Distributions Tempered

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DISTRIBUTIONS TEMP

ER

EES
SYLVIE BENZONI
Notations generales. Quel que soit le d-uplet dentiers naturels = (
1
, . . . ,
d
), quel
que soit x = (x
1
, . . . , x
d
) R
d
ou C
d
, on note
x

:= x

1
1
... x

d
d
,
et

designe la derivee partielle dordre [[ =


1
+ +
d
denie par

:=

1
x
1
...

d
x
d

si est une fonction [[ fois dierentiable (on utilisera aussi la notation

pour les
distributions).
Lespace de Schwartz. Lensemble des fonctions C

`a decroissance rapide
S(R
d
) := C

(R
d
) ; (, ) N
d
N
d
, p
,
() := sup
xR
d
[x

(x)[ <
est un espace vectoriel sur lequel les p
,
forment une famille denombrable de semi-normes.
On le munit de la topologie (metrisable) induite par ces semi-normes. Cela signie quune
suite de fonctions (
n
)
nN
delements de S(R
d
) converge vers dans S(R
d
) si et seule-
ment si p
,
(
n
) tend vers zero quel que soit (, ) N
d
N
d
. La meme topologie est
induite par les semi-normes q
n,m
denies par
q
n,m
() := max
||n
sup
xR
d
(1 + |x|)
m
[

(x)[ ,
o` u | | designe la norme euclidienne canonique sur R
d
. En eet, pour tout x R
d
,
on a
|x|

d max
||=1
[x

[ ,
et pour tout m N, il existe c
m
> 0 tel que pour tout t R
+
, (1 + t)
m
c
m
(1 + t
m
).
Donc on a pour tout x R
d
,
(1 + |x|)
m
c
m
(1 + d
m/2
max
||=m
[x

[) ,
ce qui implique
q
n,m
() c
m
max
||n
_
p
,0
() + d
m/2
max
||=m
p
,
()
_
.
Dautre part, pour tout N
d
,
[x

[ |x|
||
(1 + |x|)
||
,
donc
p
,
() q
||,||
() .
Quel que soit p [1, +], lespace S(R
d
) sinjecte contin ument dans L
p
(R
d
), ce que
lon note S(R
d
) L
p
(R
d
).
Date: 13 novembre 2012.
1
2 SYLVIE BENZONI
Demonstration. Pour p = + on remarque simplement que pour tout S(R
d
),
||
L
= p
0,0
() = q
0,0
() .
Pour p < +, on utilise que x (1 +|x|)
s
est integrable en dimension d si s > d. Par
suite, en choisissant un entier m > d/p on a pour tout S(R
d
),
_
R
d
[(x)[
p
dx
_
R
d
(1 + |x|)
mp
[(1 + |x|)
m
(x)[
p
dx
q
0,m
()
p
_
R
d
(1 + |x|)
mp
dx ,
do` u
||
L
p C q
0,m
() , C :=
__
R
d
(1 + |x|)
mp
dx
_
1/p
.

Lespace S(R
d
) est stable par derivation ` a tout ordre. Ceci decoule immediatement
du fait que
p
,
(

) = p
+,
() ,
cette egalite impliquant de plus que la derivation

est continue de S(R


d
) dans S(R
d
),
quel que soit N
d
.
Lespace S(R
d
) est stable par multiplication par des fonctions polynomiales de nim-
porte quel degre. Il sut de le verier pour le monomes x

. Pour cela, on va faire appel


` a la formule de Leibniz multidimensionnelle:
(1)

() =

!
!( )!
(

) (

) .
(Linegalite ci-dessus signie
i

i
pour tout i 1, . . . , d, et ! =
1
! . . .
d
!.)
Or pour (x) = x

, on a

(x) =
!
( )!
x

si et 0 sinon. Donc, si on note M

loperateur de multiplication par la fonction


x x

(M

)(x) =

,
!!
!( )!( )!
x

(x) .
Par suite,
p
,
(M

,
!!
!( )!( )!
p
,+
() .
Ainsi, M

est une application lineaire continue de S(R


d
) dans S(R
d
).
Lespace S(R
d
) est stable par transformation de Fourier, et F est une application
lineaire continue de S(R
d
) dans S(R
d
).
Demonstration. Elle repose sur les formules reliant derivation et transformation de Fourier
(2)

= (i)
||

() = (i)

() .
Ces formules sont valables avec la denition suivante pour la transformation de Fourier:
F()() = () =
_
R
d
(x) e
ix
dx .
DISTRIBUTIONS TEMP

ER

EES 3
La verication (immediate) est laissee au lecteur. On en deduit que

() = (i)
||+||
F(

(M

))() ,
do` u
p
,
( ) |

(M

)|
L
1
(R
d
)
< +
puisque

(M

) S(R
d
) L
1
(R
d
).
Lespace S(R
d
) est une alg`ebre pour le produit (ordinaire) des fonctions, et
S(R
d
) S(R
d
) S(R
d
)
(, )
est une application bilineaire continue. En eet, dapr`es la formule de Leibniz (1),
p
,
()

!
!( )!
p
,
() p
,0
() .
Lespace S(R
d
) est une alg`ebre pour le produit de convolution, et
S(R
d
) S(R
d
) S(R
d
)
(, )
est une application bilineaire continue.
Demonstration. On peut utiliser les resultats precedents car, on a (par le theor`eme de
Fubini)
F( ) = F()F() ,
do` u le diagramme commutatif:
(, )
F
(f, g) f g .
(Par abus de notation on designe encore par F loperateur (, ) ( ,

).) Autrement
dit, si designe le produit ordinaire, le produit de convolution, on a
= FF ,
o` u F est la transformee de Fourier inverse (tout aussi continue que F), denie par
F(g)(x) =
1
(2)
d
_
R
d
g() e
ix
d .

Lespace S(R
d
) est compris entre lespace des fonctions C

` a support compact
D(R
d
) et lespace E (R
d
) des fonctions C

, au sens o` u lon a des injections continues


D(R
d
) S(R
d
) E (R
d
) ,
lespace E (R
d
) etant muni de la topologie de la convergence uniforme de toutes les de-
rivees (y compris dordre zero!) sur tout compact, et lespace D(R
d
) etant muni dune
topologie (assez delicate ` a denir) telle quune suite (
n
) delements de D(R
d
) converge
si et seulement sil existe un compact xe K contenant tous les supports des
n
et (
n
)
converge uniformement sur K ainsi que toutes ses derivees. De plus, D(R
d
) est dense dans
S(R
d
), qui est lui-meme dense dans E (R
d
).
4 SYLVIE BENZONI
Quest-ce quune distribution temperee? On peut voir lespace de Schwartz comme
un ensemble de fonctions test permettant de denir des fonctions generalisees que lon
appellera plus precisement des distributions temperees. Celles-ci nauront pas necessaire-
ment des valeurs ponctuelles mais seront denies au travers de leurs valeurs contre les
fonctions test .
Les distributions temperees sur R
d
comprennent tout dabord toutes les fonctions or-
dinaires f telles que f L
1
(R
d
) quel que soit S(R
d
) et

_
R
d
f(x) (x) dx
soit une forme lineaire continue sur S(R
d
). (Notons que puisque S(R
d
) est metrisable,
la continuite dune forme lineaire equivaut ` a sa continuite sequentielle.)
Cest le cas par exemple si f L
p
(R
d
) avec p [1, +]. En eet, dapr`es linegalite de
Holder on a

_
R
d
f(x) (x) dx

|f|
L
p
(R
d
)
||
L
p

(R
d
)
et on a vu que S(R
d
) sinjectait contin ument dans L
p

(R
d
).
Cest le cas aussi pour une fonction f localement integrable et `a croissance au plus
polynomiale, cest-`a-dire pour laquelle il existe k N et C > 0 tels que
[f(x)[ C (1 + |x|)
k
, x R
d
.
Car alors

_
R
d
f(x) (x) dx

C
_
R
d
(1 + |x|)
k
[(x)[ dx C q
0,k+m
()
_
R
d
(1 + |x|)
m
dx
pour m > d.
Denition 1. Une distribution temperee sur R
d
est une forme lineaire continue sur
S(R
d
).

Etant donnee une distribution (temperee) T on note generalement T, limage dune


fonction test S(R
d
) par T. En particulier, dans les deux exemples cites ci-dessus, on
identie la fonction f avec la distribution (temperee) T
f
denie par
T
f
, =
_
R
d
f(x) (x) dx .
Bien entendu, lensemble des distributions temperees comprend aussi des objets qui ne
sont pas des fonctions. Le plus cel`ebre dentre eux, dont lintroduction est anterieure au
developpement de la theorie des distributions par L. Schwartz, est la masse de Dirac ,
denie par
, = (0) .
Cest clairement une distribution temperee puisque
[, [ p
0,0
() .
On denit de meme
y
quel que soit y R
d
par

y
, = (y) .
La masse de Dirac est en fait une mesure de Radon, cest-` a-dire une forme lineaire continue
sur lespace des fonctions continues bornees.
Voici un autre exemple, assez subtil, de distribution temperee sur R. Il est base sur la
fonction f : x ,= 0 1/x, qui nest pas localement integrable. De ce fait, on ne peut
DISTRIBUTIONS TEMP

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EES 5
pas la voir comme une distribution (temperee). Cependant, on lui associe une distribution
temperee appelee valeur principale de 1/x, en observant que pour tout S(R),
lim
0
_
|x|>
(x)
x
dx
existe et denit une forme lineaire continue sur S(R).
Demonstration. Notons tout dabord que quels que soient > 0 et S(R), la fonction
f est bien integrable sur ], [], +[. Pour lexistence de la limite, on peut utiliser
le crit`ere de Cauchy. Si

> > 0,
_
|x|>
(x)
x
dx
_
|x|>

(x)
x
dx =
_

|x|>
(x)
x
dx .
Or (dapr`es la formule de Taylor ` a lordre 1!)
(x)
x
=
(0)
x
+
_
1
0

(x) d .
Le premier morceau etant fonction impaire de x, son integrale sur [

, [],

] est
nulle. Il reste donc

_
|x|>
(x)
x
dx
_
|x|>

(x)
x
dx

|x|>
_
1
0

(x) d dx

2 [

[ |

|
L
.
Ceci tend vers zero lorsque

et tendent vers zero (puisque |

|
L
= p
1,0
() < +).
La limite existe donc. Cependant, il nest pas tout ` a fait evident de voir quelle denit une
forme lineaire continue sur S(R). Pour cela, introduisons une fonction plateau D(R),
valant 1 sur [1, 1] et ` a valeurs dans [0, 1]. On suppose en outre que est paire, de sorte
que
_
|x|>
(x)
x
dx = 0
quel que soit > 0. Ainsi, en ecrivant = + (1 ), on a pour tout ]0, 1[,
_
|x|>
(x)
x
dx =
_
|x|>
(x)
(x) (0)
x
dx +
_
|x|1
(1 (x))
(x)
x
dx ,
do` u
lim
0
_
|x|>
(x)
x
dx =
_
R
(x)
_
1
0

(x) dx +
_
|x|1
(1 (x))
(x)
x
dx ,
et par suite

lim
0
_
|x|>
(x)
x
dx

|
L

_
R
(x) dx + ||
L
1 .
On conclut en utilisant linjection continue S(R) L
1
(R) et ` a nouveau le fait que
|

|
L
= p
1,0
().
On note
v.p.(1/x), = lim
0
_
|x|>
(x)
x
dx .
Remarque 1. Lexpression vague de fonction generalisee peut etre trompeuse (en
laissant entendre que toute fonction ordinaire en fait partie). Il existe en eet des fonctions
dapparence anodine qui ne sont pas des distributions temperees. Cest le cas par exemple
de la fonction analytique x e
x
2
: son defaut est de tendre beaucoup trop vite vers linni
en ; en particulier pour (x) = e
x
2
on a
_
e
x
2
(x) dx = +.
6 SYLVIE BENZONI
Lespace S

(R
d
). Lensemble des distributions temperees forme evidemment un espace
vectoriel. Il est naturellement muni de la topologie duale faible, denie par la convergence
faible des suites: une suite de distributions temperees (T
n
)
nN
converge vers T S

(R
d
)
si et seulement si, quel que soit S(R
d
), la suite numerique (T
n
, )
nN
converge vers
T, .
Un exemple fondamental de convergence au sens des distributions est celui des approxi-
mations de lunite, qui donnent une representation de la masse de Dirac comme limite de
suites de fonctions C

` a support compact.
Denition 2. On appelle approximation de lunite une famille de fonctions

pour > 0
telle que

(x) =
d
(x/) , x R
d
,
avec D(R
d
) dintegrale 1. (On suppose souvent de plus 0.)
Noter que si (

)
>0
est une approximation dunite alors par changement dechelle on a
_
R
d

(x) dx = 1 , > 0 .
Cest cette propriete fondamentale qui permet de montrer que

tend vers dans S

(R
d
)
lorsque tend vers zero. En eet, quelle que soit S(R
d
) on a alors
_
R
d

(x) (x) dx (0) =


_
R
d

(x) ((x) (0)) dx =


_
R
d
(y) ((y) (0)) dy .
Cette derni`ere integrale est en fait prise sur un compact xe (le support de ), et comme
est continue, elle converge vers zero lorsque tend vers zero dapr`es le theor`eme de
Lebesgue.
Un autre exemple tout aussi important de convergence au sens des distributions est
fourni par le lemme de Riemann-Lebesgue: dans le langage des distributions, il signie en
eet que la famille de fonctions x e
ix
tend vers zero au sens des distributions lorsque
tend vers +.
Ainsi on a deux exemples vraiment dierents de convergence au sens des distributions.
Dans le premier on a un phenom`ene de concentration autour de 0, vu par les distributions
mais pas par les fonctions (noter que pour tout x R

(x) tend vers zero), et dans


le second il sagit doscillations ` a haute frequence, vues par les fonctions mais pas par
les distributions (la limite au sens des distributions se reduisant `a la valeur moyenne des
fonctions, cest-` a-dire ici 0).
Quid des distributions non temperees? Dapr`es les injections continues et denses
D(R
d
) S(R
d
) E (R
d
), on a
E

(R
d
) S

(R
d
) D

(R
d
) ,
o` u D

(R
d
) est lespace des distributions (tout court), cest-` a-dire des formes lineaires conti-
nues sur D(R
d
), et E

(R
d
) est lespace des distributions `a support compact, qui sav`erent
etre les formes lineaires continues sur E (R
d
).
Denition 3. Le support dune distribution (temperee) T est le complementaire de
lunion de tous les ouverts tels que
T , = 0 , D(R
d
) ; supp
(sachant que le support dune fonction continue est ladherence de lensemble des points
o` u ne sannule pas).
DISTRIBUTIONS TEMP

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EES 7
Cette denition dapparence alambiquee est coherente avec la notion de support pour
les fonctions: si f est une fonction continue ` a support compact K, cela signie que le
complementaire de K, est linterieur de lensemble des points o` u f sannule; autrement
dit, si x il existe un ouvert tel que f
|
0, de sorte que
_
f = 0 quelle
que soit D(); reciproquement, si x tel que
_
f = 0 quelle que soit D()
alors f
|
0 et donc x . Par exemple, le support de la masse de Dirac est reduit au
singleton 0 (et plus generalement le support de
y
est y).
Toute fonction localement integrable sidentie ` a une distribution: si f L
1
loc
(R
d
) alors
on peut lui associer T
f
D

(R
d
) denie par
T
f
, =
_
R
d
f(x) (x) dx , D(R
d
) .
On remarque en outre que lapplication f L
1
loc
(R
d
) T
f
est injective. Par exemple, la
fonction citee plus haut, x e
x
2
peut etre vue comme une distribution (mais rappelons
le, pas comme une distribution temperee).
Multiplication dune distribution par une fonction. Pour generaliser le produit de
fonctions, on peut denir le produit dune distribution T par une fonction en posant
T , = T , ,
` a condition que lensemble des fonctions test soit stable par multiplication par . Cest
le cas pour toute fonction de classe C

lorsque les fonctions test sont C

` a support
compact : autrement dit, quelles que soient T D

(R
d
) et E (R
d
), T D

(R
d
). Si
de plus T est une distribution temperee, rien ne dit que T soit encore une distribution
temperee. Dapr`es les resultats de stabilite de S(R
d
) vus plus haut, ce sera le cas si est
elle meme une fonction C

` a decroissance rapide, ou si cest une fonction polynomiale.


Si T est ` a support compact, alors quelle que soit E (R
d
), T est ` a support compact.
`
A titre dexemple, notons que x nest rien dautre que la distribution nulle, tandis que
x v.p.(1/x) sidentie avec la fonction constante egale ` a 1.
Remarque 2. En revanche, il est impossible de denir un produit raisonnable entre
distributions: il ny a en tous cas aucune chance pour quil prolonge le produit des distri-
butions par les fonctions tout en etant associatif, car sinon on aurait
0 = v.p.(1/x) (x ) = (v.p.(1/x) x) = .
Remarque 3. Rien nautorise `a multiplier une distribution par x 1/x. Dailleurs,
on montre quune distribution T verie xT = 0 si et seulement si T = c , o` u c est
une constante arbitraire. On en deduit par exemple que xT = 1 si et seulement si T =
v.p.(1/x) + c , o` u c est une constante arbitraire.
Derivation au sens des distributions. La puissance de la theorie des distributions
reside sans doute dans le fait que lon puisse deriver nimporte quelle distribution `a nim-
porte quel ordre. La denition de la derivee dune distribution est simplement obtenue
par generalisation de lintegration par parties.
Denition 4. Soient T une distribution (temperee ou non) et N
d
. Alors la formule

T , = (1)
||
T ,

denit une unique distribution

T (temperee si T lest).
8 SYLVIE BENZONI
Il faut prendre garde ` a ce quen general, la derivee dune fonction au sens des distribu-
tions ne concide pas avec sa derivee au sens classique. Cest le cas notamment pour les
fonctions derivables par morceaux. Lexemple de base est celui de la fonction de Heaviside
H : R R
x H(x) =
_
1 , si x 0 ,
0 , si x < 0 .
En eet, par denition
T

H
, = T
H
,

=
_
+
0

(x) dx = (0) = , ,
cest-`a-dire que T

H
= (tandis quau sens des fonctions, H

est denie et vaut 0 partout


sauf en 0, cest-` a-dire que H

se confond avec la fonction nulle). Plus generalement, on a


le resultat suivant.
Proposition 1 (Formule des sauts). Soit f : R R de classe C
1
sur R

et sur R
+
,
eventuellement discontinue en 0 mais ayant des limites nies `a gauche et `a droite de 0.
On note
[f] = lim
x0
f(x) lim
x0
f(x) .
Alors sa derivee au sens des distributions est donnee par
T

f
= T
f
+ [f] .
La demonstration est une simple application de la formule dintegration par parties.
On verie facilement que la formule de Leibniz setend au produit dune distribution
par une fonction de classe C

.
La derivation fournit de nouveaux exemples de distributions, avec notamment les de-
rivees de la masse de Dirac. En particulier, la derivee premi`ere de S

(R) est denie


par

, =

(0) .
Remarque 4. Dapr`es la formule de Leibniz generalisee, on a pour tout E (R),
( )

.
Il faut toutefois prendre garde au fait que

ne se reduit pas simplement `a (0)

: le
calcul montre que

= (0)

(0) ,
de sorte que la formule de derivation du produit ci-dessus secrit aussi
( )

= (

(0)) + (0)

= (0)

.
Le resultat general suivant montre que les derivees de la masse de Dirac jouent un role
tr`es important.
Theor`eme 1. Toute distribution dont le support est reduit au singleton 0 est une
combinaison lineaire nie de derivees (au sens des distributions) de la masse de Dirac en
0.
Exercice 1. Soit : (x, y) R
2
(0, 0) (x, y) := ln(x
2
+ y
2
). Montrer que denit
une distribution temperee sur R
2
et montrer que = 4 au sens des distributions.
Indication: passer en coordonnees polaires.
DISTRIBUTIONS TEMP

ER

EES 9
Transformation de Fourier au sens des distributions. Attention ici nous revenons
aux distributions temperees exclusivement. La transformation de Fourier F : S(R
d
)
S(R
d
) setend naturellement `a S

(R
d
) en posant

T , = T , , S(R
d
) .
Ceci nest autre quune generalisation de la formule
_
R
d

f(y) (y) dy =
_
R
d
f() () d
(qui decoule directement du theor`eme de Fubini et de la denition de

f et lorsque f et
sont integrables et de carre integrable). Par exemple,

, = , = (0) =
_
R
d
(x) dx ,
cest-`a-dire que

= 1 (la distribution associee `a la fonction constante egale `a 1).
Un exemple moins immediat est celui de la transformation de Fourier (au sens des
distributions) de la fonction de Heaviside. Puisque H

= , on a

H

=

= 1 . Par
ailleurs, on a

= i

H (voir (3) ci-apr`es). Dapr`es le resultat mentionne dans la remarque
3, on en deduit que

H = i v.p.(1/) + c ,
o` u c est une constante `a determiner. Pour cela, on observe que si S(R) est paire, sa
transformee de Fourier aussi et par consequent

H, = c (0) =
c
2
_
+

() d ,
H, =
_
+
0
() d =
1
2
_
+

() d .
Ces deux quantites etant egales par denition de

H, on en deduit c = .
En combinant la denition de

T et celle des derivees au sens des distributions avec
les formules (2), valables pour les fonctions C

` a decroissance rapide, on voit que ces


derni`eres setendent aux distributions temperees:
(3)

T = (i)
||

T ,

T = (i)


T .
Exercice 2. Calculer la transformee de Fourier dune gaussienne
x
1

2
e
xm
2
/2
2
,
o` u > 0 et m R
d
, puis celle de la fonction bornee
x e
itx
2
,
o` u t R
+
. Indication: pour la premi`ere, se ramener par des changements de variable
appropries au cas m = 0, d = 1, puis en resolvant par exemple une equation dierentielle,
au calcul de
_
R
e
x
2
dx; pour la seconde, appliquer le theor`eme de Cauchy `a la fonction
z ; Re z < 0 e
zx
2
,
o` u S(R
d
) est xee, utiliser le premier resultat et faire un passage `a la limite.
10 SYLVIE BENZONI
Convolution. On generalise facilement la convolution des fonctions `a la convolution
dune distribution temperee avec une fonction C

` a decroissance rapide. En eet, si


S(R
d
) alors quel que soit x R
d
, la fonction y (x y) appartient aussi ` a
la classe de Schwartz. Par consequent, quel que soit T S

(R
d
), on peut denir une
fonction T = T par
(T )(x) = T , (x ) .
Lexemple fondamental est la convolution par la masse de Dirac:
( )(x) = (x) .
De facon generale, T denie comme ci-dessus est une fonction C

, de derivees

(T )(x) = T ,

(x ) .
Toutefois son comportement ` a linni nest pas evident. Du coup on peut se demander si
cest meme seulement une distribution temperee. La reponse est heureusement armative.
En eet, pour tout S(R
d
),
_
R
d
(T )(x) (x) dx =
_
R
d
T , (x ) (x) dx
_
T ,
_
R
d
(x ) (x) dx
_
par linearite de T et de lintegrale (ceci demanderait quelque justication), cest-`a-dire
encore
_
R
d
(T )(x) (x) dx = T ,

,
o` u

(x) := (x). Ceci est en fait un moyen de denir T directement comme une
distribution temperee, en posant
T , = T ,

, S(R
d
) .
On voit ainsi facilement que le lien entre produit de convolution et produit ordinaire
via la transformation de Fourier, exprime dans la formule
(4) F( ) = F()F() ,
se generalise au produit de convolution entre S(R
d
) et S

(R
d
):
F(T ) = F(T)F() .
En eet,
F(T ) , = T , = T ,

=

T , F
1
(

) .
Or, dapr`es (4) et la formule dinversion de Fourier
F
1
()(x) =
1
(2)
d
F()(x) ,
F
1
(

) = (2)
d
F
1
(

) = (F(

) =

.
On en deduit la relation attendue:
F(T ) , = F()F(T) , .
DISTRIBUTIONS TEMP

ER

EES 11
Remarque 5. En posant = , =

et en appliquant la transformation de Fourier
inverse `a la formule (4) on obtient
F
1
() F
1
() = F
1
() ,
do` u lon deduit
(5) F() =
1
(2)
d
F() F() .
Comme (4), cette formule setend au cas dune distribution temperee T et dune fonction
S(R
d
):
F(T) =
1
(2)
d
F(T) F() .
Cependant, sachant que lon ne peut pas multiplier les distributions, cette derni`ere formule
fournit un argument contre lextension du produit de convolution `a deux distributions
temperees quelconques.
Il reste neanmoins possible de denir le produit de convolution dune distribution tem-
peree avec une distribution `a support compact. En eet, si T est une distribution `a support
compact et S est une distribution temperee, on peut denir

S S(R
d
) par

S, = S, , S(R
d
) ,
puis

S D(R
d
) quel que soit S(R
d
), et enn
T S , = T ,

S , S(R
d
) .
En particulier, on voit immediatement que T = T, cest-`a-dire que la formule =
setend aux distributions (temperees). Autrement dit, est element neutre pour le produit
de convolution.
R ef erences
[1] Strichartz, R. S., A guide to distribution theory and Fourier transforms. World Scientic Publishing
Co. Inc. 2003.
[2] Zuily, C.,

Elements de distributions et dequations aux derivees partielles : cours et probl`emes resolus.
Dunod, 2002.

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