Un nez électronique est un appareil permettant de détecter et d'analyser des odeurs et des flaveurs, en complément ou remplacement de l'odorat humain ou de celui du chien (utilisé par exemple pour détecter de la drogue ou des explosifs).

Un prototype de nez électronique à Gdansk en 2013.

Depuis la fin des années 2000, la technique des capteurs électroniques a connu d'importants développements d'un point de vue technique et commercial. L'expression anglaise electronic sensing (traduite en français par « capteurs électroniques ») fait référence à la capacité à reproduire les sens humains au moyen d'une batterie de capteurs et de systèmes de reconnaissance.

Lors des quinze années précédant 2007, des recherches ont été conduites pour développer des techniques, généralement nommées « nez électroniques », capables de détecter et d'identifier odeurs et flaveurs. Les étapes du processus de reconnaissance sont similaires à celles de l'olfaction humaine pour permettre l'identification, la comparaison et la quantification. Cependant l'évaluation hédonique est une spécificité encore essentiellement réservée au nez humain, étant donné qu'elle est relative à des opinions subjectives.

Encore à la recherche de crédibilité au milieu des années 1990[1], ces appareils ont connu de telles améliorations qu'ils commencent à être utilisés en routine dans certains secteurs industriels.

Principe de fonctionnement

modifier

Les instruments nez électroniques sont conçus pour l'analyse par empreinte chimique ou par empreinte d'odeurs.

De façon simplifiée, les analyseurs nez électroniques se composent de trois parties principales :

  1. système d'échantillonnage ;
  2. système de détection ;
  3. système de traitement des données.

Les nez électroniques peuvent être couplés à des passeurs automatiques d'échantillons pour le stockage (jusqu'à 96 flacons), l'incubation, l'agitation, le prélèvement et l'injection de l'espace de tête (headspace).

Le système de détection peut utiliser différentes techniques :

Un logiciel d'analyse statistique permet de traiter et interpréter les mesures des nez électroniques et de construire des modèles qualitatifs (Analyse en Composantes Principales, Analyse Factorielle Discriminante), des cartes de contrôle qualité (modèles Statistical Quality Control et Soft Independant Modeling by Class Analogy), des modèles quantitatifs (modèle de régression linéaire Partial Least Square), des modèles de suivi de vieillissement.

Applications industrielles et secteurs d'applications

modifier

Les nez électroniques sont déjà utilisés dans l'industrie, par exemple pour l'une des étapes du cycle de vie d'un produit, s'il faut détecter ou quantifier des odeurs, ou au contraire l'absence d'odeurs (par exemple pour des huiles alimentaires raffinées devant être organoleptiquement neutres[3]) :

  • développement de nouveaux produits ;
  • industrialisation ;
  • commercialisation ;
  • amélioration de produits ou de procédés.

L'odeur, le goût et les caractéristiques chimiques sont des paramètres clés dans de nombreux domaines industriels et culinaire puisqu'ils déterminent directement la qualité et le succès des produits.

Les nez électroniques sont utilisés pour mesurer et évaluer ces paramètres dans :

Éventuellement associé à un réseau neuronal voire à une intelligence artificielle, des nez électroniques ont été proposés pour

  • la détection de drogues, explosifs, gaz toxique (éventuellement inodore pour l'homme) ou autres produits dangereux ;
  • l'agriculture (évaluation qualitative et/ou classements de miels[8], de poissons[9] ou l'état de céréales par exemple[10]) ;
  • le diagnostic de maladie (quand ces maladies changent l'odeur du malade ; comme pour la leishmaniose chez le chien (qui en est un réservoir)[11] ; selon une expérience publiée en 2019 basée sur le reniflage électronique d'effluves d'échantillons de sang et/ou de poils de chiens chauffés dans de l'eau, avec 95% de réussite (le détecteur est néanmoins encore un prototype trop fragile, mais il pourrait être encore amélioré et commercialisé selon ses concepteurs[11].

Nuisances odorantes et législation

modifier

Cette technique est particulièrement en vogue dans les domaines les plus problématiques sur le plan de l'odeur. Notamment l'enfouissement, le compostage, l'équarrissage, le traitement des eaux usées… En France, il existe un arrêté dans le domaine de l'équarrissage qui fait mention de la possibilité de faire des mesures olfactométriques via les nez électroniques. En ce sens, la législation française est assez innovante puisqu'elle est la première au monde à reconnaître la pertinence des nez électroniques pour le suivi environnemental.

Autres techniques, prospective

modifier

Dans l'industrie, l'évaluation des arômes est généralement confiée au nez humain ou au procédé de chromatographie en phase gazeuse (CPG). Cette dernière technique donne une information sur les composants volatils organiques, mais la corrélation entre les résultats analytiques et la perception globale de l'odeur n'est pas directe, à cause d'interactions potentielles entre les différents composés odorants. C'est pourquoi les nez électroniques sont de plus en plus utilisés dans les applications industrielles.

Une voie explorée est celle de la biomimétique [12]

Utilisation en tennis de table

modifier

L’ITTF (Fédération internationale de tennis de table) et la FFTT (Fédération française) ont annoncé l'utilisation de « nez électroniques » appelés « ENEZ »[13] pour contrôler les raquettes des pongistes, à la suite de la modification en 2008 des règlements relatifs à la colle qui ne doit plus comporter de solvants[14].

Références

modifier
  1. Marquis F & Mielle P (1996) Le nez électronique en quête de crédibilité. Odours & VOC’s Journal, Special Issue, 40-46.
  2. « Un nez électronique à l'essai », sur CORDIS (consulté le )
  3. Vigneron, P. Y., Vanhemelrijck, J., Stoclin, B., & Caigniez, J. (2002). Évaluation de la neutralité organoleptique des huiles raffinées à l’aide d’un nez électronique. Oléagineux, Corps gras, Lipides, 9(4), 264-269.
  4. Di Natale, C., Macagnano, A., Paolesse, R., & D'Amico, A. (2001). Artificial olfaction systems: principles and applications to food analysis. Biotechnologie, Agronomie, Société et Environnement, 5(3), 159-165.
  5. Romain, A. C., & Nicolas, J. (1998). Nez électronique adapté aux odeurs de sucrerie, Rapport final. FUL. |résumé
  6. Vouillamoz, J. F., Schaller, M., Carron, C. A., & Bozzi-Nising, A. (2009) Discrimination des chémotypes de thym vulgaire avec le'nez électronique'SMart Nose®. Revue suisse de viticulture, arboriculture, horticulture, 41(6), 345.
  7. Nicolas J (2003) Appliquer le nez électronique pour reconnaître et suivre en continu de mauvaises odeurs dans l'environnement
  8. Benedetti, S., Mannino, S., Sabatini, A. G., & Marcazzan, G. L. (2004). Electronic nose and neural network use for the classification of honey. Apidologie, 35(4), 397-402.
  9. Etienne M., Luchon M., Steinmetz V., Pachot A., Fleurence J. (1997). The multi-gas sensor technology: a new tool for the quality evaluation salmon (Salmo Salar). Final Meeting of the Concerted Action Evaluation of Fish Freshness, Nantes.
  10. Feast S (2001) Potential applications of electronic noses in cereals. Cereal foods world, 46(4), 159-161.
  11. a et b Elizabeth Pennisi (2019) Who sniffs the sniffers? Electronic nose takes a whiff of dogs to spot deadly disease |21 février 2019
  12. Wang, P., Zhuang, L., Zou, Y., & Hsia, K. J. (2015). Future Trends of Bioinspired Smell and Taste Sensors. In Bioinspired Smell and Taste Sensors (p. 309-324). Springer Netherlands (résumé).
  13. http://www.fftt.com/sportif/arbitrage/actualites/boosters.pdf.
  14. http://www.ittf.com/_front_page/ittf_full_story.asp?Year=&General_Catigory=&ID=12807&Category=General&Competition_ID « Copie archivée » (version du sur Internet Archive).

Articles connexes

modifier

Bibliographie

modifier