CNV Pratique

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La Communication NonViolente en pratique

Comment parler ce "langage du coeur" ? Rponse de Marshall Rosenberg, docteur en psychologie clinique, ancien lve de Carl Rogers. Directeur de la formation du Center for Nonviolent Communication, Sherman au Texas, il anime, travers le monde, de nombreux sminaires ouverts au grand public et aux organisations prives. Quarante ans aprs avoir dvelopp aux EtatsUnis le processus de communication nonviolente (CNV), il vient dtre seulement publi en France : Les mots sont des fentres ou bien ils sont des murs (Syros).

Il y a quatre points simples mais essentiels suivre. Dabord, jobserve ce qui se passe rellement dans une situation donne : questce qui, dans les paroles ou les actes de mon interlocuteur, contribue mon bien(mal)tre ? Ensuite, jexprime ce que je ressens en prsence de ces faits : suisje triste, joyeux, inquiet, fch ? Puis je prcise les besoins lorigine de ces sentiments. Ainsi, la mre dun adolescent pourraitelle exprimer ces trois points en disant son fils : "Lorsque tu laisses tes vtements dans le salon au lieu de les emporter [observation], je suis de mauvaise humeur [expression] car jai besoin de plus dordre dans les pices que nous partageons [besoin prcis]." Dernire composante : une demande prcise et concrte. "Pourraistu, sil te plat, prendre tes affaires et les mettre dans ta chambre ?" En utilisant ces quatre points et en aidant lautre faire de mme, nous tablissons un courant de communication qui dbouche naturellement sur la bienveillance. Et cela, aussi bien dans son couple ou avec ses enfants quau travail. Chaque anne, nous formons des policiers, des enseignants, des infirmires. Mais aussi des militants pour la paix, dans des rgions touches par la guerre comme le Rwanda, lIrlande, la Palestine ou Isral. Source: Psychologies, n 181, dcembre 1999. Exemples Extraits de : "Pratique de la communication nonviolente", Wayland Myers Editions Jouvence, 96 pages, 29 FF Dans la communication nonviolente, notre objectif principal est de russir savoir comment va chacun, et ce qui peut tre fait maintenant pour amliorer le bientre de tout le monde. La liste de contrle, comme je lappelle, nous concentre sur certaines informations qui nous aident raliser cet objectif ; quant aux trois recommandations, elles nous aident communiquer cette information de la faon qui soit le plus susceptible dinspirer de la bienveillance et de la gnrosit mutuelles. Il est temps, maintenant, de voir comment ces deux aides fonctionnent ensemble, mais auparavant, rsumonsles cidessous.

La liste de contrle Les trois recommandations 1. Quel vnement dclenche lenvie de sexprimer chez lun et chez lautre ? 2. Quelles motions sont veilles en chacun ? 3. Quels besoins personnels gnrent ces motions ? 4. Quelles actions spcifiques chacun souhaitetil accomplir (ou voudraitil quautrui accomplisse), maintenant ? 1. Dcrivez les faits Ne collez pas dtiquettes et ne faites pas la morale 2. Mettez en lumire les sentiments et les besoins Evitez les reproches ou lattitude dfensive 3. Demandez les actions que vous souhaitez Nutilisez pas les exigences, la menace, les ordres ou la manipulation Comme je lai prcis plus haut, nous pouvons nous servir de la liste de contrle et des trois recommandations comme de "roues dappoint" pour nous aider parler et couter en accord avec le processus de la CNV. Par exemple, lorsque nous parlons, nous pouvons nous demander lequel des quatre points de la liste de contrle nous souhaitons communiquer, et nous servir des trois recommandations pour nous aider exprimer cette information de la faon qui soit le plus susceptible de stimuler chez autrui une comprhension bienveillante, le sentiment dtre li lautre et la gnrosit. Lorsque nous coutons, nous pouvons prter attention aux quatre lments dinformation que nous fournit notre interlocuteur, et utiliser les trois recommandations pour nous aider entendre cette information de manire qui veille notre propre bienveillance. Lexemple cidessous est tout simple. Il sinspire dune conversation que jai eue avec un jeune homme qui venait de quitter lhpital, aprs avoir t trait pour une overdose dont il avait failli mourir. Nous parlions dun programme de rhabilitation pour toxicomanes quil sapprtait suivre dans un autre tat des tatsUnis. Dialogue sans les outils CNV Cette conversation aurait pu se drouler de la manire suivante, si javais utilis les outils de communication "violente" enseigns dans ma culture :

Il me dit: "Je me fiche de ce que dit lquipe de rhabilitation. Au bout de quatre mois, je rentre chez moi." Je rplique: "Tu plaisantes? Tu as failli y passer!" Il reprend, sa voix trahissant une agitation croissante: "Jmen fiche. Quatre mois, a suffit." Jinsiste: "Tu ragis comme lalcoolique ou le toxico type. Il faut que tout se fasse comme tu le veux et quand tu le veux. Mais si ta faon de faire tait si bonne, comment se faitil que tu aies failli mourir ?" Il se lve, agitant la tte, la voix empreinte de colre, et dit: "Je me fiche de ce que vous pensez. Vous ntes quun abruti." Il tourne les talons et quitte la pice. Quaije fait, la lumire des concepts de la communication nonviolente? Je ne lui ai pas dit comment je me sentais, et je ne me suis pas non plus intress comment lui allait. Je suis parti du principe quil ntait quun dingue, ce qui revient au mme que si je lavais appel ainsi. Je lai tiquet comme tant alcoolique/toxicomane. La conversation a t brve, du fait que je lui ai rpondu de cette manire, et nous nous sommes retrouvs tous les deux encore plus spars lun de lautre, et encore plus peins

quavant. Quelle issue dprimante. Or de telles issues sont frquentes, lorsquon essaie de parler dun sujet forte charge motionnelle en utilisant les mthodes de communication habituelles. Dialogue en communication nonviolente La conversation aurait pu se drouler comme suit, en utilisant les outils propres au processus CNV pour me guider :

Il commence: "Je me fiche de ce que dit lquipe de rhabilitation. Au bout de quatre mois, je rentre chez moi." Je me sens immdiatement inquiet, et le processus CNV me dit que si je veux me lier lui de faon tangible et constructive, il est utile que nous parlions tous deux des quatre lments de base. Je dcide de commencer en lui communiquant ces quatre points en ce qui me concerne. Je lui dis: "Je suis inquiet lorsque je tentends dire que tu veux rentrer au bout de quatre mois, parce que je souhaite que tu reoives le plus daide possible, et la meilleure qui soit. Peuxtu men dire un peu plus sur les sentiments et penses que tu as, qui te conduisent dire que tu souhaites rentrer dans quatre mois, quoi quen pensent les autres ?" Le fait de lentendre constitue pour moi lvnement dclencheur. Je me sens inquiet parce que mon besoin est que les gens dont je me soucie reoivent tout le soutien dont ils ont besoin pour amliorer leur qualit de vie. Ce que je veux dans limmdiat est quil me fournisse lun des quatre lments dinformation, savoir ses sentiments. Il me rpond: "Et bien, je vais simplement rentrer chez moi dans quatre mois. Je me fiche de ce quils disent." Il na toujours rien dit de ses sentiments. Jessaie donc un autre chemin pour parvenir au mme but. Je tente de deviner ses sentiments. Je lui demande: "Astu peur que lon te demande dy rester plus que quatre mois?" "Oui", me ditil. Pour comprendre lorigine de sa peur, la liste de contrle suggre que je minfirme de ceux de ses besoins qui sont en jeu. Je lui demande: "En quoi le fait de rester plus de quatre mois te perturbe?" "Cest trop long", me rpondil. Les questions ouvertes ne gnrent souvent pas beaucoup dinformation. Jessaie donc une autre approche, en tentant de deviner lequel de ses besoins est concern. Je tente cette question: "Estce que lide de rester plus de quatre mois te fait peur, parce que tu penses que tu te sentiras seul, loin de chez toi si longtemps?" "Oui, ma famille et mes amis vont me manquer; en plus ce sera lt, et je ne pourrai pas aller la plage." Il semble que son besoin de compagnie et celui dtre dans un cadre quil apprcie soient la cause de sa peur, mais je souhaite avoir confirmation de cela. Je lui demande: "Lorsque tu penses cette dure de quatre mois, estce que tu es inquiet lide que dici l, le besoin dtre avec ta famille et tes amis, et de pouvoir profiter de la plage, sera si fort que tu ne peux pas imaginer comment tu vas le supporter ?" "Oui", ditil dune voix plus douce. "a minquite beaucoup." Je cherche alors le quatrime lment dinformation : y atil quelque chose quil dsire de moi maintenant? Je menquiers auprs de lui: "Pensestu que je puisse faire ou dire quelque chose maintenant, qui taiderait te sentir mieux ce propos ?"

"Non", rpondil. "Cest juste que je me fais beaucoup de souci. Je ne suis jamais parti de chez moi si longtemps." Parvenu ce point, un cycle de communication est achev. Chacun dentre nous a pu apprendre les quatre lments dinformation concernant lautre, tels quils se prsentent maintenant, propos de ce problme spcifique. Je pourrais poursuivre et lui offrir davantage dempathie pour sa peur, ou je pourrais essayer de voir si nous pouvons trouver quelque chose pour laider grer cette peur, ou encore lui demander sil a envie de mentendre lui dcrire les merveilleuses visions de dveloppement personnel et de maturit que jentrevois quil pourra raliser, sil suit ce programme de rhabilitation jusquau bout. Limportant est ceci : les portes de la communication sont ouvertes, et le dialogue peut se poursuivre. Wayland Myers

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