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L'âme de Napoléon
L'âme de Napoléon
L'âme de Napoléon
Livre électronique108 pages2 heures

L'âme de Napoléon

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À propos de ce livre électronique

C'était une impossible rencontre. À un siècle de distance, celle d'un empereur, Napoléon, et d'un écrivain maudit, Léon Bloy.
L'un croyait à peine au ciel, l'autre, pour ainsi dire, y vivait. L'un voyait dans la religion un simple instrument de gouvernement, un adjuvant de son ambition toute terrestre ; l'autre pratiquait l'extase et l'oubli de soi dans un catholicisme mystique, sombre et flamboyant. L'un mena sa vie comme un météore dont l'éclat illumine encore les imaginations ; l'autre fut un vaincu de l'existence, vivant misérablement dans les emportements vains et les fureurs impuissantes, écrivant faute de vivre et ne vivant jamais bien d'une écriture pourtant magnifique. L'un voyait les humains comme la pâte qu'on modèle pour construire son destin, indifférent aux autres et tout entier dans sa propre légende ; l'autre puisait dans sa foi une immense compassion pour le pauvre, le laid, l'oublié, préférant toujours les humbles aux puissants, apercevant le salut dans le regard des réprouvés. L'un croyait à la force, l'autre à la faiblesse.
Et pourtant Napoléon fournit à Léon Bloy le sujet d'un de ses grands livres, l'un des plus étranges et des plus beaux qu'on ait écrits sur l'homme inépuisable. Dans l'océanique bibliographie impériale, L'Âme de Napoléon figure parmi la poignée de curiosités fascinantes, la gerbe de textes hors du commun que le petit général corse a suscités chez les grands écrivains.
LangueFrançais
Date de sortie5 août 2022
ISBN9782322430628
L'âme de Napoléon
Auteur

Léon Bloy

Léon Bloy, né le 11 juillet 1846 à Périgueux et mort le 3 novembre 1917 à Bourg-la-Reine, est un romancier et essayiste français. Connu pour son roman Le Désespéré, largement inspiré de sa relation avec Anne-Marie Roulé, il est aussi un polémiste célèbre.

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    Aperçu du livre

    L'âme de Napoléon - Léon Bloy

    Table des matières

    INTRODUCTION

    L’AME DE NAPOLÉON

    IL LES AUTRES AMES

    L’ANGOISSE

    LA BATAILLE

    LE GLOBE

    LES ABEILLES

    VIL L’ESCABEAU

    LA TIARE

    LE CHANCRE

    L’ILE INFAME

    XL LES MERCENAIRES

    LES GRANDS

    LES SACRIFIÉS

    LA GARDE RECULE !

    LE COMPAGNON INVISIBLE

    XI

    XII

    XIII

    I. L'AME DE NAPOLÉON

    IL LES AUTRES AMES

    III. L'ANGOISSE

    IV LA BATAILLE

    V LE GLOBE

    VI. LES ABEILLES

    VIL L’ESCABEAU

    VIII. LA TIARE

    IX. LE CHANCRE

    X. L'ILE INFAME

    XI. LES MERCENAIRES

    XII. LES GRANDS

    XIII. LES SACRIFIÉS

    XIV LA GARDE RECULE !

    XV LE COMPAGNON INVISIBLE

    À ANDRÉ MARTINEAU

    Mon cher André, ce n’est pas moi qui te donne ce livre, le plus important, peut-être, de tous ceux que j’ai pu écrire jusqu’à ce jour.

    C’est mon fils André qui te le donne, mon douloureux fils André que Dieu m’a repris dans son innocence baptismale et qui a dix-huit ans, au-jourd’hui, dans le Paradis.

    Il en eût été le dédicataire et il convient que tu prennes sa place, en cette manière. Je veux croire que telle est sa volonté.

    Il eût aimé Napoléon comme tu l’aimes, et votre commun Patron, le grand Apôtre de la Croix, te fera comprendre, si tu l’interroges avec amour, ce qu’il y avait de désirable et de magnifique dans la souffrance du plus glorieux de tous les mortels.

    Nous sommes au soir du monde, mon cher enfant ; tu seras témoin, peut-être, des divines et terribles choses que le vainqueur des rois semble avoir si grandiosement préfigurées.

    Puisse l'Ame de Napoléon agrandir ton cœur et te servir de réconfort pour les épreuves inconnues.

    LÉON BLOY

    5 mai 1912.

    INTRODUCTION

    I

    L’histoire de Napoléon est certainement la plus ignorée de toutes les histoires. Les livres qui prétendent la raconter sont innombrables et les documents de toute nature vont à l’infini. En réalité, Napoléon nous est peut-être moins connu qu’Alexandre ou Sennachérib. Plus on 1 !étudie, plus on découvre qu’il est l’homme à qui nul ne ressembla et c’est tout. Voici le gouffre. On sait des dates, on sait des faits, victoires ou désastres, on sait, à peu près ou à beaucoup près, des négociations fameuses qui ne sont, aujourd’hui, que de la poussière. Son nom seul demeure, son prodigieux NOM, et quand il est prononcé par le plus pauvre de tous les enfants, c’est à rougir pour n’importe qui d’être un grand homme. Napoléon, c’est la Face de Dieu dans les ténèbres.

    Il est notoire que les prophéties ou préfigurations bibliques ne peuvent être comprises qu’après leur entier accomplissement, c’est-à-dire lorsque tout ce qui est caché aura été révélé, ainsi que Jésus l’annonce dans son Evangile, et cela porte nécessairement la pensée au delà des temps. Napoléon est inexplicable et, sans doute, le plus inexplicable des hommes, parce qu’il est, avant tout et surtout, le Préfigurant de CELUI qui doit venir et qui n’est peut-être plus bien loin, un préfigurant et un précurseur tout près de nous, signifié lui-même par tous les hommes extraordinaires qui l’ont précédé dans tous les temps.

    Si on veut accepter ce postulat et y pénétrer un peu, voici que l’Histoire prend un aspect tout à fait nouveau et que l’Océan Napoléonien, si terriblement houleux jusqu’ici, devient tout à coup très calme, sous un ciel d’une sérénité miraculeuse.

    Qui de nous, Français ou même étrangers de la fin du XlXè siècle, n’a pas senti l’énorme tristesse du dénouement de l’Épopée incomparable ? Avec un atome d’âme c’était accablant de penser à la chute vraiment trop soudaine du Grand Empire et de son Chef ; de se rappeler qu’on avait été, hier encore, semble-t-il, à la plus haute cime des Alpes de l’Humanité ; que, par le seul fait d’un Prodigieux, d’un Bien-Aimé, d’un Redoutable comme il ne s’en était jamais vu, on pouvait se croire, aussi bien que le premier Couple dans son Paradis, maîtres absolus de ce que Dieu a mis sous le ciel et que, si tôt après, il avait fallu retomber dans la vieille fange des Bourbons !

    Il est vrai que cette chute avait presque déraciné la terre. Les convulsions de 1813, malgré la douleur et l’amertume excessives, furent d’un tel grandiose que l’imagination et l’orgueil même en peuvent être consolés ; mais la fin est trop horrible, trop soudaine surtout, encore une fois, et la résignation la plus angélique est tentée de se dérober à la doxologie de ce Psaume colossal de la pénitence.

    II

    On a beau savoir qu’il y eut des fautes immenses, ces fautes sont précisément ce qui fait que la tristesse est insupportable.

    Quel est celui qui, lisant l’histoire de- l’Empire, n’a pas essayé, se supposant contemporain, de se persuader, par exemple, que Napoléon aurait moins de confiance en la loyauté russe, moins de caresses pour Alexandre à Tilsitt ; qu’il démolirait la Prusse de fond en comble et rétablirait la Pologne ; qu’il trouverait mieux que le dangereux escamotage de Bayonne ; qu’il ne ferait pas des rois de ses misérables frères ; ne disperserait pas ses forces de Cadix à Moscou, gaspillant, détruisant ainsi les plus belles armées du monde ? A qui n’est-il pas arrivé enfin d’espérer, quand même, la survenue de Grouchy à Waterloo, de ce médiocre et funeste Grouchy si aveuglément choisi par l’Empereur pour le mouvement stratégique le plus décisif ? Et ce n’est pas tout.

    Comment ne pas pleurer au récit de la seconde Abdication ? Le plus grand des vainqueurs abdiquant deux fois I Napoléon jeté en bas de son trône par un Fouché, par un Lafayette, puis allant livrer son corps et son âme à l’Angleterre !.

    J’ai cessé de souffrir de ces choses le jour où j’ai pu comprendre, ou du moins entrevoir, la destinée toute symbolique de cet Étre extraordinaire.

    En réalité tout homme est symbolique et c’est dans la mesure de son symbole qu’il est un vivant. Il est vrai que cette mesure est inconnue, aussi inconnue et inconnaissable que le tissu des combinaisons infinies de la Solidarité universelle.

    Celui qui saurait exactement, par un prodige d’infusion, ce que pèse un individu quelconque, celui-là aurait sous les yeux, comme un planisphère, tout l’Ordre divin.

    Ce que l’église nomme la Communion des saints est un article de foi et ne peut pas être autre chose. Il faut y croire comme on croit à l'économie des insectes, aux effluves de germinal, à la voie lactée, en sachant très bien qu’on ne peut pas comprendre. Quand on s’y refuse on est un sot ou un pervers. Par l’Oraison Dominicale il est enseigné qu’il faut demander notre pain et non pas mon pain. Cela pour toute la terre et pour tous les siècles. Identité du pain de Césaret du pain de l’esclave.

    Identité mondiale de l’impétration. Équilibre mystérieux de la puissance et de la faiblesse dans la Balance où tout est pesé.

    Il n’y a pas un être humain capable de dire ce qu’il est, avec certitude. Nul ne sait ce qu’il est venu faire en ce monde, à quoi correspondent ses actes, ses sentiments, ses pensées ; qui sont ses plus proches parmi tous les hommes, ni quel est son nom véritable, son impérissable Nom dans le registre de la Lumière. Empereur ou débardeur nul ne sait son fardeau ni sa couronne.

    L’Histoire est comme un immense Texte liturgique où les iotas et les points valent autant que des versets ou des chapitres entiers, mais l’importance des uns et des autres est indéterminable et profondément cachée. Si donc je pense que Napoléon pourrait bien être un iota rutilant de gloire, je suis forcé de me dire, en même temps, que

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