The Alans and The Begining of Romanian States (French)
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Lun des traits particuliers du peuple des Alains est constitu par leur double nom au Moyen ge ; ct du nom Alain, connu ds lAntiquit, alan,1 les sources mentionnent galement le nom as2, que leurs descendants, les Ossettes, ont conserv avec une lgre modification, jusqu nos jours3. Les Russes du Moyen ge ont adapt leur phontisme lethnicon as : ainsi, il a pris la forme (pl. )4, qui se trouve la base de lhongrois jsz (pl. jszok)5 et du roumain Ia] (pl. Ia]i)6. Les grands orages que lhistoire a levs dans la steppe eurasiatique ont arrach de nombreuses branches du tronc alain, enracin l o le Caucase rencontre la plaine.7 Les deux ouragans provoqus par
GGE A/I 39-48, 366-74; DIVR I 26; BrinN 126-31; LM I 266-7; EI2 I 365: alan < aryan. V. la note prcdente; les deux noms ont un sens absolument identique, comme le constatait, parmi dautres, la moiti du XIIIe sicle le missionnaire franciscain Guillaume de Rubrouck: Alani qui ibi dicuntur Aas et Alani sive Aas (WyngS I 191, 199). Pour les variantes phontiques de ces ethnonymes dans le monde musulman, v. EI2 I 365 et pour ceux usits en Chine BretR II 88-90. 3 SIE I col. 329. 4 Ibid. s. v. ALANY (v rus. istonikah: jasy); de mme, VasmW III 496; VailM I 34: En vieux slave on observe un flottement de a- et ja- linitiale. 5 MNTES II 264 pour les variantes phontiques rencontres dans les textes latins concernant le royaume hongrois voir GombC IV 76; les auteurs mdivaux ont considr les Alains de faon errone - et par consquent ils les ont appels les descendants soit des Philistei bibliques soit de Yaziges, population sarmate tablie dans la Pannonie pendant loccupation romaine (PHoP 64). 6 Le nom ethnique proprement dit nest enregistr dans aucune source; il se retrouve au pluriel dans le toponyme Ia]i et au singulier dans lanthroponyme aujourdhui sorti dusage, Ia] (ConsD 301). La prsence de -] (au lieu de -s) au singulier est d aux influences du pluriel, utilis beaucoup plus souvent dans un tel cas (= ethnonyme) que le singulier (IordN I s. v. Ia]i) . 7 Pour lhabitat dorigine des Ossettes de nos jours, successeurs des Alains antiques et mdivaux, v. SIE I col. 329.
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les Huns et les Mongols les ont parpills dans toutes les directions. La premire vague les a ports jusqu lAtlantique, dans la pninsule Ibrique et en Afrique du Nord,8 la seconde les a disperss dans les parties orientales et centrales de notre continent9 et en Chine10. Les qualits des mercenaires alains ont t partout hautement apprcies, ce qui explique dans une grande mesure leur dispersion gographique extraordinaire.11 Lun des plus consistants groupes alains, utilis par les Tatares dans des buts militaires, a t cantonn dans la seconde moiti du XIIIe sicle dans la rgion situe entre les Carpates et le Dniestr.12 Ils ont jou un rle considrable non seulement dans le destin des Tatares des rgions occidentales de la Horde dOr, mais ils ont contribu dans une gale mesure la fondation et la consolidation tatique de la Valachie et de la Moldavie. En dpit des recherches entreprises sans relche par les
Ibid.; GGE A/I 39-48, 366-74: DIVR 26. V. les deux notes suivantes. 10 V. en gnral pour les Alains au Moyen ge EI2 365, LM I 266-7 et VerlEs passim et pour ceux de lAsie Centrale et de lExtrme Orient, PellC 641 et BretR II 88-90. 11 Pendant que le missionnaire franciscain Jean de Marignolli/WyngS I 542 soutenait que les Mongols ont conquis la Chine laide des Alains, le Byzantin G. Pachimeres consignait la bravoure de ce peuple genreux de lextrmit de louest du territoire des Tatares: En effet, ils taient la fois les compagnons de guerre de Nogai et ceux travers lesquels il avait obtenu des victoires (FHDR III 451). Des contingents alains sont attests au XIVe sicle en Byzance, T`rnovo, Vidin et dans les royaumes hongrois et serbe (v. les notes 29-34). Br`tV 44 fournit une liste suggestive, bien quincomplte des souverains qui ont utilis les Alains au Moyen ge. 12 Des prcisions dordre territorial sont fournies par Br`tV 43 (... le pays des As, des Alains... nest autre que la Moldavie actuelle), DeceH 62 (bild s - ce qui signifiait alors la partie centrale de la Moldavie, o se trouve aujourdhui la ville de Ia]i), SpinM 171 ( le pays de Ia]i - localis en Moldavie et dans les rgions limitrophes). Plus incertain est le moment de ltablissement des Alains dans ce pays. Mme si une note dont on ne connat pas lanne du Chronicum Salernitanum prcise que Alani... feruntur a Lanus fluvio ultra Danubium a t insre dans le volume GCE A/1 41, qui comprend Lateinische Namen bis 900, il para[t quil sagisse dune erreur de datation des diteurs; elle rappelle de faon trop vidente Alanus fluvius, inscrit sur les portulans ds le XIVe sicle (v. la note 23). Cette inscription ne peut pas constituer la preuve de la continuit des Alains partir de lAntiquit et jusquau Moyen ge sur les territoires situs entre les Carpates et le Dniestr (v. aussi MhlC 63). Le fait que les principales autorits au sujet de linvasion mongole de 1241 en Europe Centrale et de lEst, savoir le savant persan Fzl Ollh Rd od-Dn et Rogerius, le chanoine de Oradea, ne les mentionnent pas dans la rgion nomme ci-dessus (DeceIn passim), est un argument qui ne peut tre ignor. La supposition conformment laquelle les Tatares ont transfr ce groupe ethnique de son habitat natal dans la rgion carapato-dniestrienne probablement en mme temps que le dplacement des Turcs Seldjoucides de Kypak en Dobroudja, cest--dire peu aprs 1280 (DeceP 188) est plus plausible (CihoA 229, n. 10: les Alains ont t amens ici aux embouchures du Danube par le khan Nogai).
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historiens pour claircir la gense des pays roumains, la contribution alaine ce processus est reste compltement nglige. 1. Le pays des Alains et les Tatares Les parties occidentales de la Horde dOr ont connu dans les deux dernires dcennies du XIIIe sicle une volution part lintrieur de ltat tatare. Le noyau initial - marque de frontire sur le Bas Danube - sest dvelopp tel point sous le commandement du gnral mongol Nogai, que celui-ci a pu dfier dans les dernires annes du sicle mentionn ci-dessus le pouvoir central pour se proclamer khan. Il a fallu deux guerres acharnes au chef lgitime de lulus Djui13, Tokta, pour liquider cette dissidence en 130114. Lespace contrl par Nogai, agrandi par ses propres forces15 et quil a directement conduit vers la fin de sa vie (m. cca 1300), stendait sous la forme dun semi-cercle en dehors de larc des Carpates, partir de la Ruthnie jusquaux Portes de Fer sur le Danube. Le centre de commande, optimal pour coordonner les deux ailes, a t fix Isaccea.16 La contribution du groupe alain au renforcement du pouvoir de Nogai nest pas reste inaperue pour les contemporains aviss de Byzance.17 Les liens conomiques et diplomatiques du sultanat mamelouk avec les Tatares de la Horde dOr ont fait que les ralits de cette dernire - y compris celles de la rgion situe entre les Carpates et le Dniestr - soient relativement bien connues en Egypte et en Syrie.18 Les informations fournies par les sources mameloukes sur les Nogaides et sur leurs auxiliaires nous permettent de saisir des aspects importants de
Lexpression courante dans les sources orientales pour dsigner la Horde dOr. Voir la monographie VeseH et dans lhistoriographie roumaine Br`tV 38-9, 43, 54, 57, 72-3, 108-11, DeceH 61-3, SpinM 171-2. 15 Au dtriment du khan rgnant sur la Volga (Pachimeres/FHDR III 444-50). 16 Les chroniqueurs mamelouks Baibars/TiesS I 93 et an-Nuwair/ibid. 139 prcisent que les rsidences de Nogai se trouvaient Isaccea, sur le Danube, jusquaux Portes de Fer (Saqdj wa nahr Tun wa m yal Bbu l-add). Cest dans la capitale Isaccea que furent frappes des monnaies au nom du khan Nogai et de son fils aka (OberA 269-9). Les troupes tatares ont occup en 1291 le Banat de Mava (NikoI 68 suiv., PapaR 168). En Dobroudja se sont instals les Turcs Seldjoucides (v. DeceP passim avec la conclusion catgorique dans ce sens la fin de ltude) et dans le territoire carpato-dniestrien les Alains (v. la note 12). Le Boudjak, en tant que prolongement naturel de la steppe eurasiatique, a t et devait demeurer jusqu la dissolution finale du pouvoir nomade dans cette rgion lhabitat de prdilection de la chevalerie tatare. 17 V. la note 11. 18 V. CiocCom 1108.
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lorganisation de la population ci-dessus mentionne ; elles prouvent aussi sans quivoque lexistence dun pays des Alains19, dirig par un chef20, appartenant probablement au mme peuple. Il y avait galement des troupes tatares qui stationnaient sur le territoire de ce pays.21 La cartographie occidentale confirme cette ralit ; dans le portulan de Giovanni da Carignano du dbut du XIVe sicle on trouve consigne au-dessus du Danube lAlania22, qui correspond certainement au pays des Alains des sources mameloukes. Important pour la localisation de cette Alania est le nom que certains cartographes mdivaux ont attribu au fleuve Prut : Alanus fluvius23, eau quun auteur arabe de la mme priode appelait nahr Ya24, cest--dire la rivire Ia]i. Les Alains sont rests ct des membres de la puissante famille mongole du Danube non seulement dans la priode de gloire, mais galement pendant les temps durs. Aprs la seconde bataille entre Tokta et Nogai, pendant laquelle ce dernier a t vaincu et tu,25 son fils, aka, sest retir et a organis la rsistance dans le pays des Alains, do il a repouss les attaques de ses ennemis acharns26. Ce nest quaprs le khan vainqueur eut envoy comme renfort un corps darme que aka a t forc de se rfugier au sud du Danube, sur le territoire de ltat bulgare, o il a t assassin T`rnovo, sur lordre du tzar Thodore Svetoslav27. La fidlit des Alains lgard de Nogai et de son fils, prouve dans la confrontation avec le pouvoir central, a fini par les exposer aprs llimination de aka, le dernier rebelle de marque, des reprsailles de la part des vainqueurs. Les vicissitudes par lesquelles sont passes cette occasion les Turcs Seldjoucides de Dobroudja, compromis en tant
Baibars/TiesS I 92: bild s. Ibid.: muqaddam. 21 Ibid. en 1300 ou 1301 est mentionn le tmen (= thoriquement, unit de 10.000 soldats) dans larme de aka. 22 PoSpR I 62, 64, Br`tV 43, SpinM 203. 23 MillM 17, Br`tV 43, SpinM 203. 24 Baibars/TiesS I 88 a not la variante phontique enregistr par son informateur chez les Roumains ou chez les Russes, respectivement chez les Ruthnes. Quant lidentification avec le Prut, v. VeseH 45, VernM 188. 25 Le plus probable en 1300 (Baibars/TiesS I 90-1, an-Nuwair/ibid.138). 26 Baibars/TiesS I 92-3, an-Nuwair/ibid. 138-9. 27 Baibars/TiesS I 93, an-Nuwair/ibid. 139, Pachimeres/FHDR III 448-51; au sujet du contexte politique et des consquences de cet acte, v. CiocH.
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que gens de Nogai28, ne pouvaient pour rien au monde pargner les braves Alains. La consquence de cette situation a t un vritable exode de leurs demeures parpilles entre les Carpates et le Dniestr. Le groupe probablement le plus massif, dnombrant environ seize mille personnes, dont plus de la moiti taient apte pour la guerre29, sest dplac en 1302 avec laccord de lempereur Andronic II en territoirre byzantin.30 Mme si lempereur btissait de grands espoirs sur cette chance arrive juste au moment opportun31, leur rendement militaire na pas rpondu ses attentes ; les Alains ont t vaincus en tant que mercenaires par les Turcs en lAsie Mineure, prs de Magnsia32 et puis par les Catalans aux pieds des Balkans prs dApros en 130533. La tension croissante avec les Byzantins et surtout le dsastre souffert de la part des Catalans34 ont dtermin les survivants Alains de traverser les montagnes pour chercher abri dans la Bulgarie de Thodore Svetoslav35. La tche quils sengageaient de mener fin au service du tzar a t formule dans des termes clairs : dfendre les frontires contre les Byzantins, impatients de reconqurir les cits de Mesembria et dAnchialos36, occupes quelques annes avant par les Bulgares37. Tout ce que lon sait sur leur sort cest quils ont t accueillis par Thodore Svetoslav, leur traces se perdant par la suite sur le territoire bulgare.38 La prsence des Alains est en revanche atteste jusqu une poque relativement tardive Vidin ; le tzar Jean Sratzimir a employ
28 Une partie dentre eux ont russi traverser la mer jusquen Anatolie natale, le reste ont t contraints de renoncer la religion musulmane pour devenir chrtiens. Ces derniers sont connus sous le nom de Gagauzi (DeceP 174, 188-92). 29 Pachimeres/FHDR III 451. 30 La demande dasile a t transmise lempereur par lintermdiaire du mtropolite de Vicinia et explique par Pachimeres/ibid. comme un acte de libration de la servitude de Nogai; une autre motivation, la fois intresse et fausse, chez Gregoras/ibid. 509: Les Alains qui taient chrtiens depuis les temps les plus anciens sont tombs sous le pouvoir des Scythes (= Tatares) quils ont servis contrecur, de leurs corps ; en revanche leur esprit tait tortur par le dsir de libert et par la haine des mcrants ; pour la datation (1302), v. DlgR IV 37. 31 Pachimeres/ibid. 32 Gregoras/ibid. 509, 511. 33 Pachimeres/ibid. 453 et PachB II 548-51 ; pour ces luttes, v. OstrG 406-7, Br`tV 44 ; datation chez DlgR IV 48: 1306. 34 Quelques soient les exagrations, les pertes avanes par une source contemporaine sont impressionnantes : des 3000 cavaliers et 6000 fantassins seuls 300 auraient survcus (SchlE 229, Br`tV 44). 35 PachB II 601. 36 Ibid. 37 OstrG 407. 38 Ibid.
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dans les luttes de 1365 contre le roi de Hongrie, Louis dAnjou, un dtachement dAlains musulmans.39 Ce groupe, converti a lislam probablement sous linfluence de Nogai, doit avoir fait partie du groupe de 3000 cavaliers refugis dans les premires annes du XIVe sicle avec Kara Kiek, le fils de aka, auprs du tzar Michel iman de Vidin, aprs larrt et lexcution du dernier conspirateur contre Totka, savoir Tura, le fils de Nogai40. On peut galement supposer que cest de ce groupe de mercenaires alains que se sont dtachs ceux qui ont trouv un emploi la cour des princes serbes41. Cest toujours entre les Carpates et le Dniestr que semble avoir ses origines la puissante communaut des Alains du royaume hongrois. Signals dans les documents pour la premire fois en 1318 ou 1323, ils ont occup un territoire tendu dans les collines de Mtra, o ils ont fond un pays (Iszsg), attest en 1366.42 Les privilges dont a joui la colonie alaine pendant les XIVe-XVe sicles, prouvent limportance des services rendus la royaut hongroise.43 Si lon suit sur une carte imaginaire la dispersion des Alains de lespace situ entre les Carpates et le Dniestr partir de 1302, cause par la crainte des reprsailles du khan Tokta, on constate que tous les souverains du centre et du sud-est de lEurope ont accueillis les bras ouverts ces fameux guerriers chez qui le mtier de mercenaire avait t lev au rang doccupation nationale. Basarab, le fondateur de la Valachie, a pu lui aussi apprcier les vertus militaires des Alains. 2. La seigneurie des Alains et Basarab Entr depuis longtemps dans le circuit de lhistoriographie roumaine, le tmoignage crit du contact du premier vovode de la Valachie avec les Alains se trouve dans larchi-connue note de la prface du Zakonik, rdig par le souverain tefan Duan, et qui concerne les
GjuzG 235, PavlM 119. An-Nuwair/TiesS I 139-40. 41 FranS 45, IordT 169, n. 4. 42 PHoP 62-3. Tout en niant la contribution des informations des sources mameloukes et byzantines, qui attestent lexistence des Alains dans lespace carpato-dniestrien la fin du XIIe sicle, MhlC 64 a suppos de faon erronne que les Ia]i, qui ont donn le nom la capitale de la Moldavie, sont venus de Hongrie au cours du sicle suivant; les tentatives de trouver un contexte historique dans lequel une telle migration de louest vers lest aurait pu avoir lieu se sont avres, invitablement, inutiles. (ibid. 64 suiv.). 43 PHoP 63-4.
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adversaires des Serbes dans la bataille de Velbud : ct des Bulgares et des Byzantins, dans larme commande par le tzar Michel iman se trouvaient Basaraba Ivanco, ..., les Tatares noirs, qui vivent dans les environs, la seigneurie des Alains et encore dautres seigneurs44. Si de cette note on peut uniquement dduire que les Valaques ont lutt en tant quallis des Alains dans la campagne contre les Serbes, organise sous le grand patronage du khan de la Horde dOr, zbek45, un indice de nature toponymique nous laisse entendre que le prince de la Valachie, comme tous ses voisins dailleurs, a eu lui-mme sa solde des Ia]i. Les villages de Valea Ia]ului46 (identique au village Ia]i, attest dans certains documents internes du vovodat valaque47) et de E]ciori48, dans son proche voisinage, sont situs trop prs de la premire capitale du pays, Curtea de Arge],49 pour ne pas suggrer la fonction que remplissaient auprs du souverain ceux qui prtrent leur nom ces endroits. La garnison cantonne dans ce primtre doit avoir constitu, toutes proportions gardes, un corps de garde linstar des lgions dlite alaines des grands khans mongols, godai, Mngke et Koubila50. Pourtant, on ne peut pas prciser ce point de la recherche, si dautres communauts alaines, rpandues sur tout le territoire de la Valachie,51 ont eu des attributions militaires au service des vovodes roumains. 3. E\cu pris`cariul et Drago] Parmi ceux qui ont affront larme serbe Velbud est galement mentionn la seigneurie des Alains ( )52. De
IosiR 74, Mih`C 274. Voir CiocH 1112-3. 46 ILR 261. 47 DIR B LI 71, DIR B L2 71; StoiB II 679: Le village mentionn partir de 1523, quand il appartenait au monastre dArge]. 48 DIR B L2 57 village aujourdhui disparu, prs de B`rb`te]ti, lancien district Curtea de Arges. 49 6 kilomtres du centre ville (RATR 70 C). 50 BretR II 88-9. 51 Ia]i-Gorj, le dpartement Gorj (ILR 158) et les villages aujourdhui disparus: Ia]ii de la Olte\, village situ prs de Morunglav, lancien district Bal] (DIR B L1 71, DIR B L2 71), Ia]i, village situ probablement prs de Scorarul Vechi, lancien district Br`ila (ibid.), Ia]i, village prs de Strmba, lancien district de Mih`ile]ti (ibid.), E]ciori, village prs de B`rb`te]ti, lancien district Curtea de Arge] (DIR B L2 57) ; pour dautres toponymes de la mme origine, v. IordT 169. 52 V. la note 44.
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lnumration mme des combattants - Basaraba Ivanco, les Tatares noires du voisinage, cest--dire du Boudjak53, puis les Alains -, il rsulte que cette seigneurie se trouvait sur le territoire de lancien pays des Alains entre les Carpates et le Dniestr54. Le sisme politique, qui a secou le pays des Alains au tournant du XIIIe au XIVe sicles, na pas provoqu, en dpit des grandes pertes dues lmigration, lbranlement de la structure dorganisation de la communaut : la seigneurie alaine nest quun autre nom pour le pays mentionn ci-dessus. Ses membres taient, respectivement drivaient probablement en gale mesure des Ia]i qui ayant dfi le danger avaient refus dmigrer aprs 1301 et de ceux qui, migrs Byzance, taient rentrs chez eux la suite de lappel de Tokta, qui leur tait parvenu pendant la bataille dApros en 1305.55 Le mrite davoir reconstitu aprs un laps de temps relativement court la marque de frontire alaine fonde par Nogai appartient selon toutes les probabilits Tokta, que la source byzantine cite ci-dessus a surpris dans son effort - significatif quant la question en discussion - de faire rentrer les Ia]i rfugis dans la pninsule Balcanique. Le mme besoin de scurit la frontire de lOuest de la Horde dOr a dtermin ses successeurs au trne de Sarai, zbek (pendant le rgne duquel est attest la seigneurie alaine) et Djani Bek (m. 1358) de conserver intacte la formation militaire situe entre les Carpates et le Dniestr. Toutefois, ds que le pouvoir des khans a commenc decliner aprs laccession au trne de Berdi Bek (1358-1362),56 les auxiliaires alains de lextrmit occidentale de ltat tatare ont echapp au contrle de lautorit centrale pour entrer dans lorbite des vainqueurs arrivs avec des forces nouvelles dau-del des montagnes. De la seigneurie alaine ne se sont conservs que quelques vestiges, malheureusement trs peu nombreux. Lun des plus importants est, certes, Ia]i57, le nom de la plus rcente capitale de la Moldavie. Selon
V. les notes 97-101, 109. V. les notes 19 et 22 (Alania). 55 V. la note 33 et PachB II 548. 56 SpulH 109: Mit dem Tode Djambeks (1357) hrten die geordneten Zustnde in der Horde fr fast zwei Jahrzenhte berhaupt auf ; /GrIaH 255 : Cette anne l (1357) les querelles lintrieur de la Horde taient loin de steindre, au contraire, elles prenaient des proportions ; SpinM 06. 57 PhilO I 730: le nom topique de Ia]i est analogue aux noms topiques de Bulgari, Comani, Ru]i, Srbi... ; sur la mme ligne, IordT 274 numre les toponymes qui contiennent le mot Ia](i) sur le territoire de la Roumanie et comme il est trs probable que ces toponymes proviennent du nom ethnique, dorigine slave, des Alains, il les insre justement dans le chapitre Toponymes forms partir de noms des peuples (p. 261) ; cependant, la page 169 il contredit cette affirmation, qui est du domaine de
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un tmoignage de la chronique du Concile de Konstanz (1415-1418), rdige par Ulrich von Richental, la premire capitale de la Moldavie58 a t, elle aussi, une cit alaine ; aprs avoir cit les villes Ia]i (Iesmarckt) et Baia (Molga),59 on fait la prcision suivante : Die zwu seind Philistei60. Il est bon de rappeler que ces Alains semblent tre devenus noirs, comme tous ceux qui ont peupl pendant le Moyen ^ge le territoire situ entre les Carpates et le Dniestr : Roumains, Comans, Tatares61. Dans quelques chroniques russes, o sont mentionnes des villes de la Moldavie, on trouve la squence suivante : , , 62. Certains historiens ont rapport noir comme pithte de () , ce qui donnerait la foire des Alains noires 63. Cest quoi se rduit lhritage toponymique inventori dans notre historiographie sur la seigneurie des Alains. Quant au processus de dsagrgation de cet organisme, il reste envelopp dans les voiles du silence et du mystre. Dans lespoir dclairer quelque peu que ce soit cette question, il convient de rexaminer la premire source narrative interne au sujet de lespace situ entre les Carpates et le Dniestr aprs la mention en 1330 de la seigneurie alaine. La source, qui reflte sa manire - trange pour beaucoup dhistoriens - la situation de la rgion une distance de presque trente ans, cest--dire en 1359, est due Simion Dasc`lul, qui a interpol la chronique de Grigore Ureche. Cest lui qui a consign la tradition suivante sur Drago] desc`lec`torul, cest--dire sur le fondateur de la Moldavie, et sur E\co pris`cariul :
lvidence, et prsume inutilement un anthroponyme : En tant que formation, la situation est semblable celle constate Hu]i; un individu appel Ia] a fond ou a t un moment donn ma[tre de la localit qui a pris par la suite son nom, au pluriel Ia]i. Les vicissitudes explicatives subies par ce toponyme dans notre historiographie sont passes en revue par MhlC 61 suiv.; GiurT 242-8 a dress un court historique document de la localit. 58 GoroD 86-7. 59 V. la micromonographie de la ville chez GiurT 182-90. 60 KaradD 82 et dans un des manuscrits avec la mme rfrence: Das sind Philistri (ibid. 83) ; les passages ont t rlvs par MhlC 65, qui cite galement dautres sources dans lesquelles les Alains de la Moldavie sont ainsi nomms (v. aussi la note 5). 61 V. CiocCom 1114 suiv. 62 VosLe 240; ErmLe 163: , , ; NovLeN 475: , , ; AndrAO 216 et GiurT 243 ont reproduit la dernire variante. 63 Sur les traces de N. Karamzin et de W. Tomaschek, dans lhistoriographie roumaine GherF 38 et PhilO I 730.
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Rcit tir de la prface de la chronique moldave Cette histoire raconte un fait connu jusque de nos jours, savoir que ce pays est habit par deux peuples parlant deux langues, moiti sont Roumains et moiti sont Russes. Parce que cette histoire nest pas consigne par le vornic (= dignitaire de la cour moldave) Ureche, jai tenu la consigner, comme jai fait avec dautres, pour la sauver de loubli. La prface de la chronique moldave raconte quaprs avoir tu laurochs, et se prparant de rentrer, les chasseurs se dtournrent de leur chemin pour admirer quelques endroits merveilleux ; et traversant quelques champs, ils se retrouvrent lendroit o stend de nos jours le bourg de Suceava. Et ds quils sont arrivs au bord de leau, l o la fort est petite, ils sentirent la fume dun feu quils poursuivirent jusqu lendroit o slve de nos jours le monastre E\canii. L
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ils trouvrent un rucher et un homme trs vieux, E\co, Russe par son origine, qui gardait les ruches. Questionn par les chasseurs qui il tait et de quel pays il venait, le vieillard leur rpondit quil sappelait E\co et quil venait de la Pologne. Ils lui ont galement demand comment sappelait cet endroit-l et qui il appartenait. E\co leur rpondit que ctait un endroit dsert, mais riche en nourriture, habit uniquement par des btes et des oiseaux qui stendait au sud jusquau Danube et au nord jusquau Dniestr, o il fait frontire avec la Pologne. Aprs avoir entendu cela, les chasseurs rentrrent au Maramure] do ils firent venir leurs gens et dautres encore dans ces endroits. Dabord, ils sinstallrent au pied de la montagne pour se rpandre ensuite sur le territoire moldave, vers le sud. Ds quil apprit larrive des gens de Maramure], E\co se rendit en Pologne do il fit venir un grand nombre de Russes qui sinstallrent tout au log du fil de Suceava vers le nord, ainsi que sur le Siret, du ct de Boto]ani. Cest ainsi que les Roumains se sont rpandus vers le sud et les Russes vers le nord. De mme, le bourg Baia fut fond par des potiers saxons et Suceava, dit la chronique, fut fonde par des pelletiers hongrois, qui dans leur langue sappellent suci ; cest pouquoi en hongrois Suceava sappelle pelleterie. Cest ainsi que fut fonde la Moldavie.
La variante de cette tradition, telle quelle est consigne par Miron Costin est partiellement diffrente de celle qui est enregistre par Simion Dasc`lul. Les guerriers de Maramure] ont rencontr le mme vieillard qui, questionn par un interprte qui il tait, leur rpondit : Je suis Ia\co de Sniatyn, je me suis install dans cet endroit depuis quelques annes et jai un petit rucher. A part vous, je nai vu personne dans ces endroits. Drago] lui dit quil est venu avec ses hommes pour stablir dans ces endroits, les Tatares ne constituent plus un empchement. Et sil veut y faire venir ses gens et ses parents, il leur offrira toutes les terres des alentours avec le droit dhritage. Le vieillard lui remercie de ses paroles bienveillantes et lui promet dy amener tous ses parents ; il tint sa parole : il fit venir tous ses gens de Sniatyn de Pocutie dans ce pays ; le village Ia\cani, portant le nom de laeul Ia\co, est le plus ancien habitat de la Moldavie. Ce nom sest conserv jusque de nos jours mme si le village sest uni avec la ville Suceava. Le sort a fait que la ville ne porte pas son nom ancien. Quelques pelletiers sont venus de la Hongrie et sy sont installs (en hongrois, pelletier se dit soci) et ainsi la ville et la rivire prirent le nom de Suceava. Toutefois le nom Ia\cani ne disparut pas, restant attach une partie de la ville.65
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La question cardinale, de laquelle dpend de faon dcisive la sparation du noyau historique de la lgende rapporte par les chroniqueurs moldaves, regarde lidentit dE\co pris`cariul. E\co reprsente de toute vidence la prononciation dialectale de Ia\co, comme cest le cas de E]i pour Ia]i. Soumis une analyse linguistique qui tient compte de lorigine ruthne du personnage dans la version de Simion Dasc`lul, le nom comprend deux composents : ia\- et -ko, le dernier tant une dsinence typiquement ukrainienne, qui entre dans la composition des anthroponymes66. Cest dans ce contexte que sexplique galement la semi-occlusive dentale -t- : celle-ci provient de la fricative dentale -s-, transforme sous linfluence de la voyelle prcdente : Trubetzko face Donsko67 portent tmoignage pour ce phnomne linguistique slave. Dailleurs, la forme Iasko(s) est atteste par un acte patriarcal de 1359 en tant que nom dun grand boyard moldave.68 Par consquent, lanthroponyme dorigine ruthne Ia\co est la paire de Ia]i, nom de personne en circulation dans la Moldavie mdivale,69 les deux ayant la mme signification que le franais Alain - lAlain. Un acte banal de vente-achat rdig le 17 octobre 1667 Ia]i est providentiel pour cette identit : le vendeur se prsente comme Ia\co (Ia] - je lai sign la manire des Polonais)70. La formulation un peu maladroite veut dire que le signataire a utilis dans lacte la variante polonaise - en fait ukrainienne Ia\co, quil considrait certainement comme tant plus protocolaire et donc plus adquate figurer dans un document officiel que le nom familier Ia], port par le mari dAnghelina, la fille de Gliga Mnjea. Mais afin dviter tout quivoque, la nature de lacte rclamait galement un enregistrement de lidentit du vendeur, laquelle ne pouvait tre garantie que par Ia], le nom courant dans le cercle de ses connaissances. Lheureuse quivalence Ia\co = Ia], quaffirme le mari dAnghelina, prouve que pour un Moldave quelconque du XVIIe sicle les deux noms avaient encore, en dpit des formes si diffrentes, le mme sens. Devant cet argument valable du moins sur le territoire de la Moldavie au Moyen ^ge, sinon ailleurs, comme il semble probable, il ny a pas dautre solution tymologique possible.71
Non russe prcise VasS 138. Les exemples cits, ibid. 146-7. 68 N`stD 346. 69 Ia]ul, boyard de Falciu, cit par ConsD 301. 70 GhibS IV 276 signal par ConsD 301, qui a propos par consquent la drivation Iacu < Ia]. 71 GrinS IV 536 identifie , - = c = i et envoie pour des preuves chez GrinM II 243-4, o dans un conte ukrainien avec des animaux, cueilli dans le village Taranovka de la rgion Harkov, apparat la paire et a, qui ne prouve aucune
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Malgr la forme ruthne de lanthroponyme, E\co appartient sans aucun doute, comme le montre le contenu smantique du nom, au patrimoine alain, tel que les fondateurs de la Moldavie lont trouv, aprs avoir travers les montagnes. Compltement absente chez Miron Costin, linstance avec laquelle Simion Dasc`lul a soulign lorigine slave du personnage - Russe de la Pologne - pour expliquer pourquoi le pays est peupl moiti par des Roumains et moiti par des Russes renvoie ncessairement la lgende tiologique cense claircir un tat des choses en dvoilant la cause efficiente72. La forme ukrainienne dE\cu et de Ia\cu est tout aussi peu concluante quant lappartenance ethnique de la figure lgendaire comme, par exemple, Ste\co pour }tefan Mu]at, le prince moldave dorigine indiscutablement roumaine dans la premire moiti du XVe sicle73. Lorigine de Ia\co et de ses parents de Sniatyn ne prouve, elle non plus, lorigine ruthne de ce peuple ; dans la principaut de Haly, dfinie dans les sources mamelouks comme pays des Roumains et des Russes,74 vivaient ensemble et sinfluenaient rciproquement des groupes ethniques diffrents. La question que nous nous proposons dexaminer par la suite se rfre la consistance historique du personnage en discussion. Quelque sommaire que paraisse, une comparaison du tableau fourni par les chroniqueurs avec limage de lespace carpato-dniestrien la veille du desc`lecat (fondation de ltat), reconstitue par les historiens et les archologues, montre que la simplification jusquau
relation entre et i. Il ny a pas non plus de fondement documenaire et explicatif pour SSM II 586-7, qui considre que et c sont des mots diffrents, le premier provenant de , le second de . Lhomonymie des noms propres avec les adjectifs (v. la note 62 ; pour dautres attestations GiurT 243), respectivement (v. la note 52) avec le sens unanimement accept dalain est rest inexplicablement en dehors du raisonnemenet linguistique. La mme carence appara[t chez IoneE 160 qui fixe comme etymon le nom rpandu dans la Pologne du XIIIe sicle, Hyacinthe: par un intermdiaire latino-catholique, Jacek et Jacko, les hypocoristique polonaises actuelles de cet anthroponyme ont t connues galement en ukrainien et sont identiques aux formes plus anciennes dorigine slave: Ia\cu, I\cani, etc. en roumain. 72 StahC 171; pour dautres interprtations, v. les tudes rcentes: CazaP, PeciD et particulirement PeciE. 73 CostD II 877 (indice) ; pour les noms similaires de boyards moldaves, v. IRSSSM1 195. 74 Du contexte des chroniques il rsulte que cette bild lq wa r-rs se trouvait dans la proximit du pays des Alains (Baibars/TiesS I 92 et an-Nuwair/ibid. 138); SpinM 190 considre que les auteurs cits ont pris en considration deux pays et conclut: Le pays des Valaques, associe au pays des Russes, tait situ dans les zones limitrophes de cette dernire, donc dans la moiti nordique de la Moldavie. Pris la lettre, le texte arabe ne confirme la sparation opre par l'historien de Ia]i.
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schmatisme du rcit transmis longtemps de faon orale, se trouve en contraste foncier avec la ralit complexe dcouverte par les savants.75 Le fait quaprs une slection brutale, qui a pratiquement transform laire gographique mentionne en tant que terra inhabitata laspect virginal, de toute la population ait survcu dans la lgende seulement E\cu pris`cariul, prouve son importance exceptionelle dans la fondation de la Moldavie. Il est, certes, ridicule de supposer que la rencontre du vieillard solitaire ait pu avoir une telle signification pour Drago] et ses gens, arrivs dans ces parages pour sen rendre ma[tres. Mais si lon va dans le sens inverse du processus de personnification, on constate que E\cu est un produit classique de limagination folklorique - fiction qui incarne le groupe alain, appel dans le contexte mme de la chronique les I\cani76. Il est naturel qu la suite de laccord avec Drago], la collectivit alaine de Suceava ft augmente par les mercenaires appartenant la mme population venus de Sniatyn77 ; abandonns aprs le reflux du pouvoir tatare - endroit dsert et sans ma[tre, comme le dit sans ambages Simion Dasc`lul, pendant que Miron Costin apprcie le fait comme prmisse de la fondation du pays -, les Alains de Pocutie sont entrs volontiers au service du nouveau pouvoir, lequel fut renforc son tour grce eux.
Il existe un vrai consensus cet gard; parmi dautres, GiurT et MateMP, qui soulignent un degr relativement avanc durbanisation avant larrive de Drago], tout aussi bien que SpinM 322, qui attire lattention sur leffectif dmographique considrable avant la fondation. 76 Les deux mots sont incontestablement apparents, sauf que I\canii (Ia\cani chez Miron Costin) ne proviennent pas de E\co, comme lont pens nos chroniqueurs, mais de ladjectif substantivis (), connu en Moldavie (v. la note 70), auquel on a ajout le suffixe roumain -an, qui (avec ses variantes: -ean, -ian, -eanca etc.) fait driver en gnral des noms de famille dappartenance locale, tels Albean < Alba, Budeanu < Buda (ConsD LVIII), mais galement des ethnonymes comme rutean, macedonean. On peut trouver une forme intermdiaire entre ladjectif slave mentionn et Ia\cani dans le nom de la localit situe prs du bord du Dniestr, Ia]ca (RATR 43 D, correctement cite par Br`tV 43 dans la srie des habitats alains). Ce dernier nom topique au fminin singulier, est srement la paire du masculin pluriel Iacani et sinscrit parmi les couples forms de toponymes drivs dethnonymes : Comana/Comani, Rusca/Ru]i, Scheia/Schei, Srba/ Srbi (IordT 269, 281, 284-6). Un argument de plus pour prouver que le nom Icani nest pas d au vieillard Ecu, mais quil dsignait lorigine un groupe ethnique est offert par deux homonymes de la Moldavie, elles aussi au pluriel : I\cani, village dans le dpartment Bac`u (ILR 161, RATR 39 A, COSTD II 464, n.2) et E\cani, village sur le Dniestr dans lancien dpartement Orhei (DIR A LI 94). 77 Pas loin de Sniatyn se trouve le village Iasenov-Polnyi et la ville Iasinea dans les Carpates Boiss (RATR I C, 8B) qui rappellent les Alains.
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Un indice dcisif de la profession et de la force de ces I\cani, dont Drago] a certainement d tenir compte, est offert par le dcryptage de loccupation dE\cu. Ce nest quavec quelques variations, peu significatives, que les dictionnaires de la langue roumaine ont retenu deux sens de base du mot prisac` rucher : 1. endroit dans une fort o lon a abattu les arbres ; clairire ; 2. endroit ainsi prpar pour les ruches.78 Cest le slave preseka qui a t enregistr comme tymon.79 Tout comme les chroniqueurs, les lexicographes qui ont dduit les sens de rucher des textes roumains relativement tardifs par rapport lpoque de la fondation de la Moldavie, ont ignor la signification militaire et administrative initiale, solidement atteste dans toute lEurope Centrale et de lEst, savoir celle de obstacle la frontire ralis par des amnagements forestiers80. Ce sens a disparu de notre langue avec la ralit quil dsignait : les rangs de ruches ont t partout remplacs dans lespace mentionn au cours des XIIe-XIVe sicles par un systme de dfense assur par les forteresses situes sur la frontire81. Dans ces conditions, la mutation smantique connue par le mot pris`car apiculteur na rien dtonnant: quand Simion Dasc`lul a not au XVIIe sicle lattribut professionnel de E\cu, il a retenu, sans en tre conscient, seulement la forme genuine du vocable transmis par tradition, car le sens originaire du mot, savoir celui de gardien de frontire, avait t depuis longtemps oubli et remplac par celui dapiculteur82. Les pris`cari formaient un corps professionnel, jouissant de divers privilges.83 Il arrivait trs souvent - dans le royaume hongrois par
TiktW XX 1261, DLR VIII/5 1499, DLRLC VIII 580. Qui signifie ausgehauene Stelle im Walde, wo man Bienenstcke aufstellt (TiktW 20 1261). 80 GckH 9: Neben dem lateinischen Namen indagines und des deutschen Hag erscheint frh die slavische preseka und das magyarische gyep. Sie alle gelten als Bezeichnung fr einen Verhau im engeren und fr ein Grenzhindernis im weiteren Sinne. G. Popa-Lisseanu a traduit dans cet esprit indagines par prisac` (Chronicon pictum Vindobonense/IIR XI 110, 234-5) et K. Horedt a constamment utlis le mot avec ce sens dans un ouvrage consacr ce genre de fortifications en Transylvanie, o il a galement signal des toponymes roumains Presaca, quelques-uns ayant des correspondants hongrois composs: -gyep (HoreE passim et 115, 117) ; v. aussi CzajS 13 suiv. (chap. Die Preseka), GrnG, KleiG, LoseG, StarG, TagG. 81 V. HoreE 113. 82 La rduction de Icani Ecu peut sexpliquer par le mtier assign par confusion au vieillard ; on sait que lapiculture est une occupation solitaire par excellence, tant pratique de faon individuelle, tandis que la garde et la dfense dun point militaire constituent obligatoirement une activit de groupe. 83 Pour les noms de ces gardes de frontire mdivaux et leur rgime prfrentiel, v. surtout GckH 12 suiv. (chap. Grenzwchter)
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exemple - que la dfense de divers segments de la frontire dtat et des points de passage fortifis soit confie certains groupes allognes du point de vue ethnique.84 Cest de ce genre de services (des Alains, en loccurrence) quont bnfici les Tatares dans le primtre dlimit par les Carpates et le Dniestr. A lintrieur de cette vaste marque de frontire, comme dans toutes les formations destinations similaires, dailleurs, ont t fortifies les positions dintrt stratgique. Selon toutes les probabilits, le fondateur du pays des Alains, le gnral mongol Nogai ne pouvait omettre limportance militaire, offensive et dfensive, dun point gographique comme celui quoccupe Suceava de nos jours. Il contrle dun ct la voie qui se bifurque Iacobeni vers la Transylvanie trajet expriment avec succs en 1241 par le contingent tatar command par le prince Kadan85 - et vers le Maramure], do Drago] est descendu en 1359 avec ses gens. Dautre part, il nest pas moins important de noter le rle de Suceava en tant que nud de communication sur laxe nord-sud, qui reliait les pays de lEurope Centrale et de lEst avec le bassin pontique. Cest ces bienheureux attributs que doit sa fondation la prisaca dI\cani, dfendue par ceux qui lont nomme ainsi. Elle doit avoir exist pour des dcennies, tout comme le pays dont elle faisait partie, cest-dire depuis les dernires dcennies du XIIIe sicle jusquaprs la fondation de la Moldavie par les gens de Maramure] en 1359, avec une brve interruption due lexode du dbut du XIVe sicle. Pour une juste valuation de lhritage alain dans son ensemble, il faut souligner que les I\cani ont contribu dune manire dcisive au dveloppement de la structure urbaine de la Moldavie : la seule exception de Siret, les trois capitales de ce pays Baia,86 Suceava,87 Ia]i88
Idem, passim. A cette poque-l, le chemin sparait Ruscia au nord de Comania au sud (Rogerius/DeceIn 201 avec des commentaires). 86 V. la note 60. La ville a connu un essor important grce lexploitation et lusinage des gisements dor et dargent situs dans sa proximit (GiurT 182-3). 87 Dans lopinion de Miron Costin ce nom est une usurpation du nom Iacani qui tait le plus ancien (v. la note 65). 88 V. MhlC passim. Ce bourg du XIVe sicle, qui est mentionn pour la premire fois (comme douane) dans le privilge commercial accord en 1408 par Alexandre le Bon aux commerciants de Liov, a t lun des centres les plus importants sur la route tatare (CostD II 312) qui traversait Suceava, Ia]i, L`pu]na, Tighina jusqu Hadjibei et Oceakov (IRSSM1 I 95). On peut supposer que les Alains, que les Tatares ont cantonns dans cet endroit, ont eu la mission, mme si ce ntait la seule, de garder et dadministrer le plus important gu sur le cours moyen du Prut.
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- furent leurs origines, situes chronologiquement avant la fondation,89 des tablissements alains dans leur plus grande partie. Appuy sur ces piliers massifs, dentre lesquels font leur apparition dans le miroir de la toponymie dautres fragments moins importants de Ia]i, de Ie\cani90 et, peut-tre, de Le\cani91, spars par la rivire des Ia]i, ou le Prut, le pays et puis la seigneurie des Alains a eu de toute vidence pour frontires le Dniestr lEst et les Carpates lOuest. Cest Simion Dasc`lul qui nous dit quelle fut lextension ultrieure de ce pays vers les autres points cardinaux : jusquau Danube vers le sud et jusquau Dniestr vers le nord. Discrdite par le cadre fantastique dans lequel elle fait son apparition, cette prcision de gographie politique na pas t prise au srieux et de ce fait elle na pas joui de lexamen critique des exgtes. Cette omission est prjudiciable pour la connaissance des ralits de lextrmit nordique du pays des Alains autant que de ses limites dans la direction oppose. Conformment au rcit de Miron Costin, Ia\co a amen la suite de son entente avec Drago] ses gens de Sniatyn, de Pocutie. Par son caractre topographique ponctuel, ce tmoignage, contrastant visiblement avec lassertion gnralisatrice et explicative dune manire force de Simion Dasc`lul, dfinit un groupe restreint, dont la similitude avec la
Voir GiurT 184 suiv., 277-8, 242. E]anca au nord de Dorohoi (RATR 12 A), peut-tre Ia]lov`\ au sud de R`d`u\i (ibid.), la rgion de Ia]i dans lancien dpartement B`l\i (CostD II 243), I\canii mentionns ci-dessus (v. la note 76). 91 Dans lune des traductions de lacte du prince Iuga de 28 novembre 1399 figure le chancelier La\co (DIR A I 7), indiscutablement le mme que le boyard Ia\co du temps dAlexandre le Bon (ibid. 8, 10, 12, 15, 17, 18, 20, 21 22, 25; pour lidentification, v. CihoA 60 et AnstD 347-8). Vu la diffrence graphique considrable entre les lettres du dbut des deux mots, on ne peut pas souponner un lapsus calami des copistes, mais une alternance phontique due lapprochement sonore de la voyelle et de la consonne liquide. Ce cas semble indiquer plutt une contamination avec \, nom port, parmi dautres, par le successeur de Bogdan au rgne de la Moldavie, driv chez les Transylvains et les Moldaves de lhongrois Lack, hypocoristique de Lszl = Vladislav (ConsD 94). Si des noms topiques tels Lacani/Lacana proviennent de lanthroponyme Lacu, comme on la suppos (ibid.), ou de lethnonyme I\can/E\can (altr sous linfluence de lanthroponyme cit?) on ne peut le savoir de faon catgorique. Le groupe de toponymes - aussi quivoques que nombreux - mrite une investigation ultrieure part: Lescana - ancien nom du village Lecani dans le dpartment Bac`u (ILR 166), identique L`\cani (DIR A LI 144), puis L`\cani/Le\cani, village situ sur Bahlui, dpartement Ia]i et La\cani, village situ sur Albinea, non loin de la ville de Roman, L`\cani sur Jijia, dpartement Boto]ani, L`\cani, village sur Moldova, dpartement Suceava, L`\cani, situ sur Soholui, dpartement Covurlui et L`\cani, village prs de Fere]ti, dpartement Vaslui (DIR A LI 144).
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colonie de I\cani est frappante. La supposition, selon laquelle les Alains de Sniatyn auraient t, tels leurs parents tablis prs de Suceava, des pris`cari de profession, simpose de soi. La lecture de la carte renforce cette ide : plac dans une position stratgique de premire importance, tout comme I\cani, Sniatyn surveillait lartre qui se bifurquait pas loin de l, vers louest, en deux grandes routes : lune menait vers la Pologne, lautre vers la Hongrie. Suggre par les traces toponymiques de la Pocutie,92 la prsence des Alains Sniatyn comme gardiens de frontire au service des Tatares est appuye par la principale source narrative au sujet des vnements de la rgion dans la dernire partie du XIIIe sicle93. Elle atteste le vif intrt de Nogai de transformer la principaut ruthne en fer de lance de sa politique dirige contre la Lituanie, la Pologne et la Hongrie.94 Limplantation dune garnison forme de ses fidles Alains dans la Pocutie rpondait dans ces conditions une ncessit. Vue de Isaccea, la capitale des possessions de Nogai, la prisaca alaine du bassin suprieur du Dniestr se rvle comme le poste le plus avanc vers le nord du systme organis par le fameux gnral tatare - paire symtrique des Portes de Fer sur le Danube.95 Il est impossible dtablir avec certitude si les Tatares ont annex la Pocutie au pays des Alains, comme nous le laisse souponner la colonie des Ia]i de Sniatyn et la dsignation du Dniestr comme frontire nordique dans le passage narratif de Simion Dasc`lul, ou sils lont cde aux voisins, le pays des Roumains et des Russes, qui ne peut tre autre
V. la note 77. Il sagit de la chronique de Haly-Volynia qui sachve en 1292 (ZdanD 511). 94 La diagrame de cette relation fonde sur les faits de la chronique mentionne cidessus est prsente ibid. 509-10: The Halych-Volyn Chronicle, mentioning Danylos son Levs request for aid against the Poles, which he submitted to the khan Menke Timur (1274), adds: because all the princes were than under the Tartars. The dependance of Halych-Volyn Rus on the Mongols is confirmed by the apparently friendly message of Nogay to the Halych-Volyn princes, about which there is a notice in the chronicle under the year 1277. In this message Nogay expresses himself in this way: You always complained of Lithuania; see, now I myself give you my army and the general Mamshiy with it, so go with them against your enemies. When, to continue our argument, Lev contemplated extending the boudaries of this realm with the help of the same Nogay, after the death of Boleslaw of Cracow, all other princes had under Tartar pressure to assist him in his campaign against Poland. The expression all the princes being Tartar underlings is repeated once again in the chronicle under the year 1285, on the occasion of the Mongol invasion of Hungary, and also in the account of the advance of the Mongol army against Poland in 1286 with Halych-Volyn regiments as auxiliaries. 95 V. la note 16.
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que la principaut de Haly-Volynia avec sa population mlange.96 De toute faon, quand les Alains de Sniatyn se sont tabli dans la Moldavie de Drago], la Pocutie nest pas entre dans la composition du nouvel tat parce que, si elle avait t annexe par les gens du Maramure], le transfert de cette colonie aurait t dpourvu de sens. La seconde partie de la relation de Simion Dasc`lul au sujet de la frontire, selon laquelle le pays dsert dE\cu stendait au sud jusquau Danube, se heurte ds le dbut contre un obstacle apparemment insurmontable : le Boudjak a t un territoire habit exclusivement par les nomades tatares, qui le traversaient dun bout lautre avec leurs troupeaux et leurs haras. Malgr cet obstacle, la dclaration incroyable dE\cu a obtenu au bout dapproximativement deux annes un certificat de vracit. Un acte rdig par le notaire Antonio di Ponz le 11 fvrier 1361 Kilia montre que Thorboch tartarus de miliario Coia de centenario de Rabech de decena de Boru a vendu Bernab di Carpena une esclave dans la prsence de quelques tmoins gnois nominaliss, ct desquels sont galement mentionns dans la mme qualit Bechangur nuncius Coia, Aruch et Oia tartari, habitatores Iavarii.97 Une conclusion coup sr correcte a t tire par un rput mdiviste de Ia]i : selon lui, Iavaria - fruit de la confusion que faisaient les Gnois et les Tatares du Danube entre les Alains et une autre population caucasienne, savoir les Iviri de la Gorgie - dsigne la bien connue Alania entre les Carpates et le Dniestr.98 Cette identification ouvre de multiples perspectives explicatives sur le statut du Boudjak et de ses habitants en 1361, tout aussi bien quavant et aprs cette anne. Ce que prouve linformation enregistre sur place, nota bene, est dun ct linclusion du Boudjak dans la Iavaria et dune autre ct lexistence de la structure organisatrice traditionnelle de cette enclave
Ce vaste mlange ethnique, qui caractrise galement la Bukovine avant la fondation, semble avoir t le rsultat dun long processus dosmose, non leffet dune colonisation, comme laffirme Simion Dasc`lul pour expliquer la situation de la Moldavie. 97 PistN 16. 98 CihoA 229, n.10: Iavaria signifie lIbrie, cest--dire le pays habit par les Ibres (Alains), emmens ici aux embouchures du Danube par le khan Nogai. Il est dificile de dcider si le Dominus de Auria, censarius in Chili, qui est cit dans un document similaire, dress six jours plus tard (PistN 23), est un Tatare, ma[tre de lAuria, cette dernire tant considre comme une autre variante phontique de lIbrie (CihoA ibid.), ou si le seigneur est un Doria < dOria < de Auria, nom port par une illustre famille gnoise dont provient galement le chroniqueur Iacobus Aurie, cest--dire Iacopo Doria (v. DoriI).
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tatare. Employ partout par les Mongols pour enrgimenter ses sujets, le systme dcimal - mis en vidence par le vendeur de lesclave dans le but de se lgitimer - voque le tmen de aka, le fils de Nogai, fond sur le mme principe et cantonn au dbut du sicle dans le pays des Alains99. Au bout dune interruption de quelques annes, priode pendant laquelle il sest trouv sous lautorit du tzar bulgare Thodore Svetoslav (m. 1322), le vassal du khan de Sarai,100 le Boudjak est rentr entre les frontires du pays des Alains. Ses habitants, les Tatares noirs, mentionns en 1330, doivent avoir survcu, linstar de leurs consanguins attests dans cette rgion en 1301 et 1361, en tant que groupe organis, inclus dans la seigneurie alaine. Cet encadrement territorial ne semble pas avoir t doubl par un rapport hirarchique. La srie des chefs nomades dau-del du Dniestr - dpendants ou non des khans de la Volga - montre, au contraire, le Boudjak tatare comme entit autonome lintrieur du pays des Alains.101 Cest dans ce vaste pays que sont entrs les gens du Maramure] en 1359. Quelque instable queut t la seigneurie alaine cette poque - ce que les sources ne soutiennent pas ! -, la solidarit parentale devait obliger ses membres de ragir de faon unitaire dans des moments dcisifs pour leur sort tous. Un de ces tournants fut la rencontre avec Drago]. Heureusement, la lgende na pas dissout entirement la vrit sur cet vnement majeur. Ce qui est surprenant avant tout cest le caractre pacifique de la fondation, dautant plus que dans le droit international du Moyen ^ge une conqute par lpe assurait la lgitmit ultrieure de la possession. A la base de la lacte fondateur du pays - une Landnahme certaine dans le cas de la Moldavie - il ny a pas de guerre par laquelle les nouveaux venus bannissent ou soumettent les autochtones, comme il est arriv ailleurs, mais un accord.
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V. la note 21. V. CiocH 1101 suiv. 101 Atlamos, prsent comme le chef des Tatares des embouchures du Danube et beaufrre du khan Djani Bek dans une chronique hongroise et une chronique valaque, a t roumanis par les auteurs anonymes dune balade populaires dans Alimo], haiduc din |ara de Jos Alimo], hadouk du Bas Pays (sources et bibliographie chez CiocPa 351). Prfigur par aka au dbut du sicle, Atlamos annonce pendant la cinquime dcennie le dernier potentat de Boudjak, attest dans les documents en 1368 : Demetrius, que le titre de prince des Tatares place parmi les chefs indpendants, chose expliquable dans les conditions de la dcomposition de la Horde dOr (v. Br`tD et SpinM 275). Il est incertain si Dominus de Auria de 1361 appartient cette srie. Le cours infrieur du Siret a form la frontire de sud-est du Boudjak tatare, respectivement de lAlania (v. CiocPa passim).
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La faon harmonieuse de lentente, prpare probablement par des ngociations, laisse entrevoir une complmentarit des intrts des forces en collusion. La disparition du patronage des Tatares, au service desquels les Alains avaient t jusqualors,102 a cr pour les mercenaires cantonns entre les Carpates et le Dniestr une situation critique : ils sont rests sans occupation et... sans solde. En acceptant le nouveau rgne, ils pouvaient de nouveau se nourrir la manire traditionelle: la marque de frontire - la c`pit`nia (le commandement) comme lappellait Grigore Ureche103 -, fonde et administre par les gens de Maramure] au service du roi de la Hongrie, Louis dAnjou,104 a conserv la fonction que Nogai avait jadis attribue au pays des Alains, fonction perptue par les khans rgnant sur la Volga. Linstallation de la nouvelle autorit sur la place reste vide, suite au reflux du grand pouvoir de lEst, a conduit la communaut alaine tourner les armes contre ses anciens ma[tres. La manuvre fut dautant plus facile accomplir que les membres de ce groupe ethnique taient, la diffrence des chefs musulmans des Tatares devenus de plus en plus intolrants,105 des chrtiens orthodoxes, tout comme leurs aeux du Caucase106 et comme leurs voisins roumains et ruthnes du nouvel habitat. Selon lopinion accrdite par les historiens, le noyau de ltat fond par Drago] se trouvait au Nord-Ouest de la Moldavie, ayant pour centres les villes de Baia et de Siret.107 Lextension territoriale de la marque de frontire la [ncep`tur` (au commencement) nest pas rductible cette rgion. Lentente de Drago] avec les Alains concernait coup sr toute la communaut, pas seulement les I\cani de Suceava et de Sniatyn, comme taient tents de le croire, suivant la tradition orale, les chroniqueurs moldaves. Ainsi, les Ia]i d ct du Prut et le pays des Ia]i des environs de la bourgade de B`l\i108 prouvent que la c`pit`nia de
V. la note 65; dans le mme sens, toutes les chroniques slavo-roumaines, comme le remarquait SpinM 307. 103 UrecG 17 n. 1. 104 SpinM 307 remarque la concordance des opinions des historiens dans cette question. 105 V. SpulH 217 suiv. 106 V. RichP 305 (indice) qui prsente la situation confessionnelle des Alains du Caucase et de la Crime entre le XIIIe et XVe sicle, tout comme les efforts de la papaut de leur imposer lobdience ecclsiastique lgard de Rome. 107 Et il est tout fait normal que ce soit ainsi, ajoute SpinM 308, vu la proximit du Maramure], do taient originaires les fondateurs. Laffirmation de lauteur lgard du noyau de ltat ainsi localis, est valable uniquement dans l'acception de Kernland, qui suppose obligatoirement un Nebenland connexe. 108 V. la note 90.
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Drago] ne sest pas rsum au nid modeste de la Bukovine, do il se serait largi dans les dcennies suivantes, mais quelle a compris ds le dbut toute la zone des collines de lespace entre les Carpates et le Dniestr. Ce nest pas seulement la toponymie qui plaide dans ce sens. Entr depuis longtemps dans le circuit historiographique, o il a t sousestim, le tmoignage de lune des sources les plus proches de lpisode en discussion rvle toute sa valeur informative dans la perspective de lentente des gens de Maramure] et des Alains. Il sagit de la Chronique moldo-russe, qui prcise que Drago] et ses compagnons sont arrivs la frontire (margine), o vaguaient les nomades tatares109. Dans lacception mdivale du terme, margine ne dsignait pas une ralit filiforme, mais - tout comme le mot hotar frontire du vocabulaire actuel des Transylvains - il faisait rfrence une large bande territoriale qui, dans ce cas, couvrait srement tout le Boudjak. Malgr leur caractre fragmentaire et disparate, les informations ci-dessus permettent la reconstitution dune image cohrente de lespace dentre les Carpates et le Dniestr lpoque de la fondation de la Moldavie. Au-del des incertitudes de dtail, on constate que les frontires naturelles - les Carpates, le Dniestr, le Danube et la mer Noire ont t tellement fortes, quelles ont contraint lAlania de se constituer comme tat. Le caractre unificateur de ces lments gographiques a prvalu sur la disjonction interne : il y a eu un Haut Pays, |ara de Sus, le domaine proprement-dit des Alains, et un Pays Bas, |ara de Jos, le Boudjak, rserv aux Tatares nomades. Cest dans ce moule gopolitique que sera tourne en deux tapes, 1359 et ante 1393, la Moldavie,110 en tant quhritire directe de la seigneurie des Alains. On ne saurait souligner suffisamment la valeur formative long terme de cette matrice dans le dveloppement du second tat mdival roumain situ au nord du Danube. Lhritage alain fut dterminant non seulement pour ltendue du territoire sur lequel a rgn Drago] ; cest surtout lappui militaire apport par les premiers partisans du nouveau prince qui prsente une importance encore plus grande pour les dbuts de ltat, y compris pour lacte dindpendance par rapport la couronne hongroise : le premier
CSR 160; texte 156: x . Adoptant une opinion largement rpandue, Papa 112 considre que ce processus, obscur dans sa majeure partie, a eu lieu en plusieurs tapes: La Moldavie des fondateurs sest progressivement attach les formations les pays situs au nord et au sud, remplissant la fonction de noyau unificateur. La dernire de ces formations a t le Pays Bas, attach du temps de Roman Mu]at.
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vovode de la Moldavie est entr en possession dun dispositif militaire constitu, compos de professionnels endurcis dans les guerres. Fonde sur cette structure, le rgne a t vigoureux ds le dbut et de ce fait il a dcourag toute rbellion locale. Lambiance idyllique de la gense de la Moldavie, telle quelle a t retenue par les narrateurs anonymes et par les chroniqueurs, constitue un reflexe vridique de cet tat de choses. La solidit du nouvel tat la rendu rsistant toute preuve extrieure. La rapidit avec laquelle il a obtenu son indpendance de la tutelle hongroise (1365) et le succs avec lequel il la dfendue conscutivement sont des signes de sa vigueur premire. Sans pouvoir la prouver par des documents, la contribution des Alains au processus dmancipation initi par Bogdan I devient dans le contexte historique donn un paramtre qui ne peut tre pass de vue. Conformment au rcit enregistr par Miron Costin, Drago] et le lgendaire Ia\co tablirent un accord comprenant des obligations rciproques, qui stipule clairement la prestation du nouveau prince lgard des Alains : il leur fait don, avec droit dhritage, de tous les domaines des environs111. Il sagit srement dune reconnaissance des ralits antrieures, prcdant la fondation de la Moldavie, et non de dons proprement dits. Le fait que cette opration ait rellement eu lieu et quelle nappartient pas la fabulation historique folklorique est tmoign par des documents qui font sortir ces derniers Alains du territoire tnbreux de la lgende les dplaant dans la lumire de lhistoire. Un acte mis Constantinople en 1395 confirme le fait que le patriarche cumnique a accept la soumission de deux monastres appartenant Iaskos de la Moldavie.112 Il ny a aucun doute quant lidentit du personnage : cest le chancelier, attest entre 1399 et 1411 en tant que membre du conseil princier sous le rgne de Iuga et dAlexandre le Bon113. La mme certitude quant la localisation dun des deux monastres : o ailleurs qu... I\cani114. Les documents de la chancellerie princire moldave ont associ donc deux noms - de la personne et de lendroit - pour une seconde fois,
V. la note 65. N`stD 346. 113 CostD II 849, DIR A I 7, 8, 10, 12, 15, 17, 18, 20, 21, 22, 25; DRH A I 13-39 (la denire mention en 1409); identifi au possesseur des deux monastres de N`stD 347-8. 114 Le vovode Alex`ndrel faisait un don ce monastre prs de Suceava, le monastre de Ia\cu, ayant pour patronne la Sainte Vierge... (CostD II 462 ; v. StoiR 797-8) ; N`stD 350 a suppos que le second monastre aurait pu avoir t difi prs de Suceava, lendroit o Petru Rare] a fait btir lglise ayant pour patron Saint Dmtre.
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aprs leur association par la tradition orale. Il est important de remarquer que les deux juxtapositions proviennent de deux catgories de sources indpendantes : les chroniqueurs, qui ont consign lhistoire de E\co et de Drago], nont pas connu les actes officiels mentionns ; sils les avaient connus, ils nauraient pas pu manquer de remarquer - et de consigner ! - le paralllisme frappant des deux paires de noms. Si au sujet des mentions des I\cani on constate que les noms renvoient tous la localit situe en marge de la ville Suceava, pour ce qui est de lanthroponyme, la situation est plus complexe. En contraste avec le Ia\cu de la lgende, cration reprsentative pour la communaut alaine, mais pour autant fictive, son homonyme des documents a t sans aucun doute un personnage en chair et en os. Ce dernier a t sa manire dificateur pour lhritage laiss par les Alains la Moldavie. Le nom de Ia\cu doit avoir t entendu par les contemporains comme driv de lethnonyme lAlain115, ayant par consquent une valeur exponentielle pour le groupe duquel il provenait et quil a probablement reprsent au dbut auprs du pouvoir. Pendant les quatre dcennies passes aprs ltablissement de laccord historique entre Drago] et E\co, au cours de lassimilation de la communaut des Ia]i au sein de la majorit a eu lieu la transformation des chefs alains en boyards moldaves. Une usurpation de la proprit collective, reconnue en tant que telle dans le trait originaire de 1359116, a accompagn ce processus. Elle explique la manire dans laquelle pan (seigneur) Ia\cu est devenu lun des plus riches hommes de son poque, comme le montre la possession des deux monastres, les plus anciennes fondations nobiliaires de ce genre en Moldavie117. La situation matrielle, aussi bien que le contrat initial entre les Alains et le pouvoir se trouvent lorigine de lascension du personnage dans la haute hirarchie politique de ltat. Devenu au plus tard en 1395 une figure de premier rang de la Moldavie,118 le boyard
Labsence dun autre dterminant onomastique plaide dans le mme sens, ce qui le particularise dans le conseil princier et de ses homonymes, qui vont lui succder (v. CostD I 849 et les documents mentionns dans la note 113): le nom de Iacu, plein de sens par lui mme, nanvait pas besoin de quelque marque supplmentaire pour fixer lidentit du personnage. 116 V. la note 65. 117 AnstD 350. CihoA 156 se trompe quand il pense que le copiste Iacu aurait bnfici lui aussi des dons faits par Alexandre le Bon quelques artistes et lettrs : Grce son mtier, celui-ci tait devenu probablement assez riche, pour pouvoir faire btir un monastre prs de Suceava; de plus, il na pas fait btir le monastre pendant les premires annes du rgne dAlexandre (ibid. 121), mais plus tt. 118 Les vicissitudes quont subies les Alains de la Moldavie entre 1359 et 1395 sont compltement ignores. Il mest impossible de dcider si la chronique de Iurg
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Ia\cu a particip, avant mme de fonctionner comme chancelier (logof`t)119 dans les assembls princiers de Iuga120 et dAlexandre le Bon121, la prise des grandes dcisions politiques de ltat : lanne mentionne, il a vou ses monastres la patriarchie de Constantinople pour aider le vovode }tefan de se rconcilier avec linstance suprme de lglise orthodoxe122. La grandeur du personnage tait pourtant une manifestation crpusculaire. Avec la disparition du boyard Ia\cu sachve le chapitre de la coopration moldo-alaine ou du moins ce que nous en connaissons. En mme temps, cest laccord final de lhistoire des Alains dans lespace carpato-danubien, qui avait t illustr, avant lpisode moldave, par leur coopration avec les Tatares et les Roumains de la Valachie.
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