7345 Chap19

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Marketing Management

Philip Kotler Kevin Lane Keller Delphine Manceau Bernard Dubois

Chapitre 19
Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente
Les communications marketing prennent de plus en plus la forme dun dialogue entre lentreprise et ses clients. Les marques ne se demandent plus seulement comment contacter leurs clients, mais aussi comment les clients peuvent les contacter et mme comment ils peuvent se contacter les uns les autres. Les techniques utilisables dans ce but sont nombreuses, avec Internet, le fax, le tlphone mobile et les applications sans fil. Ces technologies permettent de passer dune communication de masse une communication plus cible et double sens, dans laquelle les consommateurs jouent un rle croissant. Ce chapitre tudie quatre questions :
Comment intgrer le marketing direct la politique de communication ? Comment utiliser efficacement le marketing interactif ? Comment tirer le meilleur parti du bouche--oreille travers le marketing viral ? Comment mettre en place et piloter une force de vente de manire favoriser son efficacit ?

COCA-COLA. Quand lentreprise a relanc le site coca-cola.com, ce ntait plus un site institutionnel classique prsentant des informations, des chiffres et des rapports annuels, mais une communaut interactive de consommateurs cherchant partager leur crativit. On y propose un monde virtuel o les consommateurs peuvent jouer, couter de jeunes talents musicaux, mixer de la musique, participer des blogs, tlcharger des fonds dcran, regarder des films sur la happiness factory Le site propose chacun de crer sa bouteille de Coca, prsente une galerie des bouteilles dj cres, et permet de faire un mash-up de ces bouteilles. Prs de 100 000 bouteilles ont ainsi t dessines par les internautes. Comme lentreprise sait que toutes ses propositions ne vont pas gnrer de laudience, elle a fond sa stratgie web sur lexprimentation afin didentifier les axes les plus porteurs 1.

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Source illustration : www.coca-cola.fr.

Il est aujourdhui essentiel pour les entreprises dadopter un dialogue avec les consommateurs et de sadresser chacun de manire personnalise au moment adquat. Dans ce chapitre, nous analysons les diffrents outils de la communication individualise : le marketing direct et interactif, le marketing viral fond sur le bouche--oreille, et enfin la force de vente.

1. Le marketing direct
Le marketing direct est une communication directe aux consommateurs en vue dobtenir une rponse et/ou une transaction.

Ses caractristiques spcifiques sont labsence dintermdiaire entre lentreprise et le client, une double fonction de communication et/ou de vente, et lattente dune raction rapide du client (souvent une commande ou une demande dinformation). Les canaux utiliss incluent le mailing par courrier, fax, e-mail ou SMS, lenvoi de catalogues, le tlmarketing (tlphone), ou encore la tlvision interactive2.
CARREFOUR MARKET. Chaque mois, lenseigne de distribution crit 1,5 million de porteurs de sa carte de fidlit, cibls en fonction de leur comportement dachat. Elle dite parfois jusqu 14 variantes dun mme mailing afin de ladapter au profil des clients. Ces courriers offrent des points cadeaux, mais aussi des donnes sur leur historique dachat en magasin et des informations sur leurs centres dintrt (club vin, bb, animaux 3).

Aujourdhui, le marketing direct reprsente un budget annuel de 9,7 milliards d, soit 30 % des investissements de communication et 47 % du hors-mdia. Aprs avoir considrablement augment pendant des annes et doubl en dix ans, les montants investis enregistrent actuellement un lger tassement avec une baisse de 3 % au cours des trois dernires annes. Limportance du marketing direct dans les plans de communication sexplique par de multiples raisons : la fragmentation des marchs et la recherche dune approche personnalise du client ; le dveloppement du marketing relationnel,

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incitant les entreprises envoyer des cartes danniversaire, des documents dinformation, des invitations et dautres messages pour construire une relation suivie avec les clients les plus fidles et les plus rentables4 ; et la richesse croissante des bases de donnes permettant un marketing direct rellement personnalis. Dans les activits business-to-business, le cot croissant des visites commerciales incite les rserver aux prospects les plus importants et les prparer par du tlmarketing, de le-mailing et lenvoi de courrier.

1.1. Les

avantages du marketing direct

Par rapport aux autres outils de communication, le marketing direct offre le double avantage de la slectivit et de la pertinence. Lentreprise ne sadresse qu la cible vise. Elle peut choisir le moment le plus pertinent pour contacter son client ou son prospect. Les fabricants de couches, par exemple, utilisent le marketing direct pour sadresser aux parents de jeunes enfants lge habituel o la taille des couches change afin de leur prsenter le produit nouvellement adapt aux besoins de leur bb. De mme, Nestl construit en permanence un fichier dadresses de jeunes mamans et leur envoient des informations sur les produits, des conseils, des bons de rduction, des chantillons et des cadeaux. En gnral, le marketing direct bnficie dune attention plus soutenue des consommateurs que les autres outils de communication du fait de la pertinence du message pour le prospect. Parmi ses autres avantages, le marketing direct permet de raliser facilement des exprimentations avant une opration : de multiples annonces peuvent tre testes, avec une mesure empirique des rsultats obtenus. En outre, les oprations ralises sont moins visibles pour les concurrents que dautres actions de communication. Enfin, on peut calculer prcisment limpact et la rentabilit des oprations. Une tude a t ralise par BehaviorScan sur une centaine doprations de marketing direct effectues en France et en Allemagne dans les secteurs de lalimentaire et de lhygine-beaut. Elle montre que 58 % des oprations permettent la marque de faire progresser sa part de march dau moins 10 % et, quen moyenne, le gain de part de march atteint 34 % dans les six mois5. Ce gain provient principalement du recrutement de nouveaux acheteurs, tandis que le niveau de consommation par acheteur augmente peine. Parmi les diffrents types doprations, lenvoi de coupons est le plus souvent efficace (89 % des actions conduisant un gain de part de march suprieur 10 %), devant lenvoi de magazines de consommateurs (58 %) et dchantillons (43 %). Enfin, la prsence dune opration publicitaire en parallle renforce fortement lefficacit du marketing direct en faisant passer son taux de succs 80 %, mme si cette pratique reste relativement peu courante (30 % des oprations testes). En effet, il est souhaitable dintgrer le marketing direct avec les autres oprations de communication et de vente pour maximiser son efficacit. Lidentit de la marque se construit et se nourrit des diffrentes oprations ralises, depuis les mailings et e-mailings jusqu la publicit et aux oprations de relations publiques. Dans la mesure o le marketing direct intgre des outils assez divers, nous les prsentons successivement dans les paragraphes suivants.

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1.2. Le

mailing

Les mailings sont prpars partir de fichiers internes ou achets (ou lous) lextrieur. On peut trouver une liste de nimporte quel groupe : les gauchers, les futurs maris, les parents denfants de 4 5 ans, les grands voyageurs, les adeptes de musique classique, les fans de body-building En gnral, un fichier est dabord lou lessai , puis test pour vrifier le taux de rponse. Le mailing reprsente prs de la moiti des investissements de marketing direct. Il permet une grande slectivit, une personnalisation et une flexibilit maximales en mme temps quil se prte bien aux oprations de test. Pour des produits tels que les livres ou les abonnements aux magazines, il constitue un outil marketing de premire importance. Le mailing peut se faire sur diffrents supports. Le courrier, bien sr. Le contenu de lenvoi peut prendre des formes trs diverses : lettre, prospectus, chantillon, magazine, coupon, etc. Avec la monte en puissance des autres supports et notamment de le-mailing, le courrier papier a d redfinir ses spcificits. Il prsente lavantage doffrir des possibilits cratives importantes et de jouer sur lmotionnel. Pour renforcer cette dimension, les agences travaillent aujourdhui sur de nouvelles textures et de nouvelles matires de courrier6.
RUINART. Ds 1788, Claude Ruinart, fondateur de la maison de champagne ponyme,
crivait ses meilleurs clients. La tradition a t reprise Nol 2007 avec un courrier particulirement soign avec calligraphie en or sur lenveloppe, timbre de collection et catalogue haut de gamme rserv quelques milliers de bons clients 7.

Le-mailing permet un envoi simultan une multiplicit de destinataires assorti dun lien avec le site Internet de loffreur, ce qui facilite la prise de commande. Cet outil est beaucoup moins cher que le courrier classique : le routage dun message lectronique cote environ 2 centimes contre 45 pour une lettre8. Un troisime avantage porte sur la facilit de mesure du nombre de destinataires ayant lu le message, travers le taux douverture et le taux de clic9. Cependant, le-mailing se multiplie et voit, par consquent, son taux douverture et son efficacit diminuer. Dans un sondage rcent, 23 % des personnes interroges avaient reu plus de 20 messages e-mail au cours des dernires 48 heures10 ! Le spamming (envoi de-mails non sollicits) est trs peu apprci, do limportance dutiliser le-mailing davantage auprs de ses propres clients que des prospects. Lenvoi de SMS sur tlphone mobile rpond au mme principe, mais exige une grande brivet du message (pas plus de 160 caractres). Ce support connat un engouement croissant car il se caractrise par un taux de lecture lev et rapide (le message SMS est lu en moyenne dix minutes aprs rception) et la possibilit de localiser le destinataire par puce RFID de manire lui envoyer une information encore plus personnalise. Tout comme pour le-mailing, un lien peut tre tabli avec le site Internet de la marque. Parfois, un dialogue peut sinstaurer, le destinataire rpondant par SMS pour indiquer son produit prfr ou son ge. Un frein rside toutefois dans lobtention des numros de tlphones portables. Les entreprises peuvent demander cette information leurs clients ou louer des fichiers auprs de socits spcialises, mais celles-ci sont limites par la rglementation stricte sur lautorisation divulguer ces donnes11.

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GO SPORT. Lenseigne utilise les SMS commerciaux depuis plusieurs annes. En proposant systmatiquement sa carte de fidlit gratuite, elle a rassembl une base de donnes de 1,5 million de clients renseigne sur les sports prfrs et lge de chacun, dont 500 000 ont donn leur numro de portable. Go Sport ralise huit dix campagnes SMS par an autour de promotions et de soldes prives. Ainsi, lorsque le rayon matriel de plonge liquide ses fins de sries en janvier, Go Sport peut en informer par texto les 20 000 amateurs de plonge de son fichier. Rsultat : 5 10 % des SMS entranent un achat, contre 1 % pour le-mail12.

Source illustration : www.go-sport.com.

Le mailing par tlcopie, enfin, est rserv aux offres destines aux entreprises, mais en dclin. Llaboration dune campagne de mailing suppose successivement de dfinir ses objectifs, cibler les destinataires, choisir les supports, tester la campagne et en mesurer les rsultats.

a) Les objectifs
En gnral, une opration de marketing direct a pour but dengendrer des commandes immdiates. Le taux de rponse mesure donc le succs de la campagne. Pour un mailing, on considre quun taux de 2 % est satisfaisant, encore que tout dpende de la catgorie de produit et du type de mailing. En amont des ventes, la campagne peut dvelopper la notorit ou lintention dachat. Par ailleurs, toutes les actions ne visent pas lachat immdiat. Il peut sagir de procurer des pistes la force de vente, de renforcer limage ou les bonnes relations (cartes de vux ou danniversaire) ou de faire venir les clients dans un point de vente.

b) Les cibles
Il faut identifier prcisment les caractristiques des clients et prospects les plus susceptibles dacheter. On utilise souvent la formule RFM (rcence, frquence, montant) pour les slectionner13 : on value lattrait de chaque client en fonction du temps coul depuis son dernier achat, de la frquence des achats passs et des montants dpenss depuis quil est devenu client. On peut galement adopter une approche de segmentation classique, fonde sur des critres sociodmographiques ou comportementaux. Les jeunes mres sont intresses par les petits pots et les jouets ducatifs ; les lycens par la musique et les vtements ; les jeunes maris par llectromnager et le mobilier. Les styles de vie et les centres dintrt fournissent galement une base de dpart : il y a des fans de sport, de cuisine ou dinformatique. Une fois la cible dfinie, il faut obtenir les noms des prospects. On labore souvent des listes dacheteurs rcents que lon complte en louant des fichiers, tarifs ladresse. Les fichiers externes prsentent certains inconvnients : duplication des noms, donnes incompltes, adresses obsoltes, etc. Les meilleurs dentre eux contiennent, au-del de ladresse, des informations prcises sur les caractristiques sociodmographiques et les habitudes dachat de chaque personne14.

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c) Loffre propose
Le taux de rponse un e-mail est influenc par la formulation de lobjet du message, ainsi que par loffre propose15. Pour un mailing papier, le taux de rponse est affect par plusieurs facteurs16 : Lenveloppe externe doit attirer le regard, laide par exemple dune illustration en couleurs ou dun slogan accrocheur. Lenveloppe est plus efficace, mais aussi plus coteuse, si elle contient un timbre de collection, est crite la main, et diffre du format normal (sauf pour les communications daffaires). La lettre doit tre personnalise et commencer par un titre qui donne envie de lire la suite. Le papier doit tre dun bon grammage et le texte ponctu de remarques et dannotations en marge. Un P.S. incitatif ainsi que la signature dune personne haut place dans lentreprise accroissent le taux de rponse. Un prospectus en couleur accompagnant la lettre accrot le taux de rponse, compensant ainsi son cot. De meilleurs rsultats sont galement obtenus si lon indique un numro vert et si le bon de commande est prdcoup. Enfin, la carte de rponse, couple une enveloppe T, doit tre trs facile remplir.

d) Les tests
Lun des rels avantages du marketing direct est la facilit avec laquelle tous ces lments peuvent tre tests en vraie grandeur sur le march. On peut tester des accroches, des prix, des offres et des fichiers. Tout cela permet damliorer grandement les taux de rponse et la rentabilit.

e) La mesure de limpact
En totalisant les cots, on peut assez facilement estimer le taux de rponse correspondant au point mort. Il faut bien sr dduire les retours et les impays. Mme si le point mort nest pas atteint, limpact peut quand mme tre positif si lon prend en compte les effets plus long terme en termes de notorit et de bouche--oreille, ainsi que la valeur vie des clients conquis grce lopration. Cette notion, voque au chapitre 5, tient compte de la longvit habituelle des clients, de leurs dpenses annuelles et de la marge brute moyenne, moins le cot dacquisition et dentretien (en appliquant un taux li au cot dopportunit dans lusage des montants investis).

1.3. Le

marketing par catalogue

Anctre du marketing direct, le catalogue sintgre la fois dans la vente distance et dans la communication des distributeurs. Par exemple, Ikea dite chaque anne un catalogue qui stimule la vente en ligne, mais surtout donne des informations aux clients avant quils ne se rendent dans un magasin. Plusieurs centaines de millions de catalogues sont distribus chaque anne en France. On distingue les catalogues gnraux de la vente distance, tels ceux de La Redoute ou des 3 Suisses, et les catalogues spcialiss issus des grands magasins (Galeries Lafayette, le Printemps), des grandes surfaces (Carrefour, Auchan) ou des fabricants (cosmtique, textile, bijouterie, etc.). Dans certaines catgories de produits business-to-business comme les fournitures de bureau (Office Depot), des socits de vente par catalogue obtiennent de trs bons rsultats. Certaines entreprises se distinguent par les cadeaux quelles offrent, leur politique de service (remboursement, garantie) ou leur rapidit de livraison (48 heures chrono).

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La plupart des entreprises mettent leur catalogue sur Internet, ce qui leur permet de toucher plus de clients potentiels moindre cot. Mais cela exige de trouver des manires de les inciter se connecter au site web de la marque : tandis que le catalogue va vers le client (approche push), cest au client de se connecter sur Internet (approche pull).

1.4. Le

tlmarketing (ou marketing tlphonique)

Le tlmarketing est la fois utilis dans les secteurs de la grande consommation et du business-to-business. Il consiste utiliser le tlphone afin datteindre diffrents objectifs : prendre des commandes, par exemple aprs lenvoi dun catalogue ; contacter ou qualifier des prospects ; prparer une visite de la force de vente ; entretenir les relations avec les clients travers des entretiens tlphoniques ; rpondre aux questions des clients ou leur fournir une assistance. Epson dispose ainsi de trois hotlines diffrentes : la ligne Epson information, la ligne b-to-b / b-to-c et la ligne service aprs-vente. Globalement, le tlmarketing permet aux entreprises daccrotre leur chiffre daffaires, de rduire leurs cots commerciaux et damliorer la satisfaction de la clientle. Les centres dappel peuvent tre utiliss la fois pour recevoir des appels ou en mettre. Ils associent de plus en plus le tlphone avec les autres canaux de communication avec le client (encadr 19.1).

1.5. Les

autres mdias employs pour le marketing direct

Les grands mdias peuvent galement tre utiliss pour faire du marketing direct. La presse, la radio et la tlvision accueillent des publicits qui, couples un numro vert, permettent la prise de commande immdiate. Le tlachat repose sur des missions tlvises au cours desquelles sont prsents un certain nombre de produits, qui peuvent ensuite tre commands par tlphone. Les systmes de tlvision interactive permettent au tlspectateur de solliciter davantage dinformations sur le produit, de demander une brochure, de prendre rendezvous avec un vendeur ou mme de passer commande grce sa tlcommande. Un dcodeur transmet linformation lentreprise par le rseau tlphonique.

1.6. La

responsabilit sociale et thique du marketing direct


Dans lensemble, les entreprises qui pratiquent le marketing direct entretiennent de bons rapports avec leurs clients. Ceux-ci apprcient quon leur transmette des informations qui leur semblent utiles. Toutefois, un certain agacement se dveloppe face la multiplicit des messages reus (figure 19.1). Les situations qui peuvent survenir sont les suivantes17. Lirritation. Nombreux sont ceux qui se plaignent du caractre intrusif de certaines pratiques de marketing direct et notamment du marketing tlphonique. Ils dnoncent les appels en soire, les employs insistants et lusage des automates dappel. La survente. Il arrive que des oprateurs de marketing direct tirent parti de la crdulit ou de la position de faiblesse de certains consommateurs. Par exemple, la prsentation ambigu dune loterie fera croire certains destinataires quils ont gagn.

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19.1

Pour approfondir

Les centres dappels multicanaux


La socit Caudalie, une PME qui commercialise des soins de beaut base de ppins de raisin vendus en pharmacie, a un centre dappels interne de trois salaris qui rpondent, chaque jour, 50 appels tlphoniques, 200 courriers et 60 e-mails. Dcathlon gre plusieurs centaines dappels et de-mails par jour qui portent sur des demandes dinformation sur les produits et leur disponibilit en magasin, des ractions aux campagnes de communication ou des rclamations aprs un achat. La tendance est aujourdhui aux centres multicanaux intgrant tous les moyens de contact avec les clients. On en compte aujourdhui environ 3 000 en France, employant 260 000 personnes, pour un chiffre daffaires annuel dpassant les 7,5 milliards. Si 80 % des entreprises optent pour des centres internes, certaines sous-traitent lextrieur, comme la SNCF qui a con Phone Marketing son opration Grand Voyageur. Parmi les avantages de la prise en charge en interne, on peut citer la condentialit des informations mises et la matrise des messages dlivrs aux clients, tandis quun cot moindre et une plus grande exibilit en cas de saisonnalit de lactivit jouent en faveur de lexternalisation. Ce secteur est parmi ceux qui dlocalisent le plus : en quelques annes, une centaine de plateformes ont t cres en Europe de lEst, au Maghreb ou en Afrique francophone. Faibles cots dinstallation, salaires diviss par trois, souplesse horaire due une lgislation moins contraignante : en choisissant la dlocalisation, les socits tentent optimiser leur quation conomique. Aujourdhui, les spcialistes insistent sur limportance de la qualit en matire de centre dappels. Comme le note Emmanuelle Grossir, tout le monde a vcu le scnario catastrophe [] pour limage de lentreprise, dans lequel un client appelle un service consommateurs pour un problme, patiente dix minutes 34 centimes la minute avant dobtenir un oprateur qui ne rsout pas le problme mais lui propose la promotion du moment . En raction, les spcialistes prconisent le recours des numros gratuits, en ne rservant les appels surtaxs quaux numros forte valeur ajoute. La gestion des ressources humaines est essentielle pour former et amliorer les conditions de travail des tloprateurs forcment stresss par une activit qui exige un certain rendement. En France, on estime quenviron 70 % des tlconseillers sont embauchs en contrat CDI, pour un salaire mensuel brut de 1 400 en moyenne. Ceci pourrait expliquer le turnover lev du personnel : 25 % en Europe contre 19 % dans le monde. Selon Franois Henri, directeur du ple centre dappels de MRM Partners, on ne peut pas faire du customer care si on ne fait pas du people care lintrieur du centre dappels .
Sources : Centres dappels , Dossier, Stratgies, 24 mai 2007 ; Call centers : pourquoi tant de haine , CB News, 10 mai 2004, p. 26-28 ; Centres dappels, mode demploi , Stratgies, 23 octobre 2003 ; Centres dappels : le service au bout du fil , Enjeux, 1er octobre 1998, p. 98-100.

Source illustration : www.caudalie.fr.

La tromperie et la fraude. Certains oprateurs de marketing direct mettent des messages qui, de toute vidence, trompent les consommateurs qui les lisent. Les performances ou mme les dimensions du produit ou du service sont exagres, et les prix sont parfois trompeurs. En France, la publicit de nature induire en erreur est interdite par larticle L. 121-1 du Code de la consommation. Pourtant, chaque anne, de nombreuses arnaques sont dbusques. Linvasion dans la vie prive. Cest peut-tre la question la plus pineuse. chaque fois quun client prend contact avec une entreprise, que ce soit loccasion dune garantie, dune promotion ou dun paiement, son nom et ses caractristiques sont rpertoris dans une base de donnes qui pourra ultrieurement tre exploite. Est-il lgitime dplucher les carnets de naissance des quotidiens

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a ne me drange pas : il y a parfois des offres intressantes que jutilise 22 %

Je trouve quil y en a vraiment trop et je les mets presque tous la poubelle 31 %

FIGURE 19.1

Japprcie de recevoir des offres qui me permettent de choisir 6% a mnerve souvent, mais je les trie et jen mets quelques-uns de ct 41 %

Les rsultats dun sondage sur lopinion face aux messages commerciaux reus directement

Source : sondage CustomEyes ralis auprs de 3 991 personnes, repris par Marketing direct : concilier relationnel et promotionnel , LSA, 27 mars 2008, p. 38-43.

nationaux et rgionaux pour revendre les adresses ainsi recueillies aux fabricants de couches-culottes et de petits pots ? De mme, peut-on, loccasion dune prestation de service aprs-vente, interroger les consommateurs sur leurs magazines prfrs pour exploiter ensuite ces informations commercialement ? En France, la CNIL surveille de prs toutes ces initiatives, et les entreprises doivent solliciter lautorisation des consommateurs avant de leur envoyer des e-mails. Les professionnels du marketing direct doivent se sentir concerns par toutes ces questions. Plutt que de ne rien faire et prendre ainsi le risque dune rglementation plus contraignante, ils prfrent en gnral se doter de codes de dontologie et exclure de leurs syndicats professionnels les plus indlicats.

2. Le marketing interactif
Internet offre aux entreprises et aux consommateurs une approche interactive et individualise18. Le marketing interactif constitue une forme rcente et en ligne du marketing direct, mais le dpasse dans la mesure o il intgre la publicit sur Internet (les bannires), le parrainage de sites, les liens sponsoriss sur les moteurs de recherche, et les sites Internet eux-mmes.
UNILEVER a dvelopp une plate-forme
Internet de marketing relationnel (pourtoutvousdire.com) complmentaire de son magazine papier. Son objectif est de mieux connatre les habitudes de consommation des 20 % de la clientle qui engendrent 50 % du chiffre daffaires. Pour ce faire, le site prodigue des conseils pratiques pour la vie quotidienne et propose aux visiteurs de discuter sur des forums. Mais auparavant, il

Source illustration : www.pourtoutvousdire.com.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur faut sinscrire et divulguer des informations personnelles (adresse, composition de la famille, gots, talents particuliers, etc.). En fonction de leur profil, les internautes ne verront pas les mmes pages apparatre sur leur cran ni ne recevront les mmes newsletters19.

2.1. Les

avantages et les inconvnients du marketing interactif

Le marketing interactif prsente plusieurs avantages spcifiques : faible cot ; capacit de sadresser individuellement chaque consommateur ; capacit de toucher les individus peu exposs aux autres mdias et notamment la tlvision ; choix prcis des sites dans lesquels les bannires sont insres ; capacit dapparatre lcran lorsque le consommateur a tap un mot pertinent dans un moteur de recherche. En effet, la communication sur Internet permet de faire apparatre une bannire en fonction de la recherche dinformation que le client est en train deffectuer : le ciblage ne se fait donc plus seulement en fonction du profil identitaire du consommateur, mais de son intrt du moment. Cest ainsi que Google propose un placement publicitaire particulirement cibl aux annonceurs (encadr 19.2). Si lapparition personnalise du message apparat souvent comme un avantage dterminant, une exprience sur un site de vente en ligne a toutefois montr que ce nest pas toujours le cas, en particulier pour les produits trs impliquants20. Un autre avantage cl du marketing interactif est la mesure trs prcise de lefficacit de la communication en suivant le nombre de clics et le parcours des internautes. Cest ainsi que de nombreuses entreprises font des essais sur Internet avant dlargir le spectre des campagnes les plus efficaces. Les spcificits dInternet permettent, en outre, de privilgier des communications moins conventionnelles que sur les autres mdias en les destinant une clientle cible.
SUNSILK. La marque a cr sur Internet la srie Libre comme lair (du nom dune de
ses gammes), qui raconte lhistoire de Chlo, jeune provinciale de 22 ans qui arrive Paris en esprant devenir mannequin ou actrice et dchante trs vite devant la concurrence implacable du milieu. Douze pisodes hebdomadaires de 2 minutes 30, dans lesquels la marque napparat que trs discrtement sur le cabinet de toilette de Chlo et en signature finale, sadressent la cible difficile des jeunes femmes de moins de 30 ans, peu fidles aux marques, trs critiques des spots publicitaires traditionnels, et fortes utilisatrices dInternet. La srie, diffuse sur Dailymotion, a gnr plus de 500 000 visites en trois mois sur le site Sunsilk et 1,5 million de vidos vues, tout en permettant de constituer une base de donnes de 100 000 jeunes femmes qui reconnaissent avoir achet les produits de la marque21.

Le cot dentre rduit de la publicit sur le web est un avantage essentiel pour les PME. Le budget moyen dune campagne sy lve 829 k, soit cinq fois moins qu la tlvision, et cette moyenne cache de profondes disparits. En consquence, on compte en France deux fois plus dannonceurs sur Internet qu la tlvision22. Les secteurs qui ont t les premiers sintresser au web (les tlcoms et le voyage) ralentissent aujourdhui leurs investissements, tandis que la croissance est plus forte dans la distribution (avec notamment des investisseurs comme La Redoute et CDiscount), la grande consommation (Nestl a

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19.2

Cas dentreprise

La stratgie particulire de Google vis--vis des annonceurs


Cr en 1998 par deux tudiants en doctorat de luniversit de Stanford, le moteur de recherche fut nomm ainsi daprs un jeu de mot sur googol, le nombre correspondant un 1 suivi de 100 zros, en rfrence la quantit massive dinformations disponibles en ligne parmi lesquelles Google aide les utilisateurs se reprer. La mission de lentreprise est dorganiser linformation mondiale et de la rendre accessible et utile de manire universelle . Lentreprise est devenue le leader des moteurs de recherche grce son innovation constante et son dynamisme conomique. Au fur et mesure que Google gagnait en popularit auprs des internautes, il attirait de plus en plus de marques souhaitant faire de la publicit en ligne. Celles-ci achtent des publicits de recherche , cest--dire des petites botes de texte bref en lien avec les termes de la recherche en cours mais montres part, ct du rsultat de la recherche. Google met les mots cls aux enchres, mais les annonceurs paient seulement lorsque les utilisateurs cliquent sur la publicit les concernant. En complment, Google fournit aux annonceurs des outils pour mieux cibler leurs publicits et pour mesurer lefcacit de leur marketing interactif. Google Analytics, fourni gratuitement, labore un tableau de bord prcisant comment les internautes ont trouv le site, quelles publicits ils ont vues et sur lesquelles ils ont cliqu, comment ils ont surf sur le site et combien de trac a t gnr. Certains annonceurs ont ainsi appris que les visiteurs de leur site rencontraient des difcults les conduisant abandonner leur processus de commande, suggrant des changements dans le site. Ces donnes permettent damliorer un programme de marketing interactif en temps rel et mme de construire un plan mdia sur Internet. Les services proposs favorisent une approche marketing centre sur loptimisation des ressources et des budgets marketing. Google lappelle le management de lactif marketing , suggrant que la publicit en ligne doit tre gre comme un actif dans un portefeuille nancier, avec des arbitrages variables en fonction des conditions de march. Plutt que dappliquer un plan marketing dvelopp plusieurs mois plus tt, il sagit dutiliser les informations collectes en temps rel sur les campagnes en cours pour optimiser leur efcacit.
Source : www.google.com ; Google Flex , Adweek, 20 mars 2006 ; Keywords, Analytics help define user lifetime value , Advertising Age, 24 avril 2006, p. S2 ; Survival guide , Herald Sun, 29 mars 2006 ; Google , Fortune, 31 octobre 2005, p. 168-169 ; Googles profit sails past expectations , USA Today, 21 octobre 2005.

multipli par 6 ses dpenses publicitaires sur le web en 2007) et le luxe qui y consacre des montants croissants. Les premiers annonceurs sur Internet taient respectivement eBay, la SNCF, SFR et France Tlcom en 2007. Pepsi consacre plus de 5 % de son budget publicitaire au web cause du bon rapport efficacit / cot de ce mdia23.
PEPSI. Une communication autour du thme de Star Wars sintitulait rend visite Yoda . Le personnage vert aux oreilles pointues volait travers la page daccueil de Yahoo! avant datterrir dans une petite bote en haut droite de lcran. Les internautes qui cliquaient sur la bote arrivaient sur un site Pepsi qui prsentait une promotion spciale. Grce des tudes de march, Pepsi a pu placer sa publicit sur les pages du site Yahoo! les plus frquentes par les acheteurs de packs de 12 ou 24 canettes, sa cible pour cette opration. Les ventes ont grimp de plus de 10 %.

Le recours Internet a toutefois quelques inconvnients. Les entreprises ne matrisent pas toujours lusage que les internautes font de leurs messages et de leurs activits marketing. En outre, le consommateur peut refuser ou fermer la plupart des messages commerciaux. Du fait de la ncessit de demander la permission linternaute avant de lui envoyer des e-mails, le marketing interactif apparat comme un marketing autoris,

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ce qui cre un engagement plus fort chez linternaute qui laccepte24. Les consommateurs choisissent les marques qui les contactent et les publicits quils souhaitent voir25.

2.2. Les

diffrents outils du marketing interactif

Le marketing interactif relve doutils trs divers26. Les sites Internet. Une entreprise doit avoir un site Internet qui incarne ou exprime sa mission, son histoire, ses produits et sa vision. Le site doit tre attrayant la premire visite et suffisamment intressant pour stimuler les visites futures. Sept lments doivent tre pris en compte lors de sa conception (tableau 19.1). Pour inciter les internautes revenir rgulirement sur le site, il faut particulirement travailler sur les lments de contexte et de contenu, tout en les changeant en permanence. Les internautes jugent un site en fonction de deux critres : (1) la facilit dutilisation, qui dpend elle-mme de la rapidit de tlchargement, de la facilit comprendre la page daccueil et naviguer dune page lautre ; (2) lattrait du site,
TABLEAU 19.1

La prsentation : apparence et design Le contenu : texte, images, son, vido La communaut : capacit permettre une communication entre internautes La personnalisation : capacit du site modier lui-mme son contenu en fonction de linternaute ou permettre linternaute de le personnaliser La communication : du site vers linternaute et/ou de linternaute vers le site La connexion : liens avec dautres sites Le commerce : vente en ligne ou non
Source : Jeffrey Rayport et Bernard Jaworski, E-commerce (New York : McGraw-Hill, 2001), p. 116.

Les sept facteurs de conception dun site Internet efficace

quant lui, correspond lorganisation claire des pages sans une foultitude de donnes, la lisibilit du texte et des caractres, et au bon usage du son et de la couleur. Il convient galement de tenir compte des proccupations de scurit et de respect de la vie prive de nombreux internautes27. Les microsites sont des zones limites, gres et achetes par une entreprise externe au site. Il sagit, par exemple, de quelques pages web qui fonctionnent comme supplment au site dorigine. Cet outil est particulirement utile pour les entreprises qui vendent des produits qui intressent peu les gens. Ainsi, peu de gens visitent spontanment les sites Internet des compagnies dassurance, mais un assureur peut crer un microsite sur un site de voitures doccasion qui donne des conseils lachat et suggre de bons contrats dassurance. Les liens sponsoriss (40 % des investissements sur Internet) permettent dassurer la promotion dun site web partir de mots cls taps par les internautes sur les moteurs de recherche. Les termes de la recherche constituent une approximation des centres dintrt du moment du consommateur et permettent de proposer un lien pertinent avec des offres de produits et services. Des sites comme Google, MSN ou Yahoo! commercialisent ce type de prestations. Lannonceur ne

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paie que si linternaute clique sur le lien. Le cot au clic varie selon le rang dapparition du lien et selon la demande pour le mot cl en question. Le taux de clic avoisine les 2 %, beaucoup plus que pour les bannires Internet. Un responsable de Samsung estimait quil est 50 % moins cher de toucher 1 000 personnes sur Internet de cette manire quen utilisant la tlvision, et lentreprise y a transfr 10 % de son budget publicitaire28. Certains considrent quInternet passe progressivement dun outil de recherche un outil de dcouverte grce aux sites et aux systmes de recommandation comme Pandora ou Whattorent qui suggrent de la musique, des films, des sites web ou tout autre outil. Les bannires publicitaires (20 %) sont de petits aplats rectangulaires prsentant du texte et parfois des images, qui saffichent linsu de linternaute pour attirer son attention sur un produit ou une marque distincts du site quil consulte. Limage peut tre fixe, anime, en flash Plus laudience est large, plus le prix est lev. Lefficacit des bannires est value par deux indicateurs distincts : le nombre de personnes voyant la page (laudience) et le taux de clic visant consulter le site de lannonceur. Aux dbuts dInternet, les internautes cliquaient sur 2 3 % des bannires, mais la forte baisse survenue depuis incite aujourdhui de nombreux publicitaires privilgier dautres formes de communication29. Pourtant, les bannires restent un outil privilgi de communication sur le web : lorsque lon sait que les internautes passent seulement 5 % de leur temps rellement chercher de linformation, on voit quil est possible dattirer lattention des gens qui surfent sans objectif prcis. Cela suppose dlaborer des bannires cibles qui veillent la curiosit30. Lmergence du ciblage comportemental permet aux entreprises de suivre le comportement en ligne des consommateurs afin dajuster au mieux la publicit au prospect. Par exemple, si une personne consulte trois sites web lis lassurance automobile, puis regarde un site consacr aux loisirs ou au sport, des bannires pour lassurance automobile peuvent apparatre. Microsoft souligne que le ciblage comportemental augmente la probabilit de clic jusqu 76 %, tandis que des voix slvent pour dnoncer limmersion dans la vie prive des consommateurs31. Les interstitiels sont des crans publicitaires de transition, souvent anims ou avec vido, qui apparaissent lors du passage dune page web une autre. Par exemple, des publicits pour le mdicament contre la migraine Tylenol de Johnson & Johnson apparaissent sur les sites web des brokers ds que les marchs financiers baissent de plus de 100 points. Parce que de nombreux internautes les trouvaient gnants, de nombreux logiciels permettent aujourdhui de bloquer les pop-up . Les vidos sur Internet. Grce aux sites de contenu vido comme Dailymotion, YouTube, MySpace Video ou Google Video, les consommateurs et les publicitaires peuvent mettre en ligne des vidos et des publicits visionnes par des millions de gens dans le monde. Les vidos sur Internet sont peu coteuses (20 100 k) et permettent aux responsables marketing dtre plus audacieux dans leur communication.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

BMW. Pour communiquer son positionnement autour du luxe et de la performance, le constructeur automobile a cr une srie de petits films diffuss sur Internet, mi-chemin entre la publicit et le cinma. La saga a dmarr en 2001 avec des acteurs comme Mickey Rourke et Madonna, mis en scne par des ralisateurs clbres, comme John Frankenheimer ou Ang Lee. Chaque film dure moins de dix minutes et peut tre tlcharg sur le site de la marque. Avec un budget de 3 millions de dollars par film, la vido est conue selon une approche cinmatographique, mais aussi pour montrer les qualits particulires des modles BMW. Afin de crer du trafic sur son site, lentreprise a prsent les bandes-annonces de ses films comme spots TV. Le rsultat a t impressionnant. Selon BMW, plus de 55 millions de personnes ont regard les films sur le web, gnrant un norme bouche--oreille et une forte couverture presse. Certains critiques de films les commentent dun point de vue cinmatographique. En demandant aux internautes de senregistrer avant tout visionnage, lentreprise a collect des informations sur des prospects potentiels, dont certains taient peu sensibles aux efforts marketing antrieurs de la marque32.

Source illustration : BMW / Ritta & Associates.

Le-parrainage consiste associer son nom un contenu spcifique sur un site web, souvent li linformation. Il peut se matrialiser sous la forme dune image, dun lien ou dun contenu fourni par le partenaire. Un support frquent de-parrainage est le podcast, cest--dire les fichiers numriques permettant de rcouter une mission de radio sur un lecteur MP3 ou un ordinateur. Lentreprise qui parraine le podcast peut diffuser une publicit radio de 20 ou 30 secondes au dbut de lmission. Les alliances consistent pour deux entreprises communiquer de manire rciproque sur le site de lautre. AOL et Amazon, par exemple, ont de nombreux partenariats. Les communauts virtuelles. De nombreuses entreprises parrainent des communauts en ligne dont les membres communiquent par messages et chat sur des sujets plus ou moins lis la marque. Elles proposent des activits individuelles ou collectives aidant les membres de la communaut entrer en relation33. Ces communauts fournissent parfois des informations prcieuses et prcises sur les comportements des consommateurs (voir chapitre 3). Lenvoi de-mails sintgre dans le marketing direct. Son pourcentage dans les dpenses est faible cause de son cot nettement infrieur au mailing papier, cependant il est de plus en plus utilis par les entreprises. Lentreprise Microsoft dpensait 70 millions de dollars en mailings postaux, elle envoie dsormais 20 millions de-mails par mois, ce qui lui cote beaucoup moins cher.

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Voici quelques recommandations formules par les utilisateurs avertis de cette technique : (1) le message doit intgrer une forte incitation ragir ou cliquer sur licne intgre, par des jeux ou des loteries par exemple ; (2) le contenu du message doit tre personnalis : IBM, par exemple, propose aux clients qui reoivent sa lettre dinformation lectronique de choisir les sujets abords ; (3) il faut donner une information non accessible par courrier classique et donc variable dans le temps ; Travelocity ou Nouvelles Frontires, par exemple, envoient des promotions de dernire minute sur les voyages disponibles ; (4) il est indispensable de donner aux consommateurs un moyen facile de se dsabonner dune liste de diffusion. Le marketing mobile est en pleine croissance. La publicit sur mobile reprsentait 581 millions de dollars dans le monde en 2006. La plupart des oprations correspondent lenvoi de SMS commerciaux et promotionnels, mais pas seulement : Darty utilise le mobile pour informer de lenvoi dun article command en ligne ; en cas de rupture de stock, Ikea propose denvoyer un SMS ds que larticle sera nouveau en rayon ; certains constructeurs automobiles prviennent leurs clients de la prochaine date limite pour leur contrle technique ; Peugeot a dvelopp pour le lancement de la 308 un site sur mobile permettant de dcouvrir la voiture et de tlcharger des photos. Grce la RFID, la golocalisation par tlphone mobile permet dindiquer lagence bancaire ou le garage le plus proche de lendroit o se trouve le consommateur. Cependant, pour que le consommateur peroive bien ces initiatives, il faut quelles ne soient pas trop nombreuses (ne dpassant pas un message par mois dune mme marque) et rpondent un rel besoin34.

3. Le marketing fond sur le bouche--oreille et le marketing viral


De plus en plus conscientes de limportance du bouche--oreille, notamment sur Internet, les entreprises essaient dsormais de le contrler, parfois de le stimuler35. Pour cela, elles peuvent recourir diffrentes techniques comme lorganisation dvnements exceptionnels qui feront parler deux, la stimulation du bouche-oreille lectronique ou lidentification de consommateurs complaisants.
BZZAGENT. Cette entreprise amricaine organise des campagnes de marketing fondes sur
le bouche--oreille. Elle a rassembl une arme de 260 000 consommateurs qui acceptent de vanter les produits quils jugent dignes de leurs louanges. Ds quune entreprise devient cliente, Bzzagent identifie ceux qui correspondent au profil sociodmographique de la cible vise et leur propose de participer la campagne. Elle leur envoie un chantillon du produit et un manuel sur les mthodes employer, qui recommande par exemple dvoquer le produit auprs des vendeurs des magasins ou den discuter avec leurs amis et leur famille. Lentreprise prtend que ses mthodes sont honntes puisque les agents sont seulement rtribus par des petits cadeaux et ne participent que si le produit leur convient. Elle a travaill sur plus de 250 projets, pour des entreprises diverses, comme des maisons ddition, Cadbury Schweppes ou Levis Dockers 36.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

3.1. Le

buzz et le marketing viral

Le buzz consiste organiser des oprations ou des vnements originaux qui gnrent un fort intrt du public et des mdias et stimulent le bouche--oreille.
NIKE. La marque a russi habiller la statue de la libert du Pont de Grenelle, Paris, du
maillot du basketteur Tony Parker. Lance sans autorisation, lopration a t interrompue par la police, et les pompiers sont intervenus pour dcrocher le vtement. Mais lvnement a t voqu dans les journaux tlviss et la presse, sans achat despace publicitaire ni amende37.

Le buzz prsente souvent lavantage dtre peu coteux, car il sappuie sur une couverture mdiatique gratuite. En effet, les mdias, en particulier locaux, relaient volontiers les vnements originaux et amusants, a fortiori si on les informe discrtement quelques jours avant. Une autre approche pour stimuler le bouche--oreille consiste envoyer des messages par e-mail ou sur Internet en incitant les consommateurs les diffuser leur entourage38. Cette approche est appele marketing viral en rfrence aux phnomnes de contagion des virus qui se propagent trs rapidement.
Le marketing viral consiste favoriser le bouche--oreille lectronique en incitant les consommateurs diffuser par Internet des informations sur lentreprise.

HOTMAIL. ses dbuts, le fournisseur daccs Internet a insr, la fin des messages transmis par son intermdiaire, la phrase : Hotmail : un compte GRATUIT qui vous suit partout et tout le temps ! Grce ce message, Hotmail a russi se faire connatre et attirer plus de 12 millions de clients lors de ses 18 premiers mois dexistence, avec un budget marketing limit 500 000 dollars.

La radio Europe 2, loprateur de tlphonie mobile Orange, le shampooing Pantne et les prservatifs Manix ont galement eu recours au marketing viral. La marque de bire Budweiser a fait connatre massivement sa campagne Whassup conue pour le march amricain grce aux nombreuses parodies de ses spots qui ont fait le tour du monde.

Source illustration : budweiser.com.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

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Pour que cette stratgie fonctionne, il faut diffuser des messages jouant sur lhumour (parodie, message dcal), lappel la curiosit (jeux de piste en ligne) ou les divertissements (bandes dessines), de manire ce que les gens aient envie de les transmettre leur entourage. Certaines marques encouragent les clients mettre en ligne des vidos amusantes les montrant en train dutiliser le produit. Dautres crent des personnages imaginaires suivis par les internautes.
SEGA. Une campagne de marketing viral pour le jeu sportif Bta-7 montrait un joueur fictif qui jouait sans arrt pendant trois mois. Elle a t suivie par plus de 2 millions de joueurs. La campagne avait t conue par Campfire, socit spcialise dans le marketing viral qui a aussi travaill sur le film Le projet Blair Witch et sur lAudi A3. Cette agence conoit des campagnes virales plusieurs niveaux en fonction du degr dintrt des personnes vises. Elle distingue les scaphandriers qui suivent la campagne minute par minute ; les plongeurs qui la regardent une fois par semaine ; et les ricocheurs qui entrent par hasard en contact avec elle en surfant sur Internet 39.

Lors du lancement dun nouveau produit ou service, certaines entreprises contactent directement certains clients potentiels identifis comme des leaders dopinion, afin de les informer sur la nouveaut en lancement ou la leur prter. Ces personnes transmettent le message leurs collgues et amis en se lappropriant, ce qui lui confre de la crdibilit. Le marketing viral peut provoquer des succs commerciaux inesprs avec des budgets trs rduits. Il est particulirement adapt aux petites marques qui ne disposent pas de budgets importants. Il convient galement aux marques qui gnrent une relation particulire avec leurs clients, car ceux-ci ont envie de les soutenir. Il doit sappuyer sur le plaisir et lamusement davantage que sur les techniques classiques de la communication et du marketing direct. La diffusion de linformation ne repose plus sur des rgles lies la proximit gographique des individus (comme dans le cas du bouche--oreille classique), mais sur

19.3

Pour approfondir

Cinq ides reues du marketing viral


Des ides reues circulent sur le marketing viral, sur lesquelles il faut revenir. 1. Seuls les produits extravagants stimuleraient le bouche--oreille : cest faux puisque mme les mdicaments vendus sur prescription peuvent faire lobjet dun bouche--oreille intense. 2. Le bouche--oreille surviendrait ou ne surviendrait pas, on ny pourrait rien. Cette ide reue est aujourdhui largement remise en cause par les nombreux succs de marketing viral remports par les entreprises qui sappuient sur des clbrits, des clients davant-garde, des listes de diffusion et des forums de discussion. 3. Les plus gros clients constitueraient le meilleur point de dpart du bouche--oreille. Or, ce sont souvent les adeptes de la contre-culture et les clients atypiques qui jouent un rle cl. 4. Pour sappuyer sur le bouche--oreille, il faudrait agir le premier et tre rapide. Noublions pas que certains copieurs habiles peuvent galement y recourir. 5. Il serait ncessaire dutiliser la publicit et les mdias pour stimuler le buzz. Bien au contraire, si elles sont utilises trop tt ou trop intensment, les techniques de communication classiques peuvent touffer le bouche--oreille lectronique.

Source : Rene Dye, The Buzz on Buzz , Harvard Business Review, novembre-dcembre 2000.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

des centres dintrt partags. Les lois mathmatiques spcifiques auxquelles correspond le bouche--oreille sur Internet, modlises par Steyer, Garcia-Bardidia et Quester, en font un outil relativement imprvisible avec une diffusion extrmement rapide de linformation et un arrt brutal40. Les caractristiques spcifiques du buzz et du marketing viral rsident dans leur fort taux dchec, lorsque le bouche--oreille ne se transmet pas. Mais de nombreuses entreprises prennent ce risque compte tenu du cot limit des oprations. Plus grave, il existe un risque de dnaturation du message qui peut se retourner contre son instigateur. Lencadr 19.4 prsente quelques conseils pour russir une opration fonde sur le bouche--oreille. Il convient galement de noter que ce type de marketing est parfois la limite de lthique. Certaines entreprises rmunrent des consommateurs pour promouvoir anonymement un produit ou un service dans des lieux publics sans dvoiler la nature du lien qui les lie lentreprise. Il peut sagir de commander la marque dans un bar ou dutiliser le produit et den parler dans un lieu public.
SONY ERICSSON. Pour lancer son tlphone appareil photo numrique T681, Sony Ericsson a embauch des acteurs qui, vtus comme des touristes, se rendaient prs des grands monuments et demandaient de vrais touristes de les prendre en photo ; le prt de lappareil tait loccasion den discuter et de vanter ses mrites, mais cette pratique a donn lieu controverse41.

3.2. Les

leaders dopinion

On assiste souvent un processus de diffusion de linformation en deux tapes modlis de longue date par les spcialistes de marketing (voir chapitre 6) : les techniques du marketing classique et les mdias veillent lintrt des leaders dopinion, qui eux-mmes assurent une diffusion plus large de linformation ou du produit. Dans le cinma, par exemple, les oprations de relations presse et les critiques sont dterminants pour laudience des premiers jours, tandis que celle-ci provoque le bouche--oreille qui dtermine les entres des semaines suivantes. Les commentaires des spectateurs, sur des sites spcialiss comme Allocin, mais aussi dans le monde rel, peuvent jouer un rle essentiel pour enrayer la baisse habituelle de frquentation au cours des semaines. Pour renforcer ce processus, certains professionnels contactent les leaders dopinion en amont de manire anticiper le bouche--oreille42 (encadr 19.4).
YES. Sony a projet le film Yes des blogueurs de Los Angeles et San Francisco pour tester leurs
ractions avant sa sortie en salles. Ces petits groupes dinfluenceurs ont immdiatement gnr un bouche--oreille important sur le web.

Pour analyser les communications interpersonnelles, les spcialistes utilisent le concept de cliques, des petits groupes composs de membres en frquente interaction43. Les membres dune mme clique partagent des caractristiques communes. Leur proximit facilite une communication efficace entre eux mais les isole des autres cliques, ce qui peut nuire la diffusion des ides nouvelles. Certaines personnes jouent un rle de pont et mettent en relation plusieurs cliques. Ce processus de diffusion a t modlis par la thorie des avalanches44.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

699

19.4

Pour approfondir

Comment stimuler le bouche--oreille


Voici dix conseils pour orchestrer des oprations marketing fondes sur le bouche--oreille. Identier les personnes et les entreprises inuentes et leur consacrer des efforts particuliers. Dans les activits business-to-business, il peut sagit dentreprises de grande taille, danalystes sectoriels, de journalistes, dacteurs publics et dun chantillon dadopteurs prcoces. Dans les activits de grande consommation, il peut sagir de membres visibles de certaines communauts comme les DJ locaux ou des dirigeants dassociations. Quand Ford a lanc la Focus, la marque a prt des voitures des DJs et des personnalits branches an quelles soient vues en train de la conduire. Cependant, certains spcialistes considrent que les caractristiques spciques de la diffusion de linformation sur le web rendent inutile un ciblage sur les leaders dopinion et permettent de diffuser linformation tous azimuts. Donner des chantillons de produits aux personnes cls. Pour le lancement dun shampooing, par exemple, on peut identier les personnes qui aiment chatter sur les sites comme aufeminin.com et leur proposer des chantillons en esprant quelles en parleront sur leur site prfr. Rcompenser le bouche--oreille et le parrainage. De nombreuses marques offrent un cadeau ou une rduction aux clients qui recommandent leurs services leur entourage. Rcompenser par lcoute. Si on aide les consommateurs entrer en contact avec lentreprise, quon leur montre quon les coute attentivement et quon leur fournit un vrai soutien, ils seront volontaires pour aider une marque qui leur permet de participer llaboration de ses produits et de ses prestations. Demander la sincrit des consommateurs sollicits pour lopration : leurs opinions, si elles sont sincres, auront beaucoup plus dinuence que des propos forcs. Aider les consommateurs raconter des histoires. Les consommateurs intgrent les produits dans leur vie quotidienne. Si des chaussures de sport les aident mieux courir, ils ne disent pas Just do it mais racontent comment leur confort de course sest amlior. Il faut leur fournir des outils les aidant partager leurs vritables expriences avec leur entourage ou les mettre sur Internet. Fournir des informations faciles transmettre. Cela suppose que cette information ne ressemble pas une publicit ou un communiqu de presse, car elle semblerait peu naturelle et le bouche--oreille samenuiserait rapidement. Il faut proposer des informations intressantes et faciles fractionner pour que le consommateur puisse les forwarder intgralement ou en partie, le poster sur son blog, se les approprier en les transformant. Linformation doit tre utile et originale : loriginalit dtermine lintensit du bouche--oreille, lutilit son caractre plus ou moins laudatif. Ne pas trop planier. Le bouche--oreille est un processus spontan. Il peut survenir nimporte quand et ne pas survenir. Si on essaie de le forcer, il ne ressemble plus du bouche--oreille et na pas la mme inuence. Le point cl est de faire en sorte que les gens deviennent conscients de leur opinion sur le produit car, alors, ils la communiqueront ds que leurs interlocuteurs sont intresss. Ne pas prendre les inuenceurs pour des vendeurs. Les inuenceurs formulent leurs propos dans leurs propres termes et voquent le pour et le contre ; cest ainsi quils sont crdibles et efcaces. couter le bouche--oreille. Si le bouche--oreille est ngatif, il ne faut pas fulminer mais lcouter. Cette coute ressemble parfois une visite chez le dentiste : difcile et pnible sur le moment, mais salutaire sur le long terme. Un bouche--oreille sincre donne des informations prcieuses sur les perceptions des clients et, plus il est cout et pris en compte, plus les corrections amneront un bouche--oreille positif.

Sources : Alexandre Steyer, Renaud Garcia-Bardidia et Pascale Quester, Modlisation de la structure sociale des groupes de discussion sur Internet : implications et contrles du marketing viral , Recherche et Applications en Marketing, vol. 22, n 3, septembre 2007, p. 29-44 ; Sarit Moldovan, Jacob Goldenberg, et Amitava Chattopadhyay, What Drives Word of Mouth ? The Roles of Product Originality and Usefulness , MSI Report n 06111 (Cambridge : Marketing Science Institute, 2006) ; Online Chat Is a Grapevine That Yields Precious Fruit , New York Times, 25 dcembre 2006 ; Rules of the Game , Advertising Age Point, dcembre 2005, p. 2223 ; The Net of Influence , Business 2.0, mars 2004, p. 70 ; Wordof-Mouth Marketing Speaks Well for Small Business , Chicago Tribune, 28 juillet 2003.

700

SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

Selon Malcolm Gladwell, trois facteurs aident gnrer de lengouement pour une ide donne partir dun phnomne de contagion45. Premirement, il faut contacter trois catgories dindividus : les experts qui savent toutes sortes de choses, les connecteurs qui communiquent avec un grand nombre de personnes, et les vendeurs qui ont un pouvoir de persuasion naturel. Toute ide qui veille lattention de ces trois catgories a des chances de se diffuser de manire large et rapide. Deuximement, une ide doit tre exprime de manire inciter les gens agir, sinon elle ne donnera pas lieu contagion. Troisimement, il faut que les personnes qui diffusent lide soient capables dorganiser des groupes et des communauts autour delles.

3.3. Les

blogs

Les blogs sont devenus un lment important du bouche--oreille. Ils sont de nature trs diverse : certains blogs sont essentiellement destins aux proches, la famille et aux amis, tandis que dautres sont conus pour sadresser une large audience. Selon le moteur de recherche de blogs Technocrati, chaque jour plus de 175 000 nouveaux blogs sont crs et 1,6 million de pages sont mises en ligne. Dans ce contexte, les entreprises crent leurs propres blogs et suivent ce qui est crit sur ceux des autres.
SKIP PETIT ET PUISSANT. Pour le lancement de ce nouveau Skip trois fois plus concentr que les lessives classiques et dot de trs bonnes qualits environnementales, lentreprise a cr le plus petit blog du monde avec ses 143 pixels carrs. Cest aussi le plus puissant puisquil permet denvoyer un message dans lespace grce un centre de recherche spatiale Vancouver qui branche sur un de ses tlescopes un rayon laser infrarouge contenant des informations numrises. Les 500 premiers blogueurs ont gagn le droit denvoyer un message dans lespace, une offre qui se voulait ludique. Le blog traduit sur le plan cratif le concept du produit , explique Stphane Allard, directeur gnral associ de lagence interactive Via Nova Spheeris. Le blog a reu 25 000 visites en dix jours46.

Les moteurs de recherche de blogs permettent de savoir ce que disent les gens sur nimporte quel sujet travers lanalyse instantane de millions de blogs47. Outre le nombre de blogs voquant la marque, ils peuvent classer chaque blog selon sa ractivit linformation, son impact dans la blogosphre, le caractre plus ou moins positif des commentaires et leur degr de pertinence. Certains consommateurs utilisent les blogs pour remercier certaines marques ou, au contraire, dnoncer celles quils jugent dficientes48. Les dfauts du service clientle de Dell furent dnoncs sur le web par une srie de commentaires dutilisateurs. Un client nerv du fournisseur daccs America Online a enregistr et broadcast un reprsentant de lentreprise renclant annuler son contrat. Aujourdhui, les responsables marketings explorent toutes sortes de mesures pour valuer et quantifier les effets du bouche--oreille. Bien que 80 % du bouche--oreille ait lieu en dehors dInternet, la plupart se focalisent sur le on-line parce quil est facile suivre. Certains modles permettent mme de prvoir le succs dun produit partir de ces lments. Ainsi, on peut anticiper la frquentation dun film partir du nombre et du caractre plus ou moins positif des commentaires des internautes lors de la premire semaine de diffusion sur les sites spcialiss49.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

701

4. La mise en place de la force de vente


La forme la plus ancienne du marketing personnalis est la force de vente. De nombreuses entreprises industrielles sont confrontes des problmatiques complexes face auxquelles les reprsentants constituent le meilleur outil marketing. De mme, de nombreuses entreprises de grande consommation confient des missions essentielles leurs quipes commerciales.
NESTL WATERS. Dans cette entreprise, une dizaine de responsables de comptes cls grent chacun une grande enseigne de distribution, comme Carrefour ou Auchan. Interlocuteurs uniques du responsable achats du distributeur, ils ngocient lassortiment rfrenc, notamment les nouveauts, les prix, les emplacements en magasin et le schma gnral des oprations promotionnelles. Les quelque 70 chefs de secteur, quant eux, sont chargs de visiter une soixantaine de points de vente par mois pour organiser les promotions, sassurer que les produits Nestl sont bien placs en magasin et collecter des informations sur le terrain. Cest travers cette organisation que Nestl a convaincu 95 % des hypermarchs dinstaller des palettes Vittel, Aquarel et Quzac dans leur alle centrale au printemps, dans un dcor sportif organis autour des retransmissions des matchs de Roland Garros et darches voquant les arrives du Tour de France, des oprations qui gnrent ponctuellement une hausse de 3 5 % de part de march50.

Mme si aucune entreprise ne conteste limportance de Source illustration : photo J.-C. de Quillacq la force de vente, nombre dentre elles sont sensibles son et G. Cardon. cot lev et croissant. En consquence, elles cherchent faire prendre en charge une partie des activits commerciales par des units de vente oprant par courrier postal, par e-mail et par tlphone. Les entreprises essaient galement daccrotre la productivit de la force de vente par la slection des vendeurs, leur formation, leur supervision, leur motivation et leur valuation51. En ralit, la place des reprsentants varie normment dune entreprise lautre52 et lon peut identifier diffrentes catgories o la crativit joue un rle croissant : Le reprsentant livreur, dont le rle consiste avant tout livrer un produit, du fuel domestique par exemple. Le preneur de commandes, comme le vendeur dans une boulangerie. Le missionnaire, qui doit surtout crer un climat favorable au produit ou informer un client actuel ou potentiel, tel le visiteur mdical employ par un laboratoire pharmaceutique. Le technicien, qui dispose de fortes connaissances techniques, comme lingnieur technico-commercial qui joue un rle de conseil auprs des clients. Le crateur de demande, qui doit faire un effort cratif pour vendre des produits (aspirateur, encyclopdie) ou des services (assurance, services publicitaires). Le vendeur de solutions, dont le rle consiste rsoudre un problme du client, souvent en intgrant diffrents produits et services proposs par lentreprise.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

Les reprsentants constituent un lien privilgi entre lentreprise et sa clientle. Le vendeur transmet et adapte loffre aux besoins spcifiques des clients, en mme temps quil fournit lentreprise de nombreuses informations en provenance du march. Pour la plupart de ses clients, il est lentreprise. Cest pourquoi il convient de grer avec soin les diffrents lments relatifs la mise en place dune force de vente : la dfinition des objectifs, la stratgie, la structure, la taille et la rmunration (voir figure 19.2).
FIGURE 19.2

La mise en place dune force de vente

Dfinition des objectifs

laboration de la stratgie

Choix de la structure

Taille de la force de vente

Mode de rmunration

4.1. Les

objectifs et les missions assigns aux vendeurs

Lactivit de vente nest que lune des tches dun reprsentant. Celui-ci doit savoir analyser les problmes de son client et lui proposer une solution adapte. Il sagit en ralit de montrer au prospect que lentreprise peut laider amliorer sa propre situation. Les entreprises doivent dfinir avec soin les objectifs de leur force de vente. On peut, par exemple, dcider quelle devra consacrer 80 % de son temps aux clients actuels et 20 % aux prospects, 85 % aux produits bien tablis sur le march et 15 % aux nouveauts. Lallocation prcise dpend de la nature des produits et du profil des clients, mais quel que soit le contexte de vente, la force de vente prend en charge une ou plusieurs des activits ci-dessous53 : La prospection de nouveaux clients. La qualification : rassembler des informations sur les prospects et dfinir les priorits au sein des clients et des prospects. La communication : transmettre la clientle des informations relatives aux produits et services de lentreprise. La vente : approche du client, prsentation commerciale, rponse aux objections et conclusion. Le service : conseil, assistance technique ou financire, livraison. La collecte dinformation : tudier le march, recueillir des informations utiles la socit et rdiger des rapports sur ses visites et ses rsultats. Lallocation de priorits : dcider quels clients obtiendront les produits en cas de pnurie54. Compte tenu de leur cot, les vendeurs de terrain doivent se concentrer sur les produits complexes et customiss, tandis que la vente de produits simples ou standardiss repose davantage sur la vente distance, sur Internet ou par tlphone, prise en charge par la force de vente localise au sige de lentreprise. En outre, il importe de prparer et de faciliter le travail des vendeurs en confiant des quipes moins qualifies la prparation des visites, la rdaction des offres et le remplissage des bons de commandes. Aujourdhui, les reprsentants traitent moins de comptes et leur principal objectif consiste les faire crotre. Cette approche est trs diffrente de la situation dans laquelle les vendeurs doivent vendre au maximum de clients55.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

703

19.5

Cas dentreprise

La force de vente de Charlott, une marque de lingerie fminine vendue domicile


Vendue exclusivement lors de runions domicile, la manire de Tupperware, cette marque de lingerie fminine rassemble aujourdhui 2 200 vendeuses rparties sur toute la France, soit deux fois plus quil y a cinq ans. Le modle conomique se caractrise par labsence dintermdiaires et de frais de structure. Cest la force de vente qui est au cur du dispositif. Les ventes se droulent chez une cliente, appele htesse , qui invite huit de ses amies pour leur prsenter des parures des prix situs entre 40 et 100 , soit 15 25 % moins cher que les marques Lise Charmel ou Simone Prle. Les vendeuses ont un double rle : prsenter et vendre des produits, mais surtout organiser des runions de vente chez les femmes quelles connaissent. La marque rmunre uniquement ses vendeuses de manire variable par une commission de 20 35 % des ventes, soit 300 500 par sance d1 h 30. En complment, les vendeuses sont rmunres sur le parrainage de nouvelles vendeuses et touchent 8 % du montant des ventes ralises par leurs lleules. Par exemple, Anne Laon, une vendeuse qui a commenc travailler pour Charlott en 2003 et a parrain 70 recrues, tire aujourdhui la majeure partie de ses revenus (3 000 3 500 par mois) de ses activits de parrainage. En ralit, la plupart des commerciales gagnent environ 2 000 par mois, mme si quelquesunes atteignent les 10 000 . Compte tenu de son systme de rmunration, Charlott peut recruter largement sans prendre de risques. Toutes les candidates sont reues au sige de lentreprise et se voient coner un catalogue. Elles ont ensuite dix jours pour trouver une amie qui accepte dorganiser une vente, moyennant quoi le contrat est sign. Ainsi, 80 % des candidates sont embauches, mais seules 40 % restent au-del de six mois car nombre dentre elles ont du mal constituer un chier de contacts. Une fois embauches, elles suivent des formations, auxquelles sont consacrs 6 % du chiffre daffaires de lentreprise. 320 animatrices sont charges denseigner les principes de la vente domicile, dapprendre mieux connatre la lingerie, dexpliquer comment lexposer lgamment ou comment transformer une chambre en cabine dessayage An de donner conance en elles aux vendeuses, la prsidente Vronique Garnodier a complt les formations par des cours de savoir-tre et par des astuces pour lever les objections des clientes timides qui nosent pas accueillir de vente chez elles. Les rsultats sont au rendez-vous : la marque a multipli son chiffre daffaires par 4 en cinq ans pour atteindre 21 millions en 2007, avec un taux de rentabilit de 30 %. Elle a dvelopp des activits en Espagne et au RoyaumeUni. La France reprsente aujourdhui 90 % du chiffre daffaires, mais ce chiffre pourrait diminuer compte tenu des ambitions internationales de sa prsidente.
Sources : Ltonnante mthode de Charlott pour recruter ses vendeuses , Management, mai 2008, p. 36-37.

Source illustration : www.charlott.fr.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

En cas de contrat important, les vendeurs ne sont pas les seuls entrer en contact avec le personnel de lentreprise vise. La vente devient alors un travail dquipe, le reprsentant jouant le rle dhomme-orchestre vis--vis du client. Les autres intervenants comprennent : la direction gnrale qui participe directement la vente pour des contrats trs importants ; les ingnieurs et techniciens qui fournissent linformation et lassistance ncessaire au client, avant et aprs la vente ; le service clientle qui assure linstallation, lentretien et le service aprs-vente ; et ladministration commerciale qui prend en charge lanalyse des donnes de vente, la facturation et diverses tches de secrtariat. Dans loptique marketing, le vendeur doit analyser les chiffres de ventes, estimer un potentiel, rassembler des donnes sur le march, dvelopper des stratgies et des plans. Les responsables de la direction commerciale et les responsables de comptes cls doivent disposer dexcellentes comptences marketing. Trop souvent, le marketing et la vente sont en conflit : les responsables marketing considrent que la force de vente ne ralise pas le potentiel des produits quils ont imagins, tandis que la force de vente juge que le marketing ne comprend pas rellement le march. Pourtant, une collaboration et une communication intenses entre ces deux dpartements constituent un facteur essentiel de croissance des ventes et de la rentabilit56. Les entreprises peuvent avoir une force de vente interne ou la sous-traiter des entreprises qui touchent une commission sur les ventes. Des entreprises comme Cegetel, Nokia ou Danone font appel la sous-traitance commerciale pour une partie de leur activit. Cette option offre plusieurs avantages : (1) la souplesse de faire voluer la taille de la force de vente en fonction des ractions du march et en cas de forte saisonnalit ; ainsi, Sony utilise une force de vente externalise pour ses consoles de jeu lors de la haute saison de fin danne, sans avoir assumer ses cots fixes toute lanne ; (2) la pertinence pour les PME aux moyens limits ; avec seulement neuf personnes au sige, lentreprise qui commercialise en France le Muesli Jordans fait appel une quinzaine de commerciaux externes pour couvrir toute lanne 1 200 hypermarchs et 1 500 supermarchs ; (3) la rapidit de la mise en uvre, alors quil faut du temps pour recruter et former des vendeurs internes. linverse, cette solution est souvent coteuse et parfois mal perue par les vendeurs internes, qui peuvent se sentir mis en concurrence ou craindre une restructuration.
HP a une force de vente interne pour la clientle dentreprises, mais fait appel une vingtaine de vendeurs externes pour les magasins grand public (hypermarchs, Fnac, Darty) : plus de 1 200 points de vente sont visits chaque mois par ces promoteurs de vente . Nous organisons tous les trois mois des runions rassemblant la force de vente externalise, les responsables de comptes cls et les directeurs marketing, explique la directrice marketing imagerie et impression. Paralllement, nous accompagnons rgulirement les promoteurs de vente sur le terrain, pour les assister, les conseiller. 57

4.2. La

structure de la force de vente

Le mode dorganisation dune force de vente dpend en grande partie de la stratgie adopte. Si lentreprise ne vend quun produit des clients homognes, elle optera pour une structure par zones gographiques58. Si de nombreux produits ou marchs sont en jeu, une organisation par produits ou par clients se justifie davantage. Certaines entreprises adoptent une organisation plus complexe.

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MOTOROLA a quatre types de forces de vente : (1) une force de vente pour les marchs stratgiques compose dingnieurs spcialiss dans la technique, les applications et la qualit, assigns aux comptes les plus importants ; (2) une force de vente organise par zone gographique qui traite de milliers de clients dans des zones trs diverses ; (3) une force de vente distributeurs charge de coacher les distributeurs de produits Motorola ; et (4) une force de vente interne qui fait du telemarketing et prend des commandes par tlphone et fax.

Le tableau 19.2 indique limportance des diffrents aspects de la structure dune force de vente en fonction de son cycle de vie. Un point est toujours essentiel : la gestion des comptes cls, traite dans lencadr 19.6.

TABLEAU 19.2 Quatre facteurs favorisant le succs dune force de vente Cycle de vie de lactivit Dmarrage Niveau dimportance Importance de la force de vente et des partenaires de vente Taille de la force de vente Degr de spcialisation Allocation de ressources la force de vente Stratgie client sous-jacente Construire la notorit et gnrer des commandes rapides du produit Mieux pntrer les segments actuels et en dvelopper de nouveaux Servir et garder efcacement les clients actuels Insister sur lefcacit, prserver la relation client, sortir des segments non rentables **** ** * *** Croissance Maturit Dclin

*** *

**** ****

** ***

**** **

**

****

Source : Andris Zoltners, Prabhakant Sinha et Sally E. Lorimer, Match Your Sales-Force Structure to Your Business Life Cycle , Harvard Business Review, juillet 2006, p. 81-89.

SAS. Le fabricant de logiciels destination des entreprises a rorganis sa force de vente par secteurs dactivits des entreprises clientes avec, par exemple, un groupe rassemblant les banques et les compagnies dassurances. Cette nouvelle organisation lui a permis de faire crotre ses ventes de 14 %59.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

19.6

Pour approfondir

La gestion des comptes cls


Lorsquune socit traite avec de gros clients, elle leur affecte souvent un vendeur de haut niveau appel gestionnaire de comptes cls. La gestion des grands comptes reprsente une activit sufsamment spcique pour quon lui donne une place autonome dans lentreprise. Xerox traite ainsi 250 grands comptes laide dune force commerciale distincte. Chez McCain, le leader de la frite surgele, un gestionnaire de comptes cls ne soccupe que de McDonalds, premier client de la socit. La concentration industrielle, la centralisation croissante des achats, la complexit des produits sont autant de facteurs qui favorisent la gestion des ventes par comptes cls. Le commerce se concentre un tel point, explique Fabienne Saligue, consultante chez Bernard Julhiet, que jai vu un patron de PME dans le textile se demander sil allait supprimer les vendeurs terrain pour ne garder de sa force de vente que des responsables de comptes cls. Lorsque Pernod a fusionn avec Cusenier, les effectifs de vente bass au sige ont doubl pour atteindre 60 personnes rparties en trois quipes : lune consacre Auchan et Opra, la deuxime Carrefour et Metro, la troisime Leclerc, Systme U et Intermarch. En parallle, le rseau sur le terrain a t rduit de 130 80 personnes. Jean-Franois Lalu, directeur commercial de lentreprise, indique que cette organisation a permis denrichir fortement la relation avec [les] clients : nous avons une meilleure connaissance de leurs plans promotionnels six mois ou un an. En merchandising, nous avons mieux intgr les contraintes des distributeurs [], les rfrencements deviennent plus rapides, les partenariats et notre prsence dans les prospectus plus nombreux . La mise en place dun systme de vente par comptes cls soulve de nombreuses questions : comment les slectionner ? Comment les grer ? Comment valuer ceux qui sen occupent ? O les placer dans lorganisation ? etc. La slection des comptes cls se fait en gnral en tenant compte du volume de vente et de prot, du degr de centralisation des achats, des attentes spciques en matire de services et du dsir dentretenir avec les fournisseurs des relations long terme. Les responsables de comptes cls doivent bien connatre le secteur et le mtier de leurs clients, comprendre les processus de dcision dachat, localiser les rseaux dinuence chez leurs clients, et savoir comment les exploiter leur prot. Ils doivent aussi tre capables de mobiliser en interne les quipes dont ils ont besoin R&D, production, logistique pour satisfaire les besoins des clients. Dans certaines socits, comme Procter & Gamble, on a mis en place des quipes multifonctionnelles : les cadres de diffrents services se regroupent pour travailler sur des problmes de marketing, de logistique ou de nance dun client spcique. Les gestionnaires de comptes cls sont vritablement en charge dune relation faire fructier entre deux entreprises. Les entreprises commettent parfois lerreur de nommer leurs meilleurs vendeurs pour soccuper des comptes cls. Mais les deux postes ne requirent pas les mmes comptences. Le gestionnaire de comptes cls est davantage dans le rle dun consultant marketing interne qui vend les comptences de son entreprise audel des gammes de produit.
Sources : Catherine Pardo, La gestion des comptes cls , in Encyclopdie vente et distribution, A. Bloch et A. Macquin (d.) (Paris : Economica, 2001), p. 397-406 ; Michelle Bergada et Julien Bernard, La rvolution vente et ses enjeux organisationnels , Dcisions Marketing, janvier-fvrier 1998, p. 37-45 ; Michelle Bergada, Rvolution vente (Paris : Village Mondial, 1997) ; Lindustrie adapte son organisation commerciale , LSA, 11 avril 2002, p. 54-60 ; Gary S. Tubridy, Major Account Management , in AMA Management Handbook, 3e dition (New York : AMACOM, 1994) ; Sanjit Sengupta, Robert E. Krapfel et Michael A. Pusateri, The Strategic Sales Force , Marketing Management, t 1997, p. 29-34 ; Robert S. Duboff et Lori Underhill Sherer, Customized Customer Loyalty , Marketing Management, t 1997, p. 21-27 ; Tricia Campbell, Getting Top Executives to Sell , Sales & Marketing Management, octobre 1998, p. 39.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

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4.3. La

taille de la force de vente

La force de vente constitue un atout parmi les plus productifs pour une entreprise, mais aussi les plus coteux. La plupart des entreprises fixent le nombre de vendeurs dont elles ont besoin partir dune analyse de la charge de travail. La mthode comporte cinq tapes : 1. On classe les clients par catgories de volume correspondant leurs achats annuels (rels ou estims). 2. On dtermine la frquence de visite souhaitable pour chaque catgorie (nombre de visites par client par an). 3. On calcule la charge de travail globale, exprime en nombre de visites effectuer par an (en multipliant le nombre de clients dans chaque catgorie par la frquence de visite correspondante). 4. On fixe le nombre moyen de visites quun reprsentant peut effectuer dans une anne. 5. On obtient le nombre de reprsentants en divisant le nombre total de visites faire dans lanne par le nombre annuel de visites pouvant tre effectues par un reprsentant. Par exemple, une entreprise estime quil y a 1 000 clients de type A et 2 000 clients de type B sur son march. Un client de type A doit tre visit 36 fois par an, contre 12 fois pour un client de type B. 60 000 visites doivent donc tre effectues. Si lon suppose quun vendeur fait, en moyenne, 1 000 visites par an, lentreprise a besoin de 60 reprsentants plein temps.

4.4. La

rmunration des reprsentants

La mise en place dune force de vente de bon niveau obit trois impratifs : recruter des individus capables, savoir les motiver et savoir les garder. Dans ces trois domaines, la politique de rmunration fait la diffrence. Il nest pas facile de mettre au point un systme de rmunration qui satisfasse la fois les objectifs des reprsentants et de la direction. Un vendeur recherche un systme qui lui procure une certaine rgularit de revenus, une rcompense en cas de performances suprieures la moyenne et un sentiment de justice. Pour lemployeur, un bon systme de rmunration permet de contrler lactivit des reprsentants et de la canaliser vers les activits prioritaires de lentreprise, et ce dune manire peu coteuse et simple grer60. Or, ces objectifs sont en gnral divergents, ce qui explique la grande varit de systmes de rmunration dun secteur lautre et dune socit lautre. Lentreprise doit dterminer le poids respectif des quatre lments qui composent le systme de rmunration : (1) la partie fixe a pour but dassurer au reprsentant une certaine stabilit de ses revenus ; (2) la partie variable, qui peut prendre la forme dune prime, dune commission sur le chiffre daffaires ou dun intressement aux bnfices, vise stimuler et rcompenser un surcrot dactivit ; (3) les remboursements de frais compensent les dpenses consenties pour raliser les visites et inviter les clients ; (4) les avantages annexes, telles que la voiture de fonction ou lassurance-vie, assurent la scurit matrielle et augmentent lattrait du poste. La plupart des systmes de rmunration associent partie fixe et partie variable. En effet, un systme mixte est particulirement adapt lorsque le volume des ventes dpend de lactivit du reprsentant et que lentreprise souhaite quil exerce galement des tches non directement lies la vente comme la rdaction de rapports faisant remonter des informations du march.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

Une rgle souvent utilise consiste valuer 70 % la part du fixe et allouer 30 % aux autres lments. Mais les variantes autour de cette formule sont si nombreuses que celle-ci ne peut servir de base llaboration dun plan de rmunration. Ainsi, la part fixe est plus forte pour des postes comprenant une forte proportion de tches autres que la vente, ainsi que pour les activits de vente complexes au plan technique et exigeant un travail dquipe. Certaines entreprises indexent aujourdhui la partie variable des indicateurs tels que la satisfaction ou la fidlit du client. Chez IBM, par exemple, les reprsentants sont partiellement valus partir denqutes de satisfaction ralises auprs des clients61. Dautres firmes allouent une partie de la rmunration variable la performance globale de lquipe de vente ou mme de lentreprise dans son ensemble, dans lobjectif dinciter les vendeurs dvelopper un esprit dquipe. Certains vendeurs trs efficaces peuvent toutefois se sentir pnaliss par un tel systme sils ont limpression de soutenir leurs collgues moins performants.

5. La gestion dune force de vente


Un directeur des ventes doit recruter, former, superviser, animer et valuer ses reprsentants (voir figure 19.3).
FIGURE 19.3

La gestion dune force de vente

Le recrutement

La formation

La supervision

La motivation

L'valuation

5.1. Le

recrutement et la slection des reprsentants

Bien choisir ses vendeurs est crucial pour la russite dune entreprise. Lcart de performances entre un vendeur exceptionnel et un vendeur mdiocre est considrable. Une enqute a rvl quen moyenne 27 % des reprsentants ralisent plus de 52 % du chiffre daffaires. En outre, il faut prendre en considration le gaspillage occasionn par le recrutement de personnes inadquates. Le turnover moyen, tous secteurs confondus, est de lordre de 20 % dans la force de vente. Or, le dpart dun reprsentant implique des cots de recrutement et de formation de son remplaant, sans ngliger quune force de vente largement compose de nouvelles recrues est souvent moins productive. De nombreuses tudes ont mis en vidence la faible relation entre les performances dun vendeur et des variables lies son niveau dexprience, son parcours dtudes, son statut antrieur, son style de vie, son attitude, sa personnalit et ses comptences. Cest pourquoi il est difficile de dfinir des procdures de recrutement et de slection adaptes. Les meilleurs prdicteurs sont des tests composites fonds sur la mise en situation, en dcrivant des scnarios de vente et de travail proches de la ralit de lentreprise et en analysant comment les candidats se comportent62. Certaines socits comme IBM et Procter & Gamble accordent une grande importance aux tests. En ralit, les procdures de slection des candidats varient considrablement, depuis la simple entrevue informelle jusquaux tests et entretiens approfondis.

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Les autres lments dinformation pris en compte sont les caractristiques personnelles des individus, les rfrences et lexprience passe. Certaines entreprises font mme passer des entretiens avec les clients.
LE PRINTEMPS. Le grand magasin organise des sances de speed recruiting au cours desquelles des candidats au poste de manager commercial, prslectionns sur dossier, disposent de sept minutes pour convaincre successivement un responsable des ressources humaines, un cadre oprationnel et une cliente du Printemps. Les clientes qui participent lopration sont choisies parmi les dtentrices de la carte de fidlit et slectionnes sur des critres lis leur ge et leurs habitudes dachat. Elles sont ensuite briefes sur le profil recherch pour le recrutement : avoir de lallure, le got des tendances, et tre capable de grer une quipe de 20 30 salaris. Si certains candidats ont le sentiment dtre davantage interrogs sur leurs connaissances de la mode que sur leurs aptitudes de managers, les notes des clientes montrent quelles sont moins svres dans leur notation malgr un style plus direct lors de lentretien. Pour ceux qui sont slectionns, suit ensuite un ultime entretien avec le responsable du magasin63.

Source illustration : recrutement.printemps.com.

5.2. La

formation et la supervision des reprsentants

Les clients attendent des reprsentants quils connaissent parfaitement bien les produits, suggrent des ides pour rsoudre leurs problmes, soient efficaces et fiables. Pour rpondre ces attentes, les entreprises consacrent des efforts importants la formation des vendeurs nouvellement engags, qui dure de quelques semaines plusieurs mois selon les secteurs et les entreprises. IBM demande ses technico-commerciaux de consacrer chaque anne 15 % de leur temps la formation, dont une partie distance. Certaines socits mettent galement en place des programmes de formation pour les vendeurs des magasins, mme sils commercialisent galement des marques concurrentes64. Les programmes de formation portent en gnral sur plusieurs sujets : lentreprise, son histoire et son organisation ; les produits, leur processus de fabrication et leurs fonctions dans diverses utilisations ; les caractristiques des clients et des concurrents, la manire de discerner les diffrents types de clients, leurs besoins, motivations, habitudes dachat ; les techniques de prsentation des produits et des arguments de vente, souvent travers des jeux de rle dans lesquels les participants jouent le rle de vendeur ou dacheteur ; la manire dont les vendeurs doivent organiser leur travail, rpartir leur temps entre la clientle actuelle et la clientle potentielle, rdiger les rapports, construire leurs itinraires.
ALETRA. Cette entreprise fabrique des microprocesseurs qui peuvent se reprogrammer continuellement, ce qui constitue une alternative la conception sur mesure habituellement choisie par les constructeurs informatiques, automobiles et de llectronique grand public. Entre 2002 et 2007, Altera a dpens 11 millions dans des formations lempathie pour sa force de vente, et ce travers diffrentes mthodes. Dabord, les reprsentants font

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur le test de personnalit de Briggs et Myers. Ils font ensuite des exercices qui les aident se mettre dans la peau des clients. Une mthode consiste simaginer plac derrire une personne et de voir le monde travers ses yeux. Le formateur joue aussi le rle du client et donne dix minutes un vendeur pour poser des questions permettant de comprendre les problmes du client65.

De nouvelles mthodes de formation sont constamment labores afin de favoriser le dveloppement des comptences et des connaissances. Les diffrentes approches utilises sont lanalyse transactionnelle, les exercices de sensibilisation, et bien sr lenseignement distance. Certaines entreprises cherchent galement, dans leurs formations, favoriser les changes dexpriences entre vendeurs, pour tenir compte du fait que le savoir commercial est en partie informel et exprientiel66. En matire de supervision, les entreprises diffrent dans la manire dont les vendeurs rendent compte de leur activit leurs suprieurs, tout comme dans le degr de prcision avec lequel leurs tches sont dfinies67. Tout dpend de la nature de leffort de vente. Les reprsentants pays la commission et qui ont pour mission de dnicher leur propre clientle bnficient en gnral dune grande indpendance. Les vendeurs salaris, qui lon attribue un groupe de clients, sont soumis un contrle plus strict.

5.3. La

productivit de la force de vente

Combien de fois par an faut-il rendre visite un client donn ? Tout dpend du volume de commande que lon peut attendre dun client en fonction du nombre de visites qui lui sont rendues68. Une augmentation du temps pass avec les clients accrot les volumes de vente, mais aussi les cots. Il faut donc trouver le juste quilibre. Des recherches ont montr que le temps consacr par les vendeurs aux petits clients est trop lev compar celui pass auprs des grands comptes, plus rentables69.

a) Llaboration des normes de prospection


En gnral, une entreprise souhaite dterminer le temps consacr la prospection des nouveaux clients. Elle exige, par exemple, que ses vendeurs y allouent le quart de leur temps et quils arrtent de rendre visite un prospect aprs trois tentatives infructueuses. Livr lui-mme, un reprsentant a en effet tendance se consacrer la clientle existante : les clients actuels sont connus, et le vendeur espre obtenir une commande facile, alors quavec un client potentiel, laffaire ne sera peut-tre jamais conclue.

b) La gestion efficace du temps


Un reprsentant doit planifier ses interventions. Pour ce faire, il prpare un planning annuel de visites la clientle actuelle et potentielle, dans lequel il indique les runions de vente, les salons et foires auxquels il participe et, le cas chant, les tudes de march effectuer. En gnral, un vendeur passe beaucoup de temps prparer ses visites et son travail, voyager, attendre, raliser des tches administratives comme la vrification des commandes, la rdaction des rapports de visites, la participation aux runions de vente et les contacts internes lentreprise. Compte tenu de toutes ces activits, il nest gure surprenant que le temps effectif de vente corresponde en moyenne 29 % du temps de travail des reprsentants70 !

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

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Pour amliorer la gestion du temps de leurs vendeurs, de plus en plus dentreprises rpartissent diffremment leurs efforts entre forces de vente au sige et sur le terrain71. La force de vente au sige intgre trois fonctions : le support technique rpond aux questions des clients actuels et potentiels ; laide la vente prpare le travail des vendeurs sur le terrain et suit le bon droulement des livraisons ; le tlmarketing identifie et qualifie de nouveaux prospects, procde certaines ventes, sintresse aux clients ngligs et prolonge parfois la vente sur le terrain en proposant des produits complmentaires ou nouveaux. La force de vente sur le terrain peut alors se consacrer prioritairement aux plus gros clients et aux prospects les plus importants. Elle cherche convaincre les clients dadopter des systmes de commande lectroniques et des systmes contractuels dveloppant des relations de long terme. Les nouvelles technologies de linformation facilitent galement beaucoup le travail du vendeur. La vente et linformation sur les stocks sont bien sr transmises de manire lectronique. En outre, des systmes daide la dcision sur CD aident les reprsentants. Les ordinateurs portables permettent daccder en quelques clics des informations sur les clients et leur historique de commande, dassurer un service client en temps rel, dorganiser lenvoi dchantillons et de brochures. En outre, Internet joue un rle essentiel : dabord pour permettre au client potentiel de se renseigner sur lentreprise et ses produits ; ensuite, parce que certains problmes qui nexigent pas dintervention directe peuvent tre rgls distance. Compte tenu de son cot limit, de nombreuses PME font du web leur principal outil de vente. Une telle volution les oblige revoir leurs structures commerciales et redfinir le rle de la force de vente. Non seulement les commandes passent par Internet, explique un directeur gnral, mais nos commerciaux peuvent aussi nous faire remonter des flux dinformations qualitatives. Leurs comptes rendus de visites ne sont plus faits par tlphone ou partir de notes papier, et nous pouvons prendre en compte plus aisment les soucis et souhaits de notre clientle 72.

5.4. La

motivation des reprsentants

La plupart des vendeurs ont besoin dtre encourags et stimuls. cela, plusieurs raisons inhrentes au travail fournir : le vendeur travaille souvent seul ; ses horaires sont irrguliers ; il doit sans cesse affronter les vendeurs de la concurrence ; et il lui arrive souvent de ne pas enlever une affaire laquelle il avait pourtant consacr beaucoup defforts73. Or, la motivation et le travail des vendeurs peuvent donner lieu un cercle vertueux. Plus un reprsentent est motiv, plus il sinvestit dans son travail et meilleures sont ses performances. Il est alors mieux rcompens, donc satisfait et motiv pour poursuivre ses efforts. Une recherche a mesur limpact de diffrents stimulants et montr que les facteurs de motivation des vendeurs sont, dans lordre, la rmunration, les promotions, la progression personnelle et le sens du devoir accompli74. Dautres facteurs (respect, scurit, reconnaissance) jouent un rle secondaire, mme si le classement varie selon les individus. De nombreuses socits imposent leurs vendeurs des quotas qui fixent ce qui doit tre vendu au cours de lanne. Souvent, le systme de rmunration est li aux quotas : un vendeur qui fait mieux que son quota peroit une prime ou une commission supplmentaire. Les quotas sont fixs chaque anne dans le cadre du plan marketing. Lentreprise tablit dabord une prvision de vente qui devient la base de planification de la production, du personnel et des finances. Puis, pour

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

chaque zone, elle fixe des quotas correspondant, en gnral, un total suprieur la prvision, de faon inciter les reprsentants donner le meilleur deuxmmes. Mme si les quotas ne sont pas atteints, les prvisions de ventes peuvent donc quand mme tre ralises. Chaque responsable dune quipe se voit attribuer un quota, quil rpartit entre ses vendeurs75. Certains prnent des quotas levs pour stimuler leffort, dautres des quotas ralistes pour favoriser la confiance en soi. En gnral, on considre quun reprsentant devrait avoir un quota au moins gal ses ventes de lanne passe, auxquelles on ajoute une part de lcart entre les ventes passes de lquipe et les objectifs de lanne. Cette part est dautant plus leve que le reprsentant ragit positivement la pression. Une autre question cl est la rpartition des quotas entre les produits. Si un reprsentant commercialise de nombreux produits, doit-il tout vendre ou concentrer ses efforts sur quelques produits prioritaires sans se proccuper des quotas relatifs au reste de la gamme ? Cette question est cruciale lors du lancement de nouveaux produits, qui exigent en gnral un effort commercial particulier. Lutilisation des quotas prsente toutefois plusieurs inconvnients. Si lentreprise sous-estime le potentiel de vente et permet aux reprsentants datteindre facilement leurs objectifs, elle leur verse des primes injustifies. Si, linverse, le potentiel de vente est surestim, les vendeurs prouvent beaucoup de difficult atteindre leurs quotas et sont dcourags. Certaines entreprises abandonnent aujourdhui les quotas en considrant quils focalisent lattention des vendeurs sur les rsultats court terme, au dtriment du service aux clients et de leur satisfaction sur le long terme76. De manire gnrale, les critres adopts pour valuer les vendeurs doivent avoir pour objectif de stimuler chez eux des comportements conformes la stratgie de lentreprise.
SIEBEL SYSTEMS, le leader mondial des logiciels de gestion de la relation client, nutilise
pas de quotas pour piloter sa force de vente. Les critres dvaluation utiliss sont multiples et incluent la satisfaction des clients, le taux de renouvellement des contrats et la rentabilit gnre. Chaque vendeur entre dans une base de donnes toutes les informations relatives chaque visite au client, dont les conversations et les tarifs voqus. La visite est alors value par un systme de scoring prenant en compte les objectifs de vente et de satisfaction de la clientle. La prime obtenue par le vendeur est calcule en fonction des scores obtenus auprs de ses diffrents clients. Ainsi, Siebel parvient obtenir de bons niveaux de satisfaction et de fidlit, puisque plus de la moiti de son chiffre daffaires provient des renouvellements de contrats 77.

Les entreprises ont galement recours dautres moyens pour stimuler leffort de leurs vendeurs. Lorsquelles dsirent les inciter fournir un effort particulier, elles organisent souvent des concours de vente individuels ou par quipe, mme si ce type doutils semble plus efficace auprs des reprsentants en dbut de carrire que des reprsentants chevronns78.

5.5. Lvaluation

des reprsentants

Nous avons jusquici analys les questions de supervision pralables au travail des vendeurs afin de guider leur travail et de les motiver. Mais pour superviser, il faut galement contrler a posteriori, et un bon contrle passe par une information rgulire et double sens sur les rsultats obtenus79.

CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente

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a) Les sources dinformation


Parmi les documents raliss par les vendeurs, il est essentiel de distinguer trs clairement les plans dactivit future et les comptes rendus dactivit passe. Un exemple de rapport du premier type est le plan de travail du reprsentant, qui indique les visites faire et les itinraires. Il a pour objectif dhabituer le vendeur planifier son travail, en mme temps quil informe ses suprieurs sur ses activits et fournit une base de comparaison entre plans et ralisations. Il permet galement de juger de laptitude du vendeur prparer son programme de travail et le mettre en uvre. Les entreprises qui laborent des plans marketing exigent souvent de leurs vendeurs un plan daction annuel dans lequel ils exposent leur programme daction quant lacquisition de nouveaux clients et laccroissement du chiffre daffaires trait avec les clients actuels. Le vendeur devient alors le vritable gestionnaire de son territoire. Ses plans sont tudis par son suprieur hirarchique et servent de rfrence pour les objectifs de vente. Plusieurs documents sont utiliss par les vendeurs pour rendre compte de leurs activits a posteriori. Le plus connu est le rapport de visite, dans lequel le reprsentant consigne les lments importants de ses contacts avec le client, par exemple les marques concurrentes voques, leurs niveaux de prix, le degr et la nature de la rsistance du client et les chances de conclure laffaire. Certaines socits exigent galement de leurs reprsentants des rapports sur les nouvelles affaires traites ou prospectes, sur les clients perdus ou sur les tendances du march et les conditions conomiques locales. Ces diffrents rapports fournissent des informations brutes dont on peut extraire des indicateurs de performance de la force de vente : (1) le nombre moyen de visites effectues chaque jour ; (2) le temps moyen pass chaque visite ; (3) le chiffre daffaires par visite ; (4) le cot moyen par visite ; (5) le pourcentage de commandes par visite ; (6) le nombre de nouveaux clients conquis sur la priode ; (7) le nombre de clients perdus ; et (8) le cot de la force de vente en pourcentage du chiffre daffaires.

b) Lvaluation formelle des reprsentants


Lvaluation formelle des reprsentants peut reposer sur plusieurs approches. Lune dentre elles consiste comparer leur performance actuelle leurs rsultats passs. Un exemple est prsent au tableau 19.3. Le directeur des ventes peut tirer de nombreux renseignements partir des chiffres contenus dans ce tableau. lvidence, les ventes totales obtenues par Martin saccroissent danne en anne (ligne 3). Cela ne signifie pas pour autant quil amliore ses rsultats. La ventilation du chiffre daffaires par produit rvle quil a pouss davantage le produit B que le produit A (lignes 1 et 2). En se rfrant aux quotas qui lui avaient t assigns (lignes 4 et 5), on dcouvre que laccroissement des ventes de B sest fait aux dpens du produit A. Or, il ressort des indications relatives la marge brute (lignes 6 et 7) que lentreprise gagne plus sur A que sur B. Martin pousse le produit fort volume mais faible marge, au dtriment du produit le plus rentable. En fait, bien que ses ventes totales aient augment de 1 100 au cours de lanne passe (ligne 3), la marge brute accuse une diminution de 580 (ligne 8). Les frais de vente (ligne 9) sont en constante augmentation, quoique leur montant exprim en pourcentage du chiffre daffaires semble stable (ligne 10). Cette augmentation ne parat pas due un accroissement du nombre de visites (ligne 11), bien quelle puisse sexpliquer, au moins en partie, par lacquisition de nouveaux clients (ligne 14). Il semble toutefois que cette prospection se fasse au dtriment de

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

TABLEAU 19.3

Fiche dvaluation dun reprsentant

ZONE/NORD-EST Reprsentant : Pierre Martin 2002 1. Ventes nettes du produit A 2. Ventes nettes du produit B 3. Ventes nettes totales 4. % du quota du produit A 5. % du quota du produit B 6. Marge brute du produit A 7. Marge brute du produit B 8. Marge brute totale 9. Frais de vente 10. Frais de vente en % des ventes totales 11. Nombre de visites 12. Cot par visite 13. Nombre moyen de clients 14. Nombre de nouveaux clients 15. Nombre de clients perdus 16. Ventes moyennes par client 17. Bnce brut moyen par client 251 300 423 200 674 500 95,6 120,4 50 260 42 320 92 580 10 200 1,5 1 675 6,09 320 13 8 2 108 289 2003 253 200 439 200 692 400 92,0 122,3 50 640 43 920 94 560 11 100 1,6 1 700 6,53 324 14 10 2 137 292 2004 270 000 553 900 823 900 88,0 134,9 54 000 55 390 109 390 11 600 1,4 1 680 6,90 328 15 11 2 512 334 2005 263 100 561 900 825 000 84,7 130,8 52 620 56 190 108 810 13 200 1,6 1 660 7,95 334 20 14 2 470 326

la clientle actuelle, comme lindique un accroissement rgulier du nombre de clients perdus (ligne 15). Les deux dernires lignes rvlent lvolution des ventes et des bnfices bruts raliss par client. Ces chiffres prennent toute leur signification lorsquon les compare aux moyennes gnrales de lentreprise. Par exemple, si son bnfice est infrieur la moyenne de la socit, il est probable que Martin se concentre sur des clients improductifs. Lexamen du nombre annuel de visites (ligne 11) peut rvler que Martin effectue moins de visites que les autres. Si les distances quil doit parcourir pour couvrir sa zone ne sont pas sensiblement diffrentes, on peut conclure quil ne travaille pas pleine capacit, que ses itinraires sont mal conus, quil ne comprime pas suffisamment le temps dattente ou quil passe trop de temps avec certains clients. Pierre Martin peut tre trs efficace mais peu apprci des clients, par exemple si son portefeuille de clientle se renouvelle constamment. De nombreuses entreprises, comme Mercedes ou France Tlcom, mesurent la satisfaction des clients non seulement vis--vis des produits et services, mais galement du contact avec les vendeurs80. Il convient galement de tenir compte dautres lments car le succs des ventes peut tre li aux actions de la concurrence, la performance des produits et dautres facteurs. Les explications possibles dun niveau de performance relvent

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en effet dlments internes (efforts, capacit, approche commerciale), mais galement externes (la nature de laffaire, la chance)81. Cest pourquoi la performance des reprsentants doit galement tre value sur des critres qualitatifs82, notamment en analysant la performance dans le rle de vendeur (organisation de son travail, retour de linformation, travail dquipe), la performance comportementale (connaissance technique, adaptation la situation de vente, prsentation, personnalit), et la performance extra-rle (aide aux clients, intgrit, comportement daide aux autres membres de lquipe).

6. Lart de vendre
Vendre est un art reconnu depuis longtemps, qui a donn lieu de nombreuses FIGURE 19.4 analyses83. Un vendeur efficace nest pas seulement dou ; il a acquis une Les tapes mthode dans la gestion de linteraction avec le client. Les entreprises investisde la vente sent chaque anne des millions pour former des individus la vente. On leur enseigne, par exemple, la mthode SPIN (situation, problmes, implications, ncessit-valeur), qui incite les vendeurs comprendre les prospects en susciProspection tant des questions autour des thmes suivants84 : 1. Situation actuelle de lacheteur ; par exemple : Quel systme de facturation utilisez-vous ? 2. Problmes rencontrs, difficults et insatisfactions vis--vis des produits et solutions utiliss lheure actuelle ; par exemple : Certaines parties du systme sont-elles lorigine derreurs frquentes ? 3. Implications : il sagit dapprhender les consquences des problmes rencontrs par lacheteur ; par exemple : En quoi ce problme affecte-t-il votre manire de travailler ? 4. Ncessit-valeur : on cherche mesurer lutilit de la solution propose ; par exemple : Quelles conomies lentreprise raliserait-elle si ces erreurs taient rduites de 80 % ? Quel que soit le style de vente choisi, la plupart des analyses dcomposent lacte de vente en six tapes prsentes la figure 19.4 et que nous discutons ciaprs dans le contexte dune vente industrielle.

Prapproche

Prsentation et dmonstration

Rponse aux objections

6.1. Les

six tapes de la vente

Conclusion

a) La prospection
La premire tape est la recherche et la qualification du prospect. La plupart des entreprises prennent elles-mmes en charge cette tape de manire permettre aux vendeurs de se consacrer davantage la vente. Pour qualifier les prospects, on prend en compte leur viabilit financire, leur chiffre daffaires et la probabilit de relations commerciales long terme. On les contacte parfois par courrier ou par tlphone de manire valuer leur degr dintrt pralable pour lentreprise. Il est assez courant, en pratique, de qualifier les prospects de chauds, tides ou froids. Les premiers sont confis la force de vente sur le terrain, les deuximes aux quipes de tlmarkerting. Mais mme pour les prospects les plus chauds, il faut souvent au moins quatre visites avant de conclure une vente.
Suivi

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

b) La prapproche
Le vendeur doit disposer de beaucoup dinformations sur lentreprise cliente (besoins, processus de dcision dachat) et les acheteurs (caractristiques personnelles, fonctions, styles dachat). Le vendeur dtermine ensuite son objectif de visite (qualifier le prospect, recueillir des informations complmentaires, conclure la vente), son mode de contact (visite personnelle, tlphone, e-mail) et sa stratgie de vente globale pour ce prospect.

c) La prsentation et la dmonstration
Le vendeur dcide de la faon dont il va aborder le client au dbut de lentretien de vente. Son aspect, ses premires phrases et rponses sont importants. Lentre en matire doit tre positive et chaleureuse. La premire impression est en effet essentielle. Elle influence la qualit perue du conseil fourni et la confiance accorde par le prospect au vendeur85. Celui-ci peut ensuite faire davantage connaissance avec lacheteur et lcouter attentivement, de manire comprendre ses besoins. Puis il prsente ses produits en les reliant aux problmes du client. Limportant est dexprimer les caractristiques de loffre sous forme de bnfices client. Une caractristique correspond une particularit du produit, par exemple sa dure de vie. Un bnfice exprime le rsultat correspondant pour le client : une plus grande scurit, un gain de temps, etc. Il sagit donc dexpliquer ce que le client retirera du produit, conformment loptique marketing. titre dillustration, lencadr 19.7 prsente un exemple doutil daide la vente permettant aux vendeurs de faire parler les clients sur leurs besoins tout en dmontrant par un vcu rel les bnfices offerts par un produit technique.

19.7

Cas dentreprise

La matire plastique Surlyn de DuPont : passer dun discours de vente technique un discours marketing centr sur les besoins des clients
Le Surlyn est un polymre de DuPont de Nemours existant depuis plus de 30 ans. Traditionnellement utilis dans lemballage alimentaire et industriel, il a rcemment trouv des applications dans la cosmtique (bouchons de parfums, tubes et pots). Les caractristiques essentielles de cette matire sont : sa polyvalence (mthodes de transformation varies qui lui permettent des utilisations sous forme de lms, de produits mouls ou extruds) ; sa polysensorialit puisque cette matire peut revtir diffrents touchers et couleurs, de la transparence la plus totale au paillet ou iris. Cette diversit en fait une matire trs intressante avec une double image : dans lindustrie alimentaire, elle est reconnue pour ses caractristiques techniques mais se trouve aujourdhui fortement concurrence par dautres matires moins chres ; dans le secteur cosmtique, et plus gnralement dans le luxe et la grande

consommation, elle possde une image haut de gamme et un potentiel de dveloppement important.

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Or la polyvalence de cette matire ne la rend pas facile apprhender pour le client qui nimagine pas aisment tous ses emplois possibles. Comment organiser pour une telle matire la phase cl de dmonstration lors de lacte de vente ? Culturellement, DuPont, socit oriente vers la science et la R&D, sait dvelopper des brochures techniques et montrer un large ventail dobjets en Surlyn, depuis les poignes de portes et les carreaux de salle de bain jusquaux acons de parfums. Ce discours reste centr sur les caractristiques techniques du produit et non sur les attentes du client. La direction marketing de DuPont a donc ressenti le besoin de dvelopper de nouveaux outils de prsentation du Surlyn aux clients, destins essentiellement aux designers et aux responsables marketing en charge du dveloppement des nouveaux produits. Il sagissait de passer dun discours technique un

discours marketing centr sur les besoins des clients, avec une communication plus sduisante mais susceptible de mettre en avant les proprits de la matire. DuPont a demand lagence de design Plan Cratif de rchir cette problmatique. Plan Cratif a propos un objet emblme, outil daide la vente en trois dimensions conu pour montrer loriginalit des formes permises par le produit. Lobjectif ntait pas tant dexpliciter dans cet objet toutes les possibilits offertes par la matire que dinciter le client poser des questions. Un coffret contenant 7 objets emblmes embotables aux caractristiques sensorielles diffrentes et un CD-ROM prsentant diffrents univers de cration a t conu, dans le but de faciliter le discours de lacheteur potentiel sur ses besoins et dencourager lchange dinformations avec le vendeur. La force de vente a suivi une formation sur lutilisation de ce coffret.

Sources illustrations : DuPont de Nemours et Plan Cratif.

d) La rponse aux objections


Un client est presque toujours amen faire des objections au cours dun entretien de vente. Sa rsistance peut avoir une origine psychologique ou logique. La premire trouve sa source dans de nombreux facteurs : refus dtre influenc, prfrence pour le statu quo, dsir de gagner, mauvaise perception du vendeur, prjugs, incapacit de dcision ou dsir de ne pas dpenser dargent. La rsistance logique peut provenir dun dsaccord sur le prix, les dlais de livraison ou les caractristiques du produit. Pour rpondre ces objections, il convient de garder une approche positive, en demandant lacheteur de clarifier ses propos, puis en rejetant le bien-fond de lobjection ou en en faisant un argument dachat. La capacit grer les objections et y rpondre fait partie intgrante de la capacit de ngociation.

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SEPTIME PARTIE Communiquer la valeur

Un dfaut rcurrent des reprsentants rside dans loctroi de rductions de prix ds que les clients le demandent. Une entreprise a identifi ce problme en observant que ses ventes avaient augment de 25 % alors que ses profits taient rests stables. Elle a alors dcid dencourager ses vendeurs vendre le prix plutt que de vendre par le prix . Elle leur a fourni plus dinformations sur lhistorique des achats et des comportements de chaque client, tout en organisant des formations sur les opportunits de cration de valeur. Lentreprise a ainsi russi dvelopper davantage son chiffre daffaires, tout en accroissant ses marges86.

e) La conclusion
Un reprsentant doit savoir reconnatre les symptmes qui annoncent le bon moment : une attitude de lacheteur, un commentaire de sa part ou bien une question. Le vendeur peut alors demander lacheteur de passer sa commande, rcapituler les points daccord, offrir son aide pour remplir le bon de commande, demander lequel des deux produits il prfre, linviter dcider de questions mineures telles que la couleur ou la taille, ou encore indiquer ce que le client va perdre sil ne passe pas sa commande tout de suite. Le vendeur peut galement avoir recours des stimulants de dernire minute : un petit rabais, un supplment de quantits ou un cadeau.

f) Le suivi
Il est ncessaire quun vendeur suive le client afin de connatre son degr de satisfaction et, partant, sa probabilit de rachat. Ds la vente, le reprsentant doit fournir toutes les informations complmentaires relatives aux dlais de livraison, aux conditions de paiement, au service aprs vente. Il est souvent recommand de faire une visite de contrle aprs rception de la marchandise, de faon vrifier que tout est en ordre. Une telle visite permet de dtecter un ventuel problme, tmoigne de lintrt que le vendeur porte son client et rassure ce dernier quant au bien-fond de sa dcision. Par exemple, Mercedes oblige tous ses concessionnaires rappeler dans les quinze jours tout nouvel acqureur afin de recueillir ses premires impressions.

6.2. Le

marketing relationnel

Les principes de vente et de ngociation que nous venons de dcrire sont fortement orients vers la transaction car ils portent sur une vente donne. Cependant, la plupart du temps, lentreprise ne cherche pas obtenir une vente court terme, mais construire une relation client-fournisseur de long terme. Elle souhaite dmontrer quelle peut rpondre aux besoins de son client de manire plus satisfaisante que les concurrents. Nous avons voqu les principes du marketing relationnel dans le chapitre 5. En situation dachat business-to-business, cette optique est encore plus importante. Les clients recherchent des fournisseurs susceptibles de leur proposer un ensemble coordonn de biens et de services dans leurs diffrentes localisations. En outre, ils collaborent troitement avec les quipes des fournisseurs pour amliorer les produits et les processus. Les reprsentants travaillant avec les comptes cls ne peuvent se contenter dappeler les clients lorsquils pensent que ceux-ci sont prts passer commande. Ils doivent aller les voir rgulirement, discuter avec eux, leur faire des suggestions sur leur activit, se tenir au courant de leurs projets, connatre leurs problmes et montrer quils peuvent les servir de diffrentes manires. Quand un programme de marketing relationnel est mis en place correctement, lorganisation sintresse autant la gestion des clients qu celle des produits.

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Si le marketing relationnel est une stratgie marketing extrmement efficace, elle nest cependant pas adapte toutes les situations87. Il convient donc de dterminer quels segments et quels clients spcifiques ragiront positivement cette approche.

Rsum
1. Le marketing direct est un marketing individualis et interactif qui utilise un ou plusieurs outils en vue dobtenir une rponse et/ou une transaction. Il connat aujourdhui une croissance considrable dans ses formes traditionnelles mais aussi lectroniques. Les principaux outils du marketing direct sont le mailing (par courrier, e-mail, SMS, fax), la vente par catalogue, le tlmarketing et lutilisation des mdias classiques pour la vente. 2. Le marketing interactif permet une interaction et une individualisation accrues de la communication travers des sites Internet bien conus, des microsites, des liens sponsoriss, des bannires, des interstitiels, des vidos sur Internet, des communauts virtuelles et dautres approches. 3. Le marketing fond sur le bouche--oreille et le marketing viral consistent trouver des manires dinciter les consommateurs parler des produits, des services et des marques. Le marketing fond sur le buzz repose sur des oprations ou des vnements originaux qui gnrent un fort intrt du public et des mdias et stimulent le bouche-oreille. Le marketing viral, pour sa part, favorise le bouche--oreille lectronique en incitant les consommateurs diffuser par Internet des informations sur lentreprise ou ses produits. 4. La force de vente assure le lien entre lentreprise et ses clients. Dans bien des cas, le vendeur incarne lentreprise auprs deux. Il lalimente en informations sur le march. 5. Mettre en place une force de vente suppose que lon dfinisse des objectifs, une stratgie, une structure, un niveau deffectifs et un mode de rmunration. Les objectifs sont fixs par rapport aux nombreuses fonctions pouvant tre assumes par les reprsentants : prospection, qualification, communication, vente, service, collecte dinformations et allocation de priorits. Les dcisions relatives au nombre de reprsentants sont prises partir destimations sur la charge de travail globale et la productivit moyenne dun vendeur. Enfin, le systme de rmunration tablit le niveau de rtribution financire, la rpartition entre le fixe et le variable, ainsi que les facteurs dterminant la part variable. 6. Grer une force de vente implique cinq volets : (1) le recrutement et la slection des reprsentants ; (2) la formation, qui porte sur les techniques de vente mais aussi sur lentreprise, ses produits, ses marchs ; (3) la supervision des vendeurs et les aides pour quils organisent leur temps efficacement ; (4) un systme de motivation efficace ; et, enfin, (5) une valuation rgulire, individuelle et collective. 7. Aucune approche de la vente nest adapte toutes les situations, mais on identifie en gnral six tapes successives : la prospection, la prapproche, la prsentation et la dmonstration, la rponse aux objections, la conclusion et le suivi. Loptique marketing met laccent sur la capacit du vendeur couter le client, de manire comprendre ses besoins et lui proposer une solution adapte.

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Notes
1. Cokes Web Formula Is a Work in Progress , Brandweek, 4 septembre 2006, p. 9 et www.coca-cola.com. 2. Pierre Desmet, Marketing direct : concepts et mthodes (Paris : Dunod, 2005). 3. LSA, Marketing direct : concilier relationnel et promotionnel , 27 mars 2008, p. 38-43. 4. Ran Kivetz et Itamar Simonson, The Idiosyncratic Fit Heuristic: Effort Advantage as a Determinant of Consumer Response to Loyalty Programs , Journal of Marketing Research, n 40, novembre 2003, p. 454-67 ; Ran Kivetz et Itamar Simonson, Earning the Right to Indulge: Effort as a Determinant of Customer Preferences toward Frequency Program Rewards , Journal of Marketing Research vol. 39, mai 2002, p. 155-70. 5. Laurent Battais, Lefficacit des actions de marketing direct sur les marchs de grande consommation : lexprience BehaviorScan en France et en Allemagne , Dcisions Marketing, n 30, janvier 2003, p. 63-75. 6. CBNews, Linluctable repositionnement du mailing papier , 6 novembre 2007, p. 22-23. 7. LSA, Marketing direct : concilier relationnel et promotionnel , 27 mars 2008, p. 38-43. 8. Rduire les cots marketing , Dcision micro et rseau, 18 fvrier 2002, p. 36-37. 9. Sur le-mailing et les caractristiques du message susceptibles daccrotre son efficacit, voir Anne-Sophie Cases, Christophe Fournier et Pierre-Louis Dubois, Etude de linfluence des caractristiques dun e-mail commercial : approches exprimentales in Vivo , Revue Franaise du Marketing, n 209, octobre 2006, p. 7-22, et Caroline Lancelot Miltgen, Yseulis Costes, Thibault Munier et Stphanie Gauthier, Lefficacit dun e-mail vocation commerciale : tude des caractristiques sociodmographiques des internautes sur le processus de rponse , Revue Franaise du Marketing, n 205, dcembre 2005, p. 21-40. 10. Sondage CustomeEyes cit dans LSA, Marketing direct : concilier relationnel et promotionnel , 27 mars 2008, p. 38-43. 11. Capital, Les promesses de la pub sur mobile , juin 2008, p. 104-106, et Dcisions Marketing, Entretien avec Brangre Brial de M6 Web : Le push SMS, un nouvel outil marketing , n 45, janvier-mars 2007. 12. LSA, Marketing direct : concilier relationnel et promotionnel , 27 mars 2008, p. 38-43. 13. Bob Stone, Successful Direct Marketing Methods, 6e dition (Lincolnwood : NTC Business Books, 1996). 14. Sur les bases de donnes internes et externes, voir le chapitre 5. 15. Voir Anne-Sophie Cases, Christophe Fournier et PierreLouis Dubois, op. cit. 16. Edward Nash, Direct Marketing : Strategy, Planning, Execution, 3e dition (New York : McGraw-Hill, 1995). 17. Les piges gogos du marketing direct , Capital, 1er avril 2002, p. 104-106. Pour une analyse des conditions rglementaires lexercice du marketing direct et, plus gnralement, du marketing, lire Nicole Ferry-Maccario, Droit du marketing (Paris : Pearson Education, 2005). 18. Sur les nouvelles formes de communication lies Internet et au buzz, voir le numro spcial de Recherche et Applications en Marketing coordonn par Marie-Laure Gavard-Perret, vol. 22, n 3, septembre 2007. p. 22-23 ; How Much Can You Trust Buzz? Boston 19. Ne laissez pas tomber le web, a marche ! , Management, septembre 2002, p. 34-38. 20. Michel Kalika et Stphane Bourliataux-Lajoinie, Lanalyse des comportements de navigation sur un site marchand , Dcisions Marketing, n 22, janvier-avril 2001, p. 79-86. 21. Management, Sunsilk invente le soap opera sur Internet , octobre 2007, p. 58. 22. Journal du Net, e-Pub : Plus dannonceurs et de plus gros budgets , 13 fvrier 2008, www.journaldunet.com. 23. Wall Street Journal, Once-Wary Industry Giants Embrace Internet Advertising , 17 avril 2006. 24. Seth Godin, Permission Marketing : Turning Strangers into Friends and Friends into Customers (New York : Simon et Schuster, 1999). Sur limpact psychologique de la demande de permission aux clients avant tout envoi de-mail, voire Hlne Yildiz, Permission et engagement : proposition dun cadre thorique appliqu au courriel praccept , Recherche et Applications en Marketing, vol. 22, n 3, septembre 2007, p. 5-28. 25. Asim Ansari et Carl Mela, E-Customization , Journal of Marketing Research, vol. 40, no. 2, mai 2003, p. 131-145. 26. Philippe Jourdan, GRP et Internet : une transposition sans risque , Dcisions Marketing, n 27, juillet-aot 2002, p. 73-78 ; Jean-Philippe Galan et Isabelle Fontaine, Le placement des bannires publicitaires sur le web , Dcisions Marketing, n 26, avril-juin 2002, p. 71-81 ; Emmanuelle Le Nagard-Assayag, Autour de la notion dinteractivit : vers diffrents mdias interactifs ? , Jacques Lendrevie, Internet est-il dou pour la publicit ? et Nathalie Varille, Rglementation de la publicit : lInternet, un autre visuel publicitaire , tous trois dans le numro spcial de la Revue franaise du marketing consacr Internet, n 177-178, 2000, respectivement p. 29-47, 102-118 et 135-152. 27. Jan-Benedict Steenkamp et Inge Geyskens, How Country Characteristics Affect the Perceived Value of Web Sites , Journal of Marketing, vol. 70, juillet 2006, p. 136-50. 28. BusinessWeek, Online Ads Take Off Again , 5 mai 2003, p. 75. 29. Puneet Manchanda, Jean-Pierre Dub, Khim Yong Goh, et Pradeep K. 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CHAPITRE 19 Piloter le marketing direct, le marketing interactif, le marketing viral et la force de vente
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vente par tlphone (25,1 %) et lattente et les voyages (17,4 %). James Narus et James Anderson, Industrial Distributor Selling : the Roles of Outside and Inside Sales , Industrial Marketing Management, 1986, p. 55-62. Les cybercommerciaux, fers de lance des PME , La Tribune, 17 janvier 2000, p. 31-33. Willem Verbeke et Richard Bagozzi, Sales Call Anxiety : Exploring What it Means When Fear Rules a Sales Encounter , Journal of Marketing, 2000, 64, juillet, p. 88-101. Gilbert Churchill Jr., Neil Ford et Orville Walker Jr., Sales Force Management : Planning, Implementation and Control (Homewood, Ill. : Irwin, 1993). Voir aussi Jhinuk Chowdhury, The Motivational Impact of Sales Quotas on Effort , Journal of Marketing Research, fvrier 1993, p. 2841 ; Murali K. Mantrala, Prabhakant Sinha, et Andris A. Zoltners, Structuring a Multi-Quotas Sales Bonus Plan for a Heterogeneous Sales Force , Marketing Science, 1994, p. 121-144 ; Wujin Chu, Eitan Gerstner et James D. Hess, Costs and Benefits of Hard Sell , Journal of Marketing Research, fvrier 1995, p. 97-102 ; et Manfred Krafft, An Empirical Investigation of the Antecedents of Sales Force Control Systems , Journal of Marketing 63, juillet 1999, p. 120-34. Georges Lavalette, La nouvelle direction commerciale : dmarche, mthodes, outils (Paris : Dunod, 1992). Eilene Zimmerman, Quota Busters , Sales & Marketing Management, janvier 2001, p. 59-63. Confessions of a Control Freak , Fortune, 4 septembre 2000, p. 30 ; The Era of Efficiency , BusinessWeek, 18 juin 2001, p. 92. Sur la stratgie de Siebel en europe, voir Alain Bloch, Anne Macquin et Dominique Rouzies, Cas Siebel Systems : le dveloppement en europe , Centrale des cas et des matriels pdagogiques, 2001. Sur les caractristiques privilgier dans les challenges de vente et la ractivit des reprsentants ce type dopration, voir Fanny Poujol et Christophe Fournier, Caractristiques dun challenge de vente et adhsion des commerciaux , Dcisions Marketing, n 47, juilletseptembre 2007, p. 33-46. Alfred Zeyl et Armand Dayan, Force de vente (Paris : ditions dOrganisation, 1999), chap. 16. 80. Pour une revue des diffrentes mthodes, voir Yves Evrard, La satisfaction des consommateurs : tat des recherches , Revue franaise de marketing, 1993, nos 144145, p. 53-65. Lensemble de ce numro spcial est consacr ce thme. 81. Philip Posdakoff et Scott MacKenzie, Organizational Citizenship Behaviors and Sales Unit Effectiveness , Journal of Marketing Research, aot 1994, p. 351-363 ; Andrea Dixon, Rosann Spiro et Magbul Jamil, Successful and Unsuccessful Sales Calls : Measuring Salesperson Attributions and Behavioral Intentions , Journal of Marketing 65, juillet 2001, p. 64-78 ; William Verbeke et Richard Bagozzi, Sales Call Anxiety : Exploring What It Means When Fear Rules a Sales Encounter , Journal of Marketing, 64, juillet 2000, p. 88-101. 82. Catherine Parissier, Anne Mathieu et Sad Echchakoui, Comment dfinir et mesurer la performance du vendeur , Dcisions Marketing, n 40, octobre-dcembre 2005, p. 63-74. 83. Voir Ren Darmon, La vente : de la persuasion la ngociation commerciale (Lille : EMS, 2008). 84. Neil Rackham, SPIN Selling (New York : McGraw-Hill, 1988). Voir aussi The SPIN Selling Fieldbook (New York: McGraw-Hill, 1996) ; James Lardner, Selling Salesmanship , Business 2.0, dcembre 2002-janvier 2003, p. 66 ; Sharon Drew Morgen, Selling with Integrity: Reinventing Sales through Collaboration, Respect, and Serving (New York : Berkeley Books, 1999) ; Neil Rackham et John De Vincentis, Rethinking the Sales Force (New York : McGraw-Hill, 1996). 85. Jasmin Bergeron, Jean-Mathieu Fallu et Jasmin Roy, Une comparaison des effets de la premire et de la dernire impression dans une rencontre de vente , Recherche et Applications en Marketing, vol. 23, n 2 juin 2008, p. 19-36. 86. Joel Urbany, Justifying Profitable pricing , Working Paper Series, Marketing Science Institute, Report n 00-117, 2000, p. 17-18. 87. Pour une analyse dtaille et critique du concept de marketing relationnel, voir Gilles Marion, Le marketing relationnel existe-t-il ? , Dcisions Marketing n 22, janvier-avril 2001, p. 7-16.

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Activits
Question de rexion
La capacit vendre relve-t-elle de qualits innes ou acquises ?
Les opinions divergent quant limpact des sessions de formation sur la capacit vendre efficacement. Certains considrent que les bons vendeurs sont ns ainsi , que cette capacit correspond des traits de personnalit et des facults dveloppes au cours de la vie entire, et quil est trs difficile de les influencer travers des techniques apprises ponctuellement. La cl du succs dune quipe de vente rsiderait alors dans la capacit reprer les bons profils lors du processus de recrutement et de slection. Dautres soutiennent, linverse, que la formation la vente ainsi que lentranement des techniques de ngociation sont essentiels, et que nimporte qui, form efficacement, peut devenir un bon vendeur. Quen pensez-vous ? Le principal facteur cl de succs dune force de vente rside-t-il dans la qualit de la slection ou dans la qualit de la formation ?

Exercice
Choisissez un site Internet et analysez son efficacit au plan de la communication et de linteractivit. Analysez son contenu, sa dimension communautaire, son degr dindividualisation, sa frquence de renouvellement, son activit commerciale et toutes les dimensions qui vous semblent opportunes.

tude de cas
Tupperware
La socit Tupperware est cre en 1946 aux tats-Unis par Earl Tupper, un ingnieur chimiste. Elle propose alors des bols avec couvercle hermtique pour conserver plus longtemps la fracheur des aliments. Mais, dans le monde du marketing, la marque est surtout connue pour ses mthodes de vente : les vendeuses sont des femmes au foyer qui runissent chez elles leurs amies et voisines afin de leur prsenter et de leur vendre les produits, moyennant une commission. Cette approche originale aux cots fixes limits se rvle extrmement efficace : malgr labsence de publicit, Tupperware se diffuse rapidement dans les foyers amricains et devient un prcurseur de ce que lon appellera plus tard le marketing viral . En 1961, la socit arrive en France avec les mmes produits, les mmes mthodes et le mme succs. Plusieurs dcennies plus tard, les produits ont t copis et limage a vieilli. Les runions de consommatrices paraissent dsutes. La clientle est de plus en plus ge. Au dbut des annes 2000, Tupperware dcide de renouveler radicalement son approche marketing en gardant les mmes principes, mais mis aux gots du jour. Il sagit dsormais de sduire les 35-45 ans et, pourquoi pas, terme, les 25-35 ans. Pour ce faire, lentreprise revoit sa gamme avec 200 produits allant du couteaurobot aux moules gteau en passant par les bols de taille variable se dpliant

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selon la contenance souhaite. Les nouveaux articles permettent non seulement de conserver les produits au rfrigrateur et au conglateur, mais aussi de cuire au micro-ondes et au four traditionnel : un produit Tupperware supporte aussi bien une temprature de 25 C que de + 230 C. Plus haut de gamme, loffre repose sur des matires diversifies et sur un design moderne et color. En consquence, les botes en plastique, ancien produit ftiche de la marque, ne reprsentent plus que 9 % des ventes ; plus de la moiti du chiffre daffaires franais est ralis avec la coutellerie, les moules en silicone et les produits high-tech. Chaque anne, le catalogue senrichit dune trentaine de nouveaux produits conus par le centre de design, install en Belgique, et le bureau de R&D, situ en Floride. Parmi les axes de dveloppement, on trouve notamment la recherche sur la conservation des aliments avec des matires comme le Gore-Tex qui laisse passer lair mais pas leau. Par exemple, la cave fromage permet celui-ci de ne pas transpirer mais ne laisse pas chapper dodeur. En complment, lentreprise remet plat ses mthodes de vente. Elle remplace ses runions traditionnelles dune heure et demie, voire deux heures, par des ateliers Savoir-Faire dune heure, toujours domicile, anims par des conseillres culinaires qui enseignent lart des rouleaux de printemps, du foie gras ou du cake. Ces ateliers visent un public beaucoup plus large : mres de famille, jeunes couples ou femmes actives , explique Denis Gruet, le PDG de la filiale franaise. Pour la premire fois de son histoire, lentreprise a recours la publicit, dans lobjectif de faire voluer radicalement son image. Avec un budget de 500 000 , elle opte pour des visuels chocs montrant des personnes dcales par rapport limage actuelle, telles une punkette portant un iguane sur lpaule ou une jeune fille avec un piercing, avec la question Franchement, vous me voyez une runion Tupperware ? . Nous avons mis sur lautodrision , explique Sylvie Bguin, directrice du dveloppement de lagence publicitaire Baxb : La marque a une telle notorit que nous ne risquions pas de la ridiculiser. Il fallait prendre contre-pied cette image suranne. Au cours des trois mois de campagne dans 16 magazines fminins (Elle, Cosmo, Cuisine actuelle, etc.), 40 000 personnes se connectent au site Internet de la marque.

Source illustration : www.tupperware.com.

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Cette campagne permet galement de raliser un autre levier daction envisag : le recrutement de nouvelles ambassadrices. Les 17 000 conseillres sont diriges par 1 700 monitrices , elles-mmes supervises par 60 concessionnaires . Chaque conseillre peroit une commission de 20 % sur les ventes. En organisant deux runions par semaine, elle peut gagner environ 200 par mois. Les monitrices touchent une commission de 23 % sur les ventes et des primes allant jusqu 30 % de leur salaire. Pour rcompenser celles qui atteignent leurs objectifs, le PDG leur offre des produits de la marque et des voyages au bout du monde. Le rajeunissement semble en bonne voie : alors que lge moyen des monitrices atteignait 55 ans au milieu des annes 1990, il est aujourdhui de 45 ans ; quant aux monitrices, elles sont encore plus jeunes avec une moyenne de 38 ans. En complment de cette approche de vente traditionnelle et identitaire, lentreprise favorise la visibilit de ses produits travers des corners en magasin. Ce sont des displays mis chez les commerants sous la forme dun totem vantant un produit que le client peut acheter sur place , explique Denis Gruet. La cave fromage est place chez des fromagers, par exemple. Un tiers des concessionnaires grent en permanence un deux corners de deux quatre semaines, ce qui reprsente pour la marque 40 60 corners en parallle. cela sajoutent des oprations ponctuelles en GMS ou dans des salons comme la Foire de Paris. Les corners reprsentent 1,5 2 % du chiffre daffaires et intgrent tous un stand de minidmonstration. Les clientes semblent ragir favorablement ces volutions. Le nombre dateliers a augment de 20 % en dehors de la rgion parisienne, atteignant le chiffre annuel de 400 000 runions dune dizaine de personnes. Le chiffre daffaires moyen de chaque atelier Savoir-Faire a augment de 8 % en deux ans et, au total, la marque ralise environ 150 M de chiffre daffaires en France.
Sources : Julia Dion, La nouvelle mthode de vente de Tupperware , Management,

mai 2005, p. 62-63 ; Agns Le Gonidec, Tupperware renoue avec le succs , Le Journal du Net, 12 octobre 2005 ; Ava Eschwge, Tupperware sort de sa bote , Marketing Magazine, dcembre 2004, p. 48 ; www.tupperware.fr.

Questions
1. Faites une analyse SWOT de la politique marketing actuelle de Tupperware. 2. Analysez la structure de la force de vente et son mode de rmunration. Quels sont les avantages et les inconvnients de ce systme ? 3. Analysez le site Internet de Tupperware. Comment le jugez-vous ? Quelles volutions recommanderiez-vous ?

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