Explor Funct PMN
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Quintessence
P La spiromtrie, facile dusage au cabinet du gnraliste, renseigne lors de pathologies obstructives telles que la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) et lasthme. Elle permet de poser le diagnostic de trouble ventilatoire obstructif, de quantifier sa svrit et dvaluer sa rversibilit. P Les mesures des volumes pulmonaires et la capacit de diffusion du monoxyde de carbone (DLCO) peuvent dans certaines situations complter la spiromtrie. P La mesure des volumes pulmonaires permet de poser le diagnostic de trouble ventilatoire restrictif, de distension pulmonaire ou de pigeage gazeux. P La mesure de la DLCO reflte ltat de la microcirculation pulmonaire et permet dvaluer le trouble de lchange gazeux induit par une pathologie obstructive, restrictive, ou vasculaire pulmonaire.
Introduction
Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) usuelles se composent de trois examens standards: la spiromtrie, la mesure des volumes pulmonaires et la mesure de la capacit de diffusion du monoxyde de carbone (DLCO). La spiromtrie est considre comme le meilleur test de caractrisation de la sant respiratoire dun patient. Simple et rapide de ralisation, elle est praticable au cabinet du gnraliste [1]. Les mesures des volumes pulmonaires et de la DLCO pourront, dans certaines conditions, complter la spiromtrie. Ces deux examens sont disponibles au cabinet du pneumologue. Cet article est largement inspir des recommandations ATS/ERS 2005 des socits amricaine et europenne de pneumologie [26]. Son objectif est doffrir au mdecin non-pneumologue une interprtation simple et systmatique des EFR. Un rsum pratique (tab. 1 p) et un algorithme dinterprtation (fig. 1 x) sont galement proposs.
Antoine Pasche
Les auteurs ne dclarent aucun soutien financier ni dautre conflit dintrt en relation avec cet article.
des individus risque de maladie respiratoire ou encore destimer un risque opratoire. Les EFR ont galement un intrt dans la surveillance dune maladie respiratoire en valuant leffet dune intervention thrapeutique, en dcrivant lvolution dune maladie ou en dtectant des effets secondaires de mdicaments. Finalement, elles sont utiles dans lvaluation dune invalidit ou encore dans des enqutes pidmiologiques de sant publique. Une revue rcente propose une mise jour des contreindications aux EFR [7]. En raison de complications cardio-vasculaires ou respiratoires possibles, on ne devrait pas les raliser en cas de cardiopathie instable (infarctus du myocarde, angor), danvrisme aortique ou dembolie pulmonaire. On sabstient de les effectuer dans les trois semaines aprs une chirurgie thoracique, abdominale ou crbrale par crainte de complication locale. Finalement, certaines conditions comme des douleurs thoraciques, abdominales, faciales ou encore un tat confusionnel rendront le rsultat sous-optimal et devraient tre corriges avant la ralisation des EFR. Si les EFR sont but diagnostique, le patient doit interrompre ses bronchodilatateurs en fonction de la pharmacocintique du mdicament. En rgle gnrale, les bronchodilatateurs de courte dure daction sont interrompus 6 heures avant lexamen et ceux de longue dure, 12 ou 24 heures avant. La thophylline ne doit pas tre administre pendant les 24 heures prcdant le test. Sil sagit par contre dun examen de suivi dune maladie pulmonaire, les bronchodilatateurs sont poursuivis. Dans les heures prcdent le test, le patient ne doit pas fumer, manger ou se livrer une activit physique. Les EFR commencent par la rcolte des donnes dmographiques, qui permettent de calculer les valeurs de rfrence. En pratique, ces valeurs sont donnes par un logiciel utilisant des quations de rfrence issues dtudes sur des populations en bonne sant. Elles prennent en considration des paramtres anthropomtriques, tels que le sexe, lge et la taille. Il existe galement des variations interethniques. Une valeur est considre comme anormale si elle est infrieure au 5e percentile de la distribution de la population de rfrence. Actuellement en Europe, les valeurs publies par la CECA (Communaut europenne du charbon et de lacier) sont celles communment admises et utilises pour les adultes [8].
Spiromtrie
La spiromtrie est une mesure physiologique de la faon dont un individu inspire ou expire des volumes dair au
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VEMS/CV(F)
<5e percentile oui non
oui
non
non
non
oui
spiromtrie normale
syndrome restrictif
Pigeage gazeux
VR/CPT >95e percentile
syndrome mixte
non normal
KCO
oui
KCO
non
oui Asthme
non
KCO
oui
BPCO
Figure 1 Algorithme dinterprtation des fonctions pulmonaires, VEMS: volume expir maximal en 1 seconde, CV(F): capacit vitale (force), CPT: capacit pulmonaire totale, KCO: coefficient de diffusion du CO, VP: valeur prdite.
Tableau 1 Interprtation des explorations fonctionnelles respiratoires. a. Volumes Syndrome restrictif Pigeage gazeux Distension pulmonaire b. Spiromtrie Syndrome obstructif Test de bronchodilatation Degr du trouble ventilatoire (obstructif et/ou restrictif) VEMS/CV ou VEMS/CVF <5e percentile Rversibilit significative: D VEMS ou CVF >12% et 200 ml par rapport la valeur de base VEMS (% de valeur prdite) Lger Moyen Moyennement svre Svre Trs svre Classification de la BPCO selon GOLD (valeurs post-bronchodilatateur) Stade I Stade II Stade III Stade IV c. Capacit de diffusion DLCO normale: 75125% valeur prdite Trouble de la diffusion Lger Moyen Svre DLCO (% valeur prdite) 6174 4060 <40 >70 6069 5059 3549 <35 VEMS/CVF <70%, VEMS >80% valeur prdite VEMS/CVF <70%, VEMS 5079% valeur prdite VEMS/CVF <70%, VEMS 3049% valeur prdite VEMS/CVF <70%, VEMS <30% valeur prdite CPT <5e percentile (ou <80% valeur prdite) VR/CPT >95e percentile (ou >130% valeur prdite) CRF >95e percentile (ou >130% valeur prdite) (sauf en cas de grands volumes harmonieux)
CPT: capacit pulmonaire totale, VR: volume rsiduel, CRF: capacit rsiduelle fonctionnelle, VEMS: volume expir maximal en 1 seconde, CV: capacit vitale, CVF: capacit vitale force, BPCO: broncho-pneumopathie chronique obstructive, GOLD: Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease, DLCO: capacit de diffusion du monoxyde de carbone.
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cours du temps. Elle permet dvaluer la sant respiratoire dun patient mais ne fournit pas un diagnostic tiologique elle seule. Son apport principal est de dtecter et de quantifier un trouble ventilatoire obstructif. La spiromtrie dtermine: Au cours dune expiration force: le Volume Expir Maximal en une Seconde (VEMS, ou en anglais FEV1); la capacit vitale force (CVF, ou FVC); le dbit expiratoire de pointe (DEP, ou PEF); le dbit expiratoire maximal entre 25 et 75% de la CVF (DEM2575, ou FEF2575). Au cours dune expiration lente: la Capacit Vitale (CV, ou VC). Physiologiquement, la CV et la CVF sont quivalentes. La spiromtrie peut donc se limiter la manuvre de lexpiration force. Cependant, en prsence dun trouble ventilatoire obstructif, la CVF peut tre abaisse par rapport la CV, do lutilit de raliser en plus une manuvre lente. La spiromtrie permet de poser le diagnostic de trouble ventilatoire obstructif si le rapport VEMS/CV (rapport de Tiffeneau) ou VEMS/CVF est diminu. Elle permet dvaluer la svrit dun trouble respiratoire selon la valeur du VEMS. Finalement, elle peut aussi, en cas de diminution harmonieuse du VEMS et de la CV(F), faire suspecter un trouble ventilatoire restrictif ou un pigeage gazeux. Graphiquement, la spiromtrie est reprsente par la courbe dbit-volume. La morphologie de cette courbe est utile la bonne interprtation de la spiromtrie puisquelle renseigne sur la qualit du test et peut galement montrer des images typiques de troubles fonctionnels particuliers (fig. 2 x). Le test de bronchodilatation est utile en cas de trouble ventilatoire obstructif afin dvaluer son degr de rversibilit. Il se pratique de la manire suivante: spiromtrie
avec expiration force, inhalation dun bronchodilatateur (par ex. salbutamol, Ventolin 400 g par arosoldoseur avec chambre dinhalation), pause de 15 minutes, spiromtrie avec expiration force. Le test de rversibilit est considr comme positif si le VEMS et/ou la CVF augmente de >12% et >200 ml aprs bronchodilatateur.
dbit
EXPIRATION
volume
INSPIRATION
a)
b)
c)
Figure 2 Exemples de courbes dbit-volume pathologique: en noir: courbe normale, en rouge: a) asthme, b) emphysme, c) syndrome restrictif.
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Broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) Linitiative GOLD (Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease) [9] propose un critre unique pour diagnostiquer le trouble ventilatoire obstructif dans le cadre de la BPCO: un rapport VEMS/CVF <0,7, mesur aprs bronchodilatateur afin dcarter les cas dasthme. Cette dfinition a lavantage de la simplicit, ne ncessitant que la manuvre dexpiration force et tant indpendante des quations de prdiction. Toutefois, elle surestime la prvalence du trouble ventilatoire obstructif chez la personne de plus de 50 ans. Sur le plan pratique, il parat raisonnable de ne retenir le diagnostic de BPCO quen prsence de symptmes associs un rapport VEMS/CVF abaiss. Linitiative GOLD propose de classer la svrit de la BPCO selon le VEMS post-bronchodilatateur (tab. 1b).
vitale la spiromtrie. Une capacit vitale basse peut relever dun trouble ventilatoire restrictif ou dun pigeage gazeux.
Volumes pulmonaires
Alors que la spiromtrie mesure le volume dair mobilisable entre inspiration complte et expiration complte, la mesure des volumes pulmonaires totaux requiert dautres techniques. Les volumes pulmonaires peuvent tre mesurs par la plthysmographie corporelle ou par la mthode de dilution des gaz. Cette dernire mthode entrane une sous-estimation des volumes en prsence de troubles de distribution de la ventilation lis un trouble ventilatoire obstructif. Pour cette raison, la plthysmographie corporelle reprsente actuellement la mthode de rfrence. La mesure des volumes pulmonaires est en particulier indique en prsence dun abaissement de la capacit
Capacit de diffusion
La capacit de diffusion du monoxyde de carbone (DLCO), appele aussi facteur de transfert du CO (TLCO), reprsente la capacit des poumons transfrer les gaz de lair alvolaire aux globules rouges dans les capillaires pulmonaires. La DLCO reprsente ainsi une fentre sur la microcirculation pulmonaire et reflte la surface de poumon disponible pour les changes gazeux. La mthode habituelle de mesure est celle de la DLCO en apne. Aprs une expiration complte, le sujet effectue
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une inspiration rapide et complte dun mlange dair contenant une faible fraction de CO et dun gaz inerte (hlium ou mthane). Aprs une apne de 10 secondes, il expire lentement et la fraction de CO et de gaz inerte est mesure dans lair exhal. De l sont calculs: le coefficient de diffusion du CO (KCO), qui exprime le taux de transfert du CO dans le sang capillaire et le volume alvolaire (VA), qui exprime le volume de distribution du CO au cours de la manuvre. La capacit de diffusion est calcule comme le produit de ces deux mesures: DLCO = KCO x VA. Plusieurs facteurs influencent la valeur de la DLCO. Le taux dhmoglobine: le CO se fixe sur lhmoglobine, ainsi la DLCO augmente en cas de polyglobulie et diminue en cas danmie. Il convient donc toujours de corriger la DLCO en fonction du taux dhmoglobine: cest la DLCO corrige. Le taux de carboxyhmoglobine: toute augmentation de [HbCO] (tabagisme, intoxication au CO) diminue la DLCO. Le sujet doit sabstenir de fumer dans les 24 heures prcdents le test. Laltitude: loxygne et le CO sont en comptition pour se fixer sur lhmoglobine. En altitude, la baisse de la fraction inspire doxygne entrane une augmentation de la DLCO. Lexercice physique: toute augmentation du dbit cardiaque entrane une augmentation du volume capillaire pulmonaire, donc de lhmoglobine disponible, et par consquent de la DLCO. Le sujet ne doit pas avoir fourni un effort physique avant la mesure de la DLCO.
pneumopathies interstitielles ainsi que dans lvaluation fonctionnelle prcdant une rsection pulmonaire. Dans linterprtation de la DLCO, il est utile dexaminer galement ses composantes: le coefficient de diffusion (KCO) et le volume alvolaire (VA). Le tableau 2 p rsume les principaux profils pathologiques de la DLCO.
Conclusion
Les EFR constituent un outil indispensable lvaluation pulmonaire des patients prsentant une symptomatologie respiratoire et dans le suivi dune maladie pulmonaire. Grce la spiromtrie, le mdecin gnraliste peut mettre en vidence un trouble ventilatoire obstructif et assurer le suivi dune BPCO ou dun asthme. Il rfrera le patient au pneumologue pour poursuivre les investigations par des mesures des volumes pulmonaires afin de poser un diagnostic de syndrome restrictif ou pour raliser une mesure de la capacit de diffusion afin dvaluer la microcirculation pulmonaire.
Correspondance: Dr Antoine Pasche Service de pneumologie Dpartement de mdecine CHUV CH-1011 Lausanne antoine.pasche[at]chuv.ch Rfrences
Expansion incomplte Perte localise dunit Perte diffuse dunit Emphysme Maladie vasculaire pulmonaire Haut dbit sanguin Hmorragie alvolaire Normal
Normal
VA: volume alvolaire, KCO: coefficient de diffusion du CO, DLCO: capacit de diffusion du monoxyde de carbone.
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