer son poitrail, et la sensation se communiquait l'oreille
de Francesca.
Elle lui caressa le bras, merveille par la duret et la densit de ses muscles.
Ils taient surtout obsds par le fait de me contrler. Mon poids ne reprsentait qu'une
des choses qu'ils pouvaient manipuler.
Elle crut sentir Ian se crisper sous sa joue.
Ton corps est devenu un champ de bataille.
C'est ce que tous les psychologues me disaient.
Je peux trs bien imaginer ce que ces mmes psychologues diraient de ta relation avec
moi.
Elle releva la tte et croisa son regard. Les lampes taient rgles au minimum dans la
chambre coucher, et elle n'arrivait pas distinguer son expression.
Parce que tu aimes tant que a contrler les choses ?
Il opina du chef.
Je t'ai dit que j'avais presque rendu folle mon ex-femme.
Le cur de Francesca s'emballa tandis qu'elle contemplait sa beaut mle et rude. Elle
savait qu'il parlait trs rarement de son pass.
Est-ce que... est-ce que tu te souciais tellement d'elle que tu t'inquitais en permanence
de son bien-tre ?
Non.
Elle frona les sourcils devant cette rponse rapide et catgorique. Il eut une lgre
grimace et dtourna le regard.
Je n'tais pas amoureux d'elle, ou rien de ce genre, si c'est a que tu veux savoir. J'avais
vingt et un ans, j'tais toujours tudiant, et notre relation tait une stupide erreur. Quelque
temps avant, j'avais eu une dispute avec mes grands-parents. Une grosse dispute. Je ne leur
avais pas parl depuis des mois. Je suppose que j'tais plus vulnrable alors face une femme
comme Elizabeth. Je l'avais rencontre une leve de fonds l'universit de Chicago - ma
grand-mre tait aussi venue y assister, dans l'espoir de se rconcilier avec moi. Elizabeth
tait une danseuse classique de talent et appartenait une famille amricaine aise. Elle avait
grandi dans l'ide que le statut social est un lment essentiel, et qu'il fallait courtiser des
personnes comme ma grand-mre.
Et toi, dit doucement Francesca.
C'est a qu'Elizabeth a pens en premier - avant mme que nous soyons maris, avant
mme me connatre. Elle a compris plus tard l'erreur qu'elle avait faite. Elle voulait un
mariage de rve avec un prince charmant, pas se retrouver coince avec un btard diabolique,
dit-il avec un sourire amer. Elizabeth tait peut-tre vierge, mais elle tait loin d'tre
innocente dans l'art d'obtenir ce qu'elle voulait. Elle a dcid de me piger dans ses filets, et
j'ai t assez stupide pour la laisser faire.
Elle... elle a fait exprs de tomber enceinte ? Ian hocha la tte, et son regard croisa de
nouveau celui de Francesca.
Je sais que beaucoup d'hommes disent a, mais dans mon cas, c'est la stricte vrit.
Aprs qu'elle est tombe enceinte et que je l'ai pouse, j'ai dcouvert ses vieilles botes de
pilules dans la salle de bains. Les plaquettes n'taient qu' moiti consommes. Quand je l'ai
interroge l-dessus, elle a reconnu qu'elle avait arrt la pilule au dbut de notre relation.
Elle prtendait que c'tait parce qu'elle voulait un enfant de moi, mais je ne la croyais pas. Ou
plus exactement, je crois qu'elle voulait effectivement tomber enceinte pour que je l'pouse,
mais que, dans le fond, elle n'avait pas rellement envie d'tre mre.
Francesca sentit son cur se glacer ces mots.
Est-ce que tu as peur que je fasse la mme chose ? Avec la contraception, je veux dire ?
Non.
Pourquoi en es-tu si certain ? Senquit Francesca, bien qu'elle ft dj soulage par la
rapidit et l'assurance de la rponse de Ian.
Parce que je sais mieux dchiffrer la personnalit de quelqu'un trente ans qu' vingt.
Merci, murmura-t-elle doucement. Qu'est-ce qui est arriv quand tu as interrog
Elizabeth ?
J'tais convaincu qu'elle essaierait de nuire au bb maintenant que j'avais dcouvert ses
manigances. La grossesse avait servi ses intrts. Nous tions maris. Elle tait trs belle,
physiquement en tout cas, et sa vie tait consacre la danse.
Malgr son calcul intress, je crois qu'elle dtestait l'ide de voir son corps dform par la
grossesse... qu'elle dtestait les changements que la maternit apporterait sa vie. Elle n'avait
pas du tout un caractre maternel. Je pensais qu'elle allait faire quelque chose pour mettre
fin cette grossesse - a ne m'aurait pas tonn d'elle, en tout cas. (Il regarda Francesca droit
dans les yeux.) Ce n'tait pas de protger Elizabeth qui m'obsdait tant. C'tait de protger
l'enfant qu'elle portait. Et, effectivement, je suis devenu maniaque du contrle. Tu sais
comment je peux tre.
Mais tu m'as dit une fois qu'elle a essay de te faire porter la responsabilit de la perte
du bb, se souvint-elle.
Il hocha la tte.
Elle a dit que c'tait parce que je la harcelais tous les jours pour qu'elle prenne soin
d'elle, parce que j'essayais de contrler ses activits quotidiennes et son planning. Elle avait
l'impression que je restreignais sa libert, que je l'emprisonnais entre les murs de ma propre
anxit. Elle avait entirement raison sur ce point. C'est ce que je fais quand je m'inquite
pour quelqu'un, et je m'inquitais pour ce bb.
Mme si c'est vrai, a ne me semble pas une raison suffisante pour provoquer une fausse
couche. a arrive une femme enceinte sur cinq, non ? C'tait peut-tre tout simplement
naturel ? Pourquoi faudrait-il absolument que ce soit li ton comportement ? demanda
Francesca.
Elle se sentait la fois perplexe et irrite par cette Elizabeth. a avait l'air d'tre une garce
manipulatrice.
On ne le saura sans doute jamais. De toute faon, a n'a plus d'importance.
Francesca n'tait pas d'accord ; a en avait - et mme beaucoup. Cela expliquait pourquoi
Ian tait si pessimiste, si cynique dans sa faon de voir ses relations avec les femmes.
Pourquoi l'as-tu pouse si tu n'tais pas rellement amoureux d'elle ? Ne put-elle
s'empcher de demander.
Il haussa lgrement les paules, et elle ne rsista pas au dsir de caresser ses bras. Elle
avait envie de le consoler, de ne pas dtacher les mains de lui. Qui savait quand il la laisserait
de nouveau le toucher de manire aussi intime ?
Je ne permettrai jamais que l'un de mes enfants soit un btard.
Les mains de Francesca se figrent. C'tait seulement la deuxime fois qu'il faisait allusion
ses origines illgitimes devant elle. Elle se souvenait qu'il s'tait dfini comme btard
ds le soir de leur rencontre, au cocktail donn en son honneur.
Ton pre..., chuchota-t-elle, fascine par la lueur qui brillait dans les iris de son amant.
(tait-ce un avertissement ? Un message implicite pour qu'elle cesse de l'interroger ce sujet
? Elle dcida de continuer malgr le risque potentiel.) Tu sais qui il tait ?
Il secoua la tte. prsent, elle percevait nettement la tension dans ses muscles, mais il ne
chercha pas s'carter d'elle. Elle prit le parti de pousser son avantage ; aprs tout, il n'avait
pas essay de la fuir comme il l'avait fait Paris.
Est-ce que tu as t tent de savoir qui il tait ? Est-ce que tu en as envie aujourd'hui ?
Seulement dans la mesure o obtenir cette information me permettrait de buter ce
salopard.
Francesca en resta bouche be. Elle ne s'tait pas attendue une telle agressivit.
Pourquoi ?
Il baissa un instant les paupires, et elle se demanda si elle tait alle trop loin. Allait-il
finir par se dfiler ?
Qui que ce soit, il a abus de ma mre. Je ne sais pas si c'tait par un viol tel que la
justice actuelle le dfinit, ou s'il a simplement sduit une femme malade et vulnrable, mais
quoi qu'il en soit, je porte de toute vidence les gnes d'un putain de dgnr.
Oh, Ian, murmura-t-elle, le cur dbordant de compassion.
Son amant avait d vivre un cauchemar quand il tait petit. Un cauchemar qui n'avait pas
cess.
Et tu ne l'as jamais revu ? reprit-elle. Il n'est jamais revenu ?
Il secoua la tte, les paupires toujours closes.
Et ta mre, elle n'a jamais...
Il rouvrit les yeux et regarda la jeune femme fixement.
Chaque fois que j'abordais le sujet quand j'tais enfant, son tat d'anxit s'aggravait.
Elle retombait dans des comportements obsessionnels et compulsifs. Au bout d'un moment,
j'ai vit le sujet de l'identit de mon pre comme la peste. Mais au fond de moi, je me suis
mis le har. C'est lui qui a fait a ma mre, qui a aggrav sa maladie. Je ne sais pas
comment, mais j'en suis absolument sr.
Mais elle tait dj malade... schizophrne...
Oui, sauf qu'il suffisait de mentionner mon pre devant elle pour provoquer une
nouvelle crise, une crise terrible.
Francesca ne pouvait pas supporter la tristesse qui se lisait sur son visage. a lui fendait le
cur. Elle le serra aussi fort qu'elle put.
Oh, Ian, je suis dsole...
Il gronda un peu sous son treinte puis lcha un petit rire. Il recommena lui caresser les
cheveux.
Et tu penses que c'est en me serrant comme un boa constrictor que a va arranger les
choses ?
Non, chuchota-t-elle en lui embrassant le torse. Mais a ne peut pas faire de mal.
Il l'treignit son tour et la fit basculer sur le dos, venant s'allonger sur son ventre.
Non... Tu ne pourras jamais me faire de mal, murmura-t-il avant de l'embrasser comme
il savait si bien le faire, lui faisant tout oublier l'espace d'un instant.
Mme la souffrance qu'elle percevait en lui.
Francesca savait qu'elle se souviendrait de cette nuit passe dans le lit et les bras de son
amant durant toute sa vie. a avait t une exprience sublime de le voir s'ouvrir elle,
mme un tout petit peu. Par le pass, il lui avait pourtant dit qu'il ne voulait qu'une relation
purement physique et que tout ce qui l'intressait tait leur complmentarit sexuelle.
Or, cette nuit, il y avait eu davantage que du sexe entre eux. C'est du moins l'impression
qu'avait eue Francesca...
Elle se rveilla sous les rayons du soleil qui filtraient travers les rideaux. Elle cligna
paresseusement les yeux et se rendit compte qu'elle tait seule dans le grand lit luxueux o
elle avait pass tant d'heures intensment rotiques avec Ian la veille.
Ian ? Appela-t-elle d'une voix encore embrume par le sommeil.
Il sortit de la salle de bains, superbe, vtu d'un pantalon bleu et d'une chemise blanche
amidonne, assortis d'une cravate en soie noire rayures bleu clair et de la ceinture boucle
dore qui attirait toujours le regard de la jeune femme vers ses fines hanches. L'avait-elle
vraiment vu entirement nu la veille, travers son reflet dans le miroir tandis qu'il la
possdait ?
Ou tout cela n'avait-il t qu'un rve ? Ses treintes, la faon dont il lui avait fait l'amour la
nuit dernire...
Bonjour, fit-il en s'approchant du lit tout en ajustant un bouton de manchette de ses
doigts habiles.
Bonjour, rpondit-elle d'un air hbt.
Elle lui sourit, heureuse de sentir la lumire du soleil sur sa peau et de pouvoir contempler
son amant.
Je crains de devoir quitter la ville pour un moment. Je ne sais pas avec certitude quand
je reviendrai.
Le sourire bienheureux de Francesca disparut. Les mots qu'avait prononcs Ian
rebondissaient l'intrieur de son crne comme un cho de fusillade.
J'ai parl Jacob, et il va aussi te donner des leons de moto. J'aimerais que tu puisses
passer les deux permis, voiture et moto, en mme temps. Lin va t'envoyer le manuel du
permis deux-roues. Je te laisse ma tablette numrique pour que tu puisses l'tudier, fit-il en
dsignant du doigt la table basse.
Ses manires brusques ne firent qu'accentuer la confusion et le choc que ressentait
Francesca.
Euh... Ian? Tu peux m'expliquer la partie Je quitte la ville, et je ne sais pas quand je
reviendrai ? Linterrogea-t-elle en se redressant dans le lit, appuye sur un coude.
J'ai reu un coup de tlphone ce matin. (vitait-il sciemment de croiser son regard ?) Je
dois m'occuper d'une affaire urgente.
Ian, ne fais pas a.
Il se figea brusquement en entendant la scheresse de son ton, les doigts toujours poss
sur la boutonnire de sa chemise. Ses yeux flamboyrent.
Ne fais pas quoi ?
Ne pars pas.
La jeune femme n'avait pu empcher ces mots de jaillir de sa bouche.
Un silence pesant s'abattit sur eux pendant un long moment.
Je sais que tu te sens probablement mal l'aise cause d'hier soir, mais ne t'enfuis pas,
plaida-t-elle, tonne par sa propre audace.
Avait-elle secrtement redout ce moment toute la nuit, alors qu'ils parlaient, faisaient
l'amour et s'ouvraient l'un l'autre ? Avait-elle su ds le dbut qu'il la fuirait forcment aprs
lui avoir dvoil tant de choses aussi intimes ?
Je ne suis pas sr de savoir de quoi tu parles, rpondit-il en baissant les bras. Je n'ai pas
d'autre choix que de partir, Francesca. Tu comprends certainement que certaines affaires
m'obligent m'loigner de temps en temps.
Oh, je comprends trs bien, rpliqua-t-elle d'une voix pleine d'motion. Ta fuite
d'aujourd'hui n'a rien voir avec celle de la dernire fois.
Non. a n'a strictement rien voir, fit-il d'un ton dur. Qu'est-ce qui te prend, Francesca ?
Elle baissa les yeux vers les draps, refusant qu'il voie les larmes qui embuaient ses yeux.
Elle aurait voulu cracher de colre, de douleur.
Oui, qu'est-ce qui peut bien me prendre ? fit-elle avec amertume. Stupide et nave petite
Francesca. Pourquoi est-ce que je ne me souviens pas que tout ceci n'est que du sexe, un
arrangement avec toi ? Oh, et avec ta queue, bien sr. N'oublions pas cette intervenante
capitale dans la partie.
Tu dis vraiment n'importe quoi. J'ai reu un coup de tlphone. Je dois partir. a n'est
pas plus compliqu que a.
Pourquoi ? C'est quoi, cette urgence ? Dis-moi.
Il cligna les yeux, visiblement dcontenanc par la brusquerie de sa demande. Elle
remarqua que les commissures de ses lvres avaient pli sous l'effet de la colre.
Parce que je le dois. Il y a certaines choses dans la vie qu'on ne peut viter, et il s'agit
d'une de ces choses. C'est la seule raison pour laquelle je pars. Et a devrait tre suffisant
pour toi. En plus, ta raction stupide ne me donne aucune envie de t'en dire davantage,
ajouta-t-il entre ses dents tout en se dtournant d'elle.
Une vague de colre gonfla la poitrine de Francesca. C'en tait trop pour elle, de se voir
ainsi congdie, en particulier aprs l'intimit qu'ils avaient partage la veille, alors qu'elle
avait cru qu'il s'ouvrirait enfin.
Si tu pars maintenant, je ne t'attendrai pas. Ce sera fini entre nous.
Il fit brusquement volte-face, les narines frmissantes de colre.
Tu me mets au dfi, Francesca ? Tu cherches me pousser bout ? Tu es vraiment
revancharde ce point ?
Comment oses-tu me dire a alors que c'est toi qui fuis cause de ce qui s'est pass
entre nous ? s'exclama-t-elle en s'asseyant, raide, sur le lit, tirant Le drap sur sa poitrine.
La seule chose qui s'est passe entre nous, c'est que tu te comportes comme une gamine
capricieuse alors qu'une affaire urgente exige ma prsence.
Alors dis-moi de quoi il s'agit. Aie au moins cette courtoisie envers moi, Ian. moins
que tu considres que, vu les rgles de cette putain de relation, et cause de ma nature soi-
disant soumise, je n'ai mme pas le droit de te demander a ?
Il prit la veste qu'il avait dpose sur une chaise. Ce n'est qu' ce moment qu'elle remarqua
la valise roulettes pose ct de son attach-case. Il s'apprtait rellement partir. Elle se
sentait compltement impuissante. Il enfila le vtement en la fixant d'un regard glacial.
Comme je te l'ai dj dit, ton attitude purile ne me donne aucune envie de te donner
plus d'explications. (Il prit sa valise.) Je t'appellerai ce soir. Tu seras peut-tre revenue la
raison d'ici l.
Ne te donne pas cette peine. Je n'aurai pas chang d'avis. Je peux te le garantir, fit-elle
d'un ton aussi digne et froid que possible.
Le visage de Ian devint blme. La jeune femme eut soudain envie de retirer ce qu'elle
venait de dire, mais son caractre ttu et sa fiert l'empchaient de le faire.
Il hocha la tte, les lvres pinces, et quitta la chambre, claquant la porte derrire lui avec
un bruit fracassant qui retentit horriblement dans les oreilles de Francesca.
Elle ferma les yeux, submerge par une vague de dsespoir.
Trois jours plus tard, elle tait assise dans une salle de l'cole de conduite de Deerfield,
dans la banlieue de Chicago, en train d'tudier le manuel du code de la route pour deux-roues
sur la tablette numrique de Ian. Oui, elle envisageait toujours de continuer le frquenter
pour une relation purement sexuelle, et non, il n'avait pas essay de la recontacter depuis son
dpart le dimanche prcdent, prenant sans doute au mot ce qu'elle lui avait dit sous le coup
de l'motion. Elle essayait de se convaincre que cette issue la soulageait or,
malheureusement, sa mthode d'auto-persuasion ne fonctionnait pas si bien que a.
Pourquoi une ombre tait-elle apparue sur le visage de Ian quand elle lui avait demand de
ne pas la rappeler ? Elle n'avait vu cette expression chez lui qu' une seule autre occasion,
quand il avait paniqu en comprenant qu'elle tait vierge - on aurait dit que c'tait lui qui se
sentait abandonn, et pas l'inverse. La jeune femme ne cessait de ruminer cette pense,
comme si une main invisible enserrait en permanence son cur.
Non, elle n'allait pas perdre son temps rflchir a.
Elle n'avait aucune chance de dchiffrer les mandres obscurs et complexes de l'me de
Ian.
Ctait mme stupide d'essayer.
Elle se surprit elle-mme en continuant prendre ses leons de conduite avec Jacob, vu la
faon dont Ian et elle s'taient quitts. Mais, trangement, l'ide d'obtenir son permis tait
presque devenue une obsession. Peut-tre qu'une partie d'elle-mme croyait ce que son
amant lui avait dit. Qu'il s'agissait d'une tape essentielle dans le dveloppement d'un adulte,
qu'elle avait repouss cause des traumatismes motionnels de son enfance et son
adolescence. L'envie dvorante qu'elle avait de conduire correspondait peut-tre un dsir de
prendre pleinement le contrle de sa vie pour la premire fois. Les leons se passaient bien.
Et le tableau tait bientt termin.
Pour la premire fois dans sa vie, elle avait effectivement l'impression de commencer
contrler quelque chose, et pas seulement de se dbrouiller pour survivre au jour le jour. Elle
voulait tre aux commandes de la vie de Francesca Arno, comme Ian le lui avait suggr. Et si
cette vie tait destine tre pitoyable, eh bien... elle saurait au moins qui en tait
responsable.
Elle commenait avoir mal aux yeux force de lire sur la tablette. Elle avait dj pass
l'examen du code de la route, mais il restait encore celui moto.
Vous vous sentez prte ? demanda Jacob qui lisait le journal assis ct d'elle.
Le dossier de la jeune femme tait complet, et ils patientaient dans les locaux de l'cole
depuis presque deux heures pour que Francesca puisse passer l'examen.
Pour la partie crite, oui, rpondit-elle. Mais j'aurais peut-tre d m'entraner plus d'une
journe sur la moto de Ian ?
Vous allez trs bien vous en tirer, la rassura Jacob. Vous tes bien plus l'aise sur un
deux-roues que derrire le volant, et vous avez pourtant pass brillamment votre permis
voiture.
Elle lui lana un regard ironique.
J'ai failli chouer l'examen de conduite. La premire chose que j'ai faite aprs avoir
dmarr, c'est couper la route d'un autre conducteur.
Mais cela a t votre seule erreur, lui rappela aimablement le chauffeur.
Quelqu'un pronona son nom.
Souhaitez-moi bonne chance, dit-elle d'une voix angoisse Jacob, tout en se relevant.
La chance ne sera pas ncessaire. Vous tes parfaitement capable d'y arriver, la rassura-
t-il avec bien plus de confiance qu'elle n'en prouvait elle-mme.
Elle passa l'preuve pratique sur la moto de Ian : un superbe engin rutilant de fabrication
europenne.
Jacob lui avait rvl que Ian avait toujours t passionn de moto.
Je crois qu'il m'a dit qu'il aimait les rparer quand il tait adolescent. Il a un talent
incroyable pour a. Je suppose que a a un rapport avec les maths, avec le cerveau qu'il a ; un
vrai ordinateur ! En tout cas, il est capable de rparer un moteur presque aussi vite que moi,
et j'ai quasiment deux fois son ge, avait dit le chauffeur avec une pointe de fiert dans la
voix.
Elle avait aussi appris de Jacob que Ian possdait des parts dans une socit franaise
novatrice et de plus en plus populaire, qui fabriquait des motos et des scooters de luxe.
La seule raison pour laquelle elle avait accept de poursuivre les leons avec Jacob tait
l'une des choses que Ian avait dites au sujet des scooters durant leur sjour Paris : un tel
vhicule resterait abordable pour son budget limit et conviendrait parfaitement ses
dplacements en ville, sans mme parler de son besoin d'indpendance et de son dsir de
mieux contrler sa vie. Son plan tait d'en acheter un bas prix une fois qu'elle aurait son
permis - et tant pis si c'tait une faon de profiter de la gnrosit de Ian aprs qu'il l'eut
abandonne.
Elle avait accept les cent mille dollars qu'elle avait gagns en tant que laurate du prix.
Elle prendrait tout ce qu'il lui avait offert avant de le quitter, comme il l'avait quitte elle.
C'tait en tout cas ainsi qu'elle tentait de voir les choses. Cela la rconfortait de se dire
qu'elle se comportait aussi durement avec Ian qu'il l'avait t avec elle.
Le salaud. Quitter Chicago juste aprs qu'elle se fut mise nu devant lui, aprs lui avoir
fait croire qu'il se dvoilait enfin.
Alors ? demanda Jacob qui patientait debout dans la salle d'attente quand elle revint
aprs l'preuve pratique.
Il la dvisagea avec anxit. Une expression sombre se lisait sur le visage de la jeune
femme.
Ne vous en faites pas. Vous pourrez repasser l'preuve ds que vous aurez repris
quelques heures de cours.
Un large sourire apparut sur les lvres de Francesca.
Je vous faisais marcher. J'ai russi. Et vraiment haut la main, cette fois.
Il la serra brivement dans ses bras et la flicita. Elle clata de rire, la fois heureuse et
soulage. Elle avait russi ! Mieux vaut tard que jamais.
Jacob la quitta pour aller ranger la moto de Ian dans le compartiment arrire de la
limousine - Francesca n'en avait pas cru ses yeux quand son amant lui avait montr l'norme
espace disponible qu'offrait le vhicule une fois la table centrale replie. La jeune femme
s'assit dans la salle d'attente ; quand on l'appellerait, elle irait apposer sa photo sur son
permis. Dans le Dpartement des Vhicules Motoriss, mieux valait savoir patienter. Aprs
quelques minutes d'inactivit, de plus en plus fbrile, elle alluma la tablette de Ian, soulage
de pouvoir enfin lire autre chose pour passer le temps que les rgles du code de la route. Elle
ouvrit le navigateur Internet, et plusieurs adresses de sites vinrent s'afficher
automatiquement dans la fentre de recherche... de toute vidence, des sites que Ian visitait
rgulirement. Avec un lger sentiment de culpabilit, elle tudia l'historique de navigation.
Quand Ian trouvait-il le temps de surfer sur Internet ? La plupart des domaines ne la
surprenaient pas - des entreprises et des professionnels sur lesquels il se renseignait.
L'un d'entre eux pourtant ne collait pas. Elle cliqua sur le lien en jetant un coup d'il
nerveux vers la porte pour s'assurer que Jacob n'allait pas la surprendre en train de fouiner
dans les affaires de Ian.
Le Centre de Recherche et de Traitement Gntique - le laboratoire d'un institut
hautement rput, situ au sud-est de Londres, dans un superbe domaine arbor. Francesca
contempla la photo du btiment ultramoderne au milieu du paysage champtre. Il lui fallut
lire en dtail d'autres pages du site pour comprendre que le laboratoire tait connu pour ses
avances dans le domaine du traitement de la schizophrnie.
Elle pensa la mre de Ian, et son cur se fendit.
Est-ce qu'il s'intressait aux progrs de la mdecine concernant cette maladie cruelle en
souvenir d'Helen Noble ? Peut-tre finanait-il personnellement une partie des recherches ?
Jacob ? a vous dit quelque chose, le Centre de Recherche et de Traitement Gntique ?
demanda-t-elle d'un ton innocent au chauffeur quand il vint se rasseoir son ct, quelques
minutes plus tard.
Pas du tout. Pourquoi ?
Vous ne saviez pas ? C'est une sorte de laboratoire et d'hpital la fois. Vous n'avez
jamais entendu Ian le mentionner ?
Jacob secoua ngativement la tte.
Jamais. O est-ce qu'il se trouve ?
Au sud-est de Londres.
C'est logique, alors, commenta Jacob d'une voix distraite tout en feuilletant son journal.
Si c'est l'une des socits britanniques que possde Ian, il ne m'en a sans doute jamais parl.
Pourquoi donc ?
Il ne m'emmne jamais quand il part Londres, Il dispose de sa propre voiture et de son
propre appartement au centre-ville.
Oh, fit Francesca d'un ton toujours lger, esprant tre parvenue dissimuler Jacob sa
curiosit dvorante. Et il y a d'autres endroits o il conduit lui-mme et ne vous emmne pas
?
Jacob la dvisagea quelques instants.
Non, pas vraiment, maintenant que j'y pense. Je l'accompagne partout sauf Londres.
Mais ce n'est pas vraiment surprenant. Ian est anglais aprs tout, non ? Cela semble logique
qu'il n'ait pas besoin de chauffeur l-bas. C'est d'ailleurs pour a que je suis avec vous
aujourd'hui.
Effectivement, opina la jeune femme.
Son pouls s'tait mis marteler ses tempes. Ian tait Londres. Ian ne lui en avait rien dit,
bien sr, et, soit Mme Hanson l'ignorait elle-mme, soit Ian lui avait dit de tenir sa langue.
Quelque chose sonnait bizarrement dans ce que lui avait dit Jacob. Ian Noble tait chez lui
partout. Il pouvait conduire dans n'importe quelle ville, sans avoir besoin des services d'un
chauffeur. C'tait uniquement une question de confort. Il tait le Chat qui marche tout seul,
aprs tout. Pour lui, tous les endroits se ressemblaient. Elle se souvenait trs bien d'avoir
cherch capturer cet aspect de sa personnalit, des annes plus tt, quand elle l'avait peint
son insu. C'tait prcisment a qui lui avait voqu la nouvelle de Rudyard Kipling. Elle
savait d'exprience que, o qu'il aille, il se montrait sr de lui, l'aise, matre de son
environnement... obstinment seul.
Alors, pourquoi Londres serait-il diffrent ? Pourquoi laissait-il derrire lui Jacob, le
chauffeur en qui il avait toute confiance ?
Elle releva brusquement la tte en entendant son
nom.
a y est, fit-elle en dissimulant peine son enthousiasme.
Elle se retint de toutes ses forces de presser encore Jacob de questions sur Ian et Londres.
C'est vous qui conduisez pour le retour, dit ce dernier.
Et comment que je vais conduire, rpondit-elle avec un sourire triomphant.
L'aprs-midi suivant, elle tait assise sur une banquette dans le hall d'accueil de Noble
Enterprises.
L'endroit produisait une impression de modernit la fois sobre, luxueuse et pure -
grce au sol de marbre beige ros, aux boiseries prcieuses et aux murs brun clair. Le gardien
qui occupait le bureau circulaire au centre du hall ne cessait de lui jeter des regards
souponneux. Elle tait l depuis presque deux heures, tudier la lumire sur le grand mur
vierge o son tableau serait accroch, prenant de temps en temps des photos avec son
tlphone portable.
Elle voulait tre sre de saisir correctement la luminosit de l'endroit o il trouverait sa
demeure dfinitive.
Le gardien dcida finalement qu'elle n'avait rien faire l et quitta son bureau pour se
diriger vers elle. Francesca se releva et rangea son tlphone dans une poche arrire.
Elle n'avait pas envie de devoir se justifier.
Je m'en vais, assura-t-elle au jeune homme la carrure impressionnante et au visage
massif.
Le regard de ce dernier semblait davantage inquiet qu'agressif, cependant.
Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour vous aider, mademoiselle ?
Non, rpondit-elle en s'cartant. (Lorsqu'il fit mine de la suivre, elle soupira.) Je suis
l'artiste charge de peindre la toile qui sera accroche ici, rpondit-elle en dsignant du doigt
le grand mur vide qui surplombait le bureau du gardien. J'observais les nuances de la lumire
l'intrieur du hall.
Comme le gardien la scrutait d'un il sceptique, elle jeta un regard en biais et vit le
panneau du restaurant Fusion.
Euh... Excusez-moi. Je vais juste faire un tour chez Fusion pour aller dire bonjour
Lucien.
Durant une seconde, elle eut l'impression que la gardien allait la suivre alors qu'elle
obliquait vers le restaurant mais, quand elle observa autour d'elle aprs s'tre approche du
bar luxueux, les portes de verre taient toujours fermes, et le jeune homme n'tait nulle part
en vue. Elle poussa un soupir de soulagement.
Francesca !
Elle reconnut l'accent franais de Lucien.
Salut, Lucien. Oh, Zoe ! a va ? Salua Francesca, heureuse de revoir la belle jeune
femme qui avait essay de la mettre l'aise pendant le cocktail donn en son honneur.
Zoe et Lucien se tenaient cte cte. Il tait quinze heures trente, un mardi aprs-midi, et
le restaurant tait dsert l'exception d'eux trois. Francesca eut un instant d'hsitation en
voyant Lucien carter subitement le bras de la taille de Zoe, et l'expression quelque peu
coupable qui se lisait sur leurs visages.
Pourquoi cherchaient-ils dissimuler leur relation ?
a va, fit Zoe en lui serrant la main. Le tableau avance bien ?
Aussi bien que possible. J'ai un peu de mal avec la lumire. Je suis venue m'asseoir dans
le hall d'entre pour tudier la luminosit qui baignera le tableau dans la journe, mais le
gardien a plus ou moins fini par me faire quitter les lieux, dit-elle avec un sourire penaud. Je
me suis faufile ici pour lui chapper.
Lucien gloussa.
Tu veux quelque chose boire ? Lui lana-t-il en se dirigeant vers le grand bar en noyer.
De l'eau gazeuse avec du citron, c'est a ?
Oui, rpondit la jeune femme, agrablement surprise que Lucien se souvienne de ses
gots.
Zoe s'assit ct d'elle sur l'un des tabourets et lui posa d'autres questions au sujet du
tableau. Francesca remarqua que Lucien n'avait pas demand Zoe ce qu'elle voulait boire et
avait directement pos une bouteille de bire ambre devant elle.
Alors vous deux, vous tes ensemble ? demanda Francesca quelques minutes plus tard
tout en sirotant sa limonade.
Elle regretta sa question en voyant les deux jeunes gens afficher une expression quelque
peu ahurie.
Je veux dire... Je pensais juste que a avait l'air... Laissez tomber, bafouilla-t-elle en
avalant une autre gorge avant de reposer son verre sur le comptoir. Ne faites pas attention
moi. Je n'arrte pas de dire des choses stupides.
Lucien clata de rire, et Zoe adressa Francesca un sourire hsitant.
Ce n'est pas a, reprit Lucien. Oui, Zoe et moi, on sort ensemble. On essaie juste de
djouer les radars, c'est tout.
Les radars ? fit Francesca, confuse.
Ian, pour rsumer, poursuivit Lucien sans cesser de sourire.
Ian ? Pourquoi essayez-vous de le lui cacher ?
Il n'apprcie pas trop les relations entre les employs de Noble Enterprises, en
particulier entre un cadre et une non-cadre.
Je n'arrte pas de rpter Lucien que je suis aussi cadre, intervint Zoe en le foudroyant
du regard - c'tait visiblement un sujet trs sensible au sein du couple. Je n'ai pas le
sentiment que nous enfreignions des rgles. Nous appartenons deux filiales totalement
diffrentes de l'entreprise. a ne poserait certainement aucun problme Ian.
Et qu'est-ce que a change, si a lui en pose un ? Lcha brusquement Francesca en
fronant les sourcils. Pourquoi tout le monde n'arrte pas de lui faire des courbettes comme
s'il tait le roi, et nous ses sujets ? Vous avez le droit de vivre votre vie en suivant vos dsirs,
pas les caprices de Ian.
Un silence pesant s'ensuivit. Francesca mit un moment se rendre compte que Lucien
regardait derrire elle, et que Zoe tait en train de se tourner lentement sur son tabouret, les
traits figs.
Francesca ferma les yeux et prit une grande inspiration.
Ian est derrire moi, hein ? Murmura-t-elle Lucien.
Le regard contrit que lui lana le jeune chef lui tint lieu de rponse.
Elle se retourna son tour sur son tabouret, saisie par une vague d'anxit. L'homme
d'affaires se tenait entre l'entre du restaurant et la zone du comptoir o elle s'tait installe
avec Zoe. En le voyant, elle sentit ses dfenses se fissurer. Il lui avait tant manqu qu'elle en
eut le souffle coup. Il portait un costume noir impeccable qui soulignait la perfection les
lignes masculines de son corps lanc, l'une des chemises blanches amidonnes qu'il
affectionnait, et une cravate argente.
Son visage tait semblable un buste de marbre : superbe, froid, impassible. Ses yeux
flamboyaient nanmoins, tandis qu'il la dvisageait- il ne regardait qu'elle - depuis la
pnombre de la salle l'clairage tamis.
Depuis quand es-tu rentr ? demanda Francesca, la bouche sche.
Je rentre peine. Mme Hanson m'a dit que tu comptais venir voir le grand hall. Comme
je ne te voyais pas, je me suis dirig vers mon bureau et Pete - le gardien - m'a parl d'une
jeune femme qui tait reste assise toute une partie de l'aprs-midi devant lui, en prenant de
temps en temps des photos, et qui lui avait dit tudier la lumire. (Francesca crut distinguer
un sourire amus se dessiner sur les lvres de Ian quand il pronona ces mots.) J'ai eu
l'impression qu'il avait du mal dcider si tu tais une menace potentielle ou une apparition
ferique.
Oh... je vois, fit Francesca.
Elle se sentit bizarrement trouble, comme s'il avait russi la toucher avec son
compliment dtourn. Elle lana un regard gn Zoe. Venait-elle de mettre le couple dans
l'embarras ?
Vous prenez une pause, mademoiselle Charon ? demanda Ian avec une gentillesse
bourrue.
Zoe descendit de son tabouret et lissa sa chemise en rougissant.
Je prenais une pause, mais il est temps que je retourne au bureau.
Ian hocha la tte et regarda vers Lucien.
Oui. Il vaut toujours mieux tre discret pour ce genre de chose, fit-il en regardant le
jeune chef droit dans les yeux.
Lucien opina silencieusement. Francesca comprit que Ian venait juste de signifier au
couple qu'il ne ferait rien pour contrarier leur relation, tant qu'ils ne la criaient pas sur tous
les toits.
Puis-je te parler un moment ? Il y a quelque chose que je voudrais te montrer, dit Ian
Francesca.
Zoe se glissa derrire eux ; elle souhaitait clairement profiter de l'occasion pour s'clipser.
Je... D'accord, rpondit Francesca.
Elle se sentait quelque peu pige par la situation, sans parler des yeux fascinants de Ian et
du soulagement qu'elle avait le revoir. Avait-elle vraiment cru qu'elle pouvait le chasser de
son esprit et de son me si facilement cause de sa colre ? Qu'tait la colre, face aux
sentiments inexplicables et profonds qu'elle ressentait pour lui ?
Elle dit au revoir Lucien en lui lanant un regard d'excuse pour ce qui s'tait pass. Le
jeune homme lui rpondit par un sourire rassurant.
O allons-nous ? demanda Francesca Ian aprs qu'ils eurent quitt Fusion pour se
diriger vers la sortie de l'immeuble, en face des ascenseurs.
Elle avait cru qu'il la conduirait son bureau, mais il la prcda jusqu'au coin de la rue.
On retourne la rsidence. Il y a quelque chose que je veux te montrer l-bas.
Elle s'arrta brusquement et le scruta. Une expression trange traversa le visage stoque de
Ian, et elle se demanda s'il se souvenait de lui avoir dit quelque chose de trs similaire
quelques semaines plus tt... la soire o ils s'taient rencontrs ici mme, au sige de Noble
Enterprises.
Je ne veux pas rentrer l'appartement avec toi, dit-elle avec raideur.
Avait-il peru que son timbre sonnait faux ? En tout cas, c'tait le cas pour Francesca. Une
partie d'elle avait trs envie de rentrer la rsidence avec lui. Pourquoi diable le trouvait-elle
si irrsistible ? Il tait comme une drogue laquelle elle s'tait accoutume, et mme pire.
Pire, parce que c'tait son me qui tait implique. Pire, parce qu'une part de l'me de Ian...
tait hante aussi.
J'espre pouvoir te faire changer d'avis sur ce que tu m'as dit juste avant que je parte,
dit-il d'une voix calme en marchant devant elle.
Les nuages taient venus masquer le soleil faiblissant, et les yeux de son amant semblaient
particulirement lumineux avec le ciel sombre et bas en arrire-plan. Ils se tenaient sur le
trottoir, au milieu des passants, mais c'tait comme si on avait referm une bulle autour
d'eux.
a n'avait rien voir avec un caprice comme tu me l'as reproch la semaine dernire,
Ian. Tu m'as quitte sans me donner d'explication.
Je suis revenu. Je t'avais dit que je le ferais.
Et je t'avais dit que je ne serais plus disponible quand a arriverait.
Quand elle pronona ces mots, une lueur flamboya dans les iris de Ian. D'une certaine
faon, elle savait avant de parler qu'il dtesterait cette phrase.
J'aime savoir que vous tes disponible pour moi.
Francesca prouva une sorte de trouble. Elle dtourna les yeux en direction du fleuve.
Le tableau avance bien.
Je sais. Je suis venu voir tes progrs quand je suis repass chez moi en rentrant. C'est
spectaculaire.
Merci, rpondit-elle en vitant toujours son regard.
Jacob m'a dit que tu avais russi tes deux preuves de conduite. Il est trs fier de toi.
Elle ne put s'empcher de sourire. C'tait aussi un vritable motif de fiert pour elle - de
profonde fiert.
Elle devait cela Ian.
Effectivement. Merci pour m'avoir encourage le faire. (Elle contempla fixement ses
chaussures.) Ton voyage Londres s'est bien pass ?
Comme il ne rpondait pas immdiatement, elle releva les yeux vers lui.
Je ne me souviens pas de t'avoir dit o j'allais,
Tu ne l'as pas fait. Je l'ai devin. Pourquoi est-ce que tu te rends toujours seul l-bas ?
Ne put-elle s'empcher de demander. Jacob m'a dit que tu ne l'emmenais jamais.
Elle vit le visage de Ian s'assombrir.
Ce n'est pas la faute de Jacob, reprit-elle. Il ne savait pas non plus o tu tais. Je lui ai
juste pos des questions sur tes voyages, et c'est l qu'il m'a dit qu'il ne t'accompagnait jamais
Londres. J'en ai dduit que tu devais y tre, vu qu'il tait avec moi Chicago.
Pourquoi t'es-tu montre si curieuse ?
Elle encaissa le coup. Pourquoi, en effet, si elle proclamait que Ian ne l'intressait plus ?
Qu'est-ce que tu veux me montrer la rsidence ?
Le regard froid qu'il lui lana lui prouva qu'il se rendait parfaitement compte qu'elle avait
lud sa question. Il la prit par la main et l'entrana sa suite.
C'est une chose qui doit tre vue, pas dcrite.
Elle hsita quelques secondes. Envisageait-elle vraiment de lui pardonner son dpart
abrupt et sans explication du dimanche prcdent ?
Elle soupira et lui embota le pas.
Elle ne s'avouait pas vaincue, mais exactement comme lors de leur premire nuit, elle ne
trouvait pas la force de lui rsister. Peut-tre cause des jours interminables qu'elle avait
passs sans lui, ou parce que sa soudaine rapparition l'avait force baisser la garde, ou tout
simplement parce que le revoir l'emplissait d'une vague tourdissante de chaleur et de joie.
Quelle qu'en ft la raison, elle n'avait pas la force de lui rsister cet aprs-midi-l.
Quand Francesca sortit de l'ascenseur, une impression d'tranget la saisit en apercevant le
vestibule de la rsidence. Elle avait dsormais l'habitude de ce lieu, mais tant de choses
avaient chang depuis la premire fois o elle avait pntr dans son monde...
L'apprhension qu'elle ressentit en entrant dans l'appartement feutr, lie la prsence de
Ian juste derrire elle, n'tait que trop familire.
Par l, dit-il de sa voix grave et calme, semblable une caresse sur sa nuque.
La fbrilit de Francesca ne fit que crotre pendant qu'elle le suivait jusqu' la bibliothque
- la pice o Ian avait accroch le tableau Le Chat qui marche tout seul.
Quand il lui ouvrit la porte et l'invita entrer, la premire chose qu'elle remarqua fut la
prsence d'un autre homme qui lui prsentait son profil, concentr sur sa tche.
Davie ? s'exclama-t-elle, berlue de rencontrer son ami dans cet endroit inattendu.
Davie lui jeta un regard par-dessus son paule et sourit. Il reposa le tableau qu'il tait en
train de prparer et se tourna vers elle.
Le regard de Francesca faisait des allers-retours entre l'apparition surprenante de son ami
et le tableau qu'il avait pos en quilibre sur une table contre le mur.
Oh, mon Dieu ! O est-ce que tu l'as retrouv ?
Elle resta interdite en contemplant la toile reprsentant un panorama urbain de Chicago,
o apparaissaient les immeubles Wrigley, Union and Carbide, et le Mather Tower. Elle avait
peint ce tableau quand elle avait vingt ans et l'avait vendu pour deux cents dollars une
galerie en banlieue. a lui avait fendu le cur de s'en sparer, mais elle n'avait pas eu le choix
l'poque.
Avant que Davie n'ait le temps de rpondre, elle se mit tourner sur elle-mme, toujours
stupfaite. Elle n'arrivait plus respirer.
Ses tableaux encerclaient toute la bibliothque. Davie les avait aligns sur les murs ; il y en
avait une bonne quinzaine - tous vendus plusieurs annes auparavant par la jeune femme. Ils
se dployaient comme des ptales autour du Chat qui marche tout seul, trnant au milieu.
Elle n'avait jamais vu autant de ses uvres rassembles. Elle avait d s'en sparer une par
une, avec l'impression d'arracher chaque fois une petite part de son me. Au fond, elle s'en
tait toujours un peu voulue de ne pas avoir su conserver prs d'elle les trsors les plus
prcieux, les plus sacrs de son art.
Et maintenant, ils taient tous l, devant elle. Elle en tremblait d'motion.
Cesca, fit Davie voix basse.
Il s'approcha d'elle, le visage srieux.
C'est toi qui as fait a ? demanda-t-elle fbrilement.
C'est une commande, rpondit le jeune homme.
Elle suivit son regard entendu.
Ian se tenait sur le seuil de la bibliothque. Il la contemplait d'un regard intense qui
renfermait une lueur d'inquitude - et aussi quelque chose d'autre, de plus sombre... de la
tristesse.
Oh non. Elle tait capable de se dfendre contre son arrogance. Contre sa manie de vouloir
tout contrler. Contre son autoritarisme.
Mais pas contre cette expression anxieuse et un peu perdue qu'elle lisait prsent sur son
beau visage viril. C'tait trop pour elle. Toutes ses motions refoules explosrent d'un coup
dans sa poitrine, comme un orage qui couvait depuis trop longtemps.
Elle se rua hors de la pice.
Laissez-moi faire, ordonna Davie Ian quand ce dernier se tourna pour rattraper
Francesca.
Ian sentit son estomac se nouer face l'angoisse qui se lisait sur le visage de la ravissante
jeune femme. Il dtestait se sentir impuissant. Il avait organis toute sa vie pour viter cette
sensation dplaisante, terrible. Et pourtant, il lui fallut l'endurer quand il s'obligea rester
immobile, regardant Davie se lancer la poursuite de Francesca.
Bon sang, comment as-tu russi faire a, Davie ? demanda Francesca son ami quand
ce dernier la rattrapa finalement dans l'atelier.
Elle tait heureuse que ce ft lui et non Ian. Ce dernier avait bris les dernires dfenses
qu'elle possdait encore en commettant ce qu'il avait fait. Comment avait-il su que lui
restituer ainsi ses uvres du pass dtruirait toutes les murailles qu'elle avait bties pour se
protger de lui ?
Davie haussa les paules et s'avana vers la table o Francesca entreposait ses fournitures
de peinture. Il dtacha une feuille d'essuie-tout et la lui tendit.
Ian m'a donn carte blanche pour localiser et acheter un maximum de tes travaux
passs. Quand on dispose de ce genre de ressources, ce n'est pas aussi difficile que tu pourrais
le penser.
Quand on dispose d'autant d'argent, tu veux dire, rpliqua Francesca en s'essuyant la
joue avec le Sopalin.
Davie lui adressa un regard plein d'empathie.
Je sais que ta relation avec Ian est termine, comme tu me l'as dit la semaine dernire,
mais c'tait un projet que nous avions lanc depuis plus longtemps... avant ton voyage Paris,
en fait. Tu m'en veux ?
Pour avoir complot avec Ian ? Renifla-t-elle avec un pauvre sourire.
Je n'aurais pas accept si a n'avait pas reprsent quelque chose d'aussi important pour
toi. Tu sais que j'essaie de rcuprer une partie de tes anciennes uvres depuis un bon
moment maintenant. C'est parce que je pense que tu es une artiste exceptionnelle que j'ai
voulu faire a, Cesca. C'est pour a que j'ai accept d'aider Ian rassembler les pices. Pas
pour son argent. (L'attention de Davie fut soudain capte par autre chose, et il s'avana vers le
tableau.) Tu t'es surpasse, murmura-t-il. C'est la plus belle de toutes tes crations.
Tu le penses vraiment ? fit-elle en se rapprochant de lui.
Davie hocha solennellement la tte, parcourant des yeux le grand tableau. Il croisa le
regard de la jeune femme.
Je sais que tu as dit que ton... histoire avec lui tait finie, Cesca. Mais je ne peux pas
m'empcher de voir que Ian Noble est compltement fou de toi. D'accord, j'ai mis des
rserves sur ta relation avec lui par le pass. Mais ce qu'il vient de faire, ce n'tait pas
seulement grce l'argent. Tu ne me croirais pas si je te dcrivais les efforts et l'obstination
dont il a fait preuve pour retrouver tes toiles.
Elle ne savait pas trs bien au juste ce qu'elle devait prouver. Deux larmes perlrent au
coin de ses paupires.
Il l'a fait parce qu'il le pouvait, Davie.
En quoi est-ce mal ? Senquit le jeune homme d'un air perplexe. Qu'est-ce qui t'intimide
autant chez Ian Noble ? Je vois bien que tu es non seulement attire par lui, mais aussi
dchire. Qu'est-ce qu'il t'a fait ? demanda-t-il avec cette fois une nuance d'inquitude dans la
voix.
Oh, Davie..., chuchota-t-elle misrablement.
Elle ne lui avait jamais parl de l'aspect sexuel de sa relation avec Ian... du fait que son
amant se dfinissait comme dominant, et la dfinissait, elle, comme une soumise.
Elle lui avoua tout en bredouillant, s'emptrant dans des priphrases comiques en essayant
de dcrire Davie une version soft de leurs bats et en s'apercevant que c'tait presque
impossible.
Francesca..., commena Davie en la regardant d'un air vaguement gn. Ce genre de
pratiques sexuelles n'a rien de terrible en soi. Je croyais que tu n'avais pas vraiment
d'exprience dans...
Aucune... avant Ian.
Oui. Mais les gens font ce qu'ils veulent dans leur lit. Tant que c'est entre adultes
consentants et que personne ne fait de mal personne... (Il plit brusquement.) Ian ne te fait
pas de mal, hein ?
Non... non, ce n'est pas a! s'exclama-t-elle. Je veux dire... j'aime... j'aime la faon dont il
me fait l'amour, dit-elle en rougissant comme une pivoine.
Elle n'avait jamais eu ce genre de conversation avec Davie auparavant... avec personne, en
fait.
C'est juste qu'il n'arrte pas de vouloir tout contrler, reprit-elle. Regarde la faon dont il
s'est arrang avec toi pour faire tout a dans mon dos ! Il savait que a me donnerait envie de
lui pardonner pour m'avoir quitte sans explication la semaine dernire, alors qu'on
commenait devenir proches.
Davie soupira.
Non, je te l'ai dit. Ian m'avait dj demand bien avant de retrouver tes tableaux. Il ne
pouvait pas savoir que vous alliez vous disputer et que a te pousserait lui pardonner.
coute... j'ai pass beaucoup de temps travailler avec lui, ces dernires semaines, pendant
que je ngociais le rachat de tes uvres. Je sais qu'il est autoritaire, mais c'est aussi
quelqu'un d'avis. OK, il est ttu et il essaie toujours d'imposer sa faon de faire. Mais je
pouvais difficilement le lui reprocher alors qu'il accomplissait clairement tout a pour te faire
plaisir.
Elle ne rpondit pas et dvisagea son ami. Comme elle avait envie de le croire !
En fait, je ne connais qu'une seule autre personne aussi ttue que lui, reprit Davie d'une
voix taquine.
Francesca clata de rire. Elle savait de qui son ami parlait.
Si tu mettais les choses au clair avec lui pour dfinir, une fois pour toutes, qu'il ne peut
se montrer dominant avec toi que dans le cadre de vos relations sexuelles, a irait mieux ?
Mais il se dvoile tellement peu moi... C'est comme s'il pouvait m'oublier juste en
appuyant sur un interrupteur.
Davie hocha pensivement la tte.
Eh bien, c'est toi de voir, bien sr. Je ne suis pas certain qu'il ait la facult de t'oublier
si facilement. Il reste indchiffrable la plupart du temps, a, c'est indniable, mais a ne veut
pas dire qu'il ne pense pas toi. Juste qu'il est trs bon pour le cacher. Quoi qu'il en soit, je
voulais juste que tu saches quel point il s'est investi pour retrouver tes toiles. Il n'a rien
lch. (Davie jeta un coup d'il sa montre.) Il va falloir que j'y aille. C'est moi qui fais la
fermeture de la galerie ce soir.
Merci, Davie, fit-elle en l'treignant chaleureusement. Pour avoir retrouv mes tableaux,
et pour m'avoir parl de Ian.
De rien, rpondit-il avec un regard empli d'affection. Je serai toujours l si tu as envie de
parler.
Elle hocha tte et le regarda sortir de la pice, l'abandonnant ses doutes et ses espoirs.
Dix minutes plus tard, elle frappa doucement la porte des appartements privs de Ian.
Elle entendit un entrez distant, et elle pntra dans la pice. Il tait assis sur le divan dans
le coin-salon, sa veste dboutonne, ses longues jambes plies devant lui, en train de
consulter ses messages sur son tlphone portable. Il leva les yeux vers elle quand elle
s'approcha.
Je suis juste retourne voir les tableaux, dit-elle. Je suis dsole de mtre enfuie comme
a.
Tu vas bien ? demanda-t-il en posant le tlphone sur le divan.
Elle hocha la tte.
J'tais... bouleverse.
Un silence pesant se prolongea entre eux tandis qu'il la dvisageait.
J'ai pens que a te rendrait heureuse. Les tableaux.
Les yeux de Francesca la brlaient, et elle fixait obstinment les motifs du tapis oriental.
Bon sang... elle avait cru s'tre dbarrasse une fois pour toutes de ces larmes gnantes.
Ils me rendent heureuse. Plus heureuse que je ne puis le dire. (Elle se fora le regarder
dans les yeux.) Comment savais-tu que a me toucherait autant ?
Je sais quel point tu es fire de ton travail, rpondit-il en se levant. J'imagine que a a
d tre trs dur pour toi de te sparer de ces uvres.
C'tait comme d'abandonner une partie de moi chaque fois, dit-elle en essayant de
sourire. (Un tremblement nerveux agitait ses mains. Il s'approcha d'elle, et son regard la
cloua sur place.) Je ne sais pas si je pourrai un jour te rembourser cette dette. Je veux dire...
Je sais que les toiles t'appartiennent. Tu les as achetes. Mais le simple fait de pouvoir les
revoir, c'est extraordinaire. C'est... presque trop, tu ne penses pas ?
Pourquoi est-ce que ce serait trop ? Tu crois que j'ai fait a pour te remettre dans mon lit
?
Non, mais...
Je l'ai fait parce que tu as un talent exceptionnel. Tu sais quel point j'apprcie ton art.
Je ne jouerais pas les mcnes si tu n'tais pas aussi doue, Francesca.
Elle expira lentement. Comment pouvait-elle argumenter face une gnrosit qui
semblait aussi sincre ?
Merci. Merci infiniment d'avoir pens moi, Ian.
Je pense plus toi que tu ne le crois.
Elle avala pniblement sa salive, se souvenant de ce que lui avait dit Davie un peu plus
tt... Il est trs bon pour le cacher.
Je suis dsol de t'avoir bouleverse la semaine dernire. Je devais rellement
m'occuper d'une affaire urgente. Je n'essayais pas de t'viter, s'excusa-t-il. Mes sentiments te
concernant sont toujours les mmes. J'aimerais que tu reconsidres ce que tu m'as dit l'autre
jour. Je n'arrte pas de penser toi, Francesca.
En entendant la faon dont il avait prononc cette dernire phrase, la jeune femme plongea
ses yeux dans les siens.
Si... si on reprend notre relation l o on l'a laisse, Ian... est-ce que tu peux me
promettre que tu essaieras seulement de me contrler... de me dominer... au lit ? demanda-t-
elle d'une voix oppresse.
Prononcer ces mots avait t plus dur pour elle qu'elle ne l'avait prvu. Comme il ne
rpondait pas aussitt, elle sentit les battements de son cur s'acclrer. Le visage de Ian
tait toujours impassible, mais ses yeux brillaient d'motion.
Tu veux dire dans le cadre de nos relations sexuelles ? Parce que je ne peux pas te
garantir que je n'aurais jamais envie de toi hors d'une chambre coucher. Comme tu le sais
depuis Paris, le dsir peut surgir n'importe o.
Oh... eh bien, oui. C'est ce que je voulais dire. Je reconnais que j'aime quand tu me...
domines sexuellement, mais je ne veux pas que tu essaies de contrler ma vie.
Tu penses la faon dont j'ai essay de contrler Elizabeth ?
Tu m'as dit que tu me faisais plus confiance moi.
Elle sentit qu'il rflchissait, et prouva le besoin de mieux s'expliquer.
Je tiens vraiment te remercier pour m'avoir encourage prendre davantage le
contrle de ma vie, fit-elle - elle ne voulait pas qu'il pense qu'elle tait insensible aux choses
positives qu'il lui avait apportes durant leur courte relation. J'ai apprci que tu fasses cela.
Mais je veux tre la seule aux commandes de ma vie, Ian. En dehors du sexe, je veux dire,
ajouta-t-elle dans un souffle.
Les lvres serres de son amant ne formaient qu'une mince ligne.
Je ne peux pas te garantir que je ne chercherai jamais contrarier ta nature.
Mais tu essaieras ?
Il la scruta longuement et soupira.
Oui. J'essaierai.
Le cur de la jeune femme bondit dans sa poitrine. Elle s'lana dans ses bras et l'treignit
avec force. Quand elle leva les yeux vers lui quelques instants plus tard, une lueur
d'amusement brillait dans ses prunelles. Il avait d comprendre l'lan de joie qui l'avait
submerge en entendant ses mots. J'essaierai.
J'ai une ide, dit-elle. Laisse-moi t'emmener faire un tour en moto.
Je ne peux pas, rpondit-il avec regret en lui caressant la joue.
Mais Jacob dit que je suis une trs bonne conductrice - meilleure qu'en voiture.
Il sourit largement, et elle crut qu'elle allait fondre.
Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je dois retourner au bureau. J'ai normment de
travail.
Oh..., lcha-t-elle, due. Elle s'en remit trs vite, cependant. Elle comprenait qu'il avait
de lourdes responsabilits.
Mais puisque tu en parles, je t'ai ramen une surprise de Londres, dit-il avec un petit
sourire sur sa bouche si ferme.
Hein ?
Il dtacha les mains du corps de la jeune femme et s'avana vers un tiroir. Quand il revint,
il portait un casque de moto noir d'une main - une paire de gants de cuir fourrs dans
l'ouverture - et dans l'autre main, un cintre o tait suspendu un blouson de cuir noir
moulant.
Oh, mon Dieu, je l'adore ! Laissa-t-elle chapper en tendant la main vers le vtement.
Il descendait jusqu'aux hanches, avec une fermeture clair en diagonale et des boutons.
Elle savait qu'il lui irait la perfection. Elle caressa doucement le cuir d'un geste
apprciateur.
Je peux l'essayer ? demanda-t-elle Ian d'une voix vibrante d'excitation.
Pas de protestation pour le cadeau ? fit-il d'un ton ironique alors qu'elle tait htivement
le blouson du cintre.
Elle sentit le rouge lui monter aux joues.
J'aurais d protester... C'est juste que... on dirait qu'ils ont t conus pour moi, dit-elle
en jetant un coup d'il au casque.
C'est parce que c'est effectivement le cas, murmura-t-il.
Elle lui adressa un sourire par-dessus son paule tout en se ruant vers la salle de bains
pour contempler son reflet dans le miroir. Comment faisait-il pour toujours trouver le cadeau
parfait ? Elle aurait aim pouvoir lui rendre la pareille. Elle entendit le tlphone de Ian
sonner dans la pice d' ct alors qu'elle tait en train de remonter la fermeture clair. Le
blouson lui allait rellement la perfection - moulant, lanc et sexy.
Elle revint dans la chambre coucher, radieuse. Ian s'tait rassis sur le divan et discutait
au tlphone.
II haussa les sourcils d'admiration quand elle dfila
Devant lui avec la veste ; ses yeux bleus la dtaillaient des pieds la tte.
tudions la possibilit d'mettre des obligations, tait-il en train de dire son
interlocuteur.
Elle s'avana vers lui en se sentant ridiculement heureuse de la conversation qu'ils avaient
eue tous les deux. Avait-elle fait une erreur en reniant sa promesse de ne plus s'investir
sentimentalement avec lui ?
Mais il avait promis qu'il essaierait d'tre moins autoritaire. Cela signifiait beaucoup pour
elle. Elle savait que les gens ne pouvaient pas changer du jour au lendemain et, dans le cas de
Ian, son dsir de contrler tout ce qui l'entourait remontait au plus profond de son enfance,
quand il avait t forc de veiller sur sa mre au lieu d'tre protg par elle.
C'tait peut-tre pour a qu'elle n'avait pas protest devant son cadeau. S'il faisait des
efforts pour assouplir son comportement, elle devait en faire galement. Bien sr, l'adorable
blouson et le casque reprsentaient des cadeaux faciles accepter, reconnut-elle
intrieurement en caressant d'une main les lignes fluides du vtement. Une lueur apparut
dans les yeux de son amant quand elle effleura le cuir juste sous la courbe de ses seins.
Quelque chose s'veilla en elle au mme moment, comme si son sang coulait plus vite. Elle
s'avana d'un pas vers lui.
Il la contempla fixement, les narines lgrement frmissantes. Tout d'un coup, elle se
rendit compte quel point il lui avait manqu - et combien elle avait eu peur, sans se
l'avouer, de ne plus jamais pouvoir le toucher.
Il faut voir les intrts des obligations et les frais de dossier. On comparera avec les taux
bancaires, dit Ian au tlphone.
Un trange mlange d'audace, de gratitude et de dsir envahit la poitrine de Francesca. Il
lui avait offert un cadeau d'une valeur inestimable en retrouvant ses tableaux. Il lui avait
rendu son pass.
Elle voulait lui donner quelque chose en retour.
L'expression de Ian changea quand elle s'approcha pour lui carter dlicatement les
jambes. Il ouvrit grands les yeux lorsqu'elle s'agenouilla devant lui et essaya de lui attraper le
poignet quand elle tendit la main vers la boucle en argent de sa ceinture. Elle le regarda dans
les yeux, l'implorant silencieusement, et il relcha son treinte.
Elle dboucla sa ceinture et dboutonna sa braguette de ses doigts agiles.
L'mission d'obligation nous donnerait plus de flexibilit pour de futures acquisitions
qu'un simple emprunt bancaire, tait en train de dire Ian au tlphone.
Les doigts de Francesca caressrent ses testicules recouverts par le boxer tandis qu'elle
essayait de faire descendre son pantalon.
Il se racla la gorge pour dissimuler un grognement. Elle lui lana un regard reconnaissant
quand il souleva lgrement les hanches de manire lui permettre de faire descendre le
pantalon et le boxer sur ses cuisses.
Puis elle prit son membre en main, l'tudiant avec fascination. Il tait toujours aussi doux.
Une vague de tendresse et de dsir la submergea cette vision, cette sensation... l'odeur
mle de son sexe qui emplissait ses narines. En quelques secondes, elle le vit se raidir,
s'paissir et s'allonger.
Extraordinaire.
Elle ferma les yeux et le prit dans sa bouche ; elle voulait le sentir durcir encore entre ses
lvres. Oh, que c'est bon, songea-t-elle travers le brouillard de dsir qui l'enveloppait.
Comme elle l'avait introduit dans sa bouche avant que l'rection soit totale, elle pouvait
l'aspirer plus profondment. Elle commena osciller la tte d'avant en arrire entre ses
genoux, de plus en plus vite. Son sexe se tendit, ce qui tira ses lvres serres. Elle frissonna
quand il passa la main dans ses cheveux, sur sa nuque. Comme distance, elle l'entendit dire
:
Euh... tu disais, Michael ? Oui, c'est a, juste une valuation des deux options possibles.
Il emplissait totalement la bouche de Francesca, prsent, et elle arrivait tout juste le
contenir. Il la tenait par les cheveux, dans le cou, et l'aidait doucement trouver le bon
rythme. Elle se mit utiliser sa main en plus de sa bouche, caressant de bas en haut la base
de l'pais membre quand il glissait hors de sa bouche.
Il eut un hoquet et toussota.
Hem... oui. Michael, fais-moi une faveur, et rcupre-moi juste l'estimation chiffre des
scnarios pour des obligations dix ans et vingt. Je prendrai une dcision ds que j'aurai vu
les chiffres. Oui, c'est tout pour le moment, merci.
Elle prit vaguement conscience qu'il laissait tomber le tlphone sur les coussins du divan.
Elle leva les yeux vers lui alors que son membre turgescent dpassait moiti de sa bouche.
Ne me regarde pas avec cet air innocent, murmura-t-il en utilisant sa prise sur ses
cheveux pour contrler ses mouvements. Tu savais exactement ce que tu faisais, n'est-ce pas
? N'est-ce pas ? Insista-t-il avec fermet tout en l'encourageant acclrer. (Elle hocha la tte
et mit un gargarisme sourd de confirmation. Il siffla entre ses dents :) Tu fais tout pour me
torturer, Francesca.
Elle le sua avec enthousiasme et secoua lgrement la tte. Il hoqueta.
N'essaie pas de nier l'vidence, ma beaut, reprit-il d'une voix qui se faisait de plus en
plus rauque.
Elle gmit fivreusement. Lui donner ainsi du plaisir la plongeait dans un tat de quasi-
transe.
Elle le prit profondment dans sa gorge. Il ructa de plaisir et affermit sa poigne dans sa
chevelure, exigeant qu'elle le suce plus vite et plus fort.
Elle le masturba avec son poing, avide de le satisfaire, de le voir succomber, de goter sa
semence. Il s'empala totalement en elle et elle le reut dans sa gorge nouveau, luttant pour
respirer par le nez. Les hanches de Ian s'arqurent brusquement, et il gronda, de plus en plus
fort, en commenant jouir. Elle le sentit vibrer contre son palais et carquilla les yeux alors
qu'il commenait se rpandre dans sa gorge.
Il se retira partiellement aprs une seconde ou deux pour se vider compltement sur la
langue de la jeune femme.
Au bout d'un moment, il relcha sa prise et commena lui masser le cuir chevelu. Son
corps puissant s'effondra sur les coussins du divan, et son sexe glissa hors de la bouche de
Francesca avec un bruit de succion.
Tu mrites une bonne fesse pour a, dit-il en la contemplant entre ses paupires mi-
closes tandis qu'elle se lchait les lvres.
Elle vit un petit sourire apparatre sur sa bouche et le lui rendit. Il n'avait pas franchement
l'air furieux - plutt celui d'un homme repu et satisfait.
Est-ce que tu vas m'en donner une ? demanda-t-elle, parcourue par un frisson
d'excitation.
Bien entendu. Tu vas avoir droit une sance de tapette. Je ne peux pas te laisser me
distraire pendant que je travaille, Francesca.
Ses gestes dmentaient ses mots : il lui caressait les cheveux d'une main, et la joue de
l'autre, d'une manire trs tendre. Elle ne pouvait s'empcher de se dire qu'il avait plutt
apprci d'tre distrait dans sa tche.
Va dans la salle de bains et mets une robe.
Elle se leva et suivit ses instructions, sentant son pouls battre ses tempes. Quand elle
revint dans la suite quelques minutes plus tard, elle se figea en le voyant. Il l'attendait, torse
nu.
Suis-moi, dit-il en lui prenant la main.
Francesca ouvrit grands les yeux quand elle le vit sortir la cl familire de sa mallette.
Ce que j'ai fait n'tait pas si grave, si ? demanda-t-elle d'un ton inquiet lorsqu'il
dverrouilla la porte de la pice o il lui avait dit qu'elle recevrait ses punitions les plus
svres.
Tu as compromis mes capacits rflchir au moment o je devais prendre une dcision
professionnelle, dit-il en la faisant pntrer dans la pice et en refermant la porte cl
derrire lui.
Il la mena jusqu'au tabouret haut qu'elle avait dj remarqu lors de sa premire visite,
celui qui tait pos en face de la barre horizontale qui ressemblait une barre de ballet, avec
un dos bizarrement incurv. De devant, il semblait plutt ordinaire, avec un contour en demi-
cercle. Mais la partie arrire s'incurvait vers l'intrieur, comme si on avait t un croissant du
disque. Ian conduisit Francesca jusqu' la commode en bois de cerisier et ouvrit un tiroir. Elle
scruta le tabouret, la fois perplexe et incroyablement excite. Quand elle vit que Ian avait
sorti le pot de stimulant clitoridien et la tapette en cuir noir, sa vulve se contracta
violemment.
Il la dvisagea attentivement quelques instants plus tard, pendant qu'il appliquait la crme
sur son clitoris.
Je vais te donner une bonne cinquantaine de coups. Tu mriterais encore plus pour ce
que tu as fait.
Les joues de Francesca devinrent brlantes de dsir et de crainte.
Tu ne t'es pas trop plaint pendant.
Un demi-sourire fendit les lvres fermes de son amant.
Assieds-toi sur le tabouret, face au mur, ordonna-t-il.
Elle fit ce qu'il lui disait, s'asseyant sur le rebord du sige pour viter le croissant
manquant l'arrire.
Recule de manire ce que tes fesses dpassent du bord. Penche-toi en avant et pose tes
mains sur la barre. Oui, comme a.
La jeune femme commena comprendre ce qui allait se passer en se penchant en avant,
faisant peser le poids de la partie haute de son corps sur la barre, tandis que son postrieur
retombait de l'autre ct, travers le trou du tabouret. La crme commenait brler son
clitoris, et elle pouvait voir dans le miroir Ian se dplacer derrire elle, la grande tapette de
cuir noir dans la main.
Oh non... Ses fesses taient terriblement exposes et vulnrables... et parfaitement
positionnes pour recevoir les coups.
Whack.
Un gmissement jaillit de sa gorge sous le bref aiguillon et la brlure cuisante.
Chhh..., murmura Ian en caressant sa chair avec la fourrure. C'est trop pour toi ?
a va aller, dit-elle dans un souffle.
Il releva le bras et donna un autre coup, puis un autre. Cette fois, il utilisa directement sa
main pour apaiser ses fesses, caressant et massant doucement la chair brlante sous ses
paumes.
Tu n'as pas de chance d'avoir un aussi beau cul, marmonna-t-il tout en la caressant.
Pourquoi ?
Peut-tre que s'il l'tait moins, je n'aurais pas le punir autant.
Francesca gmit quand il frappa nouveau, atteignant la courbe infrieure de son
postrieur. Elle vit son sexe se dresser sous le tissu de son pantalon. Il souffla fort et
empoigna son membre travers le tissu.
Je croyais que tu me punissais parce que je t'ai distrait pendant ton travail, dit-elle en le
regardant avec des yeux carquills se caresser d'une main tout en levant nouveau la
tapette.
Ae ! Gmit-elle une seconde plus tard quand il toucha une deuxime fois la mme zone
sensible.
Il aimait vraiment la frapper cet endroit-l - la courbe infrieure de son postrieur.
Malgr la douleur cuisante, elle sentit son clitoris pulser d'excitation.
Toutes mes excuses..., marmonna-t-il en la frappant cette fois plus haut. Tu es
effectivement punie parce que tu m'as distrait. Je voulais juste dire que... un cul aussi
splendide est fait pour tre puni rgulirement, fit-il avec un petit sourire.
Elle rprima un nouveau cri quand il la frappa nouveau. Elle pouvait voir dans le miroir
que ses fesses commenaient prendre une jolie couleur rose du ct droit.
Elle ne put retenir un gmissement de pur plaisir quand il dboutonna son pantalon et le
fit descendre avec le boxer au-dessous de son membre turgescent,
Ian..., gmit-elle en voyant son rection.
Tu vois ce que je veux dire ? demanda-t-il en abattant une nouvelle fois la tapette,
faisant sortir tout l'air des poumons de la jeune femme.
Il se caressa et frappa encore. Elle n'arrivait pas dtacher les yeux de sa main en train de
monter et descendre sur son sexe rigide.
Je n'avais pas prvu de te prendre, juste de te punir. Mais ton joli cul m'a fait changer
d'avis.
Oooh, fit-elle en recevant un nouveau coup.
Son postrieur commenait la brler srieusement. Elle serra les dents en voyant Ian
lever une nouvelle fois son bras.
Encore combien ? demanda-t-elle entre ses dents serres.
Je ne sais pas. Tu m'as nouveau dconcentr, rpondit-il d'une voix sombre en
frappant encore.
Elle vit qu'il caressait son membre de plus en plus vite, le visage grimaant. Il lui donna un
nouveau coup, faisant trembler sa chair. Il poussa un juron touff et jeta la tapette sur le
divan, la surprise de Francesca.
Ma punition est termine ? demanda-t-elle, dcontenance par cette interruption
soudaine.
Non, fit-il en se dirigeant d'un pas rapide vers la commode pour prendre un prservatif.
a ne fait que commencer.
Elle le regarda avec une excitation croissante retirer ses vtements. Il s'approcha derrire
elle et droula le prservatif sur son rection.
Relve-toi, dit-il.
Elle sentit son clitoris chauffer entre ses jambes pendant qu'elle descendait du tabouret.
Ses fesses la brlaient. Elle rsista l'envie de les masser pour apaiser la chaleur.
Tiens-toi la barre et penche-toi en avant, dit-il en la caressant doucement.
Elle s'excuta. Presque aussitt qu'elle eut immobilis l'avant de son corps en s'accrochant
la barre, il carta les lvres de sa fente et la pntra par-derrire.
Si mouille... Si docile, lcha-t-il en contemplant son postrieur.
Ahhh, gmit-elle, les yeux carquills.
Je t'avais prvenue, murmura-t-il en assurant sa prise sur ses hanches et en
commenant la pilonner. Tu m'as provoqu, Francesca. Tu dois en accepter les
consquences. Je vais te prendre pour mon seul plaisir.
Durant les quelques minutes suivantes, alors qu'il la besognait, elle eut l'impression qu'il
faisait trembler l'univers entier par ses coups de reins. Elle le contempla dans le miroir,
bouche grande ouverte, alors qu'il s'enfonait en elle encore et encore ; chaque muscle de son
magnifique corps tait band, et son membre tait semblable un piston bien huil qui allait
et venait dans son fourreau humide un rythme infernal.
Il avait dit qu'il ne se soucierait pas de son plaisir elle mais, en le voyant ainsi prendre le
sien, avec la tension dlicieuse qui s'intensifiait dans son vagin, l'effet de la crme
stimulante... elle ne pouvait pas rsister. Elle succomba l'orgasme, secoue de
tremblements et gmissant sans aucune retenue. Il poussa un juron et lui claqua les fesses
avant de les empoigner fermement, les collant contre lui pendant qu'il jouissait son tour.
Ils demeurrent colls l'un l'autre pendant un laps de temps qui sembla Francesca
durer plusieurs minutes, bien qu'elle penst aprs coup s'tre trompe ce sujet - Ian tait
toujours trs attentif ce que le sperme ne dborde pas du prservatif. En tout cas, il lui
caressa le dos et les hanches tendrement pendant ce qui sembla Francesca tre une
dlicieuse ternit, jusqu' ce que leurs respirations s'apaisent.
Enfin, il se retira avec un grognement rauque. Il l'aida se relever et la prit dans ses bras.
La bouche de Ian se referma sur la sienne. La jeune femme ferma les yeux, s'abandonnant
aussi compltement son baiser qu'elle l'avait fait lorsqu'il lui faisait l'amour.
Tu sais ce que j'ai envie de faire avec toi ? Chuchota-t-il doucement quelques
centimtres de sa bouche un peu plus tard.
Elle passa la langue sur ses lvres, savourant le got de la salive de son amant, et leva des
yeux ensommeills vers lui.
Quoi ? demanda-t-elle d'une voix tranante. Une lueur tincela dans ses iris bleus, et elle
se demanda s'il avait totalement apais la flamme qui se consumait en lui. Il secoua la tte,
comme pour claircir ce point, et lui prit la main. Ils quittrent la petite pice confine, et il
referma la porte cl derrire lui.
Rhabille-toi et attends-moi, dit-il.
Elle le regarda avec un mlange de perplexit et d'admiration devant son corps divinement
sexy et ses fesses nues - un spectacle qu'elle n'avait pas eu l'occasion de voir aussi souvent
qu'elle l'aurait voulu. Quand il revint dans la pice quelques minutes plus tard, elle tait dj
habille. Elle le regarda, agrablement surprise.
Il portait un Jean impeccablement ajust qui descendait bas sur ses hanches et l'un des
tee-shirts blancs qu'il mettait parfois l'escrime, une veste en cuir sur le bras. Le souffle
coup, elle admira son corps souple et muscl. Elle ne se lassait jamais de le regarder.
Qu'est-ce que tu fais ? demanda-t-elle d'une voix incrdule.
J'ai chang d'avis.
Sur quoi ?
Sur le fait de retourner au bureau. Allons faire un tour moto. Je veux te voir en action.
Francesca demeura un instant bouche be avant d'clater de rire. Elle n'arrivait pas y
croire. Il tait en train de prendre une dcision sous l'impulsion du moment... de manire
spontane ? Ian ?
Elle mit sa veste en cuir, en proie une folle excitation, et alla chercher ses nouveaux
accessoires.
Tu viens de t'engager pour une sacre balade, dit-elle avant de s'avancer vers le seuil.
a, je le sais dj, rpondit-il d'un ton ironique derrire son paule, la faisant sourire
encore plus.
Comment cette journe qui avait commenc de faon si morne et ordinaire pouvait-elle se
finir aussi formidablement ? Se demanda-t-elle alors qu'elle attendait l'ascenseur avec Ian.
Il tait sexy comme un dieu avec son jean et son blouson, le casque pos au creux de son
bras. Il remarqua la faon dont elle le regardait et sourit de manire un peu diabolique.
L'ascenseur descendit jusqu' la cave, et les portes s'ouvrirent, interrompant la contemplation
de Francesca.
Elle se dirigea vers le parking, familire des lieux depuis ses leons avec Jacob. Toute une
zone tait rserve pour les vhicules de son amant. Jacob avait une sorte de bureau non loin,
rempli d'outils et de pices dtaches.
La jeune femme s'arrta quelques secondes plus tard quand Ian enfourcha sa moto noire
d'un mouvement fluide.
Eh bien ? Monte, dit-il d'une voix douce en voyant fixer la moto qui se trouvait ct de
la sienne.
Elle tait un peu plus petite que celle de Ian, mais magnifique sa propre faon, avec une
carrosserie noire brillante orne de rayures rouges stylises.
D'o est-ce qu'elle vient ? demanda-t-elle, estomaque.
Il haussa les paules et posa ses pieds botts terre, enserrant le deux-roues entre ses
cuisses puissantes,
Comment pouvait-il avoir l'air aussi naturel sur une moto de voyou que vtu de ses
costumes sur mesure dans un environnement luxueux ? La vision de ses mains recouvertes
de cuir noir fit inexplicablement frissonner Francesca.
Elle est toi.
Non ! Je veux dire... Elle s'interrompit, regrettant sa rponse impulsive.
Elle fixa Ian d'un regard implorant. L'aprs-midi s'tait si bien pass... Les tableaux, la mise
au point avec Ian pour qu'il n'essaie pas de contrler sa vie, la veste et le blouson qu'il lui
avait offerts, le plaisir qu'elle lui avait donn en retour, la faon dont il l'avait prise... et dont
elle avait aim a. Elle ne voulait pas tout gcher en protestant, mais une moto... C'tait
vraiment beaucoup trop, n'est-ce pas ? Surtout aprs tout ce qu'il venait de lui offrir.
Avant qu'elle ait le temps de formuler ses objections, Ian la prit de court.
D'accord. Elle est moi. J'ai plusieurs motos. Je te la prte pour la dure de ton
existence, dit-il en la tanant du regard. Tu peux accepter a, Francesca ?
Elle sourit et enfourcha la moto. Une vague d'exaltation enfla dans sa poitrine tandis
qu'elle s'installait.
Oh oui. a, elle pouvait l'accepter.
Jacob lui avait dit que Francesca avait un don inn pour la moto quand il l'avait consult
pour savoir quel type de deux-roues lui acheter. Il tait heureux de constater quel point son
chauffeur avait vu juste. Voir la jeune femme foncer dans les rues de la ville, prendre des
virages serrs et zigzaguer entre les obstacles du parcours tait un vritable plaisir.
Quand il se rendit compte que le sentiment qui l'envahissait en l'observant tait de la
fiert, il se moqua de lui-mme en son for intrieur. En quoi tait-il important qu'il l'ait
initie une passion qu'il apprciait tant ? Ce qui comptait, c'tait le got qu'elle y prenait...
qu'elle ait dcouvert une autre facette de son extraordinaire palette de talents.
Il jeta un coup d'il latral et vit qu'elle se trouvait son ct ; ils venaient juste de rentrer
Chicago, sur l'avenue qui bordait le lac, et la nuit commenait tomber. Elle leva le pouce
son intention, et il imagina prcisment le sourire qu'elle faisait sous le casque. Quelque
chose, dans la conduite moto, soulignait sa force physique naturelle, la fracheur de son
nergie vitale... et ses fesses moules par le Jean qui lui donnaient envie de la ramener illico
presto la rsidence chaque fois qu'il les contemplait, c'est--dire peu prs tout le temps.
D'un geste, il lui fit signe de s'arrter sur un parking, non loin du parc Millennium.
Quelques minutes plus tard, ils ressortaient pied sur Monroe Street, entre le parc et
l'Institut des arts. Les nuages s'taient dissips, et la nuit s'annonait froide et dgage.
O est-ce qu'on va ? Lui demanda-t-elle avec un sourire jusqu'aux oreilles, une mche de
cheveux cuivrs lui chatouillant la joue.
Il l'carta et prit la jeune femme par la main.
Je me suis dit que j'allais t'emmener dner.
Gnial.
Son enthousiasme donnait sa voix un adorable ct essouffl. Ian dut faire un effort pour
dtacher les yeux de sa magnifique silhouette balaye par le vent.
Tu es un pilote fantastique, fit-elle. Tu as l'air tellement l'aise sur une moto. Tu as
commenc quel ge ?
Onze ans, je crois, rpondit-il en plissant les paupires pour essayer de se remmorer
l'vnement.
Si jeune ?
Il opina.
Quand je suis retourn en Angleterre aprs la France, j'ai eu du mal m'acclimater.
C'tait un monde entirement nouveau, un mode de vie compltement diffrent. Ma mre
n'tait plus l, dit-il avec un pli amer sur les lvres. a a t trs dur pour moi. J'avais un
cousin nettement plus g, que j'ai toujours surnomm oncle . Oncle Grard a dcouvert
un jour que j'adorais la mcanique. Quand j'ai trouv une vieille moto en panne dans le
garage de son domaine - qui se trouvait tout prs de celui de mon grand-pre - je l'ai suppli
de me laisser la rparer. C'est de l que date ma passion pour ces engins. Mon grand-pre
s'est mis s'y intresser aussi, et a a cr un lien entre nous trois.
Et tu as commenc sortir de ta coquille ? demanda Francesca en le dvisageant tandis
qu'ils marchaient.
Oui. Un peu.
Des notes de musique rsonnaient dans l'air pur et mordant alors qu'ils atteignaient
l'avenue Michigan. Ian remarqua un attroupement sur un trottoir.
Oh ! Les Naked Thieves jouent ce soir au parc Millennium. Caden et Justin sont quelque
part dans la foule, l'informa Francesca.
Les Naked Thieves ?
Elle le fixa d'un air incrdule.
Le groupe de rock ? Les Naked Thieves ?
Il haussa les paules et se sentit un peu stupide, bien qu'il prt soin de ne pas le montrer.
D'aprs l'expression qui se lisait sur le visage juvnile de Francesca, il tait dfinitivement
cens savoir qui taient ces Naked Thieves. Il se concentra sur les lvres pulpeuses de la
jeune femme et oublia trs vite son embarras.
Comment tu peux ne pas connatre a ? Tu es presque une idole pour les jeunes, mais
c'est comme si... (Elle secoua la tte et se mit rire, un rire qui semblait la fois triste et
incrdule.) C'est comme si tu tais sorti du ventre de ta mre en costume trois-pices avec ta
mallette la main.
Il accusa le coup. Plus que n'importe qui d'autre, il aurait aim avoir une vraie enfance - et
une adolescence. Passer des aprs-midi d't qui s'tiraient l'infini, sans se soucier du reste
du monde ; se rebeller contre des parents qu'on ne pouvait soi-disant pas supporter alors
qu'on les aimait plus que tout et qu'on savait tre toujours l pour nous... faire le mur pour se
rendre un concert de rock dans un parc avec une fille splendide comme Francesca.
Qu'est-ce que tu fais ? Lui demanda la jeune femme en le voyant sortir son tlphone
portable d'une poche de son blouson.
J'appelle Lin. Tu as envie d'aller ce concert, et elle pourra nous procurer des places
assises de dernire minute.
Ian, les places assises sont vendues depuis des lustres. Fais-moi confiance - avec Caden,
on a essay de se procurer des entres.
On va en trouver, rtorqua-t-il en composant le numro de Lin.
Il s'interrompit quand Francesca posa la main sur son avant-bras. Le soleil couchant et les
reflets dans ses cheveux confraient une teinte rose ses joues et ses lvres. Ses yeux
sombres brillaient d'une nuance de dfi.
Allons juste nous asseoir sur la pelouse.
La pelouse, rpta-t-il d'un ton pince-sans-rire.
Oui ! On ne voit pas grand-chose, mais on entend trs bien. Et tout le monde a le droit
d'y aller, ajouta-t-elle en l'attrapant par le bras et en le tirant en direction du parc.
C'est justement le problme, non ?
Oh, arrte d'tre si anglais !
Une repartie cinglante lui vint l'esprit - une raction pidermique. Il n'tait vraiment pas
habitu ce qu'on lui parle sur un tel ton. Il vit l'excitation qui ptillait dans ses yeux de
nymphe et ravala finalement sa rplique. Il pourrait bien s'habituer tre taquin et
subtilement rprimand - condition que ce soit par elle.
Je te gte vraiment trop, rpondit-il finalement en marchant avec elle vers la foule
grouillante de jeunes devant eux. Je ne ferais pas a pour qui que ce soit d'autre, j'espre que
tu en es consciente.
Il s'arrta brusquement quand elle se retourna vers lui, se dressa sur la pointe des pieds, et
l'embrassa sur la bouche. Son parfum et son got le submergrent. Le doux gmissement
qu'elle laissa chapper quand il approfondit le baiser tait aussi dlicieux que le contact de
son corps. La beaut de son visage le frappa lorsqu'elle leva les yeux vers lui, les paupires
mi-closes.
C'est la chose la plus gentille que tu m'aies jamais dite, souffla-t-elle.
Peut-tre parce que tu es la plus belle chose qui me soit jamais arrive.
La pointe de regret qu'il prouva quand ils arrivrent sur la pelouse une minute plus tard le
surprit.
Il aurait d dire ces mots voix haute.
Il n'tait pas certain de pouvoir renoncer ce point ses dfenses, cependant - et admettre
cette vrit lui fut plus pnible que jamais.
La. Meilleure. Journe. De. Ma. Vie ! s'exclama-t-elle en insistant sur tous les mots
quand ils revinrent dans la suite de Ian quelques heures plus tard. D'abord mes tableaux -
merci encore pour a, Ian, je suis encore sous le choc. Ensuite la balade moto - cette bcane
est gniale - et puis les Naked Thieves dans le parc !
On ne distinguait quasiment rien pendant le concert. On aurait dit qu'ils hurlaient la
mort ou au meurtre, murmura Ian alors qu'elle tendait les mains vers lui dans l'attente.
Elle se tourna pour qu'il puisse l'aider retirer son blouson. Malgr ce qu'il venait de dire,
elle remarqua le petit sourire sur ses lvres et sut qu'il n'tait pas aussi indiffrent
l'exprience qu'il ne le laissait paratre.
C'est juste parce que tu ne connais pas les chansons, dit-elle en refusant de se laisser
aller la mauvaise humeur.
C'est comme a que tu appelles ce bruit ? fit-il d'un ton ironique en dposant son
blouson sur le dos d'une chaise.
Francesca se retourna vers lui.
Tu n'avais pas l'air de passer un si mauvais moment que a.
Il vit son petit air de dfi et secoua la tte. Elle clata de rire. Elle faisait allusion au fait
qu'ils avaient pass la majeure partie du concert dans les bras l'un de l'autre, de plus en plus
excits et fbriles, jusqu' ce que Ian dclare qu'il tait temps qu'ils partent s'ils ne voulaient
pas tre arrts pour outrage la pudeur.
Il lui avait fait une surprise leur arrive dans le parc, aprs qu'ils eurent trouv l'une des
rares parcelles de gazon encore disponibles.
Attends-moi une seconde, avait-il dit. Ne t'assieds pas tout de suite.
Elle l'avait observ, curieuse et tonne, alors qu'il s'approchait d'un groupe de jeunes gens
particulirement bien quips qui pique-niquaient quelques pas d'eux.
Il leur avait parl et avait dsign quelques objets. De l'argent avait chang de mains. Un
moment plus tard, Ian tait revenu vers elle. Derrire lui, les jeunes de la petite bande
arboraient une expression la fois berlue et enchante. Visiblement, il leur avait offert
davantage qu'une petite somme pour son butin - deux couvertures, deux bouteilles d'eau
frache et une assiette recouverte de papier alu qui renfermait quatre pices de dlicieux
poulet frit, dcouvrit-elle un peu plus tard.
J'ai bien l'impression que tu as aim ton premier concert de rock, le taquina-t-elle.
Ce n'tait que la pure vrit. Il avait apprci de passer la soire allong ct d'elle sous
l'une des couvertures ; la foule bruyante autour d'eux lui avait sembl des lieues de leur
petit univers intime et priv.
J'ai aim tre contre toi, rpondit-il simplement, la faisant rougir de plaisir. (Il baissa les
yeux sur elle.) Tu peux peut-tre te prparer pour aller au lit ?
Le son de sa voix grave la fit frissonner, ainsi que la lueur de dsir qui brillait dans ses
prunelles. Elle se dirigea vers la salle de bains.
Et... Francesca ?
Elle se retourna vers lui, fronant les sourcils d'tonnement comme il restait silencieux
pendant plusieurs secondes.
Pour moi aussi, dit-il finalement.
La jeune femme en fut plus perplexe encore.
La meilleure journe de toute ma vie.
Elle resta plante l alors qu'il disparaissait dans le dressing. L'incrdulit et un sentiment
plus profond devant cet accs de franchise faisaient battre son cur. Elle dtestait
l'apprhension qui se mlangeait l'merveillement que les paroles de Ian avaient fait natre
en elle.
Combien de temps pouvait durer une exprience aussi extraordinaire avec un homme si
rticent se livrer... sachant qu'elle risquait son cur face l'nigme de Ian Noble ?
Les semaines suivantes dfilrent toute vitesse, baignes dans la lueur des sentiments de
plus en plus profonds qu'elle prouvait pour Ian. Elle s'habituait peu peu ses humeurs,
comprenant que lorsqu'il semblait distant, il tait en ralit occup grer une somme
considrable d'informations, laborant les stratgies de ses diverses socits de multiples
niveaux, prenant des dcisions sa manire, concise et rapide. Il continua lui donner des
leons dans la chambre coucher, et Francesca se montra une lve doue. Ian tait toujours
aussi exigeant avec elle - peut-tre encore plus -, mais, mesure qu'elle tait plus l'aise avec
l'ide de soumission sexuelle, elle lui faisait aussi davantage confiance. Leurs rapports
physiques se modifirent subtilement, s'adoucirent d'une certaine manire, devenant de
vritables changes rciproques de pouvoir, d'abandon et de plaisir.
Francesca souponnait que cet enrichissement tait d leur degr d'intimit croissant, et
se demandait si Ian pensait la mme chose qu'elle.
Il lui donna aussi d'autres leons, l'initiant l'escrime, qu'elle dcouvrit avec un vif plaisir.
Ils passrent plusieurs dimanches travailler sur les notions de base de l'investissement
financier, Ian la mettant au dfi d'laborer elle-mme un plan de placement pour son argent.
Elle lui prsenta deux options successives. La premire fois, les remarques et objections
courtoises de Ian et ses lgers froncements de sourcils la renvoyrent son ouvrage.
La deuxime fois, elle sut en voyant son petit sourire fier qu'elle avait finalement russi
apprendre les rudiments ncessaires pour grer son argent. Ainsi, Ian lui donna non
seulement des leons d'amour et de passion, mais lui apprit galement quelques principes de
base pour matriser sa vie.
Francesca ne fut pas la seule apprendre quelque chose, cependant. Avec l'aide de la jeune
femme, Ian apprit se montrer plus spontan, profiter du moment prsent... vivre comme
un homme de trente ans, au lieu d'un cinquantenaire blas et fatigu.
Le problme, c'est qu'il ne parvint jamais rellement lui dire ce qu'il prouvait pour elle,
et qu'elle tait trop timide et trop effraye pour lui rvler qu'elle tait tombe amoureuse de
lui. N'tait-ce pas prcisment l'oppos de la faon dont il avait dfini leur relation au dpart ?
Ne la prendrait-il pas pour une idiote qui confondait le dsir et l'obsession avec linique
chose de plus profond ?
Cette pense la hantait.
Elle la repoussait en permanence quand elle tait avec lui, dsireuse de ne pas gcher les
moments qu'ils avaient, craignant de miner le prsent en ressassant des angoisses concernant
le futur. Elle se sentait un peu comme une funambule, luttant en permanence pour garder
l'quilibre sur la corde raide de leur histoire passionne, redoutant de trop s'attacher lui...
ou qu'il la fuie du jour au lendemain.
Un soir froid de la fin d'automne, c'est ce qui arriva.
Francesca travaillait dans l'atelier de l'appartement, essayant de finaliser les derniers
dtails du tableau. Elle releva le pinceau de la toile, retenant son souffle, et contempla la
minuscule silhouette sombre qu'elle venait de peindre - un homme vtu d'un impermable
gris, marchant le long du fleuve, tte baisse contre le vent froid du lac Michigan.
Ian remarquerait-il qu'elle l'avait de nouveau reprsent dans l'un de ses tableaux ? a
avait du sens pour elle, d'une certaine faon, se dit-elle en essuyant son pinceau. Il tait
dsormais inextricablement li presque chaque lment de sa vie.
Alors qu'elle observait son uvre, son cur se mit battre plus vite.
Termin.
Traditionnellement, chaque fois que ce mot s'imprimait dans son cerveau avec cette
impression dfinitive, elle ne posait plus jamais le pinceau sur la toile d'un tableau. Tout
excite, elle se rua hors de l'atelier et partit la recherche de Ian. C'tait un dimanche, et il
avait choisi de rester travailler dans la bibliothque de la rsidence.
Elle tait sur le point de bifurquer l'angle du corridor central quand elle entendit une
porte s'ouvrir et les bribes d'une conversation voix basse - un homme et une femme.
... raison de plus pour agir rapidement, Julia, disait l'homme d'affaires.
J'insiste sur le fait qu'il n'y a aucune garantie, Ian. L'amlioration que nous constatons
en ce moment n'est peut-tre que transitoire, mme si nous sommes raisonnablement
optimistes l'Institut..., fit-elle avec un accent britannique marqu.
mesure qu'elle et Ian se dirigeaient vers la porte d'entre, Francesca ne parvint plus
distinguer leurs voix. Elle aperut toutefois le visage de la femme. C'tait l'lgante inconnue
avec laquelle il avait petit-djeun Paris, celle qu'il avait dsigne comme une proche de sa
famille. Le cur de Francesca se serra une nouvelle fois quand elle perut la lourde tension
qui rgnait entre eux, similaire celle qu'elle avait dj constate dans le hall de l'htel
parisien. Comme la fois prcdente, elle battit en retraite et retourna furtivement l'atelier.
Elle ne savait pas au juste comment elle le savait, mais elle tait certaine que Ian n'aurait
pas voulu qu'elle le voie... qu'elle lui pose des questions... qu'elle essaie de le rconforter.
Mme si c'tait ce qu'elle dsirait le plus au monde en cet instant prcis.
Elle passa plus de temps que ncessaire l'atelier, remettant minutieusement de l'ordre
dans son espace de travail, pour laisser Ian se remettre tout seul et en douceur. Enfin, elle
dcida de partir sa recherche, mais ne le trouva pas.
Elle tomba sur Mme Hanson dans la cuisine, qui nettoyait les plans de travail.
Je cherchais Ian, dit la jeune femme. J'ai termin le tableau.
Oh ! C'est formidable ! (L'excitation qui se lisait sur le visage de la gouvernante s'effaa
rapidement.) Mais je crains que Ian se soit absent. Il a d quitter Chicago pour un moment.
Une affaire urgente.
Francesca eut l'impression de recevoir un coup de poing dans l'estomac.
Mais... je ne comprends pas. Il tait juste l. Je l'ai vu avec cette femme...
Le Dr Eptstein ? Vous l'avez vu arriver ? Senquit la vieille dame d'un air surpris.
Dr Julia Epstein. Bien. Elle connaissait enfin son nom.
Je les ai vus partir. C'tait quoi cette urgence ? Est-ce que Ian va bien ?
Oh oui, trs bien. Ne vous en faites pas pour a.
O est-il parti ? demanda Francesca d'une voix tremblante.
Profondment blesse, elle n'arrivait pas croire que Ian tait parti une nouvelle fois sans
la prvenir, sans mme prendre la peine de passer l'atelier et de lui dire au revoir.
Mme Hanson vita son regard et recommena frotter les carreaux de la cuisine.
Je n'en suis pas trs sre...
Vous l'ignorez vraiment, o vous me dites a parce que Ian vous l'a demand ?
La gouvernante lui jeta un regard interdit, que Francesca soutint sans ciller.
Je l'ignore rellement, Francesca. Je suis dsole. Il existe une petite partie de la vie de
Ian qu'il garde farouchement pour lui, mme vis--vis de moi, alors que je connais la moindre
de ses petites habitudes.
Francesca passa affectueusement la main sur le bras de la vieille femme.
Je comprends.
Elle tait sincre. Si la vieille dame elle-mme ignorait o Ian tait parti, a ne pouvait
signifier qu'une chose.
Il s'tait envol pour Londres - l'endroit qui reprsentait la partie secrte de sa vie, o
Jacob ne l'avait jamais accompagn, pas plus que Mme Hanson... et encore moins Francesca.
Le Dr Epstein, en revanche... elle savait trs certainement ce que Ian allait faire l-bas.
Francesca ne pouvait pas s'empcher de se remmorer encore et encore la voix crispe de
son amant, son expression perdue au milieu du hall de l'htel.
La femme tait mdecin ? Est-ce que a voulait dire que Ian avait des problmes de sant ?
Non, a n'tait pas a. Bien sr, elle ne pouvait pas en juger en se basant sur son apparence,
mais il lui avait fourni les rsultats complets de son dernier check-up pour lui prouver qu'il
n'avait pas de maladie sexuellement transmissible.
Vous connaissez bien le Dr Epstein ? Tenta Francesca.
Non. Je ne l'ai rencontr qu'une ou deux fois, trs brivement, quand Julia Epstein est
venue ici la rsidence. Je pense qu'elle exerce quelque part Londres, mais je n'ai jamais su
quelle tait sa spcialit, maintenant que j'y pense... Francesca ? Est-ce que tout va bien ?
Interrogea la gouvernante d'un air inquiet - et Francesca se demanda quelle expression elle
avait bien pu lire sur son visage.
Oui. a va. (Elle serra le poignet de la vieille dame pour la rassurer avant de s'carter et
de se diriger vers la porte de la cuisine. Combien pouvait bien coter un billet d'avion
Chicago-Londres ?) Mais je crois que je vais devoir m'absenter pour quelques jours, moi
aussi.
Davie lui proposa de l'accompagner Londres, mais Francesca refusa poliment. Quand elle
lui expliqua les raisons de son voyage, elle se montra dlibrment vague et imprcise, disant
qu'elle avait appris par Mme Hanson que Ian devait grer une crise familiale, et qu'elle avait
dcid de le suivre pour lui offrir son soutien.
La vrit, c'tait qu'elle ne voulait pas que Davie se rende compte qu'elle entreprenait ce
projet fou sans avoir la moindre ide de l'endroit o elle se rendrait aprs avoir atterri
l'aroport d'Heathrow. La seule chose qu'elle savait, c'tait que quelles que fussent les raisons
de la prsence de Ian Londres, c'tait quelque chose qui l'angoissait, et qu'il avait choisi de
prserver ses proches de cette douleur.
Si, par miracle, elle russissait le localiser, il serait furieux contre elle. Et pourtant, elle ne
pouvait pas supporter l'ide qu'il souffrait tout seul, loin d'elle. Elle tait de plus en plus
convaincue que ces visites urgentes en Angleterre taient lies aux dmons qui le
hantaient.
Par ailleurs, si ce qu'il faisait l-bas tait destin dtruire petit feu leur relation dans le
futur, n'tait-il pas prfrable qu'elle dcouvre de quoi il retourna il plutt que de retarder
l'invitable ?
Ian avait essay de l'appeler durant le vol de O'Hart" Heathtrow, constata-t-elle aprs
l'atterrissage de son avion. C'tait ce qu'elle avait espr. Cependant, quand elle tenta de le
rappeler, elle tomba sur son rpondeur.
Dcourage, elle s'attarda l'aroport, alla faire du change et rcuprer ses bagages,
esprant qu'une sorte de miracle adviendrait pour lui rvler l'adresse de l'appartement de
Ian, ou l'endroit o il se trouvait ce moment.
Comme rien de tel ne se produisait, et qu'elle n'arrivait toujours pas le joindre, elle prit
un taxi et indiqua au chauffeur l'adresse du seul endroit qu'elle savait avoir un lien avec les
sjours de Ian Londres.
L'Institut de Recherche et de Traitement Gntiques, annona-t-elle.
Elle se souvint que le Dr Epstein avait mentionn l'Institut .
tait-il possible qu'il s'agisse de l'hpital et centre de recherche mdicale dont elle avait
consult le site sur la tablette numrique de Ian ? De toute faon, quel autre indice avait-elle
?
Quarante minutes plus tard, le taxi s'arrta devant les portes vitres au design
ultramoderne du laboratoire, qui tait construit au milieu d'un magnifique parc. Francesca
aperut plusieurs silhouettes en train de dambuler sur la pelouse, toujours par deux. Chaque
fois, l'une des deux personnes tait vtue d'un uniforme blanc. Des infirmires ou des aides-
soignants escortant des patients ?
Elle fut prise d'un terrible doute et resta assise l'arrire du taxi. Bon sang, qu'tait-elle en
train de faire ? Quelle folie l'avait pousse sauter dans un avion et se rendre dans un
hpital aux confins de Londres, o elle ne connaissait personne et n'avait aucune raison
valable prsenter pour justifier sa prsence ?
Le chauffeur lui adressa un regard interrogateur.
Est-ce que vous pourriez m'attendre ici ? Lui demanda-t-elle nerveusement tout en lui
tendant son rglement.
Je peux attendre dix minutes maximum, rpondit-il schement.
Merci, rpondit-elle.
Si ce voyage se rvlait tre une impasse, elle le saurait trs vite.
Elle carquilla les yeux en pntrant dans le hall d'accueil un instant plus tard.
Il n'tait pas exactement semblable celui de Noble Entreprises Chicago, mais il y
ressemblait fortement - les boiseries sombres et lgantes, le marbre rose-beige et le mobilier
de couleur neutre.
Puis-je vous aider ? fit une femme assise derrire un bureau circulaire quand elle
s'approcha.
Pendant quelques secondes, Francesca demeura plante l sans rien dire. Puis, une ide se
fit jour dans son esprit, et elle rpondit sans y avoir rellement rflchi :
Oui. J'aimerais voir le Dr Epstein, s'il vous plat. Son cur enfla dans sa poitrine durant
une fraction de secondes qui lui parut extraordinairement longue, pendant que la femme la
regardait avec une expression neutre.
Certainement. Qui dois-je annoncer ?
Elle soupira de soulagement, mais l'angoisse la reprit aussitt.
Francesca Arno. Je suis une amie de Ian Noble. La femme carquilla lgrement les
yeux.
Trs bien, mademoiselle Arno, dit-elle en dcrochant le tlphone.
Francesca patienta, sur des charbons ardents, pendant que la rceptionniste parlait
plusieurs personnes successives, la dernire tant le Dr Epstein lui-mme. Que pouvait
penser Julia Epstein, informe qu'une trangre qui affirmait tre une amie de Ian Noble
venait de se prsenter l'Institut et demandait la voir ? Malheureusement, Francesca ne
put deviner grand-chose partir de la moiti de conversation qu'elle entendit. La
rceptionniste reposa le combin.
Le Dr Epstein va venir vous chercher dans le hall. Puis-je vous offrir un rafrachissement
en attendant ?
Non, merci, rpondit Francesca.
Elle ne pensait pas tre capable d'avaler quoi que ce soit ; son estomac tait trop nou. Elle
dsigna les confortables fauteuils situs juste derrire elle.
Je vais juste l'attendre l.
La rceptionniste opina du chef d'un air cordial et retourna son travail. Cinq - longues et
pnibles -minutes plus tard, le Dr Epstein fit son apparition dans le hall. Francesca se releva
de son sige aussi vite que si elle tait monte sur ressorts quand elle reconnut la femme
qu'elle avait aperue chez Ian.
Elle portait une blouse de laboratoire blanc, au-dessus d'une lgante jupe couleur vert
d'eau. Une autre femme l'accompagnait, sans blouse mdicale mais vtue avec une lgance
et un got extrmes. Francesca eut l'impression que, bien que cette dernire ft plus ge -
autour de soixante-dix ans, peut-tre -, elle irradiait la sant.
Francesca Arno ? Linterpella le mdecin tout en s'approchant.
Elle tendit la main, et Francesca la saisit.
Oui ; je suis dsole de dbarquer sans prvenir comme a, mais...
Tous les amis de Ian sont les bienvenus. (Le timbre de sa voix tait chaud, mais
Francesca se demanda si c'tait de la curiosit ou de la perplexit qu'elle lisait sur son visage.)
Je crois comprendre que vous n'avez pas encore rencontr la grand-mre de Ian ? Permettez-
moi de vous prsenter la comtesse de Stratham, Anne Noble.
Sous le choc, Francesca regarda l'lgante vieille dame. L'espace d'un atroce instant, elle se
demanda si elle tait cense s'incliner ou faire quelque chose de ce genre. Il existait
certainement une tiquette qu'elle ne connaissait pas, et elle craignait d'tre catalogue
d'emble comme une Amricaine grossire.
Dieu merci, la comtesse se rendit compte de sa gne avant qu'elle se mette bafouiller
comme une idiote.
Je vous en prie, appelez-moi Anne, dit-elle chaleureusement en lui tendant la main son
tour.
Ses yeux lui rappelrent immdiatement ceux de Ian - un bleu cobalt, acr et perant.
Je suppose que je suis venue au bon endroit, marmonna Francesca en serrant la douce
main d'Anne.
Vous n'en tiez pas sre ? Senquit la vieille dame.
Non, pas entirement. Je... je cherchais Ian.
Bien sr, rpondit Anne sans paratre surprise, ce qui fit monter d'un cran l'angoisse et
la confusion de Francesca. Il a dj mentionn votre nom devant moi, mais je n'avais pas
compris que vous deviez venir Londres. Ian est parti faire un tour, et je suis venue vous
saluer sa place.
Alors Ian est bien ici ? demanda Francesca d'une voix tremblante.
Anne et le Dr Epstein changrent un regard.
Vous ne le saviez pas ? fit la comtesse.
Francesca secoua ngativement la tte avec l'impression de sombrer sous les eaux.
Mais vous tiez certainement au courant que ma fille se trouvait ici, en tout cas ?
Votre... fille ?
La tte de la jeune femme commenait lui tourner. Le hall d'accueil baign par la lumire
lui sembla soudain trop brillant, projetant un halo surraliste autour de chaque contour.
Mme Hanson ne lui avait-elle pas dit que les grands-parents de Ian n'avaient qu'une fille
unique ?
Oui, ma fille, Helen. La mre de Ian. Ian est parti l'emmener faire une promenade. Grce
au travail acharn de Julia et de l'Institut, ajouta la vieille dame en adressant un regard
chaleureux au mdecin. Helen traverse une priode de lucidit extraordinaire. James, Ian et
moi n'en revenons pas.
Les deux femmes dvisagrent Francesca. Anne tendit la main et lui toucha l'paule.
Vous tes terriblement ple, ma chre. Je pense qu'il serait mieux que nous permettions
cette jeune femme de s'asseoir plus confortablement ; n'est-ce pas, docteur ?
Absolument. Nous allons monter dans mon bureau. J'ai du jus d'orange en rserve ;
votre taux de sucre est peut-tre un peu bas ? Voulez-vous que je vous fasse apporter quelque
chose manger ?
Non... non, a va aller. La mre de Ian est toujours en vie ? Croassa Francesca, le cerveau
obnubil par cette nouvelle information.
Une ombre passa sur le visage d'Anne.
Oui. Aujourd'hui, elle l'est.
Mais Mme Hanson... m'a dit que la mre de Ian tait morte il y a des annes.
La comtesse soupira.
Oui, c'est ce que croit Eleanor. (Francesca mit quelques secondes comprendre
qu'Eleanor tait le prnom de la gouvernante.) Quand Helen est rentre en Angleterre, James
et moi avons dcid qu'il serait peut-tre... mieux ou du moins... plus facile... (Anne hsita ;
son visage exprimait une tristesse infinie alors qu'elle essayait de trouver les mots justes
pour dcrire une dcision prise une vingtaine d'annes plus tt, au milieu d'une priode de
stress et d'angoisse.) Qu'il valait mieux que ceux qui avaient connu et aim Helen gardent le
souvenir de ce qu'elle tait autrefois, et ne voient pas comment cette maudite maladie l'avait
ravage, l'avait prive de son identit... de son me. Peut-tre avons-nous eu tort.
Ou peut-tre pas. Ian n'a jamais approuv le choix que nous avons fait.
Ian... Il n'avait que dix ans quand Helen est retourne en Angleterre, n'est-ce pas ?
demanda Francesca.
peu prs, rpondit Anne. Mais nous ne lui avons pas rvl que sa mre tait vivante et
soigne dans un institut de l'East Sussex avant qu'il ait vingt ans - un ge o il serait capable
de comprendre que nous avions pris cette dcision dans le but de le protger. Ian tait
persuad, comme tout le monde, que sa mre tait morte.
Le silence bourdonnait dans les oreilles de Francesca.
Ian a d tre furieux quand il l'a dcouvert, lcha-t-elle sans rflchir ce qu'elle disait.
Oh oui, rpondit la comtesse d'un ton amer sans paratre se formaliser de l'expression
brutale de la jeune femme. Ce fut une priode difficile pour Ian, James et moi-mme. Ian
cessa de nous parler pendant quasiment un an, alors qu'il tudiait aux tats-Unis. Mais nous
avons fini par nous rconcilier, et nos rapports se sont apaiss. (Elle dsigna d'un geste ample
le hall d'accueil.) Ensuite, Ian a financ la construction de l'Institut, et nous avons travaill
ensemble pour le dvelopper. Cet endroit nous a permis de pacifier notre relation avec notre
petit-fils, aussi bien qu'avec Helen, dit-elle en adressant un regard reconnaissant au Dr
Epstein, mme si ses yeux demeuraient tristes.
La vieille dame finit par se rassrner et serra davantage sa main autour du bras de
Francesca, l'invitant marcher son ct.
Je vois bien que vous tes choque par cette nouvelle. Je pense qu'il serait mieux que ce
soit Ian qui vous en parle, compte tenu des circonstances... inhabituelles.
Ian et Helen vont arriver au grand salon aprs leur promenade, annona le Dr Epstein
Anne.
Nous les y rejoindrons, alors, fit la comtesse Francesca d'un ton dcid, en se dirigeant
vers les ascenseurs. James est dj l. Je vais pouvoir vous prsenter au grand-pre de Ian.
Trop sonne pour protester, Francesca suivit le mouvement, incapable de penser autre
chose qu'au fait que la mre de Ian tait toujours en vie, et qu'elle tait traite dans cet
hpital. Son cur se serrait l'ide de revoir son amant.
Ils prirent l'ascenseur, et Julia Epstein les quitta un tage infrieur. Elle leur dit au revoir
en sortant de la cabine, les informant qu'elle devait retourner son laboratoire.
C'est une scientifique brillante, confia Anne Francesca alors que les deux femmes
traversaient un couloir qui les mena jusqu' une pice lumineuse aux nombreuses fentres.
Maintenant qu'on a dcod le gnome humain, le Dr Epstein et ses collgues exploitent ces
connaissances pour rechercher de meilleurs traitements contre la schizophrnie. Ian a
financ tout son travail. a va vraiment tre une rvolution. L'un des traitements mis au
point par le docteur a reu rcemment l'aval de l'Agence europenne des mdicaments, et elle
nous l'a recommand pour Helen. Jusqu' prsent, les rsultats semblaient mitigs, mais
cette semaine, son tat s'est amlior de faon spectaculaire. Ian est fou de joie. Il arrivait
souvent Helen de ne reconnatre ni son fils, ni son pre, ni moi, tant sa psychose tait
svre, mais maintenant... le changement est incroyable. Elle a t autorise sortir de
l'tablissement, une chose qui n'avait jamais t possible depuis les six annes qu'elle est
interne ici.
C'est merveilleux, dit Francesca en parcourant du regard la pice que le mdecin avait
dsigne comme tant le grand salon .
De vastes fentres offraient une vue charmante sur le parc et le petit bois. Des patients, des
soignants et des visiteurs taient parpills dans la confortable pice, certains jouant des
jeux de plateau, d'autres bavardant simplement et profitant de la vue. Francesca supposa que
les patients qu'elle voyait ici faisaient partie des plus chanceux, ceux dont les symptmes
taient temporairement sous contrle. Ils semblaient tout fait autonomes et vaquaient
d'eux-mmes leurs activits, sans soignants pour les accompagner.
Un vieil homme d'aspect robuste se leva l'approche des deux femmes. Sa silhouette haute
et digne rappela Ian Francesca.
Francesca Arno, j'aimerais vous prsenter mon mari, James.
Je suis enchant de vous rencontrer, dit ce dernier en lui tendant la main. Ian nous a
parl de vous hier - ce qui nous a marqus, car, notre grand regret, il mentionne trs
rarement une femme devant nous. (Une lueur brillait dans les yeux du vieil homme.) Nous
tions en train de discuter avec le Dr Epstein quand elle a eu la nouvelle de votre arrive.
Nous n'avions pas compris que vous deviez venir en Angleterre.
C'est parce que je me suis dcide sur un coup de tte.
Ian ne sait pas que vous tes l ? demanda James d'un air perplexe tout en restant poli.
Non, rpondit Francesca.
Peut-tre le vieil homme remarqua-t-il son trouble, car il lui tapota gentiment l'paule,
tout en jetant un coup d'il par l'une des fentres.
Eh bien, il l'apprendra trs vite. Je le vois en train de s'approcher avec Helen. Oh, mon
Dieu...
Francesca sentit les doigts du vieil homme se resserrer un instant autour de son paule.
Elle suivit son regard travers la fentre et se figea elle-mme en dcouvrant la scne. Ian
marchait ct d'une femme l'allure fragile, vtue d'une robe bleue qui flottait sur son
corps trop frle. Pendant que James parlait, la femme s'tait brusquement tourne vers Ian et
l'avait frapp d'un coup de poing l'abdomen. Elle avait trbuch et failli tomber, mais Ian
l'avait rattrape bras-le-corps. Cependant, ses efforts pour tenter de calmer sa mre se
rvlrent vains, et Helen se dbattit de toutes ses forces comme si elle craignait pour sa vie
entre les mains de son fils.
Appelez le Dr Epstein, ordonna schement James l'un des aides-soignants qui avait
galement remarqu ce qui se passait.
Accompagn de trois autres infirmiers, il se rua vers la porte qui conduisait au parc pour
porter assistance Ian.
Oh non. Pas encore, se lamenta Anne d'une voix trangle en observant la scne avec
Francesca.
Helen battait dsesprment des bras et des jambes pour se librer de l'treinte de son fils.
Elle le gifla avec force la mchoire. Francesca crut que son cur allait s'arrter quand elle
vit l'expression afflige de Ian. Combien de fois son amant avait-il vu sa mre se comporter
ainsi ? Combien de fois sa mre douce et aimante avait-elle disparu pour laisser place cette
harpie violente et effrayante ? On entendait prsent un cri perant rsonner travers le parc
- le bruit de la peur d'Helen Noble, et de sa folie renaissante.
Attendez, fit Anne d'un ton autoritaire en empoignant Francesca par le coude alors
qu'elle s'apprtait se ruer vers Ian, incapable de rester sans rien faire devant la dtresse de
l'homme qu'elle aimait. Ils l'ont matrise.
Les deux femmes demeurrent cte cte, impuissantes, observant les trois infirmiers
immobiliser la psychotique en plein dlire avant de la soulever et de la porter vers la clinique.
Lorsqu'ils passrent devant Anne et Francesca dans le grand salon, se dirigeant rapidement
vers le hall, la jeune femme distingua pour la premire fois le visage d'Helen - sa bouche
dforme par une grimace, son front dgoulinant de sueur, ses yeux bleus carquills et
exorbits, qui semblaient focaliss sur une vision de cauchemar qu'elle seule pouvait voir.
Non, songea Francesca. Ce n'tait pas Helen Noble. Pas rellement.
Une infirmire traversa le couloir en courant, suivie par le Dr Epstein. Les infirmiers
dposrent prcautionneusement la femme gmissante sur le sol, et l'infirmire lui fit une
injection.
Anne se mit pleurer en silence quand ils emportrent sa fille loin d'elle.
Francesca passa un bras autour des paules de la vieille dame, sans trouver quoi dire, elle-
mme sous le choc.
Ian ! s'exclama-t-elle en le voyant marcher vers eux accompagn par son grand-pre.
Elle ne l'avait jamais vu si ple. Tous les muscles de son visage taient crisps.
Le regard qu'il lui jeta fut glacial.
Comment as-tu os venir ici ? fit-il en s'avanant vers elle, bougeant peine les lvres
tant sa mchoire tait serre.
Francesca crut dfaillir. Elle ne l'avait jamais vu dans un tel tat... si dsespr, si furieux,
si vulnrable. Elle n'arrivait pas trouver quoi rpondre. Il ne lui pardonnerait jamais pour
tre venue sans avoir t invite, pour l'avoir vu dans ce qui resterait peut-tre l'un des
moments les plus misrables de sa vie.
Ian...
Mais il l'interrompit en se dirigeant grands pas dans la direction o sa mre avait t
emmene. James adressa son pouse un regard triste avant de suivre son petit-fils.
Anne prit Francesca par la main et la mena vers une chaise. Elle s'assit son ct ; toute
l'nergie que Francesca avait remarque en elle lors de leur rencontre semblait l'avoir
abandonne.
Ne soyez pas en colre contre Ian, dit-elle d'une voix atone. Avec Helen, ils ont partag un
merveilleux moment ce matin, et maintenant... tout est gch nouveau. Il est boulevers,
c'est une vidence.
Je peux comprendre pourquoi, rpondit Francesca. Je n'aurais pas d venir. Je n'avais pas
la moindre ide de...
La comtesse lui tapota distraitement le bras.
C'est une maladie terrible. Brutale. a a t dur pour nous tous, mais c'est encore plus
rude pour Ian. Depuis son plus jeune ge, il a t oblig de prendre soin d'Helen. Aprs s'tre
install chez nous, quand il a commenc s'ouvrir un peu, il m'a dit qu'il devait la surveiller
en permanence, de peur que les voisins ne se rendent compte de la gravit de son tat - il
craignait d'tre envoy l'orphelinat si sa mre tait interne de force.
Il vivait dans la crainte quotidienne qu'elle se fasse du mal ou qu'on les spare. Il n'a
presque jamais pu aller l'cole comme les autres enfants, parce qu'il lui fallait prendre soin
d'Helen. Le village o ma fille a chou - nous n'avons jamais su comment - tait trs isol et
un peu arrir. Je suis certaine que les services de protection de l'enfance auraient t alerts
sur la faible assiduit scolaire de Ian s'il s'tait trouv dans un endroit moins recul. Mais il a
russi garder secrte la maladie de sa mre. Il a dcouvert l'endroit o elle cachait ses
rserves d'argent et a gr frugalement leurs dpenses, gagnant de l'argent en rendant de
menus services dans le village et, plus tard, quand les gens se sont rendu compte qu'il avait le
gnie de l'lectronique et de la mcanique en effectuant de petits travaux de rparation. Il
faisait toutes les courses, le mnage et la cuisine pour eux deux, gardant aussi propre que
possible leur petite maisonnette et scurisant au maximum les lieux pour viter que sa mre
se blesse lors d'un accs de violence psychotique... comme celui auquel vous venez d'assister.
(Anne se tut un instant et poussa un profond soupir.) Tout cela, alors que, lorsque nous
avons fini par les retrouver tous les deux, Ian n'avait mme pas atteint son dixime
anniversaire.
Francesca frmit d'motion. Pas tonnant que Ian soit si obsd par le contrle. Oh, Dieu,
quel pauvre petit garon... Et comme il avait d se sentir seul ! Cela avait d tre terrible pour
lui de connatre l'amour de sa mre durant ses priodes de lucidit, pour le perdre
brutalement quand la maladie reprenait le dessus... comme elle venait de le faire.
Brusquement, Francesca se souvint d'une expression qui transparaissait parfois sur le
visage de son amant et lui crevait le cur, celle d'un homme qui avait non seulement connu
l'abandon et la solitude, mais qui savait aussi avec certitude qu'il serait rejet nouveau.
Je suis tellement dsole, Anne, fit-elle en ayant conscience de l'inadquation - de la
drisoire petitesse - de ses paroles.
Le Dr Epstein nous avait mis en garde contre tout optimisme excessif. Mais c'est si dur
de ne pas esprer, et Helen faisait de tels progrs... Nous l'avons vue, trop brivement, nous
avons pu lui parler - elle, notre Helen. Notre douce et trs chre Helen. (Elle laissa chapper
un profond soupir.) Eh bien, il y a d'autres traitements en cours d'exprimentation. Peut-tre
bien qu'un jour...
Francesca ne pouvait pas s'empcher de penser, cependant, en entendant le timbre morne
de sa voix et en voyant son expression fige, que la vieille dame n'tait pas loin de renoncer
tout espoir de voir sa fille aller mieux.
Elle se demanda combien de fois les Noble avaient cru voir l'tat de leur fille s'amliorer
pour voir leurs espoirs rduits en miettes encore et encore quand la folie reprenait le dessus.
La jeune femme se releva en tremblant plusieurs minutes plus tard, quand Ian refit
irruption dans le grand salon.
Elle dort, dit-il sa grand-mre en vitant consciencieusement Francesca du regard.
Julia a suspendu le traitement. Maman va reprendre ses anciens mdicaments. Au moins, ils
parvenaient la stabiliser.
Si par stabiliser tu veux dire abrutir , je suppose que tu as raison, rpondit Anne.
Ian fit une grimace en entendant ces mots.
C'est le seul choix que nous ayons. Au moins, elle n'essayait pas de s'automutiler. (Il
regarda Francesca. Elle se recroquevilla intrieurement sous son regard glacial.) Nous
partons, lui dit-il. J'ai appel mon pilote, et il tient l'avion prt dcoller pour Chicago.
D'accord, rpondit Francesca.
Une fois qu'ils seraient dans l'avion, elle pourrait au moins essayer de lui expliquer
pourquoi elle tait venue Londres.
Elle s'excuserait de s'tre mle de ce qui ne la regardait pas. Peut-tre qu'elle arriverait
lui faire comprendre...
Mais chaque fois qu'elle repensait l'tat de faiblesse et de vulnrabilit dans lequel elle
l'avait vu... elle frmissait et se disait qu'il ne pourrait jamais lui pardonner.
Il lui adressa peine la parole durant le trajet vers l'aroport, conduisant en regardant droit
devant lui, les articulations blanches force de serrer le volant. Quand elle essaya de briser le
silence en bafouillant des excuses, il la coupa schement.
Comment savais-tu o j'tais ?
Je t'avais vu deux fois avec le Dr Epstein... une fois Paris, et la deuxime fois la
rsidence. Je l'ai entendu mentionner un Institut , et Mme Hanson m'a dit qu'elle tait
mdecin.
Il lui jeta un regard furieux.
Ce n'est pas une explication, Francesca. Elle se recroquevilla sur le sige passager.
J'ai... j'ai vu que tu allais rgulirement sur le site de l'Institut de Recherche et de
Traitement Gntique quand tu m'as prt ta tablette pour que je rvise le code de la route.
En voyant son regard offens, elle se fit encore plus petite.
Tu as consult mon historique de navigation ?
Oui, admit-elle d'une voix misrable. Je suis dsole. J'tais curieuse... Je me demandais
pourquoi tu avais disparu si brusquement. Jacob m'a dit ensuite que tu ne l'emmenais jamais
Londres, et j'ai commenc rassembler les pices du puzzle.
Eh bien, je ne peux en tout cas pas te reprocher d'tre une idiote, lcha-t-il en crispant
encore davantage les doigts sur le volant. Tu dois tre fire de tes talents de dtective.
Non. Je me sens minable. Je suis vraiment dsole, Ian.
Il ne rpondit rien, mais elle vit qu'il serrait les dents, et que sa peau semblait
particulirement ple, par contraste avec ses cheveux sombres. Elle renona toute tentative
de communiquer avec lui jusqu' ce qu'ils aient embarqu bord de l'avion.
La voix du pilote grsilla dans le haut-parleur, annonant qu'ils avaient l'autorisation de
dcoller.
Assieds-toi et boucle ta ceinture, fit-il d'un ton brusque en dsignant d'un hochement du
menton le fauteuil o elle s'installait d'habitude. Mais une fois qu'on aura dcoll, je te veux
dans la chambre coucher.
Elle demeura interdite. Quelque chose dans le timbre de sa voix lui disait exactement
quelles taient ses intentions. Elle attacha sa ceinture en tremblant.
Ian, a ne va pas t'aider te sentir mieux d'essayer de me contrler parce que tu te sens
tellement...
Elle laissa sa phrase en suspens lorsqu'elle vit ses yeux flamboyer d'une colre peine
contenue.
Tu te trompes. Je vais prendre un pied fantastique te faire chauffer le cul au rouge et
te baiser sans mnagement. a fait assez longtemps que tu prends la pilule. Je vais te prendre
nu et jouir si profondment en toi que tu sentiras mon sperme s'couler pendant des jours.
Elle tressaillit, non cause de ses mots crus - en d'autres circonstances, elle aurait pu
trouver excitant ce langage grossier -, mais parce qu'il tait en train de lui dire qu'il avait
l'intention de lui faire rellement mal pour avoir eu l'audace de le surprendre dans un
moment de faiblesse.
Tu as voulu voir quoi ressemblait ma vie prive, soit. Sache seulement que tu
n'aimeras pas forcment ce que tu peux y dcouvrir.
Rien de ce que j'ai vu aujourd'hui ne dtriore l'image que j'ai de toi, rpliqua-t-elle d'un
ton enflamm.
S'il faut absolument que a fasse une diffrence, c'est que je te comprends cent fois mieux
maintenant... et que je t'aime mille fois plus.
L'expression de Ian se figea, et son visage devint plus ple encore. Francesca sentit les
battements de son pouls lui marteler les tempes au milieu du silence qui s'ensuivit. Pourquoi
ne parlait-il pas ? Elle remarqua peine que l'avion avait quitt le sol. Elle n'arrivait pas
croire qu'elle venait de laisser chapper la vrit qu'elle avait tant essay de lui cacher.
Le silence sembla durer une ternit, rendu pire encore par la chute de pression qui suivit
le dcollage, et provoqua des bourdonnements dans les oreilles de Francesca.
Tu n'es vraiment qu'une gamine, dit-il finalement en desserrant peine les dents. Je t'ai
dit ds le dbut que cette relation tait uniquement sexuelle.
Oui, mais j'ai pens... ces dernires semaines, j'ai eu l'impression que les choses avaient
volu, fit-elle d'une toute petite voix.
Elle eut l'impression que son cur se fissurait quand elle le vit secouer lentement la tte,
sans la quitter un instant du regard. Il dtacha sa ceinture de scurit.
Je veux te possder, Francesca. Te dominer. Voir ce caractre obstin en toi abdiquer
devant le plaisir... devant moi. C'est a que je t'ai propos. Tu as absolument voulu voir quoi
ressemblait mon monde, et tu peux arrter maintenant de te complaire dans tes rves de
jeune fille. C'est tout ce que je peux t'offrir, ajouta-t-il en dsignant du doigt la porte de la
chambre. Maintenant, rentre dans cette pice, enlve tous tes vtements, et attends-moi.
Pendant quelques secondes, elle resta immobile et le regarda, encore sous le choc de la
blessure que ses mots lui avaient inflige. Elle tait sur le point de refuser quand elle songea
la douleur aigu et intense qu'elle avait aperue sur son visage quand sa mre l'avait frapp.
Les blessures de Ian taient tellement plus profondes que les siennes. Peut-tre que a
l'aiderait, d'avoir l'impression de retrouver le contrle aprs avoir travers une exprience si
terrible ? Est-ce que le sexe ne servait pas a ? exorciser les douleurs en utilisant les
puissantes sensations physiques l'uvre pour reprendre pied au milieu du chaos ?
Oui. Elle pouvait aider Ian de cette faon. Elle comprenait que sa colre tait lie au
sentiment de vulnrabilit, de faiblesse, qu'il prouvait prsent devant elle.
Elle dtacha lentement sa ceinture.
Trs bien. Mais je fais a seulement parce que je suis tombe amoureuse de toi. Et je ne
suis pas une petite fille nave. Je pense que tu m'aimes en retour, et que tu es juste trop fier,
trop ttu - et trop bless par ce qui s'est pass avec ta mre ce matin - pour le reconnatre.
Une vague de souffrance passa fugitivement sur les traits rudes du visage de son amant
avant de disparatre aussitt. Il demeura silencieux quand elle se leva et se dirigea vers la
chambre.
Ian pntra dans la chambre dix minutes plus tard. Un puissant dsir l'envahit
instantanment quand il distingua la jeune femme assise nue l'extrmit du lit. Elle avait
pingle en chignon ses splendides cheveux. Ses ttons roses taient dj dresss vous en
mettre l'eau la bouche - pas d'excitation, souponnait-il, mais cause du froid. Il savait qu'il
n'y avait pas de peignoir dans la salle de bains. Il n'aurait pas d la faire attendre nue par cette
temprature. Malgr tout, quelque chose dans son corps ple l'excita et le troubla
douloureusement.
Lve-toi, fit-il schement, refusant de se laisser adoucir par l'exquise vision qu'elle
offrait.
Rencontrerait-il un jour une femme aussi belle ?
Serait-il un jour touch par une autre femme, comme il l'avait t par Francesca ? Un
millier d'motions s'tait mis bouillir en lui lorsqu'elle avait prononc ces mots
incendiaires.
... et que je t'aime mille fois plus.
C'tait plus qu'il n'en pouvait supporter. Il tait dj dvast par les nouvelles que James
lui avait confies juste aprs que les infirmiers eurent emmen sa mre rugissante, alors que
Francesca se trouvait dans le grand salon... dvast que la jeune femme ait assist tout cela.
Il prouvait un besoin irrpressible de la punir, non seulement parce qu'elle avait vu sa
mre dans un tat de terrible vulnrabilit, mais aussi parce qu'elle l'avait vu lui. Il avait
pass la majeure partie de sa vie prserver Helen des regards emplis de piti et d'horreur.
trangement, savoir que Francesca avait t tmoin de la folie de sa mre dans toute sa
gravit tait beaucoup plus douloureux que quand il s'agissait d'trangers.
Il s'approcha du secrtaire et dverrouilla un tiroir. Quand il vit la jeune femme carquiller
les yeux devant l'objet qu'il tenait, un clair de dsir le traversa.
Oui. Je garde quelques accessoires en rserve dans l'avion, et pas de ceux que tu connais
dj. On va commencer par ta punition, et on passera ensuite d'autres moyens de te faire
crier.
Les joues de la jeune femme virrent au pourpre, mais il ignorait si c'tait caus par
l'excitation ou la colre. La seule chose qu'il savait, c'tait qu'il voulait vraiment l'entendre
crier, songea-t-il en prenant la sangle en lastique noir. Il voulait voir Francesca se tordre de
remords et de plaisir ; il voulait qu'elle le supplie avec ses lvres roses qui hantaient ses
rves... il voulait qu'elle lui dise encore qu'elle l'aimait.
Cette pense disparut aussi vite qu'elle tait venue. Il dplaa le banc rembourr qui se
trouvait au pied du lit vers le centre de la pice.
Mets tes pieds l-dedans, dit-il Francesca en s'approchant avec le harnais noir. (Si prs
d'elle, il pouvait sentir le parfum fruit de son shampooing.) Appuie-toi sur mes paules pour
te tenir debout.
Qu'est-ce que c'est ? Linterrogea-t-elle en s'agrippant ses paules.
Il essaya d'ignorer la douceur de son corps contre sa chemise.
C'est une sangle qui va enserrer tes jambes pendant que je te punirai, et restreindre tes
mouvements. a sera peut-tre un peu inconfortable, mais a me donnera beaucoup de
plaisir.
Je ne vois pas comment, rpondit-elle en grimaant alors qu'il resserrait la large bande
noire et la faisait remonter le long de ses jambes jusqu' la courbe infrieure de ses fesses.
L'accessoire collait troitement les cuisses de la jeune femme l'une contre l'autre et faisait
rebondir son postrieur, exposant la chair pulpeuse aux paumes de Ian et la tapette. Il
tendit la main et ptrit l'un des globes de chair entre ses doigts. Son sexe se dressa.
Tu comprends maintenant ? dit-il en cartant la main avec rticence.
L'lastique noir tait conu sur le mme principe qu'un bustier, en faisant ressortir
pleinement la croupe de la jeune femme, tout en lui attachant les jambes.
Ian ! s'exclama-t-elle quand il la souleva dans les airs pour la porter vers le banc.
Il faut que je te porte, puisque tes jambes sont attaches, fit-il en dposant la jeune
femme genoux sur le banc. Reste comme a pour le moment. Ne bouge pas.
Quand il s'approcha nouveau de Francesca, il tenait une paire de menottes.
Contrairement celles en cuir doux qu'il utilisait habituellement sur elle pour ne pas abmer
sa peau sensible, celles-ci taient en mtal.
Joins les mains dans le dos, dit-il. (Il frona les sourcils aprs avoir fix les menottes
ses poignets.) Je ne veux pas que tu essaies de te librer de ces liens, Francesca. Tu pourrais
te blesser.
D'... d'accord, l'entendit-il dire.
Il croisa son regard, semblable un puits sombre et velout. Une puissante vague
d'motions le submergea - du dsir, de la concupiscence brute, de la colre - lorsqu'il
reconnut la lueur qui brillait dans ses iris.
Pourquoi est-ce que tu me regardes avec tant de confiance ? fit-il d'une voix dure.
Parce que j'ai confiance en toi.
C'est stupide. (Il la guida en la prenant par le coude.) Reste genoux. Penche-toi en
avant. Colle tes seins contre tes cuisses. Appuie le front sur le coussin et garde cette position
jusqu' la fin de ta punition. Et ne me regarde pas, o je te chtierai plus durement.
La jeune femme tait vraiment une nymphe ; ses yeux avaient une sorte de pouvoir
magique sur lui. S'il les regardait assez longtemps, il finissait toujours par avoir l'impression
qu'ils brillaient comme un phare inbranlable et ternel.
Il alla chercher la tapette. Il savait pourquoi Francesca avait ouvert grands les yeux quand
elle l'avait vue. Elle tait en bois vernis, longue et troite - seulement dix centimtres de
large. C'tait un instrument de punition corporelle bien plus srieux que la tapette en cuir
noir qu'il utilisait ordinairement sur elle.
Il tait dtermin lui faire payer sa dcision impulsive de le suivre Londres. A la chtier
pour avoir dclench une telle tempte d'motions en lui.
Il rprima un grognement en contemplant la vision qu'elle offrait. La sangle lastique
faisait ressortir son postrieur sculptural de manire extrmement excitante. Il caressa une
fesse, puis l'autre, soulevant la chair au maximum au-dessus de la sangle pour pouvoir
profiter de chaque parcelle de peau blanche et dlicate.
Elle sursauta quand il frappa avec la tapette sur la courbe infrieure de ses fesses, et il
sentit qu'elle avait retenu un cri. Cette rserve lui plaisait.
Comme tout en elle lui plaisait...
Tout sauf son caractre impulsif, tout sauf son enttement et sa navet se croire
amoureuse de moi.
Tout chez elle. En particulier sa spontanit et sa sagesse innocente qui doivent tre
chries, pas blesses.
Il lui donna trois coups rapides, en cartant ces penses troublantes de son esprit. Son sexe
se durcit encore contre le tissu du boxer. Oui, c'tait de a dont il avait besoin. La luxure lui
permettrait d'oublier les sentiments drangeants qu'il prouvait.
C'tait a que servait le sexe.
Elle ne parvint pas se retenir de crier cette fois, et il interrompit la punition pour apaiser
la peau brlante et satine d'une caresse de ses doigts.
Je n'arrive pas croire que tu m'aies suivi Londres, dit-il d'une voix qui vibrait de
colre.
Je serais alle plus loin pour te retrouver.
Il se figea, et son visage se crispa quand il perut le tremblement dans la voix de Francesca.
Est-ce que tu pleures ? demanda-t-il d'un ton cassant en contemplant la nuque de la
jeune femme.
Non.
Est-ce que je te fais trop mal ?
Non.
Il serra le manche de la tapette et frappa deux reprises.
C'est la premire fois que je te punis sans utiliser la crme stimulante. La douleur
surpasse peut-tre le plaisir, fit-il en abattant une nouvelle fois la tapette.
Il grogna d'extase devant la vision rotique de la chair blanche frmissant sous les coups, et
empoigna en grimaant son membre dress travers le tissu de son pantalon.
Non, ce n'est pas a, souffla-t-elle d'une voix touffe.
Elle sursauta lgrement quand il frappa nouveau.
Brlant d'en avoir le cur net, Ian introduisit les doigts dans son entrecuisse, juste au-
dessus de l'lastique noir. Quand il le retira, un fluide luisant recouvrait son majeur. Sans
faire de commentaire, il leva la main et lcha plusieurs coups successifs.
Il n'arriverait jamais la contrler rellement, parce qu'elle le tourmentait chaque fois
qu'il essayait.
Quand il eut termin, le postrieur de la jeune femme tait rouge et brlant sous ses
doigts. Lorsqu'il la prit dans ses bras pour la soulever du banc et la remettre debout, elle
haletait doucement, et ses joues taient teintes de rose. Il s'agenouilla devant elle pour faire
redescendre l'lastique noir le long de ses cuisses et de ses chevilles.
Il dtacha les menottes. Elle laissa chapper un petit cri de surprise quand il fit passer la
sangle lastique autour de son cou et commena faire descendre la bande sous ses seins.
Ce fut un peu laborieux, mais quand il eut termin, ses magnifiques seins plantureux
taient exposs et offerts de faon aussi rotique que ses fesses l'avaient t. Il lcha un
grognement de satisfaction et lui attacha de nouveau les mains dans le dos.
Qu'est-ce que tu vas faire ? Lui demanda-t-elle d'une voix mal assure quand il s'empara
d'un fouet en cuir noir.
Il tait constitu d'une lanire souple, conue davantage pour aviver et aiguillonner la chair
que pour flageller et causer de la douleur. Il comprit la nuance de peur qui perait dans la
voix de la jeune femme. Il n'avait jamais utilis ce fouet-l sur elle.
Ta punition n'est pas finie. Regarde ce fouet. (Il le souleva devant elle de manire ce
qu'elle puisse examiner la mince lanire d'environ trente centimtres de long attache un
manche de cuir.) Ne prends pas cette expression si craintive... c'est moins effrayant que a
n'en a l'air. Dans ma main, c'est un instrument tout fait sr. a va juste te piquer
agrablement et veiller tes nerfs.
Les yeux de Francesca s'agrandirent quand il leva la main, mais elle ne protesta pas
lorsqu'il abattit la lanire de cuir sur son sein ple.
Voil. Est-ce que c'est trop pour toi ? fit-il d'un ton bourru, en caressant et ptrissant
doucement le ferme globe de chair.
Comme elle ne rpondait rien, il la dvisagea. Elle semblait un peu perdue, mais ses yeux
brillaient d'excitation. Elle secoua la tte sans dire un mot.
Il rprima un sourire et abattit le fouet sur l'autre sein, puis de nouveau sur le premier,
contemplant avec fascination la chair blanche se colorer d'un lger rose et les ttons se durcir,
lui donnant l'eau la bouche.
Est-ce que a brle ? demanda-t-il un moment plus tard en lui massant les seins, aprs
avoir repos le fouet.
Oui, souffla-t-elle.
Tant mieux. Tu l'as mrit, murmura-t-il. (Il pina doucement ses deux ttons, et elle
frmit de plaisir.) Si je n'avais pas autant de scrupules avec toi, je t'aurais fait endurer bien
pire pour ce que tu as os me faire.
Pour me punir d'tre tombe amoureuse de toi ? Il interrompit son lent massage et
plongea les yeux dans les siens. La jeune femme haletait de plus en plus, et ses seins se
soulevaient entre les paumes de Ian au rythme de sa respiration.
Non. Pour avoir fouin dans mes affaires et t'tre mle de ma vie.
Pour avoir vu ma mre au moment o elle tait le plus vulnrable... pour avoir vu ma
douleur.
Je t'ai dit que j'tais dsole, Ian.
Je ne pense pas que tu le sois, rpondit-il d'une voix de nouveau furieuse.
Il se pencha sur elle et l'embrassa sauvagement. Il ne dsirait qu'une chose, plonger son
sexe dans sa fente troite et humide, et se perdre dans l'abme misricordieux du plaisir.
Quand il relcha enfin sa bouche, le souffle de Francesca tait chaud et doux contre ses
lvres.
Tu n'arriveras pas me faire changer d'avis, murmura-t-elle.
Il ferma les yeux, comme pour empcher la tempte d'motions qui rugissait en lui de se
manifester. Il se sentait de plus en plus dsespr.
Nous verrons, fit-il en passant derrire elle pour lui ter les menottes.
Son regard s'attarda sur les fesses toujours rougies de la jeune femme. Il l'avait frappe
plus durement qu'il ne l'avait jamais fait, songea-t-il avec une pointe de regret. Pourtant elle
ne s'tait pas plainte, alors qu'il lui en avait donn la possibilit. Et sa fente trempe de dsir,
quand il avait pass la main entre ses cuisses, rvlait clairement qu'elle avait ressenti plus de
plaisir que de souffrance.
Tourne-toi et agenouille-toi au pied du lit. Appuie-toi sur le rebord pour te tenir.
Elle suivit ses instructions sans aucune hsitation, arquant le dos et croisant les bras sur le
lit. Elle ne regarda pas de ct quand il s'approcha derrire elle, mais Ian sentit la curiosit et
l'apprhension monter en elle.
Douce et confiante Francesca.
N'aie pas peur, murmura-t-il. Cette fois, c'est au plaisir que je vais te soumettre, pas la
douleur.
Il mit en marche le vibromasseur en forme de lapin et le rgla une faible intensit. Son
sexe se dressa avec force quand il vit quel point son petit orifice tait luisant, et sa vulve
trempe.
Il introduisit le sex-toy profondment dans le vagin de la jeune femme. Elle hoqueta et
sursauta brusquement quand les oreilles du lapin se mirent tourner et stimuler
nergiquement son clitoris.
Oh!
C'est agrable ? demanda-t-il en tirant l'objet de sa fente avant de le replonger aussitt.
Les muscles de son vagin se resserrrent instantanment autour de la silicone comme une
petite bouche avide. Seigneur, il voulait la prendre tout de suite... mais il attendrait. Il
obtiendrait d'abord la soumission de Francesca... elle le supplierait.
Pourquoi ressentait-il ce besoin aussi imprieux ? Cela demeurait un mystre pour lui,
mais il ne pouvait pas touffer ce dsir.
Il joua avec les rglages du vibromasseur, caressant le sexe de la jeune femme, laissant les
oreilles du lapin stimuler son clitoris, savourant les gmissements, les hoquets et les petits
cris de la jeune femme. Quand la respiration de Francesca devint chaotique, il dsactiva le
masseur clitoridien et se concentra sur l'entre du sexe de la jeune femme.
Oooh, s'il te plat..., gmit-elle au bout d'un moment.
Il savait qu'elle avait failli atteindre l'orgasme, et qu'elle rclamait le retour des oreilles du
lapin sur son clitoris.
Ton clitoris est trop sensible. Je ne veux pas que tu jouisses tout de suite.
Je t'en prie, Ian..., insista-t-elle d'une voix gare en s'agrippant au rebord du lit et en
commenant bouger les hanches pour accompagner les va-et-vient du sex-toy.
Il abattit une claque cuisante sur ses fesses. Elle cessa ses mouvements frntiques du
bassin.
Dis-moi, qui commande ici ? fit-il calmement.
Toi, chuchota-t-elle aprs un instant d'hsitation.
Alors tiens-toi tranquille, ordonna-t-il avant de recommencer faire aller et venir le
vibromasseur dans son vagin, laissant le tube fusel et l'anneau rotatif faire leur travail.
Au bout d'un moment, elle lcha un gmissement rauque et dsespr. Il se laissa flchir et
augmenta la vibration du sex-toy.
Oooh, gmit-elle. Oh, Ian... laisse-moi bouger.
Reste tranquille, ordonna-t-il en plongeant le vibromasseur profondment en elle,
jusqu' sentir la chaleur et la moiteur de son sexe sur ses doigts.
Il plissa les paupires en regardant le manche de silicone entrer et sortir de son troite
fente. Les gmissements d'excitation de la jeune femme emplissaient ses oreilles. Il la
tourmenta, la maintenant juste sur le fil de la jouissance, savourant son pouvoir sur elle.
Je t'en supplie... laisse-moi jouir, implora-t-elle.
Il cessa de faire bouger le vibromasseur en entendant la voix brise de la jeune femme. Il
avait la fois envie de lui refuser l'accs au plaisir, et de lui donner tout ce qu'elle voulait... et
mme davantage.
Ce conflit intrieur le dchirait. Il retira le vibromasseur et le jeta sur le lit.
Relve-toi, dit-il d'un ton plus brusque qu'il ne l'aurait voulu.
Quand elle se retourna vers lui, il vit que ses joues avaient encore rosi. Son front et sa lvre
suprieure luisaient de sueur. Elle tait belle en couper le souffle. Il plongea le majeur dans
la crevasse humide de son sexe. Elle suffoqua, mais il ne bougea pas la main.
Si tu veux jouir, montre-le-moi, dit-il.
Elle leva vers lui des yeux brillants d'excitation, mais il perut sa confusion.
Tu peux jouir contre ma main, mais tu dois me prouver que tu le veux. Je ne bougerai
pas.
Elle se mordit la lvre infrieure, et il cda presque. Presque.
Allez, l'encouragea-t-il.
Elle ferma les yeux, comme pour se protger de son regard, et commena cambrer son
bassin contre la main de Ian. Un gmissement franchit ses lvres. Il la contempla, captiv, en
maintenant son bras immobile, mais sans la caresser, laissant la jeune femme faire tout le
travail.
C'est a. Montre-moi que tu n'as pas honte. Montre-moi que tu peux te soumettre au
dsir, murmura-t-il.
Elle arqua le bassin plus franchement, se frottant contre sa main... cherchant
dsesprment le plaisir. Elle laissa chapper un cri aigu de frustration, et Ian se laissa
presque flchir.
Non.
Ouvre les yeux, Francesca. Regarde-moi, exigea-t-il d'une voix rauque.
Elle entrouvrit lentement les paupires tout en continuant ses mouvements. Il vit son
dsespoir, sa dtresse, sa peur que son dsir surpasse sa fiert.
Tu n'as pas avoir peur, chuchota-t-il. Tu es plus belle pour moi que tu ne l'as jamais
t. Maintenant, jouis contre ma main.
Il flchit le biceps pour accentuer la pression de sa main contre le sexe de Francesca, lui
accordant ce qu'elle dsirait dsesprment, et mritait. Il ferma un instant les yeux en
sentant son liquide tide recouvrir ses doigts tandis qu'elle jouissait.
Quelques instants plus tard, l'esprit embrum par le dsir, il tourna la jeune femme vers
lui et lui demanda d'une voix rauque de se pencher nouveau sur le rebord du lit. Il
carquilla brusquement les yeux en plongeant enfin son membre durci dans la chaleur douce
du fourreau de la jeune femme. C'tait comme s'il pntrait une femme pour la premire fois
- non, c'tait mme infiniment meilleur, comme un monde qui s'ouvrait devant lui, une
exprience entirement nouvelle d'une intensit effrayante.
Il se perdit en elle, et tout devint noir autour de lui mesure que le plaisir le submergeait,
touffant son champ de conscience. Il lui donna de sauvages coups de reins, le souffle
brlant, les muscles crisps, le sexe presque douloureux... l'me dvaste.
Francesca, gronda-t-il d'une voix pleine de rage, bien que sa colre l'et quitt.
Il empoigna des deux mains son torse dlicat et l'obligea se redresser de manire ce
qu'elle se tienne debout devant lui, lgrement penche en avant.
Il continua la baiser, sentant son cur battre toute allure sous ses paumes, les
tremblements de plaisir qui secouaient sa chair, les contractions musculaires de son vagin
autour de son rection conqurante.
Sans mme y penser, il repoussa le corps de la jeune femme en avant et l'agrippa par les
hanches, acclrant le rythme et la force de ses coups de boutoir et grimaant de plaisir. Il se
cabra derrire elle, les muscles tellement crisps qu'il la souleva lgrement au-dessus du sol.
L'orgasme le foudroya littralement. Il poussa un grondement d'agonie bienheureuse en se
rpandant au plus profond de Francesca. Un dsir violent et primitif s'empara de lui, mme
au milieu de la tourmente - le dsir d'imprimer sa marque en elle, de la possder totalement...
de la faire sienne.
Il retira brusquement son pnis luisant et gonfl de ce dlicieux paradis et jacula par -
coups sur le dos et les fesses de la jeune femme, jusqu' ce que sa peau ft recouverte du
liquide blanc.
Durant une minute entire aprs la fin de cet ouragan de jouissance, il resta debout,
immobile, la main crispe sur son sexe, essayant de reprendre son souffle, les yeux fixs sur
le corps nu de Francesca dgoulinant de sa semence. Il songea la duret de la punition qu'il
lui avait inflige, la faon dont il l'avait force ravaler sa fiert pour jouir contre sa main,
la sauvagerie dont il avait fait preuve en lui faisant l'amour.
Une vague de regret dferla en lui.
Il aida la jeune femme se relever, et alla chercher un mouchoir la salle de bains. Il
essuya doucement la peau de Francesca et ta sa chemise pour lui couvrir les paules. Il
n'aurait pas d la laisser si expose au froid.
Il lui fallut un immense effort pour soutenir le regard solennel de la jeune femme tandis
qu'il reboutonnait la chemise sur son torse, couvrant la peau douce qu'il avait tellement envie
de caresser encore... de vnrer. Il ouvrit la bouche pour parler, mais que pouvait-il dire ? Il
s'tait comport de manire dure, goste, et elle ne lui pardonnerait sans doute jamais.
Il avait voulu dmontrer Francesca qu'elle tait stupide de se croire amoureuse de lui,
mais prsent qu'il avait russi, il ne ressentait qu'un profond regret.
Incapable de supporter plus longtemps les deux puits sombres qui le scrutaient, il se
dtourna et quitta la pice.
Dix jours plus tard, Davie se tenait devant le placard de Francesca, vtu d'un smoking. Il
faisait glisser les cintres sur la tringle pendant que Francesca le regardait d'un air absent,
assise sur son lit.
Et celle-l ? demanda Davie en sortant une robe du placard.
Elle cligna les yeux en reconnaissant la robe style bohme chic qu'elle avait fait le choix
stupide de porter au cocktail chez Fusion quelques mois plus tt - la soire o elle avait
rencontr Ian. Elle n'arrivait pas croire que sa vie avait chang de faon aussi radicale en un
aussi court laps de temps. Qu'elle tait tombe aussi profondment amoureuse, et qu'elle
avait gch cet amour comme elle savait si bien le faire. Mais finalement, quand on regardait
les choses dans leur ensemble, il y avait une sorte de logique.
Davie remarqua son manque d'enthousiasme vident pour la robe. Il la souleva et la
dtailla.
Qu'est-ce qui ne va pas ? Elle est trs jolie.
Je ne viens pas, Davie, dit-elle d'une voix rauque force de ne plus servir.
Si, tu viens, rtorqua Davie en lui adressant un regard inhabituellement noir. Tu ne vas
pas rester enferme dans ta chambre pendant toutes les vacances d'automne.
Et pourquoi pas ? C'est mes vacances, rpondit-elle d'un ton morne en tripotant les
pompons d'un coussin dcoratif. J'ai fini tout ce que j'tais cense faire. Je n'ai pas le droit de
traner dans ma chambre, si j'en ai envie ?
Ah... la vrit clate enfin. Francesca Arno est du genre se morfondre dans sa chambre
et refuser de s'alimenter aprs une rupture, exactement comme les filles qu'elle mprisait
avant.
Ian et moi, on n'a pas rompu. C'est juste qu'on ne s'est pas parl depuis une semaine et
demie.
Elle repensa la faon dont il l'avait regarde avant de quitter la chambre coucher de
l'avion - son expression de regret, de confusion... de dsespoir. Elle avait cru qu'il pouvait lui
offrir davantage que du sexe, mais elle s'tait trompe. Et toute relation n'impliquait-elle pas
deux personnes ? Qu'est-ce que a pouvait faire, qu'elle croie dur comme fer leur amour, si
lui en doutait ?
En plus, continua-t-elle, pour qu'il y ait eu rupture, il faudrait d'abord qu'on ait t
ensemble, et ce n'est pas le cas. Pas au sens qu'on donne ce mot.
Est-ce que tu as essay de le contacter ? fit Davie en allant suspendre la robe dans la
salle de bains.
Non. Je peux encore sentir sa colre. C'est comme si elle irradiait dans tout Chicago.
Ce n'est pas de la colre, marmonna son ami.
Hein ?
C'est ton imagination, Cesca. Pourquoi ne l'appelles-tu pas ?
Parce que. a ne changerait rien. Davie soupira.
Vous tes tous les deux des ttes de mule. Tu ne pourras pas l'viter ternellement.
Je ne l'vite pas.
Oh, je vois. Tu as compltement abandonn, alors.
Pour la premire fois depuis des jours, Francesca sentit de la colre se mler son
dsespoir. Elle jeta un regard irrit Davie, et il sourit, en lui tendant la main.
Allez. Justin et Caden nous attendent. En plus, on a une surprise pour toi.
Elle poussa un soupir de frustration, mais se leva du lit.
Je n'ai pas envie qu'on me console. Et mme si j'en avais envie, quoi a rime de me
traner une stupide soire pour clibataires guinds - avec en prime costume-cravate exig
pour les hommes ? Tu sais trs bien que je n'ai rien de correct me mettre. Et que je dteste
ce genre de soires. Il me semblait que toi aussi, d'ailleurs.
J'ai chang d'avis. C'est pour une bonne cause, dit-il alors qu'elle se dirigeait vers la salle
de bains.
Quoi, sauver mon petit cur bris ?
Pour commencer, juste te faire sortir de cette maison, rpondit Davie sans paratre se
formaliser du ton sarcastique de la jeune femme.
La soire pour clibataires avait lieu dans un nouveau club branch du quartier North
Wabash, dans le centre-ville. Caden et Justin taient au meilleur de leur forme dans la
voiture, survolts et beaux tomber par terre dans leurs smokings tout neufs. Francesca, de
son ct, mourait dj d'envie de rentrer, avant mme qu'ils soient arrivs. Des souvenirs
merveilleux et terribles s'taient mis dfiler dans sa tte quand elle avait enfil la robe
bohme ; tous les dtails de la soire o elle l'avait porte pour la dernire fois lui taient
revenus en mmoire d'un seul coup.
Une femme doit savoir faire oublier ses vtements, Francesca. Pas l'inverse. C'est la
premire leon que je vous enseignerai.
Le souvenir de la voix douce et grave de Ian la fit frissonner. Il lui manquait... C'tait
comme un gouffre bant dans sa poitrine, un gouffre qu'elle n'arriverait jamais combler.
Davie avait du mal trouver une place de parking proche de leur destination, et ils
tournaient en rond depuis un moment. Elle regarda par la fentre de la voiture quand ils
traversrent le fleuve Chicago, et vit la tour de Noble Enterprises qui se dressait quelques
blocs de l.
tait-elle vraiment la nave jeune femme prsente au cocktail en son honneur donn
quelques semaines plus tt ? Si fragile, si peu sre d'elle-mme... si pleine de crainte que
quelqu'un d'autre le remarque ? tait-ce vraiment elle qui avait pntr dans la rsidence de
Ian, plus merveille par la prsence ct d'elle de cet homme sduisant et nigmatique que
par la splendeur de cet appartement, ses uvres d'art et... sa vue tourdissante ?
Ils sont vivants... les gratte-ciel... certains plus que d'autres. Je veux dire, ils ont l'air
vivants. C'est ce que je me suis toujours dit. Ils ont chacun une me. La nuit, en particulier...
Je peux le sentir.
Je sais que vous en tes capable. C'est pour a que je vous ai choisie.
Pas cause des lignes parfaitement droites de ma composition et de la prcision de mes
reproductions ?
Non. cause de cela.
Elle sentit ses yeux se remplir de larmes. Il avait si bien su lire en elle, mme au tout
dbut, voyant des choses qu'elle ne voyait pas. Il avait chri ces choses en elle, l'avait
encourage les cultiver, jusqu' ce que...
Non. La rponse tait non. Elle n'tait plus cette jeune femme.
Davie gara la voiture dans un parking payant sur Wacker Drive, au sud du fleuve, assez loin
de leur destination finale. Francesca ne put s'empcher de frissonner quand le vent du fleuve
pntra son pais manteau de laine alors qu'ils traversaient le pont. Davie le remarqua et lui
entoura les paules. Justin l'imita aussitt et se plaa de l'autre ct de la jeune femme,
faisant barrage de son corps contre le vent. Caden les rejoignit trs vite, au grand amusement
de Francesca, crochetant son bras avec celui de Justin pour obstruer au maximum la bise
glaciale venue du lac. Ils la serraient de si prs en l'escortant sur le trottoir que Francesca
finit par trbucher aprs qu'ils eurent pass le pont.
Les garons, je ne vois plus rien !
Mais tu es au chaud, non ? fit Justin d'une voix enjoue.
Oui, mais...
Soudain, Justin et Caden la poussrent vers une porte tournante qui bordait le trottoir.
Francesca ouvrit grands les yeux quand elle comprit o ses amis la conduisaient. Elle rsista,
mais Justin poussait derrire elle, et elle n'avait pas d'autre choix que de pntrer dans le hall
de Noble Enterprises.
Elle regarda autour d'elle, berlue de se retrouver sur le territoire de Ian de manire si
inattendue... si brutalement.
Plusieurs douzaines d'yeux se retournrent vers elle devant cette arrive peu discrte. Elle
vit le visage familier et souriant de Lin, celui de Lucien, de Zoe... et - elle tressaillit - Anne et
James Noble un peu plus loin. Quant cet homme lgant aux cheveux poivre et sel qui leva
vers elle sa coupe de Champagne au milieu du silence gnral, n'tait-ce pas M. Garrond, le
conservateur du muse Saint-Germain que Ian lui avait prsent Paris ? Non. C'tait
impossible.
Ses yeux s'agrandirent encore d'incrdulit quand elle vit ses parents qui se tenaient mal
l'aise ct d'une plante verte. Son pre avait la mchoire serre, mais sa mre faisait de son
mieux pour afficher un grand sourire.
Pourquoi est-ce que tout le monde me regarde ? Murmura-t-elle Justin quand il
s'avana ct d'elle.
Une vague de panique envahit sa poitrine la vue de cette scne surraliste. Justin
l'embrassa chaleureusement sur la joue.
C'est une surprise. Regarde, Francesca. Tout a est pour toi. Flicitations.
Elle fixa l'endroit qu'il dsignait du doigt, le pan de mur autrefois vide qui dominait le hall
d'accueil. Son tableau avait t encadr et accroch. Il tait stupfiant... parfait...
Comme elle restait bouche be devant le grand mur central, Justin lui dtourna gentiment
le menton, pour lui montrer ce qui se trouvait d'autre dans la pice. Tous ses tableaux taient
prsents dans le hall, encadrs et exposs sur des chevalets. Les gens dambulaient autour
en costumes de soire, sirotant leur Champagne, et semblaient admirer son travail. Un petit
quatuor cordes jouait le concerto brandebourgeois n 2 de Bach.
Elle adressa un regard berlu Davie. Ce dernier eut un sourire rassurant.
Ian a organis a, dit-il tranquillement. Des collectionneurs, des critiques d'art
renomms, des propritaires de galerie et des conservateurs de muse parmi les plus
influents de la plante sont l ce soir. Ce cocktail est en ton honneur, Francesca... une chance
pour le monde de dcouvrir la grandeur de ton talent.
Elle tait horriblement mal l'aise. Oh, Seigneur. Tous ces gens regardent vraiment mon
travail ?
Mais aucun visage ne semblait moqueur, ni mme perplexe, en tout cas, se dit-elle en
regardant alentour.
Je ne comprends pas. Est-ce que Ian avait prvu tout a avant Londres ?
Non. Il m'a contact un jour ou deux aprs ton retour, et m'a demand de l'aider mettre
en place cette exposition. J'ai fait encadrer tous les tableaux. On a mme russi en retrouver
quatre autres ajouter la collection. Ian tait impatient que tu les voies.
Une intuition soudaine frappa Francesca, et elle parcourut la foule des yeux.
Ian se tenait ct de ses grands-parents. Il avait l'air sombre, imprial, et
extraordinairement sduisant, en smoking noir et nud papillon. Il la fixait d'un regard
intense... flamboyant. Seule Francesca, qui le connaissait prsent si bien, pouvait distinguer
l'ombre d'angoisse sur ses traits, l o d'autres n'auraient vu que froideur et impassibilit.
Elle crut que son cur s'arrtait de battre, et serra les bras autour de sa poitrine.
Pourquoi est-ce qu'il a fait a ? Souffla-t-elle.
Je crois que c'est sa faon lui de te dire qu'il est dsol, rpondit Davie. Certains
hommes envoient des fleurs, Ian...
Envoie le monde, murmura Francesca entre ses lvres engourdies.
Ian s'avana vers elle, et elle marcha dans sa direction, se dplaant comme une morte
vivante vers l'homme dont elle ne pouvait dtacher les yeux, et dont elle dsirait la prsence
plus que tout au monde.
Bonsoir, fit-il d'une voix calme quand ils se retrouvrent.
Salut. C'est plutt une surprise, russit-elle dire.
Elle avait l'impression que son cur qui battait tout rompre envahissait sa poitrine,
comprimant ses poumons. Elle prit conscience que des dizaines d'yeux taient sans doute
fixs sur eux, mais elle ne voyait plus que ceux de Ian - et l'espoir fou qu'elle y lisait.
Est-ce que la faon dont je l'ai accroch te plat ? demanda-t-il.
Elle comprit qu'il parlait du tableau.
Oui. C'est parfait.
Comme chaque fois qu'il souriait, elle sentit son cur bondir dans sa poitrine. Il tendit la
main. Reconnaissant ce geste familier, elle commena dboutonner son manteau. Aprs
qu'il l'eut aide ter le pardessus, elle se tourna vers lui, la tte droite, le menton haut - oui,
mme dans la robe bohme. Il la contempla, et elle vit qu'il reconnaissait la robe. Son sourire
se communiqua ses yeux. Il prit deux coupes de Champagne sur le plateau d'un serveur qui
passait et murmura quelque chose l'oreille de l'employ avant de lui tendre le pardessus.
Quelques instants plus tard, il lui tendit une flte de Champagne et s'avana plus prs
d'elle. Francesca eut l'impression que les autres convives de la soire faisaient leur possible
pour reprendre leurs conversations et leur laisser un peu d'intimit. Ian fit tinter sa flte
contre la sienne.
toi, Francesca. Puisse la vie t'offrir tout ce dont tu rves, car personne ne le mrite plus
que toi.
Merci, murmura-t-elle en trempant les lvres dans son Champagne avec rticence, peu
sre de ce qu'elle tait cense ressentir dans des circonstances aussi surprenantes.
Accepterais-tu de passer la soire avec moi, maintenant - il embrassa du regard le hall
d'accueil bond - et plus tard ? Il y a certaines choses que j'aimerais te dire en priv. J'espre
que tu les couteras.
La jeune femme sentit sa gorge se nouer en essayant d'imaginer ce que ces choses
pouvaient tre. La perspective de passer les prochaines heures se poser la question lui
semblait insupportable. Une petite voix intrieure lui disait qu'elle devrait refuser pour
protger son cur bless. Mais elle dvisagea Ian, et sa dcision fut prise.
Oui. J'couterai.
Il sourit, la prit par la main et l'escorta vers la foule.
Il tait minuit pass quand Ian ouvrit la porte de la suite et l'invita entrer. Elle pntra
dans la superbe chambre o rgnait une lumire tamise.
J'ai pens que je ne reverrais peut-tre jamais cette chambre, souffla-t-elle en regardant
autour d'elle, chrissant tous les dtails du sanctuaire de son amant comme elle ne l'avait
jamais fait auparavant.
Ils avaient pass toute la soire ensemble, sans que Ian ne la quitte une seule fois. Il l'avait
prsente des acteurs majeurs du monde de l'art contemporain, lui avait dsign les quatre
derniers tableaux qu'il avait retrouvs, l'avait entrane dans des conversations avec sa
famille et ses amis. Mais l'attention de Francesca tait reste focalise sur lui. Elle n'avait pas
cess une seconde de se demander quoi il pensait... de s'interroger sur ce qu'il avait
l'intention de lui dire quand ils seraient seuls.
Trois galeristes en vogue lui avaient propos d'intgrer leurs futures collections, et on lui
avait demand de participer une exposition prvue au muse d'Art contemporain de
Barcelone. Elle avait questionn Ian ce sujet, car c'tait lui le propritaire de ces toiles, et il
lui avait rpondu simplement que c'tait elle de dcider. Quatre collectionneurs avaient fait
des offres sur ses uvres, mais Ian avait refus tout net. Pour couronner le tout, l'une de ces
offres avait t faite par l'entreprise dans laquelle travaillait le pre de la jeune femme, qui
avait pli en entendant la somme propose. De manire gnrale, Ian avait eu sur ses parents
un effet spectaculaire. Ils s'taient montrs si avenants et dsireux de lui plaire qu'elle tait
presque sre que Ian penserait qu'elle avait menti leur sujet. Cette soumission servile de
leur part la dcevait un peu, mais elle tait avant tout soulage.
Ian referma la porte derrire lui et s'adossa contre le battant. Elle se tourna vers lui.
Merci, Ian, souffla-t-elle. J'ai eu l'impression d'tre la reine du bal.
Je suis juste heureux que tu sois venue.
Je pense que je ne l'aurais pas fait si Davie et les autres ne m'avaient pas mene en
bateau. Je pensais que tu ne voulais plus me voir depuis Londres... depuis tout ce qui s'est
pass l-bas. Tu tais tellement en colre.
Je l'tais, oui. Mais je ne le suis plus depuis un bon moment.
Vraiment ?
Il secoua la tte, sans cesser de soutenir son regard.
Vraiment. Mais j'avais foutrement du mal savoir ce que je ressentais au juste. Il ne m'a
pas fallu beaucoup de temps pour le comprendre, mais je devais trouver un moyen de te le
dire sans que tu t'enfuies aussitt. Je te prsente mes excuses pour le tour que je t'ai jou ce
soir. (Sa bouche dessina un pli amer.) Je suis dsol, de manire gnrale.
Elle tressaillit devant cette dclaration inattendue.
Dsol pour quoi ?
Pour tout. Depuis les premiers mots dsobligeants et arrogants que j'ai pu t'adresser,
jusqu' mes derniers actes gostes. Je suis dsol, Francesca.
Elle avala pniblement sa salive et ne put s'empcher de dtourner les yeux. Mme si elle
savait que cette discussion tait ncessaire, aprs tout ce qui s'tait pass entre eux, a lui
semblait soudain secondaire par rapport aux vnements de Londres.
Comment va ta mre ? demanda-t-elle d'un ton calme.
Son tat est stabilis, rpondit-il, toujours adoss contre la porte. (Il expira lentement au
bout de quelques secondes et fit un pas vers elle. Elle garda les yeux fixs sur lui tandis qu'il
tait sa veste de smoking et la dposait sur le dossier d'une chaise, hypnotise par sa mle
beaut.) Il y a peu d'espoir qu'elle fasse des progrs avec ce traitement, mais a n'empirera
pas. C'est mieux que rien.
Oui. C'est mieux que rien. Je sais que tu ne veux pas de ma piti, Ian. Je comprends cela.
Je ne suis pas venue Londres pour te montrer ma compassion.
Pourquoi es-tu venue, alors ? Senquit-il d'une voix calme qui s'accordait la solennit
du moment.
Pour t'offrir mon soutien. Je savais que ce qui se passait l-bas tait une cause de
douleur pour toi, mme si je n'avais aucune ide de ce que j'allais y trouver prcisment. Je
voulais juste tre l pour toi. C'est tout. Il sourit faiblement.
Tu en parles comme si c'tait une simple chose sans importance... Non. C'est moi qui ai
ragi comme si a n'avait pas d'importance. J'ai pris ton acte de gentillesse et de sollicitude, et
je te l'ai jet au visage, dit-il en serrant la mchoire.
Je sais que tu t'es senti vulnrable. Je suis dsole.
a fait tellement longtemps que je suis oblig de la protger..., dit-il brusquement aprs
un long silence.
Je sais. Anne m'en a parl, rpondit-elle en comprenant qu'il parlait de sa mre.
Il frona les sourcils.
C'est grand-mre qui m'a dit que je me comportais comme un sale crtin goste. Elle a
refus de me parler pendant presque une semaine quand je lui ai avou une partie des choses
que je t'avais dites aprs ton incursion l'Institut. Je ne l'avais jamais vue faire a, dit-il d'un
air perplexe comme s'il ne savait toujours pas comment prendre la chose.
Francesca ne put s'empcher de sourire en son for intrieur en imaginant l'lgante vieille
dame traiter son petit-fils ador de sale crtin. Elle tait surprise et reconnaissante qu'Anne
ait pris sa dfense.
Je n'tais pas l pour porter un jugement. Et mme si a avait t le cas, je n'ai rien vu
d'autre qu'une femme trs malade et son fils aimant qui se bat pour elle contre vents et
mares.
Il dtourna les yeux, fixant le mur oppos.
Je t'ai traite injustement... cruellement. J'aime te donner des punitions parce que a
m'excite sexuellement, mais mon but n'est jamais de te faire vraiment mal. Sauf ce jour-l,
dans l'avion... c'est ce que j'ai fait. Pas compltement, mais une partie de moi avait envie de...
... de me faire souffrir autant que tu souffrais ?
Un clair de culpabilit traversa le regard de Ian quand il la scruta de nouveau.
Oui.
Je comprends, Ian, dit-elle doucement. Ce n'est pas ce qui s'est pass dans la chambre de
l'avion qui m'a bouleverse. Tu ne m'as pas fait mal, et tu savais forcment que j'y prenais du
plaisir. C'est le moment o tu t'es dtourn de moi aprs.
Elle sentit qu'il se crispait.
J'avais honte. De ma mre. Du fait que tu l'aies vue. De moi, parce que j'prouvais
toujours ce maudit besoin de la dissimuler au monde extrieur. Qu'est-ce que a peut bien
faire, maintenant ?
Il avait lch ces derniers mots d'un ton amer, et ils demeurrent suspendus dans l'air -
comme s'il avait crach un poison, une pense refoule enfouie profondment dans son
esprit depuis toujours. Peut-tre les mots les plus puissants, les plus cruciaux, qu'il ait jamais
dits Francesca... personne.
La jeune femme s'avana vers lui et entoura sa poitrine de ses bras, pressant la joue contre
sa chemise blanche. Respirant son parfum mle unique, elle le serra trs fort contre elle. Elle
baissa les paupires tandis que l'motion la submergeait. Elle comprenait combien il lui avait
t difficile de prononcer ces mots, lui qui faisait tout pour dissimuler le moindre signe de
vulnrabilit, qui demeurait stoque et fort parce qu'il croyait ne pas avoir d'autre choix.
Je t'aime, lui avoua-t-elle.
Il lui souleva le menton, rapprocha son visage du sien et lui caressa la joue. Elle vit qu'il
fronait les sourcils.
Qu'est-ce qui ne va pas ? Murmura-t-elle.
Je ne me suis pas donn l'autorisation de tomber amoureux de toi.
Elle rit doucement en entendant ces mots. C'tait tellement typique de Ian. L'amour gonfla
dans sa poitrine, si grand et si pur qu'il prit le pas sur la douleur.
Tu ne peux pas tout contrler, Ian, et a encore moins que le reste. Est-ce que a veut
dire que c'est vrai ? Que tu m'aimes ?
Je crois que je t'aimais avant mme notre rencontre, depuis que j'ai compris que c'tait
toi qui avais captur mon image dans le tableau... toi qui avais saisi ma douleur avec tant de
lucidit. Tu es trop bien pour moi, dit-il durement. Et je ne suis pas sr de te mriter. Mais tu
es mienne, Francesca. Et, pour ce que a vaut... je suis tien. Aussi longtemps que tu voudras
de moi.
Ces mots firent vaciller et trembler l'univers de Francesca, lui faisant perdre l'quilibre.
Mais il posa ses lvres sur les siennes, et elle trouva son centre de gravit.
1 Terme d'escrime pour dsigner une zone de garde. (N.d.T.)
[1]
En franais dans le texte. (N.d.T.)
[2]
Nom un d'un cocktail alcoolis. (N.d.T.)
[3]
En franais dans le texte. (N.d.T.)
[4]
Le muse en question est fictif, du moins Paris. L'auteur fait peuttre
rfrence au chteau de Saint-Germain-en-Laye bien que ce
dernier n'abrite pas rellement d'antiquits grecques ou romaines.
(N.d.T.)