Globalisation et interculturalité
Par Awatif Elgouchi
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À propos de ce livre électronique
Cet ouvrage collectif, le troisième de la série EPI, est le résultat d'une belle collaboration scientifique entre des professeurs chercheurs de l'Université Mohammed V de Rabat. Il traite des nouveaux enjeux socioculturels de la globalisation des marchés et des valeurs et qui pose le choix complexe entre identité et diversité, entre force et dialogue, notamment pour les pays qui la subissent. De manière générale, l'approche suivie dans le cadre de cet ouvrage a été d'inviter différentes disciplines scientifiques à dire en quoi la globalisation peut être une opportunité ou une menace. A travers des lectures critiques et des études de terrains, les différents auteurs du livre proposent un modèle éthique de la gestion de la globalisation respectueux des particularités et des possibilités de chacun.
Awatif Elgouchi est professeure chercheure à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l'Université Mohammed V de Rabat. Ses recherches actuelles portent sur les domaines du management interculturel et de la communication. Elle est coordinatrice de l'ouvrage.
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Aperçu du livre
Globalisation et interculturalité - Awatif Elgouchi
Introduction
Parler des valeurs parle des valeurs. En axiologie, la manière dont le chercheur entend et modélise les valeurs culturelles en dit long sur les siennes ; son référentiel exerce une influence indéniable sur sa vision et sa conception de la culture et de ses composantes et le met d’emblée dans un rapport d’interculturalité incluant tous les biais méthodologiques qui s’ensuivent ; le point de vue objectif, qui doit être a-culturel dans ce cas-là, n’existe pas et il s’avère nécessaire de reconnaître et de composer avec cette subjectivité par le moyen d’une nouvelle approche épistémologique (Elgouchi, 2022).
Dans l’anthropologie culturelle occidentale, le paradigme moderne de la connaissance a été perverti par le cartésianisme et l’empirisme : ces courants philosophiques ont favorisé le primat d’une vision instrumentale et solipsiste de la raison qui réduit les sciences de l’homme aux sciences de la nature. Or, avoir une vision juste du rapport de l’homme aux valeurs suppose la considération de tous les contextes d’intelligibilité et il serait impossible de prétendre à un modèle canonique ou une théorie complète et universelle sur les valeurs de base en l'absence d’un travail collégial impliquant toutes les aires culturelles, d’une posture réflexive favorisant une neutralité axiologique (Weber, 1965).
Par ailleurs, il existe, en amont de cet effort constant d’appréhender cet objet complexe, une assise philosophique propre à différentes cultures, laquelle prédétermine le rôle et la finalité des valeurs dans la régulation des rapports humains et des rapports de l’homme avec son environnement. Dès lors, au moins deux courants majeurs se distinguent :
Le premier, plutôt classique, qualifie et organise les relations humaines sur la base d’une dualité morale du bien et du mal et qui trouve souvent sa source dans les croyances religieuses. Les valeurs culturelles y sont fixées, ancrées et transmises selon qu’elles correspondent, ou pas, à un sens de l’élévation. Le deuxième, subséquent, introduit un vecteur nouveau basé sur l’intérêt et les droits individuels et collectifs et qui provient essentiellement de la philosophie dite des Lumières et des principes de la révolution française. Les valeurs y renvoient au sens de profit et à des vertus matérielles.
Parmi les cultures du courant classique, la culture arabo-musulmane s’inspire principalement du Saint Coran dans le choix et la définition des valeurs culturelles. Celles-ci doivent correspondre au sens moral tel que dicté par les dogmes religieux, elles sont la définition même de la caractéristique humaine et la condition sine-qua-non distinguant l’homme de l’animal. D’ailleurs, la langue arabe, tout comme sa tradition, foisonnent de règles de conduite et d’attitudes qui esquissent une échelle très détaillée déterminant l’ascension de l’homme – ou sa décadence- vers sa qualité humaine. Des valeurs comme « المروءة » « الفتوة » « الشهامة » « النبل » désignent, dans ce qui est appelé chevalerie ou code de l’honneur, des degrés d’élévation n’ayant pas toujours leur équivalent dans la tradition occidentale, concernent -contrairement à elle- aussi bien les hommes que les femmes et font fi de la caste sociale et de la race car elles sont érigées en pratique religieuse requise de tous (Ibn Tanbak, 2000 ; Al Asfahani 1980).
Dans les cultures rationalistes, les valeurs acquièrent une dimension utilitariste et progressiste. L’élévation morale cède le pas au progrès ou plus adéquatement à la progression ; car au vu de l’histoire moderne, toutes les progressions enregistrées ne mènent pas forcément vers le progrès ; les conséquences parfois désastreuses des innovations à destruction massive, du nucléaire au viral en passant par l’intelligence artificielle et les problématiques du big data, trahissent chez ces cultures un manque de sens existentiel derrière ce besoin incessant d’avancer à l’infini, cette course frénétique éloignant l’homme de sa définition essentielle fondée sur le bien et le mal.
Plusieurs penseurs occidentaux réitèrent ce constat de « désenchantement du monde » -sans cesse repris depuis Nietzsche ou Weber-, notamment Taylor (1994) qui explique ce « Malaise de la modernité » par la valorisation excessive de l’individualisme. Certes, les individus sont désormais davantage en mesure de choisir leur mode de vie et d’agir conformément à leurs convictions ou à leurs croyances, mais ils sont également privés des « horizons moraux » qui donnaient sens à leur vie sociale dans les sociétés traditionnelles. Face à ce dérapage narcissique de la culture contemporaine, Taylor démontre dans son œuvre maîtresse (Les sources du moi, 1998) que la modernité était riche d’autres traditions possibles, qu’il convient d’exhumer : comprendre l’identité moderne revient à identifier les tensions persistantes dans la formation philosophique de la subjectivité moderne. Le sens du moi est profondément lié à un sens du bien. Il est donc impossible de comprendre notre identité sans se référer aux cadres moraux qui l’informent et lui donnent sens. En clarifiant l’expérience moderne, le philosophe renoue donc la relation profonde entre le Moi et le Bien : l’indépendance du sujet à l’égard de toute valeur préexistante est illusoire. Le self dont Taylor fait l’histoire n’est ni l’ego de la psychologie ni l’acteur de la sociologie ; il n’est pas non plus l’individu rationnel de l’économie, ordonnant son action par un calcul stratégique. Parce que le moi n’est ni un objet ni un organisme, il se constitue par ses interprétations et se définit par sa généalogie dans la géographie des statuts et des fonctions sociales, dans les relations intimes et dans l’espace d’interactions morales et spirituelles qui est le sien ; l’identité d’une personne inclut ses positions relatives aux questions religieuses, éthiques et politiques.
Aujourd’hui, de nombreuses études examinent les valeurs sans les promouvoir et y mêlent parfois des items qui n’en sont pas une (ex : hédonisme, créativité). Depuis Thomas et Znaniecki (1918) jusqu’à Shalom Schwartz (2006) en passant par Rokeach (1973), Hofstede (1991) et Maio et Olson (1998), les valeurs sont agencées dans des graphiques et des schémas sans mention de la notion de bien et de mal, sans cette dimension d’ascension humaine qui en est le rôle essentiel. Ces modèles occidentaux ambitionnent pourtant d’offrir une cartographie détaillée et fiable de tous les systèmes culturels. Or leur examen méthodologique et leur application sur certaines cultures en particulier en dévoile bien des lacunes (Chataigné et al., 2016 ; Manabe, 2019 ; Elgouchi, 2019). Celui de Schwartz offre l’exemple le plus approuvé et appliqué à l’échelle mondiale. Emprunté à Rokeach (1973), il propose un modèle structural qui a la particularité de ne pas être exclusif à un champ spécifique. De très nombreux travaux font appel à ce modèle ; une base de données comme Psychinfo indique plus de 80 références. Cependant, il en existe peu qui comparent la structure du modèle à celle que l’on peut observer empiriquement sur des échantillons nationaux représentatifs d’autant plus que Schwartz travaille essentiellement sur des groupes d’étudiants et d’enseignants ce qui constitue en soi un premier biais de représentativité.
Schwartz (1992 ; 2006 ; 2012) définit les valeurs de base comme des croyances liées aux affects, qui sont l’expression de motivations visant à atteindre des objectifs (tels la sécurité, le pouvoir, la stimulation). Ce qui distingue les valeurs entre elles, c’est donc le type de source motivationnelle qu’elles expriment. C’est ce qui lui a permis de définir dix valeurs de base (1992 et 2006) et ensuite dix-neuf (2012) organisées selon un continuum circulaire (figure 1) reflétant leur degré de compatibilité et de conflit. Pour Schwartz, tous les types de valeurs sont considérés comme universels car ils correspondent à trois exigences ou besoins de l’existence humaine à savoir :
1. « satisfaire les besoins biologiques des individus,
2. permettre l’interaction sociale
3. et assurer le bon fonctionnement et la survie des groupes » (Schwartz ; 2006, 2012).
Il n’est pas le seul à omettre les besoins spirituels qui constituent une source encore plus importante et qui sont toujours fortement présents dans les cultures non occidentales ; la revue des théories des besoins se distingue par l’absence remarquable de cette dimension, et lorsque Maslow, vers la fin de sa vie, ajoute la spiritualité au besoin d’accomplissement c’est dans une conception moderne qui dépasse le religieux et parfois se détache de lui pour se référer au corps à la place de l’âme. Cette ultime mention de la pyramide de Maslow n’est curieusement pas reprise dans le modèle qui nous est parvenu ni dans ceux qui l’ont succédé.
Dans sa théorie révisée, Schwartz (2012) définit dix-neuf valeurs fondamentales qui confirmeraient l’hypothèse centrale d’un continuum motivationnel circulaire où les valeurs s’organisent en fonction de leurs motivations compatibles et conflictuelles, de l'expression de l'autoprotection par rapport à l’évolution, et de l'intérêt individuel par rapport à l'intérêt collectif. Il cherche également à diviser le continuum en un ensemble qui ambitionne d’être plus fin, englobant des valeurs qui seraient significatives et distinctes sur le plan conceptuel, dotées d'un plus grand pouvoir heuristique et prédictif universel
.
Continuum motivationnel circulaire de 19 valeurs avec des sources qui sous-tendent leur ordre
En sus de l’intérêt peu clair de subdiviser les dix valeurs du premier modèle pour en faire dix-neuf ; car il aurait été plus probant d’en rajouter d’autres provenant de cultures différentes, Schwartz confond, dans son nouveau modèle, ce qu’il a lui-même appelé « objectif global » d’une valeur, « ses motivations » et « ses composantes » (2006). Par exemple, « l’indépendance de la pensée et de l’action » qui était un objectif global de la valeur « autonomie » deviennent dans le modèle révisé deux valeurs distinctes. De plus, il justifie cette subdivision par une analyse ultérieure des données de Caprara, Schwartz, Capanna, Vecchione et Barbaranelli (2006) -dans laquelle les deux facettes pensée
et action
ont été séparées- et qui a révélé que la facette pensée
seule, et non la facette action
, expliquait la forte corrélation positive entre les valeurs d'autonomie et le facteur d'ouverture du Big Five (par exemple, Roccas, Sagiv, Schwartz et Knafo, 2002). Ici, encore, Schwartz admet entièrement que l’ouverture au changement est la seule motivation derrière l’autonomie. Or, la recherche d’autonomie peut découler, dans certaines cultures, d’une motivation de « dépassement de soi » quand elle est mise au service de la collectivité : la citation de Confucius « quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner du poisson » exprime la crainte d’être un fardeau pour autrui plutôt que l’envie de s’en affranchir. Dans d’autres cultures, elle peut exprimer le besoin d’autoprotection (évitement de l’anxiété) face à des circonstances fluctuantes. D’ailleurs, si on considère le sens conceptuel et philosophique de la valeur d’autonomie, on constate qu’elle prend naissance dans la possibilité de création du collectif humain (Aristote) et que, dans l’histoire de la pensée européenne seulement (Luther, Calvin), elle s’est diffusée socialement et politiquement jusqu’à s’enfermer dans l’individualité, souvent contre ce collectif qu’elle a permis de construire au départ. De plus, l’indépendance intellectuelle est fondatrice de l’indépendance de décision et d’action et ne peut s’en séparer (Kant). Les proposer en deux valeurs distinctes à partir d’une seule analyse de données trahit une surestimation de l’empirique d’autant plus que le modèle dit révisé admet plusieurs biais méthodologiques.
D’ailleurs, le deuxième exemple que cite Schwartz dans ce sens en est la preuve ; car la subdivision de la valeur « sécurité » en deux valeurs distinctes « sécurité personnelle » et « sécurité sociale » à partir d’une étude sur les perceptions des conséquences de l’immigration pose la question méthodologique sur la faisabilité et la pertinence de lier l’étude des valeurs à une problématique particulière comme celle de l’immigration, de surcroit dans une zone géoculturelle spécifique et durant une conjoncture épisodique. L’ensemble des analyses, dans cette étude, suggère que « la santé » serait une autre valeur distincte dont la signification varierait considérablement d’une culture à l’autre (Schwartz, 2019). On se demande si le positionnement multidimensionnel incompatible -ici- est une raison suffisante et un argument valable pour écarter la composante « santé » et lui supposer plusieurs sens selon les cultures, sachant pertinemment que les conceptions culturelles de la notion de sécurité peuvent différer mais certainement pas celles de santé.
En suivant cette même logique de subdivision, l’exemple des valeurs « conformité » et « tradition » devient déconcertant car suivant le positionnement multidimensionnel, dans les deux modèles, les deux valeurs devraient fusionner, d’autant plus que leur sens conceptuel est largement synonyme, en premier lieu, car il est établi que les traditions, à travers « la subordination du sujet à des objets abstraits : coutumes, idées religieuses » (Schwartz, 2012) ne sont qu’un moyen parmi d’autres permettant d’assurer la conformité au sein de la société.
D’autres exemples qui illustrent bien la vision partielle dans la conception du continuum motivationnel de Schwartz sont les relations de complémentarité et d’antagonisme définies selon le seul référentiel culturel du théoricien. Ainsi, les valeurs « pouvoir » et « réussite » peuvent être l’expression d’une motivation orientée vers soi ou, au contraire, une forme de dépassement de soi quand elles sont mises au service de l’intérêt général ou des siens. Dans ce cas, elles ne peuvent être opposées à