L' Oeil du cyclone
Par Nathalie Cotard
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À propos de ce livre électronique
Comment puiser dans ses ressources intérieures au lieu d’attendre que le temps fasse son œuvre ?
Plongeant dans le destin de 12 personnes dont l’existence a basculé, ce livre nous invite à suivre pas à pas les parcours qu’elles ont empruntés pour retrouver la joie et redonner un sens à leur vie. Maladie, perte d’un être cher, difficultés professionnelles, accident… Pour sortir de l’œil du cyclone, elles ont dû changer leur regard sur elles-mêmes et ouvrir de nouvelles portes. De ces témoignages hors du commun, Nathalie Cotard tire des enseignements inédits, qu’elle partage sous forme de contes, de clés et de conseils pratiques, pour que chacun découvre sa manière de composer avec l’adversité et devienne maître de sa renaissance.
Conçu pour aider les gens qui font face à une épreuve tout comme ceux qui s’enlisent dans un quotidien insatisfaisant, cet ouvrage lumineux, source d’inspiration autant que guide pratique, permet de se remettre en marche, un pas à la fois.
Nathalie Cotard
Nathalie Cotard est coach de gestion accréditée par l’International Coaching Federation. Elle enseigne à l’Université Laval en leadership et gestion des ressources humaines après une carrière dans le milieu des affaires. Naviguant entre les mots et les images, elle aime relier la raison à l’intuition pour élargir les perspectives et stimuler le potentiel des personnes qu'elle accompagne vers le dépassement de soi.
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Avis sur L' Oeil du cyclone
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Aperçu du livre
L' Oeil du cyclone - Nathalie Cotard
L’inconnu
de la
randonnée
J’ai été interpellée par la force de la résilience sur un chemin de randonnée, à l’été 2008, en traversant un village, dans le sud de la France.
Je marchais en silence depuis quelques jours avec un groupe d’amis, pour prendre du recul et ralentir. Ce séjour était comme un souffle d’oxygène dans ma vie courante, qui n’en finissait pas de courir. Au cours d’une pause, je m’étais éloignée du groupe pour flâner dans un marché quand j’ai rencontré un homme, en fauteuil roulant, curieux d’en savoir plus sur ma randonnée. Nous avons fait connaissance, parlé de la marche, de la nature, jusqu’à ce qu’il me raconte son accident d’escalade, suivi par des mois d’immobilisation, et qu’il me confie, au détour de la conversation : « Ma liberté, c’est mon fauteuil roulant. » Sur le moment, je suis restée sans voix, et un vieux souvenir s’est présenté à moi.
À 17 ans, je m’étais cassé une vertèbre lors d’un accident de bateau. Les mots du médecin avaient été rassurants : « Vous avez de la chance, mademoiselle, la fracture est tombée du bon côté de la vertèbre. » À l’époque, je n’avais pas pris la mesure de cette phrase. J’avais subi la réadaptation, impatiente de retrouver ma liberté, dans une insouciance naïve. J’avais retrouvé ma motricité, et couru vers la vie adulte sans me poser plus de questions.
« Ma liberté, c’est mon fauteuil roulant », me disait donc cet homme. Après un silence, je lui ai demandé : « Que voulez-vous dire ? » Il m’a raconté comment son fauteuil était devenu pour lui un moyen d’escalader la vie autrement. J’ai aimé son authenticité, sa simplicité, le calme de ses propos, le sourire dans ses yeux. La détermination que j’ai ressentie chez lui m’a fascinée. J’ai poursuivi mon chemin avec une foule de questions en tête : qu’est-ce qui permet d’avoir autant d’énergie quand on a vécu le pire ? Comment se sentir libre et heureux quand la vie bascule ? D’où vient cette force ? Ces questions m’ont habitée longtemps, jusqu’à ce que je sois confrontée à une épreuve qui les a rendues vitales à mes yeux. Ce fut le point de bascule, sans que je le sache encore, qui m’a permis de ressentir ma propre vulnérabilité, et plus tard d’initier ce projet de livre.
En 2010, mon immigration au Québec a bouleversé mon noyau familial. Deux de mes trois enfants sont restés en France temporairement pour y étudier. Ils me manquaient chaque jour. Nous avions décidé, avec mon conjoint, d’écouter leur choix, mais la tristesse m’envahissait dès que je ralentissais. J’avais le sentiment de ne pas pouvoir être là pour eux comme je l’aurais voulu, au quotidien. J’étais ébranlée aussi que mon fils cadet vive loin de son frère et de sa sœur. Le manque grignotait ma joie, jusque dans les moments heureux, ou de retrouvailles. Je m’empêchais, malgré moi, de les vivre pleinement. Le manque est un caméléon. Il se transforme en colère, en peur, en doute ou en silence pour se faire entendre. J’ai peu à peu senti que son vrai visage était la tristesse, que j’ai souvent étouffée ou combattue, pour l’évacuer. J’aurais aimé pouvoir faire autrement, être une mère plus résiliente face à cette souffrance de l’éloignement. J’étais en quête d’un apaisement, qui me semblait hors de portée à ce moment-là.
J’ai repensé à l’inconnu de ma randonnée. J’ai décidé, comme lui, de me relever intérieurement. Je suis alors partie à la recherche d’outils, de clés et de modèles de résilience. J’étais avide de discerner comment dépasser l’adversité. L'absence d’un être cher, un accident, un deuil, une maladie, une autre épreuve ou encore un virus qui s’étend comme une traînée de poudre partout sur la planète : les visages de l’adversité sont multiples. Les étapes à franchir vers le mieux-être sont-elles les mêmes pour tous ? Sont-elles particulières à chacun ? Est-on résilient de nature ou est-ce qu’on le devient ? La résilience s’apprend-elle ?
Au cours des dernières années, j’ai eu la chance de rencontrer 12 personnes qui ont accepté de revisiter leur expérience, et de la partager pour la mettre au service d’autrui. Elles ont toutes trouvé leur chemin personnel vers la résilience. Ce livre présente le récit de leurs parcours et met en lumière les résiliences singulières plutôt que la résilience.
3 Regards sur
chaque témoignage
Les enfants ont trois secrets pour apprendre : le premier est qu’ils écoutent les histoires extraordinaires avec une ouverture du cœur qui laisse place à l’imagination, à l’inconscient, à un univers où tout est possible. Le deuxième est qu’ils osent imiter des modèles avec une perspicacité ancrée dans l’observation. Le troisième est qu’ils expérimentent dans un processus constant d’essais-ajustements, sans jugement.
Les adultes, quant à eux, ont parfois oublié cette richesse et cette diversité dans les manières d’apprendre. Ils sont invités ici à retrouver l’enfant en eux.
En m’inspirant des trois secrets d’apprentissage des enfants, j’ai choisi de présenter chaque témoignage en trois volets :
• Le conte. Inspiré du récit et de l’énergie que j’ai ressentie lors de chaque rencontre, il a une portée symbolique et universelle. Toi qui découvres ce livre, laisse-toi aller dans la lecture des contes avec le cœur, sans chercher à les comprendre avec la tête. Pour laisser toute la place à l’imaginaire, le conte est placé d’entrée de jeu dans chaque chapitre.
• Le récit. C’est la restitution du cheminement de chacun pour composer avec l’adversité. À la fin du récit, la section « Ce que je garde de cette rencontre » est une synthèse des impacts de la rencontre sur moi.
• Inspire-toi de… Tu y trouveras, puisées dans les récits et dans mon expérience, des pistes concrètes pour expérimenter, voir autrement, réussir à croire en l’avenir, et élargir le champ des possibilités.
Parmi les parcours, tu auras le choix de capter les images, les mots ou les façons d’avancer qui résonnent le plus pour toi. Tu ne peux pas changer ce qui arrive ou ce qui est arrivé, mais tu peux modifier ton regard et ce que tu fais avec ce que tu as vécu. Mon rêve est que ce livre puisse t’offrir de nouvelles clés.
À l’issue des rencontres, j’ai été fascinée par les points communs entre les témoignages. Je les ai synthétisés pour offrir quelques repères, tels les cailloux d’un Petit Poucet dans une forêt inconnue. Cela ne garantit pas, bien sûr, de ne pas se perdre quand l’adversité bouscule. Mais face au sentiment d’être démuni, ces repères peuvent être une option pour changer de regard.
Parallèlement, certains leviers de résilience m’ont plus interpellée que d’autres. Je me suis nourrie des expériences transmises pour questionner mes propres clés. Cela m’a servi face aux turbulences intérieures que j’ai vécues, et également durant la pandémie, pour stimuler la réflexion des personnes que j’accompagne en coaching. Cette démarche t’est proposée en fin de volume, pour que tu puisses affiner ton propre itinéraire. Car c’est toi qui as les meilleures ressources intérieures, et c’est toi qui peux choisir de prendre en main ta résilience plutôt que de compter sur le pouvoir de guérison du temps qui passe.
Chaque témoignage est d’une grande générosité, et révèle quelques pépites d’inspiration et de réconfort. Je t’invite à te laisser porter par la découverte de parcours de vie transformés et enrichis par les épreuves que chacun a traversées. Puissent ces expériences vécues, les contes qui en sont inspirés et les clés pratiques t’ouvrir une porte pour débrancher des impossibles et t’inviter à te mettre en marche vers de nouveaux « pas » possibles, un pas à la fois !
Chapitre 1
La voie
du chêne
Le conte
L’étoffe
d’un chêne étoilé
Il était une fois un bourgeon emporté par le vent, jusqu’à des contrées fort éloignées. Par un beau matin d’été, il atterrit au pays des bleuets, pour se déposer et s’enraciner. Une petite pousse commença à germer. L’hiver venu, tout devint blanc et glacé, mais le bourgeon était déterminé, sur la glace, à percer. D’effort en effort, il resta debout, sans peur d’affronter le blizzard et ses coups. Au retour de l’été, les bleuets épatés virent à quel point le bourgeon avait changé. Robuste, il avait l’allure d’un jeune arbre élancé, prêt à continuer de s’élever, aussi haut qu’une étoile pour briller.
•
Nul ne saura jamais pourquoi, un jour, son tronc fut scié, par un bûcheron inexpérimenté qui souhaitait s’entraîner. Dans son élan coupé, l’arbre resta planté là, ayant perdu sa hauteur, qui était sa plus grande valeur. Furieux, il se demandait sans cesse pourquoi ce bûcheron maléfique était passé par là. De pourquoi en pourquoi, il restait au plus bas, se sentant fort découragé, de son rêve brisé.
•
Dans sa rage, il puisa la force d’un nouveau virage. Tel un phénix renaissant de ses cendres, il regarda sa souche et se laissa toucher. Du fond de sa mémoire, il fit monter la sève de l’espérance et de la persévérance. De racine en racine, il visita la fierté, la générosité, la colère, l’orgueil et l’humilité.
•
Un matin, à l’heure où la rosée rafraîchit la forêt, il aperçut un arbre tordu, tranché et fleuri à la fois. Ses jeunes repousses avaient le goût d’une vie relancée qui poussait vers la liberté. Ce fut comme un coup de foudre pour le rallumer. Il songea à ces tiges élancées, et se surprit à rêver de les dépasser. Ses efforts furent parfois balayés par le vent, mais tenace face aux éléments, il resta tourné vers l’avant.
•
Il prit le temps de s’entraîner à viser les cimes, bravant la peur d’être décimé. Un jour, alors qu’il gagnait de plus en plus en hauteur, un arbre remarqua son air soucieux de se rapprocher des cieux. Il lui souffla dans les branches qu’à ces hauteurs célestes, il pouvait lâcher du lest ! C’était normal de trembler, mais les arbres autour de lui seraient toujours son filet, car nul n’est seul dans la forêt.
•
Du plus loin qu’il se souvienne, il y avait toujours eu une âme alentour pour accueillir ses peines, et lui redonner le courage de se donner de la peine. Alors, du haut de son expérience d’être descendu au plus bas, il se dit que la vie présente ses hauts et ses bas, mais que l’essentiel est dans le prochain pas.
•
Quand sa tête effleura les sommets, il fut émerveillé de la force que la vie lui avait confiée, de persévérer jusqu’à la ligne d’arrivée. Il avait réalisé son rêve par une branche détournée. Bien sûr, le sentier avait été escarpé. Qui était-il pour l’avoir bravé sans jamais abandonner ? Était-ce la force du rêve qui l’avait propulsé ? L’attente de gagner un combat contre un vide à combler ? Il regarda ses feuilles aux lobes généreux, comme des oreilles multiples à l’affût de la suite. Il se délesta du poids de ses fruits et sourit, plus léger de les laisser aller.
•
Un écureuil du quartier s’était rapproché et, devant l’abondance, avait alerté : « Hé ! Venez ici, les amis ! Approchez-vous de cet arbre : il regorge de friandises, servez-vous à votre guise. » Un hibou incarnant la sagesse aboutie freina néanmoins ces ardeurs d’appétit : « Prenez soin de ces fruits. Ils sont des graines à planter pour vous abriter quand la nature sera déchaînée. Ce sont aussi des fruits de la passion, qui réveilleront en vous les rêves et les visions. Car je vous le dis, cet arbre est bien talentueux : c’est un chêne étoilé. » Étonné, le chêne regarda le hibou qui l’avait inspiré : ce n’étaient plus les cimes qui le tentaient, c’était de nourrir l’essaim d’abeilles, d’oiseaux et d’autres animaux. Ses branches jouèrent alors une symphonie, dont les notes s’offraient en harmonie.
•
« Peu importe ce qui t’arrive, tu as la responsabilité d’en faire quelque chose. »
Dean
• Dean •
la persévérance
pour percer
Août 1987 : une vie bousculée
Dean Bergeron sourit à dire qu’il est un bleuet du Saguenay. Adopté à l’âge de six mois, il est entouré de six frères et sœurs, et reçoit l’amour de sa famille. Sa maman lui transmet la force de la détermination, de la persévérance et du dépassement de soi. Dès l’enfance, il doit se battre pour faire accepter sa différence. En effet, la couleur de sa peau l’amène à devoir trouver des mécanismes de défense pour se faire une place auprès des autres enfants. Il comprend que se dépasser sera un moyen d’être accepté, et il cherche donc à devenir le meilleur, à l’école et dans le sport.
Doué pour le hockey, il est remarqué par les entraîneurs et connaît un parcours d’exception. Repêché dans le circuit provincial à 16 ans, il part en Estrie, puis dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec. Il rêve de la Ligue nationale et de représenter le Canada dans les tournois internationaux. Il témoigne qu’il n’était pas le plus talentueux, mais un de ceux qui ont travaillé le plus pour parvenir à son rêve. Le hockey lui offre une voie vers la reconnaissance et l’estime de tout un public. Tout lui réussit. Mesurant plus de six pieds, il n’a peur de rien, et ne ressent aucune limite, jusqu’à cette journée de pratique sur la glace qui va bousculer sa vie et sa voie. Lors d’une bagarre dans une simulation de match, un joueur le frappe à la tempe une première fois… puis une deuxième. Dean tombe. Un craquement se fait entendre. En une fraction de seconde, sa vie bascule.
Faire face à une nouvelle réalité
L’accident est largement médiatisé, et Dean se montre fort. Il y a le Dean « de jour », devant les projecteurs, qui fait face à l’adversité avec courage, et le Dean « hors projecteurs », qui ressent une grande injustice. Après une phase intense de soins aigus et une opération complexe, il reçoit un verdict terrible : paraplégie. La paralysie rend l’usage de ses jambes impossible ; pour les bras, c’est incertain.
Pendant deux mois, Dean refuse d’accepter cette réalité. Il veut lutter, revenir en arrière. Confronté à l’impuissance, la question « Pourquoi c’est arrivé ? » le hante sans cesse et reste désespérément sans réponse.
Puis, une deuxième période commence : la réadaptation. C’est la rencontre d’un autre monde : « Tu tombes dans un milieu où il y a plein de gens qui sont comme toi. » Il est un patient parmi d’autres, confronté aux défis de tout réapprendre. Il n’est plus le meilleur parmi les meilleurs, mais découvre ses limites. Son esprit compétitif le pousse néanmoins à aller de l’avant. Une montagne d’efforts, de batailles et de courage lui sont nécessaires pour s’en sortir. Il lutte « contre » l’adversité, avec énergie et force pour remonter la pente.
Et si la marche reste impossible, les bras sont la cible de tous les efforts : les petites victoires se comptent en millimètres d’autonomie. Récupérer la motricité de la main est un combat de tous les jours… jusqu’à ce qu’il puisse saisir et tenir un mouchoir. La notion de temps est hors de propos, le patient doit se soumettre à la patience. La concentration et la volonté sont les axes auxquels il doit se raccrocher pour regagner la maîtrise des gestes quotidiens. « Tu ne te demandes pas comment tu vas construire une vie et avoir des enfants, tu te demandes comment tu vas faire pour t’habiller tout seul ! » dit-il. Chaque victoire est minime à l’extérieur, mais immense à l’intérieur.
De petit pas en petit pas : tout le secret est là.
Quel est le déclic pour alimenter cette volonté hors du commun ? Où Dean puise-t-il la force de se battre ? Une croyance héritée de l’enfance est d’une grande aide : « Si tu travailles assez fort, tu peux y arriver. »
Une troisième phase se profile : la réinsertion sociale et le retour dans le milieu de vie, après les soins aigus et la réadaptation. Cela a été la phase la plus difficile, car Dean s’est trouvé confronté sans cesse à sa différence.
Et la question du « Pourquoi ? » était encore très présente à ce moment-là : « Pourquoi moi ? J’avais moins de chances de subir cet accident que de gagner à la loto. » Cette question amène son lot répété de souffrance et de rébellion, qui s’ajoutent à la douleur physique, sans jamais apporter de répit. Elle ravive la rage et ravage la confiance, conduit parfois à la désespérance, et reste une question sans issue.
Dean se sent parfois découragé. Or, il fera quelques rencontres décisives qui lui redonneront confiance en une autre vie possible.
Passer du pourquoi au comment : lutter pour plutôt que lutter contre
Dean rencontre d’abord Errol Paillé à l’Institut de réadaptation. Celui-ci se déplace aussi en fauteuil roulant. Il a déjà reconstruit sa vie, et réside avec sa conjointe à Montréal. Dean reconnaît en lui quelqu’un qui peut le comprendre. Errol l’invite à aller passer une fin de semaine chez lui, Dean accepte l’invitation. Et l’aventure commence !
Au moment de se diriger vers la voiture d’Errol, Dean le suit en fauteuil, et reste derrière lui, se demandant bien comment ils vont faire sans l’aide du personnel médical. Errol lui indique qu’il va devoir faire le tour du véhicule, et suivre ses conseils pour monter seul du côté passager. Il lui faudra pour cela se placer près du siège, se mouvoir à la force des bras, démonter les roues du fauteuil et charger celui-ci dans la voiture. Les étapes sont multiples, mais Dean découvre en observant Errol qu’il est possible de regagner la liberté. Errol conduit une voiture adaptée. Dean entrevoit pour lui aussi cette possibilité.
Quand ils arrivent à destination, c’est un nouveau parcours du combattant qui attend Dean : descendre le fauteuil, monter les roues, réussir à rejoindre la maison. L’épouse d’Errol leur demande alors d’aller faire quelques courses. Voilà un nouveau défi : refaire toutes les étapes, comme si c’était simple ! Depuis le départ de l’Institut de réadaptation, Dean est plongé dans une suite de « Comment faire ? » qui s’imposent : comment poser tel geste ? Comment monter dans une voiture ? Comment réussir à faire les courses sans craindre le regard des autres ?
Cette fin de semaine à Montréal est épuisante pour Dean, mais elle est aussi un virage essentiel du pourquoi l’accident est arrivé vers le comment vivre avec. C’est un vrai déclic. Constater l’autonomie de son ami lui redonne espoir et fait monter en lui la perspective d’un monde meilleur. Il pose un nouveau regard sur la réalité. Il décide de passer de « lutter contre ce qui est arrivé » à « lutter pour une nouvelle vie ».
Les petites victoires se succèdent. Dean sourit en se remémorant ces instants : « Mon cerveau s’est remis à rouler et à trouver plein de trucs ! » C’est une source de joie et de fierté au quotidien, même si les doutes et les peurs sont omniprésents. Il se souvient qu’après l’accident, il avait peur de tout : peur du regard des autres, peur de sortir de la maison, peur de traverser la rue, peur de rouler sous la pluie, peur d’être différent, peur de tout ce qui peut arriver. Un moment particulier l’a marqué lorsqu’il est retourné pour la première fois dans un bar. Avant l’accident, sa grande taille lui donnait de l’assurance. En fauteuil, traverser le bar à une hauteur de quatre pieds en affrontant les regards au-dessus de lui a été tout un défi.
Reconnaître ses peurs est une étape clé, mais comment les apprivoiser et les dépasser ? Dean s’est inspiré des personnes qui partageaient sa réalité : « Je voulais m’en sortir, être le meilleur, même pour manier mon fauteuil. » Il n’a jamais mis de côté son élan compétitif, issu de l’enfance : c’est sur ce socle qu’il a trouvé la force de poursuivre son évolution.
Se mettre en marche vers de nouveaux défis
Dean commence ses études d’actuaire à l’Université Laval, persuadé que le sport est fini pour lui. C’est sans compter une nouvelle rencontre. Dans un couloir de l’université, il fait la connaissance de Pierre Pomerleau, un éducateur physique qui a mis en place un programme d’athlétisme en fauteuil roulant à l’Université Laval. Pierre lui propose de s’entraîner à la course en fauteuil. Dean découvre une équipe d’athlètes et fait la connaissance de Chantal Petitclerc, qui prépare les Jeux paralympiques de 1992. Cela rallume une braise encore bien présente en lui : poursuivre le rêve de représenter son pays dans le sport. « Quand j’ai vu leurs chandails, je me suis dit que moi aussi, j’étais capable ! »
Le rêve de représenter le Canada en hockey avait été anéanti en une fraction de seconde. Dean en caresse désormais un autre : représenter le Canada dans la course en fauteuil. Avec les années de recul, il partage un conseil : « Il faut que tu retrouves le rêve qui t’a toujours animé. Tu ne peux pas renier qui tu es, tu peux réaliser tes rêves dans ton nouvel état. Ils vont se réaliser d’une façon complètement différente de ce que tu pensais au départ. »
Depuis l’enfance, Dean s’est toujours inspiré de modèles pour le guider. Des joueurs de hockey talentueux, des têtes d’affiche lui avaient donné la force d’aller s’entraîner sans relâche. Errol est devenu un autre modèle, offrant la