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Oto-rhino-laryngologie

A 38

Dyspnée laryngée
de l’enfant
Orientation diagnostique et conduite à tenir en situation d’urgence
DR Philippe CONTENCIN
Service d’oto-rhino-laryngologie, chirurgie cervico-faciale de l’enfant, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 75674 Paris Cedex 14.

Points Forts à comprendre Orientation diagnostique


Diagnostic positif
• Le larynx de l’enfant est rétréci
et sa muqueuse sensible à l’œdème en regard La dyspnée laryngée est inspiratoire et lente. C’est une
de la sous-glotte (sous les cordes vocales) bradypnée, c’est-à-dire que la respiration est ralentie,
(voir : Pour approfondir 1). freinée en l’occurrence par le temps inspiratoire. Le
• Les processus inflammatoires d’origine virale rythme respiratoire s’abaisse par allongement de la
ou traumatique (intubation, endoscopie) durée de l’inspiration. Celle-ci s’accompagne d’un tirage.
se localisent préférentiellement dans ce territoire Il s’agit de la mise en jeu des muscles inspiratoires
et autour de l’épiglotte. accessoires, tels que les intercostaux et les sterno-cléido-
• Tout obstacle des voies aériennes extra- mastoïdiens, associée à une élévation de la dépression
thoraciques est majoré (donc surtout perceptible) endothoracique due à l’augmentation des résistances.
à l’inspiration (voir : Pour approfondir 2). Une dépression des parties molles apparaît donc aux
• Une dyspnée avec ralentissement creux sus-sternal, sus-claviculaire et épigastrique ainsi
de l’inspiration, tirage et stridor (ou cornage) que dans les espaces intercostaux.
signe l’origine laryngée de l’affection. L’expiration est normale en cas d’obstacle modéré. Elle
• Le diagnostic d’une dyspnée laryngée peut devenir active, avec contraction des muscles abdo-
est clinique. Les examens complémentaires sont minaux, et freinée également en cas d’obstacle très
inutiles ou dangereux en urgence. Ils ne doivent important. Chez le nouveau-né ou le petit nourrisson,
pas conduire à mobiliser l’enfant ni à retarder une polypnée peut être conservée mais c’est le ralentis-
la mise en œuvre du traitement. sement de l’inspiration qui permet le diagnostic.
Le tirage est généralement associé au bruit inspiratoire
que l’on appelle stridor. Ce terme est défini comme un
bruit respiratoire anormal. Survenant à l’inspiration, il
signe son origine extrathoracique, supratrachéale. De
tonalité aiguë, il évoque une vibration glottique ou
Ce dysfonctionnement de l’appareil respiratoire appar- supraglottique. Rauque ou grave, il correspond à une
tient au groupe des dyspnées obstructives hautes liées à lésion sous-glottique ou trachéale haute. En fait, on
une pathologie des voies aériennes supérieures. appelle plus volontiers « cornage » un bruit de tonalité
Situation fréquente chez l’enfant, elle comporte un grave, caverneux, proche de celui d’une corne de brume.
risque d’hypoxémie susceptible d’entraîner de lourdes Associé ou non à une toux rauque « aboyante », il signe
conséquences neurologiques, voire le décès. la présence d’un obstacle jouxtant le bord inférieur des
Ce peut être la plus urgente des détresses vitales chez un cordes vocales (glotte et sous-glotte), tel un œdème de
enfant mais, heureusement, il s’agit souvent d’une laryngite aiguë. A contrario, une toux de tonalité non
dyspnée modérée, simplement remarquable par son modifiée sera liée à un obstacle supraglottique.
bruit. Ce cornage ou ce stridor ne doit pas être pris pour La voix peut être grave et rauque également dans les
des sifflements de crise d’asthme encore trop souvent lésions sous-glottiques (laryngites) alors qu’elle est
confondue avec la dyspnée laryngée. Le traitement, lié à couverte mais de tonalité conservée dans les tumé-
un diagnostic étiologique difficile car souvent initiale- factions épiglottiques. Dans ces derniers cas, comme
ment imprécis, passe par le respect de principes qui ne dans une inflammation pharyngée, il existe aussi une
peuvent être maîtrisés que par une bonne connaissance dysphagie dont l’enfant peut se plaindre mais qui se
de l’anatomie des voies aériennes supérieures. manifeste uniquement par une hypersialorrhée (bave).

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DYSPNÉE LARYNGÉE DE L’ENFANT

Diagnostic de gravité Si l’état de l’enfant l’autorise et que le diagnostic reste


hésitant d’après la clinique (ce qui est rare), des radio-
Chez un petit enfant, les autres signes de gravité sont à graphies du larynx de face et de profil, réalisées au
rechercher systématiquement. Sueurs, tachycardie, cours d’une inspiration et d’une expiration, permettent
hypertension artérielle, agitation sont des signes d’alerte parfois d’orienter le diagnostic tout en précisant les
qui précèdent l’épuisement de l’enfant en cas de indications d’une endoscopie. Rappelons qu’elles ne
persistance ou d’aggravation de l’obstacle. Après une doivent pas retarder la mise en œuvre du traitement et
amélioration trompeuse de la dyspnée et du tirage sont formellement contre-indiquées en cas de signe de
apparaît une prostration. Puis, la survenue d’irrégularités gravité.
du rythme respiratoire (pauses ou gasps) annonce l’im- Hormis les difficultés d’extubation en réanimation qui
minence de l’arrêt cardio-respiratoire. En présence d’un peuvent survenir à tout âge, le diagnostic étiologique se
de ces signes, il ne faut pas attendre, même pour réaliser pose différemment selon l’âge de l’enfant. En effet, si
un cliché. Il faut intervenir d’urgence : oxygénation au les laryngites sont de très loin les causes les plus
masque éventuellement suivie d’une intubation. fréquentes de dyspnée laryngée, elles ne surviennent
qu’exceptionnellement avant l’âge de 6 mois. On
envisagera donc l’origine d’une dyspnée laryngée
Diagnostic différentiel selon 3 groupes d’âge.

• Toute polypnée ou tachypnée (rythme rapide) permet


d’éliminer une dyspnée laryngée, sauf chez le Enfant de plus de 6 mois
nouveau-né. Elle correspond à une pathologie pulmo-
naire ou cardiaque. 1. Laryngite sous-glottique
• Une bradypnée (rythme lent) avec freinage expiratoire
signe un obstacle endothoracique (trachée, bronches ou C’est une inflammation de la sous-glotte le plus souvent
bronchioles). Le diagnostic peut être fait dès l’inspection, d’origine infectieuse. On l’appelle croup ou acute laryn-
par contraction visible des muscles abdominaux à l’ex- gotracheitis en anglais. Dans sa forme bénigne, elle
piration alors que l’inspiration est libre et brève, tandis survient plus fréquemment la nuit et l’hiver, par
que l’auscultation permet de retrouver les sifflements ou temps humide, ainsi que lors de la pollinisation ce
râles bronchiques, toujours à l’expiration. Une dyspnée qui fait évoquer un lien avec l’allergie. Elle survient
asthmatiforme est donc une bradypnée avec sifflement exceptionnellement avant 6 mois (il faut alors penser à
expiratoire caractéristique. une malformation laryngée) mais peut atteindre tous les
• Un tirage sous-mandibulaire, associé au tirage âges de l’enfance. Son origine est réputée virale car elle
cervico-thoracique, fait évoquer un obstacle sus-jacent est souvent contemporaine d’une rhinite et ne s’accom-
au larynx, généralement pharyngé, choanal ou nasal. pagne pas d’hyperleucocytose. Il a été retrouvé davantage
C’est le cas des hypertrophies amygdaliennes rencon- d’immunoglobuline E (IgE) dirigées contre un virus
trées au cours d’une amygdalite, d’une mononucléose para-influenza et un taux plus élevé d’histamine dans
infectieuse ou bien d’un phlegmon péripharyngé. Le cri les sécrétions pharyngées des enfants qui souffrent
est parfois nasonné, assourdi mais jamais rauque ni de laryngites ou de bronchopneumopathie sévère.
éteint. Surtout, la ventilation est améliorée par l’ouverture L’Influenzavirus, le virus respiratoire syncytial, l’her-
de la bouche ou la mise en place d’une sonde naso- pesvirus, le virus de la rougeole, les adénovirus et les
pharyngée. virus coxsackies ont également été retrouvés. La laryn-
• Une dyspnée en deux temps accompagnée d’un gite morbilleuse survenant au cours de l’évolution peut
stridor rauque, d’un sifflement et (ou) d’une toux être très grave, avec ulcérations profondes, nécrotiques,
« aboyante» (alors que la voix est normale) correspond dénudant le cartilage. Elles peuvent évoluer vers la
le plus souvent à un obstacle trachéal (corps étranger, sténose et, si nécessaire, l’enfant doit donc être intubé
granulome). avec beaucoup de précautions (petite sonde).
Les atteintes bactériennes sont exceptionnelles. La plus
dangereuse est la laryngite diphtérique (ou croup en
français) devenue rarissime grâce à la vaccination. On
Étiologie doit y penser en cas d’angine associée, à fausses
membranes, avec altération de l’état général et aspect
En l’absence de signe de gravité, l’examen clinique peut « toxique » de l’enfant. Mais elle peut être isolée et se
être approfondi et des radiographies réalisées mais il manifester par une dyspnée progressive, avec toux
faut s’entourer de quelques précautions. Le matériel rauque et voix éteinte. L’existence d’une rhinorrhée
d’intubation doit être prêt avant de manipuler l’enfant séropurulente ou sanguinolente est aussi évocatrice.
qui, s’il reste assis, ne doit pas être mis de force en Dans ces cas, il faut pratiquer une laryngo-fibroscopie
décubitus dorsal. Cela peut aggraver brutalement la prudente et essayer de ramener une fausse membrane à
dyspnée, de même que l’utilisation de l’abaisse-langue la recherche du bacille de Klebs-Loeffler avant d’entre-
qui sera proscrite. prendre immédiatement une sérothérapie.

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Oto-rhino-laryngologie

Hormis la diphtérie, exceptionnelle, la gravité du décompenser l’état respiratoire. C’est la triade « dyspnée
tableau clinique de la laryngite sous-glottique ne semble laryngée-fièvre élevée-dysphagie » qui suffit à faire
pas dépendre du germe. évoquer le diagnostic. Les radiographies sont inutiles. Il
faut tout mettre en œuvre pour assurer au plus vite la
2. Laryngites striduleuses perméabilité des voies aériennes. En cas de doute, si une
Ce sont des laryngites « spasmodiques » réalisant laryngofibroscopie est jugée nécessaire, elle doit être
un accès brutal et bref de dyspnée laryngée avec tirage réalisée en structure de soins intensifs avec le matériel
et cornage, parfois associée à une toux rauque. La d’intubation prêt et à l’aide d’un mini-fibroscope. Le
dyspnée disparaît en quelques minutes ou quelques larynx apparaît globalement tuméfié, rougeâtre ou violacé ;
heures. L’accès peut se répéter mais de façon toujours l’épiglotte n’est souvent plus reconnaissable et il faut un
brève. Il s’agit très vraisemblablement d’un spasme réanimateur ou un oto-rhino-laryngologiste pédiatrique
glottique ou supraglottique du larynx. La laryngo- expérimenté pour intuber l’enfant, toujours en position
fibroscopie, le plus souvent réalisée après l’accès assise ou demi-assise. Ensuite, les prélèvements bactério-
dans cette forme d’évolution si rapide, ne montre qu’un logiques sont effectués par écouvillonnage et hémocul-
érythème laryngé diffus. On parle d’hyperréactivité tures, parfois même par ponction lombaire. Une antibio-
laryngée, d’allergie et de reflux gastro-œsophagien pour thérapie est entreprise.
expliquer partiellement cette affection encore un peu
mystérieuse. 5. Laryngotrachéobronchite bactérienne
3. Laryngites récidivantes On admet qu’il s’agit d’une forme sévère d’infection
trachéale par des staphylocoques ou des streptocoques
Il s’agit de laryngites dyspnéisantes répétées, tantôt (le plus souvent) qui s’étend aux bronches et au larynx,
rapidement résolutives, tantôt justiciables de corticoïdes pouvant entraîner une dyspnée inspiratoire prédominante.
per os et parfois même d’une hospitalisation. Chez Le tableau typique associe cependant une dyspnée aux
certains enfants, le coût social, psychologique et iatro- 2 temps avec encombrement trachéobronchique et alté-
génique de l’affection est considérable du fait de la ration de l’état général chez un enfant très fébrile.
répétition des crises. Le bilan étiologique de cette entité L’abondance des sécrétions purulentes avec nécrose
passe par l’élimination d’une malformation anatomique épithéliale et le risque d’obstruction laryngotrachéale
laryngée (sténose, hémangiome), d’un foyer infectieux
imposent l’intubation.
pharyngé ou sinusien. Une allergie a également été
souvent retrouvée de même que, surtout, un reflux 6. Corps étrangers
gastro-œsophagien pathologique. Il y a suffisamment
Chez un enfant en bonne santé, apyrétique, c’est la sur-
d’arguments pH-métriques pour affirmer l’existence
venue brutale d’une dyspnée laryngée en période diurne
d’une association entre reflux gastro-œsophagien et
qui doit faire évoquer le diagnostic. Alors que l’enfant
laryngites répétées mais cela ne permet pas de préjuger
d’une relation de cause à effet et les phénomènes était en train de jouer ou de manger, un « syndrome de
d’allergie alimentaire sont évoqués. pénétration » est survenu : accès brusque de suffocation
avec apnée, cyanose ou érythème intense et quintes
4. Épiglottite aiguë de toux avec reprises respiratoires bruyantes. Il est
C’est une infection bactérienne de la margelle et du ves- essentiel de retrouver cet élément clinique à l’interro-
tibule laryngé. Le germe en cause est un Hæmophilus gatoire de l’entourage présent au moment du début des
influenzæ de type B, retrouvé dans les hémocultures symptômes. Si le corps étranger reste bloqué au niveau
dans la quasi-totalité des cas. Cela explique que cette du larynx, il provoque le plus souvent une dyspnée
pathologie, rare jusque dans les années 1990, a pratique- modérée ou intense, parfois dramatique, avec dysphonie
ment disparu aujourd’hui grâce à la vaccination systé- voire même aphonie.
matique des nourrissons contre ce germe. Cependant, il À titre d’exemple, tout corps étranger végétal ou plas-
n’est pas exclu qu’elle puisse être à nouveau observée à tique plein, cylindrique ou arrondi, mais de surface irré-
la faveur d’une baisse de la vigilance vaccinale ou chez gulière, de taille proche des dimensions de l’endolarynx
un enfant étranger. de l’enfant (comprimés, cacahuète, bonbon, bille), peut
Cette laryngite exceptionnelle réalise une cellulite ou un provoquer une apnée obstructive catastrophique. À l’op-
abcès sous-muqueux qui peut obstruer complètement la posé, les corps étrangers fins acérés (plastiques, os ou
filière laryngée supraglottique. coquilles) entraînent une dyspnée modérée et une
Elle peut survenir à tout âge, sous la forme d’une rhino- aphonie s’ils sont fichés sagittalement dans la glotte et la
pharyngite très fébrile qui évolue rapidement vers la sous-glotte. Il faut y penser devant un tableau
dysphagie et la dyspnée d’intensité rapidement impres- de laryngite dont l’évolution n’est pas satisfaisante les
sionnante. On est frappé par l’attitude de l’enfant, pâle, premiers jours. La laryngoscopie est donc ici systéma-
qui reste assis, refuse de s’allonger et bave. La toux est tique. Enfin, un corps étranger trachéal, surtout s’il est
de tonalité normale mais la voix est étouffée. grossièrement sphérique, est généralement mobile et peut
L’examen doit être réduit au minimum : pas d’abaisse- entraîner, par intermittence, une dyspnée laryngée lors de
langue, pas de décubitus qui pourraient brutalement son positionnement dans la sous-glotte.

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DYSPNÉE LARYNGÉE DE L’EN-
FANT

7. Œdèmes par brûlure dès les premières minutes de vie en


ou allergie cas de lésion sévère (atrésie laryngée) ;
Citons les brûlures thermiques • les malformations très rares
(liquides bouillants, gaz enflammés) comme les diastèmes (ou fentes
ou caustiques (liquides corrosifs laryngées) postérieurs, les kystes
d’entretien ménager), les piqûres laryngés ou pharyngolaryngés ;
d’insectes et les œdèmes allergiques • les exceptionnelles laryngites néo-
qui peuvent obstruer la margelle du natales pour lesquelles on incrimine
larynx. des virus et le reflux gastro-
œsophagien.
1 Kyste pharyngolaryngé (larynx Toutes ces affections ne peuvent être
Nourrisson de moins intubé). diagnostiquées que lors de la laryngo-
de 6 mois scopie, indispensable dans cette
Laryngites virales isolées et corps tranche d’âge. Le traitement repose
étrangers sont exceptionnels dans sur l’oxygénation au masque et sur
cette tranche d’âge. Toute dyspnée l’intubation si nécessaire.
laryngée, même si elle rétrocède sous
vasoconstricteurs et (ou) corticothé- À tout âge
rapie, impose un bilan radiologique et
endoscopique à la recherche d’une Les processus tumoraux endolaryn-
étiologie particulière. gés, exceptionnels, peuvent se voir
• L’hémangiome sous-glottique se quel que soit l’âge. La dyspnée est
manifeste après un intervalle libre de généralement précédée par une
plusieurs semaines, associé une fois dysphonie ou une aphonie prolongée.
sur deux à un angiome cutané cervico- Le nouveau-né comme le grand
facial. La radiographie de face est évo- enfant peuvent avoir ces symptômes
2 Sténose laryngée.
catrice si elle montre une voussure d’aggravation progressive et lente,
sous-glottique asymétrique. La laryngo- jusqu’au moment de la décom-
scopie met en évidence une tumé- pensation respiratoire. Rappelons
faction rougeâtre, dépressible, de la que, dans ce cadre, les patients sont
sous-glotte. encore souvent suivis pour asthme
• La sténose sous-glottique congénitale avant qu’une endoscopie ne mette
devenant symptomatique au premier en évidence l’obstacle glottique ou
épisode inflammatoire des voies supraglottique. La papillomatose
aériennes supérieures : là aussi, radio- laryngée est la cause la plus fré-
graphies et endoscopie permettent le quente, à côté de tumeurs muscu-
diagnostic en montrant un rétrécisse- laires ou nerveuses ou de carcinomes,
ment concentrique ou bilatéral de la exceptionnels.
sous-glotte.

Nouveau-né Conduite à tenir


3 Papillomatose laryngée. en situation d’urgence
Alors que le tableau est généralement
typique à cet âge, il faut penser à une Face à un enfant souffrant de dys-
obstruction laryngée devant des pnée, rappelons que le traitement
apnées sans prodromes, des accès de ne doit souffrir aucun retard, même
cyanose ou de bradycardie, des pour examen complémentaire. Bien
troubles de déglutition ou encore un entendu, il est en grande partie
arrêt cardiaque. Les causes princi- dépendant de la cause. Toute surve-
pales sont : nue brutale de la dyspnée, sans
• les formes sévères de laryngomala- fièvre, doit faire préparer une endo-
cie réalisant un repli obstructif de scopie à la recherche d’un corps
toutes les structures supraglottiques ; étranger (enfant laissé à jeun, bloc
• les paralysies laryngées, essentiel- opératoire, anesthésiste et oto-rhino-
lement bilatérales, réalisant une laryngologiste prévenus). Mais une
fermeture partielle de la glotte ; constante guide le thérapeute en
• les sténoses laryngées congénitales urgence : la prévention ou la dimi-
(ou acquises après intubation trau- nution de l’œdème du chorion,
matique et prolongée) se manifestant 4 Laryngomalacie. essentiellement sous-glottique.

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Oto-rhino-laryngologie

Traitement de la laryngite aiguë Traitement des corps étrangers


sous-glottique laryngo-trachéaux

Nous détaillerons le traitement de la laryngite aiguë En cas d’extrême urgence, avec obstruction laryngée
sous-glottique, forme la plus classique mais aussi la complète (apnée), une manœuvre de Heimlich doit être
plus courante de dyspnée laryngée. Ce traitement est en tentée. Rappelons que celle-ci doit être faite par com-
effet applicable aux autres formes d’obstacle laryngé pression thoracique et épigastrique, à l’aide des bras et
dès lors qu’une inflammation tissulaire locale s’est des poings. Chez le nourrisson, on peut préférer la
installée (traumatisme d’intubation, d’endoscopie, de manœuvre de Mofenson (brutale tape dans le dos de
brûlure) ou risque de survenir (corps étrangers, l’enfant penché en avant). Cependant, ces manœuvres
processus expansifs). Ses principes sont : éviter le ont peu de chances d’être efficaces du fait du manque
stress, les changements de position, rassurer enfant et d’air dans les voies aériennes inférieures (l’inhalation a
parents, humidifier les voies aériennes, lutter contre souvent lieu en début d’inspiration). L’idéal est une
l’œdème. Sur ce dernier aspect, rappelons que les anti- ponction (aiguille ou cathéter court) à travers la mem-
inflammatoires, même en injection et en inhalation, brane crico-thyroïdienne afin de permettre d’admettre
n’agissent qu’en quelques dizaines de minutes. C’est la de l’air intrathoracique. Alors, la manœuvre de Heimlich
raison pour laquelle l’utilisation de vasoconstricteurs sera plus efficace. Il ne faut pas tenter une telle manœuvre
est fondamentale dans les premières minutes du traite- si l’enfant respire, même très difficilement.
ment. L’administration d’adrénaline en aérosol a été En cas de dyspnée modérée, il faut éviter de mobiliser
validée dans cette indication, sans effet secondaire l’enfant et envisager rapidement (dans les 2 à 5 h) une
connu aux posologies et rythme d’utilisation recom- laryngo-trachéo-bronchoscopie sous anesthésie générale.
mandés. Les corticoïdes viennent en complément et en Le traitement des kystes et des processus expansifs
relais de l’adrénaline pour éviter un éventuel effet endolaryngés repose sur l’exérèse endoscopique, plus
rebond lorsque l’effet de celle-ci est épuisé. Le tableau rarement par chirurgie cervicale externe.
résume le protocole à suivre pour ce traitement en
fonction du stade clinique de dyspnée (tableau, voir : Prévention
Pour approfondir 3).
L’antibiothérapie n’est nécessaire qu’en présence d’une La couverture vaccinale maximale contre Hæmophilus
fièvre élevée et (ou) de troubles de la déglutition de type B doit être maintenue ainsi que les campagnes
avec bave (risque théorique d’épiglottite ou, plus de prévention vis-à-vis des risques domestiques d’inha-
sûrement, de laryngotrachéite bactérienne). On choisit lation de corps étrangers.
une association active sur les cocci gram-positifs (y Enfin, la prise en charge visant à prévenir les récidives
compris les staphylocoques résistants à la méticilline) en cas d’épisodes identiques dans les antécédents (bilan
et sur Hæmophilus influenzæ, par exemple fosfomycine ou traitement du reflux gastro-œsophagien) doit être
et céfotaxime. poursuivie. ■

TABLEAU
Traitement en urgence d’une laryngite aiguë sous-glottique

Clinique Traitement principal Complément

Stade I Toux aboyante ± fièvre Célestène ou Solupred per os Humidification


Stade II Idem + dyspnée avec tirage Aérosol au masque (air) : Surveillance hospitalière 6 à 24 h
et cornage modérés adrénaline + Soludécadron
Célestène ou Solupred per os Corticothérapie à poursuivre
ou intraveineux per os 2 à 5 j
Stade III Tirage majeur, Idem mais adrénaline 5 mg Hospitalisation en réanimation
signes de lutte importants et oxygène
Corticothérapie intraveineuse Intubation en l’absence
d’amélioration
Aérosol à renouveler après 1 à 2 h
si nécessaire
Stade IV Détresse respiratoire- Oxygène et intubation Réanimation
épuisement-suffocation Appel réanimateur immédiat

Célestène (bétaméthasone) ; Solupred (prednisolone) ; Soludécadron (dexaméthasone).

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DYSPNÉE LARYNGÉE DE L’ENFANT

POUR APPROFONDIR

1 / Rappel anatomique 3 / Modalités thérapeutiques


La compréhension des méca- • Stade I (toux aboyante avec ou sans fièvre, très légère dyspnée) :
nismes de survenue des humidification de l’air inspiré, position demi-assise, éviter de remplir
dyspnées laryngées et leur l’estomac, bétaméthasone (Célestène 8 à 16 gouttes/kg/j) ou predni-
sémiologie clinique rendent solone (Solupred 1 à 2 mg/kg/j) per os en 2 fois, pendant 1 à 3 j.
nécessaire une brève descrip- • Stade II (idem stade I + dyspnée avec tirage et cornage modérés) :
tion des structures anato- calme imposé à l’enfant et son entourage, aérosol propulsé par de
miques du larynx pédiatrique. l’air au masque avec, quel que soit le poids, dexaméthasone
Contrairement à celui de (Soludécadron) 4 mg + adrénaline 2 mg, sans dilution, à administrer
l’adulte, constitué d’un tube en 10 à 20 min et corticothérapie concomitante par voie générale
globalement cylindrique mar- (per os, intramusculaire ou intraveineuse), en relais de l’aérosol.
qué horizontalement par la Hospitalisation recommandée ou observation de plusieurs heures
saillie du pli des cordes vocales pour surveillance, dans l’attente d’un éventuel rebond.
(glotte), le larynx du nourris-
• Stade III (dyspnée avec tirage majeur, importants signes de lutte
5 Schémas comparatifs du larynx son et du petit enfant forme ou détresse respiratoire) : même traitement sauf oxygène et adréna-
un segment de cône rétréci
(adulte, enfant, à échelles différentes). line
sous le plan glottique. C’est
5 mg dans l’aérosol. Transfert en réanimation pour surveillance.
donc au niveau sous-glottique,
Intubation laryngotrachéale en l’absence d’amélioration. L’aérosol
juste avant la jonction avec la trachée, que se situe le segment le plus
peut être renouvelé après 1 à 2 h si la dyspnée reprend après une
étroit de la voie aérienne supérieure dans ces tranches d’âge.
phase d’amélioration.
En outre, la sous-glotte est entourée d’un anneau cartilagineux
inextensible (le cricoïde) qui rend les tissus sous-muqueux obstructifs • Stade IV (épuisement, suffocation) : oxygène pur au masque et
en cas de traumatisme (intubation, endoscopie, corps étranger) ou intubation laryngotrachéale (choisir une sonde d’un calibre inférieur à
d’inflammation. À ce niveau en effet, le chorion, lâche et propice à celui normalement utilisé pour le poids et l’âge de l’enfant). Transfert
l’œdème, peut entraîner un rétrécissement important de la voie en réanimation. Corticothérapie intraveineuse.
aérienne : on estime que 1 mm d’épaisseur supplémentaire de la paroi POUR EN SAVOIR PLUS
sous-glottique réduit la voie aérienne de 10 à 20 % chez l’adulte mais
de près de 50 % chez le nourrisson.
Lemaire V, Narcy Ph. Quel traitement recommandez-vous pour la
Enfin, la margelle (berge supérieure, circonférentielle, du larynx dyspnée laryngée de l’enfant ? Concours Med 1999 ; 121 : 8-9.
supraglottique comprenant l’épiglotte, cartilage fin et souple) est
recouverte de tissus également très extensibles par l’œdème. En cas Narcy Ph. Corticothérapie et laryngite aiguë sous-glottique. Arch
de processus inflammatoire (infection, brûlure, choc direct par le Fr Pediatr 1991 ; 48 : 389-90.
laryngoscope), elle devient tuméfiée et peut constituer une masse Weyd B, Bellouma P, Boidin L, Juvin D. Efficacité de l’adrénaline en
basculant dans le vestibule du larynx et obstruant brutalement la voie aérosol dans les laryngites sous-glottiques de l’enfant. Rev Off Soc
aérienne jusqu’à la glotte. Fr ORL 1997 ; 43 : 31-4.

2 / Physiopathologie Points Forts à retenir


Tout rétrécissement, tout obstacle endolaryngé partiel élève considé-
rablement la résistance à l’écoulement de l’air. En outre, le calibre des • L’étiologie est dominée par les laryngites
voies aériennes varie en fonction du temps respiratoire. Hormis la et les corps étrangers chez l’enfant
sous-glotte, indéformable, le calibre des voies respiratoires extra- de plus de 6 mois.
thoraciques se trouve diminué par la dépression relative qui règne à • Chez l’enfant de moins de 6 mois,
leur niveau à l’inspiration. À l’inverse, à l’expiration, la surpression à distance de toute détresse, une laryngoscopie,
relative (induite par la mécanique respiratoire) entraîne une dilatation éventuellement précédée de radiographies,
des voies extrathoraciques alors que les voies endothoraciques,
est nécessaire.
comprimées par la surpression endothoracique, se rétrécissent.
Contrairement aux phénomènes obstructifs bronchiques, c’est donc • Le traitement est essentiellement local
à l’inspiration que la dépression induite sur les voies aériennes extra- et symptomatique en urgence, par oxygénation
thoraciques malléables de l’enfant aggrave la perturbation aéro- et aérosols au masque comportant de l’adrénaline
dynamique. Tout obstacle haut situé se manifeste donc surtout au et un corticoïde, sans dilution, associés
temps inspiratoire. En se prolongeant, la dyspnée s’accompagne à une corticothérapie par voie générale.
d’hypoxie et d’hypercapnie, d’autant plus marquées que l’effort En outre, en cas de suspicion de corps
respiratoire est important. Elles s’accompagnent d’angoisse, étranger, une laryngotrachéoscopie conduite
d’agitation puis d’obnubilation, de sueurs et d’encombrement trachéo-
par un personnel entraîné doit être envisagée
bronchique. La cyanose est très tardive.
sans tarder. Sinon et en cas d’échec des aérosols,
Outre l’augmentation des résistances, l’obstacle laryngé génère une
perturbation du flux aérien qui devient turbulent et fait vibrer les
l’intubation à l’aide d’une petite sonde trachéale
structures pariétales souples. Cela provoque un bruit anormal (stridor) est nécessaire.
qui, là encore, se situe ou prédomine à l’inspiration.

790 LA REVUE DU PRATICIEN 2000, 50

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