CMDT Budget
CMDT Budget
CMDT Budget
Le CDMT est potentiellement un instrument trs utile pour combler le vide frquent
entre les politiques de dveloppement et leur traduction budgtaire. Lapproche par les
Objectifs du Millnaire pour le Dveloppement nest pas contradictoire avec
llaboration des CDMT, car ceux-ci sont des instruments pour grer la tension entre les
objectifs et la contrainte budgtaire. Nanmoins, la mise en place dun CDMT peut tre
dangereuse si elle rsulte dune conditionnalit impose de lextrieur et si elle fait appel
demble des instruments sophistiqus. Le CDMT doit tre mis en oeuvre de manire
graduelle en fonction des capacits. Ainsi conu, le CDMT peut contribuer efficacement
plusieurs processus convergents : la rforme des finances publiques (prise en compte
du cadre macro-conomique, rforme des nomenclatures budgtaires), le renforcement
des capacits darbitrages budgtaires fonds sur les performances, le suivi des rsultats
des diffrentes politiques et la rtro-action du suivi sur la dfinition des politiques.
Marc Raffinot est Matre de confrences lUniversit Paris Dauphine, EURIsCO et chercheur associ DIAL. Boris
Samuel est Statisticien conomiste.
106
Dfinition
La dfinition couramment retenue2, tire du Manuel
de gestion des dpenses publiques de la Banque
mondiale, est la suivante : Un CDMT comprend
une enveloppe financire globale fixe au sommet
par les services centraux, des discussions la base
pour lestimation des cots prsents et moyen
terme des options de politique publique et, enfin, un
processus dajustement des cots et des ressources
disponibles. (Banque mondiale, 1998). Le CDMT
apparat ainsi comme un processus de dcision
itratif permettant de fixer la contrainte macroconomique et de planifier les politiques
sectorielles. Une seconde dfinition provenant de la
mme source prsente le CDMT comme un
ensemble cohrent dobjectifs stratgiques et de
programmes de dpenses publiques qui dfinit le
cadre dans lequel les ministres oprationnels
peuvent prendre des dcisions pour la rpartition et
lemploi de leurs ressources . Ainsi, le CDMT
sinscrit dans une logique de gestion oriente sur
les rsultats, faisant rfrence la planification
stratgique, la notion de programme et
lautonomie de dcision des gestionnaires.
Ltablissement dun lien entre les allocations
budgtaires, la fixation dobjectifs et le suivi des
performances est une dimension essentielle de
lexercice.
Principaux objectifs
Lobjectif du CDMT (pluriannuel) est doffrir un
cadre commun aux dfinitions des politiques, de
planification et de budgtisation aux niveaux
central et sectoriel. Il vise dcloisonner le
processus de dcision en permettant des changes
itratifs entre niveaux global et sectoriels et entre
perspectives stratgiques et financires. Il sagit
de : (i) dterminer la contrainte globale sur la base
dun cadre de ressources soutenable moyen terme
; (ii) prendre en compte les implications financires
des politiques (cots des politiques en cours,
charges rcurrentes relatives aux projets
dinvestissement, projets pluriannuels, etc.) ; (iii)
amoindrir les tensions lors de lexcution
budgtaire en assurant une meilleure prvisibilit
de la contrainte de ressources et des ordres de
priorits (OCDE, 2005a ; chap. 6).
De quoi sagit-il ?
Lide de CDMT nest pas nouvelle. Avant que
lajustement structurel ne balaye les systmes de
planification, de nombreux travaux ont t
consacrs la liaison entre le plan moyen terme et
le budget. Le fait que ces travaux aient t ngligs
est probablement une des raisons de leffondrement
des systmes de planification aprs les annes
1980.
107
Encadr 1
Le CDMT global prsente un cadrage macro-conomique, des projections dtailles des agrgats
budgtaires en ressources et en emplois (cadrage macro-budgtaire).
CDMT sectoriels
Cadrage macro
Ressources
Emplois
valuation de limpact
CDMT global
laboration
Suivi
Administratif
Socit civile
Statistique
Cadrage
globale
macro-conomique
et
contrainte
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nouvelles politiques
rserve
politiques en cours
pargne budgtaire
anne
n-1
n+1
n+2
Encadr 2
permettant les
performances.
premires
valuations
des
Lidentification
des
possibilits
dpargne
budgtaire est alors entreprise ainsi quune
rflexion sur les activits qui pourraient tre prises
en charge par dautres oprateurs que ltat. Enfin,
dans les pays mettant en uvre un DSRP, cest le
moment de la prparation des bilans de la mise en
uvre et de la rdaction du rapport annuel
davancement. Afin dalimenter le processus
dalignement entre ressources soutenables et
dpenses, la revue des dpenses sectorielles permet
dvaluer les cots approximatifs des orientations et
objectifs retenus. De mme que pour le cadrage
macro-conomique, laffinement des programmes a
lieu tout au long du processus budgtaire et prend
en compte les plafonds et contraintes communiqus
par le niveau central en fonction des volutions du
cadre macro-conomique.
Fixation de plafonds indicatifs
Sur la base de concertations menes entre niveaux
central et sectoriels, le processus permet de
109
proposer
des
enveloppes
indicatives
2e trimestre
Juin
Juillet aot
Septembre
Adoption du budget
Novembre / dcembre
Lutilisation dune contrainte flexible peut permettre de faire rvler leurs prfrences aux responsables sectoriels pour
obtenir des ordres de priorits sur la dpense (cas de ltude sur la Mauritanie). En revanche, elle peut constituer une
brche perue comme un assouplissement de la contrainte budgtaire, ce qui entrane terme une incitation aux dpenses
additionnelles. Au Bnin, les responsables centraux proposent divers scnarii de dpenses articules deux scnarii
macro-conomiques.
7
Nous verrons plus loin quune autre approche consiste voir dans le CDMT la traduction budgtaire du DSRP. Le
CDMT est alors un instrument de mise en uvre du DSRP.
8
Une partie importante des arbitrages effectuer en cas de rduction des ressources est dailleurs interne aux secteurs
prioritaires, puisque ce sont eux qui disposent des dotations budgtaires les plus importantes.
110
Cadrage
macro-conomique
contrainte budgtaire globale
et
111
La programmation sectorielle
Vision sectorielle unifie
Lexistence dune stratgie nationale facilite
llaboration de CDMT sectoriels, si toutefois la
stratgie est effectivement reflte au plan
budgtaire et prend en compte lensemble des
dpenses du ministre ou du secteur concern. Dans
la pratique, les principaux secteurs dpensiers, mis
part la dfense, sont couverts par des stratgies
globalement bien dfinies (souvent dans
lducation et la sant et dans une moindre mesure
lhydraulique ou le dveloppement rural). Cest
probablement l lun des impacts importants de la
mise en place dapproche par programmes
sectoriels (Sector Wide Approaches=SWAPs) et
des politiques de lutte contre la pauvret menes
depuis les annes 1990.
Il nest pourtant pas rare de constater la coexistence de plusieurs stratgies pour un mme
secteur, ventuellement contradictoires, lies
diffrents approches (par exemple le DSRP dun
ct, un exercice de planification interne de lautre
ou des programmes dappuis de bailleurs). Et il est
frquent que lensemble des dpenses du secteur ne
soit pas pris en compte dans les stratgies
nationales. Cest le cas pour certains financements
extrieurs, parfois pour une partie du budget de
fonctionnement (les dpenses communes dont la
forte proportion caractrise des systmes faible
performance budgtaire, pour les budgets des
administrations etc.) ou pour les dpenses ralises
par des administrations locales, sans parler du
secteur priv. La mise en place de procdures
exceptionnelles (comptes spciaux) par les bailleurs
rend plus complexe lidentification des dpenses.
En outre le recours des units dexcution des
projets ou programmes est encore loin dtre
abandonn malgr les recommandations8. De
nombreux pays connaissent des situations o la
politique sectorielle est conduite ou mise en uvre
par des institutions autres que le ministre en
charge, par des institutions morceles et/ou de
8
responsabilits
administratives
diverses,
complexifiant la prise en compte globale au niveau
budgtaire. Enfin, pour des secteurs ayant recours
des partenariats public/priv, des oprateurs semipublics ou des EPA (dans lhydraulique, les
infrastructures etc.), les pratiques de comptabilit
publique ne prennent pas toujours correctement en
compte les activits de ces entits dans le budget.
Linadquation frquente des structures de pilotage
des politiques sectorielles couple aux faiblesses de
lexcution et du suivi budgtaire rendent dlicate
la formulation dune stratgie sectorielle globale, en
termes techniques mais aussi institutionnels.
Lexercice CDMT peut servir de catalyseur pour
avancer vers la mise en place de structures
sectorielles
unifies.
Dans
certains
cas,
llaboration dun CDMT sectoriel a t la premire
occasion de mettre plat les dpenses relles dun
secteur, ce qui a permis de constater quel point la
structure des dpenses diffrait des priorits
nationales.
Planification stratgique et budgets programme
Le renforcement des capacits de budgtisation et
de planification sectorielle passe par une rflexion
sur les structures administratives, qui doivent offrir
des possibilits de coordination satisfaisantes. Ainsi
des exercices de planification stratgique sont
conduits paralllement au dveloppement des
stratgies sectorielles et des CDMT pour mieux
aligner
lorganisation
des
services
gouvernementaux avec les objectifs poursuivis (cf.
Short, 2003, pour lexemple du Rwanda, qui a
dfini un modle de planification stratgique
appliqu tous les niveaux de gestion
administrative). En revanche les classifications par
programmes ne sont pas toujours suffisamment
matrises pour tre utilises durant lensemble du
cycle budgtaire. Ctait par exemple la situation au
Burkina Faso, (Mespl-Somps et Raffinot 2003).
Lalignement ncessaire des classifications par
programme avec la planification stratgique du
gouvernement est une difficult pour les pays
mergents ou en transition (Diamond, 2003),
rendant leur utilisation oprationnelle difficile, a
fortiori pour les pays en dveloppement.
Aussi, la mise en place de budgets programmes
pour dterminer les priorits doit tre entreprise
avec prcaution, selon des programmes larges,
simples et sans contradiction avec lorganisation
institutionnelle (OCDE, 2001). Lexistence de
classifications fonctionnelles, indpendantes des
structures administratives et des politiques
conduites, constitue souvent un juste milieu pour le
suivi des politiques sectorielles. Le CDMT doit
dabord tre un instrument oprationnel adapt aux
capacits existantes.
112
113
la
classification
administrative
(Mespl-Somps et Raffinot, 2003).
Les classifications fonctionnelles prsentent les
allocations par fonctions indpendamment de la
structure organisationnelle du gouvernement10,
contrairement aux classifications par programmes.
Disponibles dans de nombreux pays DSRP11 elles
sont peu coteuses pour les systmes de gestion
budgtaire et fournissent des critres utiles pour les
arbitrages intersectoriels et le suivi dexcution.
Excution et suivi budgtaire
Il est irraliste de penser quun CDMT pourra tre
oprationnel et soutenable dans un contexte marqu
par une absence, un retard trs important ou un
manque de fiabilit des donnes sur lexcution
budgtaire. Outre le manque dincitation
amliorer la formulation du budget en cas de doute
10
114
115
14
. Il est noter que pour le systme de notation des
finances publiques dans linitiative PPTE, la note
concerne lexistence de projections moyen terme et non
dun CDMT.
116
16
Voir OCDE, 2005b et dans le domaine des finances
publiques, PEFA, 2003. Les instruments de diagnostic
dans le domaine des finances publiques constituent
dsormais une base oprationnelle pour le renforcement
coordonn par les partenaires des systmes de gestion
publique.
117
Encadr 3
118
gestion
des
finances
Conclusion :
portun ?
un
exercice
op
119
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