Comme les fleurs au soleil: Donner un sens plus profond à sa vie
Par Johann Gauthier
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À propos de ce livre électronique
Au contact de son nouveau compagnon, Thomas saisira l’importance de ne jamais quitter un endroit sans d’abord avoir, telles les fleurs au soleil, réellement ouvert tous les pétales de son cœur et de son âme. Grâce à cette ouverture, il parviendra à donner un sens plus profond à sa vie et à aimer comme jamais auparavant. Ce faisant, il constatera non seulement qu’un chemin pavé d’or l’attend, marqué
par plusieurs révélations qu’il trouve dans les réponses à une question toute simple : comment devient-on riche ?
Au cœur de ce récit, vous découvrirez, comme Thomas, un chemin pavé d’or, celui de la transformation et de l’éveil de la conscience. Ce chemin, invisible aux yeux de la plupart des êtres humains, se révèle à nous alors que le royaume du cœur ouvre toutes grandes ses portes pour nous accueillir dans la splendeur de l’être.
Johann Gauthier
JOHANN GAUTHIER est coach éveilleur de plein potentiel, conférencier, consultant, auteur, formateur, conseiller en voyages et entrepreneur social. Il aide les leaders et les entrepreneurs à penser différemment pour obtenir des résultats différents et a mis au point le Bootcamp pour futurs auteurs, destiné à ceux d’entre eux qui souhaitent écrire un premier livre.
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Aperçu du livre
Comme les fleurs au soleil - Johann Gauthier
Prologue
Thomas a eu une enfance relativement paisible à Montréal, aux côtés de ses parents, Jean Bloch et Marie Leclerc. Thomas a toujours vu en son père un véritable héros. Ce dernier avait en effet joué un rôle crucial dans la libération de la Hollande du joug allemand durant la Seconde Guerre mondiale. Il avait été décoré de la Croix de Victoria, la plus haute distinction accordée à un militaire canadien en reconnaissance d’un acte de bravoure et d’abnégation exceptionnel en présence de l’ennemi.
La guerre a toujours été un sujet tabou à la maison, Jean se contentant de dire qu’elle avait pour unique but de nous enseigner ce qui est fondamental dans notre passage sur Terre. Il soulignait que le plus important est d’aimer notre prochain et de propager l’énergie de l’amour par chacun de nos gestes. Cela, disait-il, par souci de respecter notre mission d’âme et de réaliser pleinement le but ultime de notre vie, qui est d’aimer véritablement.
Durant son adolescence, Thomas semblait avoir tout pour être heureux. Sa mère, en particulier, s’assurait qu’il ne manque de rien sur le plan matériel. Toutefois, un jour, elle tomba gravement malade. Un diagnostic accablant révéla un cancer du côlon à un stade avancé. Thomas n’en eut pas conscience, car sa mère avait pris l’habitude de lui cacher certains faits sous prétexte de le protéger. Outre son cancer, Marie souffrait également en silence d’hyperthyroïdie, une surproduction d’hormones de sa glande thyroïde la drainant de son énergie vitale. Thomas ne remarquait rien, si ce n’est qu’après de longues journées d’un travail épuisant en tant qu’infirmière à l’urgence, elle rentrait souvent à la maison pour se mettre immédiatement au lit, exténuée. Pendant ce temps, son père, silencieux, préparait le repas du soir.
Pendant quelques années, au cœur de son adolescence, Thomas reçut de son père des enseignements de nature spirituelle durant l’été. Ces enseignements suscitaient généralement peu d’intérêt en lui, mais il préférait dissimuler ses véritables sentiments pour ne pas vexer son père.
Jean, un homme d’une grande rigueur intellectuelle et spirituelle, avait fait une importante faillite en tant qu’homme d’affaires lorsque Thomas était encore un jeune enfant. Alors que Thomas recevait à contrecœur les enseignements spirituels de son père, il se remémorait les nombreuses visites à l’usine de fabrication de meubles de ce dernier, avant qu’il ne soit contraint de fermer l’entreprise par suite d’une hausse record des taux d’intérêt en pleine récession, obligeant de nombreux chefs d’entreprise, y compris son père, à déclarer inévitablement faillite.
Thomas se souvient particulièrement de l’admiration que son père suscitait chez ses employés et les nombreuses personnes qu’ils rencontraient, notamment lorsqu’ils déjeunaient ensemble chaque dimanche matin dans le restaurant favori de son père. Jean Bloch possédait un leadership naturel indéniable, le genre de leader assuré qu’on ne conteste pas ouvertement, surtout lorsque ce leadership a été forgé dans la sueur et le sang aux côtés d’autres soldats dans des batailles terrifiantes, au cours desquelles il a accompli de nombreux actes de bravoure et d’abnégation pour préserver notre droit à la liberté.
Jean Bloch enseignait donc à son fils les principes de la pleine conscience. Au fil de plusieurs longues journées d’été, Thomas avait appris à écouter en âme rebelle, présentant à son père un visage censément ouvert, désireux d’éviter les confrontations et de maintenir la paix, mais lui opposant intérieurement un non retentissant.
Entre les enseignements de Jean sur l’éveil et la maladie qui rongeait silencieusement sa mère, Thomas développa une forme sournoise d’excès de confiance, une arrogance à la fois assurée, silencieuse et empreinte de colère, tel un jeune lion se croyant plus grand que son père-roi. Certes, il n’en était pas conscient, occupé qu’il était à faire semblant d’écouter son père tout en se promettant que sa vie d’adulte serait davantage axée sur la réussite que sur la spiritualité. Tout pour ne pas ressembler à son père. Jusqu’au jour où la vie lui fit signe, lui permettant d’ouvrir les pétales de son propre cœur, comme les fleurs profitent de la générosité d’un soleil levant en ouvrant graduellement leurs pétales pour révéler leur grandeur, leur splendeur et leur puissance naturelle.
Derrière l’amour d’un père et d’une mère pour leur fils, ainsi que les enseignements sur la vie et son chemin pavé de pépites d’or à découvrir, se cachent de nombreuses richesses que révèle une ouverture grandissante du cœur dans l’invisible. Mais ça, Thomas ne le découvrira que plus tard, en allant à sa propre rencontre, alors même qu’il s’y attendra le moins. En une suite de bénédictions divines, la vie mettra bientôt sur son chemin des gens et des événements pour le guider là où il a précisément besoin d’aller.
Ces rencontres l’amèneront à renoncer à certaines croyances tout en s’accordant plusieurs pardons afin de libérer l’énergie de son cœur et la toute-puissance de son être. Ainsi, il répondra à l’appel de son âme pour vivre et propager l’amour véritable, à sa manière, en étant totalement libre d’être lui-même, doté d’un cœur en or.
Pour l’heure, Thomas est occupé à générer des profits toujours plus grands, alors que spirituellement parlant, il n’a encore aucun intérêt à ouvrir son cœur, malgré tous les enseignements prodigués par son père au fil des ans.
Chapitre 1
Chelsea, Québec, Canada, le 2 décembre 1999
À 33 ans, Thomas occupe un poste de direction dans une importante entreprise de commerce international. Depuis son bureau, il jouit d’une vue impressionnante mise en valeur par des fenêtres panoramiques qui mettent en scène un décor riche en fauteuils de cuir et tableaux de peintres renommés, ainsi qu’un imposant bureau en acajou. Ses murs sont ornés de nombreux prix et distinctions.
En ce matin plutôt frisquet, Thomas balaie son bureau du regard, cherchant des réponses à divers enjeux de communication stratégique auxquels fait face l’entreprise qui l’emploie. Pour mieux réfléchir, il se lève de sa chaise qui roule un peu plus loin, et s’approche de son principal diplôme, baigné d’une douce lumière. « Thomas Bloch, maîtrise en science politique, Université de Montréal, 1989 », murmure-t-il. Doté d’une solide expertise, d’une grande capacité d’analyse et d’un jugement assuré, il jouit d’une grande autorité et d’influence depuis son poste élevé.
Soudain, le téléphone sonne, le rappelant à l’ordre. Il doit s’atteler à plusieurs tâches s’il veut s’éviter une autre interminable journée au bureau. Rapidement, il se rassoit et décroche le combiné. « Bonjour, ici Thomas Bloch. En quoi puis-je vous être utile ? »
Aucune réponse, seulement un souffle saccadé. Il baisse les yeux sur l’afficheur et voit qu’il s’agit en fait de sa mère. Il jette ensuite un œil à son portable et constate qu’il a manqué trois appels successifs, trop absorbé par sa planification de la journée dès sa sortie du lit. Il a d’ailleurs l’impression d’avoir cauchemardé toute la nuit à propos de dossiers s’accumulant en piles sur son bureau, tous marqués du mot URGENT en lettres rouges. Dans son rêve, il voyait défiler devant lui des scènes de rencontres houleuses chargées d’arguments de toutes sortes qui l’attendaient. Il soupire, puis reprend la parole d’un ton qu’il veut cordial, habitué à se dissimuler derrière un mur de politesse. Toutefois, quelques trémolos dans sa voix trahissent une irritation que sa mère aura tôt fait de détecter.
« Quoi ? Combien de fois t’ai-je dit de ne pas m’appeler au bureau, maman ! Si je ne te réponds pas, c’est que…
— Ton père vient d’être admis à l’hôpital. C’est un cancer, rétorque sa mère d’un ton monocorde.
— Il va s’en sortir, n’est-ce pas ? demande Thomas, inquiet.
— C’est un peu compliqué », lui répond sa mère après un moment d’hésitation.
Après quelques respirations profondes pour calmer sa voix, désireux de jouer au même jeu que sa mère et de rester en grande partie imperturbable face aux émotions qui pourtant le submergent, Thomas lance : « Donne-moi l’heure juste, maman. Mais fais vite », conclut-il en jetant un œil à la pile imposante de dossiers posés sur un coin de son bureau, comme si tout ce travail constituait une parfaite excuse pour éviter de vivre pleinement ce moment interminablement présent.
Sa mère reste silencieuse pendant de longues secondes, adoptant cette réserve qui la caractérise si bien. Elle a appris, au fil des années, à ne pas s’exprimer ouvertement avec son fils, croyant ainsi le protéger de la réalité parfois glaciale et dure de la vie. Mais Marie Leclerc, malgré sa grande retenue, finit par céder face à l’insistance de son fils, éternel lionceau. La preuve en était qu’elle n’avait toujours pas raccroché, tandis que lui perçoit encore son souffle prolongé au bout du fil, qui lui murmurait « Je t’entends, mon fils. » Finalement, elle lâche ce qui semble à Thomas une bombe à retardement : « C’est là où nous en sommes pour le moment. Ça ne sert à rien de s’en faire. Je vais rencontrer son médecin dans quelques minutes, mais je tenais à t’informer de la situation.
— Mais, maman, tu as été infirmière en chef d’un hôpital, n’as-tu pas déjà une idée du diagnostic ? »
Il était vrai que sa mère avait souvent démontré au cours de sa carrière un meilleur discernement et une facilité à poser un diagnostic supérieur à celle de nombreux médecins. Bien qu’elle n’ait pas fait d’études de médecine, faute d’argent – elle venait d’un milieu ouvrier fier, mais modeste – son expérience ainsi que son esprit d’analyse et de synthèse surpassaient souvent celles de la plupart des médecins, qui lui vouaient d’ailleurs une confiance et un respect inébranlables. Thomas a hérité de son côté analytique, toujours pressé d’aller droit au but, à l’image de sa mère. Mais en ce moment, il sent qu’il perd pied, ce qui le frustre de plus en plus. En réponse à Thomas, sa mère dit d’une voix lasse : « Ton père perdait du poids, c’était visible, et son teint était devenu pâle. J’ai également remarqué du sang dans ses urines, mais il ne m’en parlait pas. Tu le connais… »
À son poignet, le tic-tac de sa montre Kenneth Cole dernier cri rappelle à Thomas que le temps file à vive allure, au rythme de son cœur qui palpite. Tout stress supplémentaire à celui qu’il subit déjà au jour le jour lui est insupportable. La tension se lit sur son visage encadré de fins cheveux châtains. Il aurait aimé pouvoir arrêter le temps. Il possédait bien des talents, mais pas celui-là. La situation lui parut ironique. Expert en communication, pensa-t-il, mais pas même foutu de communiquer avec ma propre mère. Elle ne me dit pas tout, je le sens !
« Tu sais comme moi que ton père a toujours agi comme s’il n’avait jamais quitté son uniforme de lieutenant-colonel, lui dit finalement Marie, Toujours maître de la situation, sans que l’on puisse lui dire quoi faire et comment le faire. Sa santé n’y fait pas exception. »
Hagard, cherchant vainement à se rassurer, Thomas ne sait trop quoi penser. Sa gorge se noue. Il frappe du poing avec force sur son bureau, fermant les yeux un instant pour mieux sentir sa colère grandissante.
Sa mère a toujours eu l’art de minimiser les faits et de le « protéger », à sa manière. Voilà qu’elle tente à nouveau de le faire, malgré le temps écoulé. La loi du silence règne en maître dans la famille Bloch. Satanée loi du silence de merde, se dit Thomas en ponctuant sa pensée de jurons, sentant encore une fois que sa mère ne l’a ni entendu ni compris. Il devine que l’état de son père est grave, mais à quel point, il n’en a aucune idée. Il est convaincu cependant que sa mère saisit bien la gravité de la situation et tente de le rassurer, non sans difficulté. Son cœur bat la chamade. Les minutes lui semblaient durer des heures.
« Thomas, tu as déjà une vie très chargée. Tu es cadre supérieur dans une multinationale et la dernière chose dont tu aies besoin est de te préoccuper de l’état de santé de ton père. Je suis à ses côtés et tout est sous contrôle. Dès que j’aurai plus d’informations, je te contacterai. Cela te convient-il ?
— D’accord », répond-il d’une voix résignée, sans la moindre conviction.
Il se sent totalement impuissant devant la situation. Chose certaine, il ne peut plus se permettre de prolonger la conversation, qui a déjà trop duré. Il a pris du retard sur son horaire. Plusieurs réunions importantes l’attendent, dont l’une doit débuter dans quelques minutes.
Et voilà que sa mère raccroche sans dire un mot. Pantois, Thomas fixe le combiné d’un regard vague avant de raccrocher à son tour sans avoir pu dire au revoir à sa mère. Son cœur se débat dans sa poitrine oppressée. Je suis certain qu’elle sait quelque chose et qu’elle ne veut rien me dire, comme toujours. Va-t-il s’en sortir ? se demanda-t-il.
Ainsi, sa mère l’a laissé en suspens, à osciller entre les « peut-être que ça va » et les « peut-être que ça ne va pas si bien que ça ». Un moyen de lui épargner le pire ? En écoutant sa mère, Thomas a senti le poids écrasant de la frustration et de la colère, telles d’immenses vagues qui s’apprêtent à aller se fracasser contre des rochers. Rien pour le rassurer.
Des pas annonçant l’arrivée de son visiteur le tirent de ses pensées. Thomas se lève pour lui serrer la main en souriant, masquant tant bien que mal son tumulte intérieur. Il invite son interlocuteur à s’asseoir et entame la conversation dans un tourbillon d’émotions qui, telles de fines gouttelettes en suspension dans l’air, inondent l’espace de leurs larmes, comme pour apaiser les âmes et les cœurs meurtris par une vie trop souvent incontrôlable.
Chelsea, Québec, Canada, le 2 décembre 1999, midi
Appuyé contre une table située à proximité de la machine à café, Thomas fixe sa tasse qui se refroidit depuis déjà un bon moment. Même le bourdonnement de la cafétéria bondée et le va-et-vient des gens venant se servir du café ne l’atteignent pas. Il est épuisé et a l’estomac noué. Ses pensées sont accaparées par son père et la conversation frustrante qu’il a eue plus tôt avec sa mère.
Il n’a ni le temps de s’asseoir pour déjeuner tranquillement, ni de s’attarder à la rage qui l’envahit, tel un ennemi sournois sur le champ de bataille. Son attention s’éparpille entre les projets auxquels travaillent ses employés, qu’il n’a pas encore réussi à réviser, de même que les réunions, à la fois routinières et ardues, avec ses supérieurs, sans oublier la multitude de courriels à traiter qui l’attendra encore jusque tard dans la soirée.
Il saisit sa tasse d’un geste brusque, salue ses collègues d’un signe de tête, attrape au passage une barre de chocolat dans un distributeur automatique, puis retourne rapidement à son bureau. Il doit rattraper le temps perdu. L’après-midi s’annonce chargé, rythmé par des sollicitations incessantes – « Thomas, viens voir ici. Thomas, comment je règle ça ? » –, des poignées de main, des sourires aussi feints que nécessaires, des conseils et de nombreux cafés pour rester concentré et efficace.
Une fois dans son bureau, Thomas prend place dans son fauteuil en cuir et pose sa tasse vide, sa main tremblante lui rappelant que c’est déjà son quatrième café de la journée.
Chelsea, Québec, Canada, le 2 décembre 1999, 19 h 30
Après une autre longue et épuisante journée de travail, Thomas sent le besoin de se distraire. Il tente auparavant de joindre sa mère. Après plusieurs appels sans réponse, il lui laisse un message. Il repense à leur conversation de ce matin et à sa promesse de le rappeler dès qu’elle aura plus d’informations. Peut-être n’a-t-elle pas d’autres nouvelles à lui communiquer. Peut-être est-elle occupée au chevet de son père. Peut-être, peut-être, peut-être, se répète Thomas comme pour mesurer toute son impuissance, alors qu’il sent tant de dureté monter en lui, prête à éclater à tout moment.
Il lui vient à l’idée d’appeler son père dans sa chambre d’hôpital, mais il se ravise, ne sachant pas dans quel état il le trouverait. Il se résigne à attendre des nouvelles de sa mère, en espérant qu’elle tienne sa promesse. Thomas est partagé entre appeler son père coûte que coûte et accepter qu’il n’y peut strictement rien pour l’instant. En bon directeur, il a l’habitude d’agir promptement pour régler toutes sortes de situations, mais la vie lui lance maintenant une tout autre invitation : de ralentir pour mieux ressentir, chose qu’il n’a jamais fait auparavant. En l’absence de cette certitude, l’attente de nouvelles de la part de sa mère lui ronge les tripes.
Il décide de se rendre au Lounge, resto-bar branché de Chelsea, à l’ambiance intimiste. S’emparant des clés de son Accord Prelude pour une autre soirée bien arrosée, il sort de son condominium et prend la direction du Lounge.
À son arrivée au resto-bar, aux teintes noire et rouge, avec son propre DJ et sa musique entraînante, il s’installe à sa table habituelle, au fond de la salle. La table est recouverte d’une nappe de soie rouge assortie à un siège en velours d’un noir soyeux. Il prend la carte des boissons alcoolisées, mais son regard azur se détourne un moment vers le lustre de cristal suspendu au milieu de la salle animée, où l’effervescence de la fin de semaine bat son plein. Comme il fait bon vivre en ce moment, se dit Thomas en bombant le torse, bercé par l’énergie ambiante. Il a l’impression d’être rentré chez lui.
« Vous avez choisi ? » lui demande une serveuse vêtue d’une élégante tenue noire qui épouse ses formes avec grâce. Ils échangent ensemble des regards empreints de sous-entendus qui démontrent qu’ils sont sur la même longueur d’onde. Il fait soudainement très chaud.
« Apportez-moi une coupe de votre meilleur champagne », répond Thomas en esquissant un sourire charmeur. Il ne quitte pas la serveuse de ses yeux pétillants, faisant danser son regard sur elle sans aucune gêne ni retenue, visiblement satisfait de ce qu’il voit. Il se sent parfaitement à l’aise, dans son élément.
En ce début de décembre, Thomas a choisi de passer sa soirée au Lounge, un lieu qui lui sert de refuge, un véritable antre pour le lion en lui. Il ne s’inquiète de rien d’autre que de capter toute l’attention de la gent féminine, savourant chaque instant de sa soirée.
Chapitre 2
Chelsea, Québec, Canada, le 15 décembre 1999, 7 h 45
Thomas s’est vêtu avec soin ce matin, revêtant un élégant complet noir et une cravate bleu cyan. Cette touche de couleur s’accorde parfaitement avec le bleu éclatant de ses chaussures en suède et la teinte turquoise de ses yeux.
Ce jour est important, mais malgré cela, Thomas s’est levé en retard. Il saute rapidement dans sa voiture, ne s’arrêtant en route que pour ramasser un café et un muffin au passage. Au bureau, il incarne le parfait exemple du virtuose capable de jongler avec une sérénité légendaire.
Thomas a une rencontre cruciale avec ses supérieurs, rencontre qu’il prépare minutieusement depuis des semaines avec les membres clés de son équipe. Il doit présenter d’importantes stratégies d’expansion pour l’entreprise. Mais il y a un risque, car si la rencontre tourne mal, cela pourrait lui coûter cher.
Entrant dans son bureau pour récupérer quelques dossiers essentiels, il desserre légèrement sa cravate en prenant une profonde inspiration. Tout va bien se passer, se rassure-t-il. Souris et fais-toi confiance. Ton équipe et toi êtes fins prêts, ça va aller. Il jette un œil distrait à la vue panoramique de la ville sans vraiment avoir le temps de s’y attarder.
Il jette un œil à sa montre, qui lui rappelle que sa réunion commence dans trois minutes. Il avale rapidement une gorgée de café et engloutit son muffin au double chocolat en guise de coup de fouet matinal. Prenant sa brosse à dents de secours, il se dirige vers la salle de bain. Face au miroir, il observe son visage pâle et ses yeux bleus qui lui paraissent ternes, souhaitant presque ne pas avoir à se confronter à son propre reflet.
Si tout se passe bien ce matin, je m’offre des vacances bien méritées, souffle Thomas en se brossant les dents avant de se précipiter vers la salle de réunion pour présenter son argumentaire à la haute direction. Déterminé, il est prêt à se faire entendre avec assurance. Il avale rapidement sa salive et entre dans la salle où l’attendent ses supérieurs et les membres les plus influents de son équipe, les regards fixés sur lui et les marques de fatigue sous ses yeux. Il s’empresse de serrer la main de chaque dirigeant avant de s’installer confortablement sur une chaise en cuir, tel un lion sur son trône, saluant brièvement ses employés d’un signe de tête.
« Je vous prie d’excuser mon retard, il y avait un embouteillage monstre sur l’autoroute, fait-il en réprimant un léger gargouillement dans son estomac douloureux à cause de son reflux habituel. De quoi parliez-vous ?
— Ne vous en faites pas, Thomas, nous vous attendions. Allez-y, parlez-nous de nos nouveaux partenaires et de leur rôle dans l’avenir de notre entreprise », répond Ross MacLeod, vice-président principal chargé de la stratégie et du développement des affaires. Ce dernier le fixe intensément du regard, comme pour souligner l’aspect crucial de cette rencontre pour l’avenir de Thomas et celui de l’entreprise.
Thomas étale ses dossiers sur la table avec assurance et lance sa présentation sur l’écran de la salle avec enthousiasme et dynamisme. Par moments, il invite ses principaux conseillers à détailler des aspects techniques des projets, tandis qu’il met en lumière, avec son efficacité légendaire, les retombées commerciales stratégiques et la visibilité accrue que ces partenariats pourraient offrir à leur entreprise.
Soudain, on frappe à la porte. C’est Isabelle, l’adjointe de Thomas, qui s’immisce discrètement dans la salle de réunion pour annoncer : « Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Bloch, mais on vous appelle d’urgence. »
Thomas jette un œil à son portable et constate qu’il a manqué trois appels de sa mère. Il soupire avant de dire devant ses supérieurs visiblement agacés : « Isabelle, tu vois bien que nous sommes en pleine réunion. Je t’appelle plus tard. » Son ton trahit un brin de mécontentement envers son adjointe.
Des toux sèches et des murmures se font entendre dans la salle en réaction à cet échange inopportun. Thomas bouillonne intérieurement, mécontent de cette interruption qui risque de nuire à son image, bien qu’il sache qu’Isabelle, dotée d’une excellente intuition, ne le dérangerait pas sans raison valable. Il soupire à nouveau et cette fois, Isabelle s’approche pour lui murmurer discrètement à l’oreille : « Comme vous voulez, mais je vous prie d’accepter mes condoléances les plus sincères. Votre père est décédé cette nuit. »
Sur ces mots lourds de sens, Isabelle quitte la pièce, ses pas résonnant dans le silence. Thomas, submergé par un tourbillon d’émotions, se sent soudain nauséeux. La salle, d’abord silencieuse, se tourne vers lui, ses collègues le regardant avec embarras alors qu’il tente désespérément de garder son sang-froid malgré le choc de la nouvelle.
« Quelque chose ne va pas, Thomas ? s’enquiert monsieur MacLeod d’un ton empreint de compassion.
— Une urgence m’oblige à reporter cette réunion. Nous fixerons une nouvelle date par nos assistantes. Excusez-moi. »
Le cœur serré, la nausée le gagnant, Thomas quitte précipitamment la salle sous le regard stupéfait de ses employés et de ses supérieurs. Il se précipite aux toilettes, où il asperge son visage d’eau froide, tentant de calmer la tempête intérieure qui l’agite.