Corrigé Croire Ou Savoir
Corrigé Croire Ou Savoir
Corrigé Croire Ou Savoir
entre croire et savoir ?" Introduction. La distinction entre les verbes "croire" et "savoir" conduit souvent opposer les substantifs "croyance", dune part, et "savoir" ou "science", dautre part. On oppose croyance et savoir comme deux faons de connaitre. Elles concernent donc le rapport de la raison au rel, et nos diverses faons de l'apprhender. Croire renvoie dabord la croyance religieuse ou superstitieuse: croire en Dieu, croire au paradis, croire au Pre Nol, croire au Prince charmant. Croire c'est affirmer ou nier l'existence de quelque chose ou de quelqu'un. Soit qu'on le dsire et l'espre (la terre promise, l'immortalit), soit qu'on le craigne (l'Apocalypse, le chat noir). Savoir consiste en une connaissance confirme par des preuves ou des dmonstrations. Le savoir doit tre rationnel, qu'il soit d'ordre logico-mathmatique (sciences apriori) ou exprimental (sciences a posteriori). Le savoir peut tre technique ou scientifique, pratique ou thorique: savoir conduire ou savoir historique. Le choix se focalise sur lopposition entre science et religion. Depuis l'Antiquit, l'alternative fait dbat: soit que le progrs du savoir fasse reculer les croyances irrationnelles, et c'est l'idal du progrs des Lumires; soit que le savoir positif ne suffise pas l'esprit humain qui garde au-del un besoin de croire, irrductible la science.
"Faut-il choisir ?" Cette question suppose d'abord que l'on puisse choisir, que le savoir ne s'impose pas nous comme une vidence, et la croyance comme un besoin ou une illusion. Demander s'il faut le faire suppose rsolue la question de savoir si l'on peut le faire. De plus pour choisir, il faut un libre arbitre et des raisons ou des critres qui fondent le choix. Il fait un savoir, en somme, qui permette de choisir en connaissance de cause; donc un savoir qui prcde et conditionne le choix lui-mme. Enfin, la question suppose qu'on puisse distinguer et opposer croire et savoir. Une distinction qui n'est pas vidente pour tous les philosophes, et mme pour le sens commun: sait-on toujours si l'on sait ou si l'on croit ? Sait-on ou croit-on que le soleil se lvera demain ? Demander s'il faut choisir comporte une double question : c'est demander si cest ncessaire et si cest prfrable. Ncessaire, si les deux termes sexcluent. Prfrable si le savoir est suprieur la croyance. Mais n'y a-t-il pas des croyances suprieures au savoir, ou des croyances que le savoir ne peut pas remplacer ? Et peut-tre croire et savoir peuvent s'avrer compatibles, voire complmentaires, voire mme indiscernables. Auquel cas, il ne faudrait plus, voire on ne pourrait plus choisir. Nous commencerons par tablir pourquoi il faut choisir le savoir contre la croyance, la vrit contre l'erreur ou l'illusion. Puis nous examinerons si certaines croyances ne sont pas prfrables ou irrductibles au savoir. Enfin, nous nous demanderons s'il faut choisir, c'est a dire si nous avons le pouvoir de choisir et si les deux termes sont distinguables. 1. Il faut choisir le savoir a. On choisit la vrit plutt que l'erreur et l'illusion pour pouvoir agir sur le monde. Par exemple, la biologie permet de gurir des maladies, alors que la magie est inefficace contre le Sida ou le cancer. Descartes et le mcanisme. Supriorit technique du savoir.
b. Le savoir me rend libre et indpendant. L'ignorance me rend dpendant de croyances et esclave de superstitions. Supriorit morale et politique du savoir. c. Selon Epicure, la croyance religieuse repose sur la peur et produit des crimes (le sacrifice d'Iphignie). Pour Kant et les Lumires, le savoir permet le progrs de l'humanit vers la libert et le bonheur. d. Lignorant ne peut pas choisir la croyance puisqu'il ne peut pas la comparer avec un savoir qu'il n'a pas. Il est condamn croire, sans choisir. On ne peut pas choisir la croyance. Transition: l'histoire des sciences montre comment le savoir a remplac les croyances. C'est la fois une ncessit logique (force des preuves et dmonstrations) un besoin pratique (la technique), et un choix moral (la vrit libre). Mais croire dans le progrs par le savoir et la science peut tre une croyance. Le positivisme d'Auguste Comte, au XIXe sicle, affirme une foi dans la science sense rsoudre tous les problmes de l'humanit. Le savoir devient objet de foi, et la science tenue pour toute puissante devient l'objet d'une religion. Le savoir semble rattrap par un insatiable besoin de croire. 2. Il faut choisir la croyance a. Pascal, pourtant grand scientifique, soutient que le savoir doit faire place la foi. Sur le sens de la vie et du monde, il faut parier sur l'existence de Dieu. Il faut choisir de croire contre la raison, mme sans savoir, mme si c'est absurde. b. Au sein mme de la science, toujours selon Pascal, il est des vrits fondamentales qu'on ne peut pas dmontrer. Axiomes et postulats fondent le savoir mathmatique, mais sont eux-mmes objets d'une croyance vidente. La raison s'appuie sur une croyance premire: le principe de non contradiction ou du tiers exclu. c. La croyance est porteuse de vie et de cration. La science est triste et strile, alors que l'art accroit la volont de puissance et le dsir de vie par ses illusions (Nietzsche) d. Nietzsche critique la croyance en la vrit scientifique. Il n'y a pas d'objectivit, ni de faits, mais seulement des interprtations et des croyances. La science mme repose sur une croyance en la vrit. La science nait encore d'un besoin de croire. Transition: La critique de Pascal et de Nietzsche conduit admettre la supriorit de la croyance. La science ne peut se fonder toute
seule et dpend de croyances. La croyance, foi ou illusion, est plus cratrice et plus vitale pour l'existence humaine en qute de sens. Pire, on peut douter de l'existence d'un savoir objectif: le savoir ne serait-il pas, au fond, une croyance dguise ? Ou, inversement, n'y a-t-il pas en chaque croyance un savoir ( pistm, en grec) cach, ou une sagesse (sophia, en grec) implicite ?
grands scientifiques (Pascal, Newton, Pasteur) font cohabiter croire et savoir: la foi dans la vie prive, la science dans le laboratoire de recherche. Cette cohabitation n'oblige pas choisir; au contraire, elle comblerait une double nature humaine, la fois rationnelle et passionnelle. Il ne faut pas choisir ; ce nest pas ncessaire, ni peut-tre souhaitable. b. Mieux : on ne peut pas choisir. On ne choisit pas le savoir, car les raisons de choisir prcdent toujours le choix : pour choisir en connaissance de cause , il faut dj savoir. Ce que Descartes appelle la libert d'vidence: on est oblig de choisir le vrai; le libre arbitre est fortement enclin vers l'vidence. Le choix de savoir nest pas vraiment un choix. c. L'histoire des sciences montre que des savoirs se sont avrs tre des croyances (la science d'Aristote, le gocentrisme). Des croyances peuvent donner des intuitions scientifiques (Bachelard : le rve inspire la science). Certains soutiennent que la croyance monothiste a favoris l'unification de la science moderne. Savoir et croyance sont interchangeables. d. On ne peut pas choisir car on ne peut pas distinguer savoir et croire. Le doute sinsinue : le savoir est toujours provisoire et probable ; la croyance persiste et parat plus forte. Le sceptique efface la distinction. e. David Hume soutient que toute connaissance des faits est une croyance, un belief en anglais. Car l'exprience seule est source de croyance et de savoir. Un savoir est une croyance plus probable: je sais que la terre est ronde et que le soleil se lvera demain, parce que je nai jamais eu de contre-exemple; mais je crois que je gagnerai au tierc un jour ou que certains
hommes peuvent ressusciter. Savoir nest quune faon vrifie et confirme de croire. Conclusion. L'historien Paul Veyne se demandait si les Grecs croyaient en leurs dieux. Comment des esprits qui inventrent la philosophie, les mathmatiques, la dmocratie, ont-ils pu croire de telles balivernes ? Comme nous croyons au Pre Nol, pour se faire plaisir, sans y croire vraiment. Il est diffrentes manires de croire, depuis la croyance aux fantmes jusqu'aux vrits premires qui fondent la science. La science nest peut-tre quune croyance qui na pas encore t rfute, comme le suggre le principe de rfutabilit ou de falsifiabilit de Karl Popper. Mme si l'on peut les distinguer, mme si la raison oblige prfrer le savoir la croyance, on doit reconnaitre que la question du choix se pose rarement. Soit que le progrs de la science efface inluctablement des croyances, soit que la croyance s'impose nous sans que nous puissions y rsister (croire en l'amour ternel), soit que nous ne reconnaissions pas qu'il s'agit d'une croyance (la science d'aujourd'hui est la croyance de demain) La question du choix semble donc mal pose. 1. Parce que la distinction est tnue et contestable. 2. Parce que choisir le savoir est sans doute un choix thique, mais quen ralit, le choix simpose notre volont, soit par lvidence rationnelle du vrai, soit par le besoin irrsistible de croire. Cette dualit du savoir et du croire est sans doute constitutive de la condition humaine, de cette double nature humaine, la fois rationnelle et pathologique , comme dit Kant. Les robots peuvent-ils avoir des croyances ?