L'albatros

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L'albatros

Introduction :
Le pome L'Albatros est extrait de "Spleen et idal", la deuxime partie du recueil Les Fleurs du mal. Cette partie voque l'homme dchir entre l'aspiration l'lvation et l'attirance pour la chute, dchirement l'origine de l'envie nomm spleen, indissociable de la condition humaine et qui finit par triompher. Ce pome a t inspir Baudelaire lors d'un voyage sur un navire qui le devait le mener juqu'aux Indes, mais qui finalement s'est achev sur l'le Maurice. L'albatros traduit chez Baudelaire la conscience d'tre diffrent des autres. Baudelaire a recours une image trs suggestive pour dpeindre sa propre condition dans une socit qui l'ignore compltement. L'image de l'albatros captur voque l'ide d'un tre totalement tranger au monde qui l'entoure. Baudelaire faisait partie de la gnration des potes maudits, c'est--dire non compris par les gens de son poque. Les trois premires strophes concernent l'albatros tandis que la dernire est ddie au pote.

Etude mthodique
I- La parabole du pote oiseau A- Une double analogie ---- Une double comparaison Le pome L'Albatros est fond sur une double comparaison. L'albatros est personnifi tant donn que le pote est compar l'oiseau. Grce un rseau de personnification, les trois premires strophes comparent l'albatros un roi dchu (" roi " vers 6), un voyageur ail tomb du ciel. La quatrime strophe explicite le symbole en faisant du pote, par une comparaison et une mtaphore hyperbolique, un " prince des nues " (vers 13) aux " ailes de gant " (vers 16). Exil parmi les hommes, la vie de l'albatros apparat donc comme une parabole qui dfinit l'existence du pote. Le pote et l'albatros sont associs dans la dernire strophe et cette association oblige une rinterprtation : le voyageur ail devient le pote, les hommes d'quipage : la foule et les planches : le thtre social. B- L'lvation -----Les thmes du pote - La verticalit, l'aspect arien. L'albatros est voqu dans toute sa grandeur comme le confirme l'enjambement des vers 1 et 2 qui suggre l'immensit des espaces que l'albatros a parcourir. Cette notion de grands espaces est renforce par l'hypallage du vers 2 (" vaste oiseau des mers " = oiseau des vastes mers). - L'aspect sublime : Au-dessus de l'horizontalit mdiocre (la socit), l'oiseau donne une impression de majest, fait de fluidit, comme l'eau sur laquelle vogue le navire mis en relief par l'harmonie suggestive du vers 4 en " v ", " s " et " f ". - L'isolement, la solitude : Il y a le monde d'en haut et le monde d'en bas et la communication entre les deux est difficile, voire impossible. - La situation de la victime : l'albatros mais en mme temps, le pote est agress par les moqueries des marins (vers 11 et 12) puis par l'archer et les hues (vers 14 15).

II- Un univers soumis de fortes tensions A- Le jeu des antithses

-----Le jeu des antithses Le pome de Baudelaire donne de l'albatros deux visions radicalement opposes : autant l'oiseau en vol est un oiseau majestueux l'allure souveraine dsign par la priphrase du vers 16 : " les rois de l'azur ", autant lorsqu'il se pose il parat ridicule : - les " ailes " du vers 7 qualifis des deux pithtes " grandes " et " blanches " ? " les avirons (vers 8) ; - la beaut du vers 10 ? la laideur du vers 10 ; du vol royal (vers 3), on passe au boitement de l'infirme (vers 12). Ces oppositions sont soulignes par des antithses : - " roi " (vers 6) ? " maladroit " et " honteux " (vers 6) ; - le " voyageur ail " (vers 9) ? "gauche " et " veule " (vers 9) ; - " nagure si beau " (vers 10) ? " comique " et " laid " (vers 10) de plus, ici, la rime intrieure croise associe encore l'ide de l'albatros celle d'un animal ayant perdu son rang et son titre de " roi " ; - " infirme " ? " volait " (vers 12). B- Le jeu sur les sonorits ---- Les sonorits Le jeu sur les sonorits renforce le contraste. La majest de l'oiseau en vol est rendue par l'assonance en " en " (vers 1, 2, 4, 13, 14, 16) et l'allitration en "v" (vers1, 2, 3, 4). La dchance de l'albatros se traduit sur le plan phontique par une sorte de dgradation et l'assonance en "en" est dsormais associe des mots dont le sens ou les connotations sont ngatives ou pjoratives. Le destin funeste de l'oiseau est prdit par l'allitration en "s" du vers 4 : "gouffres amers". La troisime strophe accumule des sonorits qui produisent un effet dsagrable avec l'assonance en "e", assonance dj prsente dans la strophe prcdente avec "eu" de "honteux" au vers 6, "piteusement" au vers 7, " cot d'eux" au vers 8 et l'allitration en "c" et en "gu" comme "gauche" au vers 9 et la cacophonie " comique et laid " du vers 10. Ainsi, le jeu des sonorits accentue la diffrence de l'animal au fur et mesure du pome ce qui est renforc par la disposition en chiasme des sonorits du vers 11. C- Le mouvement des phrases ---- Le mouvement des phrases Il prend une valeur descriptive. On notera en particulier : - Une ample phrase, bien balance pour prsenter l'oiseau en vol dans la premire strophe ; - Une nouvelle phrase dans la deuxime strophe trs ample mais cette fois avec une nuance d'ironie pour prsenter l'oiseau pos sur les planches ; - Dans la troisime strophe, une srie de trois phrases exclamatives plus courtes, au rythme plus hach pour traduire la souffrance de l'albatros ; - Dans la quatrime strophe, une phrase en deux parties qui explique la dimension symbolique de la comparaison avec l'oiseau, il rcapitule l'opposition.

III Les symboles d'une chute A- Une image symbolique ---- L'image de la chute A prendre au sens physique et au sens moral du terme, la chute du pote oiseau est suggre par des images symboliques : perdant la libert dont il jouit quand il " hante la tempte " (vers 14). C'est une mtonymie du climat pour dsigner le lieu, il est dsormais prisonnier des " planches " au vers 5, synecdoque pour dsigner le pont du navire. On note le caractre ridicule de l'oiseau lorsqu'il est en dehors de son lment car un roi sur une planche, ce n'est pas sa place. L'anacoluthe des deux derniers vers (" exil " est au masculin singulier, on attend donc un sujet au masculin singulier mais on a " ses ailes " qui est au fminin pluriel) accentue le dchirement du pote entre ses deux vies : celle de la ralit et celle de l'idal. L'art est pour Baudelaire une affaire personnelle : le pote ne se mle pas au public vulgaire. Leurs cultures sont trop loignes. Le pote doit donc s'exiler, tre seul et cette singularit s'est cristallise dans le symbole de l'albatros.

B- La porte des images ---- La porte des images L'albatros est dsign par les expressions suivantes : des priphrases au x vers 2, 3, 6, 9, 13, 19 qui ont toutes une valeur emphatique : de priphrase en priphrase, c'est tout l'aspect majestueux et souverain qui est dploy. La dernire strophe dveloppe la comparaison entre le pote et l'albatros. C'est la mme souverainet dans la solitude mais c'est la mme dchance lorsqu'il redescend au niveau de l'humanit vulgaire. La comparaison entre l'oiseau et le pote permet de dgager la signification allgorique du pome : comme l'albatros, le pote est victime de la cruaut des hommes ordinaires comme les hommes d'quipage au vers 1 qui ne sont pas es " indolents compagnons " (vers9). De plus, les " nues " du vers 13 ? " hues " du vers 15. Les marins du vers 11 agacent et provoquent l'animal. Le pote est donc dchir entre le monde sublime (la posie) et la vulgarit dgradante de la socit. Bien plus, l'agressivit des hommes qui se manifeste par les hues de la foule va jusqu' une volont de meurtre symbolise par l'archer du vers 14. On n'hsitera pas mettre mort le pote symboliquement mais il reste un homme incompris. L'albatros pote se moque des flches qui ne peuvent l'atteindre. Il est exil, c'est--dire tranger du milieu dans lequel il vit et est trs mal vu et ses ailes, c'est--dire le gnie, le gnent.

Conclusion :
Selon Baudelaire, la place du pote dans la socit est compare un albatros : majestueux dans le ciel, son lment, mais ridicule sur terre et au contact des hommes. De mme, le pote se situe au-dessus du commun des hommes pour ses pomes, mais ml la foule, il n'est rien et devient ridicule. Baudelaire faisait ainsi partie de la gnration des potes maudits, c'est--dire non compris par les gens de son poque.

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