Les énigmes de la psychométrie et les phénomènes de télesthésie
Par Ernest Bozzano
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Ernest Bozzano
Ernest Bozzano, 9 janvier 1862, Gênes - 24 juin 1943, Gênes. Issu d'un milieu aisé, Ernest Bozzano a eu la chance de pouvoir se consacrer très tôt à la passion de sa vie : apprendre. Lecteur insatiable, il réduisit peu à peu son champ d'investigation jusqu'à ce qui allait devenir le coeur de sa recherche : la personnalité humaine. Après une vie entière d'expérimentations et de réflexions, il acheva son parcours convaincu de la prédominance du psychisme sur la matière et de la continuation de la vie après ce qu'on appelle la mort.
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Les énigmes de la psychométrie et les phénomènes de télesthésie - Ernest Bozzano
Duchâtel
¹ et du docteur Osty
² dans le domaine de la psychométrie, il n’est plus possible de mettre en doute l’existence de cette « influence personnelle absorbée par les choses, et perçue par les sensitif ». Ce qu’on ne sait pas encore, c’est si l’influence en question contient virtuellement l’histoire de la personne qui fut propriétaire de l’objet, histoire susceptible d’être évoquée psychométriquement par le sensitif, dans ses moindres détails, ainsi que d’aucuns l’affirment. Par contre, tout concourt à montrer que, pour ce qui a trait aux influences d’êtres vivants, cette extension des pouvoirs de la psychométrie est en grande partie imaginaire. L’influence personnelle enregistrée par les objets n’exerce, en réalité, d’autre rôle que celui d’établir le rapport avec la personne ou le milieu lointain qu’il s’agit de psychométrer. Cette influence met le psychomètre sur une piste et lui permet de la suivre. Il en découlerait que les descriptions et révélations véridiques qu’on obtient, grâce au rapport psychométrique, loin d’être directement extraites de l’ « influence » contenue dans l’objet psychométré, seraient acquises par le moyen de facultés de clairvoyance et de télépathie appartenant au sensitif, lesquelles facultés s’orienteraient par l’entremise de l’ « influence » perdurant dans l’objet.
Je m’empresse, toutefois, d’ajouter que cette limitation des pouvoirs de la psychométrie, (dont je viens de m’occuper uniquement au point de vue des « influences » de nature humaine enregistrées par les objets), n’éliminerait pas l’hypothèse des professeurs Buchanan
³ et Denton,
⁴ et selon laquelle l’objet serait lui-même capable de révéler son histoire dans tous ses détails ; elle tend, plutôt, à en limiter la portée, et à en modifier la signification. Les informations obtenues, grâce à l’analyse psychométrique constitueraient, en tout cas, une question de « rapports » établis par un « moyen » qui ne serait pas matériel proprement dit, ainsi que nous le prouverons postérieurement.
Ici réside le plus important problème de la phénoménologie psychométrique. Le fait de pénétrer les secrets biographiques de la matière inanimée resterait bien mystérieux, même s’il se réalisait par le secours des rapports avec un « moyen » qui ne soit pas précisément de la matière.
Autour de cette énigme majeure, d’autres énigmes s’élèvent ; et elles ne sont pas moins troublantes. Effectivement, tout semble démontrer que les sensitifs entrent parfois en rapport avec le monde animal et végétal, en s’identifiant à tel point avec l’ « influence » contenue dans l’objet psychométré, qu’ils semblent s’approprier, ou les sensations, les sentiments, les vibrations et les sensations rudimentaires des organismes, ou de la substance étudiée.
Ainsi, de même que l’ « influence » laissée sur les objets par une personne vivante a la vertu de mettre le sensitif en rapport avec la subconscience de celle-ci, de même l’influence laissée sur les objets par une personne décédée aurait le pouvoir de mettre le sensitif en relation avec l’esprit de ce décédé. Cette dernière supposition paraîtra bien moins inconcevable que celles énoncées jusqu’ici, puisqu’elle est une prémisse mineure, conséquence logique de la prémisse majeure.
D’autres modalités, non moins énigmatiques, se présentent dans la phénoménologie psychométrique ; nous les discuterons lorsqu’elles jailliront des faits.
***
Avant d’aborder au vif notre sujet, il est utile que nous consacrions quelques paragraphes à établir le bien-fondé de l’assertion que je viens à l’instant de formuler, et suivant laquelle il est prouvé que les objets présentés au sensitif n’agissent pas uniquement à la façon de simples stimulants, mais contiennent, de fait, une « influence » personnelle humaine, capable de mettre en rapport le sensitif avec la personne qui fut propriétaire de l’objet.
Dans ce but, je ferai remarquer que l’objet présenté au sensitif ne sert pratiquement à évoquer l’histoire d’une personnalité humaine que s’il a été touché et employé par celle-ci ; dans le cas contraire, il ne provoquerait chez le sensitif aucune association de nature humaine ; il pourrait, par contre, en provoquer d’autres concernant l’histoire de l’objet en tant que matière. Il en résulte que cette différence d’associations ne pourrait pas se réaliser s’il n’y avait pas, en réalité, une imprégnation fluidique humaine des objets.
Lorsqu’un objet a été employé par différentes personnes, il met le sensitif à même d’exercer, successivement, son « influence » sur chacun de ces individus, y compris le milieu dans lequel ils ont vécu ; mais il ne provoque, chez le sensitif, aucune évocation de personnes absolument étrangères à l’objet, indice probant que les fluides humains absorbés par la matière inanimée sont réellement les agents évocateurs des impressions psychométriques.
Quand l’objet a successivement appartenu à diverses personnes, on note quelquefois des erreurs d’orientation fort instructives. Par exemple, dans un cas cité par M. Duchâtel, le consultant présente une lettre au sensitif, en se proposant d’obtenir des renseignements sur l’envoyeur ; il obtient, au contraire, des informations abondantes et précises sur le destinataire. Ceci peut être probablement attribué au fait que, par une loi d’ « affinité élective », le « fluide » du destinataire s’est montré plus actif, plus en rapport avec le sensitif par le fluide de l’envoyeur. Il s’ensuit que, pour expliquer les faits, on est amené dans tous les cas à admettre l’existence d’un « fluide personnel humain » s’attachant aux objets ; cette conclusion est corroborée par tant de circonstances, toutes convergentes vers la même conclusion, qu’on peut la considérer comme définitivement acquise pour la science.
***
Je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’étayer de longs arguments l’autre affirmation relative à la réelle fonction des « influences humaines » contenues dans les objets : c’est-à-dire d’établir le rapport entre le sensitif et la personne propriétaire de l’objet. Cette conclusion incontestable ressort des faits, car, dans le cas contraire, le sensitif devrait exclusivement tirer de l’objet des renseignements concernant la période durant laquelle le consultant est resté en possession de l’objet. Tout différemment, le sensitif révèle souvent des incidents qui se sont produits longtemps avant, ou après, que le consultant employât l’objet étudié, il déborde quelquefois même le passé et le présent pour s’aventurer dans l’avenir : il y a là une preuve indiscutable qu’en ces circonstances, le sensitif exerce ses facultés clairvoyantes en puisant dans la subconscience de l’individu, présent ou absent, avec lequel il se trouve en rapport psychométrique, et non pas directement, dans l’objet psychométré.
Tout ce qui vient d’être dit se réfère aux cas d’influences humaines enregistrées par les objets. Les mêmes conclusions semblent, jusqu’à un certain point, aussi légitimes dans les cas d’objets liés à des influences animales, mais elles sont moins admissibles quand il s’agit d’organismes végétaux dépourvus d’une subconscience pouvant être explorée. Il ne semble point, par ailleurs, qu’on puisse conclure de même au sujet d’objets étrangers à toute influence humaine, animale ou végétale, et qui cependant révéleraient au sensitif des passages plus ou moins génériques de leur histoire géologique, paléozoïque et archéologique. En effet, dans ces cas, on ne peut guère écarter l’interrogation : Où le sensitif pourrait-il puiser ses informations, s’il ne les tire pas de l’objet même, ou d’un milieu transcendantal en rapport avec celui-ci ? Le problème reste très mystérieux, et la solution en est douteuse, ainsi que nous le noterons le moment venu.
***
Maintenant, pour éclairer mon sujet, je dois produire des exemples en prévenant le lecteur qu’il ne m’est pas possible de les classifier, car trop souvent, les incidents contenus dans un cas particulier appartiennent à différentes catégories de faits. Force nous est donc de nous résigner à les disposer de la meilleure manière possible, en négligeant les méthodes normales de classification scientifique.
Parmi les exemples dignes d’intérêt, on remarquera plus spécialement ceux obtenus par l’entremise de Miss Edith Hawthorne, morte il y a déjà plusieurs années, à l’âge de 39 ans. Créature grêle et maladive, son état de santé ne l’empêchait nullement de se prodiguer dans les œuvres charitables et philanthropiques. Animée d’une compassion ardente envers les enfants abandonnés, elle avait fondé un institut (The Tiny Tim Guild), destiné aux soins des petits paralysés et rachitiques, auquel, dans les dernières années de son existence, elle consacrait tout son temps. Voici comment un témoin parle de son admirable esprit de sacrifice :
Sa génialité dans l’intuition des soins à donner pour rendre la vie à un larynx ou à une langue paralysée était étonnante ; elle employait une patience sans limites pour mener à bien un traitement, appliqué si doucement qu’il n’était plus qu’une distraction et une joie pour le jeune malade. Miss Hawthorne était fermement convaincue que des influences du monde spirituel l’assistaient dans sa tâche. Elle pensait que les systèmes ingénieux qu’elle imaginait, et dans lesquels chaque instrument s’adaptait expressément à chaque petit patient, lui étaient suggérés par les « Invisible ».
La prétention ne paraît pas si invraisemblable si l’on songe aux remarquables facultés médiumniques qui s’étaient manifestées en elle à cette période de sa vie.
En ses expériences psychométriques, Miss Hawthorne fit preuve d’une capacité de recherche réellement scientifique. Dans le but d’éliminer toute possibilité de suggestion involontaire ou de lecture de pensée, elle se faisait envoyer de pays lointains des objets inconnus destinés à être psychométrés, et elle enregistrait immédiatement ce que lui suggérait chaque objet, en transmettant ensuite son texte à l’envoyeur, afin que celui-ci consignât ses observations en regard du document psychométrique.
Ces quelques notices biographiques permettront de faire mieux apprécier l’importance scientifique de la série d’expériences qui fut faite par l’entremise de ce sujet sensitif et que publia en partie, la revue anglaise Light de 1903 à 1904.
***
1er cas. – Extrait du Light, 1903, page 214. Miss Edith Hawthorne écrit :
L’expérience suivante a été faite avec M. Samuel Jones (16, Askew Bridge-road, Dudley, Worcestershire), avec lequel j’entretiens une correspondance assez suivie. Je l’ai choisi parce que tout mon entourage sait que nous ne nous sommes jamais vus et que je n’ai jamais été dans le comté où il demeure.
J’ai donc prié M. Jones de m’envoyer différents échantillons d’une substance quelconque, au sujet desquels je devais tout ignorer, hormis le numéro d’ordre nécessaire pour les distinguer l’un de l’autre. À leur réception, je devais prendre note des impressions éprouvées pour chacun d’eux, en les tenant successivement dans mes mains, et expédier ensuite les impressions écrites à M. Jones, qui apposerait, en regard, ses commentaires touchant l’authenticité de mes notes psychométriques.
Dans le Rapport qui suit, les observations de M. Jones sont enregistrées entre parenthèses.
Histoire du spécimen n° 5 :
Posant ma main sur un échantillon entouré d’une enveloppe épaisse constitué par une substance dure et résistante, je perçois immédiatement :
– Deux ou trois hommes qui observent un mur noir. L’un d’eux a une lanterne à la main ; un autre observe avec insistance et se livre à l’inspection des lieux, en se montrant très prudent avant de donner son avis.
(C’est là une fidèle description des inspecteurs qui descendent, le matin, dans les puits de la mine, avec une lampe de sûreté, afin de constater si tout est bien en ordre, avant l’arrivée des mineurs. S. Jones).
– Je sens que cet échantillon est constitué par du charbon. Rien de schisteux en lui : c’est un très beau morceau de houille.
(Parfaitement : c’est de la houille « Heathen ». – S. Jones).
– Il a été extrait d’une profondeur importante.
(De la couche la plus profonde de la mine. – S. Jones).
– Les hommes qui travaillent dans cette sorte de tunnel se trouvent très en contrebas du point d’où me parvient un bruit de roues et de wagons en mouvement.
(À la surface du sol, un chemin de fer à voie étroite passe très près du point d’où a été extrait l’échantillon. Le tunnel noir est une branche de la mine. – S. Jones).
– Je vois des groupes d’hommes qui travaillent, en s’ouvrant le chemin à travers le mur noir. Quelques-uns d’entre eux travaillent debout, d’autres sont accroupis, mais tous prennent des attitudes malaisées et forcées.
(Les mineurs travaillent, en effet, par groupes isolés. Le restant de l’alinéa est une bonne description du pénible travail de la mine. – S. Jones).
– Maintenant, mon regard s’arrête sur un homme qui travaille tout seul dans une galerie si basse et si étroite qu’il doit se tenir couché. Un sentiment d’anxiété et de tristesse me saisit en le regardant ; je prie et je souhaite qu’on n’ait pas à déplorer un éboulement qui l’écrase.
(Non ! des malheurs ne se sont pas produits dans ce puits depuis longtemps. – S. Jones).
– Chose étrange ! Ses pensées ne s’attachent pas à son travail. Il songe à sa femme et à son petit enfant. Maintenant, j’aperçois un cimetière de village où les humbles reposent en grand nombre, et je vois les inscriptions naïves placées sur leurs tombes.
(Il n’y a pas de cimetière ou d’église aux alentours. Le cimetière le plus rapproché est à un mille de distance. – S. Jones).
– En regardant ce malheureux, j’ai l’idée que de nombreux accidents, ignorés par le monde, se sont produits dans cette mine.
(Non : c’est une mine relativement récente ; aucun sinistre ayant fait des victimes humaines ne s’y est produit. – S. Jones).
– Je vois devant moi une muraille noire, impénétrable et inexplorée ; je perçois de l’eau à peu de distance. J’en éprouve des vibrations si fortes et si vives que je suis amenée à poursuivre le chemin. Je le vois s’ouvrir devant moi et il doit me conduire à droite. Je me sens troublée : il faut boucher ou dévier cette source si l’on ne veut pas voir les ouvriers se noyer comme des rats dans leurs trous.
(Très exact ! très vrai ! Il y a beaucoup d’eau dans la mine, et précisément dans la direction indiquée. Il y en a au point qu’une galerie creusée à droite a dû être abandonnée avant de parvenir au filon du charbon. La pression de l’eau gênait les travaux d’approche. Maintenant le danger a presque disparu, et les mineurs estimeraient que la mine est presque sèche si l’eau n’existait toujours dans le sous-sol. – S. Jones).
– Maintenant je ne saurais définir nettement les impressions que j’éprouve : elles sont tristes et contradictoires ! Je me sens anxieuse et préoccupée au sujet d’une région inexplorée de ces contrées noires. Je suis émue par la pensée d’un danger indéfinissable et menaçant. Je souffre de la tête, je me sens étouffer, je suis prise par des vertiges ; il y a quelque péril à craindre outre les sources d’eau. J’étouffe de plus en plus. Les poumons se gonflent péniblement contre les côtes ; la bouche, le nez, les yeux, les oreilles sont saturés d’une sorte de gaz lourd et malpropre. Ma tête éclate !
(Excellente description des effets produits par la saturation humide ; effets plutôt accentués dans la mine. – S. Jones).
– Oh ! quelle vision horrible ! J’aperçois l’homme dont j’ai donné tout à l’heure la description, râlant sur le sol, livide, perdant du sang par la bouche, le nez, et les oreilles !
(Eurêka ! Quelle révélation ! Je me rappelle tout à coup qu’il y a vingt ans, un homme est resté mortellement blessé dans la galerie en question, pendant qu’il s’efforçait d’atteindre le filon de houille sans y réussir, par suite de l’irruption de l’eau. Cet homme est mort quatre semaines après le malheur ; sa femme l’avait rendu père quelques heures avant son décès. Or, ce bébé – maintenant un jeune homme de vingt ans – est celui-là même qui a apporté l’échantillon que vous avez psychométré. Serait-ce là la raison de votre impression de tristesse ? – S. Jones).
– À présent je descends beaucoup plus bas que cette couche de houille. Ma pensée se reporte à des centaines et des centaines de siècles avant la venue du Christ. Je contemple maintenant une forêt dont les arbres colossaux ont un feuillage si épais que je ne parviens pas à entrevoir le ciel. J’aperçois des ours gigantesques gris-noirs, vivant dans les cavernes. Je vois un énorme animal, droit sur un rocher, près d’une source qui jaillit impétueusement d’en bas, en prenant la forme d’une nappe d’eau. Je rattache vaguement cette source à celle existant actuellement dans la mine et qui a provoqué en moi un tel malaise.
(Très vrai ! On m’informe que l’eau qui inondait notre mine jaillissait d’en bas ! Que d’excellentes observations véridiques dans votre essai psychométrique ! – S. Jones).
M. Jones ajoute la note suivante concernant le spécimen de charbon psychométré. Le spécimen était un morceau de houille appelé techniquement « Heathen coal » ; terme qui se rapporte à la couche spéciale de charbon d’où il a été extrait. Il y a dans la mine plusieurs couches ou filons, séparés l’un de l’autre par des sédiments d’autre nature ; le charbon dit « Heathen » constitue la couche la plus basse de la mine. Ce spécimen m’a été remis par un mineur, qui doit l’avoir porté dans sa poche ou dans sa main ; je ne puis rien affirmer à ce sujet. – S. Jones).
Dans ce premier cas, les énigmes à résoudre s’enchevêtrent de façon inextricable ; il est donc préférable de poursuivre